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OBSERVATIONS
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SOUM ISES
\ )\)l LES P R É S I D E N T ET C O N S E I L L E R S
COMPOSANT
LA PREMIERE CHAMBRE DE LA COUR ROYALE DE RIOM.
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�DE
M. L E D R U , A R C H IT E C T E A CL E R M O N T ,
SOUM ISES
A MM. LES PRÉSIDENT ET CONSEILLERS
COMPOSANT
LA PREMIÈRE CH AMRRE DE LA COUR ROYALE DE RIOM.
In omnibus quidem , maxime tamen in ju r e ,
»•quitus spectanda est.
M e s s ie u r s ,
Engagé dans un procès avec MM. Béthune, Goyon (Victor) et Guyonic, mes
anciens associés, il m ’a paru que s’il s’agissait uniquement de décider, selon les
lumières du droit, et d’après votre haute expérience, les questions débattues devant
vous, il y avait à la lois pour moi, comme pour mes adversaires, ces garanties de
science et d’impartialité qui n’ont jamais failli à vos justiciables.
Mais il est, dans certains débats judiciaires, des laits préliminaires à signaler,
importants à apprécier, et que les exigences de l’audience ne permettent pus toujours
de révéler complètement. Le magistrat a cependant besoin de les connaître, nonseulement pour juger la moralité du client, mais aussi celle de sa cause.
A ces considérations premières, il faut rattacher celles qui appartiennent au fonc
tionnaire public , honoré jusqu’à ce jour de l ’estime de ses concitoyens , et (pii veut
la conserver; au père de famille (pii doit tenir à cœur de laisser intact le seul patri
moine qu on ne saurait lui enlever, son honneur, sa probité.
�C ’est sous l’influence de ces déterminations que j’ai pris la plume, non pour dis
cuter le droit, non pour rechercher ce que j’ai entendu appeler au palais des fins de
non-recevoir, ou des moyens de nullité, mais pour raconter avec simplicité com
ment j’ai été conduit, par suite de mes études sur les bitumes d ’Auvergne, à con
tracter une société avec mes adversaires, quelles circonstances l ’ont préparée, et quels
actes y ont mis fin.
En pareil cas, le langage d ’une partie qui expose sa propre cause, doit paraître
intéressé; je l’ai compris, et voulant éviter ce reproche, je m ’efforcerai de repro
duire principalement toute la correspondance qui s’est établie à ce sujet.
Je ferai, avant tout, parler MM. Béthune et consorts avec leurs propres écrits.
Les pièces relatives aux projets et propositions de traité passeront successivement
sous les yeux de la Cour.
Depuis 1810, je me suis occupé des bitumes d’Auvergne; le 7 mai de cette
année, j’achetai, par acte notarié, le droit d’exploiter le gisement de la montagne
dite de l’Ecourchade.
Le 4 mars 1829, j’ai obtenu la concession de cette mine qui était comprise dans
une demande générale de tous les gisements de la Limagne.
Le 30 janvier 1837, après de grands travaux de recherches et de nombreuses
découvertes, j ’ai renouvelé ma demande.
Toutefois, je n’ai jamais envisagé cette entreprise que comme industrie, et suis
resté constamment étranger aux spéculations de bourse, auxquelles les matières
bitumineuses ont donné lieu.
En 1838 , ma position se résumait en ces termes : J ’étais demandeur en conces
sion des gîtes bitumineux de la Limagne;
Propriétaire d ’un tiers de celui de Chamalières dont la concession était obtenue.
J ’avais fait conduire à Paris vingt-six bateaux de nîatières bitumineuses.
J ’avais fait des dépenses considérables en travaux de recherches et d’expériences.
J ’avais enfin acquis pour une vingtaine de mille francs de terrains bitumineux.
Aussi des propositions m ’avaient été adressées par des personnes des plus hono
rables, lorsque j ’appris que MM. Béthune et consorts, pour se présenter comme
opposants à ma demande, venaient d’acquérir à un prix exorbitant le tiers de la mine
de Chamalières.
A cette époque, ces messieurs ont-ils été circonvenus par moi, entourés de mes
obsessions,
pour arriver <\une association?
Leur correspondance va nous faire connaître de quel côté a été l’initiative.
M. Jean-Baptiste Goyon m ’écrivait le 15 août 1838 :
�Je désire traiter avec vous de tous yos droits
à
l’Ecourchade et aux concessions que vous
avez demandées.
Au mois de septembre suivant, il n’y avait encore rien d ’arrêté, et M. Guyonie,
écrivant à M. Goyon-Pératy, lui recommandait expressément de hAter le résultat.
Vous voyez, disait-il dans sa lettre de septembre 1838, que nous sommes débordés
de toutes parts, et dites-le bien à M . Ledru; il ne s’agit plus de discuter entre nous
quelques points de détail, il faut courir rapidement ensemble vers un avenir qui puisse
nous dédommager.
Souvenons-nous bien seulement que notre p a ri sera bien peu de chose, si nous n’ab
sorbons pas M . Ledru dans notre sp/icre.
M. Guyonie s’adressant à son tour directement à moi, m ’écrivait, le 19 septembre
1838, dans ces termes :
Réunis à quelques amis, nous avons désiré nous intéresser dans l’exploitation des bi
tumes d’Auvergne. Notre correspondant àClerm ont a dû vous en entretenir.
Nous sommes étrangers à tous démêlés qui auraient pu s’agiter antérieurement. Nous
venons loyalement et ouvertement à un homme loyal. Notre concours dans le présent et
dans l’avenir fécondera notre entreprisc commune. Pour le présent vous avez toute sécu
rité ; pour l’avenir vous devez concevoir de larges espérances. Nous avons intérêt à marcher
d’accord.
À un pareil langage, dont la franchise et la loyauté se retrouvaient au moins
dans les expressions, que devais-je répondre ?
Il était donc naturel de me confier à ce présent, pour lequel on me promettait
toute sécurité, et de me laisser aller à de larges espérances , que j ’étais d ’ailleurs
très-disposé à concevoir, au souvenir de mes longues études et d ’une expérience qui
m’avait été déjà si coûteuse.
J ’envoyai à Paris, et sur la demande qui m’en était faite, la copie d’un traité passé
avecM. Barbereux , dont on sollicitait le lieu et place. On me répondit par l’envoi
d’un contre-projet.
M. Guyonie m ’écrivait le 19 septembre 1838 :
Nous avons reçu communication , par votre frère, de votre projet de traité; nous l ’a
vons examiné, et tout en admettant les bases principales, nous avons cru devoir y ap
porter quelques modifications dans la forme et dans le fond. Nous avons, en conséquence,
dressé un contre-projet, appuyé de réflexions sérieuses et rationnelles. Nous avons chargé
notre correspondant de vous en donner connaissance et de recueillir votre réponse. Nous
étions dans cette attente, lorsque nous apprenons l’absence de Clermont du correspon
dant; alors nous prenons le p a rti, voulant vous donner une preuve de la sincérité de nos
intentions, de vous adresser sous ce pli copie entière de nos résolutions.
�Les principaux articles de leur contre-projet étaient ainsi conçus :
A rt . 2. M M ......mettent en Société et apportent :
1°. Les deux tiers de la mine de l ’Ecourchade, tels q u’ils appartenaient à Mme veuve
Nicolas ou à M. Jusseraud ;
2°. Tous les terrains bitum ineux acquis par M. Goyon , ainsi que les matières extraites,
outils et ustensiles y attachés ;
3°. Tous les droits que Mme veuve Nicolas peut avoir à l’obtention dos concessions de
mandées par M. Ledru le 2 février 1837 et par elle-même en mai 1838, ainsi que les
droits et réclamations que ladite dame peut avoir à exercer contre M. Ledru, soit pour
non jouissance , indem nité ou autrement.
A rt . 8. L ’actif de la Société serait destiné , d’abord à rembourser les mises de fonds de
M M ......... avec l’intérêt à 6 0/0.
A rt . 13. Toutes contestations relatives à l’Ecourchade sont éteintes.
E x lrait des réflexions sérieuses et rationnelles.
Nous ajouterons que déjà une première garantie existe dans l ’apport de M M ....... qui ne
peut être évalué à moins de 60,000 fr.
Enfin , après beaucoup de pourparlers , après des explications que je devais croire
franches, on tomba d ’accord sur les bases d’un traité.
Il fut passé, le 6 octobre 1838, « entre 1°. M. Agis Ledru, élève architecte,
» demeurant à Paris, rue Sainte-Marguerite, faubourg Saint-Germain, n° 1 0 ,
» agissant comme mandataire de M. Louis-Charles-François Ledru, architecte, «Je—
» mourant à Clermont-Ferrand , suivant sa procuration sous seing privé, en date du
» 20 septembre 1838, d ’une part;
» 2°. 31. Auguste Valeau, négociant, demeurant à Paris, rue Richer, n° 10 ,
» agissant tant en son nom que comme se portant fort de M. Jean-Baptiste Goyon» Pératy, demeurant à Bordeaux ;
» 3°. M. Maximilien Béthune, imprimeur, demeurant à Paris, rue de Vaugirard,
» n° 30, tant en son nom que comme se portant fort, conjointement avec M. Guyo» nie, de .M. François Boucaumont, géomètre, demeurant <\Clermont-Ferrand;
» 4 °.
M. Antoine-Blaise-Léonard Guyonie, propriétaire, d e m e u ra n t à Paris, rue
» de la Bourse, n °2 , tant en son nom que comme se portant fort, 1°- de 31. Pierre» \ictor Goyon, propriétaire à Clermont-Ferrand ; 2°. et de 31. Boucaumont, çon» jointement avec 31. Béthune, d ’autre part (1). »
.1 avais envoyé (h; confiance ma procuration , ne pouvant prévoir que les conven
tions primitivement arrêtées, recevraient sur les lieux d'importantes modifications.
(1) V o ir les articles <1n traité à la lin du M é m oire .
�Aussi, grand fut mon étonnement, lorsque je reconnus que les conventions les plus
sérieuses, les plus utiles à conserver dans mes intérêts, étaient dénaturées ou sup
primées. Par exemple , il n’était plus question de l’apport des deux tiers de la mine
de Chamalières que devaient faire ces messieurs , d ’après le projet même qu'ils m ’a
vaient envoyé, en m ’annonçant qu’ainsi serait détruite toute concurrence.
D'autre part, je vis pour la première fois ces mots : Chacun pour sa p a r t , écrits
à la suite d ’un renvoi, au moment de la signature, qui venaient détruire le principe
de solidarité établi par l’acte.
Je fis aussitôt mes observations, principalement sur l’omission des apports qui
m’avaient été promis; M. Bétliune répondit qu’on pouvait, il est u a i , établir
une concurrence à ma porte, mais qu’il n ’y avait pas d’intérêt à le faire, et que mon
inquiétude devait cesser.
Aucune de mes réclamations, quelque juste quelle pût être, ne fut admise.
Je craignais alors un procès que je ne devais pas éviter plus tard , et acceptai ces
clauses telles (ju’ellcs étaient rédigées, dans la double pensée que ces messieurs les
exécuteraient fidèlement, et que l’opération en elle-même promettait de l ’avenir.
Par les principales clauses de ce traité, je cédais les trois cinquièmes de tout ce qué
je possédais concernant les bitumes d ’Auvergne.
On devait me rembourser toutes mes dépenses réglées à 92,555 fr. ; mais on alté
rait cette clause en stipulant qu’une partie, 10,000 fr. seulement, serait en argent,
et le reste en papier. On m’imposait contre mon aveu une garantie de 50,000 lr.
pour les marchandises que je livrais, et pour plus grande sûreté on me retenait
30,000 fr.
Pour tous les délais que prenaient ces messieurs, ils ne me tenaient compte d ’au
cun intérêt, tandis que leurs mises de fonds devaient leur rapporter dix pour cent,
quoique dans leur projet ils n’eussent demandé que six.
Comme indemnité des sacrifices que m ’avaient occasionnés les soins donnés à l’af
faire , on me reconnaissait une mise de fonds de 100,000 f r ., mais l’on établissait
qu’elle ne serait payée qu’en actions de la Société à former.
On s’engageait à faire toutes les mises de fonds nécessaires au développement de
l’entreprise, et j ’en étais exempt.
Un fonds de roulement devait être formé immédiatement.
J étais directeur des travaux en Auvergne conjointement avec MM. Victor Goyon
et Goyon-Pératy. Le gérant, à Paris, était M. Guyonie sous la direction de
\1M. Bétliune et Valeau.
Ainsi, par toutes ces restrictions apportées aux premières conventions, moyen-*
nant le déboursement de 10,000 fr. et des traites dont les échéances tenaient toute
�une année, ces messieurs se rendaient les maîtres des trois cinquièmes de mon
affaire.
La seule chose en ma faveur était celle qui m ’exemptait de contribuer aux mises
de fonds, car je livrais en marchandises une valeur plus considérable que le chiffre
des remboursements à opérer, et que, sans une gestion déplorable, on aurait pu réa
liser avant les échéances.
Enfin, comme je l’ai dit, n’ayant pu faire revenir sur les omissions et infidélités
commises dans la rédaction définitive du traité, j ’en demandai au moins la stricte
exécution...........................................................................................................................
.........................Là commencèrent les difficultés.
Très-grande fut ma surprise à la nouvelle que la Société, qui continuait toujours
à subsister entre ces messieurs pour le tiers de la mine de l’Écourchade, puisqu'ils
refusèrent de la confondre avec mes apports, était pleine de discorde et de méfiance.
Il fallut plus de six semaines de réclamations de tous genres pour obtenir le règle
ment et la remise des valeurs qui m ’étaient dues.
Les trois associés de Paris, MM. Béthune, Guyonie et Valeau, s’étaient portés forts
pour ceux de Clermont, et ceux-ci, pour se décider suivant l’issue de l’affaire, diffé
raient leur ratification. L ’un d’eux fut exclu pour motif de tardivité.
M. Guyonie me faisait encore connaître cette circonstance par une lettre du G no
vembre 1838 :
Je me suis porté fort envers vous de l’exécution de notre traité du 6 octobre en ce
qui concerne M. Houcaumont.
M. Boucaumont n’a pas payé le premier terme ni souscrit les acceptations dans le délai
fixé par ledit traité.
C onséqucm m ént, M . Boucaumont eut hors de notre Société. Il ne doit ni ne peut en
faire partie. S’il vous faisait un acte d ’offre quelconque , vous le refuseriez , par le m otif
de tardivité et de l’exécution personnelle quç j ’ai remplie envers vous.
Un autre associé ne se décida à remplir les engagements pris pour lui que pour
éviter l’exclusion dont il fut menacé.
C ’est ce qui a motivé la lettre de M. Guyonie, du 14 du même mois de no
vembre :
l)’apn>s ce que m ’annonce votre lettre du 11 Courant sur le retard de M. Victor G o y o n ,
je vais lui écrire par le courrier ou celui de demain pourqu il remplisse son engagement,
sans quoi j’y satisferai immédiatement.
De son côté, M. Goyon, inquiet sur la direction qui m ’était accordée, avait déjà
écrit à M. Guyonie le 10 octobre 1838 :
Relativement à la direction de Clermont par tiers, il me semble q u’il n ’est pas suffi
�samment expliqué que les droits des uns et des autres sont égaux en tout et partout.
M. Ledru seul a le titre de gérant, et si par hasard la direction q u ’il voudra donner aux
travaux 11e convenait pas , nous n’aurions pas le môme pouvoir que lui pour la
changer.
Bientôt M. Guyonie me témoignait (ce qui était plus sérieux) les craintes que lui
faisaient concevoir les dépenses de M. Goyon.
Il m ’écrivait le 24 décembre 1838 :
Ma lettre de hier vous a fait pressentir une dissidence avec M. Goyon. Celte dissidence
vient d’éclater manifestement par des traites queM . Goyon oncle vient de tirer sur nous,
jusqu’à concurrence de 14,400 fr. pour l’affaire Boucaumont. Comme nous ne voulons
pas rester sous le coup des traites de M. Goyon , nous lui révoquons nos pouvoirs. Cet acte
tempérera un peu l’ardeur des dépenses de M. Goyon.
Vous voyez là une scission véritable que MM. Goyon ont provoquée ; mais vous ne de
vez pas vous en émouvoir : elle est étrangère à la Société qui nous lie à vous.
Vinrent ensuite les questions d’amour-propre, les titres à donner ou à recevoir,
et alors qu’il s’agissait de choses bien plus graves, on discutait sur la qualification
honorifique qu’il convenait d ’accorder à chacun.
M. Guyonie me disait, en effet, ce qui se passait à ce sujet, par sa lettre du
13 janvier 1839 :
M. Goyon oncle a manifesté, dans notre dernière assemblée, le dessein de marcher
d’accord et de concourir au développement et au succès de l’affaire. Nous ne demandons
pas m ieux , et depuis trois mois notre correspondance n ’a pas d ’autre but; il serait bien
désirable d ’y arriver. Que faut-il faire pour cela? O11 propose de leur accorder, à
M. Goyon-Pératy le litre à'inspecteur, et à M. Victor Goyon celui de contrôleur, en
ajoutant à l’un et à l ’autre le mot général. A mon sens, c’est une superfétation que de
dire inspecteur-général quand il n ’y en a q u ’un seid inspecteur; mais si l ’union et la
concorde sont à ce p r ix , je ne verrai aucun inconvénient « satisfaire à ce petit grain
d'amour-propre.
Si nous nous arrêtons un instant sur cette correspondance, et réunissons en peu
de mots les résultats qu’elle apporte naturellement, nous serons amenés à recon
naître qu’il ne peut se présenter <\l’idée de personne que les fautes de la gestion
me fussent personnelles , et que, seul , j ’aie jeté mes associés dans de folles
dépenses.
Comment admettre ces reproches, si l’on se souvient que M. Guyonie était gênant,
que MM. Béthune et Valeau formaient un conseil souverain d ’où partaient des actes
irrévocables; que MM. Goyon, inspecteur et contrôleur général, étaient chargés de
surveiller chaque opération, et qu’ils avaient demandé ces titres précisément pour
changer la direction que je voudrais donner, si elle ne convenait pas.
�Toutefois, à Paris, on n ’avait rien su organiser.
Pas un client, pas un travail utile aux concessions. Ce n ’est pas tout: nous al
lons bientôt voir qu’on refuse à une maison solvable, une vente de quatorze ba
teaux , qui faisait entrer dans la caisse de la Société plus de 60,000 fr ., dont au
moins 24,000 fr. de bénéfices.
Malgré cet étal de sommeil et d’encombrement, on décidera ainsi qu’on va le dé
montrer par la correspondance , qu’il sera extrait et expédié trente nouveaux bateaux.
On chargera la Société de cette énorme dépense, sur la vague espérance d ’un mar
ché à conclure avec un sieur Pezerat qui avait conçu le singulier projet de remplacer
par du bitume, les rails des voies à vapeur, et qui se berçait de la pensée que FAca
démie des sciences décréterait, sur sa demande, que le bitume serait dorénavant
plus dur que le fer.
Continuons à présenter les détails offerts par la correspondance.
Je recevais les h novembre et 26 décembre 18.38, deux lettres de Paris, relatives
à la vente Adrien; elles s’exprimaient ainsi :
La Société dite du M ilie u , sous le nom d’Adrien aîné , comme je te l ’ai m a rq u é , nous
prend des marchandises; ils veulent faire u n marché à 60 francs les 1,000 kil. pour les
Lussat, Chamalières et Croix-des-Rameaux que nous avons à Paris. Je vais demain présenter
cotte demande à ces messieurs , q u i, je pense, sera acceptée d’eux.
4 novembre 1838.
L edru , de Paris.
Il est bien vrai cependant que la maison Adrien aîné avait proposé de prendre de suite
les matières de quatorze bateaux, mais à u n prix qui n’était pas acceptable; que d ’autres
propositions dans le même genre ont été faites, mais que l ’on n ’a rien terminé par deux
raisons : la première, parce que les prix n ’étaient pas assez avantageux ; la deuxième,
parce q ü e , si nous avions tout vendu, notre établissement, q u’il est si nécessaire de tenir
en pleine activité, aurait langui.
26 décembre 1838.
L ed ru , de Paris.
Le gérant me pressait aussi pour lui faire expédier des marchandises et accélérer
les travaux.
C'est ce qu’il m ’écrivait d'abord,
Le 11 novembre 18.38, lorsqu’il me disait:
Veuillez ne pas ralentir les travaux et profiter des premières eaux pour nous expédier
des marchandises. Veuillez me dire , par le retour du courrier, si nous pourrions con
tracter l’engagement d’une fourniture qui pourrait dépasser un m illion de kilogrammes.
Le 14 du même mois, il me disait:
Vous faites bien de continuer les travaux d’extraction, mais vous devez leur donner
plus d ’extension. Nous attendons non-seulement \otre excellent bateau de D allet, mais
�dix et vingt autres s’il était possible. Aux autres renseignements demandés par ma der
nière, je vous prie de joindre celui de savoir quelle quantité nous pourrions en fournir
chaque année, trois cents par exemple. Vos autres travaux en architecture ne doivent
être pour vous que secondaires ; en ce moment vous avez dans les bitumes une source de
fortune que mes amis et moi mettrons tous nos moyens (pour vous et pour nous ) à déve
lopper d’une manière aussi prompte qu’assurée. Soyez donc explicite envers nous et exclu
s if pour l ’affaire.
Cette dernière lettre, comme on le voit, semblait annoncer que les éléments de
fortune étaient entre nos mains, et que le succès serait aussi grand qu’il serait prompt.
Le lendemain, 15 novembre, M. Guyonie examinant l’entreprise en elle-même
et dans tous ses moyens, annonçait qu’il serait possible de livrer annuellement trois
à quatre cents bateaux, et promettait de faire honneur à toutes les traites qui seraient
tirées sur lui.
Il importait peu d ’ailleurs, à ses yeux, que la maison Adrien n’eût pas pris ces
quatorze bateaux , car il y avait lieu de s’attacher à de plus grandes, à de plus belles
opérations.
Aussi l’avenir se parait-il pour lui des plus brillantes couleurs, et il laissait glisser
sur sa plume, l ’un de ses rêves qu’il avait faits pour moi, c’est que dans son opinion
je devais avoir nécessairement 80,000 fr. de rentes.
Voici sa lettre du 15 novembre 1838 :
Quand bien même la maison Adrien ne prendrait pas les quatorze bateaux, nous n’au
rons pas à nous en préoccuper, j’ai mis notre Société en rapport avec une autre maison
qui prendrait tous nos produits; voilà pourquoi je vous ai demandé hier s i , ayant les
concessions, nous pourrons livrer annuellement de trois à quatre cents bateaux.
Tous vos regards doivent se porter sur l’avenir, qui sera magnifique, si nous avons les
concessions : 80,OUI) francs de rentes pour vous ; n’en dites r ie n , mais c'est mon opi
nion.
Le même espoir de succès, la même confiance préoccupait M. Guyonie, lorsqu’il
m ’écrivait.
Le 28 novembre 1838:
Ici nous n ’avons pas encore commencé les travaux d’application, quoiqu’il nous en soit
demandé souvent; les essais ont pris beaucoup de temps, mais ils touchent à leur terme,
et nous allons nous mettre à l’œuvre.
Le 1er décembre 1838 :
Achetez, d’un commun accord avec M. Goyon , les terrains que vous croirez utiles à la
Société, laites charger et expédier les bateaux ; que pour le tout on tire sur no us, comme
il a été d it, il y sera fait honneur.
2
�Le 2y janvier 1839 :
Nous attendons le complément des quatorze bateaux , et si je pouvais prendre les cho
ses sur m o i, je vous dirais de nous envoyer les trente demandés.
Le 3 0 mars suivant, il m ’envoyait la copie de son projet de traité avec le sieur
Pezerat.
Sa lettre, à ce jour, était ainsi conçue :
Je joins ici copie de mon projet, vous priant de m ’en dire immédiatement votre opi
nion, alin de convoquer les administrations des deux Sociétésà une conférence définitive
qui sera StlMc de la signature du traité.
A r t . l or de ce traite. — M. Pezerat, ès-dites qualités, s’oblige à prendre , soit poul
ies employer, soit pour les revendre , tous les bitumes asphaltes à provenir des mines de
la Compagnie d’Auvergne, dont est directeur NI. G uyonie, et dont le m inim um annuel
serait de deux cents bateaux pesant l’un de 50 à 60,000 kilogrammes.
Le 1er avril 1 8 3 9 , j ’apprenais par une lettre de M . Guyonie que la réalisation de
son projet avec Pezerat éprouvait des difficultés. Cependant il ordonnait toujours de
nouveaux travaux
La réalisation de mon traité avec la Compagnie, Pezerat éprouve quelque difficulté par
suite d’un incident qui ne provient ni de vous ni de m o i, et dont je vous rendrai compte
s’il est nécessaire. — Toutefois , j ’espère que nous en terminerons. — Sous cette persua
sion, je vous prie de nous expédier immédiatement le bateau de bitume préparé en pains
qui esta votre disposition, et d’en faire préparer continuellement par AI. Gallice.
1er avril.
Si vous avez des matières pulvérisées en excédant de la fabrication, joignez-les à l’en
voi du bateau.
2 avril.
Ainsi, dès le mois de novembre 1 8 3 8 , voilà une opération annoncée à grand fracas,
le traité Pezerat: on presse les extractions, les chargements de bateaux; on ne veut
pas être pris au dépourvu devant cette immense consom m ation; ce n est que quatre
mois après, le 30 mars, qu'il est question de prendre des arrangements réciproques.
M a is, remarquez-le b ie n , on n ’avait de renseignements ni sur la solidarité de l’a
cheteur, ni sur la position de la Société, et tout d ’un coup l ’un disparaît, l ’autre se
disperse.
Quel a été le directeur de cette opération, qui l’a créée en quelque sorte, l’a dé
veloppée et constamment dirigée?
Nous le savons, ce n’est pas moi.
Quel est celui qui doit en avoir la responsabilité ?
Ce n’est pas encore moi; je suis en droit de le soutenir hautement.
�Mais il faut aller plus en avant; il faut, en présence de ces faits, reconnaître nonseulement que les travaux effectués ne l’ont pas été par moi uniquement et d’après
ma pensée, mais d’après les indications, les demandes incessantes du gérant. Il faut
encore reconnaître que si la volonté de féconder une industrie avait réellement existé,
si l’espérance de gros bénéfices trop tôt réclamés, n’avait pas été le premier mobile,
une toute autre direction aurait été suivie, et l’entreprise eut conquis le succès qui
lui était presque assuré.
Voyez, en effet, ce qui m’avait été promis, et rappelons, en peu de mots, ce qui
a été fait.
Dès le début, MM. Guyonie et consorts ont été arrêtés par l’obligation de faire
des fonds de roulement; et moi qui ne les avais admis que pour imprimer, à l’aide de
leurs capitaux, un développement à mon affaire, moi qui ne devais contribuer en rien
aux dépenses, je suis forcé de me constituer caution , en remettant à des tiers,
sur les instances de mes associés, des traites qu’ils refusèrent de payer après les avoir
acceptées.
Avant de traiter, vous écriviez :
E xtrait des réflexions sérieuses et rationnelles.
Les associés désirent, aussi vivement que M. Ledru lui-même, le succès de l’entre
prise; ils y apporteront tous les soins et tous les capitaux nécessaires, mais ils doivent
rester juges de la quantité et de l’opportunité des mises de fonds. L ’entreprise ne faillira,
pan à défaut de ressources. Ainsi donc, inutile de créer à l’avance un fonds de 50,000/)-.
L ’article du traité était ainsi conçu :
Anr. G du traité. — MM. Valeau , Béthune, Goyon et autres prendront les moyens de
donner à l’entreprise tous les développements dont elle est susceptible. A cet effet, ils
feront un capital proportionné aux acquisitions, exploitations de la Société, et établisse
ment d’usines reconnues nécessaires.
Au moment de l’exécution, le 10 novembre 1838, M.
Béthune écrivait à
M. Guyonie :
Je crois que nous ferons bien de suite d’écrire au banquier de Clennont que désigne
M. Ledru, de lui demander s’il lui convient de faire les fonds fixés à environ tant par
mois, en le couvrant en traites acceptables à quatre-vingt-dix jours sur vous. Tout serait
ainsi central, et nous verserions chez vous notre quote-part à mesure des payements, et
huit jours ii t’avance, et au surplus il arrivera que, p ar la suite, les rentrées des marchan
dises serviront à cela.
lâchons de taire chacun pour le mieux, et je crois que nous avons une belle balle en main.
�Le 28 novembre 1838, M. Guyonie me mandait :
Dans notre réponse à M. C ariol, nous l’avons autorisé à mettre à votre disposition
2.000 fr. pour vos dépenses de détail; ainsi, chaque fois que' vous emploierez tout ou par
tie de la somme, vous fournirez une truite sur moi à quarante-cinq jours , que j'accepter a i ,
en sorte que les 2,000 fr. restent toujours à votre disposition; mais ceci ne s’applique
q u’aux dépenses de détail. Vous aurez l ’obligeance, pour les autres dépenses, de m ’en
adresser un état ou aperçu à l’avance, afin que je le soumette à l’approbation du conseil,
et par le courrier suivant que je vous adresse l’autorisation d ’y pourvoir. Rien ne vous
manquera.
Cette correspondance démontre bien que j ’étais en réalité caution de mes asso
ciés ; car, s’ils ne payaient pas, à qui devait-on demander le remboursement? Et
quoiqu’il me fût promis que rien ne me manquerait, on sait déjà que tout m ’a man
qué.
Sur ces entrefaites, la Société avait à peine trois mois d’existence que M. Valeau
suspend ses payements.
Il s’était porté fort pour M. Goyon-Pératy, qui, du même coup, s’arrêta aussi
vis-à-vis la Société, quoiqu’il fût l’agent le plus actif de l’affaire, qu’il partageât la
direction en Auvergne, et eût demandé avec le plus grand sang-froid le titre d'ins
pecteur général. Il avait jugé à propos de rester caché derrière M. Valeau , sans
adhérer ni résilier.
Une terreur panique s’empare aussitôt de M. Béthune ; il m ’écrit qu’il ne peut
plus payer, qu’il a besoin de ses fonds pour ses affaires personnelles, comme si
celle-là lui était étrangère.
M. Guyonie, tout en ne remboursant pas les effets Valeau, endossés par lui,
l’attaque pour s’emparer de ses cinq douzièmes, n’hésitant pas à se charger des deux
tiers des dépenses de l’affaire, lorsque sa signature était en soulfrance pour
4.000 ir.
Une circonstance grave se présente aujourd’hui. M. V ale au n’a pas payé les 4,106 fr.
70 c. formant sa quote-part, et celle de M. Goyon-Pératy, dans les 10,000 fr. d’acceptations
à l’échéance de ce jo u r, et du 20 courant, M. Valeau ne se montre pas, et il fait dire
q u’il est dans l’impossibilité de payer. — M. Goyon, à qui je viens de parler moi-même
pour ses douzièmes, déclare q u ’il ne paye pas non plus ; que d’ailleurs il ne fait pas partie,
d it- il, de la Société Ledru.
Cependant ces messieurs ne donnent pas leur désistement, car il nous serait facile de
les faire remplacer par des hommes plus solvables.
L ’engagement deM . Valeau, dans celte occasion, était sacré : c’était une dette d’hon
neur, et je ne trouve pas d’expression pour qualifier son procédé à mon égard. — Je me
�suis présenté chez lui sans pouvoir le rencontrer, ni lui exprimer toute l’indignation dont
je suis saisi.
Ma signature qui était intacte , qui n ’a jamais souffert, va se trouver atteinte par la
déloyauté d’un homme q u’on disait millionnaire.
Revenant au contre-temps qui nous afflige, vous pouvez changer la tempête en bonace,
par la mise hors de Société de M. Valeau, tant pour lui que pour M. Goyon , oncle.
18 janvier 1839.
G uyonie .
Pour le cas où vous obtiendrez la résiliation du traité à l’égard des sieurs Valeau et
Goyon-Pératy, je me trouve tout naturellement substitué à leur lieu et place.
Veuillez bien en conséquence, Monsieur, me donner une déclaration spéciale d’aban
don desdits douzièmes.
21 janvier 18.19.
G uyon ie .
M. votre frère paraîtrait vouloir en prendre u n , j ’en suis charmé et je le lui réserve ;
quant aux autres, je les retiens pour moi ou pour mes am is, q u i, sur ma parole et sans
aucun exam en, en prendront chacun un. Ceux-là du moins y viendront franchement, et
y apporteront leurs concours et leurs capitaux dans la proportion de leur émolument. Ils
consentiront comme moi à donner à notre entreprise l’extension nécessaire. L ’un d ’eux
vient à l’instant de retenir un de ces douzièmes aux conditions premières; je le lu i ai
prom is, et je voudrais déjà pouvoir le compter au nombre de nos associés.
Je me chargerai de diriger l ’instance contre les sieurs Valeau et Goyon; elle commen
cera aujourd’hui et a besoin de soins. Veuillez prier M. Cariol de ne donner aucun ordre
à cet égard, et do révoquer ceux q u ’il aurait donnés.
22 ja n v ie r 1839.
G u y o n ie .
E^a défection Valeau et Goyon nous tient toujours en suspens; le jugement a été rendu
par défaut le 25 courant. Je hâte l’expédition.
S’ils renonçaient ils seraient im médiatem ent remplacés par des hommes solides, dont je
répondrais comme de inoi.
*
29 janvier 1839.
G uyonie .
J ’éprouve le besoin de vous dire en même temps q u ’il m ’est impossible, complètement
impossible de garder mes trois douzièmes. J ’ai besoin de mes fonds pour désengagements
propres à mes affaires, et je ne puis en disposer pour d’autres. Des exigences instantes,
violentes, me nuiraient sans cloute, mais vous auriez à voir si elles ne nuiraient pas bien
plus à vos intérêts, et surtout à la marche de l ’affaire.
Mais je tiens surtout à être dispensé de payer la traite, au 14 mars, de 2,500 fr.
20 février 1839.
M a x . Bèthune .
Ce funeste contre-temps (les troubles de P aris), me met dans l’impossibilité d’acquitter
demain vos 2,500 fr. de traite. Veuillez, pour vous couvrir, tirer im médiatement sur moi
une nouvelle traite de 2,500 fr., à échéance du 10 août.
13 mai 1839.
G uyonie .
Jusqu’à ce qu’il ait été fait et réalisé un fonds de roulem ent, il a été délibéré que los
payements de dépenses seront faits comme les payements du traité, selon l'émolument
de chacun de nous , et je ne conçois pas que ce mode ait éprouvé quelque résistance do
�—
u
—
\otre part ; vous êtes plus que tout autre intéressé à son adoption: quatre signatures
valent mieux qu’une. A in s i, pour clore le passé , nous vous prions :
1°. De réunir toutes vos dépenses personnelles jusqu’au trente-un mars, et de tirer
sur nous i\trois et six mois;
2°. De réunir également toutes les dépenses des mariniers, et de tirer sur nous pour
leur m o nta nt, à s ix , neuf et douze mois.
Vous me comprendrez dans chaque payement pour, c i.........................................1/3
M . Béthune pour......................................................................................................... ... 1/6
M. votre frère p o u r .................................................................................................... ... 1/12
Et M. Valeau p ou r....................................................................................................... ...5/12
12/12
Vos traites ainsi faites seront acceptées par chacun de nous, et payées pour sa part.
8 avril 1839.
G üyonie .
Q uel soin ne prend-on pas de ma sécurité ? « Q uatre signatures valent mieux q u ’une,
» et vous tirerez sur chacun de nous pour son ém olum ent. »
Mais aussi quel ingénieux moyen de se débarrasser à mon profit de la solidarité
envers les tiers en cas de faillite de l’un des bailleurs de fo n d s , et de me forcer au
remboursement des traites tirées personnellement sur l u i , moi qui ne devais pas
contribuer aux dépenses ?
Le cas était probable ; les affaires de M . V aleau ne se relevaient p a s , ces mes
sieurs voulaient se débarrasser de l ’éventualité.
L ’événement si habilement prévu se réalise; la faillite Valeau est déclarée le
11 juillet
1839.
Déroute générale. A ucune des traites acceptées par le gérant
n ’est payée, et les tiers me poursuivent avec vigueur.
Messieurs Sainbucy et C a rio l, banquiers.
M. Valeau a déposé aujourd’hui son b ila n , qui présente un déficit de 75 pour 0/0 et quj
rejaillit gravement sur m o i, je suis donc dans l’impossibilité actuelle de payer; mais avec
moi, ce lient qu’une question de temps, il n’y aura rien à perdre : seulement il faut que je
trouve des facilités chez mes créanciers; vous êtes en ce m om ent, Messieurs, les plus ri
goureux.
Notre établissement et nos marchandises sont intacts; ils ont une valeur quintuple du
montant des dettes; il nous faut seulement pouvoir attendre l’obtention des concessions,
la vente des matières ou leur application.
A cet effet, nous aurions besoin d ’un crédit successif, chez vous, Messieurs, d environ
30,000 fr., qui vous serait garanti d’abord par nos engagements individuels; ensuite par
un privilège sur notre établissement matériel et marchandises dans telle forme que vous
|e désireriez.
U juillet 1839.
G u y o n ie .
�À Messieurs Cariai et Sambùcy , banquiers.
Pour ce qui est de me poursuivre à outrance, ce serait à votre détriment et au mien.
Je ne crains pas de vous dire q u e, dans l ’état extrême de gêne où je suis, toutes les ri
gueurs possibles n'obtiendraient pas la moindre somme, mes ressources entières sont pa
ralysées.
12 août 1839.
G uyonie .
J ’en reviens à vous dire que mon actif est plus que suffisant pour éteindre mon passif,
mais à la condition q u’on me donnera du temps pour réaliser.
Que s i , au contraire, ou me met dans la position de M. Valeau, on ne retirera pas le
dixième de ce qui est dû.
Quant à donner une hypothèque, elle serait tardive aujourd’hui, et l’on n’en retirerait
aucun fruit.
17 août 1839.
G uyonie .
Les poursuites de rigueurs de MM. Cariol vont me forcer, après le second jugement, îi
déposer mon bilan. Cette mesure réagira sur mes coassociés eu nom collectif, e t , aux
termes de l’article 458 du Code de commerce, les scellés seront immédiatement apposés
chez vous.
‘22 août 1839.
G uyonie .
Tel était le résultat qui m ’était promis, après maints efforts, maintes concessions
de ma part, et des dépenses multipliées que je n’étais pas tenu de faire. M. Guyo
nie, qui avait voulu la haute main et envahir toute l’affaire, qui, à volonté, tantôt
refusait l’occasion d ’un marché avantageux , tantôt pressait avec ardeur l’envoi de
marchandises restées sans emploi, M. Guyonie recule devant les conséquences de ses
engagements personnels; il se laisse poursuivre à outrance; il sollicite des délais , et
en désespoir de cause menace de son bilan ses créanciers , s’ils sont trop exigeants.
En résumé, il ne paye plus.
Peut-être avait-il oublié, dans ce moment, que, pour faire face aux sommes qu'on
lui réclamait, il avait encaissé, comme nous le démontrerons ¡»lus tard , les accepta
tions personnelles à ses coassociés.
Les tiers porteurs poursuivirent. Une proposition qui pouvait tout sauver, avait
été faite, celle d ’un emprunt. On dressa, à Paris, procès-verbal de la résolution
prise et un état des dettes portées à 33,000 fr.
Je donnai une nouvelle preuve de modération en consentant à suspendre mon pri
vilège sur l’affaire pour faciliter leur emprunt, à eux qui devaient pourvoir à toutes
les dépenses, et me devaient encore une soixantaine de mille francs. M. (ioyon refusa obstinément son adhésion. Il pensait pouvoir ne pas payer les dépenses ordon
nées , dirigées, surveillées par lui-même. Il fit partager son avis à M. Béthune ; mais
le tribunal de commerce n’apprécia pas le moyen, qualifia leurs prétentions île sou
�verainement injustes, el les condamna solidairement dans l’action de garantie inten
tée par moi.
S i, arrivé à cette phase de ma position, nous avions besoin de connaître de quelle
manière ces messieurs se jugeaient entre eux , il serait facile de placer en regard du
tableau que la correspondance vient de dessiner, celui qui dépeignait chacun des
associés.
C ’est encore la correspondance qui fournira les couleurs.
Je ne comprends pas la marche actuelle de notre Société; les dépenses sont faites , elles
doivent être payées. Les sociétaires ne le pouvant pas en ce m om ent, la maison Cariol
consent à nous faire un prêt de 33,000 fr. J ’en préviens M. Goyon qui ne me répond pas,
et au moment de signer, il s’y refuse, et nous signifie un acte insolite.
Paris, 26 août 1839.
G uyon ie .
Ma chute entraînera infailliblement celle de mes coassociés ; celui qui l’aura provoquée,
M. Goyon lui-même, n ’en sera pas à l’abri......
La résistance de M. Goyon aura constitué la Société en une masse de fraisqui s’élèvera
au moins à 3,000 fr.; elle lu i aura enlevé tout crédit pour l’avenir, et cela par pur entê
tement et par mauvais vouloir; car, en laissant de côté la question de solidarité, il est
évident que l’actif de la Société sera plus que suffisant pour couvrir l’em prunt de 33,000 fr.
Paris, 19 septembre 1839.
G u y o n ie .
Je réponds à la lettre par laquelle vous me dites :......Que Al. B ia u z h t a cru devoir re
fuser le titre d ’arbitre.
L ’extrême délicatesse de AI. Biauzat est digne «l’éloge et de respect. ÀŸec toute l’im
partialité possible, il n’est guère de la nature humaine de pouvoir déposer à l’instant
même la conviction de l ’avocat, pour prendre la conviction contraire de l’arbitre; et il
est à regretter q u ’un scrupule aussi honorable ne soit pas venu, etc......
Avant tout, et sans préjuger aucune question, il fallait me sortir de l’abîme où m ’a
jeté mon dévouement pour la Société. Il eût été temps après cela de recourir à l’arbitrage.
C’est une fatalité qui entraînera la ruine, non-seulement de la Société, mais je le
crains,' la ruine de chacun des associés.
Nos concurrents exploitent le scandale de tous ces procès et de tous ces refus de paye
ments. Ils vous ont présenté au ministère comme étant sur le point de faire faillite.
Paris, 24 octobre 1839,
G uyon ie .
Ge que je conçois moins encore , c’est que MAL Goyon et Béthune puissent prétendre
que les dépenses ont été faites sans leur consentement.
Une telle assertion dans la bouche de M. Bétliune, me semble si extraordinaire que je
ne saurais croire à sa réalité.
S’il a été articulé quelque chose de semblable, ce no peut être que l’effet de l’imagi
nation délirante d ’un avocat bel esprit que je vous ai déjà signalé, q u i , ayant donné à
AL Goyon le conseil intempestif de plaider, voudrait, au prix même de la vérité, faire
triompher son déplorable avis.
Il n’en sera point ainsi....
�J ’ai fait hier prendre copie de douze lettres de M. Béthune, qui toutes attestent:
1°. q u’il y avait des réunions sociales fréquentes ; 2°. que toutes les dépenses leur étaient
communiquées à l’avance; 3°. que lesdites dépenses étaient souvent provoquées par euxmêmes; 4°. que ce sont eux qui ont demandé le mode de traites tirées par vous, et ac
ceptées par inoi pour raison desdites dépenses. M. Goyon recevait de fréquentes commu
nication#, il participait à votre gestion et aux émoluments, etc.
Paris, le 9 novembre 1839.
G uyonie .
J ’ai reçu hier soir la visite de M. Béthune; il m ’a communiqué le prononcé du jugement
de Clermont; m ais, malgré ce jugem ent, et lorsque je lui ai proposé de terminer l’af
faire à l ’amiable par un emprunt solidaire, il in’a répondu que quand bien même il y
entendrait, M. Goyon n ’y consentirait pas, ainsi q u’il s’en était formellement expliqué
à Clermont.
A insi, il est bien certain que si, comme vous le dites, AI.......... sollicite des délais
fondés sur un projet d’arrangement, il induit la justice en erreur.
Mais dans quel but agit-il ainsi ; je n ’en sais rien.
Serait-ce pour aggraver le malheur de la position des gérants, et perdre entièrement
la Société? Je n’ose le penser. Vous qui êtes sur les lie u x , dites-moi votre opinion.
Paris, 22 novembre 1839.
G uyonie .
Notte considération commerciale est étrangement compromise ; l’obtention des concessions
reculée, te s frais énormes de comptes de retour, protêts et frais judiciaires, tout ce dé
sastre est l’œuvre d ’abord de M. Goyon e t d e .. . . , adopté par M. Béthune. Ils en seront
punis, mais vous et moi avons été les premières victimes. En définitif, tout le mondi*
perdra dans cette fâcheuse affaire, et ces pertes nous auront été occasionnées par le dé
faut de concours des dissidents, au moment où il était le plus nécessaire. On a voulu
nous sacrifier, croyant surnager au-dessus de nos débris. Cet espoir a été trompé.
Paris, 18 décembre 1839.
#
G uyonie .
11 paraît que les jugements des tribunaux de commerce de Clermont et de Paris n’ont
pas convaincu M. Goyoïi.
En effet, M. Béthune m ’a donné hier soir communication d’une lettre dudit sieur
G oyon, où il déclare q u’il ne reconnaît pas la solidarité, et q u ’en conséquence il a formé
appel «le votre jugem ent....
On paraît compter beaucoup sur des influences de position et de localité à la Cour royale
de Iliorn , comme si la Cour rendait des services et non pas des arrêts.
Paris, 2 \janvier 1840.
Quoi qu’il
cm)
G uyonie .
soit de ce tableau que je ne crée pas, et que M. Guyonie a seul tracé,
le procès fut perdu, et les événements, qui changent ordinairement les hommes, pro
duisirent leur effet accoutumé. I\1. Béthune, (pii avait déjà fait un voyagé au mo
ment des plaidoiries, accourut de nouveau , et \int à moi me communiquer, disait-il,
le résultat de ses récentes observations.
Il m exposait que nos discussions perdraient l’affaire, et qu’il était urgent pour
son avenir de rétablir la concorde.
�Là ne s’arrêtèrent pas les obsessions.
Des démarches de toute espèce furent aussitôt mises en œuvre ; mes amis tour
mentés pour me faire accueillir des paroles de paix et de conciliation.
Au milieu de ces sollicitations qui m ’arrivaient de toutes parts, je cédai et con
sentis à une transaction , dont je ne prévoyais pas alors pour moi les tristes consé
quences.
Et cependant, à cette époque, ma position avait quelque importance;
J ’étais maître des deux cinquièmes de l’affaire,
Créancier de ces messieurs pour une somme de lG 0 ,0 0 0 fr ., avec privilège sur
l’actif social.
Il y avait donc de ma part quelque bon vouloir à ne pas insister sur le maintien in
tégral et actuel de tous ces avantages, et à les livrer à des chances plus ou moins incer
taines d’un arbitrage que ma position ne réclamait pas.
Cela posé, pourra-t-on croire à ces bruits colportés dans le public que j ’étais un
homme processif et un coureur d’audience?
Les arbitres sont convoqués; la réunion se composa de M. Cariol, de MM. Goyon
et lié thune, Bay le et Conchon, leurs défenseurs. Je n’y parus pas. On rédigea une
transaction. Quelques jours avant, M. Cariol m ’avait demandé mon adhésion à un
projet beaucouj) plus simple, dont il me reste une copie de sa main.
La rédaction définitive voulut devenir plus claire et plus explicite. Elle enfanta la
transaction du 25 février 1840 :
Entre les soussignés
Louis-Charles-François L e d ru , architecte, demeurant à Clermont-Ferrand, d’une
part, et Maximilien B éthune, im primeur, demeurant à Paris, rue Vaugirard, 30 ; PierreVictor (ioyon, propriétaire à Clermont-Ferrand, d ’autre part;
A été exposé ce qui suit :
MM. L edru, Béthune, Auguste Valeau et Antoine-Blaise-Léonard Guyonio o n t, par
conventions verbales, en date du 6 octobre 18:58, formé une Société pour l ’exploitation
des bitumes d’Auvergne. Cette Société n’a duré que neuf mois. Elle a été dissoute par
suite de la faillite Valeau , déclarée par jugement du tribunal de commerce de la Seine ,
<‘n date du 11 juillet 183!).
A celte époque, les parties ne purent s’entendre sur le mode à suivre pour la liquida
tion de la Société. Des difficultés s’élevèrent entre les associés, soit sur le sens de la con
vention du 6 octobre 1838, soit sur la part contributive de chacun dans les dépenses et
les dettes de la Société. Des traites furent protestées , et par suite plusieurs instances ont
été portées devant les tribunaux de la Seine et du Puy-de-Dôme, où elles sont encore
pendantes.
Dans cette situation, les soussignés, voulant épargner à la Société des frais qui ne fe-
�raient, qu’aggraver la position de chacun des associés, désirant en même temps mettre
un terme à des contestations, q u i, si elles se prolongeaient, compromettraient sérieuse
ment l’actif social, o n t , par l’intermédiaire d’amis com m uns, arrêté les conventions
suivantes , qu’ils ‘promettent d'exécuter de bonne fo i, à titre de transaction pur procès.
A rt . 1er. La Société formée pour l’exploitation des bitumes d ’Auvergne, par conven
tions verbales du 6 octobre 1838, demeure dissoute à dater du 11 juillet 1839.
M . Ledru est seul chargé de la liquidation.
A rt . 2. Les comptes des gérants et directeur , ainsi que les dettes de la Société, dans
lesquelles seront compris les frais des instances actuellement pendantes, seront réglées
et liquidées conformément aux livres et pièces justificatives , par MM. Chanson et Cariol,
que les parties désignent comme arbitres souverains et amiables compositeurs. A cet ef
fet , les comptes et pièces à l’appui leur seront remis avant le 15 du mois prochain.
A rt . 3. Les parties estiment que , d’après les notes fournies par M. Ledru et les ren
seignements émanés deM . G u y o n ie ,.ces dettes s'élèveront approximativement à la somme
de 4-0,000 fr., savoir : pour les dépenses faites en Auvergne 30,000 f r . , pour celles laites
à Paris 10,000 fr.
A rt . 4. M.M. Béthune et Goyon s’engagent, solidairement, à avancer immédiatement
tous les fonds nécessaires pour solder le montant des dettes liquidées , et garantissent
M . Ledru de toute poursuite à ce sujet de la part des tiers.
A rt . 5. M.VI. Béthune et Goyon, payant tous les créanciers et ayant privilège sur les
marchandises et le matériel mobilier de la Société qui ont été saisis à Paris, vendent à
M. L edru, à forfait et à ses risques et périls, toutes les marchandises et tout le matériel
mobilier de la Société, soit à Paris, soit en Auvergne, tels qu’ils résultent de l’inven
taire et des livres de ladite Société. Il est convenu que , dans l ’état ou récolement des
marchandises qui sera dressé lors de la livraison que le sieur Ledru sera tenu de prendre
dans le délai d’un mois ou plus tôt s’il le peut, il -sera fait distinction de la quantité des
bitumes qui restent en magasin sur les vingt-six bateaux que M. Ledru a apportés à la
Société , et dont il a lixé la valeur à 50,000 francs qu’il a garantie, et dans le cas où les
sieurs Guyonie, Valeau ou tout autre mettraient obstacle à cette livraison, le sieur
Ledru et les sieurs Béthune et Goyon s’engagent respectivement à agir en commun pour
le faire cesser.
Il est bien entendu que, la livraison faite, M. Ledru remettra à MM. liéllnme et
Goyon leurs promesses, qui sont, de la part de M. Béthune ensemble 7,500 fr., et de
celle de M. Goyon ensemble 2,500 fr.
A rt . 6. Cette vente est faite moyennant une somme qui ne peut être définitivement
arbitrée en ce m om ent, mais qui sera équivalente à celle que MM. Béthune et Goyon
auront déboursée conformément à l'article 4 ci-dessus; elle sera payée aux sieurs Béthune
et Goyon dans deux ans, par moitié , à dater du jour où M. Ledru aura reçu livraison du
matériel et des marchandises; elle produira intérêts à 5 0/0 l’an , qui seront payés en
même temps que le capital.
A rt . 7. MM. Béthune et Goyon vendent de plus à M. Ledru, qui pourra en jouir dès à
présent :
1°. Leur part dans les terrains bitumineux qui appartiennent à la Société ; 2°. leurs
�droits et parts dans les concessions obtenues ou demandées par M. ILedru, et qu’il a ap
portées à la Société, suivant le traité verbal du 6 octobre 1838; 3°. tous les droits que
Boucaumont tient de la veuve Nicolas, au lieu et place de laquelle M. Ledru sera
subrogé.
A rt . 8. Cette vente est faite moyennant la somme de.... Elle sera payée en deux ter
mes égaux, d’année en année, dont le premier écherra un an après que l’ordonnance
royale relative aux concessions demandées aura été rendue.
Elle ne sera pas productive d’intérêt; elle sera payée à MM. Béthune et Goyon divisément et dans les proportions suivantes :
A. M. Béthune..........................................
A M. Goyon................................................
Elle leur vaudra remboursement des sommes qu’ils ont versées dans la Société à litre
de mise de fonds.
A rt . 9. Il est expressément convenu que la vente faite par les art. 7 et 8 ne deviendra
définitive à son égard qu’autant que, dans l’année qui suivra l ’obtention des concessions,
ou s’il n ’y a pas de concession dans le cours de 1 8 il , il n’aura pas manifesté l’intention
de se désister de son acquisition.
S’il use de cette faculté , la vente sera résiliée de plein droit , et les objets vendus seront
remis en vente par adjudication volontaire; le prix qui en proviendra sera distribué
entre les soussignés au marc le franc de leur mise sociale; dans ce cas seulement le marc
le franc de MM. Béthune et Goyon s’accroîtra de 9,000, différence de 27,000 à 36,000 fr.,
prix réel des droits de M me veuve Nicolas, vendus au sieur Ledru par les sieurs Béthune
et Goyon.
A rt . 10. MM. Béthune et Goyon subrogent M. Ledru à tous leurs droits et actions
contre MM. Guyonie et Valeau, de qui il pourra, à ses risques et périls, répéter la part
contributive dans les dettes sociales dont ils ont eux-mêmes fait les avances, conformé
ment à l’art, 4.
A cet effet, il sera remis à M. Ledru une procuration que MM. Béthune et Goyon
s’obligent à ne pas révoquer; il est bien entendu que les frais auxquels (jette réclamation
pourra donner lieu , seront à la charge de M. Ledru, qui devra garantir ses mandants
des conséquences de leur mandat. MM. Béthune et Goyon consentent également à ce que
M. Ledru soit subrogé ii tous les droits auxquels MM. Guyonie et Valeau pourraient pré
tendre dans l’actif de l’ancienne Société.
A rt. 11. E nfin, il est expliqué que si, par suite des contestations qui pourraient
s’élever avec MM. Guyonie et Valeau, il était décidé par arrêt, ayant acquis la force de la
chose jugée, que l’actif social serait licite et M. Ledru condamné à rapporter ce qu’il au
rait touché; dans ce cas le présent traité sera considéré comme non avenu, et les par
ties seront remises dans leurs droits et actions, tels qu’ils existaient avant le présent
traité.
A rt . 12. Au moyen des présentes conventions, et soirs la foi dk leiju complète exé
cution
, tout procès entre les soussignés, et toutes contestations avec les créanciers de la
Société, cesseront immédiatement ; chacune des parties promettent de donner des ordres
pour que les poursuites soient arrêtées. — 1°. Il est convenu que M. Ledru versera à 1«
�caisse de MM. Sambucy et Cariol,'ct au compte de MM. Bétlmne et Goyon, eu déduction
des sommes qu’il aura à leur payer , conformément à l’art. 6 , la moitié du prix net des
marchandises livrées, au fur et à mesure des ventes q u’il opérera ; — 2°. toutes les
sommes q u’il pourra recouvrer de MM. Guyonie et Valeau, ainsi qu’il est dit ci-dessus.
A rt . 13. Toutes les difficultés qui pourraient s’élever sur l’exécution des présentes, se
ront jugées par MM.\ Baijle, Conchon et Verdier-Latour, avocats, et C ariât, lesquels de
vront s’adjoindre un cinquième arbitre de leur choix ; et, à leur défaut, par trois arbitres dé
signés par le président du. tribunal de commerce de Clerihont-Ferrand.
Les arbitres procéderont comme amiables compositeurs, en dernier ressort, sans recours
en cassation, et seront dispensés de toute formalité de justice.
A » t . 14. M. Bétlmne déclare qu’il a vendu à M. Ledru, entrepreneur, habitant à
l’aris, rue de Vaugirard, 120, un des trois douzièmes auxquels il avait droit, par suite
des conventions verbales, du 6 octobre 1838; que le prix: n’en ayant pas été payé, le
sieur Bétlmne a l ’intention d’exercer contre lui une action en résiliation; que toutefois,
il n ’entend recourir à ce moyen de rigueur q u’autant q u e l’inlluence de M. Ledru frère,
de Clermont, serait impuissante pour obtenir de M. Ledru une résiliation volontaire.
A rt . 15. Dans le cas où l’enregistrement du présent traité'deviendra nécessaire, les
frais seront à la charge de la partie qui y aura donné lieu.
Fait en autant d’originaux que de parties intéressées.
A Clermont-Ferrand.................
Cet acte si clair, si lucide que, jusqu’à présent, il a arrête tout le monde et brouillé
toute l’affaire, ne contient pas les chiffres de vente laissés en blanc. La date ellemême n’est pas marquée, parce qu’on ne voulait faire commencer, sans doute, l’exé
cution que lorsqu’on connaîtrait définitivement les sommes à fixer par le règlement
des comptes.
Ne résulte-t-il pas d’abord de la lecture de cette transaction que je n ’envisage pas
ici nu point de vue du droil, que j’étais <\la fois liquidateur et acheteur? Comment
faire concorder ces deux qualités, si ce n’est en établissant ce principe, que les rem
boursements seront faits en valeurs de la chose sauf complément de ma part, s’il est
nécessaire.
Aujourd’hui on frappe ¡i ma porte à grands coups d’assignations, et on crie : Vous
êtes acheteur ; payez vite, et en argent. Ne puis-je pas répondre qu’une moitié de la
position emporte l’autre; que si je n'étais pas liquidateur, je ne pourrais rien être du
tout, qu’il n’y a pas de raison pour m ’ôter plutôt la première des qualités que la se
conde.
Vous appuyez vos réclamations sur ce quevoüs avez payé les dettes de la Soéieté.
Mais, par votre fait, elles ne sont pas encore liquidées, comme le prescrit l’acte luimême q u i, à cause de cela, n’est pas complété.
C’était cependant une opération préalable et toute à votre diligence que cette liqui*
�dation ; vous ne deviez payer que les dettes liquidées, et vous devie? immédiatement
les payer toutes, me garantissant des p’oursuitesdes tiers.
La transaction est explicite ¡\cet égard ; elle nomme le tribunal arbitral qui réglera
le* comptes, et fixe les délais pour la remise des pièces de la comptabilité.
Je me suis empressé de déposer entre les mains des deux arbitres tout ce qui concer
nait la comptabilité en Auvergne. Ce compte a été réglé, mais rien n’a été produit
des comptes de Paris q u i, aux termes des transactions faites avec Goyon , Béthune et
Guyonie, devaient être aussi réglés par arbitres; en conséquence, des arbitres avaient
été nommés; mais, au bout de six mois, un second tribunal a été substitué au premier
par l’adhésion Guyonie. Là encore, même silence, 011 laisse expirer les pouvoirs.
Ainsi, vous qui deviez payer les dettes liquidées, vous rendez impossible cette liqui
dation.
Vous aviez perdu de vue que, d’après les termes et l’esprit de la transaction, votre
créance devait se former d’une somme complexe, dont la fixation devait être immé
diate et invariable, pour que la transaction pût être complétée, datée et rendue
exécutable.
Sans l’exécution rigoureuse de cette clause, comment expliqueriez-vous l’art, 0 ,
portant que cette somme sera payée par moitié? Chercher une pareille solution , ne
serait-ce (tas chercher la moitié d’une quantité indéterminée?
Vous n’avez donc pas le droit do réclamer la moindre partie des dettes, tant qu elles
ne seront pas complètement liquidées, et que le chiffre total de votre créance ne sera
pas fixé irrévocablement.
Ce n’est qu’en 1843 , après avoir obtenu des ordonnances de saisies pour plus de
200,000 l'r., que vous avez cru avoir besoin de faire régler les comptes des dépenses
faites cinq ans auparavant; et aujourd’hui qu’il 11’y a encore de réglé que les comptes
de Clermont, vous ne in’avez justifié que le payement d ’une somme de 2,000 fr. à la
commune de Chamalièrcs ; vous, ne produisez pas les lettres de change remises à la
maison Cariol et aux mariniers.
A Paris, je suis poursuivi par vos créanciers, contre lesquels vous m ’avez garanti ;
il en résulte que, d’un côté, vous ne faites pus liquider, vous ne payez pas; et de
l’autre, vous ne justifiez pas les payements de celles des dettes qui sont liquidées, et
vous voulez.le remboursement du tout , en l’exagérant.
Pensez-vous appeler cela l’exécution de bonne foi des conventions qui nous
lient ?
Vous arguez de ce que j ’ai pris possession. L h ! Messieurs, ne vous rappelez-vous
pas qu’il y avait péril en la demeure, à cause de l’affaire des concessions? Pouvais-je
�alors prévoir que vous élèveriez jusqu’à 70,000 fr. vos dettes évaluées approximati
vement à 40,000 f r ., et (pii réellement n’atteignent pas ce chiffre. Je vous ai fait
signifier de reprendre l’affaire, vous n ’avez pas paru ; était-elle donc plus mauvaise
que quand vous me l’avez livrée? N ’ai-je pas le droit.de répéter ce que vous savez
bien , et ce que les lettres de chacun apprennent suffisamment, que vous avez pré
cipité l’entreprise dans des embarras inextricables et ruineux, tandis que, dans mes
mains, elle était devenue riche de quatre concessions, de 45,000 fr. de ventes, et
d’un marché qui assurait par an 18,000 fr. de recette sans débourser un centime?
Ne me sera-t-il pas permis de dire encore que ses produits étaient admis dans les
travaux publics par le cahier des charges de la ville de Paris, et par les rapports les
plus favorables des ingénieurs et du conseil des bâtiments civils, que tous les travaux
du Jardin des Plantes et du collège Sainte-Barbe étaient donnés à l’entreprise des
bitumes d ’Auvergne, et qu’une solide clientelle se formait?
Tout cela, vous le savez, n ’avait pas été obtenu sans de lourds sacrifices.
Mes dernières ressources s’étaient, il est vrai, épuisées pour relever l'affaire; mais
avec des fonds elle pouvait marcher l’égale des Sociétés rivales : des propositions
étaient faites de plusieurs côtés, et nous pouvions eu tirer parti d 'u n com m un accord ;
c’est ce (pie vous annonciez quand je travaillais dans l’intérêt de tous ; il y avait alors
paroles de paix , éloges sur la conduite de l ’entreprise, encouragements à persévérer
ju sq u ’à l’obtention des concessions; on devait alors se réunir, traiter l’affaire en fa
m ille; on parlait de reprendre l ’industrie; on s’inquiétait déjà d ’un g é rant; on m ’é
crivait pour me tenir au courant de ce qui se passait et exciter mon zèle par de bonnes
dispositions.
Je recevais, dans ces bons moments, les lettres suivantes :
Le Conseil des mines a entendu le rapport de AI. Migneron pour les concessions ; la
discussion et le vote doivent avoir lieu prochainement, et on croit que la décision ne
tardera pas à être rendue; je vous en préviens, afin que vous écriviez à vos amis cl
aux membres du Conseil des mines que vous avez vus à P aris, et particulièrement de
faire agir auprès de M. Teste et de M. Legrand, qui assistaient à lu lecture du rapport et
qui doivent assister aux délibérations. Vous savez que AL Teste est mal disposé...........
.............................................. . . . . . ' ........................ Ne j>crdez donc pas de temps, la chose est
urgente et importante.
l»aris, 15 ju in 1842.
M a x . Bétiiuive.
Je vous serai bien reconnaissant si vous vouliez avoir la bonté de venir me voir diman
che prochain , avant m id i, j ’aurai à causer avec vous de nos intérêts communs.
Votre tout dévoué serviteur, M a x . B ethune.
16 ju in 1843.
A Monsieur Ledru fils.
�Dès que les ordonnances furent à la signature du Iio i, avant inème leur renvoi
au ministère, ces messieurs émirent les prétentions les plus exorbitantes : des oppo
sitions sur les sommes que j ’offrais (le déléguer répondirent.à ma demande de for
mer le tribunal institué par la transaction elle-même, bien d’autres les suivirent.
Sans aucun égard pour la position que j ’avais faite à l’affaire, pour mes offres con
formes à nos conventions, sans considérer les conséquences finales de leur conduite
pour eux-mêmes, ils me poursuivirent avec acharnement, et veulent m ’enlever jus
qu’aux moyens d’existence.
Je ne pouvais plus rien, mes ressources étaient paralysées; je sommai ces mes
sieurs de tout reprendre ; je voulais les forcer à ne pas annihiler encore une fois une
entreprise dans laquelle j ’ai mis toute ma fortune, et q u i, après tout, est leur seule
garantie.
Aujourd’h u i, je ne peux plus tenter une troisième fois de la faire réussir, mou
Age, ma santé, mes malheurs, sont des obstacles insurmontables. Les matières dé
posées à Paris ne sont pas d ’une vente facile sans leur transformation en mastic;
elles nécessitent des préparations spéciales que ne peuvent pas opérer des usines
ordinaires; il faudrait reformer une clientelle, renouer des relations interrompues
depuis deux ans : cette tâche serait trop lourde pour moi, mes forces n’y suffiraient
plus.
é
La transaction a été faite pour arrêter les procès, consentie sous la foi de sa com
plète exécution; vous ne l’exécutez pas, et vous recommencez les procès. Elle con
tient une clause compromissoire, faite pour que l’interprétation de l’une quelconque
des parties ne puisse pas nuire à l’autre, et soit immédiatement réglée par des arbitres
amiables compositeurs et jugeant eu dernier ressort. Dès l’origine des discussions,
je l’invoque, vous la repoussez; je vous cite, aux termes de l’acte , devant le [»ré
sident du tribunal de commerce, et vous répondez que vous n’avez pas connaissance
de l’article, mais que s’il existe, vous en demandez la nullité. Vous répétez cette
énormité devant le tribunal de commerce de Paris.
Qui l’a.faite, Messieurs, cette transaction? Quels en sont les rédacteurs? Je m’en
rapporte à M. Guvonie. Voici ce qu’il m’écrivait à ce sujet :
J ’ai lu ce projet de compromis; au premier exam en, j ’ai reconnu ne pouvoir y donner
mon adhésion, et si quelque chose m ’étonne, c’est q u’il ait reçu la vôtre. Deux motifs
principaux semblaient devoir s’y opposer.................................................................................
Le second tient à ce que l'on propose pour arbitres les deux avocats qui ont défendu le
système des adversaires. En matière ordinaire , un juge se récuse s’il a connu de l’affaire
en tout autre qualité. Ici c’était, il me semble, un devoir d’en agir ainsi.
Paris, 4 février 18W).
O üvonie .
�C ’est après une observation si complète et si loyale de l’acte émané d’eux-mêmes,
que ces messieurs prétendent en exagérer les charges pour les rejeter toutes sur moi.
Quels moyens emploient-ils pour y arriver? Ils interprètent contre m oi, qui suis
l’acheteur, toutes les obscurités qu’ils y ont introduites.
Je me suis désisté dans les délais de la seconde vente qui était conditionnelle; ils
plaident contre le désistement.
Ils portent ¡\70,000 fr. le chiffre de leurs dettes, et une inspection sévère de la
comptabilité, une comparaison rigoureuse des actes antérieurs avec les chiffres qu’elle
contient, prouvent qu’il n ’y a véritablement que les dettes provenant des dépenses
de Clermont, qu’il ne peut pas y en avoir sur celles de Paris, et encore que les
dettes sur les dépenses de Clermont ont été occasionnées par la disparition de
¿6,840 fr. 69 c. encaissés par le gérant.
Encore une démonstration à faire ! Elle sera facile en la divisant par proposi
tions, afin d ’apporter plus de clarté dans la discussion des chiffres.
P R E M IÈ R E PRO PO SIT IO N .
Ayant pour but de démontrer, par la lettre de M. Guyonie à M . Goyon, en date
du 7 mai 1839 :
1°. Qu’au 31 mars 1839, il y avait balance entre les dépenses et les sommes encaissées;
2H. Que la balance n’existant plus, pour les dépenses avant le 31 mars, dans le
compte de ces messieurs, il y a eu disparition d ’une somme de .......... 26,846f 69e
Lettres de M. Guyonie à M. Goyon.
M onsieur,
J ’avais instamment prié M. Ledru, de Clerm ont, et nos cointéressés s’étaient joints à
moi, de fournir ses traites personnelles et celles des mariniers sur chacun de nous pour
son émolument. Il s’y est refusé, ne voulant pas compromettre l’avenir de l’entreprise
dans un moment aussi décisif; j ai accepté.
M M . Valeau cl Bélhune m’on t, par contre, fourni leurs acceptations individuelles et je
viens réclamer les vôtres. Voici le relevé succinct et exact des comptes, depuis le 1vv octobre
jusqu'au 31 mars.
1". Dépenses de M. Ledru, de Clerm ont...................................... 19,078f 10e
2°.
—
de M. L e d ru , de P aris.............................................. 12,629 87
3°*
—
de M. Guyonie............................................................. 12,814 85
T o t a l ................................................... 44,522 82
Reçu pour vente de marchandises...................................................
15este .
44,522'82'
7,0(54 38
............................................. 37,458 44
4
�Dont à votre charge......................................................
Sur quoi vous avez p a y é .............................................
3,121 53
2,070 »
R este ..............................
1,051 53
J ’ai fourni sur vous mandat au 5 ju in .. - 500' » ' ¡ 1 000 ,
—
—
au 3 ju ille t.. . 500 » j _______
R este d û ............................
51 53
4°. Dépenses, des mariniers, non compris le sondage.......................................
19,818
Dont à votre charge........................................................ 1,650 85
A quoi ajouter le restant d û .........................................
51 53
T ot a l ................................
1,702 38
Laquelle somme est payable les 31 juillet et 30 septembre , selon les deux traites ciincluses, une de 900 fr., l’autre de 802 fr. 38 c., que je vous prie de me renvoyer revêtues
de votre acceptation.
7 mars 1839.
G uyonie .
D ’après cette lettre, la situation de la Société se dessine nettement :
Dépenses générales au 31 mars 1839............................................... 64,332f 82e
Ventes de marchandises..............
7,064 38
Mise de fonds des coassociés fourRecettes générales.)
"¡e e„ acceptations individuelles ( dont une partie ne
£ 64>332 82
se trouvé pas sur les comptes
présentés aujourd’hui ) .........
57,208 44
Les comptes se balançaient, et il n’était rien d û: voilà un fait acquis, et auquel
rien ne peut être enlevé.
Il ne pouvait plus exister de dettes que pour des dépenses du 31 mars au 1 " juillet.
Cependant les traites des mariniers d ’ensemble.................................
19,810'
»c
n’ont pas été payées à échéances, quoique les dépenses aient été faites
avant le 31 mars et les valeurs correspondantes encaissées.
Surlesdépenscsd’Auvergne, dont le chiffre est porté à. 19,078’ 10e
il n’a été payé que...........................................................
12,000
»
quoique la somme entière ait été aussi dépensée avant
le 3 1 mars. Il est resté dû à la maison Cariol, qui avait
ouvert
crédit à ces messieurs.........................................
7,078 10
7,078 10
Donc il n’a pas été payé sur les dépenses laites antérieurement au
31 mars une somme de...........................................................................
20,888 10
�D ’un autre côté , l’encaissement des mises de fonds au 31 mars
s’élevait
toujours d ’après la lettre ii la somme de.................................
57,268 44
Tandis que le chiffre total des mises de fonds d ’après le compte re
mis aux arbitres de Paris n ’est plus que de................................... ..
Dont la différence...................................
30,421 75
26,846 69
est égale , à quelques francs près, au montant des dépenses impayées.
Q u’est devenue cette somme de 26,846 fr. 69 c .?— Commenta-t-elle disparu
de la caisse? C ’est un problème que je ne cherche pas à résoudre; il me suffit de
prouver que rien ne constate son emploi.
Donc il est démontré qu’il y a eu disparition de cette somme de. . . . 26,846f 69e
COROLLAIRE.
Il résulte de cette proposition que la dette de 26,846 fr. 69 c. occasionnée par
a disparition, a pesé entièrement sur les dépenses d’Auvergne, et qu’il n’y avait pas
de dettes pour les dépenses faites à Paris jusqu’au 31 mars; car la somme due aux
mariniers et à la maison Cariol provenait des dépenses d ’Auvergne.
D E U X IÈ M E
PROPO SITIO N .
Les dettes, au 31 ju ille t, portaient toutes sur les dépenses d ’A uvergne, et il n ’v
en avait aucune sur les dépenses de Paris.
En effet, le 31 juillet, ces messieurs se réunissent, et délibèrent sur l’opportunité
d’un emprunt; ils fixent le chiffre à 33,000 fr.; après un court exposé, ils disent :
Que néanmoins les premières dépenses ont été payées, mais q u ’il en reste à payer
pour une somme d ’environ trente-trois mille francs.
A iit . 1er. MM. L edru, do Clerm ont, et Guyonie sont autorisés, chacun en ce qui le
concerne, ensemble ou séparément, de régler, avec la maison de banque Sambucy et
Cariol, de Clermont-Ferrand , l’ouverture d ’un crédit, en faveur de la Société, d ’une
somme de 33,000 fr.
A rt . 2. Les fonds provenant de l ’em prunt resteront, ju sq u ’à l'em ploi, entre les mains
de MM. Sambucy et Cariol; ils seront, sur l ’autorisation de M. G uyonie, appliqués aux
remboursements des deux acceptations d ’ensemble7,000 fr. de M. Guyonie pour dépenses,
l’une de 3,000 f r ., échue le 15 ju in , l’autre de 4,000 fr ., échue le 15 juillet courant.
Ensuite au payement des traites délivrées aux mariniers Portepain, Josian, Gannat et Gros,
à échéances de fin courant, de fin septembre et 15 décembre, lesdites traites s’élevant :
‘
La l r« échéance à .............................................
La 2»
—
à .............................................
La 3^
_
à .............................................
9,543f
10,003
1,693
T o t a l . . . .....................
21,239
�28
—
—
Le surplus sera employé à payer les autres dettes de la Société, s’il y a lie u , et après
délibération spéciale sur chaque dépense.
Il serait absurde de supposer que ne procès-verbal ne contient pas toutes les dettes
de la Société au 31 juillet; il est explicite à cet égard.
Une des conséquences de la première proposition est que les 26,888 fr. 10 c.
en déficit sur les comptes antérieurs au 31 mars, ne pouvaient intéresser que les
comptes d’Auvergne.
On obtient une preuve directe de ce fait, si on compare les chiffres de la lettre du
7 mai avec ceux du procès-verbal de la délibération sur l’emprunt.
LETTRE.
1°. Dépenses de M. Ledru, de Clermont-Ferrrand. . 19,078f 10e
Elles se décomposent par
Une somme remboursée à la maison Cariol avant le
31 m ars........................................................................
1 2 ,0 0 0
»
7,000
»
Deux acceptations Guyonie aux 15 juin et 15 juil
let, remises à la maison Cariol, et proteslées.
Un reliquat.. . . .......................................................
78 10
V'. Mariniers réglés avant le 31 m a js.............. ................................
7 ,0 0 0 f
»c
78 10
19,810
»
Totai..................................... ....................... 26,888 10
PROCÈS-VERBAL.
Deux acceptations Guyonie aux 15 juin et 15 juillet,
et protestées...............................................................
7 ,0 0 0 f
Mariniers................................................. 21,239' »‘
qui se décomposent par............................................ 19,810
Les frais d ’un dernier envoi, réglés après le 31 mars.
A divers....................................................
4,761'
»c
»
7 ,0 0 0 f
19,810
»c
»
1,429
»c
qui se décomposent par,
Un reliquat......................................................................
78 10
A divers............. ............................................................
4 ,682 90
T otal..........................................
33,000
»
78 10
26,888
10
On voit par ce tableau que les sommes dépensées avant le31 mars, qui n’ont pas
�été payées, et qui sont imputables sur les comptes d ’Auvergne, se reproduisent dans
le détail des dettes comprises <iu procès-verbal du 31 juillet.
En retranchant du chiffre de l’emprunt........................................... 33 ,0 0 0 f 00
le chillre des sommes dépensées avant le 31 mars et non payées. . . 26,888 10
On a une différence de.....................................
6,111 90
qni provient encore des dépenses d ’Auvergne, car elle se décompose
par une lettre de change pour envoi de matières, réglé après le 31 mars.
1,429
»
1,089
»
L ’indemnité à la commune de Chamalières, réglée par M. Goyon, à
2,000
»
Mes avances à la Société portées trop bas au chiffre d e ..................
1,593 90
Par les frais de location des instruments de sondage réglé par
M. Goyon à ............................................................................................
Ces messieurs devaient le'savoir puisqu’ils recevaient mes états tous
les mois.
Somme égale...............................................
6,111
90
La somme totale de l’emprunt pour couvrir les dettes de la Société, avait donc
rapport aux dépenses d’Auvergne.
Donc, le 3 1 juillet 1839, il n'y avait pas de dettes sur les dépenses de Paris.
Ce fait ressort encore de la nature même des choses.
Il est bien avéré qu’il n’y avait pas de dettes à Paris sur les dépenses avant le 31 mars.
S ’il y en a eu au 31 juillet, elles ne peuvent provenir que des dépenses faites dans
le laps de temps compris entre ces deux époques.
Or, toute la correspondance prouve qu’à partir du 31 mars, les dépenses ont
toujours été en diminuant, et que le 16 juin elles ont été tout à fait arrêtées.
M. Guyonie écrit :
16 avril. — Pour l’avenir, renfermons-nous dans le strict nécessaire...........
3
mai. — Au point où en sont les choses, nous vous réitérons nos instances de lie faire
aucune dépense...............
22 mai. — Nous ne pouvons faire aucune vente, môme en baissant les p rix .............
—
— Vous savez que, jusq u ’à nouvelle déterm ination, il ne faut faire aucuns
travaux en Auvergne.................
3 j u i n . — Généralement les entreprises de bitume ne sont pas en faveur; pour se
soutenir et attendre des temps meilleurs, elles ont besoin de marcher petitement et avec
beaucoup d’économie, (-’est le seul moyen d’éviter des désastres.
16 ju in . — Toutes nos dépenses sont arrêtées, sauf celles de conservation.
�Les dépenses n’ont donc pu être que fort peu élevées pendant ce laps de temps
de deux mois et demi.
Pour les couvrir, ces messieurs ont eu :
La différence du chiffre des rentrées, pour vente et travaux, au 31 mars, au
chiffre total des mêmes rentrées portées dans leur compte.
Chiffre total des rentrées portées au compte. . . . 10,747' 73e
Chiffre des rentrées au 31 m ars............................
Différence................... ..................
7,064 38
3,G83f 35e
3 ,683f 35e
somme plus que suffisante pour l’entretien, pendant deux mois et demi.
Il est donc démontré, d’après les documents fournis par ces messieurs eux-mêmes,
que le 31 juillet il n’y avait pas de dettes sur les dépenses de Paris.
T RO ISIÈM E PROPOSITION .
Je dis que la somme de 40,000 fr., à laquelle est évaluée la dette totale , s’ap
pliquait, au moment de la transaction, aux dettes provenant des dépenses en A u
vergne.
Que la distinction faite dans la transaction entre les sommes 30,000 fr. et
10,000 fr., ne signifie pas qu’il y eût une dette de 10,000 fr., provenant des dé
penses occasionnées par les travaux de Paris.
Que, par conséquent, on ne peut pas s’appuyer sur cet acte pour défendre ce
principe, qu’il y avait dette à Paris, et dire qu’il a été reconnu.
La preuve de celte assertion ressort des chiffres mêmes , indépendamment des con
séquences des propositions déjà démontrées.
Ces messieurs ne peuvent nier avoir connu tous les articles des dépenses de Clermont et les chiffres exacts de chacune, car elles n’avaient été entreprises que d ’après
leurs décisions. M. Goyon traitait directement les marchés, et en surveillait l’exécu
tion dans les plus grands détails.
Tous les mois un état circonstancié des dépenses était adressé au siège de la So
ciété.
Le 9 août 1839 , je leur avais fait signifier le détail suivant des dépenses cons
tituant dettes en Auvergne, les sommant de déposer la somme de 37,295 Ir. 05 c.
pour les couvrir.
1°. T rois lettres de change acceptées par le directeur, pour acquisition et exploi
tation, dont deux montant à 7,000 fr., sont revenues protestées, faute d’avoir été
�acquittées à l’échéance, et dont la troisième de 3,000 fr. n’est pas encore échue,
ensemble..................................................................................................
2°. Pour dépenses diverses pendant les mois de juin etde juillet 1839.
10,000f
»c
2,482 05
3°. Pour frais de conduite, faite par les sieurs Gros frères, Portepain frères, Josian fils, et Gannat, réglés en huit lettres de change,
acceptées par le directeur, dont quatre montant à 9,543 fr., sont re
venues protestées faute d’avoir été payées, formant ensemble...........
18,720
»
4°. Pour frais de conduite par les sieurs Portepain frères, suivant
la lettre de voiture, dont le directeur a refusé règlement..................
1,693
»
5°. Pour redevance d ’un brevet d’invention...................................
400
»
0°. Pour indemnité à la commune de Chamalières..........................
2,000
»
2,000
»
7°. Pour intérêt des capitaux et frais de poursuites pour le paye
ment des traites échues, environ..........................................................
37,295 05
Dans l’action en garantie intentée par moi contre eux, à cause des poursuites
j ’étais l’objet, le tribunal de commerce a été saisi de cette demande.
M. Guyonie lui-même a fait faire la même signification, avec les mêmes chiffres
pour son propre compte.
dont
Il est donc bien démontré que ces messieurs savaient que le 9 août il était dû
37,295 fr. 05 sur les dépenses d’Auvergne.
Au moment de la transaction, mon Irrre journal a été remis chez M. Cariol, où
se réunissait la commission chargée de rédiger la transaction, et l’on y a trouvé :
Que les dépenses générales s’élevaient à ........................................ 29,265' 79''
Sur lesquelles il avait été payé avec les fonds provenant de la maison
Cariol...............................' ...........................................
Avec le produit des ventes de marchandises.. . .
18,569
» )
’
,
1 20,145 95
1,566 96 )
Q u ’il restait dû à divers............................................
9,119 84
Le compte des mariniers, moins la lettre de change aux mains de
Gannat-Mestre (comme il est expliqué), constituait une dette de. . .
19,739 88
T ô t a i ............................
28,859 72
1
ouïes ces sommes-ci étaient payables à Clermont, soit à la commune de Cha-
inalières, soit à l’entrepreneur du sondage , au conducteur des travaux , el surtout aux
mariniers et aux tiers porteurs de lettres de change.
On en <i constitué un ensemble de 30,000 fr., en y comprenant les frais y relatifs.
�—
32
—
Mais dans ce chiffre n’étaient pas comprises les deux acceptations Guyonie au
profit du la maison Cariol, qui avait avancé............
18,569r
»c
et n’avait reçu que.........................................................
12,000
»
Différence...................................
0,569
»
réglées par deux lettres de change d’ensemble.................................
7,000
»
1,840
»
8,840
»
attendu qu’on était en compte courant avec elle ;
ni la lettre de change à Gannat-Mestre...............................................
T ô t a i .................................................., .
Ce total était payable à Paris, et on l’a représenté approximativement par le
chiffre 10,000 francs.
Cela posé, il est faux aujourd’hui de prétendre que les dettes occasionnées par
les dépenses de Clermont ne s’élevaient qu'à 30,000 fr., et de vouloir imputer les
autres 10,000 fr. sur les dettes occasionnées par les dépenses des travaux de Paris.
Le 31 juillet, ces messieurs estimaient eux-mêmes les dettes générales de la So
ciété à 33,000 fr. Il a été démontré (pie la somme, résultant de l’emprunt, ne de
vait être appliquée qu’aux dépenses d ’Auvergne, et que les principales dettes étaient
antérieures au 31 mars. Le 9 août 1839 , le chiffre total des dettes, 37,295 fr. 05,
provenant des dépenses d ’Auvergne, leur a été signifié. Leur demande pour cet
article est plus élevée ; et ils voudraient cependant que ce chiffre , au moment de la
transaction, se fût trouvé réduit à 30,000 f r ., tandis qu’il s’était accru des arré
rages, des intérêts, et d’environ 4,000 fr. de frais de procédure.
Donc, la somme de 40,000 fr. ne s’appliquait qu’aux dettes provenant des dé
penses en Auvergne.
QU A T RIÈM E P R O P O SIT IO N .
On ne peut arguer, pour soutenir le contraire, de ce que les 7,000 fr. d’accep
tation Guyonie aux mains de la maison Cariol ont été portés au compte de Clermont.
Car, s’il n’en avait pas fait partie , il aurait fallu qu’il y eût dette sur les dépenses
provenant des travaux de Paris, et le contraire a été prouvé.
Comment, d ’ailleurs, expliquer qu’en 1840, j ’aie présenté ce chiffre de 30,000 fr.
c »mine le total des dettes provenant des dépenses de Clermont, lorsque, quelques
mois auparavant, le 9 août, j ’avais annoncé par une assignation, qu’elle s’élevait à
37,295 fr. 05 , lorsqu’antérieurement ces messieurs avaient reconnu par un acte ,
qu’elles montaient à 33,000 fr.
Si l’on compare l’assignation donnée à la lettre du 7 mai et à l’acte d’emprunt,
�s
on retrouve les mômes éléments. La différence est occasionnée par les irais énormes
des procès et les comptes courants.
Ce transport s’explique par les faits eux-mêmes ; la transaction ne recevait pas son
exécution, les livres et comptes de Paris n’étaient pas envoyés aux arbitres, et les
délais étaient passés; MM. Guyonie et Valeau refusaient leurs adhésions, et M. Cariol, ne voulant pas laisser plus longtemps sa maison à découvert, comprit les deux
traites dans le reste de son compte qui faisait partie des sommes à régler à Clermont.
CIN QUIÈM E PROPOSITION.
La dette de 31,082 fr. 60 c. sur les dépenses de Paris, portée au compte pré
senté en 1843, par ces messieurs, devant le tribunal arbitral, est fausse et sans
fondement, et les livres qui l’établissent sont irréguliers.
'
En effet, les dépenses correspondantes à cette dette n’ont pu être faites que du
1er octobre 1838 au 31 mars 1839, ou du 31 mars au 31 juillet de la même année,
ou du 31 juillet à l’époque de la signature delà transaction.
Mais il a été démontré qu’au 31 mars il n’y avait pas de dette à Paris, et qu’il n’v
en avait à Clermont que par suite d ’une soustraction faite à la caisse.
Il
a été démontré qu’au 31 juillet 1839 il n’y avait pas de dette à Paris, et qu'à
partir du 21 ju ille t, personne dans la Société ne pouvait ordonner une nouvelle dé
pense; cette dette n ’a donc pu être contractée à aucune de ces trois époques : donc
elle n’existe pas.
La démonstration se tire encore d ’un ordre de faits.
Supposons pour un moment que cette dépense ait pu être faite à l’une de ces trois
époques.
Evidemment cette supposition ne sera pas admissible pour la première, puisque
l’état de la comptabilité est parfaitement constaté; elle ne peut pas l’être non plus
pour la troisième, car personne n’avait plus le droit de rien faire, et la comptabilité
n’indique plus que des sommes très-minimes à partir du 31 juillet 1839. On ne peut
donc supposer la possibilité de ces dépensés que du 31 mars au 31 juillet, en ad
mettant pour un moment (pie le procès-verbal du 31 juillet puisse ne pas contenir
toutes les dépenses de la Société, quoique le contraire ait été démontré.
O r , il a été établi par la correspondance que toutes les dépenses à cette époque
étaient restreintes au plus absolu nécessaire, et qu’il fallait aller petitement pour enter
les désastres; et aujourd’hui on présente un cliiffre de 35,327 fr. 34 c. de dépenses
faites à cette époque , quand la caisse était arriérée déjà de plus de 20,888 Ir. 10 c.
Si l’on compare ce chiffre de 00,772 fr. 08 c. avec les dépenses de Paris du
5
�—
u
—
I er octobre au 31 mars, on trouve que, pendant ces six premiers mois, il a été dé
pensé par ]\i. Ledru, de Paris..............................................................
12,629' 87e
Par M. Guyonie.......................................... . ..................
12,814 85
T o t a l ,..........................................
25,444 72
Pendant ce laps de temps ont été élevées des constructions et faits tous les achats
.de première organisation. Tandis que pendant les deux mois et demi qui ont suivi,
on n’avait plus qu’à subvenir aux dépenses courantes, dépenses fort restreintes, d ’a
près la correspondance, d ’abord à cause de l’état de misère des bailleurs de fonds, et
ensuite à cause de l’exiguité des opérations faites; et on se trouverait cependant
avoir dépensé 35,327 fr. 36 c . , ce qui est contradictoire. Bien plus, si l’on compare
encore le chiffre total des dépenses de Paris, suivant ces messieurs, avec le chiffre
des dépenses en Auvergne :
Pour Paris avant le 31 mars, M. Ledru, de Paris..........................
M. Guyonie.........................................
12,629' 87‘
12,814 85
Ueste , selon ces messieurs................................. 35,327 36
T o t a l ..............................................
60,772 08
c •
, , , ^
( Dépenses de Clermont.....................
Suivant la lettre du 7 mai 1839,
1. .
1Mariniers.........................................
19,078 10
Ân
19,818
»
A divers................................................................
11,962 44
T o t a l ..............................
50,858 54
On trouve qu’il aurait été dépensé à Paris 9,913 fr. 54 c. de plus qu’en Au
vergne , et cependant sur ces dernières dépenses ont porté les frais des principales
opérations de la Société, l’extraction et la conduite de quinze bateaux de matières,
un soudage poussé à plus de 40 mètres de profondeur, divers travaux de recherches
et des acquisitions de terrain.
La fausseté de ce chiffre de 31,682 fr. 60 c. annoncé comme dette, est encore
démontrée, si l’on fait une juste appréciation des travaux exécutés à Paris, tels qu’ils
figurent dans l’état compris à l'inventaire dressé au moment de la prise de possession
de février 1841.
Un architecte expert, très-employé par les tribunaux de la Seine, sur mon invita
tion, a fait une*évaluation très-large des constructions, qu’il a fixée à .
Et si l’on y ajoute l’évaluation du matériel et des travaux, ou
aura pour le résultat :
7 ,1 28f
»c
�—
35
—
lieport.......................................................... 7 ,1 2 8 f »c
Un manège de hasard............................ .............................. .............
500
»
Tant pour Paris que pour Clermont cinq grandes chaudières, en fonte.
1,000
»
Deux cercles en fer...........................................................................
60
»
Onze petites chaudières d’application, pesant ensemble 1,567 kil.
50 centig., à 1 fr...........................................................................
1,567 50
l ne grande chaudière en tôle, pesant 950 kil., à 1 h ...................
950
»
Outils de bitumiers à P aris.. ..........................................................
750
»
à Clermont............................................ .. • • •
T o t a l .....................................
36 50
11,992
»
DÉPENSES ACCESSOIRES.
15f
Frais de manège, graisse et huile
Cheval de manège........................
150
Nourriture du cheval, pendant 150 jours, ù2r25cpar jour.
337
Harnais du manège
10
Faux frais pour le cheval.................................................
30
Location d’une écurie......................................................
30
Articles d’écurie...............................................................
25
Emmagasinage des marchandises, transport de la rue
597
» /
\
\
Poliveau au chantier de la Gare d ’Ivry, n° 3 6 , de
dix-huit bateaux représentant 9,000 mètres cubes de
matière, à l f 50e , valant..........................................
1,350
»>2,100
»
Déchargement et rentrée des quinze bateaux expédiés pen
dant la durée de la Société, représentant 750 mètres
cubes, ¡\ l f......................
. . . . . ............................ «
750
» I
Fabrication et exécution de travaux , pulvérisation de
35.000 kilogr. de roches bitumineuses, à 6 Ir. les
1.000..kilogr. , valant..........................................
210
»
Fabrication de mastic, 52,000 kilogrammes:
—
Main-d’œuvre..........................
—
Combustible............................
—
Brai de gaz..............................
5f
»c
3
»
'• 2,700 05
22 50
l’rix de revient des 1,000 kilogr.. 30 50
Les 5 2 ,0 0 0 , ¡\ce prix, valant..................... 7~. 1,586
>
Application et fondation pour 287 mètres de superficie,
à 3r 15e, compris les transports, valant...................
T o t a l ..........................................
904 05
17,389 05
�Report.............. •............................. 17,389f 05c
Frais de gestion pendant neuf m ois...............................
—
1,350
»
de location pendant dix-huitmois, à 1,800r, valant 2,700
»
Pour faux frais et cas imprévus, 1/10° des dépenses communes........
Total
général
4,050
»
2,143 95
des Dépenses................... 23,583
»
Différence entre cette évaluation, qui est calculée assez largement pour
que le résultat soit plutôt au-dessus qu’au-dessous de la réalité,
et les 60,766r 88e portés à leur comptabilité...............................
37,403 08
A la logique de ces raisonnements, ces messieurs opposent leur compte et leurs
livres.
Aux termes de la transaction, j ’étais seul liquidateur, et ces messieurs devaient
payer les dettes liquidées.
O r, aucun des articles de cette dette de 31,682 fr. 60 c. n’a été liquidé. Ces
messieurs ne se sont même pas soumis aux deux arbitrages consécutifs constitués par
eux pour faire apurer leur compte, et ce n’est que quatre ans après les prétendus
payements de cette prétendue dette, qu'ils pensent à en faire établir le chiffre, lorsque
la vérification s’est compliquée d ’un aussi long espace de temps.
Les arbitres nommés à leur requête sont forcés de déclarer que la confusion qui
règne dans leur compte ne permet pas de le suivre.
Les livres, présentés à l’appui de cette prétention devant les arbitres de Paris,
portent en eux-mêmes des marques évidentes de désordre et d’irrégularité.
On n’y trouve d’abord pas les 26,888 fr. 10 c. qui manquent aux recettes, et dont
l’emploi n’est justifié par rien.
Les recettes sont diminuées et les dépenses augmentées.
En effet :
1°. Le 26 décembre 1838 , M. Ledru, de Paris, agent de la Société, m’écrivait :.
Voilà la véritable position des choses. Il n ’a été vendu que 15 à 16,000 fr. (lo matières
bitumineuses, en y comprenant même ce que nous avons employé pour la fabrique.
Et cependant, sans qu’on justifie d ’aucune non-valeur, les rentrées pour ventes
et travaux ne figurent au compte que pour........................................
2°. Les constructions sont portées pour une somme de...................
9 ,4 12f 73K
14,334
»
Et le 4 février 1840, M. Guyonie écrivait :
Notre actif se p e rd , nous devons 1,050 fr. de loyer de la Gare. Le propriétaire est en
droit de nous faire un commandement, et d ’obtenir, dans les trois jours,, la résiliation
�du bail, en se faisant attribuer les constructions que nous y avons faites et qui ne peuvent
être évaluées à moins de 8,000 francs.
Ces m êm es constructions, évaluées par un architecte-expert près les tribunaux, ont
été portées au chiffre de 7,128 jv.
On trouve , dans les livres, quarante erreurs grossières signalées par un teneur de
livres chargé de la vérification , des articles au grand-livre, non portés au journal et
réciproquement, des grattages en grand nombre, et enfin un mois de novembre placé
avant le mois d’octobre précédent.
L ’écriture, quoique variée avec exagération , est encore une preuve; elle se repro
duit la même de distance en distance. On reconnaît la même plume.
De toutes ceâ considérations, il résulte nécessairement que la dette de 31,682 lr.
est supposée, qu’elle doit se réduire à deux articles : loyers à Paris à partir de la dis
solution , lettre de change du marinier Gannat, poursuivis à Paris.
----- ---------------
RÉSUMÉ.
Il
résulte de l'ensemble de ces propositions que s’il y a eu dettes, elles n'ont été
amenées que par la disparition de 26,846 fr. 49 c. faite à la caisse.
Que cette dette n’a jamais porté que sur les dépenses d’Auvergne, et qu’au mo
ment de la transaction , il n ’était rien du à Paris.
Q ue, par conséquent, le chiffre de 40,000 fr. indiqué dans la transaction était,
d’après toutes les pièces et tous les actes qui l’ont précédés, le chiffre maximum des
dettes de la Société.
Q u’il était véritablement le prix de la première vente.
Aujourd hui on veut ajouter 31,682 fr. à ce chiffre de 40,000 fr.
De deux choses 1une, ou le chiffre de 40,000 fr. qui s’appuyait sur tous les
éléments de l’affaire, est vrai ou faux.
Dans le premier cas, la transaction n’a pas été observée par mes adversaires qui
veulent élever ce chillre a 70,000 lr. ; qui m ’ont poursuivi avec rigueur pour me
l’imposer; qui ont anéanti pour la seconde fois l’affaire, sur le produit de laquelle
je devais leur rembourser, comme liquidateur, les valeurs qui seraient fixées par
arbitres :
Ou le chiffre de 40,000 fr. est faux; et ces messieurs pourront prouver, contrai
�rement h tous leurs actes antérieurs, qu’ils ont réellement 31,682 fr. de dettes à
Paris ; que les dépenses ont été véritablement laites et les dettes payées ;
Dans ce câs, n’aurais-je pas été induit en erreur, puisqu’on m’a présenté le
chiffre de 40,000 fr. comme le maximum de pri», et qu’aujourd’hui on veut le
porter’ à 70,000 fr. ?......
Par leur requête au président de Paris, MM. Guyonie, Goyon et Béthune ont
demandé à saisir jusqu’à 70,000 fr.
pour les dettes seulement, et jusqu’à
145,183 fr. 26 c. par celle qu’ils ont présentée au président de Clermont : Somme
totale 215,183 fr. 26 c.
Cependant ils ne comprenaient pas la part de M. Valeau, ni cette liste fertile
d ’accessoires ou d'évaluations approximatives qui permet toujours une grande élas
ticité.
Déjà aujourd’hui ils se réduisent à 117,000 fr. : c’est un premier pas en arrière
qui en promet d ’autres.
En résumé, si nous revenions rur le passé, et rappelions à grands traits tout ce
qui me concerne , nous verrions que j ’avais apporté à ces messieurs une affaire dans
une belle position; que pour en acheter les trois cinquièmes, ils devaient me rem
bourser mes dépenses évaluées à 92,000 fr. ; que sur cette somme, ils n’ont payé
(pie 30,000 fr. ; que dans mon apport figuraient des terrains bitumineux pour une
vingtaine de mille francs, vingt-six bateaux de matières dont le seul transport à
Paris avait coûté 42,000 f r ., et desquels M. Adrien offrait d ’acheter la moitié
pour 60,000 fr. ; que mes apports avaient donc une valeur réelle.
Comment ces messieurs m ’ont-ils rendu l’entreprise?
Dans un état de ruine difficile à dépeindre.
Malgré ces fâcheux résultats, je ne me suis pas découragé. Je l’ai relevée par les
plus grands efforts; j ’ai obtenu quatre concessions; j ’apportais des ventes pour
45,000 fr.
On s'est refusé à toutes mes demandes d'arrangement amiable; on a nié l’ar
ticle de la transaction qui pouvait y amener; on m ’a traité sans pitié, sans égard ;
on a saisi jusqu’à mes honoraires, mes seuls moyens d ’existence , et on veut encore
m’écraser sous une dette-imaginaire de 200,000 fr.
Ces messieurs, comme on le voit, veulent me faire payer cher l’honneur de leur
Société, leur loyal concours et la bonne direction de leurs entreprises.
Vous vous plaignez d’avoir dépensé de l’arpent ; je ne le nie pas ; mais il s’agit
de fixer la somme. Je soutiens et crois prouver que les chiffres posés par ces mes
sieurs sont d’uno exagération monstrueuse.
�J ’ai essayé également de démontrer que si ces dépenses n ont pas apporté des bé
néfices, il faut en attribuer la cause à mes adversaires, qui, n’organisant rien de sé
rieux , se ballottaient d’une entreprise à l’autre, sans mieux connaître ce qu'ils
abandonnaient que ce qu’ils recherchaient.
On ne saurait d ’ailleurs oublier qu'au moment de faire face à leurs dépense*,
si mal calculées, une somme de 26,000 fr. avait disparu de la caisse, et qu’enfin
une faillite, dont je n’ai pas à rechercher les motifs, est venue jeter ses désastres
au milieu d’éléments déjà si contraires.
Ici doivent s’arrêter mes observations.
Peut-être ont-elles été trop longues ! Elles restent actuellement soumises à une
appréciation éclairée, celle de la Cour. C’est là ma sauvegarde ; c’est là une garan
tie qui n’a jamais failli à l’honnête homme, et, à ce titre, j’ai le droit de la récla
mer hautement; car elle appartient à mon nom, à ma vie remplie par quarante ans
de travaux utiles, à mon honneur resté intact jusqu’à ce jour, à ma famille dépouil
lée si durement de ses moyens d’existence!
Si
mes prétentions’ m ’ont égaré, j ’ai fourni, pour les juger, toutes les pièces du
procès.
J ’ai dit aux magistrats :
Voilà la correspondance, interrogez-la.
Ne vous apprendra-t-elle pas (pie , loin d’avoir recherché la Société de mes
adversaires, j’ai été circonvenu pour la créer dans leur intérêt?
Que si leur intelligence et leur capacité sont grandes, elles n’étaient pas au moins
appropriées à une entreprise (pie leur gestion imprudente et leurs nombreuses dis
sensions ont rendue mauvaise?
Que loin d ’avoir payé pour moi, ils n’ont acquitté que les dépenses qu’ils avaient
ordonnées, et qu’il a fallu les y contraindre par un jugement, alors qu’ils m ’avaient
entraîné à les soutenir de mon argent, de mon crédit et de ma signature.
Cette correspondance n’a-t—éile pas établi encore quelles étaient mes dispositions
« accepter une transaction, et dans quel moment?
Lorsque ma position et mes droits me défendaient de l’accepter.
Depuis cette transaction quelles dettes ont été payées?
Quelles preuves à l’appui?
Les dettes de Clermont? Mais elles ne peuvent provenir que d ’un déficit de
26,000 fr.
Les dettes de Paris? Mais elles n’existent pas,
�N’en est-ce pas assez pour justifier le reproche qu’il me sera permis, en ter
minant, d ’adresser à mes adversaires?
C ’est que, par leur propre fait, ils ont anéanti pour la seconde fois l’entre
prise qui devait être la garantie des droits de chacun ; c’est qu’au moment où
mes efforts lui venaient en aide pour la relever, ils en ont anéanti la valeur qui
devait les payer.
A vous, Messieurs de la Cour, de statuer sur toutes les questions qui vous sont
présentées.
Plein de respect pour votre décision, je m’y soumets par avance ; car s’il arrivait
que le droit, dont je n’ai pas appris à connaître l’application , pût m ’être défavo
rable, il y aurait, je dois le croire, pour mes juges si haut placés et dont l’opinion
est si grave pour moi, l’intime conviction que dans toutes les périodes de mes rela
tions avec mes adversaires, je n’ai jamais manqué à l’honneur ni à la bonne foi.
Clermont-Ferrand, 3 février 1846.
LliD RU .
------------ ---------------A RTICLES DU TRAITÉ DU 6 OCTOBRE 1838.
A kt. l ,r M. Ledru inet en Société :
1°. Les droits résultant des recherches et expériences auxquelles il s’est livré pour
faire déclarer concessihles les gîtes bitumineux désignés dans sa pétition du 8 fé
vrier 1837 ;
■2°. Les droits résultant de l’ordonnance royale du \ mars 1829 , qui lui a concédé la
mine do l’£courcliade. Toutefois, MM. Valeau, Béthuneet autres, ayant pris connaissance des
prétentions de la daine veuve Nicolas et du sieur Jusseraud, déclarent accepter toutes les
conséquences des instances entamées et à entamer à ce s u je t, et à accepter les apports de
M. Ledru, avec toutes leurs éventualités. Il est convenu que, dans le cas où les contesta
tions entre le sieur Ledru et les deux anciens coassociés amèneraient la nécessité de faire
la vente de cette m ine, il s’en rendrait adjudicataire au mieux des intérêts de la Société,
et à ses frais, si scs associés le jugent utile à leurs intérêts ;
3°. Toutes les acquisitions de terrains bitumineux q u ’il a faites depuis sa demande en
concession ;
4°. Les matières bitumineuses actuellement en magasin dans le département ou en dé
pôt à Paris, ainsi que toutes celles extraites. Enfin le matériel de l ’entreprise, tel qu il se
compose en ce moment.
�©
—
A\ —
A rt . 2. MM. Goyon, V aleau, Bé thune et autres, prendront le lieu et place de M. Ledru
pour toutes les dépenses généralement quelconques laites jusqu’au l pr octobre courant,
au sujet des bitumes d ’Auvergne, lesquels consistent :
'i 1°. Dans le prix d’achat des terrains bitum ineux , s’élevant à la somme de vingt-un
mille quatre cent quatre francs.............................................................................. 21,404f »c
2°. Dans la valeur des objets mobiliers, consistant en outils, ustensiles,
chevaux, chaudières, meubles en granit, etc., qui sont, d’après l’état cijoint au présent, de trois mille six cent cinquante francs................................
3,650
»
qui sont réglés à la somme de vingt-cinq mille francs........................................ 25,000
»
3°. Dans tous les frais de recherches, expériences, exploitations, honorai
res au géomètre en chef du cadastre, pour le plan annexé à la p étition, etc.,
4°. Dans tous les frais occasionnés par le transport à Paris de vingt-six ba
teaux de matières bitumineuses, conduites par eau, frais de canaux, déchar
gem ent, emmagasinage, et qui ont été réglés , par le frère de M. Ledru , à
la somme de quarante-deux mille cinq cents francs.......................................... 42,500
»
Lesquelles sommes forment le total de quatre-vingt-douze mille cinq ceut _________
cinquante-quatre francs........................................................................................... 92,554 »
définitivement réglé ainsi, qui sera remboursé ;ï M. Ledru immédiatement après l’adop
tion du présent tra ité , partie en argent com ptant, partie en valeurs sur Paris , savoir :
Dix mille francs en espèces, h u it jours après la signature do l ’acte........... 10,000* »•'
Dix mille francs en lettres do change, acceptées à trois m ois’ ................... 10,000
Dix mille francs à cinq mois................................................................................ 10,000
»
»
Dix mille à sept m ois............................................................................................
Dix mille à neuf m ois..........................................................................................
.
Douze mille cinq cent cinquante-quatre a onze m ois.....................................
10,000
10,000
»
Quinze mille à douze m ois.................................................................................
15,000
»
Quinze mille à quinze mois.................................................................................. 15,000
»
...
,
.
.
Anr -t
12,5;i4
»
»
’ Parchacun de nous,
Pour sa Purl '• MM- Valeau 3/12, Bclhune 3/12,
Guyonie 1/12, B. Goyon
2/12, P.-V»rGoyonl/12,
Boueauœont 2^12.
Somme égale, quatre-vingt-douze mille cinq cent cinquante- ___________
quatre francs............................................................................... 92,554
Il
»
est expressément convenu que les dernières traites des derniers trente mille francs
ne pourront être négociées par M. Ledru q u’après le délai accordé pour la vente des bi
tumes actuellement à Paris; et pour atteindre te bu t, lesdits trente mille francs seront
réglés en simples obligations, sans être à ordre.
A rt . 3. Pour les soins q u cM . Ledru a donnés à cette entreprise, pour les sacrifices et
pertes q u’elle lui a occasionnés, ainsi que pour l’abandon q u ’il fait à MM. Valeau,
Béthune, Goyon et autres, des 3/5cs de l’affaire, M. Ledru recevra une indemnité de
cent mille Irancs, qui lui est assurée par privilège, en actions de la Société à former , et
qu’il ne touchera q u ’après que les fondateurs auront retiré dix p. 0/0 de leur mise de
fonds.
A kt .
M. Ledru sera propriétaire des 2/5, s de tous les objets mobiliers ou immobiliers
dont se composera l’actif, et participera , dans la proportion des 2/50S, dans les bénéfices
nets de toutes les entreprises de la Société. I! est entendu que ce droit à la propriété des
5
�2/5es de l’actif de la Société et des 2/5es dans les bénéfices ne s’exercera que sur la portion
des bénéfices restant après le prélèvement 1°. des Irais d’administration; 2U. du montant
des dépenses de toutes natures laites par la Société, et des sommes à payer à M. Le dru à
divers titres.
A rt . 5. A commencer du 1er octobre de l’année courante, toutes les dépenses seront
à la charge de la Société, les dépenses antérieures restant toutes au compte de M. Ledru,
au moyen du règlement fait en l’art. 2. —-A l’avenir, M. Ledru ne sera tenu à aucune
mise de fonds. A partir de la même époque, les marchandises seront au compte de la So
ciété , et M. Ledru déclare que la valeur des vingt-six bateaux de bitume, qui sont en
dépôt à Paris, est de, au m oins, 50,000 fr. ; en conséquence, il garantit formellement le
produit de ladite somme de cinquante mille francs par la vente desdits bitumes, dans le
délai d’un an ; il consent que les sommes qui pourraient être en déficit sur ce p rix, lui
soient imputées sur les derniers trente mille francs qui lui sont dus par MAI. V aleau,
Béthune, Goyon et autres.
A rt . C. MM. V aleau, Béthune, Goyon et autres, prendront les moyens de donner à
l ’entreprise tous les développements dont elle est susceptible; à cet effet, ils feront un
capital proportionné aux. acquisitions, exploitations de la Société et établissements d’usines
reconnus nécessaires.
A rt . 7. M. Ledru sera gérant des exploitations de la Société en Auvergne; il recevra
son traitement annuel, fixé à la somme de 3,000 fr., qui sera porté à 6,000 fr. trois mois
après f’obtenlion des concessions. Ce traitement et les travaux seront partagés par tiers
avec AIM. G oyon, oncle et neveu.
A rt . 8. Il ne devra que sa coopération personnelle à la Société; tous les frais d’admi
nistration, ainsi que les traitements d’agents, dont la nomination sera jugée utile, seront
aux frais de la Société, qui s’entendra pour le choix avec le directeur gérant. En Au
vergne , M. L edru, en cette qualité, portera tous ses soins et tout son zèle aux intérêts
de la Société, et s’engage à ne s’occuper dans aucune société de même nature , ni direc
tement ni indirectement. Il s’oblige d’apporter à la Société toutes autres concessions q u ’il
pourrait o btenir, ainsi que les brevets d’invention et de perfectionnement qu’il obtien
drait.
A rt . 9. La survivance dans la direction des exploitations sera réservée à l’un des en
fants de M. Ledru , qui pourra se l ’adjoindre à titre gratuit, et le désigner à la Société
pour son successeur en cas de mort, ou de démission de' sa part. E n cas q u ’il ne l’ait pas
lait de son vivant, elle sera désignée par celui qui serait nommé par la fam ille, pourvu
toutefois qu’il réunisse toutes les qualités propres à cette mission. Cependant M. Ledru, à
moins de maladie ou d ’impossibilité, ne pourra se démettre de ses fonctions avant un délai
de cinq ans.
A r t . 10. La direction ii Paris, sera représentée, pour l’administration , par AL Guyonie, en qualité de directeur, et par un conseil de quatre membres dont feront nécessai
rement partie, AIM. Valeau et Béthune.— AL Ledru pourra assister, chaque1 fois qu’il le
jugera utile, au conseil, et il y aura voix délihérative. Cette direction sera souveraine,
ef l’acte de Société, qui sera publié immédiatement après l’obtention de* concessions,
respectera cette stipulation. M. Guyonic recevra un traitement annuel de dix-huit cents
�francs, y compris les frais de loyer du siège social, lequel traitement sera porté à quatre
mille francs trois mois après l ’obtention des concessions, toujours y compris le loyer so
cial. Il ne pourra s’intéresser directement ni indirectement dans aucune opération de
même nature.
A rt . 11. Dans le cas où il ne serait accordé aucune autre concession àM . Ledru, ou que la
concession obtenue n ’équivaudrait pas au quart de la demande, tout l’actif de la Société,
dans lequel entrerait nécessairement les indemnités qui seraient allouées, à M. Ledru , en
vertu de la loi du 21 avril 1810 , serait destiné à rembourser d’abord les mises de fonds?
et l ’excédant seul, s’il y en avait, serait partagé dans les proportions ci-dessus indiquées.
A rt . 12. Immédiatem ent après les concessions obtenues, il sera passé un acte authen
tiq u e , lequel devra être revêtu de toutes les signatures et formalités voulues par la loi.
A rt . 13. Les difficultés qui pourraient s’élever au sujet du présent traité , seront sou
mises à la décision de trois arbitres, dont deux seraient nommés par les parties, et le
troisième par les deux prem iers, ou par le président du tribunal de commerce de la
Seine. Le jugement de ces arbitres, qui seront dispensés de la prestation du serment et
de toutes autres formalités voulues par la l o i, sera sans appel ni recours en cassation.
Fait sextuple, à Paris, le (i octobre 1838.
Ont signé :
A. L e dru , As,‘. V a l e a u , M a x . Bethune , (ü jyonie .
Toutes les pièces et lettres annoncées dans ce Mémoire sont dans les mains de
M. Ledru.
Clermont , lmp. de 'Jnmaiid-Lakdmot frère».
�
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Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ledru. 1838?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Ledru
Subject
The topic of the resource
bitumes d'Auvergne
transport fluvial
sociétés
arbitrages
industrie
ventes
créances
architectes
mines
Description
An account of the resource
Observations de M. Ledru, Architecte à Clermont, soumises a MM. Les présidents et conseillers composant la première chambre de la cour royale de Riom.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud-Landriot frères (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1846
1810-1846
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV05
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Lussat (63200)
Chamalières (63075)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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arbitrages
architectes
bitumes d'Auvergne
Créances
industrie
Mines
sociétés
transport fluvial
ventes
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Text
■
MEMOIRE
PO UR
la dame D
CO NTRE Me P
ubois
e r o n
;
, Notaire au Châtelet.
N
U Notaire de P a r i s , que le genre de fon
miniftere conftitue l’homme du Public & le d 2
pofîtaire-né de fa confiance, peut-il fe fouftraire
à la garantie civile d’un délit commis dans fon
étude par fon premier C l e r c , c’e f t - à - d i r e , par
celui qu’il y avoit prépofé pour partager en quelque
forte fes fonctions, pour y être c o - N o t a i r e avec
l u i , pour recevoir en fon abfence, fouvent même
fous fes y e u x , les conventions des Parties, leurs
engagemens, les effets ou les deniers qui en etoient
l’o b je t , à l’effet enfuite de co nvertir & rediger le
tout en contrats, dont le Notaire figne les minutes,
& délivre les groffes & expéditions ?
Quels prétextes fur-tout le Notaire pourroit-il
imaginer pour n’être pas civilement tenu & refponfable des faits de fon prépofé, lorfque ce pré
pofé n’a fait ce qu’il a fait, & n’en a donné fa reA
'
,
�1
connoiflance ob liga toire , qu'au nom de Ton prep o f a n t , & que les engagemens q u ’il a contrariés
pour & au nom de ion commettant, étoient de
nature à ne pouvoir être rempli« que par le N o
taire lui-même ?
Telle eft, dans le point de droit, l’unique ques
tion que cette Caufe préfente.
Quant au fait, il eil fort fimple. Il fe réduira à
mettre fous les j e u x des Magiftrats la copie fidele
de la reconnoiffance que le C l e r c , au nom de fon
N o t a i r e , a donné à la dame D u b o i s , de fon effet
de 30 ,0 0 0 livres, apporté pour être converti en
contrats.
U n H dit de Janvier 1 7 8 1 , ayant o u v e r t , au
nom du R o i , un emprunt à renies viagères fur une
ou plufieurs têtes, la dame Dubois fit porter au
T r é io r R o y a l la fomme de 30,000 livres , d o n t ,
fuivant l’uiage , & par l’impoiTibilité d’en ufer
autrement dans la premiere affluence d’un emprunt
public, il ne lui fut alors délivré qu’une reconnoiffance ou bordereau au p o r t e u r , portant récépiiîe
de la fomme fournie, pour être conilituée en rentes
viagères. T o u t le monde fçait que ce n’eft qu’afifez
long-tems a p r è s, lors de la réda&ion de ces bor
dereaux en minutes de contrats, & avant leur fîgnat u r e , que le Tréior R o y a l en expédie des quittances
�3
de finance, pour être annexées à ces minutes, &
qui contiennent les noms & lage des perfonnes au
profit & far la tête desquelles les rentes viagères
fe conftituent.
L a dame D u b o i s , munie de fon récépifle de
3 0 . 0 0 0 liv re sa ne pouvoit feule en faire ufage. Il
fa l lo i t , pour fa converiion en contrats, le faire
paii'er à un Notaire de P a r is , à fon choix ( 1 ) ; & à
cette é p o q u e , il y avoit déjà plus de douze ans
que M e Péron étoit le fien dans toutes fes affaires.
Il y auroit même eu à la dame Dubois une forte
d ’ingratitude de faire remettre à un autre qu a fon
N o t a i r e , une paiTation de contrats qui devoit lui
p r o c u r e r , de la part du R o i , le bénéfice d’une
piftole par 1 0 0 0 livres.
M c de i l e n n e f o r t , étoit aufli depuis long-tems le
Procureur au Châtelet, & l’homme de confiance de la
dame D ’ubois ; & M c de Rennefort demeuroit même
maifor\ que M c P é r o n , fon Notaire.
C f; fut donc par M c de Rennefort que la dame
D u b o is fit paiTer à M c Péron fon bordereau de
3 0 . 0 0 0 li v r e s , avec la note du placement qu’elle
entendait en faire en deux rentes viagères égales,
l ’une fur fa tête & celle de fon fils aîné, & l'autre
fur fa tête & fur celle de fon puîné. V o i c i , pour
"
( 1 ) Les contrats ( portoit PEdit ) feront paffès pardevant tels Notaires,
du ChâteUt de Paris que le/dits acqtiéreurs voudront choijîr, qui feront
tenus de leur délivrer lîfdits contrats S AN S F R A I S .
A
�fa décharge perfonnelle envers la dame*. D i j b o i s , le
récépiiïe que M e de Rennefort lui en a remis. C ’eft
ce récépiiïe qui donne lieu à la conrejftation. Il eft
ainfi conçu :
J e JouJJïgné reconnoît que M . de Vienn e f ort via
remis un bordereau de Cemprunt viager actuellement
ouvert fu r le R oi par Edit du mois de Janvier der
nier , de la fotnme de3 0 ,0 0 O livres , pour être placée
au profit de Madame M arie Ju lie Chat lotte Sauvé,
veuve de Julieri-François-Thibault Dubocs , F cu yer ,
Secret aire général des Suijfes & Grifons , & Chef des
Bureaux de la Guerre , à C) pour ¡00 , en deux parties
égales de 1,350 livres de rente chacune ; ia premiere
fu r la tête de ladite dame veuve D ubois} ■&fu r celle
de M . Louis-Augufle-Thibault D ubois, fon f i l s , qui
en jouira après le dé'cès de ladite dame f a mere , ainfî
que des arrérages qui en feront dus audit décès ; & la
Jeconde fur la tête de ladite dame veuve Dubois , &
fu r celle de M . Georges - Julien - François Thibault
Dubois , fou autre fils , qui en jouira pareillement
après le décès de ladite dame f a mere , ainfi que des
arrérages lors dus , le tout avec la jouijfance du
premier dudit mois de Janvier. E t p a r l a r e
m is e
DES
GROSSES DES CONTRATS
DE
TIT U T IO N DESDITES D E U X RENTES V IA G E R E S
LA
,
CONS
PRÉSENTE RECONNOISSANCE D EM EU RERA
Fait a Paris ce
Février
Signé
P i L L O T , principal C lerc de M . P é r o n , Notaire.
NULLE.
25
ij$z.
�5
Pendant le cours de 1 7 8 1 , la dame Dubois a
inutilement preffé, iolîiciré, envoyé demander dans
l’étude de M ° Péron la délivrance des groiTes de
ies deux contrats ; tantôt elle étoit trop impatiente,
les quittances de finance n’en étoient pas encore
expédiées ; tantôt les minutes en alloient être ré
digées ; tantôt envoyées à la fignature à l’H ô te ld e V i l l e , ces minutes n’y étoient pas encore arrivées
en rang utile , & c . & c .
T e l étoit l’état des c h o i e s , lorfqu’au commen
cement de l’année 1 7 8 3 les prévarications du fieur
Pillot ont fait explofion. Le Miniftere public en a
rendu plainte ; & , par Sentence rendue au Châtelet fur procès de grand criminel, le 1 6 Janvier
1 7 8 4 , Pillot a été déclaré atteint & convaincu
» d’avoir pratiqué des manœuvres infidieufes pour
» s’attirer la confiance de plufieurs des cliens du
» Notaire chez lequel il étoit en qualité de pre» mier Clerc ; d’avoir commis divers abus de con» fiance & infidélités envers différentes perfonnes,
» jfoit en recevant des iommes d’argent pour placer
» dans des emprunts fur le R o i , (bit en vendant en
» vertu des procurations qu’il s’étoit fait donner
» par plufieurs Particuliers, différentes parties de
» rentes, contrats & récépiffés des F e r m e s ___ ; &
» encore ledit Pillot véhémentement fufpeft d’être
» l’auteur d’une fauffe iignature appofée au bas
» d’une procuration, en date du 16 Janvier 1 7 8 3 ,
�6
» pafïee devant F o a c i e r , & c . ». Pour réparation
de quoi Pillot avoit été condamné au carcan avec
écriteau , ( Clerc de Notaire ayant abufé de la con
fiance de plufieurs cliens , & Jufpect d'être faufjaire )
à la marque, & aux galeres à perpétuité.
Sur l’appel à la Tournelle , l’ Arrêt du 23 Mars
1 7 8 4 n’a réformé la Sentence que dans les chefs
relatifs au faux. L ’écriteau a été réduit à ces mots :
Clerc de Notaire ayant abufé de la confiance de plu fieurs cliens. Les condamnations du carcan , de la
m arque, des galeres, de la confiscation de biens,*
pour les cas réfultans du procès, ont fubfifté en
leur entier.
C ’eft alors que la dame Dubois s’efl: adreiïee à
M e P é r o n , N o t a ir e , comme civilement refponfable du délit & du v o l de fon bordereau de
3 0 , 0 0 0 livres , commis dans l’étude de M e Péron
par P i l l o t , fon principal Cle rc , & comme obligé,
par le récépifle que Pillot a donné de ce bor
dereau , en cette qualité, pour ce récépiiTé ne
demeurer nul que par la remife qui feroit faite à
la dame D u b o is , & qui ne pouvoit lui être faite
que par le Notaire , des groiTes de fes contrats de
rentes. Elle lui demande ou la délivrance de ces
deux contrars, expédiés dans les termes & de la
manière ci-defTus exprimés, ou deniers fuffifanspour
en acquérir de pareils, avec le cours de leurs arré
rages à compter du i cr Janvier 1 7 8 1 .
�7
,.
Nous ne fçaurions être férieufement divifés Tuf
le point de droit.
En général, nul ne peut être obligé , fans doute,
ni par le contrat, ni par les délits d ’autrui. N on
debet aheri per aherum iniqua conditio infer ri. L.
ff. de Reg. Ju r.
Mais cette réglé reçoit exception contre celui
qui a fondé cet autrui de Ton pouvoir. » Comme
» les conventions fe forment par le confentement,
» perfonne ne peut en faire pour un autre , s ’ i l
» N EN A DONNÉ LE POUVOIR «. D o m a t , L o i x
civ. liv. i , tit. i , feft. 2 , nomb. 3.
A i n f i , d’après l’a&ion inftitorienne pleinement
reçue dans nos m œ urs, quoiqu’on ne pui/Te en
général être engagé par le fait d’un t ie r s , cepen
dant le prépofant eft tenu des faits & des engagemens de fon prépofé, parce que c’eft le prépofant
lui-même que la Loi répute avoir contra&é par le
miniiïere de celui qu’il a prépofé. T o u s deux aux
y e u x de la Loi s’identifient, & ne forment qu’un
feul obligé , qui eil le prépofant.
O r , il eil deux fortes de prépofés par le fait defquels le prépofant peut être engagé.
Les premiers font ceux que le titre de leur man
dat & l’ùfage ont défigné par le nom propre de
Fondés de procurations. Il ne s en agit point ici.
Les féconds font ceux d o n t , à la vérité , les
pouvoirs ne font point coniignés dans un afte écrie
m oyens.
�8
& ofteniible , mais dont le mandat n’en eft pas
moins notoire & confiant, parce qu’il fe fait connoître par l'on propre fait public & extérieur qui en
conflitue l’exiflence.
Ce font ceux là que l’ufage a qualifiés du ji o m
générique de prépofés, & que les L o i x appellent
injîiiores, dénomination qui emporte avec foi la
définition du genre de ce mandat,, de cette prépoiitiorj : injluor appeilaïus ex eo quod negotlo gererido infiat. L . $ , ff. de injîu . a&. On lent déjà
quel eft le negoùum gerdtidum auquel , dans l'ufage
notoire , le Notaire de Paris prépofe fon principal
C l e r c , & l’affiche pour fon inilireur, fon commis,
fon repréfentant, à tout le public qui vienr jour
nellement traiter d'affaires dans fon étude, foit que
le Notaire y foit ou n’y foit p a s , & plus particuliè
rement encore à fes anciens cliens, habitués à le
voir repréfenter par le Clerc de confiance qu’il a
mis à la tête de fon étude pour le fuppléer dans
la multitude infinie d’opérations différentes dont il
eil continuellement furchargé.
C ’eft d’après cette notoriété des pouvoirs du
p r é p o fe , encore que ces pouvoirs ne foient pas
rédigés en a6te é c r i t , & pour que la foi publique
n’y fût pas trompée , q u e, dit la Loi i , ff. de inftit.
œquum prætori. vifutn e jl , Jicut commodo [en-
timus ex aclu inflitorum , iià eiiam obligari nos ex
contraclibus ipjorum , & conveniri,
A
�9
A la v é r it é , cette obligation que nous impofe
notre Inftiteur detre refponfable & a&ionnable
pour Tes faits, ne s’étend pas à ce qu'il auroit con
t r a t en autre qualité & pour d’autres objets que
ceux de fa prépofition. Non omne ( ajoute la L o i 5,
§. 1 1 & i l . ) non omne quod cum infîitore geritur ,
obligat eum qui prœpofuit ; f e d ita , j i gratiâ ejus
cui præpofuus fu e rit , contra&um ejl.... id eft , ¿un*'
taxat ad id propter quod eum prœpofuit.
Mais cette exception même vient confirmer la
réglé générale , d’après laquelle le prépofé oblige
fon prépofant ex omni causa cui præpofttus efl.
Que par l’événement cet inftiteur Te foit trouvé
ignorant, inéxaft, infidele, p r é v a r ic a t e u r , tout
cela eft indifférent à ceux qui n'ont contra&é avec
lui qu’en fa qualité de prépofé & dans les limites
de fa prépofition. Ils n’en ont pas moins pour leur
obligé civilement le p ré p o fa n t, avec lequel , en
contrariant vis - à - vis de fon prépofé , les tiers
ont réellement contra&é & qui doit s’imputer
d’avoir auiïï indiferétement placé fon choix & mis
fa confiance : quoniam ( dit à ce fujet la L o i 7 du
même titre ) fib i imputare debet, qui eum prœpo -
fu it.
Ces principes puifés dans le texte formel des L o ix
Romaines , font atteftés par tous nos D o&eurs
François être parmi nous dans la plus grande v i
gueur , foit en pays de Droit é c r i t , foir en p^ys
�IO
de Coutume. Il fuffira d’indiquer à ce fujetMornac ,
fur le titre 3 de aclione Lnjluoriâ , livre 1 4 du
D i g e i l e ; DefpeiiTes, des contrats & quaii-contrats ;
les L o ix civiles de D o m a t , liv. 1 ,tit. 1 6 , fe£l. 3 ;
Pothier , Traité des obligations, part. 2 , chap. 6 ,
fe£l. 8 , & c . & c .
Pour fimplifier , nous ne citerons que Pothier ,
qui aptes avoir établi les engngemens principaux
auxquels le prépofant eil aifujetti par le fait du
prépofé, & dans l’étendue de fa prépotîtion,s’occupe,
nomb. 45 3 de l'obligation accefjoire des commettans
qui naît ( même ) des DÉLITS de leurs prépofés
en ces termes :
» Ce n’eil pas feulement en contrariant que les
» prépofés obligent leurs commettans. Quiconque
» a commis quelqu’un à quelque fon&ion , eil ref» ponfable des délits & quaji-délits que fou prépofé
» a commis dans l’exercice des fondions auxquelles
» il étoit prépofé , L. $ , §. 8 ff. de lnftit. acï......
» Cette obligation du commettant eil une obliga» tion acceiïoire à l’obligation principale du pré» pofé qui a commis le délit ; elle s’étend à tout
» ce que l ’obligation principale renferme, pour les
•» dommages-intérêts dus à celui envers qui le délit
y) a été commis. Mais le commettant n’en eil tenu
» que civilement , quoique celui qui a commis le
» délit en foit tenu par corps.... Le commettant peut
» feulement requérir, en payant, la ceiîion ducréan» cier. »
,
,,
�11
L e poinr de D r o i t , on le r é p è t e * ne fera vraifemblablement pas contefté.
Mais Ton application aux Notaires de Paris, dans
le choix public qu’ils font de leurs Clercs p,our
les repréfentér dans les détails immenfes des affaires
de leur E t u d e , pourroit-elle raifonnablement éprou
ver plus de difficulté ? Invoquons à cet égard
leur ufance générale & la notoriété publique. Difons
mieux : l’établiiTement qu’ils font, aux y e u x de ce
même public , de leurs principaux Clercs pour inftitores ad gerenda negotia de leur Etude , & leur
foumiffion tacite, ipfo facto , à être engagés par les
faits de ces prépofés, comme ils le feroient par leurs
faits p r o p r e s , font, pour les Notaires au C h â t e le t ,
autant de néceffité & d’intérêt perfonnel, qu’ils font
d équité légale : la preuve en eft fenfiblé.
Perfonne n’ignore en effet c o m b ie n , par é t a t ,
les Notaires de Paris font rarementrchez eux. Sans
ceiTe ils font appellés au dehors par des rédaâions
ou des fignatures de contrats de m ariage, par des
réceptions de teftamens , par des conférions d’in
ventaires qu’ils vont fuivre jufques dans les P r o
vinces , par leur afliftance à des affemblées de Dire&ion tenues chez les C o n f e ils , & c . & c .
Cependant s’il étoit d’ufage de ne contra&er pardevant eux que fous leurs yeütf & en leur préfence;
ii toutes les fois qu’ils font abféns de leurs cabi
nets ( & ils le font Couvent ) , les P a r tie s, faute
(
B £
�de trouver dans les Clercs du Notaire des infîitores
qui le repréfentaffent, étoient obligées de reven ir,
jufqu a ce qu’elles fuiTent aifez heureufes pour le
rencontrer ;; en un niot , s’ils ne s’étoient pas dé
terminés au parti notoire' & public d’aiîocier leurs
Maîtres-Clercs ( à la fignature près ) aux fondions
de recevoir , en leur abfence , ou même , lorfqu’étant chez e u x , ils font occupés à d’autres opé
rations , les conventions des P a r t i e s , de fe charger
du dépôt de confiance fait entre leurs mains, foit
des effets , foit des deniers néceifaires à la réalifation des contrats, enfin de d o n n e r , quand les circonftances ou l’importance de l’objet l’e x ig e n t , des
récépi(fés ou reconnoiifances deftinées, comme dans
notre efpece , à demeurer nuls par la fignature ou
la délivrance des a&es dans lefquels ces deniers ou
effets étoient convertifTables : que deviendroit, au
détriment co m m u n , cette multitude d’a&es & de
contrats qui fe reçoivent journellement chez les N o
taires? A u lieu de 1 5 ou 30 a i l e s , plus ou m oins,
qui habituellement fe paifent par jour dans certaines
Etudes,fans exiger la préfence du Notaire lui-même,
il faudroit les réduire à deux ou t r o i s , comme étant
le feul nombre à la convention, à la réda&ion, Ô£
à la fignature defquels un Notaire, perfonnellement,
par lui-même , & fans en partager les opérations
avec perfonne , feroit tout au plus dans la poffibiiité de faire face.
�. , I ,'5
Cependant la notoriété eil toute au contraire.
Les opérations q u i , pour ainfi d ir e , le font d ellesmêmes, ne font que de f t y l e , & n’exigent que la con
fiance publique il juftement acquife aux Notaires de
Paris, telles que les conilitutions de rentes à prix d’ar
gent, les baux à loyer avec une partie de la location
promife d’avance, des dépôts d’offres réelles., des coniignations, & cent autres a£tes du même genre , qui
exigent que les deniers en foient laiiïes chez le N o
taire jufqu a la figriature de la minute, s’opèrent tous
les jours en l’abfence du Notaire comme en fa préfence. Les deniers reftent de confiance entre les mains
du principal Clerc , comme ils ieroient reftés en
celles du N o t a i r e , s’il y avoit été ; & fi les Parties
payantes ou coniignantes en veulent un recepiffé ,
c ’eft pour l’abfence du Notaire , le principal Clerc
qui le donne en cette qualité , pour fon Notaire , &
avec la claufe , comme dans notre efpcce , que la
remife faite à la Partie Toit du contrat de rente , Toit
du bail contenant reçu du lo yer d'avance, foit de
l’a&e de dépôt ou de confignation , anéantira de
plein droit la reconnoiffance donnée pour le N o
taire, & la rendra fans effet.
Q u e d’occafions même où, s’il falloit attendre la
préfence - & le retour du Notaire , l’affaire & fon
émolument manqueroient pour lui , prenons-en
un exemple entre mille. Il s’agira d’un emprunt pu
blic : la preffe eft a u T r c f o r royal ; l’argent qu’on y
B 3
�14
apporte de toutes p a rts, & la difficulté pour les
Particuliers d’y aborder , leur font craindre que
d’un inftant à l’autre l’emprunt ne foit fermé. L e
Client ordinaire du Notaire porte fon argent chez,
l u i ; mais parce qu'il ne trouve pas le Notaire luim ê m e , fi le Client ne p o u v o it , fuivant l’ufage, laiifer
de confiance fes deniers au principal C lerc, quoique
connu publiquement pour être fon inftiteur, fon
repréfentant, fon prépofé aux affaires de l’Etude, tant
pour recevoir que pour payer ; faudra-t-il que le
Client demeure expofé à la fâcheufe alternative de
perdre ou fon argent ou Toccafion d’un placement
avantageux ?
O r c’eft à cet inconvénient qu’a fubvenu l’ufance
notoire & univerfelle des Notaires de Paris q u i , dans
l’objet d’empêcher que pour leur abfence ou leur
occupation ailleurs, on ne porte chez un autre N o
taire , les o pérations, aftes ou contrats propofés
dans» leur E t u d e , avec les fuites & le bénéfice qui doi
vent leur en revenir, laiffent leurs principaux Clercs
dans l’ufage habituel de donner pour e u x , quand on
le demande , les mêmes fûretés ou reconnoiifances
qu’on auroit pu exiger d’eux-mêmes, s’ils euffent été
préfens; d’autant mieux que Pillot eft peut-être le
premier iniHfeur infidele qui ait mis fonPrépofant
dans le cas de faire honneur à un engagement que
P i l l o t , autorifé à ce fujet vis à-vis du public , n’a
effe£hvement contra&é qu’au nom de fon Notaire
�15
.
& pour l u i , foit par fa fignature en qualité de prin
cipal Clerc de M e Peron , l'oit par les termes de fa
reconnoiffance qui demeurera nulle de plein droit ,
la délivrance h la dame Dubois des grojjes de Jes
deux contrats de rentes; délivrance que , non Pillot,
par
mais Ton Notaire feul, pouvoit réalifer.
A u furplus que les faits & délits des Clercs de
•Notaires commis à l’occafion & dans la geftion des
affaires de l’E t u d e , obligent le Notaire , & qu’il en
f o i t , conformément aux L o i x , civilement garant &
refponfable , c’e f t , indépendamment du point de
droit, un point de fait & de Jurifprudence dont il
n’eft plus permis de douter depuis l’Arrêt célébré
qui l’a ainii jugé in icrminis l’année derniere contre
M e L a i r , Notaire.
Sa caufe fembloit pourtant beaucoup plus favo
rable , car il ne s’élevoit contre lui aucun mandat
tacite , aucune prépofition préfumée ; il exiftoit
encore moins ni recepiffé ni reconnoiflance écrite,
que fon principal Clerc eût donné pour lui.
M e Lair obfervoit au contraire que s’agiifant
d ’une rente de 1 5 0 0 livres au principal de 3 0 0 0 0 1.
due à la ville de Vierzon par les Etats de Bretagne ,
& dont le contrat étoit tombé en rembourfement,
tout fon miniftere de Notaire avoit été confommé
par la quittance de rachat fignée devant lui par les
Parties , & dont il n’avoit f a i t , comme Officier
public, que certifier la vérité. L e nommé de Bergues,
�16
fo n troifîeme Clerc , qui depuis étoit allé aux Etats
de Bretagne toucher ces 3 0 0 0 0 livres qu’il avoit
emportées , n’ayant rien fait en cette partie au nom
& pour le profit du Notaire.
Cependant il a fuffi que les pieces néceflaires
pour recevoir fuflent émanées de l’Etude de M e Lair,
& que de Bergues eût abufé de la qualité de fon
Clerc pour retirer au nom du Notaire les 3 0 0 0 0 liv’.
en queftion. La C o u r a décidé que le délit de ce
fien C le r c , commis dans fes fonctions de C le r c , étoit
à la charge du Notaire. M G Lair en conféquence a
été condamné à la reilitution des 5 0 0 0 0 liv. envers
la ville de Vierzon , & les Etats de Bretagne qu’il
prétendoit avoir mal payé , ont été renvoyés de fa
demande en garantie, avec dépens.
Ici M e Peron eft en bien plus forts termes.
C e n’eft pas un troifîeme Cle rc qui , fans même
en avoir donné de recepiiTé à la Partie , eil allé hors
TEtude & chezle Tréforier,furprendre la délivrance
d’une fomme de 3 0 0 0 0 \. ou de fon bordereau. C ’eit
Pillot, non en fon nom privé & par l'effet d’une con
fiance perfonnelle quelconque que la dame Dubois
n’a jamais mife en lui, mais au nom de M e Peron
fon Notaire , en qualité de fon principal C le r c , dans
fon Etude même , où il étoit publiquement connu
pour être fon repréfentant, q u i , en l’abfence de M e
Peron & pour l u i , a donné fon recepiiTé du borde
reau que la dame Dubois faifoit remettre à M e Peron
�J7
fon N o ta ire ; recepiff e qui devoit refter fans valeur
dès l’inftant où M e Peron auroit délivré les deux
* contrats de rente qui en étoient l’objet.
M e Peron ne peut donc fe libérer envers la dame
D u b o i s de l ’engagement que Pillot fon inftiteur, &
fur la foi de la confiance publique, a contractè pour
l u i , qu’en délivrant à la dame Dubois les groff es
promifes de fes deux contrats ; ou en fourniffant les
deniers nécéffaires pour lui procurer un bordereau
de l’emprunt viager de 1 7 8 2 , tout femblable au
fi e n , & tel que les négociations s’en font encore fur
la Place jufqu’au premier Janvier prochain.
M e B A B I L L E , A v o ca t.
D
r e u e
, Procureur.
A PARIS, chez P. G. S im o n oc N. H. N y o n , Imprimeurs du
Parlement, rue M ignon Saint André-des-Arcs ,
1786
�
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Factums Vernet
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dubois. 1786]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Babille
Dreue
Subject
The topic of the resource
notaires
responsabilité civile
emprunts
rentes viagères
prévarication
abus de confiance
fraudes
faux
doctrine
clercs de notaires
Description
An account of the resource
Mémoire pour la dame Dubois ; Contre maître Péron, notaire au Châtelet.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de P. G. Simon et N.-H. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1786
1782-1786
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
17 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0116
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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Abus de confiance
clercs de notaires
doctrine
emprunts
Faux
fraudes
notaires
prévarication
rentes viagères
responsabilité civile
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Text
M
ET
P O U R
É
M
O
I R
E
CONSULTATION
M adam e la M arquife
de
C
a b r i s
,
b e lle -fille , défendant l’interdiction de fon m ari;
CONTRE
de Cabris , Douairière ,
Madame d e L o m b a r d S a i n t
B e n o i t y Marquife
pourfuivant linterdiclion du Marquis de C a b ris,
fon fils , pour caufe de démence.
V IC T IM E S
malheure ufes des com p lo ts, de cabales
combinées , le marquis & la marquife de Cabris fe font
vus l’objet de perfécutions méditées dès les premiers inftans où leurs nouveaux engagemens dans la fociété fembloient devoir leur en affurer les douceurs.
D ’ambitieux collatéraux , retenus par un pere refpectable, ne gardent plus de mefures dès qu’ il a ceffé d’être.
Ils trouvent bientôt le moyen d’introduire le défordre
A
�dans une maifon où régnoit l’union; on favorife les goûts
d’un jeune homme qui commence à jo u ir; on fe m énage
par les dépenfes où on le précipite le moyen de le perdre ,
ati moins pour prodigalité. Les gens d’afFaires font changés,
la cabale fait expulfer un homme en poiTeilion de la con
fiance du chef de la famille depuis trente ans , elle lui
fubftitue un agent de fa main , d’abord fous le nom de
curateur pendant la m in orité, devenu enfuite agent gé
néral & Confeil intime.
D e nouvelles circonftances produifent bientôt d’autres
combinaifons.
Des reproches de manque de parole faits au bailli de
Mirabeau , refufant d’acquitter un fupplément de doc
promis d’honneur à fa niece , Sc accepté par le mari.
Un prêt fait à une belle-mere dans l’indigence , fuppofé
depuis employé à la fouftraire à la tyrannie fous laquelle
elle languifloit avec la fortune la plus brillante, devinrent
des crimes irrémiiïïblcs aux yeux de ceux que ces récla
mations contrarioicnt.
En 1 7 7 6 le Marquis de Cabris envoyé fon époufe
auprès de la marquife de Mirabeau , malade à Paris, où.
elle pourfuivoit fa demande en féparation contre fon
mari ; fes foins fc bornent à ceux qu’exige l’état de la
malade..
Aufli-tot quelle eil rétablie , fa fille fc retire au co u
vent de Popincourt. La marquife de Mirabeau déboutée
de fa demande , rentre dans la maifon de fon m a r i, elle
en cil enlevée huit jours a p rè s, &
maifon de f o r c e ,
qui
conduite dans une
n’étoit faite ni pour fon é t a t , ni
pour fon âge ; fa fille follicite 6c obtient la permiifion de
�3
la v o i r , , clic en reçoit des pouvoirs, eHc.n'cn fait 4'autrc
ufage que de révoquer les plaintes rendues contre le. mar
quis de Mirabeau , & de chapger les,jÇppfcils. -Tout cil
•notifié à.celui qui-cn étojt l'o b je t, pour l’epg^gjçrà, traiter
avec plus, d ’égards la mere de douze, encans.
H uit jours après , ordre du Roi qui exile à Lyon cette
fille q u ia v o it voulu calmer les troubles domeftiques; elle
fait des repréfentations aux M in iftr e s ';, quatorze jour,s
après l’ordre eiV révoqué, elle retourne tout de,fixité au
près de Ton mari , qui , inftruic. de ce qpi sfei^ pa0e,,
adrefle fes repréfentations aux Miniftres , & fait-les re
proches les plus vifs à M . le marquis de Mirabeau qu’il
regarde comme l’auteur de cet a£bc furpris à l’autorité.
La cabale fentit alors qu’il falloir hâter, l’cxéçuxiçn du
projet combiné depuis fi long tems.
Q uand le marquis de Cabris étoit en P r o v e n c e , & fa
femme à Paris , on avoit cfpéré perdre le. mari par les
gens dont on l’avoir entouré ; dans l’opinion que fon
anéantiiïement faifoit retomber la femme f o q s ,la puiffance de fon pere, on penfoit que le même coup les frapperoit tous les deux; réunis ils paroifloient redoutables à
la cabale ; il falloir les détruire avant que la confiance
fut parfaitement rétablie par Pcxpulfion des gens d ’af
faires. Quelques accès de vapeurs qu’eut le marquis de
C a b r is , fournirent le prétexte d’une demande en inter
diction. Il ne fut queftion que d’alFcrmir la perfonne de
puis longrtems pratiquée ( i ) , de la déterminer à intenter
cette a£tion honteufe Si flétriflante pour fa poftérité.
( i ) V o ici cc que dit la dame douairière de C abris e lle -m ê m e page 1 8 , pre-
A ij
�4
La dame de Lombard , douairiere de C a b r i s , alors
âgée de foixante a n s , avoit paiTé fa vie dans une apathie
complette , uniquement occupée de Tes petits exercices
domeftiques , 6c de la confervation de fa fanté ; on l’avoic
vue dans fa jeunette abandonner un mari eftimable 8c
refpe£té de Tes égaux, aux foins de quelques amis tendres
qui lui a v o ie n t rendu la fanté qu’il ne pouvoit recouvrer
dans fa maifon. Sa femme n’avoit jamais figuré dans l’adminiftration intérieure d’une fortune parfaitement con
duite 6c beaucoup augmentée ; mais elle avoit développé
des talens pour la perfécution; de deux filles plus im m é
diatement foumifes à fa furveillance , l’une avoir été
forcée de fc faire religieuse, & l’autre avec plus d’énergie
dans la m e , réduite à fo rc e de mauvais traitemens pu
blics , à l’état malheureux où on a voulu depuis conduire
le marquis de Cabris. O n la détermine contre lui par l’appât
flatteur du co m m a n d e m e n t, on lui préfente la difpofition de cinquante mille livres de rente attachée à la curarâtelle qu’on lui p rom et, iî elle veut demander l’interdi&ion. O n lui fait voir l’anéantiflement de fa belle-fille
tom bant fous fa puiiTance comme une propriété de l’in
terdit , où rentrant fous l’autorité paternelle du marquis
de Mirabeau , on lui p ro m e t, à tout évén em en t, de l’en
débarraiTer par la voie de l'autorité.
Les cabales fe mettent en m ouvem ent; îc bailli de
Mirabeau arrive à G r a t t e , il loge chez la dame de L om
bard , le marquis de Cabris 8c fa femme fe préfenterrt
m icre lign e du mémoire : « depuis long-tem s les parens de la fam ille me peignoiinfc
» com m e in évitable la rcffourcc de l’in te rd i& iaiu
*
�5
inutilement pour le v o ir , ils font conftamment refufës ;
s’ ils écrivent à leur mere & à leur oncle , leurs lettres
refirent fans rép o n fe, le bruit fe répand à Gratte que cc
ch ef de la c a b ale a Tes poches pleines d’ordre du R o i ,
pour punir ceux qui oferont s’oppofer à fes volontés im périeufes , qu’on veut faire interdire le mari & enfermer
la femme pour le refte de fes jours.
Aufli-tôt paroît une demande en interdi£tion j des té
moins domeftiques ou gagiftes de la dame douairiere de
Cabris , des gens de la lie du peuple , qui ne vivoient
point avec le prétendu malade , font entendus dans le
fecrct , avec l'appareil d’une procédure criminelle , ils y
d é p o fe n t, fuivant le vœu de ceux qui les produifent ; le
prévenu cft interrogé, & répond trop bien pour les vues
que fe propofe la ca b a le , il écrit fa défenfe de ia m a in ,
il demande à faire preuve par témoins de fon bon fens ,
l’enquêce lui eft a c c o rd ée, le juge mieux confulté fe hâte
de retirer cette grâce , quand on voit que la preuve peut
devenir complette ; le prétendu malade aflemble à Ton
château la communauté de fes habitans de Cabris , &c
tranfige avec eux fur des conteftations fufeitées par les
agens de la cabale pour lui aliéner l’amour de fes vafTaux ;
on crie au fief immolé ; le juge eft réeufé , la récufation
jugée contre le marquis de C abris, il le déclare atteint 8c
Convaincu de démence & l’interdit.
Plus de dix familles de parens diftingués habitent la
mêm e ville , on ne demande point leur fuffrage , qu’on
eft aiTuré qu’ils n’accorderoient pas à une iniquité con
duite fous leurs yeux. T o u t fe paiTe entre le religieux
p ro fè s , votant en fon nom , deux beaux-freres 6c deux
�6
des parens de l’un de Tes beau x-frcres, qui ne l’étoient
pas du marquis de Cabris. L a cabale y a jo u te , pour faire
n o m b re , les noms de quelques parens de demeures éloi
gnées , donc la plupart ne connoiilent pas le malade ,
même de v u e , 6c qu’on fait voter par des procurations
non annexées 6C qui n’ont jamais paru.
L e marquis de C a b r is , fa femme
leur enfant fe
trouvent mis tous les trois fous la curatelle d’une'femme
incapable, qui n’avoit jamais géré d'affaires, &L qui avoit
elle-même befoin d’un curateur pour les fonctions qu’oti
lui confioit ; on l’auto rife, non à remettre à ces trois pu
pilles fa fomme arbitrée pour leur fubfiftance, mais à en
faire l’emploi pour eux.
Les votans portent toute leur attention à ménager les
intérêts du procureur qui venoit de défendre à la demande
en interdiction du marquis de Cabris , fon curateur dan?
la minorité , fon procureur fondé depu is, l’homme dépofitairc de toute fa confiance, que les beaux-freres avoient
placé auprès de lui auiîi-tot la mort de fon perc.
L a curatrice eft chargée d’acquitter ce qui eft du à ce
procureur , fans aucun titre. V oilà le premier a£tc de
générofité de la cabale , il en furvint bientôt d’autres.
Le Marquis de Cabris étoit appelant de la fentence
d ’interdi&ion ; pendant qu’il fuit fon appel k A ix , les
portes de fa maifon font enfoncées, en vertu de cc juge
ment rendu fur fon état civil; fes meubles font dilperfés,
fes domeftiques cxpulfés; la curatrice perçoit fes revenus;
le juge dépouillé par l’a p p e l, l’autorife à faire faifir les
prétendus pupilles eu x-m êm es, pour les ramener en fon
pouvoir.
�7
T o u t femble confpirer la perte de l’opprimé , il de
mande à être mis fous la fauve-garde de la Juftice , Ie
Parlement le refufe ; il veut Te faire interroger par un
Com m iflaire de la Cour , ôC n’y parvient qu a grandpeine. U n e ordonnance permet à la curatrice de faire
exécuter par provifion la fcntcnce d’appel , on n’en ex
cepte que les perfonnes. A vec, tant d’avantages on redoutoit encore la défenfe du marquis de Cabris , tant qu’il
auroit fa femme à fes côtés.
Le 1 4 F é v r ie r, au milieu de la n u i t , elle eft enlevée
du lit de fon mari par des cavaliers de m aréchauflee, 8c
conduite à vingt lieues dans un couvent de la M o n ta g n e ,
où toute communication lui eft interdite ; fon mari préfente requête au P a rlem en t, pour qu’elle lui foit rendue,
com m e néceiTaire à fa défenfe; la demande eft jointe au
fo n d : il veut l’aller v o ir , il eft arrêté lui-même par un
huiifier efeorté de maréchauflee , en vertu d'un arrêt de
ce même P arlem en t, qui lui avoit rcfufé quelques jours
auparavant de le mettre fous la fauve-garde de la Juftice.
Sa fille lui eft également enlevée 6c mife entre les mains
de la curatrice. Enfin il eft ramené dans les mêmes mains,
& la mere aiFe£te encore , après c e l a , de faire plaider la
caufe , pour avoir un arrêt confirmatif ; il eft prononcé
le 1 i Avril. Dès ce moment le m a r i, la femme & l’en
fant paiTent, avec leur fortune , fous la puiflance de la
cabale.
Ici s’ouvre la carriere de deux procédés ; la curatelle1
s’étend fur les perfonnes & fur les biens ; le marquis de
Cabris n’étoit pas fou , mais il falloir le rendre tel, pour
prévenir &. empêcher tout retour : on place auprès de lui »
�ê
à i 1 0 0 liv de gages , le nommé A lziary , homme connu
par fa vie fcandaleufe , on lui entretient une table ou
verte pour fes aiTociés , où le maître n’eft admis que
quand il leur plaît. D eu x payfans en fous-ordre , gagés
pour le fuivre dans des inftans de liberté , ont l’ordre trop
fcrupuleufemcnt exécuté , de contrarier fes volontés ; la
moindre réiiftance, le plus leger fouvenir des droits de
fa raifon , font fur le champ punis par des coups i il
pafTe fa vie lié 8c garotté , 8c ne peut obtenir de voir
lâcher fes fers , que lorfqu’il parvient à plaire à cet
Alziary.
Sa mere , trop occupée de fa propre fanté pour le
venir vifiter dans fon ch â tea u , à trois quarts de lieue de
la ville de Gratte qu’elle habite , patte des iix mois fans
le voir.
Livré à des domeiliques qui veulent épargner leurs
peines, il couche fans drap s, & pour groiïïr le bénéfice
de la curatrice , k laquelle les parens avoient déterminé
une penfion fixe , 011 le laitte fans vêtemens , point de
médecin , 6c pour tout chirurgien celui du village, quand
il vient pour le rafer.
La femme initruice du fond de fa prifon , préfente en
1 7 7 9 une requête au Juge, pour faire conftater ces indi
gnités. C e juge prévenu , ordonne fon tranfport à Cabris.
Le jour convenu avec la curatrice , il l’y trouve dînant
avec fon fils; on rettufeite l’homme dont on avoir éclipfé
l’exiftence ; fon dire eft configné dans le procès verbal ;
on met dans fa bouche l’éloge de l ’adminiftration de la
curatrice , Sc on lui fait rejeter avec mépris les fecours
généreux de fa femme.
Leur
�V
L eu r fille u n iq u e , héritiere ci’un nom diftingué & do
de j o o o o liv. de re n te , e'ft mife dans le couvent de
G r a d e , k deux cent livres de peniion par année; fon édu
cation fe borne à quelques mois d ’ un maître d ’ écriture , 8c
aux petits exercices des coilvens de province.
L a femme enlevée dans le tems du procès d’interdic
tion , efl: releguéc dans un couvent où les pendons font
de cent quatre-vingt livres. L a cabale avoit arbitrairement
fixé la ficnne à cent louis > à prendre fur les trois mille liv .
que les parens avoient réglées pour fa dépenfe perfonn elle , 6i que le Parlement a portée à quatre mille liv'.
V o ilà ce que l’on fait à l’égard des perfonnes.
Les gens d’aiFaircs il utiles à l’interdi&ion, reçoivent
bientôt des récompcnfcs proportionnées aux ferviccs qu’ils
ont rendus pour la faire prononcer.1 Ils font mis en pofíe ilion d’ un mobilier de 8 0 0 0 0 livres, ils en difpofcnt
à. leur difcrécion , ils ne font i n v e n t o r i e r que ce qu’ils ne
croyent pas mériter leur attention ; pas un feul titre in
ventorié , les archives immenfes des te rre s, tous les titres
de famille font o m is , cet inventaire cil -figné par lacuratrice 6c par deux parens dévoués qui n’y afliftent ni
les uns ni les autres.
L ts biens font affermés au-deflous de ce qu’en avoic
trouvé le Marquis de Cabris lu i - m ê m e ; on donne des
pots de vin , on paye des termes à l’avance , les baux
font livrés à des fermiers fournis par les procureurs qui
pourfuivoient 6c défendoient l’intcrdi&ion. Les prétendus
parens ayant gratuitement fuppofé qu’il cft dû à l’un
de ces procureurs (le fieur Seytrc), autorifent la curatrice
à vendre 6c à emprunter pour cela ; elle lui accorde généB
�Io
jeufement é i'oo-o Livr , fom m e déléguée aufli-tot par des
mandats acceptés des ferm iers, qui deviennent p a r-ta
débiteurs perfonnels du délégué.
O n démolit des bâtimens faits depuis peu , fous les
ordres Sc fur les devis de cet homme d’affaires.
O n en conftruit de neufs h grands frais.
O n détruit des jardins plantés par le propriétaire avec
foin
5c avec beaucoup
de dépenfe, on en fait des cham ps,
o n ^ e répare rien , on laiiîe tout périr.
L ’anéantiiïement des deux époux prévenoit les incon-?
véniens d’une plus grande lignçc , fie laifloit aux beauxfreres l’efpoir de partager les fubftitutions des biens aux
quelles leurs femmes font appelées ; mais le marquis de
Cabris avoit, ,unc fille , 6c elle pouvoir vivre.
Les beau x->frères renouvellent une prétention de légi
times de leurs fe m m e s , fixées par le reftament du pere
com m un à 8 o o o liv. de fupplémem 3 & que- le marquis
de Q ibris avoit généi-eufement acquittées beaucoup audulà par une fomme. de z o o c o liv. payées en 1 7 7 5 à
chacun d’eux.
L a curatrice fait un compromis avec fes gendres , &
par une tranfaclion elle leur affure dès à préfent une fomme
d’environ 2 0 0 0 0 0 liv . acquittée en partie par des em
prunts s le furplus délégué fur les biens de l'on fils, a,leur
choix.
A v ec 5 0 0 0 0 liv. de revenus dont on faifoit dépenfer
moins de 6 0 0 0 liv. aux propriétaires > fans autres charges
que les engagernens fuggérés par la cabale , on etoit tou
jours à 1 étroit dans l’adminiftration.
Les prix de ferme étoient délégués à l’avancc aux gens
�1I
d’affaires & aux fous-ordre:; la voie des emprunts éroit
é p u ifé e , les billets de la curatrice devenus le rebut de '
la place de GraiTe.
L ’anéantiiTement de la trarrfa£tion paffée entre le rhatquis de Cabris & fes vaiTanx Hu moment de l'interdiCtiOn *
fait efpérer à la cabale une preuve complette de
la
fuppofée démence. L a curatrice n’ofe attaquer directe
ment cet a£te confenti par celui qu’e lle repréfente : on
le fait attaquer par le fermier ; il fuccam be , & lfe Par
lement d’A ix qui avoit reçu la dénonciation doucette
tranfaction comme une preuve de l’aliénation d’efprit
du marquis de C a b r i s , confirme trois ans après ce mo
nument de fa fa g e fle , Sc condamne le fermier à de
gros dommages & intérêts envers la com m unauté; répa
ration que les gens d’affaires , îniligateurs de la démar
che , engagent la curatrice d’acquitter aux dépens du
fonds.
' •
t
T o u t étoit perdu , les deux époux, leur enfant unique
& leurs biens, fi la femme n’eût fait entendre aux pieds
du T rô n e fes gémifTcmens & fes’ cris.
Le Sou verain, dans le fecret de fa ju ilice, charge fpécialcmcnt un m iniftrc(M . Lcnoir, Confeiller d’Ètar) digne
de fa confiance d’être le protecteur du foible, de lui faire
un fidelle rapport des malheurs de la marquife de Cabris.
Elle cft admife , non pas à fe juftifier d’accufations
connues , mais on lui permet de donner le journal de fa
vie ; auili-tôt fa liberté lui eit rendue.
Elle n’en profite que pour fecourir fon mari & fa fille,
pour recouvrer avec eux leur état & leur fortune.
L e moment étoit décifif; il ne reftoit plus à la cabale,
B ij
�11
pour confommcr Tes entreprifes , que de difpofer de cette
fille unique , elle approchoit de fes douze ans ; d ’accord
fur tous les moyens de l’oppreflion , les chefs de la cabale
fe trouvoient divifés fur ce point ; chacun vouloit difpofer de cct enfant ; tous cherchoicnt à fe tromper , la
c u r a tr ic e , fans volonté à elle , recevoir toutes les imprefiions de ceux qui prenoient alternativement des avan
tages fur fes entours.
Les foins & le courage, de la nicre préviennent ce façrifice.
Ses plaintes portées aux pieds du T rô n e , Paine com~
patiflante du Souverain eft émue du récit de tant de
m a u x , fa, juftice eft éclairée par les juges refpcttablcs qui
com pofent fon Confeil ; un premier arrêt ordonne que
le Parlement d’A ix enverra, dans un mois pour tout délai,
les motifs de fes jugemens &: les procédures faites contre
le marquis & la marquife de Cabris.
A rrê t définitif du i 5 A o û t 1 7 8 3 , qui caffe & annulle tous ceux du Parlement de Provence 3 la fentence de.
GraJJe qui prononce l ’ interdiction du marquis de Cabris
notamment l'avis de parens qui nomme la curatrice } enfem ble tout ce qui a pu s'enfuivre ù s'en ejl en fu iv i, ordonne que de l'ordre exprès de Sa M a je jlé 3 le marquis de
Cabris & la demoifelle de Cabris f a fille feront amenés dans
cette ville de Paris
le pere 3 pour être mis dans une
maifon de fa n té du choix de Sa M a je jlé , & la fille 3 dans
le couvent de Bon-Secours.
Sur la demande en interdiction , originairement formée
par la mere du marquis de Cabris contre fon fils 3 les
Parties renvoyées devant M . le Lieutenant C iv il du Châ-
�15
-telet 3 f a u f Vappel au Parlement de Paris 3 ou. lefdites
deux dames de Cabrif j belle-mere ô bru 3 formeront telles
demandes qu’ elles aviferont 3 toutes les chofes demeurant
en état.
C e t a£te de la bienfaifancc & de la juftice du plus
clément des M o n a r q u e s, uniquement occupé du bon
heur de Tes fujets , n’attere pas la cabale.
L e iieur Seytre écrit le 2 7 A o û t 1 7 S 3 à celle-même
qui avoit obtenu cet a& e de jufticc :
Q u e la dame Lom bard en a reçu la nouvelle de
M . le marquis de M ir a b e a u , avant que perfonne en aie
été inftruit dans le pays x
E t qu’ i l lui mande 3 ne vous alarme\ pas 3 madame ,
fu r cet événement 3 c’ efl un arrêt rendu fu r requête fans
vous entendre 3 & une fimple oppofition de votre part en
fu fpen d l ’ exécution.
L ’officier chargé de l’exécution de l’arrêt du Confeil trouve la demoifellc de Cabris n’ayant pour tout linge
que quatre chemifes 3 fans coiffure & fans jupes , avec la
feule robe de toile qu’elle avoit fur le corps.
Les ouvriers travaillent toute la nuit pour finir le feul
habit que le marquis de Cabris ait apporté : on y joint
d ix-n eu f chem ifes, il n’avoit ni mouchoirs ni bas. L ’offi
cier ne peut obtenir pour lui Sc pour fa fille , qu’ on leur
f&urniffe le linge dè h t & de table dont ils vont avoir
befoin.
L ’arrêt du Confeil des dépêches ordonne que les frais
de tranflation feront pris fur les biens du marquis de
C a b r i s , fa fubfiftance, celle de fa fem m e & de leur fille
�14
doivent aufli leur être fournies des memes f o n d s , tous
fans exception , entre les mains de la curatrice ; l ’officier
chargé de l’exécution de l’a r r ê t , la fomme inutilement
de facisfaire à ces devoirs que la nature lui im p o fe , que
la juftice exige de ceux qui ont entre les mains les biens
des autres, ÔC que l’arrêt mis à exécution , ordonne précifémenr.
A v e c un mobilier de 8 0 0 0 0 liv. paiïe entre les mains
de la cu ratrice, plus de 3 5 0 0 0 0 liv. par elle touchées
des revenus des biens pendant les fept années de fon
ufurpation , elle ne peut fournir les frais de tranflation ,
elle a difpofé du linge même trouvé dans la maifon de
fon f ils , elle ne peut pas en donner pour l’ufagc indifpenfable des propriétaires , elle refufe de quoi payer le
premier quartier de leur penfion.
Il 'faut qu’ une femme , qu’ une mere infortunée , le
jouet des perfécutions & de la tyrannie de la cabale ,
luttant depuis Jept ans contre la tyrannie ëc l’injuftice ,
épuifée à pourfuivre des fantômes oppreffeurs difparus
dès qu’elle a pu les faiiir , il faut qu’elle avife aux frais
de tranflation de fon mari & de fa fille , il faut qu’elle
feule les pourvoyc de linge de toute efpece , qu’elle les
habille , qu’elle les meuble , qu’elle les nourriiïe , ainiî
qu’elle-même , qu’elle procure au perc les fccoursde fanté
qu’exige fon é t a t , ôc à fa fille l’éducation dont fon âge
eft fufceptiblc , fur la feule relTourccf'dc íes amis ôc d ’em
prunts trop multipliés pour n’être pas onéreux.
S'il pouvoir encore refter quclqu’apparcnce de réparer
promtement les vides ! L a curatrice a reçu d ’ avance deux
années du prix des fermes , elle a enlevé du château le
�M
peu de meubles qui y reftoient, les maifons de ville
de campagne font dévaftées.
L a vaiiîelle d’argent efl mife en gage, il n’y a pas j u f
qu’aux boucles d’or de Ton fils qu'elle n’aie arrachées defes pieds la veille de fon déparc, & qu’elle a vendues pour
venir le pouriaivrc en cette ville ( i ).
Les Parties renvoyées à un nouveau T r i b u n a l, la ca
bale y reprend fes anciens erremens ; une femme feptuagénaire quitte pour la premiere fois fa retraite , à deux
cent lieues de la capitale ; y vient-elle apporter du pain
aux opprimés qu’elle en prive depuis long-tems? Non ,
elle annonce des avances dont elle demande le rembourfement par privilège fur les rentrées échappées à la vigi
lance de fes agens ; y vient-elie donner à fon fils des
fecours de fanté ? 'Elle ne le voit que pour renouveler à
fes organes la réminilccncc des mauvais traitemens exercés
contre lui , elle fe fait accompagner du iicur A lziary qui
en a été .l’i-nftrumcnt ; amené à grands frais en cette ville
pour reprendre fon c a p t i f , pour le rejeter dans les fers
que l'humanité d’un M onarque bieiifaifant a brifés.
Si l’on défefperc de cet avantage , on peut au 'moins
s ’en ménager d’autres , à la faveur de l’afcendaot qu ’une
longue c i cruelle habitude procure iur I’eiprit de ceux
q u ’on a tenus fous fa loi : on peut furpremlre au marquis
de Cabris un arrêcé de compte qui couvre les vices de
l’adminiftration ; on peut extorquer fon confcntemcnt à
la difpofition déjà projetée de fa fille unique.
( t ) C ’ cft le fieur R a b a is , o rfeyrc Je G r a llc , qui les a achetées depuis le dépare
«lu marquis de Cabris.
�TS
U n e affemblée de famille eft indiquée chez le M ag iftrat le 2 o D écem bre; des parens &. am is, illuftres par
leur naiflance , diftingués par leurs grades 6c par les
places qu’ils o c c u p e n t, démontrent l’oppreffion exercée
par la cabale : les interrogatoires du marquis de Cabris
devant les Juges de Provence, les dépofitions de témoins
refpe£tables entendus fur les lieux , les actes paifés par le
prétendu malade dans le tcms même des pourfuites, pour
le faire déclarer en d é m e n c e , font mis fous les yeux du
Juge ; on d é velo p p e, on rapporte les preuves des mau
vais traitemens exercés fur la perfonne : les actes multi
pliés des abus de l’adminiftration de la prétendue cura
trice font repréfentés, elle eft forcée d’avouer la difperfioa du m obilier, la difpofition à fon profit de la vaijjellc,
d ’ argent 3 jufqu’à la vente des boucles d ’ or de fon fils. O n
lui repréfente les quittances de ces recettes anticipées ,
toutes les voix s’élevent pour la forcer à donner des alimens aux propriétaires de ç o o o o l i v . de re n te , dont les
revenus font encore dans fes mains , tous les vœux fe
réunifient pour la priver de ce refte d’une ufurpation
anéantie par l’arrêt du Confeil des D épêches du i 5 Aoiic
précédent.
Le Magiflrrat nomme un féqueflrc pour la réception
des reven us, fon ordonnance en dirige l’application à la
fubfiftance du marquis de Cabris , de fa femme 3c de leur
enfant.
C e t a£tc de juftice ne remédie point à leurs maux , les
revenus font reçus d’avance , des faifies fur ce qu’on n’a
pu toucher, faites par les membres de la cabale entre les
mains des fermiers dont les baux font an éan tis, mais qui
continuent
�r
17
continuent k percevoir les fruits dans l’anarchie ; des
délégations fur ces mêmes baux laiiTent le féqueftre fans
fon£tion.
L a cabale qui veut rétablir le défordre , fait paroître,
fous le nom d e là curatrice , une confultation im prim ée,
répandue avec profuiion , dans laquelle on fuppofc un
conflit entre la mere & la femme du marquis de C a b ris ,
pour la préférence de fa curatelle, queilion vraiment fupp o f é e , puifque la femme combat depuis fept ans de T r i
bunal en tribunal, 8c foutient que fon mari n’a jamais
été dans le cas d’être interdit, qu’ il n’eft pas encore dans
ce c a s , malgré les mauvais traitemens exercés fur fa perfonne pour aliéner fa raifon.
Enfin la cabale voyant échapper de fes mains 8c la
curatelle que l’arrêt du Confeil a caiFée, 6c l’adm iniftration des biens qui l’occupe bien d avan tage, 6c l’cfpoir de n’avoir ni l’un ni l’a u tre , par l ’état de fanté du
marquis de Cabris , par le vœu unanime des parens ÔC
am i$, par les preuves rapportées des traitemens exercés
fur la perfonne du malheureux pendant l’ufurpation , 6c
des
abus
encore
plus énormes dans
l’adminiftration
des biens ; la cabale n’a plus connu que les mouvemens
de la rage 6c du défefpoir contre celle qui éclairoit fa
conduite pafïee , 6c qui anéantifloit fes projets pour l’a
venir. U n libelle affreux de 69 pages eft imprimé 6c d is
tribué avec profuiion ; tout ce que la malignité , le
m en fon ge, la calomnie la plus atroce peuvent enfanter
y efl: prodigué contre une femme qui arrache à la cabale
fes vi£limes.
Ses mœurs y font attaquées par les calomnies les plus
C
�i 8
.baffes. & les plus viles : les a£üons les plus innocentes de
fa-vie y font empoi-fo-nnées , >fon honneur & fa réputation
y font déchirés , les fafifications d’écrits confignés dans
des regiftres publics , les altérations d ’écrits particuliers
pour leur donner un fens tout combiné &. convenable à
la malignité des calomnies grofiieres dont le libelle cfl:
tiffii y font prodiguées. O n y joint la difcufïion du procès
d’intcrdi& ion, dont tous les actes font anéantis par l’arrêt
du Confeil des Dépêches du i 5 A oût 1 7 8 3. C e m ém oire,
ians p ro c è s, fans con tcftation, fans P a rties, fans autre
objet que la diffam ation, cft fuivi de la confultation ré
pandue un mois auparavant fur la queftion de préférence
pour la curatelle de l’interdit entre la merc de la fem m e,
queftion qui n’eft préfentée nulle part dans ce mémoire ,
que n’ont jamais vu les Jurifconfultcs qui ont iigné la
confultation.
A près ce tableau des perfécutions qui ont détruit ma
m aifon, l ’exiftence de ma fam ille, & qui ont ruiné notre
fortune, je prends la plume pour ma défenfe pcrfonncllc,
mon mari a été privé fept ans de fa liberté civile , il s’eft
vu enfermé en chartre privée dans ia propre maifon , expofé aux plus vils traitemens, dénuée du néceffaire le plus
indifpenfable.
J ’ai été enfermée trois ans dans un cou ven t, fans cornmunication avec ma famille 8c mes amis ; notre fille ,
dans l’âge le plus tendre , a été abandonnée fans fecours
& fans foin , & quand j ’obtiens ma liberté , que je la
procure à ces deux infortunés , victimes de la cabale ,
quand je parviens à dévoiler fes noirs c o m p lo t, je vois
mon honneur , ma réputation attaqués par un m é
�i,9
moire calomnieux , où coure ma famille cû: diffamée.
Je commence pitr établir fur les preuves les moins
équivoques &: connues des auteurs mêmes de la.calom nie,
la fauil’e té des imputations. Pour mettre; de l’ordre, dans
ma déferife , pour éviter le défordre ail celé de nos. ptr.-féc uteurs, je diviferai par fàics leurs imputations abomi
nables , 6c je joindrai mes preuves fur chaque faitJe me vois forcée de nommer plu fleurs perfonnes dans
m a justification, & de donner des copies 6c des extraits
de leurs lettres;, leurs noms tcfpc£lablç.s donnent de nou
velles forces à mes m oyens, je ne les cite-que quand leur
témoignage m ’eft néceffaire, je n’emploie de leurs écrits
que ce que je ne pourrais omettre fans aff.oi.blir ma. de*f e n f e , & c’eft toujours avec les ménagemens dûs à leur
naiffance & au rang qu’ilis occupent dans le mondes
■
'
Si je jette en,fuite un. coup d’œil fur. la difcuiîion de
l'affaire , de l'interdiction anéantie par l'arrêt du
1y
A o û t dernier, ce ne fera que pour développer davantage
les complots de la cabale qui nous p crfécu te, pour dé
montrer qu’elle ne s’efl; jamais étayée que fur le menfonge
& fur les fuppoiitions les plus révoltantes.
P R E M I E R
F A I T .
« L ’ hôtel de Grajfe placé dans le plus beau local
fj
>j embelli de tout ce que M M . de Cabris avoient cru
» propre a en fa ire un féjou r agréable, ne lui parut pas
53 ajje\ vajle s i l fa llu t cùnfiruire & vetfer, fuivant l ’ ufage
>3 des A rtifies en ce genre, z o o 3o o o livres au lieu de
»
i o o , o o o liv. qu'on avoit projeté d'employer ’>.
L a maifon paternelle étoit occupée par la dame de
C ij
�£
Lom bard ,
laifle par
&
douairiere de
6
Cabris. Son mari lui avoit
teilament la jouiflance d’un ap partem en t,
elle l’occupoic prefque tout entier.
L a déférence du fils pour fa mere , rem pêchoit de
la reftreindre à ce qui lui étoit réfervé. Les influences
de la cabale naiflante fur
Pcfprit de mon
mari , le
portèrent à en faire conftruire un autre. Q uoique bien
jeune encore, je prévis l’énormité de la d é p e n fe, & je
m ’y oppofai ,
mais inutilement ; j’en écrivis à mon
pere , &C voici ce qu’il me répondit par fa lettre du
a Février 1 7 7 3 .
» A l’égard de votre bâtiment ,
on dit qu’il faut
w une fois en fa vie faire une folie , c’en eût été une
» plus tard , au lieu qu’a préfent c’cft jeter la go irme
» de la jeunette à bon marché fur un fonds , & d’une
n
maniéré bien folide ; au
refte j ’ai
apperçu qu’en
53 qualité de voifin de l’Italie , le goût de bâtir étoic
» celui du pays.,; au fond , cela me paroît tout fim ple,
»> à G ra d e , où chacun conftruit fes propres fonds ;
» Q u a n t à moi parernellement p a rla n t, j’aime mieux
« que Cabris bâtille que s’il péroroic à l’hôtel de ville
»
d’A ix »3.
Que
réfultc t-il
d e - l à ? U n e dépenfe confidérable
pour mon m a ri; pour fa m e re , la jouiflance où elle eit
encore d’une maifon où elle n’avoit droit qu’à un petit
appartement ,
àc
pour
la cabale qui
fc
formoit ,
l ’expérience de ce qu’elle pourroit ofer par la fuite.
Si j ’avois eu fur mon mari dans les commencemcns
de mon mariage , l’afccndant qu’on me fuppofe , née
& élevée à P aris, nouvellement tranfplantéc en province,
�a u r o is -je balancé un inftant entre le féjour de Graiïe
& celui de la C ap itale, où notre fortune & les attenanccs
de ma familie nie promettoient une exiftence agréable.
D E U X I E M E
F A I T ,
I l parut en 1 7 7 4 , des affiches imprimées contre des
perfonnes de la plus haute conjîdération
qui furent fuivies
d'informations, décret de prife- de-corps
& tout l ’ appareil
de la procédure criminelle. I l ejl d ity page 6 du Mémoire
que le marquis de Cabris n ’ étoit pas l ’ auteur de ces
couplets y mais qu’ i l avoit eu la foibleffe de f e prêter a
l ’ exécution du com plot, & on ajoute de fu ite a. la page 7
qu’ i l s ’ étoit laiffe entraîner par fon epoufe qui avoit cherché
a exercer f a vcngeance perfonnelle & celle de fa fociété de
Poetes.
On a tranferit pour le prouver des fragmens de lettres
qu’ on dit écrites de moi , & qu’ on refufe de repréfenter.
'
A la page 1 3 , ligne 1 4 ,0 / 2 dit 3 que j e ne craignois
pas-feulement les foupçons , mais les preuves ; à a la page
6 8 j i l ejl dit , que f i on fe reporte en 1 7 7 4 3 mon
imprudence attira fu r la tête de mon mari un orage terrible
où j e rifquai d'être compromife encore plus que lu i 3f i j e ne
parviens a étouffer les progrès de la procédure criminelle.
Je laiiTc h. M. le Marquis de V a u vcn a rg u cs, ch ef de
la maifon de mon m a ri, & à M . de G r a s , fon beaufrcrc, la réponfe à cette imputation.
V o ici ce que le premier écrivoit au M arquis de Cabris
le 1 5 M ai
1774.
» V ous aviez raifon de croire , Monfieur mon cher
�11
» cou fin , que je ferois étonné 8c fâche de votre aflaire ,
» 8c que je ne négligerois rien pour la faire finir. M . de
» C alvi m ’a dit vous avoir envoyé h i e r , par M. de
» Briançon, les lettres d’ap pel, Il la procédure cil caffée,
»
comme je l’efpere ,
les prifonniers feront élargis;
« profitez de ce premier moment fans délai , pour les
» faire paffer en Piémont ou en Italie ; ces témoins
font les feuls qui puiiTc dépofer contre vous ; il cft
» inutile que je vous dife combien cette affaire m’afflige,
»
8c combien je la trouve humiliante pour vous............
J’étois alors venue à P a r i s , pour implorer les fecours
de mon p erc, dans une affaire qui compromcttoit mon
mari.
V o ic i cc que le Marquis de Vauvcnargues m ’écrivoic
à moi-même à Paris , le i 6 M a i 1 7 7 4 .
*j Vous ne devez m ’adreffer , ma chcrc cou fine,
» aucun rem erciem ent, des foins que je puis me donner
» pour l’affaire de votre mari ; on a ici une minute de
» la procédure fur laquelle M. C a l v i , bcau-frerc d e M .
« le Procureur G énéral, a confulté les trois plus fameux
» A vocats qui unanimement ont été d’avis d ’appeler
» des décrets, 8c de tout cc qui a été fait. M . C a lvi
» a levé ces lettres d’appel 8c les a envoyées à M . votre
« m a ri, par M . de Briançon; j ’ai écrit fur cela à M .
« de Cabris , que fi la procédure eft cafféc , les prifon« niers feront fur le champ mis en liberté ; je lui écris ,
a & lui répété plufieurs fo is, que lorfque les prifonniers
m feront élargis, il ne doit épargner, ni peines, ni
» argent , ni a&ivité pour les
faire paffer en pays
» étranger ; ces prifonniers font les feuls témoins qui
�¿3
« puiiïent dépofer contre lui , s’ils difparoiiTent, tout eft
dit en notre faveur (i ).
L e Marquis de Vauvenargues lorfqu’ il
écrivit
cette
lettre , ne foupçonnoit pas que cette expreflion d’intéiêc
le rendroit un jour aux yeux de ma bcllc-mcre , tout
au
moins complice d ’un complot dont il cherchoit à
détourner l'effet de deiTus la tête de fon parent.
Il écrivoit à M . le Marquis de Cabris lui-même , le
16
Juillet « je vois avec douleur que les voies
de
m conciliation pour l'affaire des placards font épuifées.
» L ’obftination de M . de Pontevès a rendu inutiles
>3 celles même qui paroiffbienc les plus affurées. Il veut
»3 un arrêt; je prévois qu’un arrêt ne peut être que bien
» fâcheux pour vous. M .P a z e ry , A vocat le plus célébré que
» nous ayons pour la confultation., homme cftimé autant
par fa p ro b ité , que par fes lum ières, m’a d i t , M.
» le marquis de Cabris , doit mettre la main fur la confm cience , s’il cit innocent, il faut qu’il refte tranquille...
Il m ’écrivoit à moi , le 2 4 Juillet « après la lettre
que vous m’aviez fait l’honneur, ma chere cou line ,
v* de m ’écrire le 1 o de ce m o is , j’étois tranquille fur
»3 le fort de mon cou iin ; mais cet état d’affurance cil
(1) O n fem ble à la page 7 , avo ir voulu tirer des preuves d’ inculpation de ce que
clans les lettres q u 'on m e fuppofe , je parle de cette affaire en nom c o lle & if ; v o ilà
le M arquis de V a u v e n a rg u e s fe fervant des mêmes cxpreflïons ; dans la lettre que
je cite quelques lignes plus b a s , on y lit » nous fommes aiTujetis aux réglés
« de la ju ftic e , tous nos foins* toutes nos démarchés j doiven t aboutir à to u rn er
* les choies de façon que ce (oit nos parties qui fafl'ent les fa u te s , & nous four« nifTtnt des c irc o n ft a n c c s h eu reu fes , dont il faut être a tte n tif de p ro fite r , en nous
» conform ant toujours à la rcgle : voilà notre tâchc.
�*4
»> bien changé depuis la le& u re de la vorte du 2 1 , Ton
»
état m’a fflig e , &c je le crois dans le plus grand d a n g e r ,
>3
pour ne pas fuivre vos avis ôc ne pas vous don n er
«
fa confiance , qui vous cfl: aquife par des titres il
«
refpcctablcs. D a n s cette fituation des chofes , je ne
»
vois pas , m a chcrc coufine , ce qui peut vous refter
»
à faire que vous n’ayez déjà fait.
L a cabale
bcau-pere
qui s’étoit form ée dès la m ort de m on
, pour nous
défunir
8c
nous
d é p o u ille r ,
profitoit de tous les événemens.
M . le M arqu is de V au vcnargu es m ’écrit le 20 A o û t
I?74'
»3 C e n’e f t , ni votre faute , ni la m ie n n e , fi d’autres
>3 confeils ont prévalu ; il ne refte plus que des précau>3 tions à p r e n d r e .............vous en a v e z propofé , j’en ai
»
propofé aufîî ,
on veut en fuivre d ’autres. O n rend
»
fufpetb à votre mari tout ce qui vient de v o u s ..........
33 Je prends donc la liberté , m a cherc coufine , de vous
33 confciller de refter en repos, 6c de ne plus vous mêler
>» de cette affaire, parce que tel bon parti que votre mari
>3 pourra
prendre , on
le lui fera éviter s’il vient de
»3 vous ÿ fi les chofes réuiTiHent, com m e on le lui fait
3
j efpercr , tant mieux , fi au contraire elles m anqu ent y
>3
votre
mari reconnoîtra alors qu’on l’a trom pé , Sc
«
reviendra à vous avec plus de confiance que jam ais.....
»
Je vous confeillcrois moins l’ina£tion , fi je ne voyois
>3 contre vous que des gens en fous ord re; mais dès-que
>3 la fa m ilU s'en m êle, refle^ en repos , s ’ i l efi pojjible ,
>3 fà n s cela on rejetera fu r vous tous les mauvais fuccès.
M» de G r a s , C o n icillcr au Parlem ent d ’A i x , bcaufrere
�frere de mon m a r i , lui écrivoit le 3 1 M ars 1 7 7 6 .
« Je ne vous répété pas ce que je vous ai die pour
' } finir cette malheureufe affaire , qui afflige véritable”
ment toutes les perfonnes qui vous appartiennent ;
» vous croyez 6c je le crois auiîi , qu’il n’y a pas allez
« de charges dans la procédure; mais je ne voudrois pas
» pour tout au monde courir le rifque d ’être jugé dans
» une affaire de cette nature , d ’autant plus que vous
» ne pouvez pas vous diflimuler qu’il y.a des préfomp« tions fi fortes que les Juges pourroient les regarder
» comme des preuves ; j’ai vu juger pluficurs fois des
»» aff aires criminelles fur des préem ptions moins fortes;
» croyez-en une perfonne qui a trente ans de fervice,
« 6c qui vous cil attachée par des liens trop forts pour
»
»
»s
»
avoir d’autre objet que votre avantage. Réfiéchiflez
bien , mon cher frere, fur l’avis que je vous donne ,
6c croyez qu’il n’eft di£té que par le véritable intérêt
que je prends à vous. C e t intérêt eft éclairé par une
« longue expérience qui m’-a appris qu’il n’y a rien de
» sûr au Palais.
La même lettre en contient une autre du Marquis
de VauvCnargues , pour engager mon mari à la conci
liation.
A ces témoignages je peux joindre celui dc >M. le
Marquis de Mirabeau mon perc , fur la même affaire.
Par une lettre du i
Juin i 7 7 4 > ü me marque que
dans cette affaire je dois nie conduire par les confeils
des parens de mon m ari, 6c entr autres de M . de V au vcnargues : 6c il ajoute » fi quelqu’un y récalcitre , il
faut lui donner la peur , pour qu’il gagne la M o n t a g n e ,
D
�26
m & laide fa procuration ; au refte il eft certaines gens
» qui ne trouveroicnt pas bon certaines retraites ; vous
m
m'entendez.
Par une autre lettré du
1 8 A o û t fuivant , il me
marque » M . de Cabris eft trop malheureux pour qu’il
» me foit permis de le blâmer ; d’ailleurs, je ne mç
« fuis jamais guere exercé en ce genre ; plus nos devoirs
« font pénibles , plus ils font impérieux , & fi M . de
« Cabris fe refufe à ce qui eft dû à fa perfonne , vous
»» ne pouvtz remplir les vôtres envers lui qu’en faveur
■
» de fa maifon ; je ne fuis point furpris que la caraf
es trophe s’ avance , il feroit plus que tems qu'il fongeâc
m à fa perfonne. M. de Vauvenargues m ’a mandé & dit
>4 que la famille dévoie être contente de vous ; je n’ai
« en ma vie qu’une méthode pour fixer les incertitudes
« qui fe préfentent plus abondamment aux têtes vives ;
« c’eft de me dire , où donc eft le devoir ? Marchons ;
« mais v o j s n’en êtes pas encore là.
Il m’écrivoit le 4 Septembre » tout innocent qu*eft
» M- de Cabris , êc je le crois en vérité beaucoup , le
>j hafard fculpourroit alarmer tout autre moins intrépide;
»» e n fu ite , qu’un Homme puiiTe vous affirmer comment
» un aut.e jugera.
M on pere croyoit que mon mari n’étoit pas coupable ,
8c affùrément il ne l’étoit pas , fes Advcrfaires ne l’ont
jamais cru tel ; il eft de notoriété que les couplets dont il
s’agifloit dans le procès, avoient été envoyés en manufcric
à. M- l’A bbé de Pontevès , l’un des offenfés dix ans
auparavant , dans le tems où mon mari étoit au Collège
& moi au Couvent. Les offenfés ne cherchoient dans
�la vivacité de leurs pourfuites que la découverte des
véritables auteurs dont ils croyoient que mon mari p o u
voir avoir quelque connoiflance:.
Je n’ai pas befoin d’autre preuve de l’innocence de
mon mari ,
que l’accommodement fait par M M . de
Pontcvès(, quand ils ont déïefpéré de trouver les vrais
coupables.
En faut-il un autre témoignage ? M . le Marquis de
Pon^evès, homme d ’une naiflanceilluftre3 & en poiTcffion
de la confidération due à fon rang & à fon mérite perfo n n e l, efl: parent de M. de Cabris , il habite la même
v i l l e , il avoit eu contre lui le procès des couplets deux
ans auparavant : la cabale qui fe réunit pour nous perdre
en 1 7 7 7 , n ’ofa jamais invoquer fon fuffrage ; il fut fi
révolté des moyens employés pour nous détruire l’un èc
l’autre , qu’en 1 7 7 9 , il fe joignit aux parens qui firent
des repréfentations au miniftre du R oi fur les excès
dont mon mari Sc moi étions vi£bimcs ( 1 ).
Q u ’on juge à préfent les motifs des auteurs du M é
moire dans les fragmens fuppofés de mes lettres copiés
à la page 7 ; qu’on juge l’intention dans leurs afTertions
des lignes 7 & 1 9 de cette même page , où il cil d i t ,
que ces lettres prouvent de.quclle terreur j ’étois agitée
pour m o i-m ê m e , &C que je gardois encore moins le voile
dans celle écrite à la dame de Lombard , parce que je
parle de cette affaire en nom collectif , & comme par
tageant avec mon mari les fuites qu’elle pouvoit avoir.
( i ) Placct de fam ille dépofé chez M e Pizcau , N o taire à P a r is , le j o Ar r i l 177?-
D ij
�i 8
O n a eu encore l’infidélité de tronquer cette phrafe
de ma lettre , où après avoir parlé d’ une affaire qui fait
des principauxhabitans.de. Graffemes ennemis ; » j ajoute
”
je ne peux plus rien cfpérer de la coniidération qu une
» femme cire ordinairement de fon mari.
Je fuis bien éloignée d’envier à madame de Lom batd,
le mérite d’avoir terminé cette affaire malheureufe ; mais
jamais elle ne l’a connue que par les bruits p ublics;
jamais elle n’a fait aucunes démarches pour fon fils. Dans
cent lettres que j’ai des différens parens ou autres perfonnes à. qui je me fuis adrefféc alors , on ne trouvera
fon nom nulle part ; j’ai encore une lettre d’elle à fon
fils du 10 A vril 1 7 7 6 , lorfqu’il éroit à A i x pour termi
ner cette affaire ; la premierc qu’elle lui ait écrite depuis
fon départ de Graffe , où il n’en cft pas feulement
queilion.
M o n pere m’écrit le 1 o Juin 1 7 7 4 « le fait eft que ou
« vous êtes les coufeils de M . de Gourdon x Si à A ix ,
» £c dans la Province , ceux de M . de Vauvenargucs.
»3 V o ilà quelle doit être votre bouffole, 8c votre affaire
» eft d ’être le point de raliement & de réunion de leurs
» correfpondances.
C e furent en e f f e t , M . de la T o u r , premier Préfidcnt ,
èc M .
de Caftillon , Procureur .Général du
Parlement d’A ix , qui voulurent bien en être les arbitres,
mais ce ne fut point à la follicitation de la dame de
Lom bard, cômme on le dit à la page 8 du Mémoire ;
j’oppofe -à cette affertion deux témoignages qu’elle ne
reeufera certainement pas M . de Gras , fon gendre *
&
M.
de Vauvenargucs , dans leur lettre écrite fur
�1 9
l'a même feuille le 3 1 Mars 1 7 7 6 " , déj«\ c it é e ; voici
comme le premier s’en explique ; » je crois devoir vous
» inftruire , Monfieur &C très-cher frere , de ce qui s’efk
» paile depuis peu de jours , au fujet de l’affaire des
3» placards ; M. de la T o u r ôc M . de Caftillon , ont bien
» voulu d ’ office y ô fans que perfonne les en eût priés ^
agir auprès de M . de P o n te v è s , pour l ’£ngager à
« donner fon confentemenr pour finir cette a ffa ire, par
m
l’arbitrage de quelques Gentilshommes ou Magiftrats.
M . de Pontevès a conicnti enfin d’arbitrer; il a prié
>3 M . de la T o ur de vouloir bien être un des arbitres ;
» M . de la T o u r nous a ch argés, M . de Vauvenargucs
>» &
moi , de vous écrire, pour demander votre confcn-
» tement à cet arbitrage.
O
Le marquis de Vauvenargucs m ’écrit le 2 6 Juin Aiivant n j ’ai l’honneur de vous féliciter , madame ma
» chere coufine , l’affaire de M . Cabris a été finie hier,
si La procédure a été ca'flee du confencernent de toutes
» les P a rtie s , entièrement an éantie.........Ces M M . ont
»
donné hier leur d é p a rte m e n t, & tout e ft, dieu merci ,
»3 terminé.
T R O I S I E M E
«
F A I T ,
p. 9 , alineâ, Iig. 3.
M . de Villeneuve , homme d ’ une tiaiffance & d'un
>3 mérite dijlingué 3 baron de Mouans } & Sénéchal de
»3 GraJJ'e
,f e plaignit d'un affaffinat prémédité fu r f a per-
» fonne ; le Parlement d 'A ix prit connoiffance de cette
»» affaire 3 & nomma des Juges a Grajfe • la procédure
>3 fu t
inflruite , & des decrets lancés y le
�yo.
» décrété de prife-de-corps prit la fu ite ; on ménagea la
»»foiblejfe de fe s complices. Madame de Cabris & madame
» de La Tour Roumoules , qui ne furent décrétées que d'afm figné pour être ouïes , & un Jîeur Briançon 3 d ’ ajourne» nement perfonnel; le procès f u t réglé a l*extraordinaire ,
» on récola s on confronta les témoins, & les accufés préfens
m ejfuierent toute l ’ humiliation de cette injlruclion crimim nelle. Sentence le
z Octobre
i 7 7 6 , qui juge les
contumax & les coaccufés ; fentence qu’on donne en
guillemets comme copiée fur la grotte à la page
1 o du
/Mémoire (1).
Q u i ne croiroit à cet expofé que le quidam dont on
laitte le nom en blanc , décrété de prife-de-corps , 8c
ayant pris la f u i t e , eft un aflaflïn à gages , amené pour
commette le crime , 8c qui s’enfuit fans être connu »
quand il a manqué fon coup ; il eft pourtant vrai que
ce
particulcr dont le nom eft ici laitte en blanc par
affectation , eft le comte de Mirabeau mon frere aîné,
que le comte de-Mirabeau eft le feul qui ait eu querelle
& prife avec M . de Villeneuve enfuite de relations an
térieures entr’eux.
Il eft certain encore que le comte de Mirabeau a été
décrété fous fon nom de K iclor de Riqueti 3 comte de
Mirabeau 3 qu’il eft nommé pluficurs fois dans la fentence, 8c qu’il demeuroit alors avec fa femme 8c fa famille
(1) Il eft bon d'obfcrver que la prétendue connoiiTance que le Parlement d 'A iï
prit de cette a ffa ire , ne fut que de commettre un Juge de la T«rre de l’accufatcur,
parce que « u s de Gratte refuferent d'en connoître.
�31
îi M anofque , à vingt lieues de G r a iïe , où cette procédure
s’inftruifoit.
il cil éga’cment certain 6c prouvé par un certificat du
Greffier de GraiTe ( 1 ) donné le i 4 Février dernier , que
jamais la fcntence n’a été levée, ni les droits payés. La
copie qu’on a affecté d’inférer dans le Mémoire , cil
altérée de falfifiée dans les vues de fon auteur.
A v a n t de difeuter cette fen ten ce, ce les conséquences
qu’on en veut t ir e r , je vais rendre compte des faits
généralement connus dans toutes nos familles 6c dans la
Province entiere.
Le com te
de M irabeau , mon fere , éto it exilé à
M anofque , d’ordre du R oi.
A u mois d’A o û t
1 7 7 4 , il vint au Château de Tou-
rettes , voifin de Grafle de deux lieues , pour traiter
du mariage de M . de Gaffaud,gentilhomme de M anofque,
avec mademoifelle de Villeneuve Tourettes. Je ne le
vis qu’à fon retour. Il étoit intéreiïant qu’étant réfractaire aux ordres du R o i , il ne fe montrât pas à GraflTe ,
je le menai dîner à la campagne chez madame de la
T o ur ma parente.
M adam e de Villeneuve & madame de la T o ur font
feeurs, com m e héritieres de M . le baron de G r a d e , leur
pere ; elles ont partagé les terres de Mouans Sc de Sartoux cù elles demeurent toutes les deux ; leurs habitations
ne font féparées que par le grand chemin , & leurs
domaines font extrêmement rapprochés.
(1) NM. dis pi««* juiUfiiatius.
�3*
Le dîner fut fervi , attendu la chaleur de la faifon ,
ious une allée de marronniers d’un pavillon de madame
de la T o u r ; nous étions huit à table , madame de la
T o ur 6c mesdemoifclles Tes filles "au nombre de trois ,
dont la plus jeune avoit alors douze ans , M . de Briançon
neveu de madame de la T o u r ,
le comte de M irabeau;
j ’y avois ma fille avec Tes bonnes, cinq ou fix domeiKques nous fefvoient.
A
la fin du dîner, à trente pas de n o u s , parut un
homme couvert d ’un paraiol qui venoit voir travaillée
des ouvriers.
M . le comte de Mirabeau demanda qui c’étoit, quel
qu’un dit que c’étoit M . de Villeneuve ; il I’avoit vu
chez M. le marquis de V ence , 8c croyoit devoir s’ex
pliquer avec lui fur quelques objets qui leur étoient
perfonncls. Le comte de Mirabeau fe leve de table , 6c
fa ferviette à la main va joindre M . de V illen e u ve , en
préfence de dix ou douze ouvriers que ce dernier faifoit
travailler ; l’un èc l’autre étoient fans armes ; ils cauferent quelque tems cnfcmblc fous le parafol de M. de
Villeneuve en continuation de promenade; la converfation
s’échnufla , les paroles devinrent plus élevées, «5c la rixe
fut pouflec encore plus loin.
Le comte de Mirabeau revint coucher à G rade , 5c
repartit le lendemain pour Matiofque. M . de Villeneuve
crut devoir
rendre plainte de prétendus excès , il y
comprit madame de la Tour fa belle-fœur, avec laquelle
il plaide depuis vingt ans. L ’honneur que j’avois d’êrre
avec elle me valut au(lî un rôle dans cette accufation de la
part d’un gentilhomme que je ne connoidois pas , ■.&
que
�33
que je n’avois vu qu’une fois, lors de mon mariage.
J’ai la preuve de tous les faits de cette hiftorique ,
puifqu’on me force de le publier.
Preuve que le comte de Mirabeau étoit à M anofquc
d ’ordre du R o i , l’ordre lui-même.
C e t ordre connu dans la Province.
M . de Tourrettes ( du nom de Villeneuve) , m’écrit
le 24. A o û t 1 7 7 4 :
-
« O n ne peut exécuter des décrets contre M . votre
frcrc , puifqu’il cft fous la main du R o i «.
Preuves du m otif du voyage du comte de Mirabeau.
L e même M . de Villeneuve T o u re tte s , m ’écrit le 1 1
Août 1 7 7 4 .
« Quoique le voyage de M . votre frcrc fût un myftere
>3 pour tous autres que M. le comte de V en ce ( de la
>3 maifon de Villeneuve ) , madame la comtefle (de Vcn33 ce) & moi 33.
Il m ’écrit le 9 Septembre fuivant 33 , la vérité faite
33 pour tout le monde , ne peut être biaifée , ni dillimulée
» par vous , non feulement c’eft au public qu’il faut
33 dire l’objet du voyage du com te , à vos parens , mais
» même aux Juges; 6c qui peut le trouver mauvais »3 !
M . de Tourettes eft le pere de la demoifelledont le comte
de Mirabeau étoit venu traiter le mariage.
Il exifte une lettre du comte de Mirabeau , écrite de
Hollande en 1 7 7 7 , dans laquelle il rend compte de ce
voyage , & des motifs qui l’avoicnt déterminé, les mêmes
que ceux qu’on vient de voir.
Preuves que je n’étois pas même inftruite du voyage
E
�34
& que je n’ai vu le comte de Mirabeau qu’à Ton retour
de Touretres.
Le même M. deTou rettes écrit au comte de M irabeau,
le 3 i A oû t t 7 7 4 .
» Q u a n t à madame votre f œ u r , je me charge de
» déterminer fa defenfe ; clic eft iim p le , en offrant
» de prouver qu’elle ignoroit votre voyage à Tourettes
»
Sc k V e n c e , qu’elle ne vous a vu qu’au retour ; cette
» preuve va .auiïi à votre décharge ».
Le même M . de T o u rettes, m ’écrit à moi le 9 Sep
tembre 1 7 7 4 ,» nous n’avons pas befoinque M. Pazcry,
» ( célébré A v o c a t d’A ix , co n fu lré), nous dife qu’il n’y
»3 a , ni complots , ni aflaflinat de prouvé «.
Preuve que la querelle vint d ’une explication deman
dée par M . le comte de Mirabeau.
M . le marquis de M arignane, fon beau-pere , m’écrit
.
le 7 Septembre 1 7 7 4
Q u e fon gendre eft inexcufable d’avoir pouffé les
choies ii loin , furcouc étant averti que cette démarche
feroit en pure perte , & il ajoute » je ne lui pardonne
m donc p.HS d’après des avis de M . de Briunçon , d’avoir
« été
faire cette bravade ridicule , ôc furtout de ne
» s’être pas contenté des exeufes & du défaveu de M*
«
d e V i l l e n e u v e ...............J ’a j o u t e r o i s m ê m e q u e s’ il e û t
« eu à faire à tout autre , les propos dont il demandoit
M raifon n’ayant pas été tenus devant lui , &
étant
» défavoués , il ne pouvoit exiger autre chofe que le
«
renouvclcmenc de ce défaveu devant des pçrfonncs
« qui pourroient avoir entendu parler de ces propos »>•
M . de Tourettes m ’écrit le 1 1 A oût 1 7 7 4 ; » M. de
�,5
3S
Villeneuve (Pofrenfé) connaît M . votre frerc , sVranç
trouvé plufieurs fois à A ix , l ’année dernière , mêmç
,J chez lç marquis de V ence ».
Preuve que la querelle fc borna à une rixe peu com
mune entre gentilshommes.
M . du B ou rgu et, Confeiller au Parlement ( parent de
M . de Mirabeau ) , m’écrit le 3 Septembre 1 7 7 4 , qu’il
a écrit à M M . les marquis &c bailli de Mirabeau.
» J’ai d i t , ( ajoutc-t-il), à l’un &c à l’autre , que le
» comte de Mirabeau avoit
eu le malheur de donner
« à GraiTe des coups à M . de Villeneuve-M ouans, qui
» avoit pris la voie de la plainte en
v
juftice ,
que
j’allois arrêter autant qu’il dépendroit de moi , toutes
« les pourfuites jufqu’à leur réponfc ; voilà où j’en
y> étois , madame , ma chcrc confine , quand vous m ’a» vez fait l’honneur de m ’écrire ; j ’ai vu avec plaiiir
»3 que la choie s’écoit paiTée ainii que je Pavois'pré» fumé ».
D ans la lettre déjà citée de M . de Tourettes , au
çomte de Mirabeau , du 3 1 A o û t , il lui marque que ion
affaire « n’a que le titre d’effrayant , qu’on ne prouve
» qu’une rixe ordinaire , dont touc au plus il cft Pagref*
>3 feur.
Il m’écrit la même chofe dans fa lettre du 9 Sep tembre »3 je le répète , l’affaire n’eft autre chofe qu’ une
» rixe dont M . de Mirabeau cft Pagreiieur >3.
Le même M . de Tourettes , écrit au comte de M ira
beau, le 8 Septembre 1 7 7 4 ; » les Avocats ont décidé qu’il
s? falloir fin ir, ce qui me furprend & me défefpcre........
» fi la procédure c f t bonne , M . de V i l l c n c u v e - M o u a n s
E ij
�3&
» fera aux nues ; vous , ou les vôtres ne devez lui offrir
» que de l’argent. O u i , c o m t e , je dis de l’argent. Le
» payfan de votre village qui efl: étrillé 6c fait informer,
» prend de
l’argent ,
pourquoi le gentilhomme qui
»> s’ailimile à lu i, n’en prendroit-il pas? Je fa is bien que
» vous vouleréparation de, la calomnie • mais la répam ration cft contenue dans le déportem ent, 6c le dépor»
tement paroît ie donner gratuitement ».
Il lui écrit le 20 Septembre » dans Phypothefe d ’une
«
r ix e , le décret peut être arbitraire au Juge; celui de
>5 prife-de-corps contre vous bleffe tout ce qu’on vous
n doit ; mais cela ne veut pas dire qu’il puifte être cafte,
99 Sc c’eft en fin de caufe qu’on appréciera ce qu’il vau t».
Il lui marque le x 5 Janvier 1 7 7 5 , » tout ce que l’on
«
a fait contre vous jufqu’ici n’efk rien ; il n’eft pas
»
douteux que le Parlement ne foit prévenu en votre
« faveur , il doit l’être pour la caufe , £c votre p a rtie,
>j comme vous l’avez bien prévu , avoit encenfé
»s l’idole dont il avoit obtenu deux arrêts injuftes à la
» follicitation du Procureur Général Joanis , fon parent,
»3 par lequel il n’avoit pas honte de fe faire protéger.
O n laiffa fuivre à cette affaire le cours ordinaire de
la Juftice , parce que mon pere l’exigea.
V oici les ordres qu’il me donna le 10 Juin 1 7 7 5 ,
dans le plus fort de l’inftruclion.
” Je me vois obligé de vous prier , ma fille , de
» facrifier vos reflentimens ; fuppofé que vous en ayez,
» contre M. de M o u a n s , pour ne pas barrer la fin que
>j je dois defirer de cette vilaine & malheureufe affaire;
»> j ’ai chargé votre coufm du Bourguec 6c autres per-
�37
» Tonnes de nies amis , dans ce pays-la, de la finir ;
” afin de faire biffer le décret lancé contre votre frere;
» c’eff bien affez qu’ un pareil afte aie été , il ne faut:
» pas du moins en laiffcr , s’il fe p eu t, la t r a c e , &
»3 cela peut importer pour toute la vie de votre frcrc : en
*s général les réparations ne font gucrcs prifées par les
peifonncs qui n’en ont pas befoin ,
& ne réparent
>j rien d’ordinaire ; mais quelle que puiffc être votre
»3 façon de penfer à cet égard ou celle de vos confeils,
« vous aurez toujours bonne grâce de facrifier ce qui
>3 vous cil perfonncl pour foulager votre frere , des
» fuites & du fouvenir d ’une affaire dont la tournure
la plus favorable 8c le terme le plus ordinaire eût été
» à le faire condamner à vingt ans Sc jour de prifon.
>» Je vous prie donc , ma fille, de vous conformer en
” ceci à ce que M. du Bourguet vous mandera être
33 néeeffaire, 6c vous m’obligerez en faifant bien ; adieu,
J3 ma fille , j ’embraffe Pauline , 8c falue M . fon pcrc.
» Signé M i r a b ü a u .
Sans des ordres auiii pofitifs, je ne pouvois me difpcnier de fuivre la réparation qui m’etoit duc : on voit
l’opinion qu’en avoit mon perc dans cette lettre ; c’étoic
celle qu’en avoit toute la Province, Si la propre famille d e
M . de Villeneuve M ouans; on a déjà vu ce qu’en penfoie
M . de V iilcncuveTourcttes, dans les pafiages de fes lettres
ci-delfiis tranferits, & dans celle du 8 Septembre 1 7 7 4 .
11 m ’écrivoit dès le 1 5 d'A out précèdent , 33 ce n’e ff,
»3 ni avec moi , ni avec perfonne de toutes celles qui
33 ont
»9
l’honneur de vous connoître , que vous avez
à vous juftificr fur ccttc malhcureuie affaire
,
que
M.
�35
» votre pere la prenne du bon côté 5 &C elle cédera de
»3 vous affliger ,
ôC tournera à la
honte parfaite de
» l’autre «,
M . le marquis de M arignane, m’écrie dans celle du
7 Septembre , que j’ai déjà citée.
» Sa requête (de M . de Villeneuve) cil une horreur,
»5 donc je crois que peu de gens font capables ; c’cft
»5 un tiiTu d’infamies , d’abiurdités &: de calomnies, qui
» mériteroit les peines les plus capitales li cette afîairc
pouvoir fe fjivre en juitice «.
Je devois à madame de la T o u r , de lui faire part
de la lettre de mon pere: elle la communiqua à M . do
Briançon , fon n ev eu , qui en donna avis au comte de
M irabeau fon ami ; voici la réponfe de ce dernier du pre
mier Juillet 1 7 7 5 , que madame de la T o ur me renvoya.
« Je ne viens que de recevoir , mon cher ami , ca
»5
lettre du 1 7 Juin ; j’y apprends avec le plus grand
« étonnem ent, la conduite de madame de Cabris ; ii
îj fon pere elt fon pere , j’ai cru que j’écois fon frere ,
m &. depuis dix mois fous les verrous , je ne fais fi clic
« devoit déferter ma caufe , mais je crois qu’„ellc fe fait
» juitice à elle-même en ne répondant pas à quatre ou
» cinq lettres qu’elle a de moi.
jj
Q uant à t o i, mon ami , je te pardonne un moment
55 de délire , pourvu que ce ne foit qu’un m om en t: tu
*> ignores mes projets, j’ai cru qu’un cœur comme le tien
3> les devoit deviner ; j’ai juré de ne recevoir jamais un
» accommodement ; mais quand celui-ci me paroîtroic
» auiîi convenable qu’il cil ridicule ; quand on m ’auroit
» confukée , ce qu’on n’a pas daigné faire , je ne fuis
�39
» pas foupçonnable de laÜTer là mon ami ; réparation,,
»
mon cher Briançon , &: jurons-nous encore une fois
» une amitié éternelle ; jurons que l’une de nos figna» tures ne fe verra jamais dans cette affaire, qu’acccm » pagnée de l’autre: voilà ma profeilion de f o i , hâte
>3 toi de me répondre &. de me raiïùrer.
m
Je n’ai aucune nouvelle de ma famille , & je fuis
>5 depuis iîx femaines ici ; même f ans, fecours pécuniaire;
h
n’importe , quand j’y ferai trop m al, j’en faurai fortir.
» L ’acte d’amitié que tu projettes ne t’écarte pas de
»> trente lieues ; mais pour mettre à profit cette petite
» perte de tems , paile par Grenoble & Geneves , ru
» verras un pays délicieux , ôc c ’eit la route la plus
droite.
» Adieu mon éternel, Sc peut-être aujourd’hui mon
» unique ami ; je fuis trop en colere pour c’en écrirc
» aujourd’hui davantage.
^
Signe .M ir a b e a u fils»
)
C ’eft dans cet état que fut rendue la fentencc du z
O ito b re 1 .7 7 6 , non pas telle que l’ont inférée entre des
guillemets les auteurs du m ém o ire, à la page 10,;, mais
comme je vais la mettre en colonnes à côté 'de cette
copie , pour faire juger de leur exactitude , de leur fidé
l i t é , & du m otif qui les a excités à cette falfification. >
y> Sentence du 2 Octobre
Nous Juge commis par la
» 1 7 7 6 , qui juge le con-
Cour pour remplir le Tribu-
« tumax Ô£ fes coaccufes ,
n al} par Jes decrets & arrêts
n les déclare atteints & con-
du 8 Novembre 1 7 7 + i 4-
�» vaincus du délit articulé
M a i & 1 1 Septembre der
» dans la plainte ; pour ré-
nier
« paration de quoi, les con-
nommés par decrets de la.
« dam ne ¿<7^5 àparoîtredans
Cour tenant la Chambre des
« la falle du Palais royal ,
vacations les $ 0 Juillet & 1 1
Sept, derniers pour le profit
« un jour d’audiencc , & les
en avis des foujfignés
>3 plaids tenans , & enfuite
jj au lieu de Mouans , 8c
du défaut de la part des ac-
sa dans la falle des habitans
repréfentés pour fubir les der
» du lieux de Sartoux , en
niers interrogatoires lors de
33 préfence du Confeil af-
la v i f te de la procédure 3fu r
les ajjîgnations a eux don
nées 3fuivies d'un exploit de
33 femblée , & là y faire des
i3 exeufes 5c demander par33 don à M . de Villeneuve ,
>3 dcfquelles réparations pu
eufés non contumax de s ’ être
is bliques procès verbaux fe«
proclamation 3 avec affiche
le tout fa it par Lantier qui
en a drefféfon procès verbal,
J3 feront dreifés. L e ...........
en déclarant la contumax bien
n , , , ...........effc condamné
33 en i o 1. d’amende envers
33 le Roi , &c 6 o o o liv. d’a-
inftruite contre fieur V ictor
33 mende envers l’accufa-
aux objets fournis par les
33 tcur ; le Heur Briançon
trois accufés non contumax,
33 en 4 liv. envers le R o i , 8c
ni a leurs exceptions & dé-
33 6 o o liv. envers l’accufa» tcur; les dames de Cabris
fenfes 3 ayant tel égard que
de raifon a la requête de
” Sc de Roumoulcs en i liv.
plainte du fieur de Vaille-
»3 d’amende envers le R o i ,
>3 &C 300 liv. chacune d’a-
neuve 3 & h fe s fins civiles >
»3 mende envers l'accu fa -
rabeau contumax 3 le fieur
33 tcur. Ils y font tous con-
Jofferandy
de R iq u c t i, C o m te de M i
rabeau , fans nous arrêter
en déclarant Le fieur de M i
Briançon 3 la
dame
�damnés folidaircment ,
ainfi qu’aux dépens ; &
jufq u’au p a y e m e n t, les
dame de Cabris, & la dame
de Graffe la Tour atteints
& convaincus , fiv o ir , ledk
deux dames , & le fieur
fieur de Mirabeau
Briançon , fon t condam-
infulté de deffein prémédite
nés y fuivant les ufages
le fieur de Taille neuve dans
de Provence , à tenir les
un de fe s domaines enclavé
arrêts de la ville.
dans fon f i e f , d ’ en être venu,
d ’ avoir
à cette occafion , aux prifes ,
& de l ’ avoir enfuite excédé
de coups ; ledit fieur Brian
çon , la dame de Cabris & la
dame de la Tour d ’ avoir participé au dejfein où étoit ledit
fieur de Mirabeau d ’infulter ledit fieur de Villeneuve , &
d ’ avoir autorifé ledit dejfein , en réparation de quoi avons
condamné les accufés a comparoître dans la fa lle du Palais
ro y a l, un jour d ’ audience , le p la id tenant , en la préfence
du fieur de Villeneuve , f i bon lui femble , ledit fieur de
Mirabeau ayant la tête nue, & derrière le bureau, à déclarer
que follem ent 6’ témérairement i l a infulté , excédé de coups
le fieur de V illeneuve , qu’ i l s ’ en repent, & lui demande
pardon ; laquelle réparation fera réitérée aux mêmes formes
dans le lieu de Mouans & dans la fa lle où f e tient le Confeil
des habit ans de Sartoux , ledit Confeil a cet effet affemblé,
a laquelle fa lle ledit Confeil affemblé , lefdits accufés non
contumax feront des exeufes au fieur de Villeneuve ; defi
quelles réparations publiquesil fera dreffé des procès verbaux
féparés ; avons condamné en outre ledit fieur de Mirabeau
a 10 liv. d ’amende envers le Roi , a 6000 liv. d ’ a m en d e
envers ledit fieur de Villeneuve , pour lui tenir lieu des
F
�4*
dommages & intérims ; ledit fieur de Briançon a
livres
d'amende envers le R oi 3 & a 600 livres d'amende envers
h d it fieur de Villeneuve ; & les dames de Cabris & de lu
Tour en z livres d ’ amende envers le R o i , & a 300 livres
d'amende chacune envers ledit fieur de Villeneuve , pour
lui tenir lieu des réparations civiles 3 condamnant les ac
cufiés aux dépens , pour toutes lefquelles adjudications ils
feront contraints folidairement ; & a cet effet ledit fieur de
Mirabeau tiendra les prifons 3 & le fieur de Briançon les
arrêts de la ville ju fq u 'a entier paiement 3 avec inhibitions
0
défenfes a tous les querellés de récidiver 3 fous plus
grande peine. F a it a G rafie dans le Palais ô dans l&
Chambre du Ccnfeil avant midi 3 le 2 Octobre 1 7 7 6 3 ayant
remis la procédure & toutes les pieces civiles 3 enfimble
notre préfente fentence au Greffe. Signé R e v e l le cadet *
Juge commis par la Cour 3 T r a s t o u r , Affeffeur
Guerate ,
&
Affeffeur .
O n voit ici avec étonnement que dans la fcntence
copiée dans le mémoire , madame de la T o ur Roumoules
& m o i , nous fommes d’éclar'ées atteintes & convaincues y
du délit articulé dans la plainte ; (aflaifinat prémédité
fur la perfonne de M . de Villeneuve , ligne
2
5 page 9 )
que nous y fommes également condamnées, madame de
la T o u r & m o i , à paroître dans la fallc du Palais royal
de Gratte , un jour d’aud ien ce, & les plaids tenans, &
enfuire au lieu de M o u a n s, dans la falle des habirans de
S a rto u x, en préfence du Confeil affcmblé , & là y faire
\ des exeufes , O demander pardon.
Et à la ligne 2 2 ; que nous fojnmcs également coi*-
�43
née$ , madame de la T o i# &C m o i, à garderies arrêts
de la ville ju fy u ’au paiement des réparations civiles & des
dépens.
Il n’cft pas jufqu’à la note mifc au bas de cecre même
page i o , où l’on fait une grande diflertation pçur m ’actabler d’injures, fous prétexte de l’amende prononcée par
cette fentence ; fans s’épuifer çn citations d'autorités, Qfl
po uv oi t
en trouver une dans l’article 7 du tit. x 5 dç l’or-r
donnance de 1 7 7 0 qui apprend qua l>m.çndç fl’eft point
infamante quand elle n’eft: pas confirmée par arrêt, quanti
elle n’eft pas jointe à une condamnation fur qn dçlic jn-r
famant. Toutes les charges de l’informatiot} de M . d«
Villeneuve contre madame de la Tour & moi fc bprnçn^
i dire que pendant fa querelle avec lç (leur de Mirabeau
nous avions ri dans un lieu d’où nou? np pouvions cepen
dant ni les voir ni les entendre.
J
Je ne dois pas oublier içi que la cabale qui minoiç
notre m a ifo n , étoit (ï co n n u ç, que M . de T o m c tte s c>
par fa lettre du 1 1 A oû t 1 7 7 4 , me m arque: « ççttç
»
affai re eft d’autant plus défagré^ible , que vous êrcs
»> entourés de gens abominables, ô£ çapablçs de to.y.tcs
?» fortes d’ipiquités.
Q U A T R I E M E
F A I T .
L a dam? de Lombard> douairière de Cabris > prétend
que pendant mon féjour à Lyon en 1 7 7 6 j ’ avois forcé la.
police a fuivre rfies pas ; elle fa.it de Içngs détails de prér
fendus prçcès verbaux qu’elle fuppqfe fq its a cet égard
tant par la, Police de Lyon que par c$llç de Paris i clic
Fi j
�t4
copie même en guillemets 3 a la page / j
M u r on.
'
j
celui du fie tir
'
Je ne puis & ne dois répondre à cc fait que par la
plainte que j’ai rendue, Sc par la réparation authentique
que j ’en attends de M . le Lieutenant Criminel. Si je me
livre ici à quelques réflexions, cc ne fera que pour dé
montrer l’abfurdité Sc la fauflecé qui naiflent de ces écrits
mênics.
'
M'. le M arquis‘de Mirabeau fit partir le 6 Juillet 1 7 7 6 '
le' fleur Muron , lui troïfieme ^ à la pifte du comte de
Mirabeaiu fon fils , qui s’étoit échappé du château de
Jtauir. If' j>afôît par une lettre écrite à M. le marquis de
Mârignanhé le 9 Septembre fu iv a n t, imprimée dans un
inémoire de la comtcflc de Mirabeau contre fon mari ,
pages 10 Sc fuivantes , ’»j qu’ils le fiiivircrit en S a v o ie ,
»j en Dauphiné , à Lyon Sc en P ro ven ce , qu’ils revinrent à Lyon où', fur clés avis Jqu’iPgagnoit les échelles
*> de Savoie Sc les Verrières de SuifTe, les chargés d’ordré
« y coururent.
C ’étoit donc contre le com te de Mirabeau que le iieur
Muron étoit envoyé. f
Ces chargés d ’ordre n’en iivoienr point contre moi ,
& n’en pouvoient point avoir; une femme en puiiTance
d’un m a r i, qui ne fe plaint pas,'qui ne parle d’elle qu’avec
,lcs expreflions du rcfpcdt Sc de l’cftimc , une femme qui
joint à ces témoignages domeftiques ceux des deux fan lillcs, & de toutes les perfonnes dont elle cft connue ,
ne peut avoir à fes trouffes des Infpecteurs de Police.
Il cft donc abfolumcnt faux que le ficur Muron Sc fes
adjoints avent drefle procès-verbal de mes démarches.
�45
Le procès verbal dont parle le libelle , aujourd’hui
fuppofé entre les mains de mes A dverfaires, n’effc donc
qu’un être de raifon , une piccc fauiîc , fabriquée dans
l ’obfcur'ité , pour fc préparcredes armes controinnoi , &
s’ il étoit poiïible qù'cllc-fût reuêtuç d e ! lafigmiTurc d’un
officier de Police , ce ne (croit que Je fruit de la préva
rication de de la coupable-complaifanceipour celui, qui le
payoir.
. . .
-t
Je ne veux pas d-autre prouve de la non exifter.ee de
ce prétendu procès v e rb a l, que l’ordre du Roi .décerné
contre moi le i 9 Juin 1 7 7 7 , à la follicitation de mon
pcrc & à l’infçu de mon m a r i, 6c révoqué quatorze jours
jours .après:(lé 4 Juillet) , fur /na'fimplc rcpr6fcncatipn ,
avant que mon mari , alors en Provence , eût pu ctt.êtrc
inftruit.
* ■.
. r
^Si le procès verbal eût exifté, le gouvernement auroitil refté onze moits £aus fôvir contre moi,, 6c fe fçroic- il
contenté d’un exil de quatorze .jours ?
,
Si je pouvois defeendre juiqu’à me juftificr, jc..n’aurois befoin que des lettres ci-devant citées ; on y vo.it mon
pere lui même , faifant l’éloge de ma conduite, exigeant
de moi des facrifices.
L a famille de mon mari me témoignant la plus grande
confiance, 6c prenant part aux chagrins domeftiques que
j’éprouve. M . de Vauvenargucs m ’écrit dans fa lettre
déjà citée , du i ‘4 Juillet 1 7 7 4 .
» Il ne me refté qu ’à vôus dire combien je fuis atten>» dri Sc touché de votre confiance 6c dé votre lituation.
n Vous pouvez avec liberté 6c sûreté , foulagcr votre
y> cœur dans le mien ; vos peines me font auifi fenfiblcs
�4^»
» que. . . . . . C e p e n d a n t mq. chert co’uÆne , nç l’abîïR’3 donnez p a s, il feroic perdu. La crainte Jcule qu’inf« pire une .Femme refpeâfcnblp * ppjt -quelquefois' arrêter,
v un m ari ; le -votre s’éloignera de vous , tournera ,
v changera de plan ^ d ’amis , 6c! d’habitudes , comme
» un malade qui ne trouve point de bonne plaçc , cet
v état cruel..le forcera de reyenir k vous :; je le délire ,
« je Pefpere.............. Mais en tout , ma chcre coufinc ,
» ouvrez-nous à. moi fans crain te, vous je poyvp:£ aveç
v affûta ne e ; quelque 'vertueuie que foie une am«?, elle
»> ne trouve pas toujours en elle - même de quoi ic
») fuffire.
Le même marquis de Vauvenargues m ’écrivoit le i 6
JuiHet i 7 7 4 :
»» Au furplus , ma chere co u fin e, votre conduite visn
vis de votre m a r i, & relativement-à. tous fes intérêts,
m eft âdlive , éclairée & refpc&able à tous égards, mon
■
a témoignage eft inutile pour le prouver, ce font dei
»5 vérités connues que j’ai atteftées , que j’attefte 6c que
» j’attefterai tant , & à qui il vous plaira.
On a vu quelles étoient les expreflions de celles de
M . de Totirrettes & des autres perfonnes avec qui j’étois
en correfpondance pour les malheureufes affaires de ma
famille.
La dame de Lombard , douairière, m’écrivoit à Lyon,
enfuite à Paris en 1 7 7 6 & en 1 7 7 7 .
D ans ia lettre du t 7 M ai 1 7 7 6 elle $ t : y ce feroif:
» une grande faxisfaction 5c confolation pour moj d#
» vous voir jçi d.ins quelque tems , que vous y fuifie.?
�*
47tranquille & comme vous devez y être ; voilà , m a
»> chcre fille, tous mes fouhaits.
J’ai déjà imprimé une autre lettre du 2 Janvier 1 7 7 7 ,
oii elle me marque ; « que c ’cil avec le plus v if intérêt
»» qu’elle reçoit le témoignage de mon amitié ; rien
« n’égale ( ajoutc-elle ) le plaifir que j’ai de favoir que
a
vous jouiriez d’une bonne fanté dans l’endroit où vous
*5 ères , fi ce n’eft celui que vous me cauferiez étant
« avec nous. Si le Seigneur daigne exaucer mes vœux ,
» vous jouirez de la vraie félicité pour tous les te m s,
*3 Pauline dit que. vous venie%, que vous venie\.
Je ne rappelerai point ici les certificats des rclîgieufes
^c la DeiTerte à Lyon , de Popincourt à Paris , & de
Siftcron.en Provence, couvcns où j-’a l demeuré -'pendant
le tems que je n ’ai pas été avec mon mari ; j’ai déjà été
forcée de les imprimer ailleurs , & je le ferai même de
rappeler le d ern ier dans un inftant.
A -t-on ofé fe permettre l ’affrcufc aiTertion ( inférée
page 1 9 , ligne 19. da m ém oire) quo mon mari s’éroit
éloigné de moi ! a t on pu oublier que le 3 1 Mars 1 7 7 6
il m ’envoya auprès de ma mero alors malade & à la
fuite de ics aiïaires à P a ris , que le n M ai 1 7 7 7 , il
me marquoit : « ma mere avec qui vous avez eu uti
53 con)mcrco fuivii de lettres-, m ’a dit pluficurs fois que
»i - vous n’étiez pas éloignée de revenir, èc m ’a même
«
montre des lettres qui confirmoient fon difeours. Je
w deiircrois que- vous vous mainteniez toujours dans ce
i» ü n tim çn t t &C que vous exécutiez promptement vorrç
*i projet.
Q u e le 4 A o û t 1 7 7 7 il écrivoit au marquis de M*-
�. 4?
rabcau de fa propi;c main , pour (e plaindre de l’ordre qui m ’avoic exilé de Paris : » fans les égards que ma
» femme conferva pour vous, & qu’elle m ’oblige à par» tager , je vous aurois déjà dénoncé au Tribunal de
« NoiTeigncurs les Maréchaux de France , je vous y
» anrois dénoncé comme le perturbateur de mon repos
» domeftique , le calomniateur de ma femme , d’une
« femme que je refpe£te.
M on mari adrefla en même tems des repréfentations
aux M inières du Roi fur cette furprife faite à l’auto
rité , &. leur envoya copie de fa lettre à M . le marquis
de Mirabeau.
C I N Q U I E M E
F A I T .
M on e x il a Sijleroti ; lettre de la Supérieure du couvent
ou j ’ étois ; entrée de Madame la marquife de Limaye pen
dant la nuit dans ce couvent.
Les auteurs du mémoire s’oublient fur les motifs qu’ils
veulent donner à ma détention.
A la page i 5 , premier alin éa, voici ce qu’ils en difent : » tous fes parens defircrcnt fauver leur honneur Sc
« le ficn qu’elle compromettoit à A ix dans le cours de
» l’année 1 7 7 8 , ils obtinrent un ordre du R oi pour la
» faire renfermer dans le couvent des Urfulines de Sii” teron ». (J’étois alors avec mon mari qui fuivoit fou
appel de la fentcncc d'interdiction ; je ne le quittois pas -,
je fus enlevée de fon lit au milieu de la nuit). D ans la
note au bas de la page 4.0 , après avoir raconté l’hiff
toirc fabulcufe , que M . de Cabris m ’étoit échappé au
fpe£taclc
�4i>
fpe&acle , &
av o it couru de loge en l o g e , f a ifa nt des
folies , ils ajo ut en t de fuite : «
les parens
s’ém urcnc
d ’une c o ndu ite qu i les c o m p r o m e t t o i t , ils cr urent né>> ceiTHirede féparer M . de C a b r i s d ’une c o m p a g n e ( q u i
»
le d é f e n d o i t) qui d o n n o it à fes malheurs une publ icité
33
Ci affligeante , q u ’ils fc réunirent & o bt in re nt du R o i
33 un ordre de la con du ire dans le c o u v e n t de Siiteron »>.
L ’hiftoire du f p e & a c l e , je le r é p è te , eft a b fo lu m e n t fauiïè.
M o n mari y alloit f o u v e n t , il y étoic
c o m m e tous les
autres fpectateurs ; toute la ville d ’ A i x & celle de M a r fcille peuvent l’attefter ; la publicité affligeante étoic dans
les pourfuircs de la cabale' pour l’interdiCtion.
L a c o nt ra di c tio n q ue je viens de relever n’eft: pas la
feule q u ’on puiiTe reprocher fur cet étrange f a it à mes
perfécuteurs.
M . le Bailli de M i r a b e a u , qui a toujours été reconnu
p o u r a vo ir p r o v o q u é de f a it obte nir l’ordre qui m ’enlcv o i t k la défe nfe de m o n mari , éc rit le 6 N o v e m b r e
1782
à la c o m t c f le de M i r a b e a u , fon autre n i e c e , qu i
v o u l o i t être féparée de fon m ar i : 55 vous êtes fa f e m m e ,
«
nulle autorité fous le ciel ne fauroit difloudre le lien
35 qui l ’a tt a ch e à vous , de vous à lui ; le Souverain lui»5 m ê m e ne le pourroit que par un acte de tyran nie
35 inouïe.
Je m ’interdirai tou te réflexion fur cette religion de
circonitance.
E n c o pi a nt la lettre de la Supérieure du c o u v e n t de
Siiteron au M i n i f t r e , page 1 5 , les auteurs du m é m o ir e
auroient du dire que cette religieufc n’ a v o i t été a p p e l é e par
les intrigues de la c a b a l e , du f o n d du L a n g u e d o c où elle
G
�5®
îWoit fait profeffion , que pour exercer fcs persécutions
contre moi.
Ils aur oicn t dû dire q u ’après que j ’eus obt en u la révo
c at ion de l’ordre du R o i , cette Supérieure voulu t m e re
tenir du iien p a r t i c u l i e r , m a lg ré les repréfentations du
S u b d é lé g u é de l’i n t e n d a n t , porreur de cette ré vo c at io n ,
q u ’elle ne cé da q u ’à la crainte d ’un tu mu lt e o<?cafionné
par plus de cin q ce nt perfonnes raflemblées qui s’é toient
tranfportées aux portes de m o n c o u v e n t fur le bruit de
m a liberté répandu dans la ville , 6c q u ’il fallut q u ’on
m e portât aux fenêtres pour appaifer l’in d ig n a t i on du
p e u pl e , qui fa vo it que m o u r a n t t depuis trois m o i s , on m e
refufoie des bouillons £c un médecin.
J’opp polerai à cette le ttre, dictée par la cabal e m ê m e ,
une lettre écrite par la Supérieure précédente au m ê m e
M i n i i t r c , le : o D é c e m b r e 1 7 7 8 :
» M o n i c i g n c u r , je viens de recevoir une lettre de M . de
'»3 la T o u r , In t e n d a n t de cette p r o v i n c e , par laquelle il
«
m e fa it part d ’un ordre de Sa M a j c f t é , pour refufer
îj d o r é n a v a n t à m o n parloir l' a vo c a t d u R o i de ce tte
»
v i l l e , qui éto it en ufage de venir co nfé rer en m a pré-
»
fe nc c a v e c m a d a m e la ma rq u ife de C a b r i s , enfuitc
»
d ’un de cret du P a r l e m e n t , 6c d ’une lettre de vo tre
«
part à M . de la T o u r qui l’y autorifoit en a p p ro u v a n t
”
le decret : j ’ai o b é i , 6c M . l’a v o c a t du P«.oi ne verra
M plus m a d a m e de Ca br is .
” Je crois de voir à la vérité 6c aux
>3 marq uife de
55
intérêts de la
C a b r i s que j ’eftime p r o f o n d é m e n t , de
prendre fur moi d’avoir l’hon neur de vous écire
,
Mon-
>3 f e i g n e u r , pour vous certifier q u ’a y a n t toujours été pré-
�51
» fente aux co nférences de M . D e y r a u d a v e c m a d a m e la
»> mar qui fe de C a b r i s , 6c pré fi dé, c o m m e je le d e v o i s , à
” toutes leurs relations , je n’ai jama is rien vu ni c n u tendu qui ne fût dig ne des fentimens de l’un 6 c de
u l ’a u t r e, 6c qui pût porter la mo in dr e atteinte aux ordres
» de Sa M a j ef t é .
»> Je dois encore avoir l’honn eur de vous aifurer que
>» depuis dix mois que cette d a m e cft détenue dans m a
m maifon , elle s’y cil fa it g é n é r a le m e n t refpc£ter 6c
53 aimer , q u ’elle réunit toutes les qualités du c œ u r 6c
» de l ’e f p r i t , que fa p i é t é , fa do uceur 6 c fa foumiiîîon
» aux ordres de Sa M a j e f t é nous édifient tous les jours :
« ces difterens t é m o ig na g e s font con iîgné s dans pluiieurs
» de mes lettres à M . de la T o u r , 6c je ne do ut e pas
» q u ’il ne vous en ait rendu c o m p t e , c o m m e je l’en ai
» chargé.
O
»
V o t r e juftice
&
votre
»s M o n f e i g n c u r , vous feron t
»
bienfaifance fi connues ,
pardonner , j ’cfpere , la
liberté que je prends de vous adrcilcr cette le t t r e ; m a
>5 c o nf c ic nc e cft en ga g é e à vous faire parvenir un té mo i”
S naS c dû » &
peut-être cft de venu néccfïaire ,
»
puifque je fuis feule à portée de juger m a d a m e de
«
C a b r i s , 6c de c o n n o ît r c la vérité ; je fuis d ’ailleurs
»> entièrement défintérefTée dans des affaires bien étran»
geres à m o n é t a t ; m o n devoir 6c la vérité p o u v o i e n t
»
fe u ls
me forcer de m ’en occuper.
Je fuis avec un très-profond r c f p c d ,
Monfeigncur ,
V o t r e très-humble & très-obéiflante f er va nt e,
Sœu r A i l i e r , Supérieure du monafte re de Ste. Urfule.
G ij
�52
Je puis oppofe r encore une lettre écrite par la m ê m e
Supérieure à M . de la T o u r , In te n d a n t de la province ,
ch a rg é de faire e xéc ut er les ordres décernés contre moi.
U n certificat de cette m ê m e Su p éri eu re , préfente aux c o n
férences q u ’il m ’a v o i t été permis d ’avoir a v e c M . D e y raud , A v o c a t du R o i , que le P a r le m e n t a v o i t n o m m é
pour m o n C o n f e i l , un certificat de toutes les religieufes
fans ex ceptions , fur la maniéré d o n t je m e c o m p o rt o is
dans le c o u ve n t ; enfin celui de tous les gens d e - c o n d i
tion , h o m m es en place & notables de la m ê m e v il le , du
9 Fé vrie r 1 7 8 1 ,
fur la réquifition de M M . les co m te s
de G r u e l , pcrc & fils , à qui j’ai l'honneur d ’a p p a r te n ir ,
du c h e f des M i r a b e a u ( ce dernier fy n d i c de la noblcfle
du D a u p h i n é ) ; Sc d ’après l’expofé qui leur eft fait de la
lettre écrite pa-r la d a m e A u g i e r , Supérieure , d o n t ils
11’héfitent pas d ’attefter la fa u île té.
il eft néceflarrc de diftinguer la dame Aftier de là
dame Augier qui lui a fuccédé.
L e t t r e de Madame A/lier a M . l'intendant de
Provence.
i) M o n f i e u r , j ’ai reçu la lettre que vo us m ’a v e z fait:
»
l’honn eur de m ’é c r i r e , en da te du 1 5 de ce m o i s , les
”
intentions du R o i f o n t remplies , M o n fi e u r D c y r a u d
”
ne voi t plus m a d a m e la m a r q u if e de C a b r i s , je fuis
>5 bien éloignée d ’ofer réfifter à des ordres fupérieurs.
« J’ai déjà eu l’honneur de vous aiTurer, M o n f i e u r %
»
q u ’il ne s’étoit c o m m i s aucuns abus dans les relations
«
qu e m a d a m e de C a b r i s a eues ave c le iîeur D c y r a u d 3
�53
”
conformément aux in tentions du P a r l e m e n t 8c h 1%
”
première a p p r o b a t io n du M i n i f t r c ; la fam il le a b f e n t e
,J
ne peut pas connoîcrc aufli bien que moi la vérité ,
13 &
je puis feule certifier c e qu i s’eft paiTé fous mes
»
yeux ; je mé rite d ’auta nt plus de cr o ya nc e que j ’étois
»
charg ée
»
porté d ’autre i n t é r ê t dans cette a f f a i r e , que ceux de
«
m o n d ev oir &
»
M . A m c l o c Sc la fam il le que les no u v e a u x ordres feront
»
e xa c te m e n t ob fervés , c o m m e l’onc toujours été ceux
»
que vous m ’a v e z fait l’honneur de m e c o m m u n i q u e r .
»
Je fuis av e c un p r o fo n d r e f p c d ,
d ’e mp êc he r les abus , 8c que je n'ai j a m a i s
de la ju fticc ; vous
po u v e z affurcr
Monficur ;
P . S. J’ai remis à m a d a m e
Votre
très - hu m b le
5c
d e C a b r i s la lettre que vous
très - o b é i f f a n t e fervante ,
m ’a v e z adreffée pour elle; il
fœ ur de Sr. Jean R . V* S.
ne m ’appartient point de lui
A i l i e r , Supérieure,
do nn e r aucun avis fur Tes
affaires.
C e r t i F I CAT de la Dame A flie r 3 Supérieure.
» Je foufïignée, Supérieure des religieufes du m on af te re
»
de Sainte U r f u l e de cette ville de Siftcron , certifie en
»
f ave ur de la vérité , que depuis le dccrct du Parlement:
»
du 1 4 M a r s d e rn ie r, qui m ’ a été c o m m u n i q u é le pre*
»
mier A v r i l , par lequel il a été permis à m a d a m e la
»
ma rqu ife de C a b r i s , dé ten ue par ordre du R o i dans
�14
ce. m o n a f t e r e , de co nfé rer a v e c fon C o n f c i l fur fes
a ff a ir e s, 6c depuis le c h o i x que ladite d a m e de C a b r i s
a f a it de M . D e y r a u d ,
A v o c a t du R o i au Siège de
ce tt e v i l l e , pour fon C o n f c i l , je n ’ai jamais rien vu
ni e nt e nd u dans leurs différentes co nférences ou j’ai
affifté , f u i v a n t
l’intention
du P a r le m e n t , é no ncé e
dans le fufdit de crct , qui ne fût c o nf o rm e à la d é
ce nc e & qui pût faire fufpecker les fentimens & la pru
dence d ud it Heur D e y r a u d ; que le fujet le plus ordi
naire de ces co nférences é t o it les affaires de ladite
d a m e ; que les confeils 6t les d é ma rc he s du fieur D e y
raud o n t toujours été c o n fo r m e s a u x
ordres de Sa
M a j c f t é , 6c dirigés par le r c f p c d qui leur cil: dû ; élo i
gn és des partis violens ,
8c feu lemen t a c c o m p a g n é s
des motifs de c o nf o la t io n propres à adou ci r les peines
de ladite d a m e de C a b r i s , & q u ’enfin la c o nd ui te d u
ficur D e y r a u d , dans fes relations a v e c ladite d a m e ,
a été fi ex aéï e 6c fi p r u d e n t e , que je ne fan rois croire
q u ’il ait pu don ne r lieu à la mo in dr e plainte de la parc
de qui que ce foit ; en foi de quoi j ’ai fait le préfent
c e r t i f i c a t ; à Siftcron ce
x o A o û t 1 7 7 8 , jignè fœu r
de St. Jean , A i l i e r , Supérieure.
CERTIFICAT
de toutes les Religieufes du Couvent
de S i fier on.
« N o u s fouffignées Supérieure , Ai fiftante , & toutes
«
nos Sœurs profeffes du mona fter e de fainte U r fu l c de
»
cette ville de Sifteron , déclarons 6c certifions que
m
m a d a m e la marquife de C a b r i s , p e n d a n t fo n iéjour
�u
”
dans notre c o u v e n t , où elle eft dé tenue par lettre Je
”
c a c h e t , mène une c ond uit e exemplaire , q u ’elle pra -
”
tique les exercices de religion , des vertus morales &
”
c h r é t ie n n e s , & obferve toute la d é cen ce & la dig ni té
»
q u ’on d o it attendre d ’une f e m m e de fon rang , que fa
»
do uceur 8c fon h o n n ê te té la f o n t chérir de toute notre
>3 c o m m u n a u t é , 8 c que ce ne feroic q u ’avec le plus v i f
>3 regret qu e nous la verrions iortir de c h e z n o u s , il* clic
>» éto it transférée dans un autre co u v e n t. En foi de quoi
33 nous avons, fait 8c figné ce préfent certificat. A Sille >3 ron le 20 M a i 1 7 7 8 ^¡ignées fœur de Sa int J e a n ,
»3 A i l i e r , Supérieure ; fœu r du St. E f p r i t , H u g u e s , A f >» fiftante ; fœur du St. A m o u r , D e y r a u t , Z e l a t r i c e ,
33 fœ u r de Ste. A g n è s , Berticr ; fœ u r de St. X a v i e r , de
»3 B r e m o n t ; fœ ur St. C h a rl e s , C r u d y ; fœu r de St. A u »3 g u i l i n , B o r e l y ; fœur du S a c r é - C œ u r , C o n f o l i n ; iœ ur
»
du Sa uve ur , B o i s ; fœur de St. P i e r r e , de C h a m p c l o s ;
»
f œ u r de St. P a u l , de C h a m p c l o s ; f œ u r . d u V e f b e in -
33 c a r n é , de C h a m p c l o s ; fœur de Ste. C c c i l e , F e r a n d ;
>3 fœu r de Ste. R e i n e , M i e u l e ; fœ u r de Ste. O n g e l e ,
33 G u i b e r t ; fœ u r C l e r c , de B e r m o n d ; fœ u r de Sainte
>3 R o f a l i e , L a t i l ; fœu r de Jéfus, Ifourd ; f œ u r de Sainte
»
U r f u l e , de C k a t e a u a r n o u x ; fœu r d e St. J o f e p h , Jacob.
oi;
C E R T I F IC A T des M aires 3 Conftds & Notables de la ville
de Sifieron. ■
»
»3 M o n f i e u r le C o m t e de G ru e l du Sais , & M . le c o m t e
») Jacques de G ru e l fon fils , f y n d i c s . d e la N o b l e f l e du
»3
ha u t D a u p h i n s , oncle 8c coufin de m a d a m e la mar-
�¿6
«
quife de C a b r i s , dé ten ue par ordre du R o i dans le
»
c o u v e n t de Sainte - U r f u l c de cette ville d e .S i f t c r o n
33 en P r o v e n c e , a y a n t appris qu e la d a m e A u g i e r de
33 Ste. C é c i l e , religieufe profeiïe du c o u v e n t des U r f u sj lines de la ville d u P o n t St. E f p r it , en L a n g u e d o c , Sc
33 depuis un an feu le me nt fupérieure du c o u v e n t de Sif"
33 teron , a v o i t d e m a n d é au M i n i f t r e du R o i , dans le
»
mois de N o v e m b r e d e rn ie r, le c h a n g e m e n t de m a d a m e
33 la mar qui fe de C a b r i s , leur p a r e n te , fur le fo n d e m en t
a» q u ’elle m e t t o it le défordre dans la ma if on , &
trou-
33 bloit les exercices divins , en re cev ant au parloir trop
93 d e vifites , èc n o t a m m e n t tou te la m a u va i fe c o m p a 33 gnie de la v i ll e ; les M M . c o m t e s de G r u e l , do miciliés
j> à cin q licucs de cette v i l l e , nous a y a n t prié de dire ce
33 qui effc à notre c o nn o iff a nc e , nous fouiîignés M a i r e ,
33 C o n f u l a & u e l de la ville de Sifteron , &
nous Ex*-
,33 C o n f u l s & autres N o t a b l e s de lad ite v i l l e , certifions,
-•> en f ave ur de la v é r i t é , que la c o n d u it e de m a d a m e la
,33 ma rqu ife de C a b r i s , depuis fa d ét en ti o n au c o u v e n t *
»
lui a attiré l’a t t a c h e m e n t Sc le refpc£t de toute la
»
ville , q u ’elle ne voi e au parloir que ce q u ’il y a de
53 gens c o m m e il f a u t , d ’honn eur 8c de probité , que
33 toutes les^perfonnes de d i f t i n û i o n , no n f e u le m e nt de
33 ce tt e v i l l e , mais en core celles qui y o nt pafle., n’o nt
33 pas m a n q u é de l’aller v o i r , q u ’elle efk l’objet .de la
55 véné ra tio n publ ique , &C q u ’ il par oît q u ’il ne peut y
avoir eu que de vils calom niate urs qui ayent fug géré
33 c o n t r’cllc des délations fecretes ; certifions en o u t r e ,
7) q u il eft de no t o r ié t é pu bl iqu e q u e ladite d a m e m a r
quife
�57
3>. quifc de Cabris donne à la mai fou de .Sainte Urfulc
,J quinze cenc livres de penfion pour elle &C fa femme
M de c h a m b r e , &C qu’elle y cft fi m a l logée , ii mal cou« chée , fi mefquinement nourrie , & ii négligée dans
5j fes maladies , qu’il paroît , eu égard à ce que coûtent
33 les vivres dans cette ville', 8c à la penfion ordinaire
33 de cent quatre-vingt livres fixée dans ce couvent pour
3j les penfionnaircs , que la communauté gagne , fur les
« 1 5 0 0 liv. au moins les deux tiers ; en foi de quoi , 8C
3j à la requête des iieurs comte de G r u e l , avons figné
33 le préfent c ertifica t, pour fervir Sc valoir ce que de
s? raifon , fait contrefigner par notre fecrétaire, 8c ap33 pofer les fceau Sc armes de la ville : à Sifteron le 9
33 Janvier 1 7 8 1 . Ainfi fignés Bcrard de St. Denis , M .
« Conf. ; Juflert, M . Conf. ; F u q u c t , Conful ; F. S. Im33 bert , E x -C o n fu l ; R c g n is , E x - C o n f u l ; Deiraud ,
33 Confeiller 5c A vocat du Roi au Siège ; Richam La*
33 plaile, D irc& eur des dames de la Vifitation; Pellegrin,
33 C h evalier; Deroux des Com tes d e 'L a r ic , Lieutenant
33 des M aréchaux de France ; Chevalier de Caftagny ,
y* ancien Capitaine d’infanterie; T o u rn a d rc, Capitaine
33 au Corps royal du génie ; H a t c l , premier Conful en
” * 7 7 9 i G om bcrt , Ecuycr ; Bezadc de Mazicres ,
53 Confeiller du R o i ; Ricaudi , A v o c a t au Parlement
« de Paris, LaplalTe , A vocat ; le Prieur Laplafle ; Ven*
33 tavon ; R ic a u d y , Lieutenant C r im in e l; C a f t a g n y ,
y» Chevalier de l’Ordre de Saint Louis; C a f t a g n y , Prêtre;
33 R ic a u d i, Chevalier ; B a r le t, Prieur ; le Chevalier de
33 Verneuil , Capitaine d’infanterie ; Deleuze , ancien
33 Officier d’infanterie ; Deleuze , Officier d’infanterie j
H
�58
» Gantianne , Chanoine théologal de la cathedrale »
îj
Regnier , A v o c a t ; Vormerdre.
E n marge ejl écrit > contrôlé à Paris le 9 Fevrier 1 7 S 1»
reçu 1 4 fols. Signé L e z a n .
• Il cft ainfi audit certificat légalifé , certifié véri
table, figné & paraphé , & dépofé pour minute a
M c Pijcau , l’un des Notaires à Paris fouiîignés ,
par a£te de ce jourd’hui 9 Février 1 7 8 1 ; le tout
étant en la poiTeiüon dudit M e Pijcau , Notaire.
A i n f i [ignés
D eyeux
&
P ije au ,
N o ta ire s,
avec
paraphes : ù en marge eji écrit 3 contrôlé lefdits
' jour & an ,
J’avois eu la liberté de recevoir an parloir les vifites
des perfonnes qui me faifoient l’honneur d’y venir ; la
lettre de la dame Augier , Supérieure , avoit produit
l’effet que la cabale en avoit efpéré. M adam e la marquife
de Limaye , ma parente (du côté de mon pere) venoit
fouvent d’A ix me confolcr dans ma retraite : a la fin de
D écem bre 1 7 8 0 , elle pafle au château de Mirabeau fur
fa route ; M . le Bailli de Mirabeau , inftruic de fou
projet, lui apprend que le parloir m’eft interdit: elle foutient qu’il ne doit jamais l’être pour une femme comme
elle : elle arrive à cheval à cinq heures du f o i r , le 3 1
Décembre : elle fc préfente à la porte du cou ven t, on la
lui refufe : elle retourne à fon auberge, fait porter par un
payfan une échelle quelle applique au m ur, au bas d’une
fenêtre de hauteur d’homme , elle en cafle les vitres ,
le payfan , porteur de l’échelle, s’en retourne à l’auberge
avec fon laquais.
�59
M adam e la marquife de Lim aye dans les corridors du
cou vent, ne fait où inc prendre, elle frappe à routes
les portes, &: me demande p artou t, une religieufe & ma
femme de chambre la rencontrent; cette dernicre la con
duit chez moi.
M adam e de Lim aye s’étoit blèiïee à la jambe par la
chute d ’un cheval , je la fis mettre au lit ; le lendemain
dès le m a tin , j’en avertis la Supérieure , & je la priai de
faire fortir madame de Limaye fans éclat ; elle me le
promit.
D ans le même inftant qu’elle faifoit cette promeiTc ,
elle donna fa requête à M . le Lieutenant-Général de la
Sénéchauflee, pour requérir fon tran fport, ôC recevoir fa
pl ai nre.
Elle reçut dans l’intervalle la vifite de madamé de
Lim aye au parloir , qui lui fit des exeufes de ce qui s’étoic pafle y Sc à. laquelle elle promit encore de ne faire
aucun éclat.
PromeiTe artificieufe : les Juges arrivent, & la plainte
eft rendue avec tput l’éclat & tous les cara£teres qui pouvoient l’aggraver.
O n dreile le procès verbal des prétendues effra&ions
commifes dans le couvent, elles fe bornent à quelques
carreaux de vitres.
Preuve que madame la marquife de Lim aye étoit
connue dans fon fexe & dans fa qualité.
L a déclaration que la Supérieure en fait elle-même
dans le procès verbal.
H ij
�Co
■EXTRAI T des rsgifires du Greffe du Siege de Sifleron.
A
M o n sieu r
le
L ieu ten an t-G én éral.
Supplie humblement dame de Sain te-C ecilc Augicr ,
Supérieure du Monaftcrc de Sainte Urfulc de cette ville
de Sifteron :
Remontre qu’elle .eft chargée de veiller à la sûreté &
au bon ordre de fa maifon ; & s’étant apperçue que des
étrangers qui y font actuellement, s’y font introduits pen
dant la nuit, elle vous requiert d’y accéder avec les Gens
du Roi , pour lui concéder verbal dudit fait : à l’original
figné fœur de Sre. Cccile , Augicr , Supérieure.
Soit montré au Procureur du R oi à Sifteron le 3 1 D é
cembre 1 7 8 0 , Signé Iiarlet de la Cazette à l’original.
V u la requête ci-deflus & le d e c re t, nous requérons
qu’il foie accédé audit couvent en notre compagnie, ppur
dreffer procès verbal de la plainte ci-deiTus , & avons
iigné à Sifteron les fufdits jour Sc at\: fignés L a t i l , Confeille r, & P. D . R à l’original.
V u la plainte ci-deiTus, notre d e c re t, & les conclu
rions
dudit Procureur du Roi :
Nous Lieutenant particulier, en l’abfence, ordonnons
qu’il fera par nous tout prélentemcnt accédé , en com
pagnie dudit Procureur du R o i , de notre Greffier fuivi
de l’ H u i f l î c r de fcrvice au monaftere de Stc. U rfulc, pour
y procéder relativement à la plainte ci-defl'us : à
Sifteron
le 3 1 Décembre 1 7 8 0 •>figné Barlct de la Gazette à l’ori”
ginal. Collationné figné Jacob.
�61
Nous Charles-François de Burles, C h e v a lie r, C o n
seiller du R o i , Lieutenant-Général au Siège royal 6c Sc>
néchauiTée de la ville de Sifteron en P ro ven ce, certifions
à tous qu’il appartiendra , que M c Jacob qui a expédié ,
collationné 6c figné l’extrait c i- d e flu s , cft Greffier en
c h ef audit Siège 6c SénéchauiTée , aux écritures & fignatures duquel foi doit être ajoutée tant en jugement que
hors d’icelui ; en foi de quoi nous avons fait £c figné le
préfent, contrefigné par notre fecrétaire, 6c fait appofer le
fccau de nos arm es, pour fervir 6c valoir ce que de raifon.
Fait 6c donné à Sifteron dans notre hôtel le i 5 Février
1 7 8 4 . Signés de Burles 6c H ern cl, Secrétaire.
E
X
T
R
A *1
T
des Regifires du Greffe du Siege de Sijleron.
D u 31 Décembre 1 7 8 0 ,
à Sifteron , Nous Picrrc-
Jofeph Barlet de la Cazette , Confeillcr du Roi , Lieu
tenant Particulier au Siege royal 6c SénéchauiTée de la
ville de Sifteron , en abfencc, en compagnie de M e Jofeph-Gafpard Latil , Confeiller 6c Procureur du Roi ,
6c de M c Jean-François Jacob , Greffier en chef audit
Siege 6C Sénéchauilee, fuivis de l’huiilier de fcrvice , nous
étant rendus au monafterc de Sainte-U rfulc, fitué hors
les remparts de la ville : eniuite de notre ordonnance
de ce jour au bas de la requete, de plainte a nous p o r t é e
par dame de Sainte Cecile Augier , Supérieure dudic
monafterc , 6c par laquellejadite dame nous r e q u i e r t de
vouloir
accéder audit couvent ; ou étant a r r i v é s
eu
�6i
compagnie de qui dcffus , nous nous ferions fait annon
cer par Phuillïcr qui eft à notre fuite , &
feroit comparu-e la dame fupcricura
qui
a l’inftant
nous auroit
fait ouvrir les portes dudit monaftere , ôc nous auroïc
conduits dans la falle capitulaire ou nous aurions trou
vé dame Hugos , fœur du Saint - Efprit , affiftante
dame d’Eyraud , fœur du Saint - A m our , zélatrice ,
&
dame Confolin , fœur du Sacré C œ u r , économe ,
dame B orely, fœur de Saint-Auguftin , confeillere ; la
dite dame fupérieure en préfence des dames ci-dellus
nous auroit requis de vouloir recevoir juridiquement fa
plainte; à quoi adhérant , elle nous auroit expofé que
le j our de hier , environ l’heure de huit du foir , l’on
vint frapper à la porta dudit monaftere , qui vife fur le
grand chemin , que la fœur de Notre-Dame , tourriere
dudit monaftere , accourut au bruit & demanda à ceux
qui frappoicnc , ce qu’ils demandoient , &. lui ayant
écé répondu d’ouvrir les portes ; ladite fœur répliqua
qu’on ne le pouvoir pas attendu qu’il écoit cxprcflemenC
défendu d’ouvrir les portes à cette hcure-là , que ladite
fœur de N otre-D am e s’apperçue alors que l’on avoir
frappé fi rudement que l’on avoit fait fauter la fèrrrure
de la première porte de la cour ainfi qu’un areboutant ;
que ladicc dame fupérieure , avant l’heure du coucher ,
fit faire la vifite dcfditcs portes dudit monaftere, qu’elle
fie refermer tout de fuite , que ladite dame fupérieure
s’étant retirée dans fa cham bre, elle entendit quelque
bruit dans ledit monaftere . . . . que ce jourd’hui à l’heure
de neuf heures ôc demie du m a tin , madame la marquife
de Cabris auroit demandé à parler à ladite dame fup«-
�¿3
Heure en particulier , & lui auroit die qu’elle éroît fort
en peine fur cc qui venoit d’arriver, Sc fur ce qui s’étoit
paillé hier au f o i r , qire madame de L im a ye, fa coufine ,
s’étant préientéc hier au foir pour la demander 6c n’avant
pu la voir , elle s’étoit introduite dans le couvent par le
moyen des échelles qu’elle s’étoit procurées3 accompagnée
de Ton laquais , qui l’avoit aidée à s’introduire dans lcd.
m onaftere, qu’elle congédia auifi-tôt ; que ladite dame
de Limaye pour s’introduire dans le monaftere avoit
brifé les vitres, d’une fenêtre 6c enfoncé un con treven t,
que s’étant introduite par ce moyen dans ledit m onaf
tere , habillée en cavalier : elle avoit frappé à pluficurs
portes, attendu qu’elle ne favoitpas la chambre de ladirc
rnarquife de C a b r is , qu’elle fut apperçue par la
L a t il , fœur de Sainte llo fa lie , 6c par la fille de chambre
de ladite dame marquife de C a b r is , qui eurent l’une 6c
l’autre quelque frayeur de voir une perfonne ainfi déguiféc
à une pareille heure , que la dame de Lim aye fe trou
vant couchée dans fon appartement , elle prioit ladite
dame fupérieure de trouver un moyen pour la faire fortir , ce que la dame fupérieure trouvant fort difficile ,
elle a dit à ladite dame marquife de Cabris de faire
habiller ladite dame de Limaye en fem m e, 6c qu’elle
t â c h e r a i t enfuite do la faire forcir p a rla porte des exter
nes , pour donner moins de fcandalc ; que la dame fupéricurc pour cela faire 6c pour que la chofe fût moins
co n n u e , fît apporter chez elle toutes les clefs des portes
pour qu’elle pût fortir en bonne 6c duc forme , que dans
cet incervalle de tems ladite dame de Lim aye a difparu ;
qu’environ un e heure après ladite dame de Limaye a u r o i t
�64
paru au parloir ,
Si y auroit fait demander ladite da me
fupérieure, 6c que l a d . d a m c d e L i m a y c a u r o i t f a i t d e s excufes, offrant e l l e -m ê me de faire fa déclaration c o m m e quoi
elle étoit entrée
de ne
dans ledit c o u v e n t ,
point faire d ’éclat
6c q u ’elle la prioit
de cette affaire , que
ladite
da me fupérieure ne p o u v a n t ‘ tolérer une pareille voie de
fait ,
6c voulant mettre l’ordre dans le monaftere d ont
on lui a confié l’adminiftration , elle nous requiert de lui
concéder a £ t e , ainfi que de ferment q u ’elle offre de prê
ter fur la vérité d’i cel lc ,
6c a figné à l’original ^figné s c eu r
d e S a i n t e - C e c i l e A u g i e r . , Supérieure.
Ledit
fieur Procureur du R o i a d i t , q u ’il n’c m p ê c h c
q u ’il foit conc édé a£te à ladite d a m e fupérieure, de la
plainte ci-deiTus ,
requérant
fra&urcs
L a t i l ,
en
6c du ferment qu’elle offre de prêter.,
outre qu’ il
foit
dreffé procès-verbal
y m e n t i o n n é e s , 6c à figné à l ’original
des
figné
Confeiller , 6C Procureur du R oi .
E t nousdit Li e ut ena nt Particulier , en abf cncc , avons
c on c éd é a£tc. à ladite da me fupérieure , de la plainte cideffus , 6c du ferment q u ’elle a prêté fur la vérité d ’icelle,
ordonnons en outre q u’il fera procédé à la defeription des
f ra &i o ns ci-deffus mentionnées ,
notre Greffier à l’original
6c J a c o b
Et
,
,fignés
&
avons
B a r le t de l a
figné
avec
C a z e tte ,
Greffier.
procédant à la defeription
ci-deffus ,
ordonnée ,
nous nous ferions rendus dans une c hambr e dudit m o n a f
tere dont la fenêtre vife fur le jardin du c o t é du l e v a n t ,
& aurions trouvé la fenêtre de ladite chambr e c ompo fé e de
d o u z e carreaux dont fept vitres on t été brifées 6c* rem
placés
tout récemment av e c du papier bl anc , ,6c é tant
defeendus
�defcendus dans la falle capitulaire, avons demandé À ladite
dame fœur fupérieure , fi elle n’avoic plus aucune def-
3c
cription à nous faire fa ire ,
n’ayant rien trouvé de
plus à écrire , avons dreiTé le préfent procès-verbal , pour
fervir 3c valoir à ce que de raifon , & avons figné avec
ladite dame ftipérieurc , ledit ficur Procureur du R o i ,
& notre Greffier ; à l’original , Jign.és
de
, Supérieure, B a r l e t d e l a C
, Confeiller , Procureur du R o i , £c
C ecile A u g ier
L atil
Sœ ur
Greffier. Collationné.
S ain te
a z e t t e
,
Jaco b
,
Ja c o b .
N o u s Charles-François de Burlcs, Chevalier, Confcil1er du Roi , Lieutenant Général au Siege Royal de la
Sénéchauflec de la ville de Sifteron en Provence , certi
fions à tous qu’il appartiendra , que M e Jacob , qui a
e x p é d ié , collationné 3c ligné l'extraie ci - defïiis , cft
Greffier en c h e f dudit Siège 3c Sénéchauflec , aux écri
tures Sc fignatures , duquel foi doit être ajo utée, tant en
jugement que hors icelui ; en foi de quoi nous avons
fait
3c
figné ce p réfen t, contiefigné par notre Secrétaire,
& fait appofer le fccau de nos armes 3 pour fervir
&: valoir à ce que de raifon. Fait 3c donné à Sifteron ,
dans notre H ô te l, le i 5 Février 1 7 8 4 , figné d e B u r l e s ,
Si H e r n e t , Secrétaire.
D eux lettres que m ’écrit madame la marquife de Limaye , elle-même, retenue dans l’auberge de Sifteron ,
par fon accident des i er &
8 Janvier
1 7 8 1 , où elle
fe plaint amcremenc des procédés de la fupérieure , &
de fes manques de promclTe : elle y marque » l’Abbé la
» T o u r , (A u m ô n ier du c o u v e n t ) , vint hier au foie
J
�66
m’apporter mes bottes , &C me fit une longue v i f i t e ,
dans laquelle il me témoigna Tes regrets lur tout ce
qui s’étoit paiTé ; que s’il en étoit le maître , il jeteroit au feu tout ce qui s’étoit é c r i t , il me dit qu’il
fcroit fon poffible pour me ménager une entrevue
avec vous avec l’agrément de la fupérieurc ; il cfl:
revenu aujourd’hui pour m’apprendre qu’il n’avoit pu
obtenir
le confentement
de ces dames , 6t pour
m’exhorter à renoncer à vous voir ; je ne lui ai point diilîmulé que j’étois convaincue que ces dames ne fe conduifoient
que par fes confeils , 6c qu’il dépendoit
abfolument de lui quejevous viffe au parloir aux heures
permiies , 6c que je n’y paroitrois qu’ en habits de
femme ; mes follicitations ont été inutiles , je lui ai
fait fentir cependant combien j’étois fcnfiblc à fou
refus Sc à l’éclat qu’on avoit fait à mon occaiion ,
tandis qu’on
m ’avoit promis qu’on me donneroic
jufqu’à onze heures pour fortir , 6c qu’on ne porteroic
aucune plainte.
D ans celle du 8 , elle me dit » je n’ai fait aucune
a? efpece de fracture que celle des carreaux de vitre , ce
» qui ne feroit point arrivé, fi on n’avoit pas eu la dureté
« de me refufer d’ouvrir la porte à une heure qui n’étoit
» point in d u e ........... qu’on n’a pas vu d’exemple de
*> pareilles rigueurs à l’égard de perfonne , encore moins
”
à l’éçard
d’une femme comme moi.
©
V oilà la perfonne qui paiTa la nuit dans le couvent
dans mon appartement : voici ce que le M ém oire die
page 1 7 , l i g n e
14,
le lendemain i l fa llu t fortir ,
5î Vétourdi n’ avoit pas fbngé au dénouement de Vefealade*
�¿7
La lettre que je reçus de M . Barlet , Juge, qui a^oic
dreffe lui-même le Procès-verbal.
M adame,
« J e n’ai pu lire fans attendriffement la lettre que
»> vous m ’avez fait l’honneur de m ’écrire ; vos malheurs
«
6c l’intérêt générai qu’ils vous avoient acquis m ’atta-
*i choient déjà bien ilnccrement à vous: je faifois gloire
» de partager la fenfibilité de vos a m is, 6c c ’étoit un
» honneur bien vrai pour moi que d’ofer me mettre du
« nombre ; je fuis très-flatté qu’une circonftance impré« vue m’ait fourni l’occafion de vous le témoigner, mon
»> deiîr étant de faire plus *particulierement votre connoiiTance , vous devez fentir combien il m ’eft doux
>» de la faire en vous obligeant, 6c de vous obliger d’une
» maniéré auifi conforme à mon inclination qu’à mon
m devoir ; ce dernier m o tif vous difpcnfc de toute gra« titude à mon égard ; je dois, il cil v r a i , ainfi qu’on
» vous en a in fo rm é, mander à M . le Procureur Géné«
ral tout le détail de cette affaire ; je le ferai d’autanr
«
«
»
«
plus volontiers que je crois , ainfi que vous raffurez
vous-même , que les fuites ne peuvent être que trèsavantageuies pour vous 6c très-peu nuifibles à madame
de Limaye. L a place que j’occupe ne me permet dans
» aucune circonftance de diffimulcr la vérité, 6c mon
»3 eftime pour vous, eft dans celle-ci une nouvelle raifon
« pour ne pas la taire; je prends donc cette voie, comme la
»3 plus douce 5c la plus honnête,elleeftla plus conformeaux
»3 égards qui vous font dûs ; foyez perfuadée, m adam e, q«c
m
je fais apprécier votre mérite, & que fi jepouvois en être
�¿s
» moins convaincu, le criunivcrfclqui s’élève pour vous,
» ôc qui réclame en faveur de votre vertu ôc de votre
33 innocence , feroit lui feul un titre aiTez refpe&able
33 pour vous mériter les fuffrages 8c les applaudiifemens
« de toute âme honnête 6c fenfiblc.
Je fuis avec refpc£t,
M adam e,
votre très-humble ôc trèsobéiiTant
B arlet
Sifleron ,
4. Janvier
ferviceur ,
de
l a
G a ze tte .
1784.
Celle de M . l’Evêque de Siitcron , du 3 Jan vier, ou
il me m a rq u e ,, l’év enem ent, m a d a m e, qui s’eft pafle
33 ces jours derniers au couvent de Sifteron , ne p e u t,
33 ni ne doit vous être attribué en aucune manière ,
55 j’ ai été fort aife de ne vous y voir autrement compro33 mife que comme l’objet d’un attachement qui n’a
33 point connu les bornes de la prudence.
C e lle d e M . le Procureur Général du Parlement d’A ix ,
du 1 8 Janvier , qui m ’écrit « j’ai vu M . l’Evêque de
3* Sifteron , vous ne paierez , ni réparations étrangères,
« ni nouvelle conftru&ion , mais feulement les répara5î . tions rendues néceflaircs par le dommage que'madame
53 de Limaye a caufé; vous faites noblement ôc fagement
« d y ajouter les frais de juftice.
M . le Procureur Général me fait l’honneur de mvécrire
encore le 8 F é v r i e r „ j’ai vu madame de Limaye , votre
33 coufine } toujours remplie de zele ôc d’intérêt pour
�*9
V vous ; je ne puis douter qu’on ne demande votre tranfl
« lation dans un lieu dont vous n’auriez pas le choix , 6c
» qu’on n’envenime ia vifitc nodturne de madame de
»
Limaye , jufqu’à lui imputer un projet d’enlevcmcnc
ji de concert avec vous , vous êtes en pays ennemi ;
•» qu’il ne faut cependant quitter que pour être en lieu
jj de liberté. Je me hâte de vous marquer ces choies ,
qui me font dictées par le fcul motif de votre intérêt
s?
de celui que je prends à la rigueur de votre fort.
Q u ’on juge à préfent quels motifs animoient les auteurs
du mémoire dans la defeription maligne & indécente qu’ifs
fe permettent ( pages 1 7
&
1 8 du mémoire ) de cet
événement dont ils avoient la plus exadte connoifiance.
O n dit page 1 8 du mémoire , qu’en 1 7 7 7 , j’étois
détenue d’ordre du R oi au couvent de Popincourt ; ccffc
Une fauiTcté dont je ne vois pas l’intérêt.
«
S I X I E M E
Prêt de 1 0 , 0 0 0 liv. fa it en
F A I T .
1773
3 a madame la
marquife de M irabeau, diffipation & dilapidation qui me
fon t imputées des biens de mon mari ; procurations q u 'il
m 'a données teflament q u 'il m'a dépofé.
M on mari alla en 1 7 7 3 , voir la marquife de M ira
b e au , Ta belle-mcre ,*qui ne le connoifloit pas, & qui ne
l’avoit jamais vu ; il l’a trouva dans l’indig#nce, man
quant du fimple néccflaire, il lui prêta z 0,0 00 1. je n’eus
d’autre part à ce prêt que d’être fenfiblc à cet acte de
générofité exercé en faveur de ma mere , mon mari
n’exigea aucune reconnoiilancc ; quel titre pouvoit don
ner une femme en puiiTancc de fon mari ?
�70
La marquife de M irab eau, n’a formé fa demande en
féparation qu’en 1 7 7 5 , plus de deux ans après.
En 1 7 7 6 , mon mari m ’écrivit dans une lettre que
j ’ai déjà citée » vous me ferez le plus grand plaifir d’al53
1er joindre madame votre mere le plutôt qu’il vous
33 fera poiîible , vous pourriez m ’être de la plus grande.
« utilité pour mes affaires......... vous pourriez auiïï être
33 de
quelques fecours dans les affaires qui affligent
33 madame votre m e r e , & cette lettre vous mettroit cl
3> l'abri des reproches injufies qu'on pourroit vous fa ire..
Je ne me fuis jamais mêlée des affaires de ma mere ,
que pour en procurer la conciliation : elle me donna fa
procuration le 4 Juin 1 7 7 7 , datée du couvent deSaintM ichcl , où elle étoit enfermée ; je n’en fis d’autre ufage
que de révoquer les plaintes quelle avoir rendues contre
fon mari , 6c de changer les gens d’affaires qu’on pouvoit
fufpe&cr d’avoir m is'la divifion entr’eux. Cetre révoca
tion qui devoit affurer le repos de M . le marquis de M i
rabeau % lui fut fignifiée le 6 Juin. C e t a£tc de refpe£t
filial m’attira l’ordre du R oi du 19 Juin 1 7 7 7 , qui
m ’exiloit à Lyon , ôc révoqué le quatre Juillet fuivant.
A u furplus , un arrêt du Parlement de P a r is , a pro
noncé la féparation des deux époux ; c’efl: aux Parties à
s’en plaindre, 6c non à ma bclle-mcre, qui n’eft encore
ici que l’inftrumcnt d’une vengeance particulière.
O n prétend ( dans la note des pages 18 6c 19 du
mémoire ) } que mon mari a emprunté depuis 1 7 7 3 ,
ju lq u cn 177-7 » une fomme de i i z , o o o liv. 6c qu’il a
aliéné pour 1 3 5 ,6 7 6 liv. de fes capitaux.
J’obferverai d’abord fur ce tableau qu’on a eu la pru
�7f
dente précaution de ne donner , ni le nom des acquéreurs
des fonds prétendus aliénés, ni le nom des Notaires qui
ont reçu les contrats , ni leurs dates ; on a craint avec
raifon , que dans une vérification que j ’en aurois faite ,
je ne prouvafle , ou que ces aliénations avoient été faites
pour acquitter les charges anciennes des b ie n s , ou pen
dant mon abfcncc ; ou qu’enfin , elles étoient l’ouvrage
de la curatrice, &. par confëqucnt de ceux qui la mettent
en avant.
O n donne bien des dates vraies ou fauffes des préten
dus emprunts , mais 011 fe garde d’y nommer les prê
teurs, ni les Notaires qui ont reçu les a£tes , on craint
toujours ma vérification.
Si on peut ajouter la moindre foi à ces a£bes, il cil
évident que les emprunts des 3 1 0 0 0 liv. des t 9 M ai 8c
20 Juin 1 7 7 3 , ont été faits dans la minorité de mon
m a r i, fous J’autorifation du fieur Scytrc , fon curateur,
placé dans fa confiance par la c a b a le , à l’exclufion d’un
ancien Procureur, qui avoit géré les affaires de mon beaupere pendant trente ans.
Le prétendu emprunt de 3 2 0 0 0 liv. du 1 6 Novem
bre 1 7 7 5 , cil fait fans que j ’en aie eu même connoiflance.; c’étoit dans Je fort des pourfuites de l’affaire
des affiches. Je prouverai l’influence de la cabale fur ces
emprunts.
Q u ’on fe rappelle que M . de Cabris me cachoit cette
a ffa ire, que je fus obligée d’abandonner à fes gens d’af
faires Sc à la cabale qui me pourfuivoit moi-même ; j ’ai
ci-devant tranfcrit.une lettre de M . de Vauvenargues; que
je ne puis m’empêcher de répéter i c i , » on a i n t é r ê t de
�7»
j> cabaler contre vous , je prends donc la liberté de vous
>3 prier de refter en repos , & de ne plus vous mêler de
î> cette affaire ; je vous confeillerois moins l’inaction ,
5j fi je ne voyois contre vous que des gens en fous-ordre;
3) mais dès que la fam ille s'en m êle, reftez en repos, s’il
33 eft poilible 33.
Le curateur de M . de Cabris , devenu Ton homme de
confiance & Ton fondé de pouvoir depuis fa m a jo rité,
lui nécefiitoit des emprunts pour de prétendues dépenfes
fecrettes. C e Procureur faifoit les emprunts , les reccv o i t , en faifoit l’emploi , Sc ils en comptoient enfuite
enfemble comme ils l’cntcndoient.
Les autres emprunts qu’on date des 4 & 1 o Juillet
1 7 7 6 , 5 Mars 1 7 7 7 , montans enfemble à 5 8 0 0 0 1.
ont été faits dans mon abfence : la dame de Lombard
& la cabale, ne nieront pas qu’à ces époques j’étois à Lyon
êc à Paris : je demande à toute la Province qui efl - ce
qui difpofoic de mon mari dans ces momens? C ’étoit la
cabale qui lui faifoit contracter des engagemens, lorfque
j ’étois à deux cens lieues de l u i , 6c l’on ofe aujour
d’hui m ’en rendre refponfablc.
Lors de l’arrangement
de l’affaire
des affiches en
1 7 7 6 , mon mari fe rendit à A ix avec le ficu'r Scytre,
fon fondé de pouvoir, fouvent cité par les deux Par
ties dans cette a ffa ire, 6c dont je vais parler plus ample
ment dans un inftant.
Le fieur A lziari , Procureur de GrafTe , collègue du
fieur Scytre -, devenu Procureur de la dame douairière
de Cabris , dans la demande en interdiction de fon fils,
qui a toujours occupé depuis pour elle dans fa qualité de
curatrice ,
�73
Curatrice,& qui occupé encore pour elle, écrivoic à mon mari
le 8 Juin i 77<j> dans un moment où Ion attendoit l'ar
rangement de Pafïaire des affiches 33,enfiniffant ce procès,
33 je préfume que vous aurez befoin de fonds ; il y a
33 peu de jours, Alavéne Ce trouvant chez m o i, un parti3j culier
vint me demander fix mille livres à lui faire
33 prêter ?*Lorfqii’il fut p a r t i, Alavéne me prit à part ,
33 8c me dit que vous pourriez en avoir befoin , & que
» je pouvois vous en écrire, du depuis 6c pas plus loin que
33 de ce matin , j’ai arrêté quelqu’un qui cherchoit du
»» papier pour mander dehors dix-neuf mille livres ,
3) qu’on lui faifoit placer au cinq pour cent ; comme je
33 ne compte pas beaucoup fur Alavéne , 8c dans la
s» crainte d’ailleurs de vous fâcher , -j’ai détourné la
33 perfonne du placement , en lui faifant envifager un
33 manque de sûreté ; fi ces dix-neuf mille livres peuvent
3j vous être agréables, ayez la bonté de m ’adreffer par
33 le retour du courier , 8c fans retard , une procuration
originale pour emprunter cette fomme de qui j e trou33 verai a propos en conftitution
de rente au denier
3J v i n g t , les intérêts payables à G r a ffe ,
avec
pouvoir
33 d ’obliger à raifon de cet emprunt , vos biens à toute
3> Cour. Le prêteur eft un honnête citoyen , avec lequel
33 vous ne ferez pas fâché d ’avoir affaire; fi par hazard
33
cette fomme étoic placée d’ici au retour du porteur ,
33
je pourrai la trouver d’ailleurs. M es clercs ligneront
33 l’a&e fans favoir rien de rien , 6c la chofe n’ébruitera
33 p a s , fi vous êtes bien aife de remplir la procuratioa
x> du nom d ’ A lavhie , c’eifc égal , &
fi vous voulez
» qu’il ignore ceci vous pouvez la remplir de mon nom ,
K
�74
53 Sc me marquer comment
je
dois difpofcr de cet
jj argent ; mais fur le tout j’attends votre réponfe par
îj le retour du courrier , crainte de manquer le prêt, ou
jj de conftituer le prêteur en perte de fruit de fon argent.
V o ilà qui indique aflfez les prêts des 4 8c 10 Juillet
1 7 7 5 , dont je viens de parler ôc de quelle maniéré les
agens de la cabale conduifoicnt mon mari k faire des
e mpr unt s.
Je défie que depuis mon retour auprès de lui à la fin
d t Juillet 1 7 7 7 , jufqu’au 2 4 Février , jour de m onenlevcment , on cite un feul emprunt , 8c cependant alors ,
nous'foutcnions l’afFairc la plus grave qu’il eût eu de fa
vie.
Q u a n t à la dette de 6 1 , 0 0 0 liv. du fieur S e y tre , je
ne lui ai jamais connu de titre ; on ne m ’en préfente
aucun ; je ne trouve d’autre indication de cette créance ,
dont je n’ai jamais entendu parler , que l’avis de parens
du 2 4 Février 1 7 7 8 .
M c Seytre avoit été le curateur de mon mari , par le
choix de fes beaux-frercs ; il avoit géré en cette qualité ;
la même faveur lui procura des pouvoirs à la majorité
de mon mari ; il a adminiftré toute notre fortune juf
qu’au moment de l’interdi&ion.
En fa qualité de Procureur au Siège , il
étoit le
défenfeur de mon m ari, fur la demande de fa mere , 8c
contre les pourfuites des parens qui lui avoient afluré
cette adminiffcration.
Par la délibération des mêmes parens, douze jours après
la fentence d’iruerdi&ion dont il y avoit appel f u i v i , il
cft d it , art. p > que madame la douairiere requiert qu’ i t
�lui fo it donné pouvoir de régler ô arrêter les comptes avec
les gens d'affaires dudit fieur de Cabris
,
(Ton fils )
notam
ment avec M e Seytre fon Procureur général y emprunter
en capital de penfion ( rente conftituée) ou autrement avec
,
intérêts pour payer les avances quipeuvent avoir été fa ites
& les autres dettes urgentes que le fieur de Cabris peut avoir
contractées
& obliger a cet effet les biens & revenus dudit
fieur de Cabris 3 ou d ’y pourvoir autrement par indications
fu r les fermiers , f i la dame de Lombard en trouve le moyen.
Les parens , à leur tête le Bailli de Mirabeau , reli
gieux profès , votent tous ces pouvoirs , & le Juge les
copie dans fa fentencc dans les mêmes termes :
Les baux faits par la curatrice annoncent la déléga
tion de cette dette pour i i o o o 1.
Y
a-t-il eu un compte entre le prétendu créancier &c
là curatrice ? C ’eft ce qui fe développera par celui qu’elle
doit rendre elle-même. Je vois par les regiitres du contrôle
de GraiTc , une ailignation donnée en i 7 8 3 , à la requête
de la dame douairiere de C a b r i s , au (leur Seytre , en
revifion du compte de Padminiftration que ce Procureur
avoit eue des biens de mon mari ; ailignation procurée
par une brouillerie furvenuc entre le fieur .Alziary , les
autres confcils de la curatrice & le fieur Seytre , Sc reftéc fans fuite , lorfque l’admilîion de ma requête au
Confeil fut connue.
J’ai déjà fait voir que le fieur A lzia ry, Procureur de ma
bclle-merc , celui qui a obtenu en cette q u a lité, la fentenccd’interdiilion , étoit en coçrefpondance avec M. de
C abris, qu’il lui propofoit des emprunts: voici la p re u v e
qu’il lui rendoit d’autres fervi.ces dans l’adminiAracion
K ij
�7<>
de Tes affaires. Le 1 1 Juin i 7 7 6 , il lui écrivit: » j’ai
33 l’honneur de vous joindre ici pour 1 1 5 o 1. de papiers
»
que M , Ricord , c a d e t , m ’a fourni fur Marfeille ,
53 payable au premier .Tuilier ; j ’y ai mis des endoÎTe» mens en blanc ; vous voudrez bien m’accufer la récep« tion de cette fomme ; M . Girard l’aîné , n’a pu fe
5} charger de vos mandats, 8c il m’a fallu faire l’im » poilible pour les placer ; ils étoient à trop long jours
îî pour lin n é g o c ia n t, puifcjue l’un étoit pour tout F é vricr, & l’autre à la Pâques.
Les (leurs Seytre & A lziary , Procureurs au Siege de
G rade , pourfuivant &
défendant l’interdi£tion de mon
m a r i , étoient tous les deux à la fois fes agens.
Je trouye au poflcripium de cette lettre , 33 je déca3j chetre ma lettre pour avoir l’honneur de vous obfer33 ver , que puifque vous êtes à A i x , vous devez con33
fulter à l’effet d’obtenir une réduQion fur les épices
33 de votre procès contre la communauté de Cabris. L a
33 levée de la fentcnce vous coûta près de 1 0 0 louis; les
33 épices du Siege z j o o liv. celles de M . de M artigny
»
1 2 5 0 liv. & le furplus , pour les droits royaux. D ès
33 que ce procès doit être arbitré , ou quand même il
33
devroit refter là , il doit y avoir une voie pour faire
>3 reftituer les épices prifes en fus de la taxe ordinaire , bc
cette reftitution ira au moins à 2 4 0 0 liv. ; je fens
3> bien que vous ne retirerez pas les petites portions qui
peuvent compéter à M . Floris & Car...; mais vous n’en
33 ferez pas grâce à M . d’Andon , & à M . de M artigny,
33
33
qui vous ont rendu des bons fcrviccs dans l’occa-
33
fion. Veuillez j moniïcur, pour votre intérêt Sc plus
�77 '
Jî encore pour votre fatisfa&ion , ne pas négliger ccc
» article; les perfonnes qui font fans crédit obtiennent
« ôc vos plaintes teilcroicnt-elles fans fuccès.
M c Floris a prononcé Pinterdi&ion de mon mari ,
après avoir fait juger en fa faveur , qu’il n’y avoit lieu à
la réeufation propofée contre lui.
Les i o o o o o liv. rappellécs dans le mémoire de dettes
criardes aux m archands, ouvriers &C fourniiTeurs , me
paroît un être de raifon.
'D epu is mon m ariage, je n’ai jamais fait & jamais
connu de ces fortes de dettes dans la maifon.
Il ne s’en eft contracté aucune depuis mon retour au
mois de Juillet i 7 7 7 , M . de Cabris auroit-il fait pour
1 0 0 0 0 0 liv. de dettes, de fourniiTeurs dans les quinze
mois de mon abfence ?
C es fourniiTeurs qui voyoient fous leurs yenx attaquer
l ’état de M . de Cabris, auroient-ils gardé le filcncedans
les huit mois écoulés depuis mon retour jufqu’à mon
enlcvcment ?
Il y a des négocians fore riches à G r a il e , mais ils
font leur commerce dehors ; les fourniiTeurs comme par
tout ailleurs, y font avec de fort petits fonds j ne peu
vent comme ceux, des petites villes , faire que des avan
ces journalières.
Les ouvriers n’y ont que leurs bras pour leur fubfiftance.
Le fieur B re n e t, fculpteur de Paris , avoit fourni des
bronzes
des meubles par commiiîion à M . de C a b r i s ,
je favois que le compte n’en étoit pas foldé ; ces mêmes
�7*
effets doivent être encore dans notre maifon ; cet objet
quand la curatrice auroit'acquitté quelque chofe là-dcffus , ne peut pas être une dillipation ; on auroit bien de
la peine à en trouver dans les aliénations , dans les
emprunts & dans les dettes annoncées dans le m ém oire,
quand on en pourroit fuppofer l ’exiftence.
Ces aliénations montent , comme on
Uy.
l’a vu , à ............... ........................................ .•
135000
Les emprunts à .........................................
112000
Q u ’on joigne à cela les fuppofés cent
mille liv. de dettes criardes, c i ...............
100000
Les foixante - un mille livres dues à,
M c S c y trc , encore plus incertaines, ci • ■
pm
m
'
O n ne trouvera q u e ................................
iiooo
1
418000
Sur cela je trouve un emploi dans les
propres fonds de mon mari , que mon
pere ne défapprouvoit pas :
L a conitru£tton de la maifon neuve ,
portée dans le mémoire à ...........................
200000
Pour quatre-vingt mille livres de meu
bles qui y ont été portées, ci U n e bibliothèque d e .................... ...
U n jardin conilruit à Cabris , qui a
coûté plus de
„ D es mouUns à. h u ile , conffcruits à neuf,
Cil addition aux anciens, 6c qui pour une
80000
11000
jjoqo
1
�dépenfe de vingt mille livres, augmentent
/¿Vt
le revenu de la terre de dix mille liv. ri • •
20000
L e prêt fait en 1 7 7 5 à madame la
marquife de M ira b ea u ................................
20000
T o ta l de l’e m p lo i................................
347000
Il
s’enfuivroit toujours que mon mari ayant augmente
par des améliorations fa terre de i o o o o l i v . de revenu
n’auroit diminué fes capitaux que de 7 1 000 liv. Il jouiffoit de cinquante mille liv. de ren te; il habitoit fa terre,
où il n’en dépenfoit pas dix.
Q u ’on joigne à cela le cout énorme de l’affaire des
affiches , que fon malheur ou fon imprudence lui avoicnc
attirée, les dépenfes fecretcs que les gens d’aifaires impof o i e n t , & dont perfonne autre qu’eux n ’avoit connoiffancc, l’argent qu’il fallut verfer partout, comme le difent
mes adverfaircs eu x-m êm es, page 8 , ligne 5 :
O n trouvera encore que le pillage énorme des fousordres fe prenoit fur les économies.
Loin que les revenus euffent été touchés d ’avance ,
comme on ofe l’annoncer à la même note , ceux qui
étoient échus à Noël de 1 7 7 7 , furent faifis par un créan
cier ap ofté, par a& c recordé de Lautior, huiiTier, du 2 4
Décem bre 1 7 7 7 ; & le même A lz ia r y , procureur de la
dame douairicre de C a b r i s , y cil conftitué procureur du
fa ifiifa n t, c’eft elle à qui on a aiTuré les revenus échus
avant l’interdi&ion.
J’ai déjà obfervé que le ficur Seytre avoit adminiftré
�8q
pour mon mari jufqu’au moment de l’interdi&ion * s’il y
avoit eu des revenus touchés par anticipation, ils l’auroient été par le fieur S e y tre , qui en a compté à la dame
de L o m b a r d , douairière de Cabris , fuivant l’avis de
parens.
*
Q uan t à moi perfonnellement, je n’ai r e ç u , pendant
les quinze mois que j’ai paiTés à Lyon & à Paris en 1 7 7 6
1 777»
5 4 ° ° ^ v* 011
mon m ari, ou par Tes ordres,
& je défie qu’on me cite une feule dette ; je n’ai
touçhé , dans les fept mois qui ont fuivi mon
retour
jufqu’à mon enlèvem ent, que 6 1 6 8 Hv. des mains du
fieur Seytre, fur cette rente j ’ai tenu la maifon fans aucun
mémoire de fourni fle u r , & j ’ai foutenu le procès d’interdi&ion.
M . de C a b ris, à cette ép o que, vouloit bien me laifler
faire toute la rece tte, èc je pourrois bien répondre qu’il
ne lui a pas été délivré un fol.
Je défie encore que depuis mon mariage jufqu’à l’époque
de mon enlevcment , on me cite une feule dette que j’aye
contra&éc ni en P ro v e n c e , ni à L y o n , ni à Paris, à l’ex
ception de cinquante louis que j’ai empruntés en mon
nom & fur mon engagement du fieur B on in, négociant de
G r a d e , au moment où mon mari &c moi nous partions
pour A ix , pour y fuivre l’appel de la fentence d’interd i& i o n , & que la| cabale avoit fait faifir tous nos re
venus pour nous empêcher d’aller nous défendre au
Parlement. C ’eft là ,la feule reponfe que je daigne oppofer
à tous les reproches de diflipation qu’on me fait dans le
mémoire , & f ur lefquels je porte le défi le plus formel à
■mes adverfaires.
Je
�8i
Je n’ai jamais eu de procuration de mon m a r i, dans
tout le terris que j’ai été avec l ui , fes biens ont toujours
été adminiftrés par le Heur Seytre, comme je l’ai déjà dit.
L e 3 O & o b re 1 7 7 7 mon mari me donna une procu
ration pour l’adminiftration de Tes biens , avec pouvoir
d’aliéner ou emprunter jufqu’à concurrence de 1 0 0 0 0 1.;
je n’en ai jamais fait ufage ; je ne l’ai pas même fait
fignifier au ficur Scy tre, qui a continué de gérer, comme
auparavant, jufqu’au moment de l’interdi&ion.
Q u o i , M. de Cabris qui donr.oic au fieur A lziary ,
procureur de ma bellc-merc, des procurations pour fairei
des emprunts effe&ifs , qui en donnoit au fieur Scytre Sc
à tant d’autres que je ne connois p a s , cft-il devenu cou
pable, pour en avoir donné une à fa fem m e, & fa femme
a-t-elle fait un crime de l’avoir reçue !
Q u ’on me repréfente toutes les aliénations faites par
mon mari , tous les emprunts qu’on a datés à la page
29 du m ém oire, fans vouloir donner le nom ni des n o
taires, ni des Parties, je ferai voir que tous ces a&es ,
s’ils ex ifte n t, ont été pafles en vertu de procurations de
M . de Cabris , contenant des pouvoirs bien plus étendus
que ceux de la procuration qu’on me reproche t a n t , êc
de laquelle je n’ai jamais fait uiage. O n ne craignoic
donc dans ce témoiçnaiïc
P & du retour de la confiance du
mari à fa femme , que de lui voir cxpulfer les gens d’af
faires placés par la c a b a le , on craignoic de voir s’établir
l’ordre dans une maifon où l’on avoit introduit le défordre;
on ne redoutoit donc que de voir perdre à ces gens d ’af fa ir es
l’afeendant procuré par la cabale.
La procuration qu’on date du 4 O & o b r e , l e n d e m a i n
L
�de cellc dont je viens de parler, copiée à la page 1 9
du m ém oire, donnant p ou vo ir, entr’autres choies, d’em
prunter ou vendre des fonds jufqulà concurrence de cent
mille livres , nommer & deilituer tous Officiers de juitice,
avec révocation de toute autre procuration ; cette procu
ration cil une de ces fuppofitions monilrueufcs que la
cabale s’cit fouvent permifes dans cette affaire ; en voici
les. preuves.
i°. Rien ne juitifie que cette procuration ait jamais
cxifté dans mes main» ni dans celles de mon mari ; dans
i’hiilorique qu’en ont fait les adverfaircs , en l’annonçant
au Parlement d’ A ix dans le procès d'interdiction , ils ont
dit qu’elle s’étoit trouvée dans l’appartement de M . de
Cabris , loriqu’on enfonça les portes du chateau fous
prétexte d’en faire l’inventaire , en vertu de la fcntcnce
de GraiTe, dans le tems que nous fuivions fur l’appel
k Aix.
20. Cette procuration fignee, dit-on , d’un Notaire de
de deux témoins , n’a jamais été contrôlée ; on fuppofe
que le Notaire fignataire y déclare au bas que M . de
Cabris s’eil chargé de faire remplir cette formalité de con
trôle, prévarication puniflable de l’Officier qui ne pouvoir
pas ignorer qu’il en étoit feul tenu. La vraie procuration
que j’ai reçue le 3 O & o b r c , cil portée au contrôle par le
Notaire le 1 4 , & on veut qu’il n’y porte pas celle du 4 ,
^u’il a dans fon porte-feuille, qu’il fait légalifer à GraiTc
le même jour.
3 °* Le N o ta ir e , prétendu fignataire, entendu dans
1 enquete faite le 1 1 Novembre fur l’intcrdiction,y détaillé
tous les actes qu’il a reçus pour mon m ari, jufqu’à la pro-
�83
curation du 3 O&obre. Il ne parle point de celle fnppofée
faite le 4 , ÔC donc ce Notaire n’auroit pu perdre le fôuvcnir,
fi elle avoit exifté; les témoins qu’on veut qui l’ayent foufcrite, entendus dans la même enquête, n’en font aucune
mention.
4 0. Cette procuration , datée en tête du premier O c
tobre , & du 4 par un renvoi à la fin de l’a c te , fuppofe un procureur général & fp é c ia l, dont le nom eft
laide en blanc. Le commettant y dit dans le corps de
l’acte, qu’il approuve tout ce qui fera fait par fondit pro
cureur conftitué ; dans la procuration de la veille je fuis
nommée par mon nom , indiquée en qualité de procuratrice ; tout ce qui annonce ma geftion, eft défigné fous
une dénomination fém inine: il y eft d it , que le commet*
tant approuve tout ce qui fera par ladite dame fa it & géré.
Pourquoi m ’applique-t-on cette procuration fuppofée,
plutôt qu’à M c Seytrc , donc les pouvoirs fe trouvoient
nominativement révoqués par celle de la veille 3 O c to
bre, que j’avois en mes m a in s, plutôt que tous ceux qui
en avoient reçu de M . de Cabris.
50. Cette prétendue procuration du 4 révoquoit celle
du 3 ; je reitois fans pouvoirs, dès qu’elle étoit hors de
mes mains ; je m’en ferois donc nantie , comme j ’avois
fait de celle où j’étois nommée, ou pour recevoir, ou pour
ne pas voir contrarier les opératiçns dont on mc fuppofe le
p ro je t, par ceux à qui cette révocation pouvoit être rcm if e , ou qui pourroient la trouver.
Enfin , ce qui eft encore plus étonn ant, cette procu
ration paifée le 4 , Ce. trouve lcgalifés par le L i c u r c n a n r
Particulier de G rade le 1 4 , dans le délai m ê m e d o n n é
L ij
�s 4.
pour le contrôle: la légalifation fuppofc qu’on avoit befoin
de l’envoyer dehors ; mon mari fuppofé com m ettan t, moi
fuppoféc procuratrice fo n d é e , étions tous deux fur les
lieux ; c’ étoit là où l’adminiftration devoit être faite :
cette procuration fe trouve trois mois après dans le ca
binet de mon mari , le nom du procureur en blanc ,
elle n’eft pas contrôlée , 8c elle eft nantie d’une légali
fation.
Q u e conclure de tout ceci ? Des horreurs dont je fuis
forcée de détourner les yeux ; il me fuffit de répeter que
je n’ai jamais reçu de pouvoir que ceux de la procuration
du 3 Octobre , 8c que je n’en ai jamais fait ufage.
Quand je retournai à Gratte au mois de Juillet 1 7 7 7 ,
mon mari me fit l’aveu que dans mon abfence on l’avoic
induit à faire un teftament trop favorable aux auteurs de
la fuggeftion
humiliant pour m o i , 6i nuifiblc aux inté
rêts de notre enfant ; il me témoigna fes delîrs de le
révoquer.
Si je fuis coupable d’avoir applaudi à ce deflein ,
j ’avoue ma fa u te; il fie un teftament m vftiquc, d’ufage
en P ro v e n c e , il m ’en rendit dépofitaire; ce dépôt cft
encore dans mes mains , nanti de tous les cachets.
Dans une requête préfenréc contre moi par le Bailli
de Mirabeau au Parlement d’A ix le 4 M ai 1 7 7 9 ; il dit
pofitivement qu’ i l y a beaucoup a dire fu r ce teftament t
dont les difpoftions ont été difeutées lors de l'arrêt de la
Cour ( fur l'interdiction) ; comment difeute-on les difpoiitions d ’ u n teftament myftique tant qu’il eft cacheté ?
Q u i a pu mettre fous les yeux du Parlement d’Aÿc ce
dépôt qui neft jamais forci de mes mains? L ’a-t-on en-
�«5
core trouvé dans. le cabinet de mon mari ? Je dois m ’interdire toure réflexion à cet égard.
M ais fi on fuppofe que j ’ai furpris un teftament à mon
mari , que ce teftament contient des difpofitions en ma
fa v e u r, comment allier ces prétendues captations avec
la réfiftancc que j’ai toujours oppoféc à fon interdiction,
qui m ’en aiTuroit l’irrévocabilité ? A v e c quels avantages
je rétorquerois les objections de mes ennem is, fi je rapprochois toutes les pieccs qu’ils fc procuroient depuis trois
ans , pour parvenir à l’interdiction de mon mari?
P R E U V E S
Que le marquis de Cabris } mon mari ¡ n ' a jamais été dans
le cas de l ’ interdiclion prononcée contre lui.
Q u e le s m a uva is traite mens exercés f u r f a p erfon n e 3 p a r les
agens de la cabale 3 ont eu p o u r objet d ya lién e r f a ra ifon .
D iJJîp a tion des biens p en d a n t la cu ra telle s leurs p a rta g es
entre les auteurs du com plot.
J’ai déjà annoncé que je ne me livrois à cette difcuffion
pafïagcrc d’une procédure anéantie par l’arrêt du Confeil
des Dépêches du i 5 A oût 1 7 8 3 , que pour développer^
les moyens mis en ufage pour nous anéantir, à quels mal
heurs mon m ari, ma fille 6c moi avons été en but t e, fie
com m ent, après s’êcre emparés de toute notre fortune, en
avoir reçu les revenus par anticipation jufqu’cn 1 78 5-, on
nous 1ai île ici tous les trois, depuis il x. mois fri ns alunons.
La dame de Lombard établit dans fon mémoire que
la démence du marquis de Cabris cft une m a l a d i e héré
ditaire , 6v pour détourner les regards fixés fur elle à ces
�Si
KTOts ( i ) , elle va remuer les cendres d’un époux refpectable, toujours cher à Ton pays , où il jouifloit de la plus
grande coniidération , utile à fa province , où il avoic
occupé des places oonfidérables , ducs également h f;i
naiflance & à fa conduite ; un mari dont les iages difpofitions lui ont ailuré cinq mille livres de rente fur les
biens de fon fils , au lieu des mille liv. de revenus qu’elle
trouvoic dans fa propre dot.
Elle cite l’exemple d’une de fes filles, témoignage dou
teu x, Si donc tout le dérangement de fanté provient des
mauvais traitemens de fa mere , de fon attention à pré
venir tous les foulagemcns qui pouvoient adoucir ou éloi
gner ce m a l, à la refTcrrer quand je la faifois vivre avec fon
frere & moi dans le château de Cabris, loin des yeux de
l’auteur de fes perfécutions devenu l’objet de fa haîne.
La dame de Lombard a trois autres filles, qui toutes
ont des enfans ( mcfdames de Gourdon > de Gras & de
Sts. Ce^aire ) : le mariage les a enlevées de bonne heure
à la domination de leur mere ; ces dames ni leurs enfans
n’ont jamais donné de fignes de folie ; elles ne verroient
sûrement pas avec indifférence cette accufation de leur
m e re , d’une démence héréditaire dans leur ra ce, fi leurs
maris n’étoient pas les ennemis publics du Marquis de
Cabris.
( 0 Le fieur Seytre m'écrit le premier Mars 1785 , en parlant de la dame de
Lombard : M ia cab alc q Ui fait mouvoir cette tctc f o i b l e , qui ne fait pas s’ad» miniftrer c llc -t n c m e ; & dans une autre lettre du 15 du même m o is , qu’on
M abufe de la foiblcflc d'une tête qui auroit befoin d'un curateur, au lieu d'être
» curatrice.
�8?
Après cette preuve de démence que la dame de Lom
bard prétend que mon mari a apportée du fein de fa
m e r e , elle veut en trouver des preuves dans un confcntement fouferit de lui & du Jicur Seytre ¡fo u curateur eux
caufcs , du i y A v r il 1 7 7 >pour que fon époufe obtienne
du M inifire du R oi un ordre qui l'e x ile a Brie en Limofin ,
oit cet ordre lui fera fignifié.
On fc rappelle par la date de cet é c r i t , que c’étoit
l ’époque de l ’ affaire des affiches; mon mari étoit menacé
des pourfuites les plus rigoureufes , il en étoit averti par
fa famille , par les gens fages qui avoient la procédure
fous les yeux ; j’en ai rapporté les preuves.
O n fc rappelle qu’il m ’envoya à Paris pour intérefler
mon pere : fes Confeils , fes amis penioient qu’un exil
fort éloigné pouvoir arrêter tout ; c’cfl: ce que m ’ccrivoit
le’ marquis de Vauvenargucs à Pari», où j’étois a lo rs;
■
>3 c’c ftma derniere reflource , dit-il, dans ia lettre, ou
>3 un coup d ’autorité qu’on ne peut guercs fc flatter d’eb»3 tenir; M. le marquis de Mirabeau pourroit cependant
»3 faire quelque tentative pour cela»'. M on mari m ’avoic
en effet rem is, à mon d ép art, l ’ écrit copié page 2 6 du
mémoire de la dame de Lombard 3 écrit médité dans deS
afTemblés de C o n fe ils, de parens & de gens d’affaires j
fouferit du curateur , homme qui a joué un rôle fi impor
tant dans toutes les affaires de mon mari , & qui î’a autorifé , ou qui a conrracté pour l u i , comme mandataire,
dans prcfqtic tous les engagemens exécutés par la cura
trice. Si cet écrit eût été une preuve de démence , 1e
fleur Seytrc, Confcil du marquis de C a b ris, fon curateur
donné par la fa m ille , homme confommé dans le* at-
�8S
fa irc s, auroit donc été plus fou'pçonnable de démence
que le mineur qu’il autorifoit ? C ’efl le même homme
dont les parens ont foin de ilipulcr le fort au moment
de l’interdiction, & que la curatrice elle-même a traité
plus favorablement encore.
C e t écrit remis dans mes mains par mon mari , fut
depofé par moi dans celles de mon père dont je venois
implorer les fccours.
O n fe rappelcra encore de la lettre de mon pere, du z
Juin 1 7 7 4 ,
où il me marque :
réunifiez ces deux
» hommes-là , ma fille (M . le marquis de Vauvcnargues
>3 & M . de Gourdon ) , ne vous conduifcz que par leurs
m a v is, 5c fi quelqu'un y récalcitre 3 i l fa u t lui donner la
» peur 3 pour qu’ i l gagne la Montagne & laiffe f a procum ration. A u refle , il cil certaines gens qui ne trouve»
roient pas bonnes certaines retraites ; j’efpere que vous
m m’ entende
Je demande s’il efl poilible que mon pere eut pu parler
comme c e la , s’il n’avoit pas eu entre fes mains cet écrit
de mon mari ; 5c comment cet écrit que j’ai réclamé de
mon pere par une.lettre du z 6 Novembre 1 7 8 z reliée
fans réj)onfc, lettre que j’ai rendue publique dans un mé
moire imprimé de 1 7 8 3 ; comment cet écrit enfin f e
trouve aujourd’ hui tout a la fo is dépofé ( page 1 6 , pre
mier alinéa ) dans les regifires de la Police 3 & comment ma
belle - me/c , qui ne pénétré pas dans ce depqt 3 peut en
avoir une copie !
L ’autre écrit du 6 Juillet 1 7 7 ^ , ne paroîtra à toute
perfonne fenfée qu’un forfait entre un malade peut-être
trop
�trop riffc&é de Ton niai , Sc un homme qui promectoic
de le guérir, ou ce billet, s 'i l e x ifle , ne prouve que l’ar
tifice d ’un cfpion qui a profité d’un accès de vapeurs du
malade qu’on lui avoit. confié , c ’cft: le iîcur Garnier , fecrétaire de M . de Gras , l’un des beaux-freres du marquis
de Cabris , qui a reçu cct écrit des mains de mon mari.
Il en réfulte qu’on avoit depuis lo n g -t c m s le projet
de le détruire, que dès 1 7 7 6 on cherchoit à s’en aiTurer
les moyens ; que M. de Gras , qui a reçu cet écrit des
mains de Ton fecrétairc qui en a laifle faire ufage deux
ans après, étoit l’ennemi caché de mon ma r i , dans le
cems qu’il paroifloit le fecourir dans fes infirmités.
La date de ce billet prouve qu’il a été donné dans le
moment oh mon mari venoit de finir l’affaire des affiches,
que la dame de Lombard dit elle-même (page 8 ligne 3)
avoir f a i ll i a coûter la vie a fort fils par les chagrins dont
elle le pénétra.
A u mois de Septembre 1 7 7 7 mon mari fe bleiïapar
hafard à la cuiiTe, avec un couteau; je crus en devoir
donner avis à la dame de Lom bard fa merc , pour la
prier de m ’envoyer de la ville des gens de l’art.
Le malade jugea l’accident fi peu im portant, qu’il ne
voulut pas même leur lailTer panfer la plaie qui fe guérit
d’elle-même comme une égratignure.
La dame de Lombard prétend que le médecin dans
fa dépofition , dans l’enquête qu’elle fit en Décembre
1777,
évalue le fang
répandu
de cct
accident h
cinq livres. Je ne voudrois pas d’autres preuves contre
toutes les dépofitions de cette enquête , à peu près de
même portée , &c je demande à un h o m m e de l’art ii
M
�90
■ une bleflurc par laquelle un malade perd en peu de tems
cinq livres de f a n g , fc guérie aufîi aifément fans panfement & fans retour d ’accidens , fi le bleiïe qui vient de
perdre cinq livres de fang , peut être dans cet état de
vivacité &C de force cù ce témoin nous peint le malade.
Je puis au moins inftruirc le public fur les moyens
qu’on employoit pour avoir des témoins dans cette en
quête. Il exifte une lettre que m’écrivit le fieur Cruvc ,
aubergifte de Frejus , chez lequel logeoit^jM. de Cabris ,
du i 6 Juitv 1 7 7 9 ,
où il d i t : » au mois d’Oiitobrc
» 1 7 7 7 , M.
Commandeur de Mirabeau &c M . de
» Clapiers , le Chevalier de St. L o u is , vinrent coucher
» à F reju s, à mon auberge. Le foir le domeftique me
« dit qu’on vouloir me faire entendre en tém oin, comme
>3 M . de Cabris étoic fou lorfqu’il pafTa à mon auberge
>5 (avec Garnier le 6 Juillet 1 7 7 6 ) , àc étant monté à
« l’appartement de ces meilleurs , M . de Clapiers m ’in« teirogca beaucoup là-deflus ,
me demanda H cela
« n’étoit pas vrai , &c qu’ils favoient qu’il avoit fait des
m folies à fouper , à quoi je répondis que cela n’étoit
» p a s, que M . le Marquis fc faifoit fervir fcul dans fa
» chambre ordinairem ent, qu’au contraire ce jour-ià il
» mangea à la table d’hôte , quoiqu’il ne parût pas aufîi
”
gai qu’à l’ordinaire, &c qu’il parût même occupé de
”
”
quelque chofe , ce qui me fît demander à fon compagnon de voyage (ce même ficur Garnier) qui me ré-
n pondit que l’on n’étoit pas content quand l’on avoit
53 perdu Ton procès.
La dame de Lombard ne croit pas que les vapeurs
foient faites pour les campagnes qu’elle h a b ite, elle les
�91
renvoyé aux habitans des villes (page 1 7 , ligne 1 5) du
niémoire : voici ce que m ’écrit lé ficur Scytre le 3 o A v ril
1 7 8 3 : « la maladie de madame la douairière fa/ors à
»> Cabris) n’écoit que des vapeurs , & les vifites que le
« médecin lui a faites , pailent p o u rjc compte de M . le
» marquis qui n’en a certainement pas profité.
Le iieur G aytc , avocat de la dame de Lombard ,
m ’ecrit a Lyon le 27 Juillet 1 7 7 6 ( 1 1 jours après Je
billet fuppofé fait à Garnicr) : >3 il cft vrai que M . de
» Cabris revint d ’A ix avec des vapeurs , mais elles fc
n f o n t d ijfip ées , & quelques jours après il en f u t d é >5 liv ré.
Je ne puis omettre ici une contradiéHon échappée k
mes perfécutcurs ;
à
la page 27 du mémoire il cft dit :
» que pendant quinze mois mon mari avoit été en état
» de démence & de fureur depuis le billet de 1 7 7 6 ,
» (dont on vient de parler) jufqu’à la fcène de Septembre
>» 1 7 7 7 (expreflions du mémoire).
A la page 2 4 voici comme on s’explique : » de retour
m auprès de lui
quand la fr ê n e n'a pu l'attirer ju fqu 'a
» elle tout confpira a f a perte 3 & des organes faciles a
>» fuccomber 3 ne purent tenir contre cette accumulation
jj d'infortunes le. délire s'empara de lui.
Et dans la requête en demande d’interdi£bion du 6
Novembre 1 7 7 7 il eft dit : »j que mon mari n’ efi fo u que
» depuis mon retour auprès de lui ( en Juillet 1 7 7 7 ) ».
Dans une lettre du 8 O & o brc 1 7 7 7 , écricc au Bailli
de Mirabeau par la dame de L o m b a rd , pour l’inviter à
venir confommer le projet d’interdi&ion , elle lui dit :
>» jjion fils eft dans un état qui ne fauroit être dépeint,
Mij
�91
» il cil fort malheureux pour madame votre nîece qu il
» ne foie tel que depuis fon retour ». Il refultc de
ces contradictions , que mon mari n’étoit fou ni en
1774,
ni en 1 7 7 6 , ni en 1 7 7 7 ; qu’on l’avoit fait
déclarer tel à força d’artifices ; qu’on- a voulu enfuite
le rendre tel à force de cruautés ; qu’il a été victime de
la plus
effrayante
pcrfécution.
L a dame de Lombard n’eft pas plus heureufe en raifonnemens ; elle prétend établir page 1 3 , qu’une en
quête qui-a ^our objet de prouver qu’un individu jouit
de fa rai fon , eft une preuve négative 8c inadmiiTible e»
juftice ; c’eft fur ces principes fans doute que les Juges
ont rejeté les déportions de quelques témoins honnêtes
de fon enquête, joints aux autres pour y donner du poids ,,
& qui atteftent unanimement du bon fens 8c de la raifon
de mon mari.
D e ce que dans une requête aux Juges de G rade *
pour demander à être autorifée à la pourfuitc de mes
droits , je dis que mon mari dans les liens de l’interdic
tion , je ne puis plus plaider fous fa puiffancc, la dame deLom bard tire encore cette conféqucnce vi& oricufe; m a is
enfin toujours e f t - i l v ra i q u ’ e lle é to it réd u ite a a vouer l a
D É M E N C E 3 q u o iq u ’ e lle l ’ eû t n iée auparavant 3 com m e e lle
l ’ a fia it encore d ep u is 3 tant i l e ft v r a i que l ’ o p in iâ tre té a
fo u te n ir le m enfonge 3 fia it tom ber en con tra d iction p e r p é
tu e lle . ( C ’cft la merc de mon mari qu’on fait parler ainil
de fon fils 8c de la femme de ce fils.)
La darne de Lombard obferve (page 3 5 , deuxième
alinéa) que j’avois amené à A ix mon mari &. ma fille 5.
clic dit ( page 40 , premier alinéa ) que je le menois.
�i
e
i? 3
comme un enfant docile, dans le public à A ix & même
au fpe&acle , &c en même tems elle allure ( page 3 9 ) ,
parlant de l’interrogatoire qu’il avoit fubi à A ix le 1 8
F é v r ie r , qu’elle ne peut pas s’empêcher de trouver raifonnable: cette amélioration de fon état étoit le fr u it de mes
Joins j ou de la nature que j ’ avois fç u feconder ( 1 ). Q uand
elle parle (page 27) des bains froids que je faifois prendre
à mon m a r i, voici fes termes : madame de Cabris fa ifo ity
difent-ils, cet ejj'ai , & pour l 'y encourager s s ’y précipitoit avec lui , ainji parlent les héroïnes de romans ; quels
font les témoins? N u l autre qu’ elle. La dame de Lom bard
en a fans doute de meilleurs des foins qu’elle donnoit à
fon fils quand il étoit avec m o i, quand elle ne le voyoit
pas } quand elle perfiiloit à lui faire refufer la porte.
E ft - c e une contradiction aflez cara<ftérifée , de faire
interdire fon fils comme fou , & enfuite de le faire com T
paroître dans un procès verbal devant un juge trop pré
venu , de lui faire déclarer qu’il a à fon feul fervice la
nommée M a ria n n e , femme de chambre de la dame fa
mere , qui n’a jamais>quitté le fervice de madame la
douairiere, & qui eft encore avec elle i c i ; de lui faire
compter le nombre de fes dom eftiques, de le rendre le
conducteur de ce Juge dans les appartemens du château*
pour les lui m ontrer, Sc les difFérens lits où les habitans
de ce château couchoient, de faire configner de fa bouche
dans le procès v e rb a l, des éloges infinis du cœur de fx
m ere, de la fagefle de fon adm iniftration, & des injures
(1 ) Depuis la demande d’interdiftion jufqu’après mon enlevement d’auprês d*
mon m a r i , la dame de Lombard n’a pas .même apperçu fon fils.
�94
contre fa fem m e, & de lui faire requérir enfin que le touc
foit configné dans le procès verbal !
Je quitte toutes ces abfurdités dont le détail me me*
neroit trop loin pour me réduire à un fcul point de fait.
Je fouriens que mon mari n’étoit point en démence lors
de Patraque de fa merc pour le faire interdire comme tel
en i 7 7 7 ; &; j e l e p r o u v e , par fes interrogatoires devant
le Juge de Graflc ( 1 ) , & aii Parlement d’A ix : ces inter
rogatoires ont déjà reçu l’approbation de mes adverfaires;
comme on vient de le voir (2).
• Par les rapports de médecins & chirurgiens (3).
Par fon enquête de quarante-deux témoins s gens graves,
par ceux dont l’état peut infpircr quelque confiance, en
tendus dans l’enquête de la dame de L o m b a rd , & dont
les dépolirions font conformes.
Je l e
p ro u v e
enfin par quatre lettres de fa main ,
écrites à fa mere (4) dans le cours de cette honteufe infta n c e , pour la démouvoir d ’une a&ion odieufe pour elle
èc flétriiTante pour tous les deux ; par la tranfa&ion qu’il
pafTa à la veille de fon interdi&ion , avec fa communauté
de Cabris affembléc dans les falles de fon château , dont
des témoins de l’enquête déclarent qu’il
d i c t a des claufes.
d is c u ta
&
I^a dame de Lombard foutient que fon fils étoit fou à
catte époque.
(1 ) V o y c i Picccs juftificatives, n°
( i ) V oye\ P. juftif. n” . 3.
Î 3)
Voyel
Cf) V°yel
p*
n°. 4.
n°' 5'
�95
Quel les font Tes preuves ? L a fcntence de G r af l e qui
l ’a déclaré tel.
Les' arrêts du Parl ement d ’A i x qui confirment cette
fcntence.
Tout
cela eit caile 6c anéanti par l’arrêt du C o n f e i l
des D é p ê c h e s du i 5 A o û t 1 7 8 3 .
II
ne lui refte tout au plus q u’ une enquête c om po fé e
de fes domeftiques , gagiftes ou affidés, des gens de la lie
du peuple qui ont dépofé à fa vol ont é , à qui on a voulu
aiTocier quelques gens h onnê te s, d ont les dépofitions dét r u i f e n t , c o m m e on l’a vu , fes prétentions ; prétentions
encore anéanties p a r l e t émoig na ge des q u a r a n t e - d e u x
t émoins entendus à la requête de m o n m a r i , qui tous
dépof enc'de ion bon fens.
Elle veut infinucr , page 3 5 , que cette cafîation 6c
l ’anéanti fl ement de
ces
titres cft la fuite
d ’un
défaut
de forme dont l’oppofition perpétuelle avec le f ond , a
renouvelé le procès.
Je n’ ai befoin que d’ un m ot q u’elle a eu grand foin de
di fl imul er, pour faire difparoître ces plaintes 8c ces ré
flexions politiques.
L ’arrêt du 1 5 A o û t 1 7 8 3
cft émané du C ô n f e i l des
D é p ê c h e s , où Sa M a j e i t é aflifte en perf onne,
Sc qui ne
conno ît des affaires de particuliers que quand il y a in
fraction au droit des citoyens.
C e t arrêt cafic non feulement les arrêts du Pa r le me nt
de P r o v e n c e , mais la
fcntence de Greffe qui prononçoit
l* interdiction 3 NOTAMMENT L*AVIS DE PARENS qui
déféroit la c ur a t e l l e , cette curatelle m ê m e 8c t o u t
ce
q u i s’£N e s t e n s u i v i , & par c onf équent ces aliénations
�multipliées de la curatrice, ces ailes d’emprunts fans fin,
ces baux frauduleux , toutes ces reconnoiflances données
aux fous-ordres dans le partage de la dépouille de 1 op
prim é, ce procès verbal du Juge de GraiTe pour conilarer
la maniéré dont le marquis de Cabris étoic tenu par ia
m ere, copié ii complaifamment à la page 43 du mémoire.
C e t arrêt ordonne que mon mari Si fa fille feront
conduits ici de l’ordre de Sa Majefté , & fous les yeux
de fes Miiiiilres ( 1 ).
Je laide au public à juger les motifs de la caiïation pro
noncée dans le confeil d’Etat du R oi , de jugemens de
Juges inférieurs , d’avis de parens rédigés dans l'intérieur
d’une fam ille, d’ une curatelle qui pouvoit être réformée
par un Juge fupérieur, fx elle avoit été dans le cas d’être
prononcée , de tous les actes faits par la curatrice , dont
le fort dévoie fuivre celui du jugement qui lui avoit donné
fes pouvoirs ; enfin des motifs de cette prévoyance pour
les perfonnes prouvées dans l’oppreffion.
Je dois quelques réflexions fur ces parens qui ont voté
dans cet avis du 1 4 Janvier 1 7 7 8 , fur le vœu de cette
prétendue famille entiere dont la dame de Lombard fait
tant d’étalage dans plufieurs endroits de fon mémoire.
( i ) Les ordres de Sa Majefté ont été exécutés avec une attention particulière»
& une décence extrême. M o i - m ê m e j'ai pouiTé l’attention fi loin , qu'allant audevant de mon mari Si de ma fille , je m’ arrêtai à i j lieues de Cabris : !e peuple
¿coic foulevé d’indignation contre la dame de Lombard & fes gens d’affaires 3 ma
préfcncc pouvçic fervir de prétexte à des excès concr'eux, j ’attendis.
Il eft faux que l’Officicr ait refufé à la dame de Lombard de voir ma fille.
L ’hôtel que madame de Lombard appelle mon h ô te l, dans lequel elle prétenj
«ju’on a refufé de lo ger Ton f i l s , appartient à mon mari.
J’y
�91
J’ y trouve dix -n e u f noms ; à la tête , M. le Bailli de
Mirabeau , Religieux profès de POrdre de Saint Jean de
Jérufalem, homme que les loix déclarent more.civilement,
ôç par conféquent incapable de voter dans une pareille
aflcmbléc.
M . Lombard de Gourdon Sc M . Creps de St C czaire ,
tous deux beaux-freres , dont l’intérêt a déjà été aflez
démontré , 6c le premier d ’autant moins excuiable à
voter dans une aflcmbléc aufli irrégulière , que vingt an
nées d’expériences paflecs fous fon pere , Lieutenant au
Siège de G rade 6c Subdélégué de M . l’intendant de P ro
vence , avoient dû Pinftruire des formes ( i ).
M . de Clapiers Colongucs , complaifant connu du
Bailli de M ir a b e a u , promoteur de Pa&ion.
M . G eoffroy D u ro u re t, à qui ceux qui coftnoiflcne la.
noblefle de P ro v e n c e , favent que mon mari ni moi n’a
vons l’honneur d’appartenir.
To us les autres y font employés parce qu’il a plu aux
comparans de les y nommer , parce qu’il leur a plu de
dire qu’ils avoient leurs pouvoirs, fans qu’ils en ayenc
juftlfié ni au Juge , ni au public par l’annexe de leur
procuration , la plupart même des perfonnes nommées
n’ayant jamais-vu M. de Cabris.
J’ai déjà obfcrvé qu’il y a voit dans la même ville,
ou aux environs , douze familles de parens rcfpectables ,
avec lcfquels le marquis de Çabris vivoit habituellement,
qu’on s’cil bien donné de garde d’appeler.
____________ ■
^.
»
. '
.
«
( i ) C e M. Lombard de Gourdon n’eft pas de la même roaifon que la dame
&
Lojnbard St. Benoît, douairière de Cabris..
. .
N
�C e t avis de parens préfente un contraile bien frap
pant ; M . le Bailli de Mirabeau , que fa mort civile mec
hors d’état de voter, paroît à la tê te , 8c M . le marquis de
Mirabeau , fon ainé, n’y paroît pas même par procureur.
O n voit en tout que ce font quatre perfonnes , deux
bcaux-frercs , dont les intérêts ont déjà été démontrés ,
un étranger 8c un homme entièrement dévoué à M . le
Bailli de M irabeau qui privent le marquis de Cabris de
fon état c iv il, qui anéantiiTent notre fam ille, qui difpo*
fent de nos b ie n s, 8c qui mettent la perfonne de mon
m a r i, de ma fille , 8c toute notre fortune dans des mains
qu’ils connoiiToient incapables d’en prendre foin.
Je crois avoir prouvé que mon mari n’étoit pas fou
lors de la demande en inrerdiCtion , 8C que cette inter
diction' n’a été prononcée que par les intrigues de la
cabale; j’aurois pu borner ma preuve à l’arrêt du Confeil
des Dépêches du i 5 A o û t 1 7 S 3 , qui caiTe cette inter
diction même rendue par un juge inférieur , & tout ce
qui s xen eft enfuivi & pu s ’ enfuivre.
Si je fuis entrée dans quelques détails des faits qui ont
décidé la juftice du Souverain , c’eft pour démontrer plus
fenfiblcmcnt la conduite de nos adverfaires , 8c ne rien:
laiifcr à defirer fur les motifs d’une interdiction qu’ils n’ont
pas eu honte d’annoncer dans leur mémoire comme néce flaire.
Je rapporte les interrogatoires devant le premier Juge
Sc au Parlement d ’ A ix , les enquêtes qui dépofent de fes
difeours avec les perfonnes habituellement en fa fociété ,,
fes lettres à fa m è r e , fes autres écrits , les a£tcs qu’il a
pafles , oiï l’on trouve de quelle maniéré il traitoit 8c
�99
conduifoît Tes affaires ; quelles autres preuves devois-jc
rapporter ?
Je vais prouver actuellement ce qu’a fait la cabale, par
le m o y e n de la dame de Lombard 5c de Tes agçns , pour
rendre Ton fils fou , du moment qu’il a été en leur puiffaneç.
M a u v a is t r a it e m e n s exer cés sur les per so n n es:
La dame de Lombard n’oppole aux faits en grand
nombre , déjà articulés à cet égard , que des déclamations
pathétiques.
Elle invoque en fa faveur le témoignage de tout le
pays que je vais faire dépofer contr’elle , de fes domeitiques qui ont oublié leur rôle dès qu’elle a ccfle de les
payer.
Elle me force de montrer mon mari tombant fous les
coups de fes valets , à ne plus diflimulcr que ces indi
gnités étoient l’ouvrage de la cabale qui les ordon noit, Si
de la meie de mon mari qui les autorifoit.
M on filcnce me rendroit complice de la dame de L om
bard , je contribuerois , en le gardant , aux foupçons
qu’elle ofe donner fur fa famille , d’une démence héré
ditaire ; je participerais à la flétriiTurc qu’elle cherche à
imprimer fur notre poftérité.
C e t objet de ma défenfc fera divifé en deux parties ,
l a premierc traitera de la nourriture , du lo g e m e n t, des
vetemens & foins de fanté. Dans la fécondé, jc r a p p o r
terai les preuves de mauvais traitemens e ffe c tifs , e x e rc é s
N ij
�1 00
par les Satellites qui entourerait mon mari à l’inftant de
rinterdidtion.
La dame de Lom bard, dont tous le domeftique fe bornoit à une cuifinicre Sc une femme de cham bre, prit, auflitôt l’interdi&ion, un état de m aifon; elle eut un cuiflnier,
un laquais ¡k. même une fécondé femme de chambre ; cc
font ces gens qui la fuivoient dans ia maifon à G ra fle, où
elle paiToic de fuite quelquefois plus de fix m o is , &: tou
jours la plus grande partie de l’année, qu’elle amene avec
elle à Cabris pour figurer dans le procès verbal du Juge de
Grafle , où l’on fait déclarer au marquis de Cabris qu’ils
lui appartiennent perfonncllement.
Dans l’abfence de fa mere du ch â tea u , il n’avoit pour
toute cuifinicre qu’une fervante païfanne à 3 6 liv. de gages
par année.
Quand la dame de Lombard étoit au château , fon fils
ne mangeoit pas avec elle , on lui envoyoit de deflus la
table dans fa chambre la portion du dîner de fa mere
qu’on jugeoit h propos.
Ces faits font atteftés par le témoignage de ma fille ,
elle les a rappelés à fa grand’mcre dans Paflemblée de
parens en l’hôtel de M . le Lieutenant civil ; elle lui a
renouvelé les repréfentations qu’elle avoit pris la liberté
de lui faire fur la rigueur de ce traitement fait à fou pere
fous fes yeux ; quand la dame de Lombard écoic abfcntc,
& j’ai obfervé qu’elle l’étoit la plus grande partie de l’an
née , mon mari mangeoit feul, ou avec le fieur A lzia ry.
V o ic i le régime qu’on lui faifoit obferver.
A ndré Court 3 l’ un des païfans qui le fervo ien t, atteftt
<
�6c de l’huiificr , qui l’cn
requéroit LÊ i S FÉVRIER iyS^-^x).
en préfence de deux témoins
fa i-
» Q u e le fieur A l z i a r y lui (au marquis de Cabris)
>j
foiL boire du vin fouvent PUR 3 lui fa ifo it prendre du
CAFÉ & lui donnoit auffi du tabac ; lorfque les domef-
»
tiques lui repréfentoient que tout cela étoit contraire a la
»
fan té de M . le Marquis & aux ordres donnés par ma-
>j
dame f a mere 3 ledit fieur Afyiary' répondoit que la ma-
»5
ladie de M . le Marquis étoit incurable 3 ù que le vin 3
»
le café & le tabac ne pouvoient pas lui fa ire plus de mal
53
qu’ i l n ’ en avoit; que pendant quelques années 3 & dans
»
le mois d ’ Août 3 l edit feigneur marquis de C a b r i s ,
»
accompagné
»
domeftiques,
»
quelques jours aux M o u l i n s près la rivicre de S i a g n e ,
»
& pris des bains qui lui étoient favorables pendant les
m
cinq ou fix premiers jours ; mais le fieur A l z i a r y lui
»
f a i f o i t boire du vi n , 6c avec plus d ’a bo nda nc e , le
ù
f o i r , ce qui l ’i n c o m m o d o i t
6c lui do nno it de fortes
»
altérations : que le n o m m é
Cavalier do n no it à boire
»
de l’e au -d e- vi e audit feigneur M a r q u i s , au vu
»
du fieur A l z i a r y , q u i , fur les reproches que le répon-
»
da nt
>3
que rien ne pouvoir augmenter fon m a l , ni le guérir ,
»
qu’il falloit lui donner t out ce q u ’il demanderoit
«
en aliment que
boiiïon : que lorfque ledit
»
M ar q u i s
bu une certaine quanti té
»
d ’eau-de vie ,
>5
(x)
du fieur A l z i a r y &
de quelques
autres
d ont étoit le r é p o n d a n t , a été paiTer
6c fit
6c les autres domeftiques lui f ai fo ie nt , répondoit
Voye\
avoit
tant
feigneur
de vin ou
6c pris du c a f e , q u o n lui préparoit fo rt
P ie ccsju ftifkativcs, n V »
�I 32
» chargé, il ¿toit beaucoup altdré 6c plus mal qu’à l’or» clinaire ; que c’étoit ordinairement après ces fortes de
» boiiTons contraires , qu’il demandoit pendant
«
une
partie de la nuit à boire , que fouvent le répondant
» avoit repréfenté au iïcur A lzia ry que fi madame la
» marquiie de C a b ris, belle fille , rev en o it, & que M . le
» marquis ou tout antre, lui apprît le peu d’attention
» qu’il avoit dans le choix des alimens ù de la boiJJ'on
« qu’on donnoit à M . le Marquis , elle en feroit fâchée;
» fur quoi Alziary répondoit que cela n’arriveroit jamais.
A quoi ce fieur A lzia ry ajoutoit d’autres propos indéccns , que ce fous-ordre ie permettoit contre moi.
m Le nommé Matthieu Pichot , autre domeftique ,
« dépofedes mêmes faits; ( i ) qu’il y a trois ou quatre ans,
« & pendant qu’il fervoic en qualité de domeftique dans
>3 le château de C abris, il s’apperçut qu’on faifoit pren
ds dre du café à M . le marquis de C a b ris , quoique le
r> médecin l’eût d éfendu , 6c même qu’après lui avoir
donné du chocolat , on lui faifoit encore prendre du
»5 café un moment après; qu’on lui donnoit fouvent du
»> vin
à
boire , 6c
particulièrement lorfque le ficur
>3 A lz ia ry , pere, mangeoit avec ledit feigneur marquis
>j à la merne table , 6c malgré la défenfc du médecin
»
6c de madame fa mere, ce qu’il a vu plu fieu rs fois;
”
en ayant fait des reproches au fieur A lzia ry 6c à André
”
Court fon dmneftique ; il certifie encore que pendant
» le même tems M . de Cabris n’étoit point vifité par
»
aucun m édecin, n’ayant point vu le médecin Roffignoli
( l ) V o y e z p ic c c s j u fti f ic a ti v c s , N * .
6.
�i o3
*■
« au château qu’une feule fois , 8c le fieur Raynaud ,
» chirurgien ne l’alloit voir que pour le rafer » ; il parle
enfuite des bains pris à la riviere de Siagne , où il accom pagnoic mon mari avec le fieur A lziary Sc André C o u r t,
fon autre domeftique; le répondant continue» qu’il vit
» avec fatisfa&ion que les bains étoient favorables à M . de
«
C a br is
, pendant les cinq ou fix premiers jours il étoit
>3 fort tranquille; mais comme A ndré & le fieur A lziary
»3 perc , lui donnoient à boire du vin , & fo u v e n t, par
33 cette raifon lui fut contraire ; une nuit , comme il
>s avo'it bu une certaine quantité de vin à fon fouper,
33 il fe trouva fort altéré ; le fieur A lziary & André le
33 fermèrent dans fa chambre ôc furent fe coucher dans
>3 des appartenions éloignés de celui de M . le marquis,
>3 ayant demandé de l’eau, &c étant feul dans Panticham33 bre il lui en donna une cruche , en but plufieurs
« coups ; une demi-heure après & vers les onze heures
>3 fc trouvant encore altéré , il demanda encore de l’eau ,
>3 le domeftique lui en donna , ce qui l’engagea d’aller
33 frapper à la porte du iïcur A lzia ry , pour Pavertir
s» do ce qui fe p a flo it, 8c pour obliger A ndré de fc
33 rendre à l’antichambre de fon maître ; le fieur A lzia ry
33 nefe remua pas du tout ; le répondant fut prier 8c folli-
» c i t e r André avec menace d’en porter plainte à m adam e
33 la douairière , de leurs négligences, & alors A ndré fe ‘
rendit avec lui dans la chambre de ion m aître, auquel
33 ils donnèrent encore à boire de Peau.
V oilà ce qui regarde la nourriture ; quant aux vêtemens
je n’ai pas befoin d’autre témoignage que le faic
certain que mon mari n’a apporté qu’ un habit. JL’officier
�i 04
chargé de 1’cxécution de l’arrêt du C o n f e i l , a dû attefler
que cet habit fait dans la nuit du départ, ne lui fut livré
que pour le voyage ; tous ceux qui ont vu le marquis
de Cabris , avant ce tems , attelleront qu’il n’étoit couvert que de haillons. Il cil arrivé à Paris avec les bas ,
& fe fervant des mouchoirs que fon conducteur a voit été
obligé de lui prêter pour l’ufage de la route.
Sa mere ne lui remit que dix-neuf chemifes ; il eft
dit> page 48 de fon m ém oire, qu’ elle demandoit le loifir
de fa ire préparer promptement le linge & les habits de fon.
fils. Que ne les lui a-t-elle envoyés depuis fix mois? Elle efl:
venue dans cette ville , elle y eft depuis quatre mois ;
elle a vu fon fils avec d’autres habits que je lui ai achetés
fans lui avoir parlé des ficns,ni lui en avoir rendu aucun.
D ans le fa it, quand je fus enlevée d’auprès de mon
ïïia r i, il avoit toute la garderobe d ’un jeune homme dç
fon état &
de fon opulence , qui aime la parure ; un
linge de corps immenfe &C du plus beau ; la dame de
Lom bard en a-t-elle difpofé comme de tant d’autres
objets? O ù a-t-elle la dureté de l’en priver volontairement,
dans un moment où elle fait qu’il 11e peut pas fe procu
rer le néceflaire fur fon propre bien?
^
Il paroîtra moins étonnant, qu’elle ait refufé de re
mettre du linge de l i t , Si de table pour l’ufage de fon fils ’y
puifque ma fille atteile, Sc elle l’a foutenu à fagrand’mcre,
dans l’aiïcniblée de parens à l’hôtel du M a g iilra t,d e va n t
Ton perc & moi , en préfence de M. le Lieutenant C iv il,
qu elle le faifoit coucher fans draps dans fa propre maiions fournie abondamment de tout ce qui étoit néceiïairc
à une famille opulente.
Oa
�1 05
O11 a déjà vu que loin de procurer k mon mari des
foins de ianté , on en détournoit l'effet par des nour
ritures 8c des boiflons contraires.
Les domeftiques 8c autres perfonnes du village de
Cabris , attellent que mon mari n’avoit point de mé
decin , 8c que le chirurgien du village ne le voyoit que
pour le rafer.
Alexandre C o u r t, Conful de la communauté , attefte
par fa déclaration du 1 7 Février dernier ( 1 ).
Q ue lors de Pailemblé© de la communauté , tenue
la fécondé fête de la Pentecôte de l’année dernierc ,
le iieur A lziary lui préfenta un certificat tout dre de fur
papier timbré , contenant nombre de faits » qu’on folli«
citoic le dépofant d’a ttefler, entr’autres, que M . le
m marquis de Cabris étoit fuivi journellement par un
« chirurgien , qu’un médecin de G rade venoie le viiîter
» fréquem m ent, qu’il mangeoit à la table de la dame
»3 f i m crc, Iorfqu’elle venoit à Cabris , 8c que ledit ficur
» A lziary ne le quittoit jamais , 8c autres faits relatifs
» aux traitemens dudit feigneur marquis de Cabris, qu’a» près avoir lu ce certificat , ayant trouvé que les.
»3 faits y énoncés n’ étoient pas véritables , le dépo
li fant refufa de figner malgré les injlances & les
>5 menaces du ficur Alziary ; il certifie encore que le
marquis de Cabris n’avoic que deux domeftiques , qu’ il
« *h’y en avoit qu’un - qui le fuivît , 8c fouvent M . de
» Cabris alloit promener fe u t, & le domelliquc n’ alloit
,3 le joindre qu’un tems après.
( j ) V o y e z p ie ccs j u f t i f i c a t i v c s , N \ 7 ,
o
�ï o6
L e fieur Seytre
m ’écrit lo i er Mars 1 7 8 3 , » l’état
» de M . de Cabris eft toujours le m êm e, il ne changera
»
pas , tant cju’il n’aura pour médecin que deux payfans
»
ôc un ivrogne, qui le gardent fans lien faire , ôc
» qui mangent tous fes revenus à votre préjudice.
Il me marque par fa lettre du 1 6 A v r il, que la com»5 munauté de Cabris attefte que M . de Cabris cil tou»j jours dans une efpecc d’abandon ; « c’eft en effet ce
qu’attefte la communauté par fa déclaration du 2. 1 A vril
1 78 3 , en fuite de la requifition judiciaire que je lui avois
fait faire ( 1 ).
L e fieur Seytre ajoute dans la même lettre « M . de
Cabris , eft toujours réduit au même état d’abandon;
«
»
depuis quelques jours il paroît plus tranquille; il feroit
portable fi en bonne juftice on vous autorife à lui
« procurer les fecours dont il.a le plus de befoin.
D ans celle du 10 M ai 1 7 8 3 , il m ’écrit » l ’exploit
•m que j’ai fait fignifîcr à la com m unauté, ôc la déli» bération qui a été prife , ont opéré quelques vifites
jj
de médecin à M . de Cabris; mais on s’en eft tenu là ;
« il ne s’eft point agi de remèdes , ôc des vifites ne
» guériffent pas : M . de Cabris ne recouvrera jamais la
« fanté pour être vifité , il eft toujours dans le même
» état , furveillé par deux payfans , p rom enant, fuivi
45 d’eux ôc de ce perfonnage qu’on nomme l’homme de
” confiance, ôc que le fieur Court appelle fort à propos
» la pefte du pays.
Il m ’écrit le 1 6 M ai fuivant, » les vifites de médecin
( 1) V o y e z pièces j u i l i f î c a t i v c s , N ° . -8,
�io7
w ont ceile depuis quelque jours ; la Tancé de M . do
» Cabris n’a rien gagné pour avoir été vifîcé , ¡k. dans
« fa lettre du 7 Juin , M . de Cabris jouit toujours de
» la fanté que Ton état pcût comporter de plus fa«vo« rable.
» M. de Clapiers ( 1 ) ne s’expofe pas à le v o i r , fo a
3) occupation au château confilte à raiTurci' madame fa
35 couiîne contre votre demande.
Il m ’écrit le i Juiîlet 33 au lieu ds tenir M . de C ia 33 piers au T i g n e t , on a trouvé plus commode de tenir
}>• M . de Cabris enfermé tout comme on en avoit ufé ci33 devant. M . de Clapiers prétend que l’état de M . de
35 Cabris l’afflige; mais on dirolt plus vrai, fi on difoit
33 qu’il le craint ; 011 ne diilimule pas la fenfation que
33 fa préfence fait à M . de Cabris , & on le punit de ce
» qu’ i l eft encore ajfci bien pour ne pas oublier à qui i l
33 eft redevable du trifte fort où on l ’ a réduit.
M on mari écoic donc enfermé en chartrc privée ; on
lui donnoit des alimens & des boiflons nuifibles dont
on avoit calculé l’effet ; il couchoit fans d ra p s , il étoic
fans vêtemens.
O n ne s’en tenoit pas là-, on le b a tto it, en voici la
preuve :
Jofeph 6c François Raybaud , habitans de Cabris ,
attellent dans le procès-verbal recordé de l’huilîier qui les
en avoit requis le 1 7 Février dernier ( z ) , qu’il y a envi« ron trois ans, ils habitoicnt une maifon du v illa g e ,
33 donc les rues donnent fur le château , qu’ils ont vu
( 1 ) Le même qui a voté dans l’avis des P a ï e n s , du 1 4 Janvier 1 7 7 * .
( t ) V o y e z pi'eccs juftificatives, N " . y.
O ij
�io8
» M . le marquis de C a b r i s , qui promenoit au-devant
33 du château ; enfuite il vint promener fur la vigne ,
si éranc là le marquis de Cabris dit au même Jean Court
33 fon domeftique , qu’il vouloir aller promener fur l’al>s lée de Saint-Jean ; Court ne voulut pas y confentir ,
j> & comme M . de Cabris infiftoit ; Court le menaça de
33 le battre s & alors M . le marquis ayant pris la route de
53 l’allée, ledit Court lui donnaplufieurs coups depoingt, ce
33 qui obligea M . le marquis de courir dans le château ; les
s) répondans certifient encore avoir ouï-dire publique33 ment que ledit feigneur marquis étoit battu par Tes
33 domcftiqiics.
Antoine R aybaud, dans fa dépofition dans îa même
forme 6c dti même jour , déclare ( i ) , que s’étant trouvé
» il y a rrois ans , au clos avec le nommé Jean C ourt ,
33
domeftique de M. le marquis de Cabris , en parlant
33
dudit feigneur, ledit Court dit an rép o n d an t, que
3 î dans la matinée du même jour , «\ mefure qu’il chauf33 foit ledit feigneur marquis , celui ci lui donna un
33 foufflet , & que lui Jean Court avoit donné vingt
33 coups de bâtons fu r le dos dudit feigneur marquis , ajoute
3> le rép o n dan t, qu’il a ouï-dire publiquement que ledit
33
feigneur marquis étoit battu par fes domeftiques.
La nommée d ’Aumas , femme C a u v in , aitefte dans la
même forme lem êm e jo u r(i ) , qu’elle a ouï dire publiquc” ment , que M . le marquis de Cabris étoit battu par fes
33 domefliques\ un jour elle vit venir M. le marquis de la
33 promenade, 8c il vouloit traverfer le village pour fe
( i ) V o y e z picccs juftif. N ° . i o .
(i
)
V o y e z pie ces j u l l i f i c a t i v c s , N ° . u .
�53
ÏC<)
rendre su château ; Jean C o u r t, Ion domeftique vûulut l’obliger de paflcr dans le pré qui cft à côté du
village, Sc comme M. le marquis infiftoit , le domeftique le força en le menaçant de paflcr dans le pré,
fur quoi ledit feigneur tout affligé, dit alors a haute
îj
voix , q u 'il éioit bien fâcheux pour lin homme de fon
»
«
«
33
» état s d ’ être obligé d'obéir en tout à un coquin de
j) domefiique 3 ajoutant la répondante, qu’elle a vu paf» fer fouvent M . le marquis de Cabris qui alloit prow mener tout feul , &c un intervalle de tems après un
33
de fes domeftique Palloit joindre.
Le même jour,lademoifclle Anne Roure, veuve Conrr,at-
33 tefte ( i ) qu’un jour forçant de la tribune d el’ëglife, elle
»> entendit que Marianne , femme de chambre de ma35 dame de Cabris, douairiere, difputoit avec, A/, le marquis ,
33 que ladite Marianne lui difoic en criant a haute voix >
J3 vous êtes f o u , vous fere\ toujours fou^ ce qu’elle répéta
>3 cinq ou fix fois, d'un ton menaçant ; un autre jour ,
jî
elle rencontra
le nommé
Acharc , domeftique du
33 c h â te a u , avec lequel elle parla de la maladie.de
33 M . le marquis , Sc demanda à ce domeftiq.uc comme
33 il fe trouvoic , fur quoi le domeftique lui di e, qu’il
» étoic tantôt b ie n , tantôt mal; la répondante dit à
33 ce domeftique que fi M . le marquis recevoir quelque
33 lettres de la paît de fon époufe , peut-êrre que cela
33 lui feroit plaiiir , ôc qu’en lui faifant réponfe cela
»
l’occuperoit quelques momens ; fur quoi ledit Achart
33 domeftique , lui répondit qu’il yavo it dans la mai ion
m**""'
(i)
1
V o y e z pieccs j u i l i f . , N ° . i z ,
"
‘ 1' ' m
�i ©9
î) les défenfes les plus expie îles de ne remettre audit
feigneur marquis aucune lettre de la part de fa fem m e3
j> ni de tout autre , de ne lui fournir
»
ni papier , ni plume,
afin qu’ il n’ écrivît aucune lettre > ni a fa fem m e} ni d
w fe s amis ( I ).
Dans un récit de cette dépofïtion , la répondante
dit , îî que la dame de Lombard réfidoit prefque conjj tinuellement à Grade ; elle certifie encore qu’elle a
35 ouï-dire publiquement, que M . le marquis étoit battu
J3 par le nommé C o u r t, Ton domeftique.
Je puis joindre ôc je joindrai bientôt à ces témoignages
ceux de tout le village de C abris, de la ville de G r a d e ,
&. de la contrée entière ; je n’attends pour cela que d’y
être autoriféc en Juftice. Je pourrois rapporter cent lettres
qui m ’annoncent un cri général 6c d ’ i n d i g n a t i o n contre
les manœuvres de la cabale qui a anéanti notre maifon
& détruit nos perfonnes.
M a fille n’éprouvoit pas un fort plus doux.
J’ai déjà dit qu’elle étoit au couvent de G rade à deux
cens livres depenfion , qu’elle n’avoit eu d’autre éducation
qu’un maître d’écriture pendant quelques mois ; il étoit
défendu de lui laifTcr voir les perfonnes qu’on foupçonnoit pouvoir avoir des relations avec moi , on ne lui
laifToit pafler aucune de mes lettres; il lui étoit expreflement défendu de m’en écrire ; elle fut mife en pénitence
publique
l’ordre exprès de fa grand’mcre , pendant
( i ) Loriqu'on voulue lui rendre la faculté d'écrire on ne le put p lu s ; le ficur
Scytrc me dit dans lu lettre du 30 Avril 178} :
n O11 ciTayoit a C a b r i s , de faire écrire M . de C a b r is , mais on m’ aflure q u o o
a> n'eft veuu à bout de rien tirer de lui ».
�ï Io
l’office fur une tombe de l’églife au milieu du c h œ u r ,
trois heures !c matin , &: trois heures le f o i r , pour s’être
procuré par le moyen d'urte mirrc pep.iionnaire, & avoir
lu un de mes mémoires , 6c ce traitement ne ce il a que
parce qu’elle en tomba malade.
L e fieur Scytre m’écrit le
2 1
Décembre
1 7 g 2 , >3
je
» dois vous entretenir, i°. de madcmoifellc de C a b ris,
53
depuis que je vous ai envoyé fa lettre elle a eu du
3)
défagrém ent, elle a eu la foiblcflc de le dire , où cela
a tranfpiré ; depuis ce tems on l’a fait fo u iller, pour
» favoir fi elle n’a pas reçu quelques lettres de votre
93
part, vous favez que madame la douairiere eft méfiante,
33
malgré toutes leurs précautions à vouloir priver made-
5J moifclle de Cabris de vos nouvelles , je lui ai remis
>s votre lettre 3 j’ai fu qu’elle l’a lue trois fois les larmes
» aux yeux ; d i e l’a laiile entre les mains de fon a m ie ,
33 & c h a q u e jour elle vient la lire.
Le premier M ai fu iv a n t, « on nous a fait à moi 6c à
« ma femme une hiftoire bien extraordinaire fur ce que
» nous
voyons madcmoifellc Pauline , par le moyen
» d’une Religieufe q u e , dit-o n , nous avons gagnée
&
que je ne connois pas par parenthefe ; on ajoute que
33 pour prévenir toutes chofes on va la faire fortir du
3> couvent , des mauvais plaifans y ajoutent à leur tour ;
» elle fera mieux fous les yeux d’un Italien ( A lziary)
33
53
qui a toujours vécu , même a C a b iis , d une manière
fcandaleufe.
Dans fa lettre du ï 5 Mars 1 78 3 , « il nie dit : ma-
53 demoifelle
33
de Cabris eft très refTcrréc dans le cou-
vent , il y a chaque jour de nouveaux tourmens
�I I z
« qui commencent à être à charge h La fupericiire; elle fis
5) plaint de tous les tripots que l’on fait fur fon compte au
55
iujet des prétendues libertés qu’elle donne à mademoi-
5} Telle de Cabris de venir au parloir ;
il
cft bien mal-
55 heureux que cette demoifelle reiTente
innocem m ent:
55 les jierfécutions que vos calomniateurs vous font
55 éprouver ; tout a un terme , Sc je fuis fur que nous
» approchons du tems où nous allons voir finir tant de
55 maux.
Il m’écrit le i G A vril fu iv a n t,
55 mademoifelle de
» Cabris ( alors à Cabris ) eût gardée à vue par cette
55 Alarianne que vous connoiflez fi bien ; il m’écrit
55 le
18 A vril , madame la douairiere efl m a la d e ;
55
55
55
mademoifelle de Cabris la fo ig n e& lui fait compagnie,
elle fort peu du château , & toujours fuivie par M arianne qui ne la quitte pas.
O n aiTembloit les principaux habitans de Cabris dans
les (allés du château ; on y lifoit publiquement les mé
moires calomnieux envoyés fecrétement contre moi ,
dans le tems que je pourfuivois l’année derniere mon
ail-aire au Confeil , la dame de Lombard forçoit ma fille
d ’en entendre la lecture. Le ficur Seytrc m’écrit le 1 o M ai
1 7 8 3 , 55 elle craint beaucoup fa grand’mere, &
n’ofe
53 dire mot devant elle ; mais lorfqu’elle peut la perdre
î3 de vu e, elle dit , que ne me laiiToit-elle au couvent,
”
55
plutôt que venir m ’emprifonner ici ; il parle enfuite
des
horreurs qu’on lui débitoit fur mon compte.
Dans fa lettre du 1 6 du même mois, il me marque : midemoifelle de Cabris continue de s’ennuyer au château ,
;5 & d y perdre un tems utile , mais n’importe on a
des
�11 3
« des craintes, Sc on l’y gardera , &c encore on la fait
33 toujours fuivre , parce que l’on craint à Cabris qu’on
»» ne lui porte des lettres de votre part ; tout le monde
55 crie contre cette conduite & plus que jamais , on
5j defirç de voir cefler une autorité qui dégénéré eu
33 dcfpotifme affreux.
Dans celle du i 8 Juin fuivant , il dit ce mademoifelle
53 de Cabris a eu une fcène avec Marianne & A l z i a r y ,
33 pere , ( qui lui parloient indécemment de moi , ainfi.
33 que ma fille me l’a répété ) ; elle dit à la premiere ,
33 qu’elle n’étoit qu’une fouillon méprifable ; & au
33 fécond, que ii elle commandoit jamais, fur le champ
33 il feroit mis à la porte : il femble que cet enfant
si devine la conduite de ces deux individus , ÔC tout le
33 mal qu’ils lui font.
Il me marque dans celle du z Juillet , « mademoi33 rdle de C a b r is ‘ fc plaint de ce qu’on la détient à
>3 Cabris; madame la douairicre feroit, dit-on , le facri53 fice de l’envoyer au couvent, iï elle ne craignoit, à ce
33 qu’elle d i t , ou mes vifites , ou les lettres que je pour33 rois lui faire parvenir.
V o ilà la maniéré dont mon enfant étoit traité ; quant
à fa garde-robe, jîai dit qu’elle n’avoit que quatre chemifes,
fans coiffures ni jupons, ni bas, & la feule robe de toile
qu’elle avoit fur le corps ; la dame de Lombard ne lui
en a pas envoyé -depuis , ne lui en a même pas apporté,
lorfqu’clle cft venue la voir dans cette ville.
Preuve qu’on a voulu profiter des malheurs de mon
mari & des m ion s, pour difpofèr delà perfonne de notre
«nfant.
P
�” 4
Le fîear Seytre m’écrit le
11
Décem bre 1 7 8 2 ,
3J quand j ’ai l’honneur de vous dire qu’il eft urgent de
»> porter remcde à tant de maux , c’eft que je fais que
» madcmoifelle de Cabris fera bientôt pubère , &
il
» tfous importe' &C à elle aufli , de mettre obftacle à
» toutes vues d’établiflement projeté.
L e m êm e dit dans fa lettre da 1 er Mars 1 7 8 3 ,
33 que dès qu’on fut informé à G rade par M . le Bailli
»5 de M ir a b e a u , alors à A ix , que le Parlement alloic
>3 donner les motifs de fon arrêt , il y eut plufieurs
» conciliabules de la cabale , tenus chez la dame de
» Lom bard , dont le fieur A lziary , fon P rocureur,
35 référoit les avis de difïérens membres de ces conci« liabulcs , entre lcfqucls il y avoit fciilion , & que ce
« Procureur agiiToit en conféquence fous' le nom de la
»» dame de Lombard
qui > comme vous fave\^ ajoute-
»3 t-il 3 ne fa it que figner.
*
O n mettoit alors en avant comme moyen de réuilîr
un projet de mariage de ma fille.
Je m ’interdis toute autre explication fur des chofes
qui intérefTent des noms refpe£bables & chers à la pro
vince , & des perfonnes dont les recherches dans une
occafion moins critique auroient été honorables pour n u
fille.
Le fieur Seytre m ’écrit le 2 3 Avril
1 7 8 3 , « il faut
w aller au cinq M a i , pour pouvoir craindre le mariage
” de madcmoifelle de Cabris ; on ne parle plus de fon,
» établi(J'ement prochain 3 o n .d it au contraire , que
« madcmoifelle de Cabrià-ne veut pas fe marier ; mais
33 de plus, je fais de bonne part que ceux qui avoient
�r t
5
5) des projets de mariage fur mademoifelle de Cabris ‘
»» manquent de ton à caufe des circonftances , ainiî
” ma crainte eft moindre de ce côté.
Le 3 o A vril il m ’écrit » quant à mademoifelle de Ca~
31 bris il ne s’agit plus maintenant de Ton établiffement; ce
3v qui occupoit iingulierement les efprits ; k préfent on
s> dit de toutes parts, il faut attendre Pévenement, Sc
>» il faut l’attendre avec d’autant plus de raifon que nous
« aurions befoin pour cela des parens, & dans les cir)) conftances , aucun ne voudroit fe montrer.
Il dit dans celle du i o M a i « qu’on ne parle pas plus
» de cet établiffementy que s’il n’en avoir jamais été quef3» tion , &
il ajoute , j’aime à me perfuader qu’il ne
y s’en agit plus abfolument avec qui que ce fo it.
Il répété encore dans fa lettre du i i du même m ois,
33 qu’il n’en eft plus queftion , & il ajoute , il doit être
33 toujours queftion pour vous, de la délivrer au plutôt de
» cet état de fervitude dans lequel on la fait vivre.
D ans celle du i 8 Juin , il m’écrit 33 on m’a dit aufli
l î que par fois on parloit de mariage à mademoifelle
3j de C a b r i s , que madame fa grand’merc lui difoit il
»3 elle vouloir fon couiin de Clapiers : elle répondit
» que non tout uniment : madame fa grand’mere lui
33 d i f o i t , que voulez-vous donc , M. de Lombard ? Elle
33 rép o n d it, il eft trop v i e u x ; M. de C . . . Il cft trop
»
g r a n d
& trop maigre:
M .
de G. M. de S. encore moins :
33 mais qui Vpulcz-vous donc ? Je fuis ma maîtrefle , lui
» dit-elle,
on ne peut pas commander mon g o iitp our
y> prendre un mari.
P ij
�n 6
(O n trouve ces noms dans l’avis de parcns cnfuitc de
l’interdi£tion de mon mari ).
A
d m i n i s t r a t i o n
d e s
b i e n s
.
L a da me de L o m b a r d s’eft fort étendue fur c c t o b j s t ,
je l’aurois réfutée en peu de mots , fi jo ne me fuffe cra
obl igée de joindre fur chaque fait la preuve des
fitions q u ’elle s’eft permifes.
f u ppo -
'
J’ai déjà dit de quelle maniéré l’inventaire a été f a i t ,
q u ’on n’y a compris que les meubles dédaignés par les
fous-ordres : pas un m ot d’ une bibliothèque de plus de
iiooo
liv.
que
mon
mari
avoit
raffemblée : pas un
fcul pa picr inventorié , les titres de l’a£tif , les archives
des terres , les titres de famille ramaifés
grand foin par mon beau-pere ,
&
&c confervés avec
devenu
la reflource
des différens membres de fa branche , lorfqu’ ils faifoient
des p r e u v e s , font livrés au premier oc cu pant : il ne refte
à mon
m a r i , ni à ma fille aucun titre pour répéter.
J ’attefte 6c j ’offre la preuve que j’ avois trouvé avapc
m o n départ pour A i x , dans le tems de l’intcrdittion ,
Z4.000 hv. de ferme des moulins à huile de C a b r i s ,
des ficurs R a n c , 6c du m ê m e
d a m e de L o m b a r d les a affermés
fieur Boni n , à qui
la
20000 hv. trois mois
après. Il eft de fait 6c j ’offre encore de prouver que l ors
qu'elle a
fai t ce bail , elle
a trouvé
de gens folvables
fort au-deflus du prix pour lequel elle l’a donné ,
n ’ y ,a pas deux moi s
depuis la caffatlon de T i n t e r -
di£tion , j ai reçu pour m o n mari des offres à
j ’ai deja
p r é c éd emme nt
8c il
z S 0 0 0 /.
dé vel oppé les motifs de ce
�117
au rabais , livré par les gens ¿ ’affaires auxquels la dame
de Lombard donnoit au même inftanc des mándemeos
particuliers fur le prix de ce bail, ôc moyennant un paie
ment anticipé dç, vingt-quatre mille livres , entre les mains
de la curatrice ; ces faits font prouvés par les réponfes
juridiques faites par les fermiers lors des lignifications à
ma requête , de l’arrêt du C o n fe il, annexées aux procèsverbaux faits à l’hôtel de M . le Lieutenant Civil.
Dans tous les autres baux , on a reçu de pareils paiemens ; ils font tous faits de gré à gré , ou plutôt fous la
c h e m i n é e , entre les-fermiers & les gens d’affaires; fans
affiches , fans publications, fans mandement de Juge , Ci
indifpenfable en pays de droit écrit pour les biens des
mineurs Sc des interdits; j’ai expoféci-devant que plufieurs
de ces moulins ont été conftruits à neuf par mon mari ,•
démolis dans Pinterdi&ion, reconftruits à grands frais fans
nécefiité prouvée, fans procès verbaux, fans mandement
de Juge.
J'ai déjà dit qu’un jardin de quinze arpens, conftruit
à grands frais, avoit été détruit; ce jardin avoit cinq
terraffes dans route fa largeur, chacune au moins de vingt
pieds de haut ; il étoit orné de réfervoirs en citernes, cëuverrs en voûté par le deffus , où l’eau étoit conduite des
parties extérieures par des tuyaux de plomb , avec des
ajuftages & des robinets en cuivre; ce jardin a été détruit
Sc réduit en champ ; un beau bouquet de futaie , orne
ment du château , a ete coupe au pied & vendu par la
curatrice, & les fouchcs détruites.
O n fe rappelle que j’ai ci-devant expofé que mon mari
avoit paffé avec la communauté de C a b r is , une tranfa&ion pour les eaux bourbeufes produites du marc des
�il 3
olives paflecs au moulin. Le fermier placé par la cura
trice contrevient à cet a£te &: fait un procès à la com
munauté pour ccs mêmes droits. Etoit-ce de fon chef
à ce fermier? O n fent combien il étoit peu fondé : avoiti l , comme cela eil probable , une indemnité de la cura
trice partie au procès comme appelée à la garantie du
fermier? Leurs conventions font demeurées fecrettes , èc
q ’ont pu venir à ma connoiffance ; je vois feulement
dans le bilan de ce fermier , depuis en fa illite , remis au
greffe de G rade en 1 7 8 3 , qu’il porte à la charge de
la dame de Lombard & à fon d é b it , tous les frais aux
quels il avoir été lui-même condamné pcrfonnellemcnt
en fuccombant contre la com m unauté; objet qui lui étoit
purement pcrfonncl , & dont il ne pouvoit avoir de ré
pétition contre la curatrice que par fuite d’un traité.
Il cil vrai que pas le crédit du même compte , il porte
le même objet au profit de la dame de Lombard & comme
dû par lui qui y étoit condamné ; mais un marchand ne
porte pas fes propres dettes à la charge d'un étranger,
pour en créditer cet étranger après.
Q ue pourroit-on conclure de cette fauiTe opération ,
dans
les livres
d’un marchand
pourfuivi au Parle
ment d’A ix en banqueroute frauduleafe , ' iinon que le
débit & lé Crédit de cet Article n’ont pas été faits en
même tems; le iïeur Seytre m ’écrit à ce fujetle 1 6 A vril
”
1 7 8 3 , on publie que vous ne parviendrez jamaiis
» à obtenu- ce que vous dem andez, & on a l’infolence
»> d’ajouter q U’à tout événem ent, madame la douairière.
» a encore n o o o liv. en un ca p ita l; qu’ un beau jour
>3
il paroîtra une quittance en faveur de ceux qui la fer-
» vent , &C la confeillent il bien ; jugez de là fi on. la
�r 19
** fert autrement que pour fon argent, &: £ avec de tels
» fcntimens ils ne font pas intéredes à entretenir M . de
« Cabris dans le trifle état oà on l ’ a réduit.
J’ai avancé qu’on avoic voulu rédimer ce ferm ier, des
dommages & intérêts auxquels il étoit condamné envers
Ja commnauté , aux dépens de la propriété de mon mari.
Le marc des olives , après qu’on en a extrait l'huile ,
connu fous le nom de grignons appartient au feigneur, qui
en tire encore une huile groffierc nommée rccence ; cet
objet à Cabris cil d’un revenu très-confidérable.
La communauté cil obligée de couper , exploiter &c
voiturer les bois fournis par le feigneur , pour le chauf
fage des chaudrons.
Les gens d’affaires de la curatrice imaginent de propofer une transaction, par laquelle la communauté en ré*duifant à 20 0 0 1, , les 2 o o o o 1. de dommages
intérêts
qui lui font adjugés par l’ârrêc contre le fermier, demeuroit
déchargée de l’exploitation & tranfport des bois néceiTaircs
au chauffage des chaudrons; de le feigneur de fa part
étoit tenu de les chauffer de ces mêmes grignons ; enforte
que le Seigneur perdoit par ce traité le produit de fes
grignons pour la confervation d’un bois dont il ne tire
rien , &. le fermier fe trouvoit rédimé par ce facrif ïc e , de dix-huit mille livres fur les 2 0 0 0 0 liv. de dom
mages & intérêts ; cet arrangement tient il fort a cœur
aux gens d’affaires, que depuis la iignification de l'arrêt
du C o n f e il, qui caffe la curatelle , depuis que la dame
de Lombard eft dans cette ville, fes confcils & fes fondés
de pouvoirs, font routes les tentatives imaginaires pour
terminer cette affaire ; le fieur Scytrc m ’écrit le 2 5 No-
�vcmbre dernier; » j’ai appris feulement depuis quelques
« jours, que madame la douairiere a laide en partant fa
« procuration à fon A v o c a t en cette ville, & qu’avec cette
» procuration & fous pretexte du tout en é t a t , par l’arrêt du
» C o n feil, on travaille à terminer une conteflation dont
55 l’objet porte eiTentiellcment fur les droits de M deCabris,
>5 que'Pon veut foumettre à faire brûler des grignons pour
>5 chauffer les chaudrons de fes moulins à huile, tandis que
» de tout tems on les a chauffés avec du bois; cette obli»5 gation exclufïve de brûler des grignons lui fera très-pré-
« judiciable dans un bail à ferme de fes moulins à huile
» parce que celui à recence ne peut produire à un fermier
>5 qu’autant qu’il a des grignons; vous ferez bien aife de
»s favoir que tandis que tout cc qui a été fait contre M . de
m C abris, a été anéanti, on cherche encore pourtant a nuire
» aux droits defaTerre ,en aggravant fes obligations envers
fes vaffaux ; cette innovation auroit déjà porté à effet, fi
>s la tranfa&ion à paffer n’avoit été liée avec d’autres objets
>5 qui regardent bien plus le ferm ier des moulins 3 que M . de
Cabris , & que l’on a eu en vue de réduire autant qu’il cil
a pofîible, en facrifiant les droits fonciers ; mais heureufe» ment le fécond conful a tenu ferme contre un parti qui
m s’étoit formé & que l’on avoit fait adopter par une délibé*
»> ration; s’il n’efl pas rompu, il eft renvoyé &C fubordonné
** à des vérifications dont le réfultat pourra bien aboutir à.
M la révocation de la délibération qui avoit été prife , mais
»s toujours vous voyez qu’il y a péril, ¡k. qu’ i l devient urgent
» de remettre toutes chofes dans leur ordre naturel, le plutôt
»» poffible.
^
e
Alexandre C o u r t , conful de la com m unauté, attefle
k
�•I I I
le 1 7 Février dernier « qu’ayant affilié aux deux confeils
53 des mois de Novembre &c Décem bre dernier , dans
« lefquels il fut queftion de finir avec le fermier des
moulins à huile , l'article des dommages 6c intérêts
j> auxquels il fe trouve condamné , & dé finir e« même
»j tems avec le feigneur de ce lieù , l’arci^le concernant
» le chauffage des chaudrons ;.l’i\tçeftan£ fut d’avis de ne
»s finir les conteftations que lorfqu’o n . 1q pourroit vala
is blement avec M . , le Marquis
où un adminiftrateur
« légitime., Sc q u e , parce qu’il fut de cet a v i s , les
» perfonnes qui agiiToicnt pour favorifer le fermier des
sj moulins , ôc les gens d’affaires de madame la mar»
quife douairière le menacerent de lui faire enlever par
» la voie du retrait fé o d a l, le bien qu’il avoit acheté
»>
»
»
n
du fieur ArdiflTon,
viron vingt - cinq
effectué , à ce qu’il
de la fignification
dans lequel il y a une récolte d’enmautes d ’olives , ce qu’on auroit
a appris enfuitc fans la circonftancc
faite à la communauté , de l’arrêt
» du Confeil , & de {’. ordonnance de' M . le Lieutenant
» C ivil , qui ôte l’adminiij:ration des revenus des biens
» de M. le Marquis , à la dame fa mere.
Pierre D aver , Auditeur des Comptes de la commu
nauté , attefte les mêmes, chofes par fa déclaration ,
donnée le même jour 1 7 Février dernier ( 1 ) il parle auifi.
de menaces qui lui furent fa ites par les perfonnes qui favorifoient les fermiers & les gens d'affaires de madame la
marquife douairière, de retrait féo d a l des biens qu’il avoit
a c q u i s ; menaces reftées fans effet par les mêmes m o tif s .
(1) Voyez picccs juftifiçativcs, N°- 15,
Q
t
�111
J’ai ci-devant expofé comment les gens d ’affaires fe
partageoient les dépouilles de mon mari ; on en a eu des
preuves dans la déclaration des fermiers à la lignifica
tion de l’arrêt du C o n f e i l , annexée aux procès-verbaux
faits en l’hôtel de M . le Lieutenant C i v i l , où ils énon
cent les mandemens donnés fur eux, & acceptés ; dans
le bilan du Heur Bonin , je trouve en débit a le ileur
A lzia ry ( Procureur de la dame de Lombard) pour une
fom m e de 6 p o 6 liv. i o fi. j d. pour raifon de plufieurs
mandats ou billets du ferm ier, à lui A lziary, acquittés ou
remis à différens termes depuis le mois d ’O & o b re 1 7 8 1 ,
derniere échéance du p r ix du bail^ jufqu’au 1 o M a i, épo
que de la faillite ; débit qui eft: balancé par un crédit des
mêmes fommes acquittées.
Je trouve dans ce même bilan un avoir du
Janvier
,payable par mon billet fin de Novembre prochain ,
de quatre mille huit cent livres au fieur G a y te , Avocat de
j 78 3
la dame de Lombard 3 & actuellement fon fondé de pou
voirs pour régir les biens de mon m a ri, même après que
les fo n d io n s de la curatrice ont ceffé.
Au-deffous de cet avoir eft mis en titre , cc
b ila n de
e x tr a it
Ronin j concernant madame de Cabris
»
du
3)
douairiere 3 & enfiuite a la ligne y
dam e de C a b r i
5
_,
33 d o u a i r i e r e , l a q u i t t a n c e d u 1 4 J a n v i e r
1783;
M pour autant que je lui ai payé par a n t i c i p a t i o n fur
33 la paye a échoir en Novembre prochain de la rente cou■55 riante des m o u l i n s a h u i i . e d e C a b r i s .
Il eft évident parcette balance que la dame de Lombard,
d o n n e une quittance au fermier des 4 8 0 0 liv. , & que
ce fermier donne à l’A vo ca t un billet du même mon-
�I z3
t â n t , payable au terme de l’échéance du prix de ferme.
L e fieur S e y t r e m ’écrit le 6 Juin 1 7 8 3 , « il en.
5î coûte
DEUX
CENS l o u i s
A v o tre
maifon ; l’adminif-
» tratrice donna à Bonin une quittance de cette fomme,
jj le 1 4 Janvier 1 7 8 3 , fur la paye des m ou lin s, à
33
écheoir en Novembre prochain , &C en échange , le
5î fieur Failli donna le même jour j fon obligation de
53
même iomme , payable au même terme ; Tes livres?
prouvent que d ’abord il l’avoit paiTée f u r i e compte
33
du Procureur , & puis
33
à caufc de la faillite , on a trouvé qu’il étoic plus
33
co n v en a b le
33
com m e
ils
p a rta g en t
de le pafler fur le compte de
, fie
l ’A v o c a t
33 qui figure dans le bilan ; on n’efl: plus étonné ici de
33 ce que , de brouillés qu’ils éto ie n t, ils fc font étroite33 ment lié s; on aioute que c’cft aux dépens de votre
33 maifon , & parce qu'on abufe de la c r o y a n c e e t d e
33 L A F O I B L E S S E D E C E L L E Q U I L ’ A D M I N I S T R E ; CH n ’ y
•33 met point de doute , en rapprochant la date de la
33 quittance.
Il cil de fait qu’à l’inftant de l’interdi&ion de mon
mari , il jouifToit de 5 0 0 0 0 liv. de rente. La dame de
Lom bard vient de me faire fignifier cxtrajudiciaircmcnt
un état de fes revenus qu’elle fait monter à 4.2.020 liv.
mais elle n’y porte qu’à 2 0 0 0 0 liv. la ferme des m ou
lins à l’h u ile, dont mon mari refufoit au monlent des
pourfuites de fon interdiction 24.00.0 liv. du fieur Bonin,
le même à qui la dame de Lombard 1 a louee 2 0 0 0 0 h v.
8c encore du fieur Rancé, autre négociant de G rade crèsfolvable ; elle omet dans cet état l’article des menus
fervices de z o o o liv. de revenus; elle ne parle pas du
Q îj
�- î ¿4
produit ' du jardin converti en champ ; de celui du bois
coupé âu pied auprès du château, qu’on peut louer plus
de i o o o 1.; de la vigne toujours réfervée par le feigneur ;
elle omet plulicurs autres objets qui feront relevés lorfqu’elle aura préfenté fon c o m p t e , ôc elle en emploie
beaucoup d’autres, non feulement au-deflous du prix qu’on
lui en avoit offert; mais au-delTous même de celui auquel
•elle a livré , à la preuve de quoi je me foumets ; elle a
fait difparoîtrc un mobilier de 8 0 0 0 0 liv. que fa qualité
l'obligeoit d’employer utilement. Le prix des bois de futaie
que je crois prxfer bas de les mettre à 1 0 0 0 0 liv. ; elle
a touché par conféqueut pendant l’adminiftration plus de
. 5 0 0 ,0 0 0 livres.
Les charges confiiloient en 7 4 * 0 liv. de rentes, la iffées par mon beau-pere; favoir:
7 0 0 0 liv. en viager 3 pour les penfions de la dame de
Lombard , 8c de l’une de fes filles.
1 8 0 liv. de rentes par lui léguées à. l’hôpital de GraiTe.
Et Z40 liv. au principal de 8000 liv. dues à M . de
Tourettes.
Les charges foncières font de 1 0 0 0 liv. d ’impofitions
de la noblciTe.
Et ce feroit porter haut les réparations que de les m et
tre à 60 0 livres.
M o n mari enferme dans fon château n’a v o it , comme
j e l’ai déjà obfcrvé , qu’une
servan te
paysanne,
à
3 6 liv. de gages ; les deux payfans qui Pefcortoient ,
gagés dans le pays à 60 liv. , 011 n’achctoit pour ce mé
nage que îc pahi & la viande de boucherie ; le furplus ,
devoit fe prendre dans la Terre, où il y a un jardin pota
�I25
ger , baffe-cour, colombiers, chaÎTe &c pêche ; je crois
porter au plus haut taux les frais de ce ménagé en
les mettant à 1 2 0 0 liv. ; l’entretien a été nul , mon
mari n’a point eu d’h a b it , on lui a même pris ceux qu’il
a v o i t : je mets en fait , parce que j ’en ai la preuve en
main , que pendant les fept années, il n’y a pas eu pour
j o liv- de viiîte de médecin.
M a fille étoit au couvent à 200 liv. de penfion; ce
feroit forcer fon entretien 6c les frais de quelques mois
de fon maître d’écritures de les porter à pareille fomme.
Je n’ai reçu pendant les trois années que j ’ai été enfer
mée au couvent de Siitcron^ que 7 0 5 0 liv. 8c depuis
les trois ans que j’en fuis fortic, 1 0 0 0 0 liv. fuivant mes
quittances.
Toutes ces fommes accumulées montent dans les
fept années à 9 1 3 9 0 liv. quand on fuppoferoit exiilant
les 1 2 2 0 00 liv. d ’emprunts faits par mon mari , annon
cées par la dame de Lombard, fans le prouver à la page 2 9
du mémoire , & dont je fuis bien éloignée de convenir;
cesemprunts n’auroient pu produire, impofitions déduites,
que 5 4 1 8 liv. de revenus annuels, & dans les fept années
3 7 9 2 6 liv. , la dame de Lombard doit donc avoir entre
les mains plus de 3 6 0 ,0 0 0 livres.
J’ai déjà, annoncé le foin de l’avis de parens * du 2 4
Janvier 1 7 7 8 , enfuite de l’interdi£tion , pour procurer
au fieur Seytre, qui défendoit pour mon m a r i , à cette
interdiction , le paiement d’une créance que rien ne
juitifie.
Le règlement que prétendoit en avoir fait la dame
de Lombard ,
à 6 1 ,0 0 0 liv. Sc l’aifignation donnée
�I 26
enfuite à fa requête au créancier , en revifion du même
compte , demande reilée fur pourfuite , quand le ficur
Seytre s’étoit reconcilié avec Tes entours, au bruit de
quelques fuccès fur mes demandes ; je ne penfe pas que
Ja dame de Lombard perfifte à mettre cette créance dans
les charges ; j’en développerai dans un inilant l’origine
&C le progrès.
ans l’érac qu’elle vient de me faire iîgnifier, elle
emploie dans les charges de la maifon ,
2 9 0 0 liv. de
r e n t é , au principal de 5 8,000 liv. d’emprunts par elle
faits les 2 4 Décembre 1 7 7 9 , &
1 6 Ma i
1782,
de
M M . de Theas , frères , Saint Cefaire & Ricord , par
a£tes reçus par A d i f l o n , Notaire à Gratte.
Elle avoit reçu lors du bail des moulins à huile , du
30 M ai 1 7 7 8 , une fomme de 2.0000 liv. d’avance fur
cet objet : elle en avoit également touché de tous les
autres fermiers ; malgré c e l a , on voit toujours la gêne
dans Padminiilration ; toujours les fermiers font en
avance , je l’ai juilifié par leur déclaration , enfuite des
fignifications qui leur ont été faites de Parrêt du Confeil,
annexées aux procès-verbaux , devant M . le Lieutenant
C ivil ; il cil public que les mandats de la curatrice couroient fur la place de GraiTe , & qu’on ne pouvoit trou
ver à les placer; le bilan de Bonin, fermier dés m ou
lins , conftatc dans le compte particulier de la curatrice
qu’en 1 <7 8 2 , il étoit en avance particulière avec elle de
8 4 3 üv. , &
dans les mandats qu’il avoit
acceptés
pour les ficurs G ayte & A l z i a r y , A v o c a t & Procureur
de la dame de Lom bard, de 4 8 0 0 liv.; j’ai rapporté Sc
fait joindre aux procès-verbaux faits devant M . le Lieu-
�i z7
tenant C ivil ,
les quittances données par la dame de
Lom bard , en fa qualité de curatrice , dans le courant
de l’année i 7 8 3 , de la plus grande partie des revenus
jufqu’au terme de Pâques ou de Saint-Michel 1 7 8 5.
J’ai joint auili des quittances données depuis Ton
départ de G rade & depuis la cadation de fa curatelle ,
par les iieurs G ayte
&
d ’eux féparément chargé
A lzia ry ,
des
fe
difant
chacun
pouvoirs de la ci devant
curatricer, de ce qu’ils ont pu en recouvrer ; je viens
d ’en recevoir une autre du même Heur G a y t e , du 18
Décem bre dernier ,
donnée
au
fermier
du
Caftelet
( T e r r e de mon m ari) de 300 livres avec une remife
gratuite au fermier de
227
livres fur le prix de fa
ferme ^ échu en Septembre dernier ; depuis l’arrêt du
Confeil , qui cade la curatelle, la dame de Lombard
déclare qu’elle n’a pas d’argent pour payer les frais de
tranflation ordonnés par le R o i , de mon mari &c de ma
fille ; elle nous laide tous les trois fans alimens , fans
lin g e, fans h ab its, manquant du plus ftrid nécedairc ,
& elle touche fans qualité nos revenus ; elle les aban
donne au premier occupan t; la moindre attenancc avec
elle, devient un titre pour s’en emparer. T o u t le monde
retient 8c le propriétaire n’a de rcdourccs que dans fes
emprunts.
Je paÏÏe à la tranfa&ion avec les
beaux-freres de
mon mari ; je commence par obferver , que cet a& c
eft annullé par l’arrêt du Confeil des dépêches du 1 5
A o û t dernier , avec tous ceux de l’adminiftration de 1a
curatrice.
La dame de Lombard
en a fait trois pages de fa
&*L
�I28
défenfe dans le méa^pirc ; c’eft en effet l’a ile le plus meur
trier de Ton adminiftration , celui qui a concouru à tout
ce qui a été fait ; j’ai befoin pour l’expliquer de quelque
développement.
M o n beau - pere avoit réglé le fupplément de légitime
de fes filles à 8 o o o liv. Le fieur Seytre alors curateur de
mon mari , le mené à A ix au mois de Juin 1 7 7 5 , fous
prétexte de terminer l’affaire des affiches; il lui fait payer
fous fon autorifation 20,000 liv. de pur fuppl^gent de
légitime à chacun des beaux-freres , & on infere , diton , dans la quittance les réferves de la porter encore plus
loin.
Pour peu qu’on veuille rapprocher ici quelques circonftanccs , on trouvera aifément le fil de cette n égo
ciation. Le iîcur Seytre avoit été placé dans la maifon
par les beaux-frcrcs de mon m ari, qui enavoient éloigné
un homme en poffeffion de la confiance depuis trente
ans.
C ’étoient ces beaux-freres qui avoient engagé mon
mari dans la batiffe de la m aifon; c’étoit le fieur Seytre
qui l’avoit conduit dans l’affaire des affiches , qui procuroit &
faifoit les emprunts , qui étoit chargé des
dépenfes fecrettes. La lettre de M , le marquis de Vauvenargues , du 20 A o û t 1 7 7 4 , copiée ci d eva n t, page
2 4 , prouve qu’on rendoit fufpect à mon m a r i , tout ce
~
'
qui venoit de moi , & qu’il y avoit plus que des fousordres dans cette manœuvre dès que la f a m i lle s 'e n m êle 3
r e jle ^
en
repos. La
dame de Lombard convient elle-
m ê m e , ( page 1 0 , lig. i cre de fon m ém oire); que lo n g
te n u aya n t 1 7 7 7 > les p a ren s d e la f a m i l l e lu i p e ig n o iç n t
com m e
�il
9
comme inévitable la reffource de Vinterdiction de fo n fils .
Le ficur Garnier que la dame de Lombard appelle ,
page 26 dé Ton m ém o ire, un bourgeois honnête de la
ville d’ A ix , & qui foutira de mon mari en venant le
conduire h G r a d e , l’écrit du 6 Juillet 1 7 7 6 , copié à l«a
même page, eft le fecrécaire de M . de G r a s , l’un de ces
bcaux-frcrcs.
Le ficur Scyrre , curateur, Procureur fo n d é , défen
dant à l’interdi£tion comme Procureur ad lites , jufqu’au
moment qu’elle a été prononcée , cfl: Je premier dont les
intérêts font ménagés & la créancè aduréc par la déli
bération des parens , votant fur l’interdi&ion. C ’eft la
dame de Lombard contre
laquelle il venoit d’occuper
dans une affaire fam eu fe, qui
le
r e q u ie r t ;
ce font
les beaux-freres qui l’avoient mis dans'la maifon, qui
le
; ils autorifent la curatrice de leur choix , &C
d ’accord avec eux à emprunter à conftitution ou autre
m ent, à donner des mandemens furies fermiers fi la cura
v o t e n t
trice le juge à propos; pour l’acquit d’une dette dont il ne
paroît aucun titre, à un homme contre lequel ils dévoient
avoir au moins de l’aigreur , & que Padminidration univcifellc des affaires de la maifon depuis fix ans, devoit
faire réputer débiteur.
Cette créance fi foigneufement déléguée , eil acquit
tée pour 6 10 0 0 liv. en com p tant, ou en délégation ac~
ccptées des fermiers.
Dans le même requifitoire , la curatrice demande à
être autorifée a puffer des compromis, ù tranfiger fu r tou
tes les contefilations mues ô a mouvoir que peut avoir fon
R
�I}0
fils. Les mêmes parens le votent , 51 le juge l’ordonne.
Après que la dette du fieur Seytre eft parfaitement
aflfurée , « paroît la demande des b e a u x - freres, en fupm
plément
de
légitime ; auffi-tot
le compromis eft
« pafle.
Si les Satuts de Provence exigent cette forme de finir
les conteftations entre proches , les loix fupérieures à
ces ufages locaux , les interdifoient à la curatrice.
L e fieur Scytre va à A ix , inftruit les Arbitres , &C
leur porte les pieces. O n fait eftimer les terres de mon mari ;
les deux Expçrts f o n t , l'un le beau-frcrc de ce même
fieur Seytre; l’autre, le vaflal d’un des bcaux-freres.
L a fixation des droits , l’évaluation des fo n d s , tout
eft à volonté ; on ne daigne pas même diftraire les
fubftitutions ; e n fin , u n e t r a n f a & i o n aiTure 1 0 0 ,0 0 0 1.
aux beaux-freres , qui en avoient déjà reçu 60,000 liv.
& que le pjerecommun croyoit aiTez bien payés de z 40001.
C ’eft fous les yeux du fieur Seytre encore, que Pacte
eft rédigé.
Il ne faut pas je crois de longs commentaires pour
prouver de quel tems & avec q u i , tout avoit été mé
dité.
Q u ’on joigne à cela, l’écrit donné par mon mari le 6
Juillet 1 7 7 6 , au fecrétaire de fon beau-frere , Confeiller au Parlement. Celui que m ’avoit donné mon mari fur
l’autorifation de fon curateur , le 1 9 A vril 1 7 7 4 ,
pour obtenir un ordre du R o i qui l’exilât à Brie , dans
le tems que nous craignions les fuites de PaiFaire des
afficJaes (copié, page 1 6 du mémoire de nos A dveriaircs,}
�n 1
•
f qu’on fe rappelle l’ufâgc que j’avois fait de cet é c r i t , 8c
en quelles mains je l'avois dépofé , &C on verra com
ment l’exécution du projet a été am enée, on connoîtra
tous ceux qui ont concouru à nous détruire.
C ’effc du fieur Seytre lui - même , que je tiens le
témoignage que je vais invoquer; mes adverfaircs favent
s’il étoit inftruit de ce qui fe paflfoit dans l’intérieur de
leur délibération ; un écrit qu’il m ’a fait paiTer dans lû
moment, oit divifé d’avee eux , il fe voyoit pourfuivi
en recours de cette même créance dont les beaux-freres
lui avoient il généreufement aiTuré le paiement par leur
délibération , développe parfaitement toutes les marches
qu’ils ont tenues ( i ).
Quoique je faffe imprimer cet écrit en entier dans
les picces juftifîcatives , je crois devoir rapporter ici Ces
énonciations fur cette tranfa£bion ; « on dit que M . le
»» M a ig re , ( M. de Gras , beau-frere, ) frappé de ce qu’il
» a trouvé dans le mémoire concernant le fupplément
» de légitime qu’on s’eit fait adjuger , a fait un mémoire
» ou lettre juftificative de ce qui a été faità M. le Garde
î) des Sceaux , Sc lui demande juftice fur l’imputation
»> calomnieufe qu’il renferme contre les légitimâmes ;
»> puifqu’il fe plaine , il femble que madame de C a b r is ’
« doit ajouter par réflexion à fon mémoire, qu’un Con^
»3 fciller au Parlement devoit favoir qu’ils font très» mal d’attendre ou de faifir un tems d ’interdi&ion
«
pour fe faire adjuger un prétendu droit contfe l'interdit.,
( i ) V o y e z pieces juftificatiycs, N ° . 14.
Rij
�•
i 3î
53 qu’on â fi fort abufé de la foiblcjje de la. curatrîte qu’ on
» avoit créée, 8c de ce que l’interdit ne pouvoit parler;
» que non-feulement on s’eft: fait adjuger un droit qu’on
>• n’avoic ofé réclamer en juiKce contre M . de C abris,
» tandis que les biens de la fuccefîion , fur lcfqucls on
3* l’a p ris,
n’ont été cftimés qu’au taux de trois pour
» c e n t , comme domaines nobles
on s’effc fait adjuja ger , 6c on a établi dans la rranfa&ion , le taux de
53 l’intérêt du paiement à cinq pour cent ; qu’on juge de
>3 l’accciToire , fi madame de Cabris a tort de c r ie r , 6c
53 de fe plaindre.
A cç premier témoignage fe joint celui d’un homme
de qualité de la P ro v in c e , dont la religion avoit été
furprife.
M . le comte de Grafie du Bar m ’écrit le i z A vril
1783 :
53 Je n’ai point entendu , madame la m arquife, don53 ncr lieu à des ordres fevères de Sa M ajcflé , contre
>3 vous , lorlquc je fignai après trente de vos plus pro33 ches pauens de Provence , enfuite des lettres de m a 55 dame votre belle-mcrc , 8c de M.. le bailli de M ira>3 beau , un mémoire allez vague qui me fut préfenté à
'53 A ix. Je iuis charmé que ces ordres foient révoqués ,
33 mais juftifiée auprès de Sa M ajcfté, la vengeance n’cil”
elle pas au-deflous d’une ame comme la vôtre.
33 M adam e votre belle-mcre m ’a fait l’honneur do
35 m’écrirê- au iiijct de votre demande au Confeil des
» dépêches ; je lui ai témoigné mes regrets de voir
33 perpétuer les differens dans fa famille ; je lui ai offert
�i 33
» mes fervices dans ce pays-ci , mais feulement pour
3î tout ce qui auroit trait à une conciliation , &: ca
» r e n v o y a n t à M M . fes gendres tout ce qui auroit l’ap>3 pprcncc de procès.
J’ajouterai ici une dernière réflexion fur les manœu
vres de la cabale.
C e font les beaux-frères qui ont médité & fait pro
noncer l’interdiction de mon mari , Si cc font eux qui
ont nommé la dame de Lom bard curatrice; c’eft la
dame de Lom bard qui leur livre par tranfaction une
partie des biens de l’interdit. Leurs titres refpectifs font
leur ouvrage réciproque ; ils fé font donné les uns aux
autres les moyens de nous dépouiller , de nous enlever
notre exiilence , de s’emparer de notre fortune : nous
fommes depuis fix mois fans ali mens , fans linges, fans
habits , fins rcflourcc tout eft pris ou engagé .d'avance ,
tout eft faiiî- La dame de Lombard a reçu nos revenus
jufqu’cn 1 7 8 5 , les beaux-freres ont
saisi
les échéances
futures , & leurs titres refpectifs anéantis par l’arrêt du
Confeil , font mis aujourd’ hui à une exécution rigoureufe;
la violence fuccedc aux artifices employées originairement
pour nous perdre.
V oilà les perfonnes qui fe font crues obligées de venir
au fccours d ’un membre de leur famille , pour mettre a
couvert fa perfonne & fe s biens ; qui ont fa it, tout ce qui
¿toit compatible avec l'honneur pour le conferver a la de moif i l l e de Cabris avec fon pere & fon patrimoine , & voila
{comme) les mains de fa mere cherchent a lui ravir tous fes
*biens.
�1 3 4
D e toutes ces perfonnes, aucune ne vient lui donner
des alimens ; toutes abandonnent les perfonnes pour fe
faiiir du refte des biens.
L a dame de Lombard implore continuellement le
témoignage du public , les dépofitions de la Province ,
des perfonnes qui ont été témoins de fon adminiftration
je ’ lui oppofe des faits , j’offre d’y joindre le cri p u b lic ,
foulcvé contre elle, l’indignation contre les excès de la
cabale.
Quand j’articulai par ma requête du 6 Mars 1 7 7 9 ,
devant l e ‘Juge de Graflfe, l’abandon où é toit mon m ari,
les mauvais traitemens auxquels il étoit expofé , quand
je demandai à en faire preuve par témoins , que répondit
la dame Lombard ? C e qu’elle dit à la page 4 1 du mé
moire.
Elle déclara qu’il étoit inutile d’entamer fur cet objet
une longue procédure d’enquête ; elle m ’y foutint nonrecevablc Sc la fit prononcer par un Juge prévenu; à cette
preuve teilimoniale que je demandois , elle fubftitua la
defeente de ce même Juge au château de C a b ris, pour y
voir le fils 8c la mere bien préparés , &. dînant cnfcmblc;
les certificats de Ces gagiftes , ou de fes parafites , les
mêmes quelle ofe faite imprimer aujourd’hui.
Je vais prouver l’inutilité de ces démarches pour s’en
procurer d’autres; je lui oppoferai les déclarations de ceux
que ces agens ont voulu féduire ; je développerai la diffé
rence des moyens que j’employe pour faire connoître la
v é rité , Sc de ceux quelle met en ufage pour l’étoufFer.
�J31
Je donnerai des preuves du cri public , auquel je join
drai bientôt des informations juridiques.
D ans l’inftânt que je follicitois mon affaire au C o n fe il,
j ’appris que la cabale vouloic extorquer des certificats
¡contre moi.
Le i 6 A vril je fis fommer la communauté de Cabris
de s’aflembler 6c de déclarer s’il n’étoit pas vrai que
mon mari étoit maltraité ; s’il n’éroit pas vrai qu’on
avoit préfenté à la communauté des certificats touC
dreifés contre moi , qu’on l’avoit follicitée de figner.
Le i l ,
la communauté s’aifemble; elle répond que
mon mari n’eft pas Îoigné; qu’il n’efl: pas fervi; qu’il cil
abandonné ; que fa mere ne le voie pas ; qu’elle paifc la
plus grande partie de l’année à Graife & loin de lui.
Pour les certificats, la communauté répond que le fieur
A lzia ry, l’homme de confiance de la dame de Lom bard,
a propofé aux Habitans de figner des certificats tout dreffés, qu’ils l’ont refufé; que fes certificats leur ont été
repréfentés fous d’autres formes, & qu’ils l’ont encore
refufé. •
L e fieur Seytre m 'écrit, le 9 A vril 1 7 8 3 , « le certi» ficat contre vous, qui a été préfenté tout dreifé, a été
» figné par les Prêtres d e l à Paroiife, ôc par quelques
jj autres qu’on n’a pas pu me nommer, mais avec des
« explications Sc reftri£üons qui font préfumer qu’on ne
« les produira point ».
A peine ma fommation avoit-elle été connue des Agens
de la dame de Lom bard, qu’ils firent tous leurs efforts
pour empêcher l ’aifemblée de la communauté.' Le fieur
�13^
Scycrc m’écric le i G A vril 1 7 8 3 : « o n fait à Cabris
» toutes chofcs au monde pour que le Confcil n ait pas
» lieu, tk. je crains que malgré le Confcil deá Confuís
» & les Confuís eux-mêmes „ on n’y parvienne. Le pre» micr Confuí me répond que non,
que vous aurez
« une preuve de la bonne volonté de vos Habirans à faire
» quelque chofe qui put concourir à manifefler le defîr
« qu’ ils ont de voir rétablir leur feigneur & vous dans
» l’état ou vous devez être ».
N e pouvant pas empêcher l’afïemblée, les A gcns de la
dame de Lombard voulurent, au m oins, atténuer les faits,
que devoit attcfler la communauté. Le même fieurScytre
m ’écrit le 2. 3 Avril : t< A lziary ( le Procureur ) parut à.
« Cabris l ’avant-vcillc du C o n fc il, pour faire le thème
»> au C o n fu í, ôc malheureufcmcnt, il ne l’a que trop bien
»5 étudié » ................... O n voit, en comparant l’cxploic,
à la délibération, que l’on a cédé aux follicitations; que la
crainte a préiidé dans ce qui a été dir. « T o u t ce qui cil
m gens du peuple éto it, dit-on, furieux au Confcil. Ils
» crioient, dites que nous voulons M adam e la jeune, 8c
» qu’il n’y a que trop long-tems que nous fommes com »
mandés p¿r des domeitiques. Mais tout ce que ccs gens-
» là. difent, on ne l’écrit pas. Le thème étant fa it, on ne
» s’en eil pas écarté «.
Le Heur Alexandre C o u r t, Coniul de la même année,
atteile le 1 7 Février 1 7 8 4 : « q u ’après le Confcil de la
» communauté tenu la dcuxicme fête de la Pentecôte,
» le S r A l z i a r y , homme d ’affaires de madame la douairière,
» lui préfenta un certificat tout drefle fur papier tim bré,
>3 contenant
�ï.3 7
*» contenant nombre de faits; que ledit fieur A lzia ry le
»> follicita d’areiter, p ortan t, entr’autres, que M . Ic
>» Marquis écoit fuivi journellement par un chirurgien;
w qu’un médecin de Graile venoit le .vifiter fréquem>» m ent; qu’il mangeoic à la table de la dame fa merc
» Iorfqu’ellc venoit à Cabris; que le fieur A lziary ne le
*j quittoit ja m a is, &. autres faits relatifs au traitement
m
de M. le Marquis de Cabris. Après avoir lu ce certifi-
» car, ayant trouvé que les faits y énoncés n’étoient pas
» véritables, il refufa de le figner malgré toutes les infm
tances & les menaces dudit fieur A lziary »».
L e fieur Seytre m ’écrit le premier Mars 1 7 8 3 : « il
»» n’y a plus qu’un cri contre toutes les manœuvres de la
» dame de Lombard &C vous ne devez plus craindre de
>• le dire ».
D ans celle du 1 o M ai fuivant, il me d it: « M . le Bailli
»> de Mirabeau mande que vous ne réuflîrez pas; le public
u defirc fi fort que juftice vous foit rendue, qu’il n’en
« croit rien; il eft même très-impatient fur l’événem ent,
» Sc défire avec le plus v if cmprciTement d’apprendre que
» vous avez eu le fuccès le plus favorable; vos habirans
» de C abris, entr’autres ceux qui font de bonne fo i,
»> difent qu’il y a trop long-tem s qu’ils font gouvernés
i} par des mercenaires; ils efperent bien que D ieu leur
»
r e n d r a l eur m a î t r e » .
Il me dit dans celle du 1 6 Mai : « ce fera le plus grand
w a£tc de juftice qu’on pourra faire de tout anéantir d’un
»
feul coup................ Le public defirc avec le plus g r a n d
v» em prcifcm ent le dénoûment de cette affaire, qui ocS
�13^
» ' cup'e tous les gens de bien qui y prennent le pîus viF
» intérêt pour vous., 8c pour le bien-être de M . 8c de
» mademoifelle de Cabris >3. Et dans celle du 2 4 du même
mois : ci il eft tems que tant de maux foient réparés, 8c
» q a’ une fituation véritablement à plaindre, trouve enfin
» un terme.......................... Je ne fuis pas fâché d’être
» brouillé avec quelqu’ un qui ne refpc&e rien, qui no
» veut voir que fon in té rê t, 8c qui trouve mal tout ce
» qui eft: jufte. M a rupture lui fait peu d ’honneur............
« A v e c deux feules paroles, je donnai la goutte à mon
» financier.pour trois femaines».
U n homme de la premicrc qualité de la province
auquel mon mari a l’honneur d’appartenir, m’écrivit le 2 7
A o û t 1 7 8 3 , pour me féliciter fur le fuccès que je venois
d ’obtenir. « Lorfque j’ai fait l’ouverture de vôtre lettre,
» toutes les perfonnes qui étoient aiTemblécs chez m o i>
»5 ont paru partager mes fentîmens, & applaudir à un
» jugement qui h’a été que trop long-tcms attendu ».
Les iieurs Bonitt 8c Bauge, tous deux bourgeois de
C a b ris , m ’écrivent dans le mois d’A o û t 1 7 8 3 , « que la
» nouvelle du gain de mon affaire a caufé une joie géné» raie, non-feulement parmi les vaflaux de C abris, mais
» dans tous les environs; les nouvelles du 1 y , ajoutent» i l s , apportoient la palme aux deftructeurs de votre'
» mari, de votre fam ille, de vos réputations 8c de vos
”
biens. Celui du 2 3 apporte votre juftification 8c rend’
« vos adverfaires honteux........................ V en ez recevoir
w les hommages de vos vaffaux dont "vous êtes la mère
«
ôC la bienfaitrice, 8c qui par un attachement partica-
�*39
lier, n’ont jamais tant rien defiré que de voir la main
de Dieu s’appefantir fur les opprçffeurs de la maifon
»
» de Cabris................ . Nous touchons au moment de
»> voir notre mere &c. libératrice tendre une main fccou>j rableà un époux malheureux, infortuné, recevoir ^ avec
« des larmes de joie, fa tendre 6c çhere fille depuis long» tems vi&im e de l’implacable avarice » .............
Q u ’on daigne comparer ces témoignages de la yérité
avec les atteftations que produit la dame de.Lom bard,
D ’ un côré ce font des certificats donnés en 1 7 7 9 , dans
le tems même qu’elle, fe refuioit & faifoit rejeter par les
Juges les enquêtes que je demandois; ces certificats font
le fruit de la fugeftion, ou de la complaifance.
C e n’eft qu’avcc des menaces ¡k. par des voies obliques,
que
fes . A g e n s tentent d’extorquer des atteftations des
malheureux que la dame de Lombard foumet à leur def»
potifrne. Elle rient d’une main la verge de fer le v é e , &C
de l’autre le certificat qu’elle v e u t qu’on foufenvê.
J e f ui s a b f e n t e d u p a y s
M e s m a l h e u r s m ’e n o n t i n t e r -
ccDté
o u i fo l é les r e la ti on s . Je r é c l a m e c o n t r e de s O
gens
à
qui y ont des attenances, q»ji l’habitent, qui y ont le pou
voir en main. M rs perquifitions font publiques, mes de
mandes exemptes .de toutes captations; je fais fommer
juridiquement les communautés de s’aflembler, les parti-'
culicrs de déclarer la vérité. Je ne demande à tous que ce
qu’ils fi vent, que ce qu’ils ont vu; je ne les intimide point
pour empêcher qu’ils ne rendent a mcsr;AHvériaires toute;
la juftice qu'ils.en peuvent attendre; & voilà le jugement
du public entre la dame de Lom bard ô£ moi.
S ij
�14 0
Je crois avoir développé l’origine des cabales qui nous
pourfuivent; leur form ation, leur réunion, leur progrès,
&. l’exécution de leurs projets.
C ette attention à m ’éloigner de la confiance de mon
m ari, à le livrer à des mains perfides & Subordonnées, a
eu tout l’efFet qu’on pouvoit attendre des circonftanccs
malheureufes qui avoient réuni de plus grandes forces, à
celles des ennemis domeftiques acharnés depuis long-tcms
à fa perte.
C ’eft dans nos propres famille?, c’eft dans nos proches
que nous avons trouvé les deftru&eurs de nos perfonnes
de nos biens.
Les uns, avides de nos dépouilles, ont ofé attenter à
notre cxiftencc avec les armes meurtrieres, des autres
égarés par l’emportement ôc par la fo if de vengeances par
ticulières.
Com binés dans remploi des moyens & réunis dans
l’exécution, ils ne peuvent être divifés que fur la difpoiition d’un enfant échappé au nauffrage dans lequel ils ont
fait périr fes parens. Heureufe défunion ! qui nous a fauyé
le dernier opprobre réfervé à terminer nos malheurs.
Les coups fous lefquels on nous a fait fu cco m b cr,
étoient d’autant plus redoutables, que ceux qui nous les
portoient s’étoient ailurés de l’impunité en gardant l’ap
parence du voile. Les feuls qui fe m ontrent, font d’un
cô té , M . le Bailli de M irabeau, Religieux profès, m ort
civilement; de l’autre, une femme fans fortune que fon
incapacité même avoit fait appeler à la curatelle.
C ’eil fous le nom de cette m ere, de cette curatrice,
�I4 I
tout à la fois infolvable & hors d’état de ientir l’aviliffement du rôle qu’on lui faic jouer, qu’on nous pourfuic
encore ici.
C ’efl: par elle qu’on a fait dévafter nos m aifons; c’cft
par clic qu’on a faic recevoir & déléguer nos revenus
d ’avance; c’efl: par elle qü’on a rempli les mains de nos
ennemis de titres q u i, quoique anéantis par l’A rrêt du
C o n fe il, fervent encore de prétexte à des faiiies mifes en
ufage pour reculer notre jouiiTance & nous priver d’alimens. C ’efl: elle qui , pour venir nous pourfuivre, a mis en
gage notre vaijjelle d*argent s & vendu ju fq u ’ aux boucles
d ’ or de fon fils.
C ’efl: fous ion n o m , enfin, qu’on vient de publier un
libelle, ouvrage de tous les membres de la cabale : où la
calom nie, la faufleté 8c la malignité ont diftilé leur venin,
à l ’appui de pieces fal/ifiées, créées $c fuppofées par Ces
auteurs.
D es premiers attentats en néccflïrcnt toujours d’autres.
•Si nos perfécuteurs n’euflent voulu qu’arrêter les diiîipations qu’ils me fuppofent des biens de mon m ari, leur
pourfuitc devoit cefler dès que je fus enfermée; l’interdi&ion devenue inutile n’étoit donc plus qu’une flécriflure
gratuite, qu’un moyen de s’emparer des biens 8c de la
perfonne, pour s’aflurer le parcage des uns, 8c Ce prémunir
contre le retour de l’autre.
L a cabale demande encore aujourd’hui que mon mari
foit déclaré fou , parce qu’elle l’a fait juger t e l; parce
qu’elle a employé les derniers moyens pour le rendre rcî '■
>
actuellement même fa rnere ne le voit que pour l’effrayer 3
dans l’efpérance de le rendre tel.
�v
14*
C ’eft à n o s J u g e s , c ’e f t a u p u b l i c h d é c i d e r
encre
m a d a m e d e L o m b a r d 8c m o i .
E l l e a d é t r u i t l ’ h o n n e u r , l ’e x i f t e n c e & l a f o r t u n e d e f o n
fils.
;
Je n’ai jamais fait faire un fcul emprunt
je l’ai reiïufciré, je le défends.
k mon
Signé M i r a b e a u ,
mari;
M ar qui fc
de C a b r is .
M e D E B E A U S E J O U R , A vocat.
�C
L E
O
N
S
U
L
T
A
T
I
O
N
.
C O N S E I L foufîîgné fur la réponfc de madame la
Marquifc de C a b r is , b e lle -fille , au mémoire répandu
contr’elle fous le nom de la dame de Lombard de SaintBenoîc, Marquife douairière de Cabris :
E s t i m e ,
que cette réponfe 8c les pieccs authentiques
qui y font jointes, détruifent fuffifamment les calomnies
par lefquellcs on a tenté de noircir madame la mar
quifc de Cabris belle-fille, dans ce mémoire; il n’étoit
gueres poilible de prendre le change fur le- but que
fe propofoient les auteurs ; un pareil ouvrage ne doic
avoir pour objet que l’ctabliiTemcnt des droits de celui
pour lequel il eft fait, ou fa défenfe contte ceux qui
attaquent ces droits. La dame de Lombard ôc la M a r
quifc de Cabris ne plaident depuis fept ans que fur un
feul point; fur la feule queftion de favoir fi le Marquis
de Cabris eft, ou n’eft pas, dans le cas d’être interdit
pour démence. La dame de Lombard paroît ne réclamer
fon titre de mère, que pour faire déclarer fon fils fou :
la Marquifc de Cabris foutient qu’il ne l ’a jamais été 6c
qu’il ne l’eft pas. L ’une s’oubliant elle-m êm e, pourfuit, au
mépris de la nature Si du fang, la flétriiTurc de ia race
entiero Sc de fa propre poftériré; l’autre, épou'fe attachée
Sc fenfible, mere tendre, veut détourner de deiTus la tête
de fon mari ôc de leur fille unique, cette tache qu’on
�*44
t e n t e d e l e u r i m p r i m e r . U n e p ar e i l l e c o n t e f t a t i o n n e c o n f ifte q u ’e n f a i t s ; c ’eft l ' é t a t d u M a r q u i s d e C a b r i s q u ’il
s ’a g i t d e j u g e r : t o u t c e q u i n ’ef t pas r e l a t i f à c e t
état
a & u e l , eft a b f o l u m e n t étra ng er à la q u eftio n fo u m ife aux
Tribunaux.
C e t t e q u e f t i o n u n i q u e d a n s la c o n t e f t a t i o n , l ’é t a t d u
M arquis
de
C a b r i s , la d a m e de L o m b a r d la
fuppofe
é c l a i r c i e , c l i c l a m e t en f a i t r e c o n n u ôc d é m o n t r é ; e ll e
f u p p o f e i o n fils r e c o n n u
e n d é m e n c e p a r l a f a m i l l e ôC
p a r les J u g e s , & q u ’ il n ’ef t plus q u e f t i o n q u e d e lui n o m
mer
u n c u r a t e u r ; e ll e f u p p o f e
une concu rrence
ôc
uri
c o m b a t , d a n s le T r i b u n a l p r ê t à p r o n o n c e r l’ i n t e r d i c t i o n ,
e n t r e la M a r q u i f e d e C a b r i s ôc e ll e p o u r c e t t e c u r a t e l l e ;
ôc p o u r e n écar.tei l’a d v e r f a i r e q u e la d a m e d e L o m b a r d
s ’ y d o n n e f a n s q u ’ il e n a i t j a m a i s é t é q u e f t i o n d a n s les
T r i b u n a u x , e l l e a t t a q u e d e l a m a n i è r e la plus a f f r e u f e l es
m œ u r s ôc la c o n d u i t e d e l a M a r q u i f e d e C a b r i s f a b r u ; e ll e
l ’a p r é f e n t e c o m m e u n e f e m m e
coupable &
convaincue
d e s plus g r a n d s c r i m e s , f l ét ri e p a r de s j u g e m e n s h u m i l i a n s ;
c o m m e u n e f e m m e d o n t l a c o n d u i t e a a t t i r é les p e r q u i f i ï i o n s ôc les r a p p o r t s d e la P o l i c e ; u n e f e m m e q u i n ’a p u
fe
c o n t e n i r d a n s le C o u v e n t
o ù f a f a m i l l e l ’a v o i t f a i t
e n f e r m e r , p o u r p u n i r fes d é r é g l c m e n s .
Il
cft é v id e n t qu e ce
m é m o i r e fans o b j e t ,
puifque
les c o n t e f t a t i o n s q u i lui f e r v e n t d e b a f c , n ’e x i f t c n t p a s , n ’a
eu pour m o t i f qu e la d iffa m a t io n d o n t nous avons d éjà
çonfeillé
à m a d a m e la
M arquife
de
C a b r i s de rendre
plain te.
O n n e p e u t v o i r , f a ns é t o n n e m e n t , q u e l a d a m e d e
J - o m b a r d } p o u r f e r v i r des v e n g e a n c e s p a r t i c u l i è r e s , n ’ aie
pas
�M-J
pas craint de flétrir l'honneur de Ton m ari, d ’une de fes
filles, Sc qu’elle cherche encore à imprimer une tache fur
fa propre poftérité. Q ue pour décrier celle qu’elle fuppofe
fa concurrente dans la curatelle de fon fils, & qui n’eft
véritablement fon adverfaire que pour détourner la flétriflure qu’elle vçut imprimer fur fa famille ; qu’une
femme de qualité, âgée de foixante-dix ans, qui exige
les égards dûs à fon fexe,*à fon âge & à fa dignité, fc
permette d’expofer contre une femme de qualité, fa bru,
des faits qui, quand on pourroit les fuppofer véritables,
devoient allarmcr la pudeur de celle qui en faifoit le
tableau.
M adam e la
Marquife de Cabris démontre de la
manière la plus convaincante la calomnie acharnée à la
pourfuivre; elle prouve les falfifications & les altérations
qu’on s’eftpermifes dans la copie tranferitedans le mémoire
de la Sentence rendue dans l'affaire de M . de Villeneuve;
elle a démontré la faufleté du prétendu procès-verbal de
POificier de P o lic e , fuppofé attaché à fes pas. Nous ajou
terons à fes preuves, une feule réflexion fur ce fait. Si la
Police eût détaché quelqu’un pour éclairer la conduite de
madame la Marquife de C a b r is , les rapports qui en
auroient été fa its, pieccs fccrettcs du Gouvernement,
n’auroient pu iortir de fes dépôts. Quand on pourroit
fuppofer l’exiilence de ces procès - verbaux ; quand ils
pourroient être venus entre les mains de particuliers,
jamais de pareilles pieces ne peuvent être employées en
juftice, 8c il cft bien étonnant qu’on fe foie permis de
les tranferire avec des guillemets, dans un ouvrage que
l’on prétend defliné à une défenfe judiciaire.
T
�146
S’il pouvoic être queftion de la curatelle du Marquis
de Cabris, de la préférence entre la merc de l’interdit &C
fa fem m e, la M arquiic de Cabris démontreroit par le
texre même des loix romaines, qu’on lui oppofe, qu’elles
ne prononcent pas en ce cas l’cxclufion de la fem me;
qu’elles l’appellent au contraire de préférence à tout autre,
elle invoqueroit l’ufage du Parlement de Provence, où les
femmes font nommées curatrices du mari interdir, à l’c »
clufion de tous les parens; elle écartcroit d’un feul mot la
prétention de la dame de L om bard , que les mauvais traitemens exercés fur fon fils pefidant l’ufurpation d’une
curatelle anéantie, & les abus dans Padminiftration des
biens en rendent indigne. M ais cette queftion fur laquelle
la Marquife de Cabris réunit le vœu des Juriiconfultes,
cft abfolument fuperflue ici; elle foutient que le Marquis
de Cabris, fon m ari, n’eft pas dans le cas d’interdiclioa
pour démence; elle a , en fa faveur, le vœu d’une famille
refpe&able, compofée de ce qu’il y a de plus diftingué par
la naiffanee àc par les emplois. L ’avis des médecins & des
gens de l’art fait pour fixer l’opinion des Juges, & aux
quels on n’oppofe rien de contraire de la part de la dame
de Lombard.
Délibéré a Paris le dix neuf Mars mil fept cent quatrevingt-quatre. Signé d e B e a u s e j o u r .
�PIECES JUSTICATirES.
N". I.
ous G
reffier
en ch ef de la Sénéchauiiée de G ratte, certifions
que la fentence rendue par M e R e v e l, Juge commis par la Cour le
deuxième jour d’Odtobre 1 7 7 6 , en faveur de Meflire Louis de V ille
neuve , Seigneur de Mouans 8c de Sartous, contre les fieurs de R iqu eti,
comte de Mirabeau , de Briançon , & les dames marquifes de Cabris
& de la T o u r, n’a jamais cté levée au G reffe, les droits royaux n’ayant
jamais été payés, ayant néanmoins joint un extrait de ladite fentence
à la groiTe de la procédure par noüs remife rieres le greffe criminel
de la Cour du Parlem ent, enfuite de l'injon&ion qui nous en avoit
été fa ite , enfuite de l’appel de la même fentence", en foi de quoi ,
nous avons délivré le préfent pour fervir & valoir ce que de raifon. A
GiaiTe le 14 Février 17 8 4 ,fig n é A
ubin.
N°. II.
Copie des Interrogats, & Réponfes du fîeur Marquis de
Cabris des 10 2c z i N ovem bre 1777.
D u 10 Novembre 1777 , dans le château ftigneurial de Cabris, &c.
nous nous ferions prèfentés à la dame mafquife de Cabris , belle-fille ^
que nous aurions trouvée au - devant du château , laquelle nous auroit
introduit dans une chambre au fécond étage , dont les fenêtres vifent au
nord, & lui ayant fait Javoir le fujet de notre commiffion, elle nous auroit ■
dit que le jieur marquis de Cabris , fon mari, étoit parti ce jourd'huigrand
matin pour la campagne , pour y paffer la journée , & d ou il ne reviens
droit que ce fo ir , étant fdchee que ledit fieur de Clapiers fon mari, ne fe
fo it pas trouvé dans fon château ; quelle efl perfuadée que s ’il favoit
qu’on venait dans la vue de l’ interroger, il ne fe feroit pas abfenté,
T ij
�troyant que notre accedit navoit pour objet que l*audition %es témoins
par lui requife par fon comparant du jour d’ hier ; & ayant interpellé la
dite dame de Cabris, belle-fille, de figner, elle nous auroit répondu quelle
croyait que fa fignature etoit inutile, & n’ a voulu figner > de ce requife.
Me Al^iary, intervenant, Sec. a dit que le fieur marquis de Çabris de-
*
vant fe trouver dans ce moment à la campagne, ainjî que la dame matquife de Cabris ,fo n époufe, vient de le déclarer, ledit Me Al^iari audit
■
nom requiert être ordonné que ladite dame de Cabris , belle - fille , fera
tenue de nous déclarer
m oyennant serm ent,
ou
le
sieur
de C a
b r i s , SON M A R I , A ÉTÉ CE M A T I N , & LE N O M DE LA C A M P A G N E OU
I L L E P R E T E N D Q u ’lL A É t É , &
FA UT E P A R L A D I T E D A M E DE C a -
BR1S , BELLE- FI LLE , DE F A I R E T O U T P R É S E N T E M E N T L ADI TE D E C L A
RATION j
ledit Me Al^iary fe réferve de requérir ce qu’ il avifera ,, & a
fig né'
V u la réquifition ci-deiTus faite par ledit M e Alziary , ouï le Procu
reur du Roi n’empcçhant, avons ordonné que ladite dame de C ab ris,
belle-fille , déclarera tout préfentem ent, moyennant ferm ent, où le
dit fieur de Cabris , fon m ari, a été ce m a t i n & le nom de la cam
pagne où il a c t é , & ordonné que la préfente ordonnance fera-tout
préfentement lue à ladite dame pac notre Greffier. A Cabris lefdit»
jour & an que deiTus >figné F l o r i s .
Laquelle ordonnance ayant été publiée par notre Greffier à ladite dame
de Cabris, belle-fille , elle nous auroit répondu, moyennant le ferment
qu elle a tout préfentement prêté, que le fieur de Clapiers , fon mari >
étoit parti ce matin avec un domeflique de confiance, & quelle ne fa it
pas abjclument ou il a été , ignorant s’ il a été à la ckaffe, à la cam
pagne , ou partout ailleurs , où fe s affaires ou fon plaifir auront pu l’ ap
peler, &
l’a y a n t
interpellée
de figner, elle nous auroit répondu ,
qu’elle croyoit que fa fignature n’etoit pas néceifaire, & a refufé de
figner , de ce enquife , ajoutant ladite dame de Cabris yque f i elle avait
fu où fo n marl Je trouvait, elle n auroit pas eu befoin de réquifition , &
rauroit envoyé avertir fu r le champ ; requife de figner,
veau
a
de
nou
REFUSÉ.
Me Al\iary a du que la déclaration que la dame de Cabris *
�14?
belle-fille, vient cîe faire fur la publication de l’ordonnance ci-deiïus,
eft en oppofition avec ce qu’elle nous a dit à l’ouverture de notre
verb a l, où ladite dame a parle d’une maniéré affirmative qui indiquoit qu’elle ne devoit pas ignorer où le fieur de C abris, fon m ari,
peut fe trouver dans ce moment ; il n’eft pas douteux que dans l ’ctat
affligeant où le fieur marquis de Cabris fe trouve aujourd’h u i, il ne
foie entièrement livré à la garde & aux foins de la dame fon époufe ,
qui devroit conféquemment nous déclarer où le fieur de Cabris fe
tro u ve, afin qu’il pût ctre procédé à fon interrogatoire, en confor
mité de ce qui a été par nous ordonné ; en l’ état il cjl fehfiblc que le
Jieur marquis de Cabris doit f e trouver dans fon château, ou q u ’i l a été
caché à quelque part par la dame fon époufe , dans la vue d‘ éviter l'inter
rogatoire ordonné, aufii ledit M e A lziary, intervenant comme deffiis,
nous prie & requiert d’ordonner que par les huifliers à notre fuite il
S E R A F A I T P E R Q U I S I T I O N DANS LES A P P A R T E M E N S DU P R E S E N T C H A
TEAU
, que ladite dame de C abris, belle-fille, fera tenue
de
F A I R E O U V R I R , P O U R S A V O I R SI 1 E D I T SI E UR M A R Q U I S DE
s ’y
trouve
enferm é
,
C
leur
ABRI S
ledit M e Alziary fe réfervant, ladite perqui-
iition faite , de requérir ce qu’il avifera , &
figné.
JEt attendu qu’il eft ùne heure après m id i, on renvoya à trois heures
après midi.
Et à trois heures de relevée, nousdit Lieutenant, nous ferions de
nouveau portés au château en com pagnie, & c. , où nous aurions
trouvé Joachim G u erin , cuifinier du fieur de C a b ris, auquel nous
aurions demandé de nous dire fi le fieur ou dame de Cabris font
dans le château, de nous indiquer l’appartement où il fe trouvent, il
nous auroit répondu ne favoir où a été le fieur de Clapiers , & qu’à
l’égard de la dame de C a b ris, fon-époufe, elle eft fortie depuis peu
de tems du château , qu’il croyoit qu’elle ne tarderoit pas de venir ,
& qu’il alloit lui envoyer un exprès pour tâcher de la trouver , afin
de l’avertir de notre arrivée audit château, 6c ayant attendu jufqu a
quatre heures & demie , fans que la dame de Cabris qui avoit les clefs
de tous les appartemens, foit revenue, nous aurions renvoyé à de-r
main de ftatuer fur la rcquifition ci-deilus faitç par ledit M e Alziary.
�1s°
Etattendu l’heure’tarde, nous aurions renvoyé, & c ., ayant chargé
ledit fieur Joachim G uerin, cuiiînier, d’avertir ledit heur de Clapiers
de la dame Ton époufe du renvoi de notre préfent verbal à demain ,
& c . , & avant que de figner, ledit M c Alziary , audit nom , nous
pries & requis d’ordonner qu’il lui fera tout préfentement délivré par
notre greffier extrait de notre ordonnance de renvoi à demain pour
la continuation de notre verbal, afin qu’ il puiffe agir ainjî que Vintir et
de la dame de Lombard l ’ exigera , & a figné.
' Et nousdit L ieutenant, vu le dire ci-deilus , & ouï le Procureur
du Roi n’em pêchant, avons ordonné que par notre greffier il fera
tout prefenrement délivré audit M c Alziary extrait de l’ordonnance
de renvoi à demain pour la continuation de notre .prefent verbal aux
fins requifes. A Cabris lefdits jour & an que defTus, fignés F l o r i s ,
M a r t i g n y , I s n a r d , médecin
A l z i a r y , L a m b e r t , chirurgien,
R i p e r t & L a u t i e r , huiiîier , Si A u b i n , greffier.
Et advenu ledit jour 11 dudit m ois, nousdit Lieutenant aurions de
nouveau accédé au château , & c ., où nous aurions trouvé ladite dame
m irjuift de Cabris , belle-fille , qui nous a dit que le fieur de Clapiers ,
fon mari, Je trouve dans fon appartement, & qu’ il va defeendre dans le
moment ; & ledit fieur de Clapiers étant entré dans ledit apparte
ment , M e Alziary s’eft délifté de la derniere réquifition par lui faite
le jour d’hier , & nous a priés & requis de procéder tout préfen
tement à l’inteirogatoire ordonné , après néanmoins qu’il aura été par
nous ordonné, a inf que ledit Me Afyary le requiert, que la dame marquife de Cabris, belle-fille , & Me Seytre, procureur du fieur marquis de
Cabris , auront vidé le prefent appartement, <S a figné.
Sur quoi la dame marquife de Cabris a dit qu’il ne s'agit pas ici
d ’un aceufé , mais des réponfes à prêter en matiere civile , qu’elle
ni M c Seytre , procureur du fieur marquis de Cabris 11’entendent pas
prêter des réponfes pour lu i, mais qu’il y auroit de la dureté de les
obliger à vider ledit appartement j qu’en bonne règle s’agiflànt de
conftater 1 état permanent d’un citoyen , fon interrogatoire pourroit
Sc devroit être public : telles font les réglés ; 8c ç’eit ainfi qu’on l’a
décidé à la dame marquife de Cabris , qui requiert le déboiitement
�i <;i
delà rcquifition faite par M e A lziary, à quoi elle a conclu, M c Seytre
ayant figné, Indice dame ayant déclaré ne vouloir figner , de ce enquife.
Me Alziary a dit qu’ il ne faut rien de plus que les efforts de la dame
de Cabris 6• de Me Seytre , pour nous convaincre que leur prefence à
l ’ interrogatoire dont il s ’agit, ne pourroit qu’être nuif i l l e , s ’ilja u t en
fu s confulter les réglés , au lieu qu elles foient telles que la dame de
Cabris les expofe , chacun fait que lorfqu’il n ejl même quefiion que des
réponfes cathégoriques à prêter auffi en matière toute civile, celui qui
ejl interrogé ejl toujours fe u l à les prêter, il y auroit même d’inconvé
nient qu’ il put y avoir des confeils qui puffent influer en quelque maniéré
aux réponfes à prêter. A u jurplus Me Alziary oljcrve qu’ il defremit
fo rt que les réglés & les devoirs defon état ne lui impofajjent la ncccfjué
de perffler a la réquifltion par lui ci-devant fa ite, & <1 laquelle il requiert
qu’ il fo itfa it droit , & afigné.
Sur quoi la dame marquife de Cabris a dit que fi elle perfide de
refter dans ledit appartement , ce n’eit ni pour répondre , ni pour
inlinuer des réponfes à fon m ari; il n’a befoin ni de fon fecours ni
de celui d ’un confeil pour les prêter ; mais ayant été hier à la cam
pagne & étant fatigue, nous voyons qu’il foufFre des douleurs , & il
peut a vo ir befoin à tout inftant de fes foins , requérant de nouveau le
déboutement de la rcquifition de M e Alziary , M e Seytre a figné , la
dite dame ne voulant figner , de ce requife.
M e de M artigny , Procureur du R o i , n’empêche qu’il foit enjoint
aux procureurs refpeûifs des Parties de vider l’appartement, & ne
trouvant nul inconvénient que la dame marquife de Cabris y refte,
pour erre plus à portée de faire exécuter les ordres de fon mari ; il
eftime qu’elle peut y demeurer , délibéré , Scc.
V u la rcquifition & dire ci-deiTus, tk les conclufions du Procu
reur du R o i , nousdit Lieutenant avons ordonné que la dame de
Cabris , de même que les procureurs des Parties relieront dans ledit
appartement , ôc q u il fera par nous tout prefentement proccde a
l ’iirerrogatoire dont il s’agit. Fait à Cabris dans le château feigneurial
led it jour i i Novembre 1 7 7 7 , f i gné F l o i u s .
�is*
Enfuite de quoi nous aurions fait prêter le ferment à M c Antoine
Ifnard , Dodteur en médecine , 8c ail fieur Louis-Elzear L am b ert,
Maître en chirurgie , 3 e bien & fidellement gérer au fait de leur coin“
miilion , &c aurions procédé à l’interrogatoire dudit fieur de Clapiers
en leur préfence & en' celle du procureur du R o i , 8c conftitue le
dit , & c. Interrogé fur le contenu, &c.
Interrogé de fon nom , fur nom, âge , qualité & demeure :
A répondu qu’il s’appelle Jean-Paul de Clapiers de Cabris , âgé
de vingt-fept ans , rcfidant ordinairement à fon prcfent château ; ¿5C
par intervalle à Grafle.
Interrogé s’ il a été malade , & s’ il l ’ejî encore :
Ledit, iieur de Cabris nous auroit obfervé qu’avant de répondre,
il étoit bien aife de nous dire qu’il étoit fâché de fe préfenter à nous
en robe de cham bre, mais que fon état de maladie où il fe trouve,
ne lui avoit pas permis de s’habiller, attendu qu’il eft attaqué d’une
maladie de nerfs qui lui fait fouiFrir des douleurs aiguës , ajoutanc
que la maladie de nerfs dont il eft attaqué, ne produit en lui que
des effets phyfiques, 8c répondant à l’interrogat que nous lui avons
f a i t , a dit que la folution de la demande précédente fe trouve dans
la réponfe ci-deifus a jo u ta n t que la maladie des nerfs dont il a été,
&: eft encore affe£té , n’attaque que fon corps , 8c n’a aucune correfpondance à fon cfp rit, 8c par conféquent ne peur le léfer fur
l’affaire qu’on lui a intentée , 8c dont il eft inftruit, & pour laquelle
nous avons accédé.
'
Interrogé pourquoi depuis environ trois mois il efl par intervalle plongé
dans la. trifiefje :
A répondu que la maladie de nerfs dont il eft attaqué, & qui re
double dans ce moment des impreiTions vives 8c douloureufes fur
fon corps , ne lui permettent pas de répondre en détail à toutes les de
mandes que nous pourrons lui fa ire , 8c que la juftice eft en droit
de lui faire . ma;s qu’il peut dire généralement qu’inftruit que fa
niere abufte par ¿ QS efprits qui fans doute ont altéré les fentimens
maternels qu’elle lui avoit toujours tém oignés, 8c qu’elle lui a intenté
une procédure en dém ence, qui n’a Çc ne peut ¿voir aucun m o t i f
légitime
�*5?
légitime } mais qu’il eft bien aifurc , foit dans fo:i. domeftique , foie
!ci dans ion village, où la liberté de la campagne permet de fe tenir
d’une manière moins décente qu’à la v ille , foie à G raife, où il fe
trouve de tems à autre aux promenades publiques , dans les converfations privées avec fes parens, fes amis , &c fes gens d’affaires, qu’il n’a
proféré, ni dit aucun mot qui puiiTe donner-fujet à des interprétations
fauiTes , contraires à la raifon & au bon fens , & encore moins laiiTc
échapper des lignes vifibles de démence, ni fait aucune ad^ion dire£te
ou indirecte qui pourroit venir à l’appui de ces figues, y mettre le fçeau
par un ufage continuel & journalier.
E t tomme nous allions faire un troijîeme inerrognt, l e r é p o n d a n t
n o u s a u r o i t d i t que dans le moment fa maladie dont iL n o u s a
parlé ci-deiTus , lui fait fouffrir les douleurs les plus aiguës Sc les plus
doulourenfes qui ne lui permettent pas de répondre davantage aux
interrogats que nous pourrions lui faire ; & comme en tout état de
caufe un accufé cft lib re , même en matiere criminelle , ce qui eft
d’une confcquence encore plus elTentielle, que dan« une affaire civile
de fe laiiTec faire fon procès comme fourd & muet volontaire, à plus
forte raifon qu’il peut requérir le Juge de prononcer fon jugem ent,
d ’après une ou plufieurs réponfes limitées pour un citoyen prévenu
en ju ftice, fur-tout quand ce même citoyen eft sûr d’avoir énoncé
tout ce qu’il croit néceiTaire pour fa 'juftification authentique & com plette.
Nous lui aurions repréfenté que nous ne procédons au préfent interro
gatoire que pour conjlater l'état de fon èfprit, nous ne pouvions nous
difpenfer de faire encore d’autres interrogats , qu’attendu l’ état ou il
f e trouve, nous ayant obfervé qu’ il foujfroit beaucoup, nous aurions
renvoyé la. continuation du prefent interrogatoire à trois heures de re
levée.
Le£ture fa ite , & c.
Et advenue ladite heure , & c.
Interrogé pourquoi à la fin du mois de Septembre dernier étant nta-^
lade , il a reftépendant trois jours fans prendre de nourriture :
A répondu qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
. Y
�154
Interrogé pourquoi il refufoit tous les alimens qu'on lui préfentoit , &
qui auraient pu le foulager dans fa maladie :
A répondu qu’il fe rcfere à fes précédentes réponfes.
Interrogé pourquoi le 23 Septembre dernier, étant detenu malade, dans
fon l i t , il refufi de prendre un bouillon , quelques inflances quon lui
f 'U '
,
A répondu qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
Interrogé pourquoi, quand on le preffoit de prendre de la nourriture , il
la refufoit en difant & répétant, mon D ie u , anéaniijj'c^ moi :
A répondu qu’il fe référé à fes précédentes-réponfes.
Interroge pourquoi environ depuis trois mois il s'emporte quelquefois
contre les perfonnes qui s’ approchent de lui :
A té p o n d u qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
Interrogé s’ il n'efl pas vrai que vers la fin du mois de Septembre der
nier il fe feroit je té par la fenêtre , f l on ne l’ avoic retenu :
A répondu qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
Nous lui aurions repréferué que fon refus de répondre précifîment aux
interrogats que nous lui faifons , pourroit ctre regardé comme un aveu ,
nous l’ interpellons de répondre plus précifément.
A encore répondu qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
Interrogé pourquoi il dit , ayant de me jeter par la jenctre , je veux
tuer mon époufe :
A répondu que l’interrogat que nous venons de lui faire eft faux.
Interrogé pourquoi le même foir il vouloit lancer un fauteuil contre la
dame de Cabris , fon époufe, f i on ne le lui eût ôté:
A répondu que cela eft faux.
Interrogé pourquoi il en lança tout de fuite un fécond contre tous ceux
qui étoient préfens :
A répondu qu’il fe rcfere a fes- précédentes réponfes :
Interrogé pourquoi il vouloit fe renfermer dans la prifon :
'*
A répondu qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
Interrogé pourquoi avant de s ’y renfermer, .cl demandoit que l ’on y
ùrulut de l'encens :
A répondu qu’il fe référé à fes précédentes réponfes.
�JÎ5
Interrogé s’ il efl vrai que dans le commencement du mois de Septembre
dernier il a maltraitéfa fille :
A répondu que cela efl: faux.
Interrogé pourquoi deux jours après , fe chauffant à la cuifine, comme
fa fille entroit, il lui donna un coup de pied :
A répondu que cela eft faux.
Interrogé pourquoi le fo ir du i l Septembre dernier, il fe donna un
coup de coâieau :
A répondu que cela eft faux.
Interpellé de nous dire f i la ble(fure étoit confidérable ;
A répondu fe réferer à fes précédentes réponfes.
Nous lui aurions repréfenté qu’ il devoit avoir une: p laie, & que celte
plaie devoit être profonde, puifqu’ il en découla environ quatre livres defang.
A dit qu’il n’a rien à répondre à cet interrogat, non plus qu a ceux
que nous pourrions encore lui faire , & que s’il a répondu jufqu’à
prefenr , ce n’a été que pour montrer une plus grande déférence à la
ju ftice, Sc qu’il demande la permiifion d’aller fe coucher.
Interrogé pourquoi le 1 8 Octobre dernier il fe donna encore deux coups
de couteau fur les fauffes cotes :
N ’a voulu répondre.
Interrogé s’ il y a environ trois mois , & dans dijférens tems , il
a.
je té par la fenêtre une dame - jeanne de vin , de l ’ argent, une montre ,
& un chien :
N ’a voulu répondre.
Interroge s’ il ejl vrai que dans le courant de l ’ été dernier il brûla quan
tité de livres excellens , & des papiers précieux ;
N ’a rien répondu.
Interrogé s’il croit être guéri des coups de couteau qu’il s ’ étoit donnés ;
N ’a rien répondu.
interrogé f i dans ce moment il foujfre beaucoup :
N ’a rien répondu :
Interrogé s'il ne feroit pas bien aife que
Lambert, chirurgien, lui tâtajfent le poulx :
A répondu que non.
Ifnard , médecin , <5*
Vi)
�E t attendu qu'il ne nous auroit pas répondu , nous aurions abrégé &
fin i nos interrogats , & plus n’ a été interrogé.
Lecture , & c . , ôc a figné ledit Jieur de Cabris avec M . le Lieutenant
& toute fa fuite.
N °.
I n t e r r o g a t o ir e s
I
I
I.
faits d’office au Marquis de Cabris par
M . le Confeiller de Saint - M a r c , à la réquifition du
Marquis de C a b ris, dans une feule féance d’environ
'
deux heures & demie.
S A V O I R F A t SO
n s
nous Philippe de Meyronnet, Chevalier, Sei
gneur du Prignon , Confeiller du Roi en la Çour de Parlement de ce
pays de Provence fia n t à A ix , Commijfaire en cette partie député, que
ce jourd’hui 18 Février 1778 , à dix heures du matin, & dans le Pa
lais , fcroit comparu M e Jean-Louis Court le jeune , procureur en ladite
Cour , intervenant pour Meffire Jean-Paul de Clapiers de GraJJ'e, Sei
gneur , Marquis du lieu de Cabris & autres lieu x, qui nous a dit que
par decret de la Cour du neuf du courant, nous aurions été commis pour
interroger ledit ficur de Clapiers fu r tels faits & articles que nous trou
verons bons ; qu’enfuite de ce dire il en ejl intervenu un. fécond le qua
torze du courant , portant qu’ il fera par noui accédé , préfent M . le
•Procureur Général du R o i , dans Îappartement que ledit fleur de Cla
piers de Cabris occupe en cette ville , en la rue du St. Ffprit , pour
l ’interroger & prendre fe s réponfes ordonnées par ledit decret du neuf
'du courant, & que le jour d’ hier, au bas d’ un comparant à nous prefenté par ledit M e Court le jeune , nous avons rendu une ordonnance
par laquelle nous avons affigné à ce jourd’hui à dix heures du matin ,
l ' accédit ordonné par le decret du quatorze du courant ; & d’ autant auc
T heure de l’ affignation par nous donnée fe trouve txpirce , ledit M c Cburt
le jeune audit nom nous prie & requiert d ’accéder tout préfenterrient
dans ¡ ’appartement que ledit fleur de Clapiers occupe dans la maifon du
�»57
fitur Theyenin, à la rue du St. E/prit, en conformité des fufd-its decrets,
&
à
ce il a conclu & a fig n é ; figné C o u r t le jeune à l’original.
A laquelle réquijition adhérant, nousdit Confeiller & Commiffaire
aurions tout de fuite , en compagnie de M c Jean-François Dcymard de
Mans , Avocat Général, M c Jean-JoJ'eph Aymard ,• Greffier commis au
Greffe de la Cour, précédés de M c Antoine Gmjfan , Huiffter, aecédé
à ladite maifon du ficur Thevenin , fituée à la rue du St. E fp rit, où
étant, ferions montés au premier étage de ladite maifon , & entrés dans
les apparlemens occupés par ledit fieur de Clapierr fur le devant de la
dite maifon , où nous aurions trouvé ce dernier s lequel, moyennant
ferment :
Interrogé de fon nom , furnom , âge, qualité & demetire ;
A répondu s’appeler Jean-Paûl de Clapiers de C a b ris, gentil
homme âgé de v in g t-fep t ans , rélîdant tantôt dans fon château de
C a b ris, tantôt dans la ville de Gratte , qui n’eft diilante du lieu de
Cabris que d’une heure de Chem in.
Interrogé s’ il fa it pourquoi & à la requête de qui nous avons accède
dans la maifon qu’ il occupe acluellement ;
A répondu que c'eft au fujet d’nne affaire qui lui a été intentée
par la d am e de Cabris fa mere , au fujet d’une prétendue démence
dont elle l’accufe , ce qui a donné lieu à ce qu’il eft venu en cette
ville pour faire cefTer la procédure prife à ce fu je t , & enftiire de
la demande que le répondant a fa ite , & qu’il lui a été accordé que
nous accéderions dans la niaifon qu’il habite préfentement , pour y
recevoir fes réponfes , attendu fes incommodités-, & nous a déclaré
que la requête fur laquelle eft: intervenu ledit decrer, a été préfemée
en fon nom.
Interrogé s’ il fouffre acluellement de grandes douleurs de nerfs ;
N
A répondu que ou i, mais qu’elles ne font pas affez e'xceifives pour
l’empccher de répondre aux demandes que nous lui ferons.
Interrogé depuis quand a commencé la maladie' dont il eft atteint ;
A répondu que fa maladie eft une maladie de nerfs qui ne peut
Être relative, ni lui porter coup fur 1affaire prefente , Sc quelle a
commencé depuis environ fix ou huit mois.
�M?
(
Interroge s’il n a pas éprouvé quelque grand chagrin qui puijje avoir
occasionnéf i maladie ;
A répondu qu’il n’a jamais eiïuyé d’autres chagrins que ceux aux
quels le commun des hommes eit expofé , & qui ayent été aflez
violens pour le jeter dans l’état de démence qu’on lui reproche, &
qu’il déiavoue.
Interrogé f i depuis l ’ époque qu’ il vient de donner au commencement de
fa maladie , i l a toujours j o u i de la liberté d’efpnt néceQuire pour vaquer
par lui-mcme au régime de fes affaires ÿ
A répondu que oui.
Interrogé s’il n’a pas fa it une procuration le deux Septembre dernier ,
pour prépojer quelqu’ un à la conduite de fes affaires ;
A répondu qu’il Te rappelle d’avoir fait une procuration de cette
nature , mais qu’il ne fauroit fe rappeler précifément le tems qu’il
l’a faite.
Interrogé s’ il f i rappelle quelle ejl la perfonne en faveur de laquelle
il a fait cette procuration,
A répondu que c’eft en faveur de M e Seytre, procureur au Siège
de GraiTe.
Interrogé s ’ il fe fouvient d’avoir fait d’autres procurations , & à
quelles époques ;
A répondu qu’il fe rappelle d’avoir fait une autre procuration auflî
générale que la précédente , en faveur de la dame de Cabris , fon
époufe , & ' fur laquelle elle devoit fe concerter à l’amiable avec
U d itM e Seytre , à cette fin que la dernière eût l ’effet d’annuller celle
laite en faveur de M c Seytre.
Interrogé s’ il fe rappelle quels étaient les pouvoirs qu’ il donnoit aux
perfonnes à qui il confioit leflites procurations ;
A répondu que fe trouvant en cette v ille , & étant dans l’intention
d aller voyager dans les pays étrangers, il y fie une procuration en
faveur dudit M c Seytre , qui lui donnoit pouvoir d ’adminiftrer les
biens du répondant pendant fon abfen ce, d’affermer les terres en
cas d’expiration des précédens baux, d’emprunter pour faire face aux
dépenfes courantes 8c néceiTaires pour l’exploitation de fes b ien s,
�159
& les autres pouvoirs qu’une procuration aiTez ¿rendue peut con
tenir.
Interrogé .quels étoicnt les pouvoirs contenus dans la procuration faite
en faveur de la dame de Cabris , fon époufe ;
A répondu que c’étoient les mêmes pouvoirs contenns dans la pro
curation faite au iïeur Seytre.
Interrogé f i , lorfquil étoit dans le defftin d’aller voyager dans les
pays étrangers , il comptait de faire fe s voyages avec la dame de Cabris ,
fo n époufe ;
A répondu que non , la dame de Cabris fe trouvant alors i Paris.
Interrogéf i , lo rf qu’ il fit fa procuration en faveur Je la dame de Cabris
il avoit encore le dejfein de voyager dans les pays étrangers , & f i ladite
dame étoit alors de retour en Provence ;
A répondu que ladite dame fon époufe étoit en effet revenue en
Provence à cette époque , & qu’il étoit encore alors dans le dciTem
de voyager dans les pays étrangers, projet que des affaires qui lui font
iurvemies , ont empêché d’exécuter.
Interrogé quelles font les affaires qui l ’ont empêché d’exécuter fon
projet de voyage ;
A répondu que ce font des réparations qu’il avoit à faire à Cabris ,
8c l’affaire aétuelle qui lui eft furvenus.
Interrogé s ’ il ne poffede pas une belle maifon à Graffe ;
A répondu 8c accordé , difant qu’il l’a fait bâtir à neuf.
Interrogé f i cette maifon efi richement meublée ;
A répondu & accordé , difant qu’il a tâché d ’aiTortir les meublçs à
la maifon qu’il a fait construire.
I
Interrogé s 'il a dépenfé des Jommes confidérables tant pour la conftruclien de fa maifon que pour fon ameublement •
A répondu qu’en effet il y a fait des dçpenfes confidérables, & plus
fortes qu’il fe 1 etoit d abord propofe , qu il avoit d’abord voulu bâtir
une maifon plus petite & dans un autre lieu que celui où il bâtit de
puis , mais que des perfonnes lui ayant confeillé de bâtir fa m a i f o n
dans un terrein plus étendu, cela l’engagea à conftruite une plus grande
m aifon, & ayec plus de dépenfe que n’en font les gens ordinaires.
�1IjO
Interrogé f i les ameublement qu'il fit à fa maifion, s ’y trouvent ac
tuellement ;
A répondu que o u i, à l’exception de quelques-uns que madamo
fon époufe a fait porter au château de Cabris.
Interrogé f i le château de Çabris n’ ejl pas auffi bien meublé ;
A répondu & accordé, difant qu’il ne fait pas pourquoi la dame
fon époufe y a fait rranfporcer les fufdits meubles, qu’il préfume pour
tant que ç’a été pour les placer dans fon appartement.
Interrogé s’ il a beaucoup de vaiffèlle d’ argent ;
A répondu qu’il n’a que des cuilliers & .fourchettes.
Interrogé s ’ il n’ a pas pojfédé beaucoup plus de la vaiffèlle , & notam
ment de la vaiffèlle plate :
A répondu & accordé, difant qu’il a été obligé de la vendre pour
des affaires qui lui étoient furvenues.
Interrogé s’ il fe rappelle qu elles étoient les affaires qui Vobligèrent
à vendre f a vaiffèlle.
A repondu qu’il croit fe rappeler que c’étoit pour acquitter des
comptes à des marchand.
Interrogé s 'il n’ a pas dans fon château de Cabris une bille bibliothèque
& un recueil d’ ejlampes conjîdérable ;
A répondu qu’il eft vrai qu’il a une collection de livres 8c une
cinquantaine d’eftampes, qu’on ne peut pas appeler fa colledtion de
livres une bibliothèque , puifqu’elle ne lui a coûté qu’une douzaine
de mille francs, y compris le prix des eftampes.
Interrogé s’ il ne lui ejl pas arrivé de mutiler des livres , & à3en dé~
chirer beaucoup de feuillets ;
A répondu Sc dénié.
Interrogé s’ il n a pas également déchiré des eflampes ;
A répondu & dénié.
L ’ avons interpellé de tâcher de rappeler q u i l a en effet déchiré des
livres & des eflampes , s’il n'a pas été porté à ce fa it par quelque ferupulc de confidence & par une ferveur de dévotion ;
A répondu qu’il ne fe rappelle de rien de pareil.
!
Interrogé f i fia maladie & les douleurs quelle lui caufie, ne l’ ont pas
je té
�rtfi
Jeté quelquefois dans un état de tri/lefje & de profonde mélancolie ;
A répondu qu’il eft vrai que Ton naturel eft trifte & mélancolique,
mais que la ma l a d i e de nerfs dont il eft atteint, ne l’a jamais jeté
dans des états pareils à ceux fur lefquels nous venons de l’interroger.
Interrogé f i les fouffrances ne lui ont jamais infpiré du dégoût pour,
la vie ;
A répondu 8c dénié.
Interrogé f i dans ces momtns de foujfrance il ne lui efi pas arrivé de
fe porter à des extrémités fur fa perfonne , & de fe faire des bleffures ;
A répondu & dénié.
Interrogé f i dans cet état - là i t n’ a pas refufé des fecours quon a
voulu lui donner, & notamment la dame fa mere , qui avoit été appelée
au château de Cabris à cette occafîon
A répondu & dénié.
Interrogéft dans de pareils momens il nt s'efi pas porté aufji à de*
extrémités contre la dame fon zpoufe j
A répondu 8c dénié.
Interrogéfi la même chofe ne lui efi pas arrivée vis-à-vis la demoifellc
f a fille ;
A répondu & nié.
Interrogé s ’ il n’ a pas je té fa montre d’or & fon argent par la fe-t
nétre ;
A répondu : non jamais.
Interrogé s ’ il craint beaucoup le chaud ;
A répondu, beaucoup plus que le froid.
Interrogéf i , pour fe garantir du chaud, il tu. s efi pas promene quel»
quefois en chemife dans la campagne ;
A répondu qu’il prend la liberté, quand il fe trouve à la campagne,
de s’y promener en robe de chambre , pour avoir moins de ch aud,
mais qu’il ne s’y eft jamais promené en chemife.
Interrogé quelles fon t fes occupations & fe s amufemens, foit à la
ville , fo it à la campagne ;
A répondu que c’eft principalement la le&ure qui l’occupe , &
qui l’amufe,
�\6l
' interrogéfi, lorfqu’il eft à Grajfe, il ne fréquente pas les compagnies;
A répondu 8c accordé.
Interroge s 'il n a pas fa it des emprunts confidérables ;
A répondu qu’il a deux dettes principales de dix mille écus chacune
envers deux particuliers de Gratte.
Interrogé s’ il n’ a pas aliéné de biens fonds & des capitaux ;
A répondu qu’il eft vrai qu’il a aliéné des-capitaux pour fournir
i la dépenfe de la conftruârion de fa maifon , mais qu’il n’a point
aliéné des fonds.
Interrogé f i les douleurs q u i l fouffre augmentent ou diminuent en
tertaines périodes ;
A répondu que fes douleurs font fi grandes , qu’elles ne fauroient
augmenter davantage, qu’elles font continues depuis quelque teins ,
& n’augmentent ni diminuent en certaines périodes.
' Interrogé f i dans le mois de Septembre dernier il n’ a pas eu des
attaques de douleurs plus violentes que celles qu’ il avoit foujfertes fc it
avant, jo it après ladite époque ;
A répondu qu’il nous a déjà dit que fa maladie a commencé de
puis iîx ou huit mois , que les douleurs qu’il éprouve n’ont jamais
difeontinué & ont toujours été plus violen tes, & qu’il ne croit pas
qu’il pût v iv re , fi elles augmenroient encore.
Interrogé f i depuis qu’ il eft atteint de la maladie dont il fe plaint ,
il n’ a pas fa it un teftament;
A répondu qu’il l ’a fait précédemment à fa maladie ,
L ’ avons interpellé de nous déclarer à quelle époque il afa itfon teftament;
A répondu qu’il ne s’en rappelle pas.
Lecture à lui faite des préfens interrogats & réponfes , il y a perfifté
& afigné: fignes C
a bris
, M
e y r o n n e t de
Saint M
arc
,
Si H ïm a r b ,
■Greffier, à l ’original.
Par extrait collationné fur l ’ original étant dans le fac de la procé
dure
criminelle
qui fe trouve riere le Greffe
criminel
de la
c °ur, expédié enfuite du decret mis au bas de la requête à elle
prefentée par
Jleur Jeun-Puul de Cabris du i 9 Février 1 7 7 S.
Signé M
a u r cj «’
�N °. 1 V .
C o p ie
du Rapport du Médecin & du Chirurgien p refais
l'interrogatoire.
a
N ous A n t o i n e I s n a r p , doéteur en médecine de la Faculté royale
de médecine de Montpellier , de cette ville de Gratte, en fuite de
l’aflignation à nous donnée par exploit du dix-neuf du préfent mois ,
fait par Laurier , huiflier ^oyal , en vertu du decret rendu par M . le
Lieutenant particulier-civil ail Siège de cette ville , à la requête de
dame Elifabeth L om bard, douairiere , marquife de C a b ris, de nous
porter le lendemain vingt du m ois, à huit heures du matin, audit lieu
de C a b ris, & dans le château de Meflire Jean-Paul de C lap iers,
marquis de C a b ris, & d la fuite dudit M . le Lieutenant, pour affifter à l’interrogatoire dudit marquis de C la p iers, & de fuite pro_
céder au rapport de l’état & fituati'on de fon e fp rit, le tout en con
formité du fufdit d é cre t, nous ferions partis de cette ville ledit
jour vingt Novem bre à huit heures ciu matin , & nous étant mis a
la fuite de M . le L ieutenant, nous nous fommes portés audit lieu
de C a b ris, où arrivés comme ledit meflire de Clapiers s’ efl trouvé
dans une campagne , & que M . le Lieutenant 11’a pu procéder à fon
interrogatoire , nous aurions paiTé route la journée audit lieu de
C a b ris , pour attendre ledit meflire de Clapiers , & fur le renvoi au
lendem ain, ordonné par M . le Lieutenant, nous étant mis de nou
veau à fa fuite le vingt-un dudit mois , à huit heures du matin , nous
nous fommes de nouveau portés audit lieu de Cabris , ôc dans le
château feignetirial, où étant ledit mef l i r e de Clapiers , s’étant préfenté , & après avoir prêté ferment pardevant M . le Lieutenant , nous
aurions aiTiftc aux interrogatoires par lui fairs audit meflire de C la
piers , & de fuite nous aurions procédé au fait de notre commiifion .
Sc en conféquence , après avoir de nouveau prêté pardevant M* le
L ieutenant, nous déclarons avoir trouvé ledit meflire de C l a p i e r s ,
aiiifi qu’à lajcance du matin & de l’après-dîner, en robe de chambre,
X ij
�-ï <Î4
avCc une barbe aiTe;î longue & en bonnet de n u it, d’une contenance
timide & jorcie , ayant l’ air trijîe, occupé, mcditatij, les yeux (om
bres '■
) ion poulx que nous avons tâté , quoiqu’il eût déjà refufé de
le laiiïer tarer, 6c bien examiné , nous a paru lent , petit & inter
mittent-, enfuitc nous lui aurions fait diverfes demandes fur les diverfes fondions de fon corps & de fon e fp rit, auxquelles il n’auroïc
pas voulu répondre, 8c nous auroit quittés pour aller s’aiTeoir à l’autre
extrémité de l'appartement, où nous étant avancés , & lui ayant de
nouveau réitéré nos queftions , & en diverfes fo is , tout ce que nous
aurions pu favoir auroit confifté en ce qu’il nous auroit dit avoir
des douleurs dans différentes parties de fon co rp s, n avoir qu un fom~
meïl déj'agrèable & interrompu par des fonges affreux, ce qu’il nous
auroit dit après bien des demandes. Nous aurions de plus obfervé
lors de l’interrogatoire du matin , des tremblemens aux extrémités
inférieures \ du refte , le tempérament de melfire de Clapiers nous
a paru être mélancolique , & fes affeétions hypocondriaques , 8c
pour ce qui eft de l’état &: iituation de fon efprit , après avoir
€or.fidcré d’un côté les divers fymptômes dont a été attaqué ledit
meilîre de C la p iers, & dont nous avons eu connoiiTance lors des
interrogats faits par M . le L ieutenant, & de l’autre fes réponfes
tant à M . le Lieutenant qu’à nous , fon état aftuel ôc fon tempé
rament particulier , nous craindrions dans l’état d’en porter un juge
ment trop précipitéy les deux fcances faites auprès de meilîre de C la
piers } n’étant pas fuffifantes pour nous initruire du véritable Ôc conf
iant état de l'on.efprit, pouvant être fufceptible de bien des im preflïons , déclarant avoir vaqué quatre jours , fa vo ir, deux jours à
la fuite de M . le L ieuten an t, & deux jours ou à conférer avec le
fieur Lambert , chirurgien , qui a été d’un avis différent , ou à
ta rédaétion du préfent rapport que nous avons fait 8c figne à
GrafTe le ¿8 Novembre 17 7 7 . Signé I s n a r d , m édecin, à l’ori
ginal.
�x'tfj
C o p ie
S avoir
faison s,
du Rapport du Chirurgien.
nous Louis - Elzear Lam bert, m ante en chi
rurgie de cette ville de G rafle , Chevalier de l’ordre de l’Eperon d ’or,
C om te Palatin , qu’enfiiite de l’aflignation à nous donnée par exploit
du 19 du préfent mois , fait par Lamier , huiilier ro y a l, en vertu du
decret rendu par M . le Lieutenant particulier-civil au Siege do la
ville de G rafle , à la requête de dame Elizabeth de Lombard , douai
rière , marquife der C ab ris, de nous porter le lendemain vingt dudic
mois , à huit heures du matin audit lieu de C a b ris, & dans le châ
teau de meflîre Jean-Paul de C lap iers, marquis du même lieu , Sc
à la fuite de M . le Lieutenant, pour aflîfter à l’interrogatoire dudit
meflîre de Clapiers , & ‘ de fuite procéder an rapport de lctat Sc
iituation de fon .efprit, le tout en conformité du fufdic decret, nous
ferions partis de cette ville ledit jour vingt N ovem bre, à huit heures
du matin , en compagnie de M e Antoine Ifnard , docteur en mé
decine de cette v iile , qui nous a,,dit avoir été,.pareillement ailignc
pour le même fujec , & nous étant mis à la fuite de M . le lieu
tenant , nous nous fournies portés audit lieu de Cabris , où arrivés ,
comme lec^jt meflîre de Clapiers s’eit trouvé dans ur.e campagne ,
& que M . le Lieutenant n’a pu procéder à fon interrogatoire , nous
aurions paflc toute la journée audit lieu de Cabris pour attendre ledit
mellire 4^ Clapiers , & fur le renvoi au lendem ain, ordonné par
M . le Lieutenant , nous étant mis de nouveau à fa fuite le vingtun dudit m ois, à huit heures du matin , nous nous femmes de nouycaii portés audic lieu de Cabris , & dans le château feigneurial, où
étant, nous avons prêté le ferment pardevant M . le Lieutenant, &
ledit meflîre de Clapiers s’étant préfenté, nous avons aflifté , ainii
que ledit M c Ifnard , dofteur en médecine , aux interrogats faits
par M . le lieutenant audic meflîre de Clapiers , & aux réponfes
prêtées par ce dernier , durant lefquelles nous avons obfervé atten
tivement la contenance dudit meilîre de Clapiers , & o bfervé qu’ il
f e plaignou de douleurs, 8c après les interrogats & réponfes , nous
�Iiîfi
avons , conjointement avec ledit M c Ifnard , taté le pouls audit
mellire de Clapiers , examine fa phifionomie t Tes yeux &: fa con
tenance , & l’ayant interroge de fa maladie & ce qu’il reiTentoit , il
nous auroit répondu qu'il ¿toit travaillé de douleurs aiguës } après quoi
nous nous iomvnes retirés avec ledit M e Ifnard , 8c nous avons eû
une conférence fecrette & arbitrale fur tout ce que nous avons re
marqué en la perfonne dudit meilîre de Clapiers , ayant déterminé
de nous aifembler en cette ville pour conférer de nouveau 8c pour
dreiïer notre rapport le furlendemain , 8c en conféquence nous étant
aiTemblés avec ledit M e Ifnard le jour ailïgné chez nous Lambert ,
après une longue conférence fur l’état 8c fituation ’de l’efprit dudit
meflire de Clapiers , nous étant trouvés contrains en opinions , nous
aurions déterminé de nous aiTembler de nouveau le vingt-quatre pour
dreffer notre rapport dans un même cahier où chacun de nous en
particulier donnerait fon opinion ; 8c comme ledit M e Ifn ard , qui
refide à Tournon, ne.s’eft point rendu en cette ville ledit jour vingrquatre chez nous L am bert, comme nous l’avions arrêté , nous Lam
bert aurions écrit une lettre"audit M c Ifnard le vingt-cinq du cou
rant , pour le prier de fe rendre en cette ville à l’effet de notre rap
port , à laquelle lettre ledit M e Ifnard auroit répondu par la fienne
du même jour , laquelle lettre renferme un refus de ftt part dudi*t
M c Ifnard de fe joindre à nousdit Lambert pour la redadtion du
rapport dont s’a g it, ce qui eft caufe que nous avons dreifé notre
préfent rapport , & donnant notre avis fur l’objet de notre coinmillion , nous déclarons 8c eftimons avoir touché le pouls de meilue
Jean Paul de Clapiers , marquis de C a b r is , que nous avons trouve
exempt de fièvre, les pulfations-étant égales, fans la moindre fré
quence , les yeux du fieur Marquis nous ont paru tranquilles , 8c fi
par fois nous y avons obfervé quelques clignotemens , nous ne les
rapportons qu’à fa vue miope ; il s’eft plaint à nous qu’il c p r o u Y o i t
des douleurs dans différentes parties de fon corps qui nous ont paru
dépendre d’une fenfibilité ou irritabilité de fes nerfs , & après avoir
entendu fes reponfes par lui faites à M . le Lieutenant particulier-1
c i v i l, 8c i celles qu’il nous a faites à nous-m êm es, nous eftimons
�i<?7 ;
que ;ledit nieffire d£ Clapiers cfl: d’un tempérament m élancolique,
niais qu’ il n’y a en lui aucun égarement d’tfprit , & qu’il jouit d’une,
faine raifon, 8c auquel nous avons vaqué trois jours & d e m i, favoir , deux jours à Cabris , à la fuite de M . le Lieutenant
Sc un
jour & demi ûn cette ville pour l’adrelTe & mis au n e t , Sc renvoyé la
taxe , nos honoraires à M . le Lieutenant. Fait & achevé à GraiTe le
z 6 Novembre 1777 , Jîgne L a m b e r t , maître Chirurgien.
N°
V.
M^PAJÎE E t TH is- CHERE M E R E ,
J e fais que vous faites continuer avec chaleur l’information que
vous avez fait prendre contre moi pour prouver l’exiftence d’un fait
qui tend à caufer ma perte , je vous prie de me faire enviiager quel
eft l’avantage que vous pourrez retirer de la reuflite entiere d’un
pareil p ro jet; ce ne feroit que par l’intérêt que vous pourriez en
retirer, que vous pouvez légitimer l’éclat que fera une p.ireille de
mande ; vous ne m acculez d’aucune dillipation dans mes biens ,
Vous ne pourriez même intenter aucune a&ion valable là -d e ilu s ,
vous fondez vos raifons fur une démence prétendue de ma part ;
je vous demande quels font les griefs qui peuvent m’avoir attiré
cet outrage d ’une m e r e , car jamais vous ne pouvez être exeufée
en public , à moins que vous n’ayez des plaintes ulterieures qui
co lo ren t cette démarche , je vous fupplie , en qualité de fils , d’ar
rêter les procédures, & de me promettre même que tout ce qui a
cté fait n’aura plus de fuite , j’attends cette grâce ; vous favez que je
11e vous en ai jamais beaucoup dem ande, cela me rend bien plus
confiant ; fi vous defirez de me voir a GraiTe , & que cette e n t r e v u e
pnilïe m’être favorable., 8c que vous ayez de plus befoin d’un ex
plication avec moi } je m y rendrai , je me repofç aifez fur vos
�1(58
fentimens j poûr n’en fortir qu’avec une promeife que tout ce qui
s’eft paiTé n’aura plus de fuite.
J ’ai l’honneur d’ctre , M adame , ma très-chcre m e re ,
avec refpe£t,
.
Votre très-humble &c obéiflant ferviteuç
;
& fils,
Lundi matin.
C ab ris.
r
Je vous prie de me faire l’honneur de me répondre.
A u dos ejl écrit:
A M adam e,
M adame la M arquife de C a b ris, douairiere.'
A GraiTe.
A Cabris 4 Décembre 1777Î
M adam e ma
chere
m ere
J
V o i c i bientôt le tems où l’on doit juger l’affaire que vous m’aveS
fufeitée ; comme je ferois fâché que l’on pût m’oppofer de n’avoir
pas fait toutes les démarches indifpenfables dans une occafion pa
reille , & qui peuvent me procurer un fucccs heureux ( ce fuccès, je
ne l’attends que de vous) ; je me hâte de vous écrire , & de vous
demander de nouveau qui peut m’avoir attiré votre indignation; un
fils laiiTé maître de fa conduite , dans un âge ouvert à toutes les
paflions , peut avoir ilaiiTé échapper dans fa conduite des marques
inconfidérées, & c’efi: p eut-être à ce reiïentiment fecret que vous
aurez conclu une affaire pour qui la démence n’aura été que le pré
texte 8c le fujet apparent: n’y auroit-il pas moyen de recouvrer vos
bonnes grâces & votre amitié : fi vous exigiez de moi quelque répa-»
ration publique pour l’ombre d’une faute que j’ignore , 8c qui n’exifte
peut-être que dans la mauvaife foi des perfounes qui vous approchent;
communiquez-moi votre intention par un tie rs, & je m ’y foumettr^i
fans peine s au contraire , fi mon raccommodement dépend d’une
entrevue
�“ 179- -
entrevue fecrette , fixez-moi encore le jour où je puis vous voir; mais
au moins puis-je efpérer de vous une lettre qui fervira de rcp a nf e
à la mienne ; vous êtes la feüle qui pouvez arrêter la procédure , vos
bontés paflees me donnent encore de l’efpoir , ne fournirez pas au
Palais un aliment pour dévorer la fubftance de vos- biens & de ceux
de ma fille.
J ’ai l’honneur d’ê tre , madame ma chere mere , avec us
refpe&ueux Sc profond attachem ent,
Votre très-humble & obéiiTant ferviteur }i/ig72e C a b r ls ;
Au dos de la lettre efl écrit :
A M adam e,
Madame la M arquife de C a b ris, douairiere, en fon hôtel ,
A Graife,
M
adame
m a
t r
I s-
chere
m e r e
,
C ’e s t avec la plus v iv e vdouleur que je vois que vous continuez
i me marquer votre inimitié , rien ne m’en convainéb davantage que
votre filence perm anent, je me flattois pourtant que vous ne laiile—
riez pas davantage votre fils dans la disgrâce la plus cruelle, permettez
même que j ’ajoute injufte ; mais cette derniere expreflion ne peut
s’attribuer qu’aux perfonnes qui vous ont donné des imprelîions dcfavantageufes fur mon compte \ voici bientôt peut-être le terme de
mon procès, ne feroit-il pas poflible d’éviter d’en venir à une conclufion définitive j
fi je ne craignois que ma préfence ne vous
infpirât du trouble & de l’indignation , malgré mes infirmités & mes
douloureufes fituations, je me traînerois jufqu’à Gratte j comment
hafarder une pareille démarche , après un filence aux deux lettres que
j ’ai eu l’honneur de vous écrire , je ne défeipere rien encore , 8c
je me flatte que vous donnerez cours à.vos bontés, après me les
avoir retirées un fi long efpace de tems : je defirerois b ie a que cette
lettre ne fût qu’un acheminement pour obtenir une entrevue de
y
�\J0
votre part ; & je ferois trop heureux qu’un feul m ot que vous me
feriez dire de vive v o ix , pût vous épargner la peine de m’ccrire \
comme je fuis prefle par mes peines douloureufes, fouffrez que je
n’ajoute rien à ma lettre.
Je fuis avec un trcs-profond refpeft ,
M adame ma chere m ere,
V otre très-hum ble 2c obéiiTant ferviteur
i-
•
& fils , 7 %72e C a b r is .
E t au dos de la lettre ejl écrit ,
A M a d a m e,
M adame la M arquife de C a b ris, Douairiere , en fou hôtel y
(
A Grafle.
M A TRÈS-CHER.E MEKE
I l eft douloureux pour moi d’être inftruit que- les démarches que
vous continuez à faire pour m oter mon honneur & mon exiftence
c iv ile , fe continuent avec acharnem ent; pardonnez-moi ce m o t,
ma chere mere , j’ai eu un moment d’im patience, je l’ai é crit, &
je crains de n’avoir bleflc le refpe£t que je vous d o is: peut-être
ai-je mérité par quelque écart involontaire (m ais qui n’a point de
rapport avec l’adte que vous avez intenté contre moi ) , que vous
m Jayez retiré tous vos fentimens de mere ; Sc c’eft juftement dans
cette crainte que j’ai l’honneur de vous écrire pour obtenir votre
commifération & mériter votre pardon : je fuis ici atteint d’un prin
cipe de maux qui détruit mon corps, mon état eft a(Tez trifte , &c
p e u t, fans le fecours des fentimens de la nature , eau-fer de la pitié :
j’ai peu de forces pour marcher ; mais fi j ’étois siir que vous oublialîîez
tout en allant me jeter à vos genoux, je fortirois tel que je me
tro u ve, dès que j'aurois reçu un mot de réponfe de votre part ; je
vous la demande cette lettre que j ’arroferai de mes larmes mille
fo is , & après fa réception , je me déciderai à partir j ce n’eft pas
�17*
autant la vue du châtiment de l’interdiétion , quoiqu’on ne puiiTe pas
affe&er plus fenfiblement un citoyen , homme de condition , pere
de fa m ille , & indépendant fous ces deux titres , que la certitude
où je dois prefque être qu’il s’ofFre toujours îjioins de moyens à la
rentrée de vos grâces , fi les pourfuites fe continuent, parce que
j ’a u r o i s lieu de préfumer que vous êtes violemment prévenue contre
moi ; vous ne me refuferez pas une réponfe par le retour de la
couriere.
Je fuis , Madame ma chere m ere, avec refp eft,
V otre trcs-humble & obcilfant ferviteurK
Marquis
de
C abris.
M ercredi au foir.
Au dos de ladite lettre eji écrit,
A M adam e,
Madame la M arquife de Cabris , douairière,
A G rafle.
n
L ’an
°
y
x.
mil fept cent quatre - vingt - quatre, & le dix-huit Février,
Nous Huiflîer royal, reçu au Siege de cette ville de GraiTe , y réfident,
foulfigné , à la requête de la dame de M irabeau, dame marquife de
Cabris , avons fommé Si interpellé André Court, ancien domeftique
de M . le marquis de Cabris , de.certifier au bas du préfent, les faits
qui font de fa connoifTance depuis l’année mil fept cent feptante huit,
furies traitemens faits audit fieur marquis de C abris, & la qualité des
alimens dont on l’a nourri depuis ladite époque, & fur les foins que
l’on a çus de fa perfonne pendant le même tem s, à l’effet de quoi
lui avons baillé copie du préfent exploit parlant à fa perfonne,
trouvée cafuellement en cette ville de GraiTe.
Sur laquelle interpellation ledit André Court certifie &
attefte que
depuis l’époque que M . le marquis de Cabris a été in terd it, & que
la dame fon époufe a été feparée de lui pour relier dans un couvent j il.
Y ij
�171
a demeuré à titre de domeftique dudit feigneur marquis de Cabris J
dans fon château dudit lieu , Jufqu’au premier jour de Janvier delà
préfente année ; qu’il a vu pendant cet intervalle que ledit feigneur
marquis de Cabris étoit gouverné par le fieur A lziafy , pere , homme
d ’affaires de la damemarquife douairiere, & p ar la nommée Marianne,
fa fille de cham bre, qui commandoit tous les domeftiques ; que la
dame douairiere reftoit prefque toujours à G ra d e , & le fieur Alziary
reftoit à Cabris avec ladite Marianne , fille de chambre ; ledit Alziary
faifoir pourtant quelques abfences de quinze jours ou environ } alors
ladite Marianne étoit à Cabris pour donner les ordres &c gouverner ;
que le fieur Alziary mangeoit ordinairement à la même table de M .
le marquis , & l’un & l’autre étoient nourris des mêmes alim ens,
foit en ragoût ou rôti j que quoique madame la marquife douairiere
eût recommandé au fieur A lzia ry , de ne point donner de vin à M . le
marquis, ni du café & rarement du tabac, néanmoins il lui faifoit boire
du vin , fouvent pur , Sc lui faifoit prendre du café; il lui donnoit
aufîi du tabac j &c lorfque les domeftiques lui repréfentoient que tout
cela étoit contraire à la fan té de M . le m arquis, & aux ordres don
nées par la dame fa m ere, ledit fieur Alziary répondoit que la maladie
de M . le marquis étoit incurable , Sc que le v i n , le café & le
tabac , ne pouvoient pas lui faire plus de mal qu’il n’en a v o it, Sc le
répondant com m e les autres domeftiques s’étoi’ent apperçus que le fieur
A lzia r y , avoit toutes les complaifances pour M . le marquis , pour
le guérir de l’ averjion qu’ il avoit pour lui ; il certifie encore que pen
dant quelques années, & dans le mois d’Aoitt ledit feigneur marquis
<le Cabris, accompagné dudit fieur A lziary, & quelques autres domefti
ques , dont le répondant étoit du nom bre, a été paffer quelques jours
aux m oulins, près la riviere de Siagne , & a pris des bains dans ladite
viviere, qui lui étoient favorables pendant les cinq à fix premiers jours;
mais le fieur Alziary lui faifoit boire du vin Sc avec plus d’abondance
le fo ir , ce qui l’incom m odoit, Sc lui donnoit de fortes altérations -y
de plus-, le répondant certifie que le nommé Cavalier , donnoit à
boire de l’eau-de-vie audit feigneur m arquis, au vu & fu dudit fieur
Alziary q u i, fur les reproches que le répondant Sç les autres domef-
�17î
tiques lui fa ifo ie n t, répondoit toujourts que rien ne pouvoit augmen
ter fon mal , ni le guérir , & qu’il falloit lui donner tout ce
q u ’il
dem andoit, tant en alimens qu’en boiflon ; cependant , le répondant
rappelle que lorfque ledit feigneur marquis avoit bu une certaine
quantité de vin , ou d’eau-de-vie, & pris du café qu’on lui préparoit
fort chargé , il étoit beaucoup altéré & plus mal qu’à l’ordiuaire ;
puifque c’étoit ordinairement après ces fortes de boilfons contraires ,
que M . le marquis demandoit pendant une partie de la nuit à boire -y
le répondant certifie encore que fouvent il avoit reprcfenté auditfieur
A k ia ry , que fi madame la marquifede C abris, belle-fille, revenoit, ôc
que fon m ari, ou tout autre , lui apprît le peu d’attention qu’il avoit
dans le choix des alimens & de la boiiïon qu’on donnoit auditfeiçneur
marquis de C a b ris, elle en feroit fâchée , fur quoi ledit fieur Alziary
répondoit que cela n’arriveroit jam ais, & que fi l’on confioit la perfonne de M . le marquis à fon épo u fe, elle iroit l’enfevelir dans
quelque lieu inconnu , pour être libre de vivre à fa fantaifie ,
ayant même ajôuté bien d’autres propos, que le répondant n’ofe
expliquer i c i , & a figné à ce qu’il nous a dit. Fait p réfent, Guil
laume M aurcl, revendeur, & Jean Girard, travailleur de cette
v ille , n o s témoins fouflïgnés avec nous Huiflïer , figné A . Court,
M aurel, Girard, & Brueri , HuiJJîer ; au-deffous eft écrit,
a
G ra s s e , le
figné
J
e
C o u rt.
18
F evrier
1784 ,
reçu douze
co n trô lé
sols n eu f d e n ie rs,
/
foufligné Mathieu Pichot , ancien domejlique du château de C a
bris , certifie en faveur de la vérité , qu’il y a environ trois ou quatre
ans, & pendant le tems que je fervois en qualité de domeftique dans
Je château de Cabris, je m ’apperçus plufieurs fois qu’on faifoit prendre
du café à M . le marquis de Cabris , quoique le médecin l’eût défendu,
&c même qu’après lui avoir donné du chocolat , 011 lui faifoit encore
prendre du café un moment après ; qu’on lui donnoit fouvent du vin
à boire , & particulièrement lorfque le fieur Alziary pere , mangeoic
avec ledit feigneur marquis , à la meme tab le, & cela malgrc la
défenfe du médecin & de madame fa mere , & que j ’ai vu plufieurs
fois en ayant fait des reproches au fieur Alziary & André fon domef-
�* 7 4
tique, h certifie encore , que pendant le m êm e tems ï moniteur de
C a b ris, n’étoit point vifité par aucun médecin , n’ayant vu M . le
médecin Roflîgnol au château qu'une feule fois, Sc le fieurRaynaud,
Chirurgien , ne l’alloit voir que pour le rafer. Je certifie encore que
madame m’ayant ordonne d’accompagner moniteur fon fils aux mou
lins de Cabris , près la riviere de Siagne , où il fut pour prendre les
bains froids dans la riv ie re , accompagné encore du fieur Alziary Sc
d ’André fon domeftique 5 je vis avec fatisfaition que les bains
croient favorables à M- de Cabris , pendant les cinq ou iïx premiers
jours îk étoi.tfort tranquille, me rappelant qu’il écrivit une lettre pour
madame fa m ere, qui pour lors étoit à la ville de Graife , & dont il
me fit lire, Sc dont je me rappelle encore de quelques phrafes que voici :
ma chere mere, tranquillifez-vous fur mon fort, j e fuis fâché des peines
que je vous ai données, je me trouve beaucoup m ieux, Sc jç vousfouliaite le bon jour ; embraiTez Pauline'je vous prie , & dites lui que
je deiire la voir au plutôt.
M ais comme André &c le fieur Alziary pere, lui donnèrent à boire
du vin & fouvent, par cette raifon lui fut contraire ; une n u ir,
com m e il avoit bu une certaine quantité de vin à fon fouper, il fe
trouva fort altéré ; le (ieur Alziary Sc André le fermerent dans fa
chambre & furent fe coucher dans des appartemens éloignés de celui
de M . le marquis ; ayant demandé de l’eau Sc étant feul dans l’anti
chambre je lui en donnai une cruche , il en but plufieurs coups ;
une demi-heure après Sc vers les onze h eu res, fe trouvant encore
altéré il demanda encore de l’eau , je lui en donnai, ce qui m’en
gagea d’aller frapper à la porte du fieur Alziary , pour l’avertir de
•cc qui fe palloit & pour obliger André de fe rendre à l’antichambre
de fon maître avec moi ; le fieur Alziary ne fe remua pas du tout ;
je fus prier Sc foüiciter André avec menace d’en porter plainte à
Madame la douairiere de leurs négligences , & alors André fe rendit
avec moi , & il entra avec moi dans la chambre de fon m aître, au
quel nous donnâmes encore à boire de l’eau , Sc peu après M . le
marquis rep o faju fqu ’au lendemain vers les huit heures tranquillem en r, & pour être la vérité telle , j’ai écrit Sc figné le préfent. Signé
M , Pichot. A . Cabris. Ce 16 Février ^784.
�*75
N °.
V I I .
J e fouflîgnc Alexandre Court, Confui de la communauté de ce îieu
de C a b ris , en l'année derniere , certifie qu’après le confeil de ladite
c o m m unanté, tenu la fécondé fête de Pentecôte , & auquel j’affiitai ,
le fieur Alziary , hom me d ’affaires de madame la marquife de Cabris,
douairiere , me préfenta un certificat tout dreflé fur papier tim b ré ,
co nten an t nombre de faits que ledit fieur Alziary me follicita d ’attef-
t e r , portant entc’autres , que M . le marquis de Cabris étoit fuivi
journellement par un Chirurgien , 8c qu’un médecin de G rafle venoit
le viiïter fréquemment , qu’il mangeoit à la table de la dame fa
niere , lorfqu’elle venoit à Cabris , & que ledit fieur Alziary ne le
quittoit jam a is, & autres faits relatifs aux traitemens dudit feigneuc
marquis de Cabris. ; 8c après avoir lu ce certificat, ayant trouvé que
les faits y énoncés n’étoient pas véritables, je refufai de le figner,
malgré toutes les inftances 8c les menaces dudit fieur Alziary. Je
certifie encore que ledit feigneur marquis de Cabris , n ’avoic que
deux dcmelliques , 8c qu’il n’y en avoit jamais qu’un qui le fuivît y
ëc fouvent M . de Cabris alloic promener feul , 8c le domeftique
n ’alloit le joindre qu’un tems après, n ’ayant jamais oui-dire que
ledit feigneur marquis pendant fa maladie , ait menacé ni infulté
aucun habitant ; & enfin je certifie qu’ayant aflifté aux deux confeils
des mois de Novembre 8c Décembre d e rn ie r, dans lefquefs il fut
queftion de finir avec le fermier des moulins à huile , l’article des
dommages & intérêts auxquels il fe trouve condamné envers la
communauté , & de finir en même tems avec le feigneur de ce lieu,
l’articleconcernaiy: le-chauiïâge des chaudrons, je fus d’avis de ne finir
l e s conteftations quelorfqu’on lepourroit valablement avec M. le m ar
q u is , ou un adminiftrateur légitime , 8c parce que je fus de’ cet avis
les perfonnes qui agiiToient pour favorifer le fermier des m oulins,
&c les gens d’affaires de madame la marquife douairiere me mena-^oient de me faire enlever par la voie de retrait féodal , le bien
que j ’avois acheté du fieur Ardilfon , dans lequel il y a une récolte
�iy6
d’environ vingt-cinq moutes d’olives \ ce qu’on auroit effe&ué , à
ce que j’appris enfuite , fans la oirconftance d’une ordonnance de M M .
du Châtelet de P aris, précédé d’un arrêt du C on feil , qu’ils ont été
iignifiés
à
la communauté de ce lieu, par
lefq u e ls
l’adminiftrauon des
biens 8c revenus de M . le marquis a été ôtée à la dame fa mere ; en
foi de quoi j ’ai iîgné le préfenr. Fait à Cabris le dix-fept Février mil
fept cent quatre-vingt-quatre , figné
N °.
COURT.
V I I I .
L ’ a n m il fept cent quatre-ving-trois, 8c le feize A v r i l , nous Huit,
fier royal au Siege de la ville de GraiTe, y réfident, fouffigné \ à la
requête de dame M arie-Catherine-Louife de Riquety de Mirabeau ,
cpoufe de M eilire Jean-Paul de Clapiers , feigneur , marquis de C a
bris , 8c autres lieux , a&uellement en la ville de Paris , au couvent
de bon Secours , qui a élu domicile pour le tems de d r o it, chez nous
H uiflïcr: fur la connoiiTance que ladite dame a eu que fur les juftes
réclamations qu’elle a prifes contre l'arrêt du Parlement de Provence,
du 9 A vril 1778 , & tout ce qui l’a précédé 8c fuivi on tente de mafquer les faits relatifs à l’état affligeant dans lequel, on a réduit M. le
marquis de Cabris , fon m a ri, 8c la négligence apportée fur l’éduca
tion de mademoiselle Pauline de Cabris ; que dans ces circonftances
ladite dame 11e doit avoir recours qu’à l’univerfalité des habitans de
C a b ris, qui ont tous été témoins 8c le font encore , de la maniéré
avec laquelle on a traité M. le marquis de C a b ris, leur feigneur , 8c
on a négligé l’éducation de mademoifelle Pauline de Cabris j à ces
caufes, avons fom m é, requis 8c interpellé les fieurs M aire 8c Confuls
de Cabris , de convoquer tout incontinent 8c fans délai , le Confe
général dé la communauté , pour lui faire part dé la préfente fom mation , 8c de déclarer s’il eft v ra i, i°. que depuis que M . de Cabris
eft fous l’interdit , ils-ont jamais vu qu’il ait été vifitc 8c fuivi par
des n ié jecilis . 1 o>qu’ils n’ont jamais vu à fon fervice & près de lui
que deux payfans • jo <q U’i[s l’OI1t fouvent vu promener, fuivi par ces
deux payfans, quelquefois par pun J ’eux feulement, 8c d’autrefois par
l’agent
�Vf 7
l ’agent de madame la marquife douairiaire \ 40. que pendant I’E ré ,
on l’a vu par fois aller aux moulins de Cabris , où il reftoit avec les
deux payfans Sc les agens , fans autre compagnie ni fecours j 50. qu’ils
n’ont jamais v u , lorfque M . le marquis de Cabris promenoit ou qu’il
croit aux moulins de Cabris , qu’il ait rien fait qui puîiTe donner
une marque vifible d’un état à défefpérer fur le retour de fa fanté en
lefoign an tj 6 a. que lorfque les adminiftrateurs ont vifité madame la
douairiere , ou pour affaires ou pour vifites de devoir, ils n’ont jamais
vu M . le marquis de Cabris auprès d’elle , quoiqu’on le vît promener
fuivi des payfans qui font auprès de lui ; 7 0. qu’il eft public que M . le
marquis mange à fon particulier dans une chambre du château qu’on
lui a deftinée, fervi par ces deux payfans ; 8°. que madame la douai
riere a fait la plupart du tem sfon fé|our & fa réfidence à GrafTe , 8c
qu’entr’autres elle y a refté depuis le commencement de Septembre
dernier, jufqu’au vingt-neuf du mois de M ars, qu’elle eft arrivée à
Cabris \ 90. que lorfque madame la douairiere eftàG raiTo, fon agent
y fait des voyages très-fréquens, & y féjourne quelque tems ; io°. que
, madame la douairiere a actuellement auprès d’elle au château, madem oifelle Pauline de Cabris , qui étoit ci-devant au couvent de GraiTe;
£ i°. que mademoifelle de Cabris n’a au château d’autre compagnie
que madame fa grand-mere j n " . que depuis le mois de Février
dernier, on a préfenté aux adminiftrateurs & autres habitans, un cer
tificat tout drellé à figner ; que ce certificat étoit préfenté par l’agent
de madame la douairiere j 13 °. & enfin , que. les adminiftrateurs ont
refufé de le figner, parce que l’ayant lu ils reconnurent qu’il n’étoic
pas en tout conforme à la vérité : tous lefquels faits étant vrais & de
notoriété publique, l’habitation entiere ne fauroit refufer de les attefter en faveur de leur feigneur, & de ladite marquife de Cabris fon
cp ou fe, qui ne veut qu’éclairer la Religion de Sa Majefté • & de fes
M iniftres, fur tous les objets relatifs à e lle , à M . de Cabris 5c à ma
demoifelle de C a b ris,
pour
obtenir juftice contre tout ce que les fur-
prifesleur ont faitfouffrir jufqu’à préfent, avec déclaration qu’au cas
de refus ou de filence, madame la marquife de Cabris le regarderoit
Z
�17*
ou comme une crainte, dont le feigneur auroit à fe plaindre contre
fes habicans, lorfqu’il s’agit de fa fan t é , de fon honneur, 8c de celle
de fa poftérité , par confisquent du bien des habitans , ou comme
un nouvel abus de l’autoriré qui l’occafionneroit 8c qui pourtant
n’excuferoit pas fes habitans à due communication , 8c leur avons
donné copie du préfent a<5te , en leur domicile, parlant à la perfonne de
Sc Honoré C a u v iii, M aire 8c premier Conful , tarit po\ir lui que pour
fes C ollègues, en ce lieu de C a b ris, ou de la ville de Grafle : je me
fuis porté diftant d’une lieue. Signé R i p e r t . Contrôlé à GraiTe, le i3
A v ril 1785., reçu douze fols neuf deniers >figné C o u r t .
E X T R A I T du cahier des délibérations de la Communauté
de ce lieu de Cabris, du contenu Jimplement de l'article
concernant le Seigneur de ce même lieu.
D u vingt-un Avril mil fept cent quatre-vingt-trois, a C ab ris, dans
l’H otel-de-V ille, le Confeil général de la Communauté de cedit lieu
de Cabris, a été aiïemblé par mandement du fieur Etienne Coure,
Lieutenant de Juge de cedit lieu, & à la requête de fieur Honoré Cau\ïny
M aire 8c premier Conful de ladite Communauté; 8c c’eft par la voie
& organe de François Bouge, fils de Claude, V alet de V ille de ladite
Com m unauté, attendu l’abfence de fondit père, tant en cri public
que par billets aux gens de la campagne, ainfi qu’il nous a rapporté
avoir fait ; & c’eft fous l’autorifarion 8c préfence dudit fieur Lieutenant
de J u ge , où ont été préfens fieur Honoré Cauvin, Maire & premier
Conful moderne; fieur Alexandre Court, fécond Conful moderne j
Abram Court, Eftimateur jadis; Honoré B outkr, M enager; André
Maccairy, Regardateur m oderne; Henri Maure!, Regardateur jadis;,
fieur Jeafi Daver, fécond Conful jadis; Honoré Pellegrin, Regarda
teur moderne ; Honoré Court, Confeiller moderne ; fieur Pierre Belline,
Maire jadis; PUrre Court, Confeiller jadis; Laurent Ajlavene, Eftimaicur jadis\ Honoré Rouftan, Eftimateur moderne; Pierre Bauje, Confeiller jadis, Honore’ Roujlan, Eftimateur jadis ; AnnibalDaver, C011-
�l79
feiller jadis; Jeàn-Bapûjle Üaver, Confeiller moderne; fieur Jean.
Raynaud, Auditeur jadis; Crijlol Ardijfon, Eilimateur nioderno;
Charles Court, Auditeur moderne; Antoine Court, Confeiller moderne;
Jean-Baptijle Cateaux, Confeiller moderne ; Jean-Baptijle Afiavene,
Confeiller moderne; JeanCourt, à feu Jean-Baptifte; Etienne Trabaudt
Regardateur jadis; fieur Honoré M ane, Notaire; Lazare Sauteron~y
Jean Daver, à feu autre; E/prit Çauvin, Eftimateur moderne; André
Vergatttr ; Honoré Raymond; Honoré Vergatter, fils d’André ; Honoré
Roujlan, à feu autre; 7e<j/z 7 r«e, à feu Laurent.
'En troifieme lieu, les fieurs M aire& C o n fu ls ont dit qu’il a été tenu
le feize du courant, un exploit , à la requête de madame M arieCatherine-Louife de Riqueti de M irabeau, cpoufe de Meflïre de C la
piers , M arquis, Seigneur de ce lieu. Lequel exploit a été mis fur le
bureau, pour y être délibéré ce que de raifon.
Sur la troifieme propofition, dont leéhire a été faite, ainfi que de
l’exploit y mentionné, le préfent Confeii a déclaré, i°. que depuis
l ’interdi&ion de M . de C a b ris, aucuns des Membres du Confeii
n’ont vu venir au Château de ce lieu, aucun M édecin, à l’exception
du fieur Jean Raynaud, Chirurgien, qui a déclaré l’avoir vu venir
q u e l q u e f o i s depuis l’cpoque de ladite interdidion ; 2.0. qu’il a vu à
fon fervice deux domeftiques ; le premier André C o u rt, travailleur;
le fécond Jacques Cavalier, garçon Cordonnier; le troifieme Jean
C o u rt, fils dudit A n d ré, aufli travailleur, & Jean-Baprifte Achard,
Régent des écoles; les trois derniers fe font fuccédés d’un à l’autre,
de maniéré qu’il n’y en a jamais eu que deux jufqu’aujourd’hui; enfuite
que ceux qui y font a&uellement, font Laurent Pellifie* travailleur,
5c ledit André C ourt qui le fuivent à fes .promenades, tantôt tous les
Jeux, tantôt qu’un feul, & quelquefois avec l’homme de confia'nce,
ajoutant qu’il y a une femme de chambre & une cuifiniere par fois;
30. que lorfque M . de Cabris va à la prom enade, il eft accompagné,
ainfi qu’il a ccé dit ci-deffus; 40. que lorfque M . de Cabris va à la
riviere de Siagne, pour y prendre les bains, il eit accompagné par
ledit homme de confiance, fuivi des deux hommes qui le fervent
Z ij
�ïE o
adiîelkm ent, 8c vilîtc quelquefois par ion Chirurgien; 50. qn’on ne
ps«; rien ftatuer fur l'état de M . de C a b ris, dans le rems qu’il étoit
aux moulins, attendu l’éloignement d’une
heure
& demie qui fe trouve
du village; <5°. aucun des Membres du Confeil étant au Chareau
n’ont vu M . de Cabris avec madame £1 m ere, à l ’exception du (leur
Jean Raynaud, fon Chirurgien, qui a déclaré l’avoir vu quelquefois
avec ladite mere. 7 0. Le C onfeil ne peut rien déclarer fur la fe'ptieme
réquifuion de l’exploit, parce qu’ils ne fréquentent pas l’intérieur du
Château; 8°. que madame la M arquife de C abris, douairiere, fait
fa réfidènce tantôt en ce lie u , tantôt en la ville de GraiTe; 90. que
l ’homme de confiance de madame de Cabris fait des voyages de tems
en cems à GraiTe & ailleurs; io °. que madame la douairiere a depuis
peu de jours mademoifelle Pauline de C abris, fa petite-fille, auprès
d’elle. 1 1°. Les fieurs Maire , C on fu ls, ont déclaré que véritablement
il leur fut préfenté par l’homme de cqnfiance un certificat, 8c que
lTayant lu , ils virent qu’ils ne pouvoient pas certifier tout le contenu;
8c que le fieur homme d’affaires le fit recopier en fupprimant tout ce
que nous 11e pouvions pas certifier, & nous l’ayant préfenté de nouveau
à figner, nous le priâmes de nous en difpenfer, pour 11e pas entrer
dans le débat de nos fnpérieurs.
Et de tout ce qne deiTus, les Sieurs ailemblés ont requis les fieurs
Etienne C o u r t, Lieutenant de J u g e , de leur eii concéder adte; ce
q u ’il a fait, & aligné qui a fu & voulu. Signés E. C o u r t , Lieutenant
de Juge;
Jkan
Jean
M aire; C o u r t , C onful; P e l i s s e , C o u r t , audit
T r u e ; R a y m o n d ; L. P e l l e g r i n ; M a u r e l ; H o n o r é C o u r t ;
D a v e r ; P i e r r e B o u g e ; M a r i e I s n a r d , Greffier, tous à
C au vin ,
l’original. Collationné. Signé
Isnard,
Greffier, en la minute des
préfentes.
N °.
J
X .
S u r pareil acle fa it aux nommés Jofeph & François
Raybaud y freres y le 1 y Février.
Lesdits
Raybaudyfreresy enfuite de l’interpellation ci-defïus, dé-
�i 81
d a te n t &: certifient qu’il y a environ crois ans, comme ils habiroîenc
une mai fon dont les fenêtres vifent au Château du préfent lieu, ils
virent M. le Marquis de Cabris qui promenoir au devant du Château,
& enfuite il vint promener fur la vigne, tout auprès de la glaciere;
létant là, ledit Seigneur Marquis dit au nommé Jèan G burt, fon
d o m e ft iq u e , qu’il vouloir aller promener fur l’allée de Saint J e a n ;
C ourt ne voulut pas y confentir, & comme M . le Marquis infiftoit,
C ourt le menaça de le battre, Sc alors ledit Seigneur Marquis ayant
pris la route de l’allée, ledit C o u rt lui donna plufieurscoups de poings,
ce qui obligea ledit Seigneur Marquis de courir dans le Château. Les
répondans certifient encore d ’avoir oui dire publiquement que ledit
Seigneur Marquis ctoit batu par fes domeftiques. Et nous Sergent ayant
, requis lefdits Raybaud de figner, ils ont déclaré ne favoir. Le tout fait
préfens Jofeph Fortont Sc Jean Pelijfc, de ce lieu, mes témoins.
Signés
F o r t o n t ,
P e l i s s e ,
C.
B o u g e .
A u-dejjous eji
écrit :
C o n t r ô l é d o u b l e a G r a s s e le d i x - h u i t F é v r i e r m î l s e p t c e n t
Q U ATRE-VIN GT-Q UATRE. R eçu
VINGT-CINQ
SOLS S I X
UENIERS.
Signé C O U R T .
N°.
P A RE I L L E
X.
fommation du même jour
a
Antoine
Raybaud.
L edit
Antoine Raybaud, en fuite de l’exploit ci-deiTusj déclare &
certifie qu’il y a environ trois ans, fe trouvant au Claux avec le nom mé
Jean C o u r t , domeftique de M. le Marquis de ce lie u , en parlant dudit
S e i g n e u r M arquis, ledit Court dit au répondant, que dans la matinée
du
même jour, à mefure qu’il chaufloic ledit Seigneur M arquis, celui-
ci
lui donna un foufflet, Sc que lu i, Jean C o u r t, avoit donne vingt
coups de bâtons fut le dos dudit Seigneur Marquis j ajoutant & répon*
dant qu’il a ouï dire publiquement que ledit Seigneur Marquis étoir
battu par fes dom |ftiques; l’ayant requis de figner, a dé c l ar é ne favoir.
�18 1
me§
Le tout fait préfent Jofeph Fortont Sc Jean peiïjfe, de ce lieu,
tém oins, fouflignés. Signes F o r t o n t , P e l i s s e , C. B o u g e . Au-dejjous
ejl écrit :
C o n t r ô l é a G r a s s e l e d ix -h u it F é v r i e r m il sept c e n t q u a t r e VINGT- QUATRE.. REÇU DOUZE SOLS NEUF DENIERS.
N° .
X
I
.
Signé
C O U R T ,
.
L a nommée D aum as, interpellée de même.
Ladite
Daumas a répondu & certifié fur l’exploit ci-deflus, qu’elle
a ouï dire publiquement que M . le Marquis de Cabris étoit battu
par fes domeftiques; & un jour pendant le tems que madame de
Cabris, belle-fille, étoit exilée, elle vit venir M . le Marquis d e l à
prom enade, & il vouloit traverfer le village pour fe rendre au Château;
Jean C o u rt, fon domeftique, voulut l’obliger de paiïer dans le pré
qui eft à côté du village, & comme M . le Marquis infiftoit, le domeftique fie força, en le m en a ç a n t, de paiTer dans le pré ; fur quoi ledit
Seigneur tout affligé, dit alors à haute voix, qu’il étoit bien fâcheux
pour un hom m e de fon ctat, d’être obligé d’obéir en tout à un coquin
de domeftique ; ajoutant la répondante qu’elle a vu paiTer fouvenc
M . le Marquis de Cabris qui alloit promener to u tfe u l, & un intervalle
de tems après, un de fes domeftiques l’alloit joindre; requife de figner,
a dit ne fa voir.
Fait prefens Jofeph Fortont, Jean Peliffe, de ce lieu, mes tém oinsl
fouilignés. Signés
efl écrit :
F o r t o n t ,
Pelisse,
C.
Bouge,
Au-deffous
C o n t r ô l é a G r a s s e l e d i x - h u i t F é v r i e r m i l sept * c e n t q u a t r e vingt
- q u a t r e . R eçu d o u z s sols
neuf
deniers.
Signé C O U R T .
�i83
N°
L A
X I I .
demoifelle Anne Roure , veuve Court t également
interpellée.
L adite
demoifelle Roure, veuve Court, enfuite de l’exploit ci-deiïus,
a déclaré ^-certifié qu’un Jour pendant le tetns que madame de C a b ris,
belle-fille, étoit exilée, fortant de la tribune de l’Eglife, elle entendit
que M arianne, femme de chambre de madame de C abris, douairiere,
difpuroit avec M. le Marquis de ce lie u , & que ladite Marianne lui
difoit, en criant à haute voixj vous êtes fo u , 8c vous ferez toujours
fou ; ce qu’elle répéta cinq à fix fois d’un ton menaçant.
U n autre jour elle rencontra le nommé Achart, domeftique du
Château, avec lequel elle parla d e j a maladie de M . le Marquis,
& demanda â ce domeftiqiie comme il fe trouvoit; fur quoi le domef
tique lui dit qu’il étoic tantôt bien, tantôt mal; la répondante die à
'ce domeftique que fi M. le Marquis recevoir quelque lettre de la
part de fou époufe, peut-être que cela lui feroit plaifir, 8c qu’en
lui f a i f a n t rep o n fe , cola l’occuperoit quelques momens. Sur quoi
ledit Achart, domeftique, lui répondit qu’il y avoit dans la maifon
des défenfes les plus txprefies de ne remettre audit Seigneur Marquis
aucune lettre de la part de fa fem m e, ni de tout autre, 8c de ne lui
fournir ni papier ni plum es, afin qu’il n’écrivît aucune lettre ni à fa
fem m e ni à fes amjs. Cette tonverfation ayant été rapportée au fieur
Alziary, homme d’affaires de madame la douairiere, celui-ci en prie
occafion de faire un faux rapport à madame la douairiere, à laquelle il
dit que ledit A c h a rt, dom eflique, lui avoit rapporté que la répondante
avoit dit que ladite dame étoit une vieille forciere; fur quoi madame
la douairiere fit avertir la répondante de
fe
rendre à GraiTe, où elle
reftoit prefque continuellement, 8c s y erant r e n d u e , elle eut des
reproches de la part de ladite dame fur les faux rapports, la répon
dante ayantfoutenu que c’étoït une invention, & q u ’el l e vouloir que
s
�184
le rapport lu! fur foutenu en face, ladite dame lui dit de retourner
à Gratte, 8c qu’elle y feroit aller ledit A ch art, dom eftique, pour fe
confronter en préfence dudit fieur Alziary ; 8c s’y étant rendue le iour
aflîgné, elle y trouva ledit fieur Alziary &c ledit A chart, lequel foutint en face dudit fieur A lzia ry , qu’il étoit faux que la répondante eût
dit que madame la douairiere étoit une vieille forciere, & ledit
Alziary fut honteux & n’eut pas le courage de répondre au domef
tique ; certifiant la répondante, encore qu’elle a ouï dire publique
m ent que M . le Marquis étoit battu par les nommés C ou re, fes
dom eftiqûes, l’ayant requife de figner, a dit ne favoir. Le tout fait
préfens Jofeph Fortont 8c Jean Pelifle, de ce lieu, mes tém oins,
foulîignés. Signés F o r t o n t , P e l i s s e , C . B o u g e .
C o n t r ô l é a G r a s s e le d i x -h u i t F é v r i e r m i l s s p t c e n t q u a t r e v i n g t -q u a t r e .
R e ç u d o u z e s o l s n e u f d e n i e r s . Signé C O U R T .
N °.
X
I
I
I
.
Je fouifigné Pierre Daver, Auditeur des Comptes de la Com m ué
nauté de ce lieu, en l’année mil fept cent quatre-vingt-deux, certifie
que m ’étant trouvé dans le Confeil de ladite communauté du mois
de Décembre dernier, dans lequel il fut propofe de finir avec les
Fermiers des m oulins, l’article des dommages & intérêts auxquels
ils fe trouvent condamnés envers la Com m unauté, 8c de finir en
même tems ayec le Seigneur du préfent lie u , fur l’article concernant
le chauffage des chaudrons, je fuis d’avis de 11e finir les conteilations
que lorfqu’on le pourroit valablement avec M . le M arquis, ou un
Adminiftrateur légitim e; 8c parce que je fus de cet avis, les perfonnes
qui agiiToient pour favorifer les Fermiers des m oulins, & les gens
d’affaires de madame la M arquife de C ab ris, douairiere, me mena
cèrent de me faire enlever par la voie du retrait féodal, des biens
que j’avois achetés, ce que l’on auroit cfFe&uç à ce que j’appris en fuite ,
fans la circonftance d ’une ordonnance de M M . du Chârelet de Paris,,
précédée d’un Arrêt du C on feil qui ont été fignifiés à U Com m u
nauté
�i
8î
Haute de ce Ireu^ par lefquels l’adminiftration des biens te revenus de
M . le Marquis a été ôtée à la dame fa mere ; en foi de quoi j ’ai figné
le préfent. Fait à Cabris le dix-fept Février mil fe p t cent quatrevintquatre. S i g n e P. D a v e r .
N° .
X
I
V.
N o t e s particulières pour fervir d'injlruclion a Madame
de Cabris. .
E l l e fait comment & par qui madame la douairiere fut féduire
k préfenter fa requête en forme de plainte du 6 Novembre 1,777 >
pour faire interdire M . de Cabris.
M ais ce qu’elle ne fait peut-être p a s, c’eft que ceux qui étoient
à la tête de ce p rojet, difoient qu’on ne demandoit une fentence
d ’interdidion contre le mari , que pour avoir une léttre de cachet
Contre 1 epoufe ; que pour juilifier leur defïèin , ils montroient cer»taines lettres de madame de C abris, qui établiiloient leurs prétendus
. griefs c o n tr ’elle : entr’autres M . le Boiteux , en repréfentoit une ,
écrite par madame de Cabris au iîeur BeliiTen , qui étoit entre fes
m ains, on ne fait com m ent, dans laquelle madame de Cabris difoic *
au fieur BeliiTen qu’elle ne vouloir plus entendre palier de fon m ari,
qui étoit un monftre de nature, &c. O n montrera peut-être encore
cette lettre, & d’autres que Ton difoit avoir de madame de M irabeau,
également outrageantes , & qui annonçoient un deiTein prémédité de
nuire à M . de Cabris ; des certificats de Lyon , relativement à une
affaire prétendue arrivée dans cette ville , q u i, félon les perfécuteurs
de madame de Cabris , prouvoient fon inconduite , & la ncceffité
de l’extrémité à laquelle 011 fe portoit contre le mari , pour fairc
enfermer la femme. O n pourra encore parler de ces lettres & certi
ficats , peut-être les montrer ; madame de Cabris doit fe prémunir
contre ces calomnies , & s’attacher à les détruire.
Elle ignore peut-être aufli que pour le fîmulacre dailemblée de
A a
�i86
jjarens i convoquée après la fentence d’interdi&ion , on fît choix des
parens de M . de C a b ris, qui ne contrediroient pas le projet affreux
de hû enlever fon exiitence. O n ctoit aifuré des abfens auxquels
011 faifoit entendre tout ce qu’on vouloit ; mais on favoit bien que
ceux de Grafle , qui voyoient par eux-mêmes ce my itéré d in iquité,
ne fe prêteroient pas à un projet auiïï horrible. Voilà pourquoi des
parens de Gralfe 011 ne convoqua que les deux beaux - freres & deux
autres qui croient neveux de l’un d’eux ; mais on fe garda bien
d’aiTembler M M . de Sartoux, de Puget, de Theas, dt Gars l’a în é ,
& c. qui fe feroient oppofés à tout ce qui fut fait dans ce fimulacre
d’ail emblée de parens.
Madame de Cabris ignore fans doute auiïï qu’après cette aiTemblée le placet de famille fur lequel on furprit la religion des M i
nières du Roi , pour la faire exiler dans un co u ve n t, fut fait 8c
dreiTé à Graife par M . le Boiteux ; que ce placet fut envoyé par un
porteur exprès à tous les parens des environs , & à A i x , & que par
conféquent tous les parens qui le fignerent, n’ont ni approfondi, ni
pu approfondir aucun des faits contenus dans ce placet.
Elle ne fait point non plus que lorfqu’on l’eût fait arrêter à A ix
Comme une crim inelle, avec le plus grand é c la t, M . le Boiteux qui
•*ctoit à la tête de cette exécution , manda prendre alors madame la
doüairiere, qui fe porta en la ville d’A ix. Son voyage eut pour m o tif
de faire retirer M . le marquis de Cabris dans fon château ; elle y
parvint en l’aifurant que fon affaire en interdidtion ne feroit plus
pourfuivie; M . de Cabris qui avoit été empêché par decret de la
C our de s’abfenter pour aller joindre madame de Cabris à Sifteron,
ne pouvant préfumer que madame fa mere le tromperait en le faifant retirer -, revint dans fon château de C a b ris, efeorté par un bour
geois du village dudit lieu , qui avoit accompagné madame la douai
rière à A ix. Il étoit fort tranquille, d’après l’aiTurance que madame
fa mere lui avoit donnée, qu’on ne faifoit point de pourfuites dans
fon affaire en interdiétion ; mais quelle fut fa furprife , lorfqu’on
lui apprit qu’on ne l’avoit fait retirer dans fôn château, que pour
�i B7
abufer de fon abfence Sc le 'pourfuivre ; il y fut fi fenfible , qU(î
pendant quelques jours Tes affe&ions nerveufes 1s plongèrent dans
un ctat trifte , 3c lui faifoient dire qu’on l’avoit trompé en lui enle
vant tout à la fois fon exiftence , fa femme , & l’adminiftration de
fes biens.
Elle ignore p eu t-être également que non feulement on fe pré
valut de l’abfence de M . de Cabris , mais que pendant la plaidoirie
on fit valoir des faits non prouves , pour faire entendre aux Juges ,
que depuis fon retour à Cabris , il avoit donné des preuves vifibles
& publiques de démence ; comme fi fur l’ctat d’un citoyen il étoit
permis de fe décider d’après des allégations ou des atreftacions ,
lorfque la juftice a déjà pris fes réponfes , fur lefquelles elle doit le
juger.
Elle ne fait pas non plus que la plupart des pareils abfens de GrafTe,
dont on a furpris la fignature , ont publiquement témoigné du regret
de n’avoir pas mieux approfondi les faits qu’ils ont atteftés, & furtout depuis que le premier mémoire de madame de Cabris , qui a
produit la révocation de fa lettre de cachet, fut rendu public.
A préfent perfonne ne tient plus à la confommation de cet affreux
p ro jet, q u i paroît être réduit à fon ternie , fi on en excepte M . le
Boiteux ëc tout ce qui efl: intéreiTé à faire entretenir cet ouvrage
d ’iniquité.
O n dit que M . le Boiteux tient à A ix des propos publiquement
injurieux & outrageans contre madame de Cabris fa niece.
Q ue M . Lemaïgre, frappé de ce qu’il a trouvé dans le mémoire
concernant le fupplément de légitime qu’on s’eft fait adjuger, a fait
vn mémoire ou lettre juftificative de ce qui a été fait à M . le G arde
des fceaux , & lui demande juftice contre ce m ém oire, fur l’impu
tation calomnieufe qu’il renferme contre les légitimaires.
P u i f q u ’il fe plaint, il femble que madame de Cabris doit a j o ut e r
par réflexion à fon m ém oire, qu’un Confeiller au parlement devroit
faY oir qu’il fonne très-mal d’attendre ôu de failir un tems d ’in te r-
A a i}
�}2 S -
diYHon pour ie faire adjuger un prétendu droit cintre l’interdit ;
qu'on a fi fort abufé de la foibleffe de la curatrice qu’on avoir créée,
& de ce que l’interdit ne pouvoit parler, que non feulement on s’eit
fait adjuger un droit qu’on n’avoit ofé réclamer en juftice contre
M . de Cabris ; &r tandis que les biens de la fucceilion, fur lefquels
ou l’a pris , n’ont été eftimés qu’au taux du trois pour cent , comme
domaine noble , 011 s’eft: fait adjuger & 011 a établi dans la tranfaétion le taux de l’intérêt du principal au cinq pour c e n t} que l’on
juge de l’acceiToirefi madame de Cabris a tort de crier & de fe plaindre
fur le fonds*
L e perfonnage nul à Grade , fe donne les plus grands mouvement
pour les ailemblées qui fe tiennent chez madame la douairiere ,
prélîdées par l’homme habillé de vio let, & où toute cette vile en
geance qui l’entoure , fabrique des mémo-ires pouE noircir madame
d e.C ab ris, & envoyer ce que l’étranger de nation qui fait nombre
dans ces aiTemblées, appelle le contrepoifon du mémoire de madame
de Cabris.
C es mémoires ont été envoyés à Aix par un porteur, pour être
fournis fous l’infpeétion de M . le B oiteu x, de M . le Maigre 6c des
Avocats d’Aix pour fo llicite r, à la faveur de ces mémoires , des
motifs favorables fur les arrêts attaqués.
O n d it, madame de Cabris fe plaint que l’arrêt du 9 Avril 177S
a été rendu fans conclufions du Miniilere public , tandis que tout
le monde fait que M . l’Avocat Général de Calilfane porta les con
clufions & plaida toute une audience.
Mais quand cela fe ro it, l’arrêt du C o n fe il, qui reçoit la requête
de madame de C a b ris, préjuge que le C onfeil veut tout voir , puis
qu’on demande & les procédures & les inrerrogaroires ; &c fur ces
pièces , quels que puiifent être les motifs que l’on donnera , tout
être penfant trouvera que c’eft une néceflitc pour une famille hono
rable , d’anéantir pour toujours l’ouvrage des perfécuteurs de cette
fam ille, qui n’a déjà fait que trop de bruit dans le royaume.
�1 8 cj
O n fera rcpondi'e, dit-on , au mémoire , on traînera i Aix én
lo n g u e u r, autant que l’on pourra , pour arrêter l’envoi des procé
dures i nt e r ro g a t o i r e s & motifs des arrêts ; on traînera davantage 3
Paris , po u r avoir le tems d e faire publier le mémoire contraire ,
en gagnant du tems , mademoifeile de Cabris aura douze ans , Si
une fois qu’elle fera pubere , fi on ne la marie pas dans les circonftances , on lui fera dire ce que l’on voudra contre tout ce que
madame fa mere dit à raifon de fon éducation ; madame d e Cabris
a le baptiftaire de mademoifeile de Cabris , elle doit veiller avecle plus grand foin à avoir prompte expédition à Aix & à Paris ; il
elle ne peut parvenir à l’obtenir avant le tems de la pubertée de m ademoifelle de Cabris , elle doit aller à toutes fins , & demander
au Confeil que tout reftera en l'état jufqu’à ce que Sa Majefte aie
ftatué fur fa requête , parce qu’après tous les attentats qu’on s’ell
permis , & avec le fecours du Confeil violet qui préfide les alTemblées , on pourrroit bien fe permettre encore celui de finir par le
iacrifice que craint avec tant de raifon madame de Cabris.
O n produira peut-être des certificats pour juftifier la conduite de
l’adminiftratrice , relativement aux foins qu’elle prend de M. de
Cabris. M adam e de Cabris ne doit pas craindre d ’avancer que fi
des certificats pouvoient être de quelque poids , elle aurait celui
de tout le village de Cabris & de toute la ville de GrafTe qui font
feandalifés de la maniere dont madame la douairiere néglige les
foins qu’elle devrait donner à fon fils en le livrant à des mercénaires qui achaque inftant aggravent fes maux au lieu de 1« fecouric
& de le foigner ; qu’elle eft fi certaine de ce qu’elje avance, qu’elle
s’en rapporte volontiers á des informations publiques que l’on pouroit prendre à fon infçu , fans qu’elle craigne d’être contredite , tant
l’indignation publique eft grande contre fes calomniateurs.
O n pourra relever encore le prétendu délabrement de la fortune;
de M . de Cabris que l’on attribue à madame de Cabris ; le papier
qu’elle a reçu , la m et à portée de répondre à cette faulle impu
tation.
�190
O n dira peut-être , M . de Cabris avoir cinquante mille écus de
capitaux qu’il avoit aliénés dans un court intervalle de teins ; mais
la bâtifle de la nouvelle maifon & l’affaire malheureufe q u ’il a eCfuyée, avoient confumé ce fonds , &c l’avoient mis dans la néceilité
de faire des emprunts ; ce n’eft pas madame de Cabris qui avoit
coopéré à ces deux objets de d é p e n f e jc ’eft lorfqu’etle veut être à
la tète de fa maifon , pour y mettre un ordre , qu’on cherche à la
détruire , pour y placer une adminiltracrice qui auroit befoin d ’être
adminiftrée elle-même.
,
C ette preuve fe tirera de ce qu’elle a fait depuis fon adminiftration 6c d après les notes inferees dans le papier que madame de
Cabris a reçu.
Elle peut ajouter qu’il n’y a q u ’un cri contre les Canfeils & les
entours de madame de Cabris la douairiere, que tous les parens
trop crédules, difent à préfent qu’elle a tort de s’en rapporter au
confeil d’un perfécuteur qui a violé une promeiTe facrée fous la foi
de laquelle le mariage de madame de Cabris avoir été f a i t , & qu’ils
défirent tous que madame de Cabris foit replacée dans fa maifon
8c dans la place q u ’elle doit o c c u p er
on en excepte ceux d’entre
,fi
les parens qui feroient intéreifés à la tenir éloignée.
U n nouveau mémoire deviendra néceiTaire pour frapper fur tout
ce qui a trait à ce qui a fuivi l’interdidion , &: notamment l’adm iniftration : tout le monde dit ; c’eft une horreur que madame la
douairiere abandonne fon fils pour préfider dans fa maifon autour
d’un tapis vert à Gralîe , fous prétexte d’infirmités , & que fa né
gligence foit portée jufqu’à le livrer entre les mains de deux payfans
qui l’excedent de coups , au lieu de lui donner des foins ; c’en
eft une autre de foudoyer avec douze cent livres un véritable ivro
gne , pour préfider à cet abus d’autorité de fa part , au lieu de les
employer aux honoraires d ’un médecin qui , en fuivant M . de
Cabris de près , auroit connu par la fuite du tems le principe de
fes affe&ions nerveufes , & l’auroit g u é r i , comme le fut monfieur
fon pere ; c’en eft une bien plus grande , qu’elle laiile mademoifelle
�191
de Cabris dans un couvent où il n’y a que des perfonnes inha
biles pour lui donner une éducation telle que fa naifffance & fa
fortune l’exigent : que juftice foit faite par le Roi à madame fa
mere , pour faire ceffer tant de maux , nous ferons des feux de
joie à Cabris & à Graffe , pour lui marquer notre fatisfaction ; voilà
les cris univerfels de ces contrées ; que madame de Cabris la d if e
dans fon nouveau m ém oire, fans crainte d’être contredite par la voix
publique.
Mc DE
B E A U S É J O U R , Avocat.
;
D e l'Im p r. d e D 'H O U R Y , Imp r.-Lib. de M g r le D u c d 'O r i Î a n s & de M g r le D u c
d e C h a r t r e s , rue Hautefeuille , près celle des deux Portes»
�
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Title
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Factums Vernet
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Cabris. 1785]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Beauséjour
Subject
The topic of the resource
démence
curatelle
maltraitance
abus de faiblesse
enfermement
ordre ministériel d'enfermement
prodigalité
successions
assemblées de famille
inventaires
terriers
Ursulines
violences sur autrui
mobilier
prévarication
médecine légale
domestiques
bibliothèques
scellées
témoins
vie monastique
hôtels particuliers
lettres de cachet
correspondances
Riqueti (Honoré Gabriel, Comte de Mirabeau)
consuls
intrusions dans monastère
créances
affaire des affiches (1776)
experts
régime alimentaire
dénuement vestimentaire
jardins
huile d'olive
retrait féodal
domaines agricoles
dépression nerveuse
Description
An account of the resource
Mémoire et consultation pour madame la marquise de Cabris, belle-fille, défendant l'interdiction de son mari ; Contre madame de Lombard Saint-Benoit, , marquise de Cabris, douairière, poursuivant l'interdiction du marquis de Cabris, son fils, pour cause de démence.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie d'Houry (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1785
1769-1785
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
191 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_V0114
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/17/53990/BCU_Factums_V0115.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Grasse (06069)
Aix-en-Provence (13001)
Sisteron (04209)
Cabris (06026)
Paris (75056)
Manosque (04112)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
affaire des affiches (1776)
assemblées de famille
bibliothèques
consuls
correspondances
Créances
curatelle
démence
dénuement vestimentaire
dépression nerveuse
domaines agricoles
domestiques
enfermement
experts
hôtels particuliers
huile d'olive
intrusions dans monastère
inventaires
jardins
lettres de cachet
maltraitance
médecine légale
mobilier
ordre ministériel d'enfermement
prévarication
prodigalité
régime alimentaire
retrait féodal
Riqueti (Honoré Gabriel, Comte de Mirabeau)
Scellées
Successions
témoins
terriers
Ursulines
vie monastique
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/17/53989/BCU_Factums_V0114.pdf
6ca4dfae1c9a08659e23706246cc235e
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Text
MEMOIRE
P O U R la Dame Marquife d e
à l'interdiction de fon mari ;
C O N T R E
Douairière
la Dam e
de
de
C
a br is
, défendant
L o m b a r d , Marquife
C a b r i s 3 pourfuivant l ’interdiction
de fo n fils ypour caufe de démence.
Une
mère foible par fo n â g e , foible par fes affect ion s,
inftrument prefque impaflible d’une aff ociation i ntéreff é e ,
pourf uit depuis huit ans la honte de fa poftérité dans la
perfonne de fon fils. Elle demande q u ’il foit interdit pour
caufe de démence, parce que les traitemens indignes exercés
pendant fept ans fur la perfonne de fon fils, autorifés par
e l l e , ou du moins tolérés, ont affoibli fon e fpr it en altérant
fes organes.
Elle demande que f on fils foit in te rdi t, pour demander
l’adm iniftration de fes biens j &. elle veut adminiftrer fes
A
�1
biens ¿parce qu’c!le en a diflîpé une partie , & pour diflîper
ie reitc.
i*
U n e femme perfécutée depuis huit ans, diffamée jufqu’au
pied du T r ô n e , privée deux fois de fa liberté , parce qu’elle
d éfendoit avec courage la p erfo n n e , l’honneur , les biens de
fon m a r i , ô£ les efpéranees de fa fille unique , vient encore
protéger des intérêts il chers. Elle demande'que fon mari ne
foit pas in te r d it, parce qu’il n’eft ni prodigue ni fu r ie u x ,
parce que fa foiblelle morale , eft un effet momentané de ion
affoibliiTement phyfique , caufé lui-m êm e par les excès &
les outrages dont il fut la vi£time.
Elle demande que l’infortuné ne foit pas puni de la bar
barie avec laquelle il a été traicé , & que fes tyrans ne trou
vent plus dans l’effet même de leurs perfécutions, un m o tif
de perfécutions nouvelles.
Elle demande le libre exercice de fes droits d ’époufe-ôc de
mère , du droit inconteftable de coniacrer ies loins à la fauté
de ion é p o u x , à l’éducation de fa fille.
Elle demande que les biens de ion mari foient confiés à
une adminiftration éclairée
i a g e , ions les aulpices des
Tribunaux.
Elle ne veut enfin que la perfonne de fon mari : elle dépofe fa fortune dans les mains d e là Jufticc.
V o ilà Us deux tableaux que cette affaire préfente.
C ette affaire doit intéreller, non pas parce que le Marquis
de C abris, dont on artaque l’exiftcnce c iv ile , c il un homme
de q u a lité , 6c qu’il a 50,000 liv. de rente ; mais parce qu'il
eft père d’un entant digne d’égards , parce que 1 état d’un ci
toyen eft une chofe confidérablc , parce qu’il importe à tous
�3
que la Loi foie entendue & exécutée dans Ton fens vérita b le,
& que l’interdiction qu’elle a établie com m e une précaution
ju fte , mais déicfpérée', ne devienne pas une fervitude arbi
traire & une flétriflure inutile.
T o u s les faits d o n t on va lire le r é c i t , font déjà confignés
dans des écrits publics ; cependant il eft néceiTaire de les rap
p eler, furtout d’indiquer les p reu v es, parce qu’ils font invrailemblables.
F
A
I
T
S
.
L a D em oifelle de M ir a b e a u , fille du M arquis de M ir a - frémi* « éso^ue.
b e a u , a époufé le M arquis de Cabris en 1769 ; deux ans
ap rès, une fille encore u n iq u e , eft née de ce mariage.
Le Bailli de M irabeau , oncle de l'epoufe , avoit pro
mis une fom m e de 30,000 livres pour égaler la d ot de la
M arquife de Cabris à celle de fa foeur , la M arquife du
Saillant. ( 1 )
C e tte promeile n’étoit point exécutée. Le M arquis de
Cabris la rappelle en 17 7 4 . L e Bailli répond q u ’on a pris un
com plim ent pour des paroles (2 ), 2c lui-même il prend cette
demande pour une injure.
D ’un autre c ô t é , la difeorde agitoit déjà la maifon pater
nelle de la M arquife de Cabris. Sa mère vivoit feule dans fes
terres du
Lim ouiîn. Elle
a voit
cru
remplir
un
devoir
de piété filiale , &. , accom pagnée de fon m a r i , elle a,voit été
voir fa mère.
( 1 ) L ettre du M arq u is de M i r a b e a u , du n Février ¿ 7 6 9 , déjà im
p rim ée.
( x ) L ettre du Bailli d e M ir a b e a u , d u 15 Janvier 1 7 7 4 , déjà im
prim ée.
A i;
�A
I.cM arquis de C a b ris , affe& é de l’embarras extrême dans
lequel il avoit trouvé fa belle-m ère, n’a voit pas balancé à lui
prêter z o ,o o c liv.
C ’etoit dans le m êm e temps qu’il demandoit les 30,000 I.
promifes par l'onclc de fa femme ; au lit, en répondant qu’il
n ’avoit
rien
promis ,
l’oncle
écrivoit - il avec
autant
d ’amertume que de mauvaile f o i , qu’ un prêt de 12000
liv . pour une obligation de 60,000, ¿toit une ufure épou
vantable. L ’oncle favoit bien cependant que le prêt étoic
de zo ,o o o liv. & ‘quc l’obligation n’exiftoit pas.
D e u x ans après, la rupture éclata entre le M arquis & la
M arquife de M irabeau. L e public a été aflez inftruit de
cette tri île querelle. La M arquife de M irabeau forma fa
première demande en féparation ; cette demande fut re
jetée. En exécutant PA rret du Parlem ent qui la réunit à
Ion m a r i, en rentrant dans l'a mailon , elle trouva un ordre
m im ftériel, en vertu duquel elle fut enfermée au co u ven t de
S a in t-M ic h e l, rue des Portes.
D epuis on a oie dire & imprimer que cette demande en fé
paration avoit été infpirée par la M arquife de Cabris. O n a
ofé dire & imprimer que les 10,000 liv. prêtées librement
par fon m a ri, deux ans a u p aravan t, avoient été prêtées fur
fes inftances, & pour alimenter ce déplorable procès.
11 étoic alors bien loin de fa penfée qu’on put un jour lui
faire un crime d’avoir c o n fo lé , d’avoir aidé fa mère.
A la nouvelle de fa détention , elle accourut fur le-champ
auprès d’elle; elle ob tint la permiflion de la voir: un refus au.
roit trahi des préparatifs perfides.
P e u de jours après , le 19 Juin 1 7 7 7 * la M arquife de C a
�11
bris cft elle-m êm e , en vertu d'un ordre m ïn ifléricl, exilée A
l ’A b baye de la Déferre à Lyon.
C et ordre cft
révoqué
quatorze
jours
après ,
le
4
J u ille t , fur la réclamation perfonnelle de la M arquife de
Cabris.
£lle retourne auprès de fon mari. Son mari ne pouvoit pa£fer fous fiicnce cet attentat à Ton autorité, cette injure faite
à lui-même dans la perfonne de fon époufe.
I l s ’adreiTa au M arquis de M ir a b e a u , feul auteur de cette
e n tre p riie, 8c lui fit les plus vifs reproches (1).
Peu de temps ap rès, inftruit par la M arquife de M ir a
beau elle-même des menaces faites de la renfermer aux
V a ld c n e s de C harcnton , il envoya conjointem ent avec fa
fe m m e , des pouvoirs pour demander à la Juftice desfecours
convenables au rang 6c à la fituation de fa belle-mère.
C e tte démarche fit jurer fa perte- ÔC celle de fa femme.
L e m oyen de l’interdi&ion étoit un moyen fa m ilie r, prefq u’autant que les ordres m inijlérids. D es deux caufes or
dinaires d’in te rd ictio n , prodigalité ô démence, la dernière
étoit moins difficile à fuppofer. Si le M arquis de Cabris
n ’eût pas prêté 10,000 liv. à fa belle-mère , s’il ne fc fût pas
préfenté pour la fecourir , s’il n’eût pas trouvé mauvais qu’on
fît enfermer fa fe m m e , parce qu’elle co nfoloit fa m è r e , il fe.
roit encore fage &: libre.
C e com p lot étoit Singulièrement encouragé par la certi
tude d ’avoir des partifans dans la propre famille du M arquis
de C a b r i s , & par la connoiiïancc des embûches déjà dref( 1 ) L ettre du M arqu is de C a bris au M arqu is de M ir a b e a u , du 4 A o û c
1 7 7 7 , déjà im prim ée.
�6
fées autour de lui par l’avidité des collatéraux , toujours ac
tive & jamais raflafiée.
L e Marquis de C a b r i s , à la m ort de Ton p è re , s’étoit
trouvé , à peine forti de l’a d o lefccn c e , propriétaire de 50,000
liv. de rente.
Scs trois foeurs , mariées à trois G entilshom m es P ro v en
çaux n’avoient eu
que 45000 liv. de légitim e , avec le
droit à un fupplément de lé g itim e , fixé par le teftament du
père com m un à 8000 lir. pour chacune ; mais elles étoient
appelées à l ’univerfalité de l’h é rita g e , s’il arrivoit que leur
frère mourut fans enfans.
L e mariage de leur frère fufpcndit cette cfpérance , & la
naiflance de la D em oifelle de C abris vint l’anéantir. O n réfolut au moins de ne pas laiifer doubler cet obftacle. D e -là
les intrigues pour troubler le jeune ménage , les ca lo m
nies auprès du m a r i , les délations auprès de la femme.
O n avoit poufle la perfidie jufqu’à égarer le cœur du M a r
quis de C a b r i s , & jufqu’à faire jaillir de cet égarem ent Tou* !
rrage &. l’infultc fur fa femme.
D e -là la réparation volontaire &
m om entanée
dont
on a fait tant de bruit ; q u i , dans ce m om ent e n c o r e , cil
le feul prétexte des calomnies , &; d ont la M arquife de
C abris a repouiTé il fouvent
la honte fur fes perfécu-
teurs.
En éloignant la fe m m e , qui feule pouvoit inquiéter la
cupidité par une furveillance in co m m o d e, on obtenoit deux
avantages , celui d’arrêter toute efpérance de poilérité fur la
tête de la fille u n iq u e , Sc celui d’environner le p o u x de gens
utiles à l’exécution des projets.
Seytre , préfenté par les beaux-frères avoit été choifi &
�7
nom m é curateur à fa minorité ; 2c le premier foin de cc
curateur avoit été de r é g le r , avec les beaux - frères, le
fupplémcnt de légitime. C c fu p p lé m cn t, fixé p a r le teitam ent du père à 14000 liv. pour les trois fœ u rs , avoit été
porté à 60,000 liv. ôc le M arquis de C a b r is , autorifé par Ton
c u r a te u r , avoit payé 60,000 liv. par quittance du 16 Juin
Ï775Seytre ne fe contentoit pas d’autorifer tout avec comp la ifa n c e , il cherchoit encore les occaiions à'autorifer \ &c
A lzia jri, Procureur à G ra tte , étoit chargé de l’aider dans
fes recherches.
C ’eft ainli qu’ils ont
fait
emprunter au M arquis de
Cabris plus de cent mille livres (1). A lziari fournilToit les
moyens Sc Scytrc les pouvoirs. C e font ces dettes qu’on a
acculé la M arqu ifc de C a b ris ,a lo rs ab fen te, d’avoir fait con
tracter à ion mari.
Le com plot d’interdi& ion form é à P a ris , favorifoit donc
les complots de Provence. La vengeance s’aflocioit à l’avi
dité. L ’infortuné Marquis de Cabris étoit environné d’en
nemis dans fa propre famille. Sa m è re , dont l’âge augmentoit la foiblcflè & l’ap a th ie, devoir céder aux impuliïons
de fes p a ren s, & les parens étoient entraînés par un double
intérêt.
Les trois beaux-frères parloient encore du fupplémcnt de
lé g itim e , peu iatisfaits de l’avoir fait tripler par le complaiiant Scytrc. L ’évén e m en t a juitifié leur elpérancc. Les pre
miers momens de la m ort civile du M arquis de C a b ris, ont
«
(1) L ettre du Heur A lz ia r i au M a r q u is de C a b ris , du 8 Juin 1 7 7 6 ,
im prim ée page 73 du prem ier M é m o ir e .
�S
cté em ployés, par fa m ère, à payer à ccs beaux-frères ccfup*
plément de légitime com m e ils ont v o u l u , fansd ifcuüion ,
fans conteftation , fans formalité.
U n intérêt plus v i f les animoic encore : a p p e lé s, au
défaut d’enfans , aux fubftitutions de la maifon de C a b r is ,
la, naiiïance de la D em oilclle de Cabris . n’avoit pu leur
enlever cette efpérance fans leur en donner une autre : ils
vou lo icn tre co u vre rp a relle lcs biens qu’elle leur faifoit perdre.
C es deux diviiîons des deux familles , réunies pour le
m êm e projet par des intérêts contraires, ont paru, dans les
premiers écrits de U M arquife de C a b r i s , un roman invraifcmblable.
C ep en dan t elle ne l’écrivoit pas fans preuves : aujour
d ’hui les preuves fe font accumulées ; elles font confignées
par to u t , dans des délibérations juridiques, dans des a£tes,
dans des écrits; Sc la double confpiration eft devenue l’hiitoire de toute la famille , de toute la province , & l’on pourroit dire même de la capitale.
S iconjje Époque
T o u t étant préparé pour l’exécution , le premier N o
vembre 1 7 7 7 , on voit arriver à GralTe le Bailli de M ira
beau ; celui q u i , trois ans au p aravant, en parjurant fa f o i ,
en refufant de payer les 30,000 liv. promifes au M arquis de
C a b r is , écrivoit à fon époufeq u ’ils étoient des ufuriers épou
vantables.
11 s’établit chez la D a m e de Lom bard , Douairière de
Cabris , 8c refufe de voir fa nièce ¿5c fon neveu qui viennent
le vifiter.
C e religieux d'un Ordre illu flre, capable de 'tous les acles
m ilita ires, incapable de tous les acles c iv ils , fans pouvoir
pour
�9
pour lui m êm e, s’étoit chargé des pouvoirsdes autres. I! étoic
muni de dix procurations que l’exceflivc bienveillance du
Juge rendit inutiles.
Six jours nprès ion a rrivée, la dame de Lom bard pré
fente la Requête en interdiction du Marquis de C a b r is , fon
fils.
Les pretextes n’étoient pas n o m b re u x , p u ifq u e, dans ce
m o m e n t encore , la dame de L om b ard ne juitifie fa d é
m arche cruelle que par deux
faits q u ’elle
appelle
des
fignes certains d ’une folie in c u r a b le , &: d o n t l ’un ne pouvoic être cara&érifé ( i ) , Ôc l’autre étoit un accident m a l
heureux (i).
La vérité eft que le Marquis de C a b r is , accablé des c h a
grins d o n t on avoit environné fa jeunelfe, & d on t on vient
d ’eiquiflcr le tab leau , étoit devenu très-fenfible ;
fcnfvbilité
lui
cette
d onnoit des accès fpafmodiques , &. des
inltans de mélancolie, fur tout les inftansqui fuivoient quel
que agitation
violente. D e cet état de foibleíTe p hvfique
à l’état de f o lie , l’intervalle e f t i m m c n f e ; cet intervalle cft
toujours le m ê m e , malgré les efforts employés pour le faire
franchir au Marquis de Cabris.
Jufqu’au m om ent de la demande en in te r d i& io n , l’opi
nion de la famille iur cet état de maladie m o m e n ta n é e ,
e lt conftatée par l’aveu de la dame de L om bard elle-même.
( i ) L a dam e de L o m b a rd a im prim é dans tous fes M ém oires ce
prétendu billet fait
6
par le
M arqu is d e C a b r is au iîeur G arnier , le
Juillet 1 7 7 6 , pour lui garantir pendant d eux ans la fanté de corps
& ti’efprit.
(1) L e M arquis d e C a b ris s’étoit blcile à la cuiiTe.
B
�10
En 1 7 7 6 , elle écrivoit à fa belle fille : V o tre mari cjlrevenu
d ‘ A i x avec quelques indifpofitions cauftes par les agitations
d ’un arrangement qui a pris trois mois de temps, mais elles ont
difparu ; i l f e porte très-bien.
E t dans une
autre lettre : V ous deve\ avoir reçu tn c
lettre de votre mari ; i l f e f a i t beaucoup plus malade q u i l
n e f l \ i l y a beaucoup a efpérer pour fort parfait radbli(jem tnt.
Quelques mois a p rès, la dame de Lom bard prétend que
fon fils eft in fe n fé , furieux, fans efpoir de guérifon , 6c elle
demande qu’il foit interdit.
L a M arqu ife de Cabris étoit feule pour défendre fon mari.
L e 7 N o v e m b r e , c’e ft-à -d ire , le lendemain de la demande
en in terd iction , elle fe préiente au tribunal pour s’y oppoler :
elle n’eft point écoutée.
L e Juge ordonne la preuve des faits. O n aiTemble, on
interroge tous lesd cm eitiq u es de la D a m e de Lombard ( 1 j.
Son fils demande à faire la preuve contraire. O n accorde \
mais on révoque cet acte de juitice avant m ême qu’il (oit
exécuté (z). Il écrit fa défenie de fa propre main ,
dans
le m ême temps il fait un a & c public de prudence &
de
fagacité , il tranfige dans les falles de fon Château a vcc toute
la C om m unauté a iïc m b lé e , fur une contellation délicate ,
fubiiilantc depuis plus de cinquante ans (3}.
Il cft interrogé ,
fes réponfes attellent fa prefence
d ’cfprit. La famille n’efl: ni ailemblée ni confultéc. Le m i'
niftère public conclut qu’ i l n y a pus lieu a l'interdiction >
Çi) D e vingt-deux témoins , lept ou huit fe u l e m e n t , les d fù iés d e
la D a m e de L o m b a rd , s’efforcent de parler c o m m e elle.
(2) L e M arqu is de C a b t i s avoit déjà fait conftater l'intégrité de fa
raifon par 42 tém oins.
(3) C e t t e tranfa& ion a etc confirmée par le Parlem ent d ’A i x , u o i s
ans aptes l’in te r d id io n prononcée co m te fo u A u t e u r .
�11
& le Juge la prononce pour caufe de manie hypocondria
q u e (i) , en ordonnant au furplus que la famille fera aiTem-
bl.ee pour nommer un Curateur à l’interdit.
Le lendemain , le M arquis de Cabris interjette appel au
Parlem ent d ’ Aix.
Malgré l’a p p e l, & douze jours après, la Sentence s’exé
cute. L ’H otel du Juge reçoit un fimulacre d ’aiTemblée de
parens. L à , préfide le Bailli de M irabeau , toujours muni
de Tes dix procurations, qu’il montre & qu’il n’a jamais d é pofées ; deux beaux-frères & deux étrangers fiègent à côté
de lui. Les plus proches parens , répandus dans dix familles
à G r a t t e , ne font pas m êm e invités : on connoilToit leur
opinion.
Sur le vœu trts~una'i ‘i m i de cette aflemblée le Jup-e ordonne l’exécution provil'oire de ia
Sentence nonobftanc
l ’appel , nom me la D am e de Lom bard C uratrice à l’inter
diction , & T u tric e de fa p etite-fille, fixe une penfion à
l ’i n t e r d i t , &L des alimens à fa femme , aucorife la prétendue
C u ratrice à emprunter
toutes les fomm es qu'elle jugera
nécedaircs fur les biens de l’interdit ; i l l'autorife fur-tout
h. arrêter le compte du fieur S e y tr e , autrefois Curateur à la
minorité du M arquis de Cabris , enfuite fo n c o n fe il, a d m im f
traceur de fe s biens , fo n Procureur, fo n défenfeur ju fq u au
moment de l'interdiction , vendu alors aux intérêts de l'a jfociation combinée,
0
depuis lors la trahiJJ'ant ou la protégeant
icur a tour fu iv a n t fe s intérêts perfonnels. (i)
( i \ Sentence d u 12 Janvier 1 7 7 8 .
( 2 ) L e fieur Seyire , mécontent de la D a m e de L o m b a r d ou de
fe? lui veillans , avoit déferré fon parti. V o i c i c o m m e elle le peignoir
alors dans fa R éplique
fo m m a ir e de 68 pages en
t r c s - p e r ic carac-
B ij
T r o is iè m e £10
qu i.
�11
Enfin , la même S e n t e n c e , par une efpèce d e vertige , autorife la C uratrice à faire enlever & mettre fo u s f a main la
perfonne de l'interdit & celle de f a fille comme étant fo u s f a
p u ijfa n cc, jufques fous les yeux du Parlement , donc leur
appel avoic provoqué la juflice.
L e M arquis de Cabris défendoit donc fa p e r fo n n e ,.fo n
honneur , fa fortune devant le Parlement d ’A ix , tandis
qu’à trente lieues de-là , fa mère , devenue fa Curatrice ,
faifoit enfoncer les portes de fon Château , brifer les fer
rures des arm oires, Sc fe m ettoit en poiTcflion de tout.
11 falloir un inventaire. U n N otaire , nom m é par
Sentence
du
14
Janvier ,
hom ologative de
l’avis
la
de
parens , é toit com m is pour y procéder en préfenec de la
C u ratrice
de deux parens. La Curatrice n’y afnfte pas.
L ’inventaire eft fait avec les fubalrernes , 6c quel inventaire i O n repréfenre feulement ce qui n’a tenté la cupi
dité de perfonne ; on ne fait nulle mention d’une Biblio
thèque de 12,000 liv. ; n e u f caiflcs de mfcubles p ré cie u x ,
envoyés de Paris pour meubler une maiion n e u v e , ne fon t
pas o u ve rte s, on fe contente d’indiquer leur nombre.
Le M arquis de C abris avoit un mobilier d’environ 80000
l i v . , fur lefquelles il devoir encore 11,000 liv. , payées de
puis par la C u ratrice elle-même. Le Notaire affirme à la clô
ture de fon procès - v e r b a l, que tout ce qui efl inventorié
n 'excède pas la fom m e de 2400 liv. ( j )
tere , im prim ée en 1 7 S 4 , page 3 1. M 4 S e y t r c , n é dans la plus grande
obfcuritc
,
fa u x pa r caraclère
j
facrijïa n t tout à l ’intérêt
,
également con
nu & élevé, par f e s intrigues & celles de f a fem m e, à la charge q u i l f a i t .
Iis font aujourd’hui dans la m eilleure intelligence.
( 1 ) O u t r e les meubles conficlérables que le M arqu is de C a b ris avoit
acheté à L y o n Si à M atfeille,, il en avoit fait venir de P a n s , c o m m e o n
�13
Les A rchives du château renfermoient trois fortes de
titres ; les titres de noblefle de la famille , les charrricrs
des terres , les titres de recouvrem ent &
de décharge.
L e repréfentant de la Curatrice obferve qu’il feroit trop
lon g de décrire ces papiers. T o u t eft confondu & entafle
d.ins les armoires.
Le Notaire appofe fon fcellé fur les
ferrures, à la réquiiiticn des parties. C e fcellé cil depuis
brifé parla C u ra tric e , qui s’empare de tout fans defeription,
(ans inventaire. .Les titres d’une famille ancienne & n om breufe , font aujourd’hui difperfés ou a n éa n tis, £c cette
perte eft irréparable, (i)
Le M arquis de C abris apprit à A i x ces invaiions rui~
neufes. Il demanda que la p e r fo n n e , celics de fa fe m m e ,
de fa filîe, ÔC fes b ie n s , fiiilent mis fous la fau ve-g ard e
du Parlement. M a is le Bailli de M irabeau n ’étoit plus à
GraiTe, il étoit revenu à A ix . Sa demande ne fut pas écourée>
C ep en d a n t on inftruir fur l’appel. N o u v e l interrogatoire
devant un Confeillcr-Commiil'aire. Les réponlcs du M arquis
de Cabris font un m onum ent de fageile , non-feulem ent
vient île l’annoncer. La M a r q u ife de C a b r is produit en ce m om en t un
m ém oire du fieur B r e n e t, & une trania& ion paifée entre lui &
le iïeur
V e r o n , fondé de la procuration de la curatrice , devant M<= Bricliird <?c
fon contrère , N o ta ite a u C h â t e l e t , le 2.0 M ars 1 7 7 9 ', par lefqael* il eft
1
conftaté que le M arq u is de Cabris avois déjà paye une f o m m e d e 4 6 ,6 9 6 .
8 fols fur les m eubles com m andés 6c en v o y é s, & q u e la cu ra tric e, en
arrêtant l’envoi de ceux qui n’étoient pas en vo yé s, a p.iyc e lle -m êm e
9 898 liv. 9 fols 4 clen. pour reftant de com pte avec les founiifïcurs. L es
quittances font jointes à la tranfaétion. L a curatrice par ce paiement défi
n i t i f , a reconnu exprelfément l’exiftence de ces meubles. 11 faut q u ’elle en
rende com pte. L ’inventaire fait par elle , eft d ’une infidélité qui épouvante.
( 1 ) La M a r q u ife de Cabris a rendu plainte par-devant le C o m milfaire Ninin ,
le 15 M a i d e r n ie r , de ce bris de f c e l l é , conftaté
�«4
fur les a&ions de fa v 'c p riv ée , mais m îm e fui- des détails
relatifs à l’adminiftration de fes biens. («)
Il n’avoit e n c o re , dans cette fituation c r u e l l e , que les fe-
cours de fa
fem me. C ’étoit à la préfence de la femme
qu’on attribuoit la force de fa railon & de fon courage.
»4 ievrier 1778.
Six jours après fon in te rro g a to ire , pendant la n u i t , *
deux heures du matin , une brigade de M aréchauilee s’in
troduit jufques dans fa c h a m b r e , &C là , en vertu d’un
ordre M in iflé n e l, d o n t il demande ÔC dont on lui refuie
la com m unication ,
fon époule cil arrachée de Ion l i t ,
conduite à S iftcro n , dans la haute-Provence , ôc renfermée
R ï Q U Î T f RÉPON
D U ! le i j
F é vr ie r .
dans le couvent des Urfulines.
Le lendemain , le M arquis de Cabris rend plainte de
cet enlèvem ent ; il redemande fa femme : fa R equête eft
jointe au fond.
Il découvre la retraite de fa fe m m e , il veut la lu iv re; '
A r r ê t du 16 Fé
v rier 1 7 7 8 .
j
Mars 17VS.
P r o c è s - v e r b a l de
au m om ent où il va m onter en v o it u r e , un Huillier lui
iigniHe A r r ê t , qui lui défend de lortir de la v i l l e ; A rrêt
,
,,
,,
,
r
,
l’HuiiTier, qui arritc o b t e n u a v a n t 1 e n l è v e m e n t d e io n e p o u l e , m a i s t e n u
lebrisMarquis
de Caen vertu
de S E C H H T , & ré le r v é p* o u r la c irc o n il a n c e . L e m ê m e H uiiîicr
[•Arrêt
vncr’
du 16 ii-
un Cavalier de MaréchauiTée s'attachent à les p a s , Sc
le gardent à vue jufques dans fa chambre.
Le 7 M a rs , la D em oifelle de C a b ris, en vereu d ’un autre
A rrêc, cil enlevée à ion p è re , jouiil'ant encore de tous les
par les deux procès-vet baux fucceflîfs du m êm e N o t a i r e ,
du 16
lanvier
Te premeir
177S , ôc le fécond fait eu vertu d'un A r tê t du Par
lem ent de P a r is , au mois d 'A v r i l dernier , &
encore par le certificat
du m êm e N o t a i r e , picces jointes aux procès-verbaux faits en l’Hôtel
du L ie u te n a n t-C iv il.
( 1 ) Cet
interrogatoire eft
M a r q u ifc dé C a b r iî ;
L i t s en l'H ûtei.
im prim é
au prem ier M é m o i r e de
c'eit une des piècts jointes aux
p r o c è s -
1*
verbaux
�15
droirs , de route Ton autorité , pour être remife entre les
mains de la D am e de Lombard.
Privé de fa fem me &C de fa fille 3 l’infortune pouvoir
encore influer fur le jugem ent par fa feule préfence. O n
l’engage à retourner à Cabris , on lui promet que le ju
gem ent fera fufpendu.
Il
part dans les
premiers jours
d ’A v r i l, efeorté d ’un EmiiTaire de fa mère. Auffi-tôt après
fon départ (i ) , A rrêrq u i confirme la S en ten c ed ’interdictioiî.
Les attentats s’a c c u m u le n t, & ce qu’on va lire eft plus
affligeant encore.
La manière dont cet A rrê t a été e x é c u t é , doit révolter
l’ame la moins fenfible. T o u te s les preuves font au procès :
il n’eft pas un fait qui puifle être révoqué en doute.
L a dame de L om b ard , cu ratrice, va déformais exercer le
pouvoir le plus abfolu fur la perfonne & fur les biens de
Ton fils, &: fur la perfonne de fa petite-fille.
Son fils , le M arquis de C a b r i s , eft enfermé dans un
coin de fon château , confié à la furveillance d ’A l z i a r i ,
père du Procureur de la D a m e de L om bard.
lier
du Marquis de Cabris , le
Ce Geô
livre à deux
traveftis en dom eftiqu es, qui le l i e n t ,
payfans
l'e n c h a în e n t, le
frappent du poing &. du bâton au gré de leurs c a p ric e s ,
& l ’on connoît le caprice des valets tyrans de leurs maîtres.
A u furplus , ces tyrans à gages étoient aiïez bien gages :
A lz ia ri
avoit
1 100
livres
par
an ;
les
deux
valets
150 liv. c h a c u n , c ’e f t - à - d ir e , plus du double des gages
ordinaires en P roven ce, (x)
(0
.
.
..
9 A v r il
„
1778.
■
'^■*^1
1
_______
^
5
(1) Eft il befoin de dire q u ’ils étoient au furplus n o u r ris, loges «f
�i6
O n prodiguoit au c a p tif les alimens les plus contraires
à fa i a n t é , le c a f é , le c h o c o l a t , les liqueurs fo r te s , roue
ce qui pouvoir enflammer fon fang & irriter fes nerfs. H
efl: rd té lix années dans cet é t a t , fans l i n g e , fans vêtem ens,
(i) fans m eu b les, fans rem èdes, & fur-tout fans plaifirs ,
(ans diftraction , fans lib e rté , le meilleur , &. peut être l’u
nique remède de la maladie. (2)
Les fenêtres de fa cham bre étoient grillées ; il vouloit
écrire , il aimoit la le£ture ; on éloignoit de lui plum es, pa
pier , encre & livres ; il aim oit fa fille , il a vécu quatre ans
ians la voir ; on a poufle l’infouciance , il faut le dire ,
l'in h u m a n ité , jufqu’à le faire coucher fans draps. O n fupprime plufieurs détails qui blcli'eroient les oreilles délicates.
__ ____ •
vêtus ? A lzia ri faifoic quelquefois à fon maître l ’honneur de l’adm ettre
à fa table.
( 1 ) L a garderobe la m ieux fournie avoit été difperfée. l o r s de la
tranilarion du m alade de Provence à P a r i s , on verra q u e
l’ Ofrici<»r
chargé des ordres du R o i , a été obligé d ’attendre q u ’on eût fait le
feu l habit apporté pat le M arq u is de Cabris ; cela ne doit pas étonner;
les habics de la M a r q u ife de C a b ris e l l e - m ê m e ,
ne
fo n t - i l s
pas
devenus la proie d e i fervantes J e fa b elle-m ère ?
( z ) C e s mauvais traicemens fo n t prouvés par la déclaration d e la
C o m m u n a u t é de C a b ris , & par fept dé^Fàrations particulières. Elles font
annexées aux procès - verbaux des aflemblées de parens faites ch ez le
Magiftrat.
La M a r q u ife de Cabris d em an de depuis lo n g tems à faire
de tous ces faits odieux , une inform ation publique , fa belle-m cre s’y
o p p o f e , Oc pourquoi ? Sans doute parce q u 'e lle fuppofe cette preuve
furabondante &
inutile. N ’a - t - e l ! e pas avoué dans ,fa réplique fo m -
m aire de 68 pages , page 48 , q u ’ il étoic qu elq u efo is néceifaire de
contraindre , de gêner Us m ouvcm ais de fon fils ? Elle le com pare à
Ch a rles V I .
Sa
�»7
Sa p e t i c c - f i l l c l a dcmoifellc de C a b r i s , unique héritière
d ’un nom d iilin g u é , 6c de 50,000 livres de ren te, eit dans
un Couvcnc de G r a ile , à 200 livres de peniion, ians G o u
vernance; ion éducation fuc un M aître d ’Ecriture pendant
trois mois feulement : ion inftruclion , tous les propos qui
pouvoient cendre au mépris de Ton père , 6c ion amuf'em en t, le récit journalier de calomnies inventées concrc /a
mère. Sa mère! il lui étoic com m andé de la h a ï r , &C ia
réiiilance à cet ordre étoic la faute la plus g rave ôc la plus
févèrem ent p u n ie '( 1 ).
Les biens écoienc adminiilrés com m e les perfonnes.
S t y t r e , Procureur du M arquis de C a b r is , & qui l ’avoit
fi bien d é fe n d u , cil d ’abord récom penfé de fa perfidie. Les
beaux-frères
avoient autorifé la C u ratrice à recevoir fon
com pte : ce com pte eil rendu fans d éta ils, fans pièces jufrificacives, Sc Scytrc cil reconnu C r é a n c i e r d e 60,000
livres (2).
Les crois beaux, frères fe préfencent à leur tour. Ils'fo n t
fervj par Scytre qu’ils ont déjà fe r v i , 8c auifi-tôt paroît une
tranfaclion , qui porte à 260,173 Üv * ^ f ° l s 3 den. ce pré
tendu fupplément de légitim e , fixé par le teilam ent du père
com m un à Z4000 liv.
(1) Elle fut condam née à d em eu rer chaque jo u r , crcis heures , fou
i e matin , à genoux fur une tom be de l’E g life , pour avoir été trouvée
lifant un M é m o ir e de fa m è r e , parvenu ju fq u a elle. C e t t e b ifir re pé
nitence fu t interrom pue par un événem en t im prévu ; il faut l'entendre
d ire avec fa naïveté de qu a to rze ans : pa r bonheur j e tombal malade.
(2.) Sur cette fo m m e , Seytre a déjà touché 50,000 livres , &: dans un
m o m e n t de m é c o n t e n t e m e n t , la d am e de L o m b a r d a déclaré e lle -m ê m e
q u e cette f o m m e pouvoit Sc devoit être tefl:ituée:on a m ê m e dit au cou*
c
fe i l de la M a r q u i fe de C a b r i s , q u ’il ex'tftoit mie Confultacion des A v o -
�iS
U n bois de haute-futaye , ornem ent d e l à T e r r e , cft
coupé & vendu.
l e s baux font faits fous feing-privés, par anticipation, 8c
pour des prix inférieurs aux prix trouvés 6c retulés par le
M arquis de Cabris lui-même , parce que l’on preréroit des
pots-de-vin confidérabies.
Le m o b ilie r, de plus
de 80,000
livres, a difparu fans
laiiler de traces. Le pillage étoit H public , 6c le diferédic
fi grand , que les mandats de la C u ra n ice étoient refulés
à fa p o r te , (ur la place de Gralfc. D ’un côté les revenus
étoient exigés,d ’avance ; de l’autre, les droirs royaux 6c les
autres charges n’étoient pas acquittés. La Curatrice a porté
l’abandon jufqu’i donner des portions confidérabies de ter
res féodales, fans exiger I.s redevances accoutumées. C e s
libéralités fo lle s , faites à tous les parens de íes dom eítiques, privent en ce m om ent ia T e rre de Cabris de plus
de mille écus de rente.
Enfin, pour donner une idée de cette d évaftation, il fuffir
de dire que pendant fix années la C uratrice a touché plus
de 300,000 liv re s , 6c qu’elle-a fait pour plus de 300,000
livres de d e tte s, lans autre dépenie que la nourriture de
l’in te rd it, celle de
fa fem me
&
de ía íi 1ie ; 6i cette dé-
penfe , en l’e x a g é r a n t , peut être portée à 6,000 1. par an ( 1 \
La M arquiie de Cabris fut inftruitc de ce défordre , Sc
de la manière indigne d ont fon mari étoit abandonné par fa
jn e r e , & traité par les valets.
ilile d em a n d a, par requête du 6 Mars 1 7 7 5 > a faire
tars de Provence , provoquée par la D a m e de L o m b a rd , par laquelle il
«toit décidé'que Seytre pouvoir être pourfuivi par la v o y e extraordinaire.
(1)
C e t ce preuve r efa ite
du com pte d e la Cu ratrice , non pas tel
q u e l l e l ’a r e n d u , mais tel q u ’ il fera rétabli par la Juitice.
�>9
preuve des mauvais traitemens exercés fur la p e r f o n n e d e
ion mari , &. en conféquence la defticucion de la C u ratrice'
C e tte demande ne produiiit qu’une fcène qui feroic rire,
fi elle ne faiioit pas garnir.
Le Juge n’ordonne pas la preuve demandée : il ordon
ne Ion tranfport à Cabris , pour voir lui-même & inter
roger le malade.
T o u t étoit ehoifi , jufqu’à l’heure de fa vifite; il trouve
le Marquis de Cabris , rafé , p o u d ré, vêtu d'un ju fie aucorps g a lon n é,
& dînant avec la dame fa m è r e , le M é -
drein &. le C h iru rg ie n ; ces trois perfonnages croient ar
rivés la veille.
L e Juge
interroge gravement l’h om m e
quoique mois auparavant
qu’il a déclaré
inienfé & h y p ocon d riaq u e,
&
rellulcitant pour un in fta n tlc même hom m e d ont il avoit
écliplé l’e x iile n c e , il écrit gravement que le M arquis de
C abris a répondu «' que la dame fa mère l’a toujours beau•>■
> coup c h é r i , qu’il n’a jamais été aband onné, étant au« contraire très-bien fervi par tous fes d o m eiliq u es, v ê tu ,
» logé
nourri com m e il le defire ; q u ’il voie avec le
» plus grand plaifir le lieur A l z i a r i , h om m e de confiance
» de la dame fa m ère, qui a bien des attentions pour l u i ,
» i l avec lequel il fe promène & converfe.... ôc que iur»> tout, i l ne s ’ étoit jam ais fo u cié de la dame fo u époufe »>.
L e Juge ajoute que le M arquis de C abris ayant dem an
dé de charger ce procès-verbal de tous ces faits , s’eit retiré.
Et pourquoi n’a-t-il pas figné ? Q u ’on pardonne cette
queftion à l’empreiTcmcnt qu on lui fu ppofepour faire conftater des réponies fi affirmatives &. fi fages.
C ette comédie finie , le Juge déclare la M arquife de Ca>
C ij
�so
bris non-recevable dans fcs demandes (i). E n vérité , tant
d ’appareil étoit inutile pour le jugem ent.
A p p el au Parlem ent d’A ix ; le 27 Juin f u i v a n t , A r r ê t
qui confirme la Sentence (2).
»
O n dira ptut-êcre que la dame de L o m b a rd , fi elle a
prodigicufcm ent influé fur la Sentence de G r a d e , n’a pu
ni difpofer ni m otiver l’ A rrêt du Parlem ent d’Aix.
C e la eft vrai : la dame de Lombard étoit à G r a d e ; mais
le Bailli de M irabeau étoit à A ix ; mais le Bailli de M ir a
beau ne prenoit la peine de cacher ni Tes démarches , ni
fori influence ( 3 ). Il avoit dit qu’il feroit enfermer fa nièce
dans la plus étroite prifon , q u ’ il avoit à cet égard tous les
pouvoirs de fon père. Il s’étoit m ontré publiquem ent le
lolliciteur 8c le miniftre de l’ordre du R o i , qui la tenoit
réléguée a u C o u v c n t .d e Sifteron.
Il avoit été plus lo in : le 16 A v r il 1779 , il a voit écrit
à la Supérieure de ce C o u v e n t , q u i l avoit reçu une pro
curation du M arquis de M irabeau , fo n frère 3 laquelle lu i
donnoit tous Us pouvoirs paternels f u r la M a rqu ife
de
Cabris , q u i, n étant plu s fou s la puijjance de fo n mari >
[ 1 ] O n ne peut fiippofer avec q u elqu e raifon q u ’ un m o t i f à cette Sen
tence. Il eft dans une C o n fu ltn tio n d ’ un A v o c a t d ’ A ix , [ M c Gaflîer ]
iîgHifice c o m m e pièce du P r o c è s ; fuivant l’uiage de ce P a r le m e n t , le
Confulran t y
décide qu e la M a r q u ife de Cabris étant enferm ée pat
ord re du R o i t étoit incapable d ’agir.
[2 ]S en ten ce du 1 7 M a i 1 7 7 9 , A r rc t du 1 7 Juin , pièces jointes aux
procès-verbaux.
( j ) P arm i les parens qui avoicnr déféré la curatelle , on co m p te
deux.
guet.
C o n feillers au Parlem ent d ’A i x , ( M M . de Gras <k d u B o u r -
�1I
retom bait f o u s la p u ijfa n c c de f o n p ère. En co nfçqu cnce v
ajoutant» de Ton autorité p r iv é e , quelques anneaux à la
chaîne de fa nièce , i l d éfen d o it q u e l l e eût aucu ne com m u
n ica tio n a vec le dehors ( i ) .
Q u elqu e rems après, il fc préfenta lui-même en Juftice
pour demander la iuppreilion d’un A lém oire publié par la
M a rq u ife de C a b r i s ,
5c
dans lequel il trouvoit fon nom
compromis par l’hiftoire des 30,000 1. p ro m ifes
DÉNIÉES.
L a fuppreflion fut à l’inftant prononcée. (1)
L ’opprciîîon devoit avoir un terme. Les plaintes de la
M arqu ife de Cabris ont frappé les oreilles du M on arqu e.
U n M agistrat refpectable ( M . L enoir , C onfeiller d’E t a t )
a été chargé d eclairer les motifs de fa détention. Elle a
fait parvenir à fon Juge , un Journal com plet de routes fes
a l l i o n s , depuis fon enfance jufqu’à fa captivité. Sur cette
( 1 ) L ettre du Bailli de M ira b ea u , du 1 6 A v r i l
1 7 7 9 , déjà
im
primée.
(z) C ’eft dans cette R e q u ê te q u ’il articuloir trois faits intéreflfans j
i ° . que la conduite de la M a r q u ife de Cabris avoit nécellité la demande,
en im erdidtion de fon mari j z ‘\ que la M a r q u ife de C a bris s’étoic
procurée un tcftam em
avoient été difeutées
de fon m a r i , d on t les d ifpofitio ns, d i f o i t - i l ,
lors de
l ’Arrêe du Parlem ent de Provence ; 30. Sc
enfin que la M a r q u ife de C a b ris avoit furpris des procurations
à fon
mari. C e s trois faits, dont la faulfeté eft évidente & d ém o n trée, fe trou
vent répétés m ot-à-m ot dans le Réquiiitoire de la dam e de L o m b a r d fait
en l’hôtel du M agiftrat, avec cette différence cependant q u ’elle avoue que
le teftament de fon fils étant m y jlïq u e , Tes difpoiitions n’ont pas pu ccre
difeutées. C e t t e obfervation n ’efl: faite ici que pour m ontrer un des filsqui lient entr’eux les m em b res de raiiociation.
�22
juilification , jufqu’à préfent inouïe , (es fers ont ¿té brifés
dans le mois de M a i 17 8 1.
L ib r e , clic eft venue fe profterner elle-m êm e au pied
du T r ô n e ,
pour
y dépoier tous les
Jugemens
rendus
co n tre Ton mari.
L e 8 Février 1783 , A r r ê t du C on fe il d’E t a t , qui ordonne
Vapport de toute la p rocéd u re, 6c des motifs de l’A r r ê t d u
P arlem ent d’A ix .
A cette n o u ve lle , la cabale fr é m it , s’a g it a ,
&
vou 'u t
calom nier encore : il cft prouvé par une D é lib é ratio n de
la C o m m u n a u té de C a b ris , ( 11 A v r il 1783 ) que l’hom m e
d e c o n f i a n c e de la dame de Lom bard a préfenté deux fois
aux H abitans allêmblés , un certificat à iigner , 5t que
deux fois les Habitans o n t refufé de figner ( 1 ) , malgré
toutes les modifications employées pour les y décerminer.
L a Juftice eut cette fois un libre cours. Le 15 A o û t 1783,
A rrêt du C on feil des D é p c c h c s , Sa M a jcité y étant , d o n t
voici les propres expreilions.
T o u t confidéré : oui le rapport, le R.oi étant en fon
i> C o n f e i l , en préfcnce ôi de l'avis deldits fleurs C o m « m iflaires, a caiTé, annullé , caiTe Sc annuile la Sentence
« du x i Janvier 1 7 7 8 , êc tout ce qui a pu s’enfuivre 5c
>3
s’en eft enfuivi , notam m ent les O rdonnances rendues
>• le 14 Janvier 1 7 1 8 , &: celui du 17 Juin 1 7 8 0 ; ordonne
(1) Pièce jointe aux Procès-verbaux. Il eft prouvé par la Déclaration
particulière du C o n f u l de ce t e m s , qii’on avoic em ploy é auprès de lui
les injlances 6c les menaces , pour obtenir quelques fign.’. tures feparées.
A ttcft.u ion particulière du C o n f u l de la C o m m u n a u t é de C a b i i s , jointe
aux Procès-verbaux.
�23
« que le ficur c’c Cabris fer.i transféré , de l’ordre de Sa
’» M a j cité ( i ) , en la m aifon d u ficur M a fie , à la V iJ lcrtc,
» près P a r is , où il fera libre aux dames de Cabris , bellc’ » mère 2c belle-fille , de lui donner égalem ent leurs foins,
v La demoiielle de Cabris fera pareillement transférée, de
v Tordre de Sa M a je ité , au C o u v e n t
de Bonfecours à
» P a r i s , ou Iciditrs dames pourront égalem ent la voir. Les
>• frais néceflàircs pour leidites deux tranilations , préalav b lcm en t pris (tir les biens dudit fieur de Cabris ; ordonne
m auffi qu’à la R equête de la plus diligente des deux dames
» de Cabris
il iera c o n v o q u é , pardevant le L ieutenant-
» C iv il du C h â ie lc t de Paris, dans le m o i s , à com pter du
» jour de la fignincation du prélcnt A r r ê t , une aflcmblée
*• des parens ù amis du ficur de C a b r is , dans laquelle lef» dites dames de Cabris pourront fe trouver , 2c même
» form er telles demandes qu elles aviferont ; lors de laquelle
m aflem bléc , lefdits parens 2c amis prendront connoiflancc
» des enquêtes refpe&ives , du rapport des M éd ecins 2c
» C h iru rg ie n s , s’il cft o r d o n n é , pour donner enfuite leur
» avis au fieur Lieutenant-Civil du C h â te lct de P a r is , au»» quel Sa M ajeité a attribué , f a u f L'appel au Parlement
» de Paris y toutes C ours , Juriidi& ion 2c c o n n o iiià n c e ,
» icelle interdifant à ics autres C ou rs & Juges, 8c jufqu’au
« J ugem en t, toutes choies d’ailleurs demeurantes en état.
« Fait au C on feil d'Etat du R o i , Sa M ajefté y étant, <Uc. »
(r) C ’eft l’ex é:u tion de cet ordre fonverain que la, d am e de L o m b a r d ,
paçe 54
de fa réplique fo m m a ire de 68 p .^ e s , &
à plulïeuri autres
endroits , exprim e ainli : E lle ( la M a r q u ife de C a b r i s ) f i t enlever fort
mari avec précipitation par la AJardihauJJ'ee.
\
�24
C e t A rrê t a été fignifié le 17 Septembre f u i v a a t , à la
dame de L om b ard ; fie voici com m ent il a été exécuté.
Le Marquis de C abris a é t é - remis entre les mains de
rOiHcier chargé de l’exécution de l’ A rrêt du C onfeil s avec
un foui habit fini la veille de Ion d é p a rt, 19 c h c m ife s ,
un chapeau déchiré &C des boucles de fer. La dame de L o m
bard avoit refuie le linge & l’argenterie néceiîaires. A u
m om ent du d é p a r t , l’Oflicier demanda quel domeitique
étoit plus agréable au M arquis , vingt voix crièrent enlem ble : pretie^ L a u r e n t, i l n’ a jam ais battu M . le M arquis.
P endant la r o u te , l’Officier fut obligé de lui prêter des
bas
des mouchoirs. ( 1)
r
(1) C e s faits font prouves par le procès vetb.il de l’O f l i c i e r , & ils ne
font pas conteftcs.
V o i c i co m m e la D a m e de L o m b a r d exeufs cette petite négligence ,
page 43 de fa R é p o n fe fo m m a a e en 68 pages : après avoir f a i t publier fort
triomphe dans Us G a le tte s É trangères ; E lle ( la M arq u ife de C a b ris )
arrive en Provence : un nommé M artin , f e difant Commiffaire chargé
des ordres du R oi , efeorté de la M arichauffée , enlève à l ’improvifle ,
avec fra cas & fcandale , mon f i l s & ma p etite-fille , fans permettre que
j e les garde une fe u le nuit 3 & que je fa ffe fa ire leurs malles. ( Et par
une note au bas de la page ; ) i l refulta de cette précipitation du nomm é
M artin , que mon f i l s f u t enlevé fa n s fies habits & fo n linge. J ’ avois
cru que c ’ étoit pure étourderie. J ’ ai vu pa r le mémoire de ma belle-fille ,
qu’ il y avoit un defjein prém édité. O n n ’ a pas voulu f e donner le temps
de lui fa ire f e s m alles j & on m ’ accufe aujourd’ hui de l ’ avoir laiJJé man
quer de tout y parce qu’ on n ’ a rien voulu emporter.
V o u s obferverezj s'il vous plaît , q u e le M arq u is de C a b ris a féjourne
3 6' heures a GraiTe j q u ’il y a vu fa m ère 3 8c q u e depuis le mois de
Septem bre 178 5 , depuis plus de Jeu x a n s , ces malles
11e fo nt pas
encore faites ; que la D a m e de L o m b a r d n’a jamais rien d on né à fon
fils j qu i n a du alors fon exiftencc q u ’aux fccours de fa fem m e.
La
�*5
L a D em oifclle de Cabris ¿toit encore plus mal pourvue.
E lle eft arrivée à Paris avec quatre chcmifes , deux m ou
c h o irs, deux coëffes de nuit , & une robe d ’indienne.
O n devinera fans
peine que l’O ffic ie r ,
co n du & eu r du
M arquis de C a b r is , ne put pas obtenir un fol pour les frais
de tranilation , malgré la difpoficion de l’ A rrêt du C onfeil t
qui ord on n oit que cette dépenfe ferait préalablement prife
f u r les biens du transféré.
E t co m m en t la D a m e de Lom bard auroit-elle donné de
l ’argent ? E lle n’en avoit pas ; &L telle étoit fa fituation
journalière au milieu du pillage que fon incapacité abfoluc
rendoit inévitable ; elle n’en a voit pas au m om ent où fes
ailociés l’a r r a c h o ie n t, com m e elle le dit e lle -m ê m e , de
fes f o y e r s , pour la traîner dans cette Capitale à la pourfuite de leur vi£fcime.
L a D a m e de Lom bard s’eft d onc décidée à quitter G raffe,
pour venir à Paris demander une fécondé fois l’interdic
tion de Ion fils , devenue pour elle &c pour les agens , le
feul m oyen de voiler les iniquités com m ifes.
A v a n t de partir, elle donna la procuration la plus étendue
à Mc G a y te , A v o c a t à G r a fíe , pour régir & adminiftrer en
fon ablcnce. (i)
D a n s l’écat des chofes , cette procuration étoit fort inu
tile : au moins A lziari ne devoir pas la regarder com m e un
a & e férieux. Il avoit lui-même fervi de tém oin à la rédac
(i) Procuration de li D a m e de L o m b a r d en faveur de M e G a y t e ,
fo n A v o c a t à G-aiTe , du 18 O f t o b r e 1 7 8 5 .
à la R e q u ê te de
Elle eft jointe ( N °. 1. )
la M a r q u ife de C a b ris , répondue
le
z 1 O ûobre
1785.
D
�i6
t i o n , & cependant malgré cette procuration faite fous fes
y e u x , il recevoit des Fermiers tout
ce qu il pouvoit les
contraindre à payer , & d onnoit audacieufement quittance
en fon nom . C e s quittances font produites, (i)
D ’ un autre côté , Seytre , malgré l’A rrê t du C onfeil
qu’il c o n n o iifo it, & qui anéantiiloit la curatelle 8c tous les
a&es de la curatelle , m ettoit la main fur la portion la plus
Jiquide des re ven u s, en vertu des délégations à lui faites
par
la C uratrice , n’attendant qu’un lignai
pour
faiiîr
le r e f t e , com m e on va le voir , en vertu des engagemens
qu’il avoit lui-même fait contra& er au M arquis de Cabris.
Seytre , G a y te , A l z i a r i , T riu m virat fu n e fte , fpoliateurs
fu b a ltern es, toujours divifés par leur intérêt perfonnel ,
mais toujours unis par la ilupidité de la Curatrice , & pour
la ruine de fon fils.
D a n s ce d éfo rd re, il étoit tout iimple que la D a m e de
L om bard n’eût pas d’argent au m om ent de fon départ. Pour
en avoir , elle a exigé d’avance les revenus de fon fils ; elle
a mis en gage l’argenterie de fon fils ; elle a vendu les bou
cles d’or de fon fils, (i)
(i)
V o y e z N ° . 1. des pièces jointes à la R eq u ê te , ci devant datées.
Q uittance du premier D é c e m b r e 178 3 , par A l z i a r i , fe difant chargé
des pouvoirs de la D a m e de L om b a rd .
(1) O n l’a vu arriver à Paris avec des boucles de fer. L e fieur R a bu is,
O rfè v r e de G ra lfc , a acheté les boucles d ’or : ce fait a été avouvé p arla
D a m e de L om ba rd , en préfence du M agiftrat & des parens aiTemblés
en
1H ô t e l ,
en D é cem b re 1 7 8 3 . A
l’égard de la vaiiïelîe , elle a aiTurc
qu elle n etoit pas vend ue , mais elle a avoué q u ’elle l’avoit m ife en
gage*
�17
C ’eit ainfi qu’elle eft venue dans cette C a p it a le , pourfui-
vre 1 état &. Ja pcrfonne de fon fils , avec le prix de Tes bou
cles d’or , de fon a rg e n te rie , & les revenus de fa T erre .
Elle l’a vu à Paris. Elle a vu fon fils , elle a vu fa petitefille réduits au plus iimple néceffaire , que leur époufe &
m è r e , épuifée par les dépenfes continuelles de fafituation ,
n ’avoit pu leur fournir qu’en recevant elle-m êm e des fecours de fes parens & amis , en com prom ettant fa dot. Elle
les a vu fubfiftant à crédit dans les maifons où les ordres du
R o i les avoit placés. Elle avoit 24,000 liv. dans fon por
te-feuille, & elle ne l’a point ouvert pour offrir à fon fils ,
à fa petite-fille, la plus foible partie de cette fom m e qui leur
appartenoit.
Jufqu’ici nous avons raconté des faits déjà publics ; la
narration a été rapide , parce que ces détails écoient inutiles,
Rcfpirons un m om ent.
N o u s allons e n tr e r , avec toutes les P a r t i e s , dans le C a
b inet du Lieutenant-Civil , où l’A r r ê t du C o n fcil a fixé le
T rib u n a l. La fcènc va changer fur ce nouveau théâtre. Le
même intérêt agitera tous les efprits ; mais les A £ e u r s &
les moyens von t fe multiplier. En P roven ce , on a voulu
faire interdire le M arquis de Cabris pour le dépouiller : à
P a r i s , on voudra le faire interdire encore pour cacher les
dépouilles conquifes , Sc pour en conquérir de nouvelles.
O n alléguoit en P rovence une dém ence iim u lé e , qu’on a
tenté de rendre réelle par tous les excès qui peuvent être
com mis fur 1111 efprit f o ib le , & iur un corps débile. A Paris,
l’on voudroit juftifier la tyrannie par fes propres effets , Sc
D ij
�réalifer la démence qui n ’exiftoit pas , par celle dont on
a voulu forcer l’exiftçnce.
C haqu e com p lot fera dirigé par la m ême main 5 chaque
fil fera conduit par le m êm e reiTort ; 5c tandis que la D a m e
de L o m b a r d , aveugle Sc croyant ne fauvcr que fes fautes
perfonnclles , s'efforcera de défendre les rapines de fes fu balternes ; elle protégera auiTi, fans le favoir , le projet
des chefs de parti ; ce p r o j e t , plus im portant que tous les
a u tre s, d’un mariage qui enchaîneroit la fille & les biens
dvi M arquis de C a b r is , Ôc dont l’âge de la D e m o ife lle de
Ç a b :is com m ençe à preiler l’çxécution.
L a M arqu ife de C a b ris va prononcer un nom plus refpe& able pour elle que tous les autres , le nom de fon père.
L e Marquis de M irabeau, q u is ’eft caché jufqu’à préfent , v a
paroître malgré lui. Elle refpe&era fon père.
JufquW ce
m om en t n’a-t-elle pas exagéré le rcfpeét ? En racontant
les attentats com m is fur fa p erfonne, les calomnies débitées
contre fon honneur , toutes les perfécutions dont elle a été
l'objet , n’a-t elle pas gardé le filence fur ce qui pouvoit cq
déceler l’auteur ? M a is après avoir vu fucceifivement in
terdire la M arqu ife de VaiTan , fon a y c u lc , & le C o m te de
M ir a b e a u , fon fr è r e ; après avoir vu des ordres miniflériels
enchaîner fucceifivement fa mère , fon frère , elle-m êm e ;
lorfqu ’on attaque fous fes yeux Tcxiftence de fon m a r i ,
l’état de fa f i lle , & l’honneur de fa jpoftérité , elle d o it
parler avec courage ; heureufe encore de pouvoir témoi
gner fes égards , en ne parlant de fon père que pour m o n
trer les écrits émanés de la main de fon père.
Les 10 D é ce m b re 1783 , 1 5
5c 1 4 J an vier, 5c 5 F évrier
�19
1784 , les parens & amis furent afTcmblés en I’H ô te l du
Lieutenant C iv il. La dame de Lom bard portant en main dixhuit procurations de dix huit parens qui avoient déjà donné
leur vœu en 1 7 7 7 , pour l’interdi& ion de Ton fils 8c pour
fa c u ra te lle , dem andoit d ’abord que Ton fils fût interrogé
d e nouveau , 6c que les perfonnes 6c les biens fuilent
dépofés entre fes mains , par fuite de la curatelle qu’elle
prétendait fubfifter encore.
Les parens aiTemblés lo n t
d’avis unanime qu’il faut
accorder du repos ôc des fecours au M arquis de Cabris
pour réparer fa f a n t é , ôc fur-tout cette foiblefle a ctu elle,
luite
des mauvais traitemens exercés
fur
fa
perfonne
pendant la cu ra te lle , ou plutôt pendant fa c a p tiv ité ; que
la dame de Lom bard doit rendre com pte de fa g e f t i o n , 6c
qu’il d oit être établi fur les biens une adminiftration provifoire. Sur le refus verbal de la M arquile de C a b ris , des
parens défignent unanim em ent pour R égi fleur M c C o u r t ,
Procureur au Parlem ent d’A ix . A u fîî-tô t, & à la première
vacation du 10 D é ce m b re 1 7 8 3 , M e Eoulard eft nom m é
Séquellre par O rd o n n a n ce du J u g e , rendue fur l’avis des
parens.
L e M arquis de C abris effc interrogé deux fois. A travers
quelques é c a rts , on voit un cfprit tantôt a i g r i ,
tantôt
accablé par la contrainte & la pcrfécution. 11 eft vifîie
par les gens de l ' A r t , 6c leurs rapports donnent Pcfpo ir
d’un ré tabliflem en t, qui déformais ne peut être que l’o u '
vraee
du tems ôc des foins alfidus.
&
Sur le t o u t , intervient une Sentence en la C h a m b re du
C o n f e i l , le 6 A v r il 1 7 8 4 , qui furicoit à faire droit fur
la dem ande en in te rd ic tio n , n o m m e , de l’avis de parens,
�3<>
le (leur C o u r t , RégifTcur, à la charge de verfer les deniers
dans la caille de M e B o u la r d , déjà nom m é S éq u eflre;
ordonne que le Marquis de Cabris fera de nouveau vifité
in te rro g é ; 2c fur les offres de la dame de L o m b a r d ,
qu’elle fera tenue de rendre fon com pte devant M e Boulard
p è r e , ancien N o t a i r e , pour être com m uniqué aux parens
6c amis raiTcmblés.
L e plus difficile étoit de faire exécuter cette Sentence
en
Provence.
O n devine
co m m en t ce ju g e m e n t , qui
dép ou illot la D a m e de L om b ard de toute adminiflrration,
devoit être accueilli par ceux qui adminiftroi e n t , ou plutôt
qui pilloient en fon n om 6c à fa place. Les m oyens de
fufpendre
au moins cette
e x é c u t io n , ne laiiïoient que
l’embarras du choix. Ils étoient offerts par les circonftances,
ou plutôt par les fuites de la mauvaife adminiftration.
La C u ratrice j tout en percevant régulièrement 6c d’avance
les revenus de fon f i l s , avoit retardé depuis deux ans le
payem ent de toutes les charges , même des droits royaux,
0 des im portions de la N oblejfe de laProvince.
Les Réceveurs
avoient formé des faifics iur tous les biens du M arquis de
Cabris.
C e n’écoit point aiïcz : la main levée de ces faifies ne
tenoit qu’au payem ent de fommes peu co n fid érab les, ôc
cette main-levée donnoit une activité libre à l’adminiftration provifoire ordonnée par la Sentence du Châtelec.
V o ic i les trois beaux-frères du M arquis de C abris qui
fe p réfen ten t, & qui form ent auffi des faifies générales'^
en vertu de la tranfaclion pajfée entr eu x
0
la Curatrice,
de cette tranfaclion qui leur d onnoit fur les biens de l’in
terdit près de cc n t mille écu s, pour un prétendu, fupplément
�31
de légitime ¡ f a t par le T cfta m e n t du père commun., à 24,000
liv r e s , & doublem ent acquitté en 1 7 7 5 , par une iomme
de 60,000 liv., donnée par le M arquis de Cabris lui-même ,
fous 1’aiKoriiation de Stytre , ion curateur.
C e n’étoit point alTcz : la main-levée de cette iaifie ne
' tenoit qu’à la dém onitration de l'invalidité du titr e , ÔC ce
titre étoit anéanti avec tous les effets de la curatelle , p a r
l*Arrêt d u C o n feil du 15 Août 1783.
V o i c i Seyrre , cet ancien C u ra te u r, cet ancien C o n fc il,
cet ancien Procureur du M arquis de C a b r is , A g e n t Ôc
déferteur de la conspiration , traître aux oppreil’e urs & à
1’ o p p rim é , iuivant la circon ilance &
fon intérêt ;
voici
Seyt&c qui raflcmble toutes les créances ( 1 ) q u ’il a fait
co n trafter lu i-m ê m e au M arquis de C abris , pendant fa
m in o r it é , com m e fon curateur; qu’il lui a fait ratifier en
majorité , com m e fon C o n fc il ôc fon Procureur ; qui ,
devenu Procureur des créanciers , forme auili en leur nom
des faifies générales fur tous les biens de fon ancien pupille,
de ion ancien client.
O n a pouflë plus loin l’oubli de toutes les bie.nféanccs.
Sur des biens enchaînés par tant de faifies, la M arquife
de Cabris ne pouvoit obtenir les moyens de faire fubfifter
( j ) Parm i
les calom nies débitées contre la M arq u ife de Cabris
on l a c u if o ir , dans tous les M é m o ir e s de la d am e de L o m b a r d , d ’avoir
jeté fon inart dans une diilîpation effrayan te, &
f u r - t o u t de lui avoir
fait contracter pour 100,000 liv. de dettes. Il faut efpérer q u ’on fe
taira e n f i n , lorfque tous les titres produits prouveront que tous ces
emprunts ont été faits pendant l’abfence de la M a r q u ife de C a b ris , par
l’entrem ife & avec l’aflîftance d e Seytre, alors curateur de la m in o r it é ,
8c
enfuite c o m m e chargé de la procuration générale du M arq u is de C abris.
�3*
fou époux & fa (ïllc , qu’à force ¿'E xécu toires du C on fcii
du Roi. O n a tenté de lui enlever cette reflource facrée,
5c l’on ne peut regarder cet effort que com m e un attentat
à l’autorité royale.
Le dernier Exécutoire étoit adrefle au nom m é B o n n irt,
Ferm ier des moulins bannaux. Bonnin
refufe de payer ,
& prélcnte une Requête aux Juges de G r a d e , par laqu elle,
en expofant qu’il a payé par anticipation à la dame de
L o m b a r d , il demande que fa perfonne & fes biens foien t
mis fous la fauve-garde de la Juilicc. L a D a m e de L om bard
eft appelée en garantie ; A l z i a r i , Procureur de la D a m e de
Lom bard , eft auffi Procureur de Bonnin.
A u c u n Juge ne vouloir accueillir cette dem ande audacicu fe
p lu s
ôc folle. U n G radué monte fur le T rib u n a l , & com m e
ancien en l l abfer.ee des J u g e s , il ordonne que la per
fonne & les biens de Bonnin feront mis fous la fauve-garde
de la J u ftic e , &
fait défenfes d ’exécuter XExécutoire du
C onfeil. U n A v o c a t d ’une petite ville de P rovence , annéantit au nom de la Juftice, les Arrêts de la Juftice-Souveraine.
E t quel eft cet A v o c a t ? C ’e s t M e G a y t e , celui que la
D a m e de L o m b a rd , en partant pour P a ris , a revêtu de f e s
pouvoirs , & nom m é fon repréfentant. (i)
( i ) T o u s ces faits fo n t configncs dans une R eq u ê te préfentée par
la M arqu ife de C a b r i s , & répondue le n
O i t o b r e dernier , à laquelle
font annexées tom es les pièces juilificatives : i ° .
L es faifies faites par
les Receveurs de la capitation & des impofitions de la nobleiïe. i 9 . Les
faifies faites à la
fc
requête des b e a u x -f r è r e s d u M arq u is de C a b r i s ,
par le miniftère de Seytre
&
d ’A lzia ri. 30. Plùfieurs faifies faites
à la R e q u ê te de piuficurs créanciers du M arq u is de C a b r is , &
par
On
�33
. O n croira fans peine q u e , lié p a r 'ta n t d ’e n tra v e s, le
RégilFeur nom m é par la Sentence du C h âtelet , n ’a pu
ju fq u ’à p r é f e n t , faire entrer aucunes fommes dans la caiflc
du Scqueftre ; mais ce q u ’on ne croira pas , c ’cft que la
dam e de L om bard , fcul auteur de tous ces embarras , par
elle-même ou par fes a g e n s , s’en faiTe un moyen férieux
devant le Juge pour cenfurcr la conduite de ce R é g iflè u r,
& l’accufer d ’incapacité , de n é g lig e n c e , & peut être même
d ’infidélité.
P endant que ces chofcs fe paiToient en P r o v e n c e , la
M arqu ife dé Cabris étoit occupée d’une affaire plus im
p o r ta n te , puifqu’clle intérefloit 8c fon repos & fa tend riilc. Le mariage de fa fille, qui venoit d ’atteindre fa qua
torzièm e année , en détruifant le principal m o tif des perfe
c t i o n s , devoit en fixer le terme. L e bonheur m êm e de
-fh fille pouvoir dépendre du m om ent où s’échappant aux
mains avides qui le tendoient fur e lle , elle trouveroit dans
•fon époux le proteéleur légal de fa perfonne 8c de fa fortune.
Un
G en tilh om m e ,
eftimable autant
par fes
qua
lités que par fa naiflance , fe préfente fous d ’auguftes auf*
piccs. A v a n t d’écouter aucune propofition , le Marquis
la M arquife de C a b ris , fournis à des devoirs qu’ils on t tou
jours r e fp c & é s , exigent l ’aveu préalable de la D a m e de
L om b ard Sc du M arquis de M irabeau , leurs père 8c mère.
L ’un 6c l’autre donnent leur aveu.
le mlniftcre de Seytre &' d ’Alziari. 4 0. Et e n f i n , la R eq u ê te prefem ee,
le 1 7 M ars
178 5 , psr le miniftere d A l z i a r i , par B o n n i n , pour fe
fouftraire à l’exécution du C o n f e i l du R o i ; &
la d éfen fe du 1 1 du
m ê m e m o i s , prononcée par M c G a y te , c o m m e A v o c a t plus ancien en
l ’abfençe des Juges.
E
�34
ÀiTur^s de ce double c o n ie n t c m c n t , le M arquis
la
M arquife de Cabris en réfèrent aux M iniftrcs du R o i , qui
applaudiflent au choix d’un G en tilh om m e connu de toute
la C o u r , Si vivant pour ainii dire fous leurs yeux.
E n f in , pour donner à cet a ile important la fanction la
plus authentique 8c la plus lé g a le , pour joindre aux vœ ux
déjà d o n n é s , le vœu de la famille en tière , ils obtiennent
des Lettres- Patentes qui com m ettent M . le L ieu tenan t-C ivil
du C h â t c l e t , pour ailemblcr les parens en fon H ô te l , &£
h om o logu er leur avis fur ce mariage.
Aiais l’aveu de la D a m e de L om bard n’étoit dû qu’à fa
foibleiTe , & fa foibleiTe le récraita. C elu i du M arquis de
M irabeau n’étoit dû qu’à l’impoflibilité du refus , & il pro
fita de la foiblcfle de la D a m e de L om b ard pour tenter
encore ce p r o j e t , fi long-tem ps médité , toujours inutile ,
mais toujours caché , ôc qui le feroit encore fans un a cc i
dent qu’il éroit impoffible de prévoir.
Les Lettres-Patentes venoient d’être cnregiftrées au Parr
lem ent , lorfquc la D a m e de Lom bard forme tout-à-coup
oppoiition à l’enrcgiftremcnr ,
préfente une Requête a.u
Confeil pour demander le rapport des Lettres-Patentes. (i)
Pendant cette contcftation , ni méritée ni prévue , la
D a m e de Lombard fait entam er une négociation auprèp
( i ) La D a m e de L om ba rd a été déclarée non-recevnb!e dans fa d em an de
en rapport, par un A rrêt du C o n f e il. A u fu r p lu s , les m oyen s préfentés
jl l’appui de cette dem an de , développoient le com plot.
de
gi
L o m b a rd
inevitable ,
Conf eil
du
annonçoit
&c
15 A o û t
l’interdiétion
m co ie
toujours
1783 : elle
de
fon filsconune
exiftante ,
annonçoit
m algrc
La
Dam e
néceiTaire
l’ Arrêt
fon droit à la
du
cura
t e l l e , c o m m e inconteftable , & co m m e une fuite certaine de ce droit >
le pouvoir de marier fa petite fille , de fa propre &
unique autorité ,
�35
d e fa belle-fille , par un fieur V i a l , confident de fes pro
jets & de ceux du M arquis de M irabeau (i). Il s’adrciïa à
l ’A v o c a t , C on feil de la M a rq u ife de Cabris.
C e t A g e n t propofoic pour première condition d’exclure
le G e n tilh o m m e nom m é dans les Lettres-Patentes , & de
choifir 1 époux de la D e m o ife llc de Cabris parmi quatre perfonnes indiquées , à la tête defquel.es étoit le fils du C o m t e
de G ra ile , Lieutenant-Général d es A rm ées N avales 2).
Cetre première condition n’épouvantoit pas la M arquife
de Cabris. Sur quatre gendres offerts, on pouvoit au moins
choifir , & même on laiffoit la liberté de les refufer tous les
quatre , ÔC de faire un ch o ix abfolumenc indépendant.
M a is la fécondé étoit révoltante. O n exig eoit qu’en faveur
de ce m a ria g e , le père & la mère fiilènt le facrifîce entier
de leur fortune , qu’ils fe li v r a ie n t à la merci d’un gendre
q u ’ils ne connoilToient pas. L a négociation n ’alla pas plus
loin.
Q u elqu es jours après , le
Septem bre 178 J , la M a r
quife de Cabris étoit à M o n t r o u g c , auprès de fon mari.
Elle y reçoit la vifite de fon frère , le C hevalier de M ira
beau , qu’elle n’avoit vu que deux fois depuis 17 ans. Il
m ê m e contre le vœ u d e fa mère. L e ctoiroir-on , fi 011 11e le lifoit pas
dans un écrit im p rim é ? V o i c i fes propres expreifions : « L a Curatelle du
M arquis de Cabris appartient de droit & de f a it à la Suppliante ; ( la
D a m e de L o m b a rd ) la D em o ifelle de Cabris ejl de droit fo u s la p u iffa n ce du Curateur de fo n père ; c ’ efl au Curateur f e u l qu appartient le
droit de la marier j tant que fo n père vivra , la mère n ’ a aucune puiffance
f u r elle . elle peut être mariée f i n s le confentem ent & contre le vœu de
f a mère. R eq u ê te au R o i , i m p r im é e , page <0.
(1) L e fieur V i a l fera tout à l ’heure un perfonnage rem arquable.
(z) Le Comte de Gralfe va fe montrer aiiiïi dans un moment.
E i j
�annonce qu’il a quitté Ton R ég im en t fans congé , fa n s
l'aveu de fort pcrc , qu’il n’efl: à Paris que pour quelquesjours.
L a M arquife de Cabris ch erch oit à deviner l’objet d’un
voyage fi myftérieux £c fi précipité, lorfqu’un tiers, dont le
Chevalier s’étoit fait accom pagner , propofe de le marier
avec fa nièce , la D c m o ife llc
de C abris , pour terminer
d ifo it-il, les conteftations qui diviioient la famille depuis li
lo n g temps.
L e f o i r , la M arquife de Cabris retourne à fon C o u v e n t ;
fon frère la fuit ¿c reite à fon parloir jufqu’à n e u f heures.
L e lendemain on a trouvé dans le parloir deux papiers (i)
échappés de la poche
du C hevalier ;
l’un n’eifc com poié
que de quatre lignes ; l’autre eft une inftru£fcion de deux
pages , donnée au C hevalier fur les moyens à employer
pour parvenir au mariage projeté. Ces deux papiers font en
tièrem ent écrits de la main m ême du M arquis de M irabeau.
L a Marquife de
Cabris tient en ce m om ent la parole
qu’elle a donnée de ne faire connoîrre les intentions de
fon père que par les écrits de fon père ( i ).
Le premier n’eft qu’un rendez-vous donné au C hevalier
fon fils.
« D e u x lettres , premier A o û t 1 7 S 5
( 1 ) , font en che-
(1) Ils font joints ^ux Procès verbaux des allemblées tenues chez le
Magiftrat , à la vacation du 1 6 Septembre.
( 1 ) Elle a voulu cacher ces écrits. Son père l’a forcée de les ren
dre p u b lics.T o u s les parens ont été témoins , q u ’au m om en t où M* R o - ,
zier , reprefentant fon père , s’eft montré à l ’aiïem blée » pour y d e m a n
der ail nom de fon père q u e fa fille lui fut e n le v é e ,
elle l’a invite à
ftifpenLlre le dépôt de fes pouvoirs, S: a inftruire fon père q u ’elle poirédoic .
ces écrits, parce que cette nouvelle pourroit au moins l’en gagera la neutra
lité. M e R o zie r cil reveuu le foir m ê m e , & il
dépolé fes pouvoirs >
�~37
min pour le Chevalier ; dans la première , je çhangeois
» l’adreiTc, & défignois l’H ôtcl Sc. Michel , rue des Francs» Bourgeois , qui é to itla m aifon de M de Fourqueux , Sc
» donne par derrière au paiTage , Ichez M adam e de Failli.
» D em a in , à onze heures du matin ou environ , je paflerai
» d ’abord à l’H ô tel de T o u r a in e , ôc iî l'on n’y cft pas,
»> à celui de S c . M ich el des Francs-Bourgeois, u
Le fécond écrit eil une note inférée dans ce billet ; cette
note cft fans date.
« D e m a n d e r d’abord fi l’on a quelqu’engagcm ent pris
» pour fa fille , attendu que fin s cela , l ’on a un parti à
>5 propofer.
» D ire que fon père veut l’établir ; que fatigué des dif» ficultés extérieures > & c , il lui a propofé d’époufer uns
» de fes nièces.
» Q u e , nièce pour nièce , cela lui a fait venir l’idée de
» réunir la portion de fa famille qui peut l’ê c r c , Sc ç[’é~
poufer celle qui peut lui procurer le plus d ’avantages ;
»
qu’il fait cette idée
¡f o r t
lo in
de
son
p e r .e
, à qui
» elle a été propofée.
» Q u ’elle ne lui c o n ven o it pas non plus «à lui dans ce
» fens là , qui coniiftoir à l’avoir par avis de parens , par.
difant tout haut , q u ’il n ’avoit pas trouve le M arqu is de M irabeau , &c
q u ’il étoit obligé de rem plir fa charge , difanc tout ba s, q u ’il avoit trouve
le M arqu is de M irabeau , & qu e celui ci avoir prétendu q u e ces deux
écrits ( écrits de fa main ) , croient fa u x , q u ’il l 'a v o i r m êm e chargé de
s’enferire en fa u x .
( i ) C e t t e date eft une erreur. L e C h ev alier de M irabeau i parti de
fon R é g im e n t fans congé , n’auroit pas etc un m ois fans paroîcre chez
fa feru r , objet de fon voyage : fa vifite à M.ontroiige , le î
b r e , & fes Lettres fiibféquetues le prouvent jufqu’à l'évidence.
Septem
Qu’on n'oublie pas
que l'écrit cft en en
tier de la ma>n du
Marquis de Mira
beau.
�3»
»* force de d r o it s , 8i contradictoirem ent avec la m è r e ;
>» mais qu’il lui conviertdroit de débuter dans le m onde
« par une réunion ; que fi cela ne leu r répugne p a s , qu'ils
»» s’expliquent fur le f o n d , 8c fur l’état de l’affaire dont
»> on n cl aucune notion.
»> Si on lui demande quels font fes moyens pour conci>5 cilier tant d ’efprits difeords , dire qu’il a un a m i , à la
» famille duquel il a les plus ienfibles obligations , qui fe
»J fait fort
»»
D ’ E N T R A Î N E R . L A V I E l L L E , & : d c DISPOSER. D E SES
a le n to u rs
; qu’à l’égard de fon p è re , qui
en traîn e
» fon oncle ( i ) , il faut qu’il foit sûr des autres côtés avant
» d’en ouvrir le m o t , mais qu’alors ce fera fon a ffa ire ;
»* mais que com m e cette courfe cft
m
ab so lu m en t
ig n o rée
n’eft qu’à court d é la i, il faut qu’on s’explique du
m oui ou du non , afin de ne le pas
d éco u vrir
&
com pro-
»» M E T T R E .
» A lors , fi l’on entre dans le récit de l’é ratdes affaires ,
» leur laiffer dire tous
leurs
m en son ges
,
ne leur rien
» difputcr ; leur difanc enfuite qu’on va s’informer de la
» verfion de l’autre p a r t ; car il faut ici-bas que tout fe
» rapproche ; mais que le
principal eft de favoir fi fa
»5 propofition eft du gré de la m ère, & fi elle aime m ieu x
» lui qu’un (z)
»
var ties
é t r a n g e r
tie n n e
sa
qu i
p l a c e
,
lui
ou l a
sera
d o n n é
d ispu ter
p a r
sans
ses
f in
. »
« Selon que tournera ce d é b u t , fi l’on paroît entrer
1
( i ) L e Bailli de M aribeau , qui entraîné, s’eft m ontre en Provence ©
C h e f de la perfccution.
[z] Étrange alternative pour le M arq u is &
la M a r q u i fe de C a b ris !
donner leur fille au C h ev alier de M irabeau ,
ou la voir m arier contro
Ieuj: vœ u , & à un étranger du choix de leurs perfécutçurs. Céder f a
place au C h e v a lie r de M ir a b e a u , ou être ctcrnellcm enc perfécuté.
�39
»»■dans fes vues, on pourra délayer & fu iv re , mais donnant
» le plus court term e; ne pouvant faire ici qu’une apparition
» bien fourde > jufqu’à ce qu’on foît sur de quelque ch ofe;"
« à plus forte r a ifo n , fi l’on paroît vouloir prendre des
« c ir c u its , faut-il preilèr par un veut-on y ne veut-on p a s >
»
A N T E C E D A N T A T O U T . >v
»» Si cela tournoit b i e n , il faudroit propofer tout de
» fuite de voir la fœ u r;
la
,
afficher toute franchisé
*
« mais ardente & g a ie ; laifler tout d ir c ;[ i] e n fu it e reprendre
» fa p a rtie ; dire que s’il faut continuer à co n tcïlcr., on
*> fç retire ; qu’il faut donc fe perfuader que chacun de
>• fa part a eu tort ou raifon juiqu’i c i , ‘ com m e il arrive
» toujours ; mais que fon plan e ftd e faire oublier de toute
>» part ce qui peut a ig r i r ; que ii ce coup - d’o e il, agrée 8c
»> cft préféré à celui de continuer
bataille
, Sc voir m arier"
»> fa fille par avis de p a ren s, tout de fuite on va fe faire
» informer de l’autre p a r t , q y ’on ne croira pas un m ot
» des
faits
litigieux
, mais qu’on verra clair fur les
« affaires réelles. »
» Si l’on voit qu’on '‘ait r e m u é e
capté les pallions
m nuifiblcs j Sc qu’il faille donner fa part à l’efpric d’in« tr ig u e , il faudra ouvrir alors la totalité de fon plan de
» réunion &: de volonté de
fixer
>5 de faire ccflcr le ch oquant
»
de
p^ y e r
,
vendre
et
l ’é t a t
de
sa
M
ère
,
dym qins de ce d éiord re,
réunir
les
biens
aifurcy: fon
: { i] Q n a y p que le Çljevalier de M irabeau s ctoit d ’abord adrelîc à un
t'iex s. À je f ic h e r t o v t e ïjp .a ^ c u is e
; ce niot peint le véritable caractère
d.ç la M a r q u ife de Ç a b r i f ; fou père m êm e eft forcé de lui rendre jufticc
dans fes confidences intimes.
i
�40
» crac; que tout cela ne T t peut que par
»> d’une p a r t , l’aveu du p è re , èc peut
»
L A S I T UA T I ON
>j
»
seul
.d
Q u e lï ce l a c o n v i c u t ôc Te conf i r me EN
isso lu ble
nécessité
AMELIORER.
DES I NTERLOCUTEURS. «
DANS L A M A I N , ET F A I S A N T T R A I T E R
m
la
se t o u c h a n t
d ’a
I LL ANC E I N-
tout c^e fuite il va Te raccorder avec fon
,
» m o y e n d’autre p a r t, & de-là
descendre chez
son p è r e
,
» attendu qu’on s’eft procuré un congé pour le refte du tems
»> de fervicc ; que l à , on ne l’efpionne pas fur ce qu’il fait
» fie'les gens qu’il ,voit ; q u e b ie n tô t on lui parlera affaires
» av e c c o n f i a nc e , fie q u ’il a mè n e r a les c h o fes1fé lo n le tem s,
' ' - , i:
» mais promptement. «.
*»’ Q u e fi au contraire cela ne convient pas , il ne
» demande que
secret a b so lu
, & repart tout de fuite pour
m fa troupe, ayant voulu com m encer par le com m encem ent,
»
fie ne
s’é t a n t o u v e r t à p e r f onne. «
O n ço n n o ît maintenant les intentions du M arquis de
M irabeau. O n voit avec quelle’influence fecrète il agifToit
dans la confpiration d e .P r o v e n c e \ fous le’ nom Sc par l’or
gane de l’oncle q u 'il entraînoic ; 6c fi l’on efl forcé de con
tinuer bataille , il ne faudra pas s’étonner de le vç>ir au pre
mier rang.
L e C hevalier
cet
cependant s’eft apperçu de la perte de
écrit. Il a em p loyé ,
pour le retirer des mains de
fa fœ ù r, l’inftancc &. la menace ; elle a cru devoir le co n ferver ôc le joindre aux pièces dépofées ch ez le Magiftrat'
pour l’inftrüction de la Jufticc. L e C hevalier cft reparti
pour fon R é g im e n t , &. l’on peut croire qu’il n’a pas d é - '
çowvert cette perte à fon père j qui fe feroit abftenu , fans
d o u te,
�4*
d o u t e , du rôle cju’il va jouer dans la derniere aiTembléc de
Parens (i).
C e t te aflemblée s’eft tenue les 1 3 , 14 &
16 Septembre
dernier.
La dame de L om b ard y d em and e, conformément a fes
nouvelles conclufiotis, que Ton fils foit in terdit; qu’elle foit
nom m ée C u ratrice à l ’intcrdi&ion. ; que la perfonne de
Ton fils Sc celle de fa petite-fille, com m e dépendante de la
curatelle de ion f i ls , lui foient remifes ; q u ’elle foit reftituée en poileffion des b ien s, titres &L papiers; q u ’iT Toit
n o m m é un Curateur ad hoc pour recevoir fon com pte de
l ’adm iniftration précédente.
A v e c elle le préfentent quatre p a re n s , M . T eiifier, A u -
[ 1 ] C ’eft au refus feul de la M a r q u i fe de C a b r is q u ’on peut attribuer
la requête de la d am e de L om ba rd , fignifiée le j Septem bre y c’eft-idire j le lend em ain
m ê m e du départ du C h ev alier. L a m anière donc
o n s’explique dans cette R eq u ê te , fur le fort de la d cm o ife lle de C a
bris , aiTure q u e cette requête eft, c o m m e l’in ftru & io n écrite au C h e v a
lier , r ouvrage du M atq u is de M irabeau .
O n y fait dire i la dam e de
L o m b a r d : « D a n s la-fâcheufe circonftance o ù la d e m o iié lle de Cabris
» fe trouve , elle ne peut pas habiter avec fa m ère , parce que fi elle
» d em eu ro it avec e l l e , elle feroit privée des confeils de rous fes pn» r e n s , tant paternels q u e maternels , p u ifq u ’aucun
d ’eux ne voit
fa
» mère. V o u s l'avez, M o n f i e u r , com bien cette jeu n e p e ifo n n e a b s » foin d ’être éclairée fur fes véritables intérêts. D ’ailleu rs, en la m e t» tant dans un C o u v e n t ,
où elle pourra voir librement le M arquis de
» M irabeau , fo n aïeu l m a te r n e l, M . & M adam e de S a illa n t yf o n oncle
» & f a tante germains > enfin tous fes proches- parens, elle pourra-êtr,*
» incelïam m en t é ta b lie, & alors plus de procès entre lesdeux M a r c j u i » fes de C a b iis. »
F
�dircur
41
!a R o te d’ A vig n o n ,
de
M
Tciflier Ton f i l s ,
le
C o m te de G rafle ôc le iicur de Com m cyras.
A v e c elle fc préfente V ia l , q u ’on a vu tour-a-1 heure
autres
de
l’A v o c a t de la M arqu ife de
C abris , A g e n t
de la négociation propofée par la dame de Lom bard pour
le mariage de la dcmoifellc de Cabris avec le fils du C o m te
de G r a f l e , & q u i, fans doute., étoit auiïî cet hom m e du
M arquis
de
M ir a b e a u , 'qui fc faifoit fort d'entraîner la
v ie ille , & difpofer de f e s alentours.
V ia l
étoit
porteur des procurations de fix parons de
G r a f l c , & chargé de porter leur vœu , conform ém ent aux
intentions de la dam e de Lom bard ( i ).
La M arqu ife de Cabris , avant de permettre qu’i l prenne
place au milieu d’une aflemblée refpc£bable, dépofe fur le
Bureau : i° . un décret de prife-dc-corps , décerné en 17 6 4 ,
par le Juge de G r a f l e , en vertu duquel V ia l & fon père ,
Greffier d’un village
voifin de G rafle ,
avoient l’un ôc
l’autre teilu pendant deux ans les priions de cette v i l l e , fur
une accufation de prévarication , de f a u x , d'intercept ion de
lettres, dans les fonctions de commis de fon p è r e ; 1*.
un Jugem ent du C o n fe il Souverain de la G u a d e lo u p e , du
15. Juin 1 7 7 5 , par lequel ce fieur V i a l , échappé des pri
ions de G r a f l e , & pafle à la G u a d elou p e, eft banni de
cette Ifle com m e injiigateur de procès , & perturbateur du
repos des fa m illes : digne repréfentant de ceux qui troublent
la famille du M arquis de Cabris.
[ 1 ] C a u x q u i fe font fait repréfenter par V i a l , connoiiToient fon
c a r a & è r e , notam m ent le fieur cle G o u r d o n , qui l ’avoit vu dans les prifons
de Grafle. L e fieur de G o u r d o n , père , ctoit Lieutenant de ce S i è g e ,
qui avoir d ïcrétc V i a l , pèie Sc fils , de prife de corps.
�45
Sur la repreTentation de ces deiK pièces, V i a l , malgré
fts murmures info'ens, fut forcé de fe retirer.
A v e c la dame de L om bard fe préfentent enfin quatre au
tres particuliers chargés des procurations de vingt - deux
parens, égalem ent Provençaux , égalem ent attachés à l ’in
térêt Sc à l’opinion de la dame de Lom bard.
C es
v in g t-h u it
parens abfens ,
&
repréfentés
par
V ia l & par les a u tr e s , manifeftenc dans leur procuration
une prévoyance remarquable.
Dans
le cas
où il feroit
queition d’un mariage pour la demoifelle de C a b ris, ils
déclarent qu’ils s’en rapportent au ch oix 5c à la prudence
de la dame de L o m b a r d ,
& qu’ils donnent leur vœ u à
celui qu’elle préfentera aux aiTemblécs.
V o ilà un choix bien é c la ir é , & un avis donné en grande
connoiflance d e ca u fc !
D e s quatre parens préfens , deux feûlem cnt fe confor
m en t aux demandes de la dame de L o m b a rd , & on les
devine. Le C o m te de G ra iiê (i) Sc le iïeur de C om m eyra s
eflriment que le M arquis de Cabris doit être in te r d it, &
[ i ] L e fieur de C o m m e y r a s n’eft là que le proxénète du C o m t e de
GraiTe ; il a pouffe Ton
zèle im pru d en t ju f q u ’à faire
d u cabinet du
la Ju ge , le théâtre de fa n o b le négociation. N ’ayant eu la liberté de voir
dem oifelle de C a b ris q u ’aux affemblées de fa m ille , il a eu un jour la
h ard ieiT ed es’adreiTerà cette jeune perfonne e l l e - m ê m e , & d e.la pérorer
pendant une d e m ie -h e u r e : E p o u f a l t f i l s du Com te de G r a jfe , & n c coutc\ pas ce que votre mère vous dira , étoient
les d eux points de fo u
difeours. D ix pareils o n t entendu cette éloquente exhortation !c la réponfe noble Sc f i g e de la d e m o ife lle d e C abris. Sa mère fut enfin obligée
d e rappeler au fieur de C o m m e y r a s
le refpeiit q u ’il devoit à fa ptt:-
fe n c e , & au lieu qui les ralïeinbloit.
F ij
�44
que fa mère doit être nommée fa C u r a tr ic e , & en cette
qualité feu!c ch argée, fans c o n c u r r e n c e , fans g u id e , fans
c c n f - i l s , de l’adminiftration d e la perfonne ôc des biens.
M M . TciiTier, père &. fils, é to ie n t, par le u rca ra& ère
leur é ta t, au-deflus de l’intérêt p e r fo n n e l, & des impulfions
étrangères. Juges impafLbles, ils ne ie décidèrent qu’après
un examen approfondi des différentes prerentions fie des
différens m o y e n s ; délicats autant que ju ftes, iis furent
d ’avis d’éviter l’interdi& ion , pour l’honneur de. la fa m ille ,
&. pour la sûreté des biens & des perfonnes ; de régler
les formes d’une adm iniilration d u r a b le , fous
l’autorité
de quelques C o n icils éclairés.
La M arquife de Cabris fe préfente de fon côté avec
d ix - fe p t parens & amis préfens , q u i , fur l ’examen des
pièces
confervécs par l’A rrêc du C o n f e i l , des n o u ve a u x ,
interrogatoires fubis par le M arquis de Cabris , & des
nouveaux rapports des gens de l’A r t , décident unanime
m ent que le M arquis de C abris n’étoit point dans le cas
de l'interdiction en 1 7 7 7 ; cl uc l’altération poftérieure de
iar f a n r é , pouvant & devant être une fuite des mauvais
traitemens exercés fur fa perfonne pendant la curatelle ;
la dame de Lom bard , fa m è r e , auteur de ces procédés,
èc rcfponfable de leurs e ffe t s , étoit par une conféqucnce
inévitable , non-rccevable dans fil demande actuelle ; que
ces fins de n o n - re c e v o ir, réfultantes des plaintes rendues
par la M arquife de Cabris , &. jointes au p ro c è s , devoient
etre jugées préalablement; à l’état actuel du M arquis de
Cabris.
Interpellés
par le M a giftrat
de donner leur avis fur
l’etat a& u cl du Marquis de C a b r i s , ils ajoutent : » que
�45
« s 'i l pouvoit être quejiion de fla tu er f u r l ’ état -actuel du
» M arquis dt C abris, » la nature de fa m aladie, Pefpérancc
de Ton ré ta b lifllm e n t > la lituation de fa f a m i lle , coût
devoit éloigner l’idée d ’une in te r d ic t io n , Sc que dans ce
cas ce feroit une précaution légale ôc fuffifante, de nom m er
des C on feils au m alade, qui donneroit une procuration irre-;
vocable pour gouverner ics biens 2c difpofcr de fcs revenus,
de 1’avis des C on feils nommés.
Enfin , forcés de s’expliquer dans le cas m êm e de Pi in
terdiction p ro n o n cée , ils appellent dans ce cas la M arqu iie
de C abris à la curatelle h o n o ra ire , le fieur C o u rt à la
curatelle o n é ra ire , foum ettant ce curateur onérairc à l’au
torité d’un C o n fc il.
D ix - f e p t parens a b fc n s , & repréfentés par leurs fondés
de p o u vo irs, portent les mêmes vœux contre l’interdiction
qu’ils remplacent par la nom ination des C o n f e i l s , &. dans
le cas imprévu de l’interdiction , ils règlent de la m êm e
manière la curatelle &
l’adminiitration des biens.
L a Marquife de C a b r i s , en fon nom p e rfo n n e l, fc ren
ferme dans les plaintes rendues par elle devant les Juges
de P r o v e n c e , rejetées par la Sentence de G ra d e , fie par
l ’Arrêc du Parlem ent d’A i x , renvoyées au Châtelec par
P A rrêt du C o n fe il des D é p ê c h e s ,
plaintes
portées
devant M .
le
dans fcs additions de
Lieutenant - C iv il.
Des
mauvais traitemens exercés fur la perfonne de fon m a r i,
& des abus com m is dans Padminiitration de fcs biens
fur les preuves déjà rapportées, iur celles q u e lle demande
à faire , elle fait réfultcr
une indignité , une incapacité,
une fin. de non-reccvoir invincible , qui doit écarccr toutes
les demandes de la dame de L o m b a rd contre fon fils.
A u fu rp lu s, clic a obfcrvé verbalem ent à la famille &
�4*
au M a g i f t r a t , q u e , dans le cas où il feroit queilion de
nom m er des C onfeils à Ton mari 3 il n e t o it guères poffible
d ’en trouver de plus fages'fic plus dignes de confiance que
ceux qu’il avoir demandés lu i- m ê m e par fa Requête du
m ême
R o te
jour 1 6 Septem bre: M. T ciiîie r : A u diteu r de la
d’ A v i g n o n , oncle du M arquis de Cabris , &
con
duit à l ’àflemblée de parens par la dame de L o m b a rd
e lle - m ê m e , M c de Beauféjour , ancien A v o c a t au P a r
l e m e n t , C on feil du Marquis de Cabris depuis 1 7 7 6. C e
choix futapplaudi de t o u s , fie il étoit/ait pour l’être. D e p u i s ,
le M arquis de Cabris a encore demandé concurrem m ent avec
ces C onfeils , M c d’O u t r c m o n t , déjà indiqué par la famille.
M . T e iifje r, préfent à l’a fïcm b lée, ÔC votant lui-même
contre l’in tc rd id io n , s’exeufa long-tcm s fur l’importance
fie la multiplicité de fes fo n ctio n s; mais enfin il a cédé
aux inftances du M arquis de C a b r is , fie il confent à faire
ce facrificc aux intérêts & au repos de fon neveu. (1)
A u milieu de ces deux partis oppofés, paroît M e R o z ie r ,
A v o c a t aux C o n fe ils , fie fondé de procuration du M arquis
de Mirabeau.
L e M arqu is de M ir a b e a u , en parlant du trtariage de la
dcmoifellc de C a b r i s , écrivoit à la dame de L o m b ard , au
mois de N o v e m b re 1 7 ^ 4 , qu’il ne vouloit aucunement f e
mêler de cette affaire. {2.)
1
‘ [ 1 ] La L ettre d u M arq u is de C a b r is à M . T e i f l i e r , Si la répoufe
par laquelle celui-ci veut bien accepter la qualité & la charge de C o n f e i l ,
fo n t annexées à la fécondé R eq uête prefentée par le M a r q u is de C a b ris
le z j Septem bre dôrnïar.
f i ] L ettre d u - M a r q u i s
.
.
de M irabeau , du
,
18 N o v e m b re
»7*4,
im p rim é e par la d a m e . d e L o m b a r d e l l c - m t m e , dans fa R eq u ê te i u
R o i , p. i i , aux P. J.
�V
O n vient de le voir dans riiifftruction écrite au C hevalier
Ton fils, tout en f e mêlant très-particulièrem ent de cette
affaire, vouloir ib cacher encore ,
faire dire au C h e valier
qu’ il f a i t cette idée fo r t loin de fo rt p ère, a qui elle a été
propofée.
Ainfi , jufqu’alors, le M arquis de M irabeau avoit agité
dans l'om bre les différentes machines qu’il faifoit m ouvoir;
à A ix , le B a i l l i , fon frère : * P a ris, la dame de Lom bard.
M a is e n f in ,
l’o it qivinitruit de la fatale imprudence du
C h e v a lie r , 6c de la perte de Vinjlruclion fecrette , il ait
défefpéré de fe cacher plus long-tem s ; foit que l ’inftance
du m om ent lui ait fuggéré la nécelîité de fa préfence, il
a cru devoir fe m ontrer à la dernière aiTembléc des parens,
& là , par l’organe de fon fondé de p o u vo irs, il a déclaré :
Q u ’il n’avoit pu v o t e r , ni fur l'interdiction du M arquis
» de C a b r is , ni fur Ja cu ra te lle ; mais que iï l'ïnterdiéfcion
” éroit p ro n o n cé e , fi la dame 'de Lom bard étoit nom m ée
» cu ra trice , com m e f a petite-fille étoit une dépendance de
>3 cette C u ra telle, ôc pour éviter
les contcftations qui
« pourroient s’élever entre les deux dames de C a b r is , au
» fujet de l’autorité qu’elles voudroient s’arroger égalem ent
»
fur cet e n fa n t;
îl
est
d ’a v i s
que la dem oifelle de
>3 Cabris f o i t t mife en te l Couvent q u ’ i l plaira au Juge
» d ’ indiquer, dont elle ne pourra fortiravant fo n établijfement^
» & où f a mère & fo n aïeule pourroient la voir a la grille
» feulem ent. ».
Q u ’on compare ce vœ u d’un defpotifme fa m ilie r, plutôt
que d’une fagefle impartiale, à l’inftrudtion écrite au C hevalier
de M irabeau ; qu’on le compare encore au projet configné
dans la R equête de la dame de L o m b a r d , dû 5 Septembre:
�43
en la mettant dans un Couvent ou elle pourra voir librement
le M arquis de M irabeau, fo u a ïe u l............. E lle pourra être
incejfamment établie. . . • l’identite des expreilions ôc
des
maximes , m anifeilerà la confiance du m êm e complor.
L e M arqu is de
M irab eau d iloit à
Ton f i is , d a n s fou
inftruction : L a Curatelle de l ’interdit emporte la puijj'ance
f u r f a fille . . . • U n homme a. moi entraîne la vieille & d i f
pofe de fe s
alentours. M a is , les alentours de la vieille ,
V i a l , le (ieur C o m m e y r a s , A l z i a r i , & m êm e la F em m ede-Cham bre, Marianne Flourt, pouvoient être entraînés euxmêmes par des intérêts d ifîe rc n s , 6c la
M arquis
prévoyance du
de M irabeau , allait jufqu’à fe méfier de ceux,
qu’il faii'oit fervir à fes deiTcins.
C ’eft pour cela qu’il prôpofe de iouilrairc la demoifelle
de C a b r i s , m ême à Ton a ïe u le, ôc que , par une tyrannie
b iz a r r e , dont l’habitude feule lui actcfte la lé g itim ité , il
veut que cette jeune perfonne demeure captive 6c privée
de la fociécé de fa mère ô£ de Ton a ïe u le , jufqu’à fon éta,b lifle m e n t, c’e il- l-d ir e , jufqu’au m om ent où la réuffitedu
projet charigcroit les chaînes de la dem oifelle de C a b r is ,
& de fa prifon la feroit païïer fous la puiüance de fo a aïeul
maternel.
%
C o n ç o it-o n co m m en t la. demoifelle de C abris pourroir
fc trouver fous la puiflâncc du M arquis de Mirabeau ? La
choie cil claire ; en époufant fon oncle , le C hevalier de
¿Vdirabcau.
L e M arquis cil né en
pays d e D r o it
É c rit ; tous fes
biens font fitués en pays de D r o it É c rit ; il prétend c o n ferver encore fon d om icile en pays d e D r o i t écrit. Son filfii,
quoique marié * demeure fous la p u iiîa n c e ,
avec Ion fils,
La
�49 '
la femme de fon fils, & tout ce qui eft fous h puiflance de fon
fils. La demoifelle d e C a b r is , en époufant fon oncle le C h e
v a lie r , fe trouve, avec tous les biens qui lui fônt deftinés ,
dans la main du M a rq u is , ion a ï e u l , ôc père de fon époux.
En P r o v e n c e , le M arquis de M irabeau laifloit ou faifoic
agir fes aiTbciés , dont le fccours lui afluroic ls? double avan
tage du m yilèrc âc du fu c c è s , &. qui prenoient fur eux l'évi
dence odieufe des efforts réunis pour opérer l’interdiition,
c ’e ft-à -d ire , l’anéantiiTement du Marquis de C a b r is , qu’il
’fiî l'o it an éa n tir, pour difpofer de fa fille ; fa u f enfuite, pour
l ’intérêt m êm e de la demoifelle de Cabris , à tom ber fur
fes propres alliés , pour leur faire reftiruer les rapines d ont
ils avoient eux-mêm es payé leurs iervices, l o r f q u e , p*r le
mariage p ro je té , il feroit devenu le père ôc le protecteur
légal de l’enfant dépouillé.
C ’eft dans ce conflit d’intérêts oppofés & de prétentions
co n tra ires, q u ’il faut chercher les décidons de la Juilice.
M O Y E N S .
D e u x queftions principales conduifent au Jugement.
L e M arquis
de Cabris étoit-il , en 1 7 7 7 , dans le cas
de l’interdi& ion prononcée par la Sentence
de G raile ,
& par l’A r iê t du Parlem ent d ’A ix ?
L e M arquis de Cabris eft-il aujourd’hui dans le cas de
l’intcrdi& ion demandée par la dame de L om b ard ?
T o u te s
les queftions incidentes
naîtront de ces deux
queftions principales.
C ’cft en agitant la première , qu’on examinera les difl'eG
�50
rentes caufes d 'indignité qui s’élèvent contre la dame de
L o m b a r d , & qui doivent form er autant de fins de nonreccvoir contre fa dem ande a£tuelle. Interdiction in ju fte,
curatelle infidelle, excès com m is ou foufFerts fur la petfonne de l’interdit , abus de tout genre dans l’adminiilration de Tes biens.
C ’efl: par une fuite néceflaire de cette première queftion,
qu’on exam inera de même fi les parens qui ont donné leur
vœ u en 1 7 7 7 pour faire interdire le M arquis de C a b r is , &
pour confier fa curatelle à la dame de L o m b a r d , furtout
ceux qui on t profité des infidélités de fon adminiilration ;
peuvent être admis aujourd’hui à voter pour que le M a r
quis de C abris foit encore interdit, Sc pour que fa mère
foie encore nom m ée Curatrice.
C*eft en exam inant la fécondé Q u e ftio n , celle de favoir
il le Marquis de C abris eft aujourd’hui dans le cas de l ’in
terdiction , q u ’on pourra difeuter les différens intérêts de
ceux qui confcillent & qui défirent cette interdiction. C ’eft
en fuppofant cette interdiction prononcée , qu’on établirai
les droits de la femme ôc de la fille de l’interdit.
P R E M I È R E
Le
Q U E S T I O N .
M arqu is de Cabris é to it-il, en 1 7 7 7 , dans le cas de
Uinterdiction ?
C etti q u iîtion
IST
PRÉALABUI,
rovxliuox i
C e tte queftion e ft la prem ière, & par l’ordre duraifon.r e m e n t & par l’ordre judiciaire.
L ’A r r ê t d u C o n f e i l des D é p ê c h e s , en annullant les Sen"
�71
tcnces de Gratte & les Arrêts du Parlement d’A i x , a ren
voyé
le refeifoire à juger pardevant M .
le Lieutenant*
C iv il du C h â te let de P a r i s , c ’eft-à-dire , le mérite des de
mandes fur lefquelles ces Sentences &
ces Arrêts étoient
intervenus.
L e T rib u n al de renvoi doit d o n c , avant toutes chofcs,
ftatuer fur le mérite de la d em andeTorm ée en 1777 * & il
ne peut examiner le mérite de cette d em a n d e, fans exami
ner fi à l’époque de cette d e m a n d e , en
1 7 7 7 , le M a r
quis de C abris étoit dans la nécciîiré de l’interdi& ion.
D ’ailleurs, les plaintes rendues par la M a rq u ife de C a b ris
devant les premiers Juges, des excès com m is fur la perfonne
de Ton m a r i , ayant été'rejetées par les Jugemens annullés ;
la caffation de ces jugemens laifle encore à juger la juftice
de ces plaintes , 8c il eft impoilible de ftatuer fur la juftice
de ces plaintes, fans comparer l’état du M arqu is en 1 7 7 7 ,
avec fon état a£tuel, fans examiner fi, en 1 7 7 7 , 1 e M arqu is
étoit dans la néceilité de l ’interdi&ion.
La difpofition de l’A rrê t du C o n fe il eft formelle à cet
égard. Il ordonne « qu’il fera convoqué
devant le ficur
» Lieutenant C iv il du C h âtelet de P a ris, une ailcm bîée des
» parens ôc amis du fieur de Cabris , lors de laquelle lefdits
« pareris ôc
amis prendront connoiflance
»> refpcctivcs, des rapports des M édecins
des Enquêtes
Chirurgiens ^
» des interrogatoires dudit fieur de C a b r i s , ainli que de
» celui qu’il prêtera de n o u v e a u , &C du nouveau rapport
» des Médecins &. Chirurgiens, s 'i l efi ordonné , pour don» ncr enfuite leur avis au ficur Lieutenant-Civil du C h â « telet de P a r is , auquel S. M . attribue , f a u f l’appc! au Par
is l e m e n t , toute C o u r , & c . «
C es enquêtes, ces rapports, ces interrogatoires, confcrG ij
�vés par TA rret du C o n feil des D é p ê c h e s , ne peuvent fervir qu’à éclairer l'état dans lequel écoic
alors la tête du
M arquis de Cabris , ôc par conféqucnt le mérite de la de
mande form ée alors par la dame de Lombard. L ’ Arrêc du
C o n feil des D é p êch es a donc voulu que les parens ¿kamis^
en prenant com m unication de ces enquêtes, rapports ÔC
in te rro g a to ire s , d o n n a ie n t leur a v i s , ôc que le Juge de
renvoi ftatuât d ’abord fur les conféquences de ces pièces
c o n fe rv é e s , c ’cft-à-dire, fu r ie mérite de la demande for*
n i é e , en 1 7 7 7 , par la dame de L o m b a r d , fur la juftied:
des plaintes rendues par la M arquife de Cabris , fur la’queitio n de favoir f i , e n 1 7 7 7 , le M arquis de C abris d evo it
ctre interdit.
Si le C o n fe il des D épêches n’avoit entendu attribuer au
Juge de renvoi que laconnorfTance de l’état a â u e l du M a r
quis de C a b r is , il n ’auroit pas exigé que l’avis des parens
£c amis 6c le Jugem ent du M agiftrat,fuiTent déterminés par
Jes cnquêtcs^rcfpc&ives faites en 1 7 7 7 , par les rapports
donnés en 1 7 7 7 , par les interrogatoires fubis en 1 7 7 7 ,
q u i, fans d o u te , ne peuvent fournir aucune lumière fur la
fituation phyfique ôc morale du M arquis de Cabris en 17 8 5 ,
D ’ailleu rs, dans ce cas , on procéderoit en vertu d ’un A rrê t
d''attribution > revêtu de L ettres-Patentes, & non pas en.
vertu d’un A rrê t de renvoi.
N o u s ne difons pas que l ’attribution donnée par l’A r r ê t
du C onfeil , ne frappe pas fur l’état aftuel du M arquis de
C a b ris ; mais cette queftion de favoir fi ce malade cft uujourd hui dans la néceflité de l’in terd iilion , cft néccfl’a ircmcnc
fubordonnée à la première., fubordonnée aux circonftances,,
aux raifons qui pourront déterminer le Juge t aux demandes
�53
que les deux dames de Cabris font autorifées a former par
le m ême Arrêc.
C e t A rrêc die que le M arquis de Cabris fera de nouveau
inrerrogé par le J u g e , ôc vifité par les Gens de l’A r t , s ’i l
ejl ordonné. C ’eft admettre que le M arquis de Cabris ne fera
point inrerrogé ni viiîté de nouveau , s ’ i l n e j l pas ordonné :
le C on feil des D épêches fuppofe donc un nouvel ordre de
ch ofes, une nouvelle p rocéd u re, une nouvelle demande ,
& c’eft: ce que la dame de L om bard a parfaitement entendu,
puifqu’elle a jugé elle-même fa demande en interdi& ion for*
m ée en 17 7 7 , a n é a n tie , & dans tous les cas , infuffifante
pour faire prononcer fur l’état a & u e ld e fon fils; puifqu’elie
a formé une nouvelle demande en interdi& ion devant M .
le Lieutenant-Civil.
11 faut d o n c , pour la régularité du Jugem en t à in te rv en ir,
pour l’exécution
parfaite de l’A r r ê t de renvoi , ftatuer
préalablement à t o u t , fur le mérite de la demande adoptée
par les Jugemens a n n u llés, fur la juftice des plaintes rendues
par la M arquife de Cabris , fur la queftion de favoir i i , en
1 7 7 7 , le M arquis de Cabris pouvoic & devoir être interdit.
Il feroit d’ailleurs impoffible de procéder a u tre m e n t, ôc le
raifonnem ent le plus fimple prouve cette impoifibiJité. Le
M agiftrat ferm erait il abfolum ent les yeux fur l ’objet princi
pal du renvoi, fur la chofe jugée par la Sentence de GraiFe
fie par l’ A rrêt du P a rle m en td ’A ix ? Croira-t-il ne devoir s’o c
cuper que de l’état a£tucl du M arquis de Cabris ? C roira t-il
n ’avoir à juger que la nouvelle demande de la D a m e de
L om b ard ? M ais avant de juger cette d e m a n d e , il faut juger
fi la D a m e de Lom bard a eu droit de la former.
La M arquife de Cabris élève aujourd’hui contre elle de»
�14
caufcs nombreufcs d*in d ig n ité, qui doivent la rendre inca
pable de former aucune demande. Il faut examiner fi ces
caufes font légitimes.
C es caufes d’indignité réfultent de la demande en inter
diction formée en 1 7 7 7 . Il faut examiner 11 le M arquis de
C abris a été juftement interdit.
C es caufes réfultent encore de fes écarts dans les fo n d io n s
de la curatelle qui lui avoit été confiée, des excès com m is
ou tolérés fur la perfonne de fon fils, des abus innom brables
aurorifés ou foufferts dans l’adm iniilration de fes biens. Elle
n ’eût pas été curatrice de fon fils , &: curatrice infidelle , li
fon fils n’eût pas été interdit. Il faut examiner fi fon fils a
été juftement interdit.
Il n’eft pas poffible de faire un pas dans cette affaire , il
l ’on veut être exaét & ré g u lier, avant d ’avoir décidé 11 le
M arquis de Cabris m éritoit, en 1 7 7 7 , l’inrerdi&ion pronon
cée par la Sentence de GraiTe , &. par l’A rrê t du Parlem ent
d ’ A ix.
Suppofons encore que le Juge s’ o ccu p e, avant t o u t , de la
nouvelle demande formée par la D a m e de Lombard ; fuppol'ons auifi que fur cette d e m a n d e , il interdife le Marquis de
Cabris ; feroit-il temps alors d’examiner fi cettedem andc étoit
re c e v a b le , U Ci la D a m e de L om bard avoit le droit de la
former ?
TD„ Marquis
Marquis de Cabris n’étoit pas en 1 7 7 7 dans le cas de
deCabris ** l 777- l’inrerdi£tion. C ette vérité , aujourd’hui d ém o n trée, cft la
tige des fins de non-rcccvoir qui repouflent la D a m e de L o m
bard , 2c avec elle cous ceux à qui d ie doit cette curatelle 11
odieufem ent exercée,
dont elle a, par récip ro cité , fervi les
p ro je ts , ou favorifé les invafions.
�n
C e n’eft pas dans les faits qui ont précédé la demande de
la D am e de L om b ard , qu’il faut chercher cette vérié ; rricn
ne peut inftruirp la Juftice , que ce qu’elle a ordonné ellem êm e pour fon inftru&ion.
D ’ailleurs , l’A rrêt du C o n fe il des D é p ê c h e s , d éfig n e, en
les c o n fe r v a n t, les pièces qui doivent être confultées. Il veut
que les enquêtes refpeciives , les rapports des Médecins &
Chirurgiens , 6 les interrogatoires du Marquis de Cabris, foient
com m uniqués aux parens 8c amis a ile m b lé s , pour donner
leur avis.
Les parens 8c amis ailemblés ont pris com m unication de
ces pièces co n lcrvé es, 8c ils ont tous déclaré , excepté ce-,
pendant le Comte de Grajfe & le fie u r de Commeyras , que
l ’état du M arqu is de Cabris en 1 7 7 7 , ne juflifioit pas l’interdi& ion dont il avoit été flétri.
En e f f e t , fi l’on coniulte d’abord les enquêtes refpe£tives,
on voit d’un cô té vingt-deux témoins entendus à la requête
de la D a m e de L o m b a rd , dont iept à h u it, c’eft-à-dire t fes
affidés, fes v a l e t s , fa fem m e-de-cham bre, veulent donner
quelque idée de la dém ence que l ’on cherche. Les autres
atteftent le bon fens 8c la raifon du Marquis de Cabris.
O n vo it d’un autre cô té quarante-deux témoins entendus
•a la requête du M arquis de C a b r is , ( 1 ) qui tous dépofenc
( 1 ) O n a obfervé que le Ju gé avoit interrom pu cette enquête avec une':
précipitation b lâ m a b le.S a n s c e l a , au lieu de quarante-deux t é m o in s ,
le"
M arquis de Cabris préfenteroit toutes les perfonnes dont il étoit connu
& fu r-to ut les habicans de fa T e r r e », d on t il fu t toujours & le père 3c
l ’ ami.
�Si indiquent des preuves de fa préfence d’c fp ric , & même
de fa (agacité 6c de fon intelligence.
Il en donnoit lui-même ,.à cette é p o q u e , une preuve bien
remarquable dans cette tr a n fa & io n , dont fcul il difeutoit ÔC
étabüfToit les claufes avec toute la com m unauté aflemblée
dans la falle de fon C h â te a u ; tranfa& ion confirmée trois ans
a p r è s , com m e un m onum ent de fa g e ile , parle m êm e T rib u *
nal qui ven oit de déclarer Ton A u te u r infenfé & maniaque.
Si des enquêtes refpe&ives on pafle aux rapports des M é
decins Sc C h ir u r g ie n s , on trouve la même v é r it é , avec quel
ques traces de l’empire exercé par la D a m e de L om bard fur
ceux dont elle s’environnoir.
L e M édecin Ifnard diflimule , Sc craint dans l'état de por
ter un jugem ent trop précipité ; deux fia n ces n étant pas fuffifa n tes pour l ’ inflruire du véritable & confiant état de l ’ efprit
q u t l exam ine.
L e C hirurgien L a m b e r t , déiintérefle , & par conféqucnt
f ïn c è r e , détaille tous les motifs de fa décifion , tous les
réfultats de fon examen , 6c déclare affirmativement que le
M arqu is de Cabris ejl
d ’ un tempérament mélancolique ;
mais qu’i l n ’y a en lui aucun égarement d ’ efp rit, & qu’ i l jo u it
d ’une fa in e raifon.
Si l’on jette enfin les yeux fur les interrogatoires du M a r
quis de Cabris , on eft frappé de fes réponfes tranquilles
8c raifonnables. D a n s celles qu’il a prêtées devant le C o n iciller-Commifl'aire du Parlem ent d ’A i x , on remarque furtout une raifon lu c id e , 6c cet ordre d ’une bonne m ém o ire,
qui ne peut claiïer les plus petitsdétails des affaires dom eiliq u e s , que dans une tête bien organifée.
E n fin , quand on a examiné tout ce qui pouvoit éclairer
le*
�les Juges, tic Provence fur la fituation defprjc du Marquis
de Cabris , pour concevoir les jugemens qui lui on t ravi fon
exiitence civilcen le déclarant infenfé ^il faut nëceiTairement
penfer à l ’aiTociation qui s’étoit formée pour l’anéantir, aux
intérêts divers qui infpiroient chaque membre de l’aiTociation , aux démarches tumultueufcs du Bailli de Mirabeau ,
enflammé par le d é p i t , & d’ailleurs entraîné par le M a r
quis de M irabeau ; fon frè re, aux in trig u e s, aux calom
nies employées pour le lu ccès; à la M a rq u ifed e C a b r i s , ar
rachée du lit de fon m a r i, ôc confinée loin de lu i, dans
un couvent de la haute Provence ; à la D e m o ifelle de
Cabris , enlevée fous les yeux de fon Père ; au M arquis
de Cabris lui-même , prifonnier dans
la
ville d’A i x ,
gardé à vue ju fq u e s d a n s fon a p p a rte m e n t, au m om ent
où il étoit encore fon unique maître fous la protection des
L o ix ; enfin , à tout ce que l’efprit de cabale & de violence a
ralfemblé dans cette aiï'airc déplorable.
C e tte troupe intéreflee marchoit fous la bannière de la
dame de Lom bard. C ’eft en fon nom que tous les coups ont
été portés; c’elt fur fa demande que Ion fils a été injuftem ent interdit.
C e tte interdiction cil l’injure la plus cruelle que la dame
de Lom bard pouvoit faire à fon fils , aux en fans de fon fils ,
aux enfans des enfans de ion fils.
Il faut diitinguer deux fortes d ’interdi& ioa ; celle p ro
non cée pour caufe de prodigalité, ,& celle prononcée pour
c a u fe d e démence. La première n’eil point une tache de fa
m ille , elle n’eft pour celui m ême qu’elle fr a p p e , qu’un
reproche de fes égaremens pâlies, l a prodigalité d’ un père
p orte lu id ig e u c c , mais jamais la ho.nce fur fes nfaus.
�5*
L ’inrerdi&ion pour caufc de dém ence cft une flétriflurc,
& pour l'in te rd it, & pour toute ia dcfcendancc : c’eft une
plaie qui du tronc va infectcr jufqu’aux plus petits rameaux.
D e tous les p réju g és, celui-là peu t-être, cft le icul raifoi:n ab le, ou plutôt ce n’eft pas un préjugé ; c ’eft une crainte légi
tim e qui vient quelquefois empoifonner le fentiment le plus
cher dans dans les apprêts d ’une union defirée, &c qui porte
l’inquifition dans une famille jufques fur les membres les
plus éloignés.
A in f i, Iorfqu’à la face de toute fa province , la dame de
Lom bard pourfuivoit avec acharnement la Sentence &. i’A rrêt qui on t déclaré fon fils en démence, elle difoit à fa P ro
v i n c e , a to u t le R o y a u m e ,e n montrant fa petite-fille,enfant
de fix a n s, intéreflante par toutes les qualités aimables que
la nature peut prodiguer : «• Q u e cet enfant vive f e u l , Sc
meure fans poftérité ; familles pures ,
m
recevoir
dans votre
« un poifon que
fein ;
il
trem blez de le
porte dans
fes
veines
j’ai tranfmis dans les veines de m ou
» fils.
C e cri terrible, elle le répète ici avec un emportement
qui e ffr a ie , &. fa petite fille touche à fa quinzième année:
elle annonce encore , elle publie que fon fils cft fou. L e
feroit-il devenu ? N ous allons examiner tout-à-l’heure s’il
cft devenu fou ,
com m ent il auroit pu le d eve n ir; mais
enfin il ne l’étoit pas en 1 7 7 7 ; la chofc eft ailèz prou
vée ,
fa mère l’a accufé de folie pour le faire en
chaîner.
Son aveuglement eft extrême : elle veut orner de quel
que vraifcm blance ce m enfonge de folie.
N ’a-t-elle pas
imprimé à Paris que fon é p o u x , le père de fon fils , avoic
�59
tïanfm is à ion fils le germe d’une démence incurable ? L a
dame de Lombard ne fait pas ce qu’elle é c r it , ou cc qu’on
écrit pour elle. Il cil impolîible de penfer q u e lle v o u lû t ,
de fa n g -fro id , pour exterminer ion fils 8c fa p e tite -fille ,
marcher à eux fur les cendres d’un mari qu’elle a dû ch é
rir 8c qu’elle doit rcfpe£ter. Si cette idée cruelle cft un fruit
de fon im ag in a tio n 3 voilà la dém ence: c'cft elle qu’ il faut
interdire.
.En vérité , les termes ufités n’expriment pas tout
l’o
dieux de ce m enfonge. Le M arquis de Cabris a trois feeurs
mariées ,8 c connues par leur bon fens 8c leur raifon. Son
père n’a jamais donné la m oindre preuve d ’un efprit difttrait
ou a g ité ; ¿te c e r te s , toute fa Province pourroit attefter qu’il
ne devoir pas cette tranquillité aux bons procédés de la dame
de L o m b ard , com m e elle a l’ineptie de le dire. Le M arquis de
Cabris lu i-m êm e, avant la tyrannie'qui a boulverfé toute fon
cx ifte n c e , n’avoit montré qu’un efprit préfent 8c raifonnable.
A infi , ce prétendu germ e de dém ence trouvé dans le fang
de fon p è r e , eft un trait perfide, le dernier trait qui carac*
tériie le com p lot formé fur la perionne de la D em oifellc
de Cabris. C ’cft pour difpoicr d’elle fans concurrence ,
pour lui ravir l’avantage du c h o ix , pour effrayer tous fes ri
v a u x , qu’on ofe flétrir en m ême-tem ps 8c fon p è re , 8c fon
ayeul ; 8c ce dcflcin peut il être douteux , lorfqu’on voie
s’empreifer autour d ’elle le C o m te de G r a d e , le M arqu is
de M irabeau , 8c tous ceux dont nous n’avons pas eu occaiion
de p a r le r ,
qui ne
craignent pas pour leurs fil*
cc qu’ils ont comploté de faire craindre aux autres.
E n s'efforçant d’ affaiblir la honte qui fuit une interdic
tion pour caufc de démence , la dame de Lom bard n’affoiH ij
�<jO
blic pas l’injure faite à fon fils, qui n ’étoit point en demenee. Elle difoit dans fa Requête au R oi : provoquer
rin te rd i& io n d ’un fils , lorfqu’il eft dans le cas de l’êrre ,
( d ’être interdit) c ’eft faire un a & e de p i é t é , c’eft obéir
aux L oix.
M ais provoquer l’interdi&ion d ’un fils , lorfqu’il n’eft
pas dans le cas d’être in te rd it; le noter com m e f o u , l o r f
qu’il eft fage ; le luppofer en d é m e n c e , lorfqu’il a toute
fa railon , pour lui ravir fon exiftencc & tous les droits de
citoyen : c’eft une atrocité jufqu’à préfent in o u ie , c ’eft une
violation des L o ix de la nature ôc de la fociété.
Les Lacédcm oniens n’avoienc point de loix contre les
crimes inconnus, nos loix n’ont pas prévu qu’une mère
fût capable de diffamer fon fils Si toute fa p oftérité, par
une
interdi&ion injufte, fous le prétexte d ’une dém ence
fuppofée1. C e t écart nouveau n ’eft donc fournis parmi nous
à aucune peine littéralem ent exprimée, [ i] M ais la raifon,
la juftice n a tu relle, veulent que celui qui a fait le m a l,
foie au moins privé des moyens de le faire encore. U n e
mère qui dépofe tous les lentimcns m aternels, doit abdiquer
auili tous les droits maternels. U n e mère qui a traité fon
[ 1 ] L a d am e de L o m b a r d tire la N o v . 1 1 5 ,
( elle fe tro m pe : c’eft
la N o v . 1 »4) pour prouver q u ’elle auroit été indigne de fucccder à Ton
fils furieux ou i n f e n fé , fi elle l’avoit abandonné. L a N o v . ne parle que
du fu r ie u x , & non pas de l’in f e n fé , & les foins q u ’elle preferit aux père
£c mere en faveur de leur fils, 11e font pas de le faire interdire. M a is la
d am e de L om ba rd ne dit pas que la m êm e N o v . la m enace de la m ê m e
p e i n e , fi elle a fait à fon fils une injure grave. S i gravem & ir. honeftam
injuriant injecejferk.
�¿1
fils com m e -un ennemi , cft i’ennemie
de Ton fiis;
elle
n ’eit plus fa mère.
A in J î, lorfque la dame de L om b ard demande aujourd’hui
que Ton fils Toit in te r d it, il ne faut pas l’é co u te r; il ne
faut pas m ême examiner fi quelque m o t if juifcifie fa de
mande ; parce qu’elle a ofé déjà le faire interdire fans
motif. L u i • (cro it-il permis de pourfuivre fon fils jufqu’au
tom beau , & de renouveler cette action infamante , toutes
les fois qu’elle feroit infpirée par fon intérêt particulier
ou par l’intérêt des autres.
C e tte caufe d ’in d ig n it é , lancée fur la dame de L o m b a rd ,
par l’intcrd iition
fils , ell g r a v e ;
m ême q u ’elle a provoquée contre fon
&
cependant elle fera p e u t-ê tre moins
d ’impreffion que celle qui nous refte à prélenter.
Elle invoque la nature pour juifcifier fa co n d u ite : fuivant
fes maximes, c’eil pour remplir un devoir de piété maternelle
qu’elle a fait interdire fon fils : c ’elt pour veiller fur fa
vie 6c fur fes biens, q u ’elle l’a privé de fa liberté phyfique
& morale. Suppofons d on c que l’in terd i& io n fut pour le
M arquis de C abris un fccours bienfaifant ôc in évita b le,
voyons co m m e elle a rempli ce devoir.
C u ratrice de fon fils, elle a écé revêtue du pouvoir des
L o ix fur fa perfonne 6c fur fes biens.
C o m m e n t a-t elle adminiftré fa perfonne ?
L e Marquis de Cabris a é t é , par fes ord res, placé dans
nne cham bre de fon c h â t e a u , à côté du n om m é A lzia ri
ivrogne [ i j de foixance ans, père du Procureur de la dame
[ i ] Seytre écrivoit à la M a r q u ife de C a b r i s , le prem ier M a r s 178 3 :
x l état de M., de Cabris ejl toujours le rneme , i l ne changera p a s t
�6i
de Lombard , qui lui-même l’a confié à deux domeftiques,
c ’eit à-dire, à deux paylans couverts de la livrée.
Alziari fe permectoit fou vent des a b fen ces, m êm e aiTez
lo n g u e s, & alors le château de C abris étoit gouverné par
M arianne F l o u r t ,
fem m e d e-ch a m b re
de la dame de
Lom bard.
L a dame de L om bard elle-même n’y faifoit que quelques
apparitions à intervalles très-éloignés. Elle habitoit conti
nuellem ent à GraiTe.
C e qui fe faifoit auprès de fon fils, fe faifoit donc par
fes ordres : fi l’on veut la traiter avec quelque fa v e u r, o n
croira feulement q u ’elle l’autorifoit ; &c Ci l’on veut être
très-indulgent , on fera au moins obligé de croire qu’elle
le to léro it; mais foit qu’elle le foufl'rît, qu’elle le p erm ît,
ou qu’elle l’o r d o n n â t,
elle en fera toujours refp on fab le,
parce que feule elle avoit l’autorité pour faire le b ie n , ôc
pour empêcher le mal.
O n a dit que les chagrins & les contrariétés avoient
troublé la conftitution du Marquis de C a b r is , 6c altéré
fa fanté. C e trou b le, cetre altération, s’étoient manifeftés
par une grande irritabilité dans tous fes organes.
L ’hu
manité feule demandoit pour lui un régime d o u x , ca lm a n t,
propre enfin à faire iuccédcr la paix à cette agitation
momentanée.
11 cil prouvé par la déclaration des témoins oculaires,
q u ’Alziari , failant manger le M arquis à fa t a b l e , pour le
„ tant qu’ il n’ aura pour M édecins que deux payfans & un
» qui le gardent fa n s rien f a i t e ,
» prtju d ice. »
iv ro g n e ,
qui mangerie Jes revenus à voire
�¿3
guérir de Favcrfîon qu*iî avoit pour l u i, lai fnifoit boire du
vin p u r , des liqueurs fo rte s, lui faifoit prendre du café
6c du ta b a c , ôc répendoit gaîm ent aux
repréfentations ,
que f a maladie étoit incurable , & que le v in , le café & le
taba c, nepouvoicnt pas lu i ja ir e plus de m al q u i l n en avoit.
L e (leur Sue., C hirurgien , viiicant le M arquis de Cabris
à M o n t r o u g e , dans l’état où l'ont réduit lix années de
tyrannie 5c de mauvais traitemens , a dit que parmi les
moyens de rétablir fa f a m é , il falloit qu.il eût la faculré
de voir 6c de parler à ceux qui lui feroiunt pla iiir; qu’on
eût l’attention d ’entrer dans fes idées , ne le contrariant
en rien.
L a dame de L o m b a r d , en faifant imprimer cet a v is,
a eu l’extrême limplicité d’écrire cette note à côté : c 'e fl
ce qu'on fa ifo it à Cabris , ju fq u au moment ou fo n époufe
l ’ en a arraché.
C o m m e n t le M a rq u is , à C a b ris , avoit-il la faculté de
voir ceux qui lui faifoient p laiiir, ôc co m m en t n’étoit-il
contrarié en rien ?
Il ne voyoit perfonne. D ans les iïx années qu'il a été
détenu ca p tif dans un cabinet de fon château , on n ’a
foufTert auprès de lui aucune vifue*étrangère. A in i i , s’il
ne voyoit pas ceux qu’il a im o it j au moins n ’éroit-il pas
obligé de voir ceux qu’il n’aim oit pas , excepté toutefois
A lzia ri , que fes complaifanccs criminelles ne rendoient
pas plus aimable.
M ais fa fille q u ’il a i m o i t , fa fille qu’il dem andoit dans
tous fes difeours , dans toutes fes lettres , il a pafle quatre
ans fans l'embralll-r , fans recevoir de fes nouvelles.
D a n s toutes les lettres I B ien tô t cette unique c o u fo U -
�64
tion lui fut arrachcc , de peur qu'il n’écrivît à fa fem m e.
Il cft
prouvé par la déclaration des témoins oculaires,
q u 'il y avoit dans la maifon les défenfes les plu s exprejjes de
ne remettre audit Seigneur M arquis aucune lettre de la p a n
de f a fem m e ni de tout autre , & de ne lu i fo u rn ir ni papier
ni plumes , afin qu'il n écrivît aucune lettre ni a f a fe m m e ,
ni a fe s amis.
O n dira fans douce qu’une trop grande application pouvo it être nuifible. Il avoit d on c au moins la liberté de la
p ro m e n a d e ?O u i, il fe prom enoit quelquefois : mais toujours
accom pagné d’un,valet fatellite , & quelquefois de deux, q u i,
pour ne le contrarier en rien , lorfqu’ il vouloir marcher dans
l'alléc de Sc. Jean , le forçoient a grands coups de poings de
marcher ailleurs. C e fait eft prouvé par la déclaration de
deux témoins oculaires.
Il cft prouvé que cette brutalité infolentc des V a l e t s , fc
m êloit m ême aux détails de leur fervice. Il eft prouvé par
une déclaration particulière , que C o u r t , l’un des dom eftiques placés auprès du M a r q u is , racontoic com m e
une
p io u e i l e , q u en chauffant ledit Seigneur M arquis , celui-ci
lui avoit donné un f o u jjle t , & que lui , Jean C o u rt, avoit
donné vingt coups de bâton f u r le dos dudit Seigneur M arquis.
arianne F lo u rt elle-même , fcm m c-de-cham brc de la
D a m e de Lom bard , fe croyoit aucorifée au mépris 6c à
l’oucrage , & difputoit audacieuiement
avec le M arquis
pour ne le contrarier en rien. Il eft prouvé par la déclara
tion d’un témoin oculaire , qu’un
j o u r , en fortant de la
tribune de l’ Egliic , M arianne difoic au M arquis a hautev o ix
: vous ctes f o x ,
0
vous fe r e ^ toujours fo u ,* ce q u e lle
répéta, cinq a f i x fo is d'un ton m enaçant..
La
�¿5
L à gardcrobe du Marquis ayant été pillée &c d ifp e rfé c ,
il a vécu pendant iîx années fans habits ôc ians linge. Il
étoit toujours à Cabris en robe-de-cham bre ou en vefte :
on a vu qu’il étoit parti pour Paris avec un feul habit 8c
d ix - n e u f chcmiies , fans bas & fans m ouchoirs ;
ôc la
D a m e de L o m b a rd , qui le plaint de n’avoir pas eu le temps
de faire faire íes m a lle s , n ’a pas encore fongé^ depuis plus
d e deux a n s, à lui faire parvenir un chiffon.
Les fenêtres de fa chambre étoient grillées com m e celles
d ’un fu rieu x ; 6c depuis qu’il eft à P a r is 3 dans cet état de
çrife 8c de trouble où l’on t réduit fix années de perfécurions , il intéreûe par fa tranquillité 8c fa douceur. Les
fenêtres de fa cham bre font toujours o u v e r te s ,
il fe p ro
m ène feul , il c o n v e r f e , il joue paiiiblement ; il fe livre
enfin avec un plaiiîr afïectueufement exprimé >àtous les amu*
femens que lui procure la petite fociété d ont il eft en vi
ronné.
O n a vu, dans le récit des fa its , qu’il étoit même arrivé aux
aftidés de la C u r a t r i c e , de faire coucher fans draps le Sei
gneur de la T e rre ,
un hom m e riche de 50,000 liv. de
rente. C ’efc ce que la D cm oifelle de C abris a affirmé à la
D a m e de Lom bard , en préfcncc des M a g iftra ts , Sc de tous
les parens aiTcmblés : aufli la D a m e de Lom bard a-t-elle dit
qu’on avoit amené cet enfant ( de 14 ans £c d e m i) aux
aflèmblées , pour lui faire infulter fon ayculc.
O n a fupprimé de ce trille récit , plufieurs détails <fjui ne
pourroient pas erre entendus fans dégoût. L e M arquis de
C abris, étoit dans fon Château , allimilé à ces infortunés ,
tombés par le bouleverfcment de tous leurs organes , dans
dans la claire des b r u t e s ,
attachés à la pierre qu’ils couI
�r
66
vrent de leur corps , & qui exiftenr >pour ainfi-dirc , au m i
lieu des horreurs de i’cxiiîetîcc.
V o ilà com m e la mère du M arquis de Cabris a f.iit inter»
dire Ton flîs , pour remplir envers lui un devoir d eptete /naicrnelU , pour obéir aux L o ix , pour v a lier fu r f a fanté.
Il étoit malade. La D a m e de L om bard
nous apprend
elle-même que des troubles antérieurs avoient a frotté fou
tempérament. Q a ’on
life
fes réponfes
faites devant le
C on fcille r-C o m m iila ire du Parlem ent d’A ix , & la manière
d o n t il parle , dans une grande tranquillité d’e f p r i t , des
foufrrances qui déchiroicnt fon c o r p s , attendrira les plus
infenfibles.
En cet é t a t , fa m ère, que la nature avoit établi fa g a r
dienne ; fa mère qui devoir faire au moins par tendrellc
ce qu’une autre auroit fait par humanité , fa mère s’empare
de l u i , le dépouille t l’enferme , l’e n v ir o n n e , pour guérir f a
f a n t é , de tout ce qui pouvoir augmenter fes douleurs , le
livre à dts m ercenaires, qui l’in fu lr e n t, qui le ty r a n n if e n t,
qui le frap p en t, &c qui pour le ca lm er, lui prodiguent des
alimcns Si des boiiTbns qui confu m cnt fes entrailles. P e n
dant lix années , elle écarte de lui tout ce qui pourroit le
rafleoir , le diftraire ; elle l’abreuve de privations & de dé
goûts : on diroit qu’elle s’exerce à embrâfer tous fes reff o r t s , moins encore par le régime brûlant q u ’elle lui fait
obfervcr , que par cette perfécurion le n te , décidée, qui mè
ne au défefpoir , Si. contre laquelle l'ame , pour s’ex h a ler,
dévore tout ce qui la retient.
Q u ’elle n’allègue point que ces fautes font les fiu tes de
fes a g e n s , Sc non pas les lionnes. C e qu’elle n’a pas fait »
elle 1 a laiiTé faire ; fie nous l’avons déjà d i t , elle eft c o u
pable de cousles excèscom m is en fon nom ôepar fon pouvoir.
�¿7
A u r o it - c n conçu le projet de juilifier un jour cette in
terdiction ü injnftement p ro n o n cée , Sc r/au roi t-on fuppofé
la dém ence que pour obtenir les moyens de la réalifer ?
D e s faits fi odieux exigent des preuves. Celles que la
M arqu ife préfente ne font pas fufpe&cs ; ce font des dé
clarations de quelques habitans de Cabris , fur lcfquelson
ne la foupçonnera pas d ’avoir e u , pendant le règne de fa
belle-mère , beaucoup d'influence ; elle a voulu cependant
proportionner les preuves à la publicité des faits ; elle a
dem andé , 8c elle demande encore qu’on
fafle fonner la
trom pette dans les rues de C a b r is , qu'on affcmble la mul
titu d e , qu’on interroge & qu’on écoute. La dame de L o m
bard s’y oppofe : cette réllftance eft un aveu forn\el. C e n’eft
pas avec les certificats du
D o c te u r , de ¿’honnête Chirur
gien y du Frère L a c e , du P rédicateur> du Chapelain , c ’eft-àd ;r e , de fes complaiians ou de fes co m p lice s, qu’elle peut
fe défendre. C ’eft la voix publique qu’il faut entendre. Si
elle n’a rien à fe reprocher , fi tous ces détails révoltans
fon t des m en fo n g e s, fon honneur exige qu’elle concoure
à l’enquête générale demandée par fa belle-fille. T a n t qu’elle
s’obftinera à fermer les cent bouches de la r e n o m m é e ,
on doit croire qu’elle eft coupable , puifqu’eüc craint d ’être
accufée.
Il n’eft perfonne q u i, en lifanc cette hifloire effrayante ,
ne tende auilitôt la main pour repoufler la dame de L o m
bard du cabinet du Juge à oui elle ofe demander encore
que fon fils foie interdit. Eft-ce donc pour le tourmenter
encore?
N o n ; nous ne lui faifons pas
cette injure : le cœur
d’Lne m è r e , de quelque intérêt qu’il foie a n im é , ne peut
lîj
�68
pas être cruel. N o u s avouons m ême qne relativement aux
excès com mis fur la perfonne de Ion iils s elle eft coupa
b l e , moins par fa mauvaise v o l o n t é , que par ia foiblciîc t fon incapacité (i) , par fa com plaifance aveugle pour tous
les intérêrs qui s’agitoient autour d’elle.
M ais elle v e u t, ou plutôt on la force de vouloir que fon
fils foit interdit , parce qu’il faut qu’elle ufurpe une puiff a n c e abfolne fur fa petite-fille , pour difpofer de fa per
fonne au gré de ceux qui guident fa v o lo n té , du M arquis
du Mirabeau , ou du
qu’elle obtienne
C o m te de G ra ile ; parce qu’il faut
encore l’adminiftration des b ie n s, p o u r
voiler ou pour confacrer les rapines de fes confédérés.
A l’égard de fa petite-fille, de la demoifelle de C a b r i s ,
rrous examinerons quel feroic ion f o r t , dans le cas de
l ’interdiction ; lorfque
nous aurons examiné l’état a£tuel
de fon p è r e , & fi l'état de fon père néceilite l’inEerdi&ion.
A l'égard des biens , il faut voir co m m ent la dame de
L o m b ard les a adminiftrés pendant fix ans , pour appren
dre fi elle feroit digne d e les adminiftrer encore.
A dm inistration
INJIBLLf,
L e premier devoir
d ’un C urateur eft de fa're appofer
les fccllés, ôc de faire l’inventaire des effets du pupille ou
de l’interdit. C e tte obligation , nécciïaire d’ailleurs pour la
décharge du C u r a t e u r , eft expreflement im pofée par les loix
R o m ain es, 8c plus expreifém ent encore par les itamrs de
P r o v e n c e , tant cités par la dame de Lom bard.
[ 1 ] S eytre, dans «ne
lettre du i M ars
1 7 8 } , parloir ainii de la»
d a m e de L o m b a r d : La cabale qui f a it mouvait e n te tête jo'tb le, qui ne
ja it p a s s ’ ndminiflrer tU t-m cm e , cette tête qui au roitbtfoin d ’ un C u xa ttu f
aulieu d ’eire Curatrice.
�69
M aires & alti Curatores, die cette loi lo c a le , cap.
de
T u tc l. arr. 10. S I tempore obi tus de cujus h xrcd itau agiuir
in dicla civitate pr.tfentes fu e r in t , illâ eâdem die obitûs ,
qu<e fa c iliter trunsferri pojjunt in tuto reduci capfafquefigillari fa c e tc per manum diclœ curiœ ordinarix pxosurent, de quibufquam atiiis poterit fie r it ettam ju ris commuais dilatione
pojlpojltâ deferiptionem debitam fie ri fa c ia n t cum ejfeclu ad
fa lv u m ju s minorum hujnfmodi. Q u o d fi ita fac-ere pofipofueTint, eifdem minoribus in cemum libris coronatorum LpfofacÎQ
tencantur ; pro qu/bus fie l esecutio realiter, prout fu prà , p r e f
iptione & apellaiione rejedis.
L a dame de Lombard devoit d o n c , au m om ent de fa
nom ination à la curatelle de Ton 61s , faire appofer les fcellés fur les effets d e fon fils , faire dreil'cr de tout un in
ventaire fidèle ; Sc faute d’avoir rempli cette formalité effc n tie lie , î'î’. c cit foumife à une peine pécuniaire , par la
loi même qui régit fa perfonne 6c Tes biens.
O n fe rappelle que le M arquis de
Cabris étoit encore
à A i x , pourfuivant fur l’appel de la Sentence du Juge de
G raife qui l’avoit in te r d it, lorfque , malgré cet appel ce r
tainement fuipenlit, la dame de Lombard ,
nom m ée C u
ratrice par une nouvelle S e n te n c e , faifoit enfoncer les ar
moires &
briier les ferrures du château de C a b r is , pour
fe mettre en pofîeilion de tous les effets de fon fils.
C ’étoit une fingulière manière d ’exécuter la loi qui lui
ordonnoit de faire appofer les fcclles.
L a même Sentence exigeoit que l’inventaire de tous les
meubles de l’interdit fût fait par un N otaire defi-gné, en
préfence d e l à C u ratrice & de deux païens.
�O n a vu nvrc quelle fidélité cct inventaire avoir été fait;
£c certes, en enfonçant les armoires , en brifant les ferrure?,
or; ne promet toit pas d’être fidèle.
U n mobilier de plus de 80000 liv. dont la M arquife de
Cabris repréfente aujourd’hui les mémoires & le s q uittances,
i’e trouve réduit à 1400 livres; n euf malles remplies de m eu
bles riches s tout récem ment apportés de P a r i s , n’on t pas été
ouvertes. O n n’a pas dit un m ot d’une b ib lio th è q u e , valant
au moins 11^000 livres; pas un m ot de l’argenterie ; pas un
m ot des meubles qui garnifioient l’habitation de la D a m e de
L om bard elle m ê m e , & donr elle n ’a que la jo u id a n c e; pas
un mot des meubles tranfportés par Ton fils à A i x ; pas un
m ot de tous les effets appartenans à la M a rq u ife d e C a b r is ,
laides à A i x , lors de fon enlèvem ent n o & u r n e , & devenus
le butin des Cervantes de la D a m e de Lombard.
Il eft: même conflaté par le fécond inventaire j fait en vertu
de l’A rrê t du Parlem ent de Paris, que plufieurs des meubles
dont on avoit daigné conftater l’exiitence , ont dilparu des
lieux où ils avoient été placés , pour être convertis à l’uiagç
de la D a m e de Lombard. ( 1 )
La portion la plus précieufe du m ob ilier, les titres de N o b le d e , les terriers, les pièces de recouvrement & de d éch arge,
tous les papiers enfin ont été l’objet d’une rapine plus révol
tante encore ; tk c’cft ici que la D am e de L om bard s’elfc
rendue coupable d ’un véritah'e-délit.
O n a vu com m ent les titres de famille Sc d’adminiftratiori
avoient été confondus Sc entaiTés fans defeription dans une
[ 1 ] Les
deux
inventaires ont ¿te joints
affeniblées de parens.
aux procès-verbaux des
�71
arm oire, fur laquelle le N otaire avoit appofé les fc e llé s , à la
réquiiîtion d ’A lz ia r i, Procureur de la D a m e de L o m b a rd , £c
des deux parensen préfence deiquels il falloit procéder.
L ’événem ent a prouvé que cette appolition de fccilés fur
des papiers précieux , dont 011 auroit dû faire la deferiptioa
la plus détaillée \ étoit moins une formalité remplie pour
éviter un travail long & p é n ib le , qu’un m oyen nouveau
d ’une invafion d ’autant plus crim inelle , qu’elle éioit c o m
binée fous un appareil judiciaire.
L a D a m e de Lom bard a brifé, ou fait brifer les fcellés
appofés fur cette armoire.
Elle s’eft e m p a r é e , &: elle a
difpcrfétous les titres. Cette perte effc inappréciable.Sans par
ler des terriers, & des pièces de recouvrem ent £1 de décha:g c , les archives do Cabris croient dépofitaires de tous les
titres de nobleflc , & ce dépôt feul pouvoit fournir les preu
ves à trente familles de Provence.
Les tirresde la rerre é toien t, pour ainii d ire, plus précieux.
E11 P r o v e n c e , point de féodalité ians titres. L a perte des
titres feroit pour la rerre de Cabris une perte au moins de
36,000 livres de droits Seigneuriaux.
L e N ota ire qui avoit appoié Iis fc c llc s , com m is par i:n
A r r ê t du Parlem ent pour les le v e r , & décrire tous 1rs
objers mis lous les fc ellé s, a conilaté par fon procès verbal,
qu’il avoic rrouvé les fcellés
b rifés,
bc
dans l’armoire
ouverte , des papiers relatifs à l’adm iniilration de la C u
ratrice.
avoit
Preuve n o u v e lle , mais in u tile , que la-C u ratrice
enlevé le« papier» renfermés dans cette a r m o ir e ,
lors du bifarre inventaire fait à fa re q u ê te , & qu’elle les
avoit remplacés par des papiers relatifs à fon adminiftra-
�T o u t ic
7Z
momie fait que le bris de fccllés eil un délie
qui ne peut être pourfuivi que par la voie extraordinaire, [ i]
Sa moindre confcqu encc cft de faire préiumer q u i l n a eu
Heu que pour fpolier les efîets mis fous la main de la
Juftice. [z]
i c i la preuve du délit c il com plette. La dame de L om b ard
efl d o n c convaincue d’une ipolation Ci confid érab le, que la
valeur des effets fpoliés ne peut pas être eftimée.
D a n s l’impuiflànce de nier le d é l i t , la dame de L om b ard
a voulu lcx c u fe r dan* fa Requête préfentée à la ({dernière
affemblée des parens. Elle a prétendu que ce fcellé n’é toit
point un fcellé ju d ic ia ire , q u ’il n’avoit pas été ordonne
par le J u g e ; que le cachet appofé étoit fon propre c a c h e t,
appofé par e l l e - m ê m e , & qu’ainfi elle avoit pu le rompre
fans y être autorifée par Juftice.
Excufe pitoyable Sc faulTe!
fcellés fur les effets
D ’a b o r d , l’appofition
des
de l’i n t e r d it , étoit une formalité
expreflément ordonnée par la Loi du pays : il n ’étoit pas
néceiïairc qu’elle fût
ordonnée par le Juge.
E n fai fane
appofer les fc c llé s , la dame de Lombard s’eft conform ée
à la Loi ; mais elle devoit auifi faire faire l'inventaire.
C e tte fécondé obligation c il une dépendance im m édiate
de Ja première.
[ i ] U n A rrê t d u P arlem ent de B a rjs , du 7 M a i 1 7 3 1 , a infirmé une
Sentence pai laquelle le L ie u te n a n t-C r im in e l d u C h â te le t a v o i t, fans
décret ni in te r ro g a to ir e , renvoyé à l ’audience fur une accufation de
corruption de dom eftiques pour rom pre des fcellés. L e m cn ie A r r ê t
décréta l ’inform ation pour parvenir à connoître les perfonnes contre
lesquelles la plainte avoit été rendue , & qui n’y étoienc pas nom m ées.
[ 1 ] R a v i o t , fur la coutum e de B o u r g o g n e , queft. 1 5 0 , n°. 37.
Enfuite y
�73
E n fu ite , le Juge n’avoit polht ordonne d ’appofer les
fc e llé s , parce qu’il avoir ordonné de faire l’in ven taire, ce
qui fuffilo t
pour conftater les quantités 8c les efpèccs
confiées à ia Curatrice. La dame de Lombard a fait appofer
les lcc'l^s fur les papiers , pour n’être pas obligée de les
invcnrorier : elle a tait ce que le Juge n’ordonnoit pas ,
pour ne pas faire ce q u ’il o rd o n n o it; c ’eft à-dire, qu’elle a
rempli la moitié de ion d e v o ir , pour fe difpenfer de l ’autre
moitié.
D a n s une tête auiïi fo ib le , il n’eft pas étonnanc que les
faits fe confondent. Ce n’eft point fon cachet qui a été
appofé fur l’arm oire; c ’eft celui du N otaire lui même. Il
faut lire les deux procès-verbaux. Il déclare dans le premier
qu’il agit en vertu d ’O rd o n n a n ce du J u g e , qu’il n ’a été
fait aucun inventaire des papiers, ôc qu’// a appofé le fc e llé
de fu s armes à la réquifition c^rs parties. Il conftare dans
le itc o n d , que ce fcellé a été brifé dans Ion a b f e n c e ,
q u ’il n’a été trouvé dans l’armoire aucun titre , ni de fam ille,
ni de p rop riété, mais des pièces de la geftion de la C u ratrice,
poftérieure à la date des fcellés.
E n f in , en fuppofant deux fauflecés : que cette appofition
de fcellés ne fut ordonnée ni par la L o i , ni par le J u g e ,
ôi que le
cachet appofé fut le cachet de la dame de
L om b ard ; ce ieroit d on c une rufe employée par elle pour
ecarter la defeription des papiers, Sc s’en faiiir im puném ent ;
&c cette rufe feroit d’autant plus co u p a b le, que le nom &
l ’appareil de la J u ftice , lui donnoient un extérieur impoiant.
C.'cil fur la foi de cette feinte fo r m a lité , que les parens,
ceniés
pre/ens à l’in v en ta ire , auroient confenti que les
turcs & papiers ne fu ik n c pas inventoriés. Brifer ce fimple
K
�74
cachet en l’ abfcnce de ces p a re n s , feroit une infidélité
auifi criminelle que le bris d’ un fcellé judiciaire» puifqu elle
auroit les mêmes c o n fé q u e n c e s , puifqu elle feroiî le prétexté
ou le m oyen de la fpoliacion des titres 8c papiers Tans
inventaire.
A i n i i , dans tous les c a s , la dame de L om bard ne pourroit exeufer l’omiiTion frauduleufe d’une formalité preferite
par la L oi & par le Juge.
D a n s tous les c a s , elle ne
pourroit fe juflifier de n’avoir pas fait inventorier les titres
& papiers pour les fouitraire &
D a n s tous les c a s ,
les difperfer à fon gré.
elle feroie coupable
d ’infidélité , &C
foum ife aux peines prononcées par la L oi.
L es autres abus de Tadminiftration fon t auifi nombreux
qu’intolérables.
O n a vu les meubles diiperfés & anéantis; ces meubles,
que le M arquis de C abris a vo it achetés à Paris , Sc donc
les mémoires fon t produits ; ccs mémoires montant à près
de 70,000 li v r e s , d ont la dame de L om b ard a payé ellem êm e une partie.
O n a vu les bois de h a u te -fa ta ye coupés & v e n d u s ;
les biens affermés par des
écrits fous fe iH g s-p riv és, &
pour des prix inférieurs aux prix offerts au M arquis de
C abris lui-même ; les fermages exigés d’a v a n c e ; les charges
&. les droits royaux arriérés; les terres féodales données
fans cenfives ; enfin , 300,000 livres au moins de dettes
contra&écs , 6c 300,000 mille livres au moins reçues &
dilapidées dans iix années , fans autre dépenfe légitime
que celle du Marquis de C a b r is , la peniion de fa femme Sc
celle de fa fille , & l’on a vu ce que le M arquis de C abris
pouvoit depenfer; 5c la penfionde fa fem me a été long-tems
�75
<3e 3000 livres , & cnfuice de 4000 livres , 6c Ion
fait
que fa fille étoit au C o u v e n t à G ra d e , à 100 livres de
peniion.
O n a vu le com pte de Seytrc arrêté fans d étails, Oins
d éb ats,
fans
pièces
juftificatives ,
&
Seytrc
conftirué
créancier de 61,000 l i v r e s , d ont 50,000 livres font déjà
p a y é e s , 6c doivent être refticuécs de l'aveu même de la.
Curatrice.
O n a vu fur-tout la tranfa&ion paiTée entre la Curatrice
& fes trois gendres , beaux-frères du M arquis de Cabris ,
par laquelle la C u ratrice fixe un prétendu fupplément de
légitim e
déjà doublem ent payé en 1 7 7 5 , Par ^es
k ° ns
offices de Seytre , alors curateur du Marquis de C a b r i s ,
à une fomm e d ’environ 200,000 liv. pour laquellcelle h y p o
thèque les objets les plus clairs de la fortune de fon fils,
6c l’on ie iouvient que ce fupplément de légitim e étoit
fixé par le tcilam ent du père c o m m u n , à 8000 livres pour
chaque feeur du M arquis de C a b r i s ,
ôc pour
les trois
c n fe m b le , à 14,000 livres.
T ou tes les
mains
pilloient autour
incapable , infouciante ,
de
fatisfaite des
la C u ratrice
refpe&s
qu’eile
recevoir tranquillement dans fon fauteuil à G r a l f e , 6c de
l’empire qui flatroit fa crédule Si. puérile vanité.
Les déclarations des Fermiers , annexées aux procèsverbaux
faits en l’H ôtel
de
M.
le
L ie u te n a n t-C iv il,
énoncent pluiieurs Maridemens donnés fur eux 6c acceptés,
lans énoncer aucun motif.
Le Bilan du fieur B o n in , [1] aujourd’hui annexé aux
[ 1] C ’eft au fîeur Bonin que la dame de L o m b a r d avoit afferme
pour lOjOOO livres ,
les moulins banneaux à h u ' l c j dont on avoir
K
ij
�7<Z
mêmes p rocès-verbaux, fait mention de plusieurs m andats
ou billets acquittés par l u i , fur-tout à A l z i a r i , pour 6,906
livres 10 fols 5 d en iers, &c cette lornme paroît acquittée
depuis le mois d ’O c to b re 1 7 8 1 , juiqu’au dix M a i fuivant.
C o m m e n t dans l’efpace de fix mois , &C à quel titre,, cette
fo m * ie a-t-elle été payée à A lziari ?
Le m êm e Bilan relate au 14 Janvier 1783 , un billec
de 4800 liv. payable a la fin du mois de Novembre fû iv a n i >
à M ‘ G a y te , A vocat de la dame de Lombard, 6c a&uellemcnc
ion fondé de pouvoirs.
C o m m e n t M e G a y te ctoit-il créancier de 4,800 liv.? [1]
O u a vu la C u r a t r i c e , partant pour P a r is , donner la
procuration la plus é te n d u e , pour régir & adminiftrer en
fon a b ( e n c e , à M e G a y t e , A v o c a t ,
0
quelquefois Juge v
lo r fq u il s’ agity pour l'intérêt de celle qu'il repréfentet d ’arrêter
offerc au M arq u is d e C a b ris 14 ,0 0 0 liv.
d eux
ans
après, &
Bonin a fait banqueroute
ceux q u i o f i o i e n t 14 ,0 0 0
livres n ’ont pas fait
banqueroute.
[ t j C e t t e queftion trouve fa réponse dans une L ettre de S e v t r e ,
du 6 * Î u in 1 783 , déjà im prim ée : «■11 en coûte
100 louis à votre
» maifon ; l’adminiftratrice donna à Bonin une quittance de cette f o m m e
»> le 14 Janvier 1 7 8 3 , fur la paye des moulins à écheoir en N o v e m b r e
» prochain,
»» tion de
» prouvent
3c en é c h a n g e , le failli donna
la m ê m e f o m m e , payable au
que d ’abord il 1avoit paffée fur
» & puis comme : l s p a r t a g e n t &
a
fe m êm e jour fon o b lig a m êm e
terme : fes livres
le com pte du P ro c u r e u r,
caufe de la fa illite ,
oit
a trouvé
» q u i l étoit plus convenable de le palier iur le com pte de \'A voca t
o qui figure dans le Bilan. O n n ’eft plus étonné k i de ce q u e ,
de
» brouilles qu ’ils é to ie n t, ils fe fo n t étroitem ent liés : on ajoute q u e
» t'eft aux dépens de votre maifon , & parce q u ’on abufe de la croy ance
o> £' de ¿>1 foibleffe de celle qui l ’ ad m inijhc* «
�77
Iss exécutoires du C onfeil d 'Ê ta t. O n î v u , malgrc cettc
procuration , paflée en préfence d’A lz i a r i, A lziari lui-mêm e
toucher les revenus de la t e r r e , com m e fondé de pouvoir
de la Curatrice. O n ne peut pas exiger un exemple plus
frappant de la licence autorifée par le défordre.
O n a vu enfin la C uratrice , pour raiTcmbler les reffources de fon vo y a g e & de fon féjour à Paris , exiger
d ’avance les revenus de
fon fils,
mettre
en gage Ion
arg en terie, vendre fes boucles d ’o r , arriver à Paris avec
24,000 livres dans fon porte-feuille, trouver fon fils & fa
p etite-fille réduits
au fimple n é ce ila irc , & 1 obtenant à
c r é d it ; ne pas leur tendre un é c u , & garder les 24,000
liv. appartenantes à fon fils, pour les frais de la demande
en interdiction qu’elle venoit intenter contre lui.
Il faut laiiler les ames honnêtes fc pénétrer de ce trait :
le fentiment eft plus éloquent que la parole.
V o ilà les preuves d ’une bonne adm iniitration , que la
dam e de L om bard préfente à la J u llic e , pour mériter Ht
obtenir le droit d’adminiftrer encore. [1]
La raifon
&
la
Loi la repoufl'ent avec mépris. Elle
FlNS DI non
prétend à la confiance de la J u ftic c , lorfqu’elle doit redouter * 1 c Ev ° 1K-
[ 1 ] 11 feroit ridicule de parler ici du prétendu co m pte par elle
rendu devant M * Boulard , ancien N o t a ir e , conform ém ent à la Sentence
d u 6 A v r i l 1784- C e co m p te 11’a été ni v u , ni examiné , ni débattu par
les parties intéreflees. N ’e f t - i l pas étonnant que M * Boulard , nncttn
N otaire ,
fe
foit
attribué
iine
au:orité
fuffifante
pour
allouer
les articles de ce c o m p t e , en déclarant q u ’il n ’a eu pour le fo rm er
que des renfeignem ens fuperficiels ? N ’eft-il pas plus étonnant e n c o r e ,
q u e les parties intéreflees, n’a y e n t p u , ju fq u ’à p r é fe n t , obtenir la c o m
m unication des Pièces Juftifkatives de ce prétendu cu .npie ?
�7*
Tes vengeances.
T o u te s
Tutor. £ Curât. du f f ,
les
L o ix
du
titre
de fu fpecl.
ÔC du cod, s’elevcnt contre -elle.
Suivant la Loi 3 de ce t i t r e , au f£, §. 16 .’ le tuteur q u i,
par fraude ou par n é g lig e n c e , n’a pas fait inventaire des
effets du p u p ille , doit être mis en prifon : T utores, qui
repertorium non fecerunt vinculis publicis jubetur conti
nt ri , & infuper pro fu fp e d is habentur. [1]
La m êm e L o i , §. 5 , prononce la deilicution du tu teu r,
s’il a commis des infidélités dans fa tu t e lle , s’il a caufé
quelque dom m age au pupille , s’il a fouftrait fes b ie n s ,
s’il a décourné fes moyens de fubiîftance. S i fo r te gm jfutus
in tutelâ e f l, aut fordidd egit , v el perniciosè pupiLlo , v el
aliquid intercepit ex rebus p u p illa rib u s, fufpeclum poflularc
licet.
La Loi 7 du même titre , §. 1 , punit par la deftitution
de la Vuteilc , non-feulement la fraude c o m m ife , mais la
négligence g roflière, parce qu’elle efl: très-voifin e de la
fraude : S i fra u s non f it adm ijfa, J ed lata neghgcntia quia
ifla prope. fraudent accedit ; removeri hune quaji fufpeclum
oportet.
La Loi 7 , cod. de fu fp . Tut. v e l Curât, décide qu’un
tuteur ou un curateur a cc u fé , doit être privé de ics fon c
tions & de fon p ou voir, jufqu’au jugem ent de l’accufation ;
6c pendant l’in t e r v a lle ,
un
autre
doit être chargé
['-] T o u t ce que ces L oix du tir. 16 du f f ,
de
ordonnent contre les
tuteurs fufpefts t elles l’appliquent égalem en t aux curateurs du furieux
8c «.lu prodigue.
N on tantum autem adolefcentis cu ra to r, f e d etiam
fu r io f î, vel p rod ig it uc fu fpeclus removeri p otejl. L eg. 5 , ff. de fufp. tut.
v e l c u u t . §. 1.
�79
l ’adminiftration. Eum quem ut fufpeclum tutorem v e l curatorem a ccu fa s, pend.en.tt caufâ cognitionis
ahjlinere ab
admïnijlraùone rerum tuarum , donec caufâ fin ia tu r , pr.tfes
Provincia juhehit. A liu s ramen intereâ in
locum ejus in
adminifiratione rerum ordinandus eji.
Ainfi d o n c , au m om ent où la dam e de Lom bard a été
accuféc ; lorfque la M arquiié de C abris s’eft élevée contre
les abus de Ton ad m in iftra tio n , lorfqu’elle a rendu plainte
d evant les premiers Juges des excès com m is fur la perfonne de Ton m a r i , lorfqu’clle a renouvel* Tes plaintes
devant M . le L ieu tenan t-C ivil; dès ce m om ent les fo n d io n s
&
r autorité de la dame de Lom bard auroient été fufpcn-
ducs , fi d ’ailleurs l’A r r ê t du C o n fc il des D épêches ne
l’avoit pas dépouillée de la curatelle.
Les plaintes de la M arquifc de Cabris auroient fuffi
pour néccffirer la difpoiition de la Sentence du 6 A v r il
1 7 8 4 , q u i , fur l’avis des parens a iîcm b lés, a nom m é le
fieur C o u rt Régiiïcur des biens du M arquis de C a b r i s ,
jufqu’à ce qu’il fût autrement ordonné.
1
E t lorfquc la fufpenfion de fes p ou voirs, s’ils fubfiiloient
e n c o r e , feroit prononcée par la Loi m ê m e , jufqu’au ju
gem en t de l’accufation , elle propofe férieufement de lui
rendre fes pouvoirs anéantis, avant m êm e que l’accufation
foit examinée.
C e c i démontre avec plus d’évidence encore la néceifité
de juger avant tout l’objet d^s plaintes rendues par la M a r
quifc de Cabris , le mérite des fins de non-rcccvoir qu’elle
¿lève contre fa b elle-m ère.
Si les griefs copfignés dans ces p la in te s , radminilfcratiçn
�8o
cruelle de
la perfonne , l’adm iniftration
deftru&ive des
biens , n’étoient pas pour la juftice fuffifamment conftatés
par les preuves que la M arqu ife de C abris p r é fe n te , il f audroic l'admettre , malgré la réfiftance de la D a m e de L o m
bard , à la preuve publique q u e lle
follicite
; & jufqu’à
l’événem ent de cette preuve , la D a m e de L om bard
ne
pourroic être écoutée ni dans fa demande en interdiction
de fon fils , ni dans fa demande à fin d !’être nom m ée C u
ratrice.
Mais les preuves acquifes fuffifent déjà pour éclairer la
J u ftic e , & fixer fa déciiion. Q u e faut-il d avantage que des
écrits que la C u ratrice n’ofe point attaquer , ôc fes pro
pres aveux?
D e s lettres de Seytrc , des déclarations particulières, donc
la D a m e de Lom bard auroic dû pouriuivre les auteurs, s’ils
cuiîent attefté des faits calom nieux ; aifurent tous les mauvais
ttaicemens d o n t le M arqu is de C abris a été l'objet 6c la
vi£time ; & la force avec laquelle elle réiifte à ce qu’une
enquête publique foie ajoutée à ces déclarations particu
lières , eft-ellc m ême une preuve invincible.
Les abus dans l’adminiftration des b ie n s, f o n t conftatés
par des écrits placés fous les yeux du M agiftrat.
Les M ém oires des meubles achetés à Paris par le M a r
quis de C a b r i s , m ontant k près de 70,000 liv. , fur lefquelles la Curacrice elle-m êm e a payé près de » 1,000 liv. ,
&, l’étrange inventaire fait par la C u ra trice , qui porte la to
talité
des
meubles
de
fon
fils à
1400 liv. font pro
duits.
L e com pte par lequel Scytrc a été, fans titre & fans ol jet,
conftitué
�8*
conftitué créancier de 61,000 Iiv. cft p ro d u it: les q u itta n
ces des 50000 Iiv. qu’il a déjà reçues, fon t repréfentées. La
coni'ulration par laquelle il eit décidé que Scytrc peut être
pourfuivi pour la reititution , même par la voie extraordidinaire , exifte dans la main de la D a m e de Lom bard.
L a trania& ion par laquelle le prétendu iupplémcnc de
légitim e des trois fœurs du Marquis de Cabris , a été por
tée à près de cent mille écus , cft produite.
Les baux faits
par la C uratrice , fous
fcing-pr.ivé &
pour des prix inférieurs aux prix offerts fon t produits.
Les faifics faites par les Receveurs des droits du R oi &c de
la Province , pour le payem ent des fommes non acquittées
par la C uratrice , ion t produites.
Les procès-verbaux du N o t a i r e , qui prouvent & îc bris
de fc e llé s , & le défaut d’inventaire des titres
p a p ie rs ,
iont produits,
t
Les quittances données par A îzia ri , com m e fondé de
pouvoirs de la Curatrice , & la procuration de la C uratrice
donnée dans le même te m p s , &c en préfence d’ A l z i a r i , à
M e G a y te , A v o c a t de G r a f f e ,
font produites.
Enfin , la Curatrice a avoué elle-même dans les aiTemblces de fa m ille, en préfence du M agiftrat , que pour faire
la guerre à fon fils , elle a voit mis en gage la ig e u te rie de
l'on fils, SC vendu les boucles d’or de fon fils.
Q uelles preuves voudroit-on
p ro u v é
chercher encore ? Il c fl;
que la D a m e de L om b ard s’efl: rendue, c o u pa bl e
de toutes les infidélités dont une feule , aux te rm e i des
L oix qui la condam nent , fuffiroit pour fa deilitution , il
elle étoit encore Curatrice. U n e feule fuiiiroit donc auiïi
‘
L
�S»
pour la rejeter loin de l’adminiflration qu’elle veut faifir ;
s’il éroit poffile que fon fils fût i n t e r d i t , s’il étoit poilible
que l’injare faite à fon fils par l’iniquité de la première
interdiction , ne fût pas capable de le garantir de la fé
condé.
Parens
nomi-
E n écartant la C u ratrice , il faut écarter avec elle les
natf.urs
8t ceux qui o n t
fRHMlÈRE Dcura* parens qui l’avoient nom m ée C uratrice
XÏLIE.
intérêt de la n o m m e r: encore par e x e m p le , ceux qui lui
ont prêté de l’argent q u ’elle difoit deftiner aux befoins de
l’interdit ; parce que le fuffrage des uns &
des autres effc
in d ign e de confiance.
En d r o it, les nominatcurs fon t garans &: rcfponfablcs du
T u te u r qu’ils n o m m e n t , parce que le Juge en confirm ant
leur choix , cède à l’aifurance qu’ils lui d onnen t de la fuffifin c e & de la capacité du Tu teu r. A u di font-ils tenus des
m êm es in té r ê t s , & fournis aux mêmes peines que le T u
teur dont ils font garants. (i)
D a n s l’e fp è c e je s parens qui on t fait nom m er la D a m e de
L om b ard C uratrice de fon fils ,
adminiftration. Leur fuffrage
fon t refponfables de fon
feul établit ce cautionne
ment dont rien ne peut les d é liv re r, ôc dont les circonftances rendent les réfuitats effrayans. L a
D am e de L om bard
cft abfolum ent infolvable. Elle ne pofsèdc rien : elle n’a
pour fubfiilcr qu’une penfion de 500a liv. , établie fur les
[ 1 J Etiam jidejujjbrem & Ltredem fidejujforis ad ratïonem ea/ndùm itfurarum revocandos ejje confiât , ad quam &
tutor rcvocatur. L e g . 3. if.
d e fid e j. & nomïna. & h*rc tuto.
Easdem reputaciones habebunt quas tutor : L e g . 5. Ibid.
�83
biens Je Ton fils pnr le ccilamcnt de Ton mari. O n vi ont de
voir l ’immenfité des répétitions
qui
v o n t être
exercées
contre elle. Les parens nominateurs, refponfables de fa g e f tion , n’ont pas d’autre m oyen
d’éviter le fardeau de ces
répétitions , prêt à tom ber fur eux par l’iofolvabilité de la
C uratrice, que de faire interdire encore le M arquis de C a b ris,
pour remettre dans la m êm e m a in , avec les pouvoirs d ’une
n ouvelle adminiitration , les Fautes de l’ancienne.
L a Juflice rejette leur fufFragc , entraîné par un intérêt fi
vifible &. fi grand.
C e u x qui ont eu la foibleiTe de prêter de
l’argent à la
C u ratrice fous le prétexte des befoins de fon fils in te rd it,
fon t animés par le m êm e in té rê t, 6c repoufléspar le m êm e
motif. Leur débitrice eft in fo lv a b le , & le feul m oyen qui
leur relie de ne pas perdre leurs avances , eft de faire inrerdire encore le M arquis de Cabris pour rendre à fa mère ,
avec les pouvoirs d ’une nouvelle adminiilrarion , le pou
voir d'acquitter les fommes prêtées.
M ais au milieu de ces votans intércûes , il en faut diftinguer trois qui joignent à l’intérêt com m un un intérêt plus
important. Les trois beaux-frères du M arquis de C abris ,
com batten t non-feulement pour fe fouftraire aux fuires du
cautionnem ent contracté par la nom ination de la D a m e de
Lom bard à la curatelle fi mal adminiltréc ; mais pour c o n ferver, s’il eft p o fu b leja portion des biens de l’interdit que la
C uratrice leur a li v r é e , fous le prétexte du prétendu fupplément de légitime. Le ieul moyen , co m m e l’on v o i t , eft
de faire interdire encore le M arquis de Cabris , pour conf a c r c r ,p a r l’autorité d’ une fécondé adminiitration., les rapi
nes de la première.
L
ij
�84
C ette expultîon de tous les nominacei rs de 1 ancienne
curatelle ÿ va trouver place lorfque nous examinerons le
nom bre & la diverfité des avis qui protègent ou qui co m
battent la demande a£tuelle de la D a m e de L om bard en.
interdiction de Ton fils.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
L e M arquis de Cabris e jl- il aujourd’ hui dans la nèccjfité
de l ’ interdichon ?
A près ce qui vient d’être dit , la première vérité qui doit
frapper , eft l’inutilité de cette queftion.
Si la demande de la D a m e
de Lom bard eft rejetée ,
co m m e elle doit 1 erre , par les indignités , les incapacités ,
les infidélités qui Ce raiTemblent fur ia t ê t e , il eft ieniible que le Marquis Ton fils , f û t - i l d’ailleurs dans la nécefliré de l’inrerdi£tion , ne peut pas être interdit.
Cependanc il le M arquis de Cabris eft aujourd’hui hors
d ’état d ’adminiftrer ia perfonne &. fes b ie n s , il faut que la
J-ullice veille fur lui.
« N ou s ne fommes que les adminiftrateurs de nos b ie n s,
» & la Loi qui nous en confie le g o u v e r n e m e n t, fe réiêrvc
« toujours l’empire abfolu qui lui appartient pour étendre
« ou refferrer notre pouvoir , fuivant les vues que la iageiTe
»» lui inlpire , & qui n’ont jamais pour objet que notre vém ri table intérêt. »
C eft en écabliiTant cette vérité , que le célèbre C o c h in
détailloit les d if lé r e n s moyens employés pas la Juftice pour
aflurer les intérêts des foibles d’c f p r i t , 5c des incapables.
�« D c-là font nées , continue-t-il , ces différentes précati» tions que la Loi prend courre des m ajeurs, pour empê« cher qu’ils ne diiîipent leurs biens , lorfqu’ils paroifténe
» incapables de les conicrver ; les uns font abfolumenc
» interdits de toute diipofuion , les autres ne le font que
» par rapport à l'aliénation des fonds ;
aux autres on
m donne un iimplc ^ o n f e i l , fans l’avis duquel ils ne peum vent contracter ;
il y en a qui ne font gênés que dans
» un feul genre d’action , par exemple , à qui on défend
» d’entreprendre aucun procès fans l’avis d ’iin A v o c a t.
»» L e remède change fu iva n t les circonflances, & c e f l la
» nature de chaque affaire qui règle la manière dont on doit
« pourvoir aux befoins de ceux a qui ces fecours fo n t n é c e f
faires. »
L a Juftice , dans cette circon ilance com m e dans toutes
les autres , appliquera donc le remède fuivant le befoim
Elle fera cc qui eit fuffifant : elle ne fera point ce qui eft
inutile. ■
D e u x partis font propofés dans l’ailemblée des parens.
L e p r e m ie r , conform e aux demandes de la D am e de
Lom bard. Le fécond , conforme aux demaxuies de la M arquife de Cabris.
Suivant le p re m ie r, il cil indifpc niable d ’interdire le M a r
quis de Cabris.
Suivant le fécond , il fuffiroit d’établir des confeils à l’adminiflration de fes biens.
Par le p re m ie r, dans le cas de l’inrcrdi£tion p ro n o n cé e ,
la D a m e de Lom bard feule, fans g u i d e , (ans confeils , cil
appelée à la curatelle de f'on fils , c ’cft-à dire à l'administra
�96
tion de fapcrfonne , de Tes b ie n s , & d e laperfonnc de fa fille.
Par le fé c o n d , dans le cas de l’interdiction p r o n o n c é e ,
la M arquife de Cabris eit appelée à la curatelle honoraire ;
le ficur Court,déjà nom m é régifleur, à la Curatelle onéraire,
toujours fous Paiiiilance de C onfeils éclairés.
Ii faut balancer les avantages ôc les inconvéniens de ces
deux partis , en oubliant pour
un m om ent les fins de
non-recevoir qui écartent la D a m e
de L om b ard 6c ceux
qui la pratiquent ÔC qu’elle favoriié.
I n u t i l i t é
L a liberté fociale eft le plus grand bien : la privation
de
I .' INTERDICTION.
de cette liberté eft le plus grand mal ; fie fi ce mal eft
employé com m e re m èd e, au moins ne fa u t - il l’employer
qu’à la dernière e x tr é m it é , lorfqu’il eft indifpen fable, &;
lorfqu ’un remède plus doux ne peut pas le remplacer.
» Q u e le p r é te u r , s’écrie la Loi , fe garde d ’enchaîner
>j un citoyen des liens d ’une curatelle, légèrem ent 6c fans
» connoillance de caufe. »
Si l’interdiction en
général eft un remède extrêm e ,
l’in te rd id io n prononcée pour caufe de d é m e n c e , a de plus
le
trifte
inconvénient d’étendre la tache
que fa caufe
p r o d u i t , jufqucs fur les defeendans de l’interdit.
Lorfque le citoyen frappé de cette interdiction , a des
e n fa n s , fie fur-tout des enfans q u i , par leur naiflancc 6c
leur fortune , ont des droits aux alliances les plus difting u é e s , il faut que l’interdiCtion foit d’une grande u tilité,
pour que le bien puiiTe compenfer le m a l, 6c c’eft encore
un m otif de ne l’employer que dans la plus grande néceffité,
6c à défaut de tout autre m oyen.
O n fait que trois caufes peuvent provoquer l’interdiCtion :
fureur, d é m e n c e , prodigalité.
�*7
D a n s le premier c a s , la Loi a deux objets : la sûreté
de la perfonne & la sûreté des biens. L e furieux peut
mettre en danger fa perfonne 5c celle des autres.
D a n s les deux derniers c a s , la Loi n’a q u ’un o b j e t ,
la sûreté des biens. 11 ne faut pas craindre que i’im bécille
&
le
prodigue attentent fur leur perfonne ou fur celle
des autres.
A i n f i , dans ces deux c a s , lorfque les biens font confervés
par des moyens déjà é ta b lis , ou lorfqu’ils peuvent être
affûtés par des précautions poflibles &. fuffîfanres, il ne
faut pas fonger à l’humiliante refl'ource de Tinterdidlion.
C es raifons on t introduit com m e une vérité g é n é ra le ,
que l’intcrdi£tion feroit in ju fte , parce qu’elle feroit inutile,
contre un hom m e d ’une telle foibleiïe d ’e f p r i t , q u ’il ne
pût manifefter
ni
m in e u r, parce que
exécuter aucune volonté ; contre un
la tutelle p ro d u it, quant aux biens
qu’il s’agic de c o n fe r v e r , le m êm e effet que l’interdi& ion
&. en fin , contre un hom m e dont les biens font fubftitués,
parce que la fubftitution feule rend toute aliénation impoiTible.
e ces principes g é n é ra u x , & pour en faire l’applicntion,
paflbns à l’examen de l ’état aftuel du M arqu is de Cabris
relativem ent à fa p e r fo n n e , Si relativem ent à fes biens.
L a r a ifo n , ce don fi g r a n d , qui diilingue notre efpèce,
do n t nous lorames fi fiers, eft un don fragile. L ’orgueil
de le poiTéder cil bien humilié par la foiblellè des relion s
d on t l’afTcmblage le p r o d u it, & dont l’accord le dirige.
Un
accident i m p r é v u ,
une
joie f u b it e , un
chagrin
c u :fa n r , tout ce qui franchit l’cfpace des effets ordinaires,
peur troubler ou détruire ces rcilorts d éliés, & fufceptibles.
de toutes les impreffions.
état actuel du
Dk
�88
Q u ’on choiiîile l’être de La plus robufte co n ilicu tio n ,
qu’on l'arrache d e .fa place o rd inaire, qu’on l’enlève à fes
habitudes
jo u rn a lière s,
facultés 6c de
à f e s . plaifirs ,
à l’ufage de Tes
fes rcflourccs ; qu’on l’a (TujétilTe à une
tyrannie longue 6c flétri l i a n t e , qu’on afloibliil'e les mem-*
bres par les douleurs , 6c fou ¡une par la iervitude ; cet
h om m e b ie n tô t ne fera plus un h o m m e ,
iî la railon efl
l ’unique attribut de {’humanité.
O n efl encore indigné de tout ce que le Marquis de
C abris a foufîert fous l’empire de la curatelle exercée par
fa mère. Interdit fans m o tif lé g it im e , au printems Je ion
â g e , au m om ent où fa majorité a ccom p lie, m ettoit dans
fa main
le libre ufage d’une fortune coniidérable ; cette
chaîne honteufe 6c non m é r it é e , pouvoit feule révolter
fon arne ôc troubler fes fens : ainfi , l’interdi£Uon feule
étoit capable d’opérer la caufe de l'interdiction.
É l o i g n é d e fa f e m m e , d e fa f i l l e , d e fes a m i s , d e tous
c e u x qui
la plus
lui é t o i e n t
chcrs ÔC agr éa b l e s , r e n f e r m é
pet ite c h a m b r e
é t é lcul
au
monde t
de
p ri v é
fon
de
c h ât e au ,
toute
comme
dans
s’il eût
communication
Sc
des plus (impies a m u f e m e n s , c o u v e r t d e h a i l l o n s , t y r a nn i f é
6ç b a t tu par fes va l et s ; c o n t i n u e l l e m e n t irrité , 6C par les
ri gueurs de fa c a p t i v i t é , 6c par le
il
éroit
nourri ;
pouvoit-il
comment
réfiiler à fix
cet
a n né e s
feu des
infortuné
de
cet
al imens d o n t
j eune
homme
étrange f u p p ü c c ,
aux efforts c o m b i n é s c o n t r e fa raifon.
La conduite des Subalternes déchaînés contre'le M arquis
de Cabris , ou plutôt enchaînés avec l u i , a trop decélé
Ipur objet. C et accord confiant des deux régimes contraires
à fa tranquillité, régime de procédés, régime de nourriture,
&
�&
89
fu r - to u t le propos d ’ A lziari $ que la maladie de fo n
maître étoit incurable ; qu'on pouvoit impunément lu i pro
diguer le c a f é , le vin , les liqueurs fo r te s , fans craindre
de lu i fa ir e plus de m al qu i l ríen avoit , aflfurcnt aflez
qu’on ne vouloir pas tourmenter le M arquis gratuitem ent,
& que la brutalité étoit m otivée par le projet d’anéantir
fon exiitence morale.
Sa
m ère,
feul auteur de ces
dangereux,
procédés
parce qu’elle les a p e r m is , ou parce qu’elle ne les a pas
empêchés ; c’eil fa mère qui vient aujourd’hui exagérer
leurs effets funeftes , pour juítifier ía perfécution paflée, &C
autorifer fa nouvelle perfécution.
C e tte penfée jette un fentim ent amer au milieu du raifonnem ent le plus froid.
Il ne faut pas croire cependant qu’un entier fuccès ait
couronné ce com p lot , &
q u ’on foit parvenu à enlever
au M arquis de Cabris la dernière étincelle de fa raifon.
Si nous prenons
l’engagem ent d ’expofer
avec vérité
l ’état actuel de fon e f p r it , nous exigeons au moins quelque
confiance. Il feroit injuite de voir dans un aveu le prétexte
d ’une réticence.
- Le
entière
Marquis
liberté
de Cabris
n’cit pas
toujours
d’efprit ; les tourmens q u ’il
pendant fix a n n é e s ,
dans une
a fouiFerts
en augm entant fa feniibilité ner-
veufe , ont aíFcdté fes facultes morales.
le
fouvenir de
fes douleurs, &, rout ce qui peut lui rappeler ce fo u v e n ir,
lui donne un accès de taciturnité & de m élancolie. A i n f î ,
c ’cit ce qui devroit exciter fes refpeCts, qui agite fes fens,
&
qui trouble
fes o rg a n e s; la préfence de fa m è r e , &
l’appareil d’un interrogatoire.
O n voit dans ceux qu’il a
M
�9°
prêtas devant M . le L i e u t e n a n t - C i v i l, moins un h o m m e
égaré , qu’ un hom m e aigri par la contrainte , 8c révolté
contre la tyrannie ,
qui refufe une réponie jufte à. des
demandes dix fois ré p étée s, 6c q u i , plus fouvent e n c o r e ,
ne veut ni écouter la d e m a n d e , ni faire la réponfe.
Son efprit cft tranquille , loin de tous les objets qui
peuvent lui retracer Tes infortunes. T o u s ceux qui l’entourent
attellent fa douceur. O n lui laiile la plus entière lib e rté ,
Ôc jamais il n ’a fait craindre le danger d ’en abufer.. Il
interroge , il répond avec juftefle : tous fes m ouvem ens
fo n t pofés 8c réfléchis. Il cft reconnoiiïant 8c afl'c£lueux
avec fa femme 8c fa fille. D e s perfonnes de la plus haute
diftin£tion n’ont pas dédaigné de le voir , de l’admettre
dans leur f o c i é t é , de faire la p a r tie , 8c l’on a ch oiii le
l'e R é v e rfis .
ieu le plus c o m p liq u é , le moins fufceptible de diftra£tion * ;
.
.,
/
•
,
, .
a
.
r
„
,
c
„
,
la prelcnce d c l p n t a ete la raeme ju iq u a la fin ; 6c après
quatre heures, de repos ôc de gaîté , l’humeur n ’a percé un
feul inftant qu’au fimulacre d’un interrogatoire.
D e -là
réfultent trois vérités.
L a p r e m i è r e , que le
M arquis de Cabris n’eft pas privé de l’cfpoir d’une entière
guérifon ; 6c les rapports des M éd ecins ôc C hirurgiens la
prom ettent avec alTez d ’aiïurancc. E n droit , cet efpoir
fuffiroit pour le garantir de l'interdiction.
La
&
seconde
qu’il cft
,
que la m élancolie n’eft qu’in fta n ta n ée ,
prcfque toujours libre de fens 6c de raifon..
E n d r o it, ces longs intervalles de tranq u illité, fuffiroienc
encore pour écarter la reiTource rigoureufe d’une inter
diction.
L a t r o i s i è m e , que m ê m e , dans fes m o m e n sd e vapeurs
ÔC de m é la n c o lie , il a l’extérieur paiiible ; que Ja nature
�9 1'
de fa maladie tend au repos
8c à l’apathie ; que dans
c e t é t a t , fes mouvemens lo n t lents &c mefurés t qu’il cft
enfin dans l’impofiîbilité morale d’attenter à fa perfonne
& à celle des autres.
C e tte dernière v é r it é , fixe & détermine l’objet fournis
dans la circonitance au loin de la Juitice. Elle n’a point
à veiller fur la sûreté de la perfonne. Elle ne doit être
occupée que de la confervation des biens.
A l’égard des biens
3 ils
fon t dans un état déplorable^
O n a vu les défailres de la curatelle exercée par la dame
de Lombard. Six années de mauvaife adminirtration , o n t
jeré dans la fortune du M arquis de C a b r i s , le trouble que
iïx années de mauvais traitemens ont porté dans fa perfonne.
M a is les fautes de fa mère ne peuvent pas être un m o t if
de l'interdiCtion qu’elle
demande ,
&
d’autres moyens
peuvent rétablir l’ordre &. la balance dans l ’adm iniitratioa
des biens.
D ’ailleurs, ces biens font fubititués, & cette fu b ititu tio n ,
dont l’efpérance a dirigé les plus ardens iniligateurs de
l'interdiCtion déjà p ro n o n cé e ,
repouifer l’idée
cil juilem ent ce qui d oit
d’une interdiction
néceilaire.
Parmi les
principes éta b lis, on a vu que l'interdiCtion étoit inutile
contre un hom m e déjà enchaîné par une fubllitution , Sc
qu’elle devoit être écartée par cela feul qu’elle étoit inutile.
C es m o tifs , éclairés par les meilleures in te n tio n s , o n t
v « 01 la fa-
entraîné les iufïragcs du tribunal de fam ille; de ce premier MILL£*
tr ib u n a l, établi par l’autorité fo u v e ra in e , pour juger fur
l ’état aCtuel du M arquis de Cabris.
O n a vu que ia mère n’avoit pu réunir que deux voix
M ij
�i fa demande en in te rd ictio n , celle du C o m te de G r a f f e ,
& celle du fieur de C om m cyras. [ i]
L e fieur de C om m cyras ne mérite pas cTÆtrc compté.
Sa conduite aux aiTemblées , a clairement dém ontré qu'il
ne vouloit l’interdiction que pour créer la dame de L o m b ard
cu ra trice , Se qu’il ne vou lo it établir cette c u ra te lle , que
pour protéger l ’agiotage exercé par lui jufques dans le
cabinet du J u g e , pour le m ariage projette de la dem oifclle
de C abris avec le fils du C o m te de G raile.
D ’ailleu rs, il s’eil rendu indigne de toute co n fia n c e %
par une fauiTeté volontaire. 11 a pris place dans l’aflemblée
en qualité de parent du M arquis de C a b r i s , [ i ] &. certes
[ i ] O n ne parle pas ici des v in g t - h u it procurations par lefquelles
v in g t-h u it parens de P rovence ont cru pouvoir donner leur vœu à
]’interdi£tion d em an d ée par la d am e d e L o m b a r d .
P our ccarter ces
v in g t - h u it c o m p la ifa n s , il n ’eft pas néceiTaire de rappeler l ’intérêt qui
d éterm ine en m ê m e - r e m s ,
&
q u i rejette leur fuffrnge. Il fufïit de
dire qu e ce v œ u , apporté de deux cents lieues , eft la preuve la plus
o d ie u fe de leur a veuglem en t & de leur m auvaife volon té. Ignorent-ils
q u ’en matière d ’incerdiétion ,
les abfens ne
peuvent pas délibérer :
parce q u e , pour pron on cer fur l ’état d ’un cit o y e n , il faut avoir fous le*
y e u x les fig n e î démonftratifs de fa dém ence 3 ou de fa préfence d ’efprit.
A u fu r p lu s , de ces 28 parens q u ’on préfente c o m m e la majeure par
tie &: la plus refpefbible de la fa m ille , le M a r q u is de V a u v e r n a r g u e s eit
feu l parent p a te r n e l, & encore au cinq uièm e degré.
T o u s les autres
fo n t parens de la D a m e de L o m b a r d . A i n f i , lorfqu e dans leur procura
tion , & dans Pailèinblée de f a m ille , ils prennent la qualité de parens
p a tern els, ils attellent une erreur volontaire , qu e la M a r q u ife de C a b r is
les défie de juflifier.
[ a ] Dans fon d i r e , au procès-verbal d ’a fle m b lé e , le fieur de C o m m eyras fe qualifie coujîn au quatrièm e d egré du côté p a te rn e l, à caufe de
�93
il n’cil lié à la famille de Cabris par aucun lien de p aren té,
quelqus éloigné qu’on puide le fuppofer.
Il pouvoit fe
préfcnccr com m e ami : l’ A rrêt du C on fcil des D épêches
co n voq u e les parais & amis ; mais fon vœu manifeftoic
q u ’il étoit encore moins ami que p a re n t, & entre deux
m e n fo n g e s , il a préféré le moins ridicule.
L e C o m te de G r a d e s’avance donc feul pour conqué
rir l’interdiction du M arquis de C abris ; Si c’effc ainfi qu’il
prétend pour fon fils à la main de la demoifelle de C abris.
C e mariage auroit pu convenir. M ais n’eft il donc d ’autres
moyens pour époufer la demoifelle de C a b r is , que de faire
interdire (on père ? Pou r captiver fon c œ u r , qui doit pré
céder fa main , n’eit-il donc d’autres moyens , que de graver
fur le front de Ion père une empreinte flé trid à n te; que de
livrer fon père aux mains avides & cruelles qui on t anéanti
fon e x iftc n c e , détruit fa fan té , troublé fon repos , & dévoré
fa fortune ?
Si le C o m te de G ra d e n ’a vu que ce chem in
pour
arriver à fon b u t , qu’il fe retire : fon vœ u refte inutile
com m e fon projet.
L a Juftice ne peut pas écouter un
fu d ra ge qu’un intérêt viiible [ i] accufe de p a rtia lité ; 8c
la demoifelle de Cabris déclare , avec toute la vivacité de
M adam e de V ille n e u v e , fo n e'poufe. L a d am e de C o m m e y r a s n ’eft point
née V illeneu ve. Elle eft fille d u fieur R abies t de la petite ville Ü A n o t t
dans la haute-Provence.
[i]
A cet intérêt , le C o m t e de GraiTe en joint un a u t r e , m o in i
r e m arq u ab le, à la vérité. Il eft oncle du C o m t e de GraiTe d u B a r , & du
fieur de St. C e z a i r e , beaux-frères du M arq u is de C a b r is , cautions de la
cu ratelle, & défendant pour leur propre co m p te r'envahiifem ent d ’une
portion des biens de leur beau-frère.
�94
Ton pays 6c la franchife de Ton â g e , que les Puiflances de Ja
terre ne pourront jamais la contraindre de fe donner aux perfccuteuis de Ton p ère,
6l
aux protecteurs de la perfécution.
L e C o m te de G rad e croit ou ne croit pas ce qu’il attefte
aux ailemblécs. S’il efl perfuadé que le Marquis de Cabris cft
m aniaque, affligé d 'u ne f o lie héréditaire , la fortune efl:-elle
un m o t if aflez puilïant, pour que le fils du C o m te de G ra d e
foit uni à la fille d’un m aniaque? Si le C o m te de G ra d e n’efl:
pas perfuadé de cette démence héréditaire, la fortune eft-elle
un m o tif a iîlz puidant pour que fa bouche démente fa penfée , pour qu’il déclare tout haut cequ ’il contredit tout bas ?
C o n tre
le fudrage
d ix - n e u f parens &
unique du C o m te de G r a d e , [ i]
amis préfens ,
rademblenc d ix - n e u f
fudrages contraires. Dépouillés de tout intérêt perfonnel,
exempts de toute p ré v e n tio n , ils ont prononcé fur l’etac
actuel du M arquis de C a b r i s , après un examen impartial
des événemens paiTés & des circonflances préientes
Ils
o n t remarqué dans la foiblcd'e actuelle de leur parent &C
ami j l’effet fu nede des mauvais traitemens a u ton frs par
fa première interdiction. Us ont reconnu dans les interro
gatoires & dans les rapports des gens de l’A r t , que cette
[ i ] O n a vu le M arq u is de M ir a b e a u , déclarer à la dernière aflem b l c e , q u ’il n’avoit pu voter pour l’interdiftion j mais la fuppofer d ’ ane
m anière cruelle , & rayer le M arq u is de C a b ris d e la lifte des v iv an s,
pour courir d ’un pas rapide à ce q u ’il defire uniqu em ent. N ’eft-ce pas en
effet feindre un pere m o r t , & m ort fans avoir laillé aucune trace de fo n
pouvoir p a te rn e l, que de vo u lo ir fe faifir de fa fille pendant ia vie , d e
d em an d er ferieufement à la Juilice que cette fille foit en ferm ée dans
u n C o u v e n t , d ’où elle ne fortiroit qu e pour être m a riée, o u elle n ’auroif
la liberté de voir fa mère & fes autres parens q u à la grille fe u le m e n t,
mais où elle verroit tres-librement le M arq u is de M ir a b e a u , lui diétanc
¿ e fp o tk ju e m e a t le m o y e n 8c le m o m e n t de fa liberté?
�foibleiTe d’efprir, dépendante de la foiblefTe des organes
étoir m omentanée , fufceptible de guérifon , fur - tout tran
quille , & toujours exempte de tranfports & dc m ouveniens furieux , tels qu’üs fiflrnt craindre pour la perfonne
du malade. Us ont jeté un regard d ’intérêt fur fa fille
unique, fur la dcm oifcllc dc C a b ris , âgée de quatorze ans
& d e m i, appelée par fa naiiTance & par fa fortune à une
alliance h on orable, & digne à tous égards d ’un m énagement
qui conferve dans l ’opinion publique & dans les cems \
v e n ir , l ’honneur dc ia p erfo n n e , & celui de fa poftérité
Entraînés par des motifs fi fages , les d ix - n e u f pa r c n '
& amis ont décidé que la perfonne du malade étant en
sû reté, foit par la nature de fa m a la d ie, foie par les foins
de Ion e p o u fe , dont perfonne ne peut le priver ; il falloir
rejeter la précaution humiliante dc l’in terdiction , puiique
d autres moyens ulités, faciles & fuffifans, pouvoienc veiller
à la c o n f e c t i o n des b ie n , , feul objet à régler dans ce
m om ent.
Parm i ces m o y e n s , ils on t choifi celui dont la Juftice
ellc-mem e d onne des exemples fréquens. Ils défirent q u ’elle
entoure le M arqu is de C abris de confeils ftgcJ & éclairés
avec le pouvoir d'établir & de diriger fur fts biens une’
adminiltration durable (i).
L a Juftice peut choifïr entre ces deux partis, interdic
tion ou nomination de confeils. E lle peut fuivre la v ’
partiale & ifoléc du C o m te de GrafTe, ou les voix
réunie
de d ix -n e u f parens & amis défintérefles. M ais Ja JuÎ^cc"1**
peut choifîr que cc qui cil rigoureufem ent jufle
pouvoir même détermine fon choix.
*
( i ) L e M arq u is de C a b ris a
une Requête du mois de Septembre dernier,
~
°n
r ~ ---------
” ” S* pn
\
�L ’intcrdi& ion , fût-elle d ’ailleurs fondée & u t i le , feroic
encore une iniquité b arb a re, parce qu’elle ne ieroit motivée
que par les brutalités de ceux qui la provoquent.
M ais clie cft abfolument in u tile , relativem ent aux deux
objets qu'elle doit e m b ra fle r; inutile pour la perfonne qui
n ’eft: point en d a n g e r ; inutile pour les biens qui feront confe r v e s ,
8c
par la fubftitution qui les enchaîne ,
ôc
par
l’adminiftration légale des confeils que demande le Marquis
de C a b r i s ,
que fa fam ille demande avec lui , & fatis
l'autorité defquels il ne pourra faire ni aliénation de fonds,
ni emploi des revenus.
Q u e l mal peut-on craindre ,
ôc
quels biens ne d oit-on
pas attendre de cette adminiftration , fi l’on nom m e les
confcils demandés par le M arquis de Cabris
ôc
par fa
fa m ille? L ’un eft c h e f d’un T rib u n a l-S o u ve ra in , [i] fujet
diftingué du M onarque lui-m êm e,
ôc dont
la modeltie feule
tient lccrets en ce m om ent les tém oignages honorables
qu’il en a reçus; les deux autres font deux anciens A v o c a ts
au P a rlem en t, [ i] dont le zèle peut feul égaler les lumières.
[ i ] M . T e y f l i e r , A u d iteu r de la R o te d ’A v ig n o n . O n obfervera q u ’il
eft parent de la d am e de L o m b a rd ; q u ’il a etc amené par elle aux
a ir e m b lc e s , Sc q u ’il s’eft déclaré le prem ier contre l ’in t e r d id io n q u ’elle
p o u r f u i t , après avoir entendu les f a i t s , & balancé les différens motifs.
E n le v o y a n t , fans le connoître , Sc fans autre raifon de confiance que le
caradtère dont il eft r e v ê t u , la M a r q u ife de Cabris a voulu rem ettre
entre fes mains le ju g em en t irrévocable d t ce trifte procès. Elle a propofé
à la dame de L om ba rd de confier ég alem ent fes p o u v o ir s à ce M a g iftra t,
fon parent, fou a m i , amené par elle aux a flem b lé es, qui terniineroit dans
deux heures une co nteftatio n, l’orig in e des troubles q u i déchirent la
fa m ille ,
&
le
germ e de m ille
autres conteftations.
L a d am e de
L o m S a r d a refufé.
f i l Mes d’Outremont <
5c de Beauféjour.
A in û ,
�97
A in fi, dans la balance de la J u ilic e , rien n’autorife l’inte-rdicfcion , 5c tout la co n d a m n e ; la fituation aétuellc du
M arquis de C a b ris , qui ne demande que des foins affectueux,
Si que ces ioins pourront rappeler, à cet état de fanté & de
paix dont il jouiiibic avant fon efclavage ; la ficuation de fes
b ie n s, déjà ftables dans les liens de la fubftitution, 6c q u i,
dans cous les c a s , feront fans doute plus utilement adminiftrés
par des C onfeils inftruits, que par un curateur, q u i, en ne
lui fuppofant pas l’incapacité abfoluc de la dame de L o m
bard, peut être très-inhabile aux affaires; &c e n fin , l’honneur
de la demoifelle de C abris , qui va devenir Pcfpérance d ’une
famille égale à la fie n n e , 8c dans laquelle elle d oit porter
feulement , les dons aimables que la nature a daigné lui
prodiguer.
Il ne refte à exam iner qu’une queflion incidente à celle
que nous venons de réfoudre.
D a n s le cas impoflible à n
p r é v o i r , où le M arquis de C abris fcroit in te rd it, q uelr
autre que la Marquife de Cabris fa fem m e pourroit pré- „
tendre h la curatelle?
Si la mère du Marquis de C a b r is , fi la dame de Lom bard
ne s’étoit pas rendue indigne de la curatelle qui lui avoit
été co n fié e; fi elle n’avoit pas traité fon fils com m e un
étranger , com m e un e n n em i., com m e un efclave ; on
pourroit examiner s’il exifle une concurrence ÔC un droit
égal cnrre-ellc 6c la Marquife de Cabris.
M a is depuis que fon in fou cia n ce, fa cruelle infenfib ilité,
& fon incapacité to ta le , fc font manifeftées par des œuvres
fi funeftes ; depuis qu’elle a perdu tous fes droits fur la
perfonne de fon fils , m ême le droit de pourfuivre fon
N
�interdiction , quand même elle fero t néceflaire ; on voie
bien qu’ il n’y a plus de livaliié , & que la femme feu.e du
M r.]u's de C abris pourroic être la c u r a tr ic e , s i l étoit
qucltion d’une curatelle.
C ’cit ici l’alarme générale.
Il eft tacile de fenrir que
t jus les intérefles, ceux qui ont fait interdire le M arquis
d e Cabris , 6c ceux qui veulent le faire interdire encore ;
ceux qui ont partagé íes dépouilles , ôc ceux qui veulent difpofer de ia fille, agitent avec effroi toutes leurs m a n œ u v re s ,
pour écarter le
m om ent
où
la M arqu ife
de
Cabris ,
jo ign an t les droits de la Juftice aux droits de la n a tu re ,
p o u rro it, dans fa iollicitude m a te rn e lle , fouftraire fa tille
à toutes
les intrigues qui
m en aien t fon
bonheur ,
fie
pourfuivre des refticutions immenfes fur les déprédateurs
des biens de fon mari.
Il n’eil pas étonnant qu’on a it , dans cette réfiftance,
épuifé tous les moyens d’invention , les faux p rin cip e s,
Jes faux raifonnemens , les calomnies.
11 étoit impoffible de nier que le droit ccm m un ne permît
d ’appeler une femme à la curatelle de ion mari in te rd it;
le fentim ent des Jurifconfultes étoit u n a n im e ; la Jurifprudcncc du C h â tc lc t offroit des exemples nom breux ,
ôc
l’ A rrêt du Parlem ent du 17 A v r il 1 7 3 4 , qui défère à la
M arquife de M cnars la curatelle de fon m a r i, étoit feul
un exemple ailcz d é c iiif, aflez refpcctable.
M ais on a voulu créer une excluiion particulière.
On
a prétendu que cette Jurifprudence étoit contraire aux loix
R o m a in es, 5c Spécialement contraire aux ftatutsde Provence.
C e c i eft une fuppofition : on eft obligé de renouveler cc
reproche , toutes les fois qu’il plaît à la dame de L om b ard
de renouveler fes erreurs volontaires.
�99
Pas un mot dans les ftatuts de Provence q uip u jile faire pré*
fumer ce qu’elle veut y lire. D a n s les loix R o m ain es, pas
une
trace d’cxclufion de la femme à la curatelle de fon mari.
La Marquife de Cabris a cité un A rrê t du Parlem ent
de P roven ce, du u Juin 1 6 9 4 , rapporté par le continuateur
de Boni face, qui nom m e une fem m e curatrice à l’interdiction
de fon mari.
Pluficurs A rrêts des autres Parlem ens des Provinces régies
par les Loix R o m a in e s , prouvent qu’ils fuivent tous la mê
me Jurifprudence , ôc qu’ils adm ettent , fu iva n tle s circonfta n ces, la femme a la curatielle de fon mari. B ouvot fournit
un exemple plus étonnant encore. Il cite un A rrê t du Parle
m ent, dont il recueilloit les d é d i i o n s , qui a nom m é une fille
curatrice de fa mère.
Les loix générales qui excluent les femmes des curatelles ,
com m e charges publiques, ne font pas obfcrvées dans le
Royaum e. Les deux Arrêts cités fuffifent pour le p rou ver;
& la curatelle de l’in te rd it, co tn m : droit h o n o ra ire , doit
être donnée devant le Juge , &
dans la forme preferite par
la loi , c ’cft à-dire , fur l’avis des parcnsaflfcmblés.
Il eft abfurde de vouloir appliquer à cette queftion la loi
14. ff. de curât, fu ri. qui défend de nomm er le mari curateur
de fa femme , de crainte qu’il ne la répudie pour fe difpcnfer de lui rendre compte.
D ’abord cette crainte eit une chim ère pour nous. L e d i
vorce eft loin de nos mœurs & de nos loix. Aulli B outaric
Sc les Auteurs qui ont traité la même matière , «mettent que
cette loi n’efi: pas obfervée, & que dans tous les Pays de D ro ir
É c r i t , le mari eft journellement curateur de fa femme mi
neure com m e en Pays Coutum ier.
D ’ailleurs , refufer au mari la curatelle de fa fe m m e , ce
N ij
�100
n’eft pas refufer -4 la femme la curatelle de fon mari ; furtout lorfque cous les biens de la fem m e font dotaux , lors
qu ' e l l e ne peut acquérir que pour fon m a r i , co m m e la M a r
q u i f e d e Cabris.
D e tous les Auteurs anciens & m o d e m cs>Bourjon eft peutêtre le feul qui éloigne la femme de la curatelle de fon mari.
Ce f r o i t , dic-il , renverfer l ’ordre naturel que de mettre un
mari fous la dépendance de fa femme. Il admet cependant
une exception en faveur de la femme d’un M a rch a n d , ôc in s
truite de fon com m erce.
U n A u teur moderne a remarqué qu’en général on peut
reprocher à Bourjon de manquer de c r it iq u e ,& que fouvent
les mêmes règles lui fervent à décider pour Sc contre.
En e f f e t , il venoit d’avouer q u e , co nform ém ent aux L o ix
R o m a in e s , un fils pouvoir être curateur de fon père interdit.
Filium f i fobriè v iv a t , patris curatorem dandum magis quam
extraneum. Il ne trouvoit pas révoltant de m ettre un père
dans la dépendance de fon fils. C e p e n d a n t, il faut convenir
qu’il y a moins d’inégalité entre un mari 6c fa femme qu’en
tre un père 6c fon fils. Auiïi l’on a v u , par l’ A rrêt de la Marqui fe de M én a rs,q u e le Parlem ent n 'avo it fait aucune atten
tion au fyftême ifolé de cet Auteur.
Le fils curateur de fon père refte toujours fous la puiffànce
de fon p ère, co m m e la femme curatrice de fon mari demeure
fous la puiiTance de fon mari. C e tte puiffance du père
du
mari i n t e r d i t , n’eft plus une puiffance d’exercice ; elle eft pu
rement légale.Elle fubfifte feulement pour l’utilité de ceux qui
la pofledent.
En donnant au fils la curatelle de fon p è r e , en donnant à
la femme la curatelle de fon m a r i , ce n’eft pas une autorité
�10X.
que la loi leur donne ; c’eit un devoir qu’elle leur impofc , un
devoir qui feroic prefcric par la nature , s’ il n’ étoit pas pfefcric par la loi.
L e fils cil in(pire par le re fp cil filial ; la femme par l’amour
conjugal , par la com m unauté d’intérêts ; & , com m e die
D argen tré fur l'article 491 de l’ancienne C o u tu m e de Bre
ta g n e , propter communes liberos & dignitaitm fa m ilU .
Il faut conclure de ces p rin cip es, que la femme n’eft pas
curatrice de fon mari de droit com m un , mais qu’elle peut
l’être par une jufte exception ; 2c que le Juge ne peut pas fe
difpenfer la n o m m e r , lorfqu’elle cil: appelée à cette charge
par les circonftances 5c jj>ar le plus grand nombre des parens
ailemblés.
D a n s l’cfpèce, on a vu la famille diviféc chez M . le Lieuten a n t- C iv il, entre la D a m e de L om bard ¿c la M arquife de
Cabris ; 6c fans avoir recours aux moyens de droic 6c de raiion qui repouiTent prefquc toutes les voix favorables à la
D a m e de Lombard , la Marquife de C abris emporte encore
la balapce. T r e n te voix choifiiïènt la D a m e de L om bard ;
trente fix appellent la M arquife de Cabris.
M ais bientôt la D a m e de Lombard reile feule, fi l’on veut
feulem ent rappeler le nom de ceux qui l ’environnent.
O n a vu quel intérêt animoit le C o m t e de GraiTe. C e
m o t if, indigne de l u i , eft égalem ent indigne de la confiance
du M àgiftrat.
O n a vu quel rôle jouoit le fieur de Com m éyras. C e rôle
peut prouver le zèle ÔC l’adreile d ’un négociateur , mais non
pas l’impartialité d’un Juge.
O n a vu que dix-huit parens, repréfentés par des fondés de
' P rocuratio n , étoictlc ou complices, ou caution^ où créanciers
Vœu bi la Famille.
�■i- r! ;
.
.
..
10 1
.
.
.
.
de la première adminiitration. C o m p li c e s ,-ils veulent rercn i r ' l s dépouilles injuftcmcnc'acquifes , càm m ç le prétendu
i
luppleaicnc de légitim e arrache par les bcaux-frercs.
Cau
tions , ils craignent de porter le fardeau des négligences ou
des infidélités de la D a m e de Lom bard. Créanciers , ils pré
tendent fe créer un moyen de recouvrer les fommes im pru
dem m ent prêtées.’ C es differens intérêts ne peuvent être
aflurés qu’en remettant la fortune du Marquis de Cabris en
tre les mains de cefle qui a com mis ou fouiîert les dépréda
tions , qu’une autre fera punir &. réparer.
Les dix autres ont
figné le M ém oire calomnieux fur
lequel la M arquifé de Cabris a éré privée de fa liberté.
C e t te démarche violente a prouvé qu’ils étoient fes enne'
m i s , 8c qu’ils m é d ito ie n t, depuis fept ans , la ruine de fa
famille.
j
D ’un autre c o t é , trente-fix voix impartiales défèrent la
curatelle à la M axquife de C a b r i s , dans le cas imprévu de
l ’interdiction de fon mari. D a n s le n o m b r e , on voit deux
pareils de la dame de Lom bard , amenés par elle aux ailemb lé e s , & qui n’ont pu fe décider contre elle j que fur les
preuves rapportées &
difeutées d evant toute la famille :
on voit onze parens très-proches de la dame de L o m b ard ,
q u i , n’étant point intérclFés à la première administration,
prononcent avec une entière liberté fur celle c,u’il i ’agit
d’établir. O n voit ii;izc parens du M a r q u i s de Cabris égale
ment recom m an d ab lçs, & par leur naillance , & par leur
forrunc. Sept amis préfens viennent ajouter leur lu il rage à ce
concours rcfpcdable.
Sur
¡(Il “
un Phjct d e t cette im p o rta n c e , Iorfque dans le*
L o ix générales
dans les Lo"ix particulières, rien ne co u -
�i °3
tredit le vœu de la farçiille , & lorfque le vœu de la famille
cft lui-m êm e néceflité par* les circonftauccs , c ’cil lui qui
doit déterminer & dicter le Jugem ent.
*
. Si la L o i , com m e l’allure la dame de L o m b a r d , refu fo it impérieufemenc à la M arqu ifc de Cabris la curatelle
de fon mari , la L o i feule iuftîroit au iyftême & aux cfp éranc.es de la dame de L om bard : les autres moyens Îeroicnt
inutiles.. E n .effet., fi le Code.,, le D ig e ftc & ' les. Statuts de
Proveucp , ne veulent pas qu’une femme foie curatrice de
fon m a r i, pourquoi invectiver cette femme ? Pourquoi la
calom nier ? Pourquoi tenter d’attirer fur elle les mépris
ou les foupçons du public & de la juitice ?
O n fe rappelle ces trois faits avancés dans la R equête du
r j pons1! ao
Bailli de M irabeau , Iorfqu’il v o u l u t , au Parlem ent d’Aix , u h ° c h , ! '
faire iupprimer un M ém oire de la M arqu ife de Cabris ,
faits
menfongers
tant de fois répétés , &c tanr de fois
détruits !
La dame de Lom bard en a fait encore fa principale défenfe devant M . le L ie u t e n a n t - C i v i l , pour oppofer au
moins
le ton du reproche
aux reproches dont elle eit
accablée.
Elle reproche donc
à
la M arqu ife de C a b r i s , d’avoir
livré les biens de ion mari à la plus folle dilîipation, de
lui avoir fait contracter pour plus de i 20,000 liv. de dettes,
de lui avoir furpris deux procurations pour faire des e m
prunts encore plus confidérables, de lui avoir fait faire un
teilam ent m yjlique en fa faveur. (1)
[ 1 ] L a d a m e de L o m b a r d
ne s’en tient pas à ces reproches ; elle
renouvelle les calomnies pcrfonelles q u e l l e a colportées dans les B nreru x
C o n t r e
l
*
�io 4
Les réponfes ne font pas difficiles.
D a n s fon com pte fi fingulièrement rendu devant M e
Boulard , la darne de L om bard déclare elle-m êm e q u e lle
a pris l’adminiftration dont elle va rendre com pte , des mains
ù tS 'c y ir c , C v r a t i u r à la minorité du M arquis de Cabris
depuis le décès de fon père , 2c ion
F
o n d e
de
po uvoirs
,
depuis fa majorité jufqu’à fon interdiction. C ertainem ent la
M arqu ife de Cabris n ’a jamais pu difliper le bien-de fon
m a r i , fi elle ne l a jamais adminiftré.
La M arquife de Cabris a annexé à fa R equ ête du a i
O f t o b r c dernier , tous les actes des emprunts faits par fon
mari avant fon interdiction.
des M in iftre s , dans les T r ib u n a u x , Sc q u e fes I ¡b e lle s , imprim es par
m illiers , ont verfées dans tout le R o y a u m e . L a M a r q u ife de C a b r i s ,
dans fes premiers écrits, a oppofé à chaque fait des preuves co n traires,
& des preuves écrites. Ici un m o t doit fuffire. C e s calom nies l ’ont fait
exiler de Paris à L y o n en 1 7 7 7 . L ’ordre a etc révoqué 14 jours après fur
fa feule dem an de. En 1 7 7 8 , ces calomnies l’ont fait arracher des bras
de fon mari q u ’elle d é f e n d o i t , &
l ’ont confinée dans un C o u v e n t des
M o n ta g n e s de Provence. Seule elle a fait jug er les m otifs de cet o r d r e ,
ôc feule elle a o btenu fa révocation. C e s c a l o m n i e s étoient la plus appa
rente raifon des Ju gem en s de Provence. Elle a d em an de juftice po u r t l!e
& pour fou m a r i , au C o n f e i l des D épêches de S. M . T o u t a été examiné.
L e M iniftre m ê m e duq uel étoit émané l ’ordre contre la M arqu ife de
C a bris , étoit M e m b r e du T r ib u n a l. T o u s les Jugem ens rendus en P r o
vence contre-ellé Sc contre fon m a r i , ont été annuités. L e M arq u is, c!e
C a b r is a été délivré des mains dé fa m ère , 8c placé fo us les yeux dé fa
fe m m e . L a d em o ifelle de C a b r is a été enlevée à fon a y e u l e j & rerriife'
entre les mains de fa mère. C e t t e réponfe eft aiTez b o n n e , Sc la d am e
de L o m b a r d daignera s’en contenter.
R c c o n n o iilà n c c
�!°5
ReconnoifTance de 12,000 iiv. empruntées le
21 M ai
17 7 3 , par le M arquis de C a b r is , alors m in e u r, &, aflïfté
de Seytre , fo n curateur.]
R c co n n o illa n c e de 10,000 liv. empruntées le 19 Juin
1 7 7 3 , par le M arquis de C a b r i s , alors m i n e u r , &: afliftc
de Seytre, fo n curateur..
R en te de i.,6oo 1. fans retenue , au principal de 32,000 1.
conftituée le 2.1 N ovem bre 1 7 7 j , par le M arquis de Cabris,
encore m in e u r, ôc ailiité de Seytre >fo n curateur. (2)
R en te
de
1,400
liv. fans
r e t e n u e , au principal
de
2,S^ooo liv. conilituée le 5 Mars 1 7 7 7 , par S e y tre , fo n d é
de la procuration générale du M arquis de Cabris , alors
majeur.
R en te de 900 liv. fans retenue, au principal de 18,000 1.
conftituée le 4 Juillet 1 7 7 6 , par Scycre, fo n d é de la pro
curation générale du Marquis de Cabris, alors majeur.
C es a£tes , qui portent les emprunts faits par , ou pour
le M a r q u is , à i i o , o o o l i v . , prouvent qu’ils o n t été fa its ,
partie pendant fa m inorité fie par fon c u ra te u r, partie pen
dant fa m a jo r ité , par fon fondé de procuration g én éra le ,
pendant l’abfence de fa
L yo n ; c e t o i t
femm e.
A lo rs elle étoit à
l’époque des troubles fcmës entre-elle
ôt
ion mari. Il faut être au-deilus d’un démenti , pour accufer
la M arqu ife de
Cabris des emprunts faits pendant Ton
abfence , facilités ôc autorifés par les A g e n s publics de la
tyrannie &C des déprédations d ont elle demande vengeance.
[ 1 ] Sceytre & A lzia ri faifoienc prêter cet argent , & eux - m ê m e j
c o m m e Procureurs des créa nciers, font faifir aujourd’hui les biens du
M arqu is de Cabris.
o
�i o6
II eft très-vrai que le Marquis de Cabris j
peu de temps
avant fon. interdiction , a donné à fa femme une procuration
à l'effet d’emprunter 2.0,000 livres; mais la Marquifc de
Cabris a-t-elle emprunté zo>ooo livres? N o n , elle n’a pas
emprunté un fol en vertu de cette procuration. U n e procu
ration ne peut exiilcr que par fqn e x é c u t io n , comme le
pouvoir ne ie manifefte que par fes eff ets. Lorique la M a r
quifc de Cabris n’a pas ufè de cette procuration, quelle abiurde méchanceté de dire qu’ elle l’avoit furprije à Ion mari
pour en aimj'cr!
A u iurplus, cette procuration eft la fe u le ; c’cft encore
une p etite malice de la dame de Lomb ard , ou de
ceux
qui la dirigent , d ’en avoir annexé deux aux Procès-ver
baux d’affemblee, lc de les appliquer toutes deux à la M a r
quifc de Cabris. Il feroit difficile de dire à qui la fécondé
étoit deftinée ; mais il eft certain qu’elle ne ro it pas deftinée à
une fem m e. L e nom du Procureur eft en blanc, ôi le Procureur
eft annoncé partout fous une dénomination mafcuune : fa
date prouve quelle a été fouferite vingt-quatre heures après
celle donnée à la Marquile de Cabris. La minute a toujours
été entre les mains de la dame de Lombard. T o u t imiique
que cette fécondé procuration avoit été réellement furprife
au Marquis de Cabris, pour révoquer celle donnée la veille
à fa femme.
A l’égard du T e f t a m c n t , dont on prétendoit autrefois
que les difpofitions avoient été connues Scdilcutécs lors de
l’Arret du Parlement d’A i x , la dame de Lombard convient
a u j o u r d ’hui qu’il eft m y fliq u c, ôC par conféquent clos & se
cret ; fi l’on pouvoit reprocher au Marquis de Cabris d’a
�107
v o ir .d é p o fé Ton teilam ent dans les mains de fa femme;,
quelle difpntc pourroit s’élever fur les diipoficions ignorées
d'un hom m e vivant ?
Q u e peuvent ces reproches v a in s , pour enlèvera la Marquife de Cabris l’honneur de la curatelle de Ton m ari?
N o u s difons l'honneur,
c’ell une obfervauon qui ré
pond à tous les re p ro ch e s, & qui prévient les-plus hardis
foupçons.
T a n d is que la dame de L o m b a r d , incapable par Ton âge
autant que par fa foibleilè , accufcc & convaincue de tant
d ’infidélités, demande à haute voix que ion fils foie inter
d it, pour administrer f e u le , fans fe c o u r s , fans confeils,
fes biens qu’elle a difperfés; la M arquifc de Cabris , forte
par f i jcuneile &c par l’expérience de fes malheurs , ne de
m a n d e , dans le cas où , contre toute juftice, fo n m ari feToit in terd it, que l’honneur d’être fa C u ratrice, & e.lle de
mande cet h o n n e u r , parce que ce feroit une injure de le
lui refufer. Elle ne veut point adminiftrer les biens; elle ne
veut que veiller fur la p erfo n n e , vivre auprès de fon m a r i,
réparer le défordre de fa fan té , tandis qu’ un confeil éclairé
réparera le défordre de fes affaires, & lui faire oublier ,
s il eff poilible , par toutes les douceurs d ’une vie tranquille,
les tribulations dont il a été iî long-temps tourmenté.
C ’eft conform ém ent à la demande de la M arquife de C a
b r is , que le plus grand nombre des P a ro n s , toujours dans
le cas de l’interdiction qu’ils n’approuvenc p a s , en la nom
m ant Curatrice honoraire, nom m ent M c C o u r t , Curateur
onérairc, ôc le foum ettent à l ’autorité d ’un confeil.
M e C o u rt cft celui que la Sentence du
6
A v r il
1784 a
provisoirement c h a r g é , iur la nom ination des p a r e n s ,d e
O ij
�108
l ’adminiflration dont la dame de L om bard a été dépouillée.
C ’eft un titre pour être ca lo m n ié ; il fuffit que M e C o u rt
foie appelé par les parens à la charge tant convoitée par la
dame de L o m b a rd , pour qu’on
reproches de négligence
8c
tente de l ’exclure par des
d’infidéliré. Q uels
reproches
dans la bouche de la dame de L om b ard !
C ep endant le choix des parens mérite d’être juftifié.
M c C o u r t , Procureur au Parlem ent d’A i x , jouit d’une
bonne renom m ée , qu’il doit à fa probité autant qu’à fes
lu m ières; il administre les biens du M arquis de Cabris
depuis environ dix-huit m o is; il a renouvelé une partie des
b a u x , ÔC ceux qu’il a renouvelés ont donné une augm en
tation annuelle de 5,000 liv.
L a d ame de L om b ard lui reproche de n’avoir fait verC ontre i «
c’ fer dans la caiiTe du Séqueftre, qu’une fomme de 1300 1.
tu u .
& de n’avoir point affermé les moulins à hui'e. La modicité
R é g isse u r a
de la dernière récolte préfente l’apparencc d’un défavantage
que le parti de la dame de Lom bard relève avcc une mauvaife-foi vraiment criminelle.
C es m o u lin s , affermés par la dame de Lom bard 20,000
li v r e s , ôc qui auroient dû l’être au m oins 14,000 livres,
n ’o n t rapporté l’année dernière que 7,5 6 9 liv. 7 fols 3 d.
Q u ’un hom m e né 6c vivant à Paris , dont les terres bor
dent les remparts de Paris , ne puifïc pas calculer les ré
coltes de P r o v e n c e , cette ignorance n’éronne pas; mais
que la dame de Lom bard , qui a vécu 70 ans fous les oli
viers Prov.cnccaux, affecte d ’ignorer que les produirions
de cet arbre font alternatives ; que la bonne 6c la mauvaife
ré o ltc fc fuivent avec cette régularité dont la Nature a
marqué tous les ouvrages : que cet ordre altern atif, général
�ro9
dans tous les cantons de la P r o v e n c e , cil encore plus fCnfiblc dans les cantons voiiins des m o n ta g n e s , & plantés de
vieux oliviers; que
la dame de Lom bard alfecle furcouc
d ’ignorer que l’année dernière a été vraimenr défaflreufe,
qu’elle n’a pas rapporté la moitié d’une mauvaiie ré co lte;
& qu’cllç a iîe & e cette ignorance pour en faire un reproche
grave & le m o t if d’un foupçon in ju rie u x , cette mauvaifefoi efl intolérable.
L a M arquife de Cabris a annexé à fa dernière requête
le certificat des C onfuls de G r a t te , donné le 29 Septembre
d e r n ie r , &. le certificat des C onfu ls de Cabris , par lequel
ils attellent que dans le terroir de G ra d e &
les terroirs
voiiins , la nature a divifé les récoltes des olives par bonne
& mauvaife a n n ée ; &c que la bonne année produit HUIT
fois plus que la maavaife.
Q u e cette différence énorme ne furprenne pas ; on peuc
promettre avec affurance que ces moulins à h u ile, qui n’onc
pas rapporté 8,000 livres l’année dernière , rapporteront
cette année plus de 50,000 livres.
L a M arquifc a annexé à fa dernière requête le com pte
(1) que M c C o u rt s e ft
cmprcfie d ’envoyer à la première
nouvelle des reproches de la dame de Lombard.
Il fa it, dans le préambule de ce c o m p te , l’obfcrvation
qu’on vient de lire fur la différence des récoltes , 5c il ajoute
q u ’ il avoit fait procéder à des enchères pour affermer les
moulins à huile ; mais que ceux qui avoient dcjjein de pren-
(1) Par le r-éfultat de ce c o m p te , M<-‘ C o u r t efl: en avance de 10 9 6 Jiv.
j f o l s 9 d.'; il a reçu 5798 l i v . 1 2 fols 6 d . & i l a dépenfe 6 8 94 livres 18
fols 3 deniers.
�1tO
dre cette F er m e, furent rebutés par de fa iffe s ctaintes que
certaines perfonnes du P a y s leur infpitèrent.
La dame de Lo m b ar d reproche donc au Regiiïeur de
n ’avoir pas fait ce q u e l l e , ou fes agens l’ont empêché de
faire.
Le Régiflcur obfcrve encore qu’il eft intéreflant pour le
Ma rquis de Cabris que fes moulins ne foient pas affermes
cette année , par deux raifons : d’abord , parce que la récolte
pendante doit donner un produit cxccdant deux années
de la Ferçne ordinaire , êc enfuitc parce qu’il pourra favorr
]c véritable produit de fes mouiins , qu’on ignore depuis
environ 10 ans.
Le Régiflcur répond avec la même énergie au fécond re
proche de la dame de Lombard.
En effet., n ’cft-il pas ridicule que la dame de L om b ard
fe plaigne de ce que la caille du Séqucitrc n’a reçu encore
que 1300 liv res, elle par qui les biens du M arquis de C a
bris ont été pillés pendant fepe a n s , &
font enchaînés
aujourd’hui.
L e R égiflcur obfervc tout ce qu’on a déjà vu dans le récit
des faits : qu’elle avoit exigé d ’avance 20,000 livres fur la
Ferm e des moulins
à h u ile , ôc environ 1700
livres du
Ferm ier de la T e rre de Blézardes. Il obfcrve qu’elle avoit
laiilé arrérager les im portions de la N o b lcile , la capita
tio n , la taille
8c
les intérêts dûs aux Créanciers légitimes
de fou fils, Sc qu’elle avoit négligé des réparations cflèntiçllcs.
Il obfervc que peu de temps après la, nomination du Sé~
�111
quef l re , (i) les rentes & revenus du Marquis de Cabris ju re n t
Jai fis pour les fr a is de f a tranßadon a P aris , & par d ’ autres
f a i f e s fa ite s a la Requête des fieur de G ourdou de Gras , 6
la D am e de S. Ce\aire ( z ) du fieur M a ß e , M ‘ de P en fo n a
P a ris , & de la Dam e Prieure du Couvent de Bon-Secours.
Il
oblcrvc que' toutes ces fa ifles ont été fu iv ies de celles
fa ite s a la requête des Dem oifclles de B o n p a r, du fie u r de
T a rd ivi , & du fieu r Courmes , Créanciers du M arquis de
Cabris , ( 3 ) & enfin par une autre à l.i requête de la Dam e
M arquife douairière, (4) de forte , ajoute le Régi fleur , qu’ il
n ’ a prefquericn reçu des Fermiers, dont les mains ont été liées
par les diverfes fin fie s.
Q u e la D a m e de Lom bard trouve une réponfe , s’il c il
pofîible. C es cfForts contre la probité & la capacité de l’iiom (1) C ’eft-à dire t peu de temps après la Sentence du 6 A v r i l 17 8 4 ,
q u i a enlevé Paiiminiilration à la D a m e de L om bard.
(1) Pour l’exécution de la tranfaétion qui porte le prétendu fnpplém ent de légitim e à plus de 100,000 liv., tranfaétion annullée par l ’A rrêt
du C o n fe il.
(3) C e fo n t les créances facilitées par A lzia ri & nutorifées par S e y t r e ,
c o m m e curateur , ou c o m m e fo nd é de pouvoirs du M arqu is de C a b r is ;
&: aujou rd ’h u i , c’oft: Seytre } c’eft A lzia ri qui fe trouvent Procureurs
des créanciers, & qu , en cette qualité ; pourfuivent & font faiiir les
biens.
-
(5) N ’eft-on pas étonné ou indigné de voir la D a m e de l om bard fe
préfencer elle - m êm e c o m m e créancière de fon f i l s , lorfqu ’elle a diilïpé
plus de 100 m ille écus fur fes r e v e n u s , lorfqu’elle a grevé fes biens de
plus de 100 m ille écus de dettes ? N ’eft on pas ind ign é de la v o i r ,
comme créancière 'de fo n f i s , failli' & enchaîner dans les mains des 1e r m i e r s , les revenus de fon fils , & fe plaindre de ce que les revenus de
fun fils
ne font pas dépofes dans la caiiTe du Séqueftre ?
�1I
X
me appelé par les circcnftances 5c par la Fa mil le , a 1 adminiftration des biens , atteftent l’inutilité des calomnies hafardées contre la Marquife de Cabris , qui ne veut pas adminif*
trer ; Si dans ces reproches infeniés , on voit plutôt le défefpoir du fuccès certain de la belle-fille , que l ’cfpoir de réuilîr
elle-même.
Elle cil il loin d’efpérer , qu’on annonce autour d ’elle que
dans l’impoilibilité de la nommer curatrice , les Juges n o m
meront un curateur d’office , autre que ceux indiqués par
les parens.
C e fyftême tient du délire qui agite tous les fyflêmcs de
l ’aiTociation. 11 faut une caution à l’in terdit, co m m e au pu
pille. Les pareils nominateurs (ont cautions du curateur q u ’ils
nomment. Les Juges doivent confirmer leur choix , s’ils ne
veulent pas être eux-mêmes cautions du curateur qu’ils fubfûitueroienc au choix des parens. Leurs fonctions refpe&ables font déjà trop onéreufes, pour leuriuppofer ledefir d’en
augmenter le fardeau,
D a n s l’efpècc , il faut donc fe décider entre deux perfonnes préfentées par la famille , la mère & Tépoufe du Marquis
de Cabris.
E t c o m m en t balancer ? Sa mère cft rejetée par la loi. Elle
cft comptable d’une curatelle déjà e x e r c é e , d ’une curatelle
fouillée de tous les abus que l’incapacité, l’infouciance &c l ’indélité peuvent accumuler. Elle cft comptablcde toutes les d i
lapidations qu’elle a autorifées ou fouftertes ; elle cft compta«
ble d’ un mobilier immenfe difperfé,destitrcs fouftrairs fans in
ventaire & au mépris des fccllés bi ifés, des baux faits par an
ticipation ôt fous lignaturc privée,iignes perfides d’un prix in-r
ferieurau véritable prix
elle cft comptable des bois coupés
fans
�M3’
fans nécelîîtré-, des terres abandonnées- fans redevance
des pertes eliuyccs par le retard des 'rçpcarations urgentes.
Elle.eit comptable des dans confidérablcs faits à les gendres
fous le prétexte & Je nom de légitime , des foixante mille
livres dont elle a payé les trahiions d e S e y t r e , de toutes les
rapines exercées par les fubaiternes, par A l z i a r i , qui oioit
fe couvrir de ion n o m , ôc de ion pouvoir pour piller les reve
nus de ion fils.
Elle effc comptable des tourmens que ion fils a foufFcrts
dans fon propre C h â t e a u , des privations qu’il ép ro u vo ita u
milieu de fa f o r t u n e , au milieu de ceux qui dévailoient fa
fo r tu n e , . d e s atteintes portées à l'on exiftence., des alimens
contraires à fa fan té , des haillons dont il étoit c o u v e r t ,
des injures qu’il en te nd oi t, des coups qu’il r e c c v o i t , fous la
main même de fes valets. Elle cft comptable de tout ce qu’il
a enduré à P a r i s , dans l’humiliation &C le befoin , redevable
de fa vie au crédit d ’un Maître de Peniîon , lorfqu’clle le
v o ÿ ô i t , lorfqu’clle lui p àr loi t, toute cha-gée des revenus
de fa T e rr e , du prix de fon argenterie
6i
de fes boucles
d ’or.
T e l l e cft l’indignité de cette ancienne curatrice, qu’un
étranger,un inconnu, un habitant desplus lointaines régions,
lui feroit préférable Sc préféré.,
s’il étoit queftion d ’une
nouvelle curatelle.
L a femme de fon fils, aux droits que la Loi lui d o n n e ,
unit les droits de la nature , de ia famille, de fon é t a t ,
:dc fa tendrefle , do nt d i e a donné des preuves éclatantes.
S e u l e , . e l l e a défendu fon époux, courte tous fes parens
ennemis; & pour la v o i r défendu , elle a traîné trois années
.de fa jeuncüc lous^un joug aviliiTanr. Pleine du courage
P
�ii4
qui l’anime c n c o r c , elle n’a briie Tes fers que pour brifer
ceux de ion épo ux , pour l’arracher des mains qui s’appefantifloient fur lui , pour le placer fous la fauve-garde d ’un
Tribunal plus propice. S e u l e , elle l’a accueilli foiblc &
dépouillé; elle l’a foigné , habillé &C nourri , fans autre
créJic que fa p ar ole , fans autre fccours que ceux de fes
amis , aux rifqucs de fa dot & de fes elpérances. Dans ce
mom en t encore , elle ne détend contre
l’intrigue Sc la
c a l o m n i e , que la douceur d’être auprès de l u i , de veiller
fur fon repos &. fur le bonheur de fa fille. Elle rejette les
foins. &î les foupçons inféparablcs de toute admmiftration
pécuniaire : elle ne prétend qu a l’honneur d etre époufe
&. mère.
M a i s , pourquoi ce parallèle ? pourquoi ce combat fur
la curatelle du Marquis de Cabris ? La curatelle ne peut
exifter que par l’interdiction , & le Marquis de Cabris ferat-il interdit ?
J
N o n : l’interdiition eft impoflible, parce qu’elle eft injufte ; elle clt injulte , parce qu’elle eft inutile.
Elle ne pourroit avoir que deux objets : la fureté de la
perfonne, & la fureté des biens.
Depuis que le Marquis de Cabris n’eft plus fous le bâton
de fes valets , fa perfonne eft en fureté : fes biens feront
confervés par les précautions que laJuftice fait prendre dans
de telles circonftances , par les foins aifidus &: éclairés d’un
Confc il relpcctablc.
Qu el avantage de plus pourroit promettre l’intcrdi£tion ?
Elle feroit utile fans doute , mais feulement à ceux qui
la provoquent.
Elle feroit utile à la dame de Lom bard , pour couvrir
�ir5
d ’une impunité éternelle les abus dont elle eft coupable ;
aux parens qui l’ont protégée, pour fe fouftraire à la caution
qui les menace ; à fes A g e n s fubalternes, pour petpétuer
leurs rapines; à S e y tr e , pour conferver les 60,000 liv
fi
juftement acquifes ; aux beaux-frères, pour légitimer , s’il
étoit p offible , le prétendu fupplément de légitime ; au
C o m t e de G r a ffe , pour unir fon fils à la fille d’un homme
q u ’il veut noter de f o lie ; au Marquis de Mirabeau , pour
exercer librement l’empire qu’il fe promet fur les perfonnes
& fur les biens.
Si ce genre d'utilité étoit une raifon légitime de l 'interdiction , il faudroit fuppofer à la Juftice, à fes M i n i ftres,
le droit & la penfée d’immoler à l’affemblage bizarre de
tant d’intérêts odieux , la fortune & l’exiftence du M a r
quis de Cabris , l’honneur de fa fe m m e , & le bonheur de
fa fille.
S ig n é t
M ira b e a u
C H A M B R E
Me DU
,
D U
M ar qui fe de Cabris.
C O N S E I L .
V E Y R I E R ,
de
Avocat.
N orm an d ie,
Procureur.
D e l’ imprimerie de P . G . S I M O N & N .-H . N Y O N ,
Imprimeurs du P a r le m e n t , rue Mignon , 1 7 8 5
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Vernet
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Cabris. 1785]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Du Veyrier
De Normandie
Subject
The topic of the resource
démence
curatelle
maltraitance
abus de faiblesse
enfermement
ordre ministériel d'enfermement
prodigalité
successions
assemblées de famille
inventaires
terriers
Ursulines
violences sur autrui
mobilier
prévarication
médecine légale
domestiques
bibliothèques
scellées
témoins
vie monastique
hôtels particuliers
lettres de cachet
correspondances
Riqueti (Honoré Gabriel, Comte de Mirabeau)
créances
experts
régime alimentaire
alcool
dénuement vestimentaire
Description
An account of the resource
Mémoire pour la dame marquise de Cabris, défendant à l'interdiction de son mari ; Contre la dame de Lombard, marquise douairière de Cabris, poursuivant l'interdiction de son fils, pour cause de démence.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de P. G. Simon et N.-H. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1785
1769-1785
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
115 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0114
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_V0115
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/17/53989/BCU_Factums_V0114.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Grasse (06069)
Aix-en-Provence (13001)
Sisteron (04209)
Cabris (06026)
Paris (75056)
Manosque (04112)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
alcool
assemblées de famille
bibliothèques
correspondances
Créances
curatelle
démence
dénuement vestimentaire
domestiques
enfermement
experts
hôtels particuliers
inventaires
lettres de cachet
maltraitance
médecine légale
mobilier
ordre ministériel d'enfermement
prévarication
prodigalité
régime alimentaire
Riqueti (Honoré Gabriel, Comte de Mirabeau)
Scellées
Successions
témoins
terriers
Ursulines
vie monastique
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/17/53987/BCU_Factums_V0112.pdf
1c169e904091ce7df9cacd0ff34792af
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MÉMOIRE
P
o u r
le fieur M
o n t g o lfie r
,
R ec e v e u r-G é n é ra l
de
j
l 'a r c h e v e c h é de Paris , a c c u ffé ;
C
o n t r e
le
fi e u r
M
onroy
, E nt e p r e n ur
d e B âti-
m e n s , a c c u fa te ur ;
;
>
E N préfence du f ieur CARDON , Marchand de v in , de
M e. D u f r e n o y , Procureur au Châtelet , & de la
dame G l R A R D , co-accufés.
f
----- ,---------------------------------------------------^
,
,
H ic r.iurus ahtreus t jl o
N il con fcirt f i b i nulLi pallcfccre culpâ.
H o r . , Epift. i o . Liv. n . Ad Mæcen.
L e fieur Montgolfier eft acc ufé de complicité dans
une faillite prétendue frauduleufe........................ E h !
q
u
de
i nous eft : à l’ab ri d’une accufation ? q ui de nous
eft à l’abri des incurfions de ces corfaires domeftiques,
A
j.
j
{
�\i ‘ Av
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v
ç<a.> '. »»•' ,
W**^Aî '
- A K&kV^ib V«
* * V A
• < >xaSÎÏ'
; iy h
4 ,
q u i , ne vivant que de méfaits & d'intrigues 3 épient la.
fimplicité pour en abufer ; qui 3. armés de tout ce que"
la calomnie a d'effrayant, mettent à prix leur inaction y&Z qui , s’ils ne réufliiTenr pas par la terreur qu’ils infpiren t, efent dérober jufqu’au glaive de la loi f pour-
égorger ou dépouiller leurs viét-imes.
,
Mais fe pourroit - il que le fieur Montgolfier fût
coupable ? Se pourroit-il même qu’il fût fufpe£t ? Non..
E t vous tous hommes honnêtes qui , parvenus comme
lui au terme d'une carriere irréprochable , joui il c z en
paix de votre vie pailec ; croyez, avec une douce fécurké , qu’il n’eft pas polîîble de démentir une réputation
acquife par plus de cinquante ans de délicateiTej croyez
donc d’avancc à fa pleine juftification.
Croyez même que sJil cft réduit à paroître aux pieds
de la juftice comme fc défendant d ’être, coupable ;
G’efl: qu’une affociation clandefline , ipéculant fur fe s
dépouilles, a ourdi contre lui la trame la plus odieufe ;
c’eft qu’incapable de tranfiger fur fon honneur, il n’a
pas voulu acheter fon repos aux dépens d’ une juitification folemnelle ; c’eft q u e, fort de fon innocence,,
il n*a pas craint de livrer à fes ennemis un combat à
outrance, & de leur difputer , devant des juges équi
tables , la proie qu’ils ofent encore fe promettre do
Iburs machinations.
F A I
T S.
Au mois de juin 1 7 8 3 , le fieur M ontgolfier, créan
cier du. iieur Diot de Blanchard, s’eft trouvé, par une*
¿¿légation judiciaire, celui du fieur Cardon..
�î
Alors le fieur Cardon , marchind de vin traiteur,
fai Toit un commerce floriflant : il avoit du bien, & ce
bien il l'avoir amaiTé par l'on travail ; une fortune aor
quife préfentoit ainfi à un prêteur une iïïreté matérielle :
des iuccès d’ induftrie lui prometcoienc même l ’accroiffement de ion Oça^e.
¿5
Le fieur Montgolficr fc détermina donc aifément à
Jaiffer entre les mains du fieur Cardon une fomme de
10,000 livres. Ce p rêt, quoique le fieur Montgolficr
eût déjà fait quelques négociations avec le fieur Cardon.,
e i t , à parler exactement, le premier qu’il lui ait fait.:
il eft , fi nous pouvons parler ainfi , la racine de la
créance qu’il répète aujourd’hui.
Tous les jours le .fieur Cardon cherchoit à agrandir
fon commerce, & il formoit des entreprifes d’ un avan
tage très-apparent; mais pour rcalifer fes efforts il lui
falloit des avances , il en obtint du fieur Montgolficr.
Eh ! de quel capiralifte n’en eut-il pas obtenu , tant
la confiance qu’il infpiroit étoit grande , tant les appa
rences lui étoient favorables ?
En 1 7 8 4 , il vend une|maifon , & les lettres de ratifi
cation de fon acquéreur font fcellées fans oppofition.
En 17^ 5 > ü ie préfente pour acquérir des économats
trois mille toifes de cerrein ; on les lui cède, moyennant
une redevance annuelle de 3000 livres, & à la charge
de conftruire un bâtiment au moins de 100,000 livr. ;
& fa fortune j fa réputation fo n t , pour l’exécution d’un
engagement auili important, des fûretés dont fc contente
ür* confeil adminiftratif.
Enfin t & c’eit à l’aeeufateur même du fieur Mont*A z
�41
golfier qu’il faut s-’adreflfer pour favoir la confiancequ’infpiroit le iieur Cardon ; c’eft dans Tes écrits ( i )
cju'on apprendra que ion commerce en vins étoic coniidérable ; qu’il avait des magafins en Bourgogne , aux
environs de Paris Ù dans cette capitale,• que ion auberge
jouijfoit de la plus grande vogue ; que fept domejîiquss
étoient continuellement occupés a. en fàire le fervice ;
qu’il confommoit annuellement pour 40 h 50,000 livres
de poiffon, fans parler des autres comefltbles ; qu’il
faifo it pour 500,000 d'affaires par an ; ôc qu’il avoic
pour plus de deux millions de crédit.
Scra-t-on maintenant étonné que le ficur Montgolfier
ait fait des prêts confidérables au fieur Cardon ? Le
fera-t'On fur-tout,./! 011 réfléchit avec quelle facilité un
premier prêt en amene d’autres , lorfque le débiteur
a une fois gagné la confiance de fon créancier ? Ec
ne craignons pas de le dire, le fe r a - t - o n , fi on fais
avec quel abandon le ficur Montgolfier fc livre à Tattraic
de rendre fervice ?.
,
Au mois de juillet 178 6 , le fieur Montgolfier s’eft
donc trouvé créancier du ficur Cardon , d’une fomme
de 80,189 livres, portée par. portions x en plufieurs bil
lets, à diverfes échéances.
Sans doute cette fomme étoic confidérablc , & l’in
térêt de la conferver pouvoir caufer quelques follicirudes ; d’ailleurs le ficur Cardon avoit déjà promis des
rembourfemens, &c il ne les avoit pas faits; déjà.il avoit
eu befoin de répit.
) Premier mémoire du fieur Monroy, page 10* 11 & 12.
�f
D ’ailleurs encore le fieur Montgolfier le voyoic oc
cupé à ia conitru&'ion d’un bâtiment ; &C ce bâtiment',
dcftiné cependant à fervir d’auberge, éraloic dans for»
architeclure un luxe moniïrucux ; même des coldnnes
en décoroient la façade.
Il conçut donc quelque défiance , non pas pourtant
encore fur la folvabilité de fon débiteur, mais fur la
prudence de fa conduite ëc la diferétion de fes entreprifes.
H témoigna des inquiétudes : malheureufement elles
furent calmées. Cardon lui préfenta un étal général de
fes affaires, duquel il réfultoit qu’il avoit pour plus de
Joo,ooo livres de bien libre & c ffe& if; il lui annonça
de plus des rembourfemens très-prochains ; en un moc
il réuflit à le tranquiUifer.
Mais de nouvelles échéances arrivèrent , &. il paroîc
que le fieur Cardon n’éroit guère alors plus qu’aupara
vant en état d’y faire honneur : il avoit pourtant a
craindre de réveiller les foupçons du fieur M ontgolfier,
& il fentoit bien que le feul moyen de prolonger fa'
fécurité étoit de lui propofer quelque rembouricmcnrEn conféquence, le 28 a o û t, il lui offrit l’ordre dequatre effets, l’un de 4000 livres, fur le comte d’Harcourt, & les autres de 3000 livres chacun, fur un fieur
Hapillon.
Quoique le fieur Montgolfier eût de fortes raifonS
^ ne pas croire à la folidité de ces effets , il les accepta
pourtant, mais h valoir fur fa créance.
Depuis cette époque, près de deux mois s’écoulèrent
fans que le fieur Montgolfier conçût de nouvelles inquié-*-
�6
•tudcs ; le fieur Cardon continuoit Ton commerce 5c fes
conilru£lions ; rien dans fes affaires apparentes n’annoncoic
une mauvaiie iituation»
On conçoit donc fans peine quel fut Ton étonne
ment lorique M e. Dufrcnoy , procureur au Châtelct s
vint lui faire parc du dérangement des affaires de Car
don ; & on prévoie déjà fa conduite en femblablc con
joncture.
I l devoit prendre des précautions p ou r, s’il écoit poffible , affurer fa créance : fes titres étoient de fimples
billets , fans privilège, fans hypothéqué ; il avoir donc
à leur donner une date certaine, de pour cela il falloic
en faire prononcer la condamnation.
Mais alors tous fes billets n’étoient pas échus, & la
faillite n’étant pas ouverte, les échéances étoient en
core de rigueur ; il ne fît donc ailigner le fieur Cardon
que pour 54,089 livres, montant des billets échus : i!
ne fe préfenta pas , & le 13 octobre fentence de con
damnation intervint contre lui.
Pendant les délais de cette procédure le mauvais état
des affaires de Cardon avoit éclaté : faute de payement,
les ouvriers employés à fes conftrudtions avoient quitté
Je travail , & quelques créanciers, affemblés chcz
dame Pourrin , avoient inutilement tenté de le leur
faire reprendre.
D ’un autre côté , la fituation pcrfonnelie de Cardon
empiroit h chaque intlanc ; pluficurs ièntenccs étoient
déjà rendues contre lui ; des contraintes par corps
menaçoient fa Iibcrté\; enfin fa faillite éroit inévitable:
.cependant 9 difoit-il, fes affaires n’étoient qù’engorgées.
�7'
& le moindre répit, pouvoit les remettre dans leur circu
lation naturelle.
Il étoic donc intéreflant pour Tes créanciers de venir
à fon fccours : auffi fe réunirent-ils le 13 o&obrc , 2c
convinrent-ils de follicucr un arrêt de l'urféance : on
dreiïa. fur-le-cham p le placet ,\ il fut ligné même par
le 'ficur Monroy.
Mais des vues pacifiques n’animoient pas rous lescréanciers; quelques-uns, mus par toute autre envie que
celle de conferver au ficur- Cardon les moyens de ré
parer fa fituation, s’oppoferent à l'obtention de la furléancc.
L a liberté du ficur Cardon reità donc expofée auxmêmes exécutions : il s’abfenta.
C ’cit encore M e. Dufrcnoy qu i,-le 29 oeiobre , ap
porta au ficur Momgolficr la nouvelle de cette diiparu-'
tion , qui ouvroit irrémiiîiblcmcnt la faillite.
•
Le ficur Montgoifier étoit créancier de 80,289 Jiv.
8c il avoir titre exécutoire pour la plus grande partie'
de cette fomme j il pouvoir donc commencer les pourÎliitcs : il croit même le plus intérefl'é à le faire.
M c. Du frenoy lui ofFrit ion mini-flic re j il l’accepta.
En conféquence , le 29 ottobre plainte fut rendue y,
information -faite , 8c décret d’ajournement perfonnel
prononcé contre Cardon. Le même jour les fccllés furent
aPpofés fur fes effets.
Le
} faifie reelle de les deux maifons, l’une au
Gros-Caillou &c l'autre à la Râpée : tout cela à la requête
du fieur Montsolfier.
O
�8
Pendant ces pourfuitcs , les créanciers s’étoient fouv-cnr
aflemblés pour aviier à un parti convenable; mais rien
n’écoic encore arrêté, lorfque le 13 novem bre, 5c à
une aflembléc extraordinaire , le fieur Cardon , après
avoir donné l'état de fes affaires, fie propofer l’abaiidoji
eén éral de fes biens.
Sans contredit on ne pouvoir exiger de lui rien de
plus ; il abandonnoit tout : auiîi fa propofition fut ac
ceptée ; &C on croira difficilement qu’un a&e de cette
nature ait ¿té fiiivi d’une plainte en banqueroute fraud-uleufe.
Quoi qu'il en foit , l’acbe d’abandon fut dreiTé : les
créanciers qui compofoient l’ affenïblée le fignere-nt ; ils
s’ unirent Sc nommerentles iieurs Montgolfier Sc Soi fions
fyndics de l'union.
Ces fyndics fe tranfportcreni à. Sain t-Cloud , où b
fieur Cardon s’étoit réfugié ; mais ce ne fut pas fans
difficulté qu’ils le déterminèrent à iigncr. De noûvellcs
réflexions avoient changé fes réfolutions : il ie croyoi.c
cncord riche ; il étoit fur-tout perfuadé qu’il abandon^
noit à fes créanciers plus qu’il ne leur devoir ; il rjépugnoit à fe mettre «à leur merci par un abandon général :
il refufa donc d’abord de figner, & il ne s’y détermina
que quand le fieur Montgolfier lui cut fair entendre que
l’abandon entier de ia fortune, quelle qu en fut la fituatio n , étoit un hommage qu’il devoit aux bpnnes inten
tions de fes créanciers.
Quoique cet a£te fût figné par beaucoup de créanciers,
il ne l’etoit pas par la pluralité, 6c on ne pouvoit par
conféquent en pourfuivre l’homologation. Cardon reftoit
donc
�9
donc toujours expofé à des contraintes } il ne pouvoir
agir pour acquérir ccttc pluralité : il étoit ainfi impor
tant de lui obtenir un arrêt de furféance : les créan
ciers le folliciterent, & l'obtinrent le 13 décembre.
Alors le fieur Cardon, tranquille fur fa liberté , tra
vailla«! acquérir la pluralité : il y réulîir. le 3 mars 1 7 8 7 ,
2c le 13 du même mois ce traité fut homologué provi*
foiremcnt avec les créanciers accédans.
Mais^ déjà fe formoit un orage contre le fieur Cardon.
Le'fieur Monroy , fon créancier de 1 5 , 3 5 7 livres, animé
par la cupidité & par d’autres motifs odieux que nous
lai fions au fieur Cardon à développer , avoit formé le
projet de ie ruiner fans reiTource, & pour cela de fe
rendre maître de la difeuifion judiciaire de fes biens.
D e - là , comme moyen de parvenir à fon b u t, une aceufation de banqueroute frauduleufe.
Effe&ivement , le 7 avril 1 7 8 7 , il a rendu plainte 6c
fait entendre dix-huit témoins.
Le premier juin, le décret d’ajournement perfonnel
déjà prononcé contre Cardon a été converti en décret
de prife de corps ; fa femme & M e. Dufrenoy ont été
décrétés d’aifignés pour être o u ïl; ils ont tous iubi in
terrogatoire.
O
Tout ce qui avoit été fait jufqu’alors ne laifibit matière
à aucun foupçon contre le fieur Montgoîfier ; cependant,
on (aura bientôt pourquoi, le fieur M o n ro y, dans fes
Manœuvres, vifoit direâemcnt à lui ; il falloir donc
dreffer de nouvelles batteries.
E n conféquence, le 14 juin , nouvelle plainte & infor
mation , compofée de
témoins,
B
�ro
Ces efforts ont encore été impuiflans cont re le fieur
M o n t g o l f i c r , mais le fieur M o n r o y ne s’eft pas pour cela
d é c o u r a g é ; il a encore ajouté h (a plainte, il a fait en
tendre c n c o r c j n e u f t é m o i n s , Sc il cil enfin parvenu h
obtenir ce qu’il pourfuivoit fi c h a u d e m e n t : le fieur Moncrçolfier a été décrété {faffigné pour être oui.
Q u e le fieur M o n r o y ait fait du fieur Montgolficr un'
objet particulier de
(es pourfuites, tout le m on de en'
pénètre les m o t i f s ; .Y peine les a-t il lui m ê m e déguifés;
h peine a-t-il dilRmulé qu’il fc flattoit que le fieur M o n t
golficr, impliqué dans une affaire criminelle , s’emprefferoit d’en acheter c hèr em ent l’cxtin& ion . Il vouloir
d’ailleur» fc rendre maître de la difcuilion des biens de
Cardon, &
pour cela il falloir en dépouiller
le fieur
Montgolficr ; pour cela il falloit le rendre fufpecl.
Mais combien pourront fc méprendre fur les caufes de
Uacharncmcnt de cet a c c u l a t c u r , fur les caufcs de la per(écotion lourde &- raffinée qu’il lui a fait éprou ve r!
faut donc
Il
leur apprendre que fes e n n e m i s , ou Tes en
vieux , fc font ligués, fitût qu’ils ont vu qu’on pouvoir tirer
parti cont re lui d’une affaire malheureufe; qu’il fc font
emparés du fieur M o n r * y , o n t dirigé tous fes c o u p s , l ’ont
aidé de leurs manœuvres ic m i m e de Uur plume: il faut
leur apprendre que le fieur Montgolficr a eu a redouter
la p^rfiJn: »le cette cabale m o n l l f u t u f c , plus ericorc que
r ir d f t ic c
du fieur M ^ n r o v
,
Q . j o quM en f o i * , le û-—:r Montgolficr ctoit
te il I* icroit pîefr:«te pp jr prerer ic* t c p o n f e i , fi , a ru**
de I» c o n f c i c n c ^ , il n\ ût c l o u t é que Ion imp n ;
J j î c U fcntC : mat» s'il dcroi t compte J ,
t
fa codyM,;c •
�Tt
ctoic-ce avec l'appareil humiliant des formes rigoureufes de
la juftice ? N ’étoic-cc pas plutôt pour éclairer l'opinion
publique & raffurer la propre d é lic a tc fle , que pour r e m
plir le premier devoir d’un h o m m e fufpc&?
Aufli interjetta-t-il appel de fon d é c r e t ; mais il fuccom ba:
Sc cette défaite viendroic en co re effrayer fou
i n n o c e n c e , s'il ne pouvoir pas dire hautement q u e , lié à
des c o- a ccu fé s cont re Icfqucls s’élevoient fans doute des
p r é e m p t i o n s fAcheufes , il a été la vi&ime f o r c é e du
principe de l’ordre judiciaire, qui veut qu’c* matière cri
minelle , tinjlruclion fo it indiv 'tfible ; s’il n’avoit pas furtout la douce & ineftimablc confolation de fc rappelIcr l’h o m m a g e publiquement rendu à
la pureté de f i
c o n d u i t e , par un magiftrat aufli glorieufement
co nnu
par fon intégrité que par fes rares talcns ( i ) .
Le ficur Monrgolficr cft d o n c revenu devant les pre
miers juges: il a ioutenu y interrogatoires ic répondu à
2 j)
interrogats ,
prcfque
tous adminiftr¿s p a r l e fteur
S io n r o y , c ’eft-i-d.re prcfque tous c a p t i e u x , dérifoircs,
étranger» \ la conrcftjtion , fie pourtant infidiculemenc
»■^produits fous toutes les formes. Scs rcüiftrcs ont été
compulfé* , fie p r o c è s -v e rb a l , t i n t J e leur defeription que
de l’expédition J e» articles relatif) i Î* c r é a n c e ,
a été
joint au procès : il x été c o n f r o n t é , ifcc. en un m o t , il a
fubi toutes
les é p r e u r e t
de la
procédure la
plus ri-
goureuf?.
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^
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kul«« Ata» '»i »4M «39 pc"»*»
�12
Sans doute ces épreuves ont coûté à fa fenfibiüté ; fans«doute il a été bien cruel pour lui de fe voir étroitement
e n v i r o n n é de la défiance & des menaces de la juftice;
mais maintenant, arrivé à une juftifîcacion éclatante , il
retiendra Tes plaintes, il oubliera toutes Tes peines, il at
tendra avec confiance les réparations qui lui font dues.
Et nous, voués à fa défenfe par affection 6c par un
fentiment intime de fon innocence, plus encore que par
les devoirs de notre mi'niftcre ; nous à qui les fourdes
manœuvres de fes ennemis font connues, & qui avons
pour ainfi dire vu de près , les rciForts tendus pour le
perdre ; puiffions-nous, maîtrifantl’ indignation dont nous
fommes pénétrés, ne pas franchir les bornes d’une iage
modération! Puiffions-nous ne pas perdre de vue que il
la calomnie artaque avec fureur , l'innocence ne fe dé
fend qu’avec courage, que la vérité eft fa juftificationi,.
qu’elle eft même fa vengeance !
M
O
Y
E
N
S
.
Etonné de voir le fieur Montgolfier impliqué dans
une affaire criminelle , on fe demande d'abord ce qu'il
a fa it;
bientôt il faut renoncer à trouver dans fa con
duite quelqu’a&ion fufpe£te.
Avant la faillite du fieur Cardon , il lui a fait des
avances, il lui a donné des fecours, >1 l’a aidé à amélio
rer le fort d*unc famille nombreufe ; & féduit, aveu
glé même fi l’ on veu t, par les apparences, il s’eft de
prêts en prêts, de ménagemens en ménagemens, trouvé
ion créancier de 80,2.89 livres, à l’époque du dérange-
�*5
ment cíe fes affaires. Cela eil malheureux; mais cck*
cft-il blâmable?
Ma is , entendons nous dire, la créance du fleur Mont j
/ golficr efl f i confidérable ! E h bien Í qu’importe fî elle cft
Jincere? Au furpîus & indépendamment de toute preuve
de fa iinceriré, que conclure de. la quotité de cette
créance? qu’elle eft invraifemblablc, qu’elle cil fufpe&c.Loin de nous pareille conféqucnce! Il n’y a qu’une ma
ligne prévention, il n’ y a peut-être qu’une probicé équi
voque qui puiiTe la concevoir ; car ceux-ià feulement qui
en font capables, préfument hardiment le dol. Quel eft
en effet l’homme honnête qui ne fait pas que l’excès
de confiance^ ordinairement produit par l’excès de droi
ture , produit à fon tour un abandon qui ne calcule pas,
& qui ne s’arrête que quand il eft pleinement détrompe.
Ignore-t-on d'ailleurs que le ficur Monrgolficr n’a pa3
prêté 80,189 livres en un fcul prêt, mais par des prêt!?
divers, fucceffifs, amenés les uns par les autres, pendant
pluiîeiirs années? A-t-on oublié qu’il a été induit à ceá
différens prêts par la fituation floriflante du ficur Cardon,par la profpérité apparente de fon com merce, par l'exiftence matérielle d’une fortune adez c on f i d é r a b l e , par
fon exactitude dans plufieurs opérations, par le défaut
de pourfuites publiques contre l u i , par des promefles
^êm e des indications de rembourfement total.
Et combien d’autres ont été abufés auffi cruellement
que lui : le fieur Soldons a fait des avances pour 81,000 liv.,
le fieur Gourct eft créancier de 38,000 liv ., la femme le
S*eur répète 56,000 l i v . , & c . Enfin, car tout eft relatif,beaucoup d’autres perfonnes, en prêtant au fieur Cardon’
�•14
des fommes moindres , ne lui ont-elles pas confié la plus
grande partie de leur fortune? Son pailif ne s’éleve-c-il
pas à près de 500,000 livres? Que de créances feroient
donc fufpe&es, ii pour cela il fuffifoit qu’elles fuflent
confid érable s !
Après la fa illite , le iieur Montgolfier s’ efl: comporté
en créancier qui, pour l’intérêt général, veut éclairer la
conduite de fon débiteur & conférvcr le gage commun;
il a provoqué contre Cardon une procédure févere, 6c
mis Tes biens fous la garde de la juftice.
C e débiteur a-t-il expofé l’écat de Tes affaires & de
mandé à traiter avec fes créanciers? Le fieur Montgol
fier a été le premier à exiger qu’il fît un abandon géné
ral de fes biens; il s’eft même employé perfonnellemenc
pour l’engager à cette abnégation de toute propriété.
Le traité du 13 novembre a-t-il été conclu , &. le fieur
Montgolfier nommé fyndic? Il a conilamment fervi la
confiance de l’union ; il s’eft efforcé de prévenir le dépériflement des effets de C ard on , Sc il en a fuivi la difeuffîon avec le moins de frais poilible.
En un m ot, toutes les démarches du fieur Montgol*
jier ont eu d’abord pour but l’avantage de fon débiteur, ÔÇ
^depuis fa faillite, l’intérêt commun des créanciers.
Ec de fon côté qu’A fait le fieur M onroy ?
Avant la faillite , il a faic quelques négociations avec
C a rd o n , il lui a fait quelques avances, mais il l’a ufuré»
Sc il a ainfi ^contribué au dérangement de fes affaires (0*
( 1 ) « P a r l’ événement de toutes nos négociations, il s’eit trouvé mon créait-
p
cier ; je lui ai fait des billets ; a l’époque de leur échéance je les ai re*ouvel-t;S
�Après la fa illit e , il a, fans intérêt légitime, puifque le
fieur Cardon avoir abandonné tous Tes biens , rendu
plainte contre lui; il l’a fait emprifonner ; &. abuiant ainil'
<î;s formes criminelles, il lui a ôté les moyens de conti
nuer fon commerce &: d'augmenter le gage de fes créan*
ciers. Sacrifiant à fa cupidité l ’intérêt de tous, il a traverfé
les arrangemens pris par la pluralité unie ; il s’eft oppofé
à une difeuffion amiable, pour y fubftituer une difcüilîon
judiciaire & ruineufe; il a retardé la vente des vins 8c ils:
ont dépéri; il a empêché la continuation du bâtiment du!
Gros-Caillou ,• &. ce bâtiment s'eft détérioré : la plupart
des matériaux réfervés pour l’achcvcr font même deve
nus hors de fcrvice.
En un m o t, le fieur Monroy , par toutes fes démai'-'
ches, n’a pas feulement travaillé à la ruine du fieur Car
don, niais même à la dilapidation complccte du gage des
créanciers (i).
» faute d’argent, 6c M onroy a toujours exigé que j’y compriffe les intérêts. Ces
» billets ont été renouvellés fi fo u v e n t,& il y a eu à là fin tant d’intérêts cum ulés,
» que la totalité de ma dette s’eft trouvée formerune forr.me de 1 5,000 livres. (Mém.
» de C ardon , p. 1 7 ) ».
( 1 ) L i fieur L argiliere, un des témoins du fieur M o n ro y , a obfervé, lors de
ion récolem ent, que « M o n ro y étoit un malheureux qui étoit caufe que lui t é - ’
» moin ctoit dans la m ifere, & que fans toutes fes chicanes infâmes, les créan” ciers de Cardon ne feroient p is dans la détrefie ; que fi Cardon n’eût pas été
” chaffé de fa m aifon, il l’auroit payé ;
6c
que M onroy lui a dit que fon plus ‘
}> grand plaifir étoit de confommer tout en frais ».
L e fieur M onroy a dévoilé à cet égard fes intentions défaftreufei; il en a fait
Part à plufieuri perfonnes , & c’eft d’après cela que les créanciers , unis dans une
délibération du 23 ju in , ont d éclaré« qu’ils font unanimement convaincus que le
^*eilr M on roy ne peut avoir d'autre but que de multiplier les frais , que l’union
"
ne peut qu’applaudir aux efforts du fieur M ontgolfier, pour empêcher qu’il ne
ct féuflifle dans fon projet ; qu’elle l’invite a ies continuer, & c , » .
�lé
Qu4on prononce maintenant lequel du fieur Montgoifier ou du fieur Monroy devroit aujourd'hui jouer le rôle
d ‘accufateur. Qu’on dife pour lequel des deux c’ cft un de
voir de fe jufiijîer.
M a is, quelque droit de s’en plaindre qu’ait le fieur
M ontgoliîcr, telle eft la fatalité de fa fituation, qu'il faut
qu’il repoufife une accufation , que c ’eft à lui à fe juftifier.
Il s’agit donc de remplir cette tâche, facile il eft vrai, mais
douloureufe à celui qui, defcendu.dans faconfcience pour
vifiter auftèrement fes a v io n s , n’en trouve aucune qui ,
bien loin d’émouvoir fon repentir, ne lui faiTc goûter la
douce fatisfa&ion d’avoir tout fait pour le bien.
L ’accufation intentée contre lui pofe fur deux bafes ca
pitales: l’exagération de fa créance, 6c la collufion de fes
pourfuites. Sa juftification fe divife donc naturellement en
deux branches: il a à. établir la fincérité de fa créance
Ja légitimité de fes pourfuites.
§.
I.
L a créance du fieur Montgolfier ejlfncere.
Le fieur Montgolfier cft porteur de treize billets du
fieur C ard on , qui forment en total la fomme de 80,289 !•»
il établit donc fa créance par des titre ; & très-certainefnent des titres méritent croyance, fur-tout quand ils font
jnattaqués 6c inattaquables par l’infcription en faux.
Rem arquons même que la nature de ceux du fieur M ont'
golficr cd une preuve 'de leur fincérité. S’il eût été capable
de
�*7
de fimuler des créances ; éft-ce qù’il fe préfenteroit avec
de fimplcs billets, fans dare certaine, fans hypothèque?
■Eft-ce que fa créance auroit été expofée à fe confondre
dans la maffe des chirographaires? cft-cc qu’ une partie
confidérable fe rrouveroit en ce moment réduite à une
condition fi défavantageufe?* Non , certainement; la
fraude a (Turc fes pièces & épuife les précautions, pour ne
pas manquer la proie qu ’elle convoite.
Ce n'eft pas au refte à l’exiftcnce de fes titres que le
fieur Montgolfier borne les preuves de la réalité de fa
créance. Il a mis fes regiftres fous les yeux du magiftrac
inftru&eur, & ce magiftrat j-ufte'& éclairé (i) , y a re
connu tous les caradleres de la fincérité ; il a trouvé le rap
port le plus exa£t entre les énonciations des différentes
portions de la créance & les titres divers de cette créance.
» Vérification faite, eft-il dit à la fin du procès-verbal
» de compulfoire, du regiftre couveic en pa-chemin
” v e rt, avons remarqué que les dates, numéros & fommes
M y portées cadrent parfaitement avec les dates, numéros
6c fommes portées au regiftre, couvert en peau verte;
>3 8c pour d ’autant plus nous affurer, de la part du fieur
» Montgolfier, la fincérité & la légitimité de fes créances,
,s il nous a repréfenté , pour notre inftrucbion feulement,
’5 les effets dont il fe trouve porteur, au bas dcfquels
*» nous avons remarqué des numéros conformes à ceux
,J énoncés esdits regiftres, ainfi que les fommes ».
Le f i e u r Montgolfier invoque d’ailleurs, fur la fincérité
de fa créance, la rcconnoiffance formelle qu’en fait la
( l ) M . Judde,
�i8
pluralité unie des créanciers 3 6c les aveux ou témoignages
multipliés qu’en contient la procédure de Monroy.
Peut-on d’après cela former une preuve plus complette de la iïncérité d’une créance , &. le fieur Monroy *
qui ofe y réfifte* , ne feroit-il pas bien embarraffé fi on
en exigeoit une pareille <îe la fincérité de la fienne £
Ne le feroit-il pas même fi on lui demandoic quelle
preuve de plus
dans l’ordre naturel des choies , le
lîcur Montgolfier pourroit apporter ?
C e n’eft pourtant pas encore allez poi r le fieur Mont
golfier -, il veut à des preuves pofuivea réunir des preuvesen quelque maniere négatives ; il veut examiner les infor
mations du fieur Monroy , & rcpouilèr d’ailleurs les impu
tations particulières de cet accufateurSix témoins ont été confrontés au fieur MontgolfierCe font ainfi , fur plus de 60 , les feuls qui aient été'
préfumés faire charge contre lui. Ces témoins font l'esficurs Hollicr Ifaac C a lm e r , Charpentier, Pierre &C
Nicolas M ercier, &. la dcmoifelle Dcgouy..
Nous allons rapporter dans toute leur force les dépofuions de ces témoins ; mais auparavant il nous paroîc
cflentiel de donner une idée de l'information en général t
èc de dévoiler les manœuvres qui l'ont produite : il
n’en faudra fans doute pas davantage pour la juftement
apprécierOn ienc combien il doit être difficile de prouver,,
foit la partialité d’un commiiTaire-informateur , foit la
corruption des témoins, & c’cfl: pour cela qu’on voit il •
peu d’infurre&ions contre les procédures dont les abus
�*9
font couverts par une régularité extérieure ; mais il fort
quelquefois du fein même de cette procédure des traits
de lumière , q u i , en tant qu’ils éclairent les juges fur
la c o n f i a n c e qu’ils doivent accorder à certaines déposi
tions , font propres à tenir lieu d’une procédure vrai
ment épuratoire ; or le fieur JVlontgolfier peut fc flatter
de réunir des moyens généraux de fufpicion contre la
plupart des acteurs qui ont figure dans les informations
du iieur Monroy.
On lit dans la dépoiition du troifieme témoin de la
fécondé information , que M e. Petit Dufrcnoy 0 le
Jieur Montgolfier fe font permis de lui tenir des propos,
dont il s’eit tenu offenfé , relativement à un billet àt
ordre pour lequel il cil créancier de Cardon.
Et ce témoin a déclaré , à la confrontation, ne pas
connoîcre le Jieur Montgolfier , qui le voyoic au/fi pour
la prçmiere fois.
-Ain il de deux chofes l’ une ; ou le témoin , à la follicitation de Monroy , a fauflement & fous des rapports
nuifibles compris le fieur Montgolfier dans fa dépoiition;
ou le commifTaire-réda&eur s’eit lui même rendu cou
pable de cette prévarication.
Le fieur Nicolas Mercier a dit auiîi à la confronta
tio n , « que le commiflaire lui a demandé comme un
■» confeiTeur ce qu’il favoit fur chaque fait, qu’il lui
a répondu ce qu’il favo it, que le commiflaire lui
demandoit chaque fait féparément, ave^-vous vu telle
& telle chofe , que lui témoin répondoit «.
Eil -ce là , nous le demandons, la conduite que doit
tenir un commiflaire ? D o it - il provoquer la dépoiition
C ij
�20
d’ un témoin î D o i t - i l , par des queftions, dirigef cette
dépofition /ur certains faits &c certaines pcrfonncs ( i ) ?
Ec lorfqu’il a tenu une pareille conduite, n’efl- il pas.
au moins fufpcct de partialité?. N e doit-on pas ie méfier
de ia réda&ion, fur-tout Iorfqu’on voit le même témoin %
à qui on a fait dire que le fieur Montgolfier Sc le fieur
Dufrcnoy mangeoient fouvent enfemble chez le fieur
Cardon , Iorfqu’on le v o i t , diions- nous, déclarer, à laconfrontation ,. qu’il ne les a jamais vus enfemble?
Enfin le fieur Charpentier interpellé........... a dit : « qu’:t
»s ne fe rappelle pas avoir été chez le commiflaire ,
» qu’on lui a apporté ia dépofition chez lui pour la'
»1 figner, qu’il l’a fignéc & s’en eft convaincu depuis
m qu’il a été confronté aux autres accufés,.ne fe rap>3 pelle pas qui. la lui a apportée, croit fe rappcller que
» c’étoit vers les une heure, que M onroy ne l\a point
» prié de depofer en fa faveur, puis a dit que oui y
« puis non ».
Que s’ils le peuvent, le commiffaire & le fieur
Monroy effacent les terribles indu£tions qu’il fauc
tirer de pareilles déclarations. Que s’ils le peuvent,
ils détournent la fufpicion qui doit rejaillir des aveux
de ces témoins fimples & timorés, fur les dépofitions
de ceux qui, plus fidellcs à leurs criminels engagemens,
ou naoins fcrupuleux., ont perfiilé d a ns leurs impofturcs.
( i ) Les recueils font remplis d’arrêts qui ont défendu aux juges d'interroger
fcs témoins. Il y en a même qui les ont punis pour l’avoir fait, O n diftingue
celui du 43 j u>lie* 1618 dans 1 affaire de la Pivardiere , & ceux des 16 janvier
1 6 1 7 , 15 mars 1723 & X mars 1728 , qui font rapportés dans Brillon Denifaro,.
J» Répertoire, &.c.
�it
Mais le fieur Montgolfier peut encore fe pniTer de
ces moyens généraux de réprobation ; il ne doit fûrement pas craindre d’aborder 5c de combattre les dépo
lirions qu’on lui oppofe.
\
L e iîeur Hollier a dépofé que la femme Cardon lùi
avait montré une lettre de fon m ari, par laquelle il
l ’engageoit à fe rendre caution pour les ¿6,000 livres
q u il devoit au fieur Montgolfier.
A la confrontation , il a obfervé « qu’il ne fait que
» de ouï-dire, que le fieur Montgolfier a reçu des fom« mes à compte de fes créances , & qu’il n’en a pas de
« connoiflancc perfonnelle ; & de plus, que d’après la
» lettre que la dame Cardon lui a montrée , il pouvait
» croire qu’il ne lui étoit du que 25,000 livres, mais» qu’il n’a jamais prétendu dire ni ne prétend pas cn« corc que fa créance ne foit pas réelle de ne s’éleve'
» point à 81,000 livres
La dépoiition du fieur Hollier fe réduit donc d’abord à
de fimples oui-dire , d’ailleurs vagues, & auxquels il attache
lui-même fi peu de confiftance , q u il n'a jamais prétendu ni
ne pretend pas encore en ce moment, que la créance du Jielir
Montgolfier ne foit pas réelle & ne s’éleve pas a 8i,oüo
livres. Tout le monde f a i t , au refis , que les dépofitions
fondées fur des ouï dire ne méritent aucuttc confidérarion : Teftes ex auditu alieno fidem non faciunt ( 1 ).
Et tout le monde faura bientôt ce qui a pu donner lieu
a des bruits d’tf compte reçu par le fieur Montgolfier.C* ) E n un m u ij de ouï-dire , il n 'y a point de phin. L oilîl. reg. de dr. coiit«
�il ne refte donc de la dépofition du ficur Hollicr
..que ce qui efl: relatif à la prétendue lettre du ficur
C a rd o n ; mais à cet égard il eft témoin unique, ôc par
conféquent il ne fait pas preuve, fuivant cetce maxime ?
Teftis unus , teflis nuUus ( I ). Mais le fieur Montgolficr
veut bien fuppofer Pexiilence de la lettre, &: en expli
quant ce qui a pu y donner lieu , mettre au grand jour
tous les détails de fa conduite.
II avoir, on fe le rappelle, obtenu le 13 o£tobre fen.jtencc pour 54,089 livres, montant de huit billets échus ,
& il écoit encore porteur de cinq billets non échus ,
formant z6,zoo livres. Le fieur C ard on , comme on fc
le rappelle encore, n’ayant pu obtenir un arret de fur{eance, s’étoit réfugié à Saint-Cloud , & fon abfence
avoit ouvert fa faillite. Le ficur Montgolfier fe trouvoic
donc, à l’époque de cette abfence, avec un titre exé
cutoire pour 54,089 livres, mais avec de fimples billets
pour 26,200 livres. Cette dernière fomme étoit donc
deilinéc à être appellée très-défavantagçufcment dans
l ’ordre des payemens : il voulut acquérir pour elle une
fureté particulière, & il crut que l’époufc du fieur Car
don confentiroit volontiers à fc rendre caution ; mais
elle s’y refufa , & de-là la lettre de ion mari pour
l’engager à fc rendre caution pour les î.6,000 livres
qu'il devoit, au fieur Montgolfier.
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( 1 ) G .tte regle fi f r g e , établie par l.’ s loix de M oyfe & confirmée par lcs
■ P-omains , a été adoptée par tous les tribunaux de l’univers. Non flabit teflis
unus contra aliquemquidquid iliudpeccati & ficinoris fucrit. Douter,
cap. 19. v. ¡ 1Manifeflc fancitnus ut unhis omnímodo teflis rcfponfîo non audiatur ^ ctiàinfi
p rx d a rx curia honore filg e a t. L . 9. §. 1. Cod, de teftib.
I
�Certainement il n’y a dans tout cela rien de répré“
ienliblc. Le ficur Montgolfier pouvoir chercher à affii-rer fli créance par tous les moyens ne portant point
atteinte aux droits acquis à la maiTe des créanciers : or
les créanciers n’avoient aucun droit fur la fortune par
ticulière &C libre de la dame Cardon ; le ficur Mont
golfier pouvoir donc prétendre à fon cautionnement*
Sa dem ande, au refte , n’a pas eu d'eiFct , & il n’y a
pas perfevéré dès qu’il a été queftion de comprendre
la dame Cardon dans l’abandon général fait par fon
mari : il s'eft alors cmpreifé de confondre fon intérêt
particulier dans l’intérêt commun.Mais paiTons aux indu£lions qu’il faut tirer de cet
incident.
Le fait énoncé dans la prétendue lettre du fieur Car-don cil clairement expliqué; il effc évident que lorfque
le iîeur Cardon a parlé des 16,000 livres qii"d deveit ait
fieur Montgolfier y il a entendu les 16,200 qu’il lui devoir,
outre les 54,089 portées par la fentcnce du 13 octobre,
il ne pouvoit en ciFet , & indépendamment de la connoiiTance intime qu’il avoit de la créance totale, igno-rcr la portion qui faifoic l’objet de cette fcntcncc ; car
elle lui avoit été fignifiée. Pourquoi d’ailleurs n’a-t-il
Parlé que de i 6 yooo livres? parce que le (leur M ont
golfier ayant titre-exécutoire pour 54,089 l i v r e s n ’avoic
pas befoin & fur-tout ne demandoit pas de fûreté particulicre pour cette fom m e: eh un m o t , parce que cette
fomnic étoit entièrement étrangère
relaO à la négociation
O
tive au cautionnement de la dame Cardon.
Sien loin donc qu’on puifle conclure de la préten
�'14
due lettre du fieur Cardon qu’il ne devoit que ¿6,ooo
livres au iîeur Montgolfier , il faut la regarder com qc
une reconnoiflancc formelle
involontaire qu’il lui
dcvoic 80,289 livres. Car au moment ou a été écrite
cette lettre le lîcur Cardon devoit déjà 54,089 livres.
Cela écoic conftaté par la fentence du 13 octobre ; de
forte qu’en convenant pofierieurement à cette fentence
( 1 ) qu’il devoit 2.6,000 livres, il a articulé bien pofitivement qu’outre 54,0.89 livres il en devoit z6,ooo;
ce qui forme la créanc.ç totale du fieur Montgolfier.
«
»
»
*
»5
«
«
»
m
»
«
>î
»
«
Le fieur Ifaac Calmer a dépofé.......... : « qu’il étoit
allé trouver au Châtelet le iieur Cardon pour l’engager à arranger l’affaire pour laquelle il étoic arrêté,
en lui expofant le danger qu’il courroit fi l’affaire
du fieur Monroy continuoit à fe pourfuivre, d'autant
plus que le fieur Cardon n’ ignoroit pas que lui dépofant fa voit la connivence qui regne entre ledit fieur
Cardon
le fieur Montgolfier, pour une créance de
80,000 livres dont ledit fieur Montgolfier paroîc
créancier ; tandis que la femme dudit Cardon avoic
dit à tous ceux qui ayoient voulu l’entendre que
le fieur Montgolfier n’étoic créancier que de 25,000
livres , & que même le fils du fieur Cardon avoit
avoué ce fait à lui dépofanc , que ledit fieur
Cardon a répondu au dépofanc qu’il ç’en moquoic
( 1 ) La lettre a ¿té écriie ils Sjint-Ç lou d , «Sc le fieur Cardon ne s’y çft
¡rpfngié q u i le 29 oftobre,
» puifqu’U
�a5
M puifqu’il étoic arrêté, que l’éclat étoit fait, qu’on ne
l’avoit arrêté que comme un voleur en plein jo u r ,
« que fcs créanciers n’avoient qu’à le faire pendre &
» rôtir s'ils vouloienc, qu’ils en étoient entièrement
» les maîtres, qu’il étoit las de vivre; qu’alors le dépo-» fant obfcrva audit Cardon que quand on étoit pere
>3 de famille on devoit fe conduire autrement..............
» qu’il étoit inconcevable que ne pouvant prouver une
»3 perte de plus de 6o}ooo livres fur les effets qu’il a
« négociés , il préfente aujourd'hui une ma fie de 5 à
” 600,000 livres ; ce qui prouve que plufieurs des créan« ciers qu’il a portés dans fon état font des créanciers
*s fimulés ôc frauduleux ; que ledit Cardon fur ces ré» flexions répondit au déposant que les créanciers q u il
» avoit annoncés dans fon état p a ÿ if étoient fnceres &
» véritables , ôc finiilanc toujours par dire que le fieur
« Monrgolfier étoic fon ami intim e, ainiî que la veuve
» Girard, &. qu'il s’arrangeroie avec eux dans le cas où
« fcs créanciers ne voudroient pas les rcconnoîtrc ».
Le ficur Calmer interpellé à la confrontation de dé
clarer comment il favoit qu’ il régnoit une connivence
entre le fieur Montgolficr Sc le fieur Cardon pour une
créance de 80,000 livres a d it , par Cardon ô fa femme
ù qu'il nO. pas de connoifjance perfonnelle de cette conni
vence.
La dépofition du fieur Calmer repofe, comme on le
v o it, à l’égard du fieur M ontgolfier, fur des propos
qu’il attribue à Cardon j & le premier point à txamincr cil fans contredit celui de favoir s’ il cil prouvé que
ces propos aient réellement été tenus. Or très-certaincD
�inent il n’en exîfte aucune preuve : le fieur Calmer eÆ
à cet égard témoin unique , & de plus fa dépofition eit
formellement contredite par Cardon,
Mais fuppofons l’exiftence ôc la preuve de ces propos,
& voyons , dans le fait ôc dans le d ro it, de quel poids,
ils pourroient être contre le fieur Montgolfier.
Que Cardon air dit quyon lravoit arrêté comme un vo~
leur, que fes créanciers pvuvoient le faire pendre & rôtir p
q u il ¿toit las de■ vivre , ôc. ce font des extravagances ,,
©u du moins des propos fans conféquence, & produits
par le défefpoir de fa c a p t i v i t é . Qu’il ait die enfuite que le
fieur M onigolfitr étoit fo n ami intime , & qu il s'arrange
rait avec lui f i les créanciers ne vouloient pas le reconnoitre ;;
tout cela efir vague & in fi g ni fiant; & fi l’on prétendoic
en induire quelque foupçon , il ne faudroit que s’adrefieEau fieur Cardon , ou plutôt au fieur Calmer lui-m êm e*
pour le difïïper.. Que lui a effectivement répondu le fieur
Cardon fur le reproche qu’il lui faifoit de fimulation de
créances ? Que les créanciers qu il avoit annoncés dans fort’
état p a jfif étoient finceres ô véritables. Cela eft fansdoutc afl'ez poiitif &. aflez clair pour lever route équi
voque,. pour fervir d’interprétation sûre à tout ce qui
pourroit en avoir befoin.
Enfin , dans le droit & en fuppofant que Cardon eûc
avoué au fieur Calmer une c o n n i v e n c e , il n’en pourroit
encore rien réfultcr c o n t r e le fieur Montgolfier.
En général, une dépofition fondée fur un oui-dire ne
mérite aucune confederation ; mais lorfque le oui-dire
tombe fur une partie contre laquelle le témoin dépofe,.
il. en réfulte une confeffion extrajudiciaire.. Une feule
�£7
chofe feroit donc confiante dans notre hypothèfe: le
fieur Cardon auroit cxtrajudiciairement confeiTé une
connivence entre le fieur Montgolfier 8c lui.
O r , il efl: de principe, en matiere criminelle, qu’ uher
confeiîîon extrajudiciaire , même lorfqu'élle efl. réitérée
dans les interrogatoires, ne fuffic pas pouraiTeoir une con
damnation contre celui qui l’a faite ; 8c qu’à plus forte raifon elle ne fait pas preuve contre les complices par lui
déclarés (1).
Mais à quoi bon une difcufîion fi férieufe pour une dépoficion du fieur Calmer? Efl>ce que des reproches cîef
tous les genres ne s'élèvent pas contre lui ?
Jouant le rôle de médiateur pour en abufer, il s’adreiTe au fieur Cardon & lui d i t , qu'il fa it la connivence
qui regne entre lui & le fieur M ontgolfier; 8c à la con
frontation il déclare n’avoir point de connoiflance /><?/'formelle de cette connivence.
11 dépofe que le fils Cardon lui a avoué que le fieur
Montgolfier n'étoit créancier que de 25000 livres; Sc à
la confrontation il n’efl: plus queftion que de Cardon
& de fa femme.
N e font-ce pas là des variations choquantes ? n'eft-ce
pas le cas d’appliquer la loi : Tefies qui adversiis fidem
fuam tejlationis vacillant audiendi non furtt , 1. 2 , ff. de
teftib.
E t dans la bouche de qui encore fe trouvent ces vanations? Dans celle du fieur I s a a c C a l m e r . ............ du fieur
0 ) On peut vo ir entr’ailtre* crim lualiiles, L a c o tn b :, p a rt., I l l ch. 1 1 , ° - * * 4 *
D 'i
�i8
Calmer reproché, nous le difons à regret, pour avoir
eiTtiyé une condamnation au blâme.
Eft-ce là un témoin fur lequel l’œil de la jufticc puifle
fe repofer avec quelque abandon ? Eft-ce la le témoin
de Jaloi : teflis intégra, frontis & inculpâtes v 'uce ?
Remarquons même que ‘pour qu’ un témoin foit reprochable par défaut de bonne renommée, il n’eft pas néceflaire qu’il ait été flétri par un jugement exprès. Il eft
dans l’ordre focial certaines taches qui heureufement
nJont pas befoin du fceau de la juftice, pour rendre
plus ou moins indignes de foi ceux à qui une conduite
répréhcnfiblc les a imprimées ( i ) Enfin, Sc cette derniere réflexion d ç ;t écarter fans re
tour la dépofition entiere du fieiu Calmer > il paroît
que le dérangement des affaires de Cardon a eu pour
eaufe principale , fes négociations avec les fleurs D oligny* Mardochée Dupin , du Pougetj Henris & Ifaac
Calmer l u i - m ê m e , qui l’ont fait dupe de plus de
iooooo livres ( i) . Or il efl: confiant que la plupart de ces
agioteurs, Sc en particulier le fleur C alm er, font Intime
ment liés avec le fleur Monroy ; 6c il y a tout lieu de croire,
qu’intérefles à mettre le défordre dans les affaires de Car
don, 8c même à le perdre pour échapper à fes juftes pourfuites, ils ont chargé le fleur Monroÿ de cette entreprife , en fe réfervant de l’aider de leur témoignage. On
peut donc confldérer le fleur Calm er dépofant contre
(1)
Tejlium fides diligenter cxaminanda ejl. ldeàque in ptrfonâ eorum txplo-
ztnda trunt in primis..... & an honejlœ & inculpatce
reprehcnjrbilis, 1. 3 , ff. de T eftib.
an verà notatus quis
(2) Voy. le pitmicr mcm. de Cardon, pag. 7 & fuiv,
�*9
C ardon, comme témoin intéreiTé & mcnle comme té*,
moin dans fa propre caiife; cc qui fuffic très-certaincmenc
pour anéantir fa dépofitiôn: Omnibus in re propria dicendi
tcjiimonii facultatcm jura fub moveruni , I. 1 0 , ff. de Teftib.
A l’égard des quatre autres témoins confrontés au fieur
Montgolfier, il feroit fuperflu de nous occuper de leurs
dépofitions. T outes, hors celle du fieur Pierre M ercier
ont été, par le choc de la confrontation, réduites à ne
faire aucune charge contre le fieur Montgolfier, & cellelà n’ayant aucun rapport avec fa créance, mais feule
ment aux procédures faites à fa requête 3 il ne peut en
être queftion que fous le paragraphe relatif à ces pro
cédures.
Nous pouvons donc pafTer de fuite aux imputations
particulières du fieur M o n ro y , & en entreprendre la dif-
cuifion avec d’autant plus d’aiTurance , que manquant
de toute efpece de fondement dans les informations,
eHes ne peuvent être qu’hafardées & calomnieufes.
On fc rappelle qu’au mois d’août 178 6 , le fieur C ar
don remit au fieur Montgolfier , a valoir fu r fa créance 3
Quatre lettres-de-change, trois de 3000 livres chacune ÿ
fur un fieur Hapillon , & une de 4000 livres fur le
comte d'Harcourt. Hé bien, le fieur Monroy argumente
cette opération ; il prétend que la créance du fieur
■Montgolficr a été réduite de 1300 0 livres par la remife
ces effets, & que* foit le fieur Montgolfier en n’en
ant pas compte ; foil le fieur Cardon en ne les dé-
�30
iduifant pas dans fon bilan , fe font rendus coupables
r'- Vk'l! V
¿ ’exagération de créance.
; »
Il fuffit, pour effacer cette inculpation, de rendre
» « »’•t
*
¿compte des circonftances particulières de l'opération
qui y donne lieu.
Les lettres fur le fieur Hapillon avoient été remifes
¡au iieur Montgoliîer, fous l’endoffement en blanc du
fieur C ard on , & l’échéance étant arrivée , il les remir
lui-même au fieur Chatain , un de fes commis, pour
qu’ il pn allât recevoir le payement ; mais le ficur Ha
pillon les laiiTa protefter & il fut aifigné; alors il fouiint d’une parc, qu’il n’avoit pas reçu la valeur, 8c de
l’autre, que le fieur Chatain n’étoit que prête-nom, Sur
ces entrefaites arriva le dérangement des affaires de
Cardon : plufîeurs créanciers, comme nous l’avons dit,
s’aiïemblerenr le 23 o&obrc ; & ce qu’il eft ciienriel de
remarquer , le fieur Montgolfier les inftruifît, que créan
cier de 80,189 livres, il étoit porteur de 13000 livres
d'effets à valoir fur fa créance; il les prévint qu'il en
feroit dédu&ion s'ils étoient acquittés, mais que le
payement en étoit très-douteux, foit par le peu de folvabilieé des débiteurs, foit à caufe des conteftations qui
s’étoient déjà élevées fur ce payement. Le fieur Pain
porteur d’une lettre-de-change auflî de 3000 livres, fur
le fieur H apillon, en fit également fa déclaration. Le
ficur M onroy &. le fieur Hollier étoient à l’affemblée.
Quoi qu’il en fo it , 1.x prétention du fieur Hapillon
donna lieu à plufîeurs procédures, dont le réfultat fut
une fentcnce rendue le 30 offcobre, par laquelle le
/leur Chatain fut déclaré prête-nom du fieur M ontgol*
�fier,, en conféqucnce les pourfuites faites à fit requête’
nulles , & il fut ordonné que les lettres-de-change refïeroient dépofées au greffe.
L e fieur Montgolfier ou le fieur Châtain auroient pu
fans doute fe plaindre de TmjufHce de cette fentenee ^
& fi les chofes fuiTent reilées dans leur état naturel y
ils en auroient certainement demandé la reformation
mais peu de temps après le fieur Hapillon a fait failli ce
les lettres-de-change font devenues fans valeur , & parconféquent toutes pourfuites ultérieures,, inutiles.
Alors les- recours ont eu lieu , & le fieur Montgolficr,
dénonçant au fieur Cardon la fentenee du 30 o£lobre,, Im a fait ( de droit feulement, à caufe de leur dépôt
au greffe) la remife des trois lettres-de-change fur H a
pillon.
Q uanta celle fur le comte d’ FÎarcourc, elle a été pro
f i l é e le 25 o& obre; le fieur Montgolfier a-obtenu fentcncc le 6 novembre, ô£ le 10 on lui a fait fignifier un
arrêt de furfé'ancc.
Il cil donc inconteflable que le fieur Montgolfier
n’a pas dû tenir compte des effets dont il s’agit ; il ne
les avoit reçus qu’à valoir , & ils n’ont pas valu ; partant
il c il, malgré la remife de ces effets, reilé créancier
80,189 livres; & il fuffît pour cela qu’il les ait rap
portés non-acquittés , & qu’il ait juftifié de fes diligencesPour en obtenir le payement ; ce qu’il a1 fait.
A l’égard du fieur Cardon & de la1 mention qu’il a1
foite du fieur Montgolfier fur fon bilan , comme créanClct de 80000 liv,, malgré la remife de ces effets, elle:
cft'indifférente au fieur Montgolficr car le fieur Mon1*
�to y n’a fans doute pas l’intention de le rendre refponiàble de l’exa&itude de ce bilan.
A quelle époque, au furplus, le fieur Cardon a-t-il
donné ion bilan ? Le 13 novembre. Quelle valeur avoient
alors les lettres de-change pour le fieur Montgolfier ?
A u cu n e; car le 30 octobre écoit intervenu, en faveur
d’Hapillon , la fentcnce des confuls , & le 10 novem
bre le comtc d’Harcourt avoir fait fignifier fa furféance.
Le fieur Montgolfier étoit donc alors créancier, comme
auparavant, de 80,289 livres; le fieur Cardon a donc
dû le comprendre dans fon bilan pour cette créance to
tale ; 6c s’il ne l’avoit pas fait , il y a grande apparence
qu’aujourd’hui le fieur Monroy l’accufcroit, à cet égard,
de fouftra&ion de créance.
Ici devroic fans doute fc terminer toute difc.uilion
relativement à la négociation des lettres-de-change donc
il s’agit. T out foupçon d'exagération de créance à cc
iujct cil difiipé, &. le fieur Monroy n'a droit de porter
fes recherches que fur cc point ; mais ce n’en cil pas
affez pour le fatisfaire; ayant befoin de coupables, il
voit des délits dans les choies les plus innocentes; ayant
prémédité des outrages , il en a impudemment créé les
occafions. C ’eil la marche du calomniateur : ea efi
calumniatoris natura , omnia in crimen vocare , omnia ad
injuriarn vertere. Démofth.
11 a donc prétendu que les lettres-de-change fur Hapillon avoient été excroquées par Cardon , au fieur M ardochée Dupin ; que le fieur Montgolfier les avoit rece
lées ; que pour fc les approprier, il en avoit paffé l’ordre
fiour Chatain &; qu’il n’en avait pas tenu rpgiftrc »
�33
d a enfin avancé que pour s’en aiïiirer le payement, il
»voit offert de fe parjurer , c’eft-à-dire d'affirmer que
le fieur Chatain nJétoit pas fon prête-nom.
C e fonc-Ià autant d’atroces impoilurcs. ni._
i ® . Les Iettres-de-changc n’ont pas été escroquées à
D u p in , ôc il s en faut b ien , car elles ont tenu lieu de
reftitution d’effets excroques par ce juif. Cela eft prouvé
par la procédure.
Rien au refte de plus indifférent au fieur Monto-olfier; car il eft encore confiant qu’ il n’à eu aucune parc
à la tranfmilîion de ces effets dans les mains de Car
don, qu’il a même parfaitement ignoré la maniéré dont
elle s’étoit faite. E h , comment préfumer le contraire ?
Dans quelles circonftances ces lettres ont elles été né
gociées au fieur Montgolfier? On ne Ta pas oublié; lorfqu’ unc partie confuiérable de fa créance étant échue, il
attendoit journellement les rembourfem?ns promis par
Cardon ; lorfquc nouvellement affoupi fur la folvabilicé
de ce débiteur, il étoit important de prolonger fa féCurité au moins par quelques à compte. Ec l’on croiroic
que dans de pareilles conjonctures, Cardon ne s’eil pas
appliqué à cacher au fieur Montgolfier roue ce qui pourroit lui faire fufpe&er la légitimité des effets qu’il lui
ftégocioit! Quelle abfurdicé!
x°. Le fieur Montgolfier porteur des lettrcs-de-changc ,
fous l’endoflement en blanc de Cardon, 6c voulant s’en
procurer le payement, les remit, à l’échéance, au fieur
Chatain , l’un de fes commis, pour les préfenter au dé
biteur ; ma;s ¡1 lui falloir le pouvoir d’acquittcr, & il
^es paiTa à fon ordre. Cela fe pratique journellement dans
E
�34
Je commerce* Le fieur Montgolfier a d’ailleurs il pet»
cherché à.fe fervir par-là d’ une voie oblique & déguifée,,
qu’il a accepté fous fort nom la lettre-de-change fur le
comte d’H arcourt, provenante aulîi de la reftitution
faire par Dupin ; & enfin qu’il a paffe celles fur Hapillon fous celui d\in de Tes commis. Etoit-ce l a , en vé
rité,. la pcrfonne qu’il aurait choifie s’il eût cherché à,
détourner les recherches ?
3°. Si le ficur Montgolfier n'h pas tenu rcgiftre de
l ’opération relative aux lctrres-de-change d’Hapil!on„
c’eit qu’elle n’étoit pas de nature à demander cette for
malité. D e quoi s’agiilbic-i! ?. D ’une remife h valoir; or.
une remife de ce genre étant éventuelle , ie fait toujours'
de confiance:: elle ne devient véritable négociation que
lorfqu’clle cft réalifée par le payement. Alors elle n'eifc
plus a. valoir elle a valu, e lle e il confommée
il faut
en tenir compte ; alors donc feulement elle devient fujette à regiftre : or la remife faite au. fieur Montgolfier
n’a pas va lu ; les effets n’ont pas été p ayés, il les a.
rendu non-acquitfés, il n’a donc jamais été dans le cas
d’en faire regiftre.
4°. Et à l’égard de PofFre de fe parjurer , eft-il poffible que le lieur Montgolfier, ait befoin de defeendre àune juftification ? Sans doute,, s’il n’avoit à parler qu’à,
ceux qui le connoiffent, elle ieroit inutile : ils ont d é jà ,
de toute leur indignation, rcpouiTe une telle calomnie.
Mais il s’adircfTe à la juftice & il veut la convaincre. II>
s’adrciTe peut-être à cette partie du public qui croit tout
fans examen , auprès de laquelle la hardieffe dent lieu de'
preu ve, qui confond toujours le menfonge. impudent avec-
la vérité,
il veut la détromper*.
�Hapillon ayant foutenu que Chatain n’ étoît que prêtenom du fieur M ontgolficr, le fomma de déclarer quand
& comment il avoit acquis les effets dont il étoit
porteur.
' '
L e fieur Chatain dit que « la valeur en ^voit été
« fournie à Cardon par le iicur M ontgolfier, Sç'qüe et•» lui-ci les avoit négociées à lui demandeur fous la
•» iîgnaturc de Cardon ».
Sur c e , Hapillon demanda la mife en caufe du fieur
Montgolficr, & elle fut ordonnée.
Il s'eft donc préfenté aux Confuls , & il a déclaré
«5 que les trois lettres de-change acceptées par Hapillon,
♦» lui avoient été remifes 6c négociées par le fieur Carn don fur fa ûgnature en blanc, à valoir fur plus forte
« fomme qui lui étoit due par ledit Cardon ; que fous
« le même cndaiîcmcnr er> blan c, iJ a négocié lefdites
« lettres-de-change au fieur Chatain , qui lui en a compté
>3 la valeur, de auquel il en a donné fon aval de ga« rantie; laquelle déclaration il eft: prêt & offre d’affirmer fous la religion du ferment fincere & véritable
« fi nous l'exigeons: nous obfervant qu'il n’ a tenu au« cune cfpece de regiflre de cettc opération « .
C ’eft de cette prétendue déclaration qu’abufe fi étran
gement le fieur Monroy.
Nous difons prétendue, car elle ne peut être regardée,
fur-tout littéralement, comme étant du fait du fieur
Montgolficr. Elle ne lui a pas été lue & elle n'eit point
(ignée de lui ; il pourxoit donc la défavouer en entier ;
il pourroit du moins la rcétifier ; mais il veut bien la
fuppofer rigoureufement cxa&e.
E ij
�3^
Q u’a-t-il offert d’affirmer ? que le (leur Chatain lui
avoit compté la valeur des lettres-de change, ccft-à-dire
qu’il ¿toit dé-fintéreffé par ce porteur d 'o rd re, qu’il ne
lui demandoit & ne lui demanderoic rien: Sc non p a s ,
comme- l'avance M o n ro y , que Chatain lui en avoit
fourni la valeur comptant, c’eft-«\-dire en efpeces; cc
q u icil bien différent; or, très-certainement le fieur Mont;golficr pouvoir offrir cette affirmation , il pourroit même
ia faire encore aujourd’hui.
E t qu’ on ne penfe pas que ceci cil une interprétation
bénignement imaginée pour !c befoin d’ une juftification
difficile. Continuons.
Les Confuls ne trouvant pas fans doute leur but rem
pli par la déclaration du fieur Montgolfier, ont jugé à
propos de l'interroger de nouveau , & (après avoir auiîï
fait fubir un interrogatoire fecret au fieur Chatain ) ,
ils l ’ont fait appcller dans la- chambre du confeil , cfii'
ils l’ont interpellé de déclarer « comment 6c en quels
» objets il avoit reçu la valeur des 9000 livres, mon» tant des lettres-de-change ».
Le fieur Montgolfier avoit à faire une réponfe bien
lïmple. Il pouvoir dire qu’il avoit reçu les 9000 livres
en efpeces ayant cours , & tout auroit été terminé ; car
on ne pouvoir exiger de lui des détails plus particuliers.
C ’eft effectivement la réponfe qu’il auroit faite , fi pré
cédemment il avoit offert d’ affirmer qu’il avoit reçu la
valeur en deniers comptans ; mais ce n’étoit pas là ce que
le fieur Montgolficr avoit fait ; ce n’étoit pas- là ce qu’il
avoit offert ¿ ’affirmer ; aufïï ce n’eft pas ce qu’il a ré-
�SI
» À quoi le fieur Monrgolfîcr a répondu qu’ il a reçu
» valeur à fa fatisfa&ion ».
Voilà bien fans équivoque l’interprétation de ce qu’ il
a offert d’affirmer, qu'il avoit reçu une valeur qui le dé~
fintérejfoit ; mais pourfuivons, 6c cela devient encore plus
évident.
et: Par nous interpellé d’office de nous- déclarer cathé« goriquement en quels objets ; » il a répondu que ci cette
» valeur n’a été qu'entendue entre lui 6c le ficur Cha-*
» tain ; pourquoi il ne peut nous en donner le détail ».
(Cette déclaration eft la feule qui ait été lue au fieur
M ontgolfier, Sc qu’il ait (ignée).
Le fieur Montgolfier a t-il d o n c , ainfi que M o n ro y ,
oie le répéter jufqu’à fatiété , offert de Te parjurer? îï
peut mentir impunément, Ton intérêt le demande , Sc
pourtant il ne le fait p as: il peut dire qu’ il a reçu en
4 tJpeceTi ’&"Ton payement ne doit plus lui être dénié j mais
il n’a reçu que valeur entendue, 6c il le déclare ingénu
m e n t, quoiqu’on puifle (comme on l’a fait) fc fervir de *
€et aveu pour lui contcfter fa créance.
A h ! fans doute > on a Confpiré contre la réputation
6c le repos du ficur Montgolfier! mais devoit-on abufer
auiîi impudemment d’une procédure irrégulière ôc étran
gère à la co n ten tio n ? Devoit-on jamais ofer en faite
fortir l’offre de fe parjurer contre quelqu’un qui n’a pas
même voulu meïïtir.
Et comment au furplus concilier quelqu’idée de fraude
avec la conduite franche & ouverte du fieur Montgol
fier? N ’a-t-il pas, fitôt le dérangement des affaires de
C a rd o n , inftruit les créanciers, qu’il é.toit porteur des
�38
llettres fur Hapïllon ? Sc dès-lors n’a-t-il pas prévenu tout
foupçon fur Tes pourfuites à cet égard? N ’a-tril pas pré
venu ces lâches imputations du fieur M onroy ? q u ii avoit
deux objets en f e fervattt du nom de Chatain, pour s'ap
proprier les lettres en quefiion : le premier , de ne point pa~
roître porteur d’effets qu'il favoit ne pas appartenir légiti
mement a celui qui les lui paffoit > & le fécond , d'en rece
voir s'il pouvait le montant , fans en faire déduclion fu r
f a créance. Premier m é m ., p. 44.
Que le fieur M onroy ne fe lediffimule donc pas, l'a
charnement qui a conduit fa plume fort lui-même de
contre-poifon à la calomnie qui en cil découlée.
A quoi bon par conséquent nous occuper des reproches
de dérail auxquels s’eil livré le fieur M onroy? Ce feroic
nous aiTujettir à relever des injures prodiguées fans pu
deur; ce feroit fouiller gratuitement notre plum e; car
il n’eil aucune des impoilures de ce témémsasss^miksa*—rairc accufateur , qui ne foit démentie par la procédure
gée avec Part le plus perfide.
Croiroit-on , au demeurant, quJil cil néceflaire de ju£
tifier le fieur Montgolfier fur cette remarque du fieur
JVJonroy, que le 10 mai ï 786 , un billet de 8600 livres
¿toit échu , que Cardon ne Pavoic pas payé , 6c que ce
pendant le fieur Montgolfier lui avoit prêté 4601 livres;
que le 10 juin un autre billet de 10000 livres etoit auifi
éch u , que Cardon ne l’avoir pas non plus payé , & que
pourtant le fieur Montgolfier lui avoic encore prêté
8000 livres? Rien de plus facile que cette juilification.
Avant la faillite, quelle étoit la fituation du fieur
Montgolfier à 1égard du fieur Cardon? J 1 étoic dans k
�35>
plus parfaite fécuriré ; il avoit dans f;i folvabilité une.
pleine confiance. L ’échéance d’un billet n’étoic done'
pas un motif d’en exiger le payement, n’étoit pas même
un obftacle à prêter encore.Et la conduite du fieur M onroy lui même cft uiï
exemple bien frappant de ce que la confiance dans la1
fortune de Cardon a été capable d’ opérer, même à la1
veille de fa faillite & poiléricurement à tous les prêts
du fieur Montsrolfier.
Ses billets écheoient au mois- de
Í7
feptembre 1-786,. il n’en demande pas le payement, il*
confent à les renouveller , & ils le font effectivement
le 10 ôc 1 1 de ce mois.
M a is , dit encore le fieur M o n ro y , les billets du fieur
Montgolfier étoient fuccefïivement échus , 5c pourtant'
ii n’en demandoit pas même le renouvellement.
Y a-t-il encore là quelque chofe d’étonnanr, fi on1
fait attention au rapport de fituation dans lequel fe trouvoit le fieur Monto-olficr avec fon débiteur?
Cardon annonçait journellement des rembourfenlens,»
& le fieur Montgolfier, confiant en íes promefles, çompr-oit même iur celui de fa créance entière. Il fc gardoic’
donc de demander le renouvellement de fes billets ; il
ne vouloit pas, par une femblable novarion , faire de'
nouvelles échéances ôc éloigner ainfi fon rembourfement.
Enfin il fc gardoit biende preiTer fon payement à chaque
échéance : il n’auroit pu le faire que par une adtion ju
diciaire ; or certainement 011 conviendra qu’ un parti d e ’
cette nature doit êtte abfolument la dernicre reifource
d’un créancier de fommes confidérables, de fur-tout d’un 1
créancier dont la créance totale cft divifée- en échéances*
�40
fucceflives. Écrafer fon débiteur à la premiere échéance,
ce n’effc sûrement pas fe préparer l’acquit des autres.
L e Heur Monrgoliîer endormi par les promettes de
C ard on , s’eft: donc trouvé, au mois d'octobre 1 7 8 6 ,
créancier de 54,089 livres, montant de différons billets
. fucceifivement échus; 8c il l’avouera hardiment, fa con
fiance dans la fortune de Cardon étoit telle, qu’ il auroit
encore attendu, fi M c. Dufrenoy ne fût venu le dé
tromper.
Enfin faut-il répondre au fieur M o n r o y , quand il pré
tend qu’au mois de juillet 1 7 8 6 , le fieur Montgolfier a
travaillé à l’inventaire du fieur Cardon, de concert avec
lui ; d’ou il conclut qu’il en connoiÎloit parfaitement les
affaires.
A cette époque le fieur Montgolfier a feulement exigé
que Cardon lui fît parc de l’ctat de fes affaires, 8c Car*
don lui a communiqué feulement un tableau général,
duquel il réfultok qu’il avoit pour plus de 300000 livres
d,e bien libre 8c effeélif.
Eh , de bonne fo i, croira-t-on que fi le fieur Monto-olfier
avoir, au mois de juillet, eu connoiiTance de
£5
rér'ac au vrai des affaires de C a rd o n , il auroit attendu
plus de quatre mois pour prendre les précautions nér
oeflaires à la sûreté d’une créance de plus de 80000 liv. ?
Répétons-le donc , nous aurions pu nous difpenfer
de répondre à ces reproches du (leur M onroy, 8c notre
filcncc ne les auroic sûrement pas accrédités. Il n’en au
roit pas moins été confiant que le fieur Montgolfier eft
créancier finccrc de 80,289 livres. Etoit-il cffe&ivemcnc
£ préfumer que le fieur Monroy pue jetter quelques
foupçons
�4i
foupçons raîfonnables fur la. fincérité d’une créance
portée en des titres, juftiiîée par des livres en regie, re
connue par la pluralité des créanciers
, ce qu’ il n’auroic jamais du perdre de vue, répétée par un hpmmc
notoirement incapable de fraude.
§.
I
I.
'
Les pourfuites du Jicur Montgolfier font légitimes.
L a fincérité de la créance du fieur Montgolfier une
fois certaine: nous pourrions dire que la caufe eft finie.
Quel intérêt peut4 l avoir eu à tremper dans un complot
frauduleux? Nous défions même le fieur M onroy & les
génies malfaifans qui l’infpirent, de lui en trouver un
vraifcmblable.
Nous pourrions donc éca rte r, fans le moindre dé
tail , tous les reproches relatifs aux pourfuites du fieur
M ontgolfier : étant fans objet déterminé ils tombent
d ’ eux mêmes.
Prouveroit-on que le fieur Montgolfier a dans fes
pourfuites civiles uié de ménagemens pour Cardon ;
bien loin de pouvoir lui en faire un crime , le fieur
M onroy même lui en devroie de la reconnoiffance. Ces
ménagemens auroient produit l’abandon général des
biens du failli ô£ l’économie des frais de difeuffion. Eh i
que peut défirer de plus une mailc de créanciers! Heureufe la faillite dont la difeuffion ne tombe pas entre les
mains d’ un pourfuivant , qui par une activité inconsi
dérée } confume le gage commun. Ils le favent déjà, les
F
�4*
créanciers du fieur Cardon , combien il leur eut été avan
tageux que les pourfuites contre ce débiteur ne fuiFent
pas paiTées des mains du fieur Montgolfier en celles du
fieur Monroy : la dilapidation de leur gage eft déjà bien
avancée.
Prouveroit-on que le fieur Montgolfier n’a pas donné
des fuites aiTez meurtrieres à fa procédure criminelle^
de quel droit pourroit-on le lui reprocher? Avoit-il con
tracté,* par exemple envers le fieur M o n roy, l’engage
ment de pourfuivre Cardon comme banqueroutier frau
duleux , &c n’a-t-il pas été le maître d’abandonner fes
pourfuites à cet ég ard , fitôt qu’il les a cru mal fondées,
ou haiardeufes ?
Enfin , découvriroit-on quelques irrégularités dans les
procédures faites au nom du fieur Montgolfier, nous le
demandons, feroient-elles de fon fait? Pourroic-on les
ïui imputer 5c fur-tout en former contre lui la matière
d ’une accufaiion ? Depuis quand donc une partie peu
©u point verfée dans la fcience des formes ? une partie
qui eft purement paifive dans tout cc qui fe fait de ju
diciaire , feroit-clle criminellement refponfable de la con
duite des officiers publics auxquels elle a remis fes inté
rêts,. & dont le choix a été le plus fouvent forcé pour
clic ?
M ais voyons en particulier fur quoi le fieur M on ro y
fonde fes reproches.
U n fcul témoin, Pierre Mercier,, a dit « que le 24
» oftobre 1 7 8 6 , le fieur Cardon fils, accompagné d’un
» particulier qui s’efi: dit huiificr, font venus chez le ré» pondant, à la. Nouvelle France,, 6c lui ont fait figner
�45
* un papier, que ce particulier &: ledit iîeur C a rd a *
*> dirent au dépofant que tout cela n’étoit que des for-
y
t c
» malités de juftice, & q u e , fous huit à quinze jburs, /M>uZ*c$c^ x C f i
*> les affaires du fieur Cardon feroient terminées, 8t que
m toutes ces opérations fe faifoient de concert entre le
iieur Montgolfier 8c le Heur Cardon pere , 8c que lo:s
« de I’appofition des fcellés du 30 o & o b r e , le commif» faire a d i t , à lui dépofant, que tout ce qu’ on faifoit
»3 étoit d’accord, & convenu entre le fieur Cardon 8c
» le iïeur Montgolfier ».
Nous ne dirons pas que le fieur Mercier érant témoin
unique , fa dépofition doit être rejectée: elle efl: de trop
peu de conféquence pour qu’il foit befoin de Pattaqutfr
«n forme. Sur quoi repofc-t-elle ? fur des oui-dire. Elle
ne mérite donc aucune coniidération ; & cela efl: d’au
tant plus certain qu'on a évité de faire entendre en témoignage ceux de qui font venus ces oui-dire. On a donc
négligé le feul moyen de conftater légalement le fait ;
& pourquoi cette négligence? Sans doute pour ne pas
révéler le menfonge du témoin.
Quand au refte, il feroit vrai que le commifTaire ,
l’huiffier 6c cent autres auroient dit qu’il exiftoit un con
cert entre le fieur Montgolfier Sc le fieur C ard o n , pourroit-on foutenir qu’il y a preuve de ce concert. Eft-ce
que pour former une preuve, la juftice fe contenta ja
mais de propos vagues? elle ne reçoit dans fa balance
que des faits & des faits cowftans. Or ici y en a t-il un
feul de cette nature ? Il n’y >n a pas même d’articulé.
Quand d’ailleurs le fils Cardon auroit cherché à donner à une faille faite fur fon pere êlcs couleurs favoriF ij
j
,j
�V* ’ 1
44
Wessÿ. quand le Commiffaire auroit, des. mêmes traits:
peint l’appofition des fcellés, afin de déterminer le fieur
Mercier à être gardien eft-ce qu?il faudroit e a conclure
une colluficn entre le fieur Montgolfier & le fieur Cardon.?
Le pourroit - on ,. furtout en confidérant l’iiTue des
procédures qui ont eu lieu ?
D ’un côté elles ont produit contre le fieur Gardon
un décret d’ajournement perfonnel r or cft-on. de con
cert avec quelqu'un lorfqu’ on le fou met à une procé
dure féve re, lorfqu’on provoque & obtientj contre lui
un décret rigoureux. A la vérité ce décret n’a pas été
lignifié 'y mais pourquoi? Parce que les circonftances s’y
l'ont oppofées. Sirôt l’abfence de Cardon & par conféquent fitôt le décret ce failli a parlementé avec fes;
créanciers, il leur a propofé des arrangemens, & ces
arrangemens ont été acceptés. Quand eil-ce donc que
le fieur Moutgolfier auroit pu raifonnabîement pourfuivte
ia procédure criminelle ?. C e n^étoit pas avant l’a â e du:
,1.3 novembre,, car il auroit rompu toute voie de con
ciliation ,. &: par-là compromis l’intérêt des créanciers®.
C e n’efl: pas enfin après l’aile du 13 n o v e m b r e c a r
au moyen des conditions de ce traité,. tous les créaaciers accédans ont ccnfenti à ceÎlcr toutes pourfuites.
D ’ un autre c ô té , les pourfuites du fieur M ontgolfier
ont amené un abandon des biens du fieur Cardon en
quoi qu'ils puijjent conjifler ô en quelque lieu qu'ils foientr
fituées ; or cft-on frauduleufement de concert avec quel
qu’un, lorfqu’ on l’amene à fe dépouiller fans réferve?;
jEc quand il feroit vrai qu o n auroit eu quelques m énagemens pour l u i , feroit-on répréhenfible ? N ’auroit-on
�4'f
pas mérité la- rcconnoifTance des créanciers, plutôt que
leur animadverfion ? N ’auroit-on pas donné une preuve
de Ton zele pour leur avantage , plutôt que de ion atta
chement pour le failli.
t II faut donc encore écarter les inductions que pré
tend tirer le fieur Monroy de ce que les-.pourfuites du
fieur Montgolfier ont été faites par le miniftere de
M c. D u fren o y , procureur au Châcelcc
& celui du
fieur Cardon avant ia faillite. Encore une fois,, quand
on fuppoferoit une efpccc de concert entre ce procureur
& le fieur M o n t g o l f i e r pour ufer de ménagemens en
vers C ard o n , quel en auroit été l’effet? L ’abandon gé
néral de fes biens 6c Féconomie des frais de difeuffion.
Il n’auroit donc eu lieu que pour l’avantage de la maffe
des créanciers.
Au furplus, il n’y a eu ni pu avoir de premeditation
frauduleufe entre M c, Dufrenoy & le fieur Montgolfier.
Lorfque ce procureur cft venu l’avertir du dérangement
des affaires de Cardon , i l lui êtoit parfaitement inconnu :
cela eft établi par la procédure ; enforte que lorfque
M °. Dufrenoy lui a offert Ton miniftere pour, autant
qu'il feroit poffible, mettre à couvert Ces intérêts dans*
la faillite , il n’a vu ni pu voir en lui qu’un officier pu
b l ic , revêtu du caraftere néceflaire, 6c il a , fans autre
exam en , accepté fes offres. S’il y a là quelque chofe
d’irrégulier , ce n’eft, certainement pas au fieur M o n t
golfier qu’il faut Fimputer. Si M c. Dufrenoy n’a pas dû’
fe charger de fes intérêts, c’eit à lui à fe difculper.
Finalement, &■ à l’égard de Fappofition des ficelles, de
ïavente des effets 8c de toutes les opérations judiciaires ,•
�4<S
on n’a ríen à imputer perfonnellement au fleur Montgol
fier ; ce font des opérations auxquelles il n’a pas même
aflifté, dont les irrégularités ne pourroient tendre qu’ à
des fins civiles , & qui ne regardent, fous tout autre
point de vue, que les officiers publics qui y ont procédé
Que le fieur Monroy s’adrefle donc à M . le lieutenantcriminel, à M. le procureur du R o i , aux commiilaires „
procureurs, & c. C e feroit à eux à Ce juftifier, fi, cc que
le fieur Montgolfier eft bien éloigné de croire, il s’étoic
pafte quelque chofe d’jrrégulier dans l’exercice de leurs
fonctions. Il remarquera donc feulement que tous les re
proches hafardés par le fieur M o n ro y , relativement aux
détails de cet exercice , d’abord dénués de vraifemblance,
le font aujourd’hui de toute preuve.
Ainfi difparoifTent les inculpations du fieur Monroy,,
6c fans doute l’opinion publique vengera le fieur M ont
golfier de leur témérité; nous ofons même croire qu'elle
le venge déjà. Mais ce n’efi: pas afîcz pour la juitice : il
faut qu'elle puniiTe. E t certes qui le mérita davantage
que le fieur M onroy & fes complices ? Qui plus honteuiement qu’eux Te rendit jamais coupable de diffamation
atroce? Qu’on ouvre leurs écrits, fie, fi on le peut, qu’on
en foutienne la le&ure fans les repoufler vingt fois d ’unp
bouillante indignation.
Si encore ils s’écoienc bornés à des injures ! mais ils fe
font rendus coupables des infidélités les plus groifierer
nient iniques. Taire ou traveftir les faits, tranfpofer les
d ates, tronquer les a i l e s , fuppofer des charges & des
preuves, fupprimer des cirçonft^jiccs ciTentielles &
�47
rapprocher de totalement étrangères ; tels font les élémens de ces écrits ( 1).
C ’eft ainfi que déchiré par des libelles fcandaleux, atta-^
qué par des manœuvres perfides, & pour ainfi dire traîné'
d' humiliations en humiliations,'* le fieur M ontgolfier a été
pendant quatre années entieres la victime de fes enne-mis. C ’eft ainfi que pendant quatre années entières, Ia!
calomnie a lentement promené dans fon fein fes poi
gnards empoifonnés. Mais le jour de la juftice approche..,..
& ce jour fera celui de la vengeance de l’innocence
outragée.-
M onsieur
J U D D E , Confeiller, Rapporteur.
M c. D E F R E S S E N E L , A vocat.
T
a il la n d ie r
,
Procureur.-
( 1 ) Ils font fignés pat M . Guillaume, alors avocat au parlement & maintenant5
aux Confeils,
De l’imprimerie de la Veuve Hérissant , rue Neuve Notre-Dame,
�
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Factums Vernet
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montgolfier. 1786?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Judde
Defressenel
Taillandier
Subject
The topic of the resource
créances
banqueroute
fraudes
lettres de ratification
commerce de vin
cessation de travail
saisie
prise de corps
témoins
lettres de change
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Montgolfier, receveur-général de l'Archevêché de Paris, accusé ; Contre le sieur Monroy, entrepreneur de bâtiments, accusateur ; En présence du sieur Cardon, marchand de vin, de maître Dufrenoy, procureur au Châtelet, et de la dame Girad, co-accusés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de la veuve Herissant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1786
1783-1786?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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banqueroute
cessation de travail
commerce de vin
Créances
fraudes
lettres de change
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saisie
témoins
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PDF Text
Text
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N O U V E A U MÉMOIRE
A U R O I
ET A L’A S S E MB L É E N A T I O N A L E ,
E n dénonciation contre le S r. L A M B E R T
Contrôleur - général
des Finances.
S I R E ,
Si le ciel t’a fait R o i ; c’eft pour me protéger.
MÉrope .
J ’A I eu le courage d’expofer la vérité à Votre Majefté, lorfqu’il étoit
dangereux d’en préfenter les traits, fous des Miniftres qui abufoient
de votre autorité pour perfécuter : maintenant que la liberté eft un de vos
bienfaits; maintenant qu’affranchi vous-même de la tutelle minifterielle, vous
Voulez regner par la loi & l’amour paternel ; c’eft avec fécurité que je la mets
de nouveau fous vos yeux & ceux de l’augufte Aff emblée, dont plufieurs
de fes honorables membres l’ont accueillie , en me répondant de fon fuccès.
C ’eft fous les aufpices de la lo i, qui établit la refponfabilité des Miniftres,
que je traduis le Sr. Lambert au Tribunal de la Nation, dont vous êtes
l'augufte Chef. Loi fage & heureufe, faite pour immortalifer à jamais le
Peuple qui la propofe, & le Monarque qui la fanctionne. Plutôt, elle eut
fauvé la France des malheurs qui la défolent ; mais elle en préviendra le
retour, fi ce n’eft pas en vain que les citoyens l’invoquent ; fi les coupables
. A
�( ï )
dénoncés, convaincus &c néanmoins impunis, ne continuent pas à occuper
les places dont ils auront abufé contre les intérêts de la patrie &c au détri
ment des citoyens.
Vers la fin de 1785 , des perfonnes qui me votiloient du bien, firent
part à feu M. le Comte de Vergennes d’une difgrace qui m’étoit furvenue,
& qui renverfoit ma fortune
mon établiflement.
M. le Comte de Vergennes y fut fenfible. Il étoit mon compatriote : nos
Peres a v o ie n t été amis. Il me connoiffoit, m’eflimoit &c il m’en avoit
déjà donné quelques preuves.
Ce Miniftre m’offre les reflources de fa proteâion, pour réparer le
dommage que me caufoit l’être mal-faifant ( a ) , auteur de la deftru&ion
de ma fortune & de mon établiflement , il me propofe de réhabiliter l’une
pour opérer l’autre ; ienfible aux mouvemens de fa bienveillance, je lui
demande fa recommandation auprès du Contrôleur-général, pour être
placé dans la finance d’une maniéré avantageufe, & analogue aux efpérances que j’avois eu lieu de concevoir fous MM. Turgot, Clugny,
Taboureau, Necker &c Joly de Fleury.
M. de Vergennes accueille ma priere, parle à M. de Calonne, & convient
avec lui que la premiere place de Fermier, Régiffeur ou Adminiftrateurgénéral des finances fera pour m o i, Si certes ! fans être égaré par l’amour
propre, fans recourir à aucune comparaifon avec la plupart de ceux qui
occupent ces places, je crois pouvoir dire, que j’étois capable de les remplir.
Quelquefois il s’écoule un long-temps fans qu’il en vaque.
J ’avois attendu iix mois ; j’étois preil'é d’en obtenir une quelconque ;
je priai M. le Comte de Vergennes d’écrire il M.de Co'onia ( b ) , alors
( a ) C é to it
la
M
a r q u is e
de
S i l l e r y , ci-dcvant C
o m tesse
de
G
e n l is
, femme
célébré par fou efprit & encore plus par fon mauvais cœur , qui la rendue depuis vingt
ans le fléau de la triailon d’O rléans, o ù , on ne trouvera qui que ce foit qui ne Ia
détefte ; même parmi ceux qu’elle a pu obliger , car elle leur fait achij||j^trop chef
les grâces qu’il eft d’étiquette dans les maifons des Prin ces, de répandre fü’r ceux qu*
v font attachés , 6c dont on ne peut fe paiTer. InceiTamment j’expoferai au public le
fu j:t de mes triftes démêlés avec ce cruel auteur de différens ou vrages, fur la relig‘on >
l'hum anité, la m orale, & c . fi je ne fuis pas aflafliné.
(1)) U n mois après, M . le Duc de Villequier ayant écrit à M . de Colonia pour le
m im e objet , il en reçut cette réponfe ci. » P a ris, 16 mai 17 8 6 . M . te D u c , j’ai f3lt
» connoître aux Fermiers généraux le defir qu’a M . le Com te de V ergen n es, que Ie
�Intendant de la ferme générale, pour me propofer à la place de caiiîîer,
que le Sr. de Cimmery devoit quitter , &C qu’il quitta en effet huit à neuf
mois après.
De même que M. de Calonne s’étoit engagé envers M. le Comte de
Vergennes ( a ) , M. de Colonia s’engagea par fa réponfe ; néanmoins
j’échouai, &c c e la croit jufte. Au moment de la nomination, il fe trouva
une délibération antérieure de deux ans, qui appelloit M. .Toly de St. Eufebe
à la place. J ’eus connoiffance des motifs ; ils ctoient vrais o£ folides :
j ’applaudis a la nomination. MM. de Calonne
Colonia, fâchés des circonftances, me remirent à la premicre vacance, après l’affemblce des
Notables, dont il étoit déjà fort queilion.
Prefque auffitôt je perdis M. le Comte de Vergennes. M. de Calonne
fe retira du miniftere, pendant la tenue de l’Affemblée, & M. de Colonia
abdiqua fon Intendance.
M. le Comte de Montmorin fut appelle aux affaires étrangères ; M.
de Villedeuil, r.u Contrôle général, tk le Sr. Donet de la Boullaye, protégé
par Madame de MontefTon, auprès de M. l’Archevêque de Sens (b ) ,
reçut de cette Dame le feeptre de la ferme générale.
» Sr. M orizot obtienne l’emploi qu’il follicite , &
auffitôt qu’ils m’auront remis leurs
» obfervations fur cette dem ande, j’en rendrai compte à M . le Contrôleur-général. Je
» ne laiiTerai point ig n orer, M . le D u c , à ce Miniftre , l’intérêt que vous accorder
» au Sr. M o riz o t, & je ferois fort aifj que mon fuffrage pût concourir au fuccès de
» fos vues. 11 Je fuis avec r e fp e it, M . le D u c , & c . Sign é,
(a)
de
C
o l o n ia .
M . de Colonia m’ ayant averti de foire parler par M . de Vergennes à M . de
C alon ne, au moment qu’il comptoit prefenter fon travail à celui-ci ; j’écrivis au premier ,
dont je reçu la réponfe ci-aprcs. » V erfailles, n juillet 178 6 . J ’ai re ç u , M oniteur, la
» lettre que vous avez pris la peine de m'écrire le 7 de ce m o is, relativement à la
» place que vous defirez d’obtenir. Je fuis fort aife des difpofitions favorables que M .
» de Colonia vous a témoignées à ce fujet. Je ferai avec plaifir ce qui dépendra de
» m o i^ p o u r concourir à en alTurer l’effet, & je ne laiiTerai pas échapper la première
” occafion que je trouverai, de témoigner à M . le Contrôleur-général l’intérêt que je
” prends à ce qui vous regarde.
Je fu is, & c . Signé , d e V e r g e n n e s .
00
Sa nomination déplut beaucoup à la C o u r , où le Sr, la Boullaye n’étoit ni
cftimé ni aimé. L ’Archevêque en eut de la difgracc, quoiqu’il s’en défendit, en difant
•ju il n avoit pu refufer Madame de Monteffon. C elle-ci s’en eft auffi repentie, quand
elle la vu mécontenter tout le monde. Elle afîuroit qu’elle ne le coiinoiffoit pas auparavant,
�(4)
M. le Marquis de la Fayette me préfenta à M. le Comte de Montmorin,
en l’inftruifant des arrangemens pris pour moi avec Ton prédéceffeur,
(dont il avoit été le témoin 8c prefque l’inftigateur ) , avec MM. les Comtes
ik Marquis d’Apchon, les Comtes de Schombcrg & Marquis de Lambertie,
pendant que M. le Duc 6c Madame la Ducheffe de Liancourt, l’Abbé de
G a fc, M. de l’Eflart & M. le Duc de Villequier, en avoient fuivi &C
prefl'é l’exécution avec Madame de Malesherbes auprès du Sr. de Colonie.
Naturellement bienfaifant, M. le Comte de Montmorin confentit facile
ment , quand il *fut inftruit de mon honnêteté , à achever l’œuvre com
mencée par M. le Comte de Vergennes. Je remis mes titres à ce Miniftre
patriote, pour les joindre à la lettre qu’il me donna pour M. de Villedeuil,
avec une particulière pour le Sr. Donet de la Boullaye.
J ’avois connu, peu de temps auparavant, M. de Villedeuil, par l’entremife du feu Marquis de Bercy, lorique M. le Duc de Maillé ( a ) avoit
follicité pour moi les bontés de Monfeigneur le Comte d’Artois. Il m’ac
cueillit très-favon.blement, en m’aflurant que l’engagement de fon prédecefleur feroit d’autant plus facré pour lu i, qu’il fçavoit perfonnellement
ce que je méritois.
La réception du Sr. de la Boullaye fut moins honnête, ou plutôt elle
fut grolîiere. Après unephrafe de protocole pour M. le Comte de Montmorin,
il me congédia fort brufquement.
Je ne me rebutai pas. Je me retournai du côté du Sr. de Colonia, en le
priant d’ entretenir le Sr. la Boullaye des arrangemens qu’il avoit lui-même
arrête pendant fon exercice. L ’ex-Intendant me le promit, & tint parole.
Le 23 juillet, il m’écrivit (b ) de revoir le Sr. de la Boullaye , en affurant
& qu’elle ne l'avoit protégé qu’à caufe de la Comteffe de L a m a iïa y e , fœur du la Boullaye
qui pendant vingt ans avoit été la complaifante de Madame de Monteflon. V o ila une
excellente raifon, pour faire d’un Donet de la Boullaye un Intendant des finances ; c’eit
cependant celle qui réuflit à exclure l’homme capable , qui n a pas de fœur complaifante.
Souvent même fon parent, celui auquel on a des obligations , & qui eut fait honneur à
fon protefteur, eil rejeté, pour protéger à fon préjudice des fots, des impudens , fans
qu’on en roupille.
( a ) J ’ai encore pour le p ro u v er, les lettres de M M . de B ercy & de Maillé.
( b ) V o ici les deux lettres. » J ’ai parlé de v o u s , M onfieu r, à M . de la B ou llaye,'
» vendredi encore avec le plus grand intérêt, & il m’a paru difpofé à vous obliger. Il
» m’ a même demande votre adrefle ; c’eft tout ce que je puis pour vous à préfent-
�C 5 )
Madame de Malesherbes, par une lettre à la même date, que je ferois
reçu plus humainement.
Le 30 fuivant, l’entrevue eut lieu. Le fous-Miniitre de la ferme m’offrit
le bon de Fermier adjoint à la ferme entiere. Je l’acceptai ; lorfque huit
jours après il retira fon offre, en me propofant une penfion de 4000 livres,
que je refufai, répugnant à être le croupier de la ferme, quand je pouvois
la fervir utilement.
Vainement je reprefentai au Sr. de la Boullaye que le Miniftere me
deftinoit une place & non une penfion onéreufe au fife (a ) ; le fâcheux
trancha impérieufement, en me dil'ant : Eh bien ! vous n'atireç qu'une plau
inférieure.
En effet, il s’en étoit préparé les moyens. M. de Villedeuil en envoyant
dans les bureaux la lettre de M. le Comte de Montmorin, pour y répondre,
avoit laifle celle qui y étoit jointe (de M. de Calonne) à M. le Comte
de Vergennes, qui formoit mon titre. Le Sr. de la Boullaye s’en em
para & la fit difparoître, fans que j’aie pu me la reprocurer de lui.
AiTure que je ne la reproduirois pas, il rédigea la réponfe qu’il préfenta
à figner à M. de Villedeuil, de maniéré, qu’elle reconnoifloit &c re-
» V ous fçavez que ma bonne volonté pour vous obliger a toujours été entiere. V o y e z
» M . de la Boullaye , d’après même notre converfation de vendredi; il le d efire, & je
” ferai fort aife , fi j’ai contribué à vous rendre heureux. » J ’ai l’honneur d ë tre , &cSlgné, DE C O LO N IA .
Celle à Madame de Malesherbes ejl ainfi conçue :
» L ’intérêt que vous prenez à M . M orizot, ne peut qu’ajouter à celui qu’il m’a infpiré
” depuis long-temps , & par lui-même & par les perfonnes qui me l’avoient recommandé.
” Il n’a pas dépendu de moi qu’il n’ait été placé quand j’avois une influence que les
” circonftances m’ont ôté*. Je le fervirai du moins de mon témoignage & de mon ap p u i,
” & c’eft ce que j’ai déjà fait. Je le ferai encore , & je me féliciterai de vous prouver
” »>nfi mon empreflement à vous plaire,
fu is, & c . Signé, DE C
(a)
o l o n ia .
Cette penfion d’ailleurs auroit éprouvé fur le champ la diminution qu’elles ont
toutes fubies auflitôt par l’impôt que mit deilus l’Archevêque de S en s, &
en outre
^ e aur° it fini au renouvellement du bail de la ferme ; enforte que c’étoit une adreiT«
“ Sr. la B o u lla y e , pour paroître accorder quelque ch ofe, & me fruftrer réellement en
définitif.
�( 6 )
nouoit les engagemens pris avec m o i, mais feulement pour une place
tellement inférieure, que je n’aurois pu 1 accepter ( a ) .
Je l’obfervai fur le champ à M. île Villedeuil, en lui rapportant la
lettre que M. le Comte Montmorin avoit renvoyé à M. le Marquis de
la Fayette ; mais ce Miniftre me répondit : » l’erreur eft fans conféquence,
» ce font de ces inadvertences de bureaux, auxquels ils font fort fujets ;
» MM. de Montmorin, la Fayette & moi, nous avons vu l’engagement,
» Sc puis , il fuffit de vous connoître pour ne pas vous propofer de
» ces miférables «mplois.
Je fuis confiant ; j’efpérai que la fupercherie du Sr. la Boullaye ne me
préjudicieroit pas, & comme j’ai peu d’ambition, deux califes aux fermes
ayant vaqué prefque auiHtôt, j’en demandai une; mais le Sr. de la Boullaye
fit fi bien, que l’une fut vendue h un Huiffier-prifeur, l’autre fut donnée
à un Directeur de la ferme.
A ce moment, M. de Villedeuilfe retira du contrôle, ôc M. Lambert
monta au trône de la finance.
M. le Marquis de la Fayette parla de nouveau à M. le Comte de
Montmorin ( b ) , pour reprendre les engagemens avec le Sr. Lambert,
de maniéré qu’ils fufîent enfin remplis; ce Miniftre y confentit &C écrivit
dans cette intention au Sr. Lambert.
Suivant la routine, la lettre fut renvoyée dans les bureaux de l’in
tendance , où le Sr. de la Boullaye eut foin d’éviter dans la réponfe ,
l’expreiTion de place inférieure, q u i, dans la premiere , avoit bleiTé mes
droits & excité ma réclamation pour y inférer celle de place convenable,
qui, dans l’acception maltotiere, que le Sr. de la Boullaye fe préparoit
d’y donner, l’auroit rendue fynonyme.
( a ) C ’étoit fi peu une place inférieure, que portoient les engagemens, quen donnant
la çlace du Sr. de Cim m ery au Sr. J o ly de St. E ufebo, on ne me propofa pas celle
de Contrôleur des cailles, que faifoit vaquer la promotion du Sr. J o l y , qui étoit de
jo o o liv re s, & dont on augmenta le traitement de cent piftoles, pour la donner a
un nouveau v e n u , le Sr. A c o y e r,
qui
1occupa
fix lemaines
feulement, pour avoir
fa retraite avec 3000 1. de penfion. Eh ! voila comme le fang des peuples convertis efl
m onnoie, fervoit a faire des peniions a des favoris ; il eft aife de vérifier le fait.
( b ) Je pourrois rapporter ici les lettres de M . le Com te de Montmorin à M . lfi
Marquis de la F a y e tte , avec celles de ce dernier qui me les e n v o y o it, mais tous les, deu*
exiftent heureufement, & on peut les confulter ; néanmoins pour ceux qui n’en ont pas
�( 7 )
Je me défiai d’un Intendant, qui dès notre premiere entrevue m’avoit
annoncé machiavel pour Ton cafuiile. D ’après le confeil de mes protec
teurs , je vis en particulier le Sr. Lambert , pour le mettre au fait du
manège ( a ) du Sr. la Boullaye, & de ce que j’en avois ;\ attendre.
Le Sr. Lambert m’avoit paru bon homme, & fa dévotion ajoutant à
mon opinion, je crus tout ce qu’il me promit; je ne tardai pas m’appercevoir, que dans les gens en place, la foibleiTe étoit auffi dangereufe
que la mauvaife foi réfléchie. Le Sr. de la Boullaye le menoit par le bout du
nez; les chefs de bureaux, & jufqiùuixfimples commis, en faifoient de même.
Défefpéré, je m’adreflai à fes parens, à les amis Sc à tous les Miniftres
qui vouloient l’accompliiTement des engagemens pris avec moi. Chacun
d’eux écrivit, ote parla au Sr. Lambert , dont, aux réponfes que j ’ai
entre les mains, je reconnoiffois le protocole du mauvais éleve de
machiavel. Pour faire fortir celui-ci de derriere la toile, je convins avec
Madame de Malesherbes & M. Clément de Barville, qu’ils écriroient
au Sr. Lambert, relativement à ce qu’il m’avoit dit verbalement, afin
d’embarniffer le la Boullaye dans les réponfes qu’il lui donneroit à
foufcrire ; ils devoient entrecroifer leurs lettres, & les rendre preflantes.
U facilité, je vais en citer u n e: » J ’ai l’honneur, Monfieur , de yous envoyer ci» jointe, la réponfe que j’ai reçu de M . de la Boullaye , relativement au Sr. M orizot,
» auquel vous vous intéreiTez ; je d fire bien finccrement que la bonne volonté que
» témoigne M . de la B o u lla y e , ne demeure pas ftérilc , & que le Sr. Morizot puiffe
” bientôt en éprouver les effets.
J ’ai l’houneur, & c . Signé, le Comte
de
M
o n t m o r in
.
( a ) O n connoît tout le trigaudage du Sr. la Boullaye dans les bureaux des domaines
du R o i , qu’il bouleverla pour y faire entrer de force un Secrétaire de fon gendre Jo ly
de Fleury ; ce coup de main a valu mcme depuis de la difgraco au Sr. Debonnaire
de Forgées.
On fçait comment il donna du defTous au Sr. V ia l, auquel tout le crédit de M o n s ie u r ,
frère de R o i, ne put faire reftituer la p lace, quoiqu’elle lui eût été ôtée injuftement.
On n’ignore p a s, comment il difpofa au profit d’une de fes créatures, d’une place
de D ire&cur des A id e s, promife par M . Lambert à M a d a m e . Sans tous les efforts de
cette généreufe Princefle, fon protégé n’obtenoit pas juftice.
Le déplacement du Sr. d eF o rg u es, Receveur de la Barriere d ’E n fe r, a fait aflez de
bruifc par fon injuflice.
^ E n fin , qu’on confulte M . Falbert de Q uingey & tous les b u reau x, & on aura du
r- la B o u lla ye, la jufte opinion qu’on doit en avoir. Il eft connu.
•
. V
�C 8 )
Le ilratagême me réuifit. Le Sr. de la Boullaye fut obligé de fe mettre
en fcene dans les réponfes qu’il fournit a la iignature du Sr. Lambert ; celle
à Madame de Malsherbes annonçoit l’homme dès l’exorde, & on Pauroit
reconnu à tout le corps de la lettre, quand bien même il n’y eût pas
été nommé.
Celle à M. Clément de Barville promettoit une réponfe définitive,
d’après le rapport de M. de la Boullaye, dont l’intention étoit bien d’éviter
de la faire ; mais M. de Barville la provoqua , en écrivant de rechef à M»
Lambert pour qu’il la lui fit.
Elle vint, remplie de fiel, d’injures, de menaces, de diffamations, &
foufcrite du Sr. Lambert. M. de Barville la jugea auffitôt furprife à M.
Lambert. En effet, les objets dont il s’agiffoit, étoient étrangers à lui,
mais perfonnels au Sr. la Boullaye. Il ne jugea pas à propos de me
remettre une lettre qui compromettoit le Contrôleur-général, fon ancien
camarade ; mais il m’en laifla prendre une copie, que je portai au Sr.
Lambert.
Dès que celui-ci la v it , il la défavoua, en me promettant d’en témoigner
fon mécontentement au Sr. de la Boullaye. Néanmoins ce dernier avoit
réuiïï, pendant les dix mois qui s’étoient déjà écoulés du miniftere du
Sr. Lambert, à fe faire affurer , par la fignature de ce dernier , jufqu’à
fes vengeances perfonnelles, &c à difpofer1 de tout, à l’infçu du Sr. Lambert,
& à mon préjudice.
Vainement je prévenois , je follicitois &C j’avertiffois le Sr. Lambert,
à toutes fes audiences qu’il donnoit fréquemment ; je n’en étois pas
moins éconduit , malgré fes paroles & fes affurances , à fon infçu,
quoi qu’il fignât.
Entre plufxeurs faits particuliers, je n’en citerai qu’u n , c’eft celui du
bail des meffageries , pour lequel le principal Miniftre avoit une nouvelle
compagnie, qui lui donnoit une fomme confidérable d’augmentation,
& que le Sr. Lambert paifa à l’ancienne, en fe cachant du principal
Miniftre, &c à l’inftigation de la Dame de Villeneuve, fa belle-fœurj
qui vivoit avec les Morel ( a ).
. Le Sr. Lambert avoit promis formellement à Madame de MonteiTon,
( a ) Le public a retenti, dans le tem ps, de la reconnoiiEance de l’ancienne Com
pagnie envers la Dam e Villeneuve.
que
�( 9 ).
que je ferois un des RégiiTeurs de ce bail, s’il y en entroit de nouveaux,
& il y en avoit eu deux admis. Madame de Monteilon s’en plaignit au
Sr. Lrmbert, qui lui dénia en avoir admis de nouveaux. Effectivement
il n’en fçavoit rien , & il avoit figne.
Mais le fait capital dont j’ai à me plaindre, & qui eft l’objet principal
de ce mémoire, eft encore plus étrange. Il prouve linguliérement combien
le Sr. Lambert étoit incapable de gérer le contrôle général. Comme ce
fait eft amplement expofé &c difcuté dans quatre mémoires imprimés,
qui ont déjà paru, j’abrégerai, pour ne rien répéter de ce que j’ai
dit, &c je fiipplierai Votre Majeité de s’en faire rendre compte, & l’AiTemblée nationale d’en prendre communication.
J ’occupois depuis douze ans un emploi dans les bureaux de la loterie
royale, aux appointerons de 4000 livres, fans les gratifications ordinaires
& extraordinaires. L’intrigue oppreiïïve de deux chefs m’en avoit retenu
le payement pendant les douze années, malgré les ordonnances & déci
dons des Miniflres. J ’avoisfervi à mes frais, & j ’attendois impatiemment
chaque anuée ma tranflation dans une autre partie de finance, pour en
reclamer judiciairement le payement contre l’adminiftration de la loterie ,
fans craindre d’être révoqué par elle, fur cette înfurreûion; Iorfque
confidérant, d’un côté , que cette tranflation pouvoir être différée par
des événemens imprévus ; de l’autre, que j’avois un preffant befoin de
percevoir en entier à l’avenir mes appointemens , &c de toucher pour le
moment ceux arriérés, afin defolder les avances que lagénérofité m’avoit
faites, dans la vue de me faciliter les moyens d’attendre la rentrée de
ces fonds; au rifque delà révocation, j ’avois réfolu, peu après l’arrivée
de M. Lambert au miniftere des finances, de pourfuivre en Juftice mon
recouvrement.
Dans cette intention, j’avois difpofé un mémoire, fur lequel un Jurifc°nfulte expérimenté m’avoit donné fon avis. L’un & l’autre alloient
paroître imprimés, lorfqu’il tranfpira qu’il
préparoit une réforme dans.
ks bureaux.
furfisit aiïïgner & à publier mon mémoire, & le 2.5 août, le miniftere des finances abandonna le Sr. Lambert.
Quatre jours après, 'es opérations de la réfome, complotées & arrangées
dans le fecret, éclatèrent, telles que je les ai expofées dans mes deux
ptacets à M. Necker, qui ont été imprimés,
B
1
�C i° )
A mon grand étonnement, je me vis inglobé dans la fuppreflion
défaftreufe qui avoit été manoeuvrée pour mafquer à M. Lambert la
création d’une multitude de places ruineufes, & le renvoi de cinquante
peres de famille, auxquels on ôtoit l’état & le pain pour le donner à
des étrangers , nouvelles créatures que la Roche & les Adminiilrateurs
fubftituoient à des Commis plus capables qu’eux.
Cette opération, aulieu d’être une fuppreflion , étoit une vraie créa
tion, qui, loin de diminuer les frais de 120,000 livres, comme on
l’avoit fait entendre au Sr. Lambert, les avoit augmenté de 51000 livres,
fuivant le dépouillement qui en a été fait depuis au tréfor royal.
Alors je me pourvu à la Commiflion de la Police, contre l’adminiftration de la loterie, pour la faire contraindre à me payer mes appointemens retenus, & j’écrivis en même temps au Sr. Lambert, pour lui
apprendre la furprife qu’on lui avoit faite, le tort particulier qu’il me
caufoit ; n’ ayant aucune autre reflource pour fubfifter & pour lui repréfenter, qu’ au lieu d’avoir rempli envers moi les engagemens de fes deux
prédéce fleurs & les fiens, pendant les onze mois de la durée de fon
miniftere, il m’avoit, en le quittant, privé d’une place médiocre , lorfqu’il
devoit m’en donner une plus avantageufe.
Auflitôt je rendis public mon mémoire à confulter , après en avoir
auparavant envoyé un exemplaire à S. A. S. Madame la Princefle de
Lamballe, à M. le Préfident de Rofanbo & à M. de l’Eflart, que j’avois
pris à témoin de la vérité des faits que j’y énonçois. Ces deux derniers
me répondirent chacun par une lettre qui en rcconnoiiToit l’authenticité.
La Princefle fit encore plus ; elle envoya l’exemplaire à M. Lambert,
avec fon atteftation, en lui recommandant de me faire payer de mes
appointemens , d’après l’afliirance qui lui en avoit été donnée par M.
N ecker, lors de fon premier miniftere; enfin, elle redemandoit à M»
Lambert, pour m oi, la place qu’il m’avoit ôtée.
Le Sr. Lambert répondit à ma lettre du 2 feptembre, ainfi qu’il fuit«
Paris , 7 feptembre ¡788.
C e n’c ft, pas M onfieur, par une ordre particulier que j’ai donné à votre ¿gard >
que la place que vous m’apprenez que vous aviez dans les bureaux de la loterie,
s ’e f t
trouvée fupprim ée; j’ignorois même que vous y fuffiez employé.
J’ai exigé des Adminiilrateurs une économie fur leurs frais de régie, qui allât au
�(
Il
)
moins à 12 0 ,0 0 0 livres; je leur ai laiffé la fixation particulière des retranchemens qui
procureroient cette économie. C ’eft ce plan qui a produit & néceflitc les fuppreflions
dans lefquelles vous avez été compris. Si j’euffe pu prévoir que ces réformes vous
fi fient éprouver une perte, au lieu des effets que vous aviez a attendre de toutes les
efpérances qui vous font données depuis long-tem ps, j ’aurois cherché, du moins pour
l’inftant, à détourner de vous ce contre-temps ; mais e n v o u s a d r e s s a n t a M . l e
D ir e c t e u r - g é n é r a l
d e s f i n a n c e s , je ne doute pas qu’il n’entre dans les mêmes
vues, & je lui rendrai volontiers m o n t é m o i g n a g e fur vos talens & votre perfonnel,
fuivant la connoiflance que je puis en avoir.
J ’aurois defiré pouvoir remplir l’engagement que M . de Calonne avoit pris avec M .
le Comte de V erg en n es, & qui avoit été renouvellé par M . de Villedeuil avec M .
le Comte de M ontm orin, pour vous donner une place diilinguée dans la finance.
V o u s avez les preuves de l’intention où j’étois de la te n ir, par les affurances que
j ’en ai données à M . le principal Miniftre , à M . de Lam oignon, à M . le Com te de la
Luzerne, à M . le Com te de M ontm orin, à M . le D u c de V illeq u ier, à M . de Barville
& autres de vos protefteurs ( a ).
Je vais avoir l’honneur de réitérer mes regrets à Madame la PrinceiTe de Lam balle,
qui m’a fait celui de m’écrirç, en m’envoyant votre mémoire im prim é, pour la répétition
de vos appointemens contre la loterie & la réclamation de votre place. Je fu is, & c
Signe, L a m b e r t .
Cette lettre n’a pas befoin d’un long commentaire, & h l’apologie
près de la faullc opération fouferite par le Sr. Lambert fur la loterie, on
y trouve tout ; mais on fçait que plus un Adminiftrateur eil aveugle,
plus il a d’affe&ion pour fes opérations; au furplus, on voit que le Sr.
Lambert connoiffoit parfaitement la teneur des engagemens de MM. de
Calonne & Villedeuil avec MM. les Comtes de Vergennes & Montmorin,
Puifqu’il dénomme tous les Miniftres avec lefquels il les avoit fanftionné.
Ce n’ell plus le ftyle du Sr. de la Boullaye, pour une place inférieure 011
convenable ; dès qu’il n’ell plus le fecrétaire de l’ex-Miniftre, celiu-ci
rétablit la chofe en convenant que les engagemens portoient fur une
place diflinguée ; & au lieu de cette place diilinguée il m’a ravi jufqu’au
chétif emploi qui me faifoit vivre , il m’a mis fans état & fans pain.
Mais confidérez fes regrets de n’avoir pu prévoir ma perte, & détourner
dt moi ce contre-temps. Ce contre-temps ! ah ! eit-ce le mot qui convient
( a ) Je n’ai pas befoin de rapporter tous les engagemens par écrit de tous ces
Miuiftr.es & autres, puifque
M.
Lambert
en
convient ; mais je les garde en original.
�( 12, )
à la chofe ? n’eft-ce pas plutôt un attentat; puifque ôter l’état & le pain à
un homme, c’eft lui donner lentement la mort. L ’ex-Contrôleur-général
pénétré , ne femble-t-il pas me dire : » j’ai fait une faute, je l’avoue; mais
» une fa u te involontaire. J ’ai été furpris, je ne vous fçavois pas là ! il
» j’avois encore de l’influence fur l’adminiftration de la loterie , je vous
» reftituerois votre place. Adreffez-vous à M. Necker, il eft juile, il
» vous réintégrera, lorfque je lui aurai parlé de mon erreur, de vos
» talens & de votre perfonnel.
C ’eft ce langage que confirme le billet ci-après du Sr. Lambert, du 12
feptembre 1788.
M . Lambert envoie à M . M orizot la lettre de Madame la Princefle de Lam balle,
qu’il defire d’a vo ir, & fon mémoire qu’il a lu , & qui n’a été vu de perfonne ; il n’a point
réfufé de voir &
d’entendre le Sr. M orizot; Mais il n’a plus aucune influence fur
l’adminiftration de la loterie , S i M . N ecker peut feul y pourvoir.
Je fuivis l’avis du Sr. Lambert. Le jour même j’écrivis à M. Necker,
8c par fa réponfe du 17 feptembre, ce Miniitre me renvoya à en
entretenir le Sr. del’Eflart, auquel je remis mon placet manufcrit, deftinc
pour M. Necker, que le Sr. Lambert avoit approuvé, &c que depuis j’ai
fait imprimer, lorfque le Sr. de FEffart , d’abord enclin à me rendre
juftice , en a été détourné par une femme qui follicitoit pour les Adminiftrateurs de la loterie.
Votre Majefté, Monfieur, & toute votre Cour, ne dédaignèrent pas
de lire ce placet, qui occafionna le renvoi de la femme Gourbillon &
de fon fils. Tous furent révoltés de l’injuftice que j ’éprouvois, & néan
moins ce fut à ce moment que fe formeront les intrigues pour empêcher
la réparation, foit de celle que je pourfuivois devant M. Necker, Juge
né de la queftion en reftitution de ma place, foit de cel’e pour le paye
ment de mes appointemens, dont le Confeil étoit faifi, au moyen d’un
Arrêt, du propre mouvement du R o i, qui avoit évoque de la commiilion
de la police ma demande avant l’inftru£Uon achevée.
Je dévoilai toutes ces intrigues clans un deuxième placet ;\ M. Necker ■>
que M. de Barentin remit imprimé à ce Miniftre, auprès duquel je réunis
çncore le fuffrage de MM. les Comtes de Montmorin, de la Luzerne &
celui de M. de Villedeuil.
M , N ecker m’écrivit la lettre ci-après,
�C *3 )
‘
Perfailles
M . DE R
um are
,
ce 6 février 178g.
a dû prévenir M . M o rizo t, qu il devoit faire le rapport de fon affaire
au Comité contentieux. M . le Direfteur-général l’engage de lui envoyer toutes les inftruélions qu’il croira c o n ven ab les. S i M . M
o r iz o t
PO RTÉE A UN AU TR E T R IB U N A L , IL
Q u ’ a LE DÉSIGN ER LUI-M&ME , & en atten
n ’a
PRÉFÉRÉ QUE
sa
d e m a n d e s o it
dant , M . le Direéteur-général ayant connoiffance de la fituation dans laquelle il fe trou ve,
lui envoie un mandat de 12 0 0 1.
Ce mandat n’a pas fuffit pour les frais d’impreiHon des quatre mémoires
que j ’ai donnés. M. de Rumare, que le Sr. Lambert avoit nommé* mon
Rapporteur, en l’endoftrinant contre moi, s’étoit heureufement démis,
& M. de Fourqueux lui avoit fubftitué M. de Pafloret;
J ’acceptai entre les mains de M. de Barentin l’offre faite par M. Necker
d’un autre Tribunal que le Confeil; mais quand le Comité contentieux
eut connoiffance de cette propofition & de mon acceptation, fans attendre
les injlrucllons que M. le Dire&eur-général m'avoit engagé d'envoyer, fans
que Maître Perdry, mon Avocat au Confeil, en fîit averti, fans avoir mes
pièces, fans que mes adverfaires fuflent conftitués ; enfin, fur un écrit
furtif, illégal de ceux-ci, & non communiqué, ce Comité s’emprefla de
m’étrangler par un Arrêt qui me déclaroit fubitement non-recevablc, dans
l’efpoir qu’il m’empêcheroit de profiter du bénéfice de l'offre de M. Necker
pour le changement de Tribunal (a ).
Maître Perdry, par cet Arrêt, fe trouvoit pour ainfi dire compromis dans
fon honneur & fa fidélité, vis-à-vis de fon client, qui pouvoit en quelque
forte le prendre à partie. Il préfenta requête au Comité contentieux,
pour le rappeller au principe de ne pas juger les Parties au moins fans les
entendre ; & M* de Pafloret qui rapporta cette requête, fit rétablir les
chofes , en ordonnant que cette production illégale &c clandeftine de mes
adverfaires me. feroit communiquée. Les Magiilrats fe prêtèrent d’autant
( a ) Eft-il croyable que tfes h om m es, oracles du Confeil du R o i, fe permettent de
rendre ainfi des Arrêts en fon nom impunément ? Seroit-il poflîble que l’Aflemblée
nationale ne ’ prît point en confidération le fort de leurs com m ettans, jufticiables de
tels ^ g e s , & qu’ils ne les écartaflent pas du plus jufte des Rois qu’ils trom pent, &
d°nt ils abufent fans ceiTe. Oh ! qui auroit donc pitié de l’infortunée nation, obligée
fe voir ainfi ra va gé e , fans ofer fe plaindre , fe foulevcr ni fecouer ce régime arbitraire.
�'
"I
au mépris de toutes les formes , qu’ils fe promettoient bien de répéter le
même , en obfervant toutes les formes.
Mais ce fut alors , que très-déterminé à confommer la propofition de
M. N ecker, & à ne pas paroître dans un Tribunal, dont les vieux
Magiftrats fouloient aux pieds, fans fcrupule, les L o ix, la confcience &C
l’honneur, je démalquai la monftruofité de leur procédé, dans un mé
moire que je donnai le 18 juin dernier à l’Affemblée nationale & à
Votre Majefté, que je fuppliois de me juger elle-même, ou de me nommer
un Tribunal, en lui expofant quelques réflexions fur la néceifité de
réformer les bureaux de fon Conieil.
J ’attendois, Sire, votre décifion , lorfque votre peuple, las du joug
de ces defpotes Magiftrats , qui avoient ui'urpé votre autorité pour vous
fubjuguer v o u s-m ê m e , s’eft levé en rompant fes chaînes, &C a pris les
armes pour délivrer fon Monarque bien-aimé.
Les fecouffes d’un fi noble effort, en altérant l’harmonie apparente
qui déguifoit les vrais défordres de la Capitale, ont ébranlé un moment
les fondemens de la fécurité particulière. A l’abri de ce trouble momenrané , ceux auxquels l’empire de l’iniquité échappoit, ceux que j’avois pu
bleiTer par une révélation de faits honteux, mais nécelïaires à mettre en
évidence, ceux enfin que l’habitude a familiariié avec le crime, me
menacerent d’un attentat horrible.
Pour leur épargner un forfait de plus, j’ai cherché unafyle fur une T erre étran
gère : j’y toitchois à peine, que j’allois échouer contre un nouvel écueil ( a ).
( a ) Quarante-huit heures après être arrivé à Bruxelles, où je ne A>nnoiffois perfonne,
le Gouvernement me notifia l’ordre de fortir des Terres de l’Em pereur, dans vin gtquatre heures, & il étoit alors onze heures du foir. Je communiquai les pafle-portsque
j’avois de mon d iftriil, de l’H ôtel-de-V ille de Paris & celui du R o i, je rendis vifite
a M . le Comte de TrauttmaudorslE En voyant l’état de ma fanté, il .'évoqua I ordre de
déguerpir. C e Miniftre honnête s’exeufa même de l'avoir ^donné , fur ce qu’il ne me
connoiiToit p as, & fur ce qu’un François m’avoit rendu ftlfpeft; j’ai fçu depuis le nom
du lâche, q u i, abufant de la confiance qu’infpiroit fon n o m , fon état 8c fon rang »
m’avoit rendu ce mauvais office ; je ne le nomme p as, par égard pour M M . les Ducs
de........... meilleurs patriotes que lu i; je fouhaite de n’être pas fo.ee à le nom m er, car
ce trait-là ne lui a pas fait honneur à B ruxelles, dès que j’y û été connu. On peut
voir aux pièces juftificatives, le certificat du Gouvernement de B ru x elle s,la lettre du
M iniilre de l’Empereur & celle du Miniftre du R o i des François.
t
!
1
I
�C *5 )
Sans la vigilante prote&ion de M. le Comte de Montmorin, qui me pro
cura un moment de repos, pendant lequel, je donnai avis à quelques-uns
de MM. les Députés à l’Affemblée nationale du malheur de ma pofition
des dangers qu ej’avois courus pour avoir ofe demander juftice au R o i&
à l’Affemblée, avec ces carafteres de vérité & de courage, qui n’appar
tiennent qu’à l’honnête homme, parce que lui feul peut les ioutenir.
Aux a ffu ra n c e s de leurs bons offices, ils jo ig n ir e n t une invitation vrai
ment fr a te r n e lle de revenir, & ils m’annoncerent le rappel du S r . Lambert
au miniftere.
Je me mis en marche auifitôt, & j ’en prévins une parente dti Sr.
Lambert, qui, pénétrée du tort que celui-ci me fait éprouver, m’avoit
promis fa médiation auprès de lui trois jours avant mon départ.
AufTitôt mon arrivée, je réclamai la parole de cette parente en même
temps que j’adrefl'ai au Sr. Lambert la lettre ci-après.
P a r is , 4 feptembre 178g.
-M O N S IE U R ,
R
appelle
au Contrôle-général, tout ce quo je vois de plus avantageux pour vous
dans cet événem ent, c’eft la facilité qu’il vous donne de réparer partie du dommage
que vous avez pu commettre pendant votre premier miniftere.
Pour y parvenir sûrement, il faut vous environner de perfonnes honnêtes, & éloigner
de vous les frippons , les intrigans & les gens de parti, qui vous avoient dominé &
circonvenu ; malheureufement la nature vous a refufé le don de connoître les hom m es,
don fi nécefTaire à ceux appellés à les gouverner.
U n intérêt majeur ne me permet pas de vous diflimuler cet a v is , dont dépend pour
tttoi la réparation des torts que vous m’avez fait par furprife, & pour vo u s, l’eftime
& le refpeét du public éclairé, qui 11e confond pas l’homme avec la place.
Si vous êtes ju fte, avec courage vous ferez le bien, même à ceux qui vous feroient
Perfonnellement défagréables, s’ils font d’ailleurs honnêtes & capables. V ous ne profiterez
Pas de votre place pour exercer vos vengeances ou celles de
vos créatures. Main
tenant que la refponfabiïué efl une Loi de l'E t iit , vous vous expofetiez à être dénoncé,
à moins que la régénération ne foit illufoire, ou que l’Affembée nationale ne foit
elle-même complice avec nos ty ra n s, vous feriez infailliblement jugé d’après la lettre &
*e billet que vous m’avez adrefle les 7 & 1 2 feptembre de l’an dernier. Faites-y attention;
V ous fçavez qu’à pareille date vous m’avez mis fans pain , pour donner ma place
au Jei,ne B i l l e c o q ; enforte qu’à charge à la fociété qui me fait vivre depuis ce m om ent,
^ dans un temps où chacun n’a pas trop du fie n , je fuis dans la fituation la plus
«W oureufe.
Aujourd’h u i, M on fieu r, que vous avez reffaifi l’autorité, vous devez à la Juftice &
�( 16 )
à la fociété de chafler honteufement ce B i l l e c o q , déjà fi riche par lui-même & par
la fortune immenfe de fon beau-pere , qui vous a trom pé, pour me reftituer ma place
ou me donner une retraite analogue aux appointemens de la place. Je ne la demande
même pas aufli avantageufe que vous l’avez faite aux autres, auxquels vous avez donné
âppointement & gratification en retraite, en aflurant moitié d’icelle à leurs femmes.
C e feroit vous couvrir d’opprobre & manquer à votre d evo ir, fi vous accordiez de
nouveau votre confiance à un
la
R
oche
, qui en a fi cruellement abufé, d’intelligence
avec les Adm iniftrateurs.
Le public éclairé par les quatre mémoires que j’ai donnés , les a proferits, & beaucoup
des
h o n o r a b le s
membres de l’Affemblée nationale fe promettent de les éplucher, lorfqu’ils
s’occuperont de la finance. Il eft impoffible que leur fortu ne, acquife aux dépens du
R o i & de la Nation , ne lerve pas à foulager le peuple qu’ils ont dévoré par leur dépré
dation. Heureux encore s’ils n’expient à la lanterne les forfaits de leur oppreiïion.
V o u s n’ignorez p a s , Monfieur , que tous ces flippons qui vous ravirent votre fan£Hon
pour me ravir ma place, ne m’avoient pas fatiifait de mes appointemens, pendant douze
ans que je l’avois occupée avec diftinâion. V o u s en avez vu la preuve dans les témoi
gnages foutenus des Adminiftrateurs, q u i, pendant les clou/., années , ont donné à mon
tra v a il, à ma vie publique & p rivé e , les élog:s qu’ils ne pouvoient leur refufer ( a ) .
M ais vous avez vu aufli les preuves de cette intrigue atroce qui m’en a privé , &
qui avoit été menée avec fuccès par les Srs. M efnard, Seigneur de Conichard r &
P ré v o it, Montaubert d’A rlin co u rt, connus notoirement pour les deux tyrans de la finance
les plus effrontés, comme pour las deux vampires les plus ir.fatiables.
M algré l’évidence de mes d ro its, le Comité contentieux du Cor.A-il n’a pas eu honte
de former cabale pour les anéantir, & d’admettre des fins de non-recevoir ipadmiflibles.,
qui font la fource du brigandage de la M agiïtrature, qui depuis deux fiécles défoie la
France & en prépare la perte.
O b ligé , au péril de ma vie qui étoit m enacée, d’échirer cette cabale rcl'inccrate,'
je l’ai fait avec fuccès dans mon mémoire au R o i , auquel le françois & l’é-.ratiger ont
applaudi. L a chicane effaie d’éternifir ce procès, dont vous aviez d’aboid nommé pour
Rapporteur ce Grégoire de Rumare , aufli eilimé au H avre qu’à P aris, &. je ne puis
fuffire aux frais quelle dévore.
V o u s devez prononcer fur le rapport de M . de P aftoret, les Magiftrats du Confeil
ne pouvant plus connoître de cette difcuflion depuis la plainte que j’ai portée contr’eux
au Roi & à l’Afïl’mblée nationale, & la propofition qui m’a été faite par M . N ttk er
pour me changer ce Tribunal.
Des Magiilrats com prom is, attaqués , devroient fe réeufer d eux-mêmes. La réunion
des bureaux ne change pas leurs difpofitions. Elle n’épure pas leur cœ u r, & c’eft Ie
cœur qui infpire la confiance ou qui diffuade. Réunis ou divifés, les Magiftrats for t les
(a )
V. dans mon mémoire à confulter les lettres des Srs.Campan , Pcrnon, M efna ; à
&. de Clugny.
jnemes >
\
�( >7 )
mûmes f & ce n’étoit pas une réunion qu’il falloit, & qui ne diminue aucunement leur
ignorance & leur corruption. La nation attendoit une fuppreiîion & un renouvellement
total. L e bien public les follicitoit ; fans cela , la régénération eft manquée , notre efpoir
trom pé, & le defpotifme nous menace de fes vengeances implacables.
T erm inez, M oniieur , cette querelle honteufe pour vos confreres , odieufe au public '
& douloureufe pour moi. V ous préviendrez le Jugement de l ’augufte A flem blée, déjà
affez furchargée de travaux importans pour le bien général & particulier. V o u s vous
ménagerez des droits à Ton eftim e, au lieu de vous attirer des difgraces.
C e provifoire rem pli, il ne vous reftera , Moniteur , qu’à acquitter les engagemens
que vous aviez pris pour m o i, avec tous les M iniftres, pendant que vous étiez Contrôleurgénéral. La mechancete du Sr. Donet de la B o u lla y e , qui avoit toujours quelques ififipides
créatures de fes favorites à p ou rvoir, vous en a empêché, piefque à votre infçu ;
car c’étoit vers la fin de votre miniftere qu’il vous furprit votre fignature , au bas
d’une lettre injurieufe &. calomnieufe qu'il vous faifoit répondre contre m o i, à M .
Clément de Barville.
V o u s n’a v ie z , vous ne pouviez avoir alors aucun grief contre moi. L e Sr. Donet
vous abufoit, pour couvrir de votre autorité fes reffentimens perfonnels, & difpofer,
à mon préjudice , des places auxquelles j’avois d ro it, par vos engagemens &. le vœu
réuni des M iniftres, qui vouloient une fois, qu’un homme qui le m éritoit, entrât dans
les finances du R o i , depuis trop long-temps la proie de toute la valetaille delà Cour
& de la Ville ( a ) .
D eux de ces Miniftres bien intentionnés font encore aujourd’hui dans le miniftere
jes deux plus fermes appuis de l’honnêteté malheureufe. Ils n’ont point changé, & je
n’ai pas démérité. A u contraire, mon courage développé par le malheur & les circonftances, m’a mis dans un jour nouveau, & vu fous un afpeft plus intéreflant •
d’honorables membres de l’augufte Aflemblée ont penfé, qu’une fi jufte énergie décéloit
quelque v e rtu , dont on pouvoit tirer avantage pour le bien public ; ils m’ont afliiré
de leur proteâion.
Secondez leurs intentions patriotiques, M onfieur, je fupplierai M M . les Comtes
de Montmorin & de la Luzerne de vous réitérer leurs opinions fur mes droits ; mais
pourvoyez promptement à la reftitution de ma place ou à la fixation de ma retraite,
ainfi qu’au payement de mes appointemens , fi long-temps & fi vexatoirement retenus.
Cet objet eft provifoire & requiert célérité, puifque enfin depuis un an je fuis fans
Pain , & cette extrême fituation eft votre feul ouvrage. Je fuis, & c. Signé, M
o r iz o t .
Les torts du Sr. Lambert, fes faux fuyant, fon manège & ma fituation,
ni’autorifoient à lui écrire, ainfi qu’on vient de le v o ir, avec une
énergie propre à rappeller fon ame aux fentimens qui lui étoient devenus
( a) Campan, Morel, Diancourt, &c. &c.
c
�( *8 )
étrangers, mais en vain; le Sr. Lambert, éloigné des principes de juftice
que je lui retraçois , ne me fît aucune réponfe ; aucontraire, averti par
cette lettre de mon retour dans la Capitale, il s’emprefla de m’inquiéter,
¿k l’aide du Comité de Police de l’Hôtel-de-Ville de Paris.
Ce Comité turbulent me cita devant lu i, par lettre du 8 feptembre
dernier, quatre jours après celle que je venois d’écrire à M. Lambert.
J e comparus devant les Srs. P itra (a ) & Dufour ( b ) , adroits caffards
p a t r i o t i q u e s , qui, depuis la révolution, s’étoient introduits d’abord fans
miffion à l’Hôtel-de-Ville, & avoient réuffi enfuite, malgré l’amovibilité,
à s’y perpétuer avec miffion, voulant abfolument être quelque chofe,
en dépit de l’improbation générale & de la nullité, dont les a frappés la
nature. Obfcurs & myftérieux comme les Sibilles, à peine purent-ils me
dire le motif de leur indifcret appel. Je parvins cependant à démêler les
refforts de la même intrigue qui m’avoit expatrié, & qui, en apprenant
mon r e t o u r , r e n o u v e l lo it fes e ffo r ts pour s ’e m p a r e r , s ’ il étoit p o f fib le ,
de ma perfonne, en employant à cet attentat, des formes en apparence
légales; car ni le Sr. Lambert, ni les Commis de M. Bailly,dans les
bureaux de la Police municipale, n’ignoroient_ ou ne devoient ignorer
leur incompétence.
Au fein de l’anarchie, où toutes les réglés font oubliées, confondues
ou violées, l’abus étoit facile, & le danger preffant. J ’avois à craindre le
defpotifmc fanatique & la complaifance intércffée des Officiers, Rois de
la Police parifienne , compofée en partie du rebut des diftrifts ( c ) , depuis
que les gens fenfés & honnêtes les abandonnent aux intrigans. D ’ailleurs,
l’afcendant d’un Contrôleur-général, qui a la lâcheté & la baffeffe de
flatter des fubalternes incompétens, pour provoquer d’eux des attes
( a ) P itra, marchand bonnetier, & lai-m êm e,u n peu bonnet de laine , n’étoit pa?
con n u , avant que les murs de Paris fuflent tapifTés de fon nom.
( b ) Celui-là , & fon frere , Secrétaire du d’Aligre , font fort connus. Les hurlemens
des cliens écorchés
les ont longuement célébrés.
.. ( c ) Je ne prétends pas qu’il ne refte plus de gens honnêtes &
éclairés dans le*
diftriéts ; ce n’eft pas c e la , je fçais qu il y en a encore qu’on n’a pu réufTir à écarter,
mais ils y font fans influence, & fans ofer parler, &. le défordre entr’autres de certain*
d iiw a s eft au dernier période.
�Ci 9 )
illégaux, lorfqu’il peut recourir à des Tribunaux compétens,me rendoit
encore plus redoutable cette voie oblique, infolire & vexatoire.
Je pris les feules précautions que je pouvois prendre dans de fi fâcheufes
circonitances , & je fis Maître Carre, CommiiTaire au Châtelet, dépoiitaire
de la déclaration ci-après.
L ’ a n mil fept cent quatre-vingt-neuf, le jeudi dixfeptembre , deux heures de relevée,'
en l’hôtel & devant nous, A dricn-Louis C a rr é , Confeiller du R o i , Commiffaire-enquêteur
&
examinateur au Châtelet de P a ris, eft comparu Maître Edroe-Etienne M o riz o t,
A vocat au Parlem ent, demeurant à P a ris, rue St. Thom as du L o u v re , Paroifle St.
Germ ain-l’Auxerrois :
Lequel nous a déclaré , qu’il auroit été averti, environ le 20 juillet dernier, qu’une
cabale puiflante &, nombreufe devoit profiter du trouble &
du défordre où étoit la
C ap itale, pour le faire aiTafliner, à caufe de certaines affaires, entr’autre une qu’il
avoit avec des Financiers, dans laquelle étoient compromis grand nombre de Magiftrats
S i de M inières, hors maintenant du miniftere ( a ) , ou rappelles au miniftere; qu’en conféquence, le comparant auroit auflitôt fait un emprunt ( b ) , & pris des paffe-ports de fon
diftriiS, de l’H ôtel-de-Ville & du R o i, & fe feroit enfui, le 25 dud. mois de ju illet, à
Bruxelles, d’où il en auroit prévenu fes protetteurs à l’Aflemblée nationale, & fes amis ; que
raffuré par ceux-ci, & jufques par quelques-uns de M M . les Députés de l’Aflemblée nationale,
que ladite Affemblée s’occuperoit de" faire rendre au comparant la juilice qu’il avoit
réclam ée, il s’étoit mis en marche pour rentrer dans fa patrie, en apprenant la nouvelle
du rappel du Sr. Lambert au contrôle-général q u o i q u e l e S r . L a m b e r t f u t s o n
en n em i
c a p it a l
; qu’arrivé à P a ris, le comparant auroit é crit, le quatre du courant,
audit Sr. L am b ert, pour le prévenir de la juilice qu’il réclamoit de l u i , & il auroit
appris qne la cabale renouvelloit fes intrigues, & même auroit e ifa y é ,p a r des voies
illégales 8 i infolites ,
de s’emparer de fa perfonne, pour difpofer plus sûrement de
fa v ie ; qu’en conféquence , cette cabale infernale l’auroit dénoncé à l’H ôtel-de-Ville ( c )
comme fufpett , imaginant que dans un moment où l’organifation de fa Police eft
incomplette , fa Municipalité leur donneroit la fatisfaélion & l’avantage de le faire
arrêter & conftituer prifonnier ; qu’alors le com parant, fouilrait à la fociété, ilo lé , fans
( a ) rattendrai, pour tout d ire , que l’on m’oppofe les ailes livrés par ce lâche que
je ne nomme pas.
( b ) C e fut un V ica ire -g é n é ra l, du Diocèfe d’A u tu n , qui eut la générofité de
Ine prêter.
( c ) U n Millin du Perreux , Député à la V ille , Repréfentant de la commune, n’eft
P is fait pour infpirer de la confiance à un citoyen, honnête. J ’ignore qui p eu t, fans
K-pugnance, fiéger avec Un homme de cette trempe.
�(1°)
déferife , ne pourroit échapper au poifon , s’il avoit échappé au poignard ; ce que
vo yan t le com parant, il auroit pris la réfolution de dénoncer à fes concitoyens, par
un mémoire qu’il v a faire imprimer, la fituation dans laquelle il fe trouve , fe réfervant »
jorl’que les Lois reprendront leur empire , de fe p o u rvo ir, ainfi &. contre qui il avifera.
Defquelles déclarations led. Sr. comparant nous a requis de lui donner a ft e , ce que
nous lui avons oélroyé , pour lui fervir & v a lo ir, ce que de raifon, & a ligné avec
n o u s, Com m ¡flaire, la minute des préfentes , demeurée en nos mains. Signé fu r l’expé
dition , C
arré.
J ’étois occupé à la réda&ion du mémoire annoncé ci-defïus, lorfque
no&urnement le Comité de Police de l’Hôtel-de-Ville me dépêcha un
courier,porteur d’unemiffiveimpertinente, lignée desSrs. Montaleau, ( a )
Prélxdent, Lagrénée 6c Bonvallet , qui ne m’avoient jamais vu ni
entendu, lefquels m’affuroient cependant être parfaitement injlruits fans
m’avoir parlé.
Rien ne motivoit, dans cette lettre infultante , les peines arbitraires
dont elle me menaçoit en ftyle de G rève, fi ce n’eft un faux rapport
du Sr. Dufour , contre lequel Maître Perdry, Avocat au Confeil ( b ) ,
a rétabli la vérité, dont on avoit les preuves , en démentant complétetement les aiîertions erronées du Sr. Dufour. Je me difpofois à employer
ces preuves, pour éclairer la Capitafé fur l’oppreffion de l’Hôtel-de-Ville ,
dont les membres, pour la plupart , incapables , indignes ou flétris,
aggravoient les défordres de l’anarchie, lorfque de vertueux citoyens,
infiniment plus habiles, ont développé les manœuvres anti-patriotiques
---- —
■
—
( a ) Je ne conçois pas comment le Sr. Moctier de Montaleau a pu briguer d’être
Député à l’H ô tel-d e -V ille , d’où fon frere a été chaffé, à moitié de fon cours d’échevinage. 11 me femble qu’avec un peu de délicateffe , il faudroit s’exclure d’un théâtre
où notre nom s’efl dégrade & flétri. Je conçois encore moins qu on députe des
Magiftrats & des Nobles titrés, tous gensintéreffés à la c o n f e r v a t i o n des abus, dont ils. viven t,
& par lefquels ils regnent; & ce qui eft encore plus inconcevable, c eft que tous les quinze
jours les diftriils nomment de nouveaux r e p r é f e n t a n s , & cependant on voit toujours les
mêmes perfonnages remplir les m îm es Comités & les m îm es noms affichés. Je fouhaite qu’au
milieu du mécontentement général contre l'H ô tel-d e-V ille, il n’arrive rien de fâcheux,
mais j’en doute. Je fouhaiterois encore que le petit nombre d’honnêtes gens qui s’y
trouvent , & y jouent un trifte rôle , fe retiraien t, pour n’avoir point à fe reprocher
le malheur de leurs concitoyeus, car on fe laflera.
( b ) Voyez fon certificat aux pièces juftificativos.'
�C »1 )
de ccs tyrans municipaux ( a ) , qui entendent nôus traiter plu'ôt en
vagabonds fans aveux, qu’en citoyens auxquels ils doivent des égards.
J ’ai repris alors ma tâche, pour dénoncer
Votre Majeftc, &
l’ A^emblée nationale, le Sr. Lambert, comme un M i n i s t r e i n e p t e ,
i n j u s t e , m a l - h o n n ê t e e t o p p r e s s e u r , dont l’honneur du T rône,
& le bonheur de vos Sujets follicitent le renvoi, & les injuftices une
punition. E n fu ite ,p o u r la fupplier de me rendre enfin la juftice que je
reclame depuis il long-temps, &C h laquelle il feroit dangereux , pour le
Sr. Lambert, de s'oppofer.
Votre Majefté abufée, votre autorité ufurpée, votre fife épuifé, vos
Provinces dévailées, votre Etat trahi, votre Royaume à deux doigts
de fa perte , vos peuples affamés , avilis, »dégradés par la corruption &
l’efclavage ; la France, enfin , cette fi belle contrée de l’Europe, n’offrant
plus que le fpeftacle de toutes les douleurs & de toutes les miferes : voilà
le tableau trop vrai des opérations meurtrieres des Miniitres & des
Magiftrats.
O ui, ce font vos Miniftres, enrichis des dépouillés de vos peuples ,
qui ont multiplié les impôts & les emprunts encore plus ruineux, pour
en dévorer le produit, ou acheter, par la prodigalité des dons , la faveur
intéreflee d’avides courtifans, néceflaires il les maintenir en place.
Ce font vos Magiftrats, infidelles à leurs obligations, traitres à la
Nation & à fon Chef fuprême , qui, par leur lâcheté dans vos Confeils,
ont célé la vérité à Votre Majefté, & lui ont dérobé la connoiifance
des gémiffemens & des plaies de fon peuple. Fiers de s’en dire les peres ( b "),
Pour en éxiger la docilité d’un enfant, ils faifoient fervir fa propre
force à l’enchaîner par une coalition combinée ; ces confpirateurs du
( a ) O n m’aflure ce Comité renouvellé en entier, dans ce moment. J ’en félicite la
Capitale. Maître Letellier &
tous les gens honnêtes pourront efpérer à leur sûreté,
& cefler de vo ir la Garde nationale obtempérer à des ordres arbitraires , évidemment
jnfenfés, les exécuter
b o u rea u x
avec un empreflement
indécent,
&
s’honorer d’être
les
de leurs concitoyens. S ’ils euflent continué, nous aurions été trop heureux
reprendre nos fers.
( b ) Sous les noms féduifans de patrons &
de p eres,
Ils affeftent des R o i s , les démarches altieres.
B r v t u s , trag. de Volt.
�( “
)
malheur public échangeoient les grâces de la Cour contre la pré
varication criminelle des nombreux complices de fon afferviiTement ;
& le fang des infortunés cliens, dont s’abreuvoient à longs traits les
vautours en robe, étoit, pour ainfi dire, la foute du pafte infame de
ces Cannibales.
L ’excès du défordre a produit le remede. Votre Majefté a convoque
fa Nation, pour s’occuper avec elle de l’oeuvre immenfe de fa régéné
ration. L ’élite dont elle s’eft environnée, a fondé la profondeur de
l’abyme, & nous attendons de íes pénibles travaux, 8c de votre augufte
bienfaifance, une nouvelle exiftence.
Pour parvenir à ce but heureux, eft-ce un Lambert, inepte & injufte 3
qui peut y co-opérer ? feroit-ce un Miniftre fans idées, fans cara&ere,
qui pourroit éclairer & diriger Votre Majefté, au milieu des accidens
douloureux, irréparables de cet enfantement politique ? a-t-il feulement
l ’ in t e llig e n c e propre à faifxr l’enfemble de ce vafte plan, chef-d’œuvre
de la raifon humaine, dont votre fagelïe a déjà fanâionné quelques-unes
des lignes.
Vous l’avez v u , Sire, dans mon expofé des onze mois de fon premier
miniftere ; toujours fignant, & ne fcachant point ce qu’il fignoit ; avouer,
dél'avouer, contredire, aller &C revenir fans ceffe, au gré du caprice
ou des paillons , tantôt du Sr. la BouUaye, tantôt de la Dame de
Villeneuve, ou des bureaux, ces royautés fubalternes, d’ou émanent
depuis ii long-temps ces décifions atenttatoires aux droits des citoyens
& à la juftice qu’ils invoquent.
Votre Majefté a vu le fous-Miniftre Laroche, fans autre expérience
des affaires que celle acquife à ouvrir & fceller les paquets du bureau
des dépêches, confommer avec les Adminiftrateurs de la loterie une
opération défaftreufe pour la caiiTe publique , & ruiner cinquante peres
de fam ille, dont ils livroient la dépouille à leurs créatures.
Vous avez lu enfuite l’expreffion patétique des regrets du Sr. Lambert
dans fa lettre & l'on billet des 7 & n feptembre 178 8 , après
m’avoir ravi mon état &c mon pain, fans le fçavoir ; lorfque fes engagemens perfonncls, dont lui-même circonftancie l’origine & les détails»
l’obligeoient à me donner une place diftinguée; fon confeil officieux,
de m’adreffer à M. Necker, afin d’obtenir de lui la reftitution de mon
emploi; fa promeffe d’en apuyer la réclamation par fon témoignage
�c *3 ) ;
fur mes talens & mon'perfonnel; cette intime {ftrfuafion de l’empreffement de M. Necker à entrer dans fes vues, dès qu’il les lui aura
expofées, toutes ces chofes n’ont pas échappé à l’attention de Votre
Majefté.
Eh ! cependant, cédant à une honte puérile, à un orgeuil puiillanime,
ce papelard, loin d’écouter les remords de fa confcience qui le preffent
fur la réparation de ion attentat, tremblant de voir fon opération appro
fondie , fon ineptie & fon injuitice mifes au grand jour, il garde un
filence homicide, que, dis-je, pour montrer davantage la vérité de cette
maxime , que quelque dificile qu’il foit de ne pas fe tromper, il e'ft
bien plus difficile encore d’avouer qu’on s’eft trompé ; il effaie d’enve
lopper de nuages fon erreur, afin qu’elle ne puiffe être pénétrée, &
¿échapper ainfi à la févérité d’un examen qui en provoqueroit la
déformation.
D ’un côté, pour étouffer les accens plaintifs da ma v o ix , le Sr:
de la Michodiere, auquel le» fondions d’Infpetteur-général impofe l’obli
gation de fcruter cette opération, trahit fes devoirs, fori honneur & les
droits du malheureux, pour fauver, s’il eft poifible , le Sr. Lambert des
reproches & des mépris du public ( a ).
De l’autre, la bureaucratie contentieufe du Confeil, fabrique un Arrêt
monftrueux, & afin de prévenir le changement de Tribunal, propofé par
M. Necker (pour m’arracher à ce régime), il me déclare, à l’improviite,
non-recevable, fans avoir entendu mon Défenfeur , ni avoir vu hies
P'cces, & fur une feule requête informe &c clandeftine, fournie furtive
ment par mes adverfaires, fans s’être conllitués.
Mais, pour établir l’ineptie du Sr. Lambert, il ne faut pas fe mettre
beaucoup en frais, elle eft notoire, & chacun fçait que ce fut fon titre
de recommandation auprès de l’Archevêque, principal miniftre, qui ne
demandoit qu’un automate docile à fes volontés, pour leur donner , par
^ fignature, un caraftere de forme.
C ’eft peut-être aufTi cette faculté paffive, fi commode à la rapidité des
°pérations d’un Adminiftrateur en chef, qui a déterminé M. Necker à
fouffrir la rentrée de cet incapable , dans un miftiftere pour lequel il a’a
( a ) V o y e z la Lettre du Sr. la M ichodiere, dans mon fécond placet à M.Neckei\
�( 24 )
aucune aptitude , dans lequel il eft l’effroi &c le fcandale de la fociété,
& qu’il ne tiendrait pas un moment, fi M. Necker fe retiroit ( a ).
Je pourrois citer une multitude de faits, honteux pour ce Miniftre,
qui cara&érifent les injuftices auxquelles l’entraîne fon ineptie ; mais
fans rappeller les plaintes générales des citoyens, & fortir du cercle des
miennes , dans lesquelles je me fuis renfermé, ce ne fera pas multiplier
les fcènes' épifodiques, ni facrifier l’objet principal aux acceffoires, que
de les étayer de celle d’un Magiftrat, dont la déclaration eft relative à
la publicité de la mienne. Voici fa lettre.
P a r is , 2/ m ai 17 8 9 .
M a d a m e la Ducheflfe d e ..........a bien voulu , M onficur, me prêter les deux exem
plaires des placets à M . N ecker , que vous lui avez remis. Je les ai lu avec l’attention
& l’intérêt qu’infpire un homme honnête & malheureux. Rien n’eft mieux fondé fur-tout
que les plaintes que vous portez contre M . L am b ert, & fa malheureufe facilité à fe
laitier prévenir , 8c à figner aveuglément tout ce que fes partifans lui préfentent. A u x
exemples que vous citez, & à ceux que vous vous propofez de citer encore dans le
nouveau mémoire que vous annoncez, vous pouviez en ajouter un, qui ne feroit pas
moins frappant que tous les autres. V o ici le fait :
U n nommé C a u v y , charpentier de Sette en Languedoc, fous les prétextes les plus
friv o le s, forme au Parlement de Toulouze
une demande manifeftement injufte &
révoltante , contre la Compagnie des intérefles aux Salins de S e tte , dont je fuis
m em bre,
ainfi que plufieurs autres perfonnes du plus
haut rang, 6c parvient à
furprendre un Arrêt favorable de cette Cour.
L a Compagnie fe pourvoit an Confeil en caflation de cet A rr ê t, qui blefloit toutes
les réglés de la Jurifprudeuce & d elà Juftice : & après la plus ample inftru&ion, elle
obtient un Arrêt du C o n feil, qui caiTe celui du Parlement de T o u lo u fe, & compenfe
les dépens.
Cet Arrêt contradiiloirement rendu, revêtu de toutes les formes légales , eft figr.ifié
à C a u v y , qui y acquiefce dans le f a it , en fe faifant rembourfer à T ouloufe, le montant
des droits qu’il avoit payé pour l’expédition de l’Arrêt de cette Cour.
L a Compagnie regardoit donc cette tracafferie comme abfolument terminée, & n y
penfoit plus.
Cependant C a u v y étayé par quelques perfonnes avec lefquelles il s’étoit engagé de
partager le produit des condamnations qu’il pourroit obtenir contre la Compagnie des
S alin s, s’avife , après quatre mois d’ina& ion, de préfenter une requête à M . Lambert >
( a ) Je ne veux pas
rapporter
l’anecdote de la fille naturelle du Chevalier
de
M éziére, dopt Clam ecy & les environs ont été les témoins.
nom^é
�( 25 )
nommé depuis peu Contrôleur-général ; & fur cette requête, ce Miniftre , fans avoir
égard à un Arrêt contradiftoirement rendu , revêtu de toutes les formes légales, acquiefeé
par les Parties, &
après tous les délais expirés, fait rendre un nouvel A rr ê t, qui
ordonne que la requête de C a u v y fera communiquée aux Conceilionnaires des Salins
de Sette , & les condamne provifoirem ent, folidairement e t p a r CORPS , à payer aud.
C au vy une fomme de 6000 !.
Il feroit difficile , je crois , M onfieur , de trouver un exemple plus révoltant de l’abus
de l’autorité & du pouvoir miniftériel. En effet, condam ner, fur une fimple requête
non communiquée, une Compagnie , compofée en grande partie des premieres familles
du R o yau m e, à p a y e r > 6* par corps, une fomme. de 6000 liv re s, elle qui dormoit
tranquille, à l’abri d’un A rrêt contradi&oire & de la chofe ju gée, c’eft violer tout-k-lafois, les loix de la Juftice , de la propriété, de la sûreté & de la liberté des citoyen s;
c’eft un a&e fi tyrannique & fi defpotiqu*, qu’un ¿ D e v d’Alger ou un S u l t a n
Conftantinople n’oferoit l’entreprendre.
de
Si vous v o u le z , Monfieur , enrichir la colle&ion de vos plaintes, contre M . Lambert,'
ce fait inique, je vous laiffe le maître. Je vous donne cd fait pour exaél & certain.
Les preuves en font dépofées chez M . Guillaume , A vocat au C o n fe il, chargé de défendre
ta Compagnie des Salin s, & nous ne doutons pas que ce ne foit à M . Lam beit à qui
nous devions le choix qui a été fait de M . G
r e g o ir e d e
R
um are
( a ) , pour R ap
porteur de cette inique & indécente inftance.
R ecevez, M onfieur, l’affurance de la parfaite confidération avec laquelle j’ai l’honneur, & c .
Signé, d ’ A c q u e r i a , Préfident, Tréforier-général de France.
S’il manque quelque chofe à la conviûion que porte avec lui cet écrit,
*1fera facile ;\ Maître Guillaume, l’un des honorables membres de l’augufte
AlTemblcé, d’y fuppléer, puifqu’il eft dépofitaire des preuves. Mais certes !
M. ne doit pas être étonnée, fi fes peuples, fuccombant fous l’opprefïîon
de femblables Miniitres, mis aux derniers abois par des abus révoltans
de fon autorité, recourent avec un empreffement tumultueux, & pour
3lnfi dire défordonne à fon cœur, pour en obtenir un fort & des Miniitres
Phis conformes à l’anxiété de leur fituation, & aux fentimens paternels
fon Roi.
Le Sr. Lambert n’eft pas l’homme qui convient à V. M. pour feconder
les vues bienfaifantes qu’elle a fur fon peuple. Il a trop peu de lumieres
^ de fentiment pour ce qui eft jufte. Si des génies fublimes éclairent votre
Trône, &r approchent de la perfeftion dans les moyens d’une falutaire
regéncration, il dérangera dans l’exécution, où il altérera, par/a mal( a) Pour celui-là, oui, car c’eft fon ame damnée.
D
�( 2 ,6 )
adreffe, & fa dépravation, l’économie & la fageffe de leurs deffeins.
Ce ne font pas les bayonettes qui font ou affurent les révolutions
utiles; c’eft le changement de régime qui ramene l’empire de la juftice,
de la probité & des mœurs, fans lequel il n’eft point de révolution
folide & heureufe.
Depuis fon rappel ( & c’eft ce qui eft à remarquer ) , le Sr. Lambert
ne s’ eft pas montré détaché du fyftême d’injuftice dont j’ai été la viftime,
& qui, pendant fon premier miniftere, l’avoit rendu l’objet de la pitié
& du mépris public. A peine lui ai-je remis fous les yeux fes tors , fes
engagemens &c fa lettre du 7 feptembre 17 8 8 , dont fon rappel lui conféroit
le pouvoir de remplir le vœ u; que loin d’y fatisfaire, en me reftituant
ma place, il intrigue lâchement auprès des Repréfentans de la commune,
dont il connoît l’incompétence, pour leur furprendre l’afte de violence
& de defpotifme , qu’il n’ofe fe permettre lui-même dans les circonftances.
Sous le point de vue de l’ineptie &: de l’injuftice, fi le Sr. Lambert
mérite d’être écarté du miniftere, il provoque fon expulfion , fur-tout
par fa mal-honnêteté & par fon penchant à opprimer.
Malgré les preftiges de l’amour propre, il n’eft permis à aucun homme
d’ignorer à peu près les bornes de fa fphere , & c’eft ;Wui, qui touche
à la fin de fa carriere , qu’il eft fur-tout moins pardonnable de fe méconnoître. Les différentes circonftances où s’eft trouvé le Sr. Lambert, les
affaires dans lefquelles il a échoué, l’appréciation de fes proches &C de
fes amis, fa propre expérience, tout enfin a du l’éclairer fur ce qu’il vaut,
& lui apprendre à fe juger lui-même.
O r, le Sr. Lambert, au printemps même de fa vie, n’a pas brillé dans
la Magiftrature, il y a toujours végété, fans fe faire remarquer par aucun
atte utile ou important. Né au-deffous du médiocre dans l’ordre des talens,
l’argent feul le fit monter au Palais, & lui ouvrit la cairiere des dignités.
Pour fe donner un peu de confiftance, il prit le m a f q u e d’un parti auftere,
dont les vertus font impofantes fans être folidaires ; l’opinion trompée par
cette repréfentation menfongere, s’égara un inilant, mais bientôt elle fe
vangea de fon erreur, quand les œuvres lui firent juger de l’ouvrier.
Si le Sr. Lambert, pour mieux connoître fes forces intelleûuelles, eût
confulté fa nombreufe famille, qui ne fait aucun cas de lui ; s’il eût coti'
fidéré comment, dans fon adminiftration domeftique, il a été peu habÜe
mené par les agens de fa confiance } il n’eût pas eu la témérité de
�( *7 )
briguer deux fois un miniftere, dans lequel ion ineptie & fon injuftice
ont donné la mort, à une multitude de peres de familles, &c expofent tous
les jours le fort de plufieurs millions de citoyens. Il manque donc aux
règles de la probité & de l’honnêteté, en ofant prendre fur fes foibles
épaules, la charge qui feroit plier un atlas; & s’il peut s’exeufer, cen’eil
qu’aux dépens de fon efprit ou de fon cœur.
Mais ce qui ajoute à ces preuves de mal-honnêteté, c’efl l’avidité du
Sr. Lambert, qui coûte plus à l’État & à la Nation, qu’un Adminiftrateur
intelligent &c capable. Logement, penfion, appointement, places, grâces;
il envahit tout pour lui, tes fien s(a) &c fes nombreux collatéranx, &
nous fommes au fein de la détrefle la plus cruelle. Ah ! les frelons
çefferont-ils enfin de dévorer le patrimoine des laborieufes abeilles , &
qu’il me foit permis d’être ici l’écho du Platon de la France, dans fon
difeours, fur la fanûion royale: les emplois font f i fcandaleufement remplis ,
les grâces font f i indignement proflituècs, que fi les effets de la révolution ne
deftéchent principalement la fource de cet abus, le citoyen honnête, utile,
mais timide, eft pour jamais découragé par les fuccès exclufifs du fot
intrigant &c ambitieux.
Ma premiere proportion remplie, il me refte à fupplier Votre Majeilé
de me rendre la juftice que je réclame depuis fi long-temps, & qu’il eit
de l’intérêt du Sr. Lambert de ne point traverfer.
Si les forces militaires défendent les Trônes contre l’invafion des
ennemis du dehors , ft l’habileté des Capitaines maîtrife le fort des armes,
c’eftla Juftice, Sire, qui les foutient contre les chocs tumultueux de la
difeorde au dedans, & de la fidélité des Magiftrats à en fuivre les prin
cipes , dépend la fplendeur des Empires ; fans elle, bientôt les Lois font
violées, les droits confondus, la sûreté eil anéantie, l’arbitraire perfide
les remplace, 8c l’cgoïfme deilrufteur étouffe la vertu dans fon germe,
—
_________________________ ________________________________________________________________________
___________________
( a ) E t quand il n’y a pas de places, il en créé. Tém oin celle pour le Sr. Guignace
de la Bretonniere, fon parent, réfugié dans le T em p le, qu’il avoil voulu faire enfermer,
& au lieu de la place à Bicêtre , qu’il lui deftinoit, il en fait une aux Ferm es, de
5000 livres, pour le récompenfer de fon inconduite , pendant qu’il dépouille un
J'omtne Honnête & utile
de la fienne. C e n’eft pas la feule qu’il ait créé aufli peu
a Propos, & on fçait tout le trigaudage pratiqué pour faire Guignace de L angé, fon
teau-frere} Direfteur des loteries à Lille,
�(
5
en rompant les liens qui unifient les diverfes parties de la fociété.
Telle eft, malheureufement, la fituation où nous ont amené vos Magiftrats, après deuxfiécles de tyrannie, en fubftituant au réglés immuables
de l’équité, les formes incertaines & capricieufes des fins de non-recevoir ;
formes non moins commodes à leur afioupifiement & à leur dépravation ,
qu’aux fophifmes & à la voracité des cohortes affamées, que l’appas du
butin appelle à guerroyer fous les fanglans drapeaux de la chicane.
J ’ai vu l’ honoraire de mes travaux, le gage de mes créanciers, les
débris de ma fortune , mon aliment quotidien enfin, prêts à être en
gloutis dans ces gouffres, par un Arrêt du Comité contentieux de votre
Confeil, fila précipitation à me facrifier, ne m’avoit elle-même , quoique
très-involontairement, ménagé une planche pour me fauver du nauffrage.
Averti’ par le danger encouru, inftruit de la ruine de mes concitoyens,
qui fe font brifés contre ces éceuils dévorans , j’ai recouru à la juftice
perfonnelle de Votre Majefté , qui m’offroit un afyle , & j’ai eu l’hon
neur de lui préfentér , le mois de juin dernier, un mémoire que j ’ai
répandu dans l’AiTemblée nationale.
Si Votre Majefté daigne s’en faire rendre compte par quelques-uns des
honorables Membres, elle fera convaincue, i°. que me retenir le paye
ment des douze années de travail que j’ai confacrées à fes bureaux, &
dont je n’ai reçu que le tiers des appointemens , c’eft me voler les deux
autres tiers , &c les voler à mes créanciers ; 20. que la reftitution de
mon emploi, ou la continuation provifoire de mes appointemens, ne
peuvent m’être refufée, en totalité ou en partie , pour fubfifter fans
l’injuitice la plus évidente & la plus cruelle.
En effet, S ire, j’ai démontré la légitimité de ma prétention à être
payé des deux tiers de mes appointemens retenus par l’intrigue des Srs.
Mefnard & d’Arlincourt. Mes mémoires ont obtenu le fuffrage unanime
de votre C our, de votre Capitale, de vos Provinces , & jufqu’à celui
du pays étranger, 011 ils font parvenus. Quatre de vos Miniitres, dont
deux font encore en place , après avoir reconnu mes droits , lés ont
protégé, & la bureaucratie de votre Confeil, malgré fa partialité &C
formes obliques l’exprimer, n’a pas ofé m’en débouter.
Je fuis donc créancier de PÉtat pour ces deux tiers d’appointemens
non foldcs, & en cette qualité, j ’invoque pour moi & mes créanciers,
l’honneur ôc la loyauté fran çoife, fous la fauve garde defquels les
2
8
�( *9 )
fenfibles Repréfcntans d’une Nation toute dévouée à l’honneur , ont mis
Tes créanciers.
Serai-je le feul excepté de cette utile garantie, qui fait la gloire de
nia patrie, & honore les dignes interprétés de fes généreux fentimens ?
Eh, pourquoi !
Eft-ce que j ’aurois à craindre le fuccès de quelques fins de non-recevoir ?
Mais ce génie créateur, Député de la Provence , n’a-t-il pas rendu
l’opinion générale , lorfqu’il a exprimé la fienne particulière ? J ’ai méprijé
toute ma vie , » a-t-il dit, » les fins de non-recevoir, 6- je ne m'apprivoiserai
pas avec ces formes de Palais.
D ’abord, cette objedionne fieroit pas à la Majefté royale & nationale,
&c j’en ai prévenu la tracaiferie , en donnant la preuve par mes mémoires,
qu’il n’en exiftoit pas. Enfuite, croit-on que j’aurois été aflez peu attentif
pour leur laifler prendre naiffance, 6c permettre que des Adminiftrateurs
de loterie m’euffent enveloppé dans des filets, dont ils ne connoiffent
pas feulement la tiiTure ?
RepouiTé, par la vénalité &c une indigence honorable, du fanduaire de
la Juftice, qui avoit été mon berceau, & où j’avois fait mes premieres
armes, comment aurois-je négligé de me garantir du labyrinthe de fes
formes , en ufant du peu de lumieres que j ’avois acquis avant de tomber
dans lapouiliere des comptoirs de la loterie (a).
Avec des Adminiftrateurs tirés eu hafard de boutiques, d’ateliers ou
d’antichambres, fans éducation ni culture, fans connoiffances théoriques
ou pratiques du droit ou des formes, encroûtés de l’ignorance la plus
crafle en finance même, aurois-je méconnu ma fupériorité fur ces for
bans , ôc négligé de prendre mes avantages ? non ! une inadvertance aufli
létargique ne peut fe préfumer , lorfqu’il m’étoit il facile & ii intéreflant
d’y veiller ! J ’ai eu ce foin : mes mémoires en donnent les preuves , je
les répéterai pas.
( a ) Compte-t-on pour rien l’humiliation d’avoir appartenu à la loterie ; mêlé parmi
Ce
'1 y a de plus méprifable dans la fociété, &
^Ue
guérifon,
mémoire.
de C lugny
m’auroit propofé
croit-on que j’y ferois en tré, ni
d’y entrer, fi ce n’avoit été l’efpoir de là
l’aflurance d’une place diitinguée dans la finance. V o y e z mon premier
�( 3° )
Qui m’écartera donc du port, ouvert par l’humanité des archite&es
politiques de la conftitution, aux créanciers de l’État ? fera-ce la nature
de ma créance ? l’impuiflance d’y fatisfaire ? ou quelque reproche encourru
par le créancier, occafionera-t-il le rejet de la créance ?
La nature de ma créance eft telle, que fur les débris des privilèges,
elle doit fe foutenir avec privilege. C ’eft le prix de mon temps, de mes
peines & de mes fervices , & ce n’eft point dégrader l’employé des bureaux
du R o i, d’en alîimiler l’appointement au falaire de l’ouvrier. Or , lefalaire
de l’ouvrier eft privilégié ; il ne fouffre ni retard pour le payement, ni
diminution vexatoire dans le payement.
L ’impuifTance d’y fatisfaire ne fera pas alléguée par ceux qui connoiflent
les reffources abondantes de l’Etat, & pour lefquels le mot banqueroute eft
infâme. Sans avoir comparé la recette à la dépenfe ( qui devroient être
publiques), on eft afluré de les mettre au niveau, & de foulager le
peuple avec les richeffes immenfes que le clergé facrifie, que les nobles
& les riches offrent à l’en vi, & par l’économie exercée fur la prodigalité
des penfions & l’énormité des traitemens.
Quand l’impuiflance feroit auiïi réelle qu’elle eft imaginaire, où feroit
l’inconvénient d’obliger les Srs. Mefnard & d’Arlincourt ( a ) , àmeiatis-
( a ) Ces deux fots , fans talens ni m érite, ont fait la plus brillante fortune. M e(nard ,
temont.
commis à l’intendance de Rouflillon , fous M . B ertin , avoit 800 1. d’appoin-
11 m angeoit,
à 8 f. par repas, avec Fribourg. Il fuivit M . Bertin à P a ris, qui
le fit fon Secrétaire, pendant que cet Intendant étoit Lieutenant de Police. D e -là M .
B ertin , nommé Contrôleur-général, le nomma premier commis. C ’eft à ce pérou où
il a puifé la fortune qui l’a conduit à la C o u r, à l’intendance de la p ofte, à celle de
la loterie, à la place d’Adminiftrateur , &
avec laquelle il s’eft procuré équipages,
nombreux domeftiques, arm oiries, bonne table, voyages., plaifirs, T e rre s , châteaux,
Seigneuries, tout enfin , excepté l’eftime publique. On l’a vu jouer un rolle dans l’aftàire
du Comte du Loup des G r è s , par un plat é crit, 011 ce poliflon prenoit infolemmei1*’
le titre de Chevalier, fans s’expliquer fi c’ctoit Chevalier françois ou chevalier grinpant.
D A rlin cou rt, fils d'un employé de la ferme à D o u len s, a fucceflivement prit trois
noms , pendant fon orageufe jeuneflfe, après laquelle, pour d’agréables raifons fans doute,
le pauvre T lm fy , Ferm ier-général, lui donna fa n iè c e , fa place & fa fortune. Son
avarice &
fa dureté auroient conduit à la G rève fon g ndre Baudouin de Quem adeue,
fi on punifloit les gens riches. D ’A rlincourt, quoique b ête, ignorant & ne fçaehantql,e
figner fon n o m , n’en a pas moins pendant douze ans mené la loterie & les M iniflres
�Ç 3' )
faire de leurs propres deniers ? n’y suroit-il pas au contraire de la juftice
à les y contraindre? ce font eux qui ont commis la prévarication. Mais
au moins pourroit-on prendre mon payement fur les 630000 1. dont le
Sr. d’Arlincourt a profité par une erreur dans fes comptes, & elle ne
feroit pas la feule recouvrer , fi ces comptes, qui n’éprouvoient d’autre
cenfure que celle du Sr. Mefnard, fon complice, étoient livrés à la revifion
de ceux qui les connoiiïent & s’y connoiiTent.
D ’ailleurs, le retranchement de la penfion de 25000 livres, accordées
contre toute bienféance au Sr. d’Arlincourt, celle du Sr. Sémonin 6c une
multitude d’autres, prodiguees fans modération ni pudeur aux employés
de cette partie , laiflent des fonds pour me iatisfaire ; & il en manqueroit,
qu’il faudroit plutôt les prendre encore lur les 140000 1. diftribuées
annuellement à titre de bienfaiiance , à des étrangers , qui en font indignes,
ou par la fuppofition de leur indigence fimulée, ou par la dépravation
qui les y fait participer. Les dettes paffent avant les aftes de bienfaifance,
& il n’y a pas de mérite à être généreux du patrimoine des créanciers.
Ce n’eft donc pas l’impuiflance de fatisfaire à ma créance qui s’oppofera
à mon payement ? l’Etat en paie &c en paiera de bien moins facrce !
Sera-ce donc quelque reproche mérité par le créancier, qui occaiionera
le rejet de la créance ?
D ’abord, ii le titre par lui-même n’eft infe&é d’aucun reproche, il a
toute fa force, & peu importe que le porteur auquel il en eft dû le mon
tant qu’il exige, foit répréhenfible ou irréprochable. Il ne s’agit pas de fon
m oral, c’eft de fa créance dont il faut s’occuper.
Mais admettons des reproches contre m oi, porteur du titre : ces repro
ches feront-ils valides contre mes créanciers, pour les fruftrer du prix d’une
créance hypothéquée aux fommes qu’il m’ont prêtées pour me faire vivre,
lorfque j’attendois mon payement ? Ce fyftême , qui ne feroit qu’abfurde
Sf révoltant dans les
»»»-Tribunaux de la fifcalité , que fera-t-il devant
Votre Majefté & l’augitfte Aiïemblée à laquelle j’en foumets l’examen?
a fon gré ) pjj-cg que M efnard, de moitié avec lu i, faifoit paffer tout ce que d’Arliricourt
Pr°p o fo it, fans égard à aucunes obfervations de fes collègues. Eh ! c’eft pour enrichir
Pareils imbécilles qu’on foule les peuples; que l’on vexe les honnêtes gens ! en v é rité ,
cek finira peut-être d’une façon ou d’autre. 11 faut l’efpérer,
�32- )
Ces reproches ne pourroient tomber fur moi que comme commis ou
comme citoyen.
Comme commis, j’ai rapporté clans mon mémoire,à confulter tous les
titres d’éloges que j’ai reçu & mérité conftamment depuis mon entrée
dans les bureaux du R o i, jufqu a la furprife qui m’en a exclu. Il eft curieux
de voir comment le Sr. de la Michodiei'e, en voulant imprudemment y
toucher, s’eft perdu lui-même d’honneur & de réputation. Le fait & la
preuve en exiftent dans mon deuxieme placet à M, Neclcer. C ’eft fon
propre écrit qui le flétrit, fans sucun effort de ma part, pour lui arracher
le manteau d’homme de bien, fous lequel ce Magiftrat gangrené cachoit
la honte des malverfations multipliées pendant fa longue adminiftration.
Mais encore , fi on me trouvoit difpofé à pafler en quelque forte con
damnation fur ce qu’on oferoit dire contre m oi, comme commis, qu’on
ne fe flatte pas de la même indifférence fur les attaques faites au citoyen
en ma perfonne. Les qualités qui le diftinguent, furent le feul patrimoine
que me laifla mon pere, après cinquante ans de fervices dans la robe &
l’épée. Il avoit fait valoir avec foin ce domaine, & il produifit beaucoup,
pour fa confidération perfonnelle & fa tranquillité intérieure. Ambitieux
comme lui de cette efpece de fortune, qui fait rarement des jaloux ou des
rivaux , je- n’ai point négligé le fond qui la procure ; &c fans avoir ni les
moyens de mon inftituteur, ni le mérite des facrifices de mon modèle,
j’ai peut-être été plus heureux dans mes fuccès, puifque jufqu’à mes adverfaires , tous ceux qui me connoiiTent, ont rendu témoignage à mes efforts.
Ecoutez, s'il vous plait , le Sr. Campan dans fa lettre du ¡y feptembre
ty8 S , à M. le Préfident de Rofambo , après lui avoir- rendu tous les
renfeignemens avantageux qu’il tenoit du Comité général de fes confreres ;
il termine ainfi : E nfin, Monfieur, le Sr. Mori^ot efi Avocat, & dans fes
momens de loifiir il confacre généreufement fes lumieres dans cette partie , a la
veuve & l'orphelin qui les réclament.
Si d’après l’aveu de mes ennemis j’ai été un commis utile, un citoyen
gcncreux, il s’enfuit qu’aucun reproche mérité par Ie créancier de l’Etat >
n’occaiionera le rejet de fa créance; au contraire, plus le citoyen s’eft
emprefle de payer fa dette à la patrie, plus la reconnoiffance de la veu ve
& de l’orphelin follicitent la patrie d’être exatte à payer les appointemens
du commis.
(
Eh ! comment la patrie balanceroit-ellc ? elle qui fe montre li pei1 ar'
dente
�( 33 )
dente dans fa détrefle à reprendre fes tréfors aux vampires de la finance ,
qui fe les font appropriés. Eft-ce que ces gains illicites, qui ont trans
porté la fortune publique à ces Adminiftrateurs gorgés d’or & d’argent,
fous des Miniftres infurveillans ou complices , font des propriétés que les
Lois protègent ? Le droit de la Nation fur les richeifes détournées de fon
fifc , eft imprefcriptible. Elle peut toujours les arracher des mains infidelles
qui les ont fouftraites , parce que la poifeiïïon d’objets volés ne peut jamais
devenir un titre de propriété.
O r , fi la patrie eit indulgente pour fes déprédateurs , fera-t-elle injufte
& inhumaine vis-à-vis des citoyens qui l’ont fcrvie fidellement ?
Je l’ai fervie douze années fans être payé.
Elle me voleroit, elle voleroit mes créanciers, fi elle me retenoit les
appointemens que je n’ai pas perçus , par la prévarication des Srs. Mefnard
8c d’Arlincourr, dont l’opulence fcandaleufe , fous les yeux de ceux qui
manquent de pain, eft une infulte à la raifon & à la mifere publique.
Mais fi Votre Majefté n’ordonne point enfin ce payement, fi fur le
rapport de l’augufte Ailemblée elle ne ie décide point ; fi abfolument elle
veut la décifion d’un Tribunal fur ma répétition ; je la fuppüe de comniettre la Jurifdi£Hon des Juge-Confuls de fa Capitale.
D ’après l’offre contenue dans la lettre de M. Necker, du 6 février, &
qu’il m’a confirmée à fon Audience du 1 3 o&obre dernier ; c’eft à moi de
choifir & défigner le Tribunal qui doit me juger. La récufation, d’ailleurs,
que j ’ai propofée à Votre Majefté, contre les bureaux dtt Confeil, la
peinture que je lui ai faite de la dépravation de fes autres Tribunaux ( a ) ,
ne permettent pas d’en nommer aucun d’eux, ni d’y avoir confiance, &
malgré le peu de vergogne des Magiftrats, ils fe refuferoienr fans doute
à connoître de cette conteftation, & à devenir mes Juges. J ’avoue môme
que jamais je ne comparoîtrois devant eux, & qu’alors, avec les apparences
de vouloir rendre juftice, ce ieroit réellement la refufer que de m’y
adreffer, quand on eft certain que je n’y comparoîtrai pas.
( a) L ’on fe rappelle l’infame prévarication des Srs. Bachois & Brun ville, dont j’ai
donne les détails dans mon deuxieme placet à M . N ecker; ces deux Magiftrats font
er>core en place, malgré les gémiiïçmens univerfels d elafo cicté. Q u ’a t t e n d - o n pour les
chafier & les punir?
E
�( 3 4
J ’ajouterai que la reftitution de mon emploi, ou la continuation pro
)
visoire de mes apointemens, ne peut m’être déniée, puifqu’il y va de
mon exiftence, 6c qu’il eft de l’intérêt du Sr. Lambert d’y concourir
au lieu de s’y opofer.
Cette fécondé queftion eft étrangère à la première, elles n’ont rien
de commun entr’elles. Ce n’eft point un incident détaché de la demande
en payement de mes appointemens retenus , c’eft une réclamation à part,
foumife
des obfervations & à des principes nouveaux ; le Miuiftre
des finances en eft l’arbitre né. Il ne me feroit rien adjugé fur la première,
que je n’en ferois pas moins fondé à prétendre au fuccès de la fécondé,
& le gain de celle-ci ne liquideroit pas les droits de l’autre.
Dans les détails de mon expofé, V. M. a vu , i° . tout cfe qui eft relatif
à la furprife qui m’a ravi mon emploi; i ° . mes démarches Scies mouvemens que je me fuis donnés pour éclxirer les manœuvres de cette
furprife; 30. la lettre & le billet du Sr. Lambert qui motivent fes
regrets, 2c les affurances de fon témoignage auprès de fon fuccefleur, pour
parvenir à réparer laperte qu'il ria puprévoir que j'éprouverois.
La foibleffe du Sr. Lambert, fon héfitation à avouer fon erreur & à
donner fon témoignage à M. N ecker, fa nonchalance à preffer mon
rétabliffement, n’auront pas échappé à Votre Majefté; & ce qu’elle
aura pu remarquer avec étonnement, c’eft l’inaftion du Sr. Lambert,
depuis fa rentrée dans le miniftere, fon refus formel, quoique tacite de
me réintégrer, & fes intrigues pour me perdre.
Néanmoins , la reftitution de mon emploi eft indifpenfable ; la
Juftice la demande, l’humanité la follicite , l’intérêt même du Sr.
Lambert l’exige.
Par fa lettre du 7 Septembre 178 8 , le Sr. Lambert a avoué qu’il avoit
été induit en erreur. S’il eut été encore . Contrôleur-général, il en eut
réparé le dommage, &. je ne puis en douter, d’après l’expreifion de fes
regrets, & fa promefte d’appuyer ma réclamation , que quatre autres
Miniftres appuyoient déjà.
Il eft à préfumer que M. Necker y auroit acquiefcé, fans le Sr. de
l’Effard, fans l’intrigue des bureaux & la pufillanimité du Sr. Lambert.
Cependant, la reftitution qui a parujufte, dans fon principe, au Sr.
Lambert n’a pas perdu de fa confidération par le laps du tem ps, au
�(30
contraire , le rappel de ce Mi'ûftre s’étant opéré avant la déciiion que
j ’attendois, il devoit en effectuer auflitôt la reftitution.
Mon déplacement étant l’ouvrage d une fiirprife avouée & reconnue ,
mon rétabliiïcmcnt devenoit un ade ind ipt niable &c néceflV.ire.
Quelque libre que l'oit la nomination aux emplois exercée par les
Minières , elle eil néanmoins ftibordonnée aux réglés de l’équité , de
la raifon & à l’inrérêt de la chofe.
Un lu jet pourvu d’une commiffion ne peut en être dépouillé fans for
faiture ou incapacité. Admettre des principes ou un ufage contraire,
c’eft bleffer l’équité, introduire un brigandage dans l’adminiftration, &C
lin arbitraire décourageant pour le fervice.
J ’avois rempli mon emploi avec diftin&ion. La férié des témoignages
rapportés dans mon mémoire à confulter , prouve que je n’avois à
craindre aucun reproche de forfaiture , encore moins d’incapacité ,
puifqu’il étoit queftion de me confier une place plus importante.
Douze années d’exercice répondoient de mon expérience , & m’afFermiffoient dans ma poffeiïion ; ainiï, loin d’appréhender de voir la fille
de Laroche, porter en dot au Sr. Billecoq mon emploi, j ’avois tout lieu
d’elpérer un avancement mérité par mes fervices.
Or , il faut convenir que ce feroit fe jouer barbarement d’un citoyen,
f i , quand il a rempli avec exactitude le porte qui lui étoit confié , il
pouvoit perdre ce porte fans avoir démérité. Ce fyftême abfuçde révoltéroit la Juftice, & répugneroit à l’humanité , qui follicite au moins
la continuation provifoire de mes appointemens devenus néceflaires
Pour ma lübfiftance.
Il faut que je v iv e , & tant que le ciel prolongera mes jours, j ’ai
droit, en travaillant , à être logé , nourri , vêtu.
11 femble au contraire que le Sr. Lambert foit d’accord avec mes
adverfaires pour me faire périr : pendant que d’un côté je pourfuis en
Juftice le payement de mes appointemens, dont la chicane éternil’e la
c°nteftation ; de l’autre, le Sr. Lambert retient la reftitution de mon
emploi , pour m’ôter les moyens de me défendre & de vivre.
En effet , depuis i y mois , fans autre reffource que la générofité de
cluelques citoyens à me prêter des fonds , j ’ai épuifé ces fécours ; j’ai
augmenté leurs titres de créance fur moi. Placé entre le befoin Si le
�( 3« )
crime , je végété dans le défefpoir, n’ayant à choiiir qu’entre le v o l , la
mendicité ou le fuicide. Sans fortune , fans patrimoine, à mon âge , ÔC
avec une fanté délabree par le travail ÔC les chagrins , puis-je embraffer un nouvel état ( a ) , ou tenter de nouvelles entreprifes ? eil-ce
après avoir pris le travail d’un homme dans fajeuneffe, qu’il fera permis
de le rejeter de l’arène où il ne fe montre pas encore fans vigueur?
Au moins , fi revenant fur mes pas, je pouvois reprendre mon temps,
mes peines, mes fervices, ma fanté, je fiiirois loin d’une contrée (b) ,
où la bafleile , la crapule , les offices honteux, décident feuls du bonheur
de fes Habitans, où la probité abandonnée ne trouve ni acceuil ni
foutien. Ce n’eft: pas que par-tout où il y a des hommes, 8c des Mi
nières fur-tout, il n’y ait des pallions à combattre , des injuftires à
dévorer ; mais où eft l’Empire fur la terre, où avec fon travail &c de
l’honnêteté, un citoyen ne puiffe être aflùré de fon état ôc de fon
pain ?
» On vous a donné , me dit le Sr. Lambert , une penfion de 900 I.
Certes ! 900 1. de penfion fur une place de 6000 livres, font-elles
un traitement affez avantageux pour ofer en parler ? il ne fuffiroit
pas aux befoins de mon domeftique, ôc ce n’eft pas avec cette parci
monie qu’il a réglé le fort de ceux qui avoient moins mérité que moi.
D ’abord , ce n’eft point une penfion qui m’étoit dûe, ni que je
répcte, c’eft la reftitution de mon emploi, dont le Sr. Lambert a trouvé
la réclamation fi jufte, qu’il y a promis fon appui ; enfuite, pour que
cette obje&ion put valoir , il faudroit qu’au moins en la fixant, il eût
obfervé les] règles en ufage dans les bureaux. Or , l’ufage , lorfqu’on
prive un employé de fa place, eft de lui accorder, en retraite, moitié
de fes appointemens. Le Sr. Lambert l’a pratiqué pour plufieurs de ceux:
qu’il a fiipprimés, ÔC il l’a outre-pafle pour beaucoup d’autres, auxquels
il a accordé en retraite la totalité, outre qu’il en a aflùré moitié aux
femmes , après le décès de leurs maris , tandis que pour moi il 2
dédaigne la règle Sc même les obfervations particulières que des Adminif”
trateurs lui ont fait à mon égard.
(a )
Si, je pouvois devenir N otaire, A rc h itele ou Banquier, j’aurois encore afle*
tôt fait fortune ?
^
(b) on fe détache facilement d’une paia»- ingrate & injufte.
�C 37)
Je m’explique : lorfque les Adminiftrateurs arrêtèrent la lifte des
employés qu’ils vouloient profcrire, ils fixèrent la quotité de leurs peniions;
je fus porté fur cette lifte avec un éloge fingulier, & pour 1800 1. en
retraite ; cependant le Sr. d’Arlincourt , de concert avec le Sr.
Laroche, réduifirent les 1800 1. à moitié, pour ajouter au traitement de
leurs créatures ; & le Sr. Lambert qui fignoit tout aveuglément, figna
encore cette fupercherie.
Ce n’étoit donc pas à 900 1. que le Sr. Lambert, d’après les Admi
niftrateurs, avoit entendu me réduire ! Ce Miniftre le fentit dès l’abord,
& même le Sr. de l’Eflard, qui m’offrit, du premier m ot, 2000 1. Je
refufai fa propofition, outre qu’elle étoit infuffifante. Je n’avois point
droit à une penlïon, mais à la reftitution de ma place, ou à la conti
nuation provifoire de mes appointemens , jufqu’à ce que la place difilnguée,
promife par le Sr. Lambert & fes deux prédécefTeurs, en indemnité de
mes fervices , m’eût été accordée.
» Touchez ces 900 livres , pourfuit le Sr. Lambert, » & vous vivrez?
E h ! où a-t-il pris, le Sr. Lambert, que je vivra i, & que je ferai,
fubfifter mon ménage avec 900 livres , dans un temps où les calamités
publiques ont doublé !e prix des comeftibles ? S’agit-il feulement d’acheterl
du pain? ne faut-il pas être logé, vêtu, pourvoir en fanté & en maladie
aux befoins communs à tous les hommes, & même à ceux relatifs; car,
enfin, l’éducation , l’état, l’âge, l’habitude, forment une fécondé nature
dont on n’étouffe pas entièrement les droits.
Au furplus, je ne pouvois percevoir ces 900 livres, & pourfuivre
en même temps la reftitution de ma place, fans donner lieu h une fin
de non-recevoir contre ma réclamation, & on connoît le fuccès des fins
de non-recevoir. Cette obje&ion fpécieufe n’eft qu’un détour pour pallier
l’iniquité qui fait différer la reftitution de ma place ou la continuation
provifoire de mes appointemens.
Le Sr. Lambert a cru que je donnerois dans ce piège, & que par
provifion je prendrois cette penfion, afin d’avoir à me dire: » vous
» avez accepté votre penfion en retraite , vous ne pouvez plus réclamer
» votre place. »11 s’eft trompé. Je ne l’ai point accepté. Je ne l’accepterai
jamais que je n’obtienne juftice entiere , ou je préféré que la Nation
en fafle fon profit, fx fes repréfentaus font capables de fe fouiller d’un
déni de juftice.
�C 38 )
Le Sr. Lambert s*eil imaginé de même que s’il pouvoir éluder & traîner
en longueur, pour la reftitution de ma place, il réuiîïroit , pendant
ces délais affeftés, à faire juger, par fa bureaucratie du Conieil, ma
demande en payement de mes appointemens retenus. A lors, comme
fes Arrêts {'ont à commandement ; déclaré non-recevable fur ce point,
le Sr. Lambert m’oppofoit auflitôt ce Jugement, pour fe refufer à
la reftitution de ma place, pour régler la quotité de ma penfion en
retraite , &c prétendre fuffifans les 900 1. accordées ; mais il s’eft encore
trompé.
Je ne confentirai point à ce que la demande provifoire paffe la
derniere , & avant toutes choies , la premiere à décider, c’eft la refti
tution de ma place ou la continuation de mes appointemens , parce
qu’avant tout, il faut que je puiffe vivre , pour me défendre & procéder
fur la qiteftion en litige au Confeil , pour laquelle il m'eft promis un
un autre Tribunal.
Je ne fouffrirai pas qu’on intervertiiTe cet ordre facré , & on ne
l’intervertira pas, fans forfait de part & d’autre. Que le Sr. Lambert le
perfuade bien que je l’ai vu s’avancer avec ce tour de force , mais
que je lui en oppoferai un autre, s’il perfifte à abufer de fa place pour
m’opprimer !
O r, fi la Juftice demande la reftitution de ma place , fi l’humanité
follicite,au moins provifoirement, la continuation de mes appointemens,
l’intérêt même du Sr. Lambert l’exige.
Depuis fi long-temps que les dépofitaires de votre autorité , S ire,
abuient de votre confiance, en a-t-on vu un feul puni ? Quel eft le
Miniftre opprefteur, le Magiftrat fcandaleux(aj, le Financier déprédateur,
dont en France on ait fait 1111 exemple ? cependant, que de coupables
parmi eux ! ce n’eft même que parmi eux qu’il y en a. Il fuffit d être en
en place , pour fe tout permettre, & il femble que les fupplices foient
exclufivemcnt le lot de la claiîe utile , indigente, obfcure , qui connoitroit
h peine le crime, fi elle n’ y étoit p rovoquée par les malverfutions de
celle qui l’ opprime en la gouvernant.
( a ) V o y e z fi Beaudouin de Quemacleue, gendre de d’A rlin co u rt, n’a pas été fouftrait à la Juftice. U n homme du peuple, coupable comme lu i, eût été pendu. E h !
voilà comme les Lois font infulTifantes contre les coquins riches & puiffanst
�( 39 )
L ’impunité de ces prévaricateurs a tout perdu dans votre Empire, elle
y a corrompu les mœurs, & attiré les fléaux qui nous défolent. Les corps
politiques comme les individus, ne peuvent eviter la peine qu’ils ont méritée;
les uns 6c les autres fubiflent des révolutions qui expient leurs forfaits,
& pendant que les nations difTolues fe déchirent par des fa&ions, les
Gouvernemens perdent l’autorité qu’ils ont fait fervir à la difïolution des
Nations.
Quel feroit donc le privilege du Sr. Lambert, s’il pouvoit, avec fécurité,
être injufle &C opprefleur, me dépouiller de mon état, m’arracher înon
pain ( a -) , attenter à ma vie, tk. me préparer une fin lente &c tragique,
dans les convulfions de la rage & du délefpoir, irrité par la faim ? Seroit-il
plus coupable, s’il me faifoit aiTaiîiner, ou s’il m’ailaiïïnoit lui-même? ah!
je le lui pardonnerois plus volontiers, & dans la fituation horrible où il
m’a réduit, je lui fçaurois quelque gré d’abréger mon fupplice.
Cependant les Lois divines & humaines, m’autorifent à défendre ma vie
contre le fcélérat qui l’attaque. I l e s t l i c i t e d e r e p o u s s e r l a f o r c e
pAR l a f o r c e , félon même la Commune, de Paris, & de donner la mort
à celui qui la prépare. Le Sr. Lambert me provoque &c s’expofe. La pa
tence , comme l’oppreiïion, a fes bornes ; la nécefïïté feule n’en reconnoît
pas. T o u t s u c c o m b e , a dit (b ) l’auteur de la m o tion, pour exclure les
banqueroutiers & ayant caufe des affemblecs publiques; TOUT DOIT SUC
COMBER d e v a n t l ’ h o m m e q u i a f a i m . Il faut v iv re , & celui qui
111 en ôte la faculté, eft véritablement mon aiTaffin; qu’importe, la forme
*>u l’effet cil le même.
C ’eft un rafïnemant de fcélérateile de réduire un citoyen
une telle
Extrémité, qu’il foit néceilîté de périr miférablement, ou de fe livrer à
des excès excufables néanmoins , dans l’ordre naturel, fi l’ordre public
les réprouve; celui-là feul eft coupable du crime qui y provoque, Sc
Ce feroit un objet digne d’occuper l’attention de l’augufte Affemblée, fi
( a) Je ne confeille à perfonne de nV’ôter mon état & mon pain, fans m’arracher en même
temPs *a v ie j ca ria fienne ne feroit pas en sûreté,
fi
je n’obtenois Juftice.
^ ( k ) Il feroit à defirer que ce publicifte en fît u ne, pour propofer de rendre un peu
n°bIe(Te & de dignité au pafte con ju gal, ravalé au-deflous des baux à chetel du
orvand , elle auroit même dû précéder celle fi précieufe pour l’enrégiftrement des
i unes gens de vingt-un ans.
�C 40 )
prenant en confédération le trifte fort des fubordonnés, elle établifloit une
Loi pénale contre cette efpece de guet-à-pens, ou la paflion réfléchie,
affaiïïne avec art.
Sans ce frein tutélaire, la Juftice anéantie, l’humanité méprifée, ne
laifTeront à l’homme, pour fe défendre, que le poignard. Vainement on
multipliera les échafauds & les boureaux, reffources familières aux defpotes
qui menacent l’indocilité , rebelle à leurs forfaits : l’ordre ne s’établit pas
par la violence ; les voies de la Juftice y conduifent plus efficacement ; quand
on eft afïuré de l’obtenir, on n’eft pas tenté de fe la faire; au contraire,
les Lois fanguinaires aigriffent fans contenir, 8c malgré les fpéculations,
les paradoxes 8c les fophifmes des charlatans en politique, l’échafaud eft
fans horreur pour l’homme, que des affaiTins heureux y conduifent.
Socrate, Phocion 8c leurs imitateurs, ont fuccombé fans foibleffe, parce
que n’en ayant point à fe reprocher, ils ont envifagé dans la mort, un
terme à l’opprefïion, ôc un afyle contre l’oppreffeur.
Toute légiflation eft vicieufe, qui ne prévient pas les délits, & emploie
les boureaux ; elle eft parfaite, ii elle enchaîne les citoyens par l’intérêt
particulier à l’intérêt général, 8c s’ils font entraînés au bien, par l’attrait
à le faire, feul garant qu’il fera fait. L ’efprit ni le génie même, ne fuffîfent à trouver le fecret d’une bonne légiflation; les orateurs font rare
ment d’habiles légiilatenrs. Au lieu de fes Lois fublimes, admirées depuis
tant de fiécles, S o l o n eût laifle des Arrêts de Réglemcns, s’il n’eût été
qu’un difeoureur du Palais.
Mieux confeillée, V o t r e M a j e s t é , confacrera les principes de fon
cœur, elle fera regner la Juftice, 8c fes efforts, pour en régénérer, étendre
8c protéger l’Empire, afîureront la félicité publique, objet de fa tendre
follicitude.
M O R I Z O T , Avocat.
N o t a . Certain grand Seigneur a trouvé mes mémo'res fo rts.. . . Je n’ai pas de pein®
a le croire; car l’attentat dont je me plains, eft fort. Mes preuves font fortes. L a vérité
eft forte. M on caraftefe.. . . ma logiqu e.. . . tout eft fort. Bon Dieu ! que certains grand*
Seigneurs font foibles; quand, pour une C ro ix , un C ordon, un G ra d e , un m ot, üs *"e
coupent la gorge ; pour m o i, qui n’ai pas l’honneur d’être un grand Seigneur, je ne me
la couperai, que quand on me ravira mon honneur, mon état 8c mon pain. Il faut bief»
cefler de v iv re , quand on vous coupe les vivres.
Mais Ci M . Lam bert, qui n eft pas un grand Seigneurs, quoique fes fils fe foient cotntifieS >
trouvoit, lu i, mes mémoires forts, je lui propofe de s’en plaindre en Juftice réglée, &
O*1
�(40
on nous donne des Juges intègres, je confens que celui de nous deux qui fera reconnu
coupable, foit pendu ; car c’eft un combat a mort entre lui & m oi, que je veux foutenir,
& ma propofition ni mon confentement, ne font pas temeraires, fi M . Lambert garde
le filence. Cependant, c’eft convenir de to u t, & donner les mains a fon deshonneur ; &
s’il n’a pas.le courage de defeendre dans l’arène judiciaire , où je l’attends, & dans laquelle,
o mes concitoyens, je vous fupplie de vous réunir à m o i, pour me fournir vos plaintes
& vos griefs particuliers, afin que ce fycophante, ipalgré la puifiance dont il eft envi
ronné , ne triomphe point de mes efforts folitaires ! notre intérêt eft commun , & en
défendant les m iens, je ne néglige pas les vôtres.
PIÈCES JUSTIFICATIVES.
I—
mmmmmmmmr n mmm
N °. I.
Ce r
-N o U S
M
t if ic a t
ic h e l
de
du
B
G
o u vernem ent
eelen
d e
B
ru x elles
.
, E c u y e r , & c . Amman de la V ille , banlieue &
ammanie de B ru xelles, & c . & c .
Certifions que le Sr. M otizot, fe difant A vocat de P aris, a féjourné dans cette V ille
depuis le zij juillet jufqu’au commencement d’août dernier; qu’ayant eu à fon arrivée
des.notions qui nous ont rendu cet A vocat fu fp eft, nous lui avons fait intimer l’ordre
de quitter, dans les vingt-quatre heures, les Terres d e là domination de Sa M a jefté,
l’Empereur & R o i ; mais le lendemain de l’intimation de cet ordre ayant reconnu que
les notions qu’on nous avoit données fur fon com pte, étoient dépourvues de preuves
fuffifantes, nous avons révoqué led. ordre , & lui avons permis en conféquence de
refter en cette V ille , pour achever les affaires qui l’y amenoient; que pendant le court
féjour que led. Sr. Morizot y a fa it, il ne nous eft parvenu aucune plainte qui le concer"
lâ t , & nous déclarons ne pouvoir donner , de la conduite qu’il a tenu i c i , qu’un
témoignage avantageux. En foi de qu oi, nous avons fait figner les préfentes par POfïïcier
du département de P o lic e , & y avons fait appofer le fceau ordinaire de nos armes.
Fait à Bruxelles , le aa feptembre 17 8 9 . Par Ordonnance. Signé , d e P r e z .
N °.
Lettre
l
E
d e
M.
m pereur
le
,
Com
te d e
I I.
Trau
ttm a n sd o rff
, M
in is t r e
d e
à M. Morizot, en lui envoyant le certificat ci-deiTus.
Bruxelles, i f oElobre 1789.
^ a i reçu la lettre que vous avez pris la peine de m’écrire , M oniteur, le 12 du mois
F
�(4 0
dernier, & m’étant fait rendre compte par la Police de ce qui pourrait être déclaré à
votre fu jet, ce département n’a pas trouvé de difficulté a vous expédier la déclaration
ci-jointe. Je ne doute point quelle ne remplille votre o b jet, & je fuis très-parfaitement,
M onfieur , & c . Signé , T r a u t t m a n s d o r î F .
N °.
L
ettre
d e
I I I.
M. le Chevalier de
la Gravierre, Réfident de France à Bruxelles.
M.
le
Co m
te
d e
M
o n t m o r in
, à
A Verfailles , j août 178g.
L e Sr. M orizot, Monfieur , qui eft aftuellement à Bruxelles , me demande une lettre
de recommendation auprès de vous. Je ne puis la lui e n v o y e r, puifqu’il ne m’indique
pas fa demeure. S’il fç préfente à vous , je vous prie de le recevoir favorablement. C ’eft
un h o m m e très-mallieureux , qui eft digne de votre intérêt. Je fuis très-fincérement,
M on fieu r, entièrement à vous. Signé, l e C o m t e d e M o n t m o r i n .
O
b s e r v a t io n
. Je me fuis engagé de tout prouver par écrit : o r , on vient de v o ir ,
i ° . que des gens mal-intentionnés m’avoient inquiété à mon arrivée à Bruxelles ; 20.
l’ordre qui setoit enfuivi d’en déguerpir; 30. la rétra&ation de l’ordre; 40. le témoignage
rendu à ma conduite dans cette Ville.
L a lettre de M . le Com te de Montmorin ajoute à mes preu ves, en établiflant, i° . que
j’ai été inquiété, & que j’ai recouru à fon témoignage ; 20. qu’il la donné, connoifTant
bien la fource de mes malheurs, & combien je les méritois peu.
M aintenant, pour ne laiffer abfolument rien fans preuves écrites, je vais établir, par
le certificat de M . P e r d r y , la faufieté du rapport fait au Comité de Police de l’H ôtelde—
V ille de P aris, fur la foi duquel lis Srs. Bottiers de M ontaleau, Lagreflce & Bonvalet,
ne fe feraient pas permis de fouferire une lettre atroce à un c ito y e n , qui vaut mieux
qu’e u x , s’ils euflent fuivi la première réglé du bon fens, qui étoit de me parler & de
s’afiurer de la vérité par mon aveu ou ma dénégation ; mais il eft des gens qui croient
fe réhaufler, en affeéhnt de l’im portance, & de dédaigner les réglés les plus fimples.
N °.
Ce r
t if ic a t
d e
M
a ît r e
P
I V.
erd ry ,
Avocat aux Confeils du Roi.
J e fou ilign e, certifie, qu il n a pas dependu de Maître Morizot de préfenter fa requête
& d’être ju g é , puifquil n a p u , jufqua préfent, fe procurer fes pièces, qui font encore
entre les mains de M . P aftoret, R apporteur, lequel n’a pu lui-même fe les procurer
�( 43 )
que depuis quelques jours ; je certifie encore que quand bien même Maître Morizot
auroit eu fes pièces, & qu’il auroit préfenté fa requête, il n’auroit pu être jugé défini
tivem ent, y ayant un incident provifoire en communication de titres à juger préalable
ment , pour qu’il puiffe enfuite fe défendre au fond. A u furplus, Maître M orizot ayant
récufé le Confeil entre les mains du R o i , & M . Necker lui ayant offert de défigner
le Tribunal qu’il vo u d roit, par fa lettre du 6 février dernier, il n’y a encore point de
Tribunal no m m é, auquel Maître Morizot puiffe adreffer fa requête, ce q u i, avec les
délais réciproques entre les Parties , ,ne/ permet pas
à Maître M orizot d’efpérer un
Jugement définitif de long-temps. En foi de quoi je lui ai délivré le préfent certificat,
pour lui fervir & valoir ce que de raifon. A P a ris, ce 29 feptembre 1789 .
Signé, P e r d r y .
C
o n c l u s io n
. Maître Perdry eft un impofteur infigne, fi Dufour eft honnête homme.
\
M O R I Z O T , Avocat.
�
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Factums Vernet
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Morizot. 1790?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Perdry
Morizot
Subject
The topic of the resource
prévarication
ferme générale
intrigues de Cour
pension royale
La Fayette (Marquis de)
Calonne (Charles-Alexandre de)
favoritisme
loterie
Necker (Jacques)
troubles publics
créances
offices
Description
An account of the resource
Nouveau mémoire au Roi et à l'Assemblée Nationale, en dénonciation contre le sieur Lambert, contrôleur-général des Finances.
Pièces justificatives.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1790
1785-1789?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0111
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Bruxelles (Belgique)
Rights
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Domaine public
Relation
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Calonne (Charles-Alexandre de)
Créances
favoritisme
ferme générale
intrigues de Cour
La Fayette (Marquis de)
loterie
Necker (Jacques)
offices
pension royale
prévarication
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REPLIQUE
P O U R
M .D
'
A
b b a d i e
,
Confeiller - Honoraire au
Parlement de Paris, Préfident à Mortier au Parlement
de Navarre.
C O N T R E
Madame
la
P r éfidente D ' A b b a d i e
fon
E poufe.
M
U
n
e s s i e u r s
,
Citoyen R om ain, qui avoit mené une vie paifible
voyant fon nom écrit fur les tables fatales qui annonçoient
les p r o f i t i o n s , s’écria avec douleur: « Malheureux que
» je fuis ! c’ef t ma belle maifon
» mourir ».
d’A lb e qui me fait
M . le Préfident d Abbadie s’écrie aujourd’hui dans une
A
Farlem ent de
P aris.
G rand’Chambre.
�2
iituation
non
moins affligeante : « M alheureux que
» fuis ! c’eft ma fortune
qui fait de
» enaem ie
qui
m o r t e lle ,
&
ma femme
l’excite à
demander
je
mon
ma
» profcription ».
L e s faits de la C aufe ne juftifient que trop cette exprcffion de fa peine , ce cri de fa douleur*
L e plan de M adam e la Préiidente d’À lb a d ie fe réduit
à ces deux points:
« Je fu is , d it-elle, exem pte de reproche.
» E t mon mari eft infenfé ».
L a défenfe de M . le Préfident d’A bbadie roule fur les
deux points contraires.
« M o n époufe , d it -il, eft grièvem ent coupable envers
» moi.
» E t je jouis de ma raifon ».
R é ta b liro n s ces deux p o in ts , & ramenons-y toute la
Caufe.
Il n’eft pas inutile de retracer les torts de M adam e la
Préfidente d’A bbadie envers fon mari : les uns ont dcd le
prélude & les préparatifs de fon a£tion ; les autres
en
décèlent les motifs ; tous c o n c o u r a ie n t à la faire exclure
de la curatelle de M . le Préfident d’A b b a d ie , fi ce M agiftrat avoit befoin d’un curateur.
I*r«mier tort.
premier
tort de M adam e d’A b b a d ie
eft
d’avoir
rendu dans tous les te-nps fon mari malheureux.
M . le Préfident d’A bbadie a fait entrevoir une partie de
fes malheurs d om eftiqu es, en l'hôtel du fieur Lieutenant
C i v i l , dans fon dire du 27 Septembre 1 7 8 ; .
�3
E n vain obje&e^t-on que ce dire étoit écrit d’une main
étrangère. Il avoir été écrit fous la di&ée de M . le Préfi
dent d’A bbadie ; & le procès-verbal conflate qu’il a réfuté
lui-même cette obje& ion , en déclarant Jeul & fans l’ajjîjtance, de fon Procureur, q u il p erfifoit dans fo u dire.
L e dire du 27 Septem bre 1 7 8 ; n’ efi. donc pas, com m e
o n l a plaidé , l’ouvrage d’une
l ’ouvrage de M . le Préfident
volon té étrangère ; il eft
d’A b b a d i e , &c une foible
expreflion de fes malheurs.
O u b li des égards qui lui étoient dus ainfi qulà fa m ère;
mépris de fa perfontie ; contradiftions perpétuelles ; nécefiité de vivre féparément : voilà d’après le dire du 27 S e p
tem bre 1 7 8 ^ , c e que M . le Préfident d’A b bad ie a trouvé
dans le mariage.
I l s’eft expliqué un peu plus ouvertem ent dans fes in
terrogatoires.
Il dit dans celui du. 29 D é c e m b re 178J : « Q u ’il eft
» bien aife de prouver à M adam e d’A b bad ie qu’il n’a pas
» befoin d’elle pour fe maintenir en bonne fanté ». D ans
celui du j Janvier 1 7 8 5 : « Q u e M adam e d’A bbadie eft la
» caufe dè tous fes chagrins ; qu’il confent à lui donner
» dix mille livres par année pour vivre clans un c o u v e n t» .
Dans celui du 13 Janvier : « Q u ’il ne croit pas Être o b ligé
» de faire de plus grands avantages à une fem m e qui le
» perd de réputation ; qu’il la difpenfe de fon attachem ent».
Dans celui du 1 7 , «qu’il lifoit (à l’arrivée du fieur Lieutenant
» C iv il à Vitry)le M ercure de F ra n ce dans lequel étoitjriiif» toire d u n e femme qui avoit empoifonné fon m ari, &
» qu à cette occafion il s’étoit livré à quelques réflexions chaA ij
�4*
» grines, fur les malheurs que les maris font fujetsà éprou» ver de la parc de leurs fe m m e s , & fur fa propre fitua» tion ». Dans c e lu i du 22 avril , il s’écrie : « C om m e n t
» ne pas tenir rigueur à uue fem m e qui deshonore fon
» m ari, qui lui fufeite une affaire dont l’éclat le met hors
d’état d’exercer aucune
fon& ion ! enfin dans celui du 18
M a i , il répond : « qu’il perfifte dans tout c e qu’il a déjà
» dit, ( concernant la peniion de Madame d’A b b a d ie , & fa
» retraite dans un c o u v e n t ) , que le iieur Lieutenant C iv il
» eft trop prévenu en faveur de ladite d a m e , que d’après
» la conduite qu’elle a tenue à l’égard de lui répondant
» tant à Pau qu’à P a ris, & les chagrins domeiUques qu’elle
» lui a ca u fé s, il fe croit en droit de fe tenir éloigné d’e lle ;
» que c’efl: le feul m oyen qu’il ait de rétablir parfaitement
» fa fanté, qui n’a été altérée que par les peines &
les
» inquiétudes qu’elle lui a caufées ».
C e s réponfesne font point l’ouvrage d’une volo n té étran
gère: M . le Préiident d’A b bad ie étoit feul a v e c le M agiftrat,
lorfqu’il les faifoit.
V ou le z-v o u s révoquer en doute ces plaintes modérées
qu’ une douleur profonde arrache au plus patient & au plus
d ou x des hommes ? E c o u te z du moins la M arquife du
C o u d r a i , fa focur, qui ne peut pas vous être fuipe&e.
« T o u t e s vos peines, lui dit-elle dans fa lettre du 27
» N o v e m b r e 1 7 8 4 , au paiTé
,
a u
p ré le n t
ôc a 1 a v e n ir , ont
» é t é , font ôc feront toujours les miennes par mon atta» chem ent pour: ma famille ,
et
pour
vous
en
p a r t i-
» CULIER » .
E c o u te z les parens & amis de M . le Préfident d’A b b a d ie ,
notamment le fieur de Joantho , fon coufin germain , adi*
�s
gné par vous co m m e par l u i , & que vous n’avez fufpe&é
Il vainement à la dernière a u d ie n c e , que parce qu’il vous a
rendu juftice à l’un & à l ’autre. C es païens & amis parlent
dans leur avis des chagrins de M . le Préfident d’A b b a d ie ,
& des peines domeftiques auxquelles il a été en proie.
V o u s précendez prouver fon bonheur , par les
lettres
qu’il vous a écrites de Paris en 1781 ? Il eft vrai qu’il les
com m ence toutes ,
en vous appellant f a chere fem m e,
com m e vous l’appeiliez votre, cher mari, & qu’il les finit en
vous aflurant d e ¿’attachement a v e c le q u e lil eft tantôt tout à
vo u s,
tantôt votre très-humble, ferviteur. U n mari bon par
caractère, & qui feroit heureux par fa fe m m e ,
n’auroitil
donc jamais d'autre nom à lui d o n n e r , d’autre fentiment
à lui offrir ?
E n fin , vous invoquez la naiiTance de vos deux enfans
com m e une preuve du bonheur de votre mari. C e tte nai£fance prouve bien que M . le Préfident d ’A b bad ie eft p ère;
mais elie ne prouve pss qu’il foit heureux époux.
Q u e lle circonftance choifiifez-vous pour vanter le b o n
heur paiTé de M . le Préfident d’A b b a d ie ? C e l l e où vous
travaillez à le rendre le plus miférable des hommes. A h !
la pourfuite de fon interdiction ne peut pas être le premier
tort que vous ayez eu envers lui. C e n’eft que par dégrés
qu’une femme bien née acquiert l’affreux courage d’atta
quer ouvertement l’état de fon m ari, & de b r a v e r ,
vous faites depuis deux ans , la^cenfure publique,
comme
L e fécond tort de M adam e la Préfidente d’A b bad ie eft
de s être emparée à P oitiers, le 9 Septem bre 1781 , d’ une
fom m e de 20,000 liv. qu’elle s’eft fait remettre clandefli-
Sccond torr.
�6
nem ent par le R égiffeu r de fon m a r i, qui fe retiroit avec
elle en B é a r n , fous prétexte qu’il étoit m alade, & hors
d’état de donner quittance de cette fomme.
Ajoutons 2 1 3 6 liv. que M adam e d’Abbadie avoit reçues
à Paris au m om ent de fon d é p a rt, co m m e elle le déclare
dans fon M ém oire imprimé au C h â t e le t , pag. 149.
E lle avoit donc fait au mois de Septem bre 1781 une
recette de 2 2 13 6 liv.
Jettons maintenant un c o u p - d ’œil fur la dépenfe.
M adam e d’Ab bad ie porte d’abord en dépenfe une fom me
d e j o o o liv. pour frais de voyage.
C e t article ne doit pas être alloué.
M adam e d’Ab bad ie eit partie de Pau au mois d’août
1 7 8 1 , pour venir joindre fon mari à Paris, & pour retourner
ave c lui en Béarn. Sa belle-mère qui a approuvé ce v o y a g e
lui a donné yo o o liv. pour l’aller & pour le retour. Si elle
nie la quotité de la fom m e qu’elle a reçue , elle eft forcée
de conven ir du moins qu’elle a reçu fom m e fuffifante pour
les frais du v o y a g e . C e fait n’a pas befoin de preuve ; il
eft dans l’ordre naturel des ch o fe s; il eft néceilaire ; on ne
v o y a g e pas à c r é d i t , & l’époufe d’un Magiftrat qui jouit
de plus de 40,000 liv. de
rente , n’entreprend pas une
route de deux cents lie u e s , fans avoir en main au m om ent
de fon départ les fonds dont elle peut avoir befoin.
Il n’y a donc aucune d éd u û ion à faire pour frais de
v o y a g e , fu r ie s 2 2 13 6 liv. que M adam e d’Abbadie a tou
chées au mois de Septem bre 17 8 1.
D e ion aveu , elle n’a dépofé à fon arrivée à Pau , dans
les mains du fieur d cB eau reg ard qu’une fomm e de i ; o o o l .
elfe retient donc à fon profit une fomm e de 7 1 3 6 liv.
�7
V o y o n s ce qu’ eft devenu le dépôt de i j o o o liv.
M adam e d’A b bad ie convient qu’elle a touché en 1782
3000 liv. pour la penfion que fon mari lui faifoit»
R e lie n t 12000 liv.
L e fieur Louftau , 1agent de M adam e d’A b b a d ie , & fort
correlpondant a reçu le 11 Septem bre 1 7 8 2 , du lieur de
Beauregard une fom m e de 3000 liv. favoir i j o o l i v . en
a r g e n t, & un billet du fieur de Beauregard de pareille
foïHme ; à qui a-t-il remis cette fom m e & ce billet? à Ma>
dame d'Abbadie. E lle ne peut pas nier ce fait. Madame la Préfidente d’Abbadie mère donnoit au iieur de Beauregard des
reçus des iommes qu’e lle t o u c h o it : elle lui a d o n n é en 1782
trois reçus montant à 9000 I. qui font dans les mains de M a
dame d’A b b a d ie ; elle auroit donné également un reçu des
5000 liv. touchées par le fieur Louftau le 11 Septem bre
1782 , fi le fieur Louftau les avoit reçues pour elle; il les
a donc reçues ponr le com pte de Madame d’A bbadie.
V o ilà donc 1 3 ,13 ^ liv. appliquées au profit de M adam e
d’A b b a d ie , dont la maifon étoit d’ailleurs défrayée à Pau
par fon m a r i, ainfi qu’il Je déclare dans fon interrogatoire
du j Janvier 1 7 8 6. C e n’eft donc pas un a£te d’adminiitration qu elle a fait en 1 7 8 1 , lorfqu’elle s’eft emparée clandeftinement à Poitiers des revenus de fon mari ; c ’eft une
entreprife in té reffée , qu’elle ne peut pas colorer par la
pureté de fes motifs.
L e troificme tort de M adam e d’A b b a d ie eft d’avoir quitté
fon mari en Béarn pendant d ix -n e u f m o i s , depuis le mois,
d efe p te m b re 1781 jufquesau mois ¿ ’avril 17 8 3 ,
Troifième tort*
�8
» Il n’y avoit pas , d it - e lle ,
de logement pour moi
» au château de Bizanos.
S ie d - il bien à une femme de dire qu’il n’y a pas de l o
gem ent pour elle , dans un Château habité par ion mari ?
Il y a au château de Bizanos un rez-de-chauifée, ôc un
premier étage : Je rez-dechauiTée étoit occupé par Madame
la Préfidente d’Abbadie mère ; le premier étage auroit fuffi
pour Madame d’A b b a d ie , fi elle avoit été jaloufe de vivre
avec fon mari ; mais elle aimoit mieux refter feule dans ia
maifon de Pau. V o ilà quel étoit fon attachement pour
fon mari ; voilà le foin qu’elle prenoit de cette téte fi chère.
M . le Préfident d’Abbadie arrive à Paris avec le Frère
L iflon d e , dans le mois d’avril 1783. Madame fon époufe
le fuit de près à fon infçu ; que vient-elle faire ? C ’eft
ici fon quatrième tort.
Quatrième tort.
E lle fait vifiter fon mari le 6 mai 178? , par le fieur
B orie fon M éd ecin ordinaire , & par les fieurs Dejean &
de M o n ta b o u rg , & elle fait fabriquer le même jour par le
fieur Borie un certificat ,
dans lequel ces M édecins at-
t e f t e n t , après un demi-quart-d’heure d’exam en;
i°. que
M . le Préfident d’Abbadie parle nuit & jour , qu’il a perdu
le fommeil & l’appétit, & que cet état dure plufieurs jours ;
2°. qu’il a été fou à Pau , depuis le mois de feptembre
1781 , jufques au mois d’avril 1783 , & à Paris , depuis cette
dernière époque , jufqu’au 6 mai , jour de leur vifite ; ce
qu’ils ont appris , difent-ils, du Frère L i (fonde fon compa
gnon de v o y a g e , ( qui leur donne à ce fujet un démenti
f o r m e l; ) 30. qu’ il ne faut pas héfiter d’employer la force
contre M . le Préfident d’A b b a d ie , foit dans la maifon du
fieur
�9
Heur de Borda , foit dans une maifon publique ; c e qu’ils
Jaiiïsnt au ch oix de Madame Ton époufe.
C ’eft , a-t on dit à cette au d ien ce, Madame la Préfidente
d’A bbadie mère qui avoit conçu le projet de faire enfer
mer fon fils : elle avoit fait confier c e projet par le F rè re
L iifo n d e à M . de Cheraute , qui l ’en avoit détournée ;
M . de Cheraute l’a déclaré , & le Frère Liifonde ne l a
pas nié.
M . de Cheraute l a déclaré ! O ù efl donc cette décla
ration? Je l’ai cherchée avec la plus grande attention parmi
les pièces de Madame laPréfid en te d’A bbadie , ôc je ne l ’y
ai pas trouvée.
'
Si elle e x ift o it, elle ne prévaudroit pas fur les preuves
réelles que M adam e la Préfidente d’ Abbadie mère a don
nées de fa tendreife pour fon f i ls , avec qui elle a toujours
v é c u , & dont elle a été la com pagne fidelle jufqu’à fou
dernier moment.
L e Frère L iifon d e ne l’a pas nié! M ais il n’a pas été
interpellé fur ce fait ; fon filence n’en fournit donc pas
la preuve.
N o n ; le defir de faire enfermer M . le Préfident d’A b
badie n’a jamais fouillé le cœ ur de fa mère : c’eft fon époufe
qui s’eft fait autorifer à exercer cette violence. Q uand on
eft capable de demander à un M é d e c in une ordonnance de
ce g e n r e , on efl aiTûrément capable de l’exécuter.
L e cinquième tort de M adam e d’A bbadie eft de s’être
fait remettre claiideftinement par le fieur O liv ie r ,
cinquième ton
le 8
novem bre 1783 , une fomm e de 36000 liv. appartenante
à fon m ari, ainfi qu’il eft établi par le co m p te que le iieur
B
\
�ÎO
O liv ie r a rendu à M . le Préfident
d’A bbadie le 10 du
m êm e mois.
» M a i s , dit M adam e d’A b b a d ic , j’ai mandé le 11 no» vem bre 1783 , à ma belle-mère , que fur ces 36000 l i v . ,
» j’avois déjà remis 6000 liv. à mon mari ,
que j’avois
» wardé 5000 liv. pour ma dépenfe ; que j’avois converti
» les 2$ 000 liv. reftantes en billets des fermes , pour ne
» pas laiiTer l’argent o i f i f , & que j’étois prête à envoyer
» des fonds à ma belle-mère auffnôt qu’elle voudroit.
C ’eft là , en effet , la teneur d’une copie de lettre de
M adam e la Préfidente d’Abbadie, à fa belle-mère , en date
du 11
novem bre 1 7 8 3 ; copie dont rien ne garantit la
c o n fo r m ité avec l’o rig in a l, s’il a jamais exiilé , ô t que fa
teneur même rend plus que fufpefre.
D ’un côté ,
M adam e d’Abbadie n’a pas^pu mander à
fa belle-m ère le 11 novembre
1783 , qu’elle avoit déjà
remis 6000 liv. à fon m a ri, puifqu’elle ne lui a remis cette
fomme que le 13 du même m ois, fuivant la tranfa&ion du
2 juillet 178 4 .
D ’un autre côté , elle n’a pas mandé à fa belle-mère par
fa lettre du 11 novembre 1783 , qu’elle étoit prête à lui
remettre ces fonds , puifque fa belle-mère 11e lui dit rien
qui ait trait à une pareille offre , dans fa réponfe du 19 du
même mois
, & q u e lle & fon fils ont au contraire , par
leurs lettres du 8 mars 1 7 8 4 , preffé le fieur d’Etehegaray
de pourluivre en Juitice la reftitution des fomines iixrées
a Madame d’Abbadie par le fieur O liv ier ; ce qu’ils n’auroient point f a i t , l i , dès le îx novembre p récéd en t,
Ma
dame d’Abbi-die avx)it offert de les leur rendre.
Enfin , il a fallu compofer avec Madame d’Abbadie fur
�11
,
cette reftitution, & lui abandonner , par la tranfa&ion' du
2 juillet 1 7 8 4 , une fomme de 13000 liv . en fus de celle
de 3600 liv. qu’elle avoit reçue pour fa psnfion en 1783 ,
c e qui fait une fomme de 16600 liv. qu’elle a touchée
en 1785 , quoiqu’elle n’eût aucune dépenfe à faire dans la
maiion du fieur de Borda.
13000 liv. en 17 8 1 , 13000 liv. en 1783 ; voilà quels
ont été pour M adam e d’ Abbadie les fruits de cette adminiftration officieufe qu’elle exerçoit pour fon m a r i , à fon
infçu , & contre fon gré.
L e fixième tort de M adam e la Préfidente d’A b b a d ie ,
eft d’avoir quitté fon mari pour la fécondé fo is , depuis
le mois de N o v e m b re
1785 jufques à la fin du mois
de D é ce m b re 1 7 8 4 , qu’il eft venu la joindre à Paris,
& d’être reftée dans cette C a p ita le, tandis qu’il étoit en
Béarn.
E lle a cherché une premiere excufe dans la lettre de
fa b elle mère du 19 N o v e m b re 1783 , par laquelle elle
la remercie de ce qu’elle veu t bien refter auprès
fieur
de Borda.
Mais elle n’a pu recevoir cette lettre de Pau que le 26
N o v e m b r e , & elle avoit laiiTé partir fon mari dè& le 1 4 ,
avec le F rère L iflon d e qui lui a mandé qu’ils étoient arrivés
à Pau le 2 j , avant qu’elle ait reçu la lettre de fa belle mère.
C ’eil donc de fon propre m ouvem ent qu’elle s’eft déter
minée à refter feule à P a ris, & non d’après la lettre de
fa belle m è r e , qui d’ailleurs ne l’en prioit pas.
E lle a cherché une fécondé excufe dans une lettre que M .
le Préiident d’Abbadie lui a écrite de Paris le 1 9 M ai 1 7 8 1 ,
pour lui annoncer le projet qu’il avoit de l’attirer incefB ij
Sixième tort.
�\2
famment dans cette C a p itale, où elle pourroit paffer q u el
que temps.
M ais il n’y a aucune liaifon entre ce projet manqué en
17 8 1 , & le féjour que Madame d’Abbadie a fait à Paris
pendant quatorze mois en 1783 & en 17 8 4 5 en l’abfence
de fon mari, qu’elle a quitté volontairement ôc fans aucune
néceiïité.
septième tort.
L e feptieme tort de Madame la Préfidente d’Abbadie
lui a paru enfin à elle-même fi o d ie u x , fi ré vo ltan t, qu elle
n’a pas même eflayé de le c o lo r e r , &
q u e lle l a laiifé
dans toute fa noirceur. Je veu x parler du certificat q u e lle
a fait fabriquer le 5 F év rie r
1 7 8 4 , par le fieur B orie
qui y attefte : i°. Q u ’au mois d’avril 1 7 8 5 , à fon arrivée
à Paris, M . le Préfident d’Abbadie étoit depuis deux ans
dans un état de dém en ce, (quoique ce Magiftrat eût vécu en
Béarn,.à 200 lieues du'fieurBorie , depuis le mois de S eptem
bre 178 1 jufques au mois d’avril i 7 8 3 .) 2 ° Q u ’aumois d e N c vem bre 1 7 8 3 , lors de fon départ pour P a u , c ’eft-à-dire le 14
N o v e m b re jour de fon départ, M . lePréfidentJd’Abbadie étoit
dans un état de d é m e n c e , aifertiondontla fauiTeté eft démon
trée par la lettre que M . le Préfident d’Abbadie a écrite à
fon R égifleu r le 8 N o v em b re 1783 , p arle compte que le
fteur O liv ie r lui a rendu le 1 0 , par l’aiïignation qu’il a
fait donner au fieur O liv ier le 11 , & par la reconnoiffance qu’il a donnée le 1 3 , veille de fon départ , de la
fem m e de 6000 livres que M adam e la Prcfidente d’Abbadie
lui a fait -remettre. 3P. Enfin que la maladie de M . le
Préfident d’Abbadie paroît être parvenue à l’incurabilité.
Quel
trait de lumière
environne
dans
ce
m om ent
�\
n
M adam e la Préiidente d’A b b a d ie , & perce le vo ile donc
elle fe pare aux yeu x du public?
E lle fait déclarer fon mari in cu ra b le, à P a r is , trois
mois après fon départ pour Pau.
E lle le fait déclarer incurable par un M é d é c in , qui,,
fuivant la lettre qu’elle a écrite à fa belle-mere , le 2 $
O & obre
1 7 8 3 , quinze jours avant le départ de M . le
Préiident d’A bbadie pour P a u , avoit promis fa guérifon
' totale.
V o t r e mari fou incurable! Q u e l befoin aviez-vous de
cette
atteftation , le
6 F évrier 1 7 8 4 , un an avant que
vous a y e z . pourfuivi fon in te rd id io n ? Q u o i ! votre fang
ne s’eft point glacé à la vu e de ce préfage finiftre ; vous
n’avez pasrepouÎTé la main qui v o u s l ’offroit ; vous le gardez
depuis trois ans; vous le faites circuler d anstouslesTribunaux
où vous traduifez votre m a ri, & quand deux M édécins qui
l ’ont vifité récemment pendant foixante-huit jo u r s , atteftent
à la juftice fous la foi du fe r m e n t, [que fon état habi
tuel eft un état de ra ifo n , tel qu’il fe manifefte dans fes
interrogatoires, vous les a c c u f e z , l’un de com plaifance,
l’autre d’impofture; vous rejettez avec horreur une vérité
co n fo la n te, pour vous repaître d’une illufion qui devroic
vous défefpérer ; tous ce u x qui vo y en t votre inari ,
étrangers , parens , amis , M agiftrats, tous le trouvent
raifonnable 5 &
vous qui ne l ’avez pas vu depuis deux
ans, vous fon époufe , vous vous obftinez
à dire qu’il
eft infenfé ; vous démentez la notoriété p u b liq u e , vous
m éconnoiifez l’évidence m êm e ! A h ! ne cherchez plus
d e x e u fe à votre a v e u g le m e n t;
ne fuit ainfi la lumière ,
g u id e.1
jamais l ’efprit humain
que quand il a le cœ ur pour
•
�14
Huitième
tort.
L e huitième tort de M adam e la Préfidente d’A b b a d ie ,
^ d>avoir attifé fon mari dans cette C a p ita le, au mois
de D écem bre 17 8 4 , fo u s prétexte, com m e elle le lui difoit
dans fa lettre du 8 N o v e m b re p ré céd en t, que fes affaires'
e x ig e o ie n t fa p ré fe n c e , pour le faire interdire à P a u , fans
qu’il pût fe défen d re; de l’avoir tenu en chartre privée
depuis le
Mars 1 7 8 j
au fo ir ,
jufqu’au lendemain
onze heures du m atin, pour l ’empêcher de fe pourvoir
contre l’interdi&ion provifoire dont il avoit été frappé
le 3 du même m o is, & de l’avoir privé des fecours néceifaires contre une colique violente , dont il a été atteint
la nuit du 25 au 2 6 Mars.
M adam e la Préfidente d’A bbadie convient qu’elle s’eil
emparée des clefs de l’h ô t e l , le 2$ Mars au f o i r ,
pour
la première
tenu
fois ,
&
q u e lle
a
par
conféquent
• fon mari en chartre privée , pour l’empêcher de partir
le lendemain pour fes terres de Poitou : mais elle nie
qu’il ait eu la colique dans la nuit du 25 au 2 6 Mars
& elle a pour garant de fa dénégation le C o ch e r D o u c et.
C e C o ch er peut bien attefter qu’il n’a eu lui-même
aucun mal la nuit du 2 j au 26 Mars 1785* , 6c que s’il
avoit fouffert com m e fon m aître, il auroit reçu tous les
fecours qui lui auroient été néceffaires; mais fon témoi
gnage purement négatif ne détruit point le fait pofitif &
prouvé que M . le Préfident d’Abbadie s’eft plaint d’une
colique violente la nuit du z<; au 2.6 Mars 178J , fans
qu il ait pu recevoir les fecours du dehors qu’il demandoit;
&
fi c’eft une trahifon de la part de fon é p o u fe , de
l ’avoir attiré de Pau à Paris, pour le faire interdire à
- Pau à fon infçu, fans aucune inftrudion, c’eft un attentat
�de l’avoir tenu en charte p riv é e , dans une
circonftance
où il avoit tant de befoin d’être libre pour fe d éfen d re,
& une cruauté de lui avoir refufé au milieu des douleurs
les plus aigu ës, des fecours que la pitié prodigueroit en
pareil cas au dernier des hommes.
Enfin , le neuvième tort de
M adam e la
Préfidente
d’A b b a d ie , eft d a v o ir laiifé infpirer à fes enfans la crainte
& le mépris de leur p è r e , 6c de les avoir rendus témoins
des follicitations
qu’ elle
fait
pour
fon. interdi£Hon.
V o u s vous rappeliez, M e ille u rs , cette fcène qui s'eft
paifée dans la maifon du fieur de B o r d a , lorfque M . le
Préfident d’A bbadie
eft allé en perfonne réclamer
fes
enfans, accom pagné de deux N o ta ire s, de M e.B o u rg e o n
fon Procureur au C h â te le t, & du C hevalier de Saiutray.
I l a trouvé fes enfans dans le fallon ; à peine
lui ont-ils
laiifé le loifir de leur donner un premier figne d’amitié.
L e nommé
Tiercclin, laquais de
M adam e la Préfidente
'd’A b b a d ie , eft venu lui arracher l’un qui s’eft enfui dans le
jardin ; l ’autre s’eû réfugié dans les bras du C hevalier de
Saintray qu’il ne connoiifoit | a s , & à qui il ne ceifoit de
dire d’une v o ix tremblante : » M . le C hevalier e m p ê c h e z ,
» je vous p rie, que papa ne nous amene ; papa n’eft
» point
le maître ,
c ’eft maman qui eft
maîtreife de
» tout ».
; M è re aveugle ! vous fouffrez |que vos enfans n’ayent de
la confiance
qu’en vous
autorité que la v o tre !
leçons ,
avouer.
&
ne
donnez leur
ôc infpirez-leur
L ite s-le u r
,
connoiiisnt
donc
d’autre
de meilleures
des fentimens qu’ils
puiflent
qu’ils dépendent principalement de leur
N euvièm e tort.
�\6
» p i r e , que vous d é p e n d e z vous-même de votre m a ri, &
« quevous avez tous trois le même maître».
D ites leur que vous devez à votre mariage l’aifance
dont vous jo u iffe z , que toutes leurs efpérances font du
cô té de leur p è r e , & qu’ils ont droit de tout attendre
de fa tendreffe & de fa bonté.
L ife z leur l'interrogatoire du 13 Janvier 1 7 8 6 , où il
dit : « que vous devez être perfuadée qu’il n’a pas moins
» d’attachement que vous pour vos enfans ».
L ifez leur l’interrogatoire du 17 du même m o is, ou il
dit : « qu’il facrifieroit fa fortune & mêfne fa vie , s’il le
» falloir, p o u r les perfonnes qui lui appartiennent ».
L ife z leur l’interrogatoire du 22 A v ril fu ivant, où il
d i t , « qu’en follicitant la caifation des arrêts du Parlement
» de P a u , il avoit annoncé aux Magiilrats du C o n f c i l, que
» fon intention é to itd e faire emploi des fommes inobiliaires
» provenantes de la fucceffion du fieur de B o r d a , qu’il
’ perfifte dans cette réfolution , pour le bien de [es enfans f
& qu’il demande atle de fes offres de faire cet emploi.
N ’affe&ez plus d’aifocier vos enfans à vos follicitations,
com m e
s’ils
étoient intéreifés à
demander avec vous
l’interdi&ion de leur père.
Conduifez-les plutôt aux portes de la Baftille, & dites
leur: mes enfans, v o ici la prifon où votre père fut e n ferm é,
martyr de
fon zèle pour les L o ix dont il eft le Miniftre.
Souvenez-vous ,
lorfque vous ferez
élevés à
ce faint
M iniftere, de le prendre pour votre m o d è le , & de fervir
com m e lui le R o i & la Patrie.
Montrez-leur 1arrêt du 21 Juin 1 7 7 6 , & dites-leur : rrres
enfans ? voici le titre le plus précieux pour votre p è r e , la
récompenfe
�IJ
■'
récompenfe honorable de fes longs facrifices, l’arrêt de la
C o u r des Pairs qui l’a reçu parmi fes m em bres, en confidération de la nature des fervices que lui avoienu infpirês
depuis
d ix ans fo n
^èle & fon attachement .au bien du
fervice du R o i f & à l'honneur de la Magïjlrature '.
CeiTez de les entretenir des prétendues folies de leur
père ; entretenez-les de fes vertus & de ion amour pour
eux ; diiïipez une prévention funeite qui aveugle
leurs
e fp rits, & qui flétrit leurs cœurs : dites-leur la vérité , &
laiflez agir la nature.
V ou s connoiiTez , M eilleurs, les torts de M adam e d’Abbadie ; ils font g r a v e s , ils font multipliés ; permettez que
je vous le demande maintenant ; ne trembleriez-vous pas
d e la nommer curatrice de fon mari, s’il pouvoit être in
te rd it, & vous repoferiez-vous du foin de la perfonne &
dg la io r tu n e de M . le Préfident d’A b bad ie, fur une femme
qui n’a fçu refpe£ter jufqu’au préfent ni l’u n e , ni l’autre ?
M ais M . le Préfident d’Abbadie n’a pas à craindre
un
événem ent auili m alheureux, puifqu’il jouit de fa raifon.
C ’eft le fe co n d i point de la c a u fe , le point le plus eifent i e l, & qui demande le plus d’attention.
L e s parties pofent ici deux propofitions contraires.
M adame la Préfidente d’A bbadie foutient & entreprend
de prouver que fon mari e f t , depuis 1 7 8 1 , dans un état
de démence.
M.
le Préfident d’A bbadie foutient &
prouve qu’il
eft dans un état de raifon.
Ecartons d’abord les preuves de l’état de démence.
N o u s retracerons enfuité fous un point de vu e trèsfimple les preuves de l’état a&uel & habituel de raifon.
C
�18
M adame d’A lb a d ie invoque trois preuves, pour établir
que fon rr.ari a été infenfé en 1 7 81 .
,
L a première coniifte dans les deux lettres qu’il a écrites
les 18 Juillet &
16 A o û t 1781.
Mai? ces deux lettres ne prouvent que deux momens
d’abfence qu’il a e u s , lorfqu’il les a écrites. E lle s ne font
point concluantes pour fon état Habituel, même en 1781»
elles le font encore bien moins
pour fon état actue.1 &
habituel qui eft l’état fur lequel la C o u r doit prononcer.
a
L a fécondé preuve eft la lettre que le fieur dOlhaiTarry
écrite à M adam e d’ A b b a d ie , le 30 Juillet 1 7 81 .
M ais cette lettre ne parle que de mélancolie & de dïjlrac-
tïons. ]Un état de mélancolie n’eft pas un état de d é m e n ce ,
& des diftra£lions ne font point l’éclipfe de la raiion.
-La troifième preuve eft le ce rtifica t où le fieur T o n n e t ,
RégiiTeur des Terres du P o ito u , répète ce que Madame
d’Abbadie lui a dit à Poitiers, le 9 Septembre 1 7 8 1 , de
l’état de fon mari, pour colorer à fes yeux la précaution
qu’elle prenoit de le voir en fe cre t, de le faire cacher
dans la ruelle, de peur que M . d’Abbadie ne fu r v în t, 8c
de toucher vingt mille livres à fon infçu ; mais le fieur
T o n n e t n’eft dans cette partie de fon certificat que, l’écho
de Madame d’Abbadie , qui eft fans contredit le témoin
le plus fufpe£t & le moins digne de foi fur l’état de fon
mari.
Madame d’Abbadie ne prouve donc pour l’année 1 7 8 1 ,
que deux momens d’abfence qui ne forment pas un état
habituel ; & la preuve que M . le Préfident d’ Abbadie
n é to it pas en démence en 1 781 , c’eft fa correfpondance
de 178 1 avec fon épo ufe, & la précaution q u e lle a prife
�'19
,c
à Poitiers de fe dérober à fes regard s, quoiqu’il fût ma
la d e , pour percevoir fes revenus.
E lle invoque trois preuves, pour établir que fon mari a
été infenfé en 1782.
L a première eft une lettre que le (leur de Montbadon»
fon frère , a reçue de M adam e la Préfidente d’A b b a d ie ,
m è r e , en date du 30 D é ce m b re 1782.
M ais la mère dit feulement dans cette lettre que fon
fils diftrait par d’autres objets, n’a pas répondu à la de
mande que le fieur de M ontbadon lui faifoit de fa pro
curation pour procéder à un nouveau partage des biens de
la fucceffion de feu M . de M o n tb a d o n , père. E lle ne dit
pas que fon fils étoit en dém ence , le 30 D é ce m b re 17 8 2 ;
& fi M .
le Préfident d’Abbadie a refufé fa procuration
pour procéder à un nouveau partage, c ’eil parce qu’il ne
vou loit point plaider contre fa b e lle -m è r e , & qu’il lui
avoit déjà déclaré à elle-m êm e, com m e il l e d i t dans fon
interrogatoire du 13 Janvier
1 7 8 5 , qu’il
s’en rapporte-
roit aux arrangemens qu’elle feroit dans fa famille : E xem p le
d’honnêteté & de confiance refpetlueufe que les enfans
de M adam e de M ontbadon auroient dû imiter.
L a fécondé preuve de la prétendue dém ence de M *
d’Abbadie en 1782 ,
eft le certificat que M adam e
badie a fait fabriquer à P a ris,
M ai
par le fieur B o r ie ,
d’Ab~
le 6
1783.
M ais fi ce certificat porte que les M édecins ont appris
du Frère Liffonde que M . le Préfident d’Abbadie a été en
démence à P a u , en 1 7 8 2 , 1 e F rère Liffonde leur donne
lui-même à ce fujet un démenti formel.
L a troifième preuve eft l’enquête faite à Pau en 178$.
C ij
�Je la
connois
20
enfin cette enquête : on l’a citée comm e
contenant la preuve de deux faits principaux qui font ;
i°. que M . le Préfident d’Abbadie avoit fait acheter des
o i e s , pour leur apprendre l’alphabet. u°. Q u il avoit fait
acheter des chevres, pour les atteller a fa voiture.
Eh
b i e n , de 58 témoins qui ont été entendus a P a u , aucun
ne dépofe de ces faits controuvés , com me témoin o cu
laire. Les domeftiques de M . le Préfident d’ Abbadie , qui
feuls auraient été à portée d’en avoir connoiifance , n en
difent pas un feul mot. T r o is ou quatre étrangers qui en
parlent, n’en parlent que com m e témoins d’oui-dire, &
ne nomment pas le témoin principal dont ils font l’échç.
Q u e l eft donc ce témoin invifible qui a parlé par l’organe
des témoins d’oui-dire ? Faut-il le demander? C ’eft celle
qui les avoit fait aiïigner ; c’eft Madame d’Abbadie.
L ’enquête de Pau n’eft point concluante par elle-même.
E lle a été d’ailleurs annu llée, & ne peut par çonféquent
faire foi en Juftice.
Madame d’Abbadie ne prouve donc pas que fon mâri
ait été en démence en 1782 ; & la preuve qu’il n’y étoit
p as, c’eft fa correfpondance
en 1 7 8 2 , avec fes paretis ,
fes amis & fes gens d’affaires.
E lle invoque trois preuves , pour établir que fon mari
a été en dém ence en 1783.
L a première eft le
année.
certificat du 6 M ai de la même
M ais ce certificat ne prouve même pas que M . le Pré
fident d’Abbadie ait effuyé dans la journée du
6 M ai
1 7 8 3 , un accident critique. Il eft démontré faux dans la
p artie, où le certificateur dit qu’il parle d’après le F rère
�LiiTonde : il eil donc plus que fufpett dans la partie où
le cercificateur dit d’après lui-même que M . le Préfident
d’Abbadie ¿toit le 6 M a i 1783 dans un état de démence.
Si le fieur Borie en a im p o fé, quand il a dit que le F rère
LiiTonde lui avoit attedé la prétendue démence de M .
le Préfident d’Abbadie à Pau en 1 7 8 2 , qui peut s’aiïurer
qu’il n’en impofe pas égalem ent, quand il attefte fa prétendue-démence dans la journée du 6 M ai 1783 ? D ’ail
leurs ce n’eft pas l’accident du 6 ?vïai 1783 ,
q U’iI faut
juger , c ’eft l’état aftuel ôc habituel de M . le Préfident
d’Abbadie.
L a fécondé preuve de la prétendue dém ence de M . le
Préfident d’Abbadie en 1783 ,
eft la lettre de M adame
la Préfiden te d’Abbadie , m è r e , à fa bru, en date du ip N o
vem bre d e là même année, par laquelle elle promet de faire
continuer à fon fils, lorfqu’il fera à P a u ,
le traitement par
l ’éle£tricité.
Mais ce traitement convient aux maladies nerveufes ,
bien plus qu’à la démence. Madame d’Abbadie , m ère, n’a
donc pas reconnu la prétendue démence de fon fils, quand
elle a annoncé à à fa b ru , qu’elle luiferoit continuer c e
remède. E lle ne l’a pas reconnue non plus dans d’autres
lettres qu’elle a écrites à fa bru. E t com m ent pourroit-on
foupçonner qu’elle regardoit fon fils comme infenfé en
i
7 8 3 î qi,and on vo it que par fon teftament du 10 F év rie r
de la même année, elle le charge de foins qui ne convien
nent qu a un homme raifonnable.
L a troifième preuve eft la lettre du frère LiiTonde à
M adame d’A b b a d ie , du mois de N o v e m b re
1783,
où
il lui rend com pte du vo y a g e de fon mari , qui é t o i t ,
�22
dit i l , diftrait & g a i, & qui chantoit fans être prié; mais
on peut être diftrait & gai fans être en dém ence; &
M.
fi
le Préfident d’A bbadie chantoit fans en être p r i é , c ’eft
qu’il ne chante que pour fon plaifir, ôc qu’il n’eft pas un
de ces hommes qu’ on prie de chanter pour le plaifir des
autres.
M adam e d A ’bbad’te ne prouve donc pas que fon mari
ait été en démence en 1783.
E t la preuve qu’il n’y étoit p a s, c’eft fa correfpcndance
de 1783 , c ’eil la précaution que M adam e d’Abbadie a
prife de recommander le fecret pour lu i, au R é g ifle u r, quand
elle lui a fait demander l’état de fa ca ifle , par une lettre
du fieur O liv ier , du 2 Juin 1783 ; c ’eil le com pte que
le fieur O livier lui a rendu le 10 N o v em b re 1783 ; c’eft
le refus qu’il a fait d’allouer en dépenfe 36,000 liv. que
ce caiffier avoit
livrées à Madame d’A b b a d ie , le 8 du
même mois ; c’eft enfin le foin qu’elle a eu elle-même de
retirer une reconnoiflance de l u i ,
du léger à - com pte
qu’elle lui a remis, le 13 N o v e m b re 1 7 8 3 , la veille de
fon départ pour Pau , ainfi qu’il eit dit dans la tranfa&ion
du 2 Juillet 1784.
Madame
d’Abbadie invoque deux fortes de p r e u v e s ,
pour établir que fon mari a été infenfé à Pau en 1784.
L a première eft une colle£tion immenfe de lettres qu’elle
a reçues en 1784 , principalement du fieur L ou ftau , fon
agen t, &
de la dame D etchegorry , fa confidente , la
femme dd ce Procureur de Pau qui avoit aiTifté à Poitiers
en 1781 , à la recette myftérieufe de 20,000 l i v . , & que
M.
le Préfident d’Abbadie loge gratuitement dans
h ô t e l, depuis plus de vingt ans.
fon
�*3
Mais plus ces lettres font m ultipliées,
plus elles font
Îufpe&es. O n n’accable pas une femme pendant une année
en tière, de nouvelles facheufes fur l’état de fon mari, qu’autant* qu’elle le veut bien, & qu’elle le demande elle-même.
D ’ailleurs des lettres niiilives ne font point foi contre un
tiers; c’eft une maxime fa c r é e , & qui ne fera point mé
connue pour la première fo is , en matière d’état, au pré
judice de M . le Préfident d’A bbadie.
L a fécondé preuve de la prétendue dém ence de M . le
Préfident d’Abbadie en 1 7 8 4 , eft l’enquête faite à Pau en
1787.
M ais cette enquête où les témoins ne dépofent que d’ouidires fur les faits p rin cip a u x, a été annullée d’ailleurs par
le même jugem ent auquel M . le Préfident d’A bbadie d o it ,
Meilleurs , le bonheur de vous avoir pour Juges , & une
enquête nulle ne fauroit opérer la moindre convi& ion ;
quod nullum efl nullum producit effeclum.
M adam e d’Abbadie ne prouve donc pas que fon mari
ait été en dém ence en 1784.
E t la preuve qu’il n’y étoit p a s , c ’eft fa correfpondance
de 1 7 8 4 , ave c fon époufe, fa foeu r, M e H utteau, alors
fon confeil & fon a m i; M . de C h e rau te, le fieur L ou ftau ,
a v e c tous ceu x qui
faifoient les
préparatifs fecrets de
fon interdi&ion.
M adam e d’Abbadie invoque fix preuves pour établir que
fon mari étoit en détrtence en 1785.
L a première eft la procuration fous feîng-privé donnée
par M . le Préfident d’A bbadie au fieur d’E tch é g a rai, le
30 D é ce m b re
1784 ,
que Madame d’Abbadie
com m e une preuve que fon
regarde
mari étoit dans un état de
�24
démence qui ne lui permettent pas de la donner pardevant
Notaire.
Mais qui fouferit une procuration donnée fous feing-privé
peut en foufcrire une donnée pardevant Notaire. C e n eft
p a s
l a
prétendue dém ence de M . le Préfident d’A b b a d ie ,
c ’eft la fatigue de
fon
voyage qui l’a empêché de
tranfporter chez un N otaire le 30 D écem bre
fe
1784 , le
lendemain de fon arrivée à Paris.
_La fécondé preuve de fa prétendue démence en 1785' >
eft le dire de fon Procureur à la vacation du 26 Janvier de
la môme année.
• L e Procureur de M . le Préfident d’Abbadie , a bien dit
â cette vacation , q u il étoit malade dans fon lit; mais il n’a
pas dit qu’il étoit en démence.
L a troifième preuve eft la requête donnée au Parlement
de P a u , par M . le Préfident d’Abbadie le 8 avril
178; ^
à fin d’oppofition à l ’arrêt du 3 Mars précédent qui l’avoit
interdit par provifion com m e infenfé.
J 1 feroit bien étrange qu’une requête dont le but étoit de
faire juger en 178 j que M . le Préfident d’A bbadie n’étoit
pas in fen fé , contint l’aveu qu’il étoit infenié. A u di n’y
trouve-t-on pas un pareil aveu. O n y dit bien que M . le
Préfident d’Abbadie a éprouvé autrefois des crifes fâcheufes;
mais on n’y dit pas que ces crifes étoient des accès de folie.
La
quatrième preuve
d’Abbadie , dans
fon
eft l’aveu de M .
interrogatoire
17 8 ;.
C e Magiftrat a avoué dans
a v o ite u en
du
29
le Préfident
D écem bre
cet interrogatoire ,
qu’il
1 7 8 ; , pendant fon féjour dans la niaifon de
g a in t-V i& o r P deux accès d'une maladie de nerfs, dont il avoit
tu
�eu précédemment quelques attaques , & qui avoient duré deux
ou trois jours chacun ; mais loin qu’il ait reconnu que
c ’étoient des accès de folie , il dit
au contraire dans le
m êm e interrogatoire , « qu’il a cru jouir dans ces
accès
» de fa préfence d ’efprit, que quand les accès fe font paf»
» fés, il s’efi: rappel’ é
ce qu’il avoit, dit ôc fait pendant
» ces a c c è s , & qu’il a jugé raifonnable tout ce qu’il s’eit
» rappellé, com m e il en avoit jugd pendant l’accès m êm e;
» mais que ce qui le raiTure le p lu s , c’efl; le tém oignage de
» fon M é d e c in , qui lui a dit que pendant les accès m ê m e s ,
» il lui avoit répondu exactement à toutes les' queftion*
qu’il lui avoit faites ».
L ’aveu de M . le Préfident d’A bbadie efi: indivifible , &
puifqu’on veu t le convaincre par lui-même qu’il a eu deux
accès pendant cinq mois qu’il a paifés dans la maifon de
S aint-V ictor, il faut qu’on convienne avec lui que c ’éroient
deux accès d'une maladie de nerfs qui avoient duré deux ou
trois jo u r s , & qui ne lui avoient point fait perdre l’ufage
de la raifon.
L a cinquième preuve eft le. dire que le fieur P h ilip ,
M é d e c in , a fait en l’hôtel du fieur Lieutenant-Civil , le
ap Septem bre 178^.
Mais[ le fieur Philip a déclaré formellement dans ce dire
que ce qu’on appelle accès de dém ence dans la perfonne
d e M . l e Préfident d’Abbodie, n’eft qu’une maladie n e rv e u fe ,
curable de fa nature, déjà diminuée par l’ufagè des re m è
des qu’il lui a indiqués , &: qui ne lui fait point perdre la
raifon.
Enfin la fixième preuve d e là prétendue dém ence d e M .
l e Préfident d’A b bad ie, en 1 7 8 ^ , eft la correfpondance du
D,
�2
6
C o ch er P o u c e t avec M adam e la P r é s e n t e d’Abbadie. _
O n voit en effet dix-fept lettres du C o c h e r D o u c e t , qui
accufe la réception de celles que M adam e la P r u d e n t e
d’Abbadie lui a fait l’honneur de lui écrire , qui lui confe ille ,
dans une datée du
22
avril 178s1 , d’enfermer
l’A b b é d’Etchegarai dans une chambre, s’il va dans la maifon du
fieur de B o r d a , qui lui rend com pte dans
une
autre , d’un M ém oire imprimé qu’il a vu chez m o i , Jorfqu’il y a accompagné fon maître, & q ui, dans la plupart,
lui donne des nouvelles telles qu’elle les d efiro it, fur l'état
de ;M . le Préfident d’Abbadie.
Mais la correfpondance de M adam e la Préfidente d’A b
badie avec le C o ch er D o u c e t , ce faux délateur de fon
maître , chatte par lu i, &: indécemment accueilli par elle
ne prouve que les machinations de l’une & la lâche perfi
die de l’autre. L a bienféance,
l’honnêteté, la confiance
néceffaire des maîtres pour ceux, qui les fe r v e n t, le repos
des fam ^ les, la fureté du Magiltrat com m e celle du fimple
C it o y e n , dans l’azyle facré qu’ils habitent, tout crie v e n
geance contre cette correfpondance fcandaleufe , 6c la
d évo u e à la haine publiqus.
M adam e d’Abbadie ne prouve pas que fon mari ait été
en démence en 1785’ , & la preuve qu’il n’y étoit p a s , ce
font les deux certificats
des fieurs D e j e a n , de M onta-
b o u r g , D a r c e t , Philip ôc M athey* M é d e c in s ,
les j & i ç
donnés
Juillet 1785;,- après plufieurs vifites ; ce font
les deux certificats du fieur P h ilip , des 14 mai &
juillet 1 7 8 ; ; ce font les démarches continuelles
le Préfident d’Abbadie a faites
des Magiftrats du C o n f e i l ,
en
14
que M .
1 7 8 5 , tantôt auprès
pour folliciter la caifation
des
�27
arrêts du Parlement de Pau; tantôt auprès du fîeur L ie u te .
nant C i v i l , pour faire co m m encer la procédure que le C o n feil lui avoit r e n v o y é e , en calTant tout ce qui avoit été fait
à Pau ; tantôt auprès de fes Confeils pour régler avec eux
la marche de cette- procédure.
A joutons à toutes ces preuves de l'état de raifon de
M . le Président d A b b a d ie dans les années antérieures 'à
cette conteftation, le fuffrage de fa mère & de fon oncle
qui jufqu a leur décès arrivé vers la fin de l’année 1 7 8 4 ,
ont perfévéré dans la confiance qu'ils lui avoient a cco rd é e,
en le chargeant de l’exécution de leurs teftamens , 6c le
tém oignage de vingt-fix parens & amis q u i , au mois de
feptembre
178)*, ont rendu juftice dans leur a v i s , à fa
fageife & à fa bonne adminiftration. C e t avis eft plus jufte &
plus légal que celui donné à Pau le 2 mars 1 7 8 ^ , par
trois amis de Madame d’A b b a d ie , ôc par cinq parens &
alliés éloignés de fon mari , dont deux font en contradic
tion avec e u x -m ê m e s , & dont un demande pardon à M . le
Préfient d’ Abbadie de la foiblefie qu’il a eue de fe laiiTer
fé d u ire ,& d e
voter fon interdiction contre le cri de fa
confcience. Il eft plus jufte & plus légal que celui donné
au Cliâteletpar des parens , des alliés 8c des amis de M adame
d ’Abbadie , que leur qualité rendoit fu fp e & s , que les O r
donnances du fieur L ie u ten an t-C ivil ne permettoient pas
d’appeller, & plus digne de foi que la déclaration du C o
cher D o u c e t , q u i a eu l’audace d’ aller figurer avec deux
autres va lets, dont un aux gages de M adam e d’A b b a d ie
dans
raiTemblée des foi - difans parens
&
amis de fon
maître.
L e défenfeur de M adame d’A bbadie invoque fans ceiïe
D ij
�a8
ïa rrê td u Parlement d e P a u , du 3 mars 1 7 8 ? , qui prononce:
rinterdiûion
provifoire de M . le Préiident d A b b a d ie ,,
com m e un témoignage de fa demence.
Si je dis que cet arrêt a été c a f l é , il s’efforce
de le
juftifier, & il dit qu’il l’a rétabli.
Si je dis que le Parlement de Pau n’a jamais interdit
par p ro v ifio n ,. fur un iimple avis de parens , un hom m e
accufé de démence , il dit que la Jurifprudenca de cette
C o u r eft d’interdire ainfi pour caufe de dém ence , & il cite
dix-fept arrêts qui ont interdit par provifion des pères de
famille accufés non de d ém en ce, mais de p rod igalité, dont
les. diiTipations devoient Être nécefTairement établies par
des a £ t e s d o n t la ruinei auroit pu être confom m ée dans
vingt-quatre h e u re s , & dont l’interdi&ion provifoire n’a
pas été par conféquent prononcée com m e celle de M . le
Préfident d’A b b a d ie , fans connoiifance de c a u fe , & fans
une nécefïlté apparente.
Si je dis qu’un Bédeau de l’Univerfité de P a u , nommé
C a ta ly,, accufé de démence en 1 7 8 j , a échappé à Tinterdittion provifoire, malgré l’avis de fes parens, qui porte v
que fon état d’infirmité ne lui permet pas d’adminiftrer
fes b ien s, & que l ’adminiflration doit en être déférée au
fieur Cataly C u r é , il répond que Cataly n’avoit aucuns,
b ie n s , & que fa famille ne. s’o ccu poit que des moyens,
de pourvoir à fa fubfiftance.
Si je dis que les M édécins qui ont vifité C a ta ly en
exécution d’un arrêt du Parlement, de P a u , ont rapporté,
» qu’il étoit dans un état d’afïaiffement qui prodtiifoit une. '
» diminution & une difficulté de jugement qui le rendoit
» impropre à foutenir fes- id ées, » il perfifte à dire qu’il
�29
ne s’agiiToit point de l’état moral de C a ta ly , & qu’il s’agiffoit'uniquem ent de lui donner du pain.
A u refte, la procédure relative à ce Bedeau d e l’ Univerfité
eft fous les yeu x de M . l ’A vocat-G énéral. C e Magiilrat verra
ii j’ai bien ou mal lu, & aura la bonté de le dire.
Je me fuis plaint contre M adam e d’A b b a d ie de Tinterdi&ion provifoire de Ton mari ; c’étoit le droit ôc le devoir
de mon rriiniftère : maïs en parlant de l’arrêt du Parlement
de Pau , qui l a p r o n o n c é e , je n’ai pointbleiTd le refpeft du
à cette C o u r , com m e on a voulu le faire entendre. J ’ai
l’honneur d’être connu des anciens Magiftrats du Parlement
de Pau , fous les yeux defquels j’ai c o m m e n c é , il y a
vingt-quatre ans , l’exercice de ma profeflion. Ils fçavent
fi je leur fus dévoué ôc fidèle , & je crois leur prouver que
je le fuis encore , en défendant un de leurs chefs , celui
qui dans des temps orageux fe montra à leur tête , &
fçut faire a ve c eux le facrifice de fon état ôc de fa libertéN o u s voici arrivés à l’année 17 8 6 , fans que nous ayons
trouvé dans le cours des années antérieures des preuves de
la prétendue dém ence de M . le Préfident d’Abbadie. N o u s
y avons trouvé , au contraire, des preuves multipliées de
fon état deraifon. L es cinq premiers mois de l’année 1 7 8 6 ,
eoniacrés à l’examen de fa perfonne , von t fournir le co m
plément de ces preuves 3 £c mettre le dernier fceau à fon
état.
C e tte procédure a été affez longue pour fixer l’état habi
tuel de M . le Préfident d’A b b a d ie , & affez rigoureufe pour
qu’aucun fymptôme de fon état n’ait échappé aux regards
,de la Juftice.
Madame 4’Abbadie a fait diverfes defcriptions de l’état
�de fon mari : vo ici com m ent elle s’exprimoit nu Parlement
de P a u , dans fa R e q u ê te du i8 février 1 7 8 ; , qui eft la
R e q u ê te introduclive de linftance.
3) L a maladie de' M . le Préfident d’Abbadie , difoit-elle ,
» conlifte dans uns privation totale des facultés intellec» tuelles , qui. femble être atïujettie à un cours périodique
» pendant des accès qui durent huit à dix jours : . . . à ces
» accès fuccede une efpèce de cslm e a p p arent, qui fubfifte
» à-peu-près pendant le même tem ps,& dans.ce calme même
» l’efprit ne reprend qu’imparfaitement une efpèce d’ailiette
» qui ne lui b iffe que la faculté de réunir quelques idées.
» L a vie de. M . le Prélident d’Abbadie eft partagée,
» ajou toit-o n , entre celle d’un homme en dém ence, & celle
» d’ un hom m e qui conferve à peine les lumières de l’en» fan ce ».
C e langage étoit bon à Pau , où
vouloit faire interdire
Madame d’Abbadie
fon mari a b f e n t, fans inftruûion
préalable, fans connoiiiance de caufe.
Mais à P a r is , depuis que la procédure du C hâtelet a
fixé le véritable état de M . le Préfident d’Abbadie , il
n’étoit plus poiTible de divifer fa vie en deux révolutions
de huit à dix jours chacune , dont l’une le plonge dans
les ténèbres de la f o l i e , & dont l’autre lui rend à peine
les lumières de l’enfance. O n a imaginé un nouveau fyftême , auquel on a cru pouvoir donner un peu plus de
v.raifemblance : on a plaidé que tous les i£ , 18 & 20
jo u rs , M . le Préfident d’Abbadie eft fujet à des accès de
folie qui durent 4 , 8 , 10 & 12 jours.
J e n’ai befoin., pour renverfer ce fyflême , que de fuivre
rapidement l’ordre chronologique des aôes qui compofent
�J'
t
$
la procédure du C h â te ie t; je démontrerai, par ce m o y e n /
r°. que M . le Préfident d’Abbadie n’eft point malade tous
les i y , iS & 20 jo u rs ; a 0. qu’il n’eit point malade pen
dant 4 , 3 , i o &
i2 jours'; 3°. que fa maladie n’eft point
là démence.
Pour mettre plus de clarté dans l’ôr'dre chronologique
de cette p ro c é d u re , je la diviferai en deux époques; l’une
depuis le 29 D é ce m b re 178J , jour du premier interroga
to ire , jufques ali 3 Mars 1786 , jour de la première viiite des
M édecins ; l ’autre depuis le 3 Mars jufqu’au 18 M a i , jour
du dernier interrogatoire.
L e 29 D é ce m b re 17%$', premier interrogatoire o ù M . le Première époque.
Préfident d’ A bbadie développe la raifon la plus faine ôc
la plus entière.
( L e f Janvier 1 7 8 5 , deuxième interrogatoire exem pt
de critique , quoique , d’après une R e q u ê te de M adam e
d’A bbadie du 2 du même m o i s , fon mari dut être le j
dans un accès de folie.
L e s i? 6c / 2 du m ême m o i s , M . le Préfident d’A b b a d ie
comparoît en l ’hôtel du M a g i ü r a t , & demande à être
interrogé.
O
Il eft interrogé l e 13 pour la troifième fois;, & répond
avec la plus grande jufteiTe.
L e 1 7 , jour défigné com m e un jour de dém ence , il
donne dans un quatrième interrogatoire des preuves fen*
fibles de fa raifon.
L e 2 1 , jour indiqué par le M a g iftra t, cinquième- inter~
rogatoire auiïi fain que les précédens.
2 S > fixième interrogatoire également b o n , dans
�32
lequel le fieur Lieutenant - C iv il fait contracter a M . le
Préfident d’Abbadie l’engagem ent de comparoure le i
.
Février fu iv a n t, pour être entendu.
D u 2 y Janvier au premier F é v r i e r , il y a un intervalle
de fix jours; mais nous avons la preuve la plus, convain
cante que cet intervalle n’a pas été marqué par un accès
de folie : c’eft l’aveu même de M adame d’A b b a d ie , qui
dans fa note 2 , fur le rapport des M éd ecins , dit que M . l e
Préfident d’Abbadie avoit eu un accès dans les premiers
jours du mois de F évrier. E lle reconnoît donc qu’il n’a pas
eu d’accès dans les iix derniers jours du mois de J an vier;
car elle convient que les accès font divifés entr’eux par
des intervalles de i j , 18 ôc 20 jours. V o ilà le mois de
Janvier révolu fans accès, d’après l’aveu même de Madame
d’Abbadie. N ou s n’avons donc befoin que de prouver qu’il
n’y apaseu d’accès dans les premiers jours du mois d eF év rierj
& cette preuve eft confignée dans la procédure.
L e premier F év rie r , feptième interrogatoire, où l’éner
gie du fentiment fe joint à la lumière de la raifon.
L es 3 ôc 4 du même m o i s , M . le Préfident d’Abbadie
comparoît fie demande à être interrogé.
L e 6 il eft interrogé pour la huitième fo is , & répond
avec jufteiTe.
L e 8 , il comparoît de n o u v e a u , ôc demande à être
interrogé.
L e 9 , il fubit le neuvième interrogatoire, qui n’a eifuyé
aucune critique.
L e s 14 & 18 il co m p a ro ît, ôc demande à être interrogé.
Le
�33
L e 2 0 , le (leur L ieu tenan t-C ivil ordonne la vifite de«
M édecins.
Arrêtons - nous un inftant.
Du
2p D écem bre 1 7 8 j au 18 F évrier
1786 inclufi-
v e m e n t , il y a un intervalle de cinquante - deux jours
marqués par des a£tes perfonnels à M . le Préfident d’A b b a d ie , ôc fi voifins les uns des au tres, qu’ils ne laiflent
point de place à un accès de folie de 12 , 1 0 , 8 , 6 , ni
m êm e quatre jours. ( 1) Il eft donc faux que Al. le Préfident
d’A bbadie foit fujet à des accès tous les 15-, 18 & 20
jo u r s , & que ces accès durent 6 y 8 , 10 & 12 jours.
Continuons.
L ’O rdonnance du 20 F é v r i e r , qui a fufpendu le cours
des interrogatoires pour faire place aux vifites des M é J e - ,
c i n s , n’a été fignifiée que le 2 Mars fu iv a n t, à la requête
de M . le Préfident d’A b bad ie, qui attendoic que M adam e
fon époufe la fie fignifier Ôc exécuter ; ce qu’elle n’a pas
ju gé à propos de faire. E lle trouve par ce moyen un vuide
de dix jours ; fa v o ir , depuis le 20 F évrier jufques au 2
Mars , ôc com m e
elle
a befoin de tirer parti de to u t ,
elle p la c e , après-coup, dans ce vuide un accès de folie.
(1 ) I l n’y a d a n sc e t efpace de yz jourj , qu’ un feul intervalle où Madame
d ’ Abbadie puifle placer un a c c è s , qui eit l'intervalle du *9 Décembre au
y Janvier ; ( car elle convient qu’ il n’y a pas eu d’accès à la fin du mois
de Janvier ) ; mais outre que les interrogatoires fubis dans ces deux jours
excluent l’ idée d’ un accès de folie intermédiaire, dont Madame d’Abbadie
n’a , ni ne peut avoir aucune preuve , la persévérance de l'état d« raifon
dans ce court interva'le eit d’ ailleurs certifiée par le Chirurgien de V i t r y ,
qui vo yo it tous les jours M. le Préfident d’ Abbadie.
E
�34
Mais fi elle avoit cru furprendre fon mari en démence
dans les derniers jours du mois de F é v r i e r , eUe nauroit
pas manqué de le faire vifiter par les M é d e c in s , en exé
cution de l’O rd onnance du 20 du môme mois. D ’ ailleurs,
le fieur Philip attefte , dans le rapport, qu’il a vifité jour
nellement M . le Prëfident d’Abbadie depuis la première
quinzaine du mois de F évrier jufques au 3 M a r s , jour où
v les vifites juridiques ont c o m m e n c é , & qu’il l’a toujours
trouvé jouiflant de fa raifon.
M.
le Préfident d’Abbadie n’a donc pas eu d’accès dans
les derniers jours du mois de 1* évrier 1786.
N o u s avons parcouru la première époque , qui comprend
l’intervalle du 29 D écem b re »785 au 3 Mars 1 7 8 6 , c’eftà-dire foixante - quatre
jours ,
fans
que
nous
ayons
trouvé un feul accès de folie ; parcourons maintenant la
fécondé é p o q u e , qui eit du 3 Mars au 18 M ai.
L e s vifites des M édecins commencent le 3 Mars : ils
Deuxième
époque.
vo y en t M . le Préfident d’Abbadie pendant foixante-huit
jours confécutifs; l’un tous les jo u r s , l’autre tous les deux
jours. L eu r rapport conftate qu’il n’y a qu’un jour dans
le mois de M a r s , qui efl le ip , & deux jours dans le mois
d’A v r i l , qui font le 10 & le 11 , où ils ne l’ayent point
trouvé chez lui ( parce qu’il étoit forti ) ; mais il a été
vu le 11 Avril par le fieur L ie u te n a n t-C iv il, enforte qu’il
n y a qu’un feul jour dans le mois de M a r s , & un feul
jour dans le mois d’A v r i l , où M . le Préfident d’Abbadie
n’ait pas été fous les yeux de la Juftice.
D epuis le
3 Mars jufques au
î7
in clu fivem e n t, les
�M éd ecins le trouvent toujours en bon é t a t , fuivant leur
rapport.
L e 18 , il a un accès de fièvre ; maïs fes p a roles, dit
le fieur Philip , étoient d’un jugem ent fain , & n’annonçoient aucune efpèce de lézion dans les opérations de *
la m e .
L e ip , il va fe promener à Clamart-fous-Meudon.
L e 2 0 , il eft vifité fu c c e lliv e m e n t, dans la matinée ;
par les deux M édecins , qui s’accordent à dire qu’il étoit
a g i t é , mais qu’il ne déraifonnoit pas.
L e 21 , les deux M édecins le trouvent dans l’état de
r a ifo n , qui e f t , fuivant leur ra p p ort, fon état habituel.
L es 2 2 , 23 , 2 4 ,
& jours fu iv a n s , jufques au p A v ril
in clu fivem en t, ils le trouvent en bon é t a t , fuivant leur
rapport.
Le
11 A vril il comparoît en l’hôtel du M a g iftr a t, &
confère avec lui d’une manière raifonnable. C e fait eft
conftaté par le procès-verbal du 12 , qui fait mention de
la comparution du 11 .
L e 1 2 , il fait un dire lon g & raifonné en l’hôtel du
fieur L ieu tenan t-C ivil.
L e 1.3 , il fubit dans fa maifon l’onzièm e interrogatoire,
où fes réponfes marquent de l'agitation , ôf non pas la
dém ence. O n y trouve feulement deux ou trois idées dont
il reconnoît lu i-m êm e à l’inftant le peu de ju ftefle, tant
il eft vrai que la raifon dominoit toujours en lui au milieu
de cette agitation paiTagère, ainfi qu’il eft conftaté par le
rapport des M édecins , qui déclarent d’ailleurs que le même
jour 13 A v r i l , vers m in u it, il a répondu jufte aux diverfes
E
ij
�56
queftions qu’ils lui ont faites r & qu ils lui en ont fait aflez
pour s’afifurer que fa fituation étoit changée en bien.
Il étoit encore mieux le 14 A v r i l , fuivanc leur rapport.
D epuis le
14 A v ril jufques au p M a i , jour de leur
• dernière vilite , c’e f t - à - d i r e pendant vingt-fix jo u rs , les
M éd ecin s continuent de vifiter aiTidumetit M . le Préfident
d’A b b a d ie , le trouvent toujours dans un calme parfait,
dans la plénitude du bon fe n s , & le laiifent en cet é ta t;
c e qui fe trouve confirmé par cinq interrogatoires qu il
a
fubis, & par fix dires qu’il a faits perfonnellement en l’hôtel
du fieur L ie u te n a n t- C iv il, depuis le 14 A vril jufques au
18 M a i, jour du dernier interrogatoire.
Dans la fécondé époque , qui s’étend du 5- Mars au 18
M a i , ôc qui comprend foixante-dix-fept l'ours, nous trou
vons deux révolutions dans la fanté de M . le Préfident
d’Abbadie.
Suivant Je r a p p o rt, ces révolutions n’ont été que de
trois jours chacune.
Suivant le ra p p o rt, M . le Préfident d’Abbadie n’a point
déraifonné dans la première.
Suivant le rapport, ôc d’après le dire du 12 A vril , &
l’interrogatoire du 13 , la raifon de M . le Piéfident d’A bbadîe ne s’eft point éclipfée dans la fécondé , & n’a eifuyé
qu’une agitation p a iïa g ère, au milieu de laquelle elle a
toujours dominé : c’eft l’expreflion du rapport ; c’eft le
réfultat du procès-verbal d’audition.
Réfumons.
D epuis le 2p D écem bre
17 8 5 ,
c ’eft-à-dire dans
1 7 8 ; jufques
l’efpace
de
cent
au
18 M a i
quarante-un
jours que M . le Préfident d’Abbadie a paifés fous les yeux
de la J u f lic e , on n e n trouve que deux ou trois couverts
�37
d’ un léger nuâgc qui n’a point fait éclipfer fa raifon.
P e r m e tte z , M e ille u rs , que je remette fous vos yeux le
dire que M . le Préfident .d’A bbadie a fait en l’hôtel du
fieui; L ie u te n a n t-C iv il le 12 A v r i l , qui étoit un jour d’agi
tation. V o u s allez voir qu’un jour d’agitation n’eft point
pour M . le Préfident d’A b bad ie un jour de démence.
« L eq u el nous a dit qu’en rentrant hier ch ez l u i , fur
» les onze heures du f o i r , il a appris que nous avions pris
» la peine de venir le voir ; qu’il lui a été remis un billet
» que nous lui avions é c r i t , par lequel nous lui marquions
» de vouloir bien fe rendre en notre hôtel dans la fo ir é e ,
» ou aujourd’hui dans i après-midi.; que cédant à l’empref» fement de fe rendre à notre invitation., il s’eft tranfporté
» hier au foir çn notre hôtel entre onze.heures & m in u it,
» pour nous demander a£te de fa comparution ; que n’ayant
>3
point notre G r e f f i e r , nous n’avons pu faire mention fur
» notre procès-verbal de fa com parution, & nous l ’avons
» remis à c e jo u rd ’hui ; qu’il camparoît en c o n fé q u e n c e , &
» nous fupplie de lui donner a£le de fa comparution , tant
» du jour d’hier que d’aujourd’hui, & de fes offres de répondre
» aux queftions que nous voudrons lui fa ire, & a figné ».
V o ilà le langage que M . le Préfident d’A bbadie a tenu
le 12 A vril , le jour le plus critique qu’il ait eu dans l’eipace
d’environ çjnq mois. C e n’eft pas là le langage de la dé
mence.
L a procédure du C h â te le t, continuée pendant cinq mois
moins douze jo u r s , prouve i°. que M . le Préfident d’A b badie n’eft point malade tous les
ij,
18 &
20 jo u rs ;
2 0. qu’il n’eft point malade pendant 5 , 6 , 8 , 10 & 12
jours ; 30. q ue çz maladie n’eft point la démence.
�M. le Préfident
eft un état de
38
d’A b bad ie p rou ve que
fon
état habituel
raifon faine & en tiere, & que fon état
accidentel & paffager n’efl pas
un
état
de
folie.
Par quel m o tif ie r o it il donc interdit ?
L a dame de Saintot n’a pas été interdite, par l’arrêt
12
F é v rie r
du
1 6 4 8 , quoiqu’elle fût fujette à des accès de
m é la n c o lie , qui affoiblifloient de temps en temps fa mémoire
& fa raifon: & pourquoi ?
Parce
ment dans un état de ra ifo n , &
qu’elle étoit habituelle
qu’elle n’avoit pas
mal
adminiftré.
L e C o m te de Sauveterre avoit été interdit au C h â te let
en 1 7 8 2 , & M e Babille avoit été nommé d’office confeil
de fa curatelle. L a C o u r a infirmé la fentence d’interdic
tion
en lui confervant le même confeil : &
pourquoi ?
parce que le C o m te de Sauveterre n’étoit pas imbecille
quoiqu’il eût l’efprit fo ib le , & qu’il n’avoit pas encore fait
de grandes diflipations.
L e (leur Profit n’a pas été interdit pas l’arrêt du 7 Mars
préfent mois , quoiqu’il eût efluyé plufieurs crifes violentes
marquées les unes par la d é m e n c e , les autres par la fureur :
& pourquoi ? parce qu’il étoit habituellement dans un état
de raifon , & qu’il n’avoit pas mal adminiftré.
C es arrêts font conformes à la difpofition de la L o i ,
qui ne donne des curateurs qu’à ceux que leur état habituel
rend abfolument incapables de bien adminiftrer par euxmêmes. M.-'ntz captis....& qui perpetuo morbo lalorant, quia
rebus fu is fuperejje non poffunt, curatores dandi funt.
M . le Prélidcnt d’Abbadie eft en état de li e n adminiftrer
par lui-même. Sa capacité eft démontrée par la preuve la plus
co n va in ca n te , qui eft l ’expérience. D epuis 1 7 8 1 , époque
�!v
.
.
39
depuis laquelle fon époufe fe plaît à dire qu’il eft incapable
de toute adminiftration, il a fait chaque année des épargnes
!
qui ont fe rv ià augmenter íes biens ; il a em ployé en 1784,,
30000 liv. d’épargnes à acquitter d’autant les legs portés
par le teftanient de fa mere. L es a&es d’acquifition & les
quittances des legs font joints à la procédure qui conftate
I9 fituation de fon êfprit ; il fait v o ir en m êm e temps qu’M
eft dans l’habitude de raifonner, & dans l’habitude de bien
adminiftrer.
M adame d’Abbadie op p ofe deux arrêts d’interdi£tion
rendus l’ un contre M . le Préfident de P a n n e s , l’autre contre
la dame de la Garde.
L a C o u r fait par quels motifs elle s’eft principalement
déterminée à prononcer ces deux interdi&ions. E lle fait
aufii que de pareils motifs ne fe rencontrent point dans cette
caufe.
D ’a illeu rs, M . le Préfident de Pannes étoit en démence
pendant des mois entiers j des crifes auilï longues pouvoient
donner de grandes alarmes fur fon com pte; & le défenfeurde
M adam e d’Abbadie foutenoit que la dame de la Garde étoit
conftamment infenfée , fi non dans fes difcours
du moins
dans fes attio n s, c e qu’il ne peut pas dire de M . le P r é
fident d’A b bad ie, fans fe jouer de la notoriété publique.
Madame d A b b a d i e , accablée de la raifon de fon m ari,
qui s’eft foutenue fi longtemps dans fes interrogatoires,
voudroit faire entendre que
ce
de fa fagefíe, & invoque à l’appui de ce
'
preuves
paradoxe, ce que
ne font pas là des
M . d’Aguefteau dit dans la caufe du teftament.de M . l’A b b é
d Orldans.
Mais pour faire fentir la mauvaife application qu’elle
l
�4-0
fait de l’autorité de M . d’A g u e ife a u , il me fuffit d*obferver
que ce Magiftrat avoit déjà rendu com pte d une infinité de
faits qui
ca ra & e rifo ie n t
la dém ence com pletteôc continuelle
de M . l ’A b b é d’O r lé a n s , & dont la preuve étoit acquife par
l’enquête de M . le Prince de C o n t i , lorfqu’il s’eft exprimé
en ces termes :
« Suppofons qu’avec une enquête p a re ille , l’on vienne
v vous demander la confirmation d’une fentence d’interdic» tion : croira-t-on que l’on pût y trouver la matière d’une
» difficulté férieufe & véritable ? Q uand même les interroga» toires que l’on feroit fubir en ce cas à M . l’A b b é d’Orléans
» feroient fages & pleins d’une raifon apparente, pour» roient-îls jamais effacer
cette multitude prodigieufe
de
» f û t s , qui forment une image fi v iv e du cara&ere d e fo n
» efprit- ».
V o k - o n dans cette ca u fe ,
com m e dans celle de M .
l’ Abbé d’O rlé a n s , une multitude prodigieufe de faits de
dém ence ? A -t-o n feulement la preuve d’tin feul fait grave
qui annonce quelque danger imminent pour la perfonne
ou pour la fortune de M . le Préfident d’A bbad ie? O n n’a
que des témoins d’oui-dire des deux faits principaux, ou
plutôt de l’intention qu’on dit que M . le Préfident d’A b
badie a eue , d’atteler à fa voiture des chevres qu’il n’y a
point a tte lé e s , & d’enfeigner à des oyes l’alphabet
qu’il
n’a jamais prononcé devant elles , & /enquête qui
ren
ferme ces abfurditésa été annullée. Q u e lle différence entre
la caufe de M . l’A b bé d’Orléans & celle de M . le Préfident
d’A b b a d ie ! Dans la prem iere, c’étoit une multitude p ro
digieufe de faits de dém ence qui n’étoient contrebalancés
par aucun interrogatoire : dans la f é c o n d é , c’eft une m ul
titude
�41
titude d’interrogatoires pleins de raifon qui ne font contre
balancés par aucuns faits
qui cara&erifent un état
de
démence.
V o u le z-v o u s iavoir ce que penfoit de la preuve réfultante des interrogatoires,
l’illuflre Magiflrat dont vous
invoquez le fuffrage ? E c o u te z ce qu’il dit à ce fujet dans
la m ême caiife.
« Diftinguons deux efpèces d attes très-différens.
» L e s adtes de la premiere efpèce font tellem ent per» fo n n e ls , fi attachés , fi inhérens à la volon té de celui
» qui les p a if e , ils portent; un cara&ere fi évident de fon
» a & io n , de fon efprit, de fon ju gem ent, qu’ils ne peuvent
» prefque jamais être confidérés com m e l’ouvrage d’une
» main étrangère.
» T e ls font les interrogatoires de ceux qiù font accufés
» d’un c r im e , ou foupçonnés de d é m e n c e , & qui paroiifent
» en la préfence de leur J u g e , dénués de tout fe co u rs,
» fe u ls , fans autre appui que celui de leur in n ocen ce, ou
» de leur fageiTe, dans la main de leur propre confeil ,
» com m e parle TEcriture ».
J u g e z , d’après c e l a , ce qu’auroit dit M . d’AgueiTeau à
la vue de cette multitude d’interrogatoires & de dires perfonnels de AI. le Préfident d’A b b a d ie , foutenus par un rap
port de M é d e c in s , & par divers a£tes qui marquent une
bonne adminiftration , & une fage économ ie. Jugez ce que
dira le Magiftrat qui o ccu p e fa p lace, & qui y fait revivre
ion éloquence & fon zele.
A i-je befoin de combattre la demande fubfriiaire de
M adam e d’A b b a d ie , tendante à ce que fon mari foit inter
rogé de nouveau , pendant deux m o i s , de deux jours l’un?
C e tte demande inouie eft une vraie dérifion à juftice.
F,
�42
Q u o i ! n e u f interrogatoires fubis dans l’efpace de fix
femaines, depuis le 29 D é c e m b r e 1 7 8 y jufqu’au 9 F év rier
1 7 8 6 j deux interrogatoires fubis dans la premiere quinzaine
du mois d’a v r i l, cinq interrogatoires fubis & fix dires perfonnels faits depuis le ip avril jufques au 18 M ai , une
foule d’a&es de comparution & de dires p e r fo n n e ls , mêlés
pendant près de cinq mois à tous ces interrogatoires, &
des vifites de M é d e c in s , continuées fans interruption pen
dant foixante-huit jours confécutifs , tant d’a&es qui e x
cèdent fi prodigieufem ent la mefure de l’inftru&ion ordi
naire , ne fuififent pas à M adam e d’A bbadie ! Jufqu a quand
abufera-t-elle donc de la patience de fon m a ri, & quel fera
le terme de cette perfécution ?
E lle veu t que M . le Préfident d’A bbadie fubiffe encore
trente interrogatoires de deux jours l’u n , dans l’efpace de
deux mois ; mais elle avoit formé la même demande au
C hâtelet par fa R e q u ê te du 12 Septem bre 1 7 8 ; , & elle a
acquiefcé à l’Ordonnance qui l’a rejettée, puifqu’elle a requis
elle-même l’exécution de cette ordonnance par fes requêtes
des 2 &
17 Janvier 1786. C ’eft donc ch ofe jugée ave c
elle que fon mari ne doit pas fubir une pareille épreuve.
D ’ailleurs, M . le Préfident d’A bbadie n’a-t-il pas été
interrogé par le fieur Lieutenant C iv il dans des jours q u e lle
a choifts elle-même com m e des jours de folie ? N ’a-t-il pas
été vifité & entendu par deux M édecins pendant plus de
deux mois? N ’eft-il pas entendu plufieurs fois par femaine
depuis quatre mois qu’il a l’honneur de v o ir les M agiftrats,
& de folliciter leur juftice? Chaque conférence qu’il a a v e c
eux ne vaut-elle pas un interrogatoire ? Q u e l eft donc le
but de M adame la Préfidente d’A b b a d ie , & que cherche-
�43
t-elle après un com bat de deux ans foutenu devant quatre
T rib u n a u x , fi ce n’eft à juftifier fes pourfuites par leur
excès m ê m e , & à faire naître tôt ou tard, s’il eft p oflib le,
dans l’organifation fenfible de fon m a r i, une révolution qui
lui ferve d’e x c u fe , & qui allure le fuccès de fon a&ion.
L e iieur Profit, dont l ’efprit étoit agité par intervalles,
& dont l’adminiftration n’étoit pas aufii fage que ce lle d e
M . le Préfident d’A b b a d ie , n’avoit été interrogé qu’une
feule fois au C h â t e l e t , & ne l’a pas été en la C o u r. L a
dame Profit, prefque auiïi acharnée que M adam e d’A b b a d i e ,
à la pourfuite de l’interdiftion de fon m a r i , a demandé
fubfidiairement fur le barreau , qu’il fût furfis pendant fix
mois au Jugem ent de fon a p p e l , pendant lequel temps
fon mari feroit interrogé par un CommiiTaire de la C o u r ;
mais fa demande a été rejettée. M adam e d’A bbadie a-t-elle
donc pu croire que la fienne feroit a cc u e illie , & que la
C o u r , inftruite de l’état de M . le Préfident d’A b b a d ie , par
une longue p rocéd u re, ôc par l’infpeûion journalière de
fa p erfonne, laffujettiroit à de nouvelles é p r e u v e s , qui
dégénereroient en une forte d’inquifition ?
M adam e d’Abbadie propofe un fécond c h e f de demande
fubfidiaire , qui tend à ce qu’elle foit admife à p r o u v e r ,
11®, que le 12 A v ril i~j%6s M . le Préfident d’Abbadie a
paru à fon b a l c o n , un rafoir à la m ain , &
qu’il a fallu
qu’un voifin accourût de fa maïfon pour le défarmer ; 20. que
le m êm e jour ( 12 A v r i l ) M . le Préfident
d ’A bbadie a
fait toutes les folies poifibles à l’H ô t e l- d e - V ille , aux T u i
leries , ôc en l’H ô te l du fieur Lieutenant-Civil ; 30. que
toutes les fois qu’il a eu des a c c è s , il a fallu aller chercher
y n étranger pour le contenir par des menaces.
FÜ
�C es faits imaginés en défefpoir de caufe font faciles a .
écarter.
D ’abord le fait du rafoir demande une explication après
laquelle il doit paroîcre évidemment indifférent ou faux.
Prétendez-vous que M . le Préfident d’Abbadie avoit un
rafoir à la main le 1 2 A vril 178 6 , fans aucun mauvais deffein,
fans qu’il ait faic aucun m ouvement tendant au fuicide?
D ans c e cas, le fait eft indifférent^Il n’eft point d’h o m m e ;
parmi ceux qui fçavent fe rafer eux-mêm es, ( & M . le
Préfident d’Abbadie eft de ce nombre ) à qui il n’arrive
quelquefois de fe montrer à une fenêtre ou à un balcon ,
un rafoir à la main ; & la preuve d’un fait indifférent ne
doit pas être ordonnée ; frujlra enini admittitur ad probandum quod probatum non relevât.
Prétendez-vous que M . le Préfident d'Abbadie avoit le
12 A vril un rafoir à la m ain, dans le deffein de fe couper
la g o r g e , ou de fe m utiler, deffein qui n’a pu être décou
vert que par quelque m ouvem ent de fa p a r t , tendant au
fuicide ? dans ce cas, le fait eft déjà démontré faux de trois
manières; i°. par l’événem ent; 20. par le rapport de M éd e
cins ; 30. par votre aveu formel.
i°.
C e faic eft démontré faux par l’événement ; en
e f f e t , fi M . le Préfident d’Abbadie avoit eu un rafoir à
la main , &
s’il
avoit voulu fe couper la g o r g e ,
oh
fe
m utiler, il auroit eu amplement le loifir'de le faire avant
que le voifui eût eu le temps de fortir de fa maifon , de
monter dans celle de M . le Préfident d’A b bad ie, & d’arrivec
à fon balcon. S ’il ne l’a point fa it, c’eft qu’il n’avoit pas plus
la volon té que le m oyen de le faire.
2°, C e fait eft démontré faux par le rapport des M é
�4?
decins; en e f f e t , le rapport conflate que le 12 ôc le 13 avril
1 7 8 6 , M . le
Préiident d’Abbadie étoit Jans la' moindre
apparence- de fureur ni de violence,
5 0* Enfin , ce fait eft démontré faux par l’aveu formel de
Madam e d’Abbadie. C e t aveu eft configné dans fon C o m
mentaire fur le rapport des M é d e c in s , note 4.0, conçue
en ces termes.
»Jamais perfonne n’a dit que M . le Préfident d’A bbadie
» montrât de la fureur & d e là v io le n c e » .
C ’eft dans le mois de Juillet 1 7 8 6 , trois mois après la
journée du 12 avril, que M adam e d’A bbadie rendoit cette
Juitice à fon mari ; elle a donné trois ouvrages imprimés
au C hâtelet dans les mois de Juin &
de Juillet 17 8 5 ;
elle ne parle du fait du rafoir dans aucun ; &
c ’eft au
mois de Mars 17 S 7 , qu’elle imagine de dire pour la p re
mière fois , que fon mari étoit armé d’un rafoir lé 12 avril
I 7 8 5 , ôc agité par la fureur du fuicide ! Q u ’elle tâche donc
de s’accorder fur ce fait avec l’é v é n e m e n t, avec le rapport
des M é d e c in s , & avec elle-même.
L e fécond fait n’eft pas plus admifïible que le premier,
fi l’on peut appeller fait une allégation.vague qui n’a aucun
objet fixe ôc déterminé.
Q u ’eil-ce qu’on
a
voulu d ire , quand on a die que M .
le Préiident d’Abbadie a fait, le 12 avril 1 7 8 5 , toutes
les folies p o ifib le s , & com m ent concilier cette allégation
avec le dire raifonné qu’il a fait le m ême jour en l'H ô t* !
du (leur Lieutenant-Civil ?
L article premier du titre 20 de l’O rdonnance de 1 6 6 7 ,
veut que les faits qui giflent en preuve foient articulés?
�^6
c eft le feul moyen de diftinguer les faits indifférens dont
la preuve doit être refufée
d’avec les faits ielevans dont
la preuve peut être ordonnée. Tout a Us folies poffibles ne
font pas des faits articulés ; il n eft donc pas poifible d’en
ordonner la preuve.
L e troifième fait concernant l ’appel d’un étra n g er, pour
contenir M . le Préfident d’Abbadie par des m e n a c e s , n’eft
ni plus e x a d ni plus admiiTible que les deux autres ; en
effet , quel befoin peut-cn a v o i r , de contenir par des
menaces un h o m m e , q u i , fuivant le rapport des M éd ecin s,
& de l’aveu même de M adame d’A b b a d ie , n’a jamais donné
la moindre marque de fureur ni de vio le n ce ?
L a dame Profit articuloit des faits de fureur de fon mari,
poftérieurs à la Sentence du C hâtelet dont elle étoit appel
lante, C es faits ont été rejettés, & la S entence a été con
firmée. Madame d’A bbadie donne aux faits qu’elle articule,
une date antérieure de plus de trois mois à la Sen ten ce
du Châtelet où elle ne les a pas articulés. C e s faits font la
dernière refTource de la chicane qui
cherche à retarder
le jugement de la caufe la plus fimple & la plus jufte.
D e quoi s’agit-il dans cette caufe ?
S ’agit-il de pourvoir à la confervation de la peçfonne
de M . le Préfident d’A bbadie ?
Mais Madame d’A b b a d ie convient elle-même dans fon
M ém oire imprimé au C h â te le t , page 1 14., qu’elle lui auroit
laiffé l’adminiftration de fa perfonne , s’il avoit voulu lui
lailfer l’adminiftration de fa fortu ne, & l’expérience prouve
depuis plufieurs années , que M . le Préfident d’A b bad ie
fçait adminiftrer & conferver fa perfonne.
S ’agit-il de pourvoir à la confervation des deniers de la
fucceflion
du
fieur de
Borda?
�47
Mais M . le Préfident d'A bbadie offre d’en faire e m p l o i ,
& de les convertir en immeubles.
S ’agit-il de pourvoir à la confervation des immeubles ?
M ais M . le Préfident d’Abadie fe foum et à un C on feil
fans lequel il ne pourra ni les aliéner, ni les e n g a g e r,
& plus de deux millions de fes biens font grévés de fubftitution au profit de fes enfans.
Q u e refte-t-il donc ? le revenu : voilà le feul intérêt
de la caufe : M adame d’A bbadie veu t jouir du revenu de
M . le Préfident d’A bbadie ; & pour fe ménager cette jouiffa n c e , elle brûle du delir de facrifier fon état, fa lib e rté ,
tous fes droits c i v i l s , & de com prom ettre la deilinée de
fes enfans ; c’eft ainfi qu’elle prouve qu’elle eft digne époufe
& tendre mère.
Mais pourquoi M . le Préfident d’Abbadie ne continueroit-il
pas de jouir de fon revenu ?
I l ne l’a jamais diflîpé; il eft au contraire dans l’habitude
de faire des épargnes & des acquisitions ; & s’il le dépenfoit
en e n tie r , il ne feroit que lui donner fa deftination naturelle.
S o p h o cle accufé de d é m e n c e , fous prétexte qu’il négligeoit fes affaires domëftiques pour com pofer des T r a g é d ie s ,
parut devant fes Juges , tenant fon CEdipe à colonne à
la main. E co u te z , leur d it-il, ce D ram e que j’ai co m p ofé
r é c e m m e n t, & jugés fi c ’eft-là l’ouvrage d’un infenfé :
il l u t , & il fut abfous.
M . le Préfident d’A b bad ie, chargé d’une femblable accufa tio n , n’a point de production du génie à offrir pour fa
défenfe. L a nature, en le douant d’un efprit fage & judicieux
�48
verfa fes plus beaux dons dans fon c œ u r ; mais s’il n’a
pas le talent d’écrire com m e S o p h o c le , il joint à une raifon
faine le mérite de mieux adminiftrer.
V o y e z , dit-il aux M agiftrats, le Procès-verbal de mon
audition : les réponfes que j’ai faites durant le cours d’en
viro n
cinq mois font-elles d’un homm e en démence ?
Voyez
les acquifitions que j’ai faites annuellement de
puis 1781 : un infenfé en auroit-il fait autant?
V o y e z les épargnes que j’avois en main en 1 7 8 4 , & les
quittances de 30,000 livres de legs faits par ma m ère,
que je me fuis empreffé de payer de mes revenus. L ’homme
le plus fage auroit-il pu mieux faire ?
Je parle com m e un hom m e raifonnable, j’agis com m e
un bon père de famille ; je ne fuis ni fou ni diffipateur ;
en quelle qualité ferois-je donc interdit ?
Monjleur
S E G U IE R ,
A vocat Général,
M e B E R G E R A S , A v o c a t.
J
A
u l h i a r d
,
Procureur.
P A R I S , chez K N A P E N , Imprimeur de la Cour des A id e s , au
bas du Pont S. Michel, 1 7 8 7 ,
�
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[Factum. D'Abbadie. 1787]
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An entity primarily responsible for making the resource
Seguier
Bergeras
Julhiard
Subject
The topic of the resource
démence
curatelle
traitement par électricité
psychiatrie
divorces
maison de force
successions
conseils de famille
abus de faiblesse
violences sur autrui
certificat médical
témoins
experts
Description
An account of the resource
Réplique pour monsieur d'Abbadie, conseiller-honoraire au Parlement de Paris, président à Mortier au Parlement de Navarre. Contre madame la présidente d'Abbadie, son épouse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Knapen et Fils (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1787
1781-1787
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0106
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_V0105
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Paris (75056)
Pau (64445)
Bizanos (château de)
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abus de faiblesse
certificat médical
conseils de famille
curatelle
démence
divorces
experts
maison de force
psychiatrie
Successions
témoins
traitement par électricité
violences sur autrui
-
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fb8ff42d1e0d706a533a1138f9a47a6c
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PLAIDOYER
PO U R M.
d ’A b b a d i e
, Confeiller-H onoraire au Parlement
de Paris, Préfident à M ortier au Parlement de Navarre.
C O N T R E
Epoufe
M
L
Madame la P r éfidente D 'A B B A D I E
, fo n
.
e s s i e u r s
,
s Juges du Châtelet ont prononcé fur l’état de
M . le P ré fid e n t d’A b b a d i e , c o n fo r m é m e n t à l’avis d e fes
parens & amis aff em b lés au n o m b r e d e vin gt-fix , en l ’H ô tel
e
du fieur Lieutenant C iv il, à la vue de feize interrogatoires,
dont plufieurs ont été fubis dans des jours défignés com m e
des jours de f o lie , & dont un feul marque une agitation
paff agère, au milieu de laquelle la raifon a toujours furnagé,
à la vue d’un foule d’actes de comparution & de dire perfonnels de M l e Préfident d’A b b a d ie , à la v ue enfin du
A*
Parlement de
Paris.
Grami’Chambre*
�a
rapport de deux Médecins qui l’ont vifité pendant foixante*
huit jours confécutifs , iis ont décidé d une voix unanime
qu’il n’y avoit lieu à l’interdiôion de M . le Préfident
d’A b b a d ie , 6c ils l’ont maintenu dans l’adminiftration de
fa perfonne & de fes biens.
C e Tribunal auroit-il donc été aveugle fur l’état de M. le
Préfident d ’A bbadie, après l’inftruîtion la plus longue ôc
h plus complette ? N ’auroit-il fu reconnoître un infenfé dans
an examen de cinq m o is, & auroit-il pris le délire p ou r
le bon fens, les ténèbres pour la lum ière, les écarts de la;
folie pour la marche de la raifon ? Cela n eft pas croyable ,
& ce feroit une efpèce de phénomène dans l’adminiftration
d e la Juftice, fi les mêmes preuves ,, qui ont convaincu les;
Juges du Châtelet que M . le Préfident d’Abbadie eft dans
un état de raifon, pouvoient vous convaincre, Meilleurs r
qu’il eft dans un état de démence..
M . le Préfident d’Abbadie eft-il raifonnable ou infenfé,,
eft-il capable ou incapable dadminiftrer fa perfonne & fes
biens l V o ilà le vrai point de la caufe : elle eft fimple parelle-m £m e, & elle feroit bientôt développée, d’après la;
procédure , d’après l’expérience, fi l’envie d’attirer la déri~
iion publique fur M . le Préfident d’A b b a d ie, & des foupçons odieux fur ceux qui lui font d évo u és, ne l’avoit furchargée d’incidens faux, méchamment, amenés, fur lefquelsl e r e f p e â d û à la perfonne de ce Magiftrat, & au caractère*
dont il eft revêtu , & la défenfe qu’il doit à ceux qui ont eut
le bonheur de le férvir, ne nous permettent pas de-garder lefilence.
Trois adverfaires pourfuivoient dans le principeTinter*Ji£tion de «M.- le Préfident d’Abbadie j Le Marquis du
�5
C o u d r a i, Ton beau-frère , la Marquife du Coudrai, fa foeur,
& Madame la Préfidente d’Abbadie. La mort lui a enlevé
fa fœur^ la Sentence du Châtelet a défarmé fon beaufrère; il .lui refte pour adverfaire.celle qui n’auroit jamais dû.
l’être : fon époufe.
E lle vie n t, dans le .délire de la cupidité , dévouer fon
mari à.une efpèce de mort civile; elle vient flétrir fes enfans
dans la.perfonne de leur père , 6c les marquer, .pour ainfi
dire, du fceau de la réprobation.
E t c’eft au milieu de cette aftion effrayante dont les
ames honnêtes ont tant de peine à foutenir le fpe&acle , que
Madame la Préfidente d’Abbadie fe vante d’être digne
époufe ôc tendre mère !
A h ! l'amitié conjugale tâcheroit de détourner de deffus
Ja tête d’un mari le coup mortel de l’interdiction , & la
tendrefTe maternelle feroit des prodiges pour épargner à
des enians le préjugé que peut faire naître contr’eux la
profcription de leur père.
La digne époufe ( i ) eft celle q u i , au mois
d’A oût
dernier, défendoit fon mari accufé de démence dans ce
fan&uaire où Madame la Préfidente d’Abbadie s’efforce
d’immoler le £en.
L a tendre mère eft celle qui , combattant aux pieds de
l a C o u r pour fon é p o u x , déjà interdit au C h â t e l e t , le
c o u v r o i t de fa fille co m m e d’une
égide facrée , & recom •mandoit à la fenfibilité des Magiftrats la deftjnée de cette
enfant, l'unique efpérance de fa mai fon.
V o ilà le modèle que Madame la Préfidente d’Abbadie
devoit fuivre ; mais elle a d’autres principes & d’autre-s
La Marquife de CabrU.
A i;
�4
vues ; là fortune defon mari dont elle demande la curatelle*
eft l’idole à laquelle elle facrifie tout le refte.
i l ne s’a c co m p lira pas ce facrifice affreux. M . le Préfident d’Abbadie ne fera point vid im e de l’intrigue & de la
cupidicd : non , il ne le fera pas ; ce ferait en vain que le
c ré d it s’a rm e ro it contre lui : ce fecours décèle la foibleife
& la crainte du' plaideur qui l ’im p lore, & n’ajoute point a
fes droits. M . le Préfident d’Abbadie
fe préfente feul;
toute fa force eil en lui-même ; toute fa confiance eft dans
l.i Juftice qui s’eft déjà déclarée en fa faveur; elle ne 1 aban
donnera pas dans cette dernière attaque , & ellefaura mettre-,
un frein aux complots d’une femme qui a juré fa perte, & lu i
faire trouver enfin le repos après de longs ôcpénibles combats
dans le lieu même o ù il fe dévoua à fon faint miniftère.
L a défenfe de M* le Préfident d’Abbadie fera divifée en
deux parties.
L a première comprendra les faits antérieurs à la demanda
à fin d’interdiction de M. le Préfident d’A b b a d ie , dont la
plupart ont été dénaturés , ou font encore entièrement;
inconnus.
L a fécondé comprendra les procédures qui ont été faites
fur cette demande, dont Madame la Préfidente d’Abbadie
n a donné qu’une idée imparfaite & trompeufe.
Dans le tableau des faits on verra:,
D ’un c ô t é , Madame la Préfidente d’Abbadie méditantpendant quatre ans l’interdit\ioii de M . le Préfident d’Abba-?
d ie, fabriquant par le miniftère. d’un tiers des pièces infidieufes pour faire illufion fur fon état, & pour tromper
la Juftice , quittant fon mari pendant des années entières, ÔC
portant de temps en temps , à l’ombre dum yûère, une main
�?
ïndifcrètefur Tes reven u s, en attendant le moment où elle
doit s’aifurer de fa perfonne, & s’emparer de toute fa fortune.
E t d’un autre c ô t é , M . le Préfident d’Abbadie malheu
reux , mais toujours bon m ari, bon p è re , augmentant fes
biens par fes épargnes, ôc démontrant fans ceife par l'expé
rience qu’il eft bon adminiftrateur, tandis que la cupidité
crie autour de lui qu’il eft incapable de toute adminiftration.
Dans le tableau des procédures on verra la famille de
M . le Préfident d’À b b a d ie , fa m ère, fon oncle , fes paren s, fes amis, rendant tous juftice à fa capacité & à loti
adminiftration ; deux Médecins atteftant fous la foi du
ferm ent, après l’examen le plus long & le plus fcrupuleux,.
que fon état habituel eft un état de raifon entière ; M . le
Préfident d’Abbadie juftifïant, par des interrogatoires mul
tipliés, les témoignages qui s’élèvent de toutes parta en fa
faveur; enfin les Juges du Châtelet confacrant tous ces
fuifrages par une décifion folem nelle, applaudie du p u b lic,
refpe£tée par le Marquis du Coudrai lui-même, ôc dont
Madame la Préfidente d’Âbbadie feule affe&e de méconnoître la fageiTe & la juftice.
L e réfultat des faits & des procédure^ fera que M , le'
Préfident d’Abbadie ne doit pas être interdit, & que s’il'
a v o i t jamais le malheur de l’être , Madame la Préfixlente
d ’ A b b a d ie d e v ro it être exclue de fa curatelle comme fuf-
gefte & indigne.
F A I T S ;
f
M . le Préfident d’A bbadie, après avoir été pendant cinq;
ans C onfeillec en la C o u r , a été pourvu en 17.63 d W '
�6
Change de Préfident à Mortier au Parlement de Navarre,,
dont feu M . fon p è « avoit été titulaire.
Il a été marié en
1 7 7 ° à la demoifelle la Faurie de
M o n b a d o n , fille d’un Confeiller au Parlement de Bor
deaux. Il a v o it alors environ quarante mille livres de rente,
& de grandes efpérances que lui o.fFroit la fortune au iieur
de Borda fon o n cle , Fermier-Général.
A ces avantages fe joignoit dans la perfonne de vl. le
Prélîdent d’Abbadie., le titre de recoinmand».tion
plus
honorable.; le mérite d’avoir facrifié en 176^ for utat &
fa liberté, par zèle pour le fervice du R o i , & pour le
bien de la Patrie.
C ’eft ce Magiilrat que Madame fon Epoufe avoit d’abord
traité dans un M ém oire im primé, d'homme pufiUanime 9
en affe&ant de pafîer fous filence les évènemens mémo
rables de fa Magiürature : nous avons eu l’attention de les
lui rappeller; nous l’avons forcée à-s'enorgueillir de fon
époux , & à fe couvrir un inflant de la gloire de celui
qu’elle venoit avilir : elle a répété à cette audience l'hom
mage qiie nous avions rendu les premiers au zèle & au
courage de M . le Préfidenc d’Âbbadie. O n fait maintenant
par une bouche non fufpe&e., quel a été le dévouement
de ce M agiftrat, quelle fermeté modefte il a montrée
pendant dix.ans au milieu des révolutions publiques, à
la tête de fa C o m p a g n ie, à la fuite de la C o u r , dans les
prifons de la Baftille , & dans le lieu de fon exil. C ’eit
en la Cour qu’il avoit trouvé les modèles de ces vertus
fublimes qui l’ont diftingue dans la P ro v in c e , & c’eft vous,
MeiTieurs, qui lui en avez accordé le digne p rix , quand
vous l’avez reçu en 177 6 Confeiller H o n o r a ^ e , en con-
�7
jldèratlon de ta nature des fervices que lui avaient mfpires
depuis d ix ans f o x {èle & fort attachement au bien du fervice
du R o i
, & à £honneur de la Magijlrature.
M . le Préfident d’Abbadie en s'unifiant à la demoifelle
de M ;o nbadon avoit négligé entièrement l ’intérêt de fa
fo rtu n e, & n’avoit confulté que le penchant de ion cœur.
L e contrat de mariage ¿nonce une dot de 80,000 l i v , ,
& un p a iem e n t de 60,000 liv. à compte : mais dans la
réalité, fuivant une contre-leitre du même jo u r, la d o t
n a été que de 4^,000 l i v . , & il n’en a été payé que
25^,000 liv» ; les 20,000 liv. reliantes n’étoient exigibles
qu’après le décès de M . & de Madame de Monbadon , ôc
fans intérêt : cette fiûion a paru néceiTaire pour l’honneur1'
du co n trat, & pour afFoiblir aux yeux de la famille de
M . le Préfident d’Abbadie le facrifice qu’il faifoit de routes
fes prétentions. Il a ajouté à ce facrifice le don d’un douaire
de dix mille livres de rente, qu’il a conftitué à fon époufe.'
Il convient de- nommer ici le négociateur de ce mariage,,
qui va jouer un rôle inréreffant dans cette caufe : c ’eft le
fieur Louitau , A v o c a t , allié de M. le Préfident d’Abbadie,C e t A v o c a t , excité par un ami de M . de M o n b a d o n , a
propofé cette alliance à M . le Préfident d’A b b a d ie , qui'
féduit par des dehors flateurs n’a pas héiité l o n g - temps*
de l’accepter. L e fieur L o u ftà u eft intervenu dans le contratde mariage comme Procureur fondé de Madame la Préfidente d’Abbadie m è re , & y a fait en cette qualité une'
déclaration dont il importe de rappeller la teneur.» D éclarant ledit fieur L o u ft a u , au nom de ladite B a m e 3»
» en conioçm ité de ce qui eft porté par fa procuration ,.que-
�*
» bien qu’elle ait difpofé par le préfent contrat à titre de libé» ralité en faveur du fieur fon fils., de l h o t e l , ain.fi que de
» l’ameublement, comme d’effets à elle appartenans, ncan» moins, la vérité eft que l’acquifirion du local, ainfi que le
» bâtiment de i’iiôtel ont été faits par ladite dame., & par
» elle payés dis deniers propres & particuliers au fieur fon
» fih ; laquelle déclaration ladite dame s’eft crue obligée
:» de faire, pour lever tout doute à cet ég a rd , & rendre
juftice à la vérité
Si dès avant fon mariage M . le Préfident d’Abbadie
aba«donnoit en quelque forte à Madame fa mère une partie
de fa fortune , & fi cet abandon caraiâérife la confiance
filiale, le premier fenriment de la nature , faudra-t-il s’éton
ner de voir cette digne m£re aiTociée jufqu’à fa mort à
l’adminidration des affaires de fon fils; & iorfqu’elle inter
viendra avec lui dans une procuration relative à fon intérêt
p erfcn n el, ce foin infpiré par la tendreffe, accueilli par
le refpeft , autorifé par 1 habitude, devra-t-il être regardé
com m e un aveu tacite que la mère fera malgré elle de
la démence de fon fils ?
Continuons :
M . le Préfident d’Abbadie avoit cru former une union
heureufe : cette illufion n’a pas duré long-temps. Je ne me
permettrai point de rechercher la'caufe des diffenfions qui
ont régné entre les deux époux ; je me contenterai de lire
ce que M . le Préfident d’Abbadie en a dit lui-même le
27 Septembre 178 j en l’hôtel du fieur Lieutenant C ivil ^
en préfence de fes parens & a m is, & dans fon interro
gatoire du 18 Mai dernier. A P a u , & dans les Provinces
yoifmes où c is difleniions ont é c la té } perfonne n’aeufera
Mi
�9
M . le Préfident d’Abbadie d’avoir chargé le tableau.
« D e tout temps Madame la Présidente d’Abbadie a
Dire
du2f S‘f -
» témoigné la plus grande indiiiérence envers le compa- umbre I78*"
» raut, ¿k envers feue Madame la Préfidente d’Abbadie
» fa mère ; accoutumés à mener une vie tranquille ces
» derniers ont vu avec peine que Madame la Préfidente
» d’Abbadie ne vouloit pas s’aifujettir à leur genre de vie \
» elle portoit môme l’oubli des égards qu’elle leur devoit
» jufqu a refufer de manger avec e u x , & attendre que
» l’heure de leur repas fût paffée pour recevoir à fa table
» des convives qu’elle attiroit à leur infu : les chofes avoient
» été portées au point qu’une féparation volontaire avoit
» été arrêtée ; mais la promeife de Madame la Préfidente
» d’Abbadie d’avoir de meilleurs procédés a fuffi pour
» rétablir leur cohabitation prête à ceifer : ces faits font
» de notoriété publique dans la ville de Pau & dans toute
» la Province.
» Les promettes de Madame la Préfidente d’Abbadie
» font reftées far,9 effet : fon goût pour la diifipation n’a
» fait que s’accroître, & c. & c.
» A dit que nous fommes trop prévenus en faveur de interrogatoire du
jj
j»après
' la
i conduite
î • qu»elle
n a tenue a' 18 M J 1
» 1ladite
dame
; que d
» l’égard de lui répondant, tant à Pau qu’à Paris , & les
» chagrins d om eftiques qu’eJle lui a c a u f é s , il fe c ro it en
» droit de fe tenir éloigné d’elle ; que c’eft le feul moyen
» qu’il ait de rétablir parfaitement fa fanté , qui n’a été
» altérée que par les peines & les inquiétudes qu elle lui a
» caufées ».
Les parens &
amis qui ont été témoins des peines de
M . le Président d’A bbadie, ôc la Marquife du Coudrai fa
B
�10
fœur qui les a fi vivement fen ties, confirmeront bientôt
ce qu’il en a laifié tranfpirer.
L e chagrin a plongé M . le Préfident d Abbadie au bout
de dix années de m ariage, dans une efpèce de mélancolie
qui à ia naiifance portoit de loin en loin une confufion
paflagere dans Tes idées; mais ces legers nuages fe diffipoient promptement, & la raifon reprenoit auffi-tôt ià.
force & fa lucidité. C ’eft dans le premier de ces inftans
critiques que M . le Préfident d’Abbadie a écrit de Bourbonne-lès-Bains , le 18 Juillet 1781 , à Madame fon
époufe, une lettre dont la fin fe reffent de l’agitation dans
laquelle il étoit..
Entre ép oux, cette lettre devoit être jettée au feu, &
reiter à jamais dans le plus profond fecret. Madame la
Préfidented’Abbadi.e l?a gardée avec foin; elle y a vu labafe
de l'interdiction de fon mari dont elle a aufii-tôt conçu
le projet, &
des ce moment toutes fes' combinaifons,
toutes fes démarches ont eu pour but pendant quatre ans
cette aftion ftinefte..
O n a plaidé que dans le mois de Juillet 1781 M, le Préfi
xent d’A tbadie avoit cherché famèreàBourbonne-lès-Bains,
s-uoiqu’elle fût à Pau, & qu’il avoit dit, qu’il étoit indigne
de fe mettre à la table du (ieur de Borda fon o n cle , parce
qu’il avoit écrit au R o i , contre lui.
Mais 011 ne rapporte aucune preuve de ces faits.
Lt- quand ils leroient vrais, ils ne tireroient point à
conféquence pour l’état a£luel & habituel de M . le Préiîrient d’Abbadie..
A la réception de la lettre du 18 juillet 1 7 8 1 , Madame'
k P réfid en te d'Abbadie eft partie pour Paris x où elle eit arriv
�ii
vée le i ? août fuivant avec M e d’E tc h e g o rry , Procureur
au Parlement de Pau , logé gratuitement depuis p!us d*
vingt ans en l’hôtel de M. le Préfident d'Àbbadie. E lle
ne pouvoit pas arriver plus à propos pour intercepter une
lettre que ion mari a écrite le 16 a o û t, dans l’ardeur de
la. fièvre, à M . le Com te de M a u r e p a s ,& pour la joindre
à celle qui lui avoit été écrite à elle-même un mois au
paravant.
O n fent combien ces deux lettres font indifférentes au
bout de fix a n s , & peu propres à déterminer l’état a&ucl
de M . le Préfident d’A b b a d ie, qui eft conilatépar un rap
port de médecins & par fes interrogatoires.
L a maladie de M . le Préfident d’Abbadie pouvoit céder
facilem ent, dans le p rin cipe, à la vertu des remèdes : il
étoit naturel de confuiter des médecins 6c d’épuifer toutes
les relTburces que l’art pouvoit offrir dans cette Capitale,
■Mais quel foin Madame la Préfidente d’Abbadie a - t - e l l e
eu de fon mari dans le premier moment f E lle n’a rien fait
pour fon falu t, ôc elle a tout ramaifé pour fa profcripdon.
E lle étoit moins occupée de la fanté de M. le Préfident
d’Abbadie que de fa fortune, ficelle a preifé, au bout de
quinze jours, fon retour à P a u , impatiente de moiifonner
dans fa route les revenus de fon m ari, & de fe féparer
de lui dans la province.
E lle a fait éc fire , le * feptembre 1781 , par M c d’Etchegorry Procureur ^au Régiifeur de M. le Préfident d’A b
badie dans le P o ito u , la lettre fuivante.
» Il eft déterminé que nous partirons vendredi prochain,
» 7 , en pofte , nous prenons la route de P o itiers, nous
» comptons y arriver aux Troïs-Piiiiers} dimanche foir,
Bi j
�ta
» p Septembre. V ou s ne devez pas manquer dé vous rendre
» auifi pour le même jour , dimanche foir; mais n allez
» point loger aux Trois-Piîliers, allez à une autre Auberge.
» M adame
la
P r é sid e n t e
ne
veut
po in t
que
M.
le
» P r é s i d e n t v o u s v o y e , p a r c e q u ’e i l e c r a i n t q u e c e l a n e
» l ’i n q u i e t t e ,
to SORTES
»
que
d e forte
que
vous
devez
prendre
DE 'PRÉCAUTIONS POUR ÉVITER Q ü ’lL
vous
» Préfidente
êtes
A P o it ie r s.
en p a r t ic u l ie r
» l’o r , de l’argent
que
vous
:
toutes
NE SACHE
V o u s verrez Madame la
tâchez de vous procurer de
aurez a lui rem ettre
, foit
» de votre part, foit de la part de M . Delchamps . . .
» Faites attention à ma lettre.
M . & Madame d’Abbadie arrivent à Poitiers le p Sep
tem bre; ils foupent enfemble : M. le Président fe couche;
Madame la Préfidente & le Procureur paffert dans une
autre chambre, & y font introduire le Rdgiiïeur qui- apporte
vingt-mille livres ; celui-ci demande à parler à M. le Préiident ; Madame la Préfidente refufe; il infifte, elle lui
dit que fon mari ne peut plus entendre parler de fes terres
ni de fes revenus, fans entrer dans des accès de fureur,
& que pour menager fa foibleflfe, il falloit derober à fes
regards l’argent qu’on lui apportoit. L e
RégiiTeur n’eft
pas dupe de ce prétexte; mais il n’ofe point contrevenir
aux ddfenfes de Madame la Préfidente. Sur ces entrefaites
on entend du bruit dans la chambre de M . 1“ Préiident ;
on craint qu’il ne furvienne ; 011 fait cacher le RegiiTeur
dsns la ruelle : c’dtoit une fauflfe alarme.
Madame
la
Préfidente reçoit les facs fans compter les efpèces, tant
elle craint dé reveiller fon mari, & après avoir -conféré
avec le Régiileur fur le produit des terres du P o ito u }
�13
elle lui donne deux quittances, l’une de 12000 livres,
l’autre de 8coo livres, de la teneur fuivante (1).
» J’ai reçu de M . D efcham p s, notre receveur à Brefluire,
» laibm m ed e 12000 livres, à compte de larecette des reve» nus delà terre de Brefluire, dont je lui donne quittance pour
» mon m a ri, ne pouvant pas en donner lui-m im e, à caufe
» de maladie. A Poitiers, le 9 Septembre 1781.
S ig n é , M o n b a d o n d ’ A b b a d i e . (2)
Si M . le Préfident d’Abbadie étoit malade le
Septembre
1 7 8 1 , fa maladie n’étoit pas bien grave; elle ne lui ôtoit
ni Ja force de faire en porte un voyage de 200 lieues,
ni la faculté de reconnoître le tort que Madame fon époufe
lui faifoit, en recevant fes revenus, puisqu’elle n’a ofé les
recevoir qu’en fe derobeant à fes regards, & en fe cachant
à l’ombre du myftère.
M . & Madame d’Abbadie arrivent à Pau le 1 6 Septembre
1781,
fe fdparent au bout de quelques jours, & ne fe
réunifient jamais plus dans la Province. M . le Préfident
va paffer l’automne avec Madame fa m ère, dans fa terre
de B izanos, à un quart de lieue de Pau; Madame, la Préfidente ne juge pas à propos de le fuivre; elle, refte feule
dans fa maifon de V ille. C e procédé fixe l’attention publique,
& détermine la mère ôc le fils à prolonger leur féjour à
la Campagne. L e mari & la femme reftent feparés en
Eéarn , pendant dix-neuf mois, depuis le mois d’O ttobre
1781 , jufqu’au mois d’Avril
i —W T ---------"
Cl)
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m a n i è r e d o n t la
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fcène du
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1785 , époque à laquelle
■
9 Septem bre
11
1781
---------
s’eil pniTée
1
----
-|
1
à Poitiers,
;ittellé e p s r le R é g i i f e u r .
(3
L’aatre quittance Je 8000 livres, donnée an fieur Tonnet, Riigiileur de
terre ¿e S. Loup-
dans la même forme.
la
�i4
M . le Préfident d’Abbadie eft parti pour Paris, avec le
Frère LiiTonde, R e l i g i e u x C o rd e lie r, fon ancien a m i,
dévoué de tout temps à fa famille. Dans ce long intervalle,
Madame la Préfidente d’Abbadie n’a fait qti’une ou deux
vifites de cérémonie à fa belle-mère , & a délaiíTé fon
mari qu’ e lle avoit le foin de faire décrier dans la V i l l e ,
par des ames vénales qui fecondoient fes projets, & qui
partageoient fes efperances.
O n a cru vous perfuader, M eilleurs, que M . le Préfidenc d’Abbadie étoit heureux é p o u x , en vous faifant
le&ure des lettres qu’ il a écrites à Madame la Préfidente
d’A b b a d ie , de Paris 6c de Bourbonne-lès-Baias , dans les
prem iers mois de l’année 1781 ; mais ces lettres prouvent
fon honnêteté, 6c non pas fon bonheur; on n’y voit point
ces épanchemejis dé la confiance, ces élans de l’amitié,
ces effufions du cocur qui régnent dans la correfpondance
de deux époux éloignés depuis long-temps l’un de l’autre,
&
impatiens de fe réunir : les d;fienfions de M. & de
Madame d’Abbadie avoient éclate dès les premières années
de leur mariage; il l’appeîkût îa chère femm-». en 1781 ,
comme elle l’appelloic fon
:her mavi, ie divorce qu’ils
ont fait en Béarn en 1762 &
1 7 8 ? , pendant dix-neuf
mois, eft plus parlant que leur correfpondance antérieure,
& fait aiïez fentir quelle étoit la tendrefle de la fem m e,
& quel pouvoir être le bonheur du mari.
O n a plaidé que dans cec intervalle de dix - neuf mois,
& durant un court féjour qu’il a fait dans fa maifon de
Pau , M . le Préfident d’Abbadie fe dounoit journellement
en fpeclacle, faifoit courir les enfans après lu i, & devenoit
Ja fable de la Ville.
�Madame la Préfidente d’Abbadie eft bien imprudents,quand elle avance de pareils faits.
Q u o i! l’époufe d’un Magiftrat l’auroit vu devenir l’o bjit
de la dérifion publique ! elle auroit été témoin de cc-3
(cènes humiliantes, & elle lauroit ¿té plus d’une fois!
E t la mère de ce Magiftrat, cette mère tendre, cette
compagne fidelle de fon fils, auroit foufiert qu’il fe donnât
en fpe&acle, que les enfans s’attroupaifent autour de lui,
& qu’il fût leur jouet !
Peut-être des gens de la lie du peuple, ou des corn1plices fecrets de Madame la Préfidente d’Abbadie enten
dus dans l’enquête qu’elle a fait faire à Pau , auront-ils
dépofé tout ce qu’elle aura voulu; mais cette enquête a
été annullée au Confeil d’E ta t, ainfi que l’Arrêt qui l’avoit
ordonnée. O n ne l’a pas même jugée digue de refter au
Procès pour y fervir de M ém oire; elle doit être mife à
l’écart comme nulle, & c’eft abufer de la patience de la
Cour que d<^ lui. rendre compte des menfonges &
des.
abfurdités qu’elle renferme..
Quel garant Madame la Préfidente d’Abbadie a-t-elle
donc des faits qu’elle plaide, avec, tant d’aifurance ? elle.,
n’a que for» allégation.
Mais cette allég a tio n plus que fufpeéte, eft détruite p a r
deux exceptions.
La premiereeft la dénégation formelle.de M , le Préfident'
d’ Abbadie qui a été interrogé au Chntelet fur tous ces faits;
controuvés par Madame ion époufe & qui les a tous dé
mentis.
L a fécondé eft le. témoignage pofitif de feue Madame.’ la>.
Préfidente d A bbad ie fa m è re , configné dans une lettre':
qu’elle a écrite à fa bru le 1 p N ovem bre 1783 , &
qu’om
*
�16
voit à la page 2$ du M ém oire imprimé de Madame
d’Abbadie.
» Je ne me fuis jamais apperçue, dit-elle, que
mon
» fils Te foit donné en fpe&acle à Pau, ni n’en ai entendu
» parler ».
Q ui croirez v o u s , M M. ou de Madame la Préfidente
d’Abbadie qui allégué des faits fans a u cu n e p reu ve , ou de
M , le Préfident d’Abbadie qui les n ie , & qui a en fa faveur
le témoignage d’une mere refpe£table qui ne l a jamais
quitté ? V ous ne pouvez pas hcfiter entre l’allégation de
l ’une , ôc la dénégation de l’autre, 6c la parole d u ne mère qui
juftifie fon fils eft plus facrée à vos yeux que celle d’une
femme qui accufe fon mari 6c qui cherche à le perdre.
Ecartons donc de la caufe tous ces faits de démence
qui dans le Rom an de Madame la Préfidente d’Abbadie
rempliffènt l’efpace de temps que fon mari a paiTé en Bearn ,
depuis le mois de Septembre 1781 , jufques au mois d’A vril 17S3.
A cette dernière ép oque, M . le Préfident d’Abbadie
arrive à Paris avec le frère LiiTonde, ôc fe réunit au fieur
de Borda fon oncle qui lui avoit témoigné le defir de le
voir. Cette réunion les fîartoit également l’un & l’a u tre,
mais leur joie ne fut pas de longue durée.
A peine M. le Préfident d’Abbadie eft-il parti pour Paris,
que Madame fon époufe court après l u i , ôc vient le join*
dre dans la maifon du fieur de Borda.
Q u el eft donc cet e m p re fle m e n t fubit après un divorce
de dix neuf mois? L es tendres foins v o n t-ils fuccéder
tout-à-coup à l’indifférence la plus marquée, & celle qui
depuis
�17
depuis plufieurs années n’avoit que le vain titre d’ép o u fe,
vient-elle enfin en remplir les devoirs ?
C ’eft par 1’évencment que nous allons découvrir les
motifs de fon voyage.
L e 6 Mai 1783 , huit jours après l’arrivée de Madame la
Préfidente d’A bbadie à Paris , le fieur B o rie , fon M edecin
ordinaire, invite les fieurs Deiean & de Montabourg fes
confrères à fe rendre avec lui auprès de M . le Préfident
d ’A bbadie. Ils l’examinent pendant un demi quart d’heure,
après quoi , on leur fait figner un certificat rédigé par le
fieur B o r i e , dont la teneur feule démontre jufqu’à quel
point ce M edécin , fervilement dévoué à Madame la Préfidente d’A b b a d ie , a abufé de leur confiance.
E n effet, i°. on leur fait attefter, à la première & unique
vifite qu’ils font à M .l e Préfident d’A bbadie, quiL fe livre
à une loquacité qui fans interruption dure nuit & jo u r, que le
fommeil cflperdu , qu'il en ejl de même de l’appétit , & que cet
état dure plufieurs jours.
Q uel talent que celui de voir dans l’état d’un inftant l’é
tat de plufieurs jours , & de reconnaître au premier coupd’œil qu’un homme a perdu le fommeil & l'appétit ! Q uelle
atteftation que celle qui eft fondée fur une pareille certitude!
V oilà les té m o ig n a g e s que Madamela Préfidente d’Abbadie
venoit chercher à Paris c o n tre fo n mari en 1783 : voilà les
preuves avec lefquelles elle fe préparoità l’accufer de dé
m en ce, lorfque fa fortune feroit parvenue à fon com ble,
par le décès de fa mère & de fon oncle.
Rendons néanmoins aux lieurs Dejeanôc de Montabourg
la juftice qui lem eft due : ils n’ont fait que prêter une
fignaturs de confiance au fieur Borie qui a rédigé cette
G
�18
atteftation témeraire : ils ont réparé leur erreur en 1785*,
après plufieurs examens de l’état de M. le Président d’Abbadie : le tort qu’ils ont eu en 1785 cil celui de la probité
confiante : ils ont ajouté foi aux aifertions d’un confrère
qu’ils ne croyoient point devoir fufpeûer..
20, O n répète' au nom des trois Medécins dans le cer
tificat du 6 Mai 1 7 8 5 , ce qu’ils ont appris, dit-on, de:
la fam ille, c’eft-à-dire de Madame la Préfidente d’Abbadie,,
fur la manière dont M . le Préfident d’Abbadie avait ve<^u
en Bearn pendant les dix-neuf mois qu’jl venoit d’y paifer j
Roman imaginé par Madame la Préfidente d’A b b a d ie , compofé de faits faux dont des medécins de Paris ne pouvoient
avoir aucune connoiifance perfonnelle, ôc auxquels leur
fignature ne donne par conféquent aucune autenticité»
O n ajoute qu’ils ont appris par le rapport d’un M oine
qui accompagne M . le Préfident d’A bbadie, i°. qu’il v e
noit de pafler dix-neuf mois à Pau , toujours dans le même
état de délire. 20. Q u ’il y étoit journellement en fpe&acle3°. Q u e depuis le mois d’A vril ( 1 7 8 3 , ) époque de fon
arrivée à Paris , il avoit été dans un délire plus ou moins
f o r t , mais conftanf.
E h b ie n , ce M o in e , le Frère LiiTonde Re&eur de l’Univeriicé de Pau , que le redafteur du certificat du 6 M a l
178 3 , cite comme garant des faits qu’il dit avoir appris defa b o u c h e , lui donne un démenti formel fur tous ces
faits par fon atteftaûon du i j Décem bre dernier.
3°. L es M edécins déclarent que d'après Pexpafc des faits
ils pcnfer.t que M . le Préfident d’Abbadie eft en démence.
Mais ils n’avoient point vérifié les faits qui fervoient de
bafe à leur opinion; ils n’avoient jamais vu M . le Pré 11*
�T9
dent d’Abbadie en Bearn où ils difoient eux-mêmes que
ces faits s’étoient paifés. Ils les avoient appris de la bouche
de Madame la Préfidente d’Abbadie : leur aflertion fe
réduit donc en dernière analyfe, à dire que fuivant le
récit de Madame laPréiidente d’Abbadie,j *Ton mari eft en
démence. Q u el témoignage que celui de Madame la Préfidente d’Abbadie fur l’état de fon mari !
4°. Les Medecins attribuent, par conjecture , la maladie
de M . le Préiident d’Abbadie qu’ils n’ont pas eu le loifir
d’o bferver,à une humeur érefipélateufe fixée d’abord à la
jambe, & répercutée enfuite par des topiques.
N ous ignorons quelle a pu être la caufe des accidens
que M . le Préfident d’Abbadie a éprouvés autrefois ; tout
ce que nous avons appris par lui-même, par la corres
pondance de la Marquife du Coudrai fa focur, & par l’avis
de fes parens & am is, c ’eft qu’il a eu de grandes peines
domeftiques. Eft-ce le chagrin, cil-ce la repereuffion d’une
humeur érefipélateufe, font-ce ces deux caufes réunies enfemble qui ont altéré fa fanté ? C ’efl un problème qui n’efl
point de notre compétence , & dont la folution eft indif
férente dans ce moment. Mais fi les fieurs Dejean & de
Montabourg avoient eu le loifir de réfléchir fur la caufe
conjecturale de la maladie , indiquée dans le certificat du
6 Mai 1783 , ils n’auroient pas manqué d’ordonner l’appli
cation d’un cautère, qui étoit le remede le plus convenable
dans le fyftême de la repereufiion d’une humeur ; le M edécin
ordinaire de Madame la Prefidente d’Abbadie a mieux aimé
ordonner les faignées du p ied , les purgatifs, l’hémétique
m ê m e , rem èd es pour lefquels M . le Préfident d’Abbadic
C ij
�«
20
avoît une répugnance connue, ôc dont 1 ufage devoit nécef"
fairement irriter fa fenfibilité.
Enfin, - c e M e d é c in finit par dire que f i M . lePréfident
d’Abbadie ne devient pas plus docile à l’ufage de ces
remèdes, il ne faut pas héiiter d’employer la force, foit
dans la maifon du fieur de Borda , foit dans quelqu’une
des maifons ou l’on reçoit ces fortes de malades ; fur quoi
il laiife l’option à Madame la Préfidente d’Abbadie.
Envoyer dans une maifon de force un Magiftrat du pre
mier ra n g , un père de famille dont la fortune permettait
de 1ui adminiftrer dans fa maiion tous les fecours r.éceflaires !
L ’envoyer dans une maifon de force ! & pourquoi ? Pour
le faigner , pour le purger, pour lui faire prendre des bains
& du petit lait, comme fi l’ufage de ces remèdes étoic
plus fa c ile , ou leur vertu plus efficace dans une maifon
de force !
L ’envoyer dans une maifon de force au mois de M a i
1783 ! Mais dans ce temps là m êm e, il alloit voir fes
a m is, & il les recevoit chez lui , fuivant l’atteftation du
R e& eu r d e l’univerfité de Pau , fon compagnon de voyage ;
il correfpondoit avec fes gens d’affaires : il rcgloit des in
térêts avec le fieur Olivier caillierdu fieur de Borda, comme
on le verra bientôt dans un compte rendu par ce caiiTier;
Madame le Préfident d’Abbadie elle-même craignoic fa v i
gilance , & prenoit des rnefures pour lui ca ch e r les prépa
ratifs d’une nouvelle fouftrattion qu’elle v o u lo i t lui faire
de fes revenus; (1) il agiffoit en homme raifonnable; il
(1) Ce fait eft établi par une lettre du fieur Olivier du deux Juin 17»}
¿ont on parlera dans un inftant.
*
�21
veilloit à fes intérêts en bon père de famille; & l’on fon*
geoit à le releguer parmi des infenfés : qu’auroit-on pu faire
de plus , fi on avoit voulu le rendre femblable a eux ?
C e confeii , a-t-’on d i t , n’a pas été fuivi : Madame la
Préfidente d’Abbadie n’auroit jamais livré à dts étrangers
U N E T Ê T E SI C HE RE.
C e confcil n’a pas été fuivi : Mais le moment de le fuivre n’étoit pas arrivé. La mère & l’oncle de M . le Pre'fident
d’Abbadie n’étoient pas encore morts ; celle qui a ofé tenir
fon mari en charte privée , après fon interdi£lion provif
ne lui auroit peut être pas épargné la reclufion dans
une maifon de fotee , il elle avoit pu obtenir fon interdic
tion déiinitive. L e M edécin
de Madame le Préfidente
d’Abbadie devoit bien connoître fes intentions, pufqu’il
ofoit lui mettre en main l’avis cruel de faire enfermer fon
mari. Mais fi cet avis n’étoit pas bon à fuivre dans le premier
moment , il étoit bon à garder; c’étoit une arme nouvelle
contre M . le Préfident d’A b b a d ie , & un moyen d’obtenir
un jour fa récluficn.
Remarquez , M eilleu rs, que le fieur Borie ne laiffe
d’option dans fon certificat du 5 Mai 1783 , pour le traite
ment de M . le Préfident d’Abbadie qu’entre la maifon du
fieur de B o r d a , & une maifon de force. Il vouloit exclure
ce Magiilratde, fa p a tr ie , & l’enchaîn er à Paris : & pour
quoi? Parce que le féjour de Pau ne convenoit plus en
1783 à Madame la Préfidente d’A b b a d ie , qui craignoit
d’ailleurs les regards de fa belle-m ère, & qui ne vouloit
point perdre de vue cette tête f i chère , dont elle méditoit
la profeription. Son plaifir étoit de contempler fa victime,
& de continuer à fon aife les préparatifs du facrifice, &
�22
cette occupation ¿toit plus facile dans la maifon
d’un
oncle paralytique détenu dans fon lit, que dans celle d’une
mère dont la vigilance auroit éclairé les complots formés
contre fon fils, & les auroit fait avorter.
Cependant le traitement indiqué par la Confultation du
6 Mai 1783 étoitpeu propre à retenir M . le Préfident d’A bbadiedans la capitale : l ’ufage de lafaignée, de l’hémétique,
des bains 8c du petit lait eft aufli famillier à Pau qu’à Paris. O n
a eu recours à un remède extraordinaire , au traitement par
l’életlricité, qui n’eit pas commun dans la province. M .
le Préfident d’Abbadie eft allé chez le fleur Cornus pen
dant trois mois , au bout defquels il s’eft difpofé à retourner
en B ea rn , impatient de fe réunir à fa m è r e , qui defiroit
de fon côté la préfence de fon fils.
Madame la Préfidente d’Abbadie a fait les plus grands
efforts dans cette circonflance pour empêcher la réunion
de la mère & du fils. Elle a fait écrire à fa belle-mère
par le fieur Borie fon M é d e c in , & par Madame la Ducheife
de C ivra c; elle lui a écrit elle-même plufieurs lettres pour
l ’engager à interpofer fon autorité , & à retenir M . le Préfi
dent d’Abbadie à Paris , où elle lui faifoit effuyer des
contradictions perpétuelles.
O n voit la correfpondance de la belle-mère & de la bru à
ce fujet, dans le Mémoire imprimé de Madame la Préfidente
d’Abbadie , depuis la page 20 jufqu’à la page 26.
Je ne rendrai point compte de cette correfpondance.
Mais je ne puis m’empêcher d’y remarquer un trait frap
pant qui décèle l’adreffe avec laquelle Madame la Préfidente
d’Abbadie cherchoità faire illufion à fa belle-mère , ôc à lui
faire approuver le féjour de M . le Préfident d’Abbadie
�23
dans cette capitale, fous prétexte d'un traitement qui n’avoit
point lieu.
En effe t, Madame la Préfidente d’Abbadie dit dans fou
M ém oire imprimé, page ï p , qu’après la Confultation du
6 Mai 1 7 8 3 , M . le Préfident d’Abbadie alla pendant trois
mois chez le fieur C o rnu s, & q u ii ne fu t plus pojjlbie enfuue
de lui adminiflrcr aucun remide : le traitement par l’é le ¿tri
c h é navoit donc plus lieu au mois de N ovem bre 1785.
Cependant par fa lettre du 4 N ovem bre 1783, Madame la
Préfidente d’Abbadie mandoit à fa belle-mère, que fon mari
continuoit toujours le remède de l’éleftricité, que le fieur
Borie étoit d’avis de le continuer par le miniilère du fieur
Cornus; & en aiïurant que les fieurs Borie & Cornus faifoient efpérer une guérifon totale, elle chargeoit l’honneur fie
la confcience de fa belle-mère de l’interruption d’un remède
qui avoit déjà ceffé long-temps auparavant.
« V ou s vous rendez , M adam e, lui diioit - elle par (a
» lettre du a f Octobre 1783 , refponfable de fa guérifon
» auprès de fa famille & du public ». ( Page 20 du M é
moire imprimé ).
Q uel grand intérêt Madame la .Préfidente d’Abbadie
avoit-elle donc à retenir fon mari dans la capitale , au mois
de N ovem bre 1783 , fous prétexte d’un traitement qu’il
n’y recevoit pas, 6c à quel deiTein fecret ce faux prétexte
pouvoit-il fervir de voile !
E lle quitte fon mari en Bearn pendant dix-neuf m ois;
& elle vole après lui lorfquil vient à Paris. E lle veut l’y
retenir malgré lu i, malgré fa m è re , quoiqu’il n’y reçoive
aucun fecours : créd it, prétextes, prières, m enaces, tout
eft mis en ufage pour- tromper la tendreiTe maternelle,,
�24
pour faire violence à l’amour filial, pour tenir éloignés
une mère & un fils impatiens de ie réunir, p ou r’enchaî
ner M . le Préfident d’Abtadie auprès d’une époufe q u i ,
jufques-là, s’étoit montrée plus jaloufe du foin de furprendre quelques inftants de foiblefle , que celui de les préve
nir. T a n t d’empreifement de la part de Madame la Préfidente d’Abbadie après douze années de diiTenfions, après
un divorce de dix-neuf m o is , pouvoit-il être infpiré par
l’amitié conjugale ?
Mais tandis que Madame la Préfideute d’Abbadie faifoit
certifier d’un côté par Ton M édecin que M . le Préfident
d’Abbadie étoit en démence, & qu’il ne falloit pas héfiter, s’il
étoit in d ocile, de l’envoyer dans une maifon de force , elle
prenoit d’un autre côté les plus grandes précautions pour
lui laiifer ignorer qu’elle s’immifçoit dans l’adminiftration
de fes biens. Elle s’étoit fait envoyer par les Régiiïeurs des
terres du Poitou des états annuels de recette & de dépenfe : bientôt elle voulut avoir tous les mois un état fuccinct de la fituation de leur caifle , & l’événement va faire
voir dans un inftant que fon defir n’étoit pas un defir de
pure curiofité. C e fu tle fie u r Olivier , Caiiïier du fieur de
B o r d a , dépofitaire depuis plufieurs années des revenus de
M . le
Préfident
Poitou , l’homme
d’Abbadie , provenans
de
confiance de
des terres du
Madame la Préli-
dente d’ A bbadie, ôc celui qu’elle défigne pour curateur
onéraire de fon mari, qui fut chargé de demander ces
états de caiiTe de chaque mois, üa lettre eit du 2 Juin
1783 : elle a fuivi de près la Confultation du *6 M a i , qui
conAituoit M. le Préiident d’Abbadie dans un état de dé
mence. Cependant Madame la Préfideute d'Abbadie craint
que
�a;
que ce prétendu îniènfé fie Toit inftruit de Ton entreprife, &
faic recommander le fecret à fon Régifleur.
« Vouà fentez , dit le iieur O liv ie r , qu’il n’eftpas nécef» faire que M . d’Abbadie vo ye cette lettre.
O n favoit donc que M . le Préfident d’Abbadie âuroit
improuvé l’entreprife de fon ép o u fe, & qu'il l’auroit répri
mée , s’il en avoit eu connoiflance.
E t c ’eft dans ces circonftances qu’elle le fait déclarer infenfé par fon M é d e c in , & qu’elle conçoit l’idée de ren
vo yer dans une maifon de force !
Mais à quoi tendoit la curiofité de Madame la Préfidente d’Abbadie fur l’état de la caifle des Régiffeurs ? A
faire vuider cette
caifle dans celle du fieur O l iv i e r , &
celle du fieur O livier dans fes mains.
En effet, le 4 N ovem bre 1783 , le fieur O livier a reçu
des Régiffeurs de M . le Préfident d’Abbadie une fomme
de 22,000 livres , q u i, jointe aux deniers qu’il avoit déjà
en m ain , a formé un total de 36,000 livres , & le 8 du
même mois il a livré clandeftinement cette fomme de
35,000 livres à Madame la Préfidente d’Abbadie.
C e fait eft établi par le compte que le fieur O livier a
rendu deux jours après à M . le Préfident d’A b b a d ie, qui
lui demandoit fes fonds pour les emporter en Bearn.
L e dernier article de dépenfe eft conçu en ces termes.
« Du
18 N o v e m b re , remis à Madame d'Abbadie ,
» 3j’,9pp livres <? fols.
A u moyen de q u o i , le fieur O livier fe trouvoit qu itte,
fi M . le Préfident d’ Abbadie avoit eu la bonté de fe payer
de cette monnoye. Mais il a eu le foin de faire affigner
le fieur O livier le lendemain 11 N ov em 6 re
1 7 8 3 , par
D
�il?
devant les Juge & Confuls à fin de reftitutïon de la fomme
de 36,ooo livres.
Obfervons en partant, que le compte du fieur O livier
prouve que depuis 1781 jufqu’en 1783 , JVL le Préfident
d’Abbadie a continué de correfpondre avec lui fur fes
affaires, & de s’occuper de l’adminiftration de fes biens.
E n effet, on y v o it , i° . la mention d’une lettre de
M . le Préfident d’A bbadie, du y A oû t 1 7 8 2 , par laquelle
il avoit confenti au profit du fieur O livier une dédu&ion
de 740 livres 1 p fols : 20. la mention d’un envoi fait par
le fieur O livier à M . le Préfident d’A b b a d ie, le 2p A oû t
1 7 8 2 , d’une fomme de 20,351 livres : 30. la mentiond’une conférence du mois de Mai 1783 , de ce
même
mois où Madame d’Abbadie avoit fait déclarer fon mari
infenfé par le
fieur Borie ,
conférence
dans laquelle
M . le Préfident d'Abbadie, en chargeant le fieur O livier du
foin de recevoir à l’H ô tel des Fermes les intérêts du cau
tionnement du fieur de Planterofe, fon a llié , lui avoit dit
fuivant le fieur O liv i e r , avoir touché par lui-même quinze mois
d'intérêts montant à 15 o livres, à compter du premier Octo
bre ¡ 7 8 0 , au premier Janvier 1782, C es faits concourent
à établir la continuité de ladminiflration de M . l e Préfi
dent d’Abbadieen 1782 & 178 3 . Je mettrai bientôt fous les
yeux de la Cour d’autres preuves de cette adminiftration
qui s’eft conftamment foutenue juîqu’au moment a£luel.
M . le Préfident d’Abbadie étoit trop impatient de fe
réunir à Madame fa m è r e , pour attendre l’éyénement de
la demande
qu’il avoit formée contre le
fieur Olivier.
Madame la Préfidente d’Abbadie lui a fait remettre par les
mains de ce dernier, une fomme de 6000 livres, & a eu
�27
le foin de s’en faire donner une quittance , quoiqu’en re
cevant 20,000 livres à fon inçfu en 1 7 8 1 , elle èût déclaré
qu’il étoit hors d’état de donner une quittance. I l eft parti
feul pour le Bearn vers le i f N ovem bre 178 5; Madame fon
époufe a mieux aimé relier à Paris que l’accompagner ; elle Ta
quitté de nouveau, & a v é cu loin de lui pendantquatorze mois.
A fon arrivée à P a u , par a£te du i cr. D écem bre 1785 ♦
M . le Préfident d’Abbadie & M adam e fa m ère ont envoyé
leurs pouvoirs à P aris, à l’effet de les repréfenter chacun
en ce qui les co n c e rn o it,
dans toutes les affaires qu’ils
pourroient avoir tant en juftice qu’autrement. M ais à qui
ces pouvoirs ont-ils été donnés ?
I c i paroît un C itoyen honnête que Madame d’Abbadie
a diffamé avec une licence inouie » qu’elle a peint com m e
un homme fans é ta t, com m e le c h e f d’une troupe d’intrigans qui obfèdent M . le Préfident d’Abbadie. Q u el eft donc
cet homme fi d é c rié , fi fufpe£t ? C ’eit un allié de M adam e
la Préfidente d’A b b a d ie, le coufin iflu de germain de fon
mari ; c ’eft le fieur d’Etchegaray.
Il n’étoit pas un intrigant
aux y e u x de M adam e la
Préfidente d’Abbadie m ère, dont le fuffrage valoit bien
celui de fa. b ru , ôc qui par une lettre du 21 Février
1-78 4, l’appelloit fo n cher neveu , & le rem ercioit des
marques qu’il ne ceffoit de lui donner de fon zèle & de
fon attachement.
Il n’étoit pas un intrigant aux yeux de M adame d’A b
badie elle-m êm e, lorfque par fa lettre du 17 Janvier 1 7 8 3 ,
elle le rem ercioit des témoignages £ intérêt & Rattachement
yu il lui donnoit dans toutes les occafions, ôc lui marquoit
D ij
�A*
le défir le plus v i f de lui donner des preuves de fa re<on-noijfance.
Il n ¿toit pas un intrigant lorfque par fa lettre du onze
avril 1785 9 poftérieure de deux jours au départ de M . le
Préfident d’Abbadie pour P a ris, elle chargeoit la foeur du
' fieur d’Etchegaray de lui faire mille complimens, & de lui
confier le deffein où elle ¿toit de fuivre de près fon mari.
C ’eft la procuration du premier décem bre 1783 , dont
l’objet principal ¿toit de forcer la reftitution des 35,000 L
enlevées par M adam e d’Abbadie , qui a transformé à fes
y e u x le fieur d’Etchegaray en homme fu fp e â , en intrigant,
ôc qui l’a rendu digne de toute fa haine.
Remarquons deux circonftance3 dans cette procuration*
L a prem ière, c’eft que M adame la Préfidente d’Abbadie
mère & M . fon fils y reconnoiffent expreifém ent le fieur
d’Etchegaray pour leur parent. L e fieur d’Etchegaray ne
doit donc pas être regardé ici com m e un intrus, com m e
un intrigant qui s’immifee dans les affaires d’une fam ille
étrangère.
L a fé c o n d é , c’eft que M . le Préfident d’A b b a d ie , en
donnant fes pouvoirs au fieur d’Etchegaray , ne fait que
fuivre l’exem ple de M adam e fa m ère, qui avoit déjà éprou
v é le zèle & la fidélité de fon neveu. C e tte marque de
confiance de M . le Préfident d’A bbadie pour le fieur
d’Etchegaray & celles qu’il lui a données depuis ne doivent
donc pas être regardées com m e des marques de démence*
L e fieur d’Etchegaray pourfuivit la demande à fin de
reftitution contre le fieur O liv ie r : celui-ci fut con dam n é,
par une Sentence confulaire du ip
décem bre 1783 , à
�2P
payer en cjeniers ou quittances valables la fomme de 3 6000
livres.
L e fieur O liv ie r, ou plutôt M a 4ame la Préfidente d’A b
badie fous fon nom , interjetta appel de cette Sentence
com m e de Juge incom pétent. M . le Préfident d’Abbadie
eut pour défenfeur M e Martineau : mais il ne perdit pas
moins fa caufe. L es parties furent renvoyées à fe pourvoir
p ard evant les Juges qui en devoient connoître.
L ’affaire fut portée au Châtelet où M . le Préfident d’A b
badie auroit infailliblement triomphé par le miniftère du
même défenfeur. Mais le fieur d’Etchegaray rallentiffoit les
pourfuites, par égard pour Madame laPréfidente d’Abbadie
qui ne paroiffoit pas difpofée à reftituer ce qu’elle avoit
pris. C e ménagement déplut à M . le Préfident d’Abbadie
& à Madame fa mère : ils s’en plaignirent au fieur d’E t
chegaray , ôc ils lui donnèrent ordre de preffer le jugem ent
par une lettre du 8 mars 1784.
L e s pourfuites recom m encèrent: M adame laPréfidente
d’Abbadie demanda à com pofer. M . le Préfident d’A b b a
die envoya au fieur d’Etchegaray , le 19 avril 1 7 8 4 , une
procuration à l’effet de tranfiger ; ce qui fut fait par un
a & e du 2 ju ille t fuivant.
Par cet a& e'M adam e la Préfidente d’A b b a d ie , fous le
nom du fieur O liv ie r , rend com pte des 36,000 liv. dont
elle s’étoit emparée.
E lle impute d’abord com m e de raifon les 6000 liv. don
nées à M . lePréfident d’Abbadie le 13 novem bre p récéd en t,
fuivant fa reconnoiffance du même jour , & les dépens
de l’appel d’incom pétence auxquels il avoit été condamné.
E lle remet enfuite x 6,800 livres au fieur d’Etchegaray;
�jo
qui les envoye aufli-tôt à M . le Préfident d’A b b a d ie, dont
il a la quittance.
E t elle retient à Ton profit 15,000 livres en fus de fa
penfion annuelle de 3000 liv re s , & d’un fupplément de
600 livres q u e lle s’étoit fait donner par le fieur O liv ie r,
quoiqu’elle n’eut aucune dépenfe à faire dans la maifon
du fieur de Borda.
T e l fu t, pourM adam è la préfidente d’ A bbad ie, le fruit
de fon fécond coup d’eiTai dans le maniment des revenu«
de fon mari.
Madame la Préfidente d’A b b a d ie , dont la manie eft de
dire que fon mari eft fou , foutient qu’il l’a été à Pau
en 1 7 8 4 ; & pour preuve de fon allégation , elle cite des
lettres qu’elle a reçues de fes correfpondans, du fieur
L o u fta u , le négociateur de fon m ariage, & de la dame
d’E tchegorry fa co n fid en te, qui n’ont pas craint d’alarmer
fa tendreife pour fon mari , en lui écrivant fi fouvent &
fi inutilem ent, qu’il étoit malade- Mais des lettres mifiives
ne font point foi contre un tiers. Q u ’e it - c e que cet ama*
de lettres écrites avec tant de p rofufion , & gardées avec
tant de foin par une femme q u i, fi elles avoient été vé
ridiques, auroit dû les effacer de fes larm es, & que prou
vent-elles en ju ftic e , fi ce n’eft les mauvais defl'eins de
Madame la Préfidente d’Abbadie contre fon m a r i, & le
défir dont elle brûloit de le faire interdire.
C e n’eft pas tout : Madame la Préfidente d’Abbadie n’ayant
pu faire attefter par des M édecins de Pau que fon mari avoit
été fou à Pau en 1782 & 1783 , l’a fait attefter hardiment
par fon M édecin de Paris. E lle a fait plus : elle a fait at
tefter par ce M édecin que M . le Préfident d’Abbadie mourra
�5*
infailliblement dans la dém ence. V o ic i le certificat qu’elle
a obtenu de la complaifance du fieur B o r ie , le 6 f é v r i e r
1784..
» Je certifie que M . le Préfident d’A b b a d ie, que j’ai
» fuivi depuis le mois de mai de Tannée dernière jufqu’à
» fon départ, eft parti en novem bre 1783 dans le même
» état de démence dans lequel il étoit depuis deux a n s,
» lors de fon arrivée à P aris, & qu’il eft bien à craindre
» que fa maladie ne foit parvenue à l’incurabilité ; en foi
» de quoi j’ai figné la préfente déclaration. Borie.
Fixons un inftant nos regards* fur ce certifica t, q u i,
avec celui du 6 mai 1783 , a déterminé à Pau l’interdic
tion provifoire de M . le Préfident d’Abbadie. C ’eft une
des produ&ions les plus monitrueufes de l’intrigue & de
la mauvaife foi.
O n y diftingue trois articles.
L e p rem ier, c’eft qu’au mois d’avril 1 7 8 3 , lors de fon
arrivée à Paris , M r. le Préfident d’Abbadie étoit depuis
deux ans dans un état de dém ence.
L e fé c o n d , c’eft qu’au mois de novembre 1783 , lors
de fon départ pour le B é a rn , M . le Préfident d’Abbadie
étoit dans un état de dém ence.
L e troifièm e, c ’eft que la maladie de M . le Préfident
d’Abbadie eft probablement incurable.R eprenons
ces trois articles.
1°. A v ec quel courage le fieur B orie a - t - i l pu cer
tifier qu’au mois d’avril 1783 , lors de ibn arrivée à P a ris,
M . le Préfident d’Abbadie étoit depuis deux ans dans un
état de démence ?
�3%
M. le Préfident d’Abbadie ¿toit refté en Béarn depuis
le mois de i'eptembre 1 7 81 iufques au mois d’avril 1783 }
le lieur Borie ne "l’avoit point vu dans cet intervalle.
2°. Com m ent a-t-il pu certifier qu’au mois de novembre
1 7 8 3 , M . le Préfident d’ Abbadie étoit dans un état de
démence ?
N ous avons des preuves littérales du contraire.
L e 8 novembre 1 7 8 3 , M . le Préfident d’A bbadie écrit
une lettre à fon régifleur qui vient de la lui envoyer pour
l’aider à confondre l’impoflure.
L e 10 novembre 1783 , le fieur O livier , l’homme de
confiance de Madame d’A b b a d ie , rend compte à M . le
Préfident d’Abbadie de fes revenus du P o ito u , dont il avoit
livré deux jours auparavant, à Madame -d’A b b a d ie , le reliquâ montant à 3 5,000 liv.
L e 11 novem bre 1783 , M . le Préfident d’Abbadie fait
aiïigner
le fieur O livier en reftitution de cette fomme.
ü
L e 1 3 novembre 1783 , veille du départ de M . le Préfident d’Abbadie pour Pau , Madame la Préfidente d’Abbadie
lui fait compter 6000 liv. & en retire fa reconnoiffance,
ainfi qu’il eft établi par la tranfa&ion du 2 Juillet 1784..
Ec c ’eft dans ces circoniïances que Madame la Préfïdente d’Abbadie fait certifier qu’au mois de novembre
1783 , lors de fon départ pour le B éarn , M ‘. le Préfident
d’Abbadie étoit dans un état de démence ! C o m m e n t peuton trahir la vérité avec auifi peu de pudeur!
30. Enfin par quel génie le fieur Borie étoit-il infpiré
quand il a prédit que M . le Préfident d’Abbadie mourra
vraifemblablement dans la démence ? O ù avoit-il puifé ce
préfage finiftre? L a nature lui avoit-elle révélé tous fes fecrets ?
�h
cfets? L ’art avoit-ü déployé à fes yeux toutes Tes rciTource«?
A veu gle qu'il étoit ! il né voyoit pas fétat préfent de M .
le Préfident d’Abbadie , 6t. il vouloit prévoir fon état
avenir !
Il certifie que la maladie de M . le Préfident d’Abbadie
eft probablement incurable : mais Madame la Préfidente'
d’Abbadie mandoit à fa belle-m ère, par fa .lettre du 25
octobre 1785 , qui eft à la page 21 de fon mémoire im
primé , que le }leur Borie, lui faifoit efpérer la gtièrifon
totale de M'. le Préfident etAbbadie. Par quelle étrange con
tradiction ce m édecin, qui n’avoit plus vu M. le Préfident
d’Abbadie depuis le mois de novembre 1 7 8 5 , époque de
foii départ pour le Béarn , a-t-il donc certifié au mois de
février 1 7 8 4 , que fa maladie paroiiloit ótre parvenue à
l’incurabilité !
L ’événement a démenti fon aflertion à ce fujet : deux
médecins qui ontvifité , Tannés dernière, M. le Préfident
d’Abbadie depuis le 3 mars jufques au p m a i, ont déclaré
dans leut rapport que fa maladie eft curable, qu’elle a cédé
au temps ôt aux rem edes, fi elle a été jamais telle qu’on la
Jeura dépeinte, ôc qu’il eft dans un état habituel de raifon.
Mais ce qui doit le plus frapper les efprits à la vue du
certificat du 6 mai 1783 , ce n’eil point la foibleife que le
fieur Borie a eue de l’exp éd ier, c’eit le courage que
Madame la Préfidente d’Abbadie a eu de fe le faire déli
vrer. E lle ne va point demander à fon médecin des fecours .
pQur M . le Préfident d Abbadie; elle va chercher une arme
nouvelle contre lui. E lle n’eft pas en peine dè favoir com
ment on pourra le guérir; c ’eft: aflez qu’on lui certifie qu’il
ne guérira jamais.- E lle faific l’annonce de l’incurabilicé
E
�34
de M . le Préfident d’Abbadie comme une autre femme
faifiroit l’annonce de la guérifon prochaine de fon m a ri,
& elle garde pen d an t des années entières ce pronoftic
funefte & défefpérant avec le même foin que fi elle y
trouvoit l’alim en t de fes efpérances & une fource de confolations.
Je ne fais pourquoi ce certificat n’a été ni imprimé au
C hâtelet, ni lu à cette audience, à moins que Madame
la Préfidente d’Abbadie n’ait craint l’indignation que devoit
faire naître contr’elle une pièce auffi révoltante, & qui
la d ém afque il bien aux yeux du public. Mais il a exifté ce
certificat odieux : il a été annexé à la procédure de Pau,
où il a produit fon effet; il a été annexé à la procédure
du Châtelet, où il a été regardé avec horreur; nous en
avons une copie expédiée par le Greffier du Châtelet ; il
n’eft plus temps de le fupprimer, l’efprit qui l a difté efl
à découvert.
C e certificat efl digne de figurer à côté de celui du
6 Mai 178 3 , qui enhardit Madame la Préfidente d’Abbadie
à envoyer fon mari dans une maifon de force. Ils font
fortis de la même fabrique; ils avoient la même deftination : ce font deux monumens des machinations de Madame
la Préfidente d’Abbadie, contre fon mari, & de la com
plicité du M édecin qu’elle avoit aifocié à fes coupables
projets.
O n a plaidé qu’ en 1 7 8 4 , pendant fon féjour à Pau
M . le Préfident d’Abbadie a fait acheter deux chèvres
qu’il vouloit atteler à fa v o itu re , ôc deux oyes à, qui il
youloit apprendre l’alphabet..
O n ne dit pas qu’il ait fait atteler des clièvres à fa
�5?
^
voiture , ni qu’ H ait prononcé l’alj h i l e t devant des oye.3,
pour le leur apprendre ; on dit feulement qu il a voulu
le faire. Mais par quels lignes certains cette intention
s’eft-elle manifeftée? ceft ce qu’on ne fait pas.
Au mois d’Avril de l’année dernière, M . le Prérident
d’Abbadie a touché, dit-on, du bout de Ton manchon dans
le jardia des Tuileries, la ftatue qui repréfente le Tibre.
Madame d’Abbadie a dit dans fon Mémoire imprimé, qu’il
avoit donné un coup a cette flàtue, pour la punir de ce
qu’elle ne lui parloit pas; on reconnoit à ce tra it, le génie
familier qui veille iur M . le Préfident d'A b b a d ie, qui
connoît fes peniees mieux que lui-m êm e,
qui devine
lorfqu'il fait acheter des chèvres, que c’eft pour les atteler
à la voiture, lorfqu’il fait acheter
des o y e s , que c’eft
pour leur apprendre l’alphabet. Mais fi M . le Préfident
d’Abbadie étoit infenfé, fes a£tions ne feroient-elles pas
allez parlantes par elles-mêmes , & auroit on befoin de
deviner fes intentions, pour le convaincre de démence?
Dans le fait, M . le Préfident d’Abbadie a fait acheter
deux chèvres en 1 7 8 4 , pour l’ufage auquel elles devoient
fervir naturellement, il les a envoyées dans fa terre de
B izanos, d’où on lui apporroit du lait tous les matins.
L ’oye eft un aliment qu’il aime ; il en a fait engraifler
deux en 1 7 8 4 , parmi des poulets, des canards, des
dindons & des volailles de toute efpèce, qui garniiToient
& qui garnilfent en core, fuivant l’ufage de la P ro v in ce ,
la bafTe-cour qu’il a dans fa maifon de Pau.
C eu x qui lui ont attribué l’intention fecrette de faire
atteler des chèvres à fa voitu re, & d’apprendre l’alphabet
à des o y e s , n’ont fait que lui appliquer l’hifioire d’un
E ij
�¿6
fameux fou du Béarn, nommé B erd u c, dont la tradition
tranfmet les folies depuis 40 ans, dans cette province.
L e nommé D o u c e r , qui étoit en 178 4 , le Cocher &
i’efpion de M . le Préfident d’A bbadie, & qui a paffé depuis
au fervice de Madame fon époufe, ne parle point dans
la déclaration qu’il a faite le premier O & obre 1 7 8 ; , en
l’hôtel du fieur Lieutenant C i v i l , du prétendu projet de
faire atteler des chèvres à une voiture : c’eût été lui cepen
dant qui auroit été chargé, comme C o c h e r, de ce bizarre
attelage, fi M. le Préfident d’Abbadie en avoit conçu l’idée,
& il ne lui auroit certainement pas fait grâce de cet écart,
s’il avoit eu le plus léger prétexte pour le lui imputer.
A u furplus, & c’eft ici le mot décifif, fi des témoins
de Pau ont été auffi complaifans pour Madame la Préildente d A b b a d ie, que fon Médécin de Paris, & s’ils ont
eu la témérité de dénaturer les actions les plus raifônnables
de M . le Préfident d’A b b a d ie , par l’extravagance des
motifs qu’ils lui ont attribués, leurs dépofitions ne font
d ’aucun poids dans la caufe ; les enquêtes ont été annullées
par un Arrêt du C on feil; Madame la Préfidente d’Abbadie
n ’a à l’appui de ces faits que fa fimple allégation , qui eft
pleinement détruite par la dénégation formelle de M. le
Préfident d’Abbadie.
Il ne refie que les deux lettres des 18 Juillet & 16 A oû t
1781 : mais qu’importe que M . le Préfident d’Abbadie
ait eu , il y a iïx ans, deux mrtmens d’abfence , & quelle
connexité y a t-il entre ces nccidens anciens 8? psifagers,
& l’état a&uel & habituel de M . le Préfident d’Abbadie?
C ’eil fon -état préfent qu’il faut juger,
accidens paiTés-
&
non pas feà
�37
Ces accidens n’ont point troublé fa correfpondance,
ni interrompu le cours de fon adminiflratipn , qui s’eft
conftamment foutenue jufau’au moment actuel.
Ses parens, fes amis, fes g«ns d’affaires lui ont envoyé .
quelques-unes des lettres qu’il leur avoit écrites, & lui
ont accufé la réception de beaucoup d’autres; ces lettres
prouvent qu’il a entretenu fans ceife toutes fes relationsd’intérêt, de bienféanpe & d’amitié.
Il faut voir fur-tout fon administration depuis 1781 ,
«5poqueà laquelle on fait commencer fa prétendue démence:
c’eft la meillem-e défenfe qu’il puiOe fournir, c’t'ft le triomphede fa caufe.
Par Procès-verbal du 30 Juin 1781 , M . le Préfident
d’Àbbadie exerce le retrait féodal d’un bois , moyennant
la fomme de 3661 livres.
Par a£te du 2 Mars 1 7 8 2 , il fait le rachat d’une rente
foncière de 24.0 l i v . , moyennant une fomme de 4800 liv.
P a ra tìe du 18 Juillet 1782 , il acquiert pour la fomme
de 4788 liv. 17 fols 6 deniers, un bien-fonds dont Madame
fa mère a exercé
le retrait cenfuel comme dame de
Bizanos.
Par autre a£te du 25» du même m o is, il acquiert pour
la fomme de
livres, un autre bien -fon d s dont
Madame fa M ère a pareillement exeixé le retrait cenfuel.
Par afte du 3 Octobre 1783» il acquiert des droits
de féodalité &: de cen s, qui fe trouvent à fa bienféance.
Par afte du 22 O ttobre
1 7 8 4 , il çonfent un bail à
rente d’ un terrein qui ne lui étoit d’aucune utilité.
Par atle du 14 Mai 1785 } trois jours après un fécond '
�38
Arrêt du Parlement a s Pau j qui confirme fon inter
diction provifoire » M . le Piéfident dA bbad ic dans
1 ignorance de cet A.riêt , acquiert une portion de la
dîme de C re m ille, aux environs de fa terre de SaintLoup.
Depuis 17S1 jufqu’en 1785’ , M. le Préfident d’ Abbadie
a fait chaque année quelque acquifition, malgré les fouftnclions que Madame fon époufe lui avoit faites en 1781
& en 1785.
C ’eft principalement après le décès de Madame fa M ère ,
arrivé dnns le mois d’Août 178 4 , que M . le Préfident
d’Abbadie a donné des preuves figna’ ées de fon économie
&. de la fageife de fon adminiilration.
Il étoit feul héritier de Madame fa m ère, & fpécialement chargé du f jin d’erécuter fon teilament, qui contenoit des legs confidéra! les.
A entendre Madame la Préfidente d’Abbadie .dans fon
Mémoire imprimé, (pag. 1 1 1 ) , fon mari n'a pas encore
acquitté une teule difpofition du teftament de Madame
fà mère, ôc s’eft montré par le fait incapable du foin qu’elle
lui avoit confié.
1
Com m e le menfonge prend dans cette caufe le ton
d’affurance qui ne convient
qu’à la vérité! voici des
quittances d’environ 30000 livres, que M . le Préfident
d’Abbadie a payées dans les deux premiers mois qui ont
fuivi le décès de Madame fa mère, pour 1acquit dune
partie des legs- contenus dans fon teftament. Elle lui
avoit accordé quatre ans de terme, à la charge de payer les
intercts ; il a mieux aimé en bon Adminiftrateur éteindre
ces intérêts que garder des deniers oififs dans fa calife.
�39
E t d’où provenoient ces 30000 livres? des épargnes
q u eM . le Préfident d’Abbadie avoit faites fur 40000 liv. de
rente. T e l eft l’Adminiftrateur que Madame fon époufe
veut faire interdire comme incapable d’adaiiniftrer. Y eutil jamais de plus folle entreprife ?
A la vue d’une adminiflration auili f a g e , fi le concours
du Miniftère public n’étoit point néceffaire dans cette
caufe , vous vous lèv erie z, M eilleurs, emportés par le
fentiment de l’équité qui vous prefle ; vous vous hâteriez
de confirmer ¡a Sentence du Châtelet, 6c de mettre fin à
cette perfécution.
Q u e Madame la Préiident.e d’Abbadie faiTe dans l’inter
valle
de
1781
à
1785* ,
des
approvifionnemens
de
certificats & de lettres miilives fur l’état de fon mari-,
qu’elle le faffe décl-rer fou par les correfpondans, incurable
par fon M édecin, & digne d’être enfermé dans une Maifon
de F c r c e ; qu’elle s’exerce avec fus fi.;ppôts à imaginer
des traits de folie , pour ies lu-' attribuer , qu’elle s’amufe à le couvrir de ridicules, & à en faire aux yeux dit
public un objet de cérifion : ces jeux de l’intrigue & de
la malignité n’effaceront point les preuves de l’économie
de M. le Préfident d’ALbadie, &. n’exciteront pas fur fon
compte les alarmes d e là J u llic e , qui n’eft point en peine
de favoir quelles ont pu être quelquefois i'es idées fugitives,
& à qui il fuffit de voir quelle cil dans tous les temps fon
adminiftration.
L es années 17??, &
1784 que M. le Préfident d’Abba
die a paffées en Bearn n’ont cm de remarquable à fon égard
que la ceffation
de fes fondions ; fon zèle l’aj pelloit au
P a la is .. mais une indiferétion cruelle, lui en interdifoit l’eu-
�\
40
trée. Ses deux lettres de 1731 , dont Madame fon époufe
'
¿toit nantie, avaient été colportées dans la ville de Pau-,
& y avoient répandu contre lui les impreilîons les plus fa-
cheufés. Il redotftoit les regards du public prévenu; il
c ra ig n o it d’avoir à rougir dans le fanchnire de la Juftice :
fa modeftie ne lui permetcoit pas de fonger que la tache
\ des accidens qu’il avoit éprouvés y feroit effacée par la
gloire qu’il y avoit acquife : fa retraite comme Mngillrac
prouve l’excès de fa ienlibilité de de fa déiicateife ; mais
fon adminifiraticn comme père' de famille prouve qu’il
eft en é t a t . d’adminiilrer par lui-même , 6c c’efi: le père
de famille qu’il faut juger maintenant, & non pas le Magiiîrat.
Le décès de Madame fà mère a été fuivi dtj près de ce*
lyi ci..; (leur de Bordn fon oncle- C e Fermier-Général eil
déeé-;é le 3 Novembre 17S4. Tous deux avoient confié
à M. le Préiï lent d’Abbadie l’exécution de leurs teflamens.
Iis ne s’étoie-nt point aveuglés fur fon état; ils le connoffeient mieux que Madame fon époufe, qui ne vivolt
pas avec lu i, fit ils lui avoient continué l:ur confiance
la plus entière jufqu’à leur dernier moment.
Madame la Prélidente d’Abbadie attendoit depuis 178^,
dans la maifon du fieur de B o r d a , l’ouverture de fa
fucceffion , refolue de s’en emparer à quelque prix que
ce fût. Elle, avoit lniffé jufqu’alors à M . le Préfident
d’Abbadie la libre ad mi nift ration de fa perfonne ôt de
fes bi ens, quoiqu’elle feignit de croire qu’il etoit depuis
1781 dans.un état de démence, fic elle sxétoit contentée
de s’emparer deux fois d’une partie de fes revenus; mais
quand elle vit deux ou trois millions que la fuccefiion
du fieur de Borda offroit à foa mari, elle ne garda plus
de
�ft
de m efu re, c’étoit le moment où elle devoit recueillir le
fruit de fes intrigues & de fes machinations.
M e Bourgeon, Procureur au C h â te le t, avoit aififté à
i’appofition des fcellés dans la maifon du fieur de Borda,
■en vertu de la procuration qiie M . le Préfident d’Aèbadie
& Madame fa mère avoient envoyée le premier Décembre
1785 , au fieur D etchegaraî, chacun pour fon
intérêt
perfonnel; cette précaution déplut à Madame la Préfideite
d’A bbadie, & lui rendit Le fieur Detchegaraî encore plus
odieux.
Il fe forma d’abord deux partis dans la famille, dont
chacun vouloit adminiftrer au nom de M . le Préfident
d’A b b a d ie, s’il reftoit en Péarn , mais qui fe réunirent
pour le faire interdire, quand ils le virent arriver à Paris,
dans
le deifein d’adminiftrer par lui-même.
Ces partis étoient compofés, l’un du Marquis & d e la Marquifedu Coudrai,l’autre de Madame laPréfidente d’Abbadie,
6c des intrigans qu’elle avoit aiTocics a fes efpérances. Ces
deux partis s’adreifoient à M . le Préfident d’Abbadie luim êm e, pour obtenir fa procuration. Lamarquife du Coudrai
agiiïoit avec fa franchife naturelle ; Madame ü’Abbadie
plus adroite faifoit mouvoir en fi faveur les reiforts de
l’intrigue. C ’eft dans leur correfpondance avec M . le
Préfident d’A b b a d ie , & dans celle des partifans de M a
dame la Prélidente d’Abbadie que
nous allons voir les
divers mouvemens qu ils fe font donnés pour obtenir fa
confiance, refolus de le perdre s’ils ne pouvoient pas y
réufiii*.
L a Marquife du Coudrai a écrit cinq lettres à M . 1»
F.
�' 42
*
'
Préfident d 'A bbadie, 1e s * , 9 , \S , 23 6c 47. N ovem bre
1784.
. Dans celle du fix , elle lui accufe la réception de fa lettre
du a i O fto b re p récéd en t, qui lui a f a i t , dic-elle, grand
plaijîr, &
qui par cette raifon ne pacoh point dans, la
caufe. E lle lui mande que les affaires de la fuceeffion du
iieur de Borda font Amples.
/
» Il feroit donc déiirable, ajoute-t-elle, que vous vinflïex
» ic i, pour les diriger vous-même.
Dans celle du n e u f N o v e m b re , elle lui demande fa pro
c u ra tio n pour un homme en qui elle a de la confiance^
rnais que M . le Préfident d’Abbadie ne co n ço it pas.
Dans celle du 16 f elle lui indique un autre Procureur
fondé, & lui envoye un projet de procuration.
Dans celle du 23 , elle lui accufe la réception de fa
lettre du 11 du même mois , qui ne paroît pas dans la
C a u fe , parce qu’elle eft bonne , & elle le prefle d’envoyer
Ci procuration à l’homme qu’elle lui a défigné.
Dans celle du 2 7 ., elle lui accufe la réception de fa
lettre du 1 3 , qui ne paroît pas plus que les deux autres,
& elle lui dit: « T o u tes vos peines, au p aflé, au préfent
» & à l’a v e n ir, ont é t é , font &
feront toujours
les
» m ien n e s, par mon attachement pour ma fa m ille , &
» pour vous en particulier.
I c i , M eilleu rs, fe préfente 11ne réflexion bien naturelle.'
L a Marquife du Coudrai & fon mari dont elle étoit
évidem ment dans cette occafion l’interprète & l’organe,
engagent M . le Préfident d’A b b ad ie, dans le cas où il
ne viendroit point diriger lui-même fes affaires, d’envoyer
fr procuration à un homme qu’il* lui défignent. Ils preférent
1
�un étranger à Madame la Préfidente
d’A bbad ie, qu’ils
ConnoiiToient par eux-m êm es, avec qui ils écoient dans
la maifon -du fieûr de B orda, ÔC qu’ils voyoient à Paria
depuis vingt mois. Ils ne la jugent point digne de la
confiance de fon M a ri; ils perfiftent pendant plus d’un
mois dans le .parti qu’ils ont pris de l’exclure des fonftiona
de fimple mandataire; com m ent l’intrigue a-t-elle pu de*
puis leur fafciner les yeux , & leur faire envifàger M . le
Préfident d’Abbadie com m e digne d’interdi& ion, 6c M a
dame la Préfidente d’Abbadie comme digne de la Curatelle?,
D e fon c ô t é , Madame la Préfidente d'Abbadie a écrit
deux lettres à fon M a r i, dans le cours du mois de N o
vembre 1784.
- » Je fens, lui dit-elle, dans la première en date du 6 ,
» com bien la perte de votre oncle va vous affliger, &c
» ;e voudrois bien
être avec vous pour adoucir votre
»chagrin . . . Je vous envoye une expédition du tefp tament de votre o n c le , par laquelle vous verrez les
» preuves qu’il vous donne de l’attachement particulier
» q u 'il avoit pour vo u s, en vous nommant fon E xécuteur
» teftamentaire. L es fcellés ont été appofés ; vous appren» drez avec le plus grand étonnement que M . D etch e» garay, abufant d e là procuration que vous lui avez don
» n ée, conjointem ent avec feue M adame votre m ère, s’eft
» préfenté avec un Procureur au ChâteJet, pour aflifter à
» l’appofition des fcellés; cette démarche a caufé un vrai
» fcandale dans 1* maifon j il aurait dû fa v o irq u e , dans
» les circonftances où nous nous trouvons, il riy a que
v moi (¡ni
vous repréfenter, & porter à vos'intérêts
» & à ceux de nos enfans toute l’attention cu’ik mûrirent u.
■
�44
( le S r d’Etchegaray ne favoit pas cela ; il penfou à cet égard
comme le Marquis ôt la Marquife du Coudrai, comme toute
la famille, & comme M. le Préfident d Abbadie lui-même).
L es tentatives du Marquis & de la Matquife du C o u
drai, pour faire donner à un étranger la procuration de
M . le Préfident d’Abbadie, dans le cas où il ne viendroit
pas diriger lui même fes affaires, jettoient Madame la
Préfidente d’Abbadie dans un grand embarras. E lle n’ofoit
pas leur réfifter ouvertement
ni demander pour elle-même
la procuration de fon mari, dont elle ne pouvoit pas fe difiîmuler qu’elle avoit perdu la confiance. E lle prit le parti de
la faire folliciter par des tiers, & pour mieux ailurer fon fucc è s, elle invita M . le Préfident d'Abbadie à confuiter, fur le
choix de fon mandataire, des Avocats de Pau , qui, prévenus
par les agens de Madame la Préfidente d’A bbadie, devoient
naturellement lui donner la préférence; en tout événement,
elle fongea à attirer M . le Préfident d’Abbaçlie à Paris, dans
le foyer de la confpiration, pour avoir la facilité d’obtenir
fa confiance, ou de le perdre s’il la lui sefufoir.
» Il eft trop jufie, lui difoit-elle, par fa. lettre du &
» N ovem bre 1 7 8 4 , que fur des affaires ayifi importantes
» vous preniez un parti avec nos confeils & nos amis
» communs; le meilleur de tous, feroitr, mon cher mari,
» d e vous rendre ici; vous e n
sen tez
» vos a f f a i r e s
présence.
e x ig e n t
vo tre
la
n é c e s s ité ,
V ous fentez
» tout l’embarras qu’éprouveroient les affaires, fi nous ne
x pouvions les traiter que par correfpondance ; je ne puis
» vous le diifimuler, je ne laiife pas d’avoir bien des
» chofes à fouffrir, par les altercations fréquentes qui me
» font faites de la part de M . le Marquis & M adame la
�4Î
»M arquife du Cdudrai. Sans>douter que M . Huftafti: 'ner
» manquera pas de vous écrire pour vous faire part dç<
» Tes obfervatigns fur la conduite £i tenir.
M ?. H ü t t e a u .A v o c a t en la C o ur , étojt depuis dix ans
iam i de M . le Pfélident d’Abbadie , fon confeil & fon
défenfeur dans toutes fes caufes ; ce n’avoit été; que dans
celle,des 35,000 livres enlevées par Madame la Préfidente
d!Abbadie. qu’il avoit cédé à M u. Martineau le foin de le
défendre. Il écrivit à M. le Président d’Abbadie le 8 N o virnbre >784, uné longue lettre dans laquelle il fe plaint
d’.abord , de ce que le fieur d’Etche^aray.a.aififté aux fcellés
en vertu de fa procuration générale* ’( Madame la Préfi
dente d’Abbadie s’en plaignoit auflî ) & lui marque qu’il
ne peut fe difpenfer de défavouer ce qu’afait le Procureur
au Châtelet d’après cette procuration gén érale, dont il a ,
ajoute-t-il , (i indignement abufé. ( Q u e l grand abus pouvoiril donc y avoir dans la iimple ailiftance du Procureur de
M . le Préfident d’Abbadie à l’appoiition des fcellés ! )
« L e vrai mot de tout c e la , continue M e. Hutteau j eft
» l’avidité du Procureur au Châtelet qui, pour fon intérêt
» perfonnel, n’a pas craint de faire un aile injurieux à v o u s ,
» M . le Préfident, & à votre famille.
» C e premier point arrêté, qu’allez-vous faire aihielle» ment? Il y a les fcellés à le v e r, l’inventaire à faire; if
» faut prendre qualité
dans la fucceiTion, délivrer
les
» legs, & c . Pour toutes ces opérations fi férieufes, fi im» portantes , qui embraiTent des objets fi confidérables ,
» J e CROIS QUE VOTRE PRÉSENCE SEROIT ABSOLUMENT INDIS-
jd p e n s a b l e . ( Madame la Préfidente d’Abbadie le lui avoit
» marqué auiTi) au moins ne pourroit-on fuppléer à votre
�» abfence que par une procuration méditée & concertée
» pour que vos intérêts ne puiflent être compromis en
» rien; mais q u a n d il s’agit de procuration , il y a toujour*
» deux
ch o fes
eflentielles à confidérer , l e c h o i x
de la
» p e r f o n n e qui n o u s reprefente, & l’objet des pouvoirs
» q u ’ o n l u i donne.
M e. Hutteau a eu la difcretion de ne pas s’expliquer
ouvertement fur le choix de la perfonne; il favoit qu'il
n’étoit pas aifé de faire tomber ce choix fur Madame la
Prélidente d'Abbadie ; il a renvoyé à cet égard M . le
Préfident d’Abbadie à fes Confeils de Pau. (M adam e la
P ré fid e n te d’Abbadie l'y avoit renvoyé auiïi)
» O n doit vous laiiler le temps , difoit-il, de prendre
» votre parti avec les Confeils éclairés que vous avez à
» Pau ; peut-être aufTi defirerez vous avoir le temps de
» vous entendre, & de vous concerter avec moi.
11 entre enfuite dans une diflertation profonde fur les
qualités & les droits de M . le Préfident d’ A bbadie, dans
la fucceiïion de fon o n c l e , & il finit par lui dire:
i° V o i l à , M . le Préfident, mes obfervations; Je vous
i .es
soum ets
; que ce fuffrage eft précieux pour M . le
Préfident d’Abbadie ! c’eft un Jurifconfulte , fon ancien
C o n le il, le Confeil dciigné de la Curatelle, qui lui foumet
.les obfervations, au mois de N ovem b e 1 7 8 4 , à la veille
de la pourfuite de fon interdiction.
M e. Hutteau étoicTi éloigné de regarder M . le Préfi
dent d’Abbadie comme infenfé , qu’il lui a écrit dans le
courant du même m o is, trois autres lettres., dans l’une
‘ tlefqùelies, qui eft du 27 N o v e m b re , il lui recommande
fur-tout de ne donner fa procuration qu’à une perfonne
" ’il ço;;ncîi;.i panic^Hèrencnt & par Uti-mcmcy. cîe co:i-
�*7
fulter à P a u , fur fon c h o ix , & de né pas compromettre
fa fortu n e, par ¡es fa its de quelque, krangtr qu’il ne connût*
iroitpas.
C es derniers mots tendoient à i’excluficm du Procureur
/
fo n d é , défigné par le Marquis 6c la M arquife du C o u d rai,
qui écoit inconnu à M . le Préfident d’Abbadie ; exhorter
d'ailleurs c e Magiftrat à confulter fur le ch oix d’un man
dataire, à Pan où M adame la Préfidente d’Abbadie avoit
des
agens qui lui étoient aveuglém ent d évo u és, c’étoit
s*aiTurer qu’elle feroit défignée par préférence à tout
autre.
M . de C h e ra u te , Confeiller au Parlement de P a u ,
a prévenu l’avis des A vocats ; il fe flattoit apparemment
d’avoir aiTez de crédit auprès de M . le Préfident d’A b b a d ie,
pour déterminer fon choix en
faveur de M adame fon
époufe. I l lui a écrit à ce fujet, le 27 N ovem bre 1784.
» Sans doute, lui d it-il, que le foin de cette importante
» fucceflion vous d¿terminera d’aller à Paris , Ci votre
» fanté vous le permet ; 6c fi elle ne vous le perm ettoit
x> p a s, vous donnerez, votre confiance à quelqu’ un.
» C e foin regarde naturellement M adame la Préfidente
» d’A bbadic, . . . j’apprends avec le plus v i f chagrin qu’on
» travaille à voue déterminer à lui refuier votre confiance,
» 6c à la donner à d’autres . . .
S i vous ne com ptez
» pas fur fon exp érien ce, ôc fur le choix qu’elle feroit d’un
» bon C o n fe il,
qui vous e m p ê c h e , M o n fieu r, de lui
» en indiquer u n ,
de l’avis de
qui elle fe conduira,
» SUR LES INSTRUCTIONS QUE VOUS LEUR DONNEREZ ü ’iCI.
» J e penfe donc M onfieur, que la re lig io n , l’honnêteté
» & la décence vous impofent la loi d’accorder votre
�»"confiance à ¿elle qui unie à vous par les liens les plus
» facrés, partage-. . • votre tendrdfe pour vos enfans,
» & tous les biens 6c les maux qui vous arrivent, & c. & c .
R e m a r q u e z , Meilleurs, le iuffrage honorable qui réfulte
de te lettré de M . de Cheraute, en faveur de M . le Préiident
d’Abbâdie.
G ’eil un Magiftrat
du
Parlement de 'Pàu^
qui juge M . le Préfident d ’Abbadie capable de diriger
P a r ses i n s t r u c t i o n s
perfonnelles Madame la Préiidente
d’Abbadie ôc fon Confeil.
Devoit-on s’attendre à voir
ce Magiftrat ouvrir.peu de temps après, dans une aifemblée
domeftique, l’avis de l’interdi&ion
de M . le Préfident
d’Abbadie?
Q u o i qu’il en fo it, M . le Préfident d’Abbadie n’a pas
c r u , malgré fa déférence pour les lumières de M . de
C héraute, que la religion lui impofât la loi de confie^
à fou époufe le maniment de deux ou trois millions.^
& il ne fç fentoit pas naturellement difpofé à la charger
du fardeau d u n e adminiftration auifi importante. Cepen
dant comme M e H utteau, fon con feil, en qui il avoit mis
toute fa confiance, l’ exhortoit à confulter des Avocats
de P a u , fur le choix d’un Procureur f o n d é , dans le cas
fih il ne vi en droit pas à Paris, & qu’il* héiitoit de faird
ce voyage dans le mois de Décembre 1 7 8 4 , il a chargé
le fieur A bbé d’Erchegaray • fon coufin., fon am i, & fort
voiiin dans le pays de S o û le , où il étoît alors, d’ailer
prendre à Pau l’avis de ces Jtirifconfultes, fe refervant
de prendre enfuite par lui,- même tel -parti qu’il jùgeroit
convenable.
ta
quefiion a
été
propofée aux A vocats de P a u ,
dépouillée dçs circonflances particulières qui auroient pu
éclairer
�49
éclairer leur opinion. Us ont décidé que fi M . le PréiHent
d’Abbadie n’alloit point diriger lui-même fes affaires à
Paris, il devoit
envoÿer fa procuration à Madame fon
époufe. Mais M . le Préfident d’Abbadie s’eft déterminé
' à fe rendre dans cette C ap itale, malgré la rigueur de la
faifon, malgré l’accablement dans lequel l’avoit plongé la
mort de la mère & de fon oncle.
11 eft arrivé à Paris le 29 Décem bre 1784., avec l’Abbc
d’Etchegaray ; Ils fe font réunis dans l’hôtel du fieur de
Borda à Madame la Préfidente d’Abbadie , à íes enfans., au
Marquis & à la Marquife du Coudrai. Il n’étoit point de
la dignité de M. le Préfident d’A bbadie, d’aififter jour
nellement aux opérations préliminaires, telles que la levée
des fcellés & l’inventaire, 6c comme ces opérations étoieut
urgentes , &
que la Marquife
du
Coudrai
lui
avoit
mandé dans toutes fes lettres qu’il n’y avoit pas un inftant à
perdre, il a d o n n e le 30 Décem bre 1 7 8 4 , une procura
tion fous feing p rivé, en attendant que la fatigue du
voyage lui permît d’aller la donner pardevant 1Notaire ,
au fieur d’Etchegaray fon coufin , dont il avoit éprouvé
le zèle & la fidélité dans diverfes occafions, & fmgulièrement dans l’affaire des 3.6000 livres dont il lui avoit
fait reflituer m e partie. ■
» M a is , a-t-on d it, M . le Préfident d’Abbadie en don» nant au fieur d’Etchegaray le pouvoir
d’aflifter à la
» le v é e des fcellés, & à la confettion de l’inventaire,
» lui a d o n n é aufii le pouvoir de fe faire remettre le?
' j» titres & papiers de la fucceifion : il a livré une fortune
» immenfe à un homme fans état, &
qui avoit( deux
G
�»procès,
S °t
l’un en la C o u r , l’autre au C h â te le t, où il
» avoir été décrété d’ajournement perfonnel. Madame la
» Préfidente d’Abbadie n’a-t-elle pas dû s’alarmer en voyant
» la confiance de ion mari ii mal placée, & prendre les
» mefures les plus promptes pour en prévenir l’abus ?
N o n , Madame la Prélîdente d’Abbadie ne devoit nifuf*
peder le fieur d’Etchegaray à raifon de ces procès, ni
faire interdire ion mari , fous ce prétexte.
D ’abord, quel étoit le fujet des deu< procès que le
fieur d’Etchegaray avoit au commencement de l’année
178 j ? le voici.
i°. L e fieur d’Etchegaray avoit fait faifir une manufac
t u r e , fife à Paris, appartenante au fieur Texada Efpagnol,
fon débiteur d’une famine d’environ 20000 livres.
Le
fieur A rra g o n ,
autre Efpagnol j neveu du fieur
T e x a d a , avoit formé oppoiition à la iaiiïe, fous prétexte
que fon oncle lui avoit vendu peu de temps auparavant
cette manufadure.
L e fieur d’Etchegaray a foutenu que cette vente étoit
frauduleufe & n u lle , & l’a fait juger telle au Châtelet
avec dépens, dommages & intérêts.
Sur l’appel , le fieur Arragon a fait juger cette vente
fincère & valable.
L e tort du Sieur
d ’E tch ega ra y, dans ce p ro cès, a
donc été de n’avoir pas deviné avant de faifir la manufa& ure, que fon débiteur l’avoit vendue à fon neveu , &
d’avoir
cru
enfuite que
cette
vente
étoit
fimulée &
frauduleufe ; cette opinion que les Juges du Châtelet
avoient adoptée , ne le rendoit certainement pas indigne
tîc la confiance de M . le Préfident d’Abbadie.
�u
2*. L e procès pendant au Châtelet n’étoit pas plus grave*
L e Sieur A rra gon , débiteur d’une lettre de ch a n g e,
dont le fieur d’Etchegaray tftoit porteur, lui avoit mandé
en 1783 , qu’il ne la payeroit pas, & qu’il ne craignoit
point Tes pourfuites, parce qu’il s’étoit mis fous la pro•te&ipn. du
Confeil
de Caitille. L e fieur
d’Etchegaray
l ’avoit menacé de faire connoître fa mauvaife f o i , dans
les places de com m erce, s’il ne payoit pas. L e fieur
Arragon avoit reconnu fon to rt, & avoit payé.
Plus d’un an après, dans le mois de Janvier 1785',
dans ce môme mois où Madame la Préfidente d’Abbadie
envoyoit à Pau
le pouvoir de pourfuivre l'interdiction
de fon mari , J e fieur Arragon s’efl laiffé perfuader qu’il
falloit faire un procès
criminel au fieur d’ Etchegaray,
fur les prétendues injures qu’il lui avoit écrites en 1783.
Il a rendu plainte, ôt a furpris contre le fieur d’E tche
garay un décret d’ajournement perfonnel, qui eft intervenu
à propos pour accompagner à Pau la procuration tendante
à l’interditlion de M . le Préfident d’Abbadie.
M a is , qu’eil-il arrivé ? une Sentence du 24
Janvier
17 8 5 , a déclaré la plainte calomnieufe & vexatoire, a
déchargé le fieur d’Etchegaray de l’accufation , Ôc a
condamné le fieur Arragon aux dommages fit intérêts,
& aux dépens.
L e fieur Arragon a gardé le filence pendant près d’un
an: il vient d’interjetter appel de cette S e n ten ce, depuis
que la plaidoirie eit engagée en la C o u r , entre M . le
Préfident &
Madame la Préfidente d’A b b a d ie , comme
fi ces deux caufes étoient faites pour marcher enfemble,
G ij
�p
& ponr fe prêter un fecours mutuel. Mais quand le fieur
Arragon feroit juger que le fieur d’Etchegan.y a eu tort
de fe plaindre à lui-même & à d’autres, de la mauvaife
foi avec laquelle il lui-refufoit en 1 7 8 3 , le payement
d’une lettre de change, quand il feroit accueillir une
plainte en injures rendue après plus d’ un an de filetice,
ce
qui répugne aux principes , cet événement n’enta-
cheroit point l’honneur du fieur d’Etchegaray, & ne le
rendrait pas indigne de la confiance de M . le Préfident
d’A tb a d ie.
Madame la Préfidente d’ kbbadie a donc eu tort de
feindre des alarmes pour la fortune de fon m ari, à raifon
des deux procès que le fieur d’Etchegaray avoit en 1785",
ôc j h s grand tort encore de l’avoir peint récemment
fous ce prétexte, comme un homme fufpeft, connu dans
les rI ribunatJx, & indigne de toute confiance.
Si M. le'Préfident d’A b b a d ie, en donnantau fieur d’Etche
garay le pouvoir d’aififter à la levée des
fcellés & à
l ’inventaire , lui a donné en même temps le pouvoir de
fe faire remettre les titres & papiers, il ne l’a pas autorifé
par là à toucher les effets au porteur, ni les deniers de
la fucceifion : l’argent comptant & les effets au porteur
ne font point compris fous Ja dénomination vague de titres
& papiers : onpourroit comprendre tout au plus, fous cette
dénomination , les contrats , les obligations , h’ s billets
à ordre ; mais ces fortes de titres de créance n’auroient
jamais pu courir aucun rifque dans les mains du fieur d’Etche
garay , puifqu’il n’étoit pas autorifé à en toucher le montant,
& à en donner quittance. Si M. le Préfident d’Abbadie
lui avoit confond un pouvoir aufli étendu , le lien du
�ir
f a n g , l’exemple de Madame fa m ère, Ôcla fidélité éprouvée
du fieur d’Etchegaray auraient iuPiifié fa confiance. Madame
d’Abbadie deman Je que la curatelle onérairefoit déférée au S r
Olivier, homme fans ¿ ta t, fans confiftance, décrété à la R e
quête de M. le Préfident d’Abbadie , pour fouilra&ion de
papiers de la fuccelîion du fieur de Borda; elle veut confier
à cet étranger la fortune de l'on mari, & elle fait un crime à
fon mari d’avoir voulu confier à fon coufin des titres 6c pa-,
p iers, qu’il n’a d’ailleurs jamais eus, qu’il n’a jamais réclamés,
& dont il ne pouvoit pas toucher le montant; 6c elle fe
flatte de colorer fous ce prétexte une interdiction odieufe
dont elle faifoit les préparatifs fecrets depuis quatre ans,
& qu’elle a pourfuivie après que le fieur d’Etchegaray a eu
requis lui-même le dépôt des effets 6c des deniers comp
tant de la iuccefiion ?
Mais li c’eft la crainte que le fieur d’Etchegaray n’abusât
de la procuration de M. le Préfident d’A bbadie. qui a
déterminé les pourfuites de Madame d’A bbadie, pourquoi
les continue-t-elle depuis u nan que le fieur d’Etchegaray
s’eft défifté de cette procuration ?
La procuration donnée au fieur d’Etchegaray n’eit évi
demment que le prétexte des pourfuites de Madame d’A b
badie; fon vrai m otif a été le refus qu’elle a efluyé d’une
procuration, à l’effet d’admir.iftrcr. La procuration ou l’interdittion: c’étoit le dernier mot d e là cabale : je le trouve
dans la lettre de M e Lom bard, A vo ca t à P a u 3 à Madame
d’Abbadie, en date du 3 D écem bre 178 4 , (p a g e 58 de
fon Mémoire imprimé).
» S ’il a un moment heureux , il reconnoitra la fageife ,
�» lanéceilitéde l’avis, (lavis des Avocats de Pau concernant la
» procuration) il l’exécutera.
» S ’il ne le fait p a s, lavis fera votre premier titre pour
» les mefures que vos intérêts communs exigent ».
E t ces mefures étoient, comme l’événement l’a prouvé
bientôt après, l’interdi&ion de M . le Préfident d’Abbadie.
Il étoit donc décidé que M. le Préfident d'Abbadie fe
démettrait de fon adminillration dans les mains de Madame
fon époufe, ou qu’elle pourfuivroit fon interdi&ion.
Il a annoncé ouvertem ent à fon arrivée à Paris, l’in
tention dans laquelle il étoit d’aJlminiftrer par lui-même :
M adam e d’ A b b a d ie &
fes aifociés ont
aulïitôt travaillé
fourdement à le faire interdire.
L e 26 Janvier 1 7 8 ? , à h premiere vacation de levée
des fcellés, le fieur d’Etchegaray a confenti, de fon propre
mouvement, fans que pe.rfonnc l'eût requis, que les effets
au porteur, ôc les deniers comptans de la fucceifion fuifent
remis à M c Quatremere, N o ta ire , qui s’en chargerait,
comme dépofitaire judiciaire. Il en a été référé pardevant
le fieur L ieutenan t-C ivil, qui, par fon ordonnance du même
j o u r , a donné a¿le au fieur d’ Etchegaray
confentement , & a
ordonné qu’il feroit
de fes dire &
procédé à la
reconnoitlance & levée des fcellés, & à l’inventaire , à
la requête de M . le Préiideut d’ /Vbbadie; en conféquence,
lès deniers comptans Sc les effets de la fucceifion du fieur
de Borda paifoient dans les mains du Notaire Sequeftre , à
mefure qu’ils fortoient de deiTous les fcellés.
M . le Préfident d’Abbadie étoit avec fon époufe , ôc
ne fongeoit pas à s’éloigner d'elle , quoiquelle l’eut accou
tumé à vivre f e u j, par un long divorce. L a fucceilion
�¿toit en dépôt, & ne couroit aucun rifqu e, en attendant
le partage auquel M . le Préfident d’Abbadie vouloit aiïlilet
lui-même ,
mais qui n'étoit pas li prochain.
Il n’a voit
eu recours jufqu’alors qu’à M c Babille fon nouveau C o n f e il,
pour les ?. flaires de la fucceillon , & à M e Hutteau fon
Confeil ancien & habituel, comme il venoit de le ddclarer
à la vacation du a i Janvier 17 8 y : c ’eft dans ces circons
tances que , par a d e du 30 du même mois , Madame
d’A'bbadie a donné pouvoir à un Procureur au Parlement
de Pau ,
dt.‘ pourfuivre l'interdiction de fon mari , ôc
de demander la curatelle honoraire pour elle, h curatelle
onéraire pour le fieur O liv ie r , à la charge de lui rendre
compte tous les trois mois , ôc la nomination de M c Hutteau
pour confeil de la curatelle.
» Si mon mari avoit été à m oi, a-t-elie dit à cette audience,
» jamais je n’aurois fongé à le faire interdire ».
A qui étoit-il donc dans le mois de Janvier 178$’ ,
quand vous avez envoyé-à Pau le pouvoir de pourfuivre
fon interdittion ? A qui étoit-il dans le mois de F évrier,
quand vous l’avez pourfuivie ? N ’étoit-il pas à vous, & à
vous feule? N e demeuroit-il pas avec vous & avec vos
enfans ? Il étoit fans défiance au fein de fa famille, &
vous aviez profcrit fa tête ; il vous traitoit comme fon
époufe , ôc vous contempliez en lui votre victime ; il
vous auroit confacré fa vie , ôc dans l’attente de fa mort
civile que vous aviez demandée , vous comptiez le peu
de jours qui lui reftoient en core, impatiente de voir arriver
le^dernier : voilà donc le prix du facrifice qu’il avoit fait
de toutes fes prétentions, en vous donnant fa main ; voilà
la récompenfe de 1 amitié qu’il vous avoit v o u é e , & des
libéralités dont il vous avoit comblée par votre contrat de
�mariage. C e t o î t pour le faire interdire à P a u , à fon in rç u ,
que vous l’aviez invité à fe rendre à Paris : c étoit pour lui
porter des coups plus surs, que vous l’aviez attiré auprès
de vous : eft-ce ainfi qu’une époufe remplit le devoir que
la religion & l’honneur lui impofcnt ? eil-ce ainfi quelle
garde la foi jurée au pied des autels ?
P R O C É D U R E S .
L a requêteàfin d’interdidion d e M . le Préfident d’Abbadie
a été donnée au Parlement de Pau, le 18 Février 1787 ,
& répondue d’une Ordonnance portant que les parens
amis feroient aiTemblés pour donner leur avis.
L e 2 Mars fuivant, Madame d'Abbadie a fait convo
quer une aflemblée dans la ville de Pau. Aucun des proches
de M . le Préiident d'Abbadie , aucun de íes amis n’a été
appellé : l’afTemblée étoit compofée de M . de Cheraute, des
lieurs D a b e n fe , Darberats , laF orcade & Loufl.au , parens
& alliés à un dégré très-éloigné & preique tombé dans l’oubli.
A ces cinq parens & alliés fe font joints les fleurs Defpalungue & de Peyré , que M. le Préfident d’Abbadie n’avoit
jamais comptés au nombre de fes amis , & ls fieur de
Peborde que Madame d’Abbadie avoit admis d’autant plus
volontiers parmi les fiens, qu’il étoit le neveu de fon M éd e
cin, du fieur Borie qui lui avoit expédié fiofficieufementpour
fon mari en 1783 & en 1784 deux certificats de démence.
Ces parens éloignés , & ces fçjj - difans amis fc font
aiïembiés pardevanr M . de Sajus , R ap p orteu r, qui n’a
pas jugé à propos de leur faire prêter ferment.
On
a mis fous les yeux de l’aflemblée; i°. les deux
lettres de M . le Préfident d’Abbadie de
1 7 8 1 , qui ne
prouvoient rien pour fon état atluel en 178 ; ; 20. les deux
certificats
�n
certificats du fieur Borie des 6 Mai 1783 , & 6 Février
1 7 8 4 , fruits honteux d e l à furprife la plus inanifeile, ôc
d e là machination la plus odi<Mjfe; 30. la procuration donnée
au fieur d’E tchegaray, le 9 Janvier 1 7 8 ? , tendante à des
attesconfervatoires, & dont il n’avoit fait d’autre ufage que
d’affifter à la levée des fcellés ;4°. le Procès-verbal d e ie v é e
des fcellés du 26 du même m ois, par lequel il paroiifoit
que le fieur d’Etchegaray avoit requis lui-même , ôc fait
ordonner le dépôt des effets au porteur ôc des deniers comptans, qu’il n’avoit point d’ailleurs le pouvoir de toucher.
Il n’étoit pas aifé de trouver dans ces pièces une caufe
réelle des alarmts que Madame d’Abbadie feignoit d’avoir
pour la fortune de fon mari : cependant les parens & amis
de Pau ont apperçu , comme ils fo n t dit dans leur avis ,
un danger imminent de voir difparoître dans les mains du
fieur d’Etchegaray, un million ôc demi d’effets au porteur,
qui n’étoient point dans les mains du fieur d’E tchegaray,
ôc dont il avoit requis lui-même , ôc fait ordonner le dépôt
dans celles de M° Q uatrem ere/N otaire.
Il
n’étoit pas aifé de trouver dans ces pièces la preuve que
M . le Préfident d’Abbadie fût dans un état de démence: auffi
les parens ôcamis de Pau ont-ils atteflé dans leur avis la noto
riété publique; ce témoignage fi incertain par lui-même, que
chacun invoque à fon gré , qui n'efl: fouvent que le langage
de l’impofture répété par la crédulité, qui ne tient jamais
lieu de preuve au Tribunal de la L o i , ôc qui mérite com
munément fi peu de créance au Tribunal de la raifon.
Ils ont attefte aufîi leur connoiifance perfonnelle: mais il«
n’avoient point fait ferment de dire la vérité.
Ils ont été de l’avis de l'interdiction.
H
■ N
�*8
: C e t avis a été homologué par provifion, par un arrêt du
3 Mars 1787 , qui en interdifant M. le Préiident d’A bbadie,
ordonne que. Madame d’Abbadie fera fa curatrice hono
raire , aura foin de lui dans fa maifon , ôc lui fera adminiftre'r tous les fecours de M édecine & de Chirurgie néceffaires à fon état & à fa fituation ; que le Heur O livier fera
fon curateur onéraire, & M e Hutteau,Confeil delà curatelle,
& au principal, renvoyé les parties à l'audience.
C et arrêt doit paroître bien extraordinaire : M. le Prtifide'nt d’Abbadie eft jugé fou , par provifion, comme s’il
ne fai loi t pas juger par provifion qu’un homme eil dans
ion état naturel, qui eft un état de raifon. Un Magiftrat du
premier rang eft interdit au Parlement de Pau , avec la
même facilité qu’un citoyen, eft ail-igné devant les autres
Tribunaux, pour y défendre un mince intérêt. Fortune,liber
t é , magiftrature, exiftence civile, tout lui eft enlevé à la fois
fans aucune forme de procès : il eft écrafé par un arrêt fur
req u ête, comme par un coup de foudre: qui ne trembleroit
à la vue a ’un événement de ce genre! quel moyen l’homme le
plus fage auroit-il d e fe garant.r d’une pareille interdiction !
N e croyez point , M M . , que le Parlement de Pau
foit dans l’ufage d’interdire, pai provifion, (ans inftruction préalable , ceux qui font accufés de démence. O n
pou rroit, a-t-cn d it, citer cer.t arrêts qui confucrent cet
ufage , & on n’en cite pas un feul ; mais je vais en citer,
moi , qui établifl'ent un ufige contraire, & qui font d autant
plus frappans, qu’ils ont été rendus au Parlement de Pau ,
dans le temps même où finterdiclion provifoire de M. le
préfident d’Abbadie y a été prononcée.
L e Parlement de Pau étoit faiii au mois de Février
�170^ , de deux demandes à fui d’interdidion pour caufe de
démence , formées l’une contre M . le Préfident d’A bbadie,
l’autre contre, le fieur Cataîy , Huiilier de i’Univerlicé de Pau.
V ou s favez , Meilleurs , quelle marche a été .fume à
l ’égard de A4 , le Préfident d’Abbadie : le 2 M a rs, avis
d’une
poignée
de parens éloignes , &
de foi - difans
amis ; le lendemain Arrêt qui prononce l'interdiction pro
vifoire de ce Magîftrat : jamais procédure ne fut auili rapide
dans une nutière auili gruve.
La marche qu’011 a fuivie à l’égard du Bedeau de l’Univerfité a été plus lente fie plus folemnelle. La voici. D ’abord
avis de parens tendant à l’ipterdidion : mais point d'interdic
tion provifoire.'Arrêtdu 2 6 Février 178^ , rendu au rapport
de M. d’A u g e r o t , qui ordonne , avant faire droit, la vifice
du Bedeau par deux Médecins. L e premier Mars fuivant,
rapport des Pvlédecins qui déclarent que le fieur Cataly eft
dans un aifaiiTement qui le rend incapable de foutenir fes
idées. N ’ijiiporte, point d’interdi&ion provifoire : Arrêt
du 8 du même mois qui renvoye les Parties à l’audience.
L e ilippôtde l’Univerfité furvit à l’avis de fa famille & au
rapport des 7Æédecins, & le Magiftrat eil facriliéau premier
vœu formé pour fa perte.
N e dites donc pas que l’ufage du Parlement de Pau eil:
d’interdire par proviiïon fur un fimple avis de parens ceux
qui font accufés de démence ; fit à qui perfuaderez vous
qu’un Corps de Magiftrature fe foit formé une Jurifprudence auili étrange & auili dangereufe : à Pau comme à Pa
ris, l’état civil eil facré, 6c 11’eft point le jouet de l’opinio.!
ou du caprice d une pviignçe d’hommes privés qui peuvent
ailéiiient fe laifisr féduire & devenir, même fans le favoir,
H ij ‘
�6o
les inflrumens de l’intrigue & de la cupidité. L e citoyen
n’eft point l’efclave de fa famille, il eft l’enfanc de la l o i , &
la loi défend de l’interdire, fans la plus grande connoiiîance
de caufe. Obftrvarz prœtorem opportebit ne cui temcrè dira
caufœ coonitionemplenifjimam curatorem dct.
L e Parlement de Pau interdit quelquefois par provifion
ceux qui font accufés de prodigalité, ôcdont les diiïipations
font apparentes. Cette Jurifprudence eft fage ; le prodigue,
aliène valablement fes biens jufqu’au moment de ftfn interdiûion; il pourroit confommer fa ruine dans vingt-quatre
heures, & rendre, inutile la veille le fecours que la loi lui apporferoit le lendemain.-Mais l’interdidlion de l’infenfé a un
effet rétroa&if au jour où la démence a commencé ; elle eft
à la fois un préfervatif pour l’avenir, &: un remède efficace
pour le pafle. Rien n’exige donc qu'elle foit prononcée
par provifion comme l ’interdittion du prodigue. D'ailleurs
l’homme accufé de' prodigalité qui fe relève de fon inter
diction provifoire peut dire qu’il n’a rien perdu dans l’opi
nion publique; mais celui qui
eft interdit par provifion
pour caufe de démence, reçoit dans fa perfonne, & tranfmet à fes defeendans une tache
dont ils ont à rougir
pendant des fiècles. Plus cette tache eft difficile à effacer,
plus il faut héfiter de l’imprimer furja perfonne du cito yen ,
& principalement fur la perfonne du Magiftrat qui eft revêtu
d’un cara&ère facré,qui eft l’homme de la loi & delà patrie.
Nous pouvons le dire hardiment : l’interdi&ion pro
vifoire de M . le Préfident d’Abbadie n’a point d’exem
ple : c’eft un de ces évènemens extraordinaires qui frappent,
qui éto n n en t} & dont la caufe eft un myftère difficile à
découvrir.
�6i
Madame la Préfidente d’Abbadie vante l’Arrêt du Parle
ment de Pan du 3 Mars 178s" , quoique caflé, comme un
témoignage toujours fubfiflant de la démence de Ton mari :
mais cet Arrêt a été cailé principalement parce qu’il n’étoit
point fondé fur une~ preuve certaine de cette prétendue '
demence; c o m m e n t pourroit-il donc tenir lieu de preuve?
d’ailleurs le témoignage qu’on voudroit faire réfulter de
cet Arrêt ne paroitro.it pas bien impofant ii l’on remontoit
à fa four ce.
En e ffe t , l’Arrct du 3 Mars 1785’ , qui interdit par pro'
viiîon M. le Préfident d’Abbadie ne fait qu’homologiter
par provîfion l’avis des parens ôc amis de P a u , dont il
répète mot à mot les difpofitions.
C e t avis n’a d’autre bafe apparente que les certificats
des 6 Mai 1783 & 6 Février 1 7 8 4 , qui conftituent M. le
Préfident d’Abbadie depuis 1 7 8 1 ,
dans un état de de-
mence.
Ces certificats téméraires & faux font évidemment l’effet
de la collufion de Madame d’Abbadie avec fon M édecin
de Paris, qui y attefte le prétendu état de démence do
M . le Préfident d’Abbadie en Bearn , où il ne l’a jamais
v u , & qui l’attefte fur la parole de Madame la Préfidente
d’Abbadie.
En remontant à la fo u r c e , on voit que le témoignage
réfultant de l’interdifliion provifoire de M . le Préfident
d’Abbadie eft le témoignage de Madame la
Préfidente
d’Abbadie elle-même , tranfmis par elle à fon M édecin
de Paris , par fon M édecin de Paris , aux parens de Pau , 6c
par les parens de Pau au Parlement qui par provifion a
homologué leur avis.
M . le Préfident d’Abbadie continuoit de vivre avec fa«
�¿2
dpoufe ; il ne favoit pas qu il dtoit interdit. Il vo yo it.fa
curatrice, fou c u r a t e u r , le confeil de la curatelle, tous
les conjurés qui feig noi en t d ctre fes amis, 6c dont fa maifon dtoit le repaire. Aucun ne lui faifoit preiTentir l'on triils
fort ; toutes les bouches dtoient muettes en fa prdfence ,
tous les vifages dtoient fereins; la Marquife du Coudrai
feule pouifoit de temps en temps des foupirs en regardant
ion Acre , & ajloit cacher les larmes qui s’dchappoient dé
fes yeux, & que la cabale ne lui auroit point pardonne'es.
C e ft une lettre derite de Pau qui a appris à M . le Prdfident
d’A bbadie, à la fin du mois de Mars 178 ; , qu’il dtoit inter
dit comme fou depuis le commencement du même mois.
Q uel coup de foudre pour ce JvIagifLrac ! il eft heureux
qu'il ait fu fe moddrer dans le premier m om ent, & triom
pher de lui-meine. Il a imité le lilence qui régnoit autour de
lui ; il a didimulü, réfolu de fortir au plutôt d’une maifon
où il dtoit environné d’ennem is, ôc de fuir une époufe
qui dtoit à leur tête.
Son projet dtoit d’aller paifer les Fêtes de Pâques dans
fes terres du Poitou , où il vouloit régler les comptes.des
Régiffeurs. L e jour de fon départ dtoit lixé : c’dtoit le 25
Mars. L e nommé D o u c e t , fon Cocher , & fon efpion fami
lier , devoit être du voyage ; il en donna avis à Madame
d’Abbadie qui s’empara la veille des clefs de i’hôcel, ôc
tint fon mari, qui ne s’en doutoit pas, en chaitre-privde.
Un accident furvenu à M. le F ré fuient ci Abbadie dans
la nuit du 2j au 26 Mars fit découvrir cette entreprife. C e
Magiftrat fut atteint d’ une colique.violente. On voulut fortir
pour aller c h ei l’Apothicaire ; le Portier
rdpondit que
MaJame la Prcfidenie avoit les clefs. O n frappe à l’appar-
�tement de Madame la Préfidente, qui ne dormoit pas : point
d e rép o n fe; on dit à la femme-dechambre que M . d’A b badie foufïre des douleurs aiguës ; point de réponfe. L a
nuit s’écoule fans que
M. le Président d’Abbadie puifîe
faire venir les fecours dont il a befoin.
L e Poftillon qui devoit conduire M . le Préfident d’Abbadic, frappe à la porte le lendemain matin. C e Magifirat veut
partir; il s’apperçoit qu’il eft en prifon. Il ne va point
demander les clefs à Madame la Préfidente d’A bbadie; il
n’avoit jamais manqué d'égards pour fon époufe, il en
auroit peut-être manqué malgié lui pour fa geôlière; il prie
le fieur d’Olhaflarry , Chevalier de Saint Louis , fon eouiin, qui depuis quelques jours étoit avec lu i, d’aller inftriiire le Heur Lieutenant de Police de la violence qui lui
étoit faite dans fa maifon. C e Magifirat invite M. le Frciident d’ bbadie d’aller conférer avec lui : fa prifon lui eft
ouverte à onze heures du matin ; le iieur Lieutenant de
Police eiï frappé d’un étonnement qu’il ne peut diifimulér
en converfant svec M. le Préfident d’A b b a d ie , & l’engage
à aller voir M . le Garde des Sceaux , à qui Madame la
Préfidente d’Abbadie avoit infpiré la même prévention.
M . le Préfident d’ ALbadie va le même jour à Verfailles,
revient à Paris , où il paiTe deux jours, & part le 29
Mars avec l’Abbé Detchegarai pour fes terres du Poitou.
V ou s avez dû être frappés, Meilleurs, de la véhémence
avec laquelle le défenfeur de Madame la Préfidente d’A b
badie s’eft récrié contre ce voyage de M . le
Préfident
d’ Abbr.die , qu’il a peint fous les couleurs d’ un rapt. M. le
Préfident
d’A b b a d ie, a-t-il dit, a été enlevé par les fieurs
d’Etchegarai à fa femme , u fes enfans, à la fociété. Il
�¿4
n’a pas dit que M . le Préfident d’Abbadie avoit été interdit
un mois auparavant à la requête de Madame Ton époufe;
il n’a pas dit qu’elle l’avoit dépouillé à ion infçu de fes
droits de m ari, de père & de c ito y e n , & voilà ce qu’il
falloit d i r e , pour donner une jufte idée du voyage que
M . le Préfident
d’Abbadie a fait en Poitou à la fin du
mois de Mars i j 8 f : il n’a pas été enlevé à fon époufe , il
a fui fon ennemie; il auroit pu l’expulfer 6c refter maître dans
fa maifon ; mais le reifentiment du mari a cédé en lui à la
modération du Magi'ftrat, & il a fu refpecter aifez fon carac
tère , pour remettre à la loi feule le foin de fa vengeance.
O n a fait un crim e-au fieur Detchegarai d’avoir té
m o i g n é fon reifentiment , lorfqu’il a appris que M . le
Préfident d’Abbadie étoit en chartre-privée ; falloit-il donc
qu’il applaudît à cette v io le n c e , qu’il trahît les droits du
fa n g , qu’il confpirât contre fon parent, & qu’il fe-rangeât
parmi fes oppreifeurs ?
L ’ À b b éD e tch e g a ra i, a-t-on d i t , a éclaté en reproches &
en menaces ; ilvou loit enfoncer les portes de l’hôtel. Mais
la loi le lui auroit pardonné ,'f i fes forces le lui avoient
permis ; il étoit le prifonnier de Madame la Préfidente
d’A bbadie; tout moyen de recouvrer la liberté eft licite,
v lorfqu’elle eft ravie par la force privée.
C e n’étoit pas la peine de tant déclamer à ce fujet con
tre lés fieurs Detchegarai ; en fe plaignant amèrement de
la chartre privée dans laquelle M . le Préfident d’Abbadie
iewr coufin étoit détenu a v e c l’un d’eux , ils n’ont fait que ce
que
tout homme honnête & fenfible auroit fait à leur place.
C ’eft à la fin du mois de Mars 178 ; , fur la première
nouvelle de fon interditHon, & au fortir de la chartre pri
vée t, eue
M . le Préfident d’Abbadie m’a encacé
â
O O à affilier
aux
�aux aflemblées qui fe tiendroient pour fa défenfe dans le
Cabinet de M e. Babille Ton Confeil. Il m’a appelld au dé
faut de M e Hutteau , qui avoit été nommé Confeil de fa cu
ratelle, & qui par conséquent ne pouvoit plus être fon
c o n feil, ni fon défenfeur contre ¡’interdiction.
Je ne devrois avoir à m’occuper que de la défenfe de
M.
le
Préfident
d’A bbadie,
& fa caufe
devroit être
entièrement indépendante des qualités de fes défenfeurs.
Mais tel eft l'acharnement avec lequel Madame la Prési
dente d’Abbadie pourfuit fon mari, que ne trouvant point
des motifs d’interdidion dans fa perfonne, elle cherche
des prétextes dans les relations qu’il a avec fes confeils.
E lle ne me pardonne pas le zèle avec lequel je défends
c e Magiftrat depuis deux ans, & elle tâch e, dit-on, de
me rendre fufpect , par des inculpations dont elle fait
bien qu’il me feroit facile de me juftifier, fi elles m’étoient
faites publiquem ent, mais qu’elle a l’adreife de
femer
dans le fecret des cabinets, comme par une forte de
ménagement qui eft le dernier raffinement de la haine &
de la vengeance. Q u e puis-je faire dans des circonftances
femblables? ma feule reifource eft de protefter contre ces
délations ténébreufes, & d’attendre que la calomnie m’at
taque ou vertem en t, pour 1î> repoufier, ôc pour la con
fondre.
C e qui m’a étonné le plus dans le cours de cette
plaidoirie, c’a été d’entendre déclamer contre des intrigans qui parlent pour M . le Préfident d’Abbadie.
C ’eft moi qui ai 1 honneur de parler pour ce Magiftrat.
Seroit-ce donc moi qu’on auroit voulu qualifier d’intrigant?
I
�66
il y a *24 ans que j’exerce la profeiïion d’Avocat ; un
intrigant ne fe foutient pas fi long-temps dans une carrière
où l'honneur fert de guide, du moins , lorfque fa con
duite eft foumife, comme la mienne l’a é t é , aux rigueurs
de la cenfure, ôc il ne commence pas fi tard fon métier.
C e feroit pour la première fois que j’efiuyerois une pareille
injure, fi elle s’adrefioit à moi. Il faut avoir la preuve
à la main pour faire une inculpation auifi grave. Celui
qui la feroit au hazard, à l’inftigation d’une partie irritée,
courroit le
rifque
d’être
regardé
comme
l’inftrument
aveugle des partions étrangères, 6c l’organe bannal du
menfonge ôc de la calomnie.
C e n’eft point à l’intrigue que je dois l’honneur de
défendre M . le Préfident d’Abbadie : des motifs particu
liers
ont
pu
m’attirer fa confiance , que je n’ai point
recherchée. J’ai commencé en 1762
à exercer la pro
feiïion d’A v o c a t au Parlement de P a u , dans le reiïbrt
duquel je fuis né;
j’ai été témoin
du dévouement de
M . le Préfident d’A bbadie; encouragé par fon exem ple,
j’ai fait le facrifice de mon état, ôc fouffert pour la caufe
com m un e, la perte de ma liberté. D evenu libre, mais
toujours en butte aux ennemis de la Magiftrature, je me
fuis réfugié en \ j 6 8 , dans l’ordre des Avocats de Paris,
qui ne m’ont admis parmi e u x , qu’après avoir examiné
ma conduite pafTée, 6c vérifié les faits qui fembloient
me donner quelque droit à cette adoption.
M- le Préfident d’Abbadie avoit befoin d’un défenfeur
qui eut le courage de lutter fans cefle contre les diffi
cultés, contre les dangers .même qu’une cabale accréditée
pouvoit faire
naître dans cette caufe : il ni’avoit vu à
�61
Pau
dans de plus grands périls; voilà le m otif de la
confiance dont il m’a honoré; il ne me reprochera jamais
de l’avoir trahie, ni d’avoir abandonné fon parti, pour
en embrafler un contraire.
Par une R equête du 8 A vril 1 7 8 ; , M . le Préfident
d’Abbadie a formé oppofidon à l’Arrêt du 3 Mars pré
céd en t, &
a demandé par provifion, pour ôter à fes
Adverfaires tout prétexte d’inquiétude, a&e de fes offres
de ne
pouvoir
aliéner ni hypothéquer fes biens
que
de l’avis de M* Babille, ancien Bâtonnier des A v o c a ts ,
qu’il choifilToit pour fon Coufeil. Je ne fais quel eft le
C lerc de Procureur qui a rédigé à Pau
cette requête
dont les conclufions feules étoient conformes au voeu
de M . le Préfidçnt d!A b b a d ie, & convenables à fa défenfe. O n y fait l’éloge de la tendrefle de Madame la
Préfidente d’Abbadie pour
fon mari , & de fon défin-
téreffement. M . le Préfident d’Abbadie n’envie point à
Madame fon époufe ces louanges dont
elle s’eft tant
enorgueillie à cette aud ien ce, en difant qu’on n’auroit
ofé tenir un autre langage fur fon compte à P a u , où
elle eft connue : mais les fentimens qu’elle a pour fon
m a ri, fe peignent mieux dans fes p rocéd és, que dans
les co mp li me nt s qu'un C l e r c de Pr o c u r eu r a jugé à propos
de lui faire dans une req u ête, & l’opinion que M . le
Préfident d’Abbadie en a , après feize années d’expérience,
fe manifefte dans fes interrogatoires, & dans un mémoire
imprimé, qu’il a envoyé à P a u , au mois de M ai 1 7 8 ; ,
ligné de l u i , & dans lequel il n’a pas craint de rendre
publiquement à Madame fon époufe une partie de 1*
I ij
�68
juftice qui lui étoit due, & que le Clerc de Ton Procureur
n’avoit pas fu lui rendre dans fa requête.
L ’envoi de ce mémoire fait paraître ici un jeune homme
honnête aux yeux de tout le monde , intrigant à ceux
de Madame la Préfidente d’Abbadie feule & de Ces affociés , également inconnu à la Police & aux Tribunaux
de cette C apitale,
depuis dix ans qu’il l’habite, ardent
à obliger, d’ un défintérefiement ex trê m e, qui n’a voulu
d’autre récompenfe des fe'rvices qu’il a rendus à M. le
Préfident d’A b b a d ie, que le plaifir de les lui rendre, &
dont le feul crime eft d’être mon frère.
Il eft parti de Paris le 20 Mai 178 j , & eft arrivé à Pau
le 24, excedé de fatigue, reipirant à peine, chargé d’un mé
moire imprimé, & d’une confultation figtiée de M es Babille
& A u b ri, &: de m o i, & des pièces néceifaires à la défënfe
de M . le Préfident d’Abbadie; mais il n’éroit plus temps;
on n’avoit point voulu attendre à Pau ce m ém oire, cette
confultation ,
ces
pièces qui y avoient
été annoncés
15 jours auparavant : ni le choix du confeil fage ôt éclairé
auquel M . le Préfident d’Abbadie s’étoit fournis par prov ifio n , ni le dépôt des deniers comptans & des effets au
porteur de la fuccefllon du lieur de Borda n’ont pu garantir
ce Magifirat d’une interdi&ion provifoire & deshonorante
que ces précautions rendoient fi inutile- Un fécond Arrêt
du 11 M ay 178J a ordonné l’exécution de celui du trois
M ars, la preuve des faits allégués par Madame la Préfi
dente d’A b b a d ie , & la vifite de Monfieur le Préfident
d’ Abbadie par quatre M édecins de P a u , en préfence de
Monfieur de -Sajus ,
le
Rapporteur ; à l’effet de quoi M .
Préfident d’A bbadie
comparaîtrait à Pau aux jour
�69
& heure qui lui ieroient indiqués, comme fi on n’avoit
pas pu lui épargner la fatigue ët les frais de ce vo yage,
en ordonnant
qu’il feroit vifité par des Médecins
de
Paris; il l’avoit demandé par une requête du 8 A v r il;
Madame la Préfidcnte
d’abbadie
l’avoit
demandé elle-
même par une requête du 25? Mars précédent, dans le
temps où elle tenoit fon mari fous fa puiifance , en vertu du
premier arrêt. Mais du moment qu’il s’eft éloigné d’e l l e ,
elle a changé de fyftême : elle a voulu le faire conduire
à P au , & donner dans un efpace de 200 lieues le fpeâacle
affligeant d’un Magiftrat du premier rang, traduit malgré lui
devant des Juges qui avoient commencé par le déclarer
fou , ôc qui vouloient voir enfuite s'il l’étoit réellement.
O n s’eft hâré de faire procéder à l’en qu ête, tant à Pau
qu’à Paris, niais avec cette précaution qu’à Pau les témoins
étoient fondés d’avance, 6c qu’on avoit le foin décarter tous
ceux qui paroiifoient difpofésà rende jufticeàM . le Préfident
d’Abbadie. C ’eft ainfi qu’on a négligé de faire entendre le
Curé de Pau, quoiqu’affigné à cet effet, comme il le mar
que par fa lettre du 18 A oût dernier, parce qu’il n’avoit
que du bien à dire de M. le Préfident d’Abbadie. C ’eft ainfi
qu’on à négligé de faire alïigner le fieur P o r t e , M edécin
de M- le Préfident d’ Abbadie à^Pau, quoique prévenu
qu’il le fe ro it, comme il le marque par fa lettre du 27
N ovem bre dernier , parce qu’il auroit d o n n é , d it-il, à
» l’incommodité de M . le Préfident d’Abbadie un caradère
» bien oppofé à celui avec lequel on l’avoit défignée.
L a no u ve lle de
l’arrêt du 11 M t í 178J eft arrivée à
Paris le famedi foir 21. ,1’en ai été inftruit le lendemain.
M . le Préfident d’Abbadie craignoit d’ être arrêté, & tra
�70
duit d’abord auprès de ion époufe, ôc enfuite à Pau en
exécution de cet arrêt. M on avis a été d’aller prendre celui
de M e. Babille qui étoit alors dans fa maifon de campagne
près Meulan. N ou s fommes partis à cet effet le 22 mai à
onze heures du foir M . le Préfident d’A b b a d i e l e ileur
d’Etchegarai ôc moi ; nous avons couché en route. L e len
demain nous avons appris que M e. Babille étoit chez M. le
Garde-des Sceaux où il devoit diner : je m’y fuis rendu ,
j’ai pris fon a v i s , ôc je fuis revenu à Paris le même jour.
M . le Préfident d’Abbadie a été abfent pendant cinq ou
fix jours , jufqu’à ce qu’il a fçu que fa requête en caiïation
des deux arrêts du Parlement de Pau avoit été prèfentée ,
6c qu’on avoit pris des mefures qui le mettoient à l’abri
de toute violence.
A la fin du mois de Mars 178 j , M . le Préfident d’A b
badie avoit fait appeller le iieur P h ilip , ancien D o y e n
de la Faculté de M é d e c in e , qui après avoir examiné fon
é t a t , lui donna le 14 M ai fuivant un Certificat favorable.
*
A fon retour du Poitou , M . le Préfident d’Abbadie fe fit
vifiter plufieurs fois par cinq M edécins , du nombre defquels étoient les fieurs Dejean 6c* de Montabourg dont le
fieur Borie avoit furpris la fignature au bas de fon Certifi
cat du 6 Mai 1783. T o u s lui ont rendu juftice par leurs
Certificats des f & 1 j Juillet 1787.
Indépendamment de ces vifites extraordinaires , le fieur
Philip avoit vifité chaque jour M . le Préfident d’Abbadie
depuis le 16 Mai 178? , 6c l’avoit trouvé conftamment
dans un état de raifo n , jufqu’au 14 Juillet fuivant, jour
où il en a donné fon Certificat.
T e l étoit l’état de M . le Préfident d’Abbadie lorfqu’il
�7»
pourfuivoit la caflationdes deux arrêts qui l’avoient interdit
par provifion, comme infenfé. Il n’eft point de moyens que
Madame d’Abbadie n’ait employés pour empêcher cette
caiïation. M é m o ire s, confultations lignées de M es. Doutremont, C o l l e t , T ro n c h e t, Target ôc autres Jurifconfultes, 6c
diflribuées aux Magiflrats du C o n fe il, crédit puiflant, follicitations preflantes, tout a été mis en ufage contre la de
m a n d e de M . le Préfident d’A bbadie, dans un temps où il
ne devoit pas avoir de contradicteur : Madame d’Abbadie
étoit partie fecrete , ôc par cela même plus dangereufe ; mais
fes efforts ont été vains : un arrêt du Confeil du premier
A oû t 1 7 8 y a caiTé les deux arrêts du Parlement de P a u ,
enfemble tout ce qui s’en étoit enfuivi , ôc a renvoyé les
parties au C h â te le t, fauf l’appel en la Cour.
M . L e Préfident d’Abbadie a provoqué le premier I’inftru£tionau Châtelet par une requête du 5 Septembre 178^.
Il a requis l’affemblée de fes parens ôc amis pour être enfuite procédé à fon interrogatoire , ôc à la vifite de fa perfonne par des Medecins nommés d’office, ôc il a demandé
de nouveau atte de la nomination qu’il avoit déjà faite au
Parlement de Pau ôc qu’il réiteroit, de la perfonne de M e.
Babille pour fon Confeil. C ette requête a été répondue
d’une ordonnance de foient les -parens &' amis ajjemblês.
Madame d’Abbadie ôc conforts ont demandé de leur cô té
par une requête du 12 du même mois l’aifemblée des
parens ôc amis de IVI. le Préfident d A b b a d ie , pour être en*
fuite procédé à fon interrogatoire , de deux jours l’u n , pen
dant deux m o is , ôc com m e Madame d’Abbadie vouloit
apparemment difpofer fon mari à fubir cette é p re u ve, elle
a demandé en même temps la permiflion de l’aller vifïter
�72
toutes les fois qu elle jugeroit à propos. Mais le fieur
Lieutenant-Civil a o r d o n n é feulementl’aiTemblee desparens
& amis. Il a cru que M . le Préfident d’Abbadie pourroit
fe paifer des vifites & des leçons de Madame fon époufe
durant le cours de l’inftru&ion.
A u x termes de ces deux ordonnances, les parens & amis
de M . le Préfident d’Abbadie étoient les feuls qui devoient
être aiïemblés ; mais Madame d’Abbadie & conforts ont
trouvé plus com m ode de convoquer leurs parens & leurs
amis intimes. L e feul parent de M . le Préfident d’Abbadie
qu’ils ayent fait appeller eft le fieur de Joantho payeur des
rentes, coufm germain de M . le Préfident d’Abbadie , qui
l’a fait appeller aufli de fon côté avec fes autres parens &
amis au nombre de vingt-fix.
Une circonftance remarquable , c’eft que Madame d’A b
badie a convoqué à cette afïemblée
ceux qu’elle avoit
fait entendre à Par.is dans l’enquête faite en exécution
de l’arrêt du Parlement de Pau : cette enquête avoit été
annullée par l’arrêt du Confeil du premier A oû t 1785 :
elle a été reffufcitée fous la forme d’un avis ; des témoins
qui avoient depofé contre M. le Préfident d’Abbadie âu
mois de Juin 178 ç*, tels par exemple que le fieur de SaintCriftau Fermier G én éra l, le Chevalier de Borda & autres
étrangers dévoués ouvertement à Madame d’Abbadie , fe
font transformés tout-à-coup au mois de Septembre fuivant
en amis de M . le Préfident d’A bbadic, & font allés figurer
en cette qualité en l’hôtel du fieur Lieutenant-Civil.
Il s’efl formé deux aiTemblées qui fe font trouvées en prdfence l’une de l’autre , & au milieu defquelles M. le Préfi
xent d’Abbadie a paru, Sa comparution a déplu à Madame
d’Abbadie
�Il
'd’Abbadie : elle â effayé de l’écarter en lui faifant dire en
face quelques injures; mais il a fu les méprifer 6c il a
continué de fe montrer jufqu’au jour où fes parens & amis
devoient donner leur avis : il a fait au commencement du
mois d’O & obre
178^ , un voyage de 20 jours dans la
Normandie ou il m’a prié de l’accom pagner: on a furpris
dans cet intervalle le fieur O livier enlevant des papiers de
- la fucceflion du fieur de Borda ; M . le Préfident d’A b
badie a rendu plainte contre l u i , & l’a fait décréter au
Châtelet : il eft allé en Bearn au mois de N ovem bre fuiv a n t , pour ôter ladminiitration de fes biens & de fa maiTon de Pau au fieur Louftau , qui contre fa c o n fc ie n c e,
comme il l’avouera bientôt lui-même, avoit vo té fon in
terdiction , & pour faire choix d’un autre adminifirateur.
A u défaut de l’A bbé d’Etchegaray qui fe difpofoit à par
tir pour T o u lo u fe , M . le Préfident d’Abbadie a pris pour
compagnon de voyage mon frère qui l’a quitté à leur arri
vée en B earn, pour fe retirer dans fa fam ille, & qui n’eit allé
le joindre à Pau que lavant veille de leur départ pour Paris.
C ’eft ce voyage , le feul que mon frère ait eu l’honneur
de faire avec M . le Préfident d’A b b a d ie , & quelques vifîtes
qu’il lui a faites de ma part relatives à fon p ro cè s, qui lui
ont valu les titres d’intrigant & d’obfeffeur, dont il a plu
à Madame la Préfidente d’Abbadie de le décorer en l’afr
fociant aux coufms de M . le Préfident d’Abbadie , aux
fleurs d’Etchegaray.
Mais voici des faits conftans que Madame d’Abbadie n’i
gnore pas & qui devroient mettre fin à fes déclamations*
L ’Abbé d’Etchegaray eft depuisplus d’ un an à T o ulo ufe ;
le fieur d’Etchegaray , pour faire ceifer tout prétexte de ca*
lomnie ? s’eft défifté par a£te du 20 Février 1 7 8 6 , de la
�74
procuration que M le Préfident d’Abbadie luTavoit donnée
à l ’effet d’aiïifter à l’inventairé , & il n’a eu l’honneur de
voir ce Magiftrat que deux ou trois fois depuis un an.
M o n frère eft depuis le.mois: de Septembre dernier dans
la P r o v i n c e de Bearn avec mon père & ma m è i e , ma
femme 6c mon enfant.
L es voilà ces intrigans, ces obfefTeurs actuels de M . le
Préfident d’Abbadie ; l’un eft à T o u lo u fe , l’autre en Bearn,
à 200 lieues de Paris , ôc celui qu’on leur donne pour chef
a la difcretion de ne pas même
faire à M . le Préiident
d?Abbadie des vifues que la bieniéance autoriie, & que
le lien du fang femble exiger.
C e lu i
qui a l’honneur de voir le plus fouvent M . le
Préfident d’Abbadie , c ’eft moi : vous m’ en faites un crim e,
je m’en fais un devoir facré. Charge' de fa défenfe > je
cherche la vérité , 6c je la trouve dans fa bouche : témoin
de fes pein es, je les adoucis autant qu’il eft en mon pou
voir : je mets du baume dans la playe que vous lui avez
faite. Je l’admirai de loin dans les beaux jours de fa M agis
trature
je ne m’approche maintenant de lui que pour le
fervir dans fon, malheur.
Q u e Madame d’Abbadie ne fe flatte donc plus de colorer
les pourfuites odjeufes qu’elle fait contre fon mari en pré
textant qu il eft obfedé d’intrigans qui veulent envahir ia
fortune.
Ses immeubles .ne peuvent être aliénés que de l’avis du
Çonfeil fage ôc éclairé qu'il s’ eft donné lui-même.
Les deniers de la fucceilion du fieur de Borda font en
d é p ô t , & il doit en être fait emploi, du confentement de
M . le Préfident d’Abbadie , en préfçnce de fon Confeil :
�7Î
comment des intrigans s y prendroient-ils donc pour envahir
fa fortune ?
Madame d’Abbadie ne connoiffoit pas ces prétendus intrigans obfeiTeurs de fon mari , lorfqu’elle interceptoit fes
lettres en 1781 , pour l’accufer un jour de démence.
E lle ne les connoiffoit pas en 1783 , lorfqu’elle faifoit
certifier par des Médecins qui le vo yo ie n tp o u r la premiere
fo is , qu’il parloit nuit & j o u r , qu’il étoit en d é m e n c e ,
&
qu’il falloit l’envoyer dans une M aifon de F orce.
E lle ne les connoiffoit pas en 1 7 8 4 , lorfqu’elle faifoit
certifier par fon M édecin de P a ris , que fon mari avoit
été fou pendant près de deux ans en B e a r n , où il ne l’avoit
jamais vu , & que fa maladie paroiffoit incurable.
E lle ne les connoiffoit pas au mois de Mars
1785* 9
lorfqu’elle faifoit interdire à Pau fon mari qui étoit avec
elle à P a r is , & qui vivoit fans défiance
au fein de fa
famille.
Com m ent ofe-t-elle donc imputer après coup à des
étrangers la prétendue néceffité d’une interdi&ion qu’elle
a préparée quatre ans d’avance , & qu’elle a fait prononcer
dans un temps où fon mari ne vo yo it qu’elle , & les
intrigans qui alloient jouir avec elle du plaifir de voir
leur v i& im e , & de l’efpoir de partager fa dépouille ? E t
dans ce m om ent, où abandonnée par le Marquis D ucoud ra i, qui a reconnu fon erreur , elle a le courage de
pourfuivre feule l’interdi&ion de fon mari, & de demander
la curatelle dun adminiftrateur plus fage q u e l l e , & q u i,
par un excès de précaution, s’eft fournis à un Confeil ,
croit-elle pouvoir tacheter la honte de fes pourfuites,
qui n’ont plus de p rétex te, par les injures qu’elle fait proK ij
�76
diguer à des citoyens honnêtes qui embraifent la caufe du
pere de famille perfécuté par fon ép o u fe, & qui n’ont
jamais eu ni la v o l o n t é ni le pouvoir d’envahir fa fortune?
C eu x qui font dévoués à M . le Préfident d’Abbadie
font traînés dans la boue , & ceux qui le trahiifcnt font
élevés jufqu’aux cieux. L e cocher D o u c e t , ce traitre dont
Madame la Préfidente d’Abbadie a fait imprimer la correfpondanceavec e lle , & qu’elle a pris à fon fervice depuis
qu’il.a été chaffé par M . l e Préfident d’A b b a d ie, a entendu
faire fon éloge à cette audience , & vanter la lâcheté qu’il
a eue de fe rendre l’efpion de fon M aître, & de fecon<Ier par fes impoftures la confpiration formée pour fa
perte ; fi. un domeftiqüe, traître envers fon M a ît r e , eft
digne de lo u a n g e , quelle sûreté aurons - nous avec des
¡gens attachés à nos perfonnes, qui pourront vendre nos
fecrets 8t leurs menfonges, fans compromettre leur honneur
par ce trafic infâme, & quelle fera la récompenfe du zèle
& de la fidélité, fi la perfidiç & la baifelfe méritent un
hommage public ?
M ’arrêterai-je au foupçon qu’on a ofé élever à cette
•audience, en plaidant que de prétendus intrigans avoient
fait tirer des coups de fufil dans la n u it, aux environs de
la maifon de M . le Préfident d’Abbadie à V itr y , & qu’il«
Tavoient fait attaquer nuitamment fur le grand chemin ,
pour lui infpirer, fous ce prétexte , des foupçons odieux
contre Madame fon époufe? Q uelle abfurde atrocité !
M . le Préfident d’ Abbadie n’a jamais été effrayé des coups
defufil qu’il a entendus à la campagne: il fçavoit en 178^, que
c’étoit le Jardinier de M e C alo n n e, A vocat en la C o ur, alors
fon voifin à V itry , qui les tiroit tous les foirs avant de fe cou«
�77 '
;h e r, fuivatït un ufage a fiez généralement obfervé aux envi
rons de Paris, pour avertir les malfaiteurs que famaifon étoit
g a rd é e, & en érat de défenfe. L’été dernier, que M. le Préfident d'Abbadie occupoit une autre maifon à Vitry , il fçavoit
que r/étoient les jardiniers du fieur A b b é de M o n d en o ix,
Chanoine de Notre-D am e , & du fieur Foreftier, Tréforier
du Régim ent des Suiffes, fes proches voifins, qui tiroient
tous les foirs par le même m otif, des coups de piftolet
ou de fufil ; ils tirent encore tout cet h iv e r , tandis que
M . le Préfident d’Abbadie eft à Paris, ainfi qu’il eft attefté
par le Procureur-Fifcal du lieu. Eft-ce donc pour effrayer
.M. le Préfident d’Abbadie à Paris , & pour lui donner
des foupçons contre fon é p o u fe , que des intrigans font
tirer des coups de fufil ou de piftolet à V itry ? M .
le
Préfident d’Abbadie ne s’eft jamais plaint d’une précau
tion qui fait fa sûreté en même temps que celle de fes
voifins : falloir-il donc imputer à crime à de prétendus
intrigans un fait innoncent qui leur eft étranger ?
On
n’a dénoncé qu’une attaque no&urne que M . le
Préfident d’Abbadie a effuyée fur le chemin de V i t r y ,
le 21 Janvier 1 7 8 6 , à dix heures du foir , en revenant
de l’H ôtel du fieur Lieutenant-Civil où il avoit été inter
ro gé; il n’a jamais foupçonné que Madame fon époufe
ait eu la moindre part à cette attaque ; à dieu ne platfc
qu’il foit en proie à l’horreur d’un tel foupçon. L es pré
tendus intrigans auroient-ils donc fait fur le grand chemin
le métier daifaJfins , au rifque de périr fur un échafaud,
pour avoir le prétexte de rendre Madame d’Abbadie fufpe&e a fon mari ? Sont-ce auili les prétendus intrigans
qui ont fait attaquer fur le chemin de V it r y , le 16 Janvier
�78
1 7 8 6 , à dix heures du fo îr , le nommé Chilindron, V ale t
de Chambre de M . lePréfident d’A b b a d ie, par trois quidams
qui ont été décrétés de prife de corps ? Eft-il donc néceifaire
de recourir à une manœuvre auiïi périlleufe , pour faire
perdre à Madame d’Abbadie la; confiance de fon mari?
N e l’a-t-elle pas perdue déjà depuis long-temps ? N e fe
fouvient-elle plus de leurs diflenfions domeftiques , des
peines
qu’elle lui a caufées, comme il le dit lui-même
dans fes interrogatoires , de la fouftra&ion de 20000 liv.
à
Poitiers
,
de la
fouftra&ion
de
36,000
livres
à
P a ris, du certificat de 1783 , qui l’autorife à envoyer
fon m a r i dans une Maifon de F o r c e , du certificat de 1 7 8 4 ,
qui lui donne laconfolante certitude qu’il ne guérira jamais,
de l’interdiftion provifoire dont elle l’a frappé en 178J ,
de la Chartre privée où elle a ofé le ten ir, du refus qu’elle
lui a fait de tout fecours, dans les douleurs d’une colique
vio le n te, de l’efpionage fcandaleux dont il eft le jo uet,
de l’acharnement avec lequel elle pourfuit depuis deux
ans fa profcription ôc fa perte ? Eft-il befoin de feindre,
pour la rendre fufpe£te à fon m ari, ôc après tous les torts
qu’elle a eusenvers lui, quel intérêt des étrangers pourroientils avoir à lui en prêter un nouveau au péril de leur vie ?
N ous avons purgé la caufe de ces certificats, de ces
lettres m iflives, monumens odieux des machinations de
Madame d’Abbadie contre fon mari , du préjugé des
;Arrêts du Parlement de Pau , qui ont été caiTés, des
.enquêtes faites à Pau ôc à Paris , qui ont été annullées,
de ces inculpations atroces qui ont été prodiguées à des
citoyens honnêtes , avec une licence effrenée , ôc qui
tombent par leur abfurdité. Il ne refte que la procédure
�19
qui confiftc dans l’avis des parens 8r amis, dans les inter
rogatoires, & dans le rapport des Médecins. C ’eft ici que
la caufe de M . le Préfident d’Abbadie reprend fa iimpJicité
naturelle : c’eft dans l’expofition de cette procédure que fa
défenfe va acquérir un nouveau dégré de força & de folidité.
A v is
des
p a r e n s
e t
a m is
,
N ous avons trois avis dans cette caufe , dont deux
formés à la requête de Madame d’Abbadie & du Marquis
du C o u d ra i, l’un au Parlement de P a u , l’autre au Châtelet
de Paris, tendent à l’interdidion de M . le Prélident d’A b
badie , & dont le troilièm e, formé au C h â te le t, à
la
requête de M . le Préfident d’ A b b a d ic , tend à lui laifler
la libre adminiftration ds fa perfonne & de fes biens.
L eq u el de ces avis mérite d’être écouté ? Cette queftion eft facile à réfoudre.
D ’abord , lavis formé à P a u ,
le a Mars 1785*, eft
eflentiellement vicieux.
D ’un c ô t é , les proches de M . le Préfident d’Abbadie
n’y ont point concouru. O n
n’a appellé à l’aiTemblée,
ni fes c oufins, ni fes amis perfonnels. C e font trois amis
de M a d a m e d’A b b a d ie qui fe font joints à cinq parens
& alliés éloignés de ion mari.
D ’un autre c ô t é , ceux qui ont concouru à cet avis
n’ont point prêté ferment. Q uelle foi peuvent-ils donc faire
en juftice?
Dailleurs, deux des principaux auteurs de l’avis du 2
Mars 1785* , font en contradiction avec eux-mêmes.
1®. M. de C h erau te, C h e f de cet avis, a v o i t , peu
«Hé temps auparavant, par fa lettre du 27 N ovem bre 1784- j
�8o
jugé M . le Préfident d’A bbadie capable de diriger par fes
inftru£tions perfonnelles Madame d’Abbadie & fon C on feil.
Son vœ u eft donc une contradiction avec lui - même
;
une i n c o n f é q u e n c e marquée.
.
a 0. L e fieur Louftau, autre délibérant, avoit entretenu
une correfpondance fuivie avec M . le Préfïdent d’Abbadie :
il lui avoit écrit le ip Février 178
le lendemain d e l à
demande à fin d’interdi&ion, une lettre par laquelle , en lui
accufant la réception de deux de fes lettres, des 4 & 8
du même m o is , il lui marquoit qu’il avoit exécuté fes
ordres relatifs à l’adminiftration de fa maifon & de fes
biens dont il lui rendoit le compte le plus circonftancié.
I l le jugeoit donc le ip Février *785 , capable de bien
adminiftrer : fon avis du 2 Mars
fuivant eft donc une
contradiction avec lui-même , une inconféquence marquée.
Mais ce qui décèle ouvertement l’eiprit d’intrigue qui a
préfidé à l’aflemblée tenue à Pau 3 le a. Mars 1 7 8 y , c’eft
la lettre que le fieur Louftau a écrite à ce fujet à M . le
Préfident d’Abbadie le 7 août dernier , vaincu par le
je m o r d s , & cédant à fon repentir,
*
M onsieur,
» Il y a vingt-deux ans que j’ofe me flater d’avoir mérité
» vos bontés & votre confiance ; il y a plus d’un an que
» j’ai eu le malheur de perdre l’une & l’autre: après avoir
5) témoigné à ma famille ôt à mon gendre , la pureté & la
» fincérité de mes intentions pour vo u s, f a i été pour ainfi
» dire, étouffé le dernier dan6 la circonftance la plus inté-
» reflante pour tous & pour m o i . . . . J’avoüe que je fus
forcé
�8i
» FORCÉ D’ OPINER D ’ UNE MANIÈRE OPPOSE^ A MA FAÇON DE
» penser.
D e là , que de regrets, que de reproches ouverts
» de ma famille ôc de mon gendre ? j ’ a i
»
encore
dévoré.
été
e t j en
su is
Quelque chofe qu’il en foit, JE NE
pu is
» M EMPECHER DE VOUS EN FAIRE MES AVEUX : quelque
» coupable & quelque ingrat que je paroifle à vos y e u x ,
» je le ferois aiTurément bien moins fi vous iaviez comme
» j’ai été féduit par des pièces que j’ai en main ».
Q uelle idée peut-on avoir à la vue de cette lettre, de
l ’aiTemblée tenue à Pau le 2 Mars
1 7 8 5 , & quel cas
doit-on faire d’un avis que le c h e f de cette aflemblée
a ouvert contre fon opinion confignée dans fa lettre da
27 N ovem bre précédent, que le fieur Louftau a été forcé
de fuivre contre le cri de fa c o n fcie n ce, & que les autre®
ont adopté fans favoir quel étoit l’état de M. le Préfident
d ’Abbadie avec qui ils n’avoient aucune relation ?
L ’avis donné au Châtelet par les parens & amis de
Madame d’Abbadie & du Marquis du Coudrai ne mérite
aucun d’égard.
D ’un c ô t é , les parens & amis de ceux qui pourfuivent
l’interdi&ion d’un citoyen , font auffi fufpeds que les pourfuivans eux-mêmes.
D ’un autre c ô t é , les O r d o n n a n c e s du Heur LieutenantC i v i l , des f & 12 Septembre 178? , en vertu defquelles
l’aiTêmblée a été tenue en fon H ô t e l, ne permettoient d’y
appeller que les parens ôc amis de M . le Préfident d’Abbadie.
Les parens & amis de Madame d’Abbadie & du Marquis
du Coudrai n’avoient donc pas droit d’y aiTiiler. Leur vœu
çil donc nul dans la caufe,
L
�84
L e même efprit d’intrigue qui avoit préfldé à lalTemblée
de P a u , à prefldé auffi à celle tenue en l’hôtel du fleur
L ie u t e n a n t - C iv il, à la requête de Madame d’Abbadie.
E lle a convoqué Ton frère , domicilié à Bordeaux , qui a
reconnu la démence de M . le Préfldent d’Abbadie avec
qui il n’a jamais vécu ni à P a u , ni ailleurs, à l’honnetété
que ce Magiftrat a eue
de ne pas
poufuivre par les
voies rigoureufes après le décès de M . de Montbadon , le
payement des 20,000 liv. reliantes de la dot de Madame
d’Abbadie, ou le partage de la fucceilion de fon beau-père,
fur lequ el, comme il le dit lui-mêmf*, dans fon interrogatoire
du 13 Janvier 1 7 8 5 , il avoit déclaré à Madame de M ont
badon fa belle-mère , qu’il s’en rapportoit entièrement à
elle & à fa famille; ôc c’eft cette déference de M . le
Préfldent d’A b b a d ie, pour Madame de Montbadon, que
les enfans même? de Madame de Montbadon dénoncent à
la juftice comme une preuve de démence ! Madame d'Abbadie à convoqué aulli trois ou quatre de fes alliés, qui
ne font ni parens ni alliés de M . le Préfldent d’Abbadie ,
& qui fans le connoître perfonnellement, ont reconnu fa
démence aux deux voyages qu’il a faits pendant les vacan
ces de l’année
178 j , l’un de 20 jours en Normandie
pour fon plaifir , l’autre de cinq
femaines en Bearn,
pour fes affaires, voyages qui fuivant eux ne font que
des courfes vagabondes , & des enlevemens de fa perfonne. Elle a appellé le Chevalier de B orda, fon commenf a l , à qui le fleur de Borda donnoit la table & le logement,
quoiqu’il lui fût
totalement étranger, & qui après le
décès de ce Ferm ier-G énéral, a continué de loger pen
dant deux ans en fon h ô t e l, avec Madame d’A bbadie, & yt
�«*'
feroît encore , s’il en étoit le maître , ôc fi M . le Préfident
d’Abbadie ne l’avoit prié enfin au mois d A oût dernier par
le miniftère d’un H u iiïier, d’aller loger ailleurs. E lle a ap<
pellé l’Abbé Lagrenée , Prieur de Saint V i& o r , fon convive
afiidu, qui a vu partir quelquefois M . le Préfident d’Abbadiepour fa maifon de campagne dans l’écé de 178J , qui l’a
entendu chanter, fans qu’il prononçât des fons articulés ,
& qui a oui-dire à fon portier dont il a bien voulu être
l ’organe , que le 8 Septembre 1 7 8 ? , M. le Préfident d’A b
badie , ( partant pour la campagne) avoit paru dans la cou r,
avec une. vefte blanche ( par deifus laquelle étoit un habit
gris ) qu’il s’étoit aifis
fur des
p ou tres, ( en attendant
l’Abbé d’Ethegaray qui devoit partir avec lui.) : il a déclaré
aufli, ce font fès termes, qu’il avoit vu quelquefois Madame
d’Abbadie qui ne réclamoit que l’heureufe félicité de rem
plir auprès de fon mari, ( en le faifant interdire) les devoirs
de la religion & de l’ordre f o c ia l, & qu’il penfoit que de*
foins di&és par fa tendreife, & préfentés par la droiture de fe s
intentions, étaient plus chers à l’humanité de fon ame. Madame
d’ '\bbadie aappellé enfin des témoins qui avoient depofé
dans l’enquête que le Confeil venoit d’annuller, tout ce
qu’elle a pu raifembler de gens dévoués à fes intérêts, juf.
qu’à trois elomeftiques dont deux font à fon fervice , & à
la tête defquels eft le C o ch er D o u c e t qui après avoir eu
l ’hon neur de correfpondre avec e l l e , a eu celui de figurer
dans l’aifemblée des foi-difans parens & amis de fon maître.
C e ne font pas là les parens & amis de M . le Préfident
d’Abbadie, les feuls que les ordonnances du fieur Lieute
nant Civil permettaient d’aifembler. C e font des étrangers,
des intrus dont le vœu ne doit pas être écouté.
M
�84
L e s parens & amis de M . le Préfident d’Abbadie ont été
convoqués à fa requête : ils font au nombre de 2 6 , dont
feize parens ôc dix amis. La plupart ont rappellé les chagrins
domeftiques auxquels il a été en p roye; tous ont reconnu
la capacité , la fageife de fon adminiftration , l’habitude où
il eft de faire des épargnes & des acquifitions : tous ont été
d’avis de rejetter fon interdi&ion comme une injuftice ôc
une cruauté.
Ajoutons à l’avis des parens ôc amis de M . le Préfident
d’A bbadie, le jugement que le fieur de Borda fon oncle , ôc
Madame la Préfidente d’Abbadie fa mère ont porté fur fon
é ta t, ôc dans lequel ils ont perfifté jufqu’à leur dernier m o
ment.
L e fieur de Borda par fon teftament du trois août 1778 en
nommant M . le Préfident d’Abbadie fon exécuteur teftamentaire , déclare qu’ il lui doit cette confiance qui ne peut
» être en meilleurs mains, qu’elle opere fa tranquillité , 6c
» qu’elle fera le bien de tous fes repréfentans.
Mais , a-ton dit, page 112 du M émoire imprimé de Ma
dame d’Abbadie, ôc c’eft fans doute ce qu’on fe propofe de
répéter à cette audience, le teftament du fieur de Borda
eft antérieur à la maladie de M . le Préfident d’Abbadie
qui eft arrivée en 1 7 8 1 ; le teftateur ne pouvoit plus fe
choifir un autre exécuteur teftamentaire : il avoic efiùyé
dès le mois de Juillet 1780 une violente attaque deparalyfie
qui lui avoit ôté l’ufage de la parole ôc de la main droite.
L e fieut de Borda, dites v o u s , avoit perdu depuis le
mois de Juillet 1780 l’ufage de la parole , ôc n’avoit pu par
conféquent fe choifir un autre exécuteur teftamentaire? Mais
nous avons trois preuves authentiques du contraire,
�8*
i°. L e fieur de Borda avoit conienti le 2 $ Janvier 1781 ,-erf
faveur de M . le Préfident d’Abbadie, une procuration à
l ’effet de régler pour lui une affaire de la plus grande im
portance, avec la compagnie
de la Guianne. L e fient*
de Borda n’avcit donc pas perdu depuis le mois de Juillet
1780 l’uiàge de la parole.
2°* L e fieur deBorda a difpofépar una£tedu 27 A vril 17^81
en faveur du fieur de Saint Criftau de fa charge de Con-’
trô leu r, & Mifeur des o&rois de la ville de Nantes ; il
lui en a laiffé la finance qui eft de 2 ; j.,000 liv. à titre de
conftitution. Il n’avoit donc pas perdu depuis le mois de
Juillet 1 7 8 0 , l’ufage de la parole.
3 °. L e fieur de Borda s’eft démis par un a S e du "2 Jan
vier 1 7 8 3 , en faveur du fieur de Saint Criftan, de fa place de
Ferm ier-G énéral, & lui en a laiffé les fonds d’avance à titre
de conftitution. Il n’avoit donc pas perdu l’ufage de la paroledepuis le mois de Juillet 1780, il auroit donc pu fe choU
fir un autre exécuteur teftamentaire en 1 7 8 3 , époque pof*
térieure de deux ans à la prétendue démence,; de M . le'
Préfident d’A bbadie; cependant il n’a pas fait un autre choix j
il a perfevéré jufqu’à fon décès arrivé au mois de N o v em
bre 1784., dans la confiance qu’il avoit accordée à M. le
Préfident d A b b a d ie , & dont il lui avoit donné par fort
teftament une marque fi honorable. Il l’a donc jugé jufqu’à
fon dernier moment capable de remplir les fondions qu’il
lui avoit confiées
en 1778 , &
plus de p o id s, q u en
ce jugement a d autant?
1 7 8 3 , M . le Préfident d’ Abbadie
avoit paffé neuf mois a Paris dans la Com pagnie de fori
©ncle, qui connoiffoit parfaitement fon état.
�96
Madame îa Préfidente d’Abbadie a également confié à
fon fils l’exécution de fon teftament en date du 10 Février
1783 , & elle a perfeveré jufqu’à fon décès arrivé au mois
d’ Août 178 4 , dans la confiance qu’elle lui avoît accordée.
Q u e le jugement de la mère eft impofant ! E lle avoit tou
jours v é c u avec fon fils ; c’eft dans fes bras qu’elle a rendu
le dernier foupir. Elle connoiifoit fon état mieux que tous
autre : on ne fe perfuadera jamais qu’elle l’eût chargé du
foin d’exécuter fes dernières v o lo n té s, s’il en avoit été incapable, & l’événement a prouvé combien ce fils étoit
digne de la confiance de fa m è re , puifqu’immédiatement
après f jn décès , il a acquitté environ 30,000 liv. de
charges de fa fucceifion , avec des épargnes qu’il avoit
faites fur 40,000 liv. de rente,
L ’argument tiré de l’exécution du teftament de la mère
confiée aux foins du fils , n'eft point de m oi, M M ; je no
dois pa?en dérober le mérite à fon A u teu r; il eft d’un
jurifconfulte qui a été confulté à ce fu je t, & qui voudra
bien me pardonner, (1 je le nomme , pour confolider par
fon fuffrage cette partie de la défenfe de M . le Préfidenç
d’Abbadie, C ’eft M e. Martineau. Il ne renverfera pas fan$
doute dans le choç de l’audience, un ouvrage qu’il a compofé dans le calme du Cabinet , & il laiiTera du moins
dans cette caufe à M . le Préfident d’Abbadie un moyeu
de défenfe qu’il lui à fourni lui-môme.
L ’oncle ôc la mère de M . le Préüdent d’Abbadie, fes parens & amis au nombre de 26 , ont prononcé en fa faveur.
Il n’ont pas pu fe méprendre tous fur fon état ; la famille
fi intéreilée à la confervation de la perfonne ôc de la for
tune Je ce Magiftrat, nauroit pas été d’avis de lui laifler
�-87
ladminiftration de l'une ôc de l’autre , s’il en avoit été inca
pable.
I N T E R R O G A T O I R E S ,
Nous arrivons à l’dpoque la
(i)
plus intéreflante de l’inf*
tru&ion , celle où M. le Préfident d’Abbadie tantôt furpris
dans fa maifon , tantôt invité à fe rendre à l’hôtel du M agiftrat, fetrouve feul devant l u i , ôc répond fur le champ',
durant le cours d’environ cinq mois, aux diverfes queftions
qui lui font propofées; c’eft moins une inftruction faite fur
fon état qu’une inquifition exercée fur fa perfonne par M a
dame fon E p o u fe, qui abufant de l’extrême délicateffe du
fieur Lieutenant-Civil, n’a ceifé d’alarmer fa religion, par
de faux rapports, par des réquifitions continuelles faites
quelquefois par é c rit, ôc plus fouvent de vive v o ix , ôc a
forcé en quelque lorte ce MagiQrat d’ufer envers M , le
Préfident dA'bbadie d’une rigueur inouie qui convenoit
fi peu à fon caractère naturel, ôc que fes fondions n’exigeoient pas.
Les Interrogatoires que M . le Préfident d’Abbadie a fubis
font au nombre de f e i z e , non compris une foule d’aètes
de comparution, ôc de dires perfonnels. Ils ont commencé
le 29 D écem bre 1 7 8 ; , ôc ont fini le 18 Mai 178 6. O n
trouve d’ailleurs dans cet intervalle les vifites de deux
Medécins continuées pendant foixante huit jours confécutifs, depuis le trois mars 1 7 8 6 , julques au 9 mai fuivant.
( 1 ) L e procis-verbal d'audition de M . le Préfident d'Abbadic fera imprime fcparM
»ent avec quelques obfervations y relatives.
�88'
Une tête qui a pu refifter a une pareille épreuve, eft peut-*
être plus forte que celle qui i’accufè de foibleffe.
O n n’a pas ofé iufpt&er ouvertement la foi du fieur
L i e u t e n a n t - C i v i l dans les interrogatoires’de M . le Préfidenc
d’Abbadie : mais on a dit qu’il les avoit rédigés prefquetous,
on a cité pour preuve de ce fait un interrogatoire où il
eft dit que M. le Préfident d’Abbadie à répondu, diclant
lui-même : ce qui n’eft point dit dans les autres.
A cet é g a rd , M M , je dois avoir l’honneur de vous
obferver que Madame d’Abbadie deconcertée par fix inter
rogatoires que M . le Préfident d’Abbadie avoit fubis depuis
le 29 Décem bre 1785 jufques au 25 Janvier 1 7 8 5 , a eu
le courage de prier le fieur Lieutenant-Civil à la fin du
môme mois , de s’écarter de la manière de conftater les
réponfes qui eft en u fa g e , en pareil cas, au Châtelet, eit
la C o u r , & dans tous les tribunaux, & de faire écrire
pelles de M . le Préfident d’Abbadie fous fa di&ée immé
diate , fans les faire paffer par la bouche du Juge , en énon
çant qu’il les di&oit lui-même : elle fe flattoit de fairg
loupçonner par ce moyen que les réponfes contenues dans
les- lix premiers interrogatoires n’étoient pas les réponfes
fidelles de M . le Préfident d’Abbadie. L e fieur LieutenantCivil auroit du rejetter cette demande comme in d écen te,
comme injurieufe à fon caractère fie à fa perfonne « il a eu
néanmoins la complaifance de céder aux importunites de
Madame d’ Abbadie, & d’énoncer dans un interrogatoire que
M . le Préfident d’Abbadie avoit repondu , diclant lui-même
f a reponfe. Mais les reponfes qu’il n’a pas di&ées immédia
tement au Greffier dans les autres interrogatoires, il les a
adreiTées au iieur Lieutenant-Civil qui les a répétées au
Greffier,
�80
Greffier. C e font toujours le» xéponfes perfonnelles de
M . le Préiident d’A b b a d ie , & il faut neceifairement les
regarder comme te lle s, .jufqu’à ce quon s’infcrive en faux
contre les interrogatoires, & qu’on les faffe déclarer faux.
Dans l’état a£tuel des chofes, la foi eft due au caractère du
Juge , & à fon procès-verbal. Les réponfes que ce procèsverbal renferme font toutes aux yeux de la L o i les ré;ponfesiperfonnelIes de M . le Préfident d’A bbadie, la vraie
expreifion de fes penfées & l’image fidelle de la fituation
de fon efprit.
M . le Préfident d’Abbadie a fubi d’abord dans l’elpace
de cinq femaines neuf interrogatoires, fçavoir les 29 D é
cembre 1 7 8 ? ,
15,17, 2 t , & 2 f
J an vier, 1 , 6 , &
y Février 1786. A quoi il faut ajouter cinq aftes de corn-*
^parution perfonnelle des 3 , 4 , 8 , 1 4 , & 18 F é v r ie r , jours
ou il a Converfé avec le Magiftrat de manière à lui faire feu*
tir qu'il étoit inutile de l ’interroger.
L es interrogatoires des y & 17 Janvier ont été fubis
,à V itry dans la maifon de campagne de M. le Préfident
d’Abbadie , où le fieur Lieutenant - C ivil eft allé le furprendre , d’après deux requêtes de Madame d’Abbadie
contenant qu’il étoit aclu dans une démence complette.
Us ont duré quatre heures & demie chacun : iis ont roulé
fur les faits le plus propres à irriter la fenfibilité de M .
le Préfident d’Abbadie. E h ! pouvoit-il en être autrement*!
C ’ étoit fon époufe qui l’interrogeoit par l'organe du M a
giftrat, à qui elle adminiftroit tous ces faits. Mais fi M .
le Préfident d’Abbadie a été humilié par les queftions qu’o n
lui faifoit, Madame la Préfidente d’Abbadie a du être b ie *
M
�90
mortifiée de fes réponfes ; elles font toutes marquées an
coin du bon fens , & de la raifon,
L e s interrogatoires des 21 Janvier & premier Février
1 7 8 6 ont été fub:s fur l'invitation du fieur Lieutenant C ivil
à qui Madame la Préfidente d’Abbadie avoit infinué de vive
vo ix que fon mari étoit dans le délire. Ces deux interroga
toires & tous les autres font marqués au même coin. Il
n’y a qu’un fou qui foit capable d’y trouver le moindee;
fymptôme de folie»
Com m e M . le Préfident d’Abbadie foutenoit avec avan
tage l’épreuve des interrogatoires, on a imaginé d’y join
dre celle des vifites des Médecins. L e fieur Lieutenant‘C iv il à commis a cet effét, par une ordonnance du 20
F évrier 178£> , le fieur Philip ancien Doyen de la Faculté
de M é d e c in e , & le fi&ir la Clerc M édecin ordinaire du
R o i au Châtelet.
C ette Ordonnance a été fignifiée aux deux Médecins ,,
le 2 Mars
à la requête de M . le Préfident d ’Abba-
die ; il avoit provoqué l’avis des parens & amis & les
interrogatoires ; il a fallu qu’il provoquât auffi les vifites
Vies Médecins : c’eft peut-être pour la première fois qu’on
à vu un homme accufé dé démence prévenir fes adverfàïres dans toutes les parties de l’inftrucUon.
O n a plaidé que fi l’Ordonnance du 20 Février 1786
n’a été fignifiée que le 2 Mars fu iv a n t, ç a été parce que
M . le Préfident d’Abbadie devoit avoir un accès de folie à
îa fin du mois de Février , & qu’on ne vouloit pas que les
[Médecins débutàffent par le rrouver dans cet état.
; Mais fi M . le Préfident d’Abbadie devoit avoir un accès
«le folie à la fin du mois de F'évrier 1786 , pourquoi M a
llame ion ¿poufe ne i ’eil-elle pas empreffée de fignifier
�91
l’Ordonnance du 20 , aux deux M éd ecin s, & de faire furprendre fon mari à la fin du même mois dans ce prétendu'
accès de folie ? C ’eût été un fi beau début pour
nement fi propre à la confoler des
neuf
e lle ,
un évé
interrogatoires que
M . ie Préfident d’Abbadie avoit fubis depuis, le 29 D écem
bre 1785 jufques au n eu fF évrier
1785,
& du mauvais fuc-
cès des deux voyages que le fieur Lieutenant C ivil avoit faits
à V it r y , à fa réquifition, les 5 & 17 Janvier précédent.
M . le Préfident d’Abbadie étoit en démence à la fin
du mois de Février 1 7 8 6 , comme il y étoit les y 6c 1 7
J a n v ie r, comme il y a été tant d’autres fois qu’il a été
invité à fe rendre à l’hôtel du fieur Lieutenant C i v i l , fur
les réquifitions verbales de MaJame fon époufe , dont il a
confondu les aiTertions téméraires par fa préfence,
par fes réponfes.
ÔC
D ’ailleurs le fieur Philip attefte dans le rapport, que
depuis le 1 j Février 1785 jufqu’au 3 Mars fuivant, jour oit
les vifites juridiques ont commencé , il a vu journellement
A l. le Préfident d’Abbadie , & qu’il l’a
oujours trouvé
jouiifant de fa raifon. Il n'eft donc pas vrai que M . le
Préfident d’Abbadie ait eu un accès de folie à la fin du
mois de Février 1786.
Mais , a-t-on d i t , le fieur Philip ne pouvoit pas être
nommé Expert conjointement avec le fieur L eclerc : d’un
c ô t é , il étoit le M édecin ordinaire de M . le Préfident
d’Abbadie : d’un autre c ô t é , il s’étoit déjà expliqué fur fon
état par des certificats, & par le dire qu’il avoit fait au moi|
de Septembre 178J en l’hôtel du fieur Lieutenant Civil.
L a réponfe à cette obje&ion éft prompte ôc facile.
D ’un coté
f aucun m otif ne
doit faire exclure le Méden
M j.
�cin ordinaire d’ùn homme , de la vifite juridique de fa per-*
ibnne. L a connoiffance qu’il a <fe fon état paffé le rend'
même plus propre à faifir toutes les nuances de fon étatr
préfent, & à donner à la juftice les lumières qu’elle deftre»
L e fieur Philip eft d’autant moins fufpe& qu’il n’a point fait
de rapport particulier, quoiqu’il fût autorifé à en faire un
par l’Ordonnance du fieur Lieutenant-Civil, & que le rap
port quia étéfait eft commun entreluiôc le fieur L e c le rc , qui
l’a r é d ig é , qui en a écrit la minute entière de fa main r
& qui n’eft point fufpeft à Madame la Préfidente d’Ab«
badie.
D ’un autre côté , fi le fieur Philip s’étoit expliqué fur
l ’état où M . le Préfident d’Abbadie étoit en 1 7 8 5 , il 11e
s'étoit pas expliqué fur l’état où il étoit en 1 7 8 6 , depuis
le 3 Mars jufques au 9 M ai, & c’ell ce dernier état qu’il a ét é
çhargé d’examiner conjointement avec le fieur Leclerc. If
ne s’étoit donc pas expliqué fur l’objet de fa miiTion*
il ne peut donc pas être fufpeûé fous ce prétexte,
R A P P O R T
D E S
M É D E C I N S .
L e rapport des Médecins dit « qu’ils ont d’abord trou» yé
l’état
phyfique de M .
le
Préfident d’Abhadie
» fa carnation, fon em bonpoint, fes m ouvem ens, l’exer» cice des fondions corporelles , tout fon enfemble
j> dans ; l’ordre naturel, excepté fon afpeft , qui annon9 çoit de la mélancolie; qu’il leur a dit qu’il étoit accablé
» de chagrins dont il n'a point articulé la caufe ; qu’il
» s’eft fort appéfanti
fur ces foucis ôc peines d efprit
» dont il a paru vivement a f f e f t é .... qu’ils ont engagé la
* cenverfation fur divers objets, & fur différentes matières,
�» qu*il a répondu à tout a ve c juftefte & de manière à n’anv noncer aucune léfion des fondions de l’a m e , ‘ que fa
» m ém oire n’a point paru affaiblie à en juger par quelques
» traits d’hiftoire déjà a n c ie n n e , qu’ il a cités avec exadi«
» tude . . . . . que fon jugem ent & fa manière de rpifonner
» n’ont paru fouffrir aucune altération , &
qu’il revient
» fréquemment à fes chagrins qu’il peint avec DES c o û
te l e u r s f o r t e s e t s o m b r e s ; que pour mieux connoître
» fon état phyfique & m o r a l, ils ont pris exprès des heu» res différentes , qu’ils ont a ffe d é chaque jour de ï’entre» tenir fu r des matières diverfes &
autres que celles qui
» avoient été agitées la v e ille ., &
qu’il leur a toujours
» parlé de
b on jcn s, & fans aucune apparence de déraifon-
» nement ».
Suivant le rapport, cet état s’eft foutenu jufqu’au 17
M a rs, fans que M . le Préfident d’Abbadie ait donné le.
moindre figne d’altération., n i , au phyfique, ni au moral;
Il a eu le 18 Mars un accès de fièv re; mais fuivant le
rapport, toutes fes paroles étoient d’un jugement fa in , &
riarmonçoient aucune efpèce de léfion dans les opérât ions de
/f*
l ’ame.
L e 1 9 , il eft allé fe promené^ à C.lamar-ipus-Meudon ,
OÙ eft une maifon de campagne dépendante de la fuccefiion de fon oncle.
r
.
L e 20 , au matin, il a été vifité fucceifivement par les
'¿eux Médecipa.
,
L e ûeur Philip, a^tefte
(¡vil riapas.laijjééchapperunmot
quinefut raifonnab\eque
quent & un peu élevé..,
cependant fon pouls ¿toit fré
^
L e fierfr L e c le r c a t te ft e q u il l ’a trouvé mangeant des hui~
�• 94 _
.
très , ayant le pouls plus v if & plus "élevé que de coutume
parlant avec acîion , mais cependant s a n s 'd é r a i s o n n e r .
L e 2 1 , il ne reftoit que quelques veftiges de l'agitation
de la v e ille; mais il étoit dans l’état de raifon, qui eft,1
fuivant le rapport , fo n état habituel , & cet état s’eft foutenu jufques au 1 2 Avril.
L ’accès de fièvre du mois de Mars n’a donc pas été un
accès de folie.
M . le Préfidçnt d’Abbadie a fubi le premier Avril 1786
un dixième interrogatoire àuiïi fain que ceux qui l’avoient
précédé.
c'
D ’après les interrogatoires & le rapport des M édecins,
nous trouvons trois mois ôc demi confécutifr que M. le
Préfident d’Abbadie a paiTés dans un état continuel de
raifon, favoir depuis le 29 Décem bre 1785 , jufques au 12
'Avril 178 ¿T.
*
Q uelle fituation que celle d’un homme délicat & fen-
fible ,
d’un Magiftrat de la première claiTe,
recherché
pendant trois mois & demi, tantôt interrogé par le J u g e ,
tantôt vifité par des Médecins qui le trouvant toujours raifonn^ble.,, attendent toujours qu’il devienne fo u , ôc cher
chent Tans cefle à furprendre dans fes difcours, dans fes
regards, dans fon maintien , quelque fymptôme de dé
mence. Il lui auroit été permis de fe fouftraire enfin à
cette inquifition , ôr d’aller refpirer en liberté dans fes
terres jufqu’à ce que la juftice prononçât fur fon état qui 9
'y
après un examen de.trois mois & dem i, devoit être' fuffifemment connu. Mais5il a eu la patierice de foutenir cette'
é p r ç u v ç , encore pendant cinq femaines ; il a été raflcfïié'
^hum iliations, il a àvûlé pendarit cinq mois le calice que
�9S
lu i préparoit fon époufe, & où elle fe plaifoit à verfer
chaque jour de nouvelles amertumes.
C e qui a le plus offenfé M . le Préfident d’Abbadie du
rant, le cours de cette inqui’fition, c’eft l’audace des efpions
que Madame la Préfidente d A bbad ie fe van te, dans fon
Mémoire imprimé, d’avoir à fes ordres, & qui lui vendent
les infultes qu’ils font à fon mari.
Toutes ces vexations entroient dans le plan de Madame
la Préfidente d’Abbadie comme propres à irriter fon m a ri,
& à ébranler fa tête ; mais elles n’ont pas produit l’effet
qu’on s’en étoit promis; la patience de M . le Préüdeut
dA bbad ie a furpafTé l’audace de fes perfécnteurs.
L e 12 A v r i l , M . lePréfident d’Abbadie a fait en l’hô
tel du fieur Lieutenant-Civil un dire très - l o n g , ôc qui
marque la préfence de fa raifon.
L e 1 3 , il a fubi un onzième interrogatoire qui fuivant
le rapport des Médecins qui y ont aiTiflé, a duré deux
heures, ôc où la dernière répo-nfe feule marque une diftra&ion momentanée ; il s’en eft apperçu lui-même, tant il
eft vrai que la raifon dominoit toujours en lui dans cette
agitation éphémère , ôc le procès-verbal conftate qu’il a fiui
par dire au fieur Lieutenant-Civil, « qu’en bon père de
» famille, ( c’eft-à-dire , comme un bon Magiftrat qui eft:
» le père commun des citoyens ) s’il parloit à tort & à.
» travers, il devoitfuppléer à fon infuffifance. ».
Cette agitation eft tombée le même jo u r, fuivant le rap
port des Médecins qui ont viiité M . le Préfident d’Abbadie
le 13 Avril vers minuit pour la féconda fois t & qui ont
déclaré « qu il étoit excédé de fatigue Ôc d’envie de. dor
as m ir, mais que malgré cela 11 avoit répondu allez juile
�* *► aux queftionsqu’ilsiuîavoient faîtes,8c qu'flsluîen avoîenf
» fait aifez pour être fûrs que fa ficuation étoit changée en
» bien ».
Il ¿toit encore mieux le 14 A vril fuivanc le rapport.
S i dans la vifite qu’il a faite le 14 A vril au fieur Lieute*
tia n t-C iv il, H a laiifé au Portier, en fon abfence, un billet
dont le fens paroît obfcur, quelle conféquence peut-on eu
tirer ? Une idée mal conçue ou mal rendue par M . le Pré*.
' fident d’Abbadie cara&érife-t-elle un état de démence qui
néceiîite fon intercU&icm ? annonce-t-elle un danger
fi
imminent pour fà perfonne ôc pour fa fortune qu’il faille
lui en ôter Tadminiitration, & le rendre l’efçlave d’une
femme qui exerce une inquifition tyrannique fur fes expreflions, fur Tes m ouvem en t, fur toutç fon exiftence?
P epu is
fix ans que Madame
4a Préfidente d’Abbadie
garde avec tanr de foin deux lettres de fon m a ri, dont
l ’une 3 été écrite à elle-m êm e, dont elle a intercepté
Vautre, & qui marquent une diftraûion paflTagère, la per
fonne 6c la fortune de M , le Préfident d’Abbadie ont-elles
fouffert quelque atteinte ? N e jouit-il pas au contraire d’une
meilleure fànté, fuivant le rapport des Médecins qui ont
comparé fon état ancien tel qu’il leur a été d é p e in t, à
fon état préfent tel qu'ils l'ont obfervé eux-m êm es? n'at’il pas Fait chaque année des épargnes ôc des acqüifitions ?
L e billet du 14 A vril 1786 a-t-il été fuivi de quelque
accident funefte arrivé à fa perfonne, ou de quelque échec
furvenu à fa fortune? Q u ’importe donc qu’il ait fait une
ou deux réponfei dilfonantes dans fon interrogatoire du
13 A vril dernier, ôc qu’il ait écrit dans la matinée du 14
yn billet dont le fens foit enveloppé? Quelques idées obfcures
�*> - ■ 9 1
cures ôc incohérentes mêlées à des idées claires ôc juftes
pendant un ou deux jours feulement dans un efpace d’en
viron cinq mois ne forment pas un état de démence ; un
nuage qui paife n’efface point la clarté du jour ; une di£
tradion
momentanée
n’annonce
point l’éclipfe
de la
raifon.
Auifi les Médecins déclarent-ils dans leur rapport « que
» depuis le 14 A vril il n’y a eu aucun nuage, M . le Pré» fident d’Abbadie ayant toujours joui de toute fa raifon
» 6c de fon bon fens , qu’il s’eft foutenu dans un calme
» parfait, jufqu’au 9 M ai inclufivem ent, jour où ils ont
» terminé leurs vifites ; que le bon état dans lequel ils
» l’ont laiifé a continué fans interruption depuis le 14
» A v r i l , n’ayant apperçu aucun figne d’altération dans fa
» raifon , quoiqu’il eût paffé de plufieurs jours l’époque de
» fa prétendue crife, à laquelle ils avoient dû s’attendre,
» depuis le commencement du mois de M a i, d’après les
» renfeignemens qui leur avoient été communiqués».
Cinq interrogatoires que M. le Préfident d’Abbadie a
fubis depuis le 14 Avril jufqu’au 18 M a i, ôc divers dires
qu’il a faits en l’hôtel du fieur Lieutenant Civil confirment
à cet égard le rapport des Médecins.
C ’efl à la vue de cette procédure , la plus longue 8c la
plus .complette qui ait jamais éré faite en pareil c a s , que
la Chambre du C onfe;l du Châtelet a rendu le 27 Juil
let dernier, d’une voix unanime, une Sentence qui décide
qu’il n’y a lieu a 1 interdiction de M. le Préfident d’A bbadie,
& qui lui donne a&e de fes offres, de ne pouvoir faire
aucuns adçs tendans a 1 aliénation de fes biens, qu’en préfence 6c du contentement de M e B a b ille , ancien BatonN
�5>8
nier des Avocats qu’il a choifi pour fon C o n fe il, comme
aufïi de Tes offres de faire emploi en préfence du même
C o n f e il , des fommes provenantes de la lucceffion du fieur
de Borda , à l’exception des intérêts, fruits 6c revenus dont
il s’eft réfervé la libre difpofition.
L e Marquis du Coudrai a ceffé fes
p o u rfu ite s
à la vue
de cette Sentence; Madame la Préfidente d’Abbadie feule
en a interjetté appel. V o ic i le quatrième combat que M .
le Préfident d’Abbadie eft forcé de foutenir contr’e l l e , ôc
le terme heureux de cette attaque fcan.'aîeuie dont
i’é p G u f e
d’un Magiftrat n’auroit jamais dû donner l’exemple.
L e premier foin de M . le Préfident d'Abbadie, après la
Sentence du C h â te le t, a été de réclamer fes enfans âgés
l’un de dix ans, l’autre de f e p t , pour leur donner une
éducation convenable. Une Ordonnance du fieur Lieutenant
C ivil l’a aurorifé à fe les faire remettre. Il s’eft tranfporté'
lui-même à cet effet dans la rraifondu feu fieur de B orda,
accompagné de deux Notaires ôc d’un Procureur au C h â
telet-; mais fa démarche a été vaine ; Madame la Fréfidente
d’Abbadie a également méconnu l'autorité paternelle ÔC
l ’Ordonnance du Magiftrat.
Q uelle fcène, M eilleurs, que celle qui s’eft paifée danscette
occafion ! ces enfans ont jetté des cris d’effro i, ôc ont
pris la fuite à la vue de leur père. Q u e l ennemi commun
a donc étouffé dans ces jeunes cœurs les fentimens naiifans de la confiance ôc de l ’ a m o u r filial ! quel forffle impur
y a éteint le feu facré de la Nature ! malheureux père ! il
va chercher fes enfans , & il a la douleur de les voir fuir
devant lui : il tend la main à l’un', il le tient, il le carreffe, ôc un Laquais audacieux s’efforce de le lui enle
�pp
ver^(i). C e n'étoic pas encore là le dernier malheur qui
lui étoit réfervé. Reftés au pouvoir d’une mère qui facrifie tout à e lle -m ê m e , ces enfans font à la fois les inftrumens & les vi&imes de fa cupidité : on les conduit
chez les Magiftrats : ils follicitent par leur préfence l’interdi&ion de leur père : ils demandent fans le fçavoir, d’être
flétris 6t profcrits avec lui ; & c ’eft une mère qui eft leur
interprête & leur organe ! . . .
Mais fon vœu ne fera
pas rempli : la loi vient au fecours de ces êtres innocens,
& prend foin de leur deftinée, en protégeant l’état de leur
père ?
M
O
Y
E
N
S
.
L ’interdi&ion pour caufe de démence eft; une dégra
dation to ta le , une efpèce de mort civile. L e citoyen in
terdit comme infenfé eft déchu de toutes les prérogatives
qu'il tient de la nature & de la loi ; il n’a plus que l ’ap
parence de l’hcm m e; c’eft un objet de dérifion & de mé
pris, un être pailif alfervi a une volonté étrangère, & dont
l’unique droit eft de recevoir des alimens qui prolongent
fa miférable exiftence.
Plus les effets de l’interdi£Uon font funeftes, plus l’ac
tion qui tend à la faire prononcer, eft odieufe. Il eft dans
l’ordre que le père de famille jouifle de fon é t a t , de fa
liberté, de fes propriétés : lui ravir cettz jouiftance eft un
a£te violent qui répugne à la nature , & que la loi ne per-
(1} Ce Laquais eft le nommé Ticrcelln , dont la femme eft F -mnie-deChambre de Madame la Prélidenre d'Abbadie , & dont le Père vu «ians le
P o ito u , des bienfaits de M. le Pré ident d’ Abbadie
N ij
�IOO
met qu’à regret. - C ’eft moins un bien qu’ un mal quelque
fois néceifaire, pour en prévenir un plus grand.
La demande à fin d’interdi&ion du m a ri, pourfuivie par
la femme feule, contre le vœu do la famille, bleife l’hon
neur du mnriage, feandalife les m œ urs, & doit exciter la
défiance de la juftice. L a Marquife de Cabris n’auroit pas
la curatelle du Marquis de Cabris, fi elle avoit confpiré
contre l u i , & cherché des moyens de le faire interdire. L e
titre d’époufe fufRfoit à fon cœur : ce n’a été que la larme
à l’œil qu’elle s’eit vue chargée du titre de curatrice : c’efl
principalement par le zèle avec iequel e le a pris la défenfe
de fon mari qu’elle a mérité Tcftime des citoyens & la
confiance des Magiftrats.
Mais combien une pourfuite de ce genre n’eft-elle pas
odieufe de la part d’une femme qui de tout temps a fait
le malheur de fon mari, qui a employé quatre ans à s’ar
mer contre l u i , & à faire les préparatifs de fon interdic
tion , qui s’eft fait autoriier par un certificat de Médecins
à l’ envoyer dans une maifon de fo r c e , qui l’a fait décla
rer fou
incurable en fon abfence , par un autre certifi
cat d'un M édecin qui, fuivant elle-même, venoit d^ pro
mettre fa guérifon totale , qui a fait fes délices de ce cer
tificat, & d’une correfpondance collufoire par laquelle fes
confidens, fes fuppôts, un Coch er même l’entretenoient
fans ceffe de la prétendue maladie de fon mari; qui, pour
l ’accufer de dém ence, a attendu qu’il.eût perdu fa mère &
fon o n c l e , & que fa fortune fc fût accrue de plufieurs mil
lions , qui a reconnu d’abord fa capacité pour adminiflrer,
en lui demandant le pouvoir de toucher ces millions, &
a affecté de ta méconnoître au (fi tôt qu’elle a vu qu’il vou-
�ÏOI'
loit les toucher lui-même & en faire un emploi utile ; qui
l a attiré en trahifon de Pau à Paris, pour le pourfuivre
à Pau à fon infçu , ôr a réuili à force d’intrigues à le faire
interdire par provifion , fur le feul avis d’une poignée de
parens & alliés éloignés &
de foi-difans amis;
rigueur
inouie à laquelle un Bedeau de l’Univerfité de Pau échapp o it, contre le vœu de fa famille, dans le temps même
où un Magiftrat du premier rang en étoit la v id im e ; qui
a ofé le tenir en chartre privée pour l’empêcher de fe
défen dre, & l’a privé des fecours néceifaires contre une
colique violente dont il étoit atteint ; qui s’eft emparée
clandeftinement de fes revenu s, qui le rend depuis deux
ans le jouet de l’ efpionage le plus hardi ôc le plus fean*
daleux, exerce fes enfans à jouer le rôle de folliciteurs
contre leur père , contre eux-mêmes , fait coniifter fon
honneur à les déshonorer, & femble ne pouvoir plus être
heureufe que par la profeript'on de fa famille. ?
Madame la Préfidente d’Abbadie croit elle donc que la
curatelle de M . le Préfident d’Abbadie lui feroit-déférée,
après des procédés aufii odieux, s’il étoit polîible que ce
Magiftrat fin interdit? N o n : nos loix feront m éconnues,
nos mœurs entièrement relâchées , toute idée de juftice
effacée de nos efprits, tout fentiment d’honnêteté éteint
dans nos coeurs, avant qu’une telle femme puifie être nom
mée curatrice de fon mari.
Si la demande à fin d’interdi&ion de M . le Préfident
d Abbadie eft odieufe par les circonftances qui l’accompa»
gn en t, elle eft aufii injufte en elle-m êm e,
fort qu elle
&
digne du
eu devant les premiers Juges.
11 eft évident que M . le Préfident d’Abbadie jouit de ia
�i6 i
rail fon1, ¿a qu’il eíl capable d’adminifirer fes biens.
Son état de raifon eft démontré par l’avis de fa famille,
par íes interrogatoires & par le rapport des Médecins.
Sa capacité pour adminiftrcr eíl une fuite naturelle de fon
état de
ra ifo n
; elle eft démontrée d’ailleurs par fon ad-
miniftration m êm e, par fes épargnes, parles acquiiitions
qu’il a faites depuis 1781 , époque à laquelle on fait com
mencer fa prétendue démence. Il n’a jamais a lié n é, il a
toujours acquis : que pouvoit-il faire de plus ?
Rappeliez-vous , Meilleurs, c e ta & e d’adminiftration quia
fuivi immédiatement le décès de Madame la Préfidente
d’A bbadie, m ère, arrivé dans le mois d’A oû t 1784; M .
le Préfident d ’Abbadie avoit alors en réferve fon revenu
d’une année, environ 40,000 liv. Il a employé près de
trente mille livres à acquitter des legs portés par le tes
tament de fa mère, quoiqu’elle lui eût accordé un délai de
quatre ans, pour payer les fournies principales & les inté
rêts. Ces deniers étoient oififs dans fa caiife; ils ont fervi
fur-le-champ à éteindre des intérêts onéreux ; & fon projet
é t)it d’employer fucceíTivement fes revenus à l’acquit des
charges de la fucceffion de fa m è r e , fans aliéner aucuns
fonds..Si un tel Adminiftrateur pouvoir être interdit, quel
eft l’homme qui feroit digne d’être fou Curateur?.
En vain dit-on que des interrogatoires peuvent ne mar
quer qu’ une raifon apparente, & qu’ils ne font pas toujours,
quelque raifontiables qu’i!s paroiifent,
taines d’ un état de raifon.
des preuves cer
U n , d e u x , ou trois interrogatoires peuvent être fubis
dans des moments lucides &. marquer plutôt le fommeil
�103
'de la f o lie , que le réveil de la raifon. Mais feize interro
gatoires, dont neuf font fubis dans l’efpace de cinq femaines, depuis le 29 D écem bre 178) , jufques au neuf Février 1 7 8 5 , dont plufieurs font fubis dans des jours choins
par la partie qui cherche à découvrir la prétendue démence;
tant d’interrogatoires q u i , avec une foule de dires perfonnels embraifent un efpace d’environ cinq m o is , ne peu
vent pas être des fignes douteux de la raifon qu’ils an
noncent; la raifon qui fe foutient fi long tem ps, ôc qui
réfifte à une telle épreuve , doit être réelle ôc folide. D eu x
Médecins qu i, après avoir vifité M. le Préfident d’Abbadie
pendant foixante huit jours confécutifs, ont atteilé fous
la foi du ferment, que fon état habituel eft un état de raifon,
n’ont pas pris l’apparence pour la réalité ; ôc vous-mêmes,
Meilleurs, avec qui M. le Préfident d’Abbadie a eu l’honneur
de converièr en follicitant votre juftice , vous favez fi fa
raifon eft une lueur trompeufe, ôc fi elle ne reifemble pas
à celle des autres hommes.
Si fa conduite étoit infenfée, on auroit un prétexte
de dire, que la raifon qui règne dans fes interrogatoires,
n’eft qu’une raifon apparente : mais il agit mieux qu’il
ne parle, il adminiftre mieux qu’il ne raifonne , ôc des
hommes à qui la nature a prodigué fes dons, les plus
brillans, pourtoient prendre de lui des leçons de fageiTe
ôc d’écunomie.
Il
a eu des momens de trouble ôc d’agitation , cela,
eft vrai; mais ces momens dans lefquels fa raiion ne
s’eft pas éclipfée , ainfi qu’il eft démontré par fon dire
du 12 Avril ôc par fon interrogatoire du 1 3 , ets m om ens,
difons-nous, forment un
accident indifférent pour ion
�,04
. - adminiftration, & non pas un é ta t, & c’eft l’état que la
L o i confulte en matière d’interdi&ion, & non pas l’ac
cident.
L a démence eft une maladie perpétuelle de fa nature.
On
ne met. pas au rang des foux ceux qu’une fièvre
éphemère jette dans le délire, ni ceux dont la maladie
connue fous le nom de vapeurs, trouble de temps en
temps la mémoire & la raifon, ôc ce n’eft qu’à ceux en
qui la démence eft une maladie -habituelle & perpétuelle
de fa nature, que la L o i donne des Curateurs. M enti
captisi & mutïs & fu r dis
& qui perpetuo morbo laborant
,
Curatores dandi fu u t. C ’eft la difpofition des Inftitutes,
liv. 1 , tit. 23 , § 4.
E t comment feroit-il poflTible de regarder comme infenfé
un homrre
que des preuves confiantes &
multipliées
font voir dans un état habituel de raifon? l’accident du
moment où fa raifon fe trouble fans s’éclipfer, l’emporteroit-il donc fur l’état confiant & habituel où elle fe
montre fans aucun nuage , & quand la nature laiiïe un
fi grand intervalle entre un homme habituellement fou
qui a des momeos lucides, ôr un homme habituellement
calme
& raifonnable qui a quelques infians d’agitarion,
la Loi les confondra t-elle dans le jugement qu’elle portera
fur leur co m p te, & leur fera-t-elle fubir le même fort?
Q uelle feroit la condition de M. le Préiïdent d’ Abbadie,
s’il étoit interdit fous prétexte que dans un long efpace
de temps pleinement éclairé par fa raifon , il fe feroit
ren co n tré
un
ou
deux jours, pendant lefquels il auroit eu
quelques idées moins claires & moins ln.vnneufes! il fentiroit
toute l’horreur de fon éta t, il gémiroit fans cefle fous
le
�Tô*
le poids de fes chaînes, il feroît en proîe au défefpoir.
Peignez-vous, M eiïïeurs, le
fupplice d’un homme qui,
pour une légère indifpofition fe
verrôit enterrer tout
vivant: tel feroit le fupplice de M . le Préfident d’A bbadie, fi dans l’état où il eft il fe voyoit dégradé de
l ’efpèce humaine, & traité comme un vil automate qui
n*a en partage ni le fentiment ni la raifon.
E t pourquoi M . le Préfident d’Abbadie fubiroit-il cette
dégradation flétriffante ? feroit-ce parce que dans quelques
înitans fa raifon auroit eifuyé une agitation paifagère ?
mais la L o i voit d’un œil indifférent les variations de
Tefprit humain, lorfqu’elles ne portent aucune atteinte ni
à l'ordre Public, ni au bien des familles. Q u ’un homme
parle peu ou beaucoup ,
que ià parole foit lente
ou
rapide, que fes idées foient touiours claires & juftes, ou
quelquefois obfcures &
inconféquentes : peu importe,
pourvu qu’il fâche gérer fes affaires : c’eft tout ce que la
L o i exige pour le maintenir dans cette geftion. Si elle
donne un Curateur à un infenfé, c’eit uniquement parce
qu’il eft incapable d’adminiftrer fon bien : Mente captis
& qui perpetuo morbo laborant
, quia
, Curatores dandi Junt, C e
rebus fu is fuperejje
n’eft que rtlativeme: t
à i’adminiflratioti que la L o i examine les facultés ifitelle&uelles de l’homme. S ’il étoit un genre de folie com
non pofjunt
patible avec une bonne adminiftration, celui qui en feroic
atteint ne pourroit pas être interdit.
L ’inftruttion faite au Châtelet pendant près de cinq
m o is, depuis le
D écem bre 1 7 8 ) , jufques au 18 M ai
1786, fixe le dernier état de M . le Préfident d’A bbadie,
qui eit celui fur lequel la Cour a à prononcer. Q u e
O
�10 6
trouvons-nous dans ce long intervalle ? nous trouvons
deux jours du mois d A v r i l , le 12 & le 13 j pendant
lefquels fon efprit a été agité : mais dans ces jours là
mêmes fa raifon étoit dom inante, fuivant le rapport des
M é d e c in s, & comme il eft démontré par fon dire du 12 ,
&
par fon interrogatoire du
13. L a queftion à juger
dans cette caufe eft donc de favoir fi M . le Préfident
d’Abbadie doit être regardé comme incapable d’adminiftration, fous prétexte que fa raifon a efluyé une agitation
paflagère pendant un ou deux jours, dans un efpace d’en
viron cinq mois. La fjlution de cette queftion eft facile,
& la feroit également dans le cas même où cette agita
tion feroit plus fréquente , & fe renouvelleroit tous les
mois ,
hypothèfe qui eft pleinement démentie par la
procédure.
D ’abord la raifon de
M . le Préfident d’Abbadie ne
s’éclipfe point dans ces momens d’agitation. L e rapport
des Médécins le conftate ; le. dire du 12 Avril & l’inter
rogatoire du 13 le démontrent. Les foins domeftiques
pendant un ou deux jours
n’exigent pas des lumières
plus étendues que celles qui fe manifeftent dans ce dire
& dans cet interrogatoire. O n voit dans le rapport des
Médecins un fait décifif à cet égard , & digne de la
plus grande attention : » C ’eft que dans le fort d’une crife
» on a préfenté un mémoire d’ouvrier à M . le Préfident
» d’Abbadie, qui l’a lu attentivement, en a calculé le
» montant, & a répondu fur le cham p, que ce n’étoit
» pas là le réfultat de fes conventions, qu’il y avoit une
7> grande différence du prix convenu,
» term iner,
on
n avoit qu’à
donner à
mais que pour
l’ouvrier telle
�107
j*
fomme dont il devoit être content».M . le Préfident d’A b-
badie feroit donc capable de gérer fes affaires domeftiques
même dans le cas d’une maladie accidentelle femblable
à celle des 12 &
13 A vril dernier.
D ’ailleurs, les foins perfonneb du père de famille ne
font pas de tous les inftans, ni de tous les jours. Il n’en
efl aucun dans la clafïe où fe trouve M . le Préfident
d’Abbadie, ni même dans des clalTes inférieures, qui ne
paife plufieurs jours dans chaque m o is, fans s’occuper de
fes affaires domeftiques, & qui n’en confie le détail à
des fubalternes qui lui en rendent compte à des époques
marquées. M . le Préfident d’Abbadie feroit donc capable
d’une bonne adminiftration , quand on fuppoferoit que
tous les cinq m ois, tous les deux m ois, même
tous
les mois, il eifuyeroit pendant un , deux &c trois jours
une agitation femblable à celle qu’il a eifuyée les 12 &
15 Avril dernier. Une fuCpenfion momentanée de fes foins
perfonnels ne troubleroit point le cours de fon adminif
tration , qui feroit habituellement éclairée par fa raifon,
& n’en derangeroit point l’économie.
Q uel accident peut-on craindre pour la fortune de M .
le Préfident d’A b b a d ie, dans le cas où l’agiration des
12 & 13 A vril dernier viendroit à fe renouveller ?
Craint-on qu’il n’aliene fes fonds, ou
qu’il
ne les
engage par des obligations, des billets, ou des lettres
de change? mais outre qu’il n’a jamais aliéné,, qu’il eit
dans 1 habitude dacquérir, il fe foumet à un c o n fe il, fans
lequel il ne pourra, comme il efl porté par ia Sentence
du Chatelet, confentir aucuns a£tes tendans à l’aliénatioq
de fes biens.
O ij
�io8
Craint-on qu’il ne diflïpè l’argent comptant qu’il aura en
main? mais il n’a
l ’habitude de
réferve au
ja m a is
fa ire
r l.o is
dilfipé , il eft au contraire dans
des épargnes. Il avoit 40000 livres en
d’Aoû t 1 7 8 4 , & il en a employé la plus
grande partie à acquitter d’autant les charges de la fuccefiïon de fa mère. Un homme qui a été économe jufqu’à
l’âge de f o ans , ne devient pas tout-à-coup prodigue
& diifipateur. D ’ailleurs la crainte d’une diifipation future
ne doit pas produire une interdi&ion anticipée.
Craint-on enfin que l’argent comptant qu’il aura en
main ne lui foit volé ?
Mais le crime ne fe préfume pas, ôc perfonne n’ eft à
l ’abri du vol.
Si
dent
quelqu’un entreprenoit
d’Abbadie
de
voler
M . le
Préfi
en fa préfence , même en temps
de
m aladie, il s’en appercevroit, ôc il tâcheroit de prévenir
le vol. Il étoit malade le p Septembre 1781 , à fon paflage
à Poitiers, fuivant l’énoncé
des deux quittances de la
fomme de 20000 livres, que Madame la Préfidente d’A b
badie s’eft fait remettre par
le Regiffeur, A-t-elle ofé
toucher cette fomme en préfence de M . le Préfident
d’Abbadie ? N on : elle a donné un rendez-vous fecret au
R égifieur; elle l’a fait cacher dans la ru e lle , au premier
bruit qu’elle a entendu dans la chambre de fon mari;
elle a pris les facs fans compter les efpèces, de peur
que le fon des écus n’interrompît le fommeil de M . le
Préfident d'Abbadie, ôc ne l’attirât dans le lieu où elle
s’emparoit de fes revenus. M . le Préfident d’Abbadie ne
pourroit do n c pas être volé ‘en fa préfence, même e a
temps de maladie, fans qu’il s’en apperçût.
�*0ÿ
S ’il étoit volé en fon abfence , ce qui peut arriver à
tout le monde , il ne tarderoit pas à s’en appercevoir.
I l s’eft bien apperçu que Madame fon époufe lui avoit
fouftrait 35,000 livres le 8 N ovem bre 1 7 8 3 , lorfque le
fieur Olivier lui a porté cette fotnme en dépenfe dans
fon compte du 10 du même mois, comme remifeà Madame
d’Abbadie ; & dès le lendemain, il en a pourfuivi la reftitution contre le Pieur Olivier. Il mandoit de fon Château
d’Ithorots ,a u fieur Louftau , par fa lettre du 28 N ovem bre
1 7 8 4 .,aprèsdaux mois d’abfence de la V ille de Pau ; qui i
t>trouveront
dans un petit tiroir de fon fecrèt a ire , à gauche,
» du côté de la porte de la bibliothèque , un billet du fieur
» de Beaurégard , de la Jommc de 8000 liv. fou s une enve» loppe. N ’eft-il pas évident que fi ce billet lui avoit été
volé pendant fon abfence, il fe feroit apper^u du vo l ?
L es biens-fonds & l’argent comptant font donc en sûreté
dans les mains de M . le Préfident d’Abbadie , comme il»
le feroient dans celles de tout autre adminiftrateur : ce
Magiftrat feroit-il donc interdit fous prétexte de quelque
agitation pailagère qui ne feroit aucun préjudice à fon
adminiflration ? Mais le Juge qui interdit un citoyen pour
caufe de d é m e n ce, n’eft que l ’organe de la L oi qui a pro
noncé d avance cette interdiction , & la L o i n’interdit que
celui que la privation de la r.aifon rend incapable d’adminiftrer par lui-même : quia rcfîus fu is fupereffe non poffunt
iuratores dandi Jutit. O r , il eft démontré par les interro
g a t o i r e s ^ p a r le rapport des M éd ec in s, que M . le Pré
sident d’Abbadie eft dans un état habituel de raifon , &
par une longue expérience , qu'il eft capable d’adminiftrer
par lui-même» Il n eft donc pas poflible de l’interdire.
�La jurifprudence de la Cour confirme à cet égard la
difpofition de la L o i , & des exemples anciens & récens
font des garans certains que M . le Préfuient d’Abbadie
ne fera pas interdit.
L es gendres de la Dame de Saintot l’avoient fait interdire
par les premiers J u g e s , fous prétexte d’une m élancolie,
qui
depuis quelques années avoit troublé fon «fprit &
affoibli fa Mémoire , ce qui leur faifoit craindre qu’elle
ne difposât de fon bien à leur préjudice. Un arrêt du
12 Février 1548, rapporté par S o e f v e , Centurie 2 , ch. 64 f
infirma la Sentence d’interdiftion ; & pourquoi ? « Parce
» qu’on ne voyoit point , dit l’Arrêtifte, que la Dam e
» de Saintot eût encore fait aucune diffipation de fon bien,
» & qu’il n’étqit pas jufte que des enfans demandaiTent
» l’interdi£tion de leur mère fur la feule crainte qu’ils avoient
» que dans cette mélancolie elle ne vînt à difpofer de fes
» biens mal-à-propos ; une interdiction ne pouvant jamais
» être fondée fur ce qui peut arriver , mais fur ce qui efl
» arrivé auparavant qu’elle ait été demandée & pourfuivie
» en juilice.
L e fieur Fourneau DucaiTeul étoit plongé depuis plus
de trente ans dans une yvreife journalière qui troubloit
fa raifon : fes proches detnandoient fon interdi&ion fous
ce prétexte. Mais il n’avait pas di(fipé, & il a été main
tenu dans fon état par un arrêt du 1 1 Juillet 178 6.
Une habitude de trente ans eft une fécondé nature ; un
homme dont une liqueur étrangère rouble journellement la
raifon depuis plus de 30 ans eit moins capable d’adminiftrer
que ne le feroit un homme en qui une humeur naturelle pro
duiront de loin en loin pendant un ou deux jours feule
�L I1
ment
une révolution femblable à un
commencement
d’yvreife, & affimiler à cet état celui où M . le Préfident
d’Abbadie écoit les 12 &
13 Avril dernier, ce feroit le
juger avec plus de rigueur que ne le permettent le dire
du 1 2 , & l'interrogatoire du 13.
Si la C o ur a épargné en
1648 &
en 1786 le coup
de l’interdi&ion à des gens de la claiTe com m une, dont
la raifon étoit moins faine que celle de M . le Préfident
d’Abbadie , & dont la feule défenfe étoic de dire qu’ils
rfavoient point difl/pé , peut-on croire qu’elle interdira ce
Magiftrat qui a fait des épargnes & des acquifitions , ôc
qu’elle frappera fa perfonne d’une fiétrifiure en quelque
forte héréditaire, fans aucune néceflité.
Je dis , fans aucune tiécejjiiê , & c ’eft ici mon dernier
argument que je vous fu p p lie, M elïieurs, de faifir avec
toute l'attention que mérite l’importance de cette caufe.
L ’interdi&ion d’un citoyen ne doit être prononcée que
lorfqu'elle eft d’une nécefiité abfolue pour la confervation
de fa perfonne & de fes biens.
O r , il n’y a aucune néceiTité d’interdire M. le Préfident
d’A b b a d ie , ni pour la confervation de fa perfonn e, ni
pour la confervation de fes biens.
N ulle nécellitd d’interdire M . le Préfident d’A bbadie,
pour la confervation de fa perfonne : ce point eft établi
par l'aveu même de Madame d’A bbadie, & par une longue
expérience.
Madame d’ Abbadie déclare dans fon Mémoire imprimé
nu Chatelet, page 114., « que fi M. le Préfident d’Abbadie
» lui a voit envoyé fa procuration, à l’effet de le repréferxer
» p ar-tou t, on auroit eu tout ce qu’on pouvoit attendre
�» d’une interdiction, & que feulement on s’en feroit épar» gné les ddfagrdmens ».
O r , la p r o c u r a t i o n qui auroit rendu l’interdi&ion inutile
,
de l’aveu de Madame d’A b b a d ie , ne lui auroit donné
aucun
fident
p o u v o ir
fur la perfonne de fon mari ; M . le Pré-
d’Abbadie feroit refté en Béarn , maître de
fa
perfon ne, tandis que Madame d’Abbadie feroit reftde à
Paris maîtreife de
ià
fortune , en vertu de fa procuration
:
l’interdiction n’eft donc pas ndceiTaire, de l’aveu même
de Madame d’Abbadie , pour la confervation de la per
fonne de fon mari.
D ’ailleurs, une longue expdrience démontre que M. le
PrdftdentdÀ’bbadiefaitadminiftrerfa perfonne.Depuis 1781
qu’il a continud d’être maître de lui-même , il ne lui eft
en core
arrivd aucun accident fâ c h e u x , & depuis deux ans
qu’il a quittd une dpoufe devenue fa perfdcutrice , fa fantd
eft plus robutfe, & fa perfonne eft en meilleur dtat.
* N ulle ndceifitd d’interdire M . le Prdfident d’Abbadie
pour la confervation de tes biens.
Il fe fo u m e t, par une prdcaucion furabondante, d’un
c ô t e , à faire emploi de toutes les fommes mobilières
provenantes de la fucceifion du fieur de Borda, & d’un
autre côtd , à ne pouvoir paifer aucuns a£tes tendans à
l ’aliénation de fes biens que de l’avis d e M c Babille , ancien
Bâtonnier des Avocats qu’il a ch o ifi, & que la Sentence
du Châtelet lui a donnd pour confeil.
M ais, dit-on, que deviendront les revenus dans les mains
de M . le Prdfident d’Abbadie?
Je demande d’abord moi-même ce qu’ils deviendroîent
dan* les mains de Madame d’Abbadie,
Tout
�, . 1 1 ?
,
X o u t le mond.e.répo nd'^qu’ejle les. employ eroit largement
à fés beibins & à fes plalilrs% "¿c* periorme n’eft dupe de
l ’offre dérifoire .qu'elle vient de faire en la C o u r , d’employer
l ’excédent des revenus, de l’avis d e M e Hutteau fon confeil.
A coup sûr, ,M e Hutteàu auroit été confijlté plus fouvent
fur un emploi de ce g e n r e , s’il avoit continué d’être le
Confeil de M . le Préfident d’Abbadie.
M . le Préfident d'Abbadie fera de fes revenus ce qu’il
jugera à propos. Il pourvoira aux befoins de fon époufe ;
c ’eft tout ce qu’elle a droit d’exiger; il n’épargnera rien
pour l’éducation de fes enfans ; il eft bon m a r i, bon
père : 40000 liv. qu’il avoit en réferve en 178.4, lorfqu’il
ne jouiifoit que d’environ. 40,000 livres de rente , & les
acquifitions
qu’il a faites depuis
1781 , prouvent cju’il
fçait trouver de l’excédent dans fes revenus, & l ’employer
d’une manière utile. C e que Madame d'Abbadie promet
de faire , M . d. ’Abbadie l’a déjà fait.
E t quand il feroit certain qu’il dépenfera fon re v e n u ,
feroit-ce un m otif pour l’interdire? Les fruits ne font-ils pas
eonfacrés à la jouiifance du père de fam ille, & a - t - o n
jamais interdit un m ari, de peur qu’il ne donne à fon
revenu une deftination arbitraire & indépendante de.»
goûts & des caprices .de. fa femme ?
M . le Préfident d’Abba die jouit de fa raifoh : fes
interrogatoires & le rapport des Médecins le prouvent ■
:
il eft bon adminiftraceur, fes épargnes & fes acquifitions
le démontrent. Il a clioifi. d’ailleurs. M c Babille pour fon
C o n fe il; fon adminiftration aura pour g u i d e 'l ’expérience
la plus confom m ée, & la fpgefle fera déformais la com
pagne de fa raifon.
Répétons en finiiTant ce que nous diiions l’année dernière
au Châtelet.
P
�'r i4 '
Q u e Ta. deftinée de M . le Préfident d’Abbadie eft cruelle]
Sa vie n’eft depuis, fon mariage qu’une chaîne d’épreuves
affligeantes dont la dernière tend à le dégrader & à le
plonger dans-un abîme de misère.
Il eft attaqué par un parti qui a confpiré fa perte ; &
qui voit-il à la tête de cette confpiration ? Son époufe.
Une époufe*. dans le choix de laquelle il a facrifié les.
convenances
de. l’in térêt, pour fuivre aveuglément le
penchant de fon cœur.
Une é p o u fe , qu’il a comblée de libéralités dans fon
cortrat de mariage, & qu’il auroit rendue heureufé,, fi elle
avoit fçu l'être.
T u n’as, lui dit-elle, que les dehors de l'homme :I’inftih£t.
aveugle a pris dans ton ame la place de la raifôn.
N o tre condition eft changée : je ferai déformais maîtreiTè
de m oi-m êm e, & tu relieras fous ma puiifancei
Abandonne ces richeiTes que la fortune vient d’accu
muler dans tes mains : c’eft moi qui dois-en avoir la jouitfan ce, c’eft à moi à régler la mefure de tes befoins.
Defcends du rang que tu occupes parmi les Miniftres
de la loi : ta Magiftrature eft finie, le fanûuaire de la juftiee
ya fe fermer fous tes pas.
R en on ce à tes enfans : il craindront de t’appeller leur
p è r e , & ils rougiront de te devoir la naiflance.
T u n’es plus citoyen : la fociété te proferit & te rejette
de fon fein.
T u n’as qu’une exiftence paifive, & le reffe de ta vie ne
fera qu’une mort anticipée.
Il
entend ce langage : il frémit au fëul fouvenir de celle
qui- ofe l’outrager & le menacer ainfi. L e paiTé femble revivre
pour fon fupplice; les peines qui ont empoifonné le cours
de fa viÇ y fe raifetnblent maintenant danrt fon ame > & la
�11*
'déchirent foutes à la fois. Son courage ne l'a cependant pafc
abandonné : il a fubi pendant cinq mois l’épreuve humiliante
à laquelle il a été aflujetti : fouvent il a prévenu lui-même
le Magiftrat; il eft allé lui faire voir la iktiation de fon
efprit & lui découvrir fon am e, cette ame qu’aucun méfait
n’a jamais fouillée, & qui ne cotinoît p oin tée remords;
il penfe, il raifonne, il fentr, il exprime; quiconque l’en*tend partage la douleur dont il eft pénétré, &. fes perfécuceurs, pour avoir l’air de l’immoler i.ns .finrc, feignent dô
croire qu’il eft infenfible au mal qu’ils lui font.
Ihfôrtuné Magiftrat ! . . . que deviendroit-il, fi les loixpouvoient fouifrir cet affreux facrifice !
l i e Certificat-du 0. Mai 1783 , qui autorife fon épouie
à employer la force contre l u i , fort dans fa maifon, foit
dans une maifon publique, à fon choix ; le certificat du 6
Février 1784., par lequel elle l’a fait déclarer fou incu
rable, contre fa convi£tion intime, contre l’évidence même;
la chartre privée où elle l’a tenu , & l’abandon où elle
1-a làiifé une nuit entière au milieu des dbuleurs les plus
aiguës-, font le p ré fa g e effrayant du fort qui lui eft réfervé.
R elégu é dans une maifon de force', ou détenu dans la
fienne , il ne jouiroit plus à-fon gré ni du ciel qui l’écla ire,
ni de 1-air qu’il refpire , ni de la rerre qur s’offre fous fes
pas ; la nature entière difparoîtroit à fes yetrx : fe u l, faiiî
parens, fans, amis-, étranger à tout le monde &
charge
à lui-même, il chercheroit vainement autour de lui des
êtres fenfibles auxquels il pûft fe plaindre, ôt qui priifent
part a fe’s peines. Jamais la' voix confolante de l’humanité
n e frapperoit fon oreille & ne fufpendroit le cours de &
douleur. Il n entejidroit que les infultes ôc les menaces dea
tyrans mercenaires qui s’attacheroient à fa perfonne, ôcdonc»1 feroit le jouet. & la vi&ime. L a m o r t.......... la mort trop
�i
\6
lente pour fes befoins feroit fon unique _efpérance ; elle
feule pourroit brifer fes chaînes & mettre fin à fon mal
heur.
L ’idée de cette fituation, quelque affreufe qu'elle fo it5
n’eft pas c e qui l’affecte le plus dans ce moment : il eft pere :
fon cœur fe déchire au fouvenir de deux enfans dont la
deftinée eft attachée à l a fienne, & que le préjugé envelopperoit dans fa profc ription. i l fent redoubler fon courage
en fongeant au malheur dont ils font menacés : ce feroit
peu de leur laiff er une grande fortune, s’il leur laiffoit en
.même temps un nom flétri & déshonoré : il l ’a fignolé ce
nom par d’affez grands facrifi ces , pour qu’il doive être
jaloux de le conferver fans tache : les prifons de la baftille
dépofent de fon dévouement généreux au milieu des révo
lutions publiques.; les regiftres de la Cour confacrent les
,
efforts de fo n zele pour le bien du fervice du R o i & pour l'hon
neur de la Magift rature : c eft cet honneur qu’il veut fauver
comme le .patrimoine le plus précieux de fes enfans;; en
combattant pour lui-même contre fon époufe, il .combat
pour eux contre leur mere : il défend trois victimes qu’elle
s’efforce d’immoler à la fois; mais après qu’ils auront triom
phé de ce péril com m un, il leur apprendra à oublier les
erreurs de celle; qui leur donna le jo u r, & à lui rendre le
bien pour le mal qu’elle n’aura pas pu leur faire.
M onfieur S E G U I E R , Avocat Général.
Me B E R G E R A S , A vocat.
1
A Paris, chez K N A P E N
J u l h i a r d , Procureur.
;
& F ils , Lib.-Im pr. de la
C o u r des A i d e s , au bas du Pont S, M ic h e l, 1 7 87.
�
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Factums Vernet
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. D'Abbadie. 1787]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Seguier
Bergeras
Julhiard
Subject
The topic of the resource
démence
curatelle
traitement par électricité
psychiatrie
divorces
maison de force
successions
conseils de famille
abus de faiblesse
violences sur autrui
certificat médical
témoins
experts
Description
An account of the resource
Plaidoyer pour monsieur d'Abbadie, conseiller-honoraire au Parlement de Paris, président à Mortier au Parlement de Navarre. Contre madame la présidente d'Abbadie, son épouse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Knapen et Fils (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1787
1781-1787
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
117 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0105
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_V0106
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Pau (64445)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
certificat médical
conseils de famille
curatelle
démence
divorces
experts
maison de force
psychiatrie
Successions
témoins
traitement par électricité
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53960/BCU_Factums_B0121.pdf
a73f9d004d46f93845c1801d8ffd400f
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Text
PRÉCIS
P O U R Sieur J e a n CO U SSERAN D , Marchand
drapier , & ancien Juge-Conful de la Juridiction
Confulaire de Brioude , Demandeur.
C O N T R E M e B A G É S , Chanoine Hebdomadier
de l'É glife de faint Julien de Brioude, Défendeur
.
E T encore contre le Sieur Maifon 3 ci-devant Mar
chand à Brioude
, Intervenant.
L A demande que j’ai formée contre le fieur Bagés,
de la fomme de 794 liv. portée par fon billet du 15
juillet 1 7 8 1 , a donné lieu à un gros procès , & par
conféquent à des frais confidérables. Si le fieur
Bagés & le fieur Maifon , fon beau-frère , q u i, dans
cette affaire , eft fon prête-nom 3 n’ont, pas contre
-
�•*
4
•
•
•
*.
*
A
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C 1 )'
•
moi d’autre avantage , ils ont au moins celui d'avoir
nui au développement de mes m oyens, en néceilîtant une difeuffioh très-étendue. :J.e vais tâcher de
le u r donner toute leur force,..en les réfumant. J’ef;
père de donner une idée» fimple , mais vraie , de la
conceftation ; je m'attacherai aux faits principaux
qui doivent guider dans fa dédiions les détails fe con
cevront plus aifément , lors du rapport.
E n ^ to b re- 17 7 6 pétant a Paris, le fleur Maifon >
marchand mercier à Brioude, dont les affaires étoienc
dérangéès, mè fit folliciter de verfer pour lu i, entre
les mains du receveur général des loteries, la fomme
de 3000 liv. cette fomme étoitabfolumentnéceflaire^
pour qu’avec le fecours de quelques proteélions ,
il obtînt la commiffion de receveur des loteries à
Brioude. Il m’offrit des furetés, foit pour conferver
la.propriété de cette fomme , foit pour en retirer un
intérêt honnête , relativement à ce qui fe pratique
dans le commerce.
Convaincu de l ’inconduite de Maifon , je refufai
cette propofition , & je ne me ferois jamais rendu ,
fi je n’y euiTe été engagé par le fieur Martinon
marchand drapier à Paris, ôc par M e Grenier, avocat
en ce fiège^qui étoic alors étudiant à Paris : ils préfi
xèrent l’un &■l’autre à la rédaction des conventions
«Tentre Maifon Si m oi, qui renfermoient une efpèce
de fociété commandite. ^
r Mes àdverfaires, auiïï ingrats que perfides à mon
Égard, n ont pas craint d’inlinuer que dès ce moment
�( 3 >
favoîs formé le projet de m'enrichir aux dépens des
Maiion. Eh quoi! j’étois alors dans la même aifance
qu’aujourd’h u i, & Maifon étoit malheureux, erranc
& fugitif; il étoit pouriuivi par les plaintes & les
gémiifemens d’une famille nombreufe, qui étoit vic
time de fon inconduite ; je. craignois qu'il ne fît une
fécondé chute, & l’événement a fait de cette crainte,
une prédiction. Ai-je donc pu jeter des vues fur la
fortune d’un homme qui n’avoit que des dettes, & qui
nJinfpiroit d’autre fentiment que celui de la pitié \ •
D ’ailleurs, ce qui prouve la fauifeté de ces imputa
tions , c'eft que nos conventions furent l’ouvrage
de M e Grenier&dufieurMartinon ; ils n’auroient pas
fouffert des claufes injuftes, iur-tout, dès qu’ils agiffoient auprès de moi en faveur de Maifon, qui avoitfu
les intérelfer , fans doute, parce qu’il étoit malheureux.
Quelques années après, mes appréhenfions fe réalifèrent : Maifon , dont j’étois la caution , parce que
j’avois payé pour lui la fomme de 3000 liv. qui devoit être fon cautionnement e ife & if, fe conduiiic
mal dans facommiiTion ; il fit, à moninfu , des prêts
confidérables de billets à des perfonnes peu folvables ;
l ’adminiilration en fut avertie : il y eut d’abord une con-i
trainte : on fit main-baife fur tous fes meubles & marchandifes.
• Cet homme, indigne d’égards, mais qui pou voie
toucher encore, à raifon du malheureux fort de fa
famille, eut recours., dans ce défaftre, au fieur Bagés,
chanoine, fon beau-frère, & à moi. Nous nous prêtâmes
A a
'
�C
)■
à l’obliger , par un fentiment de commifératîon *
nous efpérâmes de lui 'conferver une partie de fa
fortune-, en arrêtant des pourfuites judiciaires ; j'a
vouerai , fi l’on v e u t, que j’y avois intérêt , parce
qu’il devoit me refter plus de reiîburces pour le
recouvrement de la fomme de 3000 liv. dont je
devenois ion créancier.
*
Il fut fait une faifie-exécution mobiliaire, en vertu
d’une contrainte , pour 10201 liv. le fieur Bagés &
moi en obtînmes la main-levée ; mais fous des con
ditions aufll onéreufes pour nous, qu'avantageufes
pour l’adminiftration. Je confentis que la fomme
de 3000 liv. que j’avois fournie pour le cautionne
ment , demeurât, dès cet inftant, entre les mains de
l ’admimilration, à compte de ce qui étoit dû par
Maifon. Cette offre réduifoit le montant de la con
trainte à la fomme de 7201 liv. le fieur Bagés Sc
moi nous en rendîmes folidairement cautions pour
le fieur Maifon.
Nous n’avions pas alors une parfaite connoiifance
des reiîburces du iieur Maifon; nous favions qu’il
étoit dû par le fieur Bouchon , entre les mains du
quel il y avoit une faifie, de la part de l’adminiftration ; mais nous ne favions pas combien il étoit dû :
d’ailleurs iln’y avoit pas de titres, & il falloit ménager
le fieur Bouchon , pour s’en procurer. Il eft cepen
dant vrai que le fieur Bouchon fe reconnut débiteur
dans la fuitfc, du fieur M aifon , de la fomme de?
7 S 4 2 ^Y. 8 fous<
'
/
4
�( J ),
Le fieür Bagés' s’en remit d’abord à m oi, fur tout
ce qu’il falloit faire pour noils tirer de I embarras
dans lequel nous étions ; c’eft-à-dire , pour nous
procurer le recouvrement de la fomme de 7201 liv.
S’il m’eût été poiîible de toucher , des mains du
fieur Bouchon, la fomme de 754 9 liv. 8 fous, & il
je n’avois pas été créancier en particulier de M aifon,
de la fomme de 3000 liv. notre cautionnement
folidaire auroit été éteint fur le champ. Le fieur Bagés
fuppofe que Bouchon nous a payé cette fomme ;
mais il s’en faut bien qu’il dife vrai.
Outre la fomme de 10201 liv. pour laquelle il
y avoit eu une première contrainte , de la part de
l ’adminiftration & une faifie-exécution , il étoit en
core dû par M aifon, à l’adminiftration, la fomme
de 1^66 liv. lors de notre cautionnement nous
ignorions ce fécond débet
• L ’adminiilration entendoit toucher cette dernière,
fomme fur ce qui étoit dû par le fieur Bouchon, préférablement à nous : nous ne pûmes nous diifimuler
qu’elle en avoit le droit, parce que s par notre cau
tionnement , l’adminiilration q u i, comme on fait ,
néglige rarement fes intérêts, avoit eu le foin de faire
ftipuler que nous ne pourrions entrer en concurrence
avec la compagnie fur les ejfets de Maifon pour
ce qui pourroit être du à la compagnie pour les tirages
& recettes , à compter de la première contrainte , en
vertu de laquelle fe faifoit la faifie-exécution qui
avoit occafionné notre cautionnement.
.
,
�c o
A ïn fi, pour éviter des frais q u i, quoique faits
contre Maifon , auroient rejailli iur nous je pris le
parti, du confentement du ileur Bagés , de prendre
iur mon compte des efFets que le fieur Bouchon me
donna, montant à 7545? liv. 8 fous ; fur quoi je
payai, du confentement du fieur Bagés, à la com
pagnie , ce qu’elle avoit droit de prélever iur ce qui
étoit dû par le fieur Bouchon; c’eft-à-dire, la fomme
de 23 66 livres. Cela pofé , il eft aifé de com
prendre que nous ne touchâmes réellement, fur
ce qui nous étoit d û , que 5183 livres 8 fous.
- Cette fomine a dû s’imputer au marc la livre ,
fur ce qui nous étoit dû conjointement pour notre
cautionnement folidaire , & fur la fomme de 3000
liv. qui m’étoit due perfonnellement ; en donnant
la préférence à la compagnie fur nous je ne l’avois pas donnée au fieur Bagés fur moi : ma concur
rence avec lui étoit de droit ; je me l’étois d’ail
leurs réfervée ; ainfi, en imputant au marc la livre
cette fomme de 5183 liv. 8 fo u s, fur la créance
commune de 7201 liv. & fur ma créance particu
lière de 3000 liv. il eft aifé de voir que nous res
tions créanciers en commun d’une fomme confidérable.
L e fieur Bagés a prétendu, à la vérité , que cette
fomme de 5183 liv. de voit être imputée, d’abord
fur notre créance commune ; c’eft-à-dire, fur les
7 2 0 1 liv. mais quand cela devroit être , ce que [je
�( 7 )
fuis bien éloigné d’accorder , ce paiement n’auroit
pas éteint cette même créance.
En effet, en déduifant cettefomme de ^ 183 1. 8 f.
de celle-de 7201 1. montant de notre cautionnement
folidaire, il reftoit la fomme de 20 17 liv. 12 fous,
dont nous étions débiteurs envers radininiftration.
J’avoue que je reçus de Maifon quelques objets
-minutieux, dont j’ai rendu compte au fieur Bagés, &
q u il eft inutile de détailler ici : je fais mon précis
;fans livres, fans papiers, & uniquement pour con
duire mes juges aux principales difficultés de mon
affaire , m’en rapportant, fur les détails, à l’attention
• de M. le rapporteur.
Il faut donc fixer ici cette idée , qu’après le paie
ment fait par le fleur Bouchon de ce qu'il devoit ,
& en adoptant pour un moment le faux fyftême
du fieur Bagés, relativement à l’im putation, le
fieur Bagés & m o i, étions toujours créanciers de
•M aifon, de 20 17 livres i a fous^, fauf quelques
petites déduélions, & j’étois perfonnellement créan
cier de la fomme de 3000 livres, montant du cau
tionnement effe<5tif que j’avois fait pour obliger
-Maifon.
Pour parvenir à liquider les affaires de Maifon, &
à recouvrer ce qui étoit dû au fieur Bagés & à moi ,
que de foins , que de peines n e fallut-il pas prendre,
¿k combien d’avances ne dus-je pas faire? il fallut
repoufler à grands frais des créanciers faififlans, qui
fprétendoient avoir la préférence fur nous; le plus opi-
�C 8 >
niâtre & le plus difficile à vaincre , fut le fieur Gran-*
chier, receveur des confignationsencefiège;il s’éleva
une inftance en préférence entre nous ( fous le nom
de la compagnie) & le fieur Granchier ; elle fut
portée devant M. l’intendant de la province. Après
une ample inflru<5tio n ,& plufieurs voyages que je fis
de Brioude à Clerm ont, nous eûmes le malheur de
fuccomber ; les jurifconfultes m’cxcitèrent à interjetter appel au confeil du roi, & je me laiilai per• fuader aifément , parce que je fentois que j’avois
raifon , & le fieur Bagés y confentit.
L ’affaire étant engagée au con feil, je formai le
projet d’aller à Paris, pour en folliciter le jugement.
Le fieurBagés applaudit à mon zèle ; mais en même
temps, je lui propofai de faire un arrêté de compte,
dans lequel nous fixerions ce qu’il devoit fupporter
dans les avances & faux-frais faits jufque-là. Cette
précaution étoit néceifaire pour mettre de l’ordre
dans mes affaires; ma femme & mes enfans, qui n’a
voient aucune connoiiTance du procès, la demandoient avec les plus vives inftances.
L e fieur Bagés fit quelques difficultés : comme il
n’avoit pas partagé les fatigues, il ne vouloit pas par
ticiper aux dépenfes ; il étoit cependant bien difpofé
à prendre part au bénéfice qui en feroit réfulté ; ce
pendant y le fieur B agés, entraîné par la juftice de
ma propofition , me fit un billet, le i j juillet 1 7 8 1 9
à la hâte, & au moment de mon départ.
* a Les fommes dans lefquelles il devoit contribuer,
confiitoient
�c
o
,
.
confiftoient dans la moitié des intérêts quej’avois payés,
pouracquitter, envers la compagnie, la fomme d e72 0 i
liv. montant de notre cautionnement: j’obferve qu il
nous avoit fallu payer tout de fuite cette fomme a
la compagnie , pour en éviter les pouriuites. Le fieur
Bagés & moi étions dans ce moment hors d’état d’y
faire face : pour engager Bouchon à reconnoître fa
dette, il fallut, non feulement fe contenter d’effets
payables à term e, mais je fus encore obligé de lui
prêter i ^oo liv. que je n’avois pas, & que j empruntai
à intérêt : ce ne fut enfuite qu’en négociant les effets
Bouchon, & en perdant le droit d’efcompte, que je
pus convertir ces mêmes effets en argent pour , payer
la compagnie. On fait que ces reviremens fe font
fouvent dans le commerce , & qu’ils font quelques
fois néceilaires. Le iïeur Bagés, quoiqu’étranger au
commerce, favoit, & fait bien encore qu’il dévoie
m’indemnifer de toutes ces pertes ; il devoit de
plus me dédommager de plufieurs voyages que
j’avois faits à Clermont, Sc des faux-frais faits ju£
qu’alors.
D ’après ces idées, il reconnut par fon billet, qu’il
me devoit
4 liv. & de p lu s, qu’il me paieroit une
fomme de 100 liv. pour fa portion dans les frais du
voyage que j’étois furie point de faire pour Paris: ces
deux fommes réunies font 794 liv. L e fieur Bagés
mit pour condition , que je rendrois compte de ce
que j’avois reçu ou recevrois fur notre créance,
B
�C 10 ')
Ce premier voyage ne fut point heureux’; il me
fut impolfible d’obtenir le jugement de notre affaire,
contre le ileur Granchier, malgré un féjour de deux
mois à Paris. Les faux-frais fe multiplièrent néceffairement, puifque je fis un fécond voyage à Paris
au mois de mai 1 7 8 2 ,& que ce nefut qu’après quatre
mois de fé jo u r q u e j’obtins, enfin, un arrêt favo
rable. C ’eft en vertu de cet arrêt, que nous avons
pu toucher des mains des tiers faifis , ce qui nous
étoit dû par Maifon conjointement, & ce qui nv’étoit dû perfonnellement, à l’exception de 490 liv.
dont Maifon eft encore débiteur.
Il s’agit de la demande que j’ai formée contre le
fieur Bagés, de cette fomme de 794 liv. Le fieur
Bagés a lait des efforts incroyables pour la contefter,
& il s’eil fait aider de l’intervention de M aifon, fon
beau-frère , qui entreprendra fans peine tous les
procès qu’on voudra qu’il entreprenne , parce qu’il
eft dans une pofition à ne pas en redouter l’événement.
Toutes les difficultés élevées par mes adverfaires, fe réduifent à trois ; mon but n’efl pas
de les difcuter, parce que je ne veux faire qu’un
apperçu & non un gros mémoire. Je veux feu
lement les préfenter & préparer mes juges à mieux
faifir & faire l’application des détails dans lefquels
entrera M . le rapporteur.
P r e m iè r e
e ie fic v lté .
On a p ré te n d u q u e p e u
�C 11 )
’ de temps après notre cautionnement commun ,
j’avois reçu du fieur Bouchon 7^49 liv. 8 fous;
que cette fomme avoit dû s’imputer' fur notre
cautionnement folidaire, montant à 7201 liv. que
dès-lors cette dette folidaire avoit été plus qu’éteinte, & qu’ainii les#frais des procès devoient être
à ma charge.
R é p o n s e . Je puis m’en tenir à ce que j’ai'
dit à cet égard dans le récit des faits. i° . On ie
rappelle que fur les 7549 liv. 8 fous, reçus de
Bouchon, il n’y eut pour nous que 5183 8 liv. fous,
parce que l’adminiftration avoit décerné une nouvelle
contrainte contre Maifon, pour la fomme de 2366 1.
qu’il fallut néceifairement payer cette fomme fur
ce que nous pûmes toucher de Bouchon, parce
q u e , par notre cautionnement même, nous nous
étions fournis à ne pas entrer en concurrence avec
l ’adminiitration ; ainfi, malgré le paiement fait par ,
Bouchon, & en fuppofant qu’on doive*ce paiement??«^
fur notre créance commune, abflraétion faite de la
mienne, nous reliions débiteurs envers l’adminiftration,
- de 2017 liv. 12 fous; & nous en étions créanciers
• de Maifon. Si je n’avois pas pris des peines qui
font aujourd’hui bien mal récompenfées ; fi je
n’avois pas fait des avances qu’on voudroit au
jourd’hui me faire perdre avec autant d indignité,
* nous n'aurions certainement pas fait rentrer cette
fomme.
B 2
�' ■( 12 )
2°. J’ai déjà expliqué comment Bouchon avoic
payé 7545? liv. 8 fous : le fieur Bagés fait aulfi-bien
que moi quels facrifices il fallut faire pour arracher
des «effets de :Bouchon,
pour les convertir en
argent. Lorfqu’il ne craint pas de fuppofer que
j’ai touché réellement cette fomme de 7549 liv.
8 fous, il va contre fon propre écrit, dans lequel
il a entendu, félon lu i, devoir fupporter fa portion
dans les ‘intérêts perdus pour nous & dans les fauxfrais. Je ne c o n c e v r a i jamais comment le iïeur Bagés
pourroit fe difpenfer de payer cette portion, qui
eil une moitié.
Le fieur Bagés a foutenu
que le montant de fon billet n’avoit pas pour
caufe les faux - frais par moi faits, mais bien ce
que je prétendois nous être relié dû alors par Maifon
iiir notre cautionnement; & , comme il a prétendu
que j’avois été payé dans la fuite de tout ce que
devoit M aifon, il a cru par là faire tomber ma
créance. Le fieur Bagés, pour foutenir cette afiertion,
a juilifié d’un prétendu compte par moi fait de
notre créance commune fur Maifon, au bas duquel
eil un compte particulier, contenant cinq articles.
’Le premier effc une fomme de 69 liv. 10 fou s,
pour une partie des intérêts & avances; le iècond
'confifte en une fomme de 18 liv. i f fo u s, pour
la même caufe; le troilicme a pour objet la fomme
Seconde
d ifficu lté.
�( *3 )
,de. ¿ ¿ 6 liv. 4 fous 5 den/faifant moitié de celle
de i i 1 2* liv. 8 . fou s 9. den. que Ton fuppofe être
reilée due par M aifon, fur' le cautionnement
folidaire , -lors du billet dû fieur Bagés ; le qua
trièm e article confifte en une fomme de 50 liv.
pour la moitié de fix à fept voyages faits à Clermont, & le cinquième eft une fomme de 100 liv.
' pour partie des frais du premier voyage de Paris.
. Le fieur Bagés ’ a prétendu que c’eft fur ce der
nier compte qu*a été calqué fon b illet, & que
les caufes de ce billet fe réfèrent à ces cinq ar
ticles.
Mais i° . il n’efl pas vrai que le biüet ait été fait
fur ce compte particulier. Ce com pte, ou plutôt
,.ç§t apperçu , étoit fautif; il avoit été fait à la
. liate , très - long - temps avant le b illet, & lors *
du billet, il ne pouvoit être d’aucune utilité : aufïï
ai-je. établi qu’à cette époque il étoit refté dû par
^^laifqn bien plus de 1100 liv. fur le cautionnement
i^lidaire.
' D ’ailleurs, ce qui prouve que le billet n’a pas
eu pour bafe ce compte particulier, c’eft qu’on
a furchargé les fommes portées dans ce compte.
Il y a, par exem ple, 69 liv. 10 fous, au lieu de
258 liv. on a énfuite arrêté lJaddition des cinq
articles à 794 liv. p fous ÿ den. en faifant une
furchargé, pour faire cadrer le réfiiltat de ce compte
avec le montant du billet. Je ne crois pas que
�( 14 )
le fieur Bagés ofe dire que ces iiircharges foient
de mon fait. D ’ailleurs, l’inipeéUon fur la pièce ,
.indique que les chiffres iurchargés font d’une encre
plus noire, & partent d’un port de main différent.
.A in iij dans le b illet, il ne devoit être queftion
que des avances & faux-frais.
2°. Quand le fait avancé par le iieur B agés,
. ieroit vrai ; quand nous aurions compris dans fon
.billet 5 5 6 liv. 4 fous 5 den. pour la moitié du
prétendu débet de M aifon, de i i i 2 liv. 8 fous
6 den. le fieur Bagés ferait toujours mon débiteur,
même malgré les différentes fommes que j’ai fait
rentrer poflérieurement à fon billet : il s’en pré
fente deux raifons tranchantes.
En premier lieu , quand j’ai touché, en ve'rtu
de l’arrêt du confeil, pourquoi aurois-je dû imputer
plutôt fur les 1100 liv. à nous prétendues reliées
dues du cautionnement, que fur la fommb de
3000 liv. à moi due perfonnellement. J’att VU
dans les écritures refpeétives beaucoup dé " lo ix ,
d’autorités, fur la manière dont les imputations
doivent fe faire : pour m o i, je me contente de
refpeéler toutes ces chofes que je n’entends pas ;
mais le bon fen s, o u , pour mieùx dire, l’ufage
que j’ai de juger dans une juridi&ion Confulaire,
m’apprend que Maifon étant en faillite, Si y ayant
lieu à ce que j’ai toujours entendu appeler, je
ne fais pas trop pourquoi, la 'déconfiture 3 c’étoic
�(
)
île cas d’imputer ce qui fe recevoit fur chaque
créance au marc la livre. J’ai cru que ces . prin
cipes reipeélivement invoqués, ne pouvoient s ap
pliquer qu’aux paiemens volontairement faits par
un débiteur : quand nous touchions, nous devions
imputer, comme la juilice l’auroit fait, en procédant
à un ordre : cela étant, il feroit dû encore par
-M aifon, une partie des 1 1 1 2 liv. qui, félon le fieur
B agés, étoient feulement reliées dues, lors de
fon billet, par le fieur Maifon. On comprend bien
que Maifon devant 490 liv. 1 opération du marc
la liv re , feroit rejeter environ le quart de cette
fomme fur les 1 1 12. liv. prétendu montant de la
dette commune, lors du billet.
En fécond lieu, en admettant même le iyftême
du fieur Bagés, en portant tout le débet de Maifon
fur ma créance perfonnelle , le fieur Bagés me
devroit toujours fa portion des fau x-frais, faits
lors du billet; il l’a lu i-m êm e fixée à 238 livres
8 fous.
M ais, ce n’eft pas tout : dans cette hypothèfe
même, le fieur Bagés devroit fupporter fa portion
dans les faux - frais faits depuis, & qui ont été
principalement caufés par le fécond voyage fait
à Paris , lors duquel j’obtins l’arrêt contre le fieur
Granchier. J’ai fait le détail de ces faux - frais,
dans mes écritures. Le fieur Bagés reconnoît que
lors de fon b ille t, il étoit reilé dû par M aifon,
�C I» )
fur notre créance commune : iî ce débet a été
acquitté, c’eft en vertu de l’arrêt du confeil, qui
eft le fruit de mes fatigues & de mes avances. Je
n’ai jamais entendu que le fieur Bagés partageât
les premières & ce fentiment généreux ne rend
.que d’autant plus injufte le refus fait par le fieur
B âgés, de participer aux dernières.
Mais } dit le fieur B agés, je ne devrois contri
buer dans les faux-frais poftérieurs au billet, qu en
proportion de ce que j’amandois dans la creance
qui y donnoit lieu : ma portion dans ces frais, ne
devroit donc être à leur montant, que ce que
la fomme de ¿¿ 6 4 fous j den. eft à la fomme
de 4 1 1 2 liv. 8 fous 9 den. puifque vous agilliez
pour cette fomme, & qu’il ne devoit y avoir pour
moi que ¿¿ 6 livres 4 fous 5 deniers, ou ce qui
eft de m ême, la moitié de 1 1 1 2 livres 8 fous
y deniers.
Quand on admettroit ce calcul proportionnel,
dont j’ai démontré la fauiTeté, je ferois au moins
créancier, & cependant le fieur Bagés m’a tou
jours tout refufé. Il faut donc , félon l u i , qu’il
me paie 238 livres 5 fo u s, pour fa portion dans
les faux - frais faits avant fon billet, & de pl us,
il me doit fa portion dans les faux-frais faits après.
S’il ne veut pas payer pour ce dernier objet 556 1 .
4 fous < den. que j’ai demandés, en i'uivant -le
b illet, il doit le faire au moins, fuivant le détail
que
�( i7 )
que j’en al donné dans mes écritures, & que j’offre
^affirmer.
En un m o t , j’ai payé des intérêts, j’ai foutenu
des procès coûteux, tant pour le fieur Bages que
pour moi ; ils ont donné lieu à des faux- frais confidérables : je n’en ai été ni payé ni pu l’être, de
la part du iieur Maifon, débiteur : je dois inconteftablementles répéter contre le fieur Bagés, mon aifocié.
T roisièm e
difficulté
. Le fieur Bagés Si le fieur
M a i f o n f o n beau-frère & fon prête-nom, préten
dent que j’ai été payé de tout ce qui étoit dû
par ce dernier, tant pour le cautionnement folidaire de 7201 liv. que pour la fomme de 3000 1.
à moi due perfonnellement.
Je me flatte d’avoir prouvé que
le fieur Maifon doit 490 liv. je n’entreprends pas
de le démontrer ; je m’apperçois que je fuis déjà
plus long que je ne voulois. Cette vérité eil le.
réfultat de plufieurs détails qu’il faut abfolumenc
dévorer & fur lefquels je ne pourrois point fuppléer au zèle & à l’attention de M. le rappor
teur.
20. Quand il feroit vrai que j’euife été entiè
rement payé de ce que devoit Maifon, & même
que j’en euife été furpayé, quel avantage en tireroit
l i fieur Bagés \ je devrois , à la vérité être condamné
à rendre au fieur Maifon; mais ma demande contre
R
é po n se
.
i°.
�C ** )
le iieur Bages,. pour raifon des faux-frais, ne ieroit
pas moins fondée : ce feroit toujours lui qui deyroit t
ces faux - frais-; ce feroit à lui à qui- j’aurois dû
m’adreifer : pour que je ne puiTe la répéter contre
lu i, il faudroit qu’on prouvât que Maifon les ¡a-payés :
o r , c’eft ce qu’on n’a pas même elfayé de faire.
' 3°. Je prie mes juges d’obferver qu’en admettant
toutes les folles demandes de m aifon, que j’ai
combattues avec fu ccès, il s’en fuivroit ( autant
que je puiile me rappeler ) que je devrois à Maifon
22 liv. io fous; mais, quand le fieur Bagés pourroic
lui-même demander la compenfation de ce qu’il
me doit avec ce que je devrois à M aifon, il eft
bien évident q ifil feroit mon débiteur de fommes
coniîdérables, 8c que n’ayant jamais fait d’offres, il
devroit toujours les dépens, d’après ce que j’ai
vu .dans quelques écritures, que la plus pétition
n’a point lieu en France. Cette dernière obfervation me paroît aufîi claire que précieufe dans cette'
afiaire, 8c je crois qu’elle paroîtra telle à mes
juges.
T elle eil l’idée qu’il m’a paru qu’on pouvoit
fe former de mon procès y devenu monitrueux par
les chicanes de mes adverfaires. J’ai appris que le
fieur Bagés a fait imprimer un mémoire ; j’ai
eu beau en demander un exemplaire, je n’ai pu
eh obtenir un : l’imprimeur à qui je me fuis adreiîe,
m’a répondu qu’il avoit été prié de me le refufer*
J;ai bien compris qu’on vouloit le faire paroître a
�( 19 )
fans que je puffe y répondre. Je ne doutois pas
déjà que le fieur Bagés, chanoine, ne fut fe donner
des aifances & des commodités : pour moi je n’ai
eu d’autre id ée, à ce refus, que de lui envoyer
un exemplaire du mien, auffi-tôt après l ’impreff ion.
Signé,
COUSSERAND.
Monf ieur A R C H O N D E S P É R O U S E S ,
•
*
avard,
Procureur,
Rapporteur
F
A R I O M , de l’imprimerie de M a r t i n D EG O U TTE. 1786,
n \
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Baron Grenier
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Cousserand, Jean. 1786]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cousserand
Archon Despérouses
Grenier
Favard
Subject
The topic of the resource
loterie
cautions
chanoines
prête-nom
merciers
créances
Description
An account of the resource
Précis pour sieur Jean Cousserand, marchand drapier, et ancien Juge-Consul de la juridiction consulaire de Brioude, demandeur. Contre maître Bagès, chanoine hebdomadier de l'église de Saint-Julien de Brioude, défendeur. Et encore contre le sieur Maison, ci-devant marchand à Brioude, intervenant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1786
1776 -1786
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
BCU_Factums_B0121
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0120
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53960/BCU_Factums_B0121.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cautions
chanoines
Créances
loterie
merciers
prête-nom
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53959/BCU_Factums_B0120.pdf
4a063b86cfd7c3ccffd18996bd57378f
PDF Text
Text
P R É C I S
PO U R Sieur
Jean - B
aptiste
B
ages
,
Chanoine,
de Brioude, Défendeur.
C O N T R E Sieur J e a n C o u s s e r a n d Marchand,
Demandeur
.
E
octobre 1 7 7 6 , fieur Jean M aifon, beau-frère
n
du fieur Bagés, & le fieur C oufferand , étant à
Paris, follicitèrent l 'établiffement d’un bureau de
loterie en la ville de Brioude : l’ayant obtenu ,
fous le nom du fieur Maifon fe u l, ils s’affocièrent & paffèrent un acte par-devant notaire, par
lequel il fut dit que le fieur Coufferand avoit
fourni la finance de la fomme de 3000 liv. qu’il
é toit néceffaire de configner entre les mains des
•receveurs généraux de laquelle fomme le fieur
A
�C 2 )
^
CouiTerand toucherait feul l’intérêt que lesreceveurs
en paient. L e . fieur M aiion Te chargea de tenir ie
bureau & d’en:faire tous les frais, à la charge néan
moins par le. iieuï CouiTerand de lui payer annuelle
ment une fomme de
liv. pour indemnité des
irais du bureau. Le*'bénéfice de la recette, les
rem îfes:&: rétributions de voient être partagés par
moitié.
La recette a été faite par le fieur Maifon, fous
les yeux du fieur CouiTerand qui même a engagé
le fieur Maifon à faire dès crédits confidérables à
diiFérens mifeurs, & en exprès au fieur Bouchon,
fous-ingénieur de la province.
Ces crédits mirent le iieur Maifon dans lïm poifibilité de laire à Paris les envois des ionds ,,
dont il devoit compter à fadrainiilration générale..
L ’ad mini itrafion décerna contre lu i, le 27 mai
1 7 7 8 , une contrainte de la fomme de 1020 r liv.
pour les débets envers les loteries de France ôc
petites loteries y réunies r pour le paiement de
laquelle le heur Perrol des Gofis , inipeéleur des
loteries, faifoit des pouriiùtes. Le fieur Couiferand
ie voyoit en danger de perdre la fomme qu’il
avoit financée. Le fiéur Perrol fervit le fieur
Couiferand ; il lui fit paifer le bureau, fans autre
cautionnement, à condition néanmoins qu'il fe
chargerait de remplir le montant de la contrainte alors
jdécernée contre M aifon, de la fomme de 10201 liv.
Mais le fieux ÇoulTerand ne prenant pas aifez
�( 3 );
de confiance dans la rentrée de ce qui étoic du
par les particuliers, auxquels il avoit porté le iieur
Maifon à faire crédit, chercha pour lui de plus
grandes iiiretés : il parut aufîi’ vouloir fervir le fleur
Maifon, en offrant de fe rendre caution pour moitié
de la contrainte décernée, s’il fe trouvoit une
perfonne pour cautionner l'autre ( moitié. •L<e ilei^r
Bagés confentit auifi d’être caution po,ur obliger
l e fieur Maifon ; mais il n'obligea que le, iie^r
Coufferand.
C ’eft dans ces circonilances que ^ le 2 juillet
1 7 7 8 , le fieur Coufferand & le fieur Bagés s’étant
rendus chez le fleur M aifon, au moment que les
huifliers vouloient exécuter, fe conftituèrent cau
tion par le procès verbal que l’huiifier fit, de la
fomme de 10201 liv. montant de la contrainte
décernée. V o ici les termes du cautionnement : « Et
« étant fur le point de déplacer fes meubles, font
» à l’inflant furvenus meflire Jean-Baptifte Bagés &
» M e Jean Coufferand, lefquels fe font folidaire» ment l’un pour l ’autre, & l’un d’eux feul pour le
.•» tout , rendus caution pour ladite fomme de
» 10201 liv. 1 fou 2 den. laquelle fomme ils ont
» promis de payer en deniers ou quittances valables,
« au 24 juillet préfent mois , en y imputant la
» fomme de 3000 liv. ci-deifus expliquée, & payée
» par le fieur Coufferand, déduction foite de.laquelle,,
1 objet de la contrainte demeurera réduit à la
» fomme de 7201 -liv. 1 fou 2 den. laq u elle,derA 2
‘ ‘‘ '
j
-
»
�( 4 }
» nière fomme détermine le montant de la ibmme
» qu’entçndent cautionner folidaircment lefd. fleurs
'» Couflerand .& Bagés , attendu que l’objet ci» defïus de 3000 liv. de cautionnement, concerne
S> le fieur CouiTerand feu l, auquel demeurent réfer» v é s , quant à c e , tous fes droits, privilèges ÔC
»'hypothèques»;'
C è caütiônnëfnent fait, & le iîeur Couflerand
nommé à la place de M aifon, il devint l’homme
de. r.adminiftration, <5r fut chargé de faire rentrer
tout ce qui pouvoit être dû par le fieur Maifon,
I l y a même lieu de penfer qifon exigea de lui
q u ’il remplît, tous les débets.
Ayant la liberté d’agir fous le nom de fes com•Tnettans, le fieur Couiferand, pour étendre le cau
tionnement du fieur Bagés , & pour le privilège
contre les autres faififlans, fit faire, le 11 juillet
17 7 8 , à la. requête du iieur Blanquet, receveur
gén éral, une faifie-arrêt entre les mains du fieur
Bouchon, pour fureté de la- fomme de 10201 liv.
dune part, & de celle de 3832 liv. d'autre part.
L e fieur Couflerand fai (bit la iaifie pour cette féconde
fom m e, dont il n’y avoit par de contrainte, parce
àju'il avoit trouvé par le relevé qu’il avoit fait de
la recette poftérieure à celle comprife dans la
contrainte du ir f mai 1778 , que le fieur Maifon
¿toit encore comptable-; mais le fieur Couflerand
ne faifoit pas- diftra<5tion des envois faits, par le
fieur M aifon, & des remifes qui lui étoienc dues*
�C 5 )
‘ Le 20 dudit mois de juillet 1 7 7 8 , l’adminiftration décerna une fécondé contrainte pour la recette
que le fieur CouiTerand 'avoit portée à 3832 liv.
de la fomme de 23 66 liv;
Et le 2,4 dudit mois de juillet, le iieur CouiTerand
■feui, & fans appeler le fieur B agés, toucha du
fieur Bouchon la fomme de'75 49 liv. 8 fous qu'il
devoit au fieur Maifon. Le fieur Couiferand en
donna quittance au fieur Bouchon qui fe contenta
de la promeiTe faite par le fieur Couiferand, de faire
ceifer l’effet de la faifie de L’adminiftratiôn , dont
il était faifi de l’original, 8c qu'il a toujours eu en
fon pouvoir.
Il paroîtj par un bordereau du fieur Lecouteux,,
que le fieur Couiferand a payé à l’adminiftration,.
en décharge de M aifon, la fomme de 9058 liv.
‘ en différens tem ps, Si que cette fomme j,ointe à
celle de 3000 liv. montant de la quittance de finance,
l ’adminiilration fe trouve payée de la fomme de
12058 liv. à laquelle font portés les débets du fieur
Maifon par ce bordereau.
L'on ne voit pas qu’avant l ’année 1 7 8 1 , le fieiu*
Couiferand eût touché des deniers du fieur Maifon,
ou dû faire compte d’une plus forte fomme que
de celle de 8948 liv. 5 fous 8 den. de forte qu’il
étoit créancier en 178 1 du fieur Maifon, de la fomme
de 3109 liv. 14 fous 4 den.
M ais, d’après les termes du cautionnement com
mun , le fieur Bagés étoit dégagé de fes engage-
�C
6)
mens , par ia rentrée de la fomme de 7 <j49 liv".
payée par le fieur Bouchon , puifque fon cau
tionnement folidaire avoit été reflreint à 720 1 li
vres; cependant le fieur CouiTerand l ’étendit plus
lo in , & fit entendre au fieur Bagés que l’adminiflration avoit un privilège, dont elle avoit ufé,
en faifant faifir entre les mains du fieur Bouchon.
Il lui perfuada que le cautionnement commun fubfiftoit encore pour une forte fom m e, ayant été
obligé de payer à Padminiftration une fomme de
12058 liv. & n’ayant reçu que 7946 liv. fuivant
un état qu’il préfentoit; qu’en conséquence il étoit
intéreifant pour tous deux de fuivre l ’inilance en
préférence de faifie pendante au confeil, entre les
receveurs généraux & les créanciers du fieur Maifon.
Le fieur Couiferand propofa au fieur Bagés d’arrêter
le compte qu’il préfentoit , & par lequel il fe
chargeoit feul de la fomme de 3000 liv. exceptée
par le cautionnement commun; de forte qu’il ne
fe difoit être en avance fur le cautionnement, que
de la fomme de 1 1 1 2 liv. 8 fous; ce qui faifoicpour le fieur Bagés ¿¿ 6 liv. 4 fous, à laquelle
fomme il ajoutoit celle de 88 liv. y fous d’intérêts.
L e fieur Bagés n’étant point édifié, & ne voulant
fatisfaire le fieur Couiferand, que pour tranquilliier
ia dame ConiTerand, donna un écrit conçu en ces
termes i w Aujourd hui iy juillet 1 7 8 1 , il a ete
v arrêté par moi Jean-Baptiile Bagés, chanoine, à
».la fomme de 694 liv. 10 fous, iauf & fans pré-
�( 7 )
» judice de re'viiion de ma part & de tous mes droits &
» exceptions, le tout renvoyé après le. jugement, du
» procès qui eit pendant au confeil, eiva.e ie fieur.
» Maifon , fes créanciers Sa le fieur Blanquetr j a
« la charge cependant que M. Couiferand. iera.tenu
» de me donner un compte exaét de tout ce qu’il
» aura reçu de M aifon, & que fon compte fera.
» exadfc a tout ce que Maifon devoit à la loterie.
» Promets en outre la 'fomme de 100 liv. pour
» le voyage de Paris ». Cet écrit fut dépofé entre
les mains d’un tiers qui n'en devoit faire d autre
ufage que de le communiquer à la dame Couilerand.
Le procès pendant au confeil a été jugé en faveur
du fieur Blanquet, receveur général, qui a obtenu
tous les dépens ; S c, en vertu de l’arrêt, le fieur
Couil'crand a touché des débiteurs ou dépofitaires
des deniers du fieur Maifon, la fomme de 3629 liv.
ce qui la rem plit, non feulement en ce qui touche
le fieur Bagés, & en donnant à fon cautionnement
toute rexteniion poilible, mais même par rapport
à Maifon*
C ’efl: néanmoins en cet état des chofes, que le
fieur Couiferand a fait aiîigner le lieur Bagés en
la cour, par exploit du 27 feptembre 17 8 3 , pour
être condamné à lui payer le montant de fon arrêté
de compte ( c’efl: ainii qu’il q u alifie l’écrit du i£
juillet 178 1 ) & la fomme de 100 liv. pour la
.voyage de Paris.
�<: « )
L e fieur Bagés a défendu à cette demande, 8c
a combattu la prétention par ces moyens : il a die
1°. que, ne s’étant rendu caution que pour moitié
de la fomme de 7201 liv. Ton cautionnement a été
éteint par la rentrée de la fomme de 754 9 liv.
touchée du fieur B ouchon, le 24 juillet 1778 >
2 °. que le fieur CouiTerand eft entièrement rempli
de toutes les Tommes qu’il avoit payées à Tadminiilration pour le fieur Maifon.
A ces moyens, le fieur CouiTerand a oppofé le
privilège de i’adminiftration, par l’effet duquel il
entend étendre le cautionnement du fieur Bagés à
tous les débets du fieur M aifon, & l’écrit du iÿ
ju illet, qu’il a foutenu être un arrêté de compte ;
il a prétendu être difpenfé de rendre aucun com pte,
& cependant il en a fabriqué un par une requête
qu’il a donnée.
En foutenant toujours que la fomme de 7549 liv.
touchée du fieur Bouchon, a éteint ion cautionne
ment , le fieur Bagés a auiîi répondu que l’écric
du 15 juillet n’eft d’aucune valeur, l’arrêté ayant
été fubordonné à un compte cxaét, avec La réferve
de tous droits & exceptions : il a d’ailleurs pris des
lettres de refcifion contre cet écrit ; & pour dernier
m oyen, il a dit que quand l’écrit du 15 juillet
)ourroit être confidéré comme un arrêté de com pte,
e fieur Coufferand n’en étoit pas moins fans aétions,
lors de. l’exploit introduéttf, puifqu’au iy juillet
1 7 8 1 , il ne fe difoic créancier du fieur Bagés, que
Î
�C 9 )
<îe la ibmme de 694 liv. & que depuis cet écrit,
il a touché des deniers du iieur Maifon la fomme
de 3629 liv.
PreÎTé par cette objection tranchante, le fieur
CouiTerand qui , au 15 juillet 1 7 8 1 , avoit reconnu
devoir iupporter feul 3000 liv. de plus que le fieur
Bagés, fuivan tl’a&e de cautionnement, qui à cette,
époque en a fait la déduétion , a imaginé un
fyftêine de contribution abfurde & contraire à laconvention écrite entre les parties. Le fieur Couf*
ferand prétend qu'il a auiîi un privilège en vertu
de fa quittance de finance, pour la fomme de 3000 liv.
qu’il a confignée, & que par l’effet de ce privilège,
les deniers rentrés comme des biens de Maifon ,
doivent être imputés au marc la livre fur les débets
envers l’admimilration, & fur le montant de fon
cautionnement particulier. Cette prétention a fait
la feule difficulté férieufe, dont on s’eft occupé
par les dernières écritures des fieurs Çouiferand &
Bagés. L ’on écriroit des volumes pour en faire
fentir fous tous les points de vue le ridicule Sc
le peu de fondement, & la plus légère, la plus
fimple réflexion, la réfute viôlorieufement.
i° . La convention portée par l ’aéle de caution
nement du fieur Bagés, réfiile au fyftême de con
tribution propofé. C ’eft avec le fieur Çouiferand
& les receveurs généraux , que le fieur Bagés a
icontra&é, & c’eft à l’égard de tous qu’il a reftreinc
fon cautionnement à .7201 liv.-ce qui fait qu’il
�( IO )
n ÿ a ni pour l’adminiftration , ni pour le fieur
Goufferand aucun privilège.qui puiiTe porter atteinte
à la reftri&ion, & étendre Tes engagement. Si le
fietir* Couifërand eût eui -un privilège , il l’auroit
p’erdu d’après le's termes du cautionnement, qui
fdrmeht de fa part à l ’égard du iieur Bagés, une
renonciation exptefTe. ■
’
■
’
Cette prétention du fieur CouiTerand eft un
retour inutile; elle feroit fondée, qu’il feroit non
recevablé à l’élever, après avoir lui-même reconnu
qu'il n’avoit aucun privilège. Cette reconnoiffance
eft formelle , d’après i’état écrit de fa main , fur
lequel a été fait le prétendu arrêté de 1781 ; elle
eft d’ailleurs écrite dans l’obligation de la fomme
de 7818 liv. qu’il s’eft fait confentir par le fieur
M aifon, le 11 juillet 1 7 7 8 , devant Salveton,
notaire à Brioude. Cette obligation eft faite d’abord
de la fomme de 3000 liv. montant de fa quittance
de finance, ènfuite de moitié du cautionnement
fcommun & des autres dus qui lui étoient perfonnels.
'
' Mais j obje<5le - t - o n pour le fieur Couifërand,
par un mémoire dont on a eu communication,
-le fiêur Bagés ayant promis de payer 694 liv. à
la charge d un compte exaêt des débets de Maifon
Envers la loterie, & des fommes réunies en déduc
t io n , ce compte étant rendu, il faut payer les
'¿>$>4 liv. Cette obje&ion eft une fubcilité auifi peu
■iLeurciife que peu honnête,
�C ii
)
Efl-ce donc que la réferve de tous droits & ex
ceptions & de revifer le com pte, ne font pas des
termes aiTez forts pour marquer que le fieur Bagés
n’entendoit pas contracter un nouvel engagement^
donner de l’étendue au premier 1 & peut-on même
regarder cet écrit comme un autre engagement |
ne doit-il pas fe référer au prem iery à l ’adte.de
cautionnement 1
^
\
E t quelle eût été la caufe d*un nouvel enga
gem ent, de la part du fieur Bagés, enversle fleur
Couiferand? Le fieur Couiferand, devenu l’homme
de l’admimilration, & chargé de tous les débets
de M aifon , n’a^iifoit que pour lui-m êm e ; mais
le fieur Bagés n avoit aucun m otif pour s’obliger
de nouveau ; il n’étoit entré pour rien dans les
arrangemens particuliers de l’adminiftration & du
fieur Couiferand ; il n’avoit aucune part au profit
de la recette que fait le fieur Couiferand. A u
furplus, le fieur Bagés a pris des lettres de refcifion
contre cet écrit, fruit de la furprife & de l’abus
de confiance, de la part d’un tiers.
Il faut donc, au moyen des lettres de refcifion,
& dans les termes même de l ’écrit de 1781, fe re
porter à l’a<5le de cautionnement du 2 juillet 1778.
E t, quels font les engagemens du fieur Bagés dans
cet acSte \ il ne s’eit obligé perfonnellement qu’à
faire payer à l'adminiitratioii la moitié de la-fournie
^de 7201 liv. Le; cautionnement,ainfiexpliqué, n*a pas
-Pu recevoir d’extention : radminiilration étoit alors
B 2
�c » )
créancière de toutes les fommes qu’eile a depuis de
mandées. La recette du fieur Maiion avoitceifé à cette
époque, & auflî s'eft-on réfervé pour le fieur Blanquet à l’égard de M aifoil, fes autres débets. O r ,
en acceptant le cautionnement avec la reftriétion
qui y eft faite, l ’adminiftration a renoncé à fon privi
lège , ii elle eût pu en aVoir un pour la partie de la
dette non cautionnée. Le fieur Couiferand ayant
iouffert qu’il fût dit que la fomme de 3000 liv. par
lui confignée en 177 6 , demeureroit payée fur la
fomme de 10201 liv. pour laquelle le cautionnement
étoit fa it, attendu que cette fomme de 3000 liv.
le concerne feul, il auroit auflî renoncé à ion privi
lège , s’il en eût eu un.
La queftion de favoir fi la contrainte du 14 juin
3780 fait un double emploi avec celle du 27 mai
.
de fon cautionnement ; l’on doit néanmoins , pour
• la défaveur de la prétention du fieur Couiferand ,
démontrer le double emploi & l’abus que le fieur
Couiferand en fait.
La contrainte du 27 mai 1778 , comprend les
tirages des petites loteries, de mars avril & juin, &
la recette en eft portée à 975 liv. 10 fous, déduction
faite des billets non rendus. La contrainte du 14 juin
3780^ eft aufli pour les tirages de mars, avril, mai &
juin; elle comprend même le reliquat de février, & la
recette eft portée à 973 liv. 1 f. 8 d. le double em
ploi eft évident parl’inipe&ion des deux contraintes,
�.( ! 3 )
& il eit plus clairement démontré par la faiiîe-arrêt *
faite le 20 juillet 1778 , après la ceiTation de la recette
de Maifon , pour raifon de tous fes débets , dans
lefquels n’eft pas comprife la fomme de 973 livres >
;réclamée poftérieurement.
^ Le bordereau envoyé par le fieur Lecouteux n’en
••fait non plus pas mention ; & ce bordereau efl
■cependant pollérieur à toutes les contraintes ;
il fixe les débets s toute déduction faite des envois
8c rem ifes, à 120^8 livres. Le fieur Couflerand
n’a fait raifon que de cette fomme à l’adminiflration par l’envoi de 9058 liv. & la fomme de 300 1.
confignée en 1 7 7 6. On le défie de prouver,
qu’indépendamment de 90^8 livres il ait payé 973
livres : la lettre du fieur Lecouteux n’eft pas connue,
8c cette lettre ne peut-d’ailleurs rien changer au
bordereau , qu’il a donné après que tous les débets
ont été rentrés.
Ce bordereau efl le compte du fieur Maifon f
contre lequel on ne peut pas revenir : il n’appartient
ni au fieur Couflerand , ni au fieur L eco u teu x,
d’augmenter fa dette.
A u refte , en ce qui touchelefieur Bagés, quand
la dette du fieur Maifon feroit augmentée de cette
fomme de 973 liv. le fieur Couüèrand n’en feroit
pas plus avancé, puifque le fieur Bagés n’a cau
tionné que pour moitié de 7201 liv. que d’ailleurs,
973 1. ajoutées à 90^8 liv. ne donnent que 10 0 31
liv re s, & le fieur Couflerand a touché 12677. liv#
�C 14 )
C om ptant, fans doute , peu fur tous les moyens
employés à l’appui de fa prétention, & que l ’on
vient de réfuter, le fleur Coufferand fe retranche à
dire , par le mémoire communiqué, que le fieur
Bagés , ayant refufé de contribuer aux frais du procès
jugé au confeil , il ne doit pas lui faire part de ce
qu’il a touché , en vertu de l’arrêt du confeil ; o u ,
qu’en lui en faifant part, le fieur Bagés doit lui faire
raifon des faux-frais.
Mais , on demande au fieur CouïTerand , fi le
procès étant fuivi au nom du fieur Blanquet, & pour
• ce qui étoit dû à l’adminiftration, Sc la créance de
l’adminiilration n’étant que de la fomme de 9058
livres , ce n’eft pas fur cette fomme que celles tou
chées en vertu de l’arrêt, ont dû être imputées ; fi,
d’après les termes du cautionnement, le fieur C o u f
ferand a pu toucher pour lui quelques fommes avant
l ’extinélion du cautionnement, & avant que l ’adminiflration fût remplie.
En ce qui touche les faux-frais, & enfe retranchant
. fur cette prétention, c’eft de la part du fieur C o u f
ferand , convenir qu’il a formé une mauvaife de
mande , en concluant par fon exploit introduélif ,
& par toutes les.requêtes du procès, au paiement de
la f o m m e de 69 4 Üv. promife par l’écrit du 15 juillet
1 7 8 1 , Sc de celle de 100 liv. pour frais d’un voyage
• de Paris ; demande qui a donné lieu aux frais immenfes
du procès, Sc que le fieur CouïTerand fupporteroic
toujours, quand on admettroit fanouvelleprétençion.
�( '5 )
- M ais , le fieur Bag es ne s cil pas obligé à rembourfer les faux-frais du fieur CouiTerand : leur cau
tionnement de 7201 liv. éteint depuis le 24 juillet.
1778 , n’eft pas un acSte de fociété' entr’e u x , Sc la
fociété eût d’ailleurs celle avec le cautionnement.
La fignature furprife du fieur Bagés s au bas d’un
projet de requête donnée à l’intendance, avantXédk*
de 178 1 , ne vaut pas un aéte de fociété , ni une
obligation de contribuer aux frais du procès pen
dant au confeil : il n’y a pas eu de faux-frais à Clermont. Quelle eft la valeur de cette fignature au bas
d’un projet de requête/1eft-ceunereccnnoiifanceque
le cautionnement fubfiftoit encore ? eil-ce une nou
velle convention? une convention par laquelle le fieur
Bagés fe rend encore caution de l’entière dette en
vers Tadminiftration \ fans doute on n’ofera pas le
prétendre ! ce n’eft pas d’une fimple fignature mife
fur un chiffon , fur un papier qui ne contient ni con
vention ni flipulation qu’on peut induire un enga
gement : les engagemens , les promeifes de payer ,
ou de contribuer dans des irais, doivent être exprès
& formellement écrits, lorfque ces engagemens ne
font pas de droit. Le fieur Bagés ne devoit,ni civile
ment, ni naturellement, faire les frais de la pourfuite
de l’initance, d’entre Tadminiftration & les créan
ciers du fieur M aifon, & le Heur CouiTerand ne s’occupoit de la pourfuite de cette affaire, que parce que
s’étant chargéperfonnellement de tous les débets du
fieur Maifon ^ étoit intéreifé à accélérer le rembourfement des fommes failles.
,
,
�( I * )
Tous les aétes produits de la part du iîeur Coufc
ferand, prouvent qu’il étoit i’homme de l ’adminiitration , & n’agiifoit que pour lu i , en raifon des
engagemens qu il avoit pris avec les receveurs gé?
néraux.
Dans l’a&e de cautionnement, il s’oblige , avec
le fieur B agés, de faire payer les 72.01 liv. au 24
juillet 1778 : c’étoit le terme convenu avec le fieur
Bouchon, pour le paiement des 754 9 liv. au pré
judice de cette ilipulation , l ’on imagine , pour
étendre les engagemens du fieur Bagés, & pour le
privilège contre les autres faifiiTans, de faire, à larequête du fieur Blanquet, une faifie-arrêt entre les
mains du fieur Bouchon , pour tous les débets de
Maifon. Cette faifie ne pouvoit pas nuire aux cau
tions , & empêcher leur libération, par le recouvre
ment de la dette du fieur Bouchon ; auifi, le fieur
Çouiferand , faifi de l’original de faifie , toucha-t-il,
au jour capté, c’eÎt-à-dire , au 24 juillet, les 75*45?
liv. du fieur Bouchon. Le fieur Çouiferand a touché
& donné quittance des fommes qui appartenoieïit à
l ’adminiflration.
A u refie, tous les engagemens que le fieur Bagés
peut avoir pris , foit par fa fignature au bas du projec
de requête dont on a parlé, Toit par l ’arrêt de 1 7 8 1 ,
'doivent fe rapporter aux engagemens qu’il a con
tractés par fon cautionnement ; ils n’en font que la
fuite , & il n’eft alors obligé que comme caution
aux frais & faux-frais des pourfuites d e l’inilance , en
préférence de faifie.
'
Or*
�C *7 )
Or, les fommes touchées par un cofidéjuiTeur, doi*
venc être imputées fur toutes les avances faites pour
riafon du cautionnement, & fervir à indemnifer les
cautions. L ’objet du cautionnement devant être rempli
avant que le iîeur Couiferand puiife rien prendre
pour lui perfonnellement ; dès qu’il lui refte des
deniers fur fa créance perfonnelle, il n’a rien à exiger
du fleur Bagés , pour raifon du cautionnement.
Il y a'plus, le fleur Couiferand & le fieur Bagés, '
n’étant pas parties au procès , il n’y a point de Irais
ni taux-frais à leur charge, le fieur Couiferand ne pour-'
roit répéterqüe ies voyages àParis ; mais ilsn’avoient;
pas pour principal objet la pourfuite du procès pen
dant au confeil ; les receveurs généraux n’avoient
befoin, ni de fon c ré d it,'n i de fes follicitations.
Dans tous les temps le fieur Couiferand a fait des
voyages à Paris pour les affaires de fon commerce. '
En 17 7 5 , il y é to it, & y fit un très-long féjour ;
il ne fuivoit pas alors le procès de l’adminiflration.
En 1782,, il y prit la ferme du prieuré d’Azerat :
il a acheté les prébendes de MM. de Mailhant & de
Dienne, comtes de Brioude ; il a négocié à Orléans,
& il efl allé faire d’autres affaires à Rouen : il ne feroit pas honnête qu’il fît contribuer le fieur Bagés
aux frais d’un voyage , fait pour fes affaires perfonnelles.
Il
faut donc rejeter la prétention ( dont il n’y a
d ailleurs point de demande ) en rembourfement des
faux-Irais, & s’en tenir à ces points effentiels. Le
C
�C *.« )
cautionnement commun n'a été que de 72 6 1 tiv.
cette fomme eft rentrée le 24 juillet 1778 , dans le
même mois du cautionnement ; le cautionnement 2.
donc ceiTé à cette époque : étendons le à la dette
entière de Maiion envers radminiflratioin , qui fe
porte à 90f8 iiv. le fieux CoulTerand allouant 12^ 77
liv. eft plus que rempli. Paiïbns encore que le iieur
CoulTerand a payé 973 liv. pour la troiiîème con
trainte j il eft toujours plus que rempli. Enfin 9 ad
mettons que l’écrit du i f juillet 1 7 8 1 , eft un arrêté
à 7 9 4 liv. le fieur CoulTerand ayant touché depuis
3 ¿29 liv. eft complètement défintérefte.
Signe,. B A G É S.
Monfunr T) E S P É R O U S E , Rapporteur,
Y
a zeille
3 Procureur,
�T a b l e a u pour l'opération du compte y d'après leq u el on 'doit
J uS cr
y
prétention d u S . Coufferand5 co n trelefieu r B a g es.
o n t r a i n t e pour débets envers la loterie de France & loteries y
réunies.
Pour la loterie de F r a n c e - * $22$ 1. 10 f.
Pour les loteries de piété Si des
enfans-trouvés , . . • • •
91S 1* 10
n ■
L-ïuUut-
M o n ta n t de la c o n tra in te
. . . . . . .
3
.
i o i O i 1. o :f,
“ 'A
^
Cautionnement de la part des fieurs Couflèrand &
B a g é s , reftreint à 7201 L
'****-: Contrainte pour les tirages de la loterie de France,,
poftcrieurs à ceux compris dans la précédente con
trainte , c i . . - - + * * * » * * ,
.
2^
‘
2566 I.
Suivant les contraintes, les débets fe montent à 12567 1. o f.
Et iuivant un bordereau du fieur Lecouteux , re----------------- -- —
ceveur général, envoyé pour réparer les erreurs
des contraintes, ils ne fe portent qu’à i.20y8 liv- le
fieur Couflèrand adopte lui-même ce bordereau , &
n’a fait compte à Padminiftration que de i a o j S liv..
fur cette fom m e, il faut diftraire 3000 1. à Ja charge
du. fieur Couflèrand , & dont l’adminiilration étoit
nantie : la dette envers l’àdminiftration reftoit donc
pour la fomme de «JO^S liv. ci . . . . .
1, o f,
L e 24 ju ille t, vingt - deux jours après le cau
tionnement, le fieur Couflèrand a touché du fieur
Bouchon ............................ .....
1. 8 f. ^
L a rentrée de cette fomme a fait
t
ceflèr le cautionnement,.qui n’étoit
I
que de 7201 1.
1
A c e tte é po qu e,le fieur CouiTe|
rand devoit faire c o m p te , pour
V
prix de la vendange de Maiion, de
26 I. 6 f. ‘
Pour regiftres , plaques ou. au
tres objets . . . . . . .
ap 1.
Pour v in g t-c in q billets gac
g n a n s .......................................
370 I. 10 f.
Ces iommes font en total celle de
. . .
.
7975" I. 4
f.
& rcduifent la dette envers l’adminiftration à
~
10H2 I. 16 C
�V
D e l 'autre par, ci. . . . .
Si l’on étend le cautionnement à 9 058 1. il n’eût
fubfifté, au 24 juillet 1 7 7 8 ,que pour 1082l . 1 6 f.
Contrainte de la fomme de 973 1. laquelle fait
double emploi avec la contrainte du 27 mai 1 778,
ainfi qu’on l’a démontré dans le précis , partant
c i,
mémoire.
En juillet 1 7 8 0 , la dame Maifon s’eft obligée ,
envers le fieur C o u fferand de payer la fomme de
9 7 3 l . montant de la dernière contrainte, & c e '
paiement a , en effet, été fait dans la fuite : donc
il faut encore diftraire cette fomme fur la dette en
vers l’adminiftration, ci . . . .
. . .
Il ne reftoit donc dû à l’adminiftration , en
juillet 1781 q u e , ....................................................
C ’eft dans cet état des chofes , qu’ a été fait
l’écrit qualifié d’ arrêté de compte , à 6 9 4 l . fui-’
vant lequel il eût fallu que le cautionnement eût
encore fubfiftépour 1388 liv.
Depuis cet é c r it, & en 1 7 8 2 , le fieur C o u fferand a touché, des deniers de Maifon :
Du fieur Alluys
. . . 3206 I. 9 f .}
Du fieur Marion, notaire,
2 f 6 1. 18 f. >
D ’A n d r é , huiff i er , . .
i 6 f I. 10 f . 3
Ces fommes fe portent à
. .
. . . .
1.
16 t.
573 1. o. f.
109 1. 16 f.
3(529 1.
E tçxçèdentla dette envers l’adminiftration, de
PaiTons la contrainte de 973 1. qui fait double
e m p lo i, c i ....................... ..... ............................
Il refte toujours pour le fieur C o u fferand .
1082
3P9
1*
3 f.
7 k
973 1.
.
' 2 5 4 6 I. 7 f.
Par ces calculs , il eft démontré qu’au 27 feptembre 1 7 83 , date de
l’exploit introduct i f du procès , le fieur Couff erand éta it défintéreff é ,
par rapport au fieur Bagés.
A R I O M , de l’imprimerie de M a r t i n D E G O U T T E . 1786.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bagès, Jean-Baptiste. 1786]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bagès
Despérouse
Vazeille
Subject
The topic of the resource
loterie
cautions
chanoines
prête-nom
merciers
créances
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An account of the resource
Précis pour sieur Jean-Baptiste Bagés, chanoine, de Brioude, défendeur. Contre sieur Jean Cousserand, marchand, demandeur.
tableau de comptes.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1786
1776 -1786
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
BCU_Factums_B0120
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_B0121
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cautions
chanoines
Créances
loterie
merciers
prête-nom
-
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7e5566ee5656331a80bb03b7483e7c69
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Text
MÉ M O I R E
P O U R
L e citoyen M E U N I E R , médecin , accusé.
L E public paroît
les détails
d’une accusation qui frappe sur un homme connu par
les services qu’il rend à l’humanité souffrante.
impatient de connoître
O n veut bien lui accorder des talens dans la profes
sion qu’il exerce; il reçoit tous les jours de nouveaux
témoignages de la reconnoissance de ceux qu’il a soignés;
on rend justice à sa droiture et à sa probité ; on se loue
de la douceur de ses m œ urs, de ses attentions obligeantes,
de sa sensibilité m êm e, qui n’est pas toujours la vertu
des médecins ; on s’étonne que ce citoyen, adonné sans
relâche à l’étude et à la pratique de la m édecine, puisse
avoir quelque chose à démêler avec un homme proscrit
dans l ’o p in io n , flétri par des jugemens publics, en u n
m o t, un v il intrigant.
D é p a rtcra cn t
d e l 'a l l i e r
spécial.
.
�( 2 3
l , e citoyen M eunier est bien plus étonné encore de
subir tout l’appareil d’une instruction crim inelle, dans
une affaire qu’ il ne comprend pas, dont il n’a que des
notions imparfaites , et qu’il lui est bien difficile d’ex
pliquer.
T o u t est pour lui d’une obscurité im pénétrable : com
promis par un homme qu’il connoît à peine, avec leq u el
il n’a aucunes liaisons, il examine par quelle fatalité il a
été nommé par L a fo n t-B ra m a n t; comment il peut avoir
quelque chose de commun avec ce particulier ; comment
il peut être accusé de fa u x , lui qui n’a fa it, ni su faire
en sa vie aucune affaire d’intérêts, et ne s’est occupé que
de son état.
Cependant l’accusation est sérieuse: elle estaccompagnée
de circonstances si extraordinaires,.si invraisem blables,
qu’ il devient nécessaire de lui donner une grande publi
cité; et le cit. M eunier sortira triomphant de ce labyrinthe
d’iniquités et d’horreurs*
L e cit. M eunier a eu occasion de connoître le citoyen
S u b e rt, ferm ier de la terre de Bonnefer, située dans le
département de la N ièvre.
L ’accusé jouissoit alors de cette propriété ; Subert faisoit un commerce assez considérable, et avoit la répu
tation de courir à la fortune.
L e citoyen M e u n ie r, naturellement obligeant, sefaisoit
iin plaisir d’aider Subert de ses m oyens, et lui avoit fait
différons prêts, sans nulle pi’écaulion , n é g l i g e a n t même
de prendre les assurances les plus o r d in a ir e s .
T e lle est la manie du citoyen M eunier, de croire à la
probité de tous ceux avec lesquels il a des relations; et
�m
il n’en est pas encore c o rrig é , quoiqu’il ait été souvent
la cîupc de cette extrêm e confiance.'
Il fallut cependant venir à compte avec Subert; et ce
dei’nier souscrivit au profit du citoyen M eunier, le 16
flo réa l an 8 ( la date est essentielle), un billet de 4,800 ir.
dont rfroitie payable en ventôse lors proch ain , et l’autre
m oitié quatre ans après, avec intérêts à cinq pour cent.
O n fit apercevoir à jYXeuuicr, qu’il 11’auroit pas dû
se contenter, pour une somme aussi considérable, d’un
simple billet souscrit sur papier m ort : un commerçant
étoit sujet à beaucoup d’événemens; il étoit utile d’avoir
un titre authentique, avec un bordereau d’inscriptions;
et M eunier en p révin t Subert.
Il fut arrêté qu’011 se rëndroit chez un n otaire, pour
y souscrire une obligation : m ais, dans le môme instant,
M eunier avoit le billet à la main;- Subert le dem ande,
et le met en p ièces, en disant que le billet devenoit
in u tile, puisqu’il alloit consentir une obligation.
L e citoyen M eu n ier, fort mécontent de cette conduite,
en fit des reproches à Subert. C e lu i- c i proposa de se
rendre sur le champ chez le notaii’e: on sort. E n ch em in,
on se rappelle qu’il est temps de déjeuner ; Subert p ro
pose d’entrer au café de la R é g e n ce , pour y prendre
du chocolat : m ais, au moment où il est servi, Subert
feint un besoin, so rt, disparoit, et se fait encoie atteii-1
dre pour aller chez le notaire.
M eunier est assez heureux pour avoir conservé les
m orceaux du billet lacéré ; il les a réunis comme il a
pu avec de la cire \ il le représentera dans cet état au
tribunal.
A 2
�U )
L e nommé Lafont-Bi'am ant, qui joue un grand rôle
dans toute cette affaire, étoit de la connoissanee de Subert:
ce L a f o n t - B r a m a n t est natif de D u n , département de la
C reuse; M eunier est né à Chesnier, même département.
S u b e rt, pendant son séjour à P a ris , visitoit fréquem
m en t M eunier. Il dit ù Lafont-Bram ant, qu’il connoît
un médecin de son pays. L afon t-B ram an t tém oigne à
Subert le désir de faire connoissanee avec un compa
triote dont il a entendu parler. Subert l ’introduit chez
M eunier. V o ilà l ’origine des légers rapports que M eunier
a eus, potir son m a lh e u r , avec ce v il intrigant.
T o u t se passe d’abord en complimens. Bientôt LafontBramant fait l’honneur à M eunier de lui emprunter de
l ’argent ; et celui-ci a la facilité de céder à. ses instances.
Q uelq ue temps après , L afon t-B ram an t se présente
chez M eunier. Il étoit accompagné d’un p articu lier, à
qui il donne le nom de C hâtelain, qu’il dit être agent
de change : et tous les deux racontent à M e u n ie r, qu’ils
ont fait une affaire avec Subert; que celui-ci a souscrit
un billet au p o rte u r, d’une somme assez considérable.
Ils demandent à M eunier si le débiteur est so lvab le, s’il
connoît la signature de Subert. O n lui m ontre la signa
ture seulement , sans lui faire vo ir le corps du billet.
Sur la réporfse affirmative de M e u n ie r, les deux per
sonnages se retirent; et depuis il n’a eu aucune autre
relation avec ces particuliers.
11 est difficile d’indiquer la date précise de cette fatale
visite ; tout ce que sait M eu n ier, qui ne Croyoit pas
être intéressé ù prendre note d’une circonstance indif
férente en elle-m êm e, c’est que ces faits se sont passés
�C O
avant que M eunier eût fait son compte avec Subert.
Plus d’un an se passe avant que M eunier ait entendu
parler de S u b e rt, de L afont et de Châtelain ; il étoit
dans la plus parfaite sécurité relativem ent à ces deux
derniers , avec lesquels il n’auroit pas imaginé avoir
rien à démêler.
T o u t a co u p , en therm idor an 9 , Lafont-Bram ant se
présente à M o u lin s, ayant en ses mains un effet au por
te u r, souscrit par S u b ert, le 16 p ra iria l an 8 , pour
une somme de 14,800 francs.
X ’huissier à qui L afon t veut confier ce billet pour le
faire p ro tester, et en poursuivre l’exécu tio n , aperçoit
plusieurs altérations ; il conçoit des soupçons, engage
L afon t à com m uniquer cet effet au citoyen Cordez ,
b a n q u ier, pour le lui faire examiner. Cordez remarque
comme lu i ces altérations, et conseille à Lafont de ne
pas produire ce b ille t, qui peut lui attirer de fâcheuses
affaires.
L a fo n t, familiarisé avec les accusations, poursuit, et
donne des ordres à l’huissier d’aller en avant.
Subert poursuivi rend plainte le 2.3 therm idor an 9 ,
devant le commissaire du gouvernem ent près le tribunal
crim inel. Il expose q u e, dans le courant de l’an 8 , il
souscrivit un billet de la somme de 4?^°° francs au
profit du citoyen M eu n ier, médecin à P a ris; que ce
billet étoit payable moitié en ventôse an 9 , et le sur
plus quatre ans après.
Il ajoute que depuis il a acquitté la totalité de cette
somme au citoyen M eun ier; que celui-ci lu i en a donné
une décharge le 12 prairial an 9 , attendu qu’à cette
�( 6 )
époque M eunier déclara n’avoir point l’ob ligation ,
mais qu’il prom it la lui rapporter sous deux mois.
Subert observe que ce billet ne lui a point été remis ;
mais q u ’a u j o u r d ’ h u i ( 2 3 thermidor ) il lui a été fait
présentation, par un huissier de cette ville , du même
billet de 4,800 francs ; qu’il a remarqué , i°. qu’au
lieu et place des mots M eun ier m édecin, au profit du
quel il avoit consenti l’effet , on a substitué ceux - c i ,
au p o rteu r, pour rendre l’elle t négociable; 20. qu’au
m ot qua tre, précédant ceux de m ille huit cents liv re s,
On a mis celui de q u a to rze -, 3 0. q u ’au m o t a n , précédé
d e q u a tre, on a substitué celui de ?nois\ 4 0. qu’après,
les mots valeur reçu e, au lieu de ceu x-ci, p a r solde ,
on a mis celui-ci, com ptant; 5 °. qu’en avant du chiffre
mis entre deux b arres, formant la somme de 4,800 ,
on y a ajouté le chiffre 1 , apparemment pour faire 14.
Subert expose que, d’après toutes ces rem arques, il
est convaincu que cet acte avoit été falsifié ; qu’il a
déclaré à l ’huissier , porteur , qu’il éloit décidé à le
laisser protester , et même à le faire saisir entre ses
mains lors du protêt.
Subert ajoute encore que V id il , huissier , l ’assura
qu’il étoit chargé de lui faire le protêt pour un effet
de 14,800 francs , et qu’il lui a aussi présenté un écrit
Irès-m inuté , sur un tr è s -p e tit p a p ier, au bas duquel
est la signature de lui S u b ert, qui aura été coupée au
bas de quelque écrit ou lettx’e par lui signé; p«1' lequel
é crit, visiblem ent fait expi’ès, et en caractères très-fins,
d’une main à lui inconnue, 011 semble lui faire approuver
l’effet de 4,800, pour 14,800 francs, et le faire obliger
�nu payement de cette dernière somme , qu’il ne doit
point en tout ou en partie. -? = . .
'
Sur cette plain te, dont Subert s’est départi, mais qui
a été prise pour dénonciation par le.m inistère public ,
mandat d’arrêt contre Lafont-Braniant, comme prévenu
d’êlrc auteur ou com plice du faux de l’effet que Bramant
a présenté à plusieurs personnes.
Lafont-Bram ant est arrêté et mis au secret. L e procès
verbal de visite de ses papiers constate qu’il a été tr o u v é ,
i° . un projet de citation écrit de 1,1 main de B ram an t,
tendant à faire assigner Subert pour être condam né-,
même par c o rp s, à lui payer la somme de 14,800 fr.
qu’il lui doi t p o u r vente et délivrance de m archandises,
qui lui a }été faite pour <son commerce,, le 16 y ra iria l
an 8, ainsi qu’il en sera justifié en cas de déni de. sa part.
20. U n m orceau de papier sur lequel est écirit l’adresse
suivante : M . M e u n ie r, rue Sain t-T h om as-du-L ouvre,
vis-à-vis le. v a u d e v ille , liôtel de G enève.
O n joint aussi aux pièces le billet dont il s’agit., dont
l’huissier V id il a fait la remise ; et il est d it , dans le
procès vex’b a l, que rhuissier étoit chargé d’en poursuivre
le recouvrem ent, suivant la procuration que L a fo n tlu i,
avoit donnée le 23 therm idor an 9 , à 'l ’effet d’en faire
le protêt.
>
L e billet et la procuration sont reconnus., par L a fo n t,
pour être les mêmes que ceux qu’il avôit remis à rhuis
sier, ain si que les altérations qui existent sur le billet; *
O11 procède ensuite à' l’interrogatoire de Lafont-Bra
mant. 11 est intéressant de conïioitre ce prem ier interro
gatoire. O n lu i demande, d’abord, ç’il est propriétaire
�es )
de l’effet de 14,800 fran cs, souscrit par Subert le jeune,
le 16 prairial an 8. Il répond affirmativement : il dit
qu’il en a fourni la valeur au citoyen Châtelain, qui en
a passé l’ordre au porteur le 10 vendém iaire an 9 , et
qu’il n’a accepté l ’ordre de cet effet qu’avec la garantie
de Châtelain.
O n lui demande de représenter ce billet de garantie ;
mais il l’a laissé chez lui.
A -t-il payé à Châtelain la somme de 14,800 francs
pou r laquelle le billet paroît avoir été consenti ? Il
r é p o n d que o u i , qu’il en a. fait le payem ent en ai’gent
ou effets sur différens particuliers.
Interrogé s’il connoît Châtelain qui lui a passé l’ordre
de ce b ille t, et où il demeure : il répond qu’il le con
noît peu ; mais qu’il s’est dit agent de ch an ge, et qu’il
demeure rue du faubourg Saint-Marceau.
O n lu i demande d’où proviennent les altérations qui
paroissent sur le b illet, notamment sur les mots porteur,
qua torze et comptant.
Il ne sait d’où proviennent ces altérations; il les .a
remarquées lorsque Châtelain lui fit la remise de l’effet,
et c’est ce qui le détermina à prendre la garantie qu’il
a en son pouvoir.
Interrogé par qui a été écrite la reconnoissance qui
est sur un petit m orceau de papier lib re , au bas de
laquelle est la signature Subert jeu n e : à cet égard, il
ignore par qui a été écrite cette r e c o n n o i s s a n c e ; elle lui
fut remise par Châtelain , avec le b ille t , e t , sur la foi
de cette reconnoissance, il se détermina a accepter l’effet.
O n ne voit p a s, dans cet interrogatoire, 1111 seul mot
qui
�( 9 )
qui puisse concerner le citoyen M eu n ier; jusqu’ici il
est absolument étranger à l ’accusation, et son nom ne
se trouve que sur une adresse glissée dans les papiers
de Lafont.
Mais une circonstance rem arquable, c’est que Subert,
lors de sa p la in te, a remis une reconnoissance que l’on
dit écrite et signée de M eu n ier, et sur papier tim bré, et
sous la date du 12 prairial an 9 , par laquelle il déclare
qu’il a reçu de Subert le montant d’une obligation q u ’il
avoit consentie à son profit, écrite de sa m ain , à P aris,
dans le courant du mois de floréal an 8 , d’une somme
de 4,800 fran cs, dont moitié étoit payable au mois de
ventôse, lors d ernier, et le sui’plus quatre ans après,
avec intérêts. Il est a jo u té , d it-o n , ces mots : « N e me
» tro u vant pas ladite obligation sur m o i, l ’ayant chez
» m o i, à Chesnier , laquelle est annullée par la p résente,
» je promets de la remettre au citoyen Su b ert, sous
» deux mois au plus ta r d , h com pter de ce jour ; dé33 clarant que c’est la seule obligation que le citoyen
» Subert m ’ait consentie pour la somme de 4,800 fr. »
Cette pièce est une des plus singulières du procès ;
elle est en des termes inusités. Il paroît extraordinaire
qu’on ait exigé de M eunier la déclaration que cette obli
gation étoit la seule qui lui eût été consentie par Subert.
A quoi bon cette déclaration , si en effet le citoyen
M eunier n’en avoit pas d’autre ?
M ais , au surplus , le citoyen M eunier désavoue avoir
donné cette quittance à Subert ; elle n’est écrite ni signée
de lui ; c’est une pièce fabriquée dans les ténèbres, d’une
maladresse qui dévoile le crime. E t certes il faudroit
B
�C
^
°
)
..............................................................................................................................................
■supposer le citoyen M eunier bien stupide, s’il étoit vrai
q u ’il eût donné cette quittance, d’avoir osé , en même
temps , faire circuler un billet de S u b ert, puisqu’on lui
fait dire que l’obligation de 4,800 francs est la seule qui
lu i ait été consentie, et qu’il reconnoît en avoir reçu le
payement.
U n autre fait bien im portant, c’est qu’il ne faut pas
perdre de vue que l’obligation de 4,800 francs, souscrite
par Su b ert, au profit de M e u n ie r, est du 16 floréal
an 8. L e billet présenté par L afont n’est que du 16 pi*air i a l s u i v a n t . Ce ne peut donc pas être le môme b ille t,
et la preuve que ce n?est pas en effet le m êm e, résulte
de ce que le citoyen M eunier est en état de représenter
le billet de 4,800 francs, qui fut souscrit par S u b e rt, ou
du moins les morceaux qui en ont été c o llé s, après que
Subert eut lacéré malhonnêtement ce même billet. Ces
observations recevront plus de développem ent dans la
suite.
O n raconte encore , qu’au m oment de l’aiTestation de
L a fo n t-B ra m a n t, un gendarme arracha de ses mains
un projet de lettre qu’ il feignoit de d éch irer, et qu’il
écrivoit de M o u lin s, le 23 therm idor an 9 , au citoyen
M e u n ie r.il annonce, par cette lettre, « Q u e Subert s’est
» rendu à M oulins hier au soir ; que ce matin le citoyen
» Corde/, est venu à son auberge, et lui a dit que ce
» billet étoil faux: , que c’étoit une coquineriequ 011 vou» loit faire à S ub ert, qui ne p a y e r o itq u e par la force
» d elà justice ». IL ajoute, par cette même lettre : « Nous
» avons examiné scrupuleusement le billet. M . Cordez
■
» m’a fait rem arquer qu’au mot quatorze il y avoit
�( " )
» quatre', qu’à ceux: porteur de billet, étoit le nom de
5) celui à qui il l’avoit consenti; qu’au mot m o is , il ÿ
» avoit an. M ais que Subert avoit la quittance bien cony> ditionnée de 4,800 francs ; qu’il prouvcroit même le
» faux du b illet; qu’au surplus , après ces m ots, le billet
» étoit écrit et signé de sa main ; qu’il vouloit s’inscrire
» en faux ; qu’il ne payeroit pas un so u , et qu’il man» geroit volontiers la m oitié de sa fortune pour faire
» punir le coquin qui a fait le faux.
» Qu|à l’égard de la déclaration donnée à CliiUelain}
» c’étoit bien la signature de Subert ; mais qu’elle avoit
» été enlevée de quelque écrit ou lettre; qu’au surplus
» une déclaration d’une somme aussi forte se seroit mise
» sur papier timbré.'»
» J ’ai été frappé !, continue L a fo n t, de toutes ces obser» v a lio n s, et je iié puis vous dissimuler que je recon» nois maintenant la contrefactfoh du billet. Je me
» trouve fort embarrassé pour diriger Une action : qui ne
» sait rien , ne doute de rien : m a is, dans tous les ca s,
» vous ne serez pas com prom is; on m’a prononcé votre
» n o m , et je les ai portés à cent lieues de vous ».
Ce p ro jet, écrit sur une dem i-feu ille de p a p ie r, et
qui fut saisi par le gendarm e, fait une des pièces du
procès. Les gendarmes entendus en déposition, n’appren
nent autre cliose, sinon que L a lo n t, lors de son arres
tation , leva une c o u r t e -pointe qui étoit dans le tiroir
d’une commode , en sortit une demi - feuille de papier
écrite qu’il vouloit soustraire, et qu’on lui arraclia.
L afon t-Bramiln t reconnoît ce papier pour etre le m em e
qui lui a été arraché.
B 2
�( *1 3
L a seule induction qui pourvoit résulter de ce projet
de lettre,, seroit que L afo n t-B ra m a n t étoit en corres
pondance avec M eunier. O n verra cependant bientôt
L afon t - B ram ant déclarer qu’il ne connoît pas même
l’écriture du citoyen M eunier.
V id il , huissier, entendu comme té m o in , a déclaré
que le 25 thermidor an 9 , le citoyen Lafont lui porta
un billet de 14,800 francs, souscrit par le citoyen Subert
le je u n e, pour en faire le protêt ; qu’à ce billet étoit
* •
»i
*i
•
jointe une reconnoissance sur un petit morceau de p ap ier,
égalem ent sigrvée Subert. L ’huissier fit envisager à L afont
que ce billet n’é toit pas sur un timbre proportionnel, qu’il
seroit dû une amende, qu’au surplus il a llo itle présenter
a Subert qui se trouvoit k M oulins. Il rencontra effecti
vem ent Subert chez le • citoyen- Cordez. Il lui demanda
s’il, vouloit acquitter le billet : mais celui-ci, après l’avoir
exam iné, déclara qu’il étoit falsifié. Subert convint effec
tivem ent avoir souscrit un billet au profit du citoyen
M eu n ier , d’une somme de 4,800 francs ; mais il dit
qu’il en avtoit la quittance dans sa poche. L ’huissier se
retira. Sur les cinq heures du soir, Lafont revint chez
l u i , et lui donna une procuration pour, faire le recou
vrem ent dé la somme: énoncée au b illet, lui laissa même
le bille(t et la petite reconnoissance; mais peu après le
citoyen l'a llie r . entra dans le cabinet de l’huissier , p r|'a
L afon t de sortir, et l’emmena. Sur les sept heures du soir,
l ’huissier fut invité de se rendre à l ’auberge de la dame
Bourgeois , et y déposa le b ille t, la reconnoissance et
la procuration à lui donnée par Lafont.
¿ a n s une affaire aussi extraordinaire, les plus petites
�C *3 )
circonstances ne laissent pas de frapper. Il paroît surtout
étonnant que S u b e r t, qui habite le département de la
N iè v r e , tjui certes ne devoit pas se douter des pour
suites qu’on vouloit diriger contre lu i, pour un billet
qu’il dit ne pas avoir fa it, se trouve à point nommé ci
M oulins , au moment de l’arrivée de L a fo n t, et qu’il
ait surtout dans sa poche la prétendue quittance qu’il
dit lui avoir été donnée pai* M^eunier , le 12 prairial
an 9. Il n’est pas ordinaire de porter en v o y a g e , et
d’avoir dans sa poche , à point n o m m é, la quittance
d’un b ille t, surtout lorsque cette quittance remonte déjà
à une époque assez reculée ; cette précaution manque
au moins de vraisemblance.
Jacques Cordez , b an qu ier, est aussi entendu comme
tém oin. Il dépose que le 21 du mois de therm idor, i\
cinq heures du so ir, I,afont se présenta chez lui p o u f
lui demander des renseignemens - sur la solvabilité et
situation de Subert. Sur l’assurance que donna le témoin
de la solvabilité et de la m oralité de S u b e r t, L afont
lui présenta une reconnoissance payable au p o rte u r, et
souscrite par Subert , de la somme de 14,800 fran cs,
échue. L afont se (lit propriétaire de cette som m e, et
annonce être venu exprès pour en faire le recouvre
ment. Il dit même au citoyen Cordez, qu’il alloit remettre
cette reconnoissance à un huissier pour faire les pour
suites. Ce dernier l’invite à présenter, avant to u t, celte
reconnoissance au d éb iteur, et de se rendre en consé
quence à la Ferté. Lafont ne voulut y consentir. Il fu t
cependant convenu que lu i, C ord ez, écriroit à Subert
pour l’engager à venir à M oulins , pour s’expliquer
�( i4 )
iivec Lafont. L e lendemain Subert eut une conférence
avec C o rd ez, et Subert soutint n’avoir jamais souscrit
une pareille rcconnoissance. Il fut arrêté que lu i, Cordez ,
verroit le lendemain L a fon t, à l’effet de vérifier le billet.
Cordez se rendit effectivement cliez la fem m e-Bourgeois,
où étoit logé L afo n t; e t, en présence du cit. L a v a le tte ,
il se fit représenter le b ille t, témoigna à L afon t des
motifs de suspicion qui s’élevoient sur la validité de cette
rcconnoissance. L afont répondit qu’en ayant donné la
v a le u r, il vouloit en être payé. Cordez retourne auprès
de Subert, qu i lu i exh ib e xme quittance souscrite dans le
temps par le citoyen M eu n ier, au profit duquel il avoit
originairement consenti la rcconnoissance de 4,800 liv.
Cordez , à la vue de cette quittance , soupçonna que
l ’effet présenté par L afont avoit été falsifié et surchargé.
P o u r s’en assurer, il revient auprès de L a fo n t, et l ’invite
de nouveau à lui fuire vo ir l ’effet dont il étoit porteur.
L afont le lui exhibe : Cordez lui fait rem arquer les mots
qui avoien t été surchargés ou changés , et lui repré
sente que , tenant à. une famille honnête , il courroit
risque de se faire une affaire qui ne lui feroit pas hon
neur. L afon t insiste , observe qu’il étoit obligé de faire
la prem ière pou rsu ite, et qu’à défaut de payem ent, il
cxerceroit une garantie contre celui de qui il tenoit l’effet.
Les autres témoins sont absolument insignifians. Mais
bientôt la scène va changer. Jusqu’ici L a l’o ut-Bramant
n’a voit pas parlé de M eunier. Dans son prem ier inter
rogatoire, il tenoit cet effet d’un nommé Châtelain, qu’il
dit agent de change; il a même pris un billet de garantie
de ce Châtelain , qu’à la v ér ité il avoit laissé chez lui :
�C iS )
mais Subert avoit mis en avant M e u n ie r, parce qu’il
étoit bien aise de faire croire que le billet dont on
lui demandoit le payement , étoit le même que celui
qu’il avoit, souscrit au profit de M eunier. Lafont-B ramant imagine un nouveau système de défense. O n lui
fait subir un second interrogatoire.
O n lui demande ce qu’il est venu faire à M oulins.
Il répond qu’il est venu pour faire le recouvrem ent d’un
billet de la somme de 14,800 fr. souscrit par Subert
le jeune ; et il convient avoir présenté ce billet à diffé
rentes personnes.
Interrogé si l’huissier V id il et le citoyen C ordez ne
lu i avoient pas fait rem arquer que le billet dont il étoit
p o rte u r, étoit altéré et surchargé en différons endroits :
il convient du f a it , et avoue que lui-même avoit fait
pareille rem arque; et que si ces altérations ne l ’a voient pas
frappé aussi fortement que les observations de Cordez
et V id il, c’est parce qu’étoit jointe au billet une décla
ration signée S u b ert, qui approuvoit et ratifioit tous ces
viccs.
Il avoue également que ces altérations et surcharges
existoient lorsque l ’effet lui a été remis. Il ne connoît
pas l’auteur des altérations et surcharges; mais lorsque
le billet lui a été rem is, il étoit dans le même état que
lorsqu’il l’a présenté.
O n lui demande s’il est réellement propriétaire du
billet de 14,800 fr. et s’il en a fourni la valeur à Châ
telain qui en a passé l’ordre , le 10 vendémiaire an 9.
Il r é p o n d que comme ces billets sont payables au
p o rte u r, qu’ils sont présumés appartenir à ceux entre
�(
i6)
les mains de qui ils se trouvent 3 et que celui-ci étant
endossé par Châtelain , il a cru d’abord ne pouvoir se
dispenser de déclarer à l’officier de police qu’il lui apparteu oit, qu’il le tenoit de Châtelain, auquel il en avoit
remboursé le montant : m ais, ayant considéré qu’ un
p orteur de billet lie doit pas être astreint à cette décla
ration , et q u e , dans tous les cas, l’honnête liom me se
doit à la v é r ité , il va la dire tout entière.
E n conséquence, il déclare qu’en rectifiant la réponse
qu’il avoit faite le 23 du même mois de th erm idor, qui
n’a été dictée que par un sentiment d’humanité , il tient
le billet d’un nommé M eunier, se qualifiant de m édecin,
originaire de la commune de Cliesnier, ayant demeuré
long-tem ps à Sain t-P ierre-le-M ou tier, où il a dit avoir
des propriétés , actuellement demeurant h P a ris, logo
grande maison de G en ève, rue Saint-Thom as-du-Louv rc , vis-à-vis le vaudeville.
IL reconnoît qu’il n’a point remboursé le p rix de cet
effet ¿\ M eu n ier; il prétend seulement avo ir été chargé
par lui d’en poursuivre le remboursement. Il en a donné
sa reconnoissance par écrit; et comme cette reconnoissance est au pou voir et entre les mains de M eu n ier,
qu’elle fait mention de la remise d’un effet de
14,800 francs , Lafont-Bram ant invite le directeur du
juri à prendre des mesures convenables et promptes pour
faire apposer les scellés s u j ? les papiers de M eunier.
Lafont-Bram ant a jo u te, que par cette déclaration il
est d i t , que les deux effets sont la p r o p r i é t é de M eu
nier; que dans le cas de r e m b o u r s e m e n t du b illet, M eu
nier se restreint à. la gomme de 12,000 francs l’excédant
devant
,
�C i7 l
-devant appartenu' à L a fo n t, poux- faire face aux frais et
'faux fra is; niais, dans le cas de non-rem boursem ent,
L afont étoit obligé de remettre l ’effet à M eunier.
O n demande à Lafont s i, lorsque M eunier lui fit la
•remise-de ces effets, il ne lui fit pas des observations
isur les1 altérations et falsifications que lui-même avoit ’
remarquées dans ce billet. Lafont ne manque pas de -i'épondre affirmativement : mais alors M eunier lui répon
dit que* ¿ é to it des ,taches d’e a u , et la m auvaise qua
lité dé T 'a n c r e q u i a voient produit cet effet - qu’au .s u r
plus , Subert avoit donné une déclaration à Châtelain,
qui cdüVroit ¡¿tous les vices. Lafont-Bram ànt ne manqua J
pas de demander cette'déclaration', mais M eunier rép on -:'
•dit qu’elle étoit entre les mains de Châtelain, et qu’il se
la procureroit. E n e ffe t, M eunier rapporta à L afont
cette déclaration, telle qu’elle est jointe à la procédure.
I/afont prétend encore avoir fait des observations
•sur la forme de cette déclaration ; mais,-sur la certitude
,h lui donnée par M eunier , qu’elle étoit sincère, il lui
dit qu’il ne voyoit pas d’inconvéniens à ce que M eunier
ou Châtelain poursuivissent le remboursement de l ’effet. >
M eunier lüi répond qii’il avoit eu plusieurs affaires avec
.S ub ert, qui étoit un chicaneur, .qui le feroit plaider h
ne plus en fin ir, qu’il ne vouloit pas avoir affaire avec
lu i, qu’il n e vouloit pas même que son nom fût prononcé.
O n demande à Lafont , si l’ordre qui est au dos du
■billet dont il est p o rte u r, a été mis en sa présence. Il
'répond négativement,, et que la preuve de ce qu’il avance
se tire de ses précédentes réponses.
¡Interrogé si cet ordre n’a pas'été écrit de la main de
C
�(
1
8
} '
M eunier ; iï répond , q u 'il ne connoit n i Técriture d&
M e u n ie r , n i celle de Châtelain.
O n lui demande alors si C hâtelain, qui paroît avoir
passé l’ordre de ce billet , n’est pas un être supposéLafont répond , qu’il demanda à M eunier ce que c’étoit.
que Châtelain dont la signature étoit au dos ’du billet
s’il étoit solvable. M eunier lui dit que c’étôit un agent
de change , qui dem euroit au faubourg de Saint-M arceau
ou de Saint-A ntoine ; mais , qu’il fût solvable ou non
que Subert p ajero it bien l’effet aussitôt qu’il lui seroit pré
senté ; que ees effets provenoÎGnt de la succession de sa
défunte femme ; que c’étoit à peu; près tout l’avoir d’une
fille qu’iL üvoit euô de son mariage avec elle ; et termina;
par recommander à L afont de ne. pas le nommer»
D ’après, cela , l’officieux Lafont prétend avoir écrit
d e u x 'le ttre s, de P a ris, à S u b e r t, les 26 et 27 messidor
an g y par lesquelles il lui disoit qu’il étoit porteur
d’un effet de 14,800 francs, qu’il avoit pins pour com p
tant ; qu’il espéroit qu’il 11’aurôit pas à s’en rep en tir,
quoique ne le connoissant pas. Ces deux lettres ont
demeuré sans réponse.
Q uel tissu d’invraisemblances et de faussetés t quelle
contradiction entre le prem ier et le second interrogatoire !
D ans le prem ier , L afont soutient être propriétaire de
l’effet de 14,800 francs ; il en a fourni la v aleu r h
Châtelain, qui lui en a passé l’ordre; il n’a accepté l’ordre
qu’avcc la garantie de Châtelain ; cette garantie est en sa
possession , mais il ne peut la représenter, parce qu’il
l ’a laissée chez lui ; il a fait le payement du montant du
b ille t, en argent ou effets sur diüércns particuliers; il
�( 19 D
connoît p e u , à la v é rité , C h âtelain, mai à il s’est clit
agent de change , demeurant rue du faubourg SaintM arceau ; il a rem arqué les altérations du billet , et
c ’est ce qui lui a fait prendre la garantie de Châtelain ;
enfin la reconnoissance jointe au billet,- qui en rectifie les
*vices, lui a été aussi remise par Châtelain.
Dans le second inteiTogaloire, il ne connoît pas Châ
telain; il ne sait s’il demeure faubourg Saint-M arceau ou
Saint-Antoine ; ce n’est plus Châtelain qui lui a remis le
billet et la reconnoissance, c’est M eu n ier; il fait dire à
M eunier que les altérations sont produites par des taches
(Peau, ou la m auvaise qualité de Vencre, c’est-à-dire,
qu’il distribue un brevet de stupidité à M eunier.
A -t-o n jamais donné de semblables raisons? Les taches
d’eau seroient-elles tombées précisém ent sur l’endroit fal
sifié , ou la mauvaise qualité de l ’encre n’auroit-elle pra-iluit d’effet que sur ces mômes falsifications ? T ou s ces
dires sont d’une absurdité choquante.
- Ce n’est pas tout : -Lafont-Bram ant n’a pu -payer le
montant du billet ; il n’a pas même de garantie ; il n’est
-qu’un simple com m issionnaire, qu’un officieux h. gages ,
iqui se charge de poursuivre le recouvrem ent d’un billet
qu’il reconnoît falsifié, qui en.court tous les risques pour
un homme qüi ne veut pas se nom m er; qui ne craint
;pas même l’appareil d’une instruction crim inelle., pou r
un modique salaire.
Ce qu’il y a de plus extraordinaire encore, c’est que
Lafont accepte une commission d’un homme avec lequel
il n’a aucun rapport , dont il ne com ioît pas même
t l écriture. I l faut.surtout observer que L a fo n t, dans son
,C .2
�( 20 )
second interrogatoire, a dit que M eunier se contcnteroit
de la somme de 12,000 francs, si le billet étoit payé :
de sorte qu’à cc compte L afont devoit avoir 2,800 ïir.
pour lui ; et cependant, dans un précis im prim é qu’il
a fait répandre , oubliant ce qu’il avoit dit dans son
in terrogatoire, il prétend avoir f a it , avec M eunier r
un marché à raison de 12 francs p a r jour. Que doit-on
croire au milieu de toutes ces contradictions ? Les asser
tions mensongères d’un v il escroc , condamné comme
te l, qui s’est vu plusieurs fois sous la main de la justice,,
qui n’a obtenu sa lib e llé qu’à la faveur d’une amnistie
générale, ainsi que cela est p rou vé par des pièces authen
tiques jointes au procès , poui’roient-ellcs influer sur le
sort dTun homme honnête qui exerce une profession
libérale"? L a déclaration d’un faussaire reconnu peutelle compromet ire la liberté et l ’honneur d’un citoyen
estimable ?
M ais tout est inconcevable et nouveau dans cette cruelle
affaire. C e second interrogatoire de L afont donne lieu
à un mandat d’amener contre M eunier. O n fait perqui
sition de sa personne à G hesnicr, lieu de son dom icile
d’origine. Ce ne sont pas les gendarmes de l’arrondisse
m ent, à qui 011 confie cette mission : les gendarmes do
D u n se transportent dans la maison des père et m ère
de M eunier. Parm i ces gendarmes se tro u ve n t l ’un fe
ue veu et l’antre le filleul de Bramant. O n demande <\
entrer dans une chambre où M eunier n’a voit pas couché
depuis plus de quinze jours. C e premier procès verb al,
en date du 17 fructidor an 9 , ne contient rien de remar
quable: on a tr o u v é , dans la chambre ou M eunier avoit
�( 21 )
co u ch é, des papiers insignifians, un arrêté de compte
bà tonné , signé veuve Filhon.
1-e 2 vendém iaire an d ix , nouvelle perquisition des
mômes gendarmes. L e neveu et le filleul de Lafont s’introüuiscnt seuls dans cette cham bre, écartent, sous diffé
rons pretextes , le troisième gendarme qu’ils envoient
au grenier pour y faire perquisition , et empocher que
M eu n ier ne puisse s’évader.
' D ans cette cham bre,, le gendarme , neveu de L a fo n t,
prétend avoir trouvé sous le lit un portefeuille lié avec
line ficelle; portefeuille extrêm em ent com m u n , et qui
ne pou voit être ù. l’usage du citoyen M eunier.
L e pèi’e et la m ère, instruits de cette prétendue décou
verte , s’écrient qùe ce portefeuille n’est pas à leur fils
qu’il n’a point couelio dans cotte chambre depuis douze
jours. L a m ère, dans un m oment de trouble, d it, d’après
le récit des gendarm es, que le portefeuille lui appar
tien t: on la mène chez le juge de paix pour faire l’ouverture du portefeuille, et il s’y trouve précisément la
reconnoissance donnée par L a fo n t-B ram an t, du billet
de la somme de 14,800 francs ; une lettre adressée à
M eunier par Lafont , en date du 29 messidor an 9 ,
datée de Paris; une autre lettre adressée aussi par M eu n ier
h L a fo n t, du 11 therm idor suivant, et une adresse du
citoven G aud ouin , marchand bijoutier à Paris.
L e piège étoit trop grossier pour faire illusion. Com
ment se fa it- il qu’il ne se soit trouvé dans ce porte
feuille que ces seules pièces , qu’il n’y ait pas d’autres
papiers ? Comment se fait-il encore,, qu’il ne paroisse
que des lettres écrites par Lafont à M eunier; que L afon t
�( 22 •)
i?en ait produit aucune de Meunier«; qu'il 72e-connaisse
pas même son écriture , ainsi qu’il l’a déclaré dans son
interrosiatoire ?
N ’est-il pas évident que ce portefeuille ri’a été placé
sous le lit que par les gendarmes,, et que tout est l’œuvre
de Lafont-Bram ant?
L e citoyen M eunier est en état d’établir, par une foule
d etém o in s, i° . qu’il n’avoit pas couché dans ce lit depuis
quinze jours; que la nuit qui a précédé la perquisition,
ùn étranger avoit couché dans ce l i t , y avoit oublié
sa tabatière , qü’il vint la chei-cher le lendemain avant
l ’arrivée des gendarm es, la trouva sous le l it , et n’y
aperçut aucun portefeuille.
20. Que la dom estique, deux ou trois jours avant ,,
nvoit enlevé les couches et la paillasse de ce lit, pour les
porter à la fen être, et n’avoit point v u le portefeuille.
3^. Q u’une des roulettes de ce même lits ’étant dérangée,
le serrurier fut a p p e lé, renversa le lit pour rétablir la
r o u le tte , et n’y aperçut.aucun portefeuille.
Les jH’opos qu’on attribue à la m è r e , h qui on fait
reconnoîti’e ce portefeuille comme étant le sien, ne sont
p o in t légalement établis , puisqu’elle n’a pas signé le
procès verbal., et n’a pas même été requise de le signez*.
Ces propos, fussent-ils vrais, ne seroient d’aucune con
séquence ; ils auroient échappé dans un m o m ent de
trouble et d’e fir o i, et 11e prouveroient rien contre le
citoyen M eunier.
O n se demande encore comment il est possible qu’il
aie se trouve que des lettres écrites par L a io n tà M eu n ier,
-lorsque la prem ière lettre parle d’une écrite par Meunier.,
�# C a3 ) '
et par laquelle il pressoit Lafont-Bram ant de poursuivre'
le recouvrement de l’effet de 14,800 francs. Pourquoi
L afont ne représen te-t-il pas cette lettre ? comment se
f a i t - i l qu’il ne connaisse pas Vécriture de M eun ier r
lo rsq u e , d’après lu i- m ô m e , ils étoient en correspon
dance ?
C ’est ici une bien grande fatalité ; mais Lafont-Bram ant
n’est étranger à aucun genre de perfidies. Poursuivi
comme escroc, amnistié comme t e l, familiarisé avec le
crim e, on ne doit pas être surpris de ce genre d’adresse
et de ruse.
Q uoi qu’il en so it, Lafont-Bram ant, mis en accusation,
et avant que la cause fût réglée au tribunal sp écial, use
du droit que lui accorde la l o i , de récuser le tribunal
crim inel de la ville i où siège le- directeur du jury qui a
dressé l ’acte d’accusation.
R envoyé au tribunal crim inel de R io m , la procédure
est examinée et déclarée nulle pour défaut de forme. Il
est traduit devant le directeur du jury de C lerm ont, et,,
le 18 ventôse an d ix , il est assez.heureux pour obtenir
une ordonnance de mise en liberté, du directeur du ju r y ,
sans autre examen. Cette mise en liberté est suivie d’un
mandat d’amener contre M eunier; et ce qui paroît avoirdéterm iné le directeur du j u r y , avec trop peu de
réflexion ( on doit le dire ) , « c’est qu’il paroissoit
« q u e L afont n’étoit que le fondé de pouvoir de M eunier >
« q u’il avoit même donné à ce dernier une reconnois« sance du billet dont il s’agit, reconnoissance tro u vée
’ « -chez .M eunier par les gendarmes.. .
1
�'( H )
L ’accusation pèse donc .en entier . sur Meunier¡r X-e'
tribunal spécial examinera sans >.doute , si lü‘)directeur
du jury de Clerm ont n’a pas été trop léger dans fea 1
^conduite; s i, dans une affaire aussi g ra v e , il ne dévoit
]>as prendre ^de plus grandes informations ; s’il pouvoit
p river M eunier du droit de paroître devant son adver
saire , et de le confondre.
.
L e tribunal spécial saura p ren d re, dans sa sagesse,
l e parti qu’il croira le plus convenable; il verra sur
tout s’il 11’est pas indispensable de prendre, des j mesures
rigoureuses contre L afon t-B ram an t.
T e l est le détail de cette affaire siicruelle , èt en même
•temps si extraordinaire.. Il peut avoir échappé quelque )
in exactitude, à raison de Pim possibilité où 011 se trouve
d ’avoir une connoissance parfaite de la procédure; mais
moins on n’a rien omis d’intéressant..
Q uel doit en être le-résultat ? • ■
' » . >■, id
1 °. Il est démontré que le billet de 14,800 francs n’est
pas le même que celui de 4,800 francs , que Subert reconn o î t avoir souscrit au profit du citoyen M eunier. Il y a ;l
différence dans la date. L e billet de Subert est du 16'flo- r
vîiu
réal ; -celui présenté par Lafont-Bram ant est du \i6 prai
rial : et on n’a jamais prétendu qii’il y eût surcharge
•sur la date. L ’ un-est au profit de M eu n ier; l’autre est
■tiré au porteur. Il n’y a donc ideritité ni pour la pei'sonne,
n i pour la. somme,) rirp o u n la \datcj ' -»'Vc
>
2°. Ce ne peut pas être le mêmei'billet!, puisque M e u - v)
nier représente celui de 4,800 francs tsousèrit par Subert, >
oit qu’il avoit lacéré. Les.m orceaux] scuirouvcnt ra&sem- >’
Jtjlés
�( 25 ) '
blés et c o llé s, de manière à ne laisser aucun doute.
3 °. L a quittance que Subert prétend lui avoir été
donnée, est absolument fausse; M eunier désavoue l’avoir
fournie. M al à propos m êm e il auroit dit qu’il n’avoit
pas d’autre billet de Subert : ce dernier en avoit souscrit
antérieurement plusieurs autres , que rapporte encore
M eunier. L a mention qu’on prétend avoir été faite, seroit
extraordinaire et inusitée. E n fin , si M eunier avoit donné
une semblable quittance, à moins de le supposer abso
lum ent in ep te, il se seroit bien gardé de faire circuler
d’autres effets de Subert.
4 °. N ulle relation d’amitié ou d’intérêt entre M eu
nier et Bramant. Im posture''de) Bramant dans ses inter
rogatoires. Dans le p re m ie r, il n?eat m ention que de
Châtelain : c’est avec Châtelain, seul, que Bramant a eu
affaire ; c’est à lui q u ’il a fourrii :lés fonds d u 1billet dont
il demande le recouvrem ent ; c’est de Châtelain qu’il, a
pris une garantie de l’e ffe t, pour' saMsûreté. —
" Ce n?est que dans son second interrogatoire qu’il juge à
propos de com promettre M eühiér :-et alors ce n’est plus un
•billet de garantie'qu’il a voulu prendre ; c:’est une reconnoissonce qu’il-a ' 'donnée-, reednnoissnncè qui contient
des engrtgemens réciproques1.1E t croira-t-on qu’un notaire
exercé ait donné une reconnoissance pour un acte aussi
im portan t, une' somme aussi considérable, sur papier
•moi-fc , et- sans que l’acte fut fdit ^double ¿ntre M eunier
et Bramant1? 1delà seroit d’autant plus étonnant, qu’on
assure que cbtte''reconnoissance contient une note écrite
par B ram an t, par laquelle’ il dit q u 'il seroit à propos
"qu elle f û t f a i t e double. O n peut tirer 'de cette note' la
. -doïl..
■■
■
’ •<*
; D
�C 26 )
conséquence, que cette reconnoissance n’a pas été donnée
en présence, comme le prétend Bram ant; qu’il 11e l’a
faite qu’après cou p, et pour la glisser dans ce fa m e u x
portefeuille.
Quelle confiance peut m ériter un notaire qui s’expose
a un remboursement de 14,800 francs , sans avoir
aucune action pour répéter ses frais, ouïes sommes qu’il
devoit avoir cites pour bénéfice, s’il parvient à faire ren
trer les fonds ?
Bramant n’a-t-il pas d it, dans son interrogatoire, que
M eu n ier se contentoit de 12,000 francs, et que lui devoit
.a v o ir 2,800 francs de bénéfice ?
- r " -■
j Dans son m ém oire, qu’il a fait ¡répandre, 11’a-t-il pas
d i t , au contraire, que ses vacations étoient réglées ù
raison de 12 livres par jour ? Ne voit-on pas-, k chaque
instant, Bramant tomber dans des .^contradictions, cho
q u an tes ?
»¡-, -y •
-l.-tni” '
Bram ant n’a-t-i\,pfls d it ,, dans son interrogatoire-,•qu’il
n e connoissoit, pas l ’écriture.de M eunier ? S’il ne çonnoît pas son écritu re, comment répond-il à ses lettres ?
. pourquoi ne représente-t-il pas celle à laquelle il répond?
Comment se fait-il qu’on ne. trouve précisém ent, dans
.ce fam eux p o rtefeu ille, que JUi reconnoissance donnée
par L a fo n t, et ses lettres écrites de Paris? Si elles sont
. écrites de P a ris, on doit y trouver le timbre de la poste;
et le procès verbal des gendarmes n’en fait/meunemention.
N ’cst-il pas ridicule de faire dire à ‘M eunier, que les
surcharges ou falsifications remarquées sur le b illet, sont
des taches d’eau ou l’effet d’une mauvaise çncçq, et que
ces taches d’eau ou cette mauvaise encre se trouvent pré
cisément aux endroits les plus essentiels ?
�Pourra-t-on jamais croire qu’un médecin connu, qui
a dans ses mains ses certificats d’études dans les écoles
de Paris et de M on tpellier, qui exerce sa profession
avec succès, jouit d’une fortune h on n ête, appartient à
une famille estimable, ait pu s’accoler avec un v il intri
gant, un fripon m aladroit, pour escroquer des sommes
ù un commerçant qui jusqu’ici n’a point eu à se plaindre
de M eu n ier, n ’en a reçu que des services, et a cherchó
lui-m êine c\ le trom per ?
T o u s ceux qui connoissent le citoyen M eu n ier, sont
convaincus qu’il est plutôt fait pour être dupe en affaires
d ’in térêts, que pour être un faussaire ou un escroc. L a
douceur de ses mœurs et de ses habitudes éloigne toute
idée de ce genre.
O n n’aperçoit qu’invraisemblance et confusion. L a
prétendue découverte du portefeuille est d’une gros
sièreté et d’une maladresse si frappante, que, loin d’aiFoib lir les moyens du citoyen M eunier, elle détruit tout le
soupçon, et fait rejaillir la honte sur son auteur.
T Æ C O N S E IL S O U S S IG N É ,. qui a vu les pièces et
le m ém oire du citoyen M eu n ier, ensemble le billet de
4,800 francs souscrit par Subert au profit dudit Meunier.,
le 16 floréal an 8 ;
'
ESTIM E
que l’accusation ne présente rien d’alarmant
pour le citoyen M eu n ier, et que sa justification est com
piè Le.
�(28 )
L a circonstance du rapport du billet souscrit par Subert,
est surtout déterminante , et fait tomber la plainte de
Subert.
Ce billet ne peut pas être le même que celui de
14,800 francs, qu’on présente comme falsifié : différence
dans la d a te , puisque le billet argué de faux n’est que
du 16 p rairial; et point de surcharge sur la date.
Si ce billet n’est pas le même que celui dont parle
Subert dans sa p la in te, la falsification ou les surcliai*gcs
ne peuvent être du fait de M eunier. L e billet est con
senti au profit de tout autre, puisque Subert insiste sur
un point essentiel à relev er, qu’z/
ji’ îi J'ciit
qit’un seul
billet au profit de M eunier.
L a quittance qu’il annonce est désavouée par M eu n ier;
et ou cette quittance est fausse, ou elle est sincère. Si
elle est fausse, Subert est aussi coupable que Lafon tBram ant : ce seroit un concert pratiqué entr’eux pour
com promettre M eu n ier; le prem ier pour se libérer de
ce qu’il doit à M eu n ier, le second pour se faire ren
vo yer de l ’accusation, et en faire supporter tout le poids
à M eunier.
A ussi rem arque-t-on, dans le prem ier interrogatoire
de L afon t - B ram an t, qu’il ne fait aucune, mention de
M eu n ier; qu’il ne parle que de C hâtelain, dont il dit
avoir pris un billet de garantie : et ce n’est que quand
�( 29 ) ■
il a connoissance de la plainte de Subert, des explica
tions qu’il donne contre M e u n ie r, qu’alors Lafont-Bra
mant entrevoit la possibilité de se.tirer d’affaire en com
promettant M e u n ie r, et qu’il change de batterie dans
son second interrogatoire.
S i , au con traire, la quittance est sincère, il n’est pas
possible de présum er que M eunier eût eu la gaucherie
de faire ch’culer un billet de S u b e rt, ni qu’il ait pu
espérer que Subert payeroit sans exam en , et qu’il ne
seroit pas nom m é par Lafont-Bram ant.
A in s i, invraisemblance, impossibilité que le billet dont
il s’agit provienne de M eu n ier, surtout dès qu’il rapporte
le prem ier de 4,800 francs.
R ien n’établit que le projet de lettre, arraché par les
gendarmes lors de l’arrestation de B ram ant, fût adressé
à M eu n ier; ce projet, qui n’étoit écrit qu’à m o itié, n’a
ni adresse ni d ate, et n’a pas même le nom de M eunier.
L a déclaration de Bramant ne prouve pas ce fait :
son affectation de cacher cet écrit, en présence des gen
darm es, apprend assez qu’il se préparoit à l’avance des
moyens contre qui il appartiendroit.
L e portefeuille, qui se trouve si à propos sous un lit
où M eunier n’avoit pas couché depuis quinze jours, est
une jonglerie bien cruelle, inventée par Bram ant, exé
cutée par un gendarme son ueYCU ; (l Lù ne peut influer
�. ( 30 )
sur le sort de l’ affaire. Q uelle apparence que M eunier
eût porté sur l u i , en v o y a g e , des pièces de ce g e n re ,
lorsqu’il étoit instruit de l’arrestation de B ram ant, et
des poursuites rigoureuses qu’on exerçoit contre lu i? se
s c r o it-il muni des pièces de conviction qu’il auroit eu
un si grand intérêt de cacher? Quelle noirceur! quelle
perfidie ! Ce n’est pas ainsi qu’on peut en imposer aux
hom m es, qu’on peut trom per des magistrats éclairés qui
savent découvrir le crim e et venger l’innocence.
Il
est sans doute bien m alheureux que Lafont-Bram ant
ait été mis en liberté aussi légèrem ent; avec quelle facilité
on pourroit le confondre, s’il étoit présent! M ais, dans
tous les cas, le citoyen M eunier ne doit pas douter de
la loyauté et de la justice des magistrats chargés de pro
noncer sur son sort. Il ne s’est élevé contre lui que de
simples soupçons, sur la plainte de Subert : il les détruit
par le rapport du billet de ce dernier-, il ne doit donc
pas redouter l’événement.
D
é l ib é r é
par le jurisconsulte an cien , soussigné,
à
R io m , le 24 nivôse an 11 de la république.
P A G E S ( de Ri o m ).
A R I O M , de l’imprimerie de
L
a n d r i o t
du tribunal d ’appel.
,
seul imprimeur
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Meunier. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
créances
papier mort
billets
falsification
corruption
Description
An account of the resource
Mémoire pour le citoyen Meunier, médecin, accusé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1800-Circa An 11
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0730
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Bonnefer (terre de)
Paris (75056)
Chéniers (23062)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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billets
corruption
Créances
falsification
papier mort
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70a66717728660ef02656da8149e6113
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MÉMOIRE
P our
les
Sieurs
F ra n co is E tie n n e E b b o n
P R I G N O T , Avocat.
J a c q u e s -M a th ie u M E L L I E R ,
1
Négociants.
Et F
r a n ç o is
P O U L E T ,
A u nom et comme Syndics définitifs des créanciers unis de
Louis-Étienne Herh a n , Imprimeur-Méchanicien, breveté
du Gouvernement.
E t encore comme cessionnaircs ( au nom de la masse des
créanciers unis) des brevets d ’invention et de perfection
nement de stéréotype accordés par le Gouvernement audit
Ilerhan, les nivose an 6 , et 27 brumaire an 9 , et géné
ralement de tous les droits rescindants et rescisoires dudit
Ilerhan.
3
Appelants du jugement par défaut du tribunal de commerce
du département de la Seine, du 27 décembre 1808.
Contre le sieur Jean-Baptiste G A R N E R Y , libraire3 et
consorts, intimé.
�MÉ MO I R E
POUR,
les
Sieurs
F
-E
r a n ç o is
t ie n n e
- E
bbon
P R I G N O T , Avocat.
J a c q u e s -M a th ie u M E L L IE R .J )
> Négociants.
E t F ra n ç o is
P O U L E T ,
j
A u nom et comme Syndics définitifs des créanciers unis de
Louis-Etienne H erlian , Imprimeur-Méchanicien, breveté
du Gouveî'netnent.
T ja. fa.ii.ltte
du sieur Herhcin a jeté le deuil et la consternation
parmi ses créanciers.
S’il en est quelques u n s , qui par leur aisance, ou par des arrange
mentsparticuliers ,s o n tp e u sensibles à la perte dont ils sont menacés,
il n’en est pas de même des autres..
Le plus grand nom bre, composé de peres de famille, d'artistes,
de fournisseurs, d’ouvriers, ne voient pas sans effroi un événement
qui leur enleve le fruit de leurs tra va u x, et les moyens les j>lus pré
cieux de subsistance.
Cette aff li cti on s er oi t c o n s i d é r a b l e m e n t a ll é g é e , si l ’o n r e s t i t u o i t
a la mas se de
i/ a c t i f ,
l’é t a b l i s s e m e n t stéréotype qui en a
déta
c h é pa r des c o m b i n a i s o n s a st u c i e u s e s et en fra u d e des créanciers.
Alors, la perte (s’il y en avoit), partagée entre tous, deviendroit
presque imperceptible pour ch a cu n , et la consolation renaîtroit au
sein de familles intéressantes.
�(4)
Les invitations les plus pressantes, les conditions les plus avan
tageuses ont été faites aux détempteurs de Yétablissement stéréotype
j)onr les amener à cet acte de justice,.sans q u ’il fût besoin de l'in
terposition de l'autorité judiciaire.
M a is, aveuglés par un intérêt mal entendu'., ils ont repoussé toutes
les voies conciliatrices, et répondu aux propositions d arrangement
par des paroles .menaçantes, et des significations injurieuses.
Hommes imprudents et indiscrets ! qui livrent à 1 éclat d’une lutte
scandaleuse, lés détails les plus secrets de leur commerce! et met
tent le public dans la confidence d ’opérations qui étoient condam
nées à une éternelle obscurité !
A force d’im p ortu nités auprès du tribunal de com m erce, ils sont
p arve n u s à se p ro c u r e r le succès ép h ém ere d ’un jugem ent p a r dé
f a u t , qu i consacre leurs conclusions, mais q u i tro u ve d’avance sa
réprobation dans les p rincip es q u ’il proclam e (*).
Qui pourroit croire, en effet, qu’il existe un jugem ent qui met
hors d ’état de fa illit e , un débiteur en cessation permanente de paie
ments à'effets com m erciaux, surchargé de nombreuses contraintes
p a r corps, saisi etexécuté dans ses atteliers , dont les meubles, effets
et vêtements ont été vendus par autorité de ju stice , sur le carreau
de la place publique ; arrêté à plusieurs reprises pour dettes, et
enfin incarcéré à Ste.-Pélagie?
Que ce même tribunal établit en principe, que des à comptes
donnés par un débiteur pour suspendre la vente publique de ses
meubles ou l’incarcération de sa personne, ont l’effet d’effacer une
faillite, et de relever le failli de Yincapacité dont la loi l’avoit frappé.
(* ) L ’un d’eux est membre du tribunal. Les autres onL des rapports d'intérêts avec
plusieurs des membres du tribunal.
�( fi )
Avec une pareille doctrine il n’y auroit plus aucune sûreté; le
commerce déjà ébranlé par la foule effrayante de faillites qui se
suecedent coup sur coup, toucherait à sa subversion totale; il
n’offriroit plus q u ’une forêt-noire, où la bonne foi des créanciers
serait sacrifiée à l’astuce des spéculateurs; ce serait un combat
d’adresse et d activité, où la victoire demeurerait au plus alerte, et
où le gage commun deviendrait la proie du plusavide.
L ’effet d’ une pareille anarchie serait de détruire toute confiance,
d ’anéantir le crédit, substance alimentaire du commerce.
Sans cesse harcelés par la crainte de voir disparaître leur g a g e , à
l’aide de ventes frauduleuses, les capitalistes fermeraient impitoya
blement leur bourse , les ouvriers et fournisseurs ne voudraient plus
travailler ni fabriquer qu’au com ptant, et la stagnation la plus
pernicieuse viendrait détruire jusqu’au nom de commerce.
Telle n’a pas été, sans doute, l ’intention d’un tribunal qui donne
journellement tant de preuves de son respect pour les lois , et de son
zele pour la prospérité du commerce.
Mais n’oublions pas qu’il s’agit, ici, d’un jugement par défa ut,
rendu sans contradicteurs, et signé de confiance, sur la foi du
rapport, qui lui-meme étoit 1 effet d’une surprise.
La grande majorité du tribunal v o it, sans doute, avec peine ce
monument d’inattention figurer au greffe, parmi les actes de sa
sagesse habituelle; et les trois membres qui l’ont signé, sacri
fiant 1 amour propre à l’intérêt p u b lic , applaudiront les premiers
a 1 ariièt salutaire qui le réformera.
�(6)
F A I T S ET P R OC É DURE .
L o u i s - E t i e n n e H eriian a r e ç u de la n a t u r e , des dispositions p o u r
le mèchcinisme, q u ’il a , p a r t ic u liè r e m e n t , app liquées à l'art typo
g raphique, et à des opérations accessoires.
A force de méditations, d’essais et de sacrifices, il est parvenu à
découvrir un procédé ingénieux pour répandre rapidement des
ouvrages par la voie de l’impression, perfectionner les éditions en
les multipliant, et introduire une nouvelle branche de commerce.
Ce p rocédé, a u q u el son nom se tro u ve a u jo u rd ’h u i attaché (*),
a fait I adm iration des é tra n g e rs, et lui a m érité des récom penses
honorables de la part de notre g o u v e r n e m e n t (**).
En l’an 6 il avoit obtenu un brevet d ’invention pour quinze ans,
xjui fut suivi d’un brevet de perfectionnem ent (27 brumaire an 8.)
D’abord l’établissement avoit été placé rue de Lille.
Ses développements successifs exigeant un plus grand local, il le
transporta (en i o )j dans la rue Pavée (S.-André-des-Arts.)
84
(*) Cette manipulatioiuest connue sous la dénomination de stéréotype p a r le pro
cédé d 'lier Juin, pour le distinguer du polytipage : c’est celle que les sieurs Nicole et
G arnery ne manquent pas d’annoncer au frontispice de leurs édition s, et dans les
journ aux.
A u j o u r d ’h u i - m ê m e ( i 3 m a r s 1 8 0 9 ) , o n lit d a n s le n» 72 d u Moniteur, à l ’a r t i c le des
l i v r e s d iv e r s , § . Editions sténotypes d ’a p rès le procédé d ’Hcrhan.
.(**) Dans les jou rs complémentaires de 1 an y , Ilerlian a exposé au L ouvre l’édition
de la Conjuration de Catilina, par Salluste, iri-i a, et une trèsbelle planche grand in-fol.,
imprimée avec des formats stéréotypes rapprochés l’un de l'autre, au moyen de m a
trices creuses. Opération qui peut être regardée comme le n ecp lus ultra de l’a r t, et
cjui a été récompensée par une médaille d'or.
�( 7)
L à , il s’occupa à lui donner encore plus de valeur, en augm en
tant considérablement le nombre de ses outils, en faisant faire de
nouvelles fra p p es, graver de nouveaux caractères, en imaginant
des machines dont il n’avoit nulle part de modeles; et ce fu t, alors,
que son établissement atteignit son plus haut degré de prospérité.
Il arriva, bientôt, au sieur H erh a n , ce qui est arrivé à une foule
d’Artistes.
Ses succès rassemblèrent autour de lui des spéculateurs, q u i,
calculant les produits d’une pareille invention, méditèrent de s’en
appliquer les bénéfices; car, on sait q u ’en France (comme ailleurs),
il est rare de voir les découvertes tourner au profit de l’inventeur.
Au nombre de ceux qui témoignèrent le plus d ’intérêt et de bien
veillance au sieur H erhan, éloient les sieurs Berlin D evea ux, Garnery, Laborie et N ic o lle, qui formoient une espece d ’association
pour des spéculations utiles.
Ces messieurs s’étant bien mis au fait des ressources et des moyens
d ’un pareil établissement, conçurent le projet cl’une maison de
librairie qui seroit uniquem ent consacrée au débit Ci éditions sté
réotypes.
Mais, pour réussir dans cette spéculation, il falloit commencer
par s’emparer de Xartiste, sauf ensuite à s’emparer de l’établissement ;
il falloit s’assurer de ses travaux d’une maniéré si exclusive , q u ’il
eût les mains liées pour tout autre que pour la nouvelle maison de
librairie; enfin s’impatroniser dans son établissement, à l’aide d’un
cpntrat de louage.
L ’occasion ne larda pas à se présenter de lui faire cette propo
sition.
H erhan, en se livrant à ses travaux, avoit plus consulté son ardeur
que ses moyens ; les dépenses énormes dans lesquelles il avoit été
jeté , avoient entraîné des engagements considérables qu’il étoit
hors d état de rem plir: toute son adresse se bornoit a calmer ses
créanciers, mais n’alloit jamais jusqu’à l e s satisfaire.
Ce fut dans cette situation douloureuse que le sieur Garnery lui
proposa de se défaire de la manutention de cet établissement, pour
�(
3
)
le concentrer sur une seule maison de librairie; il lui représenta ce
parti comme un moyen d’autant plus avantageux, q u ’en le soula
geant de Fembarras des correspondances commerciales, il lui four
nirait plus de facilite de perfectionner son invention; il lui fit en
visager des conditions lucratives, à l’aide desquelles il couvrirait
successivement ses dettes , sauf, après l’expiration du b a il, à rentrer
dans sa propriété qui se trouverait considérablement améliorée.
Jïerha n , cédant à ces insinuations, souscrivit, le G frimaire an i
( 1 7 novembre 1804), l’acte étrange que les associés ont qualifié de
b a il d ’industrie ; dénomination exacte en ce sens: que Yindustrie des
3
preneurs l’emporte de beaucoup sur celle de Yartiste.
En voici les principales dispositions :
Ilerlian s’engage« à ne faire usage, pendant dix-huit ans (Jî comp
te ter du i cr décembre i8 o 4 ), de ses nouveaux procédés stéréotypes,
« ainsi que de tous perfectionnements ou additions qu’il pourroit y
« faii’e , ou de tous autres nouveaux procédés analogues qu'ilpourroit
« im aginer, que pour le
compte
de M. D e v e a u x , ses héritiers ou
a ayant cause, qui auront seuls, en conséquence, le droit derequé« rir l’emploi desdits procédés pour les ouvrages dont ils entrepren« dront l’impression pendant les dix-huit ans. »
Le sieur Uerhan « promet de les fa ire profiter, à ce su jet, de tous
« nouveaux brevets d ’invention et certificats de perfectionnem ent qu’il
« pourroit obtenir. »
Uerhan « est chargé de fo u rn ir, à scs frais, tous les caractères,
« m atéria ux, matrices et ustensiles nécessaires à l'impression par le
« moyen de ses p rocéd és, et de les faire exécuter jusqu’à parfaite
« confection , comme imprimeur desdits ouvrages. »
M. D evea u x se fait adjuger la p ropriété des clichés ou form ats
fabriqués p ar Ilerlian , à un p rix m o d iqu e et payable à trois mois
.d échéance (*).
(* ) /( sols par elicile in-18.
5 sols par cliché in 8°.
�(9)
Ilerhan s’interdit jusqu’au droit de faire imprimer lés ouvrages
stéréotypés pour M. D eveaux, si ce n’est dix ans après la mort de
celui-'ci, « qui ne commenceront à se compter c[\i après ? expiration
« des dix-huit années du b ail i l industrie. »
On p e r m e t, ce p en d a n t, à Ilerhan d’imprimer, p o u r son com pte,
tous ouvrages autres que ceux compris dans l ’état a nnexé, « mais à la
« charge que la vente exclusive?nsera donnée à M. Berlin D eveaux,
35
« avec une remise de
p o u r cent sur le prix. » (Surcroît de bénéfice
pour lui. )
Un étend cette remise de
p o u r cent aux livres déjà stéréotypés
p a r Ile r h a n , avec interdiction de les faire vendre p a r d ’autres que
35
p a r M. Bertin D eveaux.
On y stipule (art. 8) que « les billets ne porteront que la signature
« sociale de la lib r a ir ie que M. Bertin Deveaux se propose d ’établir,
« en raison du présent marché; et comme sa signature personnelle ne
« sera pas sur ces billets, il s’oblige de fournir au sieur Ilerhan Ift
« preuve de sa qualité d'associé principal dans ladite maison , et de
« sa solidarité pour tous les engagements qu elle contractera. »
M. Bertin Deveaux se réserve la faculté exclusive, pendant six
m ois, « d’acquérir tous les clichés qui se trouveront exister chez le
« sieur Ilerhan, ou lui appartenir, sans q u ’il soit perm is, durant
« le même espace de six m o is , au sieur Ilerhan d’en disposer en
« fa v eu r de qui que ce soit autre que M. D eveaux. »
Enfin l’article 12 a pour objet'les mesures propres à transmettre
ces avantages aux héritiers de M. Bertin Deveaux.
Tel est le premier acte arraché à ce malheureux artiste, au sein
de la détresse et des alarmes, et qu’on 11e peut p a r c o u r i r sans un
sentiment de pitié.
On le v o i t , après avoir consumé vingt années à former un éta
blissement qui est l’objet de son affection et de son espérance , en
abandonner la direction à des étrangers , pour travailler sous leurs
ordres, et à leur profit.
%
�( ÏO )
Non seulement ils s’emparent de ses travaux p en d a n t dix-huit ans,
mais, durant le cours de ce prëtendu bail, ils disposent de son g én ie,
de ses inventions, de son imagination , et ju sq u ’aux bienfaits du
Gouvernement.
Il n’y a q u ’ un dénuement absolu de toutes ressources qui puisse
faire concevoir un pareil sacrifice ; et deja cette considération seule
pourroit fixer à l’époque du 17 novembre 1804 la f a i l l i t e du sieur
Herhan.
C a r, e n fin , ses créanciers n ’étoient-ils pas alors autorisés à lui
dire: «Vous êtes, assurément,«?« f a illit e , et nous allons vous traiter
« comme tel.
« Nous ne vous avons avancé des fonds considérables que sur la
« foi des bénéfices que vous deviez retirer de votre établissement,
« amélioré et perfectionné; mais dès que vous abdiquez l’exploi« tation de cet établissement, pour vous mettre aiix ordres d’une
« maison de librairie qui doit s’en approprier le p r o d u it, n’ayant
« réservé pour vous q u ’une modique rétribution, à peine suffisante
« pour vous faire vivre ; puisque vous vendez à vil prix vos clichés
« faits et à f a i r e ; que vous livrez à une compagnie de commerce
« ju s q u ’à vos fa cu ltés intellectuelles ( seul gage qui nous restoit ) ,
« vous êtes assimilé à un marchand ou fabricant qui ferme sa bou« tique et son magasin, et qui se retire du commerce. »
Néanmoins on n’insistera pas sur cette é po que, parceque les ca
racteres delà fa illite vont se développer avec tant d’abondance, que
nous pouvons bien faire le sacrifice de celui-ci.
On a vu que , dans ce b a il dit d'industrie , Herhan s’étoit flatté de
trouver une ressource contre le désordre de ses affaires, et un moyen
de se maintenir dans son établissement.
Vain espoir! la rétribution de 40 pour cent, accordée à Herhan
par ce b a ild 'in d u strie, étoit trop modique pour qu’il pût la faire
servir à l’acquittement de ses dettes, et des nombreux engagements
commerciaux q u ’il avoit souscrits; il se vit donc livré à de nouvelles
poursuites q u i , en s’accum ulant, presentoient la perspective la plus
alarmante.
�( Il )
Les associés, témoins (le cet état d'anxiété, jugerent que le m o
ment étoit arrivé de porter le dernier coup , et d’enlever à Ilerhan
la nue propriété de l’établissement, à l’aide d’un contrat de vente.
. Cette vente fut effectuée le 8 brumaire'an 14 ( o octobre i o ),
par acte passé devant lioileau.
L 'association (représentée par M. Bertin D eveaux) se fait vendre
3
85
par Ilerh a n , « avec garantie de toutes saisies et revendications, t o u t
« son établissement, composé de deux im prim eries, l’une m obile,
« l ’autre sté ré o typ e , presses, fonderie, atelier m écan ique, ma« chines à clicher et à frapper les matrices, à faire les biseaux,
« poinçons, et généralement t o u t ce qui dépendroit de l ’établisse*
« m e n t, sans en rien excepter ni réserver»; M. Deveaux déclarant
les bien connoître.
Le tout pour le prix de 24,000 f r . , qui sont déclarés avoir été
payés p ré se nt eme nt en especes ayant cours de m onnoie, dont quit
tance (*).
Y
a-t-il rien de moins attendu q u ’un pareil acte? Par quel excès
de détresse ou par quelle illusion Herhan avoit-il été amené à un
pareil abandon?
Comm ent concevoir que n e u f mois seulement après le bail d ’in
dustrie, il se soit déterminé à vendre ce m ême établissement pour
la conservation duquel il s’étoit déjà résigné à des conditions si
humiliantes?
D ’un autre côté, comment concevoir aussi que M. Bertin Deveaux
ait eu le courage de s’approprier au vil prix de 24,000 f r . , un éta
blissement de la valeur au moins de
sionné plus de 80,000 f r .
seulement?
3oo,ooo
f r . , et qui avoit occa
de dépenses en essais ou échantillons
Enfin , comment M. Bertin Deveaux se perm etto it-il de faire
quittancer ces 2 4)°°° f r - > quand il étoit de fait q u ’il n avoit pas
délivre une obole à Herhan ? ( fait aujourd’hui bien reconnu et
avéré. )
(* ) Il n est pas dit a la vue des notaires.
�( 12 )
Il faut nous hâter de donner le mot de ces énigm es, même pour
Ja justification de M. Jîertin D eveaux, et ne pas laisser planer sur
sa tête un soupçon qui compromettroit sa délicatesse et sa considé
ration.
On saura, donc, que cette prétendue vente du 8 brumaire an i
n ’étoit q u ’une fiction imaginée pour faire face aux procédures dont
le sieur Ilerhan étoit obsédé, et prévenir Xexpropriation ju d icia ire
4
qui se préparoit.
Cette expropriation étoit autant à craindre pour la maison sociale
de librairie que pour Herhan , puisqu’elle auroit eintraîné la chûte
du b ail d'industrie, et des grandes espérances qui s’y trouvoient
attachées.
11 n’y avoit rien de sérieux dans cet acte : la vente étoit illusoire,
ainsi que le prétendu paiement de 24,000 f r . en especes numéraires.
Ce n ’étoit q u ’une pierre d’attente destinée à être em ployée, au
besoin, contre les créanciers ; une mesure de sûreté contre la saisieexécution.
Aussi faut-il rendre cette justice à M. Bertin D eveau x, que reconnoissant bientôt toute l’inconvenance d’un pareil procédé, il a
été le premier à abjurer l’effet de ce simulacre de vente, ainsi que
de la quittance des a4,oûo f r . , et q u e , bien loin de l’invoquer contre
les créanciers, il a agi de maniéré à en faire supposer l’abandon et
le désistement.
M ais, quoi qu’il en so it, ce même acte (sérieux ou non) fournit
un caractere bien authentique de l’insolvabilité d’IIerhan, et de son
état de fa illite dès le o octobre i8o5 (8 brumaire an 14 )•
En effet, cette vente est ou sérieuse ou sim ulée; et sous l’une et
l’autre supposition, elle constituoit Ilerhan en état de fa illite.
3
En considérant la vente d u S brumaire an i/j comme sérieuse, elle
présente un débiteur q u i, criblé de poursuites pour effets commer
cia u x , soustrait clandestinement à ses créanciers le seul gage qui
leur restoit, en le faisant passer a v i l p r ix entre des mains étran
gères, et q u i , pour leur enlever jusqu’a la ressource de se partager
ce vil p r i x , en donne quittance dans le contrat même.
�( i
3
)
On y voit un fabricant qui se dépouillé de ses ustensiles , de ses
matériaux , ne laissant à ses créanciers q u ’un atelier vuide.
O r, voilà précisément quels étoient les caractères d’une faillite,
et reconnus pour tels dans tous les tribunaux , au o octobre i o >
et sous l’empire de 1’ ordoni \ anciî de 1673.
A cette époque (co m m e aujourd’h u i) la faillite se formoit au
moment où il y avoit, de la part d’un d ébiteu r, rupture de com*
3
8 5
m erce, clôture de magasin, interruption de registre; le tout accom
pagné de cessation de paiem ents, de poursuites, de condam nations,
et de signes authentiques d ’insolvabilité.
.
Toutes ces circonstances se rencontroient chez Herhan : cessation
de paiem ents, poursuites, condamnations , insolvabilité, rupture
de commerce, clôture d ’atelier, etc.
S i , au lieu d ’une vente sérieuse, on la suppose simulée (ce qui est
la véritable hypothèse), c’est bien pis encore ; et la f a i l l i t e devient
plus caractérisée, puisque, dans ce cas, à côté de la circonstance
de cessation de paiem ents, condam nations, poursuites, rupture de
fa b rica tio n , clôture tïa telier, on voit le débiteur se constituer luimême en état d'insolvabilité com plété, en soustrayant aux créanciers
les derniers débris de sa fo r tu n e , sans leur laisser l’espoir de rien
toucher du prix qui se trouve quittancé au contrat (*).
A in si, nous pouvons d’une main sûre présenter l’acte de vente du
3
8 5
8 brumaire an 14 ( o octobre i o ) comme le signe et l’étendard de
la fa illite d’IIerhan.
Et il importe peu de dire que cet acte doit être considéré comme
non avenuy les parties l’ayant traité comme tel; car il ne s’agit pas,
ici, de savoir quelles ont été les suites de cet acte entre les parties
( ) Il ne faut pas prendre ces observations pou r une inculpation contre H erlian ,
de fra u d e et (le mauvaise fo i; artiste, il étoit, comme le sont tous les artistes, inhabile
aux procédures ; il s’en etoit remis pour le gouvernement de son entreprise a la direc
tion des associes : c’est sur ceux-ci que doit retomber le reproche de tout ce <|u’il y a
eu d’irrégulier dans celte affaire.
�( 4 )
elles m êm es, mais bien do savoir s’il ne révélé pas Xinsolvabilité.
d’Herhaa à cette époque. C ’est à ce point q u ’il faut nous fixer.
Venons, à présent, aux autres actes qui ont suivi celui du 8 bru
maire an i/|.
L ’Association, qui avoit médité de vastes opérations stéréotype*,
trouvant le local de la rue Pavée trop é tr o it, exigea qu'il fût trans
porté dans un local plus étendu (rue Pot-de-Fer, n° 14).
Si la vente du 8 brumaire avoit eu quelque réalité, c’eût été à
M. Bertin Deveaux à supporter les frais considérables de déplace
ment ; mais ils furent laissés à la charge d ’IIerh an, auquel seulement
M. Deveaux fournit quelques fonds.
Herlian se procura le reste, à l’aide d’emprunts et de nouveaux
engagements , toujours sur la foi que ses prétendus protecteurs
viendroient à son secours.
Ce fut Herhan qui solda les loyers échus du local de la rue Pavée,
et qui donna au propriétaire une indemnité de 1200 fr., pour con
sentir la résiliation du bail.
Ce fut lui qui passa en son nom le bail du nouveau local rue Pot*
de-Fer, avec le sieur V id a l de Brosses, en lui payant ooo fr. d’a va n ce ,
5
et 600 fr. de pot-de-vin.
Cependant les nouveaux engagements contractés par TIerhan pour
cette translation, avoient considérablement augmenté la masse de
ses dettes; et les p rotêts, les condamnations p a r corps, les comman
dem ents, les saisies-exécutions pleuvoient de toutes parts.
Au nombre des créanciers les plus actifs, se trouvoit le sieur
Courcier, porteur de trois lettres de change m ontant à 12,000 fr. ,
acceptées par Ilerhan.
Ces lettres de change n ’ayant pas été payées à leur échéance , le
sieur Courcier avoit obtenu condamnation par corps au tribunal de
25
com m erce; e t, de su ite , il fait procéder, par procès-verbal du
avril 1807, à la saisie-exécution des meubles et effets d’IIerhan , et
particulièrement des presses, ustensiles etm atériaux qui composoient
�( i
5
)
l ’etabltsseinent ( vendu simulativement au sieur Bertin D eveaux, par
l’acte du 8 brumaire an i/j).
Le i er mai s u iv a n t, autre saisie-exécution à la requête du sieur
Bertrand.
La poursuite et la direction de la saisie-exécution appartenant au
sieur Courcier, comme prem ier saisissant, celui-ci s’en acquitta avec
zele; et les procédures furent mentes si rapidem ent, que déjà les
a f f !c h iis indicatives de la vente forcée, place du Grand-Châtelet,
étoient placardées dans Paris et sur les portes de la maison.
Assurément il y avoit bien là un signal authentique d’insolvabi
lité, et de faillite. Ce caractere de fa illite n’étoit pas concentré
entre Ilerhan et ses p ro tecteurs, comme à l’époque du 8 brum aire
4
an i ; il étoit proclamé tant dans Paris que dans les départements,
par des affiches et annonces dans les journaux.
Dans cet é tat, tout le monde conviendra q u ’IIerhan avoit perdu
la disponibilité (le son établissem ent,qui, par le seul fait de la saisieexécution, étoit devenu le gage com m un de ses créanciers.
Cependant l’alarme avoit gagné M. Bertin Deveaux et consorts.
Ce déplacement alloit porter un coup irréparable à leurs spécu
lations.
Si l’établissement étoit une fois transporté à la place d u C liâ telet,
c’en étoit fait sans retour.
M. Iîertin Deveaux avoit bien sous la main un moyen d’arrêter
ces poursuites (au moins pour quelque tem ps), en revendiquant la
propriété de l’établissement, en exécution de l’acte du 8 brumaire
an i/f ; et en attaquant la saisie du. sieur Courcier comme faite super
non domino. Mais (com m e nous l’avons déjà observé ci-dessus)
M. Berlin Deveaux auroit cru sé m anquer à lui-rnêine de produire
un pareil acte , et de lui attacher quelque réalité. La déclaration
d ach at de cet établissement, moyennant 2 4,000 hv. payees sur-lechamp en especes de monnoie ayant cours, étoit incompatible avec
la droiture et l’exacte probité qui le caractérisent.
�1
( i6 )
Il fa llo it , n é a n m o in s, à q u e lq u e p rix q u e ce f u t , p ré v en ir l’e x
p ro p ria tio n fo r c é e , et voici le parti a u qu el on s’arrêta.
C ’étoit au
cinq
mai qu e
la
vente étoit in d iq u é e ; on o b tin t une re
mise de qu elq u e s jo u r s , durant lesquels on f a b r iq u a , le i
5,
l’acte
le p lu s étrange q u ’ il soit possible d ’imaginer.
Trois parties figurent dans cet acte :
M. Bertin Ueveaux et le sieur Ilerhan , comme
Et le sieur Athanase Laborie, comme acquéreur.
Il y est dit q u e M. Bertin D eveaux «
vfnp
'vendeurs;
au sieur Laborie
tout
« ce q u ’il a acquis du sieur I le r h a n , en im p rim e rie et d épen d an ces,
« p a r le co n trat d u 8 brumaire an il\. »
A p rè s q u o i , le sieur H erhan
vend ,
de son cô té ,
un tiers
de cette
m ê m e im p rim e rie . « L ’in ten tion des p artie s, dit l’a cte, étant que
« tous les objets q u elco n q u e s q u i font partie de cette im p rim e rie
« a p p a rtie n n e n t p o u r d eu x tiers à M. L a b o r i e , et l’autre tiers à
« M. Ile r h a n , et m êm e divisem ent et d istinctem en t. »
L e p rix des deu x tiers v e n d u s « est de 69
,333 fr. (70,000 liv.
tour-
« n o i s j , q u e Ile rh a n reconnott avoir reçus de M. L a b o rie, tant en
« especes, qu’en valeurs à satisfaction , p o u r lu i et M. Bertin De« v e a u x , q u i le constitue son mandataire à cet effet. »
P ré v o y a n t le cas où Ile rh a n ju g e r o it à pro po s de ve n d re l’autre
tiers q u i lui est r é se rv é , on y stip ule des m esures d ’exécution.
C e t acte est un tissu d’énigm es et de co ntrad ictio ns p o u r q u i
c o n q u e vo u d ro it le d iscuter sé rie u se m e n t, et la raison se fatigue
en vain p o u r en concilier les dispositions avec celles de l’acte
du 8 brumaire an 14 » et m ê m e p o u r les co n cilier entre elles.
Com m ent, en effet, Ilerhan , déjà dessaisi de son établissement,
sans en rien excepter, ni reserver, par lacté du 8 brumaire an it\
(3o octobre i8o5) s en retrouve-t-il tout a-coup propriétaire? par
quet événement celte résurrection s est-elle opérée?
Voudra-t-on expliquer cette réintégrande par la simulation de:
l’acte du 8 brumaire an i/|, qui, considéré comme non avenu , avoit
�!
( *7 )
laisse à TIerhan la propriété de son établissement? Soit. Voilà ce qui
expliquera la vente faite par Ilerhan au sieur Laborie, du tiers
de son im prim erie, sous les yeux mêmes de M. Bertin Deveaux.
Mais, alors, comment se fait-il que M. Bertin Deveaux vcnof: par
le même acte et sous les yeux de Ilerhan au sieur Laborie « to u t ce
« qu’il avoit acquis de lui en imprimerie et dépendance, p a r le con« irai du brumaire an 14 »? Comment pouvoit-il invoquer un con
trat sim ulé, et considéré par toutes les parties, comme non avenu?
8
?
C o m m en t, après q u ’il a vendu lu to u t au sieur L a b o rie , se trouvet-il encore deux tiers de ce tout à la disposition d’Herhan?
De deux choses l’une: ou l’acte du brumaire an 14 étoit n u l, ou
il étoit valable. Il n’y a pas de milieu.
S’il étoit n u l, AI. Bertin Deveaux n’a pas pu vejndre au sieur La
8
borie, ni lui transporter une propriété qui n’existoit plus entre ses
mains.
Si, au contraire, l’acte du brumaire an i , conservoit son effet,
le même argument- se reportera contre Ilerhan, qui n ’a pu lien
vendre au sieur Laborie; et, dans tous les cas, il y a n u llitií de la
vente de l’un des deux tiers de l’établissement.
II est impossible de sortir de ce dilemme.
8
4
A cette obscurité se joignent plusieurs autres: comment conce
voir que le prix du tiers seulement, vendu par M. Bertin Deveaux
au sieur Laborie, soit de
;
i
:
35,000 l i v . , quand la totalité n’étoit
portée
qu’à 24,000 liv. dans le contrat d’acquisition du 8 brumaire an i/i?
Tï’est-ce pas reconnoître authentiquement de la part du sieur Deveaux la vileté du prix de sa prétendue acquisition?
Peut-on croire que le sieur Laborie ait effectivement délivré au
sieur Ilerhan 70,000 liv. tant en especes quVn valeur h satisfaction,
ainsi q u ’il est dit dans le contrat du i mai 1807.? Auroil-on donné
une somme aussi considérable à un homme en fa illite ouverte, dont
les meubles alloient être adjugés sur la p la ce publique par autorité
de justice ?
5
Y
art-il rien de plus bizarre que de vo ir le prix du tiers vendu par
M. Bertin D eveaux, délivré à Ilerhan en sa qualité de son manda*
3
�( i8 )
taire, sans même que l’acte énonce la date de ce m andat prétendu ,
et sans q u ’il y soit annexé ?
Un acquéreur sérieux auroil-il délivré scs fonds sur la foi d’une
pareille déclaration?
E nfin , M. Berlin Deveaux étoit représenté dans cet acte par un
fo n d é de procuration spéciale (le sieur Pierre Laurav son commis);
c ’étoit donc naturellement à celui-ci qu’il appartenoit de recevoir sa
portion. Par quelle singularité cc fo n d é de pouvoirs est-il privé de
ce droit? Et par quelle autre singularité ce droit étoit-il transféré à
Herhan, q u i, dans la position où il se trouvoit, étoit celui de tous
les hommes le moins convenable à une pareille mission?
Les absurdités de cet acte se multiplient sous la p lu m e, au point
q u ’il faut renoncer à les détailler.
N é a n m o in s, nous allons essayer de pénétrer ce chaos.
D ’abord, il ne faut pas perdre de vue que toute la sollicitude des
associés se portoit sur les moyens d’empêcher l’expropriation de
l ’établissement d’IIerhan, annoncée par des placards
Pour cela, on avoit négocié avec le sieur Courcier, et ou étoit par
venu à suspendre ses poursuites (*).
Rassurés sur cet article (**), il falloit se hâter de prévenir le retour
d’un pareil embarras de la part des autres créanciers; et l’on crut
y parvenir en faisant faire par Herhan, une vente de son établisse
ment à l’un des associés , q u i , à l’aide de sa qualité d acquéreur, pou-
) Cet arrangement est consigné dans un écrit sous seing-privé entre le sieur Cour
cier, les sieur et dame Herlian, et le sieur N icollc, du 12 mai 1807 ; ori y reconnoit
qu’il y avoit des poursuites de la part du sieur Courcier, et une saisie-exécution des
meubles et effets de Herhan, et particulièrement de tout l'établissement stéréotype, et
la vente signifiée.
(**) Il faut observer, que le sieur Courcier, qui ne recevoit qu’un cautionnement cl
non le montant de sa créance, de laquelle Hcrluin restoit ob ligé, ne donna pas main
lpvée de la saisie, qui se trouve encore subsister aujourd’hui.
�C *9 )
voit s’opposer à ce qu’on saisit de nouveau les imprimeries mobile
et stéréotype.
On alla,m êm e, jusqu’à croire qu’il n’étoit pas nécessaire que cette
vente comprît la totalité de l’établissement, et qu'il suffxsoit pour
l’objet qu’on avoit en vue , que la vente fût des deux tiers, sauf à
retirer l'autre tiers des mains d’Herhau , en cas de besoin.
5
Voilà ce qui explique la vente du i m ai, à la suite de l’arrange
ment, consommé avec le sieur Courcier.
Q u a n t aux m oyens d ’e x é cu tio n , en voici encore l’explication.
On auroit pu tout simplement faire vendre à Herhan les deux
tiers de son établissement; mais on sc rappela, dans ce m om ent,
l’acte de vente du 8 brumaire an i[\, et l’on craignit q u ’il ne servit
de motif pour exiger un droit de revente. Ce fut pour prévenir cette
difficulté qu ’on imagina de faire la vente d u n tiersau n om deM . Ber
lin D ev ea u x, considéré comme propriétaire de ce tiers; de plus, pour
couvrir la contradiction qui se trouvoit entre cette déclaration et
l’acte du 8 brumaire an 1 4 ,(q u i avoit transmis à M. Berlin Deveaux,
la propriété du totjt, sans en rien réserver ni excepter, ) on inséra la
déclaration que les deux autres tiers se composoient des augm enta
tions faites depuis par Herhan.
Pour ce qui concernoit le prix de la vente des d eu x tiers, on le
porta à 70,000 liv. , pareeque cet acte étant destiné à être opposé
aux créanciers d’IIerhan, il falloit bien y stipuler un prix qui se
rapprochât de la valeur de la c h o se , pour ne pas être exposé au re
proche de v il p r ix .
Mais d’un autre côté, le prix fut quittancé, pour enlever aux
créanciers le droit de le réclam er, et d ’en faire l’objet de saisiesarrêts.
Bien entendu que les associés cherchèrent à calmer Herhan sur
les effets de cette dépossession gratuite et quittancée, en lui protes
tant « que tout ce qui se passoit n’étoit que pour son plus grand
« bien; qu’il ne devoit pas concevoir d’allarmes sur la restitution
« de ces deux tiers, qui n’étoient q u ’un dépôt entre leurs m ains,
�'(
20
)
« et flans lequel il rentreroit aussitôt que le danger de Yexpropria« lion ser oit passé. »
I l e r h a n , h ab itué à n ’agir que sous leur d ire c tio n , et s’abandonnant
aveuglém ent à leur f o i , avoit consenti de signer.
Tels sont les ressorts secrets qui ont amené cet amas A'inconsé
quences, de contradictions, et de suppositions, que les parties ad
verses ont décoré du nom de vi-ntk, et q u ’on seroit fort embarrassé
de caractériser: est-ce un e vente ? est-ce un dépôt? est-ce un p rêt?
Ce n’est rien de tout cela. C ’est un com posé in fo r m e , m o n str u e u x ,
u n imbroglio r é v o l t a n t , en contradiction avec lq v é r ité , autant
q u ’avec la saine raison.
A travers ce la b yrin th e té n é b re u x , ce q u ’il y a seulem ent de bien
clair, c’est l’intention de frustrer les créanciers d 'IIerhan, en m ettant
l'établissem ent à l’abri de saisie-exécution , et en leur enlevant la
ressource des oppositions, et des saisies-arrêts, par un e quittance
sim ulée , de m aniere q u ’ils p erdro ient tout à la fois , et le gage m a té
rie l, et sa valeur représentative.
Doit-on tro u v e r é tr a n g e , après ce la , que les créanciers Ilerhan
po u sse n t les hauts cris contre une pareille in ju stice , et réclam en t
le rétablissem ent à la m asse, de ces deux tiers , p o u r le p rix en être
p artag é, com m e n ’ayant jam ais cessé d ’être le gage com m un?
U ne autre vérité encore , c’est q u ’à ce m o m e n t m êm e où 1 on prenoit tant de soins p ou r faire vend re à Ilerhan les deux tiers de son
étab lissem ent, au préjudice de ses cré a n cie rs, TIerhan étoit frappé
d ’incapacité légale p o u r effectuer va la b lem en t celte translation ,
<;tant en état de fa illite ouverte, non seulem ent par l’inexécution c-n
p erm an en ce de ses engagem en ts, mais par la manifestation a u th e n
tique d ’insolvabilité résultant de condam nations nom breuses o b t e
nues co n tre l u i , et n o tam m en t de h saisie de tout son établissem ent
avec affiches indicatives de leur vente l*)è
( ' ) Les associés n'apporteront môme pas assez d attention , et leur prudence se Irou■voit en défaut; car en négociant pour la saisie-c.récutiun du sieur Courcier, ils
oublioient celle du premier m ai, faite à la requête du sieur Bertrand, qui subsiste
encore aujourd’hui.
�( 21 )
Il ne viendra à l'esprit de personne, de contester l'état de
fa illite d’un débiteur courbé sous le poids des condamnations,
saisi dans tous ses meubles et effets, dont la ven te'a llo it être
effectuée le lendemain sur le carreau de la p lace publique.
Ü r, quand on voudroit faire grâce aux adversaires de tous les
autres caractères antérieurs de la fa illite d’IIerhan , au moins ne
pourra-t-on pas disputer sur la date des
avril et 1er mai 1807,
époque de (\aux saisie-exécutions jetées sur tous les meubles, et parti
culièrement sur les imprimeries mobile et stéréotype.
Parlons maintenant de ce qui s’cst passé depuis l’acte du i mai
25
5
1807.
Le sieur Courcier étoit appaisé, sur la foi du cautionnement q u ’il
avoit reçu; mais les autres créanciers, qui n’avoient pas le même
avantage, recommenceront leurs poursuites (¥).
L e mois de j u i n 11e laissa pas Herhan plus tran q uille, e t,sa d é co n
fiture devenant d é p lu s en plus au th e n tiq u e et no to ire , les créanciers
re d ou b lèren t aussi d ’activité.
Entre autres p ou rsu ites, nous in d iq u e ron s celles-ci :
j 8 ju in . S aisie -exécutjon des meubles et effets d’IIerban, et de ses
imprimeries, par le ministere de G habouillet, huissier, à la requête
du sieur L iem bert, négociant à Ponthiéry, faute de paiement d’un
billet à ordre de 1,000 liv.
On voit, par le procès-verbal de saisie, qu’IIerban essaya, en cette
occasion, de tirer parti de l’acte du i m ai, en réclamant la réd u c
5
tion de la saisie a un tiers seulement de l’im prim erie, sur le prétexte
que les deux autres tiers avoient été vendus au sieur Laborie; mais
011 voit aussi que l’huissier, ne tenant aucun compte de cette allé-
0 Dès le même jo u r 1 5 m a i,
du sieur Bassand.
p ro tê t
d’un billet de 5 oo liv. sur Ilcrlian, à la requête
m ai. J u g e m e n t d u t r ib u n a l d e c o m m e r c e p o r t a n t c o n d a m n a t io n p a r c o r p s .
1 $ m ai. C o m m a n d e m e n t à fin d e p a i e m e n t d 'u n billet d e l o o o l i v . c n v e r t u d ’ un
j u g e m e n t d u tr ib u n a l d e c o m m e r c e (lu 8 d u m ê m e mois.
�C
92
galion , n’en passa pas m oins à la
)
sai si e
de l’élablissenienl en l i e r , et
celte saisie fut co ntinu ée au lendem ain ; a tte n d u , y est-il d i t , 1 im
mensité des objets.
L e lendemain 19, Ilerhan fut aiîrAtiî p ar l'huissier C a r r é , et c o n
duit à Sainle-Pélagie. Mais ayant dépêché un e x p ié s vers les sieurs
Garneryet Nicolle,\[s lui e n vo yèren t un bon de i,-jo o fr .,q u i fut .su rle-champ escompté, et em p lo yé à se tirer des mains de l ’huissier ( *).
L ’exem ple de l’huissier C h ab ouillet ayant donné l'éveil sur le
danger q u e co u roit le tiers ( laissé à Ilerhan ) , d é t r e , au p rem ier
m o m e n t , frappé de saisie-exécution , il n’y avoit pas un m om ent à
p erd re p o u r se débarrasser de celte inqu iétude , en se faisant trans
p orte r aussi ce tiers.
L ’occasion étoit favorable pour amener Ilerhan à ce dernier sa
crifice; et le service q u ’il venoit de recevoir du sieur G a rn e ry , à
l’aide de son bon de 1,200 f r . , 11e lui permeltoit plus d’opposer la
moindre résistance à tout ce qu’on exigeoit de lui.
D’ailleurs, le sieur Garnery lui représentoit le transport de ce
dernier tiers comme une opération infiniment avantageuse, et une
planche dans le naufrage.
En conséquence; troisième acte de vente, du aH juin 1807, por«tant vente par Ilerhan au sieur Garnery du tiers de « tout ce qui
« composoit l’imprimerie tenue dans les lieux occupés par le sieur
« Ilerhan , rue du Pot-de-Fer, n° i!\ ; les deu x autres tiers ayant été
« vendus/»«/- lui (**) au sieur Antoine-Athanase Laborie, par acte
« passé devant de Lacour, du i m ai dernier, etc.
5
(* ) Ce bon n’ayant pas pu servir à couvrir en entier les causes de l’arrestation, il 11e
fut reçu que pour h compte ; et il n y eut pas de main-levée de la saisie-exécution du
1 8 m ai, laquelle subsiste encore aujourdhui.
(**) Fendus p a r lu i ( Hcrlian). Voilà une déclaration bien précieuse, en ce qu’elle
confirme ce que nous avions dit : que dans l’acte du ¡5 mai, le nom de M . Bertin
Deveaux n’étoit emprunté que pour éviter le droit de revente.
�( 23 )
34 666
35
« Pour le prix de
,
fr. ( ,oooliv. tournois); laquelle* somme
« le siiMir Ilerlian reconnoît avoir rerue rlu sieur Garnery, tant en
« especes, qu’en valeurs à sa satisfaction. »
Il esl inutile, sans doute, de dire que ce paiement t'toit sim ulé;
et que Ilerhan ne rerut pas une obole de ces
fr. ; ce dernier
tiers se trai toi t comme les deux autres, sur la foi des acheteurs,
qui protestoient ne recevoir ces objets q u ’à titre de dépôt.
Arrêtons-nous, ici, un m om ent, pour considérer l’invalidité de
celte vente sim ulée, et son impuissance à produire aucun effet
contre les saisies faites et à faire.
Nous avons déjà démontré jusqu’à l’évidence, q u ’«« i m ai 1807,
( quarante-trois jours auparavant), Ilerhan étoit constitué en
fa illite ouverte, par une cessation absolue de p aiem ent, par des con
traintes par corps, plusieurs saisies exécutions, etc.
34,666
5
5
Or, dans l’intervalle du i m ai au 28 ju in , sa situation n’avoit
fait qu’empirer par de nouvelles poursuites encore plus rigoureuses,
puisque c’est clans l’intervalle du i mai au 28 juin q u ’étoit sur
venue la troisième saisie exécution du 18 m ai, par l ’huissier Chab o u illet, et l ’ arres tati on de la personne d’ IIerhan par l’huissier
Caré.
5
Son état de fa illite étoit bien connu du sieur Garnery, et il n’y
avoit personne au inonde qui fut plus instruit du désordre de ses
affaires, puisque lui-même avoit concouru à suspendre la vente sur
le carreau de la place p u b liq u e , indiquée au 5 m ai, et à retirer
Ilerhan des mains de l’ huissier Carré, qui le conduisoit en prison.
Le sieur Garnery achetoit donc le 28 ju in ce q u ’il savoit bien
n’être plus à la disposition du prétendu vendeur.
L ’établissement stéréotype étant sous la main de la justice, par
les trois saisies exécutions dont il étoit frappé, ne pouvoit plus être
vendu par la partie saisie.
Ilerhan étant en état de fa illite ouverte, il ne pouvoit plus en
etre le vendeur; ainsi, il y avoit incapacité dans la chose comme
dans la personne.
�( 24 )
Le sieur Garnery achetant ce qui n étoit p lu s « vendre d’une per
sonne qui ne pouvoit pas v en dre, s’étourdissoit, sans doute, sur cette
irrégularité, dans l’espoir q u ’elle ne seroit pas relevée (*).
Cependant le sieur L aborie, acheteur des deux tiers par l’acte du
i mai, et le sieur Garnery, acheteur de Xautre tiers par l’acte du
28 juin y le tout par indivis, 11e tardèrent pas à se partager l’univer
salité de l’acquisition, pour faire valoir, chacun de son côté, sa
portion.
Par le résultat de ce lotissement (qui fut effectué le 24 juillet sui
vant), l’imprimerie stéréotype, échut au sieur Garnery, pour le cou
vrir de son tiers; et le sieur Laborie retint Ximprimerie m obile, re
présentative de ses deux tiers
que quelque temps après il a vendue
aux sieurs Ma mes pour le prix de 80,000 liv.)
C e partage scandaleux des dépouilles d ’IIerhan et du gage de ses
créanciers, se faisoit sous l’artillerie des poursuites judiciaires qui
5
se montroient plus menaçantes que jamais.
Dès le 11 ju ille t (treize jours avant l’acte de partage entre le
sieur Garnery et le sieur Laborie), la saisie-exécution faite à la re quête du sieur Bertrand, par procès-verbal du prem ier m a i, avoit
été reprise.
On peut se rappeler qu’au mois de m ai, cette saisie 11’a.voit été
suspendue q u ’en raison de la saisie-exécution faite par le sieur Courcier, et antérieure de cinq jours (le
avril.)
Mais la saisie du sieur Courcier, ayant été paralysée par l'arran
gement du 11 niai (voyez ci-dessus page 18), le sieur Bertrand se
c r u t , comme de raison, autorisé à poursuivre la saisie exécution
commencée le prem ier mai
A ux approches de l’époque destinée à la vente, le saisissant alarmé
25
( * ) P a r la considération, peut-être, que le pis-aller seroit de restituer, après en
avoir tiré grand p arti, et qu’enfin, en achetant à grand marché les créances sur Herhan,
il p a r v i e n d r a i t à figurer a v a n t a g e u s e m e n t dans 1 a c t i f , et à retenir à titre de créancier,
ce qui lui échapperait à titre d'acqucreur.
�( a5-)
de l’embarras de faire voilurer sur la place p u b liq u e , une aussi
grande masse de matériaux et de machines aussi volum ineuses,
présenta sa requête au tribunal de premiere instance, afin d’être
autorisé à les faire vendre sur le lieu, maison de la rue Pot-deFer. (*).
Depuis ce moment, les saisies exécutions s’accumulerent l’une sur
l’autre, et se croiseront au point, que le logis d ’IIerhan étoit devenu
un champ de bataille, que les huissiers se disputoient entre eux.
Et cette déplorable lutte aboutit enfin à une -vente p u bliq u e qui fut
consommée sur le carreau de la place du grand Châtelet, le
dé
5
cembre 1807 (**).
Réduit au dénuement le plus absolu, et à la détresse la plus
humiliante, par la vente de ses vêtements de premiere nécessité (***);
il n e m a n q u o itp lu sp o u r combler l’amertume d eH erh an , que d’être
traîné en p rison , et il n ’échappa pas à ce dernier malheur.
Le 8 ju in i8 o 8 , ii fut arrêté et conduit sous les verroux de Ste.Pélagie.
Dans cette situation, le code de com m erce, récemment publié,
lui fournissoit une ressource pour abréger sa détention; il l’em
(* ) « V ous expose, M M ., qu’en vertu (l’un jugem ent du 24 mars dernier, il a fait
« saisir les meubles et effets du sieur H erlian, pour sûreté des condamnations pro« noncées contre lu i par le susdit jugem ent.
« Que les effets sont, entre autres, des presses et machines destinées à l'imprimerie,
« d’un volume très considérable, et très difficile à déplacer.
« A ces causes, ledit Bertrand requiert qu’il vous plaise, M M ., c o n f o r m é m e n t à
« l’article 6 17, du code de procédure, l’autoriser à faire vendre les objets saisis sur
« ledit sieur Ile rh a n , en la demeure de ce dernier, rue Pot-de-Fer, n° 1/», où ils sont
« maintenant. »
( ) A oyez l’adresse d’IIerhan, page iC.
1
(
) L e proces-verbal en fait foi, qu’on avoit vendu ju sq u a u x caleçons, panta
lons, cravates, etc.
4
�( 26 )
brassa, en transm ettant an greffe un e
il fixa l’o u v e rtu re au i
5 mars 1807.
déclaration
de fa illite., dont
C’étoit déjà user de beaucoup d indulgence pour lui-même, que
de rapprocher ainsi sa fa illite qui, à parler exactement, avoit com
mencé dès l’ouverture de son établissement. Du moins auroit-il pu
la dater du 8 brumaire an 14 ( o octobre i o ), époque de la vente
simulée faite à M. Berlin Deveaux.
5
85
5
Mais Ilerhan s’arrêta au i m ars, pareeque c’étoit de ce jo u r q u ’il
avoit commencé à offrir notoirement tous les signaux de détresse,
et que les caractères les plus marquants de son insolvabilité s'étoient
manifestés par des condamnations et des poursuites rigoureuses.
Le tribunal de commerce qu i, dans ce m om ent, n’étoit influencé
par aucunes sollicitations, et livré à sa propre sagesse, rendit le
3o août un jugement portant déclaration d ’ouverture de fa illite à
compter du i 5 mars 1807, nomination de commissaire (M . Goulliart),
d’un agentprovisoire, etc.
L'instruction de cette faillite fut suivie dans les formes voulues
par la loi.
Cependant les conséquences attachées à la date du i mars 1807,
n ’échapperenl pas à l ’association qui s’étoit emparée de rétablisse
ment d’IIerhan; elle commença à craindre pour les actes de vente
des 8 brumaire, i5 m ai, et a8 ju in 1807, qui se trouvant placés en
pleine fa illite , étoienl menacés d’annullation.
5
Il falloit donc pour prévenir ce danger, faire rétrograder Youverture de la fa illite à un terme postérieur au moins de d ix jours ;
et ce fut vers ce but que la ji aison de librairie stéréotype dirigea tous
ses efforts.
Le sieur Garnery fut constitué le représentant de l’association, en
ce point, et chargé de toutes les démarches actives et ostensibles,
propres à obtenir la rétractation de l’époque d’ouverture de faillite.
Les autres prirent sur leur compte le travail des sollicitations
privées.
�(
27
)
En conséquence, par exploit du 12 septembre 1808, le sieur Garnery signifia aux syndics provisoires, une opposition au jugement du
o août, au chef qui fixoit la fa illite d’IIerhan au i mars 1807.
3
5
Ses moyens d’opposition (accompagnés, d’ailleurs, d’imputations
injurieuses) se réduisoient en substance à ceux-ci: « Q u’il étoit no« toire que Ilerhan n ’avoit jamais cessé de conserver la disposition
a de son avoir, et de jo u ir de la plénitude de ses droits ». (On peut
juger à présent l’exactitude d’une pareille allégation).
« Q u’il avoit fait beaucoup de paiements depuis cette époque du
« i
5 mars 1807.
« Q u ’il est évident que par sa déclaration in fu lele, Ilerhan cher« choit à anéantir des actes authentiques, que lu i,G arn ery, et autres
« négociants, avoient passé de bonne f o i avec lu i, depuis 1 époque
« à laquelle il fait remonter sa prétendue faillite.
« Enfin, que lui requérant, avoit le plus grand intérêt à maintenir
« l'exécution d’un acte passé le 28 juin 1807, contenant vente à son
« profit du tiers de son im prim erie, établie à Paris, rue Pot-de-Fer,
« 11° i/i, etc. »
L ’exploit étoit terminé par une assignation au tribunal de co m
merce « pour voir dire qu’il seroit reçu opposant au jugem ent du
« 3o a o û t, lequel seroit rapporté comme nul et subreptice, et qu ’il
« seroit fait défense de l’exécuter, etc. etc. »
Celte signification ayant été communiquée à TIerhan, pour q u ’il
eûl à donner des renseignements sur sa situation, il a fourni du
sein de sa prison (sous le nom (I'adresse à ses créanciers), une décla
ration détaillée de ses relations avec le sieur Garnery et consorts,
qui mettoit au grand jo u r Yépoque de sa f a illit e , et l’origine de ces
prétendus actes de vente des 8 brumaire an i4 1
1807.
*5 mal
et
ju in
Le combat judiciaire s’engagea, donc, entre les parties, s u r i o u
verture de la fa illite.
�(
)
La question n’etoit l’affaire que d’un mom ent, puisqu’elle trouvoit sa solution dans l’article f\l\i du code de co m m erce, qui
porte*
« L ’époque de la faillite est fixe'e par la date de tous actes consta« tant le refus d ’acquitter ou de payer des engagements de com« merce ».
Or, ici, les actes constatant le refus d’acquitter ou de payer les
engagements de commerce se produisant en foule, et formant une
série de refus à compter du i mars 1807, il étoit facile au tribunal
de vuider la contestation, en maintenant la fixation portée au juge
ment du o août; et c’est ce qui seroit arrivé dans toute autre occa
sion , le tribunal n ’ayant pas le moindre m otif de rétracter son ju g e
ment du o août.
5
3
3
M a is, depuis ce ju g e m e n t , les choses avoient bien changé.
Une question simple en apparence jeta l’agitation dans le sein
du tribunal, et produisit une explosion qui entraîna à sa suite la
réc us ati on
volontaire de trois de ses membres.
Cette désorganisation matérielle ayant apporté quelque difficulté
pour la recomposition d’une a u d ien ce, les adversaires profitèrent
de cette o ccasion, le mardi 27 décembre 1807 ( trois mois et plus
depuis l’opposition), pour surprendre au trib u n a l, qui ne se trouvoit en ce moment composé que de trois membres (le président et
d eux suppléants) , un jugeme nt p a r défaut qui rétracte la date du
i 5 mars 1807, et la remplace par celle du 1" décembre suivant.
On sait qu’il est d’usage dans plusieurs tribunaux de laisser la
rédaction des jugem ents p a r défaut et des motifs aux parties qui les
ont obtenus.
Le sieur Garnery et consorts useront largement de cette perm is
sion, en insérant dans le jugem ent des considérants, qui font une
opposition continuelle avec la vérité et avec les premiers éléments
de la jurisprudence du commerce ; et c est un service qu’ils ont
�(
29
)
rendu à la masse des créanciers de ne leur laisser aucune incerti
tude sur des motifs qu ’on ne se seroit jamais avisé de soupçonner,
et de placer ainsi le contre-poison à côté du mal.
MOYENS.
11 sem ble, après les détails dans lesquels nous sommes e n tré s,
qu’il ne nous reste plus rien à dire pour établir que la fa illite
d’IIerhan étoit ouverte au i mars 1807 ( car c’est là à quoi se réduit,
5
quant à présent, l’intérêt des créanciers *).
5
Or, l’ouverture de la faillite d’IIerh an, au i mars 1807, étant
hors de toute contradiction, nous pourrions clore ici notre travail ,
puisque tous les raisonnements accumulés ne peuvent rien ajouter
à la démonstration mathématique qui vient d’être offerte à la cour
par l’exposé des poursuites judiciaires, et autres actes constatant la
cessation de paiem ents et l ’insolvabilité d ’Herhan.
N éan m oin s, on doit être c u rie u x de connoître c o m m e n t u n ju g e
m ent aussi étrange a p u être coloré dans ses considérants , et par
quelles illusions le tribunal de co m m e rce a été su rp ris au p o in t
de déclarer hors d'état de fa illite u n d é b iteu r su rc h a rg é de con-
(*) L e sieur G arnery et consorts s’épuisent en argumentations pour combattre les
assertions des créanciers Ilerhan , sur la quotité et la nature des créances portées au
b ila n , sur les effets qu’ils ont acquittés à la décharge de Ilerh a n , etc., etc.
CVst beaucoup de peine en pure perte ; de pareils détails pourront être portés au
tribunal de premiere instance, quand il s’agira de statuer sur la validité des ventes;
mais, devant la cour d’appel, il n’y a qu’un point à ju ger: à quelle époque la fa illite
Herhan doit elle remonter? sans s’occuper des c o n s é q u e n c e s . C ’est dans ce cercle que
lu cause doit se renfermer.
�(
3o
)
traintes par corps , saisi cl exécuté dans ses meublesel ses atteliers,
dont l’insolvabilité étoit proclamée pai'p la ca rd s, annonces, et affi
ches, devenu la proie journalière des huissiers captureurs, etc. Il y
a une contradiction si incroyable entre celte situation et le juge
ment dont est a p p e l, que chacun est tente de soupçonner qu’ i! existe
quelque m otif que nous aurions dissimulé , et qui sert au moins de
palliatif à ce jugement.
Il est donc juste de donner cette satisfaction ; et c’est ce que nous
allons faire, en analysant non seulement les motifs du jugement dont
est appel, mais même le rapport du commissaire de la faillite qui
s’y trouve inséré, et qui lui a servi de base.
§. I- .
Exam en du rapport du commissaire de la fa illite (*).
T EXTI.
« D ’abord, d ’après l’examen d’une série de procédures relatées
« dans un imprimé publié par le sieur Herhan lui-mêine, nous avions
« cru appercevoir qu’il étoit insolvable même avant le i5 mars 1807,
« e t, fondés sur l’art. 41 du code de commerce, nous inclinions
« pour le maintien de votre jugem ent du 3o a o û t, sans rien préjuger
« pour ou contre la validité des ventes faites à divers par le sieur
« Herhan, pareeque nous pensions qu’il y avoit, nies celle époque,
« cessati on de paiement. »
(*) Les reproches qui vont être faits au rapport de ce commissaire ne portent
a u c u n e atteinte à la considération qu il mérite par sa droiture, et nous sommes bien
convaincus que c’est à son insçu, et contre son gré, que ce rapport a été rendu public-par la voie de l’impression.
�( 3i )
O lî S E II Y A T I ü N S.
Le commissaire débu te par avouer que la série de procédures contre
ITerhan, établissoit son insolvabilité, même avant le i mars 1807;
que cette considération avoit d’abord entraîné la conviction q u ’il y
avoit eu , dès cette époque, cessation de p aiem en t, et que par con
séquent, la fixation portée au jugement du o août devoit être
maintenue.
Cet aveu est précieux en ce qu’il laisse appereevoir la premiere
impression qui d o it résulter de la série de pareilles procédures sur
un esprit qui est livré sans prévention, à l’impulsion du bon sens
et de la raison naturelle.
Cette impression fut si profonde chez le commissaire, que déjà
il avoit rédigé son rapport en conséquence, avec des conclusions au
mÎBouTTÈ de l’opposition.
Com m ent, donc, est-il arrivé que le même commissaire ait tout
(l’un coup abdiqué sa conviction?
Par quelle m agie cette série de procédures, entraînant la cessation
5
3
de p aie m e n t, s’est-elle évanouie à ses y eu x ?
Le commissaire va lui-même nous instruire des motifs de sa con
version.
T EXTE.
«Mais avant de vous soumettre notre avis, nous avons voulu
« entendre le sieur Garnery lui-même, et savoir de lui sur quoi il
« justifioit les motifs de son opposition. »
Observations.
Assurément c’étoit fort bien d'entendre le sieur Garnery lui-meme,
mais toutes les conférences possibles 11e pouvoient pas effacer la
série de procédures qui constituoient la cessation de paiement
à époque du i mars 1807, ni faire disparoîtré es protêts, les con
traintespar corps, les commandements, les saisies-exécutions, v e n t e
1
5
1
�( 3> )
de meubles sur le carreau tle la p la ce publique ; ces pieces parlant
plus haut que tout ce que pouvoit alléguer le sieur Garnery.
T exte.
« N ous avons recon nu qu e les créanciers poursuivants et saisissants
« désignés dans la nomenclature publiée p ar le sieur Ilerhan lui« m ê m e , ne figuroient pas au bilan. »
Observations.
On voit déjà le rapport qui s’égare et sort de la question (effet
manifeste des conférences avec le sieur Garnery).
En effet, de quoi s’agissoit-il dans cette entrevue? de savoir ce
qu ’il auroit à dire contre cette série de poursuites, de procédures,
qui annonçoient une cessation de paiement, même avant le i5 mars
1807.
C etoit sur ce point seul qu’il fàlloit que le sieur Garnery établit
sa justification, et voilà que le commissaire se jette dans une dis
cussion étrangère à cet objet ; et, ce qui est bien pis encore, le voilà
qui accumule méprises sur méprises.
Premièrement, il faut commencer par démentir formellement
l ’assertion du rapport que les créanciers poursuivants et saisissants,
énoncés dans la nomenclature publiée par Ilerhan, ne figuroient
. pas au bdan, rien n ’est moins exact ; et si le commissaire a reconnu
cette circonstance , c’est faute d’avoir bien lu le bilan, ou la nomen
clature; la preuve en est facile.
L e premier créancier saisissant qui se trouve indiqué dans la
nomenclature dont il s’agit, est le sieur Bertrand (saisie-exécution
du 1 " mai 1807), pour un billet endossé Longuet et B ial.
Or, cette même créance f i g u r e à l’article 1 2 , du chapitre , du
bilan, avec laquelle elle ne devoit faire qu’un seul et même em
ploi (puisqu’elle procédoit d un ordre passé).
3
C’est ce qui est expliq ué par cette note mise en accolade. «Il est
�(' 33 )
« à observer que cette
créance n’en fait qu’une avec celle de
« MJVI. Longuet et Rial. »
La deuxieme créance énoncée dans la nomenclature, est celle du
sieur Poulain (u8 février 1807).
Cette même créance figure au bila n, chap. , à l’article Lam y, en
ces termes: à observer que cette créance (Lamy) n’en fait qu’une
avec celle de M. Poulain.
5
liassand (poursuites du i5 avril 1807), se trouve au b ila n , sous
l’art. Lamy, avec la même observation.
v
Becheyras (saisie-exécution), figure au b ila n , à l’art. 12 , chap.
<3,
article Lamy, avec la même observation.
Ainsi des autres.
Voilà déjà la preuve d’une grande inattention. Or, quand un rapp o r t, qui doit être le siege des vérités les plus exactes en point de
fait, débute par une méprise d’une aussi grande force, c’est un
préjugé bien défavorable pour le reste.
En second lieu, quel est l’objet de cette déclaration erronée?
Et où le commissaire en a-t-il voulu venir par cette assertion?
Que la nomenclature publiée par Ilerhan des poursuivants ei saisis
sants se retrouve, ou non, dans le b ila n , quelle conséquence en
résultoit-il contre I’ époque du i
5
mars 1807, assignée à la faillite de
Ilerhan? La rédaction du bilan produit en août 1808, pourroit-elle
anéantir la série des poursuites, procédures et autres actes constatant
le refis de paiem ent a v a n t les i mais et 28 ju in ? Un failli, quelque
chose qu’il puisse fa ire , ou dire, est incapable de retarder ou d’avan
cer lepoque de sa faillite. Cette époque est fixée par des actes irré
vocables qui sont à l’abri des opérations ultérieures.
5
T exte.
« Q ü’aucun d’eux 11e s’étoit présenté à la vérification, du moins
« nominati vement . »
5
�( 34 )
Observations.
C ’est la même allégation répétée en d’autres termes, mais cette
modification (au moins nominativement), est digne d’attention, eri
ce qu’elle indique que les créanciers saisissants et poursuivants
énoncés dans la nomenclature, avaient été représentés à la vérifi
cation sous d’autres noms; ce qui revient absolument au même
effet que s’ils l’eussent été nominativement, et la chose est facile
à concevoir.
Les saisissants et poursuivants ne tonoient leurs titres que par
l’effet d’un ordre; le créancier titulaire a dû se présenter seul, à la
vérification, et l’on ne voit rien en cela qui soit relatif à l’époque
de la faillite.
T E XT E.
« En second lieu, nous avons remarqué que la grande majorité
« de ceux qui ont vérifié, ont des titres souscrits postérieurement aux
« époques de la fixation de la faillite, i mars 1807, et des ventes
« faites par Ilerhan ( 1 m ai et 28 ju in 1807 ). »
5
5
O bservations.
Q u’est-ce que cela fait pour l’éclaircissement de l’époque de la
fa illite ? Et quel rapport y a-t-il entre cette époque une fois fixée,
et des effets souscrits postérieurement.
Il est évident qu’il y a ici divagation, et que la question est déjà
perdue de vue.
Au surplus, il est bon d’observer que ces effets souscrits posté
rieurement aux i mars, i mai et 28 ju in , 11 étoient que d’anciens
effets renouvelés; que leur identité est bien établie, et que par
conséquent il y a méprise dans ce point de fait.
5
5
�(
T
35
)
exte,
« Que les sommes dues aux créanciers île sont pas toutes identi« ques avec celles portées au bilan. »
Observations.
Qu’y a-t-il de commun entre ce prétendu défaut à'identité, et
l’ouverture d elà faillite, qui est fixée au i
une aberration de raisonnement.
T
5 mars 1807? Voilà encore
e x t e.
« Que plusieurs d’entre eux ont reçu des à comptes. »
Observations.
Ces à comptes reçus n’étoient pas bien difficiles à remarquer;
puisque le bilan en f’a isoit lui-mènie mention; mais quelle conséquence en resultoit-il pour la question sur l'époque de la fa illite ?
T exte.
« Qu’il est notoire que plusieurs créanciers portés au bilan, sont
« PAYÉS. »
Observations.
Ln ee cas, ce seroit une inexactitude à réformer dans le p a ssif du
b ila n , ce qui est l’affaire des syndics aux termes de l’article 628
du code de commerce.
Or, de quoi cette circonstance sert-elle pour l’époque de la faillite?
Mais est-il bien vrai q u ’il se trouve au bilan des créanciers qui
étoient payés? Où le commissaire en a-t-il puisé la preuve? JVeseroitce point là, encore une surprise, et un résultat de sa conférence
avec le sieur Garnery?
Lli bien! il est bon qu’on sache: que, malgré cette prétendue
notoriété, le fait est faux, que des créanciers portés au bilan aient
été complètement acquittés par Ilerhan ; il est, au contraire, notoire
�( 36 )
q u ’à compter du mois de mars 1807, jamais aucun créancier n’a
obtenu de lui cette satisfaction (*).
S’il se‘ trouve des créanciers -payés, ce sont ceux dont le sieur
Garnery aura tout récemment acheté la créance à trois quarts de
p erte, pour les employer en créance au p air, et s’en fabriquer un
titre de libération du prix de la vente de l’établissement stéréotype;
spéculation qui va dans l’instant se développer.
T exte.
« A l’égard du sieur Garnery, il nous a justifié de douze dossiers,
« avec les titres retirés de chez les huissiers, qu’il a payés à la décharge
« du sieur H erhan, de diverses reconnaissances ou reçus de ce der« nier, et quantité d’autres pieces qui prouvent qvt outre sa libéra« tion, il est encore, aujourd’h u i, créancier de llerhan. »
Observations.
La production de ces douze dossiers retirés de chez les huissiers,
révélé ici le méchanisme secret de la spéculation du sieur Garnery ;
c’est lui-mème qui nous apprend, que se voyant sur le point d’être
inquiété sur sa prétendue acquisition, et sur la simulation de la
quittance de
,ooofr. portée dans l’acte du aB ju in 1807, il a traité
de plusieurs créances litigieuses sur Tlcrlian, pour les appliquer à
35
( * ) N o u s a v o n s déjà fait o b s e r v e r q u e la cessation de p a iem en t a c t e a p p liq u é e a u
' m o is de mars 18 0 7, p a r e e q u e c ’est à c o m p t e r de ce j o u r q u e l ’insolvabilité d ’H e rli a n
: é to it con statée p a r les j u g e m e n t s d u tr ib u n a l d e c o m m e r c e , q u i se su c cé do ien t a v e c
ra p id it é .
10 mars ; j u g e m e n t q u i a c c o r d e u n délai d e -vingt-cinq j o u r s s u r u n billet de 29°>fr.
1 7 mars-, id. s u r u n billet de /,Gofr.
D u d i t j o u r 1 7 mars-, a u tr e j u g e m e n t , s u r u n b ille t de /,/,ofr.
D u d it jo u r , p l u s ie u r s a u tr e s j u g e m e n ts .
24 mars-, id. s u r u ne le ttr e de ch a n g e d e 6qoo fr. (o m h * Courrier), et ainsi d e s u ite ,
d e j o u r en j o u r , j u s q u ’à l ’i n c a rc é r a t io n d H e r h a n , et sans in te r r u p ti o n .
�(
37
)
sa libération, en les faisant entrer en compensation au p a ir avec le
prix de son acquisition du 28 juin (*).
Mais, 011 voit, encore, combien ce détail sortoit de la question.
Le commissaire n’auroit-il pas du lui dire:
-Que parlez-vous « M. Garnery de créances payées ci la décharge
« de Ilerh a n , et de dossiers retirés de chez les huissiers, qui operent
« votre libération du prix de la vente du 28 ju in , et, même vous
« constituent créancier de Ilerhan ?
« Il ne s’agit point, en cet instant, de savoir comment vous avez
« acheté, ni comment vous avez payé; si vous êtes reliquataire, ou
« créancier: ce sont là des points à discuter avec la masse des créan
te ciers Herhan, lorsqu’il s’agira d’établir vos droits particuliers.
« L ’ unique objet à éclaircir entre nous, est Xépoque de la fa illit e ,
« et vos moyens d ’opposition pour faire rétracter la date du i mars,
« fixée par le jugement du o août.
5
5
« Cette date; est a p p u y é e s ur u n e série de procédures, condamna
is. lions,contraintes p ar corps, saisies-exécutions, vente de m eubles ,
« et d'autres actes constatant le refus de paiem ent d ’engagements de
« nature commerciale.
« Q u’avez-vous à dire contre l’effet et les conséquences de cespour« suites? Les avouez-vous? Ou bien les déniez-vous? Les douze dossiers
« que vous m’exhibez viennent même augmenter la masse de ces
« poursuites, en en ajoutant douze aux vingt-sept qui sont énoncées
« dans la nomenclature (**).
( ’ ) O b s e r v e z , en p a s s a n t , q u e la p ré te n tio n d u sie u r G a r n e r y , (le s’être libéré à
l ’aide des créancespayées en t’acquit d u si eu r H e rh an , f o r m e u n a v e u positif, q u ’ il n ’a v o i t
p a s p a y é comptant le p r i x d e l'acte d u 28 j u i n , et q u e la quittance q u i s’y t r o u v e
é n o n cé e étoit simulée.
( * * ) Ges douze dossiers se c o m p o s e n t e ff e c ti v e m e n t , de p o u rs u it e s et p r o c é d u r e s
a n té r ie u re s a u x v en te s des i 5 mai et 28 ju in 1 8 0 7 ; d e m a n ié ré q u e c etoit de la p a r t
d u s ie u r G a r n e r y , f o u r n i r de s a rm e s c o n t r e lu i-m ê m e , et de n o u v e lle s p r e u v e s de lu
faillite o u v e r t e
avant
les ven te s.
�(
38
)
« Hâtez-vous d o n c, sans vous occup er de détails étran g ers, de dé-
3
« duire vos moyens d'opposition contre le ju g em en t du o a o û t, au
« c h e f qui fixe la date de la faillite au i mars 1807; car c’est sur ce
« p oint seulem ent qu e je dois faire mon rapport, émettre mon a v i s ,
« et donner mes conclusions. »
5
M a is , p ar une étrange irréflexion, le commissaire (donnant dans
le piege q u i lui étoit dressé), se laissa entraîner à toute autre chose
q u e ce qu i devoit faire l’objet de son exam en, et s’inclinant devant
les douze dossiers, il proclam e le sieur G a rn e r y , non seulem ent
li béré envers Ilerlian, mais mêm e son créancier.
T exte.
« Notre mission n ’étant pas d’appurer ses co m p te s, et n’ayant pas
« entendu les parties contradictoirement , nous laissons an sieur
« Ilerlian à faire les observations q u ’il ju g era convenables.»
Observations.
Nous avons v u un e ligne plus h a u t , le rapport déclarer, que
d ’après les pièces exhibées par le sieur Garnery, il étoit i*iioitvi:,
« qu 'outre sa libération , il est encore aujourd’hui créancier du sieur
« Ilerlian ; et voilà que
« q u ’il ne peut prendre
a sieur Garnery, fautq
« ment». N’est-ce pas là
le commissaire, un instant a p r è s , déclare :
aucun avis sur Y apurement des comptes du
d’avoir ewtendu les parties contradictoireune contradiction?
Il n’e s t , d o n c , plus vrai q u ’il soit prouvé (à l’aide des douze dossiers
retirés de chez les huissiers) , que le sieur G arnery s’est libéré de son
p r i x , et soit m êm e devenu créancier du sieur Ilerlian !
A laquelle des deux assertions du
rapport fa u t-il s’arrêter?
Cette inconséquence n ’existeroit p as, si le commissaire, au lieu de
se mêler des comptes du sieur G a rn ery, se fut seulement occupé
d ’éclaireir, contradictoirement entre les parties, la véritable époqiuï
de la faillite.
�( 3q )
T E X T F.
« Nous renferm ant dans les bornes de notre m ission , et d ’après
« le court exposé que nous avons fait, il est impossible de fixer l’épo« que de la faillite d ’IIerhan au i
5 mars
180 7, com m e il le pré-
« ten d ..............»
Observations.
Impossible! co m m e n t cela arriveroit-il? P uisqu e dans les asser
tions que nous venons de relever il ne se trouve r ie n , absolum ent
5
rien qui puisse faire disparoître l’époque du i mars 1807.
Mais puisque le commissaire ne ve u t pas adopter l’époque du
i 5 mars 1807 (fixée par le ju g em e n t du
qu e choisira-t-il donc depuis le i
3o a o ù t ) ,
quelle autre é p o
5 mars? A laquelle s’arrêtera-t-il de
préférence ?
Ecoutons :
T
exte
.
« La tâche qui nous a paru la p lu s d ifficile, est la fixation de la
véritable époque de cette faillite. »
Observations.
Impossible à'un côté, difficile de l’autre! voilà un embarras dans
lequel le commissaire se place bien g ra tu ite m e n t: car il ne tenoit
q u ’à lui d’en sortir par un procédé bien sim ple; c’étoit d ’obéir à la
disposition de la lo i, qui
diîcl a rf,
la faillite ouverte, au prem ier acte
de cessation de paiem ent (art.
et (l u i fixe cette cessation par la
date de tous actes constatant le refus d'acquitter ou de payer des en
gagements de commerce ( art. /j/j 1 ).
Or, on fournissoit au commissaire une assez ample provision de
pareils actes pour lui indiquer la véritable époque qui lui paroît si
difficile à trouver.
En effet, les lois commerciales prévoyant qu en plusieurs occasions
�(
4°
)
I’ iîpoquj! <le la fa illite ponrroit 'offri r* u n g r a n d i n t ér ê t, el ne v o u l a n t
pas l iv re r u n e q u e s t i o n aussi i m p o r t a n t e à l’a rb it ra ir e (les j u g e
m e n t s , - o n t c r u i ndi s pe ns a bl e d ’assigner à l’o u v e r t u r e d ’ u n e fa illite
u n p o i n t de r e co n n o i s s a n c e p r o p r e à p r é v e n i r les d i v e r g e n c e s d ' o p i
n i o n s , et q ui s ervî t de b a s e a u x t r i b u u a u x .
Cette base est la cessation de paiement, et le enraelere de cessa
tion de paiement est signalé par la d a t e du premier acte (quel q u ’il
fut ), portant refus d'acquitter un engagement commercial.
:i Au moyen de ce procédé, toute incertitude disparoît, et quiconque
cherche de bonne foi la véritable époque d’une fa illite peut la trou
ver , sans ^autre peine que de lire la date du premier acte portant
l’aveu d’impuissance de payer, ou des premières poursuites faites
contre lui à raison de défaut de paiement.
Pourquoi donc, le commissaire, au lieu de suivre une voie si
simple, s’est-il permis, en opposition avec la lo i, de se perdre, en
raisonnements et en argumentations proscrites par elle? il va en
donner le m o tif bien franchement.
vi: ;ï;
î .':
T E XT E.
,
« Car, si on prenait pour base celle des premières poursuites diri« gées contre Ilerhan, il faudroit remonter à l’origine de son éla« blissement.
« Le sieur Ilerhan s’occupoit plus à créer et à perfectionner sou
« invention, qu’à se ménager des moyens et des ressources pour
« faire face à ses nombreux engagements. »
,.
V
Observations.
On a peine à en croire ses ye u x, en lisant une déclaration aussi
extraordinaire. Quoi ?. Le commissaire fait ici laveu , que si Ion
prenoit pour base de la faillite Ilerhan , les premieres poursuites
contre lui, sa fa illite remonteroit à Vorigine de son établissement;
eh mais! les c r é a n c i e r s Ilerhan n’ont jamais rien dit d’aussi fort,
et ils s’emparent promptement d’un pareil aveu , qui prouve que
(1
�( 4* ).
ce sont les créanciers mêmes qui font grace à Ilerhan, en ne fixant
sa faillite qu’au i mars 1807; en cela, bien moins rigoureux que
le commissaire qui la fait remonter à l ’origine même, de son établisse
5
85
ment (c ’est-à-dire au b ail d ’industrie du 5o octobre i o ).
Il csl vrai, que pour adopter cette date, il faudroit prendre pour
les premieres poursuites contre Ilerh a n , et c’est ce que le com
missaire 11e veut pas; et les raisons qui vont être déduites vont nous
offrir quelque autre sujet de surprise.
bask
k
>
T
exte
.
a Un négociant n’est pas en faillite, précisément, pareequ'il laisse
« obtenir des jugements contre lui. »
Observations.
Ici commence une abnégation continuelle des premieres notions
de la jurisprudence commerciale.
Si le rapport s’étoit borné à parler du cas où un négociant àuroit
laissé obtenir un ou deux jugements restés sans exécution, ce seroit
déjà user d’indulgence; car en bonne logique, un seul jugement
qui atteste l’impuissance d’acquitter un effet commercial, suffit
pour constituer Youverture de la fa illite. Quiconque est bien péné
tré de 1 importance attachée à la foi et à la sûreté du commerce, ne
mettra pas en doute qu un négociant qui m a n q u e à un seul engage
ment tombe en f a i l l i t e ipso fa cto . Le mot fa illite n ’exprime autre
chose que ce défaut de paiement, et jamais, dans aucune place de
commerce, on n ’a imaginé de calculer combien de foison pouvoit
f a illir , avant d’être en fa illite . Néanmoins, des considérations
puissantes exigent qu’on n’ explique pas avec autant de rigueur
le défaut d’acquittement à Yéchéance d’un effet de commerce,
lorsque d ailleurs il n ’a pas donné lieu à une explosion éclatante ;
mais ici il ne s agit ni d’un jugem ent, ni de deux, ni de trois,
etc. il s’agit d une série de contraintes par corps qui se sont succé
dés durant le cours de i o , 1806, 1807 et 1808, et qui forment
85
6
�4
( * )
une insolvabilité permanente,’ e t, même , une cessation notoire de
paiement.
Texte.
« Il faut q u ’il y ait absence de son domicile, »
Observations.
Absence de son dom icile! Celte condition est imaginaire, et de
nouvelle invention.
L ’article i er du titre i i,d e l’ordonnance de 1G73, place, il est v r a i ,
la retraite du débiteur au nombre des signes de faillite, mais ce
n ’est que démonstrativement, et non limitativement. Cet article veut
que tout débiteur qui abandonne son domicile, soit reconnu en
fa illite ; mais il ne dit pas que faute de cette circonstance, il n’y ait
pas de faillite.
>
•
Texte.
« Et cessation absolue de paiement. »
■Observations.
Absolue est ici de trop, et un vrai contre-sens; car il s’ensuivroit
que jamais on ne sauroit s’il y a f a illit e , même à la suite de p lu
sieurs effets protestés, et de plusieurs condamnations, le débiteur
pouvant, par quelques paiements partiels, empêcher q u ’il y ait ces
sation absolue.
44
L ’article
1 du code de commerce dit: « Lorsqu’il y aura cessation
« de paiement », et assurément, Ilerha.n éloit arrivé au i mars 1807,
au terme où il y avoit bien cessation de paiement, puisque la vente
de ses meubles, effets, et de scs atteliers, étoit placardée dans tout
Paris, pour être effectuée sur la place p u b liq u e, faute de paiement.
5
T
e
x T Jï.
« Mais lorsqu’il traite avec ses créanciers, q u ’il leur paie des à
�( .
43
)
« comptes, qu'il contracte de nouveaux engagements avec e u x , il ne
« p eu t être regardé comme f a i lli; telle étoit notre jurisprudence avant
« que nous fussions régis par le code de com m erce. L a loi nouvelle
« (q u a n d bien m êm e on lui donneroit un e autre interp rétation ) ne
« peut avoir d ’effet rétroactif »
Observations.
Est-il bien vrai q u ’il existoit antérieurem ent au code de commerce,
un e ju risp ru d e n ce qui puisse a u jou rd 'h u i servir d ’autorité favorable
a u x asser tions avancées dans ce rapport? et qu e le code de commerce
ait in tro d u it une législation nouvelle, dont l’effet ne soit pas a p p li
cable à l’espece dont il s’agit?
N ous p o u v o n s , en toute a ssurance, attester le co n tra ire , et p o u r ne
laisser a u cu n e in certitu d e sur ce p o in t, nous allons offrir le tableau
de la ju risp ru d e n ce s u r cette niatiere.
PR IIfC IIT S
Sur les caractères constitutifs de Vouverture de la faillite.
La cessation de paiem ent considérée sous son ra p p ort avec l’o u
verture de la faillite, présente trois especes ou hypotheses qu e nous
allons p arco u rir successivem ent.
Premiere espiîce. Un négociant, dans u n m o m ent d’ u r g e n c e , a
laissé protester plusieurs effets à le u r é c h é a n c e , et obtenir des ju g e
ments contre lui (voilà un germ e de faillite); maïs ces ju gem ents
n ’ont pas été suivis d ’e xécutio n ; il n ’y a eu ni vente de meubles,
ni scellés, ni saisie-exécution, ni incarcération.
L e débiteur a trouvé le m oyen de p ré v en ir l’écla t, de calmer ses
créanciers, en payant les u n s , en donnant des ¿1 comptes aux autres,
et obten an t des délais.
De m aniéré q u ’à la suite de cet arran gem en t, il est v e n u à b o u t
de co u vrir ses dettes , et de continuer son commerce.
�(
*44 )
Supposons, à présent, q u ’il s’éleve la question (le savoir si ce
débiteur étoit en état de fa illite par le seul fait du prem ier jugem ent
obtenu contre lui.
Il faut répondre q u ’il ne doit pas être considéré comme f a i lli, même
sous l’empire actuel du code de commerce. Pourquoi cela? parcequ ’ il n’y a aucun acte public qui ait produit au grand jour la décon
fiture du débiteur. Le germe de faillite qui se trouve enfermé dans
les protêts et jugem ents, n a pas eu le temps de se développer par
les poursuites d’exécution, et il s’est étouffé promptement entre le
débiteur et scs créanciers.
A in s i, quiconque, par intérêt, ou par malveillance, viendroit
réveiller cet événement pour y puiser des caractères de faillite,
seroit mal accueilli, et succomberoit dans sa prétention.
Mais observez bien tpie la raison décisive de cette jurisprudence
se trouve dans la circonstance q u ’il n’y a eu auparavant ni depuis,
aucun signe extérieur de faillite : lois que scellés, saisie-exécution,
v en te, incarcération au. dépôt de bilan; et si quelques uns de ces
a c tesa vo ite u lieu, tout ce qui vient d’être dit ci-dessus, cesseroit
d’avoir son application, comme on va le voir dans les especcs
suivantes.
S econde espfce . C’est celle d’un débiteur qui (comme dans l’espece
précédente (laisse obtenir plusieurs condamnations faute d'acquitte
ment d’effets commerciaux à leur échéance, et qui (pour prévenir
les poursuites commencées), souscrit de nouveaux effets, contracte
de nouveaux engagements, dont le produit lui sert à couvrir les
condamnations.'
A l aide de ces emprunts successifs, il parvient à déguiser le dé
labrement de ses affaires, et à se maintenir dans son commerce,
jusqu’au moment o ù , toute ressource venant à lui manquer, il fait
enfin sa d é c l a r a t i o n üe faillite.
A quelle époque faudra-t-il fixer Xouverture de cette faillite? serace au dernier acte constatant refus de paiem ent? ou bien faudra-t-il
�(
)
45
rem on ter ju s q u ’à la premiere poursuite (q u i p ou rroit dater de p l u
sieurs années auparavant).
La réponse est; q u ’ il faut rem on ter à la date des premieres p o u r
suites , q u o iq u ’antérieures de plusieurs années à la déclaration de
faillite. La
déclaration
a eu l’efi'et de rattacher la date de la faillite
à celle du p re m ie r ju g e m e n t de co n d a m n a tio n , et de faire r e v iv r e
tous les actes interm éd iaires , p o u r ne com poser d u tout q u ’un e n
sem ble indivisible.
En pareil ca s, la d é c l a r a t i o n d ? fa illite n ’est pas un acte consti
tutif de f a illite , mais seulem ent un acte récognitif Tel étoit le p r i n
cipe admis aux consuls et dans les cours.
4
En 175 ) le sieur L ay de Serisy, ayant déclaré sa fa illit e , la qu es
tion s’éleva sur l’époque à laquelle devoit en être fixée l’o u v e r tu r e ,
plusieurs
créanciers prétendant
la faire rem on ter à d ix années
au-delà (ce qui entraîuoit la n ullité de p lusieurs ventes faites dans
l'in te rv a lle ).
L e ‘20 ja n v ie r 1^5 5 , intervint arrêt du p arlem ent de Paris, q u i ,
« p ou r fixer l’époque de la faillite de L a y Serisy, renvo ie les créan
ce ciei s p ardevant les juges-consuls de Paris, à l’effet de donner le u r
« avis qui seroit reçu en la co u r. »
Le trib u n a l des juges-consuls s’étant fait assister de plusieurs
banquiers et négociants, donna son
avi s
le 23 m a rs, portant « qu e
5
« la faillite devoit être réputée et déclarée ou ve rtç dès le i ju in 174 5 ,
« date de la prem iere sentence obtenue contre lu i , et qui avoitétê
« suivie de nombre d ’autres, sans interruption. »
Le
8 avril s u i v a n t ,
a r r ê t q u i , en h om o lo gu an t l’a w des juges-
consuls, déclare la fa illite de Lay Serisy avoir été ouverte dès le n
ju in 1745 ( n e u f ans auparavant').
On voit par cet e x em p le, un e faillite ignorée se révéler au b o u t
de d ix a n s , et se rattacher au prem ier ju g em e n t de condam nation ;
dans une espeee, où p en dan t le cours de ces n e u f annees, il n’y avoit
eu ni vente de m eubles , ni saisie-exécution , ni .scellés , ni incarcéra-
�( 46 )
lion, ni aucun autre signe ostensible de faillite, que des jugements
restes sans exécution.
Mais cette décision étoit fondée sur le principe généralement
adopté: « Que la déclaration de fa illite fait revivre les caracteres
« de faillite cpii Tavoit précédée, en la reportant ju sq u ’au premieres
« poursuites. »
Tr oi si ème ESPECE. On vient de voir l’exemple d’un débiteur q u i,
durant le cours de sa faillite, a subi, des poursuites, sinon rigou
reuses, au moins capables de le discréditer dans l’opinion publique
(car tel est l’effet inévitable des p rotêts , et de jugem ents obtenus) ;
niais une autre espece se présente, c’est celle d’un négociant qui ,
sans avoir éprouvé la moindre poursuite judiciaire, ni protêt, ni
condam nation, e t , au contraire, pour les prévenir, a fait un
atermoiement avec ses créanciers.
A la faveur de cet arrangement, son commerce n’a pas discon
tinué un seul instant; aucun signe extérieur n’a trahi aux yeux du
public le secret de son embarras, il a souscrit et accepté des effets
commerciaux qui ont été acquittés exactement à leur échéance.
Mais, voilà q u ’il se trouve, au bout de plusieurs années, hors
d’état de remplir les conditions de son contrat d’atermoiement, et
contraint de déposer son bilan p o u r laprem iere fois.
A quelle époque faut-il placer l’ouverture d’une pareille faillite?
Sera-t 011 autorisé à remonter à la date du prem ier acte de défaut de
p a iem en t, ou bien, faudra-t-il ne calculer la faillite que du jour où
il y a eu cessation absolue et définitive de paiements?
Réponse. D ’après les principes ci-dessus exposés, la fa illite est
ouverte
a n té rie u re m e n t
au contrat d’atermoiement, et à compter du
premier acte préparatoire; quand même ce ne seroit q u ’une lettre
missive, ou une circulaire.
Dans la nui t du 26 nivose, an 6 ( i
5 janvier
1798), le sieur i r * * ,
négociant, est volé.
Le surlendem ain , uS, il écrit à ses créanciers une circulaire pour
�( hl )
les informer du malheur qui lui est arrivé, leur avouant « q u ’il se
« trouve, par là, hors d ’état de payer, ses effets à leur échéance, et
« il finit par demander un délai de n e u f mois. »
Plusieurs d’entre eux lui accordent ce délai, et B........ reste en
pleine jouissance de sa maison de commerce, sans la moindre in
terruption ni le moindre changement.
Dans l’intervalle du 26 nivose au terme accordé, quelques créan
ciers se procurent un hypothéqué sur les immeubles de B ..........et
prennent inscription;
A l’expiration des neuf mois de délai, B ...... ne se trouvant pas
encore en état d’effectuer ses paieinenls, se déclare en fa illit e , et
dépose son bilan le 9 thermidor an 7 (26 juillet 1799).
fa illite de B ...........se réduisoit à solliciter de nouveaux délais,
qui le missent en étal de couvrir son passif, ce qui lui fut accordé
par un second traité, nu moyen duquel il continua de garder, comme
par le passe', sa maison de commerce.
Cependant, les immeubles de B ..........ayant été vendus, il y eut
contestation entre les créanciers hypothéquaires et les créanciers
chirographaires, sur la question de savoir si le prix de la vente devoit être distribué par ordre d'hypothéqué, ou bien au marc la livre
(question qui emportoit celle de savoir: si à l’époque des inscrip
t i o n s , ........... devoit être considéré comme fa illi).
Ceux qui demandoient la distribution par ordre d'hypotheque,
disoient : « que B...........n ’éloit pas en fa illite ouverte à époque de
« l ’inscription prise sur ses biens. »•
1
« Comment pouvoit-on le supposer en faillite, alors, puisqu’il n’y
« avoit pas le moindre signe extérieur de son i n s o l v a b i l i t é : point de
« bilan déposé, pas un jugem ent de condamnation, pas meine un seul
«protêt ; sa maison- de commerce n’avoit rien jierdu de son activité ;
« et des lettres de change jointes aux pieces du procès, et ses livres et
« registres tenus avec la même exactitude, attestoient la continuité
« des négociations, tant avec ses créanciers, qu avec d’autres, jus« q u ’au jour du dépôt du bilan. »
�( 48 )
« Comment, en pareille circonstance, etoit il possible de faire ro« monter sa faillite à dix-huit mois au préjudice des créanciers de
« bonne foi, qui avoient pris une inscription dans l’intervalle? »
Certes , voilà une espece bien favorable.
Mais ta masse dés créanciers c/urographaires se renfermoit dans
le principe « que la cessation absolue de paiements, manifestée par
« le dépôt du b ila n , avoit 1 effet de se rallier au premier acte de dé« faut de paiem ent, pareeque la cessation absolue n’étoit autre chose
« que la suite de ce prem ier acte, et le complément d’une fa illite
« commencée. »
Or, ce commencement de faillite, ils le trouvoient dans le billet
circulaire écrit par - .......... à ses créanciers, le 28 nivose an 6 ( i
janvier 1 798), par lequel il leur annonçoit l’impuissance d ’acquitter
ses effets à leur échéance, demandant un délai de neuf mois (*).
5
15
2g prairial an 9 (18 juin 1801), jugement du tribunal civil de
première instance du département delà Seine , qui déclare la faillite
de Iî.. . . . ou v e r t u , à compter de son billet circulaire du 28 nivose
an G, et ordonne la distribution au marc la livre.
5
Sur l’appel, a r r ê t de la couf du 26pluviôse an 10 ( i février 1802),
c o n f j r m a t i f , par les motifs énoncés dans le jugem ent du 29 p rairial
(plaidant M M . Chabroud e t Delahaye).
A in s i, voilà qu’il est'jugé bien disertement:
( * ) " I ja faillite d o i t se c a lc u l e r d u 2 8 ‘n i v o s c a n 6 , disoit l e u r d é f e n s e u r ; p o u r q u ’ il
« y a i t faillite , il su ffisoit q u ’il y ait d é f a u t d e p a i e m e n t , c’c s l ce q u i se r e n c o n t r e d a n s
« l ’e sp ece. S i les c ré a n c ie rs o n t a cc ep té d e n o u v e a u x e n g a g e m e n t s , c'cst q u ’ ils y étoie n t
« f o rc é s , ce n ’e st q u e s u r
1a v e u
m ê m e d u d é b i t e u r d e so n im p u iss an c e de p a y e r . A p r è s
« le premier terme exp iré, B .............avoue de nouveau qu’il 11e peut payer, il de■
<mande un second délai. N ’est-ce pas se constituer en faillite ? S ’il a continué ses opé« rations , c’est pareeque scs créanciers le lui pernicttoient; et encore aujourd’hui qu’il
« continue sou commerce, dira-t-on qu il n est pas en faillite?. Elle n’est jamais plu»
« claire que quand le débiteur l’avoue lui-meme ». (Journal du palais, deuxieme semestre
de l’an 10, page 261J, n° yo).
�( 49 )
i ° Que le dépôt du bilan opère* une cessation absolue de paiement.
2° Q u’une cessation absolue se composant de cessations partielles,
la faillite reprend sa date au prem ier acte constatant le refus ou le
défaut de paiem ent, quelque distance qui se trouve du premier acte
de défaut de paiement.
° Q u’il n’est pas nécessaire que lé prem ier acte constatant le
refus de paiem ent, soit un acte ju d icia ire, ni une poursuite, q u ’il
3
peut également résulter d’une lettre ou d’un billet circulaire.
4
° Que les arrangements, traités et transactions qui ont lieu dans
l’intervalle du premier acte de défaut de paiement, à la déclaration
de fa illite , n’empêchent pas le rattachement des deux époques, et
ne dégagent pas le débiteur de la qualité de fa illi.
° Q u’il en est de même de la circonstance de commerce continué,
d’à comptes donnés, d'effets payés, ou souscrits de nouveau et posté
rieurement; que toutes ces circonstances disparoissent devant la
déclaration de fa illite qui vient se renouer avec le prem ier acte de
non paiement.
G° Que les considérations les plus favorables au débiteur, ou aux
tiers acquéreurs, ou prêteurs de bonne f o i , sont incapables de faire
fléchir et d’atténuer cette jurisprudence ; pareeque la considération
duc à la sûreté du commerce, ne permet aucune composition avec
les principes, ni aucune acception des personnes.
5
Tel est l’exposé au vrai de la jurisprudence antérieure au code de
commerce, et qu’il a lui-mème confirmée, en la reproduisant presque mot pour mot.
3
L ’article 4^7(qui est le premier du livre , concernant les faillites),
commence par établir en principe « que tout commerçant qui cesse
« ses payements est en état de fa illite. »
Or, qui dit cesser ses paiem ents, dit, sans doute, les paiements
d ’effets échus, sans s’occuper des effets à éçheoir; il suffit donc,
q u ’il y ait non paiem ent d ’effets échus, pour que le non payant soit
en état de fa illite.
L ’article
o, en introduisant un nouveau inode de déclaration
44
7
�( 5o )
de fa illite , exige que le f a illi fasse mention, dans cette de'claration,
du jour où il aura cessé ses paiem ents ( pour faciliter la fixation de
Youverture dé faillite).
I l restoit à savoir quelle date le déclarant adopteroit p o u r fixer
l’époque où ses paiem ents seront réputés avoir cessé; et l’article /|41
leve l’incertitude en disant :
« L ’ é p oque de la faillite est fixée soit p a r la retraite du débiteur,
« soit p a r la clôture de ses magasins, soit p a r la date de tous actes
« constatant le refus d ’acquitter ou de payer des engagements
« commerciaux. »
Ce qui rentre parfaitement dans l’esprit de la jurisprudence anté
rieure au code, que nous avons exposée ci-dessus: mais le code de
commerce considéré, aussi, q u ’il pourroit survenir certains cas, où
tin débiteur (solvable, d’ailleurs), seroit exposé à subir des actes
constatant le refus d ’acquitter des engagements commerciaux, tels
que protêts, jugem ents, etc.
Or, ne voulant pas que des actes de cette nature suffisent pour
constituer une fa illite , il ajoute cette disposition bien importante,
que les actes constatant le refus de paiem ent, n ’auront l’effet de
constituer la faillite, qu’autant q u ’ils auront été suivis d’une cessa
tion authentique en ces termes : «Les actes ci-dessus mentionnés ne
« constateront néanmoins Xouverture de la fa illite que lorsqu’il y
« aura cessation de p a iem en t, ou déclaration du fa illi. »
Ainsi nous revoyons dans cette condition, la même jurisprudence
des arrêts de
et du 26 pluviôse an 10.
'
Le code veut, il est vrai, que le prem ier acte de refus de paiem ent
tTeffets commerciaux emporte- Y état de fa illite ; mais il ne le veut
que dans le cas où cette cessation partielle aura fini par une cessation
■
définitive; ce n’est que contre les déclarants
position a lieu.
faillite
que cette dis
�( 5i )
T
exte
.
« P ourquoi nous pensons que l’époque de la fa illite du sieur
« Herlian ne peut être fixée que du jour q u i l a cessé de traiter et de
« transiger avec ses créanciers, et où il y a eu cessation absolue
« de paiem ent. »
Observations.
V o ilà , encore, le même vice de raisonnement, qui dérive du faux
principe que c’est la cessation absolue de paiem ent qui ouvre la
faillite, lorsqu’au contraire la cessation absolue ne fait que former
la clôture de la f a illit e , en lui appliquant le sceau de l'authenticité,
et sa u fla recherche de Xouverture (ainsi que nous l’avons expliqué
ci dessus).
/
T
exte
.
« Et, comme il nous est dém ontré, même par le procès-verbal d e
« vérification et d ’affirmation des créanciers, que le sieur llerhan
« a souscrit les derniers engagements qui figurent dans sa faillite
« dans le courant de novembre 1807; notre avis est: que Xouverture
« de la faillite ne soit pas fixée avant le i er janvier 1808. «
Observations.
Le rapport détermine la cessation absolue de paiement de la part
du sieur llerhan , du jour où il a cessé de traiter et de transiger avec
ses créanciers; et il place les derniers engagements, traités et tran
sactions dans le courant du mois de novembre 1807.
En quoi il y a une double méprise.
i° En ce qu’il n’est pas vrai que les derniers engagements souscrits
par le sieur llerhan soient du mois de novembre 1807, ni qu ’il ait,
dans le cours de ce mois, traité ni transigé avec ses créanciers.
�t
I
(
52
)
Jamais, ni dans ce mois de novem bre, ni dans les précédents, en
remontant jusqu’au i mars 1807, il ne s’est fait de traité ni de
transaction entre eux. à moins qu’il ne plaise au commissaire d’enten
dre par traités et transaction, des commandements, saisie-exécution,
vente de meubles, arrestation.
5
Dans le malheureux état où se trouvoit Ilerhan à l’époque du
mois de novembre 1807, saisi et exécuté dans ses meubles et vête
ments (qui furent vendus quelques jours après sur la pince pu b li
q u e ) , quelle espece d'engagement, de traité ou de transaction
auroit-il pu souscrire avec ses créanciers?
L ’im agination se confond à ch erch er ce qui a pu suggérer au
com m issaire la vision d un traité et d une transaction d'Herhan avec
ses c r é a n cie rs, et de nouveaux engagements souscrits en novembre
1807.
En second lieu, quand cette circonstance existerait, de traité, de
transaction, et nouveaux engagements souscrits en novembre 1807,
comment seroit-ce une raison de n’ouvrir la faillite q u ’au prem ier
janvier suivant? Ces prétendus traités et engagements, auxquels on
assigne la date de novembre 1807, n’ayant pas été exécutés, leur
infraction, suivant tous les principes, remettroit le sieur Ilerhan
in statu quo : donc ce n’étoit plus le cas de faire servir ces engage
ments, traités et transactions, de ligne de démarcation.
Cette ligne est indiquée au 1" janvier 1808; mais pourquoi
cette indication plutôt qn’uue autre?
G’e s t, dit-on , pareeque c’est là q u ’on trouve le terme des négo
ciations d’Herhan. Mais qu’importe donc q u ’IIerhan ait ou n ’ait
pas fait dés opérations commerciales ? et en quoi cela servi roi t-il
pour retarder époque de la faillite ? Est-ce qu une faillite est in
compatible avec de pareilles opérations?
1
Quand, en 1755, les juges-consuls de Paris, assistés de banquiers
et négociants, donnèrent leur avis uniforme que la faillite du sieur
JJeseiisj’ Temonloit à n e u f ans, antérieurement au dépôt de son bilan,
�( 53 )
ils savoient forl bien qu e durant ces n e u f ans il avoit fait des arran
gem ents, des négociations de banque et de commerce, renouvelé clos
effets, traité et transigé à plusieurs reprises avec ses créanciers; mais
cette considération ne les arrêta pas ; et qu oiqu e la cessation absolue
de paiem ent n’eût été effectuée q u ’en 1754 , ils n’en déclarèrent pas
m oins la faillite
ouverte
dès le mois de ju in 1745.
D o ctrin e q u i fut consacrée par l’arrêt du parlem ent.
L o r sq u e le 7 therm idor an 7 , le sieur I>.........eut déclare' sa ces
sation absolue de paiem en t , par le dépôt de son b ila n , un ju g em e n t
du 99 prairial an g , et un arrêt co n firm atif du 26 pluviôse an 1 0 ,
n ’en déclarèrent pas m oins la fa illite
ouverte
dès le 28 nivose an G
(d ix-liu it mois a u p a r a v a n t ), et à la date de la circulaire par lui
adressée à ses créan ciers, p ar laquelle il leur dem audoit un délai de
n e u f mois.
O r , nous avons vu q u e , dans l’intervalle de cette circulaire au
dépôt de son b ila n , sa maison de com m erce avoit subsisté co m m e
a u p a r a v a n t ; aucu ne interrup tio n dans sa correspon dan ce, soit avec
ses cré a n cie rs, soit avec d ’autres négociants : son jo u r n a l, et une
liasse jointe au p ro c è s, de lettres de change acquittées dans cet i n
tervalle, faisoient p reu ve de la continu ité de ses négociations com
merciales.
Et cependant ces considérations ne firent pas fléchir le p rin c ip e ,
qu’une fa illite remonte à la date du premier acte de cessation p a r
tielle.
T k x t e.
« Telle est notre opinion, que nous soumettons à vos' lumieres et
« à votre équité.
« Délibéré à P a r i s , ce t
3 décem bre
1808. Signé G o u l l i a r t . »
Observations.
Si, effectivement, cette opinion eût été soumise à une mûre déli
bération du trib u n a l, nul doute q u ’elle eût été couverte d’une im
�( 54 )
p r o b a tio n gé nérale ; il n ’y a v o it q u e la v o ie d 'u n j u g e m e n t
f a u t , sans délibéré,
par dé
q u i ait p u arrach er au tr ib u n a l u n j u g e m e n t
c o n f o r m e à I’ a v i s d u co m m issa ire.
§• I I .
E xam en du jugem ent p a r défaut du 27 décembre 1808.
« Considérant qu’il ré su lte , tant dudit procès-verbal de vérificaa tion, que du rapport de M. Goulliart,
« P rim o, que la grande majorité des créanciers du sieur Ilerhan
« ne sont porteurs que d’engagements souscrits postérieurement au
« i mars 1807, époque à laquelle ledit Ilerhan a fait remonter sa
«fa illite dans sa déclaration. »
5
Observations.
1
Ce considérant n’est que la répétition d’une méprise qui a échappé
au commissaire dans son rapport, et qui a été renversée de fond-encomble par le rapprochement du bilan et du procès verbal de véri
fication. Ces deux pieces établissant, au contraire, que la grande
majorité des créanciers énoncés au b ila n , et vérifiés, sont porteurs
à'engagements souscrits non postérieurement au i mars 1807, mais
antérieurement à cette époque. ( Voyez ci-dessus, page
.)
5
33
T exte.
« Secundo, que les créanciers qui le poursuivoient à cette époque
« (d u i5 mars) ont été payés depuis en totalité, et 11e se sont pas
« présentés aux vérifications. »
Observations.
Même réponse qu’au considérant précédent; c’est, encore, une
inexactitude dans le fait : il n’est pas vrai que les créanciers qui
�5
poursuivirent Herlian dans l’intervalle du i mars au a8 ju in 1807
aient été payés par lui en totalité, et qu’ils ne se soient pas pré
sentés aux vérifications (*).
T
k x t e
.
« Tertio, que la p lu p a rt des créanciers désignés au bilan, et véri«fié s , ont reçu des à-comptes depui s ladite époque du i mars 1807,
5
« puisqu’ils n’ont présenté que des titres inférieurs en sommes à
« celles portées au bilan. »
Observations.
Sur soixante et d ix créanciers portés au bilan, il y en a seulement
six qui ont subi une légere dim inution, l’une de 24 l i v . , l’autre de
l i v . , etc., et qui ne s’élevent pas au total à 600 liv.
Qui dit la p lu p a rt, dit la plus grande p artie, la majorité. O r ,
convient-il de donner cette qualification , à la modique minorité
de six sur soixante et dix?
Et puis, à quoi revient cet argument? quelle conséquence four
nit-il? q u ’ils ont reçu des à-comptes, dit le considérant. Comme si
des à-comptes donnés par un débiteur étoient incompatibles avec
son état de fa illite !
C’est l’inverse du droit commercial ; car celui qui, à l ’échéance de
33
son engagement, ne peut offrir qu’un à-com pte, atteste par cela
même son impuissance et son état de faillite.
\Jii-compte donné (au lieu de la totalité) porte le caractere d ’une
cessation partielle de paiement; et loin que l’on puisse présenter des
à-comptes comme une circonstance destructive de l’état de fa illite ,
elle en donne la preuve.
( * ) P a r e x e m p l e , la saisie-exécution à la r e q u ê t e d u sie u r B e r t r a n d , e st Au prem ier
m ai 1 8 0 7 ; et ce c r é a n c i e r a été re p ré s e n té à la vérification p a r le si e u r L a m y .
C ’est p a r c ette c o n s i d é r a t i o n , q u e le c o m m iss a ir e a v o i t a j o u t e , au moins nom ina
tivem ent, ce q u ’on a j u g é à p r o p o s d e s u p p r i m e r d a n s le considérant .
�(
56
)
Voilà pourquoi un simple acte d'atermoiement, une simple réqui
sition de délais, soit à l’amiable, soit en jugement r constitue l’acte
de fa illite commencée.
On a déjà vu ci-dessus (pages
, /¡6, f\7 et /|8) ce principe con
sacré par les arrêls des 8 avril iySS et i février (802 ; en voici un
autre plus récent contre la maison de p rêt dite Lombard-Serilly.
Le () fructidor an ic> ( il\ août i o j , les administrateurs avaient
fait afficher dans le lieu le plus apparent des bureaux, un placard
annonçant que la maison de p rêt rembourseroit ses créanciers par
douzièm e, (1e mois en mois (sans cependant demander la moindre
réduction).
Plusieurs créanciers avoient déjà reçu leur premier douzièm e,
lorsque les fonds manquèrent.
Alors il y eut apposition de scellés, et la question s’éleva de savoir
45
5
85
§i ceux q u i avoient reçu leu r douzièm e devoient le
happobteb .
à la
masse.
'
On voit que cette question étoit subordonnée à celle de savoir à
qitelle époque la fa illite s’étoit ouverte.
Ceux qui se refusoient au rapport des douzièmes payés, prétendoient que. la fa illite n’avoit eu lieu qu’à l’époque de Xapposition des
scellés.
Mais les autres créanciers lafaisoient remonter au p la ca rd apposé
dans les bureaux, qui annonroit le paiement par douzièm e; sur le
motif que « quiconque, au lieu d’acquitter en entier un engagement
« de com m erce, demande du d é la i, et ne paie que p a r à-comptes,
« est, par cela seul, en état de fa illite. »
Le tribunal de première instance s’étoit laissé entraîner par la
considération que le mode d ’à-comptes par douzième avoit été adopté
par un acte homologué (ce qui lui (lonnoit l’apparence d’un arran
gement commun à tous les créanciers), de sorte que, dans cette
maniéré de voir, l’ouverture de la faillite n avoit effectivement com
mencé qu’à Yapposition des scellés ; et c est ce qu’il prononça par son
jugement du i/j mai 1807.
Mais, sur l’appel, la Cour, par son arrêt du & ju ille t 1807, a ré-
�■( 57 )
Tabli le principe dans tonte sa p u r e té , en reportant l’o u vertu re de
la faillite au jo u r de Yapposition du p la c a r d , et en o rdo nnant le
rapport des douzièmes reçus.
Les motifs de cet arrêt formant un contraste frappant avec ceux
énoncés dans le jugement dont est appel, et faisant d’avance sa ré
probation, méritent d’être rappellés ici.
« Considérant, en d ro it, que du moment qu'un débiteur est hors
« d ’élat de payer ses dettes cl l'échéance, et qu ’il a atermoyé avec ses
« créanciers, en leur promettant et annonçant q u ’il les paieroitdans
« une égale proportion dans des ternies autres que ceuxfix é s
leurs
« titres , il s’est constitué en état de fa illite ouverte;
« Q u e , dès lors, tout son acti f est devenu le gage de tousses créan
ce ciers, de maniéré qu’il ne lui a plus été permis d’en avantager
« quelques uns au préjudice des autres; et que ceux qui ont reçu ,
« soit la totalité, soit une partie du montant de leurs créances, n’ont
« pi: les recevoir qu’à la charge de rapporter ;
« CojïsiniiiiANT, en f a i t , que le fructidor an i , les administra« leurs du lombard .Serilly ont affiché (*) au lieu le plus apparent de
« leur caisse, un placard annonçant à tous les créanciers ([u ils ne les
« paieroient que par douzième;
a Que celte annonce de leur part est un véritable atermoiement
« qui a été accepté par les créanciers, puisque le plus grand nombre
« ont reçu le douzième p ro m is, et quelques uns de plus fortes
« parts, etc. (**) »
(3
3
( * ) Il y a bien mieux dans l’espece d’Herlian : au lieu d'affiches annonçant une sus
pension de paiement, il a laissé afficher, le 2.5 avril 1807, une vente publique de tous
ses effets, meubles et atleliers.
( ** ) Une foule d’arrêts anciens et modernes constatent le principe, que le morcelle
ment de paiem ent, les délais dem andés, les traités, transactions, .et atermoiements
constituent l’état de faillite.
L ’article 3 , du titre 12 , de l’ordonnance de
porte : « Q “ e tont débiteur qui a
« passé avec ses créanciers un contrat datermoiement, ne peut plus être reçu à faire
« les fonctions d’agent de change, ni de courtier de marchandises. »
Ilest à remarquer que la même disposition 11e se trouve pas dans le code de com-
8
�(
58
)
On voit que cet arrêt considere des à-comptes payés comme un
caractcre de faillite; à la différence du tribunal de com m erce, qui
decide que des à-comptes payes sont incompatibles avec 1 état de
fa illite !
T Ex T Ei
« D’où il suit que la cessation de paiem ent voulue par la loi n ’a
«pas réellement eu lieu, do la part du sieur Ilcrhan, au i mars
« 1807, et qu’il n’a pas cessé à celte époque de faire des opérations
« de commerce. »
5
Observations.
5
Lorsque le jugement avance en p oint de f a i t qu’au t mars 1807
Herhan n’étoit pas en cessation absolue de paiements ni à'opérations
commerciales, on peut, à toute rigueur, lui passer cette proposition.
Mais quand il ajoute qu’en p oint de droit cette double cessation
absolue est nécessaire et voulue p a r la loi pour constituer l ’état de
f a illit e , c’est une espece d hérésie en nialiere commerciale, que la
Cour s’empressera de réformer. Le texte qui suit va reproduire en
core la même erreur avec plus de développement.
T
e
x T E.
« Considérant que des défauts partiels et non continus de p a ien ments, ne suffisent pas pour constituer un état de fa illit e , puisque
« Yart. 441, 11’admet pour cela les actes constatant refus d ’acquit" « ter, qu aillant qu’il y a cessation de paiem ent, ou déclaration du
«f a illi -, c’est-à-dire que le failli cesse de f a i t , ou déclare q u ’il a
« cessé tout paiem ent. »
mercc, par la raison que, dans 1 esprit de ce code, Yatermoiement se confondant
snree la faillite, il étoit inutile de faire une disposition particulière à cet ¿gard.
�(
$9 )
Observations.
«.
^^ v
* •' .'if »
Il étoit impossible d’expliquer d’une maniéré plus fautive l’ar-o
ticle 4 4 1 du code de commerce, et de lui donner un sens plus cou-,
traire à son esprit et à sa lettre.
Cet article ne vient qu’à la suite de l’art. ^ >qui porte :
« Tout commerçant qui cesse ses paiements est en état de
« faillite. »
Prélend-on que la fa illite n’est consommée qu’à la suite d’une
cessation absolue? Soit, et admettons cette doctrine (q u i, néan
4 7
moins, est susceptible de controverse).
Mais quand une fois celte circonstance de cessation absolue est
arrivée, elle ne f.iit que consommer la clôture de la faillite, et rendre
certain et manifeste ce qui existoit déjà d’une maniéré moins visible.
Alors, il reste à rechercher ’epoque à laquelle In faillite a com
mencé; car, l’instant où elle est déclarée n’est pas l’intitnnt qui l’a
formée; or, c’est cette derniere époque que l’art. 441 indique comme
celle de l’ouverture de la faillite.
La loi veut que la faillite, une fois close par la déclaration du
débiteur (ou tout acte déclaratif) , soit réputée avoir commencé au
prem ier acte (quel q u ’il soit), constatant le refus d'acquitter ou de
payer des engagements de commerce; c’est-à-dire, qu’elle consacre
en principe cette même cessation partielle, que le jugement dont
est appel, rejette comme n’effectuant pas un caractere de faillite.
1
1
Toute erreur de la doctrine contenue dans le rapport du com
missaire et dans le ju g em en t, provient de ce qu’ils confondent per
pétuellement l’ouverture de la faillite avec sa déclaration, son com
mencement avec sa fin, et qu’ils appliquent à l’un ce qui appar
tient à l’autre.
T jî xt e .
« Considérant, d’un autre côté, que ce seroit compromettre le
« sort des créanciers qui ont traité de bonne f o i avec le sieur Ilerhan,
�5
( Go )
.« depuis le i mars 1807, et ceux qoi sont porteurs d’engagements
o souscrits postérieurem entî\ ladite époque, que d’approuver la dnte
« annoncée et fixée par le sieur TIerhan en sa déclaration , puisque,
« si réellement il eut été en faillite, toute opération commerciale
« lui eut été interdite, et qu’aux termes'de l’article 442 (bi code
« de com m erce, il eut été dessaisi de p lein droit de t administration
« de tous ses biens. »
Observations.
Si l’on ignorait la main qui a rédigé les motifs du jugem ent, cc
considérant suffirait pour la déceler.
On y voit le tribunal prendre en considération les conséquences
qui résulteraient contre les acquéreurs de l'établissement de TIerhan,
en prévoyant que l’époque du i mars 1807, entraînerait la nullité
5
de ces aliénations.
C ’est comme si l’on disoit, « nous^ne voulons plus reporter à la
« date du i mars 1807 la faillite d’Iierlnm , pareeque cette fixation
« compromettrait, bientôt après, la validité des ventes faites depuis
« cette époque au sieur Garneryo. t consorts. »
Mais ce m otif, blesse toute convenance, en s’écartant de l’impartialité, qui doit être le caractere distinctif de la justice distribu
tive, et il offre plusieurs inconséquences.
D abord, le tribunal n ’avoit pas à juger, ni à préjuger la validité
des opérations survenues depuis l’époque du i mars 1807; quelque
tut le sort des opérations intermédiaires, ce futur contingent n’éloit
pas soumis au tribunal de commerce; il étoit reservé aux tribunaux
civils, et c étoit, de sa part, inéconnoître et outre-passer sa com
p éten ce, que de le faire entrer en considération pour régler son
5
5
jugement.
Ce qu’on lui demandoit se réduisoit à la fixation de la date de
l'ouverture de la fa illite calculée, non sur les conséquences qui en
résulteraient, mais sur la disposition de la loi.
On n’aime point a v o ir dans ce jugement une sollicitude de cette
�(■G. )
cspecc, ni une prédilection dé personnes, qui répugne à l'impossi
bilité de la loi.
En second lieu, y eut-il jamais de considération plus déplacée,
que celle qui est ici annoncée? Et s’il s’agissoit d’un concours de
considérations, les malheureux créanciers de ïïo rh a n , composés
pour la plupart ouvriers, de fournisseurs, de fabricants, n’avoient
ils pas le droit de réclamer la priorité?
Ne d iro it-o n pas qu'il s’agit de dépouiller le sieur Garnery
et consorts, d’une acquisition laite de bonne f o i , dans l’ignorance
absolue de Yétat de fa illite d'flerhan , et de leur faire perdre le prix
qu’ils en auroient payé?
C ’e st, effectivement, ;t l’aide de cette fiction qu’ils sont parvenus
à usurper le mouvement de commisération qui s’est glissé dans le
jugement dont est appel.
_ •
Mais il n’est rien de lo u l cela.
;
L 'établissement réclamé par les créanciers d’IIerhan , n ’a jamais
résidé entre les mains des prétendus acquéreurs, qu’à titre de d é
p ô t, et pour le soustraire à l’expropriation ; ils étoient parfaitement
instruits du délabrement des affaires de leur prétendu vendeur,puis
que les affiches pour la vente forcée de l’établissement, étoient pla
cardées sur la porte même de la maison, et que l’acte du i5 mai n’a
eu lien que pour prévenir l'effet de cette vente.
Ils connoissoient si bien la détresse de Herhan, que le sieur Garnery avoit déjà avancé i?,oo liv. pour le retirer des mains d’un
huissier-captureur qui le eonduisoit à Ste.-Pélagie (voyez ci-dessus,
page 22).
Ce qu’ils ont fa it, ils l’ont donc fait en p l e i n e connaissance de
cause, et c’est une vraie dérision de les comparer à des acheteurs
de bonne f u i , qui auroient traité de l’établissement dont il s agit,
sans soupçonner le mauvais état des affaires du vendeur.
D’un autre côte, il n’est pas, non
question de leur faire perdre
le prix de leur prétendue acquisition, par une raison bien simple :
p l u s ,
�( Ga )
c’est q u ’ils n'ont pas déboursé un denier; lo prix est resté entre leurs
m a i n s , où il est encore tout entie?’.
N ’o u b l i o n s pas q u e la q u i t t a n c e de a/j,ooo liv. p or té e a u c o n t r a t d u S
b r u m a i r e , an i 4 , c e ü e de 70,000liv. p or té e au c o n t r a t du 1
5 mai , e t
e ni i n celle de 55,000 liv. p o rt é e dans l ’acte d u 28 j ui n 1 8 0 7 ; q u e
t o u t e s ces quittances s o nt u n tissu de simulations i m a g i n é e s c o n tr e
les c r é a n c i e r s (^¥). ( Voyez ci-dessus, pa ge 19).
L e s c r é a n c i e r s d’IIerl iau n ’e nt e n d e n t pas l e u r d i s p u t e r u n e o b o l e
d e ce q u i p e u t l e u r a p p a r t e n i r l é g i t i m e m e n t ; mai s ils d e m a n d e n t ,
de l e u r p a r t , le m ê m e s e n t i m e n t de j ustice.
L e u r prétention se bo rne à faire rentrer dans la masse les objets
qu'ils se sont fait ve nd re sans rien débourser , au sein de la détresse
de Ilerhan. S a u f , e nsui te , à venir, c o nc u r r e mm e n t au partage et
à contribution p o u r leurs créances vérifiées.
S ’il y a perte? elle sera p r o p o r t i o n n e l l e ; c ar d o i v e n t - i l s , dans u n
m a l h e u r c o m m u n , p r é t e n d r e à u n e e x e m p t i o n q u i blesse la loi a u
t ant q u e la r ai s on?
N o u s n e c o m b a t t o n s pas p o u r o b t e n i r u n bénéfice, mais p o u r n ou s
d é f e n d r e d’u n e perte; n o u s ne d e m a n d o n s pas q u ’on s’écarte en
n o t r e f a v e u r des d is po si ti on s do la l o i , mai s q u e l 'autori té de la loi
soit j u g e e nt r e n o u s ; p eu t -o n se p r é s en t er p l u s f a v o r a b l e m e n t ?
Quelle différence des sieurs G a r n e r y et consorts !
(* ) C ’est un point de fait , aujourd’hui devenu au-dessus de tonte contradiction,
que MM. Bcrtin-Devcaux, L aborie, et Garnery, n’ont hikh p a y é du prix de leur
acquisition , et que les quittances sont simulée?.
Ce n’est pas que dans leur système ils eussent spéculé avoir cet établissement pour
rien; mais ils entendoient en confondre le prix avec les créances acquises, ou à acqué
rir contre Ile ib a n , et se servir de ce moyen pour se couvrir de leurs créances cutieres ;
les quittances portées dans les actes des 8 brumaire an 1/,, i 5 mai et 28 juin 1807,
5e rqpporl oient, non au prix qu’ils avoient payé, mais aux créances dont ils libéroient
Ilerhan. C ’est eu cela que leur procède est tout à fait irrégulier, et les livre aux re
proches des créanciers et à l’indispensable nécessité de rapporter.
�( 6
3
)
Tém oins d e la faillite d 'Herh a n , ils s'empressent de s’assurer, par
ava n ce, des m oyens de se c o u v rir de tout danger.
On a vu par quels actes tortueux et com pliqués, ils sont parvenus
5
3oo,ooo f r ., sans bourse délier; avec la p ré c a u
à s’em parer, p ou r le prix apparent de 10 ,ooo f r . , d’un établissement
de la valeur de plus de
tion, néanmoins, de s'en faire donner quittance; forçant , ainsi , le
m alh eureux ven d eu r de s’en rapporter à leur conscience sur l'e m
ploi du p r i x , e t , p a r-là , se constituant eux-mêmes les arbitres de
leur libération.
Devenus les maîtres de toute sa fo r tu n e , ils le livrent à l'am er
tu m e , de voir ju s q u ’au dernier de ses habillements vendus sur le
carreau de l a p la c e p u b liq u e , et d’être ensuite traîné en prison.
Arrivés au te r m e , où par l’effet de la faillite déclarée, tout l'a ctif
d ’Herhan doit être mis en com m un , iis se préparent , de lo in , le
m o yen d ’éluder cette restitution, en disputant sur l' ouverture de sa
fa illite.
Non contents d ’a v o ir abuse de la rédaction d ’un ju g em e n t signé de
confiance, p o u r y p roclam er les assertions les plus fausses, et des
principes éversifs de la sûreté du co m m erce, ils osent faire parler la
com m isération due à des acheteurs de bonne f o i ! m o tif si étrange
dans l’espèce, que s’il ne se trouvoit pas dans un ju g em e n t respectable
par son caractere, 0n n’y p ourrait voir que la plus indécente ironie.
Ainsi, inexactitude de faits, violation des principes, inconvenance
dans les considérations, il ne m anq ue rien à ce ju g em e n t de ce qui
peut lui assurer une réprobation solennelle.
Signé P r ign ot, M e l l i e r , P o u l e t , syndics définitifs.
Deuxième Section de la Cour d ’appel.
Monsieur C A H IE R , substitut de M.
le P r o c u r e u r -g é n é r a l
impérial.
Me F o u rn e l, Avocat.
Me CLEMENT, Avoué.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Prignot, François-Etienne-Ebbon. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Prignot
Cahier
Fournel
Clément
Subject
The topic of the resource
brevets
typographie
imprimeurs
banqueroute
tribunal de commerce
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour les Sieurs François-Etienne-Ebbon Prignot, avocat. Jacques-Mathieu Mellier, et François Poulet, négociants. Au nom et comme Syndics définitifs des créanciers unis de Louis-Etienne Herban, imprimeur-méchanicien, breveté du Gouvernement. Et encore comme cessionnaires (au nom de la masse des créanciers réunis) des brevets d'invention et de perfectionnement de stéréotype accordés par le Gouvernement audit Herhan, les 3 nivôse an 6, et 27 brumaire an 9, et généralement de tous les droits rescindants et rescisoires dudit Herhan. Appelants du jugement par défaut du tribunal de commerce du département de la Seine, du 27 décembre 1808. Contre le sieur Jean-Baptiste Garnery, libraire, et consorts, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
An 6-Circa 1809
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
63 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0618
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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banqueroute
brevets
Créances
imprimeurs
tribunal de commerce
typographie
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3f4e41fb404d84cb8c3c258047da210a
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Text
EXTRAIT
D E S
ENQUÊTES ET CONTRE ENQUÊTES
FAITES
A P aris
dans
M arseille , A u rilla c et M auriac ,
l'affaire de
la veuve du général
DESTAING,
CONTRE les Héritiers DESTAING.
�EXTRA. IT
D E S
ENQUÊTES ET CONTRE ENQUÊTES
FAITES
A Paris , Marseille
,
Aurillac et Mauriac ;
dans l affaire de
la veuve du général
DESTAING,
CONTRE les Héritiers DESTAING.
E n qu ête f a i t e à P a r is p a r M adam e Destaing.
P rem ier Tém oin.
-
'
M . D e l a g r a n g e , général de d ivision, âgé de quarantecin q a n s ,
A déposé qu’il était lié d’amitié avec le général D estaing;
que ce dernier lui fit part du projet qu’il avait de se marier
en Egypte; que, quelques jours aprés, il l’invita à assister à la
�(a)
cérémonie de son mariage qui eut lieu dans une église grecque,
à laquelle le déposant promit d’assister; ce qu’il ne put faire,
à cause de ses occupations et à cauèe de l ’heure qui n’était
pas commode pour lu i, le mariage ayant lieu le .so ir;
Que le soir meme ou le .lendemain du m ariage, il fut
invité par le général D estaing, à manger au repas de noce ;
Q u ’on lui présenta la demoiselle Nazo , comme l’épouse du
général Destaing ; qu’il croit la reconnaîtra^
,, ■■
Q u 'il a vu fréquemment le général D e sta in g , tant au C aire,
qu’à P aris, et l ’a toujours, considéré comme marié 'légitim e
ment ;
Q u’au repas de n o c e , on lui dit que le mariage avait eu
lieu dans une église grecqu e, et qu’il fit' scs excuses au gé
néral Destaing de n’avoir pu y assister;
Q u ’au surplus, tout lè monde au Caire en parlait; qu’il
avait personnellement la conviction intime qué le mariage
était légitim e j e t qu’il mentirait à sa conscience s'il disait
le contraire.r» vr v' *■
’ ’ "r
.
*
' •
' D eu xièm e ^témoin.
M. Bertrand , général de d ivision , âgé de trente-cinq ans,
D éclare qu’il croit se rappeler que le général Destaing
s’est marié en Egypte , et qu’il a assisté au repas de noce.
D u reste, que sa mémoire ne lui fournit rien de positif
sur tous ces faitsv
Troisièm e Tém oin
'
ai
••
!:
’
»1
M . Rigel.,/membre de ¡’Institut d’E gypte, artiste m usicien,
âgé de trçnte-huit ans ,
�( 3)
A déposé qu’il passait pour constant au C a ire , que le gé
néral Destaing était marié j qu’il en à''fait compliment aü
général Destaing qui l ’en a remercié ;
Que dix à quinze jours après le mariage il a assisté à uti
repas chez le général D e sta in g , qu’il a cru être un repas de
noce ;
Q u il n avait pas ouï dire que le repas fut donné à l ’occa
sion de la naissance du fils du général D elson;
il
Que le mariage a eu lieu deux ans environ après l’arfivée
de l ’armée française en Egypte.
Quatrième Tém oin.
M. Jacquotin, membre de l’institut d’E g y p te, et colonel
au corps impérial des ingénieurs géographes , âgé de quarante-truis ans,
A déposé qu’il passait pour constant au Caire que le gé
néral Destaing avait épousé une personne du p ays, et que le
mariage avait eu lieu devant le Patriarche d’Alexandrie ;
Q u il a ouï dire q u il y avait eu un repas de noce auquel*
le général M enou et autres officiers avaient assisté;
Q u’il reporte le mariage à nivôse an 9 , sans pouvoir dé
terminer précisément lepoque.
Cinquième Tém oin.
M. B eaudeuf, payeur de la garde impériale , âgé de qua
rante-quatre a n s ,
A déposé qu’il n’a été témoin d’aucun fait ; mais que le
mariage du général Destaing était public ; que le général
�( 4 )
avait à celte occasion donné un repas auquel avait assiste
tous les officiers généraux et chefs d’administration ;
Q ue le mariage avait été célébré par le Patriarche d’A lexan
drie, dans le commencement de l’an g ;
Que les prêtres grecs étaient présens au repas; qu’il a vu
madame Destaing à la citadelle du C a ire, lorsqu’il allait
rendre visite.à madame Delson et à madame Lantin ;
Qu’il reconnaissait parfaitement madame Destaing pour
être la même qu’il avait vu au Caire ;
Que toutes les femmes qui étaient à la citadelle étaient re
connues pour être femmes légitimes d’officiers généraux.
Sixièm e Tém oin.
M. V id a l, ch ef de b ataillon , âgé de quarante-neuf a n s,
A déposé qu’il n’était pas au Caire à l’époque du mariage du
» général Destaing; mais que tout le monde lui a dit qu’il était
marié ; qu’il a su particulièrement des deux aides de camp
du général Destaing, que ce dernier était marié légitim em ent,
et que ce mariage était vu par tout le monde avec beaucoup
de respect ;
Que le général Destaing lui avait dit lui-m êm e qu’il était
m arié, et l’avait invité à dîner pour faire connaissance avec
6a femme ;
Q u’il croit se rappeler que le mariage a eu lieu au com
mencement de l’an g.
Septième Témoin.
M. R aphaël Dempu.içhis,, prêtre catholique, professeur de
langues orientales a'gé^dç quarante-trois an s;
�( 5 }
A déposé qu’il n’a pas été témoin oculaire du mariage; mais
qu’il a entendu'dire à un nommé D o u b a n n é , actuellement
négociant à Rosette, qu’il avait été témoin de ce mariage ,
qui avait été célébré par le patriarche d’Alexandrie , dans
l ’église de Saint-Georges au vieux Caire; qu’il a ouï dire la
même chose à trente personnes ;
Qu’il n’existait point de mariage à tem s, que madame Destaing avait été mariée ja xta usum eccîesice ;
Q u’il n’était pas tenu de registres de l ’état c i v i l , h cause
du peu d’instruction des prêtres grecs , que cependant ils
tenaient des notes.
Huitième Témoin.
,
M. Chephetecliy, prêtre cophte , catholique romain âgé
de cinquante-neuf ans ,
A déposé qu’il avait ouï dire par le public , que le général
Destaiug avait été marié par le Patriarche grec solennelle
ment avec la fille de la femme de Jean Naso ;
Que madame Nazo , en épousant M. N aso, s’était fait
grecque schismatiquc ;
Q u ’à l ’occasion de son mariage, M. Naso a dépensé 5 o,ooo
écus ;
Q u’il n’existait point de mariage à tems; que les prêtres
grecs tenaient des registres dont ils ne connaissaient pas la
forme; que les Coplites en tenaient aussi; mais qu’aucun n’en
donnait d'extraits ;
Q u’au surplus, ils parlent peu français, et qu’en Egypte on
ne donnait pas le nom de registres aux notes qui etaient
tenues,
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JSeut'ième Tém oin, i
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•
3VI- Duranteau, général de brigade, membre du Corps Législaiif j âgé de soixante-im ans ,
A déposé qu’il a assisté à un repas donné par le général
D e sta in g , à l’occasion de son mariage ayec mademoiselle
Nazo ;
•
Que oc mariage était de notoriété publique.
t■
'
9
D ixièm e Témoin.
|* f
M. Saba Joseph, négociant, réfugié de Jérusalem, âgé de
trenle-huit ans,
A déposé qu’il était interprête chez le général Dupas; que
ce général fut invité, par le général Destaing, h son mariage,
et y assista ;
Que le mariage d’un français avec une grecque parut une
chose si remarquable en Egypte, que tout le monde s’en en
tretenait;
Que le mariage a été célébré par le Patriarche g re c , dans
l ’église Saint-Nicolas, au grand Caire;
Que lors du départ du général Destaing pour Alexandrie ,
le général Dupas l’invita à chercher un appartement à la cita
d elle, pour madame Destaing, présente à l ’enquête.'
Onzième T ém oin .
M . D a u r e , commissaire ordonnateur, âgé de trente-trois
an s,
A déposé qu’il ne sait pas si le général Destaing s’est marié
à l’église ou devant le commissaire des guerres; m ais, qu’à l’é-
�(
7
)
poque de son m ariage, il écrivit au déposant pour l ’inviter au
repas et au bal qu’il donnait à l’occasion de son mariage ; qu'il
assista au bal avec les généraux Lannus et Boyer.}Q u’il était alors trés-lié avec le général Destaing ; que ce
dernier le présenta à son épouse, ainsi que les généraux
Lannus et Boyer;' •
Que le bruit public annonçait le général Destaing comme
marié légitimement , et que lui personnellement l’a toujours
considéré comme tel ; que le mariage eut lieu environ deux
mois avant la descente des Anglais.
D ouzièm e Tém oin.
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■ • ). >-
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- .
«
. , • •
1.
M. '] a c li, ancien négocian t interprète du général Lannus,
âgé de trente-liuit ans,
A déclaré qu’il n’avait pas assisté au mariage ; mais qu’étant interprète du général Lannus, ce dernier lui avait
dit : V ous n cle s donc pas venu à la noce avec nous?
,
que le général Destaing avait épousé la fille de Nazo ; que
le mariage avait été célébré par le Patriarche grec ; qu’il a
su de la bouche de l ’interprète du général Destaing que le
mariage avait été béni par le Patriarche m êm e, et que ledit
interprète avait été présent à la cérémonie ;
Que ce mariage avait fait beaucoup de bruit dans le quar
tier des chrétiens ;
Q u ’il avait été célébré dans l’église de Saint - N icolas ,
au grand Caire , dans un tems voisin de l ’arrivée des A n glais;
Q u’il sait que les latins tenaient des registres, parce qu’il
est latin et a été marié dans une église catholique ; mai»
qu’il ignore si les grecs en tenaient.
�(
8
)
Treizièm e Témoin.
M. Esteve , trésorier-général de la couronne , âgé de trentesix ans ,
A déposé qu’il a appris le mariage du général Destaing,
comme une nouvelle de l’armée ; que le général lui a ap
pris lui-méme ; que personne ne pouvait douter que le ma
riage ne fût légitime ; qu’il avait ouï dire que le mariage
avait été célébré suivant le rit grec ;
Q u ’il y a eu un repas de noces auquel il n’a pas assisté; que
huit k dix jours après il a été invité chez le général Destaing,
avec sept à huit autres français, et, qu’en dînant, le général
Destaing avait annoncé son m ariage, et qu’alors le déposant
l ’avait félicité et l ’avait embrassé;
Q ue le mariage a eu lieu au commencement de l ’an g , peu
de tems avant l’arrivée des A nglais;
1 Q u ’il croit que les commissaires des guerres ne se sont pas
conformés à l’ordre du jour qui prescrit la tenue des re
gistres.
Quatorzième témoin.
M. Sartelong, commissaire ordonnateur, secrétaire général
du ministère de l’administration de la guerre, âgé de trente!
sept ans,
A déposé qu’entre le i er brumaire et le i or ventôse de l’an g,
le général Destaing lui fit part de son mariage avec la fille
du commandant Nazo ; que ce commandant lui en fit égale
ment part ;
Q u’il a assisté au repas de noce, mais non à la cérém onie,
�( 9)
quoiqu'il y eut été invitéavec le général Delagrange; qu’il croit
même qu’il y a eu des billets de part de ce mariage, et que la
nouvelle en a été insérée dans la gazette du grand C aire, sans ^
cependant qu’il puisse affirmer ce fait qu’il dirait sans hésiter
en société;
Q u’il a vu au repas de noce l’épouse du général D estain g,
qn’il reconnaît pour être présente à l’enquête ;
Que le général Destaing , blessé dans une affaire contre les
A nglais, lui parla de sa femme comme d’une femme légi
tim e;
Q u’il ne peut assurer si les prêtres grecs .tiennent des
registres , que cet usage a lieu chez les prêtres catholiques
latins , qui sont beaucoup plus instruits ;
Que depuis son retour à P aris, il a vu le général Des-,
taing, qui lui a dit qu’il attendait sa femme;
Que d’après ce que lu i avait dit le général Destaing et
ce que lui avait appris la notoriété publique , le mariage
avait été célébré par le Patriarche grec et suivant le rit grec;
Q u ’il n’avait pas eu d’inim itié avec le général Destaing ;
Q u ’au surplus, quand son opinion ne lui serait pas favo
rable, cela ne l’empêcherait pas de dire la vérité ; qu’il
croyait même honorer sa mémoire en témoignant en faveur
de sa veuve et de sa fille ;
Que les commissaires des guerres ne tenaient que des pro
cès-verbaux et non des registres, que quelques personnes
faisaient inscrire leurs mariages et d’autres se contentaient de
se présenter aux prêtres du pays ;
Qu’au surplus les trois quarts de ses papiers a v a ie n t été
perdus;
Qu il ayait rédigé l’acte de mariage du général Beaudeau,
2
l
�( IO )
non sur un registre . qui n’existait pas, mais sur feuilles
volantes ; que c’est lui-mêine qui engagea le général Beaudeau à remplir cette formalité pour plus de sûreté , que
c’est le seul acte qu’il a rédigé ;
Q u ’il l’avait fait enregistrer conformément à l ’ordre du jour
de l’armée , que cet enregistrement avait lieu pour toutes
les transactions sociales et était une imposition indirecte
créée par les français.
Quinzième Témoins.
M. M arcel, directeur général de l’imprimerie im périale,
âgé de 52 ans;
A déposé, que dans le commencement de l’an n e u f, le
général Destaing épousa la dame Anne N azo, qu’il reconnaît
pour «ire présente à l’enquête;
Q u’il y eut à cette époque un repas auquel furent invités
tous les officiers généraux et les principaux chefs d’adminis
tration ; que ce repas le plus solennel qui ait eu lieu h cette
époque, fut donné comme festin de noce;
Que le mariage a été célébré à l ’église des G recs; qu’il croit
qu’il y eût des billets de .faire p a rt, imprimés ;
Q u ’un ordre du jour avait ordonné la tenue des registres
de l’état civil ; mais que cet ordre ne fut pas exécuté ; que le
déposant a perdu trois enfans en E gypte; que l’acte de nais
sance et celui de décès du dernier seulement ont été dressés.
Q u ’il n’a jamais entendu élever des doutes sur l ’existence
du mariage ; que la notoriété publique présentait comme ma
riage légitim e, et que l ’on ne parlait pas avec le même res
pect des unions illégitimes ;
�( » )
Q u ’il n’a connu aucun mariage à tems en Egypte ; cjue ce
cas est rare, et qu’il n’a lieu qu’entre musulmans, mais jamai3
entre chrétiens.
Seizièm e Tém oin.
M. Clément M archand, âgé de soixante an*,
A déposé qu’en janvier ou février 1801 la voix publique
lu i apprit le mariage du général D estaing; qu’il apprit
par tout le monde que ce mariage fut oélébré par le P a
triarche d’Alexandrie ;
Que le jour même ou le lendemain il vit un grand nombre
de personnes réunies devant la porte du général Destaing ;
qu’il apprit que cette réunion avait pour cause le mariage du
général Destaing , qu’ayant beaucoup connu ce général h
Rusette et au Caire , il crût devoir enirer chez lui et le féliciter;
que le général l'invita à rester chez lui pour lui servir d’inter
prète , parce que lu i, déposant, était traducteur d(e l ’arabe et
du grec da,ns l’administration des finances ;
^ Q u’il y eut un très-grand repas; que le Patriarche n’était
pas au dîner; mais q u il y a vu un ou deux prêtres grecs;
Que l’usage de dresser chez les Grecs des actes de mariage
n’est pas g én éra l, et que les prêtres ne font des actes que
lorsqu’on leur demande ;
Q ue les mariages à tems sont extrêmement rares et ne se
font que parmi les Turcs.
1
D ix-septicm e Témoin,
>
M . Larrey , inspecteur général du service de sau té, âgé
«le quarante-un an s,
>
�( 12 )
À déclaré q u e , dans le commencement de Fan neuf f
reçut un billet d’invitation pour assister aux noces du gé
néral D estaing, son am i; qu’il s’y rendit et y trouva plu
sieurs am is, entr’autres M. Esteves, le général Delagrange,
le général M enou;
Q u e , dans cétte réunion , M. Destaing était en grande
tenue, ainsi que tous les généraux;
Q u ’il adressa des félicitations au général D estain g, et lui
fit ses excusés de n’avoir pu se trouver à la cérémonie de
l ’église d’où l’on sortait en ce moment;
Que le mariage avait été célébré dans l’église du patriar-‘
clie des grecs , et que le repas avait eu lieu le même jo u rp
vers six à sept heures;
1
Q u e , depuis, il. a vu le général Destaing au siège d’A lexan
drie et à Paris ; que ce général lui a parlé plusieurs fois de
sa femme ;
Que ce mariage était de notoriété publique ; qu’il n’ayait
aucune connaissance
des mariaces
I
O à tems.
Enquête J'aUe h M arseille , par Madame Des iaiiig.
Premier Témoin.
M. Cliam , âgé de quarante-deux ans, négociant, et an
cien interprète du prince de N eufchâtel,
A déposé que, dans le courant de l’an n e u f, il entendit
dire que le général Destaing devait épouser la demoiselle
N azo; q u e , passant devant le domicile du général D estaing,
il vit des préparatifs de fê te s, des officiers et généraux en.
à
�( i 3)
grand costume ; qu’on lu i dit que c’était pour le mariage
du général Destaing avec la demoiselle Nazo ;
Que ce mariage avait été célébré par un P a t r i a r c h e grec ;
Que les Grecs ne tiennent pas de registres d’état civilD eu xièm e Tém oin.
M. Barthélémy S era , âgé de 5 o a n s , colonel des maraelu ck s;
A déposé que sur la fin de l’an huit ou au commencement
de 1’an neuf, le général Destaing lui d il qu’il voulait épou
ser la fille dit commandant Nazo , que le déposant lui ob
servât qu’elle n'était pas fille du commandant N azo, qu’il
avait épousé la mère , qui était veuve de Joseph Trisoglou ;
Que le général Destaing répondit que cela lui était in
différent, et demanda si cette dame était sage et avait de
bonnes mœurs, à quoi le déposant répondit affirmativement;
Que le général Destaing lui dit que son mariage serait
célébré selon le rit grec ;
Que le général Destaing l’invita à assister à son m ariage,
qu’il le remercia et ni voulut pas aller, parce qu’il ne vivait
pas bien avec la famille N azo;
Que quelques jours après, il vit beaucoup de monde à
la porte du général D esta in g , et qu’on lui dit que c'était à
l ’occasion de son mariage avec la demoiselle Nazo -,
Q u’ayant ensuite rencontré le général D estaing, c e lu i- c i
lui dit que son mariage avait été célébré suivant le rit grec,
J>ar un Patriarche grec ;
Qu’il n’y a que les prêtres latins qui tiennent des registres
de mariages et que les autres n’en tiennent point»
�C *4)
Troisièm e Tém oin.
M. Antoine Ham oui, négociant, âge de cinquante a m ,
A déposé qu’il était au Caire à l ’époque où le général
Destaing y était en activité de service, et qu’il apprit, par
la notoriété p u b liq u e, que le général Destaing avait épousé
la fille de la veuve N azo;
Que son mariage avait élé célébré par un Patriarche
grec ;
Que ce mariage fît beaucoup de b ru it; tout le monde ne
cessa d’en parler et de s’en occuper ;
Q u’il n’y a que les prêtres Latins qui tiennent des registres,
et que les autres n’en tiennent point.
Quatrième Témoin.
M. Hannaa O dabaki, âgé de cinquante-six ans, ancien mar-,
chand au Caire,
A déposé qu’il était établi au grand Caire depuis trois ans,
avant l’arrivée de l’armée française ;
Que pendant que le général Destaing y était en activité do
scivice, le déposant y exerçait les fonctions de com m issaire
particulier de police;
Q u’étant lié d’amitié avec le commandant Jean Nazo, celuici l’invita au mariage de sa fille avec le général Destaing;
Q u’il y assista dans l ’église Saint-N icolas; qu’il assista égale
ment au repas de noce;
Que le mariage fut célébré par le Patriarche d’A lexandrie;
Q u ’il n’y a que les prêtres Latins qui tiennent des re
gistres.
�C x5 )
Cinquième Tém oin.
M. Mische R o séti, bijoutier, âgé de vingt-sept ans,
A déposé que sa famille était intimement liée avec celle du
commandant Jean Nazo ; que la fille de celui-ci ayant épouse
le général D estain g, pendant qu’il était en activité de service
au grand Caire, la famille du déposant et le déposant lui-même
furent invités à assister à ce mariage*,
Q u’ils assistèrent à la célébration qui eut lieu dans 1 église
Saint-Nicolas, du rit grec, et par le Patriarche grec; et q u e ,
suivant l ’usage pratiqué par les chrétiens de cette secte, le
colonel Papas-Oglou fut le parain de la demoiselle N azo;
Que les prêtres grecs ne tiennent point de registres de l’état
civil.
S ixièm e Tém oin.
Sophie Mesk , épouse de Jean N azo, âgée de quarante-cinq
an s,
,
A déclaré être la mère de la veuve Destaing; que le mariage
a été célébré en présence de la fam ille, de diverses personnes
du pays, généraux et autres m ilitaires, notamment le général
Delzons , dans l’église Sain t-N icolas, par le Patriarche grec ;
Q u’elle ignore si les prêtres tenaient des registres.
Septième Témoin.
M. Joseph D u fe u , âgé de quarante-neuf ans, bijoutier,
A déposé que, dans le courant de l’année 178 1, le général
Destaing demanda aux sieur et dame Nazo leur fille en ma
riage , qu’ils y consentirent, et que le mariage fut célébré le
�( 16 )
lendemain du jour des Rois de l’église grecque, correspondant
au 17 juin 1801*;
Que l u i , déposant, fut invité comme parent de la fa m ille ,
et qu’il assista à la célébration dudit m ariage, qui eut lieu
dans l’église Saint-Nicolas au grand C a ire , et par un Patriar
che grec ;
Q u ’après la célébration du mariage il y eut un grand repas
de noce chez le général Destaing, auquel lui, déposant, assista;
qu’à ce repas étaient les généraux M enou,D elzons,D elagrange
et P.egnier ;
Que les prêtres grecs ne tiennent point de registres.
Huitième Tém oin.
Hébrahim Tutunzi , âgé de vingt-trois a n s,
A déposé qu’il a assisté au mariage de la demoiselle N azo,
sa n iè c e , avec le général Destaing ;
Que ce mariage a été célébré dans l’église Saint-Nicolas,
par le Patriarche grec ;
Q u’après la cérémonie, il assista au repas de n o c e , chez
le général Destaing ; niais qu’étant fort jeune alors, il n e se souvient pas des personnes qui y assistèrent, autres que
celles de sa famille ;
Se rappelle cependant qu’il y avait des généraux.
Neuvièm e Tém oin.
Joseph T u tu n z i, âgé de cinquante ans , ancien premier
commis du commandant Jean Nazo ,
A déposé que le mariage a été célébré dans l’église SaintNicolas au C aire, par le Patriarche grec, et que le parain
�C T7 )
de la demoiselle N azo, fut P apas-O glou , colonel de la légion
grecque;
Que lui , déposant, assista à la célébration , et se rendit
ensuite au repas de noce qui fut donné par le général
Destaing, auquel assistèrent divers généraux français et égyp
tiens notables ;
Que les prêtres latins de sa religion tiennent des registres ;
mais qu’il ignore si les prêtres grecs en tiennent ou non.
D ixièm e Tém oin.
Joseph M esk, âgé de quarante ans, ancien commis au
Caire,
A déposé que le mariage a été célébré dans l ’église SaintNicolas du rit grec ; que le parain de la dame Destaing
fut Nicolas Papas-Oglou ;
Q u ’il assista à la cérém onie, après laquelle il se rendit
au repas de noce cliez le général D estaing, où étaient pré
sens divers généraux, notamment le général Delagrange et
le général D e lso n , et que ce dernier était présent à la célé
bration , comme parent du général Destaing ;
Que les prêtres chrétiens, de toutes les sectes tiennent des
notes de mariage et naissance, et qu’il pense qu’ils en dé*
livrent des extraits quand on leur demande.
■
. •>
Contre E n q u ête f a i t e à A u r illa c p a r les ^frères et
sœurs D estaing. • • • • ’"
P rem ier Tém oin.
M. D e lso n , président du tribunal c iv il d’A u r illa c , âgé
3
r
�(i8)
de soixante-six ans, oncle maternel des frères et sœurs
D e s ta in g ,
A déposé qu’étant à P aris, lors de l’arrivée du général
Destaing, il ignora longtems les bruits de son mariage ; que
ce bruit se répandit à l’occasion d’une lettre écrite de Tarente
par un habitant d’Aurillac qui y avait vu arriver la famille
N azo , dont une fille se disait épouse du général D estaing;
Que la belle-fille du déposant ayant demandé au général
D estaing s’il était effectivement m arié, celui-ci répondit, en
plaisantant, que sa femme pouvait l’ê tr e , mais que lui ne
l ’était pas ;
Que le général D estaing, instruit que la fam ille Nazo
était arrivée à L yon , il le pria de demander à M. Fulssirou
une lettre de change de mille francs, payable à L y o n , qu’il
'vou lait envoyer et cette fem m e. — Ils sont là une troup e,
d it-il ; quand fo u rn is pris la f d l e , je n’a i pas épousé tout
cela. I l y a un en fa n t, f aurai soin de la mère et de
T enfant;
Q ue le général Destaing lui avait dit que son mariage
n’avait pas été fait devant un commissaire des guerres,
comme celui du général Delson ;
Que M. Nazo se trouvant aux scellés apposés chez le
général D e sta in g , il déclara que le général Destaing avait
épousé une de ses fille s, âgée de seize a n s , devant le Pa• triarche d’Alexandrie ;
Que le général D e ls o n , 111s du déposant, lui a dit qu’il
y avait eu une cérémonie religieuse dans la m aison-du
sieur N a zo , à laquelle il avait assisté ;
Que quelque tems après, le général Destaing étant pa• xain du fds <lti général D elson , le général D estaing donna
�( *9 )
à cette occasion, un grand souper, disant que c tlait pour
le baptême de son filleul.
D euxièm e Tém oin.
Madame Warsy', épouse du général Delson, âgée de vingtcinq a n s, cousine germaine par alliance des frères et sœurs
D estaing,
A déposé que le 29 nivose an g , elle n’était pas dans la ville
du Caire, qu’elle y arriva le lendem ain;
Q u’à son arrivée, elle apprit qu’Anne Nazo avait été con
duite la veille, à la n u it, chez le général Destaing; mais qu’il
n’y avait eu aucune pompe ni cérémonie d’usuge pour les ma
riages qui se font dans le pays, suivant le rit grec ;
Q u ’une douzaine de jours après, le général D estaing, à l ’oc
casion du baptême du fils du général D elson, donna un grand
souper et un bal auquel assistèrent les officiers de l’Etat Major,
et notamment le général M en o u , Anne Nazo, sa famille, et
plusieurs habitans du Caire;
Que dans cette fête, ladite A nne Nazo occupait la place de
la maîtresse de la maison ;
Q u ’il n’y eut ce jour là aucune cérémonie religieuse; mais
qu elle a ouï dire fjue le jour ou ladite N azo f a t conduite chez
le général D estaing, il y avait eu une cérém onie religieuse,
qui avait été fa ite par le P atriarche d’ A lexa n d rie, ti laquelle
peu de personnes avaient assisté ;
Q u’il y avait des églises pour le culte grec au Caire; niais
q u e , pour l’ordinaire, les cérémonies de mariage se font dans
les maisons ;
Q ue M. Nazo lui a dit, à elle déclarante, q u ’il ayait écrit au
�(
20
)
Caire pour avoir une expédition de son acte de mariage, mais
qu’on lui avait répondu que le Patriarche était m ort, et que
l’église était brûlée;
Q u au surplus, madame Destaing était considérée comme
épouse légitim é, et jouissait des honneurs dus à ce titre.
Que pour e lle, elle la croyait femme du général Destaing
et qu’elle lui rendait les honneurs attachés au titre.
Troisièm e Tém oins.
Françoise G ro n ier, fille , âgée de 3 o ans,
A déposé quêtant à Lyon , à l ’époque de l ’arrivée du
général Destaing , elle fut invitée à diner chez lui ;
Q u e lle lui demanda quand il amènerait sa femme, et qu’il
lu i répondit: elle est passée d’un côté et moi de l’autre
ce n’est pas le moyen de se rencontrer;
Q u ’étant à A u rillac, dans la chambre de madame Nazo
veuve D estaing, elle lui demanda comment elle avait été
mariée et si le prêtre avait écrit sur le registre ; à quoi la
veuve Destaing répondit que le Patriarche lui avait mis un
anneau au d o ig t, jusqu’il la première phalange, et que le
général l’avait enfoncé jusqu’à la fin du d oigt, et qu’à l’égard
du registre elle répondit : O u i , prêtre , grand livre, écrire.
Contre Enquête, J a ilc à M a u r ia c , p a r les fr è r e s
et sœurs Destaing.
Vrem ier Tém oin.
Joseph F e l , palfrenier du général D estaing,
A déclaré que pendant que le général Destaing était au
�( 21 )
Caire, son cuisinier d it, en déclarant qu’on avait amené
une femme au général D estaing, que quelques jours après,
celui-ci donna un grand repas où assista tout l’état m ajor,
et notamment le général M en o u , et que cette femme dont
il ne se rappelle pas le nom y était ; qu’il l’a entendu nom
mer madame Destaing ;
Q u ’à la suite du repas il y eut un bal ; qu’il ne sait pas
si Anne Nazo a été introduite dans la maison du général
Destaing avec pompe et m agnificence; que le cuisinier ne
lu i a donné aucuns détails là dessus -,
Q u’il croit même que le cuisinier lui dit qu’il n’avait pas
vu lui-même entrer cette femme chez le général Destaing,
et que ce jour là, il n’y eut aucune fête ;
Que le général n’a point donné d’autres fêtes, et qu’il
-n’avait jamais que dix à douze personnes à sa table.
D eu x ièm e et dernier Tém oin.
Jean Biron fait la même déclaration.
M e J U G E , Avoué.
H ACQU ART, Imprimeur du Corps Législatif et des Tribunaux ,
rue G it le-C œ u r,n ° 8.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Nazo, Anne. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Juge
Subject
The topic of the resource
contestations de légitimité de mariages étrangers
expédition d'Egypte
opinion publique
xénophobie
conseils de famille
Delzons
témoins
Description
An account of the resource
Extrait des enquêtes et contre enquêtes faites à Paris, Marseille, Aurillac et Mauriac, dans l'affaire de la veuve du général Destaing, contre les héritiers Destaing.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Hacquart (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
Circa An 9-Circa 1808
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0608
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0410
BCU_Factums_M0536
BCU_Factums_M0535
BCU_Factums_M0610
BCU_Factums_M0605
BCU_Factums_M0603
BCU_Factums_M0604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53868/BCU_Factums_M0608.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Marseille (13055)
Mauriac (15120)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conseils de famille
contestations de légitimité de mariages étrangers
Delzons
expédition d'Egypte
opinion publique
témoins
xénophobie
-
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8f3257a26465dfda8660b7e405a60148
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MEMOI RE
POUR
MM. TOURTON,R A V EL et C o m p a g n i e
;
' •,>. *- .■ ? » • .
C O N T R E
M . M O N T Z et ses P r ê t e - N o m s j
«
ou
H i s t o i r e g é n é r a l e des fraudes de M . M o n t z ;
servir a l'instruction des v i n g t - t r o i s Procès par
lui suscités à M M T our t o n R a v e l et Compagnie.
Pour
�MEMOIRE
?
Pour
MM. T O U RTON , R A V E L
et
C om pagnie;
C o n t r e M . M O N T Z et ses P
r ê t e - N oms
.
C h a q u e matière a son intérêt. L a procédure ellemême , qui le croiroit? peut offrir des détails piquans
et dignes d'attention. Il est quelquefois curieux de suivre,
dans tous ses détours , un plaideur astucieux qui veu t,
à toute force, échapper aux justes condamnations pro
noncées contre lui. En vain les tribunaux s’arment de
toute leur puissance pour le contraindre à payer. Il a
plus d’adresse que les tribunaux n’ont de force. Un moyen
lui est enlevé : mille autres jaillissent de sa féconde ima
gination. Les faux, les simulations, le s déguisemens, les
enlèvemens furtifs, et, quand la rage s’en m êle, les
destructions pleuvent de tous côtés. Les créanciers
A
�(
2
}
courent, cherchent; s’agitent. Le débiteur fuit, cache,
résiste. A qui des créanciers ou du débiteur rebelle res
tera la victoire ? Q u i, dans cette lutte scandaleuse , rem
portera, ou de la ruse, ou delà justice? 'Suffira-t-il, à
un banqueroutier, de le vouloir pour acquérir cette in
solente invulnérabilité, opprobre des lois dont elle
atteste l'impuissance, désespoir du commerce dont elle
anéantit la sécurité ?
Un tel problème, en effet, peut éveiller la curiosité
de l’observateur.
E t c’est ce problème que la conduite de M. Montz
produit aujourd’ hui aux dépens de MM. Tourton, Ravel
et compagnie.
Tout Paris sait quel est M. Montz, l’ opulence dont il
jouit, leclat qui l’environne , la dépense qu’il fait. V oi
ture brillante, mobilier somptueux, table délicate, su
perbe hôtel à la ville, maison de campagne jadis occupée
par un prince du sang royal , voluptés de toute espece,
M. Montz a tout quand il faut jouir : M. Montz n’arien
quand il faut payer.
Bien inutilement le poursuivent , depuis dix ans ,
MM. Tourton , llavel et compagnie , ses créanciers de
575,000 liv. en vertu d’arrêts souverains.
Depuis dix ans-, M. Montz se rit de leurs efforts ;
s’ amuse avec ses amis ; fait ses affaires } s’occupe de ses
plaisirs; et jette un procès à MM. Tourton, Ravel et
compagnie, à mesure que ceux-ci osent le troubler dans
sa douce vie et saisissent une de ses propriétés mobiliaires ou immobiliaires.
C ’est ainsi que sont écloses l ’ une après l’autre vingt-
�.( 3 )
trois instances de fraude, les unes déjà jugées, les autres
âguger.
> '■<
MM. Tourton, Ravel et compagnie fourniront-ils une
défense dans chaque instance? Que de redites ! E t d’ail
leurs que de frais d'impression?
Ils ont cru économique de temps pour les magistrats
et d’argent pour eux-mêmes de faire un mémoire circu
laire qui serve dé réponse à toutes.
Ge résumé des fraudes de M. Montz aura; d’ailleurs,
un double avantage1
i° . Il présentera la conduite entière de ce dernier
sous un seul aspect!
.¡xi
2°. E t peut-être en signalant un ensemble si révoltant
de machinations ourdies1 par un mauvais débiteur pour
insulter aux droits de ses créanciers, appellera-t-il l'at
tention du législateur sur les mesures qu*il conviendroit
d ’appliquer à de coupables manœuvres dont il n’y a taut
d. exemples que parce qu ’elles restent impunies.
ii 1
F A I T S .
Depuis long-temps M. Montz plaidoit avec MM. Tourton , Ravel et compagnie, sur la question de savoir s’il
devoitêtre condamné à leiir payer 675,000liv. pour le
montant de billets qu’il ûvoit souscrits solidairement
avec quelques autres'capitalistes.
iPlusieurs années furent consumées en procédures.
Production dos registres et de tous-les papiers de com
merce de la maison Tourton, comparution des parties
¿ri personne , interrogatoire^, audition de témoins, inÀ x
�( 4 )
tervention d’agens de change, il n’est pas une seule voie
d’instruction peut-être qui n’ait été requise et où n’ ait
été entraînée la maison Tourton. Elle est loin de s’en
plaindre. Elle s’en applaudit au contraire, puisque tant
d’éclaircissemens appelés et toujours obtenus d’elle n’ont
servi qu’à prouver la justice de ses demandes et la mau
vaise foi de ses débiteurs.
Mais tout a un terme, même les procès ; et malgré le
savoir faire deM .M ontz, celui-ci tiroit à sa fin dans le
mois de messidor an 7, qui ne s’écoula pas en effet tout
entier sans que la contestation ne fût jugée.
M. Montz étoit averti par sa conscience 5 il l’étoit aussi
par l’ opinion ; m ais, en habile général, et forcé de quit
ter le combat, il médita une retraite savante et songea
aux moyens de s’assurer ses dernières ressources.
La principale, celle qu’ offroit un portefeuille , riche
ment garni au su de tout Paris, ne lui donnoit aucune
inquiétude. Un portefeuille circule et s’évanouit. Il ne
faut que vouloir.
Il en étoit ainsi de l’ argent comptant.
Mais quelques parties de la fortune de M. Montz
éloient à découvert.
M. Montz avoit la nu-pi’opriété d’une maison magni
fique sise à Issy, et qui jadis avoit appartenu à M. le
prince de Conti, un très-bel hôtel à Paris, place V en
dôme, dans cet hôtel, un mobilier du plus grand prix,
une créance de a83 ,ooo liv. sur M. de Cazaux, avec qui
même il paroissoit être en procès , enfin de fort beaux
biens sis aux portes de Moulins.
Quant à cette dernière propriété y fort éloignée de
�( 5 )
Paris, et qu’on savoit moins généralement lui apparte
nir, il crut pouvoir ajourner les mesures de salut jus
qu’au moment ou il apprendroit que MM. T ou rlon ,
R.avel et compagnie l’auroient découverte.
Mais pour le reste il y avoit urgence.
Dans quelques jours, dont même M. Monlz n’avoit
obtenu le bienfaisant délai que par des promesses déceptrices d’accommodement, il alloitêtre condamné, et
sans doute saisi.
M. Montz se presse donc.
Il est intimement lié avec une espèce de complai
sant et de familier qui se fait appeler Gin d’üssery ,
et dont le surnom est peut-être la seule acquisition
qu’il ait faite de sa vie; homme à qui on ne connoissoit pour subsister ni terres, ni travail, ni place, ni
enfin nulle autre ressource que scs vénales complai
sances pour M. Montz, qui le nourrissoit à sa table et
le logeoit au quatrième dans une petite chambre de sa
maison.
L a mauvaise foi ne calcule pas toujours les vraisem
blances. M. Gin s’offrit à la pensée de M. Montz, parce
qu’il s’ofFroit sans cesse à ses yeux; parce que d’ailleurs
il falloit quelqu’un de bien dévoué; et parce qu’enfin la
tête se perd quelquefois quand il faut agir vile et sans
avoir le temps de délibérer.
Le quatorze messidor an sept , quatre jours avant le
jugement du procès , M. Montz et son ami Gin courent ire Fraude
tous deux chez un notaire, et là M . M ontz , demeurant B ail simulé
à P a ris } p l a c e V endôme , »°. 16 , loue à vil prix, pliccVcu-'
¡
�*
4
silôme. li en pour neuf a n s , h M . G in , rentier, demeurant a P a r is ,
derlSnuÎîîté. p l a c e V e n d ô m e ,
iG , la maison de la place F e n i " . Procès,
n», ï 6 , qui lui appartient.
*
Ce n’est pas tout.
C e même
jour M . Montz, en propriétaire intelli-
2 \iut7des g e n t , et en père de famille qui s’ entend bien à donner de
glaces de la .
v a l e u r A ses im m eubles, dépouille sa maison de la
iiuuson deU
.
• 1
* *
1
place Ven-^ piaCe Vend ôm e de toutes les glaces qui la garnissent de
jendemander |iaut en bas , en sorte qu après le bail fini, le locataire,
y. TroÎs.
Où 00™ M’
'***'
M . G i n , ne lui rendra que les quatre m urailles, et que la
maison sera, dans la v érité , hors de location, puisqu’ un
immeuble de cette importance ne peut être pris à loyer
par personne quand il est denue de glaces. E t ces glaces,
M>. Montz les vend à son commensal Gin , moyennant
1 5,000 fr. payés comptant,
Ce n’est pas tout.
3« F rau d e.
J S
t
Il falloit sauver le beau m obilier, c’ est encore Gin
qui l’aclietle ; car Gin a de l’argent pour tout. E l il est
Paris. Il faut to u ioul-s p r ê t à a c h e te r q u a n d son ami MontZ est prêt
p n dG iïisîid cr
«
w
à vendre. Ce mobilier lui est vendu moyennant i 5 ,ooo fr.
EnœTeîî. p a y é s com ptant. Pour sentir toute la dérision d’une pa-
la nullité,
Gin-
reille vente, à part la nullité de fortune de M .JG in , et sa
très-réelle impuissance de trouver toutes ces sommes, il
ne faut que jeter les yeux sur l’état du mobilier vendu.
11 contientQU a.ti\e r ô l e s entiers. U n e sculcligno de ces
quatre rôles vaut mieux que les quinze mille livres , prix
¡nominal de ce mobilier-, car ceLle ligne contient neuf
„ rands tableaux , dont quatre de V ern et, le peintre
de la n a tu re, et quatre, de cet excellent et ingénieux
Robert, éternellement regrettable pour les arts com m e
�( 7 )
pour Vamitié. L ’on peut, par cet échantillon , juger de
rimmense valeur de ce mobilier si ridiculement apprécié
à 1 5 ,ooo francs. Des lits d’acajou doré , des secrétaires
d’acajou , des commodes d’acajou , un billard d’acajon ,
des armoires d’acajou, des bibliothèques d’acajou, des
trictracs d’acajou, des tables de jeu d’acajou, un piano
d’ acajou fait à Londres , six tables à manger d’acajou,
des sièges d’acajou, des lustres, des candelabres, des
vases d’albâtre, de granit , de porcelaine, des statues
de bronze ou autres , tous les livres de la bibliothèque,
tous les couchers assortis au luxe général de la maison ;
voilà ce qui compose quelques-uns des gros articles.
Quant aux petits, il seroit fastidieux de les nombrer ;
on y trouve dans les plus minutieux détails tout ce ¿qui
compose un ménage bien monté ; trente douzaines de
serviettes, cinquante nappes , de la batterie de cuisine
en quantité, des porcelaines , même des cuillers de
vermeil pour se sei'vir des porcelaines, un coffrefort y etc. Enfin M. Montz pousse le philosophique
détachement de tout ce qu’ il possède au point de
céder à son ami Gin jusqu’aux torchons et aux ta
bliers de cuisine : ils sont aussi dans l’état. On sent
bien qu’un homme qui opéroit de si grandes »'éformes,
et qui, pour faire honneur à ses affaires sans doute,
vendoit jusqu’au nécessaire, n’uvoit garde de conser
ver le superflu. Aussi M. Montz vcud-il également
ses vins de toute espèce , et même jusqu’à sa bière, à
M. Gin*, l’état comprend deux mille bouteilles de vin de
Bourgogne, mille de vin de Bordeaux, deux cents de vin
de Sauterne , trois cents bouteilles de bière. On ne sait
�(8
)
qu’ admirer davantage ou de l’extraordinaire résignation
avec laquelle M. Montz renonce à tous les goûts qui
l’avoient dominé jusque-là , ou de la flexibilité parfaite
avec laquelle M. Gin se laisse saisir par tous ces goûtslà même à l’instant où son sage ami s’en guérit. M. Montz
ne veut plus pour lui d’un hôtel tout en entier : le simple
et modeste M. Gin qui, jusque-là, s’étoit trouvé suffi
samment logé dans une petite chambre au quatrième,
prend de plein saut l’hôtel pour son compte. M. Montz,
si somptueux par le passé-, conçoit tout à coup une
horreur invincible du luxe •, il ne veut plus ni glaces,
ni dorures, ni bois précieux, ni mobilier élégant, ni
porcelaines, ni vermeil : M. Gin éprouve une convul
sion pareille en sens contraire, et le jour même où son
ami; converti sur toutes ces mondanités, les apprécie ce
qu’ elles valent et y renonce, lu i, pour s’en engouer; il
abjure ses meeurs patriarchales , et troque son grabat
et ses chaises de paille contre le verm eil, les porce
laines; les bois précieux, les dorures et les glaces. Sobre
tant que M. Montz fut adonné aux voluptés de la table,
il veut à son tour connoitre ces voluptés quand M. Montz
devient sobre, et il succède aux vins de son a m i, aux
mêmes vins des difFérens crus de Bourgogne, de
JBordeaux et de Sauterne, et jusqu’à sa fantaisie pour
la bière. Quant aux fantaisies plus nobles que nourrissoit d’abord et..qu abdique entin celui-ci, il les recueille
aussi à son tour. Il prend ses tableaux , ses statues ,
même tous les livres de sa bibliothèque, et prouve
ainsi que, quoi qu’en aient pu dire quelques imbéciles
philosophes, q u i, de l’impossibilité de trouver deux
physionomies
�( 9 )
physionomies absolument pareilles , ont conclu l’impos
sibilité de trouver deux organisations morales absolu
ment semblables, il est des âmes tellement façonnées
dans le même moule et tellement identiques, qu’il n’y a
ni une pensée , ni une affection, ni une volonté , ni
une inclination dont l’une soit modifiée qui ne se i*éiléchisse dans l’autre , comme les objets dans un miroir
fidèle.
Ainsi du moins cet étonnant phénomène s'est produit
une fois ; et ce sont MM. Montz et Gin qui en ont donné
le touchant exemple.
Mais ce n’étoit pas assez de ce miracle de la nature,
il falloit encore un miracle du hasard ; il falloit que de
ces deux amis si bien faits l’un pour l’autre, les sentimens restassent les mêmes et les fortunes opposées.
L'un avoit été pauvre, tandis que l’autre étoit riche ;
il falloit que le pauvre devînt riche à son tour, quand
le riche dcvenoit pauvre : et c’est aussi ce qui arriva tout
à point par le plus grand bonheur du monde. En effet,
quelles que soient les voies secrètes dont s’est servi la
destinée pour opérer ce prodige , il est constant que
M. Gin , qui s'étoit couché le soir du i 3 messidor sans
avoir de créd it, ce dont il en auroit eu besoin pour
trouver un gros éeu à emprunter, s’est réveillé le i4
messidor tellement gorgé de trésors et de ressources,
que non-seulement il lui a fallu promptement; comme
on le voit dans l’état du mobilier actuel, un cojfre-fort ;
que non-seulement il a disposé à son gré de sommes
très-considérables ; que non-seulement il a payé 1 5 ,000 f.
comptant pour les glaces de M. Montz ; que nou^seuleli
�( 10 )
ment il a payé i 5 ,ooo fr. comptant pour le mobilier de
M. Montz; que non-seulement il a payé des sommes
bien plus énormes, comme on va le voir tout à l’heure,
pour d’autres objets : mais encore qu’il n’a pas pu se
passer plus long-temps ni de riches équipages, ni de
chevaux. M. Montz avoit deux voitures élégantes et du
meilleur ton deux jolis cabriolets plaqués d’argent,
de beaux harnois plaqués d’argent, des chevaux blancs,
des chevaux bais , une jument de selle. E t c’est tout
cela précisément qui devient nécessaire aussi à M . Gin.
Il lui faut , ni plus ni moins , les deux voitures , les
deux cabriolets j les beaux harnois, les beaux chevaux
blancs, les beaux chevaux b ais, la belle jument. Tout
cela lui est vendu, tout cela est dans l’état; tout cela est
donné comme par-dessus le marché , avec le superbe
mobilier dont il a payé en masse i 5,ooo fr.
Dieu soit loué ! la fortune ne reste pas toujours à la
même place. Dans son cours rapide, elle touche succes
sivement de sa verge d’ or loates les classes et tousles in
dividus. M. Gin a eu son lour ; il va donc aussi monter
en carrosse et jouir de l’opulence !
Erreur ! grossière pensée ! après tous les miracles
que nous venons de v o ir , un miracle plus grand va
s’ opérer. La tourbe vile et sensuelle, quand le sort la
favorise , ne sait rien autre chose que jouir brutalement
de ses dons. Mais il est des âmes stoïques qui , plus
grandes que la fortune , ne voient dans ses présens
qu’ une occasion de donner au monde d’ héroïques exem
ples du mépris qu’ ils en font.
Telle l’âme sublime de M. Gin.
�Tout a changé autour de lui : lui seul il ne changera
pas, et la tête, comme il arrive à tant d’autres parvenus,
ne lui tournera pas de sa subite métamorphose} il sera
dans l’opulence ce qu’il fut dans la misère.
M. Gin a des carrosses ; il n’y montera pas.
M. Gin a des chevaux$ il voyagera à pied , comme
par le passé.
M. Gin a le plus riche mobilier ; il continuera de se
contenter pour lui de la serge et de la bure.
M. Gin a un hôtel à sa disposition ; il restera conüné
dans cette petite chambre où il a savouré jusque-là les
charmes de l’obscurité.
M. Gin fera davantage.
Il poussera la délicatesse jusqu’à l’exaltation la plus
inouie.
S.on ami avoit été obligé de se dépouiller de tout.
M. Gin avoit tout acquis. Mais M. Gin n’a rien acquis
que pour en faire un pur hommage à l’amitié.
II est vrai qu’il est devenu le possesseur du bel hôtel,
l ’heureux propriétaire du beau m obilier, des carrosses,
des chevaux , de la cave. Il est vrai que c’est lui désor
mais qui fait la dépense dans la maison , qui paie les
gens , qui entretient la table. Peu importe. M. Montz
ne changera pas une seule de ses manières, et ne fera
pas le sacrilice d’une seule habitude. Toujours il occu
pera exclusivement l'hôtel qu’il a occupé , et M. Gin
ne se permettra pas d’occuper rien de plus que sa
chambre exiguë. Toujours M. Montz usera du mobilier
comme s’ il ne l’avoit pas vendu , et comme si M. Gin
,ne le lui avoit pas payé. C ’est M. Montz qui commauB 2
�( 12 )
liera clans la maison à tout le monde el à M. Gin luimême. C’est lui qui invitera à la table de M. Gin, qui y
fera servir et boire les lions vins de la cave de M. Gin ,
tandis que M. Gin se contentera humblement de la
petite place que jadis, et quand il n’ étoit que le parasite
de M. Montz, il occupoit au bout de la table , petite
place qu’il conserve pourtant avec une générosité sans
exemple , tandis qu’il laisse M. Montz , devenu son
hôte, continuer d’ occuper la place du maître. C’ est
M. Montz aussi quiemploiera les carrosses, les cabrio
lets , les chevaux , les cochers, les gens de l’écurie ,
sans que M. Gin se permette même d’en partager
l’usage.
Ainsi, dans le siècle passé on vit une grande prin
cesse acheter la bibliothèque d’un savant, uniquement
pour lui en assurer l’usage pendant tout le reste de sa
vie. Tel et plus noble encore M. Gin consumoit des
capitaux importans à conserver à son ami toutes les
jouissances dont d ’ impertinens créanciers menaçoient
de le priver. Plus noble , disons-nous 5 car , enfin , la
souveraine avoit bien d’autres livres à sa disposition
que ceux du savant ; et M. Gin n’avoit ni d’autre hôtel,
ni d’autre mobilier, ni d’autre carrosse.
Là ne finirent pas tous les actes de magnanimité de
M. Gin. Il rendit bien d’autres services à M. Montz.
C’ est le 14 messidor an 7 qu’avoient été passés et le
bail de l’hôtel el la vente de mobilier, de carrosses, de
chevaux, etc.
E t certes, il éloit temps, car, le 18 , le procès des
billets solidaires avoit été jugé, et une condamnation
�( >3 )
de 20,000 liv ., suivie bientôt dix jours après , c’est-àdire, le 28 messidor, d’une autre de 555 ,000 liv.,avoit
été prononcée contre M. Montz.
MM. Monlz et Gin n’étoient pas en si beau chemin
pour s’arrêter.
En conséquence , le lendemain même de ces grosses
condamnations , le généreux M. Gin qui n’avoit acheté ,
le 14 , un coffre-fort que parce qu’il avoit des trésors
qu’ il ne savoit pas où' renfermer , va chez un notaire
prêter à M. Montz 80,000liv. pour dix ans sans intérêts.
D ’autres auroient pu y regarder à deux fois avant de
prêter une pareille somme à un homme qui vcnoit de
subir de telles condamnations, et dont les affaires étoient
dans une si terrible confusion , qu’ il vendoit tout ce qu’il
avoit, jusqu’à son lit , ses carrosses et ses torchons de
cuisine. Mais le zèle de l’amitié ne se laisse pas aller à
de paniques terreurs. Quatre-vingt mille livres de plus
ou de moins dans la fortune miraculeuse que venoit de
faire M. Gin étoient une bagatelle. D’ailleurs M. Montz
qui veilloil aux intérêts de cet ami dévoué, eut grand soin
de stipuler à son proüt une spéciale hypothèque sur sa
nu-propriété d’Issy.
Ainsi et désormais MM. Tourton, Ravel et compa
gnie pouvoient venir quand ils voudroient. Le lit où
couchoit M. Montz, le mobilier dont il se servoit, les
carrosses et les chevaux qui le portoient, les tableaux
et objets d’arts qui le délecloient, les vins précieux qui
l’abreuvoient, tout étoitàM. Gin. C ’étoitparsa tolérance
que M. Montz en jouissoit. Les créanciers en auroient le
démenti.
4'. Fraude .
Obligation
simulée de
80,000 liv. Il
faut en de
mander la
nullité.
4 '. Procès .
Encore M ,
Gin.
�£,
FraU(ie.
A ff e c t a t i o n
FhôJuf« la
lônie iiHuit
¡endemander
Ja. îiullitc5«. V'orès.
^ncort •
i 'i 4 )
’ Voadroient-ils se venger sur la nu-proprlété d’ïssy ?
Une bonne hypothèque de 8o,ooo liv. la défendoit.
Mais il y avoit la propriété de l’hôtel de la place Yendôme. M. G in , supérieur à l’intérêt, ayoit négligé de
stipuler pour un prêt de 8o,ooo liv. une hypothèque sur
cet hôtel. Heureusement que M. Montz rivalisoit avec
noblesse d’âme. M. Montz avoit eu besoin de
_
_
^t
Bo;ooo liv. Gin les lui avoit pretees. L ’argent étoit re^
Montz l’avoit dans sa poche. L ’acte étoit signé.
Les stipulations éloient closes. M. Gin ne pouvoit plus
demander d’hypothèque nouvelle. Peu importe. Les
grandes âmes s’entendent et se répondent. S iM .G in n e
demandoitrien , ne pouvoit rien demander à M. M ontz,
M. Montz étoit libre d’ offrir et d’accorder à M. Gin.
E t en effet, il offre et accorde. Spontanément , donc
les parties paroissent revenir le 29 m essidor, c’est-àdire, le même jour que celui oiil’obligation de8o,ooo liv,
a été souscrite; chez le même notaire, et là, sans assigner
à leur convention nouvelle d’autre m otif, sinon qu’elles
le veulent ainsi, M. Montz , dans un second acte qu’on
assure même être inscrit au pied de l’acte de prêt de
80,000 1. , confère à M. Gin, pour le montant de ce p rêt,
hypothèque sur son hôtel de Paris, déjà couvert d’autres
hypothèques.
Nous disons que les parties paroissent. avoir sous
crit ce nouvel acte le 29 messidor. En effet , il est
difficile de croire que celte date soit véritable. L ’obli
gation du 29 messidor a été enregistrée le Ie*-. thermidor.
Cela étant, et si le i cr. thermidor, le second acte du
29 messidor existoii déjà, et surtout existoit au pied
�( ,S )
de l’autre et sur la même feuille de papier, on ne voit
pas du tout comment il se seroit fait que l’on n eut pas
présenté à la fois, le i er. thermidor, au meine enre
gistrement , ces deux actes frères , ces deux actes si
dependans l’un de l’autre. Toutefois le second acte n a
été enregistré que le 7 thermidor. L e 7 thermidor!
Or, il faut savoir que le 6 , MM. Tourton, Ravel et com
pagnie avoient, dans la simplicité de leur cœur, tente
une saisie sur ce riche mobilier qu’ils etoient loin de
penser avoir cessé d’appartenir à M. Montz. Le 6 ther
midor donc , cette sérieuse hostilité avoit mis 1 alarme
au camp. On s’étoit remué. On avoit bien visité toutes
les armes défensives pour Voir si elles étoient en état.
Alors , vraisemblablement, ou s’ apperçut de l’ omission
commise dans l’acte du 29 messidor; mais on craignit,
en la réparant par un acte du 6 thermidor , coïncidant
ainsi avec la fatale date de la saisie , de donner trop
de consistance aux soupçons de simulation. Il sembla au
conseil Montz bien préférable d avoir un acte qui con
tînt l ’addition d’hypothèque à une date antérieure. Mais
comment se la procurer ? le notaire fut-il trompé? un
subalterne acheté présenta-t-il dans la foule des actes
à signer celui-ci à la signature du notaire? Cela n est
pas prouvé. Mais cela est possible. E t quand .bientôt
on verra de qu oi, en pareille matière , s’avise M. Montz,
on verra aussi que nous ne violons pas les vraisem
blances , en craignant que le second acte n’ait été
enregistré le 7 thermidor que parce qu’en dépit de sa
date du 29 messidor il n’a existé que le 6 thermidor.
Quoi qu’il en soit, il restoit encore à sauver une
�( iG )
6'. Fraude. créance de 283,200 liv.'appartenant à M. Montz sur
Transport M. Cazaux. Si cette créance étoit éventée , elle pouvoit
simulé de la
créance C a- être perdue pour M. Montz. Heureusement pour lui,
zau\. Il faut
eiuleinander l’obligeant M. Gin étoit là avec sa corne d’abondance.
la nulliU;. La créance deM. Cazaux étoit échue dès long-temps. Elle
C)r. Procès.
Toujours M- n’étoit pas payée. Elle étoit même litigieuse. La solvabi
Cm .
lité du débiteur et les difficultés attachées au recouvre
ment de la créance pouvoient inspirer d’assez naturelles
inquiétudes à tous ceux à qui on auroit proposé de vendre
les billets. Une créance arrivée à terme sans être payée,
une créance pour laquelle on plaide n’allèche personne.
Nul homme de bon sens ne s’en charge volontiers, et
surtout u en traite à égalité absolue de valeur. Ainsi rai
sonne la prudence humaine ; mais l’héroïque amitié a
ses règles particulières. M. G in, le i er thermidor, va
f'
chez un notaire. Il est probable que les 3o,ooo 1. qu’il
avoit déjà données à M'. Montz seize jours auparavant
pour ses glaces et son mobilier , et les 80,000 liv. qu’il
venoit de lui remettre la surveille pour le montant de
l'obligation du 29 messidor , n’ avoient pas tout à fait
épuisé son coffre-fort ; car il trouve, deux jours après, les
283,200 liv. qu’il remet à M. Montz , et moyennant
lesquelles celui-ci lui transporte par acte notarié la
créance Cazaux, et les jugemens rendus contre ce dé
biteur. En sorte qu’en dix-sept jours M. Gin , à qui
encore une fois jusque-là 011 ne connoissoit ni propriété
ni ressource , donne pourtant à M. Montz tr o is cent
(¿UATRE-VINGB-TREï ZE MILLE DEUX CENTS LIVRES.
Deux observations sur tous ces actes.
i ° . Ni dans les Yeutes de glaces et de m obilier, ni dans
l ’ acte
�I *7 )
î ’actede prêt ¿Le 80,000 l i v ., ni dans le transport conte
nant quittance de 283,200 liv ., les notaires n’ont garde
d’attester une numération d ’espèces fa ite en leur pré
sence. On sent pourquoi.
2°. Bien que M. Montz eût loue, a partir du I e r . mes
sidor, son hôtel à M. Gin, bien que M. Gin eût acheté
tout ce qui y étoit, et que M. Montz n’y eût pas con
servé un chiffon, les actes de prêt et de cession at
testent que M. Montz demeuroittoujours dans ce même
hôtel : ce qui seroit très-bizarre , si on ne retrouvoit
dans cette occasion à M. Gin, logeant son ami chez lui
et dans ses meubles, la générosité habituelle de ses
procédésOn avoit; ainsi, paré au plus pressé. Les actes étoient
signés. M. G in, dès le 6 thermidor, avoil pris les ins
criptions. M. Gin avoit fait signifier son transport.
MM. Tourton et Ravel pouvoient venir.
Ils vinrent.
Leurs jugemens étoient enfin sortis du greffe ; et bien
sûrs que M. Montz, dont ils ne connoissoient pourtant
pas alors tous les talens , ne les paieroit pas sans y être
contraint, ils songèrent, à l’y contraindre.
Le premier aliment aux poursuites s’offroit de luimême ; c’étoit son brillant mobilier. Dans la pensée de
MM. Tourton, Ravel et compagnie , un mobilier si pré
cieux devoit inspirer à son propriétaire quelque désir de
le conserver ; et ils n’étoient pas sans espoir de voir
M. Montz s’exécuter pour n’en être pas dépouillé.
Ils ne rendoient pas au génie de M. Montz toute la
justice qu’il méritoit*
C
�7*. Frau d e.
Réclam a
tion de M .
Gin comme
locataire. Il
faut faire ju
ger qu’il n’a
pas droit de
réclamation.
7'. P rocès.
Toujours M .
Giu.
( >8 )
Le G thermidor, armés des jugemens du tribunal de
commerce , les huissiers se présentèrent dans l’hôtel
de la place Vendôme, qu’ ils croyoient être celui de
M. Montz , pour saisir le mobilier qui s’y trouvoit qu’ils
croyoient être le sien.
Le maître de l’hôtel et le propriétaire dumobilier parut.
Ce n’étoil pas M. Montz.
C’ étoit M. Gin.
]VI. Gin opposa ses actes.
Il requit un référé.
Il déclara que M. Montz ne demeuroit plus dans
cette maison j qu’il demeuroit à Meudon ; que lu i, G in ,
étoit le locataire de la maison de la place Vendôme *,
que lui, Gin, étoit le propriétaire du mobilier.
On examina ^ette réclamation.
Elle exlialoit la fraude.
Mais c’étoit la première qui étoit révélée à MM. Tourton , Ravel et compagnie.
Ils ne connoissoient pas encore toutes les autres. Ils
ne connoissoient ni le prêt G m , de 80,000 liv. , ni les
hypothèques Gin sur l’hôtel et sur la maison d’Is s y , ni
le transport Gin de la créance Cazaux, ni toutes les
mille et une fraudes pratiquées alors et depuis > qui se
prouvent et se trahissent les unes les autres.
Un procès de plus leur répugna pour le moment.
D ’ailleurs M. Montz avoit appelé des jugemens du
tribunal de com m erce. Il falloit instruire et faire juger
cet appel.
Pour le moment donc ils laissèrent là M. Gin et ses
menteuses réclamations , et donnèrent tout leur temps
et tous leurs soins à la suite du procès au fond.
�I I9 )
Lreur modération ne üt que donner plus d’audace à
M . Montz.
Pendant même que l’on plaidoit sur l’appel, de nou
velles fraudes furent ourdies. Sous peine de devenir ab
surde , M. Montz nepouvoit pas ne se servir jamais que
<le son ami Gin. Y a donc paroîlre sur la scène un autre
personnage, mais bien digne , comme le prem ier, par
son dévouement, par sa maladresse et par son mépris
de toutes les vraisemblances , de jouer un rôle aussi
-dans ce drame non moins révoltant que ridicule.
M. Montz a toujours ardemment désiré d’avoir à sa
pleine et entière disposition cette belle maison de plai
sance , dont nous avons déjà parlé , sise à Issy. Il la
convoitoit depuis long-temps. Depuis long-temps il en
avoit acquis la nu-propriété. Mais l'usufruit en appartenoit à M. de Besigny.
M. Montz avoit traité de cet usufruit et du mobilier
avec M. de Besigny. On ignore quels arrangemens furent
d’abord faits entre eux ; car il n'y eut aucun acte passé.
Tout ce qu’ on sait fort bien, c’est que M. Montz s’éta
b lit, en l’an 5 , à Issy, dans cette maison pour la
quelle il eut toujours une affection toute particulière, s’y
comporta en maître , y fit des dépenses et des embellissemens considérables.
Plus il y en faisoit, et plus il dut désirer de préserver
sa propriété des poursuites de MM. Tourton, Ravel et
compagnie.
Il est vrai qu’il avoit déjà donné à la nu-propriété
un abri dans l’hypothèque Gin.
Il est vrai que nul acte public ne le constituant enC 2
�( 20 )
core ni usufruitier de ¡’immeuble , ni possesseur du
m obilier, M. de Besigny , si on inquiétoit M. Montz,pourroit les reclamer,
r
Mais M. de Besigny le voudr oit-il ?
Il est très-probable qu’il ne le voulut pas , ou qu’ on
n’ osa pas même le lui proposer.
Il fallut chercher un autre prête-nom.
Il se trouva.
8«. Fraude.
Un M. la Jum elière, l’un des compagnons de plaisir de
Vente à un -jyj Montz , consentit à le devenir.
pTnfsuiVuit
En conséquence et par acte notarié en date du 18
Semandei p rairial, M. de Besigny vend son usufruit à M. la
la nullité.
-r
1•
8'. Procès. Jum elieie.
M. la Jume-
^
u n autre acte sous seing privé est souscrit le meme
‘ere'__
jour par les mêmes parties : et selon cet acte M. de
9Venîeïun Besigny vend moyennant a 5 ,ooo 1. qu’il reconnoît avoir
prête-nom du recu
lc mobilier étant dans la maison d lssy a M. la
mobilier
d’issy. IL faut
-
*
Jumelière.
"knulîiîé."
Mais quel étoit donc M. la Jumelière ?
Encore M^ia
M- la Jum elière s’est qualifié , dans ses différons
Jum elière.
actes , cultivateur.
Mais à quoi pensoit donc le cultivateur la Jumelière
en achetant une maison de plaisance occupée autrefois
par le prince de Conti ?
A la cultiver ? G’est une mauvaise plaisanterie.
A l’habiter ? Mais il en avoit une autre qui étoit son
séjour habituel dans le village de Yaudouleur , près
d’Elarnpes, comme le déclarent, les actes qu’il a signés.
Personne n’ a deux maisons de campagne. Un cultivateur
que son travail iixe davantage encore dans les lieux où il
�( 31 )
développe son industrie pour nourrir sa famille, conçoit
bien moins encore que tout autre celte absurde et dis
pendieuse fantaisie , et surtout n’acquiert pas comnie
double maison la maison d’un prince.
Aussi, M. la Jumelière , qui paroît être un homme
fort raisonnable, est-il resté dans sa maison d’exploita
tion du village de Vaudouleur, ou dans son pied à terre
à Paris de la rueBuffaut.
Rien n’a changé à Issy par son acquisition de l’usu
fruit et du mobilier.
M. Montz y demeuroit auparavant.
M. Montz y a toujours demeuré.
M. Montz jouissoit du mobilier auparavant.
M. Montz a joui du mobilier depuis.
E t M. PÆontz a si peu compris que cet événement
l’en chassât, et M. la Jumelière l’a si peu voulu , que
M. Montz à qui il convenoit en l’an 9 de ne plus avoir
1air de conserver à Paris ni domicile , ni mobilier,
puisque le domicile et le mobilier de P aris étoient sous le
nom de son bon ami Gin, a fait à la municipalité d’Issy
sa déclaration qu’il y fixoil son domicile.
Quel étoit donc le dessein de ce cultivateur de Vau
douleur, en achetant l’usufruit et le mobilier de M. de
Besigny ?
■
Dira-t-il qu’il faisoit une spéculation?
Elle étoit bizarre.
M. de Iîesigny avoit quatre-vingts et quelques an
nées. De la part de tout autre que M . Montz , nu-pro
p riétaire, n’eût-ce pas été une folie véritable d’acheter,
à quelque prix que ce fû t, cette possession fugitive que
�( 23 )
quelques mois pouvoîent dévorer, et qui, en expirant1,
laissoit son acquéreur insensé avec l’ embarras d ’un mo
bilier de ü 5 jOOO livres dont il ne sauroit que faire , et
qu’il ne sauroit où placer !
. Si pourtant la tête avoit tourné à M. la Junielière au point de conclure ce marché digne des PetitesMaisons , apparemment qu’il va se presser d’exprimer
de cette spéculation mourante tout le lucre dont elle
est susceptible , en louant à haut prix à M. Montz et
cette maison dont il ne veut pas sortir, et le mobilier
qui la garnit. Apparemment que M. la Jumelière
fera constater avec M. Montz cet important mobilier
dont il vient de traiter, et qu’il ne déplace pas !
En aucune manière.
Nul acte n’ est fait.
M. Montz reste dans la maison sans bail.
Il reste en possession du mobilier sans écrit.
M. la Jumelière abandonne tout à sa foi. Il livre
tout et la maison et les meubles avec une confiance en
tière àM . Montz , c’est-à-dire , à ce débiteur en faillite,
saisi à P aris, écrasé d’énormes condamnations, me
nacé d’une prochaine expropriation de ses biens , dé
pouillé par lui-même, si on l’en croit, de ce qu’ il y a
de plus liquide dans sa fortune, et dont tout Yactif
connu, en écartant même le passif frauduleux qu’il a
créé, est bien loin de suffire au paiement de ses légi
times créanciers.
Au reste , M. la Jumeliere fait très-bien d’écono-.
miser les frais des actes ; car , quand il en fa it, ce sont
(les absurdités de plus. Plus tard, enfin, un bail a été
�t »3 )
îait. E t , dans cet acte , comme dans tous les autres, les
vraisemblances sont si bien gardées, que ce mobilier de
25;ooo 1. M. la Jumeliere paroît le louer à M. Monlz
5 oo liv. par an. Cinq cents livres de revenu pour uue
mise dehors de 25,ooo liv ., pour une mise dehors en
mobilier qui dépérit tous les jours ! belle spéculation !
et bien vraisemblable !
.
Mais n’anticipons pas.
Pendant que tout ceci se passoit, M. Montz continuoit à plaider contre MM. Tour ton , Ravel et com
pagnie. Les années s’écoulèrent en chicanes et en pourparlexs. Enfin et en l’an i 3 , les droits de MM. Tourton,
Ravel et compagnie furent consacrés par des jugemens
souverains.
Ces jugemens étoient quelque chose. Ce n’étoit pas
tout : il falloit les exécuter.
Plusieurs débiteurs avoient été condamnés. 11 y en
avoit dans l’étranger. Il y en avoit en France. L ’exemple
de M. Montz avoit été contagieux. Plusieurs étoient
réellement insolvables. D ’autres avoient pris , comme
M. Montz, leurs précautions , et le paroissoient comme
lui.
Pendant que MM. Tourton , Ravel et compagnie délibéroient sur celui des débiteurs qu’ils poursuivroient
d’abord, et alloient aux informations pour découvrir
leurs divers biens , ou leurs fraudes variées, un créan
cier de M. Monlz perdoit patience et vint dispenser
MM. Tourton , Ravel et compagnie de commencer
contre lui des poursuites d’expropriation, en les corn-
�C 24 3
«nençant lul-même. C e créancier impatient êloit son.
propre beau-frère , M . S e l o n , qui lit saisir à la fin de
l’an i 3 , ou au commencement de l ’an i 4 , l ’hôtel de la
place Vendôm e.
D éjà , com m e on se le rappelle , M . Montz avoit dé
taché de cet immeuble toutes les glaces qu’il avoit ven
dues à Gin. Mais il craignit que ce n’ en fût pas assez pour
dégoûter ces enchérisseurs , et il imagina de recourir
encore à Gin pour lui faire un bail bien bizarre et qui
fût propre à effrayer quiconque seroit tenté de se rendre
adjudicataire , en lui laissant entrevoir pour premier
fruit de son adjudication, soit un procès , soit de grands
embarras dans sa jouissance. L e bail qu’ il avoit fait en
l ’an 7 à M . Gin n’ étoit pas e x p iré , mais peu importe.
Celui qu’ il va
faire ne
commencera
qu’à l ’expira
tion.
11 appelle
donc son fidèle Gin.
Gin court chez le notaire.
10 '. F rau d e.
B ail simulé
de l’hôtel de
la place V en
dôme. I l Cil
faut deman
der la nullité,
io '. P rocès.
Encore M*
•Gin.
li t le 29 frimaire de l’au i 4 , M . Moutz loue à G in ....
quoi ? T o u t l’hôtel com m e autrefois ? N o n , mais un
petit appartement de trois chambres dans les entresols,
outre t.a. chambre a u jo u r d 'h u i occupée par M . Gin.
C ’étoit bien déchoir du premier bail de la part de ce lo
cataire fastueux, qui alors, pour se loger, lui et son riche
mobilier , avoit eu besoin de l'hôtel tout entier.
Au
reste, s’ il se restreignoit pour sa personne , au point de
se contenter désormais de ce petit appartement, il clierclioit à s’en indemniser en espace sur les autres parties
¿de l’hôtel , car ce bail com prend t o u s les greniers ,
TOUTES
�( ’3 )
t o u t e s les écuries et t o u t e s les remises . Si l’ on songe
que l’Iiôtel cle la place Vendôme , à cause de la disposi
tion et de la magnificence de ses appartemens , ne peut
être occupé que par des propriétaires très-riches , on
sentira aisément comme , pour ces propriétaires , il y
auroit une grande tentation de l’acquérir , quand ils seroient bien assurés de n’y pouvoir loger de neuf ans , ni
une hotte de foin , ni un cheval, ni un cabriolet. L ’on
sentira encore combien il étoit vraisemblable queM. Gin,
avecsachambre, et même son appartement de trois pièces
dans l’ entresol, eût besoin de tous les greniers , de toutes
les remises et de toutes les écuries. Au reste, et pour
en ûnir sur ce point, il faut savoir que cette dernière si
mulation a manqué son but en partie. M. l’ambassa
deur de France près le roi de W irlem berg n’en a pas
moins acheté l’hôtel. Pais il a fait déclarer nul le bail de
l’ami Gin , qui non-seulement a eu la douleur de ne
pouvoir pas occuper à lui seul tous les greniers et toutes
les écuries de l’hôtel de Montz, mais qui va même cesser
d’habiter cette chambre unique si long-temps occupée
par lu i, et dans laquelle ont été méditées tant et de si
belles conceptions (i).
E t qu’au sujet de cette chambre unique il nous soit
(i) L a jugement qui auiuillo ce bail a été rendu le 2 janvier dernier
par le trlbuual de la Seine. Ce tribunal, au nombre de ses m otifs, a con
sidéré « que le bail étoit fait par Montz que poursuivoient scs créanv ciers, à un hom m e auquel, dans l’espace de sept an s,
a vendu l^j
* meubles , les gl:ices déooraut les appartemens de cette ma.sou au
>» profit duquel il a souscrit des obligations et îles cessions , de tous les*> quels laits résulte une fraude évidente, etc. ».
D
�(
)
permis de faire une observation qui prouve toute l'im
pudeur avec laquelle Montz et ses amis ne font pas difliculté «le se donner des démentis à eux-mêmes , pourvu
qu'ils parviennent à leurs fins.
M. G in, par le bail de l’an 7, étoit devenu le loca
taire de tout l’hôtel, le propriétaire de tout le mobilier,
c’est-à-dire, qu’ à partir de cette époque il a dû des
cendre de sa chambre ou de son grenier du quatrième ,
pour occuper, à lui tout seul, tous les riches apparte
nions qui composoient l’ hôtel. En effet, on a vu que
quand, quelques semaines après, on est venu pour saisir
sur M. Montz le mobilier qui garnissoit ces vastes ap
partenions, il s’est présenté pour déclarer que c’étoit
lui qui occupoit les appartenions , que c’étoit lui qui
étoit propriétaire du mobilier, et que , quant à M. Montz,
il demeuroit à Issy. Eh bien! malgré ces déclarations,
malgré cette conséquence très - naturelle du bail de
l’an 7 , s’il étoit vrai , veut-on savoir ce qui en étoit ?
Gela n’est pas diflicile-, car voilà M. Monlz et son com
père Gin , q u i, ne s’inquiétant guère de convenir qu’ils
ont m enti, quand leurs mensonges avoient réussi ( et
ceux-ci avoient très-bien réussi, puisque dès long-temps
les huissiers s’étoient retirés) , viennent naïvement se
proclamer eux-mêmes imposteurs en laissant écrire en
toutes lettres , dans le bail de l’an i/j., que le pauvre
M. Monlz est toujours demeurant dans son hôtel, place
Vendôme , et que le riche M. Gin occupe encore aujourd /tut une chatnl)ie , u^e seule chamime ! dans cc
grand hôtel qu’il avoit feint de louer. Il est diflicilc do
croire qu’ on puisse pousser l’effronterie aussi loin ! E t
�( 27 )
'pour en rester convaincu , il faut avoir les deux baux
sous les yeux.
Ainsi procédoit M. Montz pour ses biens de Paris. Sa
conduite est toute d’ une piece , et il procédoit delà même
manière pour tous ses autres biens.
On n’a pas oublié les biens de Moulins.
Ces biens valent certainement plus de 200,000 fr.
M. Montz, instruit que MM. Tourton, Ravel et com
pagnie se donnoient des mouvemens pour prendre sur
¿ces biens les renseignemens à l’aide desquels ils pourroient opérer une-saisie régulière , gagna de vitesse.
Tous ces biens étoient loués par baux particuliers. II*, i'rande’
Le 4 novembre 1806, il fit a un M. Tarteiron un bail Bail simulé
des biens do
général pour neuf ans , à commencer le u du même Moulins. 11
faut en de
mois , et moyennant 3 , 5 oo fr. , et le 22 de ce mois m ander la
même, il passa à un M. Sclierbe la vente de ces biens I I nullité.
e. P ro cès au prix de 70,000 fr.
12 '. F ra u d e.
Le seul rapprochement de ces deux ope'rations suffit V ente si
mulée et à vil
pour re'véler les intentions de M. Montz et de ses af- prix des mê
biens. I l
lidés. Un homme de bon sens ne fait p as, la veille mes
faut en de
m ander la
d ’une vente , un bail général.
nullité ou la
1.1 est très - évident que ce bail a eu deux buts dif rescision.
12«. Procès.
férons, mais tous deux pourtant imaginés pour léser
les droits des créanciers. L'un a été de tromper ,
par les apparences d’un produit médiocre , ceux qui
ne se seroient pas fait rendre compte de la valeur de
la propriété , et de les détourner par là de tout projet
de surenchère. L ’autre a été d'effrayer de surenchérir
ceux qui connoissoient la valeur de celte propriété en
plaçant à coté de leur surenchère l’alternative ou de
D 2
�(
}
subir le bail pendant neuf ans , ou de plaider pour le
faire annuler.
Surenchère
Cette alternative , au surplus , n’a pas effrayé
dont on a de
MM. Tourton, Ravel et compagnie, ni un autre créan
mandé la
nullité.
cier révolté comme eux de la vileté du prix de la vente.
13". Procès.
E t eux et ce créancier ont surenchéri. Le prête-nom
de M. Montz résiste de toutes ses forces à ces suren
chères. On plaide à ce sujet à Moulins.
Pour en iinir sur ces biens , il faut déranger ici, quel
que peu , l’ordre chronologique des manœuvres de
M. Montz, pour parler tout de suite d’une mesure qui
complète le système des vols qu’ il fait à ses créan
ciers.
Une portion cle fermages des biens de Moulins a été
l 3*. Franch.
Transport arrêtée dans les mains des fermiers par MM. Carrié
simulé des
fermages de et Bezard, créanciers de M. Montz. Tous les jours pouMoulins, il
faut en de voient arriver aussi sur ces fermages d’autres oppo
mander la
sitions : et M. Montz, qui semble avoir l’espoir d’ob
nullité.
i4”. Procès. tenir la mainlevée des oppositions Bezard , a voulll
Encore M.
Ciin.
avant tout s’assurer qu’il ne premlroit pas uue peine
inutile et qu’il recueilleroit ce fruit de son labeur , en
s’appliquant ces io,ooo fr. au préjudice de ses créan
ciers.
Il a fait un signe.
M. Gin est encore accouru chez un notaire.
11 y est accouru avec les poches pleines d’argent.
11 étoit dû 1 0,609 fr. par divers fermiers.
Ces fermiers étoient éloignés , et le recouvrement
par conséquent devoit donner beaucoup d’embarras.
Dailleurs étoient-ils solvables ?
�( 29 )
P u is, quand les oppositions Iiezard seroient-elles
levées ?
Si cette mainlevée éprouvoit des difficultés , ne perdroit-on pas bien long-temps les intérêts ?
Si elle n’arrivoit pas , le prix qu’il paieroit lui-même
pour la cession à M. Montz, criblé de dettes , ne seroit-il pas perdu ?
Qu’est-ce que tout cela fait à M . Gin?
Il a bien fait d’autres preuves de désintéressement.
Rien, en ce genre, ne doit surprendre de la part
de M. Gin. 11 est si riche! Qu’a besoin de ses revenus
ou même de ses fonds un homme si détaché de toutes
les vanités, qu’avec des carrosses il court à pied par les
boues et par les pluies , qu’avec un hôtel entier il occupe
un coin imperceptible au quatrième étage, qu’avec une
bonne table il laisse un autre en faire les honneurs et se
contente d’avoir l’air d’y être toléré? Un tel philosophe
que les richesses ne corrompent pas et auquel elles ne
donnent nul besoin , n’a rien de mieux à en faire que de
les répandre en largesses dans le sein de ses amis.
M. Gin répand donc les siennes dans le sein de
M . Montz , e t , par acte notarié du 9 juillet 18 0 7 ,
moyennant 10,509 francs ( ni plus, ni moins) qu’il paie
comptant (car remarquez bien qu'il est toujours pressé
de payer), il achète et se fait céder par M. Montz
celte véreuse, difficile et lointaine créance de 10,509 fr.
sur des fermiers saisis.
Mais pendant que tout ceci se passe à Moulins, voyons
ce qui se passe à Paris et à Issy. E t peut-être d’ailleurs
ne quitterons-nous pas M. Gin pour cela. 11 est pos-
�{ 3o )
sible que .nous ayions encore le plaisir <le l’y rea 4'- F ra u d e.
Billets
souscrits par
M . Montz à
sa mère pour
¿puiser sa
part hérédi
taire. Il fail
lir a faire an
nuler ces
billets.
,l 5'. P rocès.
v oir.
A Paris, Mme. Montz la mère venoit de mourir. Il
fuudroit n’avoir pas lu ce mémoire jusqu’ici pour ima
giner que, dans la succession de cette datne , les créan
ciers de son iils rétrouveroient sa portion héréditaire.
On trouva en eiîet après sa mort un paquet bien et
duement cacheté. On s’attendoit bien que ce ôeroit un
testament qui, sauf les arrangements secrets et de fa
mille , réduiroit M. Montz à sa légitime. Celle lé
gitime, du moins , pourroit payer quelques dettes, et
les créanciers auroieut pu prendre palience. Point du
tout. Le paquet cacheté éloit bien mieux qu’un testa
ment. C ’éloit une liasse de billets souscrits par
M. Montz au prolit de sa mère , qui, si l’on en croit les
billets, l’auroil fait hériter de son vivant de plus que
sa portion héréditaire. Ce point un jour sera examiné.
Pour le moment parlons d’aulre chose. Parions par
exemple de ce qui se passe à Issy.
A Issy , M. Moutz ne s’endormoit pas dans une
fausse sécurité. La crainte de Dieu et des huissiers lui
faisoit sûrement passer plus d’une mauvaise nuit.
Tout ce qu’il avoit fait pour sauver son avoir des pour
suites ne le rassuroit pas entièrement. Les glaces de
Paris étoient sauvées. Le mobilier de Paris étoit sauvé.
Les billets Cazaux étoient sauvés. Les fermages de
Moulins étoient sauvés. L ’ami Gin s’éloit chargé de
ces divers postes. La terre de Moulins éloit sauvée.
M. Sclierb et M. Tarteiron y veilleroient. La suc
cession maternelle étoit sauvée. De bons billets l’avoieut
�(3.
j
consommée d’avance. Sur la mars3n d’issy l’ami Gin
avoit une bonne hypothèque de 80,000 francs. Mais le
mobilier d’Issy n’avoil-il rien à redouter?
Il y avoit bien cette ancienne vente de l’usufruit faite
à M. Montz sous le nom de l’ami la Jum elière, vente
qui, tant que l’usufruit avoit duré, avoit pu servir de
prétexte pour faire réputerM. la Jumelière propriétaire
des meubles. On s’en étoit même servi avec assez
d’avantages contre les saisies du domaine. Mais cet acte
avoit vieilli. L ’usufruit avoit cessé avec la vie de M. de
Besigny. M. la Jum elière, qui 11’avoit d’autres droits
que ceux de M. de Besigny, n’avoit donc plus rien à pré
tendre ni dans le château d’Issy, ni par suite dans le
mobilier qui le garnissoit.
11 y avoit bien aussi cette vieille vente du mobilier
faite sous seing privé à M. Montz, sous le nom de l’ami
la Jum elière, par M. de Besigny. Mais si nul autre acte
n’intervenoit , quand celui-ci auroit été enregistré ( ca
qu’ il n’étoil pas), et auroit pu être produit, M. Montz
étoit resté si long-temps en possession de ce mobilisr ,
soit avant, soit depuis la cessation de l’usufruit, sans au
cune espèce de titre qui l’y autorisât, qu’on ne devineroit
même pas qu’il p6t en avoir d’autres que le meilleur de
tous , c’est-à-dire , la possession, et que les meubles
pussent appartenir à quelque autre que lui-même. Ajou
tez que , depuis ce temps , M. Montz avoit changé une
partie de ce mobilier contre des meubles plus frais et
plus riches, et y avoit beaucoup ajouté. Si donc quelque
jour M. la Jum elière venoit réclamer contre des saisies
avec son vieil acte , quand on voudroit faix’e le recolle-
�C3. )
i 5'. F ra u d e.
•du^uobiTieiT
d’Issy. Il
faut en demander la
Encore M. la
Jum elière.
?7*-> 18e. et
19 '. F r a u
des.
m ent, on ne.s’ y reconnoîtroit pins , Tien ne seroit ¿ a c
cord, et la saisie dévoreroit peu t-être la meilleure
partie des meubles.
J J n autre acte fut donc fait sous seing-privé , auquel
on donna pour date le I e r . avril 180 7 . Par cet acte , M. la
Jumelière donne à bail à M. Montz, pour trois années ,
. . . . . .
h commencer du i er. mai prochain , la jouissance de to us
les meubies qui sont dans le château d’Issy, détaillés
dans les procès-verbaux de saisie faits par le domaine
aux diverses époques qui y sont relatées, moyennant la
somme de cinq cents francs.
Ce bail a été enregistré le 29 du même mois d'avril/
11 a , depuis , et le 6 janvier 180 8, été déposé à un
notaire. Nous dirons plus bas pourquoi. C ’est un petit
tour de M. Montz qui mérite d’être noté , comme étant
vraiment un des plus curieux.
Les grands objets , au reste, ne faisoient pas négliger
à M. Montz les petits.
Par exemple , M. Montz , depuis le 1 er. avril, avoit
amené à Issy une jument
et
un tapecul.
Ils pou-»
Actes si- voient être saisis. Vile , M. la Jumelière et un acte.
cjûelques dé- M. la Jumelière vient, M. la Jumelière signe. V oici,
!n demander «n date du TO mai 1807 , un bail fait par M. Montz qui
lalIlSl
H«!11'«xV
II) •j demeure tout seul à Issy , qui
*" se sert tout seul de la bête
19'. et 20«. et de la voilure, à M. la Jumeliere qui demeure à
P rocès. Tou.
,
.
.
. 1
jours M. la Etam pes, qui ne s est jamais servi de 1 une ni de l’autre,
jumeliere.
et ^ peul-êlre ne les connoît pas même de vue, de ces
vTuilpti nmir
deux objets pour trois m ois, à raison d’un franc par
jour.
Et cet acte est enregistré. Un pareil acte ! E t en
cil e t ,
�seÎTet, on ne le faisoit que pour cela. Puis, viennent les
saisissans pendant ces trois mois ! On leur répondra.
Ils n’aui’ont pas même le tapecul ni la jument. Après
- ces trois mois, ou le tapecul et la jument n’y seront plus ,
ou Lien il y aura un autre bail»
Autre exemple. Quelques menus meubles ne sont pas
compris dans les procès-verbaux de saisie. On les éva
lue ; ils peuvent être du prix de 600 fr. V ite, M. la
Jumelière et un acte. M. la Jumelière vient*, on é c rit,
on signe. C’ est une quittance de 65 o fr. qu’a payés M, la
Jumelière pour des meubles, sans dire lesquels, qu’ôn
lui fournira. E t la quittance est enregistrée » Cet acte
en valoit en effet bien la peine comme l’autre ! Puis
tiennent les saisissans ! E t , si, outre les meubles com
pris dans les procès-verbaux, plus la jument, plus
ie tapecul, il se trouve quelques objets encore, eh
bien ! ce seront ces objets-là même qui auront été
vendus à. M. la Jum elière, et que celui-ci, la quittance
à la m ain, ne manquera pas de réclamer»
Autre exemple : et celui-ci est curieux. M. la Jum e
lière , dans tous, ses cbiil’ons d’actes, avoit bien pu
vendre ce qui existoit déjà. Mais ce qui n’existoit pas
encore, ce qui n’existe que de jour à autre , les récoltes
enün, M. la Jumelière à qui d’ailleurs elles n’appartcnoient pas, n’avoit pas pu les vendre. E t cela éloit
bien douloureux ; car en juin , et le foin qu’ on venoit
de couper, et le bois qui étoit dans le bûcher devieudroient nécessairement la proie des saisissans. Vite
M. la Jumelière et un acte. M. la Jumelière vient.
Ou écrit i et cette fois - ci ce n'est plus M. la .Tu-
�( 34 )
melière qui vend ou loue à M. Monlz; c’est M. Montz
qui vend à M. la Jumelière le bois qui est dans la
maison et le foin qu’ on vient de couper. Et l’acte est
enregistré. Puis viennent les saisissaus ! Ils n’auront ni
le foin ni le bois. C ’est dommage que MM. Tour ton ,
Ravel et compagnie n’aient pas continué à explorer ces
misérables et fastidieuses fraudes de détail. Il est pro
bable qu’ils auroient trouvé quelque acte enregistré pour
les allumettes et les tessons de bouteilles.
Cependant le moment arrivoit où allo.it éclater sur
M. Montz l’orage q u i, depuis si long- temps grondoit
dans le lointain. Mais c’est dans les grands dangers que
se développe un grand courage , et l’on jugera peutêtre que M. Montz ne fut pas abandonné par le sien.
MM. Tourton , Ravel et compagnie se résolurent
enfin, le 26 octobre 1807, a commencer les poursuites
d’expropriation de la maison dTssy , et ce jour fut fait
à M. Montz un commandement tendant à'ce but.
Les 29, 3 o et 3 i du même mois, ils firent procéder
dans la même maison à la saisie exécution du mobilier.
Il est fort inutile d’observer que M. Montz en avoit
soustrait tout ce qui avoit le plus de valeur. On sup
posera très - aisément que celui qui n’est occupé qu’à
combiner des actes pour voler à ses créanciers les
masses et les choses que leur volume ou leur nature ne
permet pas d’enlever ou de cacher, n’a garde de rester
en si beau chemin quand il s’agit d’objets faciles à dé
placer. Aussi remarque-t-011 avec beaucoup d’édifica- .
tion, soit dans les actes simulés souscritspar M. Monlz,
.soit dans les procès-verbaux de saisie qu'on n’y trouve
�( 33 )
ijamais, -malgré la somptuosité dont il fait profession
aucune des choses de prix dont il se sert habituellement
quand les huissiers n’y sont p as, comme de la vaisselle
ou des bijoux. Il n’a pas été saisi même une montre
d’argent.
M. Montz, au reste , n’entendoit pas borner ses pré
cautions à ces moyens bannaux d’enlèvemens clandes
tins , bons pour le vulgaire des banqueroutiers.
Ce que, dans le mobilier dTssy, il avoit laissé à dé
couvert, parce qu’il ne pouvoit se passer de meubles,
'venoit d!être saisi. M'. Montz étoit tranquille sur ce
¡point. Son ami la Jumelière réclameroit ce mobilier à
Taide du bail du i er. avril dernier.
Mais l’immeuble ! Déjà le commandement d’expro
priation-étoit fait. L ’hypothèque Gin existait bien.
Mais cette hypothèque bonne et suffisante pour le temps
¡où elle avoit été donnée , parce qu’alors M. Montz
n’avoit que la nu-proprieté, ne l'étoit plus aujourd’hui
que , l'usufruit s’y élant réuni , la maison dTssy av o it,
dans la fortune de M; Montz , sa valeur entière.
L ’ imagination de M. Montz ne reste jamais court.
•Une suite'de mesures fut inventée , toutes plus curieuses
l’une que l’autre. Le mois-dé novembre les vit'toutes
éclore;
Ce qui sembloit plus pressant , selon M. Montz,
cJétoit’ d’entraver la vente form ée, et de déshonorer la
propriété pour en dégoûter tout enchérisseur. O r, dans
ce dessein , il s’avisa d’un moyen qui ne pourroit être
sorti que de1 la- cervelle d’un fou-, s’il n’étoit évident
Çu il fut 'Suggéré3 et par* la rage et par la ; cupidité*,
E 2
�( 36 )
réunissant leurs efforts tant pour se venger d’-audacieuï '
créanciers pur la destruction de leur gage, que pour
mobiliser et convertir en argent, à son profit, jus
qu’aux élémens de l’immeuble lui-même, tout saisi
■qu’il éloit.
Un superbe parc faisoit le principal ornement et
une partie de la valeur de la maison d’Issy. On peut
même dire qu’il en faisoit partie en quelque sorte in
trinsèque et indispensable. Qui voudroit , en effet ,
acquérir à la campagne , et surtout sur une hauteur ,
une maison de quelque importance, dont le Yaste terrain
qui l’ environneroit seroit une lande absolument inculte ,
et privée de tout ombrage, au point de ne plus oiiYir
à l’ceil un seul arbre?
JEh bien! couper tous les arbres fut précisément ce
qu’imagina M. Montz.
Toutefois en même temps qu’il vouloit faire beau
coup de mal à MM. Tourlon , Ravel et compagnie , il
se vouloit à lui-même quelque bien. En abattant, il
assouvissoit sa colère. Mais les arbres abattus appartiendroient à ses créanciers, et c’est aussi ce qu’ il vou
loit empêcher : le pouvoit-il ? Pouvoil-il vendre une
haute futaie et tous les arbres d’un parc , au mépris
des poursuites d’expropriation commencées, et posté
rieurement au commandement, prédécesseur d’une saisie
immobiliaire ? Telles étoient les inquiétudes que rouloit, dans son esprit, M. Montz , sur l’eiïicacité de son
projet.
Plein de ces idées, il les épanche autour de lui. II
demande de tous côtés ce qu’il pourroit faire. 11 a
�(
3?
)
même l'indiscrétion de répandre des notes consultât h’es
d e c e p o in t , entièrement écrites de sa main : « On de» mande , disoil-il dans ses notes , si un propriétaire
» d’inimcubles peut vendre ( d i x jours (i) après un
» commandement en expropriation ) des superficies de
» bois : et en cas •qu’il fasse vente à term e, si l’acqué» reur peut jouir de son contrat, c’est-à-dire, ne couper
» qu’à fur et mesure des époques stipulées dans ce
» contrat, sans craindre de surenchère , ni d’opposi» lion de la part du créancier ou de tout autre». Tant
d’audace n’étoit propre qu’à soulever l’indignation doj
ceux même à qui M. Montz faisoit l’injure de les cou-i
sulter. Aussi produisit-elle cet cfTet. MM. Tourton,
llavel et compagnie furent avertis de tous côtés'des
iureurs déloyales de M. Montz. Une de ses notes mêmes
leur fut remise. Elle dut provoquer leur surveillance..
Ils se tinrent donc aux aguets.
E t ils eurent raison.
En effet, on vint les prévenir le i 3 novembre 1807,
de très-grand matin , qu’il y avoit dans le parc d’Issy
une armée de bûcherons qui, M. Montz à leur tète,
porloient la dévastation partout.
\
(1) Il est bien essentiel de remarquer celle date. L e commandement
fait par M M . T o u rton , R avel et compagnie dont il s’agit ici est du 26
octobre 1807. Et puisque dans la note M . Montz demande s i , après que
dix jours se sont écoulés depuis ce com m andem ent, il peut encore vendre
ses superficies do b o is, il suit de là que la note a été écrite au plutôt le 6
novembre 1807 ; c’est-à-dire que le six novem bre M . M ontz, qui éloit
inquiet de savoir s’il pouvoit alors vendre ses bois, ne les avoit p a s
encore vendus. Cette observation va trouver tout à l’heure son appli
cation.
i
�( 38 ).
.XJn huissier et ses témoins partirent en grande hâte
pour constater ces dégradations et pour en saisir les ré
sultats.
M. Monlz fut en effet trouvé sur le terrain.
Vingt - quatre ouvriers détruisoient tout sous ses
ordres.
Déjà une avenue entière de cent soixante - seize
beaux tilleuls, gissant encore sur la terre avec leurs
branches et leurs feuilles, n’existoit plus.
Ça et là étoient également étendus cinquante tilleuls
et maronniers que l ’onavoit coupés avec l ’aflectation ,
n o n - seulement d’avoir choisi les plus beaux, mais
<1’avoir choisi ceux dont l’abattis rompoit davantage
l ’ordre et l’harmonie des plantations.
A l’instant où l'huissier arrivoit, les vingl-quatre ou
vriers étoient tous rassemblés dans la grande allée fai
sant face au salon du château. Dix arbres étoient tombés
sous la coignce. L ’huissier s’efforça d’abord de leur
persuader’ de suspendre leurs travaux. Sous ses yeux
même ils continuèrent et déclarèrent qu’ils ne recevoient d’ordres que de M. Monlz.
L'huissier lit commandement à M. Montz d’arrêter
les travaux. M. Montz, loin de cela, commanda de re
doubler de célérité.
Après avoir constaté tous ces faits, l’huissier alla re
quérir le maire du lieu de venir interposer son au
torité.
Le maire crut qu’il ne pouvoit employer là force
sans y être préalablement autorisé par là justice. Mais
il ne refusa pas d’employer les représentations,.
�( 39)
Il vînt.
f
Il essaya de faire senlir à M. Montz tout ce que sa
conduite ofFroit de révoltant. Il multiplia ses efforts
pour le démouvoir de ses projets destructeurs.
’’ Tout fut vain.
Le maire se relira.
L ’huissierse retira aussi après avoir assigné M. Montz
pour le lendemain en référé.
M. Montz resta.
Les ouvriers restèrent.
La nuit même n’interrompit pas leurs travaux. Pour
la première fois , peut-être , des bûcherons abattirent
des arbres à la lueur des flambeaux , et M. Montz passa,
dit-on , la nuit près d’eux pour animer leur zèle et dé
signer les victimes.
!
Le lendemain s’ouvrit une scène nouvelle , et parut
un troisième acteur inconnu jusque-là.
En voyant M. Montz présider lui-même à la des
truction de son parc , et se souvenant que le 6 novem
bre , c’est-à-dire, six ou sept jours auparavant il avoit
consulté pour savoir s’il pouvoit, dix jours après un
commandement d’expropriation , vendre ses hautes fu
taies , il étoil fort permis de croire que , ni le G novem
bre , ni même depuis , il ne les avoit pas vendus ,
et que, puisqu’il les abaltoit en personne le i 4 , il les
exploitoit pour le compte de sa vengeance et de sa cu
pidité.
Néanmoins au référé intervint un M. Senet, qui n’est
ni marchand de bois , ni charpentier , ni charron , ni
tourneur, ni menuisier , ni ébéniste , ni d’aucune pro-
19 '. F ra u d e ,
V ente si
mulée des ar»
brea d’Issjr.
�[ho)
H Tauten de- fession ou l’ usage du Lois soit nécessaire. TT importe-, Oft
i'nufnu‘ la M- Se ne l n en montra pas moins un acte sous seing
20'. Procès. priVe 5 en dale du seize octobre 18 0 7 , mais enregistré
,Seuct. seu]ement ]e ç) novembre , par lequel M. Montz lui vendoit la totalité des arbres de son parc , abattus et non
abattus, moyennant d ix m ille francs p a y é s c o m p t a n t
( ce qui est très-vraisemblable , surtout dans les, cir
constances), en lui donnant trois ans pour achever de les
abattre et pour les enlever.
M. S e n e t , armé de ce bel acte, réclama les arbres ,
ainsi que la faculté de continuer d’abattre.
C’étoit devant M. le président du tribunal civil de la
Seine que se présentoit celte réclamation.
On pressent le succès que dut obtenir cette réclama
tion devant un tel magistrat , distingué par sa vertueuse
*
horreur pour la fraude, non moins que par le talent
qu’a su lui donner,, pour la reconnoitre et la dém as
q u er, une vie toute entière employée à protéger de son
expérience la bonne foi contre les ru S-CS de la procé-
•
dure.
Il sourit de mépris *, observa dans ses motifs que l’acte
n’étant enregistré que le 9 novembre, n’avoitpas de date
certaine avant ce jour , lequel étoit postérieur au com
mandement d’expropriation } ajouta qu’après ce com
mandement il n’étoit plus permis au saisi de dégrader
l’immeuble ; en conséquence , sans s’arrêter en aucune
à la réclamation du complaisant Senet, fit dé
fense à Montz de continuer la coupe*, perinitiM M .Tourton , Ravel et compagnie de faire vendre les arbres abat
tus j et leur permit aussi d’établir à Issy des gardiens
chargés
m
a
n
i è
r
e
�■chargés de veiller à la conservatiou de la propriété,
et de la défendre contre les entreprises de son propre
maître.
y
Avec cette ordonnance, on se pressa de retourner le 16
novembre à issy. Deuxjours seulement s etoient écoulés ;
maisdeux joursavoient suffi pour consommer desdévas
tations nouvelles. L ’intrépide M. Montz, sans s’ étonner
du danger, ni craindre l’ennemi, et sous le feu même
des poursuites, avoit bravement fait continuer l’ ahattis
jusqu’au moment où l’on vint chasser les ouvriers. Qua
tre-vingt-dix grosmaronniersde la plus grande beauté,
étoient, dans la grande allée , en face du salon, tombés
à côté des dix qu’avoit déjà frappés la hache lors du
premier procès-verbal. Quatre-vingts gros ormes dé
cimés dans toutes les places avoient subi le même
sort. De tous côtés avoient été également coupés beau
coup de petits arbres et des taillis. B r e f , quelques jours
de plus seulement, et le futur acquéreur d’Issy n’auroit
eu a la place d’un parc riche d’arbres, et planté dans le
meilleur go û t, qu’une cour nue et vide , où auroient
crû çà et lu quelques herbes sauvages, et o ù , pour
faire produire quoi que ce so it, il eût fallu commencer
pardefricher le terrain et par eu arracher les souches qui
l’eussent encombré.
* L ’ordonnance mit fin à ces ravages, niais non pas à
ï audace de Montz et Senet. Celui-ci osa bien appeler de
l'ordonnance, et continua de s’ opposer à la vente des
arbres. Cet appel a été rejeté. M. Senet ne se décourage
pas facilement. 11 a revendiqué de nouveau ses arbres.
E t ce qu’il y a de bizarre } c’est que , taudis qu’ il les réF
�( 4* )
clamoit comme lui appartenant, M. la Jumeliere s opposoit aussi, de son côté, à ce que MM. Tourton , Ravel
et compagnie les vendissent, parce que ces arbres , disoit-il, lui appartenoient aussi. M. la Jum elière, de plus,
réclamoit le mobilier qui avoit été saisi à Issy. E t il le
réclamoit en vertu de son bail du xer. avril (i).
r Cependant M. Montz avoit médité sur le texte offert
à ses réflexions par l’ ordonnance du référé qui refusoit
de tenir compte de la vente des bois faite à Senet, parce
quelle n’avoit pas de date certaine antérieurement au
commandement d expropriation.
Une très-heureuse idée lui vint pour donner à son
acte frauduleux cette précieuse antériorité.
E t cette idée fut tout bonnement de commettre un
faux.
11 faut beaucoup insister sur celte circonstance, parce
que toute seule elle est bien propre à donner la mesure
de la moralité de Montz et de celle des hommes qu’ il
s’est associés.
On se souvient de ce bail des meubles d’Issy fait le
i er. avril 1807 par M. la Jumelière àM . Montz.
Ce bail éloit une fraude sans doute. Personne ne peut
ne. pas l’appercevoir.
Mais c’éloit une fraude qui n’avoit alors d’autre objet
que celle de soustraire les meubles d’Issy aux créanciers.
I/ingénieuse idée de leur voler jusqu’ aux hautes futaies
u’étoit pas encore éclose dans la tête de Montz.
(1) Toutes ces réclamations ont été rejetées déjà par divers jugemens ,
jnotivés tous sur Vèvidenco de l a F r AVDe .
�( 43 )
! X e bail avoit donc ëtë fabrique et compose que dans
'Cet objet. E crit snr une demi-feuille de papier tim bre,
la demi-feuille elle-même avoit été plus que suffisante
pour l’acte assez simple qu’on y avoit couché, et qui coriisistoit uniquement dans la convention « queM . la Jume» lière louoit pour trois ans à M. Montz tous les meubles
» décrits dans les procès-verbauxde saisie faits àla requête
■» du domaine, moyennant 5oo fr. par an » . Dans l’état
matériel de la pièce, l'acte aclievé et signé, il restoit en
core assez de place pour que le receveur de l ’enregis
trement écrivît et signât la mention de l’enregistrement
•au bas du verso de la demi-feuille de papier. E t
en effet, il est hors de doute que ce receveur avoit
ainsi placé celte mention de l’enregistrement, par la
quelle les receveurs ont toujours soin de clore les actes
quand l’état matériel de la pièce s’y prêle, précisément
pour empêcher les additions frauduleuses dont il faut
convenir que M. Montz n’a pas l'invention, quoiqu’il en
ait l’habitude.
**
Cependant M. Montz , sûr q u il éloit de toutes les
bonnes dispositions de son ami la Jum elière, qu i, comme
on l’a bien assez vu , est toujours là prêt à signer tous les
actes qu’il veut, imagina de se servir habilement de cet
acte déjà enregistré, et enregistré plus de six mois avant
le commandement d’ expropriation, pour donner à la
vente d’arbres Senet, réalisée par le sons seing privé d’oc
tobre, enregistré seulement le 9 novembre, une espèce
d authenticité. « S i , se dit-il à lui-même , je pouvois re» présenter un acte enregistré en avril , où déjà je parle» rois , comme d’une affaire conclue, de la vente par moi
F 2
�( 44 )
» faite (le mes arbres à Senet, alors il n’y auroit plus
» moyen de dire que ma vente , bien qu’enregistrée
» seulement en novembre , n’a pas été faite avant le
» commandement d’expropriation » .
Le projet éloit bon. Mais l’acte d’une demi-feuille^
enregistré au - dessous des signatures des parties , ne
se prêtoit à aucune intercallation. Comment donc s’y
prendre ?
v
M. Montz n’est embarrassé de rien ; et il est toujours
admirable dans ses expédiens.
Pour le mieux admirer donc dans celui-ci, suivons-le
avec un peu d’ attention.
M. Montz commence par prendre une feuille entière
de papier timbré pour transcrire ce même acte déjà eiir
registre. Mais pourquoi une feuille entière pour cet
acle à qui une demi-feuille suiRsoit? Vous allez l’ap
prendre. Continuez de lire.
Sur cette feuille il écrit d’abord , avec une fidélité
vraiment religieuse, le bail ancien sans y changer une
seule virgule ; seulement il a soin de compasser tellement
la grosseur des caractères et les intervalles tant des mots
que des lignes , que tout le recto et tout le verso du pre
mier feuillet sont épuisés par la rédaction du bail ainsi
que par les signatures de cette partie, et que surtout il
ne reste pas assez d’espace au receveur pous mettre audessous des signatures sa mention de l’enregistrement.
M . M o u t z signe.
M. la Ju m elière signe.
Il n’y a plus de place au-dessous des signatures que
1
�( 45 )
pour une ligne. E t il faut au receveur plus (Tune ligne
pour enregistrer.
\
T o u t va Lien.
Les choses en cet é tat, on va porter cette copie au
receveur en le priant de l’enregistrer par duplicata , sous
le prétexte apparemment que l’ original s’est perdu.
Le receveur ne soupçonne pas la fraude. Il lit l'acte.
Il voit un bail de meubles à Issy fait par M. la Jumeüère
à M. Montz le i er. avril 1807, pour trois ans, moyen
nant cinq cents francs par an. On lui dit que ce bail a
été enregistré le 29 avril. Il cherche dans ses registres.
Il trouve en eilet à cette date 1111 bail de meubles à Issy
fait par M. la Junrelière à M. Montz pour trois ans et
moyennant 5oo francs. Le rapport est parfait. Pourquoi
donc le receveur n’ enregistreroit-il pas? Il enregistre.
E t il enregistre, ne pouvant pas faire autrement, en
marge. Seulement il annonce qu’il enregistre pav dupli
cata, et que, loi'S du premier enregistrement, il a été
perçu 9 francs 35 centimes pour les droits. Il faut 11e pas
oublier cette traître déclaration d e là quotité. Il y aura
peut-être quelque parti à en tirer.
L ’acte, ainsi enregistré , rentre dans les mains de
M. Montz. Voyons ce qu’il en va faire.
20*. Fraude.
Sur le verso , à la lira de la stipulation du prix du bail, Fausse
•1
, .
,
, .
vente de cin-
11 renvoie , par une astérisque, aune astérisque toute pa- chante arreille , placée au-dessous des signatures , dans l’espace d’ï/sy. î
où peut s’écrire une ligne encore. Cette ligne, il l’écrit. dra e,n ^
-,
11
*
.
y
.
ajoute aussi une feuille de papier sur l a q u e l l e il coutinue le sens de la ligne de la page précédente. Toute
cette addition énonce d’abord, etpour rattacher le reu-
m ander la
nullité.
2 1 e* I* rocès
Encore M . l'a
�{ 5C 3 '
<voï a l ’acle par aine espèce ¿’’ homogénéité de matière,,
que le hail comprend , oulre les meubles détaillés dans
les procès-verbaux de saisie , ceux énoncés dans un état
copié à la suite de l’acte. E t, après cette mention, arrive
la stipulation qui suit : «En considération de l’avantage
» résultant pour M. Montz du présent b a il, il promet à
m M. la Jumelière qu’il lui vendra cinquante des plus
beaux arbres de son p arcd ’Issy, desquels arbres M. la
» Jumelière fera choix àson gré , àlasaison convenable.
» M. Montz déclare eu oulre à M. la Jumelière que.,
» quoiqu’il eût d é j à arrêté avec M. Jean Senet la vente
» de la totalité des bois de sondit parc à Is s y , et qu’il
» ait reçu dudit Senet l e d e n i e r a D i e u , il s’engage
» à obtenir dudit M. Senet, pour M. la Jum elière, ce
» choix des cinquante plus beaux arbres, celte conven.» lion étant de rigueur, etc. ».
E t ce renvoi est très-convenablement signé de la Ju
melière et Montz.
Il est vrai qu’il n’ est pas signé du receveur de l’enre
gistrement.
11 est vrai que la fraude, le faux de l’addition , et
l’omission de la signature du receveur sauteront aux yeux,
si on produit celte pièce fabriquée.
Mais il y a remède à tout.
On ne la produira pas.
,
On ira la déposer chez un notaire. Un notaire qui n’a
ni le temps , ni l’intérêt de scruter et d’aualiser les actes
qu’on lui dépose, n’ira pas pâlir sur cet acte , pour voir
s’il y a des renvois, quel ordre ils occupent dans la pièce,
..s’ils sont en rapport avec l’acte, s’ils sont au-dessus ou
�( 47 )
Au-dessous de la signature du receveur. Ajoutez que le
notaire à qui on dépose une pièce ne s’avisera pas de soup
çonner que c’est un piège qu’on lui tend.
Ce dépôt fait, on demandera une expédition de la
pièce.
I^es notaires ne figurent pas les minutes dans les expé
ditions. Ainsirexpédition arrivera tout d’un contexte , et
avec le renvoi placé au lieu qu’ il doit occuper dans le
contexte même , et sans mention que c’est un renvoi.
E t quand on aura celte expédition; elle sera produite
dans le procès de réclamation des arbres de M. Senet ;
et on dira : « Vous voyez bien que le marché avec M. Se» net n’est pas une fraude ; que ce n’ est pas une mesure
» rêvée pour parer au commandement d’expropriation
» de novembre 1807} car voilà un acte authentique, un
» acte ayant date certaine et enregistré le 2/f avril, qui
» dit que M. Montz a vendu tous les arbres à M. Senet,
» et qu’il a reçu (voyez le scrupule de la mention ! ) le
» denier à Dieu. Or s’il est prouvé que, dès avril 1807 ,
» M. Montz s’étoit dévotement hé par la réception du
» denier a Dieu envers M. Senet, à lui vendre toutes
» les palissades , toutes les allées et toutes les prome» nades de son parc, il ne faut plus s’étonner du tout que,
» plutôt que de manquer de foi (lui qu’ on sait en avoir
« tant) et de violer ce traité si religieusement consacré
» dès avrilj8o7, il se soit mis en novembre 1807 à la tête
» des ouvriers de M. Senet dont il se faisoit le piqueur,
» pour abattre, jour et nuit, ces arbres sous l’ombrage
» desquels il n’auroit pas pu se promener plus long» temps sans offenser D ieu , la bonne foi et l’équité ».
�■I 4B :)
E t c’est tout ce qui a ¿té fait et tout ce qui a été
dit.
Le dépôt a eu lieu.
Il a été reçu sans que le notaire se doutât de
rien.
L'expédition a été demandée. Elle a été délivrée.
Elle la été comme elle devoit l’ être, sans renvoi.
Elle a été rapportée triomphalement dans le procès
S eue t.
On a dit : « Voyez , voyez ! En avril la vente étoit
*> constante. Voilà un acte enregistré alors qui le dit. La
vente n’a donc pas été rêvée en novembre. Qu’avez» vous à répondre » ?
Malheureusement il y a des esprits forts et des incré
dules, à qui la dévotion de M. Montz et sa fidélité aux
deniers a Dieu qu’il reçoit n'en imposent pas. Ces mécréans ont été assaillis, malgré eux, d une multitude de
soupçons.
E t d’abord pourquoi ce double du bail original, cette
mention de l'enregistrement par duplicata ? Pourquoi
surtout ce dépôt dans les minutes d’un notaire, lors
qu’ on représentoit tant d’autres bonnes ventes et tant
d’autres bons actes simplement enregistrés?
Que vouloit dire , d'ailleurs, la bizarre clause insérée
dans ce bail, et qui accordoit àM . la Jum elière les cin
quante plus beaux arbres du parc d’Issy ?
Quel besoin, M. la Jum elière, qui ne demeure pas
à I s s y , qui a même loué son prétendu mobilier à
M.
�( 49 )
M . Montz, avoît-il besoin de cinquante arbres dans ce
pays, et des cinquante plus beaux arbres du parc ?
M. la Jumelière n’est pas marchand de bois. Qu’en
feroit-il ?
Il demeure à Vaudouleur, près Etampes *, comment
les y feroit-il venir, et est-il bien commode d’acheter
-cinquante arbres à vingt ou trente lieues de son domi
cile ?
E t puis le bail dit que c’est à cause de l’avantage
que M. Montz tire du bail des meubles, qu’il donne à
M. la Jum elière les cinquante plus beaux arbres d’Issy ;
c’étoit donc un cadeau ? Nullement. La clause dit qu’il
les lui ven d , et comme elle ne dit pas à quel prix , il
faut en conclure que s’il y avoit e u , à cet égard } dif
ficulté entre de si bons amis et des hommes disposés
-à se traiter avec une si grande générosité , le prix
auroit été selon l'estimation et la valeur courante
<les bois. Or , quelle indemnité en faveur de M. la
Jumelière de Yavantage trouvé par M. Montz dans
le b a il, que cette convention en résultat de laquelle
M. la Jumelière paieroit les cinquante plus beaux arbres
d’Issy , tout ce qu’ils valoient? N ’étoit-il pas bien pres
sant de déranger le marché consacré en faveur de cet
autre am i, M. Sen et, par la délivrance du denier à
D ieu, pour le mécontenter seulement, pour le faire se
plaindre de ce qu’on écrémoit son propre traité en lui
prenant les cinquante plus beaux arbres , et tout cela
sans autre résultat en faveur de M. la Jum elière, que
l ’embarias pour lui de faire exploiter cinquante arbres
G
�( 5o )
loin (le sa maison et au milieu de l'exploitation d'un
autre , et de les faii'e voiturer à grands frais dans son
bûcher de Vaudouleur, après les avoir payés tout leur
prix à Issy ?
Ces mécréaus trouvèrent donc toute cette version
invraisemblable , ridicule , absurde. Ils y virent une
fable grossière , imaginée pour colorer l’acte de vente
de bois faite à Senet. Ils se doutèrent qu’il y avoit un
dessous de cartes quel qu’il fût. Et voulant vérifier
leurs soupçons, ils se transportèrent chez le notaire. Ils
demandèrent celte minute précieuse ensevelie dans les
cartons. E t ils virent tout ce qui a été dit plus haut.
Ils virent la petite manœuvre de renvoi.
Ils virent qu’il étoit dépouillé du paraphe du receveur
quoique cela eût été de rigueur s’ il eût existé lors de
l'enregistrement.
-
'
Ils virent plus. Ils virent que le droit qui avoit été
perçu éloit de 9 fr. 35 cent. Or , c’est bien là le droit
du pour l'acte prim itif, et calculé sans les conventions
du renvoi, d’après l’article 8 de la loi du 27 vendémaire an 9 , additionnelle à celle du 22 frimaire an 7.
Mais si ce même acte avoit exprimé alors les deux con
ventions contenues dans le renvoi ; s a v o ir , l'une qui
comprenoit de nouveaux meubles dans le bail, et l'autre
qui vendoit cinquante arbres ; le receveur eût dû per
cevoir 1111 droit de 1 fr. de plus par chaque convention ;
et le d ro it, au lieu de 9 fr. 35 cent, perçus selon la
déclaration, eût été de 1 1 fr. 35 cent.
�( 5 0
Les mécréans ne s’arrêtèrent donc plus au simple
doute. Ils furent convaincus qu’il y avoit faux et fraude.
Tous les magistrats, dans tous les tribunaux, en furent
convaincus aussi', car malgré toutes c e s . réclamations
croisées de plusieurs parties pour les memes objets ,
la vente, et des arbres coupés, et du mobilier d ïssy a
été ordonnée partout. Elle a été effectuée aussi. E t
pour en finir sur ces odieuses tracasseries , cette vente,
si on avoit besoin de preuves nouvelles de la criminelle
collusion qui règne entre tous ces hommes, de fraude ,
en auroit fourni une de plus. Ce marché <le M. Moutz
avec M. Sen et, malgré le denier à D ieu , étoit si peu
sérieux, le prix en étoit si peu ré e l, que bien que tout
le parc de M . Montz ait été par lu i, si on 1 en croit,
Tendu à Senet 10,000 f r . , les seuls arbres qui ont etc
abattus , et qui assurément sont fort loin de compléter
la coupe du p arc, grâces aux obstacles qu y ont ap
porté les créanciers, ont été vendus vingt - un mille
francs,
■ Puis croyez à la vente faite à M . Senet.
‘ Croyez surtout au paiement comptant qu’il a fait au
milieu de tant d’ em barras, d’ incertitudes sur l’exécution
de son marché, de craintes des créanciers, et encore
plus au milieu des embarras que doivent lui faire
éprouver ses propres finances j car qu’ est —ce donc
que ce M. Senet qui a ainsi des d ix m ille francs camptant à jeter par la fenêtre et à payer à des débiteurs
en faillite , pour des arbres qu’ il n’éloit assurément pas
sàr d’enlever , comme l’événement l’a fort bien prouvé ?
�'( 53 )
Qu est-ce que ce M. Senet, qui va acheler des coupes
de bois sur pied, lui qui n’est pas marchand de bois,
qui n’enleud rien à leur exploitation , qui ne sauroit
qu’en faire , et qui s’est ensuite si peu mêlé de les
abattre,-que quand on les coupe c’est M. Montz seul
qui préside à l’abattis , qui donne les ordres , qui
ameute les ouvriers, qui leur fait passer la nuit et les
fait tx’availler aux flambeaux : circonstance qui toute
seule suffiroit pour prouver qu’il s’ agissoit dans cette
coupe de l’ intérêt de M. Montz et non pas de celle de
M. Senet, toujours absent, si ce n’est dans les actes et
dans les réclamations? Ce M. Senet, quelle, que soit
d’ailleurs sa moralité , est un pauvre h ère, bien digne
compagnon de M. Montz sous certains rapports, puisqu’au mois de mars dernier, suivant extrait rapporte
en bonne forme , il a été constitué prisonnier pour deux
mille francs y et puisqu’encore présentement, suivant
certificat délivré par M. Hygnard, huissier, cet officier
est porteur contre lui de sentences pour mille francs ,
sur lesquels ce riche marchand de bois , qui trouve si
facilement dix mille francs dans sa bourse pour les payer
comptant dans des marchés aventureux, n’a pu encore, à
force d’à-coinpte, s’ acquitter que jusqu’ à concurrence
de 64 o fr. I Voilà les capitalistes qui secourent avec tant
de grandeur d’âme M. Montz, et qui ont toujours u
point de si grandes ressources pour acheter ses pro
priétés quand il veut les vendre ! Voilà celui qui vient
même de lui acheter tout à l’heure cette propriété même
d ’Issy 1 II est temps de parler de celte dernière fraude,
�( 53 )
par laquelle M. Montz a couronné toutes les autres.
Mais celle-ci elle-même a eu une pi'éface dans laquelle
nous allons encore voir agir M. la Jumelière.
Le commandement d’ expropriation étoit fait depuis
le mois d'octobre 1807.
Toutes ces petites fraudes pour les arbres, pour le
m obilier, pour les provisions, etc., avoient été com
mises.
Mais M. Montz voyoit bien qu'elles viendroient l’une
.après l'autre échouer contre la justice des tribunaux, et
qu’il ne sauveroit jamais sa propriété de la vente forcée.
C ’est alors qu'il tenta un dernier efl’ort pour amasser
d’avance, autour de la jouissance de l’adjudicataire, tant
d’embarras , que personne ne soit qui ne s’effraie de
le devenir.
~ Il loua à M. la Jum elière la maison d’Issy, moyen- 21e. et aa«.
nant 5 ,800 fr. par an , pour neuf an s, p ar acte du 1 9
novembre 1 8 0 7 , en le soumettant à souffrir la coupe vente simu-
de tout le parc : ce à quoi consent bénévolement ce lo- faudrÎ’Sdeî
cataire de nouvelle espèce , qui ne veut avoir de maison nulHuT/la
de campagne que pour n'avoir pas un arbre dans son
jardin.
Encore M . la
.
Au reste, et avant de parler de l'autre partie de la
manœuvre de M. Montz, qu’il soit permis de faire bien
remarquer la bizarrerie des traités passés à diverses
époques entre M. la Jum elière et M. Montz relative
ment à la maison d'Issy.
D ’abord M. Montz y demeure. Il en est même nu-
Jum elière.
Encore M .
�( 54 )
propriétaire. L ’usufruit et le mobilier sont à vendre. Ce
n’est pas M. Montz qui en a besoin qui les achète j c’est
M. la Jum elière. Ainsi la maison est à M. Montz, et
c’est M. la Jumelière qui a les meubles.
Ce contre-sens cesse enfin. On s’apperçoit qu’il n’est
pas naturel que la jouissance de la maison soit d’un côté
et les meubles de l’autre. M. la Jumelière alors fait enfin
un bail des meubles à M. Montz. Mais à peine ce bail
est-il fait, que voilà M. Montz qui garde les meubles ù
loyer et qui loue la maison à M. la Jum elière; en sorte
que les meubles et la maison ne sont jamais ensemble 5
et que, par un renversement de rôles qui seroit absurde,
si on ne voyoit très-distinctement que toutes ces va
riantes ne sont que des moyens diflerens d’une fraude
toujours la même , ayant pour but d’éluder les droits
des créanciers, M. Montz, propriétaire de la maison ,
ne garde pas la maison, mais prend les meubles à
loyer , sauf à opposer le bail à ses créanciers quand ils
viendront, et que M. la Jum elière, propriétaire dos
meubles , semble les louer tout exprès à M . Montz pour
n’en avoir plus et pour coucher entre les quatre mu
railles quand il aura loué la maison.
A présent, fera-t-on remarquer toutes les invrai
semblances qui se soulèvent contre celle supposition
que M. la Jumelière eût réellement loué Issy.
Il a une maison à Vaudouleur.
Il y est, d il-il, cultivateur.
Il y est fixé, du moins.
�( 55 )
On ne devine même pas quel rapport il pourvoit y
avoir entre sa fortune, dont il ne paroît rien , et une
seconde et inutile maison de campagne qu’il voudroit
acquérir, surtout quand elle est aussi magnifique que
celle d’Issy !
Tout le parc va être abattu-, et M. la Jumelière y
consenti et c’est dans cet état qu'il va louer la maison
d’Issy.
Comment croire de telles absurdités ?
On voit bien qu’ ici rien n’ est simple, ni naturel, ni
vrai.
Qu’a-t-on donc voulu faire par ce bail évidemment
fictif? Ce qu’on a voulu , c’est afî’oiblir le revenu appa
rent de rimmeuble ; c’ est éloigner les enchérisseurs;
puisqu’ on n’achète ordinairement une maison de cam
pagne que pour l’occuper ; et qu’un bail naissant de neuf
ans est sans contredit l’obstacle le plus insurmontable
pour la vente d’une maison de plaisance.
Voilà d’abord le moyen imaginé pour entraver la
vente.
Mais M. Montz a fait plus , et il a vendu lui-même
la maison.
E t à qui l’ a-t-il vendue ?
Il faudroit avoir bien peu profité de la lecture de tout
ce qui précède , si ou ne se tenoit pour assuré que ce
sera ou à M. G in, ou à M. la Jum elière, ou àM . Senet.
Aussi est-ce à M. Senet.
�( 50)
M. Senet, qui n’avoit pas en mars -2000 francs pour&e
sauver de l’emprisonnement 5 M. Senet, qui n’a pas au
jourd’hui encore 36 ofr. pour compléter des condamna
tions de 100Q.fr. qui peuvent Je remener demain en pri
son , a tout de suite tout l’argent q u il faut pour acheter
et habiter une maison de campagne occupée successi
vement par des princes ! Cela est en eflet fort croyable \
Il est vrai que M. Montz, qui ne veut pas qu’on tour
mente trop son cher ami Senet pour le paiement du
prix , a soin de le fixer avec assez de modération pour
que la condition ne devienne pas trop pénible : il l’a
porté à 77,000 francs. E t c’est ici que brille dans
tout son éclat la sagesse du vendeur. Il a donné sur ce
bien à son ami Gin une hypothèque de '80,000 francs;
il le vend 77,0,00 francs. Gin prendra les 77,000 francs,
ou s’en arrangera avec Montz et Senet , ce qui 11e sera
pas bien difficile ; et, de cette manière, voilà le pauvre
acquéreur préservé de la mauvaise humeur et des pour
suites de tous les créanciers. 11 est vrai que Gin ne trou
vera dans le prix de la vente que 77,000 fr. , au lieu de
80,000 fr. qui lui sont dus, et qu’ainsi il sera en dan
ger de perdre 3 ooo fr.j mais à cela ne tienne. Nous
savons tous que Gin est généreux , et il ne les regrettera
pas.
Toutefois , il ne faut pas se dissimuler que ce prix si
foible d’une si belle propriété pourra tenter les vrais
créanciers, et qu’ils ne manqueront pas de surenchérir.
Qu’ils viennent?
M. Montz y a mis ordre.
Le
�'( h 1
L e contrat de vente renferme des conditions si ex
traordinaires que peut-être , et la maison n’eut-elle été
vendue que 10,000 f r ., il ne se trouyeroit personne, qui
voulût surenchérir.
En e iïe t, M. Monts se réserve pour lui et pour toute
sa vie , des jouissances fort bizarres.
i° . lise , réserve d’abord labdlje. chanxbre à coucher
de la maison, en entrant par le grand, salon^ et les
pièces ensuite de cette belle chambre , et dans l'urne desquelles sont les lieux à l’anglaise qu’il se réserve poiiç
lui seul.
Ainsi le vendeur, dans l’appartement d’honneur, aura
la chambre à coucher et les pièces de service. Il n’aura
pas le salon ; mais il s’en servira comme d’un passage
pour sa chambre à coucher.
2°. Il se servira du vestibule en commun.
3°. Il se réserve un grand nombre de pièces çà et là
dans la maison , des remises, des écuries.
4°. H se réserve exclusivement la glacière,
5°. Il se réserve le droit de chasser dans le parc ,
quand il le voudra ,'avec trois ou quatre de ses amis.6°./ Il se réserve les passages à pied, en voiture , etc.
Bref, M. Senet ne sera pas chez l u i , ‘ n’aura rien ex
clusivement à lui, et vivra dans un indivis d’autant plus
fâcheux, qu’ il n’y aura nul remède pour s’en débar
rasser.
î
'
N ’est-il pas évident que toutes ces clauses hétéroclites
rçfi'Sont amassées dans le b^iil que pour empêcher per
sonne de se mettre à le place d’un esclave tel que le sera
II
�( 58 )
M. Senet dans sa propriété, c'est-à-dire, de suren
chérir ?
E t insulteroit-on à la raison humaine, au point de
croire avoir besoin de prouver à personne que tous ces
actes ne sont concertés entre M. Montz et ses affidés
que pour se jouer des droits de ses créanciers ?
E t comment ne croiroit-on pas à la fraude de cet
. homme qui emploie, même à découvert, la violence
pour résister aux dispositions de la justice, et q u i, si
on le laisse faire apparemment, finira par mettre le
feu à sa maison, plutôt que de souffrir que la puissance
publique l’emporte sur ses résistances ?
Sa maison a été saisie} il y a commis des dégradations
telles qu’au rapport des experts, dont l’un a été nommé
par lu i, il l’a diminuée de plus de 45 ,ooo fr. de valeur.
Ses meubles ont été saisis, ces meubles qu’ il prétend
appartenir à son ami la Jum elière. Donnant lui-même
par ses excès un démenti à ses fables , et oubliant qu’ il
dit que les meubles ne sont pas à lu i, il s’est occupé de
les dérober à ses créanciex-s , comme s’ils étoient bien à
lui. Chaque jour, depuis la saisie, a été marqué par
des enlèvemens furtifs ou par des destructions.
Il en a brisé.
Il en a vendu.
Il en a déplacé et caché de manière que les gardiens
qui pourtant veillent sans cesse, n’ont pas pu savoir ce
qu’ils étoient devenus.
Il y avoit des cygnes 5 il les a tués.
Des objets d’un très-haut prix ont disparu et n’ont
pas été retrouves.
�E 59 )
D’ordre de la justice , des cadeuats el des fermetures
ont été apposés à toutes les portes écartées pour mettre
un terme aux spoliations ; il a brisé fermetures et cadenats.
Il a arraché jusqu'aux plombs et les a soustraits.
Si les gardiens ont osé se plaindre, il les a me
n acé s, et ajoutant la dérision au v o l, il en est venu
jusqu'à avouer tous ces actes de rapine , en disant ironi
quement qu’il n’y avoit qu’à les estimer et qu’il les
paieroit.
B re f, il a tant fait que pour conserver la propriété,
il a fallu qu’un jugement ordonnât d’en expulser le pro
priétaire.
Encore, et ceci passe peut-être tout le reste soit par
la bizarrerie soit par l’audace de l’invention , les ma
gistrats ne l’ ont - ils pas emporté dans Cette occasion
sur le justiciable , et celui-ci a-t-il encore trouvé des
moyens de ravager sa propriété et de la frapper de
néant dans quelques parties, même sans qu’ il fût né
cessaire pour lui de l’habiter.
Il
existe des prés d’un très-grand produit, dépendant
de la maison. Personne en se mettant l’esprit à la tor
ture ne pourroit imaginer un moyen d’empêclier que
des prés n’ existent. E h bien ! M. Montz l'a trouvé. On
est venu avertir un matin les créanciers que sur ces
prés étoient répandus des ouvriers occupés à couper,
non pas la récolte, mais la superficie même du terrain.
On a couru avec mainforte ; el ce qu’on a trouvé,
c’est que M* Montz abusant de l’ignorance et de la sim
plicité -d’un jardinier voisin, lui avoit vendu, moyennant
H a
�( <3o )
200 fr. par arpent, la faculté de tourber ses pr:és.;à tin
pouce ou deux de profondeur pour en'faire des gazons
ailleurs , opération qui auroit détruit le prod.uM. d^s
prés pour plusieurs années , mais qui heureusement a.
été arrétée encore à temps y et ne s.’est effectuée que sur
un demi-arpent.
s- Tel est M. Montz. a-. ;
Tels sont MM: G ingia Jum elière, Senet, Schérbpet
Tarteiron.
. '
Tous ils se relaient pour fatiguer successivement les
créanciers de leur ami. *
M. Gin, tantôt réclame ou le mobilier de P a ris, où*
la jouissance de l'hôtel place Vendôme, ou les fermages
;des biens de Moulins.
*
l’hôtel de la place
Vendôme 1: il demande
■(.On vend
At
à être colloque sur le prix pour sa créance de 8o.,ooo fr.
, 0 u va vendre Issy. Il-a formé unq inscription, et de
mandera, aussi, à être coltaqué. r = ,r.
Dans ce moment on distribue devant le tribunal de
Versailles le prix de la verrorie de Sèvres qui jfulis
a appartenu à M. Montz , et dont le prix, lui est dû.
MM. Tourton , Uavel et compagnie y sont, inscrit^.
Armé de sa frauduleuse cession des bijlets'Gozaux, qu’il
prétend être une seule et même créance avec le prix de 1^
verrerie; M. Gin aie front de se présenter, de contesserà
MM. Tourton, Ravel et compagnie la validité de leu,r
inscription, et de domander qu’Qn luj abandonna lç
prix qu’il ne larderoit pas à remettre à M. Montz.
M. la Jumelière , quaut à lui ; réclame le . mobilier
■
�61
et les arbres d’Issy ; il réclame la jouissance des baux
que lui assure pour neuf ans un bail frauduleux.
M. Senet réclame aussi les arbres d’Issy, et de plus ,
il prétend être le propriétaire de le maison.
Quant à M. Tarteiron, il e s t, si on l’en croit, le fer
mier général des biens de Moulins ;
E t M. Scherbe en est le propriétaire.
Ainsi se sont successivement évanouies toutes les res
sources de M. Montz pour ses créanciers , mais non
pour lui.
La justice souffrira-t-elle cette révolte ouverte contre
ses arrêts ?
Tant de fraudes et d’excès en éluderont-ils la puis
sance ?
Non, sans doute.
Les magistrats sentiront q u 'il y va bien plus en
core de l’intérêt social que de celui de la maison Tourton, que cette véritable insulte aux lois soit réprimée ;
et chaque fois que quelqu’une de ces fraudes se produira
dans les nombreux procès dans lesquels M. Montz a eu
l’art d’entraîner MM. Tourton, Ravel et compagnie, ils
la couvriront du mépris et de la proscription qu’elles
méritent toutes.
S ig n é ,
T ourton, R avel
et
Compagnie.
M c. B E L L A R T , Avocat-Conseil.
De l'imprimerie de Xh r o u e t , rue des Moineaux, n°.
16.
�
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[Factum. Tourton. 1808]
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Mémoire pour MM. Tourton, Ravel et Compagnie ; contre M. Montz et ses prête-noms ; ou Histoire générale des fraudes de M. Montz ; pour servir à l'instruction des vingt-trois procès par lui suscités à MM. Tourton, Ravel et Compagnie.
Publisher
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De l'imprimerie de Xhrouet (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
Circa An 7-1808
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
61 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0601
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issy-les-Moulineaux (92040)
Moulins (03190)
Paris (75056)
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Faux
fraudes
inventaires
simulations
spéculation
-
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1ffa9edff0a6e1950bbd015a085b9680
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Text
MÉ MO I R E
P our R e n é E S M E L I N ,
G ilb e rt E S M E L I N - D E U X -
A I G U E S , C l a u d e - A m a b l e L A P E L I N , et M a r i e - M a g d e le in e
E S M E L I N , son épouse , J e a n - F r a n ç o is L A -
G A R D E - D E L A V I L E N N E , et T h é r è s e E S M E L I N ,
son épouse ; M a r i e - A d é l a ï d e E S M E L I N , veuve D e b a rd , intimés
Contre G
e n e v iè v e
E S M E L I N , veuve d'A m a b l e D
e c ham ps,
ex-religieuse, appelante ;
E n présence de P rocu le E S M E L I N , ex-religieuse ;
E t encore en présence de J ac q u e s - M
ar ie - P ierre
L O IS E L -
G U I L L O I S , tuteur de ses enf ans , héritiers d ’Agnès
E
sm e lin ,
leur aïeule m aternelle, aussi intimés.
LA. dame D echamps dénonce aux tribunaux un traité de fa
mille , rédigé sous ses yeux par d’anciens jurisconsultes de son
choix ( * ) , qu’elle a signé, exécuté, qu’elle approuve et exécute
journellement.
(*) MM. Bergier et Boirot.
A
�( » )
Ce traité de famille a été dicté par la nécessité.
Il a été dicté par la sagesse.
En ce qui la concerne, il a été dicté par la générosité.
11 lui assure un patrimoine d’environ 3oooo f r . , dettes payées.
Elle se dit lésée.
E t il ne lui revenoit pas une obole.
Etienne Esmelin a contracté mariage avec Marie-Anne-Barthélemy G ibon , le 29 février 1756.
Ils se sont unis sous le régime de la communauté, avec clause
expresse que « pour y acquérir d ro it, chacune des parties y con» fondroit Coo fr.; et le surplus de leurs biens, avec ce qui leur
» écherroit par succession, donation , sortiroit nature de propre» fonds. »
Ils n ’avoient qu’une fortune médiocre; elle s'est grossie par de’
nombreuses successions qui se sont accumulées sur leurs têtes,
spécialement du chef de la dame Esmelin.
L a première qui est échue de cet estoc, a été celle du sieur
Jean-Baptiste de Lachaussée, son oncle, décédé à Moulins en 1764.
L a seconde, celle de Gilbert de Lachaussée, aussi son oncle,
négociant à M oulins, décédé en 1766.
L a troisième, celle de Jacques de Lacha*ussée, frère des précé
dons, administrateur de PHôtel-Dieu de Paris, décédé en 1787.
Il a voit fait un testament suivi de codicille , par lequel il avoit
nommé pour ses légataires universels, Marie Farjonnel, sa mère;
Antoinette de Lachaussée , veuve Lafeuillant ; Elisabeth de
Lachaussée , femme Laplanche; Catherine de Lachaussée, fille
majeure ;
Et les en fans et desccndans de Marie de Lachaussée, décédée
femme Gibon.
L ’inventaire de cette succession en portoit l’actif à deux millions
soixante mille livres.
Il fut fait un premier partage provisionnel d ’une somme de
�(3 )
1179^00 fr. d ’effels ro y a u x , devant L aroche, notaire au chàtelet
de Paris, le 29 avril 1788, qui constate que le sieur Esmelin
toucha pour sa femme un premier à-compte sur cette succession ,
de i 685oo fr.
Marie Farjonnel, aïeule de la dame Esmelin , qui avoit touché
un pareil à-compte de i 685oo fr. par ce partage provisionnel,
mourut peu de temps après.
L a dame Esmelin mourut ensuite aum oisde novembre 1789.
L e sieur Gibon , son frère , directeur des aides à ChàteauT hierry , mourut au mois de juillet 1790.
Il laissa encore une succession très-opulente, qui étoit divisible
en trois portions égales, entre les enians Esmelin, le sieur G ibon ,
de Moulins, leur oncle, et le sieur Gibon-Montgon , leur cousin
germain.
L e sieur Gilbert G ibon, père de la dame Esmelin, mourut en 1792.
Enfin Elisabeth Esmelin-Duclusor, l’une des filles des sieur et
dame Esm elin, mourut aussi sans postérité dans le courant de la
même année.
Etienne Esmelin père resta en possession de toutes ces successions.
II avoit marié quelques-uns de ses enfans avant la mort de
Marie-Anne-Barthélemy Gibon , son épouse.
Il en a marié d’autres depuis, et il avoit fait aux uns et aux
autres des avancemens d’hoirie.
Deux de ses filles , Procule et Geneviève Esmelin, avoient pris
le parti du cloître, et avoient fait profession avant la mort de leur
mère.
Mais les lois des 5 brumaire et 17 nivôse an 2 ayant aboli leurs
vœ ux, elles furent rappelées à toutes ces successions.
Bientôt le refus de Procule Esmelin de prêter serm ent, attira
sur elle des persécutions que chaque jour pouvoit rendre plus graves.
L e sieur Esmelin crut devoir prendre la précaution de se faire
céder ses droits, dans toutes ces successions , pour se m e ttre , à
toutes fins, ainsi que ses enfans, à l’abri des recherches nationales.
Geneviève Esmelin avoit pris un parti tout opposé ; non-seule-
Aa
�( 4 )
ment elle avoit prêle serment, mais elle ne dissimulent pas l'in
tention où elle éloit de se marier; et le sieur Esmelin crut encore
prudent de se faire céder ses droits maternels, pour garantit sa
famille des recherches futures de ce gendre inconnu dont il étoit
menacé.
L e rapport de l’effet rétroactif des lois des 5 brumaire et 17
nivôse ne tarda pas à rendre ces précautions inutiles.
Mais , dans le même tem ps, le sieur Esmelin père éloit forcé
d ’en prendre de semblables avec d’autres de ses ercfans.
L e sieur Debard éloit inscrit sur la liste des émigrés, et Adé
laïde Esmelin, son épouse, étoil en réclusion; elle étoit menacée
du séquestre sur tous ses biens. 11 fallut encore avoir recours à la
cession de ses droits maternels. Elle consentit cette cession à son
père, le 1" germinal an 2. Mais comme elle n’étoit que simulée,
il lui en donna une contre-lettre.
L ’inscriplion du sieur Esmelin-Deux-Aîgues, sur la liste fatale,
força encore le sieur Esmelin père de faire avec lui des actes simulés,
pour se soustraire, comme ascendant d ’émigré, aux persécutions
des agens du fisc.
T o u s ces actes ont disparu avec les causes qui les avoient fait
naître; et la dame Dechamps, qui en abuse aujourd’hui, sait mieux
que personne qu’ils n’ont jamais eu de réalité.
Les orages révolutionnaires s’élant calmés, plusieurs des enfans
Esmelin, la dame Lapelin , le sieur Esmelin-Deux-Aigues, et les
mineurs Loisel, ont cru devoir rechercher leurs droits maternels.
L e sieur Esmelin a terminé avec la dame Lapelin, en lui donnant
un à-compte sur la succession de René Gibon;
Avec le sieur Esmelin-Deux-Aigues , en s’en référant à l'arbi
trage de M. Lucas, président du tribunal de Gannat, leur parent,
qui a dicté la transaction passée enlr'eux au mois de germinal an i 3.
Quant aux mineurs Loisel, la contestation est restée indécise.
Ces actions éloienl justes en elles-mêmes; et le sieur Esmelin se
seroit sans doute empressé de les prévenir , s’il n’avoil pas été
arrêté par les difficultés insurmontables qu’il trouvoit à distinguer
sa fortune personnelle de celle de scs enfans.
�( 5 )
Mais la dame Dechamps , subjuguée par un conseil pervers, qui
avoit voué au sieur Esmelin une haine implacable en échange des
services signalés qu’il en avoit reçus, a dirigé contre lui des actions
d ’un autre genre, qui tendoient à compromettre sa délicatesse, et
qui l’ont abreuvé d’amerlume.
Bientôt la perspective effrayante du mauvais état de ses affaires
est venue mettre le comble aux chagrins dont il étoit dévoré.
11 avoit fait imprudemment une affaire de finance avec la dame
L eblon d, Américaine, qui , privée de ses revenus des îles, dont
la rentrée étoit suspendue par la guerre maritime avec l’Angle
terre, avoit obtenu de sa facilité des avances énormes , au point
qu’il se trouvoit son créancier de plus de 160000 fr. sans la plus
légère sûreté, et à peu près sans espoir de les recouvrer.
L e sieur Esmelin n’avoit pu faire d ’aussi grosses avances qu’en
puisant dans les caisses des banquiers de Moulins et de Clermont.
Chaque jour ses dettes alloient en croissant, par le taux élevé
des intérêts qui s’accumuloient.
Déjà son crédit étoit épuisé chez les banquiers de Clermont, qui
ne consentoient à renouveler ses effets qu’avec l’endossement du
sieur René Esmelin, son fils aîné (*), et il ne pouvoit se dissimuler
qu'il couroit à grands pas à sa ruine.
L ’âme flétrie par les outrages de la dame Dechamps , et ne pou
vant supporter l’idée du renversement de sa fortune, il est tombé
malade dans les premiers jours de décembre i8 o 5 , et il est mort
le ig du même mois.
Les scellés ont été apposés de suite par le juge de paix des lieux.
Quelque temps après, il a été procédé à un inventaire en forme,
en présence de tous les intéressés, et spécialement de la dame
Dechamps, qui a assisté à toutes les séances.
Indépendamment de l’actif bon qui fut porté dans cet invenf (*) Le sieur Esmelin aîné avoit déjà cautionné pour 60000 fr. d’eftets de son
père à son décès; il est porteur do scs lettres , pur lesquelles il le prioit do lui
donner sa signature.
�\
( 6 )
ta ire , il fut fait un état particulier des créances mauvaises ou dou
teuses , montant à 267330 f r . , qui fut signé par tous les héritiers,
et spécialement par la dame Dechamps.
L a dame Dechamps dit dans son mémoire , page 4 » que pen
dant cet inventaire ses frères furent p o lis , caressans. Ces expres
sions sont trop foibles ; elle auroit dû dire qu’ils la comblèrent de
témoignages de tendresse, qu’ils ne négligèrent rien pour gagner
sa confiance, et pour la soustraire à la maligne influence du per
fide conseil qui l’éloignoit de sa famille, et la conduisoit à sa perte;
Que leur ayant paru avoir des besoins, ils lui remirent la somme
de 1000 fr. qui étoit provenue des premières ventes des denrées
de la succession ;
Q u’elle prit différens effets mobiliers qui étoient à sa conve
n a n c e , sur la prisée de l’inventaire ;
Que dans le partage qui fut fait en nature d ’une partie du mo
bilier , ils l’admirent pour un huitième, quoiqu’il ne lui en revînt
qu’un seizième ;
Qu'enfin ils ne cessèrent de lui prodiguer les égards et les bons
procédés.
Instruite par elle-même de l ’état des affaires de son père ; de
plus de iSoooo fr. de dettes de banque sur lettres de change qui
venoient chaque jour à échéance, dont plusieurs étoient déjà pro
testées, et dont les porteurs pouvoient consommer en frais tous les
biens de la succession ;
D e plus de 60,000 liv. d’autres dettes par billets, obligations,
rentes viagères ou constituées ;
T ém oin de l ’état de dégradation et de désordre absolu, dans
lequel se trouvoient tous les biens communs, au point que sur 24
ou 25 domaines, il n’y en avoit pas un seul dont les bàtirnens ne
fussent en ruine, les granges écroulées , et hors d ’état de contenir
la récolte prochaine.
Plus pressée d’aillours de jouir de son lot qu’aucun de s?s co
héritiers, à raison de sa position, elle a été la première à désirer
le partage.
�(7 )
On est convenu de faire estimer préalablement tous les biens
qui devoient en être l’objet.
On a nommé pour exporta les sieurs Renaudet et Ferrier, connus
trop avantageusement dans l’opinion publique pour ne pas réunir
les suffrages de tous les cohéritiers; et ils ont été si agréables à la
dame Dechamps , qu'ils ont vécu et logé chez elle pendant tout le
temps qu'ils ont travaillé à l’estimation de la terre du Bouis, qui
joint son habitation.
Cette opération terminée , tous les copartageans sont unanime
ment convenus de s ’ e n référer, sur le règlement de leurs droits res
pectifs, à la décision de deux anciens jurisconsultes de C lerm ont,
dont l ’un éloit grand oncle maternel à la mode de Bretagne des
mineurs Loisel.
Ils se sont tous rendus à Clermont avec les deux experts, R e
naudet et Ferrier, dans les derniers jours de mars 1806, et tous
y ont séjourné sans interruption jusqu’au 21 avril suivant.
Chaque jour ils se sont réunis chez les arbitres.
L à , chacun des intéressés a fait valoir ses droits ou ses préten
tions.
T o u t a été v u , examiné, discuté en leur présence par les arbi-»
1res.
Mais comme de tous les frères et sœurs Esmclin , six seulement
avoient des droits dans les biens m aternels, à raison de la mort
civile de Procule et de Geneviève; que tous au contraire étoient
copartageans dans les biens paternels; le premier pas à faire éloit,
de distinguer les biens paternels et maternels, pour en former deux
masses séparées.
Les arbitres ont tenté ce travail; mais ils n ’ont pu y réussir.
11 éloit impossible de retrouver les élémens de la plupart des
successions échues aux sieur et darne Estnelin, à défaut d ’inven
taires et de partages.
11 existoit à la vérité des inventaires dos deux principales, celles
de Jacques de Lachaussée et de René-Barthélem y G ib o n ;m a is
les héritiers Esmclin ne les avoient pas en leur possession ; et ils
n ’eloieul pas en état de les représenter.
�( 8 )
Ils n’avoîent pas des notions exactes de la nature et de la consis
tance des effets dont ces successions étoient composées.
Ils ignoroient ce qui en avoit été touché par leur p è re , en nu
méraire ou en papier-monnoie , et les différentes époques aux
quelles ces sommes avoient été versées dans ses mains.
Les arbitres avoient d’ailleurs sous les yeux une expédition fa u
tive du contrat de mariage des sieur et dame Esmelin , qui contenoit la stipulation pure et simple de la communauté , sans la
clause subséquente qui portoit que «pour y acquérir droit, chacune
» des parties y confondrait 600 fr. ; et le surplus de leurs biens,
» avec ce qui leur écherroit par succession, donation, sortiroit
» nature de propre-fonds (*)• »
D e sorte que les sieur et dame Esmelin paroissoient n ’avoir con
tracté qu ’une communauté légale et conforme à l’article 276 de
la coutume de Bourbonnais; d ’où il sembloit résulter que tout
ce qui étoit de nature mobilière dans les successions échues aux
deux époux , avoit été confondu dans la communauté, et appartenoit par moitié à chacun d’eux; ce qui frappoit spécialement sur la
succession de Jacques de Lachaussée, presque toute composée d ’ac
tions de la compagnie des Indes, ou autres effets royaux payables
au porteur.
Les arbitres, au milieu de celle obscurité, crurent apercevoir
une lueur de justice dans le plan simple de diviser la masse entière
des biens et des dettes en deux portions égales, dont l’une seroit
censée maternelle, et l’autre censée paternelle; ce qui donnoit aux
deux religieuses un seizième chacune de la masse réelle des biens,
et les chargeoit d’un seizième des dettes (**).
(*) Cette expédition inexacte a été représentée par Procule Esmelin , qui
l ’avoit trouvée dans les papiers de la succession.
Elle paroissoit mériter d’autant plus de confiance, qu’elle étoit écrite en entier
do la main de Barthélémy , notaire , dépositaire do la minute.
(**) I«a masse totale de l’a ctif lion étoit de 5<j85 <j 5 fr.
Les créances actives mauvaises ou douteuses, de 267330 fr.
Los dettes passives connues lors du partage, étoient de 205yS6 fr.
Colles découvertes depuis s’élèvent à environ 20000 fr,
�(. 9 )
Les arbitres ne se dissimulèrent pas, et ne dissimulèrent pas à
tous les cohéritiers que ce plan étoit trop favorable à Procule et
Geneviève Esmelin , même sous le point de vue de la communauté
légale des père et mère communs, comme elle paroissoit l’être
d’après l’expédition fautive de leur contrat de mariage.
M a is, d’une p a rt, il étoit urgent de prendre un parti pour satis
faire les créanciers, dont les poursuites pouvoient à chaque ins
tant porter partout l’incendie et la dévastation.
D ’autre part, il falloit par-dessus tout éviter , pour l’intérêt de
tous, d’en venir à des discussions juridiques, qui présentoient un
abîme sans fond et sans rives, prêt à engloutir toute la fortune
des copartageans.
On ne considéroit d’ailleurs la portion que devoit recueillir Pro
cule Esmelin, que comme un dépôt confié à la vertu, qui devoit un
jour revenir à la famille.
Et à l’égard de la dame Dechamps , tous ses cohéritiers regardoient l’avantage qu’elle pouvoit retirer de ce mode de-partage,
comme un sacrifice fait à sa position et à sa qualité de mère de
famille.
Quant aux mineurs Loisel , indépendamment que l’acquiesce
ment de leur père à cette mesure étoit suffisamment justifié par
l ’exemple de tous ses copartageans majeurs , grands oncles et
grand’tantes de ses mineurs , qui avoient le même intérêt qu'eux ,
on eut soin de les dédommager amplement de la perte que ce plan
pouvoit leur occasionner, comme on le verra dans la suite.
C e mode de partage une fois adopté par tous les cohéritiers, on
vit bientôt disparoitre la majeure partie des difficultés qui divisoient
la famille Esmelin.
Il en restoit cependant encore, qui donnèrent lieu à quelques
débats entre les cohéritiers.
L a principale étoit relative au sieur Esmelin-Deux-Aigues.
Après sa radiation de la liste des émigrés , il avoit traduit son
père en justice, pour obtenir de lui le règlement de ses droits ma
ternels.
B
�( IO )
L e sieur Esmclin, qui connoissoit mieux que personne les inconvéniens et les dangers de soumettre celte discussion aux tribunaux,
consentit de s’en référer à l’arbitrage de M . Lucas, président du
tribunal de G a n n a t, leur parent.
M . Lucas, après avoir entendu les sieurs Esmelin, père et fils,
pendant plusieurs séances, et avoir examiné leurs mémoires res
pectifs, crut devoir fixer le débet du père envers son fils, pour tous
ses droits maternels directs et collatéraux, à 57760 francs, dont
42760 francs pour les capitaux, et i 5ooo francs pour les intérêts
ou jouissances; et ce fut d’après cet aperçu que les parties traitè
re n t, sous sa dictée, devant H u e , notaire ù Gannat, le 17 ger
minal an i 3 (*).
T o u s l e s cohéritiers du sieur Esmelin-Deux-Aigues connoissoient
parfaitem ent la sincérité de ce traité; et la médiation d e M . Lucas,
prouvée par sa signature, ne permettoit pas d ’élever le plus léger
doute à cet égard. Mais comme il sembloit en résulter quelque
avantage en sa faveur, ils prétendoient qu’il devoit s’en départir
pour se mettre à leur niveau.
L e sieur Esmelin-Deux-Aigues insisloit sur l’exécution de cet
acte, comme étant un traité à forfait, convenu de bonne foi, slfr
des droits successifs dont la quotité étoit absolument incertaine.
Il ajoutoit que l’avantage qu’on prétendoit résulter de ce traité ,
n ’étoit rien moins que réel; qu’il étoit plus que compensé, par la
circonstance que, dans le plan du partage proposé, il n’avoit à pré
tendre qu’un seizième dans les créances actives paternelles, dont il
lui seroit revenu un huitième, si on n ’en avoit pas confondu la
moitié dans la masse maternelle, dont il étoit exclu au moyen de
l’exécution de ce traité.
Il ajoutoit encore qu’en supposant que ce traité produisît quelqu’avantage en sa faveur, cet avantage ne pouvoit être critiqué,
parce qu’il étoit bien loin d’absorber les réserves disponibles que
(*) l a transaction fait mention expresso qu’elle a été passée en présence et
par la médiation do M. L u ca s, qui l ’a signée.
�( 11 )
s ’étoit faites le père commun par les différons Contrats de ma
riage de ses enfans (*).
D ’après ces considérations, il fut arrêté que le sieur EsmelinI)eux-Aiguësprélèveroit, avant tout partage,le montant dece traité.
Mais le mode de ce prélèvement n ’étoil pas sans difficultés.
D ’une part, le capital des droits successifs du sieur EsmelmDeux-Aigues devoit être prélevé sur la masse maternelle.
D ’autre p a r t, les jouissances , et le prétendu avantage qui pouvoit résulter de ce traité en sa faveur, devoient être prélevés sur la
masse paternelle.
On prit le parti d’en faire le prélèvement sur la masse entière,
et ce parti étoit d’autant plus raisonnable , que la masse paternelle
étant avantagée par le plan du partage, en faisant frapper ce pré
lèvement par égalité sur les deux masses , on se rapproclioit de
plus.en plus du point de justice auquel les arbitres et les parties
se proposoient de parvenir.
Cet obstacle applani, il en restoit encore quelques autres, mais
qui éprouvèrent moins de difficultés.
L e sieur René Esmelin aîné avoit des prétentions de plus d ’un
genre contre la succession de son père.
L a principale résultoit delà donation que lui avoit faite son père
de la terre de Bouis, par acte du 2 mars 1793, immédiatement
avant les lois de l’égalité; donation qui prenoit sa source dans la
réserve que s’éloit faite le sieur Esmelin, par les différens contrats
de mariage de ses enfans, de disposer de cette terre au profit de tel
d’entr’eux qu’il jugeroit à propos.
Cette circonstance formoit exception aux dispositions prohibi
tives de la Coutume de Bourbonnais, qui iaterdisoit les avantages
entre enfans, autrement que par contrat de mariage.
(*) Les parties raisonnoient d’après l ’expédition inexacte du contrat de ma
riage de 17 5 6 , qui rendoit communes aux deux époux toutes les successions
mobilières.
En raisonnant d’après la clause insérée dans ce contrat de mariage, qui les rendoit propres à chaque estoc, le sieur Esmelin-Deux-Aigues étoit évidemment lésé.
Ba
�( ^ )
"Le sieur Esmelin père n ’étant d’ailleurs décédé que sous l’empire
du nouveau C o d e , tous les avantages antérieurs pouvoient être
considérés comme légitimes , jusqu’à concurrence de la portion
disponible.
Mais le sieur René Esmelin n’attendit pas qu’on lui en demandât
le sacrifice; il fut le premier à l’offrir à ses frères et sœurs; il n’y
mit qu’une seule condition, celle de l’union et de la concorde, et
que tout se terminât à l’amiable.
L a dame Debard , de son côté, élevoit des réclamations d ’urr
intérêt m ajeur, qui prenoient leur source dans une donation entre
vifs qui lui avoit été faite par les dames Delagoutte et Gudevert,
le 3 mai 1 7 7 5 , de certains biens dont le sieur Esmelin étoit mort
en possession , qu’elle prétendoit avoir droit de prélever en nature
soir sa succession, indépendamment d ’un grand nombre d’années
de jouissances de ces mêmes biens, qu’elle réclamoit à titre de
créancière.
L a dame Debard en fit généreusement le sacrifice , sans autre
indemnité qu’une somme de 1200 francs à prendre sur les créance»
douteuses, et sans y mettre d’autres conditions que celles qu’y
avoit mises son frère, l’union et la concorde, et que tout se ter
minât à l’amiable.
Enfin, le sieur Delavilenne, stipulant pour sa fem m e, dont ¡F
étoit fondé de pouvoir, fît aussi le sacrifice d’une somme de 1000 fr.
qui formoit l’objet d ’une donation qu’il prétendoit avoir été mal à
propos confondue dans la dot qui lui avoit été constituée par son
contrat de mariage.
T o u s ces obstacles applanis , il fut question de procéder au
partage.
On fit un premier traité pour en fixer les bases.
C ’est dans ce premier traité que se trouvent tout le moral de l’opéralion,les motifs qui l’ont déterminée, les circonstances impérieuses
qui la rendoient nécessaire, les sacrifices généreux faits par plu
sieurs des cohéritiers pour assurer la paix et l’union dans la famille.
On en fit un second pour y traiter quelques objets particuliers,
�( >3 )
que tous les cohéritiers croyoient devoir être renfermés dans le sein
de la famille.
Et enfin un troisième, qui contenoit le partage.
Il étoit impossible d’employer dans ce partage la voie du sort.
Les rapports étoient tous inégaux, et varioient depuis 5oo fr.
jusqu’à 33ooo fr.
L e tirage au sort n’eût pu se faire sans être répété jusqu’à sept
à huit fois.
Les morcellemens qui en seroient résulté eussent été tels, que
chaque domaine, chaque arpent de terre eût été divisé en plus de
cent portions , contre le texte de la loi et le vœu de la raison.
On prit donc le seul parti proposable, celui de faire des lots de
convenance.
Mais les frères et sœurs de la dame Dechamps, toujours fidèles
à leur plan de la combler d ’égards et de bons procédés, eurent l’at
tention de lui laisser le choix de celui qui lui seroit le plus agréable.
Elle choisit des biens de la terre du Bouis , qui étoient situés
dans la même commune que ceux de ses mineurs, qui les joignoicnt
de toutes parts, et dont l’estimation lui étoit d’autant moins sus
pecte, qu’elle avoit été faite sous ses yeux, et pardesexperts logés
et nourris chez elle pendant tout le temps de leur opération.
On usa avec elle des mêmes procédés pour le seizième des dettes
dont son lot devoit être chargé; 011 lui laissa le choix de celles
dont les intérêts étoient le moins onéreux, et des créanciers sur la
complaisance desquels on pou voit le plus compter.
Ces différentes opérations terminées, tous les héritiers Esmelin
retournèrent dans leurs foyers, en bénissant leurs arbitres, et en.
se félicitant de l’union et de la concorde qu'ils regardoient comme
rétablies entr’eux d’une manière inaltérable.
Mais le bonheur de la famille Esmelin ne fut pas de longue durée.
L a dame D echam ps, rentrée dans ses foyers , y retrouva le
«dém.on de la discorde, le misérable qui avoit conduit son père au
tombeau, et qui médiloit la ruine de sa famille.
Dès ce premier m om ent, il fut arrêté entr’eux de tenter, paç
�(
>4 )
toutes sortes de voies, l’anéantissement de tous les arrangemens
faits à Clermont.
Avant de rien entreprendre, elle eut soin de s'installer dans
son lo t, de l’affermer pour plusieurs années, de se faire payer
d ’avance du prix du bail, et surtout de laisser à ses frères et soeurs
toutes les charges de la succession dont jusqu’ici elle n’a pas payé
une obole, et qu’ils acquittent journellement pour elle.
Après avoir ainsi pris scs précautions, et le 18 juin 1806, là
dame Dechamps a fait citer tous ses cohéritiers en conciliation ,
pour venir à division et partage de tous les biens meubles et im
meubles délaissés par le père com m un, sans avoir égard à tous
projets de partage , qui seroient regaidés cômme non avenus.
Cette citation a été suivie d’un procès verbal de non concilia
tion , en date du g juillet.
L e 25 du même m ois, la dame Dechamps a présenté requête au
tribunal d arrondissement de G annat, tendante au fond à ce qu’il
lui fût permis d ’assigner ses cohéritiers , sur la demande en par
tage, dans les délais ordinaires, et à la première audience, sur sa
demande provisoire, tendante à ce qu’il fût sursis à la coupe et
exploitation des différais bois de haute futaie, et tous autres dépendans de la succession du père commun.
Elle demandoit en même temps qu’il lui fût permis de faire pro
céder à la visite et état de tous ces bois par experts , à l’effet de
constater tous ceux qui avoient été coupés et tous ceux qui étoient
sur pied, et d’en fixer le nombre et la valeur , pour, après ce rap
port, être pris par elle telles conclusions qu'elle aviscroit.
Cette demande provisoire cachoit une insigne perfidie. La dame
Dechamps savoit qu’il existoit, au décèsdu père commun , plus de
i 5oooo fr. de lettres de change, toutes échues, protestées ou re
nouvelées par ses frères et sœurs, non compris plus de 60000 fr.
de dettes ordinaires, dont les créanciers n’étoient pas moins im
patiens.
Elle savoit que chacun de ses cohéritiers n ’avoit d ’autres res•ources, pour faire honneur aux engagemena les plus urgens, que
�( i5 )
dans le prix de ces b o is, qu’ils se hâtaient de vendre et d’exploiter.
Son projet étoit de rendre leur libération impossible, de voir leur
liberté compromise, et tous les biens livrés à l’expropriation forcée.
C e projet, dira-t-on, étoit insensé ; elle ne pouvoit elle-même
manquer d’en devenir victime : cela est vrai ; mais faut-il nier
l ’évidence, parce qu’elle passe les bornes ordinaires de la vraisem
blance et de la perversité humaine ? A-t-on oublié le vœu de
Cornélie dans les Horaces ?
Quoi qu’il en soit, le tribunal de Gannat a repoussé, avec indi
gnation, cette action provisoire , par son jugement du i 5 décembre
1806, rendu d'après les conclusions motivées de M . le commissaire
impérial.
Pendant que la dame D e c h a m p s v e x o i t ainsi ses freres et sœurs,
et tentait d ’arrêter par toutes sortes de moyens l’exécution des
arrangemens faits entr’eux, ses cohéritiers cherchoient à les conso
lider et à les régulariser à l’égard des mineurs Loisel.
L e sieur Loisel avoit été assigné depuis le 5 juin , en sa qualité
de père, tuteur et légitime administrateur de ses enfans, pour en
voir ordonner l’exécution ; mais il avoit cru devoir suspendre toutes
espèces de démarches jusqu’à la décision de l’incident élevé par
la darrje Dechamps.
C et incident terminé, le sieur Loisel a convoqué un conseil de
famille le 24 décembre 1806.
Ce conseil, composé du grand-père maternel des mineurs, de
plusieurs de leurs oncles et de leurs plus proches parens, après
avoir pris communication de la transaction du i 5 a v ril, l’a ap
prouvée dans tout son contenu , et a autorisé le sieur Loisel à so
retirer auprès de M. le commissaire impérial, qui seroit invité a
désigner trois jurisconsultes pour examiner ce traité et en dire
leur avis, conformément à l’article 467 du Code civil.
L e 3 i décembre, sur la requête qui lui a été présentée par le
sieur Loisel, M . le commissaire impérial a désigné trois anciens
jurisconsultes près la cour d ’appel, également recommandables par
leur expérience et leurs lumières, M M . Andraud, Borye et PagèaYerny.
�( .6 )
Sur l’avis de ces trois jurisconsultes, les héritiers Esmelin , à l’ex
ception de la dame Dechamps, ont demandé l’homologation de la
transaction du i 5 avril.
La dame D echam ps, fidèle à son plan de contradiction, n ’a pas
manqué de s’y opposer.
Mais sans avoir égard à son opposition, dont elle a été déboutée
avec dépens, la transaction a été homologuée, sur les conclusions
de M . le commissaire impérial, par jugement du 21 février 1806.
L e 21 mars, nouvelle assemblée du conseil de famille des mineurs
Loisel ;
Approbation du partage fait sur les bases de la transaction ho
mologuée ;
Requête du sieur Loisel à M . le commissaire impérial, pour l’in
viter à désigner trois jurisconsultes auxquels seroit soumis l’examen,
du partage ;
Désignation de M M . Andraud , Borye et Pagès-Verny;
A vis de ces trois jurisconsultes pour l’approbation et la pleine
et entière exécution du partage.
*
L a dame Dechamps en a au contraire demandé la nullité, fon
dée sur le [défaut d’observation des formes voulues par la lo i , et
subsidiairement la réformation pour cause de lésion;
Et par jugement contradictoire du 2 mai dernier, rendu sur les
conclusions de M . le commissaire impérial, elle a été déboutée de
toutes ses demandes , et le tribunal a ordonné que le partage seroit
exécuté selon sa forme et teneur.
Appel de la dame Dechamps des trois jugemens des i3 décembre
1806, ai février et 2 mai 1807.
Ses moyens en cause d’appel sont les mêmes qu^en cause prin
cipale ; nullité de la transaction et du partage, lésion résultante de
l’une et de l ’autre.
L a réponse des intimés se divise en trois paragraphes.
Ils établiront, dans le premier, que la dame Dechamps n’est ni
recevable, ni fondée à opposer les prétendues nullités dont elle
excipe.
Dans
�Dans le second, que loin d’être lésée par les bases adoptées dans
la transaction du i 5 avril, et par le partage fait d’après ces bases,
elle y est avantagée du tout au tout.
Dans le troisième, que si les intérêts des mineurs Loisel paroissent avoir été lésés par le traité du i 5 avril, en ce qu’on y a gra
tifié la dame Dechamps et Procule Esmelin au préjudice de la suc
cession maternelle, ils en ont été amplement dédommagés.
§ I"
L a dame D echam ps n’ est ni recevable, ni fon d ée a opposer les
prétendues nullités dont elle excipe.
Toutes les nullités qu’invoque la dame Decliamps , contre le
traité et le partage des x5 et 20 avril, ont leur source dans de pré
tendus vices de formes.
O r la loi ne connoit point de vices de forme pour les majeurs ,
ils peuvent traiter de leurs intérêts à leur g ré, et leur signature
suffit pour rendre leurs engagemens irréfragables.
Ici, la dame Decliamps a signé les actes des i 5 et 20 avril.
A la vérité elle dit les avoir signés aveuglément, page 4 de son
mémoire, sans en avoir entendu la lecture, page 14.
Mais elle a signé si peu aveuglément, et elle en a si bien entendu
la lecture, qu’elle nous dit elle-même, page i 3 , que de retour dans
ses foyers elle a voulu se mettre en possession des articles attri
bués à son lot.
E t de f a it , elle s’en est de suite mise en possession, en les affer
mant par un bail qui est enregistré.
Elle n'a cessé d ’en jouir depuis, sans avoir été troublée par per
sonne ; et dans ce moment elle vient de quitter son ancienne habi
tation , qui appartenoit à ses mineurs, pour venir habiter dans sa
propre maison, qui fait partie de son lot.
A in si, non seulement la dame Dechamps a approuvé ce partage
dans les premiers instans; mais elle n’a cessé de l’approuver de
puis, et de l’exécuter pendant le procès.
C
�( *8 )
Et le fait d ’approbation le plus caractérisé, c’est ce changement
d ’habitation, cette translation dans sa propre maison, dans le
moment où elle remplit l’air de ses cris contre ce partage , qu’elle
dit avoir signé aveuglément, et sans en prendre lecture.
L a circonstance qu’il y a des mineurs intéressés dans ce par
tage, ne change rien à cette première fin de non-recevoir.
L a loi a prescrit des formes pour garantir les mineurs de la
fraude, d e là facilité ou de l’insouciance de leurs tuteurs, et de
leur propre inexpérience lorsqu’ils sont émancipés.
Mais ils ont seuls le droif de se plaindre de la violation de ces
formes, et il n’est pas permis aux majeurs d ’en excipcr.
C ’est ainsi que le décide l’article 1 125 du Code civil, qui porte
que « les personnes capables de s ’engager, ne peuvent opposer
Vi n c a p a c i t é du mineur , de l’interdit ou de la femme mariée, avec
lesquelles elles ont contracté.
Cette loi doit s’appliquer avec d’autant plus de rigueur à l’espèce,
que les parties ont prévu le cas , et en ont fait une clause expresse
de leurs conventions, en stipulant que le partage sera irrévocable
en ce qui concerne chacun des majeurs.
La loi seroit muette, que la convention seroit une loi écrite dont
il ne seroit pas permis de s’écarter.
C ’est en vain que la dame Dechamps prétend excepter de cette
règle générale les partages faits avec des mineurs.
Quand il seroit dans le texte ou dans l’esprit de la loi d’excepter
du principe général les partages faits avec des mineurs, la conven
tion particulière, que le partage dont il s’agit seroit irrévocable,
en ce qui concerne chacun des majeurs, feroit cesser cette excep
tion , parce que la disposition de Pliouime fait cesser celle de la
loi, et que celte convention n’a rien d ’illicite et de contraire aux
bonnes mœurs.
Mais, d’une psr', ce lexte est clair, précis, d ’un négatif absolu, ne
peuvent, ce qui écarte toute espèce d ’interprétation et d ’exception.
D ’autre part, cette loi n ’a fait que consacrer les anciens princi
pes, qui nous sont attestés par Lebrun, dans son T raité des Suc
�( *9 )
cessions, liv. 4, chap. i " , n ° 2 i où, parlant du partage provisionnel,
il dit que le mineur a le droit de s’y tenir s’il lui est avantageux,
ou d ’y renoncer s’il n’y trouve pas son compte; et que pour rendre
cette faculté réciproque, il faut qualifier le partage de simple pro
visionnel , et stipuler, par une clause précise , qu’il sera permis, tant
aux majeurs qu’aux mineurs, de demander un partage définitif ;
« autrement, le mineur pourra se tenir au partage , si le bien qui
» lui a été donné est plus commode , et la faculté ne sera pas re» ciproque pour les majeurs.
L e même principe est rappelé par Rousseau de Lacom be, au
mot P a r t a g e , sect. 5 , n 9.
Q u ’auroient donc dit ces auteurs, si,comme dans l’espèce, il a voit
été question d ’un partage, non pas simplement provisionnel, mais
définitif; et si , au lieu du silence sur la réciprocité de la facilité
de revenir contre ce partage, il y eût été formellement expliqué
qu’il seroit irrévocable en ce qu i concerne chacun des majeurs ?
Mais dans tout ce qu’on vient de dire, on a supposé, avec la
dame Dechamps, que les actes qu’elle attaque sont infectés de tous
les vices qu’elle leur suppose, résultans de la violation de toutes
les formes voulues par la l o i , pour les transactions et les partages
dans lesquels des mineurs sont intéressés ; et on a vu que dans c( tte
hypothèse elle 11’a pr.s le droit de les censurer, soit parce que la loi
lui en interdit la faculté, soit parce qu’elle se l’est interdite ellemême, par une convention formelle faite entr’elle et tous ses co
héritiers majeurs.
Mais celte hypothèse est purement gratuite, et toutes les for
mes prescriles par les lois pour la garantie des mineurs, ont été
scrupuleusement observées dans l’espèce.
On ne [»eut nier que l’acte du i 5 avril ne fut une transaction
telle que la définit l’article 2044 du Code civil , « un contrat par
» lequel les parties terminent une contestation née, ou prévien» nent une contestation à naître. »
Il s’agissoit dérégler les droits l e s plus compliqués, entre une mul
titude d'héritiers ; sur quatorze successions, qui présentoienl des
C 2
�( 2 0 }
questions sans nom bre, qui pouvoient donner lièu à des discussions
interminables.
Q u’exigeoit la loi pour rendre valable un pareil acte ? L'autori
sation du conseil de famille, l’avis de trois jurisconsultes désignés
par le commissaire du Gouvernement, et l’homologation du tri
bunal, après avoir entendu le commissaire impérial.
O r, on a vu dans le récit des faits, que toutes ces formalités ont
été exactement observées.
A la vérité, la transaction étoit rédigée avant l’autorisation du
conseil de famille, et la dame Dechamps croit pouvoir y trouver
un prétexte de chicane.
Mais ce traité, qui pour les majeurs étoit irrévocable en ce
qui concernoit chacun d’eux, n'étoit qu’un projet pour les mi
neurs , jusqu’à ce qu’il eût été autorisé par le conseil de famille,
et par l’avis des trois jurisconsultes, désignés par le commissaire
du Gouvernement; ce qui étoit prévu par l’acte même’, dans le
quel on lit qu’il ne sera passé en forme authentique, que lorsque
le sieur Loisel aura rempli pour ses mineurs les formalités pres
crites par la l o i , pour en assurer la validité.
IN’est-il pas évident, d ’ailleurs, que le meilleur moyen d’éclairer
le conseil de famille et les jurisconsultes qui dévoient donner leur
avis, étoit de leur présenter le traité tel qu*il avoit été convenu,
et qu’il devoit être exécuté entre toutes les parties, s’il leur paroissoit dans l’intérêt des mineurs ?
Vainement le tuteur auroit rendu compte à la famille assemblée
des projets d ’arrangemens qui étoient proposés entre tous les cohé
ritiers Esmelin; vainement on auroit fait part de ces mêmes projets
aux trois jurisconsultes désignés par le commissaire du Gouverne
ment pour donner leur avis; rien n’étoit plus propre à diriger
leur opinion que le traité même, qui n’étoit pas encore obligatoire
pour les mineurs, et qui nepouvoit le devenir que par l’assentiment
de la famille assemblée , et l’avis des jurisconsultes désignés.
Celte circonstance de la préexistence du traité du i 5 avril, à
l’assemblée du conseil de famille et à l’avis des jurisconsultes.
�( 21 )
n’est donc qu’un moyen de plus en faveur de ce traité, parce
qu’ il en résulte que, soit l’approbation de la famille, soit celle des
jurisconsultes, ont été données en bien plus grande connoissance
de cause que si elles avoient précédé la rédaction de ce traité.
C ’est encore une pointillerie bien misérable, que la critique que
fait la dame Dechamps des qualités de ce traité, dans lesquelles on
suppose les formalités remplies par le tuteur avec les dates en blanc.
On l’a déjà d i t , pour les mineurs ce traité n ’étoit qu’un pro
jet, qui ne devoit être passé en forme authentique et avoir d’exé
cution qu'autant que le tuteur auroit rempli les formalités néces
saires pour le rendre valable.
Il étoit donc tout simple que les dates des actes qui devoient
constater l’observation des formes prescrites par la loi fussent en
blanc ; les qualités étoient telles qu’elles devoient être dans l’acte
authentique; et en passant cet acte authentique, on devoit remplir
les dates du conseil de famille et de l’avis des jurisconsultes.
Quant au traité secondaire du même jour i 5 avril, il étoit en
tièrement dans l’intérêt des mineurs Loisel, puisque c’est ce traité
qui leur assure la succession de René Gibon, dont ils étoient exclus
par la loi.
11 ne peut donc y avoir ni motifs, ni prétexte de le censurer.
L e partage du 20 avril, qui n’étoit que la conséquence et l’exécu
tion de la transaction, n ’étoit encore qu’un projet pour les mineurs,
jusqu’à ce qu’il devînt obligatoire à leur égard, comme à l’égard
des majeurs, par l’observation des formes.
Elles ont été observées comme pour la transaction: le conseil de
famille, assemblé pour la seconde fois, l’a autorisé; les trois ju
risconsultes désignés par le commissaire impérial , consultés de
rechef, l’ont approuvé; le tribunal l’a homologué.
Ainsi, indépendamment que la dame Dechamps n ’est pas recevable à critiquer sous le point de vue de l’inobservation des for
mes, soit ce partage, soit le traité qui l’a précédé, on voit que
sa critique seroit sans fondement, et que le sieur Loisel n’a man
qué pour ses mineurs à aucune des précautions qu’exigeoit la loi
r
�( 23 )
pour les garantir de toute surprise , et s’assurer que leurs intérêts
étoient ménagés jusqu’au scrupule.
§ II.
L a dame D echam ps , loin d'être lése'e par les bases adoptées
dans la transaction du 1 5 a v ril, et par le partage fa it d’ aprèï
ces bases, y est avantagée du tout au tout.
Celte proposition pouvoit paroître incertaine à l’époque du traité
du i5 avril; aujourd’hui, elle est démontrée mathématiquement.
On éloit alors dans la confiance que toutes les successions échues
de l’estoc maternel avant le décès de la dame Esinelin étoient con
fondues dans la communauté.
Cette confiance étoit fondée sur l’expédition du contrat de ma
riage de 1756, dans laquelle on avoit omis d’insérer la clause que
chacun des futurs confondroit la somme de 600 liv. pour avoir
droit dans la communauté , et que le surplus des biens des futurs,
ainsi que ceux qui leur écherroient par succession ou donation,
leur sortiroient nature de propre.
Cette erreur se trouvant rectifiée par une expédition plus exacte,
il est évident que toutes ces successions doivent être prélevées au
profil des héritiers maternels.
Il faut cependant distinguer dans ces successions celles qui sont
échues avant le décès de la dame Esmelin , de celles qui sont échues
depuis.
T o u t ce qui a été touché sur les premières de ces successions par
le sieur Esmelin , doit elre prélevé sur la communauté, qu’il faut
considérer comme interrompue au décès de la dame Esmelin, ar
rivé au mois de novembre 178 9 , d'après la-faculté qu’en ont les
intimés et les mineurs Loisel par l’article 270 de la Coutume de
Bourbonnais.
Les successions échues depuis le décès de la dame Esmelin \ et
tout ce qui a été louché par le sieur Esmelin sur les successions
�( -3 )
antérieures depuis la même époque, doivent être prélevés sur sa
succession et sur ses biens personnels.
Ainsi, on doit prélever sur la communauté, i° ce que le sieur
Esmelin a touché sur la succession de Jean-Baptiste de Lachaussée,
décédé à Moulins en 1764;
20 Ce qu’il a louché de la succession de Gilbert de Lachaussce,
aussi décédé à Moulins en 1766;
5° La somme de i 68, 5ooliv. qu’il a touchée à compte sur la suc
cession de Jacques de Lachaussée, par le partage provisionnel passé
devant Laroche, notaire à Paris, le 29 avril 1788;
4° Ce qu’il a dû toucher de la succession de Marie Farjonnel,
bisaïeule des en fans Esmelin , décédée en 1788, l’une des léga
taires universelles de Jacques de Lachaussée, qui avoit aussi touché
16 8 , 5oo liv. par le parlage provisionnel de 1788.
Et on doit prélever sur la masse de sa succession , composée
soit de sa portion de la communauté, déduction fuite des prélèvemens, soit de ses biens personnels,
i° La somme de 188, 55o liv. 16 s. qu’il a reçue d e là succes
sion du sieur René-Barthélemy Gibon , soit en 1790, soit pendant
les premières années des assignats , ce qui est étubli par un état
écrit de sa main , que les intimés rapportent.
2°. Ce qu’il a dù loucher, pour le compte de scs enfans, de la
somme d’environ 900,000 livres, restée indivise , de la succession
de Jacques de Lachaussée, après ce partage provisionnel ;
.
5°. Ce qu’il a dû loucher de celle même somme, soit comme
représentant Elizabelh de Lachaussée , femme Laplanche , soit
comme représentant Catherine de Lachaussée, dont il avoit acquis
les droits, qui étoient d ’un cinquième chacune de cette somme
de 900,000 liv.; ce qu’il n’avoit pu faire que pour le compte de
ses enfans , à raison de l ’in d iv is io n de ces droits avec eux ;
4". Ce qu’il a dû toucher de la succession de Gilberl-Barlhéleniy
G ib o n , aïeul de ses enfans, soit directement, soit par l’effet des
cessions de droits de leurs cohéritiers dans celte succession.
On trouvera déjà une masse énorme qui suffiroit pour absorber
la succession du sieur Esmelin.
�(
4
)
. Mais que sera-ce, si on y joint les jouissances Ou les intérêts
des capitaux, à compter du moment du déccs de la dame Esmelin,
attendu qu’aux termes de l’article 174 de la Coutume de Bour
bonnais, l'usufruit des pères cesse de plein drojt, à 14 ans pour
les filles, et à 18 ans pour les mâles?
, Si on y joint pour 5o mille francs de ventes de bois de la com
munauté, faites par le sieur Esmelin, après le décès de sa fem m e,
toutes établies par preuves écrites ?
Pour pareille somme, au moins, de dégradations commises dans
les biens de la communauté, depuis la même époque?
Que sera-ce enfin, si on y joint plus de 225,000 liv.d e dettes,
connues lors du partage, ou découvertes depuis, que les intimés
ont payées , ou payent journellement pour leur compte et pour
celui de la dame Decliamps?
Non compris les prétentions de la dame de B a rd , qui-ont été
éteintes par le traité du i 5 avril.
Non compris encore les réclamations qui s’élèvent de toutes
paris contre cette succession, qui sont connues de la dame Dechamps , et qu’on se dispensera de relever, dans la crainte de les
accréditer.
Il résulte évidemment de ce tableau, q u e , la succession du sieur
Esmelin fût-elle d ’un million ( et elle est à peine du tiers) , elle
seroit insuffisante pour faire face au passif dont elle est grevée.
Et il ne faut pas perdre de vue, d ’une part, que la presque uni
versalité des acquisitions est antérieure au décos de la dame
Esmelin ; ce qui donne aux héritiers maternels droit h la moitié
de tous ces biens acquis, sans aulres charges que celle de la moitié
des reprises qui existoient alors.
D ’autre p^rt, que sur les 225,000 livres de dettes passives, il y
en a pour environ 200,000 livres , qui sont du fait seul du sieur
Esmelin, et n’ont été contraclées que depuis le décès de la dame
Esmelin; ce qui les fait uniquement frapper sur sa succession.
D ’autre part enfin, que les 2G7,55o livres de dettes actives dou
teuses, qui forment un des principaux objets de cetlte succession,
no
�(
*5)
ne doivent être comptées que pour le cinquième, au plus, de leur
valeur numérique ; les intimés en offrant l’abandon à 80 pour
100 de perte.
C ’est vainement que la dame Dechamps croit pouvoir affoiblir ce tableau, en cherchant à tirer avantage du testament de la
dame Esmelin , qui contient, dit-elle, legs du quart de tous ses
biens, au profit de son mari.
C e testament n’est pas rapporté, et il y a lieu de croire qu’il ne
le sera jamais ;
Il est olographe , et il n ’est pas écrit en entier de la main de la
dame Esmelin ;
C e n’est pas sans de bonnes raisons qu’on n’en a parlé que vague
ment dans le traité du i 5 avril;
Ce testament n’est pas d’ailleurs tel que le suppose la dame
Dechamps ;
Il porte legs de l'u su fru it, ou du quart en propriété, au choix
du sieur Esmelin;
E t le sieur Esmelin seroit censé, par le fa it, avoir opté l’usu
fruit , puisqu’il n’a cessé de jouir des biens de ses en fans, jusqu'à
sa mort. Encore faudroit-il distraire de cette jouissance la succes
sion de René Gibon , qui n’est échue à ses en fans qu'après le décès
de leur mère, et à laquelle , par conséquent, ce testament ne peut
avoir d’application.
Il est évident, d’après ce qu’on vient de dire, que si par l’effet
de l’anéantissement d e l à transaction du 1 5 avril, que la dame
Dechamps a l’imprudence de solliciter, chacun des cohéritiers
rentre dans son premier état , l’actif de la succession du sieur
Esmelin étant plus qu’absorbé par le passif, la dame Dechamps
ne peut, en sa qualité d’héritière, espérer d ’en retirer une obole?
Il importe peu, d ’après cela, d ’examiner s’il y a, ou non , lésion
dans l’estimation proportionnelle des biens dont le partage est
composé, comme le prétend la dame Dechamps.
T o u te fo is , pour ne rien laisser à désirer sur cette prétendue
lésion secondaire, les intimés rappelleront à la dame Dechamps,
D
�( 2 6 }
'
que les tien s-fo n d s qui composent son lot ont été choisis par
elle ;
Q u ’ils sont pour la plupart mêlés avec ceux de ses mineurs, et
par conséquent parfaitement à sa convenance;
Q u ’ils ont été estimés par des experts nommés par elle, logés
et nourris chez elle pendant tout le temps de leur opération.
Ils lui diront enfin que, malgré la baisse des biens-fonds, sur
venue depuis le partage, ils offrent de prendre pour leur compte
tous ceux qui se trouvent dans son lot, pour le sixième en sus de
l'estimation et du prix pour lequel ils sont entrés dans ce partage.
C ’en est assez, ou plutôt c'en est trop, sur cette prétendue lésion;
car les intimés n ’ont que trop bien prouvé que, loin que la dame
Dechamps soit lésée et dans les bases et dans les résultats du par
tage du 20 a v ril, elle a été traitée par ses cohéritiers avec une gé
nérosité sans exemple ; que tout ce qu’elle tient , tout ce qu’elle
possède de la succession de son père, elle ne le tient que de leur
libéralité, elle ne le possède que par leurs bienfaits.
On dit que ce fait est trop bien prouvé, parce que celte géné
rosité excessive semble nuire aux intérêts des mineurs Loisel.
Cependant on verra bientôt qu’on leur a rendu toute la justice
qu’ils pouvoient désirer.
§ III,
R e la tif a u x mineurs L o isel.
On ne peut se dissimuler que plus on a gratifié la dame Dechamps
et Procule Esmelin, plus les héritiers maternels ont dû faire de
sacrifices.
Ces sacrifices scroient faciles à justifier pour les mineurs Loisel.
On pourroit dire que des mineurs ne sont jamais lésés quand ils
marchent sur les traces de leurs cohéritiers majeurs, qui ont le
même intérêt qu’e u x , surtout quand de six cohéritiers cinq sont
majeurs, et reconnus pour être parfaitement capables de stipuler
leurs droits et de veiller à leurs intérêts.
On pourroit dire encore, comme l’ont fait les trois anciens juris-
�( ‘
27 )
consultes désignés par M . le commissaire impérial, pour donner
leur avis, que « tous les héritiers avoient le plus grand intérêt
» à ce que le partage n’éprouvât pas de retard. T o u s les bâtimens
» des domaines étoient en ruine. 11 éloit dû des sommes considé» rables, qui exposoient les cohéritiers à des poursuites ruineuses,
« et qui pouvoient absorber une grande partie des biens.
» La minorité des enfans Loisel rendoit ces poursuites pres» qu'inévitables, et chacun des cohéritiers pouvoit se voir expro» prier de ses biens propres, par la circonstance qu’il se trouvoit
» des mineurs parmi les cohéritiers.
» 11 s’élevoit des contestations sur la composition des masses, et
» la division entre les lignes paternelle et maternelle.......................
» sur les réclamations de plusieurs des héritiers , et il étoit impos» sible de prévoir la fin de ces discussions, et les suites funestes
» qu’elles pourroient avoir.
» La transaction qui termine toutes ces contestations sans frais,
» et dans l’espace de quelques jours qui avoient été employés à la
» préparer, offroit à toutes les parties des avantages qu’on ne sau» roit trop apprécier. »
Mais ce qui tranche toute difficulté, c’est l’indemnité que tous
les cohéritiers majeurs ont assurée aux mineurs L o isel, pour les
désintéresser et consolider leur ouvrage.
Il existoit dans la famille une succession dont les religieuses
étoient exclues par leurs vœ ux, et la mère des mineurs Loisel,
parce qu’elle éloit hors des termes de représentation.
C ’étoit celle de René G ib o n , décédé au mois de juillet 179°*
Il a été convenu par les art. 8 et g du traité particulier , du i 5
avril 1806 , que les mineurs Loisel seroient associés pour un sixième
dans cette succession, et qu’ils coinmenceroient par prélever 5280 fr.
Ilsontà partager, entr’autres objets, près de 3ooo francs de rentes
inscrites sur legrand livre, connues sous le nom de tiers consolidé ,
dont la liquidation est terminée depuis le mois de décembre der
nier, et dont la valeur, au cours, approche dans ce moment du ni
veau de leur capital.
Da
�( =8 )
Ils ont, par suite de cette association, une portion dans le domaine
de L a ro c h e , provenu de cette même succession.
Il a été en outre arrêté que le sieur Loisel préleveroit sur les pre
miers recouvremens 2000 f’r . , pour les frais de l’instance intentée
au nom de ses mineurs au sieur Esmelin ; frais qui eussent été
compensés et perdus pour ses mineurs, sans cette convention par
ticulière.
D e sorte que l’indemnité accordée aux mineurs Loisel, par leurs
cohéritiers majeurs , pour les dédommager des sacrifices qu’ils pouvoient faire au bien de la paix, par leur acquiescement au traité
du i 5 avril, peut être évaluée à environ 14 à i 5o o o lr .; tandis
que, dans le calcul le plus rigoureux, et en regardant comme un
bienfait absolu de la part des héritiers maternels les deux lots de
Procule et de Geneviève Esmelin , ce sacrifice ne pouvoit jamais
excéder 10000 I r . , formant le sixième de 60000 fr.
Quant à la prétendue lésion résultante du défaut de proportion
dans l’estimation des biens qui composent leur lo t, comparée aux
lots de leurs cohéritiers, c’est une inculpation gratuite faite aux
experts, dénuée de vérité comme de vraisemblance , et qui ne
prouve autre chose, si ce n’est l’habitude où est la dame Dechamps
de Lotit hasarder.
Ce seroit une tâche trop pénible et trop dégoûtante, que celle de
relever tous les faits faux et cnlomnieuxdont le mémoire de la dame
Dechamps est rempli; il faudroit écrire dos volumes, et surcharger
une contestation qui l’est déjà trop par elle-même.
Il suffira de rappeler quelques-uns de ceux qui ont une liaison
immédiate avec les objets en litige, pour se faire une idée de sa
véracité , de sa bonne foi sur tous.
Par exemple, on lit, page i 3, que lorsqu’elle a voulu se mettre
en possession des objets attribués à son lot, « à peine le foin du pré
» du domaine de Chirat a-t-il été coupé , que René Esmelin l’aîné
» et Deux-Aiguës sont venus avec une troupe de bouviers s’en ein)i parer à force ouverte, en l’accablant d’injures et de menaces. «
�( ^9 )
Oublions cette prétendue force ouverte employée contre une
fem m e , ces injures, ces menaces dont elle orne sa narration, pour
en venir au fait.
L e pré dont il s’agit faisoit partie de la réserve de Bouis, qui est
entrée dans le lot du sieur René Esrnelin.
Ce pré est nommément compris dans ce lot, q u i, comme to u s les autres, a été formé par les experts.
C ’est un fait prouvé par leur rapport, qui sera mis sous les yeux
de la cour , et qui est de la parfaite connoissance de la dame
Dechamps :
A b uno disce omnes.
« Scs cohéritiers se sont emparés du bois C h a b ro l, qu’ils font
» exploiter journellement par le sieur Gillot. »
C e bois Chabrol fait partie du lot de la dame Dechamps ; il y
est porté pour i 320 fr.
Mais c’est uniquement le fonds qui lui appartient.
Les arbres en étoient vendus au sieur Gillot, par le sieur Esmelin,
depuis plus de trois ans avant sa m o r t , à raison de 7 fr. le pied;
ce qui portoit la vente de ce bois Chabrol à 16000 fr.
Pourra-t-on se persuader que ce soit sérieusement que la dame
Dechamps, à qui on a donné le bois Chabrol pour i 320 fr. , en
réclame tout à la fois le fo n d s, qui vaut au moins 2/|00 f r ., et le
branlant, qui avoit été vendu 16000 f r . , et dont la majeure partie
étoit déjà exploitée lors du partage.
A b uno disce omnes.
(c Ils ont poussé l’injustice jusqu’à usurper un autre bois contigu,
» qui appartient particulièrement à ses mineurs, du chef de M . De» cham ps, leur père, et que le sieur Gillot exploite aussi. » Même
pa^e i 3.
Mais la dame Dechamps nous apprend e lle -m ê m e qu’il y a
procès pour les limites de ce bois : il n ’y a d o n c , jusqu’à la dé
cision , ni injustice, ni usurpation. Sub ju d ice lis est.
u 9°. Il y a lésion , en ce que René Esmelin, fils aîn é, n ’a point
�(
3o )
» rapporté à la masse les terres du B eyrat, de la Presle, la Sou» braut, Laroclie, le L ogis, etc. valant plus de 200000 francs, et
» qui ont été achetés et payés sous le nom de ce fils, indûment
» avantagé par le sieur Esmelin père. » Page 62.
L e sieur Esmelin a acheté par acte authentique, le 12 février
1792 , étant encore avec son père, un domaine appelé la Soubraut,
une maison , des vignes, pour la som m e, réduite à l’échelle, de
i 25oo fr.
La vérité est que celte somme a été payée par le sieur Esmelin
père. L e sieur René Esmelin en a fait le rapport à la masse lors
du partage.
Si le père avoit voulu avantager son fils, d une maniéré indirecte,
de cette acquisition, rien n eut été plus facile; il suffisoit de lui
donner quittance de ces i 25oo ir. qu’il avoit payés pour lui.
Ces fraudes ne sont pas rares, et les tribunaux peuvent diffici
lement les atteindre.
L e sieur René Esmelin s’est marié, et a quitté la maison pater
nelle le 8 frimaire an 5.
Sa femme lui a porté le revenu d’une dot de 4^000 f r . , dont il
a conservé l’usufruit après son décès.
Il a acquis en l’an g le bien de la Presle, par acte authentique,
au prix de 2^000 fr. dont 10000 fr. exigibles, et 14000 fr. en rente
viagère, à raison de 1400 fr. par a n ; il n’a déboursé pour cet
objet que 10000 f r . , c i ......................................................... 10000 fr.
Il a acquis, le 2 germinal an 1 1 , toujours par acte
authentique, le bien du Beyrat, 60000 f r . , dont 3oooofr.
en délégations de contrats, et
5oooo fr. en délégations
exigibles, c i ..............................................................................
Le 28 prairial an 12, il a acquis encore, par acte
authentique , la locaterie du Lut ou des Chaises Gooo fr.
3oooo
c i ...................................................................................................
Gooo
T
otal
46000 fr*
�(
3i )
Il a revendu , par acte authentique, une portion de la locaterie
2900 fr.
du Lut au sieur Louis Lurzat 2900 f r . , c i .......................
Par acte du 21 messidor an i 3 , il a vendu au sieur
Claude Esmelin la maison et le logis situés à Bellenave,
10000 f r . , c i .................. ........................................................ 10000
11 a revendu en détail le Lien de la Presle, par diffé
rons actes authentiques, 24000 f r . , c i .............................. 24000
Il a vendu au sieur Gillot le bois delà Soubraut 3ooofr.,
c i .................................................................................................
5ooo
Il a reçu de son père, à compte sur la succession du
sieur René G ib o n , 2600 f r . , dont il lui a fourni quit
tance, c i ................................................................ ....................
T
o t a l
.....................................................
2600
4 25oo fr.
Ainsi la différence est de 55oo fr.
Ce n ’est pas qu’il ne reste au sieur René Esmelin quelque for
tune personnelle ; mais, outre que cette fortune est grevée de
rentes viagères ou constituées , il la doit à l’heureuse circonstance
d’avoir acheté bon marché, et d’avoir revendu cher;
A l’extinction de quelques viagers;
A une bonne administration ; à de grandes améliorations ; à son
industrie.
Loin qu’il ait puisé pour ces acquisitions dans la bourse de son
père, qui étoit, comme on l’a v u , dans un tel état de gêne que
sa liberté étoit compromise à chaque instant par l ’échéance des
lettres de changes, le sieur Esmelin père, dans un pressant be
so in , avoit touché, peu de temps avant sa m ort, 6553 liv. prix
d ’une vente de bois qui appartenoit à son fils.
Comme ce fait étoit notoire dans la famille, il n’est venu en
idée à aucun de ses cohéritiers de lui contester cette somme de
6555 liv. qui fait partie des dettes passives de la succession.
Il n’y a pas un fait avancé par la dame Dechamps, auquel il ne
fût facile de faire une réponse aussi satisfaisante, si le temps et
la patience permettoient de les relever tous.
�( 32 )
Il reste à dire un mot de deux objets dont se plaint la dame
Dechamps, et sur lesquels les intimés sont prêts à lui rendre justice.
L'un est relatif à ses créances contre la succession du père com
mun , qui dérivent de sa dot moniale et d ’arrérages de pension
qu’elle prétend ne pas avoir été liquidées exactement.
Les intimés rapportent cette liquidation faite par M . Bergier,
et écrite de sa main; ils sont convaincus que cette liquidation est
exacte. A u surplus, ils offrent de revenir à compte avec elle sur
cet objet, ou devant tel commissaire qu’il plaira à la Cour de nom
mer, ou devant les premiers juges.
L e second est relatif à la somme de 4 n 5 liv. de mobilier porté
dans son lot..
Elle prétend que son lot est trop chargé de cette nature de
biens, et en cela, ses plaintes sont évidemment indiscrètes; car il
y a , y compris les rapports, au moins i5o,ooo liv. de mobilier
dans la succession , et sa quotité proportionnelle seroit d ’environ
ioooo liv.
Elle se plaint aussi de n ’avoir pas reçu cette somme ;
Elle n’en”a reçu en effet qu’une partie.
Une autre partie a été payée en son acquit pour dépenses com
munes.
Une autre partie est encore en nature, notamment les bois de
sciage.
Enfin, il y a un déficit dans le mobilier, à raison des distrac
tions qui en ont été laites en nature ou en deniers, auquel il
doit être pourvu de la manière convenue pur le traité particulier
du i5 avril.
T o u t cela exigeoit des rapprocliemens entre la dame Dechamps
et le sieur René Esmelin aîné, que les contestations pendantes
ontr’eux ont rendus impraticables.
Mais le sieur René Esmelin est toujours prêt h lui rendre justice
sur ce p o in t, qui dépend d'un compte qu’il offre encore de faire
devant tel commissaire qu’il plaira à la cour de nom m er, ou de
vant les premiers juges.
Encore
�( 33 )
Encore un mot :
L e sort de la dame Dechamps est dans les mains des intimés.
S ’ils acquiescent à ses demandes, elle est perdue.
S’ils lui résistent, c ’est par pitié pour elle , c’est pour l’arrêter,
la malheureuse, au bord du précipice qu’elle creuse sous ses pas.
Quant aux mineurs L o is e l, leurs intérêts sont à couvert.
Ils sont amplement dédommagés dans la succession de René
G ib on , des sacrifices qu’ ils font au bien de la paix.
D ’ailleurs, les traités et le partage des 1 5 et 20 avril ont eu
l’assentiment de leur père, de leur aïeul maternel, leur subrogé
tuteur, de leur famille deux fois assemblée pour en prendre connoissance, des anciens jurisconsultes deux fois désignés par le com
missaire impérial, du commissaire impérial lui-même, enfin des
juges du tribunal de G a n n a t, q u i , parfaitement instruits des faits ,
des circonstances et des localités ,_se sont empressés de les homo
loguer et d’en ordonner l’exécution.
T a n t d ’autorités réunies ne permettent pas de douter de l’uti
lité, de la sagesse, de la nécessité de ces traités pour les mineurs
comme pour les majeurs , et les intimés espèrent que la Cour voudra
bien , en les consacrant par son a rrê t, mettra la dame Dechamps
dans l’impuissance de se nuire à elle-même , et de nuire désormais
à sa famille.
S ig n e ' R e n é E s m e l i n ,
G ilbert
Esmel i n - D e u x - A i g u es ,
C l a u d e - A m a b l e L a p e l in , M a r i e - M a g d e l e i n e Esme l i n - L a p e l i n , J e a n - F r a n ç o i s L a g a u d e - D e l a v i l en ne , T h é r è s e Esmel in -L a v ile n n e , M a r ie-A d elaïd e Esm elin,
/
ve u v e D ebart
B O I R O T , a n c ie n ju r is c o n s u lt e .
H U G U E T , avoué.
A C L E RM O N T , de l'imprimerie de L andriot, imprimeur de la Prélecture.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esmelin, René. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Huguet
Subject
The topic of the resource
traités de familles
successions
émigrés
inventaires
arbitrages
coutume du Bourbonnais
conseils de famille
partage
experts
Description
An account of the resource
Mémoire pour René Esmelin, Gilbert Esmelin-Deuxaigues, Claude-Amable Lapelin, et Marie-Magdeleine Esmelin, son épouse ; Jean-François Lagarde-Delavilenne, et Thérèse Esmelin, son épouse ; Marie-Adélaïde Esmelin, veuve Debard, intimés ; contre Geneviève Esmelin, veuve d'Amable Dechamps, ex-religieuse, appelante ; en présence de Procule Esmelin, ex-religieuse ; et encore en présence de Jacques-Marie-Pierre Loisel-Guillois, tuteur de ses enfans, héritiers d'Agnès Esmelin, leur aïeule maternelle, aussi intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1756-Circa 1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
33 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0544
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Moulins (03190)
Paris (75056)
Château-Thierry (02168)
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Successions
traités de familles
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PDF Text
Text
M EM OIRE
P OUR
Sieurs Jean-François D E L S O L aîné, habitant
de la ville d' Aurillac, et Gabriel-Barthélemy
D E L S O L - V O L P IL H A C
habitant de la
ville de Paris.
C O N T R E
Dame Jeanne - Marie D E L S O L ,
Vigier-D orcet.
veuve
En présence du sieur D E S P R A T S ., habitant
de la ville d’Aurillac.
L
A
dam e V i g i e r - D o r c e t ,
propriétaire sous une condition
résolutoire, d 'u ne fortune très-considérable, traduit aujourd’hui
ses freres devan t les T r ib u n a u x , et les oblige à p r o u v e r , a v a n t
l’événement de la condition; qu’ils ont un droit incontestable,
A
�si cette condition se purifie, aux Liens que le sieur Delsol,'
leur p è r e , lui a donné par le contrat de son mariage , avec
stipulation de retour, en cas qn'elle mourût sans enfans, ou_ses
eiifans sans descendans.
Cette dem ande prém aturée, dont les annales de la juris
prudence n’offrent aucun exemple , a sa source dans l’éloignement où l’on a toujours tenu la dame Dorcet de sa famille , et
dans l’impatience où sont les personnes qui l’entourent, de s’as
surer , par des voies indirectes , avant son décès , un patrimoine
que les liens du sang , l’ordre établi par les lois et le vœu de
la nature lui prescrivaient de conserver intact a ses proches.
Les premières règles-du d ro it, les maximes de la jurispru
dence , sur la stabilité de laquelle portent l’ordre public et la
tranquillité des citoyens, les décisions de tous les auteurs , ré
sistent avec tant de force et de clarté aux volontés de la dame
D o rce t, que tout esprit raisonnable n’hésitera pas à prononcer
en faveur des sieurs Delsol.
Cette manière d’envisager une cau se, cette précision qui en
écarte tout ce qui y est étranger, l’babitude de ne voir qu’avec
les yeu x de la l o i , de ne parler et de ne juger que comme
elle , sont ordinairement le partage des Magistrats et des Juris
consultes. Le Public, aussi juste sans doute, mais nécessairement
moins éclairé , a souvent des opinions qui l’entraînent, des
préjugés qui le subjuguent ; les égards qui lui sont dûs exigent,
dans des affaires d’une importance aussi majeure que celle qu’on
v a faire connaître , une discussion détaillée , sans laquelle la
vérité ne pourrait percer jusqu’à lui.
Les sieurs Delsol n’ont besoin, pour dissiper toutes les illusions,
que de rendre compte des dispositions du père com m un, et
d’observer que , dans tous les actes* l’intention où il était de
conserver à sa famille une fortune qu’il avait acquise en grande
p a rtie , se manifeste ouvertem ent, et perce même dans une
foule de circonstances dont il est inutile de rendre compte
pour le moment.
�m
■’
'FAIT.
•■
Des deux mariages du sieur Delsol étaient issus plusieurs
enfans.
/
La demoiselle Marie D elso l, aujourd’hui veuve D orcet, fut
l’unique fruit de son premier mariage avec la demoiselle Thomas.
■ Le 2 Juin 1760 , la demoiselle Delsol contracta mariage avec
le sieur V ig ie r-D o rce t, receveur des tailles de l’élection de
Mauriac.
L e sieur V ig ie r épousait la iille d’un homme qui avait acquis
ùne fortune immense ; aussi les libéralités qu’il lit en sa faveur
répondirent-elles à la réputation dont il jouissait.
Il lui donna d’abord, par donation entre-vif, en propriété
et jouissance, la terre du Claux et une somme de 10,000liv.
et par une seconde disposition, il s’engageait de 11e point ins
tituer d’autre lieritière qu’elle.
Mais il porta en même tems ses vues sur sa postérité ; il
prévit le cas où sa lille n’aurait pas d’enfans , et celui où ses
enfans mourraient sans descendans, et dans ces deux hypo
thèses , il apposa à ses libéralités une clause de retour qu’il est
essentiel de mettre sous les yeu x des M agistrats, avec l’ensemble
de la clause qui renferme toutes ses dispositions.
» Ledit S .r Delsol ayant le mariage pour a g réab le, et ayant for>» mé la demande en délaissement, aux requêtes du palais à Paris,'
» de la terre et seigneurie du Claux et autres biens situés en
« cette province d’A u v e rg n e , dépendans de la succession de
» défunt sieur de Fortisson , et par lui abandonnés à ses créan» cie rs, faute de paiement des sommes dues au sieur D elsol,
» comme subrogé au lieu et place du marquis de Montlezun et
» de la dame de Fortisson, son épouse ; et cette demande en
» délaissement venant à lui être a d ju g ée, donne, audit c a s ,
» par donation entre-vif pure et simple , à la demoiselle Delsol,
» sa fille , ci-présente et acceptante , et autorisée, en tant que
» de besoin, par ledit sieur de Y i g ie r , son futur ép o u x, par
A 2i
�( 4 )
» avancem ent d’iioirie , le domaine , terre et seigneurie du
» C la u x , paroisse de Naucelles , en quoi que ladite terre et
j> domaine du Claux puissent consister, aux mêmes charges et
» conditions que le délaissement lui en sera fait et adju gé,
» conformément à la demande qu’il a formée aux requêtes du
» p a la is, sous la réserve des autrçs biens dont la demande a
» été formée par la même requête ; et au cas où ladite demande
» en délaissement desdits Liens ne lui serait pas ad ju gée, ledit
» sieur Delsol, pour dédommager sadite fille dudit domaine et terre
» du C la u x , lui donne et délaisse toutes les créances qui lui
» sont dues sur lesdits biens . en capital et accessoires, avec
» pouvoir audit sieur futur époux d’en exiger le paiem ent, et
» d’en fournir toutes quittances et décharges valables, à la charge
» par lai de le reconnaître, comme il s’y o b lig e, sur tous et
» clia cu n s ses biens présens et à v e n ir , pour rendre et restituer
» le tout à qui de di’oit appartiendra, le cas de restitution arrivant.
» Ledit sieur Delsol a aussi donné, par même donation entre» v i f , à ladite demoiselle D elsol, sa fille, acceptante et auto» risée comme dessus , la somme de 10,000 liv . , qu’il a tout
» présentement comptée et délivrée audit sieur de V ig ier ,
» futur époux , lequel comme content, en a quitté et quitte
» ledit sieur D elsol, et a reconnu ladite somme sur tous ses
y biens et ceux de la dame de Moissier sa mère , présens et à
» v e n ir , pour la rendre et restituer, le cas de restitution arri» v a n t, à qui il appartiendra.
» Et à l’égard du surplus des autres biens qui se trouve* ront rester audit sieur Delsol lors de son décès , icelui a
» promis de n'instituer d'autre héritière que ladite demoiselle
» D elsol, sa f i l l e , sous la. réserve de l’usufruit de tous lesdits
1» biens institués , et de pouvoir vendre et engager lesdits
>» b ien s, ainsi qu’il trouvera à propos , tant à la vie qu’à la
» mort, et encore de pouvoir disposer d’une somme de 10,0001.,
» et n’en d isp o san t p a s , ladite réserve tournera au proiit d<? '
» sadite fille,
�( 5 )
» Et enfin, à la charge de payer à la demoiselle L a g a rd e ,
» sa belle-m ère , au cas où elle survive audit sieur B e ls o l, une
» pension annuelle et viagère de 600 l i v . , payable de six en
» six m ois, et d’avance ; et au cas ou ladite demoiselle D e lso l,
» future épouse, viendrait à décé.der sans enfa n s, ou ses enfans
» sans descendons, ou sans disposer valablement, ledit sieur
d Delsol se réserve expressément le droit de réversion et de retour,
» tant des biens donnés que réservés, sans qu’il puisse êtva
» dérogé, par sa dite fille , future épouse , audit droit dô
» réversion, par aucune disposition ni autres actes à ce contraires*
L e sieur D elso l, donateur, qui avait passé à de secondes
noces avec la demoiselle Dubois de Fontenilles , est décédé en
1780, laissant plusieurs enfans de ce mariage.
Peu de jours avant son décès , il avait fait un testament dans
lequel il instituait son fils aîné , et successivement ses autres
enfans , par ordre de primogéniture , ses héritiers universels ,
voulant expressément q u e, dans le cas où la dame Jeanne-Maria
D e lso l, épouse du sieur de V ig ier , viendrait à décéder sans enfa n s ou descendons , son héritier recueille et profite du droit de
réversion stipulé par le testateur dans le contrat de mariage da
sa fille avec le dit sieur de Vigier, etc.
Ce testam ent, qui fut déclaré nul pour vice de forme seu
lem ent , expliquerait suffisamment, s’il en était besoin , les
intentions du sieur Delsol; il y manifeste formellement la volonté
de transmettre à ses enfans , en vertu de la clause du retour
qu’il s’était réservé , la condition a rriv a n t, les biens qu’il avait
donnés à sa fille du premier lit. Cette réflexion , qu’on pou rrait
regarder peut-être comme indifférente , est c e p e n d a n t trèsim p o rta n te , ainsi que les sieurs Delsol le dém ontreront dans
le cours de leurs moyens.
Q uoiquil en soit, après le décès du père commun , la dame
D o rcet, en sa qualité de donataire un iverselle, s est mise en
possession d’une fortune qu’on peut évalu er, sans exagération,
�( 6 )
à, tin million , 'valeur de ce tems ; ( l ’actif mobilier'montait- à
plus de 709200 liv. )
.
• *.-c
. La majeure partie de cette fortune a été engloutie en peu
d’années. L a dame D o rcet, après avoir épuisé les créances
mobilières, a vendu tôus les immeubles qu’elle a trouvés à vendre*
et cependant elle n’ignorait pas que son père l’avait grevée d’un
droit de retour transmissible à ses héritiers : elle n’ignorait pas que
le donataire, possédant à charge d’un retour conventionnel, ne
pouvait disposer des biens donnés, au préjudice du droit de
retour; m ais, quoique devenue veu ve depuis 1785, quoiqu’elle
soit dans un âge très-avance , au lieu de jouir tranquillement
des débris d’un patrimoine im m ense, pour cette p ro v in ce,
elle a manifesté ouvertement la volonté de faire passer dans
des mains étrangères, des biens que les lois lui commandaient
de co n s e r v e r dans sa famille. E lle 'a vendu au sieur Desprats,
par acte du i 5 A v ril 1806, un pré appelé de Concourt, situé
dans les environs d A u rillac, moyennant le prix et sommé de
¡quarante et quelques mille francs.
L e sieur Desprats n’a pas été aussi confiant que les autres
¡acquéreurs de la dame Dorcet; il paraît, qu’ayant eu connaissance
du contrat de mariage du 2 Juin 1760, et de la clause particulière
du retour que le sieur Delsol père s’était réservé, il a refusé de
payer le prix de l’acquisition qu’il avait faite, à moins que la
dame Dorcet ne lui fournît caution, et il a , en effet, m otivé
son refus , sur ce que la dame Dorcet ne possédait le pré d<3
Cancourt, qu’en vertu des dispositions que le sieur Delsol avait
faites, dans son contrat de m ariage, avecjle sieur D orcet; que
d’après ces dispositions, elle n’avait pas une pleine et entière
p rop riété, mais seulement une propriété conditionnelle et réso
luble , la condition arrivant, parce que feu sieur Delsol s’était
réservé le droit de retour, dans le cas ou elle mourrait sans
enfans, ou scs enfans sans descendans, en lui interdisant toutes
dispositions ; que ce droit subsistait malgré son prédécès , en
faveur de ses autres enfans, d’où il suivait que le sieur Desprats
�était en danger cTéviction, et partant fondé à faire résoudre la
v e n te , ou à ne payer que sous caution.
T el fut le langage que tint le sieur Desprats à la dame D orcet,’
lorqu’elle voulut obtenir le paiement du prix d e là vente.
L a dame D o rcet, offensée d ’un refus aussi extraordinaire,
a voulu en rendre les sieurs Delsol , ses frères, responsables :
et comme ils sont appelés par les liens du sang à recueillir les
biens sujets au droit de retour, après son d écès, elle les a
traduits devant vous, en même tenis que le sieur Desprats; ce
d ern ier, pour voir ordonner l’exécution de l’acte de vente du
pré de C an court ;
Et les sieurs D elso l, pour voir dire que la clause de son
contrat de mariage avec le sieur Dorcet, en date du 2 Juin
1760, relative au droit de retour qui y est stipulé, est éteinte
par le prédécès du sieur Delsol p è r e , ou que ce droit a été
recueilli par elle , en sa qualité d’héritière instituée, et, dans
aucun cas, ne pouvait l'empêcher de disposer; que d’ailleurs ce
droit de retour était une substitution fidci-commissaire, abolie
par les lois des 25 Octobre et 14 Novembre 1792; qu’ain si,
sous tous les rapports, la clause était caduque et nulle.
Les sieurs Delsol, voulant rester étrangers aux démêlés survenus
entre Desprats et leur sœur, avaient d’abord formé la résolution
de ne pas discuter, du vivan t de la dame D orcet, un droit qui
n’est pas encore ouvert; aussi opposèrent-ils, contre leur mise
en cause, une exception aussi simple que péremptoire ; ils dirent
que la stipulation dont il s’agit, n’ était qu’une clause condition
nelle , dans le cas où leur sœur viendrait à décéder sans enfans,
et que, jusqu’à ce que cette condition fût accom plie, ils ne
pouvaient avoir qu’une simple espérance, mais non pas UT1
droit ouvert,* qu’ils ne pouvaient exercer aucune action, puis
que leur droit n’était pas ouvert ; qu’ils ne pouvaient non plus
renoncer a ce droit , puisque toutes les lois défendent de
renoncer, ou se départir des espérances acquises, lorsque les
droits ne.sont pas encore ouverts; qu’au surplus, la renonciation
�.
( 8 )
serait encore illusoire , puisque , dans le cas ou ils viendraient
à prédécéder leur sœur, cette espérance serait transmise à leurs
enlans , indépendamment de leur volonté et de tout acte qu’ils
pourraient consentir ; qu’en conséquence , ils ne pouvaient
<]¿fendre à l’action qu’on[intentait contr’eux, et qui était prématurée,
mais qu’ils se réservaient de poursuivre tous les elîèts de là
stipulation qui pourraient tourner en leur la veu r, lorsque les
conventions insérées dans ladite stipulation seraient accomplies )
et que leurs droits seraient ouverts.
Il était donc Lien évident qu’aucun Tribunal, où la cause eût
été discutée, ne pouvait forcer les sieurs Delsol à s’expliquer
sur les prétentions qu’on leur supposait, comme héritiers naturels de leur p è r e , à un droit non encore ouvert.
Mais ils n’opposaient cette exception que pour l'honneur des
r è g le s ,
pour ne pas plaider avec leur sœ ur, et pour son seul
in térêt, car ils ne peuvent être effrayés sur l’événement d’une
cause, jugée d’avance en leur faveur, par les lois les plus
Tonnelles, par les décisions les plus respectables. A u ssi, vont*ls proposer avec la plus aveugle confiance, les moyens qui
doivent faire proscrire une prétention qui choque ouvertement
les principes généraux sur la transmission de toutes les stipula
tions conditionnelles en gén éral, les lois et les opinions des
auteurs, la jurisprudence unanime sur la transmission du droit
de retour conventionnel, en particulier; qui dénature cette espèce
de stipulation , jusqu’à lui supposer des effets diamétralement
opposés à ceux qu’elle produit dans son exécution.
MOYENS.
Les sieurs Delsol vont donc établir, en suivant le plan que
paraît avoir adopté la dame D o rce t, i.° qu’en p rin cipe, la
stipulation du droit de retour, faite par le donateur, au cas où
le donataire décéderait sans enfans, ou ses enfans sans descen
d a is , est, de sa nature, transmissible aux héritiers du stipulant,
nonobstant
�( 9 )
>
nonobstant le décès du donateur avant le donataire; qu'ainsi/
dans l’espèce particulière de la cause , la dame Dorcet n’ayant
pas d’en fans, les sieurs D elsol, héritiers naturels du donateur,
ont été subrogés en son lieu et p la c e , et ont continué en leur
personne, la saisine dont il était revêtu ;
2.° Que les lois nouvelles abolitives des substitutions, n’ont
pas atteint le droit de retour t qui n’a aucune ressemblance avec
une substitution , soit dans sa nature , soit dans son caractère,
soit dans ses effets-
3 .° Que la qualité (l’héritière instituée de son p è r e , n’a pas
donné à la dame Dorcet le droit de recueillir , à ce titre , l’efièt
d’une stipulation faite contr’elle.
4 .0 Et enfin, qu’en aucun c a s, elle n’a pas le droit de dis
poser des objets soumis au droit de retour.
I.re
L a première proposition ne présente , les sieurs Delsol ne
craignent pas de le dire , aucune difficulté.
Il n’en est pas de la réversion conventionnelle comme de la
réversion légale ; dans celle-ci, c’est la loi qui vient au secours
d’un père qui a négligé de stipuler le retour de ce qu'il a donné ;
elle ne veut pas qu’il souffre à-la-fois une double p e rte , celle
de sa fille et celle du bien qu’il lui avait donné : Ne et Jilicc
annssœ et dotis damnum seniiret. Tout est personnel dans le
m otif de la loi ; elle n’a que le père seul en vue. A in s i, lorsque
1 ordre de la nature n’a point été troublé, que le père est mort
avant la fille, quand, par la suite, celle-ci mourrait sans enfans , la réversion légale ne s’étend pas aux héritiers du père.
Mais lorsqu’il s’agit d’une stipulation de réversion, on doit,
se decider par d autres règles. Il est de principe, que le droit
de retour stipulé par le donateur, même pour lui seul, se transïUCt
ses iieiit,içrs ; Içs héritiers n’ont pas besoin de la vocation
P roposition
�( 10 )
de l’homme pour profiter des droits dont leur auteur est décédé
saisi ; ils n’ont besoin que de celle de la loi qui les saisit de tous
les droits du défunt, qui les subroge à sa saisine , en la conti
nuant en leur personne.
Il leur suffit donc que celui auquel ils sont appelés à succéder
ait été vraim ent saisi du droit qu’ils réclam ent, et que ce droit
ait fait partie de ses biens.
O r, Jes contrats, même conditionnels, saisissent toujours à
l’instant m êm e, sans attendre l’événement de la condition; les
actions qui en résultent, quoique non encoi’e ouvertes , sont in
bonis du stipulant. Contractus et si concütionalis , tamen ex prœr
senti vires accipit, dit Vinnius. In contraclibus , id tempus spectatur quo contrahimus, dit la loi 18, dig. de verb. oblig.
De l à , cette règle générale qu’on trouve écrite dans tous les
livres élémentaires , et notamment dans les Instituts : que les
stipulations conditionnellès se transmettent aux héritiers, quoique
le stipulant soit décédé avant l’événement de la condition, quoi
que l’expression n’en soit pas dans l’a c te , par la raison qu’on
11’est jamais censé stipuler pour soi uniquement, mais aussi pour
ses successeurs. E x stipulatione conditionali tantum spes est debiturn ir i, camque ipsam spem in hœredem transmittimus, si priùs
cjuàni conditio extet , mors nobis contingat. L iv . 3 , tit 16 ,
p. 4. Cum qui sub aliquâ conditione stipulatus fu e rit, posteà,
existente conditione, hœres ejus agerepotest: même liv, tit. 20, § 24.
Qui paciscitur sibi hccredi que suo pacisci intelligitur, dit aussi
une règle de droit bien connue.
Et cette rè g le , qui est posée aussi par le Gode N ap o léo n ,’
s’ applique aux stipulations conditionnelles , comme à toutes le§
autres : les lois sont expresses. Envain voudrait-on apporter
quelque e x c e p tio n à cette règle ; elles décident qu’on doit n’en
admettre aucune , et par conséquent que les stipulations condi
tionnelles se transmettent, soit qu’011 ait fait mention des héri
tiers, soit qu’on n’en ait pas fait mention : generaliter sancinuis
omnem s tip u la tioncm, sWc in dando, sivc infacicndo, stvc mixte.\
�( 11 }
ex dànda et faclcndo viveniatur, et ad liŒTedes et contrh hceredes
transmit t i , sive specialis liæredum liât mentio, sive non : 1. i3,
cod. de contract et comm. stipul.
On ne peut donc* pas prétendre, d’ après un texte aussi général,
aussi absolu, que le stipulant, qui n’a voulu parler que de luimême , qui n’a pas nommé ses héritiers , ait entendu restreindre
la stipulation à sa personne ; car la loi Utrum , dig. de pactis ,
répond que la stipulation n’en est pas moins réelle. Plerumque
enim , ut Pedins a ït , persona pacto inseritur, non est personale
p actu m fiat, sed ut démonstretur cum quo pactum factum est.
Charondas , dans ses pandectes , nous donne ce principe
comme une véritable règle du droit français , q u il a placé
_ parmi les autres règles, en ces ternies :
» A u x contrats, on regarde le tems qu’on contracte ».
» Cette rè g le , dit Charondas , appartient principalement aux
contrats conditionnels, car de ceux qui sont purement faits,
» n’y a doute ».
» Tout contrat conditionnel, si au tems que nous contrac» tons, il est valable , a effet et exécution quand la condition
» est ad ven u e, encore que celui qui a promis soit mort............
» Aussi /’héritier du stipulâteur décédé auparavant l’événem ent
» de la condition, peut agir incontinent ex conditionali, parce
» que pendant la condition , celui qui a stipulé est réputé avoir
y> été créancier ».
Il n’y a donc pas la moindre difficulté sur ce p rin cip e, qui_
ne s’applique pas seulement aux conditions stipulées dans les
contrats intéressés , mais aussi à celles qui sont renfermées dans
les contrats bienfaisans ; et pour l’établir, il s u f f i r a i t d ’observer
que llicard et une foule d’autres auteurs le d é cid e n t très-posi
tivem ent ; mais cette question est traitée par un des plus profonds
Jurisconsultes de nos jours , avec une profondeur remarquable.
)» I l est fau x, cli 1- i l, que les contrats intéresses soient les
seuls dans lesquels le stipulant est censé avoir parlé pour ses
héritiers la règle est générale pour toute espèce de contrais,
B3
�( "
5
puisque les lois n’ont fait aucune exception puis qu’au contraire
elles ont exclu toute exception par la généralité et l’universalité
absolue de leurs expressions : generalifer sancimus omnent
stipulationem................. iransmitti, sive specialis hœredum liât
inentio, sive non ».
» L e sens de la règle n’est pas précisément que nous sommes
présumés avoir pensé à nos héritiers et ayant-cause , et avoir
positivement voulu stipuler pour e u x , car il est Lien rare que
les contractans y pensent positivem ent, et on ne présume pas
ce qui arrive rarement. L e vrai sens de la réglé est seulement
que le stipulant qui n’a pas formellement restreint la stipulation a sa
personne , ne peut pas etre suppose avoir voulu exclure ses
héritiers. Or , cette présom ption, nécessairement applicable
ii toute espèce de stipulation, suffit toute seu le, non pour en
opérer la transmission, car c’ est la saisine seule qui l’opère ,
mais pour écarter les obstacles qui pouiTaient l’arrêter ou la
rendre inefficace ».
« Que le contrat soit intéressé ou bienfaisant, il n’im porte,
puisque dans l’un et dans l’autre, la saisine y a lieu de plein
droit; il faut bien qu’elle soit continuée dans la personne des
transmissionnaires. On ne peut pas les supposer exclus par le
stipulant, lorsque celui-ci n’a pas prononcé leur exclusion ; o r ,
s’ils ne sont pas exclu s, il est dans l’ordre des choses que,
comme successeurs universels ou singuliers du transmettant, ils
succedent a la saisine commencée en sa personne, comme à
tous ses autres droits, quand même il n’aurait point du tout
pensé à eux ».
« En d e u x mots , toute stipulation conditionnelle est nécessai
rement transmissible à 1 héritier du stipulant, si la condition peut
encore recevoir son accomplissement, parce qu’au m oyen de
la saisine attachée aux actes entre-vifs , le droit qui en résulte
a fait partie des biens du transm ettant, dès le tems même de
l’acle. 11 n’est pas nécessaire, pour cela , de donner à la clause
aucune extension, parce que c’est la loi seule, la force de la saisine,
�( >3 )
et non pas l’intention positive de transmettre, qui opère la
transmission. Il est vrai que la saisine elle-même dépend, en
quelque sorte , de l’intention du stipulant ; mais c’est seulement
en ce sens qu’elle ne s’applique qu’aux droits que les parties
ont eu en v u e , et pour les cas qu’elles ont exprimés ; du
reste, une fois que la condition prévue par les parties, est
a rriv é e , il devient constant que la saisine a eu lieu ab in itio,
et que la transmission s’en est su ivie, sans que les stipulans y
aient seulement pensé ».
Ainsi s’exprimait M. L ’-esparat, lors de l’arrêt célèbre de 1767,’
et l’on verra bientôt que sa doctrine prévalut sans aucune
difficulté.
Il ne peut donc pas s’élever aujourd’hui la moindre controverse
raisonnable sur ces principes appliqués, soit aux contrats inté
ressés , soit aux contrats bienfaisans.
Mais appliqués au droit de retour conventionnel, en particulier,
il y a , s’il est possible, bien moins de difficulté encore.
Deux fameuses lois romaines décident très-formellement la
question, en faveur des héritiers du stipulant, c’est la loi Caius
et la loi Avia.
L a loi Caius avait pour objet une dot donnée au mari par
l’aïeul maternel de la fem m e, et réversible à cette femme
en cas de divorce, intervenu sans sa faute; le divorce arriva.'
mais le donateur, qui s’était réservé le retour, était prédécédé:
nonobstant ce prédécès, le Jurisconsulte décide que les héritiers
du donateur doivent proiiter du reto u r, en qualité de transmissionnaires, comme aurait fait le donateur lui-même.
Respondi in persond quidem neptis videri inutiliter stipuhitioncm
esse conceptam , quoniàm açus malernus ci stipulalus proponitur;
quod cùm ùa est, hœredi stipulatoris, quandocumque divcrtcnt
niulicr, cictio compctcrc vidcluv.
L a loi ydvia n est pas moins expresse. L a question était de
savoir si le retour de la dot, n’ayant été r é se rv é que par un
simple p acte, et non par une stipulation en forme , il était
�( *4 )
transmissible aux héritiers du donateur ? La loi la résout en ces
termes :
A sia tua earinn qucc profil'nî tua in dotcm dédit, et si verborum
obligatio non intercessit, actionem ex Jide convention is ad te , si
hœres ex titisti, transmittere potuit. Voilà donc deux textes Lien*
précis , qui décident q u e l e retour conventionnel est transmissible
aux héritiers du donateur, quoique celui-ci soit décédé avant
l ’événement de la condition, sous laquelle il avait stipulé' le
retour à son profit.
Et ces décisions des lois romaines , sont devenues aussi celles
de tous les arrêts et de tous les auteurs, depuis les plus anciens
jusqu’aux plus modernes.
Papon, dans son recueil d’arrêts notables, au titre des dona
tions, art. 38 , dit qu’il a été jugé que « la retention faite par
un donateur, si le donataire meurt sans enfans, la chose
» donnée retournera au donateur, sans faire mention des siens,
» est réelle et non personnelle, par ainsi transmissible à l’héritier
» du donateur, s’il se trouve m ort, lorsque la condition d’icelle
» retention advient »;
M. M ayn ard , L iv . 8, Chap. 3 3 , dit que , par sentence de
la sénéchaussée de L au zerte, le retour stipulé par un oncle
donateur, au pays de Querci, pour le cas du décès de son neveu
donataire, sans enfans, ledit cas étant a rriv é , quoique après
le décès du donateur , fut jugé transmissible aux héritiers du
donateur, nonobstant le défaut de ce mot sien, ou autre équipollent.
M . M aynard ajoute que, sur l’appel de cette sentence, par arrêt
rendu à son rapport, au mois de Janvier 1674, conlirmatif de
la sentence, le retour fut adjugé aux héritiers du donateur.
Cette jurisprudence a été lixee irrévocablem ent par un arrêt
récent, qui a jugé en faveur des héritiers du donateur, contre
l’héritier de la donataire, par contrat de mariage.
Eu voici l’espèce , telle qu’elle est rapportée dans la dernière
collection de jurisprudence. V . Retour.
« L e sieur L h é ritier, par le contrat d.ç m ariage de demoiselle
�( '5 )
Marie Albertine-Racine , sa belle-nièce, avec le marquis de
R a v ig n a n , du 18 Mars 17 12 , lui avait donné 3o,ooo//, avec
la clause que ladite somme retournerait audit sieur Lheritier, au
cas de décès de la demoiselle future épouse, sans enfan s , et encore
qu'il y eût d&s enfans, et qu'ils vinssent à décéder avant leur majorité.
L e donateur est décédé en iy 3o ; le 20 Novembre 1764, la
demoiselle Racine , donataire , est décédée sans avoir laissé
d’cnfans, ni de son premier mariage avec le marquis de R avign an ,
* ni de son second mariage avec le comte de Dampus.
Après son décès, les enfans du donateur demandèrent au
marquis de Mesmes, donataire universel de la demoiselle Racine,
veu ve Dampus, la restitution des 3o, 000//, données p arleu r père,
conformément à la réserve stipulée p a rle contrat de 1712.
La cause portée au châtelet de Paris, il y intervint, le 29
Juillet 1766, sur les plaidoiries respectives des parties, pendant
cinq audiences, sentence par laquelle, attendu le décès de la demoi
selle Racine, veuve Dampus, sans enfans, le marquis de Mesmes
est condamné à restituer aux enfans du sieur Lhéritier, les 3o, 000,7
dont il avait stipulé la réversion. L e marquis de Mesmes interjeta
appel de la sentence du châtelet; mais par arrêt du mardi 17 Février
1767, rendu en la grand-chambre, conformément aux conclusions
de M. l’avocat-général, Barentin, la sentence fut unanimement
confirm ée, après des plaidoieries très-solennelles ».
« L ’appelant, dit l’additionnaire de Lebrun, invoquait en sa
faveur plusieurs lois m alentendues, un arrêt du 6 Mai 1614
rapporté par M ornac, ( où il s’agissait d’un retour stipulé par un
pere naturel, dotant sa fille qui laissa des enfans, au cas que celle-ci
décédât sans enfans); l’avis de Boucheul, de Bretonier sur Henrys,
et de Larouvière, en son traité du retour ;| mais M. L’esparrat,’
avocat des intimés héritiers du donateur, dans un mémoire où
il a traite a fond la matière , développa les lois , invoqua les
suffrages des plus savans auteurs et de la jurisprudence , et
éta b lit, sans réplique , que le droit de retour, ainsi que les
stipulations conditionnelles, se transmettent à l’héritier du stipu,-
�( 16 )
lant , nonobstant le prédécès de celui-ci ; que les actes entrevifs , même conditionnels, opèrent la saisine in instanti ; que
les conditions y ont un efïèt rétroactif; que , suivant la règle, le
mort saisit le vif, les héritiers succèdent à tous les droits dont
leur auteur est décédé saisi ; qu’ils n’en pourraient être p riv és,
que par une volonté expresse du stipulant, qui aurait fôrmellement
restreint la stipulation à sa personne; que c’est à celui qui les
prétend exclus, à p r o u v e r leur exclusion; que les conventions
sont toujours censées réelles ; que la personnalité ne s’y suppose
jamais,* q u elle doit être prouvée par des expressions qui la '
nécessitent ».
Cependant, comme le dit M . L ’esparat en rendant compte de
cet arrêt, la cause avait ete plaidée tant au châtelet qu’au
- parlem ent, par M. T ro n cliet, et c’était bien le cas de lui
appliquer ce que V irgile avait dit d’Hector: Si Pergama dextra
defendí potuissent, etiàm hác defensa fuissent ; mais malgré les
grands talens et les prodigieux efforts du défenseur, qui passait,
d ès-lors , à bien juste titre, pour un des plus profonds Juris
consultes de ce tem s, tous les Magistrats , ainsi -que l’avocatgénéral, Barentin, qui portait la parole, reconnurent facilem ent,
comme avaient fait les premiers Juges , que pour cette fo is,
M . Tronchet s’était trom pé; qu’en effet, la prétention de son
client qu’il avait défendu avec tant de z è le , était évidemment
subversive des principes gén éraux, sur la transmisión de toutes
stipulations conditionnelles ; qu’elle était contraire à toutes les
décisions des docteurs et des lo is, sur la transmission du retour
conventionnel en particu lier, et qu’eniin elle était également
contraire à-la jurisprudence établie par tous les jugemens rendus
sur cette question.
Si des arrêts on passe au suffrage des auteurs, on verra que
la question y est toujours décidée uniformément, en faveur des
transmissionriaircs , notamment lorsque le donateur, étant plus
âgé que le donataire, a cependant p réyu ? non-seulement le
décès
�( ' 7 ') '
décès du donateur sans enfans, mais encore le ‘décès de ses
enfans sans descendans.
» La réversion conventionnelle, Mit Lebrun, traité des succès» sions, L iv. i.,C h a p . 5 , Sect. 2, passe à nos héritiers, si nous ne
» l’avons limitée , ce qui se iait quelquefois , en 11e la stipulant (
qu’au cas du prédécès du donataire ; mais quand nous l’avons
» stipulée simplement, au cas du décès du donataire sans enfans,
» alors nous avons parlé pour nos héritiers ou ayant-cause ».
« Quant à la réversion conventionnelle, dit Lacombe , au mot» réversion, elle ne concerne pas moins les héritiers du donateur.
» qui l’a stipulée, que sa personne même. JSam plerumque tain
» Jiœredibus nostris quàm nobismetipsis caçemus. Loi 9, dig. deprob.
» A in s i, si un ascendant fait donation à son fils ou à sa lille ,
» à condition de réversion , si le donateur meurt sans enfans,
» les choses données passent aux héritiers du donateur prédécedé,
» si elle n’a été limitée ».
Suivant M. Henrys, quoiqu’en général l’ascendant donateur
qui se réserve le retour, soit censé le faire tant pour lui que
pour ses héritiers, cette présomption légale devient bien plus
forte encore , lorsque j e donateur a p r é v u , non-seulement le
décès du donataire sans enfans , mais encore le décès de ses
enfans sans descendans : « En e ife t, d it-il, quoique le père
» survivant , l’ordre de la nature en soit troublé, c’est pourtant
» chose assez commune; mais qu’un père pense survivre à sa
» iille et aux enfans quelle peut laisser; qu’il étende si loin
» sa pensée , c’est ce qu’on ne peut pas présumer. Donc, a jo u te * t-il, quand le père a stipulé que la dot serait r é v e r s ib le , si
* la lille décédait sans enfans , ou ses enfans sans enfans, il
» ne s’est pas persuadé que tout cela pût a rriv e r, lui v iv a n t,
» et par conséquent il a bien entendu que cette stipulation fût
» aussi bien profitable à ses héritiers qu’à lui-même ; autrement
» il n aurait pas eu une visée si longue; et s’il n’avait cru stipuler
» le retour que pour lu i, il en aurait restreint la condition
i et les termes ; il se serait contenté de parler du prédécès
�( .1 8 ,3
» de sa fille sans enfans, et il n’aurait pas ajouté : et de ses
» enfans sans enfans.
L ’opinion de cet auteur , qui marche toujours dans ses
décisions, à la lumière des vrais principes , mérite ici d’autant
plus de considération, qu’independamment de son mérite per
sonnel , il nous apprend lu i-m e m e qu il a d’abord balancé sur
la question ; mais c’est ce qui donne un plus grand poids à
sa décision. Un avis qui est le fruit d’une longue et mûre
réflexion, est bien plus respectable qu’un jugement précipité,
donné sur la première idée dont on est saisi.
A la vérité , B o u ch e u il dans son traité des conventions de
succéder, Bretonnier sur H enrys, et M.e L arouvière, avocat
au p a r le m e n t de Provence , paraissent etre d’un sentiment
co n tra ire ,' mais Boucheuil ne se décide" que d’après l’arrêt de
M o rn ac, qui n’a pas de rapport à l’espèce. Bretonuier a fondé
pareillement son sentiment sur l’arrêt de Mornac et sur celui
rapporté au journal du p alais, sous la date du 26 août 1682.
M a is, outre que Bretonnior n’a pas bien connu l’espèce et les
circonstances de cet a rrê t, puisqu’il dit que les Juges de Riom
avaient jugé contre la réversion, et que l’arrêt confirma leur
sentence, tandis que c’est précisément tout le contraire , les
Juges de Riom ayant ordonné la restitution en faveur du frère
donateur, cet arrêt n’a pas jugé la question agitée et résolue
par M. Ilenrys,
M. Henrys donnait son avis sur une question pareille à cello
qui nous occupe en ce moment : il se demandait si la stipulation
de réversion, en cas du décès du donataire sans enfans, ou
de ses enfans sans descendans, était transmissible aux héritiers
du donateur, au cas que celui-ci vint a prédécéder ses enfans,
et l’on vient de voir que sa décision ne laisse rien à désirer*
L ’arrêt de 1682 a jugé , mais n’a ]?as jugé antre chose, qu’un
frère ayant doté sa sœur, avec stipulation de retour, au cas
qu’elle mourût avant lu i, sans enfans, ne pouvait pas J'airo
uçage de cette clause , pour répéter la dot dans la succession
�( >9 )
du fils de la donataire, qui avait vécu six ans après elle /
parce que la condition sous laquelle le retour était stip u lé,
n’était pas a rriv é e , et que la donataire avait laissé un enfant
qui avait recueilli.
Ainsi donc , il faut écarter de la cause l’opinion de Bretonnier :
soit parce que c’est une opinion solitaii’e , qui a été proscrite par
tout ce qu’il y a de plus respectable en autorités , soit parce qu’elle
n’avait pas en vue la question de cette cause , et qu’en l’examinaut
de près , on voit qu’il a voulu dire uniquement qu’il ne faut
pas trop étendre les stipulations de retour, et qu’ainsi le retour
étant stipulé pour le décès du donataire sans enfans, il ne faut
pas l’étendrc au cas du décès de ses enfans sans enfans.
Par rapport à M .' Larouviere, on n’en parle i c i , que parce
que probablement la dame Dorcet voudra s’aider de son opinion;
mais il suffit, pour donner une idée du poids qu’elle m érite, de
dire, qu’il fut prouvé lors de l’arrêt de 1767; que les Jurisconsultes
même les plus m édiocres, ont reconnu très-facilement depuis
que cet auteur n’avait pas connu les premiers principes de la
matière , et qu’il n’avait pas entendu les auteurs par lui cités.
A in s i, il n’y a pas une seule l o i , pas un seul auteur, pas
un arrêt qui favorise la prétention de la dame Dorcet ; tout
co n co u rt pour établir la proposition des sieurs D elsol, que le
droit de retour, stipulé par leur père lors du mariage de la '
dame D o rcet, e s t, de sa nature , transmissible , le cas prévu
arrivant ,■il n’y a peut-être pas un seul point de droit sur lequel
les lois soient plus précises, les suffrages des auteurs plus unanimes,
et la jurisprudence plus ancienne, plus uniforme et plus con stan te.
L ’espèce particulière de cette cause facilite l’ap p lica tio n de
ces principes ; le sieur Delsol père a stipulé, lors du contrat
de mariage de sa fille avec le sieur D o rce t, le droit de retour
de tous les biens dont il la gratifiait, dans le cas où elle décé
derait sans enfans , ou ses enfans sans descendons. La dame
Dorcet n’a pas eu d’enfans de son mariage ; son âge la met
dans l'impuissance d’en avoir aujourd’h u i, quand elle passerait à
G 'Z
�( 20 )
de secondes noces ; ses frc re s, héritiers naturels du donateur?
doivent donc profiter, après son décès, des biens grevés du
droit de retou r, c ’est-à -d ire , de l’universalité des biens laissés
par le sieur Delsol à sa fille aînée.
L e sieur Delsol n’avait pas besoin, pour leur transmettre ce
droit , de stipuler expressément pour lui et pour les siens ,
puisqu’en p rin cip e, le droit de retour stipulé par le donateu^
se transmet toujours à ses héritiers.
L e redoublement seul de la clause , qui. est un m otif détermi
nant pour tous les auteurs, et notamment pour M. H en rys,
établirait clairement l ’intention du donateur, quand elle ne
serait pas m an ifeste d après les en constances de cette cause ;
d ’ a p r è s
c e l l e
surtout que , par son testament de l’année 1 7 8 0 ,
annullé pour vice de forme , cette clause de retour est renou
velée , le cas prévu par la stipulation arrivant.
I l n’y a donc plus de doute sur le m otif, sur l’objet de cette
stipulation ; c’était pour ses héritiers, et non pour l u i , que le
sieur D elsol, père commun, se réservait le droit de retour';
cette convention eût été fort inutile pour lu i, puisqu’il aurait
eu le droit de retour sans stipulation, en vertu des lois romaines I
qui régissaient notre p rovin ce, et par exprès , en vertu de lq.
loi Jure siiccursum.
C’est donc aux sieurs D elsol, transmissionnaires et ayant-cause
de leur p è re , que les biens sujets au droit de retour doivent
appartenir après le décès de la dame Dorcet.
Dira-t-on, comme on l’a annoncé, qu’en supposant, en thèse
gén érale, qu’un droit de retour conventionnel, soit de sa nature
transmissible , il faudrait, dans l’espèce particulière de cette
cause, restreindre l’application de ce principe aux objets com
posant la donation entrcrvifs, faite par contrat’ de mariage ;
mais qu’en ce qui concerne lp$ biens dont le sieur Delsol
gratifiait la dame D orcet, sa fille, a titre d’institution contrac
tuelle, cette institution n’ayant, de sa nature, effet qu’après le
décès de l’instituant, elle n’est pas susceptible de réversion à
son profit, et ù plus forte raison, au profit de scs héritiers.
�C elle objection peul paraître spécieuse au premier coup-d’œil ;
mais un moment d’attention suffit pour se convaincre qu’elle
n’est pas Solide.
I l est essentiel d’abord d’observer, d’après tous les auteurs, et
particulièrement d’après R icard , Furgole et Potliiér, que l’on
peut apposer un droit de retour à toute espèce de libéralités, et
par exprès, qu’on peut l’apposer à une institution contractuelle.
Ce principe ne peut éprouver aucune difficulté. Mais le droit
de retour, apposé à une institution, est-il de sa nature transmis
sible aux héritiers de l’instituant ?
L'affirmative de cet te question est également incontestable.
L ’institution contractuelle, est comme la donation entre-vifs, un
contrat, une obligation que contracte l’inlituant envers l’institué,
de lui laisser tous ses biens; elle ne diffère de la donation entre-vifs,
qu’en ce qu’elle est faite sous la condition particulière d elà survie
du donataire. Mais cette condition particulière n’empêche, pas
que l’instituant contractuel ne puisse faire résilier ou révoquer
la libéralité , si telle ou telle condition a r r iv e , n’importe en
quel tems , et que cependant elle puisse avoir jusques-hi tout
son e/Ièt,* en ce cas , les biens qui en sont l’objet, comme étant
retournés à la masse de l’hérédité et réunis au patrimoine du
donateur, appartiennent à ceux q u i, lors de l’arrivée de la
condition résolutoire , se trouvent représenter le donateur ou
instituant ; ces représentons ne reprennent pas les biens eu
question , en qualité de substitués au donataire ; c’est le donateur
lui-même, toujours existant dans leur personne, qui reprend sa
chose, comme ayant cessé d’appartenir à l’institué, au moyeu
de la résolution de l’institution qui a eu lieu par 1 événem ent,
comme le donateur ou ses représentons reprennent la choçe
donnée, lorsqu’il y a survenance d’enfant, même posthume,,
quoique le posthume ne soit né que depuis son décès.
Ainsi donc, que le sieur Delsol donateur fût ou non desaisi,
an moyen de l’institution contractuelle qu’il f a i s a i t en faveur
tle sa ¿Ile, sous une condition résolutoire, cela serait fort iudij>
�( 22 )
ïl.e
J 'K O P O S IT IO :*.
férent, et la résolution de cette convention serait évidemment
opérée , le cas arrivant.
En un m ot, le retour qui s’est fait ex causa antiquâ et inherenle
contractui donationis, doit avoir son eïïèt, tant pour l’institution
que pour la donation; la condition, lorsqu’elle est accom plie,
a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement a été contracté ;
les effets de la stipulation, le cas arrivant, sont donc transmissibles,
soit que la condition soit apposée a une institution, soit qu’il
s’agisse d ’une donation entre-vifs, pure et simple.
Mais le droit de retour n’a-t-il pas éle aboli par les lois de
la révolution, et notamment par les lois des 25 Octobre et 14
Novem bre 1792 ?
C ’est la seco n d e question que présente cette cause, question,
qui véritablement 11’en est pas une.
Et d’ab o rd , deux lois de la révolution se sont occupées du
droit de retour; la prem ière, c’est la loi du 17 Nivôse an 2}
la deuxièm e, c’est la loi du 22 Ventôse suivant.
Mais que portent ces lois ?
L a loi du 17 Nivôse an 2 , a posé dans le titre intitulé de
la succession des ascendans , des règles pour établir q u e,
dans tous les cas , les ascendans étaient toujours exclus par
les héritiers collatéraux qui descendaient d’éux ou d’autres
ascendans au même degré ; et c’est après avoir développé
ces règles dans quelques articles , que la loi dit à l’article 74 :
» Les biens donnés par les ascendans à leurs descendans avec
» stipulation de retour, ne sont pas compris dans les règles ci5) dessus , ils ne font pas partie de la succession des descendans
» tant qu’il y a b RU au droit de retour ».
Cet article n introduit donc aucun changement dans l’ancienne
législation, relative au droit de retour ; il déclare même que
cette législation doit toujours être suivie, pour tout ce qui s’était
fait sous son empire , car c’est le déclarer positivem ent, que
¿ ’affranchir le droit de retour des règles nouvelles que la loi
établissait, et de décider que tant qu’il y a y ait lieu à ce droit,
�(» 3 )
les Liens donnés ne faisaient pas partie de la succesion des
descendans.
»
»
»
»
»
»
A l’égard de la loi du 23 Ventôse , l’article 5 porte « qu’il
n’est rien innové par l’art. 74 du décret du 17 Nivôse , à
l’égard des donations antérieures, au 5 Rrumaire, aux effets
du droit de retour lég a l, dans les pays et pour les cas où ce
droit avait lieu ; que néanmoins il 11e pourrait être exercé
sur les Liens du donataire acquis à la République, par droit
de confiscation, ou autrement ».
Cet article conserve les effets du retour lé g a l, pour tous les
pays où il avait lieu , relativement aux donations antérieures
au 5 Brum aire, comme l’article 74 de la loi du 17 Nivose ,
conserve l'effet du droit de retour conventionnel, relative
ment aux mêmes actes.
On ne peut donc pas dire que l’une ou l’autre des lois qui
viennent d ’être citées , ait apporté le moindre changement au
droit de retour, consacré jusqu’alors par l’ancienne législation,
ni qu’elle lui ait porté la moindre atteinte. Il ne faut donc
pas parler de ces deux lois, qu’on invoqua sans aucun succès,
lors de l’arrêt célèbre rendu dans l’affaire de la dame de
N availles, ,dont on parlera tout à l’heure.
Mais peut-on opposer avec plus de succès les lois de 1792
qui ont aboli les substitutions ?
Remarquons d’abord , que les lois du 17 Nivôse et du 23
Ventôse an 2 , postérieures aux lois de 1792, abolitives des
substitutions, ont con servé, comme nous, venons de l’établir,
les effets des stipulations de retour, et ceux du retour lé g a l,
dans les pays et pour les cas où ce droit avait lieu , à 1 égard
des donations antérieures au 5 Brumaire an 2 , et c’est deju
une preuve positive que. les lois,- qui ont aboli les substitutions,
n’avaient pas eu en vue les stipulations de reLour.
Mais peut-on même trouver quelque ressemblance entre uno
�( 24 )
stipulation, de retour et une substitution, soit dans la nature, soit
dans le caractère'et les effets de ces deux espèces d’actes ?
Quest - c e , d’abord, qu’ une substitution?
« C’est une disposition par laquelle le donataire, l’iiéritier
» institué ou le légataire , est chargé de. conserver et de
rendre à un tiers ».
Telle est la définition qu’en donne le code c iv il, à l’art. 896,
et c ’est aussi celle des anciennes lois et des auteurs qui ont
traité de cette matière.
« Il y a substitution , dit M. Merlin , toutes les fois que
dans un acte de libéralité, la personne gratifiée est chargée de
rendre à une personne gratifiée en second ordre, la chose qui
lui a été donnée ; il y a substitution, toutes les fois qu’il y a
deux donataires ou légataires apelés successivem ent, l’un qui
reçoit directement de la main du donateur, l’autre qui ne reçoit
de la main du donateur, que par le canal du premier donataire;
il y a substitution, toutes les fois que le donataire direct sert en
quelque sorte d’entrepôt, pour faire arriver l’objet de la donation
-au donataire substitué; en un m o t, il y a substitutions toutes
les fois que le donateur a voulu que le second donataire n’ari’ivât
à la chose donnée, qu’après qu’elle aurait été possédée , pendant
1111 teins quelconque, par le prem ier; dès que ce vœu p araît, il
y a charge de rendre , et. par conséquent substitution Jidei
commissaire ».
Ainsi , d’après cette doctrine , dans une substitution Jidei
commissaire, il entre nécessairement trois personnes; celle qui
donne, celle qui est gratifiés à la charge de rendre, et celle
à qui l’on doit rendre.
L a substitution fidei commissaire renferme donc, à proprement
parler, deux donations; lu n e au profit de celui qui doit rendre,
l ’autre au profit de celui à qui doit être rendu l’objet donné.
Mais le second donataire 11e devant recueillir qu’après le
prem ier, ces donations doivent être successives. « Il fau t, dit
l'eregrinus ( de Jidei commissionis, art. 17 , n,° x. ) que les deux
gratifiés
�( 25 )
gratifiés soient appelés à recueillir successivement et non pas
concurremment, ordi-nesuccess'wo et non conjunclivo seusimultaneo».
Dans le droit de retour, au contraire, au lieu que le donateur
soit chargé de rendre à des tiers, c’est, le donateur lui-même qui,
en supposant la condition apposée par le contrat, intervenue,
reprend lui-même la chose qu’il avait donnée, et en redevient
le propriétaire , comme il l’était avant la donation, et avec
les mêmes droits qu’il avait avant.
A u ssi, M. Merlin prévoit-il cette question dans le répertoire
de jurisprudence ,
Substitution, et il la résout en peu de mots.
« La clause de retour au profit du donateur, constitue-t-elle
un fidci commis ? N on, parce q u ’ on n ’y trouve point une cliai’ge
de rendre à un tiers, gratifié en second ordre; on ne peut donc
la considérer que comme une donation à tem s, et c’est ainsi
que les lois la caractérisent.
A la vérité, le donateur meurt quelquefois avant l’événement
de la condition , et ce sont ses héritiers q u i, une fois que la
condition est arrivée, prennent sa place, et se saisissent des choses
qui étaient l’objet de sa donation; mais les héritiers du donateur
ne sont pas des tiers , ils ne sont pas gratifiés en second ordre ; ce
sont des représentons du donateur, qui continuent, pour ainsi
dire, sa personne, deviennent les maîtres de toutes les propriétés
qui lui appartenaient, exercent tous les droits qui étaient en sa
puissance, sont soumis aux mêmes charges auxquelles il était
o b lig é, en un m ot, sont absolument à sa p la c e , et sont, en
quelque sorte , ce qu’il était lui-même.
C ’est là la décision des lois, et c’était même une règle de droit.
Jlœredcm ejusdem potestatis jurisque esse cujus Jiat defunctus
constat, dit la loi 69, dig. de regulis juris.
L a loi 12, Cod. de acquir. velamitt. hcered. dit aussi: hœrcsin oninc
jus mortui non tantum in singularum rerum dominium succedit.
Ce principe est écrit aussi dans tous les auteurs.
« L ’héritier succédant aux biens et aux c h a r g e s , dit Dom at,
se met en la place du défunt, et sa condition est
raême »,
�. {aG 5
Les héritiers diffèrent même si peu du défunt, en matière de
stipulations , et sont, au contraire , tellement identifiés avec lu i,
qu’ils entrent par la force de la loi dans ces stipulations, pour
ainsi d ire , malgré lui ; qu’ils y entrent sans qu’il les nom m e,
sans qu’il s’occupe de leur intérêt, sans qu’il le prévoie , et qu’il
suffit qu’il ait stipulé pour lu i, et qu’il n’ait pas formellement
déclaré qu’il n’entendait stipuler, que pour lui-m êm e, pour qu’il
ait dans le même tein s, et par cela seu l, stipulé pour eux.
Les héritiers ne sont donc pas des tiers à l’égard du défunt ; ils
sont le défunt lui-m êm e, et dès - lors la stipulation de retour
dont ils sont dans le cas de jirofiter, n’a rien de commun avec
les substitutions qui ne regardaient jamais que des tiers.
C e p e n d a n t , ce sont les substitutions ét uniquement les substi
tutions, que les lois de 1792 ont entendu abolir, c’ est-à-dire, les
actes connus pour te ls , les dispositions qui portent ce titre , et
non pas des actes o ù , par des interprétations subtiles , on
prétendrait trouver un caractère ou un résultat analogue à celui
des substitutions , ce qui n’a pas été l’intention de ces lois.
Deux espèces de motifs ont déterminé les Législateurs à abolir
les substitutions.
D’abord, le m otif politique, qui a été de détruire le préjugé,
d’après lequel les biens n’étaient conservés dans une famille ,
qu’en sacrifiant tous ses membres , pour réserver à un seul l’éclat
de la fortune, ce qui était inalliable avec les principes que la
révolution avait introduits.
Et ensuite, le motif de l’égalité, qu’011 avait commencé à
établir entre les enfans, pour les successions , et qu’on avait lo
projet de rendre absolue, comme otil’a exécuté, en effet, depuis.
O r, aucun de ces deux motifs n’existait pour le droit de retour,
et au contraire, le droit de retour, envisagé sous le rapport des
enfans, héritiers de leur père donateur, rentrait même parfai
tement dans les vues des Législateurs d’alor6 ; car il avait pour
çflèt de faire revenir dans les mains de tous les enfans, ce qui
�t 27 )
était sorti de celles du père , pour appartenir à un seul ; ce'qui
était précisément l’opposé des substitutions, qui attribuaient à
lin seu l, ce qui naturellement aurait dû appartenir à tous.
Mais indépendamment de ces puissantes considérations , il est
impossible même de tro u ver, entre le droit de retour et une
substitution, la plus légére ressemblance.
Tout le monde sait que les substitutions étaient des disposi
tions émanées uniquement de la volonté d’un seu l, et qui se
passaient dans l’absence et sans le concours de ceux qui
pouvaient en être l’o b jet, comme dans les testamens ou même
dans les contrats de m ariage, où les substitués n’intervenaient
pas ; ( e t on sait qu’il était bien rare qu’ils y intervinssent ,
puisque la plupart du tems même ils n’étaient pas nés).
A u lieu que le droit de retour n’était pas une disposition,
un acte émané de la pure volonté du donateur ; c’était une
convention, un p a c te , un contrat qui était fait entre le do
nateur et le donataire, et qui supposait nécessairement le concours
et la réunion des deux volontés.
Les principes à cet égard sont connus , et les effets d’une
disposition conditionnelle sont bien difïérens de ceux d’ une
stipulation.
Les dispositions conditionnelles de l’iiomme ou de la loi ne
se transmettent pas à l’héritier de l’appelé décédé avant l’évé
nement de la condition. ( Et voilà pourquoi le retour lé g a l,
les jid ei commis ne sont pas transmissibles). Mais, c’est parce que
les héritiers ne recueillent du chef de leur auteur que le droit
dont il est décédé saisi. Or , les dispositions -conditionnelles ne
saisissent qu’au moment de leur ouverture ; jusques-là, elles ne
sont point in bonis de l’appelé. Si donc , à la différence des stipu
lations conditionnelles, et notamment des stipulations de retour,
qui, comme on l’a établi , sont transmissibles, et ont un effet
rétroactif au jour auquel la convention a été contractée, les dis*
D a
�( »8 )
positions conditionnelles ne saisissent qu’au moment, de leur ou
verture, les substitutions qui ne sont évidemment que de pures
dispositions, ne peuvent être régies par les mêmes règles que
les stipulations conditionnelles , et par exprès , que les règles
applicables au droit de retour conventionnel.
Sous aucun rapport d o n c, la stipulation de retour n’a rien de
commun avec les substitutions , qui ne regardaient jamais que
des tiers, tandis qu’encore une fois, les héritiers du donateur ne
sont pas des tiers, puisqu’ils ne sont pas gratifiés en second ordre.
On ne peut donc pas pretendre, de bonne fo i, que les lois
abolitives des substitutions ,•aient atteint les stipulations de retour.
Cette question n'est cependant pas nouvelle,* elle a été jugée
en Thèse par la Cour de Cassation dans l’affaire de N availles,
où le sieur Larregoyen, qui s’opposait au droit de retour, argu
mentait aussi des lois de 1792, qui abolissent toutes les substi
tutions non ouvertes de l’art. 896 du Code N a p o l é o n qui les
prohibe pour l’a v en ir, et de l’art. g 5 i du même Code qui prohibe
toute stipulationconditionnelle de retour des choses données,au pro
fit d’autres que le donateur personnellement, et survivant à l’événe
ment de la condition qui doit donner ouverture au droit de retour.
En effet , a-t-on dit , nul doute que l’on doit regarder
comme une véritable substitution la stipulation expresse ou tacite
du droit de retour au profit d’autres que le donateur vivan t, lors
de son ouverture : o r , les substitutions non encore ouvertes lors
de la publication des lois des 25 Octobre et 14 Novembre 1792,
sont abolies par ces lois ; d o n c, toutes les stipulations de retour
au profit d’autres que le donateur , qui n’étaient pas encore
ouvertes à cette époque, sont pareillement abolies; et c’est p a r T
cette raison, a-t-on ajouté, que l’art. y 5 i du Code civil défend
de stipuler le retour au profit d’autres que le donateur survivant
à son ouverture.
^
O11 faisait aussi beaucoup va lo ir, pour le sieur Larregoyen,
ja circonstance particulière qu e, dans le fait, il s’était éçoul^
�(» 0 )
plus d’un siècle d’in tervalle, entre la stipulation de retour et
l’ouverture de ce droit au profit de la dame de N a va illes, re
présentant ceux qui avaient constitué la dot ; que pendant ce
tems , la dot donnée à la charge de retou r, avait passé succes
sivement dans sa descendance , par plusieurs inains , sans pou
voir être aliénée au préjudice du droit de retour qui pourrait
s’ ouvrir un jour, ce qui, suivant le défenseur de M. Larregoyen,
présentait tous les caractères d’une véritable substitution graduelle
dans la descendance de la donataire, et ensuite , en cas d’ex
tinction de celte descendance , en faveur de ceux q u i, pour
lors, représenteraient les donateurs.
M ais, M. D aniels, substitut de M. le Procureur - g én é ra l,
portant la p aro le, combattit fortement ce système ; il professa
le principe que le caractère du droit de retou r, qu’il considéra
sans aucune difficulté comme trausmissible aux héritiers du
donateur, était absolument étranger à celui des substitutions,
et que les stipulations qui le renfermaient n’avaient pas été
abolies par les lois de 1792.
» De ce que les substitutions testamentaires, et même celles
» abolies par contrat de mariage , disait ce M agistrat,' ont été
v abolies, il ne faut pas conclure qu’il en est la même chose du
» droit de retour. La disposition textuelle des lois ( celles du 17
» Nivôse an 2, art. 74, et du 23Ventôse suivant, art. 5 ) s’éléve» raient contre cette conséquence , puisqu’elles conservent le droit
» de retour ( en faveur d’autres que le donateur ) , lorsque les
» substitutions étaient déjà abolies.
*
>?
»
»
» D ’ailleurs, ajoutait-il, le droit de retour ne peut être assim ilé
à une substitution, lorsque le donateur exerce lu i-m êm e ce
droit; ce n'est donc pas non plus une substitution, quand ¡1
est exercéspar ses héritiers, qui ne représentent avec lui que
la même personne ».
Cette doctrine fut consacrée par la cour de cassation, par
i*rrût du 11 Frimaire an 14 , rendu en la section des requêtes,
�(30)
rapport de M. B o rel, sous la présidence de M. Muraire , eî
qui est rapporté au Journal des audiences d elà cour de cassation,
pour l’année 1 4 — 1806. La cour rejeta le pourvoi du sieur
Larregoye’n contre l’arrêt de la cour d’appel de P a u , qui avait
accordé le droit de retour.
« A ttendu, portent les motifs des Juges suprêmes, que les
lois du 17 Nivôse an 2 , art. 7 4 , et 23 Yentôse suivant,
art. 5 , ont conservé les effets des stipulations de retour, et
3> ceux du retour légal dans les pays et pour les cas où ce
a> droit avait lie u , à l’égard des donations antérieures au 5
» Brumaire an 2, et que, d’après les lois et d’après les différences
» qui ex isten t entre les droits de réversibilité conventionnels
3> et légau x, et les substitutions , on ne peut appliquer au droit
d> de retour, l’abolition prononcée par les lois des 25 Octobre
» et 14 Novembre 1792 ».
Cet arrêt qui a retenti dans toute la France pour avertir
les personnes q u i, comme la dame Dorcet, auraient pu croire
<[ue les lois de la révolution avaient assimilé les stipulations
■de retour aux substitutions, et les avaient abolies comme
e lle s , ne permet plus aujourd’hui d’établir une controverse
raisonnable sur ce point de droit , et de le faire revivre
«ivec le plus léger espoir de succès.
Aussi les sieurs Delsol ne pousseront-ils pas plus loin leurs
réflexions sur une question aussi solennellement a g ité e, et qui
a été jugée., après que tous les m oyens, pour ceux qui s’oppo
saient à la réversion , ont été discutés , avec une méthode ,
une profondeur et une sagacité remarquables.
Et envain la dame Dorcet dirait-elle , que dans cette espèce,'
il ne s’agissait que dune donation entre-vifs ,• mais que s’il
s’ était agi d’un di'oit de retour apposé à une institution contrac
tuelle , on aurait jugé qu’une telle stipulation était une véritable
substitution, abolie par les lois nouvelles.
Cette objection ne peut pas résister aux principes qu’on a
�(3 0
développés sur la différence qui existe entre la nature , le
caractère et les effets d’un droit de retour , et ceux d’une
substitution.
Qu’importe, en effet, que le 'd ro it de retour soit apposé à
une donation ou à une institution,' ce droit n’est toujours qu’une
condition casuelle , résolutoire ; il n’est toujours qu’une c o n v e n
tion ' entre le donateur et le donataire, qu’un droit que se
réserve le donateur de résoudre la donation ou institution, si
la condition arrive ; niais dans ce cas-la même , les héritiers du
donateur ne recueillent pas comme appelés en deuxième ordre ;
ils ne so n t, comme on l ’a v u , que les représentais du donateur ;
ils sont le donateur lui-m êm e, selon la belle fiction de la loi.
Dès-lors , toute idée de substitution s'efface d’elle-même, et
le donateur, en stipulant pour lui et non pour les tiers, n’a
pu faire une substitution.
Encore une fo is, il n’existe pas , il ne peut pas exister
de substitution dans une stipulation de droit de retour, quelle
que soit la nature de l’acte qui renferme cette stipulation; et
par une conséquence nécessaire, il ne peut pas en exister daus
l’espèce particulière de cette cause, où l’on a apposé un droit
de retour à des contrats , à des pactes qui saisissent les héritiers
du stipulant de tous ses droits, et qui les continuent en leur
personne.
M ais, dit la dam eD orcet, et c ’est là la troisième proposition
n exam iner, quand le droit de retour serait transmissible aux
héritiers du donateur, je ne serais pas moins propriétaire des
biens qui eu sont grévés, puisque je suis appelée comme héritière
de mon p ère, à recueillir sa succession, et qu’à ce titre, les
éflèts du droit de retour doivent me revenir.
Cette objection, dont il est impossible de pénétrer le sens, a moins
qu’on suppose qu’elle est d’une absurdité difficile à q u a lifie r , ne
repose, dans l'interprétation la plus favorable qu’on veuille lui
donner, que sur une confusion d’idées.
rri.e
P R O P O S IT IO N
�( 3a )
En eïïet, pour que la dame Dorcet piit s’accorder avec ellemême , il faudrait le concours de plusieurs choses. Il faudrait
d’abord, commencer par effacer du contrat de mariage de 1760,
la clause du retour que se réserva le sieur D elsol, donateur ; il
faudrait ensuite que le sieur Delsol fût mort sans représentans
au degré successible, autres que la dame Dorcet; il faudrait
enfin supposer que la stipulation de retour est, de sa nature,
personnelle, et par conséquent incommunicable aux héritiers
du donateur, nonobstant son prédécès.
O r , aucune de ces circonstances ne sé rencontre ic.û
I l existe dans le contrat de mariage de la dame D orcet, une
stipulation de retour, de la part du sieur D elsol, donateur, qui
ju i interdisait la disposition des biens dont il la gratifiait, qui les
réservait pour lu i, si elle n’avait pas d’enfans de son m ariage;
et ce droit de retour existe encore incertain, puisque la condition
n ’est pas purifiée par le décès de la dame Dorcet ; il existe,
•puisque l ’effet de la stipulation ne doit s’ouvrir qu’après le
décès de la ' donataire, cette stipulation étant, de sa nature',
transmissible aux héritiers du stipulant.
Mais , par cela seul que le droit de retour existe encore, et
qu’il n est pas ouvert, qu’il ne peut l’être même qu'au décès
de la dame D o rcet, il est évident, il est plus clair que le jo u r,
qu’elle n’a pas recueilli avant l’événement de la condition, un
droit qui ne doit s’ouvrir qu’après que cette condition se sera
purifiée , et qu’ainsi sa qualité d’héritière universelle , à la charge
du droit de retour, ne lui a pas conféré celui de profiter d’une
convention dirigée expressément contre elle.
Autrem ent, il faudrait dire qu’un droit stipulé contre la dame
D orcet, par son contrat de m ariage, avait été stipulé en sa
faveur ; il faudrait dire que la dame Dorcet s’est succédée à ellemême , de son v iv a n t, ou en d’autres term es, qu’elle doit
aujourd’hui recueillir comme héritière universelle de son père,
par son, contrat de m ariage, ù la charge d’une stipulation de
retour,
�( 33 )
t e t o u r e n cas de décès sans enfans, les Mens sujets à ce droit
d e retour, avant le terme apposé à la stipulation.
I l est facife de voir que cela ne peut pas être ainsi.
En deux m ots, le contrat de mariage donnait tout à la dame
Dorcet, excepté le droit de retour ; sa qualité de donataire et
d’héritière universelle, ne lui a donc assuré l’espoir de recueillir
les biens de son père , qu’à la charge du droit de retour ; mais
encore une fo is, elle n’a pas recueilli dans la succcession de
son p è re , les biens dégagés de la condition de retour , ( et cela
est impossible, puisque cette condition est subordonnée à son
décès, qui n’est pas encore arrivé ). Sa prétention manque
donc de toute justesse ; elle ne serait tout au plus qu’une pure
pétition de principes ; ce qui nous ramène nécessairement et
dans tous les cas, à la question de savoir si la clause de
retour était réelle ou personnelle, et si par conséquent, elle
est devenue caduque par le prédécès du sieur Delsol père, ou si
l'elfet en a été transmis à ses héritiers, autres que la dame Dorcet.
Or , les sieurs Delsol- ont établi qjLie la clause était réelle et
transmissible aux héritiers du donateur.
Ils sont donc, comme héritiers naturels de leur p ère, appelés
à recueillir l'elfet de la stipulation de retour, à l’exclusion de la
dame Dorcet contre laquelle a.été dirigée cette stipulation.
lleste à savoir maintenant, si elle a pu disposer des objets soumis
au droit de retour.
L a discussion sur cette question ne peut être ni longue ni
difficile.
C’est un principe certain, et qui n ’a même jamais été le sujet
d’aucune controverse, que le donataire ne peut rien faire qui
puisse anéantir ou dim inuer, de quelque m a n i è r e q u e ce soit,
le droit de retour, car autrement il serait bien inutile de le
stipuler, si le donataire pouvait y porter atteinte.
A u ssi, tous les auteurs, et notamment M. D o live, en ses ques
tions de droit, Ily. 4? cliap, 8 , nous apprennent-ils que
fàyeur
E
�(34 y
du di’oit de retour a été poussée si loin , que les choses données-,
retournent e x e m p t e s de toutes charges et hypothèques qui yv
avaient.été imposées p a r le donataire, et même que les aliéna
tions qu’il en avait faites sont cassées en faveur du donateur au
quel ce di’oit de retour est adjugé ; il n’y. a : d’exception à ’ cette
règle , dit D olive , que pour les biens donnés par les père et mère,
à leurs fils :en faveur du mariage , lesquels,. nonobstant le droit
de retour , sont hypothéqués subsidiairement à la restitution)
de la dot.
M. M erlin, dans le répertoire de jurisprudence, V . Réversion,'
se demande si le donataire peut aliener et disposer au préjudice
du droit de retour, et il s’explique en ces termes.
« Il n’y a aucune difficulté sur la n ég a tive, par rapport au
» r e t o u r conventionnel; comme il affecte les biens donnés par.
une clause expresse qui. fait ^partie de la donation m êm e, il
» est clair qu’il doit avoir son effet contre tous ceux qui les
» possèdent, n’importe à quel titre ; et c’est ainsi'qu’on le juge
x dans tous les Pplem ens. ».
Ces principes ont été consacrés par le Code N a p o l é o n . L ’art, 953 porfe : « L ’effet du droit de retour sera de résoudre
3> toutes les aliénations des biens donnés, et de faire reyenir ces
3> biens au donateur, francs et quittes de toutes charges et hypo3? thèques , sauf néanmoins l’hypothèque de la dot et des conven3» tions matrimoniales, si les autres biens de l’époux donataire ne
» suffisent p a s, et dans le cas seulement où la donation lui aura
3) été faite par le mémo contrat de mariage duquel résultent ces
» droits et hypothèques. »
C ’est donc une vérité incontestable , que la stipulation du droit
de retour lie les mains au donataire, et que celui-ci ne peut dis
poser à titre onéreux ou gratuit des biens qui y sont sujets ; o u ,
ce qui est la même chose, que les dispositions qu’il peut en avoir
faites ne préjudicient pas à ceux qui doivent profiter de.cette
stipulation , lorsque l'événement qui y a donné lieu est arrivé.
Mais- indépendamment du poiut de. d ro it, il existe-dans lo
�( 35 )
contrat de mariage de la dame D o r c e t une prohibition for
melle de la part du donateur, de porter atteinte, en aucune
manière , au droit de retour qu’il stipulait.
» Sans qu’il puisse être dérogé, par sadite fille , future épouse,
» audit droit de réversion , par aucune disposition ni autres
» actes à ce contraires. »
V o ilà une clause p roh ibitive, s’il en fut jam ais; elle interdit
à la dame D orcet, donataire , toutes dispositions des biens dont
la réversion est réservée. C’est là une des conditions de la
donation ; elle en fait p a rtie, et dès-lors point de doute qu’elle
ne doive avoir l'effet le plus rigoureux, puisqu’elle ajoute
encore, s’il est possible, à la sévérité des lois et des auteurs
qui mettent les personnes grévées du droit de retour, dans
une interdiction absolue de disposer.
Que reste-t-il maintenant à la dame Dorcet pour appuyer
sa demande ? Rien , absolument rien. Les dispositions des lois,
la jurisprudence , le sentiment de tous les auteurs , l’intention
manifeste du donateur, concourent unanimement pour écarter
dans tous les sens , l’idée même qu’elle puisse porter la plus
légère atteinte au droit que doivent recueillir les sieurs Delsol,
comme héritiers de leur p è r e , la condition prévue par le
contrat de mariage de leur sœur arrivant.
Les Magistrats, chargés par les lo is, de veiller à la conser
vation des patrimoines dans les familles , s’empresseront donc
de proscrire une démarche dont le but ( avoué publiquement)
est de dépouiller les héritiers naturels, malgré la volonté form elle de l’auteur com m un, pour enrichir des étrangers.
M . e B A S T I D , Avocat.
Me R A M P O N Avoué licencié.
1
M.e B O N N E F O N S , Avoué.
de
A
l ’imp r i m e r i e
A U R I L L A C ,
C A L D A G U É S et
PELLISSON,
IMPRIM EURS DE L A PRÉFECTURE DU CAN TA L.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delsol, Jean-François. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bastid
Rampon
Bonnefons
Subject
The topic of the resource
successions
nullité du testament
fideicommis
avancement d'hoirie
contrats de mariage
substitution
droit de retour
Description
An account of the resource
Mémoire pour Sieurs Jean-François Delsol aîné, habitant de la ville d'Aurillac, et Gabriel-Bartélémy Delsol-Volpilhac, habitant de la ville de Paris. Contre Dame Jeanne-Marie Delsol, veuve Vigier-Dorcet. En présence du sieur Desprats, habitant de la ville d'Aurillac.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Caldagués et Pellisson (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1760-Circa 1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0531
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0629
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53842/BCU_Factums_M0531.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Paris (75056)
Claud (seigneurie du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
contrats de mariage
droit de retour
fideicommis
nullité du testament
substitution
Successions
-
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60231d3c6badd281d0fd7a642ff505c2
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Text
MEMOIRE
EN
R É P O N S E ,
POUR
M e. J e a n - J o s e p h C R O Z E , ancien a v o c a t, ex
législateur , sous-préfet de l’arrondissement de
B r io u d e , a p p e la n t e t
in tim é j
CONTRE
,
Le sieur G a s p a r d - R o c h M O M E T homme
de loi , habitant de la ville de Paris intimé;
,
E t encore contre le sieur I g n a c e M O N T B O IS S IE R -B E A UF O R T -C A N IL L A C , habitant
de Paris } appelant.
LES grandes conceptions, en matière d’agiotage et de
calcu l, sont dans le domaine de la haute finance de Paris.
Quelques hommes obscurs, par fois nécessaires , désignés
A
�( * )
sous line dénomination très - vulgaire , voudroient se
donner de l’importance, et ne cherchent qu’à faire des
dupes.
L e provincial timide évite rarement de tomber dans
leurs filets ; et s’il est assez heureux pour échapper ù leurs
pièges, on le signale alors comme un homme de génie
qui a f a i t un coup de ?naitre.
T elle est la marotte de cette horde de vampires, plus
dangereux qu’utiles, dont les gains sont souvent mons
trueux , et le luxe to u jo u rs u n scandale.
Habitués dans les antichambres, ils pénètrent rarement
dans l’intérieur; mais ils laissent à la porte des pamphlets,
des écrits calom nieux, et croient inspirer de l’intérêt,
ou donner prise à la malignité.
L eur ton est d’être à p ie d , et de faire payer des voi
tures ; ce n’est qu’en province qu’ils se distinguent, en
se faisant porter en chaise; et jouant ainsi les importans,
ils ne veulent pas s’apercevoir qu’ils ne sont que ridicules.
M e. Croze , ancien avocat, ex-législateur , sous-préfet
de B riou d e, est aux prises avec le sieur M om et, faiseur
d’affaires à Paris.
L e sieur Momet voudrait s’ identifier dans cette cause
avec un nom illustre, chéri et r e specté dans ce d é p a r
tement , et dont les malheurs doivent toucher les cœurs
généreux.
Mais pourquoi M . de Canillac seroit-il le plastron de
M om et? Ce n’est pas sérieusement qu’il voudrait revenir
contre un a c t e authentique, par lequel il a irrévocable
ment transmis l’objet exigu qu’il réclame. M . de Canillac
est homme d’honneur, incapable de revenir contre ses
�(3 )
engagemens; il rougira du rôle qu’on lui fait jouer, lors
qu’il sera plus éclairé sur ses intérêts.
O n s’occupera peu, dans ce mémoire , de sa récla
mation ; le seu l, le véritable adversaire de M e. G roze,
est le sieur M o m et. On ne s’attachera qu’à ce dernier,
et on lui prouvera que sa défense est un tissu d’impos-
y~
t Lires.
F A I T S .
M . Ignace Montboissier-Beaufort-Canillac etoit pro
priétaire d’une terre appelée de Chassaigne, située dans
le département de la H au te-L oire, près Paulhaguet.
Cette terre est d’ancienne origine ; elle a été premiè
rement possédée par la maison de P olign ac, d’où elle
a passé à celle de Montboissier-Canillac.
P a r m i les im meubles q u i composent cette terre, il s’en
trouve qui ont des dénominations différentes, notamment G»—,
quelques parcelles de terres et de p rés, connues sous le
nom de la Védrine.
Cette propriété a toujours été une dépendance, une
annexe de la terre p r in c ip a le , affermée cu m u la tiv e m en t
avec Chassaigne à l’époque de la vente dont il va être^-^"^'*'
question.
L e 2 septembre 1791 , cette terre de C hassaigne fut
saisie î-éelleinent sur M . de Canillac, &
requete de *
Gaspard Rousseau, homme de loi à Paris. L a saisie
réelle, d o n t on a sous les yeux une copie eciite par le ^ ^
clerc du sieu r M om et, co m p ren d C h a s s a ig n e et la V e ~
.
Arme, On ne trouve, sous cette d ern ière dénominationf
que cent trente-trois quartonnées de terre , c’est-a-dire ?
A a
^
�(4)
dix-sept septerées, .quelques p ré s, et trente-trois septe
rées de bois.
Ce n’est qu’à la Védrine qu’on trouve des bâtimens
d’exploitation pour les fermiers ; le château n’offre, dans
ses dépendances, d’autres bâtimens de cette nature que
des écuries pour les chevaux, et des greniers pour re
cevoir les redevances qui autrefois étoient assez consi
dérables.
Ce lieu de la Védrine est une dépendance absolue de
la terre ou domaine de C h assaign e , comme on veut
l’appeler a u j o u r d ’ h u i . Il n’y a point de village de ce
nom * il n ’ex iste d’autres bâtimens que ceux employés
à l ’e x p l o i t a t i o n de l’entière propriété.
L e 30 vendémiaire an 4 , avant d’avoir obtenu la ra
diation de la saisie réelle, M . de Canillac vendit, ou du
moins fit rédiger par-devant notaire une vente précédem
ment faite sous seing privé de cette terre de Chassaigne 3
au profit du sieur Momet.
Il est dit que M . de Canillac vend le domaine dit de
Chassaigne, consistant en une maison de c h e f, bâtie à la
moderne , cour , jardin et'dépendances, ensemble les batimens nécessaires à ïexploitation ,*le tout contenant cinq
septerées trois quartonnées. (Il n’y a de bâtimens d’exploi
tation qu’à la V éd rin e , et ceux de Chassaigne 11e sont
compris en la saisie réelle que pour trois septerées. )
L e 7 juin 1784? A 'a ^ fait un partage par-devant
notaires, de tous les biens de famille : la terre de Chas
saigne est échue au lot du sieur de Canillac ; la Védrine
ii’est pas désignée dans la composition du lot j et le sieui.
de Canillac ne jouit de cet objet qu’à raison de ce que la
�( 5)
terre de'Chassaigne lui-est délaissée en termes généraux
par ce partage.
Suit l’indication de tous les immeubles qui composent
cette terre de Chassaigne , et auxquels on ne donne aucun
nom particulier.
M. de Canillac déclare soixante septerées trois quartonnées de terres labourables, vingt-une septerées de pré ;
Cent vingt septerées de bois, tant taillis que haute futaie,
situées dans la commune de Chassaigne et celle de Sansac;
D eux septerées deux quartonnées de vigne;
Cinq septerées une coupée de terrain inculte.
Ce qui form e, e st-il d it, un total de deux cent dix
septerées une quartonnée de terrain ( i ) , ainsi que le
tout se poursuit et com porte, sans aucune exception
ni réserve; même le mobilier v if et m ort, de quelque
nature qu’il soit, qui se trouvei’a dans le domaine, ap
partenant au vendeur, (juz CTitetid 'vendre ¿t î*acquéreur
tout ce qiùil possède, et tous les droits qu’il a et peut
avoir dans le domaine et dépendances : garantissant en
outre à l’acquéreur les deux cent dix septerées, à di£
•arpens près en dehors ou en dedans.
M . de Canillac déclare que le domaine prése n te m en t
vendu lui appartient comme lui étant échu par le-par
tage des biens de la succession de M . P i e r r e B e a u f o r t Cunillac, son oncle, dont il étoit héritier pour un tieis,
-et encore son donataire ; et il ajoute que M . Beaufoit-Ca-
( 0 H y o erreur daps l’addition : le détail donne deux cent treize
septerées sept quartonnées et unfc coupée.
�nillac, oncle , en étoit propriétaire, comme seul héritier
de M . Ignace Canillac, son pèie.
Cette vente est faite moyennant 600000 livres assignats
( 8622 francs, écus ).
E n exécution de cette vente, le sieur Momet a pleine
ment joui du domaine de C hassaign e et de la V édrine,
son annexe, qui en est une dépendance , le joint sans
m oyen , et pour lequel M. de Canillac n’avoit d’autre titre
que le partage de 1784.
M e. Croze, lé g isla te u r, m em b re du conseil des cinq cents,
étoit à P a r i s , et a v o it eu occasion de connoître le sieur
M o m e t. M ". C ro ze ignoroit absolument la consistance de
la p r o p r ié té de Chassaigne ; il ne connoissoit en aucune
m a n iè re ni la localité , ni le produit : ce lieu est distant de
Brioude de trois mnyamètres, et il étoit aussi étranger à
M e. Croze, que s’il eût été à une distance de cent lieues.
L e sieur Momet lui propose d’en faire l’acquisition, et
ne doutoit pas alors que la Védrine ne fit partie de sa vente.
M e. Croze s’informe sur les lieux*, les renseignemens qu’il
obtient lui apprennent que celte propriété peut lui
convenir; mais il étoit bien loin de savoir ou de penser '
qu’il pouvoit y avoir de l’équivoque sur le point de savoir
si la Védrine faisoit partie du domaine de Chassaigne : on
se r a p p r o c h e , on est d accoid sur le prix.
L e 24 floréal an 4 > ^ es^passé un acte sous seing privé,
fait double entr’eu x, par lequel Momet y prond la qua
lité de propriétaire du domaine de Chassaigne, la V é
drine, circonstances et dépendances.
L e sieur Momet vend en conséquence les domaines de
Chassaigne et de ta Védrine , circonstances- et dépeu-
�.
¿ dances, ainsi et de la même maniéré qu’il est énoncé *7 °'*^/7/u^n-Æ
au contrat de vente qui lui a été fait par M . de Canillac,
par acte passé devant D elo ch e, notaire, le 30 vendé
miaire an 4.
Les domaines de Chassaigne et la V éd rin e, deux fois
répétés dans cet acte, sont écrits de suite, sans rature,
j—
de la main du clerc de M om et, et signé par luiCette vente est faite moyennant 36000 fr. écus.
Me. Croze est porteur de cet'acte sous seing p riv é ,
à la vérité cancellé comme nul après l’acte authentique ,
mais subsistant dans son entier avec les signatures des
parties.
Gomment M omet a-t-il eu l’impudence d im prim er, ^
page 3 de son m ém oire, que cette vente sous signature
pr ivéefut consentie pour le seul domaine de C h a s s a i g n e ? * **\
Il faut convenir qu’il est lieureux pour M e. Croze de^*«—
pouvoir donner un démenti formel à Momet - il est^~'#H*"^V '*
toujours important de conserver les actes : malheureuse* *'ï! •*“
ment pour l’hum anité, il est rare de trouver des hommes
^ w"
qui traitent de bonne foi.
' ‘ * ‘
Momet n’est pas plus véridique, lorsqu’il d it, à la suite
de cette fausse assertion , que M e. Croze alla à B rio u d e
chercher ses fonds, et probablement visiter l’objet q u ’il
avoit acquis.
Il est de notoriété que M e. Croze ne quitta point Paris,
et ne pouvoit pas le quitter; que les fonds lui furent
portés par la dame sa sœur , et q u ’il desira de suite une ¿±1.
vente par-devant notaire.
M c. Croze ne laissa pas écouler un long délai pour
se mettre en règle : la vente notariée est du 29 prairial
�(8 )
suivant. Le sieur M omet en fit le projet sans le commui
niquer, et le notaire Deloche le mit en forme : on croit
j|
même que la minute de l’acte est écrite par le clerc de
Momet.
M ais, dans cette m inute, M e. Croze s’aperçut que
M om et, q u i, par l’acte sous seing privé , avoit vendu
Chassaigne et la V é d r in e, avoit affecté de ne mettre
l’acte notarié que le domaine de Chassaigne.
\
- Etonné de cette affectation , M e . ^roze l’observe à
1
Momet ; il trouve d’autres négligences ou omissions dans
I
aJO '
la rédaction de l’acte authentique ; il exige que tout soit
i
conforme à la premiere vente ; il note les additions ou
corrections dont l’acte lui paroît susceptible.
- .,
•;
*
M omet ne regarde pas comme essentielle la mention
«
^**de la V éd rin e; c’étoit une annexe, une accession , une
-"I dépendance absolue du domaine de Chassaigne. M°. Croze
v insiste; et alors on ajoute à la vente notariée un renvoi qui
paroît satisfaire toutes les parties. Il est ainsi conçu : « Les
« domaines de Chassaigne et de la Védrine , désignés seu« lement dans le contrat qui sera ci-après énoncé sous
« le seul nom du domaine dit de Chassaigne, etc. »
C ertes cette addition-, ainsi que les autres, n’ont rien
de ridicule ; et quelqu’afiectation qu’ait mise Momet à
i,, ^ ^
transcrire dans son memoiie la copie figuree de cette
,
m inute, il ne parviendra pas a justifier les reproches qu’il
ÿ
s’est permis contre M c. Croze : on n’aperçoit rién de
¿ 7 ““ •
minutieux ni d’inutile dans ces ehangemens.
‘‘ “ .
Ces additions sont signées des parties, du notaire et du
receveur d e l ’ e n r e g i s t r e m e n t . Momet, dans la suite-, a cru
devoir.obtenir un arrêt de la cour, pour demander une
expédition
�r 9 r
expédition vîdimée demande que le notaire DelochêTa
régardé comme une injure, et avec fondement. A u ssi,
par la cdmmunication qu’on a prise, et de 1 expédition dé
la vente, et de celle de la procuration , on a vu que le
notaire D e lo c h e a fait toutes réserves et protestations
contre la prétention de M o m e t, fo n d a n t le m o tif de
l'arrét, et a n n o n ç a n t que sur les minutes des actes y
énoncés , il existe des changemens , des renvois et des
ratures qui ont été faites après coup , et a son insçu.
L e notaire Deloche observe et atteste que les quatorze
renvois portés au contrat, et a i n s i figures dans la pré-)
sente expédition, sont tous paraphés, tant par lesdits
sieurs M om et eP C ro zej que par le siéur G tou , receveur
de l’enregistrement, et par les deux n otaires, etc.
M omet glisse assez légèrement dans son mém oire, et
dans une n o te, page 12, au bas , qu’il vient de se .pour
voir extraordinairement à Paris contre le siëur Deloche.
Momet sans doute administrera la preuve de cette pour
suite extraordinaire, qùi n’est pas plus vraie qu’il l’est
que le sieur Deloche étoit le notaire de confiance de
M e. Croze. ' ; •' ■
'
.«■
i ' -v/y, . ' *>.
v Ce dernier n’a jamais eu aucune relation avec le no
taire ; mais il est au moins prouvé que D e lo c h e étoit le
notaire de M om et, puisqu’il.a reçu la vente qui a été
consentie par M . de Ganillacj ’
Quoi qu’il eri soit, la consistance de ce domaine est la
môme que celle insérée en ,l’acte sous.séing p iiv e , avec
la clause spéciale que le vendeur ne pourra îepeter 1 ex
cédant; des contenues désignées, à quelle quantité qu’il
puisse monter.
£
�:
(
10^
L é sieur Momet vend avec toute garantie.
Il est convenu que l’acquéreur entrera en jouissance à
dater du jour du contrat, qu’il percevra les jouissances
des années 179^ et 1796.
L e vendeur ne se réserve que les jouissances de 1794.
La vente est faite moyennant la somme de 36000 f r .,
dont le contrat porte quittance.
M e. Croze convient q ue, malgré la quittance, il n’avoit
payé que la somme de 18000 fr. sur le prix principal,
et 600 francs de pot de v in , dont il n’est point mention
en l’acte authentique, mais dont l’énonciation se trouve
dans la vente sous seing privé.
A l’égard du prix resté dû, suivant le même acte sous
seing p r iv é , M e. Croze devoit payer 3000 fr. dans trois
m ois, s’il le jugeoit à propos; et, pour les iôooo francs,
il étoit convenu qu’il seroit accordé term e, qui ne pourroit etre moindre de deux ans, et on devoit prendre la
forme d’un acte de dépôt.
Cette convention fut exécutée : la forme de dépôt
paroissoit essentielle, pour donner la certitude au ven
deur de toucher du numéraire. Mais le sieur Momet
voulut comprendre dans le billet les intérêts de deux
années ; on disputa sur les retenues : enfin on convint
d’une déduction de i 5 o fr. pour cet ob jet, de sorte que
le billet de dépôt fut de 19650 fr.
Parmi les conventions de la vente notariée, qu’il est
inutile de rappeler en entier, puisque Momet a mis tant
de soin à les transcrire, il étoit dit nommément qu’il seroit
loisible à l’acquéreur d’obtenir h scs frais des lettres de
ratification.
�S’il y avoit des oppositions de la part des créanciers du
vendeur ou de ses auteurs, il devoit les faire cesser, et en.
rapporter m ainlevée, ainsi que toutes radiations néces
saires , dans la quinzaine, à compter de la signification
qui seroit faite.
'
«
En cas d’éviction, de trouble ou d’opposition à la jouis
sance de l’acquéreur , Momet s’obligeoit d’indemniser
M e. Croze, en lui fournissant dans l’arrondissement des
départemens de la Haute-Loire et du Puy-de-Dôm e, des*
terres formant corps de ferm e, et ce , à dire d’experts ,
sans pouvoir par le vendeur offrir , pour l’indemnité,
le remboursement du prix de la ven te, et contraindre
Me. Croze à l’accepter.
L e sieur Momet remet à M e. Croze le contrat de vente
sousciit à son profit p a r le sieur de Canillac, l’expédition
du partage de famille de 1784, dont on a déjà parlé. ■
L e sieur Momet s’oblige de remettre incessamment à
M e. Croze toutes les autres pièces relatives à la propriété
du domaine ven d u, aussitôt que le sieur de Canillac les
_lui auroit îem ises, et notamment les lettres patentes et
1 arrêt d enregistrement qui avoient été obtenus sur cette
transaction portant partage.
L e sieur Momet est tenu d’aider au besoin M c- Croze,
a sa première réquisition, des diverses quittances de paye-mens par lui faits pour le sieur de Canillac, à différens
créanciers privilégiés ou hypothécaires , sur les biens
vendus, et de lu i justifier des subrogations portées par des
quittances, jusqu’à concurrence de la somme de 400000 f.
Enfin Moinct promet de remettre incessamment- à
M e. Croze toutes les pièces qui seroient nécessaires pour
B 2
****
�(' 12 )’
sc faire mettre en possession réelle du domaine vendu, à
peine, etc.
•
•
C’est ici le cas de remarquer que 'Momet ayant sans
doute conçu quelques craintes relativement à M . de Can illac, crut qu’il étoit utile d’obtenir des lettres de rati
fication sur la vente qui lui avoit été consentie.
Son contratlui étoit nécessaire; il l’avoit remis à M c. Croze,
en exécution de l’acte du 29 prairial an 4. Il écrit le 13 prai
rial an 5 à M e. C roze, pour l’inviter à lui confier ce pre
mier acte. Mo. C r o z e s’en fit un plaisir et un devoir.
M om et lui en donne un récépissé le 22 du même mois.
Il agit en conséquence, et a Correspondu directement,
pour cet objet, avec le conservateur : M e. Croze en a la
preuve dans les mains.
- •
^ Parmi lesAcréanciers de M . de Canillac, étoit le sieur
Labastide^ ancien avocat, juge de paix à Brioude, créan
cier légitime d’une somme de 1300 fr. en principal: il
avoit vainement sollicité du sieur Momet le payement dè
cet objet modique.
Il prit Je l'humeur : L e dépôt fait par Momet au bureau
des hypothèques lui parut un moyen sûr d’être paye; il
fit un enchère : le domaine de Chassaigne, acheté par
Momet 8622 f r . , valeur ré e lle , fut porté à 65000 fr.
L e sieur Momet se vit obligé de parfournir.
M ais, quoiqu’il ait voulu effrayer ou intéresser sur
çette augmentation de p r ix , il ne faut pas croire qu’il lui
en ait coûté fort cher. i°. Lescréances du sieur Labastide,
en principal intérêts ou frais, se sont montées à 2700 fr.;
2°. il a payé aux dames de Sansac i o 5 o fr.; 30. aux frères
G allice, 2000 francs ; 40. à Magdeleine Ravier , une rente
�C ?3 )
viagère de 200 fr.; 5 °. à la nation, un capital de 5 oo fr.
d’une rente de 25 francs due aux religieuses de la V au dieu ; to tal, 8200 francs, en comptant pour 2000 francs
le principal de la rente viagère que Momet paye à M agdeleine Ravier.
Encore, si on en croit une lettre du sieur Fabre, son
fondé de p o u vo ir, en date du 29 prairial an 11 , il auroit
transigé à une somme bien moindre; il en seroit quitte
pour 5 ooo francs.
Encore a-t-il pris sa revanche, et a-t-il eu tous les moyens
pour mettre à contribution d’autres acquéreurs de M, Can illac, qui n’avoient pas obtenu de lettres de ratification,
contre lesquels il avoit formé sa demande hypothécaire.
L e sieur Momet a osé dire que le dépôt de son contrat
pu bureau des hypothèques étoit du fait de M e. C roze,
qui 1 avoit ainsi •désire ; mais c’est encore un mensonge
maladroit. Q u’importoit à M e. Croze que Momet déposât
son contrat? il étoit plus simple pour l’acquéreur de dé
poser le sien: les créanciers du premier vendeur n’auroient
pu former opposition qu’en sous - o rd re , et M e. Croze
n’avoit rien à craindre de leur part.
M®. Croze fit au contraire tout ce qui étoit en son pou
voir pour éviter les démarches du sieur Labastide, et ce
lut un sujet de discussion qui les a divisés.
M®. Croze, pour lever tous les obstacles relatifs au parfournissement, fit présenter la dame sa mèi'e comme cau
tion du sieur M om et; et M°. C ro ze est encore oblige
relativement à ce cautionnement, puisque la dame Croze
a été assignée, en sa qualité de caution, en rapport et
distribution de la somme dê 65oôo francs, montant des
enchères.
�( T4 )
. Bientôt vient un changement de scène. Le 13 fructidor
an 1 1 , M . de Canillac imagine de prétendre qu’en ven
dant le domaine de Chassaigne , il n’a pas vendu la pro
priété de la Védrine ; il cite M e. Croze en désistement
de cet objet. Gomment s’adresse-t-il à M®. Croze, qu’il ne
connoissoit pas? pourquoi n’assigne-t-il pas directement
M om et, son vendeur?
Ce n’étoit pas le compte de M om et, qui le faisoit agir,1
ou plutôt qui agissoit sous son nom.
Mais M®. Croze se trouvant, par cette demande, en péril
d’éviction , prend le parti de faire saisir et arrêter entre
ses imains les sommes q u il pouvoit devoir à M.omet,
Il étoit également dans l’intention de dénoncer à Momet
la demande en désistement formée par le sieur de Canillac, lo r s q u ’il est prévenu par M omet, qui, le 13 nivôse an 12,
** le cite en conciliation sur la demande qu’il entendoit
former en payement du montant du billet de dépôt." *
Me. C roze, en réponse, lui fait notifier, le 16 du
même mois, 1°. les titres de créances hypothéquées sur
le bien de Chassaigne, dont Momet s’étoit obligé de
rapporter la mainlevée.
2°. Un jugement du tribunal du P u y , du 8 fructidor
an 7 , portant réception de caution de la dame Croze,
pour le parfournissement de 1 enchere, ensemble l’acte
de soumission de caution.
3°- I 'e certificat du conservateur des"hypothèques, sur
l’obtention des lettres de ratification de M om et, avec
l’extrait des oppositions subsistantes sur M . de Canillac.
L e 18 du même mois do nivôse, M e. Croze dénonce
à Mqmçt la cjemande.formeê-par M . de Canillac, en dé-»
�( ï 5 ) .
sistement du domaine de la V édrine, le procès verbal de
non - conciliation, et la saisie-arret qu’il avoit fait faire
en ses mains.
L e 27 nivôse, les parties comparoissent au bureau de
paix. M e. Croze proteste qu’il est prêt à remettre le
d ép ôt, sous la déduction des payemens considérables
par lu ila its à cl)mptê“d e ’cètte somme; mais il déclare
qu’il doit aussi déduire les fermages d e ïjg ' 5 , à lui vendus, ,
dont il n’a pas touché le montant, puisque le fermier
s’étoit libéré antérieurement entre les mains de la régie,
et en rapportoit la quittance.
Me. Croze conclut'encore à une indemnité pour les
courses, voyages et avances par lui faits en vertu de la
procuration de Momet.
M e. Croze cite encore M omet pour se concilier, i°. sur
la demande en g a ra n tie d u désistem en t ré cla m é par M . de
Canillac; 20. en validité et confirmation de ses saisiesarrêts; 30. en payement des fermages de 1795; 4°. en
rapport, mainlevée et radiation des oppositions et ins
criptions hypothécaires prises sur les domaines vendus,
tant du chef du sieur Momet que de ses auteurs; 5 °. en
remise des titres de propriété que M omet s’étoit obligé?
par l’acte de vente, à délivrer à M e. Croze; 6°. cri~justilication des quittances, avec subrogation^ des créanciers
hypothécaires, jusqu’à concurrence de 4 0 0 0 0 0 fr ., 7 • en
payement d’une somme de 2883 francs 93 centimes, pour
indemnité, faux frais, voyages, déboursés, par suite de
la procuration du 27 prairial an 4 ; 8°. en représentation
du titre que Momet prélendoit a v o ir contre, M e. Croze,
afin d’y émarger les payemens laits sur icelui, et l’annuller
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( 16 )
s'il étoit soldé; 90. à ce qu’il fût tenu, en cas d’eviction,
et à défaut d’exécution des clauses du contrat, de fournir
et délivrer des immeubles de môme nature, conformément
«lu contrat de vente.
L e 23 prairial an 12 , jugement qui joint toutes les
demandes. 11 n’est pas inutile d’observer ici que M e. Croze
rfvoit-toujours été franc et gén éreux; il avoit souscrit
uil billet de dépôt; et au moyen de ce qu’on avoit compris dans ce billet deux années d’intérêt, il étoit expressèment convenu que les intérêts n auroient pas cours,
s’il y avoit des obstacles poui la libération. Quelqu’in—
quiétude que pût concevoir M®. Croze sur la solvabilité
de son vendeur, il n’avoit cependant pas refusé de donner
des à-comptes : il est en état de justifier, par des quit
tances approuvées de M om et, qu’en l’an 6 et en l’an 7
a Pay® à compte de la somme restée entre ses mains,
celle de 8076 francs ; que depuis il a encore payé cello
de 7600 francs ; total, 15676. Et comme il est inévitable
que le sieur Momet sera tenu de rembourser à M e. Crozo
lé prix des fermages de 1795 , qui sont expressément
Vendus par l’acte du 29 prairial an 4 , il en résulte que
M e. C ro ze, à très-peu de chose près, est entièrement
quitte envers le sieur M om et.
ü n ne conçoit donc pasTacliarnement, les vexations
de ce vendeur inquiet, dont les prétentions sont sans
fondement comme sans intérêt, et qui plaide pour l’unique
plaisir de ca lo m n ie r un fonctionnaire public irréproèhable.
Quoi qu’il en s o it, la cause portée au tribunal de
B n ou d c'lë n messidor an 1 3 , sur toutes les demandes,
il
�C 17 )
il fut rendu un jugement dont le sieur Momet a transcrit
les motifs et le dispositif dans son mémoire.
„ .
v II suiïira de rappeler que , par ce jugem ent, M . de j
Canillac est déclaré non recevable dans sa demande en
désistement de la partie du domaine dit de la V tdrin e. *7'
M e. Croze est gardé et maintenu dans la possession et
jouissance de cette meme partie, comme anntxee et/u/mant une dépendance du domaine de Chassaigne.
< En ce qui touche les demandes respectives des sieurs
Momet et C ro ze , le jugement donne acte a Momet de
ce que M e. G ro ze a reconnu avoir reçu l’arrêt d enregis
trement et les lettres patentes de 1786, et de ce que Momet
a offert audience tenante , et a mis sur le bureau de 1 au
dience, les autres titres réclamés par M e. Croze, en vertu
de la dixième clause du contrat de vente du 29 prairial
an 4;, lu i d o n n e p a r e ille m e n t acte de ce qu’ilq fjre de rap
porter la mainlevée de toutes les inscriptions procédantes de son f a i t , ou de celui de ses auteurs , su r les
biens vendus, dès que M e. Croze aura fait transcrire son
contrat de propriété , et dénoncé au sieur Momet les ins
criptions. A y a n t égard au x offres, faisant droit su r les
•conclusions prises par le sieur M o m e t, condamne M eCroze à payer à ce dernier, en deniers ou quittances vala
bles , la somme de 19660 francs, m o n tan t du billet de
d ép ô t, avec les intérêts de la somme depuis la date de
i 6 5 o fiancs
la vente , sous la déduction de la som m e
comprise dans le billet pour intérêts du p rin cip jl, sur
la q u e lle les payemens qui ont pu être faits seiont imputes
d’abord sur les intérêts, subsidia'frcment sur le principal,
■
*- M c. Groze est tenu, dans le délai de trois mois à compter
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�( 18 )
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.
du jugem ent, de faire transcrire son titre d’acquisition.
( M e. Croze n’est pas tenu de le faire par son contrat; il
s’en est réservé la simple faculté : Sera loisible audit
acquéreur d?obtenir des lettres de ratification. )
Faute de ce faire dans le d é la i, et sans qu’il soit besoin
d’autre jugement, il est fait pleine et entière mainlevée à
M omet des inscriptions de M e. C roze, et notamment de
celle faite au bureau de Paris, volume 18, n°. 674 ; en
celui de C orbeil, volume 3 , n°. 3 ° 3 j en celui de D ieppe,
volume 1 1 , n°. 583.
I l est é g a le m en t ordonné que sur la remise qui sera
faite par le sieur M om et, à chacun des conservateurs des
bureaux des hypothèques,de l’expédition par extrait du
jugem ent, ils seront tenus de radier les inscriptions.
Il est fait mainlevée à Momet de toutes autres inscrip
tions de M e. Croze : tout conservateur est tenu de les
radier.
L e jugement prononce encore mainlevée de toutes
saisies-arrêts ou oppositions, à la requête de M e. Croze :
tout gardien ou dépositaire est contraint de verser.
Les parties sont mises hors de cour sur le surplus des
demandes ; M e. Croze est condamné en tous les dépens
faits par M om et, tant en demandant que défendant.
M . de Canillac est condamné au tiers des dépens adjugés
ù M om et; M e. Croze est condamné au coût de l’expédi
tion et signification du jugement, sauf ¿1 lui à en répéter
■
les deux tiers contre. M . de Canillac. ( Disposition bien
.singulière, lorsque Momet étoit évidemment garant de
M e. Croze sur la demande en désistement. )
Enfin ce jugement doit être exécuté par provision, et
�( T9 )
nonobstant l’appel, quant a la condamnation du montant
du billet.
M e. Croze ne pouvoit laisser subsister ce jugement visà-vis de Momet ; et sans s’embarrasser de ce que fcroit
M . de Canillac, qui avoit succombé sur la demande prin
cipale, il présenta , le 6 thermidor an 13 , requête en la
cou r, pour demander des défenses^ et par exploit du ic du
même mois , il fit signifier son acte d’appel, ensemble
l’arrêt qui permcttoit d’assigner sur la demande en dé
fenses.
Sur cette demande , intervint arrêt le i 5 thermidor. La
cour peut se rappeler que, touchée des motifs que M e.
Croze avoit proposés, elle avoit prononcé des défenses
de mettre le jugement à exécution , et que l’arrêt ne fut
rétracté qu’à raison de ce que M o m et, ou son avo u é,
offrit de donner bonne et suffisante caution pour la tota
lité du prix de la vente, conformément ù l’article 1663
du Code civil.
,
La cour ayant égard à scs offres, se détermina à joindre
la demande en défenses au fond, à la charge par Momet
de donner bonne et suffisante caution pour la totalité du
prix j et de faire recevoir cette caution en la cour. Les
dépens furent réservés.
L e sieur Momet eût été fo r t em barrassé d ’e x e cu tcr cette
p a rtie de l ’a rrê t : u n e ca u tio n n ’est pas p o u r lu i si fa cile
à tr o u v e r ; aussi a -t-il g a rd é le p lu s p ro fo n d silence.
Mais depuis, le sieur Momet a cru qu’il etoit utile à
ses intérêts de faire paroître de nouveau jVl. de Canillac
sur la scène; il lui a fait interjeter appel, par acte du
29 thermidor an 13, du jugement de I3rioud e,qui le déC 2
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�( 20 )
claroit' non' recevable 'dans sa demande en désistement
de la poi’tion dite de la Védrine : les deux appels ont
été joints pour être statué sur le tout par un seul et
même arrêt.
M e. Croze va développer ses moyens de défenses : il
commencera par examiner la demande principale en
désistement, mais aux risques, périls et fortunes du sieur
M om et, et sauf sa garantie.
Il
présentera ensuite ses griefs contre le jugem ent,
dans la partie relative au sieur Momet. Il se flatte de
démontrer que ce jugement blesse en ce point tous les
principes du droit et de lc q u ite , et que Momet n’a
jusqu’ici proposé que des objections frivoles.
P r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e sieur de C anillac, en vendant Chassaigne au sieur
M om et, a-t-il compris dans cette vente la 'portion dite
< de la Védrine ?
. O n a déjà vu que la portion de la Védrine étoit une
dépendance, une annexe de Chassaigne; que M . de Canillac
ne possédoit la Védrine qu’à raison de ce que Chassaigne
étoit avenu à son lot par le partage de 1784.
Ce partage ne désigné point particulièrement la V é
drine; cependant M . de Canillac en a toujours joui.
1 La saisie réelle de 179*5 qui porte sur Chassaigne,
comprend aussi la Védrine. Ce dernier objet étoit affermé
cumulativement avec Chassaigne, lors de la. vente qu’en
a consentie M. de Canillac.
�( 2ï )
•• Chassaigne étoit une terre assez considérable, qui depuis long-temps étoit dans la famille Canillac. La V é drine est de la justice et de la directe, et n’en a jamais
été séparée.
Les deux objets étoient unis par la nature du domaine
ou fief dom inant, et par l’extinction ou la destruction
des bâtimens d’exploitation à ChassaigneT par la confusion des revenus, et la réunion des impositions; par la
destination du père de famille, et par l’accession à per
pétuelle demeure.
Les états de section de la commune de Chassaigne,
dressés en 1790, et subsistant encore pour la répartition
de la contribution foncière, comprennent Chassaigne et
la "V édrine comme faisant partie de la même propriété;
et les contenues, désignées par M . de Canillac dans sa
vente , concoi’dent parfaitement avec les contenues des
états de section.
3 .
L e sieur .de Canillac charge son acquéreur de payer
le montant de toutes les contributions : celles de Chassaigne et la Védrine sont réunies.
L e sieur de Canillac vend les bâtimens d’exploitation :
il j i ’y en a qu’à la V éd rin e.
: L e sieur de Canillac vend les bestiaux : il n’y en avoit
quu la V édrine; ils avoient été, comme l’exploitation,
fixés à la-Védrine.
L e sieur de Canillac vend le domaine de Chassaigne,
comme Uii étant échu par le partage de 1^84; il remet
.cet acte de partage à l’acquéreur; il ne jouit de la V é
drine qu’en vertu de ce partage, et n’a pas d’iiulre titre.
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22
)
L e sieur de» Canillac charge l’acquéreur d’entretenir
le bail de ferme, le subroge à ce même bail; et ce bail
comprend cumulativement Chassaîgne et la V édrine, qui
sont affermés sous un seul p r ix , n’ayant que le même
fermier.
Il
cède les fermages échus pour l’année i j g 5 , sans
aucune ventilation ni réserve : son acquéreur se met en
possession de la totalité des immeubles.
L e sieur de Canillac donne ensuite une procuration
pour retirer des m e u b le s , réclamer des arrérages qui
ne sont pas de la comprise de sa vente ; il ne fait men
tion en aucune maniéré du lieu de la V édrine, quoiqu’il
ait soin de réclamer tous les objets non vendus. Cette
procuration est du 19 germinal an 6.
L e sieur de Canillac laisse jouir son acquéreur et les
siens pendant dix ans sans réclamer.
D ’après toutes ces circonstances, pourroit-il s’élever
un doute sur la question de savoir si la Védrine est
comprise dans la vente de Chassaigne ?
Les conventions s’interprètent par l’exécution qu’elles
ont eue. La loi 9 1 , ff. P r œ d iis, §. 3 , parle des fonds
séjans et des fonds sabiniens , q u i, quoique conservant
des noms différens, nJen sont pas moins unis et compris
dans la même disposition, s ils ont été confondus dans
la même gestion, si les revenus en ont été réunis dans
les mêmes comptes. Titio sejana prœ dia, sicuti comparati sunt do , lego : cum essent gabiniana quoque sirnul uno pretio compai'at° non sujjicere solnrn argu
ment um emptionis respondi , sed inspiciendum , an
�( 23 )
ïitteris et rotionibus appel/atione seianarum ga lin ia
quoque coniinentur, et utriusque possessionis confusi
reditus, titulo seianorum accepto lati essent.
Henrys, tom. 4, consultation 5 e., pag. 93, pense qu’il
ne peut y avoir de plus forte preuve d’union que lors
que les revenus ou les produits sont payables et por
tables au lieu principal.
D um oulin, Des iiefs, tit. i er. §. 1". glos. 5 , n°s. i 5
et 16 , D e pertinentes quce accédant Jeudo uniuntur
nt fundo patrimonalii ex destinatione patris farn .
N°. 16, il pense qu’un fonds nouvellement acquis, est
réuni à l’ancien , toutes les fois que le père de famille
a manifesté l’intention de n’en faire qu’un seul. Reqm n tu r ergo aliquis actus fa c ti per quem appareat quod
jfundus noviter acquisitus unitur veteri, jure perpetuum
accessioms et pertinentiœ ex quo colligitur üllimilS
eundern fa n d u m constituendi.
D ’Argentré , sur l’article 26 5 de la Coutume de Bre
tagne , n°. 2 5 , dit que l’union de deux terres se fuit par
la destination du père de famille ; et il place parmi les
preuves d e l union la différence du p rix , étant vraisem
blable que celle d’un moindre prix a été unie à celle
d’un plus grand : Validœ conjecturœ sœpè p e t u n t u r à
pretu magnitudine. Il est en ce point d ’accord avec DuMioulin.
M oruac, sur la loi Pa tron u s, 34, ff- D e legatis ,à.\t
que les fonds placés sous le même bail sont tous censes.
fiiiie partie de la même terre ; et sur le §• 31 c^e la loi
P r œ d u s , il enseigne que la possession explique Iç
titre.
�( H )
Ces autorités sont précises. La Védrine étoit réunie à
Chassaigne , et en faisoit essentiellement partie ; c’étoit
le même fief, la même te rre , la même exploitation, la
destination du père de famille : il n’y a pas eu besoin de
distinction ni de désignation particulière pour en trans
mettre la propriété au sieur de C a n illa c , par le partage
de 1784. 11 a entendu et voulu vendre tout ce qu’il
possédoit à Chassaigne; il a remis le bail général qui cora*
prenoit la V éd rin e, l’état des sections, et l’extrait des
rôles matrices qui e n g lo b e n t la Védrine. C’est la même
contenue que celle q u ’il a vendue. Est - ce sérieusement
q u ’il v o u d r o it a u jo u rd ’h u i revenir contre des conventions
aussi claires, qui ne peuvent présenter rien d’é q u iv o q u e ,
et q u i, dans le cas d’am biguité, s’interpréteroient contre le
vendeur? P o tu il legem apertiùs conscribere.
Loin de nous cette misérable objection, qu’il n’a vendu
que le domaine de Chassaigne. Ne sait-on pas qu’à l’épo
que de la vente on ne pouvoitou on n’osoit rappeler des
dénominations féodales? ne voit-on pásmeme que le sieur
de Canillac n’a pas osé se servir du nom de château, et
qu’on a cherche un terme équivalant, en disant maison de
chef ? pourroit-il aussi dire qu’il 11’a pas vendu le château ?
Enfin il a t° u t cédé : le domaine est vendu avec ses cir
constances et dépendances. La Védrine n’a jamais été
qu’une dépendance de la terre de Chassaigne : cette terre
est dans la maison de Canillac depuis lon g-tem ps; elle a
toujours eu la Védrine pour annexe; les anciens monumens de la province l’attestent. A vant comme après la
vente, le sieur de C a n ille , dans ses écrits particuliers, dé
signe cette propriété sous le nom de terre; c’est encore sous
cette
�. ( 2SÎ
:
cette dénomination que M om eta fait faire ses affiches pour
la vendre : une de ses affiches est dans les pieces.
En un m ot, M om et, acquéreur de M .Canillac, a vendu
noininativementàM®. Groze, Chassaigneet la V éd u n e ,
il a vendu comme il avoit acquis , comme il avoit joui -, il
seroit garant envers M®. Groze de cette demande , et c est
assez s’en occuper: la prétention du s i e u r Ganillacn’exigeoit
~ •v
. • ' -v
~ A »
pas une discussion sérieuse.
Q uestions
r e l a t i v e s
a u
s i e u r
M o m e i.
§. IerM ‘ . Croze doit-il être autorisé à maintenir ses inscrip
tions sur les biens du sieur M om et ?
L e sieur Momet traite assez légèrement cette ques
tion importante qu’il a mise au dernier rang dans son mé- ÿlbU-'
moire. Offriroit-il donc une si grande sûreté , lui qui se ÿ ^
^ ^
trouve dans un état d’insolvabilité notoire, qui est séparé
de biens avec son épouse, et cherche à vendre ses p r o p r i é tés? Il a persécuté tous ceux avec qui il a eu affaire; il a
fait éprouver toute sorte de désagrémens au sieur G i r o t
de Pouzol, à qui il avoit vendu le bien de Meudon.
L ’état de ses aifaires doit effrayer tous ceux qui ont quel.
*
qu’intérôt à démôleravec lui; et cette inquiétude augmente ¿4j U
y»
précisément, parce qu’il fait p l u s d’efïorts pour rassurer.
p i*«
Mais par son contrat de ven te, du 29 prairial an 4 , il
a promis une .pleine et entière garantie à M®. Croze ; il
a hypothéqué ses bieus à cette garantie ; il a con- f t 0*}
D
�(*6)
1
tracté des obligations très - étendues avec son acquoreur ; il est tenu de rapporter la mainlevée de toutes les
oppositions ou inscriptions hypothécaires, soit de son
chef personnel, soit du chef du sieur Canillac ; il est tenu
de justifier avec subrogation de quittances, jusqu’à con
currence de 400000 francs de créances hypothécaires.
M e. Croze est en péril d’éviction, dès que le sieur Canillac
a interjeté appel du jugement de Brioude.
A
E n cas d ’é v ic tio n , le sieu r M o m e t d o it fo u rn ir d ’autres
fo n d s en co rp s d e f e r m e , sans p o u v o ir jam ais o ffrir au cu n e
ri
re stitu tio n d e d en iers : la clause est de rig u eu r.
M e. C r o z e , co m m e h é r itie r de la dam e sa m è r e , est
* '^
e n co re en g ag é p o u r le cau tion n em en t p a r elle p rê té à
' ‘
ra iso n d u p a rfo u rn issem en t des en ch ères.
4
M e. Croze n’a d’autre moyen que son inscription, pour
assurer et maintenir l’exécution de son contrat. Quel seroit
donc le m otif qui feroit prononcer la mainlevée de cette
inscription? et comment pourroit-on priver M e. Croze
de la faculté que lui donne la loi ?
'
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., ..„,4 ,
.»Av ■
’
•
V i / 7*
;
1
; 2^9.
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tions existantes. I l est v ra i q u e p a r acte d u 7 m a i 1 8 0 6 ,
ç’e s t-à -d ir e , en cause d’a p p e l, M o m e t a fait sign ifier la
F >•ê ■• •*
'
M o m e t px-étend q u ’il ra p p o rte la m a in le v é e des in sc rip -
^ m a in le v é e d e q u elqu es-u n es des in s c r ip tio n s : ce lle des
'
I dam es d e S a n sa c , q u ’il a p a yée lo rs du p arfou rn issem en t
^
'i '
.
des enchères, est pure et simple; mais celle des frères
G-allic e , il ne présente qu’un jugement par défaut ; et on
sait que les co n serva teu rs 11c peuvent radier que sur un
acte authentique , ou sur un jugement qui a passe en force
de chose jugée : colle du sieur Labaatidc n’est radiée qu’en
*»!>v qq
concerne le tlomaine de Chassaigne; celle des enfans
�(*7 )
.
..
, , 0
de P ierre M outte est donnée par utie tutrice qui n’en a )s. l i o*L
pas le droit; d’autres ne sont quô conditionnelles , sans
expliquer sur quoi porte la condition, et en quoi elle
....................
(i 9
consiste.
•
D ’un autre cô té, il en existe encore une foule d’autres, /
telles que cellede M . la Fayette ; celles du sieur Thom as, du
sieur A ndré ftpudieûC du sieur Denis- J oseph H ibon, du V
sieur Robert-Michel le Normand, du sieur J acques M arie, i
en a fait une sut J
/ r
ceti une
uuc foule
tuuit: d’autres
a autres ;: Momet
iyiuuk-i lui-meme
j.«*
-------------i
#
le domaine de la Védrine qu’il a nominativement ven d u j
m
A
L ’inscription de sa femme sur tous les biens personnels------------------du mari subsiste égalem ent, et est en concurrence avec
celle du sieur Croze. C’est au milieu de tous ces obstacles
que Momet se permet de demander la mainlevée de l’inscriptionde M e. Croze ; et, chose plus étrange encore, c’est
que le jugement dont est appel donne acte ù M om et dô
. ^ ^
ses offres de rapporter la radiation des inscriptions qui /'***’ 7
peuvent exister, et q u e, sous la foi de ses offres, on oblige
M e. Croze à donner mainlevée de l’inscription par lui faite,
qui est sa seule sûreté , l’unique moyen de maintenir l’exé
cution de son contrat.
Momet con vient, page 28 de son m ém oire, qu’il est
obligé de justifier des quittances des c r é a n c i e r s de Canillac ,
pour 4 0 0 0 0 0 f. (assignats), mais il
d i t pas que c est avec
w ..\ X
^
subrogation des créanciers ; ce q u i, aux termes de la loi
\
du 11 frîmaire an 6 , leur donne la même valeui ou le
m
même effet qu’en numéraire. .
1
A la'sù ite, M oniet prétend rapporter des quittances
- ,
excédant de beaucoup la somme promise* On lui deman^
dera ou sont ces quittances ,• s’il les d deposees ou corn,n
e
,
D 2
�( *8 )
muniquées ? mais tant qu’il ne les aura pas fait conn oître, on lui donne le démenti le plus formel. Ce n’est
là qu’ un mensonge impudent , comme s’il avoit espéré
que la cour s’en rapportât à sa parole.
,
Il
est également curieux d’entendre Momet soutenir à
la même page, qu’il n’a pas vendu à M e. Croze les fer
mages de 1795. V oici comment s’exprime le conti-at de
yente du 29 prairial an 4, après la clause générale portant
ven te, où il est expressément stipulé que le vendeur ne
pourra répéter contre l’acquereur l’excédant de la con
tenue , à quelque quantité qu’il puisse se monter. Il est
ajouté, « pour par ledit sieur C roze, ses héritiers et ayans« cause, jouir, faire et disposer du domaine en pleine pro« p riété, et comme de chose leur appartenante, à compter
« de ce jo u r, et en commencer la jouissance par ¡es re« venus etfermages des années iy g 5 et 1796, vieux style;
« le vendeur se réservant seulement les fermages de l’an* nce 1794. »
Telles sont les expressions littérales du contrat, nonseulement dans l’expédition délivrée à M e. Croze , mais
encore dans l’expédition vidimée qui a été imprimée dans
le mémoire.
Il
paroît alors bien étrange que M o m et, toujours à la
page 28 , ait transformé cette clause en une simple fa
culté , et trouve qu’il y est d it, Pourra le sieur Croze
jo u ir, etc. ; de sorte que, suivant lu i, simple faculté pour
le sieur C ro ze, réserve pour Momet ; e t , suivant son
système, Momet n’ayant pas reçu au delà de sa réserve,
M e. Croze doit se pourvoir ainsi qu’il avisera pour cet
objet : Momet n’a rien & faire à tout cela.
�( *9 )
Si ce n’est pas une jonglerie de M om et, une indécente
plaisanterie, il faut croire qu’il extravague. Q uoi! Momet
vend le domaine avec les fermages de 1795*, il vend tout
avec pleine et entière garantie, et il ne doit s’inquiéter
en aucune manière si son acquéreur a joui ou non de
l’objet vendu avec garantie! il ne lui a cédé qu’une simple
faculté de jouir ou de ne pas jouir ! M omet en sera quitte
pour dire qu’il n’a rien touché au delà de sa réserve !
M a is, en matière de vente, toutes les conventions sont
de droit étroit, toutes les conditions font partie du prix :
M e. Croze n’eût pas acheté aussi ch e r, s’il n’eut pas eu
le droit de percevoir les fermages de 1795, qui font un
objet considérable.
11
y a même p lu s, ces fermages dévoient essentielle
ment faire partie de la vente ; le sieur Canillac les avoit
cedes à M om et; et dans l’affiche que ce dernier a fait
1
poser, affiche dont M e. Croze est porteur, qui est écrite Ç
de la main du clerc de M om et, il y est dit expressément
'
,
que la récolte de l o f a i t partie de la vente.
Dans l’acte sous seing privé qui a précédé la v e n te
'
authentique, Momet a vendu expressément cette récolte
de 1795. Peut-on en imposer ainsi à la justice, et se jouer
de ses obligations ?
Momet n’a donc rempli aucun de ses engagemens ; il
,
ne rapporte aucunes quittances ; il ne justifie point des
ladiations; son acquéreur n’a pas joui des objets vendus;^—/
la dame Croze n’est pas libérée de son cautionnement
Mornet a. affiché son insolvabilité par une s é p a r a t i o n ùoJb&zr
de biens avec sa femme; ses propriétés sont vendues ou
hypothéquées; il y a péril d’éviction : donc M°. Croze
�(36î
a été dans la nécessité la plus urgente de prendre ses
précautions ; donc son inscription doit être maintenue, ft*1*
M ais, oppose M om et, je ne puis pas être continuel
lement dans les liens d’une inscription : transcrivez votre
contrat; et si, après la transcription, il existe encore des
inscriptions sur moi ou sur le premier vendeur, j’en rap
porterai la mainlevée.
T r a n s c r iv e z v o tre c o n tra t! P o u r q u o i le sieu r M o m e t
.
v e u t- il e x ig e r q u e M e. C r o z e s’assujettisse à u n e fo r m a lité
co û teu se et m u tile ? D ’a b o rd sa v e n te est a n té rie u re à la
'
lo i d u i i b ru m a ire an 7 : on p u r g e o it alors les h y p o
th èq u es p a r des lettres de ra tifica tio n ; m ais ce n’é to it là
q u ’u n e sim p le fa cu lté q u ’a v o it l ’a c q u é r e u r ; il a v o it le
d r o it de se co n te n te r d ’u n e sim p le o p p o sitio n à fin de
co n se rv e r.
-V *
I i
. *
1
t
ls
» _/
Telle est aussi la convention de la vente; M e. Croze
a n’a pas voulu y être assujetti.
x'
,*
« Sera loisible audit Croze dVbtenir des lettres de rati\
« fication, etc. » M om et, qui n’y voit pas plus lo in ,
semble vouloir prendre le contre-pied de toutes les conventions; tantôt il transforme un droit évident en simple
, :
\ f a c u l t é tantôt une simple faculté en un droit coactif.
Qn ne peut pas plus, complètement déraisonner. En gé, néral tout acquéreur a le droit de faire une inscription
conservatoire pour sa garantie : l’édit de 1771 l’y aute
**
risoit, la loi du 11 brumaire an 7 en a une disposition
précise.
Il
y a celte différence entre les deux lois, c’est qu e,
dans la prem ière, l’obtention des lettres de ratification
étoit toujours facultative, tandis q u e, d’après la loi du
�( 3 0
i i brumaire, la transcription étoit le complément de la
Vente, en faisoit partie essentielle : on ne pouvoit opposer
le contrat à des tiers qu’autant qu’il étoit transcrit.
Cependant on n’a jamais dit que le vendeur pût forcer
son acquéreur à transcrire ; et Momet a bien mal choisi,
en citant ù l’appui de son système l’arrêt rendu en la cour,
le 25 prairial an 1 1 , dans la cause du sieur Choussi contre
le sieur Gardelle.
Cet arrêt, rendu sur la plaidoirie de M M . Vissac, et
Pagès (d e R io m ), a jugé tout le contraire de ce qu’on
lui fait dire. L e sieur Choussi avoit vendu une propriété
au père du sieur Gardelle : le vendeur offroit une grande
solvabilité; cependant G ardelles’avisa, par contrariété,
et sans aucun but utile, de faire une inscription conser
vatoire contre le sieur Choussi.
Cette inscription arrêtoit toutes les transactions com
merciales du sieur Choussi ; il demanda et obtint la ra
diation des juges d’Ambert.
Sur l’appel interjeté par G ardelle, M e. Pagès, conseil
de Choussi, s’aperçut qu’il existoit des inscriptions bien ou
mal fondées sur le sieur Choussi ; il conseilla à- celui-ci
d’en obtenir la m ainlevée, et de la rapporter avant que
la cause fût plaidée.
L e sieur Choussi l’obtint en effet ; et sur le rapport de
la radiation de toutes inscriptions , la cour conliima le
jugement d’Ambert. Mais comme le sieur Choussi ne
s étoit pas mis en règle en cause principale , qu il ne rapportoit la mainlevée qu’en cause d’appel, la cour jugea
que Gardelle avoit pu refuser la mainlevée jusqu’au rap
port de la radiation. E u conséquence, quoique le sieur
,
^
�C 32 )
Ghoussï gagnât son procès, il fut condamné en tous les
dépens.
Comment Momet est-il assez imprudent pour citer un
préjugé directement contraire à sa prétention ? M e. Croze
comptoit aussi tirer de grandes inductions de cet a rrê t,
qui juge solennellement que tant qu’il existe des inscrip
tions sur le vendeur , l’acquéreur a le droit de maintenir
un acte conservatoire.
Il
est donc démontré ju sq u ’à l’évidence , que l’inscrip
tio n de M®. Croze doit être m ain ten u e. Si Momet trouve
qu’elle est e x a g é r é e , qu’il en demande la réduction, et
alors on e x a m in era si sa proposition est raisonnable; mais
ju squ e-là tout ce qu’il a dit et écrit choque trop ouver
tement les principes et la raison, pour que la cour puisse
balancer un seul instant.
Ce qu’on vient de dire pour l’inscription s’applique par
faitement à la saisie-arrêt ; aussi Momet s’est-il contenté
d’attaquer cette saisie comme irrégulière, sur le fonde
ment que M°. Croze n’avoit pas de titre authentique , et
qu’on ne pouvoit faire procéder à une saisie sans titre.
Quoi ! M°. Croze n’a point de titre qui l’autorise à faire
une saisie-arrêt! Qu’est-ce donc alors que son contrat dè
•vente, par lequel Momet s’oblige de rapporter les main
levées de toutes inscriptions, de justifier d’un payement
de 400000 fr. avec subrogation, de garantir sa vente, de
faire jo u ir, etc., etc., etc. ?
Le cautionnement de la dame Croze , l’acte de soumis
sion de caution , ne sont donc pas encore un titre suffisant.
L e sieur M om et, il faut en convenir, est dans un grand
embarras, une .grande pénurie de moyens, ‘puisqu’il est
réduit
�( 33 )
réduit à parler contre l’évidence , et rappelle à cliaqite
instant cet ancien adage , « qu’il vaut encore mieux- dire
« une sottise que de ne rien dire du tout. »
§. I I .
M*. Croze d o it-il se libérer dans Vinstant même de
ce qu'il reste devoir du billet de 19650 fr. ? D o it-il
les intérêts du montant de ce billet depuis lu rente
I
du 29 prairial an 4 ?
La libération du sieur Croze de ce qu’il reste devoir
sur le billet dont il s’agit, n’offre pas de difficulté. M e.-Croze
a toujours offert de compter avec le<.sieur M om et; il a
demande le rapport du billet, pour y émarger les quit
tances de toutes les sommes qu’il a payées à compte; et ¿2V«on a déjà vu que le résultat prouveroit qu’il s’est à peu ^
'
près libéré par anticipation. Mais M®. Croze exige , con'•
formément à l’article 1663 du Code c iv il, que le ’ sieut?
Momet donne préalablement une caution suffisante pour
^
la totalité du p rix , et ne fera aucune autre réflexion ; il
n’a pas besoin d’ajouter que, dans l’état où il en est avec lo
sieur M om et, la caution doit porter sur la totalité du p rix ,’
)
I
ainsi que la cour l’a jugé par son arrêt rendu au provisoire.
■
Relativement aux intérêts de la somme déposee, le sieur
I
Momet n’avoit pas observé que le billet comprenoit les
I
intérêts de deux ans ; il avoit cru devoir reclamer les
I
intérêts delà somme totale du jour de la vente. Si M e. Croze
etoit capable d’équivoquer sur l’objet ou la cause du billet,
J
il diroit qu’alors le sieur Momet ne vouloit pas qu’onI
E
�( 34 )
•pût penser que cet acte avoit quelque connexité avec le
prix de la vente ; car il exigea que le billet ne fût pas sous
la même date. La vente est du 29 prairial, le billet est du
i 5 du môme mois; il y a bien évidemment novation, et
le sieur Momet sciemment a renoncé au privilège du
vendeur, en dénaturant sa créance.
Il
a même renoncé aux intérêts de droit; et cette abdi
cation a fait partie des conventions, et déterminé les par
ties sur la nature et la forme d’un billet qui avoit pour
objet, d’une part, d’assurer le payement en num éraire, de
l’autre , de laisser entre les mains de l’acquéreur un gage
qui pût le x'assurer sur le maintien de l’exécution de la
vente.
L e sieur M om et, qui, comme on l’a dit, avoit demandé
les intérêts de la somme totale ; q u i, pendant deux ans,
avoit tenu le même langage, est enfin convenu, à la veille
du jugement, qu’il avoit compris deux années d’intérêts
qu’il consentoit de déduire ou allouer sur la somme prin
cipale, qu’il réduisoit alors à 18000 francs.
Cet aveu du sieur Moxnet est précieux dans la cause.
Il ne faut pas perdre de vue que le terme de la libération
de M e. Croze etoit au tnoins de deux ans. O r , il est
de principe que tant que le terme de la libération n’est
pas échu , le débiteur même d’un prix de vente ne doit
pas d’intérêt. Pothier le décide ainsi dans son Traité du
contrat de vente, tom. i cr. , png. 297. « On décide corn
et munément, d it-il, que l’acheteur 11e doit pas d’inté« rêfs pendant le temps du terme qui lui est accordé
« pour le payement du pn x , quoiqu’il jouisse pendant
« ce temps de l’iiéritage; et quand il y auroit du doute,
�( 35)
« ïl doit s’interpréter contre le vendeur. » Potliier cite
Fachin , Govarruvias, etc.
En faisant l’application de ce principe à l’espèce par
ticulière, il y avoit entre les parties un billet de dépôt;
et on ne contestera pas sans doute que le dépôt valoit terme
jusqu’à la demande. L e même auteur Pothier, Traité du
d ép ô t, chap. 2, sect. i re. pag. 39, n°. 45 , art. 2, enseigne
qu’une somme d’argent déposée ou donnée à titre de
dépôt, ne produit pas d’intérêts; le dépositaire, tant qu’il
n’a pas été mis en demeure de la rendre, ne doit aucun
interet : TJsurce in depositi actione sicut in ccetens bon ce
Jidei ju d ic iis , ex mora venire soient. L oi 2, cod. Depos.
L e titre du sieur M omet est un billet de dépôt : la
procuration qu’il a donnée, la demande qui a été formée
en vertu de cette procuration , ont pour objet un billet de. .
dépôt, et la réclamation de la somme déposée. Ce n’est 1 £?
p (is lo iig in e , c est le titre qu’il faut examiner : le titre
est le résultat de la convention, et la convention doit
s’exécuter.
L e sieur Momet a reconnu la convention , en p ren an t
poui titie un billet de dépôt; il l’a reconnue en y co m
prenant deux années d’intérêts.
Si la somme eût dû produire des intérêts de sa nature,
il n y auroit pas compris ces deux années; et s’il s y est
déterminé , s’il a choisi cette form e, il « senti > a su
qu’après les deux années, il seroit nécessaire de former
une demande pour faire produire légalement des intérêts.
L e sieur Momet n’a pas même élevé de doute à cet
égard. Par une lettre en date du 27 thermidor an 6 ,
adressée à M c. C ro ze, il le prie de lui faire passer de
E 2
^
�( 36 )
l’argent,'en lui observant que l’argent est à Paris au meil
leur m arché, à deux pour cent par mois; et il ne vou
drait pas payer des intérêts, lorsque M ‘. Croze ne lui
en paye pas ; il remet tout cela c l sa justice.
E t M e. Croze dans ce temps-là payoit des à-comptes :
Croze ne pouvoit divertir les deniers ; il devoittoujours avoir la somme prête; car le dépositaire est néces
sairement astreint à se libéi’e r , du moment qu’on veut
exiger la somme.
r
Ce n’est point ici un dépôt irrégulier, c’est-à-dire, un
acte qui autorise le dépositaire à se servir des deniers ;
c’est un dépôt pur et simple: l’argent n’est pas censé sorti
des mains du dépositaire pour en tirer p arti, il faut qu’il
le conserve , et qu’il soit toujours prêt à le rendre ; donc
il ne doit d’intérêts qu’autant qu’il serait en retard de
verser à la première sommation,
I
►
(¡,
■f
1
I
;<
i
i
§. I I L
u
• ■
I
M e. Croze a -t-il le droit de demander une indemnité
{l raison des avances qiCil a fa ite s pour le sieur
M om et ?
' \
»•
»
r
L e sieur Momet ne peut pas disconvenir qu’il avoitr
\ Une entière et juçte confiance en M®. Croze; qu’il lui
donna une procuration , à la suite.dç la ven te, pour régir
et administrer, et qu’il abusa souvent de la complaisance de son, mandataire, qui n’a. épargné ni sa bourse
ni ses peines pour obliger son mandant..
sieur Momet: prétend n/avoir donné celte prociv-.
;
-! i ,
!
' 'T J
.
»*W-* ^
vp
*•
^
U
^
y,
^
^
�( 37 ) _
ration à M e. Croze que pour l’obliger ; il ajoute que cette.
procuration étoit même inutile, dès qu’il y avoit une vente
authentique.
■
•
. Si la procuration n’avoit d’autre objet que l’exécution
a,
v de la vente, le sieur jVlomet auroit raison , et M e. Lroze
seroit le premier à le reconnoître.
. /
Mais c’est encore une petite inexactitude de M omet..
1°. Lu procuration est antérieure à la vente. 2°. Par l’acte
sous seing p r iv é , il s’étoit obligé de fournir cette procu
ration , pour faire remplir iï sesfr a is les objets qui étoient
à sa charge. 30. Elle étoit indispensable pour toutes les
' j
affaires que Momet avo.it encore avec les créanciers de /
M. de Canillîic, et M e. Çroze, pour les term iner, a fait
deux voyagesde Paris dans son département, vingt voyages
au moins au P u y , pour s’occuper exclusivement d’affaires
personnelles au sieur Momet.
C est ce que ce dernier a reconnu souvent par une cor
respondance suivie et multipliée. Que de peines in fn ies
« cela ne vous donne-t-il pas ( écrivoit-il à M®. Groze
i-j»,
« le’ 16 messidor an 6 ) ; je suis bien heureux de vous
« avoir la ; sans vous , que serois-je devenu avec cette
t-__
« bande d’archers et de iiloux ! Mais vous êtes là , je suis
£__
» tranquille à cet égard; vous en viendrez à bout. »
j
Dans une foule d’autres lettres, il rem ercie M°. Croze
de tous ses soins; et la meilleure preuve q u ’il n a pas cru
donner une procuration inutile , c’est que le 29 brumaire
Uan 9 il a révoqué la procuration q u ’il avoit donnée à
M®* ^‘roîîe5pour la remettre au sieur Fabre : donc il sen/
toit la nécessité d’avoir un m andataire sur les- lieux.
Q u on lise d’ailleurs cette p r o c u r a t i o n imprimée au
�( 3^ )
^
^
/
7
mém oire; on y verra M e. Croze autorisé à poursuivre
**7
’ tous les débiteurs de M o m et, faire toutes diligences ,
former demandes, comparoître au bureau de paix, etc.
Ce mandat général ne pouvoit avoir pour objet la jouis
sance de la terre de Chassaigne. Enfin le sieur Momet a
si souvent répété ce mandat dans toutes ses lettres , qu’il
n’est pas permis d’équivoquer.
/
^
Et sans doute, quelque juste que soit cet objet de de-fr __mande, quoique la procuration soit dirigée sur une mul
titude d’objets, M e. Croze se seroit peut-être déterminé
à en faire le sacrifice, s’il ne s’étoit aperçu que le sieur
1______ Momet vouloit qu’il fût sa dupe.
Quoi ! contre la foi prom ise, contre la nature de son
titre , le sieur Momet s’avise de demander les intérêts du
dépôt depuis la vente! Le sieur Momet arrive, prend des
actes de voyage, en fait prendre par le sieur de Canillac,
et veut ainsi mettre à contribution M e. Croze, qui jus
qu’ici avoit fait pour lui des voyages coûteux, sans en
répéter le montant.
Pourquoi Me. Croze seroit - il ainsi dupe du sieur
►
Momet ? En quoi sa délicatesse scroit-elle blessée , lorsy*
qu’il réclame le remboursement de ses avances? Celui qui
•
^
affaires des autres doit être indemnisé; l’équité ne
'
permet pas qu’on profile des dépenses d’autrui, et l’équité
l ’emporte sur toutes les subtilités. T el est encore le langage
'*
f i '* * * ’ de Polluer , du quasi contract. negotiorum gestorum ,
sect. r , p ag. 336.
• ''
M e. Croze n’a pas besoin d’insister sur le clief de demande qui a pour objet la remise des titres de propriété;
Momet s’y est expressément obligé par son contrat : celle
�C 39 0
obligation est irlême de droit. Momet prétend les avoir ^
offerts à l’audience ", M e. Croze ne les a ni vus, ni retirés.
yrj A
iCe n’est
11 l. 4 pas
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-v«lrf à
M l’audience
I^ft«« */I rt/\ «qu'on
11 n peut
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/ l^f1O1* il
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4
*
*1
•
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n
«
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y
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des titres;
ils doivent être communiqués et déposés, soit au greffe, ^
soit chez un notaire.
Momet s’est aussi permis de reprocher à M e. Croze
d’avoir excédé la procuration du sieur Canillac; procu- 0 ua
ration donnée par lui pour raiiiier la vente de Chas.saigne, qui a été remplie par le sieur Cailhe, et qui a
compris dans cette ratification le lieu de la V éd rin e, quoi.qu’il ne fût pas exprimé dans la procuration.
L e sieur Momet a donc oublié ce qu’il mandoit à
M e. Croze par sa lettre du 5 messidor an 6. « I^a ratifi« cation contenue en la procuration, et la ratification
« qu’on peut faire d’abondant, en vertu de cette procu« lation , pareroit au vice qui pourroit exister dans la
« vente, à cause de l’émigration.
. « S i vous n'avez pas f a i t fa ire la ratification dont
« e s tquestion, en vertu de la procuration, je p e?iseq u lî
« estu ïsta n t de la fa ir e bien m otivée, parce quêtant
« postérieure à la loi sur les lésions, elle pourra parer
« au x friponneries de * * * * * à ce sujet. Il est à propos
« qu’elle soit d’une date antérieure à tout ce que p o u r r o it
w faire Canillac à ce sujet. Je vous engage à lui donner
w la date la plus ancienne que vous pourrez. »
/ i^
M e. Croze pouvoit-il avoir dans l’idée qu’il y eût du
doute sur la Védrine? Il lui étoit n o m in a tivem en t vendu : '
le sieur Canillac n’avoit pas réclamé. Ce n’est que plus de
trois ans après qu’il s’est pourvu; et ce n’étoit pas excéder «^ 4 *7
la procuration, que de faire concorder la ratification avec
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^ 4°
l a vente consentie à M e. Croze , d’employer les mêmes
termes du contrat.
M®. Croze terminera ici la discussion d’une cause devenue fastidieuse, mais nullement embarrassante dans sa
décision.
L e sieur Momet auroit dû se renfermer dans les moyens
i
de fait et de droit, et surtout se déiendre toutes person
nalités.
> i'
Cependant il a eu l’audace de répandre un pamphlet,
l
de colporter chez les magistrats un écrit injurieux, où
<•', t'1’
il accuse M a. Croze de prévariquer dans sesfon ction s.
C ’est l’injure la plus grave , la plus atroce, qu’on puisse
, , " .
faire à un fonctionnaire public. Jusqu’ici M e. Croze a
.
^ y, m é r i t é la confiance et l’estime de ses concitoyens : appelé
'
par eux aux premières, aux plus honorables fonctions,
- ‘ 'ï/ju—*•—>
sa conduite fut toujours digne d’éloges.
|Comme tous ceux qui-ont obtenu des succès, il a fait
■ '1 -,
des ingrats et des jaloux : mais ses ennemis même ont au
‘ J
moins reconnu son intégrité, et ne lui ont jamais i*e> .> f i * - ^
proche de manquer à ses devoirs, ni de prévariquer. ’
M®. Croze doit obtenir une réparation éclatante dô
■
.-v
cette injure ; il se propose de la demander lors de la
•'.V
plaidoirie de la cause.
Il
avoue que l’inculpation de Momet lui a
t
extraordinaire, qu’il ne sauroit comment expliquer cette
;/
incartade, dont un homme de cette sorte 11e connoît
*11
pas la force.
/ .f
Momet n’est entré dans aucun détail. Quelques par•,U>J'
ticuliers ont appris à M®. Croze que Momet s’éloit plaint
d’avoir éprouvé un retard dans la liquidation d’un»
creancc
�( 41 )
.
créance nationale, et ne manquoit pas de l'attribuer à
M e. Croze, sous-préfet.
C ’est une grossière imposture lancee par
omet ,
M
contre sa propre connoissance , il veut parler sans d
oute
de la rente due aux dames de la V aud ieu, et qui forme
en principal un objet de 5oo francs.
Il
s’est adressé directement, pour la liquidation , à
M . le préfet de la Haute-Loire -, il l’a obtenue de l u i ,
sans que cette opération ait été communiquée a la sous
préfecture de Brioude.
Ces sortes de liquidations ne passent point par le canal
de la sous-préfecture. M e. Croze a ignoré les démarches
de M om et, et n’en a été informé que long-temps après
que la liquidation a été terminée.
M e. Croze fait ici sa déclaration, non pour se justi
fier ; il ne doit compte de sa conduite en administration
qu’à ses supérieurs : mais il n’a voulu laisser aucun louche
dans sa défense, et finira par rappeler ce que dit Tacite:
Calumniatores, genus hominum nunquam panis satis
coercitum.
Signé C R O Z E .
Me. P A G È S ( de Riom ) , ancien
Me. V E R N I È R E ,
avoué
a v o ca t.
licencié.
A RIOM ; de l’imprimerie de L andriot , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1806.
�
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Factums Marie
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Croze, Jean-Joseph. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Croze
Pagès
Vernière
Subject
The topic of the resource
actes frauduleux
fraudes
Polignac (famille de)
domaines agricoles
ventes
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour maître Jean-Joseph Croze, ancien avocat, ex-législateur, sous-préfet de l'arrondissement de Brioude, appelant et intimé ; contre le sieur Gaspard-Roch Momet, homme de loi, habitant de la ville de paris, intimé ; et encore contre le sieur Ignace Montboissier-Beaufort-Canillac, habitant de Paris, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1791-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0523
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Paulhaguet (43148)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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actes frauduleux
domaines agricoles
fraudes
Polignac (famille de)
ventes
-
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MEMOIRE
A CONSULTER.
*
E N l’an 12, le sieur Blanchard , mon beau-frère, teinturier
à R iom , voulut s’associer avec le sieur Castillon , propriétaire
de cette ville, pour l’exploitation d’un cylindre à indiennes,
qu’ils achetèrent en commun au sieur Dufour , serrurier, de
meurant à Paris.
Dom icilié moi-même à Paris, je consentis, pour obliger mon
beau-frère , à cautionner le payement de sa m oitié, vis-à-vis du
vendeur et ce vendeur exigea encore que le sieur Castillon
vînt certifier ma caution.
- L ’acte, passé à P aris, sous signatures privées, le 18 prairial
an i i , est ainsi conçu :
« Nous soussignés, M ichel D ufour, serrurier machiniste, rue
de la J uiverie, n° 27 , à Paris,
« Pierre Blanchard-,-teinturier, habitant de la ville de R iom,
département du Puy-de-Dôm e, autorisé par le sieur Castillon,
d e présent à R iom , qui a promis de trouver bon et de ratifier
les conventions suivantes,
A
�. ¿ tie n n e Castillon, propriétaire de la ville de R io m , dépav-
tCI^ E t Jean -B ap tiste Assollant, rue de la Vieille-Draperie, n ” 4 7,
, Sommes convenus de ce qui suit; savoir: que mo, M .cliel
D ufour promets et m’oblige de construire, faire condui r e ^
mettre en place un cylindre suivi de tous les agrès nécessaires a_
t r ^ n r r ^ T ^ d r e r les toiles de coton, fiy a m s j £ j a i M e „„-ïTitTSÏÏe largeur j u s q ^ H ^ ' u n e a m ^ s trois rouleau^.
Æ S 5 t S ™ r , celui du m i li e u ^ S ^ iv r e T a c quarante-cinq
nonces v s ,le s deux autres en papier, à la façon anglaise;le
tout bien co n d itio n n é , et dans toutes scs proportions, afin 'qu’il
puisse cylindrer de la première qualité: de faire aller ledit cy¡indl.e p nr eau avec la même roue d’un moulinJarinier ou rnailmii me sera fournie par lesdits Castillon et Blan^FnrrnTdê fournir iQut .ce qui sera nécessaire pour ladite mécatouFconduit et placé dans l’espace de quatre mois, h
compter de ce jour: le q u e l cylin d re je garantis pendant un an
entier- d’après lequel temps, étant bien conditionnedans toutes
ses parties, je n’aurai plus aucune responsabilité; et en ce qui
concerne la.conduite, elle sera aux frais des acquéreurs, qu’ils
pnyeront aussïïôTreçu ; il sera conforme à celui que j’aïTirproportion de sa grandeui .
« L e prix dudit cylindre sera de la somme de huit mille six
cent ^î-vnnrp.-seizc livres dix sousa rg e g t, tournois , de laquelle
swnm cnwTCastillon promets et m’oblige de faire passer, par
lettres de change ou autrement, en la demeure du sieur Dufour,
à Paris s«*;»«», la somme de quatre mille trois cent trente-huit
livres cinq sous , savoir, celle de deux milllrcent-st.i^ïrÆ-neuf
livres deux sous six deniers, daii^ un a n , a comptei du jour
que le cylindre sera en état de travaillci, et celle de deux mille
cent soixante-neuf livres deux sous six deniers , un an après ,
avec rintéret à raison de six pour cent, sans aucune retenue.
�« A l’égard des quatre mille trois cent trente-huit livres cinq
sous, restans, pour parfaire celle de huit mille six cent soixantesçise livres dix sous,
. « M oi Blan^iajdjtïi’oblige et promets de payer ladite somme
audit sieur D ufour, audit domicile^mêmes espèces¿ payeinens
ç[ug.dessusa afin qu’au jit terme de deux
ans il ne soit ríen dû audit Dufour.
« E t moi Jgan-Baptiste Assollant, promets et m’oblige qu’en
casaque ledit Blanchard ne pût payer la totalité ou partie des
^
quatre mille trois cent trente-huit livres cinq sous, aux termes CaH+V+w *Ci-dessus , a p rèstoutes p oursuites faites . dans ce cas seulenient, je promets et m’oblige de payer audit Dufour les sommes
qui pourroientlui êtredues par ledit Blanchard, que je cautionne.
Castilloiïf^cn outre, dan^ïe cas où ledit Dufour ^
n e p û t être payé en tnut où en paati-eipnHtrsitur Blanchard, et^P
^
sieur Assollant, sa caution, aux échéances dites ci-dessjjs, après
«
toutes poursuites fa ite s, dans ce cas seulem ent, jawdengage et
promets d’acquitter au sieur Dufour le restant du prix ou la totalité , avec les intérêts, au même prix; alors ledit cylindre lui aj>
partiendra en son entier, sauf à lui de rendre néanmoins ce qui
auroit été payé par ledit Blanchard en principal et intérêts, les
dommages-intérêts qui pourroient être dûs audit Castillon à cause
de non-payement, déduits; en ce cas seulem ent, ledit Castillon
sera libre de faire vendre ledit cylindre ,^pour le"~prix enfproVenant être payé au sieur D uiour, jusqu’à concurrence de ce
q u i lui seroiPaû, le surplus seroit payé et rem boursé à celui qui
auroit le plutôt satisfait à ses engagemens, et le restan t, s’il y en
avoit, à celui qui, par sa faute, y auroit donné lieu. Néanmoins,
ce qui pourroit rester dû au sieur D u fo u r, de la part du sieur
Blanchard (fitsii ca u tio n , n e pourra être exigible centro ledit*
qu’un an après les deux axis expirésTqtti
pgw etttovp+Hjno,
�r
« Nous P ierre Blanchard et Etienne Castillon, fournirons et
payerons les maçons et matériaux, chaux, sable et pierres qui se
ront nécessaires audit D ufou r, pour le placement dudit r.ylfp.
dre. 11 est convenu entre les parties qu’en cas q*K»Îesdi(s Castillon et Blanchard veuillent avancer le terme de leur payementledit Dufour s’oblige à leur faire une remise cfe douze pour r.pn t
J «tesd its Castillon et Blanchard s’interdisènt la faculté, jusqu’à
parfait payement dudit cylindre, d’en exiger la ven te, même en
cas de mésintelligence entr’eux; mais une fois p ayé, ils se réser-.
* vent respectivement le droit, en cas d’incompatibilité, de de
mander et faire effectuer la venté dudit cylindre, et d’en partager
le prix , à l’exception néanmoins, qu’en cas de défaut dé paye-*
ment dudit Blanchard, il sera libre audit Castillon de le faire ven
dre , p o u r, du prix enjprovenant, fiftir de paya^letliH ifeii*^
(^ e q u i p o u r r o i t 4« ^ » * ^ d
« Jiait Jnple entre nous, sous nos signatures privées, présens,
à Palis les.siçjiî’SDufoux-, Assollant et Blanchard, ledit Castillon
devant signer en son domicile, le 18 prairial an 11.
Signé, Dufour, Assollant et Blanchard. ,,
Rien de plus clair que la nature de l’obligation que j’ai con
tractée; rien de mieux désigné que la personne envers laquelle'
je me suis obligé, et de mieux précisé que l’événement et la>
condition de mon obligation.
C ’est à Paris que j’ai cautionné le payement d’un objet mo
bilier.
C ’est envers le sieur D ufour, domicilié à Paris, que je me suis
obligé.
C ’étoit faute de payement aux termes convenus, et après
toutes poursuites faites, dans ce cas seulement} cikti’acte que
j’étois obligé de- payer au sieur Dufour les sommes qui-p o u r '
roient lui être dues par le sieur Blanchard.
. ...
�(5 )
L ’obligation du sieur Castillon envers le sieur Dufour étoit
d’abord de payer sa moitié du prix du cylindre, et quant à l’autre moitié, l’obligation dépendoit de deux événement.
L e prem ier, du non-payement aux échéances.
L e second, de poursuites faites contre Blanchard, et contre
m oi, sa caution.
On examinera bientôt si le sieur Castillon n’a pas changé
volontairement la position des choses, et s’il n’a pas amené l’im
possibilité de réaliser les conventions. Il faut remarquer d’abord
il'
que le premier terme de payement étoit fixé au dix-huit prai
rial an i a , et que le trente frimaire an 12 , a été passé entre le
sieur D ufour, le sieur Castillon et un sieur A lb ert, qui n’est
point en cause, un acte dont je me suis procuré la connoissance.
2f
----Cet acte, sous signatures privées, est ainsi conçu :
« Nous soussignés, M ichel D u fo u r, serrurier, et Etienne
?"
Castillon, propriétaire, et Claude A lb ert, négociant, tous deux
habitans de cette ville de R io m , sommes convenus de ce qui
suit :
« M oi D ufour, reconnois avoir reçu de M . Castillon seul, et
de ses deniers , la somme de huit mille six cent soixante seize
livres dix sous , pour le payement par anticipation du prix du
cylindre par moi vendu au sieur Castillon et à Pierre Blanchard,
teinturier à Riom. En conséquence, je tiens quitte ledit Castil
lon de ladite somme , et Je subroge , sans néanmoins aucune
priorité à la subrogation ci-après, en tous mes droits contre le
citoyen Blanchard et Jean-Baptiste Assollant, sa cautiflS^ je lui
donne pouvoir de se servir de mon nom pour la répétition de
lu moitié de ladite somme de 8,676 livres 10 sous et intérêts •, et
attendu néanmoins que dans cette somme il y est entré celle de
7>°oo livres, prêtée audit Castillon par le citoyen A lb ert, moi
-Qüj^ur, du consentement dudit Castillon, subroge ledit citoyen
A lbert en tous mes droitssur ledit cylindre, jusqu’à lu libération
�(6)
^litière dudit Castillon envers le citoyen A lb ert, des effets de
commerce jusqu’à la concurrence de la somme de 7,000 livres,
“ .a a tirés cejourd’hui au profit d* ce dernier. D ém o n co té,
^ o i A lbert, en acceptant la subrogation faite a mon proüt, dé
claré que sans cette condition je n’auro.s pas prêté ladite somme
'„ d it Castillon-, et reconnois que pour le plein et entier effet
d’icelle, j’ai demeuré dépositaire tant du double du citoyen D u
four, que de celui dudit Castillon. Fait triple entre nous a Riom ,
sous nos signatures, le 3o frimaire an,
de la république fran' caise Si,rn é , A lbert, Dufour et Castillon. ”
•
3 Cette convention sembloit mettre le sieur Castillon aux droits
du sieur Dufour-, et en ne supposant pas, ce qui paroîtroit dé
montré, que le sieur Blanchard a paru sous le nom du sieur A l
bert pour prêter les fonds, ou que depuis, au moins, il a rem
bourse sur les produits du cylindre l’avance faite par le sieur
* Castillon, dans le désir de profiter du bénéfice de la remise de
douze pour cent, il est établi du moins que les conditions du
traité de l’an 11 devoient toujours s’accomplit.
C ’est ce qui n’eut point lie u , et le 18 prairial an 12, terme du
premier payement, et le 18 prairial an i 3 , terme du second
L v p m rn t s’écoulèrent successivement sans aucune réclamation
contre le sieur Blanchard, ni de la part du sieur D ufour, désin
téressé par l’acte de frimaire an 12, ni de la part du sieur Castillo n , qui paroissoit à ses droits. .
O n n’a point constaté que le sieur Blanchard ne vouloit point
....
payer~aux termes convenus. ..... .. ............ ......
Il n’a été exercé aucunes .gpursuites a u ^ v e i W p o q u w d e
payem ent, pour constater l’insolvabilité actuelle du débiteur.
Je me suis procuré la connoissance d’un autre acte sous seingp riv é , en date du 1 3 brumaire an i 3 , foit entre le sieur Dutour,
lesîeu r Castillon et le sieur Blanchard ; cet acte est ainsi conçu :
' « Par-devant, etc. ont été présens Pierrc-M icliel D ufour, ser-
�( 7 )
rurier-machiniste, habitant à Paris, rue de la Juiverie, n°. 27,
d’une part ;
L t Etienne Castillon et Pierre Blanchard, propriétaires, habitans de la ville de R iom , d’autre part.
Lesquelles parties ont dit que par acte sous seing privé, du
18 prairial an 1 1 , le sieur Dufour avoit vendu auxdits sieurs Cas
tillon et Blanchard un cylindre suivi de tous ses agrès, bien
conditionné dans toutes ses proportions, ainsi qu’il est plus au
long expliqué audit acte, que ledit sieur Dufour devoit garantir
pendant une année entière, ù compter du jour de sa mise en ac
tivité; que peu de temps après que le cylindre eut été posé, l’un
des rouleaux éprouva quelque défectuosité, et que le second
avoit cassé, ce qui avoit donné lieu à une réclamation judiciaire
de la part des sieurs Castillon et Blanchard, contre le sieur D u
four , qui avoit été portée au tribunal'de commerce de R iortl,
Pa r exploit du 7 v en d ém iaire an i 3 ; que le d it sieur Dufour ayan t
réparé le prem ier rouleau, et remplacé le second, il ne restoit
plus qu’à faire prononcer sur la garantie promise et sur les domuiages-intérêts que lesdits sieurs Castillon et Blanchard prétendoient leur être dûs. Comme ces contestations auroient donné
lieu h des frais considérables et à des voyages dispendieux, sur
tout par l’éloignement-du sieur D ufour, les parties, pour les évi
ter , et pour leur tranquillité réciproque, on t, de l’avis de leurs
conseils , traité et transigé par transaction sur procès, ainsi qu’il
suit :
.
A rt. Ier. — L e sieur Dufour s’oblige de délivrer, dans son niq^ ,
gaein à Paris, dans cinq m ois, à compter de ce jou r, auxdits
sieurs Castillon ot Blanchard, un rouleau en papier, bien condi
tionné, et conforme au dernier reçu, q u i a été posé le i3 du
courant, et qui a trois boulons.
Airr. 2.— A u moyen de laquelle délivrance ledit sieur Dufour
demeurera -entièrement dégagé envers les sieurs Castillon et
�'(
8
;
Blanchard, à compter de ce jour, tant de la garantie promise par
l’acte dudit jour 18 prairial an x i , que par celle de rouleau à
recevoir.
"
:
En conséquence, les parties promettent de ne plus le recher
cher directement ni indirectement pour raison de ladite garan
tie, ni pour le passé, ni pour l’avenir.
A rt. 3 . — A u moyen des conventions ci-dessus, et en faisant
par le sieur Dufour la délivrance du rouleau dont il s’agit, aux
termes ci-dessus stipulés, tous procès intentés et à intenter entre
les parties, pour raison tant de ladite garantie que pour dommages-intérêts, demeurent éteints et assoupis, sans autres dépens de
part ni d’autre.
Nous soussignés, dénommés en l’acte ci-dessus et de l’autre
part, après en avoir pris connoissance, l’approuvons dans tout
son contenu, et promettons l’exécuter selon sa forme et teneur.
Fait triple entré nous, sous nos signatures, à R iô m , ce i 3
brumaire an ï 3.
...
^ — ;;---Signé, Blanchard, Castillon et Dufour. »
Cet acte donne lieu nécessairement à plusieurs observations
et le conseil examinera quelles sont les conséquences qui en dé.rivent.
On remarque, d’abord, que je ne suis point partie dans cette
transaction, où les sieurs Castillon et Blanchard renoncent envers
Dufour à la garantie promise par l’acte du 18 prairial an n et
y dérogent en ce point.
On voit qu’il n’est question dans cet acte d’aucune réclamation
possible de la part du sieur D ufour, contre le sieur Blanchard
et qu’il est payé intégralement du prix du cylindre.
Si, au contraire, il existe une action possible à cette époque,
c’est contre le sieur Dufour \ elle est reconnue, par ce dernier
appartenir à Blanchard comme à Castillon, et il transige sur cette
action intentée par l’exploit du 7 vendémiaire an 13 , qui contient
�(9)
la demande au tribunal de commerce, de dommages-intérêts, et
l ’exécution de la garantie promise par Dufour , en l’an onze.
Ainsi, Dufour est bien payé, Blanchard est bien libéré envers
lu i, et on ne lui demande rien, pas plus qu’à sa caution.
A lb e r t, lui-même , qui, dans l’acte du 3 o frimaire an 12 , paroît subrogé aux droits du sieur D u fo u r, pour le cas de nonpayem entde la somme quiparoît prêtée àCastillon, pour éteindre
à l’avance la dette de Blanchard et la sienne, n’est point appelé
à cette transaction. Il semble impossible de ne pas tirer de ces
faits la conséquence que Castillon et Blanchard ont concouru à
exécu ter, à son égard , les conventions que Castillon semble
avoir faites avec A lbert : comme il faut nécessairement en conp
d u re qu’à l’époque du i 3 brumaire an i 3 , A lb e rt, n’ayant au
cune réclamation à faire contre Castillon, ce dernier, en fait
comme en droit, avoit acquitté envers Dufour la dette de Blan
chard , principal obligé avec lui.
Ce fut par line lettre du sieur Castillon, datée de 'Riôm, le 17
frfriiâîre an i 3 , c’est-à-dire long-temps après l’échéance dû preîriièr ferme indiqué par l’acte' de l’an onze, le seul qui fût alors
à ma connoïssance, que j’entrevis le plan combiné entre mon
beau-frère et Castillon de me forcer à les aider "de ma bourse, et
en saisissant ^ comme prétexte, le cautionnement que pavois
contracté envers Blanchard ,~e"t en alléguantqu’il n’avoit point
acquitté la première portion de sa dette, ce qu’on n’a eu garde
de faire constater, aux termes convenus, par aucune voie légale.
Cette lettre est ainsi conçue :
« M on sieur,"voilà'là~ troisième que j’ai 'iTïÔnhéur ~dë ’vous
» écrire; il me semble q u i vous ne poüvczriai'ré autrement'que
” me faire réponse,attendu que vous êtes obligé, ainsi que m oi,
» à payer, faute par M . Blanchard, votre beau-frère , d’avoir
» lc rrroÿen de le faire. C ’est donc avec moi qu’il faudroit trou* ver quelques moyens pour éviter la perte totale de votre
B
�( 10 )
somr et de sa famille. Si je suis obligó de poursuivre son mari
corps , les frais augm enteron t la somme ; ils seront en pure
perte pour celui de nous qui se trouvera a même de payer :
espérance de bien faire leurs affaires se trouve etemte par ce
moven Combien il me répugne d’être obligé a poursuivre
imi qu’y a deux ans qu’il habite ma maison, et qui est à
même de faire de bonnes afTaires, si notre.fabrique va en augnentant ' 11 ne faut pas s’attendre que nous puissions mettre le
cvlindre "en
parce qu’il est dit, qu’aucune des parties ne
v e n t e ,
a en demander la vente qu’il ne soit totalement payé
^ar chacune d’elles: vous n’avez qu’à voir votre double -, vous
^trouverez cette clause expresse -, ainsi nous n’avons que le
droit de faire des poursuites d’usage. Il paroît que vous n’avez
pas entendu obliger votre beau-frère jusqu’au point de payer
pour lui. Ce service est bien considérable 5 mais_si_vous^ne
l’aviez pas cautionné , jc^n’aurois j>as entré dans la vente , et
n ouTñ eTeríoñsIñi l’un ni^’aütfë dans cesembarras. L e terme
est échuT a i n s i que des~eTfêts que jjT con tractés , qu’il m’est
"impossible d e l Æ g fe , si vo u sjic venez de bon cœ ur sousc^ â T 5 sCTg 5s ^ é n i» ce
vons POUVCZ fairePar d’autrcs
efíbtTsur*Paris. C ’est le plus grand service que vous puissiez
rendre à votre sœur et à sa famille, qui peuvent bien vous con
server le principal et le revenu, et le bien payer par le moyen
de leur travail et du produit du cylindre, et surtout si notre
indiennerie se soutient. V e uillez m e faireréBpnse de suite.J^Û
été dans cette affaire de bonne fo i: vous ne pouvez vous oblicar )c ne saurois S0UPÇ011*
ncr q u e lo ^ ^ ^ e ^ n r n t d ^ s nos doubles n’ait pas été fait
de votre aveu et consentement, puisqu’il paroît que Redouble
que j’ai entre i ™ i n s ^ s t ^ c r it ™ _ e r ^
prouvé clé'votre signa tureTEu ne recevant pas de rtponse, je
1 ne s a in ^ o T m ’a ttè n a ^ 'Y o u s connoissez plus cj[ue moi que
�( 11 )
» les poursuites vont vite en fait de marchandises, et que si je
» suis forcé d’y v e n ir, ce ne sera pas long , que nous nous ver» rons de près à Paris. Suivant la lettre de mon frère , que j’ai
» reçue ces jours derniers, il paroît que sa femme vous parla, et
» que vous lui répondîtes que vous n’aviez pas de réponse à me
» faire, attendu que vous aviez écrit au sieur Blanchard, et que
» vous lui aviez écrit vos intentions sur mes deux lettres. V otre
>> beau-frère m’a soutenu n’avoir reçu aucune lettre de votre part,
» mais qu’il en attendoit de jour en jour. Celle-ci restant sans
» réponse, de suite je prendrai mon parti à ne rien ména» g e r , il en arrivera ce qui pourra. Si vous pouviez ih’éviter de
» faire contrôler nos doubles et toutes poursuites , notrej abrr» que, en vaudroit bien m ie u x ^ et que vous devenez bien mte» ressant pour votre beau-frère et sa famille, qui n’ont pas d’au» tre ressource ; et en acquittant chacun nos obligations , il se
» trouve u n fonds que chacun a in térêt de m én ager , les uns
» pour soutenir leur maison , et les autres pour trouver leurs
» fonds. Pensez-y sérieusement, je n’entends pas vous surpren» dre*, j'ê vous écris Ce que je pense, et je suis en attendant
» réponse , avec une parfaite considération et confiance, M oii» sieur , votre très-liumble et obéissant serviteur.
» Signé, Castillon jeune, B io m ,le 17 frimaire an i 3 .
» P . S. M . Blanchard m’a dit qu’il étoit sur le point de faii’e le
»>voyage de Paris, s’il ne recevoit bonne réponse de votre part.
« Répondez donc de suite, bien ou m al’, qu’on sache comment
»> il faut s’y prendre. »
Il faut s’arrêter surtout, dans cette lettre, au point de fait
qu’elle constate j que le cylindre avoitservia elever une fabrique
d’indiennerie, et que ces mots , notre fabrique , notre indiennerie, établissent sans Réplique le fait d’une société entre Castilloü et Blaac'faardrsocielé q u ia du produire des résultats oui
Ba
�( 12 )
ont pu et dû servir à liquider Blanchard, soit envers Dulour,
soit envers Castillon, soit envers Albert.
TS’en
pas tirer la conséquence que Castillon a acquitté,
le ,3 frimaire an .3 , une dette de la société, pour laquelle il est
non-recevalile à me rechercher comme garant ?
Te dois encore ne pas omettre un fait qui démontrera le ma
n è g e employé constamment, et d’accord,pour me forcer à p a y «
un engagement que je regardois comme anéanti.
_
«
Le “ m e germinal an 13 , je reçus une assignation a compa*
d o i t - o n
i-oître le treize floréal an 13 , « à l’audience du tribunal de com^ 1 rce de B-ipmj pour me voir condamner, solidairement avec
t - S ï e i i Blanchard.,,comme..caution-~de^e..dei;nier,.et même
7 par corps, à p a yer la somme .de.
ccn t,so ix a ^ -six
1 livres dix sous, avec les intérêts au taux de six pour cent par
!> nn pour le quart du cylindre vendu aux sieurs Castillon et
» B lanch ard , moyennant huit mille six cent soixante-seize liv.
dix sous, comme m’étant_porté caution pour le sieur Blari* r W pour
ladite moitié étoit exigible le cinq
!" nivôse a S m a . « àfcu tep w r.te.Se!V
payement de sa moitié dans la moitié du prix du cylin^
■, l’énonue du cinq niv6se, époque indiquée comme con", venue entre les parties, et aux dépens. »'
.
.
Cet exploit me fut signifié à Pans, à mon domicile, par Belli„ uet jeune, huissier, à la requête du sienr Dufour, qui elisoit
d micile à Paris pour vingt-quatre heures seulement , et i\ Riom
rh 97 un sieur Gomot.
Je fus instruit aussitôt, par le sieur Dufour,que cette assena•
tété faite sans son aveu; etsonbut etoitfacile à deviner,
tionavoitc
déclaration en forme authentiTe crus devoir prendie cciic
t . ’ t l ü.do»e.gei».inaLüHc-fut-rédigée ainsi qu il slut :
T
l ’v-uj’ourÆlu.i «st compai-u.d.çy.an.t Tardif et sonegHegue,jio-
taircs à Paris, soussignés,,-
•
..............................
�C 1.3 )
» Sieur :]Viî ichcl D u fou r, serrurier-machiniste, demeurant iv
Paris, rue de ltuTuiverie, n°. 27.
.
- » Lequela,»par ces présentes',1déclaré que c’est à tort et à son
insu que, par exploit de Bellaguet jeune, huissier près lps tribu
naux de Paris, en date du onze germinal courant, enregistré, il'
a été donné ipsa requête assignation au sieur Jean- Baptiste
Assollant, demeurant rue des Marmôuzets , n°. 4 2, pour com
paroir, le 13 floréal prochain; à l’audience du tribunal de cornmerce de R iôm ; que son intention n’est' pas et n’a jamais été de
donner aucune suite à ladite assignation, ni d’exercer aucune
poursuite contre ledit sieur Assollant, vis^à-vis duquel il n’a
aucune réclamation à élever; qu’il n’entend nullement non plus
en exercer aucune pour les causes mentionnées audit exploit,
dont' il se désiste purement ¡et simplement en consentant sa
pleine et'entière nullité.; ■ in*r '-rrp ■
<v
'
!
” I ^e présent désistement, donné en faveur dudit sieur Assoljant, ne p o u rra , dans aucun cas ni d’aucune manière ¿m u r e , soit
aux droits du slaur -'Gastillon^ Isoit. du sixmr .'Blanchard y ou 1de
toute autre personne que ce soit.
S
x
»-Dont acte-fait eti passé en la idÈmeuré du sieur D u fo u r, le
germinal an i 3 . »•
En •s'an*6tantf&eulemcnt au' fait 'établi par cette déclaration,
que le sieur Dufour n a aucune réclamation à élever contre
moi, n’^ti i?ésii|tei--t’-U pas une fin de non-recevoir bien impérativ e ‘, contre toute action intentée ou à intenter, et ne peut-on
pas employer un raisonnement bien décisif ?
J ’ai contracté un engagement envers le sieur Dufour: le sieur
Dufour est payé; il n’a aucune réclamation à élever contre m oi,
1l n ’en a aucune à élever contre Blanchard ? En supposant qu’un
nouveau créancier ait été substitué ù l’ancien, envers lequel le
débiteur s’est trouvé déchargé, la novation ne s’est-elle pas
opérée complètement ? et ne suis-je pas déchargé de toute ga-
�( i4 )
'
„ n tic par ce seul fait? Je livre ces réflexions aux lumières de
1
’
'il) ■'!,
mon conseil.
■
.i • o
Je restai dans l’inaction avec l’acte rapporté , et le sieur Castillon qui fut sans doute prévenu de son existence, renonça
„our le moment à ses projets; car ce ne fut qu’en vendémiaire
an i4 seulement qu’il fit constater l’insolvalnlite de son associé
et au il me fit citer devant le tribunal de commerce de R io m ,
„ o L m e voir condamner, et par corps,' à liu payer la somme due:
‘ r Blanchard, après m’avoir, dénoncé le jugement de condam
nation rendu antérieurement contre ce dernier.
Sur le déclinatoire présenté au tribunal de commerce, il a été
vdonné de plaider a u fond ;'etil’article 8, titre 8 de l’ordonnance
de 1667 pàroît avoir ifôndé -l’opinion des premiers juges.
' L a cour d’appel se trouvé saisie par moi; et tels sont en
abrégé les faits et moyens que j’ai cru devoir -communiquer à
jnes cons.e.iU ,_quijpn^priés de les peser et de^résoudre les ques
tions suivantes m
~
-—
Les juges de Riom sont-ils incompetens ratione loci et ratione materiœ ?
'
^ r
l ' 1
'•
a°i L e sieur Castillon doit-il être déclare non-recevable dans
sa demande ?
3°. L e sieur Castillon a-t-il un recours quelconque ,à exercer
contre m oi?
ASSOLLANT.
�CONSULTATIONS.
-Lj E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire à
consulter pour le sieur Assollant,
P
rend l a
r é s o l u t io n s u iv a n t e
:
Les Juges de Riom sont incompétens \
L e sieur Castillon est non-recevable dans sa demande, et
aucun recours ne lui est ouvert contre le sieur Assollant, pour
le remboursement de la dette qu’il a acquittée volontairement
a titre de sociétaire et de co-obligé avec le sieur Blanchard.
P
r e m iè r e
Q
u e s t i o n
.
L a question de compétence proposée doit être résolue en faveur
du sieur Assollant sous le premier rapport, ratione loci.
I
m c o m p é t e n c e
ratione loci.
O n ne peut s'empêcher de penser que les juges du tribunal
de commerce de R io m , qui se sont déclarés compétens, ont fait
une fausse application des lois, et ont violé les règles de compé
tence.
’ Ils ont violé l’article 1 7 , titre 12 de l’ordonnance de com
m erce, et faussement appliqué l’article 8, titre 8 , de l’ordon
nance de 1667.
.
L ’article 1 7 , titre 12 , de l’ordonnance du commerce, est
ainsi conçu ;
« Dans les matières attribuées aux juges et consuls, le créan« cicr pourra donner l’assignation , à son choix, ou au lieu du
« domicile du débiteur, ou au lieu auquel la promesse a été
“
qjla marchandise fournie, ou au lieu auquel le payement
* doit être fait. »
�( 16 )
O n , v o it-q u e -le
v
r
cni«
c
r é
a
n
c
i e
r
des -conditions
m
e
p eu t assigner que dans trois
exp rim ées:
Le* premier , est le lieu du domicile du débiteur;
Le deuxième, est le lieu otx la promesse a etc faite et la marclxandise foui-nie;
.
;
' L e troisième, est le lieu auquel le payement doit etre fait.
L ’application du droit au fait, est focile.
L e sieur Assollant est dom icilié à Pans : sous ce rapport, on ne
pouvoit et on ne devoit l’assigner que devant les juges de Paris.
C ’est à Paris que l’acte du 18 prairial an n , contenant la
romesse des sieurs Dùfour et Assollant , a été fait et signé, et
si la marchandise devoit être fournie à Riom , la double condi
tion-exigée par l’ordonnance pour compéter la juridiction ne se
trouvant pas réunie, la compétence ne peut se décider en faveur
du juge du lieu où la marchandise a été fournie ; car les deux
conditions requises par l’ordonnancé pour fixer la compétence,
ne se trouvant pas jointes, ce point ne peut la déterminer.
T ’ordonnancé ne compète point et le juge du lieu où la pro
messe a été fcite T e F cB fttrd u lieu où la marchandise a été
fournie- elle ne recpnnoît comme compétent, que le juge de
l’on droit où à la fois la promesse a été faite et la marchandise
fou rn ie; autrem ent, il faut
d
’ a
p
erzo
r è
s
en
revenir à la règle générale,
laquelle on dit ordinairement , f d
e m e ju s
se c u tu s
e s ,
i lo m i c i lm m s c t/ iii d e b e s .
L’avis du commentateur Bornier se rattache au notre. 11
énonce l ’ o p i n i o n que cette disposition e t l a m a r c h a n d i s e f o u r n i e
n’a été ajoutée que relativement aux marchands forains, et
encore pense-t-il que trois circonstance doivent y concourir ;
la première, que la marchandise soit livrée au lieu de 1 établis
sement des consuls ; la seconde, que la ccdule ou obligation y
soit passée ; la troisième, que le payement y soit destine.
Il n’excepte'que le cas où Ta~mafclviiKÎisé 3 du ocre payée
prom ptem ent,
�( *7 )
promptement, parce que le marchand peut s’en aller d’heure en
heure; mais si l’on a vendu à crédit, dit-il, habitéfuie depretio,
en ce cas le marchand ne peut être convenu hors de la juridic
tion de son domicile.
L e commentateur Jouese est aussi d’avis que le concours des
trois circonstances doit avoir lieu pour distraire le débiteur de sa
juridiction naturelle.
A insi, en considérant encore que le payement devoit être fait
à Paris au sieur D ufour, d’après l’acte cité, cette troisième cir
constance vient démontrer que les juges de Riom ont violé les
dispositions de l’ordonnance, en retenant une cause dont les
juges de Paris devoient seuls connoître.
C ’est vainement qu’ils s’appuyent du vœu de l’ordonnance de
1667 : fausse application en est aussi évidente que la violation
de celle de 1673 est démontrée.
L ’a rticle 8, titre 8 de l ’ordonnance de 1677 est ainsi conçu :
« Ceux qui seront assignés en garantie formelle ou sim ple,
» seront tenus de procéder en la juridiction où la demande ori» ginaire sera pendante, encore qu’ils dénient être garans, si ce
» n’est que le garant soit privilégié, et qu’il demande son renvoi
» par-devant le juge de son privilège. Mais s’il paroît, par écrit
» ou par l’évidence du fait, que la demande originaire n’ait été
» formée que pour traduire le garant hors sa juridiction, enjoi*
» gnons aux juges de renvoyer la cause par-devant ceux qui en
» doivent connoître; et en cas de contravention, pourront les
» juges être intimés, et pris à partie en leur nom. »
L e principe consacré par l’ordonnance ne peut être appli
cable à l’espèce.
D ’abord il ne s’agissoit point, de la part du sieur Assollant,
de procéder en la juridiction où la demande originaire étoit
pendante.
Tout étoit jugé avec le sieur Blanchard, assigné au lieu de son
�( i8 )
rlnmicile. Il s’agissoit de faire exécuter une obligation devenue
personnelle au sieur Assollant, par l’insolvabilité de Blanchard
après toutes poursuites faites; et cette poursuite engendroit une
action distincte et séparée. La demande nouvelle à intenter ne
pouvoit être portée devant le juge de la demande originaire
_puisquelle n y étoit plus pendante, et que l’ordonnance impose
cette condition. La raison de la loi est évidente \ elle suppose
que l’action en garantie peut et doit être formée dans le même
temps que la demande originaire j et pour abréger les procé
dures , elle veut faire décider par un seul jugem ent, ce qui
autrement entraîneroit deux procedures et deux jugemens
Les conditions de la loi sont contraires à celle du cas particulier
où la demande contre Blanchard dut être formée, et où toutes
les poursuites durent être faites avant de s’adresser à sa caution.
L e principe enfin qu’on doit-rechercher.dans les conventions,
quelle a été la commune intention des parties contractantes
doit recevoir ici sa juste application.
Il est évident que le sieur Assollant, s’engageant à Paris en
vers le sieur D u four, demeurant à Paris, n’a jamais entendu être
distrait de ses juges naturels, pour aller plaider à Riom. L e sieur
D ufour, avec lequel il a contracté, et envers lequel seul il s’est
obligé, ainsi qu’on le démontrera bientôt, n’a jamais eu non plUs
l’intention d’aller former h R iom une demande contre le sieur
Assollant.
“
On ne peut donc s’empêcher de conclure que, sous ces divers
rapports, l’incompétence des juges de R iom , ratione loci, ne
peut être raisonnablement contestée.
I
m c o m p é t e n c e
ratione person ce et materiœ.
Ce double moyen d’incompétence peut être invoqué avec
succès par le sieur Assollant. Il est fondé sur sa qualité person
nelle et sur la nature de l’obligation qu’il a contractée.
�( >9 )
Blanchard, négociant, a pu être traduit devant les juges du tri;
hunal de commerce, relativement aux difiérens intervenus sur
la vente d’iuT^objet mobilier servant à travailler cIcT sa pro.¡Uu*
fession.
Sa qualité personnelle et la matière compétoient également la
^
Lx
jundictiom
A u contraire, le sieur A ssollant, employé à la comptabilité, et
n’adoptant point d’autre qualité dans l’acte de prairial an 11, devoit être considéré comme lusticiahle des tribunaux civils, ra^
tïone personœ.
s .
Sous un autre rapport, il ne pouvoit être traduit devant les
juges du commerce, incompétens ratione materiœ. On a du re
marquer que l’obligation de la caution est distincte et séparée de
celle du débiteur principal, avec lequel il n’y a point d’engngQj
ment solidaire. Assollant a cautionné le payement du prix d’un
objet m obilier, après la discussion de ¿lanchard.» aux termes
convenus, et on voit qu’il n’a point contracté en qualité de com
merçant ni de sociétaire, comme il n’a point renoncé à sa juri
diction ordinaire, pour en adopter une autre.
L ’obligation consentie par le sieur Assollant avoit-elle ouvert
une action contre lui? Elle étoit personnelle à lui ; elle étoit sé- ^
¿7
parée de celle à diriger contre Blanchard': on n’a pu former de
demande, à raison de cette obligation purement civile, que de
vant des juges ordinaires.
• S’ètre^idressé aux juges du commerce, c’est, de la part de l’ad
versaire, avoir méconnu les règles de compétence.
A vo ir retenu cette cause pour la juger, c’est, de la part des
juges du tribunal de commerce, avoir violé le^droit et la loi.
Ils sont incompétens à l’égard du sieur A ssollant, 'ratione pcrsonce et ratione materiœ.
L ’on ne doit pas clouter que les juges d’appel s’empresseront
de venger les principes méconnus par les premiers juges.
G 2
�S
e c o n d e
q u e s t i o n
.
Le sieur Castillon doit-il être déclare' non-recevâhle dans sa
demande ?
Les fins de non-recevoir s’élèvent en foule contre la demande
du sieur Castillon, dirigée contre le sieur Assollant; elles se
puisent et dans les actes et dans les faits exposés, et dans l’appli
cation la plus juste du droit.
L ’acte du 18 prairial an 1 1 , établissant que le sieur Assollant
n’a contracté d’obligation qu’envers D u fo u r, «t que le sieur
Castillon ne s’est point réservé de recours contre le sieur Assolla n t. lorsqu e , pour le cas prévu de non-payement A» )n pn^ t^ ,
Blanchard et de sa caution, il est^stipulé dans l’acte que leT^TTTr
¿ ^appartiendra en son entier au sieur C ^ illo n Tlfer^TTiT»
première fin de non-recevoir contre l’action qu’il intente.
Par l’effet de l’acte du 3 o frimaire de l’an 12 ? Dufour se trou
vant sans action, et le sieur Assollant ne pouvant plus être su
brogé par lui en des droits et p riv ilèg es q u ’il n ’a p lu s, le sieur
C astillon lui-même ne pouvant faire usage de la subrogation
pour la transmettre, en cas de payement, au sieur Assollant, sans
ouvrir une action contre le débiteur cautionné, qui rêÏÏueroit
sur le créancier, il en résulte que le sieur Assollant se trouve
déchargé de son cautionnement, et que le sieur Castillon'est nônrecevable à le poursuivre comme caution du sieur Blanchard
U ne autre fin de non-recevoir résulte encore de la novation
établie par cet acte de frimaire an. 12 . où un nouveau créancier
se trouve substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur s’est
trouvé^ déchargé.
A u cunes poursuites n’ayant été faites aux; termes fo n vpmic.
contre Blanchard, par qui que ce soit, toute action contre le
sieur Assollant, qui ne s’étoit soumis
payer pour son beaufrère qu’après toutes poursùites faites, aux termes convenus et
dans ce cas seulem ent, est non-reccvable.
�( ai )
Enfin la preuve du payement de la part de Blanchard, qui ré- )
suite d’une foule de circonstances, forme un dernier moyen, qui,
^
appuyé de tous les autres} qui se prêtent un mutuel secours, dé
montre avec eux qu’il ne peut exercer aucun recours contre le
sieur Assollant •, point que la troisième question présente à décider.
Pour bien apprécier les moyens de fait et de droit qui fondent les fins de non-recevoir indiquées, il faut s’arrêter d’abord
à l’examen de l’acte du 18 prairial an n , qui contient en luimême la solution d’une partie des questions que la demande du
sieur Castillon présente à décider.
Blanchard et Castillon sont constitués débiteurs principaux
envers le sieur D ufour ; Assollant y est déclaré la caution du
sieur Blanchard envers le sieur D ufour ; Castillon est encore
certificateu r de caution envers le sie u r D ufour.
Les obligations et des débiteurs principaux, et de la caution,
et du certificateur de caution, sont toutes consignées dans le
même contrat.
Castillon s’oblige au payement de la moitié du cylindre, en
vers Dufour.
Blanchard prend le même engagement pour l’autre moitié
envers le même vendeur, et le sieur Assollant s’oblige de payer
au sieur Dufour la totalité ou partie de la dette de Blanchard ,
si elle existe encore aux termes convenus, après toutes pour
suites faites, et dans ce cas seulement; ce sont les expressions de
l’acte.
On ne voit pas que le sieur Assollant contracte aucun enga
gement envers le sieur Castillon ; il ne s’oblige qu envers Dufour.
Castillon vient cautionner la caution clle-meme envers Dufour, et il promet de payer, si Blanchard et sa caution ne payent
point , après toutes poursuites faites,
^ml
/ h truj^ C.
X ul
®
�(
22
)
D ans ce cas p ré v u de non-payem ent de la part de B lancliard
et du sieur A s s o lla n t, il est stipulé qu e le cylindre appar
tiendra en son entier à Castillon , et qu’ il sera libre de le faire
' CO n p r é v o it m ê m e le cas d’un déficit q u i doit être à la charge
de celu i des d eu x associés, q u i , par le défaut de p a y em en t, y
auroit donné lie u -, et l’on ne p eu t s’ em pêch er de rem arquer que
C astillon ne se réserve pas d’action en répétition contre le sieur
AST e lle est en abrégé l’économ ie de l ’acte du 18 p rairial, trans
crit en entier dans le m ém oire à consulter : la p rem ière fin de
n o n -recevo ir in d iq u ée en découle nécessairem ent.
P o in t d’ o b ligation , p oin t de droit.
L e sieur A ssollant n ’a p oint contracté d’ obligation envers le
sieur Castillon : ce dern ier n ’a donc personnellem ent aucun droit
contre lui.
On peut dire plus encore-, c’est que la lettre, comme 1 esput
du contrat, prouve que jamais les parties n’ont entendu créer
une obligation d’Assollant envers Castillon.
Il étoit dans la nature des choses que le sieur D ufour exigeât
ue B lanchard fût caution n é, et qu e la caution le fût elle-m êm e -,
^ «toit u n e sûreté personnelle pour le ven d eu r. Mais Castillon,
n u i devoit p articip er il la propriété, C»” ™ 0 *Tcq>J°itotiônraa
rv lin d rc ne pouvoit ot n e,d ev o it ex ig er q u ’u n e clio se, dons le
cas o ù il’ p n yeroit le cy lin d re , c’étoit le droit d’en disposer; ja
mais il ne p o u v o it p ré ten d re, en acquittant sa dette (pu isqu e
tout nssocié est ten u indéfinim ent des dettes de l ’a u tre), à rép éter
le p ayem en t contre u n ü m é t r a n g e r à sa propriété com m e à ses
produits.
.
.
___ Il est vrai c e p e n d a n tq u ç ja n s je d r o .t commun la caution
¿ » t obligée, e î^ T k ^ r t i li c a t e u r , de la même man .cro que le
débiteur principal est obligé e n v e r s là caution; mais dans 1espèce
�(
23
)
particulière, il y a dérogation tacite à ce droit, et l’on voit clai
rement que telle a été la volonté dés parties.
Castillon ne s’est point engagé pour Assollant, mais pour son
associé Blanchard, et il s’est engagé, sous la seule condition d’un
recours, soit sur la personne de cet associé, soit sur le cylindre
appartenant à la société.
En vain Castillon opposeroit-il à cette fin de non-recevoir le
droit qu’il prétendroit faire résulter de la subrogation,qui lui a
été consentie par D ufour, dans l’acte du 3 o frimaire an 12 ; c’est
dans le fait même du payement constaté par cet acte, que se
puise une autre fin de non-recevoir qui va être développée.
La subrogation n’a pas pu déti’uire la loi que les parties s’étoient créée à elîe-même le 18 prairial an 1 1 , et il n’a pas pu dependre du sieur Castillon de changer la position du sieur Assol^lant, par des conventions particulières, qui n’ont point altéré
l’efiet des conventions générales.
s. I I .
En droit, la caution est déchargée, lorsque la subrogation aux
droits, privilèges et hypothèques du créancier, ne peut plus, par
le fait de ce créancier, s’opérer en faveur de sa caution.
Ce principe a été consacré par le Code civil des Français,
Qrt^2o37 ?
déjà adopté par notre ancienne jurisprudence.
Dans l’excellent article Caution, fait par M . M erlin , et rap
porté au Répertoire de jurisprudence, on lit, au chapitre intitulé,
D e la manière dontfinissent les cautionnemens, que le caution
nement, en thèse générale, finit, lorsque les obligations pour
lesquelles il est donné s’étcippent, et que ces obligations peu
vent s’éteindre de différentes manières, notamment,
«” 7 »^Lorsque le créancier s’est mis hors d’état de faire à la
caution une cession ou une subrogation utile de ses droits
et de ses hypothéqués , comme lorsqu’il a pris des arrange-
�( ¡>4)'
mens avec son débiteur ou avec des personnes tierces, de
façon qu’en recherchant la caution , celle-ci j ie puisse agir
contre le débiteur cautionné , que l’action ne reflue contre
~lo créancier. A quoi bon seroit-il, ajoute-t-on, qu’un créancier
pût exercer un cautionnement dont il ne pourroit plus tirer
aucune utilité ? >>
D e l’application de ce principe , aux faits de la cause , résulte
un second moyen de repousser la demande du sieur Castillon.
En fait, il est établi, par l’acte du 3 o frimaire de l’an 12, que
le sieur Dufour a été payé du sieur Blanchard par le sieur Castillon , associé de ce dernier. E n cet état de choses, comment
le sieur Dufour créancier subrogeroit-il le sieur Assollànt à dpg
droits qu’il n’a plus ? et comment le sieur Castillon lui-même en supposant que la subrogation contenue en l’acte cité ouvri
ront quelque droit en sa faveur, pourroit-il en conférer un qui
s’exerceroit contre lui-même, puisqu’associé de Blanchard et
tenu mdefimment des dettes de la société ? la subrogation qu’il
feroH.au sieur Assollànt de tous ses droits , donner oit lieuTi des
poursuites contre^ lui ; et qu’ainsi Faction contre
cautionné , reflueroiFsur le créancier.
Il est évident que le créancier du sieur Assollànt, caution de
Blanchard, soit qu’on doive le voir dans le sieur .Dufour , soit
qu’on puisse le trouver dans le sieur Castillon , s’est mis hors
d’état de faire à la caution une subrogation utile de ses droits. Il
a donc ouvert par son fait une fin de non-recevoir contre l’action
qu’il intente.
S iiiCette fin de non-recevoir résulte de la novation opérée par
l’acte déjà cité du 3o frima irejan 12.
On ne peut pas contester que le cautionnement finit lorsqu’il
y a une novation.
C ’est
�(
^5
)■
C’est l’avis de M . M erlin, consigné dans le Répertoire, verbo
Caution, §. 3. — C ’est celui de tous les jurisconsultes.
C ’est le vœu de la loi, consigné dans l’article 1281 du Code
civil, ainsi concu :
A rt. 1281. « Par la novation faite entre le créancier et l’un
des débiteurs solidaires, les co-débiteurs sont libérés.
« La novation opérée à l’égard du débiteur principal, libère
^ c a u tio n s . »
'
__
Prouver la novation, c’est établir la libération du sieur Assol
lant; c’est justifier que l’action intentée contre lui n’est pas rece..... ..
Vable.
. ■_
.. Pour y parvenir, il faut rappeler en peu do. .mots les carac
tères de la novation , qui peuvent s’appliquer au.cas particulier.
L a novation est le changement d’une obligation en une autre.
Graran de C oulon, verbo Novation, Répert. de jurisp.
Lorsque la novation sc fait avec l’intervention d’un nouveau
débiteur, ou d’un nouveau créancier, la différence de créancier
ou de débiteur est une différence suffisante pour rendre la nova
tion utile, sans qu’il soit nécessaire qu’il en intervienne d’autres.
Pothier, Traité des obligations, part. 3 , chap. 2 , §. 4 ? n°- 56 1.
Lorsque par l’effet d’un nouvel arrangem ent, un nouveau
créancier est substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur se
troij^rejdéchargé , il y a novation. Art. 1271 dn Cnde çivil.
Ces principes, adoptés par les meilleurs jurisconsultes, et con
sacrés par la l o i , sont incontestables.
Il est question d’examiner s’ils çeuvent être appliqués aiifait.
T)n voit dans l’acte du 3o^frimaire an 12 ; que,l’obligation
contenue en l’acte du i8"prairîal an 11 est changée en une au tre.
On remarque qu’un co-obligé paye une dette non-exigible ,
et qu’au moyen de ce payement , fait avec l'intervention de deux
nouveaux créanciers,savoir,le sieur Castillon et le sieur Albert,
le débiteur principal est libéré envers l’ancien créancier.
D
�( 26 )
-N'est-il pas évident, selon l'avis .le l’ othier, que la différence
est suffisante pour rendre la novation utile , sans q u .l sort né
cessaire qu’il en intervienne d’autres ?
- O n voit"enfin que par l'effet d'un nouvel engagement, de
nouveaux créanciers sont substitués à 1 ancien , envers lequel
le débiteur principal, et même le codébiteur, se trouvent libères.
L a n ovation est parfaite.
Sans doute on pourrait objecter,j n l a j ç ^ v oi.t. éte exigible
'
si le sieurGastillon avortjxg ç comme
c e r t i f i e u r de e a u r i ^ S i S i ^
^
1-1”11 J u u
de^
ni vis-^vîs~~de ses rnrHffeiteiirs , et dans ce ca s ^ o n
J ^ S - ^ k i r e q'ïïK le rértîfiSteur ayant payé doit avoir
la caution ~quTit a cerliliée; mais dans l’esUfd e ïësTdeux conditions d’exigibilité de la dette et de payefrrn t à titre de certificateur de caution n’existant p o in t, le
p a v e m e n t fait le 3o frimaire de l’an 12 n’est plus qu’un paye
ment volontaire et libératit, lait par un codebiteui poui le
com pte du débiteur p rin cip al j q u i sc trouve lib é ré envers le
01 L a qualité de codébiteur rend illusoire la subrogationjmSl
^^Tfnj ’ p.ônsëStîFparragCfërTcreanôér^ elle n’empêche point
lTnovatîon, qui se trouve parfaite par rexti.ncti.Qn de la dette de
la art du débiteur, et parla substitution de nouveaux créanciers
¿a la place de l’ancien ,''envers lequel le principal débiteur se
trouve libéré. E lle est bien plus illusoire encore, lorsqu’on
*0
considère q u e c’est un associé qm a pa^é la d ç tte d e la société et
n„. |!n feit , nn; son inté rê t, c W l d i ^ o u r )omPde’la j^ g ^
i i r ô S S ^ r S t M a S r d é e par l'acte d'épraïnarah f i . h t une
d 5 5 !S d S 5 S 3 S 5 B ô n vient militer en faveur de la caution, et
néccsSUe la rigoureuse application du droit; c’est que la nova
tion opérée a préjudicié à cette caution. lin effet, infoimée de la
libération j et ne. voyant point exercer de poursuites aux épo
�(
27 .5
ques convenues, elle a dû penser que la novation e toit parfaite,
et l’avoit déchargée de son obligation : consequemment elle a du
cesser de veiller à la solvabilité du débiteur principal.
S- I V .
La loi du contrat, qu’ón rie peut violer impunément, loi ac
ceptée par toutes les parties le 18 prairial an 1 1 , commandoit, à
défaut de payement de la part de Blanchard , de frire des pour6uitcj» contre lui aux termes convenus *, et api es toutes pouisui
tes faites, dans ce cas seulement, l'obligation du sieui sso an
existait; l’exécution de la clause exprimée ouvroit seule un droi
contre, le sieur A ssollant, caution de Blanchard, dioit sans
quel il ne pouvoit y avoir d action.
^ ^
%A vo ir v iolé la loi du contrat. en n é g lk e a n tJ f e S C i y
une clause désignée de rigueur par ces mots, dans ce cas seu e
ment , clause inexécutable après les termes convenus, C est
avoir ouvert la fin de non-recevoir la plus forte contre toute ac
tion en recours contre lê sieur AssoIÎant.
^
Ce n’a point été sans dessein que la condition im p erative de
poursuites aux termes convenus contre Blanchard, a été inseree
dans l’acte dont est question , et que le droit résultant de l’obli
gation du sieur Assollant n’étoit réputé ouvert qu’après toutes
poursuites faites, et dans ce cas seulement.
lie sieur Assolant n’avoit pas voulu prendre sur lui les nsq s
qu’il pouvoit c o u r i r par la négligence du créancier ^j.1
-T**
mité son obligation à un temps déterminé, passé loque , e e c e‘vroit s’éteindre. Si le sieur BlanchaVcl etoit insolvable à 1 époque
désignée, le sieur Assollant devoit payer pour lu i. mais 1 c evoit
être prévenu de In so lvab ilité, elle devoit être actuelle et prou
vé^ aux termes convenus. L e silence des cieanciers a prouve
que le sieur Blanchard n’ét°it.pas insolvable alors.
S’il l’est devenu depuis, le toïl irréparable fait a la caution en
D 2
�( 28 )
violant la loi du contrat, justifie pleinement la fin de non-recevoir invoquée.
y
U n dernier moyen vient se rattacher h tous ceux indiqués ;
il se tire de la preuve que Blaueliard s’esUikéiXJSa onPeUenieHt,
r,
cc c.ui r ésl,lte d’une foule de circonstances qui formeroient
au moins des présomptions de la nature de celles que la loi abandonni aux lumières et à la prudence du magistrat. Cespresomp,;ons peuvent guider sa décision lorsqir elles sont ainSl que
dans le cas particulier, graves , précises et concordantes.
Elles résultent,
.
i° D e la qualité_des£arties adverses, qui, étant de sggiétc
ur l’exploitation du cylindre , ont nécessairement appliqué
S premiers produits à. l’ext^çtion d e là dettecontractée pour
en acquérir la propriété et en user en société.
E lles résu lten t,
la
° D u p e i n e n t anticipé , fait par C astillo n , qin dém ontre
fî-inre au’il avoit dans son associe? et la certitude q u il
—---------
"t d’être rcniBoursé.
^ F U e s naissent du silence du sieur_Albert dans la contestation,
uoi ue subrogé aux droits du sieur Dufour sur le cylindre,
p a r l ’acte du 3 o frim aire.
'
L a transaction du i 3 brumaire an i 3 , entre D u fo u r, Cas-
V
*
et Blanchard, offre encore une présomption plus forte de
vi ° - t-on Dans cette transaction TP ufour reconnoit, avec Cas™ 1 iifi B la n cïïS rrësT lib ér^ n vers, lui. Blanchard paroît
e! transige 7
“
i r
intentée à sa r e q u ê te comme à celle de son associé, contre D u fou r, en
exécution
de l’acte de pianîa a n n .
C ’est à une époque bien postérieure aux termes de paye
ment convenus, et à la date de l’acte de frimaire an i ï , que
Blanchard transige eu commun avec Castillon, sur 1action en
�(
29
)
garantie de la bonté du cylindre, que l’acte de l’an 11 ouvroit
contre Dufour ; et si ces circonstances n’établissoient pas une
libération nécessaire, d’où pouvoit seule résulter un droit ex^clusii pour Blancliard et Castillon de sacrifier comme d’améliorer
la chose, de quel œil la justice verroit-elle un accord fait au pré
judice de la caution , à laquelle on ne peut contester le droit
d’être subrogé en toutes les actions ouverte^ au débiteur princi
pal, pour contester le payement de la dette envers le créancier?
Cet acte ouvriroit encore une fin de non-recevoir contre l’ac
tion du sieur Castillon, s’il n’établissoit pas implicitement l’ex
tinction de la dette de Blanchard envers Dufour.
4°- L ’exploit abandonné du n germinal an i 3 , fait évidem
ment de concert entre Castillon et Blanchard, sous le nom de
Dufour^ qui l’a désavoué en démontrant l’artifice des adversaires
du sieur Assollant, prouve que la demande intentée contre lui
n ’est qu’une ruse employée pour le forcer à payer une dette
acquittée.
'5°. L ’acte du 12 germinal an t 3 , souscrit par D ufour, établit
encore la libération de Blanchard, puisque dans cet acte le seul
créancier envers lequel Assollant s’est obligé, sous des condi
tions exprim ées, déclare q u il n'a aucune réclamation à élever.
6°. E nfin, la lettre dn 17 frimaire , écrite par le sieur Castillon
au sieur Assollant, établit que la fabrique d’indiennerie, montée
avec le cylindre, est exploitée en commun; qu’elle est en plein
rapport; et au milieu des réclamations exercées par Castillon, on
devine aisément, par les conseils qu’il adresse à la caution, et les
espérances qu’il lui donne d’être remboursée sur le revenu de la
fabrique, qu’il n’a rien à prétendre, et qu’il cherche forcer le
sieur Assollant à faire une mise de fonds pour son beau-frère,
dans la société : but vers lequel tendoit l’acte du 3o frimaire
an 11 , et qu’on aura vainement tenté d’atteindre par la demande
du sieur Castillon , que le sieur A lbert eût dû form er, s’il n’eût
�I 3° )
pus été payé par la société de commerce, dont l’existence est in
contestable.
La libération de Blanchard se présume par tous ces faits-, et si
la justice en doutoit encore, elle voudioit jeter un regard, et sur
l’acte de société (i) que devroit produire Castillon, et sur les
registres qui doivent contenir l’emploi du produit du cylindre
et la mise de fonds de chacun des sociétaires : il est certain que
la preuve de la libération s’y trouveroit matériellement établie.
En dernière analyse, et à cote de tous les moy ens qui sont indi
qués en faveur du sieur Assollant, viendra se placer encore la con
sidération pluspuissante peut-être, que le sieur Castillon nepourroit s’imputer qu’à lui-même d’avoir mal choisi son associé, et
d’avoir imprudemment paye pour lui une dette noh-e^igible.
O n n’oubliera point en effet que. si le sieur Castillon devoit
payer la dette de Blanchard, que le sieur Assollant avoit cau
tionné vis-à-vis du sieur Dufour, c’étoitalorsque ce dernier n’auroit point été payé, ni de Blanchard, ni du sieur Assolla»!;, aux
termes convenus, après toutes poursuites faites, et dans ce cas
seulement ; mais que cette faculté étant personnelle à 'Dufour,
<ille n’a ouvert aucun droit à Castillon, puisque les conditions
sous lesquelles il devoit s’ouvrir n’ont pas reçu leur accomplis
sement, par la seule volonté de Castillon, qui ne peut se venger
que sur le cylindre.
O n verra que Castillon avoit un^ interet à se conduire ainsi
qu’il l’a fait : c’étoit celui de jouir de la remise de douze pour
cent, et que c’est ce qui l’a porté à suivre la foi de Blanchard,
et à acquitter sa dette , devenue depuis la dette de la société.
On sentira qu’il n’a pas dû poursuivre son associé aux termes
convenus, puisque ces poursuites auroient tourné contre la
société, et que révénement d’une déconfiture, si elle est réelle,
ne peut faire revivre en sa faveur un droit qu’il a laissé pres( i ) O u devra le provoquer form ellem ent par exceptions.
�C 5i )
crire, faute de remplir les conditiéils sôu3 lesquelles il pouvoit'
seul exister.
On sera convaincu qu’il à pü âe faire rembourser, aiix termes
convenus, par son associé , puisqu’il n’a point exercé de pour
suites contré lui. On pensera que, si depuis Blanchard est devenu
insolvable, le tort que Castillon peut en éprouver, n’est dû
qu’à son im prudence, et que l’imprudence comme la cupidité
peuvent jamais servir de titres contre un tiers de borinë foi.
L e sieur Assollant a rendu un service d’ami ; il n’a dû se croire
obligé que jusqu’aux termes des payémens indiqués'. Dans le
silence des parties intéressées1qui s’étoierit soumises à1 lui justi
fier l’insolvabilité du débiteur à cette1époque, il a dû croire
Blanchard libéré totalement , et il n’a pas dû s’inquiéter de sa
position ultérieure.
Il
a dû bien moins encore se persuader qu’un codébiteur,
q u i avoit acq u itté vo lo ntairem en t u n e dette non-exigible, vicn-'
droit s’adresser après longues années à un; homme qui n e lû t
jamais obligé envers lui-, e tq iii, on le rép ète,(air c’est le mot
le plus important de la défense du sieur Assollant], ne dêvoTt"
payer qu’après des poursuites à termes f ix e s , qui n ont point
été effectuées, qui ne peuvent plus Vêtre, et qui seulesouvroient
une action contre la cdïïtion quon pôufsüit.
L e droit et l’équité se réunissent donc en faveur du sieur
Assollant pour proscrire l’action que le sieur Castillon a formée
contre lui.
Et en résumant toute la discussion ci-dessus ;
Considérant sür la prem ière question,
1 • Qùo l’acte du 18 prairial an 1 1 , a été fait et signé a P aris}
Que le sieur Assollant réputé débiteur à défaut de payement
pai Blanchard qu’il a cautionné, a indiqué dans l’acte son domi
cile a Paris\ et encore, que le payement devoit être fait à Paris \
2 • Que l’obligation contractée par Assollant, l’a été en sa
�qualité de citoyen non-commerçant, et qu’il n’a point renoncé
à sa juridiction ;
3°. Que le cautionnement du sieur Assollant constitue une
obligation distincte et divisible de celle de Blanchard, en ce que,
i°. Elle n’est point solidaire avec celle du débiteur principal;
2°. En ce qu’elle ne pouvoit exister qu’après une discussion
préalable ;
3°. Q u’il ne s’agissoit point de procéder sur une assignation
en garantie formelle ou simple en la juridiction commerciale
de R iom , où la demande originaire auroit été pendante, puis
q u e d’abord la
demande originaire formée contre Blanchard ,
devoit être jugée, aux termes de l’acte de prairial an i x, lorsque
le sieur Assollant devoit être assigné ;
Q u’il étoit question, au contraire, de juger une demande dis
tincte et formée séparément contre le sieur Assollant, à fin de
p ayem en t de la somme dont Blanchard étoit réputé débiteur
pa’rjùgem ent, demande formée contre le sieur Assollant, comme
s’étant obligé à payer pour B lanch ard , sous des conditions eX-‘
' pTiméés en ;l’acte.
*' Par ces motifs, le conseil estime qu’il y a lieu de réformer
la décision des juges du tribunal de commerce de R iom , comme
ayant violé les règles de compétence, ratione lo c i, personœ et
materiœ.
Sur la seconde question,
Attendu qu’il est établi en fait, et prouvé par pièces ,
i°. Que les sieurs Blanchard et Caslillon se sont associés pour
élever et exploiter en commun une manufacture d’indiennes ;
Qu’ils ont acheté pour l’exercice de leur profession, un cylin
dre muni de tous scs agrès , au sieur D u fo u i, serrurier-machi
niste ;
Q u’ils sont convenus d’en payer le prix à des époques déter
minées , chacun par moitié ;
�(•33 )
Que le sieur Assollant, en cautionnant le sieur Blanchard ,
s est obligé envers le sieur D ufour, seulement, alors que le dé
biteur principal ne pourroit pas payer la totalité ou partie de sa
dette, de l’acquitter, après toutes poursuites faites aux termes
convenus, ei dans ce cas seulement ;
Que le vendeur a exigé, pour sa sûreté personnelle, que le
sieur Castillon certifiât la caution de son associé, et se soumît à
Payer, dans le cas où elle ne seroit point acquittée aux termes
fixés , après toutes poursuites faites , et dans ce cas seulement ;
Q ue dans cette hypothèse , le sieur Castillon s’est réservé la
propriété exclusive du cylindre, comme le droit de déduire, sur
les sommes payées par Blanchard, les dommages-intérêts qu’il
auroit droit de prétendre ; mais qu’il ne s’est réservé aucun droit
de réclamation contre le sieur Assollant*,
Que le 3 o ventôse an 12 , Castillon a payé volontairement la
dette de Blanchard, qui n’étoit point exigible, et qu’il s’est fait
substituer avec un sieur A lbert, comme nouveaux créanciers, au
sieur D u fo u r, ancien créancier, envers lequel Blanchard, débi
teur principal, s’est trouvé libéré;
Q ue le 18 prairial an 12, terme du premier payement indi
q u é, s’est écoulé sans réclamations judiciaires contre Blanchard
ni sa caution, soit de la part de D ufour, soit de celle de Castillon,
soit enfin de celle d’Albert ;
Que le 7 vendémiaire an i 3 , Castillon et Blanchard ont tra
duit le sieur Dufour devant le tribunal de commerce de Riom ,
pour obtenir contre lui des dommages-intérêts, à raison de la
mauvaise qualité du cylindre qu’il avoit garanti pendant un an;
Que le i 3 brumaire an i3 , ils ont transigé sur cette réclama
tion, et se sont reconnus respectivement quittes et libérés, au
moyen de la livraison d’un rouleau que Dufour s’oblitreoit d’ef
fectuer;
Qu il est prouve, par un acte du douze germinal an i 3 , passé
E
�.( 34 5
devant Tardif et son confrère, notaires à Paris, que le sieur Dufour n’avoit à cette époque aucune réclamation à former contre
Blanchard et sa caution ; et qu’une assignation, donnée le onze
germinal an i 3 au sieur Assolant, avoit été mal à propos signi
fiée à la requête du sieur D u fou r, qui l’a désavouée ;
Que cette assignation, évidemment nulle, et d’ailleurs tardi
vem ent donnée, n’a point été renouvelee le dix-huit prairial an
treize, à la seconde époque fixée pour la libération de Blanchard,
qui s’est écoulée comme la première, sans aucune réclamation
de qui que ce fût;
Que les poursuites de Castillon contre Blanchard n’ont eu lieu
qu’en vendémiaire an quatorze, c’est-à-dire, deux ans après le
premier tci'me fixé pour toutes poursuites a défaut de payement,
contre les débiteurs de D ufour;
Que c’est en cet état de choses que le sieur Assollant a été cité
devant les juges du commerce à Riom , à la requête de Castillon,
en sa qualité de nouveau créan cier de B lan ch ard , comme étant
aux droits du sieur D ufour, ancien créancier.
Attendu qu’il résulte de tous ces faits ,
i°. Que Castillon, associé de Blanchard, n’a point acquitté la
dette de Blanchard et d’Assollant envers Dufour, après des pour
suites judiciaires contre ces derniers , faites eu sa qualité de certificateur de caution, mais qu’il a acquitté volontairement une
dette de la société , non encore exigible, et dont en sa qualité
d’associé il pouvoit être tenu ;
2°. Que l’acte du trente frimaire an douze a opéré une nova
tion , puisqu’un nouveau créancier a été substitué à l’ancien, en»
vers’lequel le débiteur principal s’est trouvé libéré ;
3 °. Que par l’effet de l’acte susdaté de frimaire an treize, A s
solant, caution envers D ufour, n’a pu être subrogé par ce dernier
en des droits et privilèges contre Blanchard, qu’il a reconnu ne
plus avoir, dans les actes des i 3 brumaire et 12 germinal aa 13 j
�Ç 35 )
Qu’il ne pourrait point l’être également par Castillon d’une
manière utile, puisque l’action qui en résulterait contre Blan
chard pourroit refluer contre lu i, à x-aison de la société de com
merce qui a subsisté et paraît subsister encore entr’eux;
Que dans son intérêt personnel Castillon n’a pas voulu pour
suivre son associé aux époques fixées par l’acte de prairial an
onze, et que l’acte n’ouvroit une action à D ufbur, ou ses ayanscause, contre les co-obligés, qu’après toutes poursuites faites, aux
termes convenus, contre le principal débiteur *,
4 °. Que le sieur Assollant n’a souscrit aucun engagement en
vers Castillon, qui a prévu le cas où Blanchard et sa caution ne
payeraient pas le sieur D ufour, en se réservant la propriété du
cylindre et un droit de recours en dommages et intérêts contre
son associé, sans en retenir aucun contre sa caution.
Considérant que toutes ces conséquences forcées des faits éta
blissent autant cle fins de non-recevoir contre la demande de
Castillon, en ce que,
i°. Tout associé étant indéfiniment tenu des dettes de la so
ciété, est non-recevable à répéter, contre la caution de son asso
cié, le payement volontaire d’une dette de la société, et qu’un
certificateur de caution n’a de droit contre la caution que lorsqu il a payé pour elle une dette exigible, et après toutes pour
suites faites ;
2°. E n ce que le cautionnement finissant par la n ovation ,
Castillon n’a point d’action contre Assollant •,
>
3 . En ce que l’obligation s’éteignant lorsque le créancier s est
mis hors d’état de faire à la caution une cession ou une subroga
tion utile de ses droits, et le cautionnement cessant avec l’obli
gation, Dufour et Castillon n’ont plus aucun droit contre Asso
lant, caution de Blanchard envers Dufour qui est payé ;
4 • En ce que la loi du contrat a établi., dans l’espèce, une fin
de non-recevoir expresse contre l’action exercée maintenant
«
E 2
�( 36 )
contre la caution, en prescrivant au créancier Dufour de discuter
le débiteur principal aux ternies convenus, et d’épuiser dès-lors
les poursuites, pour pouvoir s’adresser, dans ce cas seulement, à
la caution ;
Q u’à défaut de poursuites aux termes convenus, le sieur
Assollant a pu se croire déchargé des causes de son caution
nement, et ne plus veiller à la solvabilité du débiteur principal;
et conséquemment que Castillon est lui-même non-recevable
dans son action, personne ne pouvant avoir plus de droits que
Dufour , qui devroit lui-même être déclaré non-recevable , s’il
s’adressoit à la caution, sans avoir fait toutes poursuites aux ter
mes convenus *,
5 °. Enfin , en ce que toute action doit dériver d’un droit et
que Castillon n’a plus de droit contre Assollant,
P u isqu e d’abord il ne peut user de celui qui est ouvert à tout
ccitificateu i de caution, n ayant pas p aye Dufour en cette qua
lité, et après des poursuites ju d ic ia ire s;
Puisqu’il a acquitté volontairement une dette de la société et
qu’il a ainsi libéré Blanchard envers le sieur D u fo u r, et opéré
une novation, dont l’effet a été de décharger sa caution de toute
garantie 5
Q u’il ne tient aucun droit de la subrogation consentie en l’acle
de frimaire an 12 , parce que ces dispositions, qui sont à l’égard
du sieur A ssollant, res inter alios a cta , ne peuvent lui être
opposées en ce qu’elles ont de dérogatoire à l’acte de prairial an
11 , et que cette subrogation ouvrant à Castillon le droit de
Dufour contre Blanchard, lui a oie en meme temps celui qui
pouvoit s’ouvrir un jour en sa faveur contre Assollant, s’il étoit
contraint d’acquitter sa dette ;
Qu’il suit donc de là, que Castillon a eu un droit hypothéti
que contre Assollant, mais que l’événement possible n’est point
arrivé par son fait ; que le droit qui en dérivoit s’est anéanti, et
�( 37-5
se trouve remplacé par celui de propriété du cylindre et de
poursuite contre Blanchard, que Castillon s’est réservé en tout
événement dans l’acte de prairial an 11 , droit qu’il peut puiser
encore dans l’acte de frimaire an 1 2, s’il est vrai qu’il n’ait point
été remboursé par son associé, et qu’il ait bénévolement payé
d’abord le sieur Dufour et ensuite le sieur Albert.
E t en tous cas et en un m ot, sans droit contre Assollant, Cas
tillon n’est pas recevable dans son action.
Sur la troisième question ,
Attendu que les faits, moyens et considérations exposés cidessus, et notamment dans le § 5 , attestent la libération de Blan
chard, envers D ufour, et que la caution se trouve ainsi déchargée
de l’engagement qu’elle avoit contracté envers lu i, le 18 prairial
an 11 ;
L e conseil, en persistant dans ses précédentes résolutions,
estime quele sieur Assollant est déchargé de son cautionnement,
et qu’à cet égard on n’a aucun recours à exercer contre lui.
Délibéré à Paris, le 14 août 1806, par les jurisconsultes
soussignés.
PETIT-D AU TERIVE, G A IR A T , JULLIENNE,
PRIE U R (de la Marne).
�'( 38 J
L ’A N C I E N A V O C A T S O U S S IG N É , qui a pris lecture du
mémoire et de la consultation à la suite,
et par les mêmes motifs, sur tous les points.
Il observe que le sieur Assollant doit insister sur un moyen de
nullité qui paroît décisif. L ’exploit introductif de l’instance est
donné à une femme qui n'a voulu dire son nom. L ’huissier n’a
pas rempli le vœu de l’ordonnance de 1667, article 3 du titre 2,
qui veut, à peine de nullité, qu’il soit fait mention, en l’original
et en la copie, des personnes auxquelles les exploits ont été
laissés. L e sieur Assollant peut invoquer avec succès la jurispru
dence constante de la Cour d’appel et de la Cour de cassation.
X/irrégularité de cet exploit est évidente -, et ce moyen n’a pas
été couvert par les défenses au fond j il a été opposé in limine
E
st d u m ê m e a v i s ,
litis.
Sur l’incompétence des juges de commerce, le soussigné re
m arque, d’après Jousse, sur l’art. 4 du titre 12 de l’ordonnance
de 1673, que la vente d’un cylindre ne peut être de la compé
tence des tribunaux de commerce. Il faut bien distinguer les
ventes faites par des marchands et artisans des choses qui doivent
être converties en ouvrages de la profession de l’acheteur, d’avec
celles qui ne doivent point être employées ou converties en
ouvrages de la profession. Ces dernières ne sont point de la
compétence des tribunaux de commerce. Jousse prend pour
exemple la vente d’un métier à bas faite à un bonnetier. Il décide
que la vente de ce métier est une vente ordinaire, faite pour
l’usage de l’ouvrier seulement, et non afin de revendre ; et dèslors, d it-illes juges de commerce ne peuvent en connoître.
Cette doctrine s’applique parfaitement à l’espèce particulière ;
la vente d’un cylindre pour calandrer est ¿\ plus forte raison une
vente ordinaire, laite pour l’usage de l’artisan seulement, et non
pour être revendu.
�( 39 )
Relativement aux moyens du fond, le soussigné n’a rien à
ajouter les moyens sont développés avec autant de force que de
clarté, et la libération du sieur Assollant est évidente.
Délibéré à R io m , le 22 août 1806.
P A G E S ( de Riom ).
*
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A RIO M , de l’imprimerie do
Landriot, seul
imprimeur de la Cour d'appel
�
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Factums Marie
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[Factum. Dufour, Michel. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Petit-Dauterive
Gairat
Julienne
Prieur
Pagès
Subject
The topic of the resource
créances
cylindre à indiennes
textile
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
An 11-1806
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0502
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0310
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Coverage
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Paris (75056)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
cylindre à indiennes
textile
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b087fe33b86257d08158a33637bd24be
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MÉMOIRE
POUR
L e sieur A U B R E T O N , receveur de l’en
registrement et des domaines en la ville
d’A h u n , défendeur en assistance de cause;
c o n t r e
Le sieur H e n r y - C l a u d e B E R M O N D ,
ancien administrateur des loteries , rentier
demeurant à P a ris, demandeur ;
ETC ON TR E
L o u i s J O R R A N D , notaire impérial, habitant
de la ville d’Ahun, défendeur au principal;
EN
De
PRÉSENCE
B E T - B O U Q U E T , habitant de
la ville d’Auzance, aussi défendeur
G aspard
.
V
i c t i m e depuis dix ans de la duplicité de ceux en
qui j’avois placé ma confiance, j’ai su me résigner à mon
sort, et j’ai vu avec le calme de la probité trompée passer
ma fortune en des mains étrangères. Mais ceux qui s’en
A
�(2 )
disputent les lambeaux se croient autorisés à expliquer ma
conduite , chacun suivant l’intérêt qui le dirige. Si ces
explications sont nécessaires à la justice, elles 11e doivent
émaner que de m oi : je,dois la vérité à des magistrats
q u i, j’ose l’espérer, n’auront pu que me plaindre, sans
me retirer leui^ estime. Je la dois encore à nies c ré a n cie rs ,
en retour de la confiance honorable qu’ils m ’o n t accordée,
en me chargeant moi-même de ma propre liquidation.
; U n concours d’événemens plus imprévus les uns que
les autres, m’a plongé dans un abîme où je veux rester
seul. Mes créanciers ne me reprocheront point d’avoir
rien dissimulé de ma position; je leur dévoilerai ce que
j’ai fait et ce que j’ai eu projet de faire. Si je me suis
ab u sé'p ar des espérances chim ériques, ils savent déjà
que les chances du commerce trompent l ’habiJeté comme
l ’inexpérience; et ils ne demanderont de moi que l’as
surance de ne leur céler ni mes ressources réelles, ni
celles de mes opérations qui tendoient à les augmenter.
Je vais donc leur en rendre un compte fidèle; il attes
tera ma bonne volonté, et la foi que j’aurai, autant que
possible, gardée à mes engagemens.
F A I T S .
Je fis l’entreprise, eu l’an 5 , de fournir cinquante
mille pieds cubes de bois pour la marine. L e m a rch é
en fut passé avec le ministre.
Son excellence me fit avancer une somme de 5o,ooo fc.
pour subvenir aux frais considérables de mes premières
avances; et cette somme devoit m’être retenue sur mes
livraisons; c’est-à-dire, par un tiers sur chacune, ju squ ’à
extinction des 5o,ooo francs.
�(
3 )
Je m’empressai aussitôt d’établir sur divers points les
relations qui m’étoient nécessaires. U n sieur L ia is, ar
mateur de Cherbourg, ayant encore une maison d’affaires
à Paris, me fut indiqué, et il accepta ma correspondance;
il faisoit pour moi les avances de fonds sur mes simples
traites, et recevoit pour mon compte les rescriptions du
gouvernement.
M a spéculation eut bientôt épuisé tous mes fonds
disponibles ; je ne recevois plus du gouvernement que
des valeurs qui perdoient jusqu’à 5o pour 100 : elle ne
me fut donc que très-onéreuse. L ’inobservation des or
donnances pendant la révolution , avoit laissé dévaster
les futaies, et les bois propres à la marine étoient singu
lièrement rares ; les propriétaires qui les vendoient de
gré à gré se prévaloient de ces circonstances.
Cependant il falloit fournir au gouvernement pour
couvrir ses avances. D ’ailleurs on espère toujours que
l ’avenir vaudra mieux que le présent; je continuois donc
de fourn ir, et peu à peu j’épuisois mes ressources.
L e «sieur L ia is , indépendamment de ses recettes, se
mit à découvert ►pour moi de 12,000 f r . , qu’il avança
sur mes simples traites ; mais lorsque j’eus besoin de
nouvelles avances, et qu’il me vit livré à l u i, Liais me
parla un autre langage, et voulut des précautions.
P o u r m’avancer 24,000 f r . , le sieur L i a i s , se confor
mant au formulaire des prêteurs de la capitale, voulut
i° . une obligation notariée, pour avoir une hypothèque
spéciale ; 20. des lettres de change pour la môme somme
et aux mômes échéances.
Il n’y avoit pas à hésiter, puisqu’il s’agissoit de remplir
A 2
�(4)
des engagemens; je fis l’obligation, je iis les lettres de
change; j’exigeai seulement qu’ il fût dit dans l’obligation
que par l’acquit des lettres de change l’obligation demeureroit solue et acquittée; d’où il résulte que je n’avois
pas à payer d’obligation, mais bien des lettres de.change.
La seule chose cependant qui me parut e x tr a o r d in a ir e ,
c’est que le sieur Liais voulut faire faire l’obligation
sous un nom étranger; il donna pour prétexte que ces
fonds n’appartenoient point à sa maison de Cherbourg,
et qu’ il ne vouloit pas s’assujétir à lui en montrer l’ori
gine. Les motifs du sieur Liais ne m’intéressoient pas,
il me suffisoit de n’avoir affaire qu’à lu i; et en effet,
il restoit porteur de l’obligation q u i, y compris les in
térêts pour dix-huit mois, fut consentie pour la somme
de 32,640 francs. J ’ai continué de traiter avec lui.dans
notre correspondance et nos comptes ultérieurs, pour
les intérêts après l’échéance.
.
'
L ’obligation avoit été faite sous le nom d’un* sieur
Caillas , musicien , ami du sieur Liais , et habitant la
même maison.
Les lettres de change furent tirées par le sieur L iais,
sous le nom dé veuve Liais et fils, au profit de Caillas
sur m o i, et j’en fis sur-le-champ acceptation pour payer
à échéance.
L e sieur Liais étoit nanti de ce double g ag e, et ce
pendant je n’a vois pas encore les 24,000 francs; je devois
seulement tirer sur lui successivement pour me remplir
de cette somme ; et ma confiance étoit telle envers cet
armateur , que je ne soupçonnois pas môme que mes
traites pouvoient encore lui faire un titre de plus.
�(5 )
Je tirai sur lui pour 12,000 francs d’effets;'il les laissa
protester, sous prétexte que l’obligation n’étoit pas encore
inscrite ; enfin , et après cette form alité, il les accepta.
Je restai en compte courant avec lui , et il est inutile
que j’en dise les détails : je n’avois encore de lui aucune
défiance, v
Je me trouvai à Paris quelque temps avant l’échéance
de robligation. Liais me fit beaucoup valoir les prétendus
services qu’il m’a voit rendus; il me demanda de lui sous
crire , par obligeance, pour 5o,ooo francs de billets à
ordre, en me promettant de les imputer sur l’obligation,
s’i l ‘ne les: retiroit pas«-.;Cette proposition m’effraya ; je ne cru sp a s devoir y
adhérer. Je me rendis à Rochefort.
; ; ,
L ia is , qui étoit instruit.rde ce v o y a g e , m’écrivit à
R ochefort, le 12 prairial an 1.1 , la lettre ci-après, sous
le couvert des Imbert, mes commissionnaires, avec les
quels il étoit aussi en correspondance.
« J ’ai, lieu d’être étonné, M onsieur, de la manière
«
«
«
«
«
«
dont vous en agissez avec m o i, après tous les procédés
que j’ai eus pour vous : vous ne pouviez vous refuser
à me souscrire les effets que je vous avois demandés.
Je vous le répète, si pari défaut de remise de vous
j’éprouvois quelques désagrémens, je ne manquerois
pas de les faire retomber sur vous; vous auriez perdu
«
«
«
..
ma confiance ; et dès ce moment j’enverrois un exprès
pour vous poursuivre, tant pour ce que; vo u s.m e
devez en co m p te cou ran t, que pour l’ inscription. »
L ’obligation étoit du 27 nivôse a m o , et devoit échoir,
�m
ainsi que les six lettres de change, le 30 messidor an 11.
J ’avois-tout lieu de redouter l’effet de la menace qui
m ’étoit faite : je cédai; j’envoyai les 5o,ooo francs de
traites , en réfléchissant qu’elles couvroient ma dette
hypothécaire de 32,640 francs.
L e 28 messidor, deux jours avant l’échéance de l’obli
gation et des six lettres de change, Liais m ’écrivit :
cc T o u t honneur sera fait à vos traites échéant en fruc« tidor.
« Je suis en pourparler avec quelqu’un pour lui subs« tituer votre obligation , qui seroit payable dans les
« termes que vous demandez ; m ais, avant t o u t , l’on
c< désire avoir un nouveau certificat des hypothèques :
« envoyez-moi ce certificat de suite. » Cette lettre, enre
gistrée le 18 nivôse an 13, étoit d’une adresse remar
quable; car, en m’annonçant que les traites de 5o,ooo fr.
seroient acquittées fidèlement, il est clair que je redevenois débiteur de l’obligation; elle me tranquillisoit sur
l'échéance, tout en me prévenant qu’il p o u rro ity avoir
u n transport ; ce q u i , e n core u n e fo is, m’étoit indifférent,
si les traites étoient acquittées ; et tout étoit combiné
pour m ’en donner pleine confiance.
M a sécurité 11e fut pas longue : on me présenta pour
plus de 20,000 francs de traites tirées par m oi, à valoir
sur les rentrées de la m arine, touchées par Liais pour
mon compte , et à cet effet acceptées par Liais ( indé
pendantes de 5o,ooo francs donnés par obligeance )*
Je n’étois point en mesure pour couvrir une aussi forte
somme, parce que rien n’avoit dû m’y préparer. Il étoit
�(7)
clair que le sieur Liais ar ri voit à une faillite ; mais les .
porteurs d’effets étoient fondés à s’en prendre à moi ;
je ne pou vois pas m’en défendre*
Dans cette conjoncture, partagé entre l ’espoir, qui ne
se perd jamais, de venir à bout de mes affaires, et la né
cessité peut-être urgente de déclarer une suspension à
mes créanciers, j’étois dans cette pénible situation d’un
liomme q u i, ne pouvant tirer aucun parti de la confusion
de ses idées, semble implorer les conseils de tout le monde, •
et cependant craint de les demander.
C ’est ici où commencent mes relations avec le sieur
Jorrand , qui parut prendre intérêt à moi avec une fran
chise si cordiale, que je remerciai la providence de m’en
voyer un sauveur dans l’homme de qui j’aurois peut-être
le moins espéré des consolations.
i J ’étois élevé avec l’opinion que la fortune du sieur
Jorrand devoit son accroissement à la mienne. J ’avois
perdu mon père à l’age de dix ans; celui du sieur Jorrand
fut mon curateur et l’administrateur de mes biens : sans
clientelle et sans fortune apparente , il s’occupoit des
affaires de mon p è r e , et travailloit dans son étude lors
qu’ il venoit dans la ville d’Ahun.
L e sieur Jorrand, devenu après son père notaire et
p ro cu re u r, sembloit devoir être mon protecteur par
reconnoissance. Je fus surnuméraire à l’enregistrement,
pour conserver une place occupée depuis un siècle par mes
ancêtres. La régie vouloit me la conserver, et cependant
le sieur Jorrand l’avoit sollicitée et obtenue. A la vérité
cette conquête ne s’étoit pas consolidée sur la tête de
l’ usurpateur ; la régie avoit eu la bonté de penser que
�(
8 )
les démarches de mon protecteur n’étoient qu’ une perfidie,
et ni’a voit rendu presqu’aussitôt la place de mon p è r e ,
en destituant le sieur Jorrand.
Son procédé, dont j’avois à cette époque exprimé l’in
dignation avec toute la vivacité de mon âge, ne m’avoit
pas, comme on peut le croire, disposé à regarder désor
mais le sieur Jorrand comme un ami bien chaud. Il est
vrai que le temps fait tout oublier. La révolution est
venue encore passer par-dessus ce petit événement. L e
sieur Jorrand a été député à la convention ; il a voulu
depuis être receveur général du département; et ayant
fait le voyage dé Paris pour ses sollicitations, il s’est établi
chez mon frère : en sorte qu’insensiblement, et d’occa
sions en occasions, les rapports s’étoient rétablis entre nous
à l’époque à laquelle je viens de m’arrêter. Ils s’étoient
même rétablis au point que depuis quelques années il
vivoit habituellement chez m o i, il y faisoit son étude,
et je n’avois rien de caché pour lui : il sembloit par ses
prévenances vouloir me faire oublier le passé. 'Dans la
p ro s p é rité momentanée de mes affaires, il m’avoit offert
6es soins, sa bourse et son crédit. Je m’absentois souvent
des mois entiers, il faisoit les affaires du dehors comme du
dedans; je n’avois donc pu avoir rien de caché pour lui.
A l’époque de ma suspension, il paya pour moi 10,000 fr.
a M . Fauchier, montant de deux traites que je ne devois
p a s , mais que j’avois négociées à M . Fauchier ( ce sont
les premières traites acceptées par L ia is, qui sont reve
nues sur moi ). Cette som m e, en y comprenant les intérêts
et quelques autres avances, s’est portée à 14,000 fr. lors
qu’il a rédigé l’état de mon passif.
Son
�■'( 9 ).
Son obligeance ne nie sembla donc pas assez étrange
pour que je dusse m’en défier, dans ma situation. L e sieur
Jorrand ayant singulièrement accru sa fortune par l ’ac
quisition des biens de ra b b a jje,d u ,M o u ler, passant pour
avoir un portefeuille considérable, et,m ’ayant d’ailleurs
l ’obligation de plusieurs services domestiques que je n’ai
nulle envie de lui reprocher , me sem bloit, à poiut
nom m é, l’homme le plus propre à me délivrer de l ’em
barras où m’avoient, jeté les circonstances.
Je donnai donc tète baissée dans; la-proposition qu’il
me fit de ses services ; je rne reprochai même d’avoir
nourri dans mon cœur, pendant ^ingt ans, l’injustice de
le croire un malhonnête hom m e, ne doutant p;js que
son empressement à m’o b lig e r, après m’iivoir n u i , ne
fut un acte honorable de contrition et de grandeur d’âme.
Je crus aussi à la compensation ,du bien et du mal dans
les destinées humaines; et je fus(1dès cet instant résigné
¿1 exécuter avec u n e ,.confiance aveugle^ tout ce que le
r¡sieur Jorrand voudroit me prescrire..
• ■vil se fit d’abord livrer.,tous mes papiers; fit un état
exact de toutes mes ressources; étiqueta de sa main jus
qu’aux'choses les plus minutieuses, même ma commis
sion de yeceveur; il dressa l’état de mes .dettes (q u e je
rapporte écrit ¡de»jsa m ain ) ; et quand-il eut tout v u ,
il concerta le plan de son opération. ;
Il faut, me dit-il, que j’aie un titre ostensible et for
mel pour régir toutes vos affaires, Vous allez donc me
? consentir un bail à ferme pour neuf ans de tous vos
biens. L e prix en sera dit payé, d’avance pour les six
premières années. Tous vos bestiaux me seront vendus;
B
�( ito))
cette vente aussi portera quittance.'Quaïît'a’Vos'marchés
avec le gouvernem ent, vous m’en passerez le transfert
aussitôt! que j’aurai pu comprendre auprès des bureaux
du ministre si je n’ai aucun ‘risque à courir en me
substituant à vous.
T o u t autre qtfe moi eût réfléchi peut - être sur le
danger incalculable 1d ’un dépouillement aussi absolu.
Mais que le lecteur se mette s’il le peut àJla !place d’un
homme qui ayant jusqu’alôrs tenu àjses engagemens avec
h o n n e u r, s e voit à la veille d’y m an q uer, et de ^sup
porter les soupçons injurieux de tous-ceux qui se Soiit
confiés en sa signature.
Si dans une telle situation on est encore blâmable de
n’avoir pas tout p r é v u , j’admirerai’ la force dpâftie(de
ceux qui auroient pu mieux faire; pour moi, je ne vis
que l’obligeance du sieur Jorrand, et je souscrivis à tout.
Un seul point cependant me causoit une légère répu
gnance , c’étoit de donner quittance par anticipation ;
non pas que j’eusse la pensée que le sieur Jorrand en
abuseroit ; elle eût été in co m p a tib le avec ma confiance
absolue en lui : mais il me sembloit que mes créanciers
pouvoient y voir le signe d’une fraude dirigée contre
e u x , et cette simple apparence me révoltoit. L e sieur
Jorrand eut bientôt à cet égard vaincu mes scrupules.
V o tre bail à ferm e, me d it-il, ne sera qu’un épou
vantail pour ces petits récalcitrans, qui dérangent tou
jours les opérations d’une masse de créanciers, en faisant
des saisies et des frais inutiles. Mais j’écrirai moi-même
à vos principaux créanciers que je suis à la tête de vos
affaires, pour les retirer d’un simple engorgement. Vous
�( 11 )
conserverez; la> possession yde. vos propriétés-, où je ne
ferai que puiser annuellement .ce qui sera nécessaire à
votre liquidation. A in sirne vous^ inquiétez'vpas) de; l’ap
parence , lorsque je; serai p r ê t. à déclarer comme v o u s ,
que je n’ai point payé les sommes dont l’acte portera
quittance; d’ailleurs, je ne veu xravoir votre actif que
pour payer tout le mondei
A
r
.
'
r
/
Je n’eus rien à répondre à cette explication , et je
fus rassuré par le fait, en demeurant en possession appa
rente de tous mes< biens, dont je; n’ai retiré cependant
que le peu de denrees necessairèsi ài ma; consommation.
Lorsque la faillite du sieur Liais eut rejeté su r'm o i
toutes mes traites, qui étoient plutôt'les siennes,, je me
rendis à Paris, où habitoient la majeure partie des-créan
ciers qui les avoient fait présenter : là je les convoquai,
pour leur exposer la cause de mes r e t a r d s le u r commu
niquer ma-situation! avec; le sieuxvLiaisi, etrson dernier
arrêté de compte avec moi. J ’eus la satisfaction* de voir
qu’aucun blâme ne me fut imputé
mes créanciers eurent
confiance.en m o i; et'en me donnant umdélai- de trois
ans) pour continuer mes fournitures<au gouvernem ent,
ils m?autoriserent à disposer de la totalité 'de mes fonds.
L e sieur Jorrand ayant assisté à cette convocation', se
fit nommer; syndic ; fonction qui-lui donnoiÉ toutedatitude
pour l’exécution,du p la n ta g e et généreux duquel j’at*.
î
tendois lestplus grands avantages.
: t) t ;
L ’affirmation des créances eut lieu à Guéreb léi 12 ger-i
m inai an 1 2 ; et le sieur Jorrand’ s’y fit’
réserve des
« sommes payées pour moi après le contrat d ’ u n io n .,
« pour déplacement et préparatipn: de bùisi de marine
« étant actuellement à Pontarion. »
�( I2‘ )
Pendant m'es'négocic\tions avec mes'créanciers * “je^visois
à une spéculation plus avantageuse que la -précédente’ ,‘
et je ne doutois jDasr'qu’en ! la faisant réussir je ne vinsse
à bout de mes engagemens sans une diminution notable
dans ma fortuné,
;
r. <>.
'
■ -j
'■•Lie ministrôf(>uvroit'UnrConCo:iirs pour dés fournitures., ■
à faire à la marine dans les ports de l’Ouest.
;*
Les prix s’annonçoient comme infiniment plus avan
tageux aux spéculateurs que dans mes marchés de l’an 5
et de l’an 10 , en ce que le transport des bois devoit être
p a y é p a r lieues; ce qui n’avoit>pas eu lieu dans les mar-r
cliés précédens.
: ’ *i;
Un autre encouragement consistoit à faciliter lesîachats
par la marque des bois propres à la m arine, desquels
alors la destination ne pouvoit plus être détournée.
Mais il m’étoit impossible de faire aucune soumission
en mon nom ,' en ayant déjà une première qui n’étoit
point remplie ; tout onéreuse qu’elle étoit, le ministre
n’auroit souscrit aucun marché nouveau avec m o i, tant
que le premier n’étoit pas pleinement exécuté.
Je ne pou vois donc agir qu’avec un nom emprunté;
et je me fis présenter sous celui du sieur Bet-Bouquet,
mont beau-frère.
Les sieurs Imbert , négocians à R och efort, chargés
de cette négociation, me marquèrent, le 12 messidor
an 1 1 , que ce marché étoit passé, et m ’en annoncèrent
les conditions.
' '
'
‘
Par une autre du 28, ils me demandèrent mon appro
bation pour ce m arché, parce qu’ils savoient bien qu’il
me concernait seul j je ’leur répondis pour donner cette
�( i3 )
approbation et les remercier-, ils m’en accusèrent récep
tion le 17 thermidor an 11.
Ceci se passoit, comme on le v o i t ? peu de jours avant
mon bail a ferme , consenti au sieur Jorrand , et si le
jour même de ce bail il ne se fit pas investir de ce marché,
c’est qu’il n’étoit encore qu’ un projet, jusqu’à ce que la
soumission du sieur Bet-Bouquet fût approuvée par le
ministre.
Cette approbation fut donnée et le transfert fut signé
par Bouquet, à la date du I er. brumaire au 12 , au profit
du sieur Jorrand : il-sait-lui-même qu’à cette époque on
m ’oifroit 30,000 francs de bénéfice sur ce seul marché.
Mais l ’espoir de me récupérer entièrement, m ’empêcha
d’accepter cette négociation : le sieur Jorrand d'ailleurs,
qui me faisoit entrevoir de plus grands bénéfices, m’ob
serva qu’il seroit possible que les traites que l’on m’offroit en payement des 30,000 francs, ne fussent peutêtre pas acquittées. Je gardai donc le marché pour mon
co m pte, sous le nom du sieur Jorrand.
J ’hésitois si peu à mettre sur sa tête ma fortune et mes
ressources, que je voulois encore qu’il prît le transfert
de mon ancien marché de l’an 5 , qui devenoit bien meil
leur par les circonstances, puisque les payemens s’eifectuoient exactement. Ce qui m’engageoit encore à lui faire
ce transfert, c’est que je craignois que le gouvernement,
informé de ma suspension, n’annullât ce marché, et ne^
mît des entraves dans ma liquidation.
T r o p prudent pour accepter ce transfert, sans être
éclairci de toutes les chances à courir, le sieur Jorrand
m ’envoya à Paris pour savoû* si le ministre voudroit
�( r4 )
l’accepter, parce que cette acceptation l’auroit mis hors de
danger pour les suites.
J ’écrivis au sieur Jorrand que cette substitution pouvoit souffrir quelques difficultés ; et mes lettres qu’il n’a
certainement pas perdues, aideront peut-être à éclaircir
mes intentions sur l’un et l’autre marché. Je lui faisois
part des difficultés qu’il y a v o it, et le sollicitois de venir
pour les lever lui-m êm e; il me répondit par une lettre
du 10 pluviôse an 1 2 , datée d’A lm n :
« D ès que tu trouves quelque difficulté aux change« mens proposés pour la fourniture , et que tu as l’espoir
« de la conserver, tout déplacement de ma part devien« droit inutile; presse donc la levée des obstacles, afin
« que Ton puisse mettre en mouvement les bois préparés;
c< fais surtout en sorte d’obtenir des fonds, sans quoi tout
« seroit entravé. T u sais que je suis déjà en avance de
« beaucoup. »
Cependant', et malgré sa lettre, le sieur Jorrand partit
à l’instant pour Paris en, toute, hâte. Le 14 pluviôse an
1 2 , il écrivoit à; ma fem m e, de Paris :
ce Aubretonia bien; traité avec >la grande majorité de(
cc ses créanciers, etc. : quant à lia fourniture, elle pouvoit»
ce se continuer sous 1son nom ; la seule'difficulté est* dej
ce faire lever quelques oppositions à la* trésorerie, afin'
« d’en recevoir les deux tiers-des livraisons faitesr,, au>
« moyen desquelles: on feroit.face aux dépenses des' li-<
c< vraisons à faire. Aubreton espère obtenir bientôt ces*
« mainlevées. Comme’ je ne puis prendre ici aucun
« engagement direct, je neparoîtrai pas, et ne ferai qu’ùH>
« très-court séjour. »
�( i 5 .)
¡Lorsque le sieur .-Jorrand vit qu’il ne pouvoit pas-réunir
les deux marchés sur sa tête, il dirigea tout vers le marché
Bonquet.iJeimis à sa disposition la totalité des Lois de
construction qui étoient déjà préparés pour moi avant
de .marche 'Bouquet ; ce que Jorrand n^ignoroit pas ,
puisqu’il m’en parloit lui-même dans sa lettre du 10
pluviôse.
Ces bois furent.envoyés à A n goulêm e, pour le compte
du."marché Bouquet; mais les.agens de la marine trou
vant de la précipitation à cet envoi, décidèrent queices
bois ne pouvoient être que ma propriété , parce que
Bouquet ne pouvoit pas avoir eu le tem ps d ’en faire
exploiter et mettre en route depuis sa soumission ; en
conséquence il y eut séquestre à Angoulêm e ; mais il
fut bientôt levé à cause des besoins de la m arine, et sur
les représentations que je iis, ainsi que >MM. Im bert,
à l’ingénieur, que M . Jorrand étoit mon mandataire
pour l’un et pour, l’autre marché : la correspondance
de M M . Imbert en fait mention, et les bois furent reçus
sous le nom de Bouquet.
Les envois se sont continués, depuis cette ép oqu e,
toujours pour le compte du marché Bouquet, mais avec
les bois qui m’appartenoient avant l’an 12 , et qui ont
dû produire des rentrées pour plus de 30,000 francs.
Il m’étoit dû des sommes assez considérables d’arriéré
par le gouvernement; j’avois encore pour 10,000 francs
de rescriptions : tout cela fut mis à la disposition du sieur
Jorrand.
Si on joint à ce produit celui de mes biens-fonds ,
valant au moins 2,000 francs par année ; tous mes bes
tiaux, valant à peu près 8,ooo fr.; une créance arriérée
�( 16 )
de 1,000 francs sur mon m étayer, etc., on voit que le
sieur Jorrand a eu toute facilité pour liquider mes dettes
réelles sans bourse d é lié e , et même en commençant à
se mettre à couvert pour la sienne.
J ’ai dit que le sieur Jorrand avoit été nommé syndic
de mes créanciers par le concordat de l’an 12; il demanda
une nouvelle convocation à Aubusson, et sollicita le sieur
Queyrat de s’y faire nommer syndic.
L e concordat me donne six années de délai pour payer,
en m en tio n n a n t toujours que c’étoit pour parachever ma
fourniture avec le gouvernement. L e sieur Jorrand, qui
a signé et dirigé ce concordat, y a bien laissé*entendre
que cette fourniture s’étoit continuée pendant les années
précédentes; et cependant il savoit mieux que moi que
toutes les livraisons avoient été mises sur le compte du
marché Bouquet.
Je ne crois pas que le sieur Jorrand eut alors le projet
bien formé de s’approprier le marché Bouquet; j’en-juge
par les lettres qu’il é c riv o it, et par l’emploi qu’il faisoit
de mes fonds à toutes mes affaires sans distinction.
Dans un projet de lettre qui 111’cst resté de sa main ,
il écrivoit a un de mes créanciers plus' obstiné que les
autres, pour l’engager à adhérer'au concordat; et dans
ses motifs de persuasion il lui disoit : « La situation
« d’Aubreton a pris son principe dans des circonstances
ce qui ne se renouvelleront pas.... Maintenant il a pris
« des arrangemens d’après lesquels son travail sera dirigé
cc par quelqiCun q u i inspire une pleine confiance, et il
« y a tout lieu de croire que le résultat en sera plus
« avantageux. »
Je reviens à Liais , que j’avois laissé en l’an 11 en
�. ( 17)
faillite o u verte, et qui cependant, faisant ressource de
tou t, avoit trouvé un moyen plus funeste que le pre
mier, pour compléter ma ruine.
J ’étois parvenu à obtenir de lui un arrêté de compte
daté de C h erb ourg, du 2 brumaire an 1 2 , qui régloit
toutes nos affaires, et comprenoit les traites postérieures
à mon obligation ; il se trouve soldé en ma faveur par
27,791 francs 88 centimes, en ce que j’acquitterai les
5 o,ooo francs de traites données par obligeance. L ia is ,
au surplus, reconnut par ce même arrêté de c o m p te ,
écrit en entier de sa m a in , que toutes les autres traites
se trouvoient acquittées. ( O n ne doit donc pas perdre
de vue que les 32,640 francs de traites souscrites lors de
l’obligation étant acquittés par m oi, l’obligation devenoit
nulle. )
O n vient de voir que je demeurai chargé d’acquitter
les 5o,ooo francs de traites données d’obligeance; et par
le même arrêté de compte il fut convenu que jusqu’au
parfait acquittement desdites traites, l ’obligation demeureroit en dépôt entre les mains d’un sieur Pothier, à qui
je payerois les intérêts annuels.
Je vis le sieur P oth ier; il me reçut parfaitement; et
après m’avoir laissé parler du sieur L ia is , il captiva ma
confiance, en me montrant une grande indignation contre
sa conduite envers moi : il me marqua beaucoup d’a
m itié, m’ouvrit sa bourse, et m’offrit même 3,000 francs
sans intérêts.
J ’acceptai cette somme : elle a été remboursée en partie
par le sieur Jorrand.
L a fatalité qui m’a poursuivi dans toutes mes affaires
C
�( i 8 ) .
a voulu que ce sieur P o th ier, si obligeant pour m o i, si
courroucé contre L ia is, fût au contraire un intime ami
de Liais et de Caillas, qui tous trois, comme je l’ai su
depuis , étoient associés pour l ’entreprise de la tourbe
carbonisée.
Comme il étoit écrit que chaque dépôt se convertiroit
en transfert, le sieur Potliier s’est trouvé muni d’un
transfert de mon obligation, passé à son profit par Caillas,
prête-nom de L iais, en fructidor an 13.
A in si, et malgré ma correspondance et mon arrêté de
compte avec Liais, qui prouvent sa propriété et ma libé
ration, le tout bien en règle, et enregistré avant le trans
fert d’une obligation éteinte, L i a i s , mon débiteur de
27,791 francs, sans attendre les délais du concordat,
fit mettre mes biens en expropriation , sous le nom de
P o th ier, par-devant le tribunal de Guère t.
L à , le sieur Jorrand se présenta avec mon acte du
28 thermidor an 1 1 , pour revendiquer mes bestiaux
comme sa propriété : mais cet acte fut attaqué de nullité,
comme fait après la cessation de mes payemens ; et le
tribunal de Guéret ordonna une preuve que le sieur
Jorrand n’a point laissé faire.
Il n’étoit point encore aguerri à se dire propriétaire
des dépôts que j’avois confiés à sa bonne fo i, ou peutêtre avoit-il des vues plus grandes.
Quoi qu’il en soit, ce jugement ayant p e u t-ê tre eu
reflet d’éloigner beaucoup d’enchérisseurs, le sieur Jor
rand crut le moment favorable pour acheter à vil prix
les biens de celui qu’il proclamoit son am i, et qui avoit
mis corps et biens sous sa tutelle.
�( !9 )
J ’avois , bien avant cette adjudication, formé contre
Polluer une demande pour faire annuller le transport
de l ’obligation de Liais. Cette procédure fut suivie devant
le tribunal d’A u bu sson , saisi d’une demande en homo-7
logation du concordat ; mais le sieur Pothier déclina
la compétence, et demanda son renvoi à Paris : il l’a
obtenu, sur l’appel, en la Cour de Limoges.
Déjà dupe du sieur Potliier, je ne devois pas laisser
à mes créanciers l’embarras de se dépétrer de ses chicanes.
L a malignité d’autrui m’a donné enfin de l’expérience,
et je l’a i , quoique un peu ta rd , mise en pratique. C ’est
au magistrat de sûreté que je dénonçai les manœuvres
des trois associés de la tourbe carbonisée ; mais le di
recteur du jury jugea à propos de renvoyer les parties
à fins civiles. Je ne perdis pas courage, et une nouvelle
plainte adressée à son excellence le grand -ju ge, avec
les pièces justificatives, eut plus d’efficacité : Caillas fut
arrêté, et dans plusieurs interrogatoires qu’il a subis,
ainsi que Pothier, ils révélèrent sans doute tout ce que
j’avois intérêt de faire connoître, puisque le magistrat de
sûreté ordonna que les papiers du sieur Caillas seroient
saisis. Mais un sieur P é r ie r, gendre du sieur Pothier,
en est instruit; il trouve le moyen de communiquer avec
Caillas, détenu chez le magistrat de sûreté, prend ses
clefs , et va enlever ses papiers, qu’il dépose chez un
agent de change : heureusement il est pris sur le fait,
rendant les clefs à Caillas ; le magistrat de sûreté lui
fait rendre les papiers , les fait déposer au gre ffe, et
décide qu’il y a lieu à instruction criminelle. Je rends
plainte contre le sieur P érier; mais le même directeur
C a
/
�( 20 )
du jury se trouve encore là, et prend sur lui de décider
que me trouvant seul plaignant, il n’y a pas lieu à suivre
le procès quant à présent.
Cette suspension bizarre et arbitraire décidera sans
doute mes créanciers à seconder, mes efforts pour dé
masquer une collusion aussi déhontée; il ne sera peutêtre pas impossible de prouver que des escrocs de Paris
ne sont pas plus invulnérables que d’autres.
C ’est pour parvenir à ces fins, que le sieur Berm ond,
habitant la ville de Paris, a été nommé syndic, et le
sieur Picolet, avocat en la Cour de cassation, conseil
de l’union ; ce dernier, qui a toutes les pièces, a tout
di rigé jusqu’à présen t, même la procédure contre le
sieur Jorrand : l’un et l’autre se sont fait connoître ,
et ont choisi leur avoué à G u é r e t , avec lequel ils sont
en correspondance.
.Pendant que je m’efforçois de lutter contre la dilapi
dation de ma fo rtu n e , le sieur Jorrand étoit en dis
cussion avec les sieurs I m b e rt, mes correspondans de
Kochefort , sur les p rod u its du m a rch é Bouquet. Ce
procès important a laissé des traces précieuses que les
plaideurs des deux parts voudroient bien avoir pu sup
prim er; car aujourd’hui ils colludent, et sans leurs débats
écrits j’en serois réduit à attester la vérité par ma seule
science, les sieurs Imbert m’ayant refusé toute commu
nication depuis leur accord avec le sieur Jorrand.
Je vois par un jugement du tribunal de commerce de
R och efort, du 13 janvier 18 1 0 , que le sieur Jorran d,
comme fondé de pouvoir de Bouquet, avoifc assigné les
sieurs Imbert en 1809, pour lui payer 37,946 fr. 40 cent.
�( 2t )
par eux reçus, du payeur de la marine, sur le marché
Bouquet, et comme commissionaires chargés par ledit
B o u q u et, pour fourniture de bois de construction.
Il offroit déduire 12,000 francs, et 144 fr. payés sur
ses mandats (sans doute pour les frais de séquestre de
l ’an 1 2 ) .
A ce la , les Imbert répondoient qu’ils avoient été les
com m issionnaires cï*Aubreton, am i de J o r r a n d , pour
une fourniture de l’an 10, et que dans le cours de cette
fourniture ils lui avoient endossé pour 8,000 fr. de lettres
de change venues à protêt ; en sorte que leur créance,
suivant e u x , est montée à 12,888 francs 67 centimes. '
Ils ajoutoient « que le sieur Aubreton , se trouvant hors
« d’état de remplir la fourniture de bois qu’il s’étoit
« soumis de faire, et se trouvant encore débiteur envers
« le gouvernemen de vingt et quelques mille francs, pour
« én éviter en apparence la retenue, demanda aux sieurs
« Imbert de faire une nouvelle soumission pour la four« niture de quatre cent quatorze stères, ou douze mille
«
«
«
«
«
et
«
«
«
«
«
pieds cubes de bois de construction, sous un nom em*
prunté, c’est-à-dire, sous le nom du sieur B o u q u et ;
laquelle soumission a eu lieu le 6 messidor an r i , souS
le cautionnement des sieurs Imbert. Cette soumission
ainsi faite et acceptée, le sieur J o rra n d , se mit à la
tête de cette nouvelle fourniture, et fit choix des sieurs
Im bert, pour ses commissionaires en cette v ille ; et
comme il avoit une parfaite connoissance de’ la créance
des sieurs Imbert sur ledit sieur A u b reto n , dont 011 lui
a fourni un double du compte balancé, ledit sieur
Jorran d, indépendamment de la commission d’usage,
�( 32 )
consentit à ce que lesdits sieurs Imbert fissent la retenue
du cinquième du produit net de la fourniture de bois
qui seroit faite sous le nom de B o u qu et, pour se rem
plir de leur créance sur ledit sieur A u breto n ;
« Que peu de temps après des bois furent mis en
et route, et même rendus à Angoulêm e, pour compléter
« la fourniture de Bouquet. L e ministre, jugeant avec
«c raison que les bois expédiés étoient la propriété du
« sieur Aubreton , puisque ledit Bouquet n’avoit pas eu
« le temps d’en faire exploiter et préparer, donna des
c< ordres pour qu’ils fussent séquestrés, pour être livrés
«
«
«
et
« sous le nom du sieur Aubreton ; et ce n’est qu’après
cc de vives sollicitations et les besoins pressans du p o rt,
« que le ministre s’est déterminé à consentir que les
« plançons et bordages fussent reçus sous le nom de
cc B o u q u e t, quoiqu’il fût bien constant que les bois
cc composant la première livraison de ce dernier, étoient
cc la propriété dudit sieur Aubreton. »
A cela le sieur Jorrand ne répondoit qu’en éludant,
et se re n fe rm o it dans son titre. C e p e n d a n t, par une
inconséquence assez inexplicable, il avouoit ( peut-être
à cause de sa correspondance) que sur le marché Bou
q u et, il étoit bien convenu de laisser déduire le cin
quième de la dette d’Au breton ; mais il s’en prenoit aux
Im b e r t, qui par leur retenue des fonds de la m arine,
avoient arrêté les nouvelles expéditions.
L e tribunal de commerce de Rochefort mit la cause
en délibéré, ès-mains de son président; et après a v o ir
entendu un rapport fait sur l’examen des pièces respec
tivement produites 9 il rendit un jugement qui fixe les
�( 23 )
points de faits reconnus constans , avec une précision
dont rien ne doit être omis.
« Considérant, 8°. que le sieur Aubreton vouloit con« tinuer la fourniture sous un autre nom que le sien,
« attendu qu’il avoit encore beaucoup d’autres bois d’achat,
« dont majeure partie étoient exploités et en route, écrivit
« au sieur Imbert de faire en sorte de passer un nouveau
« marché avec la marine, pour la fourniture de quatre
« cent quatorze stères, ou douze mille pieds cubes de
k
«
«
«
bois de construction, sous le nom du sieur B o u q u e t,
lequel marché eut lieu le 6 messidor an i i , au nom
dudit sieur B o u q u e t, et sous le cautionnement des
sieurs Imbert père et fils;
,
c< Considérant, 90. qu’à l’époque de ce m arché, le
« sieur J o r r a n d y fa m i intim e du sieur A u b r e to n , et
« comme chargé d’une procuration générale de Bouquet,
« se mit à la tête de cette fourn iture, et a continué les
« sieurs Imbert père et fils pour ses commissionnaires
c< en cette v ille ;
«
«
«
«
«
«
«
«
« Considérant, io°. que le sieur Jorrand étant parfaitement instruit de la créance des sieurs Imbert père
et fils sur A u b reto n , puisque leur compte balancé se
trouve jo in t ¿1 la production de B o u q u e t, tout en leur
accordant la commission d’usage , consent en outre
qu’ils prélèvent, sur le montant de la fourniture nette
de Bouquet, un cinquième d’ icelle, pour se remplir
du montant de leur créance sur ledit sieur Aubreton;
« Considérant, i i ° . que peu de temps après ce nouveau m arch é, ayant été mis des bois en route pouy
�( 24 )
opérer la fourniture dont il étoit question pour icelui,
le gouvernement les considérant comme étant la propriété du sieur A u b r e to n , avec d’autant plus de raison
que Bouquet n’avoit pas eu le temps d’en faire exploiter
et préparer jusqu’alors, ils furent, en vertu des ordres
du ministre, séquestrés, pour être livrés sous le nom
du sieur A u b reto n ; q u ’il paroît m êm e, d’après une
lettre du sieur Penevert, que le nombre étoit de deux
cent dix-huit pièces ;
« C o n s id é r a n t , 120. que par suite, et sur la repré« sentation qui fut faite des besoins pressans que le port
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
a voit des bois de l'espèce de ceux qui se trou voient
soit en route et rendus à A n go u lê m e, le ministre, par
sa dépêche du 21 messidor an 12 , a consenti que les
bois en plançons et bordages dont il s’agit, q u i f a is oient
partie des bois dûA u b r e to n , quoique passés en vente
sous le nom de ce dernier, fussent distraitsy et reçus
sous le nom de B o u q u et; ce qui fut fait;
c'c Considérant, 130. qu’indépendamment de ce concc s e n le m e n t , il pa ro ît q u e les bois q u i co m p osent la pre« mière fourniture faite par Bouquet étoient la propriété
cc du sieur A u b r e to n , puisque d’après les ordres donnés
« par le sieur Penevert au sieur T r ip o n , contre-maître
« charpentier, ce dernier a fait une recette provisoire,
« en plançons et bordages, de cent cinquante-huit pièces,
cc cubant ensemble deux mille cent quarante-huit pieds
cc cubes, suivant son procès verbal du 6 fructidor an 12,
cc sur le produit desquels les sieurs Imbert père et fils
« paroissoient avoir des droits pour se remplir d’autant
cc de
�( 25 )
« de leur créance sur ledit sieur A u breton , soit en totalité
« ou partie. » (i)
Par ces motifs, le tribunal de Rochefort a réglé la
recette des Imbert à 39,340 fr. 64 ce n t., et leur dépense
à 25,287 fr. 83 ce n t., y compris les 12,000 francs déjà
payés au sieur Jorrand , et le surplus pour droit de
commission et frais de voiture; ce qui constitue les sieurs
Imbert débiteurs de 11,567 francs.
Jorrand a interjeté appel à Poitiers, le 10 février
1810 , à cause des droits de commission accordés , et
pour un article de 960 francs pour voiture : tout quoi,
disoit-il, étoit accordé au mépris des écrits, conventions
et obligations souscrites par les sieurs Im bert.
Mais en même temps le sieur Jorrand ne voulant pas
perdre de temps, a fait un commandement aux sieurs
Imbert de payer les 11,567 fr. accordés par le jugement
qu’il approuvoit en cette partie.
Sur cet appel les parties ont transigé et passé un arrêt
d’expédient à Poitiers. Mais quel qu’il s o it, il ne doit
être que relatif aux griefs d’appel, et il ne peut rien
changer aux faits reconnus constans par le jugement de
Rochefort.
(1) Les sept premiers motifs se rapportent à mon marché per
sonnel antérieur; les quatorzième, quinzième et seizième motifs
sont la fixation des recettes et déduction.
Pour pouvoir se présenter sous le nom de Bouquet, Jorrand
a donné à Bouquet la qualité de marchand patenté première
classe. Cette patente est fausse; le maire a certifié q u e lle
n’existoit pas.
P
�( 2 6 }
J ’ai voulu réclamer auprès des sieurs Imbert les pièces
par elles produites au président de Roehefort. Je leur
ai demandé des explications sur les écrits, conventions
et obligations dont parloit le sieur Jorrand dans son
appel. Je n’ai rien pu obtenir des sieurs lmbert : dès
l’instant qu’ils ont été d’accord avec le sieur J o rra n d ,
ils ont été muets pour moi.
Ils pouvoient avoir cette l'éticence pour mes créan
ciers; car en se payant par leurs mains ils ont senti qu’ils
faisoient tort à la masse, et qu’ils s’exposoient à des re
cherches. Mais, à mon égard, je ne devine pas pourquoi
ils ont voulu me taire la vérité, à moi qui 11’ai donné
à Jorrand l’administration de mes biens et de mes res
sources , qui ne l ’ai chargé de l’exécution de mes mar
chés que pour les payer ainsi que les autres créanciers
( ma correspondance avec les Imbert en fait mention
expresse ). Ce ne peut donc etre que le sieur Jorrand
qui leur a prescrit le silence.
Si c’est pour m’ôter les preuves de propriété du mar
ché B o u q u e t, ils savent bien qu’elles résultent de leur
correspondance do l’an 12 et 1809 ; mais ils auront cru
tous mes papiers au pouvoir du sieur Jorran d , ce qui
étoit très-vraisemblable.
Déjà les créanciers convoqués le 22 juin 1809, pour
la nomination d’ un syndic à la place du sieur Queyrat,
nvoient eu l’œil ouvert sur les démarches du sieur J o r
rand , et avoient chargé le sieur Bermond , nouveau
syndic, de le poursuivre en reddition de ses comptes.
L e sieur Bermond ayant pris le temps d’aller aux
enquêtes, a voit commencé une procédure à Guéret par
�( *7 )
une requête du 14 avril 18 10 , pour demander que le
sieur Jorrand rendît com pte, comme mon associé, et
pour conclure, dans le cas où il ne le seroit p a s , à la
nullité de toutes ventes , baux à ferme , transport de
créances ; de tout quoi le produit seroit rapporté à la
masse des créanciers.
Le syndic ne parle pas, dans cette requête, du marché
.Bouquet, soit qu’il l’ignorât, soit qu’il ne crût pas pou
voir attaquer le sieur Jorrand sur cet article. C ’est le
sieur Bouquet qu’il a assigné le 18 juin 18 10 , pour le
faire condamner à rendre compte du bénéfice des bois
relatifs au marché fait sous son nom.
L e tribunal a ordonné jusqu’à présent trois articles
d’instruction sur cette affaire; i°. que le sieur Bouquet
produiroit le transfert par lui fait à Jorrand; 20. que
Jorrand seroit appelé en cause; 30. que je serois aussi
appelé pour répondre aux interpellations qui me seroient
faites.
Jorrand n’est venu à l’audience que pour se plaindre
de moi ; il a c r u , je n’en doute pas, que celui qui crie
le plus haut fait le plus d’impression ; il a supposé que
des injures lui donneroient une quittance.
Je crois en avoir assez dit pour prouver le contraire :
une reddition de compte, qui tournera au profit de mes
créanciers, ne doit pas m’être indifférente. Si ce compte
est dû il faut qu’il se rende. Les faits que j’ai rapportés
me semblent assez précis pour ne pas douter ; et je me
ibornerai à en tirer quelques conséquences.
D 2
�( *8)
Objections et réponses.
L e sieur Jorrand nie foi’mellement que le marché
Bouquet fasse partie de son mandat; il prétend qu’il en
est sérieusement propriétaire en son nom , par le transfert
du I er. brumaire an 12.
Cela est impossible. Tous ceux qui ont participé à ce
marché et à ses suites lui donnent un démenti formel.
Les sieurs Im b ert, de R och efort, ont constaté par
toute leur correspondance que c’est m oi qui leur ai donné
l ’ordre de faire ce ma relié sous le nom de Bouquet; que
c’est pour m oi qu’ils l’ont fait.
L e sieur Bouquet, dans les actes de procédure éma
nés de lu i, convient ne s’être jamais mêlé de ce marché;
il dit n’avoir été que mon p r ê t e - n o m , pour le f a i r e
tourner en ma fa v eu r ,* et qu’après avoir donné une
procuration à J o rra n d , le I er. brumaire an 12 , parce
que Jorra n d f a is a it alors toutes mes affaires , il en fit
un transfert, pour ne plus figurer nominativement.
Les agens de la marine sont venus compléter ces preuves
en faisant saisir les premiers bois fournis par le marché
B ouquet, en constatant que ces bois étoient les m iens.
Enfin le jugement de Rochefort achève la conviction,
en donnant des détails sur des faits personnels au sieur
Jorrand; et certes le résultat de ce jugement ne peut pas
être suspect pour la cause actuelle; car ni le syndic des
créanciers, ni aucune autre partie intéressée n’y étoit
appelée , et tout s’est révélé entre le sieur Jorrand et
les Imbert.
�( 29 )
Que si aujourd’hui les Imbert nioient des faits articulés
par eux-mêmes, et non contestés par le sieur Jorrand,
leurs lettres restent pour attester que moi seul étoit à
leurs yeux le négociateur et le propriétaire.
M a is, dit le sieur Jorrand, il ne s’agit pas de savoir
quel étoit le propriétaire avant le I er. brumaire an 12,
si je le suis devenu à cette époque.
\
Cette objection ne pourra être écoutée que lorsque le
sieur Jorrand rapportera, i°. sa correspondance avec les
commissionnaires depuis son transfert; 20. les pièces pro
duites par lui au tribunal de Rochefort, ainsi que l’atteste
le jugement; 30. les écrits, conventions et obligations
d’entre lu i et les sieurs Im b e r t, suivant ce qu’il a dit
dans son appel du 10 février 1810 : alors on saura si
véritablement le sieur Jorrand a eu la conscience de sa
propriété dans le marché Bouquet.
En attendant qu’il communique ces pièces essentielles,
011 peut trouver des indices dans quelques lettres des
sieurs Im b e rt, les seuls commissionnaires qui se soient
mêlés des fournitures de Rochefort.
Dans une lettre à mon adresse, du 16 ventôse an 12,
les Irnbert me rendent compte de ce qu’ils ont fait poul
ie marché Bouquet, et ils me disent : « D ’après la levée
« du séquestre apposé sur vos bois, votre ancienne four« niture doit reprendre son cours comme cette dernière
cc que rien ne doit plus arrêter. Nous pensons d’ailleurs
cc qu’il ne dépendra que de vous qu’il y ait une certaine
« quantité de bois destinée pour la remplir, lorsque telle
ce ou telle partie sera marquée ¡)our M . B ouquet. »
�( 3° )
L e 2 prairial an 12, c’est encore à moi qu’ils s'adressent
pour dire : « Nous attendons toujours ,avec impatience
et de vos nouvelles, ainsi que de M . Jo rra n d , pour Ici
«¿fourniture B ou q u et : il,nous tarde bien de recevoir
« des bois pour cette soumission. »
L e 21 du même m ois, ils m’écrivent encore pour se
plaindre de mon silence : « Depuis deux mois que vous
« êtes instruit que toutes les difficultés sont levées, que
c< vous pouvez donner cours à votre marché, ain si qu'à
« celui B o u q u e t, vous ne vous êtes nullement mis en
« mesure pour livrer en ce port. »
Ces lettres sont d’une date postérieure au transfert,
daté du I er. brumaire au 12,
Les sieurs Imbert n’ignoroient pas ce transfert appa
ren t; cependant ils ne parloient de Jorrand que comme
d’un fondé de p o u vo ir, d’un agent, et ils entendoient
toujours ne se mêler du marché Bouquet que pour m oi.
Ils l’ont cru jusqu’à la fin.
L eur lettre du 11 mai 1809 est encore plus expres
sive. J e leur demandois un compte du m a rch é Bouquet;
ils me répondent : « Nous sommes tout prêts à vous
«
«
«
«
«
«
cc
«
fournir un compte exact de toutes les livraisons que
nous avons exécutées sur le marché Bouquet, dès que
nous aurons la garantie formelle que sur leur produit
nous prélèverons tout ce que vous nous devez. Quand
nous serons tous d’accord sur ce point essentiellement
nécessaire à nos intérêts, qui ont bien souffert de cette
créance, nous réglerons avec vous , et rem ettrons
ensuite à qui de droit ce qui pourra rester en nos
�( 31 )
* mains ; jusque-là nous ne nous démunirons pas d’un
« sou. »
Et lorsque le sieur Jorrand s’est présenté à eux sous
le nom de Bouquet , en 1809, pour leur demander des
comptes, ils ont dit à Bouquet comme à Jorrand qu’ils
n’avoient suivi ce marché, depuis son origine, que comme
mes commissionnaires, et pour m oi.
S’ il y avoit du doute vis-à-vis Jorrand, en son nom ,
il n’y en a pas vis-à-vis Jorran d, syndic de mes créan*
ciers.
Celui - ci ne peut prétexter aucune erreur , aucune
croyance d’avoir géré pro suo.
Lorsqu’il a été nommé syndic depuis l’an 12 jusqu’à
1806, lorsqu’il a accepté ce syndicat, Jorrand a con
tracté l’obliga tion de ne rien détourner pour l u i , mais
de rapporter fidèlement à la masse tout ce qui seroit
provenu de ma fortune, de mes ressources, de mes bé
néfices.
O r , le marché Bouquet étoit dans mon actif; le sieur
Jorrand ne l’ignoroit pas : ses bénéfices étoient donc ma
propriété. Quand même il auroit eu seul une correspon
dance pour ce ma relié , et une gestion suivie, tout cela
'se rapportoit à sa qualité de syndic.
A cela il répond que la date du transfert le met à
l’abri de cette comptabilité. Je ne suis syndic, d i t - i l ,
que sous la date du 2 5 nivôse an 12; le transfert Bouquet
est du i«r. brumaire an 12 : donc j’étois propriétaire
avant d’être syndic.
L a loi et les faits repoussent cette objection.
�( 32 )
L e transfert du i er. brumaire an 12 est un acte sous
seing p r iv é , enregistré seulement en 1810.
O r , les actes sous seing privé n’ont de date contre les
tiers que du jour de l’enregistrement ( Code civil, art. 1328 ).
Rien n’autorise donc le sieur Jorrand à montrer cet
acte comme un titre antérieur à son syndicat.
Je ne puis sur cette date précise donner des notions
bien certaines , n’ayant pas la mémoire assez locale sur
un fait auquel je n’attachois alors aucune importance :
mon attestation pour ou contre seroit d’ailleurs inutile
à mes créanciers, qui ne verront que la date légale.
Ils demanderont de plus au sieur Jorrand ce que
veut dire sa réserve insérée dans l’acte d’affirmation de
sa créance, le 12 germinal an 1 2 , ce de ce qu'il a voit
« payé pour A u b r e to n , pour déplacement et préparation
' « des bois de marine qui sont maintenant à Pontarion. »
Ces , bois n’ont pas été livrés sur mon marché de
l’an 5 , sur lequel le sieur Jorrand n’a presque rien
fournis.
Cette livraison n’étoit donc faite que pour le marché
B o u q u e t, et alors le sieur Jorrand n’entendoit avoir
avancé les frais de transport que pour m o i.
Il paroît que ces bois de Pontarion y étoient encore
au 29 thermidor an 1 2 , époque où le sieur T r ip o n , par
une lettre ci Vadresse du sieur Jo rra n d ou du sieur
A u b r e to n , nous écrivoit à l’un ou à l’autre de venir
l’y joindre : preuve ajoutée à toutes les autres, que tous
mes correspondans ne faisoient aucune différence entre
les intérêts de Jorrand et les miens.
Supposons,
�C 33 )
Supposons, si le sieur Jorrand l’aiine m ie u x , que sou
transfert a véritablement la date du ier, brumaire an 12;
il n’en résultera rien de plus avantageux pour lui.
Car à cette d a te, le transfert sera toujours postérieur
à la cessation de mes payemens, qui est de l’an 11. ( L e
concordat de 1806 a rejeté, comme tardive, l ’inscription
du sieur Jorran d, qui est du 4 vendémiaire an 12. )
Suivant la déclaration de 1702, confirmée par le Code
de commerce, ce transfert seroit n u l, quand même il
seroit an térieur, s’il n’avoit précédé cette cessation de
plus de dix jours.
En vain le sieur Jorrand oppose-t-il que le nom Bouquet
lui suffit pour être à couvert. Les matières de fraude
sont remises à la prudence du juge; la loi s’en rapporte
entièrement à lu i, comme le prouvent l’art. 1363 du Code
civil, et l’art 444. du Code de commerce.
.. Ici la nullité seroit de plein droit; ca r, par une cir
constance que le sieur Jorrand n’expliquera jamais , le
transfert est gratuit.
Q u’il explique, s’il sc peut, comment après avoir pris
la peine de suivre une admission de m arch é, près des
commissaires de la m a r in e , et ensuite dans les bureaux
r du ministre, après avoir fait les dépenses nécessaires
pour cette négociation , il seroit concevable qu’on en
laissât gratis tout l’avantage à un nouveau ven u?
Personne n’y croira ; et précisément la résistance du
sieur Jorrand à s’approprier ce marché, aide à convaincre
q u ’ il étoit trop avantageux pour le donner pour rien.
D ’autres en offraient un bénéfice considérable, et cer
tainement je ne m’en serois pas privé pour faire un pur
E
�( 34 )
cadeau au sieur J o r r a n d , trop opulent pour le recevoir.
Quand j’aurois voulu le faire, je ne le pouvois pas;
la loi me défendoit de rien détourner de mes créanciers,
pour en préférer un seul.
Aussi n’en ai-je pas eu la pensée, et nul ne peut m’en
accuser : ma correspondance avec les sieurs Im bert, qui
étoient aussi mes créanciers, le prouve. J ’ai continué
après l’an 12 de me présenter à eux comme propriétaire
du marché B ouquet, et c’est ainsi qu’ils m’ont toujours
considéré jusqu’à 1809, comme l’atteste le jugement de
Rochefort.
Ce transfert, mon bail à ferm e, ma vente de bestiaux,
l ’état de mes dettes de la main du sieur J o rran d , ses
lettres à mes créanciers; cela fait un tout inséparable,
un corps de faits et d?opérations qui se lient mutuelle
m en t, et s’expliquent les uns par les autres.
O n ne croiroit à la mutation sérieuse du marché Bou
q u et, que si on pouvoit croire à celle de mes bestiaux
et de mes récoltes.
O r , le sieur Jorrand n’a pas même osé persister à vou
loir s’approprier mes bestiaux. Il a avoué n’avoir qu’un
titre co lo ré, et une propriété apparente.
D e même il l’a dit pour son bail à ferme; et la preuve
en est qu’il n’en a pas demandé la maintenue lors de
l’expropriation.
A in si il ne faut le juger que comme il s’est jugé lu imême ;
Puisqu’il ne veut pas garder la qualité honorable d’ami
officieux, chargé d’améliorer ma fortune, il faut qu’il
avoue n’avoir voulu que la dévorer.
�( 35 ) .
Mais malgré lui il n’est qu’ un mandataire comptable :
et une triple qualité l’oblige à rendre un compte depuis
la fin de l’an n .
i°. Comme fermier sans avoir rien p a y é , il doit un
compte des récoltes, des bestiaux et de leur cro ît, des
bois coupés et de l’arriéré des fermages.
Et qu’il n’objecte pas que déjà je suis convenu avoir
conservé la possession de mes biens ; cet aveu que je
pou vois dissimuler, puisqu’un bail authentiqua m’en dispensoit, est une preuve de ma véracité. Mais j’ai expliqué
que ma possession avoit consisté à être le maître appa
rent comme par le passé, et à recevoir le blé néces
saire à ma consommation; mais le surplus des denrées,
les bestiaux, les bois, etc., sont restés à la disposition du
sieur J o rra n d , comme je l’ai déjà dit.
Q u’il n’objecte pas non plus qu’étant mon créancier
de 14,000 francs, il a entendu se payer par ses mains,
en prenant quittance des fermages et des bestiaux par
anticipation.
Il ne peut pas le dire a in s i, puisqu’il a affirm é, en
nivôse an 12 , être mon créancier de ces 14,000 fr.
20. Comme mon mandataire général il est comptable,
i ° . de tous les bois préparés à mes frais, qu’il a employés
au marché Bouquet ; 20. des bénéfices de ce même mar
ché ; 30. de 10,000 francs qu’il a touchés pour moi de la
trésorerie, et de toutes autres sommes moins considé
rables que je pourrai justifier.
30. Comme syndic des créanciers, il est encore com p
table de tout ce qu’il a dû faire pour rechercher tout
mon actif ( notamment la créance de 27,791 francs, due
�( 36 )
par L ia is, et celle de 10,000 francs, montant de deux
traites acquittées au sieur F a u c h ie r), faire valoir mes
ressources, et n’en laisser péricliter aucune.
L e sieur Jorrand’veut singulièremet abréger sa respon
sabilité. Il dit qu’il n’a été syndic que pendant l’an 12 ,
l ’an 13 , et partie de l’an 14 ; et même qu’il n’a point
de-comptes à rendre pendant ce délai, parce que les
créanciers m’avoient laissé la gestion de mes affaires.
Il y auroit bien de la mauvaise foi dans cettte objection,
si elle étoit sérieuse; c a r ie sieur Jorrand n’auroit eu un
syndicat de deux ans que pour s’approprier tout ce que
mon actif présentoit d’avantageux, et il auroit accepté
une fonction purement oisive.
Cette prétention choque la loi, qui répute tout syndic
comptable. Elle choque aussi la vérité ; car plusieurs let
tres du sieur Jorrand prouvent qu’ il géroit mon actif,
régloit et recevoit. Ainsi je n’avois conservé la gestion de
mes affaires , que comme marque honorable de confiance
>
■
de mes créanciers; mais par le fait, c’est le sieur Jorrand
qui a tout dirigé , et je ne me suis mêlé que de ce qu’il
m ’abandonnoit, et sous sa tutelle.
Ouant
à la durée du syndicat
du sieur J o rran d ', ce n’est
V
“
pas là ce qui doit borner sa comptabilité; car un bail à
ferme de neuf ans, et le marché Bouquet, d’ une durée in
définie, n’ont rien de compatible avec les deux ans du
syndicat.
Il ne faut pas non plus que le sieur Jorrand prétende
être quitte, pour avoir fait les fournitures des seuls bois
préparés pour mon compte ; il suffit qu’ il ait voulu
prendre sur sa tête le marché Bouquet, pour qu’il doive
�C 37 )
rendre compte du bénéfice dont il étoit susceptible, sans
le régler à sa manière.
T o u t mandataire doit accomplir le mandat, tant qu’ il
en demeure chargé , et répond des dommoges-intérêts
qui pourroient résulter de son inexécution (C o d e civil,
- article 1991 ).
Si cette loi peut quelquefois paroître sévère pour
celui qui est resté chargé du mandat de gré à gré , et
par oubli de s’en départir, ce n’est au moins pas pour
celui qui a voulu le retenir en croyant se l’approprier.
L e sieur Jorrand a dit en plaidant, qu’il devoit ce
procès à l’acquisition qu’il avoit faite de ma maison.
J ’ai pu etre étonné (com m e tout le m o n d e) que
lui Jorrand, déjà propriétaire de trois maisons, dont deux
au Moutier et une à À h u n , en ait acheté une quatrième.
Mais je ne comprends pas trop comment le sieur J o r
rand a pu supposer que je ne lui demandrois compte de
rien, s’il n’a voit pas acheté ma maison. C’eût été faire tort
de 5o,ooo francs à mes créanciers , et le sieur Jorrand a
oublié son rôle en laisant croire que son intention étoit
de les frustrer, en ne rendant compte de rien
L e sieur Jorrand a longuement discuté sur le contrat
d’union du sieur B erm on d, qu’il prétend ne pas etre
dans les formes voulues par les ordonnances.
Il dit « que les sieurs Bermond et Serson ne sont pas
et créanciers , parce qu’ Àubreton avoit suspendu en
« thermidor an 11 , et que leur obligation est du i5
« vendémiaire an 12. » Il ajoute qu’aucun des créanciers
n’a aiïirtrié, et que le contrat n’est pas homologué.
Quoique le sieur Jorrand connoisse à fond cette ma-
�( 38 )
tiè re , tout ce qu’il a dit à ce sujet n’est que mensonge.
Tous les créanciers ont figuré au contrat d’union.
M M . Bermond et Serson sont créanciers, parce que
leur obligation n’est qu’un arrêté de compte, suite d’un
premier titre. Tous ont affirmé leurs créances, et le
sieur Jorrand comme les autres.
Il y a eu jugement d’homologation; les sieurs Bermond
et Serson y sont parties; le sieur Jorrand sa voit tout cela
mieux que m o i , et cependant il le démentoit.
Je n’ai plus qu’un mot à répondre au sieur Jorrand.
IÎ a dit que je l’ai trompé sur l’état de mes dettes, pour
l ’engager dans mes mauvaises affaires ; et sans autre
explication il a pris texte dans ses propres paroles pour
se courroucer contre moi.
Trom per Jorrand eût été un peu difficile ; et je ne
me pique pas de faire des miracles.
Gomment ose-t-il dire que l’état de mes dettes lui étoit
inconnu? c’est lu i qui l’a dressé, et je l’ai encore écrit
de sa main! je le mettrai sous ses yeux , pour qu’il le
reconnoisse, et ne mente plus, au moins sur cet article (i).
Je n’ai pu rien dissimuler à Jorrand, puisqu’il avoit
tout en son p o u vo ir, qu’il cherchoit mes créances où
elles étoieut, et gouvernoit ma fortune comme la sienne.
Lorsqu’on se dit trompé, il faudroit un peu consulter
l’opinion publique pour savoir son secret, et surtout
(1) Le contrat d’union diminue le passif de plus de 80,000 fr.
Plusieurs des créanciers ont été tirés de la liste, notamment le
sieur Q u e y ra t, qui n’a signé le concordat que co m m e -démis
sionnaire.
�( 39 )
il ne faudroit pas s’aveugler au point de dire ce qui
choque l’évidence. Ceux qui compareront l’opulence de
Jorrand et la m ienne, demanderont ce qu’est devenue
ma fortune : on le leur dira ; et alors il est vraisem
blable que je ne passerai plus pour avoir fait une dupe
du sieur Jorrand.
Je crois qu’il faut arrêter là le cours de mes réflexions,
elles me mèneroient peut-être au delà des bornes que je
me suis prescrites; et après avoir dit que j’avois supporté
sans amertume la perte de mes biens, je serois peut-être
inconséquent. D ’ailleurs ma tache a été remplie en ren
dant un compte fidèle de ma conduite depuis l’an n :
je désire que mes créanciers me rendent la justice de
penser que j’ai voulu faire pour le mieux. Si le sieur
Jorrand a l’ infidélité de leur disputer un dépôt qui eût
dû être sacré entre ses mains, il a été de mon devoir
de m’y opposer de tou les mes forces. Maintenant, si les
Liais, les Caillas, les Pothier et les Jorrand triomphent,
je me consolerai en pensant que je n’ai rien à me re
procher, ni dans mes intentions, ni dans mes efforts,
et j’aurai la fierté de dire seul : T o u t est p e rd u , fors
l’honneur.
Signé A U B R E T O N .
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
A R IO M , de l’imp. d cT H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire»
rue des T aules, maison L a n d r i ot. — Décembre 1810.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Aubreton. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Subject
The topic of the resource
créances
fraudes
commerce du bois
construction navale
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Aubreton, receveur de l'enregistrement et des domaines en la ville d'Ahun, défendeur en assistance de cause ; contre le sieur Henry-Claude Bermond, ancien administrateur des loteries, rentier demeurant à Paris, demandeur ; et contre Louis Jorrand, notaire impérial, habitant de la ville d'Ahun, défendeur au principal ; en présence de Gaspard Bet-Bouquet, habitant de la ville d'Auzance, aussi défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
An 5-1810
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0425
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ahun (23001)
Auzances (23013)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53809/BCU_Factums_M0425.jpg
commerce du bois
construction navale
Créances
fraudes
-
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7887ef65a97d1c066524297e3798aa67
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41
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�COUR
r
MEMOIRE
EN
IMPÉRIALE
RÉPONSE?
POUR
Sieur J oseph DE L A ROCH E-LAM BERT,
habitant à Issoire, intimé et appelant ;
C O N T R E
Dame F r a n c o i s e - A g l a é - G A b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G O U R D O N , son m ari; dame
A n g é liq u e - A r m a n d e - C a m ille D E LA
L U Z E R N E et sieur A n a t h o c l e - M a x i m ilien H U RAU LT D E
V I B R A Y E , son
mari, habitans de la ville de P a r is , héritiers
bénéficiaires de madame d e M o w t m o r i n , laquelle
étoit héritière bénéficiaire du sieur EmmanuëlFrédéric de T a n e , son frère, appelans ;
CONT RE
Sieur HENRI D U V E R G I E R , habitant a P a ris;
S i m o n T E R O U L D E yhabitant à Daudeville;
P i e r r e - L o u is L A I S N E , ancien sellier à
Paris habitant à Sens; A n t o i n e - L o u is
A
DE RIOM.
CH A M BR Ï.
�( a )
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; etJEÀN
C H A R D O N y chapelier y habitant a P a ris,
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,,
aussi appelans,
C ON TR E
Sieur
A
D E TANE - SA N T E N A S,
habitant à Paris y intimé ;
m é d é e
ET
C O N T R E
Sieur L o u i s N A T T H E Y , habitant de Nyon en
Suisse y aussi intimé.
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la p lu s grande s im p lic ité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’une te r r e , chargé d’en payer
S a n s
le p rix à un notaire choisi par une direction de créan
c ie r s , lui en paye près de m oitié; ensuite il revend la
te rre, et laisse dans les mains du second acquéreur une
somme égale à ce q u 'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second acquéreur , p o u r s u iv i par les opposans, produit des quittances de consignation, assigne
les créanciers en m ainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces c r é a n c ie i’s attaquent le prem ier acqué
r e u r, qui met en cause son garant : c e lu i-c i emploie
�C3 )
pour libération le jugement qui a validé sa consignation.
A lo rs l’acquéreur observe aux créanciers qui le pou r
suivent , que leurs oppositions à des lettres de ratification
^ ont lie leurs interets à ceux du second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés , ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
V o ilà à quoi se réduit la question p rin cip ale, et il
est évident que jusqu’ici elle ne présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse : mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du vendeur
origin aire, qui com prennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers elle seroit pour euxmêmes , font cause commune avec e u x , pour que tout
retom be sur le prem ier acquéreur.
A lo rs tout s’exagère et se com plique. L ’émigration de
l ’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout : d'autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à m ille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas, et le
tribunal même où il a trouvé justice. E n fin , après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la m ultitude, mais plus
étrangers en core, on vient crier à l ’injustice et à l’indé
licatesse , en disant froidement : « Q ue m’im porte si vous
« devez recouvrer ou non
5ooooo francs que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas la vôtre ! Que
A 2
�(4 )
«
«
«
«
m’im porte encore si vous êtes ruiné par ce payem ent,,
et si votre famille est respectable. Je veux de l’argent,
et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose
moins en mesure de me résister; d’ailleurs votre émi-
« gration se prête à tous mes sophismes : il y a tant de
« lois, sur cette m atière,, qu’ il est im possible.de ne pas
« y voir que tout doit retomber sur vous. D ’ailleurs ,
« quand je me suis donné la licence d’im prim er qu’une
«• décision contraire à mon intérêt étoit un, jugement de
« f a v e u r , j’ai calculé l’effet de cette injure sur l’esprit
« des magistrats auxquels j’en demande la réform e. Si
« je ne puis les forcer à croire qu’il faut sacrifier un
ém igré par préférence, m on adroite censure sera tou«■jours d’un poids quelconque dans la balance ; elle
« achèvera probablem ent de-me conquérir le suffrage de
« ceux, dont l’opinion auroit été incertaine. »
A in si eût parlé M achiavel ; ainsi parlent les syndicsdes créanciers, de T an e , qui v e u le n t, p e r jh s et n e fa s ,
intéresser en se présentant comme des victimes.
Q u ’ils tâchent de prouver à la Cour, que m algré leursoppositions à des lettres, m algré un jugement qui pro
nonce contre eu x la validité du payement que le sieur
Natthey a été chargé-de leur faire, il leur reste encore une
action : voilà leur cause..
Mais que dans leur colère et dans leurs' calculs ils fassent
semblant de supposer de l’adresse, des insinuations et de
la faveur; que tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent à insinuer que cette ém igration deviendra aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des»créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s*être f a i t de ses propres J'a i! tes un m oyen
d?acquérir : voilà ce qui n’est ni la cause ni la. vérité r
mais une insigne et brutale calomnie;
Car personne ne sait m ieux que les adversaires qu’il
n?y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la R o ch e-L am b ert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en>
écus sur une terre qu7ils n’ont pas : et on ose encore leu r
demander plus de ôooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce:
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
f a i t s
;
A p rès la m ort du sieur Em m anuël-Frédéric de Tane>,
sa succession fut acceptée sous bénéfice d’inventaire par
Françoise-G -abrièlle de T a n e , épouse de M . de M o n tm orin , ministre des affaires étrangères.
Madame de M ontm orin ne pou voit vendre en cette
qualité les biens de la succession sans y appeler- les
créanciers ; elle fit apposer des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyi’e , Chadieu, la ChauxM ongros et le m obilier de la succession. Il y a eu pour
777400 francs de ventes avant 1790.
L a terre de Ghadieu fut vendue par madame de
M ontm orin aux sieur et dame de la R oche-Lam bert, par
acte du 17 juin 178 8 , moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a i s évalués à 5 deniers par liv re , produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000 fr. seroient
payés solidairement par les sieur et dame de la R ocheLam bert eiitre les m ains de Trutat¿ notaire-séquestre,
�(6)
ou a u x créanciers q u i auront été délégués; savoir, un
quart au i 5 septem bre, et le surplus dans le courant
des deux années, en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et q u e , s’il se trouve des oppositions du ch ef
de madame de M on tm orin , elle les fera lever dans les
six semaines ; mais hors ce c a s, elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de T an e de Santenas, T ero u ld e, commissaire à terrier;
C hardon, chapelier; L ouis L a isn é , sellier, et T o u ta in ,
tailleur d’h ab its, tous syndics des créanciers de T a n e ,
lesq u els, après avoir pris lecture de la ven te, la con
firm ent et ratifient a u x conditions y exprim ées. Ils font
élection de dom icile chez M- P ern ot-D u plessis, procu^
reur au parlement.
L e jour même de la’ v en te, M . de la R oche-Lam bert
paya la somme particulière de 7812 liv. 10 s ., à T ru ta t,
n otaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
E n 1 7 9 1 , les sieur et dame de la R o ch e -L a m b e rt,
voyageant en A lle m a g n e , envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur b e a u -frè r e , deux procurations; celle du
sieur de la R oche-L am bert porte pou voir d'em prunter
les sommes nécessaires à ses a ffa ires, g érer, liq u id er,
vendre : elle est passée devant H eidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 1791.
• L a procuration de la dame de la R oche-Lam bert porte
pou voir & em prunter 60000f t \ pour placer sur C ha d ieu ,
�(7 )
régler compte açec M . T r u t a t , notaire j recevoir ,
donner q u itta n ce, fa ire tous emprunts qiùil jugera bon
être, pour Varrangement des affaires de son m a ri. Cette
seconde procuration est passée devant L u tn e r, notaire à
W o r m s , le 20 octobre 1 7 9 1 ( 1 ) .
E n vertu de ces actes, le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
L e 27 novem bre 1791 , par acte reçu C a b a l, notaire
à-Paris , le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la R o c h e -L a m b e rt, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n ’avoit pas de pou voir de la dame de la R oche-Lam bert ) ,
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
P a ris, moyennant ôooooo f r . , dont il reçut i2Ôooo fiv
en assignats, et quant aux 376000 fr. r le sieur Sauzay
prom it les payer dans un an a u x sieur et dame de la
R oche-Lam be? t , o u y si bon lu i sem blait, a u x créanciers
desdits sieur et dame de la R o c h e - L a m b e r t , et spé
cialem ent a u x créanciers privilégiés sur ladite terre..
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la R o ch e-L am b ert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux im putations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dam e de la Roche-Lam bert quittoient la F rance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur prem ière pensée a été de s’o ccu p er
de leurs c ré a n c ie rs, et que tel a été l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�s’ oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
E n fin , pour l ’exécution de ladite clause, le sieur de SaintP on ey fait une élection de dom icile à Paris.
L e 4 janvier 17 9 2 , il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellem ent ; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics.
L e 22 avril 179 2 , le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’u n e , du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
•Tane.
Dans la même année 17 9 2 , le sieur de la R oche-L am bert fut porté sur la liste des émigrés.
L a dame de la R oche-Lam bert n’a jamais été portée
sur aucune liste.
Sous prétexte d’une loi du 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens des absens du te rrito ire, sans les
désigner encore comme émigrés , le sieur Sauzay fit
déclarer par le curé d’A u tezat, à la m unicipalité du lieu ,
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la R oche - Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il a voit pris des lettres de ratification, et que
les créanciers opposans aux lettres absorberont le p r ix
et au delà : d’où il conclut qu’il a intérêt de conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre -est h y po t h é q u é e . « E n sorte q u e , dit le sieur
a Sauzay, s 'il[fa itfa ir e ladite déclaration, c’est m oins
« à
�(9 )
«
«
«
«
«
«
«
à cause des sommes dont il peut paroître débiteur, et
dont la république ne pourra ja m a is profiter, puisq u elles doivent être absorbées pa r les dits créanciers
hypothécaires opposans a u x lettres de ra tifica tio n ,
que pour donner des preuves de son civ ism e, et empêcher qiüon ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence. »
Par acte du 25 juillet 17 9 3 , le sieur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux M artres, les m ou
lins et fours banaux des M artres, dépendans de la terre
de Chadieu , moyennant la somme de 61100 francs,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
L e 7 nivôse an 2, par acte reçu Gabal, notaire à P aris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Chadieu
au sieur W a llie r , Suisse, pour lui ou la personne que
W a llie r se réserva de déclarer dans les six m ois, m oyen
nant 530000 fr. dont W a llie r paya comptant 40000 f r . ,
s’obligea de payer 135000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des
355ooo fr. restans, W a llie r
fut délégué à les payer, so it a u x créanciers de T a n e ,
précédent propriétaire, q u i se sont trouvés o p p o s a n s
A U X L E T T R E S D E R A T I F I C A T I O N PR ISES P A R S A U Z A Y ,
soit afin d'en f a i r e le dépôt et la consignation partout
où besoin se ra , aussitôt après le sceau sans opposition
su r le sieur S a u za y des lettres de ratification à prendre
sur la présente vente.
L e sieur Na tthey dit avoir été subrogé par le sieur W a llie r
à ladite vente, par acte sous seing p rivé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-D ôm e
fit décerner, le 24 ventôse au 2 , une contrainte contre
B
�( ï° )
le sieur S a u za y > pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche - Lambert eu vertu du contrat de
vente de 179 1, sous prétexta que le vendeur étoit ém igré.
E nsuite, et à la date du 26 floréal un 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
3
cc Je soussigné, receveu r de l’enregistrem ent et des domaines
« au bureau 'de S ain t-A m a n t-T a llen d e, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G . E tienne-Jean-Louis N a t t h e y , de N y o n ,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
,
te suivant la déclaration de com m and en sa faveur par le
■« C. W a llie r , du 7 nivôse d e r n ie r ) , la somme de trois cen t
ce cinquante - cinq m ille livres,, pour servir itant au .nom des
a cit. N atth ey et S a u z a y , qu’en ce lu i du C. Jean-JBaptiste
cc W a llie r , à la libération de Chadieu.
cc D e quoi m ’a été dem andée la présente déclaration , à l’e ffet
cc d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale sur ledit
cc Chadieu.
ce Saint-A m ant, le 26 floréal an 2. Sig n é M a u g u è . »
Il
p a v o ît q u ’ un a r r ê té du d é p a r t e m e n t , e n l’an 3 ,
annülla la ^vente fa ite au sieur Sauzay, et mit la terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et W a llie r, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay , et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que le sieur W a llie r avoit voulu 3e
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�( 11 )
il fit des offres à W a llie r , et même une consignation en
mandats. Mais les lois sur la réduction du papier-monnoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de la Seine sus
pendit le p ro cè s, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de T an e produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frim aire an
4j
reçu du C . J e a n -M a r ie T 'V a llier,
cc des deniers empruntés de J a q u e ro t, par acte d u ............. la
« somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix .du domaine
« acquis par S a u za y , des sieur et dame de la R oche-Lam bert,
ce ém igrés , suivant le contrat du 27 novem bre 1791 ; ladite
« somme de 355ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
cc nationale sur le receveur du district de C lerm o n t, n°. 424, en
ce date du i 5 brum aire dernier ; dont quittance. S ig n é M a u g u e . «
/
Les créanciers ont retiré du même registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an
a de 32851 francs
25
4 »reçu
de Jean-Louis N atbhey la somme
centim es pour les intérêts restans du prix
cc
principal du domaine de C h ad ieu , acquis de la R o ch e L a m -
cc
b e rt, sa fem m e et Saint-Poney, ém igrés, par le sieur Antoine
S au zay, lequel en a fait vente au C. W a llie r , par acte reçu
C a b a l, notaire à P a ris, le 7 nivôse an 2 , lequel W a llie r a
passé déclaration au profit dudit N a tth e y , par acte sous seing
p r iv é , du 7 nivôse an 2 , enregistré à Paris le 17 messidor
cc
cc
cc
ce
an 3 , par P in au lt; ledit payem ent fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lia s , directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrem ent à Paris , le
cc 12 frim aire présent m ois; et ledit payem ent effectu é en une
cc rescription de la trésorerie nationale sur les domaines d’ém i« g rés, n°. 493 ? e t sous la date dudit jour 12 du présent mois.
cc
« Certifié c o n fo rm e , le 8 vendém iaire an 11. Sig n é
M
B 2
augue
.
»
�( 12 )
L e iei\ nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de T a n e , aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite qualité de
créanciers opposans a u x lettres de ratification prises
par Sauzay, de se trouver le i 5 pluviôse suivant .chez
le receveur de Saint-Am ant, pour y recevoir le p rix de
C hadieu. Il est constaté par cet exploit (resté au pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que Natthey y procède
c o m m e obligé d?a c q u it t e r 376000 fra n cs en ca p ita ly et
3 2 8 5 2 / h en intérêts , tant pour se libérer lui-m êm e 9
que pour libérer le sieur S a u z a y , a in si que les sieur et
dame de la R o ch e -L a m b e rt? premiers acquéreurs j et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers ne se présentèrent p a s; et le sieur
Natthey fit dresser, le i5 pluviôse an 4 , par le receveur
de S ain t-A m an t, la pièce suivante produite par lui.
«
cc
«
cc
« Je soussigné, receveur de l’enregistrem ent et des domaines
au bureau de Saint-Am ant-Tallende, d éclare, d’après le débat
des com ptes qui a eu lieu cejourd’hui entre moi et le cit.
Parades, des Martres , fondé de p o u v o ir d u C. E tie n n e -J e a n L o u is N a tth e y , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc
tc
cc
cc
cc
te
«
cc
cc
nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Chad ieu , la somme de s ix cent d ix - n e u f m ille s ix cent quatre c
là >res quinze sous en l ’acquit d u d it d o m a in e, 'dont quittance
et d éch arge, sauf audit Parades, qui en fait expresse réserve
pour ledit C. N atth ey , de plus ample e x a m e n et apuratiou
desdits com ptes , et de se pourvoir d e v a n t q u i il appartiendra ,
pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
sus des sommes dues p ar led it C. N a tth ey pour la libération
dudit dom aine de Chadieu.
cc Saiut-Am ant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4«Signé M a u g u e . »
�'
( I3 )
En marge est écrit :
« Sur 1 invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. nivôse der« n ier, n a com paru cejourd ’hui en m on bureau.
« L e i 5 pluviôse an 4 * Sign é M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers de Tane n’ont form é aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la Roche-Lam bert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulte, du 3 floréal an 10 , et
c’est le moment d’être attentif sur leur prem ière d é
m arche, pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 179.1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
S a u z a y , sur sa vente du 27 novem bre 179 1.
P ar exploit du 11 brumaire an 11 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauza y au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la vente de 1788 ; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente ci lu i consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit p a ye m e n t. (C ette pièce est produite par le
sieur Natthey. )
L e 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
h Natthey.
A lors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal d e Clerm ont, pour voir dire qn’ il est valablement libère au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés ù lui
donner m ainlevée de leurs oppositions.
�C »4 )
le
«
«
«
«
«
«
«
L e 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clerm ont rend
jugement suivant :
« L e tribunal déclare le demandeur (N atthey) bien et
valablement libéré du p rix de la terre de Chadieu l
en conséquence , fait m ainlevée de l’opposition faite
par les défendeurs (les syndics) au bureau des h yp othèques de C lerm ont, le 2 décem bre; ordonne qu’elle
sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
présent jugem ent; condamné les créanciers aux dom mages-intérêts de N atthey, à donner par déclaration. »
E li vertu de ce jugem ent, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu. Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
T o u t d’un co u p , en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire , A m bert et C ler
m ont, sur tous les biens appartenans ou ayan t appar
tenu a u x sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la R och e-L am b ert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur N atthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de p ro p o s, jusqu’à p résen t, de dire
que pour verser 170644 francs en 1791 , il avoit été
emprunté pour les sieur et dame de la R oche-Lam bert,
savoir, 44000 francs à la dame de B ourneville, m ère de
madame de la R o ch e-L am b ert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de T a n e - S a n t e n a s , représenté par Am édée.
�( x5 )
On a vu que le sieur de S t.-P on cy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T.ane, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
E t comme les syndics n’a voient inscrit que pour leur
in térêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la R och e-L am bert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
L e sieur N atthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
assigner les sieur et dame de la R oche-Lam bert en main
levée de ladite inscription.
L e lendem ain, Am édée de Tane (très-d’accord, comme
on le voit déjà., avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert de payer les arré
rages de l’em prunt ci-dessus de 30000 francs.
L e 23 du même m ois, il a été présenté requête au
tribunal de C lerm ont, sous le nom des sieur et dame de
la R o c h e - L a m b e r t ; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de T a n e , et à ce que le sieur Natthey, se disant
lib é r é , fût tenu de fa ir e valoir envers eux ladite libé
ration , sinon .de garantir les sieur et dame de la RocheLam bert. Ils ont co n clu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 9* ^ suivantes, et au désistement de
Chadieu. Enfin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à :1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
A m édée de Tane à la mainlevée du commandement de
�(
i6
)
payer par lu i fait, attendu que N atthey, chargé de payer
tout le m onde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a .eu lieu , les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce ju g em en t, le tribunal de Clerm ont distingue
les intérêts des créanciers de T a n e , d’avec ceux d’A m édée
de Tane. A l’égard des prem iers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
R och e-L am bert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur A m édée de T a n e , il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire T ru ta t,
comme obligation directe et indépendante de l’acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de la Roche-Lam bert de leur opposition au commande
ment de p a y e r (1).
I l y a appel de ce ju g e m e n t , tant p a r les héritiers et
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheL am bert, que par les sieur et dame de la Roche-Lam bert
contre Natthey et contre le sieur A m édée de Tane. O n a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert;
(1) C e jugem ent est transcrit en son en tie r, avec les m otifs,
à la fm du m ém oire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( *7 )
<l’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , q u i, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lam bert.
M O Y E N S .
P o u r suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour être
clair, autant que possible, dans une discussion dénaturée
et obscurcie par de fausses applications de prin cipes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
T a n e d’avec ceux des héritiers de M on tm orin , quoiqu’ils
aient réuni leurs intérêts, sérieusement ou non. O n exa
m inera, en prem ier lieu , s’il est vrai que les créanciers de
T a n e aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la R o ch e-L am b ert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la R o ch e-L am b ert.
20. Sur l’appel des héritiers de M ontm orin il s’agira
de savoir s i , au cas où le versement du p rix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation n ationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de T a n e , la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
M on tm orin , comme condamnée à m o r t, ou pour le
sieur de la R oche-Lam bert, comme ém igré.
30. Quant à l’appel du sieur de la R o c h e -L a m b e rt
contre le sieur Am édée de T a n e , il y aura lieu d’exam iner
si le sieur Natthey, charge de faire face à. tout, a également
lib éré le sieur de la R oche-Lam bert de cette dette.
C
�( .18)
E n fin , l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir s i, dans le cas où le sieur de la Roche*
Lam bert seroit condamné à payer des sommes quelconques
aux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A
p p e l
d e s
c r é a n c i e r s
de
T
a n e
.
La prétendue ém igration du sieur de la Roche-Lam bert
est le prem ier texte de la proposition des créanciers d e
T a n e ; ils l’appuyent sur un arrêté du conseil d’état, du
3 floréal an 1 1 , portant que tout créancier d'émigré
non liq u id é, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre l’ém igré : ils en concluent qu^
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
R ien de plus incontestable que ce point de d roit; mais
aussi rien de moins applicable à la cause.
L ’arrêté de l’an n seroit applicable, si Ghadieu.ayant
été vendu nationalement,, le sieur de la R oche-Lam bert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au gran d
liv r e , pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement..
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence.
i° . La terre de C h ad ieu , qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lam bert a
été débiteur, com me détenteur y n’a point été vendue;
�( r9 )
la nation ne s’en est point emparée : un séquestre aussitôt.,
m is que l e v é , n’a pas em pêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée , sortie des mains du
sieur de la R o ch e-L a m b ert, au 27 novem bre 1 7 9 1 , et
le sieur de la R o ch e-L a m b ert n’a été mis sur la liste
des ém igrés qu’en 1792. L a vente ayant une date au
thentique avant le 9 février 179 2, devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Chadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des évén em en s, lors
q u ’à vant leur départ ils ont mis hors leurs mains l ’im
m euble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le 'gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxièm e vente ; lo rsq u e ,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 1791 , et n’a voient rien
de commun avec l’ém igration?
30. 11 ne s’agit pas de créanciers d’ém ig ré, q u i, après
avoir eu la nation pour seul o b lig é, parce qu’elle s’étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposansqui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur interm édiaire.
Les créanciers de Tan e ont bien senti qu’il falloit
C 2
�C 20 )
prouver , avant t o u t , comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lam bert.
Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, i° . les héritiers
de M ontm orin ou d e T a n e , comme obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification
ou C h a d ie u , à cause de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la R oche-Lam bert, comme délégué envers eux par l’acte
de 1788..
P o u r amener à eux le sieur de la R o ch e-L am b ert,
#
il y a une seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite sans novation,
c’est-à-dire, sans l’extinction de la dette du prem ier obligé;
et de même il n’y a pas de novation sans l’intention
form elle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r , qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788,
on n’y verra pas même Papparence d’une novation ; au
\
contraire,, madame de M ontm orin reste débitrice des
créanciers de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 376000 fr. que payeront les acquéreurs de
C h ad ieu; ils conservent sans le moindre- doute-le droit
de s’adresser à. madame de M ontm orin ; et cela est si
bien p ro u v é , que nous voyons dans l’inscription du 11
janvier i8 o8 ‘, et en la C o u r, les dames de la L u zern e ,
héritières de M ontm orin , se r é u n ir aux créanciers de
Tane pour attaquer le sieur la R oche-Lam bert, à cause
de Tintérêt qu’i l a ù ne pas payer lui-mêm e.
�( 21 )
Si les dames de la- Luzerne n’étoient pas restées débi
trices envers les créanciers de T an e , elles ne seraient
pas là pour fa ir e valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs ; car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette som m e, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la R oche-Lam bert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers*
M a is, d it-o n , les créanciers sont parties en Facte
1788. D on c il y a délégation et obligation directe
personnelle des sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
l ’ont même exécutée en partie par leurs payemeus
de
et
ils
do
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de Facte de 178 8 , pour ratifier et
c o n fir m e r la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
d e cette in terven tion , commandée par d’autres circons
tances.
Madame de M oütm orin étoit héritière1 bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
L a c o u tu m e de P a r is ne permet à l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles; mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus n o u v e lle m e n t réfo rm ée, en est le supplém ent; et
s u iv a n t la ju ris p ru d e n c e constante à P a iis5 aucun héritier
bénéficiaire ne peut vendre les immeubles sans appeler
les créanciers.
�22)
A in s i, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
re u r, pour éviter des enchères et d’autres contestations',
q u i , bonnes ou m auvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il étoit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation , lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in fo r m a com m uni d’un
acte qui ne contenoit qu’une indication de payem ent,
11e disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l ’engagement des sieur et dame la R oche-Lam bert , et
qu’ils éteignoient celui de madame de M ontm orin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la ven te, que les créanciers intervenoient";
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu’on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Q uœ dubitationis tollendœ causâ
in contractibus inseruntur, ju s com m une non lœdunt.
(
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la R oche-Lam bert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
« P ou r qu’il y ait délégation (dit M . Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du c r é a n c ie r de décharger le
« premier d éb iteur, et de se contenter de Vobligation
« de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�< *3 )
« place du p rem ier, soit bien m arquée. C ’est pourquoi
« si P ierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers m o i, a , par un partage, chargé Jacques,
c< son cohéritier, de me la payer à sa décharge , il. riy aura
« pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m o i, si je ri*a i par q uel qu'acte déclaré fo rm ellem en t
« que je déchargeois P ierre : sans c e la , quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rien pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ie r r e 9
« et que j'a ie déchargé P ie r r e . L . 40, g. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
4 e la R oche-Lam bert ont contracté une obligation pertonnelle envers les créanciers de Tan e , sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas, et substituons-y qu’ils
ont contracté , com m e acquéreurs E T d é t e n t e u r s ,
l ’obligation de payer 375000 fr. pour le p rix de la terre
de Chadieu.
Q ue va -t-il en résulter ? R ien que de fort ordinaire ;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellem ent.
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel*
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure \ c^r les conventions particulières de la vente-
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi d ic te , et dont elle ordonne l’exécution.
L e résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la R o ch e-L a m b ert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ ordre entre les soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de T a n e ; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
personnels du sieur de la Roche-Lam bert.
S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
R oche-Lam bert, e ’est qu’en effet ils ne le pouvoient pas;
car, i° . les syndics n’ont pas form é opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la R och eLam bert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au-sieur Sauzay le 27 novem bre 1791.
A in si ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur S au zay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaquer les sieur
et dame de la R oche-Lam bert.
Ils së sont jugés eux-m êm es sur ce p o in t, par leur
exploit donné à Sauzay en l’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur Immi
gration , prouvent qu’il 11’y avoit plus lieu à un ord re,
si un ém igré étoit débiteur, parce que le gouvernem ent,
dans ce c a s , forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
3°. Les créanciers pouvoient encore moins ou vrir un
ordre contre le sieur do la R o c h e -L a m b e rt, après le
jugement
�(
25
)
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. N atthey, son garant,
a répondu à leur demande ^n faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tarie se croient dispensés de tou t,
quand ils disent que cette chose jugée est un p iè g e , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils en sont les maîtres:
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
'
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à dém êler au sieur de la R och e-L am b ert,
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réform er,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler les créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est pour un ém igré,
et nullement pour libération envers eux.
Si les sieur et dame de la R oche-Lam bert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement.que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveraient aisém ent, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose.
Il s’agit en ce point d’ une vérité de ré v o lu tio n , où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. P ou r être m ieux é co u té, en cherchant le sens
de quelques lois de circonstance que le législateur ne
nous a pas données comme ratio scr ip ta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d une autorité
prépondérante.
D
�c 76 )
L es créanciers de T a n e , en citant beaucoup d’arrêts/
ont prévu qu’on pourroit leur opposer celui rendu en
la C o u r de cassation entre les héritiers Lecom te et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvem ent réfu té} en disant que
l ’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison ; car quoique dans
cet arrêt il fût question d’une somme versée à la régie
par l ’acquéreur d’un bien de condam né, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé ; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour m ot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens j c’est dans le plaidoyer de
M . M e rlin , qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des ém igrés à verser les sommes par eux
dues, à la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion , ce. magistrat n ’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Veffet de ce versem ent, et pour q u i il est présumé
être fait. V o ici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M . d’O rm esson , vendeur d’une ferme moyennant
425ooo fr. ? avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m o rt, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
p rix de la vente.
A p rès la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame B élan ger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers L ecom te, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix, L a dame Bélanger se pré-
�( >7 )
iendit libérée m algré l’opp osition , et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente, comme y étant
obligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit pour le
compte des a yan t d r o it, et par conséquent des créan
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
C ’est pour examiner cette prétention que M . M erlin
discute; et nous allons voir qu’il l’adopte entièrement.
« Si au lieu de payer aux héritiers Lecom te (créanciers)
« le moatant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir p ou r eu x ( i ), leur
•« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eu x-m êm es... . . .
c< Q u e re ste -t-il à exam iner? Un seul point, celui de
-« s a v o ir si en effet les héritiers Lecom te o n t , par les
« m ains $ un tie r s , touché après la m ort du citoyen
cc d’Orm esson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
cc (A rtic le 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débicc teurs des ém igrés, à quelque titre que ce soit, ne
cc pourront se libérer valablement qu’en payant h 1$
,c< caisse du séquestre. )
« C ’est donc par forme de séquestre, que la nation
cc va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nation
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
,« personnel,* elle les recevra pour le compte de ceux q u it
(i) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. M e rlin ; ils sont conform es à la r t. 1 ^ 9 du Code c iv il/
D 2
�'
( 28)
«
«
«
«
pourront y avoir droit ; elles les recevra par conséquent pour les remettre a u x créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en F ran ce, sauf à en retenir le
restant à son p ro fit, s’il y a lieu..,. . . .
« (A rtic le 17. Les sommes déclarées en vertu des
c< articles précéd en s.. . . seront versées.. . , dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrem ent, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« é m ig ré , et sans y préjudiciel'. )
« V o ilà qui confirme , qui développe bien clairement
' « les conséquences que nous tirions tout à l ’heure de l ’ar« ticle 14 de la loi du 8 ‘.avril 1792. L e s oppositions des
« créanciers d’un émigré ne peuvent ni em pêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il d o it,
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la som m e que le receveur de Ven« registrement aura touchée. P reuve évidente et sans
„« réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; p r e u v e évi
te dente et sans réplique que les créanciers opposajis
« sont censés recevoir par les m ains du receveur de
« Tenregistrement j preuve évidente et sans rép liq u e,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé p a y e r , non
« pas seulement à la république, m ais encore a u x créan« ciers même opposans. » Questions de d ro it, tome 5 ,
y 0. Lettres de ratification.
Il faut rem arquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’O r-
�^
( 29 )
messon n’avoiënt été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d?insuffisance des deniers versés, et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d!Ormesson qu’au même cas
d’insufiisance. L e pourvoi des créanciers fut rejeté.
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lam bert ; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits,' et en jouant sur les mots.
' Quand ils ont poursuivi Sauzaÿ pour les payer comme
leur d ébiteur, N atthey, son garan t, a fait juger contre
e u x qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un p ayem ent, mais plutôt d’un versement
pour un ém igré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l ’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’ém igré qui n’ont pas provoqué leur liquidation , et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payem ent. ?
Disons donc avec M . M erlin que si Natthey a payé
•le prix de C h ad ieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n ’est
pas pour le sieur de la Roche-Lam bert qui n’avoit aucun
drçit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
- A in si, quand les créanciers de Tane pourraient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien', puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eu x : par conséquent
ils sont payés; e t, ne craignons pas de ré p é te r, 1’arrçté
�( 3° )
du 3 floréal an n , . l a seule loi de leur système, ne-se
rapporte nullement à eux.
D e là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,,
et bien se garder de'com m encer rune attaque d irecte,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras. ,
’
*
Mais qui a autorisé', on le ré p è te , les créanciers de
T an e à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
in dividu, pour ¡^rendre inscription sur ses biens. E t certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 1791 contre le
sieur de la R o c h e -L a m b e rt, en avoient encore moins
en 1808.
: t
A
ppel
des
h é r i t i e r s
de
M
o n t m o r i n
.
leur égard , il n’est pas.douteux qu’une obligation
personnelle de la part: des sieur et dame de lu R ocheLam bert a existé.
'
-
i
A
M ais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C ’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
-'iL e s héritiers de M ontm orin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent c o n c o u r ir .
L e p rem ier, en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
L e sbçond,' en prouvant que les acquéreurs postérieurs,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur delà Roche-Lam bert,
n ’ont pas payé.
L e troisièm e, en prouvant encore que la perte des
versemeus faits p our la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la R oche-L am bert, à cause de son
ém igration, que pour les héritiers de madame de M ontr
m o rin , à cause de sa condamnation révolutionnaire.
V o ilà ce que devoient justifier, les héritiers de Mônt>
m orin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres ^
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Xrutat que les deniers de
voient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir.
4
;
/
C e p e n d a n t les héritiers de M ontm orin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la R ocheLam bert. En avoient-ils le d ro it?
•
v
• D ’abord ils’ ne rapportent ni m ain levée, : ni consen
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
de prem ière n é c e s s ité , quand il n ÿ auroit pas .d’autre
o b sta cle .
::
:
:
En second lieu , comment prouvent-ils que les acqué*
reurs postérieurs n’ont pas p a y é ? ,
,
T o u t ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la R oche-Lam bert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le p r ix , soit à T ru ta t,
�(
3*
)
soîï aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à S au zay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement a u x créanciers p ri
vilégiés sur la terre.
•
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la R oclie-L am bert n’a rien touché de ces 376000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout ; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des h ypoth èques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créa n ciers, de payer les 376000 francs.
• Ce contrat judiciaire résultant des le tt r e s e ffa c e l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. a u x créanciers
privilégiés seulem ent.
A son to u r, le sieur Sauzay vend au sieur W a llie r ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers d e T a n e , l’ont obligé
de ne payer qu’à eux , qu’il délègue W a llie r ou Natthey
à paj^er 355ooo fr. a u x créanciers de T a n e , opposans
a u x lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer.en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposans aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qiCau nom des prem iers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’ il verse le prix de sa vente.
; Ensuite il les assigne, et fait juger contre e u x y en qua
lité de créanciers de Tane> c£tv il est libéré.
Et
�( 33 )
E t on appelle ce jugement res inter alios acta. On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’ intérêt d’un é m ig ré , parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Nattliey. M ais, i° . il est
aussi question des héritiers de M ontm orin et de la 'con
fiscation de leurs biens ; car Nattliey’, qui clierchoit à
consolider sa lib ératio n , ne manquoit pas de justifier dé
son m ieux son versem en t, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’ém igré plutôt que contre un autre, c’est que cet ém igré
n’est ni p a rtie , ni appelé à ce jugement dont on veut
lui appliquer tout l’effet.
O r , vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose ju g é e , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un cô té, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de com m un, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au prem ier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eu x la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payem ent.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur q u i,
après une libération jugée v a la b le, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire , pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
la jugement.
E
�( 34, )
N ’est-ce pas un abus du raisonnement que de soutenir *
de tels paradoxes? Si mon acquéreur-chargé de vous
p n y e r a fait juger contre vous qu’ i l avoit valablement
p a yé y qui pourra d ire , sans choquer le bon sens, que
•je n’aiipas payé m oi-m êm e, et que je reste débiteur?
A II devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse ou il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re - judicata pro veritate habetur,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression, seroit certainement réputé être en trèsbonne m onnoie, si un jugement l’avoit'dit : n u l n ’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libéi’ation , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué.
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a p r é te n d u si constante sur la défense des lois de
c o n s ig n e r sans o ffres p ré a la b le s , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des c ita tio n s n o m
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions fo rcé es, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles , puisque les créanciers et les héritiers de Tane
ne veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à, leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validité
de son payement.
E t ; chose étoïlnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de Pan 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de' la Roche-,
L am b ert, après avoir, laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion eçtre les, héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de M ontm orin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l ’exception cedendarum actionum , et ne leur diroient
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perd u , et s’ils’ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
N atthey, qu’ils expliquent donc pou rquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par'ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi iis paroissent regarder
ses versemens de Tan 2 et de l’an 4 comme un chiffon
inform e, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers d e T a n e , le sieur de la R oche-Lam bert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugem ent, ils ont perdu tout- recours contre
lu i; car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E a
�C 36 ) •
lu i'd ire : « V ou s avez acheté Chadieu , et vous l ’avez
»■
‘ revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu ,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
* être-payé par v o u s, qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le sou ten ir, 011 le trouve au contraire fort équitable;
on se passionne même au point de dire que M i de la
Roche-Lam bert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce -n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnem ent; c’est seulement dans
les lois sur les ém igrés, qu’on a prétendu trouver la preuve
que res périt domino signifie, en langage de révo lu tio n ,
que le prix d’un immeuble dû à'des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute émigration , a péri
p ou r Témigré,
.
Pourquoi ajouter,à la dureté des lois jrévolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cettei subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des ém igrés, et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent a u x débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais - qu’y a-t-il de c o m m u n entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte n otarié, en 1 7 9 1 , et un bien d'ém igré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré^
'
�( 37 )
qui par des lettres de ratification a form é un contrat ju
diciaire avec des opposans non ém ig rés, et des débiteurs
d’émigrés ?
Mais admettons en toute hum ilité qu’ un républicole n’a
dû souffrir de rien,* et que tout le sacrifice doit tom ber
sur le proscrit, n’y a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de M ontm orin soient ici à l’unisson avec les
créanciers de Tan e , pour dire que rémigré seul doit
perdre le versement ?
■Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
N atthey,. quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche - Lam bert , seconds débiteurs, il
faudra b ien , pour être conséquent, arriver jusqu’aux
héritiers de M on tm orin , premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M . de la Roche-Lam bert a été sur la liste des
émigrés , madame de M ontm orin a été condamnée révolutionnairement : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article I er. de la loi du 26 frim aire an 2 , dit que les
biens des condamnés devoient être régis et liq u id és, et
vendus comme les biens des émigrés.
L a seule réponse qu’on ait pu faire à cette observa
tio n , a été de dire que madame de M ontm orin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu
�( 3 8 }
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
A u verg n e consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état 011 il la tro u ve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le N atth ey, de N y o n ;
qui a consigné à Sain t-A m an t?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
N atth ey, sur la vraisemblance de ses versem ens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lam bert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur q u e lq u ’ u n la perte de ses versem ens, il
est évident que ce ne peut êtrer sur celui à q u i il aurait
p ro fité, c’e s t - à - d i r e , aux héritiers de Tane , comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du p r ix , puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de p r é f é r e r pour la
perte, les sieur et dame de la R o c h e -L a m b e r t, et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W a llie r ; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur oli l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur'personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
domino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à e u x , la somme consignée
�( 39 )
n’etoit pas pour eux. Q u’elle ait été versée pour-les'hé
ritiers de M ontm orin ou pour les créanciers de Tane,.
c est toujours aux héritiers de M^ontmonn que lu somme
devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
Comment donc a-t-on pu espérer de prouver qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la R ocheL a m b e r t, qui n’étoient propriétaires ' de cette somme
à aucun titre et en aucune q u alité, pas plus qu’ils ne
l ’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si la libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national, c’est le vendeur séquestré qui se retrouve
passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur, et qui a donné pouvoir à un tiers
de verser pour lui.
Cum jussu meo id quod m ih i debes sohns creditori
m e o , et tu à me et ego à creditore meo liberoi\ L . 6 4 ,
ff. D e solutionibus.
S o u v e n o n s -n o u s e n c o r e q u e M . M e r lin a p r o u v é q u ’ u n
v e r s e m e n t fa it à la caisse d u s é q u e s tr e , é to it ce n sé ê tre
fa it a u x créa n ciers , et q u e c ’est a b s o lu m e n t c o m m e si
ces c ré a n c ie rs a v o ie n t e u x -m ê m e s re ç u et d o n n é q u itta n c e .
T o u t ce qu’il a dit se rapporte parfaitement aux hé
ritiers de M ontm orin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils assurent
que la somme étoit versée.
U n autre moyen s’applique1 encore aux héritiers de-
�C 4®)
M ontm orin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un ém igré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
O r, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il y a extinction de la dette par con
fusion. (C o d e c iv il, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 1 0 , art 17. )
A in s i, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
M ontm orin sont payés par N a tth e y , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Ils ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 11 , pour revenir de la nation à
l’ém ig ré, puisque la nation les a traités de m êm e, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V o ilà , n’en dou
tons pas , ce qui est dém ontré jusqu’à l’évidence.
A
ppel
contre
le
sieur
A
m édée
de
T
an e
.
L e jugement de Clerm ont n’est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W a llie r ; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roclie-Lam bert à payer la créance du sieur
A m édée de T a n e , qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa v e n te , il est constant que le sieur Santenas
n’a plus d’action ; car le sieur de la R oche-Lam bert a
laissé
�(4 0
laissé entre les mains de Sauzay une somme suffisante
pour payer tout le p rix par eux d û , c’e s t - à - d i r e ,
375000 fr. , quoiqu ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
A u reste, il suffit de renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà d it, et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clerm ont n’a pas voulu pro
n o n cer, par une,autre inconséquence.
A
ppel
contre
le
sie u r
N
a t t h e y
.
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la R oche-Lam bert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la R oche-Lam bert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooo francs a u x créanciers de
Tane , opposans a u x lettres de ratification prises par
S a u za y , ou à consigner après le sceau de ses lettres,
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable açec les créanciers,* qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu il d ise , j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�( 4» )
.
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le p rix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances* il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en -présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lu i, de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement d élégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-m onnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réd u ction , et ont rigoureusement
exigé qiüils rapportassent les quittances des créanciers
délégués par la v en te, même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel n’ayant rien payé lui-m êm e, seroit privé
de tous moyens de défense.
E s t - il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
R o ch e-L a m b e rt à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payem ent, et q u i, m algré un jugem ent,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o c h e -L a m b e rt sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de T an e sur
leurs doutes, et de leu r apprendre si le prem ier verse
m ent de 3 55 ooo fr . 7 que N atthey dit avo ir fait à Saint-
�( 43 )
A m ant le 26 floréal an 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i5 pluviôse an 4 ,
en appelant les créanciers opposans ?
A u cun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du 1 5 pluviôse an 4 est un versement ou
un co m p te, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit m o is, lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits *, et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour savoir ce que Natthey a payé réellement.
L e sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la r é g ie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à ren dre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui com pter 355ooo francs , il faut au
moins convenir qu’une contrainte 11’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin s e r a ,
après le sceau des lettres de ratification ,* mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme m andataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son »payement; et il
ne s’en dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son m andant, car il est obligé sans
exception , ou de faire va lo ir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclam ation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lam bert de l’effet de leurs
recherches.
' Que si le sieur Natthey p réten d o it, ainsi qu’il en a
menacé , s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i° . Parce que lu i-m êm e a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen pérem ptoire sur la cause
actuelle.
2°. Parce que la demande en garantie a été jo in te ,
et que loin d^attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. Parce que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche*-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’ il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont toujours statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (i) ; l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la R oche--Lam bert dans ses
21 juin 1808.
(1) « J’ai reçu votre le ttre , M onsieur, et je ne veux pas un
cc seul instant vous faire attendre ma réponse.
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc
cc
« J’ai d’abord été fort surpris des inscriptions que les créan
ciers de T a n e ont prises sur vos biens ; j ’ai dû ensuite me
souvenir qu’ils avoient précédem m ent regretté de n’avoir pas
pris cette voie d’abord , et de s’ètre engagés dans une autre
voie qui ne leur a pas plus réussi que c e lle -c i ne peut leur
prom ettre du succès. V ous croyez d’a v a n c e , je l’espère, que
toutes choses sont parfaitem ent en règle vis-à-vis d ’eux...........
ce V o u s avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai propriétaire de Ghadieu. D ’un mot je vous tirerai de toute inquiétude. I l n e t i e n d r a q u ’ a vous q u e N a t t i i e y o u m o i , a v o t r e
te C H O I X ,
OU T O U S D E U X R E U N I S , N E V O U S O F F R I O N S D E NO US SU RS-
cc
a
titu e r
vous
dans
cette
a ffa ir e
: je vous en passerai acte
cc public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is , toutes Choses sont parfaitem ent en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc
cc V oilà u n prem ier problèm e réso lu , à votre satisfaction sans
doute. V ous v o y e z q u e N a t t i i e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
te Q U E M E M E NO US VOUS' O F F R O N S , SOUS N O T R E G A R A N T I E E T C E L L E
CC D E
C H A D I E U , D E N O U S SU B S TI T U E R
A VOUS. . .......................
cc V ous êtes encore dans l’e r r e u r , quand vous supposez que
cc les créanciers de T an e avoient fait opposition aux lettres de
cc ratification obtenues par M. votre, père sur MM. de T ane.
cc Fayon s’in scrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ce ciers non u n is, et ne fit point inscrire l’union...............I I n ’y
<c eut aucun acte conservatoire de la part de l’union;
�( 4 <S )
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M . de
Batz, représentant JNultliey , et M . de la R o ch e-L am b ert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre'
« votre p è r e , l’union fit o p position , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4 > il y eut des lettres de ratification
cc prises sur S a u za y, et l’union eut le tort extrêm e de ne pas
cc prendre d’in scrip tio n , ni faire d’opposition.
cc Ils n’ont donc que celle du 2 2 décem bre 1 7 9 1 ; mais il y a
cc. condam nation contr’eux sur c e p o in t, à l’occasion de l’inscc
tance très-âpre et très-vive qu’ils avoient com m encée à Paris
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils atta-
ct
quoient, dans S a u za y, W a llie r et N a tth e y , et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de n’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre fam ille, au lieu de se
faire condam ner sur leu r inscription de 1 7 9 1 . M a is , à dire
v r a i , je n’aurois pas im aginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient im aginé de finir par où. ils
auroient voulu com m encer. Mais les actes su bséqu en s , leur
liquidation, l e u r payem en t, sont tels qu’ils ne peuvent cherc h e r qu’à effrayer et à a r r a c h e r q u e l q u ’a r g e n t , du moins de
Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
cc
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos b ie n s , ils en
ce
ont égalem ent pris sur Chadieu.................... Instruisez-m oi de
ce tout ce qui s’est passé d eux à vous dans cette insurgence, et
ce vous aurez de ma part, ou par m oi, instructions parfaites. Je
ce vous répète que m ’identifiant à N a tth e y , je me mettrai avec
cc plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment à m e
ce faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s’il y a
ce quelque demande form ée. V oilà de ma part, j ’esp ère, fran« ch ise, loyauté autant que vous pouvez d ésirer, et plus que
« vous ne pourriez exiger.
cc Recevez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�.
(
47)
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
form e; ca r, d’après les principes, on contracte valable
ment per epistolam a ut per n un tium .
ce attach em en t, et veuillez le faire agréer à M. votre père,
te S ig n é D e B atz.
« D ès que j ’aurai votre ré p o n se , je partirai ou vous écrirai
cc sur-le-cham p. Je ne suis nullem ent in q u ie t, parce que je
ce connois les faits, et qu’ils sont réguliers. »
Paris, g juillet 1S08.
,
v*
te
te
«
ce
« Je n'ai pas perdu de tem ps, M onsieur, à prendre tous les
re.nseignemens et toutes les instructions utiles contre les créan
ciers de Tane. J’aurai une consultation dés plus habiles gens,
L ’a f f a i r e paroit inattaquable par les créanciers de T an e. Il est
heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
u t ile , surabondance de p récau tio n , pour acquitter à la fois
ce
vous et m o i, et pour m ettre dans tous les sens les créanciers
c< en dem eure. V ous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces.....................M. votre père n’auroit pas dû prendre inscc cription sur C h a d ie u , surtout sans m ’en prévenir : il n’auroit
et pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
cc créanciers. Son intérêt est de faire cause com m une a v e c
cc Chadieu : quiconque lu i dira le contraire se tro m p era , rin
ce duira en erreur. A u reste , je lui dem ande, et j ’espère qu’il
ce ne m e le refusera pas , de vouloir bien faire rayer son inscc cription au bureau de Clerm ont. J’ai b e so in , pour ma seule
« délicatesse v is-à -v is de deux personnes à qui j’ai fait deux
« em prunts, d’avoir leur certificat d’inscription avant le vôtre,
« parce qu’agissant de bonne foi et d entière confiance en m o ir
et ils ont reçu dans leu r acte ma parole d’honneur qu’il n ’existoit
�( 4 8 }
M . de Batz, représentant N atthey, a toujours continué
d’agir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de L aroch e-L am b ert la consultation
très-détaillée de M M . P oirier et Bellard (annoncée dans
Ici dernière le ttre ), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
11 y a donc impossibilité de délier le sieur Natthey de
son nouvel engagem ent, qui lève tous les scrupules des
lois de rém ig ratio n , lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
te
a
pas d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
donner en toute vé rité, et il se trouve que la vôtre existoit
le jour m êm e où j’affirmois q u il n’en existoit p a s, ou du
moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de f a it , et
celle de deux pauvres petits créanciers que j’ai fait condam ner
à Riom , et que j’espère faire rayer à tous momens. M. votre
p è r e , a p r è s a v o ir fait r a y e r celle q u ’il a déjà faite , pourra
au m êm e instant , s’il le j u g e à p r o p o s , la fa ir e r é ta b lir . Je
n’y suis que pour ma délicatesse seu lem en t, et j ’espère qu’il
cc
ne me refusera pas cette satisfaction lé g ère, q u i, dans aucun
cc
cc
«
«
cc
«
c<
cc cas , ne peut lui être dom m ageable , et qui a été pour moi
ce le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc
parlant.
A u su rp lu s, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M. V a u trin , et je m’en rapporte à ce qu’il vous conseillera
cc
cc à ce t égard.
Je vous re n o u ve lle , M onsieur, l’assurance de mon dévoue« m ent à vos in térêts, et de mon bien sincère attachem ent.
cc
«
S ig n é D e B a tz . »
II
�( 49 )
_
?f II,n e reste plus gu-un mütr àcdire sur l’elTet 'de cette
garantie, s’il tfaflloit eii’ Veriir à elle'; il est réglé par le
Code civil ^ iquiis’exprim e ainsi : ;
,* A rticle i ? 42 ^ c< T ou te ¡obligation de falrejse résout en
« dommages-intérêts, en cag de ;non-exécution.de:larpàr£
« du débiteur. »
A rticle 1184.
L a condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à »
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été e x é c u te ra le c h o ix , ou de forcer l ’autre à l’exé« cution de la convention lorsqu’elle est possible, o ird ’cn
« demander la résolution avec, dommage^ et intérêts.
« L a résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
L e sieur de la Roche-Lam bert a conclu à la résolution
de la vente de 1791 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui dem ande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
qlie lç sieur de la R.oche ~Lam bei t dut etie oblige de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a. point /«levé une
prétention aussi im m orale; il est vraisemblable qu’il s’en
G
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitim e : ainsi , à son
égard , il ^suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payem ens, puisqu’il s’y est én gagé, ou -qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendéur soit
à. l ’abri de toutes recherches;1
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
n
jY
À o'
' ‘ ,/
rj!
'
•
•
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.* :• ■• ;•
A-RIOM, de l’imp. de T H I B A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1810,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53807/BCU_Factums_M0423.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
-
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M É M O I R E
E T
CONSULTATION.
��M É M O I R E
A CONSULTER,
ET C O N S U L T A T I O N
POUR
J
a c q u e s
S A U L N I E R , propriétaire, habitant de
la commune d’A g o n g e s , membre du conseil de
l ’arrondissement de M oulins, et président du canton
de Souvigny
CONTRE
Un E crit signé J A Q U O T , traiteur à P a r is , rue de
la H arpe, se disant créancier du sieur
U
n
C o u d ert.
libelle diffamatoire est jeté avec profusion dans le p u b lic,
au mépris de toutes les lois de police.
Un sieur Jaquot l'a signé comme mon accusateur, et je n’ai
jamais eu de relations avec cet homme. Un autre individu col
porte ce libelle; et plus inconnu encore, il laisse savoir à peine
quel est son état et son nom.
1
�( 2 )
Ce sieur Jaquot m ’accuse d’avoir acheté une propriété qui
devait être le gage d’une créance de 25,ooo fr. qu’il dit avoir
contre le sieur Coudert, de qui j ’ai acheté une propriété il y
a onze ans.
Une cédule signée'par moi comme juge de p a ix , devait ,
suivant lui , m ’empêcher d’acquérir ; et cependant , le sieur
Jaquot, qui a connu ma vente judiciairement depuis l ’an n ,
ne s’était pas même douté que je fusse réprehensible, puisqu’il
s’est présenté à moi à cette époque pour saisir et recevoir' la
partie disponible du prix de mon acquisition : et c’est après avoir
reçu annuellement huit jDaiemens de moi, comme acquéreur,
qu’il imagine d’attaquer cette vente, ou plutôt de me diffamer
joour me faire acheter son silence.
Q u ’a i- je donc fait de condamnable, en achetant un objet
mis en vente, et en justifiant de tous mes paiemens ? Je suis
à le chercher moi-même.
Il est rare qu’en suivant le cours de ses affaires, on puisse
éviter toujours de froisser les intérêts d’autrüi; mais les devoirs
de la société n’imposent pas la nécessité de s’oublier perpétuel
lement pour ceux qui n’ont aucun titre à cette abnégation de
soi-même. On est tenu sans doute d ’observer ce que les lois et
la probité exigent, et je suis prêt à soumettre toute ma conduite
à
la censure, pour que mes conseils recherchent avec scrupule
si je me suis écarté de cette double ligne.
J ’étais juge de paix du canton de Saint-Menoux , lorsque le
sieur Coudert habitait la commune d’Agonges; je n’avais d’autre
liaison avec lui que celle d’un voisin de c a m p a g n e , et je ne con
naissais absolument aucune de ses relations.
L e sieur Coudert, né sans fortune, avait été élevé à Paris
pour se destiner au palais. Dans les dernieres années de la ré
volution, il se fit recevoir avoué aux tribunaux de la Seine.
E n 1793, un sieur Faure, son oncle, propriétaire de la terre
de P rm g y, commune d’A g o n g e s, et d’une riche habitation à
Saint-Domingue, lui fit donation eutre-vifs de ces deux objets.
�( 3)
Après ce changement de fortune, le sieur Coudert resla
encore quelque tems à Paris , et vint en l ’an 5 habiter sa terre
de Pringy, avec tout le de'goût que devait y porter un habitant
de la capitale, obligé par les circonstances de vivre isolément
dans une campagne de province.
Cependant, et malgré ce dégoût, personne ne supposait que
le sieur C ou dert, dont on ignorait les affaires, songeât à vendre
une propriété qui semblait sa seule ressource : les revenus de
son habitation de Saint-Domingue ne lui parvenaient pas; et,
quoique dès l’an 8 tous les esprits fussent occupés de nos colo
nies , il ne paraissait pas vraisemblable que le sieur Coudert eût
le projet de quitter le continent, jusqu’à ce que les communi
cations fussent bien rétablies.
A cette époque je cherchais à faire une acquisition, et l ’idée
ne me vint pas même de rien proposer au sieur Coudert. J ’avais
en vue une autre propriété; j ’en suivais la négociation , et me
croyais au moment de terminer, lorsqu’on m’annonça brusque
ment, dans un dîner où se trouvait le sieur Côudert, que mon
affaire était manquée , et qu’un autre était acquéreur.
Je parus sans doute affligé de celte nouvelle, et en effet elle
me fut sensible. L e sieur Coudert, qui en fit la remarque,
m ’attira après le dîner dans un coin de l’apparleraent, pour me
dire :
« Ne vous affectez pas de ce coup m a n q u é, il peut se ré« parer, si vous voulez acheter Pringy; je ne tarderai pas à le
« vendre; j ’ai des deltes qui ne me laissent presque aucun re« venu ; j ’entends fort peu à régir les biens , et j ’aime mieux me
« liquider et avoir un revenu certain, qui me suffira jusqu’à ce
« que j’aie mes biens de Saint-Domingue : le général Leclerc
« j a déjà fait rendre les possessions françaises; ainsi la mienne
« ne peut pas me manquer ».
J ’avoue cjne , charmé de cette proposition, je m’occupai dèslors de la faire réussir; je pris des renseignemens sur la terre
de Pringy : j’en parcourus tous les héritages , et cherchai ,
�( ,4 )
comme font les acquéreurs, à connaître la valeur de ce que
je devais acheter.
La négociation dura assez long - tems. L e sieur Coudert
devait rassembler l’état de ses dettes qu’il voulait déléguer, et
j ’étais intéressé moi-même à avoir sur ce point une rédaction
soignée. Je demandai à communiquer le tout à M . D u rin , pré
sident de la cour criminelle de Moulins. Nous y fîmes plusieurs
voyages. M . Durin lut tout , rédigea l ’acte , et m ’en remit le
p r o j e t , écrit de sa m a i n , pour le donner ail notaire qui devait
recevoir la vente.
Les conventions étaient, que j’achetais la terre de Pringy
moyennant 72,000 fr. L e sieur Coudert déléguait 54,526 fr. à
treize créanciers dénommés en l’acte, dont douze étaient porteurs
de titres hypothécaires; et à l ’égard des 17,474 f r . , le s.r Coudert
convertissait cette somme en une rente viagère de 1,200 francs
pour lu i, dont 600 fr. étaient réversibles sur la tête de Sylvie
Coudert sa sœur.
Tous ces points étaient arrêtés, conclus, et rédigés m êm e;
depuis plusieurs jours, par le notaire, lorsque la veille de la
clôture de l’a c t e , on me
présenta à signer, c o m m e j u g e de
p a ix , une cédule donnée à la requête d’un sieur J a q u o t , traiteur
à Paris, pour citer le sieur Coudert au bureau de conciliation.
On conçoit aisément que je ne suis pas en état de dire,
après onze ans , si celte cédule disait qu’il était dû au sieur
Jaquot 25 ,ooo francs pour fournitures d’alimens et d’assignats
pendant cinq a n s , ni si elle disait que le sieur Coudert avait
fait un billet de ces 25,000 francs, ni enfin si ce billet était
de l’an 5 ou de tout autre époque.
M a mémoire n’est pas assez fidèle pour avoir conservé ces
même pour me dire si j ’ai lu e0 effet toute celte
cédule. Il n’était question, c o m m e je viens de le dire r que
d’ une cédule de conciliation ; et ce serait exiger beaucoup des
juges de paix , que de vouloir qu’ils missent une grande at
tention à une permission de citer, lorsqu’il s’agil sur-tout d’une
détails , ni
�( 5 )
action hors de leur compétence. J ’avais (Tailleurs pris toute
espèce de précautions vis-à-vis le sieur C ou dert, pour n’avoir
rien a démêler avec ses créanciers; j ’avais exigé de lui un état
exact de ses dettes, à produire à M\ D urin, pour les déléguei*
Il donna cet-état, en ajoutant qu’il laissait en arrière quelques
usuriers à qui il avait déjà trop payé, et quelques petites dettes
domestiques, peu considérables, dont il ignorait lui-même le
montant.
A u reste, quand j ’aurais parfaitement vu tout ce que sup
posera le sieur Jaquot, je ne comprends pas encore en quoi
il pouvait être de mon devoir de rompre mon marché pour
attendre l’issue d’une semblable réclamation. L e sieur Coudert
devait savoir mieux que personne, ce qu’il avait à régler
sur ce point. U n traiteur, demandant des pensions fournies
pendant la plus grande dépréciation des assignats, ne devait pas
paraître créancier de sommes bien considérables, quand même
on aurait su qu’il réclamait 25 ,ooo francs. Ainsi je ne supposai
pas le moins du monde, que j ’allais m’exposer à une vengeance
terrible, qui ne devait éclater qu’au bout de dix ans.
Je laissai donc clorre l ’acte du notaire : il fut signé par Dom
Picard et le sieur Mérite, comme témoins. L e notaire me de
manda 4,000 francs pour les droils de fisc ; et je lui comptai
cette somme : puis regardant toutes choses comme terminées,
je ne songeai plus qu’à entrer en possession de ma nouvelle
propriété.
Quelque tems après , le notaire me porta mon contrat de
vente expédié, enregistré, transcrit ; je ne m’occupai donc
plus de cette affaire, si ce n’est pour satisfaire à mes engagemens. J ’ai exécuté toutes mes conditions; quelques créanciers
avaient des sommes plus considérables a reclamer que ce qui
était prévu, j’en ai payé pour 1,340 francs au-delà de ce à quoi
je m’étais obligé.
J ’ignore si le sieur Jaquot est allé au bureau de paix après
sa citation; je sais seulement que je ne l’y ai jamais v u ? ni
�(6 )
personne de sa part. Je n’ai entendu parler de lui qu’en l’an
époque à laquelle il fit une saisie-arrêt, entre mes mains, de ce
que je pouvais devoir à mon vendeur. Cette saisie fut motivée
sur un jugement qu’il disait avoir pris contre le sieur Coudert,
le 18 pluviôse an n ; et cette date semble prouver que depuis
la cédule de l’an 9 , il n’avait fait aucunes diligences, en*sorte
que si j ’eusse suspendu mon acquisition pour attendre ses
poursuites, le délai aurait été un peu long.
J e iis une déclaration judiciaire sur cette saisie-arrêt et sur
quelques a u tres,'je répondis que je devais 1,200 fr. de rente
viagère, en vertu de mon contrat de rente, du 22 frimaire
an 9. L e sieur Jaquot fut appelé à l’audience du 11 fructidor
an 1 1 , et la , discutant ses droits, il demanda que je fusse tenu
de verser entre ses mains les arrérages de la rente viagère
de 1,200 francs, par moi due au sieur Coudert, aux termes
de mon contrat d’acquisition.
L e tribunal de Moulins régla les droits du sieur Jaquot ;
il fut admis à venir à concurrence avec cinq autres créanciers
saisissans, qui étaient un boucher, deux boulangers, un jour
nalier et un officier de santé ( L a qualité de ces saisissans prouve
que le sieur Coudert avait accusé vrai, en n’exceptant, de l’état
de ses créanciers, que quelques dettes domestiques).
11 me semble que c’était alors le moment de se plaindre de
mon acquisition , si le sieur Jaquot avait à m’en blâmer. A u
contraire il est obligé de déclarer qu’il a poursuivi la distribu
tion de la rente par moi due au sieur Coudert, et qu’il s’est
fait adjuger 600 francs par an, à recevoir de mes deniers et
du prix de ma vente.
Voilà donc un règlement positif entre le sieur Jaquot et m o i,
provoqué par lu i, et exécuté de ma part.
Neuf ans se sont passés depuis ce règlement, lorsque tout
d ’un coup j’apprends que le département de l’Aliier est inondé
d’un écrit imprimé, signé de ce même Jaquot qui m ’accuse
aigrement de prévarication et de dol-, sous prétexte que mon
�( 7 )
acquisition lui fait perdre sa créance. Je suis accouru à M oulins,
où on m’a dit que le colporteur de ce libelle , se disant homme
d’affaires et auteur de l ’écrit, était parti pour le déparlement du
P u y - d e - D ô m e . J ’y suis venu encore, et j ’ai vu , soit dans ma
route, soi* à R iom , soit à Clermont, que le libelle était dans
les mains de tout le monde.
Je ne doute pas un instant que cet être officieux ayant fouillé
dans les papiers de J a q u o t, et trouvé la cédule signée de moi
en Pan 9 , aura bâti sur le rapprochement des dates tout l’écha
faudage d’un procès; et au métier qu’il fait de distribuer en
personne ses propres calomnies , pour m 'intim ider par un pro
cès g ra v e, ainsi qu’il a la naïveté de l ' imprimer , je ne doute pas
un instant qu’il ne soit acquéreur ou actionnaire du billet de
25.000 f r . , signé du sieur Coudert.
Pour fortifier la circonstance du rapprochement des dates,
l ’auteur de l’écrit ajoute que la terre de Pringy a été acquise parmoi au plus vil prix , à 72,000 fr. , y compris un mobilier de
16.000 f r ., tandis qu’elle consiste en 6 domaines garnis de bes
tiaux , et est évaluée à 125,000 fr. dans un acte du 16 avril 1793;..*
que je retiens encore 17,474 IV. de capital pour-un viager de
1,200 f r . , ce qui fait 1111 autre bénéfice de 5,474 fr.’ ;... que ce
viager fut encore stipulé insaisissable, pour en enlever la res- '
source aux:créanciers;... que, par des combinaisons criminelles
avec le sieur Couderl , j ’ai fait déléguer des créances non éta
blies par titres, en omettant des dettes légitimes, et en faisant
ajouter que ce qui ne serait pas dû serait gagné pour moi.... L e
sieur Jaquot dit enfin que j’ai fait transcrire sur-le-champ , afin
de lui enlever son hypothèque.
Voilà en somme tous les chefs d’accusation auxquels j ’ai à
répondre.
J ’ai acheté Pringy au-dessus du prix courant des propriétésde mon département. Six domaines semblent une masse consi
dérable pour les pays où la bonté du terrein n’exige pas qu’on
divise beaucoup'les exploitations. Mais dans un pays sablora-
�( 8 )
neux où, pour avoir des bras , il faut fournir aux colons des
bâtim ens, des bestiau x, et tous les besoins de la v i e , on est
forcé de multiplier les habitations , et leur nombre est insigni
fiant pour la valeur de la terre.
Je voudrais pouvoir présenter des baux à ferme de cette
propriété , à l’époque de mon acquisition ; mais le sieur Coudert
n’avait pu trouver à affermer que les domaines qui offraient aux
colons le plus d’avantage. L ’ un, du 3 thermidor an 6 , fait pour
neuf ans, était de 45o fr. ; l’autre, du 24 prairial an 7 , fait
aussi pour neuf ans , l’était de 400 fr. A i n s i , quand on éva
luerait au même prix ceux que le sieur Coudert fut obligé de
garder pour son compte , on ne trouverait qu’un prix annuel
,
de 2 55 o fr .; et ajoutat-on encore pour la réserve une somme
égale à un domaine, je n’eusse jamais atteint le revenu de mon
argent.
Cependant tout le département de l’Allier sait bien q u ’en
l’an 0 , l ’an 9 et l’an 10 , les propriétés de quelqu’im portance,
y étaient au plus bas prix. J e pourrais citer de nombreux exem
ples d’immeubles vendus à moins de moitié qu’ils ne se ven
draient aujourd’h u i ; et m al gr é cette bonne fortune des a c q u é
reurs, aucun d ’eux n ’a été assez malheureux pou»* trouver en
son chemin de soi-disant créanciers, qui se soient avisés, au
bout de dix nus, de leur reprocher un bénéfice trop considérable.
J ’ai cherché l’élat des contributions, pour indiquer la somme
à laquelle je suis imposé pour Pringy; mais celte cote est con
fondue avec celle de mes autres propriétés, parce qu’oulre les
six domaines de Pringy , j ’ai, sous la même perception, neuf
domaines attenans, et plusieurs locateries. Je crois, cependant,
que l’impôt de Pringy est de 780 francs, à quelque petite dif
férence en plus ou en moins; et je 11e sais pas s’il ne faut pas
en distraire l’impôt d’une prairie assez vaste, que j ’ai annexée à
I >r“ 1gy depuis mon acquisition.
L a déduction, q u ’ il a plu a Jaquot de faire, de 16,000 fr.
de mobilier, prouve toute la bonne foi du rédacteur de son
écrit ?
�( 9 )
écrit, comme si on ne savait pas que les droits d’enregistrement
du mobilier coûtent deux pour cent, et celui des immeubles
quatre pour cent.
Lorsque le sieur Jaquot a dit que Pringy avait été évalué
125,000 fr. dans une donation du 16 avril 1773 , il a menti sur
ce point comme sur le reste ; car cet acte prouve que dans la
somme de 125,000 fr. (assignats) a étc compris le quart ap
partenant au donateur dans une hab itation , appelée M ontL o u is , sise au quartier du P o n t-S a in t-L o u is au Port-auPrince.
O r, cette habitation dans sa totalité passait pour produire
plus de 3 o,ooo fr. de rente; le quart donné valait donc la peine
de n’être pas oublié ; et le sieur Coudert lui-même l’oubliait si
peu , qu’il fondait tout son espoir d’aisance sur le revenu de
cette habitation, dans laquelle il croyait rentrer incessamment.
Quant au capital de 17,474 f r . , laissé dans mes mains par un
viager de 1,200 fr ., il faut remarquer que ces 1,200 fr. étaient
réversibles sur la tête de Sylvie Coudert, et que j’avais deux
chances à courir. L a probabilité de leur vie était fort à consi
dérer sans doute ; car le sieur Coudert se disait âgé de 42 ans,
et sa sœur était plus jeune que lui.
Ce viager n’était point stipulé insaisissable , comme le dit le
sieur Jaquot, avec un mensonge de plus; il n’y avait de stipula
tion semblable que pour les 600 fr. destinés à Sylvie Coudert ,
après la mort de son frère ; et M. Durin crut cette précaution
nécessaire, parce que Sylvie Coudert étant en la puissance d’ un
mari qui faisait mal ses affaires, il fallait que ce viager ne fût
pas détourné; et pour cela, le sieur Coudert fit dire que les
<>600 fr. de sa sœur seraient insaisissables, et seraient touchés
par elle sur ses seules quittances. Mais les 1,200 fr. du viager
dus au sieur Coudert, étaient si bien saisissables , que le sit‘llf
Jaquot les a saisis; qu’on ne lui a pas même opposé qu’ils fus-
3
�( IO )
sent insaisissables, et qu’il est forcé de convenir avoir touché
600 fr. par a n , à cause de la saisie.
Il y a pour 54,526 francs de délégations à treize créanciers;
et, si on excepte i , 3 oo francs délégués à des ouvriers, les douze
autres articles de créances sont fondés sur des titres hypothé
caires. L e compte de tout ce qui leur était du fut donné par
le sieur Coudert. J ’avais à cœur de ne laisser aucune hypo
thèque sur Pringy ; et il était possible que le sieur Coudert
eût enflé les états, par lui donnés, de ses dettes, afin de se faire
des capitaux qu’il eût réclamés pour l u i , comme non délégués.
Je priai donc M. Durin de faire en sorte que le sieur Coudert
fût forcé de déléguer toutes ses dettes sans restriction. C’est alors
que M. Durin eut idée de stipuler, dans sa rédaction, que dans
le cas où toutes les sommes, déléguées par le sieur Coudert, ne
seraient pas dues, je serais dispensé de les acquiter, sans être
tenu de rembourser le montant au vendeur.
Cette clause eut l’effet que je devais en attendre; le s.r Coudert
fut forcé de donner un élat exact de ses dettes ; il était intéressé,
par-là, à remplir les 54,526 francs de bonnes et valables délé
gations; et il n’y ma nq ua pas. N o n - seulement il a fait en sorte
de ne rien me laisser en bénéfice; mais comme il avait plutôt
restreint qu’augmenté, f a i été obligé de payer 1,340 fr. au-delà
des 54,526, et je puis le prouver par mes quittances.
Quant à la promptitude de la transcription, il faut se reportqr
à l’époque de ma vente, où on sait que suivant la rigueur de la
loi sur les hypothèques, la transcription était le complément
de la vente; aussi les notaires ne manqua i ent jamais d’averlir
les acquéreurs de la nécessité absolue de p ay er les frais de trans
cription, en même lems que les autres droits. O n sait qu’un
acquéreur s’en remet absolument à son notaire de confiance; et
je me contentai de payer au mien ce qu’il me demanda pour le
coût de la vente.
�( I I )
Devais-je encore prendre sur mon compte le bilan entier de
la fortune de mon vendeur, qui venait de déléguer franchement
pour 54,5oo francs de dettes, et qui restait propriétaire d’une
riche habitation, a Saint-Domingue, et de 4^0 francs de rentet
indépendamment des 1,200 francs que je devais lui payer?
Il paraît que le sieur Jaqu ot, avant de publier un manifeste
contre m oi, avait écrit des lettres à M oulins, sous prétexte de
prendre des conseils pour me poursuivre. S’il écrivait du même
ton qu’il imprime, il est fort vraisemblable que dans les ré
ponses qu’il a reçues, on l’ait regardé comme une victime d’une
machination tendant à le dépouiller; et c’était peut-être pour
se faire des pièces à produire, qu’il se mettait ainsi en corres
pondance avec M M . Ossavy, Boiron et Gueullette, successive
ment. Quoi qu’il en soit, les fragmens qu’il a choisis dans ces
lettres prouvent assez que tout en abondant dans ses idées, par
politesse, on ne lui conseillait que le silence.
Il me parle & articles secrets arrêtés avec le sieur Coudert,
qu’il appelle mon complice ; et un instant après il se dit en re
lation lui-même avec le sieur Coudert 5 qui semblerait se donner
à son tour comme une victime dépouillée, tout en promettant
justice à ses créanciers, aux dépens de qui il appartiendra.
Mais je ne vois , dans ce langage énigmatique du sieur Cou
dert , aucune indication de ces prétendus articles secrets, que je
11’ai jamais connus; et si le sieur Coudert n’a rien dit de pareil
au sieur J a q u o t, comment donc celui-ci avance-t-il ce que sa
méchanceté seule a su inventer pour colorer ses grossières
injures?
Si ce Jaquot et son croupier étaient gens moins impénétrables,
j’eusse pu rechercher avant tout comment il était possible qu’un
traiteur de la rue de la Harpe eût pu devenir créancier de 25,000 f,
numéraire, pour la nourriture d’un homme, qu’il dit lui avoir
fournie pendant cinq ans.
L a donation d’avril 179^ C
m,a ^ it rechercher pour ré
pondre ¿1 l’une de ses fausses citations) prouve que le s.v Coudert
4
�( 12 )
habitait alors à l’hôtel d’A n jo u , rue S a in t -A n d r é - d e s -A r t s ,
n.° 22. Ainsi ce ne peut être qu’après cette donation qu’il est
allé rester chez le sieur Jaquot jusqu’au 11 ventôse an 5 , époque
du règlement de ses comptes.
D ’abord il n’y a que quatre ans d’intervalle au lieu de c i n q ,
et puis c’était précisément Je tems de la plus grande dépréciation
des assignats. Lorsque le sieur Jaquot renvoya le sieur Coudert
aussitôt après la chute des assignats , il fit sans doute un acte
de grande sagesse de régler ses com ptes, et de se faire donner
un billet; mais ne faut-il pas s’épouvanter de voir une nourri
ture de cinq ans se monter à 25 ,ooo francs en numéraire, à une
époque semblable ?
Jaquot, à la vérité, a soin de dire que ces 25 ,ooo fr. ne sont
pas tous comptés pour alimens; il y ajoute le logement, les dé
penses d’entretien, et de l’argent prêté dans les besoins du sieur
Coudert. Mais quelles sommes énormes n’aurait-il pas fallu
prêter en assignats de l’an 3 et de l’an 4 , pour atteindre 6,000 f.
par an en écus. L e sieur Jacquot est-il bien présumé s’être ainsi
mis en avance vis-à-vis un seul de ses pensionnaires ? ce n’était
pas au moins l’usage de ses pareils.
Je remarque maintenant la bizarrerie de ma destinée, et je
me demande comment il se fait que je sois accusé de retirer
un revenu trop considérable de Pringy, tandis que ce revenu
n’a pas suffi au sieur Coudert pour payer son traiteur; et c’est
ce même traiteur qui vient, avec un billet de 26,000 francs,'
crier au voleur, afin qu’on ne songe pas à lui, et qu’on ne le
croie que volé.
M ais, au reste, que m ’importe de scruter la manière d’agir
d’un traiteur envers un habitué de sa maison; je n’eusse jamais
supposé avoir rien de commun a vec lui; mais puisque le hasard
et m;i mauvaise fortune m ’ ont mis en rapport avec cet homme,
an point de me réduire à une justification de ses calomnies, je
demande 1.° si, d’après les circonstances que je viens d’exposer,
je puis avoir à redouter le procès dont il me menace pour faire
�( i3 )
annuller ma vente comme frauduleuse; 2.° si je suis fondé,
moi-même , a le poursuivre en réparation civile ou criminelle,
avecdommages-intérêts, applicables aux hospices; et par quelle
voie je puis, y parvenir.
S A U L N IE R .
CONSULTATION.
T A?, conseil, soussigné, qui a l u , i.° le mémoire ci-dessus;
2.° l’acte de donation faite par Je s.r Charles Faure au s.r Coudert,
le 16 avril 1792; 3 .° deux baux à ferme, consentis par le sieur
Coudert, des domaines Cottin et Langeron , en date des 3 ther
midor an 6, et 24 prairial an 7; 4.0 le contrat de vente consentie
par le sieur Coudert au sieur Saulnier, devant Aucouturier,
notaire à Saint-Menoux, le 22 frimaire an 9 ; 5 .° une copie du
jugement rendu entre Foret, Fêvre, J a q uo t et autres saisissans,
le sieur Saulnier, liers-saisi, et le sieur Coudert, partie saisie,
le 11 fructidor an 11 ; 6.° un mémoire imprimé, signé Jaquot,
daté de Paris, du i . er avril 1 8 1 1 ,
Est d’avis , sur la première question , que les faits exposés
au mémoire du sieur Jaquot , ne sont pas de nature, à faire
jamais prononcer la nullité de la vente consentie par le sieur
Coudert au sieur Saulnier. .
A la vérité, et quoi qu’en dise Rousseau - Lacombe en ses
matières civiles, les lois (juce in fraudent creditorum sont ob
servées en France; et l ’art. 1167 du Code civil prouve parfaite
ment que ces lois sont en-pleine vigueur. Il faut donc regarder
comme un principe certain que la régularité de ra^quisition ,
�( i4 )
faite par le sieur Saulnier, ne le préserverait pas de la recherche
des créanciers, s’ils prouvaient clairement que cette vente a été
faite en fraude de leurs droits.
Mais il ne suffit pas d’alléguer la fraude ; il ne suffit pas
même de prouver que le débiteur a exécuté le projet de faire tort
à ses créanciers; il faut encore que l ’acquéreur ait participé à la
fraude : Contra emptorem q u i, sciens fraudent, com paratif.
( L . 5 , C od. de revoc. h. quæ in fraud. crédit. )
E t ce sont les créanciers qui doivent prouver la participation
de fraude qu’ils imputent à l’acquéreur : Fraudent creditores
agentes probare debent. ( L . 18, fF. de probat. )
O r, en examinant les circonstances de l’acquisition du sieur
Saulnier, 011 ne peut y voir aucune preuve qu’il ait eu le projet
formé de dépouiller le sieur Jaquot de sa créance.
Ce n’est pas assez qu’un acquéreur sache directement ou indi
rectement que (son vendeur doit, pour qu’il faille en tirer la
conséquence qu’il eût dû ne pas acheter, sans donner le tems
aux créanciers de prendre toutes les précautions nécessaires.
Raremen t on vend ses biens sans avoir des créanciers; et si,
parce que l’acquéreur les a connus, il était exposé a être accusé
de fraude; il faut convenir que les contrats de vente ne seraient
pas des actes aussi solides qu’on le croit communément.
L a loi ne donne nulle part cette latitude aux créanciers, par
cela même que, dans l’usage, celui qui achète ne se croit pas
le droit de porter l’inquisition dans les affaires de son vendeur.
On convient du prix , on s’occupe de part et d’autre de ses avan
tages, et tout le rôle de l’acquéreur est de payer avec sûreté. Il
n’est donc pas suspect, par cela seul qu’il saurait des créanciers
que son vendeur ne lui délègue pas : il n’ est coupable de fraude
que s’il a véritablement concerté avec son vendeur les moyens
de Irustrer ses créanciers connus. Et sur ce point encore la loi
s’explique clairement : Quod ait prœtor, S C ie n te , sic accipimus te conscio ci'fraudent participante. Non en im , si sim pliciter scia ilium creditores habere, hoc sufficit ad contenden-
�( l!> )
dum teneri eum actio'ne ; sed si particeps jra u d is est. ( L . 10 ,
if. cjuæ in fraud. crédit. ).
Cependant il se trouve ici deux circonstances assez extraordi
naires pour mériter quelques réflexions de plus sur la position
où le consultant s’est trouvé : i.° Comme juge de paix il a signé
une cédule donnée par le sieur Jaquot, créancier dq son ven
deur; 2.° il a fait transcrire son contrat de vente deux jours
après s a rdate , et avant que le sieur Jaquot eût pu obtenir h y
pothèque.
Sans doute il eût'été plus louable peut-être que le sieur Sauln ie r , par respect pour la noble fonction dont il était revêtu, se
])rivât d’acquérir jusqu’à ce que Je sieur Jaquot eût achevé de se
mettre en règle, ou qu’il exigeât une délégation de cette créance.
Mais il faut convenir que 1 absence d’un simple procédé n’est
pas une faute aux yeux de la lo i, et on ne doit pas êlre plus
sévère qu’elle.
Un juge ne peut pas acheter des droits litigieux} ni se rendre
adjudicataire d’objets vendus en sa justice. V oilà tout ce que la
loi exige de plus à son égard; tout le reste des conventions qui
le concernent demeure’donc dans la règle générale.
Si le sieur Saulnier a lu la cédule qu’il a délivrée le 21 fri
maire an 9 , comme il fout le croire, il y a vu certainement que
le sieur Jaquot prétendait à une créance de ü5 ,ooo fr. contre le
sieur Coudert, et qu’il n’avait encore aucune hypothèque.
Mais en revenant aux règles générales , qui confondent le
juge avec les autres h o m m e s,y a-t-il réellement signe de fraude
dans l’acquisition faite le lendemain de la connaissance que le
sieur Saulnier a eue de celle créance ! On croit pouvoir dire lé
galement que non.
L e sieur Saulnier était déjà en négociation d’une terre assez
considérable; il dit même que tout était conclu et préparé pour
la signature; ainsi, à moins de renoncer absolument à acquérir,
il était difficile de changer les convçnlions déjà faites, pour
(Jonner place à un nouveau créauqier, lorsque la première con-
�( 1(5 )
dition du vendeur était d'avoir 1,200 fr. de viager, et que tout
le surplus était délégué à des créanciers hypothécaires. IL est
visible que l ’acquéreur avait intérêt de préférer les délégations
hypothécaires, et de renvoyer le simple billet du sieur Jaquot
sur les 17,000 francs non délégués. M ais, à son tour, le ven
deur aurait mis plus de résistance encore à ne rien retrancher
de son viager ; ainsi il n’y aurait pas eu de vente.
À la vérité, il y aurait eu un autre parti plus convenable pour
éviter tous les reproches : le sieur Saulnier, en ne transcrivant
p as, eût donné le tems au sieur Jaquot de se procurer une
hypothèque, et de la faire valoir.
Cependant on est forcé de convenir que dans ce cas le sieur
Saulnier s’exposait à ne faire rien de.solide ; car suivant l’art. 26
de la loi du 11 brumaire an 7 , il n’existait pas de vente incomrautable sans une transcription. Le s.r Coudert pouvait vendre à
un autre, et emprunter sur l’immeuble déjà sorti de ses mains,
sans que l’acquéreur pût s’en défendre, s’il n’avait pas transcrit ;
et ici les deux parties ne paraissent pas avoir une grande con
fiance dans le sieur Coudert.
Peut-être bien y a-t-il eu quelque précipitation dans la trans
cription de la vente du sieur Coudert; mais en supposant qu’elle
eût été retardée de quinzaine , ce qui était un terme assez long
pour cette époque, on ne voit pas trop ce que cette prolonga
tion eût valu de plus au sieur Ja q u ot, car en quinze jours il
pouvait difficilement obtenir un jugement contre son débiteur.
Cette transcription , au reste , ne se trouverait un signe de
fraude que si le sieur Saulnier eût voulu en abuser pour se faire'
donner une quittance collusoire de la portion du p rix, restée
libre en ses mains. Mais, au contraire , le sieur Saulnier n’a rien
changé à sa situation; il est resté débiteur du sieur Coudert, et
les créanciers non délégués ont pu s üdiesser a lui pour laire
des saisies-arrêts.
Il faut encore apercevoir une excuse en faveur du consultant,
dans les biens qui restaient au sieur Coudert. Ils consistaient,
�( 17 )
i.o dans le quart d’ une habitation à Saint-Domingue; 2 .° dans
des contrats de rentes perpétuelles de 450 francs annuellement;
3 .° dans la rente viagère de 1,200 francs créée à son profit par
l’acte de l’an 9.
Les biens de Saint-Domingue 11e lui ont pas été d’une grande
ressource à cause de la guerre; mais la fortune du s.r Coudert
ne doit pas s’apprécier, parce qu’elle est en 1811. Il faut se
reportera l’an 9, et considérer s’il avait assez d’espérances réelles
pour ne pas être présumé avoir voulu frustrer ses créanciers en
Vendant le seul immeuble qu’il eût en France, car l’action n’est
ouverte aux créanciers que dans le cas d’insolvabilité de leur
débiteur, nisi de ipsius inopiâ constet , et il faut de plus que
le vendeur et l ’acquéreur se soient Concertés pour ôter toute
ressource aux créanciers, comme 011 l ’a déjà dit. r
Or , en l’an 9 , il était très-probable que les possessions de
Saint-Domingue fussent considérées comme une espérance trèsréelle ; et on se souvient même que le succès de nos armes, à
cette époque, y ramenait une grande quantité de Français, soit
pour y retrouver leurs propriétés q u i , çp éffpt, leur était fidè
lement rendues , soit pour y courir les chances de la fortune.
Ainsi le siepr Coudert ne devait.pas.se croire hors de toutes
ressources, lorsqu’il vendait Pringy moyennant 72,000 francs.
. D ’ailleurs, l’emploi.du prix,de ,petite vente ne se prête pas à
.des idées de fraude , de la part ^ ê m e du vendeur, puisqu’il
.en délègue la majeure .partie à ses créanciers hypothécaires, et
s’en réserve à peine .un quart poi^r le.destiner à un viager.
Si donc „il ne résulte, pqs, ¿le çonsiliuin fr a i(d is , en la per
sonne du .vendeur, il,y en\aura.1ç.ncQK? moins, dans la personne
•de .1-acquéreur ¿\qui n’élflit tenu h \a.uti;e,.çhose , ,.vis - à - vis les
•créanciers du vendeur¿,quià\'ne\ pas; nser d,e, fraude pour leur
-ôter , par. des .voies -illicites , ^ e 1prix;,,c9n,yenu.<O r ,, tqut ce
^prix a un emploi bien connu; le,sieur Slaulnier a parfaitement
suivi cet emploi; il a payé les créanciers (Mégués : et quant
�( i8 )
à la rente réservée au vendeur, il ne s’en est point dessaisi au
préjudice des créanciers, et la preuve en résulte du propre fait
du sieur Jaquot.
Cette dernière circonstance n’est pas seulement exclusive de
la fraude imputée au sieur Saulnier, elle est encore décisive
contre le sieur Jaquot , pour neutraliser tous les procès qu’il
pourrait intenter.
En effet, le sieur Jaquot a fait, en prairial an n , une saisiearrêt entre les mains du sieur Saulnier ; et quand il pourrait
supposer qu’il ignorait sa qualité d’acquéreur en saisissant, au
moins ne l’a-t-il pas ign o ré , lorsque le sieur Saulnier a fait sa
déclaration judiciaire. Cependant , au lieu d’attaquer la vente
du sieur Saulnier comme frauduleuse , le sieur Jaquot s’est pré
senté pour en recevoir la portion du prix disponible. Il se l’est
fait adjuger en jugement ; il la reçue tous les ans depuis l’an u
il a donc approuvé ce qu’il veut attaquer aujourd’hui.
Car il est de principe qu’on approuve une vente n u lle, lors
qu’on en reçoit le p r ix , et encore lorsqu’on agit pour le deman
der. Cette règle a lien même contre le mineur dont les biens
auraient été vendus illégalement sans sa participation et sans
formalités. Il devient non recevable à attaquer cette aliénation ,
par cela seul qu’en majorité il en aura reçu , ou simplement
réclamé le prix.
On peut voir, sur cette question des approbations faciles, les
principes enseignés par ï)omat *en ses Lois civiles , et par
M- Merlin en ses Questions de droit, tom. 6 , pag. 217. JSec
silentio prœtermiltendum alienationes illa s quce, initio insp e c to , ipso'jure nullœ erant).*. Subindè e x post facto confirm a r ip o s s e , si rninor1ja ü i m ajor fa ctu s alienationem ralam
liabuerit, siv e ëxpressè'\ Sive tacitè dùm ïnstituit ad œstimationem seu preliuiti êjus quod illitiite dislractuiu est.... Subsecuta solutio , vel p etitià 'ï'v ela ccèp ta tlo cestim atlonis, necessariam tacitœ ralihabilionis inducit conjectuVam. ( V o ë t . in
fL l i b .'27 > tit,.9:. ) ;
! i11
�( i9 )
On lit, à la suite de la dissertation de M. Merlin sur cette
question , un arrêt de la Cour de cassation, qui a jugé dans le
même sens : « Attendu que Marie Bordenave a ratifié la vente par
« la quittance qu’elle adonnée' en majorité delà portion du prix
« qui restait à payer à l ’époque où elle est devenue majeure ».
( 4 thermidor an 9. )
Ici la qualité des parties n’est pas la même ; mais il n’y a pas
de raison pour détourner l'application des mêmes principes. II
n ’y a à cela qu’une exception , et ce serait le cas où la connais
sance de la fraude ne serait survenue qu’après ; car l’action
révocatoire ne commence à la vérité que à die detectœ fra u d is.
Mais le sieur Jaquot n’annonce aucune découverte nouvelle;
tout ce qu’il sait aujourd’hui, il avoue l’avoir su en l’an 11. L a
vilité de prix, la transcription , sa cédule signée du sieur Saulnier, tout cela existait, et lui était connu, lorsqu’il a attaqué
le sieur Saulnier en l ’an 11 , pour verser dans ses mains une
portion du prix de son acquisition, et lorsqu’il l ’a touchée a n
nuellement.
Cette fin de non*recevoir ne peut pas être accusée de sévérité,
lorsqu’on voit au digeste, d’où sont tirées les lois quœ in fraudem
creditorum , que l’action en nullité de la vente 11’était admise
que pendant un an, à compter du jour où le créancier a pu être
informé qu’il existait une vente de son gage. Intrà annum , quo
experiundi potestas fu e r it, actionem dabo, ( L . i . re, ff\ quœ
in fr . )
■A u reste, les délais plus ou moins longs que la loi a pu ac
corder au sieur J a q u o t, pour exercer son action , deviennent
inutiles, lorsqu’au lieu d’agir il a approuvé l’acte. Ainsi , en
réunissant l’approbation et l’absence des preuves auxquelles la
loi l’aurait soumis, on ne peut voir dans les menaces du sieur
Jaquot, contre le sieur Saulnier, que l’effet de l’humeur, peutêtre fort excusable, d’un créancier qui perd; mais il ne paraît
pas qu’il puisse en résulter rien d’inquiétant contre le sieur
Saulnier.
6
�( 20 )
S u r l à SECONDE q u e s t i o n , le s.r Sanlnier paraît fondé à se
pourvoir contre le sieur Jaquot en réparation des injures véri
tablement grossières et outrées qui se lisent à toutes les pages
du mémoire imprimé, répandu avec profusion dans les départemens de l’A llier et du Puy-de-D ôm e, sous le nom du sieur
Jciquot.
Ptien n’est plus g r a v e , en effet, que l’imputation faite au
sieur ¿Saulnier. L ’accusation publique d q p révarica tion ^ dol et
f r a u d e , qui se lisent dès la première page ; la menace de le
citer devant les tribunaux pour fa ir e appliquer sur son fro n t
le fe r de V ig n om in ie, résultat in fa illib le d'une conduite per
verse et sca n d a leu se, sont un genre de diffamation si grave
contre un ancien juge de paix, qu’il est impossible de concevoir
une accusation publique qui pût porter une plus grande atteinte
à sa réputation. Il est donc légitime et presque indispensable que
le sieur Sanlnier en demande une réparation, qui soit aussi pu
blique que l’offense.
Les anciennes ordonnances étaient extrêmement sévères contre
les écrits contenant diffamation. Les édits de i 56 i et i 563 fai
saient défense de semer des libelles , l’un à peine^de punition
corporelle, l’autre à peine de confiscation de corps et de biens.
Un édit de 1626 prononça la peine de mort contre les libellâtes
et diffamateurs. Enfin un arrêt de régleraient de 1723, sur la
librairie, étendit même jusqu’aux imprimeurs les peines rela
tives aux libelles diffamatoires. Il ordonne de les démettre de
leur profession, et les déclare incapables de l’exercer à l’avenir.
L a déclaration de 1728 condamne les compositeurs de libelles
au bannissement. Celle de
les condamne aux galères per
pétuelles.
L e Code pénal du 25 septembre 1791 , et celui du 3 bru
maire an 4 , n’ont prévu que le délit des injures verbales; mais
ces lois sont muettes sur les calomnies écrites; en conséquence,
les anciennes peines furent alors considérées comme abrogées : les
tribunaux n’ont cru pouvoir adjuger que des dommages-inté-
�( 21 )
rets civils h la partie offensée, ainsi que l ’a décidé la Cour de
cassation, par trois arrêts des 11 brumaire an 8, 20 ventôse an 12 ,
et 21 germinal an i3.
L e nouveau Code des délits et des peines, qui n’est loi, pour
le ressort de la Cour impériale, que depuis son installation, dé
finit clairement la calomnie écrite et la punit.
Art. 367, « Sera coupable du délit de calomnie, celui qui.....
« dans un écrit, imprimé ou non, qui aura été affiché, vendu
«
«
«
«
«
ou distribué, aura im pu té, à un individu quelconque, des
faits qui, s’ils existaient, exposeraient celui contre lequel ils
sont articulés a des poursuites criminelles ou correctionnelles,
ou même l’exposeraient seulement au mépris ou à la haine
des citoyens ».
On ne peut pas objecter au sieur Saulnier qu’avant de savoir
s’il y a calomnie, il s’agit d’examiner si l’imputation qui lui est
faite est ou non mensongère , afin de savoir si elle est une
calomnie.
L a loi n’a pas pu vouloir que le diffamateur commençât par
attaquer la réputation de son adversaire, lorsque la voie des
tribunaux lui était ouverte pour demander justice si elle lui
était due. A u reste, la loi répond elle-même à cette objection.
Art. 368 . « Est réputée fausse toute imputation à l’appui
« de laquelle la preuve Légale n’est pas rapportée. En consé« quence, l’auteur de l’imputation ne sera pas admis , pour sa
« défense, à demander que la preuve en soit faite ».
L a peine de la diffamation varie suivant les conséquences
que l’imputation eût produites. Les art. 3 7 1 , 375 et 376 graduent
cette peine; et il paraît inutile d’en chercher l’application.
Mais sera-ce cette loi qui devra régler la procédure et la peine,
ou seront-ce les lois précédentes? car le sieur Jaquot a daté son
mémoire du i.c* avril 18 11; et cependant il ne l’a d i s t r i b u é à
Riom , Clermont et Moulins que dans le mois de juin. On serait
bien porté à croire que cette date a été mise afin que les réglemens nouveaux sur la librairie 11e gênassent, ni le sieur Jaquot,
�( 22 )
ni son imprimeur, à cause de la permission qu’il eût fallu de
mander à la police. Quoi qu’il en soit, si l’impression elle-même
conslitue le délit, il résulte encore davantage de la colportation
et distribution que le sieur Jaquot en a fait faire : et comme ce
fait est postérieur à la mise en activité de la loi, c’est elle évi
demment qui doit punir le délit sans qu’il y ait pour cela ré
troactivité.
O r , aux termes des art. 2, et 3 du Code criminel, le sieur
Saulnier peut exercer une action en réparation et dommages-,
intérêts.
Pour y parvenir il peut, ou dénoncer le fait à M. le procureuï
impérial aux termes de l’art. 3 i du même Code, ou donner une
citation devant le tribunal correctionnel, soit de Paris, soit de
Riom , soit de Moulins, contre le sieur Jaquot, pour être con
damné i.°e n une somme fixée pour dommages-intérêts (a p p li
cable , ainsi que le sieur Saulnier le jugera à propos); 2.0 aux
peines correctionnelles prononcées par la loi contre le délit de
diffamation; 3.° à l’affiche du ju g e m en t, au nombre de cinq
cents exemplaires, aux frais dudit Jaquot.
Cette citation devra contenir élection de domicile dans la/
ville où siège le tribun al, et sera donnée à trois jours auxquels
il faudra ajouter un jour pour six lieues, suivant que cela est
établi par les art. 182 et 189 du Code criminel.
On a dit que les tribunaux: de Riom ou de Moulins sont
compétens pour connaître de cette demande ; et en e ffet, c’est
toujours le tribunal dans le ressort duquel le délit a été commis,
qui est compétent pour le réprimer; cela d’ailleurs est encore
prévu p ir l’art. 29.
Or, il a été déjà remarqué que le délit n’avait pas été seulement
commis à Paris par l’impression du metnoire du s.r J a q u o t,
mais qu’il l’avait été encore a Riom et a Moulins par la dis
t r i b u t i o n qui en a été faite dans ces deux villes avec profusion.
Si le sieur Jaquot objectait que c’est un mémoire pour sa
défense, comme créancier, et qu’il sera soumis seulement à la
�( 2 3 }
censure du tribunal qui jugera le fond du procès civil, on lui
répondra qu’il n’y a pas de procès commencé; que l’art. 377
du Gode pénal s’applique aux mémoires donnés dans une cause
de laquelle les juges sont déjà s a is is , et que l ’une des parties
plaidantes fait imprimer pour sa défense. Mais lorsqu’il n’y a
pas de procès déjà pendant, il faut en revenir à l’art. 368 , qui
ne permet pas de plaider pour rechercher si le diffamateur a
dit v r a i, il faut qu’il prouve sur-le-champ la vérité de ce qu’il
a v a n ce , par jugement ou acte authentique , aux termes de
l ’art. 370.
En effet, la réputation des hommes ne doit pas être flottante
et en suspens.
Si le sieur Jaquot avait a accuser de fraude le sieur Saulnier,
il devait faire ju g er qu’il y avait fraude ; et ensuite il eût été
excusable de l’imprimer ; mais il est incontestable qu’il n’a
pas pu e x abrupto l’avilir, et appeler Pigrtominie sur sa tête.
L a société est intéressée à ce qu’ une diffamation aussi incon
sidérée ne reste pas impunie.
D
élibéré
à R io m , le
juin 1811.
M .e D E L A P C H 1 E R , ancien avocat,
L
e
C
onseil
s o u s s ig n é
,
V u la Consultation ci- dessus, est du mê m e avis sur tous les
points , par les mêmes motifs.
En premier lieu , la menace du sieur Jaquot de faire un pro
cès au sieur Saulnier, au sujet de l'acquisition qu’il fit du sieur
Coudert, le 22 frimaire an 9 ( 1 2 décembre 1 8 0 0 ) , et d’en
poursuivre la révocation après plus de dix ans d’exécution pu
blique , comme faite en fraude des créanciers du vendeur, tandis
que le prix entier, moins le capital d u n e rente viagère de
1,200 f r . , leur fut délégué, et que lui Jaquot, créancier chirographaire non délégué ,'mais saisissant, reçoit chaque année,
depuis huit ans, son contingent
de cette rente viagère, en vertu
�a h )
de jugement de distribution, rendu entre les saisissans , I’acquéreur tiers-saisi, et le vendeur, partie saisie, le n fructidor
an i i , est d’une témérité sans exemple. Comment, en effet,
écouter les clameurs d’un créancier qui ne se réveille , pour
crier à la fraude contre la vente des biens de son débiteur,
qu’après avoir donné dès l ’origine, et pendant le cours de huit
années consécutives, l’approbation la plus formelle à cette alié
nation , en recevant son contingent du prix, d’après un juge
ment de distribution, prov oqué par lui-même?
Une aliénation, par voie de vente , ne peut préjudiciel’ aux
créanciers du vendeur, et être faite en fraude de leurs droits,
que de l’une de ces deux manières : ou parce qu’elle est fa it e à
v il p r i x , ou parce que le prix est payé immédiatement après
la transcription du contrat, au vendeur qui le soustrait à ses
créanciers non inscrits.
Dans les deux cas, cette fraude n’ouvre l ’action révocatoire
aux créanciers, qu’autant qu’il est prouvé que Vacquéreur a
participé à la fra u d e pour en profiter, et q u e , par l’événe
ment , les créanciers ont perdu leurs créances , par l'effet de
l ’aliénation attaquée ( i ) .
O r, aucune de ces circonstances ne se rencontre dans l’espèce :
i.° Le sieur Coudert, vendeur, n’a point consenti la vente
dîi 22 frimaire an 9 , à dessein de frauder ses créanciers par la
soustraction du p r ix ; et le sieur Saulnier, acquéreur, n’a pas
favorisé cette soustraction frauduleuse, puisque les trois quarts
de ce prix et plu s, ont été délégués aux créanciers hypothé
caires, inscrits ou non, et que l’autre quart, converti en rente
viagère, a resté entre les mains de l ’acquéreur, où il pouvait
être saisi par les créanciers non délégués , et où il l’a ¿lé
réellement ;
2.0 Si les créanciers chirographaires sont dans le cas 'de perdre
(1) V o i r D o m a t , lois c i v i l e s , liv. 2 , tit. 1 0 , sect. i . r o , n.°s
3, 4
et
6,
et les lois q u ’ il cite.
2.°
�( 25 )
une partie de leurs créances, ce n’est pas la vente faite au sieur
Saulnier, qui leur en a occasionné la perte, puisqu’ils ont
profité de tout ce qui pouvait leur revenir du prix.
Diront-ils que la perte de leurs créances dérive d e la vilité
du prix de la ven te, et de la conversion d’un quart environ de
ce prix, en rente viagère? Mais est-ce après plus de dix ans
d’approbation de la conversion d’une partie du prix en viager,
et de silence sur la prétendue vilité, que l’on peut écouter des
clameurs qui ne sont appuyées d’aucune preuve? des vociféra
tions purement hasardées?
D ’ailleurs, quand il y aurait eu une lésion réelle dans la
fixation du prix, on conviendra bien que ce serait une absurdité
de vouloir lui assigner pour cause, le dessein formel concerté
entre le vendeur et l’acquéreur, de faire perdre les créanciers du
premier, tout exprès pour gratifier l’acquéreur à leur préjudice :
cependant il faudrait que ce concert odieux fût invinciblement
p ro u vé , pour que les créanciers du vendeur fussent admis
à dépouiller un acquéreur qui possède publiquement et paisi
blement, depuis plus de dix ans, en vertu d’une vente dont ils ont
connu toutes les conditions dans le tems, qu’ils n’ont jamais improuvée ni accusée de collusion ni de fraude, et dont la loi pré
sume la sincérité et la loyauté, jusqu’à la preuve contraire.
Ces réflexions suffisent pour inspirer une sécurité parfaite au sieur
Saulnier sur toutes les tentatives que pourrait faire le s.r Jaquot.
E n second lie u , autant il est certain que le sieur Saulnier
n’a rien à redouter de l’attaque dont il est menacé par le sieur
Jaquot, autant il est constant qu’il est fondé à demander ven
geance aux tribunaux du libelle infâme que cet audacieux a
répandu contre lui, à profusion, par les voies indiquées dans la
Consultation. L ’ofiense est trop gratuite pour rester impunie ,
et trop grave pour être dissimulée.
D
élibéré
à Clermond-Ferrand, le 17 juin 1811.
BERGIER.
R l O M , J.-C , S A L L E S , Im prim eur de la Cour Impériale et du Palais.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Saulnier, Jacques. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
diffamation
libelle
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultation pour Jacques Saulnier, propriétaire, habitant de la commune d'Agonges, membre du conseil de l'arrondissement de Moulins, et président du canton de Souvigny ; contre un écrit signé Jacquot, traiteur à Paris, rue de la Harpe, se disant créancier du sieur Courdert.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
Circa 1793-1811
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0422
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Agonges (03002)
Paris (75056)
Rights
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Domaine public
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Créances
diffamation
libelle
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Pour F r a n ç o i s LE RASLE , ancien ’ avocat à u
parlement de Paris, habitant à Paris, intime
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f Cii ' ' >- :
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J i ■>
et incidemment appelant ; .*, fy;:ino^ i! v.v -^n
*
le Directeur de la régie et des do
maines, p o u r s u iv a n t a u n o m d e monsieur
; le P R ÉFET du département du Puy-de-Dôme,
C o n tr e M .
la ca u se d e M
le b a r o n d e H o m p e s c h
*r lie u t e n a n t g é n é r a l a u ' s e r v ic e d e l'A n g l e
te r r e } a p p e la n t
^ m : 'Jt
. i'J: j'jfp'
présence de madame' M a r i e - E l i s a b e t h
T A L E Y R A N D D E P É R IG O R D , veuve
de Jacques-Charles d e C h abannes , intimée ;
En
E t en core en p résen ce de d a m e M
'
a r îe - L o u is e
B R A C H E T v e u v e 'd e R e c l e s n e ,~ H e n r i -
M ALLET,
C O Q , intimés, .
Joseph
et J a c q u e s
F IL L E .t:,
IS
IV',
i.;'
?*£
i) l
e; cause de la plus grande 'simplicité- a été em
brouillée par des demandes en nullité e t en-reddition
de compte, que la régie ne-peut aujourd’hui -.justifier
A
U
n
�:
C 2 )
par aucun titr e , ni étaver par aucun texte de loi.
Pour ôter, un prix de vente aux créanciers d’une suc
cession bénéficiaire, et le recevoir elle-même, la régie
leur oppose une rquitfcance non enregistrée, pour l’op
poser à des actes" authentiques.
^
, , rEüe attaque 'de, nullité une inscription prise sur la
succession bénéficiaire., sous prétexte de l’erreur dans
la date d u 1m ois, q u o i q u e la séparation des patrimoines
ait été o rd o n n é e , et qu e l’acquéreur n’ait eu pour créan
cier de fait et de droit queles créanciers de la succession*
E n fin , elle persiste à demander un compte préalable
de gestion., sous prétexte d’une procuration ancienne,
sanS‘ pouvoir justifier d’aucune gestion ni versement de
dèniôrs.cLLrX \ : i
>
,
.. 0Qu£lque& faits é t quelques réflexions suffiront pour
renverser un système de résistance plus opiniâtre que
spécieux*
Vî - r t v.' î . ’A I ŒVS*;a
••Vf
' V: f- V
' '
L e sieur le .Rasle est’créancier, du sieur Jean-Frédéric
dè Chabanes, et de madame Marie-Élisabeth Taleyrand
deiPérigord:, sa irtière, d’une )Sümme .de 63,000 francs ,
pp^tée. Jÿar .obligation ; passée devant Eouchev, notaire
à P^risy-le 30. thernpidor 0an< 12.
—
‘ Par cet acte,^madame âe Ghabanes a subrogé le
sieur le Rasle à l ’effet d’une inscription prise par elle,,
le 26 ventôse an 11 Psur lés biens de Jacques-Charles
d^ ChafraneS ^ .son haari ■
>:et de Marie-JacquesfOilbert
deMuhabanes,; son fils ^ héritier ;dudit Charles.
i'xGettè insétiptidû*étoit de 2 2 1,8 58 .francs, rc’est-ù-dire,
�(3 )
*47 >*44' francs pour le capital de sa dot ou douaire y
* 3 >7 I 4 francs pour les intérêts*, et 60,000 francs pour
le droit d’habitation ou préciput de communauté ; mais
la subrogation n’est faite que jusqu’à concurrence des
53.000 francs dûs a u 1sieur le Raslé.
“
:• ,
L e 2g ventôse^ an 1 3 , M . de Chabanes. a. subrogé
le sieur le Rasle, pour plus grande sûreté, à l’effet d’une
inscription qu’il avoit prise lui-mêmé, le 9 prairial an 10,
sur la succession de M arie-Jacques-Gilbert., son.frère
(acceptée par lui sous bénéfice d’inventaire).
'i
Cette inscription étoit de 630,000 francs, c’est-à-dire,
300.000 francs pour la légitime dudit sifeur Frédéric, de
Chabanes, promise par son contrat de mariage, d u '24
juillet 1780, et le surplus pour intérêts échus ou à échoir*
M . de Chabanes n’étoit alors connu à Paris que
comme le descendant d’une illustre maison, et coirtme
l’inventeur breveté des vélocifers. On ignoroit que déjà
à Londres il avoit fait des entreprises de commerce, ni
quelle en avoit été l’issue.
'
M . le baron de Hompesch s’est présenté comme ac
quéreur de la terre de Rochefort, sur laquelle frappe
l’inscription de madame de Chabanes, dont il demande la
nullité et la radiation.
f-î
M . de Hompesch d it, dans son m ém oire, qu’il étoit
lié d'affaires et d’amitié,à Londres, avec M . de Chabanes*
Il a expliqué, dans d’autres écrits, la nature de.cette
liaison. M. de Chabanes avoit fait à Londres une grande
entreprise sur le commerce du charbon. M . de Hompesch,
sans révéler quelle sorte d’intérêtTil avoit dans cette
entreprise, se contente de dire qu’il aJréglé ses comptes
A 2
�(4 I
avec M . de Chabanes à 2,396 livres sterling 2 sons
et- dem i, -dont ‘M . de Ghabanès resta son débiteur;
2°. que ’M . de Chabànes parvint à fa ir e passer son
établissement sur Ict téte de M ►de Hompesch.
Quoi qu’il en soit du passé 7 il paroît que M . de Chabanes vendit à M . de Hompesch, par acte sous seing
privéy du 7 pluviôse an 1 1 , fait à Paris, i°. en qua
lité dûhéritier bénéficiaire de son frère, la terre de R oehefort ; 2.0. en son n om , une créance de i 5,ooo francs
sur la dame Bernard, veuve de Ghabanès, sa parenter
payable après le décès de ladite dame;. '
' L ’acte .ne. porte aucune compensation avec des créances
précédentes; au contraire,, M.-de Hompesch s oblige de
payer le p rix aussitôt après la transcription...
Ce prix de vente, n’est pas> fixé ; il fut remis à l’esti
mation des fsieurs W anhoorick et Houssey.
Ces arbitresivinrent. de Paris estimer la terre de R ochefort à 66,000 fiV, et le prix de la créance à'm oitié
du capital ? attendu l’usufruit. ( La dame Bernard avoit
quatre-vingts ans.- } j
•
: Cette vente alarma madame de Chabanes, qui n’avoifc
plus que ce 1gage, ( r ) pourj. toutes ses reprises. Il paroit
que guidée par le texte de la coutume de P aris, elle
cx’Ut devoir eri demander la nullité ( en l’an 12 ), comme
faite par un héritier bénéficiaire sans les, formalités lé
gales. • L
I,J . î
).
\
1' r
(1) La terre de Lapalisse, v e n u e par substitution d’un oncle r
ïi’étoit pas sujette à l’hypothèque de madame de Chabanes».
�( 5 )
- Cette demande avoit été accueillie par jugement du
22 floréal an 12 ; mais ce jugement fut infirmé en la
Cour impériale de la Seine, le 20 frimaire an 1 4 , par
le motif que la coutume d’Auvergne ne prescrit aucunes
formes à l’héritier bénéficiaire pour aliéner les biens de
la succession.
Il est bien à remarquer que lors de cet arrêt M . de
Hompesch ne ,dit pas le moins du monde qu’il eût rien
payé à son vendeur; au contraire, il demandoit acte de
ses offres de payer le prix de sa vente à qui il seroit
dit et ordonné.
M . de Hompesch avoit transcrit, mais il ne notifioit
pas sa transcription pour sommer les créanciers de faire
une enchère. Madame de Chabanes le mit en demeure
de faire cette notification , par exploit du 31 janvier
1806, pour être fait enchère s’il y avoit lieu, sinon elle
lui fit sommation de payer ses créances, en exécution de
l’art. 2169 du Code civil.
Cette sommation n’a pas engagé M . de Hompesch à
se mettre en règle; il a même vendu à M . de Sarrasin,
le 16 mai 1807, la terre de R ochefort, moyennant le
prix apparent de 72,000 francs, en se soumettant à faire
radier les inscriptions, et à ne recevoir 30,000 francs
qu’après cette radiation, sans intérêts jusqu’alors.
Pour tenir sa parole envers M . de Sarrasin , M. .de
Hompesch a assigné en mainlevée d’inscription, i° . la
dame de Taleyrand-Périgord,- veuve de Chabanes; '2?. le
sieur le Rasle, la dame de Reclesrie, lés .sieurs M allet
et V illecoq, tous subrogés à 1 inscription de. madame dé
Chabanes.
• .
.- - ,,
�C « .)
l i a prétendu que rinscription étoit n u lle, et que
bailleurs madame de Chabanes étant comptable envers
ses fils, n’avoit pas dû prendre d’inscription jusqu’à l’apu
rement de son compte.
Il a conclu encore à la reddition de ce com pte, et à
des dommages-intérêts.
Pour moyen de nullité de l’inscription, M . de Hompescli a dit que le contrat de mariage de madame T a leyrand de Périgord y étoit daté du 18 juin 1769, au
lieu du 18 février 1759.
M . de Hompesch a produit alors une quittance sous
seing p riv é , de M . de Chabanes, datée du jour même
de sa vente ( 7 pluviôse an 11 ) , enregistrée le 25 mai
1808, par laquelle M . de Chabanes auroit reconnu avoir
reçu par anticipation, de M . de H om pesch, 86,000 fr.
Il s’est prévalu de cette quittance pour dire qu’il y
avoit compensation et payement des 66,000 fr. dûs pour
p rix de la terre de Rochefort ; d’où il s’ensuivoit que les
inscriptions étoient inutiles pour le forcer à payer ce dont
il étoit déjà libéré.
' Pour prouver que madame de Chabanes étoit comp
table envers son fils, M . de Hompesch a produit une
procuration à elle donnée le 30 juin 1782, pour régir
ses biens, et un bail à ferme de la terre de Curton, du
4 janvier 1783.
Madame de Chabanes a répondu que son inscription
étoit régulière, et que loin d’avoir fait usage des pro
curations à elle données pour recevoir aucune somme,
elle prouvoit être en avance de fonds.
ELle a conclu à la séparation des patrimoines.
.
�(7 )
^ D e son côté, M; le R asle, plaidant avec les deux ins
criptions de l’an 10 et de l’an n , a pris les mêmes
conclusions que madame de Chabanes , en ajoutant que
1 effet de 1 inscription de l’an io devoit lui être adjugé,
comme seul subrogé à cette inscription, contre laquelle
M . de Hompesch ne proposoit aucun moyen de nullité;
* -^ar jugement du 14 avril 18 10 , le tribunal de Clermont a décidé , i ° . que l’inscription de madame de Cha- banes étoit régulière, parce que la date du mois et de
Tannée étoit conform e, et qu’il n’y avoit pas d’autres
actes de la même année; 20. que la compensation n’avoit
pas lieu par un acte sous seing p rivé, au préjudice des
droits acquis à des tiers , surtout en succession bénéfi
ciaire; 30. que la séparation des patrimoines est de droit,
et s’oppose encore à toute compensation ; 40. que les
prétentions de M. de Hompesch, à faire déclarer madame
de Chabanes comptable et débitrice, doivent être dis
cutées lors de l’o rd re, dont il ne s’agit pas.
En conséquence, le tribunal de Clermont a déclaré
l’inscription valable , a ordonné la séparation des patri
moines demandée par madame de Chabanes, et a con
damné M , de Hompesch à rapporter le prix de son
acquisition, sous réserves des droits respectifs des parties,
même du sieur de H om pesch, pour les faire valoir à
l’ordre.
Sur le surplus des demandes, les parties ont été mises
hors de Courr
’ <
L a régie de l’enregistrement a été autorisée par M. le
�( 8 )
•Préfet du P uy-de-D ôm e à mettre le séquestre sur les
biens de M . de Hompesch, comme sujet de l’Angleterre,
et à interjeter appel dudit jugement.
- M . le Rasle ne voyant aucun chef du jugement statuer
sur ses conclusions, et craignant qu’on ne lui objectât
le hors de Cour prononcé, pour l’éliminer de l’instance
sur l’ap p el, a cru devoir interjeter un appel incident,
m otivé sur le silence du jugem ent à son égard, et no
tamment en ce qu’il ne lui avoit pas adjugé tout l’effet
de l’inscription de l’an 10.
C ’est en cet état que la cause fut présentée en l’au
dience d elà C ou r, du 8 juin 1811. Les conclusions de
M . de Hompesch étoient toujours pour la nullité et
radiation des inscriptions, et subsidiairement pour un
compte. Cependant l’arrêt ordonne seulement une plus
ample contestation sur le compte demandé à madame de
Chabanes, jet sur le bénéfice de la séparation des pa
trimoines.
lia régie*, parlant aujourd’h u i au nom de M . de
H om pesch , n’en revien t pas m oins à toutes ses prétentions.
Elle veut encore la nullité de l’inscription de madame
de Chabanes, pour erreur dans le mois de l’année 1769.
Elle refuse à madame de Chabanes le droit de de
mander la séparation des patrimoines, parce que, dit-elle,
elle n’est pas créancière.
Enfin, la régie ajoute que si m adam e de Chabanes
est jugée créancière, son fils, qui a droit comme elle à
la séparation des patrimoines, primeroit son hypothèque,
ayant une inscription antérieure.
' Néanmoins ayant bien compris que ce dernier moyen
servoit
�servoit au sieur le Rasle plus qu’à lu i, la régie se hâte
de dire que M . de Ghabanes n’a pas pu subroger M . le
Rasle a son inscription sur Rochefort , parce qu’alors
les choses n etoient plus entières , M . de Hompesch étant
libéré du prix de sa vente par un payement antérieur.
T e l est le sommaire des moyens de M . de Hompesch.
M. le R asle, qui les a déjà réfutés, s’en tiendroit à ses
précédens écrits, si l’arrêt de la Cour ne lui faisoit un
devoir de donner une plus grande explication sur le fond
de la contestation , qui avoit été renvoyé aux discussions
de l’ordre. Il doit donc se défendre aujourd’h u i, comme
préparé à être jugé sur le tout. Ainsi le sieur le Rasle
va répondre aux prétentions de M . de Hompesch, dans
le même ordre qu’il les propose ; après quoi il résu
mera ses propres prétentions, comme corollaire de ce
qu’il aura prouvé.
§• Ier.
L'inscription de madame de Chabanes ( cédée au sieur
le R a sle, pour 53,000fr a n c s ) est-elle nulle?
Il y avoit une question préalable que M . de Hompesch
a jugé à propos d’omettre, quoiqu’elle eût été agitée
la première audience de la Cour.
E to it-il besoin d'une inscription ?
M . de Hompesch auroit pu trouver tout à la fois la
solution de ces deux questions dans le silence même de
l’arrêt du 8 ju in , qui ne laisse à statuer que sur le pré
tendu compte et ses résultats, sans rien préjuger sur le
Jbnd, Alors M , de Hompesch se seroit épargné l’articlë
R
�(
Ip
)
p rin cip al de sa [discussion;, celui* à la vérité q u il avoit
fortifié- le plus , parce qu’il paroissoit y; attacher le plus
d’importance.
-.•• •
Ce n’est, pas sans une grande méditation que la Cour’
a>élagué les;fins^de nç.n-reçevoir , qui eussent été pré
judicielles et péremptoix’es ; c’est qu’en effet, il n’est
plus douteux;iquç¿les créanciers n’ont besoin d’aucune
inscription pour depaander la séparation des patrimoine»
dans les -successions ou,vertes avant le Code civil»
; Les titres;<du code et du digeste D e bonorum sépa
ration ibu s, la loi sur le régime hypothécaire, du 11 bru,maire an 7 , açcordojenl; expressément.et sans condition y
aux créanciers du défunt*, le droit dedemander la sépa
ration des patrimoines. L ’art. 878 du Code civil donne
le même droit dans tous les cas et contre tout créancier.
A la vérité, l’art. 2111 exige une inscription dans les
six mois de Y ouverture de. la succession, et défend de
prendre hypothèque valable sur l’héritier avant ce délai.
Mais, il n’étp.it pas possible, d’appliquer cette disposi
tion aux successions anciennes , vsans un effet rétroactif
que la loi prohibe, et même sans contrarier ouvertement
le texter.de la lo i, qui n’entendoit*pas fixer un délai,
quand ce délai étoit pass-é.
A u surplus, cette question a; été solennellement jugée
en la Cour de cassation, par arrêt du 8 mai 1811*, qu’il
est inutile de transcrire, parce que tous, les arrêtjstes
l ’ont recueilli comme fixant la jurisprudence. (Denevers,
18 i l , page 267. Sirey., 1 8 1 1 , pag* Bibl. du, barreau,
année 18x1. Jurisp.,du Code civil,, etc.)
jXon-seulejcaent ce point de droit est constant aujour-
�r( xO
d’iiui pour toutes les successions anciennes,'mais ikfaudroit le dire de même pour une succession oüverte'sous
le Gode c iv il, lorsqu’elle n’est acceptée que sous bénéfice
d ’inventaire.
Car , à l’égard d’une-telle succession, la séparation
des patrimoines est de d roit, puisque, i° . l’effet du bé
néfice d’inventaire est à*empêcher la confusion des biens
de l’héritier avec ceux de la succession, suivant l’art. 8oa
du Gode civil ; 2 l’héritier bénéficiaire n’est qu’ un
administrateur qui doit rendre compte aux créanciers
de la succession, d’après l’art. 803.
?
• Il ne faut donc pas d'inscription pour avertir les
créanciers personnels de l’héritier de ne pas compter
sur une confusiorn‘ impossible ; et. à ; quoi senviroit-elle,
lorsque l’art. 2146 du Code a dit que les .inscriptions
prises depuis l’ouverture d’une «succession bénéficiaire,
ne produisent aucun effet entre les créanciers de la
succession.
Ces principes viennent fl’être appliqués par un* arrêt
de la Cour impériale de Paris, entre le sieur -Pigal,
créancier chirographaire de la succession Ledoux ( ou
verte sous le Code civil , et acceptée par bénéfice d’in
ventaire), et les créanciers inscrits de la dame C hol,
héritière bénéficiaire. Ceux-ci prétendôient à la priorité /
comme seuls hypothécaires et inscrits; ils réclamoient
le bénéfice de l’article 2 1 1 1 , qui exige une inscription
dans les six mois pour permettre la séparation des pa
trimoines. Mais la Cour de Parislajugé.autrem ent.
« Attendu que par cela .seul qu’une succession .est
« acceptée par bénéfice d’inventaire, la séparation des
B 2
�( 12 )
« patrimoines existe nécessairement ; que les créanciers
« de l’hérédité n’ont pas besoin, en ce cas, de demander
« cette séparation ; que c’est par une conséquence de ce
« principe, que l’article 2146 du Gode Napoléon porte
« que l’inscription prise depuis l’ouvertue de la succes« sion , ne produit aucun effet entre les créanciers de
« cette succession, lorsqu’elle est acceptée sous bénéfice
« d’inventaire ;
« Attendu que l’article 2 111 ne s’applique qu’aux suc« cessions acceptées purement et simplement;
« M et l’appellation et ce dont est appel au néant ; émen« dant, décharge l’appelant des condamnations contre
« lui prononcées.
. ■
« D u 20 juillet 1811. Cour impériale de Paris (1). »
D ’après cela , et puisque madame de Chabanes est
créancière d’une succession non-seulement bénéficiaire,
mais encore ouverte avant le Code civil, il ne paroît pas
fort essentiel de suivre M . de Hompesch dans sa disser
tation sur l’effet que doit produire, dans une in scrip tion ,
la différence entre le 18 fév rier ^rj 5g, et le 18 Juin 1759.
Les deux arrêts copiés par M . de Hompesch n’avoient
d’ailleurs qu’une application fort indirecte à la cause ac
tuelle; car dans le premier (du 22 avril 1807) il s’agissoit
d?une inscription faite sans la moindre mention d’un titre;
dans le second (du 7 septembre 180 7), l’inscription ne
eontenoit ni les noms, ni les prénoms des créanciers pour
qui elle étoit faite, ni la vraie date du titre; en sorte
(1) Sirey, supplément, 18117 PaS* 385. Deneyers , supplé
ment, j 8 n , pag. eoo.
�( ;! 3 )
_
_
v
qu’il étoit impossible de casser l’arrêt qui avoit jugé une
semblable inscription irrégulière.
T ou t cela, n’a rien de, commun-jt ,u ne, inscription où
le nom et le prénom du créancier, le nom et le prénom
du débiteur, la*date'de l’année, et l’époque de l’exigi•bilité sont réguliers. Qu’importe après cela la ’différence
.du m ois, lorsqu’aucune hypothèque de; la ’mêmeoànnée
'n ’est en concurrence;lorsqu’il seroit ridicule de’ supposer
-un mariagevarrivé deux fois dans la même année entre
les mêmes personnes ;, et lorsqu’enfin avec le secours des
’tables' alphabétiques des contrats de mariages 'établies
-dans ' tous les bureaux d’enregistrement / depuis 174 0 ,
-aucun créancier postérieur ; ne pourroit prétendre de
bonne foi se trouver dépaysé dans' ses recherches.
Ce moyen dé nullité avoit été parfaitement'discuté
par le jugement dont est appela qùi l’a rejeté. Rien n’étoit
plus pitoyable, en'effet , que d’avoir crû'renverser un
titre avec un aussi frêle’ moyen •d’attaq u e:‘>’a ücupium
sjlla barum , et rien de plus.
'
‘ ’I '
r. . : Vp
A u reste, cette arme s’est; brisée dans les mains de
’ M . de Hompesch , depuis l’arrêt de cassation dont il
n’a pas jugé a propos de parler , parce;qu’il lui eût été
trop difficile d’en esquiver l'application. ■ ^ ;
A in s i, et dans toutes les1 hypothèses, Madame de
Chabanes a un titre 'd é créance régulier sur la succes
sion bénéficiaire de son mari ’et de son fils (G ilbert).
La terre de ' R o ch efort est son gage, et ce gage est
affecte spécialem ent à la créance de M .-le R asle, pour
•■un capital de 83,000‘frai-ùiSr' ; '
" c,' .1.1 ! :
�'(i4)
§. I I.
,
'
Madame de Chabanes est-etie créancière?
Alitant «M. dè Hompesch favoit été abondant dans
jses idées pour )discuter la question précédente sur ;là•quelle la Cour n elu i avoit demandé aucune explication ,
•lautant il ;acétéîbref et stérile sur la prétention élevée
op&rjluL, que madame de Chabanes >/’est pas créancière.
• En dix Ugnes bien comptées, M . de Hompesch a
-stout dit./Unejprocuration’du 30 juin ¡1781 (1) /u n bail à
cferme du i4)ja.nvier 1783, une procuration du 20 mars
',178.6, pour vendre deux cents carreaux de terrain ap
partenant à son fils à St.-Domingiie-, voilà, suivant M . de
Hompesch, trois pièces qui prouvent tout ce que la
Cour a voulu ;savoir. Il croit sur la foi de ces dix lignes
que madamje de Chabanes doit être réputée -débitrice,
sans autije démonstration, et il le croit rpar cela seul
qu’il y a conclu : C red id i propter qu od lo cu tu s su m .
Ce qui valoit cependant la peine d’être recherché, c’étoit
l’usage que madame de Chabanes pouvoit avoir fait de
ces procurations pour recevoir. Car enfin il arrive tous
les jours que celui qui voyage donne un pouvoir pour
•renouveler ses baux our faire d’autres actes urgens en
-son absence , sans que pour cela le mandataire ait touché
les revenus du mandant. Il eût été fort aisé à M . de
Hompesch de compléter ses preuves, en puisant dans
(1) Elle est du 3o juin 1782. Vérifié sur les pièces même de
M. de Hompesch.
�( i 5 )
tes mêmes sources ou il a trouvé les* trdîs'actes dont ifr
se prévaut. Les inventaires et 'papiers* de la maison dfe
Chabanes étoient à sa disposition^, puisqu’ils sont proLI
duits par madame'de CHabanesi
' * ‘
; Régulièrement c’étoit à M . de Hompesch à prouver
que madame de Chabanes avoit reçu* des sommes pour
son fils, puisqu’il a articulé ce fait, et cju’jil est deman
deur. M. le Rasle. pourroit avec plus de raison éluder
la difficulté, en disant que madame de Chabanes reste
créancière de sa dot et reprises, tant qu’on ne rapporte
pas des quittances de compensation. Mais l’arrêt* de la
Cour ne seroit pas exécuté; et pendant que M. de Hom
pesch se récrie sur la lenteur de ce procès qu’il ne veut
pas éclaircir,, M . le Rasle va donner à la Cour les ex
plications qu’elle demande, parce*qu’il'plaide pour tout
autre motif que* celui de contrarier M.- de; Hompesch.
Il a l’intérêt très-réel de recouvrer son argent.
Mademoiselle de Taleyrand-Périgord'se marià‘Te 18
février 17 5 9 , avec M . Jean-Charles d e‘ Chabanes.
.E lle se constitua en d o t, x°. ses droits légitimaires
paternels, tels qu’ils étoient réglés par acte d e ’ liquidaT
tion passé entre. M . de Taleyrand-Périgord et ses enfans,
le 14 juin 17 5 7 ; 2<\ une rente d e 56,000 francs^annuel
lement sur l’état ; 3p. une rente viagère-' de 42 francs,
constituée en tontine sur sa tête, par sa bisaïeule; 40: la
dame de Taleyrand:, sa mère , lui lit donation de 80,000 fr.
L e douaire de la future fût fixé à 6,000 francsde rente
viagère, réductible à 4,000 francs*, en casd’enfâns, et le fonds du douaire- fut réglé à! 80,000 francs.
Il lui fut assuré un droit d?habitâtion-dans l’un des
�( *6 )
châteaux du futur; avec meubles nécessaires et convena
bles à sa qualité , et la jouissance des jardins, parcs et.
prés-clôtures dudit château.
L e préciput de communauté fut fixé à 26,000 francs,
que la future pourroit retirer, même,en renonçant à la
communauté, avec son carosse, sa toilette, garderobe, ,
diamans et bijoux»
* . 1
.
.
j
, M . Frédéric çle Chabanes, fils de Jean-Charles, se maria
10,24 juillet 1780, avec mademoiselle de Y o yer d’A r genson. Son ¡père lui donna pour légitime 300,000 fr.
M . de jChabanes père, accablé de dettes, en France,
et ayant obtenu une concession de terrains à Saint-Do
m ingue, partit pour cette île, à la fin de 1779, et laissa,t
dit-on , une procuration, faisant espérer vraisemblable
ment à ses créranciers des fonds d’A m ériq u e, q u i, comme <
on va le voir, ne devoient jamais arriver à leur destination.
A peine débarqué à Saint-Domingue, M . de Chabanes
ne pouvant sans doute exploiter les terrains concédés.
sans une habitation, en acheta une du sieur Bourguignon,
appelée des Trois-Palmistes.
Il paya un à-compte de 26,300 francs, mais avec les
deniers du sieur Jouette ; le surplus du prix n’étoit pas
payé à sa m o rt, pas plus que le prix de seize nègres
qu’il avoit achetés.
.
M , de Chabanes père mourut à Saint-Domingue, le 26
septembre 1780, laissant un testament du
par lequel
il légua son habitation d e s Trois-Palmistes à M . le baron de
Taleyrand-Périgord, à la charge d’en payer le prix, e t .
cçlui des sei^ç,nègres, et de rembourser M . Jouetlc, .
�( *7 )
Madame de Chabanes fut nommée tutrice de ses dèux
enfans , mais seulement honoraire. L e sieur Morandez
.fut nommé tuteur oneraire; et lui seul, suivant l’usage ?
dut toucher les revenus, pour en rendre compte.
On va tout d’un coup apprécier ce que pouvoient être
ces revenus, après la déduction des charges.
Dans un précédent m ém oire, M . de Hompesch évaluoit à 23,600 francs le revenu des terres de la succes
sion (1).
Sans perdre du temps à prouver qu’il y a de l’enflure
dans cet état, voyons seulement les charges relatées dans
l’inventaire lui-mêine (d u 18 janvier 178 1).
La succession devoit,
i°. En rentes perpétuelles, dont le capital au denier
vingt é t o it......................................................... 41,700 fr.
2°. Des rentes viagères, dont le capital au
denier dix étoit d e .........................................
30,000
3°. En obligations ou effets, avec ou sans
in térêts............................................................... 176,202
40.' A u x fournisseurs de la m aison.........
16,254
5 °. Dettes de Saint-Domingue.................. 638,000
Qu’on ajoute à cela les arrérages et intérêts non payés,
les reprises de madame de Chabanes, etc., on sera con
(1) M. de Hompesch y ajoutait 20,000 francs de rente pour
Lapalisse, idéalement, à la vérité, et par un simple calcul de
probabilité. Mais la terre de Lapalisse venoit de Jean de Çhabanes , qui l’avoit substituée au profit de l’un des enfans de
Charles de Chabanes ; ainsi cette terre n’a jamais appartenu à
la succession.
G
�(r8)
vaincu à Pinstant que les revenus étoieut au-dessous de
zéro.
.
Madame de'Chabanes en fut si promptement iconvain
cue, qu’elle renonça à la communauté par acte du 7 juillet
'1781, pour s’en tenir à ses reprises. ( L ’inventaire n’étoit
terminé et clos que le 16 juin 1781. )
Ses deux fils se portèrent héritiers bénéficiaires , et
traitèrent sur la substitution de'Lapalisse, qui fut déclarée
appartenir à Frédéric, par acte du 30 mars 1782, homo
logué au parlement.
Jusque-là madame de Chabanes n’avoit eu aucune ges
tion. Son fils Frédéric, marié et émancipé avant la mort
de son p è re , jouissoit de ses revenus. Madame de Cha
banes avoit eu quelques instans la qualité de tutrice hono
raire de son fils Gilbert ( émancipé l e .14 janvier 1782);
mais l’inventaire prouve que tout l ’actif et les papiers
de la succession furent.remis au tuteur onéraire, le sieur
Morandez. C’est donc à-celui-là seul qu’on a un ^compte
à demander pour, cette première époque. •
En 1782, ^Gilbert de Chabanes, partant pour SaintDom ingue, laissa ¿.madame de Chabanes, sa m ère, une
procuration (le 30 juin 1782) pour régir ses biens de
France, toujours communs et indivis avec son frère, qui
n’avoit pas encore répudié. Ne pouvant mettre à la voile
qu’en juillet ou ao û t, on présume bien qu’il se munit
de tous les fonds que les fermiers purent lui donner,
sans s’embarrasser des charges qu’il laissoit à acquitter.
Son voyage fut aussi court qu’il pouvoit -l’être. IL ne
dut rester que quatre ou cinq mois a Saint-Domingue;
eau il se trouve un acte notarié ; souscrit par lui en
�f
î
France le 29 juillet 1783; et nous allons voir par d’autres
actes qu il ne s’absenta plus jusqu’à la fin de l’année 1788.
L e seul usage qu’ait fait madame de Chabanes, de ce
pouvoir du 30 juin 1782,, ou plutôt le seul- qu’on lui
im pute, est un bail à ferme de la terre de Curton, fait
en vertu d’une procuration de madame de Chabanes , du
14 janvier 1783, devant un notaire de Bordeaux (1).
M . de Hompesch ne prétend pas que ce bail prouve le
moins du monde que madame* de Chabanes ait rien
touché par anticipation sur ce bail ; et quant aux termes
à échoir, on voit que M . Gilbert.de Chabanes étoit déjà
de retour avant que le premier terme eût pu arriver.
Gilbert de Chabanes avoit eu le temps de connoître le
mauvais état de sa fortune à Saint-Domingue. Il en re
vint dans le printemps de 1783, et le premier acte connu
qu’il fit en France fut une déclaration du 29 juillet 1783,
pour consentir à l’exécution du testament du p è r e , et
à la délivrance des legs.
M . le baron de Taleyrand - Périgord , légataire de
l’habitation des Trois-Palmistes (à la charge de la payer),
s’en mit en possession ; et par arrangement de famille
(1) M. de Hompesch avoit dit dans un premier mémoire que
le prix de ce bail étoit de 7,000 francs, qu’il mettoit en ligne
pour faire monter le revenu de la succession à a3,6oo francs.
Mais où avoit-il pris ce fait? Ce n’est pas dans le bail; il ne l’a
pas dans son dossier : il a l’inventaire de 1789, où ce-bail1 est
énoncé, cote 3, et le prix n’est que de 3, 5oo francs.
Il cite aussi les baux des autres terres, e£ ne les produit pas.
Est-il aussi exact pour ceux-là que pour Curton?
C 2
�f20)
avec madame de Chabanes, sa sa u r, il lui vendit celte
hab talion iè n août 1783.
* Madame de Cliabanes eut donc des démarches à faire
pour régir cette propriété, ou pour en vendre de quoi
faire les payemens les plus urgens.
V oilà ce qui explique les deux procurations des 5 mai
1784, et 20 mars 1786, où M . de Hompesch prétendoit
trouver des preuves si claires de la gestion de madame
de Chabanes, et même des ventes par elle faites de la
propriété de ses fils.
La procuration du 5 mai 1784 contient pouvoir par
madame de Chabanes à M . le comte O gorm an, résidant
à Saint-Domingue, de régir et affermer l’habitation des
Trois - Palmistes, appartenant à ladite dame de Cha
banes (1) ; et celle du 20 mars 1786 lui donna pouvoir
d’en vendre deux cents carreaux ( l’habitation en avoit
trois cents ). On ignore si cette vente a eu lieu ; mais il est
inutile de le rechercher, puisqu’elle ne vendoit que sa
propriété, et non celle de ses enfans.
Madame de Chabanes se mêloit si peu des revenus
de son fils depuis son retour en France, qu’il est prouvé,
i°. par deux procurations des 24 février 1784, et 17 août
1 7 8 5 , que Gilbert de Chabanes avoit chargé M . de
Junquières, avocat, de ré g ir , affermer ses biens de
France, recevoir tous loyers et rentes, etc. ; 20. par trois
(1) M. de Hompesch a imprimé dans son dernier mémoire,
page 16, que madame de Chabanes avoit donné une procura
tion , le 20 mars 1786, pour vendre deux cents carreaux de
terrain a p p a rten a n t
à
son fils- dlîlé*
�( 21 )
procurations des 8 mars 1785, 20 mars 1786, et 31 janvier
* 7^7 y qu’il avoit chargé M . Bessaiguet de Léogane de
régir ses biens d’Am érique, et d’en toucher les revenus;
3°. par des baux des 10 septembre 1785, 16 mars 1787, et
25 février 1788, qu’il afferma par lui-même , ou par
d’autres mandataires que sa mère 5les terres de Rocliefort,
Madiq et V iq , à l’expiration des baux précédens; 40. par
des actes des 6 mai 1786, 29 avril 1786, et 30 juin 1788,
qu’il régloit ses affaires et ses com ptes, tantôt par luimêm e, tantôt par ses agens, mais toujours sans l’inter
vention de madame de Chabanes. *
Tous ces actes sont faits aussi sans la participation de
Frédéric de'Chabanes, parce qu’après avoir e u , comme
on l’a d it, la qualité d’héritier bénéficiaire, Frédéric
avoit répudié, le 30 décembre 1785, à la succession de
son p ère, pour s’en tenir, aux 300,000 francs de légitime
assurés par son contrat de mariage.
M . Gilbert de Chabanes, parti une seconde fois pour
Saint-Domingue à la fin de 1788, y mourut le 6 mai
1789 : son inventaire fut commencé à Paris le 6 juillet
suivant.
M . de Hompesch avoit d’abord affecté de remarquer
que madame de Chabanes parut à cet inventaire comme
héritière des meubles et acquêts, qualité de laquelle il
tiroit de grandes conséquences. 11 eût dû y voir plutôt
qu’elle n’y étoit à la première séance que comme habile
à se porter héritière, et qu’élle n’y étoit plus du tout
à la seconde séance , au moyen de sa renonciation.
En effet, dès le lendemain de l’ouverture d’inventaire,
et par acte du 7 juillet 1789, madame de Chabanes avoit
�( 22 )
renoncé à Ja succession de son fils; sa- répudiation, datée
et énoncée à la seconde séance, ne pouvoit pas être igno
rée de M . de Hompesch ,, qui a cet inventaii'e dans son
dossier.
Frédéric de Chabanes accepta la succession par bé
néfice d’inventaire r le n juillet 1789, fit continuer l’in
ventaire comme seul héritier de son frère, et se mit en
possession^ des biecfs en cette qualité.
V oilà tous les éclaircissemens qu’il a été possible de
donner à la Cour sur la prétendue gestion de madame
d€ Chabanes. Il est prouvé qu’elle n’a eu de gestion que
pendant la fin de 1782, jusqu’au milieu de l’année 1783;
et on ne montre aucun payement fait en ses mains en
cette qualité.
M ais, comment vivoit donc . madame de Chabanes,
a voit demandé M . de Hompesch, si elle ne touchoit
rien? Sa dot étoit si médiocre !
A cette question tudesque, madame de Chabanes ré
pondit qu’elle avoit, i ° . la rente de 6,000 francs portée
en son contrat de mariage; 2°. son traitement de dame
d’honneur, de 4,000 francs; 30. un brevet de pension
créée pour elle en 1779, de 6,997 francs.
Quoi qu’il en soit, il est prouvé que madame de
Chabanes ne doit aucun compte ; 011 si on insiste à vouloir
qu’elle en doive un pour six mois, elle l’a rendu, en
disant qu’elle n’avoit rien touché, et qu’au contraire il
est prouvé, par l’inventaire de 1781 , que madame de
Chabanes étoit en avance de
francs.
�( 23 )
Ainsi , M .’ le Rasle, son subroge*, revient présenter
avec confiance l’inscription d u 2,6 ■
ventôse an 1 1 , et
■conclure, non-seulement à ce ,qu’elle 1ne soit pas rayée,
mais encore à être -colloque pour 53,000 francs et les
intérêts , au rang de cette inscription.
Est-elle ou’ n’est-elle pas exagérée 1quanÈ aux arrérages
et droit d’habitation ? M. de Hompesch ne dit plus rien
là-dessus’ : au reste^ cettë^ discussion'¿^appartient qu’à
madame de Chabanes. Car il suffit à *M. *le Rasle qu’i l y
ait une créance incontestable dè 53,000 francs, et il n’a
besoin d’aucune nouvelle explication pour prouver ce fait.
7
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& inscription de Frédéric de Chabanes doit-elle primer
celle de madame de Chabanes ? et M . de Hompesch
est-il aux droits de M . de Ghabanes-contrite libéré?
pour réclamer cette priorité ?- Mi/ ,4‘ &***■ •r '
j
k
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ja
...
I /
•; J
M . de Hompesch le dit ainsi, croyant s’attribuer à lui
seul la créance de M. ide Chabanes, au préjudice de la
subrogation faite à M . le Rasle.[J
oooço^;u r;o
:>
Pour arriver à cette démonstration, il part d e: lo in \
et il est obligé de confesser des principes èt des faits qui
doivent abréger singulièrement la difficulté. Car M .-le
Rasle va s’en emparer* à l’instant, commè de chose utile
à lui seul.
i'
.
;fni
i
Frédéric de Chabanes, dit M . de Hompesch, -est créant
cier de son père et de son frère\ en’ vërtu de ¿Ôn cotitra'fc
de mariage ^ donc il a aussi-le droit de demander la
�.
( M )
.séparation des patrim oines.. . . . . . Adopté. Car M. de
Chabanes, simple héritier bénéficiaire de son frère, n’a
pas fait de confusion : il peut donc venir comme créan
cier , de son chef, à la succession du défunt.
L ’effet de la séparation des patrimoines , continue
M . de, H om pesch, est de faire payer les créanciers du
défunt '.avant, ceux de Vhéritier ; elle établit un mur de
séparation entre ces d eu x’ classes de créan ciers............ ..
Adopté encore. M . de Hompesch a traité avec Frédéric
de Chabanes, et il- n’a de garantie que contre son ven
deur. , M. $e Hompesch n’est pas créancier de la suc
cession ’ il ne peut donc pas venir en p riorité, ni
même en concurrence avec madame de Chabanes, qui
est créancière de la succession. L e mur de séparation
est bâti par M. de Hompesch lui-m êm e ; il faut que
les créanciers de la succession bénéficiaire soient d’un
côté avec le prix de l’immeuble; l’acquéreur restera de
l ’autre avec les créanciers personnels du vendeur.
C e n’ étoit p a s , à la v é r it é , p o u r cette conclusion que
ft/h de H om pesch a placé M . de Chabanes au rang de
créancier de la succession , et q u ’il lu i a accordé une
créance de 630,000 francs; il continue son raisonnement,
et; i l dit
‘ :
’
• J ’ai payé 86,000 francs à) mon vendeur, le jour même
de ma vente ; donc je suis libéré par compensation. Il
a reçu cette somme sans im p u ta tio n , et je suis maître
de l’imputer sur la terre de R o c h e f o r t plutôt que sur la
créançe vendue. M on vendeur a donc touché sa propre
créance hypothécaire et inscrite ; ce qui me met à sa
plaqe pour son inscription.
Autant
�( 25)
Autant d’erreurs que de mots.
Que peut signifier à des tiers une quittance occulte
et suspecte, contradictoire avec le titre même de M . de
Hornpescli, et avec le langage qu’il a tenu pendant
quatre ans?
En quoi et comment cette quittance, fut-elle authen
tique, vaud roit-elle libération, compensation, subro
gation, etc., après une transcription qui forme un contrat
•judiciaire tacite, vinculum ju r is , entre l’acquéreur et
les créanciers dont l’immeuble est le gage ?
M. de Hompesch , se disant créancier de M . de Cîiabanes, tantôt de 9,900 livres sterling (o u 230^00 fr .),
tantôt de 2,396 liv. 2 s. et demi sterling, produisant
aujourd’h ui, pour le prouver, quatre actes publics passés
à Londres, et contenant obligation de i 6 , 5oo liv. sterling,
ou , si on veut, de 8,080 liv. sterling (1), auroit-il oublié
(1) Ceci mérite une explication qui ne sera pas inutile pour
montrer que M. de Hompesch sait parfaitement faire ses affaires,
et qu’ainsi il ne faut pas attribuer à une simple négligence les
précautions qu’il dit n’avoir pas voulu prendre lors de sa vente.
Voici le style de l’une de ces obligations.
« Soit notoire à tous, par ces présentes, que moi Jean-Frédéric
« de Chabanes-Lapalisse, marchand de charbon de Mille-Banck« Street-Westminster, reconnois devoir et être fermement en« gagé envers M. Charles Hompesch, communément appelé le
« baron de Hompesch Nei/i E lm s, dans le comté de J u ry, en la
« somme de huit mille livres sterling, argent bon et légal de
« la Grande-Bretagne, etc.
cc La condition de l’obligation ci-dessus, est que si le susdit
D
�c * 6 ')
qu’il a avoué avoir été lié d’intérêt avec M . de Chabanes à Londres , et avoir succédé à ses magasins et
marchandises?
Sa prétendue quittance ne contient libération sur le
passé que de 36,000 francs, q u i viennent, a-t-il dit, en
déduction du p rix des ventes. L e surplus est un nouvel
emprunt de 5 o,ooo francs en traites sur Londres, et en
cautionnement d’effets.,
On croiroit que M . de Hompesch, pour corroborer
cette pièce, -et donner quelque vraisemblance à. sa date,
rapporte au moins les comptes et les traites acquittées :
point du tout; il ne justifie rien..
M . de Hom pesch, qui veut ne pas payer un prix de
vente, et qui prétend établir une concurrence avec des
créanciers hypothécaires, ne s’est pas flatté, sans doute,
«
te
«
«
engagé 'Frédéric Chabanes-Lapalisse , ses héritiers, exécu
teurs et administrateurs , payent ou payeront exactement
et fidèlem ent, ou feront payer audit Charles Hompesch la
pleine somme de q u a tr e m ille liv r e s sterling de monnoie
<c légale de la Grande-Bretagne, avec les intérêts de ladite somme
« à cinq pour cent par an, à dater du jour de la susdite obli
ge gation, aussitôt la demande fa ite ; alors, le bon ci-dessus
c<
cf.
cc
<c
cc
de h u it m ill e l i v r e s Csterling) doit être n u l, sinon le susdit
bon ou la susdite obligation doit rester dans toute sa force
ou pleine valeur.
<c Londres, Tan fa*, du règne de notre souverain seigneur
Georges I I I , roi des royaumes unis de la Grande-Bretagne,
dans l’année de notre S e ig n e u r 1802.
• ce S ig n é J o h n -F r é d é r ic d e C hab an es -L a p a lis s e . »
�( *7 )
de venir dispute? le gage des autres créanciers avec un
chiffon sans date et sans probabilité, comme s’il eût été
le maître de se donner une créance.
: Dans sa propre vente du 7 .pluviôse an 1 1 , M . de
Hompesch ne dit pas qu’il a payé; il d it, au contraire,
qu’il payera le prix après la transcription. ~
i II ne peut prétexter à cette clause, toute de son fa it,
aucun m otif secret, vaucune gêne. Il achetait sous seing
privé.
En plaidant à P aris, il réitéroit cet engagement en
présence de madame de Chabanes. Il offroit de payer
à qui par justice seroit ordonné.
Que fa u t-il conclure de cela, si ce n’est qu’alors la
quittance datée du 7 pluviôse an 11 n’existoit pas?
- Quand elle auroit existé, M. de Hompesch se jugeoit
lui-mêm e. Il contractoit un engagement qu’il veut ré
voquer aujourd’hui . . . . et avec quoi ?
A vec un prétendu règlement sous seing p rivé, qui
réduit à 36,000 francs sa créance apparente, d’abord
si énorm e, pour laquelle, à la v é r ité , il est encore
possesseur des titres.
Quand il seroit croyable que M . de Chabanes a payé
230,000 francs sans retirer les titres, il faut dire que
le titre et le règlement ne valent pas mieux l’un que
l’autre.
Les obligations passées à Londres ne font un titre
en F ran ce, que lorsqu’elles sont confirmées par un ju
gement rendu en France. ( Code c iv il, art. i 5 . S ire y ,
an 12, p a g .. . . et 192* D enevers, 1808, pag, 449;
D %
�( *8 )
1810, pag. 2,36, 238*, 18 11, pag. 468. M erlin, Questions
de d r o it , V °. Etranger et Jugem en t, §. 14. )
Sa prétendue quittance est sous seing p r iv é , et n’a au
cune valeur contre des tiers, suivant l’article 1328 du
Gode civil.
-^
L a compensation qu’il propose est donc un rêve que
ne firent jamais ‘ des acquéreurs d’immeubles grevés
d’h y p o th è q u e s; et ce q u i rend plus inconvenable la
préten tion de M . de H om pesch, c’est que sa soi-disant
quittance ne le subroge pas même à l’inscription dont
il veut s’emparer au préjudice d’un transport authenti
que fait au sieur le Rasle..
A in s i, plus on veut examiner le système de M . de
H om pesch, pour y chercher de vraies objections à ré
soudre, plus on demeure étonné qu’avec une pièce’
apocryphe et sans valeur il ait cru .sérieusement acheter
uu immeuble grevé d’hypothèque, sans le payer.
Q u e l p riv ilè g e auroit donc cet a cq u éreu r, après avo ir
pris des engagem ens bien form els par son a cte, et les
avoir réitérés par sa transcription ?
L a loi étoit là pour lui expliquer les effets de cette
transcription, et lui- marquer ses devoirs.
« La transcription.... ne purge pas les- hypothèques
« et privilèges établis sur l’immeuble.
« L e vendeur ne transmet à l’acquéreur que la pi-o« priété et les droits qu'il avoit lui-même à la chose
« vendue. Il les transmet avec l'affectation des mêmes
« privilèges et hypothèques dont il étoit chargé. » ( Code:
c iv il, art. 2182. )
�( *9 )
j- « L ’acquéreur déclarera..., qu’il est prêt à acquitter,
xc sur-lc-champ ^‘'les dettes et charges hypothécaires, jus« qu’à concurrence seulement du p rix , sans distinction
cc des dettes exigibles ou non exigibles. »>( Gode civil, art.
2184.)
«
M . de Hompesch ne s’est peut-être pas dissimulé qu’il
n’éviteroit pas de se conformer à la précision de ces
articles. Aussi il les a éludés, eu ne faisant aucune no
tification de sa transcription, pour qu’il n’y eût encore
ni enchère, ni ouverture d’ordre. Pendant ce temps-là,
il a engagé M . de Sarrasin, son acquéreur, à,transcrire
lui-même et à notifier aux créanciers inscrits; et M. de
Hompesch continuoit de les occuper à discuter sa quit
tance et ses prétentions novatrices.
Passons sur cet épisode, qui importe moins au sieur
le Rasle qu’il n’importera à madame de Chabanes et à.
ses subrogés postérieurs; suivons encore M . de Hom
pesch dans ses objections*
Il sait bien qu’il n’est pas subrogé à M. de Chabanes,
mais il veut se mettre à sa place de plein droit , en
disant que la quittance du 7 pluviôse an 11 équivaut à
un payement que l’héritier bénéficiante se seroit fait à
lui-même de sa propre créance,• et en ce cas, dit-il, il le
porteroit valablement en compte de bénéfice d’inventaire
vis-à-vis les autres créanciers.
Si l’opération supposée étoit justifiée par un acte authen
tique , il resteroit encore la question de savoir si M . de Chabanes, héritier et administrateur de la succession, auroit
pu se payer par ses mains sans un ordre judiciaire. Mais
�( 3° )
acceptons, s’il le faut, sa quittance comme .un transport ;
fait à M . de Hompesch, le 7 pluviôse au 1 1 , d’une porr
tion de la créance de M. de Chabanes contre la suc
cession bénéficiaire.: il existe un autre transport au profit
de M . le Rasle, du 29 ventôse an 13. Lequel aura la
préférence ?
'
Il n’y a de transport valable que celui qui est accepté
par acte authentique par le débiteur, ou celui qui est
fait avec remise du titre et notification au débiteur. ( Code
c iv il, art. x689, 1690.)
. O r , M . de Hompesch n’a ni acte authentique, ni re
mise du titre, ni notification.
M . le Rasle a tout à la fois acte authentique, remise
du titre, et une inscription en son nom , qui est la seule
notification qu’il pût faire légalement après une trans
cription.
Ainsi tout ce que M. de Hompesch a dit pour prouver
que M . de Chabanes est créancier sur l’immeuble vendu,
est dit en faveur du sieur le Rasle; e t, d’après cela, le
droit que s’arrogeoit M. de Hompesch, d’imputer les
86,000 francs à sa guise, devient sans intérêt.
Cependant il n’est pas inutile de lui observer que la
clause de sa vente, comparée avec sa quittance, prouve
qu’il avoit entendu lui-même imputer ces 86,000 francs
sur la partie de sa dette non sujette à transcription.
En citant l’art. 1 256 du C o d e , pour prouver que le dé
biteur est présumé payer la dette qu’il avoit le plus d’in
térêt d’acquitter, M» de Hompesch a pris cet article à
�(3 0
rebours ; car il àvoît intérêt de ne payer que la dettë
mobilière j vendûe par M . de Chabanes
son nom\
et il avoit intérêt à ne pas payer à an héritier bénéfi
ciaire le prix d’un immeuble, pour ne pas le payer deux
fois.
L ’ordre de créances qu’a fait M . de H om pesch, en
plaçant le fils au premier ran g, à cause de la date de son
inscription, est encore sans intérêt; car M . le Rasle re
présente le fils et la m ère, et M . de Hompesch n’en re
présente aucun. D ’ailleurs, il arrangeoit les choses à l’in
verse de l’ordre légal des collocations; car y ayant lieu ,
d’après lui-m êm e, à séparation des patrimoines sur une
succession bénéficiaire ( ouverte avant le Code ), madame
de Chabanes doit être colloquée au premier rang, parce
que son hypothèque est de 1759 : son fils ne doit être
payé qu’après elle, puisque son titre n’est que de 1780,
M . de Hompesch se plaint de ce que les premiers juges
avoient renvoyé les parties à un ordre. Il atteste qu’il
n’en faut pas, et que l’ordre est tout fait.
Si madame de Chabanes n’a pas de raison pour s’y
opposer, M . le Rasle est encore tout prêt à faire écho
avec M , de Hompesch, pour répéter après lui : Un ordre
est inutile ; il est tout fait.
Personne, en effet, n’est moins intéressé à en vouloir
un que M . le Rasle ; il représente les deux créanciers
inscrits, par une subrogation antérieure en date à tous
les titres dont se prévalent les autres parties de la cause.
Il peut donc parfaitement abonder dans le sens de M . de
Hompesch, pour que la Cour fasse dès à présent la col-
�( 3= 0
location des 66,000 francs, parce qu’il sèra inévitablement colloqué au premier rang, pour le montant de son
inscription et des accessoires.
RÉSUM É.
M . de Hompesch est acquéreur d’un immeuble pro
venu de la succession bénéficiaire de Gilbert de Chabanes.
Cet immeuble est grevé d’une hypothèque de madame
de Chabanes-, depuis 17 5g , et d’une hypothèque de
M . Frédéric de Chabanes, depuis 1780.
M . le Rasle est subrogé à ces deux hypothèques jus
qu’à concurrence de 53,000 francs.
Elles sont conservées par des inscriptions régulières;
pt d’ailleurs y ayant lieu à séparation des patrimoines,
il n’a pas fallu d’inscription.
M . de Chabanes, qui a vendu l’immeuble grevé, n’a
pu ôter aux créanciers de la succession le droit de rece
voir le prix qui représente l’immeuble.
Il n’a pas perdu lui-même le droit de venir comme
créancier de la succession, puisqu’il n’a vendu que comme
héritier bénéficiaire.
Ainsi le sieur le Rasle, subrogé a M . de Chabanes, peut
se faire payer en vertu de son inscription, qui est re
connue au procès avoir une cause légitime ; il le peut
aussi comme subrogé à madame de Chabanes. A in si, avec
ces deux titres, rien ne l ’empêchc de toucher les premiers
deniers de la vente.
I,a demande d’un com pte, contre madame de Cha
banes ,
�( 33 )
banes, ne porte aucun obstacle à ce versement, puisque
M . de H om pescli, obligé de justifier sa demande en
com pte, n’a pas prouvé que madame de Cliabanes fût
débitrice.
Pendant l’année qui a précédé l’émancipation de son
fils, le sieur M orandez, tuteur onéraire, a eu la gestion
comptable.
L a procuration du 30 juin 1782 n’a pas duré six
m ois, et n’a été suivie d’aucune gestion comptable.
Ainsi madame de Chabanes reste avec ses créances, et
3VL de Hompescli n’a aucun m otif de ne pas payer après
sa transcription, comme il s’y est obligé.
La quittance sous seing privé, qu’il rapporte, ne s’im
pute ni ne peut s’imputer sur le prix de sa vente, et peut
encore moins être opposée à un créancier hypothécaire.
La cause n’a donc aucune sorte de difficulté, puis
qu’il ne s’agit que de l’exécution d’un titre clair et non
contesté. On plaide pour savoir si un acquéreur payera
le prix de son acquisition.
I^e sieur le Rasle n’a pas cru devoir grossir ce mé
moire d'une discussion sur son appel incident, parce
qu’il n’étoit fondé que sur le silence du jugement de
Clermont à son égard. On ne lui conteste pas le droit
de se présenter comme subrogé aux deux inscriptions;
e t, au contraire, on les discute contre lu i, en cette
qualité. M. le Rasle a donc obtenu déjà tout ce qu’il
avoit intérêt d’obtenir.
Il ne s’arrêtera qu’un instant sur une demande en
doiïUïiages-intérôts que M . de Hompescli a jugé a propos
form er, sous prétexte que lui-m êm e, M . de H om E
�( 34 )
pesch, bien confiant dans la bonté de sa cause, s’est
engagé vis-à-vis M . de Sarrasin , à rapporter la radiation des inscriptions dans le mois de la transcription,
et que ses adversaires ont la dureté d’em pêcher, en
voulant prendre pour eux l’argent que M . de Hompesch
s’étoit destiné. M. de Hompesch ajoute q u e , dans la
même confiance, il a consenti, vis-à-vis de M . de Sarrasin,
à ne toucher 30,000 francs qu’après cette radiation, sans
intérêts! E t sur cela il prend son texte pour dire qu’il
doit être indemnisé de ce qu’il perd.
Que ne s’obligeait-il, par une clause plus chevalelesque encore, à un dédit considérable, pour avoir le
plaisir de le demander!
Cependant la rég ie, qui parle aujourd’hui pour ellemême , trouve cette réclamation très-légitime.
Il
suffit de lui répondre qu ’ un Créancier . qui plaide
pour être payé d’une dette non suspecte et fondée en
titres, ne doit de dommages-intérêts à personne; et si
qu elqu ’un en d evo it dans cette c a u se , ce seroit plutôt la
régie, pour le mauvais exemple qu’elle y a don n é, en
voulant faire prévaloir un acte non enregistré, à des
subrogations authentiques, pour retarder le payement
d’ un prix dé vente exigible depuis neuf ans.
M e. D E L À P C H I E R , ancien avocat.
M c. B E À U D E L O U X , avoué licencié.
r > *
J ,T
: r.
A. R I O M , de l’imp. d e T H Î B A U D , imprîm. de la Cour impériale, cl libraire,
'
' f
rue des T au le s , maison L a n d rio t. — Janvier 1 8 1 2 .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Le Rascle, François. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
créances
brevets
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour François Le Rasle, ancien avocat au parlement de Paris, habitant à Paris, intimé et incidemment appelant; Contre M. le Directeur de la régie et des domaines, poursuivant, au nom de monsieur le Préfet du département du Puy-de-Dôme, la cause de M. le baron de Hompesch, lieutenant général au service de l'Angleterre, appelant; En présence de Madame Marie-Elisabeth Taleyrand de Périgord, veuve de Jacques-Charles de Chabanes, intimée; Et encore en présence de dame Marie-Louise Brachet, veuve de Reclesne, Henri-Joseph Mallet, et Jacques Villecoq, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1804-1812
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0417
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2201
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53801/BCU_Factums_M0417.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
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Domaine public
brevets
Créances
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28dce18cff8747d778589fa16f98bb5a
PDF Text
Text
Mhuii iiiwrarmwmr'aminHii
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h a b ita n t à Is s o ir è / in t im e
et a p p e l a n t ;
CONTRE
Dame F r a n ç o i s e - A g l a é - G a b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G'OU R D O N i, son mari ; dame
A n g é l iq u e - A r m a n d e - C a m il l e D E L A
L U Z E R N E , et sieur A n a t h o c l e - M a x i ^ M IL IE N H U R A U L T D E nVI B R A Y E , son
mb éa nr i é, ,fhabitans
de la'ville de -Paris y héritiers
fic ia ir e s d e m a d a m e
M o n t m o r in la q u e lle
é toit héritiaire bénéficiaire du sieur EmmanuelFrédér ic -De Tane,s on f r èr e appel ans • ‘
C
o
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e
SieurHenriDuvergierhabitantàParis SimonTerouldeabitantàDauville
clà
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P
P a r is -h a b it a n t à S en s
'An t o î n e - L o u i s
A
�(2 )
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; et J e AN
C H A R D O N y chapelier y habitant à P a risr
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,
aussi appelanSy
CONTRE
Sieur
D E TANE - SAN TEN AS y
habitant à P a ris , intimé ;
A m édée
\
1
E T
C
O
N
T
R
E
Sieur L o u is N A T T H E Y , habitant de, Nyort en
Suisse y austsi intimé ,
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la plus gran d e simplicité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’uné terré, chargé d’en payer
lie prix à un notaire choisi par une direction de créan
ciers, lui en paye près de moitié;, ensuite il revend la
terre, et laisse-dans les‘¡mains du second acquéreur une
somme égale à ce qu'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second aciqUéreur/poursuivi par les opposans, produit.des quittances de consignation, assigne
les créanciers en mainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces, créanciers attaquent le premier acqué
reur, qui met en causç son. ga$an& : celui -ci. emploie
UANS
�C3 )
pôur libération le jugement qui a validé sa consignation.
Alors l’acquéreur observe aux créanciers qui le pour
suivent, qjieileurs oppositions à des lettres de ratification
ont lié leurs intérêts à ceux dit second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés, ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
Voilà à quoi âe'réduit la question principale, et il
est évident que jusqu’ici elle në présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse s 'mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du v e n d e u r
originaire , qui comprennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers-elle seroit pour euxmêmes, font cause commune avec eux, pour que tout
retombe sur le premier acquéreur.
Alors tout s’exagère et se complique. L ’émigration de
l’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout;: d’autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à mille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas , et le
.tribunal même où il a trouvé justice. Enfin, après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la multitude, mais plus
étrangers encore, on~vient crier à l’injustice et à l’indé
licatesse, en disant froidement : « Que'm’importe si vous
« devez recouvrer ou non 5ooooo francs: que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas-la vôtre ! Que
A 2
�(4.)
«. m’importe en.côjrè ,si vo u â tes ruiné par ce payement
« et si votre famille est respectable*..Je veux.de>Pargent,
«• et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose;
« moins en mesMve.;de me-résister’ ; d?aille.iirs voüreiémi« gration.se ¡prête à tous mes sophismes :*'jl y^ajjt.ant de;
« lois sur cette matière, qu’il est impossible dfej ne-'pasr
« y voir que tout doit retomber sur vous..pinailleurs.,;
« quand je me suis donné la licence d’imprimer qu’une
« décision contraire à}mon intérêt étoit unjjjugcmfint de
« fa v e u r , j’ai-calculé; Peffet 'dé ,cettje»in jurp sue, liesprit,
« des magistrats auxquels j’eri idemaïnde ' la réforme.::Si
« je ne puis le s ’forcer, à- croire gqu’il feu ti sacrifier uni
« émigré par préférence, mon .adroite censure sera*tou« jours d’un poids quelcqnque' dans, la i balance;;Vielle
a achèvera probablement de me conquérir le suffrage de^
« ceux, dont l’opinion auroit; été incertaine. ! »[ , *< < .
Ainsi eût parlé Machiavel?;, ainsi panlerit vies '.syndicsdes créanciers de T an e, qui veulent, pe?;\fas et nefas ,
intéresser en se présentant comme des victimes..
Qu’ils .tâchent de-prouver à la Gour que malgré leurs
oppositions à/des lettresy; malgré un jugement qui pro
nonce contre eux la validité du payement que le-sieur.
Natthey a été chargé'de-leur faire, il leur reste encore une,
action : voilà leur cause.
t ;
Mais que dans,leur colère et dans leurs calculs- ils fassent
semblant de supposer, de l’adresse, des insinuations et-de
la faveur; quo tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent ¿\ insinuer que cette émigration deviendra aux
sieur et dame de la'Roche-Lambert, un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s'être,fait de ses propresJautes un moyen
d’acquérir voilà ce qui n’est ni la cause ni la vérité 3
mais une insigne et brutale calomnie.
•Car personne ne sait mieux que les adversaires qu'il
n’y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la Roche-Lambert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en
écus sur une terre qu’ils n’ont pas : et on ose encore leur
demander plus de 5ooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
*
... ■i
■:
:
F
A
I
T
S
.
*
- Apres la mort dû'sieur Emmanuël-Frédéric de Tane*
sa succession1 fut acceptée sou& bénéfice d’inventaire par
Françoise- Gabriëlle) de Tane, épouse de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères.
Madame-de Montmorin ne-pou voit vendre en cette
qualité les .biens, de la succession sans y appeler les
créanciers ; elle fit apposer’des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyre, Chadieu, la GhauxMongros et le* mobilier de la succession. Il y a eu pour
7 7 7 4 0 o francs de ventes avant 1790:
La terre de Chadieu fut vendue' par madame de
Montmorin aux sieur et dame de la Roche-Lambert, par
acte du 17 juin 1788, moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a is évalués à 5 deniers par livre, produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000' fr. seroient:
payés solidairement par les sieur et dame de la RocheLambert entre ¡es mains de Trutaty notaire-séquestre ?
•
�( 6 )
ou aux créanciers qui auront été délégués• savoir, un
quart au i 5 septembre , et le surplus dans le courant
des deux années , en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et que, s’il se trouve des oppositions du chef
de madame de Montmorin, elle les fera lever dans les
six semaines; mais hors, ce cas , elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de Tane de Santenas, Teroulde, commissaire à terrier;
Chardon, chapelier; Louis Laisné, sellier, et Toutain,
tailleur d’habits, tous syndics des créan ciers de Tane,
lesquels , après avoir pris lecture de la vente , la con
firment et ratifient aux conditions y exprimées. Ils font
élection de domicile chez M. Pernot-Duplessis/procu
reur au parlement.
Le jour même de la vente, M. de la Roche-Lambert
paya la somme particulière de 7812 lîv. 10 s., à Tvutaty
notaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
• En 1791 , les sieur et dame de'la Roclie-Lambert,
voyageant en Allemagne, envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur beau-frère, deux procurations; celle du
sieur de la Roche-Lambert porte pouvoir $ emprunter
les sommes nécessaires à ses affaires , gérer , liquider ,
vendre : elle est passée devant Heidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 179 1.
La procuration de la dame de la Roche-Lambert porte
pouvoir d'emprunter 60000 fr , pour placer sur Chadieu ,
�(7)
régler compte avec M\ T ru tat , notaire ; recevoir ,
donner quittance , faire tous emprunts qu'il jugera bon
être 9pour Parrangement des affaires de son mari. Cette
seconde procuration est passée devant Lutner, notaire à
Worms , le 25 octobre 1791 (1).
En vertu de ces actes,.le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
Le 27 novembre 1791 , par acte reçu Cabal, notaire
à Paris, le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la Roche - Lam bert, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n’avoit pas de pouvoir de la dame delà Roche-Lambert ),
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
Pa ris , moyennant ôooooo fr ., dont il reçut 126000 fr.
en assignats, et quant aux 376000 fr. , le sieur Sauzay
promit les payer dans un an aux sieur' et dame de la
Roche-Lambert you , si bon lui semblait, aux créanciers
desdits sieur et dame de la R och e-Lam bert , et spé
cialement aux créanciers privilégiés sur ladite terre.
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la Roche-Lambert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux imputations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dame de la Roche-Lambert quittaient la Fiance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur première pensée a été de s’occuper
de leurs créanciers, et que tel a été' l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�( 8 .)
s’oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
Enfin, pour l’exécution de ladite clause, le sieur de SaintPoney fait une élection de domicile à Paris.
'
Le 4 janvier 179 2, il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellement; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics. .
/ •' ' '
1
L e 22 avril 1792., le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’une, du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
Tane.
Jn . -j
jrj *i> r .*ii oooooct ü; .«irr. /< m r ^-n,ci
Dans la même année 1793 > ^ sieur clejla Roclie-Lam
ber t fut porté sur la 'liste des émigrés, v/rv f\ ? A
La dame de la Roche-Lambfert n’a jamais été -portée
sur aucune liste. \ , ’ 1,
Sous prétexte d’une loijdu 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens desrabsens du territoire:,jsans ]e$
désigner encore comme émigrés,--le sieuib Séjuzayi^fit
déclarer par le curé d’Autezat, à la municipalité*jdu lieu,,1
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la Roche-Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il avoit pris des lettres dti^at ificéition^èt que
les créanciers opposâns* aux: rèttres1
prix'
et au delà : d’où il conclut qû’ii a iii(-eret^e 'conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre pst hypothéquée. « E n sorte que , dit.,1e sieur
« Sauzuy, s'il fa it fa ir e ladite déclaration , c'est moins.
« à
_
�a cause des sommes dont il peut paroître débiteur ,.et
dont la république nèipourra jamais p ro f ter ^ puisqii elles doivent être absorbées par lesdits créanciers
hypothécaires opposans aux lettres de ratification ,
que pour donner des preuves de son civisme y et empêcher qu!on ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence» »jJ . j *
i ->
Par acte du 25 juillet 1793 , le sîeur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux Martres, les mou
lins et fours banaux des. Martres, dépendans de la terre
de Ghadieu yumoyennanti la somme de 6 1100 francs ,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
" Le 7' nivôse an 2, par acte reçu Cabal, notaire à Paris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Cliadieu
^au ¡sieur .W allier, Suisse, pour lui ou la ‘personne que
W allier se réserva de déclarer dans les six mois, moyen
nant 5.30009 frrj dont^Wallie^paya comptant 40000 f r .,
s’obligea de payer 136000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des 355ooo fr. restans, W allier
-fut délégué à les_payer,-: soit aux 'créanciers de T ajie ,
précédent propriétaire \ qui se sont trouvés OPPOSANS
«
«
«
'«
«
«
«
A U X L E T T R E S DE R A T I F I C A T I O N PRISES PAR S A U Z A Y ,
soit afin d’en fa ir e le dépôt et la consignation partout
où besoin sera , aussitôt après, le sceau sans opposition
sur le sieur Sauzay des lettres de ratification à prendre
sur la présente .vente. ■ • !
,
‘LesieurNattheyditavoir été subrogé par le sieur W allier
à ladite vente, par acte sous seing privé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-Dôine
fit décerner , le- 24 ventôse an 2 , une contrainte contre
B
�( 10. )
le sieur Sauzay , pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche-Lambert-en vertu du contrat de
vente de 17 9 1, sous prétexte que le vendeur étoit émigré.
Ensuite, et à la. date du 26 floréal an 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
'
■
cc Je soussigné, receveur de l'enregistrement e t des domaines
ce au bureau de Saint-Am ant-Tallende, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G. Etienne-Jean-Louis Natthey, de N yon,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
ce suivant la déclaration de command en sa faveur-par le
« C. W allie r, du 7 nivôse d e rn ie r), la somme de trois cent
cc cinquante-cinq mille livres , pour servir tant au nom des
cc cit. Natthey et Sauzay , qu’en celui du C. Jean-Baptiste
cc W a llie r, à la libération dp Chadieu.
c< D e quoi m’a été demandée la présente déclaration
cc
cc
, à l ’effet
d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale' sur ledit
1
Chadieu.
U Saint-Amant, le 26 ilotéal àn 2. Signé Mavgue. h >
.
* -
1
w.
^
.
..
’ . :,
. •
.11 pavoît qu’ un arrêté du département , en l’an 3 ,
ànnulla la vente faite au sieur Sauzay , et mit ta terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et ‘Wallier, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay, et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que lo-sieur W allier avoit voulu se
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�Ci1 )
il fit des! offres à Wallier:, et même u n e - consignation, en
mandats. Mais les* loisjsurlla réduction ,.du papier-môunoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de'la„Seine sus
pendit le procès, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de Tane produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frimaire an
4 ? reçu du C . Jean-M arie W allier ^
cc des deniers empruntés de Ja q u e ro t, par acte d u ............ la
«c somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix du domaine
cc acquis par Sa u z a y, des sieur et dame de la Roche-Lam bert,
« ém igrés, suivant le contrat du 27 novembre 17 9 1 ; ladite
«c somme de 355 ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
« nationale sur le receveur du district de Clermont, n°. 42,4, eu
ce date du i 5 brumaire dernier; dont quittance. Signé Maugue. »
L e s créan ciers o n t retiré du m êm e registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an 4 , reçu de
cc de 3 2 8 5 1 francs
Jean-Louis Natthey la somme
25 centimes pour les intérêts restans du prix
ce‘principal dii domaine vde Chadieu, acquis de la Roche-Lam-
i< b ért, ’sa femme’ et Saint-P;oncÿ, émigrés; par le sieur Antoine
« Sa’uzay,"lequel en a fait vente au C. W allie r, par acte reçu
« C ab al, notaire à Paris, le 7 nivôse an 2 , lequel W allier a
ce passé déclaration au profit dudij: Natthey, par acte sous seing
cc privé , du 7 nivôse an 2 , enregistré il Paris le 17 messidor
cc an 3 , par Pinault ; ledit payement 'fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lias, directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrement à Paris , le
cc 12 frimaire présent mois; et ledit payement effectué en une
cc rescription de -la trésorerie nationale sur les domaines d’émi-
« 'g r é s , n ° / 4 g 3 , çt souô la date dudit jour 12 du présent mois.
« Certifié conform e, le 8 vendémiaire an 1 1 . Signé Maugue. »
’ '
B 2
�( 12 )
L e i ev. nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de Tane, aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite, qualité de
créanciers opposans aux lettres de ratification prisesr
par Sauzny; de se trouver le i 5 pluviôse suivant chez
le receveur de Saint-Amant, pour y: recevoir leprioo, de>
Ch adieu. Il est constaté par cet exploit (resté au. pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que l^atthey y procède
comme obligé d’acquitter 37 5ooo frauc^e^ cjap.ital^et^
32852 fr . en intérêts , tant pour se libérer lui^niéme y
que pour libérer'le sieur Sàuzay , ainsi que les,sieur'et
daine de la Roche-Lam bert , premiers acquéreurs et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers 11e se présentèrent pas ; et le sieur
Natthey fit dresser, le i 5 pluviôse an 4 , par le receveur
de Saint-Amant, la pièce suivante produite par lui.
« Je soussigné, receveur de l’enregistrement et des domaines
« au bureau de Saint Amant-Tallende, déclare, d’après le débat
<c des co m p tes qui a eu. lieu ce jo u rd ’hui entre m oi et le .ç it»
ce Parades , des Martres , fondé de pouvoir du C. Etienne-Jean cc Louis Natthey , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Cha?
six cent dix-neu f mille six cent quatre
cc livres quinze sous en l’acquit dudit domaine., dont quittance
cc dieu, la somme de
cc et décharge, sauf audit Parades, qui en Tait expresse réserve
cc pour ledit C. Natthey , de plus ample examen et apuration
r< desdits com ptes , et de se pourvoir d ev an t qui il appartiendra ,
« pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
« sus des sommes dues,par ledit, C. Natthey pour la libération
« dudit domaine de Chadieu.
« Saint-Amant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
�En marge est écrit :
( i3 )
« Sur l’invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. niyôse der« nier, n’a comparu cejourd’hui en mon bureau.
« Le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers- de Tane n’ont formé aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la- Roche-Lambert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulter, du .3 floréal an 10 , et
^c’est le moment d’être attentif sur leur première dé
marche y pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 17 9 1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
Sauzay , sur sa vente du 27 novembre 1791Par exploit du 1 1 brumaire an 1 1 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauzay au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la* vente de 1788; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à(payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente à lui consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit payement. (Cette pièce est produite par le
sieur Natthey.)
Le 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
à Natthey..
Alors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal'de Clermontj.pour voir dire qu’il est valablement libéré au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés h lui
donner mainlevée de leurs oppositions.
�( ¿
4 )
Le 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clermont rend
le jugement suivant :
« Le tribunal déclare le demandeur (Natthey) bien et
« valablement libéré du prix de la terre de Chadieu ,*
« en conséquence, fait mainlevée de l’opposition faite
« par les défendeurs (les syndics) au bureau des hypo« thèques de Clermont, le 2 décembre ; ordonne qu’elle
« sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
« présent jugement; condamne les créanciers aux dom« mages-intérêts de Natthey, à donner par déclaration. »
En vertu de ce jugement, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu . Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
Tout d’un coup, en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire, Ambert et Cler
mont, sur tous les biens appartenans ou ayant appar
tenu aux sieur et dame de la Roche-Lambert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur Natthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de propos, jusqu’à présent, de dire
que pour verser 170644 francs en 17 9 1 ? ^ 3voit été
emprunté pour les sieur et dame de la Roche-Lambert,
savoir, 44000 francs à la dame de Bourneville, mère de
madame de la Roche-Lambert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de Tane-Santenas, représenté par Amédée.
�(
)
On a vu que le sieur de St.-Poncy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T an e, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
Et comme les syndics n ’ a voient inscrit que pour leur
intérêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre »les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la Roche-Lambert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
. .,
Le sieur Natthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
.assigner les sieur et dame de la Roche-Lambert en main
levée'd e ladite inscription.
Le lendemain, Amédée de Tane (très-d’accord, comme
. on le voit déjà, avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la Roche-Lambert de payer les arré
rages de l’emprunt ci-dessus de 30000 francs.
Le 23 du même mois, il a été présenté requête au
tribunal de Clermont, sous le nom des sieur et dame de
la Roche-Lambert; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de Tane, et à ce que le sieur Natthey, se disant
libéré,' fût tenu de faire valoir envers eux ladite libé#
ration, sinon de garantir les sieur et dame de la RocheLambert. Ils'ont conclu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 91 et suivantes, et au désistement de
Chadieu. Euiin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à:1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
Amédée de Tane à la mainlevée du. coin mandement, de
�( i6 )
payer par lui fait, attendu que Natthey, chargé de payer
tout le monde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a eu lieu, les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce jugement, le tribunal de Clermont distingue
les intérêts des créanciers de Tane, d’avec ceux d’Amédée
de Tane. A l’égard des premiers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
Roche-Lambert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur Amédée de T-ane, il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire Trutat,
comme obligation directe et indépendante de l'acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de' la Roche-Lambert de leur opposition au commande
ment de payer (1).
11 y a appel de ce jugement, tant par les héritiers et ,
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheLambert, que par les sieur et dame de la Rodhe-Lambert
contre Natthey et contre le sieur Amédée de Tane. On a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
"des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la Roche-Lam bert;
(1) Ce jugement est transcrit en son entier, avec les motifs,
à la fin du mémoire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( i7 )
d’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , qui, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lambert.
M O Y E N S .
Pour suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour etre
clair, autant que possible, dans une discussion denaturee
et obscurcie par de fausses applications de principes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
Tane d’avec ceux des héritiers de Montmorin, quoiqu’ils
^ient réuni leurs intérêts, sérieusement ou noni On exa
minera, en premier lieu, s’il est vrai que les créanciers de
Tane aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la Roche-Lambert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la Roche-Lambert.
2°. Sur l’appel des héritiers de Montmorin il s’agira
de savoir s i, au cas où le versement du prix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation nationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de Tane, la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
Montmorin, comme condamnée à m o rt, ou pour le
sieur de la Roche-Lambert, comme émigré.
30. Quant à l’appel du sieur de la Roche-Lam bert
contre le sieur Amédée de Tane ', il y aura lieu d’examiner
si le sieur Natthey, chargé de faire face à tout, a également
libéré le sieur de la Roche-Lambert de cette dette.
C
�( ï8)
Enfin, l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir si, dans le cas où le sieur de la RocheLambert seroit condamné à payer des sommes quelconquesaux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A ppel
d es
c r é a n c i e r s
de
T a ne*
La prétendue émigration du sieur de la Roche-Lambert
est le premier texte de la proposition des créanciers de
Tane ; ils l’appuyent sur un arrêté^ du conseil d’état, du
3 floréal an i l , portant que tout créancier à'émigré
non liquidé, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre rémigré : ils en concluent que
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
Rien de plus incontestable que ce point de droit; mais
aussi rien de moins applicable à la couse.
L ’arrêté de l’an 1 1 seroit applicable, si Chadieu ayant
été vendu nationalement, le sieur de la Roche-Lambert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au grand
livre, pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement.
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence;
i°. La terre de Chadieu, qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lambert a
été débiteur, comme détenteur y n’a point été vendue m
0
�C 19 )
la nation né s’en est point emparée : un séquestre aussitôtmis que le vé , n’a pas empêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée, sortie des mains du
sieur de la Roche-Lambert, au 27 novembre 1 7 9 1 , et
le sieur de la Roche-Lambert n’a été mis sur la liste
des émigrés qu’en 1792. La vente ayant une date au
thentique açant le 9 février 17 9 2 , devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Ghadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des événemens , lorsqu’avant leur départ ils ont mis hors leurs mains l’im
meuble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxième vente ; lorsque,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 17 9 1 , et n’avoient rien
de commun avec l’émigration ?'
3°. 11 ne s’agit pas de créanciers à'émigré, qui, après
avoir eu la nation pour seul obligé, ’parce qu’elle s'étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposans qui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur intermédiaire.
♦
t e s créanciers de Tane ont 'bien senti qu’il falloit
C 2
�(
20
)
p ro u v e r, avant tou t, comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la Roche-Lambert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement -personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lambert.
- Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, r°. les héritiers
de Montmorin ou de Tane,. comme« obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification,
ou Ghadieu, à cause' de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la Roche-Lambert, comme délégué envers eux par Pacte
de 1788^
Pour amener à eux le sieur de Ta Roche-Lambert,
il y a une-seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite'sans novation,
c’est-à-dire,.sans l’extinction de la dette du<premier obligé;
et de même il- n’y xa pas de novation sans, l’intention
formelle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r, qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788*
on n’y verra pas même l’apparence d’une novation ; au*
contraire-,, madame de- Montmorin reste- débitrice des
créanciers, de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 3760,00 fr. que payeront les acquéreurs deChadieu ; ils conservent sans le moindre-doute le droit
de s’adresser à madame de Montmorin et cela est si
bien prouvé, que nous.voyons dans l’inscription du 1-1
janvier 1,808, et en la Cour* les dames de la Luzerne,
héritières de Montmorin , se réunii’ aux créanciers de
Tnne pour attaquer le sieur la Roche-Lambert, à cause
de l’intérêt qu’il a à, ne pas payer lui-même..
�( 21 )
Si les daines de la Luzerne n’étoient pas restées débitrices envers les créanciers de Tane , elles ne seroient
pas là pour fa ire valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs*, car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette somme, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la Roche-Lambert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers#
'
M ais, dit-on, les créanciers sont parties en Facte de
1788. Donc il y a délégation et obligation directe et
personnelle des sieur et dame de la Roche-Lambert ; ils
l?ont même exécutée en partie par leurs payemens de
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de l’acte de 1788 , pour ratifier et
confirmer la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
de cette intervention, commandée, par d’autres circons
tances.
Madame de Montmorin étoit héritière bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
1
La coutume de Paris ne permet à1 l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles*, mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus nouvellement réformée, en est le supplément; et
suivant la jurisprudence constante à Paris, aucun héritier
bénéficiaire ne-peut vendre les immeubles sans appeler,
les créanciers.
�t A in si, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
reur , pour éviter des enchères et d’autres contestations,
q u i, bonnes ou mauvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il éloit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation, lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in form â communi d’un
acte qui ne contenoit 'qu’une indication de payement,
ne disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l’engagement des sieur et dame la Roche-Lambert i et
qu’ils éteignoient celui de madame de Montmorin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la vente, que les créanciers intervenoient;
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu'on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Quce dubitationis tollendœ causa
in contractibus inseruntur, jus cdmmune non lœdunt.
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la Roche-Lambert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
c< Pour qu’il y ait délégation (dit M. Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du créancier de décharger le
« premier débiteur, et de se contenter de Vobligation
de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�( *3 )
« place du premier, soit bien marquée. C’est pourquoi
« si Pierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers moi, a, par un partage, chargé Jacques,
« son cohéritier, de me la payer à sa décharge, il rfy aura
<< pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m oi, si je n'ai par quelqii’acte déclaré formellement
« que je déchargeois Pierre : sans cela, quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rten pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ierre9
« et que j raie déchargé pierre.. L . 40, §. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
de la Roche-Lambert ont contracté une obligation per
sonnelle envers les créanciers de Ta ne-, sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas 3 et substituons-y qu’ils
ont contracté , comme acquéreurs E T D É T E N T E U R S ,
l’obligation de payer 376000 fr. pour le prix de la terre
de Chadieu.
Que va-t-il en résulter? Rien que de fort ordinaire;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les>
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellement.*
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure ; car les conventions particulières de la vente
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi dicte, et dont elle ordonne l’exécution. '
Le résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la Roche-Lambert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ordre entre lés soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de Tane; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
■personnels du sieur de la Roche-Lambert.
^ 'S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
Roche-Lambert,'.c’est qu’en effèt ils ne le pouvoient pas^
car, 10. les syndics n’ont pas formé opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la RocheLambert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au sieur Sauzay le 27 novembre 17 9 1. ' ’
Ainsi ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur Sauzay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaqùer les sieur
et dame de la Roclie-Lambert.
Ils se sont jugés eux-mêmes sur ce point , par leur
exploit donné à Sauzay en l ’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
• 2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur l’émigration , prouvent qu’il n’y avoit plus lieu à un ordre,
si un émigré étoit.débiteur, parce que le gouvernement,
dans ce cas, forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
30. Les créanciers pouvoient encore moins ouvrir un
ordre contre le sieur do la Roche-Lam bert, après le
jugement
�( *5 )
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. Natthey, son garant,
a répondu à leur demande en faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tane se croient dispensés de tout,
quand ils disent que cette chose jugée est un piège , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils ' en’ sont les maîtres :
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
- * ■
'r
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à démêler au sieür de laf Roche-Lambert J
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réformer,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler lès créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est ¡pour un émigré,
* et nullement pour libération envers eux. 1 "
r
,\
\
Si les sieur et dame de la Roche-Lamliert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveroient aisément, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose. .
11 s’agit eu ce point d’une vérité de révolution, où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. Pour être mieux écouté, en cherchant le sèns
de quelques lois de circonstance que le* législateur ne
nous a pas données comme ratio scripta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d\me autorité
prépondérante.
D
�( »6 )
Les créanciers de Tane, en citant beaucoup d’arrêts,
ont prévu qu’on pourvoit leur opposer celui rendu en
la Cour de cassation entre les héritiers Lecomte et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvement réfuté, en disant que
l’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison; car quoique dans
cet arrêt il fut question d’une somme versée à la régie
par l’acquéreur d’un bien de condamné, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour mot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens ; c’est dans le plaidoyer de
M. M erlin, qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des émigrés à verser les sommes par eux;
dues, ¿1 la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion, ce magistrat n’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Feffet de ce versement, et pour qui il est présumé
être fait. Yoici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M. d’Ormesson, vendeur d’une ferme moyennant
425ooo f r . , avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m ort, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
prix de la vente.
Après la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame Bélanger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers Lecomte, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix. La dame Bélanger se prér
�( 27 )
{dudit libérée malgré l’opposition, ' et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente; comme y étantobligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit polir le
compte des ayant droit , et par conséquent des créant
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
'
v
C’est pour examiner cette prétention que M. Merlin
discute’; et nous ,allons, voir qu’il l’adopté entièrement.
- « Si au lieu de payer aux héritiersLecomte (créanciers)
« le montant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir pour eux ( i ), leur
« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eux-mêmes..
cc Que reste-t-il à examiner? Un seul point, celui de
« savoir si en effet les héritiers Lecomte on t, par les
c< mains d'un tiers , touché après la mort du citoyen
« d’Ormesson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
• « (Article 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débi
te tcurs des émigrés, à quelque titre que ce soit, ne
c< pourront se libérer valablement qu’en payant h la
cc caisse du séquestre.)
c< C’est donc par forme de séquestre , que la nation
ce va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nution
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
« personjiel ’ elle les recevra pour le compte de ceux qui
(1) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. Merlin ; ils sont conformes à l’art. 12 39 du Code civil,
D 2
�c
2
8
}
pourront y aÿoir droit ; elles les recevra par consé~
quent pour les remettre aux créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en France, sauf à en retenir le
restant à son profit, s’il y a lieu..........
>
« (Article 17. Les sommes déclarées en vertu des
« articles précédens.. . . seront versées.. . . dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrement, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« émigré, et sans y préjudicier. )
• « Voilà qui confirme, qui développe bien clairement
« les conséquences que nous tirions tout à l’heure de l’ar« ticle 14 de la loi du 8 avril 1792. Les oppositions des
« créanciers d'un émigré ne peuvent ni empêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il doit;
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la somme que le receveur de Ven« registrement aura touchée. Preuve évidente et sans
•c réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; preuve évi« dente et sans réplique que les créanciers opposans
« sont censés recevoir par les mains du receveur de
« Tenregistrement ,* preuve évidente et sans réplique,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé payer , non
« pas seulement à la république, mais encore aux créan~
« ciers même opposans. » Questions de droit, tome 5 ,
v°. Lettres de ratification .
Il faut remarquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’Or«
«
«
«
�( 29 )
messon n’avoient été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d'insuffisance des deniers versés , et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d?Ormesson qu’au même cas
d’insuffisance. Le pourvoi des créanciers fut rejeté.
>
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lambert; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits, et en jouant sur les mots.
Quand ils ont poursuivi Sauzay pour les payer comme
leur débiteur, Natthey, son garant, a fait juger contre
eux qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru, équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un payement , mais plutôt d’un versement
pour un émigré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’émigré qui n’ont pas provoqué leur liquidation, et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payement.
Disons donc avec M. Merlin que si Natthey a payé
le prix de Chadieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n’est
pas pour le sieur de la Roche-Lambert qui n’avoit aucun
droit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
Ainsi, quand les créanciers de Tane pourroient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien, puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eux : par conséquent
ils sont payés; et, ne craignons pas de répéter, l’arrêté
�( 3° )
du 3 floréal an n , la seule loi de leur système, ne se
rapporte nullement à eux.
De là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,
et bien se garder de commencer une attaque directe,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras.
Mais qui a autorisé, on le répète, les créanciers de
Tane à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
individu, pour prendre inscription sur ses biens. Et certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 179 1 contre le
sieur de la Hoche - Lam bert, en avoient encore moins
en 1808.
A ppel des h é r it ier s
de
M ontmorin.
A leur égard, il n’est pas douteux qu’une obligation
personnelle de la part des sieur et dame de la RocheLambert a existé.
Mais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
Les héritiers de Montinorin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent concourir.
Le premier , en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
Le second, en prouvant que les acquéreurs postérieurs ,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur de la Roche-Lambeït,
n’ont pas payé.
Le troisième, en prouvant encore que la perte des
versemens faits pour la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la Roche-Lambert, à cause de son
émigration , que pour les héritiers de madame de Montmorin'; à cause, de sa. condamnation révolutionnaire.
Voilà ce que dévoient justifier les héritiers de Montr
morin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres,
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Trutat que les deniers devoient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir. .
Cependant les héritiers de Montmorin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la RocheLambert. En avoient-ils le droit?
D ’abord ils ne rapportent ni mainlevée , ni conseil*
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
,de première nécessité, quand il n’y auroit pas d’autre
obstacle.
Eu second lieu , comment prouvent-ils que les acqué
reurs postérieurs n’ont pas payé ?
Tout ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le prix ; soit h Trutat,
�( 32 )
soit aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à Sauzay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement aux créanciers pri
vilégiés sur la terre.
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la Roclie-Lambert n’a rien touché de ces 375000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des hypothèques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créanciers , de payer les 375000 francs.
Ce contrat judiciaire résultant des lettres, efface l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. aux créanciers
privilégiés seulement.
A son tour, le sieur Sauzay vend au sieur W allier ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers de Tane, l’ont obligé
de ue payer qu’à eux, qu’il délègue W'allier ou Natthey
à payer %55ooo fr. aux créanciers de Tane , opposans
aux lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposajis aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qu'au nom des premiers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’il verse le prix de sa vente.
Ensuite il les assigne, et lait juger contre eux, en qua
lité de créanciers de Tane} qu’il est libéré.
Et
�( 33 )
Et on appelle ce jugement res inter alios acta . On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’intérêt d’un émigré, parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Natthey. Mais, i°. il est
aussi question des héritiers de Montmorin et de la con
fiscation de leurs biens; car Natthey, qui cherchoit à
consolider sa libération, ne manquoit pas de justifier de
son mieux son versement, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’émigré plutôt que contre un autre, c’est que cet émigré
n’est ni partie, ni appelé à ce jugement dont on veut
..lui appliquer tout l’effet.
O r, vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose jugée , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un côté, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de commun, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au premier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eux la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payement.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur qui,
après u n e Nlibération jugée valable, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire, pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
h jugement
E
�(34 r
N’est-ce pas un abus du raisonnement" que de soutenir
de tels paradoxes? Si mon acquéreur chnrgé de vous
payer a fait juger contre von* qu’il avoit valablement
pavé, qui pourra dire, sans choquer le bon sens, que
je n’ai pas payé moi-même, et que je reste débiteur?
Il devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse où il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re* judicata pro veritate habetur ,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression , serait certainement réputé être en trèsbonne monnoie, si un jugement l’avoit dit :■ nul n’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libération , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué..
' J
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a prétendu si constante sur la défense des lois de
consigner sans offres préalables , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des citations nom
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions forcées, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles, puisque les créanciers et les héritiers de Tanene veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validitéde son payement.
E t , chose étonnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de l’an 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de la RocheLambert, après avoir laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion entre les héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de Montmorin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l’exception cedendarum actionurn , et ne leur diroieut
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perdu, et s’ils ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
Natthey, qu’ils expliquent donc pourquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi ils paroissent regarder
ses versemens de l’an 2 et de l’an 4 comme un chiffon
informe, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers de Tane, le sieur de la Roche-Lambert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugement, ils ont perdu tout recours contre
lui *, car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E 2
�( 36 )
lui dire : « Vous avez acheté Chadieu , et vous l’avez
« revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
« être payé par vous , qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le soutenir, on le trouve au contraire fort équitable ;
on se passionne même au point de dire que M. de la
Roche-Lambert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnement; c’est seulement dans
les lois sur les émigrés, quron a prétendu trouver la preuve
q u e res périt domino signifié, en langage de révolution,
que le~prix d’un immeuble dû à des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute é m ig ra tio n a péri
pour t émigré.
Pourquoi ajouter à la dureté des lois révolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cette subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des émigrés , et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent aux débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais qu’y a-t-il de commun entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte notarié, en 179 1? et un bien d'émigré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré,
�C 37 )
qui par des lettres de ratification a formé un contrat ju
diciaire avec des opposans non émigrés , et des débiteurs
d’émigrés?
Mais admettons en toute humilité qu’un républicole n’a
dû souffrir de rien, et que tout le sacrifice doit tomber
sur le proscrit, n’ÿ a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de Montmorin' soient ici à l’unisson avec les
créanciers de. Tane 5 pour dire que Vémigre seul doit
perdre le versement ?
Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
Natthey,, quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche —Lambcrt , seconds débiteurs, il
faudra bien, pour être conséquentarriver jusqu’aux
héritiers de Montmorin, premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M. de la Roche-Lambert a été sur la liste des
émigrés, madame de Montmorin a été condamnée révolutionnairemept : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article i eiv de la loi du 26 frimaire an 2 , dit que lès
biens des condamnés devoient être régis et liquidés, et
vendus comme'les biens des émigrésLa seule réponse qu’on ait pu* faire à cette observa
tion, a été de dire que madame de Montmorin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu;
�( 38 )
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
Auvergne consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état où il la trouve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le Natthey, de Nyon,
qui a consigné à Saint-Amant?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
Natthey, sur la vraisemblance de ses versemens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lambert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur quelqu’un la perte de ses versemens, il
est évident que ce ne peut être sur celui à qui il auroit
profité ^ c’e s t-à -d ir e , aux héritiers de Tané, comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du prix, puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de préférer pour la
perte les sieur et dame de la Roche - Lambert , et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W allier; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur ou l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
dowino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à eu x, la somme consignée
�( 39 )
n’étoit pas pour eux. Qu’elle ait été versée pour les hé
ritiers de'Montmorin ou pour les créanciers de Tane,
c’est toujours aux hér'tiers de Montmorin que la somme
"devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
• :
Gomment'donc a-t-on pu. espérer de prouver, qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la Roche1Lam bert, qui n’étoient propriétaires de cette somme
à aucun titre et en aucune qualité , pas plus qu’ils ne
l’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si ta libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national,‘ c’est le vendeur séquestré1qui se retrouve
-passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur - et qui a donné pouvoir.à un tiers
de verser pour lui.
*
Y- .
Cum jussu meo id quod mihi debes sohns creditori
meo , et tu à me et ego à creditore meo liberor. L , 64,,
ff. De sohitionibus..
• .. r . ?
Souvenons-nous encore que M. Merlin a prouvé qu’un
versement fait à la caisse du séquestre, étoit censé être
fait aux créanciers , et que c’est absolument comme si
ces créanciers avoient eux-mêmes reçu et donné quittance.
Tout ce qu’il a dit se* rapporte parfaitement aux hé
ritiers de-Montmorin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils-assurent
que la somme étoit versee..
Un autre moyen s’applique' encore aux héritiers de'
�( 4° )
/
Montmorin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un émigré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
Or, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il-y a extinction de la dette par con
fusion. (Code civil, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 10 , art 17. )
Ainsi, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
Montmorin sont payés par Natthey , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Iis ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 1 1 , pour revenir de la nation à
l’émigré, puisque la nation les a traités de même, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V oilà, n’en dou
tons pas , ce qui est démontré jusqu’à l’évidence.
A
p p e l
c o n t r e
l e
sie u r
.
A iyiéd ée d e T a n e .
Le jugement de Clermont n?est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W allier; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roche-Lambert à payer la créance du sieur
Amédée de Tane, qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa vente, il est constant que le sieur Santenas
•w’a plus d’action ; car le sieur de la Roche-Lajmbert a
laissé
�( 4T )
laissé entre les mains dç Sauzay une somme suffisante
■pour payer tout le prix par eux d û , c’e s t - à - d ir e ,
3y5ooo fr. , quoiqu’ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
Au reste, il suffit dé renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà dit , et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clermont n’a pas voulu pro
noncer , par une autre inconséquence.
A ppel contre le s ie u r N a t t h e y ,
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la Roche-Lambert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la Roclie-Lambert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooq francs aux créanciers de
Tane , opposans aux lettres de ratification prises par
Sauzay , ou à consigner après le sceau de ses lettres.
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable avec les créanciers ; qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu’il dise, j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�(4 0
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le prix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances 3 il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lui , de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement délégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-monnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de.payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réduction, et ont rigoureusement
exigé qu’ils rapportassent les quittances des créanciers
délégués p a rla vente , même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel noyant rien payé lui-même, seroit privé
de tons moyens de défense.
E st-il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
Roche-Lambert à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payement, et qui, malgré un jugement,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o ch e-L am bert sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de Tane sur
leurs doutes, et de leur apprendre si le premier verse
ment de 355ooo fr., que Natthey dit avoir fait à Saint-
�C 43 )•
Amant le 26 floréal an. 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i 5 pluviôse an 4?
en appelant les créanciers opposans ?
Aucun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du i5 pluviôse an 4 est un versement ou
un compte, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit mois , lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits ; et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour sav.oir ce que Natthey a payé réellement.
Le sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la régie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à rendre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui compter 366000 francs, il faut au
moins convenir qu’ une contrainte n’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin sera ,
après le sceau des lettres de ratification ; mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme mandataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son payement; et il
ne s’cn dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son mandant, car il est obligé sans
exception, ou de faire valoir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclamation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lambert de l’effet de leurs
recherches.
Que si le sieur Natthey prétendoit, ainsi qu’il en a
menacé, s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i°. Parce que lui-môme a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen péremptoire sur la cause
actuelle.
20. Parce que lia demande en garantie a été jointe,
et que-loin d’attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. P a rc e que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel ; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont t o u j o u r s statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (r); l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la Boche-Lam bert dans ses
2 1 ju in 1 8 0 8 .
(r) « J ’ai reçu votre lettre, Monsieur, et je ne veux pas un
« seul instant vous faire attendre ma réponse.
cc J ’ai d abords été fort surpris des inscriptions que les créan
ce ciers de Tane ont prises sur vos biens ; j’ai dû ensuite me
« souvenir qu’ils avoient précédemment regretté de n’avoir pas
cc pris cette voie d’ abord, et de s’être engagés dans une autre
cc voie qui ne leur a pas plus réussi que celle-ci ne peut leur
« promettre du succès. Vous croyez d’avance, je l’espère, que
cc toutes choses sont parfaitement en règle vis-à-vis d’e u x ..........
cc Vous avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai pro« priétaire de Chadieu. D ’un mot je vous tirerai dô toute inquié<c tude. I l n e t i e n d r a , q u ’ a vous q u e N a t t h e y o u m o i , a v o t h e
<C CH OIX , OU TOUS DEUX R É U N IS , N E VOUS OFFRIONS DE NOUS SUI3S-
cc
cc
t i t u e r a vous d a n s c e t t e a f f a i r e : je vous en passerai acte
public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is, toutes choses sont parfaitement en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc Voilà un premier problème résolu, à votre satisfaction sanste doute. Vous v o y e z q u e N a t t h e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
cc QUE M EM E NOUS VOUS O FFR O N S, SOUS N OTRE GARA N TIE ET CELLE
CC DE CH AD IEU , DE NOUS SUBSTITUER A VOUS..................................
? ce
Vous êtes encore dans l’erreu r, quand vous supposez que
« les créanciers de Tane avoient fait opposition aux lettres de
te ratification obtenues par M. votre père sur MM. de Tane.
cc
ce
Fayon s’inscrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ciers non unis , et ne fit point inscrire l’union............. \\ n’y
« eut aucun acte conservatoire de la part de l’ union.
�(
4
6
}
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M. de
Batz, représentant Natthey , et M. de la Roche-Lambert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre
<c votre p è r e , l’ union fit opposition , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4, il y eut des lettres de ratification
cc prises sur Sauzay, et l’union eut le tort extrême de ne pas
cc prendre d’inscription, ni faire d opposition.
<c Us n’ont donc que celle du 2 2 décembre 17 9 1 ; mais il y a
cc
condamnation contr’eux sur ce point,
cc
tance très-âpre et trés-vive qu’ils avoient commencée
cc
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils attaquoient, dans Sauzay, W allier et N atth ey, et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de 11’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre famille, au lieu de se
cc
faire condamner sur leur inscription de
ce
v r a i, je n’aurois pas imaginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient imaginé de finir par où ils
cc
cc
cc
à
l’occasion de l’ins-
17 9 1.
M ais,
Paris
à
à
dire
auroient voulu commencer. Mais les actes subséquens, leur
<c liquidation, leur payem ent, sont tels qu’ils ne peuvent chercc cher qu’à e f f r a y e r e t à a r r a c h e r q u e l q u ’ a r g e n t , du moins de
cc Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos biens, ils en
cc ont également pris sur Chadieu...................Instruisez-moi de
cc
tout ce qui s’est passé d’eux à vous dans cette insurgence, et
cc
vous aurez de ma part, ou par moi, instructions parfaites. Je
cc
vous répète que m’identifiant à N atth ey, je me mettrai avec
cc
ce
plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment a me
faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s il y a
ce
quelque demande formée. Voilà de ma part, j espère, fran-
« chise, loyauté autant que vous pouvez désirer, et plus que
** vous ne pourriez exiger.
“ Keccvez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�( 47 )
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
forme; car, d’après les principes, 011 contracte valable
ment par epLstolam a ut per nuntium.
«attach em en t, et veuillez le faire agréer àJM . votre père.
« <Signc De Batz.
« Dès que j’aurai votre réponse, je partirai ou vous écrirai
« sur-le-champ. Je ne suis nullement in qu iet, parce que je
« connois les faits, et qu’ils sont réguliers. :»
Paris, 9 juillet 1808.
« Je n’ai pas perdu de tem ps, Monsieur, à prendre tous les
cc rëriseîgnernens et toutes les instructions utiles contre les créan-
« f.ciers de'Tane. J ’aurai une consultation des plus habiles gens.
« L/affàireparolt inattaquable par les créanciers de Tane. II est
et heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
« u tile , surabondance de précaution, pour acquitter à la fois
cc vous et moi, et pour mettre dans tous les sens les créanciers
cc en demeure. Vous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces. . . . . . . . .
ec
c<
cc
cc
«
M. votre père n’ auroit pas dû prendre ins
cription sur Chadieu, surtout sans m’en prévenir : il n’auroit
pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
créanciers. Son intérêt est de faire cause commune avec
Chadieu : quiconque lui dira le contraire se trompera , l’induira en erreur. Au reste, je lui demande, et j’espère qu’il
« ne me le refusera p as, de vouloir bien faire rayer 9on ins
ec cription au bureau de Clermont. J ’ai besoin, pour ma seule
« délicatesse vis-à-vis de deux personnes à qui j’ai fait deux
emprunts, d’avoir leur certificat d’inseription avant le vôtre,
parce qu’agissant de bonne foi et d^entu-rre confiance en m oi,
ce ils ont reçu dans leur acte ma parole d’honneur qu’il n’existoit
�-
,
(
4
8
}
M. de Batz, représentant Naüliey, a toujours continué
<T;igir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de Laroche-Lambert la consultation
très-détaillée de MM. Poirier et Bellard (annoncée dans
la dernière lettre), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
Il y a donc im p o s s ib ilit é de délier le sieur INÎatthey de
son nouvel engagement, qui lève tous les scrupules des
lois de rémigration, lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
cc j)as d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
cc donner en toute vérité , et il se trouve que la vôtre existoit
« le jour même où j’affinnois qu’il n’en existoit pas , ou du
cc moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de fa it , et
cc celle de deux pauvres petits créanciers que j ’ai fait condamner
ce à Riom , et que j ’esp ère faire ra y e r à tous momens. M. votre
cc p ère , après avo ir fait ra y e r ce lle q u ’il a déjà faite , pourra
cc au m ê m e in s ta n t , s’il le juge à p ro p o s, la faire rétablir. Je
ce n’y suis que pour ma délicatesse seulement, et j ’espère qu’il
ce 11e me refusera pas cette satisfaction légère, qui, dans aucun
cc cas , ne peut lui être dommageable, et qui a été pour moi
w le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc parlant.
ce Au surplus, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M . Vautrin, et je m’en rapporte à. c e qu’il vous conseillera
cc à cet égard.
cc Je vous renouvelle , Monsieur,
1 assurance de mon dévoue-
cc ment à vos intérêts, et de mon bien sincère attachement.
u S i g n e D e B a tz . »
II
�( 49 )
Il'n e reste plus qu’un mot à dire sur l’effet de "cette
garantie, s’il falloit en venir à elle ; il est réglé ,par le
Code civil, qui s’exprime ainsfÎ
: Article 114 2 . c< Toute obligation de faire se résout en
« dommages-intérêts, en cas'de non-exécution delà part
« du débiteur. »
Article 1184. « La condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été exécuté, a le choix, ou de forcer l’autre à l’exé« eution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en
« demander la résolution avec dommages et intérêts.
« La résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
Le sieur de la Roche-Lambert a conclu à la résolution
de la vente de 179 1 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi' ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui demande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
que le sieur de la Roche-Lambert dut être obligé de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a point élevé une
prétention aussi immorale; il est vraisemblable qu’il s’en
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitime : ainsi , à son
égard, il suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payemens, puisqu’il s’y est engagé, ou qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendeur soit
à l’abri de toutes recherches.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R I O M , de l’ imp. de T H I B A U D , imprim. de la C o u r impériale, et libraire,
rue dej T a u le s , maison
L a n d r i o t. —
Juillet 1 8 1 0 ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
receveurs de l'enregistrement
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0413
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53797/BCU_Factums_M0413.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
receveurs de l'enregistrement
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53795/BCU_Factums_M0411.pdf
87b55140fa8b5b2c672c573c1960951d
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
PO U R
G asp ard -R och
M OM ET,
propriétaire à P a r is ,
in tim é ;
CONTRE
J ean -J oseph C R O Z E , sous-préfet de Brioude,
appelant ;
E N
P R É S E N C E
D'IGNACE B EA UFOR T- M O N T B O IS SIER
D E CANILLAC, appelant.
un b ien et le p a y e r , s’o b l i g e r et r e m p lir
ses engagemens , sont des opérations tellement vulgaires
qu’il n’y a nul mérite à les concevoir ; mais garder en
ses mains pendant dix ans la moitié du prix de son ac
quisition , susciter à son vendeur procès sur procès, le
forcer à payer
ooo francs le domaine qu’on a acheté
de lui 36000 francs, et cependant lui soutenir qu’il a
vendu un second domaine s a n s l’avoir su , et sans en avoir
jamais été propriétaire; enfin répondre à une somma
tion de payement par dix chefs de demandes incidentes P
A
C
HE T E R
65
�C2 )
voilà une conception grande et instructive, un coup de
maître qui décèle le génie et les grandes inspirations.
Il en coûte singulièrement au sieur Momet de désigner
le sieur Groze comme coupable d’une .telle conduite •,
mais réduit lui-même par le sieur Groze à se justifier de
n’avoir pas vendu le bien d’autrui, le sieur Momet est
dans la dure nécessité de dire la vérité à la cour, pour
sa propre défense.
F A I T S .
Par acte passé devant Deloche, notaire k Paris, le 30
vendémiaire an 4, le sieur de Canillac vendit au sieur
Momet le domaine dit de Chassaigne,
« Consistant en maison de chef, cou r, jardin et dépence dances, ensemble les bâtimens nécessaires à l’exploitac< tion , le tout contenant cinq septerées deux quarte« ronnée;
« Plus soixante septerées trois quarteronnées de terres
« labourables ;
« Plus vingt-une septerées de prés ;
« Plus cent vingt septerées de bois ;
« Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne \
« Plus cinq septerées une coupée de terres incultes;
« Ge qui forme au total deux cent dix septerées une
c< quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
« et comporte , sans réserve, même le mobilier vif et
« mort qui se trouvera dans ledit domaine appartenant
« audit vendeur, qui entend vendre audit acquéreur tout
« ce qu’il possède ; et les droits qu’il a et peut avoir dans
�(3)
« ledit domaine et dépendances, à dix arpens près, en
« dehors ou en dedans. »
La vente est faite moyennant 600000 francs de prix
apparent, dont l’acte porte quittance.
11 est dit que le domaine vendu appartient audit sieur
de Canillac, comme lui étant échu par le partage des
biens du sieur Pierre de Canillac, son oncle, et que le
vendeur s’oblige de remettre à l’acquéreur un extrait
dudit partage, de l’inventaire fait après son décès, du
contrat de mai’iage de lui Canillac, et du contrat de vente
de la terre de Beaumont.
Il est dit enfin que l’acquéreur se réserve les fermages et
produits de l’année 1794? et que l’acquéreur sera tenu
d’entretenir le bail ou traité fait avec le fermier dudit
domaine, pour Tannée courante seulement ( i j g ô ) .
Le sieur Croze, domicilié à Brioude, habitant alors Paris
comme membre du conseil des cinq cents, ayant eu connoissance de cette acquisition, pi^oposa au sieur Momet
de lui vendre ce même domaine, dit de Chassaigne,
avant que ce dernier sût même en quoi il consistoit. L ’ac
cord eut lieu moyennant 36000 francs. Mais le sieur Croze
n’ayant pas la moitié du prix qu’il étoit convenu de payer
comptant lors de la signature de l’acte de vente, demanda
six semaines pour se le procurer, ainsi qu’une vente sous
signature privée, laquelle lui fut consentie pour le seul
domaine de Chassaigne. Le sieur Croze ne désavouera
certainement pas ce fait.
Le sieur Croze alla à Brioude chercher ses fonds, et bien
probablement visiter l’objet qu’il avoit acquis; dès-lors il
A
2
�(45
conçut le projet de faire englober dans sa vente devant
notaire le petit domaine de la Védrine, qui était voisin de
celui de Chassaigne. De retour, il convint de passer la
vente devait notaire, le 27 prairial an 4; mais il pria le
sieur Momet de lui donner en môme temps une procura
tion générale pour gérer, administrer, même vendre ce
domaine de Gliassaigne, sous prétexte qu’il ne vouloitpas
encore faire connoître sur les lieux son acquisition; ce que
le sieur Momet ne crut pas devoir lui refuser.
En conséquence le sieur Momet remit à M e. Deloche,
notaire du sieur Croze, le double du sous-seing privé, et
une expédition du contrat à lui passé parlesieurdeCanillac,
pour qu’il rédigeât la vente et la procuration conformément
aux actes qu’il remettoit. Ils le furent en effet*, et le 27 prai
rial, jour pris avec le sieur Croze, M e. Deloche vint chez
le sieur Momet, muni de ces deux actes rédigés, et littéra
lement conformes au contrat de vente que lui avoit passé
M. de Canillac. Le sieur Croze fit dire qu’il ne pouvoit
venir ce jour-là , mais qu’il viendroit le 29. N é a n m o in s
comme il n’était nullement n é cessa ire de la présence du „
sieur Croze pour signer la procuration convenue, le sieur
Momet en signa ce même jour, 27 prairial, la minute,
qui ne faisoit mention que du seul domaine de Chassaigne,
ne contenoit aucun renvoi, et l’approbation ne constatait
que trois mots rayés.
Le 29 , M e. Deloche et le sieur Croze se rendirent en
semble chez le sieur Momet pour la signature du con
trat de vente. Du 27 au 29 , la minute n’avoit éprouvé
aucun changement, ne contenoit aucun renvoi, et ne
faisoit toujours mention que du seul domaine de Chas-
�(5)
saigne. Ce fut' h la lecture de cet, a c t e q u e l l e sieur
Croze;parvint à taire mutiler la première rédaction r et
à faire ajouter quatorze renvois, tous plus insidieux les
uns que les autres. Bientôt la .cour en reconnoîlra paj;
elle-même toute l’astuce et la perfidie, •
v; ,,
D ’abord ce ne furent que de'simples corrections clq
quelques m ots, puis quelques changemens de sens ;
enfin , des phrases entières à rectifier. Il étoit dit , par
exemple , que les fruits lui appartiendroient depuis les
dernières échéances : il prétendit que cela étoit vague,
quoique correspondant à la première vente , et s’expli
quant par elle; il voulut faire substituer 1796 et 1796.
Iln ’avoitparsa vente qu’une quittance sans numération,
et il voulut faire ajouter la numération d’espèces. Le no
taire eut la complaisance d’ajouter cette numération ; et il
est constant aujourd’hui qu’il ne paya alors effectivement
que moitié de son prix.
Il prétendit n’être pas assez sûr de la propriété de
M. de Canillac ; il voulut une remise de titres : que ne
vouloit-il pas ? Enfin , le sieur Groze aborda une clause
plus épineuse. Il prétendit que le domaine de Chassaigne,
quoique ne portant que ce nom , comprenoit un petit
domaine ou locaterie, appelé de la V éd rin e, qui en
étoit une dépendance; qu’autrefois ces domaines étoient
distincts, et séparés; mais que depuis long-temps ils n’en
faisoient plus qu’un, parce que dans l’un des deux do
maines les bâtimens d’exploitation étoient écroulés.r(L e
domaine de la Védrine, dit-on, contient seul cent trente
septerées de terre. )
. Ce lait pouvoit être exact. Le sieur Momet n’en a^oit
�(6)
auciine cônnoissance, et disoit seulement : « Je ne puis
a vous vèndre que ce que j’ai acheté : puisqu’il n’est
« pas question de ce domaine dans mon contrat , je ne
« puis en parler dans le mien; s’il fait partie de mon
« acquisition, il fera partie de la vôtre. » Alors le sieur
Croze se retrancha à demander que , pour éviter
toute difficulté, et ne pas compromettre le sieur Momet,
il fût fait mention du domaine de la Védrine , comme
désigné seulement dans le contrat fait par le sieur de
Canillac au sieur M omet, sous le seul nom du domaine
de Chassaigne. Le notaire fut d’avis de cette rédaction de
clause; parce que, disoit-il, vous réféi’ant en tout à votre
contrat, si Passertion du sieur Croze est vraie, vous ne
vous engagez à rien ; si elle est fausse, vous ne vous
engagez pas davantage. Vaincu par ce raisonnement
v ra i, le sieur Momet voulant en finir et toucher l’a
compte que le sieur Croze lui donnoit, consentit à cette
rédaction.
Il en fut de même de la clause p a r l a q u e l l e , après
celle de la garantie formelle qui est la même que celle
portée au contrat du 30 vendémiaire, le sieur Croze
exigea que le sieur Momet renonçât à tout excédant de
mesure, à quelque quantité qiCil puisse monter. Le sieur
Croze et son notaire dirent au sieur Momet : N’entendezvous pas vendre tout ce que vous avez acquis ? Il en
convint : donc, dirent-ils, cette clause ne vous engage
à rien.
Ainsi successivement furent vaincues les répugnances
du sieur Momet, q u i, habitant de Paris , ne connoissoit
pas ce qu’il vendoit, traitoit avec le sieur Croze ; do-
�7
(
)
#
’
micilîé de Brioude, qui connoissoit parfaitement ce qu’il
achetoit, et toute l’étendue du contrat de vente faite au
sieur Momet, dont il avoit sous les yeux une expédition,
et depuis long-temps une copie.
La prévoyance du sieur Croze fut telle , qu’en deman
dant successivement les corrections ci-dessus , il étonnoit
d’autant moins le sieur M om et, que s’il lui eût pré
senté à la fois quatorze renvois à ajouter ; ce qui lui
ôtoit toute idée d’exiger, comme alors il l’auroit fait,
sans doute, une refonte entière de l’acte, pour dévelop
per les additions faites , et expliquer des clauses équivo
ques qui n’étoient ainsi écrites que pour s’identifier à la
première rédaction.
Il fut inséré dans ce contrat quittance des 36000 fr.
et le sieur Momet, qui n’a rien dissimulé dans cette cause,
s’est empressé de convenir qu’il n’avoitreçu qu’une partie
de ce prix ; et qu’après le contrat, il fut fait un billet
de dépôt de 19650 fr. 7souscrit par le sieur Croze au profit
du sieur Momet, daté du i prairial an 4. ( C’étoit alors
le seul mode valable pour stipuler en numéraire, )
Quoi qu’il en soit , pour que la cour ait sous les
yeux le résultat de ce qui vient de lui être d it, et voie
par quel arç on peut surprendre un citoyen sans défiance ?
voici l’image de la minute de la vente du 29 prairial
an 4 , d’après le vidimé oi’donné ;
5
Nota. T o u t ce qui se trouve entre deux crochets dans l'acte ciaprès, ainsi que dans la procuration, a été rayé dans les minutes.
�2.) Prairial 4-
(8)
P
ar - d e v a n t les notair es
r u s t i c s au département
et à la résidence de P aris, soussignés,
Fut présent Gaspard-Roch M om et, citoyen fran
çais, demeurant à Paris, place des Victoires-Nationales, section de la H alle au L ié, n°. 5 ,
Lequel a par ces présentes, vendu, cédé, quitté
et délaissé, dès maintenant et à toujours, et a promis
de garantir de tous troubles, dons, douaires, dettes,
hypothèques, évictions, substitutions, aliénations, x
empéchemens généralement quelconques,
A u citoyen Jean-Joseph C roze, homme de lo i,
demeurant à P a ris, rue des Saussayes, n°. 124^,
section de^- [Rou] Champs-Elysées , à ce présent et
acceptant, acquéreur pour lu i, ses héritiers et ayans
cause,
* et autres
f domaines de Chassai-
L es -J- domaine dit de Chassaigne, district de
gne et de la Védrine, dé
signés seulement, dans le
contrat qui sera ci-après
énonce, sous le seul nom
du
Brioude , département de H aute-L oire, consistant
en une maison de’ ch ef, bâtie à la.m oderne, co u r,
jardin et dépendances, ensemble les bâtimens néces
'% •
S
saires à l’e x p lo ila tio n , le tout c o n te n a n t cin q septerées
trois q u artero n n ées [de terre la b o u ra b le ] ;
Plus soixante septerées trois quarteronnées de terre
labourable ;
Plus vingt-une septerées de j^rés ;
Plus cent vingt septerées de bo is, tant taillis que
haute futaie, situées dans la commune de Chassaigne
et dans celle de Sansac ;
Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
et enfin cinq septerées une coupe de terrain inculte:
ce qui forme au total deux ce n t, dix septerées une
qyarteronnée de terrain, ¡ainsi que le tout se poursuit
et comporte, sans aucune exception ni rcser\e, même
le mobilier v if et m ort, de quelque nature qu’il soit,
qui se trouvera dans ledit domaine et dépendances :
garantissant
�(
9
)'
garantissant en outre audit acquéreur les deux cent
+| par ledit vendeur repéter c^x sopterées une quarteronnée, à dix arpens près,
contre Vacquéreur l’ excé- [en dehors ou en dedans,] sans pouvoir +1 [répéter
dantdesdites terres, à quelcéd an t. ]
que quantité qu’ il puisse
P ° ur Par ledit Croze, ses héritiers et ayans cause,
monter.
jo u ir, faire et disposer dudit domaine en pleine propriété , et comme de chose leur appartenante , à
compter de ce jour, et en commencer la jouissance -+X notaires à P aris,
[& compter des dernières échéances, de manière que
de réc°lte des fermages et autres produits
dudit domaine appartiendra audit acquéreur;] ledit
*+• par les revenus et fer- vendeur se réservant seulement les fermages de l ’année
mages des années mil sept mil sept cent quatre-vingt-quatorze ( vieux style ).
cent quatre-vingt-quinze et
L e domaine présentement vendu appartient audit
nul sept cent quatre-vingt- cit. M om et, comme l'ayant acquis du cit. Ignace
seize, vieu x style ;
Beaufort-Canillac, par contrat passé devant D eloche,
Gn a ^
ct son c o n f rè re , x le tren te ve n
d ém iaire d e rn ie r, en registré à P a ris le m êm e jo u r.
A à lu charge
L a présente vente est faite A par ledit acquéreur,
@
(JUi S,° WiSe > l °mde W er et acquitter les droits d’en
registrement et frais de contrat auxquels la présente
vente pourra donner lieu ; 2°. la contribution foncière
/. I an trois et l an quatre, à laquelle ledit domaine peut être imposé pour /t [la
présente année] et les années suivantes; 5°. d’entre
tenir le bail ou traité fait [pour la présente année seu
lem ent] avec le citoyen fermier dudit dom aine, si
aucun il y a.
Etenoutre cette venteestfaitem oyennant lasomme
de tren te-six mille livres de prix principal, francs
deniers audit vendeur; laquellesom m eledit acquéreur
T nombrées et réellement a P ^ en lcm en t payée audit citoyen M o m et, qui ]e
délivrées à la vue des no- rcconnoit- cn esPeces, sonnantes 0 et monnaie ayant
tairessoussignés,
C0UtS’ comPtées + - dont 11 ost “ n ien t, eu quitte et
¿¿y.
f* d’ or et d’ argent,
�( IO )
décharge ledit citoyen C ro ze, et de toutes choses re
latives au prix de ladite vente.
A u m oyen de quoi ledit citoyen M om et a présente
ment cédé et transporté, sous la garantie ci-devant
exprimée, tous droits de propriété qu’il a et peut avoir
sur ledit dom aine, de quelque nature qu’ils soient,
même tous droits rescindans et rescisoires, mais sans
aucune garantie à l ’égard de ces derniers, voulant qu’il
en soit saisi et mis en possession par qui et ainsi qu’il
appartiendra, constituant à cet e ffet, pour son pro-t- d’opposition à l’ entrée cur.eur ’ le Porteur donnant pouvoir.
en possession dudit doH sera loisible audit acquéreur d’obtenir à ses frais, •
main e, +|
sur le présent contrat, dans le délai de quatre m ois,
¿Wï
toutes lettres de ratification nécessaires; et si, au
sceau desdites lettres, il y a ou se trouve des oppoou de troublefo n d é dans s^ioris procédant du lait dudit vendeur ou de ses •
la possession et jouissance
ledit cit0J en Mornet s’oblige de les faire
dudit domaine présente- Iever et cesser’ ct d ’en rapporter audit acquéreur
ment vendu, le cit. M o m e t les mainlevées et radiations nécessaires, quinzaine
promet et s’ oblige d’en in- aPrès Ia dénonciation qui lui en aura été faite à son
demniser ledit cit. Croze dom icile, le tout aux frais dudit vendeur; de manière
en lui fournissant, cîans '["<•
acquéreur ne soit tenu que du coût des
V
. j „ // simples lettres de ratification.
Varrondissement des der
.
r i i- i
partemens de la HauteEn cas d CVICt,on’ ^ Cdudlt dom a,neprésentement
LoireetduPuy-de-Dôm e, ven d u > le cit- M om et Promet de rendre ai,dit cit.
des terresformant corps de C roze,dans les departemens etreonvoisins, des terres
ferm e, et c e , à dire d’ e x - Pour la méme ïa le u r' ,ct ce> à dlre d’cxperts, et non
perts, sans pouvoir par le- la somme (ïu’11 ,Tient de « cevo ^ .]
dit vendeur offrir, pour
^ o n n o l t ledit cit. Croze que ledit cit. M om et lui
l’ indemnité, le rembourse- a P a i e m e n t remis une expédition en papier du
ment du prix de lad. vente,
et contraindre le cit. Croze
h Vaccepter
.
contrat de ïcn te susdat<; ct <5n0nce’ fa,t audlt c,t*
M om ct ; P,us ^ d U i o n en papier de la transac^on en f ° rme ^e partage, taite entre ledit citoyen
Canillac et [la dame] sa sœur, passée devant M ony,
qui en a gardé m inute, çt son confrère, notaires i\
�Paris, le
( 11 )
sept juin m il sept
cent quatre-vingt-qualre,
d o n t d éch arge.
x incessamment
A l’égard d’un extrait de l'inventaire fait après le
décès du père du cit. Pierre B eaufort-C anillac, de
celui du contrat de mariage dudit vendeur Canillac
avec la citoyenne son épouse, en ce qui concerne le
douaire ; de celui du contrat de vente de la terre de
Beaum ont, en ce qui concerne ce moine douaire,
]e
]V[omet s’oblige de les remettre x audit cit.
+| et Varrêt d’ enregistrenientf qui ont été obtenus
sur la transaction dudit
jour sept juin mil sept cent
quatre-vingt-quatre.
vau,
Croze, avec toutes autres pièces au soutien de ladite
propriété, que pourroit lui remettre ledit cit. C anillac,
aussitôt que ce dernier les lui aura remises, et jiotamment les lettres patentes -H [les lettres.]
Enfin le citoyen M om et s’oblige, au besoin, d’aider
l’acquéreur, à sa première réquisition , des diverses
quittances des payemens par lui laits pour le citoyen
-4- et de luijustifier des su- Canillac
différons de ses créanciers privilégies o u '
bromations portées ès-dites hypothécaires sur les biens présentement ven d u s,-4quittances , jusqu’ à due le tout à peine de tous dépens, dommages-intérêts. A
concurrence de la somme
Pour l’exécution des présentes, les parties élisent
de quatre cent mille livres domicile en leurs demeures à P a ris, ci-devant déassignats;
signées, auxquels lie u x , nonobstant, prom ettant,
A Enfin le citoyen Momet obligeant, renonçant.
s’ oblige de remettre aussi
Fait et passé à P aris, en la demeure du vendeur,
incessammentaud.acqué- l'an quatre de la république française, une et indireur toutes les pièces qui visible, le vingt-neul prairial, après m id i, et ont
lui seront nécessaires pour signé ces présentes, où quatre-vingt-quatre mots sont
se faire mettre enposses- rayés comme nuls, (i) Ainsi signé M om et, Croze,
sionréelle dudit domaine, Fleury etD elo ch e, ces deux derniers notaires, avec
d?ici au p r e m i e r fructidor paraphes. Au-dessous est écrit : Enregistré à Paris,
prochain, et obtenir celles bureau du Contrat-Social, le 6 messidor an 4 , F . 117,
qui pourraient lui man- ^ol- 10 ; R . quatorze cent quarante livres, valeur fixe
querm
en mandats, sur
ooo liv. Signé Grou.
56
G
u il l a u m e .
^
(1) Ce sont les mots rayés à la plume dans le cours de l’acte.
D
e l o c iie .^
^
�( is )
Après cet acte , il restoit encore à retoucher à la pro
cu ra tio n à laquelle on n’avoit pas pensé ; mais pour cela
on n’eut pas besoin du sieur Momet : et au lieu de porter
le renvoi ( et de la V'édrine ) , en marge , on en fut
quitte pour le placer au bas de la première page, en le
faisant aboutir au paraphe du sieur Momet ; ce qui est
prohibé par la loi du n ventôse sur le notariat, et par
les lois précédentes ( i) . Il paroît nécessaire de mettre
aussi cette procuration sous les yeux de la cour.
2T] Prairial 4.
P a r - d e v a n t l e s n o t a i r e s p u b l i c s au département de la Seine
et à la résidence de P aris, soussignés,
Fut présent Gaspard-R ocli M om et, citoyen français, demeu
rant à Paris, place des Victoires-Nationales, n°.
H alle au blé ;
3,
section de la
Lequel a fait et constitué pour son procureur général et spécial
le citoyen Jean-Joseph Croze, homme de lo i, demeurant à Paris,
rue des Saussayes, n°. 1243, section des Cham ps-Elysées, auquel
il donne pouvoir d e , pour lui et en son n o m , régir, gouverner et
(1) Le notaire a dit, au procès verbal du vidimé, que le renvoi avoit été
approuvé dans cette procuration par les paraphes du sieur M omet, du notaire
en second, et de l’enregistreur. Le sieur Momet désavoue ce fait, et il vient
de se pourvoir extraordinairement à Paris, contre le sieur Deloche.
Mais ce qui prouve que le renvoi n’a été mis qu’après l’enregistrement,
et hors la présence du sieur M omet, c’est que la copie légale de l’enregistre
ment de cette procuration, levée par le sieur M omet, ne porte mention que
de la gestion du srul domaine de Chassaigne , et ne constate aucun renvoi,
quoique la formule des registres l’exige, s’il y en a; et au contraire on voit,
dans l’extrait de l’enregistrement de la vente, que la minute y est dite avoir
quatorze renvois ; enfin la cour verra par des s a jo u t é s , par les ratures non
approuvées des mots de Chassaigne, qu’il n’étoit question que d’ un domaine
seulement,
�( 13 )
administrer les domaines de C hassaigne-t-, situés dans le ci-devant
district de Brioude, département d e là H aute-L oire, consistant en
terres, m aison, bâtimens et vignes; recevoir de tous locataires,
fermiers et autres personnes qu’il appartiendra, soit en nature ou
autrem ent, les loyers échus et à échoir ; compter avec tous débi
teurs , débattre, clore et arrêter lesdits comptes, en fixer et recevoir
le reliquat ; de tous reçus donner bonnes et valables quittances et
décharges ; accepter tous transports et délégations pour le payement
de toutes sommes dues par quelques débiteurs ; louer ou vendre, soit
en totalité ou en partie, le domaine dont il s’a g it, à quelques per
sonnes que procureur constitué jugera £i propos; laire lesdits baux
ou ventes aux p rix , charges, clauses et conditions qui lui paroltront le plus convenables; faire faire môme toutes dém olitions,
[reconstructions] et augmentations qu’il jugera nécessaires ; nom
mer et convenir de tous architectes, entrepreneurs et autres gens
de b â tim e n s ; c o m p te r avec tous fo u rn isse u rs, les payer, s’en faire
rem ettre q u itta n c e s ; to u ch e r m ô m e , en to ta lité ou autrement, le
prix des ventes qu’il pourroit fa ire dans ledit dom aine; de tous
reçus donner bonnes et valables quittances et décharges; faire régir
môme le jd iti domaines [de Chassaigne] par qui bon lui semblera;
lui donner pour cela, à celui qui acceptera ladite charge, tous
pouvoirs nécessaires. Dans le cas où quelques débiteurs se refuseroient à payer au constituant les sommes qu’ils lui doivent, et qu’il
surviendroit quelques difficultés avec qui que ce soit, faire contre
qui il appartiendra toutes poursuites, c o n tra in te s [et d ilig en ces] et
diligences nécessaires; comparoitre devant tous juges de paix , soit
en demandant ou défendant, s’y concilier, si faire se peut; à défaut
d’arrangem ens, comparoitre devant tous tribunaux com pélens, y
plaider, ou bien nommer et convenir de tous défenseurs officieux
en causes; les révoquer, en substituer d’autres; obtenir tous jugemens, les faire mettre à exécution ou bien en appeler; faire toutes
H- et de la Védrine
�\
( 14 )
exclusions de tribunaux, former toutes oppositions, donner tou tes
m a in le v é e s , consentir radiation, traiter, transiger, composer ^
substituer ès-dils pouvoirs, et généralement faire tout ce qui sera
nécessaire, promettant l’avoir pour agréable.
Fait et passé à P aris, en la demeure dudit citoyen M om et, Fan
quatre de la république française, une et indivisible, le vingt-sept
prairial; et a signé.
Hayé trois mots nuls.
Signé M om et, avec Fleury et D eloclie, ces deux derniers no
taires, avec paraphes. A u bas est écrit : Enregistré à P aris, bu
reau C ontrat-Social, le messidor an ; R* vingt sous assignats.
Signé Grou.
5
G
u i l l a u m e
4
.
A»
D
e l o c
Cependant le sieur Momet se croyoit tranquille, et
assuré surtout de toucher au temps convenu les 19650 fr.
qui lui étoient dûs ; mais il en étoit encore bien loin.
Quand il fut question de payer, le sieur Croze parla
des créanciers du sieur de Canillac, et voulut des lettres
de ratification. Q u o iq u ’il eût été convenu q u e ce seroit
son contrat qu’il feroit purger, et non celui du sieur
M om et, il pria ce dernier de souffrir que ce fût la pre
mière vente, par la raison qu’elle présentoit un prix
inférieur, et qu’il lui en coûteroit moins, s’en chargeant
pour son propre compte , et promettant d’indemniser
de tout le sieur Momet qui , cette fois encore , s’en
rapporta au sieur Croze, dont le caractère de député étoit
fait pour mériter sa confiance.
Le contrat du 30 vendémiaire an 4 fut donc mis ,
par les soins du sieur Croze , au bureau des hypothè
ques du Puy. Par les soins encore du sieur Croze, il y
�5
( i )
eut des enchères qui portèrent ce domaine de Ghassaigne
à
ooo francs numéraire.
Il n’y avoit pas à balancer; le sieur Momet s’étoit obligé à
faire jouir, il fut obligé de retenir le domaine en parfou unissant les enchères; et la mère du sieur Croze fut,
à l’insçu du sieur M om et, caution du parfournissement.
Les lettres de ratification furent scellées, à la diligence
du sieur Croze , pour
ooo francs au profit du sieur
Momet , le 14 brumaire an 7.
A in s i, voilà déjà le sieur Momet obligé de payer un
domaine ooo francs en numéraire, outre les frais mon
tant à 3600 francs, après l’avoir vendu 36000 francs, et
n’en avoir touché que 18000 francs.
Par l’inspection de ces lettres de ratification , si sa
correspondance ne le prouvoit pas , on reconnoîtroit
que tout est L’ouvrage du sieur Croze ; on verroit qu’il
s’est torturé pour arriver à y faire comprendre indirec
tement, il est vrai, tout ce qui se trouvoit à Ghassaigne,
en y faisant qualifier ce domaine de terre-domaine, quoi
qu’il se fît expédier des lettres sur le contrat du 30 ven
démiaire, qui ne porte que le nom de domaine.
Ces lettres furent frappées des oppositions de q u a tr e
créanciers de M. de Canillac , quoique le sieur Momet
n’eût cessé de prier le sieur Croze de les désintéresser avant
les lettres ; mais cela eût évité les sur-enchères , et le
sieur Croze n’auroit pas eu un prétexte pour ne pas payer.
Enfin , quatre ans se passèrent : le sieur Momet réclama
de nouveau son payement.
Alors il lui fut signifié, le 11 floréal an 1 1 , une de
mande en ouverture d’ordre ? à la requête du sieur Labas-
65
65
65
1
�( ,i6 )
tide , de B r io u d e , l’un des créanciers Canillac. Le sieur
Croze sign ifia cette demande au sieur Momet.
P o u r lever cet obstacle, le sieur Momet chargea le
sieur Fabre de payer au sieur Labastide 2700 francs ,
montant de sa réclamation, ce qu’il fit ; et le sieur
Labastide donna quittance le 12 messidor an n . Cepen
dant le sieur Croze, débiteur déplus de 18000 francs,
avoit mis le sieur Momet dans le cas de payer le triple de
son acquisition , et laissé faire pour plus de 3600 francs de
frais, nonobstant toutes les remontrances des créanciers,
notamment du sieur Labastide, l’un d’eux, poursuivant,
qui, indigné, en écrivit au sieur Momet.
Il ne devoit donc plus y avoir de prétexte pour le
sieur Croze ; mais bientôt un autre incident le mit plus
à son aise.
Par exploit du 13 fructidor an 1 1 , il paroît que le
sieur de Canillac fit assigner le sieur Croze en désistement
du domaine de la V édrine, comme ayant été par lui
u su rp é .
Aussitôt le sieur Croze saisit et arrêta en ses propres
mains, sans aucune permission de justice, ce qu’il
au sieur M om et, et lui dénonça cette saisie arbitraire.
Le sieur Momet fut forcé alors de prendre les voies ju
diciaires, et il fit citer, le 13 nivôse an 12, le sieur Croze,
en payement en deniers ou quittances du billet de 19660 f.
et en mainlevée des inscriptions qu’avoit faites ledit sieur
Croze pour sa garantie; il le somma de faire ti’anscrire sa
vente.
Au bureau de paix on remarque, de la part du sieur
Momet, une longue explication de tous ses moyens. Quant
au
devoit
�(17 )
au sieur Croze , il reconnut son écriture du billet, offrit
de payer sans intérêts, à la charge des demandes ci-après.
Sur le surplus, il refusa toute explication, et dit que sans
se nuire ni se préjudicier sur ce qu'il peut avoir d it, il
pense qiùau m oins, quant à présent, il n'y a lieu ci con
ciliation.
Assigné le 30 pluviôse en payement, il forma à son
tour dix chefs de demande contre le sieur M om et, par
exploit du 8 floréal an 12.
i°. A ce que le sieur Momet fût tenu de faire cesser la
demande du sieur Labastide.
20. A ce qu’il fût tenu de faire cesser aussi la demande
formée par le sieur de Canillac, en désistement.
°. A ce que la saisie-arrêt faite par lui-même en ses
mairis fût confirmée.
40. A ce que le sieur Momet fût condamné à lui payer
les fermages de la terre de la Chassaigne, échus depuis 1795
jusqu’au jour de la demande.
°. A ce que le sieur Momet fût condamné à rapporter
mainlevée de toutes oppositions et inscriptions existantes
sur les biens vendus.
6°. A ce qu’il fût tenu de lui remettre tous les titres de
pi'opriété des biens vendus.
70. A ce qu’il fût tenu de prouver avoir payé pour
400000 francs de dettes à la décharge du sieur de Canillac,
suivant les contrats de vente, et justifier des quittances.
8°. A ce que le sieur Momet fût condamné à payer
sieur Croze 2873 francs pour voyages et dépenses qu’il a
faits pour ledit sieur M omet, en vertu de sa procura
tion du 27 prairial an 4*
3
5
audit
C
�(i8).
9°. A ce qu’il fût tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il dit avoir contre ledit sieur Croze.
- io °. A ce que, faute de justifier de quittance avec su
brogation pour 450000 francs, le sieur Momet fût con
damné à lui fournir, à dire d’experts, des terres de même
nature et valeur que celle de la Chassaigne, et à lui rem
bourser ce qu’il a touché du prix.
Le sieur Croze n’oublia pas ensuite de demander la
jonction de ses conclusions à celles du sieur Momet, et la
jonction fut ordonnée par jugement du 23 prairial an 13.
Eu réponse aux demandes du sieur Croze , le sieur
Momet ne dissimula pas que le billet de 19660 francs par
lui réclamé comprenoit i o francs d’intérêts*, aussi se
borna-t-ilréclam er seulement lesintérêtsde 18000 francs;
il offrit de remettre, audience tenante, tous les titres de
propriété du sieur de Canillac, comme il s’y étoit obligé par
la dixième clause de la vente ; il justifia d’un certificat de
65
n o n -in s c r ip t io n sur lu i et son v e n d e u r ; et d ’ a b o n d a n t, offrit
encore de r a p p o r te r la mainlevée de toutes inscriptions,
aussitôt que le sieur Croze auroit fait transcrire et les lui
auroit notifiées ; et il soutint que le surplus des demandes
du sieur Croze n’étoient pas fondées, et que notamment,
à l’égard de sa garantie, il étoit évident que le sieur Momet
n’avoit pas vendu ni entendu vendre plus qu’il n’avoit
acquis lui-même.
Le sieur Croze répondit à la demande du sieur de
Canillac, en le sommant de justifier s’il étoit réintégré dans
son état civil, attendu qu’il avoit été émigré; puis il lui
opposa qu’il étoit insolvable, et demanda caution judicatum
A l’égard du sieur Momet ; il lui objecta que
�19
(
)
si le sieur de Canillac faisoit juger que la Védrine étoit un.
domaine séparé de la Chassaigne, le sieur Momet devoit
lui remplacer cette éviction en un autre corps de domaine,
d’après leur convention, parce que le sieur Momet lui avoit
vendu et garanti distinctement les domaines de la Chas
saigne et de la Védrine.
Sur ces moyens respectifs, le tribunal de Brioude rendit,
le 21 messidor an 13, entre toutes les parties, un juge
ment dont il importe de faire connoître littéralement les
motifs et les dispositions.
Jugement dont est appel.
Entre le sieur de C a n illa c ................le sieur M o m e t...................
et le sieur C ro z e ...............
E n ce qui Couche la demande récursoire dirigée contre le sieur
Momet par le sieur C ro z e , au sujet de la demande du sieur L a
bastide ;
Attendu qu’il est prouvé par acte reçu Grenier , notaire, le i3
messidor an 11 , que ce dernier a été désintéressé; qu’il avoit été
justifié de cet acte audit sieur Croze , lors du procès verbal de nonconciliation , du 29 nivôse an 12; que ce chef de demande devenoit
dès - lors inutile , et que d’ailleurs il a été justifié de cet acte à
l ’avoué dudit sieur C roze, par acte du 22 prairial dernier; qu’ainsi
ce chef de demande ne présente plus de difficulté.
E n ce qui touche la demande principale formée de la part du
sieur Canillac, au désistement du domaine de la V édrin e;
. A ttendu que les terres de Chassaigne, Cusse et Lacougeat sont
échues au sieur Canillac par le partage, et qu’il n’y est nullement
fait mention du domaine d e là V édrine, dont il a cependant tou
jours joui, ou par lu i, ou par ses représentons, comme étant an
n exé, et form ant une dépendance du domaine de Chassaigne,
dont l’exploitation étoil au lieu de la V é d rin e, et non à Chassaigne ;
C 2
�3
4
A ttendu que lors de la vente du o vendémiaire an > les do**
maines de Chassaigne et de la Védrine étoient affermés à un seul
ferm ier, et sans distinction du prix; que par ladite ven te, ledit
sieur Canillac autorisa son acquéreur à toucher en totalité le prix
du ferm age, ce qu'il n'auroit pas fa it, s’il avoit entendu ne vendre
que le domaine de Chassaigne seulement ;
Attendu que lors de la procuration du sieur C a n illa c, dudit
jour ig germinal an 6 , il n'est nullement fait mention de faire
aucune réclamation au sujet du domaine de la V é d rin e, et s’il
n'eût pas été dans son intention de vendre la V éd rin e, comme
une dépendance de Chassaigne, il n'auroit pas négligé>de s’en occu
per lors de cette procuration.
E n ce qui touche la demande récursoire formée contre le sieur
M o m et, au sujet de cette même demande en désistement;
Attendu que, dès que d’après les motifs précéderas la d em an d e du
sieur Canillac doit être rejetée, il devient dès-lors inutile d'exa
miner si cette demande récusoire est bien ou mal fondée.
E n ce qui touche la saisie-arrêt faite par le sieur Croze entre
ses m ains, comme des biens du sieur M o m et;
Attendu que le sieur Croze est lui-même débiteur du sieur
M o m e t; q u ’il n ’ a pas pu fa ire saisir en ses m a in s sans u n titre
contre celui-ci ; que le prétendu péril d’éviction résultant de la
demande en désistement formée contre lui n’étoit pas un m o tif
suffisant pour autoriser cette saisie; que d'ailleurs le sieur Momet
a offert de donner caution pour sûreté du payement qu'il réclam e,
conformément aux dispositions de l'article 1623 du Code c iv il, et
que dès-lors cette saisie ne sauroit être confirmée.
E n ce qui touche la demande en payement des fermages de 1795,
formée par ledit sieur Croze contre ledit sieur M o m e t ;
Attendu que ce dernier, en autorisant le sieur C ro z e , par la sus
dite vente, à percevoir lesdits fermages,nes^estpaslui-memechargé
de faire des poursuites pour le recouvrement d'iceux; qu'il n'a fait
que.m ettre à cet égard le sieur Croze à son lieu, droit et place,
çt que c’est au sieur Croze à les réclamer contre ceux qui les doivent
�( 21 )
ou qui les ont perçus ; qu’il est de fait que le sieur Momet n’a rien
to u ch é, et qu’il ne sauroit être garant de ce que lesdits fermages
sont retenus par le fait d’une force m ajeure; que d’ailleurs le sieur
Croze ne fait apparoir d ’aucunes diligences faites de sa part pour
la répétition de ces mêmes fermages.
•En ce qui concerne la demande en mainlevée des inscriptions
subsistantes sur les biens vendus au sieur Croze par le sieur M om et ;
Attendu que celui-ci a obtenu des lettres de ratification sur
son contrat de vente, le 14 brumaire an 7 , scellées, à la charge
des oppositions ;
Attendu qu’il a établi par le rapport des actes énoncés au procès
verbal de non - conciliation , du 29 nivôse an 1 1 , que le sieur
M om et a désintéressé la dame C ensat, le sieur L abastide, et les
autres créanciers opposans au sceau desdites lettres ; qu’il a justifié
à l’audience qu’il n’existoitque deux inscriptions contre lu i, à Fépoque du 27 p lu viôse an 12 ; q u ’il n ’en est p oin t survenu d'autre jus
qu’au 27 du présent , et que ces inscriptions ont été radiées par
le conservateur des hypothèques de cejourd’hui ; ce qui est prouvé
par trois certificats de ce dernier, des dates sus-énoncées ;
Attendu d ’ailleurs que le sieur Croze n ’a point lui-même obtenu
des lettres de ratification , ni fait transcrire son contrat, et qu’aux
termes de la vente sus-énoncée, il ne peut forcer le sieur M om et
à lui justifier d ’aucune mainlevée, avant d’avoir fait transcrire
son titre et d’avoir dénoncé les inscriptions qui peuvent subsister
contre lui ; qu’ainsi ce chef de demande doit être rejeté.
E n ce qui touche la remise des titres réclamés par le sieur
C ro z e , en vertu de la neuvième clause dudit contrat de vente ;
Attendu qu’il n’a pas désavoué avoir reçu les lettres patentes et
l’arrêt du 7 juin 1784, et que le sieur Momet lui a o ffe rt, audience
tenante, la remise des autres actes énoncés en ladite clause ;
qu’ainsi ce chef de demande devient dès-lors sans objet.
En ce qui touche la demande en remise de titres et quittances,
avec subrogation constatant que le sieur M om et a payé en dé
charge du sieur de Canillac, pour 00000 francs de créances hy
pothécaires ;
4
�C 22 )
Attendu que cette clause du contrat n’est point impéralive ;
que le sieur Momet ne s’est obligé que d’aider au besoin ledit
sieur Croze des titres et quittances; que ce besoin n'est point
constaté; qu’il nepourroit l’être qu’autant que le sieur Croze leroit
transcrire son titre, et qu’il existeroit des inscriptions procédantes
du fait dudit Momet ou de ses auteurs; et que dès que le sieur
Momet se soumet de rapporter la mainlevée de toutes les ins
criptions qui pourroient exister, le sieur Croze n’est point fondé
sur ce chef de demande , puisqu’il y est dès-lors sans intérêt.
E n ce qui touche le payement de la somme de 2893 francs
réclamé par le sieur C ro z e , pour voyages, dépenses par lui faits
en vertu de la procuration du 27 prairial an 4 ;
Attendu qu’il a été soutenu par le sieur Momet que cette procu
ration n avoit été donnée que le jour même de la vente, quoique
datée de deux jours avant, et pour servir de titre apparent au
sieur Croze ;
Attendu que cette procuration ^ relative à la gestion et à l ’admi
nistration, au louage et à la vente du bien y énoncé , a d’ailleurs
été révoquée par la vente qui est survenue deux jours après; que le
sieur C roze, à l’époque de cette vente, ne pouvoit avoir rien fait
en vertu de cette procuration, et que s’il a agi postérieurement,
ce n’a pu être que pour son compte et son intérêt personnel; qu’il
n ’établit pas d’ailleurs ce qu’il a fait pour le compte du sieur M om et,
en vertu de cette procuration, et que dès-lors ce chef de
demande
doit être rejeté.
E n c e qui touche la demande en rapport du prix de ladite vente,,
touché par le sieur M om et, et le remplacement en im m eubles,
faute de justification desdits titres de créances et quittances ;
Attendu que le sieur Croze est en possession et jouit paisible
ment des biens à lui vendus; qu’il n ’a point éprouvé d’obstacles à
son entrée en possession ; qu’il n’est point troublé dans sa jouissance,
et que ce n’auroit été que dans ces cas qu’il auroit pu réclamer
l’exécution de la clause du contrat de vente; qu’ainsi il est encore
mal fondé dans ce ch ef de demande.
�(< 2 3 )
E n ce qui touche la demande en payement de la somme de 19660 f.
montant du billet daté du i5 prairial an 4, quoique fait réellement
le 29 dudit mois, etdes intérêts du montant de la sommede 18000 f .,
depuis ledit jour 29 prairial an 4> sous la déduction de tous payemens , et sous la déduction sur les intérêts, depuis ladite époque,
de la somme de 1620 fra n cs, compris pour intérêts dans ledit
billet ;
Attendu que quoique lors du procès verbal de non-concilia
tion le sieur Croze n’eût pas voulu s’expliquer sur la vraie cause
dudit b ille t, il est cependant convenu, lors du jugement contra
dictoire du 23 prairial d ern ier, qu’il avoit eu pour cause réelle
le restant du prix de la vente dudit jour 29 prairial an 4 ;
Attendu que quoique fait sous la forme d ’un dépôt, ce billet
ne dérive pas moins du restant du prix d’une vente d’im m eubles,
pour la som m ede 18000 francs , et que sous ce rapport les inté
rêts de cette som m e so n t dûs de d r o it , depuis la d ate de la vente ,
d’après les disposition s de l ’article i
du Code c iv il , . qui ne
sont que confirmatives du droit ancien, fondé sur les dispositions
de la loi au code D e actione empti et venditi ;
Attendu que quoiqu’il ait été soutenu par le sieur M om et que
dans ledit billet de 19660 francs il avoit été compris les intérêts
de ladite somme de 18000 francs , jusqu’à une époque fixée entre
les parties, ce fait n’a point été formellement désavoué par le sieur
652
C ro z e ;
A tte n d u qu^il est p ro u vé par une lettre du sieur C roze, d u 7
fructidor an 6 , en réponse à une autre que le sieur M om et lui
avoit écrite peu de jours avant, dans laquelle celui-ci se p la ign o it
du retard que le sieur Croze mettoit à se libérer, que celui-ci
convint qu’il n’est en arrière de payer que depuis deux mois huit
jo u r s , et qu’ il ne souffrira pas que ledit sieur Momet soit en
perte ; d’où il suit la preuve non équivoque qu’il y avoit réelle
ment un terme convenu entre les parties pour le payement dudit
billet, et que le sieur Croze a promis de ne pas souffrir que le
sieur Momet fû t en perte; qu’ainsi, sous tous les rapports, les in-
�(
24)
térêls de la somme de 18000 francs sont dûs depuis l’époque de
le u r ven te.
E n ce qui touche la demande en ratification d ’inscriptions faites
par le sieur Croze contre le sieur M om et;
Attendu que le sieur Croze a la faculté, par son titre d’acqui
sition , de purger les privilèges et hypothèques dont les biens à lui
vendus peuvent être grevés ; que le mode de. purger lesdites hypo
thèques et privilèges, est établi par l’article 2181 et suivant du Code
civil, et qu’il ne dépend que du sieur Croze d ’en user ;
Attendu qu’aux termes de son contrat d’acquisition les frais de
la transcription d ’icelui sont à sa charge, et que s’il ne veut pas
faire transcrire son titr e , il ne peut pas le dispenser d’accorder
la mainlevée des inscriptions subsistantes de sa part contre ledit
sieur M om et ;
/
. Attendu qu’aux termes de l’article 2160 du C o d e , la radia
tion d ’inscription doit être ordonnée, lorsque les droits de privi
lèges et hypothèques sont effacés par les voies légales, et que si le
sjeur Croze ne veut pas profiter du hénéfice de la loi dans un délai
fixe, le sieur M om et doit obtenir Ja radiation des inscriptions
que ce dernier a faites contre lu i, ne pouvant pas être, par le fait
du sieur Croze, privé du droi£ d ’ exercer ses actions contre les ac
quéreurs de ses biens.
Par tous ces m o tifs, le tribunal, jugeant en premier ressort,
D éclare le sieur de Canillac non recevable dans sa demande en
désistement de la partie de domaine dit de la V éd rin e, garde et
maintient ledit sieur Croze dans la possession et jouissance de ladite
partie de dom aine, comme annexée et form ant dépendance du do
maine dit de la Chassaigne ; et faisant droit sur tous les autres
chefs de demande formés réciproquement de la part desdits sieurs,
M om et et C r o z e , le tribunal donne acte audit sieur Momet de
ce que ce dernier reconnoit avoir reçu l’arrêt d’enregistrement
e.t les lettres patentes sus - énoncés , et de pe que ledit sieur
M om et lui a o ffe r t, audience tenante, et a jnis sur le bureau de
l’audience les autres titres réclamés par ledit sieur Croze, en vertu
de
�(
25
)
de la dixième clause dudit contrat de vente; lui donne pareillement
acte dé ce qu’il offre de rapporter la mainlevée de toutes les
inscriptions prociédantes1de son fait ou de celui d esès auteurs, sur
les biens vendus, des q u e ‘ledit: sieur' Croze aura fait transcrire
son titre de propriété, et dénoncé audit sieur M om et lesdites inscrip
tions ; et ayant égard âuxçlites o ffre s, faisant droit sur les con
clusions prises par ledit siéur M om et, condamne le sieur Croze à
payer audit' sieur M om et, en deniers‘’ou quittances valables , la
somme de 19650 francs, montant dudit b ille t, avec les intérêts
de la somme de 18000 fra n c s, depuis la date de ladite vente
jusqu’au payem ent, sous là déduction néanmoins de la sommé
de i o francs comprise dans ledit b ille t, pour intérêt de ladite
som m e, lesquels payemens qui ont pu être faits seront imputés
d'abord sur les intérêts^ et ^stibsidiairement sur le principal ; et
ordonne que ledit sieur Crozè sera tenu, dans le délai de deux
m ois , à compter de cc jo u r , de faire tra n scrire son titre d'acquisi
tion ; faute de ce f a ir e , et icelui passé, sans qu’il soit besoin d'autro
jugem ent, le tribunal fait pleine et entière mainlevée en faveur
dudit sieur M o m e t, des inscriptions faites contre lui de la part dudiÇ
65
sieur C rozd, et notamment de celleà faites au bureau de Paris %
vol. 18, n \ 674,* en celui de Corbeil, vol.
583
3 \ n\
5o3 ; en celui
de D ieppe, vol. 11 , n°.
; ordonne que sur la remise qui*sera
faite par ledit sieur M om et, \ chacun des conservateurs desdits bu
reaux des hypothèques, de l'expédition par extrait du présent juge
ment , ils seront tenus de radier lesdites inscriptions ; quoi faisant
ils en demeureront bien et valablement déchargés; fait pareille
ment mainlevée audit sieur M om et de toutes autres inscriptions
faites contre lui de la part dudit sieur C ro ze, et ordonne qu'elles
seront radiées par tous conservateurs qui pourroient les avoir faites,
ainsi qu’il est dit ci-dessus; et enfin fait mainlevée de toutes
saisies et oppositions faites par ledit sieur Croze, contre ledit sieur
M o m e t, et ordonne qu’à la remise ou payement de tous les ob
jets ou sommes saisis, tous gardiens seront contraints, sur la re
présentation du présent jugem ent, par les voies de d ro it; quoi
D
�(
26)
faisant ils demeureront bien et valablement décharges- envers ledit
sieur C ro s e ; sur le surplus des autres fins *et conclusions, prises
respectivement par les parties, le tribunal les met hors de cour et
de procès; condamne ledit sieur Croze en tous les dépens faits par
ledit sieur Momet sur ladite demande en payement du susdit billet >
lesquels ont été taxés, et liquidés, d'après Favis du commissaire
taxateur de la chambre des avoués, à la somme de 562 fr.
cent, j
le condamne pareillement en tous les autres dépens faits par ledit
sieur M o m et, tant en défendant que dem andant, sur les.autres de
mandes , lesquels ont été taxés et liquidés comme dessus, à la
somme de 29g,francs 11 centimes, et condamne ledit sieur Canillac
aux deux tiers des dépens faits par ledit sieur Croze,. suivant la taxe qui
en sera faite,, et même aux deux tiers des derniers.dépens adjugés
ci-dessus, audit sieur M o m et, le tout non compris, l’expédition et
signification du présent jugement,, qui. se ro n t su p p ortées par ledit
55
sieur C ro ze, sauf à lui à en répéter les deux tiers contre ledit sieur
de Canillac , auxquels deux tiers celui-ci est pareillement condamné y
et quant: à la condamnation prononcée contre ledit sieur Croze en
payem ent dudit b illet, le tribunal ordonne que cette partie du pré
sent jugement sera exécutée nonobstant tout appel, et audit cas
à la ch a rg e de do n n er c a u tio n , atte n d u que ledit. sieur M om et esl:
fondé en titre à cet. égard*.
3
Fait et ju g é , le 21 messidor an i '..
Le sieur Croze ayant interjeté appel de ce jugement,,
Te sieur Momet voulut,. d’après ses dernières dispositions ,
le faire payer, en donnant caution ; mais le sieur Croze
demanda des défenses à la cour, et insista pour en obtenir;
malgré l’article 5652 du Code civil. Cependant, par arrêt
du
il fut débouté de sa demande, mais à là
charge par le sieur Momet de donner caution jusqu’à,
concurrence de 3 6 0 0 a francs.
�( 2? )
C’est en cet état qu’il s’agit de répondre aux moyens que
lé!1sieur Croze propose sur l’appel.
i
m o y e n s
.
L ’objet principal de la cause est de savoir si le sieur
Croze peut être fondé à retenir ce qui reste à payer duprix de la vente du 29 prairial an 4 ,'soit à cause du trou
ble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit
sur le fondement de ses propres inscriptions, soit enfin
sous prétexte que le sieur Momet n’a p'as achevé de rem
plir les conditions auxquelles il s’étoit soumis.
Pour abréger beaucoup la discussion de tous les chefs
de co n clu sion s re sp e c tiv e s , le sieu r M o m e t passera ra p i
d em en t sur ce u x q u i p résen ten t p eu d ’i n t é r ê t , afin de ne
demander l’attention de la cour que sur les points les plus
importans de la contestation.
!
Le i er. chef des conclusions- du siéur Croze formoit
double emploi et n’a plus aujourd’hui d’intérêt ; il demandoit que le sieur Momet fît cesser les poursuites du sieur
de Labastide ; mais personne ne savoit mieux que le
sieur C ro ze que ces poursuites étoient éteintes par un
acte antérieur au procès. Le sieur Momet avoit payé la
créance du sieur Labastidè.
Le 3e. chef des mêmes conclusions est décidé par les
premiers juges, conformément aux principes. Le sieur
Croze n’ayant pas de titre, ne pouvoit faire une saisiearrêt'sans autorité de justice. A u reste le payement du
billet dui sieur Croze est l’objet d’une demande, et ses
moyens sur ce point seront examinés ci-après. ' p '
D 2
�( 28 )
L e 4e. chef a pour objet les fermages de 1795 et années
suivantes. A cet égard c’est la clause du contrat qu’il faut'
consulter. « P ou rra, le sieur Croze, disposer du domaine
« comme de sa chose propre, à compter de ce jour, à
« commencer la jouissance et fermages parles années 179$
« et 1796, le vendeur se réservant seulement les fer« mages de 1794, qu’il n’a pas même touchés. »
A in si, faculté ppur le sieur Croze, réserve pour le sieur
Momet.
Il faudroit donc que le sieur Croze offrît de prouver
que le sieur Momet a reçu au delà de sa réserve ; et il
ne l’articule pas même. C’est donc à lui à se poui’voir
pour cet objet; car le sieur Momet lui a seulement dit à
cet égard qu’il se départoit des fermages passés, et renoncoit
à les recevoir.
o
Le 6e. chef est sans objet. Le sieur Momet auroit
pu objecter au sieur Croze qu’il devoit seulement lui
fo u r n ir les titres d e p r o p r i é t é , aussitôt que le sieur de
Canillac les lui auroit remis ; néanmoins il a déjà donné
les titres les plus importans au sieur Croze, qui les a
dans son dossier ; il a offert le surplus à Brioude , en
jugement.
Les e. et 7e. chefs n’ont de même plus d’intérêt. Le
sieur Momet s’étoit obligé à justifier des quittances des
créanciers de Canillac pour 400000 francs ( assignats ) ;
mais il pourroit dire encore que cette clause étoit liée à
la faculté qu’avoit le sieur Croze de purger son contrat, et
de demander mainlevée des oppositions du fait du sieur
Momet ou de ses auteurs. Mais le sieur Momët rapporte
des quittances excédant de beaucoup la somme promise ;
5
�9
( 2 :;)
il rapporte aussi la mainlevée de toutes les inscriptions.
Le 9e. chef des conclusions du sieur Croze est encore sans
objet; c’est même une demande extraordinaire. Il veut que
le sieur Momet soit tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il peut avoir contra luù Mais
ces titres de créances sont le billet de dépôt. L e sieur
Croze n’en désavoue pas l’existence ; il en a même saisi le
montant en ses mains. Ainsi le titre de créance du sieur
Momet lui sera remis sans difficulté aussitôt qu’il l’aura
payé.
Maintenant il est aisé de réduire le surplus delà cause.
Le sieur Momet a formé deux chefs de demande, qui sont
le payement du billet de ig o francs avec intérêts, et la
mainlevée des inscriptions du sieur Croze. Le sieur Croze
répond à cette demande : Je vous payerai quand vous
aurez fait cesser la demande du sieur Canillac, ou que
vous m’aurez fourni des immeubles d’égale valeur au do
maine de la Védrine ( 2 e. et 10e. chefs de demandes.) ;
quand vous m’aurez payé 2873 francs pour le temps que
j’ai employé au sujet de votre procuration ( 8e. chef. ) ;
enfin je ne puis vous donner mainlevée de mes propres
inscriptions , parce que vous me devez une garantie.
Ainsi ce qui reste à discuter présente les questions sui
vantes : i°. Que doit le sieur Croze au sieur Momet?
20. Le sieur Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit,
comme prétendant à une garantie de la demande formée
par le sieur de Canillac? 30. Est-il dû au sieur Croze 2873 f.
pour dépenses faites comme fondé de pouvoir? 40. A-t-il
droit de maintenir les inscriptions par lui faites sur le
sieur Momet ?
•
•
65
�Que doit le sieur Croze au sieur Momet ?
Il lui doit le montant du billet de 19660 francs, causé
poiir dépôt, sous la date du i prairial an 4 ; il le doit
en deniers ou quittances. Ainsi, au cas qu’il représente,
comme il le d it, des preuves de payemens faits pour près
de moitié de la somme, il n’y aura pas de difficulté à cet
égard, sauf que les imputations se feront d’abord sur les
intérêts.
Mais , dit le sieur Croze, je ne dois pas d’intérêt, parce
qu’un dépôt n’en produit pas ; le billet d ’ailleu rs n’est q u e
de 18000 francs en principal et i o francs pour intérêts
de deux ans. Si vous voulez que ce soit un simple billet,
alors, comme c’étoit un temps d’assignats ou mandats,
votre capital sera réduit à l’échelle de dépréciation, et je
vous p a ye ra i des in térêts.
A l’échelle de dépréciation ! Le sieur Croze a-t-il osé
sérieusement le proposer, quand les lois de l’an 6 sont
formelles, et quand déjà il a acheté à si vil prix ?
Il prétend que 600000 francs, de vendémiaire an 4, ne
valoient que 8000 francs numéraire. Que yaudroient donc
19650 francs en'prairial suivant?
Il veut persuader que le sieur Momet a gagné beaucoup
sur lui, tandis que le domaine acquis en apparence en assi
gnats, a coûté au sieur Momet 68600 francs, malgré lu i,
quoiqu’il ne l’eût vendu au sieur Croze que 36000 francs.
Le sieur Croze confond ses propres idées, quand il dit
que le billet du 1 prairial est un dépôt, pour en refuser
5
65
5
�(30
Pintérêt; car précisément il en a fait line saisie-arrêt,
comme d’un prix de venter A u reste le fait est aujourd’hui
reconnu» *
Le billet cependant n’a en capital que 18000 francs;
le sieur Momet se fait un devoir d’en convenir : mais
l’intérêt de cette somme sera dû après le terme fixé entre
les parties ; et les principes à cet égard sont assez certains
pour ne pas exiger de discussion.
On sait que tout prix de vente porte intérêt de sa
nature, s’il n’y a stipulation contraire *, car le capital
représente un fonds qui produit des fruits annuels. L ’ar
ticle i
du Code civil n’a rien changé sur ce point aux
lois précédentes..
652
f. I L
L e sieur Croze est-il fondé à retenir ce qi? il doit, comme
prétendant à une garantie de la demande ' formée
\par le sieur de Ganïllac ? est-il fon d é à demander un
remplacement, en immeubles T du domaine de la
Védrinel.
Sur cette question , le sieur Momet ne disputera pascontre les principes ; ca r, si réellement il est garant du
désistement ,, il n’auroit pas d’action jusq.ù’à ce qu’il l’eût
fait cesser, ou fourni une caution..
Ce n’est pas que le sieur Croze ne lui ait contesté,
même en ce cas , le droit de réclamer son payement,
moyennant caution. Cependant l’article 1653 du Code
civil en a la disposition expresse , et les lois romaines y
étoient conformes. Dom inu quœstione rnotâ emptorpre—
�32
(
)
tium solvere non cogitur, nisijidejussores idonei prcestentar.
’
•
Mais le sieur Croze a-t-il prouvé que le sieur Momet
fût son garant ?
Souvenons-nous que le sieur de Canillac demande le
désistement d’un domaine appelé de la Védrine, qu’il pré
tend distinct et séparé de celui de la Chassaigne , d’après
des baux et d’autres actes. Le sieur de Canillac a arti
culé que le domaine seul de la Chassaigne contient en
terres, prés et bois , les mêmes surfaces qu’il a vendues
l pour deux cent dix septerées.
Si le sieur de Canillac le prouve , et s’il obtient le dé
sistement qu’il demande, comment le sieu r C ro ze pourro it-il assurer avec pudeur que le sieur Momet lui a
vendu un second domaine?
Avant de répéter cette coupable prétention, que le sieur
Croze jette donc lesyeux sur la forme de l’acte qu’il a si fort
dépecé et dénaturé , mais dont la vérité sort malgré lui.
S ’il a eu le p ro je t d ’en lacer u n cito yen sans d é fia n c e ,
en méditant de si loin les moyens qu’il emploie aujour
d’hui , il n’en est pas encore à Yeçentus fraudis ; car il
est singulièrement resserré dans les clauses qui restent,
et qu’il ne peut effacer.
Dans une vente, il ne faut pas chercher l’intention
dans des équivoques, surtout pour ce qui regarde la
chose vendue ; car c’est là la substance principale de l’acte;
et dès-lors les mots ne sont plus rien pour désigner l’objet
vendu , quand il est matériellement exprimé.
En effet, que je vende un terrain d’une surface donnée
ou avec des confins constans, sans difficulté l’erreur sur
la
�( 33 )
la dénomination ne prévaudra pas, parce que la cliose
vendue sera constante.
O r , ici est-il possible de se méprendre ? et par quelles
équivoques le sieur Croze voudroit-il persuader que le
sieur Momet lui a vendu deux domaines, quand même
il n’en auroit acheté qu’un?
Le sieur de Canillac vend à Momet des bâtimens et
jardins ayant cinq septerées cinq quarteronnées ; et le sieur
Momet vend à son tour au sieur Croze des bâtimens et
jardins de la même surface , avec les mêmes expressions
copiées mot pour mot.
. En terres, en prés, en b o is, en vignes, en terrains in
cultes , on voit encore dans les deux ventes les mêmes
détails de contenue, sans la plus légère différence.
Le sieur de Canillac termine par énoncer que le tout
se porte à deux cent dix septerées une quarteronnée ; et
le sie.ur Momet ne manque pas de recopier aussi la même
redondance,-comme s’il eût voulu mieux avertir qu’il
avoit le projet marqué de s’asservir à transcrire en toutes
lettres tout ce qui concernoit l’étendue et les surfaces de la1
chose vendue.
Enfin ? le sieur de Canillac garantit les deux cent dix
septerées une quarteronnée, à dix arpens près; le sieur
Momet encore garantit la même étendue, et ne garantit
pas un pouce au delà.
Il avoit le droit de limiter sa garantie : il en a
sagement usé. O r , tant que le sieur Croze ne sera pas
fondé à dire au sieur Momet : Je n’ai pas les deux
cents septerées que vous m’avez garanties, il n’a à cet
égard^ aucune demande à former contre lui ; car ce ne
E
�( 34
\
peut être-qu’après avoir prouvé ce déficit, et si dans le
seul domaine de Chassaigne il ne trouve pas les deux cents
septerées, mesure du lieu , qu’il pourra former une de
mande en supplément contre le sieur Momet. Mais le
sieur Croze qui a fait arpenter Chassaigne, sait bien que
les deux cent dix septerées s’y trouvent.
Quel seroit donc l’interprète astucieux q u i, trouvant
ainsi la chose vendue désignée avec tant de détails ,
s’obstineroit à la chercher plutôt dans des mots et dans
des circonlocutions ?
En effet, sortons de cette partie claire et précise du
contrat , nous ne trouvons plus que de l’obscurité ou des
pièges.
Ces ratures nombreuses , ces quatorze renvois, ces
laborieuses corrections font naître tant d’idées pénibles,
qu’il vaut mieux ne pas se jeter dans le détail des obser
vations qu’il y auroit lieu de faire à chaque ligne.
U n e seule r é fle x io n ju g e cette vente. Si le sieur Croze
n ’a pas prévu et p r é p a r é sa d éfen se du p ro cès actuel ,
alors le deuxième renvoi n’est de sa part qu’une précau
tion contre le sieur de Canillac, et il n’a pas d’action
contre le sieur Momet.
Si au contraire il veut trouver dans le deuxième renvoi
une action et une précaution contre le sieur M om et,
alors il sera clair pour tout le monde que le troisième
renvoi est une précaution en faveur du sieur Croze ; et
nul homme de bonne foi ne se défendra d’y voir le
consilium fraudis le plus évident, et le motif radical
de toutes les autres corrections.
Que cependant le sieur Croze ne suppose pas que cette
�35
(
)
option lui soit laissée ; car il ne s’agit pas d’interpréter
ce qu’il a voulu faire, mais ce qui a été fait. Les règles
d’interpi-étation des actes, sont, d’après les lois, toutes
favorables à la bonne fo i, sans jamais se prêter à pré
férer même le sens littéral
l’intention connue. Co/ztrahentium voluntatem potiùs qucim verba spectari
plaçait : principe rappelé par l’article 1 1 du Code civil.
Que le sieur Croze cesse donc de placer sa confiance
dans son troisième renvoi, où il a cru insérer un do
maine ; car des paroles vagues ne créent pas une vente;
et il verra encore dans l’article 1163 du Code que les
termes généraux doivent toujours se restreindre à l’objet
positif de la convention.
Si ces principes ne jugent pas toute la question , si
déjà l’intention de la vente n’est pas assez claire par le
détail minutieux de la chose vendue , on peut suivre
encore le sieur Momet dans la tradition qu’il effectue.
Qu’abandonne-t-il au sieur Croze ? tout droit de pro
priété qu il a et peut avoir sur ledit domaine. Comment
déclare-t-il en être propriétaire ? comme îayant acquis
du sieur Canillac ^par acte du 30 vendémiaire an 4.
Quels actes lui demande le sieur Croze pour ses titres
de propriété ? les titres de la fam ille de Canillac.
A in si, le sieur Momet ne vend évidemment que ce
qu’il a acheté par Vacte du 30 vendémiaire an 4; il en
fournit une expédition notariée au sieur Croze : conséquemment il n’emploie le mot vente au lieu de subro
gation , que pour ajouter sa garantie à celle du sieur de
Cnn illac.
1617
161
four-
à
56
Enfin , les articles
et
8 du Gode civil
E z
�o s y
nissent au sieur Momet un moyen de droit qui le fait
s’applaudir d’avoir été assez soigneux pour détailler toutes
les mesures de la chose vendue.
Car le maximum de l’excédant seroit d’un vingtième
en sus ( ce qui se rapporte aux dix arpens en plus ou en
moins Mais cent ti’ente septerées à englober de plus,
ne sont pas le vingtième de deux cent dix (i).
(i) Pendant l’impression de ce mémoire, deux actes ont été déposés au greffe
de la co u r, à la diligence du sieur de Canillac, et leur existence est très-im*
portante pour la cause.
Il paroit que le sieur Croze avoit des craintes sur sa propriété, à cause de
l’émigration du sieur de Canillac ; et sous prétexte de lui être utile dans les
diligences à faire pour les séquestres, ou môme p eu t-être de lui dem ander une
ratification de la vente du 3o vendémiaire an 4 , il conçut le projet d’arranger
les choses de manière à éviter les difficultés. En conséquence, au lieu de de
m ander directement une ratification au sieur de Canillac, le sieur Croze ne
voulut qu’une procuration : le plus adroit étoit de se la faire adresser par le
sieur M om et, pour pouvoir dire, à tout événement, que c’étoit son ouvrage ;
et il en vint à bout, soit par ses instigations, soit par le canal d’un des commis
du sieur M omet, avec lesquels il étoit e n r a p p o r t , ainsi qu’il résulte des lettres
du sieur C roze, des 8 brumaire an , 27 prairial et 11 messidor an 6 , fort
curieuses, et qui montrent avec quel art le sieur Croze enlaçoit le sieur
M om et, tantôt par des prières, tantôt par des menaces.
5
P a r-d e v a n t.......... a été présent le cit. Ignace B ea u fo rt-C a n illac, lequel donne pouvoir
à ........ de réclam er le m obilier saisi sur lu i p a r........... et le prix de celui vendu par l ’admi
nistration.........de réclam er les fermages échus depuis 1789, et qu’il n ’a pas cédés au sieur
M om et, dont en tant que de besoin il ratifie la vente f ; donner quittan ce, etc. F ait le 19 ger
minal an
6.
■f portée en celle de C hassaigne, qu’il donne pouvoir de ratifier, si besoin est.
Le sieur Croze, muni de cette procuration qui n'expliquoit rien, voulut
la faire expliquer plus clairement; en conséquence, après l’avoir remplie du
nom du sieur Cailhe., il se fit donner par lui l’acte suivant :
P a r-d e v a n t........ a été présent le cit. J e a n -R e n c C a ilh e .......... fondé de pouvoir du sieur
de C an illac, par acte du 19 germinal an 6 .........le q u el, en ladite qu alité, ratifie, confirme
4
et approuve, et même renouvelle, si besoin e s t , la vente faite par e-cit. de C a n illa c... . . .
�E st-il dû au sieur Croze 2873 fra n cs pour dépenses
fa ites en vertu de la procuration du sieur Momet ?
Il
est étrange que le sieur Croze ait osé former une
demande de cette nature, sous prétexte qu’il y a eu un
intervalle du 27 prairial au 29 , et qu’il a été fondé de
pouvoir avant d’être acquéreur.
Mais s’il est clair que le sieur Croze n’a jamais pu
des domaines de Chassaigne et dépendances, S O U S ZE N O M DE L A V É D R I N E , ou toute autre
3
4
dénomination........par contrat reçu D e lo c h e , du o vendémiaire an ......... L a présente ratifi
cation acceptée P O U R le cit. Momet P A R le cit. Jean Croze , homm e de l o i , demeurant à
B rio u d e , présent et a ccep tan t, tant pour ledit cit. M om et, et comme fondé de procuration
gén érale, que personnellement pour lui-méme, comme acquéreur des mêmes b ie n s, suivant
le contrat du 29 prairial an > etc. F a it le 16 prairial an 6.
4
Ainsi peut-on être surpris que le sieur Croze ait abusé de la confiance du
lieur Momet avec qui il traitoit, lorsqu’il abuse de la bonté d’un honnête
homme qui n’a aucune raison d’être en défiance contre lu i, au point de lui
faire exprimer des clauses qui sont hors de sa procuration?
Certainement le fondé de pouvoir n’a pas deviné si le domaine de la Védrine
étoit compris dans la vente du 3o vendémiaire an 4; il falloit que l’auteur dé
cette divination y eût plus d’intérêt que le fondé de pouvoir ; Is f e c i t , oui
prodest .
Le sieur Croze a encore très-justement calculé qu’il falloit faire trouver la
veilte det la Védrine dans la vente du 3o vendémiaire an 4 , pour îa faire
résulter de la vente du ¿9 prairial; et voilà pourquoi la ratification ou vente
renouvelée de la Chassaigne et la Védrine est acceptée par lui pour le sieur
Momet; voilà pourquoi encore, dans les lettres de ratification prises l’année
suivante sur la vente du o vendémiaire, qui comprenoit le domaine de la
Chassaigne, le sieur Croze ne put s’empêchpr de faire mettre la terre-do
maine. Ce nimia precauùio juge tout à la fois ses intentions ou ses calculs;
et personne ne se défendra de dire qu’en achetant loyalement et franchement
une propriété qu’on connoît, on la fait désigner sans équivoque, au lieu ¿’em
ployer autant de détour».
3
�( 3 8 )
7 user de cette procuration avant la vente, il en résultera
q u ’alors la procuration donnée par le propriétaire du
domaine de la Chassaigne, pour le régir , gouverner ,
administrer et vendre, sera annullée de plein droit par
la vente. Car alors le sieur Croze n’a plus eu à i égir,
administrer ni vendre pour le compte du sieur Momet,
ce qui lui appartenoit à lui-même.
O r, la procuration n’a été enregistrée à Paris que le
messidor an 4, par conséquent après la vente du 29 prai
rial. Il n’a donc pas été au pouvoir du sieur Croze de faire
usage de cette procuration avant d’être acquéreur.
Dira-t-il que lu procuration portoit aussi autorisation
de régler les loyers échus et à échoir, débattre et arrêter
les comptes? Mais par sa vente du 29 prairial, il a eu soin
de faire délaisser au sieur Momet son droit aux fermages
antérieurs : conséquemment, si le sieur Croze a fait des
poursuites, c’est pour lui ; s’il a réglé des comptes, c’est
pour lui. Il seroit donc bien commode qu’il eût une ré
pétition de 2873 francs contre un autre, pour avoir fait
ses propres affaires.
5
§. IV ,
L e sieur Croze a-t-il droit de maintenir les inscriptions
qiCil a fa ites sur le sieur Momet ?
Le sieur Croze avec des inscriptions aura des procès ;
avec une transcription il n’en aura pas. Cependant depuis
dix ans il ne veut pas transcrire.
Mais si le sieur Croze aime mieux des procès que sa
tranquillité, le sieur Momel aiine mieux sa tranquillité que
�( 39 )
des procès ; et il ne doit pas être victime de ce goût par
ticulier au sieur Croze. On ne vend pas pour être gêné
perpétuellement dans ses affaires, et pour être toute sa
vie esclave de son acquéreur. Cette gênea été, etest telle,
qu’elle a opéré successivement la ruine du sieur M om et,
qui ayant fait, depuis l’an 7, nombre de ventes, 11’en peut
toucher la totalité du prix; et d’après des reventes faites
par plusieurs de ses acquéreurs, il a été exposé aux pour
suites les plus x-uineuses pour le rapport de la seule main
levée du sieur Croze, ou des sommes qui lui avoient été
payées. Les plus honnêtes se sont contentés , ne pouvant
toucher eux-mêmes leur prix déposé, de toucher du sieur
Momet les intérêts de ces sommes ; intérêts qui depuis
long-temps montent à 7496 francs par an. Le sieur Momet
peut donc avec raison dire qu’il eût été bien heureux
pour lui de n’avoir jamais connu le sieur Croze.
A la vérité un acquéreur a une hypothèque sur les
biens de son vendeur pour la sûreté de sa garantie ; mais
il a en même temps une voie ouverte pour éviter les re
cherches des créanciers qui ont aussi hypothèque sur l’im
meuble ; c’est de faire transcrire.
Aussi les lois sur les hypothèques parlent des oppositions
ou inscriptions faites en vertu de créances, et ne disent
rien de celles qui n’ont pour but qu’une garantie; ce qui
prouve que le législateur a entendu que la voie de la trans
cription y suppléeroit; car l’acquéreur n’est pas un créan
cier. La loi a voulu une inscription d’office pour le ven
deur, s’il lui restoit dû quelque chose; mais elle n’a pas eu
la même précaution pour l’acquéreur, quoique la garantie
soit une clause tellement d’usage, que la loi la supplée
�C 4° )
si elle n’est pas exprimée, et s’il n’y a clause contraire.
Les acquéreurs qui s’obstinent à vouloir faire des ins
criptions disent ordinairement que s’ils ne craignent pas
les créances, au moins ils peuvent craindre les demandes
en éviction, qui souvent peuvent survenir au bout d’un
très-long-temps, à cause des minorités qui se succèdent.
Mais , sous ce prétexte, on seroit forcé de maintenir des
inscriptions pendant des siècles; et avec cette terreur pa
nique , celui qui vendroit une seule propriété auroit le
reste de ses biens en séquestre, sans pouvoir en disposer.
Aussi la jurisprudence a-t-elle restreint sur ce point les
prétentions des acquéreurs, en les obligeant à purger leur
vente , pour forcer leur vendeur à faire radier les inscrip
tions , sans qu’ils pussent eux - mêmes en conserver une
après la mainlevée de toutes les autres.
C’est ce qu’enseigne M. Grenier, tribun, en son Com
mentaire de l’édit de 17 7 1, page 2Ô2 de la seconde édi
tion. Il cite à cet égard un arrêt conforme, rendu au parle
ment de Paris, entre le sieur deM âconetla dame Gironde,
le 3 mai 1785. Le parlement de Rouen avoit jugé de
le 18 mars 1779, et le
de
31
1784.
C’est encore ce qu’ a jugé la seconde section de la
c o u r, le
prairial an 11 , entre les sieurs Choussy et
Gardelle. Ce dernier vouloit maintenir une opposition
faite par lui pour sa garantie, et prétendoit que le sieur
Choussy n’ayant plus d’immeubles, il avoit intérêt de conserver ses droits sur celui qu’il avoit vendu le dernier.
Mais le sieur Choussy vint à l’audience avec la mainlevée
des oppositions qui avoient frappé les lettres obtenues sur
sa
parlement
25
même
Toulouse le août
�C 41 )
sa vente, et la cour lui accorda la mainlevée de l’oppo
sition de garantie formée par le sieur Gardelle.
Ainsi le sieur Momet répète au sieur Crose-: Faites
transcrire à vos frais votre contrat, comme vous en avez
la faculté ; notifiez-moi les inscriptions, s’il en existe : tant
que je seraien demeure d’en avoir mainlevée, vous aurez
droit de maintenir vos inscriptions ; sinon vous n’êtes
pas le maître delà faire durer éternellement, en ne faisant
jamais transcrire.
C’est là ce qu’a jugé le tribunal de Brioude, et il est
clair dès-lors qu’il s’est parfaitement conformé à la juris
prudence : ce n’e$t pas seulement en point de droit qu’il
a bien jugé, car, par le fait, le sieur Momet a établi qu’il
n’existoit plus d’inscriptions sur le bien de Cliassaigne ;
Ainsi le sieur Croze n’a de motifs de précaution que dans
son désir de ne pas payer, et dans son projet bien con
duit de consommer la ruine du sieur Momet.
Si la justice a atteint le sieur Croze dans sa propre ville,
et si ses concitoyens même ont été indignés des horribles
chicanes qu’il renouvelle sans cesse depuis tant d’années ,
pour s’approprier, au plus vil p rix, une belle propriété
qu’il voudroit accroître encore , à combien plus forte
raison doit-il s’attendre à ne pas se jouer de l’intégrité de
la cour. I^e sieur Momet pourroit mériter quelqu’intérêt,
par la dure position à laquelle le sieur Croze, en gênant
toutes ses affaires, est parvenu à le réduire ; mais il se
contente de gémir en lui-même du malheur de l’avoir
connu, et il n’osera solliciter de la cour que la plus rigou
reuse justice. 11 ne plaide ici que-cfe dûmno vitando $
F
�(40
et loin de rien dissimuler ; il se présente avec des pièces
o rig in a le s qui doivent seules éclairer et convaincre ; car
ses intérêts ne seront jamais mieux défendus que lors
que la cour sera à portée de tout voir, et de prononcer
en plus grande connoissance de cause.
Signé M O M E T ,
Me, D E L A P C H I E R , avocat.
Me C R O IZ IE R , avoué.
A R IO M , de l'imprimerie de L à n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d'appel.'— M ai 1806.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Momet, Gaspard-Roch. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
fraudes
ventes
abus de confiance
notaires
Description
An account of the resource
Mémoire pour Gaspard-Roch Momet, propriétaire à Paris, intimé ; contre Jean-Joseph Croze, sous-préfet de Brioude, appelant ; en présence d'Ignace Beaufort-Monboissier de Canillac, appelant.
Extrait de minutes du contrat de vente. Extrait de jugements.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1795-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0411
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Chassaigne (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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Abus de confiance
fraudes
notaires
ventes
-
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f1e55fd1ea22da2e5327412609f00711
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MEMOIRE
COUR
d ’a p p e l
de riom.
EN R É P O N S E ,
P O U R
E t i e n n e
C A S T I L L O N , habitant à Rio m ,
intimé ;
C O N T R E
J e a n - B a p t i s t e A S S O L E N T , habitant à
P a ris, appelant.
C e u x qui se rendent cautions de leurs amis ou de leurs
proches, ne calculent pas toujours toute l’étendue de leurs
engagemens, et ne croient souvent remplir qu’une vaine
formalité. Ils veulent être généreux sans sacrifices et
sans risques, exaltant leur procédé quand ils en ont été
quittes pour leur signature ; mais invoquant toutes les
chicanes connues, si on s’adresse à eux pour payer ce
qu’ils ont promis,
A
�( 2 )
. ,
’ .
Voilà mot pour mot ce qui est arrivé au sieur
Assolent. Caution du sieur Blanchard, son beau-frère,
pour une entreprise de com merce, il s’en fût proclamé
le bienfaiteur et le patron, si l’entreprise eût réussi.
Mais Blanchard est insolvable et en fuite. L e sieur
A ssolent, sa caution, doit payer pour l u i , et c’est là
ce qu’il est difficile de lui persuader. D ’abord, le tribunal
qui l’a condamné ne lui convient pas. Il va même jus
q u ’à penser q u ’ u n acte par lequel un codébiteur paye
pour lu i, avec subrogation, est pour lui une quittance,
et le dégage de. son cautionnement.
Il s’agit donc de lui prouver tout à la fois qu’il a été
jugé par un tribunal com pétent, et qii’un transport ou
subrogation de créance maintient et confirme le titre,
bien loin de le dénaturer et d’opérer novation.
F A I T S .
Castillon et Blanchard voulurent entreprendre en
l’an 1 1 , à Riom , l’établissement d’un cylindre à indiennes.
Les premiers frais devoient être considérables, et Blanfchard n’a voit aucune fortune.
L e sieur Assolent, son beau-frère, domicilié à Paris ?
vint gén<ei’eüsenient à son secours, et lui promit son
cautionnement; en conséquence, Castillon et Blanchard
firent le Voyage de Paris : on y acheta un cylind re,
moyennant 8676 liv. 10 sous; et l’acte ci-après fut passé
le 18 prairial an 11.
D u fou r, serrurier, vend à Castillon et Blanchard un cylindre
�(
3
)
qu’il s’oblige de faire conduire et mettre en place à R i o m , dans
quatre mois. La conduite sera aux frais des acquéreurs, de même
que la maçonnerie du placement.
Dufour garantit pendant un an le cylindre vendu.
L e prix dudit cylindre ( 8^76 liv. 1 0 s . ) sera payé à Dufour à
P aris, par envoi de lettres de change ou autrement, moitié dans
un an et moitié dans deux ans, à compter du jour que le
cylindre sera en état de travailler , avec intérêt à 6 pour 100.
Castillon s’oblige à p ayer m oitié de ladite
som m e auxdits
term es ; B lanchard s’oblige à p ayer l’autre m oitié.
Assolent s’oblige , en cas que ledit Blanchard ne pût payer
la totalité ou partie de ses
4338
liv.
5
s. auxdits termes , après
toutes poursuites faites ; dans ce cas seulement, il promet et
s’oblige de payer audit Dufour les sommes qui pourroient lui
être dues par ledit Blanchard qu ’il cautionne.
Castillon s’oblige en outre , dans le cas où Dufour ne pût
être payé de Blanchard et d’Assolent, sa caution, après toutes
poursuites faites, à payer lui-méme. Alors le cylindre lui appar
tiendra en entier, sauf à rendre à Blanchard ce qu’il aura pa yé ,
après déduction des dommages-intéréts de Castillon. En ce cas
seulement il sera libre audit Castillon de faire vendre ledit
cylindre pour payer Dufour,
Il est convenu entre les parties que si Castillon et Blanchard
veulent avancer les termes de payem ent, Dufour leur fera une
remise de î a pour 100.
E n fin , Castilloi* et Blanchard s’interdisent la faculté d’exiger
la vente du cylindre jusqu’au parfait payement de Dufour.
Fait triple, etc.
Pour se mettre en étal de recevoir le cylindre, il fallut
faire une construction sur le modèle donné ; elle coûta
quatre cent et quelques livres. Mais Blancliard n’ayant
pas le premier denier, 011 emprunta la somme du sieur
�(4 )
A lb e rt, à qui il fut fait un effet signé de Castillon et
Blanchard, le 17 fructidor an 11. Castillon seul a été
obligé de l’acquitter.
Bientôt le cylindre arriva : il fallut payer 493 liv.
pour la voiture ; et Blanchard n’ayant encore rie n , il
fut aussi question d’em prunter, moyennant un autre
eilet que Castillon a de même acquitté seul.
D ufour vint à R io m , et plaça le cylindre le 30 frimaire
an 1 2. Il engagea ses débiteurs à lui avancer toute la
somme promise; mais comme Blanchard en étoit inca
pable, le sieur Castillon emprunta seul du sieur A lbert
la somme nécessaire; et comme il n’avoit garde de mettre
du secret à ce payement, il en fut passé acte notarié,
le 30 frimaire an 12 } entre les sieurs A lb ert, Dufour et
Castillon.
Par cet acte Dufour reconnoit avoir reçu par anticipation, de
Castillon se u l, et de ses deniers, 8676 liv. 10 sous pour le paye
ment par anticipation du prix du cylindre.
Dufour tient quitte ledit Castillon, et le subroge en tous ses
droits contre Blanchard, et contre le sieur A s s o le n t, sa cau
tion.
Il donne pouvoir à Castillon de se servir de son nom pour
la répétition de la moitié de ladite somme de 8676 liv. 10 s.
Castillon se reconnoit ensuite débiteur du sieur Albert, à qui
il fait des effets pour la somme prétée.
Bientôt le cylindre se dérange, deux rouleaux se cas
sent; et comme il y avoit garantie pour un an, Castillon
et Blanchard assignent D ufour au tribunal de commerce
de R iom , le 7 vendémiaire an 13.
D ufour n’eut garde de décliner la juridiction ; il vint
�(5).
à Riom ; et au lieu de soutenir un mauvais procès, il
répara l’un des rouleaux, et vit que l’autre avoit besoin
de refaire. En conséquence, par un acte du 13 brumaire
suivant, il s’obligea d’en délivrer un neuf dans cinq mois;
au moyen de quoi il fut libéré de toute garantie, et les
sieurs Castillon et Blancliard se désistèrent de leur as
signation.
L e premier terme de payement pour Blanchard devoit échoir le 30 frimaire an 13 , et non pas le 18 prairial
an 12, comme a affecté de le dire le sieur Assolent pour
son avantage. Car l’échéance n’étoit qu’un an après le
posement du cylindre. O r, déjà Castillon avoit fait des
démarches pour être payé ; et le sieur Assolent nous
l ’apprend lui-même.
Dès le 17 frimaire an 13, Castillon avoit écrit au sieur
Assolent une troisième lettre, pour lui faire part de la
position de Blanchard, son beau-frère , et de sa sœur, et
pour l’engager à prévenir la perte totale de cette famille,
par des frais et des poursuites. Si vous ne Taviez pas
caution né, lui m arque-t-il, je ne serois pas entré dans
la vente.... ,* le double est écrit en entier de votre m ain...;
en ne recevant pas de réponse, je ne sais à quoi rrfatten
dre.... Suivant la lettre de mon fr è r e , vous dites que
vous ri avez pas de réponse à me f a i r e , parce que vous
aviez écrit au sieur Blanchard.... I l a soutenu ri avoir
reçu aucune lettre de votre part.... ,* je ri entends pas
vous surprendre • je vous écris ce que je pense.,..
Ainsi Castillon éci'ivoit lettre sur lettre; et le sieur
Assolent ( qui se dit pris au d épourvu, après que Cas-
�( 6)
tillon a eu le temps de s’enrichir dans un commerce
productif ), Assolent noüs prouve lui-même qu’il savoit
tout dans l’année même du placement du cylindre, et qu’il
se défendoit déjà d’une manière évasive et mensongère,
en esquivant une réponse.
Quoi qu’il en soit, Castillon, ennuyé d’écrire, fit donner
à Blanchard une assignation qui ne se retrouve plus, et qui
seroit d’ailleurs aujourd’hui insignifiante. Ensuite, le n
germinal an 13 , il assigna le sieur Assolent à payer le pre
mier terme du cylindre; il l’assigna sous le nom de Dufour,
qui l’y avoit autorisé par l’acte du 20 frim a ire an 12.
C’est ici où on va connoître l’esprit de bonne foi qui
animoit déjà le sieur Assolent: le lendemain il courut
surprendre au sieur D ufour un désaveu de cet exploit;
et comme l’acte du 30 frimaire étoit connu, il crut se
donner quittance en faisant déclarer à D ufour qu’il n’avoit rien à réclamer contre lui Assolent.
Ce chiffon ne devoit pas arrêter les poursuites de Cas
tillon, qui, procurator ùi rem suatn, avoit le droit de
plaider sous le nom de D ufour, malgré Dufour lui-même.
Cependant, comme il ne retrouvoit plus les diligences
faites contre Blanchard, il a .voulu se mettre tout-à-fait
en règle de ce côté, pour éviter une chicane de plus.
En conséquence, le 30 fructidor an 12, il a assigné
Assolent au tribunal de commerce de Riom , pour payer
sa moitié de la dette cojnmune échue. L e 5 vendémiaire
an 14 , il a obtenu un jugement de condamnation. Il l’a
signifié à Blanchard le 26, et a fait constater son insolva
bilité le 3 brumaire, par un procès verbal de carence.
A ptes cette procédure, il a assigné le sieur Assolent,
�( 1)
le i8 brum aire, au même tribunal de commerce, pour
être tenu desdites condamnations.
L e sieur Assolent s’est d’abord laissé condamner par
défaut; puis sur son opposition il a conclu à la nullité
de l’exploit en la form e, et subsidiairement à l’incom
pétence du tribunal.
Par un second jugement du 28 mars 1806, il a été
débouté de ses conclusions, et a demandé la remise sur
le fond. Enfin il s’est laissé condamner par défaut par un
troisième jugement, et a interjeté appel.
Ses moyens sont consignés dans une consultation im
prim ée, qui décide que dans tous les sens le sieur Asso
lent a raison; c’est-à-dire, i ° . que les juges de Riom sont
incompétens ; 2°. que Castillon est non recevable à lui
demander le remboursement de la dette qu’il a acquittée
volontairement pour Blanchard. Telles sont les préten
tions auxquelles Castillon va opposer des moyens.
M O Y E N S .
i° . Compétence.
L ’objet de la demande est le payement de partie du
prix d’un cylindre vendu par un marchand ou fabricant,
de Paris, h deux marchands ou fabricans, de Riom. La
chose vendue a été livrée et posée à Riom. L e prix devoit être envoyé à Paris, soit en argent, soit erTefTets
de commerce.
L ’ordonnance de 1673 veu t, nu titre. 12 , que les juges
de commerce soient compétens en plusieurs cas.
�( 8 )
Entre marchands , pour marchandises ou billets de
change.
Entre toutes personnes, pour lettres de change ou re
mises d’argent de place en place. ( A rt. 2. )
Pour ventes faites à. des marchands et gens de métier,
pour revendre, ou travailler de leur profession. (A rt. 4).
L e créancier peut assigner à son choix, ou au lieu du
domicile du débiteur, ou au lieu auquel la promesse a
été faite et la marchandise fournie, ou au lieu auquel
le payement doit être fait. ( A rt. 17. )
Ainsi il résulte de l’ordonnance de 1673, que Castillon,
créancier de Blanchard et du sieur Assolent, par subro
gation de D u fo u r, a eu le droit d’assigner Blanchard et
Assolent au tribunal de commerce, i°. parce qu’il s’agissoit du prix d’un marché fait entre trois marchands ou
artisans , sous la caution accessoire d’un bourgeois ;
2°. parce que le prix devoit être payé en lettres de
change, ou par remise d’argent de place en place.
11 pouvoit assigner Blanchard et sa caution à leur do
micile; c’étoit Riom ou Paris : Dufour étoit même obligé,
par raison de convenance, à n’assigner ses débiteurs qu’à
Riom , lieu où la marchandise étoit fournie; car c’est le
juge de l’exception qui doit connoître de la demande. O r,
la défense naturelle des débiteurs n’eût pu être que le
mauvais état du cylindre; et il est sensible que la véri
fication d’un objet aussi matériel ne pouvoit se faire que
sur le local même.
Ici d’ailleurs le sieur Assolent n’est rie n , et ce n’est
pas lui qu’il faut considérer. Blanchard est la partie prin
cipale; et certes la juridiction compétente pour l’une des
parties
�(9)
parties doit l’être pour les autres, dans un acte solidaire
et indivisible ; à plus forte raison en ce qui concerne le
iidéjusseur qui s’est identifié avec l’obligé principal, eu
l’aidant de son cautionnement.
L e sieur Assolent convient que Blanchard a pu être
appelé au tribunal de commerce de Riom ; et par une
inconséquence difficile à bien comprendre, il veut qu’on
change à son égai’d de juridiction.
Sa première objection est de dire : Il y a incompétence
ratione loci, parce que D ufour et moi sommes de Paris,
et que la convention y a été faite. O r, j’étois obligé envers
Dufour seul, je ne devois donc être assigné qu’à Paris.
Mais n’est-ce pas là une pure équivoque? S’il s’est obligé
envers D ufour seu l, il n’a pas pour cela traité seul avec
Dufoui\ Sans doute D uiour pouvoit citer Blanchard au
tribunal de commerce de R iom ; il le devoit m êm e, et
le sieur Assolent l’avoue. Gomment donc étoit-il obligé
de faire contre la caution un procès séparé, et de plaider
en deux tribunaux éloignés pour le même payement?
V oilà le sieur Assolent retombé dans la difficulté qu’il
veut résoudre ; il ne se dissimule pas q u e , comme cau
tion, il seroit dans l’ordre qu’il suivît la même juridic
tion ; mais il répond à cela par un autre moyen.
L ’ordonnance de 1667 porte que ceux qui seront as
signés en garantie seront tenus de procéder en la juri
diction où la demande originaire sera pendante, encore
qu’ils nient d’être garans.
D onc, se líate de dire le sieur Assolent, je ne devois
être appelé à Riom que si le procès contre Blanchard y
étoit encore -pendant ; mais il est jugé.
B
t
�C 10 )
Quand il seroit vrai que l’ordonnance de 1667 ait voulu
ainsi, par un mot à double sens, décider une question
dont elle ne s’occupe p a s , le sieur Assolent ne pouvoit
se l’appliquer.
D ’abord il n’étoit pas possible que le sieur Castillon l’assiguât dans le temps que le procès contre Blanchard étoit
encore pendant,* car la convention du 18 pluviôse an 1 1 ,
porte expressément que le sieur Assolent ne pourra être
convenu qu’’après toutes poursuites faites contre Blan
chard.
En second lieu , ce que l’ordonnance établit contre
un garant, ne prouve pas que les cautions aient le droit
de s’y assimiler ; et quoiqu’il y ait de la parité dans la
garantie et le cautionnement, il s’y trouve cependant
une nuance qu’il est important de saisir.
L e garant, dans le sens de l’ordonnance, est étranger
au demandeur principal; il n’a pas contracté avec lu i:
conséquemment c’est tine exception au droit commun,
que de lu i ôter ses juges pour le faire suivi'e ceux de
la personne qui l’assigne.
Mais la caution d’une dette a contracté envers le de
mandeur principal ; elle a suivi le sort du débiteur : et
dès qu’il y a communauté d’obligation, il doit y avoir
aussi communauté pour les poursuites. Accessorium
. sequitur naturam rei principahs. L e marseillais qui
endosse un effet de commerce souscrit par un individu
de Paris, et passé à l’ordre d’un autre marseillais, peutil d ir e , sans violer tous les principes du commerce :
J ’ai traité à M arseille, avec un autre habitant de M ar
seille, donc je ne puis être assigné qu’à M arseille, ra-
�c *o
tione ïoci. Voilà cependant le système du sieur Assolent.
Sa seconde objection est de prétendre qu’il y a encore
incompétence ratione materiœ et personœ. Car, dit-il,
mon engagement est distinct de celui de Blanchard, qui
est marchand. Je suis employé à la comptabilité natio*
nale, donc je n’ai p a s entendu m’assujétir à la juridiction
du commerce, quoique Blanchard ait pu y être assigné.
La cour de cassation a fait justice d’un moyen sem
blable, par arrêt du 10 vendémiaire an 13 , au sujet
d’une vente de commestibles faite par un marchand et
un individu qui ne l’étoit pas.
« Considérant que quoique Martinet ne fût pas né« gocian t, il a suffi qu’il ait fait une association avec
« Chambon, en s’obligeant, conjointement avec lui, à
cc livrer. . . pour qu’il ait été soumis à la même ju ricc diction.
« Qu’il résulterait du système contraire, que le de« mandeur n’auroit pu agir devant les juges consuls,
« que contre Cham bon, et qu’il auroit été obligé d’agir
« contre Martinet devant les juges ordinaires. . . la cour
« casse, etc. »
D ’après cela il faut se dispenser sans doute d’examiner
encore si le sieur Assolent, caution d’un marchand, et
qui n’a pas traité par lu i-m ê m e , peut être présum é,
comme il le d it, avoir stipulé qu’il ne seroit pas distrait
de ses juges naturels.
,
Une troisième objection du sieur A ssolent, prouve
qu’il 11’avoit pas beaucoup de confiance aux premiers ;
car pour la présenter, il faut qu’il soit en contradiction
avec ce qu’il a dit lui-même.
B 2
�( Ï2 )
Il n’a pas nié que la cause ne fût de la compétence
consulaire à l’égard de Blanchard; et maintenant il va
jusqu’à dire que le tribunal de commerce étoit géné
ralement incom pétent, parce qu’un objet vendu à des
marchands , ou artisans, pour travailler de leur pro
fession , ne s’applique qu’à ce qui est destiné à convertir
en marchandises pour les revendre.
A la vérité, Jousse, sur l’art. 4 du titre 12 , qu’il a le
plus longuement commenté, prend à la lettre les compa
raisons de l’ordonnance, pour en induire que la vente de
poinçons à un marchand de vin, de métier à bas à un bon
netier, n’est pas de la compétence du commerce, pas plus
qu’une vente de bois, dit-il, ou de pierres à un meunier
pour réparer son moulin. Voilà ce que pense M . Jousse,
d’ailleurs si judicieux dans toutes ses observations.
Mais il semble que la raison ne peut adopter la restric
tion trop grande que cet auteur veut porter à une juri
diction qu’il ne faut pas laisser empiéter , mais qu’il est
de l’intérêt du commerce de voir protéger et maintenir.
Les réparations d’un moulin ne sont pas destinées immé
diatement au travail d’une profession; mais des tonneaux
et un métier le sont certainement, sauf quelques exceptions
qui doivent demeurer à l’arbitrage du juge. Sans cela le
marchand de vin qui achètera des tonneaux et les revendra,
sera le maître d’alléguer qu’il ne les a achetés que pour
son usage; le serrurier qui achètera du fer, dira qu’il n’a
voulu l’employer qu’à ses propres serrures ; et ainsi dans
ce chaos de questions de faits, un arbitraire décourageant
scroit substitué au texte de la loi.
Les tribunaux de commerce ont eu d’autres guerres à
�( 13 )
soutenir contre les présidiaux , que celles des commentai
res. Plusieurs arrêts de règlement y ont mis fin; et on
connoît notamment ceux de 1733 et 1734, entre les séné
chaussées d’Angoulèm e et de Bordeaux, et les juges con
suls de ces deux villes.
L à l’article de la loi se commente par lui - même :
« Afin de revendre, ou employer dans leur travail et
« au x ouvrages de leur art et profession. »
Ainsi travail ne veut pas dire seulement emploi aux
ouvrages, puisque l’arrêt se sert ici des deux expressions,
comme de deux choses différentes.
Remarquons encore que l’objection du sieur Assolent
n’embrasse pas le fait de la promesse de payer en lettres
de change, ou remise d’argent de place en place, ce qui
est bien sans équivoque de la juridiction du commerce.
Enfin le sieur Assolent ne peu t pas prétendre que Blan
chard a été mal assigné; non-seulement parce qu’il est
convenu du contraire, mais plutôt parce qu’il n’a point
attaqué le jugement qui concerne Blanchard, et qui règle
la juridiction.
2°. Fins de non-recevoir.
L e sieur Assolent les divise en quatre. i° . dit-il, Castillon n’a aucune action contre Assolent, parce qu’Assolent n’a contracté aucune obligation envers lui. 20. Asso
lent est déchargé du cautionnement, pai’ce que Castillon
ne peut plus le subroger. 30. Il y a novation par l’acte
du 20 frimaire an 12. 40. Blanchard est présumé avoir
payé Castillon; ce qui résulte des circonstances.
�(
*4
)
Castillon ne se propose pas de suivre le sieur Assolent
dans tout ce qu’il a dit sur cette partie de sa défense; elle
est fondée sur des erreurs de droit si palpables, qu’une
longue réfutation supposeroit que Castillon n’a pu s’em
pêcher de les craindre.
§. 1er.
Pas d'action.
Il est vrai qu’Assolent n’a pas promis à Castillon de lui
payer 4338 liv. 5 s. pour moitié d’un cylindre; et en effet
il ne lui devoit rien.
Mais il l’a promis à Dufour. Dufour a subrogé Cas
tillon; c’est-à-dire, il lui a vendu sa créance. Donc Cas
tillon est devenu créancier; donc il a une action.
[
L e sieur Assolent ajoute que Castillon n’a le droit que
de faire vendre le cylindre. Mais l’acte qu’il a imprimé
en entier lui disoit seulement que Castillon seroit libre
de faire v e n d r e le cylindre, si B la n c h a r d ne payoit pas;
et comme il seroit fort difficile de retirer 8600 francs d’un
objet dont l’expérience n’a pas favorisé le crédit, Cas
tillon n’a eu garde, en usant de cette faculté, de se faire
opposer une fin de non-recevoir, qui auroit été plus
puissante que celles où en est réduit le sieur Assolent.
§.11.
Défaut de subrogation.
L ’exception cedendarum aclionum étoit un principe
de droit avant l’article 2037 du Code civil; et il est cer
tain que le créancier ne peut plus forcer la caution de
�( i5 )
le payer, lorsqu’il ne peut plus la subroger à ses droits
et hypothèques par sa faute.
Cela s’entend, par exemple , lorsque le créancier a
laissé prescrire ou périr son action ; lorsqu’il avoit une
hypothèque, et qu’il l’a laissé pei-dre.
Mais qu’est-ce que cette hypothèse a de commun à la
cause? L e sieur Assolent ne peut l’y appliquer qu’avec
un sojohisme tellement subtil qu’il devient inconcevable.
Comment D u fou r, dit le sieur Assolent, pourra-t-il
me subroger? il ne lui est rien dû. Comment pourrezvous me subroger vous-même ? votre subrogation donneroit une action contre vous-m êm e, dès que vous êtes
codébiteur de Blanchard.
La p r e m iè r e in te r r o g a tio n n ’a pas b e so in de réponse,
car c e n ’est pas D u f o u r q u i d e m a n d e ; et il n ’est b e s o in
de répondre à la seconde que si Castillon a été o b l i g é pour
Blanchard vis-à-vis D u fo u r, il est ridicule de dire qu’il
l’est vis-à-vis le sieur Assolent. Comme Castillon-, il a payé
sa m o itié, et ne prétend à aucune action à cet égard ;
comme subrogé à D ufour, il a pu assigner et faire con
damner Blanchard qui ne paye pas : donc, à son défaut,
il peut faire condamner le sieur Assolent, et il peut aussi
le subroger en ses droits résultans du jugement du 5 ven
démiaire an 14.
§. I I I .
La novation.
Sans difficulté la novation éteint le cautionnement; il
ne s’agit plus que de savoir quand elle s’opère.
�(
1 6
3
.
,
L ’article 1271 du Code civ il, cité par le sieur Assolent
en sa faveur, porte qu’il y a novation « lorsque, par
« l’effet d’un nouvel arrangement, un nouveau créancier
« est substitué à l’ancien, envers lequel le débiteur se
« trouve déchargé. » O r, ajoute le sieur Assolent, l’acte
du 30 frimaire an 12 substitue un nouveau créancier à
D u fou r, à qui je ne dois plus rien; ainsi cet acte porte
novation.
C ’est-à-dire, suivant le sieur Assolent, que si un créan
cier cède sa créance à un tiers, la caution est libérée. V oilà
qui est un peu g én éral, et ne semble pas fa vo r ise r le
commerce, où chaque oi'dre passé d’une lettre de change
substitue un nouveau créancier, sans qu’on ait imaginé ce
pendant par là opérer novation et libérer les codébiteurs.
L ’objection du sieur Assolent se seroit affoiblie, s’il
avoit aussi imprimé les exceptions que le Code civil a
mises à l’article 1171. En voici une cependant qui sembloit
essentielle.
A rt. 1277. « La simple indication faite par le débiteur,
« d’une personne qui doit payer à sa place.
« Il en est de même de la simple indication faite par le
« créancier, d’une personne q u i doit recevoir -pour lui. »
L e sieur D ufour, en subrogeant Castillon, ou lui pas
sant l’ordre de sa créance, n’a donc pas opéré novation;
car il a cédé tous les droits qui résultoient de l’acte du
18 prairial an 11. Novatio est pnoris debiti in alium
debitum translatio u t p r i o r p e r i m a t u r . Aussi l’ar
ticle 1273 du Code civil dit que la novation ne se pré
sume pas , et qu’il faut que la volonté de l’opérer résulte
clairement de l’acte.
§. IV.
�( i7 )
§. I V .
Le défaut de poursuites.
Encore un principe inconnu, invoqué par le sieur
Assolent. Je ne devois être tenu de payer, dit-il, qu’après
les poursuites faites c o n tr e B l a n c h a r d , et dans ce cas seu
lement. D o n c vous deviez les faire au terme exprès du
payement, ù peine de perdre votre action.
Etrange conséquence !
L ’ordonnance de 1673 ne libère les cautions, même
des lettres de change, qu’après trois ans à compter de
l’échéance; et le sieur Assolent veut être libéré après
un an . . . . après huit jours.
Aucune loi n’exige que , hors les protêts, un créancier
fasse ses diligences aussitôt le terme échu ; et encore à
l’égard des protêts, il faut, pour alléguer la fin de nonrecevoir, prouver qu’il y avoit provision au temps de
l’échéance ; ce que le sieur Assolent n’articule pas.
A la vérité, il veut persuader que, lors de l’échéance ,
Blanchard n’étoit pas insolvable; mais il n’en trouve la
preuve que dans le silence des créanciei's à cette époque^
ce qui n’est autre chose qu’un cercle vicieux.
§. V .
Les présomptions.
Dans ce vaste champ des fictions et des hypothèses, le
sieur Assolent n’est plus entravé dans ses citations de lois
par des lois contraires; aussi il a paru se complaire prinG
�( 18 )
cipalement dans les preuves qu’il se fo u rn it, consistant
en six conjectui-es qu’il dit graves et concoi’dantes.
i re. Obj. Les deux associés ont dû payer le cylindre avec
ses premiers produits.
Rép. Mais le cylindre (brisé et réparé en l’an 12 ) n’a
pas produit de quoi faire exister les ouvriers.
2e. Obj. Castillon , en payant d’avance, a eu confiance
dans son associé, et le sieur A lbert a gardé le silence.
Rép. La c onfiance dans l’avenir ne prouve pas le paye
ment. I^e sieur Assolent aussi a marqué sa confiance en
Blanchard, six mois plutôt, puisqu’il a été sa caution;
ce qui ne prouve pas davantage. L e sieur Albert ri’avoit
que faired’assigner Blanchard, dès qu’il peut se faire payer
du sieur Castillon.
3e. Obj. L ’acte du 13 brumaire an 13 prouvequeÜ ufour
étoit payé. Il y dit que Blanchard est libéré envers lui : c’est
à une époque bien postérieure à l’échéance ; donc Blan
chard a payé.
Rép. Ce traitéest fait tf^fl/ziPécliéance, cela est prouvé;
D ufour n’y dit pas que Blanchard est libéré envers lui ;
donc Blanchard n’a pas payé.
4c. Obj. L ’exploit du 11 germinal , sous le nom de
D ufour, prouve une ruse entre Castillon et Blanchard,
pour faire payer la caution.
R ép. A quels signes se connoît cette ruse? L e sieur
Assolent ne ledit pas. Tous les jours le créancier subrogé
se sert du nom du cédant ; la loi 7, au tt. D e hœr. vel act.
vend, y est formelle. Ici un acte notarié endonnoitle droit;
et user d’un droit n’est pas une ruse.
5 e. Obj. L e désaveu du 12 germinal porte expressé-
�( *9 )
ment que D ufour n’a aucune réclamation à élever ; donc
il établit la libération de Blanchard.
R ép. Comment le sieur Assolent o s e -t-il répéter la
révélation d’une surprise qu’il a tentée sans succès. Certes
D ufour n’étoit plus créancier après avoir cédé sa créance.
C ’étoit du créancier actuel qu’il falloit avoir cette décla
ration; et D ufour, loin de la donner pour lu i, a au con
traire ajouté dans l’acte : Sans nuire à Castillon.
6 °. Obj. La lettre du 17 frimaire prouve qu’il existoit
une fabrique d’indienne, et qu’elle étoit en plein produit.
Castillon doit produire l’acte de société et les registres ;
la preuve de libération s’y trouveroit matériellement éta
blie.
R ép. C’est donc pour ce puissant moyen que le sieur
Assolent a imprimé une l o ng ue lettre où Castillon a l’a
vantage du moins de prouver î\ la cour combien est grande
la véracité du sieur Assolent. Il dit quron n’a songé à s’a
dresser à lui que long-temps après le terme : o r , la lettre
le devance de treize jours, et c’est la troisième lettre.
C’est là que le sieur Assolent veut voir la preuve d’une
fabrique en plein rapport; et c’est là qu’on voit au con
traire que Blanchard est entièrement perdu, s’il est pour
suivi, et si Assolent ne paye pas pour lui. A u reste, Cas
tillon produit un procès verbal de carence qui dément
toutes les allégations du sieur Assolent. C’est donc à lui
à le combattre, ainsi qu’il avisera.
T elle est la dernière ressource d’une caution qui voudroit être quitte de son engagement sans bourse délier.
Mais si l’honneur ne lui fait pas un devoir de respecter
�(2 0 )
cet engagement, sa convention l’y oblige; car « les con
ventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites;
« elles doivent être exécutées de bonne foi. » ( Code
c iv il, art. 1 1 34. ) Et certes s’il est malheureux pour le
sieur Assolent de payer la dette d’un b eau -frère, il le
seroit bien davantage pour Castillon de payer la dette
d’un étranger. Il n’a fait une entreprise avec Blanchard
que sous la foi du cautionnement promis par le sieur
Assolent, ainsi que la lettre produite l’atteste. Cette en
treprise n’a pas eu de succès ; et Castillon , qui déjà
perd sa propre m ise, ne doit pas éprouver une double
perte pour alléger le sieur A ssolen t, qui s’est imposé
un devoir sacré, et qui ne peut vouloir en rejeter le far
deau sur autrui, sans manquer à la probité et à la justice.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. B E A U D E L O U X , avoué licencié.
A R I O M , de l'imprimerie de L
a n d rio t ,
seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Novembre 1806.
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Castillon, Étienne. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
créances
cylindre à indiennes
textile
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, Pour Étienne Castillon, habitant à Riom, intimé ; Contre Jean-Baptiste Assolent, habitant à Paris, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1794-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0310
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0502
BCU_Factums_G1607
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
cylindre à indiennes
textile
-
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78e90b66d07aefbf4e6875d40d25fe59
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Text
MEMOIRE
Ire. Section.
P O U R
J
acques
B R U N E L D E P R IV E Z À C , proprié
taire, habitant actuellement du lieu de C h a n z y ,
mairie de B esset, département d’A llie r, intimé
et défendeur en opposition
C O N T R E
C h a r l e s - P i e r r e et G a b r i e l L A N D R I E V E
,
,
fermiers, habitans du lieu de Chantagret mairie du
,
Peyrouse appelans et demandeurs en opposition.
le cours du papier-m onnoie, le citoyen de
Privezac a réafferm é aux appelans deux domaines où
leur famille a trouvé le germe d’ une fortune très-con
séquente pour eux. L e bail a été fait en l’an 4 pour
commencer eu l’an 5 ; le p rix en a été exprim é en nuA
P
en d an t
�.
( 2 }
.
méraire. E n abusant des nouvelles lois sur les t r a n
sactions entre particuliers, les appelans veulent se jouer
de leurs promesses ; ils ont conçu le projet inique de
payer plus de moitié moins que ce- à. quoi ils sont
obligés. Il en résulte la question de savoir si un fer
m ier qui a requis la réduction d’un bail à ferme
germ inal an 4 , au p rix d’un bail ancien, peut obtenir
cette réd u ctio n , quoiqu’il n’ait pas payé dans le mois
de la publication de la lo i du 6 messidor an 6 , l’arriéré*
des fermages. Les premiers juges ont dit non ; leur langage
est celui de la loi..
F A IT S.
L e sieur de T illy , m aréchal des camps et armées de
France, demeurant à P aris, étoit propriétaire de la terre
de B eauvoir, située arrondissement de R iom ,. canton de
M ontaigut-les-Com brailles.
D e cette terre dépendoient deux domaines très-con
sidérables, connus sous les noms de Cliantagret et C ornassat. Les L an driève en ont été fermiers pendant plu
sieurs générations. Ils y ont acquis plus de 80,000 francs;
la commune renommée leur donne 60,000 francs d’ar
gent' comptant.
L e 5 août 178 4, le sieur de T illy étant alors en son
autre terre de B ostes, département d’A llie r , distante
de huit lieues de celle de Beauvoir, le sieur de T illy re
nouvela au profit des L andriève la ferme des domaines
de C liantagret, et Cornassat. L e cours de ce nouveau
bail devoit commencer seulement î\ la Saint-Jean 178&,
et finir à lu Saint-Jeun
1797*
Pr^x ostensible fut de
�(3 )
'
îa somme de 1,300 francs argent, quarante - cinq- livres
cle beurre et douze poulets. L e bail contient plusieurs
clauses inutiles à rappeler ici.
L e sieur de T illy habitait la capitale ; sa naissance
et son rang l’attaclioient à la cour. E loigné de ses biens,
il n’en connoissoit pas le produit réel : les L an driève
les exploitaient depuis longues années; il avoit la bonté
de s’en rapporter trop à eux : aussi s’y sont-ils enrichis.
D ’ailleurs, le sieur de T illy étoit n ob le, et par cette
raison exem pt de taille; comme noble, il ne de voit que.
des vingtièmes : cette imposition étoit assise en propor
tion des p rix de ferme. Par ce m otif, tous les gentils
hommes a voient un grand intérêt a mettre en évidence
des fermages moindres en sommes; mais ils 11’y perdoient
rien. Ils recevoient des pots de vin conséquens. T o u
jours il y avoit Ou des co n tre - lettres ou des eiTets an
nuels , qui pour l’ordinaire égal oient le p rix exprim é
au bail.
I l en fut ainsi entre le sieur de T illy et les L an
d riè v e , en 1784. L e sieur de T i l l y , dont les alfaires
n ’étoient pas en très-bon état, passant alors une reno
vation de bail qui ne devoit commencer que quatre ans
après, (à la Saint-Jean 17 8 8 ), le sieur de T illy , disonsnous, reçut beaucoup d’argent com ptant, et le p rix écrit
dans l’acte pardevant notaire, en fut d’autant moindre.
L e 13 juillet 1 7 9 0 ,1 e citoyen de Privezac acquit la
terre de Beauvoir et dépendances, par acte passé devantnotaire à Paris : la vente comprenoit beaucoup de droits
féodaux que la révolution a fait disparoîlre.
L e citoyen de Privezac arrivé sur les lie u x , trouva
A u
�( 4 ) _
tontes choses dans le plus mauvais ordre. II vit les L a n driève en possession des deux domaines de Chantagret
et Cornassat -, il fut frappé de la vilité du p rix du bail :
mais il étoit obligé à l’exécuter ; il le lit.
' L orsq u ’il fut question de passer nouveau b ail, les
L andriève se m irent sur les rangs. Plus d’un an avant
l ’expiration de celui de 178 4 , ils prévinrent le citoyen
de Privezac ; ils devinrent très-pi'essans. Celui-ci étoit
dom icilié dans le département de l’A v e y ro n , où l’on attachoit peu de p rix au papier-m onnoie. Q uoiqu’il eût
à se plaindre de ce que les Landriève l’avoient payé aussi
avec ces non-valeurs, ce ne fut pourtant pas une raison
d’exclusion contr’e u x -, il se contenta de faire avec eux les
conventions qu’on faisoit alors pour n’avoir que des écus,
ou tout au moins la valeur représentative des écus.
A in si il fut passé bail entre les parties, ( et pardevant
n o ta ire,) le 8 germ inal an 4 ; il fut fait pour neuf ans,
qui devoient commencer le 24 juin 179 7, (id e s t, le 6
messidor an 5 ) ; il y est dit : à titre de b a il à fo r m e et
PRIX
D’ARGENT.
. C e bail contient à peu près les mêmes clauses que celui
de 178 4; il y a pourtant cette d iffére n ce, que p ar
l ’article X I I , le citoyen de Privezac donna aux L andriève
le droit de prendre chaque année dans un b o is , appelé
les Saulzeixr la m oitié d’une douzième portion de bois,
avantage que ne leur accordoit pas le bail de 1784; il
y a aussi cette autre différence, que p a rle bail de fan 4 ,
les Landriève
furent chargés
des contributions,' tandis
«
^
qu’ils 11’y étoient pas obligés par celui de 1784.
.
L e prix, annuel du bail de l’ail 4 fut convenu à la
�( 5 }
..
.
Somme de 3,000 francs, payable au dom icile dn citoyen
de Privezac et en numéraire (1).
Cette somme est le juste p rix de la ferme de.ces deux
domaines ; et les fermiers peuvent encore y faire de trèsbonnes affaires.
A la suite viennent les bestiaux de ces deux domaines.
Les Landriève reconnoissent a v o ir, depuis 1782, six
bœufs arans, neuf vaches m ères, un taureau, line v êle,
trois suivans et tx-ente brebis. Les bestiaux à cornes sont
estimés à la somme de 5a 6 francs : les L an driève s’en
gagent à en rendre pour môme somme en fin de ferm e;
quant aux b rebis, ils doivent seulement les remettre
tête pour tête.
Toutes ces précautions étoient dictées par les circons
tances d ’a lo rs. Instruits par le passé, les propriétaires
en usoient ainsi p o u r éviter l’écueil d u papier-monnoie.
I,e citoyen de Privezac étoit dans la ferm e persuasion
d’en avoir exprim é assez pour s’en mettre à l ’abri ; mais
il ne fut pas long-temps dans cette sécurité, les L a n d rièv e,
dans lesquels il lui avoit paru quelque honn êteté, se
m ontrèrent tels qu’ils sont. L e 9 vendém iaire an 6 , ils
lui notifièrent, en son domicile dans l’A v e y ro n , que le
(1) A rt. X Y I . E l enfin pour le p r ix de ladite ferm e , lesdits
preneurs ont promis et se sont obligés de payer audie citoyen
bailleur} chacun a n , a u x lieuoc portés ci-dessus, l a somme de
3,000
l'HANCS EN NUMÉltAIUE OU VALEUR nEHlÉSENTATTVE , Cil deUX
termes égaux tic chacun i , 5.oo francs; le premier payem ent échoira
le 11 novembre 1797 , le second le 24 ju in 1798 et a in si con
tinuer, etc.
�.
.
(6 )
,
bail du 8 germinal an 4 , se trouvant passé entre le pre
m ier janvier 1792 et la publication de la loi du 5 ther
m idor an 4 , ils en requéx’oient la réduction au taux
de celui existant en 179 0 , (d e celui du 5 août 1784 ).
Celui de 1784 n’ayant qu’un p rix ostensible, un p rix de
1,300 francs , tandis que lors de ce bail ils a v o i e n t versé
beaucoup d’ax*gent dans les mains du sieur de T illy ;
il suivroit de cette perfidie que les L andriève jouiroient
des biens du citoyen de P rivezac, pour une somme infi
niment inférieure à la valeur réelle de son produit.
L e 16 nivôse an 6 , le citoyen de Px*ivezac fit aux
Landi’iève commandement de payer la somme de i , 5oo fr.
montant du demi-terme alors échu. P ar cet acte, il fit
élection de domicile en sa maison à Pagas dans l’A v e y r o n ,
( et encore en la m aison .et dom icile du citoyen J e a n
B r u n , habitant du lieu de L a - M o iso n -N u e, com m une
du P e jr o u s e , -pour la décade seulement. Il nous a semblé
nécessaire de rapporter ici le m ot pou r mot de cette
élection ).
L e 21 du même mois , les Landrièv.e firent au citoyen
de P rivezac, ( au domicile du citoyen Brun ), des offres,
i ° . de la somme de 65o fran cs, formant le demi-terme du
ferm age sur le taux du bail de 178 4 ; 2°. de celle de
42 li'ancs pour la dîme supprimée ; 30. de celle de 6 liv,
I.o sous pour frais du commandement -de payer ; et
rien pour le beurre et les poulets; et rien pour le bois
des Saulzeix. L e citoyen Brun n’avoit pas pouvoir de
toucher ; ces offres ne furent pas reçues.
A p rès avoir cité au bureau de p a ix , et en vertu de
procès verbal de non conciliation, le 26 du même m ois,
�(
7
).
.
les Landriève assignèrent le citoyen de P riv e z a c , au
tribunal civil du département du P u y-d e-D ôm e, i ° . en
réduction du prix du bail de l’an 4> au taux de celui
de 1784; 20. en réitération et consignation de leurs offres.
Cette assignation fut donnée au dom icile du citoyen Brun.
A cette époque, le citoyen de Privezac étoit dans sa
terre de Pagas ; les Landriève profitèrent de la circons
tance pour prendre contre lui jugem ent par défaut ; il
est du 27 messidor an 7.
P ar ce jugem ent, le p rix du bail de l’an 4 est réduit
au p rix de celui de 178 4, en y ajoutant 42 francs pour
la dîme. Les Landriève réalisèrent leurs offres de la
somme de 692 fra n cs, seulement pour le terme échu le
2,1 brumah-e an 5 , ou frais, pas un centime pour ceux
échus depuis. Leurs offres sont déclarées suffisantes; la
consignation leur en est permise aux frais du citoyen de
Privezac ( 1 ) .
(1)
Attendu que d’après l’article V I de la loi du 9 fructidor an 5,
tous les haux passés entre le 1". janvier 1792 et la publication de
la loi du 5 thermidor an 4 , sont réductibles aux prix des baux des
mêmes objets en 1790, en y ajoutant les droits supprim és, quel
ques expressions et dénominations de inonnoie que les baux em
ploient.
A ttendu que tous cloutes à cet égard sont levés par l'article II de
la loi du 6 messidor an 6.
A llen d u que le bail consenti par le défendeur, le 18 germinal
an 4 , est placé au nombre de ceux sujets à r é d u c t io n .
A llen d u le fait constant que le bail desdils biens ne s’élevoit,
en I 79°> (Iu’à une somme de i,5oo frîmes.
•
Attendu que conformément aux dispositions de ladite loi du.
�.
.
.
.
( 8 )
.
P oin t de signification de ce jugem ent, point de con
signation des offres; les Landriève demeurent nantis de
tout.
L es prem ier fructidor an 8 et 5 frim aire an 9 , oppo9 fructidor an 5 , les demandeurs ont ajouté à leurs offres la
somme de 65 o francs pour un dem i-term e du bail a ferm e , la
somme de 42 francs pour les droits supprimés, plus celle de 6 fr.
5 o centimes pour frais; que dès-lors leurs offres sont régulières.
L e tribunal, par jugement en dernier ressort, donne défaut
contre le défendeur, faute de plaider ni personne pour lui ; et pour
le profit, ordonne que le prix du bail à ferme par lui consenti aux
demandeurs le 8 germinal an 4> demeurera réduit et fixé, pour
toute sa durée, tant pour les termes échus que pour ceux à échoir,
à la somme de i , 3oo francs d’une p art, comme faisant le prix
du bail existant en 1790; à la somme de 42 francs d’autre p a rt,
pour la valeur de la partie de la dîme qui doit être ajoutée au prix
de cedit bail ; en conséquence, donne acte a u x demandeurs de
leurs offres réalisées sur le bureau de F audience, 1*. de la somme
de 65o francs pour le terme de leur ferm e échu le 2 1 brumaire
an 6 ; 2°. de celle de l\2 fra n cs pour la 'valeur de la dlme sup
prim ée, qui doit être join te au prix- de l ’ancien bail ; 5°. de celle
de G francs 5o centim es pour fra is ; déclare lesdites offres bonnes
et 'valables et suffisantes ; ordonne que ledit Brunei sera tenu de
les recevoir et d’en fournir quittance aux demandeurs; faute de
c e , leur permet de les consigner entre les mains du receveur établi
en la commune de R io m , aux frais dudit Brunei : ordonne, en
con séqu en ce, que la quittance de consignation délivrée par le
receveur, leur tiendra lieu de quittance et valable décharge,
tant du p rix du bail échu le 21 brumaire an G , que de la totalité
de la 'valeur de la dîme des fru its récoltés en l'an 5 , qui doit en
faire p artie, ainsi que des fra is fa its par le citoyen B ru n ei; et
coniUimne ce dernier a u x dépens.
_
silion
�.
t 9 )
sition du citoyen de Privezac. Il demande la nullité des
offres et la continuation des poui'suites commencées.
L e 3 floréal an 9, jugement contradictoii-e rendu entre
les parties, au tr ib u n a l civil de l’arrondissement de R iom ;
l ’opposition du citoyen de Privezac au jugement par
défaut du 27 messidor an 7 a été reçue; les L andriève
ont été déclarés non recevables en leur demande en*
réduction -, l’exécution pleine et entière du bail de l’an.
4 a été ordonnée ; le citoyen de Privezac a été auto
risé à continuer ses poursuites (1).
(1) Attendu que quoique les parties du citoyen Bayle jeune,
par leur acte du g vendémiaire an 6 , aient requis en temps utile
la réduction du bail dont il s’agit, autorisée par la loi du g fruc
tidor an 5 ., néanmoins elles n ’ont donné aucun effet à ladite ré
duction , en faisant les offres des arrérages cchus, d’après les formes
voulues par les;lois’subséquentes.
Attendu que-l’article VJIII de la loi du 6 messidor an 6 , pour
autoriser la demande en réduction des b au x, exigeoit de la part
des fermiers le payement de tous 'les termes desdits baux échus
antérieurement à ladite demande.
^ A tten d u que lés parties du citoyen Bayle n ’ont pas fait des offres
de tous les termes qui éloient éclius à cette époque. ‘
Attendu pareillement qu’à ’l’qudicnce du ci-devant tribunal du
départem ent, 'eîle6 r>\}nt fait les1 6ffres: intégrales de tous lesdits
ternies échus à> cette époque. ‘ ■
'*
Attendu que les oflies cPuh denlùlerme par elles faites, et autres
accessoires* <n’onl pas'été renouvelées à dom icile, ni'-'cilecluees ait
bureau do conciliation, en consignant du in o ii'S ^ '1^0' 1^ 1^ dû çé
qu’elles avoient offert ù l’audNmfce.
"
'* "
1
Attendu que d’après toutes ces c o n s i d é r a t i o n s , lès parties du
C i t o y e n Bayle n ’ont pas satisfait, n i £1 ce qui étpit prescrit par la
‘
B
�*■ . ^10) .
.
c L e 28 du même m o is, signification de ce jugement au
domicile des Landriève.
. L e 3 prairial suivant, appel des Landriève.
• L ë 4 du même m ois, offres réelles faites par les Landriève au citoyen d e P riv e z a c , (en son
domi
cile actuel ii Chanzy, département d’A llie r ,) de la somme
de 6,352 francs 90 centimes pour les arrérages de la
ferme sur le taux du bail de 1784 échus alors, pour
intérêts et frais; offres non acceptées.
L e 26 messidor an 9 , demande par les L an d riève, en
défenses, contre l’exécution du jugement dont est appel.
Jugem ent qui ordonne que les parties en viendront à
l'audience du 6 th erm idor, toutes choses demeurant en
état.
L e 6 therm idor an 9 , jugement contradictoire 'q u i
don n e, i°» aux L a n d rièv e, acte de leurs offres de la
somme de 6,362 francs 90 centim es; 2«. au'citoyen de
P rive za c, acte de ce qu’il offre de recevoir'à bon compte
et sans aucune approbation préjudiciable. "
1 . ‘
loi du g fructidor an
6 messidor an G.
5,
ni à ce qui ctoit ordonné par celle du
•
,
r
l
i
, L e tribunal, par jugement en premier ressorly reçoit,la partie
de Lorignon opposante au jugement par d é fa u t, du 27 thermidor
an 7, lequel demeurera sans effet ; et sans s ’arrêter à la demande
en réduction du p rix du bail d u ¡8 germinal an 4> dans laquelle
les parties du citoyen B a y lc sont déclarées noiv-recevablès, fai-.
6ant droit au ioïid , ordonne que ledit lj;iil du '8 germihal an
sera exécute suivant sa form e et .teneur, jusqu’à l ’expiration d ’iceJui;
ordonne en oulreque les poursuites commencées seront continuées,
condamne les parties du citoyen lîajle aux dopçns,.
,.
,
�C rô
..
_
Réception par le citoyen de Privezac «le' la somme de
S,682 fran cs, et le 20 fructidor su ivan t, réception par
le citoyen Gourbeyre de la somme de 672 francs ; total
6,354 francs, avec la clause, le surplus et moyens res
pectifs demeurant- réservés a u x parties.
L e premier floréal an 10 , défaut contre les L an driève,
défaut non expédié.
L e i 5 du môme m ois, opposition par les Landriève,
1
M O Y E N S .
j
Dans cette cause, nous avons des lois très-positives,
rien n’est laissé à l’arbitraire. Les premiers juges ont
appliqué bien exactement ces lois ; leur jugement est le
résultat d’une m é d ita tio n sage. D a n s le n o m b r e d e ces
lois ils n e se so n t p as m é p r is ; ils o n t a p p r o p r ié à l ’espèce
celles qui lui appartiennent.
'
•
Il
en est une du 9 messidor an 4 , qui soumettait à la
réduction tous les baux à ferme passés après la publication
de celle du 4 nivôse an 3 , portant levée du maxim um . (1).
U ne autre loi du 5 therm idor an 4 , autorisa tous les
citoyens à «contracter comme bon leur semblerait. E lle
voulut que les obligations qu’ils auraient souscrites fussent
exécutées dans les termes et valeurs stipulés (2).
(1) A rt. X . Les prix des baux non stipulés en denrées, et qui
Ont été passés postérieurement i la publication de la loi du 4 ni
vôse an 3 , qui a levé le m axim um , seront réduits au p r ix du
bail précédent, etc.
(2) A rt, I", A dater de la publication de la présente lo i, chaqu»
B 2
�.
t 12 )
,
,
- Celle du 18 fructidor an 4 , .fit une exception à la r é •duclion exprim ée en l’art. X de celle du 9 messidor
précédent. ;Dans cette exception elle com prit les baux
.stipulés en denrées ou en N u m é r a i r e , E u sorte que
p a r-là , le propriétaire qui ayoit contracté moyennant
des'éctts, fut assuré de n’èti’C'payé qu’en écuset' sans aucune
réduction. Il est à remarquer ici que cette loi se sert seu
lement du .substantif num éraire , parce qu’en l’an 4 ,
quand 011 disoit n u m éra ire, l’on entendoit parler d’es
pèces sonnantes et non de;'papier-monnoie. Les mots non
stipulés en deiirées ou en num éraire ? qui y sont aussi r
signifient bien clairement que la réduction ne s’étend pas
jusqu’aux baux qui contiennent la .stipulation en numé
raire ( 1 ).
’
' '
1-'-V ient ensuite la -loi.si connue 'du 9 therm idor an
.5 :
par l’article V I , elle assujettit ù la réduction les baux
passés entre la publication de la loi du 4 nivôse an 3
et celle de la loi du 5 therm idor an 4 ; i ° . au taux du
ci'loycn sera libre de contracter comme bon lui semblera. L e s
obligations qu’ il aura, souscrites seront exécu tées dqns les ternies
et valeurs stipules.
,
(1) A rt. III. L a réduction prononcée par l’article X de la loi
du 9 messidor dernier, des prix des baux qui ont été passés pos
térieurement à la levée du m axim um , aura son effet pour l’an 5
comme pour l’an 4 >et en général pour toute la durée desdits baux.
L a même réduction pourra être demandée, sur les b a u x non
STirur.ÉS en df.nhkes ou kn •numkrauik, postérieurs au - i " . ja n
vier "179 3 , dont les anciens p r ix sont augmentés' 'de p lm J ’ un
cinquième.
'
'
�•X 13 )
b ail de 1790 , s’il en existe'u n ; 20. au, taux fixé par des
.experts, s’il n’y a point de bail èxistant en 1790. Dans
les deux cas elle veut ( article V U ) que pour le p rix o.u
l ’évaluation du pi‘ix de 1790 , on ajoute lés dunes et asulres
.charges supprimées p a rla loi du 10 avril 1791
a^ res.ï
.elle;veut que l’on comprenne aussi les sommes q:ui^pro
m ises, soit a titre d ép ôt de v in , so it par]contre-lettre5
s o itd e toute autre m a n ière, seront reconnues avoir f a i t
dajis le temps partie du p rix.
/ ' '>•
- L ’article X oblige le fei'm ief y ;depa,ander p ar éqrit la
réduction : il doit le faire dans le m ois.de la publication
de la lo i; après ce d éla i, il y est nonrecevablej (r). ‘ ,
IVarticle I I de-la loi du
messidor ari 6., (expliqua
l ’article V I de celle du 9 fructidor a n '5 , ¡¡ainsi;qu^ii suit'*
« Sont compris clqns l ’article V I'd e lu ¡loi ilu.'9:J[iîuçfeidor
» an 5 , et .suscepliblcs'de la ryductiünjlipe.ntiounéc, audit
p article, les baux stipulés, en tout ou en ¡partie,, à p rix
» d’argent, passés entre le prem ier'jajjvier;::i792, et La
6
» publication de la loi du
5 tliennidor an 4 , r elative aux
» transactions entre citoyens, quelques expressions et dé
» nominations derm om ioie , cjui1y aient été'çmployées ».
••
'r
• 1 • 11.*1 *1 *
‘ •* T7 'î •' [’ ' ’ 1» '4ï
. Mais
V III')
les ferm iers,
.) A la 'môme 1loi
’• iv‘article
*
' 'i astreint
'Y 'ft
"r
1°. à .¿requérir dans le mois la .rédiicfion
à payer
dans le jrnômc délai .au. propriétaire,-, soit-Je ipontant des
t ■ îl
(1) A rt. X . Ceux des
f e r m
t
; . . V •i : i f .f\ *i
.^’après jes.articles
i e r s , q u i
précédons, droit à la réduction du prix de l.e y r .Î w l 1 - a u r q i ç n t
pas encore demandée 011 obtenue, s e i v f . i t : >iA •
.p V i
ΔX’he d éch u s, de la demquder par écrit, dans le¿n o is fjiu¡s^iiyra
la publication de la présente.
.
•V »
1
�.
C 14)
ternies échus suivant le bail de 1 7 9 0 , soit le montant
de quatre fois la contribution foncière assise en l’an 5 ,
sur les objets afferm és, et cela dans le cas où il n’y auroit
point de bail existant en 1790. Ces deux conditions sont
de rigueur : sans demande et sans payement dans le m ois,
le ferm ier encourt la peine de la fin de non recevo ir,
parce que la loi ne veut pas que le ferm ier abuse des
circonstances, et tienne le propriétaire en état de souf
france ( 1 ).
.
^
P a r l’article X V , la même loi veut que toutes contes
tations à ce.sujet soient réglées suivant ses dispositions (2).
L ’article X V I I porte que les dispositions de cette loi
ne sont pas faites pour les baux passés par anticipation,
et dont le preneur ne seroit pas encore entré en jouis
sance. L e »bail du 8 germinal an 4 , a commencé en
m essidor'an 5. Les adversaires sont d ès-lors entrés en
jouissance avant la loi du 6 messidor an 6 ; elle est
donc applicable à la cause.
_________ 7 . '_______
-
'
'J. • i y
'
'
(1) A rt. Vlir. L es fermiers qui provoqueroient la réduction
du prix du b a il, n e l e p o u r r o n t , a p e i n e d ’ ê t r e d é c l a r é s n o n recevab les,
que
p r é s e n te ,
q u ’e n
e t
dans
le
m ois
p a ya n t
g u i suivra la p u blica tio n de la
dans le
même
m ois,
ou
au proprié
ta ir e , ou au receveur des dom aines, suivant les cas,
m o n ta n t des term es
échus,
d 'ap rès l e
d ail
exista n t
soit
en
le
1790,
so it, h défaut do b a il ou dans le cas de l’article V c i-d e s s u s ,
q u a t r e f o i s l A c o n t r i b u t i o n F O N C I E R E de Vau 5 , des objets
dont il s’agit, s a u f à com p ter, m êm e à répéter s’il y a lieu, lors
de la liquidation définitive.
(a) A rt. X V . Tontes contestations non définitivement terminées,
seront jugées eu conform ité de la présente.
�( i 5 )
- E ’analyse de ces lois met Lien en .évidence-le point
de droit. O n peut donc juger bien aisément dans quels
cas il y a lieu à réduction, quelle marche et quelles con
ditions sont à suivre pour l ’opérer légitimement.
*
t
•
A in si donc nous aurions à traiter deux questions ;
l’une de s a v o ir si le bail du 8 germ inal an 4 est'sujet
à réd u ctio n ; et l’autre d e 'sa vo ir si les Là'ndrièvë ÿ.
sont rècevables : nous nous attacherons principalement
à cette, dernière. Nous ne ferons ressortir; que comme
m oyens de considération les circonstances ¡relatives à la
p rem ière, parce que s’il y a Æn dei nonrrecevoir cei>.
ta in e , une discussion plus étendue seroit superflue^ u
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r L e 9 'vendémiaire^an ' 6 r, les ‘’Lan drièvèiion t signifié
<|u’ils' requéraient-lit ¡réduction du prixi du :'<bail r du 8
germ inal an 4 , au taux de celui de 178 4, en ;vertu tde
la loi f du 9 fructidor an 5» r i l! 1-> v'ji !i iJ- 'i ' î ' .
’ • Cette réquisition paroîtroit ê tre veriue! dansde/m ois,
3u com p tei\ dé la 'p u b lica tio n de cettei lo i'; parce ’gué
ceLte publication -n’a 'é té faite au département d u 1Puy~
de-Dôme'^ que Ae1 231 fructidor an* 5 .rio;b u b ' -i ;;i
•
’" M ais-il ne' suffisait; pas d’une simple; ré q u is itio n de la
part des fermiers. Elle constitiioitseulemëntrmieideriiande;et une demande n’est pas toujours un droit, invariable
ment acquis. Une demande n’est que le commencement
d’une contestation.
;-
1)1 -
‘
�.
( 16 )
.
P o u r que tout soit réglé , il -faut "entre les fermiers et
lé p ro p riétaire, ou un consentement récip roq u e, qui
form e un contrat entre eux , sur lequel les deux puissent
rep o ser, ou un jugement qui en tienne lieu. P ou r que
tout soit'certain de la part des fermiers , il faut qu’ils
signent leur réquisition et en l’original et en la copie
il faut qu’ils le fassent ou par* e u x ’ ou par un fondé- de,
pouvoir:spécial j etm ëm d que l’on donne au propriétaire
copie de' la procuration, parce que les fermiers y con
tractent ùn engagcrttenty celui de payer sur l’ancien bail.
Sans signature ÿlar réquisition peut être désavouée : il n’y.
a rion>deçanstâratji
t
' ;
Ici point de signature de la part des L an d riève, ni d’un
fondé de pouvoir spécial. L?ex!plôit du 9 vendémiaire an 6 ,
a été posé par un nommé A u b in , huissier reçu en vin
tribunal de distijôfci'idans lV k v e ÿ r o n 'h u is s ie r qui ne
présente aucune assurance en cas de désaveu. En sorte
qitê. Îes-Laaadidè^èrfiiiroient !pu(Yen;moqùer ■impunémen t ,
di l’on ¡¿.véitLVüiilitcles prendre! au m’ot sur lleffet de-leur
réquisitions -à 8 "i l > iuioj 'ï >
ni; , ¡\ r» i¿.ri•rrrt
A u reste il n’y avoit rien.de term idé’en(i-e,les)par,tîesy
lorsqu’à.' ipîirLÏï laulor-dui6 imossidoii an,j6.'iydrei )quoi le
etqit leuivposi‘ti'én‘ji’ti8peotive oit môj0a£nt<de<lai publication;
île cfcUeloL:,nous venons de le dire', leSrLandrièvc avoiei^t
requis la réduction.île 9 vendém iaire aü 6,: lp' citojyeifc
dé -PriiVGiiâc! n>’y[a^oit«-pas adhéré ;’hu contraire', il leur
av6it faitblerr 6'nivôse su iv a n t, commandement de payer
k fe^mme' de' rôboi francs, pour le d e m i- te r m e échu de
lftiJarme’-Siir le pied de 3000 Irancs par an. L e 26 du
moine mois , lçs Landriève l’avoient fait assigner au
tribunal
�( i7 >
tribunal civil du département du Puy-de-D ôm e , pour
vo ir prononcer sur la réduction requise par l ’exploit
du 9 vendémiaire. A u moment de l’apparition de la lo i
du 6 messidor an 6 , il n’y avoit encore rien de réglé
ni par les parties , ni par les tribunaux ; les parties en
étoient seulement en état d’une contestation bien form elle.
Elles se trouvoient donc précisém ent dans le cas de
l’article X V . -L’affaire devoit donc être conduite et jugée
en conform ité de cette loi. Il falloit donc aussi que les
L an driève payassent dans le mois de la publication
(suivant l’art. V I I I) tout l’arriéré des ferm ages, sur le
taux du bail de 1784 , existant encore en 1790 ; sans cela
fui de non recevoir écrite très-expressément dans la loi.
O r , c ’est ce que 11’ont pas fait les L an driève : en effet,
au moment de l ’é m is sio n de ceLle l o i , étoient échus les
termes de novem bre 1797 ( ou brumaii-e an 6) et de juin
1798 ( ou messidor an 6 )-, ces deux termes form oien t,
suivant le bail de 1784 , un total de 1300 francs de p rix
principal. Les Landriève devoient dès-lors payer et cette
somme et les accessoires expliqués en ce bail , et les
objets supprimés par les lois nouvelles.
. Il est vrai que les L an driève ont offert au citoyen de
Privezac ( au dom icile du citoyen Brun ) , le 21 n iv ô s e
an 6 , la somme de 65 o francs pour le demi-terme écliu
le 11 brum aire p récéd en t, plus celle de 42 francs pour
la dîme supprimée , et enfin celle de 6 francs 10 sous
pour frais.
M ais , i°. ces offres n’ont pas été faites ni a la personne,
ni au domicile du citoyen de Privezac. IiC p rix du bail
etoit payable au dom icile de ce dernier ; cela est dit dans
c
�.
.
( ï8 } .
.
,
le bail du 4 germinal an 8. Celui de 1784 portoit même
engagement de la part des Landriève. D ’ailleurs c e u x -c i
l’ont jugé eu x -m ô m es ain si, puisqu’ils sont allés au
dom icile du citoyen de Privezac pour faire leurs offres
tardives du 4 p r a i r i a l an 9. L e domicile élu par le citoyen
de P rivezac chez le citoyen Brun , n’autorisoit pas les
Landriève à y faire leurs offres du 21 nivôse an 6. Des
offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu , qu’autant que le créancier a notifié au
débiteur l’indication de payer là , ou que ce créancier
a donné à celui chez lequel est l’élection de domicile ,
le mandat form el de toucher ( 1 ). Ici rien de tout cela.
2°. Ces offres seraient encore insuffisantes, parce que le
( 1 ) D en izart , verbo o f f r e s , r i . 20, dit : « Les offres doivent
» être faites en temps et lie u , c’est-à-dire ( pour le lieu ) à la
v personne du créancier, ou à son dom icile, ou à celui qui a été
» désigné pour la convention. On ne peut pas valablement les
» faire au domicile élu chez un procureur, s’il n’y a sur cela une
» convention expresse entre le créancier et le débiteur. L a cour a
» jugé de pareilles offres insuffisantes, par arrêt rendu le 17 déj) cembre 1714» entre le sieur le Breton et la dame Jossure, quoi
» qu’elles eussent été réitérées ù l’audience sur le bureau ( en cause
}> principale ). »
Pigeau, en sa procédure civile, liv. II, part. I V , tit. I, chap. I,
note B , dit : « Elles ne peuvent l’être au domicile élu par les actes
» de procédure, tel que celui de procureur ou autre, parce que
» cette élection n ’est faite que pour que les actes que l ’on veut
n signifier à une partie parviennent sur le champ à scm procureur,
» et qu’il fasse en conséquence ce qu’il estime convenable; mais
» elle ne donne pas au procureur pouvoir de recevoir pour sa
» partie. »
�C T9 )
_
bail de 1784 , comme celui du 8 germinal an 4 , obligeoit
lesL an driève à payer annuellement quarante-cinq livres
de beurre et douze poulets rendus et conduits au château
de Bostes. Les Landriève n’ont rien offert pour cela.
30. Dans le bail du 8 germinal an 4 , le citoyen de
Privezac a accordé aux L andriève une portion à prendre
annuellement dans le bois des Saulzeix ; celui de 1784
ne leur donnoit pas cet avantage. Dans leurs offres, pas
un centime pour raison de cet objet : autre moyen d’in
suffisance.
4 0. Lorsque les Landriève prirent au tribunal civil
du département du P u y-de-D ôm e, le 2 7 messidor an 7 ,
un jugement par défaut contre le citoyen de P rivezac,
il étoit échu une autre année de ferme en son entier ;
ils devoient donc a lo rs deux années q u i, suivant le bail
de 1 7 8 4 , auroient monte à 2,60 0 fra n cs de prix prin
cipal, à 82 francs pour dîmes supprimées, à quatre-vingtdix livres de beurre , et à vingt-quatre poulets. Néanmoins
ils ne réalisent sur le bureau de l’audience , que les
sommes offertes le 21 nivôse an 6 , c’est-à-dire, 65 o fr.
d’une part, pour prix principal d’un demi-term e, 42 fr.
pour dîme supprim ée, et 6 francs 10 sous pour frais. 11
y auroit donc insuffisance énorme.
5 °. D e simples offres ne suffisent pas, et suivant les anciens
principes, et suivant les nouveaux principes sur les tran
sactions entre particuliers. Dans l’ancien droit, l’on tenoit
pour maxime que des offres labiales n e libéroicnt pas.
Les tribunaux les jugeoient toujours c o m m e non-avenues,
quand elles iréloiept pas suivies ou de réception par le
créancier, ou de c o n s ig n a tio n par le débiteur. Dans le
G %
�.
,
/ 20 ]
~
.
nouveau d ro it, même règle (i) : il faut que le débiteur
ne plaide pas les mains garnies; il faut qu’il soit dessaisi
des deniers offerts ; il faut que sa libération soit opérée
par une consignation.
- I c i ,■point de consignation par les Landriève ; ils sont
toujours demeurés rétentionnaires des deniers offerts ;
ils ont plaidé les mains garnies.
Les choses en étoient en cet état de dénûment absolu
de la part des L an d riève, lorsque la cause a été portée,
plaidée et jugée au tribunal de prem ière instance à R io m ,
le 3 floréal an g : même en cet instant point d’offres
réalisées sur le bureau de l’audience, pas même de&
sommes expliquées au procès verbal du 21 nivôse an 6.
L ’article V III de la loi du 6 messidor an 6 , est de la
plus grande rigueu r; il veut très - form ellement deux
choses infiniment essentielles : i ° . demande en réduction
dans le m ois; 20. payement de tout l’arriéré, aussi dans
le mois. L ’une de ces conditions m anquant, fin de nonrecevoir très-expresse. N e le p o u rro n t, A p e i n e d ’ê t r e
D É C L A R É S N O N - R E C E V A B L E S , que dans le m ois qui
suivra la publication de la présente, E.T q u ’ e n p a y a n t
d a n s l e m ê m e m o i s . Si l’on ne requiert pas dans le
m ois, et si l’on 11e paye pas aussi dans le m o is, c’en est*
fa it; le fermier est obligé d’exécuter le bail sans réduc
tion aucune. T elle est la peine prononcée par la lo i; efe
les tribunaux ri ont qu’a en faire l’application.
'
(1) A rt. X V de la loi du 9 fructidor an
5.
I l en est de même
de ceu x qui ont f a it des offres et consignations valables et suf
fisa n tes.
'
�(
21
)
^
Que les L andriève ne disent pas que tout a été réparé
par leurs offres du 4 prairial an 9 ; qu’ils ne disent pas
que le citoyen de Privezac les ayant reçues, il en résülte
qu’il est payé , et qu’il ne souffre plus aucun tort.
i° . Ici tout est de rigueur. L e délai donné par la loi
du 6 messidor an 6 n’est pas comminatoire', il est fatal.
L e mois écoulé sans payement de rla part du ferm ier,
la fin de non-recevoir est acquise au p rop riétaire, èt il
n’est pas au pou voir des tribunaux de le priver d’un
avantage assuré par la loi.
•
-2°. A u temps des offres du 4 prairial an 9 , le mois
donné par la loi étoit plus que passé;; la firi d e-n on recevoir étoit encourue ; la justice avoit prononcé la
peine ; les choses 11’étoient plus entières.
30. Suivant la loi du 6 m essidor, c’étoit ici une a ffa ire
d’argent ; les L andriève dévoient commencer par l ’offrir
et le consigner dans le temps utile ; ne l ’ayant pas fait à
propos, ils sont dans la même position que s’ils avoient
exercé une faculté de rém éré contre le citoyen Privezac.
S ’ils en avoient été déchus par une sentence sujette à appel,
pour n’avoir pas offert et consigné, sur l ’appel ils seraient
non-recevablcs à purger la demeure : la sentence seroit
confirmée purement et simplement.
Ici il s’agit uniquement de décider si les premiers
juges ont bien fait en prononçant la fin de non-recevoir
écrite dans la l o i , faute dir payement dans le mois. Il
est constant qu’alors il n’y avoit point de payem ent, point
d’offres suffisantes, point de consignation tenant lieu de
payement. P ar conséquent le tribunal de R iom a trèsbien jugé. C ’est l’état des choses au temps du jugement
�»
t C 23 )
du 3 floréal an 5 , qui est déterminant. A cette époque,
y a v o i t - i l oiYres et consignation ou payement ? Non. Ce
qui a été fait après le jugement et même après l’appel ,
lie peut pas faire que ce qui n’existoit pas encore lors du
jugem ent, eût existé avant ce jugement. Comme ici il ne
peut êtr« question ’que du an henè an m a lè , il faut
nécessairement remonter à l’état des choses au temps de
ce jugement.
•
’4°.' L e citoyen de P riv e za c, en recevant les sommes
offertes en cause d’q p p el, ne les a touchées qu’à bon
.compte ; il s’est réservé tous ses moyens de fait et de
droit.' Il lui étoit- dû pltis de 12,000 francs , il n’a reçu
q u’èntour j6,000 francs ; il ne risquoit donc rien en
prenant cet acompte.
■
0 ‘ 5 °. Quand au tort résultant de la conduite des adver
saires envers le citoyen de P rivezac, ce tort présenteroit
une lésion de plus de moitié , si leur projet réussissoit.
:Nous, allons le dém ontrer dans le paragraphe suivant ;
mais en attendant il doit paroître démontré que les
premiers .juges ont parfaitement bien jugé en déclarant
les adversaires non reçevables en leurs demandes en ré-r
dnçtion, ‘
: ; ■
>
•
§
II.
C eseroitpour le citoyen de Privezac un grand m alheur,
6i les L andrieve pouvoient se soustraire impunément
aux engagemens qu’ils ont contractés envers lui parole bail
du 8 germinal an 4* S’ils avoient obtenu la réduction de
ce bail au p rix de celui de 178 4, ils y auroient l’avantage
�( 23 )
^
Criminel de jouir de ses biens moyennant un prix moindre
que celui qu’ils ont p^yé au sieur de T illy .
En effet, dans l’exactitude des faits, le vrai p rix de
ferme des domaines de Cliantagret et de Cornassatj est
celui s t i p u l é au bail de germ inal an 4 .' L e bail de 1 7 8 4
et antres antérieurs avoient été préparés et faits par des
agens d’affaire, qui auraient dû m arquer plus de fidélité
envers le sieur de T illy . C e lu i-c i liabitoit la capitale;
entraîné par le tourbillon des affaires de l’état, éloigné
de ses propriétés, il étoit obligé de s’en rapporter à autrui,
et ses intérêts n’en étoient que plus m al soignés. Par cette
raison ses biens n’étoient pas affermés comme ils devoient
l ’être. D ’un autre côté, l’on faisoit donner en pot de v in ,
et sans en fa ir e m e n tio n dans les b a u x , des sommes con^
sidérables. Par ce biais , le sieur de T illy obtenant de l’ar
gent comptant ( dont il avoit très-souvent b esoin ), il avoit
cet autre profit que ses domaines ne paraissant affermés
que moyennant 1,300 francs, il ne payoit des vingtièm es
que sur ce revenu ostensible. L e bail de 1 7 8 4 a été passé
pour commencer seulement en 1 7 8 8 . Cette anticipation
nous présente sûrement la pensée bien exacte , qu’alors
il y eut de l’argent donné en secret, parce qu’il n’est pas
ordinaire qu’un propriétaire renouvelle ses baux quatre
ans avant l’expiration de ceux déjà ex is tan s.
Si aujourd’hui le citoyen de P rivezac étoit r é d u it au prix
du bail de 178 4 , au prix ostensible de i,3 ° ° francs, il
s'ensuivrait qu’il n’auroit pas le p rix réel. Il n’aurait
aucune ressource pour se faire faire raison du p rix supplé
mentaire et caché, parce que tout se passa en secret entre
le sieur de T illy et les Landriève : en sorte qu’il y aurait
�.
.
.
.
,
(
2
4
)
impossibilité absolue de rem plir le vœu des lois nouvelles
sur les fermages. Ce vœu est que le pi’opriétaire ait au
moins le p rix an cien , et ici le citoyen de Privezac ne
l ’auroit pas.
Q u’à cette considération entraînante on ajoute les ex
pressions et les inductions que présente le bail du 8
germ inal an 4 , il ne restera pas le moindre doute que
les parties ont traité en écus , et que sans la vue cer
tain e, autant que possible alors, d’être payé de cette
manière , le citoyen de Privezac n’auroit pas affermé.
E n e ffe t, i l est dit dans ce b a il, i° . que le citoyen de
P r iv e z a c a ffe rm e à p r ix d'argent. E n F ran ce, quand en
l’an 4 on disoit argent, p e r s o n n e ne se trom poit sur
l ’acception du mot. T o u t le monde entendoit des espèces
sonnantes, et non du papier - monnoie ; les plaies pro
fondes qu’avoit faites ce signe monétaire étoient encore
toutes vives , toutes saignantes ; et alors on évitoit avec
soin' ces m aux pour l’avenir.
20. Ce bail exprim e encoi*e que la somme de 3,000 fr.
sera payable en num éraire ou valeur représentative.
N um éraire signifioit alors des espèces métalliques. L a
loi du 18 fructidor an 4 , n’emploie que le mot num é
raire , pour rendre que les baux stipulés en écus, ne
seroient pas réductibles. Par valeur représentative, l’on
entendoit aussi des denrées, etc. qui représentoient aussi
des écus.
L ’usage est la m eilleure explication du sens des termes
dont on se sert dans certaines contrées; cet usage donne
toujours la mesure de l’ intention des parties. O l-, une
preuve que dans le canton de M ontaigut, par le mot
num éraire
�.
(
_
’ um éraire on vouloit dire é c u s , et non assignats ou
n
m andats , se trouve dans la relation du contrôle du
bail de germinal an 4 , faite au bureau de M o n taig u t,
le 12 germinal. Dans cette relation, 011 voit que le con
trôleur a perçu i o 5 francs; savoir, 100 francs en mandats,
et 5 francs en num éraire ( 1 ). Delà il suit, que dans ce
canton l’on ne considéroit pas les mandats comme du nu
méraire ; il s’ensuit que l ’on ne considéroit comme numé
raire que le num éraire proprem ent dit, et non ces valeurs
fictives qui ont désolé tant de Français.
30. L e bail du 8 germinal an 4 , contient rém unéra
tion et l’appréciation des bestiaux garnissant les domaines
du citoyen de Privezac. Ces bestiaux consistoient en six
bœufs arans, n e u f v a c h e s m ères, un taureau, une je u n e
vache et trois suivans; total, vin gt bêtes à co rn e s. E h Lien,
ces vin gt bêtes n’ont été estimées qu’à la somme de
5z 6 francs. Cette circonstance dépose bien clairement que
toutes les stipulations des parties ont été faites en espèces
sonnantes ; car en papier-m onnoie, vingt bêtes à cornes
auraient été portées à plusieurs m ille livres.
Considérons, enfin, que le citoyen de P riv e za c , en
affermant pour n euf années, moyennant 3,000 francs
par a n , a dû com pter sur 27,000 francs à toucher pour
toute la durée du bail , tandis qu’ il ne recevrait que
11,700 francs dans le sens du bail de 1784. L a différence
serait én o rm e; elle serait de 15,300 francs: elle vaut
(i) Enrcgislró à M onlaigut le 12 germinai an /{. Kecu 10Zfraitcs
en mandatile 100 Jvancs et 5 fra n cs de numéuaiue. Signe Pietre.
'
D
�( 25 )
b ien la peine qu’il résiste aux prétentions déloyales des
Landriève.
Que les Landriève aient fait une fortune de 8 0 ,0 0 0 francs,
on ne la leur envie pas : on la croit légitim em ent acquise ;
mais ils d evroien t être bien contens d’un aussi grand p rofit,
et ne pas viser à avoir injustement le bien du citoyen
de Privezac. Ils se sont engagés à le payer en numéraire.
C ’est chose qui appartient incontestablement à ce dernier ;
et le ti'ibunal d’appel partagera la sorte de satisfaction
q u’a dû éprouver celui de l’arrondissement de R io m ,
en trouvant dans les circonstances de l'affaire et dans la
lo i du 6 messidor an 6 , une fin de non-recevoir invincible ,
un moyen infaillible pour forcer les Landriève à tenir
leurs promesses , à rem plir un engagement sacré sans
lequel ils n’auroient plus eu la ferme des deux domaines
en question.
G OURBEYRE.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d ’appel,— A n 10,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel de Privezac, Jacques. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant actuellement du lieu de Chanzy, mairie de Besset, département d'Allier, intimé et défendeur en opposition ; contre Charles-Pierre et Gabriel Landriève, fermiers, habitans du lieu de Chantagret, mairie du Peyrouse, appelans et demandeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1784-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0234
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0233
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53733/BCU_Factums_M0234.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53732/BCU_Factums_M0233.pdf
71020f039f7e2494bb57ca332f6e629a
PDF Text
Text
TRIBUNAL
MEMOIRE
EN
d ’a p p e l
,
séan tàR iom .
RÉPONSE,
POUR
et G i l b e r t L A N D RIE V E ,
père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de
C h a r le s , P ie rr e
C h a n t a g r e t , commune d u P e y r o u z e , appelans
d ’un jugem ent rendu au tribunal d’arrondisse
ment de cette ville d e Riom, le 3 floréal an
et demandeurs en opposition ;
9,
C O N T R E
J A c q u e s B R U N E L D E P R I V E Z A C , pro
priétaire, habitant du lieu de Chauzy , commune
de B esset, département de l ' a l l i e r et
défendeur en opposition.
J a c q u e s Brunel de Privezac a afferme, le 8 germinal
an 4 deux domaines aux appelans , le prix de ce bail
A
�( a ) ‘
^
est de 3,000 fr. par année. Les appelans étoient précé
demment fermiers des mêmes objets depuis 1784', et le
prix de ce bail ancien n’étoit que de 1,300 fr. argent,
quarante - cinq livres de beurre et douze poulets pour
chaque année.
Les appelans ont demandé la réduction du nouveau
bail au prix de l’ancien, et leur notification a été faite
dans le temps prescrit par la loi.
Par une singulière fatalité, les premiers juges ont
refusé d’admettre la réduction demandée, et ont con
damné les fermiers à payer la somme de 3,000 fr. chaque
annee, pendant la durée du bail.
Les fermiers reclament contre ce jugement qui viole
ouvertement la disposition des lo is, et blesse tous les
principes de justice et d’équité.
L ’intimé qui affiche un grand désintéressement, a
des raisons personnelles pour ne pas désirer qu’on paye
toujours sans réduction ; il prétend néanmoins que le
jugement dont est appel est sage dans ses motifs, et juste
dans ses dispositions : il a cru devoir rendre sa défense
publique, et s’imagine que des déclamations bannales
contre les fermiers peuvent servir de moyens.
Les appelans se flattent au contraire de démontrer que
sa prétention est exagérée, et qu’en payant le prix du
bail ancien ils sont entièrement libérés.
FAITS.
L e 5 août 1784, un sieur T i ll y , propriétaire de deux,
domaines appelés de Chantagret et de Cornassat ; situéa
�( 3 )
#
Commune du Peyrouse, les donna à titre de ferme aux
appelans : ce bail fut consenti pour neuf années consécuti
ves, qui ne dey oient prendre cours qu’à compter du 24
juin 1788.
L e prix de la ferme est de 1,300 fr. par année ,
payables en deux termes égaux ; et pour droit de surv in e , les fermiers doivent payer en outre quarante-cinq
livres de beurre et douze poulets.
L ’intimé devenu acquéreur de ces deux domaines de
puis le 13 juillet 1790, avoit droit d’interrompre le bail
. en vertu de la loi JEmptorem ; mais il le trouva assez
avantageux pour ne pas user de cette faculté, et il en
perçut le prix pendant toute sa durée.
Quoique ce bail ne dût échoir que le 6 messidor
an 5 , néanmoins il voulut le renouveler un an avant ;
et le 8 germinal an 4 , il fut passé entre les parties un
nouveau bail pour neuf années, moyennant la somme
de 3,000 fr. par an. Il est dit que ce bail est consenti à
■prix d’argent, que la somme est payable en numéraire
ou valeur représentative : mais on verra que cette énon
ciation , dont l’intimé voudroit abuser, ne peut être
d’aucune importance; elle ne s’appliquoit qu’aux man
dats qui devoient être reçus comme espèce m étallique,
d’après la loi du 8 ventôse précédent.
Bientôt les mandats furent retirés de la circulation ;
il falloit dès-lors concilier les intérêts divers, et déter
miner la nature des engagemens de ceux qui avoient
contracté pendant les assignats ou les mandats.
L e législateur s’occupa principalement du prix des
fermages, et la loi du 9 fructidor an 5 , art. V I } régla
A a
�( 4 )
.
tpae tous les baux qui avoient été passés entre la publi
cation de la loi du 4 nivôse an 3 , portant suppression
du m axim um , et celle de la loi du 5 thermidor an 4?
seroient sujets à réduction, c’est-à-dire, que le prix en
seroit réduit à celui des baux existans en 1790.
Une loi postérieure du 6 messidor an 6, veut, art. II,
que tous baux stipulés en tout ou partie à pi'ix d’ar
gen t, passés entre le Ier- janvier 1792 et la publication
de la loi du 5 thermidor an 4 , soient susceptibles de
la i-éduction mentionnée en l’article V I de la loi du 9
fructidor précédent, quelques expressions ou dénomi-,
nations de monnoie qu i y aient été employées.
Les appelans avoient fait leurs diligences avant l’émis
sion de cette dernière loi. Dès le 9 vendémiaire an 6
ils firent signifier au domicile de l’intimé un acte par
lequel ils déclarèrent qu’ils enlendoient profiter du bé
néfice de la loi du 9 fructidor an 5 , et réduire le prix
du bail du 8 germinal an 4 , à celui du bail qui existoit en 1790.
Cette notification n’arrêta point le citoyen de Privezac.
Iæ 16 nivôse an 6 , il fit commandement à ses fermiers
de lui payer la somme de i,5oo fr. en num éraire, pour
le premier terme échu le 21 brumaire précédent.
Les fermiers , pour éviter des poursuites plus rigou
reuses , se déterminèrent à faire un acte d’offre au domicile
du cit. de Privezac , le 21 nivôse an 6 ; i°. de la somme de
65o fr. pour la moitié du prix du bail du domaine existant
en 1790; 20. de la somme de 42 fr. pour la valeur de
la dîme ; 30. 6 fr. 5o cent, pour les frais du commande
ment ; total 698 fr. 5o cent.
�( 5 )
_
Refus de recevoir : citation au bureau de paix en réa
lisation et validité d’offres ; assignation au ci-devant tri
bunal civil du département du Puy-de-D ôm e, pour voir
dire que conformément aux art. V I et I X de la loi du
6 fructidor an 5 , et en conséquence de la demande en
réduction, le prix du bail du 8 germinal an 4 demeu
rerait fixé à la somme de 1,300 fr. d’une part, comme
faisant le prix du bail existant en 1790, à celle de 42 fr.
d’autre, pour la valeur de partie de la dîme, dont les
fermiers devoient compte, et pour voir donner acte de
la réitération des offres; à défaut de les recevoir, per
mission de consigner les sommes offertes.
U n premier jugement par d éfau t, du 27 messidor
an 7 , adjugea les conclusions des appelans.
L a cause n’ayant pu être vidée sur l’opposition du
citoyen de Privezac , il fit citer ses fermiei's au tribunal
d’arrondissement de cette com mune, pour procéder sur
cette opposition.
L a cause portée à l’audience , il y est intervenu, le
3 floréal an neuf, un jugement contradictoire q u i, sans
s’arrêter à la demande en réduction du prix du bail
du 8 germinal an 4, dans laquelle les fermiers sont déclarés
non-recevables , ordonne que le bail du 8 gei’minal an 4
sera exécuté selon sa forme et teneur jusqu’à son expi
ration ; que les poursuites commencées seront continuées:
les fermiers sont condamnés en tous les dépens ; et il est
ordonné que le jugement sera exécuté nonobstant oppo
sition et sans préjudice de l’appel.
Ce jugement est principalement motivé sur ce que les
fermiers n’ont donné aucun effet à la réduction par eux
A 3
�(
6
)
demandée, enne faisant poiiitles
offres des arrérages échus,
d’après les formes voulues par les lois subséquentes.
O n prétend que l’article V III de la loi du 6 mfessidor
an 6 n’autorise la demande en réduction, qu’autant que
les fermiers payent préalablement tous les termes des baux
échus antérieurement à la demande : on ajoute que, dans
l’espèce, le's fermiers n’ont point fait des offres de tous les
termes échus à cette époque; on en conclut qu’ils n’ont
point satisfait à la loi du 9 fructidor an 5 , ni à ce qui
étoit ordonné par celle du 6 messidor an 6.
Les fermiers ont interjeté appel de ce jugement; et
pour ne pas plaider les mains garnies , ils ont, le 4 floréal
an neuf, renouvelé au domicile du citoyen de Privezac
les offres qu’ils lui avoint déjà faites, en y ajoutant tous
les termes échus.
L ’intimé n’a pas cru devoir se rendre à ces nouvelles
offres ; il a fait signifier de nouveau le jugement portant
nonobstance, avec sommation de se trouver au greffe
pour y voir présenter sa caution, et pour éviter des
poursuites plus rigoureuses. lies appelans ont présenté
requête au tribunal pour demander acte des offres réalisées
sur le bureau de l’audience delà somme de 6,362francs
90 centimes : il a été rendu sur cette requête un jugement
qui donne acte de l’appel et des offres , renvoie les parties
à une audience extraordinaire , toutes choses jusqu’à ce
demeurant en état.
Ce jugement a été notifié au citoyen de Privezac ; et,
le 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
dorme aux appelans acte de leurs offres, acte au citoyen
de Privezac de ce qu’il offre de recevoir à' bon compte
,
•
-
.
�C7 )
et sans aucune approbation préjudiciable; le surplus des
moyens respectifs demeurant réservé aux parties : c’est
en cet état que se présente la cause.
Pour prouver que le jugement dont est appel, est con
traire à la disposition des lois , et qu’il y a nécessité de
le réform er, il est essentiel d’analyser les différentes lois
rendues sur les fermages ; e t , quoiqu’en général on puisse
reprochera ces lois une grande obscurité dans la rédaction,
leurs dispositions ne sauroient être plus claires relative
ment à la question particulière qui divise les parties.
L ’article X de la loi du 9 messidor an 4 , porte « que
» les prix des baux non stipulés en denrées et qui ont
» été passés postérieurement à la publication de la
» loi du 4 nivôse an 3 , qui ¿1 levé le m axim um ,
» seront réduits au prix du bail précéden t, en y ajou» tant la valeur des dîmes et autres charges supprimées,
» conformément à la loi du 10 avril 1791 , et autres.
» S’il n’existoit pas de bail antérieur , ajoute le
» même article , le prix du nouveau bail sera réglé
» par experts , valeur de 1790 ; dans les deux cas, le
» prix de ce nouveau bail sera payé de la même manière
» que le seroit celui d’un bail passé en 1790. »
L ’article V I de la loi du 9 fructidor an 5 , dit « que ,
» si le bail a été passé entre la publication de la loi
» du 4 nivôse an 3 , portant suppression du m axim um ,
» et celle de la loi du 5 thermidor an 4 , le prix doit
» en être réduit à celui du bail existant en 179°* a
L ’article V II de la même loi veut « que l’on com
» prenne dans le prix, outre l’évaluation du prix de 1790,
a la valeur des dîmes et autres charges supprimées pair
'’
A 4
�.
.
( 8 )
■
.
» la loi du io avril 1790 , et autres, et dont étoient
»
»
»
»
tenus les ferm iers, ainsi que les sommes q u i, promises,
soit à titre de pot de v in , soit par contre-lettres, soit
de tout autre manière, seront inconnues avoir fait dans
le temps partie dudit prix. »
Enfin , l’article IX de cette même loi porte « qiie les
» b au x , soit à ferme, soit à portion de fruits dont une
» partie de loyer a été stipulée à prix d’argent , sont
» soumis pour cette partie du prix et suivant le cas, aux
a dispositions des articles précédens , dans lesquels se
» trouve compris l’article Y I précité. »
Il est ajouté « que la somme stipulée en argent dans
» le nouveau bail sera réduite à celle portée dans le bail
» existant en 1790 , augmentée de la valeur des objets
» mentionnés en l’article V I I , si la quantité des fruits
» ou denrées promises, est la même dans l’un et dans
» l’autre. »
'
L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , « comprend
» dans l’article V I la loi du 9 fructidor an 5 , et regarde
» comme susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article tous baux stipulés en tout ou partie à prix
» d’argent, passés entre le I er. janvier 1792 et la publi» cation de la loi du 5 thermidor an 4 , quelques ex
» pressions et dénominations de monnoie q u i y aient
» été employées. »
L ’article V III veut « que les fermiers qui provoque
» roient la réduction du prix de Leur b ail, ne le puissent
» à peine d’être déclarés non - rccevables , que clans le
55 mois qui suivra la publication de la présente, et qu’en
» payant dans le même mois , ou au propriétaire } ou
�( 9 )
_
» au receveur du domaine , suivant les-cas, soit le mon
» tant des termes échus suivant le montant du bail de
» 1790, soit à défaut de bail ou dans le cas de l’arti» cle V , quatre fois la contribution foncière de l’an 5 , des
» objets dont il s’a g it, sauf à compter et parfaire , ou
» même à répéter, s’il y a lieu, lors de la liquidation dé
» iinitive. »
T elle est l’analyse des différentes lois sur les fermages;
on a cru devoir la présenter de suite pour ne pas inter
rompre la discussion , et en faire plus facilement l’appli
cation au cas particulier.
Il s’agit d’examiner si les appelans ont satisfait à la
disposition de ces lois , et si le défaut d’exécution de
l’article V III de la loi du 6 messidor, peut être opposé
avec succès aux appelans , et faire obstacle à leur demande
en réduction?
Point de doute d’abord sur la faculté de réduii’e.
L e bail est du 8 germinal an 4 , par conséquent il a été
passé antérieurement à la loi du 5 thermidor an 4 ,
époque déterminée pour la réduction.
lia dénomination argent ou de numéraire ne change
pas la nature des engagemens : déjà l’article IX de la
loi du 9 fructidor an 5 , l’avoit ainsi expliqué et déter
miné , et l’article II de la loi du 6 messidor an 6 , 11e
laisse plus d’équivoque à cet égard.
Maintenant il faut se lixer sur l’époque de la demande
en réduction qui a été formée par les appelans , et ne
pas perdre, de vue que la notification par eux faite est
du 9 vendémiaire an 6 ', c’est-à-dire, antérieure à la loi
du. 6 messidor.
“
A 5
�L ’acte d’offre, la citation au bureau de paix , l’assi
gnation au tribunal c iv il, ont également précédé l’émis
sion de la loi du 6 messidor , puisque tous ces actes sont
du mois de nivôse an 6.
Ils ont tous été faits en exécution de la loi du 9 fruc
tidor an 5 , en exécution des articles Y I et IX cle cette
loi qui n’astreignoit point les fermiers pour obtenir la
réduction à faire des offres des termes éclius.
Cependant même avant la loi du 6 messidor, ils avoient
fait des offres de la moitié du pi'ix du bail précédent :
c’étoit alors tout ce qu’il y avoit d’écliu ; ils avoient donc
satisfait même au delà de ce que la loi du 9 fructidor
sembloit exiger.
V ouloir astreindre les fermiers à l’exécution de l’ar
ticle V III de la loi du 6 messidor, c’est alors donner évi
demment un effet rétroactif à la loi ; c’est lui faire régler
pour le passé ce qu’elle n’a voulu déterminer que pour
l’avenir. En effet , la loi ne parle que des fermiers qui
n’ont point encore fait de diligences ; elle veut que ceux
qui n’ont pas encore provoqué la réduction de leur bail,
ne le puissent faire que dans le mois qui suivra la pu
blication , et qu’en payant dans le même mois au pro
priétaire le montant des termes éclius d’après le bail
existant en 1790.
Mais les fermiers qui s’étoient déjà mis en règle, qui
avoient manisfesté leur intention de réduire, conformé
ment à la loi du 9 fructidor an 5 , ne sont point astreints
à la même obligation ni aux mêmes délais. L ’article X
de la loi du 9 fructidor an 5 , n’obligeoit les fermiers
qu’à la formalité de demander cette réduction par écrit,
dans le mois de la publication.
�( 11 )
L ’article X I de la même loi donnoit dans ce cas au
propriétaire la faculté de résilier, si la réduction blessoit
ses intérêts , et en avertissant le fermier dans les deux
mois de la même loi du neuf fructidor.
Cette loi du 9 fructidor n’exige pas le payement des
arrérages : faculté de_ réd uire, faculté de résilier ; voilà
tout ce qu’elle accorde.
La notification des appelans est du 9 vendémiaire
an 6 ; c’est-à-dire , qu’elle est dans le mois de l’émission,
et avant celui de la publication. Ainsi , il ne faut donc
consulter que la loi du 9 fructidor, celle du 6 messidor
est étrangère à l’espèce : ce n’est qu’une loi additionnelle
toujours favorable aux ferm iers, qui proroge encore le
délai de la notification , mais qui aggrave la condition
de ceux qui ont été négligens , en les contraignant de
payer tout ce qui est échu.
D ’ailleurs les appelans, au moment de leur acte d’offre
du 21 nivôse an 6 , ayant offert la moitié du prix du
bail antérieur, offroicnt tout ce qui étoit échu. Leur
bail a commencé le 24 juin ; il étoit payable en deux
termes égau x, l’un au jour de Noël , le second au jour
de St. Jean , et il est clair qu’à l’époque du 21 nivôse
an 6 , qui représente le 11 jan vier, il n’y avoit que le
premier terme d’échu ; c’est-à-dire , la moitié du prix
du bail ; par conséquent les fermiers ont offert tout ce
qu’ils devoient, même dans le sens de la loi du 6 ther
midor.
Comment donc concevoir d’après des raisonnemens
aussi simples, le jugement dont est appel qui oblige les
fermiers à payer 3,000 francs par année, pour un bail
�.
.
^ 12 ) .
qui, avant le papier monnoie, n’étoit que de 1,300 francs,
et qui a été augmenté de plus de moitié ?
Les fermiers, dit-on, n’ont donné aucun effet à leur
demande en réduction , dès qu’ils n’ont pas offert les ar
rérages échus, d’après les formes voulues par les lois
subséquentes ; et on explique qu’on entend par lois sub
séquentes, l’article V H I de la loi du 6 messidor.
M a is, d’une part, on a démontré que cette loi sub
séquente n’avoit aucun rapport avec les appelans qui
avoient fait leurs diligences antérieurement à sa publi
cation , et en vertu d’une loi différente. D ’un autre côté ,
on a prouvé qu’au moment des offres les fermiers avoient
offert tout ce qui étoit échu.
M ais, dit-on, lors du jugement du tribunal civil, les
fermiers n’ont pas oiï’e rt ce qui étoit échu à cette époque.
Ce motif est bien extraordinaire : la loi même du 6 mes
sidor n’astreignoit qu’au payement des termes échus à
l’époque de la notification ; elle n’obligeoit point de
faire à chaque échéance de nouvelles offres ; si la discus
sion se prolongeoit ; et si, lors du jugement du tribunal
civil qui a été rendu en thermidor an 7 , il étoit échu
d’autres termes, l’intimé pouvoit en faire prononcer la
condamnation, et même obtenir des dépens contre les
fermiers débiteurs. A u lieu de former sa demande, il
s’est laissé condamner par défaut ; les appelans 11e pouvoient donc encourir aucune peine, et, rien ne les obligeoit à faire de nouvelles olires.
Il est plus difficile d ’expliquer pourquoi on reproche
dans ces motifs aux appelans de n’avoir pas renouvelé
leurs offres à domicile. L ’acte d’offre du 21 nivôse a n 6 j
�( i3 )
étoit fait au domicile du citoyen de Privezac; il y a eu
refus de recevoir ; il n’étoit donc pas nécessaire de re
nouveler à dom icile, il suffisoit de les reitérer à l’au
dience ; et c’est ainsi que cela a toujours été pratiqué.
Les motifs du jugement une fois écartés, il n’est plus
question que de discuter les moyens proposés par l’intimé;
et on va voir qu’ils n’ont rien de spécieux.
D ’abord, l’intimé présente de prétendus motifs de
considération ; suivant lui les Landriève ont fait une
grande fortune dans cette ferme : il auroit trouvé le
''meilleur moyen d e là dim inuer, ou d e là détruire, s’il
pouvoit se faire payer, pendant neuf années, une somme
de 3,000 francs pour deux domaines qui n’étoient af
fermés auparavant que 1,300 francs par année.
Il prétend aussi que le sieur T i ll y , peu soigneux dans
ses affaires, répandu à la cour et livré aux plaisirs, faisoit peu d’attention à la valeur de ses biens, s’en rapportoit à des gens d’affaire , ou recevoit à l’avance des
sommes considérables de la part de ses fermiers.
Mais ces allégations ne sont que ridicules ; elles ne sont
appuyées sur aucun adminicule de preuves, et les appelans
ont toujours désavoué d’avoir payé par anticipation aucun
pot de vin ; ils ont soutenu que les domaines étoient
portés A leur juste va le u r, et que le prix du premier
bail ne leur promettoit aucun bénéfice.
L ’intim é, aii fond , examine deux questions : la pre
mière , celle de savoir si le bail du 8 germinal an 4
est sujet à réduction ; et la seconde, si les Landriève sont
l'ccevables ¿1 la proposer. Il observe judicieusement que
fin de non-recevoir doit être examinée lu prem ière,
�( H )
parce que la question principale seroit surabondante, si
les Landriève étoient non-recevables.
L ’intimé convient cependant que la demande en ré
duction a é.té signifiée dans un temps utile ; mais, sui
vant l u i , une demande n’est que le commencement d’une
contestation : on ne sait pas trop où il veut en venir
avec cette distinction, Il faut toujours commencer par
demander; mais au moins le jugement doit toujours se
reporter à la demande.
U n des grands griefs contre cette demande, c’est que
l ’exploit n’est pas signé des fermiers, ni d’un fondé de
pou voir; l’huissier, dit-il, ne présente aucune assurance
en cas de désaveu , et les Landriève auroient pu s’en
moquer impunément.
C ’est la première fois qu’on a imaginé de prétendre
qu’il falloit signer un exploit pour constituer une de- „
mande : comme il y a beaucoup de gens qui ne savent
pas signer , il faudroit en tirer la conséquence que toutes
les personnes illitérées n’ont pas capacité de former une
demande, ou de faire donner un exploit.
. L ’intimé ajoute qu’il n’y avoit rien de terminé entre
les parties, loi'squ’a paru la loi du 6 messidor an 6; et
quoiqu’ils fussent en litige au tribunal civil du Puy-deD ôm e, il n’y avoit encoi'e rien de réglé, ni par les par
ties , ni par les tribunaux.
O r , dit-il, l’article X V de la loi du 6 messidor an 6 ,
porte que toute contestation non définitivement terminée
sera jugée en conformité de la présente loi. Si l’ail’aire doit
ctre jugée en conformité de la loi du 6 messidor, les fer
miers doivent donc offrir tous les arrérages échus \ et c’est
ce qu’ils n’ont pas fait.
�( x5 )
Il se présente deux réponses péi^emptoires à cette ob
jection ; et d’abord les appelons eux-mêmes peuvent in
voquer avec succès les dispositions de cet article, relati
vement î\ la dénomination de numéraire qui a été em
ployée dans le prix du bail. Cette loi d it, article I I , que
le bail sera toujours sujet à réduction, quelques expres
sions et dénominations de monnoie qui y aient été em
ployées ; donc le citoyen Privezac ne peut pas dire que,
parce qu’il s’est servi de l’expression num éraire, le bail
ne peut pas être réduit.
Mais c’est aller trop lo in , que de soutenir que les fer
miers doivent offrir tous les termes échus ; il suffirait
qu’ils se fussent conformés à la loi précédente du 9 fruc
tidor an cinq : on a vu que l’article V III de la loi du
6 messidor , en exigeant le payement des termes échus,
n’avoit entendu parler que des fermiers qui jusques-là
ü’avoient fait aucune diligence.
D ’un autre côté, les Landriève, lors de leur acte d’offre,
avoient offert tout ce qui étoit. échu à cette époque,
quoiqu’ils n’y fussent pas obligés , et le citoyen Privezac
est forcé d’en convenir. M ais, d i t - i l , ces offres n’ont
été faites ni à ma personne, ni à mon dom icile, quoique
le prix du bail fût payable à mon domicile; elles ont été
faites au domicile par moi élu chez le citoyen B ru n , et
des offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu.
Quelque prépondérance qu’ait l’autorité de Denisart
sur laquelle le citoyen de Privezac s’appuie, ce ne seroit
point i\ lui à proposer une semblable objetiou. L e citoyen
de Privezac a changé cinq ou six lois de domicile pendant
�'
,
.
(i6)
.
la révolution ; et comme il n’a pas toujours été en de
mandant , plusieurs de ses créanciers ont éprouvé souvent
l’embarras de ses changemens de domicile : mais il n’est
pas exact lorsqu’il annonce que le prix du bail est payable
à son domicile. L ’article X V - du bail du 8 germinal an 4
porte que le beurre, ou les poulets que doivent les fermiers
pour survine , seront conduits à Riom ou à C lerm on t,
ou à une distance égale ; et l’article X V I dit que la
somme de 3,000francs, formant le prix du bail, sera payée
par eux aux lieux portés ci - dessus : ce n’est donc point
au domicile que Privezac a pris dans le département de
l’A veyron , que les fermiers doivent porter le prix du
bail.
D ’un autre côté, la notification en réduction du 9 ven
démiaire an 6 a été faite en la commune de Pagas, dé
partement de l’A veyron , en parlant au fils de l’intimé.
Lors de son commandement du 16 nivôse an 6, l’intimé
a élu domicile, pour une décade, chez le citoyen Jean
B run , cultivateur du lieu de la Maison-Neuve, commune
du Peyrouze près Montaigut ; et c’est à ce domicile
que les fermiers ont fait les offres le 21 nivôse an 6, le
cinquième jour du commandement, et avant l’expiration
du délai pendant lequel il y avoit domicile chez le citoyen
Brun.
Enfin , le citoyen Brun a répondu à l’acte d’offre, qu’il
n’avoit aucun pouvoir de B runei, et que cela ne le concernoit pas; et lorsque les appelans ont fait citer Brunei
au bureau de paix du canton de M ontaigut, pour voir
déclarer les ofires valables, et en cas de refus, qu’il fût
permis de consigner, Privezac a comparu par Desmaroux,
�C1 7 )
son fondé de pouvoir, et a persisté dans la réponse faite
par le citoyen Jean Brun.
Sur l’opposition formée au jugement du tribunal civil du
27 thermidor an 7 , le citoyen Brunei a assigné les appe
lons au tribunal d’arrondissement de Riom ; il a donc
reconnu, et le domicile par lui é lu , et la juridiction du
tribunal d’arrondissement : mais ensuite, en renouvelant
son opposition par exploit du 5 frimaire an 9 , il n’est
plus domicilié dans le département de l’A v e y ro n , il élit
domicile dans la commune de Cliauzy , département
d’A llier.
.
Comment pourroit-on saisir le citoyen Brunei avec des
changemens de domicile aussi fréquens ? Voudroit-il que
les offres eussent été faites aux lieux où le prix du bail
étoit portable ? c’est à Riom ou ù Clerm ont, ou à une
distance égale, et sans aucune désignation que l’indication
qu’il voudroit en faire. V o u d r o i t - i l que les fermiers
allassent au lieu de Pagas , département de l’Aveyron ?
mais il se dit tantôt domicilié de l’A v e y r o n , tantôt du
département d’A llie r , suivant l’intérêt qu’il a à em
barrasser ses créanciers ou ses débiteurs, comme il l’a fait
pour les héritiers Tassy qui ne savent où le prendre.
En un m ot, le bail est fait en la commune du Peyrouze
près Montaigut ; point d’indication déterminée pour
le lieu du payement-, élection de domicile chez le citoyen
Jean Brun-, c’est donc là ou ces fermiers ont dû s’adresser;
et il peut d’autant moins s’en plaindre, qu’il a connu l’acte
d’oifre , qu’il a comparu au bureau de paix sur la citation
par tout autre fondé de pouvoir que B ru n , et qu’il a
adhéré à la réponse de Brun.
�,
( 18 )
En un m ot, la loi qui ordonne que les offres seront
faites au domicile du créancier, doit être entendue civile
ment : elle n’a pas exigé l’impossible , elle a voulu prin
cipalement favoriser la libération ; et il est absurde de
prétendre qu’un débiteur soit obligé d’aller faire des offres
à deux cents lieues, lorsqu’il n’y a point d’indication
précise pour le payement, et lorsqu’il y a un domicile élu
dans le lieu où sont situés ces immeubles affermés.
O n ne peut pas reprocher aux appelans le défaut de
consignation de leurs offres ; il y a toujours eu litispen
dance sur la suffisance ou la validité de ces mêmes offres,
rien de déterminé à cet égard jusqu’au jugement définitif:
et comment consigner, lorsqu’il y a toujours des doutes ?
Les appelans ont réitéré leurs offres après ce jugement ;
l ’intimé a reçu à bon compte ; les appelans ne plaidoient
donc pas les mains garnies comme voudroit le prétendre
le citoyen de Privezac.
Telles sont les fins de non-recevoir singulières qu’oppose
le citoyen Privezac à ses fermiers. Bientôt par une con
tradiction choquante, et tout en invoquant la loi du 6
messidor an 6 , il vient dire q u e , dès qu’il a stipulé le
payement en num éraire, il ne peut pas y avoir lieu à la
réduction ; il croit appitoyer sur son sort en disant qu’il
a du compter sur 27,000 francs , et qu’il ne toucheroit
que i i , 5oo francs dans le sens du bail de 1784 : cette
différence, d it-il, seroit énorm e, et vaut bien la peine
qu’il résiste aux prétentions déloyales des Landriève.
Mais Icsljandriève n’ont promis 3,000 francs par année,
que parce qu’ils devoient croire qu’ils payeroient en
mandats; mais ils n’ont promis 3,000 francs, qu’à raison
�( 19 )
de la progression survenue dans les denrées pendant
l’émission du papier-monnoie ; et aujourd’hui que tout
est rentré dans l’ordre, on ne peut exiger d’eux que la
juste valeur des immeubles affermés. L a loi a prononcé ,
les appelans ont satisfait à la loi ; et le jugement qui les
condamne présente une contravention manifeste à la
disposition des lois de la matière.
s
Par conseil, PAGES ( de Riom ), anc. jurisconsulte.
BAY L E ,
avoué.
A R io m , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du Tribunal d’appel. — A n 10.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Landriève, Charles. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bayle
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Charles, Pierre et Gilbert Landriève, père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de Chantagret, commune du Peyrouze, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville de Riom, le 3 floréal an 9, et demandeurs en opposition; contre Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant du lieu de Chauzy, commune de Besset, département de l'Allier, intimé et défendeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1784-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0233
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0234
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53732/BCU_Factums_M0233.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53719/BCU_Factums_M0220.pdf
47ea75bacd2238721c6f74191cc9620a
PDF Text
Text
R
i
E
P
O
N
I*
S
E
.
MEMOIRE
IMPRIME,etc.
P O U R
Les enfans L E C L E R C - C H A M P M A R T IN ,
demandeurs e n intervention et subrogation, et
subsidiairement appelans ;
i»
C O N T R E
É tien n e
D U S S O N - P O I S S O N défendeur
et
intimé.
L e citoyen Dusson retiendra-t-il, pour 5 i?6oo francs,
des Liens qui ; au temps de leur adjudication, en l’an 9 ,
v aloient plus de 100,000 francs? les retiendra - t - il au
A
�( 2)
'
.
,
détrim ent de nombre de créanciers auxquels il est dû
entour 5o,ooo francs, et q u i, dans le sens de la maintenue
de cette adjudication, ne seroient pas entièrement payés?
lie citoyen Dusson réussira-t-il à rendre notre père insol
v a b le , tandis que le vrai prix de ces biens payeroit et
au delà tous les créanciers ? L e citoyen Dusson et l’homme
a u x algarades rép o n d ro n t, avec une extrême d u re té ,
oui ; et nous répliquerons, non. N otre prétention, tout
équitable, toute légitim e qu’elle est, fait leur désespoir;
ils s’en irrite n t, et crient au fie l, à la calom nie, à l’ab
surdité, au déraisonnement, etc. comme si l’on n’étoit
pas bien convaincu de cette grande v érité , que, soit qu’ils
s’abaissent bien aisém ent, soit qu’ils s’élèvent pénible
m en t, ils sont incapables d’offenser personne. Q ui les
connoîtra leur rendra cette bonne justice : on leur doit
aussi celle de laisser dans leurs mains le rameau d’or ; il
y fructifie si bien !
”
1
Nous ne rendrons pas ici compte des faits de la cause ;
nous sommes forcés de le renvoyer à la plaidoierie. L e
citoyen Dusson n’y perdra rien : alors on n’oubliera aucune
des circonstances propres à prouver qu’il ne se présente
pas aussi favorablement qu’il le publie.
�i °. L e s enfans Cham pm artin peuvent-ils intervenir en
la cause de Tappel de leur père ?
.
2°. P e u v e n t- ils suivre soji appel du 9 p ra iria l an 9 ,
nonobstant le traité du 10 m essidor an g ?
Intervention des enfans Cham pm artin.
Il p aro ît constant, dans la cause, que les enfans C ham p
martin ont qualité suffisante pour intervenir. i ° . Ils sont
tout au moins créanciers inscrits contre leur père : cette
qualité est établie par la substitution du 18 novem bre 17 7 9,
et par la quittance donnée par le citoyen Dusson le
3 janvier 1783; enfin, cette qualité est bien form ellem ent
reconnue par le citoyen Dusson. Ce n’est pas le m oment
d’examiner de quelle quotité est la créance. Ils sont créan
ciers d’ une somme quelcon que, et cela su ffit, dans les
circonstances, pour constituer leur qualité.
Ce n’est pas plus le m oment de discuter la question de
savoir si les enfans Champmarli,n sont ou non copropriétaii’es des biens acquis par le contrat du 22 octobre 1782;
s’il s’en agissoit aujourd’h u i, il sci'oit facile de dcm ontrer
au citoyen Dusson qu’il est non recevable à en élever la
d ifficulté, parce qu’il a concouru à la vente du 2z oc-
4. 2,
�( 4 )
<
tobre 1782; parce que le citoyen de Champmartin père
l’a approuvée en faits et en écrits authentiques.
■
M ais ce n’en est point ici le lieu. I,es enfans Champmartin ne peuvent se pourvoir que par action en reven
dication, en conform ité de la loi du 11 brum aire an 7 ;
et l’on accorde -que cette demande ne peut être portée
d’abord qu’au tribunal civil de G a n n a t, sauf l ’appel .111
doit en être de même de leur demande en restitution contré
leur renonciation, du 12 fructidor an 9 , au bénéfice de
~"iir*-vente du 22 octobre 1782 ; elle est accessoire à la reven• $icyiion,>-.Le tout est sujet aux deux degrés de juridiction.
* .*■
attendant, les enfans Champmartin peuvent
toujours ’être considérés au -moins com m e créanciers.
L a question de savoir si certains des enfans Champttiartin, n’étant ni nés n i conçus au temps du testament
du sieur-Lecïerc-de-Beauvoisin, du 18 novem bre 1779?
doivent participer à la substitution, est sans intérêt p o u r
le .citoyen-Dusson ; parce que si les non nés ni conçus n’y
participoicnt p o in t, le tout appartiendroit aux nés ou
conçus, et le citoyen Dusson n’y gagneroit rjen. Les nés ou
conçus auroient droit pour le tou t; et si aujourd’hui tous
les enfans Champmartin sont d’accord entre eux , il n’a pas
qualité pour s’en plaindre.
20. Les enfans Cham pm artin ont figuré en cause prin
cipale : à leur é g a rd , le prem ier degré de juridiction a
été stibi ; ils ont donc pu demander d’in terv en ir, potir
le u rs’ intérêts , en caisse 'd’apjjel ? dans une aiiaire où ils
ont figuré en prem ière instance.
M a t s y avoit-il instance en tre-le citoyen Cham p.maviiji
(»t i c citoyen PusjüîU Î
'
�......................................
( 0 )
.
' "L e citoyen Dusson soutient la négative ; i ° . parce que,
dit-il,"(contre sa science, et profitant sans doute de l’igno
rance des enfans Gliampmartin sur les fa its ), l’appel du
citoyen de Cliam pm artin père étoit sim ple, et que
celui-ci n’avoit pas intim é le citoyen Dusson*, ( i l nous
-renvoie à l ’article X X V I I I du titre X I de l’ordonnance
de 1 6 6 7 ) ;- 2 ° . parce q u e, par le traité du 10 messidor
arf 9 , le citoyen de Cliampmartin s’est départi de son
appel.
Ici l’on répond au prem ier moyen seulem ent, et l ’on
renvoie la réfutation
du second au §. su iv a n t, parce
qu’il s’y rapporte plus particulièrem ent.
L e moyen du- citoyen D usson, contre l’ intervention,
m anque par le fait. En e ffe t, il est bien vrai que le
citoyen de Chiim pm avtin lî’a pas in tim é le citoyen
Dusson; mais celui-ci a anticipé le citoyen de C ham pm artin, par exploit du 12 prairial an* 9 ; il l ’a assigné
pour procéder sur l’a p p el, pour vo ir confirmer la sen
tence du 8 floréal an 9 : s’il est certain que les tribunaux
ne sont saisis des affaires que par les assignations don
nées devant e u x , ils le sont, très-certainem ent, aussitôt
l ’assignation donnée. A lo rs les_tierces parties intéressées
peuvent intervenir , et prendre les conclusions utiles
a leur position. D e là une conséquence irré sistib le , que
c’est le conseil du citoyen Dusson q ui, après un travail
p é n ib le , a accouché de l’absurdité q u ’il nous impute.
- ,»
;
t .* ., * . ’ | ■ . . • §.
o» »>I I . , : j j /
.¡¿ippel du .g p ra iria l an 9.
-,
•
. ,
Ce p oin t d épen d de la ‘va lid ité du traité du 10 mes-
U
/
•pi1
$
�(6 )
, .
sidor an g. Dans les termes où en étoit le citoyen de
Cham pm artin, a-t-il pu le passer valablement à l’insu,
sans le concours des créanciers inscrits ?
A cet égard , nous avons dans le digeste des lois faites
pour la cause, au titre X I , quœ in fr a u d , cr e d .fa c ta
.
s u n t, UT RESTITUANTUK, liv. 42.
>
Dans ce titre sont deux édits du p réteu r, et des dé
cisions des jurisconsultes romains , qui font loi en
France.
L e prem ier édit porte : « Quœ fr a u d a tio n is causa
« gesta erunt cum eo q u ifr a u d e m non ig n o r a v e r itd e
« his cu ra to ri bon oru m , vel ei c u i de ea re actionem
« dare opportebit, intrii annum quo experiundi potesc< tas f u e r i t , actionem dabo : idque etiam adçersüs
t< ipsum q u i fra u d em f e c i t , serçabo. »
.
Sur ces m ots, quœ fr a u d a tio n is causa gesta e r u n t,
V u lp ie n d it , n °. 2 : « H œ c verba generalia s u n t, et
« c o n t i n e n t in se om nem omninà in fr a u d e m f a c t a m ,
« vel alienationem , vel quem cw nque contractant. »
E n la loi 3 , V u lp ien d it , §. I : Gesta fra u d a tio n is
ca u sâ accipere debem us, non solîim ea quœ contrahens
gesserit a liq u is , v e r u m e t i a m s i e o i i t È d a t a o r E R A
ad
JUDICIUM NON ADFUIT , VEL
LITEM MORI
PA
TI AT UR. (H parle du débiteur). E t § . I l , E t q u i a l i QUID FECIT UT DESINAT HABERE QUOD HABET, ad
hoc edictum perlm et.
.
.
D e là il suit , i 9. que tous les actes passés entre un
débiteur et celui qui n ’ignoroit pas la fraude, au détri
ment des créanciers, donnent lieu à l’action révocatoire,
et que cette action dure un a u , à com pter de' l’instant
�C7 )
.
^
où les créanciers ont pu a g ir , c’est-ù-dire , du jour où
ils ont découvert ces actes, à die detectœ J ’r audis ;
2°. qu’il y a fraude contre les créanciers, toutes les fois
que le débiteur ne se défend pas, lorsqu’il Je peut, sur
une demande qui lui est formée. S i ad ju d iciu m non
a d fu it, ì>el litem m o ri p a tia tu r, gesta fr a u d ottoni s
causa accipere debemus. Cela sétend jusqu’à un traité
sur p ro cès, par ce que dit A ccurse : Ciim p otuit litem
'con testari, et non fe c it etc. quod non placet \ parce qu’il
ne peut pas faire qu’il n’ait plus ce qu’il avoit aupara
v a n t : desinai habere quod h a b etj p u tii, ajoute A ccu rse,
patiendo se ju d icio v in c i, vel alias in jr a u d e m obli
gando se.
.
' Dans la lo i 10 , est le second édit du préteur ; il porte:
A I T p r æ t o r : quce L u c iu s T ìtìu s ( le civi^iexiv^fraudandi
*( ses créanciers) causâ^ sciente te ( l’accepteur) , in bonis
q uibus de ea re agitur f e c i t '; ea illi (au x créanciers),
s i eo nom ine quo de agitur, actio e i e x ed icto 'm eo
competere esse-ve o p ortet, e i se non plus quàm annus
e s t , cum de ea re qua de agitur experiun di potestas
o s t , RESTITUAS. I n t E R D U M CAUSA COGNITA , ET SI
SCIENTIA NON S I T , IN FACTUM ACTIONEM PERMITTAM.
«
«
'«
«
«
U lpien d i t , n°. 2 : « Q uod a it præ tor s c i e n t e ( et
non pas SCIENTER, comme l’a fait imprim er le c o n seil Dusson ) TE , sic a ccip im u s, te conscio et J ra u d en i
participante : non enim s i sim plicitçr scio ilium ereditores ha bere, hoc sufficit ad contendendurn te n e r i,
cutn in fa c tu m actione ; sed si particeps fr a u d is est. »
E t n°. 3 : « S i quis particeps quidem fr a u d is non f u i t ,
« verum tam en vendente debitore testato conventus à
�«
«
-K
«
«
cc
( 8 )
crcditorìbus , ne em eret : an infa c tu m actione teneatur s i co m p a ra ie n t ? et magi s est ut teneri debeat.
N uyi enim caret f r a u d e , q u i consenties testato perseverat. »
v
I,a loi 1 5 , invoquée .par le citoyen D ü sson , porte : « S i
qais cùni haberet T itium crèditorem et\sciret se sof
vendo n o n e s s e hbertates dederit testamento : deindè
dim ïsso T itio , posteà Sem pronium creditorem habere
cœpei'it • et eodem testamento manente decesserit :
hbertates datœ ratœ esse deben t, etsi hœreditas sol
s’endo non sit: qm a Hbertates ut rescindanturi u t ;ru m QUE IN EORÜMDEM.rERSOKAM EXIGIMUS, ET GONSILIUM ET EVENTUM. »
.
.
Dans le cas p ro p o sé , Sempronius-n’a^pas'à se plaindre,
.
«
«
«
■
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■
.
.
parce qu’au temps où il-est devenu créancier, libertates
datœ erant. L a chose étant faite avant /qu’il y<eût, inté
r ê t , il n’a pas été trom pé. Titius'.seul auroit eu rqualité
pour réclam er, et il a-été satisfait.
<. •
A
..
• Il en seroit autrem ent, si .l’argent prêté»par Sempro,nius avoit seryi à payer T itiu s , parce-que c e lu i- c i en
auroit pris la plncc. Aussi la loi 16 dit - elle -, nisùpripreç
pecunia postenorum dilu issi probentur. A u ssi, Bartole
d it- il, « Q u i scit se habere creditores, et fa cu lta tes suas
n on su fficere, videtur a l ion arenitif r a udem , credito ru m .
.L'insolvable qui v e n d , est jugé vendre in fra u d e m creditorum . D e là il suit tju e, si Sempronius avoit rem
place TiLius, le jurisconsulte Julianus auroit dit qu’ il y
¿1voit consilium et eventus ; et d è s - lo r s , lieu à l'action
,révocatoirc : cela nous paroît h o rs'd e doute, ,
. Dans l’espèce, le citoyen Dusso.11 prétend pue le citoyen
de
�(S Ü
,
dë Champmartin est insolvable : cela seroit v r a i, si l ’ad
judication étoit m aintenue, puisqu’il y a aux hypothèques
pour plus de 80,000 fr. de créances inscrites, et qu’ il y
auroit seulement 5 i , 6 oo fr. à distribuer. Ce seroit donc
.
le cas de dire avec Bartole, i ° . que le citoyen de Cham pmartin scit se habere creditores , et J'acultates suas non
su fficere’, 20. que le citoyen Dusson le savoit tout aussi
b ie n , puisque l’état des créances inscrites qu’il a retiré
du bureau des h yp o th èq u es, puisque cet é t a t , disonsnous , comparé au p rix de l ’adjudication , dém ontre l’in
solvabilité ; 30. que dans l ’acte du 10 messidor an 9 ,
le citoyen Cham pm artin et le citoyen Dusson videntur
y a cisci in fr a u d e n t creditorum . L ’adjudication étoit à
v il p rix ; les créanciers derniers en h y p o th èq u e, tels
que les enfans C ham pm artin, n’avoient d’espoir que dans
la valeur réelle. Sans y appeler ces créan ciers, on fait
le traité ; on sacrifie ce qui constitue leurs espérances ; 011
leur fait un tort qui seroit irréparable , si le citoyen
D usson réussissoit.
•
.
D ira-t-il qu’il ne s’agissoit pas ici d’aliénation? i° . Il
s’agissoit de l’approbation d’une aliénation, q u i, quoique
ju d iciaire, étoit funeste aux créanciers inscrits, parce
qu’il y a vilité dans le prix. 20. L e jurisconsulte U lpien
comprend dans la proscription quem cunujue coniractum .
C ’est ici le lieu de dire que Champmartin p erc, ad
ju d iciu m non a d fuit ,* litem n iori passas est. Il avoit
appelé des deux sentences du 8 floréal an 9 ; il étoit assigné
sur son appel. L e tribunal d’appel étoit saisi de l’afia ire:
il 11’avoit qu’à poursuivre et à faire ju g e r -, tout auroit
été- annuité. N e l’ayant point f a it, scs créanciers ont le
B
�:
l
.
.
C IO )
droit de reviser sa conduite et celle du citoyen Dusson.
:
Ils ont droit de faire révoqu er ce qui a été fait à leur
*
^
^
**
Q
^
*
préjudice.
C ’est encore ici le lieu d’appliquer le n°. 3 d elà lo i 10 ,
au tit. quœ in fr a a d . cred. L a position du cit. Dusson
étoit telle, qu’il ne pouvoit pas traiter valablem ent avec
le saisi, à l’insu et sans le concours des autres créanciers
inscrits; il étoit consent us ¿1 cred itoribu s, ne erneret y
c’est-à-dire, ne pacisceretur.
'
E n e ffe t, en expropriation forcée , il en est aujour
d’hui comme autrefois dans les saisies - réelles. i° . L e
créancier poursuivant ne saisit pas et ne poursuit pas
pou r lui seulem ent, mais bien pour la généralité des
V
.
créanciers inscrits.
r
L e citoyen Dusson pose lu i-m êm e
vce prin cipe, pages i 5 et 21 de son m ém oire im prim é.
'tlA
! .
t
'J
-f-
2° ‘ Pendant les poursuites, le saisi est en état d’interdic.j.*on a])soj ue ^ respectivem ent à la propriété des objets
/m 'Jx/JJvî.
saisis ; il en est seulement dépositaire de justice; il ne peut
pas en disposer directement ni indirectement.
En effet, l’art. V III de la deuxièm e loi du 11 brum aire
an 7 porte : « Pendant toute la durée des poursuites, le
« débiteur reste en possession, comme séquestre et dé« p ositaire de ju s tic e , sans préjudice néanmoins du droit
« q u ’ont les créanciers de faire procédera la saisie m obi« lia ire des fru its, conform ém ent aux lo is, etc. »
« 11 ne p e u t , à compte?' de Vinscription prescrite
« p a r ¡'art. V I , de la notification des procès verbaux
« d'affiches , disposer de la propriété , etc, »
Celte interdiction est contre le saisi, en laveur de la
généralité des créanciers inscrits : ce qui le p ro u v e , c’est
�( 11 )
,
. .
que la loi constitue le saisi seulement dépositaire de jus- î
tice; ce qui le p ro u v e , c’est que l ’interdiction date seu
lement de la notification des affiches, tant aux saisis qu’aux
créanciërsTnscnts.'' .......
“
i Q. D e ces principes il suit que;, la poursuite étant
, ,
-i
,
.
,
.
„ ,
commune a tous les créanciers, le poursuivant ne peut
^
>
1
r
faire rien qui préjudicie aux autres, et que tous traités
doivent être passés aussi avec e u x , à peine de n u llité;
parce q u e , sans cela, ces traités sont à leur égard res
inter alios acta.
J* /'vrv/i'tutA'ajZf
, *
,
j'*‘■
'i'U-J itfV
'
,
f
3 °. D e ces principes il suit q u e , les biens saisis étant
sous la main de la justice, ils le sont à la conservation
des intérêts de tous les créanciers ; il n’y a que la justice
«jui puisse en disposer. I l s’ensuit que le saisi ne peut
les alién er , sans le u r concours ; cela est incontestable
ment v r a i, même jusqu’au tribunal d’a p p e l , lorsque l’une
des parties a appelé du jugement d’adjudication. Jusqu’à
ce que le tribunal supérieur ait prononcé , les choses de
m eurent dans le même état; c’est-à-dire , en état de dépôt
de justice, en état d’interdiction d’aliéner par le saisi,
*
ni d’approuver rien de ce qui serçit aliénation, quem cion que coiitractum . L ’adjudicat-fta^est, respectivement
aux créanciers, réellem ent conventus ne erneret, id est,
ne pacisceretur cuni debitorc.
S’il en étoit autrem ent, il en résultcroit des inconvéniens énormes. Ce seroit ouvrir à la fraude une porte
inconnue jusqu’à la loi du n brum aire an 7. U n créancier et un saisi, quiseroient de concert, pourroient frus
trer impunément les autres créanciers. L e créancier saisiroit les bien s, et feroit à dessein des nullités dans la
B
s
/
[
�( procéd u re: le saisi les opposerait; les créanciers inscrils
1 ne diroient m o t, parce qu’ils verroient le saisi faire valoir
les moyens : des ju ges, peu versés dans ces m atières, J es
j rejetteroient : les enchérisseurs, épouvantés par la dis—
/ cu ssion , n’oseraient pas faire une mise. L ’adjudication
( auroit lie u ; le poursuivant aclieteroit à vil p r ix , parce
j q u’alors il n’auroit pas de concurrens : la partie saisie
j appellerait et transigerait ensuite ; s’il n’y avoit pas moyen
} de revenir co n tre, l’exécution de la loi du 11 brum aire
) serait donc un coupe-gorge pour les créanciers.
.
Dira-t-on que ces créanciers, appelés par la notifica
tion de l’afficlie, peuvent paraître à l’adjudication, pro
poser eux-mêmes les moyens de n u llité, et appeler du
j
jugem ent, s’il leur paraît m auvais? O u i, sans doute ; ils
èn ont le d r o it, la loi le leur donne : m a is, ils se ¡Drésentent ; ils voient le saisi opposer les moyens qu’ils op
poseraient eux-mêmes ; ils jugent qu’ils n’ont rien à y
ajouter ; ils croient que tout se passe avec sincérité ; ils
croient dès-lors d evoir se taire. Des créanciers ne deman
dent que d’être payés; ordinairem ent ils sont très-avares
jjou r les frais ; ils tyÿÿgnent justement d’avancer de l’ar
gent : le saisi le iaiT**rFaudra-t-il qu’ils m ultiplient les
êtres? quand le saisi fait en apparence tout ce qu’il fa u t,
sont-ils obligés d’aller jusqu’au superflu? il ne serait pas
raisonnable de le prelcndre. Faudra-t-il qu’ils soient en
suite dupes de leur bonne "foi? iaudra-t-il qu’ ils soient
ainsi volés im punément par deux hommes m alhonnêtes?
L a raison se révolte contre cette idée.
E n fin , rappelons ce qui se passe ordinairement dans
toutes les ven tes, m êm e volontaires. U n particulier an-
�( 13 )
_
nonce qu’il veut se défaire de tels biens : celui à qui il
plaît le plus , le décrie et le fait décrier ; il répand et
fait répandre qu’il n’y a pas sûreté : c’en est assez pour
éloigner quelques gens sages et tim ides, parce qu’ils veu
lent acquérir pour jouir paisiblement.
S’il s’agit d’une vente judiciaire, les enchérisseurs peu
vent arriver en foule. Chacun a fait, préalablem ent, son
calcul particulier sur la qualité et la valeur des b ie n s,
et a , par dessus tou t, com pté sur la solidité attachée à
la form e de la vente. Des moyens de nullités sont dé
veloppés par le saisi. Sur trois juges de prem ière ins
tance, deux ne sont pas en état d’apprécier ces m oyens-,
ils les rejettent. Il est passé outre à l ’adjudication. M ais
le mal est f a it, il est sans rem ède pour le moment. I<a
confiance des assistans sages a fui ; il n’est pas possible
de la l'am ener, parce qu’ils ne veulent pas acheter un
procès. L e bien saisi devient nécessairement la proie d’un
avide poursuivant ; de là extrêm e vilité dans le p r i x ,
et dès-lors anéantissement infructueux du gage des créan
ciers. C eux-ci sont horriblem ent dupes de leur bonne foi :
ils le seroient bien davantage, si le saisi, ayant appelé
du ju gem en t, pou voit ensuite, -après avoir été séduit
par le saisissant devenu adjudicataire, p o u v o it, disonsnous , transiger avec lui sans le concours des créanciers
inscrits.
L ’on peut et l’on doit parer a cet inconvénient bien
vivem ent senti ; l’on peut y parer par un moyen v ra i,
parce qu’ il est dans la loi et dans la raison. Il huit dire
alors que l’appel interjeté par le saisi ne lui appartient
p lu s , mais aux créanciers inscrits j il faut dire alors qu’il
�( i4 )
ne peut plus s’en désister sans leur participation. D é p o
sitaire de justice dès l’instant de la notification de l’alliche
aux créanciers in s c rits , dépositaire de justice envers la
généralité de ces créanciers, ce dépôt doit continuer
jusqu’à cc que les juges supérieurs ont prononcé sur son
appel. Il peut et doit faire tout ce qui convient pour la
conservation du d ép ô t, et rien pour le détruire; s’il fait
Quelque chose de nuisible , les créanciers ont le droit
d’en demander la révo catio n .—
D e tout ce que nous venons de d ir e , il résulte que les
enfans C h am p m artin , comme créanciers légitim es et
inscrits, sont fondés à révoquer le traité du 10 messidor
an 9 , à suivre l ’appel de leur p ère, du 9 prairial an 9 ,
et à faire valo ir les moyens de nullité qu’il a proposés
devant les premiers juges. Ces moyens se lient à ceux
qu’ils ont de leur ch ef; nous les présenterons en même
temps.
C H A P I T R E
II.
¿îp p cl incident des enfans Cham pm artin ^de suo.
I,e citoyen Dusson le soutient, i ° . irrégu lier; 20. non
recevab le, comme fait hors du délai; 30. non recevable,
parce q u e , d it-il, les enfans Cham pm arlin sont sans
qualité ,
cojmhc
sans in tér êts, pour le soutenir.
§. I.
Les enfans Cham pm artin o n t , par leur requête signi
fiée d’avoué ù avo u é, le 26 th erm id o r d ern ier, demandé
�_ ( 15 )
acte de ce que subsidiairement ils in terjetten t, de leur
c h e f , appel de la sentence.d’adjudication , du 8 floréal
an 9 , ensemble, de ce qui a précédé et suivi.
.
i? . Cet appel est régulier , parce que le citoyen
D evèze, constitué avoué par le citoyen D usson, l’est pour
toutes les dépendances de l’affaire. Cet appel çst régulier,
parce que , dans la règle et l’usage, il auroit pu être in
terjeté, m ême sur le barreau, lors de la plaidoirie de la
cause. A u surplus, voyez l’art. X X I I I de l’ordonnance
de 1667 , qui autorise les appels incidens, par requ ête de
procureur à procureur.
20. Par exploit du 6 frim aire d e rn ie r, les enfans
Chainpm artin ont, en tant que de besoin, et sans aucune
approbation préjud iciable, réitéré leur appel à dom icile,
et assigné le citoyen Dusson en adjudication de leurs
conclusions. Ils y ont repris ces conclusions.
§• II.
L e citoyen Dusson soutient l’appel n o n -reccv a b le,
parce que, d it-il, le jugement d’adjudication a été signifié
au dom icile du citoyen Cliam pm artin p è re, le 12 prairial
an 9 , et que l’appel des enfans 11’est venu qu’en thermi
dor an 1 0 , et la réitération en frim aire an 11.
■
> Cette prétention est une erreur. L a signification d’un
jugement d’adjudication à la partie saisie ne fait pas courir
le délai des trois m ois, prescrit par l’article X I V du titre
V de la loi du 24 août 1790 > snv l’ordre judiciaire.
E n effet, cette loi dit qu-’aiicun appel ne pourra être
signifié, APRÈS L’EXPIRATION DE TROIS MOIS, A COMP
TEE DE L A SIGNIFICATION DU JUGEMENT (coûtl'adic-
�( i6 )
t o il ’e ) FAITE A PERSONNE OU DOMICILE. E lle d i t q u e
ccs deux termes sont de rigueur, et leur inobserva
tion emportera la déchéance de l'appel.
i ° . O diosa restringenda et fa vores am pliandi. Ici
il s’agit de matière rigoureuse; il s’agit d’une prescription
très-courte. Si donc il y avoit du doute , il faudroit
l ’expliquer en faveur de celui auquel on oppose la fin
de non recevoir.
2°. Ici point de doute : la lo i est claire ; elle porte en
principe général que , pou r faire courir le délai des
trois mois de l’appel, il faut une signification du juge
m ent (contradictoire) à personne ou dom icile. Sans cette
signification, point de cours du délai. Ce délai d o r t , et
il dureroit trente ans, s’il n’y avoit point de signification
aux parties intéressées.
N e perdons pas de vue que cette lo i d it, en termes
précis, « signification fa ite ¿1 personne ou dom icile. »
Ces termes signifient bien fo rt, bien sacramentellement,
que la signification doit être faite individuellem ent à
chacune des parLies intéressées; q u e'la signification doit
être faite à la personne ou au vrai dom icile de la partie
intéressée.
Il ne suffiroit même pas d’ une signification à un do
m icile élu.
E n effet , l ’arliclc X I V
de la loi du 24
» août 1790, n’a lait que îaccouicn le délai accorde par
l’ordonnance de 16 6 7 , titre X X V I I , article X V 1L Cet
article de l’ordonnance ne donnoit que d ix ans pour
l’appel, à com pter de la signification de la sentence.
O r , M . Jousse dit : « C ette signification doit être laite
« au vrai dom icile de la p a rtiej c a r , si elle avoit éLé
« faite
�C 17 )
t
« faite au dom icile du procureur , ou à un dom icile
« élu par un acte passé entre les parties, elle ne pou r« roit opérer la fin de non recevoir qu’après trente ans. »
S’il en étoit ainsi pour une iin de non recevoir après
dix ans, à j o r t i o r i , doit-on être plus rigoriste sur une
fin de non recevoir après trois mois.
3 °.L a signification faite au citoyen Cham pm artin p è re ,
le 12 prairial an 9 , n’a pas fait courir le délai des
trois mois envers les enfans, comme créanciers inscrits.
E n e ffe t, la partie saisie et ses créanciers inscrits ne
sont pas une seule et même personne ; ils sont au con
traire très-opposes entre eux : ainsi la signification faite
par le poursuivant ou l’adjudicataire au saisi, ne sa u ro it,
sous aucun ra p p o rt, être considéi’ée comme fuite aux
créanciers.
Il y a plus : une signification faite à cinq cohéritiers
sur s ix , ne seroit bonne que contre les cin q; la fin de
non recevoir des trois mois n ’auroit pas lieu contre le
six ièm e, suivant la règle nom ina ipso ju re dividuntur.
4°. 1 /article X X II I de la loi du 11 brum aire an y ,
donne au saisi et aux créanciers la voie de l ’a p p el, tant
contre le jugement qui déchoit des moyens de n u llité, que
contre celui d’adjudication. M ais le saisi et les créanciers
nejio n t pas liés entr’eux ; le saisi peut appeler sans les
créanciers ? et vice ve r s a , ceux-ci le peuvent sans lésai si.
Il n’y a entr’eux de rapport que celui que , en cas de
reform ation du jugem ent, le bénéfice en reflue égale
ment sur le saisi et sur les créanciers, en cas de vilité
du p rix de l’adjudication.
Cela posé ; le saisi ayant la faculté d’appeler sans les
G
�( 18 )
_
créanciers, et ceux-ci le pouvant également sans le saisi,
il s’ensuit que lorsque l’on veut acquérir la fin de non
re ce v o ir, lorsque l ’on veut donner à l ’adjudication l’au
torité de la chose ju g ée, il faut la signifier à toutes les
parties intéressées : n’en om ettcroit-on qu’u n e , elle seule
peut appeler dans les trente ans.
V o u d ro it-o n considérer le saisi comme le procureur
des créanciers inscrits, contre le poursuivant et adjudi
cataire? M a is, suivant Jousse, une signification, faite au
dom icile 'du procureur-,--même-à un-dom icile é lu , ne faisoit'pa? -courir--la- fin..de.non recevoir , des d ix ans : mais
la loi de 1790 exige une signification f a i t e à personne
ou dom icile.
L es m ots, signification f a i t e â personne ou dom icile,
sont de la même rigueur que le délai de trois m ois; en
m atière rigoureuse , on ne peut rem plir par équipol
lence ce que commande une loi.
A in si, la signification, faite par le poursuivant, ne
sauroit jamais être considérée comme faite ni explicite
ment ni implicitement par les créanciers inscrits.
E lle ne sauroit l’être explicitem ent, parce q u e, si le
poursuivant s’avisoit de les y com pren dre, ils pourroient
le désavouer.
^
_
E lle ne sauroit l’etre implicitement , parce que le pour
suivant 11’est point le mandataire des créanciers inscrits.
Ils ne l’ont chargé de rien ; ils ne l’ont pas chargé de
faire vendre. S’ils avoienl voulu en venir là , ils l ’auroient fait eux-m êm es, et m ieux que le citoyen D usson,
et sans détours. L eu r inscription aux hypothèques n’a
d’autre objet que de veiller à leurs intérêts, de les infor-
�( i9 )
mer de ce qui se passe , et de les mettre à même de
s’e x p liq u e r, suivant les cas.
P ar ces raisons, c’est une grande erreur , de la p aît du
cit. Dusson, que de prétendre que le poursuivant rep iesente la généralité des créanciers inscrits ; cela n’étoit pas
vrai avant la révo lu tio n , et cela ne l’est pas plus depuis
la loi du i i brum aire an y.
A v a n t la ré v o lu tio n , dans les discussions sur saisies
réelles , la masse des créanciers n’ étoit point représentée
par le poursuivant : cliacun y discutoit ses m terets; il n y
avoit de réunion entr’e u x , que lorsqu’il s’agissoit de choses
communes à tous ; et alors ils figuroient dans la personne
du procureur ancien des opposans.
Depuis la lo i du n b ru m aire, les créanciers inscrits
sont contre le poursuivant. C elu i-ci e s t, p ar l’art. V I de
cette l o i , obligé de les appeler à la vente ; eux sont
autorisés, par l’art. X X I I I , à proposer des nullités contre
la procédure : s’ils ne sont pas conTens clü'jugement inter
venu sur leurs m oyens, ils peuvent én interjeter appel.
Dans cette p o sitio n , il est ridicule de prétendre que
la signification, faite par le poursuivant ou l’adjudicataire,
est censée faite également au nom des créanciers ins
crits, et qu’elle suilit pour faire courir le délai de l’appel.
Ce ridicule est d’autant plus g ra n d , que ccseroit mettre
le pour et le contre dans la même m ain; cc seroit icndre
impossible l’exécution de l’article X X 11I de la loi du 11
brum aire.
E n effet, cet art. porte: « L e saisi NI LES CRÉANCIERS
« ne peuvent exciper contre Vadjudicataire d'aucun
« moyen de n u llité, ou om ission de fo r m a lité s , dans
C a
'
�« les a c te s de la p oursuite, q u ’a u t a n t q u ’i l s l e s a u
« R.OIENT PROPOSÉS àV'audience oiiTadjudication aura
« eu lie u , s a u f l ’a p p e l t a n t d u j u g e m e n t i n t e r
« VENU A CET É G A R D , QUE DE CELUI D’ADJUDICATION,
k s i Ton opposoit à ce dernier quelque nullité ou Vomis-
« s ion de q u elq u u n e des form a lités prescrites. »
A in s i, point de doute que les créanciers peuvent ap
peler. O r , contre qui le peuvent-ils, si leurs moyens de
nullité sont rejetés, ou si le jugement d’adjudication est
v ic ie u x ? contre celui qui a fait rendre ces jugem ens,
c’est-à-dire, contre le poursuivant. Il ne faut donc pas
accorder que la signification qu’il fait au saisi, est cen
sée faite au nom de tous les créanciers in scrits, parce
qu’alors la voie de l ’appel seroit impossible ; parce que
ce poursuivant auroit p a r là un moyen trop facile, pour
se dérober aux vices de sa procédure.
. '
5 °. Enfin , les enfans Cham pm artin n’ont pas été ouïs
dans le jugem ent d’adjudication du 8 floréal an 9 ; il est
par défaut à le u r é g a r d , ~ëfTT~ne leur a pas été encore
signifié ; ain si, le délai de l’appel n’a pas encore com
m encé de courir.
E n vain le citoyen Dusson dit-il , qu’il représenloit
la masse des créanciers, et que d è s -lo r s il est réputé
contradictoire avec tous.
'
Ceci n’est qu’ une subtilité. i ° . Nous avons prouvé que
le poursuivant ne représenle pas les créanciers, puisqu’il
est leur partie adverse , et q u ’ils peuvent lui opposer des
moyens de n u llité, ap p eler, etc. 2.0 A u palais, nous ne
connoissons que deux espèces de jugem ens, les contra
dictoires, cl ceux, par défaut : dans les contradictoires,
�il est fait mention que telles et telles-parties ont ete ouies
par tel leur avoué ; lorsque cette mention n’y est p oin t,
le jugement est par défaut. I c i , pas de mention que les
enfans Cliam pm artin ont été ouïs : le jugement est donc
par défaut : ce fait répond à tout ce que dit le citoyen
Dusson.
• D ira-t-on e n c o re , comme le citoyen D u sson , que s’il
en était a utrem en t, les juge?nens cCadjudication ne trans
m e tta ie n t qu’u'nê propriété précaire pendant trente ans.
M ais .pour éviter le précaire , vous avez un moyeu
facile ; faites signifier aux créanciers inscrits.
M ais les choses ne peuvent pas être-en fluctuation
pendant trente ans. Introduisez Tordre du p rix de l’ad
judication ; demandez que les créanciers produisent leurs
titres : vous en avez le droit par l ’art. X X X I I de la loi
du 11 brumaire. S’ ils paraissent et demandent collocalion ,
ils acquiescent à l’adjudication-, et vous êtes tranquille :
si.certains ne paroissent pas, l’ordre est fait et h om ologué;
les créanciers colloqués sont p a y é s, les défaillons sont
d éch us, e t vous êtes également tranquille.
D ’apres cela , nous voyons bien clairem eut que le
citoyen Dusson *a créé des monstres pour se rendre un
peu reeommandable. M a is , dans le fa it, son véritable
objet est de couvrir les fautes énormes qu’il a faites, h
dessein peut-être , dans sa procédure en expropriation ,
pour éloigner les enchérisseurs, et avoir pour 5 i , 600 ir. «•
des biens que tous les conuoisscurs du canton portent ù
plus de 100,000 fr.
- Dans son m ém o ire, le citoyen Dusson a mis en pro-*''*
position .que les enfans Cliampmartin sont sans qualité ,
�I
( 22 )
com m e sans in té r ê t, pour soutenir leur appel. Nous
avons bien trouve et débattu ce qu’il a écrit sur le défaut
de qiiiilité , mais il n’a dit mot sur le sans intérêt : pour
quoi ? c’est là sans doute le sujet de sa colère , de son
d ésesp o ir , et de ses ruades contre tous ceux qui prennent
la défense des m alheureux enfans Chainpm artin.
E h quoi ! les enfans Chainpm artin n’ ont pas d’intérêt
à soutenir leur appel ! et si l’adjudication est maintenue
ils n’ont r ie n , et le citoyen Dusson bénéficie de plus
de 50,000 fr. et le citoyen Dusson insulte à leur misère!
L ’homme a u x algarades ose lu i prêter assistance pour
cela : le cœur s’en ir r ite , la raison s’en r é v o lte , et la jus
tice en vengera nos infortunés cliens!
'
r
t*
ry
A .
.
!
j
C H A P I T R E
III.
N u llités ou om issions de fo r m a lité s contre Vadjudi
cation j etc.
t
Les enfans Chainpm artin ont des- moyens qui nous
paroissent bien forts, et contre la sentence d’adjudication,
et contre tout ce qui a précédé. Examinons-les séparé
'
m ent , et commençons par ceux contre le jugem ent d’aduidicatiou.
'
ü o A iï, f
§-
Ior-
A d ju d ica tion .
A'jpfdZ*
ï>rcm ii.rcm cnt ; dons ce jugement les qualités des enfiins
Chainpmartin lie sont pas exprimées. Ceci est une omis-
r
i
�( 23 )
sion de ce qui est prescrit par l’art. X V du titre V de la
lo i du 24 août 1 7 9 0 , portant : « L a rédaction des juge« m en s, tant sur appel qu’en prem ière instance , con« tiendra quatre parties distinctes.
« D a n s la prem ière , les nom s et les qualités des
'« parties seront énoncés.
« Dans la seconde, etc. »
'
L ’art. II de la loi du 4 germ inal an 2 , porte : « A
« l’avenir toute violation ou om ission d es,fo rm es près« cri tes en m atière civile , p a r les lois ém anées des
ft représentans du peuple , depuis 1 7 8 9 , QUAND MÊME
« ELLES NE PRONONCEROIENT PAS EXPRESSÉMENT LA
« p e i n e d e n u l l i t é , d o n n e r a o u v e r t u r e <1 c a s s a t i o n . »
A rt. I V . « Cette violation ou omission ne peut donner
« ouverture à la cassation, que lorsqu’elle a été alléguée
« par l ’autre partie ( celle contre laquelle il y a viola
it tio n , etc. ) devant le tribunal dont celle-ci prétend
« faire annuller le jugement, pour n’y avoir pa<= eu égard. »
D e ces deux articles il suit que ce qui est moyen de
cassation au tribunal de cassation, est sûrement m oyen
de nullité au tribunal d’appel.
Ici les qualités des enfans C h am pm artin, et autres
créanciers, n’étant pas énoncées dans le jugement d’ad
judication, il en résulte , i° . omission de l’ une des quatre
formalités voulues par la loi du 24 août ; 20. nullité du
ju g em en t; suivant la loi du 4 germ inal an 2.
L e citoyen Dusson convient du la it de l’omission; mais
il soutient que les enfans Cham pm artin n’éloient pas dé
fendeurs , parce qu’en expropriation forcée il n’y a que
�( 24 )
deux parties, le p o u rsu ivan t, qui est le demandeur, efc
le saisi, qui est le défendeur.
L e citoyen Dussonest dans l’erreur; il est démenti par
la lettre et l’esprit de la loi du n brum aire an 7. Sui
vant cette l o i , les créanciers sont, tout aussi-bien que le
saisi , défendeurs en expropriation , ou il faut aller jus
qu’à dire que le saisi lui-m êm e n’est pas défendeur.
E n « ffe t, 1 '\ après avoir , dans ses premiers articles,
déterm iné les formes des affiches, du dépôt au greffe et
des procès verbau x d’apposition des affiches, cette loi ,
article V I , porte : « Ces procès v e r b a u x , ainsi que les
« affiches, seront n otifiés, et copie en sera laissée , tant
« au s a isi q u a u x créanciers in s c r its , etc. »
V o ilà tout ce que dit la loi pou r exprim er de quelle
m anière seront appelés et le saisi et les créanciers; elfe
n’exige pas plus respectivement au saisi que respective
ment aux créanciers.
.
Cependant le citoyen Dusson est obligé de convenir
que le saisi est défendeur en expropriation. D ès que les
créanciers sont appelés en justice dans la même form e
que le saisi, il faut en conclure que les créanciers sont
défendeurs, et que leurs qualités doivent être énoncées
dans le ju g em en t, à peine de n u llité , suivant la loi du
4 germ inal an 2.
20. Les créanciers inscrits o n t, de s u o , le droit d’ap
peler du jugement d’adjudication. Ce droit leur est donné
par l’article X X 1U de la loi du 11 brum aire an 7 ; ils
doivent donc être parties dans ce jugement : sans cela ils
uepourroient pas interjeter appel, parce que cette voie ne
peut
�'
O B
.
S U R
■
L E
S E R
V A
D É F A U T
T I O N S
D ’ I N T É R Ê T .
CSuite du paragraphe I I ypage 16. )
| Ï - J e s enfans Champmartin répètent éternellem ent
,
^ ns leur mémoire , que la valeur du bien de Bierrë ,
r|
acquis en 1 7 8 2 ,au prix de 92,000 liv. , a suivi la pro
u Sression des tem p s, et qu’il vaudrait aujourd’hui au
j\ moins 100,000 liv. Mais on dissimule i.° que 1 acqui«ition de 1782, fut un coup de tête de la part du cit.
Champmartin et de sa m è r e , car un autre acquéreur
„1
‘/en avait fait marché qu’à 6 3,000 liv.
i . a.° Que ledit Champmartin s’y est ru in é , et qu’il
I
doit plus que le prix de ladite acquisition; 3.0 que
|
dîme de vin et de grain perceptible dans les terri-
I
toires de Clairac et
M arsillac , était de la comprise
|
de la v e n t e , et qu’elle a été supprimée ; 4 .u qne la
^ *ecolte qui devait être conduite aux frais du vendeur
(
)usqu’à la St.-Jean
1783, faisait
partie
de la
v en te;
^ 0 était aussi de la comprise de ladite vente , partie
|
I
|
t
mobilier de la m aison, le cuvage tout m eublé et
Ustencilé de ses • cuve» grandes et petites, la futaille ,
tous les outils et harnais de labour , enfin les chevaux
®t bêtes à corne qui ameublaient la co u r; 6. quo
\
ledit Champmartin a aliéné 12. à 15 septérées de terre
�des m eilleures qui envoisinaient ses bâtimens ; 7 .0 (î1'/
l ’époque de ladite acquisition, les héritages étaie^
entourés d’arbres et qu’ils ont été tous arrachés ; ^
qu’il a laissé dépérir la maison et bâtimens , - que u
granges et étableries se sont éboulées; 9.® qu’une ri13
vaise administration réduit ledit bien à tel état
gradation, qu’il faudrait pour le rétablir plus de 2A10 ^
liv. de mise de fonds;
i©.° que le revenu net ilïlP,
.sable n’en e st, d’après les matrices des, rôles , que de
fr. 18 sous ; de sorte qu’en achetant ce bien 6o»°
liv. j compris les charges d’affiches et tous les fi'alS
procédure, le C. Dusson l ’a acheté au prix de vi1^ l
huit fois le revenu imposable.
,
Mais quand il y au ra it, par im possible, une ^
mentation de 20 à 2Ô3ooo liv. s ils n ’en seraient V ,
plus avancés, voulant faire honneur, à ce quils tl,s®
aux dettes de leur père ; car celles qui sont inscflte *
suivant les extraits qu’en a retiré le C . Dusson,
tent en principal
à 7 4 , 0 13
l i v , non compris i ’enc° ^
de l ’année du capital desdites inscriptions; les “e
privilégiées, q u i, suivant l ’art. XI du chap. IV
^
loi du 11 brum aire, doivent passer avant toutes ^
d ettes; l ’inscription indéfinie des enfans C ham pm ^ '^ ,
on peut aussi m ettre en ligne de compte- 20 à 2^ jj/
liv. dus à différens émigrés rentrés, dont réclai^ 11 |
de leur part.
Ainsi la déchéance de l ’adjudication de l ’an 9 ’
leur procurerait aucun profit; par
conséquent l ‘l
nem ent avec lequel ils poursuivent le G. Dussofl*
d’autre intérêt que celui de la passion.
j
(
�- ( 25)
#
peut être em ployée qu’après l’épuisement du prem ier i)Vy i .'
degré de juridiction.
L e citoyen Dusson p eu t, s’il le juge à p ropos, se traî
ner tant qu’il lui plaira sur ce m oyen ; il peut , à son
g ré , le taxer de chicane absurde; cela ne nous em pê
chera pas de croire que les enfans Cham pm artin ont
raison, et que sa réponse n’est qu’une pitoyable algarade.
Secondement. Il saute aux yeu x que le citoyen Dusson
■
.
.
.*
a imaginé tout ce qu’il a pu pour éloigner les concurrens , et devenir adjudicataire à v il prix. P o u r s’en con
•
vaincre , il suffit de lire les conditions de son affiche et
d’exam iner sa conduite lors de l ’adjudication,
A F F I C H E S .
■
'
'
•
1 °. E lle s , contiennent, par le m enu, le détail de tous
les immeubles saisis, Ghaque h éritage, composant les
divers d o m a in e s y est désigné par sa n a tu re , son éten,d u e , sa situation, et ses nouveaux tenans et aboutissans.
'
2P. Dans les conditions de l’adjudication , le citoyen
Dusson im pose, n°. 4 , à l’adjudicataire, l’obligation de
lui p a y e r, sans terme n i délais la somme de 32,000 fr.
ainsi que ses intérêts et frais, et cela, avant tous autres
créa n ciers, qu’il renvoie à l’ordre (1),
N°. 4 . « De payer audit cit. D usson-Poisson, s a n s t e r m e n i
» h é la i , les 3a,000 fr. en prin cip al, et tous les intérêts éclms et
» irais , pour raison de q u o i la vente est poursuivie, a v a n t t o u s
•» a u t u k s c r é a n c i e r s , comme bailleur de fo n d s, suivant Tar
(i)
D
pL,
�'y jf c
,
[ / Xy fr :
Aie*'
.
(
2
6
}
.
' 3°* L e citoyen Diisson y stipule que, si dans l ’affiche
sont compris des immeubles appartenons à des tiers,
ils en seront rayés sur la simple justification des titres,
ec sans jugement de revendication (i). A insi donc le
citoyen Dusson se met au-dessus de l a - l o i , et se rend
juge absolu, (p uisqu e la loi dit que la revendication
sera jugée avant l’adjudication ).
4°. L e citoyen Dusson avertit le p u b lic, que les biens
-saisis seront vendus', ou partiellem ent ou en masse,
et que dans le cas où les enchérisseurs pour le tout
» ticle X I V , cliap. Y de la loi du x i brumaire an y , e t l e s u r
« p l u s d u d i t p r i x , e t î c a s d ’ e x c é d a n t , aux créanciers inscrits
i> qui seront utilement colloques par le jugement qui en homolo~
v>guera l’ordre et distribution, ainsi qu’ il sera ordonné par le
» jugement, et les.bordereaux qui seront délivrés aux créanciers. »
Pourquoi cette clause contre la vérité des principes ? Parce
que 32,000 fr. ne naissent pas sous la main ; parce que le citoyen
Dusson vouloit épouvanter les enchérisseurs ; parce qu’il vouloit
les priver du délai qu’il y a forcément entre l'adjudication et la
perfection de l’ordre.
’
I c i, le citoyen Dusson en a imposé : les créanciers que le sieur
D uroset avoit chargé le sieur D claboulaic d’acquitter, en lui
vendant en 1774 lcs Billauds et la Jonclière, doivent passer avant
le citoyen Dusson ; de ce nom bre, la citoyenne A lla rd , etc.
le citoyen Dusson a donc cherché à induire en erreur.
(1)
N°. 8. Si parmi les immeubles ci-énoncés, il s’en trouvoit
apparlenans à des tiers, en justifiant du titre de propriété ou
d’acquisition, h l’audience indiquée, l’héritage revendiqué sera
rayé de la susdite affiche , sans qu’ il soit besoin d’un juge
ment de revendication, art• X X V I c la loi du 11 brumaire an 7).
�( ^7 )
'
couvriroient les enchères partielles, ils auroi ent la p ré
férence (i).
5 °. L e citoyen Dusson ne garantit point ni les objets
m eubles, ni les mesures des immeubles : il en laisse le
plus ou le moins de contenue en perte ou gain pour l’adjudicataire (2) ; c’est-à-dire , qu’il présente des incertitudes
pour que les mises soient moins fortes.
6°. Enfin le citoyen Dusson ne veut pas q u e , après
l ’adjudication, le saisi, l’adjudicataire, ni les créanciers ,
puissent avoir aucun recours contre lui poursuivant (3).
(1) TS°. g. « Uadjudication sera faite ou partiellemeut, con
» fermement aux lozs ci-après énoncées, » ( c ’est le cit. Dusson.
lui-même qui iait ces lo is, il ne peut donc pas les récuser, si
elles prononcent contre lui , les voici teltes qü’il les a dictées ) :
)! mais à condition que la vente n’aura lieu par parties détachées1,
» q u ’autant qu ’elle le sera en m êm e tem ps de tous les objets com
» pris en la présente affiche ; le poursuivant ne vo u lan t séparer les
» im m eubles qui sont grevés de son h yp o th è q u e , qu’autant q u ’il
» seroit payé de toute sa créance tant en p rin cip a l, intérêts que
» frais. »
Les enchérisseurs pour le tout, d a n s le cas ou i l s
couviutvoiENT les e n c ii Èues p a r t i e l l e s , auront la préférence. »
N °. 10. «
(2) N°. 12« « L ’adjudication sera faite avec toutes les charges
» dont les immeubles peuvent être légitimement grevés, et s a n s a u
» C U N E G A R A N T I E D E S O B J E T S , M E U B L E S E T M ESUIIES DES IM M E U B L E S ,
» portés aux étals de sections et matrices des rôles, indiqués par
» la présente affiche, l e t l u s o u l e m o i n s é t a n t a l a c h a r g e
» d e t / a d j u nie a t a 1 n e , et sans aucune garantie des dégradations.»
( 3 ) N “. i3 . » Enfin que le citoyen Leclcre C ham pm artm ,
j) l’adjud ica taire et tous créanciers ne pourront conserver la plént-
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�C 23 )
#
V o ilà bien des entraves ; elles font sentir que le citoyen
Dusson convoite le bien saisi : s’il l’obtenoit justem ent,
nous nous garderions bien de nous en plaindre. Il est
créancier , cela est incontestable ; et notre désir le plus
c h e r , est qu’il soit payé de ce qui lui est du légitim e
ment. Nous disons légitim em ent, parce q u e , dans le fa it,
il demande plus qu’il ne lui appartient : cela sera dé
m ontré en temps et lieu. Mais que le citoyen Dusson ait
em ployé des moyens tortueux pour atteindre son b u t;
qu’il ait hérissé la vente de difficultés telles , que tout
hom m e sage en ait été repoussé, c’est ce que nous ne pou
vons lui pard on n er.,
•
A D J U D I C A T I O N .
L e citoyen M ancel , a v o u é , requiert la mise aux en
chères , et l ’adjudication. D es feux sont allumés pour
l ’adjudication du tout : quatre enchérisseurs seulement se
présentent, le cit. D ussonjlu i-m ê m e , le cit. M an cel, son
a v o u e ,le cit. Tessot et le cit. M ou illard , gendre et com
----mensal du cit. Dusson.
Dans le f a it , le citoyen Dusson n’avoit pour concur
rent que le citoyen T esso t, parce que le citoyen M ancel
et le citoyen M ouillard n’étoient là que pour la forme.
T o u s les autres assistans avoient été écartés par les moyens
de nullité : personne n’auroit osé acheter un procès.
» tude de leurs droits et de leurs moyens respectifs
» POURSUIVANT,
U N E FOI S L* A DJ I NDI C A T I ON
» cO« eu la présente af fi che, rn0îi0?<c£E.
conthe
i ,e
et YClUC tlca objets 011011
�*9 )
L a présence du citoyen Tessot contrarioit les vues du
citoyen Dusson. Pour l’é lo ig n e r, le citoyen Dusson fait
observer que , son afïiclie portant que la vente auroit lieu
par enchère totale et par enchères partielles, la totale ne
l’em porteroit que dans le cas où elle surpasseroit les par
tielles : l’adjudication sur la totalité ne seroit que p ro v i
soire , et subordonnée aux enchères partielles.
L a dernière mise étoit de 40,000 francs sur le citoyen
M ouillard , gendre du citoyen Dusson. A utres deux feux
sont allum és, et s’éteignent sans que personne dise m ot.
L e cit. Tessot, qui aperçoit du manège , et qui d’ailleurs
ne veut pas se jeter dans un p ro cès, se retire et ne reparoît plus. L ’audience est levée , et continuée à quatre
heures de relev ée.
L ’in terv alle est em ployé très-u tilem en t : on se pro cure
quelques citoyens com plaisans p o u r figu rer aux enchères.
Les biens saisis sont divisés en quatre lots.
L e prem ier com prend la maison de Bièvre, l’enclos, etc.
et trois des personnages nommés par le cit. Dusson font
enchère. Les citoyens M a n ce l, Dusson et M ouillard n’y
sont plus pour rien. Dans l’afïiche , le citoyen Dusson
avoit fait enchère de 10,600 fr. lia dernière mise est à
18,000 fr. de la part du citoyen D eboudard.
L e second lot embrasse tout le domaine des Billauds.,
composé de bûtimens , p r é s , terres et vignes : dans l’affiche , le citoyen Dusson l ’avoit porté à la somme de
n , 5oo fr. U ne seule enchère est faite par un citoyen
N euville ; elle est de 11,600 fr. Tous les autres feux sont
allum és, et éteints, sans q u e personne dise mot.
L e troisième lot est du domaine de la B ou lau d e, com~
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posé aussi de bâtimens , p rés, terres et vignes. Dans l’af
fich e, le citoyen Dusson l’avoit mis à n , 5oo francs: un
M . Papon le porte à 11,600 francs. D ’autres feux sont
a llu m és, et éteints , sans aucune autre mise.
L e quatrièm e lot est de la locaterie de la Jonchère.
T ro is enchérisseurs la portent successivement à 4,000 fr.
et en demeurent là.
'
Les enchères partielles forment un total de 45,200 fr.
L ’on en revient aux enchères pour le tout : alors se
présentent d’abord le cit. M ancel et le cit. M ouillard pour
le cit. Dusson; après, un citoyen D eboudard; et enfin, le
citoyen D usson, qui parle et dit le d ern ier m o t, lorsque
les "choses sont au point convenu entre les conjuréscontre l’intérêt du saisi et ses créanciers légitimes.
Les enchères des cit. M ouillard , M ancel et D eb ou dard,
s’ étoient élevées graduellem ent ^ la somme de 5 i , 55 o fr.
le cit. Dusson y ajouta 5 o francs, et fut proclam é adju
dicataire, m oyennant 5 1,600 fr.
L a mise aux enchères partielles qui a été em p loyée,
n ’est pas celle avancée par les affiches. L e citoyen Dusson
y avoit annoncé que les biens saisis seroient vendus p ar
tiellem ent ou en gros , et que le mode qui donneroit le
plus auroit la préférence. P ar vente en d étail, on doit
entendre que chaque immeuble se vend séparément. L e
citoyen Dusson l’avoit donne à entendre ain si, puisque
son affiche contcnoit la description du tout , article par
article. Si on l’eût fait ain si, tous les biens saisis auroient
rendu plus de 120,000 francs. Tel achète un héritage plus
qu’ il 11e v a u t, parce qu’il le jo in t, ( quôd sœpè confines
Jhn dos supra ju sta n i ccstuncitionem mterest nostra
�( 31 )
acquirere ) ; et qui ne veut pas ou ne peut pas acheter
un domaine entier : les petits objets ont beaucoup d’ama
teurs ; la concurrence fait la hausse.
A u lieu de cela , on a mis à l ’enchère des domaines
en entier : on a donc trom pé les créanciers et le public ;
on a fait autrement qu’on avoit annoncé.
Nous concevons que le citoyen Dusson auroit pu se
dispenser de requérir la vente partielle ; mais l’ayant in
séré dans son affiche, en ayant fait une l o i , il a dû s’y
con form er, h peine de nullité.
.
L a vilité du p r ix , à 5 i , 6 oo francs , saute aux y e u x :
on la touche avec l a main.
i°. L a maison de B iè v re , etc. sont mis dans l ’afficlie
par le citoyen D u sson , seulement à 10,600 francs; les
enchères partielles sont de 18,000 fr. en résultat : il y
auroit donc une différence de 7,400 fr. à l’avantage du
saisi, ce qui ferait près de quatre cinquièmes en sus.
L e citoyen Dusson avoit porté chacun des domaines
des Billauds et de la Boulaude à n , 5oo fr. Suivant lu i,
chacun d’eux valoit donc plus que B ièvre; et néanmoins
ses prétendus enchérisseurs n’ont fait au-dessus de lui
q u ’une mise de 100 francs; ce qui présenterait un p rix
de u ,6 o o fr. pour chacun de ces deux domaines. S ’il y
.avoit eu du sé rie u x , si les enchères n’avoient pas été un
jeu peu lo u a b le , il est à croire que ces deux domaines
auraient eu la même progression dans les enchères : il
est à croire que, même en adjudication, ils auraient donné
plus de 5 o,ooo francs ; surtout si l’on considère , i°. qu’en
1774 le sieur de la Boulayc avoit acquis le domaine des
Billauds ? la locaterie de la Jon clière, et line petite dîmerie ?
�( 32 )
moyenant 30,900 fr. ( nous en avons le contrat ) ; 2°. qu’en
-1782 le citoyen Cliam pm artin , p è r e , acquit B iè v r e ,
les B illau d s, la Boulaude , la Jonchère et la d îm erie,
moyennant 92,000 fr.
Dans l’addition à son m ém oire, le citoyen Dusson d it,
i° . queCtiam pm artinpèreavoit acheté chèrem ent en 1782.
•( L ’acquisition fut faite par madame L eclerc-B eauvoisin
a ieu le , qui eut la sagesse de se p r o c u r e r, préalable
m ent, des renseignemens certains sur la véritable valeur),
20. Que la dîmerie a été abolie par la révolu tion, et
;que notre pere a vendu douze à quinze septcrées des
meilleures terres. ( L a dîmerie et les terres aliénées par
Cham pm artin père, valoient à peine 10,000 francs en
17 8 2 , et depuis 1782 jusqu’en l ’an 9 , le p rix des biens
ruraux est plus que tiercé. D ’ailleurs les biens en ques
t io n devoient des cens , etc. puisqu’en 17 7 4 le sieur
D uroset en chai'gea le sieur de la B o u la y e , et q u’en
1782 celui-ci en ch argea, à son to u r , Cham pm artin
,père ).
•
3°. Que Champmartin père a dégradé les bâtimens
de B iè v r e , et fait couper les arbres enradiqués autour
des héritages. ( L e citoyen Dusson parle ici contre sa
science : en l’an 9 , les choses étoient en m eilleur état
qu’en 1782. Q u ’il ne nous parle plus de son procès ver
bal du 18 messidor d ern ier; il sait bien comment il a
été fait ).
4 0. Q u e , suivant les matrices des rôles, le revenu
présumé n’est que de 2 ,14 2 livres 18 sous. ( Il est inouï
• que l ’on ait jamais calculé la valeur des b ien s, d’après
les matrices des rôles. L ’on sait bien que dans les temps
chaque
�\
( 33 )
#
.
cliaque contribuable a fait tout ce qu’il a pu pour rendre
ses revenus moins apparens. L e terrain des biens en
question est aussi productif que celui des meilleurs
fonds de la Lim agne d’A u vergn e ).
5°. Que le citoyen Cham pm artin fils aîné, et le citoyen
S im on n et, curateur des trois m in eurs, étoient présens
lors de l ’adjudication , et qu’ils n’ont dit m o t , parce
qu’ils ont jugé que les 5 i , 6 oo francs et les frais de l’adju
dication balançoient la valeur des biens. ( D ès que le
citoyen Dusson en appelle au citoyen Sim onnet, celui-ci
lu i répond que ce bien vaut plus de 100,000 fran cs, et
qu’un administrateur bien entendu en retirera constam
ment. 5,ooo francs de re n te , toutes charges déduites ).
6°. Que ce bien est encore dépi'im é p a r les dégradad a tio n s et les exp o lia tîo n s faites après l'a d ju d ica tio n .
( D ’une part, ces cxpolialions et dégradations sont une
calomnie ; d’un nuire côté , suivant le citoyen Dusson
lu i- m ê m e , elles seraient postérieures à l’adjudication,
et elles n’influeroient point sur l ’appréciation. du b ie n ,
au temps de l’adjudication ).
Troisièm em ent, les enchères faites par les citoyens
M o u illard , T esso t, D eb ou d ard , P a p o n 'et autres, ont
été faites sans l’assistance d’un avoué ; le citoyen Dusson
seul avoit le sien à côté de lui. Les enchères M ouillard ,
etc. sont nulles, et opèrent la nullité de l ’adjudication }
suivant la m axim e, q u i cadit à sy lla b a , cadit ¿1 toto. •
• Nous convenons que la loi du 11 brum aire an 7 f
porte , article X I X : « T o u t citoyen peut enchérir par
« lu i-rnônic ou par autrui. Ceux qui enchériront pour
« un tiers , 11e peuvent être contraints de justifier de leurs
E
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( 34 )
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« pouvoirs ; mais ils sont tenus de faire , dans les v in g t« quatre heures, leur déclaration en com m and, etc. »
L ’article X X dit , que le saisi ne pourra se rendre
adjudicataire, et que celui qui l’aura fait pour lui ( saisi )
en dem eurera responsable.
L e m ême article dit : Que dans le cas où l’on se rendroit adjudicataire pour un insolvable , celui qui pren
dra l ’adjudication en sera responsable. .
• L ’article X C I V de la loi du 27 ventôse an 8 , porte:
« L es avoués auront exclusivem ent le droit de pos«_ tuler et de prendre des conclusions dans le tribunal
« pou r lequel ils seront établis. »
P o s tu le r , disent les praticiens, et notamment D enizart,
verbo
«
«
«
«
po stu latio n ,
est l’exercice du droit « q u e les
procureurs ad lites ( aujourd’hui les avoués) ont de
représenter leurs cliens en justice; de procéd er, fo r m er des dem andes , d éfendre, et généralem ent signifier des actes en leu r nom . »
A in si donc toutes les fois qu’ il s’agira de postuler ou
de conclure, il faut un a v o u é , k peine de n u llité , sui
vant les lois des 27 ventôse an 8 , et 4 germinal an 2.
O r > pour les enchères, il faut postuler, il faut con
clure. S i, sur une enchère à la somme de 10,000 francs,
un feu s’éteintsans autre enchère, il faut demander q u e ,
faute de plus haut m e tte u r, le bien soit adjugé à l’en
chérisseur. Quand on fait une m ise, 011 dit a la justicer
Je prends cet objet moyennant cette somme; je conclus
à ce que vous me l’adjugiez moyennant celte som m e;
je contracte envers la justice l ’engagem ent de payer celte
�( 35)
somme ; mais tout cela ne se peut faire sans l’assistance
d ’un avoué.
Ce que disposent la lo i du 11 brum aire an 7 , et celle
du 27 ventôse an 8 , réunies, n’est que la répétition de
ce qu’avoit déjà statué l’édit de i 55 i , et ce qu’ensei-..
^
grioient M . le président Lem aître et d’H éricourt.
,^ .
Gomme la loi du 11 brum aire an 7 , l’article X de
l ’édit de i 5 5 i défendoit de recevoir l’enchère du s a is i;comme la loi du 11 b rum aire, l’a rticle X I défendoit la
* •
même chose par rapport aux personnes insolvables.
r I/article I X de cet édit porte : « E t seront tenus les
« enchérisseurs de nommer, leur p ro cu reu r, en faisant
« leur en ch ère, et élire^erTÎa maison dudit procureur ;
« e t a u t r e m e n t n e s e r a r e ç u e la d ite e n c h è r e .»
M . le président IiCmaître dit que si l ’enchère n ’est point
faite de cette m an ière, elle est-nulle, à raison de ces termes :
E t autrem ent ne sera reçueladite enchère. Q uando enim
statutum concipitur verbis prohibitions, elia in si non
adjiciat actum fo r e t-.nullw u, non tamen valet quod
agitur. L . non d u b iu m , cod. de legibus.
lia lo i du 11 bïurnnire an 7 laisse bien aux parties la
faculté d’enchérir; celle du 27 ventôse an 8 ne la leur
ôte pas, mais elle ex ig e , comme l’édit de i 55 i , l’assis
tance d’ iiu.ayoué.
'
•
* « L ’enchère,,dit d’IIéricou rl,. chnp. I X , a r t - X X V I I I ,
est un (iontrat q u e 'l’enchérisseur passe avec la justice,
« et par lequel il s’engage à se rendre ad judicataire, etc. »
Ce contrat 11’e peut pas se faii’e sans dem ande, sans pos
tulation; il fatil donc.rtn avoué. ^
.
D e cc que nous venons de dire il suit que les enchères
k
-
E 2 ‘
'
�.
(
3
6
)
faites par les citoyens M o u illa rd , etc. sans l’assistance
d’a v o u é , sont nulles; et cette nullité produit le même
effet que s’ il n’en étoit pas fait mention dans le jugement
d’adjudication.
\Mî
O r , par jugement du 14 floréal an 10 , plaidant le
.
citoyen M arie pour une partie saisie, et le citoyen D evèze
1
•.
A il
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• •
-1 > 1 .
.
,
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pou r le citoyen A lb a n e l, saisissant et adjudicataire , le
Mwvutf&vbf tribunal a annullé une adjudication sur exp ropriation,
f/ a W r
V
*
parce q u e , dans la sentence, l’on n’avoit pas fait mention
des noms des autres enchérisseurs; l’on avoit dit seule
ment qu’il y avoit eu plusieurs feu x, pendant lesquels
plusieurs enchères, etc. • .
^
I c i , plusieurs enchères, mais nulles; mais non mention
lég a le; e t, à p a r i; nullité de l’adjudication.
§.
II.
N otification a u x enfans Chanrpm artin, com m e créan
ciers inscrits.
Cet acte est infecté de nombre de vices : pour en bien
ju g e r , il faut commencer pai' établir certains principes.
i°. L ’article X X III de la loi du n brum aire an y , dit :
A u c u n m oyen de nullité ou om ission deform alités.
Il
faut rem arquer que cette lo i, dans aucun de ses ar
ticles, ne porte les expressions usitées dans celles d’avant
la ré v o lu tio n , les expressions a peine de n u llité ; en sorte
que celle du 4 germ inal an 2 est applicable dans toute sa
latitude; en sorte que lu znoinclre omission opère une
nullité.
�'
C 37 )
2°. Il ne faut pas croire q u e, par la loi du n bru
m aire, il y ait dérogation absolue aux anciennes lois, aux
anciennes coutumes et aux anciens usages qui iaisoient
lo is ; son article X X X V I dit seulement : « Toutes lo is,
« coutumes et visages antérieurs, demeurent abrogés E N
« CE
q u ’il s
« SENTE.
»
AÜB.OIENT
DE
CONTRAIRE
A
LA
PRÉ-
‘
D e cette disposition il suit, en prem ier lieu , que toutes
les fois que les lo is, les coutumes et les usages antérieurs
n’ont rien de contraire à cette lo i, ils ne sont pas abrogés;
ils sont encore lois. Il s’ensuit, en second lie u , que lors
que la loi du 11 brum aire est muette ou équivoque sur
quelque p o in t, elle doit être expliquée par les anciennes
lois. N on est novurn ut priores leges ad posteriores tra hantur. X/. 2 6 , au Lit. de legibus. Seci et po sterio res leges
ad priores p ertin en t, m si contrariœ sin t, idque m ultis
argiimentis prnbatur. L . 28, eod.
P o u r les exploits, nous connoissons deux sortes de for
m alités, les formalités intrinsèques , qui sont la substance
des exp loits, et les formalités extrinsèques et sans les
quelles les exploits sont nuls. Cette explication nous est
donnée par Jousse, tome 1 , page i 5 .
Dans l’espèce , la notification aux créanciers inscrits
pèche, et par les formalités intrinsèques, et par les forma
lités extTinsèqtTC57'Cornmençons par les e x t r i n s è q u e s .
A u nombre des formalités extrinsèqives^'iïoussü «place4a
nécessité d’écrire les exploits sur papier timbré. Il dit
tome 1 , page 16 : « Une autre formalité nécessaire aux
« exploits, est qu’ ils doivent êlro écrits su r papier thnhrê,
« même ceux laits à la requête des procureurs du r o i, à
�.
.
. . .
( s? )
.
...
« peine db nullité. » Il s’appuie sur l ’ordonnance du mois
de juin 1680, et les autres règlemens sur cette matière.
Dans la nouvelle législation, la loi du 13 brum aire an
7 , p o rte , i°. article X I I : « Sont assujétis au droit du
« tim b re, en raison de la dim ension, tous les papiers i\
, « em ployer pour les actes et écritures soit publics, soit
« privés. Savoir :
« 1 • L e s actes des n o t a i r e s , et les e x t r a i t s , c o p i e s et
« e x p é d i t i o n s q u i en s o n t d é l i v r é e s .
« C e u x d e s h u i s s i e r s , e t l es c o p i e s e t e x p é d i t i o n s q u ’ ils
« en d é liv r e n t. »
L ’a r l i d c
III a d é t e r m i n é l es p a p i e r s d e d i m e n s i o n ,
c e s o n l les f e u i l l e s d e 5 o c e n t . ,
cl les d e m i - f e u i l l e s d e
v
«
«
«
c e n t . , u n f r. 5 o c e n t ,
zü> c e n t .
L ’arl. X Y J I porlo. : c< Les notaires, huissiers , elc. ne
pourront em p loy er, pour les actes qu’ ils réd igero n t,
et leui's copies cL expéditions, d'autre papier que celu i
tim bré des déparlemens 011 ils exercenl leurs fonclions. »
L ’artirle X V i l I p o r lo : « L a
faculté ( d e
« extraordinairem ent) accordée,
faire t i m b r e r
p a r ¡ l' ar ti cl e Y II d e l à
« p r é s e n t e , a u x c i l o y r n R q u i v o u d r o n t e m p l o y e r d ’a u t r e
« p a p i e r j j j U ’ c x' h u f <mr m p a r l a r é g i n ^ e n le faisant t l m « brer
«
«•»vaut d ' e n ' i T . m '
usage7 t"st
ivtfiiditk
aux
ils seront fë?ius de so
rwr~ïTÏÏ~poj'!<’r timbré débité par la régir, n
n o t a it î^,
I
nuissirp,«!,
etc.
l i r a - t - o n q u e c e t t e l o i , p >r *011 nriicb* W V I ,
n°. 5 ,
p r' M; -’ r <* u n e ¡ m o n d e d ’ * 1 0 0 fr. e n e;:- . l e c o n t r a v e n t i o n
à 1’ . r . \ \ i I i , et q i i ‘ ’ l'-ni n e p Mt J' i - n j ' U ' e r la f x ' i n e
�( 39) '
M ais il n’y a pas m oyen de fuir la rigueur de la dis
position de la lo i du 4 germ inal an 2. Celle du 13 bru
m a ire 'a n 7 dit que les huissiers écriront leurs actes,
tant en originaux qu’en copies, sur du papier timbré de
dimension , et qu’ils 11e le pourront sur du papier tim bre
extraordinairem ent : elle est tout à la lois im pérative et
prohibitive*, comme im pérative, elle doit être obéie, u
peine de nullité , dit celle du 4 germ inal an 2 ; comme
p ro h ib itiv e , elle frappe forcém ent de nullité tout ce qui
seroit contraire à sa disposition : Q uando cni/n s(atulum
concipitur verbis prohibitivis , ctiam si non adjiciat
actum fo re nu Hum , non larnen valet quod agi tur.
ÜN’ im porle l’amende des to o IV. contre l'huissier *, celle
peine lui est personnelle*, s'étendroit-elle jusqu’à la partie,
il y aumit é g a l e m e n t milliu' : Scd cl s i /ex ulteriùs procedat cl peenaru- a d jic ia t, idem ad/tue diccndum e s t ,
modo pœ/ta a djic iatur a u n ulla tio u iactus , ut loquuntur;
nam et lune nullum est ipso jure quod factum e s t ,
f
,
tn-HWult
ÿ if
et prœtereà pivna , et adjecta annullationi prœstanda
est. E sem p la , dit V innius , habem us in /. 4 , /. 6 , cum
•
autli. seq. C. de incest, n u p .cl^ .
A in s i, amende par la loi du 13 brumaire an 7 , et
nullité par celle du 4 germ inal an 2 , el par l'ordon
nance de 1680 : conséquence irrésistible aux veux de la
raison.
Dan* l'espèce, la co p ie de l'alliehe de* procès v e r b a u x
.
t
d a p p o s i t i o n , de l'acte du d épô t tic l'alliehe au g p ' i . e de
C un; t , et de h n<'liticaiiôîiT^-i c*o|»ir ,,,> t,ul' <'•'* «ctr«
s u p p t w e lai.vM-e , dans le t e m p s . au\ 1 ;.| ns C’ h- mj>—
mu lti li } ^
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JiTp; irtïcT u r ' ’p p i ê r timbre e x t r a o r d in a i r e -
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( 40 )
m en t, en partie sur papier marqué au tim bre des jour
naux ( et non de dimension ) , et en partie sur papier
non timbré.
.
V o ic i l ’état exact de cette copie : elle est en trois grandes
feuilles. L a prem ière est m arquée au timbre de 1 franc
5o centim es; la deuxièm e, au tim bre de 5 centim es; et
la troisième est sans aucun timbre. Sur cette troisièm e,
est la copie du procès verbal d’apposition d’afïiclies à
Gannat. L a nullité ne sauroit en être m ieux établie : il
y a om ission, même violation d’une form alité extrin
sèque.
L ’on va jusqu’a articuler que l ’o rigin al de l ’affiche est
infecté du même vice. M ais le citoyen Dusson l ’a sous
trait de son dossier, dont nous avons pris com m unication:
le pourquoi en est frappant.
Quant aux formalités intrinsèques , il y en a de plu
sieurs sortes dans la procédure -du eitoyen D u sson , res
pectivem ent aux enfans Champmartin.
'cvJ-Tïi
_ "if
l0* ^ ’originsil de la notification aux créanciers est im , prim é en son entier. Peut-on croire que l ’huissier qui
faite éloit accom pagné d,’uix.impu jjuieiir ^ qui im prim oit sous la dictée de l’huissier à mesure que celui-ci
exploitoit ? L e citoyen Dusson p ro u v e ra -t-il que l’im prim eur ait prom ené ses caractères, ses presses et scs
<•
ouvriers à G a n n a t, à C h an tel, à Gharroux , etc. pour
im prim er l’exploit- 4 e l’huissioi-? —
'.U n v
^
V,
v
T o u t est im p rim e, ni£me Ja^matti-e-ulc de l ’huissier.
Cependant l’article II du t it r a i! de.l’iiixLQi:uiançc de 1667,
* 7
7 * *
x
porte; « Déclitrcron^flUSSi^M^. hms&ier^çt sar^cjis , pyr
% •->».%'. « leurs exp loits, les ju rid ictio n s où ils sont im inatriV'
« cillé s.
�( 41 )
« c u lé s , leur domicile , etc. le tout à peine de nullité. »
L e mot déclareront, signifie que c’est à l’huissier de
déclarer lui-m êm e, qu’il l’écrira de sa propre main : sa
m atricule doit être écrite par lui-mêm e. E n la sénéchaussée
d’A u v e r g n e , nombre d’exploits en retrait lignager ont
été annullés par cette seule raison; pourquoi? parce qu’il
s’agissoit de matière infiniment rigoureuse. I c i , il y a
même raison : une expropriation l ’est tout autant. A
A thènes , à R o m e , et en France , les subhastations ont
toujours été soumises à toute la sévérité de la- m axim e,
q u i cadit <i syllaba cadit à toto,
21°. Les enfans Ghampmartin o n t , par leu r inscrip
tion , élu dom icile chez A lexandre B ^ l l a t n o t a i r e à
G annat; la notification paroît avoir été faite chez un
cit. Rollat. Point de nom de baptême donné à ce citoyen
R ollat ; en sorte que l’on ne peut pas dire très-exaetement
que c’est le même Rollat.
Dans la même in scription , les enfans Champmartin
\
\
Jt
sont dits habitans du lieu de B iè v r e , village de Culhat ,
mairie d’Etroussat ; dans la notification , ils sont dits seu
lement demeuranfcen la commune d’Etroussat.
3°. C ’est le citoyen Baudet, huissier, qui a posé l’exploit
de notification. A u n °. 4 , il y dit qu’il a laissé aux enfans
Champmartin « copie cCautre procès verbal d’apposition
« de ladite affiche , j a i t e en la com m une de G a n n a t,
« EN MA niÉSENCE, p a r le cit. L a ssim o n n e , le ia
« germ inal an 9 , après m idi. »
Dans les numéros précédons , Baudet dit que les procès
verbaux d’apposition ont été faits-par V m cen t, huissier.
Dans le n °, 4 , il 11e dit pas que V incent a fait l’appoF
2
Io.
Cl/a.
CM LU a. b/KilcUJU.
�...............................
"
'
( 4 0
-sition d’affiches, à Gannat j il dit seulement, faite en la
com m une de G a n n a t, en ma présence, p a r le citoyen
Ija ssiin o n n e. Gela signifieroit que Lassim onne.auroitposé
l’affiche (et Lassimonne n’est point huissier) : cela signi
iieroit que Baudet, huissier, auroit fait le procès verbal
d’apposition ; ce qui n’est pas v r a i, puisque c’est l’huis
sier V incent, qui l’a fait. Il y a donc divergence entre
la notification et le procès verbal d’apposition. U n créan
cier inscrit a dû en induire qu’il y avoit fausseté, ou dans
la copie de notification , ou dans celle du procès verrbiriT"
d ’apposition. E n cet état des choses , il a dû ne pas y
c r o ir e , 'et. demeurer tranquille chez lui.
4 °. L a copie^de la notification aux créanciers ne con
tient point, assignation à l’audience du 8 floréal an 9 ,
jour indiqué pour l’adjudication. Il n’y a point d’assigna
tion ni aux enfans Charnpmartin., ni au cit. Slm on n et,
cu ra teu r, pour assister ses mineurs ; les uns et les autres
« ’ont donc pas été tenus d’y com paroir.
...
11 est vrai que l’art. V I de la loi du 11 brum aire an 7,,
d it: « S u r m it n o tifié s , et copie en sera laissée ta n t au
c< sa is i q u 'a u x créa n ciers , etc. » L e législateur ne se sert
........
pivs du terme ussig/rés.
■
M a is, c’est ici le lieu de ré p é te r, non est novitm ut
t p 7'io n s leges ad posteriores trahantnr. L ’art. X X X V I
de la loi du 11 brumaire an 7 11’abroge les ]ois., cou
tumes cl usages antérieurs , (,.ie dans les parties où elle
leur seroit contraire. Hors celle contrariété, point d’abrogaliou. Quand la loi nouvelle ne dispose pas sur un
p o iu t, l’ancienne loi et 1 ancien usage y suppléent.
1/
Les anciennes forjnes préliminaires aux ventes d’ im-
�\
'
C 43 )
‘
meuble?, sont remplacées par l’affiche. L ’affiche renferm e
ci elle seule la saisie réelle, les criées, la certification des
criées, et le congé d’adjuger. O r , la coutume de Bour
bonnais', art. C L , l ’édit de i 55 i p è t l’usage attesté par
tous les praticiens, voüïoient et’veûlent encore ùne.assignjr5'“
tion au saisi et aux créanciers. Il y en a plusieurs raisons
très-puissantes.
L a prem ière de ces raisons est qu’une affaire ne peut
être portée devant les tribunaux que par une assigna
tion. Sans assignation, les tribunaux ne sont pas saisis..
A in si celui q u i, par un e x p lo it, déclarerait simplement
qu’il demande telle chose, et s’il n’assignoit pas, il ne
pourrait pas dire qu’il a saisi même tribunal j il n’y aurait
pas moyen de statuer sur sa demande.. A in s i, celui qui
déclarerait simplement”, "jpà'r'exploil^-qu’ il appelle de" tel
jugem ent, ne pourrait pas dire qu’il a saisi le tribunal
d’appel. Il n’y aurait pas moyen de rendre un jugement
sur son appel.
L a seconde raison se tire de la loi du 11 brum aire an 7 ;
en l’article X X I I I , elle parle de jugement qui rejette les
moyens de n u llité , et de jugement qui adjuge. Dans la
règle, point de jugement sans demande préalable; et point
cfodemande légale sans assignation aussi préalable.
lia troisième raison se tîrô~üncôrê dé 'FürtT'XX^ I de
la même lo i, ainsi "conçu : « Ceux qui , avan-t-i ad judî«” cuti0rr,"voÎidroie 111 exercer aucunes des revendications
« mentionnées en l’article précèdent, poCtritvnE icirriie ,
«"ÊN SE RENDANT rÂlVTÏES INTERVENANTES , 'DANS
« la
p rocédure
ci-après. »
cCadjuiiLCii^o^ ■> s u i v a n t les fo rm es,
■
t
.
.
F ^
�( 44)
'
D ’ une p a r t, point de procédure sans assignation préa
lable : cela est certain.
D ’ un autre c ô t é , point d’intervention , s’il n’v a j oa^de cause; s’il n’y a pas d’instance ni procès ; et point
"cTêTcause, point d’instance, point de procès, s’il n’y a pas
eu d’assignation : le cit. Dusson le dit lui-m êm e, p. 8 et 9
de son mémoire. Il nous cite l’auteur du dictionnaire de
droit et de pratique, et l’ordonnance de 1667. Nous lui
opposons les mêmes autorités : s’il est de bonne f o i , il
s’y rendra.
E n cet état, par les quatre moyens que nous venons
de d évelop per, nous avons démontré que la notification
aux créanciers est n ulle ; il s’ensuit que les enfans C hann>
martîï^ n ’o n tp a s été obligés de com paroir. L ’on nous
diroit en vain , que Bien ou mal assigné , il faut se pré
senter. Cette règle signifie seulement que lorsque l’on est
assigné régulièrem ent, il faut p a ro ître, quoique la de
mande ne soit pas juste ; m ais, lorsque l’exploit est n u l,
le défendeur peut se dispenser d’y répondre : il a ensuite
la liberté d’en demander la n u llité , parce qu’un exploit
nul ne doit produire aucun eiTet légitim e.
A insi donc , les enfans Champinartin n’ ont pas dn se
présenter à l’audience du 8 floréal an 9 , et point'de iln
(Îè^noïï recevoir contr’eux.
, sur l’art. X X V I
àeT ïrto T flii n b ru m a ire, dit,, n°. 192 : « L e s défaillons
« y seraient néanm oins recevablex t d^iiTs~7e cas où le
te procès verbal d appositio n ne je in 'jiu ro it pas été notjr
« fié. » U ne notification nulle et l’absence de la notifica
tron sont synonym es, parce que ce q u i est nul ne peut
*
■—
produire aucun effet. R ien n’empêche donc que les on-
�( 45 )
fans Champmartin puissent exciper de moyens de nullité
contre la procédure antérieure à l’adjudication.
§.
III.
A c te du dépôt d u n exem plaire de Vaffiche a u greffe.
■V
Cet acte est du 12 d u m ême mois : il constate que le
■citoyen Dusson a d é p o sé , au greffe- du tribunal de
G a n n a t, i°. un exem plaire de l’affiche; 20. l ’extrait de /
la matrice du r ô le , et en a requis acte à lu i o ctro y é,
y est-il dit m ot pour mot.
11 faut rem arquer , x°. que le citoyen Dusson a fait
seul cet acte , et sans l’assistance d’un avoué ; 2,0. qu’il ne
• l’a point signé ; 30. que cet acte esUdaté du i a germ iliai a\>ant m idi.
- A u jo u rd ’hui le citoyen Dusson produit une. expédi
tion de cet acte de d ép ô t, où il est fait m ention qu’il
a signé sur la minute. Mais., i°. il y a une différence
entre cette expédition et la copie qui en a été donnée
aux créanciers inscrits. Dans l’ex p éd itio n , il est dit : L e
citoyen E tien n e D u sso n - P o is s o n , •p ropriétaire, sans
profession sp écia le, tant en son nom q u e n qu a lité .
de m a r i, etc. Dans la co p ie , après l’adjectif sp écia le,
■est le participe du présent a g issa n t, qui n’est point
dans l’exp éd itio n ; ce qui conduiront à l’idée q u e, depuis
-que la copie a été don n ée, il y a eu quelques change
mens sur la minute. D ’ailleurs il s’agit ici de m atière
rigoureuse ; notre copie nous tient lieu d’ original : il n’y
est pas dit que le citoyen Dusson a signé sur la minute*
'
�(46)
Il peut d’autant moins récuser cette co p ie , que lui-m em e
y a écrit plusieurs mots.
2°. Cet acte atteste que le dépôt de l’affiche a eu lieu
le 12 germ inal avant m id i (i). L e m ême jour paroît
avoir été fait le procès verbal d’apposition de l’affiche
à G a n n a t, lieu du bureau des hypothèques de la situa-
\<T-V
f
/■
* 'êf'DiJ'' tlou ^es biens. Ce procès verbal est daté d'après m idi.
O r , il est dit qu’alors l’affiche n’étoit pas encore dé
n*.
posée au greffe ; il y est dit seulement qu’elle 1&
seroit (2).. .
.
Dans cette position, il y a nécessairement un faux bien
evid en t, ou dans 1 acte de depot au greiïc, daté du 12 ger
m in a l avant m id i, ou dans le procès verbal d’apposition
d’affiche , daté du 12 germ inal après m idi • c a r, en rap
prochant ces deux .actes, ils s’entredétruisent. En e lle t,
le greffier atteste en avoir reçu le dépôt avant m idi ■
l’huissier y au contraire, certifie en avoir fait la publi-
(1) Aujourd’ hui 12 germinal an 9 , avant midi, a comparu
au greffe , etc.
'
(2) L ’huissicr y dit : « M e surs transporté dans tous les lieux,
» places publiques , et entrées de la commune de G a n n a t, et à
» tous endroits accoutumés'. »
A u x q u e l s lie u o c l e
h a u te v o ix ,
s ib le ,
c it o y e n iM S S im o n e a p u b lie e t a n n o n c é
et. a u s o n d u t a m b o u r , e t d e l a m a n i è r e l a p l u s o s t e n
la . v e n t e
des
m e u b le s
et
J ^ e c lc r c -C h a m p n ia r lin , d é s i g n é s
cistkée
a
DÉPOSÉE ,
ÇIVIL
1JE
il
G a n n a t,
le
ii
CONI ' OI t M É j t t E N T
im m e u b le s
I' IUiJUlÈRE I N S T A N C E
a u d it
d a n s i.’ a f f i c h e q u i a é t é e n k i ; -
germ in al
A
a p p a r ie n a r is
hies-kn t m ois, e t
LA
LOI,
AU
UK
GANNAT.
G HEF I' E
UU
qui
seha
TUIÜUNA^
�.
.
r ‘4 7 )
,
■cation après midi ' il-enonce 6n son procès verbal qu elle
sera déposée au greffe, Si le greffier dit v r a i, il s’ensuit
.que l’huissier a in e n ti, en certifiant l ’avoir publiée après
m id i; parce que,-si dès avant m idi l'affiche étoit déposée
au greffe, il étoit impossible que l’huissier la publiât après
m idi dans la .commune de Gannat. Si au contraire l’huissier
dit v r a i , il s’ensuit que le greffier a m en ti, en attestant
que l’affiche lui a été déposée avant m id i; parce que l’huis
sier , dans'son prücès~verbal*ï2la p r ê y 7?nW-,-assure^'avoir
publié ralRcIicT,~ct~'as5trre enee-rer rpreife sem dépotée au
greffe du tribunal de Gannat. E n disant qu’elle sera dé
posée , il donne à entendre bien-clairement que., après
m id i, elle ne l’étoit pas encore.
Dira-t-on que 1’liui.ssier a fait sa publication sur des
copies de .l’ailiche , et que déjà l’original en étoit au greffe
du tribunal de Ganuat ?
(
‘•
\
^
V
Nous répondons qu’il a été fait un, original de l’affiche
en question ; que cet original a été enregistré au bureau ^
de G annat, le n
germ in al; et que cet original est dit
^ ^
'}
avoir été déposé au greffe du tribunal cl,^ G an n at, le
12 germinal avant midi. A in s i, cet original ne pou voit
^>;is être au pou voir de l’huissier le même jour après midi.
Cependant l’huissier cite l ’original de l’ailiche ; il en
cite la date de l’enregistrem ent; il dit qu’elle sera déposée
au. greffe : donc elle ne l’est pas en core, donc elle est encore
dans ses mains , parce que., sans être nanti de l’original^
iJ lui étoit impossible de faire son opération.
A in si donc , il y a faux ou dans l’acte du dépôt au
greffe, ou dans l’apposition d’affiche à Gannat : dans le
prem ier cas, point d ’acte de dépôt ; dans le second cas,,
¿ fti
J t
�.
.
v
c 48 )
point d’affiche à Gannat : et dans l’un de ces deux cas ,
nullité absolue de toute la p ro céd u re, suivant la m axim e
q u i cadit à syllaba cadit à toto.
Que l’on ne dise pas que ce vice puisse être pallié par
aucune iin de non recevoir : c’est ici un faux , un faux
bien évident ; et toutes les fois que l’on vient à le décou
vrir , l’on est toujours à temps de s’en plaindre. A u reste,
nous en serions quittes pour passer à l’inscription de faux
incident ; èFlious sommes tous décides à êiT venir là , si
le citoyen Dusson pousse plus loin son obstination à
garder notre bien.
Sur la nécessité de l’assistance d’un avoué pour la régu
larité de cet acte, il suffit de rap peler, i ° . que la loi
du 27 ventôse an 8 rend le ministère des avoués néces
saire dans tout ce qui tient à la postulation et a u x conclu
sions ’ et que , sans cette assistance, il y a nullité des
actes de postulation, suivant la loi du 4 germ inal an 2 ,
et même suivant l’ordonnance de 1667 , remise en acti
vité-, 2°. que l’acte en question est un acte de postulation.
D ’abord , cet acte est nécessaire dans la procédure en
expropriation. 1°. L ’art. V de la loi du 11 brum aire dit :
« I l en est déposé un exem plaire au greffe ». 2.0. L ’art, 1
de la loi du 22 prairial an 7 , sur les droits de greffe,
porte : « Sont assujétis, sur la m inute, au droit de rédac« tio iy etc. i°. Pacte de dépôt de Vexemplaire d?affiche t
« en exécution de Varticle V d e l à loi du 11 brumaire. »
En second lie u , cet acte est de postulation. Rien ne
le prouve m ieux que sa contexture et sa dernière partie :
cl en a requis a c te , y est-il d it, à lui octroyé. C ’est lo
citoyen Dusson lui-m êm e qui a demandé et requis a cte ,
et
i
�C 49 )
et sans l’assistance de son avoué. J1 a_donc fait un acte
de postulation : et il ne le pouvoit pas. Il y a donc nullité.
§.
IV .
P ro cès verbaux (Vapposition cTaffiches, etc.
Les appositions sont nulles pour avoir été faites les 11 et 12
germ inal an 9 , qui n’étoient pas les jours convenables à
leur publicité. Elles auroient dû l’être un décadi, et renou
velées un jour de m arché suivant.
Il
est vrai que la loi du 11 brum aire an 7 est abso
lum ent muette sur le jour de l’apposition.
M ais elle n’abroge pas absolument les lo is, coutumes
et usages antérieurs, q u i, lorsqu’elle ne dit rien sur un
p o in t, doivent encore servir de règle; prîorcs leges ad
posteriores trahuntur. P o sterio res leges ad priores
p ertin en t, n isi contraria} sint. Ici point de contrariété
sur le jour des affiches, puisque celle de brum aire.n’en
dispose rien. Il faut dès-lors rem onter aux lois et usages
an teneurs.
A v a n t la ré v o lu tio n , et jusqu’à la loi du 17 messidor
an 7 , les criées pour parvenir à la vente des biens par
décret sur saisie ré e lle , les affiches pour les ventes sur
simple placard, dévoien t, suivant la coutume de B ou r
bonnais régissant le bien de B iè v r e , suivant l’édit de 1 55 i ,
devoient, disons-nous, être faites les dimanches, a l’ issue
des messes de paroisse, pour en instruire le plus grand
nombre de citoyens, pour opérer un plus grand nombre
d’enchérisseurs. Cela se pratiquoil ainsi dans toute la
France.
G
�C 5o )
La^loi du 19 messidor an 5 changea cet ordre ; elle
voulut quelles criées fussent faites les décadis, et rennuveléos le jour du marché le plus prochain. E lle l’avoit
voulu ain si, parce que les décadis étoient des jours de
cliornme, et que, ces jours-là, l’oisiveté conduit à écouter
les proclamations et à lire les affiches*, parce que les
marchés attirent beaucoup de m onde; parce q u e, par ces
m oj’cns, la vente acquiert toute la publicité nécessaire,
et que les enchérisseui-s se présentent ensuite en foule.
E n l’an 9, temps où l’expropriation dont il s’agit a eu
lie u , il y a v o it, sans con tredit, mêmes raisons de con
venance et d’utilité , pour exiger que les affiches pour
expropriation fussent posées le décadi, et renouvelées le
jour de marché suivant. L e citoyen Dusson n’étoit donc
pas maître de choisir le jour pour l’apposition des affiches :
ayant pris des jours ordinaires, il s’ensuit que la vente a
été en quelque sorte clandestine. Aussi y a - t - i l eu peu
de concours; aussi un bien en valeur de plus de 100,000 f.
a-t-il été adjugé pour 5 i , 6 oo fr. Cela est révoltant.
Des expressions même de la loi du 11 brum aire, il
suit que celle du 19 messidor an 5 est maintenue. E n
e iïe t, l’article V I dit que la notification sera faite dans le
délai de cinq jours de la date du dernier procès verbal
d'affiches. Ces m ots, dernier procès verb a l, donnent à
entendre qu’il en faut plusieurs; et il n ’en faut plusieurs
que dans le sens de la loi du 19 messidor an 5 ; c’est-àd ir e , dans le sens de l’apposition un jour de décadi, et
de la rénovation au jour de marché suivant.
Dans les procès verb«n\ d’alliches, on remarque une
autre faute bien essentielle. L ’huissier n’a pas rem pli lui-
�C 5i )
^
même sa matricule ; son nom et son surnom sont écrits
par une main étrangère ; la mention de la juridiction ou
il est l’c ç u , est en caracteres cl impression : tout ceci est
contraire à l’article II du titre II de l’ordonnance de 1667.
L a loi du 7 nivôse an 7 y a ajouté la form alité de la
(¿ ¿t^ J^
-j,
.
. .
—
¿ 7 " '“' • u
y
patente.
T o u te la procédure du citoyen Dusson est donc nulle.
E lle doit être déclarée telle.
Il
est cruel sans doute pour le citoyen Dusson , d’avoir
à combattre si longtemps pour obtenir la i-entrée_de_S£j
créance. Sur ce p o in t, il se plaint de beaucoup plus de
mal qu’il n’en a réellement. L ’on sait même que pour
appitoyer davantage sur son sort, il va jusqu’à des sup
positions invraisem blables, et qu’il espère infiniment de 4
certains moyens bons partout ailleurs.
Si
le citoyen Dusson n’est pas encore payé , qu’il s’en
accuse lui seul, et m êm e, s’il le v e u t, la bonhom m ie du j
citoyen Champmartin père.
P ar acte sous seing p r iv é , du 4 vendém iaire an 10 , le
citoyen de Champmartin père avoit vendu une portion
de son bien au citoyen Reynaud de Blanzat, moyennant
la somme de 5o,ooo fr. dont 36,000 f’r. payables le 30 prai
rial au citoyen Dusson. Il paroît que le citoyen Dusson
n ’a pas voulu recevoir cette somme. L ’on a été dans l’ im
puissance de contraindre le citoyen Reynaud en prairial,
le temps cle l’enregistrement étant passé. Depuis la date
du sous seing p r iv é , le double droit etoit encouru. P o u r
agir contre le citoyen R eynaud, il eut fallu faire enre
gistrer le double ; il en aiiroit conte ü,ooo francs. On ne
les avoit pas; 011 u’avoit pas crédit sullisaul pour les cm -
�( 52 )
_
prunier, E n sorte qu’après une conférence dans le cabinet
du citoyen B o iro t, avocat à C lerm on t, l’on a été obligé
de biffer les signatures au bas du sous-seing.
L ’ o n a v o i t préparé la vente d’une autre portion de biens.
U n citoyen estimable en donnoit 2 5,000 francs. M ais on
a craint d’avoir affaire au citoyen Dusson : la confiance ne
se commande pas.
C ’est ainsi que la famille Champmartin est aujourd’h u i
reduite à une misèi'e extrêm e, par l’épouvante qu’a inspi
rée le citoyen Dusson.
D epuis la contestation actuelle, en vendém iaire dernier,
est venue chez le citoyen G ourbeyre la demoiselle Bosredon de St. A v it , adressée p a rle citoyen Boirot. E lle désire
% acquérir le bien de B ièvre et dépendances. E lle en offre son
vrai prix. E lle ¡rayera 5o,ooo francs comptant. Suivant le
conseil du citoyen G o u rb eyre, elle a fait écrire au citoyen
^ D usson, pour lui proposer de x'cnoncer à l’adjudication ,
et recevoir de suite ce qui lui est légitim em ent dû. ( L a
demoiselle de Bosrcdon nous a autorisé à le publier. ) L e
citoyen Dusson n’a répondu que par un redoublement de
poursuites. Il a donc décrété la perte absolue de la maison
Champmartin.
A u reste, le combat n’est plus entre le poursuivant et
le saisi ; le combat est entre le poursuivant, et des indi
vidus qui sont au moins créanciers.
P ar certaine ru b riq u e , le poursuivant a accaparé le
gage des créanciers : il l’il & vil prix. S’il le g a rd e , il
profite au moins de 5o,ooo lrancs; et les en fans Champmarlin perdent to u t: ils sont sans ressource. A in s i, le
citoyen Dusson certat de lucro ca çta n d o , et les enfans
�( 53 )
Cham pm artin certant de danmo vitando. Dans cette
position, si le citoyen Dusson se dit favorab le, les enfans
Champmartin le sont bien davantage. Beaucoup moins
h abiles que le citoyen Dusson , ils mettent à découvert
leur situation, tandis qu’il dissimule la sienne, pour tâcher
de com bler la mesure de leurs maux.
Nous finirons par une assertion sur laquelle on peut
compter. Nous dirons q u e, le lendemain de l'annullation
de l’adjudication, le bien est vendu sa valeu r, et le citoyen
Dusson est payé com ptant; les acquéreurs sont prêts,
ainsi que l’argent revenant légitim em ent au cit. Dusson :
nous irions m ême jusqu’à lui garantir son payement.
G O U R B E Y R E.
A
de
l ’i m p r i m r r i o d e
L
a n d
RI
o t
,
T ribunal d’appel. — An 11,
seul imprimeur du
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leclerc-Champmartin. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
affichage
droit de criées
droit romain
adjudications
expropriations
Description
An account of the resource
Réponse à mémoire imprimé, etc. pour les enfans Leclerc-Champmartin, demandeurs en intervention et subrogation, et subsidiairement appelans ; contre Étienne Dusson-Poisson, défendeur et intimé.
annotations manuscrites. 2 pages insérées entre page 24 et 25 et intitulées « Observations sur le défaut d'intérêt (Suite du paragraphe II, page 16.)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1779-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
53 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0220
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Bierre (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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adjudications
affichage
Créances
droit de criées
droit Romain
expropriations
-
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0c643a8452c304d2453aed8a1cf38416
PDF Text
Text
A U
N O M
D U
P E U P L E
F R A N Ç A I S .
.
X _>E t r i b u n a l d ’a p p e l , s é a n t à R i o m , d é p a r t e m e n t du P u y - d e - D ô m e , a t e n d u l e j u g e m e p t s u i v a n t :
E n t r e B e n o î t C h a m c r l a t , pr opr i ét a i i ^p * h a b i t a n t d e la v i l l e d e C l e r m o n t - F e r r a n d , a p p e l a n t d ’u n
j u g e m e n t r e n d u a u t r i b u n a l c i v i l «Je p r e m i è r e i n s t a n c e d e l ’a r r o n d i s s e m e n t d e R i o m , le o n z e g e r r ni nat an d i x , s u i v a n t l e s ' e x p l o i t s d e s ‘d i x - h u i t e t v i n g t - u n p r a i r i a l m ê m e a n n é e , c o m p a r a n t p a r 1»
c i t o y e n C l a u d c - A m a b l e V e V r i î è r e , s on a v o u é , d ' u n e p a r t ;
^
^
^
E t G i l b e r t e B â t i s s e , fille m a j e u r e do d é f u n t P i e r r e , d i t L a p i e r r e , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t e d e I&
Vi l l e de R i o m , d o m i c i l e é l u e n l a m a i s o n a y a n t a p p a r t e n u à d é f u n t A n d r é F a y e , g r e f f i e r d u t r i
b u n a l c r i m i n e l du d é p a r t e m e n t d u P t i y - d c - D û m e , o c c u p é e m a i n t e n a n t jpar le c i t o y e n A r c h o n L a r
b o a u r n e , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t d e l a d i t e -ville de R i o m ; M a r g u e r i t e F o u r n i e r - L a b r u g i è r e , f e m m e
s é p a r é e , q u a n t a u x b i e n s , d u c i t o y e n P i e r r e R a y n a u d , h a b i t a n t e d e la c o m m u n e d e C e b a 7 a t , d o
m i c i l e é l u e n la m a i s o n d u c i t o y e n J e a n B a p t i i t e F r a n ç o i s M a y e t , a\ÿoué p r è s l e t r i b u n a l d ' a r r o n
d i s s e m e n t îl e R i o m , h a b i t a n t d e l a d i t e c o m m u n a d e R i o m : P a u l - A n t o i ^ F a u r e , Claude^ R o n g i e r ,
s on g e n d r e e t le c i t o y e n V i o l i e r e t c o m p a g n i e , n é g o c i a n s h a b i t a n s d e la v i l î e d e L y o n , d o m i c i l e é l u e n
la m a i s o n d u c i t o y e n S a u r e t v m a r c h a n d , h a b i t a n t d e la v i l l e d e R i o m , d a n s l a q u e l l e h a b i t o i t l e c i t o y e n
F l e u r y , h o m m e d e l o i , e t c h e z l e q u e l S.U$ o n t é l u d o m i c i l e : les c i t o y e n s B t u m e a u , M o r i n e t c o m
p a g n i e . n é g o c i a n s hjjbillans de la v i l l e d e C l e r m o n t , d o m i c i l e é î u c h e z le c i t o y e n J e a n - B a p t i s t e T a i l h a m i
i i l s , h o m m e d e loi , ha l i i t ^n t d e la v i l l e de^R' i om : R o b e r t S a i n t - H o r e n t , a v o u é p r è s l e t r i b u n a l de l a r
r o n d i s s e m e n t d e C l e r m o n t , h a b i t a n t d f l i a d i t e * v i K e d e C l e r m o n t , d o m i c i l e é ! u e n la m a i s o n d u c i t o y e n
S i u r e t , m a r c h a n d , h a b i t a n t d e l a ^ ^ ^ i , l l e ' d e R i o m , d a n s l a q u e l l e h a b i t o i t le c i t o y e n F l e u r y , h o m m e
d e l o i , e t c h e z l e q u e l i l a é l u f â ï ^ ^ H | e : J a c q u e s L. e g . i y , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t d e la v i l l e d e C l e r
m o n t - F e r r a n d , d o m i c i l ^ S ^ ^ ^ ^ ^ H a u d e s h y p o t h è q u e s sis e n la v i l l e d e R i o m : E t i e n n e M é g e ,
c u l t i v a t e u r , h a b i t a t u ^ î | H f l B P p H H r c a t ; M icheUe Patc au . v e u v e d ’E t i e n n e F r e d e t , aussi-hab itante
d u l i e u d e C c b a â j g H J p R r ^ é i u é n l a m a i s o n d u c i t o y e n A l e x i s D e v è z e , a v o u é p r è s le t r i b u n a l
d ’a p p e l s é a n t #á t S Í f f íí’ n a b i t a n t do l a d i t e c o m m u n e d e R i o m : R é n é T i x i e r , c u l t i v a t e u r , h a b i t a n t d e
la c o m m u n e ri&-Çéi>azat ; C h a r l e s V a l e y r e , c u l t i v a t e u r , h a b i t a n t d e la m ê m e c o m m u n e ; J e a n B o i g e ,
d i t G a g n a n t , c u l t i v a t e u r , h a b i t a n t d e la m ê m e c o m m u n e ; J e a n D e s m a r t i n , d i t R a y n a u d , a us s i c u l
t i v a t e u r , h a b i t a n t d e l a d i t e c o m m u n e , d o m i c i l e é l u e n la m a i s o n du c i t o y e n Sa u, r et , m a r c h a n d ,
h a b i t a n t^ d e la ' i l l e de R i o m , d a n s l a q u e l l e h a b i t o i t le c i t o y e n F l e u r y , h u m m e d e loi , e t c h e z l e q u e l
i l s on t é l u d o m i c i l e ; J e a n e t B i a i s e D e i g r a n g - ' î S , c u l t i v a t e u r s , h a b i t a n s d e la c o m m u n e d e B l a n z a t ,
domicile élu en leur d e m e u r e : J e a n R o u g e y r o n , c u l t i v a t e u r , habitant du lieu d c ^ ^ r r e , c o m m u n e
ot* B l a n z a t , d o m i c i l e é l u e n sa d e m e u r e : G u i l l a u m e e t J e a r \ T a i l h a n d i e r , p è r e J R l s , v i g n e r o n s ,
h a l i i t a n s d u l i e u d e P o m p i g n a t , c o m m u n e d e C h â t e a u - G a i , d o m i c i l e é l u e n l e u r de: , e u r e : A n n e C U i r e D e b a r d p r o p r i é t a i r e » . h a b i t a n t e d e la c o m m u n e d e C e b a z a t , d o m i c i l e é l u e n la^ m a i s o n di*
c i t o y e n C h a r l e s J u g e , h o m m e d e l o i , o c c u p é e a u j o u r d ’hu i p a r le c i t o y e n G o u r b e y r e , a v o u é p r è s l e
t r i b u n a l d ’a p p e l s é a n t à R i o m , h a b i t a n t d e - l a d i t e v i l l e d e R i o m : P i e r r e C r c u z e t - , p r o p r i é t a i r e , h a U i t i n t d e la v i l l e d e R i o m , d o m i c i l e c l u ’ c n s &* ma i s on , i h t i m é s s u r l e d i t a j fpel ; c o m p a r a n s , s a v o i r ,
O u b e r t e ü a t i s s e , p a r le c i t o y e n F a y e ; R u b a r t S a i n t - I I o r e n t , J a c q u e s Lc- gay , E t i e n n e M ë e e , M i c h e l l e
l a t e a u , v e u v e d u d i t R e n e T i x i e r , C h a r l e s V a l e y r e , J e a n B o i g e , J e a n D e - m a i t i n , J e a n e t Bl a i s o
L/engranges, J e a n R o u g e y r o n , G u i l l a u m e e t J e a n T a i l h a n d i e r , pa r le c i t o y e n M a n d e t j e u n e ; P i e r r a
C i e u z e t , p a r I 3 c i t o y e n B a y l e a î n é ; A n n e - C l a i r c D e b a r d , . p a r le c i t o y e n G o u r b e y r e ; M a r g u e r i t e
F o u r m c r L a b r u g i è r c , femme R a y n a u d , par le ci t o y e n C a m a y ; P au l- A n t o i n e F a u r e , C la ud e R o n
g e r , son g e n d r e , V i o l i e r e t c o m p a g n i e , e t l e s c i t o y e n s y B r u m e a u , M o r i n e t c o m p a g n i e , p a r lo
c i t o y e n M v n e : et M a u r i c e F r e s s a n g e s , n é g o c i a n t , h ab i t a n t de la v i l l e de C l e r m o n t , d o m i c i l e é l u
c i t o y e n M a u r i c e P r e s s a n g e s , h o m m e d e l o i , h a b i t a n t d e la c o m m u n e d e R i o m :
r i i r* |1 0ï '-,* î
> h a b i t a n t d e la v i l l e d e P a r i s , r u c T c t e b o u t , n ° . 3 3 , d i v i s i o n d u M o n t f i n ï î i ’ 1 0 i !J , c c u Fn
m a i s o n d e J e a n C o u r t , a u b e r g i s t e à la P o m m e - R o u g e , h a b i t a n t d e la v i l l o
i’n m ' °' T ’ r" lU)Vl i r ” . ^ e l,a B i d e : M i c h c l D e s g r a n g e s * c u l t i v a t e u r , h a b i t a n t d e la c o m m u n e d e B l a n z a t ,
A, 'Ç1 c <lu c i i e a la c i t o y e n B a r t h é l é m y P a g e s , n o m m e d e l o i , h a b i t a n t d e l a d i t e v i l l e d e R i o m :
«unie i r o p h i n o * S a b n r d i n , r e c e v e u r d e s d r o i t s d ’e n r e g i s t r e m e n t à C l e r n u > n t * F e r r â r i d , a y a n t é l u d o
m i c i l e e u la m a i s o n d u c i t o y e n A s s o l e n t , h o m m e d e Itti , h a b i t a n t d e l a d i t e v i l l e d e R i o m : A n t o i n e
n a p s a l , e x -g en c ra i de d i v i s i o n , h ab i t a n t de l a di t e v i l l e de R i o m ; C a z j m i r G o u r e t , p r o p r i é t a i r e ,
rilh U i u
*1° F a r i s ; G i l b e r t B o u l a r d , m a r c h a n d d e b o i s , h a b i t a n t d e la v i l l e d e M o u l i n s ;
o . . et t ^ n i b e r t , c u l t i v a t e u r , h a b i t a n t do l a c o m m u n e do C e b a z a t ; G i l b e r t F r e s s a n g e s p è r e , m a r i a n u , h a b i t a n t d e la v i l l e do C l e r m o n t , a y a n t é l u d o m i c i l e d a n s l a t n a i j o n d u c i t o y e n S a u r o t ,
a r c l and , h a b i t a n t do la v i l l e d e R i o m , où h a b i t o i t lo c i t o y e n i * l c u r y # h o m m e d e l o i , c h e z |cq u e 1 s a v o j e n t é l u d o m i c i l e : H i e r r e - G c n c s t F o u g o r o l l c s , p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t d e la v i l l e d e V i c h y ,
vMi 0 u d o n u c i l u c h e z lo c i t o y e n A l e x i s D e v c z o , a v o u é p r è s le t i i b u n a l d ‘a p W l “ i é a u t a t\\> m ,
ha()H.tut li e l a d i t e v i U c d y l ^ u m : A n t o i n e S a i n t - G i r o n , p r o p r i é t a i r e , h a b t u n i d u U<?U d e i , e z a l . c o i t ï mun- j Uc J J a s , a y a n t é l u d o m i c i l e c h e z le c i t o y e n * P i e r r e M i o c h e a î n é . a v w u é ~ p r è \ l e I r i b - j r ^ l <l*arromi isse ni unt de R i o m , b o i t a n t de ladito ville de R i o m . - J u l i e n ^ n y a n t , p r o p r i é t a i r e . h ab i t a n t
11 . i e .u dv s l î i c a r d s , c t m i n u m o f!e f j i u g c a s , a y a n t é l u d o m i c i l # c h e z r r . m v o i s - X a v i c r V i a l e t t e , p r o p n u t . i i r o , h a b i t a n t cl« l i ;,lil|u do H ii i m : M ï r i e C o u r n o n , v e u v o «lo F r a n ç o i s R a y n a u d , h a b i t a n t e
1« i l V iilo <1 A m u c p c r s o , a y a n t c l u d o m i c i l e clicz. lo c i t o y e n J e a n - l î a p t i s t e - F r a n ç o i s M a y c t , a v o u a
pttb,_\e t r i b u n a l » ' a r r o n d i s s e m e n t du R i o m , d o m e u r a > » t 'o n l a d i t e v i l l o : P i e r r e - F r a u ç o i s i V l a s s o n n c t ,
Uav’ C ! ' U .
^ î '1 , s i , n n c t . s» s œ m , p r p p r i^ t a ÿ ^ p s , h a b i t a n s d e .r la v i l l o (le R i o m . e t A n n e
■ |.i» **U" • v u u v tî t i r a v i e r . h a b i t a n t e d e la c o m m u n e dD V i c h y , a t a n t . f é l u d o m i c i l e
ll.fm aiso n d u
m a s s o n n e t p r o p r i é t a i r e , h a b i t a n t do h ^ v i l l e ' d o f i j f c ^ r i F l i i t i b e r t L a v a l , g a f d » 1- b o i s ,. J(S' Atiil'iiiii.*1! ' ! 1 r "
^,C7'l t , c o n i m u n o do B a s , a y a n t é l u
la m a i t o n d u c i t o y e n F r a i n , o i 5 n u iilii' |‘■it:.‘ , 0 , J ' S l l t ^ ' ‘' l;> ir f i 'p u l) lip , h a b i t a n t d e la v i U ^ ^ ^ B u e p e r s e : G a b r i e l H o iv in , n o t a i r e
c Ihmihm 'rlr '.«-11
<1’A i iju e po r s o , a y a n t é l u l ^ B B r l u d a n s la m a is o n d u c i t o y e n D u •
. * t» ! i ' r ,
d(î Pa>*
n a i x ■. hh aa bb ii tt aa nn tt ddo
v ii ll ll oe d ^ r r a p î f c p i r s e :•. lPi
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o ll.tflito
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e v a' innt
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V i ï l « V H ,!-’.,!1 '■ 1 a i , t P ' < - » n i o n l e t d e p u i s p l u f h e u r s a n n é e s p n I r c o m m u n e d e C ç b a r a t , e t l e c i t o y i m V"
-
-u isant ,
.
p r d W ic la ire , h ab itan t
\
.
X
d u Uuu
do
P l a u z i t , e x c u r a t e u r à l'iu t o i d i c t i o n lég ale d u
' V
1
�I
2
P i e r r e Raynaud; tous a u s s i i n t i m é s , e t d é f a i l l a n s f a u t e d e c o m p a r o i r n i a v o u é p o u r e u x , d ’a u l r e
part.
.
O u ï s l e c i t o y e n V e r n i è r e s , a v o u é d u c i t o y e n C h a m e r l a t , e n ses c o n c l u s i o n s ; le c i t o y e n P a g é s V e r n y , a n c i e n j u r i s c o n s u l t e , s o n d é f e n s e u r o f f i c i e u x ; le c i t o y e n M a n d o t i e u n e , a v o u é du c i t o y e n
R o b e r t Sa in f -H or en t, J a cq u es I .eg a y , E t ie n n e M é g e , M ich el le Pateau , v e u v e F r e d e t , R é n é T i x i e r
C h a r l e s V a l e y r e , J e a n B o i g e , J e a n D e s m a r t i n , J e a n e t B i a i s e D e s g r a n g e s , J e a n R o u g e y r o n Gu i l l a u m e '
e t J e a n T a i l h a n d i e r ; le c i t o y e n V a z e i l l e p o u r l e c i t o y e n F a y e , a v o u e d e G i l b e i te Bâ t i s s e •' le c i t o v r n
B a y l e a î n é , a v o u é de P i e r r e C r e u z e t ; le c i t o y e n G o i i r b e y r e , a v o u e d ' A n n e - C l a i r e D e b a r d - le c i t o y e n
D e v è z o p o u r l e c i t o y e n D e m a y , a v o u é d e M a r g u e r i t e P o u r m e r L a b r u g i e r e . f e m m e R a y n a u d ' - ln , : i t nvp i
M a r i e , a v o u é d e P a u l - A n t o i n o F a u r e , C l a u d e R o u g i e r , s o n g e n d r e , V i o l i e r et c o m p a g n i e c t ’ l es
- c i t oy e ns B r u m e a u , J Vl ori n e t c o m p a g n i e ; e t l e c i t o y o n c o m m i s s a i r e u u g o u v e r n e m e n t ~
*
Il s ’a g i t d e s a v o i r , i ° . si la p a r t i e d e P a g e s a_ d é c l a r é d a n s son b o r d e r e a u de c r é a n c e e t a r é r h r , é
la s o m m e d e m i l l e v i n g t - n e u f r a n c s , m o n t a n t d e s f i a i s e t l o y a u x c o û t s d ' u n e v e n t e &lui c o n s e n t i r
P i e r r e R a y n a u d e t M a r g u e r i t e F o u r n i e r L a b r u g i e r e , sa f e m m e , le d i x - n e u f j u i n mi l s ent c e n t « u a t ^
e ccaass do
V i n g t - ad ___
o u z~e .; ot
e t <i
s i _, ddaannss llo
do rrééccllaam
maattiioonn ddee cceettttee ssuom
mm
mee., îlarfî
a d ifa
t e ^p a r t i e de P a e è. s . d.<|uatr
t î L
C o l l o q u é e
p o u r l e m o n t a n t d ’i c e l l e .
i af.es u o i l e t l û
2 °. Si la p a r t i e d e P a g e s , q u i a v o i t o b t e n u l a c o n d a m n a t i o n d e s i n t é r ê t s du n r i * nr ¡ , - „. ; „, l
i
l n y j u x - c o û t s d e s o n a c q u i s i t i o n , p a r j u g e m e n t d u c i - d e v a n t t r i b u n a l c i v i l d u dépa Vt e me , " i P
i
D ô m e , d o i t , o u n o n . e t r e c o l l o q u e e p o u r d e u x a n n é e s d e s d i t s a r r é r a g e s , c o n f o r m é » , » , » • i.UlV ‘
n e u f d e la loi d u o n z e b r u m a i r e a n s e p t .
moment a 1 article d ix 3°. Si la p a r t i e d e P a g è s , q u i n ’e s t pas r e m p l i e p a r sa c o l l o c a t i o n du m o n t a n t d e sa r r ’
i •
n o n , d e r e t e n i r e n t r e ses m a i n s la t o t a l i t é de s C a p i t a u x n o n e x i g i b t a i , ou «i n a r t i » ^ ô ea nCC, a - <*r 0 l t >°.u
p a s s e r aux cré a n ci er s postérieurs en ordre.
*
‘ ‘
ces capitaux doit
4 ° . E n f i n , si le d é l a i d e d e u x d é c a d e s a c c o r d é à l a d i t e p a r t i e do P a g è s p o u r fa i r e pu , -'
i e
d é l a i q u i é t o i t e x p i r é l o r s q u e le j u g e m e n t d o n t e s t a p p e l f u t e x p é d i é , d o i t o u non î . m e r d e s f u t a i l l e s ,
»
— » e t r e pr oroge.
F A I T S .
”
P a r acte du d ix - ne uf j u i n mi l sept c e n t quatre-vingt-douze , P ie r r e Raynaud et M a r p„o r' h r
t i i o r , sa f e m m e , v e n d i r e n t a u c i t o y e n C h a m e r l a t t ou s l e s b i e n s à e u x é c h u s d e la
fourd é f u n t F o u r n i e ^ . a b r u g i è r e , l e u r p è r e e t b e a u - p è r e , s i t u é s à C e b a z a t e t l i e u x c i r c ó n Uc-c ? ss10n d e
f o r m é m e n t a u ^ t i g e e t s o u s - p a r t a g e pa s s é e n t r ’e u x e t l e u r s s œ u r e t b e l l es s œ u r s l„ ¿ S1" s ’ Con‘
t o m b r e m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - t r o i s , m o y e n n a n t la s o m m e d e q u a t r e - v i n e t m i l i a r ,
* J ep’
s o i x a n t e - t r e i z e mi l l o f r a n c s p o u r l es b i e n s é c h u s a M a r g u e r i t e F o u r n i e r p a r i l p a r t a e e S *
"î
l e s s e p t m i l l e f r a n c s r e s t a n s p o u r l e s o b , e t s p r o v e n a i s . d ’a c q u i s i t i o n f a i t e p a r le c U o v e n R t
’ i
o u p o u r le p r i x d e s c u v e s e t p o i n ç o n s é n o n c é s e n ¡a v e n t e
citoyen Raynaud,
fcjL e
v i n g t - d e u x m e s s i d o r a n s e p t . M a r g u e r i t e F o u r n i e r o b t i n t c o n t r e s on m a r i l a s é p a r a t i o n d e
E n exécution de ce jugement,* ladite F o u r n ie r fo rm a, co n tre le c it o v ’ n C h a m p rl,f I ,1
j
e n n u l l i t é de l á v e n t e du d i x - n e u f j u i n mi l s e p t c e n t o u a t r e - v i n ^ t - d o u ™ e H n . U
‘a d e m a n d o
c o m p r i s e n i ce l l e . C e t t e d e m a n d e fut a c c u e i l l i e p a r j u g e m e n t du à u f f l or é a l a n h u i t ™ " * «ut* î ^ d i *
m a n d e e n r e c o u r s qu a v o i t f o r m é e le c i t o y e n C h a m e r l a t c o n t r e lt> r i i o v , . . , n V . , 2 . i * i
•
V i l l o t B e a u l u i s a n t , c u r a t e u r à l’i n t e r d i c t i o n l é g a l e de P i e r r e R a y n a u d , le m é m o ¡ i i / c l m t
c , t ‘>yen
c e s d e r n i e r s a p a y e r a u d i t c i t o y e n C h a m e r l a t , . ° . la s o m m e de q u a r a n t e - s i x m i l l e f e p t T e n t ’ " . ^ T " '
v i n g t s f r a n c s , a l a q u e l l e se t r o u v o i t r é d u i t e , d ’a p r è s l ’é c h e l l e d e d é p r é c i a t i o n la «n m „ „ J
(! " a t r c tr eiz e mille francs assignats, prix stipulé dudit contrat de v en te ; a» t ell e d i troU
e, SOn[a,' t c q u a t r e - v i n g t s f r an cs , l a q u e l l e , a v e c c el le de dou ze c e n t s f r a n c s , pr i x des c u v e s f
•
tcnt
p i r lo c i t o y e n R a y n a u d , s u i v a n t l ’e s t i m a t i o n q u i un fut fai t e p a r l e c i t o y e n C h a
.^‘ ' " ' Çons v e n d u ?
d o q u a t r o m i l l e q u a t r e c e n t q u a t r e - v i n g t s f r a n c ; , à l a q u e l l e se t r o u v o i t r é d u i t o ^ Y * ' cc , ! e
d é p r é c i a t i o n , la s o m m e d e c i n q m i l l e f r a n c s a s s i g n a t s , p r i x s t i p u l é a u d i t c o n t r a t
¡ 'échelle de
l e c i t o y e n R a y n a u d , ou le c u r . i t o u r , e n p a y e r le m o n t a n t s u i v a n t l ' e s t i m a t i o n
S' m ' e u x n ’a i n i o i t
i l e v o i t ê t r e f a i t e d a ns la d é c a d e à c o m p t e r d e la s i g n i f i c a t i o n d u d i t j u g e m c n t ^ ' i o 05'*101^ ’ ^*tlu e l ' e
c e n t s f r a n c s c i n q u a n t e c e n t i m e s , à l a q u e l l e é t o i t r é d u i t e , d ’api ès l ' é c h e l l e do d ' * '
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Çr êe c l a *' on • la s o m m a
v i n g t c i n q f r a n c s p o u r le co û t d e s i n s c r i p t i o n s f a i t e s p a r l e c i t o y e n C h a m e r l a t - " ( . o’ /f°,î c t '*° d e c e n t
c e n t c i n q u a n t e - s i x f r a n c s , à l a q u e l l e se t r o u v o i e n t r é d u i t e s , d ' a p r è s l ’éc he l l e I c,e, , d e d i x - n e u f
s o m m e s p a y é e s p a r C h a m e r l a t , soi t p o u r l e p a y e m e n t d e s d r o i t s d e l o t s , s o i t * 0
pr<-' ciation , le*
m e n t do c e n s dûs s u r p a r t i e d e s i m m e u b l e s c o m p r i s a u d i t c o n t r a t . L e m é m o ^ ° Ur
r°uiboursea u s s i R a y n a u d a u x d o m m a g e s - i n t é i ê t s d u d i t C h a m e r l a t . r é s u l t a n s d e l ’i n c x é c u t i ^ Y ' j * 11 t o m ' amii&
v e n t e , s u i v a n t l ’e s t i m a t i o n p a r e x p e r t s , e t a u x i n t é r ê t s d u t o u t .
011 “ “ d i t c o n t r a t do
L o c i t o y e n R a y n a u d a y a n t t o t a l e m e n t d é l a n g é ses a f f a i r e s , P a u l - A n t o i n e F a u
•
•
L y o n , e t les c i t o y e n s V i o l i e r e t c o m p a g n i e , n é g o c i a n s d e G e n è v e , c r é a n c i e r s d u d i ^ T î n e Bnc,' a n t (' e
s u i v i r e n t l ’e x p r o p i i a t i o n f m c é o îl e ses b i e n s . P a r j u g e m e n t r e n d u a u ci - devant \ , a >ilal|d , p o u r d é p a r t e m e n t d u P u y - d e - D ô m e , le v i n g t - t r o i s p r a i r i a l a n h u i t , il f u t adjugé a u c-; » r '
j! c ' v’l du
m o y e n n a n t la s o m m e de q u a t r e - v i n g t - n e u f m i l l e f r a n c s , lin d o m a i n e s i t u é à I’ A m " 0 " ^ wmL' r^a t •
d u d i t R a v n a u d ; u n a u t r e d o m a i n e a p p o l é d e s G r a n g e s , s i l u é d a n s la c o m m u n e 1 " i f ’ T’ , o v e n , u , t
a p p e l é lo l î o u c h t ' t . s i t u é da ns les d é p e n d a n c e s d e L e z a t , e t e n v i r o n t r e n t e s e n i o r ' . " V 11,1 a u l r e
L e c i t o y e n C h a m e r l a t , v o u l a n t se I t é r e r du p r i x d e son a c q u i s i t i o n , fit o u v r i r * 0 )5
f r i m a i r e a n n e u f , a u g r e f f e du t i i b u ^ M I f t i l d e l ’a r r o n d i s s e m e n t d e R i o m , u n m - , „ 1
' , l" t
q u i f u t no t i f i e t a n t a u x c r é a n c i e r s
q u' b la p a r t i e e x p r o p r i é e .
4 o " 1' .
D a n s c e p r o c è s v e r b a l d ’o r d r e I H | n C h a m e r l a t d e m a n d a à ê t r e c o l l ^ M k n
p o u r lo p a v e m e n t d e la s o m r i e de c i W ï ï m t e . t r o i s mi l l e d « n x c e n t c i n q i i a n l W r a n ? « ri
t i m e s , i l a q u e l l e r e v o n o i t . l a c o n d a m n a t i o n p r i n c i p a l e a d i u . é e .i son pr«! fiî r ! 7 .
Vie T V
“ 'i'
p a r le j u g e m e n t d u ü e u f f l o i e a l a n h u i t ; e a s e c o n d l i ü u , dos i n t é r i m d c i d i u - , So , 11Bies ü(|
' ê
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..........................
�.
3
' l e d i t J u g e m e n t , a i ns i q u e de c e u x q u i é c h e r r a i e n t ^ j u s q u ' a u p a y e m e n t ; e n t r o i s i è m e l i e u , p o b r l e
p a y e m e n t des d o m m a g e s - i n t é r c t s r é s u l t a n s d e L’i n e x é c u t i o n d e la v e n t e c o n s e n t i e ' p a r l e d i t R a y n a u d ,
l e d i x - n e u f j u i n m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , p o u r l e s q u e l s i l ¡>e r e s t r e i g n a i t à la s o m m e do
d i x m i l l e f r a n c s , si m i e u x n ’a i m o i e n t l es c r é a n c i e r s d u d i t R a y n a u d l es f r i r e e s t i m e r p a r e x p e r t s ;
e n q u a t r i è m e l i e u , p o u r l e p a y e m e n t do l a s o m m e d e q u a t r e n u l l e q u a t r e c e n t s o i x a n t e - d i x f r a n c s
n e u f c e n t i m e s , c o m m e é t an t a u x d r o i t s , p a r l' a ct e du q u a t o r z e m e s s i d o r an h u i t . de G e n c s t F o u R e r o i l e s e t A n n e R a y n a u d , sa f e m m e , e t a u s s i dos i n t é r ê t s d e l a d i t e s o m m e , e t e n c o r e p o u r l e p a v e j n e n t tl e ]a s o m ni e d e s e p t c e n t d i x - n e u f f r a n c s p a r l u i p a y é e , s u i v a i t le rnÊnu* c o n t r a t , a u x d i t *
Fou gerolles e t R a y n a u d , à laquelle somme les int érê ts an t ér ie u r s audit co nt ra t a v o ie n t ete r e l i e s
j u s q u ’a l o r s ; e n c i n q u i è m e l i e u , p o u r l e m o n t a n t d e s d é p e n s a u x q u e l s l e d i t R a y n a u d flv o i e t c c o n
d a m n é p a r le j u g e m e n t d u d i t j o u r n e u f f l o r é a l a n h u i t , s u i v a n t l a t a x e q u i e n s e r o i t t a i t e e n la
manière ordinaire.
*
#
,
, . .
.
L e s a u t r e s c r é a n c i e r s f o r m è r e n t a u s s i l e u r d e m a n d e e n c o l l o c a t i o n . C e p r o c è s v e r b a l t u t c l o s lo
« e u x v e m û s e a n n e u f . L a c a u s e p o r t é e a u t r i b u n a l c i v i l d e l ’a r r o n d i s s e m e n t d e R i o r n , il i n t e r v i n t
un j u gem en t le onze g erm ina l an dix.
.
,
.
.
’ l à r c e j u g e m e n t , l es s i x p r e m i è r e s c o l l o c a t i o n s q u i f u r e n t f a i t e s s ’é l e v è r e n t à l a s o m m e a e 60 i x a n i e q u a t r e m i l l e d e u x c e n t s f r a n c s s o i x a n t e * h u i t c e n t i m e s , e t il n e r e s t o i t d e d i s p o n i b l e q u e c e l l e u e
» r e n t e u n m i l l e q u a t r e - v i n g t - d i x - h u i t f r a n c s c i n q u a n t e - t r o i s c e n t i m e s . C e s si x p r e m i è r e s c o l l o c a t i o n s
£e c o m p o s e n t d e t r o i s é l é m e n s , i ° . e n c o l l o c a t i o n d e s o m m e s fi xes e t e x i g i b l e s d è s à p r é s e n t , s o i t
P ° u i c a p i t a u x , s o i t p o u r i n t é r ê t s , a r r é r a g e s d e r e n t e , e t f r a i s , p o r t é s à la c o m m e d e v i n g t - q u a t r e
HUiIe d e u x c e n t c i n q u a n t e - s e p t f r a n c s d i x - h u i t c e n t i m e s ; 2 °. e n c o l l o c a t i o n p o u r f onds d e r e n t e s v i s «
fî eres o u d o u a i r e s o u v e r t s , p o r t é s a la s o m m e d e q u i n z e m i l l e hu i t c e n t q u a t r e - v i n g t - d i x - h u i t f r a n c s
s o i x a n t e - q u i n z e c e n t i m e s ; 3°, e n c o l l o c a t i o n p o u r f o n d s d e g a i n s é v e n t u e l s d e d o u a i r e s n o n o u v e r t s
^ t d e g a r a n t i e d ' é v i c t i o n é g a l e m e n t é v e n t u e l l e , p o r t é s à la s o m m e d e v i n g t - q u a t r e m i l l e d e u x c e n t
ci n qua nt e-s ep t francs soixanie-quinze centi mes .
t
.i',, t o 3ren C h a m e r l a t f u t c o l l o q u e e n s e p t i è m e l i e u , r a n g e t o r d r e , p o u r l a s o m m e d e c i n q u a n t e u n m i l l e d e u x c e n t s f r a n c s t o u r n o i s , p o u r l e p r i x d e la v e n t e d u d i x - n e u f j u i n m i l s e p t c e n t q u a t r e ' i n g t - d o u z e , d ’a p r è s la r é d u c t i o n q u i e n f u t f ai t o s u r l ' é c h e l l e do d é p r é c i a t i o n ; s u r l a q u e l l e d i t e
s o m m e il f u t f a i t d é d u c t i o n d e c e l l e do d e u x m i l l e f r a n c s t o u r n o i s , à l a q u e l l e f u t f i xée d ’office p a r
© t r i b u n a l la v a l e u r d e l a f u t a i l l e é n o n c é e a u c o n t r a t d e v e n t e , si m i e u x n ' a i m o i t le c i t . C h a m e r l a t ,
v i v a n t « e s t i m a t i o n q u i e n s e r o i t f a i t e p a r e x p e r t s ; e t d a n s le c a s où c e t t e e s t i m a t i o n , n e se p o r t e r o i t
p a s a la s o m m e d e d e u x mi l l e f r a n c s t o u r n o i s , i l f u t d i t q u ’il e n s e r o i t d é d u i t l e m o n t a n t d e l a d i t e
e s t i m a t i o n ; e t si c e t t e e s t i m a t i o n s ’é l e v o i t a u d e s s u s d e c e t t e s o m m e , le m o n t a n t d e l a d. e s t i m a t i o n
s e r o i t d e d r o i t s u r la s o m m e de c i n q u a n t e - u n m i l l e d e u x c e n t s f r a n c s , e t l e c i t . C h a m e r l a t no s e r o i t
c o or j ue q u e p o u r le r e s t a n t d e l a d. s o m m e . C e l l e e s t i m a t i o n n e f u t n é a n m o i n s o r d o n n é e q u ’à l a c h a r g e
p a r lo c i t . C h a m e r l a t d ' y f a i r e p r o c é d e r d é f i n i t i v e m e n t d a n s d e u x d é c a d e s , à c o m p t e r d u j o u r du cl t t
j u g e m e n t , a h n d e no p o i n t r e t a r d e r l ’o r d r o e t d i s t r i b u t i o n d u p r i x d o n t il s’a g i t
ü t , a t t e n d u q u e la s o m m e do t r e n t e - u n m i l l e q u a t r e . v i n g t - d i r - h u i t f r a n c s c i n q u a n t e - t r o i « c e n t i m e s
n e sut l i soi t p a s , a b e a u c o u p p r è s , p o u r r e m p l i r le c a p i t a l d u d i t c i t o y e n C h a m e r l a t . e t q u ’il l u i s e r o i t
e n c o r e r e s t e dû , s u r i c e l u i , la s o m m e d e d i x - s e p t m i l l e q u a t r e c e n t q u a t r e - v i n g t si* franc.* q u a r a n t e s e p t c e n t i m e s . , p o u r l a q u e l l e s o m m e , e n c o m p l é m e n t d ’ i c e l l e , i l lui s e r o i t d é l i v r é b o r d e r e a u , p a r l e
C
i,s u ^
s o m m e s n o n e x i g i b l e s e t s u j e t t e s à r é v e r s i b i l i t é , l e s q u e l l e s r e s t e r o i e n t e n t r e ses m a i n s
l usf j u a l e x i g e n c e d e s d i t s c a p i t a u x , e t a u x c o n d i t i o n s sp é c i f i é e s a u d i t j u g e m e n t , e t l e s q u e l l e s s o m m e s
r ! n » ‘CXI^ e*s
*a s o m m e d e q u a r a n t e m i l l e c e n t c i n q u a n t e - s e p t f r a n c s q u a t r e - v i n g t - t r e i z e
d a m « 1?' 05 * a -l ns i CJU GS* c o n s , a t é p a r l es c o l l o c a t i o n s d e G i l b e r t e B â t i s s e , d e la d a m e C o u r n o n , d e l a
millft o u r n i c r , e p o u s e R a y n a u d , e t d e J u l i e n J a y a n t ; e t é t a n t d i s t r a i t de c e t t e s o m m e c e l l e d e d i x - s e p t
soni î n^- Ja r ° c c .n ^ flu a t r c : v ' n S t “ ,s *x f r a n c s q u a r a n t e - s e p t c e n t i m e s , il r e s t o i t e n c o r e , s u r l e s d i t e s
i m n n t a i in o n e x i S , ü, c s * c e u e d e v i n g t - d e u x m i l l e si x c e n t s o i x a n t e o n z e f r a n c s q u a r a n t e - s i x c e n t i m e s
col l t
,C s u r .
m o n t a n t d e la c o l l o c a t i o n f i c t i v e d e F a u U A n t o i n e F a u r e , e t d e s c i t o y e n s V i o l i e r ,
■*rl ues e n s wite p o u r la s o m m e do m i l l e q u a t r e - v i n g t si x f r a n c s v i n g t c i n q c e n t i m e s , à la c h a r g e p a r
i a n t q u e l a d i t e s o m m e de v i n g t d e u x m i l l e si x c e n t s o i x a n t e - o n z e f r a n c s q u a r a n t e - s i x c e n t i m e s ,
on l e u r s e r o i t d é l i v r é b o r d e r e a u p a r le g r e f f i e r , r e s t e r o i t e n l e u r s m a i n s , d ’a c q u i t e r a n n u e l l e m e n t
y ' p!. ° ^ î i n ^ Int G i r o n , c r é a n c i e r a n t é r i e u r a u x d i t s F a u r e e t V i o l i e r , la s o m m e do d e u x c e n t q u a t r e ne*1 f ' ° lZe*
1CS v *n K^c *ncl c e n t i m e s , p o u r f a i r e faco à l ’i n t é r ê t du c a p i t a l d e la s o m m é d e c i n q m i l l o
u c e n t v i n g t - c i n q f r a n c s , ot e n c o r e d e d o n n e r b o n n e e t suf f i sa nt e c a u t i o n , a v e c h y p o t h è q u e s p é c i a l e ,
a i s a n t d r o i t s u r la d e m a n d e du c i t o y e n C h a m e r l a t , t e n d a n t e à ê t r e c o l l o q u e des i n t é r ê t s d e l a d i t e
^
d e c i n q u a n t e - u n m i l l e d e u x c e n t s f r a n c s t o u r n o i s , l e t r i b u n a l le d é b o u t a d e î a d i l e d e m a n d e , lo
« e n o u t a aus si d e sa d e m a n d e e n c o l l o c a t i o n d e l a s o m m e d e m i l l e v i n g t n e u f fi a n c s t o u r n o i s , à l a q u e l l e
se t r o u v o i t r é d u i t e c e l l e d e s e i z e c e n t h u i t f r a n c s assi gnat s. , p o u r l es fr a i s e t l o y a u x - c o û t s du c o n t r a t d o
v e n t e du d i x - n e u f j u i n m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t d o u z e ; le d é b o u t a a us s i d e «,a d e m a n d e e n c o l l o c a t i o n
a e la s o m m e do d i x m i l l e f r a n c s p o u r ; e s d o m m a g e s - i n t e r ê t s r c s u l t u i b île l ’é v i c t i o n des b i e n s d e la d a m o
«■aynnud , c o m p r i s a u d i t c o n t r a t d e v e n t e ; le d é b o u t a é g a l e m e n t d e sa d e m a n d e e n c o l l o c a t i o n d e la
s o m m e d e c i n q c e n t t r e n t e - q u a t r e f r a n c s s o i x a n t e d i x c e n t i m e s , p o u r les d é p e n s à l u i a d j u g é s p a r lo
j u g e m e n t d u n e u f t l nr ca l an h u i t . L e m ê m e j u g e m e n t le d é b o u t a e n c o r e d e sa d e m a n d e e n c o l l o c a t i o n
°fî la so mm o de d i x n e u f c e n t c i n q u a n t e - s i x f r a n c s , p o u r le r e m b o u r s e m e n t d e s c e n s e t d r o i t s d e l o t s ,
p a r l ui p r é t e n d u s fai t s p o u r r a i s o n d e s b i e n s c o m p r i s a u s u s d i t c o n t r a t d e v e n t e ; l e d é b o u t a é g a l e m e n t
<V s a d e m a n d e o n c o l l o c a t i o n d é s i n t é r ê t s d e l a d i t e d e r n i è r e t o m m e L e c i t o y e n C h a m e r l a t fut e n f i n
d é b o u t e do sa d e m a n d e e n r e s t i t u t i o n d e s j o u i s s a n c e s , c o m m e a us si d e sa d e m a n d e t e n d a n t e à r o t e n i r
e n se* m a i n s , soi t le m o n t a n t d e s p r i n c i p a u x d e s r e n t e s v i a g è r e s , s o i t le m o n t a n t d e s c a p i t a u x d e a
c r é a n c e s é v e n t u e l l e s des dr oi t s n on o u v e r t s e t ca p it au x é v a l u a s p o ur p r i x des v e n t e s , frais e t d o m
m a g e s i n t é r ê t s r é c l a m é s e n c a s d ’é v i c t i o n ,
"
,
. ,
iO c i t o y e n C h a m e r l a t a i n t e r j e t é a p p e l d u j u g e m e n t p r é c i t é . L e s g r i e f s q u i o n t d é t e r m i n e l ’a p p e l
s ont a u n o m b r e do q u a t r e . L e pi c i n i e r est r e l a t i f à la d i s p o s i t i o n d u j u g e m e n t q u i l u i a r e f u s é la c o l l o c a l o n q u il a v o i t d e ï h a n d t c p o u r la s o m m e do m i l l e v i n g t - n e u f f r a n c s , à l a q u e l l e s ’é l e v o i t , e n n u m é r a i r e
�4
•
•
■
.
l e s f r a i s e t l o y a u x - c o f l t s dé la v c n l e c o n s e n t i e p a r P i e r r e R a y n a u d e f c M a r g u e r i t e F o u r n i e r - T . a b r u g i è r e ,
sa f e m m e , l e d i x - n e u f j u i n m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , d o n t l ’é v i c t i o n a p r o d u i t la c r é a n c e p r i n
c i p a l e p o u r l a q u e l l e il a é t é c o l l o q u e .
.
(
,/"‘e ,.s®c o n d
c o n c e r n e la d i s p o s i t i o n d u m ô m e j u g e m e n t , q u i n e l ' a pas c o l l o q u e p o u r d e u x a n n é e »d ’i n t é r ê t s du p r i x p r i n c i p a l e t d e s l o y a u x - c o û t s d e s on a c q u i s i t i o n , m o n t a n t à c i n q u a n t e - d e u x mi l i a d è u x c e n t v i n g t - n e u f f r a n c s e n n u m é r a i r e , q u o i q u e c e s i n t é r ê t s l ui e u s s e n t é t é a d j u g é s p a r le j u g e
m e n t d u c i - d e v a n t t r i b u n a l c i v i l du d é p a r t e m e n t d u P u y - d e - D ô m e , du n e u f fl oréal a n i u i t à c o m p t e r
d e p u i s le v i n g t - u e u f m e s s i d o r a n s e p t , é p o q u e d e p u i s l a q u e l l e i l a l e n d u c o m p t e d e s j o u i s s a n c e s d e s
biens évincés,
. .
L e t r o i s i è m e g r i e f c o n c e r n e la d i s p o s i t i o n d u d i t j u g e m e n t , p a r l a q u e l l e la s o m m e d e q u a r a n t e mi l l oc e n t c i n q u a n t e - c i n q f r a n c s d e m e u r e e n r e s e r v e p o u r f o r m e r le f o n d s o i t des r e n t e s p e n s i o n s e t p r e s
t a t i o n s v i a g è r e s o u v e r t e s , e t q u i o n t a c t u e l l e m e n t c o u r s , soi t d e s d r o i t s é v e n t u e l s d e M a r e u e r i t a E o u r n i e r , é p o u s e d e R a y n a u d , e t q u i a e t e a t t r i b u e p r o v i s o i r e m e n t s u r c e s f o nds do r pî o r v o d i x s e n t
m i l l e q u a t r e c e n t q u a t r e - v i n g t - s i x f r a n c s d . x - s e p t c e n t i m e s au c i t o y e n C h a m e r i a t , p o u r c o m p l é t e r ‘s *
c r é a n c e a n t e r io u r e a ce lle tics c i t o y e n s F a u r e e t V i o l i c r , a la ch arge de les ra p p o r te r en cas d 'e x i^ i b i l i t é d e s c a p i t a u x d o n t i l s s o n t le g a g e , e t q u e l e s v i n g t - d e u x . m i l l e si T c e n t s o i x a n t e - Î a z e f r a n c s
d ’e x c é d a n t s o n t a t t r i b u e s , a u s s i p r o v i s o r r e m e n t , aux: c i t o y e n s H u r o et V i o l i e - i i ™ “
-£ ,„1
E n f i n , le q u a t r i è m e g r i e f f r a p p e s u r la d i s p o s i t i o n p a r l a q u e l l e les pr em^ers' iii®,, . „ „ V
i
•
s u r la l i q u i d a t i o n du p r i x d e la v e n t e d e m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e
1 on * ürlionrle ‘luc ■
o r d o n n é , i l s e r o i t f a i t d é d u c t i o n d e 1* s o m m e d e d e u x m i l l e fr a n c s , à q u o i ' l Î r i l . “ T
?
f
r é g l é d ’office la v a l e u r des c u v e s et futailles co m p rise s dans la ve n te
( an K«., i ' i
appel a
s e u l e m e n t q u e le c i t o y e n C h a m e r i a t a v o i t : d é d u i t . , p o u r c e t o b j e t , da ns u ' i i n S a J - " ™ “ 0° « c i S ï c é
p o r t é e p a r l e j u g e m e n t du n e u f f l o r e a l an h u i t ). L e c i t o y e n C h a m e r i a t se n l a i n l
î
creanc<i
l u i l a i s s a n t l ’a l t e r n a t i v e d e s’e n r a p p o r t e r à c e t t e e s t i m a t i o n d' office ou a c » i u c e
. ¡ ;<e , e n
e x p e r t , le t r i b u n a l d o n t e s t a p p e l n e l ui a a c c o r d é q u e d e u x d é c a d e s n ô u r fai rn n r
6 n 88 r i
“
10 iU & C m C n t d ° n t C St a p p C ‘ n ’a
être * * *
e t e x Pé d ‘é q u ’u n . m o T s a ^ r ^ ^ n o n C ’e s t s u r c e s q u a t r e g r i e f s ' , q u ’il s ’a g i t d e s t a t u e r .
L a c a u s e a p p e l é e a l ’a u d i e n c e du q u i n z e d e c e m o i s , l e c i t o y e n V e r n i t
, i „ r ; t „ v<, n
C h a m e r i a t , a c o n c l u a c e q u il p ut au t r i b u n a l d i r e q u ’i l a é t é mal j u g é p a r le i u g e m o n r ' . w “ . ' a p p e l
Ï " e n c e q u e 1er d o y e n C h a m e r U a e t e d é b o u t é d e sa d e m a n d e afin d ’ê t r e c o l C u é p o u r u ' s o m m i do
n u l l e v i n g t - n e u f f r a n c s m o n t a n t d e s f r ai s e t l o y a u x - c o û t s d e la v e n t e c o n s e n t i e à son n r fit p a r lo
c i t o y e n R a y n a u d , le n e u f j u m mi l sept c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , d ’u n d o m a i n e à C e b a z a t ,
, ,, P é v i c
W
3 ®t e p ,r o , u m c ,e ô P ^ i n g e m e n t d u t r i b u n a l c i v i l d u P u y - d e - D û m e , du n e u f f l o r é a l an h u i t é m e n d a n t ,, a t t e n d u q u e le r e m b o u r s e m e n t des l o y a u x - c o û t s d e l a v e n t o e s t t o u j r . u r s d u a l ’a c q u é r e u r é v i n c é ;
a t t e n d u q u e l e s l o y a u x - c o u t s o n t e t e a d j u g e s p a r le j u g e m e n t du n e u f i l c r é a l ’ a n h u i t ; a t t e n d u q u e lo
L h ^ e r i l t i_e n a v o i t d é c l a r a e m o n t a n t p a r s on b o r d e r e a u d ’i n s c r i p t i o n du t r e i z e n i v ô s e a n s e p t ;.
a t t e n d u q u i a v o i r r e q u i s d e t r e c o l l o q u e . p o u r c e t a r t i c l e d e c r é a n c e p a r l e p r o c è s v e i b a l d ’o r d r e , e t
n r i î i i n n o r ds - s a d e m a n d e n a v o i t pas é t é c o n t e s t é , f a i s a n t c e q u e les p r e m i e r s j u g e s a u r o i e n t dû f a i r e ,
£in nmf i
V T ™ “ , 7 '
v l n S * - " c u f t r a n c s , d o n t il s ’a g i t , s e r a a j o u t é e a la c o l l o c a t i o n f a i t e a
r
„
ni,P
d u n ‘ f * ‘ a p p e l , e u s e p t i è m e r a n g e t n i d r o ; 2 °. d i r e q u ’il a é t é p a r e i l l e m e n t
m a l |U0c e n c e q u e le c i t o y c n C l u m e r l a t n ’a p o i n t c t c c o l l o q u e p o u r d o u x a n n é e s à lui d u c s a l ' é p o q u e
<lu j u g e m e n t , d e s l u t c r c t s d e si» c- i i l o c a t i n n p r i n c i p a l o , e t d e s l o y a u x - c o û t s , q u i e n sont d e s a c c e s s o i r e s
E m c n d a n t , a t t e n d u q u e c e s i n t e r c t s , é c h u s p o s t é r i e u r e m e n t a s o r i n s c r i p t i o n h y p o t h é c a i ' o r ou p "
n . i e n f d « p l e i n d r o i t p a r la n a t u r e d e sa c r é a n c e ; q u ’i l s a v o i o n t é t é a d j u g é s p t r le iu - ornent
fK.réal a n h u i t ; q u ' i l a v o i t r e q u i s d ' ê t r e c o l l o q u e p o u r l e u r m o n t a n t p a r le p r o c è s verl," I d ' o r d o " uo
c e t a r t i c l e d e c o l l o c a t i o n n ¿voi t - pa s e t c c o n t e s t e ; q u e , d ’a p r è s l ' a r t i c l e d i x - n e u f fie" I, I ,
b' runjairfc a n s e p t , le c r é a n c i e r . i n s c r i t p o u r u n c a p i t a l p r o d u i s a n t d e s i n t é r i i c , ,1
i
•
l i b u x a n n é e » d ' a r r é r a g i s , a u m ê m e r a ng d ' h y p o t h è q u e q u e p o u r son C1p i " l
’ P<' Ur
iitie- le- m o n t a n t e n a i t é t c é n u n c é - d a n s l e b o r d e r e a u , d ’i n s c r i p t i o n , e t nuo c o ï t / t
$
necessauo
n ' e s t e x i g é e q u e p o u r lés i n t é r ê t s é c h u s a v a n t l ’. n s c r i p t i o n , o r d o n n e r q u ' i l s e r a aussi U° ,j l., ,I,.0 ï vi , t rI,Ic0
c a t i o n p r i n c i p a l e de l ’e x p o s a n t , la s o m m e d e q u a t r e m i l l e t r e n t e - u n f r a n c s p o u r d e u 3,01 • ’ ^ •a
.
d é s s o m m e s p r i n c i p a l e s e t l o y a u x - c o û t s ; 3°. d i r e a us si q u ’il a é t é ma! j u g é a u
\ i " liruts
m e n t d o n t e s t a p p e l ,i o r d o n n é la d é d u c t i o n do deux- m i l l e f r a nc s s u r lo p r i x p r i nc' i i ul °' *li
J u o®*
m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , à r e m b o u r s e r à l ’e x p o s a n t , e t c e , p o u r la v a l e u r r wl <;C •■V" . ■ °
c u v e s e t f u t a i l l e s c o m p r i s e s da ns l a d i t e v e n t e , si m i e u v n ’a i mo i c l ’e x p o s a n t f a i m n ? ? ” " lrico a 1;*
r i i a t i o n p a r e x p e r t s d a n s d e u x d é c a d e s . H m c n d a n t , a t t e n d u q u e la v a l e u r d e la
ï ¡'i
c t é r é g l é e q u[ à d o u z e c e n t s f r a n c s par l e j u g e m e n t d u n e u f f l or é a l a n h u i t , pa s s é e n f o r c e d e c h o s e Ui e é e '
fju 'il n ’y. û lieu ni il .n i g i n c rrUUcerr dd *’o' '^
n * à“*f a i r e rr ée gl il ee rr ., r>ar
f f i"c' e' . ni
p a r ccsiiniAiirm
s l i m a t i o j i ¡ . u..........
n e di *»
é d'u c t .i o n a .i ns !i rt u é ô
j r r é v o c a l d e m e n t p a r un j u g em
meennt t pa
. s s e e n f o r c e d o c h o i o l u _g e e ; q u e d a i l l e u r s il n' a
¿ lovi aucll„0
c o n t e s t a t i o n s u r c e t o b j e t d ains
n s l e p r o c è s v e r b a l d ’o
o r d r e ; e n f iinn ,, q u e s ’il
il y a v o i t ü o u à n no o s t i m a t i o n ,
l e d................
é l a i dv.ua,
c ' d e uax :c od m
é cpatdeer s d, eà lac odma pt et e dr ud ej ulag edma teeu td, uq uj ui gne m
a epuut ,u tqr ue i e x p' é d i é q u ’a u b o u t d ’u u
m o i s , a u r o i t ' c t e é v i d e m m e n t i n s u f f i s a n t , o r d o n n e r q u e l ’é v a l u a t i o n do la fut ai l l o e n q u o s t i o n d u m e u r e n
i r r é v o c a b l e m e n t fi xée e t r é d u i t e à la s o mm o do d o u z e c e n t s f r a n c s ; s u b s i d i a i r e m e n t , e t d a n s le cas où
1,; t r i b u n a l e s t i m e r o i t q u ’il p e u t e n c o r e y a v o i r l i e u à u n e e s t i m a t i o n , o r d o n n e r q u e I» dél a i do d e u x
d é c a d e s . a c c o r d é p o u r y f a i r e p r o c é d e r , s e r a p r o r o g é à d e u x m o i s , e t q u ’il no c o u r r a q u ’à c o m p t e r d e la
s i g n i f i c a t i o n d u . j u g e m e n t à i n t e r v e n i r . Kn c o n s é q i i e n c o d e s r e c t i f i c a t i o n s c i - d e s s u s , d i r e e t o r d o n n e r
q u e là c o l l o c a t i o n a c c o r d é e au c i t o y e n C h a m e r i a t e n s e p t i è m e r a n g e t o r d r e pa r l e j u g e m e n t d o n t e s t
: i p p e l , d e m e u r e r a d é f i n i t i v e m e n t r é g l é e e t f i x é e , i p . à la s o m m e d e c i n q u a n t e mi l l e c i n q c e n t « o i x a n t o
f r a n c s p o u r r e m b o u r s e m e n t d u p r i x p r i n c i p a l do l a v a n t o do m i l s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , s u r
U q u e l l o il s e r a d é d u i t d o u z e . c e n t s f r a n c s p o u r la v a l e u r d e s c u v e s ot f u t a i l l e s c o m p r i s e s da ns l a d i t o
v e n t e , co q u i r é d u i r a là p r e m i è r e s o m m e a c e l l e do q u a r a n t e - n e u f m i l l e t r o i s . c e n t s o i x a n t e f r a n c s ; a " , à
la t o m m e d e mi l l e v i n g t - n e u f f r a n c s p o u r l o y a u x - c o û t s d e l a d i t e v e n t e ; 3 U. à la s o m m e de q u a t r e mi l l o
t i ï c i i t o - u u f r a n c s v i n g t c e n t i m e s p o u r i n t é r ê t s d o - d o u x a n n é e s d e s d e u x p r e m i è r e ! s o m m e s : l es t i o i * .
c i a " i o n PU1SqUe
�,
b
w m m c s f o r m a n t c e l l e t o t a l e do c i n q m n t e q u a t r e m i l l e q u a t r e c e n t v i n g t f r a n c s v i n g t c e n t i m e s ;
'/i°. d i r e , e nf i n , q u ’i l a é t é m a l j u g é p a r le m ê m e j u g e m e n t , e n c e q u e le c i t o y e n C h a m e r u t a é t é d é b u u t é
d e sa d e m a n d e t e n d a n t e à r e t e n i r e n scs m a i n s s o i t l e m o n t a n t d e s c a p i t a u x d e s r e n t e s v i a g è r e s , s o i t
l e m o n t a n t des c a p i t a u x d e s c r é a n c e s é v e n t u e l l e s c o l l o q u é e s e n s e c o n d , t r o i s i è m e , c i n q u i è m e r t
s i x i è m e r a n g , q u i s ’é l è v e n t à u n e s o m m e c a p i t a l e d e q u a r a n t e m i l l e c e n t c i n q u a n t e - s e p t f r a n c s ; e n c o
q u il a é t é s e u l e m e n t a u t o r i s é à sc r e t e n i r , s u r l a d i t e s o m m e , c e l l e dû d i x - s o p t m i d e q u a t r e c e n t
q u a t r e - v i n g t - s i x f r a n c s q u a r a n t e - s e p t c e n t i m e s p o u r c o m p l é m e n t d e sa c o l l o c a t i o n p r i n c i p a l e ; e n ce
■¡uc c e t t e d e r n i è r e s o m m e i é t é d o n n é e i p r e n d r e . p a r l e b o r d e r e a u q u ’e n a d é l i v r é le g r e f f i e r , s u r l e s
f onds des r e n t e s v i a g è r e s a c t u e l l e m e n t o u v e r t e s , e t à l a c h a r g e d e n f a i r e I a c q u i t t e m e n t . E n t e n d a n t ,
a t t e n d u q u e l ’a r t i c l e q u i n z e do l a l oi d u o n z e b r u m a i r e a n s e p t s u r l e r é g i m e h y p o t h é c a i r e , a y c o r d a n t a
a d j u d i c a t a i r e la f a c u l t é i n d é f i n i e do j o u i r d e s m ê m e s d é l a i s q u ' a v o i e n t l es p r é c è d e n s p r o p r i é t a i r e s do
1 i m m e u b l e , p o u r a c q u i t t e r l e s c h a r g e s e t d e t t e s h y p o t h é c a i r e s i n s c r i t e s sans d i s t i n c t i o n e t sa ns e x c e p t>on , il e n l é s u l t e f o r c é m e n t q u e t o u t a d j u d i c a t a i r e e s t a u t o r i s é à r e t e n i r e n scs m a i n s t o u s l es c a p i t a u x
n o n e x i g i b l e s q u i s o n t c o l l o q u é s u t i l e m e n t s u r l e p r i x d e s o n a c q u i s i t i o n , q u e l l e q u a s o i t la n a t u r e d e s
c r e a n e ç s a l ’a c q u i t e i n e n t d e s q u e l l e s l e s c a p i t a u x s o n t d e s t i n é s , à la c h a r g e d ’e n p a y e r l es i n t e r e t s a q u i
rtc d r o i t , sans ba i l d e c a u t i o n , e t sous la s e u l e h y p o t h è q u e p r i v i l égi éo d e l ’i m m e u b l e p a r l u i a c q u i s ; q u e
c e t t e r e t e n u e e s t é g a l e m e n t n é c e s s a i r e p o u r la s û r e t é d e l ’a d j u d i c a t a i r e e t p o u r c e l l e des c r é a n c i e r s
i -oUoqués a v e c p r i v i l è g e s p é c i a l s u r l ' i m m e u b l e ; q u e d ’a i l l e u r s , à sa q u a l i t é d ’a d j u d i c a t a i r e , le c i t o y e n
' - h a m e r i a t j o i n t c e l l e d e p r e m i e r c r é a n c i e r , s u r l e q u e l l es f o n d s e n t i è r e m e n t l i b r e s m a n q u e n t p o u r
c o m p l é t e r sa c o l l o c a t i o n ; q u ’à c e t i t r e , il e s t l e p r e m i e r e n o r d r e p o u r r e c e v o i r l e s f o nd s r é v e r s i b l e s a
m e s u r e q u e l es c r é a n c e s e t c h a r g e s t e m p o r a i r e s ou é v e n t u e l l e s d o n t ils r é p o n d e n t v i e n d i o n t à s’é t e i n u r e ,
qu a c e m ê m e t i t r e , il a d r o i t de r e c e v o i r , p r é f é r a b l e m e n t à t o u t a u t r e c r é a n c i e r p o s t é r i e u r à l u i, I l
p a r t i e d e s f onds r é v e r s i b l e s q u i n ’e s t g r e v é e d ’a u c u n e c h a r g e a c t u e l l e , e t n e r é p o n d q u e d e s d r o i t s p u r e
m e n t é v e n t u e l s ; q u e le v i d o d e sa c o l l o c a t i o n e m p o r t e l a t o t a l i t é d e c e t t e p a r t i e d e f o nds r é v e r s i b l e à
n e u f c e n t c i n q u a n t e . q u a t r e f r a n c s p r è s , q u i s e r o n t e u x - m ê m e s a b s o r b é s p a r les f r a i s d e r é f o r m a t i o n d a
o r d r e ; q u e la c o n s e r v a t i o n e n ses m a i n s , s oi t d e c e f o i bl e e x c é d e n t , s o i t d u f o n d d e s v i a g e r s a c t u e l l e
m e n t o u v e r t s , e s t n é c e s s a i r e p o u r sa g a r a n t i e d e s s u i t e s d e la c o l l o c a t i o n é v e n t u e l l e d e M a r g u e r i t e
- i u i n i c r , epou s o d e l ' e x p r o p r i é ; o r d o n n e r , i ° . q u e l a s o m m e d e q u i n z e m i l l e n u i t c e n t q u a t r e - v i n g t t l c u z e f r a n c s , c o m p o s a n t le f o n d d e s r e n t e s , d o u a i r e e t p r e s t a t i o n v i a g è r e p o u r l e s q u e l l e s o n t é t é c o l l o
ques Cjilbcrte Bâ ti sse , ( deu xi èm e collocation ) , Alarie C o u r n o n , v e u v e de François R a y n a u d ,
1 qua trième collocation ) , et J u l i e n J a y a n t , ( sixième collocation ) , restera e n t re les mains du c it o y e n
^ ï a m e r l a t e n s a - q u a l i t é d ’a d j u d i c a t a i r e , à la c h a r g e pa r l ui d e p a y e r , a n n u e l l e m e n t j u s q u ’à l ’e x t i n c t i o n ,
l e s r e n t e s e t p r e s t a t i o n s v i a g è r e s , à l ' a c q u i t t e m e n t d e s q u e l l e s le f o nds e s t d e s t i n é p a r le j u g e m e n t d o n t
e s t a p p e l ; a °. q u e , s u r la s o m m e do v i n g t - q u a t r e m i l l o d e u x c e n t c i n q u a n t e - n e u f f r a n c s , c o m p o s a n t
l e t on d d e s c r é a n c e s e t d r o i t s é v e n t u e l s p o u r l c s q u o U a é t é c o l l u q u é e A l a r g u e r i t c F o u r n i e r , é p o u s e d e
l e x p r o p r i o , ( q u a t n ù m o c o l l o c a t i o n ) , le c i t o y e n C l i a m o i l a t r e t i e n d r a o n «es m a i n s , e n sa q u a l i t é d e
c r é a n c i e r , la s o m m e do v i n g t - t r o i s mi l l o t r o i s c e n t c i n q f r a n c s p o u r , a v e c la s o m m e d e t r e n t f - u n m i l i a
q u a t r e - \ i n g t - a i x - h u i t f . a n c s c i n q u a n t e - t r o i s c e n t i m e s do f onds e n t i è r e m e n i l i t . r e s q u ' i l a é t é a u t o r i s é
a r e t e n i r p a r l e l o g e m e n t d o n t e s t a p p e l , e n d é d u c t i o n do l a c r é a n c e p o u r l a o u e l l o i l e s t c o l l o q u é e n
s e p t i è m e r a n g e t o r d r e , c o m p l é t e r le m o n t a n t de l a d i t e c o l l o c a t i o n , e t d e s a d d i t i o n s e t a u g m e n t a t i o n s
a î c e l l e , c i - d e s s u s r e q u i s e s ; e n c o n s é q u e n c e q u e l ’i n t é r ê t d u d i t c a p i t a l d e v i n » t - t r o i s m i l l e t r o i s c e n t
c i n q f r a n c s , p a r l ui r e t e n u e p r o v i s o i r e m e n t e n p a y e m e n t , d e m e u r e r a é t e i n t j u s q u ' à l ' o u v e r t u r e d e «
d r o i t s e v e n t u e l s de l a d i t e M a r g u e r i t e F o u r n i e r , f e m m e R a y n a u d ; 3°. ¡ ’a u t o r i s e r a us s i à r e t e n i r é g a l e Kien e n ses m a i n s la s o m m e d e n e u f c e n t c i n q u a n t â - q u a t r e f r a n c s r e s t a n t e tics q u a r a n t e m i l l e c e n t c i n i l n n ^ a r » f e/^ *,r a nc s (l u;ït r e - v i n g t - t r e i z e c e n t i m e s d e f o nd s r é v e i s i b l e s , a p r è s d é d u c t i o n d e s d e u x p r é c é n i r I V y t ^ ,G|' °
au t o n se r , e nf i n, n c o n t i n u e r d e r e t e n i r d e m ê m e l e s f u n d s q u i d e v i e n d r o n t l i b r e s
d u ri'nVnf10- 10 . c.s r e n !°|! e t p r e s t a t i o n s v i e g e r c s c i - d e s s u s d é s i g n é e s , l e t o u t p o u r s û r e t é e t n a n t i s s e m e n t
d o i t o n v ('*1 i ]I? .m n j ^e e v p n t u e l l e , q u i lui s e r o n t d û s e n c a p i t a u x e t i n t é r ê t s p a r l ’é v é n e m e n t q u i
/° flanc 1 ^ lCS * ,
P0 l ] r l e s q u e l s M a r g u e r i t e F o u r n i e r e s t c o l l o q u é e a u q u a t r i è m e r a n g e t o r d r e ;
d u r i t " ° Cn L ° U a ,s or ume de n e u f c e n t c i n q u a n t e - q u a t r e f r a n c s r e s t a n t e e n e x c é d e n t do ta c o l l o c a t i o n
. « o ) c n ^ h a m e r l a t , m e n t i o n n é e a u n ° . p r é c é d e n t , n e s e r o i t pas e n t i è r e m e n t a b s o r b é e p a r l es fr a i s
n e t S e r o n [ . ? m P ,(>yes e n i r a i s d ’o r d r e , o r d o n n e r q u e , p e n d a n t t o u t l e t e m p s q u e c e q u i e n d e m e u r e r a
Sai fcCp *
e ' ^ ^ u t e c h a r g e a c t u e l l e , l ’i n t é r ê t d e la s o m m e a i n s i r e s t é e l i b r e s e r a p a y é à A n t o i n e
cuIW
’ Gn d i r o i n u t i o n d e l a p r e s t a t i o n v i a g è r e do t r o i s c e n t s f r a n c s t o u r n o i s p o u r l a q u e l l e il e s t
u i i a t " ^ 0 e n ? e x ^ e c ^: i l ' v .G Pa r le j u g e m e n t d o n t e s t a p p e l , l ' o r d r e d ' h y p o t h è q u e d u d o u z e n i v ô s e a n
«mi v ^ V o r n n c r
q u ’e n cas d ’e x t i n c t i o n d e t o u t o u p a r t i e d e s c h a r g e s v i a g è r e s a c t u e l l e m e n t
cil
* Gp , aujccl 1,e^ cs c $t a f f e c t é le f o n d do q u i n z e m i l l e h u i t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e f r a n c s , q u e l e
o y e n C h a i n o r l a t s e r a a u l o n s c à r e t e n i r le m o n t a n t do la p r e s t a t i o n a n n u e l l e é t e i n t e , q u i s e r a p a y é à
c o n i p e r u u j o u r de c h a q u e e x é c u t i o n , d ' a b o r d a u d i t A n t o i n e S a i n t - G i r o n j u s q u ’a u p a r f a i t c o m p l é m e n t
o
a r r j e r e d e sa c o l l o c a t i o n nu s e c o n d r a n g d e s c r é a n c i e r s p o u r l e s q u e l s Ici f o nds a c t u e l l e m e n t l i b r e s
on ma nc j ue , e t que' le s u r p l u s du m o n t a n t d e s d i t e s cl i a r g os a n n u e l l e s e t é t e i n t e s » s e r a p a y é a u x
' ' j o n s r a u r e e t V i o l i c r , e n d i m i n u t i o n d e s i n t é r ê t s d e l e u r c o l l o c a t i o n au t r o i s i è m e r a n g d e s d i t s
r c-ancicrs p o u r l c s q u o U l es f o nds a c t u e l l e m e n t d i s p o n i b l e s o n t m a n q u e , le t o u t j u î q u ’a l ’o u v e r t u r e de*
m u s ^ v e n i u e l s d e M a r g u e r i t e F o u r n i e r , é p o u s e d u c i t o y e n R a y n a u d , e x p r o p r i é ; £>°. o r d o n n e r ,
P
» q u a l ' u y c n c m o n t d u d c c è s du p r e m i e r m o u r a n t , s o i t do l ’ i u r r c I l a y n a i t r i , « o i t d e M a r g u c r i t o
ou i n i e r son é p o u s o , |0 c i t o y e n C h a m c r l a t e t l e s c i t o y e n s F a u r o e t V i o l i e r p r o c é d e r o n t e n s e m b l e a u
rc't^ G
V-'G^'rotrit a u q u e l c e s è v é n e m e n s d o n n e r o n t l i e u , afi n d e r e c o n n o î t r e e t f i r c r los f o n d s q u i
s
ÎVsP ° n >l, li‘ s à c ' t t c é p o q u e , e t d ’on f a i r e l ' a p p l i c a t i o n e t lo v e r s e m e n t , a i n s i q u e d e d r o i t ,
¿ ¡ « t / •!i.J'l *lL*rc e x é c u t i o n do l e u r s c o l l o c a t i o n s r e s p e c t i v e s ; 6°. o r d o n n e r la r é f o r m a t i o n d e t o u t e s l e«
a ù r i H 'UI,1S fi. CConi! i l r e s ^ ll ¡ u ^ c m c n t d o n t « ‘ t a p p e l , q u i s o n t d e s s u i t e s d e s d i s p o s i t i o n s p r i n c i p a l e s q u i
et o r oft i rnnj cs ; 7 <l. c u i n i , c o n d a m n e r les i n t i m é s e n t o u s les d é p e n s , t a n t d e s c a u s e s p r i n c i p a l e s
l'ed t
* J ï ^ d ' a i r e m e n t , e t d a n s le c a s o ù le t r i b u n a l y f e r o i t q u e l q u e d i f f i c u l t é , o r d o n n e r q u »
<i c i t o ) e n Ch. i mor l . i t p o i i r r a e m p l o y e r l e s d i t s d é p e n s c o m m e a c c o s s o i r e s do sa c o l l o c a t i o n , e t a u
m e ï a » B « t u r d i c d ’b y p o i h è q u t * .
.
%
�6
L e c i t o y o n M a n d a t j e u n e , a v o u é d e R o b e r t S a i n t - H o r c n t , do J a c q u e s L c g a y , d ’E l i e n n e M è g e , d «
JVli chel l o P a t e a u , v e u v e F i c d e t , d e R e n é T i x i e r , du C h a r l e s V a l e y r e , d e J e a n 13oif,'o , do J e a n
D e s m a r t i n , d e J o a n e t i a i ai ze D e s g r a n g e s , d e J e a n R o u g a y r o n , d e G u i l l a u m e e t J e a n T a i l h a n d i c r
a c o n c l u à c e q u' i l p l û t a u t r i b u n a l , a t t e n d u q u e l ’a p p e l i n t e r j e t é p a r l e c i t o y e n C l i a m e r l a t n e r e g a r d a
l e s i n t i m e s q u e t r c s - i n d i r e c t e m e n t ; a t t e n d u q u ’i l s n ’o n t f a i t a u c u n s j na u \ a i s e c o n t e s t i t i on ; q u ' i U n ’o n t
p a s é t é c o l l o q u e s u t i l e m e n t , e t q u e l e u r m i s e e n c a u s e s u r l ’a p p e l c l o i t i n u t i l e , d o n n e r a c t e a u x i n t i m é s
d e c e q u e , s u r l e d i t a p p e l , iis. s ’e n r a p p o r t e n t à c e q u i s e r a s t a t u e , e t c o n d a m n e r le c i t o ; e n C n a m e r l a t
a u x d é p e n s fai t s a l e u r é g a r d .
_
.
L e c it o ye n Vazcillo , po ur l e c it o y e n F a yo , a vou e de Ou berto liatisse , a conclu à ce qu'il plût au
t r i b u n a l , a t t e n d u q u e , p a r la d i s p o s i t i o n d u j u g e m e n t d o n t e s t a p p e l , q u i c o n c e r n e G i l u e r t e Bâ t i s s e ,
B e u o i t C l i a m e r l a t e s t n é c e s s a i r e m e n t a u t o r i s é à r e t e n i r l e c a p i t a l d e la r e n t e v i a g è r e , a e l l e d u o ,
p u i s q u e c e c a p i t a l f a i t l ’o b j e t d e l a s e c o n d e c o l l o c a t i o n ; q u e les p r e m i è r e s n e »o nt q u e d ’u n e s o m m e ,
a u t o t a l , . d e q u a t r e m i l l e d e u x c e n t s e i z e f r a n c s s o i x a n t e - c i n q c e n t i m e s , et q u e U e n o i t C l i a m e r l a t e s t le
p r e m i e r c r é a n c i e r c o l l oq ue p o u r r e t e n i r les c a p i t a u x de r ent es vi a gè r es e t c r é a n c e s é v e n t u e l l e s ;
a t t e n d u , , d è s - l o r s , q ue O i l b e r t e B â ti ss e a e t e s a n s i n t e r e t , e t follement i n t i m é e , d éc l a r e r le c i t o y e n
C h a m e r l a t , p u r e m e n t e t s i m p l e m e n t , n o n r e c e v a b l e d a ns s on a p p e l , a v e c d é p e n s .
L e c i t o y e n B a y l e a i ne . a v o u e de P i e r r e C r e u z c t , a co ncl u à c e qu' i l plût au t r i b u n a l , a t t e n d u ,
, P. q u e le c i t o y e n C r e u z c t n e s t pa s c o l l o q u e - u t i l e m e n t p a r le j u g e m e n t d o n t e s t a pp e l - 3 «. q u ' i l n ’i
a u c u n i n t é r ê t d a n s la c a u s e d a p p e l , 3 . q u i l n y a v o i t a u c u n e s o r t e d e m o t i f p o u r v a p p e l e r ¡0 c i t o v e n
C r e u z e t , q u i n e p r e n d a u c u n e p a r t da ns l es c o n t e s t a t i o n s d ' e n t r e l es p a r t i e s d u c i t o v e n P a e è s c i rlu
c i t o y e n M a r i e , e t q u a i n s i l es f r a i s fai t s c o n t r e u i s o n t p u r e m e n t f m s t r a t o i r e s , r e n v o y e r u f e i t o y e u
C r e u z c t d e 1 a s s i g n a t i o n a l ui d o n n é e d e la p a r t d u c i t o y e n C h a m e r l a t , e t le c o n d a m n e r o u c e le de“
p a r t i e s q u i s u c c o m b e r a , a u x d é p e n s fai t s p a r le c i t o y e n C r e u z c t e n c a u s e d ’a nn e l
A nn nn ep -_Cf lln'
n uelbu ar rr ld , a■> oc ou n« «c!l.u. 1à ce cn.'il
. ■1
LI en. c i t o y e n iGl <
o»n
u it bbee yVrrO
e . aa vv oo uu eé d*
d ’A
a i rA
re D
a û t r i..h n n a '. . » . „ ■ '_i '
q u e l a d e m o i s e l l e D e b a r d n e s t pa s c o l l o q u é e u t i l e m e n t p a r le j u g e m e n t dont1 ’
q u ’e l l o n 'a a u c u n i n t é r ê t d a n s la c a u s e d ' a p p e l ; a t t e n d u q u ' i l n ' y a v o i t a u c u n e s„ r t „ é m o t i f p o u r y
a p p e l e r l a d i t e D e b a r d q u i n e p r e n d a u c u n e p a r t da ns l e s dé b a t s d ' e n t r e l es p a r t i e s de s c i t ^ v e n s P a ^
e t M a r i e , e t q u ’a i n s i les f r a i s f t . t s p a r le c i t o y e n C h a m e r l a t c o n t r ' e l l e , so nt p u r e m e n t ^ f î u s t . a t i Î i r e s
r e n v o y e r l a d e m o i s e l l e D e b a r d do I a s s i g n a t i o n à e l l e d o n n é e p a r le c i t o y e n C h a r n e i l a t e t l e e o n T
d a m n e r , ou c e l l e des pa rt i es a d v er s e s q ui s u c c o m b e r a , a ux dépens.,
9
L e c i t o y e n D e v è z e , p o u r le c i t o y e n D e m a y , a v o u é d e M a r g u e r i t e F o u r n i e r , v e u v e L a b r u - i é r e
f e m m e R a y n a u d , c o n c l u t a c e qu il plût au t r i b u na l
atten du que M a r g u e r i t e F o u r n i o r n ° a v o i t
d e m a n d e e t n a o b t e n u la c o l l o c a t i o n d e ses c r é a n c e s q u ' e n q u a t r i è m o l i e u , r a n ç - e t o r d r e , c o n f o r m é
m e n t à l a . d a t e d e son t i t r e h y p o t h é c a i r e , q u i é t o i t son c o n t r a t d e m a r i a g e d u s e p t j a n v i e r mi l sent c e n t
q u a t r e - v i n g t - d e u x ; a t t e n d u q u e c e t t e c o l l o c a t i o n n ’e s t c o n t e s t é e ni p a r C l i a m e r l a t , ni par* a u t r e
c r é a n c i e r ; a t t e n d u q u e M a r g u e r i t e F o u r n i e r n e d o i t p r e n d r e a u c u n i n t é r ê t à c e q u e l es c a p i t a u x d e
ses c r é a n c e s é v e n t u e l l e s s o i e n t r e t e n u s p a r C h a m e r l a t o u t o u t a u t r e c r é a n c i e r do P i e r r e R a y n a u d ,
p u i s q u e , d a n s t o u s les c a s le r e c o u v r e m e n t d e c e s c a p i t a u x l ui e s t a s s u r é , d o n n e r a c t e à l a ' f o m i u i
l l a y n a u d d e c e q u e , s u r 1 a pp e l do C h a m e r l a t , e l l e s ’e n r a p p o r t e à d r o i t , e t le c o n d a m n e r a u x d é p e n s
l i a l a c a u s e d app e l ; s u b s i d i a i r e m e n t . ^ o r d o n n e r q u e M a r g u e r i t e F o u r n i e r los e m p l o i e r a c o m m e f r a i s e t
m i s e s . d e c r e a n c e , e t e n c o n s é q u e n c e , q u e le m o n t a n t d e s d i t s f r a i s f e r a p a r t i e do s o n b o r d e r e a u do
c o l l o c a t i o n , p a r toi me il a u d i t i o n , p o u r l u i ê t r e p a y é , p a r C h a m e r l a t , s u r lo p r i * du s o n a c q u i s i t i o n .
L e c i t o y e n M a r i e , a v o u a do P a u l - A n t o i n e F a u r e , C U i u l e K o n g i e r s on g e n d r e , V i o l i c r e t c o m
p a g n i e , e t les c i t o y e n s l l r u m o a u , M o r i n et c o m p a g n i e , c o n c l u t h c e q u ’i l p l û t a u t r i b u n a l , a t t e n d u nu-'
l l r u m e a u c l M o r i n n ' o n t e t n e p e u v e n t a v o i r a u c u n i n t é r ê t s u r l ’appol ; a t t e n d u q u e F a u r e e t c o n « n r i <
n ' o n t d e m a n d e d e c o l l o c a t i o n q u ' a U d a t e d e l e u r t i t r e do c r é a n t e , n e u f p l u v i ô s e a n ci nt i •
d ' a i l l e u r s , q u ’i l s n o n t fajt a u c u n e c o n t e s t a t i o n e n c a u s e p r i n c i p a l e , d i r e q u e B r u m e a u e t Ù
,
>
é: é- f o l l e m e n t i n t i m e ; . e t c o n d a m n e r C h a m e r l a t a u x d é p e n s à l e u r é g a r d ; e n c e q u i t ou c ' i u F j
'!►
c o n s o r t s , d i r e q u ’il a e t a b i e n j u g é . a u s s i a v e c d é p e n s , si m i e u x n ' a i m e lo t r i b u n a l o r d o n n e r
U.«
emp loi ero nt - on frais e t m u e s de c r e a n ce ,
q u ils l es
L e s d é f e n s e u r s o f f i c i e u x e t a v o u é s d e s p a r t i e s , p l a i d è r e n t e n s u i t e les d i f f é r e n s m o v n n s i l ’
1 1
, *m l o s i o n s c i - d e s s u f .
'
a i appui
ucj
• L e c i t o y e n c o m mi ss a ir e du g o u v e r n e m e n t , apr ès a v o i r r appelé les m o y e n s r e sp e ct i f I
r
c o n c l u t a c e q u ' i l l û t d i t q u ’i l a c l é m a 1 i u g e p a r le j u g e m e n t d o n t e « t a p p e l , b i e n a nnol *
P, r i c ’ >
o r d o n n e r , i°- q u ’il s er a a j o u l c , à la c o l l o c a t i o n d u c i t o y e n C h a m e r l a t . la s o m m e d e niiMn \Tn i
uf
f r a n c s p o u r los f i a i s e t l o y a u x - c o û t s d u c o n t r a t d e v e n t e du d i x - n e u f j u i n mi l sont c u n t n n i i r i  ¡'.wi
d o u z e ; a °. q u ’il s e r a t n c o r o a j o u t é la s o m m e d e q u a t r e m i l l e t r e n t o - u i i f r a n c s v i n g t c e n t i m e » p o u r de“ . ï
a n n é e s d i n t ü i é U ; 3°- <|u’il sora p r o c é d é A l ' e s t i m a t i o n d e la f u t a i l l e d o n t il s ’a g i t , d a n s t e l dél a i u u ' i l
p l a i r a a u t r i b u n a l ii xoi ¡ 4 ° . e n f i n , q u e t o u s los f o nds r e s t a n s a p r è s les c o l l o c a t i o n s a n t é r i e u r e s à c e l l e d u
c i t o y e n C h a m e r l a t , d e m e u r e r o n t o s - m a i n s do co d e r n i e r , à la c h a r g e p a r lui de p a y e r so i t les l e n t e s
v i a g è r e s é n o n c é e s au b o r d e r e a u d ’o r d r o , à l ui d é l i v r é , soi t l es d r o i t s é v e n t u e l s de la d a m e R a y n a u d lo c a s a v e n a n t , s a u f , a p r è s l ’o x t i n c t i o n d e s d i t e s r e n t e s v i a g è r e s a u x d r o i t s e t c r é a n c e s é v e n t u e l l e s ’
» p i o c c d e r , e n t r e la p a r t i e de P a g e s e t l es c r é a n c i e r s p o s t é r i e u r s e n o r d r e , a u c o m p t e e t d i s t r i b u t i o n
d e co qtii p o u r r a r e s t e r l i b r e d a n s l es ma i n s (la la p a r t i e d e Page*.
L e t r i b u n a l , a p r è s a v o i r e n t e n d u lu c o m m i s s a i r e , , o r d o n n a q u ' i l o n s or oi t d é l i b é r é e n la c h a m b r e d u
conseil_
L a c a u s e d e n o u v o a i i a p p u l é o co j o u r d ’h u i , il a é t é p r o n o n c é le j u g e m e n t s u i v a n t :
E n c e q u i t o u c h e le pi e n t i e r g r i e f , A t t e n d u l e p r i n c i p e quo lo r e m b o u r s e m e n t d e s f r a i s e t l o y a u x - c o û t s do la v e n t o e s t t o u j o u r s dA à
l'ucquérour évincé ;
A t t e n d u ' q uo l es f r a i s e t l o y a u x , c o û t s , d o n t la p a r t i e do P a g e s r é c l a m e la c o l l o c a t i o n , l ui o n t é t é
a d j u g é s c o n t r e soit v e n d e u r p a r lo j u g e m e n t d u u o u f f l o r é a l a n h u i t , e t s ’é l è v e n t , e n v a l e u r r é d u i t e , à
U •«•mine do mi l l e v i n g t n « u f f r a n c s t o u r n o i s ;
A t t e n d u qi i u ic m o n t a n t u n a c t e d é c l a r é p a r I,t p a i t i o d e Pa ; ; ès (Uns son b o n l e i c a u d ' i n s c i i p t i o u d u
�•
.
.
7
t r e i z e n i v ô s e a n s e p t , s u r l a p r é s e n t a t i o n d u q u e l , e t le v u d e s t i t r e s p r o d u i t s , d e v o i t è t r è f a i t l ’o r d r e ,
a u x t e r m e s d e l ' a r t i c l e t r e i l l e - t r o t s d e l a l oi d u on z e b r u m a i r o a n s e p t ;
A t t e n d u q u e p a r l e p r o c è s v e r b a l d ’o r d r e l a p a r t i e d e P a g è s , e n d e m a n d a n t q u e sa c o l l o c a t i o n f û t
p o r t é e , s u r l e v u d e s o n bo r d e r e a u ! e t d e ses t i t r e s , à la s o m m e do c i n q u a n t e . d e u x m i l l e q u a t r e c e n t
c i n q u a n t e - c i n q f r a n c s d i x s ous , q u o i q u e l e p r i x p r i n c i p a l de la v e n t e d o n t il r e q u é r o i t l e r e m b o u r s e m e n t :
n e se p o r t e , e n v a l e u r r é d u i t e , q u ’à c i n q u a n t e u n m i l l e d e u x c e n t u n f r a n c s , a é v i d e m m e n t c o m p r i s
d a n s sa r é c l a m a t i o n la s o m m e d e m i l l e v i n g t - n e u f f r a n c s , v a l e u r r é d u i t e d e s fr a i s e t l o y a u x - c o û t s p o u c
l e s q u e l s i l s ’e t o i t e x p r e s s é m e n t i n s c r i t a u b u r e a u d e s h y p o t h è q u e s ;
^
(
^
A t t e n d u q u e c e s d e u x s o m m e s r é u n i e s s o n t i n f é r i e u r e s à la c o l l o c a t i o n r e c l a m e e p a r l a p a r t i e d »
P a g e s e n v e r t u d e s on b o r d e r e a u d ’i n s c r i p t i o n ;
A t t e n d u m ê m e q u e c e c h e f d e c o l l o c a t i o n n ’a v o i t p a s é t é c o n t e s t é l o r s du p r o c è s v e r b a l d ’o r d r o ;
E n c e q u i t ou c h e le s e c o n d g r i e f ,
.
,
A t t e n d u q u e l es i n t é r ê t s é c h u s p o s t é r i e u r e m e n t à l ’i n s c r i p t i o n h y p o t h é c a i r e d e la p a r t i e d e P a g e *
a v o i e n t c o u r u de p l e i n d r o i t p a r la n a t u r e d e sa c r é a n c e r é s u l t a n t e d ’u n e é v i c t i o n f o r c é e ;
A t t e n d u q u ’i l s l u i a v o i e n t é t é a d j u g é s p a r la s e n t e n c e d u n e u f f l or é a l an h u i t ;
A
_ A t t e n d u q u ’a u p r o c è s v e r b a l d ’o r d r e l a p a r t i e d e P a g è s a v o i t r e q u i s c o l l o c a t i o n p o u r c e s m e m e *
intérêts ;
A t t e n d u q u e p a t l ’a r t i c l e d i x - n e u f d e l a l oi d u o n z e b r u m a i r e a n s e p t , l e c r é a n c i e r , i n s c r i t p o u r u n
c a p i i a l p r o d u i s a n t d e s i n t é r ê t s , a d r o i t d e v e n i r p o u r d e u x a n n é e s d \ r r é r a g e s a u m ê m e r a n g e t hypo*
t f i é q ue q u e p o u r s o n c a p i t a l ;
( ■
_
A t t e n d u q u e c e t a r t i c l e d e l a l oi q u i r é d u i t à d e u x a n n é e s d ’i n t é r ê t s t o u s c e u x q u i p e u v e n t s ' a c c u
m u l e r d e p u i s l ’i n s c r i p t i o n h y p o t h é c a i r e i u s q u ’a la c l ô t u r e d e l ’o r d r e , n ’a j o u t e pa s q u e c e s d e u x a n n e e *
u i n t é r ê t s e r o n t s e u l e m e n t a c c o r d é e s l o r s q u e l e c a p i t a l e n p r o d u i r a à l ’i n s t a n t m ê m e d e l ’i n s c r i p t i o n ;
A t t e n d u a u c o n t r a i r e q u ’il a t t r i b u e , e n t e r m e s g é n é r a u x e t i n d é f i n i s , à t ou s c r é a n c i e r s i n s c r i t s , l a
d r o i t d e l é c l a m e r d e u x a n n é e s d ’i n t é r ê t , si l e u r s c a p i t a u x e n p r o d u i s e n t sa ns d é s i g n e r l ' é p o q u e où c e t
ni e m e s i n t é r ê t s o n t p r i s c o u r s , e t q u e c e t t e d i s p o s i t i o n g é n é r a l e e m b r a s s e t o u s le s c a s , p o u r v u , t o u t e s
*
>‘lu Y s o l t
d e u x a n n é e s d ’i n t é r ê t s à la c l ô t u r e d e l ’o r d r e ;
_
_
A t t e n d u q u e l ’a r g u m e n t t i r é d e l ’a r t i c l e d i x - s e p t d e la m ê m e l oi n e s ’a p p l i q u e q u ' a u x i n t é r ê t s é c h u *
l or s u e l ' i n s c r i p t i o n h y p o t h é c a i r e ;
. .
.
'
A t t e n d u q u e l ’a r t i c l e d i x - n e u f e n e s t a b s o l u m e n t i n d é p e n d a n t , e t s e r a p p o r t e a u x i n t é r ê t s é c h u i
p o s t é r i e u r e m e n t p o u r l e s q u e l s la loi o u v r e , a u c r é a n c i e r sans i n s c r i p t i o n r e l a t i v e à c e t o b j e t , u n d r o i t
qui n e p e u t pa s e x c é d e r d e u x a n n é e s , q u e l l e q u e s o i t la m a s s e d e c e s i n t é r ê t s a c c u m u l é s :
£-n c e q u i t o u c h e l e t r o i s i è m e R r i e f ,
. . A - 0 " 1' “ <lu e . l ’a r t i c l e q u i n z e d e la l oi d u o n z e b r u m a i r e a n s e p t , d o n n e a l ’a d j u d i c a t a i r e la f a c u l t é
i n u e h n i e d o i o u i r d e s m ê m e s t e r m e s q u ’a v o i e n t l es p r é c é d o n s p r o p r i é t a i r e s d e l ' i m m e u b l e p o u r a c q u i t t e r
l e s d e t t e s e t c h a r g e s h y p o t h é c a i r e s i n s c r i t e s sans a u c u n e d i s t i n c t i o n n i e x c e p t i o n :
l e s t e r m e s d e c e t a r t i c l e il r é s u l t e c,uo t o u t a d j u d i c a t a i r e e s t a u t o r i s é à r e t e n i r , e n s e t
m a i n s , l e s c a p i t a u x n o n e x i g i b l e s u t i l e m e n t c o l l o q u e s s u r l e p r i x do s o n a c q u i s i t i o n , q u e l l e q u e s o i t 1»
n a t u r e d e s c r t a n c e s a u p a y e m e n t d e s q u e l l e s c e p r i x e s t d e s t i n e , à la c h a r g e d ' e n p a y e r l ' i n t é r ê t à q u i do
d r o i t , o u in itistar.ti , ou a u n e e p o q u e é v e n t u e l l e ;
i
ci y * sa flu a ^ c d a d j u d i c a t a i r e la p a r t i e do P a g è s a u r oi t c e l l e d e p r e m i e r c r é a n c i e r , s u r l e q u e l
les f i n a s p l e i n e m e n t l i b r e s m a n q u e n t p o u r c o m p l é t e r sa c o l l o c a t i o n ; q u ’à c e - t i t r o la p a r t i e do P a g e s
C-iV r ? 5ll e c t l v o m e n l : “ u:c c r é a n c i e r s p o s t é r i e u r s , la p r e m i è r e e n o r d r e p o u r r e c e v o i r l e s f o n d s r é v e r
si bl es a m e s u r e q u e les c h a r g e s t e m p o r a i r e s ou é v e n t u e l l e s , d o n t i l s r é p o n d e n t , v i e n d r o n t à s’é t e i n d r e ;
t t e n u qu au m ê m e t i t r e la p a r t i e d e P a g è s a d r o i t , p r é f é r a b l e m e n t a u x c r é a n c i e r s p o s t é r i e u r s , d o
ro t. ni r a p a r t i e d u p r i x r é v e r s i b l e q u i n ’e s t s o u m i s e à a u c u n e c h a r g e a c t u e l l e , e t n e r é p o n d q u e d a
dr oit s p u r e m e n t e v e n t u e l s ;
*l' ° ^ r a c t ’ p <le P a g e s n e p e u t p a s ê t r e d é s s a i s i e e n f a v e u r d e c r é a n c i e r s p o s t é r i e u r s e n
t-r0 ’ ilU Ka S° cl ul d o i t s e r v i r à l ’i n d e m n i s e r p l e i n o m e n t d e sa c r é a n c e a u L é r i c u r e :
£ n c e q u i t o u c h e le q u a t r i è m e c h e f :
, ,l ° n d u q u e la p a r t i e d e P a g è s a r e s t r e i n t son a p p e l e n c e q u e le j u g e m e n t d ’o r d r e n e l u i a p a s d o n n é
u n riela: f u t n s a n t p o u r f a i r e p r o c é d e r à l ' e s t i m a t i o n c^u’il o r d o n n e .
A t t e n d u q u e c e d é l a i , a c c o r d e à la p a r t i e d e P a g e s p a r c e j u g e m e n t , ¿ t o i t e x p i r é d è s a v a n t m é m o
*l-u
*^t ^ x p c t i i ê e t q u ’il le f û t r é e l l e m e n t .
•
(
A t t e n d u (|ue la f u t a i l l o q u i f a i t l ' o b j e t d e c e c h e f a v o i t e t c é v a l u é e , s a u f e s t i m a t i o n , à l a s o m m e do
u o u z e c e n t s f r a n c s , p a r la s e n t e n c e d u n c u f i l o r é a l a n 8 , r e n d u e a v e c le v e n d e u r .
(
A t t e n d u q u e , s u r la s i m p l e r é c l a m a t i o n d e s c r é a n c i e r s i n s c r i t ? , la v a l e u r d e c e t t e m ê m e f u t a i l l e a * t é
p o r t e e a la s o m m e d e d e u x m i l l e f r a n c s . s i m i e u x la p a r t i e d o P a g è s n ’a i m o i t s u i v a n t l ' e s t i m a t i o n p a r
experts.
A t t e n d u q u ’il e s t i m p o r t a n t p o u r t o u s l e s c r é a n c i e r s d ’e n f i n i r , e t q u e d a n s l ’é t a t d e s c h o s e s la j u s t i c e
(toit p r e n d r e t m t e r m e m o y e n p o u r é v i t e r tics f r a i s d i s p e n d i e u x .
A t t e n d u q u e p o u r p a r v e n i r à c e b u t u n e f i x a t i o n d' of f i ce e s t la s e u l e m e s u r e q u e l e t r i b u n a l p u i s ? «
a d o p t e r a v e c s a g e s s e , e u l a i s s a n t t o u t e f o i s à la p a r t i e d e P a g è s la f a c u l t é d ’u n e e s t i m a t i o n é v e n t u e l l e ,
d o n t les f r a i s d e m e u r e r o n t à sa c h a r g e , bi e l l e e s t é g a l e à la f i x a t i o n d ’of f i ce , o u si e l l e l u i e s t s u p é r i e u r e .
„ A t t e n d u , e n c e q u i t o u c h e l es d é p e n s do la c a u s e , q u e t o u s íe s c r é a n c i e r s i n s c r i t s ( e x c e p t i o n t o u t e
f oi s t a i t o d e c e u x q u i o n t é t é d é c l a r é s d é f i n i t i v e m e n t d é c h u s d e l e u r i n s c r i p t i o n , f a u t e p a r e u x d ’a v o i r
t t f e c t u é lo d é p ô t do l e u r s t i t r e s a u g r e f f e du t r i b u n a l d o n t o*t a p p e l , e t d ’a v o i r c o n s i g n é l e u r s t i t r e s a u
p r o c o s v e r b a l d ’o u v e r t u r e d ’o r d r e ) o n t , p a r lo m i n i s t è r e d e M i o c h e , a v o u e p l u s a nc i oi » * c o n t e s t ó
i
r>r$ ? ^ f s
c o l l o c a t i o n , r é c l a m é s p a r la p a r t i e de P a g e s ; q u ’a i n s i l ’a p p e l i n t e r j e t é p a i l a d i t e p a r t i ó
..
» a y a n t d o n n é l i e u ,i î ! ûs f r a i s q u ’e l l e d o i t r e c o u v r e r c o m m e a c c e s s o i r e s d e l ’o r d r e , p a r p r i v i ege e t p r é f é r e n c e à t o u s c r é a n c i e i i i n s c r i t s .
(
(
A t l o n d u , q u a n t à P. i ppcl i u t e r i e t c p a r la p a r t i e do P a g è s c o n t r e l e s c r é a n c i e r s d é c h u s f a u t e p a r e u x
d a v o i r d é p o s é l e u r s t i t r e s , e t p r é s e n t e Ipu rs d i r e s a u p r o c è s v e r b a l d ’o u v e r t u r e d ’o r d r e , c e s c r é a n c i e r i
u e c h u s d ü i i n i t i v c m c u L « ’¿ v o i e n t a u c u n i n t é i c t p o u c ê t r e a p p e l é s e n co t r i b u n a l \ q u ’i l s o u t ¿ t é f o l l c m e u t
�8
,
, . ,,
. ,
_ ,
P i tr is s o n t é v i d e m m e n t f r u s t r a t o i r e s , en
i n t i m é s , e t q u e l e s fr ai s f a i t s c o n t r e u x , p a r .a P r
i a ni i n t i o n q u e l c o n q u e , o n t é t é o c c a s i o n é s pa r
i i i ê m e t e m p s q u e c e u x p a r e u x f a i t s p o u r e n t e r u n e cor. J a m i i a t
1
u n e fol l e i n t i m a t i o n .
_
. l u c o n s e i l , d i t q u ’il a ct o ma ! j u g é par l e j u g e m e n t
L e t r i b u n a l , a p r è s e n a v o i r d é l i b é r é e n la c h a m
Co l l o q u é c p o u r l a s o m m e do mi l l e v i n g t - ni- . 1T
d o n t es t a p p e l , i ° . e n c o q u e la p a r t i e de 1 â ges n i
^ ^ ^ inscri pti on hypothécaire du treize nivûre
a n n é e s d ’i n t é r ê t t a n t du c a p i t a l d e sa c r é a n c e
francs, valeur réduite d e s f r a i s e t loyauxcoü tsco i
a n s e p t ; 2°. e n c e q u ’e l l e n ’a p a s e t e co l l oc j uc
^ ^ q u ' i l n ’a p a s é t é d i t q u e la p a r t i e d e Pagè:.
q u e d e s f r a i s e t l o y a u x c o û t s . . C1‘ • £u s i t c o m n ’i e c r é a n c i e r e n o r d r e a v a n t F . i u r e e t V i o l i e r , p a r t i e s
x e t i e n d r o i t , so it co m m e a d j u d i c a u i r , ^ c o Uo c a t i on s a n t é r i e u r e s à l a s i e n n e , au p a y e m e n t , soi t
rie M a r i e , l » s p r i n c i p a u x d e s t i n e s , v
e n t u e n es é n o n c é e s a u j u g e m e n t d o n t est a p p e l ; 4°. e n c e
ries r e n t e s v i a g è r e s . soi^t u e s c r e a n c e s ^ ^ ^ v e n t e d u
„
.
.
m i l sept c e n t
q u e la v a l e u r d e l a t u t a i n é v a l u é e a l a s o m m e do d e u x m i l l e f r a n c s , si m i e u x la p a r t i e d e P a g e s
q u a t r e - v i n g t - d o u z e , a ete
e x p e r t s , e t e n c e q u ’il n e l u i a é t é a c c o r d é , p o u r y f a i i e p r o c é d e r ,
i i ’a i m o i t s u i v a n t 1 e - ‘" _ l e r d e l a p r o n o n c i a t i o n d u j u g e m e n t , q u i n ’a é t é e x p é d i é q u e l on g t e m p s
que deux décades, a ^
E m e n d a n t , e t f a i s a n t ce q u e l es p r e m i e r s j u g e s a u r o i e n t dû f a i r e ,
a p r è s l ’e x p i r a t i o n ^ c o ||o c a t i o n do l a s o m m e d e c i n q u a n t e - u n mi l l e d e u x c e n t s f r a n c s , o r d o n n é e e n
o r d o n n e , î ■ cl l , . . e j e p a g ès p o u r l e c a p i t a l r é d u i t de sa c r é a n c e p a r le j u g e m e n t M o n t e s t a pp e l ,
f a v e u r do la pa ^ ^
v j n g t . n e u f f r a n c s p o u r l e s f r a i s e t l o y a u x c o û t s d e s on c o n t r a t d u d i x s e r a
ajoutee^
^
q u a t r e - v i n g t - d o u z e ; 2°. q u ’à c e t t e m ê m e c o l l o c a t i o n s e r a e n c o r e a j o u t é «
n u
" n u a t r e m i l l e t r e n t e - u n f r a n c s v i n g t c e n t i m e s , p u u r d e u x a n n é e s d ’i n t é r ê t s d e s d i t e s d e u x
C
d e c : n n u a n t e u n m i l l e d e u x c e n t s f r a n c s d u n e p a r t , e t d e m i l l e v i n g t - n e u f f r a n c s d ’a u t r e ;
sommes
. ‘ , ¿ g t o u t e s l esquelles c ol loc at i ons d é d u c t i o n sera n é an mo in s f a i t e , pa r la pa r ti e de
sur le m
^ s o m m e d e s e i z e c e n t s f r a n c s à l a q u e l l e l e t r i b u n a l fixe la v a l e u r de la f u t a i l l e c o m P a g e s ’ 11 l a d i t e v e n t e , si m i e u x l a d i t e p a r t i e do P a g è s n ’a i m e f a i r e p r o c é d e r à l ’e s t i m a t i o n de c e t t e
Ç r , s f, . ‘
d a n s le mo i s à c o m p t e r do l a s i g n i f i c a t i o n d u p r e s e n t j u g e m e n t à p e r s o n n o ou à d o m i c i l e ,
le’n u e l t e m p s la p a r t i e d e P a g è s d e m e u r e r a d é c h u e d e l a d i t e e s t i m a t i o n , e t t e n u e d e d é d u i r e ,
T u d i t c a s , l a s o m m e d e s e i z e c e n t s f r a n c s s u r l e m o n t a n t d e ses c o l l o c a t i o n s ; a u c a s c o n t r a i r e le
^ O r d o n n e 0 q u e ^ o u s l es f onds r e s t a n t a p r è s l e s c o l l o c a t i o n s a c t u e l l e m e n t e x i g i b l e s p a r l e s c r é a n c i e r s
o r d r e a v a n t la p a r t i e d e P a g è s , d e m e u r e r o n t ès m a i n s d e l a d i t e p a r t i e d e P a g è s , à l a c h a r g e
* " r e l l e d e p a y e r , s o i t l e s r e n t e s v i a g è r e s é n o n c é e s a u b o r d e r e a u d ’o r d r e à e l l e d é l i v r é , s o i t l es
d r o i t s é v e n t u e l s d e la d a m e F o u r n i e r - R a y n a u d , le c a s a v e n a n t , s a u f , a pr è s l ’e x t i n c t i o n d e s d i t e s
r e n t e s v i a g è r e s ou d r o i t s e t c r é a n c e s é v e n t u e l l e s , à p r o c é d e r e n t r e la p a r t i e de P a g è s e t l es c r é a n
c i e r s p o s t é r i e u r s e n o r d r e , a u c o m p t e e t d i s t r i b u t i o n d e c e q u i p o u r r a r e s t e r l i b r e da ns l e s m a i n s
d e l a d i t e p a r t i e d e P a g è s ; e t le r é s u l t a t d u c o m p t e , si a u c u n y a , l e s c r é a n c e s d e la p a r t i e d e P a g e »
p l e i n e m e n t r e m p l i e s , ê t r e v e r s é e n t r e l es m a i n s d e q u i d e d r o i t , e t n o t a m m e n t d ’A n t o i n e S a i n t G i r o n , cr éan cie r en huitième lieu et ordr e.
_
O r d o n n e q u e p a r m é m o p r i v i l è g e e t p r é f é r e n c e d e s fr ai s d ’o r d r e , l a p a r t i e d e P a g e s s e r a c o l l o q u é e p o u r le m o n t a n t d e s d é p e n s p a r e l l e faits s u r l ’a p p e l c o n t r e l e s c r é a n c i e r s q u i o n t c o m p a r u a u
p r o c è s v e r b a l d ’o u v e r t u r e d ’o r d r e , e t o n t e f f e c t u é le d é p ô t d e l e u r s t i t r e s d e c r é a n c e , e t a us si p o u r i e c o û t
d u p r é s e n t j u g e m e n t , s u i v a n t le r è g l e m e n t q u i e n s e r a f i i t ^ o n la m a n i è r e o r d i n a i r e ; la ma s s e d t s n n p i i d, ié: p. „e n„ s. a us si rcfflés
r é g l é s s e r a a j o u t é e aà sa c o l l o c a t i o n d e q u a t r e m i l l e c e n t s o i x a n t e -. s i x ft r a n c s q u a t r e • t ci ui nze c e n t i m e s o n p r e m i e r l i e u e t o r d r e ; o r d o n n e r e n c o n s é q u e n c e q u e p a r l e g r e f f i e r du
t " l i m a i d o n t e<t a p p e l , il s e r a d é l i v r é à la p a r t i e d e P a g è s u n n o u v e a u b o r d e r e a u d ’o r d r e q u i
^nr n nr e nd r a t o u te s les s o mm es à elle a dj u gé e s par les disposi tions c i- d es s us , et q ue c e l ui qui a é t é
1 T r i à F a u r c e t V i o l i e r r ot a a n é a n t i e n c o n f o r m i t é d e s m û m e s d i s p o s i t i o n s , l e s q u e l s e n c o n . , W n c e d e m e u r e n t d é c h a r g é s do la p r e s t a t i o n d e la r e n t e v i a g è r e d u e h A n t o i n e S a i n t G i r o n .
n i t o u e l e s c r é a n c i e r s q u i o n t c o m p a r u a u m é m o p r o c è s v e r b a l d o u v e r t u r e d ’o r d r e e m p l o i e r o n t
les frais p a r e u x faits sur l ' a p p e l , e n fia is et m ise d ' c x e c u t i o n c o n t r e l e u r d é b i t e u r , su i va n t l ' o r d i e
' a u x c r é a n c i e r s d é f i n i t i v e m e n t d é c h u s , f a u t e d ’a v o i r e f f e c t u é l e d é p û t d e l e u r s t i t r e s e t
• « i i i - r n é l e u r s d i r e s a u p r o c è s v e r b a l d ’o u v e r t u r e d o r d r e , l es ^déclaré, f o l l e m e n t i n t i m é s , e t c o n 5 ? m r . e l a p a r t i e do P a g è s a u x d é p e n s à l e u t é g a r d ; o r d o n n e q u e 1 a m e n d e , si el l e . a * é t é c o n s i g n é e ,
s e r a r o n d i e ; d o n n e d é f a u t c o n t r e l es d é f a i l l a n s , e t p o u r l e p r o f i t d e e l a r o le p r e s e n t j u g e m e n t c o m m u a
sera
* VF a i t UeXt p r o n o n c é p u b l i q u e m e n t à l ’a u d i e n c e d e l a s e c o n d e s e c t i o n t e n u e p a r l e s c i t o y e n s ' V c m y , '
v i r e prés iden t du dit tribunal ; T o u r n a d r e , M a n d e t , C o i n c h o n - L a f o n t , H a r e t - D u c o u d e r t , I.amlois.
• . C!P , le l a d i t e s e c t i o n , e t M a r c h e t , j u g e d e l à p r e m i è r e , a p p e l é a d é f a u t d a u t r e , ug o d e l à s e c o n d e ,
li>
n o n z e d e la ri cé pp u b l i fqlu- e f r a nç•a i s e. , . u n e e t , >nd v « b. c , _____________
1«» m ai r d i v i n g t f l o r é aall», sa u
A u n m d u p e u p l e f r a n ç a i s , il e s t o r d o n n e à t o u s l i u i s s . e r s s u r c e r e q m s de m e t t r e l e d i t j u g e T e x è c u i on Pa t o u s c o m m a n d a n s ou of f i c i e r s d e ' l a f o r c e p u b l i q u e d e p r ê t e r m a i n f o r t e l*TrsS
on s e r o n t l é g a l e m e n t r e q u i s , a u x c o m m i s s a i r e s d u g o u v e r n e m e n t ^ les t r i b u n a u x d ’y n - n i r
] a m a i n . F n foi d e q u o i lo p r é s e n t j u g e m e n t a é t é s i g n e p a r lo v u e - p r o s u l e n t e t lo g r e f f i e r . C o l L ^ F n r e ï - P u é a°Kiom , le d i x - h u i t prairial an onze. Reçu dix - sept francs tr en te c e n t i m e s ; pmir
e x p é d i t i o n s ous l e n * . . 9 1 , q u a t r e - v i n g t - q u a t r e f r a n c s ; p l u » , p o u r d i s i t - m o , d i x f r a n c s t r e i z e c e , , t i u i e s , POUGHDN.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Jugement du tribunal d'appel de Riom. Chamerlat, Benoit. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Poughon
Subject
The topic of the resource
créances
expropriations
Description
An account of the resource
Jugement du tribunal d'appel de Riom entre Benoît Chamerlat et Gilberte Batisse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1792-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0208
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0207
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53707/BCU_Factums_M0208.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Cébazat (63063)
Lyon (69123)
Blanzat (63042)
Châteaugay (63099)
Paris (75056)
Aigueperse (63001)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
expropriations
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53675/BCU_Factums_M0134.pdf
8f5f17c8b75833b8130723eaf947ad2e
PDF Text
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C O N S U L T A T I O N S
L e s S o u ss ig n é s, qui o n t vu l ’im p rim é ay a n t p o u r titre : M ém oire pour le
citoyen A . J . D u g o u r , H o m m e -d e -L e ttre s et Libraire , propriétaire du Cours
d 'A g ricu ltu re , p a r R o s ie r ; contre les citoyens L eroy f r e r e s , Libraires à L y o n ,
contrefacteurs dudit Cours d A g ricu ltu re; avec des. Observations générales sur le
vo l vulgairem ent nom m e Contrefaçon , et sur des propriétés littéraires e n sem b le
les Réponses du citoyen. L e r o y aîné , tant imprimées q u e , manuscrites , et
différentes pieces y jointes ;
E s t i m e n t , sans s' o ccu p e r quant à présent de la p ro cé d u re , qui est un c h e f d 'œuvre d irrégularités, que le citoyen D ug ou r est n o n -re ceva b le e t mal fondé
dans sa dem ande.
Il sc dit propriétaire du Cours d ’A griculture p a r R o z ie r : il avance que les
citoyens L e r o y en sont les contrefacteurs. Il s ’en faut bien que ces propositions
aient le degré d e certitude q u ’il faudroit q u ’elles eussent , pour excuser le
ton q u a
' pris le citoyen D u g o u r , et pour légitimer ses prétentions.
L e citoyen D ugour a senti le besoin qu'il avoit de s’environ n e t de p r é v e n
tions : une assertion hardie équivaut pour tant de gens à la vérité dém ontrée
q u 'il a c r u q u e , sur l'é t i q u e t t e , on
lui d o n n e r a it gain d e cause , s ’il crioit au
voleur avant m em e d entrer en matiere.
Procédons a vec plus de m étho de.
F aisons-nous d ’a b o rd u n e i d éenettedecequepeutêtrelapropriétédes
A u t e u r s , l orsqu el le n est m o d i f i é e par aucune loi positive. Montrons , d'après
l es L o i x ancien nes et n o u v e ll es , à
q u o i s e r e d u i s e n t l e s dd r o i t s
d e s
Imprimeurs sur les Ouvrages q u ’ils e n
n
o
u
s
m
p
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t r e
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l i b r a i r e s
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cetCou
Ours
vrage
, et s'il
conpar
venoit aucitoyenDugourdelui
�(
2
)
adresser c e reproch e avec tous les assaisonnemens capables d ’en augm enter
l ’am ertum e.
L e s Auteurs ont un droit naturel et sacré sur leurs O u v rag e s : qui oseroit
le contester? C e p e n d a n t , par la nature des c h o s e s , la propriété des A uteurs
sur leurs p r o d u c tio n s , ditfere essentiellem ent de celle que nous exerçons sur
nos b ie n s , m eu b les e t im m e u b l e s , et ne peut être sujette aux m êm es regies.
A p rè s que j ’ai vendu ma m a is o n , elle cesse tout-à-fait d ’être m ie n n e ; elle
appartient à l ’a cq u éreu r, de la m êm e maniéré q u ’elle m ’appartenoit auparavant.
T o u s les droits q u e j ’y avois sont eteints
à m on é g a r d , l ’acquéreur les réunit
tous Je ne p eux plus tou ch er à la chose vendue ; le nouveau propriétaire est
le maître de lui faire subir tous les c h an gem ens q u ’il juge à p r o p o s , et de la
détruire s’il lui plait.
. U n e production de l’esprit n ’est pas aussi
com plètem en t cessible. A u c u n e
■convention.ne p eut faire, que mon O u v rag e cesse d ’etre mon O uv rag e.
Je
p eu x conferer le droit de le r é c i t e r , de le c o p i e r , de l ’i m p r i m e r , d ’en débiter
des exemplaires ; mais il nie restera toujours mon droit naturel et p rim itif, qui
n ’est comparable q u a la p a t e r n it é , et qui ne peut pas plus q u e l l e s ’effacer ou
se transmettre.
R ie n ne p e u t m ’e m p ê c h e r d ’e x erce r mes facultés intellectuelles sur m o n
propre O u v r a g e , afin de le rendre meilleur. C elu i à qui j ’avois do n né ou
ven d u une cop ie de m on L iv r e , et qui auroit ex igé de moi que je renonçasse
à le p e r fe c tio n n e r , m ’auroit imposé une condition illicite e t qui ne m obligeroit pas.
N ous pouvons disposer de nos p e r s o n n e s , nous ne pouvons pas les vendre :
ce n ’est p a s , dit la D éclaration des D roits , une propriété aliénable . L a propriété
d e notre intelligence et des combinaisons de notre e s p r i t , 1 est bien m o in s ,
sans doute : nous pouvons égalem ent en d is p o s e r , nous ne pouvons pas non
plus l’aliéner : c e qui arriveroit néanmoins , si nous pouvions licitement nous
interdire la faculté d'appliquer notre intelligence à la c o r r e c tio n , au peri.eetionnem ent de nos propres O u v r a g e s , e t priver le P ublic et nous-mêmes des
avantages et des fruits de ce nouveau travail.
-'
L a propriété des Auteurs est donc , à certains é g a r d s , plus e t e n d u e , et Sous
d'autres r a p p o r ts , plus restreinte que celle q u ’on a sur des biens ordinaires.
Jamais un A uteur ne peut se dépouiller absolument de sa propriété ; son tiitc
�.
.
..
c 3 }
lu i survit ; et ce qu il c è d e de ses droits p e n d a n t sa v i e , Cil laisse toujours
une grande partie intacte.
A v a n t l'invention de l'im p r im e r ie , les A uteurs n ’avoient pas d ’autre prix
d e leurs O u v rag e s , q u e la satisfaction de plaire ou d etre utiles , à laquelle
venoient quelquefois s ’associer la gloire et la reconnoissance p ubliqu e.
L o r s q u ’un
A u teu r
vendoit
son
manuscrit ,
l ’a cheteur n e
cro yoit
pas
avoir acquis l’O uvrage , ni le droit d ’e m pêch er l ’A u te u r d ’en ven dre d ’autres
copies semblables ou plus parfaites. L ’O u v r a g e , en tant q u e production d e
l ’e s p r it, n ’etoit pas dans le c o m m e rce , mais seulement la co p ie , résultat d ’u n e
opération manuelle. C é t o i t , si l ’on p e u t s’exprim er ainsi , la p einture , le
miroir de 1 O u v r a g e , qui se vendoit et s ’achetoit ; mais c e n ’étoit p a s , c e ne
pouvoit pas être l ’O u v rag e m ê m e .
L invention de 1 Imprimerie n ’a p u c h an ger la nature des choses ; e n c o r e
aujourd hui le com m erce ne peut s’em parer q u e des copies , q u ’il multiplie
plus a is é m e n t, plus vite et à moins d e f r a i s , par la voie de l ’impression : il n e
peut ni entraver 1 e s p r i t , ni arrêter le dév elo p p em en t de la p e n s é e , ni c o m
prim er l ’essor du génie des A uteurs.
C e u x - c i , lorsqu ils m ettent au jour un O u v r a g e , le donnent au P u b lic. Ils le
donnent ; c est
1 expression consacrée , et qui m arque bien q u ’ils n ’e n te n d en t
pas e n faire une matiere com m erciale ,
ni le vendre à personne. D e s p a rti
culiers veulent-ils jouir individuellement du don fait au Public : il est juste q u ’ils
paient leur part du prix q u ’aura c o û t é , à l ’im p r im e u r , le manuscrit sur le q u e l
il a imprimé ; plus , le p a p i e r , l'encre , l ’usage des caractères et le tem ps des
ouvriers em ployés à lui procurer cette jouissance individuelle ; et c ’e s t ainsi
que le c om m erce ag.t uniquem ent sur les exemplaires de l ’O u v r a r e
En donnant son O uvrage au P u b l i c , c 'e st-à-d ire , on l'adm ettant h la partici
pât,on d , ses p e n s a s , d e scs e x p é r ie n c e s , de ses d é c o u v e r t e s , P A uteu r n e
renonce pas a laire de nouveaux effnrtc r.™,i
i
,
,
, n
, • ,
.
, . ,
rts l:,our augm en ter la valeur de son d o n ,
et le Public, lom de s en plaindre, doit lui en savoir gré. Lors donc q u e , pour
se servir dune expression tres-impropre, il vend ou cede son Ouvrage h un
m p r im e u r , 1 tispo se uniquem ent du droit qu il a d e faire des copies et de les
vendre a des particuliers, mais ,1 ne se dépouille pas de son incessible propriété.
O n conçoit que l'Im p nm eur n ’ach etant le manuscrit de l ’A u te u r , q u e pour
le revendre avec bénéfice , e n le multipliant p ar la voie de l'im p res s io n , il esc
juste de lui laisser les m oyens de rem plir son objet ; l ’A uteu r avec lequel il
iraite , lut doit d o n c , non pas de renoncer à ses droits in a lién a b les, notam m ent
T
�(
4
)
à celui de corriger et d ’améliorer son O u v r a g e , mais de s ’engager à ne pas
don ner une nouvelle édition s e m b la b le , ou meilleure , tant q u e l ’im prim eur
n ’aura pas placé ou débité un nombre suffisant d ’exemplaires de la s i e n n e , pour
se couvrir de ses avances , de ses f r a is , et lui assurer un honnête b é n é fice .
C e t t e restriction , soit q u e l l e se détermine par le nom bre d ’exemplaires à
p l a c e r , ou par le tem ps fixé pour le d é b i t , est la seule admissible pour con
cilier l ’intérêt p ublic , celui de l ’Autcur et de l ’imprimeur.
L a tyrannie d e l ’im prim eur com nienceroit au m o m en t où , étant désintéressé
p ar la ven te de son éd ition , il prétendroit avoir le droit exclusif d ’en faire d e
nouvelles , et de priver l ’A uteur du b én éfice q u ’il pourroit en tirer l u i - m ê m e ,
sur-tout en fournissant des corrections.
L e s Am ateurs qui ont acquis les exemplaires d ’une p rem iere é d itio n , ont
rendu en détail , mais avec u s u r e , les avances du M anufacturier. C e p e n d a n t
ils n ’ont pas d ’action , soit que de nouvelles éditions semblables diminuent la
valeur de leur exem plaire , soit que de nouvelles éditions plus parfaites la
réduisent
à r i e n , com m e cela arrive tous les jours.
Si l ’entrepreneur de la
p rem ie re édition, après l ’avoir débitée , conservoit le droit d ’e m p ê c h e r l ’A uteu r
d ’en faire 011 d ’en autoriser de nouvelles ; s ’il étoit dans le cas d ’obtenir une
i n d e m n i t é , il d e v r o i t , en bonne justice , la répartir sur tous les particuliers
e ntre lesquels se trouvent distribués les exemplaires sortis de sa manufacture :
c e sont eux qui supportent réellem ent la p e r t e ; pourquoi l ’im prim eur proiïtexoit-il seul du déd om m agem ent ?
C e lt e observation , susceptible de beaucoup de dévelop p em ens , conduit à
penser que les G ens-de-Lettres sont souvent la dupe du z ele q u ’on témoigné
pour
leurs intérêts , et qui cache des combinaisons plus profondes et des
desseins moins généreux q u ’ils ne le paroissent d ’abord. Il est très-vrai qu un con
trefacteur nuit à la fois à l’A uteur et à l ’Editeur d ’un O u v r a g e ; mais si celui-ci,
ayant réalisé les bénéfices q u ’il attendoit de son édition , réclame
le droit
e x c lu sif d ’en faire de n o u velle s, au p réjudice de l ’A uteu r , est-il bien honnête
e t bien délicat ? L a propriété q u ’il a l ’air de d é f e n d r e , reçoit de lui-m êm e sa
plus cruelle atteinte. Peut-il prétendre à la reconnoissance des G ens-de-Lettres ?
L e u r s suffrages doivent-ils encourager l’h om m e adroit qui les dépouillé?
E n c o r e une f o i s , la cession d ’un O u v r a g e ne peut pas produire les m êm es
effets que la cession d ’un bien ordinaire. L e cédant ne peut pas p e r d r e , le
cessionnaire ne peut pas acquérir, dans l’un com m e dans l ’autre c a s , la p ropriété
pleine , entière , a b so lu e , de la chose cédée.
L e s réglés générales du D r o iï
�c
5
)
•
civil nô sont donc pas invocablcs dans une
m atiere qui ne fut long-temps
soumise q u ’aux principes de justice naturelle que nous venons d ’exposer.
Dans la s u ite , des L o ix spéciales ont été imaginées par la crainte que les
lumières inspiroient ail d e sp o tism e ; et la cupidité de ce u x q u ’un A rt n ouveau
rendoit , en quelque sorte , les coopérateurs des G e n s -d e -L e ttre s , en a prodi
gieusem ent abusé. Q u o i q u ’il en s o i t , ces L o ix spéciales ont etc en vigueur
jusqu’à l ’établissement de la L i b e r t é ; et com m e c ’est par elles
q u ’on p e u t
apprécier les droits du c ito y e n D u g o u r , il faut d ’abord y recourir et lui en faire
l ’application.
A vant 1 7 7 7 ?
Législation n ’avoit rien fait que contre les Auteurs ; elle ne
s’étoit montrée attentive q u ’à gêner la lib erté dans ses attributs les plus chers à
l ’hom m e et les plus précieux pour la société.
L e s Prêtres furent les prem iers à p rovoquer des prohibitions en c e genre.
Us obtinrent des défenses a u x Im prim eurs et L ib ra ire s , sous peine de prison
et d'am ende arbitraire , d'im prim er ou exposer en vente aucuns alm anachs ■et p ro nosticadons , que prem ièrem ent n'aient été visités p a r l ’Archevêque ou E vêque ,
ou ceux q u 'il com m ettra. C e s défenses furent portées par l ’article 26 de l ' O r
donnance d ’O r lé a n s , du mois de Janvier 1660.
L e despotisme royal ne tarda pas à se saisir du m o ye n sugge'ré par le des
potisme sacerdotal. Bientôt l ’O rd o n n an c e de M o u lin s, de F evrier i_5 66 , art. 78 ,
défendit
en général d toutes personnes que ce s o it , d'im prim er ou f a i r e im
prim er aucuns livres ou tr a ité s , sans le congé et permission du R o i , et lettres et
privilèges expédies sous son grand scel . . . et ce sur peine de perdition de biens et
punition corporelle.
C e s dcfenses furent r e p e t e e s , aggravees dans une foule d e L o i x postérieu
res ; des C enseurs furent institues. Sans leur Approbation , point de privilège ;
et sans privilege , point d exe rcice possible de la propriété la plus sacrée.
Peu d Auteurs p re n o ie n tu n p rivilège en leur n o m ; ils p référoient de traiter
a vec un
Imprimeur ou L ibraire , pour
s ’épargner de trop humiliantes d é
marches.
Si quelquefois 1 A uteur faisoit e x p é d ie r le privilège
en son nom , com m e
il ne pouvoit imprimer lui-meme , il ¿toit obligé de recourir à un m em b re de
la corporation , de traiter a vec lui , de lui c é d e r son privilège ; a in s i, de ma
niéré ou d ’autre , lTIom m e-de-L ettres étoit à la m erci de T H o m m e de l’A rt ,
et en recevoit la loi. Celui-ci restoit
le maître
de l ’O uyrage par la force de
�C Í )
l ’a b u s , qui subordonnent l ’e x c r c ic e de
la propriété à la jouissance
du p ri
vilège.
L ’aulorité dont il é m a n o it , avoit grand soin d ’en maintenir l ’efficacité; l ’A u
teu r n ’auroit pas p u donner une seconde édition , m êm e
r e v u e , corrigée
et
augmentée , eut-il p rouvé q u e son cessionnaire avoit f a i t , sur la prem iere , tout
le profit q u ’il s’étoit p r o p o s é , un profit beaucoup plus
lui sur le q u e l
L a politique
avoit été
de
calculée
c e tem ps
et
considérable que c e
fixée la foible rétribution d e l ’A u teu r.
exigeoit q u e l ’A u te u r fût dans
la d é p e n d a n c e
d e l ’im p rim eu r ; c e dernier avoit m ê m e une sorte de droit d e suite sur l ’O u
vrage dont il avoit exploité le p r iv ilè g e ; car a v a n t,q u ’il fut e x p ir é , il pouvoit
e n dem ander la continu ation, q u e lo G o u v e r n e m e n t étoit toujours disposé à
lui accorder.
L a distinction entre les droits inaliénables de l ’A u teu r sur son O u v rag e et
c e u x d e l ’im p rim eu r sur la copie q u ’il avoit acquise , ne
cessoit pas d ’être
vraie aux y e u x de la raison et de la justice n aturelle; mais elle s ’évanouissoit
devant le privilège qui
donnoit toutes sortes de prétextes pour l ’éluder. Et
certes , on conçoit que c e n etoit pas plus un avantage pour les G e n s -d e - L e ttres , q u ’un bienfait pour le^Public.
C e tte L égislation si favorable a u x Libraires e t Im prim eurs , impétrans ou
cessionnaires de privilèges , leur imposoit en revanche des conditions
q u ’ils
devoient remplir avec une scrupuleuse exactitude. Elles sont détaillées dans le
T i t r e X du R è g le m e n t du zZ F évrier 1 7 2 3 , vulgairem ent
la Librairie.
appelé le C o d e de
A v a n t l ’obtention du privilège , il falloit rem ettre au C h a n c e lie r une c o p ie ,
manuscrite ou im p r i m é e , du L iv r e pour
lequ el ce privilège étoit dem andé.
A rt. 10 1 .
A ucu ns Livres ne pouvoient être imprimés , qu ’à la charge d ’y insérer au
co m m e n c em en t ou à la f i n , des copies entieres tant du privilège que de l ’ap
probation. Art. i o 3 .
L ’im pression a c h e v é e , on étoit obligé d e r e m e t tr e au C h a n celier la copie
sur laquelle elle avoit été f a i t e , p arap h ée par l’Examinateur. A rt. 104.
L ’exécution ponctuelle des trois A rticles qu on vient de citer , étoit co m
m andée par l ’A rticle i o 5 , sous p eine de dem eurer D É C I I U de tous les droits
portés par le privilège.
S 'il y avoit une c e s sio n , elle devoit
être
enregistrée
com m e le p r iv ilè g e ,
tout au long , sans interligne ni r a t u r e ,s u r le registre de la C om m un au té des
v
�C
7
)
Im prim eurs et L ib raires d e Paris , au plus ta rd trois m ois après sa d ate , à peine
- de
n u l l it é
. A rt. 106.
E n f i n , l ’A rt.
108 imposoit l ’obligation de rem ettre huit Exem plaires à la
C h a m b r e S y n d ic a le , avant de pouvoir exposer l ’O u v r a g e en v e n t e , a peine de
n u llité du privilège.
__ .
11 n ’est pas tem ps encore d ’appliquer les dispositions du C o d e de la L ib r a i
rie aux faits particuliers de la cause ; il faut achever d ’exposer tout ce qui tient
à la Législation des p riv ilè g es, e t son dernier état.
U n R èg lem en t du 3 o A o û t 1 7 7 7 , en e s t, pour ainsi d ir e , le com plém ent. L e
privilège y est défini : Une grâce fo n d é e en Justice , ayant pour o b je t , si
elle
est accordée à l ’A uteur , de récompenser son travail ; si elle est obtenue p a r un
■Libraire , de lui assurer le remboursement de ses avances et de ses fr a is .
L a propriété des Auteurs éloit m écon n u e , on l ’excluoit form ellem en t ; mais
on posoit du moins les seuls fondem ens justes e t raisonnables des droits q u e
les Libraires pouvoient acquérir sur les O u v rag es d ’a u tru i, et
les
bornes au-
dela desquelles leurs prétentions deviendroient abusives.
L e Libraire ( dit e n propres term es le p réam b ule du R è g l e m e n t , ) ne p e u t
p a s se p la in d re , si la fa v e u r q u ’il obtient est proportionnée au m ontant de ses
avances et à l ’importance de son entreprise : mais elle ne doit pas s étendre audelà de la vie de l’A u teu r , sans quoi ce seroit convertir une jo u issa n c e de grâce
en une propriété de droit.
C e t o i t véritablem ent pour le Libraire une très-grande fa v e u r , q ue la possi
bilité q u ’on lui laissoit d ’acquérir la jouissance exclusive d ’un O u v ra g e p e n
dant la vie de son A uteu r ; car le Libraire n e manquoit pas d ’exiger tout ce q u ’il
lui étoit possible d ’o b t e n i r , e t l'A u teur étoit p resque toujours réduit à subir la
dure L o i qui lui etoit imposee. C e p e n d a n t la p ropriété n e pou voit jamais pas
ser au L ibraire ; c ’eut été ( dit encore le R è g l e m e n t , ) consacrer le m onopole ,
et rendre un L ib r a ir e , le seul arbitre à toujours du p r i x d'un L ivre.
Il n ’y a p a s , dans la Législation de c e tem ps , de m axim e
plus constante ,
plus clairem ent énoncee , q u e celle qui interdit à un L ibraire toute prétention
à la propriété de l ’O u v rag e d autrui : le R è g le m e n t est si précis sur c e p o i n t ,
q u ’on a peine à concevoir co m m en t le c ito y e n D u g o u r , se disant H omme-deL e ttr e s , n ’a pas rougi de joindre à sa qualité de L i b r a i r e , celle de proprié
taire du Cours d ’Agriculture par Rozier. Pouvoit-il
ignorer que ces qualités
s ’excluent récip roq uem ent? N ’a-t-il pas yu que , par la réunion de deux titres
in c o m p a tib le s , il s’exposoit au reproche d ’exagération de la part des Libraires
�.
.
( 8 }
honnêtes et instruits; e t , s ’il faut le dire , au re p ro c h e d 'h y p o c r isie , d e l à part
des Auteurs , dont il usurpe les droits en affectan t de les défend re ?
L e s Articles 4 et 5 du R è g lem e n t de 1 7 7 7 , établissent la
différence
des
effets q u ’il attribuoit au privilège , suivant q u ’il étoit accordé à l ’A uteu r ou au
Libraire.
S ’il étoit a ccord s au Libraire , celui-ci devoit en jouir pendant tout le temps
fixé par le privilège , et encore pendant toute la vie de l ’A u teu r , si elle s ’étendoit au-delà.
Mais , si le privilège étoit accordé à l ’A u teu r , il en jouissoit pour lui et ses
hoirs à p e r p é tu ité , sous une restriction essentielle à r e m a r q u e r , et qui étoit
e x p rim é e en ces termes : P ourvu q u ’il ne le rétrocédé à aucun Libraire ; a u
q u el cas la durée du privilège sera ,
par le fait
seul de la
duite à celle de la vie de VAuteur.
C e s s i o n , ré
,
■
Enfin , l ’A rticle 6 vouloit q u ’après l'expiration du
p riv ilè g e accordé
l ’impression d'un O u v ra g e , et après la m ort de l ’A uteu r . q uiconque
m an deroit la permission de
pour
de-
réim prim er cet O uvrage , fût assuré de l ’o b t e n i r ,
sans que cette perm ission accordée à un ou plusieurs , p û t em pêcher aucun autre
d ’en obtenir une sem blable. C ’est-à-dire , que la faculté d ’imprimer
cet O u
vrage é toit rendue à tout le m onde , sans préférence ni réserve.
T e l le s étoient les réglés en v ig u e u r, lorsque le citoyen R o z ie r a , dit-on, traité
a v e c le L ib raire C u c h c t , aux droits duquel se présente
le citoyen D u g o u r :
c ’est donc d ’après elles, q u ’il faudra juger le mérite de ses titres, si jamais il
en produit. D ug ou r cite a vec complaisance la L o i d e 17 9 3 ; nous e n parlerons
aussi : mais on sent bien q u ’il suffit de sa d a t e , pour se convaincre qu elle ne
p eut pas influer sur le sort des actes passés , des conventions f a ite s , avant la
Révolution. L e x fu tu r is non preeteritis dat fo rm a m negotv.s.
O n allègue q u ’il a été obtenu , le 20 Juin 17 8 1 , un privilège pour l ’impres
sion du Cours d ’Agriculture par R o z i e r ; que ce privilège étoit au nom de ¡’A u
teur , pour lui et ses hoirs à perpétuité.
O n dit encore qu ’il y a e u , le 27 Mai
i
7 83 , une cession faite par l ’A uteu r au
L ibraire C u c h e t ; nous la supposerons conçue dans les termes les plus favora
bles au cessionnaire ; ce qui est accorder beaucoup plus que le citoyen Dugour
n ’oseroit prétendre s ’il produisoit son litre , q u ’il a vraisemblablement de bon
nes raisons pour ne pas montrer.
Q u e lle que soit la teneur de la cession , elle a nécessairement produit l ’effet
résolutoire que lui attribuoit le R è g le m e n t de 1777- Elle a restreint, par rapport
au
�c
9
au L i b r a i r e , la perpétuité du privilège
> .
•
...
à la vie
de
ï'A u teur-: mais R o s ie r
est mort pend an t le siège de L y o n , au mois de S e p te m b r e i 7 9 3 ; donc (..et la
conséquence est invincible) depuis le mois d e S e p te m b r e i 7 9 3 , il n ’y a plus ni*
privilège ni droits exclusifs qui pesant sur le C ours d ’A g r i c u l iu r e , et qui puissent
légitim er le monopole d'un prem ier Editeur.
.
P our que le .Libraire C u c h e t eût acquis le droit de prolonger sa jouissance
exclusive au-delà de la vie de R o zie r , il aurait fallu le concours d e
d eu x cir
constances : la p rem iere , q u e le privilège eût été accordé n o m m é m e n t
à Cu-
c h e t ; la s e c o n d e , que la durée de c e privilège eût été fixée h un term e
excé
dant celle des jours de R o zie r. N i l'une ni l ’autre de ces circonstances
ne se
rencontre ici. C u c h et n a donc pas acquis le droit de prolonger sa jouissance e x
clusive au-delà du mois de S ep te m b re 17 9 3. Il n’a pu le transmettre à person ne.
Nous montrerons bientôt que C u c h e t n ’a pas conservé jusqu’à la m ort de
R o z ie r le droit de jouir exclusivem ent du Cours d ’Agriculture ; mais nous vou
lons faire voir que , dans l ’h yp o th e se la plus favorable à D ugour , sa prétention
seroit e n co re absurde et révoltante ; et c ’est
pour ce la que nous raisonnons
d ’abord, com m e si les Réglemens, auxquels se référé le prétendu Tra ité de 1 7 8 0 ,
avoient subsisté jusqu’en 179 8.
.
Il est dém ontré que tout ce que C u c h e t pouvoit se prom ettre des
effets de
la cession à lui faite en 1783 , c ’étoit la jouissance exclusive du C ou rs d'Agrl-,
culture pendant la vie de l'A u teur : il suit de ..là que j m ê m e sous l'em pire des
anqiens R églcm ens ?l aussitôt après la m ort du,.citoyen R o z i e r , cent Im prim eurs
qui se seroient prçsentés(,ensemble ou s u c c e s s iv e m e n t, auvoient obtenu, j sans
aucune difficulté , la permission d ’imprimer , à leurs risques , le Cours’ d ’À<4 i1
*
'
*
« >»i t ;
«
culture» 4
(
Q u ’auroic.pu-dire C u ç h p t p.quv. s ’opposer à leurs entreprises ? ..N ’avoi t-il pas ,
s ’il faut l ’e n croire, lu i-m ê m e , traité en 1783;,
sous f e m p i r e du R è g le m e n t Je
} 7i 77 ■ N etoit-il.pas ^lors b ie n averti par la .Lpi , q u e , / , fa 'u seul , * 7 a ' n J o n
q u ’il acceploit , réduisait la durée du privilège à celle de la vie de l'A u te u r ; que
la grâce accordée au Libraire .ne, devoit p a s. dégénérer en d r o i t , ni sa jouissance
se convertir en propriété ?
,
. ■
. 1
‘
j Sur quoi C u c h e t , b ieû instruit qu il ne pouvoit,pas devenir pyop^jdtaire., auroittjil c o m p té en traiiar)t a v e c l ^utc-ur? Sur le remboursement^ cïe ses.iy.ances avec
b én é fice . O r son espoir n ’auroil point été d é ç u ; il a.jouj.pn sconçurr.ens depuis
17.81 jusqu’e n 1 7 9 8 ; o n . £ s p e q u i! a p la c é loiniH«* èxemplanjçs. de son édition
et réimprimé plusieurs volumes. L exploitation du privilège dont on suppose q u ’il
B
�(
lo
;
------------------------
étoit devenu cessionnaire , avoit suffi pour couvrir ses frais et lui assurer un
prtffit considerable : 1 intention du R è g le m e n t é to it plus que remplie à son égard:
il n ’avoit pas m êm e de p rétexte pour se plaindre.
O n peut à présent adm ettre , avec le c ito ye n D u g o u r , • que 1 édition du
c ito ye n L e ro y , entreprise dans les circonstances q u ’on exposera , soit d'une
ép oq ue postérieure à la m ort de l ’A uteu r ; on p e u t admettre encore q u ’après la
mort de l ’A u te u r , et m ê m e aux époques indiquées par le citoyen D ugou r , le
citoyen L e r o y ait vendu des exemplaires de son édition; dans cette h yp oth ese, et
dans la supposition admise jusqu’à p ré se n t, que le privilège qui assuroit la jouis
sance exclusive de C u c h e t , eut subsisté ju sq u ’à la m ort de l’A uteu r , il soroit
évident que le citoyen L e r o y n ’auroit pas entrepris sur cette jouissance e x c lu
sive , q u ’il n ’aureit fait aucu n acte préjudiciable au citoyen C u c h e t. A quel titre
c e dernier eut-il donc trouve mauvais q u e le citoyen L e r o y fît paroître son édi
tion dans un temps où tous les Imprimeurs du m onde p ouvoient profiter de la
concurrence é t a b l i e , garantie par l ’article 6 du R è g le m e n t de 1 7 7 7 ?
Il eut f a l l u , dira peut-être le citoyen D u g o u r , obtenir une perm ission ! O u i ,
mais elle n ’auroit pas pu etre refusée , elle n ’auroit eu d ’autre im portance q u e
la rétribution qu en eussent tire les agens de l ’autorité; et à qui se seroit-on
adressé pour obtenir cette permission en 1793 ?
L e s objections q u e le citoyen L e r o y est dans le cas de faire au c ito yen
D u g o u r , sont beaucoup plus pressantes. O n lui passe sa qualité de cessionnaire
du c ito yen C u c h e t , q u oiq u ’il ne l ’ait pas encore é ta b lie;
cependant C u c h e t
n ’a pas pu lui transmettre des droits qu il n avoit pas ; C u c h e t n ’a jamais eu ni
pu avoir ceux de la propriété ; il n avoit pu acquérir que la jouissance e xclu sive
d e l ’O u v r a g e , pendant la vie de 1 A u teu r ; le citoyen D ugou r eût-il tous les
droits
de C u c h e t , n ’auroit pas celui de jouir exclusivement depuis la mort
d u cito ye n R o z ie r ; il ne seroit pas propriétaire du C o u rs d ’A griculture ; il
seroit inexcusable d avoir pris ce titre en tete de son M ém o ire ; il auroit prouvé
par-là q u ’il ne connoît pas plus les droits des L ib r a ir e s , q u ’il ne resp ecte ceux
des Auteurs.
Si nous
consentons que le citoyen
Cuchet
argum ente de titres qui n ’ont
d ’autre base , d ’autre appui , que la Législation du tem ps des privilèges , il
sera sans doute perm is au citoyen L e r o y
de profiter des avantages que lui
fournit c e tte 'm è m e Législation , contre un injuste agresseur , auquel il n ’a pas
nui , et qui pourtant a conjuré sa ruine.
T o u t est de rigueur en matière de privilège. D ugo u r ou C u c h e t ne p e u v e n t
�(
pas choisir , dans les R é g le m e n s de
11
?
.
la L ib r a ir ie ,
quelques dispositions qui
leur accordoient faveur et grâce , en rejetan t celles qui leur im posoient des
droits et des charges. O n veut bien souifrir q u ’e n co re .aujourd'hui le p réte n d u
p rivilège de 17 8 1 , la p ré te n d u e cession de 1 7 3 3 ,
auxquels il faut n é c e ssaire
m e n t rem on ter pour établir les droits du plaignant, soient des titres adm issibles,
e t q u ’ils operent sous le régim e d e la L ib e r té com m e ils eussent op éré sous celui
d u despotisme ; c e p e n d a n t , pour user de son privilège , il falloit q u e C u c h e t
eût satisfait au vœu des articles 101 ,
i o 3 et 104 du R è g le m e n t de 1 7 7 7 , et
rem pli l ’obligation im p osée par l ’article 108 , à p eine de nullité. N ’insistons
pas sur tant de points ; arrêtons-nous à deux.
L a cession
supposée faite au L ibraire C u c h e t , le 27 Mai 1 7 8 8 , devoit être
enregistree à la C h a m b r e S y n d ic a le , dans les trois mois de sa date , à peine
d e nullité. Elle ne l ’a été , dit-on , q u e le 22 D é c e m b r e 17 8 6 , c ’est-à-dire
trois ans e t quelques mois trop tard : elle est donc nulle ; elle 11e peut servir
d e titre ni a C u c h e t ni a D u g o u r , et sans elle , ils 11’en ont plus aucun.
Le
privilège devoit etre im prim é au c o m m e n c e m e n t ou à la fin de l ’O u
v r a g e , sous p eine de d é c h é a n c e ; le privilège n ’a paru dans aucun des volumes
q u i , pend an t 18 ans, sont sortis des presses de C u c h e t.
Par où pouvoient être connus ces prétendus droits exclusifs ? D e s milliers
d ’exem plaires du Cours ¿ ’A griculture croient répandus dans le P ublic ; aucun
ne portoit le caracteru de l ’édition légale et privilégiée : ne devoit-on pas en
c o n c lu r e , ou que C u c h e t n ’avoit point de p r iv ilè g e , ou q u ’il rie vouloir pas Y e n
p r é v a lo ir , puisqu’il ne le faisoit pas connoître ?
‘
D 'a c c o r d avec les R ég lem en s g é n é r a u x , les L e ttres de p rivilège Tenferm oient
ordinairem ent cette clause r e m a r q u a b le :
Voulons que la copie des présente} ,
qui sera im prim ée tout au lo n g , an com m encem ent ou à la f i n d u d it O uvrage ,
soit tenue pour â u h m n t'sig n ifié e . P a r l a l ’autorité qui accordoit le privilège reconnoissoit la nécessité d u n e signification
d u e m e n t ' f a i t e , la
n écessité
• publication 'soÎeninelle dü privilège , afin q u e p e rso n n e n'en
c a u s e d ’ignorance. C u c h e t n ’a rien s ign ifié; rien p u b l i é ,
d ’une
pût p rétendre
il a tenu son titre
e n p o c h e ; il a dérob é , autant qu il l a p u , la connoissance du p rivilège et de la
cession ; lu ri n a jamais etc im p rim é, 1 autre 11"a pas été enregistre dans lè délai
fatal. 1,1 n a donc jamais pu argum enter ni
de
l'un ni d e
l ’autre.
Il en
egt de 1 impression du privilège et d e 1 enrégistrem ent de la cession e n matière
d e Librairie , c ô m m ë de 1 insinuation en m atiere d e donation et de substition. C e sont des itooyeils de surete publique : et c ’est pour cela que l'omission
T
�C
13
)
de ces form alités em porte la nullité des actes,qui y sont sujets , et q u ’elle doit
Être p rononcée rigoureusement lorsqu’elle intéresse des tiers.
'
A u r e s t e , si on adresse c e s . reproches à C u c h e t , c e n ’est que parce q u ’il
se trouve interposé entre le citoyen D u g ou r et
le citoyen L e r o y ; on
rend
volontiers justice à C u c h e t : s ’il n ’a pas im prim é le privilège , s ’il n ’a pas fait
enre’gistrar à tem ps la cession , en un m o t , s ’il est resté en deçà de p resq u e
toutes
les
obligations que lui imposoient les R é g le m c n s de la Libraire
en
re va n ch e il n ’a pas tenté d ’en abuser pour ruiner un éditeur de bonne foi ,
pour s ’e n rich ir de sa dépouille. C u c h e t ne se qualifie pas propriétaire du Cours
¿ ’A griculture par
R o z ie r , ni ne s ’arroge pas des droits indéfinis à la jouis
san ce exclusive de cet O u v ra g e : on n ’a pas vu C u c h e t élever des p r é te n tio n s ,
ni depuis la m ort de l’a u t e u r , ni m ê m e depuis l'établissement de la L ib e r té ]
on ne l ’a pas vu faire saisir l ’édition d e L e r o y , à une ép oque où le privilège
n e pouvoit plus exister , où la concurrence
pas vu intenter un
procès scandaleux à un
étoit largem ent établie ;
on ne l ’a
citoye n honnête , pour avoir fait
postérieurem ent à l ’abrogation des anciens R églem ens , ce q u ’il auroit pu faire
lorsq u ’ils étoient en pleine v ig u e u r: le citoyen C u c h e t ne traite pas le c ito y e n
L erov
le
d e forban , de voleur , ne le signale pas à l’A ccusateur - P ub lic , n e
traduit pas au T r ib u n a l C rim in el , n ’invoque pas contre lui tous
les pou
voirs , tous les intérêts , toutes les passions , pour s ’approprier les fruits d ’un
travail qui a contribué au soutien de plusieurs familles dans les
tem ps les
plus c a la m ite u x , et qui n ’a rien que de lé g itim e : C u c h e t enfin ne pousse pas
¡ ’inconséq uen ce aussi loin que la vexation , e t ne dem ande pas q u e les peines
introduites pour un n ouvel ordre de c h o s e s , et prononcées par nos L o ix R é p u c a in e s, soient appliquées à des faits qui les ont p récé d é e s , et ven gen t a ujourd’hui
l ’infraction imaginaire d ’un privilège royal. T ou s ces écarts sont ceu x du c ito y e n
D ugou r. C u c h e t , dont il e x erce les droits , avoit connu l ’entreprise du citoyen
L e r o y , sans tenter une d é m arch e pour en arrêter le cours , sans p rofé re r une
plainte , sans donner aucun signe de m é co n te n te m e n t; il n ’est pas présumable ,
q u e lq u e m arch é q u ’il ait fait avec D ugour , q u ’il ait e nte ndu lui transm ettre
le droit d ’inquiéter , de
persécuter le
citoyen L e r o y . L e long silence q u ’a
gardé le Libraire C u c h e t , témoigne assez q u ’il n e croyoit pas avoir c e
pré
ten d u droit.
C e t t e observation ne tend q u ’à prouver a ve c quelle in c o n c e va b le t é m é
rité le citoyen D ug ou r s’est engagé dans c e t odieux p r o c è s , e n t r a î n é , séduit
p a r l ’appât d ’une
confiscatio n, d ’une
a m en de ,
qui feroient sa fortune , en
�tout
la
cas p a r l ’espoir
d ’une b o n n e
com position q u ’il se flatte
d ’arracher
à
crainte.
U n e spéculation si honteuse n e réussira pas : un m ot suffit pour la renverser.
.C u c h e t n ’a pu acquérir, en 1 7 S 3 , qu ’une jouissance exclusive mais temporaire ,
q ui devoit cesser à la mort de l ’Auteur. L a L o i de ce tem p s d éfen d oit de faire
p lus ; et certes on ne p rétendra pas que les parties contractantes aient eu la
volonté de faire
ce que la Loi défendoit expressém ent. C u c h e t n ’a donc pu
transmettre à Dugour le droit de jouir exclusivem ent depuis la mort du R o z i e r ;
les .poursuites de Dugour sont donc injustes et vexatoires ; il n ’est pas m ê m e
recevable , étant tout-à-fait dénué de titres.
Nous avons prolongé par complaisance p our D u g o u r , l ’em pire des anciens
R ég lem e n s et l ’efiet des privilèges exclusifs , au-delà du régim e qui les avoit
in tr o d u its , et qui seul pouvoit les maintenir. Il est temps d ’abandonner c e tte
h y p o ü ie se . L e s anciens R églem ens , les privilèges exclusifs devoient disparoître
à l ’aurore de la Révolution. L e u r suppression
fut à la fois un de ses plus
grands bienfaits et de ses plus puissans m oyens.
Pouvoient-ils survivre à la Proclam ation de la L ib e r té Fran çaise dans la nuit
du 4 A oû t 1789 ? N e f u r e n t- ils pas form e lle m en t proscrits par le D é c r e t d e
l ’A ssem b lée N ationale , du 21 du m êm e mois ?
.
T o u t citoyen peut p a rler , écrire , im prim er librem ent. T e l l e fut la disposition
très-claire , très-précise , d ’un D é c r e t destiné à faire partie d e la D é c la ra tio n
des Droits. Il fut compris dans les L ettres-Patentes du 3 N o v e m b r e 1 7 8 9 , q u i
ordonnoient l ’envoi aux Tribunaux , M unicipalités et autres C o r p s A d m in is
tratifs , des
D écrets d e
1 A s se m b lé e
Nationale ,
a cc e p té s
ou
sanctionnés
p a r le Pouvoir E x e c u t i f , e t des-lors ce D e c r e t fit L o i dans toute la F ran ce.
N o n sans d o u te , il n autorisoit pas le vol ! mais il rétablissoit les Auteurs dans
des droits sacres , q ue la tyran nie n avoit jamais voulu leur reconnoitre : il
détruisoit les m archés onéreux qu'ils avoient souscrits , la lésion énorm e q u ’ils
avoient soufferte , lorsque la L o i croyoit leur faire grace en leur p e r m e t t a n t ,
sous
toutes sortes de
•
t
r
propriété.
modifications et d e
restrictions , l ’e x e r cic e
d e leur
’
L e D é c r e t du 21 A oût 1789 , reçu t son application en T790 , dans l ’affaire
du citoyen Palissot et de la c ito ye n n e
Devaux
, contre les entrep reneu rs
du Journal de Paris. Il fut juge en dernier ressort, par le T r ib u n a l du neu viem e
A rron dissem en t, q u ’une pension annuelle stipulée pour prix de la cession d ’un
�,
. .
(
'4
)
privilège , n ’étoit plus d u e , parce que la cession ne pouvoit plus produire d'effet ;
que la cession ne pouvoit pas survivre au privilège , et q ue tous les privilèges
d e Librairie ètoient éteints et supprim és par la D éclaration des Droits.
S i le citoyen L e r o y , si tout autre Libraire eu t f a i t , en 17 9 a> , une
du
édition
Cours d ’Agriculture , l ’A u te u r rentré dans sa p r o p rié té, eût été fondé à
s ’en plaindre ; mais C u c h e t , porteur de la cession d ’un p rivilège , eut vaine
m en t tenté d ’inquiéter c e t éditeur. O n eut fait à C u c h e t c e tte réponse victo
rieuse : L a cession d ’un privilège n e p e u t pas lui survivre , et désormais tous
les privilèges d e
Librairie sont éteints et supprimés , par le D é c r e t du 21
A o û t 1789 . C u c h e t eut infailliblement été déclaré sans t i t r e , sans
dès
1790.
a ctio n ,
D u g o u r , qui n ’a que les droits q u ’avoit C u c h e t > est-t-il plus re ce -
vable à les opposer en 17 9 9 ?
P ostérieurem ent à la déclaration des Droits e t au Ju gem ent du Trib u n al du
n e u v ie m e A r r o n d is s e m e n t, la
Constitution
de 1 7 9 1 avoit prononcé l'irrévo
cable abolition de toutes Les institutions qui blessoient la L ib erté. I l n'y a p lu s
avoit-elle d i t , pour
Jurandes
,
aucun
ni Corporations
garantit la L ib e r té
individu
,
aucun
privilège
de professions d 'A r ts et M é tie r s.
à tout hom m e
,
de p a rler
,
; il n'y a p lu s n i
La
C on stitution
d'écrire , d ’imprim er
ses pen sées.
,
et p u b lier
f
C ’est dans ces circonstances que l ’A u te u r du C ours d ’A griculture , a luim ê m e r e c h e r c h é le c ito y e n L e r o y , et l ’a déterm iné à e n t r e p r e n d r e , sous ses
y e u x , une
nouvelle
édition d e son O uv rag e. L e c ito y e n R o z ie r a fourni
l ’exem plaire q u ’il avuit
c o m m e n c é à corriger
de
sa m ain , e t dont il a vo it
promis d ’e ten d re les corrections , à m esure q u ’on avanceroit ; il s ’étoit c h a r g é
de revoir les épreuves , et il est de notoriété q u ’il a tenu parole ; il a suivi ,
so ig n é , tous les détails de l’impression tant q u ’il a vécu . O n est en
état d'en
reproduire des preuves écrites , et d ’invoquer à cet égard les n o m b re u x tém o i
gnages de ce u x qui fréquentoient l ’im prim erie du citoyen L e r o y .
Il n ’est pas r é d u i t , com m e on le v o i t , a se prévaloir de la L ib e r té indéfinie
q ui régnoit à cette é p o q u e ; sa position est plus honorable ; il avoit le v œ u d e
l ’A uteur , son approbation , sa collaboration imm édiate. O n ne pouvoit l ’a cc u
ser , ni de contrevenir aux L o ix qui n ’oxistoient p l u s , ni m ê m e de profiter
a v e c trop d ’e m pressem en t de l ’absence d ’aucune L o i positive. L e p rem ier de ces
rep ro ch es n ’e u t été p la c é dans la b o u c h e de personne : il n ’eut appartenu q u ’à
l ’A u teu r d e faire lo se c o n d ; mais l'A u teu r étoit lui-même h la tête de l ’entreprise.
Faudroit-il q u e le cito ye n L e r o y , dont la délicatesse p erso n nelle est à cou-
�-
(
Is
)
v e r t , se chargeât de ve n ge r celle du c ito y e n R ozier? O b je c te r a - t- o n q u ’il avoit
c e d e son O u v r a g e à C u c lie t , e t q u e dès-lors , il ne pouvoit pas autoriser u ne
nouvelle édition à son préjudice ?
E n adm ettant l ’h yp o th ese
d'une
c e s s io n ,
on r é p o n d r a ,
i . ° q u e jam ais
l ’A uteu r du Cours d ’A griculture , n ’avoit cédé la propriété d e cet O u v r a g e ,
puisque du temps des
p rivilèges^ la L o i ne reconnoissoit pas de propriété
littéraire, et que depuis l'extinction des privilèges , l ’A u teu r d e ro it bien moins
à
C u c lie t
le sacrifice
du
droit incontestable
q u ’il
avoit de
don ner
une
n ou velle édition de son C ours.
2.0
Q u e R ozier avoit laissé à C u c h e t le tem ps de p la c e r la sienne , e t d ’en
tirer un grand b én éfice ; q u ’il avoit donc rempli , envers ce L ib ra ire , toutes
ses obligations naturelles , toutes celles q u ’il avoit pu contracter licitem ent et
sans renoncer à ses droits inaliénables.
3 . Q Q u e d e son côté , C u c h e t avoit ‘réalisé sa spéculation a v e c b e a u c o u p
d ’avantages , puisqu il avoit
m es , pour fournir
à des
été
dans
le cas de réim prim er plusieurs volu
dem andes devenu es infiniment plus considérables
q u ’il ne s y étoit attendu ; q u ’après avoir joui e x c lu siv e m e n t, p en d an t plus d e
dix années , du travail de l ’A u t e u r , e t avoir p la cé au moins dix mille e x e m
plaires , il devoit être conten t de sa moisson.
L e citoyen R o zie r paroissoit être, d ’a ille u r s , dans l ’intime persuasion q u e , par
son traité avec C u c h e t , il s ’étoit form ellem en t réserve' le droit d e donner d e
nouvelles éditions , et d ’y faire les c h an gem ens et additions q u ’il jugeroit à
propos. O n assure q u ’il a souvent m anifesté cette opinion , don t le fo n d e
m en t
se trouveroit sans doute dans la cession que D u g o u r n e produit pas.
D ans c e c a s , le citoye n R o zie r n'auroit
la
suppression des
pas
seulem en t
été autorisé par
privilèges , et p a r le rétablissem ent de la L ib e r té natu
relle , à p erm ettre une
nouvelle édition de son L iv re j mais il n ’auroit fait
qu'user du droit c o n v e n tio n n e l, stipulé entre C u c h e t e t lui. C e seroit un m o ye n
d e plus contre la prétention de D u g o u r.
V o ilà dans
quelles circonstances
p ro ce d e s les plus vexatoires
f a c te u r
de
,
com m e si ce
la L ib e r te rendue
n om
a la
il s ’est permis d ’atroces
contre le c ito y en L e r o y .
injures e t
les
Il l ’ap p elle c o n tr e
pouvoit convenir au L ib ra ire qui , profitant
presse , a secondé les désirs
d ’un A u te u r qui
venoit de recouvrer la propriété d e son O u v r a g e , e n le réim prim ant
sous
scs y e u x , et sur un exemplaire corrigé de la m ain m ê m e de- c e t A u t e u r , q ui
�(
i6
)
'
p renoit encore la peine de revoir les épreuves. U n c on trefacteu r imite , le plus
servilem ent q u ’il p e u t , le papier , les caracteres , la justification et jusq u ’aux
fautes de
1 édition originale ; il se couvre du nom du L ib raire privilégié , il
v e u t être pris pour lui : mais loin d ’im iter l ’édition
qui se ve n d c h e z D u g o u r ,
L e r o y avoit très à cœ ur que la sienne en fût d is t i n g u é e , q u e l l e fût reconnue
m eilleure. O n pouvoit supposer q u ’il n ’avoit pas eu le droit de faire c e q u ’il a
f a i t , q ue le citoyen R o z ie r n ’avoit pas pu l ’y autoriser ; l ’erreur d ’un h o m m e
aveu glé p ar son intérêt personnel, paroîtroit excusable : mais la conduite violente
d e D u g o u r , ses assertions plus q u e hardies , ses efforts pour faire d ’une cause
privée une affaire d e
parti , et rendre les
involontaires de sa cupidité , ce la
plus
honnêtes gens
com plices
e x c ite l ’indignation.
T a n d is que le c ito y e n D u g ou r et m ille autres c o m m e lui , s ’autorisent d e
la suppression des p r iv il è g e s , pour s ’associer aux avantages d ’une possession cidevant exclusive , lui convient-il de trouver mauvais ce grand d é v elo p p e m e n t
de la L ib e r té naturelle , q ui rend d ’un côté ce q u ’il retran ch e de l ’autre , et
qui porte a v e c lui le m o y e n d e
com penser le mal passager q u ’il occasionne ,
p a r le bien durable q u ’il produit ? L a fortune des anciens Libraires et Im pri
m eurs eut reçu un trop rude é c h e c de la concurrence
des nouveaux venus ,
si dans le m ê m e temps q u ’elle s ’éta b lisso it, un cham p plus vaste n ’eut pas été
ouvert à leurs entreprises , et l ’on doit croire que cette considération n ’a p oint
é c h a p p é aux Législateurs.
Mais , 011 le ré p é té , D u g o u r imaginoit-il q u e la
suppression des privilèges n ’avoit pas détruit celui q u e le L ibraire C u c h e t
avoit exploité ?
Prétcndoit-il que le D é c r e t
fo rc e ; q u e le Jugem ent de
D é c r e t ; que les garanties
du
21
A o û t 1789 , étoit sans
1 7 9 0 , avoit fait une fausse application
constitutionnelles promises en
d e ce
1 7 9 1 , étoient
ch i
m ériques et illusoires ? C e tte prétention n ’avoit pas de tels caracteres d ’évi
d e n c e , q u ’il fûtper/nis de.la prendre pour une incontestable vérité. O n pouvoit
risquer de faire un mauvais procès , en appelant le citoye n L e r o y devant les
Juges C ivils , pour y voir décider la question.
M ais D u g ou r savoit trop bien
q u ’il 11’y avoit rien à gagner pour lui à une discussion froide et m é th o d iq u e ;
il lui falloit du b r u i t , de
l’éclat , l ’appareil
d ’une procédure criminelle.
c ito y e n L e r o y est dénoncé , et pourquoi ? Parce que
Le
dans un tem ps où il
n ’existoit en F ran ce aucun R è g le m en t sur la L ib r a ir ie , il a publiquem ent entre
pris , sous les auspices et a vec le concours de l ' A u t e u r , une n o u velle édition
du C ou rs d ’A gricullure. O u donc est-il é c r i t , où a-t-on vu q u ’un fait de c e tte
nature puisse constituer un délit ? Sur quel article du C o d e P é n a l , clévcra-t-on
cotte
�(
*7 )
c e tte m onstrueuse procédure ? O n croit fortem ent q u ’elle ne p e u t avoir d ’autre
issue que de soulever tous les amis de la Justice contre Je citoyen D ugou r. Il est
im p o s s ib le q u au lieu d obtenir les millions qu il convoite , il ne soit pas con
damné l u i - m ê m e à une réparation aussi éclatante que l ’offense , et en des
d o m m a g e s -in té r ê ts p ro p o rtio n n és , n o n -se u le m e n t à la gravité d e l ’injure faite
au c ito y e n L e r o y , mais encore au préjudice im m ense q u e lui cause la saisie
e t l ’e n lé v e m e n t de son édition.
D e d e u x choses l ’une : ou la cause sera jugée d ’après les L o i x q ui p révaloient
lorsq ue le p rétendu privilège a été obtenu en 17 8 1 j par R o z ie r , et lorsqu’il
a fait à C u c h e t la pretendue cession du 27 M a i 1788 ; ou elle le sera d ’après
les principes du droit n a t u r e l , p roclam és
par le L é g is la te u r au c o m m e n c e
m e n t de la Révolution , et qui étoient e n vigueur lorsque le c ito y e n L e r o y
a entrepris son édition.
D ans 1g dernier c a s , le privilège seroit anéanti depuis 1 7 8 9 ; dans le p r e
m i e r , il le seroit du moins depuis 17 9 3 .
D ans l u n
et dans l ’a u t r e , il seroit toujours a v é r é ,
i . ° q u ’à l ’ép oq u e où
D u g o u r se disant cessionnaire de C u c h e t , a co m m e n cé ses p o u rsu ite s, il y
avoit lo ng-tem ps que ni D u g o u r ni C u c h e t n ’avoient plus ni titre ni qualité
p o u r agir ; d où il suit q ue D u g o u r est n o n -re c e v a b le : 2.0 que l ’édition du
citoyen L e r o y , entreprise avant la m ort de R o z i e r , et les ventes que l ’on
suppose faites long-tem ps après , n ’ont pu nuire à la jouissance e xclu sive d e
C u c h e t , qui a cessé a ve c la
r e c e v a b l e , seroit m al fondé.
vie de l ’A u t e u r ; d ’où il suit q u e D u g o u r , fût-il
N ’oublions pas la L o i du 1 7 Juillet 1 7 9 8 , relative au droit d e p ropriété des
'Auteurs d ’écrits en tout g e n r e ; le c ito y e n D ugou r doit s ’y a ttach er a v e c c o m
plaisance ; elle semble lui prom ettre des trésors : d'abord la confiscation de
l ’édition saisie , ensuite une som m e éq uivalente au prix de 3ooo exem plaires d e
1 édition originale : com m e il y a n e u f volum es « - 4 . ° du Cours d ’A g r ic u h u r e
imprimé par
C uch et,
en
comptant chaque volum e à 12 f r a n c s , c e seroit
108 francs par exemplaire > et p our les 3 c o o e x e m p la ire s , 324,000 f r a n c s ,
sans prejudice à ¿4j000 francs qui seroient encore dus par chaque L ib ra ire c h e z
le q u e l on trouveroit un exem plaire de l ’édition d e L e r o y . T o u t ce la est m agni
fique et bien capable d ex c ite r la convoitise , mais non pas de la satisfaire.
L a L o i du 17 Juillet *79^ j dispose pour l ’a y e n i r , et n e p e u t pas remplir l'at
tente de Dugour.
C
�(
i8
)
C e t t e L o i accorde aux Auteurs d écrits en tout g enre , le droit e x c lu s if de
les ven dre et faire v e n d r e , et d ’en c é d e r la propriété , en tout ou en p artie :
e lle assure le m ê m e droit aux héritiers ou cessionnaires des A u t e u r s , durant
l ’espace de dix arts après la mort de ceux-ci.
O n ne p eu t s ’e m p ê c h e r de rem arquer que c e q u e la L o i a p pelle la p ro priété
des Auteurs , r e sse m b le fort p eu à une véritable propriété ; puisqu’e lle doit
toujours cesser dix ans après leur mort. Suivant toutes les notions r e ç u e s , nous
p ouvons ven d re à toujours les biens dont nous som m es propriétaires : si nous
m ourons sans en avoir disposé , nous les transmettons à nos h é r itie r s , non pour
dix ans , ou pour tout autre term e r e s tr e in t, mais à perpétuité. Il sem b le d o n c
que la
L o i du 17 Juillet 1 7 9 3 , en m ê m e tem ps q u'elle annonce la p ro p rié té
des A u t e u r s , ne la consacre pas tr è s -c la ire m e n t, et q u e l l e laisse b eaucoup à
désirer à la Justice.
*
Q u o i q u ’il en soit , le citoyen D ugou r peut-il puiser dans c e tte L o i des
m oyen s favorables à sa cause ? C ’est ce que nous allons exam iner.
Il est essentiel de faire observer que les troubles de L y o n ëxistoient e n
Juillet 1 7 9 3 ; que le siège alloit c o m m e n c e r ; et que R o z i e r , atteint d'un éclat
de b o m b e , au mois de S e p te m b r e , mourut sans connoître la L o i d u 17 J u ille t ,
qui ne parvint à ses c o m p a trio te s , et n e fut publiée dans leur V ille , q ue long
tem ps après.
R o z ie r n ’a donc pu faire usage du droit q u e cette L o i donnoit aux A uteu rs ;
ni C u c h e t , ni L e r o y ne p eu v e n t en argumenter.
L e c ito y e n C u c h e t a traité sous
la tyrannie
des privilèges ; le
c it o y e n
L e r o y , dans un temps où aucune L o i positive ne modifioit la liberté naturelle.
D a n s le systèm e de D u g o u r, il faudroit franchir l ’intervalle de quatre ou c in q
années , pendant
lesquelles • les anciens
Réglemerts n ’existoient plus , e t l e
no u ve a u n ’existoit pas encore ; il faudroit rattacher l ’ancienne L égislation à la
n o u v e lle ; il faudroit étendre l ’effet des cessions’ que les Auteurs ont faites d e
leurs privilèges avant 1 7 8 9 , en y appliquant les dispositions de la L o i du
19 Juillet 17 9 3 . C e s y s t è m e , enfanté dans le délire de l ’intérêt p e r s o n n e l, est
in s o u te n a b le , absurde.
Il suppose dans la L oi un vice rad ica l, le vice de la ré troactivité, q u ’on ne
p eu t supposer dans aucune L o i , beaucoup moins dans c e l l e - c i , dont toutes les
expressions sont au futur.
L a Législation des privilèges a dû servir d e réglé tant q u e les privilèges ont
existé.
�( • T9 )
L e D i o ït naturel 3. seul prcvnlu ^ apres 1 ¿iljrogcitïon des privilègesL a L o i positive , du 19 Juillet i 7 9 3 , modifie le droit naturel , e t n ’op ere
q u ’à com p ter de sa promulgation.
C o m m e n t imaginer que le citoye n R o z ie r a c é d é , en 17 8 3 > ¿ es d roi ts q u >il
n ’avoit pas à cette époque ; des droits résultans d ’une L o i p ortée dix ans plus
tard ; L oi q u ’il n ’a jamais connue , ni pu connoître ? Pensoit-il , en 17 8 3 ,
C u c h e t se doutoit-il alors, q u ’un jour les Auteurs auroient la facu lté d e c é d e r
à un Libraire la\jouissance exclusive de leurs O u v r a g e s , non-seulem ent p e n
dant leur v i e , mais encore pendant les dix années qui suivroient leur m ort >
A u c u n e des parties contractantes en i 7 8 3 ,
n ’a eu l ’idée de c e futur contin
g e n t , mais toutes deux savoient parfaitem ent q u e la cession faite au L ib ra ire
réduisoit le privilège à la vie de l ’A u t e u r , et toutes deux s t i p u l e n t en c o n sé
q uen ce. Voudroit-on que ce qui 11’a é t é , ni dans leur p e n s é e , ni dans leur
apperçu , fût néanmoins entré dans leur convention ? V o u d ro it-o n q ue le droit
de 1 u n e , que 1 obligation de 1 autre , dérivassent d ’une convention q u ’il est
évident
q u elles n o n t
pas f a i t e ,
q u ’elles n ’ont pas pu f a i r e ,
dont on ne
p e u t pas m e m e leur supposer la p en sée ; ou enfin voudroit-on q u ’elles fussent
e n g a gé es sur ce p o i n t , sans en etre c o n v e n u e s , sans avoir e u l ’intention d ’en
co nvenir >
L a L o i du 19 Juillet 17 9 3 , prise dans Je sens de D u g o u r , iroit d irec te m e n t
c o n tr e son o b j e t ; elle favoriseroit les L ib r a ir e s , et ne p rocureroit aucun avan
tage aux Auteurs.
C e u x -c i , presque tous liés par des cessions faites à des Libraires ,
etoient rentres alors dans leurs droits naturels. De quoi s'aKissoit-il
en . 7 , 3 î D e n regler lexere.ee , nuis non pas de les annuller. Cependant, si
, 7 S9
la L o, du , 9 Ju.Het, sappl.quo.t aux cessions faites avant ,789 , il résulter»*
de la que les Auteurs v.vans auroient perdu d ’avance tout ce q u elle semble leur
accorder ; les anciens cessionna.res , qui navoient compté acquérir la jouis
sance exlus.ve que jusqua la mort.des A uteurs, se trouveroient lavoir acquise
pour dix ans dé plus. Quauro.ent donc gagné les Auteurs h cette Loi faite
pour eux ? Elle leur eut ray. les droits naturels qu'ils avoient recouvrés , lors
de la suppression des privilèges; elle leur eut.enlevé tout le bien que la Révo
lution leur promettoit.
C e n ’est pas à-coup-sûr, l’intérêt des Gens-de-Lettres q u o n a en v u e , lorsqu on cherche à accréditer ce système , et à faire remonter la L oi de 1793.
T
�(
20
)
S i R o zie r eût survécu à sa p u b lic a tio n , s ’il l ’eût connue , il est présum able
q u e , dans les termes où il en étoit avec le c ito yen L e r o y , il eût fait
avec lui
un traité qui eût autorisé ce dernier à e x e rce r les droits exclusifs de l ’A uteu r :
mais L e ro y n ’a rien acquis en vertu de la L o i du 19 Juillet, elle n ’existoit pas;
ni l 'A u t e u r , ni le Libraire ne l ’avoient en vue , lorsque R ozier a consenti q u e
L e r o y imprimât son O u v r a g e , lorsqu’il a fait plus q u ’y c o n s e n tir , et que luim ê m e a‘ coopéré à cette nouvelle édition. A u s s i, le c ito y e n L e r o y ne réclam et-il pas un droit ex clu sif; il se borne à profiter du consentem ent de l ’A u teu r ,
sans en abuser. Personne n ’a le droit de l ’en e m p ê c h e r ; car personne n e p e u t
résister aux preuves convaincantes
contester à celui-ci
le droit
du
consentem ent
donné par R o z ie r , ni
q u ’il avoit d ’autoriser l ’entreprise
du citoyen
Leroy.
D u g o u r objectera peut-être , que le
consentem ent de R o zie r
devoit être
form el et p a r écrit. O u i , sans d o u te , s ’il s ’agissoit d ’une cession postérieure à
la L o i du 17 Juillet 179^ , devant produire
l ’effet prévu par
donner un droit exclu sif au cessionnaire ; mais il s ’agit
avant la L o i , dans
un
temps
cette L o i , et
d ’une édition perm ise
où aucune formalité n ’étoit prescrite , où Ro
z ie r , en usant de son d r o i t , ne s’en dépouilloit pas ; où L e r o y
n ’étendoit
pas
ses vues a m b itie u s e s , ju s q u ’à trouver mauvais que l ’A uteu r pût faire pour d ’au
tres , ce q u ’il vouloit
bien faire p o u r
lui. L ’objection est donc
tance. L a L o i qui ex ige un consentem ent form el
sans consis
et par é c r i t , annulle c e u x
q u'on supposerait avoir été donnés verbalem ent depuis sa publication , mais non
pas
c e u x qui résultent de faits
incontestables antérieurs au 19 Juillet 1798.
C e n ’est p a s , d ’ailleurs, à D ug o u r
à proposer des objections
elles solides , ne lui seroient d ’aucune utilité : quand L e r o y
q u e l ’A uteur a autorisé son édition , s ’en suivroit-il que
qui , fussent-
ne prouveroit pas
D ug ou r eût qualité
p our censurer sa conduite ? Q u i est-il ? Cessionnaire d ’un cessionnaire , dont
le droit , qui n ’est point justifié , rem onte à un privilège , et qui
n ’ayani point
observé les L o ix protectrices de ce privilège , en eût été form ellem en t déchu.
Passons néanmoins que la p rét-.idue cession de 17 8 3 fût inattaquable sous ce
rapport : elle auroit eu son effet jusq u ’au mois de S e p te m b r e 17 9 3, en supposant
que
les privilèges
n ’eussent pas
la suppression des privilèges
été supprimés en 1789 . Voilà le vrai: mais
a em porté celle du droit exclusif que pouvoit
avoir C u c h e t. Et il n ’a pas moins continué d ’en jouir p ar le fait ; il n ’a pas été
troublé , tant que
l ’A uteu r a
vécu ;
son
traité
a donc reçu sa pleine et
entière exécution et tout l ’effet q u ’il pouvoit s ’en p ro m e u re , lorsqu’il l ’a signé ;
�C
ai
)
de quoi donc p e u t se plaindre son cessionnaire ? Q u ’im porteroit que L e r o y eût
des to r ts , s’il est certain que D u g o û r n a point de droits ? N ou s croyons cette •
derniere proposition dém ontree et ne pensons pas que le succès du citoyen
L e r o y soit douteux.
.
\
D é lib éré à P a r i s , le 27 N iv ô se , an 7 de la R é p u b liq u e .
'
’
S ig n és
'
E M M E R Y ,
s
G.
H O M ,
A.
"V u
'
C.
C A M B A C E R È S ,
T H I B A U D E
AU.
la C onsultation délibérée à P a r i s , le 27 de c e m o is , et signée E m m e r y ,
H om , C a m b a c e u è s
et T h i b a u d e a u ,
L e Soussigné se joint à l ’opinion établie dans cette Consultation, que D u g o u r
11 est ni r e c e v a b l e , ni fonde dans sa poursuite contre les freres L e r o y , et
pour raison de l'édition prétendue contrefaite du C ours d ’A griculture ; et il en
a-dopte p rin cip alem ent les raisons suivantes :
T*° Q u e l ’édition dont il s’a g it, est franche e t originale, et non c o n tre fa ite ;
car si , dans le langage des anciennes L o ix , l'édition contrefaite étoit ce lle
qui étoit fai Le sans permission et au p réjudice d ’un privilège a c c o r d é , il faut '
les anciennes Lois ayant.été a b r o g é e s , et la n ou velle L égislation n'ayant-point
défini la contrefaçon , s ’arrêter au sens littéral et vulgaire du mot.
2.° Q u e si D ugou r ne produit aucune c e s s i o n , il n ’a aucun titre à une p ro
priété qui 11e fut pas originairement sienne.
"
3 .° Q u ’en aucun temps l'édition surveillée et perfectionnée par l ’A u t e u r , n ’a
pu être le prétexte d ’une querelle contre l’Editeur.
4 .0
Q u e l 'édition du Cours d ’A griculture , dont il s ’a g it, datant d ’une é p o q u e
a laquelle 1 ancienne Législation étoit abolie , et ou la n o u velle 11’avoit rien mis
a sa p l a c e , 1 on ne peut imputer a d é l i t , aux freres L e r o y , c e que la L o i
d ’alors ne défendoit pas.
5 .° Q u e la L o i de 1 79 ,J nc disposa rien a l ’égard des L iv re s qui auparavant
avaient
été
m êm e
proprem ent
contrefaits , et
par
conséquent ne
donna
�(
22
)
aucune action relative,' et que cette Loi étant rigoureusement prohibitive ;
n’est pas susceptible de cette extension, que l’on ait pu y contrevenir avant
qu’elle existât, et qu’un fait ait pour suite une peine que son auteur ne dut et
ne put pas prévoir.
A Paris , le 28 Nivôse, l'an septieme.
Signé C H A B R O U D.
L e Soussigné, qui a lu les Consultations délibérées les 27 et 28 du pré
sent m ois,
E ST
D’ A V I S ,
1 ° Que le citoyen Dugour doit être déclaré non-recevable dans l’action
qu’il intente au citoyen L e ro y , tant qu’il ne représentera pas la cession que
le citoyen Rozier est supposé avoir faite à Cuche t , de son O uvrage, et la
rétrocession que le citoyen Cuchet est supposé avoir faite à lui Dugour.
2.0
Q u ’en supposant qu’il représente ces deux titres, il doit être déclaré
mal fondé dans son action, faute d ’avoir rempli les conditions sous lesquelles
seules le Règlement de 1777 accordoit aux privilèges de Librairie un droit
exclusif qui pût gêner la liberté du commerce.
Délibéré à Paris, le 2 8 Nivose, ân 7 de la République Française.
Signé T R O N C H E T.
A L y o n , de l’imprimerie de L E R O Y .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dugour, A.-J. An 7?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Emmery
Hom
Cambacerès
Thibaudeau
Chabroud
Tronchet
Subject
The topic of the resource
droit d'édition
contrefaçon
droit d'auteur
Description
An account of the resource
Consultations. [Dugour]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Leroy (Lyon)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 7
1780-Circa An 7
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0134
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0133
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Paris (75056)
Lyon (69123)
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Domaine public
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droit d'auteur
droit d'édition
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Text
P R E M I
E T
POUR
le
E R
M
É M O I R E
C O N S U L T A T I O N S
Citoyen
L
e r o y
,
Imprimeur - Libraire
à Lyon ,
Propriétaire d’une Edition du Cours d’A gricu ltu re, par Rozier.
SERVANT
DE
RÉPONSE
AU
MÉMOIRE
P u b l i é contre l u i , à P a r is et à L y o n , sous le nom d ’A . J . D u g o u r ,
L ibra ire à P a ris , se disant H om m e-de-Lettres
A u c u n e L o i , ni crim in elle , ni civile
( I )
3 n o p e u t a v o i r d ’e f f e t r é t r o a c t i f .
D é c î. des D r , a r t.
i4.
J ’ Ai réim prim é, au commencement de la ré v o lu tio n , les huit premiers
volumes du Cours ou Dictionnaire d’Agriculture , de feu l ’A b bé R oiier
Aucun privilège connu ne s’étoit jamais opposé à cette réim pression.
L es L oix de ce temps-là m ’y autorisoient.
(i)
Dugour se d é co re o r g u e i l l e u s e m e n t d u n o m D'H om n,e-de.Latns ; i l est p re ss é de jo u ir ;
il n ’a ttend p o in t que l 'e stim e p u b l i q u e lu i d é c e r n e c e t t e h o n o r a b le d é n o m i n a t i o n ; il
f o r c e ainsi ses L e c t e u r s à r e c h e r ch e r m a l g r é e u x ses titres à l ’a u r é o l e litté ra ire : les p r in c j p a u x sont, u n
M em oire
justificatif de Louis X V I
e t u n e Histoire d'Olivier
Cromwel. J e
n ai rie n à dire s u r le rang q u ’o c c u p e n t c e s d e u x é c r i t s p a r m i n o s ric h e s s e s l itté ra ire s
n iais si les c o n tr a d ic tio n s u n p e u t r a n c h a n t e s q u ’o n y
t ro u v e s u r scs p rin c ip e s d e P o
litique et do M o ra le , n ’é to ie n t p ro p res q u ’à m o n t r e r d a n s l ’A u t e u r u n c a m é lé o n to u jo u rs
c h a n g e a n t , u n a m b id e x t r e t o u jo u rs prêt à c o m b a t t r e le l e n d e m a i n le parti q u ’il a e n c e n s é
la veille, , n e faudroit-il pas a d m i r e r l ’e x c è s d’i m p r u d e n c e q u i , p o u r u n e vain e g l o r io l e ,
suroit ve n u e rappeler des so u ve n irs si f â c h e u x ?
A
�(
E t le consentement formel
2
)
de l’Auteiir confirma
aux yeux
de la plus
scrupuleuse délicatesse , ce que toutes les L o ix m e perm ettoient.
C e tte édition est aujourd’hui dénoncée à la Justice et à mes C oncitoyens,
dans un libelle que I’Auteur lui - même n ’ose avouer , comme un attentat
qui ébranle le mont Parnasse jusques dans ses fondemens ; je me vois
traité de pirate , de corsaire , de fo rb a n , de Cartouche , de brigand, de
voleur , etc. etc. L es L oix portées contre les plus vils filous n ’ont rien d ’assez
sévere pour me châtier dignement : e n appelle sur ma tête le courroux des
Savans, la vengeance des Libraires , le glaive de la Justice , le mépris de tous
les C itoyens ; c ’est par un effort de clém ence qu'on veut bien ne pas m'interdire
le feu et l’eau.
Mais quel est l ’auteur de tout ce bruit ?
C e n ’est pas l ’A bbé Roger ; il est ;nort depuis plus de cinq ans.
C e ne sont pas ses héritiers ; ils n ’ont jamais rompu le silence.
C e n'est pas un cessionnaire ;
connoître.
•
aucun cessionnaire ne
s’est jamais fait
L e croira-t-on ? C e t aggresseur si tranchant , si prodigue d ’injures , n ’est
que l’acheteur peu délicat d ’un procès que personne avant lui n ’avoit osé
m ’inten ter, et qui lui étoit parfaitement étranger;
c ’est un marchand devenu
célébré dans le com m erce des contrefaçon s, qui en déclarant à une contre
façon imaginaire , une guerre cruelle , prétend que tous les Savans et les
Libraires honnêtes doivent faire cause commune avec lui.
C e t homm e est le C ito yen Dugour.
Pour faire de cette cause , une affaire de parti , il a placé à la tete de
son M ém o ire, son systèm e sur les privilèges littéraires ; mais cet artifice ne
séduira personne ; on verra trop que son système , sa conduite et sa cause ,
s’ils étoient soutenus du moindre succès , seroient une calamité pour les
. Auteurs et pour les Libraires honnêtes.
'igine des Pri-
Il a existé dans tous les pays et dans tous les siecles , des hommes
ts littéraires, qui se sont dévoués à copier ou débiter les différentes productions des auteurs ;
c ’étoient à Rom e les L ibrarii, que nous nommons Ecrivains ; les B ib lio p o li,
qui ont pris depuis le nom de Libraires ;
c'étoient en France les Libraires-
jurJs ou Stationnaires.
L e s productions du génie étoient pour eux tous un champ public, dont tout
�(
3
)
Libraire avoit droit de rccueillu les fruits 5 c etoit un patrimoine cornrntin ^ et
tous les manuscrits publiés devenoient en quelque sorte un droit de conquête ;
ils appartenoient primo occupanti.
A l’époque de la découverte de l’im prim erie , et même encore long
temps après, on en usa à l’égard des imprimés comme à 1 égard des manus
crits ; car l ’imprimé n ’est en effet qu’une espece de copie plus facile et
plus prompte : la presse jouit à son tour d ’une liberté sans entraves ;
comme il étoit permis à chacun de co p ie r, il fut de même permis d ’im
primer : et c ’est à cette liberté sans bornes , à cette facilité de multiplier
les écrits , que les siecles suivans ont été redevables des connoissances
les plus étendues ; c ’est par la concurrence et la liberté que les Auteurs
les plus précieux de 1 antiquité , ont été restitués à la lumiere ; q u ’ils
ont été dépouillés de la rouille q u ’ils avoient contractée dans la poussiere des
clo îtres, et purgés des fautes énormes qui altéroient les meilleurs manuscrits ,
par l ’ignorance de la plupart des copistes.
Mais une ambition jalouse, mais le génie du m onopole, souillant'de son souffle
em pesté une découverte si précieuse , inventa les p rivilèg es, et avec eux
tous les dechirem ens qui ont depuis désolé ou flétri le plus intéressant des
arts.
L'intérêt des Auteurs , la propriété de la pensée , les droits du génie , tous
ces lieux communs qui servent aujourd’hui de voile à la cupidité de quelques
Libraires, sont d ’une invention toute m o d ern e; le prétexte autrefois étoit
d ’encourager 1 art typographique ; la m o d e , de déclam er contre la concur
rence : ce fut ainsi qu un petit nombre de Libraires s’em parerent de tout
le domaine de la littérature et de l ’imprimerie.
Un arrêt de i V n
adjugea à Pierre V ia rd , YHistoire de Gaguin.
François /. accoida a un autre le Rosier histonal de France,
L es Œ uvres de Commine furent adjugées à G aillot-D upré.
L e Nouveau Testament, à Charlotte Gaillard , en i 6 5 i.
L e s Œ uvres de Seneque , a Nicolas Nivelle.
L a C onférence des Coutumes de .France, à Guillaume Chaudiere.
L a Somme de St. Thomas, le Cours de Droit Canon , l ’O in cc de la Vierge
en grec et en latin , etc. furent adjugés a d autres ; on ne fmiroit pas cette énu
mération d ’usurpations et de p rivilèges, s’il falloit les rapporter tous.
L intérêt des Auteurs n étoit donc alors compté pour rien ; ce n e to it ni pour
‘
A a
�Seneque , ni pour St. Thomas , ni pour la Vierge ,
■combattoient avec tant de vaillance.
que certains exclusifs
Et si l ’on désire une preuve encore plus frappante de la mauvaise foi des amis
les plus prononces des p riv ilè g e s, je vais la donner : ce champion redoutable des
exclusifs, ce coryphée officieux des Gens-de-lettres , qui me menace , comme un
autre Jupiter , de sa foudre , Dugour enfin , la fournira lui-même : « Com bien
» n ’est-on pas indigné d ’apprendre , s’écrie-t-il, ( i ) que Bernardin de Saint-Pierre,
» ce célébré Ecrivain qui n ’a presque d ’autre fortune que le produit de ses tra
» vaux littéraires , ne peut pas vendre l’édition originale de ses excellens ou
» vrages , imprimée à ses fra is , tandis qu ’il s’en débite une multitude de
» contrefaçons » ? H e bien ! croiroit-on, en lisant ces accens hypocrites , que
Dugour lui-m êm e, e s t , suivant ses propres te rm e s, l ’un des pirates, l ’un des
Corsaires, l ’un des forbans, l ’un des Cartouches, l ’un des brigands , l ’un des
voleurs qui pillent cet Auteur estimable , et qui volent sa propriété i Cependant
rien n ’est plus vrai : il annonce dans l’un de ses catalogues les Etudes de la ,
nature ,par Bernardin de •Saint-Pierre , 10 vol. , f i g . , p rix 12 liv. T out le monde
ait que l’édition originale n'est ni de ce prix , ni de ce format. ( 2 )
Et ce n ’est pas la seule contrefaçon qu’il publie : D u Dictionnaire de
Richelet , avec des augmentations du Citoyen W ailly , imprimé ch ez le
citoyen Bruy^et de Lyon , il vend une
édition sous le litre de L au sanne,
17 9 7 . — Du V oyage d 'Anacharsis , dont l ’édition originale
coûte
5o fra n c s,
il vend une édition contrefaite au prix de 3 o francs. — Des Œ uvres de
, dont l’édition originale coûte 42 francs , il vend une contrefaçon au
prix de 1 2 francs. — Il n’est pas jusqu’à son ami M erlin , Libraire de Paris, que ,
suivant son la n g a g e, il ne pille ; puisqu’il vend une contrefaçon des Œ uvres de
M arm ontel, qui appartiennent audit Merlin ( 3 ) .Je pourrois lui reprocher la vente
floria n
( 1 } P a g e £0 de son A l ¿moire.
( 2 ) D a n s u n a u tre C a t a lo g u e où Dugour a so in d ’a vertir q u ’on n o trouvera a u c u n e c o n
tr e f a ç o n , o n ne tro u v e en e f f e t , n i c e tt e é d itio n des Etudes , n i a u c u n e des a utres c o n t r e
fa ç o n s q u e je lui r e p ro c h e ici.
(
3)
O n vo it ici Dugour
m a rch an d p u b l i c
des
co n tr e f a ç o n s q u e p o u r s u it M erlin ; on
verra clans la s u i t e de ce M é m o i r e , Alerlin m a rch a n d n o n m o i n s hardi îles c o n tr e f a ç o n s
q u e p o ursuit Dugour : E s t - c e u n e g u e r r e , c o m m e o n d i t , et c o m m e
«’ S t - c e u n c g u e r i o de
p e r f i d i e s : Merlin
a ch e té les p r é t e n d u e s
Dugour scs v e n d e u r s ;
puis à
moi , et
on
en
voit tant ,
Corsaire à Corsaire ! P o in t d u to u t : c est u n éch a n g e d o s e r v ic e s et do
delà
A Goude dn
le p ro cè s
c o n tr e fa ço n s q u e
i n te n t é à Diane et
Nismes , v e n d e u r s s u p p o s é s
p o u r s u it
D u g ou r, et
livre d
Cormon v e n d e u rs de Alerlin ,
d s Cormon et B lanc : Dugour ,
d e son c ô t é , v e n d les co n tr e f a ç o n s q u e p o u r s u it M erlin , sans
d o u te aussi , p o u r lui li
v r e r , j a r u n ju s te r e t o u r , ses a c h e t e u r s ; delà p eu t-ê tre le s d i v e r s e s saisies
q u e Alerlin
�C 5 )
de beaucoup d ’autres contrefaçons; telles que le Poëm e des Jardins , les Lettres
à Emilie , sur la M ythologie , e t c ., etc.
Il ne faut donc pas se lasser de le redire ; 1 intérêt des Auteurs n ’est q u ’un
vain prétexte ; un odieux monopole est 1 unique but de toutes ces clameurs.
*
. . . .
Q uelle que fût la mauvaise fui de ce nouveau prétexte , le succès sur
passa les espérances mêmes q u ’on en avoit conçues : pouvoit-on refuser à un
h o m m e de lettres peu fo rtu n é, un honorable salaire de ses veilles? N ’éloit-il
pas révoltant de le condamner à consumer dans l’indigence et le désespoir ,
les restes d'une vie consacrée toute entiere au bien de la société ? M ais on
manqua le but pour l’avoir dépassé ; on servit quelques Libraires et non les A u
teurs; un torrent de privilèges inonda la Librairie ; une foule d ’actes, législatifs
outrcSr, ne cesserent d ’opprimer cette branche si intéressante de co m m e rce ,
et là Librairie périt avec sa liberté. D e 87 Imprimeurs que comptoit P a ris, et
de 28 que comptoit L y o n , à la fin du siecle d ern ier, la prem iere de ces C om
munes n'en comptoit que 36 en 1739 ; et la seconde , douze ; les autres villes
perdirent à proportion: les livres cependant se multiplièrent plus que jamais ;
mais l ’Etranger , libre de nos privilèges destructeurs , les fabriquoit; et son
industrie , enrichie par nos fautes , appîiquoit sur nos besoins une pom pe
dévorante qui nous enlevoit sans cesse une grande quantité de numéraire.
Q uoi qu’il en soit , le dernier élat de la. Législation sur cette inatiere , est
dans . deux arrêts du Conseil du 3o Août 1777 , et, dans celui du 3 o A oût
J773.
L es dispositions qui nous intéressent dans ces réglem ens sont en petit
nombre.
L ’un de ceux de 17 7 7 « défend à tous Tmprimeurs-Libraires de contrefaire
t les livres pour lesquels il aura été accordé des privilèges ; perm et au posses» seür du privilège de form er sa demande en dommages et intérêts , et d ’en
y obtenir de proportionnés au tort que ladite contrefaçon lui auroitfait éprouver
» dans son commerce » . ( Art; l ’ et 3 . ) Il borne « la durée du privilège ,
« par le seul fait de la ce ssio n ,' à celle de la vie de l’Auteur. » ( Art. 5 ). Il
donne à tout Libraire et Imprim eur ’ le droit de réimprimer ,
» l’expiration du privilège ou la morr d e '1A u teur. »’ ( Art. 6. )
a fait faim ou q ' i ’il se p répare à faire ries m ô m e s C o n t e s
D a t e u r , mais q u ’il n o saisira pas c h e z Dugour.
=
Avis
m o r a u x q u ’a n n o n c e
a
r.A '
« après
c i ré p an d
L i b r a i r i e .
E t c'est Dugour q u i im p rim e q u e sa ca use est c o m m u n e i to us les L ib r a ir e s q u i fo n t l e u r
co im n u rc e avcc honneur ! ..........
1
�. .
.
c
6
}
A in s i, une condition essentielle de la plainte en contrefaçon, c'étoit que pour
le L iv re co n tre fa it, il eût été accordé un privilège , et que ce privilège n’eût pas
pris fin par la mort de lAuteur. Sans cette condition, le Livre étoit une propriété
publique ; et la réimpression n etoit soumise q u ’à la simple permission.
Il ne suffisoit m êm e pas que ce privilège eût été accordé ; il falloit encore ,
pour q u ’il devînt obligatoire, q u ’il eût été publié ; et la form e de la publication
11 etoit point arbitraire. L ’art. i o 3 du règlem ent du 28 Février 1 7 2 8 , exigeoit
que le privilège fût inséré au com m encem ent ou à la fin du L ivre , ainsi que
l ’approbation sur laquelle il avoit été obtenu; et l’art, 106 vouloit que les privi
lèges fussent, dans les trois m ois, enregistrés sur le registre de la communauté
des Imprimeurs et Libraires de Paris , et que les mêmes regies fussent observées
à l'égard des cessions de privileges.
Ce
sont ces réglem ens qui régirent la Librairie jusques en
1 7 8 9 , et
jusqu’alors on appliqua aux contrefacteurs, les dispositions portées par les pri
vilèges auxquels ils étoient contrevenus.
L e décret du 21 Août 1789 , publié le 3 N ovem bre suivant, abolit tous
les privilèges , et chaque Libraire reprit alors le droit naturel d ’exercer son
industrie sur tous les livres connus.
O n douta cependant si le décret du 21 Août s’appliquoit aux privilèges
littéraires ; mais un jugem ent célébré , rendu, en dernier ressort, parle Tribunal
du ç.e Arrondissement de Paris , dans la cause du citoyen Palissot et de la
citoyenne Devaux , fiza invariablement la Jurisprudence , et décida que les
privilèges littéraires n ’avaient pas été exceptés.
Depuis cette loi et cette décision , la Presse et la Librairie jouirent d ’une
liberté sans bornes ; et tous les livres répandus dans le com m erce ne furent
plus considérés que comme un patrimoine commun.
L e s Auteurs dramatiques furent les premiers qui réclamèrent ; victimes euxm êm es d ’un privilège odieux et avilissant que s’arrogeoit sur eux le Theatre
e x clu sif, dit de la Nation , ils firent entendre au Sénat les accens de la
plus juste indignation contre cet humiliant servr.ge; et l’Assem blée constituante,
en perm ettant la libre érection des théâtres , accorda aux Auteurs une répar
tition sur le produit de leurs ouvrages ; mais ce droit, d ’ailleurs plein d ’éq u ité ,
fut resserré, par une sage politique, dans des limites éiroites.
C e ne fut q u ’en 1793 , et q u ’après le 3 i M ai, que la premiere L oi fut portée
sur cette m a tie re , et qu'on assigna des limites a la liberte de la presse et do la
Librairie. C ette Loi est du 19 Juillet.
�( 7 )
Elle accorde aux Auteurs pendant leur vie , 0u 'a ceux qui les représen
tent , pendant dix annees après leur m o rt, le droit exclusif de vendre leurs ou
vrages; elle soumet les contrefacteurs à une indemnité égale à la valeur de trois
m ille exemplaires de Lédition origin ale, outre la confiscation , et les débitons
à celle de cinq cents exem plaires; peines évidem m ent outrées et sans propor
tion avec le dommage.
A F
L ’excès de ces indemnités , dans un temps où l ’immoralité , en concurrence avec
le génie , spécule sur to u t, est devenu à son tour un des plus odieux , mais
aussi un des plus riches sujets de spéculation.
’
D éjà des troubles violens com m encent à éclater dans la Librairie-; des déchirem eiis cruels menacent d une destruction prochaine , une branche inté
ressante de com m erce q u ia rendu à la Patrie , à la philosophie , et à la révo
lution, les plus éminens services; une espece nouvelle d ’agioteurs se prépa
rent * élever leurs fortunes colossales sur la ruine de la Librairie française.
L e citoyen Jeudy m eritoit d ’entrer dans cette coalition , et d ’en être l ’un
des enfans perdus.
V o ici l ’honnête spéculation qu’il a imaginée.
C u ck et, parfaitem ent instruit de mon e'dition, et des circonstances dans le s
quelles je 1 avois faite , avoit été assez ju s te , ou assez sage , pour n ’oser jamais
s en plaindre; mais l ’action qu ’il avoit refusé de m ’in te n te r , Dugour l ’a Ltenti
acquise; une convention particulière est intervenue entre Cuchet et lui par la
quelle Dugovr parole acheter le droit honteux et litigieux de poursuivre tous
les Contrefacteurs qu .1 pourra,t découvrir ; mais on a soiu de cacher , non
sans ratson, quel fut ta v.l pnx de cette cession ignominieuse ( , ) A rm é de
cette prétention et de la
du , , M , « , , , 3 , D
^
D ep artcm en s, s e t rue contre une multitude de prétendus contrefacteurs ou
deb.tans . a qu, .1 demande * ,
de ^
; si c m e
rij#
pouvoir réussir, le citoyen Dugour auroit vraiment trouvé la pierre p h ilo s o p h é .
E t,
«ne
(i)
en effet : supposons un seul c<mr<facu m : la Loi le condamne à
indemnité égalé a la valeur do trois
m ille exemplaires dû
l'édition
Si Cucket avoit p u c é d e r l ’a ctio n q u ’il a v e n d u e à Dugour , les L o i * per diverses e t
cb Anastasio , qu. p ro h ib e n t cotte h o n te u s e t r a n s a c t i o n , m e d o n n a i e n t le d r o it de re m uo urscr a Dugour le p r i x de son a c q u is itio n
oh
___ r :
u
■
Co,. „
.
6 ...
Mul:" “ o n , e t d e m e faire subroger ; . niais c o m m e
cotte ce ssio n est i l l u s o i r e , |e m e d is p e n s e a u j o u r d ’hui d 'u ser de ce droit.
�. . .
c' 8 )
originale. C i ............................................................................................ 3 ,ooo Exempl.
Il a pu espérer de trouver 5 oo débitans du L ivre
contrefait j chaque débitant devroit la valeur de cinq
cents exem plaires ; pour 5 oo
débitans ,
.
.
a5o,ooo
Supposons que l'on ne puisse saisir et confisquer que
i,o c o
T o t a l .
.
.
.
.
.
264,000 E xem pl.
Dugour m ettant à led ition originale un prix arbitraire, ne manque pas de
rélever au delà de toutes les bornes ; il le suppose de n r) francs : à es
prix , les 264,000 exem plaires vaudroient près de trente millions.
O n voit par ce simple ca lc u l, combien l ’habileté de Dugour l ’emporte sur
celle de Cuchet. Celui-ci crut gagner beaucoup en re tira n t, dans un espace de
tems assez co u rt, un bénéfice de 800,000 francs ; et il crut avoir atteint \c maxi
mum de l ’industrie humaine , en faisant avec P A u teu r, le partage du lion ;
mais Dugour a laissé bien loinderriere lui et Cuchet et tous les autres Libraires :
d ’un trait de plume et avec une cession obtenue à vil p r ix , il prétend acquérir
des millions. Fournisseurs , agioteurs , dilapidateurs, et vous tous que poursuit la
justice ou l’envie , abandonnez vos tristes spéculations, m archez sur les traces
des Dugour , achetez des procès et des livres : là , sont des trésors.
L ’homme aux trente m illions, venoit donc à peine
de signer son contrat,
qu’abandonnant la stérile routine de ses confreres , il place à la tête de ses C ata
logue? , une invitation fraternelle à « ceux.qui découvriroient des éditions con
s». trefaites;des livres de sonjo n d s > d ’en-faire .connoître les auteurs, les débitans
» et les lieux des. dépôts. I l éprend l'engagement fo rm e l de leur abandonner la
» moitié de l'an: en de que. la. L oi accorde ( 1 ). »
. C ette moitié promise enfanta des prodiges.
Précédé par cet appât tout puissant , un praticien subtil , nom m é Jeudy
Duinonteix , de son métier g'iiand acheteur de procès , est le limier que Dugour
dépêche dans les dép artem en t1
'
1
Il arrive à L yo n
L ’enchantement avoit opéré : les facilites les plus
aimables , et les secours les plus touchans lui sont p rodigu és.
Il com m ence sa procédure par la voie de la plainte ; mais rien de plus irré
gulier que sa procédure.------( 1 ) L o b r u it p u b l i c ,
-
-
à L y o n , a n n o n c e q uo
p o u r d o n n e r à c e t engagement u n p e u
m é t a p h y s i q u e , n n c p ré cis io n g é o m é t r i q u e , p a lp able, ¿0,000 fra n c s ont (¡té p r o m is , en
ca s <te succès , a u x c o lla b o r a t e u rs de Dugour ; mais i l faut
m é rita peut-û tre co n firm atio n .
se niciier d u n
b ru it q ui
„
Ni
�( 9 )
N i la L o i de 1 7 9 3 , ni le C od e du 3 Brumaire •, n ’avoient mis les contrefaçons
au rang des délits ; Dumonteix poursuit comme un délit celle q u ’il m'im pute.
L a Loi du 25 Prairial an 3 , attribue aux Commissaires de p o lic e , exclusive
m ent aux Juges de p a ix , les visites et proeès-verbaux ; Dum onteix les attri
bue aux Juges de p a ix , exclusivement aux Commissaires de police.
E n fin , la premiere condition de sa réclam ation étoit au moins de justifier
q u ’il étoit propriétaire ; le règlem ent de 177 7 lui en faisoit une obligation abso
lu e ; Dumonteix ne justifie d ’aucune p ro p riété, et ne laisse pas de poursuivre.
Sa p lain te, ouvrage monstrueux du mépris de toutes les formes et de tous
les principes , ne laisse pas d ’être reçue ; il trouve un Juge q u i, sur la parole
d ’un inconnu , entreprend au hasard , une procédure criminelle , des descentes
de lieux, des violations de d om icile, des saisies ; niais pour m ettre sa responsabiiité à couvert , il déclare q u ’il agit aux périls et risques de l’inconnu ( r ) .
L a plainte portoit à la fois sur une prétendue contrefaçon littérale, qui n ’est
autre chose que mon édition , et sur une contrefaçon abrégée , en deux
volum es, so rtie, à c e q u i l p aroît, des presses de Geneve, mais attribuée
par Jeudy , à un Libraire de Nîmes.
Jeudy feignit de diriger principalem ent sa plainte contre les citoyens Cormon
e t B la n c , nouveaux Libraires à Lyon ; mais Cormon et Blanc n ’étoient dans Je
fait que deux collaborateurs de l’entreprise, et les premiers échelons d ’une intri
gue qui devoit remonter plus haut.
L e Juge et Jeudy se transportent donc ch ez Cormon et B la n c , où ils croient
amicalement attendus : ce u x -c i, sans s’informer si Jeudy étoit le vrai proprié
taire de l’ouvrage prétendu contrefait, et s’il étoit porteur de quelque titre
s empressent de lui montrer leur coriespondance et leurs livres , et m ettent
leur magasin à sa discrétion : d un côté , ils représentent 56 exem plaires du
livre abrégé , e t , dans l’excès de leur dévouem ent, ils déclarent en posséder
60 , quoique le fait fût faux ; leur ven d eu r, d isen t-ils, est le citoyen G a u d e,
libraire à Nîmes ; de 1autre , ils déclarent avoir vendu au citoyen M erlin , de
P a n s , LE i 3 F l o r é a l d e r n i e r , un exem plaire en huit volumes ; e t , cet
ex em p la ire, ils disent l ’avoir acheté de moi. Mais c ’est ici que la com
plicité se trah it; ils placent ce prétendu achat à la date du i 3 Prairial dernier ;
et c ’est un livre acheté le i 3 Prairial dernier, qu’ils prétendent avoir envoyé
le i 3 Floréal précédent !
C 1 ) L a r r ê t du Conseil du
Un faux a depuis redressé cette méprise.
3o
A o û t 1 7 7 7 , art. 4 , p e r m e t t a i t les vis ite s a u x p é r i l s et
r i s q u e s d u réclam an t ; m a i s il e xigooit rju avant de procéder à aucune v isite , il exhibât se#
titres. U n e d is p o s it io n si sim p le e t
si
sage,
n ’a u ro it pas d û ûtre m é c o n n u e .
B
�(
IO
)
Jeudy fit donc saisir , pour la forme , les 5 6 exemplaires de l ’abrégé j mais
en ennem i plein de courtoisie, il les laissa à la garde des accusés.
A rm é de cette indication si grossièrement concertée , Jeudy entraîne le Juge
de Paix chez m o i, qui étois a b sen t; il fouille et visite mes atteliers , mes
magasins, mes d ép ô ts, ne trouve rien ou feint de ne rien tro u ver, suspend
tout-à-coup ses recherches , déclare qu’il reviendra le lendem ain, et invite mon
Prote de me faire avertir.
Je parus le lendemain : je m ’élevai avec force contre la violation de mon
d o m icile , contre l’indiscrette inquisition d ’un inconnu, sans qualité ; et dé
daignant d’entrer dans aucune explication avec cet homm e sur mon édition ,
je req u is, au nom de la L o i, le Juge de Paix et lui de se retirer.
Dumonieix , ne se défendit que par de pitoyables défaites : alliant l ’absur
dité au paradoxe , il soutint hardiment q u ’il n ’étoit pas nécessaire d ’être héri
tier ou cessionnaire de l ’Auteur pour obtenir la propriété d ’un livre ; q u ’il
s u f f i s o i t de l’avoir im p rim e , et que Cuchet qui l’avoit im prim é, ayant vendu
son fonds à Jeudy , celui-ci en étoit à son tour devenu propriétaire ; c ’étoit
convenir fort nettem ent qu’il n ’a point de cession de l ’Auteur : il ajouta que
Rosier n ’ayant pas été le seul Auteur du Cours d’Agriculture , on ne pouvoit
exiger une cession émanée de lui : autre paradoxe qui multiplioit la difficulté
sans l’affoiblir ; il prétendit enfin que je n ’avois pas le droit de lui contester
cette propriété ; com m e si un citoye n ’avoit pas le droit d ’examiner les
qualités que s’arroge l ’intrigant qui viole son dom icile, qui vient porter dans
le secret de ses affaires un regard indiscret , et qui se livre à des poursuites.
Je relevai avec force l ’inconvenance et l’absurdité des défenses du citoyen
Jeudy-, et le Juge de Paix cédant à l ’évidence , reconnut , quoiqu un peu
tard , que Jeudy ne justifiant pas d ’une cession médiate ou immediate de
l ’A u teu r, n ’avoit pas le droit de requérir en l ’état de plus amples rech erches,
ni la continuation, sous aucun rapport, de sa procédure.
Dans celte position, ce Juge de Paix « considérant q u ’il n ’a procédé hier
» à une visite et r e c h e r c h e ................. que du consentem ent des personnes qui
y représentoient le citoyen L,eroy ; q u ’il s’établit aujourd'hui une difficulté
y entre les parties sur les qualités du citoyen
J eu d y -
O u gour , et sur la conti
» nuation de ses opérations , ordonne q u ’il en sera référé à l’Accusateur
y public. »
L e 12 T h e rm id o r, l ’Accusateur p u b lic , ne se croyant point appelé à connoître de simples questions de co m p éten ce, renvoya sa procédure au Juge dePaix , « pour par lui s ’assurer si les parties ont qualités suffisantes, ou les
» adresser au Directeur du Jury. »
�(
tl
)
■L e Juge de Paix ne pouvant penser q u ’une décision sur des questions trèsp eu criminelles de qualités ou de com pétence , appartînt à la Police judiciaire ,
« et considérant que les motifs qui l ’avoient déterminé à en référer....... sub
» sistoient encore , ordonna que le tout seroit sans délai transmis au Directeur
» du Jury , pour être par lui statué ce qu’il appartiendroit. »
L e Directeur du Jury pensa que le Tribunal C ivil pouvoit seul statuer
sur les qualités co n testées, et r e n v o y a , le 26 T h erm id o r, la question à
ce Tribunal.
Son O r d o n n a n c e , m odele de sagesse , de logique et de raison , mérite
d ’être connue.
« Considérant, y est-il d i t , qu’il résulte des procès-verbaux une contestation
» de q ualité, sur la cession et acquisition de la propriété et fonds de l’O u vrage.....
» Q ue la Loi du 19 Juillet 1 7 9 3 , n ’ouvre l ’action de dommages et intérêts,
» pour cause de contrefaction d ’un Ouvrage littéraire , q u ’au profit de l’A u teu r,
» ses héritiers ou cessionnaires ;
» Q ue le citoyen Leroy ne reconnoît point dans le citoyen Dugour la qua
» licé d ’Auteur, héritier ou cessionnaire du Cours complet d’Agriculture , publié
» sous le nom de ieu Abbé R osier, et que les titres produits par le mandataire du
y citoyen Dugour n’émanent point dudit Rosier ou de ses Collaborateurs ;
» Q u e la premiere condition d ’une poursuite crim inelle, est que le plaignant
» soit formellement intéressé dans le délit dont il poursuit la réparation ;
» Q u e la décision de cette question...........est une affaire purem ent civile ,
» et ne peut ni ne doit être jugée par les formes crim inelles ;
» Ordonne que , sans rien préjudicier au fond , les Parties sont renvoyées
» pardevant le Tribunal Civil du Départem ent du R h ô n e , qui ordonnera ce
y qu’il croira convenable ; sauf à être ensuite statué sur la nature de l ’action
» principale ce qu’il appartiendra. »
D après ce re n v o i, Dugour fut cite en conciliation au domicile par lui élu ;
et sur les chicanes qu il éleva, au sujet de ce d o m icile, il a été depuis c it é , soit
en son domicile à Paris, soit en personne à L yon.
U ne discussion franche et publique n ’étoit pas ce qui convenoit à Dugour ;
c ’étoit au contraire ce q u ’il redoutoit le plus : il n ’a point la qualité voulue par
la L o i , de cessionnaire de R og er ; que pouvoit-il se promettre d ’une pareille
épreuve ? Il s ’appliqua donc à fuir la lu m iere, et à redoubler de manœuvres et
d'intrigues pour surprendre à l'aulorité quelques succès éph ém eres, et arracher
«les sacrifices à ma lassitude.
Tandis qu’il révoque toutes les élections de domicile q u ’il a faites , et qu’il
B 2
�C
12
)
m ’envoie défendre a Paris , au procès q u ’il m ’a intenté à Lyon , il a l ’audace
de me dénoncer au Ministre de la Justice , comme un séditieux qui avoit
forcé un Juge à interrompre , par la crainte , une procédure légale , et
qui ne s etoir montré à lui q u ’entouré de quatre Conseils et d ’une troupe
d ’ouvriers menaçans ; t à force de calomnies et d ’intrigues , il persuada au
C h e f de la Justice que l ’emploi de la force armée étoit seul capable d ’en
imposer à ma tém érité , et il obtint du Ministre trompé , une lettre qui contenoit l ’ordre de protéger , s’il en étoit besoin , ses opérations par la force.
R ien de plus illusoire en apparence, que de faire protéger par la fo rce, une
procédure qui n'avoit point été troublée : mais cette intervention de la
puissance ministérielle sembloit préjuger la cause , et répandre avec la même
mesure toute la protection du G ouvernem ent sur mon adversaire , toute
sa défaveur sur moi ; et c etoit là le but secret que s’étoit habilement proposé
Dugour ; dès ce moment , je vis toutes les loix violées ou impuissantes dans la
suite de la p rocédure, toutes les formes foulées aux pieds ; et je dois, sans
d o u te , à l ’abus révoltant qu’on en à fait, le vol exécuté sur mes magasins à
main armée ; car les formes dérisoires dont on a accompagné cet acte de
v io le n ce , n ’en ont pas changé la nature.— Mais avant d ’entrer dans le détail
de ces faits , remontons plus haut.
Je n ’avois pas eu besoin d ’attendre la réponse qu ’on attribue au citoyen
M inistre ,
pour
pénétrer les projets que nourrissoit Jeudy : les menaces
sourdes que cet homme faisoit circu ler, les espérances sinistres qu’il annonçoit,
l ’espece d ’hommes dont il s’entouroit, l ’espionnage odieux dont il environnoit
mon dom icile , mes magasins et ma personne ; les préventions fâcheuses que je
rencontrois sur tous mes p a s, lorsque voulant me prémunir contre l ’audace d ’un
adversaire sans fr e in , j ’implorois la protection des. Autorités ; e n fin , une
foule d ’autres circonstances inquiétantes m ’avertirent q u ’autant je devois être
rassuré sur les décisions qu’alloit rendre la Justice , autant je devois être
alarmé pour ma propriété et ma fortune m enacées d ’être envahies par la violence.
Je jugeai alors convenable de transporter mon édition dans un dépôt inconnu
à mon adversaire ; c ’est ce qui fut exécuté le 14 Therm idor d ern ier, depuis
trois heures du matin , jusqu’à cinq.
L e s espions de Jeudy cherchèrent d ’abord à troubler le déplacem ent en
donnant l’alarme aux voisins , en le dénonçant au poste militaire , comme un
vol nocturne ; mais il ne fut pas difficile d ’édifier la garde et de rassurer les
voisins: malgré les agens de D u gou r, le déplacement fut consommé.
Le
Général , Com m andant de la P la ce , trompé par les machinations
�C 13 )
de DugouT' , envoya des hommes armés pour me traduire' devant lui ;
mon fre re , que l ’on trouva se u l, fut mis en état d ’arrestation pendant plu
sieurs heures ; mais 1 interrogatoire qu’il subit décela sans peine l'odieux instiga
teur de cet acte arbitraire : le G énéral éclairé par la candeur des réponses
de m o n fre re , et par les sages représentations de plusieurs C itoyens recommandables , le rendit avec em pressem ent, à la liberté , et
^
•
> i t •
ii-oiuud , sans
hesiter , la contestation a Ja Justice.
C e fut alors qu arriva la lettre attribuée au Ministre de la Justice : elle porta à
son comble la tém érité.de Dugour qui s’annonça comme le parent et le pro
tégé du- M in istre, et conquit à sa cause , comme il l ’a voit p r é v u , la
tourbe servile des instrumens dont il avoit besoin : le Juge de Paix ’ luim ein e, intimide par les inculpations q u ’on lui avoit faites , oublia ce q u elle s
avoient de calomnieux et de flétrissant : et sans s’arrêter ni aux décisions
q u il avoit portées , ni aux motifs toujours subsistans qui les lui avoient
d ictée s, il se livra à une marche rétrograde.
L e i 3 Früctidor , il reçoit une addition de plainte du citoyen Jeudy , de ce
même homme qui , suivant les jugem ens rendus , ne justifioit point de la
qualité sur laquelle il fondoit sa plainte ; de ce même homm e q u ’il avoit luim êm e renvoyé aux Autorités compétentes , pour statuer sur ce préliminaire
si i m p o r t a n t : sans aucune opposition envers ces jugem ens, sans que le Tribunal
C ivil eût prononcé sur la question préjudicielle qui lui étoit soumise , il se
réforme lui-m êm e , réveille une procédure légalem ent suspendue , et reprend
le caractere de Juge dont il s ’étoit dépouillé , e t qu’il n ’avoit m êm e jamais eu
Et de quoi se plaint Jeudy dans cette singulière procédure ? O n ne croiroit
jamais à cet excès de d élire, si l ’on n ’en avoit la preuve sous les veux • il J
plaint de ce qu'un n é g o cia « a disposé de sa marchandise ; de c e 'q u ’rni »roi
prietaire . use de sa p ropn e.e ; en un mot> de CB
j.,,
^
magasin de L .b ra .n e ,» . m app arn em , des ballots de livres qui m appartenoienc.
Sur Cette nouvelle plainte , des témoins furpnr
T
.
, ,
, \
un s lurent appelés ; ie menaçai le J u g e ,
par des actes , de le prendre a partie ; il sentit que j ’v serois fo n d é, et il
changea de marche : abusant avec audace d ’une loi qui a i t pas destinée à favo
riser des intrigues et des machinations entre les citoyen s, il se fait amener
plusieurs Préposés des Douanes qui requierent son m in istère pour rechercher
des marchandises anglaises , et il feint de rechercher des marchandises anglaises :
d s entoure avec fracas de la force armée ; alors, selon le pieux Dugour , la
r°vidence ,pa.r un de ces hasards quelle ménage quelquefois pour confondre le crime,
conduisit le Juge de P a ix dans mon dépôt ; par un autre hasard , Dugour lui-
�( 14 )
m êm e survint dans le moment, conduit comme par la main par cette Providence
protectrice ; la saisie fu t fa ite et les scellés apposés : ensuite , après avoir ingé
nieusement fait déclarer par le propriétaire de la maison, le c ito y e n Bourget, que
si on n'eût pas découvert le dépôt , il ne l ’auroit pas déclaré y on le m et hors de
chez lu i, pour supposer q u ’il s’est évadé ; puis , attendu que par son évasion son
domicile est abandonné, on y établit un poste nombreux composé de gendarmes et
de volontaires qui l’em pêchent de rentrer; puis , quatre jours après , attendu que
le propriétaire, qu’on n ’a pas laissé rentrer chez l u i , a , dit-on , abandonné sa
maison , on fait faire avec pom pe , le transport de toute cette marchandise dans
les bàtimens des ci-devant Jacobins de rue Saint-Dominique , et on la .confie à
la garde d ’un Colporteur de journaux, nommé Carret.
Q uelle procédure ! . . . . Et les vains et grossiers détours qu ’on a em ployés
pour en pallier l ’illégalité et l’abus , peuvent-ils servir à autre chose qu ’à en
redoubler le scandale ! L e Juge ne s’étoit-il pas dépouillé de toute jurisdiction ?
N ’avoit-il pas décidé deux fo is , par des sentences irrévocables , que Jeudy ne
justifioit point de la qualité q u ’il s’arrogeoit ? T an t que cette question de qua
lité demeuroit indécise , pouvoit-il agir comme si elle eut été décid ée, et décidée
à l’avantage de Jeudy ? Et qu ’importent les puériles déguisemens qui ont
livré ma fortune
à mes persécuteurs ? quand
ces déguisemens ,
quand
cet abus criminel d ’une loi purement politique pourroîent être tolérés, une saisie
que tout défendoit d ’entreprendre , depuis la décision du 8 Therm idor , est
elle moins repréhensible pour avoir été faite après ? E t quelle saisie encore ?
C ’est moins une saisie qu’une confiscation, puisque le séquestre choisi est un
homme sans fortune et sans responsabilité.
L a translation de ce d épôt, dans les mains d ’un séquestre judiciaire et sol
vable , est le sujet d ’une contestation incidente entre Dugour et moi.
. L a restitution définitive de ma propriété et la cassation de toute la procé
dure avec dommnges-intérêts, est l’objet de la contestation principale.
Et ces deux contestations sont soumises au Tribunal civil de L yo n , sur les
citations que j ’ai fait donner à Dugour.
C e D u g o u r, qui n ’a cessé de décliner la juridiction du Tribunal civil, et qui
menacoit de dénoncer ce Tribunal même , au Tribunal de Cassation , comme
incom pétent , pour prononcer sur ce qu’il appelle un vol qualifié , vient
enfin d ’abandonner tout cet échafaudage de menaces , d ’injures et de chi
canes , pour s’en tenir à l ’action civile ; il m ’a appelé en conciliation, tandis
qu’il eût suffi de conclure à l ’audience sur les citations qu’il a lui-même reçues,
�(
Mais par
une
faire achever
d ’abandonner.
blique dont il
si bien servi ,
inconséquence fort
*5
)
singulière , il a
affecté
denuii
dfi
par le citoyen P a ren .k ou x, la p m cédure crim inelle qu'il' v’enoit
Il paro.t q u .l voudroit retarder une discussion franche et pu
conno.t tout le danger , et que cette providence occulte qui l a
craint autant que lui la lumiere.
"
T e l est l ’état de la contestation.
Elle ne présente que les deux questions suivantes :
Suis-je un contrefacteur ?
Dugour auroit-il le droit de m e poursuivre ^
POU R répondre à la prem iere question , il suffit de rappeler les circons
tances dans lesquelles j ’ai imprimé.
Le Cours d Agriculture, annoncé en 1780 , commença à paroître en J 7 8 1 ,
sous le nom de 1 Auteur , sans nom d'im prim eur
L e frontispice porte : Avec permission et privilège; mais sans aucune publi
cation de permission , de privilege , de cessio n , d ’enregistrement , etc.
En 1789 , les
huit
premiers volumes avoient
été p u b l ié s ;
mais ils n ’a
voient encore été accom pagnés d ’aucune publication de c e s sio n , de p rivi
lè g e , de permission , d e censure , d ’enregistrem ent , ni d'aucune des f o r
malités alors voulues par les L o ix .
C e t ouvrage ne fut donc jamais soustrait par l'A uteu r à l’industrie corn
m u n e ; dès le moment de son apparition , il fit partie du dom aine dg n
nrimerie ; 1 A u te u r imita en cela les Voltaire
1p«
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les Mably , les Montesquieu , et tous les Sav’an!
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etoit donc permis de réimprimer les
accordé de prMUges.
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a tous Impnm eurs-Libraires
il aura été arrnrA ' j
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ete accorde des privilèges : »
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Et il ne suffisoit pas qu'un privilège eût M obtenu : il fa llo it, i peine Je
n u lh e , que ce pnvilege , et la permission qui | .,to it
et ,a rceasure
qm avon précédé la permiss,on , Tut publié a ïe c |„ |ivre qui eu étoit l'o b je t,
et sur-tout enregistre dans 1 « trois mois en la cham bre svn<l.caie.
C ette publ,cation n'ayant jamais é té faite , pOUÏrag(, e st-Jeint!Ur(;
M
P » t h ,u e , et sans etre m f c r b m m un vot,u r , je pus réim primer R n m , c t
�(
1«
)
répandre son utile compilation, comme j ’aurois pu réimprimer R aynaî, Voltaire,
Rousseau ,
et répandre leur philosophie. L ’Auteur , en
dédaignant d ’user
d ’aucun privilège , plaçoit son livre sous l ’action du droit commun ,
et il
n ’auroit pu se plaindre d ’être réimprimé : Volenti non. f it injuria.
J ’ignore si l’Auteur fit imprimer pour son co m p te , ou si Cuchet acheta de
lui l’utile faveur d ’être le prem ier à publier son ouvrage ; mais je
sais que l ’entrepreneur, quel qu’il soit , a quatruplé les fonds qu'il y a mis :
Dugour lui-même n ’a porté qu ’à 200,000 francs les frais d ’impression : or , tout
le m onde sait que l’édition est épuisée ; que la vente a surpassé 10,000exemplaires , et a produit 7 à 800,000 francs de bénéfice ; ainsi lorsque
D u g o u r, pour avoir acheté au plus vil prix une action litigieuse, s’écrie que je
lui ai volé son ouvrage, une propriété qui lui a coûté 200,000 francs à établir,
cela fait vraiment pitié.
Q u oi qu ’il en so it, il demeure certain que si j ’avois jugé à propos de réim
prim er alors le Cours d‘Agriculture, j ’en aurois eu le droit incontestable.
Mais les circonstances qui m ’y portèrent dans la suite , étoient bien plus
favorables.
L ’Assem blée constituante venoit d ’abolir en 1789 les maîtrises et jurandes ,
les privilèges de profession , les privilèges honorifiques , tous les privilèges ;
la presse étoit déclarée libre ; tous les genres de com m erce et d ’industrie
venoient d ’être délivrés des entraves qui en avoient long-temps comprimé
l ’essor. L a jurisprudence la plus solemnelle consacroit par des décisions multi
pliées, l ’abolition particulière des privilèges littéraires ;e t j ’avois à cette epoque,
dans mes atteliers , trente peres de famille sans travail et sans pain.
J ’aurois donc pu alors user sans crime de la faculté que me donnoient les
L o ix nouvelles ; et choisissant, selon mon u sa g e , paim i les livres utiles ,
l ’un des plus utiles , j ’aurois pu réimprimer , sous la sauve-garde des L oix ,
le Cours d'Agriculture.
Mais je fis plus : je pris l ’attache de l ’Auteur lui-m êm e , qui alors demeuroit à Lyon ; je réimprimai , de son aveu , et sous ses auspices , un exem
plaire que lui-même me fourn it, enrichi de notes et de corrections de sa
m ain ; je conciliai ainsi avec les devoirs de la plus scrupuleuse délicatesse , le
libre usage des facultés que la Loi me garantissoit.
T ous ceux qui ont connu l ’A b bé R o iie r , rendent justice à sa probité aus
tere
�( 17 )
tere (<)• S ’il eût jamais cédé a personne le droit e x clu sif d ’imprimer son
o u vrage, ou du moins s il eut pensé que ce droit e x clu sif n ’étoit pas a b o li, cet
estimable Ecrivain, eut lui-meme blâme mon édition , et n ’y eût certainem ent
pris aucune part.
C ’est ainsi que mon édition s’est trouvée plus parfaite que les autres : mais
je n ’imprimai que les huit prem iers volumes , les seuls qui eussent paru
avant 1793 ; je ne touchai point au 9.me, qui a été publié a p rè s, spus une
législation toute différente ; et c ’est une calamité , que l ’Auteur n ’ait pu le
re v o ir, comme les autres ; il n ’y auroit pas laissé subsister les erreurs meurtrieres échappées à l ’ignorance ou à la légéreté de l ’Editeur , et qui font de
cet ouvrage intéressant, l ’ouvrage le plus dangereux (2).
Com bien n ’est-il pas odieux , après c e la , de voir un homm e totalem ent
étranger à la propriété du m anuscrit, un simple acheteur d ’action, traiter d 'in
fa n ts brigandage, une édition que toute l’imprimerie avoit droit d ’entreprendre ,
qui étoit également permise et par les L o ix qui précédoient la révolu tio n , et
par celles qui , en abolissant les privilèges , honorèrent ses plus beaux jours ;
une édition
enfin , que l ’Auteur avoit avouée ?
C e privilège si solemnellement détruit , on chercha à le renouveler en
1791 , sous des formes moins arbitraires, et plus séveres ; mais ce projet
échoua.
‘ ( 1 ) U n do ses a m i s , h o m m e - d e - l e t t r e s c o m m e l u i , affligé de v o i r a tt a q u e r p a r Dugour
Ja m é m o ir e de c e L it t é r a t e u r e stim a b le , m'a é c r i t à c c s u j e t u n e L e t t r e d o n t je vais faire
c o n n o ître q u e lq u e s fra gm e ns.
« L a L e t t r e q u e j e v ie n s de r e c e v o i r d e vo u s , m e je t t e d a n s u n é t o n n e m e n t b i e n g r a n d ,
y C e r t e s , Rosier é to it de ma c o n n o i s s a n c e in tim e j n o u s a vo n s
y c o u r i o n s l ’u n e t
été liés p a r c e q u e n o u s
l ’autre la m ô m e c a r r i c r e ; j ’attesterai t o u j o u r s ,
y to u jo u rs t r è s - l o u a b l e ,
q u e dans l’in te n t io n
de p ro p a g e r p a r m i les h o m m e s les, c o n n o i s s a n c e s q u ’il a v o it
y a c q u is e s dans l'H isto ire n a t u r e l l e cl; dans l ’A g r i c u l t u r e , i l vous a remis ,
» moins avant sa m ort,
un exemplaire
corrigé et augmenté de sa main ,
de
trois arts au
so n
excellen t
» o u v r a g e in titu lé : Cours complet ¿'Agriculture, e tc . q u ’il v o u s le r e m it pour être réimprimé ;
» et la p ro u v e q ue j ’en ai , est q u e je 1 ai v u e n corriger les épreuves chei vous , quelquefois
» même chej m o i........... etc. , etc. »
(3 )
J e c h o is is un o p re u v e de m o n a s s e r t i o n , a u m o t Ver solitaire , pag. b 6 y. L ’A u t e u r
y p a r o ît p re sc rire p o u r re m e d e , un bol fa it avec d ix grains de panacée mercnrielle sublimee ,
q u a t o r ze
fo is autant de scamonée d'Alep , c e q u i fait 140 grain s s c a m o n é e . L e s ge n s d e
l ’art a s s u r e n t q u e la dose de s c a m o n é e
e st do 4 g rain s , j u s q u ’à 24 au p l u s : e n sorte
q u e la J o s é c o n s e i l l é e d e 140 g r a in s tuero it i n fa i l l i b l e m e n t le m a l a d e .
C
�(
i8
)
C e ne fut que le 19 Juillet 1 7 9 3 , qu’il reprit naissance, pour un temps limité ;
mais le rapporteur convint q u ’il n ’existoit plus de loix sur cette matiere , et il
en faisoil solemnellement la remarque : « S i quelque c h o s e , disoit-il , doit
» é to n n e r, c ’est qu’il ait fallu reconnoitre cette p ro p riété, assurer son libre
» exercice par une loi positive. »
Jusqu’alors cette propriété ne se trouvoit donc reconnue par aucune loi :
par conséquent, tous les citoyens jouissoient de la liberté d ’exercer leur industrie
par l ’impression de tous les écrits alors publics ; et les Tribunaux consacrèrent par
leur jurisprudence cette législation.
A in s i, sous quelque point de vue qu’on envisage mon édition , toutes les
circonstances se réunissent pour en consacrer la légitim ité. Elle a été faite sous
les y e u x , sur les notes et par les soir.s de l’Auteur lui-même , dans le temps
de l’abolition de tous les p riv ilè g e s, et pour un O uvrage qui n ’a jamais paru
revêtu d ’aucun privilège : je suis donc irréprochable.
'
O r , ce qui fut licite sous la législation et la jurisprudence de 178 9 vdeviendroit-il
crim in el, parce que la jurisprudence et la législation auroient changé en 1793 ?
« C réer des lo ix , ( disoit un Ecrivain dont Jeudy respectera peut-être le
*» su ffra g e ,) créer des lois, et juger d ’après elles les actions antérieures à ces
» loix, est en vérité une chose bien étrange, et dont on n ’a jamais eu d ’exem ple.»
C e t Ecrivain est Dugour lui - même ( 1 ) ,
et il avoit raison : tout effet
Tétroactif donné à la lo i , est un crime : c ’est une vérité proclamée par la décla
ration des Droits , e t plus encore par l ’éternelle justice. Et en effet , quelle
injustice n ’y auroit-il pas à. juger par la loi du 19 Juillet 1793 , les faits qui
l ’ont précédée ?
Q u oi ! sur la foi des loix subsistantes qui ont aboli tous les privilèges , sur 1*
foi de la Jurisprudence nationale, qui regardoit com m e abolies jusqu’aux obliga
tions contractées pour achats de privilèges littéraires, j ’em ploie ma fortune dans
line entreprise que des motifs respectables m ’inspiroient , et que les lois e t la
jurisprudence m e perm ettoient ; et parce que dans la suite la loi auroit changé ,
il faudroit punir com m e un crim e ce que j ’aurois fait à l’ombre tutélaire des loix
p récédentes ! In n ocen t, le 18 Juillet, je n ’aurois été , le 19 , q u ’un voleur I C ela
est révoltant.
( 1 ) Mémoire justificatif de Louis XVI.
•
�( 19 )
Il est impossible de juger par une loi de 1793 , une édition de 1792,011 de
1790 ; toute la procédure q u ’on a fondée sur cette loi , n ’offre qu’une
longue chaîne de nullités et de vexations; la prétendue contrefaçon est vraiment
''imaginaire, chimérique, et l ’aggression du citoyen Jeudy est sans fondem ent.
cra
C e qui est plus étrange , c ’est que le citoyen Dugour ne représente point 2,f
Rosier : l ’action q u ’il ose intenter sous le nom de ce savant , n ’a pas m êm e de
Du
prétexte.
■
dr0lt
Il n ’est en e f fe t , pas prouvé que Rosier ait jamais raité avec personne de la de mon
propriété de son manuscrit. D ’un côté, aucune cession enregistrée en la cham bre
syndicale , n ’a été p u b liée, com m e l’exigeoient les anciens réglemens ; d ’autre
p art , Dugour , vivem ent interpelé sur ce p o in t, n’a jamais produit aucun
îit r e , et s’est livre aux contradictions les plus grossieres.
D ’a b o rd , il a soutenu dans la p ro céd u re, que « sa propriété est établie par
y l ’acte de cession qui lui a été consentie par Cuchet. » C e t achat d ’action peut
en effet prouver que Dugour est cessionnaire de Cuchet ; mais il ne prouvé
pas qu e Cuchet soit cessionnaire de Rosier.
Il a prétendu ensuite que « sa propriété est établie par les reconnoissances
» qui ont été délivrées par le conservateur de la bibliothèque nationale , en
* exécution de la loi du 19 Juillet 1798 » . = Je conçois qu e Dugour ne
s’accom m oderoit pas mal d ’un m oyen si facile de conquête : s’il suffisoit de
déposer des livres à la bibliothèque nationale, pour en acquérir la propriété ,
les Dugour e t compagnie y auroient bientôt déposé toute la Librairie de là
R épublique : ce seroit aussi un m oyen par trop expéditif : mais la L oi plus
sévere exige des titres plus solides. Elle ne reconn ofc de propriété que dans
les Auteurs, leurs héritiers ou cessionnaires; c ’est la disposition littérale des art. 1 ,
a et ,7 . L e dépôt q u e lle prescrit par l’art. 6 à YA u teu r, a pour o b je t, com m e
autrefois la publication du p rivilège, de faire, connoitreles droits et les prétentions
de 1 Auteur ; c est à cette publicité q u e lle attache essentiellem ent la faculté de
poursuivre'les contrefacteurs : a i n s i l e dépôt est une con dition , mais non
pas une preuve de la propriété.
D es objections si pressantes ont de nouveau fait changer de langage à Dugour :
il déclare positivement qu’il n’exjste aucune cession de R e lier à Cuckft ; m?is
abjurant tous ses principes sur la propriété des Auteurs , sur les droits sacrés du
genie , il entreprend d établir qu il suffit d ’avoir imprimé un L ivre , pour dé
pouiller 1 Auteur de sa propriété. V oici les termes dans lesquels il énonce
C 2
'
�( 2° )
cette doctrine vraiment curieuse ( i ) : « Il n ’a poini à justifier, ni p a rle r, dit-il,
v d ’une cession faite par défunt Rosier au citoyen Cuchet ; l’ouvrage dépose
» par lui-même qu ’il y a eu plusieurs rédacteurs, et que défunt Rosier étoit
» seulement du nombre ; que l’ouvrage ayant été formé et émis par le citoyen
» C u ch e t, qui est devenu propriétaire de la matiere qui lui a été délivrée par
» ses différens rédacteurs , au moment où ils la lui ont remise , moyennant
» les honoraires par eux retirés , il n ’y a point d ’autre preuve à demander de sa
» propriété, que le f a it qu’il est éditeur et propriétaire. »
A in s i, voilà un aveu bien positif que Rosier n ’a point cédé la propriété du
manuscrit.
Mais suffit-il d ’avoir imprimé un L ivre , pour en être propriétaire? Suffitil d ’alléguer q u ’on a p ayé la matiere , en la r e c e v a n t, pour dépouiller im pu
ném ent les A u te u rs, leurs h éritiers, leurs cessionnaires , et tous les autres
éditeurs ? Q u el révoltant paradoxe ! Q uoi ! ce n ’est plus à l’acheteur à prouver
la vente , c ’ est au propriétaire de prouver q u ’il n ’a pas vendu ! Q uoi ! une
im p rim erie, sem blable à 1antre de C a c u s , dévoreroit impunément e t les
Auteurs et les manuscrits qui y seroient présentés ! Et celui qui tient ce lan
gage , encore plus honteux qu’atroce , ose vanter la propriété du g é n ie , ose
s’appitoyer sur le sort des Savans ! L ’impudence de l ’hypocrisie ne le cede ici
q u ’à celle de la dérision ou à la stupidité. L e prem ier qui imprima V oltaire,
Rousseau, N ew ton , Montesquieu , Condillac , auroit donc été le propriétaire
exclusif de leurs chefs-d’œuvre ? Q u el délire !
H eureusem ent la L oi de 1793 doit le jour à d ’autres principes : elle né
reconnoît de propriété , comme on l ’a v u , que dans YAuteur , ses héritiers ou
cessionnaires ; elle n ’en attribue aucune à l’imprimeur. Q u e Rosier , com m e
rédacteur , ait été le seul propriétaire du m an u scrit, ou q u ’il ait été seulement
du nombre des rédacteurs , peu im porte : dans le prem ier cas , on doit pro
duire sa cession ; dans l ’autre , on doit produire et la sienne et celles de tous
les collaborateurs ; dans to u s , on doit en produire et l’enregistrement dans le
tem ps p r e s c r it, et la publication : sans ces conditions im portantes, toutes les
prétentions de Dugour ne sont que des chimeres.
Dugour , oubliant le langage q u ’il avoit tenu dans sa procédure , ou en
ayant senti l ’in con ven an ce, a changé pour la quatrièm e fois de systèm e, tant son
embarras est grand : il nous représente C uchet, dans son Mémoire , com m e
( 1 ) V o y . la p r o c c d u r o d e v a n t PartntJ\pus, s u s q c c d u 8 T h c n n i d o r ,
�( 21 )
’« propriétaire exclu sif du Cours ¿'A griculture , en vertu d’un acte en form e , de
» l'Abbé R o s ie r , rawzna tel par un traité qu’il fit avec les héritiers de ce
» c ito y e n , lorsqu’il fut e n vo yé , en Ventôse de l ’an a , par le Com ité de
» sûreté générale , pour recueillir à L yo n le reste des manuscrits de l ’ouvrage
» qui lui appartenoit. »
Je ne sais pas trop de quelle valeur seroit un traité passé par des héritiers
peu instruits , avec un envoyé du Comité de sûreté générale, à la vue des écha
fauds et des ruines qui couvroient alors Lyon. Mais comme on n ’en pro
duit aucun , et que ce traité , s’il existe , seroit postérieur à mon édition ,
je n ’ai aucun interet d entrer dans une discussion sur ce point.
O n aanonce aujourd hui cet acte , sous la date du 27 Mai 1788; on ajoute
q u ’il a été enregistré le 22 D écem bre 1 7 8 6 ,
20 Juin 1 781 .
et précédé d ’un privilège du
.
‘
Mais ces titre s, s ils existent en e f f e t , ne seront pas d ’un grand secours pour
j
mon adversaire. Des qu il y avoit une cession de privilège , elle n ’a pu survivre
î
à l ’Auteur ; le même instant qui a marqué la mort de l ’u n , a opéré la des-
:
truction de 1 autre ; et suivant la Législation qui régissoit alors les transactions
de cette espece , tous les droits du Cessionnaire ont fini avec la vie de
l ’Auteur.
Q u o iq u ’il en soit , je demande pourquoi cet acte en form e , de l ’Abbé R osier,
de cet Auteur à q u i, d ’un trait de p lu m e , Dugour enlevoit nagueres sa pro
priété et sa gloire littéraire , n ’est point produit ? Depuis six mois que Dugour
me p oursuit, et que je le récla m e, pourquoi ce titre si im portant, si nécessaire
n ’a-t-il point vu le jour? Pourquoi e n fin , toutes ces variations dans le lançage’
de Dugour \ il faut en convenir ; toutes ces contradictions ne sont pas un signe
bien frappant de ses droits ; elles trahissent bien plutôt la mauvaise foi d ’un
téméraire acheteur de procès ( 1 ).
Si Dugour avoit eu le moindre droit , si le moindre espoir de succès se fût
Nulliü de
m êlé à ses poursuites , se seroit-il fait un jeu indécent de violer toutes les «¿«"¿«D uj
formes et de braver tous les principes ?
D e quel droit a-t-il institué cette affaire au Crim inel ?
( 1 ) L ’O u v r a g e de R o p er n 'e s t e n r é s u l t a t , q u ’u n e c o m p i l a t i o n d o n t les s o u r c e s s o n t
à i n d i q u e r . Si c e t E criva in avoit v r a i m e n t c é d é ses droits , je p o u rr o is
e xam in er
Un ’ o u ^ si u n C o m p i l a t e u r d e vie n t t e l l e m e n t prop riétaire des fra g m e n s q u ’il a e xtra its o u
n sc rits , q u e d a utre s C o m p i l a t e u r s o u L ib r a ir e s n e p u i s s e n t les tra n s cr ire o u extrair«
aprus lui ; m a jS c e t t c d is c u s s i o n s e r o it tro p in u t ile a u j o u r d ’hu i.
�( ** )
L a L o i du 19 Juillet 1798 , la prem iere qui depuis les-décrets de 178 9 ,'
ait accordé aux A u teu rs, des droits exclusifs à la vente de leurs ouvrages, est
une loi purement civile dans toutes ses dispositions.
, L ’Article 4 porte que tout contrefacteur sera tenu « de payer au véritablç
» propriétaire une somme équivalente au prix de 3 e o o exem plaires de 1 édition
» originale. »
L ’Article 5 soumet le
'
débitant « à payer une
somme
équivalente au prix
» de 5 oo exemplaires. »
C es dispositions sont purem ent civiles ; elles n’offrent ni amendes , ni em
prisonnement , ni aucunes peines ; elles fixent une indemnité ; rien de plus.
L e code du 3 Brumaire , qui renferm e tout le systèm e législatif sur les
poursuites crim inelles ou correctionnelles, en définisant les attributions des
O fficiers de police ju d iciaire, prouve que les poursuites de D u g o u r n ’étoient
point de leur com pétence.
L es Commissaires de police instruisent au Crim inel les procédures sur délits
dont la peine n ’excede pas « une amende égale à la valeur de 3 journées de
"» travail , ou trois jours d’em prisonnem ent; » (A r c . 28. ) et les Juges de
P a ix , considérés com m e Officiers de police ju d icia ire , instruisent les procé
dures criminelles ou correctionnelles , lorsqu'il s’agit de peines plus fortes ;
( A rt. 48. )
C ’est donc la nature de la peine qui déterm ine la nature des poursuites ;
il n’y a plus de com pétence pour les Officiers de police judiciaire , s’il ne s’agit
pas d ’un fait qui donne lieu -à une amende, à un emprisonnement, ou à une
'peine plus gra-ve quelconque.
O r , la L oi de 1793 , qui prescrit le paiement de sommes quelconques , ne
prononce ni amende, ni emprisonnement ; les L oix pénales ne peuvent ni se
suppléer , ni s’étendre : là Loi de 1793 devoit donc exclure toute idée de
poursuite criminelle.
_
T o u te la procédure instruite par Dugour , est donc frappée d ’une nullité
¿Yidente.
'
C e n ’est pas tout : le Juge de paix qui n etoit pas com pétent pour instruire
ou ju g er, ne 1 etoit pas même pour faire la saisie. L a L oi du 2 5 Prairial an 3 ,
réformant sur ce point , la L oi du 19 Juillet 1793 , a délégué aux seuls C om
missaires de police les fonctions qu’auparavant elle atlribuoit indifféremment
aux Commissaires de police , ou aux Officiers de paix. V oici le texte de cette
loi : « L es fonctions attribuées aux Officiers de paix par l ’art. 3 de la L o i du
»
19 Juillet 1793 , (v . s.) seront à l’avenir exercées par les Commissaires de
�(
*3
)
5» p o lic e , et par les Juges de paix dans les lieux où il n ’y aura pas de C om
» missaires de police, v
L a L o i du 3 Brumaire an 4 , n ’a rien changé à cette disposition.
O n ne dira pas sans doute que Lyon manque de Commissaires de police.
L e u r présence excluoit donc 1 intervention du citoyen P aren thoux, et toute la.
procédure de ce Juge de paix est un, exces de pouvoir que la Justice ne sauroit tolérer : il a exercé une autorité que la L o i ne lui attribuoit pas ; il a rem
pli des fonctions que la L oi lui interdisoit ; toute sa procédure est donc évi
dem m ent nulle.
Mais ce qui n ’étoit que nul et irrégulier dans son principe , est devenu révol
tant dans la suite : Abyssus abyssum invocat.
C e Juge qui n’avoit jamais été co m p éte n t, dans cette affaire , l ’étoit bien
moins encore , lorsque sur ses renvois répétés du 8 et du 1.4 Therm idor , les
parties furent renvoyées au Tribunal civil pour faire statuer sur la prétendue
propriété de Dugour ;
ce p e n d a n t, il os a, le i 3 F ructidor, re ce v o ir, sur des
faits accessoires , une addition de p la in te , et citer devant lui des témoins. Ici
l ’abus d ’autorité , l ’excès de pouvoir prend un caractere plus grave.
Mais ce qui combla la mesure des irrégularités et des vexations , ce fut la
saisie qui couronna dignement cette procédure : C e Ju ge, qui le 8 Therm idor ,
avoit suspendu ses recherches , jusqu’à ce que la propriété de Dugour fut
légalem ent reco n n u e, pouvoit-il les reprendre avant qu e cette question fût
jugée ? D épouillé de toutes fonctions par son propre f a i t , et par des ordonnan
ces régulières de l ’autorité su p érieu re, pouvoit-il reprendre arbitrairem ent se s
fonctions ? Sa saisie est-elle autre chose qu ’un acte de violence ?
Et si un attentat si grave pouvoit devenir encore plus coupable , il prendront
ce caractere dans les ruses mêmes dont on l’a accom pagné , c ’est-à-dire ,
dans cette recherche puérilem ent astucieuse de marchandises anglaises Si ma
propriété n etoit pas saisissable, que pouvoit changer à sa condition ce pi
toyable prétexte ? s il étoit permis de la saisir , à quoi bon ce vain détour ? E t
ce hasard qui conduit si directem ent mes oppresseurs à mon dépôt ; et cet
autre hasard, cette providence qui pour me confondre, conduit là Dugour com m e
par la main ; et ces déclarations absurdes q u ’on m et dans la bouche du dépo
sitaire ; et toutes ces manoeuvres dont j ’ai déjà rendu co m p te , à quoi p eu ven t
elles servir ? A prouver que Dugour avoit la conscience secrelte de l ’illé
galité de ses opérations ", à
donner enfin la mesure
de
son audace
et
*1° sa témérité. C ’est donc en vain que la constitution et toutes nos L o ix
�(
24
)
veillent sur le domicile du C ito yen comme sur un asyle inviolable et
sacré ; c ’est en vain que la législation , d ’une main timide , et dans des cir
constances rares ,
clairement déterm inées , ne livre q u ’à regret nos paisibles
foyers à l ’autorité publique : un abus , odieux et criminel to u t-à - la - fois , d ’une
institution purement politique et fiscale , exécutera sans hésiter ce que le L égis
lateur lui - mêm e ne perm et q u ’en tremblant ; c ’est-à-dire, des visites domi
ciliaires ; sous ce prétexte , le prem ier fripon pourra fouiller impunément tous
les domiciles , exercer la plus révoltante inquisition , et détruire , en se jo u a n t,
jusques dans le sein de la paix domestique , la liberté et l’indépendance des
C itoyen s. T elle s sont les conséquences menaçantes de l ’abus qu’on a fait d ’une
L o i ; et si cet abus n e to it pas réprimé , s’il se m u ltip lioit, la liberté violée
jusques dans son dernier asyle , ne seroit plus qu'un vain nom.
C ’est pourtant là ce Juge que Dugour m ’accuse d ’avoir intimidé par le nombre
de mes Conseils , par l ’agitation de mes ouvriers : méprisable calomnie ! Lorsque
ce Juge , plus facile sans doute que coupable , et peut-être encore plus trompé
que facile , acceptoit une commission que la L oi lui interdit, la reprenoit après
s ’en être d ép o u illé, et se prêtoit à une fable ridicule pour acquérir un prétexte
de m e dépouiller , qui de Dugour ou de moi , l’intimidoit ? qui de nous l ’avoit
d é n o n c é , calomnié auprès du Ministre de la justice ? qui de nous abusant avec
scandale de la réponse de ce M a gistrat, l ’a entraîné dans des abus déplorables
d ’autorité ?
y 1E R ES
W A T 10 N S
•> r
Rien n’est donc plus évident : la procédure de Dugour est souillée de toutes
les nullités ; crim in elle, pour une action civile ; instruite par un O fficier de
police à qui la Loi l ’interdisoit ; consommée par un Juge qui s’étoit dépouillé
de toutes fonctions , elle rassemble tous les vices à la fois.
A u fo n d s, sa plainte est aussi injuste que ses poursuites sont irrégulieres.
Il sera à jamais inconcevable qu ’on ait osé poursuivre, com m e contrefaçon ,
une édition avouée, corrigée et augmentée par l’Auteur lui-m êm e, et qui
n ’imite , sous aucun rapport , la prem iere édition ; qu’on
ait appelé
du
nom de vol une impression qu’aucun privilège connu ne m ’interdisoit, et que
l ’abolition de tous les
privilèges me perm ettoit ;
que pour
juger enfin
d ’une entreprise , irréprochable lorsqu’elle vit le jo u r , on fasse rètroagir
les dispositions d'une loi postérieure ; il est sur- tout inouï que l ’auteur de tout
ce scandale , ne soit q u ’un étranger sans titre s, sans droits et sans prétextes ,
ne soit que le prétendu cessionnaire d ’un privilège éteint long-temps avant
l'acquisition illusoire qu ’il en a faite.
C ’est
�( 25 )
C ’est Dugour cep en d an t, et il faut bien que je dévore l ’humiliation de le
redire , c ’est Dugour qui m ’accuse , qui m ’a traduit , comme un voleur,
devant un O fficier de Police judiciaire ; c ’est lui qui dans un écrit infernal
répandu avec profusion, dans un libelle où l ’on trouve autant de mensonges
que de phrases , autant de perfidies que de raisonnemens , et plus de venin
que dans aucun libelle qui ait jamais offensé les regards de la Justice ; c ’e s t ,
dis-je, lui qui appelle à grands cris, sur ma tê te , l’infamie et les peines réservées
aux plus honteux larcins. C es virulentes diatribes font tressaillir d ’indignation
une ame délicate et sensible ; déjà les esprits justes et les cœurs honnêtes ont
m o n tré , à la seule lecture du libelle , une égale horreur pour la stupidité et
pour l ’atrocité des injures. Mais ce n ’est point assez ; la Justice se doit à ellemême de réprimer avec éclat ces sales et dégoûtantes expressions qui souillent
son sanctuaire.
J ’ose croire que les Législateurs et les Savans eux-mêmes ne regarderont
avec indifférence ni l ’attaque qui m ’est livrée par D u g o u r, ni ces attaques
innombrables de Libraires à L ib raires, qui s» t venues encom brer tout-à-coup
le tem ple de la Justice, et qui ont jeté dans tout le com m erce de la Librairie
une profonde consternation. U ne loi dont l’intention est ju ste , mais dont on
fait un abus funeste , a tenté la cupidité d ’une foule d'intrigans. O n acliete
à vil prix les restes d ’une édition ép u isée, et l ’on va dans les Départem ens
lever des millions à titre d ’indemnité : la bonne foi la plus scrupuleuse , la pru
dence la mieux éprouvée, ne peuvent mettre le Libraire le plus irréprochable
à l ’abri de ces incursions. A quel signe peut-on distinguer aujourd’hui la plupart
des contrefaçons, des éditions légitim es, et les livres devenus propriété publique ,
de ceux qui appartiennent encore aux Auteurs , à leurs héritiers ou cession’
naires l Com m ent se prémunir contre la perfidie d ’un Dugour q u i , annonçant
q u ’il ne vend aucunes contrefaçons , inonde
les D épartem ens de contre
façons pour dénoncer ses acheteurs aux propriétaires ; ou contre celle d ’un
M erlin , qui sollicite avec les p lus vives instances des envois de Livres q u ’il
suppose contrefaits, pour livrer ses vendeurs à un Dugour? Un abus à la fois si
odieux et si facile, doit faire frémir les Législateurs et tous les hommes honnêtes :
les Savans eux-mêmes ne doivent envisager q u ’avec horreur l ’abus affreux que
d ’odieux spéculateurs font de leur propriété !
Sans d o u te , et Ion ne sauroit trop le rép eter, il faut être juste envers les
S avan s; il faut qu’ils puissent re tirer, s’ils le v e u le n t, le fruit de leurs
veilles ; mais il ne faut pas confondre avec l ’intérêt des Savans , toujours
jnodeMes et désintéressés, les clameurs de ces exclusifs toujours dévorés d ’am111011 ct av*des de monopole. L e problèm e est de concilier les droits incon
D
�( 26 )
testables des A u teu rs, a vec l' égalité parmi les Libraires et la liberté parmi tous
les C ito yen s, c ’est-à-dire avec une sage concurrence : j ’ose croire que la clé
de ce problème ne sera point difficile à trouver. Si un Auteur étoit tenu
d ’aliéner , à un prix quelconque , la faculté de faire une édition de ses écrits ;
si une prem iere vente n ’cxcluoit point la liberté de passer d ’autres ventes en
faveur d ’autres acheteurs ; si une sage Législation traçoit les mesures conve
nables pour q u e les ventes antérieures fussent nécessairement connues aux
acheteurs postérieurs , et pour que le p r ix , sans rebuter les Libraires , fût
favorable aux Savans , on auroit obtenu la m eilleure solution et peut-être la
seule dont ce problèm e soit susceptible.
L ’Institut National s’occupe , dit-on , de cette question im portante : c ’est
annoncer la réformation la plus désirable de la loi de 1793. Mais il est tem ps,
il est plus que te m p s, que cette révision s’opere : de toutes parts l’incendie
est allumé : par-tout on voit éclore les combinaisons les plus scandaleuses :
la L ib ra irie , ce com m erce qui a tant fait et tant souffert pour la révolu tio n ,
est incessamment livrée à d ’affreux déchiremens : il est temps d ’y porter une
main secourable. M a cause, je le sais, ne s’améliorera point par cette réform e,
et je n ’en ai nul b e so in , puisque je posséde en concurrence la propriété qu'on
me dispute , et que la loi de 1798 ne m ’intéresse point ; mais lorsqu’on
m o n tre , comme dans cette c a u s e , un vil spéculateur qui se flatte d ’acquérir
une fortune de 3 o m illions, en achetant, pour quelques é c u s , un odieux
p ro c è s, on a assez justifié la nécessité de reviser la loi qui a fait naître une
combinaison si immorale : si la chose publique doit gagner à la publication
de cette v é r ité , je m e consolerai sans peine des persécutions qui l ’auront
fait connoître.
L E R O Y
A L Y O N , de l’imprimerie de L E R O Y .
aîné.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leroy. An 7?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Leroy
Subject
The topic of the resource
droit d'édition
contrefaçon
droit d'auteur
Description
An account of the resource
Premier mémoire et consultations pour le citoyen Leroy, Imprimeur-Libraire à Lyon, Propriétaire d'une Édition du Cours d'Agriculture, par Rozier. Servant de réponse au mémoire publié contre lui, à Paris et à Lyon, sous le nom d'A.J. Dugour, Libraire à Paris, se disant Homme-de-Lettres.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Leroy (Lyon)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 7
1780-Circa An 7
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0133
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0134
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53674/BCU_Factums_M0133.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Lyon (69123)
Rights
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Domaine public
contrefaçon
droit d'auteur
droit d'édition
-
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48709710b797a0b96ded03fbcd3e257e
PDF Text
Text
C o p i e des lettres du citoyen G a u ltier ,
A u x citoyens Charcot-Corléas et Charcot-Franclieu.,
Paris, 4- prairial an 4 -
Le représentant du peuple G aultier,
A u citoyen Charcot.
J'espérois , c ito y e n , que vous me feriez connoitre la réponse du
citoyen Mognat, parce que je pensois que si sa santé ne lui per
m ettait pas de vaquer à scs a ffa ire s , il étoit entouré de personnes
qui s’en occupoient. Le silence qu’ il garde a donc lieu de me sur
prendre ; cependant je n’ en suivrai pas moins Le plan que j'a i
form é de me libérer à échéance . Veuillez m’ annoncer de suite
si vous êtes dans l'intention de 'vous libérer envers ma fem m e,
parce que si cela ne vous convenoit pas , j ’enverrois la totalité
des fo n d s , tandis que je me bornerois, dans le cas contraire, a
faire passer le supplément.
J’attends votre réponse très-prochaine ; et si le citoyen M ognat
refusoit son remboursement, j ' espère que vous voudrez bien re
mettre à un homme d'affaires les fonds que j e vous enverrois ,
pour qu’il soit en état de réaliser les offres.
Je vous répète que mon intention n’ est pas de contrarier vos
projets sur le remboursement ; mais il importe de savoir à quoi
m ’en tenir, pour que je puisse me liquider vis-à-vis le citoyen
Mognat ; et puisque mes billets sont à échéance fixe p ou r le pre
mier juin prochain, je dois prendre mes précautions pour en éviter
le protêt.
A
�.
( 2 }
.
,
.
ÏVFa femme est à Cham béry au milieu de sa famille. Te vousprésente l’assurance des sentimens les. plus affectueux et les plusfraternels»
‘
_. t
Paris r 6 prairial an 4*
Je*viens-, c it o y e n / d e recevorr voCre lettre du 3 o flo réal; je nesuis pas surpris de la difficulté que vous avez de retrouver le»;
papiers concernant m on beau-p ère mais je - puis vous garantir
le montant des créances que f a i portées dans le compte que j e
vous ai adressé au principal de 26,000 fr~
Je vous ai annoncé que mon intention étoit d’ employer le reli
quat à me libérer envers le cit. Mognat. Je n’ ai pas dû consi
dérer l’avantage que vous y trouviez, parce que la loi est précise.S-’il s’éloit glissé une erreur, je vousJa réparerois jusques-là, je '
ne vois pas d’inconvénient à laisser mon compte tel qu’il est.
Je dois au citoyen Mognat 3 o,goo fr. sur lesquels j’ai: distrait
tingt-cinq pour cen t, en conformité de la loi', parce que je croismon billet du premier jjuin 1 7g 3 ; ce qui réduiroit ma dette à
23,175 fr. Déduisant les i5 ,2 6:1 fr . dont je vous, crois débiteur,,
il me resteroit 7,9 1 3 fr. à vous envoyer. Je trouve plus expédient'
de vous envoyer un mandat de 10,000 fr. parce que vous me
feriez raison de la différence q.ui seroit de 2,087 fr.
Si mon billet se trouvoit, contre ma pensée, daté du mois de
m ai” 17C)3 , là distraction-sur 3 o,goo lr. n'étant que de quinzepou s cent’, je dévrois dtms ce cas a6 , 8G5 fr. sur lesquels distrayant,
les 15,262 1. a prendre sur vous, et les 10,000 lr. que je vous faisi
passer r. vous.- auriez à avancer i , 6 o 3 fr. que je vous adresseroisi
de suitei
1
^
'
Voilà bien des calculs; il me fich e beaucoup de-vous en fati
gu er, mais je-ne puis faire autrem ent, d’autant.plus:r que jer
ne veux pas laisser protester mes effets. Si- le citoyen Mo^naü
�_
( S }
e
.
-»voit voulu recevoir à Paris f je vous aurois évité tous'ces embarras;
m ais il ne répond rien à ce qu'on lui écrit.
Je joins ici une lettre pour lu i, et comme je ne me fie pas
beaucoup à l ’effet qu elle produira, je vais préparer un acte
d’ offre., ma résolution étant bien formee de me debarrasser de
toute affaire de compte.
• ‘
*
Je vous réitère mes excuses des peines que je vous donne.
Salut et fraternité. S ig n é, Gaultier.
.P- S . On ne m ’apporte pas assez tôt les promesses de mandats
que j’ai ¡demandées en . grosses som m es, pour que je puisse vous
les faire passer par ce courrier, poste chargée, ce sera donc pour
le prochain.........Veuillez donner de suite cours à ma lettre pour
le citoyen M o g n a t, qui n ’éprouvera pas ‘de retard : mes fonds
«eront d’ailleurs arrivés pour le i " . ou le 2, au plus tard.
Paiis , le 8 prairi.il.
.
s
-
.
1
.¡L e l’e p ré se n ta n t d u p e u p le G a u lt i e r } de 1 A in .
'
-Au citoyen Charcot-C orléas.
J e viens de m ettre à la p o ste , et dans un paquet ch a rg é , les
10,000 fran cs, en promesses de m an d ats, dont je vous ai annoncé
i ’envoi.
Je prends encore la liberté de 'vous adresser une procuration
pour retirer mes billets, ou fa ire des offres dans le cas ou le
citoyen Mognat, ne voudrait pas les remettre. .
II m ’a prêté en assignats, je lui rends en m a n d a ts; il ne peut
s ’en plaindre : ce seroit d ’ailleurs une erreur de penser que toute
espèce de papier cessera bientôt d’avoir cours en l* rance ; c’ est
1
A 2
�.
..
C4J
,
ehose impossible. L e système du gouvernement est au contraire
d’ accréditer le mandat.
Si Ton envient à des offres réelles, vous remettrez ma procuration
h un homme d’ affaires qui aura votre confiance ; l’ huissier réa
lisera 26,175 francs , et il déclarera qu’ il est encore porteur d’une
somme de 3,690, qu’il offre de payer dans le cas où le citoyen
M ognat prouvera par la représentation des billets, que leur date
est antérieure au i " . juin, ¿/u surplus » l’a personne de confiance
que vous aurez chargée d e cette affaire * dirigera l’ acte d’ offre ~
Je vous renouvelle mes excuses de-cette commission , j ’espèrecependant q ifelle ne vous entraînera pas à des peines que jevoudrais vous éviter, parce que le citoyen Mognat,. se décidera*
à recevoir son remboursements
Salut et fraternité. Signe',. Gaultier.
‘
Paris, i 4 prairial an ^
G aultierr au citoyen Charcoi-Corléas.
J’e sfè re ,, citoyen, que vous-voudrez bien m’ apprendre oii vou s _
en êtes pour ma libération envers le citoyen Mognat - V"Ecluses
Je désire terminer avant de faire le voyage que j e projette►
Salut et fraternité. Signé,. G aultier-
'
Paris , 20 prairial’ an 4..
/
Gaultier, cle l'A in } représentant du peuple ,
A u citoyen Charcot^Corléas .
Jï réparerai’ avec empressement les erreurs qurjwurroîent's’êtîé1
"lissées.dans le compte que je vous ai fait parvenir; mais je-ne;
h
�.
.
.
c 5 }
croîs pas qu’il en existe. Vous me ferez plaisir de le faire vérifier
le plutôt que vous le pourrez.
J’espère que le citoyen M ognat aura reçu son remboursement r
ou que vous lu i aurez fa it faire des offres. Je désire savoir ce qu’il
en e st, en vous confirmant que le gouvernement n’ est point dans
l’ intention d’ abandonner le mandat ; il v a même prendre des .me
sures pour le faire monter subitement*
'
•
Salut et fraternité. Signe', Gaultier-
• •'
Paris , 2$ prairial an
G aultier, au citoyen Corléas*
Je me dispose cito yen , à faire comme je crois vous l’avoir déjà
annoncé, le voyage de Bourg et de Cham béry : je voudrois avant
de partir , apprendre que mes billets au profit du citoyen M ognat
de l’Ecluse sont retirés, ou qu’ il a été fa it des offres réelles suivies
de consignation. M on intention est qu'elle soit portée à la plus
forte som m e, pour être plus sûr de leur suffisance : cette plus forte
somme seroit 26,865 francs; je persiste à vous offrir l’envoi,
courrier par courrier , de ce que vous aurez avancé , et j’espère
que vous voudrez bien m'informer le plutôt possible^ de ce qui aura
été fait.
Salut çt fraternité» Signé, Gaultier.
�(6 )
Paris , 4 messidor an 4.
G a u ltier, au citoyen Corléas.
‘
,
i
t
V o t r e lettre du 27 floréal m ’a n n o n ce , citoyen , que Von a
pris le parti de faire des offres au citoyen Magnat. -VEcluse ,
et qu'à défaut de recevoir , il sera assigné pour voir ordonner le
conseing. J ’espère que le citoyen Vzrdun donnera ses soins à
cette affaire , et qu ’il y jnèttra l’activité q u ’elle exige. Il im porte
de veiller à ce que toutes les form alités soient bien rem p lies, et
»
à ce que la citation soit bien faite au yéritable dom icile du dé
fendeur.
J e vous prie de communiquer ma lettre au citoyen Verdun .
Salut et fraternité. Sig n é, Gaultier.
■
<
•
’
>
14 thermidor an
4-
Le représentant du peuple G aultier,
A u c it f C h a r c o t-G o r lé a s .
'
* »
î
V o s dernières lettres m ’ apprennent que le citoyen Mognat- .
V E clu se . n’a point reçu son remboursement, et qu’ il s’ en est
tenu à temporiser : cette ressource ne lui aura pas été in u tile ,
puisqu’il a gagné Yépoque d’ une suspension de remboursement ;
il n’auroit pas réussi, si le citoyen Verdun avoit mieux répondu
a votre confiance , et qu’ il eût pris en considération mes recom
mandations très-formelles d’ éviter les défauts de forme. Celle
qu'il a commise en faisant citer le citoyen Mognat, en son nom
et non pas au mien, est très-forte.
I sî mal est f a i t , et. je ne sais plus ni quand ni comment le
citoyen Mognat sera remboursé.
�;
_
C
7 )
Je le sais d’autant moins que l’usage des tribunaux à L y ô n ,
n’est point le même qu’à Paris.
. L a chose est d; autant plus fâcheuse, que les fonds que je vous
ai envoyés et ceux que vous avez fournis , ont périclité, et
qu’ ils peuvent perdre encore davantage* Je retirerai bien la partie
que j’ai fournie dans l’ëtat où elle se trouvera ; mais il me serolt
trop pénible de pousser plus loin les sacrifices. J’espérois me libérer
avec'd’anciens capitaux ;-vous avez voulu m ’aider en acceptant un
transport qui n’ a pas réussi, par lai faute de celui que vous
avez chargé d’ en suivre l’ exécution ; j ’ esp'ere donc que vous
vous déciderez ainsi que moi à retirer la partie des fonds que
vous avez fournis. J’attends votre réponse pour savoir â quoi m’en
tenir.
.
" ’
‘
1
Vous pourrez remettre â ma femme la partie de mandats que
je vous avois envoyée.
■
»
. Salut et fraternité. S ig n é , Gaultier-
Paris, 17 fructidor an 41-
G aultier, ccu citoyen Charcot-Corléas. ~
»
Je consentais bien de recevoir le remboursement du capital que
■vous deviez à ma fe m m e , sous la condition que vous^ en feriez
emploi à me libérer envers le citoyen Mognat-V Écluse. Je vous
avois meme prévenu de ne rien négliger pour assurer ma libération
et la vôtre.
Il est arrivé %je ne sais comment, que le citoyen Verdun,
votre homme de confiance,,« négligé les formalités nécessaires
pour cette libération ; en sorte que le transport que je faisois au.
profit du citoyen M o g n a t n ’ayant pas été consommé par son
acceptation, ou pnr des offres valables, nous nous, trouvons dansfc même état qu’auyara-vant,-
�.
,
( 8 )
.
Je vous ai demandé en conséquence le renvoi de la somme de
ïo , ooo
francs en m an d ats, que je vous ai fa it passar.
L e citoyen Franclieu a répondu pour vous à ma fem m e, qu’il
falloit qu’elle retirât non seulement les 10,000 fr._que je vous
avois fait passer, mais encore les 16,875 que vous aviez remis
au citoyen Verdun pour faire des offres.
. L e but de cette réponse est évidemment de me faire supporter
toute la perte survenue dans le papier - m onnoie, quoiqu’ il me
paroisse évident que vous avez dû courir la même chance que
m o i, puisque j e vous déléguais à payer une partie du prix au
citoyen Mognat-VEcluse.
. ,'
( * ) [ ,Pour éviter toute .difficulté, je consens de retirer lei"
mandats que vous avez remis au citoyen V e rd u n , suivant leur
valeur au co u rs, à l’époque de la remise. Par ce sacrifice je vous
désinléresse absolum ent, et je satisfais à ce que vous pouvez
désirer. S’il en étoit autrement , je m ’en rapporterois à de#
arbitres ],
J’espère que vous me ferez incessamment connoitre votre déter
mination.
.
Salut et fraternité. Signé , Gaultier.
P . S . Je vous observe que si vous n ’eussiez pas été mon débiteur,
et que je vous eusse prié de payer pour moi des mandats , vous
l ’auriez f a it , et ne me demanderiez pas un remboursement en
numéraire*
Je vous ai proposé de payer ii un tiers ce que vous me deviez.
Vous avez consenti de me libérer envers lui ; vous ne l’avez pas
fait : vous restez mon créancier; cela est évident. [Les mesures que
vous avez prises, Ont été inellîcaces: quelle justice trouveriez-vous
à m ’en rendre victime. Je fais plus que je ne dois, en supportant
une perte quelconque sur ce que vous avez remis au cilôy. Verdun],
(*) Dans cette lettre , tout ce qui se trouve ici entre les cjtux [] est légcfement tutofiiié ou barru.
Je
�(9 )
Je persiste donc à vous demander l’envoi des 10,000 francs qne
je vous ai fait passer. Si vous les conservez, vous en resterez mon
•débiteur; car je n’ai rien à faire avec le citoyen Verdun.
A u surplus, je consens de m ’en rapporter à des arbitres, fii vom
voulez sérieusement être libéré, sans avoir satisfait ix ce que je
vous demandois, d’assurer en même temps ma libération envers
la tierce personne qui devait recevoir.
Salut et fraternité. S ig n é, Gaultier.
• Paria | iS fructidor au 4»
C
i t o y e n
,
J’avois bien consenti de recevoir mon rem boursem ent, sous la
condition que vous en feriez emploi à me libérer envers le citoyen
IVIognat. Je vous avois même prévenu de ne rien négliger pour
assurer votre libération et la mienne.
11 est arrivé que le citoyen V erdun, votre homme de confiance,
a négligé les formalités nécessaires pour cette libération. Je n ’ai
pus voulu approfondir les véritables motifs de l’omission des for'malités. J’ai préféré de vous demander le renvoi des 10,000 francs
en mandats que je vous avois fait passer.
L e citoyen Franclieu a répondu à ma femme qu’il falloit qu’elle
retirât non seulement ces 10,000 fran cs, maïs encore 16,875 fr.
que vous aviez remis au citoyen Verdun.
L e but de cette réponse est de me faire recevoir mon rembour
sement en m andats, tandis que je ne puis moi-même me libérer
de cette manière. Je 11c puis croire que vous insistiez dans cette
prétention , qui doit blesser votre délicatesse.
Je vous observe en e ffe t , que si vous n ’eussiez pas été mon
-débiteur, et que je vous eusse prié de payer pour moi en mandats,
B
�.
.
. .
f ro' ) .
.
vous:l’ auriez fa it, et ne' me demanderiez pas mon remboursement
en numéraire.
.
Parce que je vous ai proposé de payer à un tiers ce que voue
me devez, et parce que vous y avez consenti, sans avoir effectuévotre engagem ent, et sans m ’avoir libéré envers lu i,, vous vous
croiriez libéré envers moi ; cela n ’est pas proposable.
Je persiste donc à vous demander l’envoi des 10,000 fr. mandats,
que je vous-ai fait passer; si vous les conservez, vous en resterez,
mon débiteur ; car je n ’ai rien à' faire avec le citoyen Verdun.
A u reste, je consens à m ’en rapportera des arbitres, si vous-voulez sérieusement être libéré sans avoir satisfait à ce que jevous demandois , d’assurer en même temps ma. libération envers;
la tierce personne qui dévoit recevoir;
‘
J’espère que vous, me ferez incessamment connoître votre déter
mination..
Salut et fraternité. Signé,, Gaultier..
Paris, 17 vendémiaire an 5..
A u cit. Cliarcot-Frcmeheu, caissier des vivres à Lyon..
Ci
t o y e n
,
J’ai différé de répondre à la lettre que vous m ’avez adressée
le premier complémentaire ,. parce qu’il m ’a paru que vous désiriez
le retour du citoyen: Cliarcot - C o rléas, et parce que je l’ai jugé
nécessaire pour les demandes que j’ai'à vous faire.
. , Je ne rétracte pas ma proposition-de soumettre à des arbitres
îa difficulté que vous m-élevez. M ais je-pense que vous agréerez
celle que j’y jo in s, de faire le choix, des arbitres dans Paris,,
ou si mieux l’aim ez, clans quelque ville voisine de L y o n , telles::
que Grenoble, Gham béri, B ourg, M açon , C liâ lo n s e tc ., Je n'ai;
,p.>s besoin de vous dire les raisons qui me font vous, proposer, le:
tbqix ailleurs que dans-Lyon.
�'( ” )
.
ï ’espère que vous voudrez Lien aussi m ’envoyer préalablement
copie des lettres que j’ai écrites, et des offres qui ont été faites,
pour que je puisse instruire les arbitres, et défendre mes intérêts..
J’offre par réciprocité de vous envoyer copie de celles que j’ai
reçues du citoyen Corléas.
Notre correspondance respective me paroit devoir établir que
votre famille ne peut être libérée envers m oi, sans m avoir acquitté
,
envers le citoyen Mognat.
11 importe que la question se décide , puisque les fonds restent
oisifs , et peuvent encore dépérir dans la suite.
Je ne sais comment ni à quelle époque la famille Cliarcot a été
payée de sa créance sur la nation , pour raison de l’oflîçe du citoyen
de N ervo; mais j’ai peine à croire qu’elle, soit lésée par les arrangemens qu’elle a pris soit avec mon b e a u -p è r e , soit avec ses
créanciers.
J’ai encore intérêt de savoir ce qui a été fait à ce sujet, parce
que le citoyen de Nervo a constitué de son chef 10,000 francs
à ma femme.
\
J’espère donc que vous voudrez bien aussi m ’éclairer sur l’état
où se trouve l’affaire qui a suivi l’abandon fait par le citoyen de
Nervo. Vous trouverez peut-être convenable de me communiquer
un tableau de l’actif et du passif. Il serait bon de me faire connoiIre aussi l’époque des remboursemens que vous avez faits.
Quand il résulterait de ces communications, que ma femme ne
doit rien espérer de la constitution qui lui a été faite du chef
de son p e r e , je serois du moins en état de justifier que j’en ai
fait la demande, et qu’il n ’y a eu de ma part aucune négligence.
Je présente mes complimens îTu citoyen Corléas.
Salut et fraternité. Signe t Gaultier.
on«»
�I ra- )'
Paris, a frimaire an' 5»-
]Le représentant du peuple Gaultier,
y4.li citoyen Charcot-Franclieu.Je viens vous. prier instamment de m e faire passer le plutôt
qu’il vous sera possible, copie des offres et de la procédure qui'
a été faite yis-à-vis le citoyen M ognat-l’Ecluse , pour que je sois*
èn état de faire juger la question qui nous divise. Vous voyez
bien que les> retards ne peuvent qu’être funestes au propriétairedes mandats. Il y a long-tem ps que j’avois réclamé les 10,000 fr que j ’avois fait'passer,. e t que: je pouvois retirer sans aucun pré
jugé sur le fond de l’a ffaire..L a fatalité veut que j ’éprouve tou
jours des retards,.sousprétexte des*intérêt» d e s mineurs de N ervo,,
quoique je ne pense pas qu’ils puissent' jamais être en opposition
avec les miens, et encore moins avec ceux de léur sœur.
Je compte aussi sur les renseignemens. que vous me promettez,
par votre lettre du 23 , relativement a la situation de l ’actif et. du-,
passif du citoyen de Nervo*
M a. femme est sensible à votre souvenir.
Salut et fraternité. S ig n é, Gaultier;
Paris ,.5o vendémiaire an 6 .
L e représentant du peuple G aultier, de l\A in ,
ylu citoyen Charcot-Franclieu..
J’ avots form é le projet de me rendre dans ïr départem ent de
Püün, pour
y voir
mes parens et term iner plusieurs a ffa ire s, entre-
�.
( i 5 )'
autres celles qui concernent les droits de ma femme, pour lesquelles
deux objets sont à examiner.
L e premier est relatif à la créance des enfans du premier lit
du citoyen de N ervo, pour le prix de la vente d’un office et autres
objets.
L e second a rapport à la constitution de 10,000 fr. qu’il a faite
à sa fille.
Je me bornerai à vous dire sur ce second o b je t, que si ma
femme devoit perdre cette somme ou renoncer à toute espérance,
il conviendroit de l’établir indubitablement.
Q u a n ta l’autre, j’ai cru vous avoir prouvé que la délégation'
que j’ avois- entendu faire au profit du citoyen M o g n a t, n’ayant
pas eu son exécution, soit par la non acceptation de ce dernier ,
soit par les vices de la procédure faite contre l u i , par l’homme
de confiance du citoyen Corléas-, on ne pouvoit m ’opposer une
libération.
J’ai terminé par vous proposer un arbitrage partout ailleurs
qu’ù L yo n : les motifs de cette exception vous sont bien connus.
Les circonstances me forçant de renoncer à prendre un co n gé,
je me trouve dans la nécessité de prendre d’autres mesures pour
le règlement de cette affaire..
Je vous prie , en conséquence, 1“. de me fournir un tableau des
biens cédés par le citoyen de N ervo;; 20. de leur valeur; 3°. des
dettes et charges acquittées; 4** de l’époque des payemens; 5°. de
celles qui restent à acquitter ; 6°. de me faire également savoir
si vous persistez dans- Fintenlion de plaider ou de nommer des
arbitres à L yon .
Je ne pourrai prendre’ de détermination que sur votre réponse.
V ous êtes sans doute convaincu comme moi qu’ü est de l’intérêt
de tous les cohéritiers C h a rco t, de terminer sur ces deux objets.
Mon désir sera toujours d’être, juste dans mes prétentions, et de
les terminer par la voie de la conciliation.
Salut e t attachement. 1Signe, Gaultier.-
�.
( *4 )
'
1
P aris, 12 frimaire an 6-
A u citoyen Chcircot- Franclieu.
C
i t o y e n
,
Je prévoÿois bien que 1VT. Mognat ne larderoit pas à réclamer
le payement des ('fiels que j’ai souscrits à son profil, lorsque je
vous écrivis de régler les difficultés qui paroissoienl s’élever
raison de l'extinction de celle créance, par celle des liériliers
Charcot envers ma femme. Je n’ai pu obtenir réponse de vous
ni de vos cohéritiers: cependant, le cit. Mognat vient de m’écrire
d ’une manière très-pressante pour son payem ent; dès lors vous
voyez qu’il n ’est plus temps de différer. Je vous demande donc
promple réponse aux précédentes que je vous ai luîtes, et qui
prouveront dans lous les cas que j’aî voulu me libérer avec d ’an
ciens capitaux , cl que j’;ii épuisé tous les procédés honnêtes. Je
vous prie de considérer que les retards apportés à toute explication
cl à tout accom m odem ent, donneront vraisemblablement lieu à
des frais d ’enregistrement et d ’instance qu’il éloit dans l’intérêt
de lous de prévenir. Votre famille a plus (J'influence que moi sur
M. .Mognat ; elle pourroil l’employer à obtenir les délais néces
saires pour raccommodement par arbitres que j’ai proposé.
Je t e r m i n e eu vous r éi t é rant m a d e m a n d e d ’u n e p r o m p t e ré
p o n s e , pour q u e je sa che à qu oi m en tenir.
S.dut et attachement. Sigti/', C»;uiltier.
P tris , ^ nivVie un l'ï.
Cniulticr , ait cifiiW'ii ( hnrcat-J i a/<rhc’t.
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�.
.
( ’ r> >
'
'
'
et moi prenons a ce qui concerne votre famille. Je les ai trouvé»
très-disposés à approuver le marché souscrit par J. Cliarcol , et
je pense que c’est une chose terminée.
Le citoyen Corléas nous a recommandé un de ses anciens amis
domicilié dans les 13ouchcs-du-l\hône ; mais je n’ai pas encore
vu la personne chargée de ses intérêts.
J’espere que les dernières résolutions sur les transactions leront
cesser toutes difficultés entre les cohéritiers Charcot et moi ; car
elles confirment le principe, que tout débiteur charge d’une délé
gation ou d’une indication de payement , ne peut être* "valable
ment libéré , qu’autant qu’il rapporte au déléganl ta quittance
du tiers «pii devoit recevoir. Je ne crains pas que ni juges, m
arbitres, prononcent en opposition à la loi ; et par conséquent
j aurois recours cassation si mes espérances éloienl trompées.
Je vous a vois lait connaître mes justes motifs de récuser le tri
bunal du Uhône. J’ai encore sur ce point les dispositions de la
lo i; mais comme je recherche ton fours l’occasion de term iner,
j ai profité du voyage de mon frère à L y o n , pour y rechercher
nu arbitre; lorsqu’il l’a eu trouvé, il lui a paru que les dispositions
de votre famille n’étoient plus pour l’arbitrage.
Cette indécision ne pitil convenir à nos intérêts respectifs ; il
est temps, que nous ,x,n ln<>ns •]<ii doit payer Al. iMognat. Je vousai fait comioltre les inconveniens qu'il y avoit pour les uns comme
jx>ur les autres d ’attendre ses poursuites. Vous ne trouverez, pas
m auvais, qu'après avoir fait tout ce qui déjx'ndoit de moi pour
éviter un procès, j«' prenne incessamment les mesures convenables ,
pour renvoyer sur vous et vos cohéritiers tous les frais et évéuc—
nu us des |M>urMiiles auxquelles je dois m ’attendre de la part de
M. Mo^nat. Si ma qualité d<> r présentant , réunie à un patrio
tisme con stan t, pouvott m -tr.' pr. ¡udiciahle avant le 18 fructidor,
j ose <roire qu elle m< I us ■a< lu< ".-ment un droit égal à celui de.
tout autre cito \ e n , d'obtenir jcsli.e dans les tribunaux.
Salut cl all.u h 'iu cn t. S ig n e , Cijultier.
P
�( i 6 ')
C o p ia des lettres écrites p a r le citoyen Charcot-Corléas,
A u citoyen Gaultier.
,
4»
Lyon , le 8 floréal ap
C
i t o ï
IN
R
e p r e s e n t a n t
,
J’a i reçu , avec la lettre que vous m ’avez fait l’amitié de m ’écrir«
le g g e r m i n a l , la note détaillée que vous m’avez envoyée de ce
qui vous est dû sur les droits, de votre chère moitié ; je ne complois
pas qu’il vous fu t dû autant; j’attendois d’un jour à l’autre Char
c o t, qui est à R oanne, pour faire le compte. Il serait ici depuis
une quinzaine de jours, sans la maladie grave de son domestique
q u ’il n ’a pas voulu quitter j je compte qu’il sera ici dans la huitaine ;
vous pouvez cependant compter sur la somme gui vous sera due,
pour la f in de m a i , pour servir à acquitter ce que vous restes
devoir au citoyen M ognat-VEcluse, qui se trouve dans sa terre ,
à ce qu’on m’ a dit >• je lui ai é c rit, il y a une quinzaine de
jours, de vous donner l’échéance de vos billets, ou à moi ; je n ’ai
point eu de réponse ; on me dit que sa santé étoit toujours à peu
près de même. t
.
Salut et fraternité. S ig n é , Charcot-Corléas.
•
.
'JLyon , le U prairial an 4 de la république.
L e citoyen Charcot - Corléas ,
j t u citoyen Gaultier , représentant
.Vax reçu à la campagne les deux lettres que vous m ’avez fait
J’honneur d,e m ’ écrire les 4 et 6 dp courant, avec celle"pour le
citoyen
\
�.
.
.
( 17 )
c ito y e n M o g n a t; je la lui fais p a sse r, en lu i marquant en même
temps que j ’ ai les fonds nécessaires pour lu i rembourser voire
billet d*après les lois . Je ne scrois pas étonné que ses agens ne fas
sent des objections. Sur la réponse qu’on fe r a , je vous en ferai
part , sa u f à nous régler ensuite , s*il y a de l ’ erreur dans le
compte que vous m’ avez envoyé.
J’ai appris que votre chère moitié est à Cham béry ; si elle j
reste dans le mois de ju ille t, comme je dois aller aux eaux d ’A ix ,
j ’aurai le plaisir de la voir.
Salut et fraternité. S ig né , Charcot-Corléas.
’
L y o n , le 17 prairial an
4-
Le citoyen C h arcot-C orléas,
¿lu représentant Gaultier.
J’ a i reçu , rep résen tan t, la lettre que vous m 'avez fait l’honneur
de m ’ écrire le 8 de ce mois ainsi que votre procuration.
7 Jrois
jours après, j ’ ai reçu les 10,000 fr. par une lettre chargée ; je
n ’ai pas encore eu réponse à m a le ttre ; j’ai écrit à sa fe m m e , à
l’Écluse , où on m ’a dit qu’elle étoit. Si je ne reçois pas réponse,
je remettrai votre procuration à un défenseur o fficieu x, pour faire
retirer vos billets , en lui en payant le montant : je vous les ferai
passer ensuite.
Salut et fraternité. Signé, Charcot-Corléas.
Lyon , le 27 prairial an 4 de la république.
Le citoyen Charcot-Corléas,
A u citoyen G a u ltier , représentant.
J’ a 1 reçu les deux lettres que vous m ’avez fait l’honneur de
m'écrire les 14 et 20 du courant. J ’ ai remis , il y a huit jours , au
C
1
�,
(
. i
8
)
.
citoyen Verdun, défenseur o fficieu x , pour 27,000 fr. mandais,
pour présenter au citoyen M ognat, de qui je n ’ai point reçu (Je
réponse. On lui a fait signifier de recevoir le montant des billets,
par un huissier, à son dom icile, à L yon ; s’il ne répond p a s , on.
les fera consigner après avoir fa it toutes les formalités néces
saires ; n ’ayant point eu de réponse pour savoir la dote des b illets,
on sera obligé de consigner 20,865 fr. à ce que je pense. Je verrai
le citoyen Verdun que je n ’ai pas trouvé avant-hier chez lui ; j’irai
le voir aujourd’hui ou demain ; f a i vu monsieur votre frère , il y a
trois jours ; il a dû vous écrire que j 1avais remis votre affaire à
un défenseur o fficieux ; je vous instruirai de ce qui sera fa it .
Salut et fraternité. S ig n é, Charcot-Corléas.
Lyon , le 11 messidor an 4»
L e c ito y e n C h a r c o t - C o iié a s ,
A u représentant Gaultier.
J’ a i reçu , représentant, les deux lettres que vous m ’avez fait
l’honneur de m ’écrire le 28 prairial et 4 du courant. Je n ’ai pu
répondre plutôt , n ’ayant pu trouver le citoyen Verdun qui est
dans deux déménagemens de sa belle-mère et du sien ; je le ren
contrai hier; je lui ai fait voir votre lettre. L e citoyen M ognat
a été assigné, à L y o n , dans la maison qu’il a eue de son père ,
après sa m o rt; il a le domicile de son père. On m ’a dit que
sa femme y étoit il y a six semaines. 11 a été assigné pour comparoître devant le juge de paix; comme il se trouve en cam pagne,
on lui a donne huit jours; c’est le 12 de ce mois : s’il ne vient
pas , il sera condamné par défaut ; s’il paroît qu’il veuille recevoir,
on le payera tout de suite; s’il refu se, il sera cité devant le tri
bunal; s’ il ne se présente pas t on le fera condamner par défaut ,
tout de suite consigner. Les juges donnent pour {’ordinaire un
mois de délai ; on ne négligera rien pour faire terminer au plutôt.
Salut et fraternité. Signé , CharcoL-Corléas.
�( *9 )
(
:
L y o n , le 27 messidor an
Le citoyen Charcot-Corléas,
A u représentant Gaultier\
I l y a en quelque retard à la sentence, par un défaut de forme
du juge de p a ix , dans la cédule de citation qu’il a fait donner au
citoyen M o g n a t, en la mettant au nom du fondé de pouvoir;
«t le citoyen M ognat ne s’étant pas présenté, on a été obligé de
lu i faire donner une nouvelle citation régulière qui étoit pour le 22.
INe s’etunt pas présenté, on a porté l’affaire au tribunal ; on a
obtenu une sentence pour qu’ il ait à recevoir , h défaut, dé faire
consigner d ix jours après la signification ; comme il y a appa
rence qu’ il ne se présentera pas pour recevoir, on fera consigner
le S ou le g thermidor. Comm e.je dois partir avant ce temps pour
B c lle y , de là à A i x , le citoyen Verdun vous fera part du résultat
de ses démarches.
/
Salut et fraternité. S ig n é, Charcot-Corléas.
Aix , le 19 thermidor an 4 cia 1û république,
Le citoyen Charcot,
A u citoyen G a u ltier, représentant.
Je
viens de recevoir, par votre chère m o itié , la lettre que vous
m'avez fait l’honneur de m ’écrire le 14 du courant ; j ’ envoie votre
lettre à mon cousin à L y o n , pour faire ce qui sera nécessaire
pour retirer du citoyen P erdun les promesses de mandats ; s’il
11c. les a pas consignées, ce n ’est pas tout à fait la fauté du citoyen
V e rd u n , de Terreur qu’il y a eu dans la citation : c’est celle du
greffier. Le citoyen Verdun m ’a paru très-affecté de cette erreur,
qui a occasionné le retard; j'e suis1fâché à mon particulier.
Salut et fraternité. S ig n é , Charcot-Corléas.
.
C z
�( 20 )
«MMLHhVUwnm«— *— w — —i—^
———1
M
M
y?1"?
A Oulin , ce premier floréal an g.
J ’a i reçu , cito y en , à la campagne où je suis depuis
jo u rs, la lettre que vous m ’avez écrite , ainsi que le
relatif au procès que le citoyen Gaultier a intenté au cit.
votre parent, ensemble les pièces justificatives des faits
quelques
mémoire
C orléas,
contenus
dans ce mémoire.
V ous désirez, citoyen, que je vous dise mon avis sur celte con
testation; rattachem ent que je vous ai voué depuis long-tem ps,
ainsi qu’à madame votre mère , ne me permet pas de vous refuser
'mes foibles lum ières, au risque de passer pour un radoteur. Ce
pendant, afin de dévoiler autant qu’il me sera possible cet incon
vénient , j’ai lu avec la plus grande attention toutes vos bucoliques.
Je ne vous dissimulerai pas que l’impression qu’elles ont faites sur
m on esprit a été celle de la plus grande surprise, qu’un citoyen
qui fut allié à votre fam ille , et q u i, par la profession qu’il exerce,
doit connoitre au moins la disposition de l’ordonnance de 1667,
et les premiers principes du d ro it, ait form é contre le citoyen
Corléas une demande aussi injuste. Sans doute il a cru que sa
qualité de député à l’assemblée constituante seroit un titre si im
p o san t, qu’il pouvoit tout hasarder im puném ent: p e u t-ê tre ne
s’est-il pas trompé ; car la sentence qui condamne le cit. Corléas
à acquitter et garantir ledit Gaultier des condamnations pronon
cées contre lui en faveur du citoyen M o g n a t, pèche contre l’ar
ticle III du titre Y de l’ordonnance de 1667 , qui veut qu’une partie
défaillante ne puisse être condamnée que dans le cas où la de
mande se trouve ju ste et bien 'vérifiée. D ’ailleurs, celte contra
vention à l’ordonnance n ’est pas la seule qui existe dans cette sen
tence; elle ordonne l’exécution provisoire des dispositions y conte
nues, quoique les articles X IV et X V du titre X V II portent, que
les sentences ne pourront être exécutées provisoirement que dans
|e cas où les condamnations n ’excéderont pas la somme de 1,000 fr .
I
•
�( 21 )
ôu quand il y aura con trat, obligation ou promesse reconnue, ou
enfin quand il sera intervenu une condamnation précédente. O r \
quel titre avoit le citoyen Gaultier contre le citoyen Corléas ? il
n ’avoiten sa faveur qu’une condamnation par d éfaut: eût-elle été
prononcée contradictoirement;, elle excédoit de beaucoup la somme
de 1,000 fr. Je n ’imaginerai pas que cette sentence ail été rendue
en haine, de ce que le citoyen Corléas avoit décliné le tribunal où
il avoit été assigné mal à propos , je craindrois de faire injure aux
juges de première instance ; mais il n ’est pas moins vrai que la
demande en garantie formée contre le citoyen Corléas, ne prenoit
pas sa source dans la contestation qui s’étoit élevée entre le citoyen
M ognat et le citoyen G aultier: la prétention de celui-ci étoit tota
lement étrangère à cette contestation ; elle auroit dû faire la ma
tière d ’une instance particulière. Si le citoyen Gaultier eût bien
voulu se rappeler l’article VIII du titre VIII de l’ordonnance que
nous avons déjà c ité e , il eût vu que sa demande n'ayant d’autre
objet que de traduire son prétendu garant hors de sa juridiction,
il étoit enjoint aux juges de renvoyer la cause pardevant ceux qui
devoient en connoître.
Il est bien vrai que le défenseur officieux du citoyen Corléas
avoit fait une faute lors du déclinatoire proposé, en demandant
que la partie adverse fû t déclarée non recevable et mal fondée
dans la garantie qu’elle exerçoit. Cette conclusion anéantissoit le
déclinatoire ; mais elle ne rendoit pas compétent le tribunal saisi
de la contestation , s i , d ’ailleurs , il ne l’etoit pas. 11 d evoit, à la
form e de l’article que je viens de c ite r, renvoyer d’office les par
ties à se pourvoir pardevant les juges qui doivent en connoître,
parce que k s justices sont de droit public.
A insi voilà bien , si je ne me trom pe, trois vices dans la form e,
plus considérables les uns que les autres; ils form eront autant de
moyens de cassation. L a discussion , concernant le fond , les fera
ressortir encore davantage.
*
V otre m ém oire, cito yen , explique d’une manière si claire et
avec tant de précision les faits qui ont précédé la faillite de César
�de N ervo, qui l’ont accompagnée et suivie , que je me bornerai à
rappeler ceux qui peuvent avoir quelque rapport à la contestation
dont il s’agit.
Je m ets, dans cette classe, le premier mariage qu’il contracta
avec mademoiselle TTodieu, fille du contrôleur, contre-garde de
la monnoie de cette ville. Son père , en la m ariant, lui constitua
en dot la somme de 2i,o0 o liv. à compte de ce qu’elle avoit droit
de prétendre dans les droits dotaux de sa défutile mère. D e son
mariage avec César de Nervo sont issus deux en fan s , Benoît de
N crvo et la femme du citoyen Gaultier. Après la m ort de leur
m è re , César de 'Nervo épousa en secondes noces mademoiselle
votre sœur. Il étoit pourvu alors de l’office de contrôleur contregard e, que le sieur Ilodieu le père lui avoit vendu au prix de
21,000 liv. pour s’acquitter envers lui de la constitution dotale
qu’il avoit faite à sa fille du chef de sa mère. Je rappelle ces deux
faits , parce que dans le contrat d’abandon que César de Nervo a
fait à ses créanciers, le citoyen G au ltier, et Benoît de N ervo,
son beau-frère, n’y ont adhéré que sous la condition de leur pri
vilège prim itif sur le prix qui proviendroit de la vente de l’office
de contrôleur contre-garde, et de leur antériorité d ’hypothèque sur
les biens de César de N e rv o , leur père , et je reviens à ce qui s’est
passé dans votre famille , en conséquence du mariage contracté
par César de Nervo avec mademoiselle votre sœur.
II paroît qu’à cette époque ses affaires éloient déjà dans le de
rangement , ou au moins qu’elles y tombèrent peu de temps après;
car il eut recours au citoyen Corléas pour un emprunt de 80,000 1.
Il lui passa, conjointement et solidairement avec sa fem m e, une
obligation du montant de cette somme : celte obligation avoit été
slipulée à ordre. L e citoyen Corléas passa cet ordre à M . Claude
Charcot votre père ; en sorte qu’il devint créancier de son gendre
et de sa fille jusqu’à concurrence de cette somme , ainsi que de
deux autres billets ou promesses payables en payement des saints
1788 et 1789» montant ensemble à 5 , i 5 o liv.
•
.
César de Nervo , pour s’acquitter envers son beau-père en partie,
�lui donna à-compte la somme de 17,000 l!v. , et il lui passa en
outre la vente d ’une maison située à L y o n , et d’un domaine situé
dans la commune de F ontaine, au prix de 68,800 liv. ; en sorte
que toutes déductions fa ites, il ne resta plus débiteur de M . votre
père : il auroit été, au contraire, son créancier de 2,G5o liv. , si la
compensation eût pu, suivant les principes du droit, avoir son effet.
Mais M . votre père, instruit du dérangement des alfaires de son
gendre , n’avoit acquis scs immeubles que pour épargner à ses
créanciers les frais et les longueurs d’une vente judiciaire : ce fait
est consigné dans le contrat d’abandon que César de Nervo a fait
à ses créanciers. Je le rappelle avec empressement et p laisir, parce
qu’il fait honneur aux senlimens de délicatesse et d’honnêteté de
M . votre père. Je désirerois qu’il y eût dans toutes les juridictions
consulaires un registre où fussent inscrits de pareils procédés, et
que chaque année on fit placer un tableau dans le lieu le plus
apparent d e l à juridiction, pour que le public en fû t instruit.
Malheureusement dans les fa illites, dont j’ai eu connoissance, les
parens des faillis n ’en ont pas agi comme M . votre père: je pourrois citer plus d ’un exemple d ’une conduite c o n t ra i r e .
Quoi qu’il en s o it, la compensation n ’ayant pas eu lieu, M . votre
p ère, loin d’être débiteur seulement d’une somme de 2 , 65 o liv.
envers son gendre , l’étoit encore envers la masse de ses créanciers
d ’une somme bien plus considérable. Cette dette active de la masse,
jointe à la valeur de la charge de contrôleur contre-gard e de la
M o n n oie, étoient les seuls effets que César de Nervo possédoit,
et qu’il avoit abandonnés à ses créanciers. J’aurai tout dit sur les
faits qui 11’ont qu’un rapport indirect à la contestation entre le
citoyen Gaultier et le citoyen Corléas, lorsque j ’aurai rappelé que
celui-ci lu t nommé syndic de la masse des créanciers de César de
N ervo ; il n ’en étoit personnellement ni débiteur ni créancier,
puisqu’il avoit passé à M . votre père l’ordre de l’obligation qu’avoit
contractée en sa faveur César de Nervo , cl qu’enfin il 11’étoit
comptable qu’à la masse de ses créanciers, et nullem ent au cit.
Gaultier çn particulier, de la mission qu’elle lui avoit donnée*
�.
.
.
(
a
4
)
.
C e premier point bien é c la irc i, voyons donc sur quoi Gaultier
a fondé la demande en garantie qu’il a formée contre lu i , et lais
sons même de çôté tous les faits relatifs à la mauvaise procédure
faite pardevant le premier ju g e , puisque je me suis expliqué déjà
à cet égard ; les faits dont je vais rendre compte sont vraiment
ceux de la cause.
L e citoyen Gaultier devoit au citoyen M ognat une somme de
3o,ooo liv. il c r u t, sans doute , que le titre de député à l’assem
blée , se disant constituante, exigeoit qu’il fit preuve de son res
pect et de sa soumission aux décrets émanés de toutes les assemblées
passées et futures. En conséquence, il é criv it, le 4 floréal an 4 >
au citoyen C o rlé a s, une lettre concue dans les termes suivans :
«
«
« J’espérois que vous me feriez connoltre la réponse du citoyen
M ognat, etc. etc, etc. Je ne suivrai pas même le plan que j’ai
formé de me libérer à échéance j veuillez m ’annoncer de suite,
si vous êtes dans l’intention de vous libérer envers ma fem m e,
parce que si cela ne vous convenoit p a s , j’enverrois la totalité
«
»
« des fonds ; tandis que je me b o rn erai, dans le cas co n traire,
« à faire passer le supplément ;
« J’attends votre réponse très-prochaine ; et si le cit. Mognat
« refusait ce payem ent, f espère que vous voudrez bien remettre
« à un homme d'affaires les fonds que je vous enverrai , pour
« qu’ il soit en état de réaliser ses off res. »
J’ai cru , citoyen , devoir citer les fragmens de celte lettre, parce
qu’ils expliquent d’une manière claire et précise les intentions du
citoyen Gaultier , la nature et le genre des services qu’il prie le
citoyen Corléas de lui rendre , qu’il indique à celui-ci ce qu’il doit
fa ir e , et enfin qu’ il lui laisse le soin de choisir tel défenseur offi
cieux qu’il voudra, si le citoyen M ognat refuse le remboursement
qu’il veut lui faire.
V otre mémoire à consulter contient le précis des autres lettres
qu’il a écrites au citoyen Corléas ; toutes se rapportent à celle cidessus : vous avez même eu l’attention de m ’envoyer la copie des
réponses qu’il a faites à Gaultier. 11 résulte de cette correspon
dance
�.
. . .
.
c 2 5 }
.
.
.
dance suivie par ce dernier avec chaleur > qu’il n ’a jamais entendu
demander au citoyen Corléas cju’un service d ’am i; ¡1 résulte encore
que celui-ci a suivi ponctuellement ce qui lui étoit prescrit, que
Gaultier a approuvé formellement tout ce qui a été f a it , notam
ment le choix du citoyen Verdun , en qualité de défenseur offi
cieux ; il résulte enfin , que pour éviter toutes difficultés sur le
défaut de pouvoir de ce défenseur pour faire les offres réelles au
citoyen M ognat, et pour en cas de refus de sa part de les accepter,
poursuivre la consignation que Gaultier vouloit être fa ite , il a
envoyé au citoyen Verdun une procuration, et qu’il a prié le cil.
Corléas de lui faire passer les fonds nécessaires.
Une triste fatalité a ravi au citoyen Verdun la satisfaction de
faire preuve de son respect et de sa soumission pour les décret#
de l’assemblée nationale, et voici pourquoi et comment.
' L e greffier du juge de paix chargé de citer pardevant ce juge le
citoyen M o g n a t, à l’effet de voir ordonner la consignation des
5 o,ooo fr. valeur en papier-m onnoie, fit la citation à la requête
,du citoyen Verdun. Cette citation ne valoit rien , parce q u e, sui
vant nos anciens principes, les rois seuls plaidoient en France par1
procureurs : aussi le citoyen M ognat ne tint pas compte de cet
acte. L ’erreur de droit fut reconnue et réparée ; mais le citoyen
Mognnl chercha et réussit à gagner du temps.
D ans l’intervalle qui s’écoula entre les premières procédures
faites pour parvenir au terme désiré de la consignation, et entre
la sentence qui l’ordonna, intervint un décret de l’assemblée na
tionale, qui ordonna que les articles II et III de celui rendu le
i 5 genninai seroient rapportés. Ce décret fut publié en celte ville
le 29 messidor , et ne permit pas au receveur des consignations de
recevoir les promesses-de mandat que le citoyen Gaultier avoit été
autorisé de consigner. C et événement étoit vraiment de nature à
lui inspirer beaucoup de tristes réflexions sur ^instabilité des choses
humaines qui faisoient'avorter les projets les mieux conçus. Mais
ce soroit une grande question, que celle de savoir si le citoyen
Gaultier fut plus sensible à ce que la fortune ennemie lui ravissoit
D
�)
. .
. . ( 26 ^
,
le plaisir de prouver son civisme , ou de ce qu’elle le privoit d ’un
bénéfice de 7 à 8,000 fr. par la différence entre le papier-monnoie
et l’argent monnoyé.
Pour ca lm e r, dans l’un ou l’autre cas , les regrets du citoyen
G au ltier, je lui dirai qu’en supposant que la consignation eût été
effectuée, c’eût été une autre question au moins aussi difficile à
résoudre que la précédente: Si une loi à laquelle un citoyen s’est
soumis malgré lu i, etiam învitus, mais dont il n ’a pas pu empêcher
l’e ffe t, ne le met pas dans le d ro it, les choses étant encore en
tières , de se prévaloir des dispositions d’une loi postérieure , qui
s ’e st rapprochée infiniment davantage des sentimens de justice que
la précédente, qui ne dut le jour qu’à la nécessité, et q u i , sous ce
point de v u e , portoit avec elle un caractère de réprobation. Je
pourrois en dire davantage, mais je n ’en ai pas besoin pour combattre,
la demande en garantie formée p ir le citoyen Gaultier contre le
citoyen Corléas.
J’observerai d’abord que s’il eût pris la peine de recourir aux
instituts de Justinien, qu’il doit connoitre , puisqu’il est avocat, il
eût vu la différence qui existe entre le mandat qui se fait pour
l’utilité seule du m and ant, et les quatre autres espèces qui se fo n t
pour l’utilité d’autres personnes, et que le mandat dont est ques
tion , purement gratuit et fondé uniquement sur un office cl’a m i,
ne peut pas êlre dommageable pour le m andataire, excepté dans
le cas de fraude de sa p a r t, ou d’une négligence telle qu’elle peut
être comparée au dol.
S ’il eût consulté ensuite les premiers principes de notre droit
français, et les auteurs qui les ont recueillis et rassemblés, il auroit
appris que parmi nous , comme parmi les Romains , le mandat qui
se fait pour l’utililé seule du m and ant, ne produil pas d’autres
effets que la procuration , et que les deux mots sont synonymes.
En effet, la procuration est un acte par lequel celui qui ne peut
pas v a q ue r lui-même à ses affaires donne pouvoir à un autre d’agir
pour lui comme s’il étoit présent : on peut la dons er non seule
ment par un acte en form e, mais encore par une simple lettre, ou
�.
.
^ 27 ^
même par un b ille t, ou par une tierce personne chargée de faire
savoir les intentions du mandant.
Si celui à qui on a donné le pouvoir l’accepte ou l ’exécu te, le
consentement réciproque forme la convention, ainsi que les engagemens qui en sont les suites.
Dans le cas où la procuration donne un pouvoir indéfini au man
dataire, c’est à lui à y mettre les b o rn es, et à en fixer l’étendue,
d ’après ce qu’on doit raisonnablement présumer de la volonté de
celui qui l’a donnée.
A insi le pouvoir de recevoir ce qui est dû renferme celui de
donner quittance, et le pouvoir d’exiger une dette renferme celui de
saisir les biens du débiteur ; mais il ne donne pas celui de transiger.
Com m e la fonction du procureur fondé est un office d ’a m i,
elle ne peut ni ne doit lui être dommageable ; il ne sauroit être
condamné en son propre et privé nom à la garantie, à moins qu’il
ne s’y soit obligé, ou qu’il n ’ait commis quelque faute ou d o l, ou
que la négligence de sa part ait été telle qu’elle puisse être com
parée au dol.
Ce sont là les premiers principes de notre droit fran çais, con
formes à ceux du droit romain. Que le citoyen Gaultier lise la
correspondance qui a existé entre lui et le citoyen C orléas, prin
cipalement les lettres qu’il lui a écrites pour le prier de lui rendre
service ; qu’il se rappelle la procuration qu’il a donnée au citoyen
V e rd u n , son défenseur officieux, et qu’il se juge lui-m êm e; il
rougira de l’injustice de ses prétentions ; bien plus encore de la misé
rable chicane d ’avoir voulu métamorphoser une simple procura
tion , qui n’avoit d ’autre objet que ses propres intérêts, en une dé
légation qui prend sa source dans le droit c iv il, tandis que le simple
mandat dérive du droit des gens.
L a différence entre ces deux espèces de contrat eût dû suffire
seule pour l’éclairer sur leurs différens effets.
L a délégation est un acte par lequel un débiteur donne à 'so n
créancier un autre d ébiteur, lequel s’engage en son lieu et place
envers le créancier.
�■
.
<
2 8
}
.
Elle sera encore, si l’on veut , une espèce de cession par la
quelle un débiteur substitue à sa place un autre débiteur, au moyen
de quoi le débiteur délégué promet de payer à celui qui lui est
indiqué ce qui lui est d û ; elle exige par conséquent le consente
ment de trois personnes; savoir: du débiteur qui délègue; de son
débiteur qui est délégué, et du créancier du débiteur qui a fait la
délégation.
' L e m andat, au contraire, n ’a besoin pour être parfait, que du
consentement du mandant et du mandataire.
Com m ent le citoyen Gaultier peut-il concilier avec les principes
que je viens d’exposer, son système erroné de délégation,' ou
pour mieux d ire, de mauvaise foi et d’ingratitude ? II étoit le débi
teur du citoyen M ognat; mais quel autre débiteur a-t-il présenté
à sà place à son créancier ? Ce ne peut pas être le citoyen Corléas ;
Car célui-ci ne devôit rien personnellement à Gaultier ; quand il
lui auroit ’dû , il eût fallu que le citoyen M ognat eût donné son
consentement â cette subrogation d’un débiteur à un autre : quoi
que la famille du citoyen Claude C h arco t, ou si l’on veut son fils
àinë', fû t débiteur en reste du prix des immeubles- que le père
commun avoit achetés ; cependant il ne l’étoit pas du citoyen
Gaultier en particulier; il l’étoit de la masse des créanciers de
César de N ervo. S’il a fourni la somme de 16,875 francs pour
compléter les offres réelles de 5 o,ooo fr. c’a été par une suite
des’ arrangemens pris entre lui et le citoyen C o rléas, qui seul
aVoit le droit d’exiger cette somme des héritiers de Claude Charcot ;
aVilleuris, que'Gaultier 'établisse donc que le citoyen Mognat avoit
ebiisenti à ce 'changement de débiteur : certainement dans les ter
mes ;ôù 11 en étoit avec G aultier, il ne lui auroit pas donné ce consentementj-la prétendue délégation n ’exista jamais que dans ¿’ima
gination avide de G au ltier: c’est 1111 être de raison. Il ne seroit
pas tombé dans uné_ si grande erreur, s’il eût été instruit d ’un
a u t r e ' principe également certain en cette matière : c’est que la
simple indication'faite par le débiteur de la personne qui doit
payer en son gcqu it, n ’opère pas une novation.
* •>
II
�( 29 )
Il
en est de même de la simple indication faite par le créan
cier d’une personne qui doit recevoir pour lui. L a délégation ne
peut être parfaite que par le consentement des trois personnes
qui doivent concourir à son complément.
Actuellem ent que la question a été discutée à la form e et au
fond , qu’il me soit permis de demander au cit. Gaultier com
ment il pourra soutenir la validité de la sentence par défaut
rendue dans le tribunal de première instance , qui a condamné
le citoyen Corléas à l’acquitter et garantir des condamnations
prononcées en faveur du citoyen M ognat, et comment celle sen
tence à pu prononcer le passer outre. Je ‘suis si intimement per
suadé qu'elle a mal et nullement ju gé, que si le procès me
regardoit personnellement, je demanderois des dommages et inté
rêts au profit des pauvres, pour raison «de l’exécution provisoire
que le citoyen Gaultier a voulu lui d o n n er, et qu’il lui auroit
donné réellem ent, si le citoyen Corléas eût eu des meubles qui
lui appartinssent. 1
'■’ <> ■
>’
'
Je me repens presque \ citoyen , d ’avoir discuté aussi longue
ment cette ridicule et injuste contestation, qui n ’est qu’une mi
sérable chicane d ’un praticien avide et renforcé.
C e p e n d a n t, quelque1 longue que soit ma lettre, je ne saurois
la finir'sans vous a^oir tranquillisé sur la crainte quc'vous pour
riez avoir que le public n ’envisageât sous un point de vue défa
vorable, le payement que vous.avez fait des 16,876 fr. avec des
papiers-monnoie entre les mains du citoyen Corléas, qui a remis
cette somme au cit. V erd u n , défenseur officieux de G au ltier,
en vertu du pouvoir que celui-ci lui avoit' donné ¿--ainsi qu’il est
justifié par sa procuration et par la quittance qu’en a passée ledit
Verdun. «
’L
Après avoir loué les sentimens d’honnêteté et de délicatesse qui
vous inspirent cette crainte , je pourrois me borner à vous dire,
•volo.nli non f i t injuria ; mais je vous dirai quelque chose de plus.
Com m ent auriez-vous pu refuser au syndic de la masse des créan
ciers, parmi lesquels Gaultier figur.ôit pour une somme considéE
�(30)
rab le, le payement d'une somme due par M . votre pere et par' ses
cohéritiers , depuis long-temps? Com m ent auriez-vous trouvé sur la
place une somme de 16,876 fr.. valeur en écus , tandis que les
maisons de commerce les- plus accréditées n ’auroient pas trouva
à, emprunter 6,000 fr. en argents Sur le to u t, la générosité que
vous avez eue de ne pas offrir à la masse des créanciers de C ésar
de Nervo d u papier -m onnoie en payement de ce que vous lui
deviez ,. ne peut pas laisser le moindre ombrage sur votre conduite :
c ’est au citoyen Gaultier, qu’est dû un pareil' reproche. Il a voulu
faire une opération d’agio teur;. il a été puni par l’endroit où il a
péché ; il n ’y a pas grand m al à cela : c’est vraiment justiceJ.’espère que le jugement qu’obtiendra le Gitoyen Corléas sera le
complément de cette même justice , qui punit les chicaneurs et les
ingrats.,Dans tous le s cas., les cohéritiers de M . votre père et vous
en particulier, cito y e n , devez être à l’abri de toute inquiétude,
parce que vous ayez payé entre les mains- de celui qui seul a v o it
droit de recevoir; aussi le citoyen Gaultier n’a pas osé vous atta
quer dormez donc tranquillement sur les deux oreilles. Commeje n ’ai jam ais caché ma manière de penser- sur les affaires dontj’’ ai cru devoir me m êler, vous pourrez faire tel usage qu’il vous
plaira, de m a réponse; je vous renvoie toutes les pièces que vous
m ’avez, confiées, et je vous renouvelle avec plaisir, cito yen , les:
assurances des sentimens que je vous ai voués.
S ig n e ,
T O L O Z A N , l ’ a în é , ci-devant maître des requêtes.
et intendant du commerce.
Je certifie que la présente c opie e st conform e' à la m inute de
ma lettre.,
T O L O Z A N ,
À R
io m
de l ’im prim erie' de L
a n d r iot
d’appel..—
, im prim eur du trib un al'
An 9
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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[Factum. Gautier. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Copie des lettres du citoyen Gaultier, aux citoyens Charcot-Corlèas et Charcot-Franclieu.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1759-An 9
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0120
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0119
BCU_Factums_M0118
BCU_Factums_G1114
BCU_Factums_G1112
BCU_Factums_G1113
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Lyon (69123)
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Domaine public
assignats
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66a3fe73b78fcdd6eac2b36df6ea4936
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MÉMOIRE
POUR Je a n -C
laude
C H A R C O T -C O R L É A S ,
habitant de la ville de L y o n , ap p elan t de d eu x Tribunal
ju gemens r e n d u s , l’un au ci-d e v a n t tribunal civil
d'appel de
du d ép artem en t de l’A i n , le 2 1 v e n tô se an 8 R i o m
l' autre au tribunal civil de p rem ière instance ,
Séant a B o urg , chef-lieu du d é p a rte m e n t de
l'A in , le 2 3 prairial an 8.
C O N T R E A n t o i n e -F r a n ç o i s G A U L T IE R ,
J u g e au tribunal civil de première instance du
departement de la Seine , et dame Ma g d e l a i n e
N E R V O , son épouse, habitans de la ville
de P a r i s , intimés.
de
Le jugement de cette affaire appartenoit naturellement
au tribunal d' appel séant a L yo n ; le citoyen Gaultier a
c ru devoir récuser ce tribunal, par des motifs qui lui sont
personnels. Il s est pourvu au tribunal de cassation, en
•
A
'
1
�( 2 )
e
f
vertu de l’article L X V de la constitution , pour obtenir
son renvoi devant tout autre juge.
,
Un premier jugement du tribunal de cassation , du 21
vendémiaire an 9 , avoit renvoyé la cause devant ie tri
bunal d’appel séant à Dijon.
L e citoyen Charcot-Corléas, mécontent de ce premier
choix , soit à raison de l’éloignement, soit par d’autres
motifs qu'il est inutile d’expliquer , s’est pourvu à son tour
au tribunal de cassation , a été reçu opposant au jugement
du 21 vendémiaire, et en a obtenu un second le 21 n i
vôse an 9 , qui renvoie les parties devant ce tribunal, pour
y être statué sur l’appel interjeté par le citoyen Charcot
des jugemens rendus à B o u r g , département de l’Ain.
Ces préliminaires sembleroient annoncer une cause trèsimportante , des questions difficiles à résoudre, ou qui
intéressent l’ordre p u b lic, pour lesquelles sur-tout on doit
être exempt de toutes préventions : il n’est cependant pas
de cause plus simple.
L e citoyen Gaultier, ci-devant député à la convention
nationale, avoit emprunté du citoyen Mognat de l’Ecluse,
le i er juin 17 9 3 , une somme de 30,900 francs assignats,
payable au 1e1' juin 1796.
Quelque temps avant l’échéance du term e, le citoyen
G a u llier/o rw e le plan de se libérer en mandats envers
son créancier.
I! existoit des rapports d’alliance, d’affaires et d’amitié
m ire le citoyen Gaultier et le citoyen Charcot-Corléas.
L e citoyen Gaultier prie ce dernier de vouloir bien se
charger de faire ce remboursement au citoyen Mognat.
Suivant le citoyen Gaultier, les mandats devoient gagner
�. . .
(
3
}
.
p rod igieu sem e n t ; le corps lé g is la tif, d o n t il ¿toit m e m b r e ,
devoit prendre des moyens pour leur donner la plus grande
faveur et le plus grand crédit.
Il n’imagine pas que le citoyen Mognat soit assez dé
raisonnable pour /refuser un remboursement aussi avan
tageux.
'
Si le citoyen Mognat entendoit assez peu ses interets
pour ne pas accepter, le citoyen Gaultier prie alors le
citoyen Charcot de charger un défenseur officieux de faire
faire des ofFres réelles au domicile du c i t o y e n Mognat, et
de faire prononcer , en cas de refus, la permission de con
signer les sommes offertes.
'
^6 citoyen Mognat n’a pas été de l’avis du citoyen
faultier ; il a fallu en venir à des ofFres réelles, obtenir
lîn jugement qui permettoit de consigner. Dans l’inter
valle du jugement à la consignation, est arrivé un décret
qui, au lieu de donner une grande valeur aux mandats ,
a suspendu les remboursemens ; le receveur a refusé la
consignation le citoyen Gaultier n’a pas été libéré.
l i e citoyen M o g n a t a pris de l’ h u m e u r , a p o u rs u iv i
le citoyen G au ltier en p a ye m en t de ses Billets échus. L e
citoyen G aultier a im ag in é d’e x erce r u n e dem ande en g a
rantie contre le citoyen C h a rco t-C o rléa s : il a fait p ro n o n c e r
cette garantie par le ju g e m e n t d o n t est appel.
L a p réten tion du citoyen G a u ltie r est-elle f o n d é e ? tel
est i’tibrégé de la contestation q u i s’é lè v e entre les parties.
Cette dem ande est e x tra o rd in a ire et p e u réfléchie. T/ap
pelant espère de la com battre avec succès ; mais elle en
traîne avec elle d’assez longs détails : elle e x ig e certain
d évelop p em en t. Il est sur-tou t essentiel de faire c o n n o ilre
A n
�(4)
l’origine et la nature des rapports qui ont existé entre les
parties.
Jean César de N ervo avoit épousé en premières noces,
une demoiselle Hodieu. L e père de la future épouse cons
titua à sa fille , à compte de ses droits dans la succession
de la dame Berthelon , sa mère , une somme de 21,000 frPo u r acquittement de cette constitution , le père vend à
César de N ervo , son gendre , la charge de contrôleur
contre-garde de la monnoie de L y o n , dont il étoit pourvu.
Cette vente est faite moyennant la même somme de
21,000 fr. dont le mari fournit quittance.
D eux enfans sont issus de ce premier mariage, Benoît
et Magdelaine r cette dernière a épousé le cit. Gaultier.
César de N e r v o , devenu v e u f, a contracté un second1
mariage avec Louise Charcot , .fille de Claude Chareot
aîn é, et plusieurs enfans sont provenus- de cette seconde
union.
L e 17 octobre 1785 , César de Nervo et Louise Charcot,,
son épouse , empruntèrent et consentirent une obligation
solidaire de la somme de 8,000 fr. à l’ordre du cit. GharcotCorléas , appelant ; ils souscrivirent également à son profit
deux promesses d e '27 5- fr. chacune, payables en fête des
saints des années 1788 et 178g. Cette obligation et lespromesses étoient stipulées à ordre, et le citoyen Corléas
passa cet ordre a Claude Charcot a în é , beau-père de César
de Nervo.
;
■
L e 5 septem bre 1789 V César de N e r v o v e n d it à C la u d e
C iiu rc o tj son b e a u - p e r e , une maison sise à L y o n , et u n
d o m a in e
dans la commu-ne de l o u t a i n e , m o y e n n a n t
68,800 fr. , d ont son beau-père resta débiteur7
1
‘
�(5 )
A cette époque , les affaires de César de N ervo étoienfc
dans le désordre. Il cessa , bientôt après , ses payemens ;
ses créanciers acceptèrent l’abandon de ses biens par un
contrat d’union , commencé le 4 décembre 1789 , clos
le 20 janvier 1790, et homologue.
César de N ervo ne possédoit alors que sa charge de
contrôleur ; son beau-père n’avoit acquis ces biens, comme
on l'expose dans le traité d'union , que pour éviter les
frais d’une vente judiciaire. Malgré qu’il fut créancier ,
il offre lui-même de rapporter à la masse le prix de son
acquisition, et tout cela étoit insuffisant pour couvrir la
faillite de son gendre.
C o m m e il n’y avoit rien à g a g n e r , a u c u n des créan
ciers ne v o u l o it se charger d’être syndic. L e cit. Corléas,
allié de César de N e r v o , par u n e affinité éloign ée,
accepta g é n é re u se m e n t cet emploi de synd ic, et l’a tou
jours ex e rc é gratu item ent.
L e citoyen Gaultier , gendre du failli, figure dans 1acte
d'abandon; mais le citoyen Corléas, en sa qualité de
syndic, n’étoit comptable qu’à la masse des créanciers , et
non au citoyen Gaultier. L e citoyen Corléas, d’ailleurs,
loin d’être débiteur personnel,, étoit au contraire créan
cier de César de Nervo.
*
Comme syndic , il a versé dans les mains des créanciers
les sommes qu’ il a reçues, même à des créanciers posté
rieurs au citoyen Gaultier r et du consentement de ce der
n ier, qui croyoit trouver une sûreté, suffisante pour ce
qui lui étoit d û , dans la valeur de l’office de contrôleur
de la monnoie , dont son beau-père étoit encore pourvu.
S u iv a n t le citoyen G a u ltie r lu i-m ê m e
r
les créances cju il
�croyo’t avoir i répéter sur les biens de son beau-père, se
porloient ¿\ la somme de t 5 , 2 62 francs : le citoyen Corlé; S
en étoit débiteur, comme syndic. Les choses étoient en
cet é ta t, lorsque le citoyen Gaultier emprunta du citoyen
Mognat , le I er. juin 1 7 9 3 , une somme de 30,900 f'r.
on n’a pas oubl ié que le payement de cette somme devo it échoir en juin 1 7 9 6 .
L e citoyen Gaultier vouloit se libérer en mandats en
vers Son créancier; il lui avoit annoncé ce projet, mais
il ne fecevoit point de réponse. Alors il s’établit une cor
respondance suivie entre le citoyen Gaultier et le citoyen
Charcot-Corléas.
C ’est cette correspondance qui donne lieu à la contes
tation soumise au tribunal; il est donc nécessaire d’en
faire l’analyse : on joindra d’ailleurs les lettres originales
au mémoire.
, Dans une première lettre du 4 floréal an 4 , le citoyen
Gaultier écrit : « J'espérois que vous me feriez cor.noître
« la réponse du citoyen M ognat.......J e rien suivrai pas
« moins le plan que j'ai formé de me libérer à Téchéance j
c< veuillez 'm'annoncer de suite si vous êtes dans l’intenc tion de vous libérer envers ma fem m e, parcp que si.
» cela ne vous convenoit pas, j'enverrois la totalité des
« fonds, tandis que je me bornerai , dans le cas oon« traire, à faire passer le supplément.
« J ’attends‘votre réponse très-prochaine ; et si le ci
te ’ loytJn Mognat refusoit son remboursement, j’espère
« que vous voudrez bien remettre à Tin homme d'affaires
c liis fonds que je vous enverrai, pour qu'il soit en état
« de'réaliser’ les offres. » '
'
'
�( 7 )
'
« J e vous répète que m o n in ten tion n’est pas de co n « trarier vos projets p o u r le r e m b o u r s e m e n t ; mais il
« m ’im p o rte de savoir à q u o i m ’en t e n i r , p o u r q u e je
«f puisse m e liq u id e r vis-à-vis le citoyen M o g n a t.
D a n s u ne lettre du 6 prairial s u iv a n t, le, cit. G a u lt i e r ,
après a v o ir énon cé les som m es d on t il se croit créancier
de l’abandon de son b e a u - p è r e , d it : » «Je vou s ai an n on cé
que m o n intention étoit d’e m p lo y e r le reliquat à m e
R lib é re r envers le c ito y e n M o g n a t ; je n’ai pas d u con« sidérer l’avantage q u e vo u s y t r o u v i e z , parce que la
K loi est précise. »
,
Q uel avantage p o u v o it tr o u v e r le citoyen C o i’léas à ce
rem boursem ent ? Il n’ étoit pas d é b iteu r p erson n el du
citoyen G a u lt i e r ; il n’ étoit c o m p ta b le q u e c o m m e syndic
des créanciers N e r v o . T o u t l'avantage d u re m b o u rsem e n t
tournoit au b én éfice du fa illi, et non. du syndic.
L e citoyen G au ltier ajoute, par la m ê m e lettre : « D e k v a n t au citoyen M o g n a t 30,900 francs qui d o iv en t ê tre
« x’éduits à 2 3 ,1 7 5 fr a n c s , déduisant les 15 ,2 6 2 francs
« dont je vo u s crois d é b it e u r , il m e restero it 7 ,9 1 3 fr.
« à vo u s e n v o y e r ; je tro u v e p lu s -e x p é d ie n t de vo u s en
« v o y e r u n m andat de 10,000 fr a n c s , parce q u e vo u s
<r m e ferez raison de 2,087 francs.
E t s i , contre son attente , la créance de M o g n a t n’étoit
réduite p a r sa date , d o n t il est in c e r ta in , q u ’à 26,865 fr.
alors C lia rco t-C o rlé as a u ro it à avancer 1,623 francs q u ’il
lui adresseroit tout de suite.
E n fin , le citoyen G au ltier term ine ainsi : « Si le cir
to yen M o g n a t a v o it v o u lu r e c e v o ir à P a r is , je v o u s
�.
.
.
c 8 )
. .
,
.
« aurois é v ité tous ces e m b a rra s ; mais il ne r é p o n d rien
« h tout ce qu’on lui écrit. »
L e citoyen Gaultier, très-actif dans sa correspondance,
écrit le 8 prairial, pour annoncer l’envoi des 10,000 fr.
en mandais, et ajoute : « Je prends encore la liberté de
<r vous adresser ma procuration , pour retirer mes billets
« ou faire faire des offres, dans le cas où le cit. Mognat
« ne voudroit pas les remettre.......Si l’on en vient à des
«■offres réelles, vous remettrez ma procuration à un
« homme- d!affaires qui aura votre confiance; l’huissier
« réalisera 23,175 francs, et il déclarera qu’il est encore
« porteur d’une somme de 3,690 francs qu’il offre de
« payer dans le cas où le citoyen Mognat prouvera, par
« la représentation des billets, que leur date est anték rieure au 1 e1'. juin. A u surplus, la personne de con
te fiance que vous aurez chargée de cette affaire, dirigera
«- l’acte d’offres. J e vous renouvelle mes excuses de
« cette commission ,* j’espère cependant qu’elle ne vous
« entraînera pas h des peines que je voudrais vous éviter,
« parce que le citoyen Mognat se décidera î\ recevoir
c< son remboursement. »
C ’est dans cette même lettre que le citoyen Gaultier
d i t , en parlant de son créancier : « Il m’a prêté en as
« signats, je lui rends en mandats ; il ne peut s’en plaindre.
« Ce seroit d ailleurs une erreur de penser que toute es « pèce de papier cessera bientôt d'avoir lieu en France •
« c'est chose impossible : le système du gouvernement est
et au contraire Æaccréditer les mandats ».
Autre lettre très-laconique, du 14 prairial an 4 , par
laquelle il se contente de demander où en est le citoyen
.
Coi'léas,
�,
,
( 9 )
' '
_
■Corléas, pour la libération envers Mognat-Î’E d u s;'-, U
désire que tout soit terminé avant de faire un voyage qu’il
projette.
D ans u ne autre lettre du 20 prairial , le cit. G a u ltie r
m a n d e , entre autres choses :
«
J ’espère q u e le citoyen
■
« M o g n a t aura reçu son r e m b o u r s e m e n t, ou q u e vo u s
« lui aurez fait faire des offres: je désire savoir ce qu il
«■ea e s t , en vou s co n firm a n t que le gouvernement n est
« point- dans Tintention d'abandonner le mandat j il va
* même prendre des mesures pour lej'aire monter subi-« tentent ».
Autre lettre du 28 prairial an 4 . . . . . « Je vo u d ro is,
K avant de partir, apprendre que mes billets au profit
K du citoyen Mognat sont retirés, ou qu’il a été iait des
* offres réelles suivies de- consignation ; mon intention
*
est q u ’elles soient portées à la plus hau te s o m m e , p o u r
« être sûr de le u r suffisance : cette plus forte so m m e se« roit 26,865 francs. J e persiste à v o u s o ffrir l 'e n v o i ,
« courier par courier, de ce que vous aurez avancé, et
« j’espère que vous voudrez bien m ’inform er, le plutôt
« possible, de ce qui aura été fait. »
E n fin , lettre du 4 messidor suivant, au cit. CharcotCoïleas : « V otre lettre du 27 floréaj m ’annonce que l’on
« a pris le* parti de faire des offres au citoyen M ognal^ «■1 Ecluse, et qu a défaut de recevoir, il sera assigné pour
* voir ordonner le conseing.
« J espère que le citoyen V erd un donnera ses soins à.
« cette a ffa ire, et q u ’il1y m ettra l’a ctiv ité q u e l l e exige.
« Il importe de veiller à ce que toutes les formalités
soient bien rem plies, et à ce que la citation soit bien
B
-
�( 10 )
,
a faîteau véritable domicile du défendeur. Je vous prie
<r de communiquer ma lettre au citoyen Verdun. »
Ici se termine la correspondance du citoyen Gaultier-.
relativement aux offres; les lettres postérieures au relus
du citoyen M o gn at, sont inutiles à analyser : mais il est
bon de donner un extrait des réponses du cit. CharcotCorléas au citoyen Gaultier. Dans une première lettre du
S floréal an 4 , le citoyen Charcot-Corléas marque qu’il
11e croyoit pas que la créance due au citoyen Gaultier,,
sur les biens de son beau-père, fut aussi considérable ; il
doit s'occuper de faire le compte avec le citoyen Charcot-,.
et ajoute: «Vous pouvez cependant compter sur la somme
« qui vous sera due, pour la fin de m ai, pour servir à
« acquitter ce que vous devez au cit. M o gu at-l’Ecluse,.
« qui se trouve dans sa terre , à ce qu'on m ’a dit. Je lui
« ai écrit il y a une quinzaine de jours, de vous donner
« l'échéance de vos billets ou à m o i; je n’ai point eu de
a réponse. »
, Seconde lettre,, du 11 prairial an 4 r « Je fais passer
« votre lettre au citoyen M o g n a t , en lui marquant en
« même temps que j’ai les fonds nécessaires pour lui rem
« bourser vos billets d’après les lois. Je ne serois pas.
« étonné que ses agens fassent des objections r sur la ré« ponse qu.on fera, je vous en ferai p art, sauf à nous
« régler ensuite, s*il y a de 1 erreur dans le compte que
« vous m’avez envoyé. »
rIroisiem c lettre du 17 prairial an 4 , par-laquelle le
eîtoyen Charcot-Corléas annonce qu’il a reçu la procu
ration , et trois jours après les. i q , q o o iï\. mandat*»,, parune lettre chargée : « Je n’ai point encore eu de répouse;
�{ II )
l\ ma lettre a M ogn at; j’ai écrit à sa Femme, à l’ Ecluse,
« où on m’a dit qu’elle étoit. Si je ne reçois pas réponse,
« je remettrai votre procuration, u un deienseur officieux,
« pour (aire retirer vos billets, en lui en payant le mon
* tant; je vous les ferai passer ensuite ».
Quatrième lettre du 27 prairial. « J ai remis , il y a
* huit jours, au citoyen V e r d u n , défenseur officieux,
« pour 27,000 ir. mandats, pour présenter au citoyen
« M oguat, de qui je n’ai point reçu de réponse. On lui
c a fait signifier par un huissier, de recevoir le mon
* tant de ses billets à son domicile à Lyon j s il ne répond.
c pas, on les fera consigner, après avoir fait toutes les
ct formalités nécessaires. N'ayant point eu de reponse
cc pour savoir la date des billets, on sera obligé de conR signer 26,865 fr. à ce que je pense. Je verrai le cit.
tc V erd u n , que je n’ai pas trouvé avant hier chez lui j
« j'irai le voir aujourd’ hui ou demain. J ’ai vu M . votre
cc frère il y a trois jours; il a dû vous ecrire que j avois
ce remis votre affaire à un défenseur officieux j je vous
a instruirai de ce qui sera fait ».
k
C in q u iè m e lettre du 11 m essidor an 4. « L e citoyen
* M o g n a t il été assigné à L y o n dans la m aison q u ’il a
« eue de son p è r e
après sa m o r t *, il a le d om icile de
* son père: on m’a dit que sa femme y étoit il y a six
ce semaines. Il a été assigné pour comparoître devant le
« juge de paix ; comme il se trouve en campagne , on
« lui a donné huit jours : c’est le 12 de ce mois*, s’ il ne
ce vient p as, il sera condamné par défaut ; s’il paroît qu’il
k veuille recevoir, on payera tout de suite ; s’il rehise ,
« il sera cité devant le tribunal; s’il ne se présente pas,.
.
B 2
�( 12' J
^
« on le fera condamner' par défaut, et tout eïe suite'
« consigner. Les juges donnent pour l’ordinaire un mois*
« de délai : on ne négligera rien pour faire terminer
« a u plutôt ».
„ ,
Sixième lettre du 27 messidor an 4. « Il y a eu quel« que retard à la sentence, par un défaut de forme du:
« juge de paix, dans la cédille de citation qu'il a fait
« donner au citoyen M o g n a t, en la mettant au nom du
« fondé de pouvoir, .(le citoyen V e rd u n ). Mognat ne
a s’étant pas présenté, on a été obligé de lui foire donner
« une nouvelle citation régulière, qui étoit pour le 22;
« 11e s'étant pas présenté, on a porté l’affaire au tribunal:
« ou a obtenu une sentence pour qu’il ait à recevoir,,
et et à défaut de le faire, permission de consigner dix
« jours après la signification; comme il y a apparence qu’il:
« ne se présentera pas pour recevoir, on fera consigner«■le 8 ou le 9. thermidor. Comme je dois partir avant
« ce temps pour Belley, de là. à A i x , le citoyen V e rd u n
«• vous fera part de ses démarches >1.
Dernière lettre datée d 'A ix , du 19 thermidor; « J ’envoie
u votre lettre ii mon cousin à Lyon,, pour faire ce q u i
« sera nécessaire pour retirer du citoyen Verdun les p ro «■messes de mandats s’il ne les a pas consignées : ce nesfc
v pas tout a fait la faute du citoyen- V e rd u n , s-il y a eu:
f< ernnir dans la citation; c’est celle du greffier. L e-cit.
u Verdun m a paru très*-ail’ecté de cette erreur, qui a
« occasionne le retard; j’en, suis fâché en mon particu
le lier ».
Tel est f extrait de la correspondance qui a eir lieui
entre fiiitnnc et l’appelant. On peut apprécier par la.lai
�C 13 )
nature des engagcmens qu’a contractas le cit. ClïarcotCorléas. C’est à titre gratuit, à titre d’amitié et de com
plaisance, qu’il a bien voulu se charger d’agir pour un
remboursement qu’ il n’approuvoit pas; il n ÿ avoit aucun
intérêt personnel. Mais le citoyen Gaultier ayant témoigné
le désir le plus ardent de se lib ére r, le cit. CharcotCorléas, pour l’obliger, demanda a u x héritiers de Claude
Charcot aîn é, la somme de 16,875 fr. en promesses de
mandats territoriaux, qu’il réunit avec les 10,000 fr. en-voyés par Gaultier au citoyen V e r d u n , à qui il avoit
donné la procuration du citoyen Gaultieiv
■Le citoyen Verdun , en recevant cette som m e, en,
fournit quittance le 24 prairial an 4 ; il n’est pas inutile
de faire connoître comment est conçue cette quittance^
Verdun reconnoît avoir en sou pouvoir une somme de
* 6, 87 6 fr; en promesses de mandats territoriaux , à lui
remise pour le compte dn c it oye n Gaultier, par le cit.
C h a r c o t - C o r l é a s , qui déclare c o m p t e r cette somme en
t acquit des héritiers de Claude C h a rcot , et pour solde
de ce q u ils restent devoir tiu citoyen G aultier, pourles droits de reprise de la daine de jNervo', son épouse,
sur les biens délaissés p arle citoyen d e N e rv o , son p è re,
se réservant toutes reprises contre le citoyen G aultier,
si cette somme excède ce que les héritiers Charcot peu
vent lui devoir. lie cit. Charcot déclare eh outre que
cest sur 1 invitation du citoyen Gaultier, qu’il fait ladite
remise de fonds, que V erd u n reçoit pour remplir le but
de la procuration de ce dernier, en date du 8 du cou
rant, et q u ia été remise au citoyen Charcot.
D eu x jours après r c’est-à-dire 7 le 2,5 prairial an 4, ^
�( 14 )
a
citoyen Verdun fit faire des offres réelles à la requête
du citoyen Gaultier, au domicile du citoyen M o gn at,
de la somme de 26,865 fr.
Su r le refus de r e c e v o i r , et le 6 messidor suivant, le
citoyen Mognat fut cité au bureau de paix.
. L e 12 messidor, procès verbal de non comparution
dressé c o n t r e Mognat ; le lendemain 1 3 , citation pardevant le tribunal; aux fias d'être autorisé à consigner la
somme offerte.
On s’aperçoit bientôt après cette première procédure,
que la citation du 6 messidor étoit irrégulière et nulle ,
parce que le greffier rédacteur de la cédule, Favoit faite
au nom du citoyen V e r d u n , fondé de pouvoir du cit.
Gaultier.
. On ne peut pas plaider en France par procureur :
tout est de rigueur en matière d’offres; il étoit prudent
de recommencer; en conséquence le cit. V erdun fait
donner une nouvelle citation au bureau de paix, le 17
du même mois de messidor. L e 22 , procès verbal de
non comparution; le même jo u r, citation pnrdevant le
tribunal; le 2,5 messidor, jugement par défaut, q u i,
sur le refus de recevoir, permet de consigner. L e 28 du
¡même mois, signification de ce jugement, soit au cit.
M o g n a t, soit au citoyen Nivière-Chol, receveur.
L e 6 thermidor suivant, acte d’opposition au jugement
par d éfa u t, à la requête du citoyen Mognat.
.
L e 11 du même mois, acte signifié par V e r d u n , à
la requête du citoyen Gaultier, par lequel il déclare
qu’attendu .que le jugement rendu eu sa laveur porte
qu’il sera passé outre; nonobstant l’opposition, il va con-
�C
i5 )
signer ; en conséquence , il retire ses offres , et déclaré
qu’il consignera le même jo u r, trois heures de relevée.
Cette journée fut fatale au citoyen Gaultier.
C ’est le même jo u r , n thermidor, que fut publié, à
L yo n , la loi du 29 messidor précédent, qui rapporte
les articles 2 et 3 de celle du i 5 germinal, suspend les
rcmboursemens , détruit le cours des mandats que le corps
législatif devoit accréditer, d’après l’assertion du citoyen
Gaultier.
Ce même jour , 11 th e r m id o r, le citoyen M ognat
réitère son opposition , et ose prétendre que , par une
précipitation inconcevable et contre toutes les règles
établies, ou veut exécuter le jugement au préjudice de
son opposition , mais qu’on ne le peut qu’après avoir
&it recevoir des cautions»
Ce même j:our , 11 thermidor , le receveur refuse de
recevoir la consignation, comme contraire ci la loi du 29
messidor , devenue obligatoire par sa publication.
L e 24 brumaire an 8 , citation de la part du citoyen
M o g n a t, contre le citoyen Gaultier et la dame de N ervo ,
son épouse , au bureau de paix de la ville de Bourg ,
domicile de droit du citoyen Gaultier, pour se concilier
sur la demande que le citoyen Mognat se proposoit de
former aux fins de payement, i ° . d’une somme de 11,287 f„
5o cent, à laquelle se trouve réduite , d’après l’échelle de
dépréciation du département du Rhône', celle de 32,750f.
montant de six billets souscrits par les mariés Gaultier
et de N e rv o , le I er. juin 1 7 9 3 , nu profit du citoyen
M ogn at, payables , savoir : le premier billet de 30,000 fr.
assignats, le ier. j,uja 179,6; les cin*j autres de 460 francs
�•
( 16 )
^
assignats chacun, payables Jes I er. juin et I er. décembre
des années 1 7 9 4 , 179$ et 1796; lesquels billets ont été
enregistrés le 2 thermidor an 6, et les signatures reconnues
au bureau de paix de la division de la place Vendôm e
à 'l Jai’is,t par procès verbal du 28 fructidor an 6 ; 20- de
la somme de 1,261 fr. 10 cent, pour intérêts échus jusqu’au
13 thermidor an 6 ,, et plus les intérêts échus depuis cette
époque.
L e 11 frimaire an 8, le citoyen Gaultier prend à son
to,ur une cédule du juge de paix de B ouvg, pour citer le
citoyen Çharçot-Corléas , domicilié à Lyon ; il soutient
dans, cette çédule avoir donué charge au citoyen CharcotCorléas, de. le libérer envers Mognat ; qu’ il lui a envoyé
à cet effet des fonds , q u i, joints à une créance qu’il avoit
sur Charcot , en sa qualité de syndic des créanciers
unis de César de IServo , devoient. suivre pour le libérer
envers Mognat. Il ajoute qu’il avoit indiqué cette créance
pour- être ajoutée avec les fonds par lui envoyés à l’acquitlement de ses billets; que le citoyen Charcot a accepté
la charge de le libérer; qu’il a même- fait procéder à des
offres réelles, et obtenu un jugement qui a autorisé la
consignation des sommes offertes. Il cri. conclut, que le ci
toyen Charcot doit lui rapporter la preuve de sa, libération,
et le garantir de toutes les demandes contre lui formées par
le citoyen Mognat.
L e citoyen Cliarcot-Corléas avoit cru, jusqu’alors que
les héritiers de Claude Charcot étoient valablement libérés,
par le payement cju ils avoient fait entre ses m ains, et sur
la demande du citoyen G aultier, de la somme de 16,876 f.
Jl se croyoit également quitte , en faisant de celte somme
l’emploi
�C Ï7 )
remploi q u e lu i a vo it in d iq u é le c ito y e n G a u ltie r ; et
certes , il ne présu in oit pas q u ’ il p û t jamais être e x p o sé
à deven ir garant du re m b o u rsem e n t d u citoyen M o g n a t.
Pourquoi d’ailleurs la procédure avoit-elle été commencée
par M o gn at, contre Gaultier, au bureau de paix de la
division de la place Vendôm e à P a ris, et re v en o it-o n
ensuite à Bourg sur cette même action?
Comment le citoyen Charcot-Corléas, domicilie à I<yon,
pouvoit-il être distrait de ses juges naturels, et traduit a
B o u rg? C ’est ce qu’il observa lors de sa comparution au
bureau de paix. Il soutint que le bureau de paix et le
tribunal de B ourg étoient incompétens, par la raison que
prétendue demande en garantie ne dérivoitpas du même
titre que la demande principale formée par le citoyen
Mognat contre le citoyen Gaultier •, qu’alors la demande
en garantie devoit former une action particulière , qui
pouvoit être portée qu’au lieu du domicile du citoyen
Charcot-Corléas.
• XiC citoyen Gaultier persista dans sa demande. U n pre
mier jugement du tribunal civil de B ou rg , du 21 ven
tôse au 8, renvoya la cause au 11 germ inal, lors prochain ,
et ordonna que dans ce délai, le citoyen Charcot-Corléas
communiqueroit, p arla voie du greffe, au cit. Gaultier ,
les procédures qu’il avoit fait faire au tribunal de L y o n ,
pour libérer ce dernier envers le citoyen M ognat, et autres
y relatives.
Ce jugement est motivé sur ce que le défenseur du ci
toyen Charcot-Corléas, avoit consenti à la c o m m u n i c a t i o n
demandée par le citoyen Gaultier.
L e défenseur du citoyen Charcot, n’avoil aucune mission
'
C
�( 1 8 }
..
. . .
p o u r d o n n e r ce consentem ent 5 la p rocu ration d ont il éloiiT
porteur, se bornoit à décliner la compétence du tribunal
de Bourg.
D ’ailleurs, ce n’étoit point le citoyen Charcot-CorléaS’
qui étoit nanti de cette procédure; elle étoit entre les
mains du citoyen V e r d u n , défenseur à Lyon , qui avoit
été cliargé par le citoyen Gaultier, ou de son consentement,,
de faire les offres , qui étoit porteur de la procuration1
du c it o ye n G aultier, avoit correspondu avec lui, et avoiC
fait toute la procédure en son nom.
L e citoyen Verdun avoit même très-expressément refusé'-au citoyen Charcot-Corléas de lui donner commu
nication de celte procédure sous le prétexte qu’elle appnrtenoit au citoyen Gaultier , et qu’il ne pouvoit eadisposer.
:
Aussi le citoyen Cliaucot-Corléas désavoua-t-il expres
sément d’avoir donné aucune mission à- son défenseur,,
pour consentir à cette communication.
L a cause portée à l'audience du tribunal d’arrondisse
ment de B o u rg , le 23 prairial an 8, le citoyen CharcotCorléas persista à> soutenir que l’action dirigée contre lui
étoit irrégulière et incompétente ; qu’il ne pouvoit êtreactionné qu’en sa qualité de syndic des créanciers unis,
de Jean-César de N e r v o , à raison des créances que le
citoyen Gaultier et son épouse prétendent réclamer.
Qu'ayant adhères au contrat d’union , ils étoient tenus,,
c o m m e créanciers, de suivre la procédure de discussion:
que l’acte d’abandon avoit nécessitée, pour être colloqués.
suivant I ordre et priorité de leurs, hypothèques..
Il observa, cju un syndic de créanciers n’agissoit jamais*
�,
t *9 )
qn au nom et comme mandataire de la masse , et 'ne
pouvoit être actionné personnellement.
Que dans le cas particulier , la demande formée par
le citoyen Mognat, contre le citoyen Gaultier et son épouse,
dérivoit de titres étrangers à la succession abandonnée
de Jean-César de N ervo •, qu’il ne s’agissoit que d’un
simple prêt d’assignats , et que le citoyen Charcot ne s’étoit
obligé ni directement, ni indirectement, au payement de
cette créance.
L e citoyen Charcot termina , en soutenant que la de
mande en garantie , que l’on prétendoit faire résulter
contre lui de la demande du citoyen M ogn at, lui étoit
absolument étrangère , ne dérivoit pas du même titre ;
qu ainsi il a vo it été mal à p ro p o s traduit au tribunal de
■Bourg,
I^e tribunal neut aucun égard à ces moyens. Ije citoyen
■Cliarcot-Corleas fut. déclaré non-recevable et mal fondé
dans son déclinatoire , et il fut ordonné que les parties
plaideroient sur le champ au fond : ^e citoyen Charcot est
condamné aux dépens de l’ incident.
Ce jugement de retenue est principalement m otivé,
i°. « sur ce qu d est de règle constante et invariable , que
« 1 on doitcxciper , à hmine litis, des exceptions péremp« foires, faute de quoi on n’est plus admis à le faire.
« On prétend pour second m otif, que l’exception tirée
« de l’incompétence du juge est de ce nombre.
(f On dit eu troisième lieu , qu’il résulte du jugement
« du 21 ventôse au 8 , que le citoyen Chai cot-Coi léas
c< s e3t écarté de celte règle } qu’il réi lame trop lard contre
c< la compétence du tribunal’ qu’i f l ’a implicitement re
C 2
�,
C 20 3 ^
^
^
« connu par l’organe de ses fondés de p o u v o ir, et quTiÎ
« y a fin de non-recevoir à lui opposer.
« Enfin , on ajoute qu'il est prescrit par l’art. V I I I du
« tit. V III de Tordonnance de 1667, que la demande en
« garantie doit être portée devant le tribunal saisi de la
« demande principale, lors même que la garantie seroit
« déniée être due; que d’ailleurs la demande en garantie.
« dont il s’a g it, est évidemment relative à la demande
et principale , d’où il suit que l’imeompétence alléguée
« n’est pas fondée.
« D e suite , et par même jugem ent, le citoyen Gharcot
«. ayant refusé de plaider au fo n d , le tribunal donne défaut
« contre l u i, faute de plaider, en présence de son dé« fenseur ’ et pour le p ro fit, en reconnoissant d'office r
« en justice , les lettres lues h l’audience, écrites et signées
« par le citoyen Gharcot - Corléas, faute par lui de le
« faire , le condamne envers le citoyen Gaultier et son
« épouse à les relever et garantir, tant activement que
« passivement, des condamnations prononcées contre eux
« en faveur du citoyen M o g n a t, par le jugement du 2
« floréal, tant en principal, intérêts que frais générale«■ment quelconques ;ceux du fond de ce jugem ent, quoi<t que par défaut, y compris , ainsi que de ceux qui se
« feront par le présent jugement ; et le condamne en
« outre aux dépens de la demande en garantie. Ce juge
* ment est déclaré exécutoire, nonobstant opposition ou
« appel, conformément à l’art. X V du tit. X V I I de l o i « donnance de 1667. Il est donné acte au surplus au ci
» toyen Gaultier et à son épouse , de répéter ainsi qu’ils
« aviseront, le surplus de ce qui leur sera dû par le citoyen»
�( 21 )
^ §
« Charcot, os qualités qu’ils l’actionneront, après Vextinc« tion de la créance du citoyen M o gn a t, en dépens et
« intérêts seulement. »
'
Ce dispositif, qui n’est pas trop clair, est m o tiv é ,
i ° . « Sur ce qu’ il résultoit des lettres lues à l'audience,
« qu’il y a eu de la part du citoyen Gaultier et de son
« épouse, indication de payement laite au cit. C harcot,
« pour acquitter les sommes qu’il pouvoit devoir au cit.
« M ognat, et que Charcot a accepté et promis remplir
« cette indication ».
« 2°. On dit que le consentement donné par le cit.
« Charcot-Corléas, lors du jugement du 21 ventôse, de
« communiquer les procédures par lui faites pour libérer
® les mariés Gaultier et de Nervo , envers le cit. M o g n a t,
<( est une nouvelle preuve de l’existence de cette indi
cation et de son acceptation ».
« 3°. Que le citoyen Charcot-Corléas ne justifie pas
« avoir satisfait à cette indication, ce qui fait que les
« mariés Gaultier et de N ervo , sont obligés de payer
« une dette qu’ils étoient autorisés de regarder comme
« acquittée ».
« Considérant dès lors, est-il dit, que le cit. Charcot
« doit les relever et garantir, puisque c’est de l’inexé« cution de leur engagement envers e u x , que résultent
* les condamnations qu’ils éprouvent;
«
«
«
«
« Considérant au surplus , que le refus fait par le
citoyen Charcot, d’exécuter lo jugement du 21 ventose, et son silence à cette audience, quoique duement représenté, annoncent assez que la garantie a
été légitimement exercée j
�«
«
«
«
«
« Considérant enfin, que dès que rengagement du
citoyen Charcot, envers le citoyen Gaultier et son
épouse, est établi par titres, et que ceux-ci ont subi
un jugement y relatif, qui est déclaré exécutoire,
c’est le cas d’ordonner que celui-ci sera aussi exécu
toire, nonobstant appel, et que l’art. i 5 du titre 17
de J’ordonnance de 16 6 7 , s’applique naturellement à
« l’espèce ».
Ce jugement fut signifié au domicile du cit. Charcot,
]e 18 thermidor an 8 , avec commandement de payer.
Procès verbal de saisie-exécution du £er. fructidor sui
vant; mais le citoyen Charcot ayant déclaré qu’il s’étoit
rendu appelant, l’huissier s’abstint d’exécuter et se con
tenta d’assigner à bref délai, pour voir recevoir caution,
à l'effet de parvenir à l’exécution provisoire du juge
ment.
.
L e cit. Charcot-Corléas fit signifier son acte d'appel au
citoyen Gaultier, en sa demeure à Paris ; il déclara qu’il
se portoit appelant tant du jugement du 21 ventôse an 8,
que du jugement du 23 prairial, ainsi que de tout ce
qui avoit précédé et suivi, et c e , tant'pour cause de
nullité, incompétence, qu’autrement-, il désavoua , par cet
acte, avoir donné aucun pouvoir au cit. Bonnet Ravel ,
défenseur à B o u rg , de consentir à la communication
ordonnée par ce jugement du 21 ventôse.
L e citoyen Charcot-Corléas fit également signifier ce
désaveu au domicile de ce défenseur, avec copie de la
procuration qui lui avoit été remis- pour le défendre:
cette signification est du 9 fructidor an 8.
L e 13 du m ê m e mois de fru ctid o r ; le cit. G a u ltie r
�( 23 )
obtint un ju g em e n t, qui reçoit son père caution , et le
fit signifier par acte du 17 du même mois, au domicile*
de l’appelant. Ce dernier réitéra son appel, le 22 du
même mois de fructidor; le 27 du même m ois, itératif
commandement de la part du citoyen Gaultier ; le 5
complémentaire an 8 , second procès verbal de saisie- ’
exécution, à sa requête. E n fin , comme le cit. Charcot
poursuivoit sur son appel, dont la connoissance étoit dé
volue au tribunal de L y o n ,, le citoyen Gaultier récusa
ce tribunal et se pourvut au tribunal de cassation, qui
a définitivement renvoyé le jugement de l’appel devant
ce tribunal, par un jugement du 21 nivôse an 9.
T e l est l’état dç la procédure. Il s’agit maintenant de
discuter le mérite des réclamations du citoyen Gaultier
et de son épouse; elles ne présentent qu’un mélange
m onstrueux d’irrégularités, d’injustices, de suppositions
et d’absurdités.
*
. On commencera par discuter la question d’ incompé
tence; au fond on examinera s’il y a délégation ou in
dication de payement, et si les lois des 11 frimaire et
ï6 nivôse an 6 peuvent s’appliquer à l’espèce particulière.
P r e m i è r e
P r o p o s i t i o n .
L e jugement de Bourg est nul et incompétent.
Il est reconnu que le citoyen C h arcot-C o rléas n’est
pas débiteur personnel du citoyen Gaultier et de son
épouse. Il n’étoit comptable qu’en sa qualité de syndic'
des créanciers unis de Jean-César de N ervo
il avoit
�,
.
.
C 24 )
.
.
.
accepté cette commission par obligeance ; il l’exerçoit
gratuitement, et l’acte d'abandon du 4 décembre 178 9 ,
établit que c’est au refus de tous les autres créanciers,
que le citoyen Charcot-Corléas a bien voulu se charger
de celte mission pénible, pour laquelle il n’avoit aucun
intérêt que celui d’être utile à une famille à laquelle il
étoit allié.
L e citoyen Gaultier et son épouse ont formellement
adhéré i\ cet acte d’abandon, en leur qualité de créan
ciers. Comme tels, ils étoient obligés de suivre la pro
cédure de discussion ; ils n’avoient d’autre action que
celle de faire procéder à Tordre, et de se faire colloquer
suivant la priorité de leur privilège ou hypothèque.
C ’est en qualité de syndic , que le citoyen CharcotCorléas a reçu des héritiers de Claude Charcot, la somme
de 16,875 fr. pour le compte du citoyen Gaultier.
C ’est en la même qualité, qu’il a remis cette somme
au citoyen V e rd u n , chargé de la procuration du citoyen
Gaultier, pour faire des offres au citoyen Mognat.
O r , il est de principe certain qu’un syndic de créan
ciers n'agit jamais qu’au nom et comme mandataire de
]a masse; qu’il ne peut être tenu en son nom , et qu’on
ne peut l’actionner personnellement.
Dans l’espèce particulière, la demande formée par le
citoyen M ognat, contre le citoyen Gaultier ct.sa femme,
dérivoit de titres étrangers à la succession abandonnée
de Jean-César de N e rv o ; les différentes promesses qu’ ils
nvoient souscrites en sa faveur, «voient pour cause un
simple prêt d’assignats; le citoyen Charcot-Corléas ne
s’est obligé directement ni indirectement au payement,
de cette créance.
Comment
�( 25 )
■Comment donc pouvoit-on faire résulter une demanda'
en garantie contre le citoyen Charcot-Corléas, de la de
mande principale du citoyen M ognat? comment pouvoiton distraire le citoyen Charcot de ses juges naturels , et
le traduire.au tribunal de B o u rg , sur une demande qui
lui étoit absolument étrangère; qui ne dérivoit pas du
même titre , pour lequel on auroit pu exercer une ac
tion contre lui?
On ne peut s’empêcher de remarquer i c i , qu il y a eu
affectation de la part du citoyen Gaultier et de sa femme.
Les premières poursuites du citoyen Mognat avoient été
faites à Paris, où le cit. Gaultier résidoit depuis plusieurs
années, et où il avoit acquis domicile.
,
Cette procédure est de ,suite abandonnée ; le citoyen
Gaultier se fait assigner à B o u rg , qu’il dit être son do
micile'de droit, où il savoit qu’il'étoit influent, et pour
y traduire1 le citoyen Charcot-Corléas, sous le prétexte
d’une demande en garantie.
A u bureau de paix, le citoyen Charcot s’étoit contenté
de décliner1la juridiction; il renouvela son déclinatoire
lors de la plaidoirie, et soutint qu’en sa qualité de syndic
ilm e pouvoit être distrait de la juridiction où déjà il y
avoit une instance d’ordre commencée, instance que devoit
suivre le citoyen Gaultier, puisque sa femme et lui avoient
adhéré à l’abandon des biens de Jean-César de N e rv o ;
qu’ils avoient acquiescé à la nomination du syndic qui
avoit été choisi; qu’ ils avoient reconnu le cit. Charcot
en cette qualité; que dès-lors ce dernier avoit agi en leur
nom et comme leur mandataire, et que le tribunal de
Bourg étoit incompétent pour statuer sur une action qui
�c 26 )
ne pouvoit concerner le citoyen Charcot - Corléas què
comme syndic.
O n oppose à ces moyens que toutes exceptions péremptoircs doivent être proposées à limine h tis , et que l’ex
ception tirée de l’incompétence du juge est de ce nombre;
on ajoute que le citoyen Charcot-Corléas s’est écarté de
cette règle; qu’il a implicitement reconnu la compétence
du tribunal de B o u r g , par l’organe de son fondé de po u
v o i r , en offrant la communication des pièces; qu’ainsi il
a réclamé trop tard , et qu’il est non-recevable.
Ces premiers motifs du jugement sont erronés dans le
fait et dans le droit.
Dans le fait, parce que le citoyen Cliarcot a décliné la
juridiction au bureau de p a ix ; qu’ainsi il a proposé son
exception à limine lit ¿3.
Dans le droit, parce que les juridictions sont de droit
public; qu’il ne dépend point des parties de se donner
des juges, et qu’on peut, en tout état de cause, proposer
des moyens d’incompétence.
Qu’importe que le fondé de pouvoir ait offert la com
munication des pièces? D ’ab o rd , ce fondé de p ou voir
n’avoit aucune mission sur ee point ; il a été désavoué«
Dans tous les cas, le jugement qui ordonnoit cette com
munication n’étoit qu’un jugement préparatoire ou d’ins
truction, que la loi du 3 brumaire an 2 défendoit d’at
taquer,- mais aussi q u i , d’après la même l o i , ne pouvoit
être o p p o sé comme acquiescement ou fin de non-recevoir.
L ’objection tirée de l’article V I I I du titre V I I I de l’or
donnance de 1667, se rétorque avec avantage contre le
citoyen Gaultier. Cet article veut que s’il paroît par écrit
�. i
)
. .
on par l'évidence du fait, que la demande originaire n'ait
clé formée que pour traduire le garant hors de sa juri
diction , les juges soient tenus de renvoyer la cause par
devant ceux qui en doivent connoître.
O r , il étoit évident que le citoyen Gaultier ne s’étoit
fait traduire à Bourg que pour avoir le prétexte d y ap
peler le citoyen Charcot-Corléas. Celui-ci n’etoit ni son
garant fo rm e l, ni son garant simple de l’action person
nelle qu’avoit exercée le citoyen Mognat; il n’ étoit qu un
syndic de créanciers, il n’avoit contracté aucune obliga
tion ni envets le citoyen M o g n a t , ni envers le citoyen
Gaultier. Si le citoyen Gaultier et sa femme vouloient
prétendre que le citoyen Charcot ne s’étoit pas valable
ment libéré des sommes qu’il avoit versées pour leur
co m p te, ils ne pouvoient l’assigner qu’à son domicile :
cette action n’avoit rien de commun avec celle exercée
par le citoyen M ognat; il y a donc eu évidemment af
fectation. On n’a fait former la demande originaire que
p o u r traduire le citoyen Charcot hors de sa juridiction;
cette demande originaire, qui n’étoit pas même suscep
tible d’être contestée, n’avoit aucune connexité avec la
demande formée contre le citoyen Charcot : le premier
devoir des juges de Bourg étoit donc de le renvoyer de
vant les juges de son domicile; l’article précilé de l'or
donnance de 1667 le leur enjoignoit; et il est dém ontré,
même par les motifs qui ont servi de base au jugement
de retenue, que le tribunal étoit absolument incompétent
pour statuer sur cette demande.
�C*8-)
.•
î
S e c o n d e
p r o p o s i t i o n
I l il existe aucune délégation n i indication de payemen t,
qu i puisse rendre le citoyen Charcot-Corlêas respon
sable envers les intimés »
\
L a délégation est un acte par lequel un débiteur en
substitue un autre à sa place, qu’il charge de payer à
son créancier la somme dont il est tenu : Delegare est
vice sua alium reuni dare creditori. L o i 1 1 , ff. de novat.
et delegai.
, On connoît en droit deux espèces de délégations, Tune
parfaite, et l’autre imparfaite.
L a délégation parfaite est celle qui a lieu par le con
cours de trois personnes; le délégant, qui est le débiteur ;
le créancier, qui accepte la délégation, et décharge en
conséquence le débiteur; le délégué, qui par là devient
débiteur et s’oblige d’acquitter la dette. ,
Il n’y a vraiment de délégation qu’autant que toutes
ces circonstances sont réunies ; c’est alors cju’il y a novation,
et que la délégation produit l’eiFet de libérer le délégant,.
de charger de la dette la personne du délégué.
L a délégation imparfaite est celle qui se fait entre le
débiteur et le délégué sans le concours du créancier; e’es£
ce qui a lieu , par exem ple, lorsque dans un contrat dtf
vente le vendeur délègue à ses créanciers non intervenant
le prix de la vente pour s'acquitter envers eux. Dans cos
ca s , la délégation n est qu'une simple indication, qui xvapp o r t e aucun changement à la dette, et ne libère point le
débiteur*
�. /
C
29 )
Ainsi il y a délégation , lorsque le créancier accepte;
il y a simple indication , lorsque le créancier n’est pas
présent.
L ’art. X I de la loi du n frimaire an 6 , dit que la ré
duction n’est pas applicable aux délégations et indications
des payemens, même aux délégations acceptées.
L ’art. X de la loi du 16 nivôse an 6 porté : « Que toutes
« délégations et indications de payemens résultans de con
te trats de ventes passés pendant le cours du papier-mon
te n o ie , obligent l’acquéreur à rapporter au vendeur les
« quittances des créanciers délégués, aux droits desquels
« il demeure spécialement subrogé lorsqu’ils ont été payés
« de ses deniers. »
Qui pourroit croire que le citoyen Gaultier a le droit
d’invoquer 'la disposition de ces deux articles contre le
citoyen Charcot-Corléas ? Peut-on trouver dans l’espèce
particulière les traces d’ une délégation ou d’une indication
de payement, comme le désire la loi ?
Il résulte bien clairement de la correspondance qui a
régné entre les parties, que le citoyen Gaultier étoit dans
l’intention de consommer lui-même sa libération envers
le citoyen Mognat j il lui écrivoit q u i l avoit form é le
■plan de se libérer ; il proposoit au citoyen Charcot-Cor
léas , en sa qualité de syndic , de lui donner une partie des
sommes qu’it avoit destinées à ce remboursement.
Si le citoyen Mognat refusoit de recevo ir, ce n’étoit pas
le citoyen Charcot qu’il clutrgeoit de faire les offres; il
envoyoit une procuration directe à un défenseur oliieieux,
entre les mains de qui le citoyen Charcot avoit seulement
la commission de remettre les sommes que le cit. Gaultier
/
�’ '.
t 3° )
pouvoit répéter sur la succession de son beau-père , ou
celle qu’il lui feroit passer pour compléter le payement.
Si
le citoyen Gaultier confioit au citoyen Charcot le
choix de l’homme d’affaires qui seroit employé pour lui
cette circonstance pi*ouve encore que le citoyen Gaultier
se réservoit l'exercice immédiat de ses poursuites contre
le citoyen Mognat. L e citoyen Charcot ne rernplissoit, à
cet égard , qu’un office d’am i; il n’avoit aucun intérêt à
la chose ; il n’étoit point débiteur personnel ; il cherchoit
complaisamment, et parce qu’il y étoit in vité, à faciliter
la libération du citoyen G a u ltie r, qui lui en faisoit des
rem ercîm ens, lui téinoignoit sa reconnoissance, et lui
faisoit ses excuses de la peine qu’il vouloit bien prendre.
Certes , des excuses et des remercîmens ne sont pas le
langage d’un homme qui auroit cru que le cit. Charcot
ne faisoit que remplir ses engagemens.
Dans toutes ses lettres, le citoyen Gaultier s’occupe uni
quement d’une affaire qui le regardoit seul; il craint tou
jours d’abuser de la complaisance d’ un ami attentif et offi
cieux; il approuve le choix qu’il a fait du défenseur chargé
de diriger la procédure ; il veut éclairer ce défenseur sur
la marche, qu’il a à tenir ; il cherche ¿1 le prémunir contre
les fautes qu’il poùrroit commettre ; il recommande de
remplir les formalités avec exactitude, de faire des offres
au véritable domicile du créancier , d’offrir plus que moins
à raison de l’incertitude où il est sur la date de ses billets:
il est bien convaincu que les fautes qui seroient commises
ne pouvoient compromettre que lui seul; il présidoit luirnétne à sa libération ; c’ étoit lui qui donnoit l’impulsion
principale et directe à toute la procédure : le cit. Gaultier
�_
( 31 )
n avoit donc aucunement transmis au citoyen Charcot sonaction contre le citoyen M ognat: il n’y avoit donc ni in
dication , ni délégation de payement.
Comment le citoyen Gaultier pourroit-il invoquer la
disposition des lois des n frimaire et 16 nivôse an 6 ? Lapremière suppose un prêt fait à condition que l’em prun
teur payera une somme due par le prêteur à un tiers. Si
ce tiers intervient pour accepter, il y a délégation} s il*
n’est pas présent 7 il y a indication.
Ici point de prêt fait par le citoyen Gaultier à l’appe
lant ; ce dernier n’a jamais rien em pru n té, n’a jamais été
le débiteur personnel du citoyen Gaultier.
La seconde loi suppose une vente d’ immeubles, dont
le prix est délégué par le vendeur à ses créanciers. Il n y
a dans la cause aucune trace de vente ni de délégation :
donc ces deux lois ne reçoivent aucune application à la
cause.
C ’est étrangement abuser des mots et des choses, que
de vouloir faire résulter de la correspondance particulière
entre les intimés et l’appelant une indication de payement.
O n ne voit dans cette correspondance autre chose que des
témoignages d’amitié et de reconnoissance de la part du
citoyen Gaultier, un excès de complaisance de la part du
citoyen Charcot.
L e prétendu consentement de communiquer les pro
cédures ne pouvoit nullement engager celui qui n’avoit
fait qu’un office d’ami, qui n’avoit aucun intérêt à la chose.
L e mandataire officieux n’est tenu que d’un dol personnel;
Nulla utilitas ejus versatur , merito dolus prestatur
�(32
)
solus nisis forte et merces accessit. L oi 5 & 2 f f comm odati vel contrà.
:
C ’est cependant sur cette correspondance et sur ce pré
tendu consentement,que les juges dont est appel ont motivé
leur condamnation en garantie. Ces motifs sont si extraor
dinaires, la prétention du citoyen Gaultier si absurde,
qu’il suffit de la proposer pour la combattre, qu’on n’est
embarrassé que du choix des moyens.
E n f in , ce seroit faire to rt a u x lum ières du citoyen
G a u l t i e r , q u e l’on dit un jurisconsulte é c la ir é , de cro ire
q u ’il y insiste sérieusement.
Par conseil, P A G È S , ancien jurisconsulte.
G O U R B E Y R E , avoué.
•
A
R
io m ,
de l’im prim erie de L a n d r io t , im prim eur du tribunal
• d ’appel. — A u 9.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Charcot-Corléas, Jean-Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Claude Charcot-Corléas, habitant de la ville de Lyon, appelant de deux jugemens rendus, l'un au ci-devant tribunal civil du département de l'Ain, le 21 ventôse an 8 ; l'autre au tribunal civil de Bourg, chef-lieu du département de l'Ain, le 23 prairial an 8. Contre Antoine-François Gaultier, juge au tribunal civil de première instance du département de la Seine ; et dame Magdelaine de Nervo, son épouse, habitans de la ville de Paris, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1759-An 9
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0119
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0118
BCU_Factums_M0120
BCU_Factums_G1114
BCU_Factums_G1112
BCU_Factums_G1113
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Lyon (69123)
Rights
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Domaine public
assignats
Créances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53653/BCU_Factums_M0112.pdf
e44761e391b0e05098799210cd40cdd0
PDF Text
Text
P R É C I S
T
2 C. sec tio n .
POUR la citoyenne C ham pflou r et son m ari,
Appelans
CONTRE
R I B U N A L
d ' A P r E L.
la veuve I m e r et ses f i l s ,
Intimés .
Il
s’agit de statuer sur l’ordre du prix des biens de la succession
de Jacob -Jacq u es Guerne , acceptée sous bénéfice d ’inventaire.
L a dame Cham pflour d’une p a r t , la veuve Im er et ses fils
d’autre p a r t , se présentent respectivement à l ’ordre pour faire
valoir leurs droits hypothécaires et la priorité de leurs titres.
L a veuve Im er et ses fils ont introduit l ’ordre au tribunal civil
du département de la Seine.
L ’article 33 de la loi du 1 1 brum aire veut que pendant trente
jours que le procès-verbal doit demeurer o u v e rt, chaque créan
cier ait le droit de prendre com m unication des titres qui auroient
été produits, de fa ire sur e u x , dans le p ro cès-verb al, les obser
vations qu’il jugera convenables, et qu ’à faute de ce l’ordre soit
dressé sur l’extrait des inscriptions, et les titres produits , sau f
l ’a p p e l, aux termes de l’article 34 .
L e p r o c è s -v e r b a l d’ordre a été ouvert l e 29 bru m aire; il a
été clos le 1 1 nivose suivant,
A
�a
L e 6 v en tô se , il est intervenu jugem ent par défaut contre la
..
dam e C ham pflour, qui a statué sur l’o rd re , et a accordé à la
veuve Im er et ses fils l’antériorité d’hypothèque pour deux titres
qui sont en opposition , et qui portent avec eux le caractere de
la fraude la plus évidente.
v
M ais l’un de ces titres, qui est sous sein g -p riv é , n’a pas été
produit au procès-verbal d'ordre -, il n’a pas même pu l’être, n’ayan t
été enregistré que cinq décades après la clôture du procès-verbal.
L ’appel que la dame Champflour a interjeté de ce jugem ent’,
soumet à la décision de ce tribunal non-seulem ent la question
de p r i o r i t é d’hypothèque, mais encore celle de la légitimité des
deux titres de la veuve Im e r, et de l’extinction de leur h yp o
thèque par la compensation.
E xam inons d’abord si la nullité et la com pensation peuvent
être opposées sur l’appel.
. '
■
'
T..
„
F i n de tiott*
recevoir déruitt.
E lles ne peuvent pas l’être, dit-on , parce qu’elles n’ont pas
•
•
t
’j
i
s
«
•
été agitées en cause principale dans le proces-verbal d ordre.
C ’est ici une pétition de principe.
/
.
L a . nullité des titres des intimés.» et l’extinction de leur hypo
thèque par la compensation, sont des exceptions peremptoires. à
leur demande en collocation.
,
. /
’
.
\
Or il est de principe que toute exception péremptoire peut
être opposée sur l’a p p e l, sur - tout lorsque le jugement est par
d éfau t, comme elle auroit,pu l’être en.prem ière instance.
;
^
jjj
U n jugement par défaut condamne un particulier à payer un billet
nul ou dont la dette est eteinte par la compensation > il est hors de
'
do'ute qu’il peut opposer sur 1 appel, comme exception péremptoire
!f
à la demande de son adversaire, soit la nullité du b ille t, soit la
1..
il'
i;
y
1i..
Ü'i
com pensation.
I
• .
.. .
'
, 11 a même-jété jugé que Ia^lesion etoic une, exception tellement
inhérente à l’a p p e l, qu’un particulier, qu r s ’étoit çendu appelant
*
�d’un jugement qui lé condam né-sur iin'titre renferm ant lésion,"
a été déclaré non-recevable à se pourvoir en rescision par action
principale , sauf à proposer l'exception sur l ’appel.
Com m ent peut-on dire aujourd’hui que la nullité des titres des
intim és, et l’extinction de leur hypothèque par la com pensation,
n’ayant pas été(proposées devant les premiers ju g e s, on est nonrecevable à les faire valoir sur l’appel î
• Qu’importe qu’il s’ agisse ici d’un ordre entre créanciers ?
D e quelque manière qu’on entende l’article 33 de la loi du
1 1 bru m aire, il ne peut avoir d ’application qu’ aux titres qui
auroient été produits au procès-verbal. .
O r , il est constant que l ’un'des deux titres pour lesquels la
veuve Im er et ses fils sont colloqués ( la quittance des a4 > °°o liv.
de dot ) , n’a pas été produit au procès-verbal ; ce n’ est que plus
d un mois et demi après sa clôture, qu’ ils ont joint cette quittance
entre les mains du rapporteur de l ’ordre.
1 ~
'L a preuve-de ce fait est consignée dans le procès'-verbaL ; la
production que les intimés y o n t faite ne: com prend pas cette
quittance.
•
Ils n’ont pas même pu l ’y comprendre ni l’y ajouter avan t la
clôture du peocès-verbal, qui est du x i n iv o s e , puisqu’ils1 n’ ont
fait enregistrer la quittance que le 26 pluviôse s u iv a n t, d’après
une sommation qui leur a été faite de la joindre.
On ne peut donc pas opposer aujourd’hui le défaut de critique
au p ro cè s-ve rb al, d’un titre qui n’y a pas été produit (1).
0 ) L a veuve Im e t ne peut exciper de ce q u e to u te c o n stitu tio n de d o t est
présumée payée au b o u t de dix ans ; q u ’ainsi la q u itta n c e e st superflue.
L à fem m e G u e rn e est décédée le p rem ier nivose an 3 , c’est-à-dire , après n e u f
ans six m ois de m a ria g e ,
•
D ailleurs , com m e c est la veuve Im e r q u i a d o té sa fille, il y a u ro it eu lieu
co n tr elle à l’exception de g ara n tie ,
A 2
�'4
II faut remarquer que la loi dv£.' 1 1 brumaire n’interdit pas à un
créancier le droit d'attaquer les titres d’un autre créancier ailleurs
qu’au p ro cè s-v e rb a l d’ordre , ni de contester sa collocation par
d’autres m oyens que ceux déduits dans ce procès-verbal.
'
Au contraire , l’art. 34 lui conserve ce d ro it, puisqu’il n'accorde
aux collocations non contestées au procès-verbal d ’autre avantage
que celui de l’exécution p ro viso ire , nonobstant l’appel.
On ne p e u t, au surplus , tirer aucun avantage de l’action prin
cipale en nullité que la dam e Champflour a exercée au tribunal
de première instance , le même jour que son appel.
.
L a dam e Cham pflour a formé cette demande principale à raison
de créances autres que celle comprise en son inscription, et qui
sont justifiées par d’autres titres.
D ’ailleu rs, cette demande principale en nullité n’a aucun trait
à l ’exception de l’extinction de l ’hypothèque par la compensation.
■ U ne fois-bien constant que les exceptions de nullité et de
compensation peuvent être proposées sur l’a p p e l, qu’il n’y a p oin t
de fin de non-recevoir contre ces exception s, discutons le fond.
U n rapprochement de dates dégagé de toutes les circonstances
qui ont été développées à l’audience , suffit pour établir la fraude
des titres des intimés..
L e 23 juin 17 8 5 , Guerne épouse la fille Imer.
’
L a mere,-promet a là fille 24,000 liv. de d o t , sans term e pour
le paiem ent.
_
E t le 12 A v ril 178 6 3 temps auquel il est avoué que les 24,000 Æv.
de dot n etoient pas payes > Guerne , créancier de ces 24*000 liv.
e x ig ib le s, souscrit au profit de sa belle-mère , sa débitrice , une
obligation de 36 ,ooo liv. causes pour prêt payable à volonté.
M ais si la veu ve Im er eut alors réellement remis 3 6 ^ 0 0 liv.
à Guerne , que devoit-on faire >
,
�5
Guerne devoit donner à sa belle-m ère '
i ° . U ne quittance des 24,000 liv. de d o t }
a 0. Une obligation de 12,0 0 0 liv.
‘ î
’ j
, • .
C ’est ce que dicte la raiso n , ce qu’ e x ig e o it.l’intérêt respectif
des p artie s, et ce qu’elles auroient nécessairement f a i t , si elles
avoien t agi de bonne foi.
T
C e qu’ elles ont fait prouve qu’elles étoient animées d ’un autre
sentiment ; Guerne , qui dès - lors7 étoit brouillé avec tous ses
paren s, et en procès avec e u x , vouloit ajouter à une donatiori
de 40,000 liv. qu’il avoit déjà faite i sa fem m e “par son contrat
de mariage : ne pouvant le faire d ire cte m en t','il use du m oyeïi
détourné de cette obligation au profit de’ sa bèlle-mère.
Il est impossible de donner un autre m o tif plausible à là
conduite de Guerne et de la veuve Im er relativem ent à cette
obligation.
• 5n ,r' •
■■ •
' '
> ,y
C ’est dans la même vue que , la veille dè sa m ort , Guérné a
souscrit au profit de sa belle-m ère la quictàné'e' des 2 4 ,0 0 0 ^ 1^ .
de dot , qu’il a datée' de E ie n n e 'e n Suisstf, le 1\ mars 1 7 9 1 - ,
quoiqu’il soit prouvé , par un autre acte du 20 du même m ois
de m a rs, qu’il étoit alors à P a ris.’
.
J
.
'
,
‘ Cette date de Suisse fut imaginée pour éviter" l’incorivéhient
du papier timbré.
•’* •
.. ., j j . I , . \ *
.
L a quittance de dot n’ est pas plus sérieusë que l’o b lig a tio n ,
l’une et l’autre sont évidem ment frauduleuses.
'
.
f
*
Com m ent c o n c e v o ir, en e ffe t , que la veu ve Im er, créancière-;
à son tour , de Guerne son gendre ,' d’une somme; de 36 ,ôoo 1liv.
aux termes de l’obligation du 1 2 avril 1 7 8 6 , àur’o it, suivant une
quittance sous seing-privé , payé à son débiteur le ; i"4 mars
1 7 9 1 , les 24,000 liv. de d o t , dont la dette étoit éteinte par la
com pensation dè droit?
•
"
Il faudroit s’aveugler étrangement pour ne* pas voir la fraude
et la collusion.
* ' ’
, '
'
L a débitrice prête à son créancier } an lieu de se libérer envers
1
�E x tin ç n o n d e
[•hypothèque
p a r la c çm p e n sacion.
I
i
[
r
'6
lui ; la créancière paie à fcon?débiteuü' malgré lai compensation ;
tout cela pour créer <&&'hypothèques sur les biens de la succession
Guerne. ■
* ■
,Y :I ;
. ..
.
..
. •
" V L a ’ justice p o ü rrô it'^ le ferm er J es-yeux sur de pareilles machi
nations J ]{’ ‘ J n - n v i!
SrivIOltJi; i J h ' l
: j , ¿j ’T'!. ?.3îi
.r;!
r>r?r :
\j
Alors ne résulte-t-il pas du ra^ ro q h em en t des titres dés intim as,
que 3 dès (’instant que la ve'uv§ Im er-.çti;Guerne se squt. tr.ouvés
respectivem ent, créanciers¡'fit,Jdébiteurs 1 un ;de L’autre , il s'est
opér'4 .entre" le « ts0q -é a n c^ res’p ectiy e^ u n ^ .ço p p e W tiQ n qui les
^ é te in te s,"p a r ja's|u lçify ç r ^ ;d ç ) l a - l o i , ju squ a goacurrm içe.des
a4,ooo liv, d o n t.'G u e m ^ .^ojt.CTéanciei:
JȐrae temps que
débiteur de? 36,ooo liv.,d e; l’ obligation» _
0
L e paiem ent q u e .la veuve Im er prétend avoir fait depuis de
ces 24,000 l i v . , n’a pas pu faire renaître sa créance de l'o b li
gation éteints, jusqu’à concurrence », ni l’hypothèque qui y étroit
a tta ch é e , jiu préjudice: des. créanciers postérieurs , et du droit
qu’ils p n t acquis aprçs la com pensation une fois opérée.
L a veuve ïm er aupoit payé ce q u ’elle ne devoit pas ; elle auroit
à. exercer l ’action conditio indebiti, mais aucune hypothèque » puis
qu'elle ne préseppe qu’une quittance sous sein g-p rivé. P o t h i e r ,
Traité des Oblig. 3 Part. I I I , C hap. IV, D e la Comp, > nQ. 6o3.
En fin l:hypothèque de la., dame Cham pflour sur les biens de
Guerne est de 17 8 2 ¿,¿3. créance a pour cause le com pte de l’ad
m inistration de se^biens depuis cette époque.
‘ S i Guerne ne les a pas administrés par lu i-m ê m e , il étoit tenu
(de le faire le jugement du 22 octobre 179 2 l'a m i s , vis-à-vis la.
mineure , à la même plac.e que H aillet qui a administré 5 il pro
nonce contre lui les mêmes condam nations, et assure à la mi
neure le? mêmes droits , la même hypothèque sur les biens de
l ’un que sur ceux de l autre»,
Aux termes du ju gem en t, Guerne est déclaré responsable ,
co rn u e ayan t provoqu é la nominatiqn de H aillet qu’il savoit
�7
exclu ; com m e l’ayant provoqué pour se débarrasser personnel
lement du poids de l’adm inistration dont il se trouvoit alors
ch argé, et n’ayant pas été valablem ent déchargé de ce p o id s ,
qui com porte une hypothèque sur ses b ie n s, en même temps
que l’ob ligation de rendre compte.
L ’acte du 7 avril 17 8 2 , qui a servi de base à la condam
nation de G u e rn e , est indivisible ; il n’aura pas produit l'effet
de sa condam nation à rendre lui-même le com p te, tout com m e
le tuteu r, sans produire en même temps contre tous deux le
droit d ’hypothèque lé g a le , qui est attaché à la qualité d’adm i
nistrateur et de com ptable des biens des mineurs.
On conçoit facilem ent qu’il a fallu de grands motifs pour
' prononcer contre G u ern e, provocateur de la tu telle, la même
condam nation que contre le tuteur ; mais le délit com mis par
Guerne étoit révoltant : la justice a prononcé irrévocablem en t;
sa décision est là ; et ce ne sera pas infructueusement que le
dol aura été prouvé a lo rs, pour donner aujourd’hui à la belle
mère du délinquant, à celle qui a fait des actes frauduleux avec
l u i , une antériorité d ’hypothèque , q u i , en dépouillant la malheu
reuse m ineure, enrichiroit de ses débris la com plice de celui
qui a dévasté sa fortune.
A quelqu’ époque que les intimés cherchent à reculer l’h y p o thèque de la dame C h a m p fo u r, ils ne parviendront jamais à la
rendre v a i n e , puisque leurs titres sont fra u d u leu x, et que , sup
posés valab le s, l’hypothèque qui y étoit attachée a été éteinte
par la compensation jusqu’à concurrence de 24,000 liv.
Le Citoyen C A H IE R , Commissaire.
Le Citoyen C r é T T É , Avoué.
B
a u d o u i n
,
Im prim eu r du Corps lé g isla tif
et
du T rib u n a l ,
rue de G re n e lle -S a in t- G e rm a in , n ° 1 1 3 1
/
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cahier
Crétté
Subject
The topic of the resource
créances
dot
Description
An account of the resource
Précis pour la citoyenne Champflour et son mari, appelans ; contre la veuve Imer et ses fils, Intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Baudouin (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1782-An 9
1751-1789
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0111
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
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Domaine public
Créances
dot
-
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784b77e22ad5c3f4a1fa628cf00d2ca3
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Text
C O N S U L T A T I O N
t...».
d' a p t e l .
2 e . section,
POUR
la citoyenne Cham pflour et son mari
A ppelans ;
C O N T R E la
V u
veuve I
mer
et sesfils
é
tm
n
les pièces et le précis :
L es jurisconsultes anciens soussign és, sont d ’avis
Q u e la cito yen n e C h am pflou r et son m a ri, créanciers de Ja co b
Jacques G uerne , m ort in s o lv a b le , sont fo n d é s , sans d ifficu lté , dans
leur appel du jugem ent d ’o rd re , co n tre lequel ils réclam ent.
L a veuve Im er a été c o llo q u é e , préférablement à eu x, par ce ju ge
m e n t, sur le prix des im m eubles de leur débiteur com m un 1°. pour
la restitution, à titre de retour successif, de la som m e de 24,000 francs
qu’ elle a v o it constituée en d o t à sa fille ( m orte avan t elle
sans
enfans ) par son contrat de m ariage a v e c G u e rn e , de l’année 17 8 5 ;
2 0. pour un cap ital de
36,000 livres porté par ob lig atio n
du 12 avril
1786 : en tout pour 60,000 livres qui absorbent les fonds à distribuer.
L es appelans o n t à se plaindre sous deux rapports :
E t d ’abo rd parce que l’h yp o th èq u e de leur créance que le juge
m ent dont est appel ne place qu ’au 22 octo bre 1 7 9 2 , rem onte dans
la vérité à l ’année 1782 ; d ’où il suit q u ’elle prim e celles de la veu v e
I m e r , les supposàt-on de 1786 et de 1786.
E n second lieu , parce que , dans le cas m êm e où l’h yp othèqu e
des appelans ne seroit fixée qu’au 22 o c to b re 1 7 9 2 , elle prim eroit
encore la créance de 24,000 francs prétendue par la veuve Im er pour
restitution de la dot de sa fille ; çar la réception de cette d o t de la
A
�part du mari n’étant justifiée que par une quittance sous seing-privé ,
du 14 mars 1791 , enregistrée le 26 pluviôse
an 9 seu lem en t, la
veuve Im er fu t-e lle créancière légitim e de son gendre pour la répéti
tion , elle seroit sans hypothèque à cet égard.
»
;:rT
'
».•MYfÿVVÜ
Preuve de la première assertion.
Que l’h yp othèqu e de la creance des appelans rem onte à l'année
1 7 8 2 , c ’est ce qu’il n’est pas permis de m éco n n o ître , quand on en
considère l ’origine. A la v é r ité , la dam e Cham pflour n’a obtenu de
con dam n ation contre G uerne que par jugem ent du 22 o cto b re 1 7 9 2 ;
mais sa créance est le résultat de l ’adm inistration des biens d ’une
p u p ille , depuis 1782 jusqu’en 1789.
Si ce ne fut pas G uerne qui adm inistra lu i-m êm e; ce fut lui q u i,
d e concert a ve c son frère , livra frauduleusement l’adm inistration à un
nom m é H a ille t , personnage connu pour un dilapidateur in sign e, à qui
elle a v o it été interdite par arrêt du 4 septembre 178 1. E t c’est pour
cela que les deux frères G uerne on t été déclarés responsables de l’a d
m inistration de leur préposé,
22 o cto b re 1792.
par jugem ent en dernier
ressort du
Il est rem arquable que l’acte par leq uel les frères G uerne s’étoient
ad jo in t des figurans sous le titre d ’amis } pour conférer au
dateur H a illet
1adm inistration
dilapi
des biens de la p u p ille , est un acte
qualifie d élibération de fa m ille , passé devant notaires a ve c H a ille t, q u i
accep ta la charge.
D e la un double principe d h yp oth èqu e légale sur les biéns
des
G uerne pour la responsabilité de l'adm inistration d ’H aillet , dont ils
o n t été déclarés cautions par le jugem ent de 1792
i ° . H yp oth èq u e légale résultante de la nature de la créance.
( 1 ) Conformément aux principes ; « si dans la nomination d’un tuteur, il y avoit
» malversation de ceux qui le nom m ent, comme si on nommoit une personne appa» rammcnc insolvable, les nominateurs en seroient tenus», D o m a t , Lois c iv ile s ,
livre a«\, titre 1 e r ., section
4 > nombre
�■
3
L a lo i donne en effet h yp oth èqu e au m ineur pour le com pte tutéla ir e , soit co n tre le tuteur ou protuteur , so it contre ses cautions ,
certificateurs et répondans ,
mencé (i).
du jour où
l’adm inistration
a com
2°* H ypothèque légale résultante de la qualité de l'acte dans leq u el
prend sa source la responsabilité des frères G uerne.
C ’est un acte
passé devant notaires. O r , qui pourroit ignorer ou douter
que tout
acte passé devant notaires d o n n o it h yp oth èqu e légale en France ,
sous 1 ancien régim e , indépendamment de toute stipulation j p o u r la
sûreté des ob ligations qui en d é riv o ie n tï
« L es actes sous seing-privé ne peu vent se u ls, et par e u x -m ê m e s,
» produire h yp oth èqu e , quoiqu’ elle y fût expressément convenue , et
» que la date de l’acte eût été constatée par le co n trô le , nous dit
» Pothiers ( 2 ) ; au co n tra ire , les actes munis de l’autorité publique
« produisent l ’h yp oth èqu e de tous les biens présens et à venir des
» parties obligées , quand même la convention d’ hypothèque n’y seroitpas
»» exprimée. »
L e m êm e principe est attesté par d ’H é r ic o u r t, dans son Traité de
la vente des immeubles par décret ( 3 ).
L e p rofond L cise au a v o it dit de m êm e : « E n F ra n c e , l’hypothèque
» naît de l ’authenticité des actes ( 4 )• ”
M o rn ac en a v o it dit autant ( ),
5
Les recueils sont pleins d ’arrêts qui ont consacré ces m a x im e s} et
certes cela n’est pas étonnant -, car elles ne sont qu’une conséquence
(1)
tt Pro officîo administradohiî tutoris v c l curâtor:s hona , s i f dcbltores existan t,
*> ranquam pignoris titulo obligata» , porte la loi ae. au C o d e , titre de A d m inist. tut,
« Eadem causa videtur affirmatorum ,
qui scilicet, cum idoneos esse tutores affir-
*> maverunt, fidejussorum viçem sustinent » , ajoute la loi 4e*
Fidejuss. tut.
1
3 ) Page 233 de l’édition de 17 6 1.
( 4 ) Traité du Déguerpissement, liv. 1er. , chap. 8 , nomb. 9.
( 5 ) Sur la loi 4e- , au code de Pignoribus et hypoth,
digeste , titre de
( 2 ) Introduction au titre X de la coutume d’O rléan s, chap. e r ., sect. 1 ™ ., n°. 6.
(
Aa
�4
im m édiate de cette autre règle du droit français , qui attribue aux
juridiction volontaire , la m êm e
force et la même autorité q u ’aux jugemens dans l’ordre de la juridiction
contenticuse : o r , d ’après les ordonnances de i53<) et de 1667 , les
actes des notaires dans l’ordre de la
jugem ens portent hypothèque de plein droit ( 1 ).
■
Preuve de la seconde assertion.
On a dit que la veuve Im er n’a point d ’h yp othèqu e sur les biens
de Guerne son gendre pour la restitution de la d o t de sa fille , par
la raison que la réception de cette d o t , de la part du m a r i, n’est
justifiée que par une quittance sous signature privée de l’année 1791 ,
qui ne vient d ’être enregistrée que depuis quelques mois. A l’appui de
cette assertion , nous avons à invoquer le texte précis d’.une décla
ration du 19 mars 1696 , enregistrée au parlem ent le 29 du m êm e
m ois. L e législateur s’y exprim e ainsi à l’article V III.
« Foulons que tous les contrats de m ariage ,
q u ittan ces
de dot,
» et décharges données en conséquence , soient passés devant notaires ,
» à peine de privation des privilèges et hypothèques. »
C e ne fut pas au reste une règle n ouvelle q u ’établit cette déclara
tio n . L a jurisprudence l’a v o it déjà consacrée depuis long-tem ps ; et
elle l’a toujours religieusem ent m aintenue depuis (2). M ais q u ’est-il
besoin de com pulser les livres
faveur
de jurisprudence
le texte positif et littéral de la loi ?
quant on a en sa
C epend an t s’il est incontestable que la veuve Im er n’a p oin t d ’h y
p o th èq u e sur les biens de son gendre , pour la restitution de la dot
de sa f ille , par cela seul q u e lle n’en justifie le paiem ent que par une
quittance sous seing-privé ; il est conséquent que la co llo ca tio n qui
lui a été accordée par le jugem ent dont est appel , à la date de 17 8 5 ,
est insoutenable , et q u ’elle ne devoit passer pour cette créance ,
(1) A rt. 92 et
5
de l’ordonnance de i Zc) ; ordonnance de 1667 , tit.
35 , art. X I.
( 2 ) O n peut consulter le recueil de Brillom , au mot D o t , n°. 337 5 Lebrun , Traité
4e la commu/tauté,
etc. , etc.
�5
quelque légitim e qu’on la’ suppose , qu'après celle des ap p elan s, quand
m êm e on reculeroit l’h yp oth èqu e de celle-ci jusqu’au jugem ent de
condam nation du 22 o cto b re 1792.
L e tribunal d’appel do it saisir a ve c d ’autant plus d ’empressement
cette ouverture pour faire justice aux a p p e la n s, que le simple rappro
chem ent des titres de créance de la veu ve Im er suffit p our m anifester
la collusion dont ils on t été le fruit.
'
O B J E C T I O N .
V otre critique des deux co llo catio n s qui m ’ont été accordées est
tardive , et ne peut plus être écoutée , dit la veuve Im er ; les
articles
33 et 34 de la
lo i du x i brum aire s’y opposent : ils ne per
m ettent d ’attaquer par la v o ie
de l’app el que les collocation s qui
auront été contestées en première instance ; nonobstant l ’appel, celles
qui n auroient pas été contestées recevront leur exécution , p orte
ticle 34.
V ous êtes encore
l’ar
m oins recevable à faire juger sur un appel la
validité ou l’invalidité de mes titres de c ré a n c e , sur laqu elle il n’a
pas été p ron on cé par les prem iers juges.
>
R É P O N S E .
,
E cartons d ’abo rd la dernière partie de l’o b je c tio n , en observant
que les premières conclusions des a p p e la n s, peut-être trop v a g u e s ,
sont réglées m aintenant ; et les v o ic i.
Ils dem anden t,
Q u ’il soit dit par le T rib u n a l ,
« Q u ’il a été m al ju g é , et bien appelé ,
» i°. En ce que , par le jugem ent dont est a p p e l, la dem ande en
co llo ca tio n à l ’h yp oth èqu e , du 7 avril 1782 ( qu’ils a vo ien t form ée
par leur dire , inséré au procès - verbal d’ordre ) , a été rejetée ;
qu’ils ont été renvoyés à l’h ypothèque du 3.2 octo bre 1 7 9 2 , et dé
clares en conséquence inadmissibles à une co llo ca tio n en rang utile.
3* 2*. E n ce q u e , par le même ju gem en t, la veuve Imer a été col!
�6
lo qu ée à l’h yp oth èqu e du
23 juin i y 85 pour la
som m e de 0.4,000 liv.
en ca p ita l, q u ’elle réclam e pour restitution de la dot qu’elle a v o it
constituée à sa fille , nonobstant que cette créance , légitim e ou non ,
ne soit établie que sur une quittance sous se in g -p rivé, du 14 mars
79
1
1>^
ne donne point d’h y p o th è q u e , aux termes de l ’article 8
de la déclaration du 19 mars 1696.
» E m endant sur ces deux c h e fs , qu’il soit ordonné que l’hypothèque
de la créance des appelans sera rétablie et fixée à la date du 7
avril 17825 ce faisan t, q u ’ils seront payés de la somme de 3 9,5oo liv,
à eux d u e , par préférence et antériorité d ’h yp oth èqu e aux deux
créances de la veu ve Imer.
.
» Q u ’il so it ordonné a u ssi, dans tous les c a s , que la collocation
accord ée à la veu ve Im er pour la som m e de 24,000 liv ., à la data
du 2,3 juin i
785 , dem eurera com m e non
a v e n u e , et que cette créance
sera rejetée au rang des simples ch iro g rap h aires, pour n’être pavée
q u ’après l’entier acquittem ent de tous les hypothécaires. »
" '
O n v o it par ces conclusions q u ’il ne s’agit de prononcer sur rien
d ’étranger au jugem ent dont est a p p e l, sur rien qui ne soit l o b '
d ’une des dispositions de ce ju g em e n t; conséquem m ent que les appe
lans ne p ro p o s e n t, sous aucun p oin t de v u e , la vio la tio n de l ’ordr«
de la procédure.
* ”
Q u a n t au prem ier m em bre de l ’o b jectio n ,
frivole.
il n ’est
pas
m oins
D ’a b o rd , il n’est poin t applicable à la dem ande des cito yen et
d am e C ham pflour a fin de co llo catio n de leur créance à la date de
1 7 8 2 , puisque cette co llo ca tio n
prem ière instance.
a été dem andée et contestée
en
E lle ne p ourrait s'appliquer q u ’à la dem ande en rejet de la c o llo
catio n de 24,000 fr. accordée à la veuve Imer à la date du 23 juin i
785 ;
mais si le procès-verbal d ’ordre est contradictoire , le jugem ent à l’au
dience est par défaut ; et il est prouvé que la quittance sous seingp rivé de ces 2/1,000 fr. 11’a pas été produite au procès-verbal d ’o r d r e ,
qu’elle n ’a pas même pu l’ê tr e , puisqu’elle n’a été enregistrée que le 26
p lu v iô se , et que lç p ro c è s-v e rb a l a été clos le a
nivose précédent.
�7
C ependant quels sont tes- seuls titres et pièces que l’article
33 de la
lo i
prescrit de contester dans le délai que l’on prétend fatal ? les titres
et pièces qui auroient été produits au procès-verbal d ’ordre a v a n t sa c lô
ture.
D ’un autre c ô t é , il n’est pas exact de dire que les appelans n’o n t pas
contesté en prem ière instance la co llo ca tio n de 2.4,000 livres qu ’ils
attaquent m aintenant , puisqu’au procès-verbal d ’ordre ils o n t de
m andé à être colloques avan t toutes les créances de la ve u v e Im er
sans e x c e p tio n , et à la date de 1782.
Enfin l’o b je ctio n est injurieuse à la l o i , à qui elle suppose la v o lo n té
absurde d’interdire la
ressource de l’a p p e l, pour faire réform er les
injustices les plus ré v o lta n te s, lorsqu’elles auroient échappé à la c o n
tradiction en prem ière instance.
S ’il fa llo it en croire les in tim é s, une c o llo ca tio n de
5o,ooo fr. d on t
o n rapporteroit la quittance en cause d ’appel , seroit irréfragable et
sans recours, parce que la quittance n’auroit pas été connue en pre
m ière instance. L o in de la pensée du législateur une v io la tio n du d ro it
naturel si scandaleuse !
L ’appel est ou vert pour faire réform er le m al jugé. T o u t m o y e n
qui le dém ontre peut d o n c être proposé a ve c succès en cause d ’appel
co m m e devant les premiers juges : vo ilà la règle de tous les tem ps
et de tous les pays. L a raison im m uable l’a publiée ; et la lo i du 1 x
brumaire n’a jam ais songé à la détruire. E lle a seulem ent vo u lu que
l’appel qui ne porteroit que sur quelques c o llo c a tio n s , ne m ît pas
d’obstacle à l'exécu tion de celles dont la priorité ne seroit pas co n
testée , o u , si l’on v e u t , elle aura entendu que celles qui n’auroient pas
été contestées en première instance , s’exécuteroient par provision ,
lorsqu’elles p ourroient l’être sans épuiser les fonds nécessaires aux
créanciers qui réclam eroient la priorité.
En
résu lta t
,
L e jugem ent d o n t-est appel a m al jugé , soit en refusant à la créance
des appelans l’ordre d h yp oth èqu e qui lui a p p a rtie n t, soit en a cco r
dant à une partie de la créance de la veu v e Im er une hypothèque
�8
qu e la lo i lui refuse. L a réclam ation des appelans est admissible
co n tre ces deux injustices égalem ent évidentes. L ’adjudication de
leurs
c o n clu sio n s, qui n’on t point d’autre
o b je t , ne sauroit d o n c
faire la m atière d ’un doute raisonnable.
Délibéré à Paris le 9 floréal an 9 .
Signé , B E R G I E R
et G R E N I E R ,
Imprimeur du Corps législatif et du Tribunat,
rue de Grenelle-Saint-Germain, n°. n 3 i.
.
B audouin,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Champflour. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Grenier
Subject
The topic of the resource
créances
dot
Description
An account of the resource
Consultation pour la citoyenne Champflour et son mari, appelans ; contre la veuve Imer et ses fils, Intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Baudouin (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1782-An 9
1751-1789
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0111
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0112
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
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Domaine public
Créances
dot
-
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b32f1be835663f4581a6365f5390f62e
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
POUR C l a u d e HUGON D E G IV R Y , héritier
pour une sixième portion de défunt L o u i s
G U 1LL0U ET D ’ORV 1LLIERS, ancien lieu
t r ib u n a l
tenant-général des armées navales, intime et D'appel
appelant ;
•
séant à Riora
C O N T R E S i m o n B E L A N G E R , ancien
cuisinier de feu L o u i s G U I L L O U E T
D ' O R V I L L I E R S , habitant de la ville de
Paris , appelant d'un jugement rendu au cidevant tribunal civil de VAllier 3 le 6 germinal
an 8 , et intimé.
Q U E S T I O N .
Peut-on exiger le payement d'un legs conditionnel, lorsque la condition imposée au légataire n’ a pas été
remplie par le f a i t du légataire ?
,
.
I L est difficile d’expliquer comment la question la plus
simple a pu faire naître une contestation sérieuse ; par
quels motifs on a donné à cette cause une aussi grande
publicité ; pourquoi Simon, Bélanger s’est permis de dis
A
,
�C a )
_
tribucr des libelles diffamatoires, s’est répandu en injures
grossières contre le citoyen de G iv r y , ses défenseurs et
ses conseils? Etoit-ce pour donner plus de poids aux
présomptions, aux allégations, aux chimères, qui for
ment la base de sa défense ?
Un légataire conditionnel peut-il espérer la délivrance
de son legs, quand il n’a pas rempli la condition? On
sait que la condition affecte tellement la substance du legs,
qu’il ne peut pas avoir son effet sans elle;
Q u il suffit que la condition ne soit pas impossible, pour
quelle doive etre exigée;
Q u il faut se soumettre, avec une obéissance aveugle ,
à la volonté du testateur, et satisfaire ponctuellement à
la condition.
Simon Bélanger pouvoit discuter ces principes, sans
se permettre aucune diffamation.
Mais ses injures et ses menaces ne sauroient atteindre
le citoyen Hugon de Givry. Il ne les rappelle , qu’à raison
de ce que le jugement dont est appel, a ordonné la sup
pression d’un alinéa du mémoire de Bélanger, et que
ce dernier est appelant en ce chef; il ne s’en occupera
qu’autant que cela est nécessaire pour sa défense, et il
ne se permettra aucune représaille.
F A I T S .
Simon Bélanger est entré au service de M. d’OrviïliprsT
en 1779- M* d’ Orvill'crs habitoit alors la ville de Rochcf j r t , après avoir quitté Brest, où il «voit commandé la
marine et les armées combinées de France et d’Espagne.
�M. d’Orvilliers eut le malheur de perdre son époure , en
1780; il avo':t quitté le service. Isolé, livré à lui-même,
il prit la résolution de passer le î-este de sa vie dans la
retraite. Il choisit la maison de St. Magloire , à lJaris,
et s y fixa dans le cours de l’année 17 8 c, auprès de
M. Laube, ancien officier de m a r i n e , son ami, son ancien
compagnon d’armes; il habita avec lui jusquà la fin de
179°. C’est la-qu’il comptoit terminer sa carrière glo
rieuse (1); mais une attaque d’apoplexie qu’il éprouva,
dans la même année 1790, affoiblit ses facultés intellec
tuelles, et le mit dans la dépendance de Bélanger, son
domestique. Ce dernier loua , sous le nom de son maître,
une maison écartée de celle de St. M agloire, et le fit trans
férer dans cette nouvelle habitation , malgré les repré
sentations de M. Laube, et de tous ceux qui prenoient
intérêt à ce brave et ancien gén éral, dont la mémoire
inspire la vénération.
Les amis de M. d’Orvilliers instruisirent sa famille de
ce changement.Tous les parens de M. d’Orvilliers, vive
ment affectés de son état, donnèrent au citoyen Hugon
de G ivry, les pouvoirs les plus étendus, pour se rendre
auprès de leur o n c le ,y prendre tous les arrangemens et
mesures convenables, donner les ordres que sa prudence
lui suggéreroit, pour que M. d’Orvilliers fût servi et
soigné ainsi que l’exigeoit son âge et son état \ l’autoriserent même à transférer leur oncle à portée de quel
qu’un de sa famille, pour qu’il puisse veiller à ce qu’aucun
(1). P a r son testa m e n t, il a v o it m an ife sté l’ in ten tio n d 'être en terré
d ans la m aiso n de St. M a g lo ire .
A 2
�( 4 )
r
soin ne lui manque, si son médecin juge que cela
puisse se faire sans risque pour sa santé et sa conser
vation.
‘
L e citoyen ïïugon de Givry est également autorisé à
envoyer ou à changer les domestiques, et à prendre toutes
les mesures que sa sagesse lui dictera , pour que les af
faires d’intérêts soient administrées de manière que les
r e v e n u s de son oncle suffisent à ses besoins et à ses dépenses.
Ces différentes procurations qu’il est inutile de trans
crire littéralement, sont des 12 avril et 9 août 1791 , et
enregistrées le même jour 9 août.
Le citoyen Hugon de Givry se rendit auprès de son
oncle, en vertu des pouvoirs qui lui avoient été donnés.
M. d’ Orvilliers étoit peu favorisé de la fortune; sa plus
grande ressource étoit une pension de 18,000 f r . , payée
par l'état, et qui fut supprimée dansla suite. L e citoyen de
Givry ne pouvoit confier son oncle à des mains merce
naires; il prit la résolution de l’amener chez lui au mi
lieu de sa famille; il consulta le médecin Phlips sur cette
détermination; il fut décidé que le voyage ne pouvoit
entraîner aucun inconvénient. L e citoyen de Givry fit
vendre, en présence de M. Laube et de Bélanger, le
mobilier qui restoit à son oncle; le produit de la vente
fut de 403 ir. eu assignats. '
Bélanger accompagna son maître dans ce voyage; il
demeura huit jours à Moulins, auprès de lui, et l’aban
donna ensuite, pour retourner à Paris.
M. d’Orvilliers a vécu dans la maison de son neveu ,
jusqu’au 13 avril 1792. Ses neveux et nièces après sa mort
parla gèrent sa succession ; il revint à chacuu lu somme de
�( 5 )
.
.
1,831 f. 85 cent., ainsi qu’il résulte des quittances produites. M. Laube, ami de M. d’Orvilliers, étoit dépositaire
du testament de ce dernier, qui l’avoit nommé son exé
cuteur testamentaire. Comme M. Laube n etoit pas Fran
çais, et qu’il étoit sur le point de retourner dans son
pays, il envoya ce testament au citoyen de Givry. Ce
testament olographe est sous la date du 4
i 7 ^7 j ^
contient différens legs j il suffit de transcrire celui qui
concerne Bélanger.
« Je donne 6,000 fr. à Bélanger, en reconnoissance
* des services qu’il m’a rendus, par estime de ses vertus
« et par amitié pour lui ; je lui donne aussi le lit d in
« dienne, et tout le petit ameublement de la chambre
« située au premier, où je mange ; tous mes habits et les
«r deux tiers du linge servant à ma personne j enfin je lui
« donne tous mes livres qui se trouveront , après que
« M. Laube aura fait le choix de ceux qui lui conviennent.
« Je donne à C a lliste , mon laquais, un tiers du linge sér
ie vant ù ma personne, et une somme de 1,200 fr.
« L e s articles concernant les deux domestiques n au
« ront e ffe t, qu autant qu'ils seront à mon service à
« Pheure de ma mort. »
Bélanger , informé du décès de son ancien maître, écrivit
au citoyen de G iv r y , lui parla du testament dont il connoissoit l’existence, du legs qui lui avoit été fa it, et de
manda copie du testament.
Le citoyen de Givry copia littéralement l’article qui concernoit Belanger, et s’empressa de le lui envoyer.
Sans doute que Bélanger ne crut pas alors qu’il pou v o it
exiger le payement du legs, lorsqu’il en connut la condi-
�.
.
6 ) .
.
,
tion ", du moins il a gardé le silence jusqu’au 2 vendé
miaire an 7 , qu’il fit signifier un acte extrajudiciaire au
donjicile du citoyen Hugon de Givry. Il se permet, dans
le préambule de cet acte , des inculpations malhonnêtes
contre le citoyen de G ivry, et le somme de déclarer, i°. si
M. d’Orvilliers est décédé dans sa maison de Moulins;
2°. s’il a fait son testament olographe , le 14 mai 1787 ;
30. si par ce testament il a fait un legs quelconque en fa
veur de Bélanger, qui étoit son premier salarié5 40. si
M . d'Orvilliers lui a confié, à titre de dépôt ; son testa
ment, pour le déposer cliez un notaire après sa mort;
5°. s’il est encore dépositaire aujourd’hui du même testa
ment. Dans ce dernier cas , il somme le citoyen Hugon
d’en faire le dépôt chez un notaire, ou en justice, dans
vingt-quatre heures, et de lui indiquer ensuite le lieu ou
il aura fait le dépôt. Dans le cas où le citoyen Hugon
auroit, à l’instant du décès de M. d’ Orvilliers, fait le dépôt
de ce testament au greffe, ou en l’étude d’un notaire, il le
somme de lui indiquer à l’instant le notaire qui a reçu ce
dépôt; sinon et faute par le citoyen Hugon de donner à
Bélanger les renseignemens nécessaires pour avoir une
copie légale de ce testament, et de s’expliquer sur les faits
ci-dessus, celui-ci se pourvoira contre lui pour l’y con
traindre, faisant à cet effet toutes réserves do fait et de
droit.
L e citoyen Hugon de Givry répondit, i° . que M. d’O r
villiers étoit mort chez lui eu 1792; 2°. qu’il a fait 1111
testament olographe, mais qu il en ignore positivement la
date, qu’il croit cependant que c’est eu 1787 ; 30 qu’il croit
cju’il a fait un don conditionnel en faveur dudit Bélanger 3
�. .
( 7 )
4°. que M. d’Orvilliers a confié son testament entre les
-mains de M. Laube , ancien officier de marine, son a m i,
qui le lui a montré , et qui en est nommé exécuteur testa
mentaire ; 5°. q u e lui H ugon -G iviy n’est point dépositaire
de ce testament, et qu’il ignore où il e s t , et s’il existe;
6°. enfin qu’après la mort dudit d’ Orvilliers, lui G iv r y ,
a partagé avec ses autres cohéritiers les meubles et effets
du défunt, dont partie a été distribuée aux pauvres, particulièremet ses habits et linges de corps; qu’au surplus,
s’il étoit prouvé qu’il fût dû légitimement à Bélanger, la
succession d’ Orvilliers le payeroit.
.
Cet acte extrajudiciaire fut suivi d’une céclule, en date
du 5 nivôse an 7 , par laquelle Bélanger demanda que le
citoyen Hugon fût tenu de déposer le testament chez un
notaire, ou au greffe du tribunal civil, dans vingt-quatre
heures, si mieux le citoyen Givry n’aimoit payer , à lui
Béla nger , la somme de i 5 ,ooo f r . , valeur du legs à lui fait
par le testament du 14 mai 1787. Il y eut un procès verbal
de non conciliation , suivi d’une citation du 6 pluviôse, et
le 28 floréal an 7 , il intervint un premier jugement con
tradictoire, qui ordonna que le citoyen Hugon de Givry
seroit tenu de déposer au greffe du tribunal civil d’Allier
le testament olographe de défunt d’Orvilliers, dans la hui
taine , à compter de la signification du jugement.
L e 3 trimaire an 8 , nouvelle citation de la part de Bé
langer, contre le citoyen Hugon de G ivry, tendante à faire
déclarer exécutoire contre lui le testament olographe de
ieu d Orvilliers, du 14 mai 1787,6! à le faire condamner,
en qualité de seul et unique héritier de son oncle, à lui
faire la délivrance des legs exprimés ù son profit, et à lui
�C 8)
payer pnur ¡ceux, i° . la somme de 6,000 fr. fixée par le
testateur; 20. celle de 8,000 fr. pour les deux tiers des habits
et la valeur du linge servant alors au défunt ; 30. celle de
3,000 fr. pour la valeur des livres que le citoyen Hugon a
trouvés à la mort de son oncle ; 40. celle de 10,000 fr. pour
dommages-intérêts, dûs à raison de ce que le citoyen de
Givry . comme dépositaire infidèle du testament, l’a tenu
secret jusqu’au 28 floréal an 7 , qu’il a été condamné à en
faire le dépôt, et que par là il a mis Bélanger dans Fimpossibilité de former plutôt son action.
Le 8 frimaire il y a eu un procès verbal de non concilia
tion , et le 26 du même mois Bélanger a fait assigner le
citoyen de Givry au ci-devant tribunal civil d’Allier , où il
a repris les mêmes conclusions qu’au bureau de paix.
Ii est bon d’observer, que lors du procès verbal fait au
bureau de paix, le citoyen G ivry avoit exposé que Bélanger
réclamoit mal à propos l’exécution d’un testament dont il
n’avoit pas rempli la condition ; que le legs n’avoit été fait
au profit de Bélanger, qu’à condition qu’il se trouveroit
au service du testateur au moment de son décès, et que
Bélanger avoit quitté le service de M. d'Orvilliers long
temps avant sa mort. A u surplus, le citoyen de G iv iy
remarqua qu’il n’étoit héritier de son oncle que pour un
sixième; qu’il ne savoit à quel titre et pour quel motif
Bélanger lui accordoit une préférence exclusive ; il crut
devoir lui indiquer le nom, la qualité et la demeure de ses
autres cohéritiers.
Bientôt il s’est élevé entre les parties, une discussion plus
sérieuse. Bélanger opposoit comme fin de non recevoir un
écrit de M. d’Orvilliers du iô^avril 1788, qui, suivant lu i,
le
�.
.
( 9)
le dispensent d’exécuter la condition apposée au testament.
Il argumentait contre le citoyen de Givry de quelques lettres
particulières de l’envoi que lui avoit fait ce dernier, de
l’extrait du testament en ce qui concernoit Bélanger. Il
voulut faire résulter de là, une approbation du testament.
Des mémoires imprimés ont été répandus de partet d’autre.
.Bélanger s’est livré aux plus atroces déclamations ; des per
sonnalités ont été substituées aux moyens , et chaque écrit
qui émanoit de lui, étoit une nouvelle diatribe. Dans un de
¡ses mémoires , pag. 4 , verso, après avoir dit que le citoyen
•Hugon de G ivry étoit venu à Paris, le i 5 mai 1791 ,
auprès de son oncle, il s’exprime ainsi :
; « .Quel étoit le but de ce voyage ? Etoit-ce pour veiller
« plus particulièrement sur la'santé de son oncle, et pro
'« longer ses joùrs en lui prodiguant tous les secours de
« l’art des médecins ? Non. Il ne s’est rendu en si grande
« hâte dans la capitale, que pour s’emparer, ainsi que
• toutes les circonstances le prouvent, de la succession de
« son vieil oncle, avant Sa m o rt, et pour en accélérer le
« terme'autant qu’il dépendoit de lu i, sans se compro« mettre aux yeux de la justice. »
• • On doit sans doute mépriser les injures, mais une accu
sation aussi grave ne pouvoit être tolérée. L e citoyen de
Givry en demanda justice; il conclut à la suppression de
-ce libelle, et à l’affiche du jugement à intervenir.
• Il s appliqua ensuite à démontrer, en point de droit, que
Bélanger étoit non recevable à demander la délivrance de
son legs conditionnel, et qu’enfin il auroit dû former sa
demande contre tous les héritiers du testateur.
- La cause portée a l’audience du tribunal civil d’A llier,
£
�( 10 )
du 6 germinal an 8 , il est intervenu un jugement contra
dictoire , dont on va transcrire les motifs et les dispositions.
« Considérant, i °. qu’aucune des trois fins de non rece« voir proposées par Bélanger n’est fondé , attendu d’une
« part, que l’écrit en date du 16 avril 1788, dont argu<r mentoit Bélanger, non seulement ne relève pas formel
« lement le légataire de la condition portée au testament,
« mais encore qu’il en l’ésulte au contraire que le légateur
« ne supposoit sa séparation du légataire, que dans le seul
« cas du prédécès de ce dernier; de l’autre, qu’il ne résulte
« aucun acquiescement formel h l’exécution du legs, ni de
« l’extrait du testament délivré au légataire, sans réserve
« de la part de l’héritier, cette réserve étant de d roit, et la
« correspondance de l’héritier établissant qu’il regardoit le
« legs comme n u l, ni de la délivrance qui a pu être faite au
«• légataire de quelque partie du legs, puisque non seule« ment il n’est pas justifié que cette délivrance soit du fait
« de l’héritier, mais encore qu’eile a été faite avant la mort
« du testateur, de l’aveu même du demandeur.
« Considérant secondcrhent, que d'une part le citoyen
tt Hugon de Givry, par les inculpations graves qu’il a
« faites à Bélanger, tant dans son mémoire imprimé, que
« lors des plaidoiries de la cause, et sur-tout par le rapport
« de la procuration des autres cohéritiers, dans laquelle il
« s’est fait particulièrement autoriser à renvoyer les domes
a tiques, a fourni lui-même au moins de violentes prê
te sorn\itioiis , que c’étoit lui qui avoit renvoyé Bélanger
« du service de défunt Guillouet d’ Orvilliers ; que d’une
a autre part, soit que l’on considère l’intention manifestée
« par le testateur, dans sou testament, de Unir scs jours
�.
.
^.rI )
« à Paris, puisqu’il vouloit y être enterré, soit que l’on.
« considère qu’il étoit de sa eonnoissance que Bélanger
« etoit établi à Paris, et y avoit sa famille} soit que l’on
« considère enfin que ce n’est pas le testateur qui a quitté
« Paris volontairement, pour venir à Moulins, mais que
« c’est plutôt la volonté du citoyen de Givry , qui a opéré
« seule cette translation , qui a eu lieu dans la maison dudit
«’ G ivry; que dès-lors le défaut d’accomplissement de la
« condition imposée à B élanger, ne peut pas lui être re
« proche/ parce que non seulement la condition n’est pas
« restée la même par le fa it, non du testateur, mais bien
« de l’héritier, mais encore qu'il n’a plus été au pouvoir
« du légataire de l’aeçomplir, puisque le testateur, trans0
dans une maison autre que la sienne propre,
° lia plus eu dès-lors de domestiques particuliers pour
« le servir, mais bien ceux seulement du maître de cette
« maison ; que les domestiques du testateur v eussent-ils
« même resté avec lu i, ils y seroient alors devenus ceux
« de la maison, et non du testateur; ce qui n’étoît ni dans
« l’esprit, ni dans la lettre du testament.
« Considérant en troisième lieu , que les faits d’indignité
« proposes par le citoyen de G iv r y , sont non seulement
« vagues et nullement précisés, mais encore que Bélanger
« les a suffisamment écartés, tant par le rapport de ses
« états journaliers de recette et dépense, arrêtés scrupu« leusement et dans le plus grand ordre par le testateur,
R depuis 1781 , jusqu’à sa translation à Moulins, que par
(< Kl correspondance amicale, tenue par le citoyen Ilugoa
tt lui-même, avec le citoyen Bélanger, depuis la sortie de
ce dernier du service du testateur à M oulins, chez le
B 2
�( 12 )
« citoyen Hugon de G iv ry, ladite correspondance due« ment timbrée et enregistrée.
<r Considérant en quatrième lieu, que soit le dépôt fait
« entre les mains du cit. Hugon de G ivry, du testament
« de feu d’Orvilliers, soit la qualité de seul et unique
« héritier de ce dernier, à lui donnée, dans les premiers
« jugemens rendus dans la contestation, ceux postérieurs
« portant cette réserve formelle , sans que les qualités
«r puissent nuire ni préjudicier aux parties, ne peuvent
« changer sa qualité ni lui attribuer celle d’exécuteur
« testamentaire, ni lui donner de plus grands droits
« dans la succession, que ceux qu’il y a réellement ; qu’en
« principe le cohéritier n’est tenu, vis-à-vis le légataire,
« quel que soit le legs qui lui a été fait, qu’en propor« tion de la portion qu’il amende dans la succession ,
« en qualité de cohéritier ».
«
«
k
«
«
«
«
ce
«
«
«
te Considérant cinquièmement, que pour déterminer
la partie du legs relative aux livres , hardes et linges
du testateur, Bélanger ayant reconnu avoir retiré avant
la mort du testateur, le lit et l'ameublement faisant aussi
partie dudit legs, il est indispensable que l’état des
dites hardes, linges et livres soit donné, et que cette
obligation est de droit imposée à l’ héritier, tenu de
la délivrance du legs et nanti de la succession , sauf
tons contredits de la part du légataire.
« Considérant sixièmement, que quoique en principe
général l e s intérêts d’un legs portés dans un testament
olographe, ainsi que dans l’espèce, courent du jour
du décès du testateur, lorsque l’héritier nanti du testa
it m eut, néglige d’en faire le dépôt aussitôt après la
�C 13 )
« mort du testateur ; néanmoins la circonstance résul« tante de ce que Bélanger, légataire, connoissoit noti
« seulement le testament, mais encore celui qui en étoit
« dépositaire, par l’extrait qui lui avoit été adressé par
« le citoyen Hugon-Givry, doit faire éprouver des mo
« difications à ce principe ; mais que s’il est juste dans
« cette hypothèse, que les intérêts du legs ne soient point
« alloués du jour du décès du testateur, il ne l’est pas
fc moins, d’après la conduite tenue par le cit. Hugon
« de G ivry, dans l’instance en rapport et dépôt du tes
te tament, d’allouer les intérêts à compter du jour de
« la première sommation faite aux fins du rapport et
« dépôt dudit testament, du 2 vendémiaire an y , la de
« mande en délivrance du legs, n’ayant été retardée que
« par le refus obstiné du citoyen Hugon de G iv ry , de
« représenter le testament, et son seul fait ».
« Considérant septièmement, que dans l’espèce, les
« intérêts qui seront alloués, tiennent lieu de tous doin,* mages-intérêts , qui ne sont jamais dûs q u à raison
« du tort qu’on éprouve; le préjudice souffert par Bé« langer n’étant autre dans l’hypothèse, que le retard
« apporté à l’acquittement ou à la délivrance de son legs,
« et les intérêts alloués étant la compensation naturelle
« et de droit de ce retard.
« Considérant huitièmement, que la défense légitime
«■se borne aux seuls moyens de la cause, et non à des faits
« étrangers, et encore moins lorsque ces faits contiennent
« des inculpations graves, et tels que la réputation et l’iion« neur peuvent en être altérés ; qu’au nombre de ces genres
* d inculpations et faits} le citoyen Givry est fondé u
�( 14 )
m
mettre le second alinéa du v°. de la quatrième page du
mémoire imprimé du citoyen Bélanger, commençant
par ces mots : quel étoit le but de ce voyage ? et finis
sant par ceux-ci: sans se comyramettre aux y e u x de
la justice , et qu’il y a lieu des lors d ordonner la radia
tion dudit a lin éa, et que procès verbal en soit dressé
par le greffier aux frais de Bélanger.
« Le tribunal jugeant en premier ressort, déclare so
lennel et exécutoire contre le citoyen Hugon de Givry
le testament olographe de défunt Louis Guillouet d’O r
villiers , du 4 mai 1 7 8 7 ,dûment enregistré ; donne acte
aux parties de la déclaration faite par Bélanger, qu’il a
en son pouvoir le lit et 1 ameublement faisant partie du
legs à lui fait dans ledit testament ; condamne ledit
Hugon de G iv ry , en sa qualité d’héritier de défunt
Louis Guillouet d’Orvilliers, à payer et délivrer, ou
autrement acquitter, en pareille proportion seulement
que celle qu’il amende dans ladite succession, audit Bé
langer , avec intérêts, à compter de la sommation signi
fiée le 2 vendémiaire an 7 , tant la somme de 6,000 fr.
portée au même legs , que les hardes et deux tiers de
linge à l'usage du défunt, et sa bibliothèque , faisant
partie dudit legs; et pour être statué sur la consistance
« ou valeur desdites hardes, linges et bibliothèque; or« donne que dans la quinzaine, à compter de ce jour, le
« citoyen Hugon de Givry sera tenu de signifier à Bélanger
« un état certifié desdites hardes, linges et livres , sauf con« tiedils delà part dudit Bélanger, pour lesdits états et
« contredits rapportés au tribunal, ou à défaut d’iceux ,
« cire par lui statué ce qu’il appartiendra, en l’audience
�( r 5 -)
« du 6 floréal prochain , en laquelle la cause demeure
« continuée; condamne néanmoins ledit Hugon de Givry
« aux dépens laits jusqu’il ce jour par le citoyen Bélaugei ,
« ensemble au c o û t , levée et signification dudit jugem ent,
« qui sei’a exécuté par provision, nonobstant 1 appel, aux
« charges de droit, comme s agissant d execution d acte
« de dernière volonté reconnue en justice. Et faisant droit
« sur les conclusions en radiation et suppression dinjures,
«• prises par le citoyen Hugon de Givry , le tribunal 01 ■«■donne que Yalinéa du v.° de la quatrième page du me
« moire imprimé de Bélanger, commençant par ces mots.
« quel étoit le but de ce voyage ? et finissant par ceux-ci.
« sans se compromettre au x y e u x de la justice , sera
« rayé dudit mémoire comme injurieux et diiïainant, et
* que procès verbal de ladite radiation sera dresse par le
« grellier du tribunal aux frais dudit Bélanger. »
Bélanger a fait signifier ce jugement par exploit du 28
thermidor an 8 , a v e c déclaration que ce jugement le gre-voit dans quatre de ses dispositions ; qu’on conséquence il
s’en rendoit appelant, i° . en ce qu’il prononçoit la sup
pression d’une partie de son mémoire de défenses; 20. en
ce qu’il ne prononce point en faveur de Bélanger une con
damnation en dommages-intérêts ; 30. en ce que, sans
aucune distinction , il ne condamne le citoyen llu gon de
Givry qu’au payement de sa portion du legs; 40. en ce que
le payement ne prononce pas quelle est la quotité des con
damnations que doit supporter le citoyen de G iv r y , ce
qui, suivant lu i, est un déni de justice.
De son cô té, le citoyen Hugon de Givry a interjeté pu
rement et simplement appçl du même jugement par acte
�( i6 )
^
du 23 brumaire an 9 ; et c’est sur ces appels respectifs que
le tribunal a à prononcer.
L ’ordre de la discussion exige qu’on commence par
examiner la question de droit relative à la condition im
posée au testament.
On analisera ensuite les moyens particuliers et subsi
diaires du citoyen Hugon de Givry.
Et on terminera par la discussion des griefs que Bélanger
a proposés contre le jugement dont est appel.
La première règle que l’on doit observer touchant l’ac
complissement des conditions e s t, que l’on doit se con
former exactement à la disposition conditionnelle. Telle
est la doctrine de Furgole sur les testamens, tom. 2, ch. 7 ,
sect. 5 , nomb. 3 : « C’est la lo i, dit-il} que les parties con« tractantes se sont prescrite ; c’est la loi qu’un testateur
« qui dispose a imposée : il faut donc consulter le contrat
a ou la volonté du testateur, et suivre exactement et litté« ralement ce qui est prescrit : in conditionibus primum
« locum voluntas defuncti obtinet ca quœ régit condi« tiones , loi 19 , ff. de condit. et demonstral. L e temps,
« la form e, la manière, les circonstances, tout cela dépend
« d elà disposition conditionnelle.de laquelle on ne doit
« s’écarter en aucune façon ; c’est elle qui doit régler l’évé« nement et la conduite de celui qui doit accomplir la con« dition, pour profiter de la libéralité conditionnelle; et
« comme on ne doit rien ajouter à la disposition pour
« rendre la condition plus diflicile, ni pour l’éteudre d’un
« cas à l’autre , ni d’uue personne à une autre , on ne doit
« non plus rien omettre ni retrancher de ce qui se trouve
v exprime dans la disposition, et par conséquent l’accom
plissement
�.
.
. ( x7 )
.
« plissement ou l’infraction de la condition , doivent arriver
« précisément de la manière et en la forme prescrite par
<* le testateur. »
'
Ricard, dans son traité des1dispositions conditionnelles,
cliap. 5 , sect. 3 , nomb. 314 , enseigne <r que les conditions
« doivent être pleinement et exactement accomplies, aupa« ravant que la disposition qui en dépend puisse avoir
« son effet. Lorsque le testateur a attaché sa libéralité à
« une condition, la condition en est la base et le fondc« ment ; 'de sorte , que lu n e ne peut subsister qu’avec
« l’autre. Il est absolument nécessaire , pour faire sub« sister la disposition , que la condition , qui seule est ca
« pable de lui donner l’être, précède dans les mêmes
« termes que le défunt a prévus , tellement que s’il y
« manque quelques circonstances, la volonté du testateur,
« qui s’est liée h la condition ,• demeure imparfaite ; elle
« ne peut produire pareillement qu’une disposition impar
te faite, laquelle conséquemmenf demeure sans effet et
« sans exécution. »
Plus bas, Ricard ajoute, « que ces maximes ont lieu à
« l’égard des conditions en général, mais qu’elles doivent
« plus particulièrement recevoir leur application, lorsqu’il
« s agit de conditions potestatives, qu’il est au pouvoir du
« légataire d’accomplir, précisément dans les termes que
« lui a prescrits le testateur. 11 doit, avec une obéissance
« aveugle, se soumettre absolument à la volonté du dé« funt, et satisfaire ponctuellement à la condition, sans
« qu il lui soit permis d’examitier s’il seroit plus expédient
« de 1 exécuter d’ une autre façon que celle que le testateur
'« a prévue. » .
G
�( i8 )
Les considérations les plus puissantes ne peuvent empê
cher que les conditions ne soient accomplies, si on veut
profiter des libéralités : il n y a point de condition qui ne
gêne en quelque manière la volonté, la liberté , puisque
la plupart roulent sur des choses que l’on ne feroit pas
volontiers, si elles n’étoient ordonnées. Aussi, ce n’est pas
ce qu’il faut examiner ; le légataire est obligé de captiver sa
volonté ou ses goûts, pour suivre exactement les termes de
la condition qui lui est imposée , et qu’il peut exécuter. lia
loi n’excepte que tout ce qui seroit déshonorant par rap
port à l’état et à la condition de la personne à laquelle la
condition a été imposée; mais toutes celles qui n’ont rien
* de contraire aux lois ni aux bonnes mœurs , ni même à
la liberté, dans le sens des lois, doivent être strictement
exécutées.
Et pourquoi s’appesantir sur une chose aussi simple ? Ne
dépend-il pas de celui qui donne, d’imposer à ses libéra
lités les conditions qu’il lui plaît ?
O r, le général d Orvilliers avoit subordonné le legs qu’il
faisoit, tant a Belanger qu’à Calliste, à la condition qu’ils
scroient à son service à l'heure de sa mort.
Bélanger convient qu’il n’étoit pas au service du général
d’Orvilliers à l’heure de son décès; il est même reconnu
qu’il avoit cessé d’être auprès de son maître, plus d’un
an avant sa mort. Il n’a donc pas rempli la condition sous
laquelle le legs lui avoit été fait ; il est donc non recevuble
dans sa demande en délivrance de ce legs.
T out ce qui a été dit, écrit et imprimé de la part de
Bélanger, dans le cours de l’instruction, se réduit à pré-
�.
^ 19 )
.
,
..
tendre que le citoyen de Givry l’avoit renvoyé, lorsqu'il
conduisit son oncle à Moulins.
Une preuve que le citoyen de Givry ne l’a pas renvoyé,
c’est qu’il a accompagné lui-même son maître à Moulins,
qu’il a resté huit jours auprès de lui, et a voulu ensuile
s’en séparer pour aller rejoindre ses enfans qui étoient à
Paris.
Si son départ n’avoit pas été volontaire, si le citoyen
de Givry lui avoit fait violence ou l’eût renvoyé de sa
maison, comment n’auroit-il pas réclamé? Comment ex
cuser son abandon d’un ancien m aître, d’un homme si
respectable, lorsqu’il n’existe de sa part ni plainte, ni ré
clamation, non seulement à lépoque où il a quitté le service
du général, mais encore lorsqu’on voit qu’il a gardé le
silence pendant sept années entières, après la mort de
M. d’Orvilliers ?
D e quel droit, d’ailleurs, le citoyen de Givry auroit-il
renvoyé un ancien domestique qui ne dépendoit pas de
l u i , et qui étoit attaché au service de son oncle ?
Lors du départ du citoyen de Givry pour Paris, les
lettres que la famille avoient reçues, faisoient supposer que
M. d’Orvilliers étoit dans un état d’affoiblissement absolu;
il n avoit que des infirmités qui sont la suite d’un grand
ag e , et qui s etoient accrues par une attaque récente : mais
il avoit encore ses facultés intellectuelles, et il se trouvoit
dans un état tel qu’il put supporter sans danger le voyage
de Moulins; qu’il a survécu plus d’un an; qu’il a toujours
joui du libre exercice de ses droits, et que sa famille n’a
tait aucune démarche pour provoquer son interdiction.
Il est mort en possession de son état, au milieu de sa
c; 2
�( 2° )
^
^
famille; et en supposant que Bélanger eiA
U été renvoyé,
il ne pourroit pas l’imputer au citoyen de G i v r y , mais à
M. d’Orvilliers lui-même, qui u’auroit plus voulu de ses
services.
Ainsi, ou le citoyen Bélanger s’est retiré volontairement '
d’auprès du général d’Orvilliers, et, dans ce cas, il n’a
rien à prétendre; ou il a été renvoyé, et alors il l’a été par
son maître : il n’a donc point rempli la condition sous la
quelle le legs lui avoit été fait.
Le seul motif du jugement que le citoyen de Givry ait
i n t é r ê t de discuter, est celui qui paroît avoir déterminé
les premiers juges à ordonner l’exécution du legs. On y
d it, « que le citoyen Hugon de Givry a fait des incul« pations graves à Bélanger ; que par la procuration des
« autres cohéritiers, il s’est fait autoriser particulièrement
« à renvoyer les domestiques; on en conclut qu’il a fourni
a au moins de viohntes.’çrésorirptions que c’ étoit lui qui
« avoit renvoyé Bélanger du service de M. d’ Orvilliers.
On ajoute, « que si l’on considère l’intention manifestée
« par M. d’ Orvilliers, de finir ses jours à St. M ag lo ire, où
« il vouloit être enterré,* qu’il étoit de la connoissance de
« M. d’ Orvilliers que Bélanger étoit établi à. Paris, et y
« avoit sa famille; que ce n’est pas M. d’Orvilliers quia
« quitté volontairement Paris pour venir à Moulins, mais
« que c’est plutôt la volonté seule du citoyen de Givry q u i
« a opéré cette translation dans sa maison; que dès-lors le
« défaut d’accomplissement de la condition imposée à
« Bélanger, ne peut lui être reproché. Non seulement,
« disent les premiers juges, la condition n’est pas restée la
« même par le fait, non du testateur , mais de l’héritier,
�C « O
^
« maïs encore il n’a pas été au pouvoir du légataire de
« l’accomplir, puisque le testateur, transféré dans une
« maison autre que la sienne, n’a plus eu dès-lors de domes
« tiques particuliers pour le servir, mais bien ceux seule« ment du maître de cette maison. Les domestiques du
« testateur y eussent-ils même resté, ils y seroient alors
« devenus ceux de la maison et non du testateur, ce qui
« n’étoit ni dans l’esprit ni dans la lettre clu testament. »
Et sur ce fondement, la délivrance du legs est faite à
Bélanger !
Est-il donc au pouvoir des juges de changer ou modifier
les conditions apposées par un testateur au legs qu’il lui
plaît de faire? testcimentum estjusta voluntatis sententia
de eo quodpost mortem su a m jie r i velit. Les juges ne
peuvent y porter la plus légère atteinte, par des inter
prétations capables d’altérer la volonté, l’expression lit
térale du vœu du testateur; point de considération qui
puisse dispenser le légataire de s’y soumettre.
S’il étoit permis de s’arrêter à des considérations, elles
seroient toutes, dans la thèse, agitées contre le domes
tique. Il est clair que le testateur ne l’a gratifié que dans
la vue des services qui lui seroient rendus dans les der
niers temps; c’est-à-d ire , dans les plus pénibles de sa
vie : la volonté clu testateur est d’autant plus formelle
ic i, qu il a employé cette expression, à ïheure de ma
mort.
Ces principes, qui puisent leur source dans la saine
raison , comme dans les lois, ne sauroient présenter aucun
doute, ni être atténués par les efforts d'aucun interprète;
autrement les conditions seroient toujours éludées, et
�1
( 22 )
jamais domestique n’auroit encouru la perte de son legs;
il ne manqueroit jamais de subterfuge et de faux-fuyant
pour s’affranchir de toutes celles attachées aux libéralités
qui lui étoicnt destinées. Il y a plus, le maître dont le
but auroit été de s’attacher un domestique jusqu’à la
fin de ses jours, seroit abusé dans le motif de sa sensi
bilité.
Aucuns exemples dans la jurisprudence, n’autorisent
l’infraction aux lois dont se plaint le citoyen Hugon de
G iv ry ; et le danger de cette espèce d’arbitraire ne peut
manquer d’être proscrit.
L e résultat de tout ce que les juges ont v u , est une
violente présomption.
Et quoi! les -présomptions des juges; c’e s t - à - d ir e ,
l ’ouvrage de leur imagination, l’opinion imparfaite ( car
des présomptions ne sont rien autre chose ), qu’ils auront
pris sur un point de fait, seront substitués à la volonté
écrite d’un testateur, convertiront un legs conditionnel
en un legs pur et simple? N on , ce seroit la première
fois qu’un tel système seroit consacré.
Màis y a-t-il même quelques raisons de ’p résumer dans
les motifs que contient le jugement ?
Des inculpations dans un mémoire et dans des plaidoi
ries! En bonne logique, on ne voit point le rapport qu’il
peut y avoir entre l’aigreur plus ou moins fondée, qui a
pu s’introduire dans un procès en l’an 8 , et la sortie d’un
domestique en 17 9 1, d’auprès de sou maître mort en 1792.
Mais on ne dit pas en quoi consistent ces inculpations !
Mais le jugement lui-même a prononcé la suppression
d’un alinéa tout entier d’un mémoire de Bélanger, connue
�,( 23 )
.
injurieux et diffamant; et le citoyen H u g o n de G iv r y ,
traité ainsi par l’ancien domestique de son oncle, n’auva
pu repousser les injures, sans qu on trouve dans sa juste
défense, un titre contre lui!
Quant à la procuration , elle ne prouve rie n , et les
juges en font complètementTaveu , puisqu’ils n y trouvent
encore que des présomptions i mais elle doit démontrer
à la justice la circonspection et la prudence du citoyen
Hugon de G iv r y , q u i, en se rendant auprès de son oncle,
âgé et malade, craignoit de le trouver dans un état qui ne
lui permettroit plus de s’occuper de sa maison, de ses
affaires, et l’obligeroit, lui paren t, à faire usage de cette
autorité qui naturellement devoit appartenir à lui comme
à ses cohéritiers.
Il n’en fut point ainsi: le général d’Orvilliers n’étoit pas
aussi malade qu’on l’avoit craint, puisqu’il entreprit et
soutint parfaitement le voyage de Paris à Moulins ; il se
détermina librement et volontairement à se rendre dans
sa famille; et n’étoit-ce pas là qu’il étoit sûr de trouver
ces soins attentifs qui sont une nécessité dans la vieillesse,
ces prévenances qui soulagent les m a u x , ce concours d’amis
tendres qui préservent des dangers de la solitude?
A r rivé à Moulins, il a continué à jouir de la plénitude
de sa raison et de son état.
Le citoyen Hugon de Givry n’eut donc à se permettre
aucun usage de la procuration; et en parlant le langage
d u 'd r o it , quelle pouvoit être la valeur d’une telle procu
ration pendant la vie du général d’Orvilliers ? Ses parens
qui n’avoient aucun pouvoir, en pouvoient-ils conférer?
Celui qui. ay oit reçu ces pouvoirs, avoit-il un moyen légal
�( H )
d’en faire usage ? Cette procuration n’étoit qu’un acte de
prévoyance , destiné à rester sans exécution, si l’événe
ment ne le rendoit nécessaire, et un scrupule du citoyen
de Givry sur sa mission.
Les présomptions du tribunal dont est appel, sont une
injure à la mémoire du général d’Orvilliers, et au respect
que ses parèns ne cessèrent de lui porter. Elles supposent,
ou que ses facultés intellectuelles l’avoient abandonné , ou
que ses parens usoient de contrainte envers l u i , et contrarioient ses volontés.
Et quand ce seroit le citoyen Hugon de Givry qui auroit
renvoyé Bélanger, seroit-ce sans l’aveu, ou contre la vo
lonté de son oncle? voilà encore ce qu’il auroit fallu
établir. Bélanger en a bien senti la nécessité, puisqu’il a
prétendu qu’il s’étoit transporté chez le juge de paix, lors
de son départ de Moulins, mais que ce juge étoit absent,
et que tous ceux qui auroient pu le remplacer, luiavoient
refusé leur ministère.
Après huit années de silence, une allégation de cette
espèce n’est que ridicule.
Et ce juge de paix absent! Bélanger étoit donc bien
pressé de quitter M oulins, s’il n’a pu attendre son retour.
Sa démarche au reste prouveroit-elle ce que le juge de
paix n’a pas constaté ?
Croira-t-on que c’est au moment où la famille du gé
néral d’ Orvilliers remplit vis-à-vis de ce respectable parent
ce qu’elle regarde comme son premier devoir, le recueillir
dans son sein, qu'elle va répandre l’aiïliction dans son
âme , par l’expulsion d’un domestique auquel il étoit
attache •
Le
�( 25 )
#
Les faits, au reste, démentent toutes les assertions qui
servent de base au jugement.
Bélanger est p.«rti volontairement ; il n’a plus voulu
rester auprès de son maître , quand il a vu qu il falloit le
servir et vivre loin de Paris; il a préféré retourner dans
la capitale,où sa famille et ses habitudes 1 attachoient. Si
on ne lui en fait pas un reproche, au moins ne doit-il
pas soutenir que la condition du legs se soit trouvée
accomplie ?
Les premiers juges sont tombés dans une contradiction
assez remarquable.
La présomption que Bélanger a été renvoyé par le cit.
Hugon de G iv ry, les conduit à la conséquence, que Bé
langer n’est sorti que malgré lui et malgré son maître , et
qu’alors c’est comme s’il n’avoit jamais quitté le service du
testateur. Puis oubliant cette conséquence, ils disent qu’il
étoit à la connoissance du testateur, que Bélanger étoit
établi à Paris , et y avoit sa famille ; ce qui signifie appa
remment que l’intention étoit de le gratifier, quand même
il auroit cessé de demeurer avec le testateur.
Ainsi, nécessité avouée de l’accomplissement de la con
dition , puisqu’ils admettent pour équivalent la prétendue
expulsion de Bélanger , qui lui a ôté le pouvoir de s y con
former , et dispense absolue de la condition, par la v o
lonté présumée du testateur, de ne lui avoir pas imposé
cette obligation : c’est ainsi qu'on raisonne , quand on
présume.
Les premiers ju^es disent encore, «soit que l’on consi« dère l'intention manifestée par le testateur , dans son
« testament, de .lion* ses jours à Paris , puisqu’ il vouloit
•
D
�« y être enterré, soit que l’on considère qu’il étoit à sa
« connoissance que Bélanger y étoit établi, et y avoit sa
« famille. ■
»
Rien de plus curieux que ces considérations; elles veu
lent dire, sans doute, que pour l’accomplissement de la
condition, le général d’Orvillierss’étoit obligé de mourir
à Paris, et de rester attaché aux volontés de son domes
tique sur son domicile.
On doit abandonner à sa propre valeur un système qui
tendroit à faire d’un testament un titre contre le testateur.
U n testament ne date que de la mort ; ce n’est qu’à ce
moment qu’il prend son existence. Il n’est pas permis aux
juges d’examiner ce qu’il a plu au testateur de faire pen
dant sa vie : sa liberté étoit entière ; et si son intention eut
été de dispenser son domestique de la condition , à raison
de son changement de domicile, il n’auroit pas manqué
de s’exprimer sur ce point.
Une erreur monstrueuse forme la base de toute cette
discussion, en ce que Bélanger et les juges considèrent les
dispositions qu’il s’agit d’exécuter, comme étant de 1787,
tandis qu’elles n’ont d’existence que du jour du décès.
L ’instrument seul est de cette époque; et sa date, qui n’a
de propriété que pour valider l’acte en sa form e, est abso
lument nulle et sans effet au fond.
Et si M. d'Orvilliers eût vécu quinze ans encore, Bé
langer seroit donc venu, s’appuyant sur la date de 1787,
prétendre également au legs, après cette longue cessation
de services ?
Il étoit, d i t - o n , à la connoissance du testateur, que
Bélanger étoit établi à Paris, et y ayoîtsa famille.
�'
( 27 )
.
Mais connoît-on, ou conçoit-on, pour un domestique,
une autre existence que son service auprès de son maître?
et ce service n’est-il pas négatif de tous établissemens ?
Ensuite, la connoissance du testateur que Bélanger avoit
sa famille à Paris, n’offre-t-elle pas une conséquence toute
contraire à celle que le tribunal en a tiree? C est préci
sément parce qu’une famille est un juste titre d attachement
et de prédilection, parce que M. d’Orvilliers a pu craindre
que Bélanger préférât ses parens à son m aître, qu il lui
a imposé la condition d’être à son service à ¿'heure de sa
mort - et quand M . d’ Orvilliers vouloit se rendre auprès
de ses parens, c’étoit sans contredit à Bélanger à faire le
sacrifice de ses affections : et parce que le testateur avoit
connoissance de cette particularité, la condition n’en est
que plus forte.
Les premiers juges disent encore que ce n’est pasM. d’O r
villiers, testateur, qui a quitté Paris volontairement, mais
que c’est plutôt la volonté du citoyen de Givry qui a opéré
seule cette translation.
Les premiers juges ajoutent ici présomption sur pré
somption, et ne se sont pas aperçus qu’ils lançoient des
traits injurieux à la famille et à la mémoire du général
d’ Orvilliers : ce dernier est mort jouissant de la plénitude
de son état civil; tout ce qu’il a fait, il a voulu le faire;
et le livre de sa conduite personnelle et privée n’est ouvert
pour personne. Quant à ses parens , loin de contrarier les
volontés d’un oncle qu’ils n’ont cessé de respecter , loin de
le contraindre dans aucune démarche, loin de l’outrager
par des privations, le moindre de ses désirs fut toujours
une loi pour eux,
D 2
�( *8 )
#
• E n fin , porte encore le jugement, « par son séjour dans
« la maison d’autrui, le général d’ Orvilliers est présumé
a n’avoir plus eu de domestiques à son service. »
Est-il présumable que dans cet état de vieillesse et de
maladie, qui rend encore les soins particuliers plus né
cessaires, et lorsque la fortune lui en laissoit le pouvoir,
le général d’Orvilliers ait été privé de domestiques? Mais
ce qui dissipe encore les présomptions du tribunal de l’A l
l i e r , c’est la vérité constante et à la connoissance de tout
le monde, à Moulins, qu’indépendamment de six domes
tiques qui avoient toujours composé la maison du citoyen
Hugon de Givry, le général d’ Orvilliers a été servi, jus
qu’à sa m ort, par deux domestiques à ses gages et de son
choix, qui ne le quittoient ni le jour ni la nuit, dans le
même appartement qu’occupe aujourd’hui et depuis plus
de six ans, la belle-mère du citoyen de G ivry, et que rien
n’a été négligé pour rendre digne de lui la retraite où il
a terminé sa vie glorieuse.
Le citoyen Hugon de Givry se bornera à ces réflexions
sur la disposition du jugement qui le concerne. On ne v o it,
dans ses motifs, que des efforts maladroits pour justifier
une disposition que la loi réprouve; et ce n’est point avec
des présomptions , des allégations ou des chimères, qu'on
peut effacer, combattre ou altérer un titre authentique.
Il reste à examiner les grieis proposés par Bélanger,
contre ce même jugement.
' On se rappelle que Bélanger s’en est rendu appelant,
p rem ièrem en t en ce qu’il prononçoit la suppression d’ un
alinéa de son mémoire, comme injurieux et diffamant.
L e citoyen Hugon de Givry a transcrit plus haut cet
�C 29 )
-
alinéa ,* Bélanger a eu l’audace d’accuser le neveu, le
disciple du général d’Orvilliers, d’avoir cherché à abréger
les jours de ce vieillard vénérable, sans se compro
mettre aux y e u x de la justice.
.
Cette horrible diffamation , qui méritoit une peine
plus sévère, et qu’il est cruel de relever, est d’autant
plus maladroite qu’on ne commet pas de crime sans
intérêt. Et quel intérêt avoit donc le citoyen Hugon.
de Givry , de chercher à abréger les jours d’un oncle
dont toute la fortune consistoit en une rente viagère
de 18^000 francs?
'
1 Mais ce seroit s’avilir que de descendre à une justifi
cation ; -le citoyen de G ivry doit se contenter de livrer
l'auteur de cette monstrueuse accusation, à la justice et
à la sévérité du tribunal.
•
Bélanger se plaint encore de ce que-le jugement dont
est appel, ne lui a point adjugé de dommages-intérêts.
Quel tort a-t-il donc souffert? n’éloit-il pas assez heu
reux d’avoir obtenu la délivrance d’un legs conditionnel,
sans avoir rempli la condition? N ’étoit-il pas suffisam
ment dédommagé par les intérêts de ce même legs, qui
lui sont alloués depuis la sommation par lui faite de re
présenter le testament ?
Bélanger se récrie encore de ce que le citoyen Hugon
de Givry n’a été condamné qu’au payement de sa por
tion du legs; mais ignore-t-il qu’un héritier n’est jamais
tenu au payement des legs, que dans la proportion de
son amendement? X^c citoyen de Givry lui avoit désigné
la portion qu’il amendoit dans la succession de son oncle;
il lui avoit indiqué le nom bre, la qualité et demeure de
�( 30 )
scs autres cohéritiers. Bélanger n’avoit point d’action hy
pothécaire sur la succession de M. d’ Orvilliers; chacun des
héritiers ne pouvoit. donc être tenu que personnellement
pour sa portion, en supposant que la demande fut fondee.
Enfin , Bélanger regarde comme deni de justice , le
défaut d’indication précise de la quotité des condam
nations que devoit supporter le citoyen de Givry.
• Ce dernier grief est inexplicable. On n’indique ordi
nairement cette quotité qu’en termes généraux, et pour
la part et portion qu’amende le cohéritier contre lequel
on dirige les poursuites. Bélanger connoissoit en quoi
consistoit l’amendement du citoyen de Givry, qui étoit
un sixième ; i l n’étoit donc nullement besoin d’une plus
ample explication.
Par conseil, P A G E S , jurisconsulte.
B R U N , avoué.
ma
A RlOM, de l'imprimerie de L a n d r i o t , imprimeur du
Tribunal d’appel. A n 9.
�
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[Factum. Hugon de Givry, Claude. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
successions
legs
domestiques
Description
An account of the resource
Mémoire pour Claude Hugon de Givry, héritier pour une sixième portion de défunt Louis Guillouet d'Orvilliers, ancien lieutenant-général des armées navales, intimé et appelant; contre Simon Bélanger, ancien cuisinier de feu Louis Guillouet d'Orvilliers, habitant de la ville de Paris, appelant d'un jugement rendu au ci-devant tribunal civil de l'Allier, le 6 germinal an 8, et intimé. Question. Peut-on exiger le payement d'un legs conditionnel, lorsque la condition imposée au légataire n'a pas été remplie par le fait du légataire ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1779-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0104
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0103
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53645/BCU_Factums_M0104.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Paris (75056)
Moulins (03190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
domestiques
legs
Successions
-
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0aefee4f12fcbac6d452ef8745c5a9eb
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Text
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épartem
entdel'aliertribunalcivil
P O U R le citoyen S i m o n B e l a n g e r , ci-devant cu isin ier , et
premier domestique de défunt L o u i s G a i l l o n e t d ’ O r v i l l i e r s , amiral de France , D em andeur ;
le citoyen H u g o n d e G i v r y ,
héritier dudit défunt son oncle , Défendeur.
CO N TRE
seul et unique
Q u e l l e idée d o it-o n se f o r m e r d ’un n e v e u , q u i n on con ten t de
s'e tre e m p a r é de la fo rtu n e de son v i e il o n c l e , m ê m e a v a n t sa m o r t ,
em p loie t o u r - à - t o u r l’a rtifice et le m en son g e p o u r d ép o u iller un p a u v r e
d om estique d’un legs m o d i q u e , q u e le d éfu n t lui a f a i t , en récom p en se
de ses longs et pénibles s e r v ic e s ?
N ’est-ce pas à l’ingratitude la m i e u x caractérisée joindre la plus sor
dide a va ri ce? N ’est-ce pas s’exposer d’ un côlé à la raillerie et au mé
pris du p u b l i c , et de l’autre à toute l’ani madver ti on de la justice?
T e l s sont cependant les tristes désagrémens , ou plutôt telles sont les
chances également honteuses que le citoyen H u g o n G i v r y ne craint
pas de courir. Héritier du ci-devant comte d’ Orvllliers q u ’ il a dépouillé
,de son v iva nt de sa riche s uc c es si on , il croit n’en a v o ir pas assez s’ il
ne parvient à frustrer le citoyen Bellanger du legs que le vieillard lui
a laissé p ar son testament.
Et sur quel m o y e n se fonde cet avide collatéral } pour b r a v e r a vec
tant de courage les loix de la reconnoissance , et affronter a ve c tant
d intrépidité la r ume ur publ ique ? « M o n o n cl e , dit-il , n’a entendu
« donner à Bellanger q u ’autant q u ’ il seroit à son service à l'heure
de sa m ort o r , long-tems avant cet événement Bellanger l’ avoit
» quitté ; donc son legs ne lui est pas du ».
Quel h o m m e seroit assez maître de soi pour r etenir son indig n a ti o n , lorsqu’ il saura que c ’est le citoyen H u g o n G i v r y lu i- mê me ,
qui a congédié Be ll anger , qui l’a e m p ê c h é par force et par artifice
de recueillir les derniers soupirs de son b i e n f a i t e u r , de son m a î t r
tombé en enfance ?
Entrons dans le détail de c ette singulière a f fa i re , plus digne de fig u rer dans un r o m a n , ou dans une intrigue de théâtre, que d'occuper
uneplace
dans les fastes de la justice.
A.
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2
)
F A I T .
V e r s la fin de 1 7 7 9 , Bellanger entra en qualité de c h e f de cuisine
au service du comte d’Orvilliers : il étoit alors à R o e h e f o r t , où sa place
de vi ce-ami ral de F r a n c e , le retenoit.
A y a n t perdu sa f e m m e a u co mme nce me nt de l’année 1 781 , il
quitta cette ville, envi ron une quinzaine de jours après. Il vint à P a r i s ,
et se retira dans le séminaire S ai nt -Magloi re , pour y v iv re dans toutes
les pratiques de la religion.
^
A v a n t s o n départ de R o e h e f o r t , il congédia ses domestiques qu i
étoient en grand nombre. Il ne garda que le seul B e l l a n g e r , q u ’il
me na a ve c lui à Paris , dans sa voiture. 11 fut redevable de celte p r é
f é re n ce , sur tousses camarades, a ux marques les plus expressives de
fidélité, d’attachement et d’exaclilude q u ’ il n’a cessé de lui donner en
remplissant ses devoirs auprès de sa personne.
__
Cet éloge n ’a rien d’exagéré , il n’est que la répétition des discours du
citoyen d ’O r v i l li e r s , et des tém oignages q u ’il a toujours r e n i u s de la
conduite de ce lidèle s e rv ite u r , p endant tout le tems q u ’il a été à son
service.
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Si l’on interroge le supérieur du séminaire de S a i n t -M a gl oi r e, il r é
pondra , ainsi q u ’il l’atteste dans son certificat du 4 frimaire de r ni e r,
a. que le citoyen L oui s Gaillonnet d’Orvilliers , ancien lieutenant-gé» néral des armées navales de F r a n c e , ayant résidé pendant l’espace
» de dix ans environ dans ledit sé mi na ire , j’ai souvent eu occasion de
» le voir et de m ’entretenir a v e c l u i , q u ’ il m ’a très-souvent parlé du
n citoyen Simon B e l l a n g er , son cuisi ni er, qui a été à son service pen
» dant ledit tems, et qui l’étoit déjà bien a u p a r a v a n t , q u ’il ma c o n s
» tamment témoigné être très-satisfait de son s er vi ce , persuadé que
■
» ledit Bellanger le s e r v o i t , no:i-seulement a ve c respect et lidélité ,
» mais a vec le plus grand a tt a ch em ent , et qu’ en conséquence il étoit
» disposé à lui faire beaucoup de bien pendant sa vie et après sa
» mort ».
Interrogez le directeur des études de. philosophie de cette ma ison ;
interrogez le citoyen Sai nt -Simon , aussi l’ un des chefs de cette m ê m e
mai son, tous les deux attesteront les mômes faits, les m ê m es t ém oi
gnages de satisfaction des services du iidèle Be ll ang er , le mê me désir
ciu comte d Or vdli ers de lui faire ou bien de son vivant el après sa mort.
Ces titres, que la voix publ ique consacre d u n e m i ni è re si h o n o
rable pour Bellanger , sont confirmés par les écrits el libéralités du ci-,
toyen d’Orvilliers.
_
‘D ’après ses ordres, Bellanger avoit apporté an séminaire de SaintMagloire une poilion de sou ménagé j c o m m e chaque jour la santé
du comte s’aiï'oiblissoit, il étoit possible que son héritier après sa mort.
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.
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(3 )
.
.
lui contestât ce mobilier. P< ur délivrer ï iellanger de celte inquiétude ,
_ il lui d o n n a , le 16 avril 178O, l’ écrit suivant:
' « Je certifie et (onfesse que c’est par m o n avis et conseil que B e l
» langer a mis ses effets chez tnoi , el q u ’ils lui appartiennent en e n t i e r ,
» ainsi que tout ce qui est dans la c h amb re q u ’il oc cupe ».
Ce n’est pas t o u t , à cette déclaration de propriété, il ajoute en ces.
‘termes, dans l e m ê m e écrit : « Et j’y compi’ends le petit lit; et si connue
51 je l’e i p è r e , il me survit ; car s i f a v o is le malheur de le perdre ,
» il me seroit nécessaire pour coucher le domestique qui le re mp la » ceroit ».
' « D e fout c e c i , continue-t-il, il suit que le sage Bellanger-ne. i\oh
» point être inquiété après ma m o r t , sur ces meubles et l’article de
» mon testament ».
^ D ’après cet écrit , le don du petit lit que le citoyen Dorvilliers fait
a Be ll ang er , le chagrin q u ’ il éprouveroit s’ il avoit le malheur de le
perdre, l’espoir q u ’il le survivra , l’espèce d’ordre q u ’ il intime à son
héritier de 11e point inquiéter le sage ïiella n g er sur ses-meubles et
1 article de son testament ; enfin ce s u r n o m , cette épithète de sage q u ’il
lui d o n ne , toutes ces particularités prouvent que Bellanger avoit su
j u s q u a u dernier point mériter l'attachement de son m a î t r e , et q u ’ il
lui étoit devenu si nécessaire q u ’ il ne pouvoit plus s’en passer.
E n f i n , pour peu q u ’on réfléchisse sur sa situation, et q u ’on se r e
présente un vieillard de plus de 80 a n s , qui cha que j our voyoit e n
lever une de ses facultés, qu i senloit son corsps se détruire e n . d é t a i l ,
et s’ciFaisser sous le poids des infirmités ; n’est-il pas naturel de penser
que cet h o m m e se lut cru perdu l u i- m êm e, s’il avoit eu le malheur
de perdre le serviteur fidèle qui connoissoit depuis long tems ses goûts ,
ses habitudes, et qui possédoit si bien l’art de les flatter, de les e n
tretenir, cl adoucir res maux , el à foi ce de soins et de prévenances de
le faire s ur vi vr e, en quel que sorte, à lui-même.
U ne étude si continuelle de ‘services ne pouvoit être oubli ée; aussi
. ce vieux guerrier se fit il un devoir et un h onneur de les reconnoî ire;
il fit son testament olographe le 14 ma i 1787 , ainsi conçu à l’égarcl
ae Be ll ang er : o J e donne 6000 francs à S imon Bel l ang er , mon c u i
» smier el premier domesti que, en reconnoissance des services q u ’ il
a m a rendus , par estime de ses vertus et par amitié pour lui. Je
» lui donne aussi Is lit d’ indienne et tout le petit ameublement de ¡a
» cnombre située au premier où je mange , tous mes habits, et les
» deux tiers du linge servant
m a personne ; enfin je lui donne tous
» les livres qui se trouveront après qu e M . / aub (son exécuteur tesJ) lameiitaire_) aura fait le choix de ceux qui lui conviennent. -Je donne
n >-i C a li x le , mon Inquais...... l e s articles concernant les deux d o » nies tiques n'auront effet qu'autant qu'ils seront à mon servies;
M « l ’heuie de ma mort ».
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�( 4 )
_
_
Quelques années après ce testament, le citoyen d’ Orvilliers cessa
peu à peu de v i v i e , sa raison c é d i n a ; enün au mois de mars 1791 ,
Il tomba tout-à-fait dans l’enfance ; instruit de son état, le citoyen I I u gon de G l v r y , son neveu et son héritier, accourut à P a r i s , et y arriva
le i 5 mai de !a m êm e année.
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_
_
Ouel étoit le but de ce v o y a g e? étoit-ce pour veiller plus p a r t i c u
lièrement sur la sa nié de son oncle , et p r o l o n g e r ses jours en lui pro
diguant tous les secours de l’art des médecins? N o n , il ne s’esl rendu
e n°si grande hâte dans la capitale , que pour s’emparer , ainsi que
toutes les circonstances le prouvent , de la succession de son vieil
oncle avant sa m o r t , et pour en accélérer le terme, autant q u ’il d é
pendent de l u i , sans se compromettre aux y e u x de la justice.
* Il est triste pour Bellanger de se voir réduit à révéler de pareils
faits • il est triste pour lui d’être forcé d’accuser le neveu , l'héritier de
son maître et de son bienfaiteur: que disons-nous accuser ? C ’est ce
n e v e u , c’est cet héritier qui s’accuse lui-même ; c’est sa propre c o n
duite qui le traduit devant le tribunal de l’opinion p u b l i q u e , et qui le
d é n o n c e , ainsi q u ’on va le voir dans un instant.
Un e f f e t , à peine est-il arrivé chez son o n c l e , q u ’ il s’empare do
t out , fait vendre son m o b i li e r, sa batterie de cuisine; sans aucune
f or ma lit é, se fait rendre compte de l’état de sa fortune et de ses r e
venus par le citoyen E t i e n n e , n o ta i r e, l’ homme d’affaires du citoyen
d’ Or vil li er s; il ordonne à Bellanger de mettre dans des mall es, l’a r
g e n te r i e , la garde-robe et tout le linge. P o u r se dispenser d ’acquitter
'le legs fait à Calixte ( l’un des domestiques du vieillard ) il le congédie,
' et lui donne pour i n d e mn i t é , un billet de 5 o francs en sus de ses
gages.
_
Il auroit bien v oulu renvoyer de m êm e Bellanger , et s’ acquitter p a
reillement de son legs; mais celui-ci lit p!u; de résistance, assuré pnr
l’écrit de son maître , du 16 avril 1788 , q u ’ il exigeoit q u ’ il ne 'c quittât
q u ’ à ia mort; soupçonnant que cette condition pouvoit être répétée
dans son testament, il persista à tester auprès de la personne du vi ei l
l a rd , et a lui continuer ses secours. Le vo ya nt si ferme dans cette
résol uti on, le citoyen de G i v r y n’insista pas (.'avantage pour le m o
ment.
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Quand tous c e s arrangemens lurent termines , ce neveu fit transporter
dans sa v oi tur e, son vieil o n c l e , qui avoit alors perdu l’ usage de la
parole; il le conduisit à M o u l i n s , a peu-près c o m m e un cadavre que,
l’on conduit à sa sépulture. Bellanger étoit à ses côtés pour lui fournir ,
pendant le v o va ^ e, tous les secours dont il avoil besoin. Enfin l’equi'«
L e e arriva à Mmilins le 2,3 u n i 1 79 1.
_
_
_
O n se demande pourquoi cette trans.alion si subite? L e citoyen
H i l t o n G i v r y e.royoit-il que le ci toyen Dorvilliers auroit plus de secours
à Mouli ns qu’ à Paris? Ma is ne sait-on pas que dans les plus graves,
�maladies, on v i e n t , d’une extrémité de la F r a n c e à l’a ut re , chercher
guérison dans cette grande capitale? Eloit-ce le m an q ue de fortune
ou d’aisance? Mais le citoyen d’ Orvilliers jouissoit à-peu-près de 30,000
irancs de r ent e; s a v o i r , de 18,000 francs de pension du g o u v er ne
ment , dont il lui éloit toujours dû une année en a r ri è re , du château
Cihenel, bien provenant de sa f e m m e , dont l’usufruit lui rendoit
annuellement environ 12,000 f r a n cs ; enfin il lui étoit d û , par une
citoyenne D u f r e s n e , b an q u i è re , un capital de 14,000 francs.
C.e n’étoit donc ni la pénurie des m o y e n s , ni le m a n q u e des
r emèdes, ni des secours de l’a r t , qui forçoient cet avide collatéral à
faire transporter, a ve c tant de précipitation, le.citoyen d’ Orvilliers de
-taris à M o u l i n s , dans l’état oii il étoit de souffrance et d’anéantis
sement. Pourquoi donc un v o y a g e si l ong , si p é n i b l e , pour u n
vieillard qui n’a voit plus q u ’un souille de vie ?
.................. Qulcl
non m o r ta l ia p e c to r a c o g i s ,
A u r i sacra f a m é s !
Jri r g tLn,
A u r este, quelques jours après l’ arrivée à Mo ul ins du citoyen
j-’orvilliers et de sa suite, le citoyen Hugon de G i v r y , m it auprès
de lui une garde et un domesti que, qui apprirent de Bellanger la
manière de gouverner le malade. Qu an d au bout de dix à douze jours
us furent au l a i t , le citoyen G i v r y déclara à Bellanger q u ’il n’avoit
plus besoin de l u i; q u ’il avoit payé sa place à la diligence de Paris,
pour partir 1s lendemain à quatre heures du matin ; q u ’ il eût à se
tenir p r ê t , et que son domestique le conduirai t à la voiture.
Il étoit six heures du soir, q uan d ce départ inattendu fut intimé à
Bellanger. Qu e d i r e , que faire dans la position où il étoit? Il eut beau
protester qu il ne quitterait son m a î t r e , conf or mément à ses i ntentions,
q u ’après avoir reçu son dernier soupir. Vainesproteslations;le malheureux
d ür vi lli er s 11’étoit plus q u ’ une masse i n a n i m é e ; Bellanger n’étoii plus
dans sa m a i s o n ; il éloit dans celle du citoyen G i v r y ; pouvoit-il y
l e s t t r , malgr é son congé et ses défenses d ’y rester?
Il fallut donc se disposer à partir; mais avant de céder à cette
atale nécessité, il crut devoir prendre ses précautions. Il alla chez le
ci-devant curé de Mouli ns , pour le prier de veni r a ve c lui chez le
juge de paix, afin de laire constater son départ forcé. Malheureusement
ce juge etoit a b se nt , el il étoit trop lard pour y retourner : il n’ eut
que le tenis de faire ses p a q u e t s , de co mp te r a v e c le citoyen G i v r y ,
clu i lui p ay a ses g a g e s , moitié en assignats, et moilié en a r g e n t , et
? « • VOUl' se (^!>'HTasser de lui plus f a c i l e m e n t , lui promit q u ’ après
e tet.es de son o n c l e , son testament seroit, à son é g a r d , ponctuelle
ment exécuté.
Bellanger p artit p o u r P a r i s , re mp li de ces brillantes promesses;
A 3
�.
.
( 6 }
■
.
mais bientôt il eut occasion d ’apprendre que promettre et tenir de la
part du citoyen Hugon G i v r y , sont deux choses toutes différentes.
I,e citoyen d’Orvilliers est décédé à M o u l i n s , le 14. avril 1792- lk;Llanger a réclamé ¡’exécution du testament du défunt.
.
I.Vabord il en a demandé la représentation au citoyen G i v r y ; celui-ci
lui en a donné une copie, écrite de sa 111 lin. C o m m e cet adversaire se
proposoit d’exciper de ¡’obligation imposée par le testateur, d’être a
son servi ce, à Plieure de sa m o r t , pour obtenir le legs, il a lallu
plaider pour s’assurer de l’existence de cette condition , si d i e étoit
bien l’ouvrage du testateur, ou plutôt celui de son héritier.
P o u r éloigner autant q u ’ il a été en son pouvoir le jugement de cet
incident , ie citoyen Hu g on de G i v r y a n i é , devant le juge de paix
et à l’audi ence, q u ’ il étoit dépositaire du testament, quoiqu' il eu eût
donné dr; sa m-iin une copie à Bellanger ; triais convai ncu par celle
copi e que toutes c;s dénégations étoient autant de mensonges , le
t r i b u n a l , par son jugement du 28 floréal, l’a condamné ¿1 le déposer
à son g iv l le dans la huitaine; sinon fait droit sur la demande en
délivrance de, legs , et en dommages et intérêts de Bellanger.
C e dépôt a été l'ait en exécution de ce j u g em e n t , et il n’est plus
question que de décider si le citoyen H ug on G i v r y ayant forcé 13ellanger de quitter son maître avant sa mo rt , celui-ci peut exciper de
celte retraite, dictée par la nécessité , pour se dispenser d’arquitter
le legs, et les' dommages et intérêts d û s , en raison du tort qu’ il a fait
éprouver à ce malheureux domestique. Entrons en matière.
M O Y E N S .
P a r son testament olographe du 14 mai 1 7 8 7 , le citoyen Dorvilliers
a lègue à Echanger, en récompense de scs longs services, une s omme
de 6,000 f r an cs, et d’autres objuls plus au long mentionnés dans ce
testament , et i! les lui a l ég ué s, à condition q u ’il sera à son service
ù )’ h m e de sa mort.
Quelle est la nature de ce legs? Quelle est celle de la condition
qui y est apposée?
S i , d’après les principes de la ma ti èr e, et d’après les faits de la
cause, 011 démontre:
E n premier lieu , que le legs est d u , indépendamment de la condition
qui lui est apposée ;
E n second lieu, q u ’il est du encore, parce que l’ inexécution de celte
m ê m e condition n’est point le lait de j 3ellanger, mais bien celui du
citoyen G i v r y .
Il résultera de la démonstration de ces deux propositions, quo dans
tous les cas possibles, il est tenu d acquitter le legs, et les d omma ge s
et intérêts d e ma n dé s , et que j'ien ne sauroil l’en dispenser.
�(
P R E M I E R E
7
)
P R O P O S I T I O N .
L e legs est dû , indépendamment de la condition qui lui est apposée.
Quelle est la nature de ce legs? C ’e s t , sans contredit, lin legs rémunératoire , une récompense donnée p o u r des services déjà reçus et à
recevoir par la suite.
'
,
O r , quelles que soient les conditions opposées à lin l e g s , à une
donation r énni né ra to it e, elles ne peuvent jamais eire d ’un a ccompli s
sement aussi strictement rigoureux , que les conditions apposées aux
donations purement gratuites.
L a raison de cette différence vient de ce que la donation r é m u n é
ra toire est plutôt une dette que le testateur acquitte, q u ’ une véritable
donati on; car si quelquefois il donne plus q u ’ il ne d o it , il n’est pas
en son p ouvoi r d’attacher à sa donation des conditions telles, qu’ il
puisse se dispenser d'acquitter ce qu’il doit réellement : la justice ne
permet pas pius q u ’on s'enrichisse des services d’aut ru i, que de sa
fortune.
Ces principes s’appliquent singulièrement a ux legs faits à des domesticjuRs par des vieillards infirmes. O n sait que les g^ges ordinaires
cju on leur d o n n e , ne suilisent pas , g beaucoup près, pour les r é c o m
penser des peines et des soins q u ’ ils prennent de ces êtres que la mort
Ivappe en détail , et q u ’elle accabl e, avant de terminer leur cari ¡ère,
de mille et milie inf irmités, aussi pénibles à soigner q u ’à supporter.
Al ors il n’est que l’espoir d’être indemnisés du surcroît de leurs
soins et de leurs veilles, qui soutient l’attachement des domestiques
auprès de leurs vieux maîtres , et les legs q u ’ils leur font après leur
m o r t , mê me a ve c la condition de recevoir leurs derniers soupirs, ne
sont jamais regardés que c o m m e un supplément de leurs gages.
I o u t e peine mérite salaire, et tout salaire doit être proportionné à
la peine.
C ’est ce qui a été décidé par plusieurs arrêts. D e n i s a r t , verbo legs ,
en rapporte un trèi-remarquable, N°. i 4 i dont voici les circonstances.
Nous les copions.
»
»
»
»
»
w
« L e n août 1 7 5 5 , M . le mar échal de T h o m o n d fit son testament
devant notaires, par lequel, entr’autres dispositions, il iit un legs
de 400 livies de pension viagère à Sevestre, son cuisinier, laquelle
pension devoit c o mme nc er du jour de son décès; plus, il lui léguoit
Mx :nois de ses ^ages, i ndépendamment de ce qui lui en seroit dû.
T n n s mois après ce testament , le mar échal de T h o m o n d ht ui»
co*-licilc en l av eu r de tiO;s domesti ques, ù qui il légua à chacun
�»
»
»
»
.
.
,
. (
8
)
.
une pension viagère de 150 l iv r e s ; bien entendu, portoit le codi
c i l e , que ces pensions et ces dispositions 11’ auront lieu qu’autant
que ces trois domestiques seront ¿1 mon service a l'heure de
ma mort.
» T ro is ans après la date de ces testomens et c o d i c i l e , et en 1 7 6 8 ,
» Sevestre sortit de chez M. Je maréc hal de T h o m o n d , o ù il étoit
» tombé malade. L e mar échal de T h o m o n d décéda le 9 sep
» tembre 1761.
» Quatre années après sa m o r t , Sevestre demanda en justice le
» paiement de sa rente v ia gèr e; il soutint, au Ch ât elet , q u ’ il n’étoit
» sorti de chez le maréchal de T h o m o n d q u ’à cause d’une ma la di e :
» il ajouta q u ’il n’ a voit pas perdu la protection de ce seigneur, qu i
» m êm e l’avoit placé chez le marquis de Sassenage; e n f in , que s’élant
écoulé trois ans depuis sa sortie chez M. le maréchal de T h o m o n d ,
» sans que le testateur eût r évoqué le legs à lui fait, c ’éloit une preuve
» q u e M . le maréchal de T h o m o n d avoit persisté dans sa volonté. ,
» L e tuteur des mineurs enfans de M . le maréchal de T h o m o n d ,
opposoit pour défenses, que Sevestre ne s’étant pas trouvé au service
de son maître lors de son d é c è s , il étoit non recevable dans sa
demande : il argiimentoit du codicile et des termes qui s’y trou
voient , relativement aux nouveaux legs faits aux trois autres
domestiques , bien entendu qu’ils seront à mon service à Vheure
>5 de ma mort ; enfin il excipoit de celle autre circonstance, que le
» testateur, outre les 400 l i v r e s , lui avoit en outre laissé six mois
55 de ses g a g e s , ainsi q u ’aux trois autres domesliques , pour leur
» donner moyen de se mettre en condition', ce qui s u p p o s o i t , par
5) c o n s é q u e n t , que Sevestre, ainsi que les autres domestiques, seraient
» encore à son service a son d é c è s , sans quoi les legs seraient
» caducs.
» P a r sentence conlradictoire du Châtelet, du 2.8 novembre 1 7f)6 ,
» Sevestre fut débouté de sa d e ma n de , a ve c dépens. Sevestre en
» appeila en la grand’ eha mbr e ; et par arrêt du lundi i 3 juillet 1 76 7,
.0 audience de sept heures , après une plaidoierie très-contradicloire
« la sentence fut i n f ir mé e, la délivrance du legs ordonnée à Seveslre
» seulement du jour de la de ma nde , a vec dépens.»
«
«
»
»
Si l’u s a g e , dans ce t ems, eût été de motiver les jusçemens c o m m e aujourd h u i , 011 verrait sans doute que 1g motif 1g plus dirimaut de cet
arrêt éloit la nalure rénumératoire du legs, et que la condition de se
trouver auprès du testateur, au mo me nt de sa m o r t , n’étoit point à la
ri gueur une condition sine qud non ; car dans cetle espèce, si le léga
taire n’a pas acquitté la lolalité du legs par ses services, il en a acquitté
nu moins une partie, et il seroit souverainement injuste de pri ver un
domestique de ce qui lui est légitimement d û , lorsque ce 11’ est pas sa
�faule s'il n’a pas tout Fait ce q u ’ il ch voit faire pour obtenir la totalité du
legs, et que d’ailleurs il n’existe contre lui a u cu n sujet de mécontente
ment qui puisse le lui faire perdre.
_ O r , telle seroit l’ injustice dont Bellanger r>eroit aujourd’ hui la vi ct ime ,
si supposé q u ’il eut quitté volontairement le cit. Dorvi lli ers, avant sa
“ oi’t, il étoit privé de son legs. Be ll ang er , après avoir passé les plus
belles années de sa vie au service du cit. D o r vi ll er s , a v e c les plus m o
diques g a g e s , perdroil le fruit de lant d’assiduités et de soins, de tant
de nuits q u ’il a passé auprès de l u i , à le p anser, à lenét oyer et à r e m
pli r, c o m m e une garde m a l a d e , toujours au chevet de son l i t , les plus
pénibles et les plus dégoûtantes {onctions!
Il
n’est point de tribunal q u i , dans ce c as, lui refusât un supplément
de gages pour l’ indemniser de ce supplément cle fatigues et de veilles,
et on voudroit le priver d’ un legs dont il a acquitté la plus grande
partie par ses services, parce q u ’il ne lui a pas été possible de l’acquitter
en totalité!
*
Non , un tel système de défense est trop injuste , trop déshonorant
de la part de celui qui le propose, trop opposé aux intentions si claire
ment énoncées du cit. Doryilliej s ; il dégèle de la part de son héritier
un si grand fond d’ingratitude et d’a var ice , q u ’on craint de se dé s ho
norer soi-tnéme et de s?, rendre son c o mp li ce , en écoutant a v e c quel que
attention une pareille défense.
_Détournons nos regards d’ un tableau si h i d e u x , et hâtons-nous cl’arriver à notre seconde proposition,
i
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
L e legS' estdâ , parce que Vin exécu tion de la condition n ’ est pas le
f a i t de B ella n g er, n u is bien celu i du cit. IJugon Givry.
r^t-ce Bellanger qui a quitté volontairement le cit. Dorvilliers ? Est
e citoyen de G i v r y qui l’a cong édi é?
*
? C o m m e 1 intérêt est la mesure de toutes les actions humaines, v o yo ns
« a .ueur de ce flambeau si c’est Bellanger q u i , de sa propre volonté,
es l et ne , ou si c ’est le citoyen de G i v r y qui l’ a forcé à cette retraite.
.a ^,0 u l ’ e!1 supposant ciue tous ces sentimens de zèle et d’ attacl«?^ an^ei' ^uso' f Parnde auprès du comte Do rvi ll ie rs, nVusl'n,,
G- -n6 Sa 'lain 1 cIi" ei * fei' •n,t! ^ .dissimulation,
Bellanger
savoit
que
le
IjOII
»
*
.. O
.
.
1
écriif» | ,C
• CUll)'le,'0,, p ^d a i r ? son testament ; il eu avoit la preuve
avnW t G Sn l,n,11' n cl;,ns l’acte du ifj avr il 1788, relatif aux effets q u ’ il
a pporles eu séminaire de Saint-Magloire.
nsuite Bell anger, c o ir aincu que le cit. Dorvilliers ne pouvant so.
�( io 5
passer de l u ! , avoit des raisons de soupçonner q u ’ il mettoit quelque
condition dans ce testament pour le lier auprès de sa personne ju squ’à
sa m o r t , et ses soupçons ne se sont que trop bien réalisés.
O r , est-il probable que Bellanger ait été assez ennemi de son propre
intérêt et de lui-même pour quitter le citoyen Dorvilliers au mo me nt
où il entrevoj'oit à chaque minute que ses espérances alloient se
réaliser par la mort de ce vieillard agonisant? Q u o i ! il a passé q u a
torze années, sans relâche, auprès de lui, dans le plus pénible s e r v i c e ,
et c’est lorsqu’il est sur le point de recevoir les récompenses q u ’ il lui
a tant de fois promises, q u i l le quitte!
N o n , ce fait n’est pas c r o ya bl e ; Bellanger n’est point un f o u , u n
i mbécilie ;les témoignages que le comte Dorvilliers, lorsqu’il jouissoit
de sa pleine raison , n’a cessé de rendre de sa sagesse et de ses vertus, ré
sistent absolument à cette idée; et si la sortie de Bellanger de chez le
•citoyen Hugon de G i v r y pou voit être volontaire de sa part, elle ne
pourrait lui être i mp u t a b l e , parce q u ’on ne pourrait la regarder que
•comme un acte de dé me nc e ; on le plaindrait, mais on ne seroit pas
fondé à le priver de son legs, parce que tout ce qui se fait dans la
f o l ie , n ’est point du domaine des loix.
Ma i s v o y e z encore c o m m e tout choque le bon sens dans l’ h y p o
thèse que nous traitons. Si Bellanger avoit eu.dessein de renoncer aux;
avantages portés en sa faveur dans le testament de son m a î t r e , par sa
retraite d’auprès de sa personne, pourquoi a-t-il attendu, pour l’effec
tuer, q u ’il fût à Mo ul ins ? N ’étoit-il pas plus s i m p le ,p l us naturel d’exé
cuter cette résolution à Paris, il s’ épargnoit la fatigue d’un voyage pour
aller et revenir?
C ’étoit , d i r a - t - o n , pour ne pas laisser le comte Dorvilliers
sans secours dans sa route; il l’ai moi t donc, il lui étoit donc att aché;
mai s s’il n’a pu se résoudre à l’abandonner pendant sa route, quelle
raison avoit il de l’abandonner après sa route terminée? L ’a imoi t- il
moins alors? lui étoit-il moins attaché?
O u i n’est co nv ai nc u maintenant que son départ de Mouli ns a été
f o rc é ,e t que l’ intérêt, l’a v j r i c e , la cupidité ont aveuglé le citoyen H u g o n
de G i v r y , au point de le congédier de chez lui, c o m m e il a congédié
Calixte à Paris, pour profiter des legs (ails à ces deux do me sti que s, et
pour se faire un moyen qui le dispensât de les acquitter.
Est-il possible d’en douter, lorsque sans é g i rd à la foiblesse, à l’ état
d’anéantissement d u c o m l e Dorvilliers, et au\ risques de le faire périr en
c h e m i n , il le fait enlever de Pans uo i m nj U i i cadavre q u ’on porte au
lieu de sa sépulture? Et pourquoi celte translation si s ui n t e , si p ré ci
pitée? afin q u ’étant maître absolu de sa personne, rien de sa succession
ne pût lui échapper.
'
S oi Cdoi ’or! voilà donc où l u p o u ^ s c eux que tu tourmentes!et l’on.
�.
C «« )
_
douieroit encore que celte mô me soif n’a pas excité le citoyen H u g o n
cie G iv ry à congédier Bellanger de ch ez lui pour s’ emparer de son legs,
comme elle l’a porté à s’e mparer, sans aucune f or mal it é, de toute la
fortune de son oncle avant q u ’ il fût inort.
A u surplus, s’il pouvoit rester encore quelques nuages sur la véritable
cause de la retraite de Bell anger, le tribunal, pour les dissiper, pourrait
sans doute ordonner la p r e u v e , tant par titres que par témoins des faits
énoncés au présent mé moi re .
•
' Ma is quoi! cette preuve n’est-elle pas toute acquise? N ’est-il pas d’une
évidence irrésistible que Bellanger ayant tout à perdre en quitant le
comte d ’Orvilliers avant sa mort', il ne l’a pas quitté de son propre
mo uve men t ? N’est-il pas d’une évidence non moins irrésistible que le
citoyen H u g o n de G i v r y ayant r envoyé C a l i x t e , l’ un des domestiques
du c o m t e , pour gagner le legs que ce vieillard avoit f a i t , il a de même
1 envoyé Bellanger dans la v u e aussi de profiter du legs fa it à Bellanger ?
O r , le citoyen H u g o n de G i v r y peut-i l argumenter de sa propre
turpitude? peut-il se faire u n moye n de sa convoitise pour se dispenser
*d acquitter un legs qu e l’ honneur et le respect, pour la m é m o i r e d’ un
oncle qui lui a laissé tant de f ortune, lui c omma nd ent si impérieuse
ment d’acquitter?
C)ue deviendraient donc les dernières volontés des mourans , si leurs
héritiers, à l’exemple du citoyen Plugon de G i v r y , pouvoient se per
mettre de les anéantir? Quels domestiques, sur la foi instable de leurs
maîtres caducs et i n f i r m e s , sacrifieroient leurs veilles pour les soulager ,
et exposeraient m ê m e leur santé, si les promesses de ces homme s lutlant sur la couche mortuaire entre le trépas et la vie , pouvoient être
iaussées et rendues illusoires par d avides et ingrats collatéraux ?
Magistrats, 1 epoque est enfin arrivée où après, tant de secousses v i o
lentes, il vous est permis d ’avoir tout le courage de la j usti ce, et de
raflermir , par l’autorité de vos jugemens-, les bases tant de fois ébranlees de la sociabilité. V o u s en ave z dans cette ca us e, l’occasion la plus
éclatante.
'
S il est de l’intérêt de la société d’assurer le service des domestiques
«iiveis leurs maî tres, il n’est pas moins intéressant pour elle d’assurer
es îéeompenses des maîtres envers leurs domestiques.
•Ainsi vous avez à puni r l’avidité d’ un collatéral qui croit n’ en a vo ir
point assez, si a l’opulente succession q u ’ il a recuei lli e, il ne joint
Un mo di que legs fai 1 a un pauvr e domesti que, après i/| années du ser
vice le plus assidu et le pins pénible. V o u s a ve z à venger ce malheui eux auquel un héritier barbare veut arracher It pain q u ’ il a gagné au
les** Ce *anl f'6 v e '^*!s et c^e sueurs. V o u s ave z à l’indemniser dp toutes
les chicanes multipliées de son r e d o u t a b l e adversaire lui
11 luit é pr o uv er , et qui l’ont réduit à la déplorable nécessité de
�. .
( .
12
)
vendre son mobilier pour f ou rnir a u x frais de c ette injuste contesta
tion.
Justice et h u m a n i t é telles s ont les deux vertus que vous ave z à sa
tisfaire. Dél ivrance du legs , dommages et intérêts proportionnés a u x
pertes de Bell anger ; tel est le jugement q u ’elles vous c o mma nd e nt , et
q u e le publ ic attend de vous.
SIMON
J.
Les
TH.
B E L A N G E R .
L A N G L O Y S , ancien avocat au parlement de Paris.
Jurisconsultes
soussignés
qu i ont lu le mémoi re
ci-dessus, et toutes les pièces sur lesquelles il est basé, après a voir
mûre me nt réfléchi sur les questions qui y sont traitées :
Sont d’avis que
S imon Belanger doit obtenir du
tribunal ci vi l
de l’Al l i e r l’admission des conclusions q u ’ il a prises , et qui tendent
à ce que le
citoyen
H u g o n G i v r y , héritier du
ci -devant comte
d ’O r v i l l i e r s , soit condamné d’exécuter à son égard le testament du
d e r n i e r , du 14 mai 1787.
L a demande de Belanger est fondée sur la morale et sur les loix;
et ses deux titres doivent par-tout être consacrés.
D élib éré à P a r is , le 1 3 p lu v iose an 8.
C 0 S T E.
.m a u s s a l l é ,
D e l’i m p r i m e r i e de L E N O R M A N T , rue des Prêtres SaintGe rm ai n l’A u x erro i s , No. 42.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Belanger, Simon. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Simon Belanger
Langloys
Coste
Maussallé
Subject
The topic of the resource
successions
legs
domestiques
Description
An account of the resource
Mémoire pour le citoyen Simon Belanger, ci-devant cuisinier, et premier domestique de défunt Louis Gaillonet d'Orvilliers, amiral de France, Demandeur; contre le citoyen Hugon de Givry, seul et unique héritier dudit défunt son oncle, Défendeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Lenormant (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1779-An 8
1751-1789
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0103
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0104
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Paris (75056)
Moulins (03190)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
domestiques
legs
Successions
-
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72d98cf259c3a7002dcc8049ff7259cf
PDF Text
Text
PRESIDENT :
C O U R D E C A S S A T IO N
M
CHAM BRE D E S R E Q U E T ES.
c o n s e ille r r a p p o rte u r
CONSULTATION
M. D E G A U .JAL.
POUR
AVOCAT-GENERAL :
N e g o cia n t à P a ris,
CONTRE
Les Syndics de la Faillite Montgolfier et Cie, de Roanne,
1a
Q
u e s t io n
de
r a ppo r t
des
in t é r ê t s
et
b é n é f ic e s
reçus
P A R UN C O M M A N D IT A I R E .
i *i
_ _ _ _ _ _ _ ________
L’avocat aux Conseils
soussigné;
et à la C our de Cassation,
Connaissance prise d e l'a rrê t ren d u le 2 décem bre -1846,
par la C our de Lyon, e n tre les parties susnom m ées, et des
docum ents se ratta ch a n t à cette affaire,
Est d ’avis que le pourvoi form é co n tre led it a r r ê t,d o it être
rejeté.
I l
va m otiver son o p in io n .
,i.
•
■
1
F A IT S .
Une Société en nom collectif et en com m andite, s’est formée à
�Ilo an n e, par acte passé les 2 0 ju in et 20 ju ille t 4837, devant
M *üerlinot* n o taire à Paris, et sous la ra iso n Itfontgolfier et
C om pagnie, p our l'e x p lo ita tio n , à R oanne, d ’une papeterie
appartenant à M. Achille -Moutgolüar.
Cette société s’est constituée an capital d ’un m illio n , dont
700,000 fr. p our l’usine apportée p ar M. Achille Montgolfier,
et 500,000 fr. de capitaux com m anditaires, form ant le fond de
roulem eaL
M. Tilanchet, défendeur év en tu el, était l’u n de ces com m an
ditaires et p o u r la som m e de 100,000 fr.
L’extrait publié conform ém ent à la lo i, a contenu toutes les
énonciations qu’elle exige dans l ’art. 45 du Code de com m erce
e t notam m ent Jes apports ci-dessus :
L ’article 8 des statuts sociaux est ainsi conçu : « Chaque action
» donne d ro it :
__
» 4* A un in té rê t de 5 p o u r 100, payable de six mois en six
• m ois, le 1" m ai et le I er novem bre de chaque année, chez le
» banquier de la Société, a Paris ;
no ;.
>h
'*■ •
» 2“ A un dividende prop o rtio n n el qui sera payé après chaque
» inventaire annuel, et dont la quotité sera réglée p ar u ue dé» cision de l’Assemblée g én érale, conform ém ent à ce qui sera
• d rte i-a p re s ;
*
> 5* A une p art proportionnelle de p ro p riété dans toutes
le s valcnrs de la société. »
La société en tra e n c o u rs d ’exploitation. Elle étaildans toute
l’activité de cette exploitation, lorsque en m ai et novem bre \ 858,
les actionnaires reçu ren t sem estriellem ent l'in té rê t de leu r
.com m andite.
.
ni.
�ÜUMiûT” /
U uiV oiuit. « x
^¡*m-^u "
h*tx. ß*At*pL 4-t. ^><'*»«|(lui**.
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IAKOÙ*.
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.
�— 3 —
^>0
M .tB lan ch et reçu t ainsi deux fois 2 ,5 0 0 fr.* .soit ensem ble
5 .000 t fr.j! in té rê t à 5 p o u r JOO l’a n , de ^ c o m m a n d it e de
100.000 fr. Il les reçut sem estriellem ent,. à Paris^ de .ilÀJL pourol
et G irerdji banquiers d e là société M ontgolfieret'Gam pagnie„^af7
v o ir 2 ,500 fr. en m aH '8 5 8 et 2 ,5 0 0 fr. le 20 n o v e m b r e ^ ) jj$
m êm e année. Q uelques actïônnaires > et n o tam m en t M. ,AcJ]il}^
M ontgolfior, gérant, e t M .-Mont gol fier père* ^’étaient,.payés des
intérêts en m ai I 8 3 9 ,i quelques jo u rs avant la d é c la ra tio n ad ç
faillite, m aisM . Blancliet n ’a rien reçu en: 4859;, il,u ’si tpucb&(jiie
les deux sem estres d'intérêts de 1858. Uni inventaire fait à la, fin
de \ 858, ayant présenté des bénéfices,. M. Blanchefcreçut 5^61,0 frp o u r sa pari, dans lesdits. b é n é fic e s;. u¡ " f - .^q
'flíí¡cl>nmnoh
C ependant, le 22 ju in 1859, Iárso<nété'‘M ontgólfiéret Giey fut
déclarée en état d e failli té.*' '
i^
Ȓi*.
■;:l '
••
^ 20 ■'•{»>{
ifl. ;>n<-'f
<•' w I.) '■ , ¡ vn
i.G inq ans environ se passèrent et ce n ’est que le 22 mai
que les syjidicç de cette.faillite, o n t assignq M. B lanchet devant
le tribunal de com m erce deRoanne,¡afin de rap p o rt dés 5,’0Ü()Tr.
dfinftqrjêta et des 5x6 i 0 fr. de bénéficjesj qu’il avaitxeçus en 4 858.
Ici, ét quant à la procédure suivie, il çonvienti de laisser; p a rle r
Vart*ôt attaqué et d ’extraire les faits d u d it a r r ê t . . .
‘jM
'• t ■
•
*
i
p
« Une société en com m andite p a r actions à cxisté'à Rtoanfifc,
sous le iióm (le’MohtgóTfíé’r et C'e, cëtte matëoïi a è ië décliarée en
faillite le 22 mai 1854. Par exploit' dè l’hursáiér d e P a ris ;: U?s
syndics ont assïgri^ le s ie ù r B lanchet, lfun dè^ associés, sim ple
bailleur de fóudá, devant le trib u n al d eco m m erce de R oanne, en
payem ent de la som m e de 8, 010' frv q u ’il aurait: reçu e1d u d it
com m erce M ontgoliier et C,e, soit à titre d’in térêts d ’actions,
soit î\ litr e do dividende do -bénéfices, et cela, à, une époque .où,
•selon les syndics ii'ladito ntaison, loin ; de pouvoir en payer à; sep
actionnaires, n'avait pas !m≠Uïi a c tif suffisant .poup payc^sçs
�(
créanciers l'ta n d is'q ü & 'lésie u r Blarichet n e reconnait:poiiit que,
dès l’origineTMe fo n d s;soèial ait ’é té-entam é et soutient que pen
d a n t Îe temps-ôù dès-intérêts on t été payés p ar la sdctëté Mont^olfier e t'm è in è 'p lu sie u rs m ois"après, cette société é ta it'e n plein
crédit ^ qu’aux veux de tout lé' mrindé“elle' paraissait prospérer,
et^qu’avec ses élém ents de succès, elle aurait réellem ent prospéré
saris la m auvaise direction et Iles fautes du g é ra n t; ajo u tan t q u ’il
y*a (èu clé là p a rt dé lu i, M. BlanchetJ entière "bonne foi, en con
t r a c t a n t ^ soüiété et stipulant ses conditions, en versant exacte*
m en t et intégralem ent les fonds q u ’il lui avait p ro m is; en recevant
ce qu’elfe’lui d o n n a ;!b o n n e foi en tout et toujoursÆ es^ syndics
dem andaient de plus les in té rê ts de cetteisom m e et les dépens.
De le u r côté,:les syndics o n t protesté co n tre ces énonciations; ils
o n t dit notam m ent que la pensée de so u ten ir que la m aison Montgolfier était in bonis dès l’o rig in e et lors des payem ents des in
térêts et dividendes, n ’était venue au sieur B lanchet q u ’en
d e rn ie r état de plaidoirie devant la Cour, et q u ’au contraire, la
situation plus que précaire du com m erce M ontgolfier dès son dé
b u t, était nofoire et spécialem ent à la connaissance de Blanchet ;
q u’enfin, le capital socialavait été constam m ent entam é. M. Blan
chet a persisté dans ses explications ci-dessus. M. Blanchet se
présenta su r cette dem ande, en soutenant q u ’ils n ’avait reçu que
ce q u ’il avait le d ro it de recevoir, et conclut à son renvoi p u re t
sim ple d ’instance avec dépens. »
■
»
« En suite des plaidoiries contradictoires; le trib u n al de com
m erce de R oanne re n d it, le 17 octobre 4845, un jugem ent motiv é fe t conçu en ces te rm e s: »)
Le trib u n a l,
u- . / f ,;r
i
* ’ »‘Considérant'* que l’acte de société du 20 ju in 1857, reçu
M* Bertinot,n notaire à Paris, co n tien t au proGt-'des actionnaire«
la stipulation d ’un in té rê t à 8 p o u r 100 (article 8) ; •iiirfmwbi:
�« C onsidérant que lesKtiers iliirnt put'Ig n o rer cette société,
puisqu^elle a été créée par acte n o tariç.et q u ’e x tra ite n -a été pu•‘i./;.><*! Ht *»
U ‘¡i Olr..’ i-oo; *• .fow.rn
.».< *
bliç conform ém ent à la lo i;
.
,
o
-y; " I î) 0 ‘lJi: '
•
‘ G 11 <J[>
1
Cl
« C onsidérant q u 'il n ’était pas nécessaire que cet ex trait com -‘
p rit «l’a rt. 8, les dispositions de cet article n ’étan t pas de celles
* -ic!Uil<i « U S
-'1' ' •
Il 'i '
;■
dont la loi o rd o n n e la publication ;
^
^
« Que les intérêts reçus p ar B lancliet lu i sont donc acquis léga
le m e n t; ‘ 'ilir - ■'
.-..orn.iguj,-.!*
;
'
O
« Mais, considérant qu’il ne dort pas e rfè tre de niêm é duipâyem çnt ,du dividende des préten d u s bénéfices; que de l’inspection
d.es, livres il résulte que les bénéfices étaient illuspires,. e t q u e *
m êm e dès le com m encem ent des, o p ératip n s0d e d a société* isofy.
capital;n’étaU ,plus -intact ;
.Qrj{j f. . ^ > , ;. ;;Bi - lu y - ,o '- :o n m ï
, ^.C onsidérant q u e ce qui a été indûm ent, reçu est sujet à restitu-n
tÎQÏ1 «¿,b*n loq.j.. 4i.ü «k.'j n‘n
« b u p /n i) u,i{<iu ic q ^.v iiy u iv rh «r.
J « Ouï M onsieur le juge-com m issaii-é en 'soii rap p o rt, et statu an t
en ¿ p re m ie r i reçsôrt, prononce« que B lanchet est renvoyé de là
dem ande a lui form ée, q u a n t’au chef to u ch an t le rem boursem ent*
des intéfête.d’actions;
. u;
- ;
iii,i?"
-
/Mais* leico n d am n e, m êm e p ar corps, à ra p p o rte r a u i d e
m andeurs la'som m e de trois m ille six .cent dix fran c s, p a r lui
replie à titre, de bénéfice, le condam ne, eu o u tre , a u x -in té rê tsdepuis lo jo u r de la dem ande. » f» lri r ,; ;1
-«»L-:
*■ ,
,;wj
' « f a r exploit du 20 novem bre ^ 845, les syndics M ontgolfier'
et C19 ont appelé de ce j ugem ent au chef qui reuvoyaitM ! Blanchet
d ’instance su r la dem ande en rem b o u rsem en t d ’in térêts d’aç-,
tiens. Ils o n t ajouté à leurs conclusions, su r le u r appel prin cip aj,
dés cpnclusions subsidiaires, teu d an tà une preuve de faits déniés
p arM . B lanchet, et qu’il a com battue. » ' ;
,
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- 6
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—
POINT DE DROIT.
*
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‘ rJf '
« Le sieur Blanchet d o it-ii être tenu de rem b o u rser à la faillite
la som m e q u ’il a reçue de la m aison Moritgolfier à titre d ’inté
rêts d 'a c tio n s ? ^
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îif lfV*i ii"ijp
j »
« Les syndics doîvent-ils être adm is â la preuve par eux subsidiairem e.it offerte?
: ,lc " " " ‘'"l ‘
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•• , c i ü ‘l/i'f u;j:.
j)»M &A ‘Jïi(y • A-t-il été bien jugé p ar le ju g em en t d o n t est appel?
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« Quel sera le s o rt des dépens?
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l! rf'Lesconcltisiofts des syndics dé la faillite M ontgolfier ten d en t
à ce q u 'il plaise à la C our, au principal, dire q u ’il a été m al jugé
p a r le-ju g em en t dont est appel, bien ap p elé, ém endarït, con-^1
d am n er Je sieur B lanchet à ra p p o rte ra là faillite M ontgolfier le s J
intérêts q u 'iF a reçus cotnm e com m anditaire, to u t aussi t i e n que
les dividendes, par rappo rt auxquels il n ’a pas fait appel in cid en t^ 1
l'in tim é c o n d a m n e ra to u s,les d é p e n s é e première! instance et
d ’appel, leçquel?4 épQD6 inséra* dans, tous le s ta s ,p e r m is ¡aux apr.o
pelants de^tirçïxen frais de:9yndicat, l’am ende reâtltuée.Jxnjm oli
« Subsidiairem ent, et a tte n d u la dénégation' récémbiiénf faite'
P ^ J^ y e u X ; f la n c h e t, admeürey le sy n d icat à prouverai tau.t p ar
titr e s ^ u e par témoins. e|,piir experts, tous les faite p ar eux cotés, u
etspécialei2)e n t,q u e , (Jès^oni.début, la société Montgolfier était i
au-dessous de ses affaires, et q u ’ellp n ’a jam ais jjunproduire un
sancc du.sieuL- M anchet, com m e de tout autrç co m m an d itaire,
d roits et dépens réser.vés en ce cas.
^:cjr»s"‘«! 1 -HlM
tut ,rfiioic.ui‘jito'> e*i«olojüO [c Jh«> \l .u y ,ij
v .4 , Les conclusions du sieu r IMânclmt, in tim é /te n d e n t à ce q u ’ill
plaise à la Cour, sans s’a rrê te r ’à la preiïvb;subsidiaiL’em éul de-q
i
�m andée p ar lès syndics !d e la^fàillite M ontgolBer et Cie, laquelle
sera rejeitéé commis non p é r tin e n te 'in a d m is s i b le , n iettre Tàp^
••
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pellation au’ n é an t, et o rd o n n ér^q u e ce^ d o n t é é ra p p e l so rtira
s o n ’plein et en tier effet; les appelants c o n d a m n e s a îV tn e n d e ^ i1
aux dépens, sous les réserves expresses de M. Blanclïèt, à raison
de toûs kutréü droits ét aciionàî1* 1 ”/ "
,1 J-inqqc‘*
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.,inel -ur.îM O T ^S EU DISPQSBT:IF DE L ’ARRET.
« C onsidérant iju ’iî est' d ’un usage constant^ dans toutes les
sociétés-en com m andite par actions, et connu de tout'le' m onde,
d’accorder périodiquem ent Fm tér& t des'som m es A ^ e rs^ p a r'les
com m anditai fës1; que les''tiers qiii orit'confràcté ^ v e c îà société
n ’orit pu^iêtt’ë ttoîftpës p ar le défaut île publication !flë' cëttéjI;
clause de l’acte de société, puisqu’il ri’ex'iste pas (lé Société ’dé
c a.g e n re sans crite clause, poup ainsi direiobligëe.; ’
,
« Considérant qùë.la publication qui a eu liëu p ar ex trait.d e
l’acte de société, tio n fo m iérh eritàil’article ‘^ 5 du Code de' com
m erce, a renferm é toutes les indications prescrites p ar cet article
et spécialem ent la date d é b a tt e ^ri& i$ï;; que si les tiers ne se
trouvaient pas suffisam m ent renseignés, rils pouvaient, avant de
contracter a v ec ia société,‘p re n d re connaissance p ar eux-m em e?
, '‘in u r’.n91or t .
• ’i,
'>n v u . ¡\
-, .K \,
des conventions sociales, ou ils au raien t vu que les in té rê ts d e
vaient être prélevés p a r'lé s'a sio c lë s'c o m m a n d ita ire s; ‘¡»p c>‘
« CorisidéraiU i^ud^si oü'iàduidttàit rig o u reu sem en t le principe
qu’il ïà u t flek
aélf{itè,'ftiçr‘Ia fed ciÉ ë'^ ô u ^V jo V ïeëîàs^ciés com m ahditairespuissentrc'ém ’o iii kaiis éfreHènnsànrajTpo^t, '
l’irit'érêt ^ è iÎétirfcriràW iàn d it^ ii^^ y durait plus (le sdcïët^Îfè cè ’
genre possible, et qui pût se fonder et s’étab lir, puisqu’il arriv e, !l
presque dans tous les caii, q u 'il n’y a pas de bénéfices dans'les
prem iers temps de la fondation d ’uno société;
■ 1 ; j::
�© îlîiÇ ft W ’^ P P ^ t i e n t . a u ^ t r i b ^ n ^ u x ^ ^ , ,
m n ie r,s’U^s’est écoul^.un.^cop lpng tem ps depuis,q«e l^ o c ié té ^
esl ' r - ---- -1 -: 1--------------- :-£--------------i l----------- i i -------- ---•
p o u r résultat de com prom ettre l;in t^ ê t^ d e s tiers j, que^ da^s ce^
cas, ils devraient être déclarés responsables p ar le ra p p o rt des
intérêts perçus',!tàài^èeülem ënt?'dè'ptiis: ré p o q ù e où’le u r faute
et le u r ^égligencej ,a u ra içn t; com m encé à être sans,, je& cus^-quû,
dans, Jacau se, il pe s’est p o in t écoulé un, tem ps trop* long ava^t,..,
la,dissolution de la société, p o u r,.q u e ,1’on, puisse adresser0aux|j
associés' com m andj taire$3lejrep rq ch e Lde négligence ; q u ’i]s,,ont
donc reçu ;Ies in térêts ,,dejbonne .foi, pendant le c o u rt,e sp a c e n
d^;tem ps dp T existence^e hjSociétéf,
0b o b riT oi» o w iib
« Sans qu’ il soit «besoin, d ’après les m otifs ci-désstis, 'd'è sta -’ •
tuer survies conclusions subsidiaires^et) adoptant au surplus les
motifs qui o n t déterm in é les tprem iers juges, m et l’appellation/j
au . n é a n t , . y » - o - h i eaoi*'ftîf> ni :•.•>’
«,u
t t l ir OIJp D I S C U S S I O N ;
’ ioi ôni;»OM h i a .nDiorn
:
^ îItonioInioÔfJ« If»
0*. i il AVI» .Til-IB .¡ifVi/ili,
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Aucune irrég u larité de form e n apparaissant dans 1 arrêt
- i î ; O j ; ' ' f i o ■= 7,
.‘> - i i m ‘ r n | V » i i - t h i -i • y*
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attaque, nous n avons a nous occuper que des m oyens du ionci
1,/
1
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■•vnoia'w
La question du procès est.celle de savoir.îj . :7ferViq 3"- ïi> luoir.v
/;’« ter/nes généraux, ,si la clau se,,p ar laquelle ojj^convient,
dans un acte dOjsociété en com m andite, quelles com m anditai-,^
ies recevront annuellem ent les in térêts de leurs actions, est va«-^
lable dans, tous les cas, m êm e çeJuijOÙ la société n ’est pas en bé^-j
iiéfjces,, îi,ü Tw>u"f
Un; r'
n i" b . 'idic^O'- *■>'1rtoy»
Vlus spécialement,!si ces intérêts sont sujets à rap p o rt, quajid ils rr;
o n t été touchés;
•M'jiyo« o cu 'b tï'>Hnbnnîjà uh :f fif) >-^iîiisrfq
�— 9 —
O?«}
Plus spécialement encore, si la solution de cette dernière ques
tion ne dépend pas des circonstances, et n o tam m en t de la bonne
foi de l ’associé c o m m a n d it^ ^ |^ ii a touché lesdits in té rê ts ;
Enfin, si le défaut de publication de la clause relative au paye
m ent des intérêts annuels aux com m anditaires p eu t avoir q u el
que influence su r Iasol u tion affirm ative ou négative de la q u estio n .
SUR LES PRINCIPES GÉNÉRAUX.
Une distinction capitale, que nous devons faire dès l’ab o rd
et que M. B lancbet a consciencieusem eut faite, en n ’in te rje ta n t
pas appel incident de la disposition du ju g em en t du trib u n al de
com m erce de Roanne qui le condam nait au rap p o rt des bén é
fices p ar lui touchés, tandis que ce m êm e ju g em en t le dis
pensait de to u t rap p o rt quant aux in térêts reçus, — c’est celle qui
existe e n tre les bénéfices et les in térêts. Cette question de ra p
po rt s’est présentée plusieurs fois, m ôm e en ce qu i concerne les
bénéfices, et nous prouverons que, m êm e p o u r ce cas, la ju ris
prudence, n otam m ent celle de la Cour de cassation, n ’a pas
adm is le rapport.
La question relative aux in térêts est bien au trem en t favorable,
et, à plus forte raison, la ju risp ru d en ce doit-elle, q u au t aux in
térêts, se refuser au rap p o rt.
Qui dit bénéfices, dit pertes, en ce sens que l’un est la c o n tre
partie de l’a u tre , et 011 conçoit que l’idée de bénéfices ne se con
cilie pas to u jo u rs avec celle de pertes constatées (abstraction •
faite des motifs et circonstances, qui, m êm e à cet égard, o n t fait
résister les trib u n au x au rap p o rt dem andé). Mais l’idée' iVinté
rêts n'est pas, com m e l’idée de bénéfices, corrélative à celle de
perles. La payem ent d ’intérêts est indépendant de ces deux chan
ces diverses, aussi tous les statuts sociaux en contienuont-ils la
3
�— do —
stipulation -d'une m anière absolue, et sans condition ni réserve.
’ Le systènie'des dem andeurs en pourvoi, du m oins celui qu’ils
o n H n ro g u ô d evant'là‘ C o u r ® p i » d e Lÿôn, se fondait su r ra ïticle l-84l> du Code«iviHj,f ,f
*
° i::
JCcIharilcIe ex p rim e qu e : « Chaque associé est d ébiteur eu¡' j:
.1 .,ïi)i •- 1 , ; J ' • ;»• •pv *•>; * U,": •*,’ '
'
i* » vers la société de tout ce qu il a prom is d y apporter. » Cet
article tourne .contre', les dem andeurs eux-m êm es.; car, q u ’est-ce
que les com m anditaires de la société M ontgolfier et Ç % p a r
5exem ple,V on¥-i>romi& ^ ’apporte* àcèlte 'so c ié té? 5 0 0 ,0 0 0 Xr. de
n >: riI5V ;Oi: i
-ru0 w
r ',' • ‘
pay
fût)
. r.tî
annuel, soit la som m e dç 5 ,0 0 0 fr.
,
iup
l:--0 V— <fcW:VJl
y ; HUJl.l !■
. (ji;.L,£aticîç ;-I84î3 a donçjieçu.son entière ¿Misfactidn-y.'et les vé
r i t a b l e s violateurs, dp cûtiûr,tiç4e seraie n t de;ux q u i v o u d raien t lui
doppeç u^e,
des .exigiftacea-quejson texte n i son es1110.’) fil !ib OÎIv:> iuoiî
■' !T t
l'iMq
L 'article 26 du Code de com m erce, qui n ’est atitre'cliode que
l’^ p l i c a l ^ t j p f jjçipoipeide I’^ tic le ;il8 4 5 , est tout aussi
précis qn Jay e u j|d e ^ j£ ^ m a iK lit^ ie .s):e;t[lnpite la .recherche dont
fa c tio n n a ire peut être l’objet, en d isan t :, «j.que l'associé com « m anditaire n ’est passible des perles que ju sq u ’à concurrence
-r*Mlei feiid s'ijli'il à Wié'Bü dù i/i'e’ttre 'd a n s Va Société. » ( l”.
-no' ¿,; i .
>n:>tk o,‘. ir >i ! »r»; ¡io /
1
f •pJP^c! ? ^ n c ? ^ •?'};, B lapphet, quj,(a}Jaif,.une .mise de fonds de
dans l^soeiété i\Îo n t^ ü lii^ ’ et ,Çi0„, ne peut, si cette
société ü|<ïès:dGttes e ^ f a i t , des p e rie s ,e u être, tenu que ju sq u ’à
.i ,i n
o -
W
. •)
»
-iirL e co n d am n er en ou tro à ¡rapporter 3 ,0 0 0 fr., c’est dépasser
,,pt,vi(»lerdiai,liclft-20>pr6cit6i'! <u;U,i~ v.'A ¿uo) iiru»
i,
;
r.
�Il nous, paraît donc bien évident que l'a rrè t dé> la C p u F ^ p i »
de,Lyon, qui serait en état de violation des articles 1843 e t 20/
s’il eût condam né M. B la n c h e ü y y g p p o rt'd e s 5-000 fri 4 ’intérêts,
a respecté la lo i quand il a s t a î u ^ 6u t le c o n tra ire .’ '»UsO .«ihdU;;
L’argum ent su r lequel pivote toute la thèse des ie m in d e u rs ,
c’est que le payem ent desîintérôts est, quand il n ’y a pas de béné
fices, ¡un re tra it in d irect d ’une p artie dù capitalicom m anditaire.
Nous verrons bien tô t, em d ro it, si cette idée est adm issible et a
été ad m ise; m ais nous ferons u n e observation p rélim in aire, qui
prouvera que m atériellem en t cette idée est inexacte. Le- capital
com m anditaire réalisé ne reste p as'im p ro d u ctif p o u r laVociété.
Si une pdrtie de ce capital, dit fond de ro u lem en t, est employé
au besoin de l’exploitation au fu r et à'm ésiii'ô de ses besoins, lé
reste (et la plus grande.partie de ce capitiil^es^habitueU em enl
déposé chez un .banquier qui en paye l ’in té rê t à |a société, efr
l’en crédite tous les six m ois dans. ljusage-. ,Ainsj,,.et p ar le fait
de cette production d ’in térêts, jj.a g ]a se re u c o n tjie r,d a n sre sp è ç e ,.
quo .les 500,00Q fr. de, com m andite.dans la société M ontgolfier,
et C‘% soient d e v e n u s ^ 1 0^0,00 fr. ,L es tiers se, trouvafent.donc,
avoir une garantie de -10,000 fr. en sus de la com m andite prom ise.
O r, com m e la com m andité est un chiffre fixé et d é te rm in é , il
est évident que c e ;jeu des in té rê ts est en dehors de la com m an
dité, tan t dans le cas où ces intérêts sont u n nouvel actif, que
quand, au co ntraire, il s’agit de les serv ir aux actionnaires. C’estlà le m ouvem ent naturel des capitaux; e t la loi g énérale, in d é
pendam m ent de la loi spéciale que les parties se sont faite; sup
p o sé'q u ’il s’opère dans ce m ouvem ent u n e 1sorte dè balance,
î : ,1. '
fl/; .
■
;l]^pus venons d ’apprécier, sous lo rap p o rt du fcajcul et do l ’é«
qul^é>, l’urgu;ment principal de.!la; dem ande. Nous avons? ajouté-»
cet a rg u m en t pratique à c eu s qui; «juss^nt de3<t«cles légaux* .d«i» (
�— 12 —
autnàS/iO <lu Code civil et 26 du Code de com m erce, l’ouv ne point
trop étendre la présente c o n su ltatio n , nous arriv ero n s im m éd ia
tem ent à une analyse de la ^ ^ s j^ u d e n c e et de l'opinion, dés
a u teu rs. Cette ju risp ru d e n c e, ces o p in io n s, én o n cen t au surplus,
les principales raisons de décider.
Notre travail étant fait p o u r la Cour de Cassation, et spéciale
m en t, p o u r la Cham bre des R equêtes, nous d iro n s d ’abord q u e '
la C our de Cassation a été invariable en faveur de no tre doctrine
et que la Cliam bre des Requêtes, en particulier, l ’a consacrée p ar
un a rrê t to u t ré c en t, en date du 49 m ai 4847; ren d u dans une
espèce identique et qui doit être d ’au tan t m ieux connue de l’a
vocat des dem andeurs en pourvoi, q u ’il plaidait p o u r l ’admission^
du pourvoi qui a été rejeté.
tr
Le p re m ie r a rrê t ém ané de la G o u rd e Cassation su r cette
question, ét applicable au rap p o rt tant des intérêts que des b é n é
fices répartis, est l’arrê t Cardon, en date du M février 1810, et
cassant un a rrê t de la C our « p â t de Rouen, du I î décem bre
1807. (Sirev-Devilleneuve, collection nouvelle, t. 5, l re partie,
p. -loO). Vôici le texte de ce rem arq u ab le aiw'èU
a L a :C our; — S u r le m oyen dirigé contre la co n d am n atio n
à rap p o rter avec in térêts la som m e de 15,000 fr. touchée par
C ardon, pour les intérêts de sa m ise, .pendant les quatre d e r
niers mois de l ’an x, les douze mois de l ’an xi et le.> quatre
prem iers m ois de l’an x i i : — Vu l’a rt. ,8 ,,,litre IV de l’o rd o n
nance de 40 7 3 ; — C onsidérant que les m ots Ipur p a r i, dont se
sert l’ordonnance, signifient leur, mise, ainsi que le dit plus clai
rem ent le nouveau Code de com m erce, a rt. 2 0 ; — Considérant
que le pacte social du 25 b ru m aire an x contenait une stipulation
expresse, que chaque associé prélèverait les fonds de sa n iiâèà
raison do 0 pour \ 00 ; — Que cette clause est usitée, p o u r ne pas
�-=~.
di,V£(pé|iéjL:alpj, qu’il ,en résulte p o u r chaque^,associé jun'e créance
s y ^ , S o ciété,„àjajso n ,d e laquelle il a les m êm es ¿droits que les^
a u fâ e S 'Ç fffiiic ie v s ;,Q u’il geràÿ^effaygnf-efrcontraire au hieiuhi.,,
co,\nn'|ei,'ce,Md e faire.courir à des com m anditaires, le r ^ q y e d e ,
rapporte^, plusieurs années d’intérêts d o n t }%p rélèv em en t.au rait
été stipulé, fait légitim em ent et copsom ipédp, bonne foi,;..-^7, Q ue,
ce serait obliger le com m anditaire au-d^là/le sa mjse.;q u ’il au rait
toujours laissé^ en tière dans la spcjété , pt ,qu’il n e ,(sç f e r a i t
obligé à fo u rn ir,,q u ’avec la condition..fl’en re tire r. rin téi;è,t; — .
Que dans l’espèce, les.,vingt .moi^j d ’intérêt?,,dont' il.s ’agif, on t
ct«3payés, le 19 frim aire an x n , en traites acquittées en pluvjQsç,,
et ventôse suivants, tandis que la société jo u issaU d p la pléni-,
tilde de son créd it ;
-J » ; •)'
''
: .i- '
C» S ur le m oyen dirigé contre la condam nation à ra p p o rte r avec
in té rê t la som m e de 26,0 4 6 fr., p o u r les bénéfices partagés, d ’a
près l ’inventaire ar?§1^fu 50 fructidor an x : —C onsidérant, ainsi
qu’il vient d ’être d it su r lé chef précédent, qu’un com m anditaire
n ’k&t tenu de courir lé risque que de la m ise qu’il s’est obligé
d e ’fo u rn ir; — Q ue, ' d ans l’espèce} il avait été stipftY ë^ar le
pacte social ( a r t f l ^ ^ q u e chaque intéressé au rait le d ro it de
prélever à chaque inventaire sa p art des bénéfices a c q u is ;—Que
Cardon a re tiré les bénéfices d o n t il s’ag it, le \ 9 frim aire aii1xii,
temps auquel la société jouissait de to u t son c ré d it; — Considé
rant d é p lu s que, lors de la discussion au conseil d ’É tat de l’a rt.
26 du Code de com m erce, qui répète la disposition de l’à rt. 8,
titre IV de l’ordonnance de 1C75, il fu t proposé d ’a jo u ter que le
com m anditaire fut tenu de c o n trib u er aux pertes dans la p ro
portion des bénéfices q u ’il aurait p récédem m ent faits; que cette
proposition fut com battue com m e u n e in n o v atio n d an g ereu se,
et qu’elle fut re tiré e ; q u ’en conséquence, lors d e là présentation
dos-prem iers titres de ce Code^au corps législatif?1T o ra te u r d u 1
�— '1 4 * .
^ ^ { jc u v e r n e m e n t dit, que les com m anditaires ne sont jam ais pas
sibles que de la perte des fonds q u ’ils o n t m is ou dû m ettre
dans la société; — Qu’il résulteude, cet esprit bien co nnu du
législateur, q u ’un o m m an d itaire, q u i a reçu de b o nne foi des
bénéfices acquis et qui peut les avoir consom m és, ne doit pas
ê tre soum is à en faire le ra p p o rt; — Qne la seule ressource
des créanciers qui p réten d raien t ce rapport, serait de prouver
qu’il n ’existait p oint de bénéfices à l’époque où on en au rait sup
posés p o u r en faire le p artag e; — Que, dans l’espèce, cette preuve
n ’a point été faite, et qu’ainsi le m oyen proposé p ar Cardon e sta
ju g e r en point de d ro it; — V idant le délibéré prononcé dans son
audience du 7 de ce m ois: » Casse, e tc __
Nous com pléterons l’énoncé de cet a rrê t p ar deux renseigne
m ents.
D’abord nous avouerons que la Cour
de Paris, devant
laquelle la Cour de Cassation, avait renvoyé l’affaire C ardon,, s’est
réunie, par a rrê t eu date du, I l février 4 841,, à l’opinion de* la
Cour
de Romen et à iraiiô t.cassé.^m ais des, m otifs d é fa it,
contenus e n outre dans l’a rrê t de la Cour
de Paris,, o n t
erppjêcbé q u ’il fût, déféré, à son, tour,; à fo censure de la. Cour
suprême..
r>
N otre second renseignem ent consistera, à rep ro d u ire ici,
textuellem ent, le passage de LoccQ>,Bendant .compte de l’incident
qui s’est passé au conseil d ’Etat, et au q u el fait allusion l’a rrê t do
la C our de Cassation précité. (Esprit* du Code de com m erce,
Iran?.Ier, page 82).:
« On dem anda que le com m anditaire fût tenu- de co n trib u er
aux pertes dans la proportion des bénéfices q u ’il avait précédem
m ent faits. Cette proposition était fondée su r la justice due au
g érant qui po u rrait p o r te r tout le poids d 'u n e année m alhou-
�— 15 rsz.
^
re u s e , quoiqu’il n ’eût eu q u ’une faible p art aux bénéfices,
p eut-être considérables des abnées p ré c é d e n te s1/ su r la justice
due aux créanciers°qiii, ignoraht^ïa p à rt qti’à'le' gérant dans la1,
société, ont p u, trom pés par les apparentés] im rb ù v rir u n crédit
supérieur à ses m oyens ; s u r l’in té rê t de favoriser les sociétés en
com m andite auxquelles la disposition p o u rrait faire perdre to u t
crédit. On rép o n d it, quelles: bénéfices passés, so n t rép u tés con
som m és; q u ’adopter la proposition ^' ce serait changer la c o b n
dition du;com m anditaire, laqudlle consiste essentiellem ent à n«
p ouvoir p e rd re plus que les f o n d s q u ’il a m is en société; q u ’oit
dégoûterait) lest Capitalistes des sociétés en com m andite,'parce
q u ’aucun d ’eux n e voudrait s’exposer à rap p o rter, peut-être après
j
:
-i
i
‘ IO- — AT,Uii
,,
dix
ans,
le1,11dividende
qui
a .se rv i a po u rv o ir a -ses dépenses
'fi *, '
i *ii
:
-1f
'*
* •*
jo u rn a liè re s, à ses besoins; que le.systèm e de 1 art. 26 existait
déjà, et que néanm oins les sociétés en com m andite obtenaiént
d u 1crédit. La proposition fu t retirée.
"y? ![,i ' 1^ * it0
. î/;ijî«ir** ’ )?•< <1■*'f£îp 'r' ‘ 1 'itîr ’ 1 !
On a vu ce que pensait et jugeait la Cour de Cassation en 1810,
et sous ÎV m pire de i ’o rd 6nnunce<ïe 1 6 7 5 ; on va voir ce q u ’elle
pensait et jugeait neuf ans plus1tard en J 819. ML Delangle, dans*
son T raité d e s^ fffté s^ ô m l& e re id lé s;, tom e -I"; page 5 2 9 ;fc ite /
en second lieu, unlfflfêFTlé là 'C puripB ifc.de Colm ar,1en date dti
4 février \ 819, qui a résolu la question selon la doctrine de lia
Cour de Cassation, et le-.paurvoi co n tre cet a rrê t a été rejeté.
Enfin, p o u r la troisièm e fois^ën 4847, la Cour de Cassation s’e st
prononcée encore d an s le m êm e sensu p/î-'-'r
f«ob Jiol»
: tu . i , * Ifi l
Voici le texte de cet a rrê t :
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« La Cour ; —attendu, su r le p re m ie r inoyen, que 1 a rrê t atta
qué constate qu’il résulte Îorm elfem eut et textuellem ent de l’acte
î'tr 1
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de société, que le sieur Ileu d ro n , associe-com m unditaire, avaicie
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d ro it de prélever chaque année, m em é avant 1 inventaire, »es
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intérêts de sa mise su r le pied de G poui^ 4 0.0 • j—( attendu ,que
çette claiise n ’a ^ rie ft d ’es'seutiellem ent co n traire, à. la„(jualUç*
d ’associé-com njanditaire. ,ir i
.
ffr ;I ,-^ j.....
» Sur>le second m oyen : — A ttendu que le sieur H eudroti a
fourni -le' capital*de sa co m m an d ite; que la1société prorogée n’é
tait q u e 'la ; continuation de la p rem ière société;' que c’était aûx
tiers à vérifier la situation de cette société prorogée, et que l’arrêt
attaqué constatant que le sieur H eudron a agi avec une entière
b onne foi, en co n tin u an t à prélever les intérêts de sa mise, il n ’y
a aucune raison p o u r les lu i faire rap p o rter. — R ejette, etc.
f
» Du 49 mat 4 847. — Ch. re q ., — prés. M. L asagni.; — rapp.
M. IIerv éY;-^-concl. conf. M. de Boissieux, av. gén. » (Sirèv-Devillenem 'e, tom e 47, Im partie, page 586.)
'I ■■■■■'
'
.
».- ! '■
Ainsi, en -1840, en 4819, en 1847, toujours, la ju risprudence
de la Cour de Cassation est im m uable.
'’
...
• i, il*
Ici n o tre m ission serait rem plie, et nous hésitons à rien dire
de plugidevant la Cour de Cassation que ce q u ’elle a si bien dit
à toute époque; c’est donc p ar p u re suralMMÉmce que nous y
ajouterons la ju risp ru d e > ^ y je s Cours M f d m , et la d o ctrin e des
auteurs.
_n
On vient de voir que la C o u r ^ p i * d e R ouen avait vù casser
p ar la Cour su p rê m e, son a rrê t du 4 4 décem bre 4807. On ne
do it donc pas s’éto n n er que sa ju risp ru d en ce se soit modifiée;
aussi le 26 janvier 1844, elle ren d ait l’a rrê t suivant :
« A ttendu que la stipulation d ’in té rê ts, habituellem ent insé
rée dans les actes de société en com m andite, ne blesse en au
cune m anière la n atu re et l'essence du c o n tra t; que le comm an d ataire, com m e le gérant, lie court pas m oins la chance de
perdre la totalité ou une partie de son capital.
�0Éf7.
~'n »‘ Que ¡lù1'stip u latio n re s te 'tou jo u rs aléatoire; et ren tre ainsidarié la ;n a tu re dü contrat de société ; que la clause dont il s’agit
n ’ëst's'otiniisë'à aucune des p ro h ib itio n s prévues p ar les disposi
tions générales de la loi s u r les sociétés, n
» ir
r>\
>t< ,u< , .}• n *
!.
’ ,fr ■
-.g^,» A ttendu que si, par 1 effet des prélèvem ents et de l’im p o r
tance des pertes que p o u rrait éprouver la société, le fonds social
devenait insuffisant ¡pour exécuter les1opérations auxquelles il
était d estiné/ 1er gérant devrait alors user de la ressource q u i lui
est accordée p ar la loi et dem an d er la d issolution.de la société,
en se fondant/jsoit sur l’extinction de la c h o se , soit su r l’al
tératio n q u ’elle aurait subie.
..,j:
J ¿ 1/
1 V Q u’il ne s’agit pas dé rech erch er si, en cas de faillite de la
so c ié té , les tiers seraient, ou non, fondés, à forcer le com m an
ditaire à rapporter les prélèvem ents q u ’il a u ra it opérés.
'h n ” 1, i.
o!' !”
u» Q ue, daus l’espèce, la société est en pleine a c tiv ité ; q u ’il
n ’est pas articulé que le fonds social soit absorbé par les pertes.
» Que, dans cette position, les stipulations des associés doivent
recevoir leu r exécution..; qu ’elles n ’o n t d ’autres lim ites que celles
posées par la loi ou fixées <par la n a tu re du contrat. »
:'u'
Dans un arrêt du 50 m ars 484-1, la m êm e Cour a ju g é que les
intérêts non-payés, mais portîis au com pte courant de l’associé
com m anditaire, fo rm aieu t'à son profit une créance qui ne p o u
vait, en cas de faillite, être contestée p ar la masse.
o-*. ik; t
» Attendu que, conform ém ent aux conventions de lar com m an
dites arrêtées entre Varquain père et ses enfants, la m ise Sociale
de celui-ci devait p ro d u ire des intérêts payables tous les six mois;
que cette stipulation, usitée dans le com m erce, ne ren ferm e rien
de contraire à l’essence et à la n a tu re du contrat de société; —
que le com m anditaire ne doit pas être exposé à d é p lu s grands H
�— 48 —
^ ^ r i s q u e s que c e u x q u ’il a ¡voulu c o u rir; — .que le .droit ;par lu i ré
servé de toucher périodiquem ent les intérêts de la com m andita,
constitue une com litionsans laquelle il n ’eû tp as consenti à co u rir
la chance de p erd re son capital; — que celte condition n e porte
pas atteinte au principe en vertu duquel le com m anditaire n ’est
obligé que ju sq u ’à concurrence de sa mise.
t
/
-•> A ttendu que, dans l’espèce, V arquain père, a u lieu de perce
voir les intérêts de sa m ise, en a été crédité suriles.livres dejia
société; — que ces in térêts ne sont pas un supplém ent de m ise;
q u ’ils constituent su r la société, et au profit de V arq u ain , une
créance ordinaire qui n ’était pas soum ise aux m êm es’chancesque
le capital; — que les conventions de l’acte social, dont l’e x tra ita
été p u b lié , sont obligatoires p o u r les tiers com m e p o u r les as
sociés eux-m êm es; — que la mise du com m anditaire étant ab an
donnée, la m esure de la p e rte p o u r celui-ci ne peut être étendue
au-delà. »
Passons à la doctrine des auteurs.
Les com m entateurs de Sirey de V illeneuve, en rap p o rtan t
l’a rrê t de 1810, y ajoutent les notes suivantes. Après avoir çitc
le passage de Locré, relatif au fait qui s’était passé au conseil
d ’Éfat, ils ajouient :
» Il résulte clairem ent delà, q u ’il n ’est ui dans le texte ni dans
l’esprit de la loi q u ’un associé-com m anditaire soit toujours, et
en principe, ainsi que l’ont pensé les Cours de Rouen et de Paris,
tenu au rapport des bénéfices q u ’il a encaissés. En résulte-t-il, au
co ntraire, que l’associé doive toujours être affranch^de ce rap
port? Pas d ’a van taye.
» L’induction ne p o u rrait à aucun titre être tirée de la discus
sion que nous venons rap p o rter, puisque la proposition tco-
�dante à ce qne 1« co m m a n d itairefû tte n u ju sq u ’à concurrence des
bénéfices passés a y a n t été retirée;; le conseil d ’É tat n ’eût pas à
ém ettre un avis> e t ne décidât pas, en conséquence, q u ’il en ten
dait la rejeter.
'i
+ A joutons que cette in d u ctio n tirée d ’une m anière absolue,
d o n n erait lieu, à des abus nom breux. Lorsqu une société fait
sony inventaire, d it Pardessus, Cours du D ro it com m ercial,
n* -1055, et q u ’elle se trouve avoir des bénéfices, tous les associés
san9 (distinction en touchent souvent une p artie su r les deniers
qui sont en caisse, quoique ces bénéfices ne soient q u ’éventuels
et p résum és; parce q u ’ils reposent su r la supposition de la so
lidité et de la fixité des valeurs portées à l’actif dè l’iu v en taire,
qu’une m u ltitu d e d ’événem ents ou d’accidents postérieurs peu
vent. d é tru ire (ou d im in u e r. Il peut aussi a rriv e r q u ’en fo rm an t
l’actif , on y com prenne des créances douteuses, des bénéfices m o
m entanés que l’instant d ’après fera év an o u ir. Des répartitions
fondées sur|de telles bases p o u rraien t faire re n tre r en tre les m ains
du-com m anditaire, au tan t et plus q u ’il n ’a versé p o u r sa m ise, et
lui laisser la chance de gains fu tu rs, sans risque d’aucune perte.
» Concluons donc que la question de savoir si u n associé com
m anditaire p e u t.ê tre tenu- de ra p p o rte r les bénéfices q u ’il a re
tirés de la société, est une de colles que l’on, n e peut soum ettre à
une règle absolue et inflexible, et que c’est par les circonstances
bien plus que par lb;d ro it q u ’elle doit être résolue. Tel est le parti
auquel se range M’. Pardessus, loco citato,; c ’est aussi l’avis de
MM. Malepeyre et Jo urdain . T m ité des Sociétés- coin’m ., page
4 4 7,j et .c!est dans ce,, sens, qjie nous avons^ d it,, dans n o tre
Dict. du,cont.. com m ercial : c’est là une question de fa it plus que
de d ro it, q u ’il appartient aux trib u n au x . de décider d ’après les
circonstances q u i.o n t accom pagné le partage.des bénéfices En
�glé générale,nies bénéfkes.anticipés peuvent ¡gt doivent.m (ê n)£
être rapportés1; m ais'il doit en être au trem en t de$bénéfices,acqufs.,{
et réalisés. Au surplus, dans les sociétés p ar actions* q u i,p eu y en t
souvent changer de propriétaires, ce rapport est fort diXficjtl^^ob-.i,.
ten ir, et répugne m êm e à la n atu re de ce genre de société,
e n 'ç q q u ’ii aurait p o u r effet de iè te t de la défaveur su r les actions.
I I *' ‘
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1.
*;
«
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O n /d o it donc entendre, dans ce cas, q u ’il n ’y a lieü à rapport ,l
qu’autant que l’acte de société ên co n tien d rait u n e 1cluuse ex
presse. ». (Voyez société en com m andite^ n° 52..—Néanmoiris, *
M. E ugènePersil, dés Sociétés bom m ., page 105, adopte en p rin —
cipô la solution contraire à l’a rrê t ci-dessus.)
oi*
Des arrêts de la Cour de Cassation, des avis qui précèdent; ..
découle la solution de la troisièm e question que nous nous som,
. 1 Jl •
'M l r
tne.s posée, et la preuve que tout dépend ici des circonstances, et '
n o tam m en t de la bonne foi de l’associé com m anditaire qui a
, , , .
'
touche les in terets.
'
11 nous reste à citer l’o p in io n de deux jurisconsultes ém inents,»
MM. T roplong et D elangle, su r la question de rap p o rt des béné
fices et des in térêts par les actionnaires qui les on t reçus.
i
Voici com m ent s'exprim e M. T roplong, q u an t aux bénéfices
(Droit civil expliqué. — Du co n trat de Société civile et com m er
ciale, t. II, p. 5 2 i e t suivantes, n*846.)
• «î Mais le com m anditaire sera-t-il tenu ju sq u ’à concurrence
seulem ent de sa m ise, ou bien exigera-t-on encore de lui le
rapport des bénéfices q u ’il a perçus sans frdude?
» Straclia faisait là-dessus ce b ref et rigoureux a rg u m en t : le$
bénéfices sont lin accessoire du capital, et il est de principe que
raçsiçssi^ire suit la condition du p rincipal, .QrJ'le capital d ’une
société ne peut être dim inué pendant tout le tem ps d o sa durée,;
�_ 24 .donc les bénéfices doivent rester intacts ju sq u ’à «la dissolution.
Mais,
ij i avant
i ^ Stracha, Bariole avait trouvé cette idée fort problél
m atiquë. E U eJ’est en effet; ou, p o u r m ieux dire,ielle d o itê tr e
^condamnée.0') ..j
j
»
fo ,» \ilW l
-,
h ¡¡ynuri ■•l ;
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i n u iao It
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iuLors de la discussion de l’article 26 dû Code de com m erce,
■,
1-J*' .
üii m em bre proposa de consacrèr l'obligation de ra p p o rte r les
bénéfices; cette proposition1^ rejetée. On se fonda su r l’usage
“du com m ercé!1s u r1la nature du d ro it du com m anditaire, qui est
... *v: ; >--'i
.
,
• . J i:j:
ue ne pouvoir perdre, plus que sa m ise; su r la necessite de ne pas
“décourager les bailleurs de fonds p o u r lesquels l’obligation, de
rap p o rter les dividendes, qui on t servi à leurs dépenses jo u rn a
lières et à leurs besoins, serait un sujet d ’effroi.
... .. .¡[0'
” . n. , .
>ü
1 « L’articlè 26, en e ffe t/e s t rédigé de m anière à ne plus laisser
le m oindre douté ; il lim ite la responsabilité du com m anditaire
'¿ux'fonds q u ’il rai mis dans la société. L’article 8 du titre IV de
l’ordonnance de -1G75 avait m oins de p récisio n ; il disait que lé
com m anditaire "serait !obligé ju sq u ’à concurrence de sa part, et
l’on argum entait de ce m ot (part) p o u r p réten d re que la p a rfd u
com m anditaire 'se com pose du fond et des profits, de la mise
' et des bénéfices ; qu’ainsi il doit ra p p o rte r le fond et les bénéfices.
*Â m on avis, c’était o u tre r le sens des m ots et s’éloigner desusàges
’du com m erce. Savary, dans ses form ules, a soin de stip u ler que
chaque six m ois ou chaque année, les com m anditaires auronl
une certaine («somme, su r lés profits; et, com m e le rem arq u e
M. l’réinery, qui a parfaitem ent traité cette question, Savany
•indique bien pari,là que la coutum e com m erciale était de re tire r
. les bénéfices sansicrainte de les rap p o rler, et que, si l’acte social
apportait, q u e lq u e 're stric tio iï,{à'>ce d ro it/ c’était p o u r faciliter
^l’a d m in istra tio n iso cia le /e t non p ar crainte des créanciers de la
«sociot^ ifti’.d') S h îiO'!(,.)((>Î(,- "
r*
:
�• «'Disons, au surplus, q u ’un a rrê t de là C our de Cassation, du
-14 février 1810, a cassé un arrêt de la Cour de R ouen, qui avait
décidé que le cônim anditftiré rap p o rterait les bénéfices passés.
11 est vrai que, sur le renvoi de l’affaire de la Cour royale de
Paris, cette Cour don^ia ,1a préférence à l’opinion de la. Cour de
R o u en ; m ais, quelque spécieux^ que soient ses dogm atiques et
lo n g sm o tifs, ils ne sauraient trio m p h er. Je ner doute pas q u ’ils
eussent été frappés de cassation, çi des déclarations eu fait n 'a
vaient rendu le pourvoi im possible. L e texte dp l ’article 26 d u
Code de com m erce est précis e t topique; il prévient toute am bi
guité. Ce qui doit rester intact dans la c o m m an d ite^ c’est le ca
pital, parce que là qst le gage inaltérable des créanciers. Mais les
bénéfices périodiques sont faits p o u r être distribués et consom
m é?; telle est leu r destination* à ^ m o in s,q u e ra c te nde société
n ’en dispose autrem qnt, et les créanciers n ’o n t pas dû s’atten d re
à les trouver capitalisés,pour a u g m en ter le fonds social,, Qu’ils
se plaignent de fraude dans la ré p a rtitio n ;-q u ’ils accusent les
calculs de m auvaise foi o u .d ’e rre u r; q u ’ils prouvent que ce qui
a été coloré du nom de bénéfices .n’était qu’une soustractjpu du
capital, c’est le u r d ro it; ils,sero n t écoutés.' Mais ils échoueront
toutes les foi? que les liv re ,d é m o n tre ro n t que les distributions
qux époques,,convenues ou usuelles n ’o n t en tam é q_ue les béné
fices, c’est-à-djre; ce qui reste libf-’e quand les.pertes on t été cou
vertes. )>
■
,f
i\ ...
'
i On vient d e v o ir com m ent s’explique M. T ro p lo n g 'à l’égard d u
ra p p o rt des bénéfices. Dans son tom e V , pages f 88 et s u iv a n t^ ,
nos 194 et suivants, iltdit su r laq u estio n de? ra p p o rt dés intérêts:
« Ceci me conduit ù p arler d ’un cas qui se rattache plus parthciilièrem ént à l’in terprétatio n d e 1l’articlff ^8 4 ;» '' mais qui^ vu la
corinexi'té, doit tro u v er sa place ici. Dans lU'plupart dessociélés
formées p our la conslructio n et l’exploitation des chem ins de fer
�— 23 —
et autres de m ôm e n atu re, qui nécessitent des travaux prépara- 1
toires considérables et de graiules. avances de fonds, l ’acte de
société porte toujours que les bailleurs de fonds jo u iro n t des in
térêts de leu r capital à p a rtir des versem ents. O r, tant que les
travaux ne sont pas encore tçrm inçs, tant quç l'exploitation n ’a
pas produit de bénéfices, il est évident que lp s.in térêtsn e peuvent
être pris que sur le capital. C’est une délibation de l’actif p rin c i
pal. P artant de là, des esprits scrupuleux ont été,entraînés à penser
qu’il y avait en cela un d éto u r préjudiciable aux tiers; q u ’il était
dérisoire de tolérer qu’un associé d o n n ât d ’une m ain et rep rît
de l ’a u tre ; que, dans la réalité, cet actionnaire ne versait pas ce
à quoi il s’est engagé. C’est pourquoi le conseil d ’État a longtem ps
lutté pon tre de pareils p a rtis? il les neo n sïd érés com m e contraires
àTar.ticle :l 84o du Code civil, .à l’article 26 du Code de com m erce
et à touies les p otions adm ises e n ’m atière de crédit; 11
’'«^Maisi'jd’un autre côté^fé gouvenieziient,1 préoccupé d e s in té "
r e ts ' gdhérâux plu tô t q ü é ’ Ue certaines, subtilités civiles, s’est
m ohtré^riHi'nVrigoureux dans l’application du principe,-et, m algrë'-les' irôs^dü'VsBriàeil üd!'ÈfaÎ, il a 1fail l e s concessions cornniciüdécs p£ir 1À'fôrdè ' cFès'clioieV. te s.c a p ita u x sont indispensa
bles poW m e ttre W m ouvèm eiit ce's'granlls tfavaux su r lesquels
reposti l’àTènir in d u ë triè rïté n o ire pays. O u i es tro u v er, cepen,
............. .
. 1.4 Ji: . .
r
d a iït;ô n capitaux,' si‘011 ‘ïép o u sse les conibinais(ms qui peuvent
les a ttir e r ? O r, les petits capitaliste^ iie se décideront jam ais à
verser leurs fonds, si_, pendant un certain tem ps, ils peuvent être
condam nés à ne rie n recevoir annùellem Q nt à titr e ,d ’in térêts,
fên vain vous leu r direz que ces in térêts’ p o rte n t un nom tro m
p e u r; q u ’ils 11e sont pas^des fru its; q u ’ils ne sont q u ’un dé
m em brem ent des capitau x , d ô n t la. vraie d estin atio n éconon u que est de re ster intacte. Ce langage est vrai e t raisonnable;
mais il ne convaincra personiié. Les capitalistes préféreront une
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«
1
�(lotion'qui flatte leurs habitudes; routiers, ils d o n n ero n t leur as
sentim ent à une com binaison qui les traite en re n tie rs, espérant
que le1succès de l'en trep rise à laquelle ils d o n n en t leur con
fiance couvrira cet. e m p ru n t m om entané fait sur soi-m êm e, et
rendra au capital social son effectif nom inal. Que si un rigorism e
sloique s’obstine à vouloir q u ’il n ’y ait pas de rép artitio n d ’in té
rêts, eh bien ! ils p o rtero n t ailleurs leurs capitaux, et l’indus
trie sera frappée d 'in ertie , à m oins q u ’elle n ’aille chez les
banquiers faire des em prunts qui coûteront bien plus cher. Dans
eèl êîat, le gouvernem en t, qui voulait la lin , a dû vouloir
les’ m oyens; il a capitulé avec les préjugés.
« Je suis d ’au tan t m oius porté à l ’en blâm er, q u ’aucun p rin
cipe de d ro it ne se trouve blessé p ar sa tolérance. V ainem ent
objecte-t-on que c ’est s’écarter de l’article -1841», qui veut que
chaque associé soit tenu de to u t ce q u ’il a prom is de verser, et que
l’on viole l’article 26 du Code de com m erce, d ’après lequel les
associés bailleurs de fonds sont responsables ju sq u ’à concurrence
dé leur mise. Mais com m ent ne voit-on pas que, dès l’in stan t
que les statuts ont perm is des rép artitio n s d ’in térêt avant que
l’entreprise ne fût productive, c ’est com m e s’il avait été con
venu, clairem en t, invincib lem en t co n v en u , que le capital n o
minal ne serait pas le capital effectif, et que la m ise consisterait,
non dans la som m e versée, m ais dans ce qui en resterait après
fés intérêts payés? Que parle-t-on de la sûreté des créanciers
qui ont traité avec l’association? Est-ce q u ’ils n ’on t pas lu l’acte
de société? Est-ce qu’ils n ’on t pas su que, par unp sorte de circuit
ouvertem ent annoncé, les associés bailleurs de fonds o n t mis
une portion de l’apport en dehors de l’actif social destiné,^ ga
ra n tir les' tiers? Qu’on no dise donc pas que les qré^jiciersseraient
foiUlésà faire le rappel J e ces; som m es indûment; perçues! JNuLhto
�= as =
O * )/
iqgnjti \cjs j^ p c ié ^ jP ii^ ja sç a dfy Iflfip. cirait y ils ont (profité. ,d’ui\
I W M v & V Â f i P W W ^ n ■# W .damnuin dp.tyui jiije
« £ ^ n(T put.(,c$ci , ^ t | t v^ai^pour. lesj.sociétés;anoi*ymesr co,inm^
p o ^ r 1|^ .,^ jç ^ s ,e n .,c q in m a iîjd |t^ ^ tïp j« ^ Je § J9 u rs,; pn voit dan^,
l e ^ o c ^ t ^ e^^Q ^O Ta^ditfi.desconyentipns de ce ge^re^H ,est d ^
dQV^ir,,de^i^|^un^ujt d e jlp s ^ p ç c te r . ,IWVta ».ol 9up ^idmo» ii ,noS
<i<»0!liiël'o'ü!6t?rnpiieri'd;(Jiie Wffeoliitîôïïsètait to u té'd iffèrén tesi 1^ ’
(Hsti,ibuti'prié!dHttféiièté'6Îi:'d(a'dividèildës,i,bux'dé^ens'Üii capitàl
ôtaient faiteâian'è !avoii? 'étéaùtorisëès'‘par léS'sïalutsv C ë'lié serai f
jilusialoi^.qu’iinjdqtpurnerQ çnt, et chaque asso,cié serait déb iteu r,
cuver? }a^sQci;éié,«gt envers lies, tie rs, d u m o n ta n t de ;la distraction ,
d^jit ;iL|ai^i-aiÇfïpjrpiit^. .(C’e st à ce .cas q u e : je. çrqiç q u ’il faut
liraiterj l’o pinion de MW* Malpeyre et Jo u rd ain , n ’ ,3.39 ;e lle se ra ^ ;
fausse s’il p lia it; lui.f}pnner;plus de portée et re te n d re au. cas ow,
les statuts au raien t pp.rlé.fAu reste, ils' au raien t d ù faire distractiq n h |tt/m j :n03 466 e t 622 ),,— A utant le ra p p o rt,s e ra it dans le
c?ls'précédent un acte de violence, a u ta n t/il serait juste, dup«
(:fîlu.i-.ci,|»t»7f)-!
■
iii(J'I '• ‘
" >i
i\
M UD elantfle/qui a tra ité les questions q u i nous occupent avec
quelque sévérité con treiles co m m an d itaires, rèconnait cepen^l
dantr d ’une -¡manière très-explicite' l’efficacité!'de la bonne foi
quant andit ra p p o rt. (Traité des Sociétés commerciales} tom e I " , .
pages.5 2 2 -et suivantes, np* 34îiy 346, 347 et'348).
' r ■
.Vio (Mais si le com m anditaire ne doit rie n au-delà de sa mise,
n’est-il pas ten u , au m oins, de ra p p o rte r dans la caisse de la s o -v
ciélé, les dividendes qu’il à reçus, lo rsq u ’à l’expiration du con
tra t, l^àctif ne suffit point à l’extinction des d e tte s.1 '
{ ■j: i.' «
» Tqut le m onde adm et que, ju sq u ’à la dissolution de la so
ciété, il n ’y a pas, à proprem en t p a rle r de bénéfices; car ils se ■
com posent u n iq u em en t de l’excédant de l ’actif su r le passif et
�I
<?<x6
• ’
— 26 =
cet excédant ne peut 'étfè corinil que lorsque,1! après la cessa
tion des affaires et la liquidation;1! ! ^ a é u balance définitive dés
ressources et de dettes so'èialë^; jüsqué-îà/ donc| il n ’y ’a que dés
allocations provisoires^ déép rélèv eitteh té'iù r des jjàltis pré^tim és;
et*si, à la 1dissolution,1*l 'à c ü f 'h e 'S t f f f i t p o ü Ÿ ’paÿër Ièsr\!et-'
tes, il sem ble que les créanciers0 et Îè'g éran t on t le d ro it, le s1p re
m iers, p our échapper à tous dom m ages ¿,1e second, p q u r éviter, sa
r u in e >rd ’exiger des com m anditaires q u ’ilsjContribjüEinttfux pertes,
dans la p ro p ortion des bénéfices q u ’ils o n t re tiré s de
société.
M aiâjd’ùtt àu trë cô té, im posèr au com m anditaire l’obligation
de rap p o rter (les dividendes1reçus de 'ôonHe foi, em ployés à payer
ses dettes, à bâtii1où à décorer sa maison1,^consommés enfin d ’une
m anière p lu V ô u 'moins iïtifej'n'éat-c& pas uhe'riguëüi^exirêm ie?
Oii règTéVes dépenses su r ses réW nuâ a c tu e ls ,'e t Îe lég islateu r
tient c o n f ié de'\ifetté c ô n iid é rad o n ? A însi^quand le possesseur a'1
été de 'bonfie fo ip 'Ilf fait' lès fh iits-sie n sr o b lig é'd ë' restitu er l e 5
principal ]1 il garde l’àccéssôirerLa lôî nie le& soum et p o in t à des
rép étitio n s qui p o u rraien t en traîn er sa ru in e : ces revenus qu'il
a pu légitim em ent reg ard er com m e sa chose, o n p résu m e'q u ’il ne
lé s a pas conservés. La lôi irbm aine ayaitlp^npsé la.prérogative d.e
la lio n n e foi jusqu-V dispôn& r l'h é ritie r ap p aren t, quand il avait],
vendu des fonds h é ré d ita ire s/to u c h é etçqnsom m cM e prix> d’enj>
restituer l’équivùlèûtJà tihéi jtitr. véritable quiifltvpiX'Sentait, s’il
n ’était pas devenu plus, riche. Il é ta it ten u : qitatenus locupletior
- .
1
iio i.
a n o - i f i . ' . r i i i c r n ' v ; j oi
'.i! ',
faclus erat.
.
,
.
.
» O r, n estrcc pas nue application et plus îuste e t p lusneces. MPM r . .
I
y, f l / I L - V - L - ; ' - ï ; t _ **!• ri'JI /
saire de ce principe, ,<iud, dans le cas ou les.L eneiices ont etc*.
ficcs
r i i V
___________
^ l n Î ^ ï o
'W
c ()h ,n ',inor,l ';',,: In^oqnin-.
�—_27l —_
» Il faut ch çisir fJe n tre ces deux systèm es, d o n t le principe
est égalem ent vrai ; il faut p e se rjl’in té rê t opposétd u co m m an d i
taire, d u gérant et des créan ciers; et, dans la lu tte en tre le
caractère essentiellem ent provisoire des allocations faites au com
m anditaire avant la liquidation de la société, et les prérogatives
de^la bonne foi, rechercher^ce q_ui se, concilie le m ieux avec la
n atu re d u ,ço n trat de com m andite.
,
» 346. Suivant les règles du'Jdroit civil, les bénéfices n ’étant
qu’accessoire d u capital participent de sa n atu re; telle est du
m oins la d octrine enseignée p ar les com m entateurs d u Digeste.
» Slrachâ / qui écrivait au seizièm e siècle, ad o p tan t cette doc'i ‘i l.'
,
<.|
.
¡ ¿ t .1 /•> ,•.) „ • * y o i .
trin e , en in d u it sans hésitation que le com m anditaire est tenu de
, UJI :
, ! » • : ! I l J'I**,. , v»> U V t J » ?
,UÎ>1UIK> an
:
laisser dans la société tous ses benetices,, com m e accessoire de
■'io
¡>>i i r
- •
l i i ‘n
‘i D j i o u i j i r i
¡'il)' f,-i3 ' i i ; ! “ ti‘ f e i c u i i n j a * . * - . - ;
.m
son capital.
k .
.
, •
, -Mi-.
iiiiuhui ’iooi : ¿oiomopuo» io
vi-:aod ou w .
» Le statut de Sienne co n tien t quelque chose de sem blable. On
y lit : « Que ^’^ s o c ié q u i^ q u d ra ^ n ’^tre tenjj,que »jusqu’à concur
rence de, son capitçiLet des fru its acqui^ d o it le déclarer au notaire. »
» 'C’est d ir é ’en térines assez-clairs, que; si des bénéfices ou dés
früits ont é lé 're m is' aü com m anditâiréjScé n ’c st^ à p ro p rem en t
p a rle r, qV Ù n'dépôt dont^ i l ( refete com ptable, ju sq u ’à ce que la
liquidation, en constatant l’excédant de l’actif siir le passif, Con
firm e dans ses m ains la p ro p riété des gommes q u ’il a reçues/» <
"» 347. • Sous'! l ’ordonnance de Î6 7 3 . $avary,f l’un de sesa u •; i l '
:
, >" •
v c p , I jOiOl * i H j 'I'i', ir.ij.'ii)
leurs, exprim ait une opinion différente,
înui
1 .u)i fjili*
.ityrs" ■i up ^obir-Uyih *al
;
,^ 3 4 8 ., On ne: p e u t n ie r que cette opinipn ;q e (spit en].parfaite
harm onie ¡avec l’idée , sous T in flu ^aççjd o f laquelle s’est d é v e -fi
lopp^e,1a com m andite. jC’est e n ;effet, pouri a ttire r dans le com
i
m erce les capitaux, ¡d’une.noblesse f^stueuse ct,p ro d ig u e, que la
com i«andit£(a ,é tp _jn$titjjcçj, On .a vorçlji
sarçs se m êler de ^
�28- —
négoce' !éi sany'dërogéF, ’elfe pû t ^ecïïèillit^Vfes1^Àri^'s* sti^rW uVs
à V'fiififflm peV m iS'd^l’arjfjd/i't. iPfrillâiVxfbnc que''cè^luinlifUib^p
ré;i 1i&fbïès à ’*<ïes ^qiôq u est fa ppftjchéëÿp u'ii**f u r (^à^ïïfcslîfroi tl'èy
(qUîràlii^ g p riu riidi'nsi'(liiie^ V in re n t; èii' luTdbllliyrit'Wh'1éliml'ilt*»
cdri'âtii/'ëtfëôtiî'h^èf« T é s p ritcdëkpédulàti6ii*J Quc*.!V tffàitàV tfàît^
pii avoiV la perspecfive d ’iin gain dont là r e a lis a tib n '^ i^ if ^ iê ^
dans l’avenir, n ’aurait d ’ailleurs-étë défini'fivb ^ii*hpi‘èstiii&
dation lo n g u e ,,, em barrassée;,osou mise ;à J o u te s Jçsjj'^aJjÆéF, «¿u
eOiOimercç.?. •Àidf^ ;Jkorqjnçfe, Rtr^ogers p ^ jg o û .t fit» p a ^ p ^ Ü j/A ty
aux, affaires, poiwïWr^iftlesy/ibfaptitleSiiÇëitMud^h?l<ikujt[
ne soient pas enchaînés aux résultats d ’opérations dont ils n ’ont
-u.v. .U . ; !i!/;l<rc:.o r*^rï >1 - 'H /l''," !•■ t
, rub .|;.", «
pas la d irectio n ; ,et qu exposes a p e rd re le capital d o n t ils on t
:il)(jl,i;trn:f:;.9l OlJ,> . : :-,i iC?;jv >ti - UC2J.. üi'Ul (19 ,'WJ'li
lait 1 avance, ils 11e couren tp as d au tre d a n g e r; il Faut su rto u t
'
- )> çyin—.y
P j . . iiroi :.TMir).y-.
'io^ijîi
qu ils ne puissent jam ais être forces de ra p p o rte r les fruits. f[u ils
ont reçus de bonne foi et consom m és : leu r fortune pourrait^suc- '
coiliber à ces reto u rs im prévus. »
; ■’ o/iurHfî n )nk.' : o.l »
^
' i'j *(
, >' i
’ M. Delangle cite, après, la proposition faitè au conseil d ’Etat,
i't retirée, l'a rrê t de R ouen, cassé par l’a rrê t de cassation d e \ 8 Î 0 / ;
et cçJui.des la Cour de Paris, C our de.FeuA'oi*:il,m e p iio n n o lîà rrè t
de la Cour de Colm ar, en date du ,4riféyriec;,i3 i4 )j,;e.t le rejet it
d u 'p o u rv o i form é contre c e t a r r ê t,|e t il co n tin u e aidsi, page.« :
529 et 550, n 0,'5 5 2 et 555 ,'. \n [>V, ."l JuüIîü ou
t , niir.bijjpil
« 552. Nous n'hésitons pas à d o n n e r u n plein asse n tim e n t1à î
ce dernier système. Nous pensons^ avec Sayary, que, le -p rin -
.
cipe du contrat serait violé si l’on soum ettait le ,co m m an d itaire .
1
• i: ’.
>;ïll ¡¡M li." 7l: .?:.b .<
à rap p o rter les dividendes q u ’il a reçus de bonne foi. Il ne faut
pas, en effet, étendre hors de sa pof'tiie la règle qui rêitiiifà m te
allocation provisoire les dividende^ rem is à rassocié-d/M iinàrïdllairé, avant là fin dé là'société!' CN‘st potn1 Ù^l!assirtciéè‘(ji/’e l l é '*
est instituée, parce qué^ en effet, l'egalité| qüi'jif'èyidc a u x T à p '^
ports des associés e n tre eux , exige qti'aii m om ent ou itl ïiijfii-
�dation s’operej'éliacitn’tiennëfebrtipie'de ce q u ’il a: reçu !à [quelque
épofjùe et*soüs:quelqué dénom ination Ique ce feoit. Il û ’y a , jus
q u ’à la 'liquidationi'définitiv e? q u e r*d é s ‘faits provisoires entre
les Jassociés ; tout*est subordonné au résultat final desîaffaires
com m unes.
<ü °b -|w i Int’ ' r)l ^1<'jj¡ïkio* r-up ■ÎjcJiqün
» Mais à quel titre les tiers'se plaindraient-ils des distributions
de dividendes légalem ent faites? Ils on t le ‘d ro it incôntesta
ble ¿¡exiger le m o n tan t de la com m andite, tel q u ’il a été fixé par
la,,conven(ion ren d u e p u b liq u e; c a r,, c’est la fo rtu n erde la so
ciété qui a déterm iné le u r confiance. Mais^quand il est prouvé
que chaque associé commanditaire^ a versé sa mise de^fpnds, et
que toutes les sommes réu n ies on t été, sans défalcation, con
sacrées au payem ent des dettes sociales; ils n ’on t plus rien à
réclam er.
r.- au.
''¡Îiîiov
>ù
'■}
»,3S5i.JiLà1 seuie question qui puisse s’ag iter, est la question
de donne foi.
Ici1; M. D elangle exam ine a quels caractères se reconnaît lu
bonne foi. L’a rrê t attaqué ayant reconnu la bonne foi de M. B lanchet, en fait, uné plus longue citation deviendrait com plét’e m èht
oiseuse, t
j
,
Ce que nous venons 'de citer de M. Delangle est relatif au ra p
p o rt des bénéfices.
■
On a vu com bien son av is’est absolu p ô u r le cas où ces bénéfices o n t été reçus de bonne foi, et sans su b o rd o n n er sa solution
à l’état dés affaires de la société. On se dem ande co m m en t,'à
propos d u 'ra p p o rt des intérêts d o n t'le ' p ay em en test certes bien
m oins subordonné que celui des bénéfices, à''cet état des'affaires
sociales, l’opinion de ce savant ju risco risu lte1devient plus1 sé
vère p our le com m anditaire et pliis^conditionnelle. Après avoir
exam ine cette^quéstion,’ pages15 5 5 'et suivantes, n#s 501 et su i
�vants, il term ine ainsi : « Le p rin cip e qui dom ine toute la ma» tière des sociétés, c’est que le capital social ne soit p o in t dç» to u rn é dé sa destination ¡c’est quçjipendant la .d u ré e d e .
» société,'les associés n ?a ie n t|d ro it q u ’aux fruits -réalisés, de. qe
» capital ; que lorsqu’ils les o n t reçus de bonne foi^ la sopiété
» prospérant, ils lespnissçnj. g ard er. l>>ute a u tre convention est
» illicite et n u llç .* )fJ( ,-j
L^honorable juriècôyikülte qitéi iious venons de citer, nous pa
rait, n o u s'le ré p é to n s)‘¿voir usé ’ic r / q u an t aux intérêts, d ’une
sévérité peu cbnciliablé av'éë'sori1“indulgence, q u an t a u x ' 6en<ifices. On a v u / plus h a irtf q ü 'il considère les bénéfices coin me*,
acquis à la bonnèTôl du1Commanditaire q u i les a reçus ; ici-, e t
qu an t aux intérêts, \\ he p araît piis se co n ten ter dé la bonne
foi, il y ajoute p our c o n d itio n , que la société prOspèr1dVv I!
nous sem ble que celte indulgence et cette, sévérité auraient dû
s’e x e rc e ra l’inverse, ou m ieux, que la m êm e règle,,.une rè^le
com m une s’appliquait .tout au m oins aussi bien a ir second cas
uu?au p rem ier. savoir ; le d ro it de conserver à la bonne foi d,u
1
1 ,
....
^
îî- ;
t.fTUO'i
com m anditaire cq que lo coinm aiiditaire a reçu.
,i„
Et quant à la bonne foi de RI. Blancliet, in d é p en d a m m e n t’de
la déclaration souveriiiàb/kjuiijsien tebuve daus l’a rrê t/» tla q u é ,
la Cour suprêm e aura à se rappeler RI. B lanchet,¡habitant) Paris,
-tandis que la ^ q ié tf t^ tj^ iR o a n n e ^ ^ e y a jn l t* P a ris,p a p m êm e
ileila société Mouigolfioi^çi.,Ci9, mais,,dç. ses ba^quiej^M R I. Foy, r ô l i - e t i G i i - e r d y ¿etuesfres.■d'intprêts,. ne pouvant
..certes Be, douter (qu’^ e ^ o ^ i i t é . q u i ^ ç t p t à sa prem ière^ an née
<•d ’^ifitçüjçebjj.YiUTaijt'am.-i^eç,;|.a faillite dès sa(jfepcondc anuéb,
ig n o ra n t, à Pari.Sj ,jes .aifaijçp. d^^cctte société qui .^’ex p lo ite 'à
.„lovcm lw e
c ij^ n s ^ n ^ p Im fa T O ra -
�— 51 —
/s o l-
Jbles au com m anditaire, tém oignant plus énergiquem ent de son
incontestable b o nne foi !
" j'1 1 ■
11 nous reste à tra ite r en quelques m ots, une d ern ière ques
tion, celle de l’influence que p o u rrait avoir s u r la solution, la
no n publication de l’a rt. 8 des statuts, relatifs au payem ent des
in té rê ts aux actionnaires.
.*•
1C’est à to rt que les dem andeurs en cassation accuseraient l’a r
rê t attaqué d ’avoir violé l’art. 45 d u Code de com m erce, cet a r
ticle n ’exige pas d ’autres publications que celles qui on t été faites.
Le chiffre du capital social a été publié. La loi oblige-t-elle aussi
à la publication de toutes les clauses accessoires, qu i de près
ôu de loin peuvent avoir tra it à la com m andite? N on, sans
doute. La loi a donc été satisfaite, elle n ’a point été violée.
Ou a vu d ’ailleurs ce, que sta tu e n t les divers arrêts de la Cour
de Cassation et autres,, qui o n t établi la.ju risp ru d en ce. Aucun de
ces arrêts n ’assujettit sa doctrine à la, publication, de la clause
relative aux in té rê ts. Jam ais, com m ^Le d it l'a rrê t dénoncé, une
sem blable clause n ’est publiée;; il faut.sans doute, com m e le déclare
M. Troplongj, ainsi qu’on ,l[a yu .¿ci-dessus, que cette clause soit
dans les statuts sociaux; u n yeraem ettt.d’in térêts aux actionnai
res, quand les statuts seraient, muets;à fjçt égard, n ’a u ra it aucun
caractère légal. Mais il(suffit que cette,¡clausç existe dans l'acte
social ; n u l, n i a rrê t, n i a u te u r, n ’a préten d u q u ’elle d û t, en o u tre,
êtro publiée.
. ..
C’est uno clause qui règle les droits dps, associés e n tre eux, les
répartitions qui devront le u r être faites,, le m ode et l’époque de
ces répartitions. Ce n ’est pas su r des¡stipulations dç, cette n atu re,
d ’o rd re social tout in té rie u r, que l a ^ q i a pu faire p o rter ses
exigences de publication. Comme le d it d ’ailleurs fort bien l’a rrê t
attaqué, les tiers peuvent re c o u rir à l’acte de société m êm e, d o n t
la com m unication leu r est due.
�Ainsi sous tous l es rap p o rts, l ’a rrê t attaqué se justifie; il est
en concordance dans ses m otifs, dans son dispositif, avec les arrêts
de la c our s u p r ê m e .L e pourvoi dont on l’a frappe, ne saurait
avoir aucune chance d e succès..:; ,q
; i; j f. .
Malgré n o tre désir de ne tra ite r dans.cette consultation que la
question des intérêts, la seule soum ise à la Cour de Cassation et
de l’isoler de celle des bénéfices n ous avons cité des a r r ê ts ; des
opinions où elles s e tro u v e n t m êlées, à raiso n , soit des espèces
où il s'agissait de l’une et de l’au tre chose à la fois, soit à cause
des argum ents qui sont com m uns aux deux p o in ts; mais la Cour
voudra bien ne pas p erd re de vue la distinction que nous avons
établie entre l’un et l’autre cas, et que, q u an t aux intérêts, il
existe un a fortiori incontestable.
Nous dirons enfin, que M. B lanchet a donné aux syndics Mont
golfier et C‘e, un exem ple de paix et de m o d ératio n ; il s’est sou
m is au ju g em en t du trib u n al de com m erce de R oanne, dans la
disposition qui le condam ne au rap p o rt des bénéfices. Il n ’a pas
suffi, au co ntraire, aux syndics, des frais d ’un a p p el, q u an t au
chef, re la tif aux in té rê ts; ils y o n t jo in t ceux d ’un pourvoi. Ils
ne sau raient invoquer, p o u r expliquer cette persistance, la valeur
n u m érique du litige, n i la nécessité, p o u r eux, d ’étab lir u n
précédent. L’intérêt du litige est m inim e, et les chances de l’appel
et du pourvoi étaient légères.D ’autres actio n n aires, dans une situ a
tion analogue à celle de M. Blanchet ; il n ’y en a pas. C’est donc un
procès isolé, gros de frais, m ince d ’im portance, et p o u r lequel la
Cour suprême se sentira le désir de ferm er la voie à un zèle exagéré.
Nous estim ons donc, q u ’à tous ég ard s, il y a lieu, p ar la Cour
régulatrice, de rejeter le pourvoi des syndics Montgolfier et C,e.
H E N R I NO U GUI ER.
Avocat à la Cour de cassation.
P a r i s — Imprimerie de WATTERSBEIN, 8rue Moulins CLFD
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Blanchet. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
H. Nouguier
Subject
The topic of the resource
bénéfices commerciaux
société en commandite par actions
banqueroute
papeteries
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour monsieur Blanchet, négociant à Paris, contre les syndics de la faillite Mongolfier et Compagnie, de Roanne.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Wittelsheim (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1837-1848
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3015
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Roanne (42187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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banqueroute
Bénéfices commerciaux
doctrine
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société en commandite par actions
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Text
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(ij v u / D víimÁ'/$ Vrt' C’L^VíAyiCUyXevO t ^ V o u ^ C iWO-MyC -íyVt^
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Note. Roche, Damien. 1849?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
coutume d'Auvergne
testaments
jurisprudence
droit romain
doctrine
hôtels particuliers
loi Quintus Mucius
généalogie
dot
Description
An account of the resource
Titre complet : Note pour monsieur Damien Roche.
Titre en caractères d'impression et texte manuscrit.
Arbre généalogique manuscrit.
suivi de « Question »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie lithographique de Brugheat (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1849
1786-1849
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3014
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3012
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53631/BCU_Factums_G3014.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
coutume d'Auvergne
doctrine
dot
droit Romain
généalogie
hôtels particuliers
jurisprudence
loi Quintus Mucius
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53630/BCU_Factums_G3013.pdf
ad93337f9999a7792377e00775668a5e
PDF Text
Text
MEMOIRE
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Mlle PELLACOT Mme SEREIX,
Appelants.
Contre
M:
ROCHE desESCURES,
Intimé.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Pellacot. 1849]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Allemand
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
coutume d'Auvergne
testaments
jurisprudence
droit romain
doctrine
hôtels particuliers
loi Quintus Mucius
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour monsieur et madame de Pellacot et madame de Sereix, appelants. Contre monsieur Roche des Escures, intimé.
Titre en caractères d'impression et texte manuscrit.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie lithographique de Brugheat (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849
1786-1849
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3013
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3012
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53630/BCU_Factums_G3013.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droit Romain
hôtels particuliers
jurisprudence
loi Quintus Mucius
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53629/BCU_Factums_G3012.pdf
b730feb661793a1fff0b9f87db77373b
PDF Text
Text
POUR
MrROCHEDESESCURES
Intimé.
Contre
Mr M
llePELACOTM SERElX,
Appetente.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Roche des Escures. 1849]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duvergier
MandarouxVertémy
Mallye
Chomier
Fouchebeuf
Fouillet
Duclaux
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
coutume d'Auvergne
testaments
jurisprudence
droit romain
doctrine
hôtels particuliers
loi Quintus Mucius
dot
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour monsieur Roche des Escures, intimé. Contre monsieur et mademoiselle de Pellacot et madame de Sereix, appelants. [document manuscrit]
note manuscrite : « le 13 juillet 1849, arrêt confirmatif, 2éme chambre adoptant les motifs en ce qui touche la demande subsidiaire. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
lithographie Brugheat (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1849
1786-1849
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3012
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3013
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53629/BCU_Factums_G3012.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
coutume d'Auvergne
doctrine
dot
droit Romain
hôtels particuliers
jurisprudence
loi Quintus Mucius
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53572/BCU_Factums_G2816.pdf
346941c5d22fc82aeedec091af387eda
PDF Text
Text
POUR
Le Sieur Antoine BADUEL, propriétaire-cultivateur,
demeurant à Lafage, commune de Saint-Clément;
et le Sieur Antoine BADUEL, 2e du nom, aussi
propriétaire-cultivateur, demeurant à Lollière, commune de Saint-Clément, défendeurs;
CONTRE
Dame Marie-Charlotte CASSAGNE-BEAUFORT d e
M ir a m o n , veuve de M. le marquis D u p l e s s i s C h a t i l l o n , agissant comme héritière bénéficiaire
de M. le marquis de Miramon, son père, demeurant
à Paris, rue du Bac, n° 128, demanderesse.
— ..................... — 1 ■
—
M adame la marquise veuve de M. Duplessis-Châtillon , représentant,
dit-elle, M . le marquis de Miramon , son père , dont elle est héritière
sous bénéfice d’inventaire , a publié u ne consultation signée par d’honorables avocats , et plusieurs Mémoires ayant pour objet de prouver
qu'elle est recevable et fondée à demander la revendication d’héritages
jadis accensés , ou à exiger le service des rentes et prestations portées
par les titres d’accensement. Les Mémoires se réfèrent les uns aux autres,
et tous ont pour base la consultation. Leur publication , en précédant
eo
demande
tu
judiciaire, semble avoir été faite pour épouvanter d’avance et décourager au moins des adversaires fort modestes sans doute,
qui ne craignent aucun danger, quand ils ont pour eux la consécration du tems et la protection des lois.
il y a quarante-cinq ans que de simples cultivateurs possèdent paisiblement et sans trouble , par eux ou leurs auteurs , des biens-im-
�(2)
meubles libres de toute redevance seigneuriale et fe’odale. Ils les ont
recueillis ainsi dans la succession de leurs païens ; ils n'ont même pas
l'idce que ce patrimoine de famille ait jamais pu être différent de ce
qu’il est aujourd'hui. Et voilà pourtant qu’après un demi-siècle , ils
son^ troublés dans leur bonne foi , comme dans leur sécurité. Celle
sécurité aurait-elle été trompeuse? Cette possession de bonne loi pen
dant un si long-tems serait-elle illusoire ? Nous ne le pensons pas.
Avec eux nous avons confiance dans les lois, et la justice qui les ap
plique. Nous croyons que M"1“ de Châtillon s’ est bercée d’espérances
chimériques, et que ses demandes ne sont ni recevables ni fondées.
F A IT S .
Madame la marquise Duplessis-Châtillon est l’une des trois filles
qui ont survé’c u à M . le marquis de Miramon , leur père. Elle seule*
cependant, a conçu le projet d’attaquer les détenteurs actuels des do
maines de la Roussicrc, hollière, Lacroux, Lajâge situés dans la cou1'
mune de Saint-Clément, et les détenteurs du moulin de Marjons
ses dépendances, situé dans la commune de Polminhac.
Elle a publié un premier Mémoire, ou consultation pour M . le marquis
Duplessis-Châtillon, qui n’a rien à dire , parce qu'à madame sa mère
seule il appartiendrait de parler dans la cause ; et cette consultation .
signée des noms les plus honorables ( i ) , datée de Paris, le 5 mai 1837 »
expose les prétentions de M. le marquis , et cherche à justifier ces pré
tentions , ce qui est dans la règle.
Madame la marquise de C hûlillon, après avoir parlé par son
’
prend elle-même la parole, et public trois Mémoires (2) , dont l’un est
particulièrement dirigé contre M. Pierre Baducl ou ses héritiers et ay‘ini'
cause, comme détenteurs du domaine de hollière. Elle y prend la qualité
d héritière bénéficiaire de M . le marquis de ¡Miramon , son per •
Dans ce mémoire, imprimé, publié avant toute citation en justice ’
M m<î de Châtillon conclut ainsi : « Plaise au tribunal c o n d a m n e r le
» sieur Baducl ou ses héritiers et ayant-cause, à payer à la requérante
» trois années des arrérages de la rente consentie par le bail cmpby
(1 ) Celle consultation est signée par MM" B o l e , l ' u . ’ I H p i n , O i > i i .o s ll.wmoï , A. P a iia OT. e l j î ;
(Je Y atw f .snil . Il est a observer fj'ic , relativement nu domaine «le Loi.ufcitis , la consultation rul
sonne sur un acte du I!) juillet 1084, totalement ¿traiter aux héritiers II aduel .
(2) Ces trois Mémoires 11e sont signés que par MM" Houe et A. P a illk t .
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"
”
*
”
“
"
"
*
“
”
(3)
tcotiquc du sixième jour de mars de l’an 1755, laquelle consiste par
chaque an, i° en 2() quintaux de fromages, tant d’été que d’automne,
pesés au Poids de la ville d’Aurillac ; 2° 45 setiers bled seigle, mesure du Mur-de-Barrez ; 3° un quintal beurre ; 4° un cochon g r a s ,
payable à descente de montagne, ou 3o livres pour prix d’icelui ;
5“ un veau gras; 6“ deux paires de chapons; 70 vingt aunes de toile
femelle; — et à se r v ir a l’avenir ladite rente, année par année, soit
aux époques fixées par le bail emphytéotique , soit à telles autres
époques qui seraient fixées par le jugement ou consenties par les
défendeurs, si mieux n’aiment le sieur Baduel et ses ayant-cause raclieter la rente ou bien déguerpir. »
Ces conclusions sont incomplettes d’après l’acte du 6 mars 1 7 5 5 ,
*ïue nous transcrivons ci-après. M me Duplessis-Châtillon oublie de de
mander l'exercice de la justice haute, moyenne et basse, le droit de retention par prclation , les lods et ventes , les tailles aux quatre cas , et
outres droits et devoirs seigneuriaux stipulés par cet acte. En effet, voici
Ce htre qu’il importe de connaître.
<( I-’an mil sept cent cinquante-cinq et lo sixième jour du mois de mars aprèsj au château de Pestels, paroisse de Polminliac , par-devant le notaire royal du
^Hlago immédiat du Carladès, résidant au lieu do Polminliac, soubsignés, présents
°s témoins ci-après nommés, fut présent très-haut et très-puissant seigneur m essire AleX;ii)(]rc-I’ inaiiuel de Cassanhes de Beaufort, chevalier, marquis do Miramon, seigneur
dudit Pestels, Polminliac, Marions, Teyssières-les-Bouliès, Saint-Chaumiel et Saint^'rgues en Jourdanne, Laroque, Saint-Clément, Brezons, Cezeps, Monréal, Nebrousse, Paulhac, Balzac, Saint-IIéran, Cocudoux, Lasalle, la Calsade, Selles,
assinhac, le Cayre, Loubegeac, Lafage, Mougranat ; baron de Foulholles et do
*°u; conseiyneur do Vie et de Thiézac, et autres ses places, liabilant en sondit châ*eau de Pestels; lequel, de gré, pur et franc vouloir, a baillé et baille par ces
I*1«seules, à nouveau bail emphytéotique, nouveau cens et nouvelle inveslison,
* *>'er|e Baduel, laboureur, habitant de la ville de Yic en Carladès, à présent
urn'u,r de M. le marquis de Boussille, en son domaine de Mourèzo, ici présent
acceptant, son domaine appelé de Lollière, dépendant de sa terre et seigneurie de
ar»(jue, composé de maison, grange, vaclial, prés, champs, terres, bois eu
C()uiniun , pâturages, communaux, moutague de Bannes au prorata, et de la
contenue de trente tôtes d’herbages, et autres terres cultes et incultes dépendant
“ dit domaine; le tout, ainsi et de même que (îeraud Prunct et scs autres précé^ens fermiers ont accoutumé de jouir, sans autre réserve que des bois propres et
Particuliers dudit seigneur, si aucuns en y a dans ledit domaine, Oîitres toutefois
flue les bois communs qui en dépendent qui demeurent de la comprise des pré
�(4)
sentes, duquel domaine de Lollière et ses dépendances, tel et do môme qu’il est
ci-dessus baillé, j compris les prés et grange situés au lieu et appartenances do
Laroque, il sera ci-après fait un état particulier cuire ledit seigneur, bailleur, et ledit
Baduel, preneur, de tous les bâtiraens et héritages qui le composent. Le présent bail
emphytéotique à nouveau cens et nouvelle investison fait par ledit seigneur marqua
de Miramon audit Baduel, pour et moyennant le cens et rente annuels, perpétuels,
seigneuriaux cl uniformes de fromage vingt-neuf quintaux tant d'été que d'automne,
portables et posés au Poids de la ville d’Aurillac; plus de la quantité de qua
rante-cinq setiers seigle, mesure du Mur-de-Barrès; plus un quintal de beurre,
un cochon gras payable à descente do montagne ou trente livres pour le prix
d’icelui, au choix dudit seigneur bailleur; plus un veau gras, deux paires cha
pons, deux ports de vin du vignoble en sondit château de Postels, et vingt aunes
de toile femelle ; lesdits quarante-cinq setiers seigle dite mesure, payables et
portables audit château de Pestels à chaque féte Saint-Michel, de môme qi'°
toutes les autres choses ci-dessus spécifiées, annuellement en leur tems et saison,
le tout censuel et raddituel, avec tous droits de directe et justice haute, moyenne et
basse, usage et exercice d’icelle, meze, mixte, impere , droit de rétention par pre~
lation , lods et ventes et tailles aux quatre cas accoutumés au présent pays d’ AuuergM >
et autres droits et devoirs seigneitriaux dûs et accoutumés et contenus aux terriers an
ciens dudit seigneur de sadite seigneurie de Laroque. Auxquelles charges et conditions
ledit Baduel a accepté le présent bail en emphytéose, et sous et en c o n s é q u e n c e
d’icelui reconnaît tenir et avoir le susdit domaine dudit seigneur, marquis de Mi*,
ramon, et a promis et s’est obligé ledit Baduel de payer et porter comme il
est ci-dessus dit, les susdits cens et rente de vingt-neuf quintaux de fromage»
etc., de même que toutes les autres choses ci-dessus s p é c i f i é e s annuellement en
tous tems et saison à perpétuité, audit seigneur , marquis do Miramon et aux siens
à l’avenir, à commencer , etc., tant et si longuement qu’il jouira et sera tenan
cier dudit domaine de Lollière, lequel il a promis melliorer à son pouvoir,
ne le détériorer, vendre ni aliéner à personnes do droit prohibées, ni y nul(re
cens sur cens, ni autre pension annuelle, sans le scù , vouloir e t c o n s e n t e m e n t
dudit seigneur et de scs successeurs ; et d ¡celui domaine de Lollière faire nouvelle
reconnaissance à toute mutation de seigneur ou de paysan, toutes et ((liantes fois qu ^
en sera requis, et d’icelle comme des présentes, bailler et fournir à ses frais e t
dépens expédition en bonne et due forme audit seigneur et aux siens à l’avenir ;
et à 1 égard du droit d ontréo do la présente investison , il a été réglé entre les par*
tics à la somme de trois mille livres, etc. »
T e l est la cté dont M rae la marquise Duplcssis-Châtillon demande
1 exécution partielle contre les héritiers représentons , ou ayant-caiisc
«lu sieur Pierre B a d u e l, de même que par la consultation et les ¡>JC"
moires publics, elle reclame l'exécution d ’actes semblables concernant
�(5 )
les domaines de la Roussière, de Lafage, de Lacroux situe's , ainsi
que le domaine de Lollière , dans la paroisse ou commune de Saint—
Clément.
Mais ici, une difficulté sc présente. Par exploit du 12 brumaire an X I ,
(3 octobre 1802), M m0 A n ne-Jea nne Cassagne-Mirarnon , procédant
tant en son nom propre et p r iv é , suivant l ’acte passé à P a ris, le 20
aodt 1790, devant Boursier et son confrère, notaires, entre elle , son feu
rnn,i , et Jean-Gaspard Cassagne-Beaufort-Mirarnon , son p ère , que
comme mère et tutrice de ses enfans, forma devant le tribunal de pre
mière instance d’ Aurillac , contre le sieur Pierre Griffuel, détenteur
du domaine de Lafage , la même demande que prétend former au
jourd’hui la dame Duplessis-Châtillon, sa sœur; et elle en fut déboutée
par jugement du 4 frimaire an XII (26 novembre i 8o 3 ).
Ce n’est pas tout. L e 11 frimaire an XI (2 décembre 1802), la même
anie » agissant dans tes mêmes qualités, forma une demande semblable
contre le sieur Pierre T r i n , détenteur du domaine de la Roussière, et
n°us croyons que cette demande a eu le même sort que celle dirigée
c°ntre le détenteur du domaine de Lafage.
dame Anne-Jeanne Cassagne-Mirarnon était, comme madame
Uplessis-Châlillon, une fille de M. le marquis de Miramon. Les de
mandes qu’ elle formait en l’an X I , contre les détenteurs des domaines
e Lafage et de la Roussière étaient faites du vivant de M. le marquis
e Miramon , et par suite d’un acte passé avec lui , à P a r is , le 20 août
l ?i)° i acte qui devait lui avoir transmis les droits de M. le marquis
^ Miramon. Comment se fait-il donc aujourd’hui que madame de Châ^ 0n > se disant héritière bénéficiaire de son p ère , vienne réclamer cour° les détenteurs des mêmes domaines de Lafage et de la Roussière ,
^ e,i sa qualité d’héritière de son père , des droits que celui-ci aurait
nsrnis à son autre fille , la daine Anne-Jeanne Cassagne-Mirarnon,
Par 1acte du 20 août i7()0?
d’ J C'S^ c^ lc^e “ ex2>liquer , on en conviendra ; et pourtant, cela est
aI)lcs la consultation délibérée le 5 mai 18^7. On répondra sans doute
j1” 0 ’ dans ces procès intentés en l’an XI , à la requête de la sœur de
du r*116 * * lnanIu' sc
Gbâtillon , il n’ était pas question du sieur Bala
^
(^oma‘ne
Lollière , ce qui est vrai ; mais puisque , d’après
j,] Co!1st>llatioa , M n,c de Châtillon se croyait autorisée, en sa qualité
<]e eri^ re bénéficiaire , à exercer contre les détenteurs des domaines
e ^ aJoge et de la Roussière , des droits qui auraient appartenu à sa
�( 6 )
sœ ur, en vertu de l’acte de 1790, et qu’en cela elle se trompait évi
demment , les siéurs Baduel se croient bien fondés , à leur t o u r , à
demander communication de ce traite' de famille, à provoquer un conipulsoire , si besoin est , alin de savoir si le domaine de Lollicrc est
ou non compris dans les arrangemens portés par ce traité, et si îMm°
de Châtillon a qualité pour s’adresser aux détenteurs de ce domaine
situé, comme ceux de Lafage et de la Roussicre , dans la c o m m u n e de
Saint-Clément.
A i n s i , les qualités de la demanderesse sont encore incertaines , et
les sieurs Baduel déclarent ne pas lui reconnaître, en ce moment, 1e
droit qu’elle prétend exercer.
Cependant, elle a fait signifier aux héritiers Baduel , le 21 août 18^7 ?
l’acte du 6 mars 1755 , qu’ elle qualifie d’acte d’inveslison , e t , le 2 sep
tembre suivant , elle leur a notifié un commandement de payer lcS
arrérages de la rente , avec déclaration que , faute d e paiement, elle
poursuivrait contre eux l’cxccution de son titre par toutes les voies
de droit. Ceux des héritiers Baduel que ce commandement pouvait con
cerner se sont empressés d’y former opposition par acte e x t r a - j u d i c i a i r e
du 4 du même mois ; et ils viennent maintenant exposer dans ce m é m o i r e ,
les motifs d’une opposition qu’ils croient bien fondée. Ils ne d i r o n t
pas que M me Duplessis-Châlillon fait une tentative insensée ou du moin5
téméraire , pour rétablir en France le régime de la féodalité ; ce se
rait, nous en sommes surs , mal interpréter une pensée qui n’a PaS
une aussi vaste étendue. Il est certain , toutefois , que les Mémoire*
publiés ont répandu dans le public , et particulièrement dans la classC
estimable des cultivateurs , des idées fâcheuses qui troublent la scCl1
rité d’un grand nombre de propriétaires. Il est bon de les r a s s u r e r »
en attendant que les tribunaux viennent eux-mêm es leur a p p r e n d r e »
par la solennité des arrêts , que les lois subsistantes n’ont rien per
de leur vigoureuse efficacité.
Les héritiers Baduel ont à répondre à quatre Mémoires, car, b)Cn
qu’ ils ne soient pas tous dirigés contre eux , ils se réfèrent l’un à 1 a u t r e »
et lous ont pour objet de démontrer que M me de Châtillon , en sllP
posant ses qualités reconnues , est recevable e t fondée à d e m a n d e r 1 e%e
cution de lacté d u (i mars lyiïi», à faire revivre, par c o n s é q u e n t )
titre q u i , selon nous , est frappé , tout-à-la fois , par la prescript*°n
par les lois suppressives de la féodalité, comme nous allons le démontre1
Nous le ferons avec ordre cl méthode , ce nous semble , et nous auii°
�( 7 )
.
'
l’occasion de discuter toutes les objections, en nous occupant succes
sivement ;
10 De la nature de l’acte du 6 mars 1755 , qui sert de base aux de
mandes de M ’re de Châtillon ;
2° De la question de savoir e n t h è s e g é n é r a l e , si les baux emphy
téotiques, à cens ou à rentes , sont frappés de la suppression prononcée
Par les lois de 1792 et 1793, quand ils sont mélangés de féodalité;
3° De la question de savoir PARTicuLiÈRtMtNT , si les baux emphy
téotiques perpeiuels sont atteints par ces lois suppressives ;
4° De l’application de la doctrine établie aux paragraphes 2 et 3 cidessus , à l’acte du 6 mars 1755;
5° De l'objection tirée de ce que la ci-devant Auvergne était un
Pa>s allodial ;
6" Enfin , de la prescription , qui , dans tous les cas , rend la dame de
Châtillon non recevable dans ses demandes.
En plaçant le moyen tiré de la prescription, à la suite de l’ examen
du titre , de l’a n a ly e des lois et de la jurisprudence sur la suppression
la féodalité , nous n’avons d’autre objet que de suivre un ordre
plus lo gique , sans entendre préjudicier en aucune manière, aux droits
ceux pour qui nous écrivons. Il nous a paru plus convenable de
Cor>stater le véritable esprit des lois de la matière, la juste application
*lu* doit en être faite à la cause actuelle , avant de prouver que même
dans le doute la prescription protège les héritiers Baduel contre les
demandes de leur adversaire.
§ 1".
la nature de l'acte du 6 mars 1755. — I l est bail à c e n s ,
plutôt que bail emphytéotique.
Ce n’ est pas une futile distinction à établir ’, celle du bail à cens et
11 bail emphytéotique, bien qu’ en définitive, les résultats doivent être
es mêmes quant à l'application des lois abolitives de la féodalité. INIais
me de C h âlillo n , ou ses Mémoires , tiennent beaucoup à donner à
du g mars 1755 le caractère de bail emphytéotique; e t, pour
l t ster dans la vérité, nous devons simplement rechercher la nature de
cel- acte afin d’ en mieux connaître les effets ou les conséquences.
L acte de 1755 par lequel M. le marquis de Miramon concède à
•erre Baduel le domaine de Lollière, e s t , si l’on s’en rapporte à sa
ré<laotiqu , un bail emphytéotique et un bail à cens, on y voit que M . de
�( 8 )
Miramon baille à nouveau bail emphytéotique, nouveau cens et nouvelle
investison, son domaine de Lollière, dépendant de sa seigneurie de Laroque.
Ces expressions le caractérisent aussi bien nouveau bail à cens que nou
veau bail emphytéotique. Dès lors, les termes ne décident rien. Mais on
sait que la nature des contrats se détermine, non par les qualifications
qu’il a plu aux parties contractantes de leur donner, mais par la subs
tance des clauses qu’ils renferment. C'est un principe de tous les tem s,
consacré de nouveau par notre code civil, dont l’article n 56 prescrit
de rechercher dans les conventions quelle a été la commune intention
des parties contractantes, plutôt que de s’arrêter au sens littéral des
termes.
En partant de cette r è g le , et recherchant l’intention des parties , il
est difficile de trouver dans l’acte du 6 mars 17 5 5 , la simple emphytéose des Romains, qui ne savaient pas ce qu’était la directe seigneuriale ,
la justice haute , basse et m oyenne, la taille aux quatre cas , et les au
tres droits et devoirs seigneuriaux, qui se rapportent au régime féodal,
et caractérisent le véritable acccnsernent.
Il est vrai que suivant l’annolateur de Boutaric , traité des droits sei
gneuriaux, page 2 , l’essence du bail à cens et du bail emphytéotique,
ainsi que le fonds de ces deux contrats , sont absolument les m êm es,
puisque l’un et l’autre sont également un contrat par lequel il n’y a que
le domaine utile qui soit aliéné , tandis que la dominité directe reste
au bailleur avec une rente qui lui est payée en reconnaissance de la
direclilé ; ce qui fait que le contrat est spécifiquement le même. « La
» différence, ajoute-t-il, ne vient que des biens qui font le sujet de
» l’un ou de l’autre. Le bail à cens est le bail d’un fonds noble et féo » dal, au lieu que le bail emphytéotique est celui d’un fonds qai est
» tenu en roture. » E t c’est cette qualité des biens qui fait dire aux auteurs
du répertoire universel,* V° emphytéose : En France, l'emphytéose faite
par un seigneur d’ un héritage qui fait partie de son domaine féodal, a
le même effet que le bail à cens.
M . Merlin, dans ses questions de droit, V® M oulin, dit que : « Si un
» seigneur de fief donnait en emphytéose une partie quelconque de son
» domaine féodal, sa concession ne serait pas une emphytéose propre» ment dite , mais un véritable bail à cens. C ’est ce qu’établit Ilerve dans'
» sa théorie des matières féodales , tome 2 , page 3a<) : 1' emphyteose, à per» peluite, dit i l, est un vrai bail à cens ou un vrai bail à rente, suivant
» que le bailleur est ou seigneur de fief-, ou simple propriétaire de censives. »
�( 9 )
Ajoutant à ces autorités celles que nous invoquons au § S ci-après où
nous aurons occasion «le revenir sur cette distinction à faire entre les
biens nobles et les biens roturiers pour caractériser le bail à cens ou le
bail emphytéotique , il est impossible de ne pas reconnaître un bail à
cens dans l'acte du 6 mars 1755. Nous ne considérons pas uniquement,
pour le qualifier ainsi, les expressions bail à cens employées dans l’a c te ,
mais nous voyons la nature des biens concédés. Nous voyons que le
domaine de Lollière, loin d’être un bien roturier, était éminemment noble
dans les mains de M. le marquis de Miramon , qu’il dépendait de sa sei
gneurie de Laroçue, que M. le Marquis se réservait sur ce bien les droits
et devoirs seigneuriaux contenus aux terriers anciens de la seigneurie de Laroque; et de ces indications, puisées dans l’acte même , nous tirons la con
séquence que M. le marquis de Miramon a voulu faire et a fait réellement
tin bail à cens et non un bail emphytéotique. Une des conditions de l’acte
le prouve d’ailleurs d’ une manière claire et précise. M. de Miramon
y fait défense expresse au preneur de mettre cens sur cens sur le domaine
de Lollière. Cette prohibition , étrangère au bail emphytéotique , est
précisément de la nature du bail à cens. D ’ où il faut conclure que ce
serait commettre une erreur manifeste que de qualifier de bail emphytéo
tique l’acte dont il s’agit.
Nous lui conserverons cependant cette dénomination dans le cours
de ce Mémoire, uniquement pour la facilité de la discussion. Nous
pouvons d’autant mieux employer l’expression de bail emphytéotique ,
qu’elle est indifférente comme nous allons l’établir dans le § suivant.
§2.
H est indifférent de considérer l'a cte de i y 55 com m e b a il em phy
téotique ou ba il à cens ; il est toujours un titre fé o d a l ou m élangé
de fé o d a lit é , fr a p p é p a r les lois suppressives.
Après avoir affranchi les personnes , l’assemblée nationale s’occupa
de la libération du sol français. C ’était une mission digne d’elle, et
fIu elle remplit avec de sages précautions. La liberté esl un breuvage
enivrant pour les peuples qui n’y sont pas habitues. Si la pensée
de régénérer l'homme et la terre qui le porte était à la hauteur
de cette auguste assemblée , les grands hommes qui la composaient
savaient aussi combien il fallait de prudence pour prévenir cet enivre
ment dangereux. Ils ouvrirent le sanctuaire avec précaution, e t , pour
2
�( 10 )
ne pas éblouir des yeux accoutumes à la servitude , ils n’accordcrent
que successivement, et p e u - à p e u , une liberte' qui, dans leur inten
tion, devait un jour être entière.
Les décrets des
G, 7 , 8 et 11 août 178g, en détruisant le régime
féodal établirent cette distinction : Les droits et devoirs féodaux ou censuels , ceux qui dépendaient ou étaient représentatifs , soit de la main
morte personnelle ou réelle , soit de la servitude personnelle , furent
abolis sans indemnité. T ous les autres furent déclarés rachetables et main
tenus jusqu’au rachat.
On sentit le besoin d’une énumération détaillée des droits seigneuriaux
supprimés et de ceux qui étaient maintenus et rachetables. L a loi du
i 5— 28 mars 1790 survint, et par son titre 3 , art. 2 , elle classa parmi
les droits rachetables. « Toutes les rentes seigneuriales annuelles en argent,
» grains, volaille , cire, denrées ou fruits de la terre, servis sous la déno» mination de cens, cencives, surcens , capcasal, rentes féodales , sei» neurialcs et emphytéotiques , champart, tasque , terrage, arage , agrier ,
» comptant, so été , dîmes inféodées , ou sous toute autre de'nomina» tion quelconque , qui ne se paient et ne sont dus que par le pro» priétaire ou possesseur d’ un fonds, tant qu’il est propriétaire ou pos» sesseur, et à raison de la durée de sa possession.»
L a loi du 1 8 -2 9 décembre
*a m&ne année, après avoir, par son
article 1 " , déclaré rachetables toutes les rentes foncières perpétuelles
de quelque espèce qu’elles fussent , régla par l’art. 5 , du titre 3 , le
mode et le taux du rachat pour les baux à rente, ou ernphytéose p e r p é tu e lle
et non seigneuriale , qui contiennent les conditions expresses de payer
au bailleur un droit de lo d s , ou autre droit casuel quelconque en cas
de mutation.
C ’est ici que s’arrrete la première période du système d ’ a f f r a n c h is s e
ment. O n voit que la suppression n’avait encore porté que sur une
partie des redevances féodales , et que l’autre était maintenue, mais
les droits étaient déclarés rachetables.
Il fut fait un pas de plus par la loi du 18 juin — 6 juillet I 792,
Cette loi supprima sans indemnité, tous les droits casuels, soit c e n s u e ls ,
soit jéodea ux, et tous ceux qui en étaient rcprésentaiijs , c o n n u s sous les
noms de quint, requint, treizième, lods et trezains , lods et ventes, etc.,
qui se percevaient à cause des mutations qui s u r v e n a i e n t dans la pro
priété ou la possession d’un fonds , sur le v e n d e u r , 1 acheteur, les
donataires , les héritiers , et tous autres a y a n t- c a u s e du précédent pro-
�( Il )
priétaire ou possesseur; à moins , est-il dit, que lesdits droits ne fus
sent justifiés par le titre primitif d’inféodation , d’accensement ou de
bail à cens , tire le prix ou la condition d ’une concession de fonds pour
lequel ils étaient perçus; auquel cas, lesdils droits continuaient d ’être perçus
et d ’être rachetables.
L a loi du 2 5 - 2 8 août suivant confirma celle du 18 ju in , et suppri
ma sans indemnité, « tous les droits féodeaux ou censuels utiles , toutes
" les redevances seigneuriales en argent, grains, volailles, cire, den» rc'es ou fruits de la terre, servis sous la dénomination de cens, cen" cives, surccns......... et généralement tous les droits seigneuriaux, tant
" féodaux que censuels , conservés et déclarés rachetables par les lois an» térieures , quelle qu’en soit la nature et leur dénomination , etc. »
Toutefois , l’art. 5 excepta de cette suppression sans indemnité , les
droits qui auraient pour cause une concession primitive de fonds; et l’art.
*7 fit encore exception pour les rentes champarts et autres redevances
qui ne tenaient point à la féodalité, et qui étaient dues par des parti
culiers à des particuliers non seigneurs ni possesseurs de fiefs.
Ici finit la seconde période.
La première n’ avait supprimé sans indemnité qu’une partie des droits
féodaux et avait déclaré l’autre partie rachetable , la seconde periods
supprima de plus une partie de ces droits , maintenus d’abord et ra
chetables, et n’excepta de la suppression que les droits dûs pour con
cession de fonds , ou par de particuliers à de simples particuliers.
Mais vint ensuite la loi du 17 juillet 1 7<)3, dont l'article 1er supprima
sans indemnité toutes les redevances ci-devant seigneuriales , droits féo
daux , censuels , fixes et casuels , même ceux conservés par le décret du
aoât 1792. L ’article 2 ne maintint que les rentes ou prestations purerement foncières et non féodales.
C ’est la troisième et dernière p é r io d e , car les lois et autres dispo
sitions législatives survenues depuis , ne sont qu’interprétatives de la
loi du 17 juillet i7j)3.
Ainsi , d’après cette loi , les rentes purement foncières et non féo
dales > sont les seules qui soient maintenues ; les droits même conservés
par la loi du 25 août 1792 ’ comme ayant pour cause une concession
de fonds , ne le sont p o in t , s’ils ne sont purement fonciers, c’est-àdire , sans mélange de féodalité.
On ne tarda cependant pas à vouloir faire des distinctions , malgré
les termes positifs de la l o i , en demandant la séparation dans les actes
�( T2 )
de concession primitive de fonds , à titre d’inféodation ou d’accensement, de ce qui e'tait purement foncier, d’avec les droits q u i , sous
le nom de cens et de censualité, rappelaient le régime féodal aboli.
Une loi du 2 octobre 1 7 9 Î , rejetta cette distinction et cette sépara
tion par l’ordre du jour , de sorte qu’il devait être désormais bien
reconnu , que toute renie due pour concession de fo n d s, cesse d’êlre
purement foncière, quand elle est mélangée de droits féodaux ou sei
gneuriaux.
Il 11 en fut pas moins proposé à la convention nationale , peu de
tems après cet ordre de jour, la question de savoir si l’administration
des domaines nationaux pouvait recevoir le rachat offert d’une rente de
35 setiers de b lé , qualifiée foncière et seigneuriale p a r le titre primitif
ou bail d’héritage , dans lequel était en même tems stipulé un droit de
cens emportant /ods et ventes. Par la loi du 7 ventôse an II , la con
vention déclara qu’il n’y avait pas lieu à délibérer, attendu « que déjà
» elle a déclaré par un décret d’ordre du jour , du 2 octobre 17g3 ,
» q u elle avait entendu, par la loi du 17 juillet précédent, supprimer
» sans indemnité les rentes foncières qui avaient été créées , même par
» concession de fo n d s, avec mélange de cens ou autre signe de seigneurie
» ou de féodalité. »
Interprétant encore le véritable sens de la loi du 17 juillet 1703,
line autre loi du 29 floréal an I I , déclara supprimée sans i n d e m n i t é
toute redevance ou rente entâchée originairement de la plus légère
marque de féodalité.
Ce commentaire donné par la législature elle-même, par cette légis
lature qui avait rendu la loi du 17 juillet 1793, manifeste clairement
le sens de cette dernière l o i , et l’on ne peut s’y méprendre. A u s s i ,
ne fut-il plus question, pendant quelques années, de chercher à tourner
la loi pour échapper à scs dispositions précises.
Mais sous le consulat, alors que d’autres idées paraissaient prendre
faveur, et que les législateurs interprètes n’ étaient plus là pour pro
clamer leur pensée, quelques tentatives furent faites. On e s s a y a de res
susciter le système de séparation de la partie féodale de la rente d avec
la partie foncière. Le conseil d’état fut appelé à en délibérer ; et par
son avis du 3o pluviôse an X I , après avoir rappelé la loi du 17 juillet
1 79 3 , les décrets des 2 octobre et 7 ventôse an I I , l’ordre du jour
portant refus de proroger le délai fixé pour le brûlement des litres
constitutifs et récognitifs de seigneurie , et d’autoriser la séparation
�( i3 )
de ce qui pouvait être purement foncier, qui « annonce clairement
* que. la convention regardait tous les droits quelconques établis par
» les titres , comme supprimés par une suite de leur mélange avec des
" cens ou autres signes de féodalité; après avoir ajouté que telle avait
» été depuis l’opinion constante du corps législatif; qu elle s’est ma» infestée eu l’an V , en l’an VIII dans les discussions sur les projets
“ présentés à l’effet d’établir une distinction entre les rentes et pres* tâtions créées par des actes constitutifs ou récognitifs de seigneurie,
" pour soustraire à la suppression celles qu’ on regardait comme pu“ rement foncières ;
Après avoir dit « qu’il n’ est pas possible de méconnaître des inten" tions aussi évidentes, et qu’il ne peut y avoir, lieu à interpréter des
* dispositions qui ne sont nullement obscures ;
“ Le conseil d’état fut d’avis que toutes prétentions , de quelque na“ ture qu elles pussent être, établies par des titres constitutifs de rede" vances seigneuriales et droits féodaux, supprimés par le décret du
” 17 juillet 1793, ont été pareillement supprimées, et que l’on ne
" pourrait admettre les demandes en paiement de ces prestations , sans
changer la législation. »
Se méprendre maintenant sur le sens et sur le but de cette législa
tion , ce serait fermer les yeux à l’cvidcnCc , et se jetter volontairement
dans l'erreur. Q u’011 d is e , tant qu’ on v o u d ra , qu’il y aurait eu justice
d établir la distinction demandée, on peut avoir raison en faisant le
procès à la l o i , mais ce procès ne prouverait autre c h o se , si non que
loi existe, et qu’il faut lui obéir. O r , cette l o i , ou plutôt ces
lois que nous avons analysées avec la plus sévère exactitude, ne font
aucune différence à l’égard des titres constitutifs ou récognitifs de sei
gneurie ou droits féodaux. Elles ne distinguent pas si les litres sont
dcs baux emphytéotiques 011 à cens, ou bien s’ils doivent avoir toute
autre dénomination; elles 11e voient, dans les titres, quels qu’ils soient,
les signes de féodalité ou de seigneurie qui peuvent y exister ;
si de tels signes s’y rencontrent, les lois prononcent la suppres
sion des titres sans égard aux redevances que ce mélange impur cesse
faire considérer comme des prestations purement foncières.
^ avis du conseil d'état du 3o pluviôse an XI n’est pas le seul qui
se soit expliqué sur le véritable sens des lois suppressives. Nous al
lons montrer dans le paragraphe suivant la persistance de ce conseil
® repousser toute idée rétrograde, particulièrement en ce qui concerne
es baux à cens et les baux emphyteoliques.
�Quand on considérerait l'acte du 6 mars 1 755 comme un véri
table bail e m p hy t é o t i qu e , il n'en serait pas moins frappé par
les lois suppressives de la féodalité.
L ’ emphytéose à lems doit être distinguée (le l’emphytéose perpétuelle.
Dans l’origine , le bail emphytéotique n’avait qu’une durée limitée qui
ne pouvait excéder 99 a n s , ou la vie d’un homme , ou bien la vie
du preneur et celle de ses enfans. L ’emphytéose perpétuelle fut dans
la suite autorisée , et elle existait à l’ époque de la loi du 29 décembre
1790, dont l’article I er prohibe pour l’avenir les baux à rente ou emphytéose perpétuelle. L ’article 53o du Code civil a confirmé cette prohi
bition.
U ne emphyte'ose à tems n’ était considérée que comme un simple
louage , bien que des différences essentielles dussent la distinguer du
louage ; tandis que l’emphytéose perpétuelle était une véritable transmis
sion de propriété , une vente réelle. A u ssi, les lois suppressives de la
féodalité et la jurisprudence ont-elles soigneusement distingué ces deux
espèces d’emphytéose.
Sous le gouvernement im périal, il y eut quelque velléité de revenir
au système de séparation des droits féodaux et seigneuriaux d’avec la
prestation foncière, et des essais furent faits. P o u r ne pas suivre la
même voie dans laquelle on s’était précédemment engagé, on inventa
la distinction entre les pays d'allodialitè et ceux où la maxime, nulle
terre sans seigneur, était de droit commun. Un décret du 25 nivôse an
X I I I , ordonna , en conséquence , que des redevances originairement im
posées au profit du chapitre de l’église d’Aix , et qui étaient mélan
gées de féodalité , continueraient d’être servies comme redevances em
phytéotiques , et sans charge de lods et demi-lods qui y avaient été ajoutés
indûment et sans titre par les bailleurs. Ce d é c r e t, en opérant la sépa
ration de la partie purement foncière de celle qui était féodale, et
ordonnant le paiement de la première à l’état, représentant alors l’c'glise
d’A i x , rouvrait la porte à l’introduction d’un système si long-tenis et
si nettement repoussé ; de plus , il établissait une distinction entre les
titres frappés de suppression , et classait les baux emphytéotiques au
nombre de ceux que la suppression ne devait pas atteindre. Enfin, il
était le premier acte de l'autorité publique qui distinguait les personnes ,
suivant qu’elles avaient droit de seigneurie ou qu’elles ne 1avaient pas. Un
�( i5 )
arrêt de la cour de cassation, du 10 février 1806, ne tarda point à se pro
noncer dans le même sens pour une redevance établie dans le PorenIrui, pays allodial.
Mais on s’effraya bientôt des conséquences d’une rétroactivité dont
l'effet certain était de porter le tiouble dans les familles , d’anéantir
les traités , les actes , les conventions de toute nature qui avaient été
la suite de l’abolition du régime féodal, et de détruire les garanties
hypothécaires des créanciers. I)e nombreuses réclamations s’ élevèrent
de toute part, et de nouvelles dispositions législatives, en sanctionnant
les lois subsistantes , vinrent calmer les esprits. La jurisprudence ellemême ajouta son autorité interprétative à la puissance des décrets et
des avis du conseil d’état.
Il est utile de présenter ici l’analyse chronologique de ces nouvelles
dispositions législatives et de la jurisprudence, pour démontrer avec plus
d évidence encore le véritable esprit de la législation , en ce qui con
cerne la suppression des droits féodaux , et prévenir des erreurs dans
lesquelles 011 pourrait facilement se laisser entraîner. Cela est néces
saire d’ailleurs, parce que AI“1' de C h âlillo n , dans sa consultation
et dans ses Mémoires , s’arrête précisément à cette époque dont nous
venons de parler où le gouvernement impérial faisait un pas rétrograde, entièrement à rebours des lois existantes.
Un avis du conseil d’ état, du i 3 messidor an X III, rendu six mois
après celui du 25 nivôse de la même année , commence cette série
de dispositions interprétatives qui doivent désormais faire règle pour
1application des lois concernant le régime féodal. Le conseil d’état
avait à examiner un projet de décret tendant à déclarer maintenues des
redevances à prestation de fruits, mêlées de cens, portant lods, amende
et seigneurie, dues par les habilans d’ Arbois, en vertu de titres d’acccnscmcns consentis par des individus que l ’on prétendait avoir pris
r,,al~à-pr0p 0s la qualité de seigneur. Ce projet fut rejeté par les motifs
suivan's :
* Considérant que lorsque le titre constitutif de la redevance ne
“ présente aucune ambiguité , celui auquel le titre est opposé ne peut
" être admis à soutenir qu'il n'avait pas de seigneurie ;
* Considérant que toutes les dispositions législatives, et en dernier
“ üeu l’avis du conseil d’état du 3 o pluviôse an XI , ont consacré
” la suppression de toutes redevances, de quelque nature qu’elles
” puissenL ê t r e , établies par des titres constitutifs de redevances sei-
�( 16 )
» -gneuriales et droits féodaux supprimés par le décret du i y juillet
« 1793. »
L e gouvernement renh'ait ainsi dans la saine interprétation des lois
de 15 matière , et se mettait en harmonie avec les lois des. 2 octobre
1793 et 29 floréal an II.
L e 23 avril 1807, un décret impérial, rendu à l’occasion de rede
vances provenant de concessions faites à titre de cens annuel et per
pétuel emportant lods et ventes , retenues et tous autres droits censaux et seigneuriaux, quoique l’abbaye de Sainte-Benigne ne possédât
pas les terrains à titre de fief, et qu'elle n'y eut aucun droit de sei
gneurie, s’exprimait ainsi : « Considérant que les redevances dont il
» s’agit sont entachées de féodalité par leur mélange avec des droits
» de lods et ventes, et autres supprimés p arle s lois ; que d’après l’avis
» du i 3 messidor an X III, approuvé par nous , il n’y a pas lieu à exa» miner si lesdits religieux possédaient les fonds à titre de seigneurs. »
E t le décret prononça la suppression sans indemnité de ces redevances.
Ce décret prenait l’avis du conseil d’état du i 3 messidor an X I I I , pour
base de sa d écision, parce que cet avis était rentré dans les vrais
principes. Nous verrons dans la suite que M . M erlin, procureur gé
néral à la cour de cassation , qui avait conclu plusieurs fois dans le
sens du décret du 25 nivôse an X III, revint aussi sur ses pas , et recon
nut que l’avis du conseil d’état tranchait, pour l’avenir , toute difficulté.
Un avis du conseil d’état du 17 janvier 1809, approuvé le 2 fé
v rie r, rejette une réclamation des hospices d’A i x , et s’exprime avec
plus de précision encore. « A tten d u , porte cet a v is , que les rede» vances perpétuelles établies par des titres qui portent en même tems ,
» soit stipulation de lods et ventes ou dem i-lods, soit réserve de la
» seigneurie directe , sont comprises dans les abolitions sans indem» nité prononcées par les lois antérieures , quelle que soit la dctiomi» nation du titre ou la qualité de la personne au profit de qui les re~
» devances ont été étublies. » C ’est conforme au décret du 23 avril 1807,
qui déclare indifférent pour la suppression des redevances, que le
bailleur de fonds eût droit de seigneurie ou qu’ il ne l’ait point. Mais
l’avis du conseil d’ état ajoute de plus qu’il n’y a pas lieu de con
sidérer la dénomination du titre, c’est-à-dire, qu’il importe peu que le
titre soit qualifie de bail à c e n s , de bail à r e n te , ou de bail em
phytéotique.
�( '7 )
D ’ailleurs, il existe des dispositions semblables pour les emphyteoses ,
et notamment pour des emphyteoses créées en pays de droit écrit.
Une décision ministérielle avait autorisé l'administration des domaines
à poursuivre le paiement des arrérages des redevances affectées sur
les biens donnés en emphytéose, dans le ci-devant évêché de Baie et le
pays de Porentrui , pays régi par le droit écrit. L e conseil d’éta t, par
son avis du 8 avril 1809, approuvé le i 3 , rapporta cette décision, et
déclara les redevances comprises dans l ’abolition de la féodalité.
« Considérant, porte cet avis, que les titres, joints aux réclamations
» desdites communes , présentent des emphytéoses perpétuelles , consenties
» par les bailleurs à titre de fiefs sous la reserve de la seigneurie, avec la
" stipulation de lods et ventes à chaque mutation. »
Aussi M. Merlin qui avait porté la parole comme procureur-général
à la cour de cassation , lors de l’arrêt contraire du 10 février 1806, se
hâte-t-il de dire, dans le Repertoire universel, V° f i e f , sect. 2 , ^ 7 ,
que cet arrêt ne peut plus faire autorité, depuis que le conseil d’ état
a pris le parti d’assimiler aux redevances mélangées de droits féodaux,
les rentes constituées par des baux emphytéotiques, contenant stipulation
soit d’ un droit de lods , soit d’un droit de relief à chaque mutation.
Et la cour de cassation est elle-même revenue sur la jurisprudence
qu’aurait établie l’arrêt du 10 février 1806. L e 4 juillet 1809, elle a eu
1 occasion d’examiner à fonds cette question , qu’ elle a résolue dans le
sens des décrets et avis du conseil d’état que nous venons de rappeler.
11 s’agissait encore d’une redevance emphytéotique , assise sur des héri
tages situés dans le Porentrui. Un arrêt de la cour d’appel de C o lm a r ,
du 8 thermidor an X I I , antérieur par conséquent à la jurisprudence
du conseil d’ état et aux décrets que nous venons de citer , avait or
donné la continuation du paiement de cette redevance. Cet arrêt fut
cassé par la cour régulatrice , et les motifs de cassation méritent d’être
textuellement rapportés , parce qu’ils reçoivent une application directe
a la cause des sieurs Baduel.
L ’arrêt commence par viser les lois du 18 juin 1792, le décret du 23
avnl 1807 , et les avis du conseil d’état rappelés ci-dessus ; p u is, il ajoute :
" Attendu que des dispositions de ces lois combinées avec les dis* positions de ce décret impérial et des avis du conseil d’état, rendus
’* eu interprétatation , il résulte évidemment que toutes redevances cm* phyteotiques établies à perpétuité par des titres qui portent en même
® tem s, soit des droits de lods et ventes à chaque mutation , soit réserve
3
�( 18 )
»
»
*
»
»
de seigneurie directe, sont dans le ci-devant pays de Porentrui même , comme dans tous les pays de l’ancienne France , comprises
dans l’abolition de la féodalité , quelle que soit d’ailleurs la dénomination du titre, ou la qualité de celui en faveur duquel ces redevances sont consenties ;
» Attendu que la redevance emphytéotique , comprise au bail du 29
» janvier 174$, et dont il s’agit , est de ce genre ; et en effet :
» i° Elle est dite à perpétuité;
» 20 Elle contient une réserve de seigneurie , puis qu’elle soumet
» le preneur à l’obligation de reconnaître le bailleur comme seigneur
» direct de la terre grevée de cette redevance ;
» 3 ° Elle est accompagnée d’ un droit de lods et ventes, puis que le
» preneur s’oblige à payer un droit de 2 sous par livre du prix de la
« vendition ou cession qu’il fera ;
» Attendu qu’il est stipulé en outre , dans ce bail , un droit de relief,
» puisque le preneur s’y oblige , à chaque changement de main par
» dc'ccs, ou tout autrement, de reprendre cette terre, dans le délai de
» six semaines , des mains du bailleur , de lui payer à chaque reprise
» huit livres bâloires , et de renouveller alors la lettre de fief ;
» Attendu que le preneur s’oblige de plus, pour lui et ses successeurs,
» de prendre jugement du bailleur dans toutes les contestations qu’il
/ » aura à l’ occasion de cette terre ; et que de cette soumission il ré» suite que le bailleur avait un droit de justice sur cette terre , dont
» l’existence serait, au besoin , attestée notamment par la sentence ar» bitrale de i4 8 6 , jointe aux pièces et invoquée par le demandeur,
» droit éminemment féodal , et compris tel dans l’abolition du régime
» féodal ;
» Attendu que s i , comme le prétend le défendeur, à l’aide d’une tran» saction de 149- * postérieure à cette sentence arbitrale , le chapitre
» de Sainte-Ursanc a alors renoncé à tout droit de justice sur le ter» ritoire dans lequel est assise la terre sur laquelle est affectée cette
» redevance , il eu résulterait alors que le chapitre aurait u s u r p é ,
» en I 745 > ce droit de juridiction qui avait cessé de lui a p p a r t e n i r ,
» et se serait dès-lors arrogé un devoir féodal auquel il n 'a v a i t aucun
» droit, ce qui suffirait, d'après l'avis du conseil d ’état , approuvé le 28
» messidor an X I I I , et le décret impérial du 23 avril 1807 , pour faire
j» tomber cette redevance dans lit suppression de la jéod a lité;
» Attendu enfin , que de tout ce dessus , il suit que la redevance
�( T9 )
» emphytéotique, dont il s’agit, était, si non seigneuriale de sa nature,
» du moins mélangée de droits et devoirs féodaux , et comprise dans
» tous les cas , dans cette suppression ;
» Et que l’arrêt attaqué , en confirmant purement et simplement le
* jugement dont était appel, qui avait avait déclaré cette redevance pu» remerut foncière , et ordonné que le paiement en serait continué comme
» par le passé , a évidemment violé les lois , ainsi que le décret impe» rial et les avis du conseil d’état ci-dessus transcrits, c a s s e , etc.»
( Sirey , tome 9 - 1-387).
Le lendemain, 5 juillet 1809, un autre arrêt de la cour régulatrice
cassa celui de la cour d’appel de C olin ar, dans la cause du sieur T hevenol, contre le sieur Moniemdon , par les mêmes considérations et les
mêmes motifs , et surtout , parce qu’il résulte de la combinaison des
lois, décrets et avis du conseil d'c'tat, « que l’intention évidente du lé» gislateur est de frapper du même anathême et de soumettre à la
" suppression sans indemnité , non seulement les redevances emphy” téotiques perpétuelles , qualifiées seigneuriales , quoiqu’ elles ne pusM sent pas l’être, ainsi que celles auxquelles cette dénomination appar“ tenait réellement, mais encore celles déclarées foncières , mais à
* l’occasion desquelles ceux qui les avaient constituées s'étaient dits
* seigneurs , encore bien qu’ils ne le fussent p a s , et n’eussent sur les
» héritages grevés de ces redevances aucune seigneurie ; — qu’il suffit
» même pour cette suppression , que ces redevances , quoique foncières ,
» encore bien que celui qui les a constituées ne se fu t pas dit seigneur,
" fussent accompagnées et mélangées de charges féodales , parce que
" là où le titre n ’estpoint équivoque, il nest besoin d ’aucun examen ultérieur. »
Enfin, un arrêt de la cour suprême, du 18 juillet de la même année ,
déclara frappées de la suppression, les emphytéoses perpétuelles dans le
pays de Porentrui , établies avec stipulation seulement des droits de
consentement aux mutations par ventes, des droits de relief, et des peines
de commise. (Sirey, tome 9 - 1 - 3 9 3 ) .
La cour régulatrice persista dans cette jurisprudence qu’il est impos
sible de ne pas reconnaître comme fondée sur les principes qui ont
déterminé l’abolition du régime féodal et la suppression de tout ce qui
se rapportait à ce régime.
L e 17 juillet 1811 , elle eut de nouveau à résoudre la question dans
une espèce où l’ hospice de Drtle soutenait, que n’étant pas seigneur du
lorrain accensé, le census et le laudirnium stipules au titre primordial, n’a
�( 20 )
vaient rien de féodal ; que les redevances reclamces étaient de simples re
devances emphytéotiques. La cour de cassation, par son arrêt, proscrivit ce
système, et déclara de nouveau : « Q u ’il n’y a pas lieu d’examiner si les fonds
» sont réellement possédés à titre de seigneurie , et qu’il suffit, pour
» l’abolition des redevances , qu’elles soient entachées de féodalité par
» leur mélange avec des droits de lods et ventes , et autres droits sup» primés. » (Sirey, tome 1 1 - 1 - 3 7 7 . )
Nous pourrions citer un grand nombre d’autres arrêts interprétatifs
du sens des lois abolitives de la féodalité , notamment celui de la cour
de cassation du 2 mai 1808 , d’après lequel la clause de cens portant
lods, lo i, amendes , retenues et seigneurie , indique la rétention de la
seigneurie féodale. (Sirey, tome 8 - 1 - 3 12);
Celui de la cour d’appel de Besançon, xlu 29 avril 180g, portant
que la simple qualité de seigneur, prise dans le titre, frappe la rente
de suppression, sans indemnité. (Sirey, tome 9 - 2 - 2 1 2 ) ;
Celui de la cour de cassation, du 4 avril 1810, d’après lequel, la
redevance créée par un ci-devant seigneur sur des fonds dépendant de
sa seigneurie , à titre d’accensement , même sans réserve de directe , est
de plein droit récognitive de la directe féodale , et par conséquent sup
primée. (Sirey, tome io)-i-3o2) ;
L ’avis du conseil d’état du i 5 septembre 1810, approuvé le 2.3, qui
prononce l’annulation de toutes les soumissions ou obligations de payer
les capitaux ou les arrérages , souscrites par des emphytéoses , depuis
l’abolition du régime féodal ; et la rénonciation pour l’état au bénéfice des
jugemens passés en force de chose ju g é e , qui ont condamné des emphy
téoses à servir les rentes établies sur les héritages dont ils sont détenteurs.
¡Niais il faut se borner , cl nous avons d’ailleurs suffisamment cons
taté l’interprétation donnée par le gouvernement et par la cour de cas
sation aux lois abolitives de la féodalité;
Il nous reste à faire l’application de ces lois et de ces interpréta
tions législatives ou judiciaires au titre du 6 mars 1755, eu nous ré
servant de revenir sur les objections qui ont été faites ou qu’ on pourrait
faire, car nous n’ en voulons laisser aucune sans réponse.
§ 4.
Preuves de la féodalité de Facte du 6 mars 1755.
Qui contracte dans cet acte ? Quelle est la p e r s o n n e qui concède le
domaine de Laitière? C ’est le « très-haut et très-puissant seigneur, messire
�( 21 )
» Alexandre-Emmanucl de Cassa'nhes «le Beaufort , chevalier, marquis
»» de M iramon, seigneur de Peslels , Polminhac , M arions, Tcissicrcs1• les-Bouliès , le Chaumeil et St-Cirgues-de-Jordanne , Laroque, St» Clément, Brezons, Cezens, Monréal, Nerebrousse, Paulhac, Balsac,
" Saint-llcran , Cocudoux , Lasalle , Lacalsade , Selles , Bassinhac ,
” Lecayre , Loubejac , Lafagc , Mongranat; baron de Foullioles et de
” (ïiou ; conseigncur de Vie et Thiézac et autres ses places. » Certes,
v°ila des titres nobiliaires et féodaux que nous ne reprochons pas à
M. de Miramon, mais que nous devons faire remarquer dans l’intérêt
bien entendu de la cause.
L e concédant du domaine de Lollière était marquis de Miramon !
P r i qu’était-ce qu’un marquis, avant la révolution de 178g? C ’était
jadis , mais il y a du tems , un seigneur préposé à la garde des fron
tières de l’é ta t, qu’ on appelait marches. Plus tard , ce ne fut qu’un
titre de dignité donné à celui qui possédait une terre que le souverain
avait érigée en marquisat.
Dans l’ordre des dignités féodales et politiques , le titre de marquis
était pins considérable que celui de comte.
M. le marquis de Miramon était de plus seigneur de Pestels , P o l^ m lia c , etc. , et particulièrement de Laroque.
Q u’était-ce autrefois qu’un seigneur ?
Loyseau, Traité des seigneuries, chapitre xer, n° 2 4 , e t c ., enseigne
que seigneurie signifie puissance; il distingue la seigneurie privée, qu’il
°elinit puissance en propriété, de la seigneurie publique , qu’il définit
Puissance de domination.
La seigneurie privée ou la puissance en propriété serait donc \cdominium
directurn q u i , aux termes des lois romaines , est le droit du propric» taire , et le droit de directe retenu par le bailleur à emphytéose.
Mais assurément M. le marquis de Miramon , en se qualifiant de
Scigneur de Pestels , Polminhac , Laroque et autres vingt-une paroisses
011 localités, et conseigncur de V ie et Thiézac , n’entendait pas se dire
Propriétaire de tous les héritages situés à Peslels, Polminhac, Laroque,
101 Thiézac, e t c ., etc. L e titre de seigneur qu’il prenait dans l’aclc
e *7^5 , comme dans tous les actes par lui souscrits, n’avait donc
aucun rapport ¿1 la puissance en propriété dont parle Loyscau , ou bien
au dominium directurn des lois romaines ; il ne pouvait s’appliquer
(j u a la puissance de d o m in a tio n c’est-à-dire, à cette puissance féodale
écoulant naturellement alors de la qualité de marquis, de seigneur,
e monseigneur et de baron.
�( 22 )
Il faut donc reconnaître qu e, soit comme marquis, soit comme sei
gneur , M. de Miramon réunissait en sa personne toutes les qualités
nobiliaires et féodales qui désignent ou un seigneur de f i e f , ou un
seigneur censitaire ; e t , nous nous empressons de le d ir e , cette der
nière dénomination serait trop modeste.
Maintenant que ces qualités sont établies, rappelons l’arrêt déjà cité
de la cour de Besançon , du 29 avril 1809 , qui déclare supprimée la
rente ou redevance , par cela seul que le bailleur avait pris dans le
titre la simple qualité de seigneur.
Rappelons encore un arrêt de la cour de cassation , du 4 novembre
18 18 , qui déclare abolie toute rente censuelle établie par une personne
qui prend le titre de seigneur, encore qu’ elle ne le fût pas. (S ir e y ,
tome 19— 1 — 37).
D e là résulte qu’alors même que M . de Miramon aurait pris une
qualité qui ne lui appartenait pas , ce que nous sommes loin d’ad
mettre, la redevance qu’il réclame des sieurs Baduel, ne serait pas moins
une redevance supprimée sans indemnité.
Ainsi les lois suppressives de la féodalité frappent déjà le titre de 175.),
par les qualifications seules que M. de Miramon a prises dans cet acte.
Poursuivons.
M . le marquis de Miramon donne à nouveau bail emphytéotique, nou
veau cens et nouvelle investison, son domaine appelé de L ollière, « dé» pendant de sa terre et seigneurie de Laroque-» , com p osé, etc.
M . de Miramon s’ était déjà qualifié de seigneur de Laroque T et main
tenant il désigne le domaine de Lollière comme dépendant de sa terre
et seigneurie de Laroque, ce qui veut dire certainement que ce domaine
était un démembrement de son fief de Laroque. Dans tous les cas, ce
domaine de Lollière est suffisamment désigné comme une dépendance
de la seigneurie de M . de Miramon, et c’en est assez pour caractériser
l’origine féodale de ce b i e n , et amener l’application des lois abolitives
de la féodalité.
Après avoir spécifié et détaillé la redevance payable à M. le marquis
de Miramon , l’acte ajoute : « L e tout censuel et redditucl, avec tout
» droit de directe et justice haute, moyenne et basse, usage et exercice
« d’icelle , m ère, mixte, impère , droit de rétention par prèlation , lods
» et ventes, et tailles aux quatre cas accoutumés au présent pays d Au»> vergne , et autres droits et devoirs seigneuriaux dûs et accoutumés ,
» et contenus aux terriers anciens dudit seigneur de sa seigneurie de La» roque, cto. »
�( 23 )
P ar conséquent, la redevance imposée par M . le marquis de Miramon,
est pas seulement censuelle et reddituelle , elle est faite,
i° Sous la reserve de la directe, ce qui concerne évidemment, d’après
les explications que nous avons données sur la qualification de seigneur,
la directe seigneuriale, et non le dominium directurn des lois romaines ,
011 le droit que tout propriétaire d’héritages peut encore se réserver
en donnant ces héritages à bail emphytéotique à tems. E t la preuve qu'il
11 est pas possible de comprendre autrement cette réserve de la directe,
résulte des expressions qui suivent immédiatement ce mot de directe.
2° Sous la réserve du droit de justice haute, moyenne et basse, etc.
Nous n’avons pas besoin d’examiner ici en quoi consistait la haute,
Moyenne ou basse justice. On peut consulter à ce sujet C h ab rol, Cou
tume d ’Auvergne, en tète du chapitre 2. Il nous suffit de dire q u e ,
Quoique le droit de justice n’implique pas nécessairement l’ existence
d u n fief, parce que la justice et le fief peuvent se trouver en des
Plains différentes, la présom ption, d’après le droit com m u n, était en
faveur du seigneur hau t-justicier, Y 0 C habrol, loco citato, tome i ,
PaSe 3g. Il est vrai que dans les pays allodiaux on ne reconnaissait
nul seigneur sans tilre , et que celte maxime s’appliquait au seigneur
iaut-justicier, comme à tout autre. Mais ici , nous avons , dans le
nieme tilre , la preuve de la seigneurie du fief, et du droit de justice
dans la personne de M . le marquis de Miramon. T o u t se trouve réuni
Sllr la même t ê t e , et caractérise de la manière la plus formelle les
droits féod aux de celui qui se réserve en même tems la directe, et les
droits de justice haute, moyenne et basse. L e droit de rendre la justice
, en e ffe t, une émanation de la souveraineté , de la puissance pu1(llle , et le seigneur qui possédait ce droit et se le réservait dans un
a c le , n’agissait plus comme un simple propriétaire , mais bien comme
Un seigneur usant de sa puissance féodale.
3° Sous la réserve du droit de rétention par prelation.
Çe droit de prèlation, c’esl-à-dire de retraire le domaine en cas d’alienation par le concessionnaire, est commun au bail à cens et à l’emphy*éose; c est une conséquence de la directité que le seigneur s’est réservée.
4“ Sous la réserve des lods et ventes.
Ajoutons ici q u e , dans la suite de l’acte de 17^5, le sieur Pierre
uel » concessionnaire du domaine de Lollière, « promet de ne le
vendre, ni aliéner à personnes de droit prohibées, ni y mettre cens
sur c e n s n i autre pension annuelle, sans le s c û , vouloir et consen-
�( 24 )
» tement dudîl seigneur (M. de Miramon) et de ses successeurs ; et
» d’icelui domaine fournir nouvelle reconnaissance à toute mutation de
» seigneur ou de paysan, toutes et quantes fois il en sera requis. »
O r , celte défense d’aliéner sans la permission du seigneur, est une
précaution prise pour assurer le paiement des droits de lods et ventes,
droits reconnus fé o d a u x, et comme tels abolis par les d écrets, avis
du conseil d’état et arrêts que nous avons précédemment rappelés. La
réserve des lods et ventes est donc une nouvelle circonstance carac
téristique de la féodalité dont l’acte de 17^5 se trouve entaché.
Quant à l’obligation de fournir une nouvelle reconnaissance à toute
mutation de seigneur ou de paysan, c’est-à-dire, chaque fois que lar
directe seigneurie changerait de main par décès ou autrement, et chaque
fois que le domaine de Lollierc passerait sur la tête d’un autre paysan,
c’ est une condition particulière et spéciale au bail à cens, aux actes
constitutifs d’une censive et de droits seigneuriaux.
5° Sous réserve des tailles aux quatre cas accoutumés au présent pays
d’ Auvergne.
Argon et ses annotateurs, liv. 2 , chap. 4 i titre des ccnsivcs cl droits
seigneuriaux, nous font connaître ce que c’ est que la taille aux quatre
c a s, redevance féodale, s’il en fut jamais. C ’est le double des devoirs
que le sujet doit ordinairement, et qu’il paie au seigneur.
i° Quand il est fait chevalier;
2° Quand il marie noblement sa fille aînée ;
3 ° Quand il est prisonnier de gu e rre , pour payer sa rançon ;
4e Quand il part pour une expédition en terre sainte , ou pour la
visite des saints lieux.
L a Coutume d’ Auvergne, chapitre 2 5 , intitule des tailles, gaits et
AUTRES
SERVITUDES,
p o r t e .’
Art. i cr. « Le seigneur haut-justicier a droit el faculté de tailler 5« hommes
» reseans et sujets en sa haute justice, cl pour raison d’icellec/z quatre cas»
» Art. 2. C ’est à sa vo ir, quand il se fait chevalier ; quand il va en
» voyage o u tre -m e r visiter la terre sainte; quand il est prisonnier
» des ennemis , et quand il marie scs filles en premières nopces. (**)
( ') L a ta ille a u x quatre c a t, telle que l’imposait le seigneur de Laroque, n'était pas aussi douce
que celle de la coutume. Nous voyous dans une reconnaissance du \ï juin KiS4, imprimée dans le
Mémoire contre les héritiers A uzoi.lk, qua le seigneur stipule en ces termes : « K l davantalge , de payer
» le double cens dudit argent <v. quatre cas en suivant; sçavoir: pour la iriuvelle chevalerie dudit seigneur
» de Laroque, pour le mariage de scs lils, lilles, frères, sniirs, nepveus et niepees, ou pour les mettre en
» religion ; pour le fait de la guerre ou arriére-han que ledit seigneur sera mande par le r o i, notre »il« r
» pour retirer ledit seigneur de prison, étant faict prisonnier en faict de guerre ; etc. »
�( 25 )
On voit que la coutume attribue la taille aux quatre cas à tous les
seigneurs liauts-justiciers , et que ¡NI. de Miramon l’impose, à ce titre ,
au concessionnaire du domaine de Lollière. Est-ce là , nous le deman
dons , une rente, une prestation purement foncière? N ’cst-ce p a s , au
contraire, comme l’indique la rubrique du chapitre 25 de la C ou tu m e,
une servitude, une de ces obligations inutiles à qualifier, auxquelles la
féodalité' avait soumis les personnes et les choses ? Peut-on d o u te r,
après une telle condition, que l’acte de 1745 dont on demande l’exé
cution , soit un titre mélange de féodalité et par conséquent atteint
par la loi du 17 juillet 179'^ ? Si l’on en doutait, il suffirait de lire
ce que dit à ce sujet D u n od , traité des prescriptions, partie 3 , cha
pitre n : « L ’origine des tailles, dit-il, est plus incertaine. On peut
” cependant l’attribuer à la promesse qu'on fa isa it ja ire aux esclaves,
* qu’ils feraient des dons à leurs maîtres, particulièrement dans le cas
” de mariage de leurs filles, lorsqu’ils seraient affranchis. Les seigneurs,
n ont étendu ce droit à d’autres cas extraordinaires , auxquels ils étaient
” constitués en dépense ; surtout pour une cause p u b liq u e , comme
” pour rançon , nouvelle chevalerie et voyage d’outre-mer ; lesquels
” joints au mariage d’une fille du seigneur , font les quatre cas auxquels
" les tailles sont dues aux liauts-justiciers par leurs sujets dans cette
” province. »
6° Enfin , M. le marquis de Miramon se réserve les autres droits et
devoirs seigneuriaux dus et accoutumés, et contenus aux terriers anciens
dudit seigneur de la seigneurie de Laroçuc.
Il serait important de consulter ces anciens terriers de la seigneurie
de Laroque , puisqu’ils énoncent la nature des droits et devoirs dûs
et accoutumés, dont M. le marquis de Miramon se fait la réserve. A
défaut de ces pièces importantes , nous ferons observer que la réserve
a pour o b je t , non-seulement les droits, niais encore les devoirs sei
gneuriaux. Si l’on pouvait contester sur cette expression droits seigneuriaux, bien qu’ elle caractérise assez nettement la nature féodale des
droits réservés , au moins ne peut-on pas raisonnablement élever des
difficultés en ce qui concerne les devoirs seigneuriaux réservés. Les de
voirs ne sont ni un cens , ni une rente , lorsque surtout ils sont ex
primés par opposition aux droits. Les devoirs s’ entendent alors de quelque
chose de personnel, tel que la foi et, hommage , quand ils concernent
seigneur, ou la corvée et autre servitude personnelle, quand ils re
gardent le paysan. En se réservant donc les devoirs seigneuriaux, M. le
4
�( 26 )
marquis de Miramon avait imposé au concessionnaire du domaine de
Lollière et à ses héritiers et a ya n t-ca u se , des obligations féodales,
tenant uniquement à la féodalité , et qui doivent disparaître avec elle
et avec tout ce qu’elle a touché et vicié.
Nous avons d i t , au n° 4 ci-dessus, que le sieur Pierre B a d u e l,
en acceptant la concession de INI. le marquis de M iram on, avait promis
de ne mettre cens sur cens sur le domaine de Lollière, ni autre pen
sion annuelle, sans le consentement du seigneur. Cette prohibition
tient encore à la nature du contrat de bail à cens, et non à celle
du bail emphytéotique, ce qui confirme de plus en plus notre allé
ga tio n , que l’acte du 6 mars 1755 n’est pas une emphyléose.
P o u r démontrer le contraire, M me de Châtillon , dans le Mémoire
qu elle a publié , prétend que cet acte renferme même un véritable
bail emphytéotique à tems. On sent bien l’intérêt qu’aurait la deman
deresse à prouver qu’ effectivement l’acte de 1755 n’est autre chose
qu’ une emphyléose temporaire, puis qu’alors elle ne serait point frap
pée par les lois abolitives de la féodalité, l’ einphytéose à tems n’étant
considérée que comme une espèce de louage par plusieurs arrêts ,
notamment l’un de la cour royale de R o u e n , du 1 " août 1811. (Sirey,
tome 1 2 - 2 - 7 6 . ) Mais les principes de la matière et la simple lecture
de l’acle ne permettent pas de faire celle erreur.
En principes, l’emphyléose est censée faite à perpétuité , si , par une
clause expresse, elle n’est stipulée temporaire, c’ est ce qu’atteste le
Rcpertoire universel, V° emphyléose , § 1“ . A i n s i , quand même il 11c
serait rien dit dans l’acte de 1755 sur la durée de la concession, elle
serait réputée perpétuelle.
Mais il s’en faut bien que cet acte soit muet à cet égard. Il est
formellement exprimé que la concession est faite pour et moyennant le
cens et rente annuels et perpeluels , seigneuriaux et uniformes d e , etc.
Plu s loin , il est ajouté que le sieur Baduel a promis et s’est obligé
de payer les susdits cens et rente de même que toutes les autres char
ges ci-dessus spécifiées annuellement en leur tems et saison a ri;ni>KTurrE
audit seigneur marquis de Miramon et aux siens.
V ainem ent, dit-on, dans le Mémoire publié que c e s mots : Perpétuels
et Perpétuité ne concernent que le service et le paiement des presta
tions , sans se rapporter à la durée de la concession. Nous répondons
que celte distinction est plifs subtile que solide ; que la perpétuité con
sentie pour le paiement des prestations est nécessairement corrélative à
�( 27 )
la perpétuité de la dure'e de la concession ; que l’une ne peut exister sans
I autre , et qu’il serait dérisoire de prétendre avoir assujetti le sieur
Baduel à servir perpétuellement une rente , tandis qu’il ne pourrait
jouir que temporairement du domaine productif de la rente.
A in s i, l’acte du 6 mars 1755 est un acte où la féodalité sue par
tous les pores , si l’on peut s’exprimer ainsi ; c’ est une concession à
perpétuité faite sous des Conditions que les lois , les décrets , les avis
du conseil d’état et les arrêts frappent de suppression sans nul doute.
II faudrait une préoccupation bien singulière pour rester dans l’indécision à cet égard, après avoir lu l’acte , et parcouru la législation de la
Matière ; il nous reste cependant une réponse à faire à l’objection ti
rée de Yallodialité de la ci-devant Auvergne , objection d’avance refutée
parce que nous avons déjà dit , sur laquelle néanmoins il est à pro
pos de revenir pour completter la défense des héritiers Baduel.
§ 5objection tirée de ce que la ci-devant Auvergne était un pays allodial
ri a aucune jorce ni application dans la cause actuelle.
Obligés de traiter une matière aujourd'hui peu connue , et dont un
deuii-siècle d'affranchissement nous a heureusement débarrassés, on nous
pardonnera de donner quelques définitions inutiles sans doute aux an
ciens jurisconsultes, nos maîtres; mais qui faciliteront à beaucoup d’au
tres l’intelligence d’une discussion étrange aujourd’hui , quoique elle
devienne nécessaire dans la cause des héritiers Baduel.
O11 appelait pays dallodialité, ceux où les héritages fonciers étaient
tenus en jranc-alleu.
L e mot alleu avait originairement la même signification que celui d'im nuiuble , d ’heritage. Le terme de franc fut ajouté, dans la suite, pour
désigner l ’alleu ou l’héritage entièrement libre.
Ainsi , le Jranc-alleu était une propriété foncière entièrement lib r e ,
rçui ne reconnaissait aucun seigneur, et, par conséquent, exempte de
lous droits seigneuriaux.
l)ire comment il y avait en F ra n c e , dans le pays des F rancs, des
héritages libres el d’autres qui ne l’étaient pas , serait fort long et fort
uficile, car les auteurs Montesquieu, Mably, Boulainvillers et beau
coup d’autres , ne sont point d’accord. L ’opinion le plus généralement
admise , fait remonter à l’époque de la conquête la division et la dis
�( 28 )
tinction des biens en francs-alleux et en biens soumis aux droits et
devoirs seigneuriaux. Il serait plus curieux qu’utile de rechercher les
causes de cette division.
Ce qu’il importe de bien prc'ciser, c’est que , d’après Argou, desfiefs,
chapitre 3 , et tous les auteurs qui ont écrit sur les matières féoda
les le jrapc- alleu n’est autre chose qu’un héritage qui ne dépend d’au
cun seigneur, ni en fief ni en censive , qui ne doit ni foi et hom
mage , ni autres devoirs seigneuriaux.
D ’après l’article 68 de la Coutume de P aris, et les dispositions d’un
grand nombre d’autres coutumes , e t , en cela , tous les auteurs sont
d’un avis conforme , il y avait deux sortes de franc-alleu , le noble et
le roturier. L e franc-alleu noble était celui qui avait ju stic e , cen sive,
ou fief mouvant de lui. L e franc-alleu roturier était celui qui n’avait
ni ju s tic e , ni aucune mouvance.
Quand nous disons que le franc-alleu était un héritage indépendant,
ne devant ni f o i , ni hommage ou autres droits seigneuriaux , nous ne
voulons pas dire qu’il y avait en France des héritages possédés à titre
de souveraineté, car les francs-alleux étaient comme les autres héri
tages , sous l’ empire de la souveraineté royale , surtout en ce qui con
cernait la justice, les seigneurs hauts-justiciers, comme on les appelait
alors, étant obligés de reconnaître que leur justice était une éma
nation de la puissance royale ou souveraine.
Cela p o s é , et pour rentrer dans la cause voici comment on a cher»
ché à éluder les dispositions des lois abolitives de la féodalité , à l’ égard
des rentes et redevances assises sur des héritages situés en pays allo
d ia l, c’ est-à-dire , tenus en franc-allcu.
L ’art. i cr de la loi du 17 juillet 1793, a-t-tin d it, ne supprime que
les redevances seigneuriales , et l’art. 2 maintient les rentes et prestatalions purement foncières. O r , dans le pays d’allodialité , où les
héritages étaient francs et lib re s, toutes les redevances étaient de leur
nature purement foncières , et par conséquent maintenues par la loi
même du 17 juillet 1793; et quelques arrêts avaient admis ce système
qui tendait à sauver les débris du naufrage léodal. Nous avons même
déjà vu le décret impérial du 2«1) nivôse an XIII , adopter celte idée.
Continuant le raisonnement, 011 a d it: L e t i t r e 3 i de la Coutume
d’Auvergne, et Chabrol, son savant c o m m e n t a t e u r , établissent 1allodialitc du haut et bas-pays d’Auvergne. Le c o m m e n t a t e u r ajoute même
que ce titre 3 i de la Coutume , a etc reçu en entier par les habitons du
�( 29 )
droit écrit d'Auvergne. D o n c , les rentes et redevances pcrar concession
de fonds dues par des héritages situés en Auvergne, ne peuvent être
entâchées d’une féodalité impossible, puisqu’elle est repoussée par la
Coutume ; et dès-lors , les rentes censuelles ou emphytéotiques n’y ont
pas été supprimées sans indemnité par les lois de 1792 et I 7 g 3 , qui
n ont frappé que les rentes féodales.
Ce système , qui n’est pas nouveau, car nous l’avons déjà vu se for
muler , sert de base à la consultation et aux Mémoires de M mc de
Chûtillon. L a consultation et le Mémoire s’efforcent de le rajeunir au
moyen de quelques arrêts mal compris , qu’il suffira d’expliquer pour
dissiper de trompeuses illusions.
Quand nous admettrions, avec Chabrol, que le titre 3 i de la Cou
tume était reçu en pays de droit écrit d’Auvergne , ce qui serait dou
teux pour le Carladès , d’après le procès-verbal, il 11’cn résulterait point
Que tous les héritages étaient nécessairement allodiaux. Chabrol luimême a soin de nous prémunir contre cette idée, en convenant, tome 2,
page 677 , que « s’il y a un bail à cens , ou une reconnaissance qui
” )' équipolle , la présomption d ’allodialité est totalement détruite quant
” a l’héritage qui y est compris. » Cela devait être, en eifet, à moins
de prétendre , malgré l’évidence , que tous les biens étaient roturiers
dans le haut et bas-pays d’Auvergne.
« D e cela seul qu’un pays était allodial, dit M . Dalloz aîné, \ ° féo * dalité , chap. 2 , scct. i re, n° 8, il ne s’ ensuit pas que toutes les Te" devances qui y étaient créées n’ étaient point féodales ; elles avaient
” ce caractère lorsque la redevance était féodale par sa nature ou sa
" qualification ; » et il cite , pour confirmer cette règle , l’arrêt de la
cour de cassation du 27 février 1809 , qui décide que , dans le pays
de Jranc-alleu , il ne résulte autre chose si non , que sous le ressort
des coutumes les plus allodiales, il n’y avait pas de seigneur sans titre.
Dalloz aurait pu citer, à ce sujet , un grand nombre d’autres dé
cisions semblables.
Effectivement , l’arrêt de la cour de cassation , du 23 vendémiaire
an X I I I , rapporté par M me de Cliàtillon sous le n° 5 , des pièces justi
ficatives annexées à la consultation , décide de la même manière en
Ce qui regarde précisément la Coutume d’Auvergne. Il rejette le pourvoi
contre un arrêt de Iliom , parce que « toutes les redevances dues sur
" les biens situés dans le ressort de cette coutume, soumise n la maxime,
” nul seigneur sans titre, étaient de leur nature réputées purement fon-
�( 3o )
» cières , à moins que le contraire ne f û t positivement stipulé par acte
» valable. » (S ir e y , tome 5— i — 5 7 .)
Plus re'cemment, et le 25 mai 1824, la cour régulatrice, en recon
naissant qu’aux termes du droit romain, les droits de cens, commise ,
etc. , pouvaient être imposés aux preneurs des baux emphytéotiques
proprement dits, sans avoir un caractère fc’odal dans un pays d’allodialilé,
ajoute : Pourvu que les circonstances particulières de la transaction n ’clablissent d'ailleurs sa nature féodale , ou mélangée de féodalité. ( Sirey ,•
tome 25— 1— 219). E t il est à remarquer que, dans l’espèce jugée, le
bailleur n’était point seigneur du territoire, et qu’il ne s’était pas at
tribué cette qualité dans l’acte constitutif de la redevance.
C ’est donc le'titre qu’il faut consulter et non la coutume ; c’est dans
le titre qu’il faut chercher les preuves de la féodalité, parce que s’il
est vrai que , sous les coutumes allodiales , la maxime nul seigneur sans
titre, est le droit commun , le titre forme le droit exceptionnel, et
qu’avec ce titre , s’il renferme des signes de féodalité , les héritages
cessent d’être régis par le principe de l’allodialitc'.
L ’arrêt de la cour de cassation, du 27 février 1809, que nous venons
de citer , consacre cette doctrine , et ajoute , en parlant des titres,
que « l’esprit général de la législation relative à la suppression des droits
» féodeanx, est d’en détruire toutes les traces, même dans ce qui n ’ayant
» pas pour base le pouvoir fé o d a l, en réveillerait cependant (idée par des
» stipulations qui en supposent l'existence, et qui ne pouvaient légalement
» émaner que de lui; que c’ est aussi dans ce sens que s’expliquent et
» l’avis du conseil d’é ta t , du i 3 messidor an X I I I , et le décret im» périal , du 3 avril 1807. » ( S ir e y , tome y — 1— 242.)
Une rente était qualifiée dans le titre, de cens annuel et perpétuel,
nature d ’ernphytéose, portant lods et ventes, retenue, rem uage, et tous
autres droits censaux et seigneuriaux. Il s’agissait de biens concédés
dans un pays d’allodialité. Par arrêt du 3o mai 1809 , la cour de cas
sation déclftre cette rente féodale et supprim ée, « attendu que la qua» lilication de la rente dont il s’agit, et les droits qui y sont inliérens ,
v dispensent d’examiner le point de f a it , si le bailleur originaire des
» fonds qui y sont affectés, en était le seigneur, ou s’il les possédait
» allodialcment ou en simple censive, puisqu’il résulte de la qualification
» et des droits attachés à la rente, qu’il s’était réservé une directe sur
» les fonds par lui concédés ; — qu’ il suffit que les droits de lods et
» v e n te s, et autres que le bailleur a établis ou <iu il s est fait recon-
�( 3i )
» naître , soient contraires à la liberté et aux avantages de Vallodialitê,
“ et «le la franchise que les lois précitées ont eu pour objet ; que les
» droits réservés par le propriétaire de la rente soient les mêmes , et
J> qu'ils produisent les mêmes effets que les droits féodaux qui ont été
® abolis , pour que les principes qui ont déterminé cette abolition,
’> soient applicables à ladite rente.» ( Sirey , tome 10— i — 2ÜG. )
Ces arrêts et bien d’autres que nous pourrions citer, sont conformes
au* principes des lois abolitives de la féodalité, tels que les lo is, les
décrets , les avis du conseil d’état et les diverses autorités que nous
avons rappelés au § 3 , ci-dessus , les ont établis. Il en résulte que
le titre et les stipulations qu’il renferme sont seuls à considérer , même
dans les pays allodiaux , pour décider si les redevances sont ou non
féodales. Le territoire disparait dans cette appréciation où il ne s’aque de vérifier le titre ; et c’est pour n’avoir pas bien réfléchi sur
cette doctrine de la jurisprudence que beaucoup de personnes se sont
hissées induire en erreur sur son véritable esprit.
oppose cependant deux arrêts qui semblent à des yeux prévenus,
contraires à la doctrine que nous venons d’ établir; examinons.
Par arrêt du i 5 février i 83o , la cour royale de Rioin avait déclare
Cnlaché de féodalité et frappe de suppression le bail à cens d’une
Raison située dans la coutume allodiale d’Auvergne, bien que le bailleur
n ait point pris dans l’acte la qualité de seigneur ; mais il s’était réservé
h directe seigneuriale. L a cour régulatrice a casse' cet arrêt, le 3 i dé
cembre i 833 , « attendu que la maison baillée à rente , élait tenue en
" franc-alleu roturier ; que par une conséquence nécessaire, le 'bail—
leur ne pouvait conférer à cet héritage une qualité féodale , ni se
conférer à lui-même la qualité de seigneur, que la directe seigneurie
* dont parle la Coutume d’Auvergne , ne peut s’entendre que du dotni” fuurn dirccturn, tel qu’on l’induit des lois romaines , et qui ne tient
a rien à la féodalité ; — attendu , dans l’espcce que le bailleur non
* seulement n’était pas seigneur , mais qu’il ne s'est pas donne cette qua“ Me ", e tc ., (Sirey, tome 34— i — 171.)
Il nous parait difficile de voir dans cet arrêt une contradiction avec
teux précédemment rendus par la même cour ; nous y trouvons , nous ,
au contraire , une confirmation des arrêts antérieurs. La cour régula
trice commence par rendre hommage au principe «le l’allodialité , et
a la maxime nul seigneur sans titre; p u is , examinant le litre, elle voit
1 U il s’agit d’un iranc-allcu roturier, que le bailleur n'avait pas la puis
�( 32 }
sance d'ennoblir, et qui mime n’avait pas eu cette prétention puis
qu’il ne s’était pas qualifié seigneur. Dans celte circonstance, il eût été
bien rigoureux de voir dans le titre des signes de féodalité, et de ne
pas reconnaître dans la directe seigneuriale reservée , cette seigneurie
privée , ou puissance en propriété , dont parle L o y se a u , Traité des sei
gneuries , c’est-à-dire , le simple dorninium directurn des lois romaines.
Cet arrêt est donc en harmonie avec la jurisprudence, et si parfaite
ment d’accord avec elle , que la cour de cassation a soin de faire re
m arquer, dans un considérant particulier , que non seulement le bailleur
n’ était pas seigneur, mais qu’il ne s’est pas donné cette qualité, motif
qui laisse supposer que , s’il en eût élé autrement, s i , dans le titre ,
le bailleur s’ était arrogé la qualité de seigneur, la décision aurait pu
être différente.
Un autre arrêt de la cour de cassation, du 3 juin i 835 , le dernier
sur cette matière qui soit rapporté par les arrêtistes, est relatif à un
droit de percière ou charnpart , établi pareillement dans la Coutume
d’ Auvergne. En rejettant le pourvoi contre un arrêt de lliom , la cour
reconnaît que la percière n’emporte pas la directe seigneurie , et elle
ajoute :
« Attendu que l’Auvergne était un pays allodial, régi par la maxime ;
» nul seigneur sans titre, et où fief et justice n’avaient rien de commun ,
» où , par conséquent , le droit de guet , l’obligation de se présenter aux
» assises , se référaient à la justice , étaient dûs au seigneur liaut» justicier, rationc superioritatis, sans avoir rien de féodal; — attendu
» que les titres des percières dont il s’a g it , ne sont ni féodaux , ni
» mélangés de féodalité. » (Sirey, tome 35— i — 3 a 4 .)
Il y a dans les motifs de cet arrêt , une distinction entre le f i e f et
la ju stice, qui s’accorde peu avec ce que dit M. Dalloz aîné, V° féodalité r
sect. i rc, ait. i cr, que, « lorsqu’il s’agit de décider si un cens est sei» neurial ou ne forme qu’une simple rente foncière , la haute justice
» résout la queslion : le cens dû au seigneur haut-justicier est, par
» cela seul , réputé seigneurial. »11 y a peut-être aussi d é s a c c o r d avec
les avis du conseil d’état et les décrets que nous avons précédemment
cités. Mais enfin , il n’y a pas contradiction avec la règle posée dans
tous les arrêts , que pour les pays allodiaux il faut s’en référer au titre
et savoir s’ il est féodal ou s’il ne l’est point.
Esl-il bien vrai d’ailleurs que fie f et justice n’ont rien de commun
daus les pays allodiaux ; cl doit-on entendre cette proposition en cc
�( 33 )
se n s , que la haute justice exclut dans ces pays la présomption de
féodalité , malgré les titres ? Ce serait, nous le cro yon s, pousser trop
loin les conséquences du principe que fief et justice n’ont rien de
commun. Si l’un peut être séparé de l’autre et n’en dérive pas né
cessairement , les coutumes et les auteurs nous apprennent pourtant
que fief et justice peuvent se trouver réunis dans la même main. Bacq u e t , Des droits de ju stice, chapitre 6 , après avoir établi , au n° 4 i
que fief et justice n’ont rien de commun , que le fief peut appartenir
à l’un et la justice à un autre , les suppose réunis dans la même
personne lorsqu’il dit : « Quand le vassal baille à son seigneur do* minant l’aveu et dénombrement de son fief, il fait mention expresse
" qu'audit j i e f il a justice haute, moyenne et b a sse, ou bien haute
” justice seulement, ou bien moyenne el basse justice tout seulement. »
D u n o d , Traité des prescriptions, chapitre 8 , s’exprime ainsi : « Les
" justices ayant donc été usurpées par les possesseurs des fiefs et à
" l’occasion des fiefs , elles y furent communément unies , et en firent
M la partie la plus noble. Ce ne fut néanmoins que par accident; car
“ la justice en elle-même est différente du fief, comme l’autorité pu” blique diffère de la propriété , et le droit du souverain de celui du
" particulier ; en sorte que l’un n’emporte point l’autre. Ainsi l’on peut
” avoir la justice sans aucune directe dans un territoire , et toute la
" directe du territoire sans la justice. C ’est pourquoi les auteurs disent
” que fief et justice n’ ont rien de commun , l’un n’attirant pas néces” saireinent l’autre , quoiqu’ils soient ordinairement unis. » E l c’est ce
que démontre dans la cause actuelle, le titre du 6 mars i j 55 , où M. le
Marquis de Miramon stipule tout à la fois , comme seigneur du terri
toire et comme haut-justicier.
L arrêt que nous examinons , attribue au seigneur haut-justicier et
non au seigneur féodal, le droit de guet; el la consultation de M me de
Chalillon invoque la pratique de ÎNIasuer et C h a b r o l, pour démontrer
que ce droit n’avait rien de féodal.
Cependant, l'article i o , titre 2 de la loi générale du i 5— 28 mars 1790,
concernant les droits féodaux supprimés sans indemnité , abolit formel
lement les droits de guet et de garde, comme droits féodaux. De
Plus , soit Mazncr , soit Chabrol , et tous les auteurs , établissent
que le droit de guet étail une servitude personnelle à laquelle le sei
gneur avait droit de contraindre ; c’é ta il, comme Bœrius le décide ,
dccisio 212, nos 8 cl 21 , des corvées dues pour les réparations du clià' 5
�( 34 )
leau. II les considère , dit C h a b r o l, tome 3 , page 4^0 , comme faisant
partie du château même , sunt partes castri. Ce droit de guet fut fixe
à cinq sous par a n , par l’ordonnance de Louis X I , de 147f) ? et ^
se payait sur ce taux en Auvergne. Despcisses , tome 3 , page 2 1 6 ,
n° 5 , cite un arrêt du parlement de Paris , du 22 avril i 5 i 8 , por
tant que ce droit était du , même après que le château était démoli.
On peut donc être surpris que l’arrêt de la cour de cassation , en
distinguant le fief et la justice , ait attribué le droit de guet à cette
dernière, et surtout qu’il ne l’ait pas considéré, de même que la loi
du i 5— 28 mars 1790 , comme un droit éminemment féodal et supprimé.
D ’ailleurs, peut-on sérieusement prétendre que le droit de guet n’avait
rien de féodal , parce qu’il se référait à la justice , étant dû au sei
gneur haut-justicier rationc superioritatis? ce serait contredire l’histoire
de l’établissement des justices seigneuriales ; ce serait oublier q u e ,
dans l’origine, les possesseurs de fiefs étaient guerriers et juges en
même tems ; que leur justice et leur fief étaient révocables, et devin
rent permanens , héréditaires et patrimoniaux par suite de l’usurpation
des seigneurs sur la puissance souveraine. L a taille aux quatre cas
était aussi attribuée, comme le droit de g u e t , aux seigneurs haulsjusticiers par le titre 25 de la Coutume d’Auvergne; serait-il raison
nable de soutenir que c ’est pour la justice et rationc superioritatis, que
les vassaux étaient obligés de payer quand le seigneur haut-justicier
était fait chevalier, quand il mariait ses lilles , quand il était prison
nier de g u e rre , quand il lui prenait fajitaisie de faire un voyage en
terre sainte ?
Quoiqu’il en soit, il ne résulte pas de cet arrêt que la haute jus
tice et le fief soient incompatibles , et que la justice , excluant l’idée
de la féodalité, il n’y ait plus lieu d ’examiner les litres pour savoir
s’ils ne contiennent rien de féodal. La cour de cassation qui a pu
se tromper dans l’un de scs m otifs, ajoute celui-ci ; « Attendu que
» les titres des pcrcières dont il s’a g it , ne sont ni féodaux , ni mi:» langés de féodalité , » et prouve par là-même qu’il faut toujours
recourir au titre.
L e titre sur lequel la cour a prononcé était constitutif d’un droit
de percière, portion de fruits qui se prélevait sur la terre m ê m e ,
comme l’atteste C h a b r o l, tome 3 , page ¿3. C ’est donc d une part de
récolte qu’il s'agissait, d’ une espèce de dîme foncière, et non d’ un
bail à cens , ou emphytéotique. La cour de lViom , et la cour de cas
�(35)
sation après elle , ont bien pu ne pas reconnaître ni caractère de féo
dalité',, ni mélange de féodalité dans une concession de terrain sous
réserve d’une part aux fruits.
Cet arrêt ne peut donc faire naître l’idée d’un changement de juris
prudence. Il suffit, pour se convaincre du contraire, de bien se pé
nétrer des circonstances sur lesquelles la cour régulatrice a eu à pro
noncer , et des motifs de sa décision.
Quant à la cour royale de Riom , elle vient de prouver par un arrêt
récent, que sa jurisprudence n’a point varié. Par acte du 3 octobre i y i o ,
ta veuve du marquis de Chavagnac, tutrice de son fils m ineur, dé
laisse à titre de rente annuelle foncière et non rachetable , à Pierre
Baratier , un champ situé au M e y n ie l, paroisse de L u g a r d e , mouvant
en roture de la terre de Lugarde , aux cens anciens el accoutumés, et
Moyennant 60 francs de rente. L e 21 mai 1776, Pierre Tournadrc fut
subrogé aux droits de Pierre Baratier, et le 24 fructidor an X , il
approuva et ratifia le contrat de rente annuelle de 60 francs du 3 oc
tobre 1 y5o. Cette rente fut postérieurement transmise aux pauvres de
Lugarde. L e maire de la commune , dans l’intérêt des pauvres , assigna
]cs héritiers Tournadrc devant le tribunal civil de M urât, en paiement
de cette rente; el le 27 novembre 1833 , jugement qui déclare l’acte
du 3 octobre 1750 et celui du 24 fructidor an X , nuls et de nul effet,
et le maire mal fondé dans ses demandes ;
« Attendu que la loi du 17 juillet I7g3 a supprimé non-seulement
M les cens seigneuriaux et les redevances qualifiées seigneuriales, mais
" encore les rentes foncières crcces simultanément avec ces redevances,
" avec ces cens ; que la convention nationale a interprêté dans ce sens
” la loi du 17 juillet 1793, par deux décrets, le premier, du 2 no” vembre i 7[)3 ; le second, du 17 venlAse an II;
- " Attendu que , dans les pays de droit é c r i t , la renie foncière était
“ considérée comme féodale , toutes les fois qu’elle avait une origine com" rnune avec un cens proprement dit;
” Attendu qu’ on ne peut supposer aux législateurs de I7y3 d’avoir eu
“ ^intention de donner à la loi du 17 juillet, dans les pays coutuntiers,
” une exécution moins étendue que dans les pays de droit écrit ;
” Attendu que l’acte du 24 fructidor an X , est purement récognitif,
" qu’il n’opère pas novation , cl que par suite , il est entaché du même
" vice que le litre primordial, etc... »
, Ce jugement a été conlinné par arrêt de la cour royale de R iom ,
du
juillet i 837 .
�( 36 )
Tenons donc pour certain qu’il n’y a pas de changement de ju
risprudence ; e t , disons-le hautement, s’il y en avait, ce ne serait
pas une raison pour déserter les lois existantes. Les jurisconsultes sa
vent bien que la jurisprudence est parfois obligée de céder aux néces
sités passagères de la politique; c’est un malheur dont nous avons été
témoins au commencement du régime impérial. La restauration, il
faut en convenir , se défendit d’ un exemple semblable , puisque par la
loi du g novembre i 8 i 5 , article 8, elle déclarait coupables d’actes sé
ditieux toutes personnes qui répandraient ou accréditeraient les bruits
du rétablissement des dîmes ou des droits féodaux. Sous l’empire des
institutions de juillet i 83o , on n’ a pas à craindre non plus de ces
retours à de vieilles idées dont la magistrature française s’est pour
jamais débarrassée. Suum cuique sans doute ; mais il ne faut point ren
verser les lo is, ou leur donner des interprétations forcées qui.ont le
même résultat, pour rétablir ce qui ne peut plus exister, et le rétablir
au préjudice de nouveaux droits acquis.
Concluons de tout ce qui précède q u e , pour les pays d'allodialité,
comme pour les autres contrées, les lois de 1792 et I 7 g 3 , frappent
également de suppression les rentes et redevances féodales ou mélan
gées de féodalité.
Alors revient naturellement ce que nous avons exposé sur le cai'aclère féodal de l’acte du 6 mars l'jS j , dans le § 4 ci dessus. M. le mar
quis de M iram on, s’il vivait encore , trouverait fort étrange qu’on mit
en doute sa qualité de seigneur, lui qui comptait dans scs titres vingt
et quelques seigneuries , sans y comprendre les coscigneuries de V ie
et de Thiézac ; lui qui joignait à la directe seigneuriale les droits de
justice haute , moyenne et b a sse , qui se réservait le droit de retrait
ou de prélation, les droits de lods et ventes , et enfin , la taille aux
quatre cas, cl autres droits et devoirs seigneuriaux.
E t savez-vous à quoi il faudrait réduire tant de titres, tant de droits
superbement proclamés ou imposés, pour éviter en pays allodial, l’ap
plication des lois suppressives de la féodalité ? Il faudrait avouer que
ces nombreuses seigneuries ne constituaient qu’un alleu roturier; il fau
drait déclarer, à la face de la justice cl des hommes trompés, que
M . le marquis de Miramon n’était qu’un simple roturier comme ses
paysans , qu’il n’avait que des biens et des droits possédés en roture ,
et que le haut et puissant seigneur, comme il est q u a li f i e dans 1 acte de
1755, n’était quun vilain, comme 011 daignait nous nommer alors, nous
�( 37 )
tous qui n’ avions ni seigneuries , ni directe , ni haute, moyenne ou basse
justice, ni droits de rétention par prélation, de lods et ventes, et q u i ,
privés <le la taille aux quatre cas, étions obligés de nous racheter nousnicmes si nous étions prisonniers de g u e rre , et de marier nos filles
a nos frais et dépens. Certes ! maigre l’intérêt de la cause , nous ne
croyons pas que cette injure soit sérieusement faite à la mémoire de
^ 1- le marquis de Miramon.
On se trompe , au reste , sur les effets ou les conséquences de l’ai—
lodialité. On se trompe , parce qu’ on ne veut pas remarquer la dif
férence qu’ il y avait dans les pays allodiaux entre les héritages nobîts
et les héritages roturiers, ou bien entre les fiancs-alleux possédés par
les nobles et ceux possédés par les roturiers. On confond volontaire
ment ces deux espèces d’héritages pour les soustraire ensemble à l’appl'cation des lois suppressives de la féodalité : c’est une erreur qu’il
importe de relever pour l’empêcher de se répandre.
différence entre le franc-alleu noble et le franc-alleu r o tu rier,
c°nsiste principalement en ce que le propriétaire du franc-alleu noble
pouvait l’inféoder ou l’accenser, tandis que l'acccnsement ou l’inféodatioil
du franc-alleu roturier ne pouvait jamais avoir lieu. De cette règle féodale
(lue nous allons établir, résulte la suppression ou non-suppression des
prestations et redevances.
l*our justifier cette proposition , nous pourrions citer le titre ic),
article 5 , des arrêtés de Lamoignon, portant : « Celui qui possède un
’’ banc-alleu roturier, ne peut donner aucune portion de son domaine
a cens. » Nous nous bornerons à rappeler ce que dit M. ilenrion
e Pansay, dans ses Dissertations féodales, tome i cr, article alleu} § <).
Le propriétaire d’uu alleu roturier , dit le savant jurisconsulte , ne
peut ni l’inféoder ni l’accenser ; il y en a une infinité de raisons : la
principale, c’est qu’ on ne peut donner à fief ou à cens que des hcr*tages nobles; c’est que, pour pouvoir communiquer ou se réserver
puissance féodale, il faut l’avoir, il faut en être investi; enfin,
c est que les fiefs sont des dignités réelles , et que le r o i , ou ceux
flUl en ont reçu le pouvoir de lui, peuvent seuls conférer les dignités,
^e qui constitue la noblesse d’un héritage, c’ est un titre de seigneurie
aJ°uté à la propriété. Le franc-alleu noble est donc_une seigneurie,
Uu
actif. Un fief est un héritage dans lequel la propriété est unie
“ ,l la puissance publique....... »
peu plus loin , il continue : « Sans doute le propriétaire d’un
�(38 )
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
héritage peut le vendre, le donner à renie, à bail emphytéotique, en
un m o t , en disposer comme il le juge à propos ; mais cette règle
reçoit une exception à l’égard du cens. Pour avoir le droit d’imposer
sur un immeuble une redevance censuclle et seigneuriale, il ne suffit
pas d’ en être propriétaire , il faut avoir cette propriété à titre de
seigneurie : celte décision sort de la nature des choses. Le bail à cens
s’ établit par la séparation du domaine direct et du domaine ulilc ;
ce dernier passe seul entre les mains du prem ier, le premier demeure en celle du bailleur. A la vérilé , le bail emphytéotique cmporte de même la séparation des deux domaines ; et tout le monde
peut donner à emphytéose 1111 héritage tel qu’il soit, noble ou roturier. Mais il faut distinguer deux espèces de domaines d irec ts, l’un
particulier et privé , l’autre public et seigneurial. Il ne reste entre les
mains du bailleur à emphytéose que la directe privée ; et le contrat
d’accenseinent doit emporter la directe seigneuriale et publique ; c’ est
cette directe seigneuriale qui en constitue l’essence. »
A cette imposante autorité nous pouvons ajouter celle de Chabrol »
tome 2 , page 677 , qui déclare formellement que l’existence d’un bail
à cens, ou d’une reconnaissance qui y équipolle, détruit totalement
la présomption de l’allodialité ; ce q u i , certes , est d’une autre consé
quence , puisque le bail à cens suffit, lui s e u l , pour soumettre les
héritages au régime féodal. Nous pouvons enfin, invoquer l’opinion
de M. M erlin, questions de droit, V° rente fo n ciè re, § 14-, qui recon
naît sans difficulté que le franc-alleu noble peut seul être inféodé ou
accensé.
Maintenant qu’il est établi que les immeubles roturiers ne p o u v a i e n t
être inféodés ou accenses , et que l’ existence d’un bail à cens détruit
l a présomption d’allodialité, parce que les biens nobles pcuvcnL seuls
être accenses , et l’être par un seigneur fé o d a l, nous demanderons à
M",e de Ghàlillon si le domaine de L ollière, baillé à nouveau cens et
nouvelle investison, par l’acte du 6 mars 173.5, était un allodial ro
turier dans les mains de M. le marquis de Miramon , son père ; si
ce domaine , situé dans la seigneurie de Laroquc dont M. de Miramon
était le seigneur, a pu être concédé comme roturier, alors (p ie le
concédant établissait, par acte de concession, des redevances censuclles , reddituelles , avec tout droit de directe , de liaulc , moyenne
e t basse justice , droit de rétention , lods et v e n t e s , taille aux quatre
cas et autres droits et devoirs seigneuriaux contenus dans les anciens
�( 39 )
terriers de la seigneurie de L aro que ; si enfin, la directe réservée
peut être , avec ce grand cortège de féodalité , reconnue pour ce domaine direct et privé dont parle M . Henrion de P a n sa y , ce deminiurn directurn des lois romaines q u i , dans les pays d allodialité comme
dans les pays où la maxime nulle terre sans seigneur était adoptée, se
réservait sur les biens roturiers. Nous sommes persuadés que sa réponse,
quoique contraire à l'intérfit de sa cause, sera conforme à sa loyauté,
et quelle conviendra franchement de la qualité nobilière du domaine
concédé.
Eh bien ! cette qualité nobilière des immeubles situés dans les pays
allodiaux, cette seigneurie ajoutée à la propriété, comme le dit Ilenrion
forme un fie f, c’est-à-dire, un héritage dans lequel la propriété est unie
à la puissance publique. C ’est ce qu’était évidemment le domaine de
Laitière entre les mains de M. le marquis de Miramon , et ce qu ôtaient
tous les héritages possédés par lui dans les vingt ci quelques seigneuries dont le titre de 1755 nous donne l'énumération. Voilà ce qui
Résulte, sous l’ empire de l’allodialité de la coutume d’ Auvergne, de
^ distinction établie entre les francs-alleux nobles et les fiaucs-alleux
roturiers ; voilà ce qu’il fallait observer pour ne pas se jetter dans
d absurdes contradictions en parlant de 1allodialité.
I)u reste , cette digression est sans utilité réelle dans la cause , parce
qu en prenant le domaine de Lollière pour un franc-alleu roturier, les
prestations et redevances créées par la cté de 1755, n en seraient pas
^oins supprimées. M . Merlin , procureur général à la cour de cassation,
a long-tems fait triompher par ses éloquens et savans réquisitoires ,
Cc système qui tend à distinguer les allodiaux nobles des allodiaux
roturiefS • mais après l’avis du conseil d é ta t, du i 3 messidor an X III,
^ reconnut la nécessité de renoncer a cette distinction. On peut von
Ce qu’il dit à cc s u j e t , dans le Répertoire universel, V° cens , § 8 ,
Pa£e i 37 , et dans les questions de droit, V “ rente foncière , § 4 , p. 3()3 ,
' 0,1 après avoir établi cette doctrine , que le propriétaire d un francalleu roturier ne pouvait le concéder ni à fief ni a cens seigneurial,
tll,e par conséquent, la rente qualifiée seigneuriale qu il s était reservée,
11était point abolie par la loi du 17 juillet 1793 , il ajoute en note : « Cette
” c°nséquence, quelque conforme qu’elle soit aux principes rigoureux
“ du droit , 11c pourrait plus être admise aujourd’hui que dans le
" cas où le bailleur aurait fait connaître par l’acte qualifié de bail à hef
* ou de bail à cens , qu’il n’ était pas seigneur et n’ entendait pas le
�( 4o )
» devenir par cet acte. C ’est ce qui résulte de l’avis du conseil d’état
» du i 3 messidor an X III, et du décret impérial du 2.3 avril 1807.
» La cour de cassation elle-même l’a ainsi jugé par plusieurs arrêts. »
Nous avons rapporté au § 3 ci-dessus, cet avis du conseil d’ c'tat et
le décret cités par M. Merlin ; nous avons de plus fait connaître d’au
tres avis du conseil d’ état et plusieurs arrêts dans le même sens. Il suffit
de les lire avec un peu d’attention pour demeurer convaincu que, mê
me dans les pays d’ailodialité, les redevances et prestations résultant
de concession de fonds , ont été supprimées par les lois de «792 et
I 7 g 3 , quand les titres reservent au bailleur des droits et devoirs qui
se rapportent à la féodalité.
§ 6.
Dans toutes les hypothèses, les demandes de M mt de ChûlUlon sont
repoussées par la prescription.
Nous avons placé cette proposition la dernière , parce qu’il était dans
l’ordre naturel de démontrer la suppression des redevances féodales
ou censuelles que M rae de Châtillon veut faire revivre , avant de s’oc
cuper de la prescription qui , dans tous les cas possibles , vient assurer
aux héritiers Baduel la propriété libre de toute redevance , d’héritages
qu’ils possèdent paisiblement depuis plus de quarante-cinq ans.
C ’est ici le moment de présenter à la justice des considérations q«1
ont bien leur importance. Il a sans doute été fâcheux pour le s pro
priétaires d'héritages et droits féodaux de se voir subitement dépouillés
d’une partie de leur fortune. Ce malheur ne s’excuse pas à nos yeux
par la violence et les nécessités d'une révolution. Mais la même raison qui
nous fait environner de respect les droits acquis , ne nous permet pas
d'approuver des réclamations tardives qui , à leur tour , n’ont et ne
peuvent avoir d’autre but que de dépouiller des fils et petits-fils de
biens qu’ils ont recueilli par succession , qu’ils possèdent l é g a l e m e n t à ce
titre. La prescription est la patrone du genre humain , disait un e m p e r e u r ;
et cela est vrai , parce que la prescription , surtout la p r o s c r i p t i o n trentenaire , est la sauve-garde des droits de propriété. Les biens accensés ,
tous ceux dont les redevances ont été supprimées par les lois de 1792
et 1793, sont possédés depuis, libres des charges qui les grevaient et
en rendaient la valeur presque nulle dans les mains des premiers te
nanciers. Les enfans de ces premiers possesseurs ont recueilli ces me-
�( 4t )
mes biens avec toute la valeur que leur donne l’affranchissement des
droits et devoirs seigneuriaux. Ils les ont partage's en cet e'tat et dans
la pleine confiance qu’ils devaient avoir dans les lois d’affranchissement
et de libération. Des dots ont été constituées et payées eu égard à la
nouvelle valeur de ces biens ; de nombreuses transactions de famille
ont leur base dans cette valeu r, et des créanciers ont consenti à pren
dre pour gage et sûreté hypothécaire, ces mêmes biens libres de re
devances.
Il faut renverser et détruire tout cela , si vous voulez faire revivre
des redevances éteintes depuis si long-tems. Il faut opérer une ré
volution nouvelle, et ruiner , à leur t o u r , ces enfans , pères de famille
aujourd’h u i , ces créanciers qui ont eu foi dans les lois existantes et
dans le long silence des ci-devant seigneurs ou de leurs héritiers.
Y aurait-il de la raison et de la justice !' nous ne le pensons pas.
Les lois politiques ne sont point les seules qui le défendent ; les lois
civiles viennent encore au secours des droits acquis , en offrant à ceux
(iui possèdent , le moyen de la prescription comme une barrière in
franchissable à des prétentions surannées.
Nous ne devons pas être surpris que M me de Chatillon veuille faire
considérer comme bail emphytéotique Uacte du 6 mars 1755, quoique
cet acte soit plutôt un bail à cens ; et qu’elle le présente comme un
bail emphytéotique temporaire. En faisant admettre qu’il s’agit d’une
concession emphytéotique à tems , elle éviterait le moyen invincible de
la prescription , si d’ailleurs les lois suppressives de la féodalité ne
s’appliquaient pas ; et l’acte ne serait plus qu’une espèce de louage,
^«prescriptible de sa nature : ce système , s’il n’est pas fondé , ne man
que point d’adresse.
Nous avons déjà prouvé § 4 ci-dessus , que l’acte de 1 7 5 5 , n’est
Pas un bail temporaire , mais bien une concession à perpétuité ; inutile de revenir sur les preuves que nous en avons données. Voyons donc
Maintenant , si , en supposant un simple bail emphytéotique , et lui
conservant cette dénomination pour la facilité de la discussion , celte
espèce de contrat a de l’analogie avec le louage , notamment quand
les biens sont concédés à perpétuité.
fleineccius dans ses leçons élémentaires sur le Droit civil romain , liv. 3 ,
remarque la différence qui 'existe entre le louage et 1 emphytéose. « Le conducteur, dit-il, est tenu de faire la prestation du salaire
* promis, el l’emphyléose du canon. Dans le louage, le salaire est en
6 -
�(42)
» raison des fruits de la chose du bailleur ; dans l’emphytéose, la. re» devance est modique ; elle est due en vertu de la chose propre au preneur,
» et en reconnaissance du domaine supérieur et direct. »
L ’emphytéote, ajoute-il , perçoit tous les fruits, et même fait sien
le trésor qu’il trouve dans le fonds. Il a le droit d’imposor des servi
tudes ; il peut changer la face du fo n d s, il peut l'aliéner, le donner
entre-vifs, l’échanger, l’hypothéquer ; droits qui certainement ne com
pétent pas au preneur à louage qui paye un salaire ou une redevance pour
une chose qui ne lui appartient pas. Enfin , une autre différence existe ;
c’est que le preneur par bail à louage a droit à une remise de prix
du bail dans le cas de perte des fruits par force m ajeure, tandis qu’il
n’y a jamais de remise pour la prestation du canon emphytéotique.
Il est facile de voir par ces différences entre l’emphytéose et le louage ,
que le bail emphytéotique transmet au preneur le droit utile de pro
priété , ce que ne fait pas le bail à louage.
Voilà ce qui subsistait avant 178g.
Alors on disputait sur la question de savoir si le cens ou la rente
étaient prescriptibles. C h ab rol, dans son savant commentaire, tome 2 ,
pages 668 et suivantes , examine longuement cette question , rapporte
l’opinion des auteurs et cite les nombreux arrêts qui ont décidé pour
ou contre. Il fait voir la difficulté et ne la résout point ; cependant,
l’art. 2 , du titre 17 de la Coutume d’Auvergne p o r te : « T o u s droits
» et actions cens , rentes, servitudes et autres droits quelconques pres» criptibles, soyent corporels ou incorporels , se prescrivent, acquièrent
» ou perdent par le laps et espace de trente ans continuels et accom» plis ; » et il est remarquable que les opinions qui admettent la pres
cription se fondent particulièrement sur les principes de l'allodialilé des
héritages en Auvergne , parce que la prescription du cens les fait rentrer
dans le droit commun.
Les partisans de l’imprcscriplibilité raisonnaient a in s i, d’après Cha
brol , loco cítalo , page 677. Le cens est imprescriptible , disaient-ils ,
» parce que le dQinaine direct , réservé par le seigneur , est regardé
» comme une portion de la chose qui le doit : « L e seigneur est cense
» posséder le domaine direct , comme l’ emphytéote possède le do» mai ne utile. Les droits incorporels sont susceptibles de possession ,
» et elle se conserve par la seule intention. Ainsi , l’cinphyléotc ne
» possédant que le domaine u t ile , ne peut prescrire le domaine direct
» qu’il 11c possède également. » La division des deux dominités , c est
�( 4'* )
a-dire , la séparation du domaine utile et du domaine d ir e c t, était donc
la raison déterminante de l’imprescriptibilité. O r , si cette séparation a
légalement cessé d’exister , si le domaine utile et le domaine direct se
sont réunis en la personne du preneur ; si cetle réunion a duré pen
dant un laps de tems suffisant à prescrire, il faudra bien admettre , même
en supposant l’imprescriptibilité originaire du cens, que, les motifs de
cette imprescriptibilité n’existant plus, la prescription a couru au profit
d» preneur et de ses héritiers ou ayant-cause,
Eh biçn ! Par l’article 6 de la loi du i l août 1789, toutes les rentes
foncières perpétuelles, soit en nature, soit en argent, de quelque espèce
Çu’elks fussent, quelle que fût leur origine, à quelques personnes quelles
fussent dues, ainsi que les champarts de toutes espèces, et sous toutes
dénominations, furent déclarés rachelables. Il fut défendu en même tems,
de plus, à l’avenir, créer aucune rente non remboursable.
L ’article Ier du titre 3 de la loi du i 5 mars 1790, déclara pareillement
^achetables tous les droits et devoirs féodaux ou censuels utiles qui
étaient le prix et la condition d'une concession primitive de jonds ; et
article 2 présuma tels , sauf la preuve du contraire , toutes les rede
vances seigneuriales annuelles en argent, grains, volailles, cire, denrées
0u fruits de la terre, servis sous la dénomination de cens, censives,
surcens , capcasal , rentes féodales , seigneuriales ou emphytéotiques ,
chaniparl , etc.
La loi du 18 décembre de la même année, après avoir de nouveau
déclaré rachetables toutes les rentes foncières perpétuelles, régla, dans
So» titre 3 , le mode et le taux du rachat ; et l’article 5 de ce titre
s °ccupa spécialement du rachat des baux à r e n te , ou emphyteose per
pétuelle et non seigneuriale, contenant la condition de payer des droits
e lods et des droits censuels aux mutations.
Ces lois ont donc déclaré rachctable le cens ou le canon emphy
téotique comme toutes les autres rentes foncières et perpétuelles. Nulle
1 iculte 11c peut s’élever à cet égard, e t , au besoin, les articles £29
«>3o du code civil viendraient confirmer cette doctrine.
Maintenant , que rc'sulte-il de ce changement apporté par les lois de
*789 cl 1790 à l’ancienne législation sur les redevances emphytéotiques
Perpétuelles ?
11 en résulte , d’après l’avis du conseil d’état , approuvé le 7 mars
1 °8 , que « les titres q u i , qualifiés d’emphytéoscs perpétuelles aban“ donnent ensemble la jouissance cl la propriété, ne sont autre chose
�( 44 )
» qu'une aliénation absolue qui fa it reposer la propriété sur la tête de
» Vacquéreur à pareil titre. »
Il
en résulte, comme le dit M. Duranton , Cours de Droit français,
tome 1 9 , page ;5()0 , que « la propriété a passe toute entière sur la tête
» de l’emphytéote , même avant le racliat , par la faculté qu'il a ac» quise , et qu’ont encore ceux qui n’ont point racheté , de se libérer
» de la redevance ; et le concédant n’a plus eu qu’un simple droit de
>» créance , un droit purement mobilier ; en sorte qu’il n’a plus eu le
» droit d’hypothéquer le fonds , et le concessionnaire l’a eu plein et
» entier , non plus comme simple emphyléote, mais comme propriétaire
« absolu du fonds , en restant débiteur de la prestation annuelle , et avec
» la faculté de s’en racheter. » Nous observerons que cette doctrine ,
quant au droit du concessionnaire d’hypothéquer le fonds tenu à eniphytéose, a été consacrée par 1111 arrêt formel de la cour de cassation,
du 19 juillet i 832. (Sirey , tome 3a — 1— 53 1.)
11
ne peut donc plus être^ question aujourd’hui , en matière d’ emphytéose , de comparer ce contrat au bail de louage , et de parler de
possession précaire. La doininité , autrefois séparée , repose maintenant
toute entière sur la tête du concessionnaire qui n’est plus débiteur que
d ’une rente rachetable à volonté. Devenu propriétaire absolu, in to to ,
sa possession est celle de tous les propriétaires d’héritages chargés de
rentes foncières.
Ces principes reconnus , la question de prescription est d’ une solu
tion facile, puis qu’elle rentre dans l’application des règles ordinaires;
et , peut-être , aurait-il sufli de dire que nos lois et nos codes ne re
connaissent plus , à cet égard , de droit exceptionnel.
P ou r appliquer ces règles ordinaires du droit c i v i l , il ne faut pas
continuer à se faire illusion , eu regardant les fonds concédés à titre
d ’emphyléose, comme si le seigneur ou bailleur y avait conservé quelques
droits de propriété : (“) ce serait le moyen de ne jamais s’entendre.
Il ne peut s’agir maintenant que de la rente ou redevance , et de la
question de savoir si cette rente est prescrite , ou si elle ne l’est pas.
O r , nous devons nous reporter, à ce sujet, à l’art. 8 , de la loi du
i 5 mars 1790, qui porte expressément, que toutes les rentes, redevances
et autres droits rachetables, sont soumis , pour le principal, à la pres(*) <'.c fond» est appelé chef-certi dans les Mémoires de la dame de CliAlillon ; cest une erreurLe chef-cens n'est autre chose que le premier ccus dont uu htiriUige est eliargé. — Folhier, intend• >
nu titre 2 de la Coutume d Orléans.
�(4M
crîptîon établie relativement aux immeubles réels ; et à l’art. 33 du titre 2
<le la même loi , qui fait courir cette prescription à partir du 5 mars 179O.
Ainsi d o n c , voilà la rente ou redevance déclarée prescriptible par
cela seul qu’ elle est rachetablc ; et le point de départ de la prescription
fixe au 5 mars 1790.
Il
serait superflu d’ examiner qu’ elle était la durée de tems nécessaire
pour la prescription , parce que s’étant écoulé depuis cette époque ,
plus de 47 ans , la prescription serait acquise , quelle que fut l’hy
pothèse dans laquelle M me de Châtillon voudrait placer sa cause.
Le code civil , titre de la prescription , publié le 25 mars 1804, pose
Cn principe , dans son article 2219, que la prescription est un moyen
d acquérir ou de se libérer par un certain laps de tems , et sous les con
ditions déterminées par la loi. Le tems voulu dans l'espèce actuelle ,
est celui de trente ans, d’après l’art. 2262.
Trente années sont quelque chose dans le cours de la vie humaine.
M est bien juste que celui qui a possédé pendant un laps de tems si
considérable, sans avoir été inquiété dans sa possession , soit protégé
par la loi et maintenu dans cette possession paisible, à l’abri de toute
recherche et de toute tracasserie. Aussi , cette protection a été considérce comme tellement équitable et nécessaire , dans l’intérêt de l’ordre
public et du repos des familles, que l’art. 2281 du code civil a même
l'cduit à cette période de 3o années les prescriptions commencées k l’époque de sa publication, et pour lesquelles il aurait fallu , suivant les
anciennes lo i s , un plus long délai.
Cependant, la consultation, qui ne s’occupe nullement de la presCription établie par l’article 8 de la loi du i 5 mars 1790, prétend
Page 18, que la prescription ne peut courir qu à partir de la qua
trième année après la promulgation du code civil; et elle le prétend sans
donner aucun motif d’une opinion que nous devons trouver au moins
singulière. Il est vrai que la consultation parle de l’action en déguer
pissement ; et si nous sommes parvenus ^ deviner la pensée du ré
dacteur , il a voulu dire , sans doute , que cette action en déguerpisSe,nent étant jadis autorisée après la cessation, pendant trois ans ,
du service de la re n te , ce n’est qu'après ces trois ans expirés, et
par conséquent, la quatrième année après la publication du code civd > que l’action s’est ouverte et que la prescription a commencé.
Ce raisonnement est faux cn tous points. D ’abord , il ne s’agit pas
en ce moment de l'action en déguerpissement qui n’ existe plus et ne
�( 46 )
peut plus exister en faveur du bailleur qui n’a conserve , comme nous
l ’avons démontré, qu’un simple droit de créance sur les fonds con
cédés ; ensuite , parce qu’en reportant le commencement de la pres
cription à la promulgation du code civil seulement , il n’ en sorait
pas moins v r a i , en fa it , que la rente avait cessé d’être servie depuis
plus de trois ans avant ce code , et que l’action en déguerpissement,
si elle avait existé , se trouvant ouverte depuis long-tems , ce ne se
rait plus le cas d’ajouter aucune année supplémentaire aux 3o années,
fixées par l’article 2262.
D'ailleurs , il n’ est pas e xa ct, en principe , de prétendre ajouter au
délai rigoureusement fixé pour l’exercice d’une action , les années pen
dant lesquelles on a négligé de faire ce qui devait empêcher cette
action. La négligence du débiteur motive l’actio n , mais ne prolonge
point la durée du tems pendant lequel elle doit être exercée. Ne seraitil pas absu rde, par exemple , que le créancier d’une rente qui n’aurait
pas été servie depuis 32 ans , c’est-à-dire, depuis la date du titre cons
titutif, prétendit être encore dans le délai de poursuivre le débiteur
en remboursement du capital, sons prétexte qu’il faut ajouter aux 3o
années de prescription , les deux années de cessation de paiement q u i ,
d ’après l’article 1912 du code civil, motivent l’action en remboursement ?
M me de C hâtillon, dans son M ém o ire, va plus loin encore : elle
veut faire porter à 60 années le tems nécessaire pour acquérir la pres
cription ; et voici le raisonnement qu elle fait. Elle commence par se
placer dans la catégorie des absens, et invoque à l’appui de sa thèse ,
les dispositions du code civil sur les biens des absens. Un homme
s’absente , dit-elle , et ne reparaît qu’après 3o ou 4 o ans. Son absence
n’a pas été déclarée, e t , à son retour, il aura le droit de rentrer
dans la propriété de ses biens , sans qu’on puisse lui opposer aucune
prescription acquise.
Elle suppose ensuite la déclaration d’absence et l’envoi de ses hé
ritiers présomptifs en possession provisoire de scs biens dont ils ont
joui depuis plus de 3o ans. En ce ca s, dit-elle, même après l’envoi
en possession définitive, l’absent, s’il reparaît, ou ses enfans et des
cendais directs, recouvreront les b ie n s , lors même qu’il se serait
écoulé plus de Go ans depuis la disparition de l’absent.
T o u t cela est vrai ; mais pourquoi ? parce qu'il s’agit d’une matière
spéciale , parce que la possession provisoire qui doit d’abord être de
mandée , n'est qu'un dépôt entre les mains de ceux qui 1 ont obtenue,
�( 47 )
article 125 du code civil ; et le dépositaire ne prescrit jamais , ar
ticle 2236. Il peut d o n c, à la rigueur, s’écouler 40 , 5o et même 60
a«s « pendant lesquels la prescription ne courra point.
Mais après l’envoi en possession définitive, il n’en est plus de même;
ceux qui possèdent, possèdent animo dom ini, et prescrivent contre
toute réclamation qui ne serait pas faite dans les trente ans, article 133.
L ’exemple est donc mal choisi. Il l’est d’autant plus mal, qu’il prouve
contre M me de Miramon. En effet, l’ envoi en possession définitive qui
fait commencer le cours de la prescription , produit un résultat pareil
a celui des lois de 1789 et 1790, qui , en déclarant toute espèce de
rente foncière rachelable, ont consacré le droit de propriété absolue
sur la tête du redevable , et commencé pour lui le cours de la pres
cription de la rente.
Un aulre argument de même force est encore présenté dans le Menioirc do M me de Châtillon.
Elle y parle de propositions que le sieur Baduel , grand-père, au
rait faites à M . le marquis de M iram on, décédé enj 1810 , et sans
‘ »diqner la date de ces propositions qui seraient conçues en ces ter
mes : « Il y a apparence que M. de Miramon 11’ignore pas la loi du
” 29 décembre 1790, relative au rachat des rentes foncières. En con’* séquence , s’il veut me traiter favorablement, nous ferons un forfait
*• de gré-à-gré relatif au rachat de la renie du domaine de Lollière ,
" déduction faite du cinquième d’icelle , suivant la loi du i 5 pluviôse
" an V ' pour raison des contributions , q u i , pour lors , est réduite
a 34 seliers blé , et 23 quintaux cinq livres fromage et les suites ,
”
pour lors nous prendrons une évaluation commune depuis 3o ans
’’ au plus ; cl pour lors Baduel ferait des termes honnêtes à M . de M in fanion, que la loi soit rapportée ou no n , et M . de Miramon doit
considérer qu’il a été donné trois mille livres d’en trée, etc. »
f
cst 1e texte rapporté dans le M ém oire, texte dont la rédaction ,
*ord à la première personne , puis à la troisième , laisserait sup
poser que ces propositions émanent et n'émanent pas du sieur B a d u e l .
^ en soit de celte contradiction , 011 sent bien que les petits—
| s d.u sieur Baduel îte peuvent avouer ni désavouer une pièce sans
atc et dont 1 ct-cœlera annonce qu’elle n’est publiée qu'en partie.
I1"' de Châtillon prétend , page 1 1 , qu’il n’y a pas 3o ans que les
legociations entre M . Baduel et M. le marquis de Miramon sont inClroinpucs ; et celte observation est faite à coup-sûr, pour échapper
�( 48 )
aux conséquences de la prescription trentenaire, q u e , dans l'idée du
Mémoire , ces négociations auraient interrompue.
Nous ne trouvons , ni dans le code c i v i l , ni dans aucune loi anté
rieure , ce mode d’interruption de la prescription. Nous voyons bien
que d’aprcs l’art. 2248 du code civil, la reconnaissance que le débiteur
ou le possesseur fait du droit de celui contre lequel il prescrivait, inter
rompt la prescription ; mais l’écrit cité par la dame de Chatillon n’est
pas une reconnaissance de la dette. Ce serait, tout au plus , un arrange
ment proposé , resté dans les termes d’un simple projet , en suppo
sant encore que l’écrit soit de la main du sieur B a d u e l, et signé de lui.
Mais quand même cet écrit serait un acte r é e l, un accord , une transac
tion entre le sieur Baduel et M. de Miramon, il ne serait pas d’ un grand
poids dans la cause. Un décret impérial de 24 juin 1808 , approuvé
le 3 i mai, déclare nulle et sans effet une transaction faite à l’occasion
du titre de concession d’un moulin , moyennant un cens emportant lods
et ventes, défaut et amende, transaction (jui avait été exécutée pendant
cinq ans. Le décret décide que n ’ayant pas traité sur la question de l(t
féodalité, la débitrice de la rente n’avait par conséquent pas renoncé
au bénéfice de la loi du 17 juillet i7<)3.
L a cour de cassation a été plus explicite encore , en décidant, par
arrêt du 26 octobre 1808 , qu’entre un ci-devant seigneur (ou ses ayantdroit) et son tenancier , la loi n’autorise pas un acte récognitil d’une
rente féodale pour être payée comme foncière. (Sirey, tome 11 — 1— 3 a3 .)
L a cour royale de Iliom a jugé de même sur la ratification, faite de
puis les lois abolitives de la féodalité , d'un bail emphytéotique per
pétuel , avec droits censucls et reddituels, lods et ventes et autres droits
el devoirs seigneuriaux. Par arrêt du 4 avr*l 1811 , elle a déclaré la ra
tification nulle , parce qu’ elle ne renfermait aucun traité sur le vice du
titre primitif. ( Journal des audiences de la cour de liio r n , année 1811»
page 258.)
11 y a plus encore : Un arrêt de la cour de cassation , du 27 juillet
1818, a positivement déclaré que le paiement des redevances depuis
les lois abolitives , 11c peut priver les redevables du bénéfice de ces lois ,
à moins dune rénonciation expresse de leur part. (Sirey, tome 19— 1 — 126.)
Que peuvent donc signifier, en présence de ces autorités législative?
et judiciaires , les prétendues propositions faites par le sieur Baduel»
on ne sait o ù , à quelle époque , cl qui, dans aucun ca s, 11e sont ni
une reconnaissance , ni un traité , ni une renonciation , au bénéfice des^
�(49)
lois et de la prescription? Elles annonceraient sans doute de bonnes
intentions de la part de celui qui les aurait faites ; mais leur nonacceptation , en les réduisant à un projet honorable d’un côté, prouverait
que , de l’autre , on n’entendait se soumettre à aucune modification et
réduction , et qu’ on avait l’intention de courir la chance des e've'nemens.
Eh bien ! le tems et les évènemens ont prononcé : Il faut savoir accepter
les faits accomplis.
Soit donc que la prescription n’ait commence' qu’à l’ époque de la
promulgation du code civil, c’est-à-dire le 25 mars 1804, il s’est écoule',
depuis , plus de 33 années utiles à la prescription de l’acte de 1755.
Mais si, comme cela doit être , la prescription court du 5 mars 1790,
ou seulement du 2 novembre 1794 1 à cause de la suspension prononcée
Par les lois des 6 juillet 1791 et 20 aoiit 1792, il s’est ccoulé 47 ou 43
ans , près d’un demi-siècle pendant lequel le domaine de Lollière , pos
sédé en toute propriété par ses détenteurs, a successivement p a s s é ,
a titre héréditaire, entre les mains de trois générations, c’en est assez
P°ur que la prescription soit acquise.
Ici se termine la défense des héritiers Baduel. Sans avoir suivi pasd~pas, la consultation et les Mémoires publiés au nom de M me la
^ r q u i s e Duplessis-Châtillon , ils ont cherché à démontrer, dans un
Pel‘t nombre de propositions , que l’acte dont M me de Châtillon de
mande l’ exc'cution, est un acte féodal de sa nature, ou mélangé de
féodalité , et frappé de suppression absolue par les lois de 1792 et
*793, dont l’intention et le but sont clairement manifestés par les lois,
es décrets , les avis de conseil d’é ta t, les arrêts postérieurs. Ils ont
*epOndu aux objections faites , e t , se prêtant à la supposition de dii•cultés qui n’existent p as, ils ont établi que le titre de 1755 est même
elruit par l’effet de la prescription ; de sorte q u e , sous tous les rapP°rts , les demandes de la dame de Châtillon sont inadmissibles. C ’est
^aintenant aux tribunaux saisis de la cause , à prononcer et décider
* d est bien opportun de soulever des questions qui se rattachent à
!*n Régime proscrit depuis un demi-siècle , et que nos mœurs et nos
ln5tituti0ns nouvelles repoussent avec plus d’énergie que jamais.
V I O L L E , Avocat,
Et Conseiller do Préfecture à Aurillac.
f
PELET, Avoue.
OBSËKVATlOft
7
�OBSERVATION ESSENTIELLE
il
Pendant que ce Mémoire était à l’impression, et par acte du 20 septembre 1837,
Mme Duplessis-Châtillon a fait signifier aux cohéritiers Baduel la rénonciation de
ses deux sœurs à la succession de M. le marquis de Miramon, père commun ; et,
en même tems, elle les assigne devant le tribunal de première instance d'Aurillac
en main-levée de leur Opposition du 4 du même mois. Cette assignation donne
lieu à deux observations :
1°. Mms Duplessis-Châtillon ne prend plus, comme dans les actes précédens, la
qualité d'héritière sous bénéfice d’inventaire; elle agit comme seule et unique
héritière de M. son père ;
20. Elle désavoue qu’il ait été publié des Mémoires; désaveu surprenant et dont il
est difficile d'expliquer le motif, lorsqu’il est de notoriété publique que la Consul
tation et les Mémoires sont entre les mains d’un grand nombre de personnes, et
qu’ils ont été distribués à MM. les juges et membres du parquet du tribunal d’Aurillac. Y aurait-il quelque petite ruse de basoche dans ce désaveu ?..... Nous
verrons.
Aurillac, imprimerie de P. PICUT. — Septembre 1837.
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Baduel, Antoine. 1837]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Violle
Pelet
Subject
The topic of the resource
bail emphytéotique
domaines seigneuriaux
cens
retranscription de bail
biens nationaux
émigrés
rentes féodales
droit de propriété
abolition des privilèges
droits féodaux
coutume d'Auvergne
prescription
absence
poids et mesures
doctrine
droit écrit
franc-alleu
directe seigneuriale
jurisprudence
droit de guet et de garde
Masuer
forains
corvées
code civil
droit intermédiaire
domaines agricoles
fromages
vin
percière
droits rachetables
titres nobiliaires
lods
terriers
retrait féodal
opinion publique
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Antoine Baduel, propriétaire-cultivateur, demeurant à Lafage, commune de Saint-Clément ; et le sieur Antoine Baduel, deuxième du nom, aussi propriétaire-cultivateur, demeurant à Lollière, commune de Sain-Clément, défendeurs ; contre dame Marie-Charlotte Cassagne-Beaufort de Miramon, veuve de monsieur le marquis Duplessis-Chatillon, agissant comme héritière bénéficiaire de monsieur le marquis de Miramon, son père, demeurant à Paris, rue du Bac, n° 128, demanderesse. [suivi de] Observation essentielle
Table Godemel : Bail emphytéotique. v. emphytéote.
2. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? Les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? Féodalité : 1. en Auvergne, les rentes emphytéotiques étaient-elles féodales ? les Baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayans cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéote ?
en d’autres termes les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers ou ayant cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens soumis à l’emphytéose ? Reconnaissance.
4. plusieurs reconnaissances notariées peuvent-elles dispenser le demandeur de représenter le Bail emphytéotique primitif ?
3. les baux emphytéotiques ont-ils été détruits ou intervertis, à l’égard du bailleur originaire, par les lois des 18-29 décembre 1790 et 11 brumaire an 7 et par les dispositions du code civil ? voir les faits spéciaux. ibid.
en tout cas quel caractère doit avoir la notification faite aux représentants du bailleur originaire, pour opérer l’interversion ?
la prescription a-t-elle couru valablement, en faveur du possesseur, dès la notification (1793) si l’on considère que, d’après la législation, la rente quel que soit sa nature, foncière ou féodale, aurait été déclarée rachetable ? prescription.
24. en Auvergne, les baux emphytéotiques étaient-ils prescriptibles ? en d’autres termes, les preneurs emphytéotiques, ou leurs héritiers, ou ayans-cause, ont-ils pu acquérir ou transmettre, par prescription, la toute propriété des biens fournis à l’emphytéose ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de P. Picut (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1837
1755-1837
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2816
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2813
BCU_Factums_G2814
BCU_Factums_G2815
BCU_Factums_G2817
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53572/BCU_Factums_G2816.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Clément (15180)
La Roussière (domaine de)
Lollière (domaine de)
La Croux (domaine de)
La Fage (domaine de)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abolition des privilèges
absence
bail
Bail emphytéotique
biens nationaux
cens
Code civil
corvées
coutume d'Auvergne
directe seigneuriale
doctrine
domaines agricoles
domaines seigneuriaux
droit de guet et de garde
droit de propriété
droit écrit
droit intermédiaire
droits féodaux
droits rachetables
émigrés
forains
franc-alleu
fromages
jurisprudence
lods
Masuer
opinion publique
Percière
poids et mesures
prescription
rentes féodales
retrait féodal
retranscription de bail
terriers
titres nobiliaires
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53568/BCU_Factums_G2812.pdf
b0a9022963a399305f31c27a8c7b0ad0
PDF Text
Text
COUR DE CASSATION.
MEMOIRE
C H A M B R E DE S r e q u ê t e s
M. B E R N A R D ,
'
Conseiller-Rapporteur.
'
M. N I G O D
Avocat g é n é r a l
POUR
CHARLES X et M. le marquis
de P A S T O R E T ,
agissant au nom et comme tuteur de Henri-CharlesF erdinand-D ieudonné,
duc de Bordeaux et Louise-
M arie-Thérèse-d’A rtois, enfans mineurs de feu M. le
CON TRE
M. le préfet du Cher, représentant l’État.
FAITS.
!
L a foret d’Yèvre, confisquée en 1792 , fut remise à M gr. le comte
d ’Artois, en vertu d e la loi du
5 décembre
¡rrfcjEftgya
duc de Berry ;
4
18 1 -
M. le comte d’Artois a fait donation le 9 novembre 1 8 1 9 , à
Mgr. le duc de Berry, de la nue-propriété de cette forêt. Au décès
de M. le duc de B er r y , la nue-propriété comprise dans la donation,
est passée à leurs altesses royales Mgr. le duc de Bordeaux et m a
demoiselle d’Artois, héritiers de M. le duc de Berry, leur père.
�(2 )
Suivant la régie des domaines , la forêt d'Yèvre est d’origine d o
maniale, et à ce titre la loi du 14 ventôse an 7 lui est applicable.
On sait que la loi du 12 mars 1820 a limité l’effet de la loi de ven
tôse, et prescrit à la régie des domaines de faire, dans les trente
ans, sommation aux
détenteurs et possesseurs de ces biens,
d ’avoir à se conformer aux lois sur les biens engagés. Par suite elle
a déclaré ces mêmes possesseurs propriétaires incommutables à
défaut de poursuites par la régie dans le délai ci-dessus fixé.
I/administration des domaines prétend q u e , dans le but d ’in
terrompre cette prescription, elle a fait, le 6 mars 182g, à madame
la duchesse de Berry, comme tutrice de ses enfans mineurs, la
sommation prescrite. Voici dans quels termes celte sommation au
rait été signifiée à madame la duchesse de Berry : « E n son domicile
« au château des T u ileries, et en la personne de M . le marquis de
« Sassenay, secrétaire des commandemens et administrateur général
« des finances de son altesse royale 3 en parlant à un suisse dudit
« château. »
La copie n’est jamais parvenue h sa destination, et l’existence
de cet acte est restée ignorée ju s q u ’après les événemens de i
83o.
A cette é p o q u e , 011 sut par voies indirectes, que le domaine
comptait réclamer, à l’égard de la forêt d ’Y è v re , l’application de la
loi de ventôse, et q u ’il entendait se prévaloir, comme acte inter
rupt^ de prescription, de la sommation dont il vient d ’être parlé.
Les agens de madame la duchesse de B erry demandèrent commu
nication de cette pièce. Mais elle leur fut refusée.
Peu de temps après parut la loi du 10 avril i
83a ,
qui prescri
vait la vente, dans un délai fixé, des biens appartenant à Charles X
et aux princes de sa famille. Le domaine ne donnait aucune
suite à la sommation
faite à sa requête. Madame la duchesse
de B erry voulut faire cesser l'incertitude et l’espèce de trouble
apporté aux droits de scs enfans par la prétention qu’élevait
�(
5
)
le domaine. A ce l effet elle présenta, conformément à la loi de 1790,
un Mémoire au préfet du Cher, établissant que la forêt d’Yèvre
n’était point domaniale; elle exprimait dans ce M ém oire, h la date
du 3o janvier i
833 :
« qu ’elle était dans l’intention de se pourvoir
« en justice pour faire déclarer n ü l l r et sans h f f e t la signification
« à elle faite de la part de la régie des domaines à raison de la
« forêt d ’Y èvre. » Ce passage est littéralement rappelé dans la
855. (Pièce produite, n° 2.)
dès à présent, qu’à cette époque du 5 o janvier i 855 ,
requête du préfet, signifiée le 17 juin i
Observons
les 5o ans exigés pour la prescription par la loi du 1 2 mars 1820
étaient plus que révolus.
Sur le vu du Mémoire présenté au préfet par madame la duchesse
de B c rry , il fut pris un arrêté portant que la question de doinanialité serait soumise aux tribunaux. Alors madame la duchesse de
B erry prit l’initiative, et assigna l ’Etat en la personne de M. le
préfet du Cher. Elle exposait dans son exploit d’assignation, qui est
855
à la date du 4 avril i
, que it la sommation du 6 mars 1829^
« nulle en la form e, et sur laquelle le domaine n ’a encore rien dit
« ni signifié, cause le plus grand préjudice aux ventes à effectuer ; »
la demanderesse concluait ensuite à ce que la sommation fût consi
dérée comme nulle et non avenue, et par voie de conséquence, à
ce que la loi du
ventôse an 7 fût déclarée non applicable aux bois
dont il s’agit. (P ièces produites, n° 1.)
Le préfet répondit à celle assignation le 17 juin même année,
et il fut répliqué au nom de Charles X et de madame la duchesse de
B crry, lc>4 janvier de l’année suivante. Dans cette dernière requête,
on soutenait, comme on devait le fa ir e , que la loi du i/j. ventôse an 7
n’était point applicable, et l’on terminait par les conclusions ci-après :
« Dans ces circonstances, c’est donc le cas de conclure a ce q u e ,
« sans s’arrêter ni avoir égard à la sommation notifiée à madame la
« duchesse de Bcrry, en qualité de tutrice, de ses enfans f par exploit
�« du G mars 1829, de la part de l’administration des domaines, non
(( plus q u ’à la requête signifiée au nom de M. le préfet du Cher,
« par exploit du 10 juin dernier, il plaise au tribunal de B o u rg es,
« dire et ju ger ainsi q u ’il y a déjà été conclu, que la loi du 27 ven« tôse an 7, sur les domaines en g a gés, n’est point applicable à la
« forêt d ’Yèvre. En conséquence, que les enfans de feu ]\I. le duc
« de B erry seront maintenus dans la propriété, et Charles X dans la
« jouissance usufruitière de la forêt d’Yèvre jusqu’à ce qu’ils aient
« trouvé à vendre ladite forêt en conformité de la loi du 10 avril
« i
83 a. E n fin , condamner M.
le préfet aux dommages-intérêts des
« sus-nommés à donner par état et aux dépens, et ferez justice.
« B o urges, l e
4 janvier 1804. »
L e moyen de nullité n ’était point abandonné dans cette requête,
et il avait été articulé en termes formels dans l’exploit introductif
d ’instance. — Comment donc la Cour royale de Bourges a-t-elle pu
décider qu e, par leurs défenses au fond, les demandeurs avaient cou
vert la nullité de la sommation, et que cet acte valant comme acte
interruptif, le bénéfice de la prescription était éteint pour les mi
neurs? Celte fin de non recevoir n’avait pas même été opposée par
le préfet, lorsque, le
5 février 18 3 4 ,
il répondait à la requête con
tenant les conclusions au fond. — Mais reprenons les faits.
Quoique l’instance fût engagée, le conseil de famille des jeunes
princes se trouvait dans une ignorance entière de la teneur de cet
acte que le domaine s’abstenait de produire. On apprit qu’il 11’était
plus dans ses m ains, et q u e , suivant acte du 2 mai i
1
833, l’original
en avait été déposé par la régie en étude de M° Chodron, notaire
à Taris. Sur l’expédition qui en fut demandée, on put en connaître
le contenu et spécifier le moyen de nullité dont il était entaché.
C ’est ce qu’on s’empressa de faire au nom des princes.
Des conclusions furent signifiées à cet eiîct, le 1 1 avril i
85/|. 11 y
est dit que : « Vainement l’Elat prétendrait que la prescription a été.
�< ï< ô K
(
5)
« interrompue par la sommation du G mars 182g, puisqu’il résulte
« de cette sommation elle-même q u ’elle n’est jamais parvenue à ma« dame la duchesse de Berry, n’ayant élé signifiée ni à sa personne
« ni à son domicile, ni laissée à une personne attachée à son service ;
« qu’ainsi cet acte est évidemment nul. » (Pièces produites, n° 4.)
L e préfet combattit ces conclusions par une troisième requête où il
soutient que les moyens de nullité ne sont pas fondés ; et qu’en tout
cas on n’est plus recevable à s’en prévaloir, madame la duchesse
de Berry ayant par sa requête du
4 janvier conclu
au fo n d , avant
de les proposer.
C’est dans cet état que le tribunal de Bourges a rend u le 11 juillet
1S 54 le jugement dont la teneur suit :
« Considérant que l ’action dont est saisi le tribunal a pour objet
actuel de faire lever l'obstacle apporté par l’Etat à la libre disposi
tion de la part des demandeurs de la forêt d’Y è v re ;
« Que cet obstacle consiste dans la sommation du 6 mars 18 2g,
qui met madame la duchesse de B erry audit nom en demeure
d’acquitter la finance réglée par la loi du i /j. ventôse an 7, et q u i ,
suivant la prétention de l’Etat, est due à cause de la forêt d’Yèvre,
qu’il considère comme domaine engagé;
« Qu’il ne s’agit pas, quant a présent, d ’examiner si l’Etat est
fondé à réclamer l’application dis la loi précitée; q u ’il y a lieu
préalablement à toute discussion au fond, à statuer sur les moyens
préjudiciels soulevés par madame la duchesse de B e rry ;
« Considérant q u ’elle attaque comme nulle la sommation susdatée, et que de cette nullité elle tire la conséquence que la pres
cription établie par la loi du 12 mars 1820 n’ayant pas été valable
ment interrompue, PEtat est sans droit de provoquer les dispositions
finales de la loi de ventôse an y • qu ’il y a donc nécessité d’examiner
la valeur du moyen de nullité ;
« Considérant que madame la duchesse de B e rr y , s’attachant aux
�termes dans lesquels est conçue la sommation, la soutient nulle,
parce q u ’elle n’aurait point été faite suivant les règles écrites aux
art. 68 et 69 du Code de procédure civile;
« Considérant en droit q u e , pour être valable, tout exploit doit
être fait à personne ou domicile; que le législateur, prévoyant le cas
où le défendeur serait absent, autorise l'officier instrumentaire à
déposer la copie entre les mains d’un parent ou d ’un serviteur, et
même, dans quelques cas, de certaines personnes désignées spécia
lement ;
« Considérant, en ce qui touche les membres de la famille
royale, que Cordonnance du 20 avril 18 17, art. i er, a réglé que les
diverses significations judiciaires ou extrajudiciaires qui leur seraient
faites lorsqu’ils auraient leurs domiciles dans des palais, châteaux ou
autres habitations royales, seraient remises aux suisses ou concierges
desdites habitations;
« Considérant que ces diverses prescriptions de la loi et de l’or
donnance ont été scrupuleusement remplies, puisqu’on lit dans la
sommation qu’elle est faite à la personne de madame la duchesse
de Berry, en son domicile au château des T uileries, en parlant à un
suisse dudit château ainsi déclaré; qu’à la vérité on rencontre dans
le parlant à , cette énonciation : En la personne de M. de Sasscnay,
secrétaire des commandcmcns de M adame, etc.; mais que cette
surabondance ne saurait vicier l’exploit, s i , d ’ailleurs, ainsi q u ’il
vient d ’être dit, il remplit le vœu de la loi ; qu’ il résulte de ce qui
précède que le moyen de nullité n’est pas fondé, mais que le fût-il,
il serait victorieusement repousse par le mode de procéder qu’a suivi
madame de Ucrry; — Q u ’en cfl’ct, elle a déclaré danslesdivers actes
du procès qu'elle entendait aller en avant sur la sommation du
0 mars 182g; qu e, par l’adoption de cette marche, elle a fait de
cet acte extrajudiciaire un véritable acte de procédure, acte même
fondamental de sa poursuite, et q u e , sous ce rapport, la nullité
�(
7
)
serait couverte, aux termes de l’art. 175 du Code de procédure
civile, faute d'avoir été proposée avant tout examen au fond ;
w Considérant que le seul moyen de nullité u ’est pas le seul
argument qu’ait soulevé madame la duchesse de B e r r y ; q u ’elle a
en outre dénié à l’Etat le droit de faire la sommation dont il s’a g it ,
se fondant à cet égard sur deux moyens qu’il est nécessaire d ’ap
précier ;
« En ce qui touche le moyen résultant de l’exécution donnée par
les agens de l ’état à la loi du
5 décembre
1S 1/*.;
« Considérant que celte loi n ’a ordonné q u ’une chose, la restitu
tion aux émigrés des biens séquestrés ou confisqués pour cause
d ’émigration, et non vend us; q u ’elle ne s’est point occupée du ca
ractère de domanialité que pouvaient avoir ces biens; q u e , dans
l’espèce, il a suffi que la qualité d’émigré du comte d’Artois fût
dûment constatée pour que la forêt d ’Y èvre, q u i, malgré la confis
cation, n ’avait point été vendue, lui fût restituée;
« Que la commission chargée de l’exécution de cette loi n'avait
point à s’occuper de l’origine des propriétés dont elle ordonnait la
délivrance; qu e, si elle l’eût fait, elle fût sortie de scs attributions ;
et encore moins eût-elle eu le droit, pas plus que les autres agens
qui ont concouru a la restitution de la foret d’Y è v r e , d ’aliéner ce
qui pouvait faire partie du domaine de l’Etat, en l’absence de toutes
dispositions législatives expresses;
'< Considérant, enfin, sur le moyen puisé dans la loi du 8 avril
i
834 , que
cette loi n’a réglé que l’usufruit que s’était réservé
Charles X , mais qu ’elle est absolument muette sur la question
fondamentale du procès qui est de savoir si la forêt d ’Yèvre est ou
non domaine engagé;
« L e tribunal, sans s’arrêter au moyen de nullité invoqué par
Madame duchesse de Berry contre
la sommation du
G mars
�18 2g, et sans avoir égard aux autres moyens préjudiciels, les d é
clare mal fondés, etc... »
Sur l’appel interjeté par madame la duchesse de B e r r y , la Cour
royale de Bourges a rendu l’arrêt dont voici la teneur :
« La Cour, après en avoir délibéré, a reconnu que la cause pré
sentait à ju g er les questions suivantes : i ° L ’administration étaitelle recevable à faire la sommation du 6 mars 182g? 20 L e sa p p e lans sont-ils recevables à proposer la nullité de cette sommation ?
3° Cette sommation est-elle nulle?
k
Sur la première, considérant que la loi du 12 mars 1820 as
treint l’administration à faire des réserves pour l’exécution de la loi
du 14 ventôse an 7 , dans l ’acte de remise des biens qui sont res
titués en exécution de la loi du
5
décembre i
8i4;
mais q u ’il
résulte des termes de cette loi qui ne rétroagit pas que l’obligation im
posée n’est relative q u ’aux biens à remettre et non à ceux déjà res
titués; que, par l’article 7 qui précède, cette loi oblige l’administra
tion pour les biens possédés par les anciens propriétaires à faire une
sommation d’exécuter la loi de l ’an 7; que la forêt d ’Yèvre avait
été restituée en 18 16; q u ’elle était possédée en 1820 par les anciens
propriétaires; q u e , dès lors, la seule formalité par l’administra
tion était la sommation prescrite par l’art. 7 de la loi de 1820;
« Sur la deuxièm e, considérant q u ’aux termes de l’article 175
du Code de procédure toute nullité est couverte par la défense au
fond', que, dans l’espèce, lesappelans soutenaient que la sommation
du G mars 1829 est nulle pour avoir été signifiée en la per
sonne du secrétaire des commandemens de la duchesse de B e rry,
et pour n’avoir pas été signifiée au véritable domicile; mais qu’a
vant de faire valoir cette exception, les appelans ont par requête
du 4
ja n v ie r
18 34
conclu au fo n d , sans attaquer sous le rapport
de sa validité intrinsèque la susdite sommation; qu’à la vérité, ils
opposent que la tutrice n’a pas pu couvrir un moyen de nullité
�( 9 )
cou Ire l’intérêt des mineurs, mais qu’en procédure, les déchéances
sont opposables à toute personne ayant qualité pour agir, et qu’au
surplus un tuteur a toujours la faculté de reconnaître que la copie
d ’un exploit dont l’original est représenté, lui a été valablement
remise, le fait lui étant personnel; q u ’il devient inutile d’examiner
la troisième question ; adoptant au surplus les motifs des premiers
juges sur les deux premières, dit bien j u g é , mal appelé, ordonne
l’exécution du jugement de première instance, etc. »
Cet arrêt de la Cour royale de Bourges est déféré à la censure
de la Cour de cassation :
i° Pour violation de l’art. 68 du Code de procédure civile; fausse
application des art. Gg et 173 du même Code, et contravention aux
dispositions des art. 2221 et 222a;
20 Pour contravention aux dispositions de l’art. 9 de la loi du
13 mars 1820.
DISCUSSION.
P R E M IE R
M OYEN.
La Cour royale de Bourges s’est approprié les motifs des pre
miers juges sur la question de savoir si les appclans (aujourd’hui
demandeurs en cassation) étaient recevables h opposer la nullité de
la sommation du G mars 182g. Elle s’est prononcée pour la négative,
refusant ainsi de s’occuper de la seconde question, celle relative au
moyen de nullité formellement invoqué devant elle dans l’intérêt des
mineurs. La Cour, sur ce moyen, n’adopte point les motifs des prem icrsjugcs, et n’en donne elle-même aucun. La question de prescrip
�tion se trouve donc écartée plutôt que résolue par l’arrêt. Du reste,
quant au préjudice, il n’est pas moins le même pour les mineurs;
et, comme ce préjudice est la base du présent recours, c ’est par un
coup d’œil jeté sur la sommation de 1829 qu’il faut commencer la
discussion.
Si cette sommation est nulle,
toute action domaniale était
éteinte, et il y avait prescription acquise aux mineurs.
S ’il y avait prescription, a-t-on pu par un acte de procédure y
renoncer au préjudice des mineurs? Y a-t-on effectivement re
noncé? Telle est la question du procès.
§ IerL a sommation était nulle.
A u x termes de l ’article 68 du Code de procédure civile, tous
exploits doivent être faits à personne ou domicile. Voilà la règle g é
nérale. L ’art. G9 indique quelles exceptions sont apportées à cette
règle. — De ces exceptions aucune n’est applicable aux princes
du sang royal. — L a règle générale subsiste donc à leur égard
comme à l’égard des plus simples particuliers. Or, la règle, c’est que
la personne assignée soit comprise nommément dans l’exploit d ’as
signation, et cela à peine de nullité de l’exploit : l’art. 70 le décide
en termes formels.
La régie s’est-cllc conformée à ces dispositions impératives dans
la sommation faite a sa requête le 6 mars 1829? Evidemment non »
car cette sommation destinée à madame la duebesse de Berry est
faite à la princesse en la personne de M. le marquis de Sasscnay.
Or, M. le marquis de Sasscnay n ’avait, en quoi que ce fût, qualité ou
caractère pour représenter madame la duchesse de B erry en j u
gement.
Il y a donc ici une première contravention, et une contraven
tion grave aux textes formels des articles précités, dès que madame
�(11
)
la duchesse de Berry n’a pas été assignée dans sa personne. Elle
ne l’a pas été davantage, comme on va le voir, à son domicile réel et
lé g a l, pas plus que M. le marquis de Sassenay.
C ’est au château des Tuileries que celte prétendue sommation
aurait été faite, suivant ce qu’indique l’original; or, ni madame la
duchesse de B erry ni M. le marquis de Sassenay n’avaient leur do
micile aux Tuileries. Ce domicile était a l’Elysée-Bourhon. C’est
un fait facile à établir.
D’abord, M. le marquis de Sassenay, secrétaire des commandemens de madame la duchesse de Berry, ne remplissait au château
des Tuileries aucune espèce de fonction. La charge, dont il était
pourvu auprès de la princesse, le retenait, au contraire, a l’ElyséeBourbon où madame la duchesse de B erry et ses enfans avaient
conservé le personnel attaché à leur service, leurs tableaux, leurs
galeries et tout leur mobilier.
Des actes publics et nombreux témoignent d ’ailleurs du domicile de
M. de Sassenay : nous produisons l ' u n acte de notoriété reçu à Paris
p arM . Esnée,notaire, Icq mai x
; a ° l ’acte de célébration de ma-
834
5
riagede mademoiselle de Sassenay, en date du a mars 1 8 2 g , dans
lequel il est dit que mademoiselle de Sassenay habite avec ses
père et mère à l’Elysée-Bourbon ;
h la date du 2g juin i
854 , où
3° une lettre de M.
de Sassenay,
il déclare n’avoir jamais eu de loge
ment aux Tuileries et avoir conservé jusqu’aux événemens de i
83o
celui qu’il avait à l’Elysée-Bourbon.
L e domicile de M. de Sassenay n’était ¡donc ni en fait ni en
droit au château des Tuileries.
Il faut en dire autant à l’égard de madame la duchesse de Berry.
En effet, il est incontestable que l’Elysée-Bourbon ne fût le do
micile propre et personnel de M. le duc de B e r r y , de son vivant ;
o r , la fem m e, aux termes de l’art. 108 du Code civil, n ’a d ’autre
domicile que celui de son m ari, et si le mariage vient à se dissoudre,
�(
12)
elle conserve le domicile ancien ju s q u ’à ce q u ’elle ait manifesté l’in
tention de letransférer dans un autre lieu. Sans doute, et nous l’ac
cordons,la preuve de celle intention peut dépendredes circonstances;
mais ces circonstances, quand on les invoque comme constitutives
d ’un fait de ch a n g em en t, doivent être claires, caractéristiques et
décisives. Dans le doute, c ’est pour le domicile déjà établi q u ’il
faut se prononcer : c’est ce que la Cour a ju g é notamment dans
une instance en règlement de ju g e , au rapport de M. le conseiller
B a y e u x , et sur les conclusions conformes de M. l’avocat-général.
(Affaire Ancessy.) .
La loi romaine définit le domicile « ubi quis rerum atque fortxmarum
suarum summam constituit; ttndè non diseessurus si nihil evocetjUndc
cùtn profectus est peregrinari videlur; quod si rediit} peregrinari jam
destitit. La résidence même prolongée ne détruit pas l ’ancien domi
cile; c’est encore ce q u ’établissait INI. l’avocat-général dans l’affaire
Ancessy.
Peut-on dire que le séjour plus ou moins prolongé de ma
dame la duchesse de B crry au château des Tuileries ait constitué
un abandon formel de son domicile de droit, quand on sait que
l’Elysée-Bourbon continuait à être habité par les personnes attachées
au service de la princesse? Ce serait admettre que ces mêmes per
sonnes auraient pu se créer un domicile distinct et séparé du domi
cile de la princesse, en continuant, toutefois, de lui appartenir par les
liens d ’un service spécial et journalier. Ajoutons, enfin,que la nature
des fonctions de la plupart d’entre elles attestent que non seulement le
dom icile, mais même l’habitation s’était conservée pour madame
la duchesse de Berry à l’E ly sé e , quoiquellc eut une résidence aux
Tuileries. Deux lettres attestent cette vérité, l’une à la date de 1831
et l ’autre à celle de 1828. Elles sont écrites par le secrétaire des commandemens de la princesse, et portent le titre suivant : Elysi’e Bour
bon, cabinet particulier de son altesse royale.
Le principal établissement était donc resté à l’Elyséc-Bourbon; et
�(
15)
avec lui s’cst conservé l’ancien domicile, car le fait de séjour et de
résidence n’ont jamais suffi, aux yeux de la lo i, pour faire perdre
le domicile antérieurement établi.
Nous produisons de même l’extrait d ’une procuration à la date
du 23 avril i
83o , où il est dit
que madame la duchesse de B erry
démeurant à l’Elysée-Bourbon a constitué pour son mandataire M. de
Sassenay, demeurant à l’Elysée-Bourbon. Divers actes publics énon
cent le domicile de madame la duchesse de B erry en ces termes :
« demeurant à Paris à l’Elysée-Bourbon, rue du Faubourg-SaintHonoré, alors logée aux Tuileries. »
Cette indication se trouve notamment dans l ’acte de partage de
la communauté, en date du 21 janvier 1821. Et en effet la princesse
n’avait aux Tuileries q u ’une simple résidence et une habitation
de convenance; quant au principal établissement, c’est h l ’Elysée
Bourbon qu’il était constamment resté.
Sous ce second rapport, la sommation du 6 mars était encore ir
régulière, nulle et sans effet. (Art. 70 du Code de procédure.)
L e tribunal de première instance de Bourges avait échappé à la
difficulté par un seul mot. Suivant lui les dispositions du Code de
procédure n’étaient pas applicables à la cause ; c’était d’après les
dispositions toutes exceptionnelles de l’ordonnance du 20 août 1 8 1 7 ,
que ce moyen de forme devait être apprécié, et la question de nul
lité ou de validité résolue. Cette ordonnance porte :
« Les significations aux personnes qui ont leur résidence habi
tuelle dans nos palais, châteaux, maisons royales et leurs dépen
dances, seront faites en parlant aux suisses ou concierges desdits
palais; ils ne pourront refuser d’en recevoir les copies, et il leur est
enjoint de les remettre incontinent à ceux q u ’elles concernent. »
Cet article n ’a pas le sens qu’on affecte de lui donner.
11 s’ap
plique, suivant nous, aux gens attachés à titre de service ou en
�vertu d’une ch arge, soit à la personne, soit à la maison ou du roi
ou des princes. C ’est ce qu ’indiquent suffisamment les mots : rési
dence habituelle, dont se sert l’ordonnance. Du reste, elle n’a pas
pour objet de régler la question de domicile, à l’égard de ceux qui
occupent u n emploi avec résidence dans les diverses habitations
royales. L ’article io g du Code civil a statué pour ce cas. L ’ordon
nance n'a eu q u ’un seul objet en vue : indiquer dans quelles
formes on procéderait à l’égard des personnes qui avaient leur
résidence habituelle dans les palais royaux. Si on donnait à cette
disposition un autre sens, on Arriverait à dire q u ’un simple fait
de résidence dans une maison royale, n’y remplît-on aucun service,
suffirait pour opérer un changement de domicile; c’est ce que n’ad
met point le Code civil et ce q u ’il proscrit même formellement.
Au surplus, cette sommation, en ce qui concerne madame la
duchesse de B e r r y , eût-elle pu valablement se faire au château
des T u ile rie s, ce que nous sommes loin d ’adm ettre, son irré g u
larité, en ce qui concerne M. de Sassenay, n’en resterait pas
moins établie; car, d ’ une part, M. de Sassenay était domicilié à
l ’Élysée-Bourbon, e t, d’autre p art, il était sans qualité pour rece
voir une signification q u i, concei’nant des enfans mineurs, ne pou
vait être utilement faite qu’à la tutrice et à sa personne.
La nullité de la sommation du G mars 182g n’est donc pas dou
teuse en point de d roit, et nous n’insisterons pas plus long-tem ps
sur cette démonstration.
Si on objectait que l ’article G8 du Code de procédure n’est relatif
q u ’aux ajournem ens, et ne s’applique point aux sommations ou
autres actes extrajudiciaires; pour toute réponse, nous renver
rions aux Dictionnaires de D roit, et notamment au Répertoire de
Jurisprudence, t.
5 , p. 3 i , où
l’on voit que le mot exploit est un
terme générique, désignant les divers actes faits par ministère
d’huissier pour assigner, ajourner, saisir, etc.
�(
15)
§ II.
La prescription était acquise.
La nullité de la sommation établie, cet acte disparaissait d e la
cause, et l’action du domaine devenait sans objet. L ’art, g d e là loi
du 12 mars 1820 est ainsi conçu : « A l’expiration de trente années
« à compter d e là publication de la loi du 14 ventôse an 7 , les do« maincs provenant de l’E t a t , cédés à titre d’engagement ou d ’é « change antérieurement à la loi du i er décembre 1790, autres que
" ceux pour lesquels auraient été faites ou seraient faites, jusqu’à
« l’expiration desdites trente années, les significations et réserves
« réglées aux art. 7 et 8 , sont déclarés incommutables entre les
« mains des possesseurs actuels, sans distinction de ceux qu i se
« seraient conformés ou non aux dispositions des lois du i 4 ven<t tôse an 7 , 12 pluviôse an 12 , 28 avril 1 8 1 6 , et i
5 mai
1818* »
On ne conteste pas le sens, du reste assez clair, de cet article;
l’arrôt ne conteste pas davantage que le laps de temps requis pour
la prescription ne fût révolu ; il ne combat même pas le mérite de
nos moyens de nullité contre la sommation, et même il évite d ’a
dopter sur ce point les motifs des premiers ju g e s ; c e qui porterait
à croire que ces moyens de nullité lui ont paru sérieux.
Mais il nous dit à peu près, sauf les termes :
Le moyen de prescription a été compromis et déserté. Par la
requête du 4 janvier i
834 ,
on a conclu au fond pour les mi
neurs. On a d o n c, par là , validé en la form e, la sommation du
6 mars 1829, et on a fait produire à cet acte tout son effet légal,
celui d interrompre la prescription au profit du domaine et au
préjudice des mineurs.
On voit donc que si la tutrice eût gardé le silence sur la préten*
duc sommation, si elle eût négligé d ’en demander la nullité, ou si,
�(
16)
ayant demandé cette nullité, elle se fût abstenne de conclure au
fo n d , la prescription, a l’heure où nous sommes, serait acquise aux
jeunes princes à titre de droit incontestable, sa u f la question de
nullité de la sommation ; question que la Cour de Bourges n’a pas
voulu résoudre, que le tribunal pourtant avait résolu, mais par
des motifs qui sans doute ont peu touché les magistrats d’appel,
puisqu’il ne les ont pas adoptés.
Suivant la C o u r , c’est la tutrice elle-même qui a forclos volon
tairement ses mineurs du droit de proposer la nullité dont il s’agit ;
mais si de cette nullité dérivait pour les mineurs le bénéfice d ’une
prescription, le fait de forclusion, vrai ou supposé, imputé h la
tutrice, que serait-il, sinon une véritable renonciation au bénéfice
de la prescription? O r, une pareille renonciation, quel que soit le
mode dans lequel elle ait lieu, peut-elle engager le mineur ?
La renonciation à la prescription, dit M. Troplong, est un acte
pertonalissimc. Comment pourrait-il être exercé par ceux qui n ’ont
qu’un simple mandat d ’administrer ?
Voudra-t-on prétendre qu’il ne s’agit pas ici d ’une renonciation
proprement dite, mais de la simple reconnaissance d ’un fait? E t,
pour rappeler les termes de l’arrêt, dira-t-on : « Q u ’en procédure
* les déchéances sont opposables à toute personne ayant qualité
« pour a g ir , et q u ’au surplus un tuteur a toujours la faculté de
« reconnaître que la copie d’un exploit dont l’original est représenté,
« lui a été valablement rem is, le fait lui étant personnel?»
Ce raisonnement est basé sur une supposition que les faits d é
5
mentent. Jamais madame la duchesse de I erry n’a avoué que la
copie de la sommation lui eût été valablement remise, comme
semble l’insinuer l’arrêt; ajoutons même qu’elle a constamment
soutenu le contraire. On se rappelle d’ailleurs après quel délai et à
force de quels soins on est parvenu, seulement en i
834 , à se pro
curer, en l’étude de M* Chodron l’expédition de cet acte q u i, fait
en 1 8 2 g , ne fut déposé pour minute à ce notaire q u ’en i
833.
�(
17 )
L ’arrêt, en faisant allusion au cas d ’aveux faits par un tuteur,
que la copie d’ un exploit lui a été valablement remise, s’est donc
jeté dans des hypothèses de pure invention, au lieu de juger la
question véritable du procès.
Est-il vrai, d ’ailleurs, en droit, que la tutrice eût eu le pouvoir
de sacrifier, plutôt par cette voie que par telle autre, un moyen de
9
prescription acquis a se mineurs !
L ’art. 2221 nous dit : La renonciation à la prescription est e x
presse ou tacile; l’art. 2222 : Celui qui ne peut aliéner ne peut
renoncer à la prescription acquise. La renonciation expresse et la
renonciation tacite sont donc placées sur la même ligne.— Les mêmes
conditions de capacité sont exigées pour l’une et pour l’autre. — On
ne peut pas plus renoncer d’une manière tacite q u ’on ne pourrait le
faire en termes exprès et formels. — L ’art. 2222 et sa prohibition
s’appliquent dans l’un et l’autre cas. I ô i eadem ratio, ibi idem ju s
dicendum est.
Mais si le tuteur est dépourvu de capacité pour renoncer ouver
tement à une prescription acquise à son mineur, c’est à coup sûr
q u ’il lui est interdit de se prêter par une voie détournée à un acte
qui aurait le même résultat.
Autrem ent, serait-il bien difficile de concerter un simulacre de
débat judiciaire. Le tuteur s’y présenterait, conclurait au fon d ,
et les droits des mineurs seraient sacrifiés sans retour.
Dans le système de l’arrêt de Bourges, il n’y aurait même pas de
requête civile possible pour les jeunes princes , car la requête civile
n’est admise que si le mineur n’a pas été valablement défendu. Or,
on ne manquerait pas d’objecter aux princes qu’ils ont dans l’espèce
été défendus par leur tuteur lui-m êm e, puisque le moyen de pres
cription a été formellement proposé, tant en première instanc« qu ’en
appel, ainsi que la nullité de la sommation.
Tenons donc pour constant q u e , soit d ire cte m e n t, soit indirec
tement , d’une manière expresse ou par des voies détournées, la re-
3
�nonciation à la prescription ne saurait avoir lieu au préjudice du
mineur.
Le résultat est le même pour le mineur dans l’un et l ’autre cas,
et c’est surtout au résultat que la loi s’attache dans les articles
précités.
Voici comment s’exprime M. le conseiller T ro p lon g , dans l’ou
vrage déj'a cité, p. 109 : « Sous un autre rapport, la renonciation à
« la prescription est l’omission d’un moyen péremptoire qui mi« litait en faveur du mineur. De quel droit scs représentans et ses
« défenseurs veulent-ils q u ’il soit n é g lig é ? .......Remplissent-ils leur
« mission, lorsqu’ils laissent leur mineur indéfendu, eux auxquels
« s’appliquent ces paroles du jurisconsulte Marcellus : « Tulorit
« prœcipuum est officium , ne indefensum pupillum relinquat ? ;>
S i , au nom d ’un m ineur, la prescription avait été d ’abord pro
posée, puis abandonnée ou négligée dans le cours d ’une instance,
les auteurs s’accordent h reconnaître que le m ineur, devenu majeur,
serait en droit de faire réformer le jugem ent par la voie de la r e
quête civile. Pourquoi la loi lui réservc-t-elle ce re cou rs?... C ’est
parce q u ’il n’a pas été défendu, parce qu’il ne l’a pas été valable
ment , parce q u ’il y a eu violation des garanties tutélaircs!.. E h
bien ! dans la cause actuelle on aurait sacriiié les intérêts du m ineur,
on lui aurait enlevé un droit acqu is, et tout recours serait fermé
tant à lui q u ’à son tuteu r; car il serait étrange de voir un mineur
revenir, par la voie de la requête civile, proposer devant la même
Cour un moyen q u ’elle aurait déj'a repoussé presenté par le tuteur.
On objecte qu’entendus dans ce sens, les articles du Code civil
sont inconciliables avec le prescrit formel de l’art. iy 5 du Code de
p ro cé d u re , qui décide que : « Toute nullité d’exploit ou d ’acte de
« procédure est couverte si elle n ’est proposée avant toute défense
u ou exceptions autres que les exceptions d ’incompétence. « Nous
répondons, q u ’en fût-il ainsi, ce serait au Code civil q u ’il faudrait
s’en tenir, parce que là est la règle spéciale sur la capacité du tuteur
�(
19)
rt les garanties dues au pupille. Mais la contradiction n’existe
réellement p as, et rien n ’est plus facile que de concilier ces
diverses dispositions. Indiquons un exemple pris entre plusieurs
autres.
Un tuteur est assigné devant un tribunal incompétent, et l’ex
ploit d’assignation se trouve nid en la forme.
Le tuteur comparaît sur cet exploit. Il fait des actes de procédure;
il défend au fond; peut-être se sera-t-il par là rendu non recevable
à proposer plus tard la nullité de l’assignation. Voilà un cas où
s’applique, si l’on veut, l’art. 170 du Code de procédure.
Que si l’on s’étonnait que le tuteur p ût, dans ce cas, couvrir par
une défense au fond la nullité de l’assignation, et ne le pût pas dans un
autre ,... nous dirions que la différence est fort sensible entre l’une
et l’aulre espèce. L orsque le tuteur néglige, en thèse générale, de de
mander la nullité d ’un exploit, qu’il y renonce m ê m e , il peut se faire
qu’il n’y ait pour le mineur q u ’un simple préjudice de mauvaise
administration, et il faut en dire autant d’un maire ou de tout autre
administrateur. C’est dans ce sens que doit être entendue la juris
prudence. Aucun texte de loi ne trace au tuteur, en termes impéra
tifs, le modo de procédure qu’il croit devoir adopter dans la limite
de scs pouvoirs. Quand il en choisit un de préférence, il n’excède
pas sa capacité d’administrateur. En un m o t, il n’aliène point.
Mais s’il se trouve que le mode de procédure par lui suivi con
tienne une aliénation directe ou indirecte d’un droit, o u , ce qui est
la même chose, si cette procédure entraîne renonciation à une pres
cription révolue, constituant à ce titre un droit a cq u is, un droit
immobilier, l’art. 1 7 5 , quelle que soit la généralité de ses termes,
cesse d ’être applicable. Pour l’appliquer, il faudrait fouler aux pieds
les article 2221 et 2 2 2 2 ; o r , ces articles contiennent les règles fontamentalcs sur la capacité et l’étendue des droits du tuteur.
Ajoutons que le tuteur avait proposé ce m o yen , et q u ’ainsi il
n’avait plus le droit d ’en faire l’abandon.
�L ’arrêt a donc violé les art. 2221 et 2222 ; de plus, il a faussement
appliqué l’art. 173 du Code de procédure, car, loin d ’avoir aban
donné le moyen de nullité dont il s’agit, la tutrice l’avait au con
traire formellement r e se rv é , proposé et développé.
Les actes de procédure établissent celte vérité.
Madame la duchesse de Iïerry, dans son Mémoire présenté à
M. le préfet du Cher, suivant le prescrit de la loi du
5
novembre
1 79 0 , annonce ( c ’est M. le préfet q u i, dans sa requête du 29 mai
1
835 ,
rapporte les termes du Mémoire en ce point) : « Qu’elle est
dans l’intention de se pourvoir en justice pour faire déclarer nulle
et sans effet la signification à elle faite de la part de la régie des
domaines, à raison de la forêt d ’Yèvre.» (Pièces produites, n° 2).
Ce n ’est pas de cet acte, assurément, q u ’on peut induire une renon
ciation h la nullité de la sommation.
Voyons les actes subséquens :
Dans l’exploit introductif d ’instance en date du 4 avril i
833 ,
les
demandeurs en cassation insistent sur la nullité de la sommation.
Voici leurs conclusions : « Attendu que cette sommation du G mars
« 1 8 2 g , nulle en la forme et sur laquelle le domaine n ’a encore rien
« dit ni signifié, cause le plus grand préjudice aux ventes à eiïec« tuer, par la crainte qu’elle inspire aux amateurs d ’avoir à se dc<( fendre d’un procès, et par le prétexte qu’elle fournit aux spécu« lateurs de déprécier la propriété;
it V oir dire que la sommation faite le G mars 1829, à la requête
« de M. le directeur général des domaines , sera considérée comme
« n u l l e et non ave xu e . «
A insi, dans le Mémoire au préfet, dans l’exploit introductif d’instancc, avant qu’011 eût même l’idée d ’une défense au fond, il est con
clu au nom de la tutrice en termes explicites, précis et formels, à la
nullité de la sommation.
Le tribunal de première instance avait prétendu que la nullité
était couverte, faute d ’avoir été proposée avant
toute défense
�( M )
au
fond. C ’était tout simplement une
erreur matérielle
que
commettait en cela le tribun.il. La défense au fond n’a été pré
sentée que le
4 janvier 1 854 ; et, dès le 4 avril i S 53 , comme on l’a
vu , le moyen de nullité avait été proposé par l’exploit introductif
d ’inslance. Si la nullité n’avait pas été textuellement spécifiée dans
cet acte m ê m e, c’est par une raison fort simple et que les faits de
cette cause n’expliquent malheureusement que trop.
L es conseils de la tutrice ignoraient la teneur de cette sommation.
Madame la duchesse de Berry n’en avait jamais eu connaissance,
M. de Sassenay non plus. On sait que l’original n ’indique point à
quel suisse du château la copie en a été remise, si même elle l’a été,
ce qui est très douteux. Dans cet état de choses, que pouvait on
spécifier? Rien. On n’a pas manqué de suppléer à ce silence, dès
q u ’on a pu se procurer en l’étude de M e Chodron, en i
834, l ’expé
dition de la sommation.
La Cour royale a évité de tomber dans la même méprise que le
tribunal; mais elle en a commis deux autres tout aussi graves,
car, pour trouver dans l’article 17 3 , le principe d ’une déchéance
applicable aux m in e u rs, il lui a fallu (le mot est exact) changer
jusqu’aux termes de cet article, et en dénaturer le sens.
Suivant-elle, toute nullité est couverte par la défense au fond.
L ’article 173 ne dit rien de semblable. Voici son texte: Toute
nullité d ’exploits ou d ’actes de procédure est couverte, si elle n ’est
p r o po sé e
avant toute défense ou exception.
L a différence est notable, car il suflit, d ’après l’article 1 7 3 , que
la nullité soit
p r o p o sé e
avant toute défense. A cette condition,
011
échappe à la déchéance, c’est ce que porte l’article.
Plus lo in , il est vrai, la Cour se sert d’autres expressions; elle dit
qu avant de faire valoir leur exception les demandeurs ont pris des
conclusions au fond.
Faire valoir est une expression qui n’est pas dans la loi. L ’arrêt l’a
substituée fort arbitrairement à celle de proposer, la seule qui s’y
�trouve; o r , cette variante n ’est pas sans importance, et peut-être
a-t-elle été employée h dessein. Certes, la Cour n’eût pas osé avancer
que la nullité n’avait pasétê proposée. L ’exploit introductif eût donné
à celte assertion un démenti trop formel. Elle a donc trouvé plus
commode d ’écarter le terme employé par l’art. 1 7 5 , pour en substi
tuer un autre qui lui parût s’adapter plus facilement à sa thèse.
A u surplus, d ’après l’art. 1 7 3 , la défense au fond a pu être pré
sentée sans inconvénient, une fois la nullité proposée. Cette défense
était même une procédure devenue inévitable;
l’administration
gardait le silence sur le mérite de la sommation; les demandeurs
avaient argué cet acte de nullité dans un exploit introductif. P o u vaient-ils se dispenser d ’en venir à une discussion sur le fond ? Ce
subsidiaire n ’était-il pas, vu l’état de l’instance, devenu indis
pensable ?
Les demandeurs n ’ont pas fait autre chose que traiter ce moyen
subsidiaire, dans la requête q u ’on leur oppose. C’est un acte de
l ’avoué rédigé dans son étude, peut-être sans sa participation, ainsi
qu’il n’arrive que trop souvent. On y expose les faits et les moyens
de la cause, cela est vrai; mais il est vrai aussi q u ’on y demande en
termes formels et de nouveau, « que le tribunal n’ait aucun égard
à la sommation du G mars 182g. » N’est-ce pas là reproduire le
moyen de nullité? ce qui d’ailleurs était superflu.
La nullité proposée dès le début de l’instance 11’avait pas été
développée, on en convient, antérieurement à la requête du 4 jan
vier; mais où a-t-on vu que l’art. 173, qui exige que la nullité soit
proposée avant toute défense au fond, ait exigé de même que les
moyens de nullité soient développés, sous peine de déchéance ? La
Cour de Bourges apercevait sans doute celte distinction, quand
elle a substitué ces expressions faire valoir à celles dont se sert
l’art. 173.
Au surplus, une raison péremptoire s'opposait, nous ne saurions
trop le répéter, à ce que cette nullité pût être discutée avant le
�( 23)
jour ou elle l’a été. La signification du 6 mars 1829 n’était point
dans les mains de madame la duchesse de Berry. Il a fallu obtenir
une expédition de cet acte. Muni de ce docum ent, l’avoué déve
loppa, p a rle s conclusions du 11 avril, le moyen de nullité primi
tivement articulé et proposé suivant le vœu de l’art. 170.
L ’avoué n ’a donc pas renoncé à la nullité et par sujte à la pres
cription; il n’était pas autorisé à faire cette renonciation. Il n’eût
pu prendre sur lui de la faire sans s’exposer à un désaveu. 11 n ’a
pas encouru cette peine.
On n ’objectera pas sans doute que la Cour royale dans sa déci
sion s’est particulièrement fondée sur des appréciations de faits et
d’actes q u i , bonnes ou mauvaises, échappent a la censure d e là
Cour; car elle a , au contraire, méconnu l’existence d’un acte et
substitué dans une matière de droit strict, des termes arbitraires
aux termes employés par le législateur.
E n fin , le p r é fe t, en répondant le
3 février (pièce produite,n. 3)
à la requête du 4 janvier précédent, n’avait nullement excipé de la
fin de non recevoir.
Les choses étaient donc entières quand les demandeurs, dans
leurs conclusions du
nullité.
3 avril suivant,
ont développé leur moyen de
5
L ’a v o u é , aux termes de l’art. /jG , n’a-t-il pas eu le droit de
modifier les conclusions antérieures, et rectifier ce qui eût été sus
ceptible de l’être? Mais, à vrai d ire, rien n’était à rectifier, nous
croyons l’avoir suffisamment démontré.
En nous résum ant, nous dirons que la sommation est nulle, et
pour n’avoir pas été signifiée à personne , et pour n ’avoir pas été
signifiée à domicile. Si cette sommation est nulle, elle n’a pu inter
rompre la prescription. Si la prescription n ’a point été interrompue,
elle s’est trouvée acquise aux mineurs à partir de 1800. La nullité
de la sommation a été proposée dans l’exploit introductif d’ instance.
En fait, la tutrice n ’a point renoncé aux effets de cette nullité. E n
�( 24)
droit, la loi lui interdisait de le foire. La Cour royale, en jugeant
le contraire, a donc formellement violé les art. 2221 et 2222 du
' Code c iv il, combinés avec l ’art, g de la loi du 12 mars 1820, et
fait une fausse application de l’art. 170 du Code de procédure
civile.
Ainsi se trouve justifié le pourvoi formé dans l’intérêt des
mineurs.
Quant au roi Charles X , le bénéfice de la prescription lui était
évidemment acq u is, et il était recevable à l’opposer. Il est usu
fruitier de la forêt d’Y cv re . Pour interrompre la prescription à son
é g a rd , il eût été nécessaire q u ’une signification personnelle lui fut
faite dans les formes voulues par l’art. 69.
Cette signification n’a pas eu lieu. L a seule qui ait été faite par
le domaine, est la sommation du G mars, qui, au dire même du do
maine, 11e concernait que madame la duchesse de Berry. Il y avait
donc prescription au profit de Charles X .
Charles X est-il censé avoir renoncé à ce moyen? On 11e saurait
le prétendre raisonnablement.
La prescription, dit l’art. 2224 du Code civil’, peut être opposée
en tout état de cause, même devant la Cour royale, à moins que la
partie qui n’aurait pas opposé ce m o yen, ne doive, par les circon
stances, être présumée y avoir renoncé. Dans la cause, on ne peut
alléguer aucun fait de renonciation ni aucun abandon du droit
acquis, en ce qui concerne Charles X .
Le moyen de prescription a été proposé devant la Cour, ainsi qu’il
résulte des qualités de l’arrêt où il est dit : « Déclarer prescrite tant
au profit desdits enfans du duc de Berry q u ’au respect de Charles X ,
toute réclamation de l’Etat, relativement à la forêt d ’Yèvrc. Lors
même q u ’elle pourrait être considérée comme soumise aux dispo
sitions de la loi du 14 ventôse an 7.
L a Cour devait donc déclarer le roi Charles X affranchi de toute
�( 25 )
action en ce qui concerne l’usufruit. La fin de non recevoir ne pou
vait l’atteindre.
L e s exposans persistent dans leurs conclusions.
PRODUCTION.
1° Exploit introductif d ’instance.
2° Requête du 1o juin 1
833.
3° Requête du préfet à la date du 3 février.
4 ° Conclusions du 11 avril 1 834 5° Requête du 4 avril 1835.
6° Sommation du 6 mars 1829.
7 0 Acte de notoriété du 28 mars 1
835 .
8° Acte de notoriété des 9 et 12 mai 1
83 o.
4 août 1826.
834-
9° Acte notarié du 20 avril 1
10° Acte notarié du
1 1 ° Acte notarié du 21 janvier 1821.
12 0 Acte notarié du
4 ju ille t
1820.
PRO DU CTIO N N O U V E L L E ,
Requête du
4 janvier 1 834 M A N D A R O U X -VE R TA M Y,
A v o c a t a u c o n se il d ’ c ta t e t à la C o u r d e ca ssa tio n .
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IMPRIMERIE De MADAME POUSSIN, RUE ET HOTEL MIGNON , n” 2.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Pastoret.1838?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandaroux-Vertamy
Subject
The topic of the resource
forêts
domanialité
nullité
prescription
biens nationaux
émigrés
domiciliation
exploit
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Charles X et M. le marquis de Pastoret, agissant au nom et comme tuteur de Henri-Charles-Ferdinand-Dieudonné, duc de Bordeaux et Louise-Marie-Thérése-d'Artois, enfans mineurs de feu M. le duc de Berry ; contre M. le préfet du Cher, représentant l’État.
Annotations manuscrites. « 18 avril 1838, arrêt de rejet. Sirey 1838-1-309 ».
Table Godemel : déchéance : 1. la déchéance du droit de proposer une nullité d’exploit couverte par des conclusions au fond, peut-elle être opposée au tuteur qui a conclu au nom du mineur, encore bien qu’il s’agisse d’un exploit interruptif de la prescription qui courait au bénéfice du mineur ? ne saurait-on considérer la renonciation au droit de proposer la nullité ou la déshérence de ce droit, comme une renonciation à la prescription ? Nullité : 13. une nullité d’exploit est-elle couverte par des conclusions au fond, encore bien que, dans des écritures antérieures à ces conclusions, on eut demandé la nullité de l’exploit, si d’ailleurs la cause ou le moyen de nullité n’a jamais été spécifié ?
la déchéance du droit de proposer une nullité d’exploit couverte par des conclusions au fond, peut-elle être opposée au tuteur qui a conclu au nom du mineur, encore bien qu’il s’agisse d’un exploit interruptif de la prescription qui courait au profit du mineur ? ne saurait-on considérer la renonciation au droit de proposer la nullité ou la déchéance de ce droit, comme une renonciation à la prescription ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Madame Poussin (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1838
1792-1838
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2812
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Mehun-sur-Yévre (18141)
Yèvre (forêt d')
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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biens nationaux
domanialité
domiciliation
émigrés
exploit
forêts
nullité
prescription
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53560/BCU_Factums_G2804.pdf
28310671897902b40ef82dad80115a40
PDF Text
Text
!%y~.
MÉMOIRE A CONSULTER
ET
CONSULTATION
Pour MM. MICHEL DE ROTROU et Cie
Propriétaires des Coches,
Contre M . LE PRÉFET D E L A SE IN E7
Représentant l’Etat.
L e 8 mars 1837,
lecoche de Nogent, chargé de marchandises,
et appartenant aux consultants, rencontra sous l’e a u , près de
Charenton, un bateau précédemment mis à fo n d , et fit nau
frage.
Le maire de Charenton dressa procès-verbal de l’événement
en présence des consultants et du sieur P a r is , préposé de la na
vigation. Dans ce procès v e rb a l, cet agent déclare a que le ba~
�» teau lavandière qui gisait au fond de l’eau, et qui a •produit le» naufrage du coche, appartient au sieur Georges, tireur de sable,
» demeurant à P a ris , rue Contrescarpe-Saint-A ntoine, n. 3 6 ;
» qu’il avait été mis à fond le i a février dernier par suite de gros
» vents ; que vainement il avait fait sommation à ce sieur Georges
» de retirer cette lavandière du fond de l’eau , à cause des dangers
» qu’elle pouvait faire courir à la navigation, qu’il n’avait pu y
» parvenir; ajoutant ledit sieur Paris, qu’i l avait rendu compte, le
y> i3 dudit mois defévrier, à il/. Vinspecteur général de la naviga
nt tion , du séjour de cette lavandière au fond de Veau\ comme
aussi q iiil avait fait d'inutiles efforts auprès du sieur Geor» ges pour qu’i l plaçât une flamme avec ja lo n s , afin d’ avertir la
» marine. «
I l résulte de cette déclaration de l’agent de la navigation :
i° Que le naufrage du coche a été produit par la lavandière
mise à fond; a° que le séjour de cette lavandière au fond de
l’eau était connu de l’adm inistration; 5° que cependant les agents,
de la navigation ne l’avaient pas fait retirer de l’eau, et qu’ils,
n’avaient même pas signalé l’ccucil à la marine par les signes
d’usage.
Les c o n s u lta n t, après avoir fait procéder régulièrement au
sauvetage des marchandises et à ¡’estimation des pertes, qui s’éle
vèrent à près de dix mille francs, assignèrent l’E ta l, en la per
sonne de M. le préfet de la S ein e, comme civilem ent responsa
ble de la négligence de ses agents.
L e propriétaire de la lavandière , cause du sinistre , eiait no
toirement insolvable.
Sur cette assignation, M. le préfet de la Seine a opposé une
fin de non-recevoir, tirée de ce qu’il n’avait pas qualité pour dé
fendre à l’action, le préfet de police étant seul chargé, par l’arrê
�te du 12 messidor an 8 , de tout ce qui concerne la navigation
dans le département de la Seine.
E n cet état, le tribunal de première instance s’est déclaré d'of
fice incompétent par un jugement du 1er août 1837 , dont voici
le texte :
« Attendu , en fait, qu’il s’agit d’apprécier une demande qui a
» pour objet des dommages - intérêts pour torts et dommages
y> causés par l’administration pour omission de la part' d’ un de
» ses subordonnés d’avoir fait enlever un obstacle à la navigay> lion sur un cours d’eau navigable; — A tte n d u , il est v r a i,
» que l’art.
de l’ordonnance de 1669 ordonne, sous peine d’a-
» monde de 5oo f r . , même contre les fonctionnaires publics qui
» auraient négligé de le faire, d’enlever tout amas de matières
y> nuisibles au cours de l’eau dans les fleuves et rivières naviga» blcs et flottables ; qu’on peut soutenir que ce qui fait obstacle
y> à la navigation ou peut causer un dommage aux bateaux de
» ceux qui naviguent nuit au cours de l’eau , et tombe par con» séquent sous l’application de l’article précité; — ■
Attendu qu’il
» est vrai également qu’aux termes de la loi du 21 septembre
» 17 9 3 , jusqu’à ce qu’il en ait été autrement ordonné, les lois
» non abrogées seront provisoirement exécutées ; que l’a rt. 4 2 de
» l’ordonnance de 1669 n’a pas été abrogé, et que même un ar
ia rête du directoire exécutif l’a visé pour en faire l’application;
»
Mais attendu que la loi du 16 août 1790 a appelé les adm i-
î) nisirations des départements à veiller aux moyens de procurer
» le libre cours des eaux , et l’arrêté du i/j octobre de la même
» année leur a confié tout ce qui touche à la vo irie, et que la loi
» du 29 floréal an 10 a confirmé cette attribution adm in istrai » v c ; — * Attendu que le pouvoir qui seul peut enjoindre ds
» faire peut seul infliger des dommages - intérêts pour n’avoir
�» pas fait y que le pouvoir judiciaire, essentiellement distinct du
» pouvoir adm inistratif, empiéterait évidemment sur les attrï» butions de celui-ci, s’il s’ingérait d e lui enjoindre telle mesure,
r ou , ce qui revient au m êm e, de le condamner à des dom m a» ges - intérêts pour n’avoir pas pris la mesure jugée nécessaire j
■
» ,— Que, si l’administration active t o m b e quelquefois, en pareil
» cas, sous l’empire d’une juridiction qui a sur elle une puissan» ce coactive, cette juridiction n’est elle-même qu’un dém em » b r e m e n t de l’adm inistration, et constitue des tribunaux d’e x y) ception sous le nom de Conseils de préfecture ; — Que c’est
» ainsi qu’aux termes de l’art. 4 de la loi du 28 pluviôse an 8 et
» de l ’art. t\ de la loi précitée du 29 floréal an 10 , le conseil de
» préfecture doit prononcer sur les difficultés qui pourront s’éley> ver en matière de grande v o irie ;— Qu’en certains cas , et lors» que l’administration porte atteinte à la propriété mobilière , et
» surtout à la propriété im m obilière, les tribunaux ordinaires
y> peuvent être appelés à statuer sur les indemnités ducs aux c i7) toyens qui ont souffert; mais si des torts et dommages, même» passagers,peuvent tomber sous l’appréciation de ces tribunaux,
» quand ils sont la suite de faits adm inistratifs, il n’en peut
» être ainsi quand il s’agit de torts causés pour simples om is» sions de mesures adm inistratives; — Qu’en définitive, les dom» mages - intérêts devraient retomber en pareil cas sur les fonc» tionnaires publics coupables de l’omission, puisque l’E lat 116
» peut en répondre que comme garant de son préposé : o r , à ce
» titre, le conseil d’E tat, c’est-à-dire l’adm inistration, serait en» core juge, aux termes de l’art. 75 de la constitution de l’an 8,
» de l’ o p p o r t u n it é des poursuites dirigées contre son agent; à
» plus forte raison, le pouvoir adm inistratif, appréciateur de la
» conduite de l’agen t, peut-il seul apprécier la responsabilité du
�—
s
—
•> pouvoir directeur; — Que les principes les plus élevés dans
» l’ordre public ont présidé à l’établissement de la doctrine con» slitutive d’un pareil résultat, qui garantit à la haute adm ini» stration l’indépendance et la liberté de ses mouvements , né» cessité d’intérêt général, auquel tout intérêt privé est de droit
» subordonné;
» Sans avoir égard à la demande de Rotrou , le trib u n a l, sans
y> qu’il soit besoin de statuer sur les moyens invoqués par le doy> maine , se déclare d’office incom pétent, renvoie les parties de» vant qui de d ro it, et condamne Rotrou aux dépens , etc. »
Les consultants demandent i° si leur action était de la compé
tence des tribunaux ordinaires, ou de celle de l’autorité adm ini
strative ; 20 si l’Etat a été valablement assigné en la personne do
M. le préfet du département.
CONSULTATION.
Le conseil soussigné , quia pris lecture dum ém oirc qui p ré
cède et des pièces à l’a p p u i, estime qu’il faut d’abord exam iner
s i , en principe général, l’Etat peut être déclaré responsable du
dommage causé par ses agents dans l’exercice de leurs fonc
tions : car, si l’Etat était affranchi de ce genre de responsabi
lité , comme il n’appartiendrait à aucune autorité de statuer sur
la dem ande, il deviendrait inutile d’exam iner la question de
compétence, ainsi que la nullité opposée par M. le préfet du dé
partement.
�E st d’ a vis,
Sur cette question préjudicielle,
r
Que l’E tat est civilem ent responsable du dommage causé par
ses agents dans l’exercice de leurs fonctions, lorsque ce dommage
provient d’une faute de leur part y
Sur la question de compétence ,
i° Q u e , lorsque le fait dommageable reproché aux agents ad
ministratifs ne peut être ju stifié ou condamné que comme conforme
ou comme contraire aux règles d’ une bonne administration , l’au
torité administrative est seule compétente pour statuer sur l’ac
tion en réparation du dommage intentée contre l’Etat ;
2° Q ue, lorsque le fait dommageable reproché aux agents adm i
nistratifs a été prévu et p u n i par la l o i , l’action en responsabi
lité civile dirigée contre l’E tat est de la compétence exclusive des
tribunaux, soit que l’autorité administrative ou que les trib u
naux de répression ordinaires soient chargés d’appliquer la peine
aux agents adm inistratifs; et que, de plu s, les tribunaux civils
ne sont, dans ce cas, obligés de surseoir au jugement de la de
mande, que lorsque l’action publique contre les agents adminis
tratifs a déjà été intentée ;
5° Que , spécialement, dans l’espèce, 1e fait dommageable re
proché aux agents administratifs a été prévu et puni par l’ordon
nance de iG6g et l’arrêté du 19 vent, an G;
Qu’en conséquence, l’action de MINI, de Rotrou et compagnie
e s t de la compétence exclusive de l’autorité jud iciaire, et que le
tribunal de la Seine aurait dû y faire d r o it, puisque l’action pu
blique en répression de la contravention, n’ayant pas été intentée,
ne pouvait arrêter le jugement de l’action civ ile;
Sur la fin de non-recevoir,
Que l’ Etat a été valablement assigné en la personne de M. Ic j
préfet du département.
�P R O P O S IT IO N P R É J U D IC IE L L E ,
L ’Etat est responsable du dommage causé par ses agents dans
l ’ exercice de leurs fonctions, lorsque le dommage provient d’une
faute de leur part.
Si l’on s’en tient à la lettre de la l o i , la responsabilité de l'E tat
ne paraît pas douteuse , car l’art. 1 384 du Code civ il porte que
cc les maîtres et commettants (sont responsables) des dommages
causes par leurs domestiques et préposés dans les fonctions aux
quelles ils les ont employés. » V is-à-vis de ses agents, l’Etat est
un m aître, ou tout au moins un commettant.
Mais l’Etat n’ést pas un commettant ordinaire, et il faut se
pénétrer de l’esprit de la loi pour reconnaître si la règle peut
lui être appliquée. Si les fautes des domestiques ou préposés
réfléchissent contre leurs maîtres ou com m ettants, c’est parce que
c e u x -c i, en choisissant des serviteurs ou préposés négligents ou
incapables, sont eux-m êm es répréhensibles. T e l e6t le m otif
particulier de la responsabilité prévue dans le
5 de l’art. 1584
du Code civil : « ce qui a été éta b li, dit Pothier (T ra ité des
» obligations), pour rendre les maîtres attentifs à ne se servit
» que de bons domestiques. » L a loi romaine reconnaissait le
même principe : S i servos obnoxios h a b u it, dam nieutn injuria
. ien eri, cur taies habuit (ff. 1. a 7 , § 1 1 , A d leg. aquil.).
Ce m otif de la loi tient a 1 ordre même des idées politiques î
car, plus les maîtres et commettants sont attentifs au choix de
leurs serviteurs et préposes , plus ceux-ci sont eux-métues in té
ressés a rem plir exactement leurs devoirs ; par conséquent, plus
le maintien du bon ordre public devient facile.
�■\
—
8
—
Ces réflexions suffisent pour établir que l’art. 1 384
Code
civil est applicable à l’Etat : car le choix des agents administratifs
intéresse l’ordre p u b lic , bien plus gravement encore que celui
des serviteurs ou préposés des particuliers.
L es agents administratifs sont investis d’une certaine portion
de l’autorité publique : plus puissants que les agents des particu
liers , ils ont plus de facilités et d’occasions pour nuire. Le mau
vais usage ou l’abus qu’ils feraient de leurs pouvoirs serait un
malheur public.
Or, puisque la loi ne considère pas comme une garantie suffi
sante pour l’ordre public la responsabilité personnelle des ser
viteurs et préposés des particuliers, à plus forte raison en est-il
de même à l’égard des agents administratifs.
En vain l’on dirait que l’E ta t, être co llectif,n e peut encourir
qu’une responsabilité morale à raison du choix qu’il fait de ses
agents.
Considéré comme propriétaire, l’E tat est soumis aux règles de
droit commun.
Considéré comme dépositaire et régulateur suprême de la for
tune publique, l’E ta t, représenté par des administrations publi
ques préposées à chaque espèce de service, doit se conformer
aux lois qui protègent les droits privés de chacun. Si ses agents
violent ces d ro its, la faute en est à l’E ta t, qui les a choisis pour
mandataires. En pareil cas la responsabilité morale serait tout à
fait insuffisante. Ce genre de responsabilité ne s’applique qu’aux
actes purement administratifs pris par les administrateurs dans
les limites de leurs pouvoirs.
La question a d’ailleurs été résolue assez fréquemment par la
jurisprudence. Les tribunaux n’hésitent pas à condamner les ad
ministrations publiques à la réparation des dommages causés par .
�— 9 —
leurs préposes dans l’exercice de leurs fonctions. O r ces adm ini
strations ne sont elles-mêmes qu’un dém em brem ent, une per
sonnification partielle de l’Etre collectif appelé l’état ( i) .
Objecterait-on que cette responsabilité com prom ettrait la for
tune publique ?
Nous répondrions que le danger n’est pas réel.
Car la responsabilité des maîtres et commettants ne résulte
pas de cela seul que le dommage a été causé par leurs domesti
ques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont em
ployés; il faut de plus que le f a i t dommageable constitue une
faute imputable à ces derniers. E n effet, c’est parce qu’ils ont mal
choisi leurs domestiques ou préposés , que les maîtres et com
mettants sont soumis à la responsabilité civile ; or on ne peut
leur faire ce reproche, ni dès lors les rendre responsables, lors
que le dommage ne provient pas d’une faute de leurs domestiques
et proposés.
Il en est de même de la responsabilité à laquelle l’ Etat est sou
mis à raison du dommage causé par ses agents dans l’exercice de
leurs fonctions. L ’Etat doit être déchargé de toute responsabilité
s’il prouve que ses agents sont exempts de faute.
Ainsi les cas de responsabilité civile ne seront point assez m u l
tipliés pour compromettre la fortune publique. L ’Etat trouvera
dans les juges ordinaires ou administratifs toutes les garanties
possibles; de plus, armé vis-à-vis de scs agents de toute l’autorité
d un maître, il pourra facilement se faire indemniser par eux de
(1) \ o ir notam m ent a rrê ts de la cour de cassation des 19 juillet 1826
(S . 2 7 , i. 1 3 2 ), et 30 janv. 1833(S. 33, i. 99). V oir aussi la loi du 6 août
1791, a rt. 19, titre 13.
�10
toutes les pertes qu’ils lui auront fait supporter ; ressource qui
—
—
manque trop souvent aux maîtres et commettants ordinaires.
D ’ailleurs si les condamnations prononcées contre l’Etat pou
vaient devenir assez fréquentes pour compromettre le patrim oi ne public , un pareil fait indiquerait des désordres déplorables
dans le corps adm inistratif ; et le seul remède efficace contre ces
désordres serait précisément de forcer l’E tat, par une application
sévère de la règle de la responsabilité, à choisir des agents plus
éclairés et plus dévoués à l’intérêt public.
Il nous parait suffisamment établi qu’en principe, l’E tatest res
ponsable du dommage causé par ses agents dans l’exercice de leurs
fonctions, lorsque ce dommage est arrivé par leur faute ou par
leur négligence.
Nous ajouterons q u e , particulièrement lorsqu’il s’agit d’acci
dents arrivés sur les rivières navigables par la faute ou par la
égligencc des agents adm inistratifs, l’E lat est responsable par
un double m otif: d’abord en vertu du principe général que nous
venons d’étab lir, ensuite en vertu de la règle posée dans le 1 er $
de l’art. i 58 /f, d’après laquelle « on est responsable non seule
ment du dommage que l’on cause par son propre f a it , mais en
core de celui qui est causé par le fait des personnes dont on
doit répondre ou des choses que l ’on a sous sa garde ». L ’Etat,
comme propriétaire des fleuves et rivières navigables, a la gar
de et la surveillance de ces rivières : à ce titre, il est donc encore
responsable des accidents qui y a rriv en t, sauf les cas de force ma
jeure.
A u surplus, le principe a été implicitement consacré par un
arrêt de la Cour de cassation du 27 juin 1852 (S. 52 . 1. 838 ), qui
porte : «. Attendu que, s’il est constant que le bateau du deman)» deur a cchouc à son entrée dans le canal de Somme , e t , par
�—
11
—
» suite , éprouvé des avaries dans sa cargaison , il ne résulte ni
» de la déclaration du m arinier qui le m o n ta it, ni des procès » verbaux d’expertise faits depuis , qiCil faille Fattribuer à la
y> faute ou à la négligence des préposés à Ventretien du canal
ïi navigable ; que, cependant, VEtat n'aurait pu être astreint à
y) la réparation du dommage qu’autant qu'il aurait été imputable
y> à ses agents; que la preuve étant à la charge du demandeur,
» et celui-ci ne l’ayant pas faite , ainsi qu’il est déclaré par l’ar» r ê t , la demande en indemnité n’a pu être accueillie. »
Ce principe posé, il reste à exam iner quelle autorité est char
gée par la loi de l’appliquer.
P R E M IÈ R E Q U E S T IO N .
v
Vaction intentée contre VEtat par M M . de Rotrou et compa
gnie est-elle de la compétence des tribun au x, ou de celle de l’ au
torité administrative ?
Cette question ne peut être résolue qu’à l’aide des deux propo
sitions suivantes :
P r e m iè r e
p r o p o s it io n .
Lorsque le fait dommageable reproché aux agents administra
tifs ne peut être condamné ou justifie rque comme contraire ou
comme conforme aux règles d'une bonne administration , l'auto
rité administrative est seule compétente pour statuer sur l’ action
en dommages-intérets intentée contre VEtat.
Cette proposition n’offre point de difficultés.
D après le principe général qui a posé la séparation des auto
rités administrative et judiciaire , les tribunaux ne peuvent s’im
miscer dans la connaissance des actes administratifs.
�12 —
A insi lorsque le fait dommageable reproché aux agents adm i
nistratifs est une mesure purement administrative, dont l’utilité
ou l’opportunité ne peut être appréciée que conformément aux
règles de tadm inistration ; lorsque ce fa it, en admettant même
qu’il pût être considéré comme une faute des agents administra
tifs, ne peut constituer qu’une faute adm inistrative, il est évi
dent qu’en pareil cas les tribunaux n’ont point le pouvoir d’en
apprécier le caractère : car ils ne sont point administrateurs 5 la
connaissance des règles administratives leur est étrangère, et la
loi leur défend d’en faire l’application.
O r, l’E tat n’est responsable du dommage causé par ses agents
dans l’exercice de leurs fonctions qu'autant que ce dommage
provient d’ une faute de leur p a r t, donc les tribunaux ordinaires,
lo r s q u ’ils ne peuvent point exam iner si le fait dommageable con
stitue ou ne constitue point une faute des agents adm inistratifs,
sont incompétents pour statuer sur l’action en réparation du dom
—
mage.
C ’est dans cette hypothèse qu’il serait permis d’appliquer ce
principe du jugem ent de première instance , « que le pouvoir qui
» seul peut enjoindre de faire peut seul infliger des dommages» intérêts pour n'avoir pas fait. » C ar l’administration , seul
pouvoir qui peut adm inistrer, peut seule apprécier un acte de
mauvaise administration , et adjuger des dommages-intérêts aux
parties qui ont souffert de cet acte.
Mais la règle établie par le tribunal n’est pas vraie dans toutes
les hypothèses. La proposition suivante va le prouver.
D
e u x iè m e
p r o p o s it io n .
n
Lorsque le fait dommageable reproché aux agents administratifs
a été prévu et p u n i par la l o i , l ’action en responsabilité civile
�—
13
—
dirigée contre l’ E ta t est de là compétence exclusive des tribunaux,
soit que l’ autorité administrative ou que les tribunaux de ré
pression ordinaires soient chargés d’appliquer la peine aux
agents adm inistratifs. D ép lu s le jugement de la demande ne peut
être arrêté que dans un 1seul cas; c'est lorsque l’ action publique
contre les agents administratifs a été intentée avant'ou pendant
l'instance à fins civiles dirigée contre l’ Etat.
:lil
L o r s q u e le fait dommageable reproché aux agents adm inistra
tifs est un fait prévu*et puni par la -ld i, il n’appartient pliis à
l’administration d’en apprécier le caractère : ca r, dans ce c a s , le
fa it, une fois légalement p ro u vé , constitue nécessairement1} non
pas une faute adm inistrative, mais une violation des lois de
de police, c’est-à-dire un crime , un délit ou une contravention.
Dès lors les tribunaux ordinaires , en appréciant'le fait dom
mageable, ne s’im m iscent'point dans les attributions de l’adm i^ nistration ; ils restent dans les lim ites de leur juridiction1, ils in terprètent'et appliquent la loi.
D o n c, l’action à fins civiles dirigée*contre l’E tat comme te sponsable du faitde'ses agents est'dans c e c a s de leur compétence
exclusive.
Cependant l’application de cette règle soulève quelques diffi
cultés.
D eux hypothèses se présentent.
Ou le fait dommageable reproché aux agents administratifs
constitue un délit dont'le jugem ent est déféré par des lois spé
ciales à l’autorité administrative , comme , par exem ple , lors
qu’il s’agit d’une contravention de grande voirie ;
Ou ce fait constitue un d é lit, dont le jugement appartient aux
tribunaux de répression ordinaires.
Dans la première h ypothèse, on objecte d’abord que l’action
�— 14 —
dirigée contre'l’E tal comme responsable du fait de ses agents ne
peut être de la compétence des tribunaux o rd in aires, parce
que l’appréciation du délit est exclusivement réservée à l’autorité
adm inistrative. Puis l’on ajoute que tout au moins le jugement de
cette action doit être suspendu, soit jusqu’à ce que le Conseil d’E tat ait autorisé le demandeur à poursuivre à fins civiles l’agent
adm inistratif auteur du dommage ( car cette autorisation seule
permet au tribunal civil d’apprécier le fait dommageable ) , soit
jusqu’à ce que l’action publique en répression du délit ail été jugée
(car c’est alors seulement que le tribunal civil peut savoir si le fait
dommageable est imputable à l’agent adm inistratif ).
Dans la seconde hypothèse, on reconnaît que les magistrats
de l’ordre judiciaire sont exclusivem ent appelés à juger le délit;
mais on fait remarquer que, si l’action civile eût été dirigée per
sonnellement contre l’agent adm inistratif inculpé, ces magistrats
n’auraient pu apprécier le d é lit, soit sous le rapport de la péna
lité qu’il entraîne, soit sous le rapport du dommage dont la. par
tie civile réclame la réparation, avant que le 4Conseil d’Etat
eût autorisé l’une et l’autre espèce de poursuites; d’où l’on con
clut que le jugement de l’action en responsabilité civile dirigée
contre l’E tatcst suspendu jusqu’à ce que le demandeur ait obte
nu cette autorisation.
On va examiner successivement l’une et l’autre de ces h y p o
thèses, et les objections qui s’y rattachent.
Première hypothèse.— Lorsque le fait dommageable reproché
aux agents administratifs constitue un délit dont le jugemenA j
est déféré par une loi spéciale à l’autorité adm inistrative , il est
incontestable que cette autorité seule a le droit de réprim er le
délit, et d’appliquer aux délinquants les peines établies par les
lois ou par les règlements.
�— 15 —
Mais de ce que cette autorité est seule com pétente, dans cette
hypothèse, pour statuer sur Vaction publique en répression de la
contravention , il ne s’ensuit nullement ¡qu’elle ait le droit de
statuer sur Faction privée en réparation du dommage. La liaison
plus ou moins intim e de ces deux actions n’est pas une raison
su ffisa n te i pour les attribuer conjointement à ¡l’autorité adm ini
strative. Il arrive en effet très fréquemment que des questions
qui doivent être résolues exclusivement par l’autorité adm initrative sont préjudicielles à des questions du ressort de l ’a u t o
rité ju d iciaire, et réciproquement. Dans ces cas , la question ju
diciaire ne devient pas adm inistrative, ni la question ad m in i
strative , judiciaire ; chaque autorité conserve la juridiction qui
lui est propre.
De môme , lorsqu’une contravention de grande voirie est dé
férée au conseil de préfecture, ce conseil, quoique saisi de l’ac
tion en répression de la contravention, n’en est-pas moins in
compétent pour adjuger des doinmages-inlérêts à la partie p ri
vée qui a souffert de la contravention : car les^attributions des
conseils de préfecture sont tout à fait spéciales, et doivent être
rigoureusement circonscrites dans les limites de la loi qui les a
fixées. O r , ni la loi du 29 iloréal an 10 , ni aucune autre lo i,
n’attribue à ces conseils le pouvoir de prononcer, même acces
soirement à la répression d’un délit de v o ir ie , sur la demande
en dommages-intérêts.
De p lu s , si les cours d’assises et les tribunaux correctionnels
sont régulièrement saisis, conformément aux art. 35 g , 191 et 192
du code d instruction crim inelle , des demandes en dommagesinterets accessoires à la repression des crimes et des délits , c’est
par uuc exception toute spéciale; mais au moins ces tribunaux
ne sont pas eux-mêmes exceptionnels ; ils sont composés, coin-
�16 —
me les tribunaux civils , de magistrats de l’ordre judiciaire ; ils
sont, e n un m ot, les juges naturels des citoyens, l i e n est tout
différemment des conseils de préfecture, et l’on peut les as
sim iler, sous ce rapport.* aux tribunaux crim inels spéciaux
qu’avait institués la loi du 18 pluviôse an 9 ; tribunaux q u i ,
comme on s a it , ne pouvaient pas même juger les demandes en
dommages-intérêts accessoires aux procès dont la connaissance
leur était attribuée. (V o ir arrêt de la cour de cassation du 6 fruc
—
tidor an 9 , S . 2 ,1 . 26.)
Enfin cette question est .décidée par les principes consacrés
depuis long-temps en jurisprudence. A in s i, d’une p a r t , la cour
de cassation a décidéu°ique lcSitribunaux de repression, ne con
naissant de l’action civile qu’accessoirement à l’action p u bliqu e,
sont incompétents pour statuer sur l’action en dommages-inté
rêts s’ils rejettent l’action publique. (A rrêts des 27 juin 1812. S.
i5 . i . 23g . — 12 février 1808. S. 9. 1. 254 - — i er a vril i 8 i 5 .
S. i 5 . 1. 3 i 8 . — ao févrierti828. S. 28. 1. 8 i 5 . — 3 o a vril
i 8 i 3 , S. i 3 . 1. 349. — i 3 juillet 1810. S. 10. 1. 297*)
D ’où la conséquence qu’ un .tribunal de justice répressive, m ê
me un tribunal de police, est incom pétent pour statuer sur une
demande en dommages-intérêts dirigée contre la personne civ ile
ment responsable tant qu’ i l n’ est pas sa isi de Vaction publique
pour Vapplication de.la peine. ( A rrêt du 1 1 sept. 1818. S. 19.
î . 117 . — 2 6 juillet i 8 i 3 . S . i 5 . i . 1 1 7 .)
Ainsi les tribunaux de justice répressive, quels qu’ils soient,
ne sont qu’accidentellement compétents à l’égard des demandes
en dommages-intérêts.i E n principe, c’est aux tribunaux civils
exclusivement qu’appartient la connaissance de ces demandes.
> O n peut donc conclure que l’autorité adm inistrative, lors
même qu’elle est compétente pour statuer sur la répression du
�— 17 —
délit , est incompétente pour juger la demande en réparation du
dommage.
A plus forte raison cette autorité est-elle incompétente pour
statuer sur la demande formée directement contre la personne
civilem ent responsable : car cette demande est encore plus indé
pendante de l’action publique que ne l’est la demande en dom
m ages-intérêts dirigée personnellement contre l’auteur même
du délit.
Mais un autre genre d’objections s’élève. O n admet qwe les
tribunaux ordinaires sont compétents pour statuer sur les de
mandes en responsabilité civile dirigées contre l’E tat à raison
du délit d’un de ses agents; mais l’on soutient que leur compétence
est suspendue i° tant que le Conseil d’ Etat n’a pas autorisé le
demandeur à poursuivre à fins civiles l’agent adm inistratif au
teur du dommage ; 20 tant que l’action publique en répression
du délit n’a point été, jugée.
Ces objections ne nous paraissent pas mieux fondées que la
précédente.
i° S’il était vrai que la partie civile ne peut demander direc
tement à l’Etat la réparation du dommage que lui a causé le dé
lit d’un de ses agents, sans obtenir du Conseil d’E tat l’autorisa
tion de poursuivre cet agent lui-m êm e, il en résulterait d’abord
que lE t a t aurait la faculté d’opposer à l’action dirigée contre lui
une exception qui est exclusivement attachée à la personne de l’a
gent adm inistratif; ensuite que la partie civile serait privée
de son recours contre l’ E tat toutes les fois qu’elle n’aurait pas
mis en cause l’agent adm inistratif lui-même.
O r , ce résultat serait en contradiction manifeste avec la loi.
En effet, il est incontestable que l’ E ta t, personne civilem ent
responsable, est obligé solidairement avec son agent, auteur du
3
�—
18
—
dommage , à la réparation civile de ce dommage : caria respon
sabilité civile embrasse l’intégralité des restitutions. C ’est ainsi
qu’il a été jugé par arrêt de la cour de cassation du 27 février
1827 ( S. 27. 1. 228 ) que le m a ri, déclaré civilem ent responsa
ble du dommage causé par sa fem m e, est tenu solidairement a vcc celle-ci au paiement des doinmages-inlérêts adjugés à la
partie civile. Ainsi l’E tat et son agent sont deux codébiteurs so
lidaires.
O r, l’art. 1208 du Code civil porte : « Le codébiteur so li
daire peut opposer toutes les exceptions qui résultent de la na
ture de l'obligation et toutes celles qui sont communes à tous
les codébiteurs. 11 ne peut opposer les exceptions qui sont pure
ment personnelles à quelques uns des autres codébiteurs. »
L ’é ta t, codébiteur solidaire , poursuivi par la partie civile ,
11e peut donc opposer les exceptions qui sont purement person
nelles à l’agent administratif, auteur du délit ; les seules excep
tions qu’il lui est permis d’invoquer sont celles qui résultent de
la nature de l'obligation, celles qui lu i sont personnelles , celles
enfin qui sont communes à lui-m ême et A son agent.
S ’il en est ainsi, l’E tat ne peut se prévaloir de l’exception tirée
du défaut d’autorisation , car cette exception est purement per
sonnelle à l’agent administratif. En effet, il est essentiel de re
marquer que la garantie accordée aux agents administratifs par
l’art. 75 de la constitution de l’ an 8 n’a pas pour but de préve
nir les usurpations de l’autorité judiciaire sur l’autorité adminis
trative. Celle-ci est armée du droit d’élever les conflits : cette
arme lui suffit pour réprim er ces usurpations. Riais à côté de ce
danger, il en existait un autre, dont la loi devait également pré
server l’administration. 11 était à craindre que les administra
teurs 11e fussent trop légèrement traduits devant les tribunaux
�ih
— 19 —
p a rle s susceptibilités de l’intérêt privé. Pour assurer à l’ad m i
nistration toute la liberté d’action qui lui est nécessaire, il fallait
donc conférer à une autorité supérieure le pouvoir de soustraire
les administrateurs aux tracasseries de l'esprit processif. T e l est
le but de la garantie constitutionnelle , q u i, comme on le v o i t ,
est exclusivement attachée à la personne des agents adm inistra
tifs. L ’Etat ne peut donc s’ en prévaloir.
D ’un autre c ô té , obliger la partie civile qui exerce contre
l’Etat l’action en responsabilité que la loi lui donne à se pour
voir devant le Conseil d’Etat pour obtenir l’autorisation de met
tre en cause l’agent adm inistratif auteur du d é lit, c’est priver
cette partie d’un droit que lui attribue d’une manière absolue
l’art. ia o 3 du Code civil, d’après lequel le créancier d’une ob li
gation contractée solidairement peut s’ adresser à celui des
débiteurs qu’ i l veut choisir. » C a r , dans ce système , le de
mandeur serait obligé de mettre à la fois en cause , et la
personne civilem ent responsable et l’auteur principal du dom
mage.
Ces conséquences étant inadmissibles, le principe d’où elles
dérivent est évidemment faux. Aussi la cour royale de Grenoble
a -t-elle décidé, par arrêt du i 5 mars 1854 (D. 34. 2. 197), que
la partie lesee peut s’adresser directement à la personne civile
ment responsable, sans être assujettie à appeler en jugement l’au
teur lui-m êm e du fait dommageable.
Il s’agissait précisément dans l’espèce de cet arrêt d’une action
en responsabilité civile dirigée contre l’Etat représenté par l’ad
ministration des douanes.
Enfin une dernière réflexion nous paraît digne d’atten ••
tion.
L es directeurs généraux de certaines administrations publi-
‘i ■
•4
�20
ques sont investis du droit d’autoriser la mise en jugement des
préposés qui leur sont subordonnés. T e l, par exem ple, le direc
teur général des douanes.
O r, si l’autorisation nécessaire pour pousuivre les agents de ces
administrations était indispensable pour l’exercice de l’action en
responsabilité civile elle-mêm e, il est probable que les directeurs
généraux s’abstiendraient de prononcer sur les demandes en au
torisation, et rendraient ainsi complètement illusoire la respon
sabilité à laquelle la loi a déclaré soumettre ces administrations,
2° Si le jugement de l’action en responsabilité civile dirigée
contre l’E lat n’est pas suspendu jusqu’à ce que le demandeur ait
obtenu du pouvoir supérieur l’autorisation de poursuivre à fins
civiles l’agent adm inistratif auteur du dom m age, il est égale
ment certain que le jugement de celte action n’est pas subor
donné à l’exercice de l’action publique en érpression du délit.
En effet, d'après l’art. 5 du Code d’inst. cria», l’action en ré
paration du dommage peut être poursuivie séparément de l’ac
tion publique en répression du délit. Il est vrai que cet ar
ticle ajoute q u e , dans ce cas, l ’ exercice en est suspendu tant
qu’ i l n’ a pas été prononcé définitivement sur l’ action publique
—
—
intentée avant ou pendant la poursuite de Paction civile ; mais
ces term es, loin de prouver que l’aclion civile doit être sus
pendue dans tous les cas jusqu'au jugement de l’action publi
que , prouvent au contraire que le sursis ne doit être prononcé
que dans un seul cas : c’est lorsque l’action publique a été inten
tée avant ou pendant la poursuite de l’action civile ; si l’aclion
publique n’est pas exercée, l’action civile , qui en est indépen
dante , ne peut êlre paralysée. ( Arrêts de la cour de cassation
des 11 juin i 8 i 3 . S. 16. i , îGg ; et a(i ju illet t 8 i 5 , S. i 5 . i.
*>7-
�21
Il résulte de là que les tribunaux civ ils, incom pétents, il est
v ra i, pour apprécier le fait dommageable sous le rapport de la
pénalité qu’il entraîne, ont cependant le droit d’apprécier ce
fait sous le rapport des réparations pécuniaires que réclame la
partie lésée.
A in s i, dans l’hypothèse spéciale où un agent adm inistratif est
poursuivi en réparations civiles à raison d’un délit qu’il a commis,
s’il n’a point encore été traduit devant le tribunal de répression
com pétent, les juges civils saisis de la demande en réparation
du dommage doivent passer outre au jugement de cette de
mande , sauf l’exception personnelle que peut invoquer l’agent
adm inistratif, dans le cas où les poursuites dirigées contre lui
n’auraient point été autorisées par le pouvoir compétent.
S ’il en est ainsi, à plus forte raison le sursis ne doit-il point
être prononcé lorsqu’il s’agit d’une demande en réparation civile
dirigée contre l:E tat, comme responsable de ses agents. C a r l’ac
tion dirigée contre une personne civilem ent responsable du fa it
d'autrui est encore plus indépendante de l’action publique que
l’action en réparation civile dirigée personnellement contre l’au
teur du dommage.
—
—
Seconde hypothèse. — Lorsque le fait dommageable repro
ché à l’agent, adm inistratif constitue un délit dont le jugem ent
appartient aux tribunaux de répression ordinaire, et non à l’autorite adm inistrative, on reconnaît que l’action en responsabili
té civile dirigée contre l’ Etat est de la compétence exclusive des
tribunaux civils; m aison objecte encore que ces tribunaux d o i
vent surseoir jusqu’à ce que le Conseil d’E tat ait autorisé les
poursuites, soit publiques, soit civiles.
Il a été établi précédemment que, même dans le cas où l’action
publique est de la compétence de l’autorité adm in istrative, l’Etat
�22 —
ne peut forcer la partie lésée à demander au Conseil d’E tat l’au
torisation de poursuivre à fins civiles l’agent adm inistratif au
teur du dom m age, et qu’ain si, même en ce cas, le jugement de
l’action en responsabilité civile dirigée contre l’Etat n’est pas sus
pendu par le défaut de cette autorisation ; à plus forte raison en
doit-il être de même lorsque l’action publique est de la compé
tence des tribunaux de répression ordinaires.
Il reste donc à prouver dans cette nouvelle hypothèse que ce
jugement n’est passubordonné à l’autorisation des poursuites pu
bliques.
O r cette preuve est facile. En effet, s’il est vrai que le jugement
de l’action en responsabilité civile dirigée contre l’E tat n’est pas
suspendu par le défaut d’autorisation des poursuites civ iles ; à
plus forte raison est-il vrai que ce jugement n’est pas suspendu
par le défaut d’autorisation des poursuites publiques. C a r é v i
demment l’action en responsabilité civile dirigée contre l’Etat
est encore plus indépendante de l’action publique à laquelle est
soumis son agent que de l’action en réparations civiles à laquelle
cet agent est également exposé.
—
Ainsi aucune des objections prévues n’est fondée, et la vérité de
notre seconde proposition reste démontrée.
A pplication des principes précédents à l’ espèce.
MM. de Rotrou et compagnie reprochent aux agents de la
navigation de n:avoir point fait enlever du fond de l’eau le b a
teau lavandière qui a causé le naufrage de leur coche.
Il est évident que c’est là une faute grave de la part des agents
de la navigation.
�— 23 —
Mais cette faute est - elle purement adm inistrative? C ’e st-à dire , le fait qui la constitue est-il simplement une violation des
règles d’une bonne administration , ou , au contraire, est-il un
véritable délit prévu par les lois?
L ’arrêté du 19 ventôse an 6 répond péremptoirement à cette
question.
Y o ic i en effet ce qu’il porte :
« Le directoire exécu tif, vu i° les art. 42 , 43 et 44 ■
>t*1* 27 de
» l’ordonnance des eaux et forêts du mois d’août 1669 >portant :
cc A rt. 42. N u l, soit propriétaire , soitengagiste , ne pourra faire
yy m oulins, batardeaux...... ni autres édifices , ou empêchements
» nuisibles au cours de Veau dans les fleuves et rivières navigables
» et flottables , ni même y jeter aucunes ordures , immondices ,
» ou les amasser sur les quais et rivages, à peine d’amendes a rb iy> tra ires....; enjoignons à toutes personnes de les ôter dans trois
» m ois; et si aucunes se trouvent subsister après ce tem ps, vou» Ions quelles soient incessamment àte'es et levées aux fra is et
» dépens de ceux qui les auront faites et causées , sur peine de
» 5oo livres d’ amende tant contre les particuliers que contre les
y> fonctionnaires publics qui auront négligé de le faire , etc. » En
» vertu de l’art. i4 4 d o la constitution, ordonne que les lois ci» dessus transcrites seront exécutées selon leur forme et teneur. »
D après ces dispositions, qui sont encore en vigueur aujourd h u i, il y a contravention punissable, non seulement de la part
des particuliers qui occasionnent quelque obstacle nuisible au
cours de l’eau , mais encore d e j
part des fonctionnaires jniblics
q u i, chargés de faire enlever ces obstacles , ont négligé de le faire.
O r, il résulte des déclarations du sieur Paris , agent de la na
vigation , déclarations consignées dans le procès-verbal du sinistre
dressé par le maire de Charenton , a que c’est le bateau layau-
�— 24 —
» dière gisant au fond de l’e a u , qui a produit le naufrage du
» coche. »
D onc le fait dommageable , c’est-à-clire le séjour de ce bateau
au fond de la rivière, constitue la contravention prévue et punie
par les dispositions précitées de l’ordonnance de 1669 et de l’a r
rêté du 19 ventôse an 6.
L e tribunal objecte que , l’enlèvement du bateau lavandière
étant une mesure de pure administration , l’opportunité de cette
mesure ne peut être appréciée que par l’autorité administra
tive.
Cette objection serait juste si la loi permettait aux agents
de la navigation d’enlever ou de ne pas enlever les obstacles nui
sibles au cours de l’e a u , suivant le degré <Putilité qu’ ils atta
cheraient eux-mêmes d Vune ou à Vautre de ces mesures.
Mais le texte elst précis. La loi qui ordonne impérativement
l’enlèvement des empêchements nuisibles au cours de l'eau punit
l’omission de cette mesure de 5oo fr. d’amende : donc celte om is
sion est une véritable contravention, et non pas sim plem ent une
faute adm inistrative.
Sans doute l’application de la peine appartient aux Conseils de
préfecture , puisqu’il s’agit d’une contravention de grande voirie.
Mais ces conseils , n’étant pas compétents pour statuer sur les de
mandes en d o m m ages-in térêts accessoires à l’action publique ,
sont, à plus forte raison , incompétents pour statuer sur une de
mande en responsabilité civile dirigée contre l’E tat par voie d i
recte et principale.
Sans doute encore, si l’ageutde la navigation eût été poursuivi
devant le conseil de préfecture en répression de la contravention ,
le tribunal aurait été obligé de surseoir au jugement de l’action
dirigée contre l’E tat, jusqu’à la décision duconscil de préfecture.
�— 23 —
Mais l’action publique n’ayant point été exercée, rien ne suspen
dait son jugement.
Enfin M M . de Rotrou et compagnie avaient le droit d’action
ner directement l’E tat, sans être obligés de demauder au Conseil
d’E tat l’autorisation de poursuivre l’agent de la navigation à
fins civiles: c a rils ont une action solidaire contre l’E tat et contre
cet agent; e t, dès lors , les art. i2 o 3 et 1208 du code c iv il doi
vent leur profiter.
A insi du’ne part le fait dommageable reproché par M M . de
Rotrou et compagnie aux agents de la navigation constitue une
contravention, dont l’appréciation, loin d’être interdite aux tr i
bunaux civ ils, sous le rapport de l’action civile qui en résulte ,
est au contraire formellement interdite, sous ce m êm e rapport ,
aux conseils de préfecture ; et d’autre p a r t , l’action publique en
répression de la contravention n’a point été exercée contre les
agents de la navigation.
D onc le tribunal c iv il de la Seine était compétent pour statuer
sur la demande , et de p lu s, il devait y faire droit en l’état du
procès.
S E C O N D E Q U E S T IO N .
L'Etat a-t-il été valablement assigné en la personne de il/, le préfet du
département ?
M. le préfet de la Seine oppose une Gn de non-recevoir à la de
mande de M M . de Rotrou et com pagnie; il a soutenu devant
les premiers juges que l’assignation aurait dû être donnée au pré
fet de police, in v e sti, par l’arrêté du l a messidor an 8 , d elà surh
�20
veillance et de la police de la navigation dans le département
de la Seine.
Cette fin de non-recevoir serait valable , si le préfet de polico
avait été in v e sti, par l’arrêté du 12 messidor ou par quelque
autre disposition des lois ou ordonnances , du droit de représen
ter FEtat en ju stic e ; mais il n’en est pas ainsi, et l’arrêté du la
messidor se borne à énumérer les attributions de police de ce
fonctionnaire, au nombre desquelles se trouve le droit de surveiller la rivière , les quais, berges, etc.
Au contraire, la loi des 28 octobre -5 novembre 1790 ( art.
i 3 , 14 et 15 du titre 5) et celle des 15-27 mars 1791 (art. 14)
déclarent formellement que les actions qui intéressent l’E tat
doivent être intentées ou soutenues au norn des procureurs gé
néraux syndics des départem ents, qui depuis ont été remplacés
par les préfets.
D ’un autre côté, la disposition de l’art. 69 du code de procé
dure civile , d’après laquelle les administrations publiques d oi
vent être assignées en leur bureau dans le lieu où réside le siège
de l’administration , ne doit être observée que dans le cas où les
demandes contre l’Etat intéressent spécialement une branche de
l’administration générale représentée par quelqu'une de ces admi
nistrations publiques.
O r, il n’existe point d’administration générale des fleuves et ri
vières navigables et flottables du royaum e. L ’Etat est propriétaire
de ces fleuves , et le roi en est lesuprême adm inistrateur. Dans lo
département de la Seine , comme dans les autres départements ,
les agents de la navigation ne sont que les délégués du r o i , ad
ministrant au nom de l’ Etat les fleuves et rivières navigables.
Ces agents 11e forment donc point une administration publique,
et la disposition précitée do l’art. 69 du code de procédure civile
�2 7
n’est point applicable à la demande de MM. de Rotrou et compa
gnie.
En un m ot, le préfet de police est un agent adm in istratif,
qui a tout pouvoir pour représenter l’E t a t , en ce qui concerne
la police administrative des fleuves et rivières navigables.
Le préfet du département est le représentant légal de l’E tat en
justice.
La fin de non-recevoir n’est pas sérieuse.
Délibéré à Paris, le 3 avril 1 838 , par les avocats à la C our de
cassation et à la Cour royale soussignés.
Ph. B E L A M Y ,
P IE T ,
M A N D A R O U X -V E R TA M Y ,
L IO U V IL L E .
« I
C^* /(X
¿LbyaJ»
imprimerie de giraudet et jouaust rue saint honore 315
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Routrou, Michel. 1838?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Belamy
Piet
Mandaroux-Vertamy
Liouville
Subject
The topic of the resource
compétence de juridiction
responsabilité des agents administratifs
responsabilité de l'Etat
négligence
article 1384 du code civil
faute administrative
actions contre l’État
dommages et intérêts
bateau lavandière
conseil d’État
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire a consulter et consultation pour MM. Michel de Rotrou et compagnie, propriétaires des coches, contre M. le préfet de la seine, représentant de l’État.
Annotations manuscrites : « 18 mai 1838, arrêt confirmatif de la cour royal de Paris, 1er chambre sirey 1838-2-214 ».
Table Godemel : Etat. (nation).
1. L’état est-il responsable des dommages causés par ses agens dans l’exercice de leurs fonctions, lorsque le dommage provient d’une faute de leur part ?
2. L’action en dommages-intérêts intentée contre l’Etat est-elle de la compétence des tribunaux ou de celle de l’autorité administrative ?
lorsque le fait dommageable reproché aux agens administratifs ne peut être condamné ou justifié que comme contraire ou comme conforme aux règles d’une bonne administration, l’autorité administrative est-elle seule compétente pour statuer sur l’action en dommages intérêts intentée contre l’Etat ?
Lorsque le fait dommageable reproché aux agens administratifs a été prévu et puni par la loi, l’action en responsabilité civile dirigée contre l’Etat est-elle de la compétence exclusive des tribunaux, soit que l’autorité administrative ou que les tribunaux de répression ordinaire soient chargés d’appliquer la peine aux agens administratifs ? de plus, le jugement de la demande ne peut-il être arrêté que dans un seul cas ; c’est lorsque l’action publique contre les agens administratifs a été intentée avant ou pendant l’instance à fins civiles dirigée contre l’état ?
3. L’Etat est-il valablement assigné, sur la demande en dommages intérêts, en la personne du préfet du département ? Compétence. v. action possessoire.
7. l’action en dommages intérêts intentée contre l’Etat est-elle de la compétence des tribunaux ou de celle de l’autorité administrative ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Cuiraudet et Jouaust (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1838
1837-1838
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2804
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Charenton-le-Pont (94018)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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actions contre l’État
article 1384 du code civil
bateau lavandière
compétence de juridiction
Conseil d’État
dommages et intérêts
faute administrative
négligence
responsabilité de l'Etat
responsabilité des agents administratifs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53554/BCU_Factums_G2717.pdf
8acb8c5aae0e52452e0bc041e6564460
PDF Text
Text
COUR ROYALE■
:
MÉMOIRE
DE RIOiM;
Dame
A n to inette
du sieur
B R U N ,
G u illa u m e
V E RNIETTE,
ve u ve, en premières noces,
B U J A D O U X ,
et sieur
J oseph
son second m ar i, marchands, ha-
b it a ns de la ville de C l e r m o n t , appelans ;
CONTRE
L e s sieurs A
n e
nt
et
M ic h e l
B O N H O U R S , dame
B O N H O U R S et sieur J e a n - B a p t i s t e
C E L M E son m ari, et le sieu r Lo u is B O N H O U R S ,
A n ne
tuteur lég a l de ses enfans m ineurs, tous proprié
taires, habitans de Clerm ont, partie de Montf errand,
Intimés.
P
armi
■- J
I re
•
les droits accordés par la loi civile à l ’homme
social, un des plus respectables est celui de trans
mettre son patrimoine à un héritier de son choix.
C hez tous les peuples, les législateurs ont protégé
l ’exercice de ce droit sacré qui nous f a i t , en quelque
sorte, revivre dans la personne dont les affections et
il |
'■
»!
'
POUR
M1
CHAMBRE.
f:
�les services ont mérité un dernier témoignage de nos
souvenirs et de notre reconnaissance.
Mais il est rare que les efforts de l ’intérêt privé ne
cherchent pas à. anéantir les dernières volontés d ’ un
testateur. Pou r tâcher d ’y parvenir, les collatéraux ne
manque nt pas de prétextes-, l ’homme q u ’ils ont oublié
pendant sa vie leur parait inju ste, s i, à sa m o rt, il les
oublie lui- même, s’il gratifie ceux q u i , dans tous les
instans de sa vie , lui ont consacré leurs soins, et q u i ,
pour embellir son existepce ou la soulager dans les
tristes années d ’une vieillesse infirme, n ’ont épargné ni
voyages, ni veilles, ni dépenses.
C ette cause présente un nouvel exemple de ces ten
tatives hasardées, contre sa propre conviction, par l ’es
prit de cupidité qui se laisse bercer de l ’espoir q u ’il
de vra , peut-être à l ’err eu r,
justice éclairée l u i refuserait.
une hérédité q u ’une
L e sieur B run a légué, par un testament olographe,
toute sa fortune à la dame V e r n ie t t e , sa sœur.
T o u t devait faire prévoir cette disposition.
U n e amitié toute particulière unissait le frère et la
sœur ;
C e l l e - c i avait recueilli dans sa maison un frère
infir me, qui avait quitté Paris pour être entouré des
secours d ’une sœur chérie. L à lui avaient été prodigués
les soins les plus m in u t ie u x , et tous les soulagemens
que des infirmités peuvent trouver dans les ressources
de l ’a r t , dans les attentions délicates des sentimens
fraternels;
11 ne voyait jamais les enfans Bonhours, qui sont
�ses neveux, il est vrai, mais dont il disait avoir depuis
long-tems à se plaindre.
L e sieur Brun a tracé, dans l ’écrit qui contient ses
de rnières volontés, des dispositions que son cœur lui
avait dictées; et son testament est tout à-la-fois un
monument d ’affection fraternelle et de gratitude.
Co mm en t pourrait-il être sérieusement critiqué?
Aussi dans l ’embarras où ils se tr ouv en t, les enfans
Bonhours qui attaquent le te st am en t, tantôt sou
tiennent q u ’il n ’est pas l ’oeuvre de la main du défu n t,
tantôt prétendent q u ’il n’est pas celle d ’un esprit sain
et intelligent; n'hésitant pas ainsi, pour se procurer
un succès illégitime, ou à accuser d ’ un faux la dame
Verniette, leur ta n te, ou à flétrir, par la supposition
de la démence, la mémoire de l ’oncle dont ils veulent
envahir la fortune.
Ces argumens, qui se détruisent l ’ un l ’autre par
une choquante contradiction, en les isolant même,
seront faciles à combattre.
^
Déjà une vérification par experts a fait justice de
l ’une de ces déplorables objections.
U n e preuve par témoins, en réduisant l ’autre à sa
vraie valeur, démontrera aussi qu'une volonté cons
tante et éclairée avait préparé, et a consommé les
bienfaits que le testateur s’est plu à répandre sur une
sœur q u ’il chérissait spécialement.
FAITS.
L e sieur Michel B r u n , dont le testa men t a donné
�lieu au procès, avait habité Paris pendant trente ans
environ.
D u r a n t cette longue absence, il n ’avait conservé de
relations intimes q u ’avec la dame Antoinette Brun sa
sœ ¡r, épouse du sieur Verniette, négociant à Glermont.
Il avait cependant une autre sœur, la dame Mich lie
B r u n , qui demeurait à Montferrand, où elle s’était
mariée avec le sieur Bonhours; mais les rapports du
sieur Brun avec cette sœur et avec l^-s Bonhours étaient
nuls ou peu agréables; il éprouvait même pour eux
une sorte d ’éloignement dont il est inutile de recher
cher les causes, mais q u ’il a manifesté dans plusieurs
circonstances.
Au contraire, il avait toujours existé entre lui et la
dame Yer niette une amitié v i v e , q u ’avait entretenue
un échange mutu el de soins, de services et d ’attentions,
et qui engageait le sieur B r u n à faire de tems en teins
■des voyages à C le :m o n t pour revoir sa sœur et pour
passer quelques semaines auprès d ’elle.
Dès 1802, il avait entrepris la commission à Paris-,
et souvent il envoyait à Glermont des marchandises de
diverses sortes. Sa sœur Antoinette lui procurait des
demandes 5 il la chargeait aussi de ses recouvremens.
Ces rapports d ’affaires ajoutaient à leur i n t im it é , et
line correspondance suivie existait entr’eux.
C ett e correspondance est établie par une foule de
lettres qui attestent aussi les sentimens affectueux du
frère envers la sœur; elle n ’a cessé q u ’en octobre 1823,
au moment oii le sieur Br un a quitté Paris pour venir
�habiter auprès et dans la maison même de la dame '
Verniette.
E n i 8 o 5 , il désira être parrain d ’une fille de sa sœur,
alors épouse du sieur Bujadoux; il fit , dans ce b u t , le
voyage de C le r m o n t , logea chez sa sœur, et passa deux
mois auprès d ’elle, sans autre table que la sienne.
E n 1809, il voulut goûter les plaisirs des vendanges
auprès de sa sœur; il occupa chez elle les mêmes appartemens que dans ses précédens voyages, fut traité de
la même manière, et ne la q u i t t a , elle et sa famille,
q u ’avec regret, lorsque ses affaires ne lui permirent
plus de prolonger son séjour. C e fut dans cette circons
tance, que le frère et la sœur se donnèrent réciproque
ment leur portrait.
.
Il serait superflu de parler des différens autres
voyages. Mais 011 ne doit pas passer sous silence celui
que fitle si eurB run, en 1 8 1 7 , q u ’avait rendu nécessaire
la mort de son père, et lors duquel eut lieu le partage
des biens de la famille.
Ces biens étaient situés à Montferrand , ce qui obli
geait M. Brun de se rendre fréquemment dans cette
ville où demeuraient les Bonhours. Cependant jamais
il n ’a couché chez eux; et lorsqu’il s'était vu dans la
nécessité de passer la journée à Montferrand, le soir il
revenait chez sa sœur Antoinette Brun, à Clermont.
L e sieur Brun avait souvent pressé la dame Verniette
de venir le voir à Paris. C elle -c i, mère de famille et
mar chande, n ’avait pu se rendre a son invitation.
Mai s, en février 18 22 , elle apprend que son frère
est malade. Alors l ’affection re m po rte , elle abandonne
�( 6 )
son ménage, son commerce, et va passer auprès de son
frère deux mois q u ’elle consacre à l ’entourer de ses
services. Ce n ’est que lorsqu’elle l ’a rendu à la santé,
q u ’elle quitte Paris pour revenir auprès de sa famille.
Cependant
plusieurs banqueroutes éprouvées par
le sieur Br un pendant l ’année 1 8 2 2 , lui causent des
chagrins qui bientôt altèrent encore sa santé-, des soins
cons'ans lui deviennent nécessaires. Il sent le besoin
de ne pas être livré à. des services mercenaires , e t ,
par une lettre écriteMe 9 février 1823 au sieur Jarton
aînéj marchand à Clermont^ il le prie de déterminer
une des filles de la dame Ve rnie tte , la demoiselle
Amélie Bujadoux sa filleule, à se rendre auprès de lui.
C elle -ci,
qui entrait alors comme novice dans la
communauté des Urs ulines , ne put se rendre auprès
de son oncle; mais elle fut remplacée par sa sœur ainée,
la demoiselle Agathe Bujadoux, q u i a prodigué pendant
plusieurs mois au sieur B r u n tous les services que son
état pouvait exiger.
Indisposée elle-même, et voyant son oncle en conva
lescence ,
la demoiselle Agathe revint auprès de sa
mère en juillet 1823.
L e sieur B run resta encore plusieurs mois à Pari s;
mais sa santé étant chancelante, et ses infirmités p a
raissant s’accroître, il vo ulut quitter les affaires et
venir se fixer à Clermont auprès de sa sœur.
A lo rs , pour se conformer aux désirs prcssans q u ’il
manifesta par plusieurs lettres écrites en octobre 1823,
le sieur Ve rniette son beau-frère alla le chercher.
A v an t de q uit te r Paris, il mit dans ses affaires lo
�( 7 )
'ìS V
plus grand ordre; il résilia le bail de son logement,
régla ses comptes avec ses commis, donna sa procuration
à un notaire de Paris, acheta une v o i tu r e , fit marché
avec un voiturier de Marvejols, et, voyageant à petites
journées, arriva à Clermont le 2 novembre, accom
pagné de son beau-frère Y e r n ie t te , chez lequel il alla
loger, suivant son usage,N.et dans la maison duquel il
est resté jusqu’à son décès.
Les jours qui suivirent l ’arrivée du sieur B run
furent employés par lui à rendre des visites à ses amis,
à régler différens comptes avec ses commettans, et à
quelques autres affaires.
L e i 5 novembre, il acheta divers objets à son usage;
le 1 7 , il acquitta de sa propre main une facture du
sieur Leg oy t et en signa l ’acquit (1).
L e 20 novembre, il fit le testament olographe, dont
les enfans Bonhours demandent la nullité.
C e testament est court; mais il contient tout ce qui
est nécessaire pour sa validité. L e içodèle en avait été
demandé à un jurisconsulte de Clermont. En voici les
termes :
« Ceci est mon testament^: »
« J’institue
mon
« Antoinette Br un.
héritière
universelle
ma sœur
A C le n n o n t-F erran d , le vingt
h novembre mil huit cent vingt-trois.
Signe Brun
« Michel. »
Depuis comme avant ce testament, le sieur Br un
a continué de sortir, le plus souvent seul; de visiter
(1) On rapporte cette facture et son acquit.
'
*
�ses amis; de diner chez eux ; de vaquer librement à
ses différentes affaires; enfin d ’agir et de parler comme
un homme qui jouit de toutes ses facultés morales.
Il donna notamme nt, le 4 février 1824? au sieur
Verniette une procuration qui fut reçue par le sieur
A s t a i x , notaire à C le r m o n t ,
et qui autorisait son
fondé de pouvoirs à traiter avee un sieur M alhie r ,
dont il avait été l ’associé à Paris.
C ’est seulement peu de mois avant sa m o r t , que,
son mal s’aggravant, il a cessé de sortir de la maison
de la dame V e r n ie t t e , où il occupait l ’appartement le
plus commode.
L e sieur Brun est décédé le 20 octobre 1824, laissant
à la dame Verniette une fortune modique , il est v r a i ,
mais précieuse pour elle, comme un gage del à tendresse
de son frère.
Telle est l ’analyse fidèle des faits qui ont précédé la
contestation actuelle.
L e testament fut présenté le 3 o octobre p a r M ' F a b r e /
notaire à Cle rm ont, au président du tribunal civil, L a
description en fut faite, et le dépôt ordonné entre les
mains du même notaire^, e t , par une ordonnance du
3 décembre su iv ant, la dame Verniette fut envoyée
en possession des biens de l ’ hérédité.
Cependant la famille Bonhours annonce bientôt des
projets hostiles.
L e i 5 janvier 1825, un conseil de famille est réuni
pour en obtenir une autorisation afin d ’agir en partage
de la succession de l ’oncle.
C e conseil de famille, dans la délibération d u q u e l il
�(
9
)
n ’est pas parlé du testament olographe, autorise l ’ac
tion en partage, quoique l ’un des parens, un oncle
maternel, refuse son consentement, la demande ne lui
paraissant pas fondée.
Alors, et par exploit du 4 février 1825, fut intro
duite l ’instance.
L a dame Verniette fit notifier le testament.
Les enfans Bonhours déclarèrent n ’en pas connaître
l ’écriture et la signature, et formèrent opposition à
l ’ordonnance d ’envoi en possession. Us alléguèrent aussi
que le sieur Brun ét ait, bien long-tems avant la date
du testament, dans un état d ’imbécillité et de démence,
qui ne lui aurait pas permis d ’exercer une volonté libre
et éclairée.
U n ju gem ent, du 3 décembre 182!}, ordonna une
vérification,
Imberl
et
ancien
nomma,
avoué,
pour experts,
Bonjour et
Cavy,
les
sieurs
tous les.
deux notaires l ’un aux Martres-de-Veyre , l ’autre à
Clermont.
L e choix de ces trois experts,
aussi habiles que
prudens, semblait devoir offrir la plus forte garantie
aux inquiétudes des parties et à la sollicitude de la
justice. O11 verra cependant q u ’ il n ’en a pas été jugé
ainsi.
Cependant des pièces de comparaison furent pré
sentées; les unes étaient authentiques, les autres sous
seing-privé.
Parmi les pièces autlientiques, la seule qui fut ré
cente, était la procuration du 4 février 1824, dont
nous avons déjà parlé, comme postérieure au testa
�ment.
C ett e
pièce
fut
présentée
par
les
enfans
Bonhours.
Les actes sous seing-privé consistaient principalement
en lettres écrites à diverses époques par le sieur Br un.
Les enfans Bonhours en présentèrent quatre dont
les dates étaient anciennes; la plus récente était an
térieure de près de quatre années au décès du sieur
Brun.
L a dame Yerniette consentit à les admettre pour
pièces de comparaison, mais à condition q u ’on a d
mettrait aussi beaucoup de lettres q u ’elle produisit
elle-même, et sur-tout celles qui étaient les plus rap
prochées de l ’époque du testament.
Il en fut autrement. Les plus rapprochées, c ’est-àdire les plus propres k éclairer les experts et la justice
furent rejetées par les Bonhours, qui ne pouvaient se
dissimuler le d a n g e r , p o u r e u x , de la comparaison de
ces écrits récens avec l ’écriture du testament.
Cependant les experts procèdent à la vérification
qui leur était confiée.
Dans leur procès-verbal ils transcrivent les dires des
parties. C eux des époux Verniet te rappellent en subs
tance les faits que nous venons d ’exposer, et la preuve
en est offerte.
Il est ajouté q u e , « s’il existe quelque différence
« entre les écritures et signatures du sieur Brun , cela
« ne peut provenir que des attaques et des maladies
« q u ’il a éprouvées; ce qui est établi dans différentes
« lettres q u ’ il a écrites à plusieurs personnes, dans
« lesquelles il leur dit q u ’il a la main tremblante, et
�(
11
)
« q u ’il n ’écrit q u ’avec beaucoup de peine et de diffi« culté. »
A l ’appui de leurs observations, les époux Vernielte
présentent aux experts plusieurs lettres et une facture
acquittée par le d é f u n t , trois jours avant la date du
testament.
Mais les experts-vérificateurs ne crurent pas devoir
faire usage de ces nouvelles pièces; et se fixant seule
ment sur les pièces adoptées dans le procès-verbal du
commissaire, les rapprochant de la pièce désignée, se
liv ra nt, d ’abord chacun à part soi, à l ’examen le plus
scrupuleux,
s étant ensuite com m uniqué leurs ré
f le x i o n s , ils s ’exprim ent ainsi :
« Nous avons remarqué que la physionomie qui
« résulte de l ’assemblage des caractères du testament
« s’éloigne de celle q u ’offre la contexture des onze
« lettres missives co m p ar ées.' C e p en d an t, en descen« dant dans les détails de la comparaison, on est
« obligé dé reconnaître que la conform ation de beau« coup de mots entiers et de chaque ca ra ctère, pris
« isolément de la pièce indiquée, est très-ressemblante
« à celle des mots semblables et des caractères isolés
« des lettres missives; et q u ’ainsi la différence de phy« sionornie des caractères paraît provenir de ce que
« celle de la pièce déniée a été exécutée avec pesanteur
« et d iffic u lté , tandis que celle des lettres missives
« annonce une plus grande facilité d ’exécution. »
Cet te explica Lion des experts paraîtra foit naturelle^
si l ’on considère que la plupart des lettres missives
étalonL anciennes, et q u ’elles étaient loutes antérieures
�aux attaques et aux maladies qui avaient causé à la
main du sieur B run cette pesanteur et cette difficulté
d ’exécution dont parlent les experts.
Ces hommes de l ’art eussent trouvé plus d ’identité
dans la physionomie, s’ils eussent pu employer, comme
pièces de comparaison, des lettres plus récentes, et
l ’acquit
écrit de la main du sieur Brun l u i - m ê m e ,
le 17 novembre 1 8 23, sur une facture due par le sieur
Lego yt .
Les experts considèrent ensuite les actes aut he n
tiques qui ne leur présentaient que des signatures
isolées et déjà anciennes. L e jplus grand nombre de
ces signatures remontaient à l ’an 1 2 , à l ’an i 3 *et à
l ’an 14 (1804? i 8 o 5 , 18 0 6 ) ; quelques-unes à 1 8 1 8 ;
une seule au 4 février 1 8 2 4 , c ’est-à-dire à une époque
rapprochée de celle du testament , qui est du 20
novembre mil h u it cent vingt-trois.
Les anciennes
signatures
paraissent aux
experts
présenter peu de similitude avec celle de la pièce déniée.
Mais la signature de la procuration reçue A s t a i x ,
notaire, le 4 février 1 8 2 4 , frappe particulièrement
leur attention.
« E lle s’éloigne,
disent-ils,
du caractère de la
« signature ordinaire du sieur B r u n ; mais 011 ne peut
« se refuser à lui trouver une grande ressemblance
« avec celle du testament; et les experts ne doutent
« pas qu e lles aient é té produites toutes d e u x p a r la
« même main. »'
Quo i de plus décisif q u ’ une telle opinion, fondée sur
un acte a u t h e n t i q u e q u ’avaient présenté les Bonh ou rs
�( i3 )
eux-mêmes comme pièce (le cQmparaison, et qui a été
fait presqu’à l ’époque tlu testament, c ’est-à-dire dans
un tems où le testateur était dans le même état p h y
sique, et éprouvait, pour écrire, la même pesanteur
de la main et la même difficulté d ’exécution, effet des
maladies q u ’il avait essuyées.
Les experts descendent ensuite dans des recherches
soigneuses sur la conformation de chaque lettr e, soit
du testament, soit de la.signature; et, comparant cette
conformation* à celle des lettres de la signature de la
procuration et même des caractères et des mots sem
blables q u ’ils aperçoivent dans les lettres missives, ils
démontrent que la même main a dù tracer ces différens
écrits.
Nous ne les suivrons pas dans des détails q u ’il serait
trop long même d ’analyser, mais qui prouvent avec
quelle exactitude, avec quel scrupule les experts se sont
acquittés du mandat que leur avait donné la justice.
Nous nous bornerons à transcrire le résumé de leur
avis. Il est ainsi conçu :
n
« Par suite de l ’examen et des observations qui
« précèdent, les experts ont formé leur opinion et
« déclaré, à Vunanim ité, q u ’il demeure évident pour
« eux que l ’acte soumis à leur vérification a etc écrit
« et signé de la même main qui a tracé les caractères
« de comparaison. »
L e résultat d ’ une telle vérification devait, il semble,
ne laisser aucune ressource aux tracasseries.
Mais les enfans Bonhours ne se découragèrent pas;
ils critiquèrent le procès-verbal des experts, et deman-
�dèrent mie nouvelle vérification 5 subsidiairement ils
offriient la preuve de diverses allégations hasardées,
par lesquelles ils prétendaient que le sieur Br un avait
.toujours vécu en bonne intelligence avec son beau- frère
et ses neveux Bonhours; q u ’étaiit tombé malade, à la
fin de 1823, le sieur Verniette alla le chercher à Paris,
et le conduisit à C le rm o u t; que depuis cette époque,
la dame Ver niette avait fait tout ce qui était en son
pouvoir pour éloigner de lui le père Bonhours et ses
enfans; que la plupart du tems, lorsqu’ils venaient le
voir, ils étaient repoussés avec rudesse sans être admis;
Qu e la dame Verniette le tenait en charte privée
pour empêcher, autant q u ’il était en elle, q u ’il eut
des communications avec ses parens et amis;
Que souvent elle le m altrait ait ,
et q u ’il en faisait
ses plaintes à ceux qui pouvaient l ’aborder;
E n f i n q u ’il avait f ré q u e m m e n t des attaques q ui lui
faisaient perdre connaissance, et qui l ’avaient réduit à
un état d ’imbécillité.
On ne fixait pas d ’ailleurs l ’époque à laquelle avait
commencé cet état d ’imbécillité.
Ces faits n ’étaient ni vrais ni vraisemblables, ni
pertinens. C ’est ce que démontra la dame Verniette
en demandant l ’ homologation du rapport des experts.
I,a cause portée h l ’audience,
le t r ib u n a l , par un
jugement du 23 avril 1 8 2 7 , n ’admit pas la preuve
offerte; mais par de longs considérans, déduits n o
t a m m e n t , de la faculté q u ’avaient les juges de 11e pas
adopter l ’opinion des experts, q u i , dans ces matières,
n ’est que conjecturale; du laconisme du testament qui
�( i5 )
lui parut prêter aux soupçons; de la circonstance que
la physionomie du testament s’éloignait de celle des
lettres missives; de celle q u ’à la signature du testament
était ajouté le mot M ic h e l 3 qui ne se trouvait pas dans
les autres signatures; de la différence que le tribunal
crut remarquer entre Vn finale de la signature du tes
tament et celle de la procuration ; enfin et sur-tout de la
surcharge du mot vin g t dans la date du testament; par
ces divers motifs, le tribunal ordonna une nouvelle véri
fication, en la confiant à MM. Hugues, C a il h eet Murât.
Ces experts furent chargés de s’expliquer sur les
surcharges qui existent dans le testament, notamment
sur le mot v in g t, et sur la date qui y existait avant;
d ’examiner si le mot vingt avait été tracé par la même
main qui avait écrit et signé le testament; de peser
enfin dans leur sagesse les doutes que pouvaient faire
naître les réflexions
énoncées
dans les motifs
du
jugement.
C e jugement se mb lait, par ses motifs au moins,
indiquer aux experts l ’avis q u ’ils avaient à exprimer; et
q u o iq u ’il réservât aux parties tous leurs moyens de fait
et de droit, sa rédaction présentait des singularités qui
devaient nécessairement faire éprouver quelque em
barras aux
personnes chargées de la nouvelle vén-
fiication.
On pouvait s’étonner aussi de ce que les Bonhours
n ’avaient pas été soumis à avancer les Irais de celle
seconde opération q u ’ils avaient demandée.
L a dame Verniette a interjeté appel de ce jugement.
Devant la cour, la dame Verniette a demandé l ’homo-
�logation du procès-verbal de vérification, et a renou
v e l é , subsidiairement, l'offre de la preuve des faits
q u ’elle avait consignés dans le rapport des experts.
Les Bonhours, en concluant à la confirmation du
ju gem ent, ont offert, aussi subsidiairement, la preuve
des mêmes faits q u ’ils avaient présentés eu première
instance.
L a C o u r a rendu , le i 5 juillet 1829, un arrêt ainsi
concu
«» :
« At te n du q u e , d ’après la nature de l ’affaire et les
« circonstances qui s’y rattachent, il ne peut q u ’être
« utile pour la découverte de la vérité, de corroborer
« l ’existence du testament dont il s’agit par des preuves
« testimoniales; que cette marche est admissible, soit
« dans l ’e s p r i t , soit dans la lettre de la législation
« romaine et de la législation du code civil,
« P a r ces m o t i f s ,
« L a C o u r , sans préjudice des fins et moyens, tant
« de fait que de d r o i t, qui demeurent réserves aux
h
parties sur le fonds, ordonne, avant de faire d r o i t ,
« q u e , dans le mois, à compter de la signification du
« présent arrê t, faite à avoué en la C o u r , les parties
« d ’ All em and feront preuve, tant par titres que par
« témoins, par-devant M, V e r n y , conseiller-auditeur,
« commis à cet effet:
« i° Que lu dame Verniette et ses filles ont soigné
u le sieur B r u n , tant à Paris q u ’à C l e r m o n t , pendant*
« les dernières années de sa vie, dans les maladies quo
« celui-ci a essuyées, ou à raison de scs infirmités;
« 20 Qu e le sieur Br u n , voulant venir se fixer à Cler»
�(
*7
)
« mont à la fin de 1823, invita le sieur Verniette à
/
« le venir chercher à Paris; et que le sieur Verniette,
« cédant à cette invitation, se rendit effectivement à
« Paris et revint à Clermont avec le sieur B r u n , qui,
« depuis, ju sq u’à son décès, a continuellement habité
« avec les époux Vern iette;
« 3 ° Qu e le sieur B r u n , depuis son arrivée à Cler« mont jusq u’à son décès, a reçu et rendu de nom« breuses visites et est allé dîner plusieurs fois chez
« des personnes avec qui il avait eu d ’anciennes rela« tions; que, d ’ailleurs, il sortait fréquemment, soit
« pour se promener, soit pour voir ses amis;
« 4°. Q u ’il a souvent exprimé à diverses personnes
« son affection particulière et sa reconnaissance pour
« la dame Verniette sa sœur, ainsi que sa volonté de
« lui laisser toute sa fortune ;
« 5 ° Que lorsque son testament eut été fait, ce
« testament a été présenté à des jurisconsultes, pour
« savoir s’il était régulier;
« Q u e , depuis la date de ce testament, le sieur
« Br un a déclaré plusieurs fois q u ’il avait donné toute
« sa fortune à la dame Ve rnie tte , sa sœur;
« S a u f aux parties de Godemel toute preuve con« traire, dans le même délai et par-devant le même
« commissaire, dépens réservés. »
Comm e 011 le v o i t , la C o u r a ordonne la picuve
offerte par la dame V e r n ie i le ; elle l ’a ordonnée parceq u ’elle l ’a considérée, non peut-être comme rigoureu
sement nécessaire, mais comme utile pour corroborer
V existence de testam ent; elle l ’a ordonnée en autoriT+
0
�sant seulement lesBonhours à faire la preuve contraire.
L ’on verra bientôt que tous les faits articules ont été
prouvés par la dame Ver niette , et que certains de ces
faits sont établis même par la preuve contraire, dont la
plupart des dépositions, d ’ailleurs, roulent seulement
sur de vagues propos ou sur des points non interloqués.
Mais, avant d ’entrer dans l ’exposé de ces preuves
orales, fixons-nous sur celles qui résultent de la vér i
fication de l ’écriture du testament.
DISCUSSION.
S I.
E x a m e n du rapport des experts.
Nous l ’avons dit en commençant : le rapport des
experts était aussi satisfaisant que décisif. 11 était
l ’ouvrage d ’hommes aussi éclairés que soigneux, et que
leur sévère impartialité a toujours désignés à la confiance
des tribunaux. Il a été le résultat de l ’examen le plus
m in u t ie u x , qui s’est fixé sur chaque m o t , sur chaque
lettre de la pièce déniée, pour les comparer aux mêmes
m ots , aux mêmes lettres que présentaient les pièces
reconnues.
Les experts n’ont épargné ni soins ni peines pour la
découverte de la vér ité; et leurs recherches les ont
conduits à déclarer, h l ’u n a n im ité, q u ’il demeurait
évident p o u r e u x que l ’acte soumis à leur vérification
avait été écrit de la même main qui avait tracé les
caractères de comparaison.
C e l t e opinion si positive, appuyée sur de nom
breuses et de puissantes raisons, dev rait, il sem b l o ,
�( *9 )
nous dispenser de combatiré en détail les argumens
des Bonhours.
Mais discutons-les rapidement.
L a physionomie de l ’assemblage des caractères du
t
testament s’éloigue, d i t - o n , de celle q u ’offre la con
texture des lettres missives;
L a signature du testament ne ressemble pas à celle
des pièces produites, si ce n ’est à celle de la procuration;
L a lettre n de la signature de la procuration diffère
de la même lettre dans le testament;
L e mot M ic h e l, ajouté à la signature du testament,
ne se trouve pas aux autres signatures;
Les
experts
n’ont
pas parlé des surcharges , et
notamment de celle du mot vingt ;
Enfin le laconisme du testament est frappant.
Telles sont les objections proposées. Reprenons-les.
L a différence dans la physionomie des écrits n ’est
pas un moyen sérieux. Les experts nous en expliquent
la cause; elle provient, disent-ils, de ce que l ’écriture
de la pièce déniée a été exécutée avec pesanteur et
difficulté, tandis que celle des lettres missives annonce
une plus grande facilité d ’exécution.
On pourrait ajouter que tous les jours l ’on remarque
quelque différence de physionomie dans les écritures
faites en divers tems, quoique par la même personne.
E l l e est produite par le changement de plume, d ’encre,
de disposition dans la m ai n , de soin dans celui q ui
écrit, de largeur ou de longueur donnée aux caractères
suivant le caprice de l ’écrivain.
Aussi tousles homuiesde l ’a r t , appelés à comparer des
�écrits, s’attachent-ils moins à la physionomie générale
q u ’à la conformation de chaque mot et cle chaque lettre.
C ’est ce q u ’ont fait les experts. Ils ont comparé
aux mots du testament une très-grande quantité de
mots semblables, pris dans les pièces de comparaison ;
et ils se sont convaincus, ainsi q u ’ils le déclarent,
d ’après la très-grande ressemblance, soit des caractères
isolés, soit de mots entiers, que la même main avait
écrit la pièce déniée et les pièces reconnues.
E n général, les lettres missives sont d ’une écriture
très-fine, et celle du testament est assez grosse. C ’est
une des principales causes de la différence des physio
nomies. C ett e différence n ’existe pas entre le testament
et l ’acquit écrit et signé, le 17 novembre 1 8 2 3 , par le
sieur B r u n , sur la facture du sieur L egoyt ; pièce qui
n ’est pas suspecte et dont parle un des témoins.
M a is, ajo ui e- t- on , parmi les signatures des pièces
de comparaison, il n ’y a que celle de la procuration de
1 8 2 4 , qui soit semblable à la signature du testament.
O n répondra q u ’il suffit de rapprocher toutes ces
signatures pour reconnaître que la dissemblance n ’est
pas réelle, et que, si elle est un peu apparente d'abord,
c ’es t,
comme nous l ’avons déjà d i t ,
à raison de la
finesse de la plume qui a tracé les signatures des pièces
de comparaison.
Aussi la dissemblance est d ’autant moins grande
que les signatures sont plus grosses. Par exemple, si
l ’on rapproche la signature du testament de celle d ’un
acte au t he n tiq u e , passé le 4 brumaire an 1 4 , devant
Gorse, notaire, on leur trouvera beaucoup d ’analogie.
�( 21 )
Toutes les diverses signatures indiquent, d ’ailleurs,
les mêmes mouvemens et les mêmes habitudes dans la
main qui a écrit.
A u reste,
n ’y eût-il même que la signature de la
procuration de 1 8 2 4 ,
qui fût conforme à celle du
testament,, ne suffirait-elle pas pour établir le mérite
de la pièce déniée? Ces deux actes, faits à deux époques
très-rapprochées, signés l ’ un et l ’autre en caractères un
peu gros, revêtus de signatures identiques, et annonçant
l ’un comme l ’autre de la pesanteur et de la difficulté
d'exécution dans la main, ces deux actes ne doivent-ils
pas se servir mutuellement de contrôle? E t si , comme
on ne saurait le contester, la signature de la procu
ration est vraie, comment pourrait-on douter de la
sincérité de celle du testament? ce n ’est pas au nombre
des pièces de comparaison, que l ’on doit s’arrêter dans
de telles vérifications. C ’est la nature de ces pièces,
c ’est le rapprochement de leurs dates avec celle de la
pièce déniée; ce sont enfin les dispositions physiques
où se trouvait le signataire, que l ’on doit sur-tout
* considérer, afin de reconnaître si la même main a réelle
ment tracé les diverses signatures.
Il serait superflu de se fixer sur u ne remarque faite
par les premiers juges; elle consiste en ce qu à la signa
ture
Brun
, le bas du dernier jambage de 1’« n ’est pas
abso lume nt le même dans les deux actes.
C ette différence, qui est fort légère, avait été aussi
remarquée par les experts; mais elle ne leur avait paru
digne d ’aucuneconsidération. Si les Bonhours l ’ont rele
vée,
c’est q u ’ils ont senti le besoin de faire valoir, même
�les plus futiles objections. Nous nous contenterons d ’y
répondre par une observation générale que f o n t, à ce
s u je t, les experts, et q u ’ ils appliquent en même lems
aux paraphes.
Voici leurs expressions :
« C ett e circonstance nous donne l ’occasion de rap« peler que la signature du sieur B r u n , soit dans le
« corps de l ’écriture, soit pour son paraphe, présente
« cles variations sensibles dans les lettres missives et
« dans les actes q u i nous ont é té présentés. »
Observation des plus justes,
et que l ’expérience
confirme tous les jours.
Q u e l ’on compare, en effet., de nombreuses signa
tures de q ui que ce soit, faites, sur-tout^ à des époques
différentes, on y trouver a, si l ’on v e u t , des caractères
généraux de ressemblance; mais si on les examine avec
trop de scrupule , on remarquera entre toutes des
différences sensibles, auxquelles pourraient s’appliquer,
et avec plus de force m êm e , les minutieuses critiques
employées par les Bonhours contre le testament du
sieur Brun.
L ’addition du prénom M ic h e l à la signature Br un
fournit aussi un argument aux Bonhours.
Mais que peut-on en conclure, si, comme les experts
l ’ont reconnu, le mot M ic h e l est écrit de la main du
d éfunt? lors même que le mot serait i n u t i l e ,
son
addition pourrait-elle nuire à la validité de l ’acte?
qui ne connaît la maxime : Quœ superabundant non
n ocen t? Q u ’on le supprime, si l ’on v e u t , le testament
u’eu sera pas moins valable,
�Mais , dira-t-on , le sieur Brun n ’était pas dans
l'usage de l ’ajouter à sa signature.
Q u ’importe? cette précaution annonce l ’importance
q u ’il attachait à son testament^ et le désir q u ’il avait
de ne laisser aucune équivoque sur la personne du
testateur. C a r le prénom M ic h e l devait aider à le faire
distinguer de toutes les autres personnes qui pouvaient
porter le nom de Brun.
Quelques surcharges dans le testament ont aussi
fixé l ’attention des premiers juges. Ils se sont plaints de
ce que les experts n’en avaient pas parlé.
L e silence des experts, à cet égard, prouve seulement
q u ’ils n ’ont pas pensé q u ’on dùl y attacher la moindre
importance. De légères surcharges, qui ne sont même
apparentes que sur le mot vingt de la da te , devaient
d ’autant moins fixer leur attention que la date était
très-facile à lire. Les experts, d ’ailleurs, ont fait tout
ce q u ’ils étaient chargés de faire; ils se sont assurés, et
ils ont déclaré que le testament entier, et par consé
quent le mot v in g t, un peu surchargé, étaient, comme
les autres, écrits de la main du défunt. Ils s’en sont
assurés par la vérification la plus détaillée et la plus
soigneuse. E n comparant, lettres par lettres, les mots
du testament aux mots des pièces de comparaison, a
ceux des lettres missives notamment, ils leur ont trouvé
une parfaite similitude; en sorte que les lettres de la
pièce déniée leu r ont p a r u , dis en t-i ls, porte/ / emp rein le du caractère habituel et involontaire (¡ne donne
la disposition des organes appliqués à l ’écriture. De
quelle conséquence, d ’après cela, pouvait être l ’appa-
�rence d ’ une surcharge? Pouvait-elle nuire à la validité
de la date? personne n ’ignore le contraire. On sait
que les règles de la loi du 25 ventôse an n ,
sur
les surcharges, ne sont pas applicables aux testamens
olographes.
« L a surcharge de la d a t e , non approuvée dans un
« testament olôgraphe, dit M. T o u ll i e r , n ’est pas un
« moyen de n u l l it é , s i , d ’ailleurs, la date est fixe
( D r o i t civil français, tome 6 , n° 3 6 7 ) .
C ’est aussi c e ’ que j u g e , en thèse, un arrêt de
cassation, du 11 juin 1 8 1 0 , rapporté dans tous les
recueils de jurisprudence (1).
Mais, a-t-on d it , le mot vin g t surchargé paraissait
couvrir le mot d e u x , q u i , se rapportant au mois de
novembre, serait précisément le jour de l ’arrivée du
sieur B run à C le r m o n t ; or, ajoute- t- on , il n ’est pas
présumable q u ’il se fût o c c u p é , ce j o u r - l à , de son
testament.
Ainsi on croit voir, c’est-à-dire on présume que le
mot d e u x a été remplacé par le mot 'vingt.
On présume aussi q u e , le jour de son arrivée de
P a r i s , le sieur Br un n ’a pas dû s’occuper de son testa
m e n t; et c’est en réunissant deux futiles présomptions,
q u ’on s’efforce de jeter de l ’ incertitude sur un seul
mot d ’ une date q ui cependant est très-fixe et très-facile
k lire. — Pitoyable argutie , q ui ne mériterait pas
même q u ’on la discutât!
A u reste, en examinant avec attention le mot sur-
(1) V . le Journal de Dcnevers, 8, i, 370, cl celui <le Sirey, io, 1 , 389.
�(
)
chargé, rien n ’est moins apparent mie la substitution
du mot vingt au mot d e u x . La surcharge parait plutôt
provenir de ce que le mot vingt ayant été d ’abord impar
faitement tracé, soit parle défaut delà plu m e, soit-par
toute autre cause, le testateur, en voulant réparer
cette imperfection , a surchargé les traits et appuyé
davantage sa plume, ce qui a noirci la teinte.
D ’ailleurs, c’est évidemment lamême plume, la même
encre, la même main qui ont écrit et cette surcharge
et le surplus du testament. C ’est ce que prouve l ’inspeclion de la pièce; c ’est ce qui résulte aussi du rap
port des experts, qui ont reconnu que tout avait été
écrit par l ’auteur des diverses pièces de comparaison;
c ’est même ce que démontre la plus simple réflexion.
C a r ne .serait-il pas absurde de présumer q u e , de tous
les mots qui composent le testament, un seul eut été
écrit d ’une main étrangère*!
Mais supposons même que le testateur eut d ’abord
écrit le mot d e u x , et q u ’il y eût, ensuite, substitué le
mot v in g t; quelle conséquence pourrait-on en tirer?
L e testament en serait-il moins valable? Le testateur
n ’était-il pas libre, n ’était-il pas capable de disposer,
le d e u x novembre, comme le vingt du même mois?
N ’avait-il pas aussi pu donner à sa disposition telle
date ou telle autre? ne se pourrait-il pas aussi q u ’il
ne l ’eut consommée par sa signature que le jour même
indiqué par la dernière date, surchargée ou non? Quelle
influence cela pourrait-il
avoir sur la validité du
testament? Portât-il même les deux dates du d e u x et
du v in g t,
4
le testament
olographe serait également
�à l ’abri de toute critique.
C ’est ce q u ’a décidé un
arrêt de la C o u r de cassation, du 8 juillet 1823 ( 1 ) .
C ’est trop nous arrêter, sans dou te, à cette vaine
objection.
Remarquons même que toutes les argumentations
contre le testament,
toutes les petites irrégularités
q u ’on lui reproche en indiquent la sincérité. C a r il
eût été facile de les éviter,
si le testament eût été
l ’œuvre d ’ une main coupable. Mais dans la sincérité de
ses dispositions, le testateur n ’a dû y attacher aucune
importance. Dans sa bonne foi, l ’ héritière n ’a pas dû
elle-même y faire att en tion; et sans cherchera engager
son frère à écrire un nouveau testament où nulle sur
charge n ’aurait été laissée, pour lequel, aussi, aurait
été employée une plume plus fine et plus propre à
donner au testament la physionomie des nombreux
écrits de son frère; sans faire retrancherde la signature
le prénom M ic h e l, q u ’elle savait bien ne pas y être
ordinairement joint; sans avoir recours enfin à aucune
de ces précautions qui décèlent plutôt le dol que la
franchise, la dame Verniette a accepté les bienfaits et
n ’a pas cru devoir s’occuper minutieusement de la
forme de chaque mot de l ’acte qui les consacrait. E l l e
ne po u v a it ,
d ’ailleurs, prév oir,
elle 11e devait pas
même supposer que les Bonhours se hasarderaient,
contre leur propre conviction, non pas à dénier, car
ils ne sont pas allés jusque-là, mais à dire q u ’ ils ne rc( 1 ) Journal de Sircy, tom. 25 , 1 , 3 1.
�( 27 )
connaissaient pas récriture et la signature du testateur.
Enfin les premiers juges se sont étonnés du laconisme
du testament.
Etrange objection ! comme s’il était nécessaire de
dire beaucoup de mois inutiles pour faire une dispo
sition vraie et une disposition saine.
C e laconisme s’exp lique, soit par l ’état physique
du testateur qui a voulu s’épargner les difficultés
d ’ un long écrit, la pesanteur de sa main ne lui per
mettant pas d ’écrire long-tems; soit par la circonstance
que c’est un jurisconsulte qui a donné le modelé du
testament et qui a dû le donner simple mais suffisant.
Le fait a été attesté par ce jurisconsulte lui-m èm e,
entendu dans la cause comme témoin.
L e laconisme critiqué n’a donc rien de surprenant;
on eût pu même être plus concis et notamment suppri
mer, à la signature le mot M ic h e l, qui était absolu
ment inutile.
Nous avons parcouru,
et nous avons réfuté, il
semble, toutes les objections élevées contre le testa
ment. Ce sont, cependant, ces faibles objections qui
avaient déterminé les premiers juges à repousser l ’opi
nion unanime de trois experts des plus recommanda7
bles , dont l ’ouvrage même signalait la scrupuleuse
exactitude comme la capacité; ce sont ces objections
qui les avaient déterminés à ordonner une vérification
nouve ll e, sous prétexte que l ’art des experts était
conjectural, comme si un nouveau rapport, fait par
de nouveaux exp erts, ne devait (rien présenter de
conjectural.
�L ’on remarquera aussi quelespremiers juges n ’ont pas
même chargé les Bonhours des frais de cette seconde vé
rification, quoique ceux-ci eussent d û , dans l ’exactitude
des principes, fournir même aux frais de la première.
C a r c’est à celui qui conteste l ’écriture et la signature
d ’un testament olographe, à démontrer q u ’il n’est pas
l ’ouvrage de la main du défunt-, c’est à lui à faire cette
preu ve , parce q u e , comme demandeur, il doit justifier
sa demande : a ctori incum bit probatio ; parce que le
légataire u n iv e rs e l,
envoyé en
possession
par une
ordonnance du jug e, comme l ’a été la dame Verniette,
a le titre en sa faveur, et que ce titre doit être exécuté
tant que sa fausseté ou sa nullité n ’est pas clairement
établie; parce q u e , d ’ailleurs, le dol et la fraude ne se
présument pas, et que c’est à celui qui les allègue à
les prouver ( C o d e c i v i l , art. i i i G ) .
Telle est la doctrine enseignée par M. T o u ll i e r , dans
son Droit civil français, tome 5 , n° 5 o 3 ; et cette doc
trine a été consacrée par plusieurs arrêts de cassation ,
deux desquels ont été rendus les 28 décembre 1824 et
10 août 1825 (1).
L a daine Verniette a le titre en sa faveur; elle est
non seulement en possession de fai t, mais encore en
possession de droit , en vertu d ’une ordonnance du
président du tribunal de C l e r m o n t , rendue conformé
ment à l ’article 1008 du Code ci vil; elle n ’a pas,
d ’ailleurs, à se défendre contre un héritier à réserve;
elle n’aurait donc rien à prouver elle-même; ce serait,
( 1 ) V o i r le J o u r n a l tic S i r e y , t o m e a 5 , i , pages i
l o m c a G , i , 1 17 , et s ui vantes.
,
58
et s u i v a n t e s ; et
�29 )
au contraire, à ceux qui l ’attaquent à tout prouver
(
pour justifier leurs prétentions; en sorte q u e , y eut-il
même du dout e, l ’exécution du testament devrait être
maintenue.
Mais s’il pouvait rester devant les premiers juges
quelque incertitude dans les esprits sur la sincérité du
testament, les résultats de l ’enquête offerte par la
dame Ver niette , et ordonnée par la co u r, la ferait
entièrement disparaître.
S2.
E xa m en de VEnquête.
L ’enquête est des plus satisfaisantes; c’est ce dont
il est facile de s’assurer en rapprochant de chacun des
faits admis en preuve, les dépositions qui s’y appliquent.
On devait établir, d ’abord, que la dame Verniette
et ses filles avaient soigné le sieur B r u n , tant à Paris
q u ’à C le r m o n t , pendant les dernières années de sa
v i e , dans les maladies que celui-ci avait essuyées, ou
à raison de ses infirmités.
Ces faits sont attestés par un grand nombre de
témoins.
t
L e premier témoin, M. .Tarton aîné, marchand a
C le r m o n t , déclare que « le sieur Brun avait desire
avoir auprès de lui une des demoiselles Bujadoux, dont
il était le parrain; mais que celle-ci n ayant pu se
rendre aux désirs du sieur B r u n , l ’ une de ses sœurs
partit à sa place, et fut accueillie et traitée avec les
marques de la plus entière bienveillance par son oncle. »
�L e témoin
ajoute que
« ce fut lui qui régla et
arrêta le départ de la demoiselle Bu ja doux. »
Il répond, sur l'interpellation de l ’avoué des Bon
h e u r s , « q u ’alors le sieur Br un avait ressenti à Paris
plusieurs attaques. »
Ce témoin dit aussi, « que le sieur B r u n , depuis
« son retour de Paris ju s q u ’à son décès, est constam« ment demeuré chez la dame Yerniette sa sœur, dont
« il a , aussi constamment, reçu les soins. »
L e quatrième té m oin, le sieur B o n n a b a u d , m é
decin ^ qui a soigné le sieur Brun depuis sou arrivée à
Clermont jus qu’à sa m o r t , parle du ton a ffec tu eu x
q u ’avait toujours le sieur Br un en adressant la parole
à sa sœur Verniette ou à ses nièces; il dit ne l'avoir
ja m a is rencontré se u l dans sa ch am bre, mais toujours
¿1 la com pagnie de q u e lq u ’ un de sa f a m i l le , p a rticu
lièrem ent de sa sœ ur et de l a j î l l e aînée.
Il
ajoute q u ’il
occupait
l ’appartement
le p lu s
agréable de la m a ison , ou auparavant i l avait v u la
dam e V ern iette m alade.
L e cinquième témoin a entendu dire par le sieur
B r u n que la fille aînée de la dame Y ern iette avait
f a i t le voyage de P a ris p o u r lu i porter des secours.
L e sixième témoin a vu cette demoiselle à Pa ris,
chez son oncle, qui était alors malade.
L a dame veuve Be rn a rd in , dont la déposition est
la neuvième,
« a été plusieurs fois témoin des soins
« empressés de la dame Y ern iet te pour son fière.
« Elle parle d ’ une c h a m b re qu e la daine Y e r n i e l l o
�( 3, )
« avait fait décorer pour recevoir sou frère, parce q u ’il
« avait l ’habitude d ’être bien logé. »
L e onzième témoin , perruquier du sieur B r u n , « a
« constamment observé q u ’il recevait, dans la maison
« de sa sœur, tous les soins q u ’exigeait son état. »
Il ajoute « q u ’il occupait une chambre au premier
« é t a g e , décorée à neuf. »
L e treizième témoin , sous-maîtresse dans l ’insti
tution de Madame Bachélerie, avait su d e là demoiselle
B u j a d o u x , avec qui elle était liée, q u ’elle allait à
Paris pour donner des soins à son
oncle.
Depuis
l ’arrivée à Clermont du sieur B r u n , elle a su que sa
sœur et sa nièce lui prodiguaient tous leurs soins.
L e dix-septième témoin, Jeanne P e t it , a vu les soins
donnés par la dame Verniette à son frère, notamment
d e u x ou trois mois avant, sa m o rt; elle les indique
et ajoute que ce soin lu i parut tellem ent répugnant
q u ’e lle dit à la dam e T^erniette , q u ’elle était bien
pauvre , mais q u ’elle ne le fe r a it p a s , quand on lu i
donnerait un louis p a r jo u r .
L e troisième témoin de la prorogation d ’enquête a
su que le sieur Brun a été soigné à Paris et à Clermont
par Madame Verniette et par ses demoiselles. Il a vu
la lettre par laquelle M. Brun avait prié sa sœur de
lui envoyer une de ses demoiselles pour lui donner des
secours dans une maladie dont il était alors atteint. Il
a vu aussi une autre lettre de M. Brun qui se loua it
des attentions de sa nièce ; et M. Brun lui en a parlé
lui-même depuis son arrivée à Clermont.
�Toutes ces dépositions ne laissent pas le moindre
doute sur le premier fait interloqué.
L e second fait tendait à savoir si le sieur Brun avait
invité le sieur Verniette à l ’aller chercher a Paris; si
celui-ci s’était rendu à cette invitation, et si depuis
son arrivée à C le n no nt ju squ’à son décès, le sieur
Brun avait
continuellement
habité avec les époux
Verniette.
Toutes les circonstances de ce fait complexe sont
tellement certaines, q u ’on n ’entreprendra pas, sans
d oute, d ’en nier aucune.
Qu e ce soit sur l ’invitation du sieur Brun , que le
sieur V e r n ie t t e , son beau-frère, est allé le chercher à
Paris et l ’a conduit à C l e r m o n t , c’est ce que prouvent
même plusieurs lettres du sieur Br un.
Dans une lettre du 8 octobre 1823, écrite à sa sœur,
il s’exprime ainsi : Je voulais écrire hier p o u r dem ander
que Von fa s s e partir v ite mon b ea u -frère y mais
31 . Jarton ou J^augelade, je crois, me d it q u ’ i l était
in u t ile , et que 31 . B a rd avait écrit en lu i marquant
de ne pas perdre de tems.
Dans une autre lett re, du même mois , au sieur
Verniette, il lui dit : T^olrc départ rn est tout-à-fait
nécessaire et même urgent.
Beaucoup de témoins parlent aussi de cette demande
du sieur B r u n , et du départ du sieur Verniette pour
ramener son beau-frère à Clermont.
C ’est ce que
déposent, notamme nt, le premier témoin, le huitième
et le neuvième de l’enquête directe, le premier et lu
troisième de la continuation do celte enquête.
�Qu ant à la cohabitation constante du sieur Brun
depuis son arrivée à Clermont ju sq u’à son décès, elle
n ’a jamais été désavouée par les Bonhours, q u i , au
contraire, en ont argumenté eux-mêmes. L a preuve
en résulte, d ’ailleurs, de l ’ensemble des dépositions
des deux enquêtes, dépositions dont plusieurs parlent
de la chambre décorée à neuf q u ’occupait le sieur Brun
chez sa sœur.
Par le troisième fait interloqué, la C o u r avait voulu
savoir si le sieur Brun , depuis son arrivée à Clermont,
avait reçu
•> ou rendu de nombreuses visites;/ s’il était
allé dîner chez des personnes avec qui il avait eu d ’an
ciennes relations,
et s’il sortait fréq uem m en t,
soit
pour se promener, soit pour voir ses amis.
Cela tendait à éclairer la C o u r sur l ’allégation des
Bonhours, qui prétendaient que le sieur Br un avait
toujours été tenu en charte privée.
Or,
jamais assertion
ne fut plus contraire à la
vérité. Elle est démentie par la plupart des dépositions
de l ’enquête directe, et même par plusieurs des dépo
sitions de l’enquête contraire.
Ces nombreuses dépositions attestent que le sieur
Brun était très-libre dans la maison de la dame Y e r niette; que ceux qui le connaissaient venaient l ’y voir;
que lui-même allait leur rendre des visites; q u ’il en a
rendu plusieurs, à son médecin notamment, sans être
accompagné de personne; qu il se promenait aussi sur
la place de Jaude, tantôt seul, tantôt avec la dame
Y e rn ie t le ou ses enfans.
Les huitième et onzième témoins de l ’enquête con-
5
�( 34 )
traire déclarent eux-mêmes avoir vu le sieur Br un se
promener, soit devant la porte de la maison Ve rn ie tte ,
soit sur la place de Jaude: ils ajou tent, il est v ra i ,
q u ’il était avec quelqu'un, de la maison V er niette;
mais ce n ’en est pas moins démentir l ’allégation de la
charte privée.
Il est certain, en effet, que le sieur B run n ’a cessé
de sortir et de se promener, ou seul ou en compagnie,
si ce n ’est lorsque l ’augmentation de sa maladie et ses
infirmités s’y sont opposées; c’est-à-dire, comme le dé
clare son médecin B on abaud , quelques mois seulement
avant sa mort.
Il est aussi prouvé par les enquêtes que le sieur Br un
a plusieurs foisdiné ou soupé chez d ’anciens amis. C ’est
ce q u ’attestent, notamment les premier et deuxième
témoins de l ’enquête directe, le troisième et le septième
de la prorogation d ’enquête.
D ’autres témoins ont vu dans diverses occasions le
sieur Brun diner en famille chez la dame Verniette sa
sœur.
L e quatrième fait interloqué tendait à la preuve que
le sieur Br un avait exprimé à diverses personnes son
affection particulière et sa reconnaissance pour la dame
Ve rn ie tte , ainsi que sa volonté de lui laisser sa fortune.'
Ge fait est attesté par beaucoup de témoins.
L e premier témoin, M. Jarton aîné, lié d ’amitié
depuis l ’enfance avec le sieur B r u n , déclare q u i l lu i
avait m an ifesté des intentions bienveillantes p o u r la
dam e V ern iette sa sœur, et q u ’à l ’époque où il fil son
testament, époque que le témoin ne peut préciser, il
�(
35
)
lui avait dit q u 'il avait e x é c u té ce q u i l avait tou
jo u r s eu l ’intention de fa ir e .
C e même témoin d i t , au contraire, sur une inter
pellation de l ’avoué des Bonhours, que le sieur Brun
ne lui avait jamais parlé, avec le ton de l ’affection, de
ses neveux Bonhours. 11 se rappelle q u e , fort peu de
teins après l ’arrivée du sieur Brun à C lerm o nt,
le
témoin et sa femme étant allés lui rendre visite, les
enfans Bonhours vinrent aussi le voir,
et q u ’ils en
furent mal accueillis ; que le sieur Br un leur avait
même dit : « Qu e venez-vous faire ici? je n ’ai pas
besoin de vous. »
L a dame Jarton, second témoin
raconte aussi le
même fait.
L e quatrième té m oin , le médecin Bonabaucl, a re
marqué le ton affectueux q u ’avait toujours le sieur
Bru n en adressant la parole à la dame Verniette et à
ses enfans. Il dit que jamais il ne lui a parlé des enfans Bonhours.
L e sieur Brun a dit au cinquième témoin, dans une
conversation, q u i l se trouvait p lu s h eu reu x dans le
sein de sa fa m ille 3 à C le r m o n t, que lorsqu’il en
était f o r t éloigné.
L e sixième témoin déclare que, « dans les différentes
« conversations q u ’il a eues à Paris avec le sieur Brun,
« il lui a paru que ce dernier portait plus d ’affection à
« la dame Verniette sa sœur, q u ’aux B o n h o u r s ,..........
« et que lorsqu’ il a entendu parler du testament du
« sieur B r u n , il n’en a pas été surpris. »
Le douzième témoin était dans la maison, un jour
�'( 36 )
où l ’un des enfans Bonliours se présenta à son oncle,
q u i le reçut assez froid em en t y le témoin lui ayant
fait observer que c’était son nev eu , il lui répondit
q u ’ i l le savait bien , mais q u ’i l ne v o u la it pas parler.
A une plaisanterie, lors d ’ une autre visite que le
témoin fit au sieur Brun , celui-ci lui répondit :
« Vous voulez que je me m arie, je suis infirme, je
« n ’ai pas une brillante fortune; j ’ai perdu beaucoup;
« heureusement j ’ai eu une bonne sœur et un beau« frère qui m ’ont été utiles (il parlait alors du sieur
« B u ja d o u x ) ; et ce que je possède, je le laisserai à
« ma sœur Verniette , à qui je conserve beaucoup de
« reconnaissance. »
L e troisième témoin de la continuation d ’enquête
déclare que le sieur Brun lui avait dit que la dame
Verniette et lui s’étaient toujours beaucoup aimés; que
« cette in t im it é , qui datait de l ’enfance, tenait à la
« conformité de leurs caractères, et à ce que la seconde
« femme de leur père les avait obligés, jeunes encore,
« de sortir de la maison paternelle. »
L e surplus de la déposition prouve aussi l'affection
particulière du sieur Brun pour sa sœur V e r n i e t t e . '
L a dame Verniette a v a i t , enfin, offert de prouver,
5 ° q-ue, lorsque le testament eut été fait, elle l’avait
présenté à des jurisconsultes pour
savoir
s’il était
régulier, et 6 ° que , depuis la date de cet a ct e, le sieur
Br un avait déclaré à plusieurs personnes q u ’ il avait
donné toute sa fortune à la dame Verniette sa sœur.
Ces deux faits ressortent aussi de l ’enquête.
Sur le premier des deux faits, M* B i a u z a t , avocat
�(
)
37
à C l e r m o n t , a déclaré que c ’était lui q u i avait donné
le modela du testam ent, qu i l s était attache a fcni'c
le p lu s b r e f possible , parce q u ’on lu i avait dit que le
testateur écrivait péniblem ent.
Il ajoute ne pas connaître la personne qui lui avait
demandé ce modèle; mais que plus tard on lu i présenta
la c o p ié de ce testament, écrite sur une dem i-feu ille de
p a p ier tim bré et signée de M ic h e l B r u n , ........ et q u ’il
trouvala copie conform e au m odèle q u ’il avait fo u r n i.
Sur la représentation faite à M e Biauzat du testa
m e n t, il a cru le reconnaître.
L e neuvième témoin , la veuve Be rnardin, a déclaré
être la personne qui était allée chercher le modèle du
testament chez Me Biauzat.
E lle ajoute que la dame Verniette lui avait dit avoir
consulté sur ce testament
fort régulier.
i\ l.
Boirot qui l ’avait trouvé
H
~ M. B o i r o t, entendu dans la contr’enquête, ne s’est
pas rappelé ce fait; ce qui paraîtra peu étonnant, puis
q u ’il s’est écoulé plus de six ans depuis cette époque.
L e sieur Gillet, horloger, septième témoin, est celui
qui procura à la dame Verniette la demi-feuille de
papier timbré dont 011 s’est servi pour la confection
du testament.
C 'é ta it,
dit-il, peu de
tems après
Varrivée du sieur Brun ci C lerm ont} et pendant q u ’on
fa is a it les vins.
Divers autres témoins parlent des dispositions testa
mentaires, comme leur ayant été déclarées par le
testateur lui-même. Il a d i t , notamment au premier
témoin, à l ’époque du testament, q u i l avait e x é c u té
�( 38 )
ce q u ’i l avait toujours eu l ’intention de f a i r e ; au
septième témoin , et à plusieurs reprises, en parlant
de la dame Verniette : e lle p ren d bien assez de peine
p o u r m oi; elle sera mon héritière, v o ilà mon héritière ;
au neuvième témoiu, q u i l avait tout donné à sa sœur.
Les dix-septième et dix-huitième témoins, Jeanne
Petit et Rosalie L e b o r o t , parlent du testament comme
ayant été fait peu de tems après l ’arrivée du sieur Br un
à Clermont.
L a dame B r u n en parla à l ’ une d ’elles à l ’instant où
il venait d ’ètre fait. L ’autre témoin voulait faire des
emplettes dans le magasin
de la dame Verniette ;
celle-ci, qui était dans la chambre de son frère, étant
appelée, ne descendit ,que pour l ’engager à repasser,
disant q u e lle était en a ffa ires/ que le sieur Brun 3 son
fr è r e , fa is a it son testament et lu i donnait tout ce
q u i l possédait.
L e même fait est déclaré par le quatrième témoin
de la continuation d ’enquête, comme l ’ayant appris
de son épouse, dix-huitième témoin.
On le voit. L ’enquête prouve les soins affectueux
donnés au sieur Brun , pendant ses maladies, soit à Paris,
soit à C l e r m o n t , par la dame Verniette et ses enfans;
E lle
prouve que ce fut sur la demande de son
beau-frère, que le sieur Verniette se rendit à Paris
pour le conduire auprès d ’ une sœur qui le chérissait,
et dont les secours lui étaient nécessaires à cause de ses
infirmités;
E l l e prouve q u ’ il est constamment resté chez cette
sœur; mais q u ’ il y jouissait de la plus grande liberté;
�q u ’il y recevait ses amis; q u ’il allait les visiter luimême et manger chez e u x ; q u ’il se promenait à son
gré, ou seul, ou accompagné de ses parens.
Elle prouve enfin son affection, sa reconnaissance
pour la dame Ver niette , ses projets plusieurs fois
annoncés de lui faire le don de toute sa fortune, et
l ’exécution de ce désir par uii testament dont il parle
so u v e n t, depuis sa d a te ,
comme é tant
une juste
récompense des services qui lui avaient été rendus.
Toutes ces preuves sont d ’autant plus puissantes
que l ’enquête contraire ne les affaiblit même pas.
Dans leur enquête contraire, les Bonhours se sont
principalement occupés de faits sur lesquels l ’arrêt
interlocutoire ne portait pas.
Ainsi ils ont fait entendre plusieurs témoins qui
ont déclaré q u ’ils avaient examiné Je testament, q u ’ils
l ’avaient comparé à des lettres missives qui leur avaient
été présentées par les Bonhours, et q u ’ils avaient cru
reconnaître une différence totale entre le testament
et les lettres.
C om m e si elle était digne de quelque considération,
l ’opinion de certaines personnes officieuses, q u i , sans
mandat de la justice, sur la seule invitation
des
Bo nh our s, et sans autres*renseignemens que ceux qui
leur étaient fournis par ces derniers , sans pièces de
comparaison si ce n’est quelques lettres anciennes; en
un mot, sans autre examen q u ’ un coup-d’œil vague et
sur la justesse duquel a pu influer même la préoccu
pation dont on les avait entourées;
comme si une
telle opinion pouvait être mise en balance avec l ’avis
�unanime de trois experts nommés par la justice, qui
ont opéré sur de nombreuses pièces de comparaison,
et qui ont apporté à l ’opération qui leur était confiée
la scrupuleuse attention que l ’impartialité de leur
devoir leur commandait.
L ’ un de ces témoins, le sieur C u l l i a t , expert, qui
a eu la complaisance de se prêtei* aux désirs des
Bonhours et d ’a l l e r , p a r c u r io s ité , d i t - i l , voir au
greffe du tribunal de Cle rmont le testament qui y
était déposé; le sieur C u llia t prétend avoir comparé
cette pièce à la
Mais ,
chose
procuration
singulière ,
du
lorsque
24 février
le
sieur
1824*
Cullia t
eut beaucoup parlé contre le testament, et de la diffé
rence que présentaient les signatures apposées aux deux
actes, le conseiller-commissaire de l'enquête lui ayant
présenté le testament,, il a déclaré ne p a s reconnaître
clans le testament dép osé la même p iè ce q u i lu i avait
é té présentée p a r M . F a u v e r te ix , greffier. Étrange
résultat qui prouve quel degré de confiance on doit
accordera toutes ces dépositions qui n’o n t , d ’ailleurs,
aucun rapport avec les faits interloqués!
Les Bonhours ont aussi (iherché à prouver que le
sieur Br un était en état de démence et 11e pouvait
pas tester; e t , dans ce b u t , ils ont fait entendre le
sieur
Bergougnoux ,
pharmacien
à
Cle rmont ,
et
quelques autres témoins qui n ’ont fait eu général que
redire ce q u ’ils tenaient du sieur Bergougnoux.
Si l ’on en croit le sieur Bergougnoux , il avait vu le
sieur Brun à Paris un mois avant l ’arrivée de celui-ci à
Cle rm on t; et il l’avait trouvé dans un état de démence
�presqu’absolue , divaguant et ne répondant
exacte
ment
dit-il,
à aucune
question;
il avait
même,
chargé le sieur Jarton ainé d ’en prévenir sa famille.
Plusieurs échos , parmi les témoins de la contre
en quête, ont répété la même chose, comme l ’ayant
apprise du sieur Bergougnoux.
Si le fait eût été interloqué, on eût pu interroger
sur ce point M. Jarton ainé, un des témoins de l ’en
quête directe, mais dont la déclaration a précédé celle
du sieur Bergougnoux.
L a déclaration de celui-ci n ’est, au reste, q u ’ une
marque de plus du zèle ardent du sieur Bergougnoux
pou r la famille B o n h o u r s , dont
on prouverait au
besoin q u ’il a dirigé tous les efforts ; elle ne fera ,
d ’ailleurs, aucune sensation, si l ’on considère q u ’elle
est démentie et par les lettres q u ’a écrites le sieur
Brun à l ’époque même dont parle le sieur Bergougnoux,
et par toutes les dépositions de l ’enquête directe, et
même par beaucoup de dépositions de l ’enquête con
traire, qui démontrent que l ’état moral du ’ sieur Brun
était parfaitement
sain , soit avant son départ de
P a r i s , soit depuis son arrivée à Clermout.
L e sieur Brun est arrivé à C le r m o u t , le deux no
vembre 1823 ; et dans les mois d ’aout, de septembre
et d ’octobre précédons, il avait écrit plusieurs lettres,
soit au sieur Jarton je u n e, soit a la famille Verniette,
qui prouvent, q u ’il s’occupait avec beaucoup d intelli
gence de ses affaires de commerce, et q u ’il raisonnait
aussi très-bien sur sa santé.
Dans une de ces lettres, qui est du 12 septembre,
6
�( 4* )
écrite en entier de la main du sieur B r u n , quoi
q u ’elle ait quatre grandes pages et plus de l o n g u e u r , “
le sieur B run donne à sa sœur des détails sur l ’aggra
vation de .sa maladie, sur ses dépenses, lçs tracasseries
q u ’il éprouve, la difficulté q u ’il a à vendre le fonds
de son commerce, etc.
Il y parle aussi clc M. Bergougnoux père q u i , est,
d it -il , toujours à Paris. T o u t le contenu de cette lettre
signale l ’inexactitude de l ’étrange déposition du sieur
Bergougnoux.
Les erreurs de ce témoin sont aussi démontrées par
plusieurs
autres lettres
écrites par le sieur B r u n ,
pendant ce mois d ’octobre 182.3, à la fin duquel il
partit pour Clermont.
Dans deux lettres du même
jour, 8 octobre, écrites l’ une à sa sœur, l ’autre à sa
filleule, dont fut porteur le sieur Jarton ainé qui re
ven ait de Pa ris, il se plaint encore de sa maladie; il
dit combien il est pressé de terminer ses affaires; il ex
prime son désir q u ’on fa s s e p a rtir v ile son beau-frère;
il parle des pertes q u ’il fait depuis un an dans son
commerce, des mesures q u ’ il va prendre pour se rendre
à Cle rm o n t.j T o u t ce q u ’ il écrit annonce une intelli
gence lu c id e , et sur-tout attentive à ses intérêts.
Aussi ne les négligea-t-il pas, ses intérêts, avant de
quitter Paris :
11 traita du fonds de son commerce;
Il prit des arrangemens pour la résiliation de son
loyer, en conservant seulement une d i a m b i c où fut
placé le mobilier q u ’il n ’emportait pas. Ces a rra ng e
mens furent consignés dans un acte sous seing privé.
�(
Nous
43
)
rapportons le double signé
"
du
^
propriétaire ;
celui-ci a entre ses mains le double signé du sieur
Brun ;
Il laissa une procuration authentique à M. L a b b e ,
notaire à N e u i l l i , pour terminer ses affaires;
Il acheta un cheval et une voiture pour voyager à
petites journées;
Il prit en un mot toutes les mesures,, toutes les pré
cautions que les circonstances et son état de santé
pouvaient prescrire à l’homme le plus soigneux, le plus
réfléchi.
L ’on sait, et l ’enquête nous l ’a appris, q u ’à l ’arrivée
du sieur Brun à C le rm on t, ses premiers soins furent
de rendre des visites à ses amis, à ses relations, et d ’en
recevoir d ’eux.
L e lendemain même de son a r r i v é e l e 3 novembre
1823 , il régla avec son voiturier les irais du voyage de
Paris, et en reçut une quittance qui est écrite sur son
agenda, au bas d ’un règlement fait de la main même
du sieur Brun.
L e 17 du même mois il acquitta une facture du
sieur Legoyt. L ’acquit,, p o u r solde de tout compte
ju s q u ’à ce j o u r , est écrit en entier, daté et signé de
la main du sieur Brun.
Le 2.4 février su ivant, il donna sa procuration au
sieur Verniette. Ce fut le sieur Astaix, notaire, qui
la reçuttémoin de la prorogay *) et ce notaire (sixième
^
^
lion d ’en q u êt e), déclare que le §ieur Brun lu i parut
j o u ir de toutes ses fa c u lté s in tellectu elles y que sur
�V
( 44 )
une première lecture qui lui fut faite par le notaire,
le sieur Br un fit quelques observations que personne
ne lui suggéra; q u ’après une seconde l e c t u r e , aussi
don née par le notaire, il prit la procuration et la relut
lu i-m êm e.
Sont-ce là des indices d ’imbécillité ou de démence?
Veut-o n s’assurer davantage de l ’état moral du sieur
B r u n , soit à P a ri s , soit à C le rm ont? q u ’on relise les
dépositions des témoins :
Celle du sieur Jarton jeune , à qui le sieur Br un
avait fait un dernier envoi de marchandises le 22 sep
tembre
1823 f cinq semaines seulement avant son
départ de Paris;
Celle du sieur Jarton a în é , qui était à Paris en
septembre*et en octobre 1 8 2 3 , qui y voyait fréquem
ment M. B r u n , qui rapporta des lettres de lui à sa
famille, q u i , certes, aurait bien remarqué le prétendu
état
de
démence
s’il
avait
été
réel ,
et q u i , au
contraire, déclare q u e , plusieurs mois après, à Clerm o n t , à l ’époque où le sieur Brun lui dit avoir mis
à ex écu tio n ses dispositions fa v o ra b les à sa sœ u r,
P O S S É D A I T T O U T E SA. R A I S O N ;
il
'
•Celles de presque tous les témoins de l’enquête
directe et de plusieurs témoins de l ’enquête contraire,
qui ont vu le sieur Brun se promener seul, ([ni l ’ont
visité, qui en ont reçu des visites, chez quelques-uns
desquels il a même d în é plusieurs fois;
C elle , sur-tout, du sieur Bon ab aud, médecin , qui,
ayant constamment soigué le sieur Brun ju s q u ’à son
#
�( 45 )
décès, é t a i t , plus q u ’ un a u t r e , à portée de ju ger de
la capacité morale de celui q u ’il traitait. O r , ce témoin
atteste que le sieur B r u n jo u issa it com plètem ent de
ses fa c u lté s i n t e l l e c t u e l l e s q u i l avait les fo rm es
très-polies
q u 'il mettait de la recherche dans ses
expressions , q u ’i l recevait toujours avec politesse et
reconnaissance les soins des personnes q u i l ’appro
chaient.
Il ajoute : que le malade a cessé de sortir de son
appartement quatre ou cinq mois avant son d é c è s ,
et que s ix ou sept semaines seulem ent avant sa m ort,
v
les attaques réitérées q u ’i l avait éprouvées , et q u i
depuis p lusieurs mois étaient devenues p lu s m ultipliées,
avaient éteint chez lu i toute sensibilité et l'avaient
rendu indifférent à tout ce q u i se passait autour de
lu i ; cependant il reconnaissait les pei'sonnes. q u i l ’en
touraient , et notamment son m éd ecin ; mais il ne
répondait p lu s que très-lentement et p a r m onosyllabes
a u x questions qu'on lu i adressait.
A i n s i , ce n ’est qu e s ix ou sept semaines avant sa
m o r t , que le sieur B r u n avait perdu sa sensibilité;
encore n ’était-il pas en état de dé m e nc e;
Mais depuis plusieurs mois ses infirmités l'e m p ê
chaient de sortir de son ap partement.
C ’e s t , sans d o u t e , celte dernière circonstance, effet
de la maladie et non .de la c o n t r a i n t e , qui a fourni au
sieur Bergougnoux et à quelques autres témoins de
l ’en qu êt e contraire , un
prétexte
pour
tenait le sieur B r u n en charte privée.
dire
q u ’on
�.)
( 46 )
Une autre partie de la déposition du sieur Bergougnoux annoncerait q u e , 25 jours seulement avant le
décès du sieur B r u n , celui-ci était venu chez l u i , lui
par ut bien porta n t, se plaignit de la dame Yerniet te
qui vint le chercher, et disait q u ’elle le maltraitait
et le tenait enfermé.
Comm ent conciliera-t-on cette promenade du sieur
B r u n , sa bonne santé, sa v i v a c i t é , avec son décès
survenu bientôt après, et avec son état physique attesté
par le médecin?
T o u t démontre que la déclaration du sieur Bergougnoux et celle de son épouse, comme celle des personnes
qui ont redit ce q u ’elles leur avaient entendu dire,
sont indignes de la confiance de la justice.
A u reste, ces prétendus faits n'étaient pas inter
loqués. L a dame »Verniette n ’aurait donc pas à les
combattre.
Ces faits n ’avaient pas même été proposés à la C our
lors de l ’arrêt. On s’était borné à offrir la preuve vague
de l ’imbécillité, sans cotter aucun trait q ui la caracté
risât , sans indiquer même l ’époque à laquelle on la
faisait remonter.
Enfin le moral du sieur Brun se fùt-il affaibli à la
fin de ses jours, et celui-ci eût-il été en état de démence
plusieurs mois avant son décès , quelle conséquence
pourrait-on en tirer contre le testament?
Ne.sait-on pas que ce testament, quoique olographe,
fait foi de sa date; et q u ’ il f aud ra it , par conséquent,
�prou ve r q u e la démence était complette au 20 novembre
1 8 2 3 , époque du testament ( 1 ) ?
O r , non seulement cette preuve n ’est pas faite, mais
il e s t , au c o n t r a i r e , démontré par l ’ensemble comme
par le détail des deux e n q u ê t e s , que le sieur B r u n
jouissait alors c om p le tt e m e nt de toutes ses facultés
intellectuelles.
Ne sait-on p a s , aus si , q u ’ un testament olographe
ne pou rrait être dé tru it , sous prétexte de d é m e n c e,
q u e par les faits les plus graves, les plus caractéris
tiques d ’u ne démence habituelle q u i ne fit pas même
supposer d ’intervalles lucides? C a r
« un
testament
« olographe est plus favorable que le testament reçu
« par des notaires. L a présomption de sagesse est toute
« entière en faveur du
testateur qui prend le soin
« d ’é rire ses dernières volontés. »
( T o u l l i e r , D r o it civil français, tome 5 , n° 5 8 ;
Dagnesseau ,
p la id o ye r sur le
testament
de l ’abbé
d ’Orléans. )
* '
Il
s’a g it , dans la c aus e , d ’ un testament olographe,
d ’ un testament dont la sincérité a été reconnue par
l ’avis unan im e de trois experts chargés de le vérifier,
d ' u n testament dont l ’existence est corroborée par une
preu ve aussi complette q u ’on p ou va it la désirer, d ’un
testament qu i est un acte de sagesse et de reconnaissance,
(1) Voir sur ce point du doctrine les Questions de droit de Mcrün,
au mot testament , $ 7; un arrêt df Cassation , du 11 juin 1810; un
anêt de la Cour du Puis, du 17 juin 1822; 1111 anêt de la Cour de
Riom , cause des héritiers De Rouzat, du 20 janvier 18¿4 i l‘l “ n autre
arrêt de cassation, du 29 avril i 8'<4.
L e pr emi er f i nôt est r appor té par D e n c v e r s , t o m e ' 8 , 1 , 2 7 0 ; le
sec ond, le troisic-me et le q u a t r i è m e par S i r c y , t o i n e a j , 33, et t ome
2 , 2 7 7 , e t , m ê m e t ome , 1 , 27C.
�( 48 )
et qui a été le prix des soins d ’une sœur particulière
ment, chérie. L a C o u r ne s’ exposera pas à anéantir les
derniers vœux d ’ un
testateur ; elle s’empressera de
consacrer par sa justice les bienfaits q u ’à sa mort il
s’est plu à répandre sur celle q u i , seule, pendant sa
v i e , s était devouee à soulager ses tristes infirmités.
V E R N I E T T E , née B R U N .
M e A L L E M A N D , A v o ca t.
M e G R A N E T , A v o u é -L ice n cié .
RIO M ,
IMPRIMERIE
DE
SALLES
FILS ,
PRES
LE
PALAIS
DE
JUSTICE.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brun, Antoinette. 1831?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Granet
Subject
The topic of the resource
successions
testament olographe
testaments
infirmes
conseils de famille
experts
faux en écriture
expertises graphologiques
signatures
témoins
démence
médecine légale
affection fraternelle
charte privée
abus de faiblesse
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Antoinette Brun, veuve, en premières noces, du sieur Guillaume Bujadoux, et sieur Joseph Verniette, en second mari, marchands, habitant de la ville de Clermont, appelans ; contre les sieurs Annet et Michel Bonhours, dame Annet Bonhours et sieur Jean-Baptiste Celme son mari, et le sieur Louis Bonhours, tuteur légal de ses enfans mineurs, tous propriétaires, habitans de Clermont, partie de Montferrand, intimés.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Démence. v. testament. : 2. quel doit être le caractère des faits tendant à établir l’état d’imbécillité ou de démence d’un testateur ? Vérification : Lorsqu’après vérification des écriture et signature d’un testament olographe, les experts ont déclaré, unanimement, dans leur rapport que l’écriture et la signature sont émanés du testateur et que le testament est sincère et véritable ; que cette opinion est fortifiée et corroborée par les preuves contenues dans des enquêtes judiciaires ; les juges ne font-ils pas sagement de refuser un amendement de rapport et une nouvelle vérification d’experts, s’ils reconnaissent que cette vérification prolongerait inutilement le procès, sans espoir d’obtenir de documens plus positifs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1802-1831
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2717
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2718
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53554/BCU_Factums_G2717.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
affection fraternelle
charte privée
conseils de famille
démence
expertises graphologiques
experts
faux en écriture
infirmes
médecine légale
signatures
Successions
témoins
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53545/BCU_Factums_G2708.pdf
54dddb68315c62c7a0f65fe196fe5208
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ETUDE
D E Mc L O U I S
BARSE,
A V O U É P RÈS L A C O U R R O Y A L E DE R IO M .
A R R ÊT ONSLOW .
• L O U I S - P HI L I P P E , r o i d e s f r a n ç a i s , à tous c e u x q u i ces p r é s e n t e s v e r r o n t ,
sa lu t
:
L a C o u r r o y a le sé a n t à R i o m , d é p a r t e m e n t du P u y - d e - D ô m e , a r e n d u l ’ a rré t s u iv an t :
■A u d i e n c e p u b liq u e d e l à p r e m iè r e c h a m b r e c i v i l e , du m ard i se pt a vril m i l huit ce n t
trente-cinq;
sié g e a n t M M . A r c h o n - D e s p e r o u s e , c h e v a lie r de l ’ o rd re r o y a l d e la lé g i o n
<d'h o n n e u r , p r é s i d e n t ; V e r n y , P o r r a l - d e - S a i n t - V i d a l , G r e l l i c h e , D o m i n g o n , M o l i n , M e i l h e u r a t , c h e v a lie r de l ’ ord re r o y a l de la lé g io n d ’ h o n n e u r , c o n s e i l l e r s ; V i d a l , c o n s e i l l e r a u d i t e u r , to us m e m b r e s d e la dite ch am b re ;
A s s i s t a n t , M . S a l v e t o n , p r e m i e r a v o c a t - g é n é r a l p o u r M . le p r o c u r e u r - g é n é r a l ;
T
E n t r e M. A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , pr op rié taire , h ab it an t d e l a v i l l e d e C l e r m o n t F e r r a n d , a p p e la n t a ux fins d ’ exp loits des 27 j u i n , 1834 et 6 j u i l l e t 1835, d e j u g e m e n t r e n d u
au t r ib u n a l ci v il d e p r e m iè re in st an ce d e l’ a r r o n d isse m e n t d e C l e r m o n t - F e r r a n d , l e 25
m a rs m ê m e a n n é e , in t im é e t d é f e n d e u r e n i n t e r v e n t i o n , a ux fins d e r e q u ê t e s si gn if ié e!
p a r ac tes d’ avoué à a v o u é s , le s 27 ju in 1 8 3 4 , et 14 ja n v ie r 1 8 3 5 , a y a n t M» S a v a r in p o u r
av o u é , d ’ u n e pa rt ;
E t 1° M . G a b r i e l - A m a b l e - A u g u s t e O n s l o w , p r o p r ié t a i r e , h a b it a n t de la d it e v il l e d e C l e r
m o n t - F e r r a n d , et M m e M a d e le in e - C l a ris s e B e c - D u t r e u i l , v e u v e d e M . F r a n ç o is - M a u r ic e
O n s l o w , agissant tan t e n so n n o m q u e c o m m e t u t ric e d e leur» e n fa n s m in e u r s , p r o p r i é
t a ir e , h ab it an te de la v ille d e B l e s l e , d é p a r t e m e n t de la H aut e - L o ir e , in t im é s et d é f e n
d eu r s en in t e r v e n t io n , aux fins d ’ ex p lo it s et d e r e q u ê t e s su sd até s, c o m p a r a n t p a r M c L o u i s
B a r s e , l e u r a v o u é , d ’ autre p a rt ;
a» M . A r t h u r O n s l o w , officier r e t ra it é , c h e v a lie r de l ’ o rd re r o y a l de la lé g i o n d’ h o n n e u r ,
e t p r o p r ié t a i r e , h a b it a n t d e la dite v il l e de C l e r m o n t - F e r ra n d , i n t i m é , a p p e la n t et d éfe n
d e u r en i n t e r v e n t i o n , a ux fins d ’ ex p lo it s e t de r e q u ê t e s su sd até s, c o m p a r a n t p a r M c G la d e l ,
s on a v o u é , d’ a utre p a r t ;
3 " M me M arie d e B o u r d e ille , v e u v e d e M . E d o u a r d O n s l o w , h ab it an te de la dite v i l l e d e
C l e r m o n t - F e r r a n d , in t im é e e t d é f e n d e r e s s e e n i n t e r v e n t i o n , aux fins d 'ex p lo it s e t d e r e
q u ê t e s s u s d a t é s , c o m p a r a n t par Me B o n j o u r , son a v o u é , d ’ autre p a r t ;
/)• M. F o r t u n é - P i e r r e Hue , l i c e n c i é e n d r o i t , hab itan t d e la v ille de Pa ri s , a utre fo is r u e
do la L u n e , n ° 4 0 , aujo u rd 'h u i r u e du P a r a d is - P o is s o n n iè r c , m ê m e
agissant eu q u ali té
�de li q u id a t e u r d e la fa il li te du S ' . A r m a n d , c o m t e d e F o n t a in e - M o re a u , n é g o c i a n t , h a b i
tan t d e ladite v il le d e P a r i s , in tim é e t d e m a n d e u r en i n t e r r e n l i o n , aux fins d’ exp lo it s et
d e r e q u ê t e s susdatés , co m p a r a n t par M e J o b a n n e l , so n a v o u é , d 'au tre pa rt j
5 ° M ll e A n n e -M a r ie * P a m é I a de M o n g la s , p r o p r ié t a i r e , h a b it a n t e d e la v il l e de B o r d e a u x ,
fossé des C a r m e s , n® 2 3 ; M m e J e a n n e - C a t h e r i n e - A l b i n e de M o n g l a s e t l e si eu r E m i l e d e
G e r m a i n , son m ari , qui Pa uto ris e, in s p e c t e u r de la l o t e r ie , h ab it an t de la v ille d e P a l is, ru e
S a i n t - N ic o la s - d ’ A n t i n , n» a i j e t M« B e rt ra n d G é r u s - d e - L a b o r i e , arb itre de c o m m e r c e ,
h a b it a n t d e la v il le de B o r d e a u x , fossé des C a r m e s , n° 23 , ag issa nt e n q u a li t é de t u teu r de
d e M l l e A n n e - M a r i e G é r u s - d e - L a b o r i e , du S*. J e a n - B a p t i s t e - C h a r l e s G é r u s - d e - L a b o r i e ,
e t du s i e u r J e a n - B a p t i s t e - E r n e s t G é r u s - d e - L a b o r i e , ses e n fa n s m i n e u r s , hé ri tie rs d e
M m e A n n e - M a r i e - A d è l e d e M o n g l a s , le u r m è r e , tous d e m a n d e u r s e n i n t e r v e n t i o n , a ux
fins d e re q u ê t e s u s d a t é e , co m p a r a n t pa r M e D e b o r d , l e u r a v o u é , d ' a u t r e pa rt ;
POINT DE FAIT.
L e m ar ia ge de G e o r g e s L o r d c o m t e O n s l o w - C r a n l e y , p a ir d’ A n g l e t e r r e , e t ge n t ilh o m m e
d e la c h a m b r e d e sa m aje sté b r i t a n n i q u e , a v e c H e n rie t t e S c h e l l e y , d o n n a l e j o u r à d e u x
fils : T h o m a s e t E d o u a r d O n s lo w .
F a r t o n c o n t r a t d e m ari a ge , l e fils aîn é r e ç u t des p i r e et m i r e u n e c on stit u tio n sur la
v a l e u r de l a q u e l l e ils se r é s e r v è r e n t l e d roit d e fa ire n n e disposition de l 5 ,o oo li v . st e rl in g.
E d o u a r d O n s l o w v in t e n F r a n c e . Il ré si d a it e n A u v e r g n e a va nt I j 83 .
L e 6 m ars d e c e t t e a n n é e , e n pr é s e n c e de ses p è r e e t m è r e , so n c o n t r a t d e m a r ia g e
a v e c M l l e M arie d e B o u r d e ille , fran ça is e d e n ais sa n ce , m in e u r e é m a n c i p é e d 'â g e , p r o c é d a n t
sous V a l o r i s a t i o n du c o m t e d e L a i z e r , son cu ra te u r, fut p a s s é d e v a n t C h o r o n , n o t air e à P a r i s .
— L e fu t u r d é c la ra q u 'il résidait a c t u e l l e m e n t à C l e r m o n t ,
e t la fu tu re qu’ e ll e h ab it ait à
S a i n t - G e r m a i n - L e m b r o n , d e u x vil le s d ' A u v e r g n e .
-— L o r d O n s l » w e t sou épou»e c o n s t it u è r e n t » l e u r fils pu în é la so m m e de 20,000 liv r e s
st e rli n g fa isant e n a r g e n t de F r a n c e c e l l e d e 453>542 liv r e s 10 sols , à p r e n d r e savoir :
ï 5 ,o o o liv re s sur l es b i e n s co n stit u é s à T h o m a s O n s l o w , 22oo liv re s sur le m obil ie r que les
c o n sli t u a n s l a is se ra ie n t a le u r déc ès , a m o in s q u e l e fils a în é , v o u l a n t l e g a rd er e n n a t u re ,
p r é f é r â t p a y e r a son frère I«$ 2200 li vre s en a rg e n t et 3800 li vre s sur tous le s b ie n s e n c o r e
l ib re s e t a p p a rt e n a n t a ux c o n s t i l u a n s , mais q u ’ ils la is se ra ie n t à l e u r décès»
— 11 fut c o n v e n u q u e su r le s 20,000 l iv r e s s t e i l i n g les p è re ei m è r e du futu r ré a li se ra ie nt e n
b ie n s im m e u b le s sit u é s e n F r a n c e une so m me de 10,000 liv re s avant l ’ e x p ir a lio n d e d eu x
a n n é e s lors p r o c h a i n e s } q u e , ju sq ue s à c e l t e a c q u is it io n , il» p a y e ra ie n t aux futu rs u n e
•o n im e de 800 liv re s p o u r l e u r t e n i r li e u des in térê ts des 20,000 li vre s , mais qu ’ après les
a cqu is it io n s d ' i m i u c o b l c i situés en F r a n c e , ils ne p a y e r a ie n t plus q u e 3 oo l iv r e s par an
�^11
( 3 J
p o u r l ’ in t é ré t des t o , o o o li v r e t n o n e m p lo y é e s e t q u i n e se ra ie n t exig ib le s qu ’ après l e décès
des c o n s t i t u a n s ; il f u t d it que l e p a i e m e n t d e c e r e v e n u s e r a i t fait à E J o u a r d O n s l o w ,
lo r sq u ’ il sera it en F r a n c e , p a r te l b an q u ie r do Pa ris qu’ il l u i plairait ch oisir e t in diquer à
G e o r g e s lo r d O n s l o w son p è r e . L e s é pou x O n s l o w s’ o b lig è r e n t s o li d a ir e m e n t à faire c e t e m p lo i
d ’ u n e so m m e d e 10,000 liv re s st e rlin g en im m e u b le s situés e n F r a n c e . L e c o m t e d e L a i z e r
f u t m ê m e autorisé à po u rs u iv re p e r s o n n e l l e m e n t l ’ e x é c u t i o n d e c e t t e o b li g a t io n n o n o b st a n t
l a ce ssa tion d e sa q u alité de c u r a t e u r p a r l e m ar ia ge de M l l e d e B o u r d e ille , le s futurs l u i
d o n n a n t , à c e t e f f e t , tous pouvoirs n é ce ss aires. C e t t e c l a u s e , re la t iv e à l ’autori satio n d u
Comte de L a i z e r , fut d é c la r é e faire e s s e n t ie lle m e n t part ie du c o n t r a t .
— M l l e de B o u rd e il le se con st itua tous le s b ie n s à e l l e é c h u s pa r le d é c è s de «on p è r e , de
(a m èr e e t d e s o n fr è r e , et il fut dit q u e c o m m e il p ou rr ait a r r iv e r q u e , p o u r l e b i e n c o m m u n
d es é p o u x , il c o n v î n t d ’ a li é n e r le s p r op rié té s r é e lle s d e la f u t u r e , e l l e pou rr ait , lors d e sa
m ajorit é t le s a lié n e r à titre d e p a r a p h e r n a l , a v e c l e c o n co u rs e t le c o n s e n t e m e n t d e so n
m a r i , mais e n faisant e m p lo i du p r ix q ui en p r o v ie n d r a it e n a cqu isition s d e fonds ce rt a in s
situ és e n F r a n c e .
— O n c o n v i n t qu'au cas de p r é d é c è s d u m ari s a n s e n f a n s du m aria ge , la f u tu re aurait, p o u r
d o u a ir e , gains et ava ntages m a t r i m o n i a u x , la p le in e e t e n t iè r e p r o p r ié t é d ’ u n e m oitié d e la
so m m e co n st it u é e au fu tu r, e t profiterait des ava nta ge s q u e ce d e r n i e r a urait p u faire à so n
pr ofi t to u ch a n t l ’ autre m oit ié d e cette m êm e s o m m e , mais q u e , si, e n p r é d é c é d a n t , le m a r i
laissait des e n fa n s d u m ar ia ge , M ll e d e B o u rd e ille aur ait l ’ usufruit d e tous le s b ie n s d e son é p o u x
»ous la con d it io n do n o u rrir e t e n t r e t e n ir ces enfans et de v o ir r é d u ir e c e t usu fruit d e m oitié
lo r sq u e l ’ un d 'e u x aurait a tt e in t sa m a jo r it é ; q u ’ au su rp lus , soit qu ’ il y e û t , soit qu ’ il n ’y
eû t p a s , lors du pi-édécès d u m a r i , d 'e n f a n s nés d u m ari a ge , la fu tu re se re t ie n d r a it ses
b i j o u x , b ag ue s , jo y a u x e t d i a m a n s , lin g e s , effets et b arde s à son usage , e t ré a li se ra it le s
dro it s q u 'e l l e aur ait v is -à -vis la su cc ess ion de son m ari sur le s b ie n s situ és en F r a n c e , q u e
le s p è re et mèr o d e c e l u i - c i , e n e x é c u t io n d e l e u r e n g a g e m e n t solidaire , y a u r a ie n t acquis
aux d ép e n s des 20,000 l iv re s ste rl in g à lu i p a r e u x c o n s t it u é e s e n dot.
— C e s der n ie r s d é c la r è r e n t I ” q u e , p o u r la n u e p r o p rié t é d e c e t t e s o m m e , il y aur ait
substitution des enfans nés du m a ria g e , e t e n cas d e p r é d é c è s d e l ’ un ou de q u elqu e s- un s
d’ eu x, su b st it u ti on des surv ivans ou du s u rv iv a n t , q u e c e p e n d a n t E d o u a r d O n s l o w pou rr ait
a p p e le r u n de ses enfans à r e c u e i l l i r dans le b é n é f i c e d e ce t t e su b sii lu li o n u n e pa rt plus
g r a n d e que c e lle des a u t r e s ; e t a» q u e , s’ il 11’ y avait pas d ’ enfans p o u r r e c u e illir l e b é n é
fice de la subst ituti on en e l l e - m ê m e , il y a u r a i t , mais s e u le m e n t p o u r la n u e p ropri é té d*
10,000 liv re s s t e r l i n g , su b stitution d e la v e u v e , qui ne ver rait pas pou r ce l» d im p u e r son
ga in de s u r v i e .
�►,
(
4
)
_ L e s p^rc e t m è r e du futu r s’ o b lig è r e n t d e r a p p o r t e r , dan? un délai d é t e r m in e , la ra tifi
ca ti on po u r T h o m a s O n s l o w , l e u r fils a în é , des clauses le c o n c e r n a n t , à sa vo ir : c e lle s re la
ti v es aux s om m e s q u e son frèr e aur ait à p r e n d r e su r lu i ; e t à la ga ran tie de le u rs dons e t
pr om e sse s a ff e ctè re n t s o li d a ir e m e n t tous le u rs b ie n s .
L e s n o u v e a u x é p o u x v i n r e n t fixer le u r d o m ic il e à C l e r m o n t - F e r r a n d .
( S ’ il faut e n cr oir e M . G e o r g e s O n s l o w ) E d o u a r d O n s l o w c on d uis it sa j e u n e é p o u s e e n
A n g l e t e r r e au m ois d e s e p t e m b r e *7845 ils y c o n t r a c t è r e n t d e n o u v e a u l e u r u n io n su i
v a n t le r ite p r o t e s t a n t , e t ils n’ e n r e v i n r e n t q u e dans l ’ é t é d e 178 5.
L e 12 m a i 1 7 8 9 , E d o u a r d O n s l o w a c q u i t , dan s le s e n v ir o n s de C l e r m o n t , u n e m aison
de ca m p a g n e a p p e lé e T e r r e d e C h a lc n d r a t.
D a n s l e co u rs d e l a m ê m e a n n é e , il fu t in c o rp o ré dans l e s ra n gs d e la ga rd e n a t io n a le .
L e 37 d é c e m b r e , à la r é u n i o n g é n é r a l e e t s o l e n n e lle de c e t t e g a r d e , sous le s d ra p e a u x
fr a n ç a i s , il pr êta se r m e n t de b ie n e t f id è le m e n t s e rv ir p o u r l e m a in t ie n de la p a i x , p o u r
l a d é fe n s e des c i t o y e n s , e t c o n t r e le s p e r t u r b a t e u r s du re p o s p u b lic , d e s o u t e n ir l a c o n s t i
t u t i o n e t le s d éc re ts d e l ’ a sse m b lé e n a t i o n a l e co n st it u a n t e . A c t e d e c»
se r m e n t lu i f u t
d o n n é pa r le s officiers m u n i c i p a u x . I l s i g n a l e p r o c è s - v e r b a l d e ce t t e p r es ta t io n de s e rm e n t .
L e 8 nivô se an 1 1 , il fu t in sc ri t pa rm i le s plus im posé s du d é p a r t e m e n t du P u y - d e - D ô m e ,
l ’ autor ité a dm in istra tiv e l e co n sid é ra n t c o m m e a ya n t son d o m ic il e p olit iq u e à C l e r m o n t .
( S u i v a n t M M . A u g u s t e e t'Maurice O n s l o w ) E d o u a r d c x e r ç a m è i n e l e s f o n c t i o n s d ’ é l e c t e u r .
E n l ’ an 3 , l e d ir e c t o ir e e x é e n t i f m it l e sé q u es tr e su r ses b i e n s , e t , e n l ’ an 6 lu i e n jo ig n it
d o q u it te r
i m m é d ia t e m e n t
lo terr it oir e fr a n ça is . E d o u a r d O n s l o w o b é it , mais n ’ a ll a
point en A n gleterre.
( D ’ après M . G e o r g e s O n s l o w ) E d o u a r d re n tra e n F r a n c e p e n d a n t la m ê m e a n n é e m u n i
d 'u n e p i c c c ainsi c o n ç u e :
«
G E O I I G E S II.
C o n s i d é r a n t q u e l ’ h o n o ra b le E d o u a r d O n s l o w so ll ic it e h u m b l e m e n t n o t r e r o y a le p e r
m ission d e r é s id e r e n F r a n c e ;
E n v e r t u des po u voir s don t nous avo ns été in ve sti par un a cte pa ssé dans l a d e r n iè r e
session du p a r l e m e n t , et intitulé : A c t e d es tiné à e m p ê c h e r plus eff ic ac em en t p e n d a n t la
g u e r r e , tout i n d i v i d u , su je t do sa m aje st é , do se tra nsport e r v o lo n t a ir e m e n t ou de ré sid e r
e n F r a n c e ou d a m t o u t a utre pays ou li e u allié d e la F r a n c e , e t o c c u p é par le s a rm ées
fr ançaises, e t à p r é v e n i r tonte co rr e s p o n d a n c e a v e c les susdits individus et a ve c les e n n e m is
de sa m aje sté ;
�(
5
)
N o u s autorisons l e susdit h o n o r a b le E d o u a r d O n s l o w à ré sid e r en F r a n c e c o m m e il l’ a
dem andé.
B o n n e à n o t r e palais d e S a i n t - J a m e s , le 13 o ct o b re 1 7 9 8 , dan s la 3 Se a n n é e d e n o t r e
règne.
P a r t o r d r e d e sa m a je sté :
S ig n é P O I V T L A N D . »
R e n t r é dans ses f o y e r s , E d o u a r d O n s l o w a d m in is t ra sa f o r t u n e ; r e ç u t u n e p a rtie des
ao ,o o o li vre s ste rli n g que ses p a re n s lu i a va ie n t pr om is, e t r e c u e i l l i t u n h é rit a g e c o n s id é r a
b l e q u e lu i lé g u a un p a re n t é lo ig n é , et q u i co n si st a it e n u n e t e rre a p p e lé e L i l l i n g s t o n n ,
e t situ ée dan s le s co m t és de B u c k i n g h a m e t d’ O x f o r d ( A n g l e t e r r e . )
L e a6 floréal an i 3 , u n e m ais on dans la v il l e d e C l e r m o n t fut a c h e t é e p a r l u i .
C e p e n d a n t so n épou se l ’ ava it r e n d u père d e qu at re fils n o m m é s : A n d r é - G o r g e s - L o u i s ,
G a b r i e l - A m a b l e - A u g u s t e , F r a n ç o i s - M a u r i c e , et A r t h u r , Il le s avait to us fa it b a p ti se r e t
é l e v e r dans la r e l i g i o n c a t h o liq u e .
C h a c u n d’ e u x fu t, c o m m e c it o y e n fran çais, soamis a la l o i du r e c r u t e m e n t . D e u x d e n t r e u x
p r i r e n t m ê m e d u se rv ice dans le s armée3 fran ça is es . ( A u dire d e M M . M a u r ic e e t A u g u st e )
l e s doux autres s’y fir ent r e m p la c e r .
L e 18 j u i l l e t 180 8 , par a cte r e ç u T i s s a n d i e r , n o t air e à P a r i s , fu t passé l e c o n t r a t do
m a ria g e d e G e o r g e s O n s l o w a v e c M l l e C h a r l o t l e - F r a n ç o i s e - D e l p h i n e d e F o n t a n g e .
E d o u a r d O n s l o w d o n n a e t co nst it ua à son fils a î n é , d 'a b o r d à titre d ’ a v a n c e m e n t d’ h o ir ie ,
l a n u e p ropri é té d e sa maison d e C l e r m o n t , de sa t e r r e d e C h a l e n d r a t e t du m o b il ie r g a r n i s
sa n t ces d eu x h ab it atio n s; e t , e n se con d lie u , à tit re de p r é c ip u t , la n u e p r o p r i é t é des b ie n s
q u ’ il ava it re cu e illis dans la su cce ss io n d e W i l l i a m W i n h w o r t h , c on si st a n t n o t a m m e n t en
la te rr e d e L i llin g s t o n n , si tu ée dans le s c o m t é s d e B u ck in g li ar a e t d ’ O x f o r d e n A n g l e t e r r e ,
et en u n m o b il ie r co m p o sé de m e u b le s m e u b la n s , é q u ip a g e s de fe rm e , o u t il s et i n t r u m e n s
a r a t o ir e s , b e s t ia u x , e t c. e t c. — L e d o n a t e u r se ré se rv a l ’ usu fruit d e tous le s b ie n s d o n t il
v e n a it de d o n n e r la n u e p r o p r i é t é , mais s’o b lig e a de p a y e r au futur , à c o m p t e r du jour du
m a r i a g e , u n e pe n sio n d e 5 ooo f r . , qui s’ a u g m e n t e r a it d e 3 ooo fran cs lo r s du décès d e l o u l
O n s l o w ju sq u ’ à la ce ssa tion de c e t u su fru it ; p o u r sû ret é du
p a iem e n t
de
ce lte
p e n s i o n , le
d o n a t e u r h y p o t h é q u a sp é c ia le m e n t son usufruit r é s e r v é , tan t d e la m aiso n de C l e r m o n t ,
q u e de la te rr e de C h a le n d r a t . E d o u a r d O n s l o w se ré se rv a la fa cu lt é d e f.iire , à cause de
m o r t , des dispositions qu i fr a p p er a ie n t su r les b ie n s d ' A n g l e t e r r e ,
n u e p ropri é té au futur. Mais il fu t a m p le m e n t e x p liq u é q u e ces
ê t r e te lle s q u e , par le u r e f f e t , il ne re stâ t p a s , «n b ie n s
dont
il ava it d o n n e la
d isp o sitio n s
d’A n g leterre
ne pou rraien t
f a o ,o o o l i v r e s d e
re n t e à G e o r g e s O n s l o w , L ’ on d éc la ra m ê m e , et c e la par u n e cla use dite e s s e n t ie lle au
c o n t r a t , que s i ,
au
d éc ès d ’E d o u a r d ,
Ici
b ien s
d’ A n g l e t e r r e é t a i e n t insuÛisans
à
p r o d u ir e
�30,000 li v r e s d e r e n t e , G e o r g e s sc r e t i e n d r a i t , su r le s Lien s de la s u c c e s s i o n , situé«
en F r a n c e ,
des v a le u rs
suffisantes
à fo r m e r le
capital ,
d e v a n t pr odu ir e ce r e v e n u .
— A fi n d e m ie u x e x p liq u e r ses in t e n t i o n s , E d o u a r d O n s l o w s 'e x p rim a ainsi : « L e p è re du
f u t u r d o n n e e t con stit u e e n d o t a M . G e o r g e s O n s l o w , son fils , fu t u r é p o u x , en a v a n c e m e n t
d ' h o ir ie d e sa fu tu re s u c c e s s io n , la n u e p ropri é té i» de la m aiso n d e C l e r m o n t j 2° de la
t e r r e d e C h a le n d r a t . C e t t e d o n atio n est fr ite sous la r é s e r v e , p o u r M m e O n s l o w , m è r e d u
f u t u r , d e son h ab it atio n p e r s o n n e lle dans le sd it e s m aiso n e t te rre ave c la fa cu lt é d e choisir
te ls a ppa rt e m e n s q u ’ e lle ju g e ra à p ropos dans c h a c u n desdits b ie n s , e t aussi l ’ usage d es
j ardin s-pota ge rs e t b os quets, m ais, c o m m e il est d it , p o u r so n h ab it atio n p e r s o n n e l l e , sans
p o u v o ir c é d e r ce d roit à q u i qu e ce s o i t , e t sans p o u v o ir p r é t e n d r e à a u c u n e in d e m n it é e n
ca s d 'in c o m p a t ib ilit é d’ h um e u r; p o u r m o n d it s» G e o rg e s O n s l o w , avo ir dès à p i é s e n t , e t s o u s
la dit e r é s e r v e , l a n u e p r o p rié t é des dite s m aison e t t e rre , e t n é an m o in s n’ y r é u n i r l’ usu fruit
e t jo u is sa n ce q u e du jou r du d é c è s d e M« E d o u a r d O n s l o w ; d e plus M . E d o u a r d O n s l o w
d o n n e et con stit u e e n d o t à M . G e o r g e s O n s l o w , son fils, par p r é c ip u t e t hors part , su r sa
su c c e s s io n futu re , la n u e p ropri é té d es dites terres e t p ropri é té s à l u i a p p a rt e n a n t s it u é e s en
A n g l e t e r r e e t p r o v e n a n t d e l à su ccess ion d e W i l l i a m W i n t h w o r t h à lu i é c h u e s p e n d a n t son
m a ria g e , co n sist an t , e n t r'a u t re s c h o s e s , dans le s te rr e s d e L i ll in g st o n e t d e C h a r l e s l o w n ,
sit u é e s dans le s co m t é s de B u c k i n g h a m e t d ' O x f o r d , et e n toutes autres p r op rié té s t e ll e s
qu ’ ell e s se c o m p o r t e n t e t en tels endr oits q u 'e l le s so ie n t situées , p r o v e n a n t d e la s u cc e ss io n
d e M . " W in th w ort h, e n s e m b le tous les m eu b le s m e u b la n s , e t c . ; p o u r , par mond<t sr G e o r g e s
O n s l o w , avoir dès à p r é s e n t d ro it à la n u e p r o p rié t é desdites terr es et ob je ts e n d é p e n d a n t , e t
y r é u n ir l' u su fr u it à c o m p t e r du jour du d éc ès d e son p è r e . C e t t e s e c o n d e d on at ion est faite à
la ch arg e p a r M . G e o r g e s O n s l o w , qui s'y o b li g e , d e p a y e r dans q u atre a ns, du jou r du d éc ès do
son p è r e , le s s om m e s d o n t c e d e r n i e r sc r é s e r v e d e disposer« l e s q u e lle s p r o d u ir o n t in t é r ê t à
c o m p t e r du jou r de so n d é c è s , le tout ainsi qu'il va ê t re e x p liq u é , M . E d o u a r d O n s l o w e n t e n d
d o n c p o u v o ir d isp oser, à cause d e m o r t , sur le s b ie n s d 'A n g l e t e r r e qu’ il d o n n e p a r l e p r é s e n t
c o n t r a t à son fils G e o r g e s , de t e ll e s som m es q u 'il ju g e ra à p r o p o s, mais de m a n iè re q u e
M . G e o r g e s O n s l o w , futur é p o u x , ait dans le s b ie n s d o n n é s un r e v e n u d e s o , o o o f r a n c s ,
a rg e n t d e F r a n c e , aux titres et poids a c tu e ls de F r a n c e , e t l e d i t r e v e n u « e t e t fr a n c de
t o u t e s c o n t r ib u t io n s p u b liq u e s e t taxes anglaises.
S i , lors du p r é d é c è s d e M . E d o u a r d
O n s l o w , lesd its b ie n s d ' A n g le t e r r e p rodu is a ie n t m oin s d 'u n r e v e n u n e t a n n u e l d e 2 o ,o o o
f r ., M. G e o r g e s O n s l o w fils se r e m p li ra it de U d iff é re n ce en r e t e n a n t e n t r e s ses inains d es
som m es suffisantes po u r fo r m e r l e ca p it a l au d e n ie r v in g t do la p or ti on d e r e v e n u n é c e ssa ir e
au c o m p lé m e n t des a o ,o o o fr. d e r e v e n u e n A n g le t e r r e , q u e son p è r e e n t e n d lu i ussurer
c o m m e co n d it io n e s s e n t ie lle du p r é s e n t co n t ra t ; e t U so m m e , ainsi r e t e n u e p a r le d it futu r
�(7 )
é p o u x , lu i app a rt ie nd ra e n t o u t e p r o p rié t é e t sans re t o u r . A c e t e f f e t , M . s o n p è r e lu i eu
fa it des a p r é s e n t i r r é v o c a b l e m e n t t o u t e d on atio n n é c e s s a ir e . C e qui r e ste ra en sus des 20,000
fr. d e re v e n u c o m p le t dev ra seul ê tre assigné à r e m p lir le s disp os itio ns , à ca use de m ort, q u e
M . E d o u a rd O n s l o w aura fa ites. Il est b ie n e n t e n d u q u e to u t ce d o n t M . E d o u a r d O n s lo w
n ’ aura pas disposé sur le s b ie n s d’ A n g l e t e r r e a p p a rtie n d ra aud it G e o r g e s O n s l o w son fils ,
a u q u e l il en fait dès à p r é s e n t d on atio n e t re m ise . E t M . E d o u a r d O n s l o w , e x p liq u a n t e n c o r e
son in t e n t io n , d é c la r e q u e m ê m e le s som m es d o n t il aura disposé r e s t e r o n t e n t r e le s mains
d e M . G e o r g e s O n s l o w son fi l s , q u i en paie ra l ’ in t é r ê t à 5 p. o/o sans r e t e n u e , p o u r sû re t é
du se rv ic e e x a c t ju sq u ’ à d u e c o n c u r r e n c e des a rr éra ge s du dou aire d e M m e M ari e d e Bou rd e i lle sa m è r e , s a u f l e c o n s e n t e m e n t d e ce t t e d e r n iè r e po u r fa cil it e r l e r e m b o u r s e m e n t , e t
sa u f a u s s i , e n ce c a s , l e c o n s e n t e m e n t d e c h a c u n d e scs autres e n f a n s , autres q u e le d it s*.
G e o r g e s On slo w« E n a tte n d an t q u e l ’ usufruit e t jou issa nce des ob jets d o n n é s p a r M. O n s l o w
a M . son fils, so ie n t acquis p a r ce d er n ie r , M. E d o u a rd O n s l o w d o n n e audit fu tu r épo ux d è s k
p r é s e n t , e t s’ o b li g e à lu i p a y e r a n n u e l l e m e n t , en quat re te rm e s é g a u x , de trois mois e n trois
m ois à c o m p t e r du jou r du m a r i a g e , u n e pe n sio n d e 5 oo o fr . sans a u c u n e r e t e n u e , qui se ra
a u g m e n t é e d e 3 ooo fr. à c o m p t e r du jo u r où M« E d o u a r d O n s l o w r e c u e ille r a la su cce ssio n
d e L o r d O n s l o w son p è re .
— L a fa m il le de F o n t a n g e co n st it u a u n e d o t c o n sid é rab le à la future»
— L e s futurs d é c l a r è r e n t a d o p te r l e r é g i m e de la c o m m u n a u t é d e b i e n s , e t v o u l o ir s’y
so u m et t re alors m ê m e qu ’ ils h a b it e r a ie n t en pays é t r a n g e r .
— E d o u a r d e t G e o r g e s O n s l o w s’ o b lig è r e n t r e s p e c t iv e m e n t , e t d ’ h o n n e u r , à in d iq u e r ,
faire et faire faire tous acte s e t r e m p li r to utes le s fo rm a li té s pr es cri te s p a r le s lois d ’ A n g l e
t e r r e po u r q u e M . G e o r g e s O n s l o w , fu t u r , a cqu it d ’ u n e m a n iè re ir r é v o c a b l e et i n c o m m u *
tab le la p r o p rié té e t l a s a is in e des b ie n s situés en A n g l e t e r r e , et à lu i d o n n e s par l e c o n t r a t,
e t po u r q u e M lle d e F o n t a n g e eût h y p o t h è q u e e t sû re té sur tous le s b ie n s d ’ A n g l e t e r r e
pouT
ra ison d e ses droits , r e p r is e s e t c o n v e n t io n s m a t r i m o n i a l e s .
( S ’ il faut en cro ir e M . G e o r g e s O n s l o w ) p o u r re m p lir c e t e n g t g e m e n t d 'h o n n e u r , d eu x
actes f u r e n t souscrits à Pa ris , le s 18 e t a 5 d u m ê m e mois d e ju i l l e t 1808, d e v a n t le con su l
des Etats-U nis.
D a n s l e p r e m i e r , il serait é c r it : — att e n d u qu ’ un m ar ia ge d o i t , pa r la pe rm is sio n de
D i e u , être b ie n t ô t c é l é b r é e n t r e A n d i é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w et
F ran ço ise -D elp h in e
de
F o n t a n g e ) — et attendu que le d it A n d r é - G e o r g c s * L o u i s O n s l o w , en con sid é ratio n d u d i t
n ia r ia g e , a, p j r le s ar ticles signes dans le s fo rm e s f r a n ç a is e s , con stit u é u n d ou air e à la dit e
C h a rlo t t e -F r a n ç o is e - D c - lp h in e d e F o n t a n g e , la q u e lle c o n s t it u t io n p o u r r a i t , à ca use de sa
fo rm e é t t a n g è r e , ê tre p e u t - ê t r e a n n u l é e e n A n g l e t e r r e
où
est situ ée la m a je u r e p a t l i e d t
�%v / \
• )
(8 )
la fo r tu n e d ud it A n d r é - G e o r g e s - L o u is O n s l o w , c e que le s pa rties d és ir e n t p r é v e n i r ; i l est
en c o n s é q u e n c e c o n v e n u p a r l e s pr és en te s de la m a n iè re e t d a n s l e s f o r m e s su iv an te s, s a v o ir :
q u e
si le d it m ar ia ge s’ a c c o m p l i t , e t q u e si le d it A n d r c - G c o r g e s - L o u i s O n s l o w v i e n t à d é
c é d e r du v i v a n t d e l a d it e d lle C h a r lo t t e - F r a n ç o is e - D e lp l iin e d e F o n t a n g e , so n é p ou se , alor*
la d it e C h a r lo t le - F r a n ç o i s e - D e lp h i n e de F o n t a n g e , ou ses a y a n t - c a u s e , a u i o n t l e d ro it
d u r a n t sa vie d’ avoir e t r e c e v o i r , sur le s m e u b le s e t im m e u b le s d ud it A n d r é - G e o r g e s L o u is O n s l o w , u n e so m m e a n n u e lle en m o n n a ie s t e r lin g é g a l e , au co u rs du c h a n g e alor*
e x i s t a n t , à c e l l e d e 6,000 f r . , p a y a b le e n q u a t re te rm e s ég a ux d e l , 5 oo fr. c h a c u n , dep uis
l e j o u r du décès d ud it A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , s e ra p a y é e à titre d e d ou air e à la dit e
C h a r l o t t e - F r a n ç o i s e - D e l p h i n e d e F o n t a n g e f au p a ie m e n t fidèle e t c e r t a in d u q u e l d o u a ir e ,
e t g é n é r a l e m e n t à l ’ e x é c u t io n v é r it a b le des p r é s e n t e s s’ ob li ge le d it A n d r é - G e o r g e s - L o u i i
O n s l o w , pou r l u i , ses héritie rs , e x é c u t e u rs e t a d m in is t ra t e u rs; e n t é m oig n a ge d e quoi le s
p a rtie s o n t r é c i p r o q u e m e n t apposé l e u r s ig n a tu r e e t sceau , à P a r i s , l e 18 ju ille t
1808.
S i g n é A n d r é - G e o r g e s - L o u i s . O n s l o w ; C h a r l o t t e - F r a n ç o i s e - D e l p l i i n e d e F o n t a n g e ; Ju stin
d e F o n t a n g e . S i g n é , s c e llé e t d é l i v r é , en p r é s e n c e d es soussigné s , à Pa ri s; signé P a u l
B e n f i e l d , T h o m a s Jlion C l a v e r i n g , A l e x a n d r e Ilu m p h ry s. Q u ’ i l s o i t c o n n u q u e , l e a 5 j u i l l e t
180S, et la 33 * a im é e de l' in d é p e n d a n c e A m é r i c a i n e , s’ est p e r s o n n e l l e m e n t p r és en té d e v a n t
m o i , F u l w a r S k i p r i w i t h , con su l des E t a t s - U n i s , à Paris, A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , de
C l c r h i o n t , qui a r e c o n n u q u e le co n t ra t ci-de ssus est l ’ e x p r e s s io n de sa l ib r e v o l o n t é , et
q u ’ il l’ a signé et d é l iv r é c o m m e t e l. D e m ê m e s ’ est p e r s o n n e l l e m e n t p r é s e n t é Justin d e
F o n t a n g e , du Pa ri s , qui a d é c la r é le p r é s e n t c o n t r a t ê t r e l ’ e xp re ssio n d e sa l ib r e v o lo n t é
e t d e c e l l e de sa fille C h a r lo t t e - F r a n ç o is e - D e lp l iin e d e F o n l a n g e , m a in t e n a n t l’ épou se d ud it
A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , et q u e le m ê m e c on tra t a v a i t , c o m m e t e l , été e x é c u t é e n
sa p r é s e n c e e t a v e c so n c o n s e n t e m e n t ; qu ’ il l’ avait en c o n s é q u e n c e sig n é ave c e l l e . E n
foi d e q u o i , j ’ ai apposé ma s i g n a t u r e , et mon sc eau offic ie l, le s jou r e t an q u e dessus, signé
l ' u l w a r S k i p r i w i l l u — D a n s l e se con d d e ce s acte s, if se rait dit (t o u j o u r s d ’ a prè s M . Ç e o r g e a
O n s l o w ) : C e c o n t r a t , fait c l co n c lu e n t r e l'h o n o r a b l e E d o u a r d O n s l o w , d ’ u n e p a r t , et
A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , fils aîn é
et h é ri tie r p r é s o m p t if dud it E d o u a r d O n s l o w ,
d’ a utre p a r t , t é m o ig n e q u e le d it É d o u a r d O n s l o w , e n co n sid é ra t io n de l ’ afl'ection qu’ il
p o r te aud it A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , en fa v e u r de so n m a r i a g e , et aussi dans le b u t
d 'a c c r o î t r e les m o y e n s d ' e x is t e n c e et le b ie n -ê tre d ud it A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , a
donné, concédé,
a l i c u e , c o m m e il d o n n e , c o n c è d e , a l i è n e ,
par ces p i é s e n t e s , aud it
A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , son fils aîné , à te s héritie rs et a ya n t -ca u se , le s b ie n s c i dessus d é s ig n é s , sa vo ir : la te rre d e L i llin g s t o n n , e t c . , e t c . ; le d it É d o u a r d O n s l o w , p o u r
l u i , scs hé ri tie rs e t e x é c u t e u r s et a dm in is tra te u rs , c o n v i e n t pa r ce s p r é s e n t e s a v e c l e d i t
�(9)
A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , ses héritiers e t aya n t-c a u se , que l a i , A n d ré -G e o rg e s- L o u i»
O n zlo w ,
ses héritiers et aya nt-c aiis c p o u r r o n t , a v e c le s restrictions c i- a p r è s , possé der
et o c c u p e r à l ’ a ve n ir l é g a le m e n t e t p a is ib le m e n t le s terres e t h é i i t a g e s ci- de ss us d és ig n é s
e t con fi rm é s par le s p r é s e n t e s a v e c toutes le u r s a p p a r t e n a n c e s , titres cla irs e t dégagés
d e tous e m p ê c h c m e n s et ch arg es q u e l c o n q u e s , tels que d onat ions , v e n t e s , d o u a ir e s , su bs
t i t u t i o n s , r e n t e s , a rr éra ge s d e r e n t e s , jtigemens , saisies, imposé» pa r le d it E d o u a r d
O n s l o w , ses héritiers et ayant-cause , ou tout autre agissant lé g a l e m e n t e n l e u r n o m ; e t il
e st c o n v e n u d e p l u s , entre les pa rties co n tra ct a n tes des p r é s e n t e s , q u e la jo u is sa n ce e t l es
profits et fe rm a g e s , qui so n t pr ove n u s ou qui p r o v ie n d r o n t des susdites te rre s et ap pa rte*
n a n c e s co n c é d é e s e t d on né e s so n t ré se rv é s audit E d o u a r d O n s l o w ou ses a ya n t-c a u se , pou *
la d u r é e de sa vie , à la fin d e la qu e ll e lesdits prof its, fe rm ag es e t jouissa nces e t toute«
ch oses qui y o n t r a p p or t se ron t d é v o lu e s , et a ppa rt ie nd ro n t de d ro it audit A n d r é - G e o r g e s L o u is O n s l o w , à ses h éritiers et a ya n t-c a u se , e n v e r t u de la q u e lle r é s e r v e ledit E d o u a r d
O n s l o w aura l e p o u v o i r e t l’ autori té de faire ou r e n o u v e l e r tous b a u x q u elco n q u e s p o u r uni
t e m p s , n ’ e x c é d a n t pas c e lu i perm is p a r l e s lois e t usages , r e c e v o ir les fernTes e t g é n é r a l e
m e n t ê t r e con sidéré c o m m e le ferm ie r à v ie des susdites terres sur le d it A n d r é - G e o r g e s L o u i s O n s l o w , ses héritiers ou a ya n t c a u s e , g é n é r a l e m e n t q u e l c o n q u e s , sans au cu n e m
p ê c h e m e n t de la p a rt d’ au cu n d’ e u x ; et, dans le b u t d’ offrir une c om p e n satio n po u r u ne
p o r ti o n de la dit e r é s e r v e ,
et pou r po u rv o ir à l ’ e n t re t ie n dud it A n d r é - G e o r g e s - L o u i *
O n s l o w , l e d l t Ë d o u a r d O n s l o w p r o m e t par ce s p r és en te s et s’ o b l i g e , p e n d a n t sa v i e , à
p a y e r e x a c t e m e n t aud it sieur A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , ses h éritiers ou a ya n t-c a u se ,
l a som m e a n n u e l l e , en m onn a ie s t e r l i n g , é g * l e à c e l l e de 5 ,o oo fr . arg ent d e F r a n c e , e n
q u atre pa ie m e n s ég a ux à c o m m e n c e r du l 5 du p r é s e n t mois de ju il le t . E t il est d e plus
c o n v e n u e n tre l es parties q u e ladite so m me a n n u e lle , a in s ip a y é e par le dit É d o u a r d O n s l o w ,
sera é le v é e à la so m m e, en m onn aie sterlin g, é ga le à c e lle de 8000 fr ,, im m é d ia te m e n t après
la mort d e lo r d O n s l o w , p i r e d ud it É d o u a r d O n s l o w , e t du jou r d e ( o n déc ès . L a q u e l l e
so m m e sera é g a le m e n t p a y é e par q u artie r audit A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , le s h é r i
tie rs ou a y a n t -c a u s e ; b ie n e n t e n d u q u e l e pa ie m e n t desdites som m es de 5 et 8000 fr.
cessera à la m ort diulit É d o u a r d O n s l o w , de m êm e q u e la jou issan ce et profit desdUes terres
r e v ie n d r o n t et a p p a r t ie n d r o n t , par ces p rés en te s , aud it A n d r é - G e o r g e s - L o u is O n s l o w , à
«es héritiers et a ya n t -c a u s e ; et il est é g a le m e n t co n v e n u e n t r e les parties des p r é s e n t e s ,
qu ’ il sera lé ga l aud it É d o u a r d O n s l o w , p a r so n t e s t a m e n t 011 tout autre con tra t qui ne
p ou rr a a vo ir d’ effet qu ’ après son d é c è s , de l é g u e r ou d is pose r, en fa ve u r do te ll e ou do
te ll e s pe rs onn e s qu ’ il lui plaira , de toutes som mes d’ argent ù pa y e r sur l e i terres d o n n é e !
e t c o n cé d é e s par les p r é s e n t e s, le sq u e ll e s som mes l e r o n l b ie n et d u e m e n t pa yé es ave c leur»
�'** A
* *
'
( i°)
in té rê ts à 5 p . o/o par an par le d it A n d r é - G e o r g e s - L o u is O n s l o w , ses héritie rs ou ayaittc a u s e , e x é c u t e u rs ou a d m in is t ra t e u rs, à te ll e s p e rs o n n e s qui y a uront droit , en q u atre
p a ic m e n s an n u e ls à part ir du jour du déc ès dud it É d o u a ic T O n s lo w ; et le dit A n d i é - G e o r g e s L o u i s O n s l o w s ’ ob lig e pour l u i , ses h é r it ie r s , e x é cu t e u rs ou adm inistrateurs , à e x é c u t e r l e
p a ie m e n t de la m an iè re ci-dessus m e n t i o n n é e , la re g a rd a n t en pa rtie c o m m e co n d it io n des
pr és en te s ; pourra n é a n m o i n s , e t c’ e s i la v é r it a b le signification des p rés en te s , faire que la
s o m m e ou les som mes d o n t le d it É d o u a r d O n s l o w pou rr a disp oser se ro n t li m it é es de m a
n iè re à laisser audit A n d r é - G e o r g e s - L o u is O n s l o w , sur le s terr es ici co n c é d é e s <t d o n n é e s ,
u n re v e n u c la ir e t n e t d’ une so m m e , en m o n n a ie sterlin g, é g a le à 20,000 f ï , , le susdit r e v e n u
é t a n t é tab li d ’ après le s b a u x e n v ig u eu r lors du déc ès dud it É d o u a r d O n s l o w . I l est e n
t e n d u et c o n v e n u q u ’ après avo ir d é d u it la susdite so m m e d e 30,000 fr. de la total ité d u
su sdit r e v e n u é t a b li par le s b a u x , le surplus sera con si d é ré c o m m e l 'in t é r é t ¿ 5 p. ojo de
l a so m me dis pon ib le e n v e r t u de c e l l e r é s e r v e , d e m a n iè r e q u e la so m m e don t le d it
É d o u a r d O n s l o w est autorisé par les p rés en te s à disp oser sera égale à 20 fois le d it su rp lus
<lu r e v e n u après a voir d éd uit la so m me d e 20,000 fr . co m m e il a é t é d it . C e t t e r é s e r v e é tan t
n u l l e de d r o i t , dans l e cas o ù la totalité du re v e n u n ’ e x c é d e ra it pas la dite so m me de
20,000 fr . e t d e v a n t ê t r e re g a rd é e c o m m e n o n a v e n u e ; e t vu que M arie d e B o u r d e i lle ,
é p o u se d u susdit É d o u a r d O n s l o w , e t m è r e dud it A n d r é - G e o r g e s - L o u is O n s l o w a u r a ,
après l e d é c è s d ud it É d o u a r d O n s l o w , droit à u n e so m m e a n n u e lle d e
i a ,n o o livres e n
m o n n a ie fr a n ç a is e , à titre de d o u a i r e , d u r an t sa v i e , l e q u e l dou aire d oit être d’ après l e s
io is français es pris s u r to utes les p r o p r i é t é s , e t se rv i pa r tous le s h é rit ie rs n at ure ls dud it
É d o u a r d O n s l o w , il est de plus c o n v e n u q u e , dans le cas o ù le d it É d o u a r d O n s l o w d é c é
derait a va nt la dite Marie , son é p o u s e , le susdit dotiaire serait dù alors e t non a u tre m e n t;
l e d i t A n d r é - G e o r g e s O n s l o w , ses hé ri tie rs , e x é c u t e u r s ou a d m in is t ra t e u rs, a u r o n t d ro it
de r e t e n ir t e lle part ie de la so m me ou des som mes don t le d it É d o u a r d O n s l o w se r é se rv e ,
p a r ces p r é s e n t e s , de d i s p o s e r , qui se ra ie n t nécessaires , au taux de l’ in té rê t à 5 p. o jo ,
po u r assurer le p a ie m e n t de te ll e s por ti on s d ud it d ou air e q u i ne sera pas à la ch ar ge d u d it
A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w ou d e ses r e p r é s e n t a i , la q u e ll e so m me ainsi r e t e n u e , il
aura la lib e rt é de ga rd er et d e re t e n ir ju squ’ au décès de ladite M ari e ou jusqu’ à ce qu ’ il
trou v e d ’ u n e a utre m an iè re sù re lé pour le p a ie m e n t exa ct d e ladite pa rt ie du d ou aire d o n t
il n e serait pas ch ar ge c o m m e il avait été dit. Il est enfin c o n v e n u e n lr e lcsd ile s parties que
dans le cas où le d it É d o u a r d O n s l o w déc éd e ra it sans a voir, par son t e s t a m e n t , ou par
tout autre ac te , di»posé d ’ une p aitio ou de la
totalité de ladite r é s e r v e , la parti» d o n t il
n'aura pas été disposé sera j o in îe aux termo s et objets donne» e t co n c é d é s de m an iè re à
d é c h a rg e r le d it A n d t c - G e o r g c s - L o u i * O n s l o w , ses h éritie rs , e xé cu te u rs e t administrateur»,*
�( 11 )
»le toutes c o n v e n t i o n s , p r o m e s s e s et o b li ga tio n s c i- d c s a u s , rela tiv e s au p a ie m e n t de U
s o m m e ou d es som mes des qu elle s le d i t E d o u a r d O n s l o w avait le d roit d e disposer com m e
fo rm a nt l e s urp lus ci-dessus m e n t io n n e . E n té m oig na ge d e tout ce q u e dessus les parties o n t
m u t u e l l e m e n t apposé le u rs si gn a ture s e t le u rs sc eaux , à P a r i s , l e a 5 j u ille t 180S. Sig n é
A u d r é -G e o r g e s - L o u is O n s l o w j signé E d o u a r d O n s l o w . S c e l l é , e x é c u t é e t d éliv r é , e n p r é
se n c e des soussignés : signé Pa u l B e n fie ld ; signé T h o m a s Jh on C l a v e r i n g ; signé A l e x a n d r e
H u m p h ry s . Q u ’ il soit co n n u q u ’ à la date ci-dessus se so n t p r é s e n t é s p e r s o n n e l l e m e n t d e
v a n t moi, F u l w a r d S k i p i i w i t h , c o n su l des E t a t s - U n i s , à Pa ris , l ’ h o n o r a b le E d o u a r d O n s
l o w , d e C l e r m o n t , e t A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w , du m êm e l i e u , qui o n t l' u n e t l' a u tr e
r e c o n n u que l ’ ac te ci-dessus avait été e x é c u t é e t dél iv ré r é e l l e m e n t p o u r e u x .
A u c u n e s autres d é m a rch e s ne fu r e n t faites p o u r faire v alo ir e n A n g l e t e r r e l e c on tra t
4 e maria ge d e G e o r g e s O n s l o w .
L e a 5 d é c e m b r e t 8 l i y E d o u a r d O n s lo w fit à M o u l in s u n t e s t a m e n t pa r l e q u e l , co n fi r
m a n t , en tant q u e d e b e s o in , to utes le s dispositions qu ’ il ava it faites en fa ve u r du mariage
d e son fils a î n é , il d éc la ra qu ’ il vou la it q u e c e l u i - c i h é rit ât d e toutes ses p r op rié té s m o b i
liè re s e t im m ob ilière s t a n t e n F r a n c e q u ’ en A n g l e t e r r e , à la ch ar ge pa r l u i , 1® île p a y e r la
co m m e d e 60,000 f r . à c h a c u n de ses trois fr èr es ) 2® de p a y e r l a m oitié du d ou aire m a t é r
i e l } 3« de pa y e r toutes les dettes du d éf u nt ; e t 4 ° enfin d e laisser jo u ir M “ * v e u v e O n s l o w ,
sa v ie durant, de la m aison d e C l e r m o n t e t de la te rre de C h a l e n d r a t , le t o u t après l e déc ès
d u t e s t a t e u r , e t qu’ il vo ulai t d e plus q u e ses trois fils pu în é s h é r it a s s e n t , po u r ch acu n un
t i e r s , des
i 5 , ooo livres st e rlin g lors e n c o r e d u e s au te stateur su r sa c on stit u tio n dot ale
d e ly S S , mais à la c h a r g e , par les p u î n é s , d e p a y e r à l e u r m èr e l ’ a u t r e m oitié des droits
v iage rs q u ’ ell e pou rr ait p r é t e n d r e au d éc ès du test ateu r. E d o u a rd O i . s l o w e x p liq u e ensuite
q u e si le s puîn és p r é t e n d a ie n t q u e l q u e chos e su r le s p r o p rié t é s im m ob il iè re s d o n n é e s e n
F r a n c e au fils a î n é , ils p e rd ra ie n t le s G o , o o o fr. à eux promis. C e t ac te se t e r m i n e ainsi ;
S cellé e t signé en p r é s e n c e de nous s o u ssig n é s , J h o n vr t z- W il li a n is D e s r o y s , R e v e r l e y ,
A
Percy, Am ery P crcy. A M oulins, ce
décem bre l 8 n . Edouard O n s’ ow .
L e x 4 a vr il i 8 i a , en e x é c u t io n de l ’ art, i l do P a c t e des con stitu tion s d e l ’ e m p i r e , du iG
t h erm id or an l o , e t des a rt ic le s ^5 , 7 G , 7 7 , 7 8 , 79 et 80 du r è g l e m e n t du 19 fructid or de la
m ê m e a n n é e , l e p r é f e t du d é p a r te m e n t d u P u y - d e * D ô m e dressa la liste des plus fort imposés
d u d é p a r t e m e n t , sur la q u e lle il in sc rivit E d o u a r d O n s l o w c o m m e p a yan t dans le d é p a r te
m e n t G01 fr. 7& c . d 'im p ôts fonciers .
( S u i v a n t M M . M au ri ce et A u g u s t e O n s l o w ) , l e u r p ère e x e r ç a , « T a n t e t après l 8 i a , les
fo n ctio n s d’ e l e c t e u r .
P a r acLe notarié du l\ juin i 8 i 3 , E d o u a r d O n s l o w créa son m an da tair e g é n é r a l et sp écial
�( 12 )
M . G e o r g e s O n s lo w son 111* a î n é , a uq u e l il d on n a po uvoir d e , pou r lu i et en son n o m ,
g é r e r e t a dm in is tre r ses b ie n s e t affaires g é n é r a l e m e n t q u e l c o n q u e s , soit d a n s le d ép a r te m e n t
du P u y - d e - d ô m e , soit par-tout ailleurs où beso in se ra it ; passe r et si gn er tous b au x à ferm e
e t à l o y e r , aux pr ix , charg es e t c o n d it io n s le s plu s a va n t a g e u x q u e faire se po urrait et
p o u r t e l te m s que le p r o c u r e u r co n st it u é j u g e r a it c o n v e n a b l e ; r e c e v o ir le p r is aux termes
c o n v e n u s ; d o n n e r ou r e c e v o ir to utes q u itta n ce s ; t o u c h e r toutes cré a n ce s actives duc s au
co n s t it u a n t ; p a y e r to utes c e lle s p a s s iv e s ; faire to us e m p ru n t s au no m du s ' O n s l o w p è re ,
soit par ac tes a u t h e n t iq u e s , soit su r l e t t i e s de c h a n g e , b i l l e t s à or d re ou simples promesses ;
co n se n t ir h y p o t h è q u e p o u r la ga ra ntie desdits e m p ru n t s sur tou t ou pa rtie de ses b ie n s
i m m e u b l e s ; t ir e r t o u t e s le t t re s d e c h a n g e ou man da ts sur tous b an q u ie rs c hargés du re eou v r e m e n i des re v e n u s e t cré a n ce s du m a n d a n t , p r o v e n a n t des états d ’ AngleterTC ; re c o u v r e r
to u t es autres s o m m e s dues au m a n d a n t ; a c c e p t e r toutes d onat ions entre-v ifs ou te stam e n
t a i r e s , m ob iliè re s ou im m ob il iè re s , soit à titre gr atu it , soit à titre o n é r e u x , ainsi que tous
le gs, soit part ic u li ers , soit u n iv e rse ls, soit à t it re u n iv e rse l e t tou tes in st it u t io n s d’ héritiers •
e n u n m o t et g é n é r a l e m e n t r e p r é s e n t e r l e m a n d a n t p» r- to u t où beso in se ra it , et faire ce
q u ’ il aur ait pu faire l u i- m ê m e s’ il e û t été p r é s e n t , p r o m e t t a n t tout a p p ro u v e r et l e ratifier
a u b e s o in .
E n e x é c u t io n de c e t a c t e , G e o r g e s O n s l o w d e v in t l ’ a drain istra teur d e la fo rtu n e d e son
p è r e , e t r e ç u t d’ A n g l e t e r r e le s po rti ons e n co re dues de la dot de a o ,o oo liv re s s t e r lin g ,
co n s t it u é e e n 1^83 , en m ê m e tems qu ’ il p e r ç u t les r e v e n u s d ’A n g le t e r r e et de F r a n c e .
E n 1814 e t en 1 8 1 g , e u r e n t l i e u le s mariages d e M a u ric e e t d’ A r t h u r O n s l o w . L ’ un d e u x
épousa une française, e t l ’ autre u n e a ng laise.
A p r è s son m ar ia ge , A u h u r co n t in u a d e p r e n d r e du s e r v ic e dans le s a rm ées françaises.
L e 19 o c t o b r e d e la m ê m e a n n é e 1 8 1 9 ,
passé le co n t ra t de maria ge de G a b r i e l - A m a -
b l e - A u g u s t c O n s l o w ave c M a rie - A in ab le - A li x D é s a ix -d e -l lo c h e g u J e , dans l e q u e l 011 lit : —
— M . E d o u a r d O n s l o w co n st it u e au futu r épou x la som m e de Go,000 fr. u p r e n d re sur le s
180,000 à lu i e n c o r e dus par L o r d T h o m a s O n s l o w , son fr è r e aîné, po u r ses droits lé git im air e s dans le s b i e n s de L o r d - G e o r g e s O n s l o w ave ç M ila d y - H c n r ie t l e S c h e l l e y , scs père
e t m è r e , la qu e ll o so m me de Go,000 Ir. sera p a y ab le au futu r é pou x lo r squ ’ il tro u v era à en
f a ir e e m p lo i en fonds ce rt ains pu rg és de toute h y p o t h è q u e , et trois mois après qu ’ il en
aura d o n n é l'aVis a son p è re . Jusqu'au p l a c e m e n t de c e l t e
so m m e en f o n d s
SI. E d oua rd O n s l o w p a y e ra au fut ur é pou x la so m m e de 3ooo fr .
ce rt ain s ,
a n n u e l l e m e n t et sans
r e t e n u e , par m oitié, d e six mois en six mois. — M. E d oua rd O n s l o w d o n n e et co n st it u e en
outre a u fut ur é p o u x la t o m m e de 120,000 fr. a pr en dre sur la terre de L i l l i n g s t o i m , située
<11 A n g le t e r r e ; e t c o m m e elle a été d o n n é e à G e o r g e s O n s l o w par son c o n t r a t de 111 a iia gc ,
�ce lui-ci ratifie la donation de 120,000 f r . , e l s’ ob li ge p e r s o n n e l l e m e n t à la fa ire v aloir . L a
t e rre de L illin g s t o n n n e p o u v an t ê tre a lié n é e qu ’ en i 844 > l®5 120,000 fr. n e se ro nt exigible»
q u ’ après cette é p o q u e , et si alors M . O n s l o w père n'e xis te p lu s . Mais M . G e o r g e s O n s l o w
paie ra à ch acu n de ses frères, jusqu’ à l ’ exi gibilité e t à partir du d é c è s du p è r e , l e re v e n u e x c é
dan t 2o,o oofr .j et si ce re v e n u e x c é d a n t est m oin d re de 4.000 fr ., il c o m p lé te ra ch aq u e a n n é e
lu i - m ê m e cette so m m e . D a n s l e cas où E d o u a rd O n s l o w d é c é d e ra it s e u le m e n t après >8 4 4 ,
c e serait s e u le m e n t du jou r d e son d éc ès q u e les 120,000 fr. se ra ie n t e x i g ib le s .— A l ’ e x é c u
tion de to utes les cla uses e t c o n d it io n s du c on tra t, c h a cu n e des pa rties c o n t r a c ta n t e s ob li ge
ses b ie n s. M . A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w h y p o t h è q u e s p é c ia le m e n t à la ga rantie pr om ise
*
p a r l ’ a i t . G du c on tra t sa te rre de C h a le n d ra t avec toutes Ses cir con st a n ce s e t d é p e n d a n c e s ,
plu s sa m aison d ’ habitation située à C l e r m o n l - F c r r a n d , le sq u e ll e s te rr e e t m aison lu i o n t été
assurées p a r l e c on tra t pr éd até d e son m ari age . Mais il fut e xp li q u é q u ’ il sera it li b re n é a n
m oin s à A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w d ’ e xig e r la m a i n - l e v é e d e l ’ inscrip tion qui serait prise
e n v e r t u d e ce t t e clause en é t a b l i s s a n t e m êm e h y p o t h è q u e s u r le s bie ns d’A n g l e t e r r e co n fo r
m é m e n t aux lois anglaises, et d e m an iè re à assurer l ’ e x é c u t io n de ses e n g a g e m e n s en F r a n c e .
D a n s u n a cte à la c o n fe c t io n d u q u e l E d o u a r d O n s l o w a c o n co u ru , il est dit :
« L e p r é s e n t co n t ra t a été fait e n tre ci n q parties c o n t r a c t a n t e s , le a ju in i i h 4 ,
E n t r e l e n é s - h o n o r a b l e T h o m a s d’ O n s l o w
e t l ’ h o n o ra b le A r t h u r - G e o r g e s , v ic o m t e
C r a n l e y , fils a în é , h é rit ie r prés om ptif du d it T h o m a s co m t e d’ O n s l o w , d’ une p r em iè re part j
L ’ h o n o ra b le E d o u a r d O n s l o w d e L ill in gsto n n L o w e l dans le co m t é d’ O x f o r d , ré sidant
a c tu e lle m e n t à C l e r m o n t e n A u v e r g n e , ro y a u m e d e F r a n c e , d’ u n e se c o n d e part }
Ja mes S e l o n , d e m e u r a n t dans G e o r g e s - S t r e e t , A d e l p h y , com te de M id d le se x , g e n t il
h o m m e , d’ une tro isiè m e p a r t ;
^
James Bogi e D r l a p s , d e m e u r a n t dans H a r l e y - S t r c e t , paroisse de S a i n l - M a r i - le - B o n c ,
c o m t é d e M id d l e s e x , é c u y e r , d’ une q u at rièm e p a rt ;
E t E d o u a r d P l o t n e r , d e m e u ra n t dans G e o r g c s - S t r c c t , A d e l p h y , com te de M i d d l e s e x ,
ge n t ilh o m m e , d’ u n e cin q u ièm e pa rt ;
A t t e n d u qu ’ il a été fait u n co n t ra t de ce ssion e t de rétroc ess ion ( L e a s e and r e l e a s e )
le s 34 et 25 juin i 8 o 5 , ou e n v ir o n ;
q u e c e t acte est e n tre trois parties, est fait ou e xp rim e
com m e fait e n tre le d it E d o u a r d O n s l o w d’ une p a r t , le d it James S e l o n s u s n o m m é , d’ autre
part , et le d it T h o m a s , com te d ' O n s l o w , susn om mé , d é s ig n é audit c on tra t sous le n om
de très- ho norab le v ic o m t e C r a n l e y , fils aine e t h é rit ie r p r é s o m p t if de trè s-ho no ra ble com te
d’ O n s l o w d é c é d é d e p u is , e t le d it A r t h u r - G e o r g e s v ic o m t e C r a n l e y , d’ une troisi ème p a rt ;
que ce t ac te ra pp or te que par un autre a c te fait le ao avril 17*)', e n tre le dit L d o u a i d O n s l o w
et Marie Hoia lie sa feu iu m, d’ une p a r t , c l le dit James S e ton de l ’ s u l r c p a r t, par suite d’ une
�(
>4
)
so m m e e o n v e n n e tous e i un ch ac u n des manoirs» m aisons d'h ab it at io n s, fe rm es , t e f r c i e t
h é rit age s s p é c ia le m e n t d és ign és dan s le d it a cle e t dans ce lu i qui va suivre ave c le u rs d ép e n dan ce s, fu re n t r é s e r v é s et assures c n t r'a u ir e s h éritag es à l ’ usage et jouissa nce dud it E d o u a r d
OnsloTv, e t confiés à l'a dm in istra tion de James S e t o n et ses héritie rs dans l'i n t é r ê t e t pour
l e c o m p t e dudit E d o u a rd O n s l o w , ses h éritiers e t a y a n t d r o it ;
A t t e n d u que c e t a c le ( c e l u i des 2/} et a 5 ju in i 8 o 5 ) ajo ute q u e le d it E d o u a r d O n s l o w
a y a n t b c s o i n d 'u n e so m me d e 4 ° o o li vre s ste rli n g (96,000 fr. e n v i r o n ) , s'étai t adressé audit
T h o m a s co m t e d ’ O n s î o w , alors v ic o m te C r a n l e y et aud it A r t h u r G e o r g e s , v ic o m t e C r a n l e y ,
e t les avait prié s de lu i a v a n ce r e t d e l u i p r ê t e r c e t t e s o m m e sous l a gara n tie de*d it s m an oirs ,
h é rit age s e t b â ü m e n s , ce à quoi ils a va ie n t con se n ti, et q u e ce t a cte con st at e q u 'e n e x é c u t io n
d e ce t t e c o n v e n t i o n , e t en c on sid é ratio n d e la so m me de 4 ° ° ° li vre s fourn ie e t pa y é e
«udit E d o u a r d O n s l o w , par le d it T h o m a s co m t e d 'O n s l o w
et A r t h u r G e org e» v ic o m te
C r a n l e y , ou l'un d 'e u x , e t de dix sch ell in gs p a yé s audit Jam es S e t o n par eux o u l ’ un d 'e u x ,
ed it James S e l o n , sur la d em a n d e c l par la dir ectio n ou l' o r d r e dud it E d o u a r d O n s l o w ,
v e n d , c è d e , d éla is s e, et le d it E d o u a rd O n s l o w ga ra n tit , v e n d e t ratifie e n v e r s le d it Thomas,'
c o m t e d ' O n s l o w , e t A r t h u r - G o o r g e s , v ic o m te C r a n l e y , leurs héritiers et a y a n t -c a u s e , les
m a n o ir et se ign vurie de L i llin g s t o n n L o w e l , d an s l e com té d ’ O x f o r d , ave c les droit s, d é p e n
d a n c e s e t a ppa rt e na n ce s e n se m b le le s diffé re n tes m a i s o n s , f e r m e s , terres et héri tages,
situés dan s les co m tés d ’O x f o r d , B u c k i n g k a m et N o r l h a m p t o n , qui sont sp é c ia le m e n t dés i
g n é s dans ce t acte , et ce ave c leu rs droits , d ép e n d a n c e s e t a ppa rte n a n ce s po u r é lr e tenus
avec le s m êm e s a ppa rt e na n ce s par l e d i t T h o m a s , co m te d ' O n s l o w , et A r t h u r , v ic o m te
C r a n l e y , le urs héritiers et a ya n t-c a u se , à toujours ave c c e p e n d a n t la clause ou co n d it ion de
ra ch a t des m ê m e s b i e n s , en , par U d it E d oua rd O n s l o w , ses héritie rs, e x é c u t e u r s t e s t a m e n
taires et adm in istra teurs de scs b ie n s ou a y a n t -c a u se , p a y a n t audit T h o m a s , co m t e d’ O n s
l o w , et A r t h u r - G e o r g e s , vic om te C r a n l e y , ou à l' u n d 'e u x , ou à le u rs e xé cu te u rs te stam e n
taires, admin istrateu rs ou a y a n t - c a u s e , la so m m e p r in cip ale d e 4 ° oo liv res avec les in t é rê t s
a u x é poq u e s in d iq u ées dans le d it ac te j
A t t e n d u que s u r c e l t e h y p o t h è q u e , il est e n c o r e du la so m m e pr in c i p a l e d e 4000 l i v r e s ,
m a is q u e le s in té rê ts o n t été d u o m e n t pa yes jusqu'à la d a t e des p rés en te s c o m m e le sd il s
T h o m a s , c o m l e d ’ O n s l o w , e t A r t h u r - G e o r g e s , v ic o m t e C r a n l e y , le r e co n n ais se n t.
A t t e n d u q u e le dit E d o u a r d O n s l o w é tan t r é c e m m e n t c o n v e n u ave c le d it James Bo gie
D e l a p s de
lu i faire v e n t e abso lu e
m a is o n s , t e r r e s , fe rm e s
et
du m an oir de L i l l i n g s t o n n - L o w e l e t des différente s
h é ri tage s situés dans
les e o m lés d ' O x f o r d ,
Buckingham
et N o r l h a m p t o n , ave c le u rs a p p a rt e n a n ce s et le fief sim ple e t son droit de transmission
)ib re de tous droits e t ch arg e s, e x c e p té c c q u i est désign é aux p r és en te s, e t ce po u r le p r is
�'V&'V
(
>5
)
J e 35,000 liv r e s , il a été c o n v e n u e n t re le s pa rties que la so m me de ¿}oo° liv re s sur l e pr ix
d ’ acquisition sera e m p lo y é par le d it Ja m es Bogi e D e la p s à p u rg er la prop riété
d e l a d it e
hypothèque.
E n c o n s é q u e n c e l e p r é s e n t a cte fait foi qu’ e n e x é c u t io n desdite s c o n v e n t io n s , c l en c o n
s id é ra tio n d e l à so m me d e 4000 liv r e s p a y é e , soit a v a n l le s p r é s e n t e s , soit au m om e n t
m ê m e en m onn a ie de la G r a n d e - B r e t a g n e aya n t cours l é g a l , pa r le d it James B o gie D ela ps,
par l ’ or d re exp rè s d odit E d o u a r d O n s l o w , auxdits T h o m a s com te d’ O n s l o w , e t A r t h u r G e o r g e s , v ic o m te C r a n l e y , qui c o n s e n t e n t q u it ta n ce e t d éc ha rge d e la dit e so m me tan t au ■
dit E d o u a rd O n s l o w , scs h é r it ie r s ,
e x é c u t e u r s te st am e nta ir e s ou a y a n t - c a u s e , qu ’ aud it
Ja m es Bogi e Ü e l a p s , scs h é r i t i e r s , e x é c u t e u rs te stam e nta ir e s ou a y a n t -c a u s e , e t a us si e n
con s id é ra t io n d e la so m m e de 3 ij0 0 0 livres é g a l e m e n t de m on n a ie a ya n t co u rs l é g a l , b ie n
p a y é e audit E d o u a r d O n s l o w ava nt ces p r é s e n t e s , et en m ê m e teins par l e d i t Ja mes B o g i e
D e l a p s , le s q u e lle s dites som m es de 4000 li vre s .et 3 1,000 l i v r e s fo n t e n s e m b le c e l l e de
35 , o o o liv re s, pr ix e n t ie r desdils m an oir, e t c . ; et le d i t E d o u a r d O n s l o w qu itta n ce et d éc h a rg e
Je d it James Bogi e D e l a p s , ses h é r i t i e r s , e x é c u t e u r s t e s t a m e n t a i r e s , a d m i n i s t r a t e u r
et
a y a n t -c a u s e , e t c h acu n d ’ e u x a b so lu m e n t et à t o u j o u r s , c l e n ou tre e n con sid é ra tio n de
l a ‘ so m m e d e
10 sch ell in gs é g a l e m e n t d e b o n n e m o n n a ie p a y é e de la m ê m e m a n iè re par
l e d i t J a m e Bogie D e la p s audit Ja mes S e l o n , q u i l e r e c o n n a ît .
E u x , lesdits T h o m a s , com te d ’ O n s l o w , e t A r t h u r - G e o r g e s , v ic o m t e C r a n l e y , e t aussi
l e d i t Ja m e s S e l o n , d’ après l ’ or dre e x p rè s e t l ’ in d ic atio n d ud it E d o u a r d O n s l o w o n t et
c h a c u n d’ eux a v e n d u e t a lié n é e t c é d é , e t par ce« p r és en te s v e n d e n t , c è d e n t , a liè n e n t c o n
f o r m é m e n t aux q u ali té s a ux q ue ll e s c h a cu n d’ e u x agit e t à le u rs in té rê ts r e s p e c t if s , e t c h a
cu n d’ e u x v e n d , a l iè n e , c è d e et ratifie, e t l e d i t E d o u a r d O n s l o w a c o n c é d é , v e n d u , alié né ,
et déla issé , ratifié et con fi rm é , e t , par ces p r é s e n t e s , v e n d , a l i è n e , ratifie e t c on fi rm e e n
f a v e u r dud it James Bogi e D e la p s e t ses h é r it ie r s , l e d i t Ja mes B o gie D e la p s ét an t déjà e n
possession en v er tu d’ une cession p o u r l e t e rm e d’ u n e a t m é c , à lui con s e n t ie par lesdits
T h o m a s , co m t e d ’ O n s l o w , A r t h u r G e o r g e s , v ic o m t e C r a n l e y , James S e l o n et E d o u a r d
O n s l o w en c o n s i d é r a t i o n d’ une so m m e de 5 sch e llin g s s u iv an t un ac te à la v e il le d e ces
p r é s e n t e s et en v e r t u du statut fait p o u r co n v e r ti r les jo u is sa n ce et pos session et l ’ assurer
aux héritiers :
C ’ est à savoir le m an oir et se ig n eu ri e de L i l l i n g s l o n n - L o w e l , e t tout ce qui est ré pu té tel
a v e c le s droit s, e t c .
T o u s lesd its o b j e t s , m an oir , f e r m e s , p ropri é té s e t c . , fu re n t p r é c é d e m m e n t la p r o p r ié t é
e l h é rit age do W i l l i a m W in lh w oi' th, e n der nier lie u de L i l liiig s lo n n - L o w e l c i- d e s s u s n o m m e ,
é c u y e r a c t u e lle m e n t d é c é d é , et fu re n t par l ’ acte de scs dern iè re s v o lo n t é s c l t e s t a m e n t
�l é g u é » aud it E d o m r d O n s l o w ou à scs h é rit ie rs après l e d é c è s , e l à défaut de d e s c e n d a n c e
de Francis D r jc k , écuyer, lequel
a q uitté c e t t e v ie sans la isse r d e p o s t é r i t é et dep uis lon g-
teras.
Xjcsdits obje ts c o m p r e n a n t toutes le s d iv e r s e s , etc.
S e r o n t l e s d it s m a n o ir , d é p e n d i n c c s , ferme», te rr ains, h é ri tage s e t p r o p r ié t é s q u i , par l e
p r és en t a c t e , so n t co n c é d é s
e t délaissés o u e n t en d u s l 'é t r e a v e c tous e t un c h a cu n de
l e u r s d r o i t s , parties et d é p e n d a n c e s , aud it Ja mes B o gie D e la p s ou ses h é rit ie rs, pos sédés et
te n us p o u r ê tre jouis c o m m e il suit , savoir : par t e lle p e rs o n n e ou te ll e s p e r s o n n e s , p a r
r a p p o r t à t e lle p r o p rié t é , à te l p r o d u i t , dans t e l dessein et dans te ll e s vues e t s o u s t e l l e s
c h a r g e s , a u t o r i té s , c l a u s e s , c o n d it io n s, re st rictio ns e t lim it a t io n s , d e t e l l e s for mes e t e n
t e ll e s m an iè re s q u e le d it James B o gie D e la p s , à q u e l q u e ép o q u e q u e ce soit e t su c c e s s iv e
m e n t par la s u i t e , d é t e r m in e r a , r é g l e r a , d éc id e ra par un ou plusi eurs a c t e s , un écrit ou
plusi eu rs écrits a v e c ou sans po u v oir de r é v o c a t io n , destiné à ê tre sce ll é et remis pa r l u i
en p e r s o n n e e t s u r l ’ attestation d e d eu x ou plusieurs témoins d ignes de foi, c l à défaut d e
t e ls r é g l e m e n s , d ire c t io n s o u in d ic a t io n s , co m m e a u s s i , ju squ’ à ce qu ’ il ail été fait et mis
n e x é c u t io n , mê m e a u -d e là de ce à quoi pou rr aie n t »’ é te nd re le sd il cs dir e ctio n s, in dicat ion s,
réglem ens,
s’ ils é taie n t i n c o m p l e t s , po u r ê tre jouis par le d it James Bo gie D e la p s et scs
« yan t-c a u se pou r et pe n d an t la dur ée de sa vie n a t u re lle , sans être passible de dég radati ons
p o u r é l r c jouis à l’ ép o q u e e t ap rès l ’ e xp irati on de la con cess ion de la dite prop riété audit
E d o u a r d l ’ Ioraer et scs héritie rs e n qu alité d’ a dm in istrateu r pou r l e co m p t e et p e n d a n t la
v ie dud it Ja mes
Bogie D e la p s , enfin pou r ê t re jouis dep uis et après le déc ès dudit James
B o g ie D e la p s par le s h éritiers et a ya n t -c a u se dud it James B o g ie D e la p s à p e rp ét u it é .
Ticsdits T h o m a s co m t e d ' O n s l o w , A r l h u r - G e o r g e s v i c o m t e C r a n l e y ,
et James S e l o n ,
ch a cu n e n c e qui l e c o n c e r n e , savoir, c h a c u n d’ e u i po u r lu i- tné m e , ses héritiers , e s é c u te ur s test am enta ir es et administrateu rs s e u le m e n t en ce qui c o n c e r n e ses pr op res faits et
o m issions c o n v i e n n e n t a v e c le dit James Bo gie D e l a p s , se» hé ri tie rs c l a y a n t - c a u s e , et lu i
d éc la r e n t qu’ eux susdits T h o m a s , com te d ' O n s l o w , A r t h u r - G e o r g e s , vicom te C r a n l e y , e t
James S e l o n r e s p e c t iv e m e n t n 'o n t fait ni laissé fait e à le u r con naiss an ce ou v o lo n t a ir e m e n t
a uc un a c te » effet ou choso q u e l c o n q u e t pa r la q u e ll e ou au m oyen de la qu e ll e ou par suite
de la q u e lle l e s d i t s m a n o i r , d é p e n d a n c e s , f e r m e s , t e r r a i n s , héritages et propri é té s p r é c é
d e m m e n t indiques« s e r a i e n t , p e u v e n t ou d o iv e n t ¿ i r e sous le poids d 'u n e co nfis cation ,
gre v é s, saisis ou h y p o t h èq u e s quan t au t it re , à la prop riété ou de q u e l q u e m an iè re que ce
•oit tant en droit q u ’ en é q u it é .
L e d it Kdn uard O n i î o w po u r ses h é r it ie r s , e xé cu te u rs testam entaires et adm in is tra te u r* ,
ppnttn rte ave c ledit James Bogie D e l a p s , scs héritiers ou ayant«causo , lui p r o m e t e l s’ ac*
�.> ,
(
T7
)
cord e de la m an iè re su iv an te , sa vo ir que n o n o b st a n t to u t f a i t , acte , cir con st an ce ou chose
q u e l c o n q u e qu’ il s u r f i t f a i t , a c c o m p l i ou e x é c u t é , ou qui aurait été souffert v o lo n t a ir e
m e n t e t ave c con n ais s an ce d e ca use par le d it T h o m a s
lord O n s l o w , A r t h u r - G e o r g e s ,
v ic o m t e C r a n l e y , Ja mes S e l o n e t E d o u a r d O n s l o w , et qui pe u t te n dre à é tab li r le c o n
traire , e u x susdits T h o m a s , co m te d’ O n s l o w , A r t h u r - G e o r g e s , v ic o m t e C r a n l e y , James
S e l o n et E d o u a rd O n s l o w s o n t , au j o u r du s c e lle m e n t et de la clô t u re du présen t a c t e , soit
tous soit plu si eu rs d ’ e n tr’ eux , soit u n seul d ’ e u x , l é g a le m e n t saisis ou a u t r e m e n t b ie n e t
suffisamment fondés à la posse ss ion desdits m a n o i r , d é p e n d a n c e s , f e r m e s , t e rra in s, h é rit a
ges e t prop riétés , par le p r é s e n t a cte , co n c é d é s e t délaissés ou e n t e n d u s l ' é t r e dans toutes
l e s parties et p a rc e ll e s a vec tout ce q u i co n st it u e une b o n n e , sûre e t i r r é v o c a b l e prop riété d e
fa m il le e n fie f sim ple sans a u cu n e e sp è c e de co n d it io n d 'h y p o t h è q u e , de re st rictio n d e
jou issa nce ou de q u e l q u e c ir c o n s t a n c e , m o ti f ou ch os e q u e l c o n q u e qui puisse a lt é r e r , c h a n
g e r , g r e v e r ou a n é a n t ir ladite p r o p r i é t é , et qu’ eux susdits T h o m a s ,
co m t e
d’ O n s l o w ,
A r t h u r - G e o r g e s , v icom te C r a n l e y , James S e l o n et E d o u a rd O n s l o w , tous ou q u elqu e s- un s
ou ch acu n d ' e u x a ou ont p le in e p u is s a n c e , d ro it lé ga l et abso lu d e c o n c é d e r , déla isser o a
a u t r e m e n t d’ assurer lesd its m a n o i r , d ép e n d a n c e s , t e r r a in s , héritages e t p r o p rié t é s , ainsi
q u e toutes le s part ies e t p a r c e lle s d’ iceux audit James Bog’ e D e la p s e t ses h é r i t i e r s , pou r e n '
jou ir de la m an iè re et dans la forme c i- d e ss u s , c o n fo r m é m e n t aux vraies in te ntio n s e t au
sens du p r és en t ac te , en sorte q u e le d it Ja mes Dog le D e l a p s , ses héritiers, fon dés de po u v oir
e t a ya n t-c a u se puissent a v o i r , t e n i r , u s e r , o c c u p e r , possé de r, jouir lé g a le m e n t , pa is ib le
m e n t et tra n q u ille m e n t , en tout le m s et à p e rp ét u it é desdits m a n o i r , d é p e n d a n c e s , ferm es,
te rra ins e t prop riétés c o n c é d é s , délaissés ou e n t en d u s l’ étre ave c tous le urs accessoires et
eurs parties , r e c e v o ir e t tou ch e r po u r le u r prop re usage les l o y e r s , re ven u s e t profits et
ce u x p r o v e n a u t de ch aq u e part ie et p a r c e lle sans qu’ ils é p ro u v e n t a u cu n e pou rs uite l é g a l e ,
a ucu n t r o u b l e , e m p ê c h e m e n t , m o le s t a t io n , in te rru p tio n , r e f u s , é v ic tio n ou embarras do 1»
pa rt de lu i E d o u a rd O n s l o w ou ses h éritiers , ou de toute autre p e rs o n n e se p orta n t ou pr é
te n d a n t se p or te r aux droits de lu i E.lou a rd O n slo w ou ses h é rit ie rs , ou acquis de lu i ou par
scs o r d r e s , ou en qu alité do m an da tair e p o u r son c o m p t e .
D é c l a r e n t l i d i t c pr op rié té lib re et c la ir e , lib r e m e n t e t c la ir e m e n t a c q u i t t é e , li b é ré e , d é
la issée e t d é c h a r g é e , a u t re m e n t pa r le sd ii t Ed ouard O n s l o w et ses h é r it ie r s , exécu te urs et
administrateurs, b ie n et suffisamment c o n s e r v é e sans d om m ag es et tenue lib re de tous dons,
co n cess io n s
,
b a u x , h ypoth èq u e s, co n d am natio n s e t de toute
a u tr e
propri été, titre , ch ar ge e t
ernpé cheinens q u elco nq u e s qui puissent avoir été fait», com mis ou soufferts par les susdits
E .lo u a r d
O n s l o w ou toute autre p e rs o n n e p ié t o n d a n l l é g a le m e n t agir pou r lu i ou en son
n o m ou e n ver tu do pouvoirs é m a n an s de l u i , ou e n v e i l u d e t s u t autre m o y e n ou omit»
�(
«8
)
l i o n s , Co ns en te m e n t , adhésion ou d ém a rch e d e sa p a r t , e x c e p té tou tef ois l e p a ie m e n t d t
9 l iv r e s , e t c . , e t c . , etc.
C o n v i e n n e n t e n ou tre q u e le d it E d oua rd O n s l o w , ses h é r i t i e r s , on to ute e t c h a cu n e
a utre p e r s o n n e a ya n t ou p r é t e n d a n t l é g a le m e n t avo ir , tan t par son n o m q u e par scs ord re s,
ou c o m m e m an da taire p o u r son co m p t e , d r o i t , titre ou in t é rê t dans ou sur lesdits m a n o i r ,
d é p e n d a n ce s , t e r r a i n s , hé ritag es ou p r o p r ié t é s , par l e p r é s e n t a c t e , con cé dé s, délaissés ou
e n ten d u s l' é t r e dans toutes le u rs parties e t pa rc e ll e s d e v r o n t , à q u e l q u 'é p o q u e q u e ce soit, et
s u cce ssiv e m e n t à p e rp é t u it é sur la d em a n d e ra is on n ab le dud it James B o gie D e la p s , ses h é
ritie rs , agens ou ayant«cause , et m o y e n n a n t le p a ie m e n t des frais et charge» d ét e rm in é s par
l a lo i, faire r e c o n n a ît r e , e x p é d ie r, p e r m e t tr e e t e x é c u t e r ou faire en sorte qu 'il soit fait, r e
c o n n u , e x p é d ié , pe rm is ou e x é cu t é tous actes , co n v e n t io n s , a rra n g e m e n s, trans fert e t c o n firmations q u e lc o n q u e s e xigé s pa r le s lois po u r p a rv en ir à m e i l l e u r e , p lu s c o m p le t t e ou plus
a bso lu es co n ce ssio n s , tra ns fe rt e t con fir mation de tous et un c h a c u n des m an oir , d é p e n
d an ce s , f e r m e s , terrains, héritages e t propri é té s ave c le u rs d ép e n d a n c e s dan s tou tes le urs
parties e t p a r c e l l e s , en fa v e u r desdits Ja mes Bogi e D e l a p s , ses h é r it ie r s , agen s ou a y a n t cause , suiv an t son vrai sens e t sa v ra ie s ig n if ic a t io n , le tou t ainsi qu 'il sera é q u il a b le m e n t
r e c o n n u et ré c la m é par le d it James Bogi e D e l a p s , scs h é r it ie r s , agens ou ayant-c ause , par
son c o n se il ou le u rs con se ils lé g a u x .
E n fo i d e ce q u e dessus lesd ites part ies o n t apposé au p r é s e n t acte le u rs sc eaux e t signa*
t u r c s , le s jo u r e t an p r é c é d e m m e n t m e n t io n n é s . »
C o m m e m an da tair e de son p è re , M . G e o i g e s O n s l o w qu i ( suiv an t M M . M a u ric e e t A u
guste O n s l o w ) avait n é gocié ce t t e v e n t e en r e ç u t l e prix , eu pl a ça u n e pa rt ie sur les fonds
p u b li cs , savoir 300,000 fr. en son n o m p e r s o n n e l , e t le su rpl us au n om d e son p è r e , t a n t
s u r tes fonds pu blic s q u e sur ob ligations que sousc rivirent n ot a m m e n t M m e e t M . C h a b r o l*
d e - V o l v i c , M . et M m e M e s l i e r , M* e t M m e G a n n a t , et en e m p lo y a u n e autre part ie d e d i
verses m an iè re s.
L e 8 ja n v ie r i 8 a 5 , il acquit de M. le marquis de T o u r n o n , par acte n o t a r i é , la te rr e de
P é iig n a t - « u r - A llie r , m o y e n n a n t la l o m m c île i 5o , o o o f l . p a y é e co m p t an t , aux d ép e ns ( s'il
faut l'e n c r o i r e ) des ao o.o oo ft. qu'il »'était l e t e n u s sur l e pr ix .le la terre d e L i l l i n g t l o n n .
(A u d ire d e M
Le 7
G e o r g e s O n s l o w ) son p è r e jou it de la te rr e de P é i i g n i t .
ja n v ie r l 8 a 8 , par acte r t ç u D e v o u c o u x , n ot aire
à Clerm ont,
G a b r ie l
A m a b le
O n s l o w re c o n n u t avo ir reçu de ton p ère E d o u a i d , sur sa su cc e ss io n futu re e t en d é d u c tioti de l 'a v a i .c é m e n t d'hoirie con stitu é d^m »on con tra t de m a r ia g e , savoir : i* la so m m e
d# ( 1 , 5 nn f r . , 1» 8 ju ille t 181G J 2* la so m m e de 3 ooo f r , , l e 5 août 1808 j 3 * la t o m m e d e
4 >5oo i i . , le 3 u o ve m b re 1819 , 4 * t* so m m e d e Go 00 fr., le 1»* fé v rie r i 8 j 9 , et 5 ° la so m m e
�'b í
de 5 ooo fr. , l e 4 n o v e m b r e 182.}» le sq u e ll e s c i n q som mes , m o n t a n t en tout à c e l l e de
3 o,oo o f r . , fu re n t d é c la ré e s avoir été remises aux ép oq u es in d iq u ées a r e c les d en ie rs de
M . É d o u a r d O n s l o w , e t sur so n autorisation , p a r son fils aîné G e o r g e s O n s l o w . ch ar gé de
l ’ ad'n in istra tlon d e ses bie ns et affaires t l e q u e l , p r é s e n t e n l ’ acte , d é c l a r e q u e l ’ i n t e n t i o n
fo r m e lle de M . O n s l o w son p è r e est q u e ce s 3 o ,o o o fr. s o ie n t im pu tab le s sur le s droits de
M . G a b r i e l - A m a b l e - A u g u s t e O n s l o w dans sa su cce ssion future*
L e 14 ja n v ie r i 8'j 8, G e o r g e s O n s l o w re m it à son p è re u n a c te ainsi c o n ç u :
« C o m p t e des ca pit au x re çu s e t e m p lo yé s par m oi dep uis l e 4 ju in i 8 i 3 , jusq u’ au 3 i d éc e m b r e 18517.
L a lé g it im e d e m on p è r e con sistait en 20,000 livres s t e r l i n g , q u i o n t é t é t ou ché e s en
d iflere ns p a ie m e n s e t on t p r o d u it le s so m mes suivantes*
S o m m e s re çu e s
f l e 26 a o >“ ' ’ 8 o . ,
la o.ooo. 1
a v a n t m a ge stion.
^ le 3^août i8n,
§3,550*J
le i3 février l8l5(
le aGjuin i 8 i 6 ,
le î5 juin 1819,
# J le i3 juillet 1819,
le l3 novembre 1819,
le 3 février i8ao,
le iSmars i8a3f
le 34 novembre 1817 ,
4, i000*
a,400.
5o,4oo.
aa,o3o.
31,094
41>4^1
3,656.
?4'975.
Sommes reçues
p e n d a n t ma ge st io n .
a i j S5oi
367,97 6.
48i,5aG.
Total........
M on p è re posséda it d e plu s la te rre d e L i llin g s t o n n si tu ée en A n g le t e r r e dans l e com té
de B u ck in g h a m ;
il
e u avait h é r it é
d';tn p a re n t é l o i g n é , e t 1'« v e n d u e c n j u i n i 8 a 4 .
840,000 francs.
F o r t u n e pa tri m onia le ,
l 8 l , 5 a6
F o r t u n e acquise par su cce ss io n .
84 o ,o o o
To ta l. . . . .
I , 3 a i , 5 a6 fr .
M o n p è re m ’ a ch ar gé de l ’ adm in istra tio n d e ses affaires, l e 4 ju in 181 3 - Il avait alors re çu
su r sa lé g it im e , la som m e de a i 3 , 55 o fr. qu ’ il avait e m p lo y é e à u n e partie de 1 acquisition
d ’ u n e pr op riété te rr itor iale et d’ u n e m ai so n . Il d ev a it en ou tre 155,717 fr.» détaillé» ainsi
q u 'il suit :
( S u i t le d ét ail des dettes parm i le sq u e ll e s figure la so m me de 3 ooo fr. du« au r e m p la ça n t
d 'A r t h u r O n s l o w ) .
�( 20 )
J ’ ai p e r ç u dans l e co u rs d e ma gestion , sur la lé git im e d e m on p ère , p o u r l a so m me de
267 # 6 fr. \ j’ a» p ayé :
( S u i t ln d étail tles sommes dites p a y é es par M. G e o r g e s , et parm i le sq u ell es figur e, co m m e
s old ée , l e 4 d é c e m b re i 8 i 5 , au r e m p la ça n t d’ A r t h u r O n s l o w , u n e so m m e de 3 ooo fr.
J ’ ai de plus p ayé à mes frères et pr is pou r m oi les som mes suiv an te s :
( S u it le détail de ces som mes s'é le v a n t e n to t a l à c e lle d e 2 3 ^ 1 6 6 fr. ).
S o m m e s p a yé es c o m m e il a été d éta il lé ,
>55,717 fr '
a 34 >iGG fr.
S o m m e s p a y é e s à mes frères ou à m o i ,
389 , 883 .
T o t a l ................
L a diffé re nce entr e cette d er n ièr e so m m e de 389,883 f r . , e t ce lle de 767, 976 fr. reçu e
dans l e cours de ma gesti on , est de 121,907 fr* j ce tte diffé re nce a été p a y é e su r l e prix de
la terre dç L i ll i n g s t o n n . C e prix de 84 o ,o o o f r , , co m m e il a été dit pl«is haut, a été em p lo yé
ains i q u ’ il suit •
210.000 fr . rem is e n tre m es mains.
166.000 fr» placés sur le tiers co nsolidé.
320.000 fr. plac és sur les obligations.
121,90 7 fr. d 'e x c é d an t m en tio n n é plus ha nt.
ï 5 ,ooo fr. ret en us par l'a c q u é r e u r de la terre de L i l l i n s g s l o n n , co m m e d é
d o m m ag e m e n t d ’ une dune sur la qu e lle il n e c om pt ai t pas .
7,093 fr. p a y é s sur les frais d’ un pr ocès sou te nu p en d an t plusieu rs ann ée s
en A n g l e t e r r e .
To tal.
840,000 fr.
F ai t à C l e r m o n t- F er r a n d , l e x 4 ja n v i e r 1828. — S ig n é G e o r g es O n s l o w . »
A u -desso us est é c r it : «
Je reco n n ai s avoir pris com m unic at io n du c o m p te qui pr éc è d e , l ’ avoir e x a m i n é , article
par article , tant en xecette qu ’ en d ép ens e , et avoir r e co n n u le tout pa rfa itement ex act. E n
c o n s é q u e n c e , je quitte et déc ha rge mon fils aîné G e o r g es O n s l o w , de toutes choses q u e l
co n q ue s relati ve s à l’ emploi de ces capitaux jusqu’ à ce j o u r , déclaran t qu ’ il m’ a rem is toute*
les
pi èces a l ’ appui du co m pt e ci-dessus. F a it à Clei i n o n t - F e r r a u d , ce i 5 ja n v ie r i 8 a 9 .
— A p p r o u v é ce que dessus.
Si^tté E d o ua rd O n s l o w ; u
L e m i m e j o u r , i 5 jan v ie r 18 2 8 , G e o r g es On»)ow re ndit le c o m p te gé n éral des dép^n*es
e t r e c e l i t i a nn u elles faites par lui, po ur sou p è r e , d fp n is i 8 l 3 ju s q u ’ à 18^7 in clu siv em ent ,
ces recet te s e l dépendes n e ( o n c c i u a n t que les rev enus de M . E d o u a id O n »lo w ,
�( 31 )
C e co m p te est ainsi c o n ç u :
Revenusprov.
llevenusprov.
T o t a u x des
T o ta u x des
de capitaux.
d ' im m e u b le s.
re v en u s.
dép enses g é o .
AN3 ÉES.
O b i crvat.
.!
1
18 15
13 ,4 0 0
2 5 ,o 53
5 8 ,4 5 3
3 8 ,1 1 2
18 14
1 3 ,4 8 0
- 3o ,5oo
4 3 ,7 8 0
4 0 ,3 4 0
18 15
12 ,7 7 0
3 2 , i 5o
4 4 , 9 ÎO
3 3 ,7 4 2
4 0 ,6 6 0
3 7 ,9 0 4
1817
1 1 , 7 10
1 1 ,0 7 0
2 8 ,9 5 0
2 1,0 7 5
3 2 ,1 4 5
3 8 ,8 o 3
1818
11 ,0 2 0
i 3 ,8 2 5
2 4 ,8 4 5
3 i ,5o 8
18 19
1 0 ,8 9 5
2 9 ,7 7 5
4 0 ,6 7 0
3 5 ,9 7 0
1820
6 ,5 6 5
4 5 ,9 ^ 0
52,5 i 5
3 3 , I2D
1821
1 ,5 15
i 8 ,3oo
ig ,8 i 5
2 8 ,6 6 0
1822
I ,2 l 5
2 4 ,2 5 0
2 5 ,4 6 5
2 8 ,4 4 8
1823
8 10
2 2 ,2 2 5
2 3 ,o 35
2 7 ,1 8 0
1824
85o
i 6 , i 5o
1 7 .0 0 0
2 7 ,3 0 7
1825
a 4 »3 o o
7 ,2 7 5
3 i ,5 7 5
1826
2 4 ,3 0 0
7 ,0 9 3
3 i ,5g 3
3 3 ,7 4 9
5o ,5o 5
1827
2 4 ,5 0 0
7 ,8 3 3
3 2 , i 53
3o ,7o 3
4 9 8 ,4 0 4
4 9 6 .4 9 8
1816
( A u dire d e M . G e o r g e s O n s l o w ) le s s om m e s i n d i q u é e s , aux an n é e s l 8 î 5 e t s u i v a n t e s ,
c o m m e produ it des bie ns im m e u b le s, re p r é s e n t e n t l e r e v e n u de la te rre de P c r i g n a t ,
do n t ( s u iv a n t l u i ) son p è re jouissait.
L e m êm e jou r, l 5 ja n v ie r, E d oua rd O n s l o w r e c o n n u t avoir pris co n n ais s an ce d e ce c o m p t e
l ’ avoir e x a m i n é dan s ses détail« , tant en re c e t t e qu’ en d ép e ns e , et avoir r e c o n n u le tout
pa ifa it e i n e n t e x a c t j en c o n s é q u e n c e fixa déf in it iv e m en t la re ce t t e à la so m me d e 4ÿ8,4o4 fr-j
l a d ép e ns e à 4y 6 . 4'j 8 fr. , e t le r e li q u a t a cti f à la som m e de itjoG f r . , e t d éc la ra que 1»
m an da tair e ne pou van t pr oduire ce re liq uat n i r e n d r e c o m p t e d e son e m p lo i , le m an da n t
l ’ attribuait, c o m m e sou (ils l’ avait lu i-méiu e a tt r ib u é , à l’ ou bli de
q u e lq u e s
articles de d ép ense,
qu i p r o b a b le m e n t avait été c o m m is p e n d an t les l5 an n é e s d e sa g e s t i o n , et par c o n s é q u e n t
qu itta e t déc ha rg e a l e m an datai re de l'a dm in is tra tio n , et r e co n n u t avoir reçu le s piè ce s à
l ’ appu i du co m p te des re c e t t e s e t des d é p e n s e s .
Le il
avril 1 8 1 8 , u n acte fu t passé d e v a n t D e v o u c o u x , notair e à C l e r m o n t - F e r r a n d ,
e n tre E d o u a rd O u s l o w et >ci qu air e iil», duq u el il r é i u l l e ;
�e.-CÇ
-
(
2 2
)
— I* Q u e l e p è r e d é c la r e q u e son in t e n t io n a t o u j o u r s é t é de foire à c h a c u n de ses fils
M a u r i c e et A r t h u r un ava ntage d e 180,000 f r . , tel qu ’ il e n a fait u n de ce t t e so m me à son
fils A u g u s t e , lors de son mariage e n 1819, e t de r e n d r e G e o r g e s O n s l o w , son fi's a î n é , p r o
p r ié t a ir e d éfinitif de sa f o r t u n e , c o n fo r m é m e n t au co n t ra t d e mariage d e 1808, e t d'après
l e s lois ang la is es, aux q uell es se t r o u v e n t soumis le s bien s de M . E d o u a r d O n s l o w , situés en
An gleterre.
—
3° Q u e p o u r a r r iv e r a c o n s a c r e r ces in te ntio n s d e M . E d o u a r d O n s lo w ,'q u i so n t c e ll e s de
ses quatre enfans , le s parties fixen t l ’ a c t i f de sa f o r t u n e , en y c o m p r e n a n t le s a v a n c e m e n t
d'hoir ie con stit u é s, à la so m m e d e i , i 55 ,ooo fr ., dans la q u e ll e la m aiso n d e C l e r m o n t entre
p o u r 4 o,o oo fr ., et la te rr e de C h a l e n d r a t p o u r 160,000 fr.
— 3 » Q u e sur c e t t e so m me , e n p r é l e v a n t 540,000 fr. fo r m a n t le s 3 s om m e s d e 180,000,
re v e n a n t à c h a cu n d es fils pu în és, il rest e p o u r l e fils aîné 6 i 5 ,o oo f r ., so m m e in fé rie u re ,
e st - il d it, à c e lle d o n t M. E d o u a r d O n s l o w p ou v ait disposer e n sa fa v e u r aux term es des lois
a n g la is e s .
_4 ° Q u e toutes le s pa rties so n t c o n v e n u e s de co n sid é re r G e o r g e s c o m m e pr op riétai re de
l a n u e pr opriété d e l à maison de C l e r m o n t , d e la te rre d e C h a l e n d r a t , du m obil ie r garnis«
sa nt ce s deu x h a b it a t io n s , de la so m me d e 35o, oo o fr. qui lu i a été re m ise par son p è r e , et
d e la so m m e de 140,000 fr. p la c é e sur l ’ é tat ( A ’ o t a : en réunissa nt ce s diverses valeurs , on
r e c o n n a î t q u ’ e n se m b le elles 11e f o r m e n t un total q u e d e 590,000 f r . , au li e u d e s’ é l e v e r à
G i 5 , o o o f r . S u iv a n t M. G e o r g e s O n s l o w , c e l t e d if fé re n ce p r o vie n d rait de ce q u e l e r é d a ct e u r
d e l’ a cte a urait o u b li é de faire f ig u r e r , au n o m b r e des objets réunis po u r faire le s 6 1 5 ,000 fr .,
une
so m m e d e 3 5 ,o o o fr p la c é e sur la b a n q u e d ’ A n g l e t e r r e , la q u e lle som m e de a 5 ,o oo fr.
a ppa rtie nd ra it aussi a udit G e o rg es ). Q u e toutes l e s parties so n t e nsu ite é g a l e m e n t co n v e n u e s
d e con sid é re r les trois fils puîn és c o m m e pr op riétair es, par éga le p or ti on , de la n u e p r o p r ié t é
de 3 3,ooo fr- p la cé e sur ob li ga tio n s, et de 36,000 fr. placés sur l ’ état .
— 5 ° Q ' i ’ il a été ar rê te q u e si M me E d o u a r d O n s l o w , n é e B o u rd e ille , su rvivait à son mari,
l e dou aire de 12,000 fr. par a u , à e lle con stitué p a r son c o n t r a t d e m a r i a g e , se ra it serv i
p a r G e o r g e s O n s l o w po u r 6,000 fr. et par c h a c u n de ses trois frères po u r 2000 f r . , et qu ’ il
a e i a i t fait, à la p r e m iè re d em a n d e de M m e O n s l o w , u n e d élé gatio n d e 6,000 fr. à p r en d re
a n n u i' ll e iu e n t s u r les intérêt s de 320 ,000 fr . p la c é e sur ob liga tio n .
_6*
Q u e
le sd il e s parties re con n ais se nt q u e M . G e o r g e s O n s l o w n’ a au cu n co m p t e q u e l
c o n q u e à te n d re à M. son p è re , p o u r raison de la p rocuratio n q u ’ il lu i a d o n n é e p a r a c t o r e ç u
C h e v a l i e r , notaire à C l e r m o n t , le 4 ju in i 8 i 3 .
— " • Q u ’ au m o y e n do ce t a cte , c h a c u n des e n fa n s O n s l o w se re co n n a ît p le in e m e n t ré glé
ot satisfait au sujet do ses droits dans les bien» que possède t o n p è r e , et n 'av oir aucunes
�<Ÿï\
( 23 )
r é p é tit io n s q u elcon q u e s à e x e r c e r à c e t é g a r d co n tre ses fr èr es , ¿ q u e lq u e titre et pou r q u e l q u e
cause q u e ce soit, l e to u t a ya n t é t é ainsi c o n v e n u e t arrêté à titre de pa ct e de famille , e n t r e
M . E d o u a rd O n s l o w c t s e s ^ e n f a n s , qui »’ o b li g e n t de l ’ e x é c u t e r , de b o n n e foi, com m e c o n t e r
u a n t l ’ e xé cu tio n des v o lo n t é s d e M . E d o u a r d O n s l o w , l e u r p è r e , et leurs pr op re s intentions#
L e iS 8bre 1 8 2 9 , e u t li e u le déc ès d e M* E d o u a r d O n s l o w , dan» la v ille de C l e n n o n t ,
q u e dep uis so n mariage il n ’ avait cessé d’ h a b it e r a v e c sa fa m il le .
( A d dire de G e o r g e s O n s l o w ) G a b r i c l - A m a b l e signa un é crit ainsi c o n ç u : « N o u s sous*
s i g n é s , F r a n e o is -M a u iîc e O n s l o w , G a b r i e l - A m a b l e O n s l o w , d éc la ro n s q u e n ou s n’ avons
au cu n droit q u e l c o n q u e sur le s 1009 li vre s ste rli n g , faisant pa rtie de la lé g it im e de fe u
n o t re p è re E d oua rd O n s l o w , et a c tu e lle m e n t p la c é e sur le s 3 p . o jo d’ A n g l e t e r r e . N o u s d é
cl aro n s de plu s q u ’ en ver tu de l ’ ac te d e p a r t a g e , passé e n tre n ot re dit fr è r e e t n ou s, l e 1 i avril
1828, n otre fr ère A n d r c - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w est le se u l qui puisse faire v a lo ir des droit»
su r la d it e so m m e de I009 livres s t e r l i n g , qui fait pa rtie d e son patrim oine. N ou s supplion»
e n co n s é q u e n c e M sr le C h a n c e l i e r d’ A n g le t e r r e d’ autoriser le p a i e m e n t de la d it e so m m o
e n tre le s main s de n o tre dit fi è re A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w . F a i t , a ppro u v é et signé1
à C l e r m o n t - F e r r a n d , dép* d u P u y - d e - D ô m e , ro y a u m e de F r a n c e , l e 2 8 S b i e 1829 #•
L e 3 o mars i 83 o, par e x p lo it notifié au dom ic il e d ’ A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w et d’ Ar*
th ur O n s l o w , le u rs d eu x f r è r e s , F r a n ç o is -M a u r ic e et G a b r i c l - A m a b l e O n s l o w les c it è re n t
*11 concilia tion sur la d em a n d e t]u’ ils se proposa ie nt d e fo r m e r en j u s t i c e , et t e n d a n t e i» à
l e s faire c o n d a m n e r à v en ir a v e c e u x à division et part ag e de tous les b ie n s m eu b le s et i m
m e u b l e s , cré a n ce s et r e n i e s , en q u elq u ’ e n droit e t lie u q u e l e tou t fut situé , co m p o sa n t la
tu cc ess io n d ’Ed o u a rd O n s l o w p ère c o m m u n , lors duq u el pa rta ge c h a cu n e des parties serait
t e n u e d e faire tous rapport» et p r é l è v e m e n s d e d r o i t , p o u r , d e la masse ainsi c om posé e en
¿ ir e attribu é à c h a c u n e des parties sa po rti on a ffé r e n t e ; 2° à fa ire co n d a m n e r G e o r g e s 4
r e n d r e c o m p le de ce qu’ il avait fait en ver tu de la pr ocur atio n qui lu i a v a it été d o n n é e pur
M , O n s l o w p è r e , et à ra ppor ter toutes le s som m es qu 'il avait re çu e s pa r su it e , et ave c le s
intérêt s ainsi que de droit.
S u r ce t t e cit a tio n, les part ies ne s’ é la n t pas c o n cil ié e s, assignation par e x p lo it du 17 avril
fut d o n n é e k MA1. G e o r g e s et A r t h u r O n s l o w à la re q u ête de leur» frères M au ri ce et A u
gu ste , à co m paraît re d ev a n t le irilmtiul civ il de C l e r m o n t - F e r r a n d , p o u r , l ’ un et l’ antre
d é f e n d e u r , voir statuer sur la dem a nd e é n o n c é e en la citatio n , et M. G e o r g e s O n s l o w s t
voir co n d am n e r à p a y e r a ch acu n de» dem and eur» la so m m e d«? 20,000 li vre s à litre de
provision.
M. G e o r g e s O n s l o w co m p a r u t seul sur c e ’. te d r m a n d * .
U n ju g e m e n t d e d é f a u t ,
profit j o i n t , fut ren du le 5 mai co n t re A r t h u r , q u i , après en
AYuir re çu la signification , con tin ua de faire défaut.
�( 24)
L e 9 août, M m e O n s l o w , n é e B o u r d e i l l e , par exp lo it notifié au dom ic il e île ses d eu x fils,
M a u ric e et A u g u s t e , le s assigna p o u r le s faire co n d am n e r à lu i p a y e r , aux termes de son
c o n t ra t de m a r i a g e , c h a cu n a o o o fr . pa r an , à titre d e gain d e s u r v i e , et po u r voir dire
q u 'e l le serait auto ri sé e à tou ch e r p r o v is o i r e m e n t e e s sommes a ct u ell es sur le s re v e n u s d’ une
so m m e p la cé e sur ob lig ation e n tre les main s des é pou x C h a b r o l de V o l v i c , et faisa nt part ie
d e la su cc ession du père c o m m u n .
L e 24 du m ê m e m ois , M. G e o r g e s O n s l o w signifia d e s co n clu sio n s dans le sq u e ll e s il
d éc la ra co n s e n t ir à ce q u e ses d e u x frères t o u ch a sse n t , sur le u rs qu ittan ce s, les in té rê ts de
dive rs es so m m e s p la c é e s sur l ’ é tat e t su r o blig ation s, à leurs é c h é a n c e s , p e n d a n t to ute la d ur é e
du p r o cès , et ce à titre de pr ovi si on , ju sq u ’ à c o n c u r r e n c e des re v en u s de l e u r lé gitim e ,
sans que c e co n s e n t e m e n t p u t p r é ju d ic ie r e n rie n à ses m o y e n s sur le fo nd du l i t i g e , n i
ê t r e co nsid éré c o m m e u n e a p p r o b a t io n de la fixation de la lé git im e fa ite a ses freres dans
l e pa rta ge e n t re -v ifs d u père c o m m u n , n i c o m m e u n e a tt e in t e aux droits d e la d am e O n s l o w ,
n é e B o u rd e ille .
A l’ a ud ie n ce , le s sr» M au ric e e t A u g u st e O n s l o w d é c la r è r e n t n e pas s’ o pp ose r à ce q u e
l e u r mère fut autorisée à p r en d re son d ou aire jusqu’ à d ue c o n c u r r e n c e sur les som mes p la
c é e s pn tre le s mains d e M . C h a b r o l d e V o l v i c , e t d e m a n d è r e n t que M . G e o r g e s O n s l o w ,
c o m m e d é t e n t e u r de to u te la s u c c e s s io n , fût te nu d e p a y e r p r o v is o i r e m e n t seul tout le
d o u a i r e , et de ga ra ntir scs frères de toutes le s co n d am na tio n s qui p o u rr a ie n t in t e rv e n ir
co n t r ’ eux à ce t égard.
L e d i t j o u r , 2 5 a o û t , fu t r e n d u un ju g e m e n t c on tra dic toir e e n t re le s d e m a n d e u r s , le u r
m èr e e t l e u r f i è r e aîné, p a r défau t, n o n s u sce p tib le d’ opposition c o n t r e A rt h u r, qui joignit
la d em a n d e en pa ie m e n t d’ une pr ov isio n à la d em a n d e en p a ie m e n t du d ou air e , e l, statuant
survie t o u t , sans rie n p r é j u g e r sur le p a rtag e te st am entaire d e i 8 i 8 , c o n t r e l e q u e l tous le s
droits et m oy en s des parties d e m e u r e n t r é s e r v é s , c o n d a m n e les *»• F r a n r o is - M a u ric e et
G a h r i c l - A m a h l e O n s l o w à p a y e r a n n u e l l e m e n t , e t à c o m p t e r du décès d e le u r p è r e , à la
d ame O n s l o w m è r e , ch ac u n la so m me de 2000 fr. à valoir sur ses gains de survie ou pe n si on
v i d u a i r e , e l c e , ju sq u’ à la fin du litige p e n d a n t e n t i e ses e n f a n s , sous la d éd u ctio n n é a n
m oins de la so m me d e 1000 fr. q u e la dite d am e a re çu e d e G a b N e l- A m a b le - A u g iis t c O n s
l o w l’ un d’ eux ; d o n n e ac te à ladite d ame des rése rv es expresses qu ’ e lle s’ est faites d e laire
valoir tous ses droits ré su lt a nt tant de son co n t ra t de m a r ia g e , que d ’ autres d Up osilious ,
•oit au p art ag e de la succession de M . O n s lo w p è r e , soit d e louto autre m a n i è r e , r t les e x
ceptions con tra ires d e m e u i a n t re se rv e e s } e l pour p a rv en ir au p a ie m e n t des som mes d o n t
la co n d am natio n v ie n t d’ étre p r o n o n c é e , o rd o n n e quo U d ame O n s l o w mèr o toucher a an*
p u e l l r m c n t et sur sa q u ii t a u cc , p e n d a n t to ute la d u i c e du p r o c è s , et jusq u’ à d uc c o n c u r -
�( *5 )
r e n c e , le s re v en u s d e la so m me de 100,000 f r ,, d ue par les cp o u x Ch a brol de V o i r i e , et a m
é c h é a n c e s desdits in té rê ts ; fait d éfens e aux s» e t d ame de C h a b r o l de p a y e r à d’ autres qu 'à
la dite dame ju squ’ à c o n c u r r e n c e de la so m m e s u s - é n o n c é e , e t o rd o n n e qu ’ à c e t effet sign i
fication du j u g e m e n t le u r 6cra faite à la re q u ê t e de la d a m e : O n s l o w ;
O r d o n n e q u e le s frères M a u r ic e e t A u g u st e O n s l o w t o u c h e r o n t , à titre d e pr ovis ion , et
jusqu’ à l a , fin du pr oc ès , le s intérêts , 1® de la so m m é d e i 5 o ,o o o f r . , p r ê t é e à M . G a n n a t d e
Brassac p o u r G ans , l e p r e m ie r août 182J), le sq u els inté rêts s o n t pa yab le s à C l e T m o n t , c h e z
M . C a v y ; 2“ d e l à s o m m e d e
100,000 fr. p r ê t é e à M . l e c o m t e C h a b r o l de V o l v i c e t à
son épou se , soas la d éd u ctio n tou tef ois d e la so m me a n n u e lle q u e doit t o u c h e r la d a m e
O n s l o w m èr e sur ce s i n t é r ê t s ; 3 ® d e la so m m e de i8,C68 f r . , p la c é e c h e z MM. P o u r r a i
f r è r e s , b an q u ie rs à P a r i s , la q u e lle est pa y a b le le !•» mars 1 83 X ; e t 4° u n e r e n t e d e 5 p o u r
«70 sur l ’ é t a t , d e 870 fr ., d o n t un terme é c h u , le 22 mars d e r n ie r , est a c t u e lle m e n t à r e c e
v o ir c h e z le r e c e v e u r gé n é ra l ; e t c e , sur le u rs q u it ta n ce s et a ux époq u es ét lie u x où ces in
té rê ts se ron t k é ch éa n ce s e t pa yab les.
R é s e r v e aux parties tous leurs m o y en s ainsi que l es d é p e n s , m ê m e c e u x faits p a r la d ame
v e u v e O n s lo w , mère.
L e 22 août i 83 i, M M . F ra n ç o is -M a u r ic e e t G a b r i e l - A m a b l e O n s l o w signifièrent d es c o n
clu sio n s dans l e sq u e ll e s ils d e m a n d è r e n t à être autorisés à tou ch e r l e capital d’ u n e so m m e
d é p e n d a n t e d e la succession , et p la c é e sur u n b a n q u ie r de Paris , e t d é c la r è r e n t con se n tir
à c e q u e le u r fr è r e aîné tou châ t é g a le m e n t u n e s o m m e d é p e n d a n t e d e la m ê m e su ccession ,
e t p la c é e sur la b a n q u e d’ A n g le t e r r e ,
L o m ê m e j o u r , G e o r g e s O n s l o w signifia aussi d es con clu sio n s co n t e n a n t son adhésion à
c e lle s d e ces frères, sous r é se rv e des droits re sp ectifs sur l e fo nd du procès.
L e m ê m e jo u r e n c o r e ,
un j u g e m e n t aa dm it ces con clu sio n s r e sp e c t iv e s, d on n a ac te à
G e o r g e s , de Polir e par lui faite de re m e t t re à ses dou x frères les p iè ce s rela tiv e s à la c r é a n c e
q u e c e u x - c i d e v a ie n t to uch er , e t de c e qu ’ il re con n ais sa it a vo ir re çu de scs fr èt es l e u r si
g n a tu re sur u n e r e q u êt e au m aître des rôles d’A u g l e t e r r e , à PcÎTet d’ ob te n ir de c e d e r n ie r
l e p a ie m e n t des fonds placés sur la b a n q u e d e ce p a ys, et l e u r p r o m e s t c d e »¡¿,11er tous
autre s acte s n é ce ss air e s à ce t effet-sous ré s e r v e des d io ils respectifs des p a r t ie s , q u an t au
fon d du proc ès .
L e 18 juin i 8 3 i , un M . F o r l u n é - P i e r r e Hüe , se d isan t li q u id a t e u r d e la faillite d ’ un sr
A r m a n d co m te d e F o n t a in e - M o re a u , n é g o c ia n t à Pa ris , signifia a ux d e u x frères Oin»low ,
d em a n d e u rs, u n e re quêt e où il est dit qu’ A r l h u r O n s l o w avait e m p ru n té en 1820 u n e som m e
d e 1 5 ,ooo fr. d e la maison F o n t a in e - M o r e a u , e t n 'avait p oin t re m b o u r sé c e l l e so m m e 4
l ’ é ch é « n c e f ce q u i Pavait exp osé à des p ou rs uit e s do la pa rt de son c ré a n cie r ; q u e , par le ttre s,
�+
\9
. *
( =6 )
il avait r e c o n n u ces poursuite» lé gitim es , mais q u 'elle s n 'e n é t a ie n t pas moins re st ées sans
ré su lt a t j que la m aison F o n t a in e - M o re a u a v a i t , d e p u i s , fait fa ill it e ; que le c h e f d e
cetts
m aison avait fait cession de bie ns à ses c r é a n c i e r s , et q u e le liq u id ate u r n om m é par le c o n
c o rd a t avait fait le com pte du s r A r t h u r O m d o w , par l'ciTet d uq u e l c o m p t e c e l u i - c i était
con stitué d éb it e u r de 35 , 3 1 7 fr. au 20 j u il le t 1 8 3 1 j q u e le liq u id ate u r inlcr> ient au part age
de la succession de NI. E d o u a rd O n s l o w po u r qu ’ il ne soit po rté a ucu n e a tt e in t e aux droits
du s* A rt h u r O n s l o w , e t d e m a n d e r que le s som mes qui p ou rr on t r e v e n ir audit A r t h u r
O n s l o w eu dim in u tio n e t jusqu'à c o n c u r r e n c e de sa c r é a n c e , tan t en prin cipal q u 'e n in
t é r ê t , se ron t payés à la faillite F o n t a in e - M o r e a u , la q u e ll e dans tous les cas serait autorisée
à pou rs uiv re la v e n t e des im m e u b le s qui sera ient mis au lo t dud it A r t h u r O n s l o w , le tou t
sans s'a rr êter ni avoir égard aux a ir a n g e m e n s qui aur aient pu avoir été faits au p r éju d ic e des
droits des cr é a n cier s F o n t a i n e - M o r e a u , le sq u els a rr a ng em en s et p a ie m e n s qui aur aient pu
s'e nsu ivre se ra ient déc la ré s nuls et de nul effet.
C e t t e r e q u êt e n 'é tait pas r é p o n d u e d e l' o r d o n n a n c e de M . le p r és id e n t du trib u n al civ il.
E l l e 11e fu t pas signifiée à A rt h u r O n s l o w .
L e 7 avril i 83 a, G e o r g e s O n s l o w signifia des conclusion s dans le sq u e ll e s t» il d éc la ra q u e ,
puisque ses frères voulaie n t an é a n tir le s a rr a ng em en s de f a m i l l e , pris du v iv a n t e t en p r é
se n ce du père c o m m u n , il ne s'o p pose ra it pas à l'a dm ission de le u r d em a n d e en pa rta ge ,
mais q u 'e n v e n a n t à un n ou ve a u pa rtage il aurait , en v ertu de son con tra t de mariage et d u
t e s t a m e n t d e M. E d o u a rd O n s l o w , le d ro it de r é c la m e r le prix de la terre de L i llin g s t o n n ,
sou* d éd u ctio n s e u le m e n t de la so m me de 120,000 fr. assurée à G a b r ie t - A m a b l e O n s l o w p a r
son co n t ra t d e maria ge ; que l e surplus des bie ns d 'E d ou a rd O n s l o w é t a n t situé en F i a n c e ,
G e o r g e s d ev ait p r é l e v e r sur ce s bie ns un quart d e p r é c i p u t , et p a rtag er le restant par p o r
lio n égule ave c ses fr èr es ; et 2* d em and a en c o n s é q u e n c e qu'il plu t au tribunal d 'a b o id lu i
d o n n e r a cte de ce q u e , sans a vo ir nul égard à l'acte de partage du 1 1 avril 1 8 j 8 , il c o n s e n t a it
à v e n ir à division «*t part age des b ie n s de d éfu n t L d o u a i d O n s l o w , son p è r e , auqu el il serait
p rocéd é d'apr ès les forme» o ï d i i m i e s et accoutum ée » ; ensu ite dire et o rd o n n e r en p ie tu ie r
lieu que , sur ta masse de la »ucce»tion, G e o r g e s O n s l o w p rél èv era it la so m me de 840,000 fr.
po u r l 'in d e m n is e r de la v en te indu me ut faite par 1 auteur com m u n d e l a t e r r e de L i ll in g st o n n ,
d on t la p r o p r i é t é , est-il dit, appai tenait au d éfe n d e u r j en se co n d lie u , q ue, sur la niasse res
t a n t e , G e o rg e» O n s l o w fei ail envoi e pi é l è v e m e n t du quai t ; et , en troisième l i e u , q u e le
Sut plus des
b ie n s
se, ait partagé éga le m e n t m t r e le» quatre coliéiitier» j enfin n o m m e r des
e x p e r t s , un notaire et un juge-co mm is»aire pour p r o c é d e r aux opéra tion s «lu p a r t jg e et aux
(Ompi<>», dej c m ré se rv é s.
L e t i ju il le t, M au ri ce et A u g u s t e O n s l o w signifiè rent des con cl u si on s où ils deinandèt en t
�(
2 7
)
acte de ce q u e le u r fr ère con se n tait à l' a n n u la t io n du part age de 1 S 2 8 , et sou tin re n t q u ’ il,
était inadmissible à se p r és en t e r au n o u v e a u part age à faire p o u r y pren d re plus d’ un q u a rt
à titre d e précip u t, et plus d e sa por ti on virile dans les autres 3/4 à titre d’ h éritie r; qu’ ainsi
le trib unal d e v a i t , sans avoir éga rd au pa rta ge te stam entaire fait par M . E d o u a r d O n s lo w ,
l e q u e l c o n fo r m é m e n t aux offres de M* G e o r g e s O n s l o w e t aux dispositions des l o i s , serait
d é c la ré nul et r e s c in d é , les parties v ie n d ra ie n t à divis ion et part age d e tous les b ie n s m e u
b le s et im m e u b le s , c r é a n c e s , o r , a rg e n t et r e n t e s , en q u e l q u ’ e n d r o it e t li e u que le tout fût
s it u é , co m posa nt la succession d 'E d o u a rd O n s l o w , père c o m m u n , lors d uq u e l le s parties
fe ra ie n t tous rapports et p r é l è v e m e n s de d r o i t , e t n o t a m m e n t M . G e o r g e s O n s l o w ra p p o r
te ra it toutes les som mes d o n t il serait d éc la ré d éb it e u r par suite de la gestion qu’ il a v a i t e u a
d e la fortu n e de son p è re en v e r t u de sa p r o c u r a t io n ; p o u r , la masse d e l à succe ssion ainsi
c o m p o s é e , en être attribu é à c h a c u n sa po rti on affé re nte c o n fo r m é m e n t aux lois françaises»
e t pou r pr océd e r aux opéra tion s du pa rtage et des com pte s, n o m m e r , eic .
L e 2 4 , M m e O n k lo w , n ée B o u r J e i l l e , signifia des conclusion s ou e ll e d em and a ac te de
c e qu ’ e ll e d éc la ra it e n t e n d re ne vou lo ir p r e n d re a u cu n e part aux questions e t contestation«?
n é e s entre scs e u f a n s , sous la ré se rv e trè s- e xp re ss e qu ’ e lle se faisait de fo rm er a va n t la fin
du l i t i g e , toute d em a n d e en con d am na tio n au pa ie m e n t d e ses droits e t reprises co n tre les
hé ri tie rs d e son m a r i , con jo in t e m e n t e t so lida ire ment.
E n c e t état la cause fut p o r té e à l ’ aud ie n ce .
L e i * r a o û t , le s d em a nd e u rs en pa rta ge f i r e n t , par a cte d’ avo ué à a v o u é , so m m ation à
M . G e o r g e s O n s l o w de c o m m u n iq u e r à l’ avo ué des d r m a n d e u r s , sur récé pis sé ou par la
vo ie du g r e f f e , 1* l ’ acte de v e n t e de la te rr e de L i ll in g st o n n ; 2° u n e obligation du 10 août
182.I j 3 ®le s litres établissant les rente s sur l ’ état p o u r un ca pit al de iGo,ooo fr. j 4 e l ° 8 titres
ét ab liss an t la prop riété des 25 ,000 fr. pla cé s en A n g l e t e r r e sur le 3 p . 0/0 c o n s o lid é ; 5 *
l ’ob lig ation re çu e C a v y notair e , l e i*r août 1 82 9 , et souscrite par M . G a n n a t de Era ss a c;
G* l’ ob lig ation con se n tie pa r le com te de C h a b r o l et son é p o u s e ; 7* les actes co n st a t a n t le
p l a c e m e n t fait c h e z M M . Po urr at f r è r e s , b anquie rs à P a r i s ; et 8° tous le s autres actes et
titre s relatifs à la su cc ession de l ’ auteur co m m u n .
Le
, M au ri ce e t A u gu st e O n s l o w signifiè rent do n o u v e l l e ! c o n clu sio n s don t le dispositif
est ainsi con çu :
« A d ju g e a n t le s c o n c lu s io n s p r é c é d e m m e n t p rises, et y aj o u tan t, d éclare r n u lle e t de n u l
e f f e t la d i s p o s i t i o n p o r t é e au c o n t r a t d e m a r i a g e d e M . G e o r g e s O n s l o w ; s u b s i d u i i c m o n t ,
d ire q u e c e lt e disposition n e saurait valoir q u e ju sq u ’ à c o n c u r r e n c e d ’ un capital p r o d u c t if
d e 2 n , o o o l i v r e s d e r e n t e ; o r d o n n e r e n c o n s é q u e n c e q u e , c o n f o r m é m e n t ¡1 l a l o i du 1 4 j u i l
l e t i 8 i y , le s c n f a i i s p u î n é s p r é l è v e r o n t , p o u r s e l e p a r t a g e r p a r é g a l i t é «nu-’ e u x , s u r U suc-»
�( ^8 )
cession de l e u r p è re un capital ¿ g a i } o rd o n n e r aussi que l e surplus des b ie n s, ce p r é l è v e m e n t
o p é r é , sera divisé e n t re le* q u atre enfans d e M, E d oua rd O n s l o w ; et p o u r cc qui coticef n e l e
douatro de M m e O n s l o w , o rd o n n e r que c e do uaire ^cr a pris sur r u s u f r u i t d u quart des b ie n s
q u e son m<tri pouvait lui d o n n e r ) q u e si ce quar t ne suffit pas , le su rp lu s sera su pp orté par
l e p r é c ip u t du H ls a in é , e t que dans l e cas c o n t r a ir e , c'est-à-dir e si le d ou aire n 'e x cè d e pas
le quart en usu fr u it , les qu at re enfans su ppo rt e ro n t c e lt e ch ar ge par é ga li té . »
L e s plaidoiries d e la ca use c o n t in u è r e n t aux audie nces des G et i 3 août; et k c e l t e d er n iè r e
a u d i e n c e , M e Jo u v e t , avocat du sieur G e o r g e s O n s l o w , Gt la p r o d u ct io n e t don na l e c t u r e
an trib u n al du co m p t e r e n d u par ce d er n ie r , l e i 4 jan v ie r 1808, à M E d o u a i d O n s l o w , son
p è r e , des ca pit au x q a ’ il avait reçu s c l e m p lo y é s pou r lui d ep u is l e 4 )•**■* t S 13 , jusqu'au 3 k
d é c e m b r e 1S 27 , e t de la d éc h a rg e d o n n é e au bas do ce c o m p t e l e i 5 du m êm e mois d e ja n
v i e r . L e s puîn és d e m a n d è r e n t im m é d ia t e m e n t acte de ce t t e p r o d u ct io n et de ce t t e le c t u r e ;
l e p r o c u r e u r du Roi dem a nd a c o m m u n ic a t io n de la piè ce . G e o r g e s O n s l o w l u i en r e m i t lui*
m ê m e u n e c o p ie n on si gn ée e t su r pa pier libre« L e 23 août, les d em a nd e u rs par a cte d 'avou é
k a vo ué , so m m è r e n t l e u r frèr e aîné d e d o n n e r co p ie du co m p t e p rodu it à l' a u d ie n c e ; ce t t e
so m mation n e f u t s u i v i e d 'au cu n ré su lt a t. L e i 5 d é c e m b r e , dans de» co n clu sio n s signifiées,
ils d e m a n d è r e n t nele d e la pr od u ct io n du co m p t e e t qu 'il fut d éc la ré q u e , dans ce t a c t e , la
ré c e p t io n et l' e m p lo i du pr ix des biens d*Edouard par G e o r g e s , é t a ie n t a v o u é s} que d e plu s
il fut o r d o n n é q u e la co p ie re m ise au p r o c u r e u r du Roi se ra it soumise à l ' e n r e g is t r e m e n t
p a r les seins du grefïïer du t ribun al.
E11 c e t é tat e t à l' a u d ie n c e du a 5 mars »833 , f ut r e n d u le j u g e m e n t d o n t est appel qui ,
« A d ju g e a n t le profit d u défaut joint à la ca use p r o n o n cé co n tre
A r t h u r O n s l o w , pai‘
j u g e m e n t du 5 mai x 83 o , d éc la re re sc in d é e t no n aven u T a c le de p art ag e du u a vr il 1828 ;
dit q u 'E d o u a r d O n s l o w e s l d é c é d é naturalisé fran ça is, dom ic il ié à C l e n n o n l ; en c o n s é q u e n c e
o r d o n n e q u e le s pa rties v ie n d ro n t .1 division et partage de sa su ccession c o n fo r m c m e n t
aux lois fr a n ç a is e s ; d é b o u t e le sr G e o r g e s O n s l o w de sa d em a n d e en pi é l è v e m e n t de la
so m m e de 8 } o ,o o o fr. ( G e o r g e s , à l'a u d ie n c e , n 'avait plu» pa rl é de la ré d u cti on que devfait
subir ce p r é l è v e m e n t d’ apiè * l e c on tra t de mariage d 'A u g u st e , et dont il avait pa rlé d.^ns ses
c o n c lu sio n s du *j avril i 83 a ) pour 1 in d em n is er de la v e n t e d e la te rr e de Lîllin gftlonn ; l'y
d é c la r e n o n - r e c e f a b l e ; réduit au q u art en p r in cip u t les ava ntage s faits audit G e o r g e s O n s lovr dans son c o n t r a t de mariage du 8 ju il le t 1808; o rd o n n e q u 'e n v e n a n t au p a it a g e , les
pa rties feront tous rapports et prcle ve m eti» de droit j dit que sur la masse de la su cce ssio n ,
G eor ge» O n s l o w pr élèv e ra le quart po u r son p r écip u t, c l q u e les ¿mite» trois quarts se r o n t
pa rtagés par é ga 'ité e n t re le* enfans O n s l o w ; o rd on n e que p o u r 'p r o c é d e r au p a r t a g e , les
parties c o n v ien d ro n t d 'e x p e rt s dan s les trois jours de la »igtufic.iiion du ju g e m e n t sinon
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r
(
3 9
\
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qu'il y sera p r o céd é par le s s " C h a m p o m ie r , Uavel et I m b c r t fils, arc hi tect es, q u e l e t r ib u n a l
n o m m e d’ olfice; dit que les e xp e rt s eetim ero n t le s im m e u b le s d é p e n d a n t de la su cce ss io n
don t ¡»’ agit; in d iq u e io n t s'ils p e u v e n t é lr e ou non co m m o d é m e n t partages sans perdrp de l e u r
v a l e u r ; en cas de part age p o s s ib le , fix ero n t ch acu n e des paris q u e l' o n p e u t en fo r m e r , et
le u r va’ c u r ; l e lout en se co n fo r m a n t aux a m e n d e m e n s, ci-dessus in d iq u é s , des parties ; esti
m e r o n t les jouissances et ¡«»dé gradations ; in d iq u e ron t par qu i ell e s o u i é t é perç ues ou cnniinise^j en fin , (V rou tt ou t ce qui sera néce ss aire p o u r p a rv en ir au pa rta ge c o n f o r m é m e n t Aux
lo is ; n om m e po u r p r o cé d e r aux com ptes que les parties a uront à faire e n t r ' e l l e s , M* V a z e i l l e , notair e .iC leriuou<; n o m m e aussi M . Bl a n cha rd , ju g e , à r e f l e t d e r e c e v o ir U se r m e n t
des e x p e r t s , et faire au tribunal le ra pport des difficultés qui po u rr aie n t s’ é le v e r d u r a n t 1*
cours de* o pé ra tion s des exp ert s ou lors des co m pte s d e v a n t U* not aire} su rse oit à faire d i o i i
sur la d em a n d e en re d J it io u de co m p te de m an dat d irigée c o n t r e le s* G e o r g e s O n s l o w ,
ju sq u 'a p rè s les co m pte s ord on n é s d e v a n t le notair e V a z * i l l e .
O r d o n n e que le dou aire d e l à d am e v e u v e O n s l o w
m èr e sera p a yé par égalité par ses qnatre
enfatis dan s le cas où ce d ou aire n ' e x c é d e r a it pas l e re v en u du quart de la totalité de> îa
succession ; e t dons le cas où ce dou aire e x c é d e ra it l e re v e n u «lu q u a r t , d i t q ue l' e x c é d a n t
sera su pp orté par G e o r g e s O n s l o w sur l e quar t à lu i attribu é e n p r é c i p u l , c o n fo r m é m e n t
aux con clu sio n s des enfans pu în és. F a i t rése rv e à ladite d ame O n s l o w d e tous ses autre»
droits co n tre scs enfans pou r les faire valoir ainsi qu’ e ll e avisera , e t d éc la re le j u g e m e n t
co m m u n avec e lle .
D o n n e a cte à F o r t u n e - P i e r r e U ü e d e son i n t e r v e n t io n ;
en c o n s é q u e n c e , o rd o n n e qu ’ i l ’
sera p r o céd é a ux op éra tions dudit partage en sa p r é s e n c e , ou lu i d ûm e n t app e lé ; l e d é e l a r c
n o n r e c e v a b le dans le su rpl us do se sd e m a n d e s ; lui fuit n é an m o in s r é s e r v e d e tou» scs droits
po u r les faire valoir d ev a n t tous juges co m pé le n » ; rése rv e é g a le m e n t à A r t h u r O n s l o w se j
m o y en s et e xc e p ti o n s c o n tr a ir e s , et c o u d a m n e l e d i t F o r t u n é - P i e r r e llü e aux d ép e n s , c o n f o r
m é m e n t aux dispositions de l’ article 882 du cod e civil ;
F aisan t droit aux co n clu sio n s signifiées l e 1 5 d é c e m b r e , d a n s l'in t é r é t d e M a u r ic e et A u gu st e
O n s l o w , le u r d on ne ac te de la produ ctio n faite à l ' a u d ie n c e du i 3 a o û t , lors d er n ie r , par
Va v ocal »le M. G e o r g e s O n s l o w , d ’ un arrêté de co m pte sous-sein g pr ivé f a i l l e 1S jan v ie r i 8 j & ,
e n tre le s r G e o r g e s O w d o w et le s» E d oua rd O n s l o w , »011 p è r e , à l’ oc ca sion du m an da t
q u ’ il avait r e r u d e lui en i 8 l 3 ; dit que d a m ce co m p t e se trouve e m p loyé « la totalité du
prix de la terre de L ill in gston n , c o m m e to uché par le s* G e o r g e s O n s lo w ; o rd o n n e que 1a
c op ie sans signa tur e de ce co m p t e , qui a c l é rem ise e n tre les main» «lu tribunal par G e o r g e s
O n s l o w p e rs o n n e ll e m e n t , sera nouniUo par le greffier, avant ou en mémo teins que le ju ge
ra« n i à lu formalité de l' e n re g is t r e m e n t, A U charge do qui de d ro it e u d é f in it if; d o n n e a d *
i
I
�( 3o )
ik M au ri ce et A u gu st e O n s lo w de la d éc la ra tio n qu ’ ils Ont f a i t e , à 1’a u d ie n ce du 4 m a r s , de
ce q u e , re la t iv e m e n t au co m p t e d o n t s’ agit ils so co n t e n t a ie n t d 'u n e cop ie certifiée par
Georges O nslow .
C o n d a m n e les enfans O n s l o w aux d ép e ns e n ve rs le u r n iè re ;
E t dit q u e ces d ép e ns , aussi b ie n q u e c e u x faits e n tre eu x, d e m e u r e r o n t e o m p e n s é s pou r
ê t r e suppo rté* au prorata de l 'é m o l u m e n t de ch acu n . »
L e m o ti f de ce j u g e m e n t e n ce qui t ou ch e l'a n nu la tio n du p a r t t g e de 1828 e t l'op portu n it é
d 'u n n o u v e a u p a it a g e est q u e toutes les p a r t ie s d o n n e n t le s mains à ce t t e a n n u l a t i o n , et
c o n s e n t e n t à ce qu ’ un n o u v e a u pa rta ge soit o r d o n n é . Q u a n t au c o m p t e du m an dat d em a n d é
par les pu în é s au frère a în é , le tribunal siir seoit pa rc e qu’ il lui se m b le à pr opos de r e n v o y e r
à sl a tu er sur ce c h e f , lors des c o m p t e s qui se ron t à faire d e v a n t le n o t a ir e ; e t à l' é g a r d du
d ou aire de M m e O n s l o w , l e t r ib u n a l p e n se q u e le s enfans pu în és aya n t d em a n d é dans leurs
c o n clu sio n s signifiées le 4 août» q ue ce d ou aire fut su pp orté par égalité e n tre le s enfans dans
l e cas où il n ’ e x c é d e ra it pas le quart en usufruit» il y a lieu de st atuer c o n f o r m é m e n t à
c e s con clu sio n s, G e o r g e s O n s l o w n e p o u v a n t dans au cu n cas p r é t e n d re à u u e distribution
plu s favo ra ble pour lu i.
M . G e o r g e s O n s l o w a in te rje té a ppe l d e ce j u g e m e n t , par exp lo it s des 27 juin , 1 *r et
G ju il le t 1 833 , co n t re ses trois f r è r e s , co n t re sa m è r e , et co n tre le
F o r t u n e - P i e r r e Hiie.
T o u s le s i n t i m é * o n t c o m p a r u .
A r t h u r a in te rj e té appel in cid e n t du ju g e m e n t pour le faire r é fo r m e r en ce que l’ in t e r v e n
tion du sr Hue , fo rm ée p a r re q u ê t e , n u l l e c o m m e lion r é p o n d u e d ' o r d o n n a n c e et n on s ig n i
fiée à l u i , A r t h u r , a ta it c e p e n d a n t été admise.
L e s r Hue a signifié u n e n o u v e l l e r e q u êt e d’ in t e r v e n t i o n , cette fois r é p o n d u e d’ o r d o n n a n c e ♦à toutes les parties en cause.
D a n s u n e p a re il le re q u ê t e aussi r é p o n d u e d ’o r d o n n a n c e , et é g a le m e n t signifiée à toutes
les parties en ca use sur l’ appel par acte du 37 juin i b 34 »les héritiers de Motiglas o n t e s p o s é
q u ’ en 18iO, ils a va ie n t v en d u p a r a d e a u t h e n t iq u e u n dom ain e à A r t h u r O n s l o w , m o y e n n a n t
Go,000 fr. ; q u e la plus g ra n d e pa rtie du pr ix le u r était e n co re d ue ; qu ’ il était de le u r in
t é r ê t p o u r la con se rv at ion de leu rs droits d'assister soit à l ’ in st an ce en pa rtage in trod uite
e n tre les enfans O n s ' o w , soit aux op éra tion s u ltérieu re s du pa rtage; qu’ ainsi i !s d e m a n
d aien t l'a utor isa tion d’ y assister , sauf à eux à p r e n d r e teltes autres con cl u si on s qu ’ ils avise
r a ie n t.
L e 1 5 o ct o b re i 83 . j , M. Mau ric e O n s lo w est d é c é d é , laissant sa v e u v e et le u rs quatre en**
fan« mmeur» pour ses héritiers. E l l e a repr is à son lie u et p la c e l'in sta n ce en sa qualité d*
t u t ric e et en suit nom pe rs on n e l.
�W ')
( 3' )
E n ce t é t a t , la ca use a été p o r té e à l’ a u d ie n ce d e la C o u r , où M . G e o r g e s O n s l o w a p r o d u i t l e s deu x actes, en fo rm e ang la is e , faits en 1 808 d e v a n t le cousu l des E u t s - U n i s , ù Pa ris ,
e t a d éc laré qu'il e n t en d a it v o u lo ir n e faire aucun usag e de l'a cte q u e , su ivant l u i , son fr c r c
A u g u st e aurait 6igné le 28 octob re 1839 , e t où les parties ont pris le s co n cl u si on s suivantes
q ui on t p r é s e n t é à j uge r les ques tions ci- a p rè s :
CON CLU SIO N S.
M* S a v a r i n , po u r l ' a p p e l a n t , a d em a n d é qu’ il plû t ù la C o u r dire tuai ju gé par l e juge»
m e n t don t est appel ; é m o n d a n t e t faisant ce que les p rem ie rs juges auraie n t du fa ire , o r d o n n e r
q ue sur la masse de la su cc ession , G e o r g e s O n s l o w prél èv era l e pr ix de ses im m e u b l e s
d ’ A n g le t e r r e qui on t été v e n d u s, m oin s la so m m e d e 120,000 fr. d o n n é e à son fr ère G a b r i e l À m a b l e a v e c sa gara n tie j fixer en c o n s é q u e n c e ce p r é l è v e m e n t à 720,000 f r . , y co m pri s le s
a 10,000 fr. reçus d ir e c t e m e n t de l' a c q u é r e u r , par G e o r g e s O n s l o w , et e m p lo y é s à u n e ac
quisition d o n t son père a eu l 'u s u fr u it ; o rd o n n e r que sur le s autres b ie n s co m p o sa n t la s u c
ce ss ion , G e o rg e s O n s l o w p r é l è v e r a l e quart co m m e p r é c ip u é , et que le surplus sera p a r t a g é
p a r égalité e n t re les quatre cohéritie rs ou le u rs re p r é s e n t a n s , si m ie u x n ' a i m e n t l es colié rilie rs d e G e o r g e s O n s l o w e x é c u t e r c o m p lè t e m e n t l e p art ag e du 11 avril 18.28 \ o rd o n n e r la
res tit u tio n de l ' a m e n d e , et c o n d a m n e r le s in tim és aux d ép e n s d e la ca use d 'a p p e l.
M« L o u is B a r s e , po u r M me v e u v e M au ri ce O n s l o w e t M. A u g u s t e O n s l o w , a c o n c l u à ce
qu 'il plu t à la C o u r dire b ie n jugé , mal et sans cause a p p e l é ; o rd o n n e r en co n s é q u e n c e que
l e jugeirient de p r em iè re in st an ce sortira son p le in e t e n t ie r e f f e t , e t c o n d a m n e r l 'a p p e la n t
en l' a m e n d e et aux d ép e ns de la ca use d ' a p p e l.
M e B o n j o u r , p o u r M me O n s l o w , n é e B o u r d e i l l e , a dem a nd é q u 'e n ce qui la c o n c e r n e il
fut dit b ie n jugé , mal et sans ca use a p p e l é ,
et que c e lle des pa rties qui su ccom be r a fut
c o n d a m n é e aux d é p e n s .
M e G îa d e l . pour le sr A r t h u r O n s l o w , a c o n c lu à ce qu1il lu i fut d on né ac te d e ce que so it
sur le s d em a n d e s eu i n t e r v e n t io n de l a d am e d e M o n g l a s et con sorts, et du s* Il ü e, ès qualité
qu'il a g i r , soit sur l' a p p e l du s* G e o r g e s O n s l o w , il s’ en re m et à d ro it sans au cu n e appro*
b a t io n d e s cr éance» qui o n t d o n n é lie u aux in te rve n tio n s en e lle s - m ê m e s ou en le u r q u a
lité ; et faisant toutes ré se rv e s u t i l e s , c o n d a m n e r c e l l e des parties qui succom be ra aux d é
p e n s d** la cause d'appel , si m ieu x n 'a im e la C o u r les
c o m p e n s e r pour être e m p lo yé *
en
frais de partag e, à l 'e x c e p t io n toutefois «le c e u x e xp os és par les in te rv e n a ns, qui sero n t laissés
à le u r ch ar g e, c o n fo r m é m e n t à l'a rtic le 88a du cod e civ il .
Mo J u h a n o ' l » pour le s» lliie , a co n c lu à ce qu'il plû t à la C o u r d é b o u le r le s* A r l l or
O n s l o w de la d em a n d e en n u lli té , par lui fol race dans son appel ii.c id e n l de la d em a u d e
�f?
C ' [i '
( 32 )
e i r i n l e r c e n t i o n de p r em iè re in s U n c e , l e c o n d a m n e r a ux d é p e n s d c l . V n o u v c l l e i n t e r v c n i i o n j
e t , st a tu a n t sur c e l l e * c i , r e c e v o ir d e n o u ve a u en tan t que de be so in et su ra b ond am m en t l e
*r Hue, aux q ualités q u ’ il agit, in t e rv e n a n t dans l'in sta n ce en p a rtag e de la succession de d é
fu n t E d o u a r d O n s l o w , p e n d a n t e e n t r e les fi e re s O n s l o w en pr é s e n c e des antres parties de
la cause ; ce f a i s a n t , o rd o n n e r q u e le s som m es qui p ou rr on t r e v e n i r audit A r t h u r O n s l o w
'
p a r suite dud it pa rta ge se ron t v er sé es e n t r e les main s du sr l l ü e , e n dimin ution et jusqu'à
c o n c u r r e n c e de sa c ré a n c e tant en prin cipal »q u ’ en inté rê ts et fr ais; o rd o n n e r que le sr Hue
pourr a pou rs uiv re dans tous les cas le p a ie m e n t de la c r é a n c e F o n t a in e - M o re a u sur tous les
b ie n s qui é c h e o i ro n t audit A r t h u r O n s l o w sans s’ a rr ê te r ni avoir éga rd aux a rr a ng em en s
q u 'au ra it pu faire ou ferait le sr A r t h u r O n s l o w au préju dic« des droits du s* F o n t a i n e - M o
r e a u ou ses cré a n c i e r s , le sq u e ls se r o n t d éc la ré s nuls ; c l au su rpl us dire qu’ il a é le b ie n jugé
p a r l e j u g e m e n t d o n t est appel ; o r d o n n e r on c o n s é q u e n c e que ce d o n t est appel sortira
¿o n p le in et e n t ie r efl’et, e t c o n d a m n e r les appela ns en l’ a m c u d c et aux d ép ens.
E n f in M* D e b o r d , p o u r la famille de M on glas, a d em a n d é que la C o u r v oulut b i e n r e c c v o î r
l'in t e r v e n t i o n des d am es de M on glas et co nso rts ¡l e s a utorise r en c o n s é q u e n c e a assister pou r
l a co n se rv atio n d e le u rs droit», e n qualité d e cré a n cier s du sr A r t h u r O n s l o w , à l'in s t a n c e
qui existe e n t r e lui et ses coliéri ii ots re la t iv e m e n t au pa rtage de la su cce ssion du sr Ed ouard
O n s l o w , ainsi q u ’ aux op éra tions u lt é ri e u re s du pa rt ag e, qui n e p o u ir a ê tre fait q u 'e n le u r
p r é s e n c e , po ur, p e n d a n t la dite in stan ce , et lors d es dites o p é r a t io n s , p r e n d re te lle s c o n c l u
sions q u 'ils a vi se ro nt dans le u r s in té rê ts , e t en cas d e con te statio n s , c o n d a m n e r le
S' O n s l o w aux d ép e n s .
POINT
DE DROIT.
JCn c c q u i to u ch e la s u c c e s s io n :
L e pa rtage entre-vif» du u a v iil 182S doit-il ê t r e a n n u lé ?
D o i t- o n o r d o n n e r un n o u v e a u pa rta ge e n t re le s quat re fils O n s l o w de la su cc ession d r
l e u r p è re ?
E n c c q u i to u ch e les d i'o its d es p a r tie s s u r lu s u c c e ssio n :
S i c’ est la loi fran ça is e qui dnil régir le pa rta ge ; si a uc un des co héritie rs ne petit se dire
d on ataire » ou c r é a n c i e r d une po rti on de l ’ hoirie qui en e x c é d e r a it le q u a r t , et ne p e u t
r e c l a m e r po u r lu i c e l l e por tion à titre du d o n m ia g e s - i n t é r ê t * , l' u n d 'e u x est-il en droit de
p r é t e n d r e au p r é l è v e m e n t de cellft portion sur la masse q u a n d il 110 »’ att ribue ce droit
q u ’ en
v ertu
d e c e t t e q u alité p r é t e n d u e de d o n a t a i r e , ou do c r é a n c i e r , ou d 'ay a n t- d roit »
des dommages* intéi éts ?
K c la tiv en ie ii t à la loi qui doit ré gir le part age :
S i E d o u a rd O n s l o w est m o rt naturalisé fia n ç a is et domicil ié e u F r a n c e ; si ses héritiers
�( 33 )
t o n t F r a n ç a is ,
e t si sa succession é t a i t , lors de so n d é c è s , ' toute entière en F r a n c e ,
n ’ esWce pas la lo i française qui doit régir le pa rtage ?
Q u a n t à la n at ion alit é du d éfu nt :
E d o u a r d O n s l o w , q u o iq u ’ anglais de naissance , é t a i t - i l , lors d e son d é c è s ,
naturalisé
fr an ça is ?
L a lo i d e 1 790 e x ig e a it - e ll e un s e rm e n t de l 'é t ra n g e r qui vo ulai t se n at ura lis er français ?
L a constitution de 1 7 9 1 qui exi ge ait ce se ri n e n t po u r natura liser l ’ é tran ge r en F r a n c e ,
a -t - e l le dû être o b se rv é e pa r E d o u a r d O n s l o w , s’ il a v o u lu a cqu é ri r la qualité d e fran çais?
E d o u a r d O n s l o w a-t-il m an ifest é, pa r tous le s actes civils e t pol itiques d e sa vie , sou in
t e n tio n d’ ê tre naturalisé fran ça is ?
Q u a n t au dom ic il e du d éfu nt :
E d o u a rd O n s l o w c t a i t - i l , lors de son déc ès , dom icilié e n F r a n c e ?
P o u r acquérir dom ic il e en F r a n c e , est-il néce ss aire sous l ’ em p ire du co d e civ il d ’ ob le n ic
l ’ autorisation du g o u v e r n e m e n t ?
E d o u a r d O n s l o w , v e n u en F r a n c e lon g- tero s a va n t l'émission d e ce co d e , a-t -il dû ob te
n ir ce t t e autori sation s’ il a v o u lu é tab li r sou d om ic il e en F r a n c e ?
Q u a n t à la n ationalité des héritiers :
T o u s les héritiers d’ E d o u a rd O n s l o w ne sont -ils pas français ?
Q u a n t à la situation des ob jets com posa nt la succe ss ion :
A u d éc ès d’ Ed ou ard O n s l o w tous ses b ie n s n’ étaien t-i ls pas en F r a n c e ?
R e la t iv e m e n t à la qualité sur la q u e ll e G e o r g e s O n s l o w base sa d e m a n d e en p r é l è v e m e n t
du prix de la te rr e de L i ll in g st o n n , en sus du quar t d e la su cce ssion et J e sa p or tion virile :
C e t t e qualité de don atai re , de c r é a n c i e r et d’ a ya n t -d ro it à des d on im a ge s- inté ré ts , pe u te ll e fo n d e r la d em a n d e en p r é l è v e m e n t du prix d e la te rr e de L i lli n g st o n n ; 10 si la d onat ion
est aujou rd ’ hui n o n -a v e n u e , soit pa rc e que le d o n a t e u r et le don atai re l ’ aur aient a né a ntie
pa r c o n s e n t e m e n t m u t u e l , soit pa rc e qu ’ e lle serait n u l l e en F r a n c e , h cause des disposi
tion s re strictives du cod e c i v i l , e t en A n g le t e r r e pour ne pas y avo ir été soum ise aux fo rm e s
q u ’ e lle aurait dû y subir pou r y être v a l a b l e , si d’ ailleurs e ll e 11e p e u t avoir d e réalisation
sur les biens d on né s e u x - m ê m e s , ni fr ap per la v ale u r de ces b ie n s, tra ns po rt ée en F ra n c e ¿
1* si la c ré a n c e n'e xis te p a s , soit pa rc e q u e G e o r g e s O n s l o w n’ est pas don ataire , soit pa rc e
qu’ il ne sa u r a it , m êm e alors qu ’ il le f û t , a voir d ro it qu ’ au dés iste ment de l’ ob je t d o n n é ;
3 * si enfin G e o r g e s ne peu t se pl ain d re d’ une v e n t e qu ’ il a sa nc ti o nn é e en y p r e n a n t p a r t ?
Q u a n t à la donation :
L e d on ate u r et le don atai re on t-ils m o n t r é , par leur c on d uit e pos té ri eu re à la d onat ion ,
l e u r in t e n t io n de l’ an é a n tir ?
�( H )
G e o r g e * »-t-il c o n n u et n é gocié la v e n t e <le i 8 î»4 ?
L e s t e n u e s d e l'a cte de v e n t e e x c lu e n t - ils l ’ idée qu ’ E d o u a r d se cru t d ép ou il lé pav la do
n atio n de 1 808 ?
E n tant q u 'e l le e xc éd e ra it la quotité d i s p o n i b l e , la d onat ion d e 1808 se ra it -e ll e valable
aux y e u x de la loi française ?
N e s e r a i t - c e p a s s e u l e m e n t d a n s l e c a s où e l l e s e r a i t v a l a b l e a u x y e u x d e s lo i s anglaises ,
q u e Cfrtte d o n a t i o n p o u r r a i t s o r t i r q u e l q u ' e f f e l ?
O r , aux y e u x do ces lois » ce t t e d o n atio n e st - e lle vala b le ?
E d o u a r d ava it -i l capac it é p o u r f a i r e , e t G e o r g e s po u r r e c e v o ir c e l t e do nation ?
C e l t e d onat ion a -t - e l le été re v ê t u e d*s form alités anglaises n éce ss aires à lu i faire pu iser
fo r ce d a n s c e s l o i s ?
S i ce t t e do nation est v a la b le aux y e u x d es lo is a ng la is e » , n ' e s t - c e pa s s e u le m e n t parce
qu e so n o b je t la sou m ettra it h l’ e m p ir e du sta tut réel «l'Angleterre ?
S i e ll e ne tie nt sa for ce q u e du statu t r é e l a n g la is , p e u t -e ll e avoir u n e réa li sa ti on q u e l
c o n q u e lo rsq u e le s ob jets d on né s ne so n t p l u s , à ca use d e le u r m ob il is at io n , sous l' e m p ire
de c c statut ?
L e d o n a t a i re p e u t - i l , en v e r t u du sta tut r é e l , saisir co m m e é q u iv a la n t de l'o b je t don né
en nat u re , la vale u r d e c e t o b j e t qu i se trou v e e n F r a n c e sous for me niobit.è* e ?
L e s trib u n au x français po u rr a ie n t -il s d o n n e r fo r ce d 'e x é c u t io n , sur des valeurs t ro u v ée s en
F r a n c e , à un statu t é lt a n g e r ?
Q u a n t à l.i p r é t e n d u e c r é a n c e :
S i la d o n atio n est v a l a b l e , G e o r g e s pe u t-i l dire q u 'il est pr opri é taire du prix d e la terre
de L i ll in g st o n n , pa rce que ce pr ix re p r é s e n t e la te rre qui lui appa rte na it par l'effet de la
d o n a t i o n ) qu ’ ainsi il est c r é a n c i e r d e ce prix vis-à-vis de la su cc ess ion ?
TJh d o n a t a i r e p e u t - i l p u i s e r u n e q u a l i t é d e c r é a n c i e r v is - a - v i s l e d o n a t e u r d a n s l ' a c t e de
bien fa isan ce pas-c e n tr'e u x ?
C o m m e pro prié taire de la t e r r e , G e o r g e s ne ponrrait-il pas se u le m e n t agir par v o i e de
d é s is t e m e n t c o n t r e l ' a c q u é r e u r , e t sans ten ir c o m p t e de ce qu'il puise sou droit de pro
priétaire*
dan s un b i e n f a i t , par voie de
d on mia ge b- inté rê ts c u i i l t e l e v e n d e u r , aulc ui du
b ie n fa it ?
Mais c»»tte a ctio n en d ésis te m e n t n e se ra it-e lle pas rep ou ssée par le d éfau t de v a l i d i t é , en
An ^ l. -t r ir e , de sa d on at ion , défaut q u i , en A n g le t e r r e et vis-V vU T a r q u é r e u r , ferait dispa 1 ailre sa qualité de pr oprié taire ; par les t e n u e s du la v en t e de i 8 j /| , et par la i.tlilic.ilion
qu'il aurait laite de ce t t e v e n t e ?
Q u e si, la do nation ét an t n u l l e , G e o r g e s ne p e u t sc dire p r o p u é l a i r c de la te rre , peu t-il
so d u e c r é a n c i e r du prix ?
�V
( 35 )
Q u a n t au p r é t e n d u droit à des d o m m age s- in té rê ts •
S i la d onat ion e st v a la b le , G e o r g e s p e u t -il r é c la m e r des d om m age s-in té rê ts c o n t r e la
succ ess ion d e non p è r e , pa rc e q u e c e lu i- c i a ali é né la te rr e de L i ll in g st o n n ?
L e p e u t - il s’ il lu i est in te rd it d'agir c o n t r e l ’ a cq u é re u r par v o ie de dés iste ment:?
L e pe u t-i l s'il a pa rticipé à la v e n t e ?
L e p e u t -il si l e droit de p r o p rié t é , en v e r t u d u q u e l il a g i t , n e ré su lt e q u e d 'u n e d on at ion
à lui faite pa r c e lu i auqu el il d em a n d e ces d o m m a g e s - in t é rê t s ?
E t si la d on atio n est n u l l e , q u e l d ro it à des d o m m a g e s - in t é rê t s p e u t avo ir G e o r g e s
O n s lo w ?
Q u e si l ' o n suppose q u e des dom m age s- in té rê ts lu i so n t dus , la su cc ess ion se ra it-elle
o b li g é e en ve rs lu i po u r ce c h e f , do t e lle sorte q u 'il e u t droit de p r é l e v e r sur e lle l e p r i t de
la te rr e de L i llin g s t o n n ?
E n c e q u i to u c h e le co m p te d u m a n d a t :
N e doi t-o n pas a jo urne r la red dit io n de ce co m p t e ?
E n c e q u i to u c h e le d o u a ir e :
L a fixation du dou aire de M me O n s l o w m è r e e st - e l le c o n y e D a b l e ?
E n c e q u i to u ch a le s in te r v e n tio n s :
L ’ in t e rv e n t io n du s*- Hcie en p r e m iè re in st an ce est- elle n u l l e po u r v ic e d e fo rm e ?
L e s d e u x in te rve n tio n s de ca use d ’ a pp el s o n t - e lle s r é g u l i è r e s ,
et< loiv e n t-e ll es être
adm ises ?
E n ce q u i to u c h e l'a p p e l in c id e n t d 'A r t h u r O n s lo w :
C e t appel est-il fo n d é ?
E n ce q u i W u che les d ép en s :
Q u i doit su pp ort er les d ép e ns de M m e O n s l o w ?
Q u e l s d ép e ns d oiv e n t-être com p e n sé s pour être e m p lo y é s en frais de pa rta ge ?
Q u i doit su pp ort er 1es d ép e n s d ’ in t e rv e n t io n ?
P o u r m in u t e : ( s i g n é ) L o u i s B A R S E , a vo u é.
M * Lo uis B . i r t e , a vo ué près la C o u r r o ya le d e R iorn, y o ccu p a n t po u r M m e v eu v e
M au ri ce O n s l o w , n é e D cc- d u - T re u il , et pour M . G a b r i e l - A m a b l e - A u g u s t e O n s l o w , signifie
les qualités ci- dessus, e t en d o n n e co p ie :
I® A M » Sav arin, a v o u é p r è s la m ê m e C o u r , e t d e M . A n d r é - G e o r g e s - L o u i * O n s l o w ;
a* A Me G b d e l , avoué p r è s la m ê m e C o u r , e t do M. A rt h u r O n s l o w ;
3 ° A Me B o n j o u r , a vo ué près la m êm e C o u r , e t de M me v eu v e Ed ouard O n s l o w } n é e
de Bo u rd e il le ;
4 « A Me J o h a n n e l , avoué près la m êm e C o u r , et do M. F o r t u n é - P i e r r e Hue ;
�(
3G
)
E t 5 ° A M e D e b o r d , avoué pr ès la rocme C o u r , et d e M ll e de M on glas ; M . et M m e de
G e r m a in e l M . G c r u s - d e - L a b o r ie .
S a n s q u e le mod e de ré d act io n desd iles qu alités puisse nuire ni p r cju d ic ic r aux droits
d 'a u c u n e des pa rtie s.
D o n t ac te ; fait à R i o m , l e 1 4 mai i 835 .
S ig n é P E Y R I N , huissier.
M e S av ari n d é c la re fo r m e r opp os it ion aux p r é s e n t e s qualités.
H io m , ce 14 mai i 835 .
S ig n é P E Y R I N , huissier.
E n r e g is t r é à R i o m , l e i 5 mai i 8 3 5 , folio 1^3 , v e r s o , case i l.
R e ç u 5 fr an rs 5 o c e n tim e s.
S ig n é P E Y U O N N E T , r e c e v e u r .
S u it P ord o n n an ce in t e r v e n u e sur l' op po sition ci- dessus m e n t i o n n é e .
« V u les qualités ci-dessus e l des a utre sp art s transcrites, signifiées p a r l e ministère de P e y r in , huissier, le «4 ma» p r és en t mois; vu é g a le m e n t Pop p o sil io n fo rm é e à ic e llc s p ar M e S a
va ri n , a vo ué de M A n d r é - G e o r g e s - L o u i s O n s l o w ; et vu la so m m ation fa ite le i 5 de ce
m ois, audit Me Sav a ri n , à la r e q u êt e de Me Uarse, aussi a vo u é, et de la d ame v e u v e Maurice
O n s l o w et d e M. G a b r i e l - A m a b l e O n s l o w , de se t ro u v e r p a r - d e v a n t nous et en notre hôtel ,
ce jo u rd 'h u i à trois he ur es de r e l e v é e , pou r voir statuer sur ladile o p p o s i t i o n ; a tt e n d u
q u e l’ h eure ca p t é e par la d it e so m m a t io n osl plus que passée; c l attendu la non c om parutio n
d ud it Me
S av ari n , n ou s P ie r r e - A m a b le A r c h o n - D e s p é r o u s e , c h e v a li e r de l' o r d re ro y a l de
la lé gion d 'h o n n e u r, présid e n t de la i " ch am b re ci v il e d e la C o u r r o y a le d e Riom , don non s
d éfau t c o n t r e le d it M e S a v a r in , a vou é , e l , p o u r le profit, m a in t e n o n s le s pr és en tes qualités
t e ll e s q u 'elle s o n t été signif iées. F a it et d o n n é en n otre h ô t e l , à R i o m , le iG mai ¡835 , i
5 h eures du soir.
S ig n é A R C H O N - D E S P É R O U S E , p i é s i d e n t . »
'
ARRÊT.
O u i aux aud ie n ces <lp» i 3 , i!\, >5 , 19 , 3 0 , 31, 32, af> c l 37 jan vie r d e r n i e r , les avo ués en
le u rs c o n c lu s io n s , MM»* D u c l o z e l , a voca t île M. G e o r g e s O n s l o w , a p p e la n t } D e Vissac ,
avoc at du »' G a b r ie l- A m a b le O n s l o w , i n t i m é ;
C lia lu s.
Dernet , avocat du s* A i t l i u r O n s l o w ;
avo ca t du »' l l u e , e n l e u i » plaidoiries; à l’ aud ie n ce du 11 fe v iie r a u s s id e in ie r , M. S a l -
• v e t o n .l" a v o ca t -g é n é ra l, en ses oh scrv ali ons et conclusion»; et, après qu’ à ladile a u d ie n ce
du 11, la ca use a ¿ le re n v o y é e à l' a u d ie n ce de ce jour , po u r la pi onon ci.ition île l’ arrêt :
JCn f f fjtti to u c h e /<4 co m p é te n ce j
A tte n du (|uc toutes les p a llie s inté ressé es ont r e c o n n u la c o m p é t e n c e du trib u n al d e
O le in io n l, savoir : 1"S s'* G a b r ie l- A m a b le et M j u r ic e O n s ' i i w en foi 111a 111 le u r d em a n d e en
partage de la su cccssio n d’ i^douaid O n s l o w , con tre les »'• G e o r g e s et A r l liu r O n s l o w , leurs
�*
(
3 7
)
frèresj et c e u x - c i , en comparaissant, en d é f e n d a n t sur ce t t e d em and e , et en no d é c li n a n t
on a u cu n e m an iè re la juridiction du tribunal d e v a n t le q u e l ils avaient été assignés j
A t t e n d u q u e cette re con n ais sa n ce ré su lte e n c o r e , de la pa rt du sr G e o r g e s O n s l o w , partie
de D u c l o z e l , des conclusion s qu’ il a fait signifier par a cte du 7 avril 18^2, e t qu'il a ensuite
ré it é ré e s à l’ aud ie n ce des pr em ie rs juge s , co n cl u si on s par le sq u e ll e s il a dem a nd é que
l e part age fût fait d'après des bases co n form es à ses p i é t e n t io n s ;
A t t e n d u que s’ il est une fois r e c o n n u que la su cce ssion du s* E d o u a rd O n s l o w s’ est
ou ve r te en F i ance dans la v il le de C t e r m o n t ; que c’ était dan s c e l t e v il le où le s* O n s l o w
ava it sou dom ic il e de fdit e t d e d r o i t , il ne p e u t alors ê tre d o u te u x que ce n e .fut d e v a n t le
t r ib u n a ld e C le rra o n t que dût être porté e la dem a nd e en p art ag e, le li e u de l’ o u v e r t u r e d e la
su cc ession ét an t ce lu i du d om ic il e du défunt ;
A t t e n d u qu’ en a p p e l , aucu n e part ie n ’ a co n c lu à l ’ in c o m p é t e n c e d e l à C o u r , et que les
pu în é s O n s l o w , parties de De V is sa c, se so n t b orn é s à dire q u e s’ il y avait lieu d’ ap pliq uer
la lé gis lation anglaise, ce t t e a pp lic ation échap per ait à la c o m p é t e n c e de la C o u r ;
A t t e n d u que ce ne po urr ait être que dans ce cas, que la c o m p é t e n c e pou rr ait é p r o u v e r
q u elq u e difficulté»
E n ce q u i to u ch e le p rem ie r c h e f d u ju g e m e n t d o n t est a p p e l, r e l a t i f à la r e sc isio n de
V-acte d e p a r ta g e d u 11 a v r il 1828.
P a r l e m o ti f exp ri m e dans le d it ju g e m e n t .
E n ce q u i to u c h e le d e u x iè m e c h e f ou il s* a g it d u n o u v e a u p a rta g e à o r d o n n e r d e la
c o m p o sitio n d e lu m a sse d e la s u c c e s s io n d e ¿J7 . E d o u a r d O n s lo w 9 et d es d r o its des
co p a r ta g e a n s d a n s c e lte m a sse ;
. S u r la p r em iè re ques tion de ce c h e f , la q u e lle est rela tive à la natura lis ation d’ E d oua rd
O n s l o w e n Fi a n ce ;
A t t e n d u q u e la loi du 3 o avril (2 mai) 1790, ré p u t e français ce u x qui, nés hors du r oya u m e
de parons étra nge rs, son t étab lis en F r a n c e , e t q u ’ e lle le » adm et en p r êta n t l e s e rm e n t c iv i
q u e à lV x e r c i c o des droits de c it oye n s actifs après cin q ans de dom ic il e con tin u en F ia n ce »
s’ ils on t acquis de» i m m e u b l e s , ou épou sé u n e française , ou formé un é t a b li ss e m e n t de
com m erce j
A t t e n d u que ce t t e loi présen te deux dispositions d is t in c t e s , l’ une r e la t iv e aux étrangers
qu ’elle
d éc la re natura liser de pl e in d r o it , l ’ a uire r e la t iv e aux étranger» qu ’ e ll e a dm et à
l ’ e x e ic t c e des droits de c it oy e n s actif» en prêt an t le se rm e n t civ iq u e ;
A t t e n d u que c e t t e loi, en e xig e a n t îles é tra n gers qu’ e lle naiur«disait la pres tation du ser*
m e n t civiq ue pour être admis aux a va nt age s de la qualité de cit o y e n act if, ti’ a fait qu’ e x i g e r
la m êm e con dition qu’ ell e im po se aux pers onn es nées en F ra n c e }
A t t e n d u qu ’ à la qualité de fran çais est attachée la jouissa nce des droits c i v i l s , et que c ’ est
�( 38 )
l e í c i i l ^ a v a n U g P q u e la l o i a e n t e n d u c o n f é i e r a u x é t r a n g e r s q u ’ e l l e r é p u t a i t f r a n ç a i s , e n n e
l e s a d m e t t a n t à l ’ e x e r c i c e d e s d r o i t s p o l i t i q u e s , q u ' a u t a n t q u ’ ils s e s o u m e t t r a i e n t au s e r m e n t
e xigé ;
A t t e n d u q u e si l ’ o n s e p é n è t r e d e l a d i s t i n c t i o n q u i e x i s t e r n g é n é r a l e n t r e le s d r o i t s ci vil »
e t l e s d r o it s p o l i t i q u e s ,
p r e s c r i t e s p a r l a lo i d u
on
3o
n e p e u t d o u t e r q u e l ’ é t r a n g e r q u i r e m p l i s s a i t le s c o n d i t i o n s
a v i i l 1 79 0 , n’ ait été n a tu ra lisé d e p le in d r o i t , sans q u 'i l lu t ten u
d e p rê te r le ssi inent civ iq u e j
'
A t t e n d u que si des lois pos téri eu re s, te ll e s que l a con stitution d e 1 7 9 1 , on t
exi gé des
é tra n gers la co n d it io n du s e r m e n t , ces lois u ’ ont pu e t 11’ o n t e n t e n d u disp oser que po u r
l ’ ave nir , ell es n’ o n t pu ré gir l e passé , e n le v e r des droits acquis à c e u x qui a u x te rm es d e
la loi du 3 o avril 1790 é t a ie n t d e v e n u s français sans p r ê t e r de se rm e nt ;
A t t e n d u que la co n st it u tio n de 1791 n ’ e st n i in t e rp ré t a tiv e n i d éc la ra tiv e de la lo i d u
3o avril 1 "90 , e t qu’ e lle doit ê t re co n sid é ré e co m m e a ya n t statué par un droit n o u ve a u ;
A t t e n d u que la loi qui ré p u t é français , m êm e sans le u r c o n s e n t e m e n t , le» é tra n gers é t a
blis en T r a n c e , est con fo rm e aux droits des g e n s,
les droits de s o u v er ain e t é de ch aq u e
natio n s’ é t e n d a n t no n s e u le m e n t sur c e u x qu i y so n t n é s , mais e n c o r e sur le s é lia n g e r s qui
»'y son t établis ;
A t t e n d u q u e l ’ é t r a n g e r p a r l e fa it s e u l d o s a l é s i d e n c e se s o u m e t a u x lo i s d u p a r s q u ’ il
v ien t h ab iter,
e t q u ' i l e s t l i b r e à c h a q u e é t a t d e d é t e r m i n e r l e s c o n d i t i o n s a u x q u e l l e s il
a d m e t u n é t r a n g e r à s’ é t a b l i r s u r s o n t e r r i t o i r e ¡
A t t e n d u que ce serait m éco n n a ît re l e d ro it de s o u ^ r a i n e t é a p p a rte n a n t à ch aq u e é t a t ,
q ue de p r é t e n d re qu ’ un é tat ne puisse pas d éfé re r à u n é t ra n g e r la qu alité de re g n ic o l e , sans
l e c o n s e n t e m e n t ou la volon té de c e l u i a uq uel u n e p a re ill e qualité est d éfé ré e ;
A t t e n d u que c’ est à l’ é l i a n g e r qui ne v e u t pas a c c e p t e r le s titres qui lui sont co n fé ré s , à
qu itter le te rr itoire sur l e q u e l il est v e n u s’ é tablir ; e t q u e si au c on tra ir e il co n t in u e <1 y
d e m e u r e r , il est ce n sé s’ ôir e soumis à la lo i qui lu i att ribue de n ou ve a u x droits en lu i d o n
n a n t une n o u v r l l e q ualité ;
A ttendu
qu e le s' L d o u a rd O n slow de
cv jit s , n é a n g l a i s , a é t é n a t u r a l i s e e n F r a n c e
c o m m e sc t r o u v a n t d a n s le» ca s p r é v u s p a r la l o i d u
é t r a n g e r s ; q u ’ il ¿ l 3'* 1 ^o r s
3o
a v r i l 1 7 9 1 , p o u r la n a t u r a l i s a t i o n d e s
p r o m u l g a t i o n d e l a l o i , é t a b l i e n F r a n c e ; q u ’ il y a v a i t u n
d u n i c i t é c o n t i n u d e p u i s c i n q a n s ; q u ’ il y a v a i t é p o u s é u n o f r a n ç a i s e , c o n d i t i o n s q u i suffi
saien t p o u r le
fa ire
rép u ter français;
A t t e n d u q u T .d o u a id
O n s l o w tie n t no n se u le m e n t sa natura lis ation de l ’ effet de la l o t ,
n a i s qu’ il a ( n c o t e m an ife st é , par plusi eurs actes de sa vio pu b li q u e et p r iv é e , l’ in le n lio n
d ’ é t ie français;
A t t e n d u qu’ après la pu b li catio n d e l à l o i , il a co n t in u é do ré sider e n F r a n c e , ce qui
�( 39 )
fo r m e ra it , s’ il en était b e so in , u n e e sp èce d’ a ccep tation de la qualité de fia nçais q u 'il ven a it
d e r e c e v o ir ;
A t t e n d u qu ’ il paraît que la ré sid e n ce du s* E d o u a rd O n s l o w en F i a n c e est antérieure à
son m a r i a g e , c l q u e son in te ntio n fut d’y fixer sou d om ic il e en con t ra c ta n t mariage , le
G mars
83 9 n v e c l a D l l e de B o u rd cil le , n ée fr an çais e;
A t t e n d u q u e les dispositio ns du c on tra t d e m ar ia ge des futurs é pou x r é v è l e , de la part tle
l ’ un co m m e de l'a u t r e , l ’ in t e n t io n de n ’ avoir d’ autre d om icile qu ’ en F r a n c e ; le p r ix des
bie n s q u e la D lle de
B ou rd e il lc s’ était rése rv é d e v e n d r e devait ê tre e m p lo y é à a cq u é rir
d es im m e u b le s eu F r a n c e , et la dot du s» E d o u a r d O n s l o w d ev a it , jusq u’ à c o n c u i r e n c o de
10,000 li vre s s t e i l î n g , r e c e v o ir la m êm e destina tion ;
A t t e n d u que les dispositions de ce c on tra t de m ar ia ge o n t été e x é c u t é e s e t que le sieur
E d o u a r d O n s l o w eût d e v e n u a c q u é r e u r d ’ i m m e u b le s situés en F r a n c e , s a v o i r : d e la te rr e
d e C h a l e n d i a t et d’ une maison si tu ée à C l e r m o n t ;
A t t e n d u que depuis son m ar ia ge le sr O n s l o w dem e u ra a C l e r m o n t - F c r r a n d , vu que
«on m ! m ^ e ^ n A n g l e t e r r e , en 1784 » époq u e r a p p r o ch é e de son m ar ia ge , n ’ é t a it qu ’ une
sim ple visite qu ’ il était dans son d ev oir de faire a v e c son épou se 9 à ses pa re n s qui é t a ie n t
v e n u s e u x - m ê m e s à Paris po u r la c é lé b ra t io n de son m ar ia ge ; qu ’ a i n s i , ce v o y a g e qui fu t
fa it ave c l ’ espr it de re to ur, ne m o n t r e au cu n e i n t e n t io n , de la part du s ' E d o u a r d O n s l o w ,
de c o n se rv e r son d om ic il e d 'o ri gin e en A n g l e t e r r e ;
A t t e n d u qu’ E d ooard O n s l o w a fait partie en 1789 de la ga rde n at io n ale de C l e r m o n t »
e t que dans u n e r é u n io n s o l e n n e lle de cette ga rd e it a prêté , le 20 d é c e m b r e de la m êm e
a n n é e , le se rm e n t prescrit par les l o i s , ce qu i est con st até par un e x tr ait des registre s de la
mairie de C l e r m o n t ;
A t t e n d u q u e l’ ord re que r e ç u t E d o u a rd O n s l o w en 1798 de qu itter l e terr it oir e français
n e fut qu’ une sim ple meaure d’ or d re pu b li c qui t e n a it aux circo n st an ces du l e m s , et d o n t
on ne p e u t in duire que ce lu i c o n t r e l e q u e l e ll e était prise, ne fût pas natura lis é fran ça is , la
loi lui ayan t co n fé ré une q u alité qui n’ a pu lu i ê tre p o s té rieu re m e n t e n le v é e par u n e mesur e
de h au te po lice ;
A t t e n d u q u e le s* E d oua rd O n d o w a été por té en l’ an I r , en i 8 l 2 et en 1820, sur les
listes d i s plus forts im p o s é s , et les listes d o c t o r a l e « ; et que s’ il a été ainsi inscrit f c'e st
pa rce que l’ opin ion pu b li q u e , les agens du g o u v e r n e m e n t le répu la ie iU fr a n ç a is , et c apab le
d 'e x e r c e r des droits po lit iq u es;
At t e n d u q u e le s» Edou ard O n s l o w a fuit é l e v e r se« e n fin * dans la re li g io n c a th o liq u e ; et
q u e c e u x - c i ont t r l l r i n e n t été con sid é ré s co m m e fr an çais , q u e l’ on a e xigé d’ eux qu ’ ils sa
tisfissent aux lois de la con sc ri p tio n et du r e c r u t e m e n t ;
�( 4o )
A t t e n d r i que la perm ission qu’ ob tin t en 1798 E d o u a rd O n s l o w , du roi d’ A n g le t c rr o , de
ré sid e r en F i a n c e , ne peu t être c o n sid é ré e q u e c o m m e u n e p r éca u t io n qui fui prise dan*
F i n t c i è l du sr O n s lo w po u r con se rv e r ses droits en A n g l e t e r r e , et que d’ ailleurs cet acte no
pou rr ait détruire l'ciTet de la loi qui l'ava it d éc laré naturalisé en F ra n c e ;
A t t e n d u que lors de son v oyage e n A n g l e t e r r e , le sr O n s l o w a pu y faire c é l é b r e r son
maria ge su iv an t 1 e rite p rote st a n t , ce qui n ’ a été de sa part qu ’ un h om m age pu b li c re n d u à
la re li g io n dans la qu e ll e il était né , sans que d e c e lt e c é lé b ra t io n on puisse in d uir e qu’ il
ait m an ife st é l 'in t e n ti o n d 'ha b it er l’ A n g l e t e r r e ;
A t t e n d u que q u elle s que so ie n t le s induc tion s que l ’ on p e u t tirer du m ode suivi par le
s* O n s l o w , po u r faire son te st am e nt e n
i 8 i t d’ après les statuts a n g la is , et d e l' in t é r ê t
qu ’ il avait d e c o n s e r v e r í a qualité d’ anglais p o u r r e cu e il li r u n jour par lui ou par se* d es
c e n d a i s , s’ il y avait lie u , la pairie et les ava ntages qui y é t a ie n t a t t a c h é s , elles 11c p e u v e n t
jam ai s d étruir e ce qu i ré su lte d 'u n e ré sid e n ce de fait en F r a n c e qui a duré depuis 1^83 ,
é p o q u e d e *on m a r ia g e , ju sq u’ en 1829 > 18 o c t o b r e , é p o q u e de son décès^ ré sid e n ce qui a
été a c c o m p a g n é e d e plusieurs actes d ém o n t ra n t son in te ntio n d’ a c c e p t e r la Œ u a W n ^ u o u
q ui lu i avait été a cc or d ée pa r la loi j
S u r la *2e ques tion r e la t iv e au dom ic il e du s r E d o u a r d O n s l o w à C l c r m o n t :
A t t e n d u qu’ à supposer qu ’ il put s 'é l e v e r q u elq u e difficulté sur la naturalisation du sT O n s l o w
en F r a n c e , il n'en faudrait pas m oins r e co n n aît r e, d ’ après les pr in ci pes de la matiè re et l e u r
a pp lic ation aux faits d e la c a u se , qu ’ il aurait acquis un v ér it ab le d om ic il e dans le l o y a u m e ;
A t t e n d u qu'il était admis par pres qu e tous les a u t e u r * , que l ’ étra n ge r qu oiqu e no n n a t u
r a l i s é , a cq uéra it un dom ic il e e n F i a n c e , pou rv u que deux choses c o n c o u r u s s e n t , l e fail et
l ’ in t e n t i o n , la loi c o m m u n e n ' e i i g c a n t de l’ é lr a n g e r , pou r l'é tab li ss em en t de son dom ic il e,
q ue le fait d 'u n e habitation r é e lle jo in t à l' in t e n tio n de l’ é tablir ;
A t t e n d u q u e ce t t e d o c t rin e qui e j l pu isée dans le droit co m m u n a été plusieurs fois
con sa cré e par la ju ri sp ru de n ce ;
A t t e n d u que le *f E d o u a rd O n s l o w avait un v ér it ab le d om icile en F r a n c e avant le codo
c i v i l , par cela seul qu’ il y avait trans porté sa r é s i d e n c e , et qu ’ il avait manifesté par plu iio u r s acte s so n in te ntion d’y rester à p e r p é t u e lle d em e u re j
«
A t t e n d u q u ’ en e xa m ina n t la vie du s ' O n s l o w , il e it impossible ilo ne pas co n v e n ir qu’ il
n ' c ù t transporté l e siège de ses affaires en F i a n c e ; q u e ce p a j s ne fût ce lu i qu'il ne pouvait
( p i l i e r tan s que l’ on dit qu ’ il était a l u n i t ,
r i ne fût ce lu i où il re v e n a it sans q u e l’ on dit
qu'il était do re tou r , ainsi que s’ en e xp liq u e la loi lo m a in e ;
Attem lii que en d om ic il e é la n t une fuis acqu is, le s' O n s l o w n ’ en a pu é t i c pr ivé par des
loi» p o s té rieu re » , qui aur aient e s ig é des étran ger s d ’a u lr c s conditions U l l r s que c e lle do
l ' a u l o n ia lio ii du g o u v e r n e m e n t .
�( 4i )
A t t e n d u q u e l ’ art. i 3 du co d e c i v i j f p a r l e q u e l un é t r a n g e r , qu i a ¿té a d m is par l ’ autoiisation du Roi à é t a b li r so n dom ic il e en F r a n c e , y jou it de tous les droits c i v i l s , n e dit pas
q u e l 'é t r a n g e r q u i n'au ra pas o b t e n u ce t t e autorisation n e pourra pas acqu éri i de dom ic il e
enFrance;
A t t e n d u q u e c e t a r t ic le , q u i se tro u v e sous la ru b riq u e des droits c i v i l s , n ’ a pas eu po u r
o b j e t d e d é t e r m i n e r les c o n d it io n s q u e d e v a it r e m p l i r un é t r a n g e r p o u r a c q u é rir u n d o m i
c il e e n F r a n c e )
A t t e n d u q u 'il a été r e c o n n u p a r l a ju ris p ru d e n ce q u e l'é t r a n g e r q u i a v a it fixé son h a b i
tation r é e lle e n F r a n c e , e t qui avait eu l'i n t e n t i o n d e l ' j f i x e r , mais sans autori sation du
g o u v e r n e m e n t , n 'e n ava it pas moins u n d o m i c i l e lé ga l e n F r a n c e ,
e t n 'e n p ou v ait pas
m o in s ê t r e tradu it d e v a n t les t rib u n au x français , d o n t il était d e v e n u ju st ic ia ble par le fa it
d e son d o m ic il e ;
A t t e n d u q u e si l' é t r a n g e r d om ic il ié e n F r a n c e pe u t-ê tre ci té po u r acti on p e r s o n n e lle d e
v a n t un trib u n al fr a n ç a i s , on n e v oit pas d e ra ison p o u r q u e la su cc ess iou m obil iè re d e
l ' é t r a n g e r d om ic il ié e n F r a n c e n e fut pas ré gie par la lo i française , puisqu’ il e st d e p r in
cip e q u e 1<* m o b il ie r d 'u n e su cc ession e&L régi pa r la lo i d u dom ic il e ;
A t t e n d u que le s» E d o u a rd O n &low , après a voir lixé , dès 178 3, son d om ic il e à C l e r m o n t ,
n e s ' e n e s t abse n té que ra r e m e n t e t toujours a v e c esp rit de re to u r, n 'a y a n t po u r lui n i p o u r sa
f a m i l l e , aucûn é t a b lis s e m e n t ail le u rs , a ya n t co n se rv é ce m ê m e d om ic il e jusqu’ au d e r u ie i
in st an t de sa v i e , puisq u'il est d é c é d é dan s la v ille qui était le li e u d e sa ré b id eu ce h a b i
t u e l l e , c e lle de sa fe m m e ; de ses e n fa n s, et où il avait le siège d e sa forLune et d e ses affaires;
At t e n d it que toutes les parties in t é r e s s é e s , et le s' O u s l o w l u i - m ê m e ,
en p r o céd a n t
v o lo n t a ir e m e n t d e v a n t le t ribunal de C l e r m o n l* F e r r a m l, su r la d em a n d e en part ag e des b ie n s
*
d u s ' E d o u a r d O u s l o w , et en re c o n n a is s a n t la c o m p é t e n c e de ce t r i b u n a l , o n t pa r-là re^
c o n n u q u e le u r p è re était d o m ic il ié à Cl erm on t#
S u r la tro isiè m e q u es ti on re la t iv e au p r o d u it d e la v e n t e des b ie n s d 'E d o u a u l O n s l o w f
aitucs e n A n g l e t e r r e )
A t t e n d u que la su cce ss io n d 'E d o u a rd O n s l o w , n é anglais , mais naturalisé f r a n ç a i s , s est
o u v e i t e le 18 o ct o b re l S a y , r u F r a n c e , où il avait é t a b li d ep u is lo n gu e s ann ées »011 d o ïn ic il e de fait et de droit , et q u e les swuls a y a n t -d ro it à cc t t o succe ssion so n t les rtifans du
d é f u n t , tous nés fia n ç a is )
A t t e n d u q u e cette su cc e ss io n se co m p o se d e b ie n s im m e u b le s et d e bie ns m e u b le s d’ unj;
v a le u r c o n sid é rab le ) que les im m e u b le s é tan t tous situés en I 'ra n ce ne p e u v e n t ê t re l é g i j
qui» par la loi du lien do le u r situation*, que le s b ie n s m e u b le s ne p e u v e n t a vo ir d ’ autro
rè g le q u e la loi de dom ic il e du défunt) et qu 'ain si ces b ie n s im m e u b le » et ces bien» m eu bles
�( 42 )
so n t é g a le m e n t soumis a ux lois fr ançaises , e t que l e pa rta ge doit e n ê t re ord o n n é d’ après
l e co d e c i v i l , sa u f les droits que les co h é ri tie rs a u r a ie n t à faire v aloir e n vertu de disposi
tion» v a la b le s faites p* r l e u r père ;
A t t e n d u qn’ entre les bie ns m e u b le s d 'E d o u a rd O n s l o w , il ne sa ur ait y avoir de d is t in c
tio n po u r ce qui c o n c e rn e le p r ix 'd e l a t e rre d e L ill it ig st o n n , e t autres im m eu b le s situés
e n A n g le t e r r e , pr ix qui a é t é tra nsport e e n F r a n c e et q u i se tro uve dans la s u cce ssio n m o
b il iè re d o n t il s'a git ;
A t t e n d u qn e G e o r g e s O n s l o w n e p e u t a u jo u rd 'h u i r é c la m e r l e p r é l è v e m e n t du pr ix do l a
t e rre d e L i ll in g st o n n , d o n t s o n p è re lui avait d o n n é , po u r p r é c ip u t, la n u e p r o p rié t é pa r
s o n co n t ra t de m ari a ge , du t8 ju il le t 1808 , e t q u 'il no p e u t p r é t e n d r e qu.e c e pr ix doit l u i
a p p a r t e n ir c o m m e p r o p rié t a ire de la dite t e rre , e t sans q u 'il fut s u je t à au cu n re lr a n c h e m e n t
pa r suite du p r ivilè ge du statut r c e l d e l’ A n g l e t e r r e ;
'►
A t t e n d u q u e c e l t e t e r r e a été ven due» l e 2 ju in 18^4• par E d o u a r d O n s l o w , au c o lo n e l
D e l a p s ; q u e l e prix e n a é t é pa y é par l ' a c q u é r e u r , trans po rté e t p la cé en F r a n c e ; qu'ain si
. t
i l y aur ait eu u n e m obil is atio n q u e , d'ap rès plu si eu rs faits e t c ir co n st a n ce s d e l a ca use ,
Georges
O n s l o w paraîtrait n 'avoir pas ig n o r é e ,
et à la q u e lle
il paraîtrait m ê m e a v ç ir
concouru;
A t t e n d u q u e l'i m m e u b l e a ya n t été d é n a t u r é , a ya n t été c o n v e r ti eu u n e so m m e d 'a rg e n t ,
l e statut r c e l d e l ' A n g l e t e r r e n e p e u t ê t r e app li q u é au p r ix d e v e n t e c o m m e à l ' im m e u b le
mêm e ;
A t t e n d u q u e ce sta tut ne t ro u v e pas d e m at iè re à la q u e lle il puisse s ' a p p l i q u e r , le s im *
m eu b le s d o n t il s’ a g it r a c la n t pas dan s la succe ss ion de l'a u t e u r c o m m u n ;
A t t e n d u d o n c . q u e la co n d it io n e sse n t ie ll e po u r ré c la m e r l' a p p li c a t io n d 'u n sta tu t é t r a u g e r étan t que les im m e u b le s d o n n é s n ' e u s s e n t pas été m obil is é s, la m o b il is a t io n q u i s'e n est
«ipérée e n s ou m et l e prix à la toi du lie u d e l ’ o u v e r t u r e d e la su cce ssion}
A t t e n d u q u e la c o u r n e peu t avo ir à s t a t u e r sur l a p r o p rié t é d ' im m e u b le s qu i n e s on t plus
au po u v o ir d 'au cu n des m em b re s de la fa m il le O n s l o w , mais a s e u le m e n t à st atuer sur le p r i s
p r o v e n u de la v e n t e d e ces im m e u b l e s , e t qui est v e n u a u g m e n t e r d 'a u t a n t la fo r t u n e m o
b iliè r e d e M . O n s l o w p è re ;
A t t e n d u que si le sieur G e o r g e s O n s l o w n e p e u t pas s’ a p p u y e r sur le sta tut r é e l , il i n
v o q u e r a i t
i n u t ile m e n t sa d o n atio n du 18 ju il le t 1808 f pu isque c t s deu x é lé m e n s qui s o n t
nécess aires pou r é t a b li r sa p r é t e n t io n
f illingatonn ayan t
é té
n e P e u v e n t plu s c o n c o u r i r e n s e m b l e ,
la te rre d t
a lié n é e .
A t t e n d u que ta d on atio n faite h G e o r g e s O n s l o w ne p e u t , dans les te rm es où U cause se
p i é j f n t r , avoir l' e fl c t q u 'il v ou dra it lui a tt r ib u e r ;
�(
43
)
A t t e n d u qu ’ il est à pr és um e r, tVapiès le s ra pports d’ intimilé et cVaifcciioii qui o n t existé
c o n s t a m m e n t e n t re le s s T* L d o u a r d et G e o r g e s O n s l o w , q u e le p ère n e se sc ia pas d éte rm in é
à v e n d r e la t e i r c de L i llin g s lo n n sans l e c o n s e n t e m e n t ., sans l e c o n co u rs de son f i l s , au
q u e l il avait d o n n é la n u e p r o p iié lc * G e o r g e s O n s l o w a d m i n i s t r a i t , gé ra it les aiT.ûtesde
son p è r e ; et u n e négoci a ti on aussi c o n sid é ra b le e t aussi difficile , à raison de l ’ é lo ig n e m e n t
d es l i e u x , q u e c e l l e de la v e n t e d e la te rre d e L i lli n g s lo n n , n e po u vai t g u è re se faire sans
l ’ aide et s a n s la pa rt icipation de ce lu i qui avait l e plus d’ in lé ré t à ce q u e la n é g o cia tio n fût
fa ile d ’ une m an iè re a v a n t a g e u s e 5
A t t e n d u q u e G e o r g e s O n s l o w n ’ a pas con te sté t e l l e v e n t e ; qu'il en a, en q u elq u e m a n iè re ;
r e c o n n u la val id it é , soit po u r en a vo ir r e ç u le prix en q u alit é de m a n d a t a ir e d e son p è r e ,
s o it po u r l u i en avo ir T e n d u c o m p t e sans se faire a u c u n e r é s e r v e , s u iv an t les acte s des 1 4 et
l 5 j a n v ie r 1828-, qui on t é lé pr od uits en p r e m iè r e instance,*
A l t e n d u q u e r é n o n c i a t i o n p o i ï é e dans la v e n t e faite au c o lo n e l D e l a p s , que les im m e u
b l e s vèn d u s é t a ie n t lib res de to us d o n s , ainsi que le s faits e t .-¡clos qui o n t eu lieu p o s té rieu
r e m e n t e n t re E d o u a r d O n s l o w et so n fils s e m b l e r a ie n t f a ir e croir e q u e c e lu i- c i n ’ e n t en d a it
p l u s faire usag e de la disposition qui était p o r té e dans son co n t ra t d e m a ria ge ;
A t t e n d u q u e si ces p r és om p tio n s de r e n o n c ia t io n é taie n t é c a r t é e s , la d e m a n d e en p r é l è
v e m e n t ou en dispense du ra pport du pr ix de la te rr e d e L i llin g s t o n n n ' e n serait pas plus
fo n d é e si la v e n l e de c e l l e t e i r e , co m m e v e n t e «le la ch os e d’ a u t r u i , n e p o u v ait d o n n e r lieu
q u ’ à u n e action en d és is te m e n t c o n t r e l’ a c q u é r e u r , c l à u n e acti on en d o m m a g e s- in t é ré ls
c o n t r e le s c o b é r i l i c i s du d on at ai re ;
A t t e n d u que tan t q u e la v e n t e subsiste , tant q u e G e o r g e s O n s l o w n ' r x e r C e pas d ’ action
e n d és is te m e n t , il ne peut se c i é e r un droit de gara n tie ou h de* d »in m age s-in té ré ts e n
c x c i p a n l d’ u n e législation é tra n gè re qui est sans appli ca tio n aux im m e u b le s qui se tro u v e n t
dans la su cce ssion a p a r t a g e r ;
A t t e n d u q u e l ’ action d ir e cte que C c o T g e s O n s l o w a e x e r c é e c o n t r e ses c o li tr itier s , en
p r é l è v e m e n t d e la terre dp L i l l i n g s l o n n , s e m b le r a it a n n o n c e r qu*il a d o u té l u i- m é m e de
la légitim ité de son droit, ce qui s e r a î l u n e raison de plus po u r n e pn s a c c u e ill ir sa dem and ai
A t t e n d u que le s r G e o r g e s O n s l o w ne se ra it pas m ê m e fo n d é à ré c la m e r des dou»mage«in térê ts s'il a co n s e n t i à ce que le prix d e la te rre d o n t il s'agil se trouvât en vale u r m o b i
liè r e d ans la su cc ession de son père j et s’ il a a ppro u v é et r ali fié la vpn te «pi en avait été faite.
L e t o it qu ’ il
aurait é p r o u v é n e lui aurait pas c l é causé c o n t r e »a v o lo n té et malgr é son
c o n s e n t e m e n t ; il n’ aurait qu ’ à im p u t er à son pr op re fait la non e x é c u t io n de la d on atio n
q u ’ il ava il o b t e n u e de la lib éra li té de sop p è i o ;
A l t e n d u que la qualité de cré a n c i e r doit ré su lt er d’ un c o n t r a t à litre o n é r e u x ; qu'il serait
�c o n t ra ir e ¿ l ' é q u i t é e t à V csse n ce des choses qu’ e l l e p û t ré su lt e r d’ un co n t ra t de b ie n fa is an ce
q u i r e n fe r m e un a v a n t a ge p u r e m e n t g r a t u i t , le s d onat ions n e p o u v a n t pr od uire e n fa v e u r
des d o n ataire s les m ê m e s effets que le s don atio n s e n fa ve u r d es cré a nci er s ;
A t t e n d u q u e le s* G e o r g e s O n s l o w ne p e u t , à l’ aide d’ u n e q u alit é d e c r é a n c i e r qui n e lu i
a p p a rtie n t p a s , v en ir a bso rb er la plus gr a n de pa rtie de l ’ hoirie p a t e r n e l le au préju d ic e de
'ses coh éritie rs s u r - t o u t après a vo ir laissé m ob il is er l ’ im m e u b le à lu i d o n n é , après e n a voir
p e r ç u le p r ix , e t après avo ir re ndu co m p t e en q u alité d e m a n d a t a i r e , sans se faire a u cu n e
ré s e r v e j
A t t e n d u q u e le titre d e G e o r g e s O n s l o w n e lu i d o n n e d 'au tre droit q u e ce u x de d on at ai re
ou h é r it ie r p r é c i p u é , et que ces q «alités e x c lu e n t é v id e m m e n t dan s sa p e r s o n n e la q u alit é
d e c r é a n c i e r q u M voud rait s'a ttr ib u e r par suite d 'u n e disposition p u r e m e n t gr ù lu il c ;
A t t e n d u q u e le d on ataire pa r p r é c ip u t est te nu d e ra p p o r t er au p a it a g e tout ce q u i exc èd e
la q uotité dis pon ib le , e t que q u e l le que soit l' é t e n d u e de sa d on atio n , il ne p e u t r i e n p r é l e v e r
de plus q u e la qu oti té d is po nib le;
A t t e n d u q u e G e o r g e s O n s l o w , v e n a n t a v e c ses fiè re s en pa rta ge d e la su cce ss io n d e le u r
p è r e , d o m ic il ié en F i a n c e , d 'u n e su cc ess ion don t to utes les valeurs tant m obil iè re s qu’ im
m o b il iè re s se tVouvent en F r a n c e , et par c o n s é q u e n t régie par les lois f r a n ç a is e s , doit se
co n fo r m e r aux d is posit io n s des article» 9 1 3 e t 920 du co d e c iv il; e t , tou t en fa isa nl usage de
sa d o n atio n pa r p r é c i p u t , ne rie n p r e n d i e qui puisse e n t a m e r la rése ï v e q u e la l o i fait à si »
c oli é ii tie rs ;
A t t e n d u q u e l e s* O n s l o w pèt e , eu égard au n o m b re de ses e n fa n s, n'a pu disp oser au-d elà
du quart d e scs b ie n s m e u b le s et i m m e u b l e s , et que c'e s t à ce p r é l è v e m e e t ou d is pe n se de
ra p p or t q u e doit se b o r n e r l'e ff et de la d on atio n faite par p r é c i p u t , au profit d e son fi!»
G e o r g e s , de la n u e p io p r ié t é dt*s im m e u b le s et de» objet* m o b il ie rs qu’ il possédait en Fi anc e
et en A n g l e t e r r e , p r é l è v e m e n t qui d'.iilleurs n'eut pas c o n t e s t é , le su rpl us des biens d e v a n t
ê t re partagé é g a le m e n t c n tre tous les a^ant*droit.
E n ce q u i to u ch e le co m p te d e m a n d a t d e m a n d é a u s* G eo rg es O n s lo w t et en ce q u i
^ to u ch e l e dtxtiàtire
l k d a m e O/i^/dju
^
*/
r
**
V « -
F a r le s motifs e xp rim és dans le j u g e m e n t don t e»t,appel ;
t■ f
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"m
•
E t a tte ndu q u 'il 11e s e l è v e a u cu n e difficulté sur ce d ou aire .
E n ce q u i to u ch e le s in tc t'u e n t.o n s d u »r f in e , liq u id a te u r d e la J u i l l i t e d u s 1 F o n ta in e »
jM orca u , c r é a n c ie r d u s r A r t h u r O n slo w ’ ) et l* a p p cl in te r je té c o n tr e le s* H u e p a r le d it
s 1 s î r t h u r O tts lo w ;
A t t e n d u que l i n t c i v e n t io u du »» H ü e , en p r em iè re in s t a n c e , n'était pa i régu lici c , faute
�' (
4 5
)
pa r lui «l’ avoir fait r é p o n d r e ca re q u ê t e d’ in t e rv e n t io n par l e juge , e t de l ’ avo ir fait signifier
à la p a i t i e in té re ss é e ;
A t t e n d u qu ’ il y a e u néce ss ité d e la pa rt du s* IIüc d’ i n t e r v e n i r d e nou ve a u e n la C o u r ,
et q u e les frais J e ce t t e in t e i v e n t i o n ainsi q u c c c u x de la p r em iè re d o iv e n t rçj>ler à s a pl>arS*)
A t t e n d u q u e ta se co n d e in t e rv e n t io n est ré g u liè re c o m m e a y a n t été
suivie] de l ’ ordoiy-
n a n c e du j u g e , et a ya n t été signifiée ; e t qu’ au su rp lus la régu la ri té n ’ e n est pas co n t e s t é e ,
ainsi q u e le droit du »' Hiie d ’ i n t e r v e n ir .
\ > i.'r
E n c e q u i lo u c h e l ’ in te r v e n tio n d e la d a m e y in n e - M a n e - P a m è la
d e M o n g la s e t
c o m o r ts , c o m m e c r éa n c ier s d u s ’ A r t h u r O n s lc w ;
A t t e n d u q u e ce t t e in t e rv e n t io n q u i a en lie u e n a p p e l , c l qui a é t é fo r m é e par re q u ê t e
suivie d’ o r d o n n a n c e du ju ge e t n o t ifié e , n’ est co n t e st é e n i e n l a forme ni au f o n d , A r t h u r
O n s l o w n e s o u le v a n t a u c u n e difficulté sur le s i n t e r v e n t io n s .
; _
•*
■
: : -, i : ‘
'
L \ C O U R dit qu’ il a été b ie n j u g é pa r l e j u g e m e n t du î 5 mats i 8 3 3 , d o n t est a pp el ;
o r d o n n e q u e le d it j u g e m e n t sortira son pl ein e t e n t ie r effet dan s toutes ses dispositio ns , à
l ’ e x c e p ti o n c e p e n d a n t d e c e lle qui r e ç o it l’ in t e rv e n t io n du sr H iie , c r é a n c i e r d u s ' Artlrnr
O n s l o w ; é m e n d a n t , d é c la r e la dite i n t e r v e n t io n n u ll e et ir rég uliè re en la fo r m e ; d o n n e
acte au s ' l l i i e e l à ’ a d am e M ongla s e t con so rts de le u rs in t e rv e n t io n s en cause d ' a p p e l , les
autorise à a ss is ter,
à le u rs f i a i s , au pa rta ge o rd o n n é de la su cc ess ion d’ E d o u a r d O n s l o w ,
et à toutes o p é r a t io n s u lt é ri e u re s , e t c e po u r faire v a lo ir tous le u rs droits e n ' q u a l i t é d e
cr é a n cier s d’ A rt liu r O n s l o w , un des c o p a rla ge an s ; d é c l a r e , q u a n t i p r és en t , le s' llü e 11011r e c e v a b le dans le su rpl us d e se s d em a n d e s qu ’ il pou rr a c e p e n d a n t faire v alo ir dans le cou: s
l ’ in st an ce en pa rtage e t p a r - d e v a n t qu i de d ro it ; fait n é a n m o in s r é s e r v e au s ' A r t h u r O n s lo w ,
pa rtie d e B e r n e t ,
de tous se s m o y e n s et e x c ep tio n s con tra ir e s c o n t r e le d it s' l l ü e ,
partie d e C h a l u s , la d ame d e M o n g la s e t a n tre s, part ie s de D e b o r d ;
C o n d a m n e la p a r t ie de D u c l o z e l e n l ’ a m e n d e et a ux d é p e n s de la ca use d’ a p p e l envers
l a d ame O n s l o w sa mère , pa rt ie d e B o n jo u r ;
•
e n t re la pa rlie de D u c l o i c J « Ç l y . ’f a r U a s V l g J ^ y ^ < \ c t I . ^ y y ? ^ V . iie " l c t .
p ou rêtie
e m p lo y é s en frais de partage e^ ê t r e su pp orté s d’ après l ’ étn oli k ne ii t d e y c h a c u n des
lagrans;
autoriso la pa rtie d e
D u c l o z e l a faire c o m p r e n d r e
c o m p e n s é s les d ép e ns auquel» e llo a été p e r s o n n e lle m e n t
copar-
dans la nia>se des d é p e n s
co n d a m n é e e n v e rs l i pa rtie de
B o n j o u r ; c o n d a m n e le sieur ll iie, pa rtie de C h a l u s , aux d ép e n s occa sio n n és par l ’ a ppe l d*
�(
la
4 6 ’0
pa rtie d e B e r n e t ; o r d o n n e la re stit u tio n de l* amende co n sig n é e p a r c e t t e d e r n iè r e j
m a i n t i e n t la disposition des p r e m ie rs ju ge s , r e l a t i v e m e n t aux d é p e n s d e la p r e m iè re i n t e r
v e n t i o n ; c o n d a m n e , c o n fo r m é m e n t à l'a rt ic le 882 du co d e c i v i l , la p a rt ie de C h a lu s aux
d é p e n s d e son in te rve n tio n e n a p p e l ,
et le s parties de D e b o r d a ux d é p e n s d e l e u r i n t e r
v e n t io n e n la C o u r .
A la m in u t e o n t signé A r c h o n - D e s p é r o n s e , p r és id e n t , e t L a m o u r o u x , commis-greffier.
E n r e g is t r é à Ri o m , l e 18 a vr il 1 8 3 5 , fol io g o , v e r s o , case 6 . R e çu I I
com pris*
francs,
dixièm e
S ig n é P E Y R O N N E T , r e c e v e u r .
1
M an d o n s e t o rd o n n o n s à tous huissiers sur c e re q u is d é m e t t r e l e p r é s e n t a r r ê t à e x é c u
t io n ; à nos p rocure urs g é n é r a u x , e t à nos p r o c u r e u r s p r i s le s t rib u n au x d e p r e m iè r e in st a n c e d ' y t e n ir la m a i n ; à tous cora m an dan s e t officiers d e la fo r ce p u b liq u e d e p r ê t e r
m ain forte l o r s q u ’ ils e n se r o n t l é g a l e m e n t requis.
E n foi d e quoi l e d i t arrêt a é té sig n é p a r M , l e p r é s id e n t , et p a r l e greffier,
i.
P o u r e x p é d it io n c o n fo r m e d é l i v r é e à M e Ba rse , avo ué du sieur G a b r i e l - A m a b Ie O n s l o w ,
e t d e là d am e v e u v e M a u r ic e O n s l o w , n é e D u t r e u il.
L e greffier e n c h e f de la c o u r r o y a le d e R io m .
S ig n é G A R R O N .
.1 1 - 1
'
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.11.
■ n.
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E n m a rg e d e l'e x p é d i tio n est é crit :
R e ç u , p o u r d r o it de gre f fe , 26 0 fr. 3 o c.
R i o m , le 22 m ai 1 8 3 5 S ig n é P E Y R O N N E T , r e c e v e u r.
J lii
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Arrêt de la Cour. Onslow. 1835]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Garron
Subject
The topic of the resource
successions
succession d'un français né à l'étranger
naturalisation
serment civique
étrangers
droit d'aubaine
douaire
jurisprudence
ventes
mariage avec un protestant
expulsion pour raison politique
double nationalité
primogéniture
droit anglais
droit des étrangers
droit des catholiques en Angleterre
Description
An account of the resource
Titre complet : Etude de Maitre Louis Barse, avoué près la Cour royale de Riom. Arrêt Onslow.
annotation manuscrite : « 28 avril 1836, arrêt de rejet, chambre des requêtes, Sirey, 1836-1-719 (?) ».
Table Godemel : Etranger : 1. pour qu’un étranger devint français, sous l’empire de la loi du 30 avril-2 mai 1790, était-il nécessaire que, outre les conditions de domicile et autre voulues par cette loi, il prêtât le serment civique ; ce serment n’était-il exigé que pour acquérir le titre de citoyen et les droits politiques attachés à ce titre ?
l’étranger qui avait ainsi acquis la qualité de français, a-t-il été soumis, pour la conserver, à l’obligation de prêter le serment exigé par les lois postérieures ?
l’étranger établi en France qui remplit toutes les conditions exigées pour être réputé français, est-il investi de plein droit de cette qualité, sans que son consentement ou sa volonté soient nécessaires ? Est-ce à lui de quitter le territoire, s’il ne veut pas accepter le titre qui lui est déféré par la loi ?
l’ordre donné, par mesure de haute police, à un étranger naturalisé de quitter la france, enlève-t-il à cet étranger sa qualité de français ?
l’étranger qui a fixé son habitation en France, avec intention d’y demeurer, doit-il être réputé domicilié en France, bien qu’il n’ait pas obtenu du gouvernement l’autorisation d’établir ce domicile ? Le fait de l’habitation réelle, joint à l’intention suffisent-ils ?
l’étranger qui aurait acquis, d’après les lois alors éxistantes, son domicile en france, a-t-il pû en être privé par des lois postérieures qui auraient éxigées pour cela d’autres conditions ?
2. la succession mobilière de l’étranger en france, est-elle régie par la loi française ?
en est-il de même du prix d’immeubles situés en pays étranger, si ce prix a été transporté en france et se trouve ainsi mobilisé ?
spécialement : le prix de vente d’un immeuble appartenant à un français, mais situé en pays étranger et dont la nue-propriété avait, avant la vente, été l’objet d’une donation par le vendeur à l’un de ses enfans, devient-il par son placement en france une valeur mobilière de la succession du vendeur, soumise à la loi française ?
en conséquence, l’enfant donataire peut-il, lors de l’ouverture de la succession paternelle, réclamer sur de prix de vente au-delà de la quotité disponible dont la loi française permettait à son père de l’avantager ? importe-t-il peu que la donation de l’immeuble eut pû avoir son effet pour le tout en pays étranger ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1835
1783-1833
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2708
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2701
BCU_Factums_G2702
BCU_Factums_G2703
BCU_Factums_G2704
BCU_Factums_G2705
BCU_Factums_G2706
BCU_Factums_G2707
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53545/BCU_Factums_G2708.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Blesle (43033)
Bordeaux (33063)
Clermont-Ferrand (63113)
Paris (75056)
Saint-Germain-Lembron (63352)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
douaire
double nationalité
droit anglais
droit d'aubaine
droit des catholiques en Angleterre
droit des étrangers
étrangers
expulsion pour raison politique
jurisprudence
mariage avec un Protestant
naturalisation
primogéniture
serment civique
succession d'un Français né à l'étranger
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53536/BCU_Factums_G2621.pdf
84875f720efadb7daf87e08a6c3b8c51
PDF Text
Text
AVIS A U L E C T E U R .
L a date de l ’avis interprétatif du sénatus-consulte
du 16 floréal, est du 9 thermidor, et non du 19 ther
midor , comme cela a été im prim é, par erreur, à
quelques endroits, notamment à la page 7 de ce
mémoire.
�PRECIS
EN RÉPONSE,
PO U R
B O N N A F O U X , J e a n , V IA L F O N T e t
autres, habitant le département du Cantal,
intimés;
Jean
C O N TRE
Le sieur BO U RNET, propriétaire habitant
la ville d’Issoire, appelant
EN PRÉSENCE
De dame H e n r i e t t e DE CHAUVIGNY DE
B L O T veuve D E SR O Y S et de sieur A n n e t DESROYS.
E n publiant ses moyens contre le jugement du tribunal
d 'Issoire, qui admet les Bonnafoux au partage des biens
rendus par la loi du 5 décembre 1 8 1 4 au x héritiers ou
ayans cause des anciens propriétaires, le sieur Bournet s’est
mis fort à son aise. Il a représenté les intimés comme ayant
élevé une prétention absurde, que la décision des pre
miers juges n’aurait fait que consacrer avec la plus in
concevable légèreté. Suivant lui, c’est un système qui
aurait pour résultat immédiat d’appeler comme ayans
cause d’un émigré, ses parens les plus éloignés, au lieu de
ses héritiers ou de ses parens les plus proches, c’est-à-dire,
COUU ROYAL!-:
DE 111051.
a*
C H A M BRI'.
�K 'A l
( * )
''de fausser la loi sous prétexte de l’ interpréter; et cette
violation de la loi serait encore proposée à la cour contre
l’aütorité de ses arrêts déjà rendus dans la même cause.
Il nous sera facile de démontrer que ce prétendu sys
tème desBonnafoux, repose sur la disposition même de la
loi, sur la jurisprudence constante des Cours royales et de
la Cour de cassation; que leur demande est fondée sur la
doctrine copsacrée par les précédens arrêts de la Cour
qu’a obtenus le sieur Bournet. Nous aurons donc moins
à critiquer ces arrêts, qu’à en invoquer Jes principes;
car, écrits nettement dans ces arrêts, ils y demeurent
inébranlables. Nous démontrerons d’ailleurs que l’appli
cation que le sieur Bournet veut en faire ci lui seu ly
parce qu’il y était seul partie, en l’absence de ses cointéressés, est en contradiction avec le principe qui les
dicte; que c’est lui, et non les Bonnafoux, qui .repous
serait la chose jugée, si son système pouvait être admis;
c’est lui qui détruirait les principes proclamés par la loi
de iBi/f, et les règles ordinaires de l’hérédité. Les Bon
nafoux,au contraire, les invoquent^car eux ou ceux qu’ils
représentent étaient les plus proches parens et héritiers
du défunt au moment où le droit s’est ouvert; et c’est dans
les arrêts de la Cour elle-même qu’ils puisent leurs
moyens de défense. D ’ailleurs, ils sont dans la lettre et
l’esprit de la loi.
La question du procès est de savoir si un émigré étant
mort avant son amnistie, le bénéfice de la loi du 5 dé
cembre 18 14 ( {l uc tout le monde reconnaît n’avoir d’ef
fet que pour l’avenir) appartient à ceux qui auraient dû
succéder à l’émigré le jour de sa mort naturelle, q u o iq u ’à-
�■C3 )
lors il fût en état de mort civile, ou à ceux que la loi ap
pelait à lui succéder au jour de la restitution; c’est-à-dire,
a u x héritiers naturels qui auraient recueilli ses biens, lors
q u e la loi du 5 décembre a été publiée. L e sieur Bournet
soutient le premier système, et le jugement a admis le se
cond sur la demande des Bonnafoux. Tout consiste donc à
rechercher ce qu'a entendu la loi par ces mots '.leurs héri
tiers ou ayons cause. Cette question s’élève entre le dona
taire du sieur de Lespinasse, père de l’émigré, que la loi
du temps de son décès eût appelé à lui succéder pour le
tout, s’il n’eût pas été émigré, et les héritiers collatéraux
de l’émigré, qui étaient appelés à lui succéder pour moi
tié , au moment où les biens qui font le sujet de la contes
tation ont été rendus. C ’est donc sur cette question qu’il
faut fixer spécialement l’attention de la Cour.
Nous pouvons être assez sobres de détails dans le récit
des faits; quant à la discussion, elle sera toute entière pui
sée dans la jurisprudence, où l’on trouve la saine et véri
table entente de la loi. Nous plaçons à côté des faits un
tableau généalogique tel que l’a présenté le sieur Bournet,
enyajoutantquelques indications qui nousparaissent utiles.
F A IT S .
Il s’agit, dans la cause, du sort d’une partie de la suc
cession de François-Aldebert de Sévérac. On voit sur la gé
néalogie qu’il décéda en l’an 4» après avoir recueilli sa
part dans la succession de Jean-Marie-Clair de Sévérac,
son neveu, mort le i germinal an 2. Marguerite et M a
rie Sévérac, sœurs de François-Aldebert, de va ie nt re
cueillir sa succession conjointement avec Claude-Gilbert
1.
�de Cespinasse, qui représentait Catherine-Marie-Louise
deSévérac,sa mère, alors décédée; mais Glaude-Gilbert
était émigré, et en vertu des lois du moment,il était repré
senté par la nation t qui s’était réservé le droit de succéder
à la place des émigrés pendant une période de cinquante
années. Aussi ses biens furent-ils frappés du séquestre.
Toutefois, le séquestre annoncé sur les biens provenus de
François-AIdebert, fut suspendu par une circonstance
particulière. Il avait légué la jouissance de ses biens à la
dame Chauvigny, son épouse, aujourd’hui remariée au
sieur Desroys. O r , ce droit d’usufruit s’opposait à la
jouissance actuelle du gouvernement, qui leva le séques
tre et laissa la veuve en possession.
I l j i ’estpas inutile, pour la suite des faits, de connaître
la composition des deux successions successivement ou
vertes, de Jean-Marie-Clair, et François-AIdebert de Sévérac. Elle est fort bien indiquée au mémoire de J’appelant, page 4 et 5 ; il nous suiiit d’en tracer les résultats.
L e patrimoine de Jenu-Marie-Glair se composait de la
terre de Vertessère et d'une portion de celle de Sévérac,
situées dans le département du Gantai, et d’une portion
de celle de St-Martin, située dans le département du Puyde-Dôme. Il faut faire une différence entre les deux pre
miers objets qui ont été restitués par le préfet du Gantai,
en vertu du sénatus-consulte du 6 iloréal an io , et la terre
de St-Martin qui n’a été rendue que par la loi du 5 dé
cembre i 8 i/}.On voit que Glaude-Gilbert Lespinasse était
appelé h recueillir une partie des biens de Jean-MarieClair, d’abord de sou chef, et ensuite du chef de FrançoisAIdebert.
�ÏÏ'
(. S )
Quant à ce dernier, il laissait dans sa succession la terre
d’Auzat, outre sa part dans les biens de Jean-Marie-Clair;
et Claude Lespinasse était appelé à y prendre une portion
•égale avec Marguerite et Marie Sévérac, ses deux tantes.
C ’est principalement à raison de la terre d’Auzat que s’é
lève la difficulté. Cette terre est demeurée au pouvoir de
la veuve, même après son convoi, quoique, par ce seul
-fait, la jouissance dût cesser de droit, et elle a donné lieu
•à des difficultés judiciaires qu’il faudra connaître. Nous
n’avons pas besoin de nous fixer davantag^sur la quotité
des portions que pouvait amender Claude-Gilbert Les
pinasse, ou, pour lui, le gouvernement, dans ces diffé
rentes natures de biens.
Nous devons noter ici un fait important qui est devenu
le principe de toutes les difficultés auxquelles s’exposa la
dame de Chauvigny, veuve Sévérac. C ’est un point reconnu
en jurisprudence comme en législation, que là nation
,
n’était pas saisie de droit, des successions ouvertes à l’é
migré, pendant sa mort civile; qu’elle ne le devenait que par
l’appréhension réelle, la mainmise surles biens; que,faute
de cette précaution, les successions échues aux émigrés
étaient dévolues aux héritiers républicoles (pour employer
les termes de la législation d’alors). O r, il ne paraissait pas
qu’il y eût eu séquestre effectué sur les biens de FrançoisAldebert, à cause de l’usufruit de son épouse, et on se
persuada qu’aucun acte de l’administration publique ne
les avait mis sous sa main; que conséquemment Margue
rite et Marie de Sévérac, ses deux sœurs, seules héritières
républicoles, avaient été saisies de la totalité, et c’est dans
cet esprit qu’elles traitèrent avec la dame de Chauvigny,
*eur belle-sœur, par acte du 3o floréal an 5.
*Tf
�( 6 5
Par cet acte, elles prirent la qualité de seules et uniques
héritières de François-Aldebert de Sévérac, et, à ce titre,
cédèrent à la dame de Chauvigny tous leurs droits dans
cette succession, sur les biens situés dans la commune
d’Auzat et autres environnantes. Elles en exceptèrent les
droits que François-Aldebert tenait de la succession de
Jean-Marie-Clair de Sévérac; cette réserve frappait ce qui
était advenu à François-Aldebert, dans les terres de Vertessère, de Sévérac et de St-Martin. Marguerite et Marie
Sévérac se lefréservèrent pour les réunir à pareilles por
tions qu’avait chacune d’elles, de son chef, dans les mêmes
biens, et elles exigèrent que la dame de Chauvigny se dé
partît de son usufruit survies portions qui leur provenaient
du chef d’ Aldebert, leur frère, en sorte que la cession
faite, d’ailleurs, moyennant une rente viagère, fut un vé
ritable contrat aléatoire. A u reste, il paraît assez clair que
la dame’de Chauvigny ne visait qu’à réunir dans ses mains
la propriété de la terre d’Auzat, dont elle était déjà usu
fruitière. Munie de cette cession, elle se considéra comnie
‘'seule propriétaire de cette terre, resta long-temps en
possession sans être troublée par personne, et la vendit
par parcelles à un grand nombre d’individus.
Plus tard, comme nous le verrons, Marguerite et Marie
Sévérac vendirent au sieur Grenier les biens et droits
dont elles s’étaient fait la réserve par la cession du 3o flo
réal an 5 .
Claude-Gilbert Lespinasse décéda le 16 frimaire an 8 ,
tq^ijours ou état d’émigration. Il ne laissait ni frères ni
tœurs; mais son père lui survivait. O r, on était régi par la
loi du 17 nivôse an a ; le père eût donc été seul héritier
�( 7 )
s e ^t Pu laisser une succession susceptible d’èlre *
t r a n s m i s e j mais, d’après la disposition des lois sur les effets
de la mort civile, sa succession avait été ouverte au profit
des héritiers qu'il avait au jour de son émigration, et
q u a n t aux biens qu’il avait acquis depuis, à titre successif,
ils auraient également appartenu à ses héritiers, s’ils n’a
vait pas été réservés à la république. O r , Claude-Gilbert
Lespinasse n’avait d’autres biens que ceux qui lui étaient
advenus par les décès successifs de Jean-Marie-Clair et
.François-AldebertdeSévérac,si ce n’est quelques-uns situés
dans le département de la Haute-Loire ; mais ils étaient
tous sous la main de la nation qui les avait séquestrés h son
profit. Le sieur Lespinasse père n’avait donc, alors, de
droits d’aucune espèce, pas même la qualité d’héritier de
son fils, censé mort bien avant la loi du 17 nivôse an 2.
C ’est en cet état que fut rendu le sénatus-consulte du
G floréal an 10, qui, en autorisant l’amnistie des émigrés,
leur rendit tous leurs biens non vendus, réservés ou af
fectés à un service public.
La terre de St-Martin avait été attribuée à la sénatorerie de Riom ; elle était donc exceptée de la restitution.
I,a terre d’Auzat était dans la main delà damede Chauvigny, déjà remariée au sieur Desroys.
On sait que l’avis du 9 thermidor an 10, permit d’ap
pliquer l’amnistie aux émigrés décédés en état d’émigra
tion. L e i 5 ventôse an 11, le sieur Lespinasse père obtint
un certificat d’amnistie pour son fils; après cela, il sollicita
et obtint divers arrêtés d’envoi en possession des biens.
L e 11 germinal an n , les biens du département de la
Ilaute-Loire furent restitués au sieur Lespinasse père,
du
�* par un arrêté du préfet de ce département. Il faut recon
naître, en effet, que le sénatus-consulte, en ordonnant *
la restitution des biens, l’appliquait à ceux qui étaient hé
ritiers présomptifs du défunt au moment de sa publication.
D ’ailleurs ces biens étaient possédés par le fils au mo
ment de son émigration, et il y avait une différence essen
tielle à faire entre ceux-là et ceux échus à l’émigré pen
dant sa mort civile.
Toutefois, un arrêté du préfet du Gantai, du 25 ther
midor an i l , délaissa au sieur Lespinasse père les por
tions échues à son fils dans les terres de Vertessère et de
Sévérac, du chef d’Aldebert et Jean-Marie-Glair de Sévérac.
Quant aux biens situés dans le Puy-de-Dôme, le préfet
n’ordonna la remise que de ceux possédés par le fils, au
moment de son émigration; il réserva tous ceux échus
depuis, comme n’étant pas rendus par le sénatus-consulte:
cela résultait de diverses lois et règlemens, comme en
convient le sieur Bournet, pag. 8 , et c’est un point fort
essentiel à saisir.
Ainsi la question ne resta plus désormais que pour la
terre de Saint-Martin et celle d’Auzat ; tous les autres
biens avaient été restitués à Lespinasse père. Ces deux
propriétés ont donné lieuàdeux procès successifs; d’abord
entre le sieur Lespinasse et le sieur Grenier, son acqué
reur, pour la terre de Saint-Martin; et ensuite entre le
sieur Bournet, donataire de Lespinasse, et la dame Desroys, pour la terre d’Auzat.
L e 18 vendémiaire an 14 , le sieur Lespinasse céda au
sieur Grenier tous scs droits dans la succession de sou fils.
�(9 )
L e s i e u r Grenier, considérant la terre d’Auza t comme ayant
fait partie de la succession du fils, forma, en 1810, une de
mande en partage de cette terre, contre la dame Desroys,
et en réclama le tiers. Avant toute décision, et par acte
sous seing’ privé, du 16 novembre 1811, 1g sieur Grenier
se départit, au profit de la dame Desroys, soit de cette
demande, soit de tous droits sur les successions de JeanMarie-Clair et François-Aldebert de Sévérac. Ainsi, soit ^
du chef de Marguerite et Marie de Sévérac, soit du chef du
sieur Lespinasse, la dame Desroys crut être propriétaire
delà totalité de la terre d’A uzat. C ’est dans cette confiance,
qu’elle l’a vendue; mais elle était dans l’erreur, comme
le démontreront les faits qui vont suivre. Quelque pénible
qu’il puisse être pour elle de rester sujette à des garanties
contre les acquéreurs, c’est une conséquence qu'elle ne
peut éviter; mais il faudra aussi que le sieur Bournet se
résigne à subir celles qui sont attachées à sa propre posi
tion, quelque singulières qu’elles puissent lui paraître. Il
est d’ailleurs fort aisé de reconnaître qu’il ne s’agit pas,
pour lui, d’une perte quelconque, mais d’un bénéfice
plus ou moins grand.
C ’est en cet état que fut rendue la loi du 5 décembre
1814 t
ordonne que tous les biens séquestrés ou
confisqués pour cause d ’émigration, tous ceux advenus à
VÉtat par suite de partage de succession ou présucces
sion ......... seront rendus à ceu x qui en étaient proprié
, à leurs héritiers ou ayans cause. Une commission
taires■
fut nommée pour l’exécution de cette loi.
Bientôt après, le sieur Lespinasse père, comme héritier
de son fils, se pourvut pour obtenir le délaissement de la
terre de Saint-Martin.
2
9
�D e son côté, le sieur Grenier en demanda la délivrance r
prétendant qu’elle était comprise dans la cession de tous
les droits du père à la succession du fils. L e sieur Lespinasse père, disait le sieur Grenier, ne se présente que
comme héritier de son fils. Or, cette qualité-seule repousse
sa demande, car il m’a cédé tous ses droits d’hérédité.
Cette prétention eût été incontestable si Lespinasse
père n’eût pu demander la restitution de la terre, qu’au
titre rigoureux à!héritier de son fils, car il l ’avait cédé au
sieur Grenier. Il fallut donc examiner si cette qualité lui
était nécessaire, et si la remise était faite à celui qui était
l’héritier naturel ou testamentaire de l’émigré au moment
de son décès, ou bien à ceux qui le représentaient,, comme
ses parens les plus proches, et comme étant appelés à lui
succéder au moment de la restitution.
On sent que dans le premier cas, le droit, provenant
d’un fait antérieur à la cessioü, appartenait au sieur
Grenier, céda ta i r e , à ses risques, du titre et des droits de
l’héritier, et que, dans le cas c o n tr a ir e , il ne lui restait ni
titre ni droit. Un arrêté de la commission r e n v o y a les
parties devant les tribunaux, et la cause fut portée devant
le tribunal d’ Issoire.
L é sieur Grenier y soutenait que Lespinasse père avait
été saisi de droit, par le décès de son fils, non-seulcment
des biens qu’il possédait alors, mais de tous les droits et
notions qu’il pouvait exercer, ineme de ceux qui étaient
suspendus parla mort civiteetla confiscation *, que la main
l e v é e du séquestre, la restitution des biens, ordonnées à
posteriori, n’avaient fait que lever l’obstacle qui existait à
la libre exécution des lois générales en matière d’hérédité,.
�yH 'i
«tque les choses reprenaient leur cours, comme si le s é
questre et la confiscation n’eussent jamais existé. O r , didisait-il, Lespinasse père, seul héritier de son fils, avait
réuni dans sa main tous les droits de l’hérédité ; il me les a
cédés; ils m’appartiennent donc, et avec eux la terre de
Saint-Martin, pour la part qui en revenait à mon cédant.
L esie u r Lespinasse, en combattant ce système, pré
sentait une thèse tout opposée; il soutenait d’abord que,
p a r l’effet delà mort civile, Claude-Gilbert Lespinasse,
son fils, n’avait succédé ni à J ean-M arie-Clair, ni à FrançoisAldebert de Sévérac, desquels provenait le huitième de la
terre de Saint-Martin ; que conséquemment il ne les avait
pas recueillis dans la succession de son fils ; d’ailleurs, disaitil, passe pour les biens restitués par le sénatus-consulte
de l’an 10; seul héritier de mon fils, à cette époque, j’en
étais propriétaire, puisqu’ils m'avaient été rendus avant
la cession que je vous ai faite quatre ans plus tard, et ils
peuvent y avoir été compris; mais ceux-ci étaient réservés;
ils ne m’appartenaient pas ; je ne pouvais rien y préten
dre, ni même conserver à leur égard de l’espérance, par
cela seul que la loi les avait exceptés et affectés à un ser
vice public, nous n’avons donc pu avoir ni l’un ni l’autre
la pensée de les comprendre dans notre conyention ; et
quelle que soit la généralité des termes que-nous avons
employés , ils ne peuvent s’appliquer qu’aux droits que
j’avais, et non à ceux qui, ne m’ayant été restitués que
depuis, et encore à titre de faveur et non d’hérédité, sont
tout à fait étrangers à la cession et à la qualité en vertu
de laquelle je vous l’ai consentie.En un mot, disait-il, ce
n’est pas à la succession de mon fils que les biens ont été
�rendus*, c'est à moi, directement, comme à celui-là, qui
seul le représentait au moment de la cession.
Remarquons bien ici que Lespinasse se présentait
comme seul ayant cause de son fils *, que Grenier ne le
contestait pas; qu’au contraire il avait intérêt qu’il le fût,
puisqu’il se présentait comme cédataire ; que ni l’un ni
l ’autre n’avertissait la justice que si la restitution était
directe à l’héritier, il existait d’autres ayans droit de
Claude-Gilbert Lespinasse, au moment de la publication
de la loi du 5 décembre 18 14 j qu’ainsi toute la question
se trouyait dans le plus ou moins d’étendue de la cession,
et non dans le nombre ou la qualité des représentans ou
ayans droit de Claude-Gilbert Lespinasse. En un mot, il
s’agissait de savoir si Guillaume Lespinasse, censé par
toutes les parties le représentant <le la succession de son
fils et son unique ayant droit, avait ou non compris les
biens rendus, dans la cession faite à Grenier, ou si on de
vait les considérer comme rendus directement à celui qui
était ou qu’on considérait c o m m e seul a y a n t droit de l’é
migré, au moment de la restitution.
Ces moyens prévalurent, et un jugement du tribunal
d’Issoire, du iCjuin 1816, adjugea lesbiensà Lespinasse;
il déclara que, nonobstant la cession faite à Grenier, il
était demeuré l’ayant droit de son fils pour tout ce qui
n’avait pas été rendu auparavant, c’est-à-dire, qu’il l’était
resté, nonobstant la cession faite à.Grenier, mais seule
ment comme il l’était auparavant. Si le tribunal d’Issoire
ajouta qu’il était seul représentant de son fils, cette ex
pression posée par opposition à la demande du sieur Grcnicr, ne signifiait autre chose, si ce n’est qu’entre eux
�(13>
deux, seules parties litigantes, seuls dont les droits ou les
intérêts fussent mis en question , Lespinasse était le seul
représentant de son fils, lors de la loi du 5 décembre j 814.
L e jugement ne décidait pas, au surplus, que s’il y avait
d’autres représentans de Claude-Gilbert Lespinasse, ils '
n’auraient pas le droit de demander contre Guillaume ,
d’être admis à participer, pour leur .portion, à une décision
qui leur appartenait évidemment comme à lui; car la seule
chose jugée était que la restitution n’ayant été faite qu’en
1814, et ne se reportant à aucun principe d’hérédité an
térieur, on ne devait pas considérer Guillaume Lespinasse
comme saisi par sa qualité d’héritier de son fils, mais seu
lement comme appelé en qualité d’ayant droit, au moment
de la publication de la loi du 5 décembre 181 4- En un
mot, on adjugeait le profit de la restitution au x héritiers
ou ayans cause de Lespinasse fils, en 181 4 5 contre l’ayant
droit de celui ou ceux qui étaient ses héritiers au G lloréal
an 10. Voilà toute la question qui fut alors jugée.
L e sieur Grenier appela de ce jugement ; il demandait la
réformation de la décision p rin c ip a le q u a n t à l ’a ttrib u
tion de la p r o p r i é t é ; subsidiairemetit, il demandait, comme
en première instance, que le feieur Lespinasse fût assujetti
à contribuer aux dettes de la succession.
Par un arrêt du 3 mars 1817, la Cour confirma le juge
ment, quant à la disposition principale, mais le réforma,
quant au payement des dettes: la Cour ordonna un compte
entre les parties.
L ’une et l’autre se pourvurent en cassation; mais le
pourvoi fut rejeté par-un arrêt du 25 janvier 1819. Ne
nous occupons que de la décision principale, et n’oublions
pas d’observer que si la Cour de cassation se fonda seule-
�ment sur ce qu’il était reconnu par la Cour royale que
les biens en litige n’étaient pas compris dans la cession
faite au sieur Grenier, la Cour royale avait décidé que la
loi du 5 décembre 18 1 4 était une loi de grâce et de fa
veur; que les biens restitués avaient cessé d’appartenir à
l’ancien propriétaire-, qu’ils avaient été irrévocablement
réunis à la sénatorerie, plus de deux ans avant la cession;
que si Lespinasse père les y eût nominativement compris,
la clause eût été réputée non écrite, parce que la loi inter
disait à Lespinasse tout pacte, toute transaction sur des
biens qui appartenaient à autrui. Il est bon, en parcourant
les diverses phrases des instances qui ont été portées de
vant les tribunaux, de ne pas perdre de vue la direction
qui leur était donnée, et les principes qui ont été chaque
fois posés parles arrêts, pour arriver à la décision. Nous
aurons à remarquer plus tard, que celui qui décida la
Cour de cassation, comme les motifs écrits dans les arrêts
postérieurs, militent tous en faveur des Bonnafoux.
' Dans l’intervalle, e t le 27 o c to b r e 1817, le sieur Lesüinasse
avait fait donation au sieur B o u r n e t de tous les
A.
droits dans lesquels il avait été réintégré par la loi du 5
décembre 181 4 >et l’arrêt du 3 mars 1817; et désormais,
ce fut le sieur Bournet qui figura dans les nouvelles pro
cédures.
Les parties passèrent bientôt à l’exécution de l’arrêt;
elles vinrent à compte, et les difficultés qui s'élevèrent fi
rent apercevoir au sieur de Lespinasse que son fils avait
droit à uneportion de la terre d’Auzat, à laquelle il n’a
vait pas pensé jusque-là. Un incident s’éleva, et le notaire
renvoya les parties devant la Cour, où s’établit un nouveau
Jitige. I,e sieur Grenier reconnut., dans çles mémoires Un-
�w
( 15 )
primés, que Ie sieur Lespinasse père , au moment de
la c e s s i o n de l’an 14 ? était exclu de la succession de
Irançois-Aldebert de Sévérac^ comme de celle de JeanMarie-Clair; qu’en conséquence, il ne pouvait rien pré^tendreàla terre d’Auzat, comme cédataire de Lespinasse,
puisqu’elle provenait de François- Aldebert; et par arrêt
du 26 avril 1820, la Cour donna acte au sieur Bournet de
cette déclaration, à l’effet, par Bournet, d’exercer ses
d r o i t s sur cette propriété, à ses risques et périls. Il faut
convenir que le sieur Grenier n’avait pas grand mérite à
faire cette déclaration; d’une part, elle n’était que la consé
quence de l’arrêt déjà rendu contre lui, qui ne pouvait
toutefois préjudicier-aux droits des tiers 5mais quand il eût
e u d e s droits sur A u z a t, dans le principe, il ne lui eussent
plus appartenu, puisqu’il les avait cédés à la dame Desroys, par l’acte de 1810, dont nous avons parlé plus
haut.
C ’est à cette époque que le sieur Bournet fit assigner
les sieur et dame Desroys, et divers acquéreurs de par
tie delà terre d’Auzat; il d em a n d a co n tre les uns le par
tage de la t e r r e , et contre les autres le rapport des por
tions par eux acquises.
- Il n’y eutpointdedifficultéàl’égarddestiers-acquéreurs;
les sieur et dame^Desroys prirent leur fait et cause;
mais à l’égard de ceux-ci, il s’éleva des questions sérieuses.
Les sieur et dame Desroys succombèrent, non parce que
le sieur Lespinasse était le seul ayant droit, mais parcequ’ils étaient sans droit ni qualité pour garder la portion
de la terre d’Auzat échue à Claude-Gilbert, et appréhen
dée par la nation, comme succédant à sa place. Nous en.
serons convaincus par la seule inspection de l’arrêt de k
�( 16 )
Cour, et de celui de la Cour de cassation qui l’a suivi
Cela demande quelques explications.
'
i
Nous avons vu plus haut^ que la dame Desroys était cédataire de tousles droits de Marguerite et MariedeSévérac
sur la terre d’Auzat; qu’elle était encore céda taire de tous
les droits du sieur Grenier. Elle et son époux croyaient, à
ces deux titres, que la propriété du.tiers de celte terre,
provenue de François-Aldebert, ne pouvailleur échaper.
Ils présentaient leurs moyens sous unedouble face.
E t d’abord, disaient-ils, au moment de l’ouverture de
la succession de François-Aldebert de Sévérac, ClaudeGilbert Lespinasse, son héritier pour un tiers, était frappé
de mort civile; il ne pouvait donc- pas succéder à son
oncle. Sa part de cette succession eût pu, il est vrai, être
recueillie par la nation, qui se l’était réservée par les lois
sur l’émigration ; mais il fallait pour cela une appréhension
de fait, une mise en séquestre. Jusque-là, le droit de l’hé
ritier n a tu re l n’était pas paralysé; d’autant qu’en matière
de successions collatérales é c h u e s pendant l’émigration, la’
loi du 8 messidor an 7 et les règlemens p o sté rie u rs a v a ie n t
appelé les héritiers républicoles à succéder à la place de
l’émigré. O r, il n’y a eu ni séquestre ni mainmise de la
nation. Marguerite et Marie de Sévérac, sœurs de Fran
çois-Aldebert, et qui auraient concouru avec ClaudeGilbert Lespinasse, ont donc seules succédé pour le tout:
aussi, en nous cédant leurs droits, elles se sont dites seules
héritières, et nous ont vendu la totalité. La terre d’Auzat
n’a donc pas été rendue par la loi du 5 décembre i 8 i 4 j
elle nous appartient donc indépendamment de toutes dis
positions législatives qui n e sauraient s’appliquer à cette*
propriété; et aussi voit-on que toutes les d e m a n d e s en
�( *71)
partage, tousjles procès n’ont porté ique sur les autres
b i e n s , notamment sur la terre de St-Martin, et que ja
mais depuis i 8 i 4 j et malgré qu’on..ait .constamment
plaidé, on n’a réclamé la terre d’Auzat, parce qu’elle était
soumise à des règles particulières; -t .r . , •
'Mais si on n’adopte pas ce premier moyen, disaient-ils
encore, nous sommes cédataires du sieur Grenier, de tous
ses droits a la- succession d’Aldebert,
relativement à *la
A
terre d’Auzat. O r, si cette terre n’a pas appartenu, en en*
tier, à Marguerite et à Marie de Sévéracy si le , sieur
de Lespinasse a été appelé, comme héritier de son fils,
à en recueillir un tiers, ce tiers se trouve compris dans la
cession que Lespinasse a faite à Grenier, et par consé^
quent dans celle qu’il nous a consentie lui-même.
. En deux mots, disaient ils , le sieur Lespinasse ne peut
avoir droit que comme héritier de son fils, au tiers de la
terre d’Auzat; s’il a un droit, il l’a cédé, et il est,dans nos
mains; s’il n’en n’a pas,,Marguerite et Marie de Sévérac
ont pu nous céder la totalité de la succession d’ Aldebert,,
et elles l’ont fait. Dans l’un et l’autre cas, la te rre d’Auzat
nous appartient en totalité ; nousjen avons disposé de,
bonne foi, et nous ne saurions craindre les suites désas
treuses qui résulteraient contre nousd’un désistement pro
noncé contre nos acquéreurs.
Il est évident que le dernier moyen des sieuv et dame
Desroys, n’était que l’application à la terre d’Auzat,.de
celui déjà invoqué par le sieur Grenier pour la terre de
St-Martin, et qui avait été rejeté par l’arrêt de la ,Gour ;
il nejpouvait donc pas faire fortune. Quant au premier,
il disparaissait devant le fait constant que le séquestre avait
3
�:
( Ù 8 - ) ) .....................................
été' apposé''sui'là^terre d’Àuzat j 'et qu’il n’avait été.levé
que p'àr^l’exfceptibn résultante des droits'd’usufruit de la
veu ve'dé S évérac'A in si la iiiainmisedé la nation avait
restreint'Marguerite et^ftlarie de Sévérac, dans le cercle
de leurs droits personnels; et elles n’avaient recueilli et pu
cédél;';qüe les deux tiers. Restait la question de savoir
à qui la loi de 1814 avait fait’la restitution ; elle se ren
fermait dans ces termes précis : La restitution a-t-elle été
faite:â ceux qui auraient été les héritiers dé l’émigré, le’
6 flotéal an 8') jour dé soù décès, s’il n’eût pas été frappé
dèTimërt civile, é trqui le sont devenusau jour de l’amnistie,
ou à ceux’ qui'étaient'appelés à le représenté!* au moment
où la^'lôi a'ordonné qué lés biens seraient rendus ? C ’était
en effet là-véritable question qui pouvait'se présentery
cdmmëî c’est encore la difficulté à résoudre aujourd’hui;
niais1la Ôoür-n^ëut point à ‘ la décider ; car, réduite à ces
termes 1,'^e!llè ^n’appartenait point à la dame Destoys, q u i,;
éfràngère' à la‘famille dè Sévérac, ne pouvait se présenter
■.
_
:«;i .1 •' _•_. •
que COriime cessionnairc,'sans p o u v o i r user d’aucun droit
pér&mh’eT,1ni pouvoir diré que ni en l’an 10; n i en a8 14 5
elle 'feiït(été a^péléé/de son chef,1à rëprésenter Claude-GilberrLespinabe.1
• ‘-n
■
>
'’Aussi l’arrêt dé là Cour prit-il une toute autre direction
que celle qu’il faut recevoir aujourd’hui dé positions diffé
rentes. Nous allons nôus convaincre qu’en rejetant 1les
moyéns' de fya‘ dame De&oys, il ne préjugea rien contre
les droits des"Bohhafoux, ét'qü’àu contraire il'admit des*
p rin cip e qüi tiiüdctal: à lés apj^üyôr dé toute leur'autorité. '
' N e u f qifèstioris1sont posées dahs cfet arrêt sur l'intérêt'
pi-rnbipa!.J,,i' - ’
!:
s* '' ' - «
■
Z
�-c]cux premières ont'pour unique; objet de rechercher
-si-M arguerite et M arie dé Sévérac ont pu^-se^dire seules
héritières dfA ldebert, com m e profitant de.la,.mort civile
de Claude-G ilbert Lespinasse >’ et si elles ont pu céder en
totalité .»la terre d'Auzat.f;- ! jriui '
mi . :v/hnii-i.r.q
'i L es cinq questions suivantes tendent à savoir si la nation
•aoèté saisie de. plein droit, si ¡çlle a ¡conservé par ¿Je sé
q u e s tr e ;'s i le gouvern em ent est resté saisi jusqu’à la loi
de 18 14*
-"ii
L a huitième's’applique à l’étendue de la cession faite
au sieur Grenier. : ' v
;
La neuvièm e^ enfin, a pour .objet de savoir si Te sieur
B o u r n e t, comme représentant le sieur Lespinasse p è r e ,
«on d o n a te u r, peut profiter seul du bénéfice de cette loi.
O n voit que les huit premières questions n o n t aucun .
trait à la difficulté actuelle, et que la neuvième ne va être
e x a m in é e qu’en considérant Bournet comme représentant
Lespinasse, et en opposant sa qualité, d’ailleurs certaine,
aux prétentions des sieur et dameDesroys.
... . -,
Si nous parcourons les motifs de l ’a rrêt s u r les huit pre
mières q u e s tio n s , nous y voyons la Cour reconnaître
-qu’à la mort de François-Aldebert de Sévérac,- la nation
fut appelée à lui succéder pour .un tiers, par suite de la
- m o r t civile dé Claude-Gilbert Lespinasse j qu’elle opéra
sa mainmise sur les biens-,: que cette mainmise se conserva
sur la nue propriété, nonobstant la mainlevée du séquestrc q u 'e x ig e a l’usufruit de la veuve ; (jue VEtat{est demeuré
hanti jusqu'à la loi du 5 décembre i8 i4 ; que conséquem-inent la cession faite paç,Marguerite et Marie
Sévérac à
-la dame: de Cliauvigny, le 3o florçéajian^, n'q,pu lui çon-
1- . u / 7: -lin ob g'i- :! ,1 -i-j;.- t‘ i ’Ja
�,
,
.
.
.
( ao )
"férer queles deux tiers; que cette dame ne peut davantage
invoquer la' cession du sieur Grenier, qui a reconnu luimême n’avoir aucun droit à la terre d’Auzat’/'
'
Jusque-là’ tout est exclusivement applicable aux faits
particuliers qui intéressaient la dameDësroys, et demeure
tout à fait étranger à la qùestion qui nous occupe; mais il
fallait s’en rapprocher en abordantila dernière question.
Il faut donc appeler un peu plus ¡’’attention sur ces der
niers motifs du jugement.
Ils partent de ce point, que les droits dù gouverne
ment n’ont cessé d’exister que par la promulgation de la
loi du 5 décembre 18 f 4 ? et que
remise a ¿té ordonnée
au profit' des propriétàiresjdeurs héritiers ou ayans cause.
• O n n è voit là encorérien qui nedérivedelaloi elle-même.
TLà Cour dit que Lespinasse , aux droits duquel est le sieur
Bournet, a été reconnu el\déclarë être.le seul représentant
de Claude, son fils; par l’arretdu 3 mars 18 17 , et que
le ju g e m e n t et V arrêt n'ayant pas 1été attaqués p a r le s
sieur et dame Desroys, il >doit demeurer pour constant
que Guillaume Lespinasse a été seul appelé à recueillir le
bénéfice de la loi ;
■y
.. . •
j
Que d?ailleürs Claude1étant décédé le 16 frimaire an 8,
et ayant été amnistiénle i 5 ventôse an 11, sous l’empire
de la loi dû 17 nivôse , le père a été seul saisi de sa suc
cession ; qu’à la vérité son droit avait été suspendu; mais
que lorsque les biëns^dnt élé>rendus, ils n ’o n t pu l’être
qu’à Lespiüasse père',rommefson seul héritier au moment
de son dëiïes. ’ * ^
1 :,u‘
^
Q u’ènfîÜ ^ïts môVne^ hiotifs qüi Qnt fait adjuger à Lespirias^ j4ë£e le hüitiètfiié de îd terre de St-Mdrtin, mili
tent pour lui attribuer le tiers de celle d’Auzat.
�Nous sommes parfaitement d’accord sur ce dernier
motif. Il est incontestable, en effet, que la terre de SaintMartin et celle d’Auzat sont soumises à la môme règle,
comme rendues seulement, l’une et l’dutre, par la loi de
i 8 i 4 >et aussi, les Bonnafoux ont-ils cru devoir les com
prendre l’une et l'autre dans leurs demandes.
Quant aux autres motifs, ils s’appuient principalement
sur la chose jugée : s’ils semblent ensuite aborder la ques
tion , nous ne devons pas p e r d r e de vue que cette question
ne s’agitait qu’entre un héritier ou représentant de ClaudeGilbert Lespinasse, et une autre partie qui ne l’était ni,
ne pouvait l’être ; qu’ainsi la Cour n’avait qu'une chose à
e x a m in e r , celle de savoir si le tiers de la. terre d’Auzat,
échu à Claude-Gilbert Lespinasse, n’ayant été ni pu être
cédé à la dame de Cliauvigny, soit par Marguerite et
Marie de Sévérac, soit par le sieur Grenier, comme cédataire de Lespinasse père, celui-ci, par un droit nou
veau, résultant d’une loi postérieure à la cession, n’était
pas, des deux parties plaidantes, le seul appelé à recueillir
les biens rendus par cette loi. La justice n’examinait pas
si d ’autres héritiers ou ayans cause du propriétaire, pou
vaient y avoir des droits, alors qu’ils n’étaient pas présens
ni appelés pour les faire valoir. Nous nous bornons,
quant à présent, à cette remarqüe qui est nécessaire pour
bien saisir ce qui résulte des faits ultérieurs.
Les sieur et dame Desroys se pourvurent en cassalion ;
ils firent valoir d’abord les moyens qui leur étaient per
sonnels. Sur les premières questions, ils soutinrent que le
tiers de la terre d’Auzat avait été rendu, non par la loi du
.5 décembre 1814 > mais par le sénaîus-consulte du 6 flo-
�*(t
réalan 10; subsidiairement, ils prétendirent que la loi du
5 décembre 18 14 n’était applicable qu’à ceux qui duraient
été héritiers ou ayans cause du propriétaire, au moment
de sa promulgation ; que conéquemment Lespinasse pèrë^
ou Bournet, son donataire, n’était appelé'qu’à la moitié
des biens, comme héritier ou ayâtït cause "seulement du
chef paternel,' et que l’autre moitié était dévolue à M ar
guerite et à Marie de Sévérac; tantes maternelles 'de
Claude-Gilbert, et ses représentàns'fde ce chef. Oi', di
saient les sieur et dame Desroys, nous sommes cédataires
•de-Ma-pguwite et Marie de Sévérac; donc l’arrêt viole ou
applique faussement la loi de ;8i4jenattriljLuantàBQjLumet
la totalité de la portion de Claude-Gilbert Lespinasse,
dans la succession de François-Aldebert de Sévérac? tandis
qu’il nous en reviendrait la moitié.
Ce dernier moyen aurait pu être fort bon , si la cession
de Marguerite et Marie de Sévérac eût été postérieure à
la loi de 18 14 » mais, étant de beaucoup antérieure, elle
ne pouvait attribuer a la d am e D e s r o y s aucun titre, au
cune qualité pour réclamer des biens ou des droits qui
n’étaient advenus à ses cédantes que dix-sept ans après la
cession; elle n’était ni de son chef, ni du chef d’autrui,
ayant cause de Lespinasse fils, a u 5 décembre 18 14 - Cette
circonstance détermina l’arrêt de la Cour de cassation,
sur lequel il est absolument nécessaire de fixer un mo
ment son attention.
Nous ne devons pas douter que cette Cour régulatrice
n’eût abordé le moyen du fond, si elle eût pensé que
Ma rguente et Marie de Sévérac elles-mêmes n’étaient
pas appelées par la loi de 18 14 : c’eût été le seul moyen de
�( - }
.
proclamer la véritable pensée du législateur, et de ramener
à l’exécution de la loi. O r, c’est là’ le but de son institution.
S’arrêter en pareil cas à une simple exception,' c’eût été
employer un moyen évasif, d’autant moins digne d’elle,
que l'arrêt contre-lequel était dirigé le pourvoi semblait
aborder la question, quoique dans un sens tout différent,
comme nous l’avons fait entrevoir. Cependant o d lit dans
l’arrêt de la Cour de cassation, ce motif unique et fort re
marquable sur le second moyen :
•
« Attendu que pour revendiquer subsidiairemen t, non
» pas le tiers, mais bien la moitié du tiers contentieux
» sur la succession de Claude-Gilbert de Lespinasse, la
» veuve de Sévérac, épouse Desroys, étrangère à cette
» succession, se présentait comme subrogée aux droits
» des deux religieuses, Marie et Marguerite de Sévérac,
» ses belles-sœurs, en se fondant à cet effet sur une cession
» rque celles-ci lui avaient faite le 3o floréal an 5 •, mais at» tendu qu’ il est reconnu, en fait, que cette cession
» consentie en floréal an 5 , n’a point porté ni pu porter
» sur la succession de Claude-Gilbert, décédé en frimaire
» an 8 5 q u ’elle portait! seulement sur la succession de
» François-Aldebert de Sévérac, frère des cédantes, dé>> cédé en germinal an 4, et que, même sur cette succession,
» la cession dont il s’agit ne conférait nullement à la ces» sionnairele tiers en question; qu'ainsi, ne pouvant plus
» représenter les deux religieuses , Marie et Marguerite
» de Sévérac, la veuve de Sévérac, épouse Desroys, était
» "sans qualité pour en exercer les droits. » ,
Toutes ces décisions judiciaires consacraient en défini
tif, ce principe non contesté, que la loi de i8 i4 avait fuit
�(=>4 )
une grâce, une faveur, soit aux anciens propriétaires des
biens réservés par lesénatus-consulté, s’ils étaient encore
vivans, soit à leurs héritiers et ayans cause, au momentde,
la loi. Elle les appelait donc directement, non par une res
titution qui eût son principe dans*un droit antérieur, mais
par une sortede libéralité qui ne remontait pas plus loin
que la loi elle-même. C ’est pour cela que les tribunaux
avaient refusé à toutes dispositions antérieures du proprié
taire, à toutes cessions ou transactions, la force de frapper
ces biens qui avaient cessé d’appartenir à l’ancien proprié
taire, parce qu’il en avait été dépouillé irrévocablement.
Or, l’attribution a u x représentans, les saisissait tous, quand
bien même un seul d’entr’eux se fût présenté; car il est de
principe (tout le monde le sait), qu’un seuf des héritiers
qui exerce une action du défunt, conserve les droits de
tous. Ainsi, tout en agissant en son nom personnel, par
suite de la donation de Lespinasse père, et en se faisant
adjuger comme h é r it ie r o u ayant cause du fils, les biens
que venait de rendre la loi, Bournct n’empêchait pas
que les autres ayans droit ne vinssent ensuite réclamer
contre lui la participation à une chose qui leur était com
mune; car il ne pouvait avoir fait prononcer la remise à.
son profit, comme héritier ou ayant droit, sans que la
décision profitât à tous ses cointéressés.
Marguériteet Marie deSévérac étaient décédéespendant
ces discussions': les Bonnafoux qui les représentent, cru
rent que leur droit était suffisamment reconnu par ces ar
rêts, et qu’il leur suffisait, sans avoir besoin d’en demander
la réformation, en tant qu’ils avaient considéré Lespinasse
père comme' sèul héritier, de demander contre son dona-
�,* >
7«’
taire, leur portion d e l à chose commune. TJs assignèrent
soit le sieur Bournet, soit lès sieur et dame Desroys,,pour
v e n ir à partage des Liens délaissés par Jean-Marie-Clair
et F r a n ç o is -A ld e b e r t de Sévérac, et quifseraient advenus
à C la u d e - G ilb e r t Lespinasse, s’il n’eût pas été émigré.
- C ’est sur cette demande qu’est intervenu le jugement
du tribunal civil d’Jssoîre, du 25 août 1829. 11 est presque
littéralement transcrit au mémoire du sieur Baurnet*
page 18 et suivantes. Nous ne le reproduirons pas.
Trois sortes de moyens sont proposés contre ce ju
gement.
i°. Sur les qualités des demandeurs. On se borne à dire*
sur ce point, qu’elles ne paraissent pas suffisamment
justifiées, et qu’on se réserve d’examiner les actes de fa
mille. Nous n’avons donc pas autre chose à répondre à
cette assertion vague, si ce n’est que les qualités sont jus
tifiées par le rapport des actes de famille et des actes de
l’état civil, et qu’ils doivent produire leur effet tant qu’ils
n’auront pas été critiqués valablement.
20. Sur la procédure tenue par les Bonnafoux. On se
plaint de ce q u ’ ils ont été admis à participer à la resti
tution s a n s avoir même formé tierce opposition aux
arrêts de la Cour, qui avaient considéré Lespinasse père
comme seul ayant cause de son fils. Nous avons déjà fait
pressentir le motif pour lequel la tierce opposition nous
avait paru inutile. Nous appuierons davantage sur ce
p o i n t ’, mais il nous semble plus convenable de discuter
d’abord la question du fond, qui est la principale, parce
q u ’ il nous sera beaucoup plus facile ensuite de reconnaître
si lesarrets jugent quelque chose sur la question qui nous
�( 26 )
occupe; s’ils peuvent faire p ré ju d ice su x droits des Bonnafoux, et si au lieu d’avoir à y form er tierce opposition, il
ne leur suffit pas, au contraire, d’en invoquer le bénéfice.
3°. Sur le fond des prétentions des intimés. C ’est là le
seul point qui mérite une discussion sérieuse.
Commençons par bien définir avec la jurisprudence, le
véritable sens de la loi du 5 décembre 181 4 7 voyons
quelles conséquences elle doit naturellement produire, et
nous examinerons ensuite les principales objections qui
nous sont proposées.
Pour bien saisir les résultats delà jurisprudence, il faut
d’abord établir la position extraordinaire créée par la loi
de
Si elle avait voulu, comme la loi de l’indemnité, du 27
avril 1825, faire une restitution à l’émigré en la rattachant
aux droits antérieurs tels qu’ils existaient au 1“ janvier
1792; si elle avait fait cette restitution « à l'ancien pro•» priétaire ou aux Français qui étaient appelés par la
» loi, ou par sa -volonté , à le représen ter à Vépoque de son
» décès, sans quon puisse leur opposer a u cu n e in c a p a c ité
» résultante des lois révolutionnaires, » il n’y aurait eu
rien que de naturel dans son exécution; il aurait fallu re
chercher ceu*x qui étaient désignés par la l o i , ou par
l'émigré lui même, pour lui succéder, pour le représen
ter, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux, soit à titre
universel, soit à titre particulier, au jour de sa mort,
parce que les biens restitués, n’auraient pas cessé de repo
ser sur la têle de l’ancien propriétaire; que dès lors ils
auraient pu être compris, et que, de droit, ils auraient été
censés compris dans toutes les attributions ou dispositions
�( 27 )
universelles des biens de l’émigré, dans tous les traités,
c e s s i o n s , transactions relatives à ses droits et conçues en
termes généraux, parce que ses droits n'auraient-été que
suspendus.
1‘ : r 1
O r, da^s ce cas supposé, la cession faite à Grenier, par
Lespinasse père, aurait frappé tous lés biens qui auraient
appartenu ou dû appartenir à son fils, au moins tous les
droits qu’il y amendait*, le sieur Grenier aurait :iobtemi
le huitième de la terre de Saint-Martin, et le tiers de la terre
d’ Auzat, puisque sa cession était générale; et ce tiers d’Au- ,
zat cédé par lui-même à la darne Desroys, qui l’avait no
minativement acquis, n’aurait pas pu lui être ravi par le
sieur Lespinasse p ère, qui n’aurait été ni pu être admis à
reprendre ce qu’il avait vendu.
Mais, par une exception tirée de quelques termes de
cette loi, on a jugé qu’elle avait créé une position toute
spéciale, qu’elle n’avait pas restitué, mais seulement rendu;
que les^biens n’avaient pas oontinué, après le séquestre ,
de reposer sur la tête de l’émigré; mais qu’il en avait été
irrévocablement dépouillé, et que l’État lui faisait une
sorte de grace, une concession bénévole , qui n’aVait
d’autre principe que le mouvement de sa volonté, et qui
n’ayant aucune relation avec un droit antérieurement
existant, ne prenait naissance que du jour même'de sa
promulgation, n'effaçait pas l'incapacité intermédiaire,
et ne pouvait être soumise à toutes les dispositions de
l'homme, ni aux attributions légales, antérieures au 5 dé
cembre 1814. Si donc, parce qu’on a créé une exception,
le sieur Bournet est parvenu à faire mettre en dehors des
actes consentis par Lespinasbe père, au sujet de la succès-
�(ÎSf
'
* *
( 28 )
sion desonfils, toutcequilui étaitrendu parla loi de 1814,
comme étant étranger à cette succession, il faut qu’il ad
mette toutes les conséquences de ce principe, et qu’il ne
rapporte point à la succession du fils, prétendu ouverte
en l’an 8, la remise prononcée par la loi de 1814- 11
n’y aurait pas de doute si Claude-Gilbert Lespinasse eût
vécu à celte époque; il eût recueilli directement, puisque
c’était à lui qu’on donnait: mais il était mort; la loi
l’a p ré v u , et elle devait le prévoir; elle a appelé les
héritiers ou ayans cause. Dès qu’elle ne voulait pas
reconnaître comme ayans cause les cédalaires univer
sels de droits par actes antérieurs, comment aurait-elle
appliqué la qualité ^ ’héritiers à ceux qui la cherchaient
dans une succession que la loi ne voulait pas reconnaître,
et avec laquelle, vraie ou supposée, elle ne voulait pas
entrer en relation?
Et encore, si on pouvait le supposer, à quel jour eûtelle reporté la fixation du 4foit ? Étail-ce au jour de la
mort naturelle de celui qui déjà était mort civilement ?
Comment, en Défaisant partir l’attribution de propriété,
que du 5 décembre 1814> en 11’efTaçant pas Yincapacité
antérieure) aurait-elle pu reconnaître pour héritiers ceux
qui l’auraient été au jour de la mort naturelle, plutôt
que celui qui était appelé par d’autres lois, nu jour de
la mort civile? Eu ce cas, l’attribution à tel ou à tel,
suivant qu’il plairait d’appliquer telle ou telle l o i , aurait
donc été l’effet d’un caprice* plutôt que la dépendance
nécessaire d’un principe ! On tombe en effet dans le
caprice, dans l’abstraction, dans des conséquences indéfi
nissables, quand, à propos d’une exception, on veut re
�pousser le principe môme sur lequel elle a été fondée, et
q u ’on veut revenir au principe général, pour l’appliquer
à celte exception créée précisément pour échapper au
principe.
A u reste,Voyons comment l’a entendu la jurisprudence
des arrêts.
L e premier arrêt es£ celui de Lépinay do St Luc et de
l’abbé Duclaux : il est rapporté dans Dalloz , ann. 1819 ,
pag. 11 3.
Comme dans l’espèce, le sieur de Saint-Luc, émigré,
était m ort avant toute amnistie (en 1799V
Il laissait une fille unique, madame de Sully.
Celle-ci obtint l’amnistie de son père, et se fit envoyer
en possession des biens rendus par le sénatus - consulte :
toutes circonstances absolument semblables î^i celles du
procès actuel. Elle mourut le 3o janvier 1809, après avoir
institué l’abbé Duclaux son héritier universel.
Convenons ici que le sieur abbé Duclaux, légataire
universel, la représentait pleinement, et que si les droits
que lui attribua plus tard la loi du 5 décembre 1814, s’é
taient référés h. la quqjité d’hcritier ou ayant cause, fondée
sur des faits ou sur un droit antérieur à la loi; qu’en un
mot elle se fût appliquée à celui qui était l’héritier au mo
ment du décès, l’abbé Duclaux, seul, en aurait été in
vesti, caria dame de Sully était la seule héritière de son
père, et il était le seul héritier de la dame de Sully. Il en
éleva la prétention. Pour échapper à cette conséquence,
il fallait donc décider qu’on ne devait considérer comme
héritiers on ayans ca u se, que ceux qui se trouvaient
l’être au 5 décembre 1,814, et non ceux qui pouvaient
�\o'à
’
(3o)
rattacher leur droit à une époque antérieure, comme
celle du décès ; il fallait reconnaître comme tels ceux
qu’appelaient les lois en vigueur au 5 décembre 18 14 ? et
non ceux que désignaient autrefois des lois maintenant
abrogées. L e sieur de Saint-Luc, héritier au moment
de la loi, comme plus proche parent existant du sieur de
Saint-Luc, émigré, réclama la préférence; il soutint que
madame de Sully n’avait pas trouvé, en 1799, dans la suc
cession de son p ère, les biens que venait de lui rendre la
loi de 1814 5 qu’elle n’avait pu les transmettre h l’abbé
Duclaux ; qu’il fallaitexaminer quel était, au jour de la
loi de i 8 i 4 j l’héritier appelé comme plus proche parent
existant.
Celle prétention avait été proscrite par un jugement du
tribunal de la Seine et un arrêt confirmatif de la Cour
royale de Paris. 11 avait été jugé que la remise des biens
était une véritable restitution en entier, qui effaçait toute
trace d ’émigration, de séquestre ou de confiscation ; que
les biens étaient dès lo rs censés n'être pas sortis des
mains des anciens propriétaires qui les avaient tran sm is
à leurs héritiers ou ayans cause. C ’était la doctrine de la
simple suspension que le sieur Bournet veut encore faire
prévaloir aujourd’hui. On appliquait ensuite cette doc
trine aux faits particuliers, et on disait que lu dame de
Sully ayant été Vunique héritière du marquis de SaintL u c , et l’abbé Duclaux étant son légataire universel,
il était le représentant universel et l’ayant cause, non-seu
lement de madame de Sully, mais encore du marquis de
Sjiint-Luc.
fin, l’arretajoutait l’argument d’aujourd’hui,
que sans cela il faudrait supposer qu’A deux époques éloi-
�Vi
( 31 )
g n(ie5 l'une de l'autre, il se serait ouvert, au profit de deux
personnes différentes, deux successions du même individu.
Cet arrêt fut cassé, malgré sa logique forte et persuasive.
La Cour de cassation déclara que la loi n'avait fait cesser
les effets de la confiscation que pour l’avenir, mais ne les
avait pas-abolis pour le passé; q u il ne peut être question
de restitution par suite de cette loi, qui n’a réellement
rendu les biens qu’à titre de libéralité; que dès lors ils
n’avaient fait partie ni de la succession du marquis
Lépinay, ni de celle de la dame de Sully ; qu’ainsi, il n’y
avait pas deux successions du même individu; qu’enfin,
ils n ’avaien t pu appartenir ni à madame de Sully nia l'abbé
D u c l a u x , puisque, jusqu’au 5 décembre i 8 i 4 ,ils étaient
irrévocablement réunis au domaine de VElat; l’arrêt ajoute
enfin que la remise était faite non par la voie civile des
successions, mais par la voie naturellé de justice et d'é~
quite.
Il semble que tous ces motifs sont faits pour la cause
actuelle; e t, en effet, les circonstances étaient à peu près
identiques.
Si on avait dû, dans notre espèce, considérer la voie
natu relle des successions, regarder les biens comme ayant
sans cesse appartenu à l’ém igré, et étant restitués aux
véritables héritiers qu’il avait laissés par son décès, les
biens auraient incontestablement appartenu au sieur Lespinasse père; mais alors, comme nous l’avons déjà observé,
ils auraient été compris dans la cession par lui faite au
sieur Grenier; et il aurait fallu les lui adjuger comme
l’arrêt*de Paris l’avait fait au profit du*sicur abbé Duclaux;
mais comme c’était seulement une attribution faite à titre
�( 3» )
de libéralité, le 5 décembre 18 14 >à Claude-Gilbert Lespinasse ou à ses ayans cause, que cette attribution n’était
pas faite par la voie ordinaire des successions, et que le
décès de l’émigré mettait ses ayans cause en ligne, il ne
faut plus aller chercher la voie ordinaire d’une succession
ouverte en l’an 8, alors que, par sa mort civile, l’émigré
n’avait pas de succession, ni invoquer une loi transitoire
qui attribuait au père le droit exorbitant d’une succession
exclusive; il fallait et il faut rechercher quels étaient au
5 décembre i 8 i 4 » d’après les lois existantes, les héritiers
ou ayans cause de Claude-Gilbert Lespinasse; reconnaître
les parens les plus proches en degré qui étaient appelés
par la loi à le représenter. Or, dans la ligne paternelle,
c’était son père; dans la ligne maternelle, ses deux tantes;
voilà les conséquences les plus naturelles, les plus directes,
les plus sûres, et elles ne produisaient pas d’injustice, elles
n’appelaient pas des étrangers pour exclure les parens
les plus proches; car il ne pouvait plus être question de la
succession exclusive du p è re , sous la loi du 17 nivôse an a:
c’était un fait, un droit auquel le p r in c ip e de rem ise des
biens demeurait tout à fait étranger par la disposition de
la loi.
Voyons l’arrêt Devenois, du 9 mai 1821 (Dalloz, 1821,
p. 397) ; il est encore dans les mêmes termes.
Une succession s’était ouverte au profit de Devenois,
émigré. 11 mourut, en i 8 o 5 , sans avoir été amnistié; sn
plus proche parente, habile à lui succéder, était la demoi*
selle Leguerney; elle mourut eu 1808.
Les biens furent,rendus par la loi de 181 4- CJombat
entre l’héritier naturel de~la demoiselle Leguerney, et
�(r 3 3 )
qui, en omettant tous lès faits antérieurs, se serait
trouvé héritier, représentant, oü ayant'cause, si l’on veut,
de Devenois, émigré, en supposant sa succession ouverte
seulement le 5 décembre 1814.
"T ...
<
■. r
'A rrêt de Caen, qui, suivant l’ordre ordinaire des suc
cessions , regarde comme héritier ou ayant cause du sieur
Devenois, la demoiselle Leguerney, qui, en effet, lui au
rait succédé à' l’époque de son décès; mais cet »arrêta est
encore cassé par des motifs qui ne sont *qu’un résumé'de
ceux de l’arrêt de Saint-Luc. La Gourde cassation déclare
enfcore qu’il ne s’agit point de restitution, mais d’une libé
ralité exercée le .5 décembre 181 4 5 qü’elle n’a pu être at-,
tribuée à la demoiselle Leguerney, quoiqu'ellefût au décès
de Jacques Depenois sa plus proche parente. .
. :/
Ainsi, ce n’est pas le plus proche parent, celui qui est
habile à succéder au moment du décès de rémigré, mais
celui ou ceux qui lui succéderaient comme plus proches,
au 5 décembre 1814, qui sont appelés comme ayans cause
de l’émigré, à recevoir une libéralité qu’il ne peut recueil
lir lui-même par suite de son déçès.
>
Si nous jetons un coup d’œil suril’arrêt de Béthune, du
3 janvier 1821, au même volume de 1821, p. 493, nous y
voyons quelques circonstances différentes, mais une dé
cision semblable Les biens sont attribués aux frères consanguinsdu défunt,au préjudice d’héritiers collatéraux éloi
gnés qui prétendaient les exclure, et n’avaient aucun titre
pour cela.Toutefois cet arrêt, de simple rejet parla section
des requêtes, semble fondé sur une interprétation diffé
rente de la loi ; il dit que le droit du père, héritier de son
fils, n’a été que suspendu par les lois sur l’émigrationj
ce lu i
5
�C34)
mais, d’une part, la succession ouverte était celle du fils,
non émigré ; c’était le père qui l’était, et sous ce rap
port j on pouvait dire que le droit de l’émigré n’était que
suspendu jusqu’à son amnistie. O r , il avait été amnistié
vivant, et avait par conséquent repris ses droits successifs.
Ici les circonstances sont diamétralement opposées; la
succession ouverte était celle de l’émigré; il n’a point été
amnistié vivant, il est mort émigré. On doit donc dire
qu’à son égard le droit des héritiers républicoles n’a pas
été seulement suspendu, mais qu’il n’a pas existé, ou qu’iï
n ’a existé que partiellement, pour profiter des remises suc
cessives de certains biens non réservés par le sénatus-consulte de l’an 10.
>■
'
A u reste,- les arrêts postérieurs ont de nouveau con
sacré le principe admis par les deux premiers que nous
avons cités, que le droit de l’émigré avait été irrévocable
ment détruit et non pas suspendu.
Témoin l’arrêt Barbançon, du 16 février 1824. L ’arrêt
de Paris, contre lequel on s'était pourvu, avait déclaré
que « les biens invendus de l’émigré appartiennent à ceux
» qui se sont trouvés les plus proches parens, lors de la
» publication de la loi du 5 décembre 1814, et non aux» héritiers qu'il a laissés en mourant. » Rejet du pourvoi
par la section civile. lia section des requêtes avait admis,
sans doute, par suite du système de simple suspension,
iju’elle semblait avoir embrassé par l’arrêt de Béthuue.
On sent bien que par ces mots : Les plus proches pa
rens, la loi entend toujours cette proximité qui appelle à
succéder, surtout alors qu’il s’agit de leur rendre des
biens; car ce sont ceux-là, chacun suivant leur droit, à
�£®7
■ .
( 35 )
qui doit profiter la remise, puisqu’elle est faite par la 'voie
naturelle de justice et d’équité.
1
Témoin encore l’arret Dupille, du 4 juillet 1825. (Dalloz,
i825, p. 283.) L ’émigré était rentré, avait été rayé, et
était mort en '1812, après avoir disposé, au profit de ses
neveux Dupille, d’une foret confisquée, mais qui ne lui
avait pas été l’endue. Elle le fut par la loi du 5 décembre
18145 e*- ^es Dupille furent mis en possession par la dame
Biencourt, leur tante, qui aurait été héritière par moitié
avec eux. Rien de plus juste si le droit de l’émigré n’avait
été que suspendu ; car, en l’y rétablissant, en effaçant
Vincapacité antérieure, la loi faisait disparaître tout obs
tacle au droit de propriété toujours subsistant de l’émigré,
et sa disposition demeurait valable; mais la dame Biencourt
se ravisa. Trois ans après, elle réclama la moitié; elle lui
fut adjugée, par le motif qu’au moment de la promulga
tion de la loi, elle était pour moitié l’ayant cause de l’é
migré. On voit que les circonstances, ici, sont tout à fait
les mêmes, et qu’en outre il y avait, dans l’affaire Dupille,
des fins de non-recevoir tirées du fait même de la dame
Biencourt, de son consentement à la mise en possession
des Dupille, de sa reconnaissanc^expresse ou tacite de
leur droit exclusif, qui eût existé, en effet, si les mots
ayant cause, dans la loi de 1814, se fussent appliqués à
ceux qui l’étaient au jour du décès de l’émigré ; car ils n’eus
sent pu l'être que parcequel'émigré n’aurait pas cessé d’être
saisi, et qu’alors il aurait pu céder. La Cour rejeta les fins de non-recevoir, et jugea nettement le principe.
Sur le pourvoi, on s’appuyait de la loi de l’indemnité,
L e pourvoi avait été admis; mais la section civile le re5.
�n
( 36)
jeta eücore, ,en maintenant sa jurisprudence sur le véri
table sens de la loi de 18 14 j elle ajouta que la loi de 1825,
en admettant un principe diamétralement opposé relati
vement aux biens vendus,, n’avait rien innové aux dispo
sitions de.celle de *18iA 5 relative aux biens rendus.
Quoi de plus positif?
< Nous pourrions pousser plus loin les exemples de ju
risprudence. Qujil nous suffise de dire qu’elle est uniforme
sür cette question. L ’application à la cause s’en fait d’ellemême. N ’employons donc pas de temps à le démontrer;
bornons-nous à parcourir les principales objections du
sieur Bournet,,et la conviction s’opérera d’elle-même, si
déjà elle n’est complète.,ij(
On dit que la jloi de 181 4 faisait une justice et non une
libéralité. '
A cela, deuxjréponses :
i°. Les arrêts ont répondu par une décision contraire;
■2°. La justice serait due aux ¡véritables héritiers, à ceux
que la loiappelle aumomentoù on veut l’exercer,lorsque
le propriétaire ne vit plus pour en profiter lu i-m ê m e .
On ajoute que,.le père était seul héritier, soit au m o
ment de la mort de.son fils, soit au moment de son am;
nistie... : ;
‘
•
'
* Nous répondons encore:;,
s
. i°. La. succession ,s’éfait ouverte par la mort- civile, et
alors, le pèvef.n’était point, héritier ; pourquoi irait-on
clioisif répqque(lde la mort naturelle, puisqu7alors il 11’y
avait pointj de f>ucqes,sion? N ’publions pas que lu loi de
i 8 z 5 } seule,y a fait cesser l’incapacité, résultante des lois
antérieure^;,que,le ^natuç-çonsuite de l’an 10 ne Tarait
�( 3y )
pas détruite pour les biens qu’elle exceptait de la restitua
tion, et qu’à l'égard de ceux-là, l’incapacité n’a cessé que
par la loi de 18 142°. Qu’importe donc l’amnistie? Elle aproduit ses effets
par la restitution des biens non réservés en l’an io : pour
c e u x -là , pas de difficulté. Le père était seul héritier, seul
ayant cause de son fils, lors de cette remise,par conséquent
il devait seul en profiter; mais dès que la voie civile des suc
cessions n’est pas le point de départ de la loi de 18 14 >
qu'elle n a point (Teffet rétroactif comme le disent encore
les arrêts, qu’elle ne se reporte à aucun principe, à
aucun droit, à aucun fait antérieur à sa promulgation;
d é f a u t de propriétaire, elle appelle ses ayans cause,
au moment où elle parle ; il est évident qu’il faut recher
cher quels sont ces héritiers ou ayans cause au jour de la
promulgation de la loi.
L e père, dit-on, était encore vivant à cette époque; il.
était le plus proche parent, le seul héritier, le seul ayant
cause de son fils.
O ui, sans doute, il serait seul héritier, si la loi se repor
tait à l ’é p o q u e du décès du fils; encore faudrait-il user
pour c e l a d’une loi exorbitante et seulement transitoire;
mais c ’est du droit commun qu’il s’agit, et le père n’est là
que comme plus proche parent de la ligne paternelle, hé
ritier pour moitié, par conséquent; mais les deux tantes
étaient vivantes aussi, et elles étaient héritières’pour l’au
tre moitié, comme plus proches parentes de la ligne ma
ternelle. Pas de doute ce semble sur ce point.
Si le père eût été décédé en
que serait-il arrivé?
On n’aurait pas dit qu’il était plus proçhç parent; car, en
q u
’à
> >2
�ce cas, il eût fallu appeler son propre héritier, puisque
son droit personnel fût remonté au 6 floréal an 8 , jour
qu’on qualifie comme celui de l’ouverture de la succes
sion naturelle; ou au moins au jour de l’amnistie , qu’on
considère comme celui où la succession a été ouverte
légalement. Si cela était impossible, comme l’ont décidé
tous les arrêts, s’il eût fallu, dans ce cas, appeler les plus
proches parens des deux lignes comme les ayans cause
reconnus par la loi, il est évident que la survie du père,
en 1814, ne lui donne d’autres droits que ceux que sa
proximité lui attribuait au moment de la promulgation
de la loi, c’est-à dire, la succession exclusive dans la ligne
paternelle seulement.
L e sieur Bournet croit faire une objection fort sérieuse,
en disant que pour exécuter la loi de 1814, il faut re
chercher si, au moment où la loi a paru, l’émigré avait
ou non un héritier.
S’il en avait u n , c’est à lui que les biens doivent être
•endus.
S’il n’en avait pas, c’est à ses parens les p lu s p r o c h e s ,
ï ses successibles, à ceux que les lois existantes appelle*
aient à être ses héritiers.
Nous aurions besoin de quelque explication sur cet argunent pour le bien saisir. L e sieur Bournet voudrait-il dire
jue pour que les parens les plus proches, au 5 décembre
1814» profitent de la loi, il faut que l’émigré n’ait pas
laissé de parens au douzième degré au jour de son décès?
Mais alors, comment aurait-il, au 5 décembre i8i/|, des
yarens proches que le sicUr Bournet lui-même appelle
les successibles? Il est difficile de concevoir de quelle
ouche ils seraient sortis.
�tu
( 39 )
D ’ailleurs, dans quels termes de la loi, dans quel exem
ple de jurisprudence, aurait-on trouvé le principe de cet te
distinction fort peu intelligible pour nous? L e sieur Lépinay deSamt L u c, lesieurDevenois et autres, n’avaientils pas laissé des héritiers naturels à leur décès ? N ’a-t-on
pas, précisément à cause de cela, agité la question entre
les ayans cause de l’une et l’autre époque? N ’est-ce pas
pour cela qu’il a fallu examiner si'l’émigré était demeuré
saisi ou dépouillé, capable ou frappé d’incapacité dans les
temps intermédiaires? si lui ou son héritier avait p u trans
mettre, céder, donner, avant la-loi de 1814, lesbiens ren
dus par elle seule ? N ’a-t-on pas enfin nettement décidé
qu’ils étaient rendus à ceux qui se sont trouvés les plus
proches parens de l’émigré, lors de la publication de la loi
du 5 décembre 1814, et non aux héritiers qu’ il a laissés
en mourant? (Arrêt Barbançon.)
A u reste, le sieur Bournet est si embarrassé lui-même
pour fixer le principe de cette hérédité de Lespinasse
père, qu’il hésite entre le 16frimaire an 8, date du décès
du f d s , et le 18 ventôse an 1 1 , date de son amnistie. Si
on s’appuie sur le droit commun, ce serait peut-être bien
plutôt l’époque de la mort civile qu’il faudrait consulter;
et si, comme il le faut sans doute, on s’appuie sur le droit
exceptionnel, on reconnaîtra, avec l’arrêt Saint-Luc, que
la remise n’est pas faite par la voie ordinaire des succes
sions , qu’elle est le résultat d’une volonté actuelle de la
loi, et qu’il faut la prendre telle qu’elle est; que la restitu
tion faite par le sénatus-consulte de l’an 10 doit profiter i\
ceux qu’il appelait; la remise de la loi de 1814 à ceux
qu’elle indique ; que les biens qu'elle rend n’ ont pas fa it
�'G 4° )
! partie de la succession de Lespinasse fils, puisqu’alors
ils étaient irrévocablement réunis au domaine de VÉtat ;
. q u’ainsi il n y a pas deux successions du même individu,
et qu’ils ne peuvent appartenir qu’à jceu x; qui se sont
trouvés ses ayans.cause, non-com m e ayant appréhendé
sa succession en l’an 8 ou en l’an 1 1 , mais com m e rétant
les plus proches pour recevoir des biens qui ne lui appar
ten aien t, ni à l’ une ni à l’autre ép o q u e, et qu'on rem et
aujourd'hui à ses .héritiei'SiOU ayans cause, à ceux qui je
représentent.
•
'
On invoque l’art. I er de la loi qui maintient les droits
acquis à des tiers, et on dit que la qualité d’héritier du
sieur Lespinasse était un droit acquis.
Mais, d’une p a rt, puisque la transmission de la loi ne
s’opérait pas p a rla voie ordinaire dûs 'successions, on ne
concevrait pas trop cet argument appliqué à une qualité
d’héritier.
D e l’autre, on voit, à ne pas en doiiter, que cet article
appartenait plus à u n but p o l i t i q u e , qu'aux droits de successibilité attribués par les lois civiles : c’est ce que prouve
le préambule de la loi et la loi elle-même. L e Monarque
a fait cesser la proscription d’une classe recommandable
de citoyens; il veut leur rendre les biens non vendus;
mais il veut concilier cet acte de justice avec les droits
acquis par des tiers en vertu des lois existantes, >avec
l'engagement contracté de maintenir les ventes de biens
nationaux, avec la situation des finances , etc......... E vi
demment cela n’a rien de commun avec la qualité de ceux
à qui la loi va faire la remisé , et que d’ailleurs elle désigne
clairement.
* ! -..p
�(4 0
Comment, au surplus, le sieur Bournet n’a-t-il pas
aperçu qu’il ne pouvait pas être à la fois Yhéritier ou
Yayant cause, et le tiers qui aurait des droits acquis?
C ’est aux héritiers ou ayans cause qu’oryen d ; mais la re
mise n’aura pas lieu à leur profit, quand il se rencontrera
des tiers qui seront préférables à l’héritier, et ils feront obs
tacle à la remise, toutes les fois qu’ils aui’ont des droits
acquis par les lois existantes. Les tiers sont donc ici une
exception posée contre l’héritier , et leurs droits acquis
une exception à la remise des biens.Qui ne voit cela? et
comment peut-on confondre le tiers et 1h é u t ic i, ,pour
n’en faire qu’une seule et même personne?
Nous ne suivrons pas le sieur Bournet dans ses discus
sions ; cela serait fort inutile. Après avoir posé le principe,
et fait connaître parfaitement le sens clair et formel que
présente la loi de 18 14» et qu’a consacré une jurispru
dence positive etnon interrompue , il nous suffit de dire
que si le sieur Lespinasse avait tiré de sa qualité d’héritier'
de son'fils, en l’an 8 ou en l’an 1 1, un droit à des biens
qui n’ont été rendus qu’en 1814 > ce droit successif aurait
passé dans les mains du sieur Grenier, puis de la dame
D e s r o y s , qui étaient des tiers, et qui avaient acquis de
bonne foi; que si, comme on l’a jugé, la cession ne com
prenait pas les terres de Saint-Martin et d’Auzat, parce
que Lespinasse fils en avait été irrévocablement dépouillé,
et qu’elles n’ont été i’endues qu'en 18 14 »ehes ne peuvent
a p p a r t e n i r qu’à ceux qui étaient ses héritiers ou ayanscause au 5 décembre 18 14* H faut nécessairement que ce
point de départ admis par toutes les parties, excepté la
dame Desroys qui l’a contesté, produise toutes ses conséG
�(
4
2
-
quences, au profit du Marguerite et Marie de Sévérac,
que représentent les Bonnafoux. .
Aussi, pour soutenir le système contraire, le sieur
Bournet se refggie-t-il dans ce mot de l’arrêt de Béthune,
que le droit de l’émigré n’avait été que suspendu. Nous
avons fait voir ci-dessus l’espèce de cet arrêt qui n’est
point applicable, et nous avons montré en même temps
que ce système de suspension, indiqué par la section des
requêtes, par arrêt de simple rejet, avait été constam
ment repoussé par la section civile, avant et après l’arrêt
de 1821.
C ’est cependant sur ce point que roule toute la défense
du sieur Bournet; c’est avec ce moyen qu’il croit pouvoir
affirmer que les droits de Lespinasse père sont consacrés
par la jurisprudence des arrêts. Nous ne croyons pas
avoir besoin de rien ajouter pour prouver le contraire.
Les intimés auraient-ils à redouter l’arrêt de la Cour
rendu sur la demande du sieu r Bournet contre la dame*
Desroys? serait-il nécessaire d’y former tierce opposition,
à peine de voir repousser leur demande en partage? enfin
le défenseur des Bounafoux sera-t-il convaincu qu’il ne
doit pas hasarder une plaidoirie qui ne serait quun bou
leversement des principes, comme n’a pas craint de le dire
dans un écrit particulier le sieur Bournet, ou celui qui est
avec lui ou sans lui la véritable partie de la cause? Le défen
seur avoue qu’il n’est pas encore arrivé à cette perfection.
Il ne dira pris que c’est de la part du sieur Bournet une
assertion imprudente, une œuvre éphémère des désirs.... ou
des illusions de Vamour-propre) mais il se croirait fort imprii'
�tf/f
( 43 )
.
>
dentlui-même, s’il se permettait de flétrir a vecce tou de mé
pris., la conviction de ses cliens, et la décision des premiers
juges, surtout dans les termes où se présente la question.
Il croit pouvoir et devoir la soutenir avec bonne fo i, et en
tout esprit de justice et d’équité.
Quant à la prétendue nécessité de la tierce opposition ,
nousavouonsquenousnesoinmespasnon plus convaincus.
L ’arrêt de la Cour décide, non pas que les droits de Lespinasse fils avaient été suspendus, mais que les biens étaient
rendus à ses ayans cause par la loi de j8 i4 , et ne pou
vaient pas être compris dans des cessions de droits antérieuresà 1814, quelquegénéralesqu’ellespussent être, parce
que ces biens n’appartenaient alors ni de droit ni de fait,
à Lespinasse père, comme héritier de sou fils. Il n’avait
pas à décider cette question entre divers héritiers ou ayans
cause de Lespinasse fils, et à faire choix entr’eux, mais
entre Lespinasse père, qui se présentait comme seul
héritier ou ayant cause, et ses propres cédataires qui n’a
vaient d’autre titre que leur cession, d’autre droit que ce
lui qu’elle pouvait produire. Ainsi, en attribuant les biens
aux ayaris cause, comme rendus et censés leur appartenir
seulement au 5 décembre 18x4 , elle a consacré le droit do
tous les ayans cause, qui peuvent successivement se pré
senter pour y prendre part, s’ils établissent leurs droits. II
en est de ce cas comme de celui où un héritier se présentant
comme unique, obtient contre un débiteur de la succes
sion, un jugement qui le condamne à payer une somme
ou à délivrer un immeuble au demandeur comme seul et
uMqiïe'ïïcnlier du déjunt. Est-ce que plus tard d’autres
héritiers ne peuvent pas se présenter? est-ce qu’ilsauraient
besoin, pour être admis, de former tierceopposition au ju-
�, .
( 44 )
gement? Il est bien évident que non. Où donc est la dif
férence ? A u reste, rien ne sera plus facile que de former,
en tant que de besoin, une tierce opposition qui lèvera
cette prétendue difficulté de procédure.
Mais, dit-on, en termes tranchans, nous n’avons encore
aujourd’hui d’autre adversaire que les sieur et dame Desroys; car ils ont traité avec les Bonnafoux dont un modique
salaire a acheté la complaisance.
Nous n’avons rien à répondre à cette assertion, que
nous ne qualifierons pas non plus im p ru d en te. Les B on
nafoux sont seuls en qualité; nous ne connaissons aucun
acte qui les dépouille de leur droit; et quand on suppose
rait qu’ils l’ont cédé, la question serait toujours de savoir
s’il existait réellement au jour de la cession. C ’est donc
toujours leur droit et leur qualité qu’il faut examiner; car
c'est ce droit et cette qualité dont les résultats sont soumis
à la justice. Nous ne nous ferons point ici les apologistes
des sieur et dame Desroys, de la situation fâcheuse où les
a mis une fausse confiance, tout est terminé la dessus. Ils
ont été condamnés, ils ont dû l’être; mais c’est de ce la
même que découle la nécessité de reconnaître que Lespinasse père n’y avait pas droit comme unique héritier
de son fils, et nous ne craindrons pas de dire qu’il faut
examiner telle qu’elle est la question élevée par les
Bonnafoux, et que rien ne peut ni la dénaturer, ni empê
cher l’action de la justice en ce qui les concerne.
M e D E V I S S A C , avocat.
M e Clle C H I R O L , avoué
Clermont imprimerie de THIBAULT LANDRIOT
�L e s A N C IE N S A V O C A T S S O U S S IG N É S , vu le Mémoire
produit, dans l’intérêt du sieur B o u rn e t, devant la Cour royale
de Riom ; le précis en réponse pour les sieurs Bonafoux ; Je
jugement rendu par le tribunal d ’Issoire , le 25 août 1829;
ensemble la consultation , par eux déjà délibérée , le 10 mars
précédent;
Ne peuvent que persister dans l’opinion q u ’ils ont émise
dans cette précédente consultation, et sont d’avis qu’aucun
des motifs allégués par le sieur Bxjurnet, à l’appui de son a p p e l,
ne saurait prévaloir sur ceux qui ont déterminé le jugement
attaqué.
,, /
La question se réduit à un point bien simple ; il s’agit de sa
voir à qui a profité la restitution opérée par la loi du 5 décembre 1814. Or, il est évident que cette restitution a été faite
à ceux qui étaient héritiers au moment où cette loi a été pro
mulguée. La jurisprudence de la Cour de cassation est formelle
à cet égard : nous ne rappellerons pas les nombreux arrêts que
nous avions cités dans notre première consultation , et dont le
Mémoire dcM *. De Vissac a présenté une analyse aussi exacte
que décisive.
Si la loi du 5 décembre a restitué à ceux qui étaient héritiers
au moment de la promulgation, il est évident qu'il importe peu
q u e , d ’après la loi du 17 nivôse, M. de Lespinassc fut le seul
héritier de son fils, soit au moment où ce dernier est mort,
soit lorsqu’il a été amnistié. Les biens restitués par la loi du
du 5 décembre n’étaient, en cflet, ni à l’une, ni à l’autre de
ces deux époques dans la succession de Claude Gilbert : ils n ’y
sont entrés que par la loi du 5 décembre , et alors existait un
ordre nouveau de succession , d’après lequel moitié seule
ment appartient à M. de Lespinassc, comme représentant de
la ligne paternelle , et l’autre moitié aux daines Marie et
�M a rg u erite, com m e représentant la ligne maternelle. Évidem
m en t, c’est donc dans cette proportion, de moitié seulement,
que la restitution a du profiter à M. de L ’espinasse, ou à son
cessionnaire. C ’est là une conséquence de l’interprétation que
la jurisprudence a donné à la loi du 5 décem bre; o r , recon
naître à M. B o u r n e t, cessionnaire à M. de Lespinasse, avant
1814, le droit à la totalité des biens que cette loi a restitués,
ce serait supposer que ces biens existaient dans la succession,
de Claude G ilb e r t, avant la l o i du 5 décembre ; ce serait opposer
un principe diamétralement contraire à cette lo i, qui, comme
tout le monde le s a it, n’a été q u ’une loi de grâce.
Nous ne croyons pas devoir insister plus long-temps sur une
démonstration que le M émoire de M. De Vissac a rendu évi
dente, et nous ajoutons que rien de contraire à ces principes,
ne résultant des prétendus arrêts rendus , soit avec M. G re
nier , soit avec M. D esrois, ce n’était pas le cas, pour les consultans, de se rendre tiers-opposans à ces arrêts.
Délibéré à Paris , ce 23 avril 1831.
D E L A C R O IX -FR A IN V IL L E .
SC R IB E ,
,
Avocat à la Cour de cassation.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bonnafoux, Jean. 1831]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Chirol
Delacroix-Frainville
Subject
The topic of the resource
émigrés
successions collatérales
mort civile
séquestre
amnistie
sénatorerie de Riom
rétroactivité de la loi
doctrine
préfet
arbre généalogique
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse , pour Jean Bonnafoux, Jean Vialfont et autres, habitant le département du Cantal, intimés ; contre Le sieur Bournet, propriétaire, habitant la ville d'Issoire, appelant ; En présence De dame Henriette de Chauvigny De Blot, veuve Desroys, et de sieur Annet Desroys.
Table Godemel : émigré : 5. ceux qui, héritiers d’un émigré à l’époque de son décès, n’ont recueilli qu’une partie des biens restitués à sa succession en vertu du sénatus consulte 6 du floréal an X, l’autre partie ayant été affectée à un service public, doivent recueillir cette dernière partie des biens, remise en vertu de la loi du 5 xbre 1814 et ce, à l’exclusion de ceux qui, devenus héritiers plus tard, se sont trouvés habiles à succéder avec eux lors de la promulgation de cette loi. – ici ne s’applique pas la règle consacrée par la jurisprudence, que les héritiers de l’époque de la remise doivent être préférés aux héritiers de l’époque du décès.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Thibaud-Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1792-1833
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2621
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2620
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53536/BCU_Factums_G2621.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Molède (15126)
Saint-Flour (15187)
Auriac-l'Eglise (150013)
La Chapelle-Laurent (15042)
Moulins (03190)
Paris (75056)
Auzat-la-Combelle (63022)
Saint-Martin-des-Plains (63375)
Mozac (63245)
Vertessère (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
amnistie
arbre généalogique
doctrine
émigrés
mort civile
préfet
rétroactivité de la loi
sénatorerie de Riom
séquestre
successions collatérales
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53535/BCU_Factums_G2620.pdf
27b8a24024656c15cae725e128e0b392
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Text
7®îü'j
MÉMOIRE
POUR
L e sieur B O U R N E T , p ro p ri ét a ire , h a b i t a n t de la
• DE RIOM.
v il le d' Iss oir e, A p p e l a n t ;
2e CHAMBRE.
CONTRE
Jean
B O N N A F O U X , p ro p rié ta ire, habitant au
lieu de L u za règ u es 3 com m une de M o lè d e , dépar
tement du C antal ; J e a n V I A L F O N T , secrétaire
i
de la s o u s - p réfectu re de S a in t- F l o u r , et dam e
F rançoise
D E L A R O C H E , son ép o u se;
V IA L F O N T , Jeanne V IA L F O N T ,
H e n r i
sa soeur,
propriétaires , habitans d u lieu de M o lèd e ; J e a n n e
V IA L F O N T
et A n t o i n e
F O U I L L O U X , son
m ari, q u i l ' autorise, propriétaires,
habitans d u
lieu de B o u f e le u f, com m une d ’A u r ia t 3 même d é
partem ent du C a n ta l, intim és ;
EN PRÉSEN CE
D e d ame
.
Amable-H e n r i e t t e D E C H A U V I G N Y D E
B L O T , veuve de M. C l a u d e - E t i e n n e - A n n e t D E S R O I S propriétaire, habitante de la ville de M ou
lins, et de M. A n n e t comte D E S R O I S , propriétaire,
habitant de la ville de P a ri s , rue Bl an c, n° 1 7 5 ,
défendeurs en assistance de cause.
L
orsqu’ en
COTJR ROYALE
1814 un gouvernement nouveau s’établit
en Fra nc e, le prince qui en était le c h e f , après avoir
publié uue charte q u ’ il destinait à rallier toutes les
�v° ήf
'
( - )
opinions, exprima bientôt le vœu d ’effacer ju sq u’aux
dernières traces des haines et des proscriptions qui
avaient affligé tant de Français.
C ’est dans cette sage pensée q u ’il abolit d ’abord
toutes les inscriptions encore existantes sur les listes
des émigrés, et q u ’il proposa ensuite aux chambres
un projet de loi sur la remise des biens non vendus.
Les chambres s’empressèrent de concourir à cet acte
de justice, et la loi du 5 décembre 1814 fut émise.
L e b ut de cette loi était clairement manifesté par ses
expressions ; elle voulait que les biens fussent rendus
en nature à ceux q ui en étaient propriétaires, ou à
leurs héritiers ou ayan t cause.
Ces termes : a u x propriétaires ou à leurs héritiers,
n ’étaieut pas é q u ivo q u es; ceux-là seuls, qui étaient
héritiers naturels des émigrés, avaient droit aux biens
rendus -, des étrangers légataires ou cédataires ne de
vaient pas etre admis à les réclamer, parce q u ’ils
n ’étaient rendus qu'à la famille de l ’émigré, h ses pa-
i
♦
rens les plus proches.
Aussi les tribunaux s’empressèrent-ils, dès l ’origine,
de repousser les demandes de ces étrangers ambitie ux ,
q u i , à l ’aide de titres vagues et généraux, cherchaient
à s’emparer de propriétés
auxquelles ne pouvaient
s’appliquer des actes très-antérieurs à la restitution.
IVlais dans les divers conflits auxquels cette loi bien
faisante autant que juste a donné l i e u ,
toujours il
avait été reconnu q u ’aux héritiers seuls de l ’émigré,
o u , si ses héritiers n ’existaient plus, à ses parens les
plus proches devaient appartenir les biens rendus.
i
�Ü iT v
*
( 3 )
é ilm
4
Jamais on n ’avait hasardé de prétendre que les pa
reils les plus éloignés de l ’émigré, et des païens qui
u ’étaient pas, qui n ’avaient jamais été ses héritiers,
dussent cependant profiter des bienfaits de la loi.
Il était réservé au sieur Desrois, q u i , encore aujour
d'hu i comme,dans une première cause, est l ’adversaire
réel du sieur B o u r n e t , il était réservé au sieur Desrois
de créer un sy stè me, dont le résultat serait de fausser
la loi sous prétexte de l ’interpréter, et d ’enrichir ceux
qui n ’ont rien perdu en privant ceux q u i ont été dé
pouillés.
Déjà ce système, présenté avec tout l ’art possible
par le sieur Desrois l u i - m ê m e devant la C o u r , a ce
pendant
etc proscrit.
Sera-t-il plus heureux aujourd’ h u i , en le reprodui
sant sous le nom des Bonnafoux?
11 nous est permis d ’en douter.
FAITS.
L a contestation a pour objet la succession de ClaudeG ilb ert de l ’Espinasse, émigré depuis 1792 , décédé
eu pays étranger le 6 frimaire an 8.
E n se fixant sur la généalogie, on voit que les aïeux
de C la u de-G il b ert de l ’Espinasse étaient C la u d e-G il bert de Sévérac et Marie-llose Bonnafoux.
Ceux-ci,
•
de leur un io n, avaient eu cinq enfans ,
savoir :
Claude de Sévérac, qui épousa Anne de Fondras, et
en eut un fils nommé Jean-Marie-Claire de Sévérac ,
décédé sans postérité le 2 germinal an 2 -,
.
�ut
( 4 )
François-Alclebert de Sévérac , qui avait épousé
Amable-Henriette C h au v ig n y de B l o t , et qui est aussi
mort sans enfans, le 4 germinal an 4 '•>
Marie et Marguerite de Sévérac, qui étaient entrées
en religion, et dont la survivante est décédée, à ce q u ’il
pa rait, le i i septembre
i
8 i 5;
E n f i n , Catherine-Marie-Louise de Sévérac, qui avait
épousé Guil lau m e de l ’Espinasse : c’est de ce mariage
q u ’était né le sieur C la u d e-G il b ert de l ’Espinasse de
l'hérédité duquel il s’agit.
A la mort de Jean-Marie-Claire de Sévérac, sa suc
cession, régie par la loi du 17 nivôse an 2 , fut divisible
par moitié entre les Fondras, pareils de la ligne mater
nelle, et les Sévérac, païens de la ligne paternelle ; et
comme le sieur de l ’Espinasse fils représentait sa mère
qui n ’existait plus, il devait concourir, avec FrançoisAldebert de
Sévérac,
son o nc le , et avec Marie et M a r
guerite de Sévérac, ses deux
t a n t e s , au
partage
de la
moitié affectée à leur l ig n e 5 en sorte q u ’il lui revenait
un huitième du patrimoine d u .d é iu n t .
C e patrimoine se composait, i° de la terre de Y e r tessère, située dans le département du C a n t a l ; 20 des
trois quarts de celle de Sévérac, située dans le même
dé p a r t e m e n t } 3 ° des trois quarts de celle de $l-Martin,
située dans le département du Pu y-de-D om e.
L e sieur de l ’Espinasse fils,
héritier pour un hui
tième, devait donc obtenir un huitième de la terre de
Vertessère, et trois trente-deuxièmes des deux autres
terres.
Lesmemesquotités appartenaient a Franeois-Aldebert
�de Sévérac, aussi héritier pour un huitième du défunt.
Au décès de François-Aldebert de Sévérac, qui eut
lieu le 9 germinal an 4 > ses seuls héritiers étaient
Marie et Marguerite de Sévérac, ses deux sœurs, et
Claude - G ilb ert de l ’Espinasse, son neveu. C h a c u n
d ’eux était appelé à recueillir le tiers de sa succession ;
et comme cette succession se composait de la terre
d ’A n z a t , d ’ un huitième de la terre de Vertessère, et
de trois trente-deuxièmes des terres de St-Martin et de
Sévérac, il en résultait que les droits du sieur de l ’Espinasse fils, dans les successions de ses deux oncles,
s’ é l e v a i e n t
à un tiers de la terre d ’A u z a t , à quatre
trente-deuxièmes ou à un huitième des terres de SaintMartin et de Sévérac, et à un huitième plus un tiers
de huitiè me, c’est-à-dire à quatre vingt-quatrièmes ou
un sixième de la terre de Vertessère.
Mais, émigré depuis 1 7 9 2 , frappé de mort civile
par la loi du 28 mars 1 7 9 3 , il n ’avait pu alors re
cueillir lui-mème ces deux successions. C ’était à l ’K ta t
d ’exercer scs droits en vertu de 1 article 3 de la loi du
28 mars, qui porte que les successions échues et à
éch o ir a u x ém igrés pendant 5 o a n s , seront recu eillis
p a r la république.
E n l ’an 2 , à la mort de Je an -M ari e - Claire de
Sévérac, ses biens furent mis sous le séquestre, à la
diligence des agens du gouvernement. Il parait q u e ,
postérieurement, un partage fixa les lots de chaque
héritier.
E n l ’an 4 > <1 l ’ouverture de la succession de François
Aldebert de Sévérac, des mesures conservatoires furent
�aussi prises clans l ’intérêt de l ’É t a t ; et le séquestre
fut mis notamment sur le mobilier qui se trouvait
dans les bàtiinens d ’ Au zat.
Mais la veuve de Sévérac (la dame de C h a u v ig n y de
B l o t ) ¿tait usufruitière des biens de son mari pour le
tems de sa viduité,.
Donataire de l ’ u s u f ru i t, elle réclama la main levée
du séquestre, et elle o b t i n t , le i 3 germinal an 4 > un
arrêté de l ’administration départementale du Pu y-d eD ô m e , q u i , en ordonnant cette main levée, l ’autorisa
à se mettre en possession de la terre d ’A u z a t , et la
soumit seulement à faire procéder à un inventaire du
m obilie r, et dresser un état des immeubles.
L ’inventaire des meubles et l ’état des immeubles
furent f a i t s , le 24 germinal an 4 ? et
dame de
C h a u v ig n y a constamment joui, dès cette époque, de
la terre d ’Auza t.
L ’annee s u i v a n t e , le 3 o floréal an 5 , elle a c q u i t ,
au plus vil prix , les droits héréditaires des deux
religieuses, Marie et Marguerite de Sévérac, droits qui
comprenaient les deux tiers de la terre d ’Au zat.
L e 17 septembre 1 7 9 7 , la dame de C h a u v i g n y
épousa le sieur Desrois. Dès cet instant son usufruit
devait cesser, aux termes de son contrat de mariage;
elle conserva cependant une jouissance à laquelle elle
n’ avait plus droit.
Cependant
le sieur de l ’Espinasse fils mourut à
liurghen en B avi ère , le 16 frimaire au 85 le sieur
G u il la u m e de l’Espinasse son père, qui lui survécut,
était
son plus proche parent et son seul
héritier,
�( 7 )
d ’après la loi du 17 nivôse an 2. Les lois sur l ’éniigration
le p r i v èr e n t de cette succession.
Mais, en l ’an 10, parurent le sénatuscousulte du
16 floréal et l ’avis interprétatif du
9 thermidor.
On sait que le premier de ces deux actes législatifs
amnistia
les émigrés ,
en leur
imposant
quelques
c o n d i ti o n s, notamment celle d ’obtenir un certificat
d ’amnistie ; l ’avis du 9 thermidor étendit cette faveur
aux émigrés décédés, en autorisant leurs héritiers à les
faire amnistier.
L e sieur de l ’Espinasse père o b t i n t , le i 5 ventôse
an 1 1 , un certificat d ’amnistie pour son fils dont il
était l ’ unique héritier. Il est à remarquer q u ’à cette
d er n i è r e
époque, le chapitre du code civil sur les suc
cessions n ’avait pas encore paru. L a
an
2
était encore en vigueur.
J|l>i
du 17 nivôse
*
L ’amnistie prononcée, le sieur de l ’Espinasse père
obti nt divers arrêtés des préfets de la I l a u t e - L o i r e , du
Cail ta l et du Puy-de-Dôme , q u i l ’e n v o y è r e n t ,
en
qualité d ’ héritier de son fils, en possession des biens
de celui-ci.
Mais ces arrêtés diffèrent dans leurs dispositions ,
e t , par suite , dans leurs effets. 4
Les seuls biens à recouvrer dans le département de
la Ila ute-Loire étaient possédés par le fils, au moment
de son émigration. Ils furent restitués au père par un
ar r ê té que prit le préfet de ce département , le 11
germinal au 11.
M a i s , dans les déparlemens du Cantal et du Puyde Dôme se trouvaient les terres de Verlessère , de
�-\n
( « >
Sévérac et d ’A u z a t , dont une partie était échue au
fils l’E^pinasse, en l ’an 2 et en l ’an 4 ? pendant son
émigration.
L e préfet du C antal, par son arrêté du 25 thermidor
an 1 1 , délaissa au sieur de l ’Espinasse ce que l 'É ta t
avait recueilli pour son fils dans les terres de Vertessère
et de Sévérac.
Mais le préfet du département du P u y - d e - D ô m e ,
par arrêté du 7 frimaire an 12,
fit une distinction
entre les biens personnels du fils et ceux qui lui étaient
advenus pendant l ’émigration ; il ordonna , qua nt aux
premiers, la main-levée du séquestre, et le maintint
qua nt aux autres.
C e l t e dernière décision était autorisée par la loi du
8 messidor a n ^ , et par des actes du gouvernement,
des 5 brumaire et 24 frimaire an 9 et 3 floréal an 11.
L e si eur de l ’Espinasse fut donc obligé de s’y résigner;
et il ne put exercer, pour le m o m e n t au moins, les
droits q u ’avait son fils, soit au huitième de la lerre de
St- M ar ti n , soit au tiers de celle d'A nzat. Il parait que
le huitième de St-Martin ayant été déjà réuni à la sénatorerie attachées la cour royale de llioin, cela contribua
à la rigueur de l’ari f l é du préfet du Puy-de-Dôme.
Mais le sieur de l’Espinasse profita dès-lors des biens
qui lui étaient délaissés par l’arrêté du préfet du C a n t a l ,
dont la décision fut aussi définitive, les préfets de
chaque département étant chargés par la loi de pro
noncer sur ces sortes de difficultés.
Ces circonstances furent favorables ïi la dame de
C h a u v i g n y , (jui^ par S011 second mariage avec le sieur
�* \
de cu ju s.
�GÉNÉALOGIE.
»H*0 *3“
J ean
BOINNAFOUX DE BEYSSAT,
M a rg u e rite
) .
DE VERDONNAT.
____________ I____________
JEAM'E,
à
Jeas \ ialfost.
AG>ES,
MARIK-KOSE,
C l a o d e - G i l b e r t DE S É V ¿ R A C ,
JEAN-BAPTISTE,
à
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M
J t A K - J o s iP I l U O ISA FO D X .
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CLAUDE,
Roux.
A *ie
de
à
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ondeas.
*í f r a m c o i s -a l d e b e r t , .
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à ¡» .« ta » W |
HENRIETTE
DE CIIAUWGNY DE C L O T / *
rvuiariée i M. Dtsuois.
CATHERINE,
JE A N ,
Intimé.
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JX A X -Jo jcru
de
L
a x o c b i.
JEAN-MARIE-CLAIRE, ,
•J- le 3 germin»! an a.
ANTOINETTE,
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J
ia
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ia lfo r t.
MARGUERITE.
MARIE.
CATHERINE-M ARIE-LOUISE
à
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u il l a u m e de l ’E î p i s a s s e
H « li gi cU S «S <
CLAUDE-GII.BERT.
de ç u ju t.
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a R I E - F hA S C O H E ,
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J eas V ialtoxt.
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cchue
au
�Desrois,
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m i e r mari.
perdu l ’ usufruit des biens de son pre
Elle se maintint dans la possession du
tiers
de la terre d ’A u z a t , qui était échu à l ’émigré l ’Espiuasse, et que l’E t a t négligea de réclamer contr’elle,
dans l’ignorance, sans d o u t e , de son convoi ou des
clauses de son premier contrat de mariage.
Cependant* le sieur l ’Espinasse père avait cédé au
sieur Gren ier, à la charge de le garantir des dettes, et ,
pour la somme de 3 ooo fr. , tous les droits qui lui
avaient été délaissés par l ’Etat.
U n e contestation s’étant élevée entre le cédataire et
la dame Desrois, pour le partage des biens de la suc
cession de François-Aldebert de Sévérac , son premier
mari, il fut question de la terre d ’A u z a t , de la posses
sion illégale de cette dame et de la négligence des em
p lo yés de la régie. Mais cela n ’eut pas de suites; le sieur
Grenier étant sans qualité pour réclamer, la dame
Desrois se maintint dans sa jouissance.
Les événemens mémorables de i 8 i 5 produisirent la
restauration. Alors les familles des emigres purent
espérer de recouvrer ceux de leurs biens dont l ’É t a t
était encore en possession.
Un premieractede justice fut fait par une ordonnance
royale du \ juin 18 14 s (1M>> cn réunissant au domaine
de la couronne les biens qui formaient la dotation des
sénatoreries, ordonna q u ’on eu distrairait les propriétés
particulières acquises
par voie de confiscation , et
q u ’elles seraient rendues aux anciens propriétaires.
Par l ’eifet de cette ordonnance, le sieur de l ’Espinasse
père devait recouvrer le huitième de la terre de Saint2
�Martin , qui faisait partie de la dotation de la sénatorerie de Riom.
Bientôt est publiée une loi plus générale, celle du
5 décembre 18 14 s Par laquelle le pouvoir législatif
ordonne que « tous les biens immeubles séquestrés ou
« confisqués pour cause d ’émigration, ainsi que ceux
« advenus à 1 É t a t par suite de partage de successions
« ou presuccessions, qui n ’ont pas été vendus et font
« actuellement
partie
du
domaine p u b l i c , seront
« rendus en nature à ceux q ui en étaient proprié« taires, ou à leurs héritiers ou aya^it cause. »
E n vertu de l ’ordonnance du 4 juin et de la loi du
5 décembre, le sieur de l’Espinasse père avait à récla
mer, soit le huitième de la terre de St-M a rtin , soit le
tiers de celle d ’Auza t.
Dans l ’ignorance de ses droits h ce dernier ob jet, il
n agit (1 abord, que pour le huitième de la terre de
St-Martin.
L e sieur Grenier prétendit alors que les droits du
sieur de l ’Espinasse à celte terre étaient compris dans
la cession q u ’ il lui avait faite, le 18 vendémiaire an
i /j .
C ette erreur fut repoussée d ’abord par le tribunal
d ’Is^oire, ensuite par la cour de lliom.
L e jugement du tribunal d ’issoire considère dans ses
motifs, « que les biens dont il s’agit étaient irrévoca» blement réunis à la dotation du sé nat, deux ans avant
» la cession faite par M. de l ’Espiuasse à M. Grenier;
» ‘ lue, dans la supposition où les biens eussent été
» nominativement compris daus ladite succession , la
�V* •
*
c „
)
m
>
» clause eut ¿té, par les lois existantes, déclarée comme
» non avenue. »
E t , dans son dispositif, le tribunal déclare que la
qualité de représentant d u .sieur C la u d e-G ilb ert de
l ’Espinasse } p o u r l ’objet en question, repose dans la
seule personne du sieur de l ’Espinasse père, et q u e ,
p a r conséquent, il est seu l habile à se pourvoir devant
la commission du gouvernem ent, p o u r être envoyé en
possession des biens restitués p a r ordonnance royale.
Tel est le jugement que la cour de R f o m , chambres
réunies, confirma, purement et simplement en ce point,
par-arrêt du 3 mars 1817.
Depuis, par acte authentique du 29 octobre 1817 ,
le
sieur
de l ’Espinasse, qui avait une affection particu
lière pour le sieur Bournet son parent et son successible, lui a fait donation entre vi fs , de tous les droits
qui résultaient, en sa fave ur , de l ’ordonnance royale
du 4 juin 1 8 1 4 5 île la loi du 5 décembre su ivant, et
de l ’arrêt de la C o u r , du 3 mars 1817.
Cependant cet arrêt avait ordonné que M. de l ’Espinassc con trib u e rait , dans la pioporlion de la valeur
du huitième de la terre de St-M arlin, aux dettes de la
succession du sieur de l ’Espinasse fils.
E n exécution de cetarrêl, il fut procédé à un compte,
lors duquel des débats s’élevèrent. On parla de la terre
d ’ A u z a t ; et le sieur Bournet découvrit alors les droits
de son donateur au tiers de cette terre, et la posses
sion illégitime dans laquelle s’élait maintenue la dame
Desrois.
Il forma aussitôt, devant le tribunal civil d ’ Issoire,
�la demande
en
paYtage des biens de la succession d’Al-
debert de Sévérac, qui étaient situés dans le départe
ment du Puy-de-Dôme, et il en réclama un tiers, comme
représentant le sieur de l ’Espinasse iils, héritier pour
un tiers de cette succession , les deux autres tiers ap
partenant à la dame Desrois, du chef de Marie et de
Marguerite
de Sévérac, dont elle avait acquis les droits.
C ett e action avait pour b u t , principalement, d ’ob
tenir le tiers de la terre d ’Au zat.
E lle fut accueillie par jugement du 19 décembre 1822,
qui condamna la dame Desrois et son mari à rapporter
ou à faire rapporter au partage, i° tous les immeubles
de la succession ; 20 la valeur des dégradations q u ’ils
avaient commises \ 3 ° les jouissances q u ’ils avaient per
çues depuis le 5 décembre 1 8 1 1\.
L a dame et le sieur Desrois interjetèrent appel de ce
jugement.
L e sieur B o u r n e t se p l a i g n i t aussi, par un appel
inc iden t, de ce que la dame et le si eur Desrois n ’ a v a i e n t
pas été condamnés au rapport des jouissances depuis la
date du second mariage.
Devant la C o u r, la daine Desrois n ’épargna rien pour
faire triompher des prétentions illégitimes.
E lle soutint q u ’elle était seule propriétaire du tiers
de la terre d ’A u z a t , réclamé par le sieur Bournet ,
comme du surplus de cette terre.
Il lui appartenait, disait-elle, «Vplusieurs titres :
Co mm e subrogée aux droits du sieur Grenier, à qui
la cession en avait été faite, et avec qui elle avait clleincine truité ;
�Comm e l ’ayant acquis des demoiselles de Sévérac, a
qui ce tiers appartenait ;
Comme exerçant, dans tous les cas, les actions des
demoiselles de Sévérac, qui lui avaient vendu toute la
succession d ’Àldebert de Sévérac, et q u ’elle prétendait
être héritières, pour m oit ié, de l ’émigré l ’Espinasse.
Sous ce dernier rapport, la dame Desrois demandait
à être admise, du chef des dames Marie et Marguerite
de Sévérac, à réclamer les biens rendus par l ’ordonnance
du 4 juin 18 14 ? et Par k' loi du 5 décembre i 8 i 4 ; elle
concluait aussi à ce que le sieur Bournet fut tenu de
rapporter le huitièmede la terre d e S t - M a r l i n , q u ’avait
obtenu le sieur de l’Espinasse père ; elle réclamait la
moitié, soit de ce huitième, soit du tiers de la terre
d ’A u z a t , échus à ' l ’émigré l ’Espinasse.
' Toutes ces questions furent débattues pendant p l u
sieurs audiences, devant la C o u r ; tou tes, elles furent
jugées en thèse, par arrêt du deux janvier 1827 , qui
confirma le ju gem ent , quant à l ’appel principal, et
qui, l ’infirmant sur l ’a p p e l incident, condamna lad amç
Desrois à restituer les jouissances q u ’elle avait perçues,
du jour de son convoi avec le sieur Desrois.
Les motifs de l ’arrêt déclarent que ce serait sans
qualité comme sans dr oit, que la dame Desrois vou
drait retenir le tiers de la terre d ’Auzat, et q u ’elle n’en
avait été ni pu être saisie par la cession que lui avaient
faites les deux dames de Sévérac, le 3 o floréal an 5 .
Cependant
comme l'on contestait au sieur de l ’Es-
pinasse père et au sieur Bournet son donataire la qualité
d ’ héritier unique de l ’émigré, et que l ’on soutenait que
�( r4 )
les clames de SévérajC étaient aussi les héritières de celuici pour la moitié des biens q u ’avait rendus la loi du
5 décembre 18 i 4 ? la C o u r eut à se prononcer sur cette
question, et elle la décida par des motifs aussi puissans
que précis.
E n voici le texte*:
« Considérant q u ’aux termes de celte loi (la loi du
« 5 décembre 18 i 4 ) > les biens dont elle a ordonné la
« remise ont du. être rendus en nature à ceux qui en
« étaient propriétairés, ou à leurs héritiers ou ayant
« cause.
_
J
« Que le sieur G uillaum e de l ’Espinasse, aux droits
« duquel est la partie d ’Allem and , ayant élé reconnu
« et déclaré être le seul représentant
de
Cla u de de
« l ’Espinasse son fils , par le jugement du tribunal
« d ’Issoire et par l ’arrêt de la C o u r , des iG juin 18 iG
« et 3 mars 1 8 1 7 , et ces jugement et arrêt n ’ayant
« pas été a t t a q u é s pa r les pa rt ie s de Bayle , il doit
« demeurer pour constant que le
si eu r G u i l l a u m e de
« l ’Espinasse a été seul appelé à recueillir, du chef de
« Claude-G ilb ert son fils, le bénéfice de la loi du
« 5 décembre 1 8 1 4 ? pour raison de tous les biens
« séquestrés ou confisqués sur ce dernier ;
« C o n s id é r a n t, d ’ailleurs., que le sieur Claude« G il b ert de l ’Espinasse, étant décédé le 1G frimaire
« an 8 , sous l ’empire do la loi du 17 nivôse de l ’an 2,
« et ayant élé amnistié le i 5 ventôse de l ’an 11 ,
« toujours sous l ’empire de la même loi, le sieur de
« l’Espinasse son père a été seul saisi de sa succession >
il suivant lo droit commun ; qu'à la vérité
l ’ e xerci ce
�( '5 )
« de ce droi t, acquis audit sieur de l ’Espinasse père,
»
avait
été suspendu par l'effet des lois sur l’émigia'-
(( t i o n , qui l ’avaient transmis au fisc, mais que les
« droits civils ayant été, depuis, restitués aux émigrés,
« et le sieur l ’Espinasse fils ayant été amnistie , la
« remise, ordonnée par la loi du 5 décembre i B 1 4? de
« ses biens dont l ’E t a t avait été saisi momentanément,
« n ’a pu et du etre faite qu au sieur G uillaum e de
« l ’Espinasse son père, comme seul héiùtier naturel
« au moment de son décès ;
« Considérant, au surplus, et en ce qui touche la
demande
subsidiaire que les parties de Bayle ont formée
seules sur 1 appel ,
« Que le tiers de la terre d ’ Auzat formait, ainsi que
« le huitième de la terre de Saint -Martin , la quotité
« de ces biens que le sieur de l ’Espinasse fils aurait
« recueillis dans les successions de Jean-Marie-Claire
« et de 1^rançois-Aldebert de Sévérac, s’il
« émigré, et que la nation avait
« Q u e , dès
q u ’ il
n ’e û t
r ec ue i ll i e p o u r
pas
lui;
a été reconnu et décidé par les
« jugement et arrêt des seize juin mil huit cent seize
« et trois mars mil huit cent dix -se pt, que le sieur de
« l ’Espinasse père avait e u , seul, le droit de réclamer
« la remise du huitième de la terre de Saint-Marlin ,
« en vertu de la loi du cinq décembre 18 1 4 ? les mêmes
« motifs qui ont fait admettre la réclamation du sieur
« de l ’ Espinassc père par rapport au huitième de la
« terre de Saint-Martin , comme étant l ’ unique héritier
« de son fils, doivent aussi faire accueillir celle que le
« sieur Bournet son donataire a formée,
quant au
�(
)
« tiers de la terre d ’A u z a t , sans être assujetti à aucun
« rapport, respectivement à la terre de S ain t -M arti n ,
« et sans q u ’il y ait d ’autre opération à faire que de
« procéder au partage de la terre d ’A u z a t , et du mobi« lier qui en dépendait, pour en être attribué un tiers
« au sieur Bournet, avec les jouissances, suivant q u ’elles
« seront ci après réglées. »
L a dame Desrois se pourvut en cassation contre
l'arrêt. L e pourvoi fut rejeté par la section des requêtes.
L e sieur Bournet devait donc croire q u ’il était désor
mais à l ’abri de toutes tracasseries.
M ais , sur la revendication de la moitié du bien de
l ’émigré l ’Espinasse, la C our de cassation, examinant
seulement la qualité de la dame Desrois, se borna à
déclarer « q u ’il était reconnu en fait que la cession
« consentie, en floréal an 5 , n ’avait point porté ni pu
« p o rt er sur la succession du fils l’Espinasse, décédé
« seulement en f r i m a i r e a n 8 ; q u ’ e ^ e portait seule« ment sur la succession de François-Ald eb er t de
« Sévérac, et q u e , même sur cette succession , elle ne
« conférait nullement à la cessionnaire le tiers en
« question (le tiers de la terre d ’A u z a t ) ;
« Q u ’ainsi , ne pouvant non plus représenter les
« deux religieuses, Marie et Marguerite de Sévérac,
« la veuve de Sévérac, épouse Desrois, était également
« sans qualité pour eu exercer les droits. »
L e silence de la C o u r de cassation sur le fond du
droit, dont elle n’avait pas à s’occuper, à fait concevoir
a la dame et au sieur Desrois le projet de
renouveler
le
j) roc es sous le nom des héritiers maternels des religieuses,
�( *7 )
Ils ont
t ra i té
avec eux par un acte sous seing privé
q u ’ils ne présentent pa s, de crainte que l ’on n ’en
remarque
le faible prix; e t , agissant sous le nom de
cfcs prétendus héritiers, ils ont formé, soit contr’euxmêmes comme détenteurs de
la
terre d ’A u z a t , soit
contre le sieur Bournet , la demande en partage de la
succession de Claude-Gilbert de l ’Espinasse lils.
C ’est par exploit du 16 août 1828 , que l ’action à
été intentée.
n
Les prétentions que l ’on y élève ne sont pas modiques :
non seulement les demandeurs concluent au partage
de la succession de François-Aldebert de Sévérac; non
seulement ils réclament même le rapport de la portion
de la terre de Saint-Martin , restituée au sieur l ’Espin a s s e
par l ’ordonnance du 4 juin 1 8 1 4 , mais ils veulent
encore
faire confondre dans cette succession tous les
biens provenus au fils l ’Espinasse , de la famille de
Sévérac, qui était celle, disent-ils, de Catherine de
Sévérac sa mère.
T o u t e s ces p r é t e n t i o n s o n t été ac cu ei l li es p a r le t riI,
I llW ' l'Ttr ------ 1 I -
* • -»•
4
hunal d ’ Issoire, qui s’est mis en contradiction directe
avec les décisions q u ’il avait rendues l u i - m ê m e , soit
dans une cause semblable entre le sieur de l ’Espinasse
et le sieur Gren ier, soit, dans la même cause, en ire
le sieur Bournet et la daine Desrois, qui a aussi consi
déré comme inutile même, la lierce-opposilion que les
B o n n a f o u x devaient, il semble, former aux arrêts par
lesquels le sieur de TEspinasse père avait élé déclaré
,seul représentant et unique héritier de son iils.
J^es motifs du jugement examinent lu qualité des
«
�(.8 )
■
demandeurs, l ’exception résultant de la nécessité où
ils étaient de former tierce-opposition aux précédens
arrêts, les effets de la loi du 5 décembre 18 1 4 Ils décident que la qualité est suffisamment justifiée
par les actes produits.
Sur la fin de non recevoir, ils déclarent,
« Que les demandeurs n ’ayant pas'figuré dans les
jugemens et arrêts invoqués contr’eux, ont pu remettre
en question ce qui avait été jugé en leur absence; que
l ’article 474
Code de procédure, qui autorisait les
tierces-opposilions'aux jugemens auxquels on n ’avait
pas été pa rtie, accordait une f a cu lt é , mais n ’imposait
pas une obligation. »
Sur le fonds de la cause, ils jugent,
,
« Q u ’en l ’an 4 > au décès de François Aldeberl de
Sévérac, le tiers de sa succession, dévolu à C laude Gilbert L ’Espinasse, alors émigré, fut recueilli par
l ’E t a t qui le représentait ;
« Q u e , lors de l ’amnistie, le
g o u v e r n e m e n t ne réin-
. tégra le sieur L ’Espinasse père q u e dans les biens qui
avaient appartenu au fils décédé en état d ’émigration,
sans y comprendre le tiers allèrent à ce dernier dans
la succession de son oncle François-Aldebert de Sévérac;
« Q u e , dès-lors, ju sq u’au moment de la p r o m u l
gation de la loi du 5 décembre 18 1 4 > l ’ Etat s’est trouvé
propriétaire légal de ce bien; que cette loi n ’a fait
cesser, que pour l ’aven ir, l ’eiFel des lois sur l'éinigration , ce qui s’induit nécessairement de la substitution
faite dans la rédaction du mol rendu au mot restitué
qui se trouvait dans le projet;
�( i9 )
«
Q u ’en
se pénétrant bien de l ’esprit dans lequel
cette loi a été rendue et de la discussion qui a précédé
son
adoption , on voit que le législateur a voulu
accorder une laveur à l ’émigré, k sa famille ou à ceux
à qui il aurait cédé ses droits après la publication de
la loi, et q u ’en désignant les héritiers, il n ’a eu en vue
que ceux qui auraient recueilli la succession s’ il était
décédé postérieurement au 5 décembre i 8 i 4 ;
« Qu e c’est sans fondement q u ’on a prétendu q u ’en
décidant que les biens rendus doivent être attribués
aux héritiers que l ’émigré, décédé sous l ’empire de la
loi du 17 nivôse an 2 , aurait eus s’il eut survécu à la
publication de la loi de 18 r 4 ? ce serait admettre q u ’ un
individu pût laisser deux successions qui
devraient
être régies par des principes différens; q u ’il est évident,
en eff e t, q u ’on ne peut considérer comme ayant fait
partie de la succession de C l aude-Gilbert de L ’Es pi
nasse, décédé sous l ’empire de la loi du 17 nivôse an a ,
des biens q u i , à l'époque où cette succession s’est
ouverte , appartenaient à l ’E t a t ,
et qui n ’ont été
rendus à la famille de l ’émigré que par une loi de grâce
et de laveur, qui n ’a été promulguée que long-tems
après son décès, et qui, d ’après son texte et son esprit,
ne peut avoir aucun effet rétroactif:
« Q u e , d ’ après les lois alors en vigueur, les parens
du sieur de I/Espinasse fils, au degré successible le
plus rapproché, étaient, au 5 décembre 1 8 1 4 , pour
la ligne paternelle,
le sieur de L ’Espinasse père,
représenté par le sieur lîournet;
et , pour la ligne
maternelle, la dame Marguerite de Sévérac, décédée
�\
( 20 )
1e i i
septembre
i8 i
5,
*
Laissant pour héritiers les
demandeurs en partage.
Par ces m o t if s , le tribunal déclare mal fondées les
exceptions proposées par ledit sieur Bournet, les rejette,
et,
statuant au f ond, donne acte à la dame veuve
Desrois et au sieur JDesrois de la déclaration q u ’ils ont
faite par leurs conclusions signifiées 3 q u ’ ils sont prêts
à faire compte, à qui par justice sera ord onné, des,
jouissances dont ils peuvent être tenus ;
« Ordonne que les parties viendront à partage des
Liens meubles et immeubles dépendant de la succession
de François-Aldebert de Séverac; que la dame veuve
Desrois et le sieur Desrois, en leurs q ualité s, rappor
teront audit partage i° tous les immeubles de ladite
succession dont ils peuvent
être détenteurs;
i° la
valeur des dégradations qui auraient pu y être com
mises, avec les intérêts à partir du jour où elles a u
raient eu lieu ^ 3 les meubles , effets mobiliers et
créances actives qui font partie de la succession, avec
les intérêts à dater du jour du convoi de ladite dame
de C h a u v ig n y de Blot avec le sieur Desrois; 4 °
valeur
des jouissances des immeubles, à partir de la même
époqu e, avec les intérêts à dater de la première de
mande en partage, introduite par le sieur Bournet
contre les sieur et dame Desrois ;
« Ord on ne, en o u t r e , q u e , du tout ¡1 sera fait
masse pour en être attribués deux tiers à la dame
Desrois, en sa qualité de cessionnaire des dames
Marie
et Marguerite de Sévé rac, et l ’autre tiers a u sieur
B o u i n e t , aymvt cause du sieur Lespinasse père., d ’ une
�p a r t , et à Jean Bonnafcmx et consorts, d ’autre p a r t ,
comme représentant ensemble les parens successibles
dans les lignes paternelle et maternelle du sieur C la u de
Gilbert de l’Espinasse ; p o u r , ledit tiers être subdivisé
entr’eux tous, chacun suivant son amendement dans
la portion de ce dernier ; '
« Ordonne , encore , que les parties viendront à
division et partage des b iens possédés par ledit Bournet,
provenant de la succession de Jean-Marie-Cia ire de
Sévcrac n e v e u , situés dans la commune de S t - M a r i i n
desTTains^t
de
autres, ainsi que de ceux de la succession
Claude-G ilbert
de l ’Espinasse, décédé émigré, q ui
1uTprovénaient de l a famille de S év éra c, pour en être
attrïbueea
cha~cïïn sa portion afférente; auquel partage
chaque co-partageant rapportera les biens meubles et
immeubles
dépendant desdites successions, dont il se
trouve en possession , avec restitution de jouissances et
intérêts, depuis son entrée en jouissance, soit par luimême, soit par ceux dont il serait l ’ hé r i t i e r ou l ’ayant
• ■
cause. »
Tels sont littéralement les termes des motifs et du
dispositif du jugement dont on a retranché seulement
quelques membres de phrase, étrangers aux difficultés
à résoudre.
Il résulte de ce jugement que le tribunal a été
beaucoup plus lo in , peut-être, q u ’ il ne s’en doutait.
E n effet, non seulement il a attribué aux deman
deurs un droit sur le tiers de la terre d ’ Au za t et sur
le huitième de la terre de Saint-Martin , comme ayant
été restitués aux héritiers de l ’émigré l ’Espinasse par
�la loi du 5 décembre 18 1 4 1 mais encore il a condamné
le sieur Bournet à rapporter au partage tous les autres
biens meubles et immeubles provenant de la f a m ille de
Se’véra c; et par conséquent, soit les terres ou les por
tions des terres de Vertessère et de Sévérac, qui avaient
été restituées au sieur l ’Espinasse p è re , dès le 25 ther
midor an i i , par un arrêté du préfet du C a n t a l ; soit
encore les biens mêmes que pouvait avoir recueillis le
sieur de l ’Espinasse fils dans la succession de la dame
de Séverac sa m è r e , avant son émigration ; ces biens
qui furent également restitués au sieur de l ’EspinaSse
père, par les arrêtés des préfets du Puy-de-Dôme et de
la Ilaute-Loire", des 11 germinal an 11 et 7 frimaire
an 12.
.
C ette étrange largesse n ’est, sans doute, que l ’efTet
d ’une erreur q u ’ont pr od uite , on doit le croire, les
conclusions des demandeurs.
Mais elle prouve, a u m o i n s , q u e le tribunal a été
fort peu a tten ti f aux faits de la cause, comme nous
démontrerons q u ’il a commis les plus graves erreurs en
principes.
L e sieur Bournet a interjeté appel de ce jugement
contre les B o n n a f o u x , demandeurs apparenô.
Il a aussi appelé devant la C o u r la dame veuve
Desrois et le sieur Desrois son fils, demandeurs réels;
et toutes les questions soulevées devant les premiers
juges se reproduisent aujourd’hui.
C e t appel donne donc lieu à examiner les qualités
des demandeurs, la procédure q u ’ils ont tenue, le foiidement enfin des prétentions q u ’ils élèvent.
�C 23 )
Mais, sur le premier o b je t , on se bornera a faire
que les qualités ne paraissent pas suffisamment
justifiées, en ce sens, au moins, que les Bonnafoux ne
ob s erve r
représentent pas toutes les branches des parens m a
ternels de l ’émigré. On se réserve, d ’ailleurs, devérifier
les actes de famille q ui pourraient être rapportés.
Le second objet exigera quelque discussion.
L e troisième, comme le plus im po rta nt, recevra tout
le développement qui est, il semble, nécessaire pour
faire apprécier sainement les droits des parties.
S Ier. 1
*
i
P rocédure tenue p a r les dem andeurs.
~La procédure des demandeurs a été peu régulière.
Ils se présentaient comme héritiers, pour m oiti é, de
C l a u d e - G il b er t
de l ’Espinasse , d o n t , d ’après eux-
mêmes, ils n ’étaient parens q u ’à un degré très-éloigné.
Ils n ignoraient pas q u e , par plusieurs jugemens et
par plusieurs arrê ts, le sieur de l ’Espinasse père avait
été déclaré seul héritier, seul représentant du sieur
Cla ude -G ilb ert de l ’Espinasse, son fils.
C ’é t a i t , en effet, ce q u ’avait décidé un premier
jugement rendu par le tribunal d ’Issoire, le i3 juin
18 i <3 , entre le sieur de l ’Espinasse père et le sieur
Gren ier, relativement à la terre de St-Martin , objet
du procès alors comme aujourd ’ hui. Dans le dispositif
du ju g em e nt , le tribunal déclare que la q u a lité de
représentant du sieur C la u d e de /’E sp in a sse, p o u r
l ’objet dont est q u estio n ,
sonne du sie u r de l
repose
’ E s p i n a s s e pfcniî,
dans
la. s e u l e
per
et, par conséquent,
�* 1
( 24 )
q u ’ il est s e ul h a b i l e à se p o u r v o i r d e v a n t la commission
d u G ouvernem entj p o u r être envoyé en possession des
biens restitue's p a r ordonnance royale.
'»
O r , ce jugement fut confirmé par un arrêt solennel
des chambres réunies de la C o u r de Iliom , prononcé
le 3 mars 1817.
C ’est encore ce q u ’avaient jugé et le même tribunal
d ’ Issoire et la même C o u r de R i o m , entre le sieur
Bournet et les sieur et dame Desrois, qui élevaient
les mêmes questions, renouvelées aujourd'hui par euxmêmes sous le nom des Bonnafoux dont ils sont les
cédataires déguisés. Alors aussi la dame Desrois préten
dait que le sieur Bournet n’avait droit , du chef du
sieur de l ’Espinasse père , q u ’à la moitié des biens
restitués par les ordonnances royales et par la loi du
5 décembre 1814 j elle soutenait que la moitié de ces
biens a p p a r t e n a i t aux religieuses de Sévérac dont il
se disait le cédataire ou le c ré an ci er , e t dont il déclarait
exercer les droits; alors, en un m ot, elle agitait toutes
les difficultés qui se présentent aujourd’ hui; et, toutes,
elles furent repoussées par le tribunal et par la Cour,
dans un jugement du
19 décembre 1 8 2 2 , dans un
arrêt du 2 janvier 1 8 27 ; par la C o u r , notam ment,
qui , après les plaidoiries
les plus soignées, après
l ’examen le plus scrup uleux, déclare dans ses motifs ,
« que le sieur G uil la um e de l ’Espinasse a été seu l
« a p p elé à r e c u e illir , du chef de C la u d e - G il b e r t son
« fils, le bénéfice de la loi du 5 décembre 18 1 /|., p o u r
« raison de tous les biens séquestrés ou
« sur ce dernier. »
c o n fis q u é s
�( 25 )
Comment
/
concevoir q u e , sans q u ’il fut pris aucune
voie pour faire disparaître'ces respectables décisions,
un tribunal inférieur ait pu anéantir des droits aussi
solennellement consacrés ?
Mais, a-t-on d i t , ces décisions sont étrangères aux
Bonnafoux et consorts. Elles sont pour eux res inter
alios cictci.
Elles sont étrangères
aux
Bonnafoux ; mais les
Bonnafoux sont-ils les vraies parties de la cause? qui
oserait l ’affirmer? il est co n nu , il est notoire q•*u ’ils «ne
jo u e n t , dans cette nouvelle contestation, que le rôle
salarié de complaisans prête-noms, et que la dame et
le sieur Desrois ont acquis, au plus vil prix , leurs pré
tendus droits, afin de retarder l ’exécution des arrêts
de la justice, et la restitution d ’immeubles dont ils
s’étaient illégalement emparés. C e n’est q u ’en cachant
dans l ’ombre une cession prohibée par la l o i, q u ’ils
traînent encore le sieur Bournet devant les tribunaux.
A u reste, q uoiq u’étrangères aux demandeurs en ce
sens (jue ceujc-ci n ’y avaient pa s ete p a r tie s, les dé
cisions que nous venons de rappeler devaient être atta
quées, de leur part, par la voie de la tierce-opposition.
C ette voie extraordinaire, autorisée par l ’article 474
du Code de procédure comme elle l’était par les anciens
principes, a été introduite précisément pour les cas
où des tiers n’auraient pas été appelés à des jugemens,
à des arrêts qui pourraient leur nuire en att ribua n t à
un autre une qualité, un droit, un immeuble qui leur
appartiendrait.
Ces tiers sont autorisés à former tierce-opposition
4
�( 26 )
à ces décisions rendues hors leur présence, et à débattre
leurs propres moyens, à faire valoir leurs titres devant
le même tribunal qui a déjà eu à prononcer sur les
mêmes questions.
L a loi le vent ainsi dans le b ut de concilier ce qui est
du à la dignité de la justice et ce que réclame l ’intérêt
des parties;
, Ce qui est dû à la d ig n ité de la j u s t i c e , qui serait
compromise si non seulement les mêmes moyens, mais
encore les mêmes droits, la même cause étaient ac
cueillis par tel tribunal et repoussés par tel autre, sans
que celui qui d ’abord s’est prononcé ait été appelé, ou
à reconnaître sou erreur si une discussion plus appro
fondie la lui signalait, ou à consacrer son opinion par
un second jugement si un second examen lui en démon
trait la justice.
Ce que
réclame l ’intérêt des parties ; car il
convenable que ceux auxquels
sont
est
opposés (f^s juge-
mens, des arrêts oii ils n ’ont pas été appelés soient
admis à se défendre eux-mêmes, à présenter sous un
jour plus simp le, peut-être, la cause que ce jugement
a condamnée, à l ’appuyer d ’ une discussion plus forte,
plus entraînante, s’ils en ont le pouvoir; en un m o t ,
à soumettre les observations q u ’ ils croient propies à
ramener le magistrat à une opinion qui leur soit
favorable.
C ’est ce double b ut que la tierce-opposition est
destinée à remplir.
Soutenir q u ’elle n’est pas nécessaire parce que l ’ar
ticle 1 35 i du code civil n ’accorde la force do la chose
�(.,>
jugée
q u ’a u x
'
*Y-
jugemens rendus entre les mêmes parties
et pour le même o b j e t , c’est évidemment méconnaître
l'esprit de cette règle législative; c ’est aussi blesser la
lettre comme le sens de l’ article 474 du code de pro
cédure.
Sans doute l ’autorité de la chose jugée'n’a pas lieu
dans les cas prévus par l ’article
i
3 5 i
du code civ il;
car
si elle existait, il ne serait pas permis, même au tiers,
de la détruire. Mais c’est précisément d ’après le prin
cipe de l ’article 1 3 5 1 , que l ’article 474 du code de
procédure autorise la tierce-opposition. A l ’aide de
cette voie extraordinaire, les intérêts des tiers et le
respect
dù à la justice sont également ménagés, puisque
les tiers obtiennent le droit de sou tenir personnellement
leurs propres intérêts, et que la justice est elle-même
appelée à reviser, avec son impartialité ordinaire, ses“
propres décisions.
Pré tendre , d ’ailleurs, que la tierce-opposition est
in u til e , c est évidemment iaire une injure à la sagesse
du législateur que l ’on accuserait d avoir é t a b l i , dans
l ’article 474 d u c°de du procédure, une formalité abso
lument frustraloire ; c’est même vouloir rayer cet ar
ticle de la loi; car , s’il en était ainsi, quel serait le
plaideur qui ne se dispenserait pas de la règle, ne fùtce même que pour éviter l ’amende à laquelle doit être
condamné le tiers-opposant qui succombe?
La tierce-opposition est sur-tout indispensable lors
que celui qui réclame ne se borne pas à résister à une
action exercée contre lui en vertu d ’ un jugement qui
lui est étranger, mais q u ’ il prend lui-même l ’initiative;
�q u ’il veut obtenir de la justice ce que déjà elle a at
tribué à un autre; que ses efforts tendent à paralyser
les effets de jugemens ou arrêts antérieurs.
O r , C’est précisément ce q u i arrive dans l ’espèce.
L e sieur Bournet a déjà dans ses m ain s, et en vertu
de décisions judiciaires, aujourd’hui définitives, le hui
tième de la terre de Saint-Martin. Il a, de plus, obtenu,
contre le sieur et contre la dame Desrois, des décisions
semblables qui condamnent ce ux -c i à lui délaisser le
tiers de la terre d ’ A u z a t , et à lui restituer de nom
breuses jouissances. C e sont les effets de ces décisions
que tend à anéantir la demande des Bonnafoux. C o m
ment pourrait-elle être accueillie sans une tierce-oppositionPEt comment se f a i t - i l q u ’étant avertis du moyen,
puisque le sieur Desrois l ’in vo q u ait,
les Bonnafoux
n ’aient pas pris la sage précaution de former cette
tierce-opposition devant le tribunal , d ’ Issoire , qui
devait en c o n n a î t r e ? car les arrêts de la C o u r étaient
confirmatifs de jugemens rendus pa r ce t r i b u n a l .
C ette négligence aveugle ou plutôt cette étrange
obstination à ne tenir aucun compte des décisions de
la justice recevra sans doute son prix par l'annulation
de toute la procédure des Bonnafoux et consorts.
Mais, s’il fallait examiner le fonds de leurs pré
tentions, il serait facile d ’en démontrer l ’erreur.
S II.
E xa m en du f o n d des prétentions des intim és.
Les Bonnafoux et consorts, se prétendant héritiers
de l ’émigré C la u de de l ’Espinasse, ont réclamé, °n.
�vertu de la loi du 5 décembre i 8 i 4 j non-seulement
les immeubles rendus par cette lo i, mais encore ceux
qui avaient été restitués antérieurement.
Tou t ce q u ’ils demandaient leur a été accordé, par
une erreur de droit sur le sens de la loi quant aux
objets de la première classe, par une erreur de f a it ,
même dans leur propre sy s tè m e , relativement aux
biens précédemment recouvrés.
Examinons successivement les deux points :
L ’erreur de droit sera facile à démontrer en se fixant
sur les termes comme sur l’esprit de la loi, sur l ’opinion
des auteurs, sur la jurisprudence même des arrêts;
car tous les élémeus de doctrine se réunissent pour
repousser
les prétentions des Bonnafoux.
L a loi du 5 décembre 18 1 4 peut être considérée sous
deux rapports : ou comme un acte de justice, ou comme
un acte de libéralité. Or, sous l’un comme sous l ’autre
de ces rapports, elle ne peut être que favorable au
sieur Bournet.
Considérée comme acte de justice, cette loi a dù
nécessairement diriger ses dispositions en faveur de
ceux auxquels avait nui la confiscation, dont elle avait
pour b ut de réparer les effets, au moins en partie; e t ,
par conséquent, ses avantages ont dù être recueillis par
l ’émigré lui-mêm e, s'il était encore vivant; par l ’ héritier de cet émigré, si celui-ci n’existait plus au mo
ment de la loi. La justice v o u l a i t , en effet, que l ’ hé
ritier profitât de ce q u ’aurait dù recevoir l’émigré luimême, parce q ue, si la remise avait eu lieu avant le
décès de l ’émigré, l’ héritier aurait trouvé dans la suc-
�‘
( 3o )
*
cession, ou les objets remis, ou leur valeur; parce que,
en ce sens, c ’était réellement l ’ héritier qui avait perdu.
O r , c’est précisément ce que la justice prescrivait,
q u ’a entendu faire le législateur.
11 nous l ’apprend lui-même dans deux de ses actes :
dans l ’ordonnance du 21 août 1 8 1 4 , qui a précédé la
loi du 5 décembre, et dans les considérans où sont
indiqués les motifs qui ont dicté cette loi.
Dans l’ordonnance du 2 r a o û t , l ’auteur de la Charte
constitutionnelle, en la rap pelant, fait connaître sa
pensée toute entière, par ces expressions remarquables:
« L e vœu le plus cher à notre cœur est que tous les
» Français vivent en frères, et que jamais aucun sou» venir am er ne trouble la sécu rité qui doit suivre un
» acte aussi solennel. »
C ’est en exprimant ce v œ u , q u ’il annonce une loi
prochaine sur la restitution des biens non vendus des
émigres; et c est en exécution de ce vœu q u ’est pré
sentée et q u ’est adoptée la loi du 5 décembre.
O r , quel était le b ut de celte loi?
L e législateur nous l’apprend l u i- m ê m e dans son
préambule.
Il y déclare q u ’en rendant une prem ière ju s tic e par
l ’ordonnance du
21
a o û t , qui abolissait toutes les
inscriptions encore existantes sur les listes des émigrés,
il a annoncé l ’intention de présenter aux chambres
une loi sur la remise des biens non vendus.
Il
ajoute q u e , dans les dispositions de cette loi, il a
dù concilier un acte de ju s tic e avec le respret dû à des
droits acquis p a r des tiers en vertu des
lo is
existantes.
�r
( 3- )
>3
T e l s sont les m o t i f s s ur l esq ue ls est f on d é e u n e loi
o ù l ’on r e m a r q u e trois p r i n c i p a l e s d is p os i t io n s :
L ’une consignée dans l ’article i er, par laquelle «sont
» maintenus, soit envers l ’É t a t , soit envers les tiers,
» tous jugemens et décisions rendus, tous droits ac» quis avant la publication de la C h ar te constitution» nelle, et qui seraient fondés sur des lois ou actes
» du Gouvernement , relatifs à l ’émigration. » .
L ’autre, contenue dans l ’article 2 , et
qui
est ainsi
conçue :
« Tous les biens immeubles séquestrés ou confisqués
» pour cause d ’ém igrat ion, ainsi que ceux advenus à
» l ’État par suite de partage de successions ou de pré» successions, qui n'ont pas été vendus et font actuel»
lement
partie du domaine de l ’É t a t , seront rendus
» en nature à c e u x qui en étaient propriétaires, ou ci
» leurs héritiers ou ayant cause. »
L a t r o i s i è m e , e x p r i m é e pa r l ’a r t i c l e
\!\,
q u i réserve
a u x c réanci ers des é mi gr é s toutes a ctio ns su r les b i e ns
r e n d u s , en s u s p e n d a n t , s e u l e m e n t j u s q u ’ au i " j a n v i e r
1 8 1 6 , l ’e xerci ce de ces ac ti on s.
Que l ’on combine les motifs qui ont dicté l ’ordon
nance du 21 août avec ceux qui ont préparé la loi du
5 décembre, avec les dispositions littérales de cette loi.
Q u ’y reconnaitra-t-on ?
Que la loi s’est proposé de concilier tous les esprits,
d ’efiacer tous souvenirs a m e r s , de ramener tous les
Français îi une douce concorde, de les engager à vivre
tous en frères.
Que devait-elle faire pour remplir cet heureux b u t ?
y
�,*.V
i r* ‘
vi
l
( 3= )
Elle devai t, sur-tout, être jii9te!
E lle devait donc concilier tous les intérêts, tous les
droits.
,
D o n c , elle devait rendre les biens confisqués à ceux
qui en avaient été privés, c’est-à-dire aux émigrés euxmêmes s’ils étaient encore vivans; à leurs héritiers, si
ces émigrés étaient morts. C ar les héritiers avaient été
réellement privés, comme l ’émigré q u ’ils représentaient,
de tous les biens confisqués sur c e lu i - c i , puisque ces
biens leur seraient parvenus sans la confiscation.
Donc aussi elle devait respecter les droits acquis;
ca r , en les vio la n t, la justice aurait été blessée.
Donc,
enfin,
elle devait protéger les droits des
créanciers des émigrés.
O r c’est précisément tout cela q u ’elle a fait par les
articles cités; puisqu’à défaut de l ’cmigré, la remise a
été faite à son héritier; puisque les droits acquis ont
été maintenus; p u i s q u e les a c ti on s des créanciers ont
été ménagées.
Ainsi
l ’on doit
reconnaître que c ’est à titre de
justice que la remise a été faite.
E t comment pouvoir soutenir q u e , dans l ’intention
du législateur, cette remise a été une pure libéralité,
tandis que dans la loi il parle plusieurs fois d ’actes (le
justice à faire, sans employer une seule fois le nom do
lib é r a lité ?
Co mm en t ne pas réfléchir, aussi, q u e , s’ il s’était
agi d ’ un simple d o n , les actions de tous créanciers,
ou non, n’auraient pas été réservés sur les biens
rendus? c ar ces biens étant devenus, par lu d é c h é a n c e ,
déchus
�( 33 )
libres de dettes dans la main de l ’É t a t , auraient passé
libres aussi'dans celle d ’ un donataire qui n ’aurait pu
être tenu de payer les dettes d ’ un émigré dont il n ’au
rait
pas été le vrai héritier. E t cependant une jurispi u-
dence’ constante a chargé d ’ une contribution propor
tionnelle aux dettes ces héritiers eux-mêmes q u i , avant
la l o i , avaient cédé à un t i e r s , aux risques de celui-ci,
tous leurs droits héréditaires, et q u i , ayant recouvré
par Cette loi les biens non vendus,
refusaient de
contribuer avec leur propre cédataire au paiement des
dettes, sous prétexte que la remise n ’était q u ’une
libéralité. Cela a été ainsi jugé notamment entre le
sieur de l ’Espinasse lui-m«me et le sieur Grenier, par
arrêt de la cour de Riom , du 3 mars 1 8 1 7 ; et cet
arrêt fut confirmé par la cour de cassation, qui depuis
a rendu deux décisions semblables, les 26 juillet 1826
et 24 avril 1827 ( Y . Sirey, 27. 1. 100 et
Mais, d i t - o n , on a substitué dans la loi le mot
rendre au mot restituer, qui était dans le projet.
Q u ’importe? n ’est-ce pas une misérable subtilité que
de trouver dans cette substitution un acte de libéralité
dont la loi ne parle pas, au lieu d ’ un acte de ju s tic e
q u ’elle annonce positivement!
,
Telle ne fut pas, au reste, la pensée qui dicta au
législateur ce léger changement de mots; la cause en
est connue : le législateur craignit que l ’emploi du mot
restituer ne fit supposer q u ’il entendait signaler connue
une spoliation la main-mise nationale sur les biens des
émigrés.
Car 011 restitue ce q u ’on a v o lé ou,pris sans droit.
5
�Ut
k
(
3 4
)
On rend ou l ’on remet ce que l ’on a r e ç u , ce dont
on s’est chargé.
*- E n employant le mot vendre comme étant l ’expres
sion la plus juste et la plus douce, le législateur a voulu
prévenir toute fausse interprétation tendante à ‘flétrir
d ’anciennes lois, qui avaient été sévères sans dou te,
mais que les dangers de l ’E t a t avaient peut-être com
mandées.
C ’est dansce b ut unique, non dans celui d ’indiquer
un don , que l ’on a remplacé le mot restituer, non par
le mot donner, mais par le mot rendre, qui a un tout
autre sens.
L ’on donne à qui l ’on veut, par une pure générosité,
ou par des senlimens particuliers d ’affection.
Mais l ’on ne rend q u ’à celui qui a eu , et q u i , sinon
a la rigueur, au moins en éq uité , a le droit de re
couvrer.
Or, la loi de 1814 n ’ a été le fruit, ni d ’ une affection
spéciale, ni d ’ une générosité c a p r i c i e u s e , qui ait voulu
gratifier, par une étrange préférence, une classe de
citoyens plutôt q u ’une autre ; elle a été dictée par le
sage désir d ’éteindre toutes les haines, en réparant,
autant que possible, d ’anciens maux et de grandes
pertes. L ib éra le, si l ’on v e u t , en ce sens q u ’elle ac
cordait ce q u ’elle pouvait refuser, elle a cherché prin
cipalement à être juste, d ’ une justice politique et civile
tout à la fois; d ’ une ju s tic e ¡)oliti<jue, sa mesure bien
faisante tendant h détruire de funestes germes de dis
corde; d ’ une ju s tic e civile,-en ordonnant que les biens
fussent rendus à ceux-là mêmes qui en avaient été
�( 35 )
les propriétaires, ou à leurs héritiers ou ayant cause.
C ertes, ce ne serait ni faire l ’acte cle ju s tic e annoncé
par la l o i , ni remplir le b ut cle conciliation et (le
c o n c o rd e q u ’elle se proposait, que de rendre les biens
non vendus, non au parent le plus proche de l ’émigré
l ’Espinasse, mais h ses parens les plus éloignés; non
au seul héritier q u ’ il avait laissé, à cet héritier q ui
seul avait pleuré sa mort , q ui seul avait fait réhabi
liter sa mémoire,
qui seul avait accepté les charges
de sa succession, à son malheureux père enfin, encore
existant au jour ou a paru la loi du j decembie i 8 i ^ ;
mais à d ’indifierens collatéraux qui ne s’ étaient jamais
occup és du sort de l ’émigré, q u i ,
peut-être m ê m e ,
avaient toujours ignoré son existence.
On opposera peut-être q u ’au moment de son décès,
en frimaire an 8 ,
le sieur de l ’Espinasse fils était
émigré, q u e , comme tel, il était frappé de mort civile,
et q u ’ainsi il n ’a pu transmettre alors aucun droit à
aucun héritier.
C ette question, s'il était utile de l ’app ro fo ndir ,
présenterait des difficultés d ’autant plus sérieuses ,
q u ’elle a été diversement jugée par la C o u r de cassation
elle-même.
Dans l’ancienne jurisprudence, si l ’on rendait les
'biens confisqués sur un individu mort c i v il e m e n t, la
remise en était toujours faite à l ’ héritier du tems de
la mort naturelle. C ’est ce q u ’avait décidé la C o u r
de cassation par un premier arrêt du 21 fructidor
an 8; et c’est ce q u ’elle a jugé encore par un second
a n ê t , du 21 décembre 1807 , relativement à la suc
�cession d ’un
émigré,
dont la
mort
avait précédé
l ’amnistie. On lit dans l'arrêt ce motif remarquable :
« C ’est Vhéritier légitim e à l ’époque de la mort
« naturelle de l ’émigré, qui a dù recueillir sa succes« sion ( i ) . »
D e p u is, par un arrêt du j
août 1820, la même
C o u r suprême a pensé que la succession de l ’émigré
amnistié après sa mort n ’était censée ouverte q u 'a u
jour de l ’amnistie, et q u ’elle appartenait à l ’ héritier de
cette époque, non à celui qui le serait au moment du
décès de l ’émigré (2).
Mais la question est indifférente pour la cause; car
le sieur de l ’Espinasse serait l ’ héritier légitime et l ’ hé
ritier unique de son fils, le 16 frimaire an 8, date d e l à
mort naturelle; et il le serait aussi exclusivement, le
i 5 ventôse an 11
date de l ’amnistie q ui fit cesser la
mort civile du fils émigré. A cette dernière ép oque,
comme à la p r e m i è r e , la loi du 1 7 nivôse en 2 , seule
en vigueu r, attribuait au père toute la succession d ’ u n
fils qui ne laissait ni enfans, ni frères ou sœurs, ni
d ’autres ascendans.
A i n s i , que la succession du fils émigré amnistié
soit réputée ouverte au moment du décès, ou seule
ment au jo u r de l ’amnistie, dans l ’ un comme dans
l ’autre cas, le père a été le seul héritier de son fils. L u i
( i ) V o i r l e i er a r r û t , d a ns les Q u e s t i o n s d e D r o i t d e M e r l i n , nu m o t
confiscation, § 2. V o i r aussi le r é pe r t o i re d u m ê m e a u t e u r , au m o t
h é r itie r .
(^) Vuir l’ arrût dans le Journal de Sircy, a i . 1. 14.
�( 3 7 )
seul aussi, en cette q u a l ité , avait obtenu en l ’an i l
le certificat d ’amnistie du ills; lui seul, comme unique
représentant de l ’émigré, avait été, lors de l ’amnistie,
envoyé en possession, par les arrêtés des préfets du Cantal,
de la I la u te -L o ir e , du Puy-de-Dô m e, de tous les biens
de l ’émigré qui furent rendus à cette époque; lui seul
a agi, a tr ait é, a acquitté les dettes, comme héritier
de l ’émigré, depuis l ’an 11 ju sq u’au jour de la loi de
i 8 i 4;
lui seul, enfin, au moment où cette loi de
justice a été publiée, était investi et du titre d ’héritier
et des droits attachés à ce titre ;
Comment ne pas reconnaître que c’est aussi lui seul
qui a été appelé par cette loi a recueillir des biens
q u ’elle déclarait ne rendre q u ’à l ’ héritier de l ’émigré?
Que pourrait-on opposer de solide à des observations
fondées sur les faits, sur les termes de la l o i , sur
l ’équité même?
Co mm en t pourrait-on soutenir sérieusement que le
législateur, q ui a déclaré vouloir avant tout être juste,
n ’a cependant pas entendu rendre tous les biens du
fils au père , qui seul en avait été privé par la confisca
tion, et que ce législateur ait eu la bizarre pensée d ’en
rendre moitié à des parens éloignés qui n’avaient rien
perdu et à qui la confiscation u ’avait rien ô t é , puis
q u ’ ils n’auraient rien obtenu ni à la mort du fils, s’il
était décédé integri slatusj ni au momentde l ’amnistie;
la loi des deux époques ne leur accordant aucune part
dans l’ hérédité de l’émigré?
Mais la question peut être examinée avec le même
avantage sous son autre face.
�rY
( 38 )
Que l ’on suppose, si l ’on v e u t , que les biens aient
été rendus par pure lib é ra lité plutôt que par esprit de
justice.
Résulterait-il de là que ce soit à d ’autres q u ’au sieur
de L ’ Espinasse père que la remise en ait été faite?
Non sans doute.
. Les biens seront rendus, dit la l o i , à c e u x q u i en
étaient propriétaires ou à leurs héritiers ou ayant
cause.
A
leurs héritiers! Pour exécuter la loi,
rechercher si, au moment où elle a p a r u ,
il faut
l ’émigré
L ’Espinasse avait ou non un héritier.
S ’il en avait u n , c’est à lui que les biens doivent
être rendus.
S ’il n’en avait pas, c’est à ses parens les plus proches,
à ses successibles, c’est-à-dire à ceux que les lois exis
tantes appelleraient à être ses héritiers, que les biens
devront a p p a r t e n i r .
Mais nous avons vu que dans'
existait,
l ’ espèce u n
héritier
[je sieur de l ’Espinasse père avait ce ti tr e,
ou depuis le iG frimaire an 8 , date du décès du fils,
ou depuis le i 5 ventôse au n , date de son amnistie.
Il en avait été saisi par le bienfait du sénatus-çonsulte
du iG floréal an 10 et du décret du g thermidor suivant ;
il avait été reconnu comme tel par de nombreux actes
administratifs, et notamment par les arrêtés des préfets
de la Ilautc-Loire, du C a ntal, du Puy-de -D ôm e; c’est
eu cette c£11a 1ité q u ’ il avait été envoyé en possession des
biens de son fils, sur la tête duquel ne pesait plus dèslors la dangereuse qualification d ’émigré; il a
exercé
�( 39 ✓
)
seul pendant 10 ans et plus, avant le 5 décembre 18 r 4 ?
les droits d ’ héritier, et en a seul aussi supporté les
charges; il a seul disposé des biens; il a seul acquitté
les dettes de la succession.
Comm ent se ferait-il que ce ne fût pas à lui seul que
s’appliquât le texte comme l ’esprit de la loi du 5 dé
cembre 1814 > et f£ue cette loi, qui dit expressément
que les biens seront rendus a u x héritiers de l ’ancien
propriétaire, eût voulu tout lew.contraire de ce q u ’elle
disait, eût entendu que les biens seraient rendus, non
au sieur de l ’Espinasse père, encore vivant et seul in
vesti, en 1814 s fl u l itre d ’héritier de son fils, mais aux
B o u n a f o u x , qui n ’avaient jamais eu cette qualité, q ui
ne l ’avaient même jamais réclamée, et qui n’en étaient
pas plus saisis alors q u ’antérieurement?
Mais, dira-t-on, ce n ’est pas aux anciens héritiers
que la loi a entendu rendre, c’est 'a de nouveaux hé
ritiers, parens des deux lignes paternelle et maternelle,
qui auraient été successibles d ’après la l o i , si la suc
cession du fils l ’Espinasse s’était ouverte seulement le
5 décembre 18 il\.
Cett e assertion, comment la prouve-t-on?
Que l ’on cite un seul article, un seul mot dans la
loi du 5 décembre qui l’autorise?
Cette loi ne parle pas de su cce ssib le s, elle parle
d ’ héritiers déjà reconnus comme tels.
Elle ne crée pas un nouvel ordre de succession, un
nouveau mode d ’attribution ou de partage des biens ;
elle s’en réfère à l ’ordre déjà existant; elle attribue ce
�qui reste des biens de l ’émigré à l ’ héritier de celui-ci,
à celui qui déjà avait recueilli légalement le surplus de
l ’ hérédité, à celui à qui seul ce reste appartenait, puis
que seul il en avait été privé ju sq u’alors par une re
mise tardive.
Seulement la jurisprudence, plutôt même que la loi
dont le sens a été peut-être un peu forcé, la jurispru
dence a exigé que l ’ héritier légitime fut v i v a n t , pour
lui attribuer la remise, o u , si l ’on v e u t , le bienfait.
Mais aucun arrêt, aucune autorité
n ’est
allée ju sq u’à
décider, ju s q u ’à préjuger, même indirectement, que
l ’ héritier ancien, que l ’ héritier saisi légitimement et
reconnu comme tel en 18 14? s ^ existait encore lorsque
la loi a paru ,
ne fût pas aussi le Seul héritier que
cette loi appelât à profiter des biens dont elle faisait
la remise. Il était réservé aux sieur et dame Desrois
eux-mêmes e t d e faire élever par les Bonnaloux cet é t r a n g e s y s t è m e , que l'aveuglement de
l ’ intérêt ou les erreurs de l ' i m a g i n a t i o n o n t pu seuls
d ’ cl e ve r
enfanter ; qui tendrait à détruire cette maxime si con
nue : sem el hœres sem per lueres; qui établirait deux
successions différentes dans le même in div id u , et q u i ,
en laissant au sieur de l ’Espinasse p è r e , comme seu l
héritier de son fils avant
1 8 t 4 > to u t le patrimoine
recouvré antérieurement, le priverait de la moitié de
son titre pour le
tems
postérieur, et l ’obligerait à
partager les biens obtenus depuis, avec d ’autres héri
tiers, créés tout-à-coup non par la loi qui n ’en parle
pas, mais par les illusions ou les caprices de la
argumentation de quelques jurisconsultes.
vaine
�( 4. )
C ett e création fantastique est en opposition dircctG
avec les termes de la loi de 18 1 4 s qui n’appelle q u ’un
seul ordre d ’héritiers, c’est-à-dire les héritiers déjà dé
clarés
tels et eæislans encore au moment de sa p u b li
cation; qui ne reconnaît, d ’ailleurs, q u ’ une seule suc
cession de l ’émigré, puisqu’en rendant les biens non
vendus aux héritiers, elle a soumis ceux-ci à la charge
proportionnelle des dettes, même de celles dont l’É t a t
était affranchi par la decheance, et dont un simple
donataire de l ’É t a t aurait dû l ’être par le même
motif.
Ces observations, et sur-tout les termes de la l o i,
son b u t , son esprit, repoussent avec force les préten
tions tardives des B on nafoux, dont le silence prolongé
depuis 18 14 n a ^
évidemment rompu en 1829 q u ’à
la demande des sieur et dame Desrois, et moyennant
un modique salaire payé à leur complaisance plutôt
q u ’à la cession secrète de leurs droits illusoires.
L a loi de 1 8 1 4 fournirait au sieur Bournet un ar
gument de p l u s , s'il était nécessaire.
E n effet, dans le préambule, le législateur déclare
formellement q u ’il veut concilier un acte de justice avec
le respect d û 11 d e s d r o i t s a c q u i s p a r d es tiers en
vertu des lois existantes.
Dans l ’article premier, il déclare maintenir, tous
jugem en s et décisions rendus, tous actes passés, t o u s
d ro its
a cq u is
avant la p u b lica tion de la C h â tie
constitutionnelle t et <jui seraient fo n d é s sur des lois
ou des actes du Gouvernem ent rela tifs ii Vém igration.
O r , la qualité de seul héritier (le l ’Espiuasse fils
6
�p X\
'•
( 4 0
était pour le sieur l ’Espinasse père un droit acquis en
vertu des lois existantes.
C et te qualité de seul héritier lui avait été coniérée
ou reconnue par plusieurs actes du Gouvernement, re
latifs à l ’émigration, tels que le certificat d ’amnistie,
délivré à sa demande, et les arrêtés d ’envoi en possession
des biens du fils, rendus en sa faveur; ces arrêtés,
parmi lesquels celui du préfet du C a n t a l , qui reçut
sa pleine exécution, restituait au père, même les terres
de Vertessère et de Sévcrac échues au fils, par suc
cession, pendant son émigration et sa mort civile.
*
Cett e qualité indélébile d'héritier u n i q u e , ce droit
a cquis et consacré par plusieurs actes administratifs non
attaqués et inattaquables, serait un jeu si le système
des Bonnafoux était accueilli; une choquante rétroacti
vité serait admise , et tous les principes nouveaux
comme tous les principes anciens seraient également
méconnus et blessés p o u r favoriser des prétentions que
l ’équité repousse autant que la l e t t r e de la loi.
U n e autre circonstance vient encore à l’appui des
droits du sieur Guil laum e de l ’Espinasse. Il é t ait, en
18 14 > Ie parent le plus proche de l ’émigré son fils; et
sous ce dernier ra p port , n ’eiit-il pas même été alors le
seul héritier reconnu, le seul héritier saisi de ce titre
depuis le a 5 ventôse an i i , date de l ’amnistie de
l ’émigré, il eût d u , d ’après la jurisprudence, recueillir
seul tout le bénéfice de la remise accordée par la loi
du 5 décembre.
Nous verrons en effet, bientôt, que les arrêts
même
invoquas par les Bo nnafoux, ces arrêts rendus dans
�( 43 )
(les cas où l'héritier légitime de l ’émigré n ’existait plus
au moment de la publication de la l o i, ces arrêts ont
attribué tous les biens au parent le plus proche de
l ’émigré, sanstexaminer de quel côté il était parent, à
quelle ligne il appartenait.
Soit, donc, que l ’on considère que l ’émigré l ’Espinasse étant décédé en l ’an 8 ,e t ayant été amnistié en
ventôse an 11 , c’est-à-dire sous la loi du 17 nivôse an
2 , ri; a eu q u ’ un seu l héritier, un seu l représentant,
un seu l ayant-cause 3 savoir : le sieur G uillaum e de
l ’ Espinasse père;
Soit que l ’on fasse attention que le sieur de l ’Espinasse père était encore existant au 5 décembre 1 8 1 4 ,
et q u ’il avait alors un droit acquis à ce titre d ’héritier
u n i q u e , de représentant u n i q u e , d ’ayant-cause de son
fils dont la qualité d ’émigré avait été depuis long-tems
effacée par l ’amnistie;
Soit , enfin , que l ’on réfléchisse que le sieur de
l ’Espinasse père était seul aussi le parent le plus proche
de l ’ancien émigré ,
On sera dans la nécessité de reconnaître que c’est à
lui seul aussi que doivent appartenir les biens rendus
par la loi de iBi/jToutes ces idées sont en harmonie avec les opinions
des auteurs, avec la jurisprudence des arrêts.
M. Merli n, dans ses questions de d ro it, au m o t
con fiscation y § 2 , après avoir rapporté l ’arrèt de cas
sation prononcé le 25 janvier 1 8 1 9 , entre l ’abbé l)uclaux et le marquis D é p i n a y - S a i n t - L u c , fa it , sur cet
arrêt, plusieurs réflexions.
�Il remarque que l ’émigré Dép inay de L i g e r i , mort
long-tems avant la loi, avait laissé pour héritière légi
time sa fille, décédée elle-même cinq ans avant le 5
décembre i 8 i 4 > et dont l ’abbé Duclaux était le léga
taire universel \
Que cette héritière, n’existant pas en 18 t 4 ? n ’avait
pu, ni profiter du bénéfice de la loi, ni par conséquent
le transmettre à son légataire;
E t que les biens rendus avaient été attribué!' au
sieur Dépinay-Saint-Luc., comme étant le p l u s p ro c h e
p a ren t, exista n t en 1 8 1 4 ? de l ’émigré Dépinay de Ligeri.
Mais M. Merlin ajoute d ’ importantes observations :
C e n ’est,
dit-il,
que par une fin de non recevoir
contre l ’abbé D u c l a u x ,
que la question fut jugée en
faveur du sieur Dépinay-Saint-Luc. L ’abbé D u cl aux,
étranger h la famille D é p in a y , n ’avait ni titre ni qua
lité p o u r réclamer les biens rendus.
D ailleurs, p o u r a d m e t t r e la d e m a n d e du sieur de
S a in t-Lu c, il eut f a l l u supposer, s ’il exit eu en tête un
adversaire com pétent ( c ’est-à-dire un héritier vivant
de l ’é m ig r é ) , que le com te D ép in a y de Ligeri avait
laissé d e u x successions (pii s ’étaient ouvertes <i d e u x
époques différentes ; supposition q u i répugne a u x no
tions les p lu s triviales de la ju risp ru d en ce
L ’auteur fait ensuite observer que l ’arrêt cité regarde
la q u a lité d ’héritier com m e indispensable à
tout
membre de la f a m ille des anciens propriétaires 3 q u i
se présente p o u r profiter de la remise.
M. Merlin continue ainsi :
» Il dit bien ( l ’arrêt Du cl aux) que la loi du 5 dé-
�( 45 )
J f ô
« cembre i 8 i 4 est une ^oz p o litiq u e et spécia le ; mais
« il ne va pas jusqu’à dire q u ’elle donne à l ’expression
« héritier, une acception différente de celle que lui at« tribueut les lois ordinaires.
« Il dit bien que cette loi doit trouver son interpré« tation dans les motifs qui l ’ont fait rendre; mais il
« ne s’en suit nullement de là que l ’expression héritier
« soit, dans son texte, susceptible d ’un autre sens que
« celui q u ’il présente par lui-mème. »
M. Merlin termine par penser, en s’appuyant d ’ un
avis du conseil d É t a t , du q thermidor an io^ « que
«
par les mots,
le u r s
h é r it ie r s
,
l ’on doit entendre
« les personnes auxquelles les lois civiles accordent ce
« titre. »
T o u t , dans cette discussion, est précieux pour lu
cause actuelle.
S ’il est vrai que par les mots, leurs héritiers, e m
ployés dans l ’article i de la loi du 5 décembre 18 1 4 ?
on doit seulement entendre les personnes auxquelles les
lois civiles accordent ce titre, il est évident que c est
an sieur Guillaume de l ’ Espinasse seul que ces mots
s’appliquent; parce que c ’était à lui seul que les lois
civiles avaient attribué le titre d ’héritier, soit en l ’an
8 , époque du décès du fils émigré, soit en l ’an i r ,
époque de son amnistie; parce que c’est aussi le sieur
de l ’Espinasse, qui seul avait la qualité d ’hé»ilier de
vant les lois civiles, au moment où fut présentée et
décrétée la loi sur les biens remis.
S ’il est vrai aussi q u ’on ne puisse supposer que le
même individu ait laissé deux successions qui se soient
<
�U
( 46 )
ouvertes à d e u x époques différen tes, et si cette suppo
sition répugne a u x notions les p lu s triviales du droite
c’est encore le sieur de l ’Espinasse père qui doit seul
profiler des biens rendus, paice que ces biens n’ont
pas dû former une succession particulière du fils; parce
q u ’ ils ont dû se rattacher à la succession déjà ouverte
dont ils sont devenus en quelque sorte l ’accessoire, et
parce que le sieur de l ’Espinasse père, qui avait seul
recueilli et dû recueillir la succession à son ouve rt u re ,
était encore vivant en 18 14 » pour recueillir aussi l'ac
croissement que cette succession reçut alors.
E n décider autrement ce serait évidemment dire
que l ’émigré l ’Espinasse a laissé deux successions qui
se sont ouvertes à deux époques différentes; l ’une en
l ’an 8 ou en l ’an 11 , régie par la loi du 17 nivôse an
2 , et attribuée par cette loi au sieur de l ’Espinasse
père comme seul héritier; l ’autre au 5 décembre 1 8 1 4 ?
régie par le Cocl e c i v i l , e t d i v i s i b l e par moitié entre
les deux lignes paternelle et maternelle de l ’émigré.,
c ’est-à-dire entre le sieur de l ’Espinasse père d ’une
p a r t , et les Bonnafoux et consorts de l ’autre.
Indiquer une telle conséquence, c’est suffisamment
démontrer l’absurdité du système des demandeurs.
M. Dalloz dans sa Jurisprudence générale, au mot
ém ig ré, section 3 , art. 2 , § i , r , examine aussi à qui
profite la remise ordonnée par la loi du 5 décembre
1 8 1 4 ; et après avoir dit que la ju risp ru d en ce constante
de la C ou r de cassation a é té fa v o ra b le a u x parens
les />lus p roches, au jo u r de la lo i, ( ce qui cependant
n a été admis par la C o u r de cassation
elle-m êm e
que
�(47)
iff
lorsque ces parens étaient en concours avec des étrangers
cédataires ou légataires universels de l ’émigré ou de ses
héritiers) , l ’arrêtiste se livre lui-inéme à une disserta
tion sur le caractère de la remise faite par la l o i; il
prouve clairement que cette remise n’a p a s é té une
lib é r a litéj mais que l ’É ta l s ’est im posé ce sacrifice
p o u r fa ir e cesser l ’œuvre de la v io len ce , p o u r opérer
une réparation $ il le prouve avec le préambule de la
loi
où le législateur déclare s’être proposé un acte
de ju s tic e : il le prouve avec les termes de l ’article deux
par lequel les biens sont rendus non à la famille des •
émigrés, en général, mais à leurs héritiers ou ayant
cause • il Ie prouve aussi,
l ’ar ti cl e
I er
avec les expressions de
qui a maintenu les droits a c q u is, et par
conséquent les qualités et les titres existans au moment
de la remise; il argumente de la loi du 27 avril 182$
sur l ’in d e m n it é , qui est en opposition avec le système
de libéralité , puisqu’elle attribue l'indemnité
aux
héritiers du jour du décès de l’ émigré; il fait observer
d ’ailleurs , avec beaucoup de justesse, que si la loi
de 18 f 4 avait voulu faire une libéralité, il eut été
inutile de dir e, comme elle l ’a dit dans l’article 3 ,
q u ’îl n’y aurait lieu à aucune remise des fruits perçus;
enfin il ajoute , ce qui est aussi décisif, que la loi ne
contenant aucune disposition expresse qui intervertisse
l'ordre de su ccessib ilité toujours a d o p té , il ne v o it
pas ce q u i p eu t autoriser le ju risco n su lte ou le m a
gistrat à fa ir e de cette lo i une innovation exorbitante
et sans exem p le.
Ces observations sont péremploires, même celle tirée
�\v
Il *
delà
(
48
)
loi de 1825 sur l ’indemnité; car les deux lois
n ’ont de différence q u ’en ce que , d ’après la dernière,
ce sont les héritiers du jour du décès de l ’émigré,
qui profitent de l ’indem nit é, tandis q u e , d ’après la
j u risprudence actuelle delà C o u r de cassation, appliquée
à la loi de 18 r 4 5 c’est aux héritiers du jour de l ’am
nistie que les biens ont été rendus.
M. Sir ey , dans une dissertation par laquelle il a fait
précéder la relation de l ’arrêt Ma la fosse, du 18 février
i8a4? énonce une semblable opinion;
et
dans le rap-
* procheincnt des diverses parties de la loi du 5 décembre
18 14) dans le préambule notamment, où le législateur
d i t , à deux fois différentes, q u ’il se propose un grand
acte de ju s tic e et où l ’on ne voit pas q u ’il s’agisse de
lib éra lité ; dans cet article où il déclare rendre les biens
aux anciens propriétaires ou à leurs héritiers ou ayant
couse, comme dans celui qui conserve ou rétablit toutes
les actions des créanci ers des émigrés sur les biens remis;
dans la combinaison, enfin, des di ffé re nt es di sp osi t io ns
de la loi , M. Sirey trouve la preuve que le système
de la lo i n ’est pas un systèm e de lib é ra lité mais un
systèm e de ju s tic e p o litiq u e , si ce n ’est pas un système
de ju s tic e civ ile.
Ainsi ce sont des idées de justice qui ont princi
palement dominé dans la pensée du législateur. L ’on
ne peut donc pas dire q u ’il ait ordonné la remise à
titre de lib éra lité se u lem e n t, et par une libéralité
aveugle , par une libéralité indépendante de toute
autre impulsion. U n tel système serait en opposition
directe avec les termes positifs do la loi, qui
parlent
�"
( . » )
;(?
d’ actes de ju s tic e à faire, de biens à remettra a u x
héritiers de l ’ém igré. D ’ailleurs, que cette justice ait
été faite par politique ou par uu autre m o t i f ; qu elle
ait été aussi dictée, si l ’on v e u t , par des sentimens de
libéralité , il n’en est pas moins vrai que la remise n’a
pas été une libéralité pure; il n’en est pas moins vrai
q u ’elle a eu pour base principale des sentimens de jus
tice- il n ’en est pas moins vrai q u ’elle dev ait , par
c o n s é q u e n t , être dirigée en faveur de ceux-l'a mêmes
auxquels avait nui la peine de la confiscation-, e t , par
conséquent, en cas de prédécès des anciens propriétaires',
en faveur de leurs héritiers légitimes s’ils étaient encore
vivans, ou en faveur des parens les plus proches, si les
héritiers légitimes étaient aussi décédés au moment de
la loi. C a r , tout en se montrant libéral, il eut manqué
le but de justice q u ’il se proposait, le législateur q u i ,
méconnaissant les droits d ’ un héritier légitime encore
exista n t, aurait attribué tout ou partie des biens ren
dus, à des parens éloignés auxquels la confiscation n avait
pas fait éprouver la moindre perte ni le moindre tort.
L a C o u r de cassation a été bien éloignée elle-même
de commettre une pareille erreur. E n eff e t, si l ’on
parcourt les arrêts q u ’elle a rendus sur la matière, on
reconaitra q u ’ ils consacrent, au lieu de la d e t i u i i e ,
la doctrine que nous avons professee.
Les arrêts s’appliquent à trois cas différons :
i° Au cas où les parens de l ’émigré étaient en con
testation avec des légataires universels, soit de l ’émi
gré, soit (les héritiers de celui-ci;
2° A celui où l’émigré n’avait jamais été amnistié;
7
�’H
-(5°)
3 ° A celui enfin où l ’émigré, étant décédé en 18 14 ,
avant d ’avoir recueilli une hérédité ouverte pendant
sa m ort civile , avait pu cependant en transmettre les
droits à ses propres héritiers.
Dans le premier cas, c’est contre les légataires u n i
versels, dont le titre était antérieur à la l o i, que la
question a toujours été décidée. Elle devait l ’ètre ainsi,
soit parce que l ’on ne donne que ce dont on est pro
priétaire, soit parce que l ’étendue des legs repose toute
sur l ’intention présumée des testateurs. O r , il était
impossible q u ’ un testateur eût pu et eût entendu
léguer des biens qui non seulement ne lui apparte
naient pas lors du te stam en t, mais q ui même ne lui
avaient jamais appartenu , puisqu’ils n ’avaient été
rendus que long-tems après son décès. Tels sont aussi
les principaux motifs qui ont dicté l ’arrêt d ’E p in aySaint -Luc et Du cl aux , du. a 5 janvier 1 8 1 9 , l ’arrêt
R e culot, du 10 février 1 8 2 3 , l ’arrêt Ma la fosse, du
18 février 1 8 2 4 , l ’arrêt May n a r d e t L a Ferté , du 19
mai de la même année (1).
Il est même à remarquer que ces divers arrêts, en
préférant la famille de l ’émigré à des légataires un i
versels dont les titres étaient antérieurs à la l o i, n ’ont
p a s , d ’ailleurs ,
ordonné le partage
des biens
par
moitié entre les pareils des deux lignes paternelle et
maternelle de cet émigré, mais q u ’ils les ont adjugés
( 1 ) C e s arrêts sont da ns tou s les rec uei l s. O n p e u t les vo i r n o t a m m e n t
3,
a 4®} a 4 -
duns la J u r i s p r u d e n c e g é n é r a l e d e D ; t l l o z , au m o t emigre, secti on
article a , § i , et da ns le J o u r n a l d e S i r e y , 1 9 . 1. 7 6 j
1. aG 3 c l 'io'j.
23.
1.
�Jfl
en totalité aux parens les plus proches au moment de
la remise : circonstance qui rend ces arrêts favorables
au sieur (le l’Espina'sse père , parcé q u ’il était , au
moment de la loi de 18 14 ? Ie parent le plus proche de
son fils.
On doit aussi'faire observer que tous les arrêts ont
été rendus dans des espèces où les héritiers légitimes
de l'émigré étaient décédés eu x-m êm es , et n’ avaient
pu, par conséquent, recueillir, à ce titre d ’ héritiers, les
biens qui furent postérieurement remis , ni les trans
mettre à des tiers qui n ’étaient pas même parens de
t • r
1 *émigré.
Aj out ons
q u ’ une
jurisprudence semblable
établie pour l'application de la loi du
s’est
avril i B ?.5
sur l ’indemnité. Par arrêt du 8 février i 8 3 o , la C o u r
de cassation a décidé que la cession, même la plus
générale des droits héréditaires, ne comprenait pas
l ’indemnité accordée par cette loi à l ’ émigré ou à ses
héritiers.
L e second cas à examiner est celui ou 1 emigie
n’avait pas été amnistié et n’a été réintégré dans ses
droits civils q u ’en 18 14- C e cas est celui de l ’arrêt
Dcvenois.
C et a r r ê t , qui a été invoqué par les B o n n a f o u x , ne
décide absolument rien en leur faveur. Pour s’en con
vaincre il suffit de rappeler les faits, et de les comparer
aux motifs de la décision, mais en remarquant que
deux arrêts ont été rendus dans cette cause, le i er, par
déf aut , du 9 mai 1821 ( c ’est celui-là seul que rappor
tent la plupart des recueils)*, le second', contradictoire,
�sur opposition, du 28 janvier i 83 o. O11 le trouve à sa
d a te , au bulletin civil de cassation. Les motifs de ce
dernier arrêt sont sur-tout importans à combiner avec
les faits.
Pierre-René Devenois, décédé le iG octobre 1794?
avait laissé pour héritier Jacques son frère5 mais, celuici étant é m i g r é , l ’É t a t s’empara de la succession.
Jacques Devenois mourut en i 8 o 5 sans avoir été amnist ié ; il ne l ’a été q u ’en i8i/j-. Son héritière naturelle
était la demoiselle Laguerney, morte en 1808, et dont
l ’héritier était un sieur Porcher de Longchamp.
C e l u i-c i, en 1 8 1 4 ? se st présenté comme héritier de
la demoiselle Laguerne y, e t , comme se c r o y a n t , du
chef de celle-ci, héritier de Jacques Devenois auquel il
ne parait pas d ’ailleurs q u ’ il fut même parent; il s’est
présenté et a réclamé les biens rendus par la loi du 5
décembre. Mais un sieur B a zire, q ui é t a i t , en 1 8 1 4 >
le parent le p l u s proche de l ’émigré, a demandé luimême à profiter de la remise.
De là est née la question de savoir si les biens rendus
étaient censés appartenir à l ’ héritier du tems du décès,
ou à celui du tems de l ’amnistie.
C ett e question ,‘ sur laquelle la nouvelle jurispru
dence de la C o u r de cassation s’était fixée par 1111 arrêt
du 7 août 1820 , ne pouvait plus être sérieusement
élevée. Il était naturel que la C o u r , persistant dans sa
doctrine, décidât que l ’ém ig r é, mort civilement au
moment de sa mort natur elle, 11’avait pu rien transïneitre alors, ni par conséquent avoir un héritier;
*l«’ ainsi la succession devait appartenir seulement au
\
�( 53 )
;•
j6[
parent le plus proche au moment de l ’ainnistie, parce
que c’était à cette époque seulement que l ’émigré, re
c o u v r a n t son état ci vil , devait être réputé avoir laissé
une hérédité. Il était conséquent aussi avec ces idées
que la demoiselle Laguerne y, morte en 1808, ne fut
pas considérée comme ayant recueilli une succession
qui était censée ne s’ètre ouverte q u ’en 1 8 1 4 - C ’est
d ’après ces puissans motifs et notamment par le défaut
d ’amnistie avant 1 8 1 4 ? que la C o u r se détermina h
refuser l ’hérédité au représentant de la demoiselle L a
guerney, et à l ’accorder au sieur Bazire, parent le plus
proche de l ’émigré, et par conséquent son héritier en
1814, au momen t où avait cessé la mort civile de l ’émigré.
Que Ton vérifie scrupuleusement ce dernier ar rê t,
et l ’on reconnaîtra q u ’il n ’a aucune analogie avec la
cause actuelle, puisque l ’émigré l ’Espinasse fils avait
été amnistié le
ventôse an 1 1 ,
et que le sieur
l ’Espinasse père, son seul héritier alors, était encore
vivant en 1814 , n ’avait pas perdu sa qualité d ’ héritier
u n i q u e , et était par c o n s é q u e n t apt e, d ’après la loi
civile o r d i n a i r e , et appelé par la loi spéciale du 5 dé
cembre, à recueillir les biens alors rendus.
Le
seul arrêt dont l ’espèce présente une grande
analogie avec la cause actuelle est celui re ndu , le 21
janvier 1 8 2 1 , dans Tafiane de Béthune et Carnin.
Béthune-Sully fils, décéda en 1794 sous la loi du
17 nivôse an 2 , laissant pour unique héritier le comte
de Béthune son père, alors émigré. L ’É t a t qui repré
sentait le père s’empare de la succession. E11 l ’an 1 0 ,
le comte de Bélhune est amnistié; il se remarie , meurt
�%
( 54 )
avant iBi/fj mais laisse (les enfans qui lui survivent, ( i )
Plusieurs des immeubles dont s’était emparé le fisc
au décès de Béthune-Sully fils sont rendus par la loi
de 18 1 4 • Les comtes de C arn in les réclament comme
é t a n t , au décès du fils S u l l y , scs plus proches parens,
après son père, que sa mort civile comme émigré avait
rendu incapable de succéder.
Ces prétentions sont écartées par des motifs remar
quables :
Les biens étaient dévolus au père par la loi du 17
nivôse an 2 ;
L e père en était saisi par le droit com m un ;
C e droit avait é té seulem ent suspendu par l ’effet
des lois sur l ’ém ig rat io n, q ui l ’avaient transmis au
fisc ;
Mais les droits civils ayant été depuis restitués aux
émigrés, la remise, opérée par la loi du 5 décembre
18 14 > n a Pu ¿ire iaite q u ’à la famille du com te
B éthun e com m e ancien p ro p riéta ire , en t/utilité d ’hé
ritier de son f i l s .
C et arrêt présente un cas oii le succès devait paraître
plus douteux même que dans celui qui nous occupe.
E t cependant il déclare que le père émigré était saisi,
suivant le droit com m un , des biens de son fils, quoi
q u ’ il ne les eut pas recueillis, à cause de sa mort civile;
il dit que son droit n a é té que suspendu par la main-
(0
V o i r l 'arvét dans lo j ou r na l d e S i r c y ,
22,
1. 21 , et d a ns la j u
r i s pr ud e nc e g é n é r a l e d e D a l l o z , au mo t émigré, s c c t i o u
p. 8aO.
3;
art. 2. § 1»
�mise du fisc; il décide que cet émigré, en qualité d ’ hé
ritier de son fils , devait être réputé Vancien p r o
priétaire de ces biens qui cependant n’avaient été remis
q u ’après sa mort; il ajoute q u ’il a transmis son droit à
ses propres héritiers.
Tous ces principes s’appliquent littéralement à la
cause du sieur l'Espinasse père, représenté par le sieur
Bournet.
L ’Espinasse fils, émigré, avait été saisi aussi, suivant
le droit c o m m u n , en l ’an 2 et .en l ’an 4 > des biens
de Jean-Marie et de François-Aldebert de Sévérac.
Son droit avait été aussi seulement suspendu par
l ’effet des lois sur Immigration, qui l ’avaient transmis
au fisc.
Mais ses droits civils lui ayant depuis été restitués,
il a transmis, au moment de son amnistie, à son père,
à son seul héritier, tous ses droits aux biens dont son
émigration l ’avait p r i v é \ e t , par conséquent, c’est eu
faveur du père seul, q u ’a pu être faite la remise opérée
eu 1814*
On le voit; soumises au creuset d ’un examen sérieux,
les prétentions des Bonnafoux se dissipent, tandis que
les droits du sieur l ’Espinasse père en sortent intacts,
consacrés, comme nous l’avons d i t , par la loi, par la
doctrine des aut eu rs, par la jurisprudence des arrêts.
L a loi a votilu voulu faire un acte de j u s t i c e , e t ,
par conséquent, rendre à celui qui avait perdu. O r ,
le sieur de l ’Espinasse père avait seul perdu les biens
qui ont été remis; car seul il les aurait recueillis en
l ’an S , en l’an 11 , si la confiscation n’avait pas eu
�lie u , ou si les maux q u ’elle avait causés eussent été
plus tôt réparés.
Se fut-elle même proposé de faire un acte de pure
libéralité, la loi, au moins, a déclaré rendre à llié r itier, de l ’ancien propriétaire; elle n ’a d i t , ‘d ’aill eu rs,
ni explicitement ni implicitement , q u ’elle créait une
nouvelle classe d ’ héritiers; elle n ’a pas dit aussi q u ’elle
rendait les biens à l ’héri ti e r'futur ; e t , s’en référant
par son silence même au droit co m m u n , elle n ’a en
tendu , par le mot h éritier, elle n ’a pu e n t e n d r e que
celui qui déjà était saisi du titre et des droits d ’héritier ,
s’il était vivant lorsqu’elle a paru. O r , le sieur l ’Espinasse père existait alo rs , et seul il était investi de la
qualité d ’héritier de son fils; seul il avait été reconnu
comme te l, soit antérieurement, soit à cette époque,
par les autorités administratives ou judiciaires, par les
créanciers de la succession comme par toutes parties
intéressées. C ’ est d o n c lui seul aussi que désignait la
loi en appelant l ’héritier à profiler des biens r e n d u s .
L a loi de plu£ a déclaré q u ’elle entendait respecter
les droits acquis. O r , au moment où la loi a p a r u , le
sieur de l ’Espinasse père avait un droit a cquis au droit
indélébile au titre d ’ héritier unique de son fils, e t ,
par conséquent, aux avantages attachés à ce titre. Ce
droit acq ui s, la loi l ’a expressément consacré; donc
c’est à lui q u ’elle a remis les biens non vendus.
Enfin , lorsque les héritiers légitimes n’existaient
plus en 18 14 , la jurisprudence interprétant la l o i, a
attribué les biens rendus aux pareus les plus proches
de l ’cmigié.
�( 57 )
Or, le sieur de I’Espinasse père était, à cette époque,
tout à-la-fois et le seul héritier légitime exi stant, et
le parent le plus proche de son fils; c’est donc évi
demment lui seul qui doit recueillir les avantages de
la remise des biens non vendus.
Co mm en t exp liquer, d ’après ces observations, l ’as
sertion de l’avocat de la dame et du sieur Desrois,
qui , après avoir succombé sans adversaire sur un
simple pourvoi, s’est hasardé à dire dans un écrit,
que si le fond de l ’affaire avait été exam iné, l ’arrêt
aurait été cassé.
Assertion imprudente!
œuvre éphémère des désirs
pris pour la réalité ou des illusions de l ’amour-propre,
que l’on a considérées comme le succès.
Assertion irréfléchie! comme si de graves magistrats
livraient au public les secrets de leurs délibérations;
comme s i , lors même que le pourvoi aurait été admis,
une dissertation approfondie et le frottement de la
contradiction n’eùt pas fait jaillir une lumière propre
à éclairer et à guider les esprits même incertains.
C ’est cependant peut-être cette étrange assertion
q u i , imposant au tribunal de première instance, l ’a
déterminé à repousser la doctrine que lui offraient les
deux arrêts rendus par notre C o u r dans cette même
cause; c ’est par elle q u ’il a sans doute été entraîné
dans un tel oubli des principes, que non seulement il
a attribué aux Bonnafoux une partie de la terre d ’ Au zat
rendue par la loi du 5 décembre 18 1 4 , mais q u ’il a
aussi ordonné en leur faveur le rapport au partage,
soit du 8mc de la terre de S a iu t - M a r t in , restitué au
8
�( 58 )
sieur l ’Espinasse père avant cette l o i , soit même de
tous les autres biens meubles et immeubles provenus
de la famille Sévérac, et qui lui avaient été délaissés
irrévocablement depuis plus de dix années par plusieurs
actes administratifs.
L e 8me de la terre de Saint-Martin faisait partie de
la sénatorerie attachée à la C o u r de Riom. Il en fut
détaché, par une ordonnance royale du 4 juin i 8 i 4 >
comme les autres propriétés particulières acquises par
voie de confiscation , que cette ordonnance déclara
restituer aux anciens propriétaires dans l ’état où elles
se trouvaient.
Ainsi, le 4 juin , le sieur de l ’Espinasse père, comme
seul héritier et seul représentant de l ’ancien pro
priétaire, son fils, eut à cet objet un droit acquis,
indépendant de la remise faite par la loi du 5 décembre
suivant. C o m m e n t s’est-il donc fait que le tribunal
ait cru pou voir, en vertu de c e t te loi, faire participer
les Bonnafoux aux avantages d ’une restitution q ui
l ’avait précédée?
L ’erreur du tribunal est encore plus saillante rela
tivement aux autres biens meubles et immeubles pro
venant de la famille Sévérac.
L e sieur de l ’Espinasse père avait été envoyé en pos
session de ces biens, dès l’an i i et dès l ’an 1 2 , en
vertu du certificat d ’amnistie q u ’il avait obtenu , le 5
ventôse an 11 (24 février i 8 o 3 ) , pour son fils alors
décédé.
Des anétés pris, les 11 germinal an 1 1 , 25 thci-
�( 59 )
7^
midor an n , 7 frimaire an 1 2 , par les préfets de la
I l a u t e - L o i r e , du C a n t a l , du Puy-de -D ôm e, lui dé
l a i s s è r e n t , comme au seul héritier de son iils émigré
amnistié, tous les biens que celui-ci avait possédés dans
ces trois départemens. L ’arrêté du préfet du C antal
lui abandonna aussi, par une disposition expresse, les
portions des terres de Vertessère et de Sévérac, qui
étaient advenues au fils, par succession, pendant son
émigration.
Ces actes administratifs ont toujours été respectés-,
ils ont
r eç u
leur pleine exécution. L e sieur de l ’Espi-
nasse, usant des droits qui lui avaient été conférés, a
cédé, le 8 vendémiaire an i!\ (29 septembre i 8 o 5 ) ,
tout
ce qui lui avait été délaissé , au sieur Grenier qui
lui -même en a disposé à son gré depuis cette époque
reculée.
Par quel aveuglement le tribunal a-t-il cru pouvoir
condamner le sieur de l ’Espinasse à rapporter tous ces
objets au
partage q u ’il
a ordonné?
et co mment,
même dans son s y s t è m e sur le sens de la loi du
5 d é c e m b r e 181/^ ne s’est-il pas aperçu que cette loi
commandait impérieusement, par son article i cr, de ne
porter aucune atteinte a u x droits acquis avant la p u
blication de la Charte constitutionnelle} et qui sei'aicnt
fonde's sur des lois ou des actes du gouvernem ent} rela tifs à Vémigration.
Ne nous étonnons cependant pas trop de cette aber
ration. On sait q ue,
lorsqu’au point de dép art, 011
ne prend pas le droit ch em in, plus on avance, plus 011
s’écarte de la vraie route.
�JS Pt
( « . )
Riais c’est trop nous occuper de ces erreurs secon
daires, q u ’il suffit de signaler pour les faire reconnaître,
ei qui doivent, d ’ailleurs, subissant le sort de l’erreur
principale, être réformées comme elle.
C e l t e réformation est commandée par la l o i , par
l ’équité comme par la justice, par la jurisprudence de
la C our de cassation, comme par celle de la cour de
Rio m.
P a r la l o i , qui considère les biens rendus comme
une partie intégrante, comme
u n accessoire nécessaire
de la succession de l ’émigré, puisqu’elle les soumet à
contribuer aux dettes héréditaires; qui n ’a d ’ailleurs
ni déclaré ni entendu établir deux ordres de succession
dans la même personne, et q u i , rendant les biens à
l ’ héritier de l’ancien propriétaire, les a nécessairement
rendus à celui-là seul sur la tê teduqu el, au moment de
sa publication , reposait ce titre d'hé ritier, à celui-là
seul à qui les c h a r ge s c o m m e les bénéfices de l ’hérédité
avaient été depuis long-tems t r a n s m i s , l o r s q u e , s u r
t o u t , existant au moment de la l o i , il réclamait luii
%
^
4
mêmd'l’es avantages de la remise.
P a r V éq u ité com m e p a r la ju s tic e ; car c ’est l ’équité
du législateur qui a dicté l ’acle de justice q u ’il proclame
dans le préambule même de la loi. Or, l'équité voulait
que l’on effaçât les dernières traces d ’ une confiscation
odieuse, d ’ une confiscation rayée depuis long-tems de
notre législation criminelle, d ’une confiscation vio
l en te , reste affligeant d ’ un tems de discorde et d ’égaremens. L ’équité voulait aussi que l ’acte de justice lut
dirigé en faveur de celui-là seul à qui les biens confis-
�qués avaient été enlevés. Or, quel autre que le sieur
del'Espinasse père, seul héritier de son iils au moment
de son décès, au moment de son amnistie, aurait re
cueilli ces biens si les rigueurs de la confication ne l ’en
avaient
privé ? quel autre
donc doit recueillir les
faibles restes de cette succession?
E n fin p a r la ju risp ru d en ce de la C our de cassa
tion j com m e p a r ce lle de la C ou r de R iom .
Par la jurisprudence de la C our de R io m , qui s’est
manifestée deux fois sur les mêmes questions, dans
cette même cause, en faveur du sieur de l ’Espinasse
père,
q u ’elle
a déclaré seul héritier, seul représentant
de l ’émigré amnistié son fils. L ’un des arrêts fut même
l ’ouvrage solennel des chambres réunies.
Par celle de la Cour de cassation, qui n ’a eu que
dans \i ne «Soule %oacasionv* dans.ia cay&e.jle Béthuue*r\
AM.
S ullyfc.&e.5i P 1P#KWie cIuesUon a l)eu Pl'es id e n t iq u e ,
et qui l ’a résbliïô dans un seti£;*itttrorAble au sieur de
l ’Espinasse. D ’autres arrêts, quoique moins applicables,
csK c,es.
'plus au moment de la l o f * n'ont 'cepeyfnftt
appelé h recdj^lH W è^^iens,1^ (4 4 i9t»^u’un seul parent,
n ’ ex i s ta i t
c’est-à-dire le parent le plus proche de l ’émigré; e t ,
dans la cause, le parent le plus proche est encore le
sieur de l ’Espinasse père.
L e sieur de l’Espinasse, ou le sieur Bournet son
représentant,
peut aussi invoquer
la doctrine
des
auteurs modernes.
Ainsi il réunit en sa faveur les termes et l ’esprit de
la loi, le poids des opinions les plus puissantes, l ’au-
�torité des arrêts les plus respectables, tous les principes
comme toutes les considérations. Pourrait-il craindre,
avec de tels m oyens, de succomber dans sa nouvelle
lutte contre des cédataires de droits litigieux, q u i ,
se déguisant sous le masque de parens éloignés de l ’é
migré amnistié; qui, empruntant le nom de collatéraux
dont un modique salaire a acheté la complaisance,
viennent contester encore des droits évidens et consa
crés déjà deux fois par la justice éclairée de la C o u r ?
BOURNET.
M e A L L E M A N D , A v o ca t.
Me S A V A R I N , A v o u é-L icen cié.
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A RIOM, CHEZ SALLES f i l s , Seul imprimeur de la C our royale et de la Mairie.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bournet. 1831?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Savarin
Subject
The topic of the resource
émigrés
successions collatérales
mort civile
séquestre
amnistie
sénatorerie de Riom
rétroactivité de la loi
doctrine
arbre généalogique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Le sieur Bournet, propriétaire, habitant de la ville d'Issoire, Appelant ; contre Jean Bonnafoux, propriétaire, habitant au lieu de Luzarègues, commune de Molède, département de Cantal ; Jean Vialfont, secrétaire de la sous-préfecture de Saint-Flour, et dame Françoise De Laroche, son épouse ; Henri Vialfont, Jeanne Vialfont, sa sœur, propriétaires, habitans du lieu de Molède ; Jeanne Vialfont et AntoineFouilloux, son mari, qui l'autorise, propriétaires, habitans du lieu de Boufeleuf, commune d'Auriat, même département du Cantal, intimé ; En présence De dame Amable-Henriette De Chauvigny De Blot, veuve de M. Claude-Etienne-Annet Desrois, propriétaire, habitante de la ville de Moulins, et de M. Annet comte Desrois, propriétaire, habitant de la ville de Paris, rue Blanc, n° 175, défendeurs en assistance de cause.
Annotations manuscrites. « 10 juin 1831, arrêt infirmatif, 2éme chambre. Pourvoi. 22 juillet 1833, Cour de cassation, section civile, rejet. Voir Sirey, 1833-1-676. »
Table Godemel : émigré : 5. ceux qui, héritiers d’un émigré à l’époque de son décès, n’ont recueilli qu’une partie des biens restitués à sa succession en vertu du sénatus consulte 6 du floréal an X, l’autre partie ayant été affectée à un service public, doivent recueillir cette dernière partie des biens, remise en vertu de la loi du 5 xbre 1814 et ce, à l’exclusion de ceux qui, devenus héritiers plus tard, se sont trouvés habiles à succéder avec eux lors de la promulgation de cette loi. – ici ne s’applique pas la règle consacrée par la jurisprudence, que les héritiers de l’époque de la remise doivent être préférés aux héritiers de l’époque du décès.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1792-1833
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
62 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2620
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2621
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53535/BCU_Factums_G2620.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Molède (15126)
Saint-Flour (15187)
Auriac-l'Eglise (150013)
La Chapelle-Laurent (15042)
Moulins (03190)
Paris (75056)
Auzat-la-Combelle (63022)
Saint-Martin-des-Plains (63375)
Mozac (63245)
Vertessère (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
amnistie
arbre généalogique
doctrine
émigrés
mort civile
rétroactivité de la loi
sénatorerie de Riom
séquestre
successions collatérales
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53463/BCU_Factums_G2409.pdf
23f74758dc6bddb6428b123fe18e9b8b
PDF Text
Text
%6<
OBSERVATIONS
-• > :
I
PO UR
Le sieur B a r th é lem i G R E L E T , . appelant, ,J;
'■(iO:> r ;
CO NTRE
M onsieur le comte J O L Y D E
'
«
et a u tre s , intimés.
t.
*
Uî
FLEU RY ,
.,iH î..;
*i
U ne cause importante est sur le, point d’être examinée
de nouveau par la Cour. ,
Elle présente deux questions du droit transitoire ,
en matiere d hypothèque :
.
1° s ous le Code civil, et avant le Code de procédure,
la transcription était-elle nécessaire, pour arrêter le
cours des inscriptions ? . . .
.
2 Des conventions faites dans une première vente
�ont-elles pu déroger, à l’égard des seconds acquéreurs,
à la loi générale sur les hypothèques?
Ces deux questions avaient déjà été soumises à l ’une
des chambres de la C our, à l’audience du i!\ mai 1817.
L a première était la seule sur laquelle eût prononcé
le jugement dont il y avait appel : elle fut examinée
dans tous ses détails.
C.
",
'i
La seconde, élevée à l ’audience seulement, fut dis
cutée dans une réplique trop rapide pour maîtriser
l’attention.
A la même audience , la Cour , en rejetant les motifs
du jugem ent, se décida par les conventions particu
lières contenues dans le premier acte de vente.
Le sieur Grelet était étranger à l’arrêt. Depuis, lesmêmes difficultés ont été agitées avec lui. Développées
dans un m ém oir e imprimé , elles ont paru tellement
.graves, que les magistrats eux-mêmes , qui avaient
rendu l’arrêt du 14 mai 1817 , s’élevant au-dessus des
faiblesses ordinaires aux autres hommes, ont provoqué
la réunion des deux chambres ; et le résultat de cette
Téunion à été uri partage d ’opinions.
Aujourd’hui M. le comte Joly de Fleury et ses
consorts cherclient îi nous éblouir par le luxe d’une
consultation imprimée, signée de cinq jurisconsultes
de Parish
’ L ’auteur ^de1 la consultation traite l’une et l’autre
question 3 c est-a-dire qu il cherche à prouver non1r » ’ " 1’ i* 1■ - t
•
? •
seulement qu e, par des conventions particulières, on
�( 3 )
a pu déroger à la loi générale sur les hypothèques,
mais encore que la Cour de Riom a mal jugé en 18 17 ,
en ne déclarant pas la transcription nécessaire pour
arrêter le cours des inscriptions.
Cette question-ci est même traitée la première.
Pourquoi?
Parce q u e , nous dit-on, la stipulation s q u i a eu
p o u r but de conserver le droit des vendeurs dans son
intégrité acquerra d ’autant p lu s de fo r c e d e cette
démonstration prélim inaire.
Ne serait-ce pas plutôt parce qu’on a*’senti combien
serait faible le droit des vendeurs, s’il était privé de
cet appui qu’on cherche à lui donner?
'
Pour suivre dans ses raisonnemens l ’auteur de la
■consultation, nous serons donc obligés d’examiner
comme lui les deux questions, quoique la première ne
dût plus , il semble , diviser les opinions ; e t , dans
une discussion qui sera le complément de celle que
contient le mémoire imprimé du sieur Grelet (1) ,
nous ferons voir que si l’on n’avait pas négligé de
puiser aux sources, l’on aurait évité de grandes erreurs,
|:
•P R E M IÈ R E Q U ESTIO N .
"
!
Sous le Code civil, et avant le Code de procédure,
*a u’anscription a-t-elle été nécessaire pour arrêter le
cours des inscriptions?
(0
Voir le mémoire imprimé du sieur G rclct, pages 9 et suivantes.
�( 4 >
Le régime hypothécaire, établi par la'loi du 1 1 bru
maire an 7 , était d’une imperfection qui»avait frappé
tous les - bons esprits. ' L ’article : 26 de cette lo i, en
la is s a n t la propriété . suspendue entre les mains de
l ’acquéive'ur jusqu’à la transcription ; en déclarant que
jusque-là les actes de vente ne pourraient être opposés
a u æ jie r ^ j p r é s e n t a i t à Ja fraude une large voie, dont
elle ,n’ay,ait ;pa§-,manqué de profiter. On avait vu des
vendeurs‘Jminora.ux ^Jiypothéquer ; même après vies
ventes, des objets qui avaient cessé, d’ètre leur propi;iét¿ , .(et pendre ainsi leurs acquéreurs victimes d’une
i,nsi^ne, mauvaiBe foi.1 j
,
r'
C et article zfy avait cependant été inséré dans le
projet du Code civil 5 m ais, vivement attaqué au
conseil cl’jétat, ií fut supprimé, et remplâcé par l’àr'.-.r.;'-»
i>
ticle 21 01 de la rédaction d e h n it i v e .
•' r-f '»-7- . ; •'»t ■
* ■
* -, f--» -: !
....
D ès-lors, il .fut reconnu que les actes de v e n te -ili, 7 ,
; ,-ij.
„ 1
quoique non transcrits j pourraient ctre opposes a u x
tiers : e t d e .c e p r i n c ip e d é c o u la n a U L rellem en t la co n sé t v»
'«*> ", ' ' i-’’ • v ''"i
- -,i : ,
quence que les ,creancierst inscrits au moment des
ventes ^ 'seraient les seuls .qui conserveraient sur l'im
meuble vendu lin droit hypothécaire.
Cette conséquence était en harmonie avec l ’ensemble
.
(
» | ! ,J ’ j
);
'
’ T fT • ¡ j 1 y - • ; |f »'
d u n o uv e a u système h y p o t h é c a ir e . O n s a i t , en effe t,
que. fe
système repose, su r deux bases p r in c i p a l e s : la
.^péclvlitiî | q u i est étrangère a Ja question q u i nous
iit 'i'jjjiií. UK'j 0 i ¿ . l ,
' li'* ’
occupe-, la p u b l i c i t é , sur laqu el le cette,questlou roule
en entier.
. 1 u'ü.pukUçilé, prescrite paxj-nos législateurs, prosqu’à
�( 5 )
chaque article de la loi ; la p u b l i c i t é si importante
pour les tiers, et sans laquelle le Code .civil ne recon
naît pas de droits hypothécaires existans; la publicité
n’a pas même été l’objet de l ’attention du rédacteur
de la consultation : aussi a-t-il éludé la difficulté plutôt
que de la résoudre.
j Trois articles isolés du Code., et quelques arrêts de
Cours royales , forment tout le corps de la doctrine
qu’il établit.
Mais si l ’on se fut fixé sur un grand nombre d’autres
articles du Code civil même , ou du Code de procédure'
et sur les motifs qui les ont préparés} si l’on eut con
sulté, les auteurs qui traitent la question; si l ’on eut
recherché d’autres arrêts d’un plus grand poids , 011
aurait été nécessairement conduit a une conviction
contraire, et l’on serait convenu que les immeubles
yendus sous le Code civil ont été affranchis par l’alié
nation seule de toutes créances non inscrites.
On a opposé les articles 2 1 1 2 1 8 1 , 2182.
( L ’article 2x14 pose u n p r i n c ip e g é n é ra l r e la tifs
l'hypothèque, lorsqu’elle existe. Il ne s’occupe pas des
conditions nécessaires à son existence , à l ’égard des
tiers : il est donc étranger à la question. ’
Les articles 2181 et 2182 se rattachent l’im -krautre.
Il* disent q u e p o u r purger les privilèges et les hypo
thèques, il faut d’abord transcrire, ensuite notifier: la
transcription seule ne purgerait pas (Yo.y^ l’art, 2 1 ^ .) .
. L idee naturelle que présentent ces deux articles ,
c est qu ils ne s appliquent qu’aux créances ipsçwtes
�i^ar la notification est impossible à l ’égard des créances
non inscrites : d’où il suit que ce sont les premières
créances seulement que le législateur a considérées
comme charges de l’immeuble.
Aussi n’est^ce pas sans étonnement, que le sieur
Grelet a remarqué que l ’on s’emparait contre lui de
cet article 2182 même, qui lui avait fourni, dans son
mémoire, un moyen auquel on a cru cependant inutile
de répondre (1).
Qu a-tr-on prouvé^ au reste, par les raisonnemensque
l ’on a faits? Rien, si ce n’est que, comme l’a dit Montaigne,
sur toutes choses on peut p a r le r pour et contre (2).
On le pouvait d’autant plus aisément pour M, Joly
de F le u ry , que l ’on négligeait tout ce qui était propre
à jeter un grand jour sur la question,
Cette question était éclaircie ,
Par les articles 2 134 et 2 135 du Code, sur les simples
hypothèques l’un qui dit que l ’hypothèque n a de
rang que d u jo u r de l ’inscription ; l’autre qui déclare
qu’il n’y a que H y p o th è q u e légale des femmes et des
mineurs, qui existe indépendam m ent de toute . ins
cription,. Il est donc évident que toute autre hypo
thèque n existe pa s sans inscription; exceptio Jirm a t
régulant ;
Par les articles 210 6, 2108, 210 9, 2 110 , 2 1 1 1 ,
(1) Voyez page i 4 du mémoire.
(2) Il y a prou de loy de parler, par-tout, et pour et contre ( Essais
4c M o n ta ig n e , liv. 1” , cliap. 47)*
�( 7 )
^
S i i 3 , qui ont trait aux privilèges: l'article 210 6, qui
porte que les privilèges ne produisent d'effet 3 h l égard
des im m eublesj q u ’autant q u ’ils sont rendus p u b l i c s
p a r une inscription ; ce qui démontre que le privilège
n’existe pas sans inscription ; car là où il n’y a pas
d’effet, on ne peut supposer de cause : les articles 2108
et suivans, qui exigent une inscription pour les divers
privilèges auxquels ils se rapportent r enfin l’art. 2 1 13 ,■
qui dit que les créances, à l’égard desquelles les condi
tions prescrites pour en conserver le privilège n’ont pas
été accomplies, ne cessent pas néanmoins d ’être hypo
thécaires j mais que Vhypothèque ne d a t e 3 à Végard
des tiers j que de Vépoque des inscriptions.
Quoi de plus formel que ce dernier article ? Quoi de
plus décisif pour la question ? Le vendeur conserve son
privilège, aux termes de l ’article 2108, par une ins
cription d’office, prise lors de la transcription. Si cette
condition n’est pas rem plie, le privilège dégénère en
simple hypothèque ; et cette hypothèque ne date a
l ’égard des tiers, n’existe par conséquent, que d u jo u r
dè l ’inscription. O r, une inscription n’a été prise, par
les adversaires du sieur G relet, qu’en 1808 : comment
donc pourrait-elle conférer , à son préjudice, une
hypothèque sur des immeubles qu’il avait acquis
en 1806 ?
On pourrait aussi invoquer, pour le sreur G relet,
1 article 2166, qui n’accorde de droit de suite sur un
immeuble, qu’aux créanciers aya n t privilège ou h y
pothéqué inscrite ; 1 article 21G7 d’après lequel le tiers-
%
�détenteur est obligé , en cette qualité, p a r V ejfet Seul
des inscriptions y l ’articlé 2 17 7 , qui n’admet de préfé
rence sur les créanciers de l ’acquéreur qu’en faveui
des créanciers inscrits sur les précédons propriétaires;.
l ’arlicle 2182 déjà ci t é; l ’article a i 83 qui veu t que
les notifications soient faites a u x dom iciles élus dans
les inscriptions ; l’article 2 1 85 qui ne permet de sur
enchérir q u ’aux créanciers dont le titre est inscrit.
Tous ces articles démontrent la nécessité de donner,
par l ’inscription, de la p u b lic ité à la créance privilégiée
ou hypothécaire, et font voir que , sans cette publicité
si i m p o r t a n t e p o u r les nouveaux acquéreurs , ceux-ci
sont affranchis d’ une charge qu’on a négligé de leur
faire connaître.
Ces nombreux articles sur l’indication desquels on
a été si sobre dans la consultation imprimée, ne per
mettaient pas même de doute sur le vrai sens de la loi.
Mais toute incertitude, s’il en était resté, aurait dû
disparaître a la lecture des discours qui ont préparé l’ad
mission du projet présenté aux assemblées législatives.
Lesieur Grelet avait déjà rappelé , dans son mémoire
imprimé (l)> les expressions remarquables de M. Grenier,
dans son rapport atc tribunat. La transcription, avait
dit cet orateur, n’est p lu s nécessaire p o u r arrêter la
cours des inscriptions.
Il rappellera' ici le langage aussi décisif du conseiller
d ’état T h reillard .
'■
'1
•
(1) Voyez pages 15 et itf.
•
'>
!
�Après avoir remarqué sur l'ancien droit?qu ç.Vhypo-'
îhèque donnée p a r des actes occultes ne laissait au
cune garantie contre la mauvaise f o i , ce législateur,
en parlant du projet de loi qu’il présente, s’exprime
ainsi.:
« LThypothèque conventionnelle doit n é ce ssa ir e m e n t
« être r e n d u e p u b li q u e par l ’inscription, afin q u ’on
« ne puisse pas sans cesse tromper les citoyens. »
11 ajoute que l ’hypothèque judiciaire doit aussi ac
quérir la p u b lic ité par l ’inscription.
E n fin , traitant des privilèges ,• et après èn avoir
distingué quelques-uns, tels que les frais de justice,
de maladie, etc., c’est-à-dire, ceux qui-sônt compris
dans l’article 2101 du Code, il termine ainsi :
« A l ’égard des autres créances privilégiées, elles
« doivent, sans contredit, être renduùs publiques par
« la voie de Vinscription-, les tiers ne peuvent les
« supposer. »
A in si, la p u b lic ité était une condition inhérente àu
privilège ; elle était indispensable pour lui donner la
v ie , pour lui faire pioduit-e un effet, comme le dé
clare l’article 2106; e t, sans l’accomplissement de cette
condition, le privilège n’était , à l’égard des seconds
acqucfeul’â , qu’un droit imparfait et sans existence
légale, qui ne les avait grevés d’aufcune charge, pardfc
que he le trouvant pas inscrit, ils n’avâient pu le
Supposer.
*
i i
T >•
lnn°vation môme apportée à la législation du Code
civil par 1 article 834 du Code de procédure, prouve
�de plus en plus combien, antérieurement, la publicité
de l ’inscription était indispensable.
Nous avons démontré, dans le mémoire ( i ) , que
l’article 834 avait opéré un changement absolu de
législation ; c’est ce qu’avaient également déclaré et
l’orateur du gouvernement, et l’orateur du tribunat.
Mais on sera bien plus convaincu encore de cette
vérité*, si l’on considère les circonstances qui ont donné
lieu à cette innovation.
: M. Locré nous instruit de ces circonstances dans.
l’esprit du Code de procédure. L ’innovation fut pro
duite par un intérêt purement fiscal, soutenu d’une
autorité à laquelle rien ne résistait alors, celle du
chef de l’état.
La régie, alarmée de la vraie doctrine qui venait
d’être développée dans un article du journal du palais,
craignant que les bénéfices des transcriptions ne lui
' échappassent désormais, fit des réclamations, et provoqua
un examen de la question par le conseil d’état. L ’examen
ne fut pas à son avantage; il fut suivi, au- contrairer
d’un avis du conseil d’état, en datç du n fructidor
an i 3 , et qui décide,
« Que Ja transcription utile aujourd’hui pour purger
« l ’immeuble des hypothèques inscrites antérieurement
« à la vente, n ’est plus nécessaire, depuis le Code civil,.
q pour annuller l ’effet des inscriptions postérieures, v
P
•
« r
;
•
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• i: • f
( i) Poges 1G et suivantes.
'
:
.. . :
;
�.( 11 )
L ’avis avait même été approuvé et signé par le cliei'
du gouvernement.
Mais la régie fit de nouvelles représentations sur la
perte d’une branche de ses revenus : elles donnèrent
lieu à une nouvelle discussion du conseil d’é ta t, dans
la séance du 11 mars 1806.
L e conseil ne changea pas d’avis. Cependant il fallait
céder : le chef l ’exigeait. Alors on imagina de g lis s e r ,
dans le Code de procédure quelques dispositions 3 p a r
lesquelles on consacrerait ce changement f a i t au Code
civil.
.
'
y
D e là sont venus les articles 834 et 835 . r
\
C ’est ainsi que s’exprime M. Locré.
E t qu’on vienne encore prétendre que la transcrip-.
tion était nécessaire, avant le Code de procédure, pour
purger les créances non inscrites !
Même en ignorant peut-être ces détails , tous les
auteurs ,‘ qui ont traité la question , la décident en
faveur du sieur Grelet ; tous pensent que les créanciers
privilégiés , dont les titres n’étaient pas inscrits au
moment des vendes, avaient perdu le droit de suite ;
expressions de l’un de ces auteurs.
Le sieur Grelet a cité, dans son mémoire (page 18), »
les auteurs qu’il a connus ; et il est à remarquer
qu’on ne lui en a opposé aucun dans la consultation
imprimée.
Mais on a invoqué contre lui plusieurs arrêts de
Cours royales, et l’on s’est m ontré, à cet égard, fort
laborieux dans les recherches.
�Parmi* les arrêta cités , les uns jugent que , sous le
Code c iv il, la transcription avait été nécessaire pour
arrêter le cours des inscriptions; un autre est allé
jusqu’à décider que^ depuis le Code de procédure, la
transcription même d’une seconde vente n’avait pas
purgé le privilège non inscrit du premier vendeur.
Nous répondrons aux arrêts de la première espèce,
qu’ils ont été rendus, sans doute, parce qu^on ignorait
les causes qui avaient préparé l’article 834 du Code de
procédure, et parce qu’en appi’ofondissant trop peu la
question, on avait considéré l’article comme, seulement
interprétatif : erreur évidente que nous avons signalée,
en prouvant que l ’article avait opéré un changement
réel de législation ,
Nous leur opposerons d’ailleurs des arrêts contraires;
non-seulement l’arrêt de la Cour de Paris, du 22 dé
cembre 1809, et celui de la Cour de Poitiers, du 18
janvier 18 10 , mais encore deux arrêts de la Cour de
T u rin , l ’un du 23 novembre 18 10 , l’autre du n fdé7\
cembre 1812.
Nous invoquerons aussi l’arrêt de cassation, du i 3r
décembre 18 13 , déjà cité: dans le mémoire du sieur
G re le t, et dont les motifs décident en thèse que si la
seconde vente a eu lieu sous l'em pire d u Code civil,
Q U I n ’ e x i g e p a s l a t r a n s c r i p t i o n 3 alors le p r i
vilège du prem ier ven d eu r ne p eu t p lu s cire in s c r it^ )..
( t ) L c s arrêtsci-dessussc tro u v e n t au R e cu e il ile S ire y , t. 10, 2e p a r tie ,
p ag ’cs
et
t o m e 11 , 2 e p a r t i e , p a g e a 8.| ; to m e 14 , a ' p a r t i e r
p a g e 22 5 ; m i m e t o m e , i re p a r l i e , p a g e 4 (5..
�(
}
Nous rappellerons, enfin l’arrêt rendu par la Cour de
Kiom elle-même ^ le a3 avriLi8o6 , qui déclare qu e,
sous le régim e'du Code civil , et antérieurem ent au
Code de p rocédure, il n’y avait pa s besoin^de trans
cription p o u r arrêter le cours des. inscriptions.
Toutes ces décisions'souveraines, en harmonie' par
faite avec le texte de la Iol, balancent saris douta-avec
avantage par leur nombre, et par leui poids j les pré
jugés dont argumente M. Joly de Fleuryv.
Or, l’on remarquera que leurs motifs s’appliquent
aux privilèges comme aux hypothèques.
ii
"
Ce n’est)donc pas sans surprise, qu’on a.'lu dans la
consultation imprimée , que le ve n d eu r était dispensé
de}prendre lui-m êm e inscription / que la' 16i \ a pris
soin de conserver elle-m êm e son privilège ji.-. ..... Que
‘V ainement un second acquéreur chercherait à effacer
le privilège dont son acquisition est empreinte en f a i L
sant transcrire son propre contrat.
1
Cette étrange th é o r ie que l’on d évelopper d an s p l u
sieurs pages, et- de l a q u e l l e il r é s u lt e r a it q u ’ u n dixième
a c q u é r e u r se ra it oblige de faire transcrire tous les
contrats antérieurs au sien 5 cette théorie fiscale, que
la régie trouverait excellente, mais qui serait ruineuse
pour les acquéreurs; cette théorie, hasardée sans doute
parce qu’on en a senti le besoin , aurait dcv'deplorables
conséquences si elle, ^ c h a n g e a it (en doctrine. Heu
reusement qu’elle est.repoussée, par la, loi eller-même
et par de nombreux* arrêts ;• ’ e t , s’il' est v r a i‘ que
les talens de ]\je Tripier l’aient lait adopter pa,r la
�première chambre de la Cour de Paris, il faut le dire
avec franchise : ou Terreur a triomphé, ou il n’y a
rien de certain au monde que l’incertitude ; et cette
iière raison, dont on fait tant de b ru it, est un guide
souvent-infidèle (i).
-\. v. ' wv.
-'.»»’Vv:»
- Mais qu’un'arrêt isolé ne nous entraîne pas dans le
vague et le découragement du scepticisme, à l’occasionL
sur-tout d’une difficulté sur laquelle la jurisprudence
paraît aujourd’hui irrévocablement fixée,
r
r
o Indépendamment de plusieurs arrêts des Cours royales,
q u i , à des époques ou une transcription était nécessaire
pour arrêter le c o u r s ' des i n s c r ip t io n s , ont décidé que
la transcription faite par un second acqiiéreür seule-«
nient, .faisait disparaître le privilège non inscrit du
premier ven deur, on peut en indiquer trois de la
Cour de cassation, un premier du 28 mai 1807, un
second, celui du i3 décembre 181 3 , déjà cité, un troi
sième du 14 ja n v ie r 1818 (2).
Ces arrêts, quoique non relatifs à des ventes faites
sous la législation pure du Code c iv il, s’appliquent à
la cause actuelle .par les raisons même d’après les
quelles le rédacteur! de la consultation voulait y apN' ¿ '
. . i l
1!-
(1) Solàm ccrlum nihil cssc ccrti, et hominc nihil miscrius aut su*
pcrbius. Pline, liist. nat.
(2) Voir 16 1er árr¿t dans le journal de Denevers, volume de 1807,
page 295 ; et le troisième datis le journal de Sirey, tome 18 , page. 3oo.
Voir ausâi dans ce dernier journal, tome 11 , 2® partie, page 4 3^ ; un
arrêt de Turin, du 16 mars 1811 ; et tome 16, 2e partie, pago 1” , un
jurrôt de Paris, du 3 juillet 1815.
�pliquer le dernier arrêt de la Cour de Paris. Puisque,
sous les législations qui , pour arrêter le cours des
inscriptions, exigeaient une transcription, celle faite
par le second acquéreur a effacé le privilège du pre
mier vendeur, on doit convenir aussi que ce privilège,
n’étant pas inscrit, a disparu par une seconde vente
faite sous le Code c iv il, d’après les principes duquel
la simple aliénation, par acte authentique, tenait lieu
de transcription, et produisait le même effet.
i
C ’est assez et trop long-tems peut-être s’être arrêté
à la première question,
,
Reconnaissons donc, avec la loi, avec ceux qui l ’ont
rédigée, avec tous les auteurs, avec les Cours'royales,
et parmi elles la Cour de Riom , avec la Cour de cas
sation elle -même, que, depuis le Code civil et avant
le Code de procédure, la transcription cl’une seconde
'vente n'était pas nécessaire p o u r arrêter le cours des
inscriptions ;
Que la vente seule produisait ce salutaire effet;
Q u’enfin, après cette vente, le privilège d'un pre
m ier 'vendeur ne pouvait p lu s être inscrit .
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Des conventions!.particulières faites dàris uUne. preïuièievente, ont-ellés pu dérogerai l ’égard id’ün .second
acquereur à la.loi générale suri les.«hypothèquesPmi-' j ;
ci, La solution de cette seconde ^question découléi ntces»«
�( <6 )
,
sainement de l'opinion que l’on adoptera sur la première.
Il serait étrange, en effet, qu’ un second acquéreur fût
hypothécairement grevé par des conventions et des
c h a rg e s qu’une inscription -n’aurait pas rendues pu
bliques , et queden tiers cependant ne p euvent supposer,
suivant l’expression du lé g is la te u r Threillard.
Aussi le rédacteur de la consultation s’est-il princi
palement attaché à créer, sur la première question ,
une fausse doctrine qui pût lui éviter les difficultés de
la seconde.
Pour la discussion de celle-ci, des erreurs de faits
sont ses premiers élémens^ une confusion de principes
est ensuite son unique base.
Une ' première erreur de fait très-remarquable est
écrite dans plusieurs pages, de la consultation. On y
dit que l’arrét du i4 m ai 1818 avait été attaqué devant
la Cour de cassation, et que le pourvoi avait été
rejeté.
Il n’y «1 rien de vrai dans cette assertion.
Le sieur Grelet a dans ses mains la preuve contraire.
On conçoit cependant que ce1faux renseignement a
dû influer beaucoup sur l’opinion des jurisconsultes, et
leur faire considérer comme la plus juste, ce lle que la
Cour de cassation e lle - m ê m e a v a i t adoptée.
Une seconde erreur, c’est qu’ils ont cru que les deux
v e n te s
primitives étaient conçues dans les mêmes termes.
Cependant’ celle! du 19 brumaire an i 3 est pure
et simple’.»Seulement' elle charge les acquéreurs de faire
transcrire à leurs frais, sans exprimer de délai. Mais
�( >7 )
M
elle ne contient ni clause suspensive ni clause réso
lutoire.
La vente du 19 brumaire an i 3 , au contraire , .
charge les acquéreurs de faire transcrire, clans le délai
de siæ sem aines 3 avant aucune aliénation des biens
présentement v e n d u s c e qui est stip u lé comme con
dition essentielle des présentes, et suspensive de la
•vente , j u s q u à Vaccomplissement de cette fo r m a lité .
Cependant on a raisonné sur les deux ventes de la
même manière.
-i
On a soutenu, pour l’une' comme pour l’au tre, que
les premiers acquéreurs n’avaient pas eu le droit de
vendre*, que par la seconde vente, les seconds acqué
reurs étaient devenus personnellement chargés de trans
crire le premier contrat, et qu e, faute d’avoir rempli
cette obligation, on avait pu faire saisir sur eux, comme
détenteurs, les immeubles qu’ils avaient acquis.
Ces diverses propositions, qui sont sans aucune ap
plication à l’une des ventes, n’ont pu m ê m e être appli
quées à l’autre q u e par u n e étrange confusion des
principes sur les conventions avec ceux relatifs aux
privilèges ou aux hypothèques.
La confusion des principes doit être soigneusement
.évitée, dans l’examen de toute question de droit, si l’on
ne veut pas s’exposer à tomber dans de grands écarts.
M. D om at, dans son immortel ouvrage des Lois
civiles, recommande cette attention. On doit prendre
3
�rpfe
K *8 )
g a rd e} d it-il, en parlant des lois , à ne pas appliquer
une règle hors de son étendue et à des matières oie
elle n a point de rapport
Que l’on n’oublie pas cette vérité élémentaire, et
l ’on distinguera facilement la ligne de démarcation
que le législateur a tracée entre les principes sur les
conventions et les principes sur les hypothèques.
Dans la classe des premiers se trouve cette règle si
connue q u e , « Les conventions légalement formées
« tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. (Voyez
« Code c iv il, art. i i 3 4 ). »
Mais le lé g is la t e u r nous l ’ a p p r e n d lui-même ; c’est
entre ceux qui les ont fa ite s seulement, que les con
ventions sont des lois; elles n’ont pas la même force à
l ’égard des tiers.
De cette règle féconde découle la conséquence qu’une*
condition suspensive anéantit la convention, si elle
ne s’accomplit pas; qu’une condition résolutoire au
torise l’une des parties à faire annuller le contrat, si
l ’autre ne remplit pas son engagement.
Mais c’est contre les contractans seuls que de telles*
actions peuvent être exercées; et si, pour des contrats
de vente notamment, elles atteignent des tiers-acqué
reurs, c’ est s e u le m e n t lo r s q u e , la v e n te étant annulléer
le vendeur, qui en a provoqué la nullité, reprend sa.
(1) Voyez lois civiles, livre préliminaire, titre 1, section 2, note sur.
l’article 29.
�'
(
'9
.
)
chose, comme étant alors réputé n ’avoir jamais cessé
d’en être propriétaire. Les tiers-acquéreurs , dans ce
cas, ne peuvent la retenirj ils en sont dépouillés par
l’application de la maxime : dissoluto ju r e dantis, dis solvitur ju s accipientis.
Au contraire, si, en laissant subsister la vente, le
premier vendeur veut agir contre les tiers-acquéreurs,
il n’a d’autre droit que le di'oit de suite } dont la loi
sur les hypothèques règle l’exercice (voyez art. 2166
et suivans), mais qu’elle n’attribue qu’autant qu’on
le conserve en remplissant les formalités qu’elle pres
crit.
Ce serait donc une recherche moins utile que spé
culative, que celle qui aurait pour objet la dénomina
tion et le caractère de la condition attachée à la vente
de frimaire an i3 .
Quelle que soit sa nature, son inexécution ne peut
autoriser le vendeur qu’à demander que le contrat de
vente soit anéanti.
Considérée comme résolutoire, elle donne le droit
de provoquer la résolution du contrat.
E11 ta considérant comme mode d’exécution, le ven
deur peut exiger, mais contre son acquéreur seul, qu’il
s’y conforme. L ’obligation de transcrire est l’obligation
d un iait dont ne peut être tenu que celui qui s’y est
soumis.
✓
T1
est bizarre de soutenir que des tiers qui n ’ont
fait aucune promesse sont cependant liés par la pro
# 9
�messe d’un autre , par une promesse qu’on leur a
même laissé ignorer.
11 est plus bizarre encore de prétendre que par cela
»
même que la condition n’a pas été exécutée, l’exécution
doit être considérée comme effectuée. Il y a trop de
profondeur dans cette pensée : nos faibles regards n’y
peuvent pénétrer.
Si l’on 'considère la condition comme suspensive ,
cette condition venant à défaillir, il n’y avait plus de
vente; car les ventes additionnelles n’existent pas tant
q u e l a - c o n d i t i o n n ’ a pas é té r e m p lie . Conditionales
venditiones tune p erficiu n tu r ciun im pleta fu e r it
conditio. L . 7 , ff. de contrah. em pt.
Dans tous les cas que nous venons de parcourir, quel
est le droit des vendeurs?
Non celui de faire exproprier des tiers-détenteurs
par des poursuites hypothécaires; car agir ainsi, c’est
reconnaître que la vente primitive est parfaite ;
Mais celui de reprendre la chose vendue; or, on ne
dispute pas ce droit à M. Joly de Fleury et à ses
consorts.
Pourquoi donc n’en usent-ils pas?
P a r c e q u ’ ils a u r a i e n t à r e s t it u e r p lu s de 3 0 0 , 0 0 0 fr.
qu’ils ont touchés des deniers même fournis par les
t i e r s - a c q u é r e u r s , et qui serviraient au moins à indem
niser ceux-ci d’une partie de leurs pertes.
Pour obscurcir des idées simples, on fait un singulier
argument.
�( 21 )
La condition, a-t-on d it , n’est pas suspensive de la
vente, mais elle est suspensive du droit de revendre;
et la seconde vente est censée ne pas exister a l ’égard
des premiers vendeurs.
Ce système est plus ingénieux que solide.
Il est détruit par les termes de la clause , par la
nature des contrats de ventes, par le mode même des
poursuites exercées.
Les termes de la clause sont clairs.
» Ce qui est stipulé, est-il d it, comme condition
« essentielle des présentes, et suspensive cle la vente
« jusqu’à l’accomplissement de cette formalité (celle
« de la transcription). »
Il est d’ailleurs contrairë à la nature des contrats
de vente, qu’un acquéreur soit propriétaire et ne le
soit pas.
“ La vente peut être faite purement et simplement,
« O U sous une condition soit suspensive, soit résolu« toire (Voyez Code civil, art. i 58/f). »
On ne reconnaît pas, en droit, d’autre manière de
vendre.
Si la vente meme n est pas suspendue par une con
dition, elle est parfaite, et la propriété est acquise lv
l’acheteur (Art. 1 583).
O r , « ];i propriété est le droit de jouir et de disposer
' îoses de la manière la p lu s absolue (Code civil,
art. 5 /+4). «
�Donc si la compagnie Bravard était propriétaire ,
elle a pu vendre.
S i , au contraire, elle n’était pas propriétaire, pour
q u o i, vous qui n’auriez pas cessé de l’être, avez-vous
fait faire sur nous la saisie immobilière de votre propre
chose ?
E t remarquons que l’on a reconnu , par le mode
même des poursuites, que la compagnie Bravard avait
pu vendre; car ce n’est pas sur elle, c’est sur les ac
quéreurs, et notamment sur le sieur G relet, qu’on a
saisi, et qu’on, veut faire adjuger judiciairement , eil
exerçant les poursuites indiquées par les articles 2169
et suivans du Code.
On doit donc convenir que si la clause, qu’elle soit
suspensive, ou résolutoire, pouvait être opposée à des
tiers-acquéreurs, ce serait seulement en faisant an
nulier les premières ventes.
, L ’on devrait en convenir d’autant m ieux, que tous
les exemples que l ’on invoque, tels que les pactes de
rachatj les rescisions, etc., ne sont que des moyens de
résolution de contrat.
Mais dire qu’une condition opposée à une première
vente a pu grever hypothécairem ent des seconds acqué
reurs , c’est tout-U-fait méconnaître les règles de notre
système hypothécaire, c’est supposer qu’on peut le
détruire par des conventions particulières.
Noire système hypothécaire tient à l’ordre public j
c’cst pour cela même que la
publicité
en est la buse.
�( 23 )
W*
Des stipulations particulières n’ont pu y porter at
teinte. Ju s p u b licu m privatorum p a ctis m utari non
potest.
Notre système hypothècaii’e a pour but de faire
cesser les privilèges et les hypothèques occultes , de
mettre un terme aux fraudes nombreuses auxquelles
donnaient lieu des créances inconnues.
Ce b u t , que l’on a cherché pendant si long-tems ,
que l ’on est parvenu à atteindre si difficilement et
après tant d’essais infructueux, ce but équitable ne'
serait-il pas manqué, s’il était permis, dans les ventes,
de faire des conventions qui , en dérogeant à la loi
générale, frapperaient les tiers, quoiqu’ils les eussent
ignorées ?
Ne verrions-nous pas alors autant de règles sur les
hypothèques, qu’il y aurait de contrats?
Chacun ne se ferait-il pas un code hypothécaire à sa
manière , et non seulement pour son usage , mais
•encore pour celui des tiers qui ne l’auraient pas connu,
et qui cependant seraient forcés de s’y soumettre, et
de le prendre pour règle de leurs droits?
E n fin , la loi générale sur les hypothèques ne deviendiait-elle pas un m isérablejouet,destiné à tromper
les esprits simples et conlians, qui auraient eu la bon
homie de croire qu’une loi doit être exécutée parce
qu elle existe ^ qu'en s’y conformant soi-même, on n’a
pas a redouter l’attaque de ceux qui ont négligé do
servei, et qu en ne trouvant sur les registres pu-
�blics l ’indication d’aucune créance, un acquéreur n ’a
pas dù craindre des créances caché,es, et a pu payer
en toute sûreté le prix de son acquisition.
On doit s’étonner que les jurisconsultes, auteurs de
la consultation, n’aient pas remarqué les funestes con
séquences du systèmequ’ils adoptaient, et q u ’ils n’aient
pas senti que l ’absence de toute loi sur les hypothèques
serait préférable à un tel désordre; car enfin, les tiersacquéreurs ne trouvant plus alors de garantie dans la
lo i, la chercheraient dans la méfiance.
Ces jurisconsultes ont été entraînés sans doute par
l’idée tr o m p e u s e de l ’ e x iste n ce d’un arrêt de cassation
conforme à l ’arrêt du i4 mai 18 17; ils se sont peutêtre aussi laissé égarer par leur facilité et leur force
dans la lutte judiciaire, par leur érudition même;
car quelquefois l ’érudition sert moins à découvrir la
vérité, qu’à créer des difficultés : d ifficu lla tem f a c î t
ndoctrici, a d i t un célèbre rhéteur.
Quoi qu’il en so it, ils ont embrassé une erreur.
S’il est v r a i, comme nous l’avons prouvé en exami
nant la première question, qu e, sous la législation
pure du Code c iv il, la vente suffisait pour arrêter le
cours des inscr iptions ; si cette vente avait le même eft et que
p r o d u is a it a u p a r a v a n t , o u que p r o d u i r a i t aujourd’hui
la transcription; si toutes les inscriptions postérieures
'étaient nulles, comme l’a déclaré le conseil d’état, on
doit dire aussi que la clause ajoutée à la vente est
absolument insignifiante quant à^la question du pri
vilège ou de l’hypothèque.
�Cette clause, qui avait pour but le paiement du
prix, n’était que l’accessoire de l ’obligation de payer;
et l ’accessoire ne saurait avoir plus de force, ni plus
d’effet que1 l ’obligation principale qui , 1 cependant,
n’a pu grever les tiers sans la publicité d’une'ins
cription .
Une inscription a été prise , dit-on ;
Cela est vrai; mais en 1808 seulement, c’est-a-dire,plusieurs années après les ventes consenties au sieur
Grelet; à une époque où toutes inscriptions étaient
nulles, à son égard; à une époque où le privilège était
dégénéré en simple hypothèque, q u i, suivant la dis
position de l’article 2 1 13 du Code, ne d a ta it , a l'égard
des tiers, que du jour même où elle avait été prise,
e t , par conséquent, était sans force, sans existence
meme, a l’égard du sieur Grelet.
Cette inscription tardive et illégale n’a pu autoriser
des poursuites contre un acquéreur q u i, long-tems
auparavant, était devenu propriétaire, et avait payé
la totalité du prix de son acquisition.
Le sieur Grelet n’a connu ni la clause qu’on lui
oppose, ni la créance que l’on réclame. Dans les contrats
d’acquisition, on a même déclaré lui vendre les biens
francs et quittes de toutes dettes et hypothèques ; il
a dù cioirc a la vérité de cette déclaration qu’aucune
inscription publique ne démentait. Il a dù se reposer
aussi avec sécurité sur les dispositions de la loi; il ne
doit donc pas redouter l’abîme dans lequel 011 a menacé
�( 26 )
de le précipiter ( 1) ; il a peu sans doute à espérer de
la générosité de ses adversaires ; mais il compte beau
coup sur la justice de la C o u r, parce qu’il sait que
devant elle comme devant la lo i, l’homme faible et
l’homme puissant sont également forts.
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1 M* ALLEM AM D , A vocat.
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( 1) Voyez pago 6 du précis des intimés.
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------------------------------------- -
ARIOM, IMPRIMERIE DE J . - C . S A L L E S , IMPRIMEUR DU P A LA IS
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Grelet, Barthélemi. 1818?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Garron
Subject
The topic of the resource
hypothèques
ventes
conflit de lois
procédures
nullité
créances
saisie immobilière
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations pour le sieur Barthélemi Grelet, appelant ; contre Monsieur le comte Joly de Fleury, et autres, intimés.
Table Godemel : Transcription : 5. l’obligation de transcrire avant aucune aliénation des biens vendus, imposée à l’acquéreur comme condition essentielle et suspensive de la vente jusqu’à l’accomplissement de cette formalité, a-t-elle l’effet de conserver le privilège du vendeur, sans qu’il ait besoin de prendre inscription, même à l’égard des tiers acquéreurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1818
An 13-1818
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2409
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2406
BCU_Factums_G2407
BCU_Factums_G2408
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53463/BCU_Factums_G2409.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Allègre (43003)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
Créances
hypothèques
nullité
procédures
saisie immobilière
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53462/BCU_Factums_G2408.pdf
9a10e10d14fd27d3c739f3c478ae2389
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CONSULTATION
POUR
M . le C om te
Conseiller
d’E ta t,
J o l y
ancien
d e
F l e u r y ,
Procureur
gé~
néral au Parlem ent de Paris ;
M . le C om te de L A T
dames de
l a
- P i n , et M es
B o u l a y e , leurs épouses ;
C O N TR E le Sieur
L e
o u r -d u
G r e lle t.
C O N S E I L S O U S S I G N É , vu les M é m o i r e s i m
p r im és dans la cause in d écise en tre les p a r t i e s , d evan t
la C o u r r o y a le de R io m ,
E s t d ’a y i s que la saisie
im m obilière de la
terre
d'A l l è g r e a été valablem ent e x e rc é e p a r M M . J o l y
de
F l e u r y , de la T o u r - d u - P i n , et m esdam es le u rs é p o u s e s ,
tant sur les sieurs B ra v a rd et c o m p a g n ie , a cq u é re u rs .di
rects de cette ter r e , et d é b ite u rs de la m a je u re partie d u
p r ix , que sur le sieur G r e l l e t ,
comme d éten teu r a ctu e l
du
' ne partie de cet im m e u b le .
D a n s le fa it, la c o m p a g n ie B r a v a r d - F a u r e a acquis la
A
�(2 )
le rre d ’A l l è g r e , m o itié de la d am e de L a m a s s é , en b r u
m a ire an i
3,
m oitié des h éritiers de M . D o u e t d e la
B o u la y e , en frim aire de la m ê m e année.
L e p r ix de ch aq u e m o itié a été de 200,000 fr.
C h a q u e co n tra t c o n tie n t , dans les m ê m e s te rm e s, u ne
clause ainsi c o n çu e : « L e s acq u éreu rs fe ro n t transcrire
» le p résent co n tra t à leurs frais au b u re a u des h y p o » tlièqu es q u ’il a p p a r tie n d r a , et c e , sous six sem aines
y> de ce jo u r , avant aucune aliénation des biens présen» ternent vendus ; ce qui est stipulé comme condition es» sentielle des présentes, et suspensive de la vente jusqu’à
» laccomplissement de cette formalité ».
L ’acquéreur n ’a point exécuté celte clause ; il n ’a point
fait transcrire.
E t ce p e n d a n t il a re v e n d u l'i m m e u b le , en le s u b d i
visan t entre u n grand n o m b re de seconds acq u éreu rs.
L e sieur G r e lle t est du n o m b r e ; il a acquis p ar p lu
sieurs c o n tr a ts , de g e r m in a l an 1 0 , frim a ire an 1 4 , et
a vril 18 0 6 , jusqu’à c o n c u r r e n c e d’un p r ix total de plusde 20,000 fr., qui sont d éclarés p ayés co m ptan t.
N i le sieur G r e lle t , ni les autres s o u s - a c q u é r e u r s ,
n ’ont fait transcrire leurs contrats.
E n 181
4 , les h é ritie rs de la B o u l a y e , d e m e u ré s ci éan -
ciérs d’u n e s o m m e co n sid é ra b le sur le p r i x , ont fait
saisir l'im m e u b le , tan t su r B r a v a r d , le u r a c q u é r e u r ,
q ue sur tous les tiers détenteu rs.
U n e p r e m i è r e instance s’est en g ag ée sur l ’o pp osition
�( 5 )
fo rm é e h c e tle saisie p a r q u e lq u e s-u n s des tie rs -d é te n
teurs. Ils ont p réten d u q u ’ayant a cq u is sous l ’e m p ire du
C o d e N a p o l é o n , le p riv ilè g e des vendeu rs prim itifs s était
éteint p a r le seu l fait de cette r e v e n t e , sans q u ’il ait été
b eso in de la faire transcrire.
O n le u r a contesté ce p rin c ip e en thèse g é n é ra le ; et
dans la thèse p a rticu lière , o n a opposé la clau se du c o n
trat de l ’an i
3,
qui p r o h ib a it toute re v e n te avant la
transcription.
L e T r ib u n a l de première Instance a adopté ce second
m o tif, en m aintenant la saisie.
L e p r e m ie r ju g e m e n t a été co n firm é p a r u n arrêt de
la C o u r de R i o m , du 1
4 mai
1 8 1 7 , q u i s’est d écidé p ar
le m ê m e m o t if, et l ’a d é v e lo p p é en ces term es :
« A t t e n d u que par la première vente de la moitié
indivise de la terre d’Allègre à la société Bravard, Faure
3
et compagnie, en date du 1 3 brumaire an 1 , il a été con
venu que les acquéreurs feraient transcrire leur contrat
d acquisition ;
» Que la seconde, fa it e à la mêm e société Bravard, de
l'autre moitié indivise de la terre d 'A llè g r e , par acte du a3
frim a ire de la même année, impose également aux ac
quéreurs l'obligation de fa ire transcrire leur contrat d’ac
quisition dans le délai de six semaines, et avant aucune
aliénation des biens vendus, ce qui est stipulé, est-il d it,
comme condition essentielle et suspensive de la vente, ju sfl u & l accomplissement de cette formalité*
\A
2,
�( 4 )
y> A t t e n d u que la transcription de ces deux vêntes j
qui, a raison de l'indivision des objets vendus, se réfèrent
l'une à l a u t r e a été la condition de la propriété, et que
cette condition afa it la loi des parties.
ri A t t e n d u que jusqu’il cette transcription, la société
JJravard n'a pu disposer librement, en tout ni en partie,
des biens dépendons de la terre d’Allègre, puisque la
charge de fa ire transcrire les ventes était suspensive de
îexercice du droit de propriété, qui ne devait lui être ac
quis que par le fa it de la transcription, qui en était la con
dition expresse.
» A t t e n d u , dans tous les cas, que la compagnie Bruvard, en revendant à des tiers certaines parties de la terre
d'Allègre, n’a pu leur transmettre les propriétés qu'avec la
même charge , et sous la même condition de faire fa ire la
trancription qui lui avait été imposée par les vendeurs ori
ginaires.
i
A t t e n d u , d'ailleurs, que les parties de Vissac , ou
ceux quelle représente, en imposant à la société Bravard
la condition de fa ire transcrire avant de pouvoir revendre,
ont suffisamment exprimé qu’ils entendaient conserver leurs
privilèges par l'effet de cette transcription T aux termes de
l'article 2108 du Code civil ;
3 Que cette stipulation , écrite dans les ventes primitives
est devenue obligatoire pour les tiers-acquéreurs, comme
elle l'était pour les acquéreurs originaires, dont ils sont les.
t
ayans cause y
�» Qu’ainsi, et tant que les ventes des i
frimaire de Van i
3 , ri ont pas
3 brumaire et 2.3
été transcrites, le privilège
des premiers vendeurs s'est conservé, tant à l égard des
sous-acquéreurs que des acquéreurs primitifs, qui tous ont
demeuré sous l'empire de la condition stipulée auxdiles
ventes.
» A t t e n d u , enfin, que dans labsence de toute trans
cription, soil de la part du premier acquéreur, soit de celle
des sous-acquéreurs, les parties de Vissac ont pu prendre
insciiption de leur chef,
et’
agir en vertu de leur privilège,
leur est resté dû des prix des ventes dont il
s agit, tant contre la compagnie Bravard ,Faure, que contre
les tiers-acquéreurs, parties dA llem and ».
C e t arrêt a été attaqué en c a s s a t io n , et le p ou rvoi a
été rejeté.
I
D è s avant q u 'il eut été r e n d u , un sec o n d p ro c è s s’était
lié sur 1 opposition plus tardive qui avait été fo r m é e à la
saisie p a r v in g t- c in q
autres d é te n t e u r s ,
du n o m b re
desquels était le sieur Grellet.
Une
décision s e m b la b le est i n t e r v e n u e , le 3 o n o
v e m b r e 1 8 1 6 , au trib u n a l de p r e m iè r e in sta n c e ; m ais
la poursuite p erso n n elle au sieur G r e l l e t , a été a n n u llé e
p a r u n vice de fo r m e d an s la d é n o n c ia tio n qui lu i avait
été faite de la saisie.
C e v ice a y a n t été ré p aré , la saisie a été é g a le m e n t
validée co n tre le sieu r G r e l l e t p ar ju g e m e n t d u .
l o i 8,
�(6 )
L e s vingt-qu atre d éten teu rs co n tre lesq u els a été rendu
le jugem ent du
3 o n o v em b r e
1 8 1 G, n ’en o n t p oint in
terjeté appel. M a is le sieur G r e lle t est ap p ela n t de ce lu i
q u i a p r o n o n c é co n tre lui la m ê m e décision.
S u r la plaidoierie de cet a p p e l , on a soutenu c o n tre
le privilège des h é ritie rs de la B o u la y e , et co n tre la validité
de le u r saisie, le m ê m e s y s tè m e qui avait été déin pros
crit p a r l ’arrêt de la C o u r de R i o m du i
4
mai 1 8 1 7 ,
ainsi q u e par la C o u r de cassation qui a rejeté le p o u r
v o i d irigé co n tre cet arrêt.
O n a n n o n c e q u e la C o u r de
R i o m a été p a rta g é e
d ’op in io n s sur cette n o u v e lle discussion.
E t c ’est en cet état q u e le C o n s e il est consulté.
A in s i le C o n s e il en établissan t la réso lu tio n q u ’il a
ci-d essu s e n o n c é e , ne fera q u ’exp o se r
les m o tifs
qui
d o iv en t d é te rm in e r la C o u r de R i o m à p ersister dans sa
p re m iè r e décision.
L a q uestion sou m ise à la C o u r de R i o m
p eu t être
co n sid é ré e dans la thèse g é n é r a l e , et dans l ’espèce p a r
ticu lière .
L a thèse g é n é r a le consiste à s a v o ir, si in d é p en d a m
m e n t de toute stip u latio n p a r t ic u liè r e ,
il résu lte des
dispositions d u C o d e c i v i l , q u e les re v en tes qui ont eu
lieu sous son e m p ire ju squ ’à la p u b lic a tio n du C od e de
p r o c é d u r e * ont effacé le p riv ilè g e du v e n d e u r p r i m it if
qui n ’avait pas pris inscrip tion avant la r e v e n t e , lorsqup
ni le p r e m ie r co n tra t de v e n te , ni celui de r e v e n t e ,
�( 7 )
n 'o n t point -été revêtus de la fo rm alité de la tra n sc rip
tion.
O n p réten d p o u r le sieur G r e lle t que par le fait seul
de la r e v e n t e , les h y p o th è q u e s p a rticu lière s , et m é m o
le p rivilèg e d u p r e m ie r v e n d e u r , qui n elaien t p oin t
inscrits au p ara v an t cette re v e n te , se tro u v e n t p u rgées ,
sans que le secon d a c q u é r e u r ait b eso in de faire trans
c rire son co n tra t ; d ’o ù l ’on c o n c lu t que le p riv ilè g e des
hé ritie rs de la B o u la y e n 'a y a n t p oin t été i n s c r it , avant la
re v e n te faite par le u r a c q u é re u r au sieur G r e lle t , ce lu ici possède les im m e u b le s par lu i a c q u is , lib re s de le u r
c r é a n c e , et que d ès-lors les poursuites dirigées co n tre
lpi sont nulles.
L a question considérée sous ce p oin t de v u e g é n é r a l,
est ici de peu d ’in térêt, p a rc e q u ’il existe dans l ’alié n a tio n
consentie par les h é r itie r s de la B o u l a y e , u n e co n d itio n
•e xp resse au p ré ju d ice de la q u e lle il serait im p o ssib le
d ’adm ettre que l ’im m e u b le ait passé en d ’autres m a in s ,
lib re de le u r c r é a n c e privilégiée.
O n p o u rra it d o n c se b o r n e r à é ta b lir le
d roit
des
h éritiers la B o u la y e par les conséquences qui résultent
de cette convention.
I l n ’est pas indifférent, ce p en d a n t, de p ro u v e r que dans
le cas m ê m e où ce tte clause n ’existerait p a s , l ’im m e u b le
n ’en serait pas m o in s s o u m is ,
dans la
m a in
du sieur
G r e l l e t , au p a ie m en t de la cré a n c e p riv ilé g ié e ; la sti
p u la tio n q u i a eu p o u r ob jet de co n se rv e r le d roit des
te n d e u rs dans son in té g rité a c q u e rra d ’autant plus de
fo r c e de ce tte d ém o n stratio n p ré lim in a ire .
�f* ;
<. 8)
N o u s c o m m e n c e r o n s d o n c p a r e x a m in e r la question
dan s le p o in t de d roit gén éra l.
^
PREMIER.
>.
Exam en de la question en point/ de droit général.
U ne vérité recon nue de tout tem s, est que les privi
lèges et hypothèques dont un im m eu b le oit gré\é dans
la main de son possesseur, passent de droit à la charge
de celui auquel il transmet 1 im m eu b le par vente ou
autrement.
C ’est pour p rocurer à l ’acquéreur le m o y e n d ’affran^c h ir l'im m e u b le de ces charges hypothécaires que di
verses’ formalités ont été introduites à diverses époques;
le décret volontaire d ’abord ; puis les lettres de ratifica
tion conform ém en t à l ’édit de 1771 ; ensuite la trans
cription des contrats, ordonnée par la loi de bru m aire
an-7 , et m aintenue par le Code civil.
L a loi de b r u m a ir e an 7 , vou la n t e m p ê c h e r q u ’a u c u n
a c q u é r e u r p û t se soustraire à la tran scrip tio n , avait statué
q ue cette form alité était n écessa ire, n o n - s e u le m e n t pour
p u r g e r les h y p o t h è q u e s , m ais m ê m e p o u r o p é re r
la
tran sm issio n de la p ro p rié té ; en s o r t e , q u ’a p rès a vo ir
vendu l'im m e u b le , le v e n d e u r p o u v a it e n c o re le g rev er
de n o u v e lle s h y p o t h è q u e s , tant q u e le contrat n ’avait
pas été transcrit.
:
C ette disposition exorb ita n te au droil c o m m u n fut a b o
lie p a r le C o d e civil, Il n exig e a plus la transcription que
p çu r
�(
9 )'
p ou r o p é rer la p u rgation des h y p o th è q u e s. A l ’é g a rd de
la p r o p r ié t é , il sta tu a , par-son art. i
583 , q u e
la ven te
était p a r fa it e , entre le v e n d e u r et l ’a c h e t e u r , dès q u ’ils
étaient c o n v e n u s de la ch o se et du prix.
\
L ’effet de cfette disposition é ta it, q u ’aussi-tôt la v e n te
c o n s o m m é e , le v e n d e u r cessant d ’être p r o p r ié t a ir e , ne
p o u v a it plus g r e v e r l ’im m e u b le de n o u ve lle s charges. I l
passait entre les m ains de l ’a c q u é r e u r , frappé des seules
h y p o th è q u e s qui existaient au m o m e n t de la ven te.
E t l ’a cq u é re u r ne p o u v a it s’en a ffra n c h ir qu'en faisant
transcri/e son c o n tra t, et en rem plissant les autres fo r
m alités qui lui étaient prescrites.
U n duute fut alors é levé sur le point de savoir si l ’a c
q u é reu r d ’un im m e u b le n ’était ch a rg é q u e des h y p o t h è
ques inscrites à l ’é p o q u e de la v e n t e , et si par le fait
seul de ce lte ven te il était a ffra n c h i de celle s non-ins
c r i t e s , de m a n iè re q u ’il ne fut plus p ossible de les c o n
server par u ne in scrip tion , q u o iq u e l ’a c q u é r e u r n ’e û t
pas fait tran scrire son contrat.
C e doute sem b la it résolu , i ° . par le p r in c ip e g é n é ra l
du droit suivant le q u e l l ’h y p o th è q u e est u n d roit r é e l ,
in h é re n t h l ’i m m e u b l e , qui le suit en q u e lq u e m ain s
q u ’il passe , et qui ne p eu t être effacé q u e p a r les fo r m a
lités introduites p o u r le p u rg e r ;
1
2 ° . P a r l ’art. 211/j. du C o d e , qui é n o n c e te x tu e lle
m en t ce p rin c ip e ;
-
3 °. P a r l ’art. 218 2
, qui p orte : « le v e n d e u r ne transr
2>met h. l a c q u é re u r que la p ro p rié té et les droits q u ’il
B
*
�U l
( io )
*
avait lu i- m è iïié siJr la ch o se v e n d u e ; il les transmet
» sous Vaffectation des mêmes privilèges et hypothèques
.v
X
» dont il était chargé ; »
4°.
•
.
.'
P a r l ’art. a t 8 i , qui dit : « les contrats translatifs!
» de la p ro p riété d ’im m e u b le s ou droits ré els i m m o » biliers que les tiers détenteurs voudront purger de pri» vilêges et hypothéqués , seront transcrits en entier, etc. » '
O n opposait, i°. l'art. 2166 , suivant lequel les créan-,
ciers ayant hypothèque inscrite, ont seuls droit de suivre*
l ’im m eu ble , et doivent être payés suivant l ’ordre de
leurs créances ou inscriptions.
.
2». L.’art. 2 2 8 5 , qui n’accorde le d ro it de s u re n c h è re
q u ’au c r é a n c ie r d on t le titre est inscrit. ,
A u x in du ctio n s tirées de ces articles , on a rép on du
q u ’il ne fallait* pas co n fo n d re le droit
d ’h y p o t h è q u e
in h ére n t à l ’im m e u b le * avec l ’e x e r c ic e de l ’action h y
p o th é c a ire ; q u e p o u r e x e r c e r cette a ctio n , il fallait
sans d ou te q u e l ’h y p o th è q u e
f û t inscrite ; q u e l’ins
crip tio n était n é ce ssa ire , quand on vou la it don n er effet à
l ’h y p o t h è q u e co n tre des tiers-créa n ciers, ou a g ir co n tre
des tiers-détenteurs ; m ais q u ’il n’était pas m o in s certain
que cette h y p o t h è q u e existait sans in sc rip tio n ; que tant
q u ’elle n ’était pas p u r g é e , e lle grev a it l ’im m e u b le dans
la m a in de l'a c q u é r e u r , de m ê m e q u ’elle l ’avait g re v é
dans c e lle du v e n d e u r ; et que par co n séqu en t elle p o u
v a it ê tre inscrite jusqu a ce que l ’a cq u é re u r eût
tran scrire son contrat.
fait
�L ’art.
834
( II )
du C o d e de p ro c é d u re s e m b la it avoir r é
so lu tous les d o u t e s , en d écid ant que l ’inscription p o u
vait être p rise, d epuis la v e n te , ju squ ’à sa tra n s c rip tio n ,
et en a cco rd a n t m ê m e la fa c u lté d e transcrire dans la
q u in zain e p ostérieu re à la transcription.
N é a n m o in s la ju risp ru d en ce a varié sur cette q u es
tion. L a C o u r de P a ris a j u g é , p a r u n
arrêt
décem bre
p ou vait
1809,
que
l ’inscrip tion
ne
du 22
être
prise depuis la vente , q u o iq u e le co n tra t n ’e û t pas été
transcrit ; et la C o u r de P o itie rs a ju gé de m ê m e par
a rrêt du 18 jan vier 1810.
M a is la C o u r de P a r i s , p a r u n autre arrêt du 29 a oû t
1 8 1 4 , est re v en u e au p rin cip e d iff é r e n t, e n co n firm a n t
u n ju g e m e n t q u i avait validé u n e in scrip tio n postérieu re
au co n tra t de v e n te n on -tra n scrit ; et toutes les autres
C o u rs r o y a le s q u i ont eu à p r o n o n c e r su r la m ê m e
q u e s tio n , ont p orté la m ê m e d écision. T e l s sont les
arrêts re n d u s, le
le i
'4 m ars
3 i août 1808, par la C o u r de B r u x e ll e s ;
1 8 1 1 , p ar la C o u r de L y o n ; et le 2 o c to b re
de la m ê m e a n n é e , p a r la C o u r de T u r i n (1).
A u su rp lu s, il ne faut pas confondre l ’inscription dqs
simples hypothèques a v e c c e lle des privilèges. C e tte
d ernière se rè g le p a r des p rin cip e s tout d iffére n s ; e t ,
supposé q u ’il e û t p u e xister q u e lq u e in c e r titu d e su r le
droit q u ’u n c r é a n c ie r h y p o t h é c a i r e du v e n d e u r avait de
(» ) Tou» ce» arrêt» se trçuvçnt au R e c u e ille
tome p i ac. p a r t.,
Pa6- 45 ; tome 10 , a*. p a rt., p ag.rig a et 3^4 î tome 111 2e- part> » f ag* 4^4 î
tome ta ,
pa n ^
^
^ ^^
�(
12
)
s ’inscrire , p o s té rie u re m e n t à l ’a lién a tion faite p a r son
d é b it e u r , de l'im m e u b le h y p o th é q u é ; du m oins il p a
raît constant au C o n seil s o u s s ig n é , q u e la conservation
du p riv ilè g e du ve n d e u r, nonobstant toutes les reventes
u lté rie u res, n'a jam ais pu être ré v o q u é e en d ou te , sur
tout lorsque les tiers - acq u éreu rs n ’avaient point fait
transcrire le u r contrat.
E n e f f e t , le ve n d e u r est dispensé ' d e p rendre lu im ê m e inscription. L a loi a pris soin de co n se rve r e lle m ê m e son privilège. L ’art. 2108 du C o d e est fo r m e l a
cet égard ; il veut que la. tran scrip tion de la v e n t e lui
tien n e lieu d’in scrip tion : de là il suit que le p riv ilè g e
existe tant q u e la v e n te n’est pas tran scrite ; de là il
suit aussi q u e le p riv ilè g e ne p eu t jam ais p érir , puis<q u ’au m o m e n t où le co ntrat est t r a n s c r it , il se tro u v e
co n se rvé par la transcription.
L a c o n sé q u e n ce de ces d e u x p oints certains est é v i
d e m m e n t q u e si l ’im m e u b le passe entre les m a in s d ’un
n o u v e l a c q u é r e u r , avant que le co ntrat de la p re m iè r e
v e n t e ait été tr a n s c r it , le secon d a cq u é re u r n e p eu t r e
c e v o ir cet im m e u b le q u ’ave c la
ch a rg e du p rivilè g e
d o n t il est g r e v é p a r la loi m ê m e .
V a in e m e n t ce seco n d a c q u é re u r c h e rc h e ra it- il a e ffa
c e r le p riv ilè g e dont son acquisition est e m p r e i n t e , e n
faisant tran scrire son p ro p re co n tra t ! I l n ’est pas en son
p o u v o ir de soustraire l'im m e u b le a u x droits du v é n d e u r
e n é lu d a n t la fo r m a lité de transcrip tion du p re m ie r c o n
trat , p re sc rite par le C o d e p o u r la m aintenue du p riv i
lège. L e v e n d e u r p rim itil doit toujours conserver la fat-
�(i
3)
cu lte de faire transcrire lu i- m ê m e son contrat de vente
en cas de n é g lig e n c e de son a c q u é re u r et de c e u x qui lu i
su ccè d e n t \ ou de p ren d re l ’inscription qui doit lui tenir
lieu de la transcription-; a u cu n délai ne lu i a etc p ré s e n t
par la loi p o u r user de celte facu lté. E l l e existe p o u r
lui tant que le p riv ilè g e n’est p oin t éteint p a r la p res
crip tio n de
3o ans.
A d m e t t r e u n systèm e c o n t r a i r e , ce serait favo riser la
plus in to lé ra b le des fraudes. T o u t a cq u é re u r de m a u
vaise foi aurait la p le in e facilité de re v e n d r e , sans avoir
fait tra n s c rire , a u n tiers qui s’em p resserait de c o u v r ir
son p ro p re contrat de la fo rm alité de la transcrip tion ;
et le v e n d e u r p r im it if se tro u v e ra it frustré du p a ie m e n t
de son prix.
C ’est p o u r p ré v e n ir ce g e n re de fraude , q u e le C o d e a
co n servé le privilège du v e n d e u r , ju squ ’à la tra n sc rip tio n
de sa v e n t e , et q u ’il a v o u lu le m a in te n ir dans le tem s
postérieur , par le seul fait de cette transcription.
A in s i la v ig ila n c e de la lo i em brasse tous les tems. L e
co n tra t de v e n te n ’est-il pas tran scrit ? L a co n servation
du p rivilè g e est assurée p a r la volo n té de la loi. V i e n t on à le transcrire , il est m aintenu par l ’effet de ce tte
f o r m a li t é ? C es condii ions légales étant in h é re n te s au
c o n tra t, elles sont o b lig atoires p o u r tous les a cq u é re u rs
s u b s é q u e n s , c o m m e p ou r le p r e m ie r a c q u é r e u r , p a rce
que l ’im m e u b le ne p e u t le u r être transm is q u ’a u x c o n
ditions in h ére n te s à cette transm ission , conditions i m
p rim é e s par la lo i m ê m e .
Ces p r i n c i p e s , co n servateu rs du p r i v i l è g e , onl é té
�( i
t r è s - disserteraient
4
)
d év e lo p p é s , dans les m otifs d ’un ar
rêt r^ndu par la C o u r de G r e n o b l e le 8 février 18 10 ,
ra p p o rté au
r e c u e il de S i r e y , to m e
10,
2 e. p a r t i e ,
p a g e 382 ; et il est à re m a rq u e r q u e dans l ’esp è ce de
c e t a r r ê t , la question s’agitait n on pas entre le v e n d e u r
et le secon d a c q u é re u r , m ais entre le
ve n d e u r et
un
c r é a n c ie r du second a c q u é r e u r , qui étant i n s c r i t , o p
posait la n on -in scrip tion du p rivilège. L ’arrêt a jugé
q u e la transcription de la seconde
v e n te , n ’avait p oint
éteint le p rivilè g e de la p rem ière.
A la vérité la C o u r de cassation, n ’a pas professé la
¿3
83
m ê m e d o c t r in e , dans un arrêt du
décem bre i i ,
q u i a prononcé le rejet d’un pourvoi contre un arrêt
de la C o u r de N ism e s du
3 ju in
1808.
O n l i t , dans les m o tifs de ce lte d écision de re jet, q u e
le v e n d e u r p r iv ilé g ié est tenu de p re n d re in scrip tio n
c o m m e le sim p le h y p o t h é c a i r e , et q u e l ’i n s c r ip t io n ,
p o u r être v a la b le , d e v a i t , dans l ’in tervalle é c o u lé jus
q u ’au C o d e de p ro c éd u re , être prise dans le tem s où
l ’im m e u b le était e n co re e n tre les m ains du d é b i t e u r ,
et q u e , faite p o s té rie u re m e n t à l ’a lié n a t i o n , e lle est
n u l l e , soit q u e l ’acte d e m u ta tio n ait été o u 'n o n trans
crit.
M a is
il faut
r e m a r q u e r q u e , dans l ’espèce sur la
q u e lle l ’arrêt de N ism e s a v a it s ta tu é , les seconds a c q u é
reurs a vaien t fait transcrire le u r co n tra t lo n g -te m s avant
q u e le ve n d e u r p riv ilé g ié eût pris inscription ; il faut o b
server aussi que 1 arrêt de la C o u r de cassation n ’est
q u ’un arrêt de r e j e t , et que cet a rrê t, i s o l é , n ’a p o in t été
�( i
5;
considéré , par les C o u r s r o y a l e s , c o m m e fo rm an t ju ris
p ru d e n ce ; c a r , d e p u is , la C o u r ro y ale de P a ris a rendu
l'arrêt du 2 g a o û t 18 1 4 , que nous avons cite plus h a u t ,
et
qui , r e la tiv e m e n t à l ’in scrip tion d’u n sim p le titre
h y p o t h é c a ir e ,
a co n sa cré le s m ê m e s principes que les.
C o u rs de B r u x e l l e s , L y o n et T u r i n avaient adoptés déjà
par leurs arrêts de 1808 et 1 8 1 1.
f
D e p l u s , ce qui s’a p p liq u e b ien m ie u x à l’esp èce a c
tu e ll e , la C o u r ro y a le de P a ris a , tout r é c e m m e n t , à
l ’au d ien ce de sa p re m iè re C h a m b r e , m a in te n u u n p ri
v ilè g e de v e n d e u r , qui n ’avait été inscrit que p o sté rie u
re m e n t à la transcrip tion faite p a r le secon d a cq u é re u r,
de son contrat.
D a n s cette e s p è c e , L a fo s s e était cré a n cie r de C h a u v e a u - J o u v e t , a v e c h y p o t h è q u e in scrite en 1809.
E n 181 o , L afosse avait ve n d u à. C h a u v e a u , des b ien s
h y p o th é q u é s à la c r é a n c e de ce d e rn ie r ; et p o u r se l i
b é r e r , il avait co m p en sé 1 1 , 6 1 1 fr. sur le prix.
E n 1 8 1 1 , C h au veau avait re v e n d u à L is o i r e , m o y e n
5 4^5
nant 1 ,
fr., ou tre les charges.
C e t acte de ven te
n ’avait point été tr a n s c r it, n o n plu s q u e ce lu i de 1810.
E n 1 8 1 1 Lisoire avait revend u à divers , et ces d e r
4
n iers acq u éreu rs avaient fa it transcrire le u rs contrats.
L e p rivilège de C h a u v e a u n ’était p oin t inscrit.
L ’o rd re fut ouvert ; C h a u v e a u y re q u it sa c o llo ca tio n
p ar p rivilège.
S a d em an d e fut contestée p a r les créan ciers p erson n els
de L afosse et L i s o i r e , qui sou tinrent que le p riv ilè g e
�( 16 )
/■
était é t e i n t , faute d ’avoir été inscrit dans le délai fixé par
l'art.
834 du C o d e de
p ro céd u re .
L e p rivilè g e fut en eifet rejeté.
S u r l’a p p e l , la C o u r ro y a le de P a ris a infirm é le ju g e
m e n t , et ord on n é le p a ie m e n t de la cré a n ce p rivilég iée.
L e s contrats de v e n te sur lesquels cet arrêt a s t a t u é ,
son t, il est v r a i , postérieurs au C o d e de p ro céd u re ; a i n s i ,
le p r iv ilè g e , en supposant q u ’il eût besoin d e t r e com er.vé
p a r u n e in s c rip tio n , aurail pu être va la b le m e n t inscrit
depuis la transcription des d ernières ventes, p ou rvu q u'il
l ’e û t été dans la q u in za in e après c e tle tran scrip tion ; m ais
c o m m e il n ’existait a u cu n e in scrip tion du v e n d e u r , la
question se présentait dans une espèce.semblable à celles
qui ont eu lieu dans l ’intervalle an térieu r au C o d e de
p ro c é d u re ; et ce n ’est q u e p a r la fo rce du p r i v i l è g e , par
l ’effet de la m a in te n u e lé g a le qui résulte en sa fa v e u r de
l ’article 2108 du C o d e c iv il, que la C o u r ro y a le de P aris
a pu se d é te r m in e r à le faire p r é v a l o i r , q u o iq u e n on ins
c r i t , sur les cré a n ciers h y p o th é c a ire s inscrits.
C ’est en e f f e t , dans ce p r in c ip e , que la C o u r r o y a le
' de P a ris a puisé ses m otifs de décision.
L a saine d o c tr in e sur ce tte m a tiè re y est trop judi
cieu sem e n t é ta b lie p o u r ne pas les ra p p o rte r :
y> C o n sid éran t que tous les effets de la vente d ’un i m » m e u b le ne sont co n s o m m é s entre le vend eu r et l ’a c » q u é r e u r , que p ar le paiem ent du p r i x , et que par u ne
» p re m iè r e c o n sé q u e n ce de ce p r i n c ip e , la loi d o n n e
» au v e n d e u r 1 action r é s o l u t o n e , faute de p a ie m en t j
» qu h 1 égard des tie rs, les droits privilégiés du v e n d e u r
sont
�<
*7
)
» sont conservés par la tra n sc rip tio n du co n tra t et l ’ins» crip tio n d’o ffic e , conformément à larticle 2108 du
* Code civil.
» C onsid érant que cet a rticle n ’o b lig e pas le v e n d e u r
» à. faire p e r so n n e lle m e n t l ’acte co n servatoire de son
» p rivilège ; que l ’om ission de l ’in sc rip tio n d 'office n ’a
» a u cu n effet co n tre l u i , et d o n n e s e u le m e n t a u x tiers
» u n e action co n tre le c o n se rv a te u r des h y p o th è q u e s.
» Considérant que l ’acqu éreu r, encore débiteur de
» son p r ix , en ne fa isa n t pas fa ir e la transcription qui
» est à sa charge, ne peut égalem ent, p a r son f a i t , p ré-
* judicier aux droits privilégié# de son vendeur, ni c o n » fé re r à ses cré a n cie rs p erso n n els, p a r voie d ’h y p o » th èq u e,
plus de droits q u ’il n ’en a lu i - m ê m e sur
*» l ’im m e u b le .
» Que ne pouvant avoir la chose et le p r ix , ne pouvant
» transmettre la propriété que telle quelle est en ses
* mains, ses créa n ciers, à son lieu et p la c e , d o iv e n t, sur
» le p rix de la r e v e n t e , supporter comme lui - même le
» prélèvement de la créance privilégiée du vendeur pri» mitif
» Considérant que la transcription qui a été faite seu» le m en t du contrat de r e v e n t e , n ’a p o in t p u rg é l ’im » m e u b le de la ch a rg e de ce p ré lè v e m e n t 5 q u ’a u x term es
» de l ’article 218 2 du C o d e c i v i l , la transcrip tion n e
» pu rge pas ; q u ’étant suivie de la notification a u x cré a n » ciers in s c r it s , elle m et le p r ix à le u r d is p o s it io n , et
que dans 1 ordre à fa ire , ce p r i x est sou m is à l ’e x e r » cice de tous les droits préexistans.
C
�( i8 )
*
C o n sid éran t q u e l'article
834 du
Code de P r o c é -
» d ure , e x te n s if du d roit des cré a n ciers h y p o th é c a ir e s _
» en g é n é r a l, ne peut être entendu dans un sens restric» tij\ à l'égard du vendeur-, dont il réserve au contraire
» tous les droits privilégiés, suivant l'article 2x08 du Code
» civil r>.
C e t arrêt est du 22 d é c e m b r e 1 8 1 7 , et il a été re n d u
sur la p la id o ie rie de M r. T r i p i e r , l ’u n des C o n seils
soussignés.
-
O n voit q u e le« p rin c ip e s q u ’il a consacrés , s'ap
p liq u e n t p a rfa ite m e n t à l ’espèce actuelle.
L a cause des h éritiers de la B o u la y e se présente m ê m e
dans une circonstance plus décisive. C e n’est point,contre
des tiers-créan ciers q u ’ils r é c la m e n t le u r p r iv ilè g e , c ’est
co n tre le d é te n te u r
de l ’im m e u b le p a r
eux v e n d u ,
et te n u en cette qualité de toutes les ch arge s et o b lig a
tion s de son ven d eu r ; o r , s’il est constant que le p r i v i
lè g e n ’a pas m ê m e b esoin d ’être inscrit p o u r o b te n ir
la p ré fé re n c e sur les h y p o th è q u e s in scrites, à plus forte
ra iso n d oit-on re co n n a ître que l ’inscription est su perflu e
-p ou r la co n servation du p rivilè g e co n tre le d éten teu r det
l ’im m e u b le .
D ’a illeu rs, en supposant m ê m e q u e le sieur Grellet,
e û t pu. se p r o c u r e r l ’a ffra n c h issem e n t du p r i v ilè g e , en.
faisant tran scrire son c o n t r a t , il n ’a pas m ê m e r e m p li
ce tte form alité \r et , dès l ’année
1808 , les héritiers,
de la B o u la y e o n t pris u n e inscription.
C e tte in s c rip tio n a été prise en tem s utile ; elle est,
p o u r e u x l ’équ ivalen t de, 1$.transcription, de. le u r propre.,
�- ( i
9
)
contrat ; et p oü r dette tra n s c rip tio n , la lo i nè le u r pres
crit a u cu n d élai ; c ’est e n c o re * dans la cause a c t u e lle ,
u n n o u v e a u m o t i f de d écision q u i ne se re n co n tra it
pas dans les esp èces ju gées par l ’arrêt de la C o u r de
G r e n o b l e , d u 8 fé v r ie r x 8 i o , et par ce lu i de la C o u r
ro y a le de P a r is , du 22 d é c e m b r e 1 8 1 7 : car, dans l ’u n
et l ’a u t r e , le co ntrat du d e u x iè m e a c q u é re u r était c o u
vert p a r la fo rm a lité de tran scrip tion , sans in scrip tio n
du v e n d e u r prim itif.
A in s i , par la seule fo rce du p rin c ip e g é n é r a l , les
hé ritie rs de la B o u la y e p ou rraien t o b te n ir co n tre le sieur
G r e lle t la m ê m e co n d a m n a tio n qui a déjà été p ro n o n c é e
p a r la C o u r r o y a le de R i o m , co n tre tous les autres d é. tenteurs de la terre d ’A l l è g r e , q u i se tr o u v e n t dans la
m ê m e position q u e lu i.
M a is il existe u n autre m o t if de d écision p é r e m p to ir e ,
spécial dans la c a u s e , c ’est c e lu i q u e la C o u r r o y a le de
R i o m a adopté p a r son arrêt du i
4
m a i 1 8 1 7 , et q u i
résulte de la clau se insérée au co ntrat d é ven te p r im it if,
du
23 frim aire
an i3 .
C ’est sous ce second rap port que nous allon s e x a m in e r
la question.
Examen de la question d'apfès là clause spèciale du
conifal de'vente,
, 1 1 serait im possible d e d éterm in 'eí íes'e ffe tá de1 cettd
c la u s e , m ie u x q u i l s n e le ksbnt' par les m o tifs db l ’arrêt
C 2
�*'<»„
( 20 )
déjà
re n d u
sur cette question , p a r la C o u r ro y a le
de
R i o m , le i 4 m a i 1 8 1 7 . L e s p rin cip e s y sont posés d ’u ne
m a n iè re claire et lu m in e u se qui repousse toutes les o b
jections.
L a C o u r ro y a le de R i o m a très-justem ent r e c o n n u
q u ’il résultait de cette clause que jusqu’à la transcription
la compagnie Bravard ri avait pu disposer l i b r e m e n t *
des biens dépendons de la terre d'Allègre. —
Qu'en re
vendant à des tiers, elle n’a pu leur transmettre la pro
priété que sous la même condition de fa ire faire la trans
cription. —
Que par cette condition les vendeurs ont suf
fisamment exprimé qu’ils entendaient conserver leur pri
vilège par l e ffe t de cette transcription aux termes de l'art.
2108 du Code civil. —
Que cette stipulation écrite dans
les ventes primitives, est devenue obligatoire pour les tiersacquéreurs, comme elle létait pour les acquéreurs origi
naires , dont ils sont les ayans cause.
A u c u n de ces p rin cip e s ne peut être contesté. Il est
p e r m i s , en e f f e t , à c e lu i qui tran sm et sa p ro p rié té à
titre o n é re u x ou g r a tu it , d ’im p o se r à cette transm ission
toutes les co n d itio n s q u ’il lui p la ît de p re sc rire , p o u r v u
q u ’elles n ’aient rie n d ’im p o ssib le ou de p ro h ib é ; art.
1 1 7 2 ‘du C od e. O r c e rta in e m e n t la co n d itio n de ne p o u
vo ir alié n e r a v a n t d ’avoir fait tr a n s c rire , et d ’o b lig e r
les n o u v e a u x a cq u é re u rs à fa ire tran scrire, est une c o n
d itio n lic ite , d o n t la lo i assure l ’e x é cu tio n .
D è s q u e la p ro p rié té n ’est transm ise que sous ce tte
c o n d itio n , il est b ie n évident q u e la condition est o b l i
g a to ire n o n - s e u le m e n t p o u r l ’a c q u é re u r a u q u e l e lle est
�im posée, m a is p o u r tous c e u x a u x q u els il tran sm e ttra lu im ê m e l ’im m e u b le ; car en fait de p rop riété , on ne p eu t
céder que les droits que l ’on a ; on ne p eu t transm ettre
que la propriété circo n scrite et lim itée de la m a n ière
d ont on la possède ; et il n'est pas possible de c o n c e v o ir
que celu i qui a cq u ie rt u n i m m e u b le , o b tien n e sur cet
im m e u b le plus de droits que n’en avait son v e n d e u r , et
que l ’e x e rcice de sa p rop riété ne soit pas lim it é , dans ses
mains, par les m ê m e s conditions et restrictions im posées
à celui dont il p rend la place.
O n s’est livré , p ou r le sieur G r e l l e t , à u n e discussion
b ie n oiseuse , quand on a v o u lu e x a m in e r de q u e lle n a
tu re était la clause qui im posait à la c o m p a g n ie B r a v a r d
la condition de ne p o u v o ir re v en d re sans Faire transcrire ;
quand on a r e c h e r c h é si c ’était u ne co n d itio n ou suspen
sive , ou ré so lu to ire, o u s e u le m e n t u n m o d e d ’e x é cu tio n .
Ces distinctions, ces subtilités sont e n tiè re m e n t su p er
flues. L a clause est aussi sim ple que claire; son o b jet est
d e m p ê c h e r que la c o m p a g n ie B r a v a r d puisse disposer
de 1 i m m e u b le qui lui est v e n d u , sans q u e son a c q u é
re u r soit g re v é c o m m e e lle d u privilège des vendeurs
primitifs* pour le paiem ent de leur prix. C ’est e n ce sens
que l’exercice de la p ro p riété est lim it é , tant co n tre la
c o m p a g n ie B ra va rd que co n tre tous c e u x au xqu els elle
transm ettrait cette p ro p riété et l ’e x e r c ic e de ses droits.
Q u e l ’on relise la clause ; elle n ’e x p r im e pas autre chose.
O n y lit d a b o rd : « les acquéreursjferorti transcrire le
( * présent co n tra t à le u rs frais au b u r e a u des hypo*» th èq u es q u ’il a p p a rtien d ra , et c e sous six sem aines de
�( 22 )
■
» ce jo u r , avant aucune aliénation des biens vendus ».
A in s i p ro h ib itio n d ’a lié n e r avant davoir ja it transcrire,
c ’en serait assez déjà p o u r q u ’en cas d’alién ation , sans
avoir fait t r a n s c r ir e , les a cq u é re u rs de la c o m p a g n ie
B r a v a r d fussent te n u s , c o m m e elle l ’é t a i t , d ’o p é r e r cette
transcription.
M a is des sou s-acq u éreurs tels que le sieur G r e lle t ,
auraient p u disputer sur cette p re m iè re c la u s e , et so u
te n ir q u ’elle ne suffisait pas p o u r les o b lig e r p e rso n n e l
le m e n t. C ’est p o u r p r é v e n ir to ute d ifficu lté, et ren dre
l ’o b lig a tio n de tran scrire et c o n se rv e r le p r iv ilè g e , te lle
m e n t in h é re n te à la transmission de p r o p r ié t é , q u e l l e
ne p û t en être séparée par aucun acquéreur postérieur,
qu e l ’on a jo in t à la p r e m iè r e clause u n e stip u lation
ainsi c o n ç u e : Ce qui est stipulé comme condition essen
tielle des présentes, et suspensive de la vente jusqu’à l’ac
complissement de cette formalité.
V o i l à d o n c , par ce tte secon d e c la u s e , la vente re n d u e
co n ditio n n e lle à cette tra n sc rip tio n ; v o ilà d o n c tous les
seconds a cq u é re u rs tenus c o m m e le p r e m ie r d ’o p é re r
c e tte transcription. Ils en sont te n u s , p a rc e que le u r
v e n d e u r n'a p u le u r tran sm ettre q u ’à ce tte co n d ition ;
p a r c e q ue l e u r droit de p ro p riété était s u b o rd o n n é c o m m e
le sien à l ’a c c o m p lis s e m e n t de ce tte fo r m a lité ;p a r c e q u ’à
l ’égard du v e n d e u r p r im it if, ils n e sont p ro p riétaires
q u ’en co n sid é ra n t la tran scrip tion c o m m e a cc o m p lie à
lp u r é g a r d , q u ’en s u b o rd o n n a n t la p ro p riété dans le u r
p e r s o n n e à tous les effets de la transcription.
Q u e l ’on a p p e lle m aintenant cette condition comrrçe
�c ^ n --------------------------------------on v o u d r a o u suspensive, ou ré so lu tiv e ou s e u le m e n t
mode d’exécution ; toujours est-il constant q u ’e lle est
c o m m u n e a u x seconds a c q u é re u rs , c o m m e au p r e m i e r ,
q u ’elle est é g a le m e n t ob lig a to ire p o u r tous. C e n ’est pas
là une sim ple h y p o t h è q u e qui ait b e s o in d’inscription
p o u r va lo ir co n tre les tiers ; c ’est u ne v e n te co n ditionelle^qui n'existe que sous la c h a r g e expresse de su b ir
tous les effets de la co n d itio n . C ’est ainsi q u e lo rs q u ’u n
a c q u é re u r est g re v é d ’u ne co n d itio n d e r é m é r é , d ’u n
p acte c o m m is s o ir e , d ’une retenue d’u su fru it ou de se r
v itu d e , au profit de son v e n d e u r , c e u x qui a c h è te n t de
cet a c q u é re u r se trou ven t soum is de d ro it, et p a r la seule
fo r ce du contrat, p r i m it if, a u x m ê m e s c h a r g e s , a u x
m ê m e s obligations.
A u s u r p l u s , sans a voir b eso in de d istingu er , on p eu t
dire que la clause est to u t-à -la -fo is su sp ensive, ré so lu T
toire , et m o d e d ’exécu tion.
Suspensive, n o n p o u r e m p ê c h e r q u ’il n ’y ait eu, en effet,
vente et transm ission de p r o p r ié t é ; m ais suspensive dans
le sens de la clause o ù ce m o t est e m p lo y é ; c ’est-à-dire
q u e 1 e x e rc ic e du droit de p ro p riété ne p eu t pas a lle r
jusqu’à se dispenser de transcrire , jüsqu’h s’affranchir
du privilège en ne transcrivant pas , jusqu’à p o sséd er
l ’im m e u b le lib re de l ’o b lig a tio n de p a y e r , au p r e m i e r
v e n d e u r , le p r i x qui lui est dû. T e l l e est la lim ite p re s
crite au droit de p r o p r i é t é , et c ’est à ce t égard q u e la
co n d itio n est suspensive.
Résolutoire ; en ce que le v e n d e u r au rait eu droit de
f^ire résoudre la v e n t e ,
faute d ’a c c o m p lis s e m e n t
des
�(
conditions du contrat.
*4
>'
M a is on sait que le v e n d e u r a
d e u x actions ; l ’u ne , p o u r son p a ie m en t sur l ’im m e u
b le ; l ’a u l r e , p o u r re n tre r dans sa p ro p rié té à défaut de
p a ie m e n t , ou d ’e x é cu tio n des autres conditions ; et de
ces d e u x a c tio n s , le v e n d e u r est lib re d ’e x e r c e r ce lle
q u i lui plaît.
Mode d'exécution enfin ; en ce que , à l ’égard du
p r e m ie r et du secon d a c q u é r e u r , le m o d e d’e x é c u tio n
de la ven te était de la faire transcrire p o u r assurer la
co n se rva tio n du p rivilè ge ; et à l'é g a rd des héritiers de
la B o u la y e , v e n d e u r s ,- l e m o d e d ’e x é c u tio n est de c o n
sidérer la transcription c o m m e e ffectu ée vis-à-vis de
ceux qui s’étaient obligés de l ’o p é r e r ; et en conséquence
d ’e x e r c e r sur 1 i m m e u b le le p rivilè g e conservé par l ’o b li
g ation im p o sé e à tous les a c q u é r e u r s , et de se faire p a y e r
sur l ’i m m e u b l e , de le u r c ré a n c e p rivilégiée.
V a in e m e n t p r é t e n d - o n , p o u r le sieur G r e l l e t , que
les h é ritie rs de la B o u la y e n’ont droit de p ro c é d e r co n tre
lui que p a r v o ie de ré so lu tio n de son co n tra t d ’a c q u i
s itio n , et n o n p a r v o ie de saisie im m o b ilia ir e , de l’i m
m e u b le d o n t il est d éten teu r ! C ’est u ne erreur p a l
p able. O n se fon de sur ce q u e le sieur G r e lle i n ’est
pas d é b ite u r p e r s o n n e l , c e la -est vrai ; m ais ce
n ’est
point c o m m e d é b ite u r p erso n n el que la saisie est e x e r
c é e contre lui ; c ’est c o m m e d éten teu r de l ’im m e u b le
a ffe c té au p a ie m e n t de la créance p rivilégiée. A cet
é ga rd , il ré p ète q u e l ’im m e u b le est libre dans ses m ains,
p a rce que la c r é a n c e n a pas été inscrite avant son a c
quisition , et ne l ’a été q u e depuis : c ’est la q uestion
.
�( 25 )
par la q u e s tio n , et c ’est ce tte question q u ’il s’agit de
résoudre.
O r , il est p ro u vé q u e ce tte
q u estion ne p eu t pas
faire l ’objet d u doute le plus léger. L e sieu r G r e lle t
n ’a pas m ê m e fait transcrire son co n tra t ; ainsi , il
n ’aurait pu p u rg er le p riv ilè g e , q u an d m ê m e ce privi
lè g e aurait été su sceptib le d ’être p u rg é à son égard.
M a i s v a in e m e n t a u rait-il co u v e rt son p ro p re co n tra t
de la fo rm a lité de la t r a n s c r ip t io n ; le p r iv ilè g e était
impérissable p o u r l u i , p a rce q u e la m a in te n u e de ce
p r iv ilè g e était u ne co n d itio n substantielle de l’aliénation
consentie par les h éritiers de la B o u la y e , p a r c e q u e le
sieur G r e lle t n ’a p u deven ir p ro p riéta ire q u e sous la
co n d ition irritante de le c o n s e r v e r , et p a r co n sé q u e n t
d ’en subir l ’effet.
C e n ’est p oin t co n tre des tiers cré a n cie rs q u e les h é r i
tiers de la B o u la y e se d éfe n d en t dans la cause. I l ne s’a g it
p oin t ici d’o rd re , de distribution de p r i x , de p r é fé r e n c e
a d ecid er entre des créan ciers inscrits avant la v e n te , et
Un p rivilégié qui n ’a été inscrit que depuis. Sous ce r a p
p ort m ê m e , les h éritiers de la B o u la y e seraient surs d’o b
te n ir une décision s e m b la b le à ce lle s p ro n o n c é e s par l’arrêt
de G r e n o b le du 8 fé v rie r 18 10 , et p a r ce lu i de la C o u r
de P a r is , du 22 d é c e m b r e dernier. M a i s le u r droit est
b ie n p lu s i n c o n t e s ta b le , quand ils n’ont à le s o u te n ir q u e
co n tre u n tiers d é t e n t e u r , lié par les co n d itio n s irritante
e t indivisible de sa p r o p rié té , o b lig é de su b ir l ’e ffet d ’uri
p rivilè g e qu’il était te n u de co n se rv e r c o n tre lu i- m ê m e .
■'
*
-
D
�ftj:
( 26 )
L ’ob je ctio n faite co n tre le m o d e de p ou rsu ite e x e r c é e
par les h éritiers de l a B o u l a y e , est d on c sans fo n d e m e n t.
Ils auraient eu d ro it, sans d o u t e , de d e m a n d e r la rési
liatio n de la vente p a r e u x co n sen tie , rpais ils ont d ro it
aijssi d ’e x ig e r Ipur p a ie m e n t sur l ’i m m e u b le , pn ve rtu
de le u r privilègp j d ès-lo rs q u ’il est p ro u v é q u e c e p riv i
lè g e n ’est p oin t éteint et subsiste dans toute-*sa fo r c e
co n tre le tiers, détenteur. .
E t q u ’on n e s’y trom p e pas, si les h éritiers de 1î* B o u la y e a vaien t p ré fé ré l ’action en réso lu tio n du c o n tr a t, à
c e lle en p a ie m e n t de le u r p r i x , ce n ’est pas le co n tra t
de revente fait au sieur G r e lle t dont ils a u raien t p r o v o
qué la résiliation , mais b ie n la v e n te co n se n lie par e u x m ê m e s à la c o m p a g n ie B ra va rd ; tel est le droit du ven
d eu r q u i n ’est pas p a y é de son p r i x , il p e u t faire a n n u lle r
la v e n te qui a fait sortir l ’i m m e u b le de ses m a i n s , afin de
l ’y faire r e n t r e r ; et ce d r o i t , il l ’e x e r c e tant co n tre son
,
a c q u é r e u r , que co n tre c e u x a u x q u e ls c e lu i- c i a tran s
m is l'im m e u b le . L e s tiers a cq u é re u rs sont fo r c é s de su
b i r à cet é g a rd le sort du p r e m ie r a cq u é re u r.
Il
;
en est de m ê m e de l ’a ctio n en p a ie m e n t du p r i x ;
c o m m e c ’est l ’im rn e u b le q u i d o it le p r i x , le v e n d e u r ,
lib re du c h o ix de son a c t i o n , a le droit d e po u rsu ivre
son p a ie m e n t co n tre le tie rs-d é te n teu r q u i,, c o m m e le
sieur G r e l l e t , es^ sou m is ^ l ’ç ^ e r e ic c d u priyiliîge.
E n VA^N le sieu r Grellet; <^it-il qu,’il lui ço n y ien d ra it
m i e u x d e voix e x e r c e r co n tre lu i l ’açtion en résolution,
de la v e n te , p a r c ç q u ’aï; m oin s il aurait $.on i-çççurs p o u r
/
�(
»7
)
la p o rtio n de son p r i x q u ’il a p a yé e. I l ne s’agit pas ici
des co n v e n a n c e s du tie rs-d é te n te u r , m ais des droits d u
v e n d e u r. L e v e n d e u r a d roit de p o u rsu ivre son p a ie m e n t
1
p ar saisie de l ’im m e u b le , L a saisie des lié rilie rs de , a
Boulay.e a d onc, été v a la b le m e n t e x e rcé e .
L e m o t if de c o n v e n a n c e , a llé g u é par le sieu r G r e lle l ,
est, d ’ailleurs, d ép o u rv u de raison. Si la terre est ve n d u e
par suite de la saisie, les lié rilie rs de la B o u la y e ne p o u r
ro n t toujours to u c h e r , sur le p rix de l'a d ju d ic a tio n , que
ce qui-leur re^te d û , déduclio.n fÿite des à - c o m p te s q u ’ils
ont reçus \ et le sieur G r e lle t aura son re co u rs sur l ’e x
c é d a n t, c o m m e il l ’aurait en cas de ré so lu tio n de la
v e n te sur la p o rtio n du p rix p rim itif qui p eu t avoir été
payée.
E n fin , si le sieur G r e lle t p ré fè re la ré so lu tio n de son
contrat p articu lier à l ’a ctio n en p a ie m en t qui s’e x e rc e
co n tre l u i , il est b ien m a îl r e de d é g u e rp ir ; la loi lu i
d onne à cet égard to ute fa cu lté .
M ettan t
à part toutes ces vaines considérations, il
faut rentrer dans le principe. L e privilège subsiste ; il
n ’est point éteint ; à titre de tiers-détenteur le sieur
G r e lle t
en
est
d oublem ent ten u ,
et p ar le p rin c ip e
g é n é ra l de d ro it, parce que ce p rivilège n ’est pas p u r g é ;
et p a r la co n d itio n in h é re n te à la p rop riété q u i lu i a
été transm ise. D è s -lo rs que le p r iv ilè g e s u b s is t e , l ’e x e r
c ice de la poursuite
en p a ie m e n t co n tre le tiers-dé
tenteur en est la c o n sé q u e n c e nécessaire.
'
A in s i l ’arrêt d éjà ren d u p a r la C o u r r o y a le de R iorn ,
�le 1
4 m ai
( 28 )
1 8 1 7 , et m a in te n u p a r la C o u r de cassation ,
est fon dé su r les plus justes m otifs ; et l ’on doit cro ire
q u ’il s e rv ira de rè g le à la d écisio n q u e la m ê m e C o u r
est ap p elé e à re n d re
sur la m ê m e q u e s t i o n , su r les
m ê m e s actes , sur les m ê m e s d r o i t s , sur les m ê m e s r e
lations existantes e n tre le v e n d e u r et les acq u éreu rs.
Délibéré à P a ris, le 28 mai 1 8 1 8 , par les anciens
Avocats soussignés,
D E L A C R O IX -F R A IN V IL L E .
BONET.
T R IP IE R .
P E R SIL .
J. P . D E L A H A Y E .
T E S T U , Imprimeur de L L . AA. S S . Mgr. le Duc d'O r lé a n s et Mgr.
P
rince de C o n d é , rue H autefeuille, n°. 13.
( 1818) .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Joly de Fleury, Comte. 1818]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delacroix-Frainville
Bonet
Tripier
Persil
Delahaye
Subject
The topic of the resource
hypothèques
ventes
conflit de lois
procédures
nullité
créances
saisie immobilière
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour M. le Comte Joly de Fleury, Conseiller d’État, ancien Procureur général au Parlement de Paris ; M. le Comte de La Tour-du-Pin, et mesdames de La Boulaye, leurs épouses ; contre le sieur Grellet.
Table Godemel : Transcription : 5. l’obligation de transcrire avant aucune aliénation des biens vendus, imposée à l’acquéreur comme condition essentielle et suspensive de la vente jusqu’à l’accomplissement de cette formalité, a-t-elle l’effet de conserver le privilège du vendeur, sans qu’il ait besoin de prendre inscription, même à l’égard des tiers acquéreurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Testu (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1818
An 13-1818
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2408
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2407
BCU_Factums_G2406
BCU_Factums_G2409
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53462/BCU_Factums_G2408.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Allègre (43003)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
Créances
hypothèques
nullité
procédures
saisie immobilière
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53461/BCU_Factums_G2407.pdf
48aaa4ad21c1f3c53626134256a97544
PDF Text
Text
<r
COUR ROYALES
PRECIS
DE RIOM ,
i re. Chambre.
EN RÉPONSE
POUR
M. le l Comte JO L Y DE F L E U R Y ,' Conseiller
d’Etat, ancien Procureur général au Parle
ment de Paris ; M. le Comte de LATO U R
DUPIN ; les dames de L A B O U L A Y E , leurs
épouses, et autres, intimés;
CONTRE
Le
GRELLET, proprié
taire habitant à Allègre appelant
,
sieur B
arthélémy
,
.
W W Y W V Y W V VY\ l \ \
l
o r sq u ’ e n
s'appuyant sur des principes g é n é ra u x ,
'o
enst o b lig é, pour arriver aux conséquences, de tra-
y e rser quelques idées abstraites ; il n’est pas étonnant;
�qu’on s’écarte du véritable sens cle la difficulté qu’on
doit résoudre; et voilà pourquoi le sieur G rellet, en
discutant avec détail les questions qu’ il soumet à la
décision de la C o u r , a oublié ce qu’il avoit dit en
commençant, « qu’il ne suffit pas de réunir La justesse
« du sens à la connoissance des règles et de leurs dé« tails , mais qu’il faut encore mettre la plus grande
« attention à rechercher l’esprit de chaque r è g le , à
« en balancer l’ usage, et à discerner l’étendue et les
« bornes qu’elle doit avoir. »
Il s’agit moins ici des règles générales établies par
la l o i , que de la règle particulière écrite dans le con
trat de v e n t e , d’une règle de convention dont l’exé
cution est toujours sacrée pour les parties; il s’agit de
savoir dans q u el esprit cette condition ou ce mode
a été stipulé comme essentiel1 entre un vendeur et son
acquéreur; quelle étendue il devoit et pouvoit a v o ir ,
et s’il a frappé une revente qui étoit le principal
objet de la prévoyance des parties. V o ilà la difficulté
unique; elle ne peut pas se subdiviser et ue dépend pas
le moins du monde de la question fort controversée de'
savoir si, avant le Code de procédure, un simple con
trat de vente, sans transcription, a purgé les hypothèques
non inscrites.
Fixons-nous bien sur le f a it , sur les circonstances
qui l’entourent, et il en sortira, comme conséquence
im m édiate, que ni le tribunal dont est appel, ni la
C our elle-même qui a déjà rendu un arrêt contradic
toire contre d’autres tiers acquéreurs, n’ont confondu
les principes.
�C3 )
Dans le courant de l’an 3 , les héritiers vdu sieur
D o u et de Laboulaye, propriétaires d’ une moitié indi
vise de la terre d’A llè g r e , voulurent l’aliéner; la com
pagnie Bravard se présentoit pour l ’acheter; déjà elle
avoit acquis l’autre moitié appartenant à la dame Douet
de la Massée,
Les vendeurs habitoient Paris , à plus de cent lieues
de la situation des biens; n’étant, par conséquent, pas
à portée de ve iller continuellement à la conservation
de leurs droits; ils traitaient d’ailleurs, non avec un
propriétaire qui achète pour lui-mêm e, avec la scienca
qu’ il pourra payer, et qui présente au vendeur des ga
ranties morales et positives, mais avec une société uni
quement formée dans des vues de spéculation, qui n’achetoit que pour revendre, et ils durent sentir le be
soin de quelques précautions extraordinaires.
Si la loi du 11 brumaire an 7 eût encore été en v i
g u e u r, elle eût été pour le vendeur une garantie suffi
sante, car elle attachoit à la transcription seule la trans
mission absolue de la pro p riété; ainsi les acquéreurs
n eussent p u , sous cette lo i, ni revendre ni constituer des
hypothèques de leur chef sur la teri’e d’A llè g re , qu’a
près a v o i r transcrit leur propre contrat; et s’ils eussent
revendus sans cela, les sous acquéreurs eussent été obli
gés de transcrire tant la première que la seconde vente,
6oit pour devenir propriétaires incommutables, soit pour
purger les privilèges et hypothèques,
Mais alors, par l’effet de l’article 2 9 , la transcription
|Cut
à elle seule pour conserver les droits et la
�(4 )
créance du précédent p ro priétaire, en sorte qne sous
cette législation, fort dure quant à la suspension de la
p ro p riété, mais fort sage quant à la conservation des
droits du vendeur, celui-ci ne pouvoit jamais perdre
son privilège.
Cette loi venoit d’étre abolie et remplacée par le Code
c iv il, q u i , en déclarant la vente parfaite en Ira les p a rties,
par le consentement, posoiten principe dans l’article 2108
que les privilèges en général ne produisent d’effet sur
les immeubles que par l ’inscription au bureau des hypoth èq u e s, mais qui aussi dans l’article 2108 donnoit à la
transcription du titre l’effet de conserver le privilège d u
vendeur.
O n n’avoit encore aucune idée fixe sur le point de
savoir si la vente seule, sans le secours de la transcrip
tion , pouvoit purger les hypothèques; long-temps après,
cette question a divisé les jurisconsultes; on n’étoit pas
fixé positivement non plus sur les effets du privilège du
Vendeur envers les créanciers de son acquéreur ou d’urt
second acquéreur; c’est dans cette position que les héritiers
L ab o u la ye, ne voyant rien de déterminé sur les effets
de la nouvelle loi, rien de fixe qui remplaçai dans leur
intérêt la disposition de la loi précédente, sachant seule
ment qu’il est permis de suppléer par la stipulation aux
imperfections de la lo i, ou même de remplacer la volonté
du législateur par la sienne p r o p r e , en tout ce qui n’est
pas illicite, voulut prendre pour eux-mêmes les précau*tions que la loi du i ï brumaire an 7 prenoit d’oflice
auparavant pour tous les vendeurs, et écrivirent dans le
contrat la clause suivante :
�( 6 }
« Les acquéreurs feront transcrire le présent contrat
« à leurs frais au bureau des hypothèques qu’il appar« tiendra, et ce, sous six semaines de ce jou r, avant au« cune aliénation des biens ven d u s, ce q u i est stipulé
« com m e condition essentielle des présentes et suspen« sive de la vente ju sq u 'il Vaccom plissem ent de cette
« fo r m a lité . »
Ain si la loi du u brumaire an 7 , abrogée comme loi
générale, et reproduite depuis par l ’article 834 du Code
de procédure, en ce sens que le sous acquéreur ne peut
purger les hypothèques que par la transcription, reprit
toute sa force entre les sieurs Laboulaye et la société
B rav a rd , comme règle particulière dictée par l ’une et
-acceptée par l’autre des parties. Cette stipulation faite
dans le môme but doit avoir les mômes conséquences.
N e perdons pas de vue q u 'il f a u t apporter la plus
grande attention à rechercher Vesprit de chaque règle j
fixons-nous donc sur le sens de cette clause qui est v é
ritablement la seule règle des parties, leur loi de con
vention.
E lle n’étoit pas faite certainement pour lier plus étroi
tement le vendeur s e u l ; en ce qui le c o n c e r n o i t person
nellement, il ne p o u v o i t rien ajouter à sa promesse ;
elle avoit donc pour objet de prévoir le cas où des tiers
acquéroient des droits à l’im m euble, et de se préserver
du préjudice qui pouvoit en résulter pour le vendeur
primitif. Convenons ici que plus il auroit été à craindre
que le privilège fût purgé par une simple revente non
txanscrite, p lus le vendeur devait mettre d’importance à
se precautionner contre ce danger \ et voilà pourquoi il
�( 6)
dit à son acquéreur : comme une revente peut me nuire,
si ma vente n’étoit pas transcrite, je vous impose
l ’obligation de transcrire; jusques là je suspends dans vos
mains, sinon la réalité de la vente que je vous fais, au
moins le droit illimité que vous auriez de disposer de
la chose ven due; vous aurez valablement acquis de
m oi, mais vous n’aurez pas valablement vendu, tant que
vous n’aurez pas transcrit, et j’écris clairement cette
stipulation dans votre contrat, pour qu’elle modifie dans
vos mains l’exercice de votre d ro it, pour que tout à la
fois elle frappe et avertisse ceux qui voulant acheter de
v o u s , sauront ou devront savoir qu’ils ne peuvent ac
quérir que la chose qui vous appartient, et sous les con
ditions qui vous l’ont transmise; qu’ils doivent sup
porter tous les vices, tous les dangers, toutes les con
ditions de votre propriété, comme ils seroient sujets au
désistement si vous n’étiez pas propriétaires; q u i , par
conséquent, intéressés à consulter votre titre de pro
p riété, y verront que vous ne pouvez pas revendre sans
avoir transcrit; que cette précaution est prise pour qu’ils
n ’achètent pas ou qu’ils ne vous payent pas, et q u i, s’ils
passent o u tre, nonobstant la prohibition de. votre titre,
s’abandonneront à leur confiance en v o u s , cesseront
respectivement à moi d’être dans la présomption légale
de bonne fo i, et creuseront volontairement sous leurs
jpas un abîme dans lequel je les précipiterai quand
il me plaira.
V o ilà le vrai sens de la clause. A-t-elle pu avoir son
effet ? pourquoi non ? est-ce qu’elle étoit moins licite
que celle y u i réserve au vendeur une faculté résçlu**
�toire, et qui oblige les tiers, quoiqu’elle ne soit pas sti
pulée avec eux? quelle loi empêcheroit encore aujour
d’hui un vendeur d’imposer à son acquéreur la prohi
bition de revendre avant de l’avoir payé ou d’avoir
transcrit? est-ce que cette clause n’est pas aussi rée lle,
aussi conditionnelle de la propriété , que la faculté de
rachat, la clause résolutoire et autres semblables ? L a
propriété a donc passé dans les mains de la société
Bravard avec cette condition réelle et indélébile.
Quoiqu’ il en soit, les acquéreurs se mirent en pos
session, dénaturèrent les biens, rasèrent les bois, re
vendirent les immeubles à parcelles, mais ils ne trans
crivirent pas et ne payèrent que des à compte.
Parm i les sous acquéreurs, se trouva le sieur G rellet;
habitant le lieu même, il savoit que les sieurs Bravard
et autres étoient de nouveaux propriétaires, puisque l’ac
quisition de la terre d’ A.llègre a voit été l’objet princi
pal de leur société ; il savoit qu’ayant acheté par spé
culation , et dans l’espoir de bénéficier sur les reventes,
ayant d’ailleurs des fortunes insuffisantes pour payer de
leurs propres fonds, ils étoient nécessairement débiteurs
du prix ; il n’étoit pas de la classe de ces hommes sim
ples, inlnbiles en affaires, qu’il est facile de tro m p er;
si donc il négligea de consulter le titre de ses vendeurs
( ce que n’omet pas l ’homme a tte n tif), s’il paya le prix
de la revente à la compagnie B r a v a r d , sa négligence
fut im pardonnable, ou il s’abandonna à une confiance
tellement aveugle en ses vendeurs, que lui seul peut en
couiir les événemens.
Il étoit encore ¿lu entour i8 o ;ooo francs en 1 8 1 4 ,
�( 8 )
lorsque les vendeurs éprouvèrent un refus formel de
la compagnie Bravard de payer de plus fortes sommes,
D epuis long-temps les termes étoient échus,et les intimés,
ne voulant pas user de rigueu r, avoient toujours différé
de poursuivre*, ils furent enfin obligés le 10 décembre
1814 de faire un commandement; ils le dénoncèrent,
le 14 aux tiers détenteurs, et dans la suite ils ont saisi
les immeubles, tant sur les acquéreurs primitifs que sur
les tiers détenteurs. U n premier procès fut intenté par
la compagnie B r a v a r d , qui, sous de frivoles prétextes,
demandoit la résolution de la vente avec dommages-intérêts. U n j u g e m e n t du tribunal civil du P u y , confirmé
en la C o u r, purement contradictoire et maintenu de
puis par la C our de cassation, rejeta cette demande.
L es tiers détenteurs se mirent alors personnellement
eu scène; quelques-uns demandèrent la nullité de la
saisie, et indépendamment de quelques moyens de form e,
ils soutinrent que les reventes faites sous l’empire du
Code avoient purgé le privilège des premiers ven d eu rs,
faute d’inscription de leur p a rt, et ils attaquèrent ainsi
le droit des vendeurs jusques dans ses fondemens. L e
tribunal civil du P u y rejeta cette prétention, et sur
l ’appel interjeté en la C our par Garnier et autres sous
acquéreurs, il intervint le 14 niai 1817 un arrêt confirmatif.
L e sieur Grellet parle très-fugitivement de cet arrêt;
il insinue que le moyen tiré de la clause de la vente
fut présenté sans qu’on s’y attendit et comme une idée
presque subite; qu’il fit une im pression imprévue que
71e peut détruire une réplique courte et rapide. Il faut
répondre
�( 9 )
répondre à cela; car la Cour ne juge pas légèrem ent;
elle ne se livre pas sans réflexion à des impressions
im prévues, et, pour tout dire en un m ot, les intimés se
permettront de transcrire ic i, tant les conclusions qu’ils
prirent à l’audience, que l’arrêt de la Cour , et remar
queront que cet arrêt ne fut pas prononcé audience
tenante, mais seulement après un délibéré.
V o ic i iles conclusions :
« Attendu que si l’article 2.106 du Code civil dit en
général que les privilèges ne produisent d’effet sur les
immeubles que par l’inscription, il en excepte, par l’article
2108, le privilège du vendeur qui existe par la stipu
lation et qui se conserve par la seule transcription du
contrat;
« Attendu que l’article 2166 donne droit de suite sur
un im m euble, à tous créanciers ayant un privilège ou
une hypothèque inscrite ; que par ces seules expressions,
il fait une différence essentielle entre le privilège qui
donne le droit de suite, par cela seul qu’il est stip ulé, et
1 hypothéqué pour laquelle il faut une inscription,
« Attendu que les articles 2 1 6 7 , 2181 et 2.182. impo
sent à l’acquéreur l’obligation de transcrire son contrat,
¡s'il veut se soustraire au droit de suite autorisé par •
l ’article 2166;
« Q u ’ainsi, et de la combinaison de tous ces articles,
il résulte que sous l’empire du Code c i v i l , et indépen
damment même du Code de procédure, la transcription
a été nécessaire pour purger les privilèges et arrêter leurs
inscriptions;
Attendu que ces principes sont corroborés par
�( 10 )
l ’article 834 clu Code do procédure, qui accorde quin
zaine après la transcription , pour inscrire les simples
hypothèques , et q u i, appliquant nécessairement cette
faveur à tous les privilèges, réserve aussi les droits ré
sultans au profit du ven deur, de l’article 2108 du Code
civil ;
« Q u ’on rie peut pas douter et qu’on ne conteste pas
en effet, que sous l’empire du Code de procédure, l’ins
cription du privilège est inutile, tant que l’aquéreur n’a
pas transcrit; que seulement il est vrai qu’en ce cas le
second acquéreur eût pu transcrire la seconde vente sans
la p rem ière, et se soustraire par là au privilège du pre
mier vendeur;
« M ais, attendu que si le Code de procédure n’existoiC
pas lors des ventes et reventes dont il s’agit, les ven
deurs primitifs y ont suppléé par une stipulation ex
presse, et ont levé toutes les difficultés de droit, en im
posant à leurs acquéreurs l’obligation de transcrire avant
"de revendre;
« Que de cela seul résultent plusieurs conséquences
immédiates;
« L ’une, que le vendeur prim itif, sachant que son
privilège existeroit toujours tant qu’il 11’y auroit pas de
reven te, s’est mis à l’abri vis-à-vis de nouveaux acquéT eu rs, en exigeant la transcription de sa propre vente^
et que cette stipulation, écrite dans le contrat m ê m e ,
est une volonté non moins obligatoire pour les parties
et leurs ayans-cause, que celle exprimée depuis par le
Code de procédure, et qui a été obligatoire pour tout
Im m onde en gén éra lj -
�A '9
( iï )
« L ’autre, que cette réserve réelle, écrite dans le con
trat, a obligé les sous acquéreurs comme les acquéreurs
primitifs, qui n’ont pu leur transmettre que les droits
qu’ ils nvoient eu x -m êm es à la chose ven d u e , et sous
les mômes charges et conditions stipulées dans leur con
trat; qu’ainsi, les sous acquéreurs n’ont p u , ni exciper
d’ un défaut de transcription à laquelle ils étoient euxmêmes obligés , nii transcrire leur contrat d’acquisition
sans transcrire' également celui de leur vendeur ;
’ «‘ La troisième enfin, que faute par les acquéreurs
d’avoir exécuté la condition et transcrit la première
ven te, les reventes seroient absolument n ulles, sans que
les vendeurs primitifs fussent obligés pour cela d’at
taquer la première vente , et qu’il en résulteroit chez
les appelans un défaut de titre valable, pour reven
diquer la propriété des immeubles dont ils sont déten
teurs. »
Sur ces conclusions, et après les plaidoiries auxquelles
ut consacrée l’audience entière, la Cour prononça à
-ne audience subséquente l ’arrêt ainsi conçu
« Attendu q u e par la p r e m i è r e v e n t e q u e les par
ties de Vi s s a c o n t consenti e de la m o i t i é i n d i vi s e de
la terre d’A llègre à la société Brava r d - F a u r e et com
p agn ie, le treize brumaire an tr e iz e , il a été convenu
que les acquéreurs
d’acquisition ;
feroient
transcrire leur
contrat
Que la seconde vente faite à la même société
®iavitrd , de l’autre moitié indivise de la terre d’A l l o ,c >par acte du vingt-trois frimaire de la même a n n ée,
impose tgalenicnt aux acquéreurs l’obligation de fairo
�transcrire leur contrat d’acquisition dans Te délai de
six semaines, et avant aucune aliénation des biens
v e n d u s, ce qui est stip ulé, est-il d it, comme condi
tion essentielle et suspensive de la vente , jusqu’à l’ac-'
Complissement de cette formalité ;
« Attendu que la trancription de ces deux ventes qui,
à raison de l’indivision des objets vendus , se réfèrent
l ’une à l’a u tre , a été la condition de la p ro p rié té , et
que cette condition a fait la loi des parties ;
k Attendu que jusqu’à cette transcription , la société
Bravard n’a pu disposer librement \ en tout ni en
partie , des biens dépendant de la terre d’ A llègre , puis
que la charge de faire transcrire les ventes étoit sus
pensive de l’exercice du droit de propriété qui ne devoit lui être acquis que par le fait de la transcription
qui en étoit la condition expresse ;
« Attendu , dans tous les cas, que la compagnie Bra
vard , en revendant à des tiers certaines parties de
la terre d’ Allègre , n’a pu leur transmettre les pro
priétés qu’avec la même c h a rg e , et sous la m êm e
condition de faire faire la transcription qui lui avoit
été imposée par les vendeurs originaires;
« Attendu , d’ailleurs , que les parties de Vissac ou
ceux qu’elle représente, en imposant à la société Bra
vard la condition de faire transcrire avant de pouvoir
revendre, ont suffisamment exprimé qu’ils entendoient
conserver leurs privilèges, par l’effet de cette transcrip
tion, aux termes de l’article 2108 du Code civil;
« Que cet te stipulation, ecrite dans les ventes primitives,
est devenue obligatoire pour les tiers acquéreurs, comme'
�( 13 )
elle l’étoit pour les acquéreurs originaires dont ils sont
les ayans-cause;
« Q u ’ainsi, et tant que les ventes des treize brumaire
et vingt-trois frimaire de l’an treize, n’ont pas été trans
crites, le privilège des premiers vendeurs s’est con sevé,
tant à l’égard des sous acquéreurs que des acquéreurs
prim itifs qui tous ont demeuré sous l'empire de la
condition stipulée auxdites ventes;
« A tte n d u , enfin, que dans l’absence de toute trans
criptio n , soit de la part des sous acquéreurs, les parties
de Vissac ont pu prendre inscription de leur c h e f, et
agir en vertu de leur privilège, pour ce qui leur est
resté dû des prix des ventes dont il sagit, tant contre
la compagnie Bravard-Faure, que contre les tiers acqué
reurs, parties d’AUemand.
« Par ces motifs, et sans aucunement s’arrêter à ceux
des premiers juges,
« La Cour dit qu’ il a été bien j u g é , etc. »
L e sieur Grellet n’étoitpas partie dans cette instance;
Vingt-cinq sous acquéreurs n’avoient pas formé oppo
sition aux poursuites, en même temps que les autres;
mais ils avoient lié l’ instance peu de temps après, et elle
étoit déjà jugée au tribunal civil du P u y dès le 30 avril,
lorsque la Cour rendit contre Garnier et autres l’arrêt
du 14 mai 1817.
•
;
Lors de ce jugement du 30 a v r il, les vingt-cinq sous
acquéreurs opposoient tout à la fois le moyen principal
1 esu\tam de l’extinction du privilège faute d’inscription ,
et des moyens de nullité en la forme. L e sieur Grellet
en fuisoit valoir un qui lui étoit propre \ il résultoit de
�.................................................C
m
)
ce qiie là copie *de’ notification de.la saisie n’étoifc pas
signée par l’huissier. Ce moyen particulier fut admis par
le tribunal civil qui rejeta tous les autres, et qui r en
maintenant la saisie contre vingt-quatre sous acquéreurs,
la déclara' nulle envers le sieur Grellet.
Cependant, chose adm irable, les vingt-quatre déten
teurs contre lesquels elle a été maintenue ont reconnu
contr’eux-mêmes la force de la clause qui est écrite dans la
première vente et le bien jugé du jugement, et le sieur
G rellet qui avoit gagné son p ro cès,a seul interjeté ap
pel , sur le fondement ou sous le prétexte que le tri-*
bunal n e s’ é toi t pas arrêté au m o y e n tiré de l ’e x l i n c t i o n
dés droits du premier vendeur, par la seconde vente. C ’est
cet appel qui est soumis à l’examen de la Cour.
C e rte s , les sieurs Laboulaye eussent pu interjeter
appel incident, et se plaindre de ce que le tribunal civil
avoit admis si légèrem en t, comme moyen de nullité, une
copie non signée par l ’huissier, q u i, par conséquent,
ü ’étoit pas une véi’itable co p ie, et pouvoit y avoir été
substituée. Ils préférèrent exécuter le jugement , et
ils firent un nouveau commandement pour 127,300 fr.
restés d u s , et une nouvelle saisie contre le sieur Grellet,
N ouvelle opposition , nouveaux moyens de n u llit é ,
parmi lesquels est reproduit celui tiré du défaut d’ins
cription de la créance ; nouveau jugement qui rejette
ces moyens; nouvel appel dont lu Cour est saisie par Je
sieur G r e lle t , et que sans doute il sera convenable de
joindre pour ne faire qu’ un seul procès.
T e l est l’état de la cause. L e récit des faits et les courtes
Réflexions qui y sont parsemées reudroient presque si*?
�C ï5 >
perflue toute discussion ultérieure; aussi les intimés se
borneront-ils à établir quelques principes, et à repousser
les objections principales.
Il
est un principe certain qui est de tous les'tem ps, de
toutes les législations; c’est qu’ un vendeur ne transmet
à son acquéreur autre chose que ses propres droits; qu’il
transmet la propriété avec ses vices et ses avantages, ses
s'es charges et ses prérogatives, et qu’elle passe clans des
mains tierces , avec les modifications et les conditions q u i
Tavoient frappée dans les siennes. C ’est la disposition de
,ia loi 5 4 , il*, de reg. ju r. netno'plus' ju ris ad alium
transferre potest quàm ipse habet ;
D e la loi 6 7 , ff. de contr. empt. A lie n a tio c ù m j i t ,
cu tu
suâ causa dom inium ad alium transfertur. Sur
quoi Godefroi observe judicieusement : Q u ia res continet eadern ju ra 'et damna. , easdern causas et serçitu tes;
D e l’édit de 1 7 7 1 , article 7 : « Sans que les lettres de
« ratifications puissent donner aux .acquéreurs, relatif
« vement à la propriété, droits réels, fonciers, servi"« tudes et autres, plus de droits que n’en auront lesven « deurs ; »
D e la loi du 11 brumaire au 7 , qui en dit autant sur
la transcription;
D e l’article 1664 du'Code c iv il, qui impose à un se
cond acquéreur l’obligation de supporter la faculté de
r e c h a t, quand bien même elle ne seroit pas stipulée
.dans le second contrat;
De l’article 2I2Ô, qu i veut que ceux qu i n’ont suc
1 immeuble qu'un droit suspendu par une condition ; ou
�(
1
6
}
résoluble dans certains cas, ne puissent consentir qu'une
h y p o t h è q u e sujette aux mêmes conditions;
D e l’article 2182, qui dit que le vendeur ne transmet
à l’acquéreur que la propriété et les droits qu’il avoit
sur la chose vendue;
E t eniin de l’article 731 du Code de procédure, qui
en dit autant de l’adjudication.
L a tradition elle-même ne produit pas de plus grands
effets, traditio n ih il am plius tradere potest ad eum q u i
accipit quidem est apud eum q u i tradit. L . 20 fif. de
acquir. poss. et cela par cette excellente raison que le,
vendeur transmet moins la propriété que les moyens'
de l’acquérir par la possession , causa dom in i j comme
le disent si bien Dantoine et Domat sur les lois que
pous venons de citer.
Nous transcrivons tous ces textes, non pour établir
un principe que tout le inonde connoît , mais pour
prouver qu’il s’applique à toutes les clauses d’un acte,
de quelque nature, de quelqu’espcce qu’elles so ien t,
pourvu qu’elles imposent à l’acquéreur prim itif une c o n
dition quelconque. Les articles du Code surtout le d é
montrent suffisamment.
Pas de doute donc sur cette vérité et sur sa consé
quence naturelle, que les conditions écrites dans une pre
m i è r e vente frappent toutes les autres, quoiqu’elles n’y
soient pas répétées.
Il
semble qu’après avoir posé ce principe, il n’y auroit
plus rien à d ir e , car son application semble se faire
d’elle-même.
O n a imposé aux acquereurs l’obligation de transcrire
apanÇ
�( 17 )
àçant toute revente ; on l’a stipulé comme con dition es
sentielle et suspensive; les acquéreurs n’ont donc pas pu,
sans avoir transcrit, user d’ une faculté de revendre qui
étoit suspendue jusqu’à la transcription; la revente est
<lonc sans effet respectivement aux vendeurs primitifs.
Cela semble tellement clair qu’on est tenté de s’ arrêter
à ce seul m o t , et qu’on n’auroit pas le moindre prétexte
pour faire à la première chambre de la C o u r, le reproche
qu’elle se laisse trop entraîner par une première impres
sion, quand bien même elle auroit prononcé sur le champ
son premier arrêt,
.
Voyons donc les objections, puisqu’ on en fa it, et
qu’ainsi il n’est pas besoin de s’ingénier pour les aper
cevoir.
L a première consiste à dire que la clause dont il s’agit
est un mode inexécution et non une condition suspen
siv e ; que le mode ne suspend pas l’exécution du contrat,
mais peut seulement en opérer la résolution si on n’acçomplit pas la charge.
Ce seroit d’abord une chose assez inutile à a p p r o f o n d i e
par des définitions, p u i s q u e l ’acte s’e x p l i q u e n e t t e m e n t ,
et puisque d ’ailleurs mode ou condition , condition ou
m o d e, la stipulation n’a pas moins frappé la seconde
vente que la première, parce que, dans tous les cas, elle
étoit une charge r é elle, et que res transit cum suo
onere, II n’est pas nécessaire de rechercher péniblement
avec les auteurs, si le pronom relatif q u i, la particule
pour ou afm q u e , le gérondif en f a i s a n t , en p a y a n t ,
Constituent une condition suspensive ou un mode d’exéçntion, puisque les parties ont dit sans ambiguité qu’elles
3
�( xS )
stîpuloient une conditionnai qu’elles vouloient que cett«
condition fût suspensive.
A u reste, cet argument qui n’est dans l’espèce qu’un
véritable jeu de mots, servira à repousser une autre ob
jection produite par une pensée qui n’étoit pas asseic
approfondie sur le sens que doit avoir la clause de la
vente.
Si la condition est suspensive, a dit lé sieur Grellet.,
il n’y a pas de vente, faute de l’avoir accomplie. Quel
moyen alors de prendre contre l’acquéreur la voie de
l’expropriation ? Il n’y a qu’un parti pour le vendeut
prim itif, celui de reprendre son immeuble; et cette consé
quence est vraie, soit qu’on considère la condition comme
suspensive ou comme résolutoire; car, s’il n ’y a pas eu
de vente, il n’y a pas de prix.
U n instant : tout ce que cette objection peut avoir
-de subtil va disparoîlre devant la définition du mode
et les termes de b clause.
« L e m ode, dit M . M e rlin , se prend en droit pour
1k une clause q u i modifie un acte d’après un événew ment incertain. » Plus lo in , il ajoute :
« Quoique le mode ne suspende pas la transmission
* de la propriété dans la personne du donataire ou lé« gataire, il ne laisse pas de la rendre incertaine pour la
'k suite du temps, c’ est pourquoi le légataire ne peut
en pareil cas obtenir la délivrance de son legs,
* qu’en donnant des sûretés pour l’accomplissement du
mode. »
"Posé d’abord que le premier acquéreur, donnant ou
'ne donnant pas de sûretés , n’eût pas accompli le m ode.
�t* 9 )
le sous acquéreur oseroit-il dire qu’il en est dispensé?
E t s’il convenoit que ce mode a suivi la propriété
dans ses m ains, par quoi pourroit-il donc se défendre?
Mais évitons de nous renfermer dans des idées abs
traites où nous entretiendroit volontiers le sieur Grcllet,
Ap pliquon s immédiatement à la clause de l ’acte ce
que nous venons de dire , et tenons pour v r a i , s’il le v e u t ,
que les parties ont employé une mauvaise expression en
appelant condition suspensive ce qui n’étoit qu’ un
mode. Q u ’en résultera-t-il ?
Les intimés ont dit qu’ils imposoient à la société
Bravard
tran scrire AYA NT AUCUNE
des biens -présentement vendus .
l ’obligation
alién atio n
de
Si cette stipulation n’est q u ’ un m o d e , il s’en suit
que la propriété de la compagnie Bravard n’a pas
été suspendue ; et cela est très-vrai, car l ’immeuble
lui est livré sans autre condition que de payer le p r ix
si elle ne le revend pas ; elle est alors propriétaire
pure et simple , e t , en ce sen s, il y a tradition do
propriété , exécution actuelle du contrat.
Mais l ’e x e r c i c e de cette p r o p r i é t é est m odifie : ( on
vient de vo ir q u ’ u ne m o d ifica tio n peut résulter d ’un
mode ) le vendeur dit à son acquéreur qu’il ne
■pourra pas revendre
sans avoir transcrit; qu’en ce
gens, la» condition qu’il lui impose est
suspensive,
non
de sa p r o p r ié té , mais du droit absolu d’en disposer;
que sa vente sera v a la b le , mais que sa revente ne le
sera p as, tant qu’ il n’aura pas transcrit.
E t voilà pourquoi les héritiers L ab oulaye, considé
rant avec raison leur contrat comme exécuté rçspcc-
�'
( 20 )
tivement à la compagnie B r a v a rd , et la propriété
comme lui étant transmise, se sont peu occupés d’ une
revente qu’ils a voient interdite, se sont crus autorisés
à saisir l ’immeuble comme appartenant aux Bravard
qui leur en devoient le p r i x , et de le saisir en même
temps sur Grellet et autres par cela seul qu’ils étoient
détenteurs, sans s’inquiéter de leur prétendue qualité
de sous acquéreurs et d’une revente qu’ils ne rec.onnoissoient pas et qu’ils n’étoient pas obligés de reconnoître.
1
L e sieur G rellet apercevroit-il quelqu’obscurité ou
quelque foiblesse dans cette réponse ? ne penseroit-il
pas que la définition réelle des modes s’élève forte
ment contre les applications qu’il en a faites; qu’au
contraire elle éclaircit tou t, et jette le plus grand jour
et sur le sens et sur les effets de la clause condition
nelle dont il s’a g it? Cela semble assez bien dém on tré,
cependant nous pouvons encore répondre par quelques
mots.
C ’est d’abord une chose assez étrange qu’ un sous ac
quéreur se plaigne de ce qu’on veut le dépouiller par
la voie de la saisie plutôt que par celle de la résolu
tio n , c a r , en ce qui le concerne, il n’en 'seroit pas
moins dépouillé; et quant au vendeur, on ne peut ja
mais l’obliger à prendre l’action résolutoire plutôt que
la voie de la saisie.
M ais, dit-on, il faut pour cela un privilège, ou une
hypothèque conservée par une inscription.
Très-bien ; ce moyen seroit bon de la part d’un tiers,
ryant des droits valablement acquis) nous serions obligé^
�( 2Î )
dy discuter avec lui la question de savoir si le privi
lège est ou non p u rg é; mais les intimés n’ont besoin,
contre leurs propres acquéreurs, que de l’obligation par
eux contractée de payer le p r ix , et quant à e u x , ils
ne prétendent pas l’avoir effacée; quant aux tiers dé
tenteurs, les intimés attaquent leur droit dans ses fondemens, en leur répondant : V o u s n’êtes pas propriétaires
parce qu’on n’a pu vous reven dre, que mon acquéreur
n’a pas pu faire ce dont j’avois retenu ou suspendu le
droit. V ou s n’êtes donc pas vis-à-vis moi des sous ac
quéreurs légalement investis de la propriété, mais des
tiers détenteurs, sans titre, sur lesquels je puis saisir comme
sur mon acquéreur lui-m êm e, et qui êtes sans moyen
pour revendiquer la propriété que je saisis, comme ap
partenant-à mon débiteur.
En un m o t, ma vente étoit réelle, mon acquéreur
étoit propriétaire , il ne m’a pas payé , et voilà pour
quoi je saisis. Je lui avois défendu de revendre avant
d ’avoir transcrit ; vous avez acheté sansquela condition fût
rem plie, le sachant ou pouvant le savoir, et voilà pour
quoi je vous dis que vous n’avez pas de titre et que vous
n ’avez pas le droit de reclamer.
Ce n’est pas une clause réelle, d it-o n , si elle n’a pour,
but que de conserver un p riv ilè g e ; c a r, en ce cas, elle
n’est qu’ un accessoire à la promesse de payer le p r i x ,
et rien ne peut suppléer l’inscription que la loi exige.•'Erreur suffisamment repoussée , par ce que nous venons
de dire-, quelques réflexions de plus achèveront la dé
monstration.
- Pourquoi la clause, qui défend de reven dre, scroit-
�( 52) .
elle moins réelle que celle qui réserve au Vendeur la
faculté de rachat, et qui frappe un tiers sans que son
titre en parle ? que la clause résolutoire, qui est aussi
nccessoire à la promesse de payer le p r ix , et qui ne pro
duit le plus souvent d’autre effet, que de forcer le tiers
détenteur à payer une seconde fois ? Pourquoi le tiers
acquéreur en seroit-il moins frappé que de l’action en
lésion qui peut l’atteindre d’après l ’article 1681 , et le
forcer à payer deux fo is, s a u f la garantie contre son
v en d eu r, s’il n’y a pas lésion dans la revente?
Dans tous ces cas, cependant, et beaucoup d’autres, le
tiers acquéreur souffre d ’ une stipulation qu i n’est pas
écrite dans son contrat ; et il ne seroit pas frappé de la
condition la plus capable de l’atteindre, celle qui est prohi
bitive ou suspensive de la faculté de revendre !
Remarquons ici que le sieur Grellet n’a pas même
transcrit sa propre acquisition, et que depuis long-temps
les intimés ont inscrit ; (ils ne croient pas se tromper en
le disant) q u ’ ainsi la transcription de sa vente seule seroit aujourd’hui inutile. Observons qu’avant le Code il
n’y avoit pas moyen de purger, q u’on n’étoit même pas
propriétaire d’ une manière absolue sans avoir transcrit;
que depuis le Code de procédure, la purgation des hy
p o t h è q u e s ne commence que p a r la t ran scr ipt io n de la
vente ou de la r e v e n t e ; et p arc e que dans le temps inter
médiaire la question seroit douteuse on n’auroit pas pu
y suppléer par une stipulation! et une interdiction, ou
une suspension du droit de revendre, no seroit pas u n o i
clause réelle contre le tiers acquéreur ;\ qui on a re-?
ye n d u ; nonobstant cette prohibition! A quoi donc est-
�w
( 23 )
elle bonne? contre qui seroit-il possible de l’invoquer?
E t si elle 11e peut avoir aucun effet, elle n’est donc pas
permise ; 01*, qui oseroit aller jusque-là ? N ’est-ce pas
au contraire une m odification réelle et bien licite ap
posée à l’exercice du droit de p ro p riété, qui, considérée
comme mode ou comme co n d itio n , frappe plus direc
tement que toute autre celu i à q u i on a revendu ?
L e sieur Grelet attaque très-vivement les motifs du
jugement dont est appel; ils sont, d it - il, en contradic
tion avec eux-mêmes ; ils déclarent qu’il n’y a pas de
v e n t e , et ils autorisent les vendeurs à agir comme créan
ciers du prix : la réponse est facile.
D ’abord, il ne sagit guère ici des motifs du jugement;
et s’ ils ne sont pas suffisamment clairs, il n’y a qu’ à les
changer ou les expliquer comme la C o u r l’a fait la pre
mière fois.
E n second lieu , nous avons suffisamment éclairci ce
que le sieur Grellet peut trouver d’obscur à l ’interpré
tation de la clause, en prouvant avec lui et par l u i ,
qu’ il y a une vente consentie et exécutée respectivement
à la compagnie Bravard; q u e, p a r conséquent, on a
pu et dû saisir; e t, par la volonté exprimée du v e n
d e u r , qu’il n’a pas pu être fait de revente valable; que
conséquemment aucun tiers détenteur ne peut s’en faire
un titre, ni pour revendiquer comme sienne la p ro
priété saisie, ni pour soutenir qu’il a purgé un privi
lège pour lequel il lui falloit un titre, et un vendeur
qui pût le consentir.
E u iin , le sieur Grellet se jette dans les considérations,
e serois victime de ma bonne fo i, dit-il ; pourquoi
�(2 4 )
n’avez-vous pas v ous-mêmes transcrit votre contrat ou
inscrit votre créance? vous m’eussiez préservé de tout
péril.
Pourquoi ? Je vous l’ai dit. Parce qu’étant à cent
lieues, ayant affaire ù des spéculateurs, je n’ai voulu
courir la chance, ni de leurs reviremens, ni des formes
plus ou moins bien observées d’ une inscription, et que
j’ai préféré charger de tout mes acquéreurs eux-mêmes,
et leur imposer des conditions qui fussent pour moi une
garantie toujours existante que je trouverais dans leurs
mains le prix de ma vente, ou la propriété elle-même
po u r y exercer mes droits. Je l’ai fait; j’ai pu le faire;
vous avez pu et dû le savoir; certainement vous l’avez
su; vous êtes donc d u p e, s i vous l'êtes, de votre négli
gence et non de m o n hom m e d’affaires. J ’ai envoyé sur
les lieux un avocat à la Cour de Paris qui a bien voulu
se charger de plaider mes causes au P u y , j’avois besoin
de son zèle contre les chicanes multipliées de mes débi
teurs; il remplit ce ministère plus souvent qu’ il ne vou
d ro it, car rien ne finit; si son zèle vous déplait, votre
apostrophe déplacée ne l’atteint pas, tout comme vos
observations donneront difficilement l ’idée que la Cour
n’a prononcé d’abord que légèrement et d’après une im
pression im p révu e, et qu’elle doit me condamner aujour
d’ hui sur la même clause, le même c o n t r a t sans que
rien ait changé dans les moyens.
M e, D E
VISSAC,
M e. D E V E Z E ,
avocat.
avoué.
tT H I B A U D , imprimeur du R oi, de la Cour royale, et libraire, A R i o m.
'
*
M
ai1818
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Joly de Fleury, Comte. 1818]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Devèze
Subject
The topic of the resource
hypothèques
ventes
conflit de lois
procédures
nullité
créances
saisie immobilière
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse pour M. le Comte Joly de Fleury, Conseiller d’État, ancien Procureur général au Parlement de Paris ; M. le Comte de Latour Dupin ; les dame de Laboulaye, leurs épouses, et autres, intimés ; contre le sieur Barthélemy Grellet, propriétaire, habitant à Allègre, appelant.
arrêt de la Cour de Riom du 14 mai 1817.
Table Godemel : Transcription : 5. l’obligation de transcrire avant aucune aliénation des biens vendus, imposée à l’acquéreur comme condition essentielle et suspensive de la vente jusqu’à l’accomplissement de cette formalité, a-t-elle l’effet de conserver le privilège du vendeur, sans qu’il ait besoin de prendre inscription, même à l’égard des tiers acquéreurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1818
An 13-1818
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2407
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2406
BCU_Factums_G2408
BCU_Factums_G2409
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53461/BCU_Factums_G2407.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Allègre (43003)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
Créances
hypothèques
nullité
procédures
saisie immobilière
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53460/BCU_Factums_G2406.pdf
0ae2bce0ac9941caeb49ac70e33599bb
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Text
MEMOIRE
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POUR
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Le
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..
Sieur B a r t h é le m i GR E L E T , Propriétaire ,
habitant de la Ville d’Allègre, appelant ;
¡a»*
CONTRE
M. A rm a n d - G u i l l a u m e - M a r i e , Comte J O L Y
d e F L E U R Y ; et Dam e A n g é liq u e - C la u d i n e
D O U E T d e L A B O U L A Y E , son E p o u s e les
Sieurs G a b r i e l D O U E T d e L A B O U L A Y E
Officier ; C h a r le s L H E R B E T T E 3 Notaire ,
L o u is V O L F L A N B E R T , Employé au Trésor
public; et P i e r r e - L o u is L A N G L A I S 3 P ro
priétaire tous habitans de la V ille de P a r is , intimés ;
E t contre Le Sieur de S A I N T - L A U R E N T , ancien
Officier- Général aussi intimé.
Un des principaux dangers à éviter dans l’application
d
es lois, est la confusion des principes qu'e lles renferm ent aussi, pour juger sainement, il n e suffit pas
j
W| . ^ (
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‘
LAi
.’i'
^2 )
• toujours de réunir la justesse du sens à la connaissance
7 des règles; et de leurs détiails; .il faut encore apporter
‘■la plus grande attention à rechercher l’esprit de chaque
;t règle i à en balancer l’usage, et à discerner l’étendue
et les bornes qu’elle doit avoir.
Aujourd'hui, pour nous, les difficultés de l'applica
tion ont été beaucoup diminuées par les heureuses
divisions que l’on remarque dans nos Codes, où des
ii)’ -<d
chapitres distincts présentent un corps de doctrine pour
Aw#.,.V>\‘yu*. chaque matière différente. Ces divisions, aussi natu.. - « . « i - - . . r e l i e s qu’ utiles, semblent indiquer aux magistrats qu’ils
ne peuvent, sans s’exposer à de graves'inconvëniens,
"■•«o ~SrV\ puiser des règles de décision dans des chapitres étrangers aux cas qui leur sont soumis.
C’est pour ne pas avoir, peut-être, assez réfléchi sur
ces idées simples, que le tribunal’ dont lé sieur Grelet
attaque le jugement, a confondu lès principes relatifs
aux résolution^’ des contrats, avec ceux qui ont trait
■aux privilèges Ou hypothèques.
’r
L e sieur Grelet possède, comme tiers-acquéreur,
des immeubles vendus originairement .par les intimés.
Ceux-ci ont négligé toutes les précautions que la loi
leur indiquait pour conserver, sur leur ancienne pro
priété, un privilège ou une hypothèque.
.
Cependant ils ont été admis à poursuivre hypothé
cairement des tiers-détenteurs, sous prétexte que, dans
l e s contrats de vente primitifs, ils avaient stipulé une
condition suspensive ou résolutoire.
s
**
�L e sieur Grelet résiste à des poursuites hypothécaires
exercées sans privilège et sans hypothèque.
Il demande que ses adversaires soient renvoyés a
intenter, si bon leur semble, unej action en résolution,
qu’il redoute peu.
,, : t
>,v ;
'
Telle est, en analyse, la cause sur laquelle la Cour
doit prononcer.
,(
F A IT S .
L a terre d’Allègre était indivise entre la dame AnneCatherine Douet, veuve de M. de Lamassée, et le
sieur Douet de Laboulaye, son frère.
‘
,,VI - • 'u. m. . i.
L e 19 brumaire an i , la dame Douet vendit la
moitié de cette terre au sieur Bravard-Faure et com
pagnie, moyennant le prix de 200,000 fï\, qui fut
slipulé payable à termes.
0 f|,,CT
Les acquéreurs furent soumis à la charge de faire
transcrire leur contrat au bureau des hypothèques, à
leurs frais.
■
r " 9
lie 2.3 frimaire suivant , les héritiers du’ sieür de
Laboulaye* vendirent à la même compagnie l’autre
moitié indivise de cette terre, pour un prix semblable
de 200,000 francs.
i nsh 'b • •
:\ v
; u ,..;
3
La charge de transcrire fut àussi imposée aux ac
quéreurs. Voici les termes de la clause :
t!'
Les acquéreurs feront transcrire le présent contrat,
« a leurs frais, au bureau des hypothèques qu’il ap« partiendra, et ce, sous six semaines, de ce jour, avant
« aucune aliénation des biens présentement vendus;
�( 4 )
* ce qui est stipulé comme condition essentielle des
« présentes, et suspensive de la vepte, jusqu’à l’ac*> complissement de celte formalité, »
L a formalité n5a pas été remplie; les acquéreurs
ont négligé la transcription, et les vendeurs ne l’ont
pas exigée; ceux-ci n’ont même pris que Irès-tard des
inscriptions pour la conservalion de leurs droits.
Cependant la compagnie Bravai d a revendu en détail
une partie de la terre d’Allègre. Un grand nombre
d’acquéreurs particuliers ont acheté et payé le prix de
leurs acquisitions.
L e sieur Grelet est du nombre de ces tiers-acqué
reurs, que les vendeurs originaires voudraient aujourjd’Jiui rendre victimes de leur propre négligence.
Par des actes authentiques des 2 germinal an i 3 ,
¿ 2 frimaire an^ 1 4 , 12 avril 1806, le sieur Grelet a
acheté de la compagnie Bravard divers héritages dépendans de la terre d’Àllègre, et il en a payé comptant
le prix, qui s’élève à 20,668 francs.
Qn remarque dans les contrats que les héritages lui
ont été vendus fran cs et quittes de toutes dettes , pen
sions et hypothèques ; déclaration qui devait d’autant
plus lui inspirer de contiance, qu’il n'existait sur ses
vendeurs aucune inscription.
Les acquisitions faites par le sieur Grelet avaient eu
lieu depuis l’émission du Code civil, et avant celle du
Code de procédure, c’esi-àKÜre sous une législation
qui, comme nous le verrons bientôt, affranchissait les
�CS )
acquéreurs de tous privilèges ou hypothèques non ins
crites au moment des ventes.
Tranquille sous la foi de cette législation, le sieur
Grelet n’avait cru devoir prendre aucune précaution,
soit pour payer le prix des acquisitions, soit pour s’as
surer le remboursement de ce prix, dans le cas d’une
éviction future qu’aucun indice ne lui faisait craindre.
L a sécurité du sieur Grelet a été confirmée pendant
un grand nombre d’années, par une jouissance pai
sible.
Tout-à-coup elle a été troublée; des poursuites hy
pothécaires ont été dirigées contre lui et contre beau
coup d’autres tiers-acquéreurs, par les héritiers du sieur
Douet de Laboulaye, et par le sieur de Saint-Laurent,
héritier de la dame veuve de Lamassée.
Créanciers seulement d’ une partie du prix des ventes
primitives, les héritiers des vendeurs originaires au
raient pu trouver, dans les biens qui restaient encore
à la compagnie Bravard, des valeurs suffisantes pour
ce qui leur était dû; et cette modération de leur part
eût été d’autant plus juste, qu'il paraît que ce sont les
deniers même des tiers-acquéreurs qui ont servi à leur
payer ce qu’ils avaient reçu.
Mais des poursuites simples ne convenaient pas à un
homme d’affaires, ardent, et venu tout exprès de Paris
pour déployer son zèle.
Plusieurs saisies immobilières, mises successivement
en activité, ont embrassé l’universalité des biens qui
composaient la terre d’Allègre, et ont porté la déso-
�( 6 )
la (ion dans les familles respectables d’une foule, de
liers-acquéreurs qui se sont vus tout-à-coup menacés
d’une ruine prochaine.
L e sieur Grelet a reçu lui-même, le 1 janvier 1 8 1 7 ,
la dénonciation d’une saisie-immobilière, du^io mars
1 8 1 , qui comprenait tous les héritages qu’il avait
.achetés.
Il a formé opposition aux poursuites, par requête du
r mars 18 17 .
Son opposition était fondée principalement sur ce
que les créanciers poursuivans avaient perdu , faute
d’inscription, leur privilège sur les immeubles qu’il
avait acquis.
Il invoquait secondairement une nullité de procé
dure, résultant de ce que l'huissier n’avait pas signé
la copie de la dénonciation qui lui avait été faite.
L e tribunal du Puy a rejeté le moyen principal. Il
a ainsi jugé que les poursuivans avaient le droit d’agir
hypothécairement contre le sieur Grelet et les autres
tiers-acquéreurs3 et il a ordonné l’adjudica lion des biens
de ceux-ci, en exceptant cependant les héritages du
sieur Grelet, à cause des irrégularités de la procédure
faite à son égard.
Voici les motifs de la décision sur le fond du droit :
«• Attendu que les ventes des 19 brumaire et
fri« maire an i ont été consenties sous la condition
«■ imposée aux acquéreurs, de transcrire au bureau des
* hypothèques, et que, n’y ayant pas eu de transcrip
t i o n , il n’y a pas eu de vente;
5
5
3
3
23
�( 7 )
« Attendu que dans le cas de ;la vente sous une
* condition suspensive, son effet est réglé par les prin« cipes généraux des conventions (article 1
du Code
«• civil); qu’il est deprincipe queles conventions doivent
« être, exécutées suivant leur forme et teneur; que,
« faute d’exécution de la part des acquéreurs, les ven
ir deurs ont le droit de suivre leur propriété en quelques
« mains qu’elle passe ;
534
3
«■ Attendu enfin que le jugement du o novembre
* 18 16 l’a jugé ainsi, par les motifs y mentionnés. »
3
Le jugement du o novembre 18 16 était étranger
au sieur Grelet; il avait été rendu avec d’autres tiersacquéreurs, et le tribunal avait décidé que, d’ après .la
loi du Code sur les hypothèques, le piivilége des pre
miers vendeurs subsistait tant que les tiers-acquéreurs
n’avaient pas transcrit.
Dans les motifs que nous venons de copier, c'est sur
la condition de transcrire, condition suspensive, et dont
l’inexécution a paru aux juges du Puy anéantir les
ventes primitives, que ces magistrats se sont fondés
pour déclarer les tiers-détenteurs passibles de poursuites
hypothécaires.
' ,J
Mais ils n’ont pas remarqué qu’il y 1'avait uhé con
tradiction frappante entre leur‘décision et 'sés motifs.
S’il n’y a pas eu de vente, comme il est,dit dans les
motifs5 il ne devait pas être question de poursuites
hypothécaires; les héritiers Douet devaient reprendre
1
1
•
■ sgisir
••
leur
cliose
en nature; ils ne pouvaient
la111faire
�( 8 )
et âcîjuger judiciairement, pour être
d’uhe vérité c£ui n’existait pas.
payés du
prix
Si, au contraire, il y avait réellement Vente, ce que
les vendeurs eux-mêraes avaient reconnu, soit par la
réception d’ une grande partie du prix, soit par leurs
poursuites comme créanciers du surplus ; s’il y avait
réellement vente , il fallait examiner comment les
vendeurs avaient conservé leur privilège ou leur hy£otïtèqùe sur les imïneübles qui avaient passé aüx tiersacquéreurs.
Ce jugement , par les principes qu’il posait, annonçait
au sieur Grelet de nouvelles poursuites qui se sont réa
lisées bientôt après*
Pour en détruire la base, le sieur Grelet a dû se
pourvoir, pàt appel, devant ïa Cour.
Son appel présente à juger deux questions.
i ° Abstraction faite de la condition de transcrire,
stipulée dans leurs contrats de vente, les premiers vendeursauraient-ilsconservé,sansinscription,unprivilége
„ou une hypothèque sur les immeubles acquis par le
sieur Grelet?
z° Cette condition a-t-elle pu les affranchir, à l’égard
des tiers, de Îa nécessité de l’inscription de leur privi
lège, et les autoriser à poursuivre des seconds acqué
reurs, par la voie de là sâisie immobilière?
L ’on examinera successivement ces deux questions *
]a solution de la seconde découlant nécessairement de
celle de la première.
�PREMIÈRE QUESTION.
^Abstraction faite de la condition de transcrire} les
premiers vendeurs auraient-ils conservé, sans ins
cription , un privilège ou une hypothéqué sur les
immeubles acquis par le sieur Grelet ?
Pour la solulion de celte question, il faut remarquer
d’abord les dates des premières et des secondes ventes,
et se fixer ensuite sur la législation alors en vigueur.
23
Les premières ventes sont des 19 brumaire et
frimaire an i ; celles faites au sieur Grelet ont eu lieu
les 2 germinal an i , 22 frimaire an 1 4 , el 12 avril
1806.
3
3
Ainsi, les unes et les autres ont été faites depuis
l’émission du Code civil, publié en l’an 1 2 , ou 1804,
et avant que nous eussions pour loi le Code de pro
cédure, qui n’a été en vigueur qu’ au i er janvier 1809.
C’est donc par les règles de cette législation intermé
diaire, que la difficulté doit se résoudre.
Ces règles n’étaient semblables ni à celles qui les
avaient précédées, ni à celles qui les ont suivies.
Avant le Code civil, la loi du 1 1 brumaire an 7 ,
par une innovation poussée beaucoup trop loin, avait
déclaré, dans son article 26, que, jusques à la trans
cription, la vente ne pourrait être opposée aux tiers
qui, même postérieurement à sa date, auraient con
tracté avec le vendeur. Cependant, sous celte loi, les
tiers seuls étaient autorisés à argumenter du défaut
�( 10 )
de transcription, L e contrat de vente n’ en existait pas
moins entre le vendeur et l’acquéreur.
Le Code civil fit disparaître la nécessité de la trans
cription pour la perfection de la vente.
L e Code civil fit plus; il posa pour règle que toute
créance, privilégiée ou autre, non inscrite au moment
de l ’aliénation, ne grèverait pas l’objet aliéné.
L a vérité de cette dernière proposition peut être
démontrée de plusieurs manières :
Par les termes de la loi ;
Par les discours des orateurs qui Font présentée ou
discutée ;
Par les dispositions nouvelles du Code de procédure ,
et les motifs qui les ont dictées ;
Par les opinions des auteurs ;
Enfin par la jurisprudence.
Les termes de la loi sont à considérer, soit au titre
de la vente, soit à celui des privilèges et hypothèques.
Au titre de La vente, on trouve l’article i
, qui
déclare La vente parfaite entre les parties, et La pro
priété acquise de droit à Cacheteur à Cégard du ven
deur > des quon est convenu de La chose et du prix.
Cet article anéantit le 26e article de la loi du 1 1
brumaire an 7 , et fait cesser les fraudes dont cette loi
était la source, en ne permettant plus au vendeur de
contracter après la vente, au préjudice de son ac
quéreur.
A ce moyen de prévenir les abus des contrats pos
térieurs, le législateur du Code se proposa d’ajouter
583
�( 11 )
celui d’éviter les dangers résultant des actes même
antérieurs, mais non connus; et ce second but, il le
remplit par les règles contenues au titre des privilèges
et hypothèques.
Tout le système hypothécaire établi dans ce titre
roule sur deux bases principales, L A p u b l i c i t é et L A
SP É C IA L IT É .
L a p u b l i c i t é sur-tout a été rigoureusement pres
crite , comme indispensable pour faire connaître aux
tiers les privilèges ou les hypothèques auxquels aurait
pu s’être soumis le propriétaire avec lequel ils vou
draient contracter.
Pour produire cette publicité, la loi a exigé une
inscription faite par les créanciers, dans des registres
toujours ouverts au public.
De là une foule d’articles d’après lesquels, à Fexception des hypothèques légales des femmes el des mineurs,
la loi ne reconnaît ni privilèges ni hypothèques, s’ils ne
sont pas inscrits.
L ’article 2106 du Code civil déclare que « les pri« viléges ne produisent d ’effet, h l’égard des immeubles,
«• qu’autant qu’ils sont rendus publics par inscription
«• sur les registres du conservateur des hypothèques,
« de la manière déterminée par la lo i, et à compter
« de ta date de celte inscription. »
L ’article 2107 n’excepte de cette formalité que
quelques privilèges particuliers et de peu d’importance,
énoncés dans l’article 2.101.
L article 2j 08 soumet expressément le privilège du
�( 12 )
vendeur à l’ inscription ; il charge l’acquéreur de trans
crire, et le conservateur des hypothèques de faire alors
une inscription d’office pour le vendeur. Il autorise
aussi ce dernier à requérir la transcription lui-même,
à l’effet d’acquérir Cinscription de ce qui lui est dû sur
le prix.
On remarquera qu’en autorisant le vendeur à re
quérir lui-même la transcription pour conserver son
privilège, et à Ceffet d ’acquérir l ’inscription de ce qui
lui est dû, le législateur l’a clairement averli que le
privilège pouvait se perdre même avant la transcrip
tion, et qu’il était important de ne pas négliger cette
formalité.
13
L ’article 2 1
dit que toutes créances privilégiées
soumises à la formalité de l’inscription, à l’égard des
quelles les conditions prescrites pour conserver le pri
vilège n ’ont pas été accomplies, dégénèrent en simples
créances hypothécaires, et que l’hypothèque ne d a te,
à Cégard des tiers, que de l ’époque des inscriptions.
Des observations semblables peuvent être puisées
dans les articles relatifs aux simples hypothèques;
Dans l’article 2 13 4 , notamment; où on lit que l’hy
pothèque n’a de rang que du jour de l’inscription ; d’où
il suit qu’il n’y a pas d’hypothèque, devant la loi, tant
qu’il n’y a pas d'inscription.
35
Dans l’article 2 1 , d’après lequel l’hypolhèqne des
femmes et des mineurs est la seule qui existe indépen
damment de toute inscription; expressions dont se lire
�( i3 )
la conséquence naturelle, que toute autre hypothèque
n’existe pas, si elle n’est pas inscrite.
A tous ces raisonneraens, qui démontrent la néces
sité de l’inscription du privilège ou de l’hypothèque,
pour leur donner de l’existence ou de l'effet, on ne
peut opposer qu’ une seule objection, savoir que la loi
ne prescrit pas de délai pour faire inscrire le privilège
du vendeur.
Mais le silence de la loi sur ce point, peut tout au
plus autoriser à dire que tant que l’immeuble vendu
est encore entre les mains de l’acquéreur, le privilège
peut être inscrit.
Cela n’empêche pas que l’inscription ne soit néces
saire pour prévenir, en faveur du premier vendeur,
le danger d’une seconde vente, et pour que le second
acquéreur soit grevé du privilège.
Si, au moment de la seconde vente, le privilège
n’est pas inscrit, il est réputé ne pas exister relativement
au second acquéreur-, il ne peut produire aucun effet
à son égard, parce que cet acquéreur a acquis de bonne
foi, et que l’on a négligé de l’avertir parla publicité
d’une inscription. (Voir l’article 2106 du Code).
ne
peut donc donner au premier vendeur le droit de suivre
l’immeuble dans les mains du second acquéreur.
11
C’est encore ce que d’autres articles du Code civil
peuvent servir à prouver de plus en plus.
L ’article 2166 n’accorde le droit de suite qu’aux
créanciers ayant privilège ou hypothèque inscrite.
Xi art icle 217 7 ne place avant les créanciers personnels
�4
( i )
du tiers-détenteur, que les créanciers i n s c r i t s su r les
précédens pro priétaires , en sorte que tout créancier
non inscrit ne peut réclamer de préférence.
Les articles 2 1
et 2 18 4 indiquent au tiers-acqué
reur le moyen de se soustraire au droit de suite, au
torisé par les articles 2166 et suivans; et quel est ce
moyen? celui de faire une notification aux créanciers,
aux domiciles élus par leurs in scrip tio n s , et d’offrir le
rapport du prix; cela ne prouve-t-il pas qu’à l’égard
du tiers-acquéreur, la loi ne reconnaît pour créancier^
que ceux dont le titre est inscrit ?
Aussi est-ce aux créanciers inscrits seuls que l’art. 2 185
permet de faire une surenchère.
Enfin, un dernier argument se tire même de l’ar
ticle 2 1 8 2 , ou la loi dit que la simple transcription ne
83
p u rg e pas les hypothèques et privilèges
immeubles.
é t a b l is
sur les
Personne ne contestera que la transcription purgeait
avant le Code, purge encore aujourd’hui toute hypo*Ihèque et tout privilège non inscrits, tandis que ceux
qui sont inscrits ne peuvent être purgés qu’à l’aide du
moyen indiqué par les articles 2 1
et suivans.
Ainsi, en disant que la transcription ne purgeait pas
les privilèges établis sur les immeubles, le législateur
a déclaré clairement qu’il n’existait, à ses yeux, de
privilège, qu’aütant qu’il était in sc rit; c’est-à-dire que
l’ inscription était indispensable pour établir un privilège
sur un immeuble.
On le voit, les raisonnemens fournis par la lettre
83
�( i5 )
même de la loi, abondent pour démontrer qu’en ache
tant, sous la législation pure du Code civil, un im- %
meuble non grevé d’inscriptions, l’acheteur l a acquis,
libre de toutes charges et de toutes dettes; il n’a pas
eu besoin de transcrire pour arrêter le cours d’inscrip
tions qui ne pouvaient pas être prises à son préjudice,
ni pour paralyser l’t'iïet de privilèges ou d’hypothèques
qui n’existaient pas à son é gar d, et qui ne pouvaient
plus être établis sur un immeuble dont le débiteur avait
cessé d’être propriétaire.
Tel est le vrai sens de la loi du Code sur les privi
lèges et hypothèques, sens que de nombreux articles
indiquent avec la plus grande évidence, sens que les
législateurs eux-mêmes ont déclaré dans les discours
lumineux qui ont préparé la rédaction définitive de
la loi.
Parmi ces législateurs, nous croyons devoir nous
borner à en citer un dont les lumières sont aujourd’hui
un des principaux ornemens de noire Cour. M. Grenier,
dans son rapport au Tribunat, sur la loi des privilèges
et hypothèques, au nom de la section de législation,
en parlant de la transcription, s’exprime en ces termes
remarquables :
»Mais cette transcription n’est plus nécessaire au« jourd'hui pour la transmission des droits du vendeur
* a 1 acquéreur, respectivement à, des tiers ainsi/que
« lavait voulu l’article 26 de la loi du 1 1 brumaire
an 7. Elle n’ajoute rien à la force du contrat, dont
« la validité et les effets sont subordonnés aux lois
» eénérales relatives aux conventions et ;i 1n —
�( i6 )
« en sorle qu'elle n'est plus nécessaire p o u r a r r ê t e r
« le
c o u r s d é s i n s c r i p t i o n s , qui, auparavant ,
« pouvaient toujours être faites sur l’immeuble ven d u ,
« m êm e après la vente. »
Ces expressions sont aussi claires que positives, la
transcription ri est plus nécessaire pour arrêter le cours
des inscriptions. Donc le contrat de vente seul a suffi
pour arrêter ce cours; donc toute créance non inscrite
avant la vente est sans force, sans existence, même à
l'égard de l’acquéreur.
Convaincus de la vérité de ces conséquences, mais y
ayant remarqué quelques inconvéniens, les législateurs
voulurent abroger le principe, et lui en substituer un
au tre , lorsqu’ils rédigèrent le Code de procédure.
C’est dans cette pensée qu’ils insérèrent dans la der
nière loi l’article
> Par lequel il est permis aux
créanciers, qui n auront pas f a i t inscrire leurs titres
834
antérieurem ent a u x aliénations q u i s e r o n t f a i t e s
A
L A V E N I R , de prendre inscription dans la quinzaine
de la transcription.
Cet article dispose tant pour les créanciers ayant un
privilège, qu’à l’égard de ceux qui n'ont qu'une simple
hypothèque (i) ; mais il ne dispose que pour les alié
nations futures ; et ses termes indiquent clairement que,
pour le passé, l’inscription a dû précéder la vente.
C'est aussi ce que fônt observer les orateurs du gou
vernement et ceux dtl Tfibunat, lorsqu ils examinent
la disposition de l’article
du Code de procédure.
834
( i ) V o i r , pont les privilège*, la second paragraphe de l’article 834.
�( T7 )
Les uns et les autres présentent cet article comme ren
fermant une nouvelle règle qui modifie celle établie
parle Code civil, mais qui, respectant le tems passé el
les droits acquis, doit atteindre seulement les aliéna
tions faites à l’avenir.
L e discours de M. Berlier, conseiller d’état, chargé
d’exposer les motifs de la loi, et celui du tribun T arrible, sont remarquables sur la question.
M. Berlier, notamment, après avoir rappelé l’opi
nion qui n’accordait Le droit de suivre Cimmeuble, en
quelques mains qu’il eût passé, qu’aux créanciers ayant
privilège ou hypothéqué inscrite au moment de la vente^
après avoir reconnu que cette opinion était la plus
conforme au Code civil, mais après avoir fait sentir
que l'opinion contraire avait un but juste et utile, et
présentait une modification qu’il était bon d ’accueillir,
ajoute ces expressions, décisives pour la question qui
nous occupe :
« Dans cette conjoncture, on a adopté, pour le passé
* et l’avenir, un parti qui respecte les droits de l’ un et
de l’autre tems.
« Comme la disposition nouvelle n’atteindra que Les
« aliénations qui seront faites à l’avenir, les tiers* acquéreurs qui auront contracté sous l’empire de La
« Loi qui nous régit en ce moment, n’en recevront
« aucun dommage. »
Les autours ne sont pas divisés sur la question; tous
décident que sous le Code civil, et avant le Code de
procédure, l’aliénation seule, quoique non suivie de
3
�( i8 )
transcription, faisait disparaître, à l’égard de l’acqué
reur, toute créance non inscrite. Tous appliquent la
règle aux créanciers privilégiés, comme aux simples
créanciers hypothécaires.
M. Chabot (de l’Allier), dans ses Questions transi
toires, dit que celte opinion est la seule qui puisse se
concilier avec les dispositions du Code. (Voir au tom. 2 ,
page 78).
M. Tarrible professe la même doctrine dans le
Répertoire de M. Merlin, au mot Inscription hypo
thécaire, § 4.
Telle est aussi celle enseignée par M. Persil, dans
son Régim e hypothécaire, sur l’article 2182 (p. 362)y
et dans ses Questions hypothécaires, au mot Inscription,
§ . Voici comment s’exprime cet estimable auteur,
dans le premier de ses ouvrages :
5
«Ainsi, sous le Code civil, et avant le Code de pro
ie cédure, s’il est arrivé qu’ une personne ait aliéné
« l’immeuble qu’elle avait précédemment hypothéqué,
«■ mais dont les créanciers n’avaient pas encore pris
«■ inscription, cet immeuble est passé, fra n c et quitte,
«■ entre les mains de Cacquéreur, encore que celui-ci
« n ait pas fa it de transcription. »
M. Mourre, procureur général de la Cour de cas
sation, a professé la même opinion dans une cause où,
examinant les effets du privilège du vendeur, et après
avoir déclaré en principe que le privilège du vendeur,
en quelque tems qu’il soit inscrit, prime toutes les
�C 19 )
créances hypothécaires, ce savant magistrat se haie
d’ajouter, pour prévenir toute équivoque :
«Nous devons dire que le principe n’a lieu que lorsque
«■ les choses restent dans l’état d’une première vente,
« et qu’il s’agit d’un conflit entre le vendeur et les
« créanciers du premier acquéreur; car s’il y a une
« seconde vente, et que le second vendeur ait fait
« transcrire sous l’empire de la loi du 1 1 brumaire,
« ou
bien, si La seconde vente a eu Lieu sous L’empire d u
« Code c iv il q u i n ’e x i g e p a s l a t r a n s c r i p t i o n
,
«
*
«
«
,
alors le privilège du premier vendeur ne peut plus
être inscrit, sauf, pour les contrats postérieurs au
Code de procédure, l’exécution de l’article
de
ce Code. ■»
A cette masse d’autorités pour prouver qu’une vente
faite sous le Code civil, et avant le Code de procédure,
quoiqu'elle n’ait pas même été transcrite, a purgé tout
privilège ou hypothèque non inscrite au moment de
1 aliénation, à cette masse d’autorités respectables vient
se réunir encore la jurisprudence, soit de la Cour de
Riom , soit de la Cour de cassation.
L a Cour de Riom a jugé la question relativement
aux créanciers du vendeur, par un arrêt du 1 1 mai
1 8 1 , dans la cause des sieurs Reynard et Faure.
Faure avait acheté un domaine de Lardi, le 23 avril
1806.
834
5
Reynard, créancier antérieur et hypothécaire du
vendeur, n’avait pas pris d’inscription avant l’aliéna
tion; mais l’acte de vente n’était pas encore transcrit,
�( 20 )
lorsque ce créancier fil inscrire son titre. Cependant
l’acquéreur a soutenu que l’hypothèque du créancier
était anéantie à son égard; et la seconde chambre l’a
jugé ainsi sous la présidence de M. V erny,en adoptant
les motifs d’un jugement de Riorn, qu'elle a confirmé.
Ces motifs ont pour base les principes que nous avons
déjà développés; on y lit :
«• Que sous le régime du Code civil, et anlérieure« ment au Code de procédure, il n'y avait pas besoin
« de transcription pour arrêter le cours des inscriptions;
« Que Reynard n’a pu s'inscrire utilement après la
« vente, et ne peut être considéré, par rapport à Faure,
« acquéreur, comme créancier hypothécaire sur le prix
«• de sa vente , puisqu’il n’avait qu'une hypothèque
« imparfaite qui, par rapport aux tiers, ne pouvait
« prendre rang que par l'inscription. *
La Cour de cassation, dans un arrêt du décembre
i i
consacré la même vérité, relativement au pri
vilège d’un, vendeur.
Cet arrêt présente un corps entier de doctrine sur la
question, qu’il examine en parcourant même toutes
les variations de notre législation en cette matière.
Les motifs de l’arrêt décident que le privilège du>
vendeur r i est conservé, à l'égard des acquéreurs, qu'au
tant q riil est inscrit, savoir :
*
Sous l’empire de la loi du 1 1 brumaire an 7 , avant
« la transcription des ventes ultérieures;
« Sous l’empire du Code civil, avant Le contrat de
r vente du, premier acquéreur au second ;
8 3, a
5
�• Sons l’empire du Code de procédure, dansles quinze
« jours après la transcription de la seconde vente.
Voici ce que porte un des motifs de l ’arrêt :
«■Considérant que, suivant le Code civil, l’inscription,
« pour être valable, devait être prise, par le créancier,
« dans le tems que l’immeuble était entre les mains de
« son débiteur; quq faite postérieurement tiL'aliéna« tlon de Cimmeuble , elle était nulle, soit que l'acte de
« mutation eût été ou non transcrit (i). »
Quoi de plus positif que de pareilles expressions?
quoi de plus conforme à la lettre de la loi, à son esprit,
à l’opinion unanime des auteurs? Quoi de plus propre
à faire disparaître tous doutes et toute hésitation, s’il
pouvait en rester, et à convaincre que, sous le Code
civil, antérieurement au Code de procédure, la simple
aliénation produisait absolument l’efîet produit au
trefois, celui qui serait produit aujourd’hui par la
transcription de l’acte, et que les créances, même pri
vilégiées, sur un immeuble, étaient effacées par le seul
fait de la vente de l’immeuble, si les créanciers avaient
négligé de les faire inscrire antérieurement.
C’est sous la foi de cette législation intermédiaire,
que le sieur Grelet a cru qu’il n’avait à redouter aucun
privilège, puisqu’il n’y en avait pas qui eût été rendu
public par une inscription.
v
(0
Voir cet arrêt, et les questions qui sont posées, dans le Journal do
*rey, tome 1 4 , i t» partie, page 4 6 ; et dans le Code civil annoté par le
même auteur, notes i 5 et 1 6 , sur l’article aio8.
�( 22 )
C ’est après s’être assuré au bureau des hypothèques
qu’aucune inscriplion ne grevait les héritages qu’il se
proposait d’acquérir; c’est aussi après avoir exigé de ses
vendeurs la déclaration que les héritages étaient fran cs
et quittes de toutes dettes et hypothéqués, que le sieur
Grelet, plein de sécurité, a acheté et a payé le prix
de son acquisition.
Examinons si une clause qui lui était inconnue, et
que renfermait un précédent contrat, a pu détruire, à
l’égard de ce tiers-acquéreur, tout le système de la
législation hypothécaire sous laquelle il contractait, en
conservant à un p re m ie r vendeur un privilège et un
droit de suite que, d’après la loi, sa négligence devait
lui faire perdre.
SECONDE QUESTION.
L a condition de transcrire, stipulée par les premiers
vendeurs, a-t-elle pu les affranchir, à l'égard des
tiers, de la nécessité de Cinscription de leur privilège,
et les autoriser à poursuivre des seconds acquéreurs
par la voie de la saisie immobilière ?
C’est dans l’examen de la nature et des effets de la
charge de transcrire, imposée par les premiers vendeurs,
que l’on doit se rappeler ce que nous avons dit en com
mençant, sur le danger de la confusion des principes,
et sur les erreurs dans lesquelles on tombe nécessaire
ment, lorsqu’on applique à une des matières du droit,
�C
23
)
des règles qui lui sont étrangères, en méconnaissant
celles qui lui sont pvopres.
Considérer la nature de la charge dont il s’agit ;
En déterminer les effets;
Démontrer qu’elle n’a pu être d’aucune influence
pour la conservation du privilège des vendeurs ;
Telle est la tâche qui nous reste à remplir.
Si l’on se fixe sur la nature de la clause insérée aux
contrats des ventes primitives, quels que soient les
termes dans lesquels celte clause est conçue, on re
connaîtra qu’elle caractérise un mode d’exéculion des
contrats, plutôt qu’ une condition suspensive des ventes.
En effet, une condition n’est suspensive qu’autant
qu’elle est subordonnée à un événement futur et incer
tain, indépendant de la volonté des parties.
L ’on appelle, au contraire, modes, dans le langage
du droit, tous ces pactes accessoires ou ces clauses
ajoutées à la convention principale, pour imposer aux
contractans certaines obligations, certaines charges (i).
Ce qui distingue le mode delà condition suspensive,
c’est l’exécution que reçoit le contrat.
Dans le cas d’une condition suspensive, le contrat
n'est exécuté qu’après l’événement de la condition.
C’est le cas prévu par l’article 1 18 1 du Code civil.
Dans celui du mode, ou de la condition modale,
exécution du contrat n’est point ^suspendue. Cette
1
( ) Voir ce que dit le professeur Toullier dans le Droit civil français,
n e ? , pages
a et6oo. Voir aussi le Répertoire de M . M erlin, au mot
M ode .
56
�(H )
exécution s’opère sur-le-cliamp; seulement le contrat
peut être résolu, si l’ une des parties ne satisfait pas à
la charge qui lui avait été imposée. C’est le cas dont
parle l’article n
du Code.
C ’est dans ce dernier sens que les parties ont en
tendu, ont exécuté elles-mêmes les contrats de vente.
Les acquéreurs se sont mis en possession au même
instant; et, loin de s’y opposer jusqu’à la transcription
des contrats, qui aurait dû être faite dans les six se
maines, les vendeurs ont participé à l’exécution autant
qu’il était en eux, soit en délivrant les immeubles
vendus, soit en recevant le prix des ventes.
Ce prix a été payé à diverses époques, la plupart
très-reculées du délai fixé pour la transcription; il a été
payé en totalité, à ce qu’il paraît, à l’un des vendeurs,
ou à son représentant, le sieur Saint-Laurent, qui
aujourd’hui ne réclame plus rien (i), et en très-grande
partie à l’autre vendeur.
N ’est-il pas singulier de voir ces vendeurs, qui ont
exécuté eux-mêmes les ventes, et qui en ont reçu le
prix, argumenter du défaut de transcription pour sou
tenir qu’il n y a pas eu de vente de leur part?
, Mais s i c o m m e ils le prétendent , et comme l’ont
83
( i) L e sieur de Saint-Laurent, unique représentant de la dam eD ouet,
qui a fait la première vente du 19 brumaire an x , est en cause sur l’appel,
3
parce qu’il y était entervenu en première instance; et cependant il ne lui
est tien d û , à ce qu’il paraît; ce qui le démontre, c’est que les nouvelles
poursuites dirigées contre le sieur Grelet ne sont faites qu’au nom des
héritiers du sieur de L ab o u la y e , et pour le prix de la seconde vente du
frimaire an i .
23
3
�( *5 )
pensé les premiers juges, il n'y a pas eu de vente, que
devaient-ils faire?
Ils devaient reprendre dans les mains de la compagnie
Bravard, les immeubles que désignaient des ventes res
tées imparfaites, sau fàag ir, au besoin, e n désistement
contre les tiers-détenteurs.
Telle était la conséquence, et tels devaient être les
eifels de la condition de transcrire apposée dans les
ventes, quelle que fût même la nature de cette con
dition, soit qu’on la considérât comme suspensive, soit
qu’on la considérât comme résolutoire.
Considérée comme suspensive, la condition aurait
empêché que les immeubles vendus ne fussent, devenus
la propriété des acquéreurs.
Considérée comme résolutoire, son inexécution au
torisait les vendeurs à rentrer dans leur propriété.
Sous l’un et l'autre rapport, les vendeurs auraient
pu demander à être renvoyés en possession de leur
chose, sauf à examiner les droits acquis aux tiers-ac
quéreurs.
Mais, sous aucun rapport, ils ne pouvaient être
admis à faire vendre cette chose par une saisie immo
bilière faile sur les premiers et sur les seconds ac
quéreurs.
En effet, poursuivre par saisie immobilière, c’est
agir, non comme propriétaires de la chose saisie, mais
comme créanciers ayant un privilège ou une hypo
thèque sur cette chose; c’est donc reconnaître qu’on
a cessé d’êlre propriétaire; c’est par conséquent avouer
4
�Ilf
î^ \
( 26 )
que les ventes primitives avaient transféré la propriété
des choses vendues aux acquéreurs originaires que l’on
poursuit.
Ainsi, il y a une contradiction choquante entre le
sens que les premiers juges ont donné à la condition
de transcrire, et les effets qu’ils ont attribués à cette
condition.
D ’un côtéj ils ont dit que la condition n’ayant pas
été remplie, il n’y avait pas eu de vente.
De l’autre, ils ont déclaré que les vendeurs avaient
pu agir comme de simples créanciers du prix, et pour
suivre^ contre les acquéreurs diverses expropriations
judiciaires qui ont été dirigées, non seulement sur la
terre. d’Allègre, mais même sur les biens propres des
acquéreurs originaires.
. Mais s’il n’y a pas eu de vente, il n’est pas dû de
prix,
• S'il n’y a pas eu de vente, loin d’être créanciers,
les vendeurs seraient, au contraire, débiteurs envers
les acquéreurs, de sommes considérables, s'élevant à
plus de oo,ooo francs, qu’ils ont touchées à compte
du prix d’une vente proposée, acceptée, mais non
consommée.
S il-n’y a pas eu de vente, les héritiers Douet et
Laboulaye auraient tout au plus droit contre la com
pagnie Bravard, à des dommages et intérêts dont la
valeur ne pourrait évidemment s’élever à celle des
sommes qu'ils auraient à restituer, et qui, n’étant ni
3
�27
.
(
)
cerlains ni liquides, n'auraient pu autoriser des expro
priations. (Voir le Code civil, article 2 2 i3 ) .
On le voit; il est incontestable que la décision du
tribunal du Puy renferme une erreur grave, ou dans
le principe qu’elle pose, ou dans la conséquence qu’elle
en lire.
Il faut nécessairement qu’il y ait eu vente, pour
que des vendeurs aient pu agir en paiement d’ un prix,
et poursuivre des expropriations dans l’unique but
d’obtenir ce qui, disent-ils, leur reste dû sur le prix.
Or, si les vendeurs sont forcés de reconnaître qu’il
y a eu vente; si cette vérité est le résultat nécessaire,
et des considérables à-compte qu’ils ont reçus sur le
prix, et des actions qu’ils ont formées, et des poursuites
qu’ils exercent encore aujourd’hui; si donc les vendeurs
ne sont réellement que de simples créanciers, privilégiés
même, il faudra au moins se résoudre à examiner com
ment leur privilège, quoiqu’il n’eût reçu aucune publi
cité, aurait cependant conservé toute sa force à l’égard
des tiers qui, au moment où ils ont contracté avec les
acquéreurs primitifs, n’ont pas trouvé ce privilège
inscrit sur les registres destinés à le faire connaître. t
Ces dernières réflexions nous ramènent à la première
question que nous avons traitée, et qui roule sur des
principes dont nous n’avons plus, il semble, qu’à faire
l’application.
Rappelons nous ici ce que nous avons démontré en
traitant la première question , savoir :
Que, sous le Code civil, et avant le Code de pro-
�( *8 )
cédnre, la simple aliénation produisait le même effet
que produisait antérieurement, ou que produirait au
jourd’hui la transcription du contrat; ‘
C ’est-à-dire, i° qu’elle effaçait, à l’égard des ache
teurs , non seulement les hypothèques, mais aussi les
privilèges non inscrits au moment des ventes ;
2.° Qu’elle arrêtait le cours des inscriptions, qui ne
pouvaient plus dès-lors être faites utilement.
Cela posé, comment concevoir que les héritiers
Douet et de Laboulaye puissent parler de privilège, et
agir hypothécairement contre des tiers-acquéreurs, en
vertu de ce prétendu privilège, qui n’était cependant
pas inscrit en i o et en 1806, au moment où les tiers
ont acheté?
*
Leur privilège, anéanti à l’égard des tiers parla loi,
et par la négligence des créanciers, est dans leurs mains
une arme inutile.
Leur privilège, d’ailleurs, ne pourrait être exercé
contre les détenteurs qu’autant qu’il aurait été inscrit 5
c'est ce que déclarent textuellement plusieurs articles
du Code civil; l’article 2 10 6 , d’après lequel les privi
lèges ne produisent d ’ejfet qu’autant qu’ils sont rendus
publics par l’inscription ; les articles 216 6 et 2 1 6 9 ,
par lesquels, pour être autorisés à suivre un immeuble
en quelques mains qu'il passe, et à le faire vendre sur
le t i e r s - détenteur, il faut être créanciers ayant un
privilège ou une hypothèque inscrite • les ariiçles 2 18 3
et 2 1 , qui ne reconnaissent de créanciers privilégiés
ou hypothécaires que ceux dont les titres sont inscrits,
85
85
�(
29
)
'
et qui n’attribuent qu’à ces créanciers seuls le droit si
important de surenchérir; l’article
du Code de
procédure, qui même en établissant, pour l’avenir, la
nécessité de la transcription , a cependant encore
confirmé celle de l'inscription des privilèges et h y
pothèques.
Convaincus eux-m êm es q u e, sans inscription, il
ne pouvait exister pour eux de privilège, ni par con
séquent d’action hypothécaire à exercer, les héritiers
Douet et de Laboulaye ont fait inscrire leurs titres.
Mais leurs inscriptions, prises en 1808 seulement,
ne pouvaient plus être faites utilement alors, parce
que les aliénations antérieures avaient arrêté le cours
des inscriptions.
Leurs inscriptions tardives n’ ont pas fait revivre
contre des tiers-acquéreurs un privilège anéanti depuis
long-tems à Tégard de ces derniers ; ces tiers-ac
quéreurs n’en ont pas moins le droit de dire que des
immeubles qu’ils ont achetés libres de toutes dettes ,
n’ont pu être grevés depuis !es ventes, et que les créan
ciers de leurs vendeurs n’ont ni privilège ni inscription
valable sur ces immeubles.
834
Si les principes que nous avons posés sont vrais, si
la publicité des privilèges et des hypothèques est réel
lement une des bases fondamentales du système hy
pothécaire tel qu’il est établi par le Code civil, il sera
difficile de concevoir de quelle influence a pu être, à
■p r
. J
1
°8ard des seconds acquéreurs, pour la conservation du
puvilégedes premiers vendeurs, la condition de trans
crire, insérée dans les contrats des ventes primitives.
�( 3o )
Les eiFets de cette condition pourraient être trèspuissans pour anéantir les ventes ; mais ils sont évi
demment sans force pour les maintenir, et pour con
server, même contre des tiers, un privilège et une
action en paiement du prix.
Dira-t-on que les tiers ont dû connaître la clause de
la première vente, et que s’ils ne l’ont pas connue, ils
ont à se reprocher leur imprudence? Rappellera-t-on
contre eux cette ancienne maxime : Nemo ¿gnarus
debet esse conditionis ejus cum quo contrahit?
t Invoquer une pareille maxime en matière hypothé
caire , ce serait en faire la plus fausse application.
Quel a été, en effet, le but de l’établissement du
régime hypothécaire?
Ce but a été précisément de dispenser les acquéreurs
de se livrer h des recherches toujours difficiles, souvent
impossibles, sur les dettes de leurs vendeurs.
Il
a été de mettre les parties contractantes à portée
de connaître l’état respectif de leurs fortunes, par la
simple inspection des registres destinés à rendre pu
bliques toutes les charges dont ces fortunes pouvaient
être grevées.
Il
a été d’assurer à chacun des contractans qu’il
n ’aurait à craindre ni recherche, ni privilège, ni con
currence de la part de toute personne qui n’aurait pas
donné à des droits antérieurs, cette publicité si impé
rieusement exigée par la lo i, comme étant la priùcipale
base de tout le système hypothécaire.
Admettre que l’on a p u , par les clauses d’une vente,
ou d’un autre contrat, déroger à la nécessité d’une
�( 3i )
publicité aussi importante , aussi formellement exigée
à l’égard des tiers, ce serait renverser tout le sys
tème de la loi, ce serait anéantir le code hypothé
caire lui-même, ce serait nous replonger dans l’ancien
chaos de ces privilèges et de ces hypothèques qui res
taient ignorés des acquéreurs, jusqu’à l’instant où une
action aussi imprévue que dangereuse venait les tirer
de leur sécurité, en consommant leur ruine.
Qu’on cesse donc de prétendre que la condition de
transcrire, stipulée dans les premières ventes, a pu
être de quelque valeur relativement à des tiers qui
n’étaient pas parties dans les contrats, à des tiers qui,
au moment où ils ont contracté eux-mêmes avec leurs
propres vendeurs, n’ont eu qu’une seule chose à con
sidérer, n’ont eu qu’à vérifier s’il y avait, sur les
biens qui leur étaient vendus, quelques créances ins
crites.
En ne trouvant aucune inscription sur ces biens, en
achetant sous l’empire d’une loi qui effaçait toutes
dettes, tous privilèges même, non inscrits au moment
des ventes^ ces liers ont acquis de bonne fo i, ils ont
acquis sous la foi même du législateur, qui leur avait
promis qu’ils n’avaient rien à craindre; ils ont acquis,
ils ont dû acquérir avec une sécurité parfaite; et ne
seraient-ils pas autorisés à se plaindre du législateur,
fct à lui reprocher de leur avoir tendu un piège , s i ,
«jprès avoir payé le prix entier de leurs acquisitions,
il-s pouvaient être aujourd’hui poursuivis par des créan
ciers! qui furent négligens lorsque la loi leur prescrivait
de ln vigilance; par des créanciers qui> sortant, enfin
�( 3^ )
de leur longue inertie, voudraient fbire retomber sur
eux le poids de leur propre faute ?
Nous disons Le poids de Lear propre fa u te ; car pour
quoi ces créanciers n ’ont-ils pas veillé à l’exécution
de la condition de transcrire, qu’ils avaient stipulée?
Pourquoi n’ont-ils pas usé de la faculté de transcrire
eux-mêmes, faculté que leur accordait l’article 2108
du Code? Pourquoi n’ont-ils pas, au moins, pris une
inscription , comme la loi et la jurisprudence les y
autorisaient ?
L a condition de transcrire, obscurément placée dans
un acte étranger au sieur Grelet, ne pouvait ni changer
la nature du privilège des premiers vendeurs, ni ajouter
à sa force, ni dispenser des formalités nécessaires à sa
conservation.
Remarquons aussi que cette clause n’était que se
condaire, et accessoire à l’obligation même de payer
le prix.
Or, l’obligation de payer ne pouvait grever les im
meubles et s'étendre à des tiers, sans etre rendue pu
blique par une inscription.
;
’
Comment l’obligation accessoire aurait-elle plus de
vertu, et produirait-elle plus d’efl’et que l’obligation
principale ?
Cette dernière observation nous conduit et s’ap
plique à une autre objection.
On oppose que la compagnie Bravard n’a pu trans
mettre au sieur Grelet plus de droits qu'elle n’en avait
elle-même, et que la propriété n’a passé à des tiers
�( 33 )
qu’avec les charges et sous les conditions stipulées dans
les premières ventes.
Ce que nous avons dit répond suffisamment à l’ob
jection.
Nous ajouterons seulement quelques réflexions sur
la nature des charges et des conditions.
Celles qui sont placées sur le fonds vendu, de manière
à diminuer l’étendue de la propriété, suivent ce fonds,
en quelques mains qu’il passe; il n’y a pas de doute :
une servitude, par exemple, imposée par la vente pri
mitive, reste toujours attachée au fonds; et c’est en ce
sens qu’il est vrai qu’un premier acquéreur ne peut
transmettre à un tiers plus de droits qu’il n’en a reçus
lui-même.
Mais les charges, les conditions qui augmentent le
prix, ou qui tendent à en assurer le paiement, ces
charges, ces conditions ne grèvent les tiers qu’autant
qu elles ont été rendues publiques par l’inscription. En
décider autrement, ce serait rayer du Code la loi sur
les privilèges et les hypothèques; car il n’est pas une
seule vente où la charge du paiement du prix ne soit
une condition essentielle de la transmission de la pro
priété ; et l’on pourrait toujours dire que les tiers-
acquéreurs n’ont pu devenir propriétaires que sous
cette charge.'
Or, on le demande, que deviendrait le régime h y
pothécaire avec un pareil système?
Convenons donc que si les charges inhérentes au
fonds, telles que les servitudes, subsistent toujours,
5
�34
(
)
et si elles suivent la propriété dans toutes ses mutations.,
il n’en est pas ainsi des clauses, des charges, et des condilions relatives au paiement du prix de la première
vente, et que ces dernières charges et conditions no
passent pas à des tiers-acquéreurs, lorsqu’elles n’ont pas
reçu la publicité exigée par la loi, sauf cependant Faction
en résolution de la première vente, action que la loi
réserve au vendeur, mais qui lient à d’autres principes,
comme nous l’avons déjà fait observer.
C’est trop long-tems, sans doute, s’arrêter à des dé
monstrations d’ une évidence presque mathématique,
qui signalent l’erreur et la confusion de principes, dans
lesquelles se sont égarés les premiers juges, en consi
dérant la condition de transcrire, et celle de payer le
prix des ventes, comme propres à rendre toute publi
cité. inutile, même à l’égard des tiers-acquéreurs, et
à conserver sans inscription le privilège des premiers
vendeurs.
Toutes clauses, toutes charges semblables sont évi
demment insignifiantes, à l’égard des tiers, dans des
questions de privilège ou d’hypothèque, si, par une
inscriplion, elles ne sont devenues publiques.
Qu’on les fasse valoir, si l’on veut, pour demander
la résolution ou la nullité des premières ventes, cas
régi par d’autres principes, et pour lequel des inscrip
tions ne sont pas requises.
Mais qu’on ne les invoque pas pour réclamer un
privilège qui n'a pu subsister sans inscription.
Mais, diront nos adversaires, que vous importe
�( 35 )
d'être dépouillés par une action en nullité ou résolution
de la vente,, ou par celle en paiement du prix?
Nous répondrons qu’il importe à toute personne de
repousser, dans le moment, une action illégale, sauf
à se défendre, à l’avenir, d’ une action nouvelle, si
elle était entreprise.
Or, l’action en résolution ou en nullité, qui n’est
pas celle dont il s’agit aujourd’hui, cette action fûtelle même fondée, il n’en serait pas moins vrai qu’on
n’a pas eu le droit d’agir contre le sieur Grelet par des
poursuites hypothécaires, en paiement d’ une créance
non utilement inscrite à son égard.
On sait, et la Cour de cassation nous l’enseigne
elle-même sur une question semblable, dans les savans
motifs de cet arrêt du
décembre i i , que nous
avons déjà cité; on sait «que l’action en résolution
« de la vente, et celle en paiement, sont essentielle«• ment distinctes; qu’elles produisent des effets et sont
« soumises à des principes difïérens; qu’ainsi, si l’une
« de ces actions n’est pas assujétie à telle ou tellè for«• malité, il n’y a aucune raison d’en conclure que
« l’autre en soit exempte. »
5
83
Que les héritiers Douet exercent donc, si bon leur
semble, une action en nullité ou en résolution des
ventes originaires, action pour laquelle l’inscription leur
est inutile.
Mais qu’ils soient, en attendant, déclarés non recevables dans l’action hypothécaire en paiement du prix,
puisqu une inscription prise avant les secondes aliéna
�( 36 )
tions aurait pu seule leur conserver le droit d’agir par
cette dernière voie.
Au reste^ le sieur Grelet redouterait peu Taction en
nullité ou en résolution des ventes primitives.
Fût-il atteint par cette action, le sieur Grelet trou
verait au moins un dédommagement dans le prix
qu’ont touché ses adversaires ; et qu’ils seraient certai
nement tenus de restituer, au moins en très-grande
partie; et le dédommagement serait d’autant plus
juste,, que si les héritiers Douet et Laboulàye, ont reçu
de grandes sommes, c’est aux dépens même de celles
qu’ont versées le sîeur Grelet et les autres tiers-acqué
reurs, que l’on veut cependant dépouiller aujourd’hui.
' L e sieur Grelet, fort des moyens nombreux fet puissans qu’il vient de développer, espère se garantir de
cette spoliation.
- Il a acquis à une époque où la simple aliénation
tenait lieu de transcription , en produisait tous les
effets, et purgeait toutes les créances non inscrites,
quelque privilégiées qu’elles fussent. Il n’a donc pas
dû être poursuivi en expropriation pour le paiement
d’ une créance à laquelle aucune inscription n’avait
donné la publicité exigée par la loi.
L a condition de transcrire lui est étrangère; cette
condition, placée dans un contrat qui ne lui a pas été
connu, et que la loi ne l’obligeait pas à connaître, cette
condition, imposée aux premiers acquéreurs, n’a pas
dispensé les vendeurs de veiller eux-mêmes ii la con
servation de leurs droits; elle n’a pu changer la nature
�■ ( 37 )
de leur privilège, elle n*a pu les affranchir de l’obli
gation de donner à leur créance de la publicité ; elle
n’a pu anéantir, dans un intérêt privé, tout le système
de ce salutaire régime des hypothèques, que l’intérêt
public a produit.
L e sieur Grelet doit s’attendre qu’on lui opposera
un arrêt de la Cour, rendu le 14 mai dernier ( 18 17 ) ,
en faveur de ses adversaires eux-mêmes, et contre
d’autres tiers-acquéreurs.
Cet arrêt a prononcé’sur l’appel d’un jugement dont
les motifs décidaient que, même relativement aux
ventes faites sous le Code civil, et avant l’émission du
Code de procédure, la transcription avait été néces
saire pour purger les créances non inscrites.
L ’erreur était grave; l’avocat des appelans s’attacha
à la démontrer.
L avocat des intimés, tout en cherchant à justifier
les motifs du jugement, proposa un moyen subsidiaire
qu il fit résulter de la condition de transcrire, imposée
dans les premières ven tes, en présentant cette condi
tion comme ayant dispensé les vendeurs de donner
de la publicité à leur créance pour en conserver le
privilège.
v
I/objection était spécieuse; elle roulait sur une ques
tion d’hypothèque, c’est-à-dire sur une des questions
les pltis ^difficiles jdans notre droit ; elle fit sur lu Cour
une impression imprévue, que ne put détruire une
léplique courte et rapide, dont une partie seulement
fut consacrée à .l’examen de ce nouveau .moyenne! la
�( 38 )
Cour l’adopta, sans s’arrêter aux motifs des premiers
juges.
Aujourd’hui que l’objection a été approfondie, et
que le faible en a été démontré, le sieur Grelet doit
peu craindre l’influence du préjugé qu'on pourra lui
opposer.
L e sieur Grelet sait que, si les dignités et les lumières
ne garantissent pas toujours de l’erreur, c’est le propre
des âmes fortes et généreuses de la reconnaître et de
la réparer, quand elle est signalée ( 1 ).
Déjà la Cour a donné plusieurs de ces nobles
exemples, en réformant sa jurisprudence, notamment
sur des questions d’hypothèque et de testament.
Plein de respect pour ses juges, plein de confiance
en ses moyens , le sieur Grelet attendra avec calme
l’arrêj qui doit prononcer sur son sort.
t
M e A L L E M A N D , Avocat.
.1.
* .
Me GARRON,
,
Licencié-Avoué.
Ho minis est errare at D ei aut hominis Deo proximi
emendare errores. E ra sm e .
( i)
,
A, R IOM, DE L’IMPRIMERIE DE J.-C. SALLES, IMPRIMEUR DU PALAIS.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Grelet, Barthélemi. 1818?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Garron
Subject
The topic of the resource
hypothèques
ventes
conflit de lois
procédures
nullité
créances
saisie immobilière
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Barthélemi Grelet, propriétaire, habitant de la Ville d'Allègre, appelant ; contre M. Armand-Guillaume-Marie, Comte Joly de Fleury ; et dame Angélique-Claudine Douet de Laboulaye, son épouse ; les sieurs Gabriel Douet de Laboulaye, officier ; Charles Lherbette, notaire ; Louis Volflanbert, employé au Trésor public ; et Pierre-Louis Langlais, propriétaire, tous habitans de la Ville de Paris, intimés ; et contre le sieur de Saint-Laurent, ancien Officier-Général, aussi intimé.
note manuscrite : 10 février 1819, audience solennelle, après partage, confirme, journal des audiences, p. ?
Table Godemel : Transcription : 5. l’obligation de transcrire avant aucune aliénation des biens vendus, imposée à l’acquéreur comme condition essentielle et suspensive de la vente jusqu’à l’accomplissement de cette formalité, a-t-elle l’effet de conserver le privilège du vendeur, sans qu’il ait besoin de prendre inscription, même à l’égard des tiers acquéreurs ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1818
An 13-1818
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2406
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2407
BCU_Factums_G2408
BCU_Factums_G2409
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Allègre (43003)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
Créances
hypothèques
nullité
procédures
saisie immobilière
ventes
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e2acd482897ab348b2ed44075fa67236
PDF Text
Text
i
~
-
ït
■;
RÉPONSE
.) *
C O U R
IM P É R IA L E
DE RIOM.
‘ )rî
I r e CHAMBRE.,
Aux observations de la dame K E M P F E R D E
PLO BSH EIM , appelante d’un jugement
rendu au Tribunal civil de cette ville de
R iom , le 28 août 1 8 1 3 ;
POUR
Le Général TERREYRE et la dame BEAUFRANCHET D'A YAT, son épouse }
intimés.
L e s s ieur et dame Terreyre ne se sont jamais flattés
qu’un premier jugement mît un terme aux débats qui
se sont élevés entr’eux et la dame K em pfer; ils s’attendoient dès l’origine à parcourir tous les degrés de juri
diction : mais ils sont disposés à la suivre, et ne craignent
pas un nouvel examen.
Les deux questions que fait naître la dame Kempfer
�( o
ont été résolues par les premiers juges, d’après les vrais
principes; les motifs du jugement font honneur à leur
sagacité; et la dame Kempfer, pour les réfuter, s’est plus
occupée de discussions grammaticales que du point de
droit.
L e don mutuel porté au contrat du 19 brumaii’e an
4 , et qualifié de donation entre-vifs, avoit-il un effet
présent? devoit-il etre réglé par la loi alors existante,
quoique la succession du général d’Ayat ne se soit ou
verte que sous l’empire du Code Napoléon?
Telle étoit la première question. Les premiers juges
ont pensé que la loi du 17 nivôse an 2 , qui étoit aloi's
en vigueur, devoit régler les conventions matrimoniales;
ils l’ont décidé en point de fait et en point de droit.
En point de fait, ils ont judicieusement remarqué que
la clause du contrat contenoit trois objets bien distincts.
« Par le premier, les époux sc donnent réciproque« ment tout ce dont la loi leur permet de disposer en
« faveur l’ un de l’autre, y ayant des enfans, soit du
« présent m ariage , soit d’un précédent; pour par le
« survivant en jo u ir à compter du décès du premier
« mourant, suivant et aux termes de la lo i, sans être
« tenu de donner caution ,* seulement à la charge de
k l’inventaire.
« 2°. Les époux stipulent que dans le cas où ln loi
te donneroit plus de latitude à ces sortes de dispositions
« ( toujours en cas d’enfans ) , la donation mutuelle re« cevra cette plus grande étendue, pour en jo u ir aux
« termes de la lo i, sans donner caution ,* mais à la
« charge de faire inventaire. »
�. (s,
..
3°. Enfin , et toujours par la même clause, « les
« époux conviennent que s’il n’y a aucun enfant lors
« du décès du premier m ourant, ils se donnent mu« tuellement tous leurs biens, pour par le survivant en
« jou ir et disposer en toute propriété , et comme de
« choses à lui appartenantes. »
De ces trois dispositions, ainsi spécifiées et distinctes,
les juges dont est appel ont tiré la conséquence que tant
qu’il y a voit des enfans, les époux avoient eu respecti
vement l’intention de ne se donner qu’un simple usufruit;
et qu’ils avoient fort bien prévu le prédécès des enfans,
seul cas où ils ont voulu se donner la propriété.
Ils ont ajouté que le mot unique jo u ir, la précaution
de dispenser du bail de caution , l’obligation de fa ire
inventaire , exprimoient sans équivoque leur intention;
qu’ainsi, en point de fait, la dame Kempfer ne pouvoit
rien exiger en propriété, dès qu’il existoit des enfans
des deux unions précédentes.
La dame K em pfer, dans les observations qu’elle vient
de publier, trouve ce raisonnement fort étrange. L e mot
jo u ir , dit-elle, s’entend d’un propriétaire ainsi que d’un
usufruitier; il exprime également l’eifet du droit dont
chacun use; il ne peut servir, isolément pris, à fixer
l ’étendue du droit même ; et c’est à la disposition prin
cipale qu’il faut recourir, pour connoître si c’est comme
propriétaire ou comme usufruitier que l’on jouit.
Sans vouloir suivre la dame Kempfer dans ses longs
raisonoemens sur la valeur et la fo rce des mots , on
6’étonne qu’elle ait passé sous silence la troisième partie
de la clause, qui contient le don en propriété des biens
i *
**''
"
�(4
),
en cas de prédécès des enfans,;., elle y auroit vu peutêtre que les époux, n’ont pas commis. d'erreurs d'in*
telligence, et qu’ils ont senti la valeur et la fo rc e des
m ots; car, dans cette dernière disposition, ils ne se
sont pas contentés de se servir de ce mot jo u ir , ils ont
ajouté, et en disposer en toute propriété, comme de
choses appartenantes a u survivant; ils ne se sont pas
dispensés alors du bail de caution , ni asservis à un in
ventaire : ils ont donc bien su faire la différence entre
l’ usufruit et la propriété.
D ’ailleurs, quel est le grammairien ou le juriscon
sulte qui osera soutenir que ces expressions pour en jo u ir
sans être tenu de donner caution , et à la charge de
fa ir e inventaire , valent un don en propriété? n’est-ce pas
au contraire manifester d’ une manière précise l’intention
et la volonté de ne faire qu’un simple don d’usufruit?
car le bail de caution-ne peut convenir qu’à l’usufruitier.
La charge de faire inventaire répugne à toute idée de
propriété.
1
Les époux ont trouvé sans doute que la loi les restreignoit dans leurs affections, en ne permettant de donner
que l’usufruit de moitié; ils ont pu espérer qu’ils seroient
autorisés peut-être à donner la jouissance du tout, et ils on£
voulu profiter d’une loi plus libérale, qui donneroit plus
d’étendue à leur jouissance; mais ni l’un ni l’autre n’ont
voulu dépouiller leurs enfans d’ une portion quelconque
de propriété, puisqu’ils ont prévu le cas de prédécès
de ces mêmes enfans, et que ce n’est qu’alors qu’ils se
font donation de la propriété.
La dame K.empfcr? pour appuyer le système bizarre
�( 5 )
qu’elle a adopté , est allé chercher le gain de survie
de 5o,ooo francs qui .précède le don mutuel, et veut y
trouver la preuve que les époux ont voulu se donner
line .propriété si la loi le permettoit.
*
, ' Les intimés n’ont pas assez $ intelligence pour sentir
la force de cet argument.
j' Ils ne conçoivent pas qu’un gain de survie à prendre
sur le m obilier, d’après la prisée de l’inventaire, et
sans crue, puisse faire1 croire que le don mutuel pos
térieur pou voit être en propriété. Pourquoi y auroitil un gain de survie, s’il y avoit une donation de pro
priété? car l’un est exclusif de l’autre; mais les intimés
diront toujours que les époux n’ont pas laissé ignorer
leur intention lorsqu’ils ont voulu se gratifier d’une pro
priété; car le gain de survie n’est pas accompagné d’une
dispense de bail de caution, ni de ¡’obligation de faire
inventaire.
i
Cette disposition, d’ailleurs, est isolée et distincte ;
elle n’a rien de commun avec les autres ; elle étoit il
lusoire, inutile, puisque tous les gains doivent se con
fondre dans la portion disponible; elle ne peut donc
servir d’exemple, encore moins d’argument, dès qu’il
n’y a aucune conséquence à en tirer.
En voilà bien assez sur les mots; il est temps de passer
aux choses.
'
'
• Les premiers juges ayant dit qu’en point de fait les
époux n’.ivoient voulu que se donner une jouissancef
ont décidé, en point de droit, que la loi en vigueur
au temps du contrat devoit régler les conventions ;
�C 6 )
qu’ainsi la dame Kempfer ne pouvoit exiger autre chose
que l’ usufruit de moitié des biens.
Ils l’ont ainsi décidé, d’après Dumoulin, Duplessis,';
l’auteur du nouveau Traité des donations, des arrêts
anciens, et des arrêts récens de la Cour de cassation ( i) ,
et par la raison que le don mutuel est une véritable do
nation entrç-vifs, qu’il en a le principal caractère, qui
est l’irrévocabilité, et qu’ il investit immédiatement les
époux de l’espoir successif, à l’instant du contrat^de
mariage.
. j
\
.
.. Les juges dont est appel ont d it , avec une grande
justesse, qu’aussitôt qu’ un-contrat de mariage a été con
senti entre des individus, la loi en vigueur s’en empare,
elle y met son empreinte, en détermine irrévocablement
les effets, et garantit par là Pimmuabilité des engogemens.
Si ce lien de droit pouvoit, par la convention ou
le caprice des époux, être subordonné à une loi future,
il n’existeroit plus, et les conventions seroient livrées
à une fluctuation indéfinie. -Agir ainsi, c’est appeler,
c’est introduire l’effet rétroactif d’une loi nouvelle, c’est
renverser la base fondamentale de notre législation.
L e Gode Napoléon ne peut donc influer sur un con
trat de mariage du 19 brumaire an 4 ; il a été passé
sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 , et ne peut
se soustraire à'son autorité. Les articles 13 et 14 de cette
loi fixent à l’usufruit de la moitié des biens toutes les
(1) Voir le mémoire, pages 18 et suiv.
�( 7 )
libéralités permises entre époux, en cas d’enfans. La loi
est impératiçe et irritante ; elle reçoit nécessairement
son exécution dans la circonstance.
Voilà ce que la dame Kempfer appelle un raisonnement étrange ,* est-elle plus séduisante dans son système?
De tels caractères, dit-elle, ne conviennent pas aux
libéralités portées en son contrat de m ariage; la dona
tion qu’elle réclame étoit subordonnée au décès du mari
donateur, quoique qualifiée de donation entre - vifs ,*
elle avoit été faite in contemplatione mortis ,* elle ne
devoit être prise que sur les biens que laisseroit le
donateur à son décès; il pou voit les aliéner, les dissi
p e r, etc.
V o ilà, il faut en convenir, des raisons déterminantes;
c’est comme si ou osoit soutenir qu’une institution d’hé
ritier, faite avant les lois prohibitives, doit être subor
donnée à l’article 9 13 du Code Napoléon , parce que
l’instituant n’est décédé qu’après la publication du Code.
En effet, une institution d’héritier n’est faite aussi que
in contemplatione mortis ,* elle est subordonnée au décès
de l’instituant, qui peut aliéner, dissiper pendant sa vie.
Cependant on a toujours pensé qu’une institution portée
en un contrat de mariage étoit une donation entre-vifs
de la qualité d’héritier; que les effets devoient en être
réglés par la loi en vigueur au temps du contrat, et
que le Code ne disposoit que pour l’avenir.
L article iert ¿Je la loi du 18 pluviôse an 5 ne d it-il
pas aussi que toutes dispositions entre-vifs et irrévocables,
antérieures à l’émission des lois nouvelles, doivent se
régler conformément aux anciennes lois?
�C 8 )
O r , le don mutuel porté au contrat de mariage est
aussi une donation entre-vifs, q u i, comme l’institution
contractuelle, porte sur la succession , q u i, comme elle;,
ne doit prendre effet qu’au décès du donateur, dont l’exé
cution est renvoyée à l’événement , mais qui saisit dès
l ’instant même, et ubi eaiiem ratio ibidem jus.
_ La dame Kempfer ne veut rien passer aux premiers
juges; leurs décisions dii>e?~ses sont autant d'erreurs ,*
ils se sont permis de dire qii’elle manquait de respect à
la loi existante : c’est une idée faus-se cachée sous de
grands mots. .
Mais il n’y a pas Ridée fausse ; omnis idea est vera :
voilà la première règle qu’on apprend en logique; et les
premiers juges n’ont-ils pas pu penser et dire, sans blesser
la dame K em pfer, que s’en rapporter à une loi future
c’est dire que la loi actuelle est mauvaise, qu’on ne veut
pas s’y conformer, et qu’on en attend une meilleure? Ce
sera , pour contenter la dame Kempfer , offenser le lé
gislateur , et non la loi. Mais il n’en sera pas moins vrai
qu’on est obligé de se soumettre à la loi existante ; que
s’en référer à une loi future c’est introduire un effet ré
troactif, ce qui seroit une monstruosité en législation.
I/O dame Kempfer cite, à l’appui de son système, un
arrêt de la C ou r, du 29 janvier 1 8 1 2 , qui ne reçoit
aucune application à un don mutuel. Il s’agissoit, dans
la cause de la dame C lary, d’une institution faite sous
la loi du 4 germinal an 8 : les père et mère instituoient
le contractant pour la portion en préciput que la loi permettoit de donner à l’ouverture de la succession.
L a Cour pensa que l’institution n’étoit pus faite sous
une
�( 9 )
une loi prohibitive; que la loi du 4 germinal an 8 per
mettait la disposition d’ une portion virile en préciput;
que la disposition n’étoit pas annullée, quoiqu’elle fût
excessive; qu’elle étoit seulement sujette à réduction , et
que cette réduction devoit s’opérer par la loi du décès.
La Cour n’auroit pas jugé ainsi, si l’institution a voit été
faite sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 ; et, comme
on le v o it, l’espèce est bien différente , et n’a aucune
analogie avec une donation entre-vifs portée par contrat
de mariage.
M ais, dit la dame K em pfer, la loi du 17 nivôse an 2
n’est pas -prohibitive, et les premiers juges eux-mêmes
n’ont pas osé le dire; ils ont seulement dit que cetle loi
étoit impérative et irritante • et encore une discussion
grammaticale sur la différence qu’on doit faire entre une
loi prohibitive et une loi impérative. Mais on passe sur
la loi irritante ; car cette expression est encore plus forte
que celle de prohibitive , puisque tout ce qui est irritant
ne laisse rien subsister de contraire ; il casse et annulle
tout ce qui ne seroit pas conforme. C’est ainsi qu’on l’en
tend au palais; et on dira à la dame K em pfer, pour la
contenter, que c’est encore la définition qu’en donne le
Dictionnaire de l’Académie.
Les premiers juges se seroient-ils donc encore trom
pes, lorsqu’ils ont dit que la loi étoit irritante , c’està-dire, prohibitive ? Que porte l’article 1 3 , §. 2 ? « S’il
« y a des eufans de l’union, ou d’ un précédent mariage,
« ces avantages, au cas qu’ils consistent en simple jouis« sance, ne pourront s’élever au delà de la moitié du
a revenu des biens, etc. »
/
�( IO )
N e pourront : si ce ti’est pas là du proh ibitifj on ne
s’y connoît pas ; voilà pour les avantages déjà existans.
Pour ceux qui auront lieu à l’avenir, la loi leur donne
la plus grande latitude, tant qu’il n’y a pas d’enfans ;
mais, s’il ÿ en a , elle convertit ou l’éduit ces avantages
à l’usufruit de moitié, coiiformément à Varticle 13 cidessus.
D onc, s’il y a des enfans, les avantages autorisés ne
pourront excéder l’ usufruit de m oitié; donc la loi est
prohibitive.
Il est très-vrai qùe le système restrictif de la loi n’est
pas pour les libéralités entre ép o u x, tant qu’il n’y a
pas d’enfans; elle a voulu leur donner la plus grande
latitude, parce que les libéralités entre époux sont la
plus douce récompense de la tendresse et de l’affection
qu’ils se doivent mutuellement.
'
Mais la préseoce des enfans fait cesser cette latitude;
la loi les protège, elle veille à leurs intérêts, elle les
préfère aux époux, à qui elle interdit alors d’aliéner;
elle arrête les mouvemens de la séduction de la femme,
ou de l’empire du mari ; et tout rentre dans l’ordre,
du moment que l’intérêt des enfans est à couvert.
Car il faut bien remarquer ici que la loi ne fait au
cune différence entre les premières et les secondes noces;
la disposition est la même. Mais combien il eût été
dangereux de permettre des avantages en propriété, en
faveur d’un second époux! l’appât d’un nouveau lien
auroit souvent fait sacrifier les enfans d’une première
union. La loi a donc sagement prévu tous les excès aux
quels peut se porter une tendresse aveugle, plus sou-
�Vent un intérêt sordide, et n’a permis que des dispo
sitions de jouissance, en réservant toujours la moitié
libi’e pour les cnfans.
Il y a cette particularité dans la prétention de la dame
K em pfer, qu’on pouri’oit placer au chapitre des con
tradictions, c’est que tout en voulant la loi libérale du
17 nivôse an 2 , qui favorise les époux, qui leur permet
tout, sauf réduction en cas d’enfans, elle veut cepen
dant s’en référer à une loi restrictive, en haine des
secondes noces , et qui rappelle la loi romaine Hac
edictali actione , ainsi que l’édit des secondes noces.
Elle ne peut avoir que le quart , d’après le Code,
tandis qu’on lui offre la m oitié, d’après la loi qui régit
son contrat. Mais la dame Kempfer est opulente ; la
succession du général d’Ayat n’a pour tout immeuble
que la terre de ce n om ; elle ne peut se diviser com
modément : la dame K em pfer, en conséquence, veut
une propriété; elle fera liciter, elle se rendra adjudi
cataire du patrimoine de la dame T e rrey re , elle le
transmettra à ses enfans du premier lit. Voilà l’objet
de son ambition, voilà son unique désir ; elle compte
sur ses moyens bien au-dessus des facultés de la dame
T erreyre; et de là ces dissertations sur les mots employés
par les premiers juges, et sur les lois prohibitives ou
impératives.
La dame Kempfer termine sa discussion par la citation
d’un arrêt de la Cour, du 21 juillet dernier, qui n’a en
core aucune similitude. Un père avoit constitué à sa fille,
en la mariant, un avancement d’hoirie de 2,000 francs.
On doit toujours présumer qu’un avancement d’hoirie
2 *
�( 12 )
n’excède pas les facultés du constituant à l’épôque où il
est fait, qui est la seule qu’ il faut considérer.
Il est de principe généralement reconnu que l’héritier
peut s’en tenir à son avancement d’ hoirie, en abdiquant
la qualité d’héritier; mais si à l’époque de l’ouverture
de la succession la fortune a dim inué, si l’avancement
d’hoirie est excessif et blesse la légitim e, on peut l’atta
quer par la voie du retranchement jusqu’à concurrence
de la légitime. C’est ce qu’a jugé la Cour. La loi du
17 nivôse an 2 ne s’opposoit nullement à ce que le père
fît un avancement d’hoirie à sa fille en la mariant. Pour
juger s’il y a excès dans cet avancement, il faut néces
sairement attendre l’ouverture de la succession, et régler
l’eifet de cet avancement d’après la loi du décès, parce
que l’avancement d’hoirie n’est pas considéré comme un
avantage ou une donation, ce n’est qu’un délaissement
par anticipation d’une partie des biens du*constituant. La
Cour, en se conformant au principe qui veut que l’hé
ritier puisse s’en tenir à sa constitution, a décidé que la
fille Dumas étoit maîtresse de conserver son avancement
d’h o irie, ou que si les autres cohéritiers vouloient la
forcer à venir au partage, ils seroient tenus de lui dé
laisser le quart en préciput, parce q u ’ alors ils n’a voient
point à se plaindre, et qu’ils consei’voient la réserve de
la loi.
Quel rapport peut avoir cet arrêt avec le don mutuel
porté au contrat de l’an 4 ? On le cherche vainement;
on ne voit pas surtout comment la dame d’Ayat peut en
tirer la conséquence, ou qu’elle doit avoir le quart en
propriété, ou qu’011 doit lui donner 3,000 fi\ de rente,
/
�C 13 )
' 5 o,ooo fr. une fois payés; plus, la jouissance delà moitié.
On ne s’attendoit pas à cette conclusion , puisque, dans
•l’un comme dans l’autre cas, tous les avantages doivent
être restreints à la quotité disponible.
La dame Kempfer a-t-elle mieux raisonné sur cette
'question que les juges dont est appel ? C’est ce que la
fCour saura apprécier. On passe maintenant à la seconde
"question.
Par le premier contrat de mariage du sieur Beaufrancliet d’Ayat avec la dame Guyot de Mongran , du 2 août
17 8 3 , le sieur d’Ayat (article 8) « constitue à son épouse
« une somme de 4,000 fr. de rente de douaire préfix /
« dans le cas o ù , lors de la dissolution du mariage, il
« y auroit des enfans vivans issus d’icelui ; le fonds au
« denier vingt duquel douaire sera propre auxdits en « fa n s et aux leurs , de leur côté et ligne. »
C’est de ce mariage qu’est issue la dame Terreyre. Le
sieur d’Ayat a fait divorce avec la dame de M ongran,
qui est encore vivante; il a épousé bientôt après la dame
Kem pfer, qu’il a fort bien traitée par son contrat.
Mais aujourd’hui qu’il s’agit de faire le partage, la
dame Terreyre a demandé le prélèvement du fonds du
douaire de sa m ère, qui est hors la succession du père
du moment du contrat qui le constitue.
L a dame Kempfer s’oppose à ce prélèvement, sur le
fondement que la dame Terreyre est héritière de son
p ère, et qu’aux termes de l’article z 5 i de la coutume
de Paris, nul ne peut être tout à la J'ois douairier et
héritier .
�( H )
' Les premiers juges n’ont pas adopté cette nouvelle
prétention.
>'
■' « Ils ont pensé qu e, d’après la coutume de Paris,
le douaire est une créance établie par la lo i; que ce
n’étoit pas une légitime, puisque le douaire n’est sujet
ni aux hypothèques ni autres charges après le mariage;
« Que le père une fois dépouillé des objets du douaire,
n’en avoit plus la libre pi’opriété ; qu’elle étoit dévolue
aux enfans, puisque le douaire leur est propre.
a L e douaire jouissoit de la faveur la plus étendue;
il n’étoit pas sujet à prescription pendant la vie du père;
il n’étoit purgé ni par le décret intervenu sur les biens
du père, ni par les lettres de i*atificatiou obtenues contre
lui.
y
ce II n’éprouvoit aucun retranchement, soit pour former
la légitime des enfans du second lit, soit pour fournir
à la constitution du douaire du second mariage; il se
prenoit sur les biens substitués comme sur les biens libres;
et on ne peut concevoir qu’une propriété si privilégiée
en faveur des enfans du premier lit, ait pu être légè
rement anéantie par une donation postérieure au profit
d’une seconde femme.
« Si l’ imputation ou le rapport fictif que demande
la dame Kempfçr avoit lieu , tout le privilège du douaire
s’évanouiroit, la dameTerreyre seroit comme n’en ayant
jamais été saisie, et le sieur d’Ayat comme n’en ayant
pas perdu la propriété.
« L e douaire ne peut être confondu dans la succes
sion que dans le cas de partage seulement en ligne di-
�( r5 )
rcctc. La dame Kem pfer, en se mariant, a nécessairement
connu le douaire dont étoit grevé son mari par son
premier contrat; elle a su que cet objet éloit retranché
des biens de son époux, qui n’en étoit plus le maître;
elle n’a pu y placer un espoir successif, ni le comprendre
dans la donation qu’il lui faisoit.
« La dame Kempfer détourne de leur vrai sens les
articles de la coutume de Paris qu’elle invoque; c’étoit
une coutume d’égalité en ligne directe ; elle ne devoit
pas permettre de confondre entre cohéritiers la qualité
de douairier et d’héritier. La jurisprudence avoit quel
quefois admis ce principe en faveur des créanciers de la
succession , mais là se boruoit la rigueur de l’incompa-'
tibilité, ainsi que cela résulte de la note de Dumoulin (i).
L a dame Kempfer n’est ni héritière ni créancière de la
succession d’Ayat ; elle ne peut donc exiger le rapport
du douaire, etc. »
La question a été parfaitement appréciée par les pre
miers juges, et il est aisé de justifier leur décision. In
dépendamment des autorités invoquées dans le premier
mémoire des sieur et dame Terreyre (2), on-ne peut
s’empêcher de mettre sous les yeux de la Cour la disser-*
tation qui se trouve dans le Nouveau recueil de juris
prudence. On sait que l’article douaire a été composé
par M«. Levasseur, jurisconsulte distingué : on peut dire
qu’il a traité la matière ex pnyfesso dans cet article. Voici
comment il s’exprime, tome 7 , au mot D ou aire, § . 1 2 ,
( 1 ) V o ir le prem ier m é m o ire , page 29 .
(?) Ibidem, et pages suivantes.
�^
. t y 1 *'
( 16 )
page 2 13. Il rappelle la disposition de l’article 25 i d elà
coutume de Paris, nul ne peut élre héritier et douairier
ensemble. « L ’incompatibilité de ces deux qualités, dit-il,
« n’est pas considérée comme une incompatibilité abso« lue; c’est une incompatibilité relative aux seuls héri
te tiers , afin d’empèclier que les enfans qui réunissent
« les deux qualités ne soient pas plus avantagés que ceux
c< qui n’ont que le titre d’héritier. L ’héritier douairier
« est tenu de rapporter à ses cohéritiers le bénéfice qu’il
« retire du douaire : tenetur doariurn conferre , a dit
ce Dumoulin ; et ce rapport annulle son avantage.
« L ’incompatibilité des qualités d’héritier et douairier,
a n’étant que relative aux seuls héritiers , rien n’em« pêche l’héritier présomptif de réunir ces deux qua« lités contre les douairiers. L ’héritier présomptif qui
« accepte et la succession et le douaire, est tenu, comme
« héritier, au rapport des avantages qu’il reçoit comme
« douairier; mais il n’est tenu à ce rapport qu’envers
« ses cohéritiers .
Pour expliquer sa pensée, M e. Levasseur suppose un
exem ple: « Un père veuf laisse, dans la coutume de
« Paris, une succession composée de 40,000 francs de
« biens sujets au douaire, et exempts de toutes dettes;
« il laisse aussi 20,000 fr. d’autres biens. 11 s’y trouve
« 10,000 francs de dettes certaines, et 30,000 fr. d’uûe
« dette incertaine réclamée contre le père, mais sur la
« validité de laquelle il y a procès.
« Deux enfans sont appelés î\ la succession, et sont
« d’avis différons.
a L e prem ier, regardant la dette réclamée comme
valable,
�( 17 )
k valable, ne veut pas soutenir le procès, et renonce
« à la succession , pour s’en tenir à son douaire. Le
« second, au contraire, accepte la succession, et reprend
« l’instance. Il pourra cumuler, vis-à-vis de son frère
« renonçant, la qualité de douairier et d’héritier, parce
« qu’ il n’est tenu envers son frère d’aucun rapport.
« En vain son frère lui opposera la disposition de la
« coutume; il répondra : L ’effet de la réunion des deux
« qualités est de m’obliger à rapporter, comme liéri« tier, le bénéfice que je puis avoir comme douairier;
« mais ce rapport n’est dû qu'aux héritiers, et mon
c< frère n’étant pas h éritier , ne peut exiger aucun
« rapport ; je p u is, à son égard , cumuler les deux
« qualités. »
V o ilà, sans doute, qui est déterminant. L e douaire
n’est pas une donation, mais une dette du père. Si la
jurisprudence a étendu l’incompatibilité des deux qua
lités jusqu’aux créanciers, il n’y a pas d’autre raison,
sinon que le douairier, se rendant héritier pur et simple,
est tenu indistinctement de toutes les dettes. Ainsi il n’est
pas étonnant q u e, respectivement aux créanciers, on
ne puisse cumuler les deux qualités. En effet, le douai
rier qui renonce à la succession, pour s’en tenir à son
douaire, est dispensé du payement des dettes; celui, au
contraire, qui accepte la qualité d’héritier, est tenu des
faits du défunt qu’il représente in univers um jus.
Mais si le douairier, au lieu de se porter héritier pur
et simple, n’accepte la succession que sous bénéfice d’in
ventaire , alors il pourra cumuler les deux qualités,
même vis-à-vis des créanciers; il n’est dans ce cas que
3
�( rS )
créancier- comme e u x , et ne confond pas ses: àdtrons
personnelles avec celles de l’hérédité. f C’est ce qui a été
jugé par un arrêt de 17 8 2 , rapporté par M e. Levasseur,
à la saite de sa discussion, et sur les conclusions de
M . l’avocat général Seguier, dans la cause du comte de
Montzonne. Ce savant magistrat donne en maxime que
le douaire n’est ni une hérédité, ni une légitim e, ni
enfin un bien qui vienne aux enfans à titre successif ;
il établit cette différence entre l’héritier et le douairier,
en ce que l’hérédité consiste uniquement dans les biens
que le défunt a laissés à sa mort, et tels qu’il les a laissés,
chargés de toutes ses dettes. L e douaire , au contraire >
est une portion déterminée des biens que le père possédoit, non au moment de sa m ort, mais à L’instant de
son mariage ; portion que le père n’a. pas pu depuis
aliéner ou grever d’hypothèque; qui n’étoit plus' en sa
disposition au moment de son décès- : le douaire est
exempt et franc de dettes. Ces caractères sont diamé
tralement opposés à ceux de l’hérédité ; et l’on peut
dire avec vérité que les biens sujets au douaire sont
bien dans le patrimoine du père, pendant sa v ie ; mais
ne font pas partie de sa succession...........
Plus loin , ce magistrat s’étonne qu’on ose soutenir
que le douaire est une espèce d’hérédité, une légitime;
il lui paroît évident que le douaire n’a rien de com
mun avec l’hérédité; et après avoir poussé cet argument
jusqu’à' la démonstration, M . Seguier en conclut que
des créanciers n’ont aucun droit d’opposer à l’héritier
bénéficiaire l’incompatibilité des qualités d’héritier et de
douairier. L ’arrêt fut conforme à ses conclusions.
�î *9 )
i O n né craint pas de s’égarer avec d’aussi grands mon
idoles. On avoit soutenu en première instance que la dis*
position de la coutume, art. 2.51 , n’étoit pas plus forte
que celle qui dit que nul ne peut être héritier et dona
taire ; et que cependant le donataire n’étoit tenu au
rapport, que vis-à-vis de ses cohéritiers en ligne directe,
par la seule raison que la coutume de Paris étoit une
coutume d’égalité. On n’avoit pas dit, comme le prétend
ia dame Kem pfer, que le douaire préfïx étoit une do
nation, mais on avoit prouvé que le douaire, soit qu’on
le considère comme une créance, soit qu’on le regarde
comme une donation, étoit hors la succession du père;
que le rapport n’en étoit du qu’entre enfans, et non
envers tout autre : on croit avoir parlé le langage de la
raison , et énoncé les véritables principes.
On se doute bien que la dame Kempfer n’est pas dè
cet avis, et qu’elle commence par soutenir que la dis
position de la coutume de Paris est générale, absolue,
et ne souffre aucune exception; que c’est une espèce
de légitime, quoique M . Seguier ne conçoive pas com
ment on ose le prétendre.
' L a dame Kempfer cite Potliier, Lebrun, Ferrîères,
qui tous ont parlé en termes généraux et ont supposé
■le concours des enfans; car, hors ces cas, on a vu que
Pothier et Ferrières ne sont pas de cette opinion. Mais
il est rigoureusement vrai qu’entre enfan-s le douaire
■provenant de la substance du père, dort être rapporté
à sa succession, si on veut v e n ir en partage; sans quai
-l’égalité seroit blessée.
L e droit de demander le rapport ou la restitution^
3 *
�( 20 )
appartient même aux créanciers, s’ écrie la dame Kem'pfer;
et il n’y a rien d’étonnant, puisque, comme le dit Pothier,
l’enfant qui réunit les deux qualités de douairier et d’hé
ritier, ne peut pas être débiteur de lui-même; puisque
celui qui est héritier est tenu des faits du défunt, par
conséquent de toutes les dettes qu’il a laissées. Et qu’estce que cela prouve pour la dame Kem pfer, qui n’est
ni héritière ni créancière ?
Mais arrive une prétention nouvelle que la dame
Kempfer n’avoit pas encore fait éclore. Suivant elle, il
n’y a plus de douaire ; le Code Napoléon n’eri a pas
établi; la succession du général ne s’est ouverte que sous
ce Code; par conséquent l’héritier ne peut plus réclamer
de douaii’e, même vis-à-vis des tiers. Elle cite l’opinion
de l’auteur des Questions transitoires, et le nouveau
Traité des donations de M . Grenier.
A la v érité, elle convient que ces auteurs n’ont parlé
que du douaire couium icr , qui appartient à la femme
par la force de la l o i , et non par le fait de l’homme.
Mais la citation du nouveau Traité des donations n’est
pas bien choisie, au moins pour la première question ;
car l’auteur y prouve en principe qu’un contrat doit être
réglé par la loi du moment, et non par la loi du décès;
et lorsque le contrat est antérieur à la loi du 17 nivôse
an 2 , et au Code Napoléon, l’auteur accorde à la femme
même le douaire coutumier, quand bien même la suc
cession du mari ne s’ouvriroit qu’après le Code; seule
ment il ajoute que les statuts et coutumes étant abrogés,
les enfans ne pourroient par réclamer le douaire coutu
mier.
�2#
v
*X<t
Mais cette opinion peut-elle s’appliquer au douaire
préfix ou conventionnel, dont l’effet est de faire disparoître le douaire coutumicr? Une convention solennelle
portée par contrat de mariage, et sous la foi de laquelle
les enfans ont vu le jour, peut-elle recevoir la plus légère
atteinte par une loi postérieure, lorsque la convention
a eu un effet présent, lorsque le père a mis hors sa suc
cession un capital qui n’a jamais pu en faire partie, que
les enfans n’out pu recueillir à titre d’héritiers , mais
bien à un titre.particulier de créanciers, ou, si on veut,
<le donataires ? C’est ce qu’on n’oseroit soutenir sans
blesser la plus saine doctrine.
• L ’arrêt relatif au tiers coutumier de Normandie, rentre
¿ans les mêmes principes que ceux invoqués par les au
teurs cités : c’étoit un don .statutaire, où il n’y avoit rien
du fait de l’homme, et qui a été abrogé par la loi du
17 nivôse an 2 , ainsi que par le Code.
Cependant la dame Kempfer termine par dire que la
darne Terreyre doit cesser d’invoquer la vieille coutume
de Paris. L e reproche est plaisant! L a darne T erreyre,
loin de l’invoquer, n’a cherché qu’à répondre à l’appe
lante , qui la rappelle à tout propos.; elle a voulu que
cet article fût sainement entendu et sagement interprété;
et c’est encore une des contradictions familières à la dame
Kempfer. Elle est aussi fort mécontente des premiers
juges, à qui elle reproche une interprétation fo r c é e ,
des erreurs érigées en principes. La C o u r leur rendra
plus de justice ; elle a souvent reconnu la sagesse de leurs
décisions.
La dame Terreyre observera cependant qu’il s’est glissé
/
�(22)
dans le dispositif du jugement u n e erreur q u i pourroit
lu i être préjudiciable, et ce ne peut être que p a r une
confusion des conclusions de la dame Kempfer ; car le
tribunal, tout en jugeant que la dame Kempfer est une
simple usufruitière de la moitié des biens, que le douaire
est hors la succession du général d’A y a t, ordonne ce~
pendant que les biens seront visités par des experts, qui
diront s’ils doivent être licites, et, dans ce cas, ordonne
la licitation. Ce seroit accorder à la dame Kempfer tout
ce qu’elle désire. Mais s’il peut y avoir, lieu à licitation
entre cohéritiers, on ne peut l’ordonner avec l’usufrui-»tier, ni forcer le propriétaire à vendre son bien.
L a dame Terreyre se propose de faire rectifier cette
e rre u r, et se réserve même , s’il en est besoin , d’inter
jeter un appel incident quant à cette disposition.
'
P A G E S , ancien avocat.
—
M e. M A R I E , avoué licencié .
A RIO M , d e l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire i
r u e d e s Taules, maison L a h d r i o t . — Février 18 14 .
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Terreyre, Denis. 1814]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse aux observations de la dame Kempfer de Plobshein, appelante d'un jugement rendu au Tribunal civil de cette ville de Riom, le 28 août 1813 ; pour le Général Terreyre et la dame Beaufranchet d'Ayat, son épouse, intimés.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1814
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2212
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53441/BCU_Factums_G2212.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53440/BCU_Factums_G2211.pdf
9a52301b93bc3141f65a2ddaea0f271e
PDF Text
Text
OBSERVATIONS
P O U R
COUR
IMPÉRIALE
DE RIOM.
La dame K IM PFER DE P L O B S H E IM ,
veuve du Général d’A yat , appelante ;
■" c»*»»»«.
CONTR E
Le
Général T E R R E Y R E
—L
et son épouse
jf****
intimés
A
L dame d’Ayat avoit porté devant le tribunal civil
de l’arrondissement de Riom des réclamations fondées
sur une clause formelle de son contrat de mariage, et
° 7
7
sur des principes qui paroissoient certains.
Cependant ses réclamations n’ont pas été accueillies.
L e sens naturel des expressions du contrat a été détourné par une interprétation forcée.
Les principes ont été méconnus.
Les droits d’un héritier naturel ont été fixés , non
d’après la loi en vigueur au moment de l’ouverture de la ..
succession, mais d après une loi depuis long-temps abolie.
L e douaire a été considéré comme une créance or■»
d
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et héritier, à p rélever, au premier titre, le douaire
qu’il réclamoit, et à prendre, au second , la totalité
d’une réserve légale qu’il lui a été permis de cumuler
avec le douaire.
Lésée par des erreurs de fait et par des erreurs de
d ro it, la dame d’Ayat a dû demander à des magistrats
supérieurs un nouvel examen de sa cause.
C’est sur la jurisprudence mêmé de la Cour que re
posent plusieurs des moyens qu’elle invoque; c’est dans
les sources les plus respectables qu’elle puise les autres:
avec des secours aussi puissans, elle doit espérer de
faire disparoître toute équivoque, toute confusion de
principes, de ramcnci’ les questions à leur vrai point,
et d’obtenir la réformation d’un jugement où l’on ne
reconnoît pas le tribunal qui l’a rendu.
Deux questions principales avoient été soumises aux
premiers juges, et développées dans des mémoires res
pectifs :
L ’une, si la dame d’Ayat devoit avoir le quart en
propriété des biens laissés par son mari ;
L ’autre, si la quotité à laquelle cette dame avoit droit
devoit ôtre fixée d?après la masse totale des biens du
m ari, sans aucun prélèvement.
Ces deux questions ont été décidées négativement par
le tribunal de première instance.
C’est sur cette décision que l’on se propose de sou
mettre à la Cour quelques observations.
La première question roule sur les termes et sur les
effets du contrat de mariage de la dame d’A y a t , en
date du 19 brumaire an 4-
�(3 )
L es avantages stipulés par le contrat sont de quatre
sortes.
i°. Un douaire préfix de 3,000 francs de rente nette
et sans retenue, attribuée à la future épouse.
2°. Un gain mutuel de 5o,ooo francs à prendre par
le survivant sur le plus clair des biens du prédécédé.
30. Une disposition en faveur du survivant des deux
é p o u x , « de tout ce dont la loi leur permet de dis—
« poser en faveur l’un de l’autre, ou de tout ce dont
« elle ieur permettra de disposer aussi en faveur l’un de
« l’autre, au jour du décès du premier mourant d’eux,
« dans le cas où la loi alors existante donneroit plus
« de latitude à ces sortes de donations, p ou r, par ledit
« survivant des futurs é p o u x , en jouir à compter du
« décès dudit premier mourant, suivant et aux termes
« de la lo i, sans être néanmoins tenu de donner aucune
« caution, et seulement à la charge de faire faire fidèle
« inventaire des biens du prédécédé. »
40. Une disposition universelle de tous les biens en
propriété, dans le cas où le premier mourant décéderoit
sans enfans (1).
La dame d’Ayat se restreignoit, pour tous ces avan
tages , à la propriété du quart des biens laissés par son
mari, quotité déclarée disponible en sa faveur par l’ar
ticle 1098 du Gode Napoléon, sous l’empire duquel est
mort le général d7Aj*at.
Et remarquons que la valeur de ce quart est beau(x) V o ir, pour les autres détails des conventions matrimo
niales, le mémoire de madame d’A yat, pages 3 et 4.
I *
32$
�t
^4 ^
coup au-dessous de celle des diverses dispositions que
l’on vient d’analiser.
L e tribunal de première instance a réduit tous les dons
au simple usufruit d’une portion des biens du général.
11 seroit trop long de transcrire tous les motifs d’après
lesquels il déclare s’etre déterminé.
En voici le résumé :
En comparant la troisième et la quatrième clause, les
premiers juges ont cru voir dans la troisième un simple
don de jouissance, pour le cas où il y auroit des enfans,
et dans la quatrième, un don de propriété, mais dans
le cas seulement où il n’y auroit pas d’enfans.
Cette opinion devient évidente, disent-ils, par l’em
ploi des mots pour en jo u ir , qui n’indiquent qu’une
simple jouissance, et par la précaution de dispenser de
donner ca u tion , mais de soumettre àfa ir e inventaire •
ce qui auroit été superflu, si l’on avoit entendu attri
buer une propriété.
Passant ensuite à l’examen de la nature de la dona
tion, ils soutiennent, en point de droit, qu’elle est une
véritable donation entre-vifs ,• qu’elle doit être régie
par la loi en vigueur au temps où elle a été faite; que
les époux n’ont pu s’en référer à la loi future sans
manquer de respect à la loi existante; et que cette loi
future ne pourroit elle-même, sans rétroagir, donner
quelque valeur à un don fait sous l’empire d’une autre
loi qui étoit impérative et irritante.
Examinons et la justesse de l’interprétation adoptée
par les premiers juges, et la vérité des principes dont
ils ont argumenté.
�C 5 )
L ’interprétation est contraire aux termes de la clause
et à l’intention évidente du donateur.
Les termes de la clause sont clairs.
On donne d’abord tout ce que la loi du moment autorise
à donner.
M ais, comme cette loi restreignoit les dons à un simple
usufruit, on prévoit le cas où une loi nouvelle surviendroit, où elle accorderoit plus de latitude aux donations
entre époux, et l’on donne, dans ce cas, tout ce dont la
lo i existante au jou r du décès permettrait de disposer.
Quoi de plus clair que ces expressions? quoi de plus
positif? quoi de plus formel? leur sens n’est-il pas trop
évident pour avoir besoin de quelqu’interprétation? et
vouloir les interpréter n’est-ce pas chercher à les obs
curcir pour en détruire l’effet?
Donner tout ce dont la loi du décès permettra de dis
poser, c’est faire un don en propriété, si cette loi le
permet ; c’est faire un don en usufruit seulement, si la
loi n’autorise rien de plus.
Mais, dit-on, les mots pour en jo u ir , qui se trouvent
dans la suite de la clause, sont indicatifs d’un simple usu
fruit.
Etrange raisonnement! comme si le mot jo u ir ne s’entendoit pas d’un propriétaire ainsi que d’un usufruitier.
L e propriétaire jo u it, l’usufruitier jouit lui-méme, et
chacun au titre auquel il possède. L e mot j o u i r exprime
également l’eiïet du droit dont chacain use; d’ailleurs il
ne peut servir, isolément pris, ù fixer l’étendue du droit
même; et c’est à la disposition principale qu’il faut re
courir, pour connoître si c’est comme propriétaire 011
comme usufruitier que l’on jouit.
�(6 y
A u reste, dans la clause il est dit :
« Pour en jouir à compter du décès du premier mou« rant, suivant et.a u x ternies de la loi. a
A in s i, dans cette seconde partie de la clause, comme
dans la prem ière, c’est à la loi existante au moment du
décès qu’on s’en réfère pour fixer l’étendue et la nature
du droit de jou ir, et c’est comme s’il avoit été dit :
« Pour en jo u ir comme propriétaire , si la loi le
a permet ;
et Pour en jo u ir comme simple u sufruitier, si la loi
« le veut ainsi. »
Une dernière objection est tirée de ce qu’à la fin de
la clause il est ajouté : Sans êti'e tenu de donner caution,
mais à la charge dé fa ir e inventaire.
La dispense et la charge, a-t-on observé, ne peuvent
s’appliquer qu’à un usufruitier, et prouvent par consé
quent que l’on a entendu faire seulement un dan ea
usufruit.
L ’on n’a pas voulu remarquer que ces expressions
finales n’avoient été employées qu’hypothétiquement.
La clause renfermoit tout à la fois le don de la quo
tité fixée par la loi existante, et le don de la quotité qui
seroit disponible d’après la loi du décès.
L e premier don n’étoit que d’ un usufruit ; et il étoit
incertain si la loi future autoriseroit un don en propriété.
Dans cette incertitude, et dans le cas o ù , la loi ne
changeant pas, la libéralité se trouveroit réduite à un
usufruit, il falloit bien prévoir les dispenses et les charges
que l’on vouloit stipuler pour l’usufruitier.
C’est ce que l’on a fait par les expressions finales ci-
�( 7 )
.
' 3?*
dessus rapportées. Ces expressions ne signifient rien autre
ch ose, si ce n'est que pour la portion d’usufruit qui
pourroit se trouver dans la libéralité précédemment faite,
on seroit dispense de donner caution et chargé de faire
inventaire.
Mais prétendre que ces expressions changent le sens
de la disposition principale par laquelle on s’en est
référé à la loi môme pour l’étendue de la libéralité ;
soutenir que le don n’est que d’un usufruit, quoique la
loi attribue une portion en propriété, c’est s’arrêter à
de vaines subtilités; c’est substituer des idées arbitraires
à la volonté du donateur; c’est, en un mot, anéantir
la donation sous prétexte d’en fixer les vraies limites.
Comment concevoir, en effet, qu’on eût déclaré donner
tout ce dont la loi du décès permettrait de disposer,
si l’intention des parties eût été seulement de faire un
don d’usufruit?
Supposeroit-on qu’en prévoyant le cas où la loi future
-accorderoit une plus grande latitude pour les dispositions
entre ép o u x , on n’avoit cependant pas pensé que cette
latitude pourroit s’étendre jusqu’aux dons en propriété?
* Où imagineroit-on que la valeur et la force des mots
employés dans la disposition n’ont pas été senties par
'des contractans dont le rang et l’éducation ne peuvent
cependant faire présumer des erreurs d’intelligence aussi
(graves ?
Mais il est dans le contrat de mariage une disposition
particulière, q u i , si elle eût été considérée par lés pre
miers juges, auroit levé tous leurs doutes sur l’intention
du donateur.
�( 8)
Nous voulons parler du don mutuel de 5o,ooo fr.
Ce don mutuel est attribué en propriété au survivant
des époux; il est suivi immédiatement de la disposition
générale d’après laquelle le survivant doit avoir tout ce
dont la loi du décès permettroit de disposer.
Cette dernière donation comprenoit dans sa généralité,
même le don des 5o,ooo francs fait dans la phrase pré
cédente ; et les deux libéralités portées par le même con
trat devoient servir l’une à l’autre de règles d'interpré
tation. Il est en effet de principe consigné dans l’article
1161 du Code, que « toutes les clauses des conventions
« s’interprètent les unes par les autres, en donnant à
« chacune le sens qui résulte de l’acte entier. »
• En fixant leur attention sur ce don de 5o,ooo francs
en propriété, les premiers juges auroient dû, il semble,
ou attribuer cette libéralité telle qu’elle étoit faite, ou
reconnoître au moins que la volonté des donateurs, ma
nifestée par l’ensemble de leurs dispositions, avoit été
que le survivant d’eux eût en propriété la quotité décla
rée disponible par la loi du décès.
Ces idées simples ont cependant été méconnues.
Sans égard pour le don particulier de 5o,ooo fr. en
propriété, sans respect pour les termes de la donation
générale de tout ce qui seroit disponible d’après la loi
du décès, on a décidé en fait que l’intention des deux
époux avoit été seulement d’attribuer un usufruit au
survivant.
Cette décision sur le fait, sur Vintention, est trop
choquante, est d’une erreur trop palpable, pour qu’il
soit nécessaire de la combattre plus long-temps.
Passons
�( 9)
Passons à quelques observations sur le point de droit.
L e jugement décide en point de droit,
Que la disposition portée par le contrat de mariage
de madame d’Ayat est une donation entre-vifs,*
Que s’en référer à la loi future, c’étoit manquer de
respect à la loi existante;
Que la loi future ne pourroit, sans rétroagir, consacrer
cette disposition ;
Enfin, que d’après la loi existante, la disposition n’avoit
pu être faite.
Ces diverses décisions sont autant d’erreurs.
L a disposition ne constituoit pas une donation entre
vifs.
Une donation entre-vifs dépouille le donateur, et saisit
sur-le-champ le donataire ; l’un ne peut plus aliéner
les objets donnés ; l’autre, comme propriétaire, en
dispose à son gré, et les transmet à ses héritiers, quoi
qu’il meure même avant le donateur.
De tels caractères ne conviennent pas aux libéralités
contenues au contrat de mariage de la dame d’Ayat.
La donation que réclame la dame d’Ayat étoit su
bordonnée au décès du mari donateur ; elle avoit été
faite in contemplatione m ortis, et sub ejits commémo
ra tione.
Elle ne devoit être prise que sur les biens que laisseroit le donateur à son décès; celui-ci pouvoit d’ailleurs
aliéner, dissiper même pendant sa vie.
Enfin il falloit, pour que la donation eût lieu, que
la femme survécût au mari; si elle eût prédécédé, elle
xi’auroit pas été donataire, mais au contraire donatrice.
�Ces conditions, ces effets caractérisent une donation
à cause de m ort, et démontrent l’erreur de la qualifi
cation de donation entre-vifs, employée dans les motifs
du jugement.
La donation dont il s’agit n’a de commun avec les
donations entre-vifs que son irrévocabilité; c’est d’ailleurs
une vi'aie donation à cause de mort.
L a seconde erreur du ju g e m e n t n’est pas moins frappante.
Les expressions manquer de respect a la. loi exis
tante , énoncent une idée fausse cachée sous de grands
mots. La loi est impassible; en sorte que si l’on agissoit
contre ses défenses, ce seroit le législateur plutôt que
la loi qu’on offenseroit.
Mais peut-on dire que c’est manquer de respect au
législateur, que de s’en référer à sa volonté, que de
donner, s’il le permet, et seulement jusqu’à concurrence
de ce dont il permettra de disposer? Un pareil don
n’est-il pas un acte de soumission plutôt que d’irrévéx’ence? Et surtout, lorsque le législateur annonçoit luimême, comme il l’avoit fait en l’an 2, la promulgation
prochaine du Code c iv i l, n’étoit-il pas permis de pré
voir l’existence de cette loi future, et de s’en rapporter
à ce qu’elle ordonneroit ?
La Cour a fait déjà justice de cette singulière ob
jection, en déclarant valable une disposition semblable,
par un arrêt du 29 janvier 1812, dont l’espèce est rap
portée dans le mémoire de la dame d’A y a t , pages 21
et suivantes.
L ’arrêt répond aussi à la troisième objection tirée
de la prétendue rétroactivité de la loi nouvelle.
�Donner ce iîont une loi future permettra de disposer,
c’est faire une donation conditionnelle ou éventuelle; la
loi future est la condition ou l’événement : si elle est
promulguée, il n’y a pas de rétroactivité dans la lo i;
mais la volonté de l’homme opère son effet par l’accom
plissement de la condition ou de l’événement prévu.
Examinons si la loi du 17 nivôse an 2 s’opposoit à
la validité de la donation, quelle qu’en soit même la
nature, soit qu’on la considère comme donation entre
vifs ou comme donation à cause de mort.
Remarquons d’abord que les premiers juges n’ont pu
dire que cette loi fût prohibitive, quoique cette idée
eût prêté un grand appui à leur système.
Ils ont seulement dit que cette loi étoit impérative
et irritante.
O r , on connoît la différence entre le& lois prohibitives
et les lois im pératives, quant à leurs effets.
Les premières rendent nuls les actes faits contre leur
prohibition.
Les secondes sont purement réglementaires ; et les
règlemens qu’elles contiennent, sur les successions no
tamment, ne sont applicables qu’aux successions ouvertes
sous leur empire.
La loi du 17 nivôse an 2 renferme diverses règles sur
le partage des successions, et sur la portion que doit y
prendre chaque héritier.
Elle ne s’exprime point d’ailleurs en fermes prohibitifs,
quant aux donations; elle ne prononce ni incapacité de
donner, ni incapacité de recevoir.
11 y a plus; le système restrictif qu’elle établit relati-
�( 12 )
vement aux libéralités en général, ne s’applique pas aux
dispositions entre époux.
Cette vérité est indiquée par l’article 14 de la loi du
17 nivôse an 2 , et démontrée par la réponse à la dixième
question insérée dans la loi du 22 ventôse an 2.
P a r Varticle 14 de la loi de nivôse, où il est dit qu’à
l’égard de tous avantages............. qui pourroient avoir
lieu à l’avenir , « soit qu’ils résultent des dispositions
« matrimoniales, soit qu’ils proviennent d’institutions,
« dons entre-vifs, ou legs faits par un mari à sa femme
« ou par une femme à son m ari, ils obtiendront éga
ie. lement leur effet, sauf néanmoins leur conversion ou
« réduction en usufruit de m oitié, dans le cas où il y
« auroit des enfans, conformément à l’art. 13 ci-dessus. »
P a r la réponse à la dixièm e question de la loi de
ventôse, où le législateur s’exprime d’une manière bien
remarquable :
« L e système restrictif n’est pas pour les dispositions
« entre époux, sauf la réductibilité à l’usufruit de moitié,
« en cas qu’il y ait des enfans. »
Ainsi les dispositions entre époux , quelqu’étendues
qu’elles soient, sont valables en elles-mêmes;
Seulement elles peuvent devenir susceptibles de ré
duction.
Mais le droit de demander la réduction, à qui appar
tient-il, et de quel jour est-il acquis?
Ces questions ayant déjà été traitées dans le mémoire,
on se bornera ici à quelques réflexions.
La loi du 17 nivôse accordoit aux enfans le droit de de
mander la réduction des dispositions entre époux, comme
�( 13 )
à tous les liéritîêi'S en g é n é r a l c e lu i de" fa ire a n riu ller les
lib é ra lité s excessives attrib u ées à des tiers.
Mais aux termes de l’article ô j de cette lo i, le droit
n’étoit acquis aux héritiers que du jour où la succession
leur étoit échue.
Ce droit appartiendroit sans doute aux héritiers d’une
succession échue pendant l’existence de la loi du 17 ni
vôse an 2, parce que ces héritiers tiendroient leur droit
de la loi môme.
Peut-on dire qu’il appartient aussi aux héritiers d’une
succession ouverte seulement depuis le Code Napoléon,
après l’abolition de la loi du 17 nivôse an 2 ?
A vant l’ouverture de la succession les héritiers n’avoient
aucun droit acquis.
A l’ouvertùre de la succession ils n’ont pu en acqué
rir qu’en vertu d’une loi existante.
Une loi morte n’agit pas; elle ne peut produire aucun
effet, ni attribuer aucun avantage.
Ce seroit donc dans le Code Napoléon seul qu’il
faudroit chercher le droit accordé à ces héritiers. O r ,
le Code ne permet de demander la réduction des dis
positions antérieures au décès d’un père , qu’autant
qu’elles portent atteinte à la réserve légale attribuée
aux enfans , et jusqu’à concurrence seulement de celle
réserve léjg.de. ( V . les art. 920 et 9 2 1.)
Donc si le donataire se contente, pour tous les dons
qui lui ont été faits, de la quotité déclarée disponible
par le Code, cette quotité ne peut lui être refusée.
Cetle conséquence est le résultat d’un principe-élé
mentaire qui nous enseigne que toute succession doit
être régie par lu loi en vigueur ù l’instant où elle s’ouvre.
�( i4 )
L e principe et la' conséquence ont ¿té appliqués pûr
plusieurs arrêts de cassation rapportés dans le mémoire
de la dame d’Ayat (pag. 19 et suivantes), relativement
à des donations faites par contrats entre-vifs, sous l’em
pire même de la loi du 17 nivôse an 2.
; Les libéralités a voient été, il est vrai, déguisées sous
la forme de vente.
. Mais le déguisement étoit reconnu ; les arrêts con
sidèrent les actes comme contenant des donations , et
jugent la question de droit d’après ce point de fait. Les
donations furent maintenues parce que les donateurs
étoient morts sous l’empire du C o d e , et que les objets
donnés n’excédoient pas la quotité disponible fixée par
la loi nouvelle.
Ce qui a été décidé pour des libéralités indirectes,
mais reconnues, doit l’être, et à plus forte raison, pour
des libéralités franches et directes.
Les principes sont les mêmes dans les deux cas, quant
aux effets de la loi de nivôse; et l’on ne prétendra pas
sans doute que la fraude a dû obtenir devant les tri
bunaux plus de faveur que la vérité.
A u reste, la question a été jugée par la Cour de Riom,
pour une libéralité directe, dans la cause des Dumas et
Defarge.
L ’arrêt est du 21 juillet dernier : en voici l’espèce.“
Par le contrat de mariage de Louise Dumas, passé le
21 messidor an 7 , Benoît Dumas, sou père, lui avoit.
promis une somme de 2,000 francs.
L e père meurt sous l’empire du Code Napoléon, sans
avoir payé; la fille répudie la succession, et demande le
paycmeut à son frère, uu des héritiers naturels du père.
�( i5 )
340
L e frère soutient que le don excède la portion hérédi
taire de la sœur; que la loi du 17 nivôse a n -2 ne permeltoit pas au père de faire le moindre avantage à l’un
de ses eufans, et que la fille n’a droit qu’au partage par
égale portion.
- Ces moyens sont rejetés par un jugement fondé sur le
motif « que les successions doivent se régler suivant les
« lois en vigueur au moment de leur ouverture. »
Devant la C ou r, le frère, en soutenant la nullité du
don de 2,000 francs, ajoute que ce don excédoit même
le quart, quotité disponible d’après le Code. '
La Cou r, déterminée par les motifs exprimés au ju
gement, l’a confirmé , « si mieux n’aime l’appelant,
« e st-il d it , offrir partage à la partie de Marie (1),
« auquel cas ladite partie de Marie prélèvera le q u a rt,
w et partagera les autres trois quarts açec les autres
« cohéritiers. »
Cet arrêt a jugé la question dans l’espèce peut-être la
plus difficile, puisqu’il s’agissoit d’ un don fait en ligne
directe, et à un successible.
Le don a cependant été déclaré valable , au moins
jusqu’à la concurrence de la quotité disponible fixée par
le Code.
L ’application de ces principes et de ces arrêts à la cause
de la dame d’ A yat, est aussi simple que naturelle.
L a dame d’ A yat est donataire d’un revenu annuel de
3,000 fr. , d une somme en propriété de 5o,ooo f r . ,
(1)
l’arrét.
Le cédataire de la sœur : c e lle - c i est aussi partie dans
�2#
(
16
)
enfin de tout ce dont lu loi existante au décès de son
mari permettroit à celui ci de disposer.
C ’est en 1812 que le mari est décédé.
E lle a donc le droit de dem ander, ou qu’on lui ac
corde tous ses avantages m atrim oniaux, ou qu’on lui
délaisse la quotité disponible au moment du décès, c’està-dire , le quart en propriété , attribué à une seconde
épouse par l’article 1098 du Code Napoléon.
E x a m in o n s la secon de q u estion .
L e quart doit-il être pris sur la masse totale des biens
qu’a laissés le général d’A y a t , ou la dame T e r re y r e ,
unique enfant du g é n é r a l, a-t-elle le droit de prélever
avant partage 80,000 francs de douaire, et de prendre
les trois quarts du surplus ?
P o u r soutenir que le prélèvement devoit avoir lieu ,
le général Terreyre et son épouse avoient dit dans leur
mémoire que le douaire étoit une donation , et que le
rapport des donations étoit dû seulement entre cohéri
tiers, mais non en faveur d’un autre donataire comme
la dame d’Ayat.
A cette objection la dame d’A y at avoit répondu de
deux manières :
D ’abord , que le douaire n’étoit pas une donation
ordinaire, mais une espèce de lég itim e, un don con
ditionnel subordonné au cas où l’enfant douairier ne
se porteroit pas héritier de son père ;
Ensuite, qu’en considérant même le douaire comme
1
une donation ordinaire, la chose donnée à l’enfant devoit
s’ im puter.sur la légitime ou sur la réserve léga le, et
devoit par conséquent entrer, au moins fictivement,'
dans
�( Ï7 )
dans la masse , afin de fixer la quotité disponible ea
faveur de la dame d’Ayat.
• Les premiers juges n’ont adopté ni l’une ni l’autre de
ces opinions.
- Ils ont. dit que le douaire étoit une créance établie
par la lo i sur les biens du père;
< Que ce n’étoit ni une donation’ ordinaire, ni une
légitime ;
Que l’enfant en étoit saisi dès l’instant du contrat de
m ariage, et que le père n’étoit que l’usufruitier du
fonds du douaire;
Que le rapport n’en étoit dû qu’éntre cohéritiers, ou
quelquefois à des créanciers, pour prévenir les fraudes
qui pourroient être commises;
’
Enfin, que la dame Terreyre avoit deux qualités dis
tinctes, celle de douairière, en vertu de laquelle elle avoit
le droit de prélever sa créance sur la succession, et celle
d’héritière, qui l’autorisoit à faire fixer la quotité dispo
nible, en ne considérant comme masse de la succession
que ce qui resteroit après la distraction du douaire.
« A ces raisonnemens la dame d’Ayat répondra,
i °. Que c’est parce que le douaire n’est pas une donation
ordinaire, qu’on ne doit pas lui appliquer les principes
sur les rapports en matière de donation, et qu’on ne
doit pas dire, contre le texte précis de la loi, qu’on peut
etre à la fois douairier et héritier ;
2°. Que la dame Terreyre ne pourroit, même en re
nonçant à la succession de son père, réclamer aujour
d’hui le douaire, en invoquant une coutume depuis long
temps abolie;
3
�'
C *8 ) _
3°* Enfinj que le douaire pût-il être'réclamé,'et quellè
qu’en fût la nature, ce seroit cependant une portion dô
l’hérédité qui devroit'entrer dans la masse pour la fixa
tion de la quotité disponible.
.
-j->
Le douaire n’est pas une donation'ordinaire;: on peut
le définir,
Une espèce de légitime, qui, du consentement du père,
est attribuée aux enfans par la loi ou par la convention,
mais daûs le cas seulement où ils ne recevraient pas
d’autre patrimoine. J
1
«
Nous disons une espèce de légitime.
M . Pothier emploie la môme expression dans son
Traité du douaire ( n°. 293 ).
M. Lebrun, dans son Traité des successions (liv re 3 ,
chapitre 7 , nos. 24 et 28 ) , nous enseigne que le douaire
tient lieu de la légitime ; que 1-es coutumes accordent le
douaire, au lieu de légitime et d ’alim ens,* et il en con
clut ( n°. 26 ) que le douaire et la légitime ne peuvent
se cumuler 7 parce que ce sont des titres lucratifs qu i
ne peuvent concourir dans Me même sujet.
M. Ferrières, sur l’article 249 de la coutume de Payis,
n°» 2 , dit que la coutume a voulu, par le moyen du
douaire, assurer aux enfans des alimens et une légi
time. Il répète, sur L’article 2Ô2, n°. 2 , que le douaire
tient lieu de légitime à Venfant7 à laquelle on impute
tout ce qui lu i a été donne.
L e douaire est donc réellement une légitime admise
en France dans le droit coutumier, par imitation de la
légitime ordinaire étnblie par les lois romaines.
�( 19 )
Nous avons dit que le douairo n’étoit attribué aux
enfans que du consentement du père.
On distingue deux sortes de douaires, le douairepréfix,
qui est stipulé dans le contrat de mariage, et le douairo
coutumier, qui, dans le silence, des parties contractantes,
est établi par la loi.
L e douaire, même coutumier, dépend de la volonté
du père.
Car on peut stipuler dans le contrat qu’il n’y aura
de douaire ni pour la femme ni pour les enfans.
On peut aussi, en accordant un douaire à la femme,
priver les enfans de la propriété de ce douaire (i).
L e douaire n’est donc pas* comme l’ont dit les pre
miers juges, Une créance imposée par la loi sur les biens
du p ère, puisqu’il dépend de son consentement exprimé
ou tacite, et qu’il n’existe par conséquent que par l’effet
de ce consentement.
Enfin, nous avons observé que le douaire n’étoit at
tribué aux enfans que pour le cas où ils n’auroient
pas d’autre patrimoine.
Cette vérité résulte-des articles 25o , s 5 i et z 5z de.-la
coutume de Paris (?).
D e l’article i 5o , d’après lequel le douaire appartient
aux enfans , seulement s’ils ne se portent héritiers de
leur père, -et s'ils s'abstiennent de prendre sa succession.
(1) Voir Pothier, article agS, n°. 5 , et article 294» etHenuseon, Traité du douaire, chapitre 5 , n°. 26.
(2) Voir ce qui a été dit sur cette question dans le mémoire
de la dame d’A y a t, pages aG et suivantes.
3 '*
�( *à ) r ^
D e l’article 25i, qui est la conàéqüènce du précédent, et
qui porte : « Nul ne peut être héritier et douairier en« semble, pour le regarddesdouairescoutumierset-préfix. »
Et remarquons que ces deux articles s’expriment d’une
manière générale, absolue, applicable à tous les cas / qu’ils
n’admettent aucune distinction, et qu’ils ne permettent
pas de dire que leurs règles n’ont lieu qu’entre cohéritiers.
jDe Varticle 262, qui ajoute :
,
‘
)
« Celui qui veut avoir le douaire doit rendre ou res~
« tituer ce qu’il a reçu en mariage, 'et autres avantages
« de son père , ou moins prendre sur le douaire. »
Rendre et restituer, ou moins prendre, expressions
aussi claires que propres à fixer les idées sur la nature
et les effets du douaire •, expressions bien différentes de
celles employées par l’article 304 de la même coutume,
sur les rapports des donations.
Par ce dernier article, ce ne sont que les enfans venant
à la succession du père ou de la mère qui doivent rap
porter ce q u i leur a été donné.
Et dans quel but ?
’ P o u r être mis en partage entr'eux.
Dans l’article 2Ô2 il ne s’agit pas de rapport, mais de
restitution.
Ce ne sont pas les ertfans venant à la succession qui
restituent, mais les enfans qui, sans être héritiers, sont
seulement donataires.
Enfin , ce n’est pas pour que les objets soient mis en
partage en tr'eu x, que les enfans les restituent, mais au
contraire pour n’y prendre aucune part, puisque leur
qualité de douairiers s’oppose à ce qu’ils puissent con
courir au partage.
�( 21 )
< 50
Aussi le droit d’exiger l’imputation des dons sur le
douaire appàrtient-il môme aux créanciers dont les titres
sont postérieurs aux actes constitutifs du douaire et des
donations.
1
' C’est ce qu’attestent tous les auteurs qui ont traité cette
matière, et notamment Renusson, cliap. 6 , nos. 5 et 6;
Lebrun , dont l’opinion est transcrite dans lé mémoire
de la dame d’A yat, page 30; Pothier, nos. 352 et suiv.'
Ces auteurs ne fondent pas leur décision sur le danger
des fraudes, comme l’ont pensé les premiers juges. Et
de quelle fraude, en e fîet, pourroient se plaindre des
créanciers dont les droits n’existoient pas lorsque les do
nations avoient été faites?
Ils la fondent sur ce que « le douaire est loco legi« tim œ , et que in légitimant omnia computantur,* d’où
« s’ensuit que le douaire tenant lieu de légitim e, il faut
« imputer sur le douaire comme sur la légitime tous les
« avantages qu’on a reçus du père (1). »
Toutes ces règles, et les motifs qui leur servent de
base , démontrent que le douaire n’est accordé qu’en
remplacement de l’hérédité et de la légitime, et que par
conséquent l’enfant douairier qui se porte héritier, et
qui trouve dans cette hérédité la valeur de son douaire,
ne peut tout à la fois, et prélever ce douaire, et réclamer
dans le surplus des biens, au préjudice des donataires du
père, une légitime dont le douaire étoit destiné à lui
tenir lieu.
(1) y . le petit Commentaire de Claude Ferrières, sur l’art.
de la coutume de Paris.
25a
‘t y * -
�C ’est donc une grande erreur de la part des premiers
juges , que d’avoir comparé le douaire à une créance
ordinaire appartenante à l’enfant sur les biens du père*
et indépendante du droit d’hérédité.
L ’erreur des premiers juges paraîtra plus frappante
encore sous un autre rapport.
La dame Terreyre ne pourroit aujourd’h u i, même
quand elle auroit renoncé à la succession de son père,
réclamer le douaire en vertu de la loi ancienne.
M . Chabot de l’A llier et M. Grenier ont traité l’un,
et l’autre la question de l'effet du douaire coutumier,
lorsque la succession d’un père marié sous l’empire des;
anciennes lois, ne s’étoit ouverte que depuis la promul
gation de la loi du 17 nivôse an 2, ou depuis le Code
Napoléon (1).
.L’un et l’autre décident que les enfans ne peuvent
pas .demander le douaire.
« Leur droit à cet égard, dit M. Grenier, doit être
« assimilé à un droit su ccessif qu i doit être réglé par
« la lo i q u i régit à Tépoque du décès.
« A in s i, ajoute le même auteur, tes enfans ne pou,r~
« roient pas réclamer contre des tiers la distraction,
« du douaire. »
M. Chabot remarque aussi que le douaire des enfans,
quoiqu’il ne pût être exigé que par ceux qui renonçoient
à la succession de leur père, n'en était pas m oins, dans
(1)
V oir les Questions transitoires de M. Chabot, au mot
Douaire des enfans, et le Traité des donations de M. G renier,
édit. i'n~4° . , tome a , page 11G.
�( 23 )
la réalité, un'droit 'successifs qui commef tons les bulreâ
droits successifs, déçoit être réglé par la loi existante
au moment de Touverture de la succession.
Le principe sur lequel se fondent ces auteurs .non-?
veaux, est conforme à l’idée que les auteurs anciens
avoient eux-mêmes du douaire.
Ils le considéroient comme un droit successif.
Aussi ne l’attribuoient-ils qu’aux enfans qui étoient
vivons au décès du p è re , et qui étoient habiles à succéder.
Par la profession religieuse, parla condamnation d’une
peine capitale, les enfans ayant perdu l’état civil, etr?é~
tant pas habiles à succéder, n'ont pareillement aucun
douaire, dit Pothier, n°. 349.
« Ceux qui ont été exhérédés par leur père, pour
« une juste cause, observe le même auteur, n’ayant
« plus de droit à la succession, n’ont plus pareillement
« aucun droit au douaire. »
Selon Renusson Ci), l’enfant exhérédé est exclu du
douaire de même que de l’hérédité.
« La raison est , continue l’auteur , que le douaire
« est une portion des biens du père, et de son héré« d ité; comme son exhérédation l’exclut de l’hérédité,
« son exhérédation l’exclut aussi du douaire. »
Tous ces principes démontrent que les enfans ne sont
pas saisis du douaire dès le temps du mariage (2); que
(1) Chapitre 6 , n", 17.
(2) M. Pothier enseigne, aux n°\ 327 et 332, que le douaire
n’est ouvert, et que les enfans n o n sont censés saisis , qu’au
temps de la mort du pére.
�( 2*4 )
leur droit ne s’ouvre qu’à l’instant où le père meurt; et,
par conséquent, que c’est la loi en vigueur au moment
du décès qui doit seule servir de règle à leurs réclama
tions.
Il suit de là que si la loi existante au moment du
décès du père n’accorde pas de douaire aux enfans, ceuxci ne peuvent en demander.
C’est aussi ce qui a été jugé par plusieurs arrêts rendus
depuis la loi du 17 nivôse an 2, soit relativement au
douaire, soit par rapport au tiers coutumier, qui étoit
une espèce de douaire admis dans certaines provinces.
• On se bornera à citer les motifs d’un arrêt du 29 mes
sidor an 12.
« Considérant que la propriété du douaire, conférée
« aux enfans par l’article 399 de la coutume de Nor« mandie, n’étoit point une propriété pleine, parfaite,
« absolue, irrévocable; qu’elle n’étoit qu’une expectative
« conditionnelle, qui donnoit plutôt un droit d’hypo« thèque sur l’immeuble à ce destiné, le cas arrivant,
« qu’ une véritable p r o p r ié té ............. qu’ainsi cette ex« pectative a pu être enlevée aux enfans par une loi
« subséquente au mariage, et antérieure à la mort du
« p è r e , sans faire produii’e à cette loi aucun elïet ré« troactif. »
Il est évident que ces motifs s’appliquent à la loi du
Code sur les successions, comme à celle du 17 nivôse,
puisque l’une ne reconnoît pas plus que l’autre le douaire
en faveur des enfans.
La dame Terreyre ne peut donc invoquer une ancienne
coutume depuis long-temps anéantie, pour réclamer et
surtout
�( 25 )
S / i
surtout pour prélever sur une succession ouverte depuis
le C ode, un douaire qiie la loi nouvelle ne lui attribue
pas.
Mais enfin, que lèdouaire puisse ou non être réclamé,
et qu’on le considère, ou comme un avantage émanant
de la loi ancienne, ou comme une libéralité accordée
par le père, il ne doit pas être cumulé avec la réserve
légale établie par la loi nouvelle.
L a réserve légale est aujourd’hui ce qu’étoit autrefois
la légitime; l’une et l’autre mettent hors de la disposition
du père une portion de son patrimoine, afin de l’attri
buer à l’enfant, pour pourvoir à sa subsistance et à son
établissement.
Mais l’enfant qui est déjà pourvu sur les biens du
p è r e , n’a rien à réclamer ; le douaire tenant lieu de
légitim e, selon tous les auteurs, doit aussi tenir lieu de
la réserve légale. '
En vain diroit-on que c’est une dette du père ; la
légitime est aussi considérée comme une dette; une do
nation même, lorsqu’elle a été faite et non exécutée,
est aussi une dette du donateur.
Mais le douaire et la donation ne sont pas des dettes
ordinaires. L e douairier et le donataire sont des créan
ciers à titre lu cra tif, et non des créanciers à titre oné
reux. O r , il est de principe que tout ce que l ’en fan t
reçoit de son père à titre lu cra tif \ doit servir d’abord
à acquitter la dette de la nature, cest-à-dirc, la légitime
ou la réserve légale (i).
(1) Voir ce qui a été dit à cet égard dans le mémoire de la
4
�Réclamer le douaire et la réserve cumulativement ,
c’est tout à la fois blesser l’intention du père et les dis
positions de la loi.
. L ’intention du père; car en stipulant le douaire, ou
en y consentant, le père n’a-pas voulu s’astreindre à:
payer au même enfant deux légitimes; savoir, le douaire,qui est une espèce de légitime, aux dépens de ses biens
présens, et la légitime.de rigueur ou la réserve légale,
aux dépens des biens qu’il laisseroit a son décès. Le
père qu i, par la promesse du douaire, a assuré à son
enfant une portion de son patrimoine, a entendu s’af
franchir de toute autre obligation, et pouvoir disposer
à son gré du surplus de ce patrimoine. . : '
>
L ’intention du père doit être respectée.
Cette intention est d’ailleurs en harmonie avec les
principes du Code Napoléon. '• i
\, \
L ’article 1098, qui est la règle de la cause, autorisoit
le général d’Ayat à donner à sa seconde épouse le quart
de ses biens, le quart de son hérédité entière.
r
L e douaire est une portion de Vhérédité; il doit
donc être confondu dans la masse pour la fixation de
la quotité disponible; et pourvu qu’il n’excède pas les
trois quarts réservés à la dame T e r r e y r e , celle-ci n’a
pas à se plaindi*e.
,
La dame Terreyre ne peut nier que la valeur du
douaire ne soit inférieure à celle des trois quarts de
dame d’A ya t, pages 33 et suivantes. V oir aussi le Traité des
donations de M. G renier, édition in -g '., tome 2, pages 335 et
000.
�( 27 )
3J &
l'hérédité : elle n’éprouvera donc aucun retranchement
sur les trois quarts ni sur le douaire.
Donc le quart demandé par la dame d’Ayat doit lui
être accordé, s’il lui a été réellement donné.
O r , nous avons prouvé , en discutant la première
question, que cette donation existoit.
Comment donc a-t-on pu en contester l’exécution?
Une interprétation fo rcée, des erreurs érigées en
principes, foible soutien des prétentions de la dame
T erreyre, seront appréciées par la Cour à leur juste
valeur ; et la dame d’Ayat doit espérer de voir ac
cueillir ses réclamations , puisqu’elles sont fondées , et
sur les dispositions formelles de son contrat de mariage,
et sur le texte précis de la loi.
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. V A Z E I L L E , avoué licencié,
A RIO M , de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des T au les, maison Landriot. — Février 1814,.
** ~
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Kempfer de Plobsheim, Charlotte-Joséphine. 1814]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations pour la dame Kimpfer de Plosheim, veuve du Général d'Ayat, appelante ; contre le Général Terreyre et son épouse, intimés.
Note manuscrite : « jugement confirmé, par arrêt du 18 février 1814, voir journal des audiences p. 59. etc.»
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1814
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2211
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2212
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53440/BCU_Factums_G2211.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53439/BCU_Factums_G2210.pdf
9c2e2211162a8f5fb1ec7928db621844
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CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris, lecture
du contrat de mariage de M . Beaufranchet d’A y a t , avec
mademoiselle de Montgran , sa première fem m e, de son
contrat de mariage avec madame de W ittg e n ste in , qu’ il
a épousée en secondes noces, et d’un mémoire à con
sulter sur les questions suivantes :
P rem ièrem en t, madame veuve d’A y a t peut-elle ré
clam er, sur la succession de son m ari, en vertu de la
donation qu’il lui a fa ite, le quart des biens en toute
propriété , ou n’a-t-elle droit qu’à l’ usufruit seulement
de la moitié des biens ?
Secondement, madame Terreyre peut-elle prélever
le fonds du douaire de sa m è re , avant l’exercice des
droits de madame d’A y a t ?
E
s t im e
,
Q ue madame veuve d’A y a t a droit au quart en toute
propriété , des biens laissés par son mari ;
Que madame T erreyre ne peut prélever le fonds du
douaire de sa mère.
Selon l’ex p o sé,
Par les conventions matrimoniales de M . d’A yat avec
mademoiselle de M ontgran, passées en 1783, et soumises
à l’empire de la coutume de P aris, l’époux constitua à
son épouse un douaire préfix de 4,000 livres de re n te,
dont le fonds seroit propre à leurs-enfans.
1
�™ **
;
(o
L e divorce a dissous cette union , dont il ne reste
qu’une fille mariée à M . le baron Terreyre.
M . d’A y a t épousa en secondes noces mademoiselle
K e m p fe r , veuve de M . de W ittgenstein , dont elle avoit
trois enfans.
L e u r contrat de mariage, passé en l’an 4 , sous l’em
pire de la loi du 17 nivôse, contient, à la suite de divers
avantages faits par M . d’Ayat à madame de W ittgenstein , et dont le détail est actuellement inutile à connoître,
une clause dont voici les termes :
« Les futurs é p o u x , voulant se donner des preuves
« de leur amitié réciproque, se fo u t, par ces présentes,
« donation m utuelle, pure et simple et en tre-vifs, l’ un
« h l’au lre, et au survivant d’e u x , ce accepté respecti« vement pour ledit survivant, de tout ce dont la loi
« leur permet actuellement de disposer en faveur l’un de
«
«
«
«
«
l’autre, ayant enfans d’un premier mariage, ou tout
ce dont la loi leur permettra de disposer aussi en faveur
l’ un de l’autre , au jour du décès du premier mourant, dans le cas où la loi lors existante donneroit
plus de latitude à ces sortes de donations. »
E t pour le cas où il ne resteroit plus d’enfans à aucun
des é p o u x , quand arriveroit le décès du premier m ou
rant d'entr’e u x , ils donnoient au survivant la totalité des
biens de son époux décédé.
M . d’A y a t est mort en 1812. On a déjà dit que ma
dame T e r re y r e , sa fille , lui survivoit.
Des arrangemens pris avec mademoiselle de M ontgran,
depuis la prononciation du divo rce, mettent de ce côté
la succession de M . d’A y at à l’abri de toute réclamation.
�st€
(3)
Mais il s’élève entre madame veuve d’A y a t et madame
T e r r e y r e , les deux questions que l’on a posées, et que
l ’on va examiner.
C ’est au quart en toute propriété, des biens laissés
par son m ari, que s’étend la donation faite à madame
d’Ayat.
Elle survit à M . d’Ayat. E t les époux s’étoient réci
proquement d o n n é , en cas de survie, « tout ce dont
« la loi leur permettoit de disposer, ou tout ce dont elle
« leur permettroit de disposer en faveur l’un de l’autre,
« au jour du décès du premier m ourant, dans le cas où
« la loi alors existante laisseroit plus de latitude à ces
« sortes de donations. »
L a donation eut lieu pendant que la loi du 17 nivôse
an 2 conservoit sa force ; mais c’est sous l’empire du
Code Napoléon que M . d’A y at a cessé de vivre.
L a loi du 17 n ivô se, dans son article 1 4 , restreint
à l’usufruit de la moitié des biens , les avantages que les
époux stipuleroient entr’eux à l’a ven ir, dans le cas où il
y auroit des enfans; conform ém ent, ajoute la lo i, à l’ar
ticle 13 ci-dessus.
O r , l’article 13 réduit les avantages entre époux à
l ’ usufruit de la moitié des biens, lorsqu’il existe des enfiins, soit de leur union , soit d’ un précédent mariage.
M . et madame d’A y a t avoient des enfans de précédens
mariages; il en existe même encore : la loi du 17 nivôse
ne leur a donc permis de se donner que l’usufruit de la
moitié des biens.
L e Code N a p o lé o n , sous l’empire duquel est décédé
M . d’A yat , leur permettoit de se donner le quart des
2
»*:
�C 4 )
biens en propriété. C ’est la disposition formelle de son
article 1098, ainsi conçu:
« L ’homme ou la femme q u i, ayant des enfans d’un
a autre lit , contractera un second ou subséquent
« m a ria g e , ne pourra donner à son nouvel époux
« qu’ une part d’enfant légitim e, le moins prenant, et
« sans q u e , dans aucun cas, ces donations puissent
a excéder le quart des biens. »
Madam e Terreyre étant fille unique de M . d’Ayat
il n’y a point d’enfant qui prenne moins que le quart
des biens dans la succession de ce dernier. Il avoit donc
ta faculté de donner le quart de ses biens à madame'
d’A y a t , selon le Gode.
Mais le quart des biens eh toute propriété a plus de
valeur que l’ usufruit de là moitié des biens; il se ven
dront davantage.
Sans doute l’ usufruit de la moitié des biens peut finir
par valoir le quart en propriété. A u bout de vingt années,
il se trouve avoir produit une somme égale au prix du
fonds du quart des biens, et en outre, l’intérêt de cette
somme chaque année; s’il dure au delà, il produit encore
davantage; mais s’il dure moins aussi, il n’égale pas
le quart des biens. Cette valeur de l’ usufruiti est donc
aléatoire, au lieu que le quart en pleine propriété équi
vaut sur-le-champ et sans risque a un long usufruit de
la moitié de la succession; il y joint d’ailleurs les avan
tages d’une partie de cet usufruit, puisque la pleine pro
priété du quart des biens emporte l’ usufruit de ce quart.
Les avantages que le Code Napoléon permet de se faire
aux époux eu secondes noces, ont donc plus de latitude
�que ceux dont la loi du 17 nivôse leur conféroit la fa
culté de se gratifier.
Il s’ensuit que M . d’A y a t a fait à sa femme les avan
tages permis par le Code N apoléon; car il lui a donné
tout ce que la loi permettroit de lui donner, au jour du
décès du disposant, dans le cas où la loi alors existante
laisseroit plus de latitude que la loi du 17 nivôse à ces
sortes de donations.
Il lui a donc d o n n é, en définitif, la pleine propriété
du quart de ses biens, dans lequel madame d’A y a t doit
confondre tous ses autres avantages m atrimoniaux, parce
qu’aux termes de l’article 1098 du C ode, tous ensemble
ne doivent point excéder le quart.
O n soutient qu’il ne l’a pas pu. La donation est entre
v ifs , d it-o n ; d è s - lo r s elle n’a pu être valablement faite
que suivant la loi du temps de sa confection. On n’avoit
point la faculté de soumettre un acte irrévocable de sa
n a tu re , et dont tous les effets doivent être fixés au mo
ment où les parties le signent, à la fluctuation des lois
postérieures.
Mais d’abord il s’en faut beaucoup que la prévoyance
du Code c i v i l , et le renvoi à ses dispositions, fussent
contraires aux lois de ce temps-là. L e législateur luimême annonçoit souvent le C ode; lui-même il y renvoyoit souvent. T ém o in l’article 10 de la loi du 12 bru
maire an 2 , sur les enfans naturels, lequel porte :
« A l’égard des enfans nés liors du mariage, dont le
« père et la mère seront encore existans lors de la pro« mulgation du Code c i v i l , leur état et leurs droits se« ront en tout point réglés par les dispositions du Code. »
3
�(« )
On pourroit citer plusieurs autres exemples de cette
annonce légale d’ un Code prêt à paroître, auquel le lé
gislateur renvoyoit d ’avance la fixation des droits des
citoyens.
P o u r q u o i, lorsque deux époux se voyoient soumis à
des lois que leur auteur déclaroit être imparfaites et pro
visoires , et par lesquelles les volontés de ces époux
étoient gênées ; pourquoi leur refuser le droit de déclarer
eux-mêmes que si la loi actuelle se trou voit encore en
vigueu r au moment où la donation seroit recueillie, ils
conformoient respectueusement à ses règles leurs stipu
lations*, mais que si la loi promise, au co n tra ire,'éto it
promulguée avant que leur convention ne s’exécutât, et
si elle favorisoit le penchant qu’ ils avoient à ^’avantager
l ’un l’a u tre, ils entendoient profiter de ce perfectionne
ment de la législation, et de cette disponibilité plu&
grand e, qui seroit mieux d’accord avec leurs désirs?
Ils l’ont pu d’autant m ie u x , que les donations m u
tuelles, faites sous la condition de su rvie, bien qu’elles
soient qualifiées en tre-vifs, n’ont jamais été réputées
telles, mais seulement des donations ù cause de mort.
Elles en ont le caractère principal, en ce que le do
nateur se préfère au donataire, et ne se dépouille qu’en
m ourant; jusque-là il est lui-même aussi-bien donataire
que donateur. L e prédécès de l’un ou de l’autre déter
mine les qualités des parties : ce prédécès seul décide
qu’un tel est celui qui d on n e, un tel celui qui reçoit.
La C our de cassation, dans ses arrêts du ü5 ventôse an
1 1 , et du 8 vendémiaire
rapportés par M . Chabot,
en*son livre des Questions transitoires, au mot Donations
�entre ép o ux, a deux fois ainsi qualifié des donations sous
la condition de su rvie, faites dans l’intervalle de la loi
du 17 nivôse au Gode N apoléon; comme celle de M . et
de madame d’Ayat.
La C our de cassation a motivé ces arrêts, et particu
lièrement le prem ier, sur les anciennes ordonnances ; et
elle a décidé à plusieurs reprises que ces ordonnances
avoient conservé leur fo rce, même sous l’empire de la
loi du 17 n ivô se, dans tous les points que cette loi ne
décidoit pas, et que les ordonnances décidoient. O r , la
loi du 17 nivôse ne s’est point occupée de fixer les ca
ractères particuliers à chaque sorte de donation ( arrêts
de cassation, du 29 messidor et du a 5 fructidor an 113
Questions de d ro it, de M . M e r lin , tome 8 , p. 187 ).
Dès que la donation de M . et de madame d’A y a t est
une donation à cause de m o rt, il n’étoit nullement contre
sa nature qu’on s’y référât à la loi du temps du décès 5
il suffit que la quotité de la donation se trouve déter
minée dans le même temps que la personne du donateur
et celle du donataire. P a r cette clause elle l’étoit. Quand
des époux se donnent par contrat de m ariage, et dans
la forme entre-vifs, les biens qu’ils laisseront à leur décès,
clause dont la validité n’éprouve point de contestation \
ne rendent-ils pas également incertaine jusqu’à l’instant
de ce d è c è s, la quotité de la donation, que des aliéna
tions postérieures à l’acte peuvent réduire à rien ?
Les conventions matrimoniales sont irrévocables 9 il
est vrai ; mhis cela veut uniquement dire que l’on ne
peut rien changer ù la manière dont on les a constituées,
qu’il faut les exécuter telles q u ’on les a établies. L a do
�(8)
nation faite par M . et madame d’A yat étoit irrévocable
aussi : toutes les données nécessaires pour diriger dans
son exécution , la clause les contient; ce que Ton veut
y est nettement exprimé. Cherchez-vous quel est le do
nataire? voyez quel est le survivant. D é s ire z -v o u s de
connoître la quotité du don ? comparez la loi du temps
du décès du donateur à la loi du temps de la confection
de l’acte. D u moment que la donation fut signée, on
sut que les choses devroient s’y passer ainsi ; aucun des
époux n’y pouvoit changer dans la suite : leur conven
tion étoit donc irrévocable.
Enfin, le contrat existe; et ce n’est point par de vagues
argumentations que l’on renverse un contrat. Nulle loi
ne le prohibe ; il ne renferme rien de déshonnête ; il
doit être suivi ponctuellement.
Ce quart des biens , madame d’A y a t a droit de le
réclamer sur toute la succession, sans que madame T e r reyre puisse prélever le fonds du douaire propre aux
enfans du premier lit.
L e contrat de mariage par lequel M . d’A y a t créa ce
douaire, fut expressément soumis à la coutume de Paris.
O r , l’article a 5 r de cette coutume dit : « N ul ne peut
« être héritier et douairier ensemble pour le regard du
c< douaire coutumier ou préfix. »
E t madam eTerreyre s’est portée héritière de M . d’Ayat.
Elle prétendra que cet article n’a d’application que dans
le cas où il existe plusieurs héritiers. A lo rs ils se forcent
mutuellement au rapport; il ne leur est pas plus permis,
à l’égard les uns des autres, d’être à la fois héritiers et
douairieçs, que d’être héritiers et donataires; car le douaire
�(
9)
.
.
préfîx n’est autre chose qu’ une donation. Mais madame
Terreyre est fille unique; elle hérite seule : l’article s 5i
de la coutume de Paris ne la regarde donc pas.
Il suffîroit de répondre à madame T errey re, que la
coutume ne distingue en aucune façon l ’héritière uni
que de celle qui a des cohéritiers : « N u l ne peut être
« héritier et douairier, dit-elle, pour le regard du douaire
« coutumier ou préfix. »
Mais on peut entrer dans le détail des motifs de cette
décision , sans craindre que l’examen la rende moins sa
tisfaisante.
Pothier s’explique clairement à ce sujet. « L e douaire,
«
«
«
«
«
«
dit-il, est une dette de la succesion du père envers
ses enfans. L e fils, unique h éritier, étant en cette qualité seul tenu de toutes les dettes de la succession de
son père, il ne peut pas être débiteur du douaire envers lui-même ; il ne peut pas en être à la fois le débiteur et le créancier : ce sont deux qualités qui se dé-
« truisent nécessairement » (T ra ité du d ouaire, n°. 360).
L ebrun semble encore être entré plus avant dans l’es
prit de cette disposition de la coutume. V o ic i quelles
sont ses paroles :
« A l’égard de l ’incompatibilité des qualités d’héri« tier et de douairier, elle est un droit universel en
« ce royaum e, parce q u e , si l’on considère le douaire
« comme une créance , elle se confond dans la qualité
« d’héritier; et si on le regarde c o m m e un titre lucratif,
« il ne peut pas concourir avec la succession qui est de
« la même nature. Aussi l’on dit communément que le
« douaire tient lieu de la légitim e, et que celle-ci tient
/
�( 10
« lieu de la succession » (Success., liv. 3 , cliap. 7 , n°. 18).
L e b r u n , comme on le v o it, ne fait point dépendre
son avis de l’article z 5 i de la coutume de Paris; il le
tire du droit commun de la F ra n ce; et les raisons qu’il
donne sont d’une telle solidité , qu’elles s’appliqueroient
au contrat de mariage de M . d’A y a t avec mademoiselle
de Montgran , fût-il étranger aux dispositions de la cou
tume de Paris.
L e douaire, en effet, étoit une portion des biens du
père assurée aux enfans, pour le cas où il rendroit sa
succession mauvaise; c’étoit une précaution prise en fa
veu r des enfans contre les malheurs de l’administration
de leur père. Mais lorsque l’enfant accepte la succession
m ê m e , c’est qu’il y trouve plus d’avantage que dans le
douaire; il recueille alors tout ce dont le père n’a pas
valablement disposé d’ailleurs. V o tre père a vo u lu , pourroit-on lui d ire, que vous eussiez au moins le montant^
du douaire; mais il n’a pas vo u lu , quand vous recueillez
plus que le douaire, que vous mettiez à part, sans la
com pter, cette portion qu’il vous assuroit en cas de mal
heur ; il n’a pas entendu vous autoriser h contrarier par
là les autres dispositions qu’il a faites.
U ne autre raison de décider également, admise dans
la jurispi'udence, est celle-ci :
L a portion la plus forte que puisse recevoir une
épouse en secondes noces, quand son mari a des enfans
du premier l i t , c’est une part d’enfant le moins prenant.
A in si, madame d’A y a t est donataire d’une part d’enfant
le moins prenant. Mais comment la part d’enfant jdoiteile se régler? P o u r la bien connoître, il faut voir ce
�que pourroit faire un enfant à la place de la veu v e, et
ce à quoi il auroit droit; car voilà ce qui a été donné
à la veuve. Elle doit l’avoir si ce don n’excède pas la
quotité disponible relativement à elle. O r , un autre en
fant mis à la place de la veuve empêch eroit de prendre
le douaire; et comme rien ici n’a été donné à titre de
p récip u t, le second enfant auroit la moitié de tous les
biens : ce seroit là la part d’enfant. La loi ne veut pas
que lorsque cette part est donnée à l’épouse e n secondes
noces, elle excède le quart des biens. Elle ne l’excèdera
donc point; mais il n’y a nul prétexte raisonnable de la
réduire plus bas.
U n arrêt de la Cour d’appel de Paris, rendu le 20
février 1809, a notamment consacré cette doctrine dans
la cause de M M . Jonnery et Sirot.
D
é l i b é r é
à
Paris, ce 30 novembre 1 8 1 2 .
BELLART, DESÈZE.
A RIOM, de l’imp. de THIBAUD, impritn. de la Cour im périale, et libraire,
rue des T aules, maison L a n d r i o t , — Juillet 1813.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Beaufranchet d'Ayat. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bellart
De Sèze
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2210
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2211
BCU_Factums_G2212
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
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62c953af3fe1b7ea9464ee5a4e27e2c9
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Text
M É MO I R E
EN
R É P O N S E ,
P o u r dame C h a rlo tte -J o s é p h in e K E M P F E R
D E P L O B S H E IM , veuve en premières noces
de M. le comte de la maison régnante de
Sa y n
et W
ittgenstein
- B erlenbourg,
et en secondes noces de M. Louis- CharlesAntoine
de
B eaufranchet
d
A y a t,
général de brigade, inspecteur général des
haras de l’E m p ire, demanderesse;
C o n t r e M. D e n i s T E R R E Y R E
général de
brigade, baron de l'Em pire, l'un des commandans de la légion d'honneur ; et dame
A nne - P a u l in e
-
V ic t o ir e
B E A U F R A N C H E T
D E
D' A Y A T son
épouse, autorisée en justice, défendeurs.
M
Kempfer de Pl obsheim , veuve du général
d’A y a t, réclame des avantages qui lui sont assurés par
son contrat de mariage.
ADAME
�C * )
Elle eût désiré éviter des discussions judiciaires.
Elle a tenté des moyens de conciliation ; on les a
repoussés.
Elle a proposé des arbitres; on les a refusés.
Elle s’est vue alors obligée d’agir devant les tribunaux.
Ses demandes sont légitimes; on les lui conteste ce
pendant : mais ce n’est pas assez.
Les calculs de l’intérêt ont exalté les passions de ses
adversaires ; et les observations les moins convenables,
les imputations les plus hasardées comme les plus inju
rieuses, sont venues se mêler à leurs moyens de défense;
la mémoire d’un père n’a pas même été épargnée, dans
le but indiscret de blesser sa veuve.
L a dame d’Ayat n’exigeoit pas de sacrifices d’intérêt;
elle n’en auroit pas accepté. On n’ignore pas qu’elle eût
été disposée plutôt à en faire elle-même.
Mais elle avoit droit de compter sur les égards qu’on
se doit, même entre étrangers, et dont il est étonnant
que la dame et le général Terreyre se soient écartés.
La dame d’Ayat n’imitera pas l’aigreur du ton qu’ils
ont adopté ; elle exposera ses moyens avec la simpli
cité qui convient à une bonne cause; elle prouvera que
c’est la loi du temps du décès qui doit fixer la quo
tité des avantages qui lui ont été promis, et que cette
quotité doit être prise sur la totalité des biens du gé
néral d’Ayat.
F A I T S .
Le général Beaufranclict d’Ayat avoit épousé en pre
mières noces la dame Elisabeth Guyot de Montgran.
�m
( 3 )
L eur contrat de mariage est du 2 août 1783.
L ’article 8 de ce contrat est le seul essentiel à connoître. Voici comment il est conçu.
« Ledit sieur futur époux a donné et donne à ladite
« demoiselle future épouse , 4,000 livres de rente
« de douaire préfix, dans le cas où, lors de la disso« lution dudit mariage, il y auroit des enfans vivans
« issus d’icelui ; le fonds au denier vingt duquel douaire
« sera propre auxdits enfans et aux leurs, de leur côté
« et ligne. »
Ce mariage a été dissous le 29 prairial an 2 , par un
divorce *, et le 4 pluviôse an 3 , une transaction régla et
liquida tous les droits de la dame Montgran.
Deux enfans étoient nés de ce mariage \ un seul, la
dame T e rre yre , a survécu à son père.
En l’an 4, le général d’Ayat rechercha en mariage la
dame Kempfer, veuve de M . de Sayn - Wittgenstein,
Sa recherche fut agréée, et le contrat de mariage fut
dressé le 19 brumaire an 4.
Par l’article i^r. de ce contrat, les futurs époux e x
cluent le régime de la communauté.
Par l’article 3 , il est convenu qu’ils jouiront à part,
et divisément, de leurs biens, et l’épouse est autorisée
à disposer de son mobilier et de ses revenus.
Par l’article 4 , le futur doue la future « de 3,000 fr.
« de rente nette, et sans retenue de douaire préfix.........
« le fonds duquel sera propre aux enfans à naître dudit
* futur mariage. »
L ’article 5 attribue au survivant des époux un gain
m
�( 4 )
de survie de 5o,ooo francs , à prendre sur le plus clair
des biens du premier décédé.
L ’article 6 porte que les meubles et les effets mobiliers qui se trouveront dans les maisons appartenantes à
l ’un ou à l’autre des époux, appartiendront aussi au
propriétaire de la maison, sans qu’il ait besoin d’aucune
quittance, à l’exception seulement des habits, linges,
hardes, et autres effets qui, par leur nature, seront à
l’usage particulier de l’un des époux.
D ’après l’article 7 , le loyer des lieux qui seront habités
conjointement -, sera payé par moitié, et les meubles et
effets mobiliers qui s’y trouveront, seront aussi présumés
appartenir par moitié aux é p o u x, mais sous l’exception
de ceux que leur nature ou des marques particulières
indiqueroient appartenir à l’un d’eux seulement.
L ’article 10 charge chacun des époux de contribuer
pour moitié aux dépenses du ménage.
L ’article 11 doit être transcrit littéralement, comme
renfermant la clause sur laquelle roule la discussion.
a Les futurs époux , voulant se donner des preuves de
« leur amitié réciproque, se fo n t, par ces présentes,
« donation mutuelle , pure, simple et entre-vifs, l’un à
« l’autre, et au survivant d’e u x , ce accepté respectivement
( « pour ledit survivant, de tout ce dont la loi leur per« met de disposer en faveur l’un de l’autre, ayant en« fans d’un premier mariage, ou de tout ce dont la loi
« leur permettra de disposer aussi en fa v e u r Yun de
« Vautre, au jo u r du décès du premier mourant d'eux,
« dans le cas où la loi lors existante donneroit plus
�«
«
«
«
«
«
C 5 )
de latitude à ces sortes de donations , pour par ledit
survivant desdits futurs époux, en jouir à compter du
décès dudit premier mourant, suivant et aux termes
de la loi, sans être néanmoins tenu de donner aucune
caution, et seulement à la chai’ge de faire faire fidèle
inventaire des biens du prédécédé.
« Dans le cas où, au jour du décès du premier mou« rant desdits futurs époux, il ne laisseroit aucun en« fant, soit du précédent, soit du futur mariage, les« dits futurs époux, pour ledit survivant, se font do« nation, toujours ce accepté respectivement pour ledit
« survivant, de tous les biens meubles et immeubles qui
« se trouveront appartenir au premier mourant d’eu x,
« au jour de son décès, à quelque somme qu’ils se trou« vent monter, et en quelques lieux qu’ils se trouvent
« dûs et situés.
« Pour par ledit survivant jouir, faire et disposer du
« tout en toute propriété, et comme de chose lui ap
te partenante, à compter du jour du décès dudit premier
« mourant. »
Telles sont les conventions de ce contrat de mariage;
conventions par lesquelles la dame Terreyre et son époux
ont été prodigues d’observations assez singulières.
A les en croire, les amis du général d’Ayat remar
quèrent qu’il n’avoit pu résister à la séduction ; ils lui
reprochoient d’avoir oublié les deux enfans qu’il avoit
alors, etc.
On n’a pas réfléchi, en alléguant ces remarques et ces
reproches, que les libéralités des deux époux étoient ré
ciproques ; q u e , dans l’article 1 1 notamment 7 le gé
�( 6 )
néral d’Ayat recevoit, par une disposition générale, le
don de tout ce que la dame Kempfer pouvoit lui donner
alors ou pourroit lui donner à l’avenir; et que la dame
Kempfer avoit elle-même trois enfans de son premier
mariage, qu’elle n’avoit cependant pas intention d’ou
blier, mais envers qui sa fortune lui permettoit d’etre
généreuse, comme elle l’étoit envers son futur époux.
La dame et le sieur Terreyre ne l’ignorent pas; la
fortune de la dame d’Ayat étoit très-considérable; celle
du général étoit modique : celui-ci trouvoit donc, dans
des libéralités réciproques, un avantage bien supérieur
à celui qu’il offroit lui-même.
Pourquoi donc de vaines déclamations?
Pour colorer ses plaiutes, la dame Terreyre présente
un tableau de la fortune de son père, qu’elle tire des
articles de son propre contrat de mariage avec le géné
ral Terreyre.
Que pourroit signifier ce tableau, puisque la dame
d’Ayat s’est restreinte au quart des biens de son mari?
Il signifieroit seulement que par les dons mutuels, la
dame d’A y a t , en donnant beaucoup, recevoit peu.
L a dame T erreyre, qui accuse son père de prodiga
lités, et qui conteste aujourd’hui si amèrement les droits
d’une belle-mère dont elle n’eut jamais à se plaindre,
auroit dû reconnoitre que c’est à cette belle-mère cepen
dant qu’elle doit la conservation de la terre d’A y a t, un
des plus précieux objets de la succession.
Elle n’ignore pas que le général d’Ayat vouloit la
vendre; qu’il avoit même envoyé à cet effet une pro
curation et un projet de division de la terre en plusieurs
�C7 )
lots, pour la facilité des ventes, et que son épouse n’a
usé de son influence sur l’esprit d’un époux qui la chérissoit, que pour empêcher une vente si nuisible aux
intérêts de la dame Terreyre.
On rapporte la preuve écrite de tout ce qu’on avance.
Ce fut le 2 juillet 1812 que la dame d’Ayat eut le
malheur de perdre son é p o u x, qui lui fut enlevé aux bains
de V ichy par une mort subite : une lettre du 3 juillet
lui apprit ce cruel événement.
La dame d’Ayat habitoit alors à B lo t, dans son châ
teau, à plusieurs lieues de distance d’Ayat.
L ’on a osé dire qu’à-la nouvelle du décès, elle avoit
fait enlever le mobilier d’A y a t, pour meubler Blot.
La dame d’Ayat ne s’abaissera pas à l’épondre à cette
odieuse accusation.
Mais comment a-t-on pu la hasarder ?
La dame Terreyre et son mari a voient-ils pu oublier
les faits récens qui la détruisent ?
La nouvelle fatale ne fut connue de la dame d’Ayat que
le 3 juillet.
L e 4, elle écrivit à M. le juge de paix pour l’inviter
à apposer les scellés sur le mobilier d’A yat, qui étoit
confié aux soins des domestiques.
L e 6, les scellés furent, apposés; et les domestiques,
sur la réquisition du juge de paix, aflirmèrent devant
lui qu’ils n’avoient soustrait ni vu soustraire aucun objet.
Ce magistrat choisit en même temps deux gardiens
des scellés.
L e 1 4 , les scellés furent vérifiés et reconnus intacts,
en présence du général Terreyre et de son épouse ; toutes
�( 8 )
les clefs furent remises à c e u x - c i; tous les objets qui
garnissoient le château leur furent délivrés du consen
tement du fondé de pouvoir de la dame d’ Ayat. Ils ne
firent aucune réclamation alors; plusieurs mois se sont
écoulés sans qu’ils en aient fait ; bien plus, ils ont rendu
à la dame d’A y a t , sur sa demande, quelques objets qui
lui appartenoient, et qui étoient l’estés au château.
Gomment se fait-il donc qu’ils n’aient pensé à ces pré
tendus enlèvemens, que lorsque la dame d’Ayat a ré
clamé ce qui lui étoit dû ?
La dame Terreyre et son mari avoient été beaucoup
moins exacts eux-mêmes. Ils avoient entre les mains, de
puis le 12 juillet, la clef du cofFre du secrétaire qu’avoit
laissé à Paris le général d’Ayat.
Ils s’étoient chargés de faire apposer les scellés sur
le mobilier.
Ces scellés n’ont pourtant été apposés que le 21 sep
tembre , sur la réquisition de la dame d’Ayat.
Cependant celle-ci n’a élevé aucun soupçon , et n’a
fait aucune remarque ; elle croit à l’honneur dans les
autres, parce qu’elle est incapable elle-même de manquer
à ses règles; et si elle rappelle ce fait à ses adversaires,
c’est uniquement pour qu’ils puissent apprécier leur
propre conduite à son égard.
Ce fut à Paris que la dame d’Ayat fit proposer au
général Terreyre, par un notaire respectable, des moyens
de conciliation qu’il rejeta, et des arbitres qu’il refusa.
L a dame Terreyre et son époux s’étoient emparés
de toute la succession, des meubles et des immeubles ;
ils ne vouloient pas de conciliation; ils ne vouloient pas
de
�( 9 )
de décision arbitrale; il falloit donc provoquer contr’eux
une décision judiciaire.
La dame d’Ayat les cite en conciliation , le 5 janvier
1813; elle expose ses droits; elle réclame le quart de la
totalité des biens de M. d’Ayat.
Les cités comparoissent au bureau de paix , par un
fondé de p o u v o ir, mais pour déclai’er que ce n’est que
pour obéir à la loi.
Une demande en provision.est formée le 7 mars 1813.
Cette demande choque la dame Terreyre ; elle re
marque que la dame d’Ayat est très-opulente , et n’a
pas besoin de provision.
Qu’importe! celle-ci ne jouissoit d’aucune partie de la
succession. La dame Terreyre et son mari possédoient
tout ; on leur avoit délivi'é le mobilier d’A y a t, celui
trouvé à V ich y , estimé, y compris l’argent, 2,714 fr. ;
le prix du mobilier de Paris, vendu, tous frais déduits,
3,614 fr. 60 c. ; ils avoient touché 1,200 fr. sur la solde
de retraite du g é n é ra l, 1,293 fr. sur son traitement
d’inspecteur gén éral, les termes échus des rentes sur
l’état ; ils avoient perçu les récoltes des immeubles.
A ussi, pour repousser la demande en provision , la
dame Teri’eyre n’a trouvé qu’un moyen aussi étrange
qu’illégitime ; elle a prétendu que la dame d’A y a t ,
aussitôt qu’elle.eut appris la mort du général, s’occupa
de spolier, de dévaster entièrement la maison cC\A yat,
et d’en transporter tous les effets et mobilier de toute,
espèce dans le château de Blot.
Imputation d’autant plus extraordinaire, que la dame
Terreyre sait bien qu’aucun meuble n’a jamais été acheté
�Cio)
par le général, que les meubles antiques qui garnissoieni
Ayat s’y trouvent encore, et que le château de Blot n’a
que des meubles modernes , tous achetés par la dame
d’Ayat.
Imputation tardive, après avoir assisté à la rémotion
des scellés, et avoir reçu tous les objets mobiliers sans
aucune réclamation, sans aucune réserve.
Imputation imprudente, et qui n’est qu’une misérable
chicane à laquelle il est surprenant que la dame Terreyre
ait eu recours.
La dame d’Ayat a toujours eu de l’affection pour la
dame Terreyre; elle eut oublié les injures. Elle n’exigeoit
qu’une rétractation; on ne l’a pas faite. Elle a demandé
justice; elle l’obtiendra.
Quant à la provision, c’est un objet peu important,,
aujourd’hui que la dame d’Ayat a consenti elle-même à
joindre le provisoire au fond; et c’est des questions prin
cipales seulement que nous devons nous occuper.
D eux questions ont été discutées dans le mémoire
publié par la dame Terreyre.
En adoptant le même ordre, nous prouverons d’abord
que la dame d’Ayat a droit, non à un simple usufruit,
mais au quart en propriété qu’elle réclame.
Ensuite, que ce quart doit être pris sur la totalité des
biens du général d’A y a t , y compris môme les 80,000 fr.
de douaire que la dame Terreyre croit pouvoir prélever.
�2b
( »
)
§. Ier.
La dame d'Ayat a droit au quart des biens en
propriété.
Par l’article n du contrat de mariage, du 19 brumaire
an 4 , les deux époux se donnèrent mutuellement tout
ce dont la loi leur permettrait de disposer enjfaveur
l’un de Vautre au jo u r du décès du premier mourant.
L e Code Napoléon, loi en vigueur à l’instant du décès
du général d’A y a t, autorisoit un don du quart. (V oyez
l’article 1098. )
Ainsi ce quart a été attribué à l’épouse par la dispo
sition éventuelle.
Mais on critique cette disposition ; on prétend qu’elle
doit être réduite à l’usufruit de moitié des biens, con
formément à la loi du 17 nivôse an 2.
Une donation mutuelle, d i t - o n , est une donation
entre-vifs ; c’est la loi en vigueur au temps du contrat
qui doit la régir : tels sont les principes; telle est l’opi
nion des auteurs, et notamment de Duplessis; telle est la
jurisprudence des arrêts.
S’il étoit nécessaire de discuter ces principes, on pourroit démontrer qu’un don mutuel, un don de quart est
réellement une disposition à cause de mort ; qu’il n’a
de commun avec une donation entre-vifs que son carac
tère d’irrévocabilité ; que d’ailleurs il n’a aucun effet
présent, puisque le donateur peut, pendant sa v ie , dis2 *
�( 12 )
poser de tout, puisque la mort seule lui donne ouver
ture, et en fixe l’étendue.
On pourroit rappeler les termes de l’article 284 de la
coutume de P aris, loi du contrat de mariage, qui porte:
Un don mutuel de soi ne sa isit, avis est sujet à déli
vrance : preuve évidente qu’un pareil don ne peut être
assimilé à une donation entre-vifs, qui saisit sur-le-champ,
et pour laquelle on n’a jamais dit que la délivrance fût
nécessaire.
On pourroit enfin invoquer l’opinion de Dumoulin
sur l’article 187 de l’ancienne coutume; celle de Ferrières,
et de beaucoup d’autres auteurs, qui tous distinguent le
don mutuel de la donation entre-vifs.
Mais ce luxe d’érudition seroit superflu pour la dé
cision d’une question tout à fait étrangère au cas dont
se sont occupés les auteurs et les arrêts invoqués dans le
' mémoire de madame Terreyre.
Que disent les auteurs, et que décident les arrêts cités?
Qu’une donation mutuelle est irrévocable, en ce sens
que si elle a été autorisée par la loi existante à l’instant
où elle a été faite, elle n’a pu être détruite ou restreinte
par une loi postérieure.
Et sur quel principe sont fondées ces opinions, ces
décisions ?
Sur un principe reconnu de tous les temps, consacré
par toutes les législations, et consigné dans l’article 2
du Code Napoléon , qui nous enseigne que la loi n'a
point d'effet rétroactif.
Dans la cause , il ne s’agit point d’anéantir ou de
�( 13 )
réduire, en vertu d’une loi nouvelle , un don valable
ment fait sous l’empire d’une loi ancienne.
Il s’agit d’examiner si deux époux ont pu se faire
mutuellement un don conditionnel, et subordonné à
l’émission d’une loi future.
Ramenée ainsi à ses vrais termes , la question est
résolue, soit par les principes, soit par la jurisprudence.
Un principe élémentaii’e nous apprend que les con
trats de mariage sont susceptibles de toute espèce de
conventions , -pourvu qiCelles ne soient pas contraires
au x bonnes mœurs.
Ce principe est écrit dans l’art. 1387 du C ode, que
l’on ne considérera pas sans doute comme formant un
droit nouveau.
' 'O r , que pourroit-on trouver de contraire aux bonnes
mœurs , dans une disposition par laquelle on se réfère ,
pour la quotité que l’on entend donner, à celle qu’une
loi future déclarera disponible ?
Certes, on ne peut supposer qu’une loi future établisse
des règles immorales.
Dira-t-on que c’est manquer de respect pour une loi
existante?
Ce seroit pousser le scrupule bien loin, et témoigner
pour une loi momentanée et qui a cessé d’exister, plus
de vénération que n’en montroient ses auteurs eux-memes
qui , à l’époque où ils la publioient, la présentoient
comme passagère, et annoncoient la promulgation pro
chaine d’un Code civil. ( Y . loi du 22 brumaire an 2 ,
article 10. )
�C 14 )
^ On sait aussi que les conventions conditionnelles ont
toujours été .permises.
Les donations conditionnelles notamment étoient ad
mises dans notre droit, et un de nos plus célèbres auteurs
a fait un traité particulier sur ces sortes de dispositions.
11 est possible cependant qu’on n’eût pas prévu autre
fois une condition semblable à celle écrite dans la clause
que nous examinons.
Mais qu’importe que l’on puisse ou non citer des
exemples! il n’en est pas moins vrai qu’on ne peut con
tester la vérité du principe qui autorise les dons condi
tionnels; il n’en est pas moins vrai que la condition ac
complie a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement
a été conti’acté.
La conséquence de ces observations est simple, et nous
conduit à dire que puisqu’une loi nouvelle a autorisé
à disposer du quart en propriété, et puisque.cette loi
a été émise avant le décès du général d’A yat, c’est-àdire, avant que le don mutuel fût ouvert, c’est à la quo
tité fixée par cette loi nouvelle que doit s’étendre une
donation tout à la fois mutuelle et conditionnelle.
Donc la dame d’Ayat a droit au quart en propriété.
M ais, dira-t-on, une donation môme conditionnelle
ne peut être valable, si elle est prohibée par la loi
existante, parce qu’alors il y a incapacité de donner d’un
c ô té , et incapacité de recevoir de l’autre.
Cette objection , qui seroit la plus forte, repose sur
une fausse base.
L a loi du 17 nivôse an 2 ne prononçoit aucune pro-
�C 15 )
hibition , n’établissoit aucune incapacité de donner ni de
recevoir d’un époux à l’autre.
Ce seroit même tomber dons une grande erreur, que
de juger de l’esprit de la législation d’alors , relativement
aux époux, par l’esprit de cette même législation, re
lativement aux successibles, et surtout aux héritiers en
ligne directe.
Un décret du 7 mars 1793 a voit aboli la fa c ilité de
disposer de ses biens en ligne directe.
L ’article 16 de la loi du 17 nivôse an 2, sans pro
noncer de prohibition »positive en ligne collatérale,
n’accordoit cependant la faculté de disposer d’un dixième
ou d’un sixième de ses biens, qu’au profit d’autres que
des successibles.
Mais il n’en étoit pns ainsi entre époux ; le législa
teur leur avoit accordé la plus grande latitude pour les
dons qu’ils voudroient se faire, parce que son but avoit
été de favoriser les mariages.
Seulement il avoit autorisé les enfans, s’il en existoit
à l’instant du décès de l’époux donateur, à faire réduire
les dons à l’usufruit de la rnoité de tous les biens.
.• Voici comment s’exprime l’article 14 de la loi de
nivôse an 2.
« A l ’ égard de tous autres avantages échus et recueillis
a postérieurement ( au 14 juillet 1789 )> ou qu i pour« ront avoir lieu ¿1 l'avenir , soit qu’ils proviennent
« d’institution , dons entre-vifs , ou legs faits par un
« mari à sa fem m e, ou par une femme à son m ari,
« ils obtiendront également leur effet, sauf néanmoins
a leur conversion ou réduction en usufruit de moitié ?
�il6)
« dany le cas où il Y a m o 't des en fa n t, conformément
« à l’article 13 ci-dessus. » ' ' .
On remarque dans cet article deux dispositions dis
tinctes.
La première, qui est absolue , dont l’effet est présent,
et par laquelle les dons même universels sont autorisés
entre mari et femme.
La seconde, hypothétique et éventuelle, qui permet
aux enfans de demander la réduction en usufruit de
moitié.
Ainsi la disposition même universelle n’est pas dé
clarée nulle par la loi ; cette disposition est valable en
elle-même ; seulement elle est susceptible d’être réduite
à l’usufruit, sur la demande des enfans, s’il en existe au
décès du donateur.
; Nous disons, s’il en existe au décès du donateur,
et nous le disons avec la loi elle - m êm e, dans son
article 57.
a L e droit de réclamer le bénéfice de la loi, quant
« aux dispositions qu’elle annulle, n’appartient qu’aux
« héritiers naturels, et à dater seulement dü jou r où
« leur droit est ouvert, sans qu e, jusqu’à cette époque,
«r il y ait lieu à aucune restitution de fruits. »
Les termes de cet article sont aussi clairs que pré
cieux pour la solution de la question qui nous occupe.
L e droit de réclamer le bénéfice de la loi n’appar
tient q u a u x héritiers naturels, et à dater seulement
du jo u r où leur droit est ouvert.
Ainsi les enfans de l’époux donateur ne sont pas
saisis, dès l’instant de la donation, du droit d’en de
mander
�1
mander la réduction en usufruit, ou de la faire annuller
quant à la propriété, ce qui est la.même chose.
Ce droit ne leur est attribué qu’à l’instant où ils
succèdent; s’ils meurent avant l’ouverture de la succes
sion, ils ne trasmettent pas à des héritiers collatéraux
un droit qui ne leur a jamais été acquis, et la dona
tion universelle subsiste quant à la propriété même.
C’est aussi ce dont on n’a jamais douté. Jamais des
héritiers collatéraux n’ont élevé la prétention de faire
réduire à l’usufruit de moitié une donation faite entre
époux, sous l’empire de la loi de nivôse an 2, sous
prétexte qu’il existoit,des enfans à l’époque de l’acte.
Mais pourquoi n’a-t-on pas élevé cette prétention?
Parce qu’on étoit convaincu que la donation étoit
valable en elle-même, qu’elle étoit seulement suscep
tible d’être réduite. Car, si elle avoit été nulle dans
son origine, ab initio , elle n’eût pu devenir valable
ex post f a c t o , par un fait postérieur et étranger au
donateur comme au donataire. On connoît la maxime
« quod initio vitiosum e s t , non potest tracta temporis
.« convaîescere. »
- . Ces observations nous conduisent à une dernière con
séquence.
- Si la donation n’étoit pas nulle dans son origine; si
elle étoit seulement susceptible de réduction en usu
fruit; si le droit de réclamer cette réduction n’a pas été
acquis aux enfans, dès l’instant même de la donation;
si, d’après l’article 57 de la loi de nivôse, ce droit ne
devoit leur être attribué qu’il dater du jo u r où ils deviendroient héritiers, on peut dire qu’ils n’en ont jamais
3
�X 18 )
été saisis, lorsque la succession s’est ouverte sous l’empire
du Gode Napoléon.
En effet, la loi de nivôse an 2 pou voit leur faire
concevoir une espérance , mais ne leur conféroit aucun
droit. Cette loi établissoit une règle dont l’effet étoît
renvoyé au temps de l’ouverture de la succession, et
qui ne pouvoit s’appliquer par conséquent qu’aux suc
cessions ouvertes sous son empire.
Et en vertu de quelle loi des enfans demanderoientils aujourd’hui la réduction à l’usufruit ?
Seroit-ce en vertu d e là loi du 17 nivôse an 2? On
leur répondroit que cette loi n’existe plus, qu’elle a
été abolie par le Code Napoléon.
Seroit-ce en vertu du Code même? On les renverroit
à l’article 1098, qui autorise le don du quart en pro
priété , et à l’article 920, qui n’admet les demandes en
réduction que lorsque les dispositions excèdent la quo
tité disponible.
Remarquons que raisonner ainsi ce n’est pas donner à
la loi nouvelle un effet rétroactif. La loi ne rétroagit que
lorsqu’elle enlève un droit acquis sous l’empire d’une
loi antérieure. Dans la cause, on ne se propose pas d’en
lever à la dame Terreyre un droit qui lui fut acquis;
sa qualité d’héritière ne lui a été attribuée que par le
Code, puisque le général d’Ayat est décédé en 1812:
elle ne peut donc réclamer plus de droit que le Code
Napoléon n’en attache au titre qu’elle reçoit de cette
loi même.
Les principes que nous invoquons sont consignés dans
plusieurs arrêts.
�C
r9 )
• Un premier arrêt de cassation, du i 5 brumaire an 14,
les a appliqués au cas o ù , par une donation faite en
l’an 4^ et déguisée sous la forme d’une vente, un sieur
Bruley avoit disposé de la totalité de ses biens.
- Mais il étoit mort sous l’empire du Gode civil.
Les héritiers du sieur Bruley prétendoient que la
disposition devoit être régie par la loi en vigueur au
temps de l’acte, et en demandoient la nullité.
Celte demande, accueillie en première instance, fut re
jetée par la Cour de Dijon , dont les motifs pourroient
être littéralement opposés aux prétentions de la dame
Terreyre.
En voici quelques fragmens :
« Que la prohibition faite par la loi du 17 nivôse,
« de iminuer la réserve légale des cinq sixièmes des
« biens au profit des héritiers, n’opéroit qu’une nullité
« relative de la partie des libéralités qui excéderoit la
« quotité disponible; que c’est ce qui résulte évidemment
« de l’article 57 de cette loi, qui s’explique ainsi : ¿1 dater
« seulement du jo u r oit leur droit est ouvert ; que la
k loi fait donc dépendre la nullité du cas de l’ouverture
« du droit des héritiers présomptifs ; que c’est donc à
« cette époque qu’elle fixe l’examen de la validité de
« l’acte. D onc, s’il ne s’ouvre pas de droits à leur profit,
ce ou, si Vacte ne blesse pas Vétendue de leurs droits,
« lors du décès , ces héritiers ne sont pas x’ecevables à
« critiquer l’acte.............................; que s’ il s’agissoit de
« la capacité absolue d’ une personne, l’acte seroit ra
te dicalemcnt n u l, pour avoir é té ' fait dans un temps
ce où elle étoit absolument incapable de disposer, comm’o
�«
«
«
k
pendant une interdiction subsistante; mais qu’il en
est autrement de la disponibilité bornée à telle quotilé de biens; qu’à cet égard on ne consulte que le
temps du décès, etc. »
L e pourvoi contre cet arrêt fut rejeté, et l’on re
marque dans les motifs de l’arrêt du rejet ,
Que l’arrêt attaqué, en décidant que les héritiers ne
pouvoient être investis du droit d’attaquer l’acte qu’au
moment du décès de leur auteur, s i ce droit existoit
à celle époque , « et que les demandeurs n’ont pas
« trouvé ce droit dans sa succession, d’après le chan
te getnent de législation, n’a pu violer et n’a pas violé
« l’article énoncé de la loi du 17 nivôse an 2 , qui
« avoit été abrogée pendant la vie du vendeur (1). »
Un autre arrêt de cassation, du 22 août 1810, juge
aussi qu’ une donation en faveur même d’un successible, étoit valable, quoique faite sous l’empire de la
loi de nivôse au 2 , parce que le donateur étoit décédé
sous l’empire de la loi du 4 germinal an 8, qui permettoit de donner aux héritiers naturels.
L ’arrêt cité casse une décision contraire de la Cour
de Rouen.
On lit dans les motifs,
« Que si l’on considère l’acte comme une donation
« déguisée, par l’interposition de la personne du sieur
« Labarbe, devenu depuis le mari de la demoiselle A n -
(1) Voir cet arrêt dans le journal de Denevers, année 1806,
pages 3 9 -4 3 .
�« gélique-Flore Breant, cette donation n'auroit été que
« réductible ;
« Qu’en effet, la loi du 17 nivôse an 2 n’établissoit
« pas une incapacité absolue dans la personne d’un suc« cessible, mais annulloit seulement, pour le maintien
« de l’égalité , l’avantage fait à l’un des héritiers au pré« judice des autres;
« Que le droit de ceux-ci n’a pu prendre naissance
« qu’il Vinstant du décès de la dame veuve Sain son ,
« et tel que le J ix o it alors la loi du 4 germinal an 8 ,
« qui ne prononçoit en leur faveur qu’une réserve de
« moitié des biens de la donation, etc. (1) »
Si ces principes sont applicables, même à des dons
faits à des successibles, à l’égard desquels la loi de ni
vôse an 2 n’autorisait aucune disposition, à plus forte
raison sont-ils vrais relativement à des libéralités entre
les époux q u i, d’après cette l o i , pouvoient se faire mu
tuellement des dons universels, sauf la réduction à l’usu
fruit de moitié des biens, s’il y avoit lieu.
Les mêmes principes ont été consacrés par un arrêt
de la Cour impériale de Riom , rendu le 29 janvier
dernier ; en voici l’espèce :
Par un contrat de mariage, du 13 fructidor an 10 ,
les père et mère de la demoiselle l’Espinat lui avoient
fait une donation entre-vifs, et par préciput, du huitième
de leurs biens présens, e( en outre ils l’avoient instituée
héritière d’une semblable portion dans leurs biens à
(1)
Voir cet arrêt dans le journal de Denevers, année 1810,
pages 439— 441.
�venir, même ¿tune plus grande quotité tant desdits
biens présens qu'à v en ir, si les lois existantes lors de
îouverture de leurs successions, leur permettaient une
disposition plus ample.
La mère est décédée le 30 messidor an 12 , sons l’em
pire du Code.
'
L a demoiselle l’Espinat et le sieur Clary, son mari,
ont réclamé dans les biens de la mère le quart en préciput, quotité disponible fixée par le Code.
Cette demande a été contestée par les mêmes moyens
qu’invoque la dame Terreyre, et l’on a soutenu que la
quotité de la disposition de voit être réglée par la loi
en vigueur au temps du contrat. C’étoit la loi du 4
germinal an 8 , qui ne permettoit de donner qu’une por
tion d’enfant, un huitième.
L e tribunal civil d’Aurillac a accordé le quart, et la
Cour a confirmé cette décision, dont elle a même adopté
les motifs. En voici le texte :
« Attendu que les contrats de mariage sont suscep« tibles de toutes les clauses qui ne sont point contraires
« ni aux lois ni aux bonnes mœurs ; que la disposition
« portée au contrat de mariage de madame Clary n’a
« rien que la loi réprouve, puisque madame de Boussac,
a sa mère, ne l’a instituée que de ce dont la loi exis
te tante lors de son décès lui perinettroit de disposer;
« qu’ une pareille disposition ne porte aucun préjudice
« aux autres enfans, qui rCont droit qu'aux réserves
« que la loi du décès leur assure, réserves auxquelles
« il n’est pas porté la moindre atteinte par l’institution
a dont il s’agit, et que la jurisprudence ne donne même
�ô û l
«
«
«
«
«
•t*3 )
.............
aux puînés d’action pour attaquer les libéralités faites
sous la forme de ventes ou d’obligations déguisées,
que jusqu’à concurrence seulement des atteintes que
ces actes peuvent porter aux réserves que fait eu leur
faveur la loi de l ’ouverture de la succession. »
Tous ces arrêts sont décisifs pour la question. L e der
nier surtout a prononcé sur une clause absolument sem
blable à celle du contrat de mariage de la dame d’Ayat.
Gomment le résultat de la cause actuelle pourroit-il
être différent ?
,
On doit donc en convenir.
La loi du 17 nivôse an 2 n’étoit pas prohibitive, sur
tout entre époux.
.
•
Elle n’établissoit ni incapacité de donner, ni incapa
cité de recevoir.
Les droits de réduction qu’elle attribuoit aux héritiers
ne devoient être ouverts pour ceux-ci qu’au jour de l’ou
verture de la succession.
Ce droit n’a jamais été ouvert pour la dame Terreyre,
parce que la loi du 17 nivôse an 2. étoit abolie à l’ins
tant du décès du général d’Ayat.
L e Code Napoléon seul doit régir une succession ou
verte sous son empire.
Seul il doit déterminer la quotité réservée à la dame
Terreyre; et par conséquent le quart des biens du gé
n é ra l, portion disponible fixée par le Code, appartient
à la dame d’Ayat.
Il nous reste a prouver que ce quart doit être pris
sur la totalité des biens, sans aucun prélèvement.
*oí
�C H
)
§. I I .
L e quart doit être pris sur la totalité des biens,
sans aucun prélèvement.
La dame Terreyre veut prélever sur la masse de la
succession de son père une somme de 8o,ooo fi\, fonds
du douaire, et prétend que ce n’est que sur le reste des
Liens que la dame d’Ayat doit obtenir l’usufruit de
moitié ou la propriété du quart.
Pour justifier sa prétention, la dame Terreyre dit que
le douaire est une donation, et qu’une donation n’est
pas sujette à rapport, excepté entre cohéritiers.
L ’objection renferme une double erreur.
L e douaire n’est pas une donation.
Fût-il même considéré comme donation, il n’en devroit pas moins être rapporté , au moins fictivement,
pour servir à former la masse des biens, et à calculer
la quotité disponible.
L e douaire n’est pas une donation.
Tous les auteurs reconnoissent cette vérité ; la nature
du douaire et son objet ne permettent pas de l’assimiler
aux donations.
Pothier notamment, dont la dame Terreyre a invoqué
l ’opinion, s’exprime ainsi en parlant du douaire des
enfans (i) :
(i) Voir le Traité du d o u a ire,« 0. 292.
�( 2 5 }
« Ce douaire, de même que celui de la femme, n’est
« pas regardé comme une donation que l’homme fasse
« aux enfans qui naîtront de son mariage. »
L ’auteur conclut de cette proposition que le douaire
n’est pas sujet à l’insinuation , ni même au retranche
ment , pour la légitime des autres enfans.
Cet auteur s’occupe plus particulièrement de la nature
du douaire, dans d’autres parties de son ouvrage, et il
le définit ,
’ « Une dette qui procède de l’obligation que les coû
te tûmes imposent à tout homme qui se marie, d’as« surer, sur les biens qu’il a en se mariant, aux en« fans qui naîtront du mariage, de quoi leur fo rm er
« un patrim oine.............
« XJne espèce de légitime que la loi ou la conven
te tion du contrat de mariage assure, dans les biens de
« l’homme qui se marie, aux enfans qui naîtront du
« mariage, pour pourvoir à leur établissement (i). »
Ferrières, sur la coutume de P aris, Lebrun , dans son
Traité des successions (2), disent aussi que le douaire est
accordé aux enfans pour leur tenir lieu de légitime et
d'alimens.
Le douaire pouvoit d’autant moins être considéré
comme une donation ordinaire, sous l’empire de la cou
tume de Paris, que la loi l’accordoit lorsque la conven
tion ne l’attribuoit pas.
( 1 ) V o ir ie m êm e T ra ité, nos. 6 et agS.
(2) Voyez Ferrières, sur l’article 252 de Paris, n°. 2, et Lebrun,
Traité des successions,'liv. 3 , cliap. 6 , n°. 28.
4
�(26)
D ’après les articles 247 et 248 de cette coutume, la
femme avoit un douaire coutumier quand on ne lui
fixoit pas un douaire conventionnel-, et d’après les ar
ticles 249 et 2 55 , le fonds du douaire coutumier ou
préfix étoit propre aux enfans nés du mariage.
Mais comme la loi ou la convention n’a voit eu
pour but que d’assurer aux enfans un patrim oine, une
espèce de légitim e, des ali m ens, pris sur les biens du
p ère, le douaire cessoit ou se restreignoit lorsque les
enfans devenoient les héritiers du père, ou lorsqu’ils
recevoient de lui des dons qui pouvoient leur fournir
tout ou partie du patrimoine qui leur avoit été des~
tiné par le douaire.
D e là les règles écrites dans les articles 25o , 25 i et
2.52 de la coutume de Paris.
L ’article 25 o n’accorde le douaire qu’aux enfans qui
s’abstiennent de prendre la succession de leur père.
« Si les enfans venant dudit mariage, dit cet article y
« ne se portent héritiers de leur père, et s’abstiennent
k de prendre sa succession, en ce c a s , ledit douaire
« appartient auxdits enfans, purement et simplement,
a sans payer aucunes dettes procédant du fait de leur
« p è r e , créées depuis ledit m ariage, et se partit le
« douaire, soit préfix ou coutum ier, entr’eux,sans droit
« d’aînesse ou prérogative. »
L ’article 261 ajoute :
« Nul ne peut être héritier ou douairier ensemble,
« pour le regard du douaire coutumier et préfix. »
Ces deux articles ne doivent pas se séparer; le second
n’est que le corollaire du premier»
�( 27 )
: L e premier pose le principe ;
L e second renferme la conséquence.
Par le prem ier, le douaire n’est accordé aux enfans
que d’une manière hypothétique et conditionnelle.
Jusqu’au décès du père, le droit des enfans, ou douaire,
n’est qu’informe , et peut avorter ou défaillir, selon
les expressions de M. Pothier.
A u moment du décès, les droits des enfans sont ou
verts; mais alors les enfans ont deux sortes de droits,
entre lesquels ils peuvent choisix*.
Ils peuvent êtx*e héritiei’s ou douairicrs, à leur gréi
S’ils acceptent le titre d’héiùtiers, et les avantages qui
sont attachés à ce titre, leur di'oit au douaire s’efface;
c’est comme si ce droit n’avoit jamais existé pour eux.
La raison en est qu’en acceptant la succession ils
trouvent dans l’hérédité même le patrim oine, la légi
time , les alimens que le douaii-e étoit destiné à leur
fournir; alors le vœu de la loi et l’intention du père
sout remplis ; et ce sei-oit au contraire blesser ce vœu
et cette intention , que d’attribuer aux enfans à la fois;
et le douaire, et l’hérédité, c’est-à-dix*e, deux avantages
dont l’un n’est attribué qu’à la place de l’autre.
S i , au contraire > les enfans s’abstiennent de la suc
cession , alors le cas du douaire se présente : par leur
option ils deviennent douairiers, et ils obtiennent ainsi
les alimens et la légitime que leur pèx*e et la loi avoient
voulu leur assurer.
f
Cette distinction est importante; elle est fondée sur la
nature même du douaire , et elle explique pourquoi
certains auteurs, et notamment Pothier, ont pensé que
4 *
�c
2
8
}
l’enfunt qui avoit accepté la succession sous bénéfice
d’inventaire pouvoit réclamer son douaire.
Remarquons d’abord que Pothier ne parle pas de
l ’héritier pur et simple , et qu’on ne croit pas qu’on
puisse citer aucun auteur qui ait pensé qu’on pût être
à la fois héritier pur et simple, et douairier,
Pothier même suppose que l’héritier bénéficiaire aban
donne tous les biens de la succession ( 1 ) , et il pense
que dans ce cas, comme il ne retient rien absolument,
il a le droit de demander son douaire; il cite même un
arrêt du 4 mars 1750, qui a admis l’enfant à renoncer
ù la succession qu’il avoit d’abord acceptée sous bénéfice
d’inventaire , et à demander le douaire.
F errières, sur l’art. 25 2, n°. 3 , pense que l’héritier
même bénéficiaire ne peut pas ensuite renoncer à cette
qualité, et retourner au douaire ,• cette opinion paroît
plus conforme aux principes, et à la maxime qu i sernel
hœres semper liœres.
Renusson trouve la question très-ardue ( 2 ) ; il l’exa
mine soit relativement aux créanciers, soit relativement
aux cohéritiers, et il se décide en faveur de l’enfant q u i,
selon lui , en rendant compte de la succession , peut
renoncer ¿1 sa qualité d’héritier pour être douairier.
On voit que les auteurs même les plus favorables à
l’enfant , ne l’admettent à réclamer son douaire que
lorsqu’il ne recueille rien dans la succession , et même
lorsquV/ renonce à la qualité d’héritier.
( 1 ) V oyez n°. 35 i.
(2) V oyez Traité du douaire.
�( 29 )
Ainsi l’opinion même de ces auteurs est d’accord avec
la distinction que nous avons faite, et que nous avons
tirée de la nature du douaire.
S’ils accordent le douaire à l’enfant, qui d’abord avoit
eu l’imprudence de se porter héritier bénéficiaire, c’est
seulement parce que cet enfant ne trouve pas dans l’héré
dité les alirnens, la légitim e, le patrimoine que devoit
lui procurer le douaire; en sorte que l’enfant est alors
précisément dans le cas pour lequel ce douaire lui avoit
été promis.
Mais dans un cas contraire, et lorsque l’enfant prend
d’une autre manière sur les biens du père ses alimens
et sa légitime, il n’a pas droit au douaire.
C ’est ce dont on se convaincra de plus en p lu s , en se
fixant sur les termes de l’art. 2Ô2 de la coutume de Paris.
Voici comment est conçu cet article :
« Celui qui veut avoir le douaire doit rendre et res« tituer ce qu’il a eu et reçu en mariage, et autres avan« tages de son p è r e , ou moins prendre sur le douaire. »
Les termes de l’article sont précieux.
Il n’est pas dit doit rapporter, mais doit rendre et
restituer............. ou moins prendre sur le douaire.
En sorte que ce n’est pas à titre de rapport que le fils
doit restituer les dons, ou moins prendre sur le douaire,
c’est parce que le douaire devant tenir lieu de légitime
ou d’alimens, il diminue lorsque la légitime et les ali
mens ont été en partie fournis par d’autres avantages.
Et remarquons qu’il est reconnu par tous les auteurs
que cette restitution des avantages ou cette diminution
du douaiic peut être exigée non-seulement par les co-
�( 30 *
héritiers du douairier, mais aussi par les créanciers du
père, postérieurs même, soit au contrat de mariage, soit
aux donations (1).
L eb ru n , en rappelant la règle, observe,
« Que cette incompatibilité du don et du douaire se
« pou voit opposer par des créanciers postérieurs à l’un
« et à l’autre, parce que s’ils ont dû connoître la con« dition de celui avec qui ils contractoient, ils ont aussi
« dû s'attendre au rapport du douaire, qu i est fo n d é
« en COUTUME et dans l ’ i n t e n t i o n du père, qui ne
« doit qu’une fois des alimens à ses enfans, et qu’ils sont
« subrogés à cet égard a u x droits du p ère, pour de« mander ce rapport et cette imputation aux enfans
» douairiers. »
Si le douaire étoit une donation, certainement le
rapport ne pourroit pas en être demandé.
Personne n’ignore que des enfans donataires de leur
père , quoique par plusieurs actes diiférens, n’auroient
à craindre aucune action des créanciers postérieurs.
Ce n’est donc pas sur les principes généraux relatifs
aux rapports en matière de succession, mais sur des
principes particuliers, produits parla nature.du douaire,
qu’est fondée la règle de l’imputation des dons sur le
douaire.
N o u s disons d e Fimputation ,• cette expression est celle
(1)
Voyez Pothier, Traité du douaire, n°. 352 ; Renusson,
même Traité, chap. 6 , n°. 6; Ferrières, sur l’art. 262, n°. 4 ;
Lebrun, Traité des successions, livre 3 , chap. 6 , n°. 28.
�( 3' )
qu’emploie Pothier en traitant la question ; c’est aussi
la plus propre à indiquer la règle.
En effet, c’est moins un rapport que doivent les enfans,
qu’un retranchement qu’ils éprouvent proportionnelle
ment à ce qu’ils ont reçu.
L e douaire, d’après la coutume comme d’après Vin
tention du p è r e , n’étant accordé que pour remplacer
la légitime, doit diminuer ou disparoître, selon que
cette légitime est en partie payée ou totalement rem
plie.
- Il diminue, s i, par des libéralités antérieures à son
décès , le père s’est acquitté en partie de l’obligation que
la loi lui imposoit, en donnant à ses enfans une partie
de son patrimoine..
- Il disparoît, s’il laisse à ses enfans sa succession , et
que ceux-ci l’acceptant trouvent par là dans l’hérédité
la légitime, le patrimoine que le douaire leur assuroit.
En un mot, le père et la coutume ne promettoient aux
enfans que le douaire. Ce douaire devoit leur tenir lieu
de tout patrimoine, et les enfans, à l’ouverture de la
succession du père, devoient, ou se contenter du douaire,
ou y renoncer pour prendre l’hérédité; mais ils ne pouvoient avoir l’un et l’autre avantage : et se porter héri
tiers, c’étoit ne pas vouloir être douairiers.
C ’est donc bien vainement que la dame Terreyre ré
clame le prélèvement du douaire, et se plaint qu’on
veuille la soumettre au rapport de cet avantage.
Elle n’a pas de douaire à prélever; car son droit
au douaire ne devoit s’ouvrir qu’au décès de son
�¿to i
C 32 "J
père (1) ; et puisqu’elle a accepté l’h érédité, elle n’a
jamais été saisie de ce droit : par la même raison, on
n’a point de rapport à lui demander.
Si l’on pouvoit, au reste, considérer le douaii’e comme
une donation ; si l’on pouvoit supposer que la dame
Terrej^re en a été saisie, et que l’acceptation de l’héré
dité n’a pas fait disparoître son droit, il seroit facile de
démontrer qu’elle en doit le rapport, au moins fictif,
pour servir à fixer sur la masse entière des biens la va
leur de la portion disponible.
r L e sieur d’Ayat a donné à son épouse la quotité dis
ponible établie par le Code.
Cette quotité étoit-elle du quart de la totalité des
biens ? Telle est la question.
Pour la résoudre, examinons si le quart de la tota
lité seroit ou non sujet à réduction.
Mais comment doit se former la masse pour déter
miner la réduction ?
L ’article 922 du Code nous l’apprend.
« La réduction se détermine, dit cet article, en for« mant une masse de tous les biens existans au décès
« du donateur ou du testateur; on y réunit fictivement
a ceux dont il a été disposé par donation entre-vifs,
« d’après leur état à l’époque de la donation, et leur
a valeur au temps du deces du donateur; on calcule sur
« tous ces biens, après en avoir déduit les dettes, quelle
(1) V o yez Potliier , Traité du d ou aire, n°. 332.
« est,
�(33 )
« est,: eu égard*à la qualité des héritiers qu’il laisse,
« la quotité dont il a pu disposer. »
Ainsi les biens donnés doivent être réunis au x biens
existans au décès, pour calculer la quotité disponible.
L ’article 921 déclare que « la réduction des disposi« tionç entre-vifs, ne pourra être demandée que par
« ceux au profit desquels la lo if a it la réserve. »
Il ajoute que les donataires, les légataires, les créan
ciers ne pourront demander cette réduction, n i en profiter.
Mais la loi ne fait de réserve qu’au profit des enfans
qui déjà n’ont pas reçu sur les biens de leur père une por
tion de ce que le législateur a voulu qu’on leur attribuât
L ’enfant donataire ne peut demander la réserve; il
ne peut même en profiter, si ce 11’est jusqu’à la concur
rence de ce qui lui manque, dans l’objet donné, pour
atteindre la valeur de la quotité réservée.
S i, pour la preuve de cette vérité, il étoit nécessaire
d’invoquer des autorités, on pourroit en citer de nom
breuses et des plus respectables.
La réserve légale est aujourd’hui ce qu’étoit autrefois
la légitime; et personne n’ignore que l’enfant légitimaire
étoit obligé , même à l’égard d’un héritier ou d’un
donataire étranger, d’imputer sur sa légitime tout ce
qu’il avoit reçu du défunt.
M . le procureur général Grenier traite cette question
ex professo, dans son excellent ouvrage sur les dona
tions et testamens; il la traite relativement à la réserve
établie par le Gode; il est de l’avis de l’imputation des
dons antérieurs au décès : il s’appuie de l’opinion d’un
grand nombre d’auteurs anciens, et il remarque qu’il
n'est pas un auteur, au moins de sa connaissance, ,
3Ȇ
Ht
�...................................
(
34 )
qui ait professé une doctrine différénie. Ori ne saüroit
mieux faire que de renvoyer à une dissertation aussi
lumineuse que profonde (i).
• D ’après l’article 1098 du Code Napoléon, le général
d’Ayat pouvoit disposer en faveur de sa seconde épouse,
d’une portion d’enfant le moins prenant , sans que ce
pendant la disposition pût excéder le quart des biens.
La dame Terreyre est l’unique enfant : la dame d’Ayat
doit donc avoir le quart des biens ; en sorte que la ré
serve légale pour la dame Terreyre est des trois quarts.
Remarquons même que la loi se sert de cette expres
sion générale, le quart des biens; expression qui indique
que les biens entiers doivent servir à l’attribution du
quart, et qui ne permet pas d’accorder à la dame Terreyre
le prélèvement qu’elle demande.
A u reste, il suffit qu’elle n’ait droit qu’à la réserve
légale, pour qu’elle doive imputer sur cette réserve tous
les dons qui lui ont été faits; car le père, en respectant
cette réserve, avoit le droit de disposer de tout le surplus
de ses biens.
M . Grenier a examiné aussi la question relativement
à une donation faite par un époux à une épouse en se
condes noces (2). Il observe avec beaucoup de raison
qu’il s’agit moins, dans des cas semblables, d’une ques
tion de rapport, que d’une question de réduction ou de
retranchement, puisque le rapport fait par l’enfant n’est
pas r é e l, mais seulement fictif. Il pense que les enfans
(1) Voyez Traité des donations et des testamens, n°. 5g5 et
suivans , deuxième édition, in-/?. , tome 2 , page 53i.
(2) Voyez le môme Traité» n05. 499 et 5oo, tom. 2, p. 167.
�doivent rapporter à -la succession de leur père tout ce
qu’ils ont reçu de l u i , afin de mettre à portée de cal
culer ce que le second époux peut demander,■et il cite
un arrêt du 2 avril 1683.
Cet arrêt ( 1 ) a décidé eu effet que des enfans d’un
premier lit étoient obligés de rapporter ce que leur mère
leur avoit donné avant son second mariage , ou de
moins prendre dans le partage de sa succession avec le
second mari, donataire.
L a même, question/a été jugée depuis le C od e, par
la Cour impériale de Paris, par un arrêt du 20 février
1809 , que cite M . Pailliet (2) dans une note sur l’ar
ticle 1098.
A in s i, considéré comme donation, le douaire seroit
sujet à un rapport au moins fictif.
Nous disons f i c t i f , parce que ce rapport n’auroit pas
pour but d’enlever à la dame Terreyre la moindre partie
des 80,000 francs donnés, mais seulement de servir au
calcul de la valeur du quart disponible, quart qui seroit
ensuite payé aux dépens des biens libres.
Quel que soit donc le caractère que l’on suppose au
douaire, le résultat sera le m êm e, et la dame d’A yat
aura toujours le quart de la totalité des biens du général.
Mais un douaire n’est pas une donation ; ce n’est qu’un
avantage conditionnel, accordé seulement pour le cas où
l’on ne seroit pas héritier, et qui disparoît dès l’instant
où l’hérédité est acceptée.
( 1 ) Voyez-le au Journal des audiences, tome 3 , page 682.
(2)
Voyez la seconde édition du Manuel du droit français,
par M. Pailliet, avocat.
�La dame Terreyre est héritière ;
Elle n'est donc pas douairière,
E t par conséquent il ne peut être question du pré
lèvement des 80,000 francs.
La discussion à laquelle nous nous sommes livrés s’appliqueroit aussi au cas où la quotité disponible seroit
seulement de l’usufruit de moitié des biens, au lieu d’être
de la propriété du quart.
Mais cette question que nous avons examinée la pre
mière, n’est pas plus douteuse que l’autre.
C ’est la loi du décès qui seule doit régir la succession
ouverte sous son empire;
C ’est elle qui a fixé les droits de l’héritière naturelle ;
C ’est elle par conséquent qui doit régler la quotité
disponible, avec d’autant plus de raison, que la loi
de nivôse an 2 ne prononçoit aucune prohibition absolue,
et n’établissoit entre époux aucune incapacité de donner
ni de recevoir.
Donataire de tout ce dont la loi en vigueur au temps
du décès du donateur a permis de disposer , la dame
d’Ayat réclame le quart; elle en a le droit ; et c’est elle
surtout qui ne doit pas les moindres sacrifices à ceux
qui ont cru pouvoir se dispenser à son égard même des
moindres ménagemens.
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. R O U H E R , licencié avoué.
A R IO M , de l’imp. de TH IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
ru e des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1813.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Kempfer de Plobsheim, Charlotte-Joséphine. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Rouher
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Charlotte-Joséphine Kempfer de Plobsheim, veuve, en premières noces de M. le comte de la maison régnante de Sayn et Wittgenstein-Berlembourg, et en secondes noces de M. Louis-Charles-Antoine Lors de Beaufranchet d'Ayat, général de brigade, Inspecteur général des haras de l'Empire, demanderesse ; contre M. Denis Terreyre, général de brigade, baron de l'Empire, l'un des Commandans de la légion d'honneur ; et dame Anne-Pauline-Victoire de Beaufranchet d'Ayat, son épouse, autorisée en justice, défendeurs.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2209
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
BCU_Factums_G2212
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53438/BCU_Factums_G2209.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
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PDF Text
Text
M. D e n i s T E R R E Y R E , Général de brigade ,
~ Baron de l'Em pire, l'un des Commandans
de la Légion d’honneur , et dame A nneP a u l i n e - V i c t o i r e LO RS DE BEA U F R A N C H E T - D’A Y A T, son épouse, au
torisée en justice, défendeurs;
CONTRE
Dame J o s é p h i n e K E M P F E R D E P L O B S H E I M , veuve en premières noces , de
Georges
Huet
Berlem bourg
•
de
, et
Seign -W ittgn estein -
en secondes noces de
Louis-Charles-Antoine
L
o rs d e B e a u f r a n -
, Général de brigade , In s
pecteur général des haras de l'Empire ,
demanderesse.
ch e t-d A ya t
^
�( 2)
Q U E S T IO N S .
i°. L es dispositions entre époux, stipulées en con
trat de m ariage, doivent-elles se régler par la loi en
vigueur à Vépoque du contrat, ou par la lo i existante
à Vouverture de la succession de Vépoux prédécédé?
2°. Une fille , unique héritière de son père, peut-elle
prendre tout à la fo is les biens de îhérédité et le douaire
préjix q u i lu i est propre; ou , en d’autres termes, pe«/elle être douairière et héritière ?
JVîX a d a m e T e r r e y r e , fille unique du général d’Ayat,
n’a point à se reprocher un premier acte d’hostilité envers
la seconde femme de son père; c’est elle qui la provoque
par une demande exagérée qui a suivi de près la mort
du sieur d’Ayat.
Madame Terreyre ne doit à une seconde femme aucuns
sacrifices d’intérêt; elle n’est pas tenue aux mêmes égards,
à la même déférence qu’elle doit à sa m ère, pour qui
elle conserve toute la tendresse, tout le respect d’une
fille bien née : mais il suffisoit que la dame Kempfer
fût légalement la veuve du général d’A yat, pour que
sa fille désirât terminer aimablement toutes discussions.
Elle n’a pu y parvenir; elle est traduite en jugement,
et la défense est de droit naturel.
. L ’héritière du sang doit compter sur la faveur des
magistrats, lorsqu’elle défend son patrimoine contre
�l’ambition et la cupidité d’une seconde femme, qui a
trouvé le moyen de s’approprier une partie de la for
tune de son m a ri, que la nature et la loi destinoient à
sa fille unique. Mais madame Terreyre ne prétend à
aucune faveur ; elle demande justice , et se flatte de
démontrer que la'dame Kempfer est mal fondée dans ses
prétentions.
»
*
F A I T S .
L e sieur Beaufranchet-d’A yat contracta mariage avec
dame Elisabeth Guyot de Mongran , le 2 août 1783.
Il fut stipulé entre les époux une communauté conju
gale dans laquelle chacun devoit confondre une somme
de 30,000 francs.
Il est dit que le sieur de Beaufranchet se marie avec
les droits à lui appartenans, qui consistent i°. dans la
somme de 100,000 francs dont il lui a été fait donation
par un sieur abbé V an ier, lors du contrat de mariage
de la dame sa mère , et sous la charge de l’usufruit au
profit de cette dernière;
2°. Dans ce qui peut lui revenir, soit dans les biens
de la succession de son père, à raison des 40,000 francs,
fonds de douaire constitué par le sieur d’Ayat père à
la dame son épouse, et stipulé propre aux enfans du
mariage , soit dans les biens de la succession de son
aïeul.
La dame le Normand, mère du sieur d’A yat, lui cons
titue, en avancement de sa succession, 5 ,000 francs de
rente, au capital de 100,000 francs, qui lui appartiennent
1 *
�w
x
. •
( 4■
;
légitirnexiieut'idahs les 10,000 francs rde rente sur les se
crétaires du ro i, constitués par le contrat énoncé et daté.
La mère constitue, en outre, une somme cle 100,000 f r . ,
dont elle se réserve l’usufruit. ; t..ÀL .
t-uü v;
« Par une clause) expresse, portée en l’article 8 de ce
contrat, «.Je sieur d’A y a t constitue à son épouse une
« somme de 4,000 francs de rente de douaire préfix,
« dans le cas o ù , lors de la dissolution du mariage, il
cc y auroit des enfans vivans issus d’icelui; le fonds au
« denier vingt duquel douaire sera propre auxdits en« f a n s et aux leurs, de leur côté et ligne. »
Ces conventions sont les seules utiles à rappeler.
Il est né de ce mariage deux enfans; un iils, et une
fille qui est la dame Terreyre. Le 29 prairial an 2 , le di
vorce a été prononcé entre les époux, pour cause d’in
compatibilité d’humeur et de caractère. '
, L e 4 pluviôse an 3 , il y eut transaction entre les époux
divorcés; les droits de la dame Mongran furent liqui
dés et réglés; elle renonça à la,communauté conjugale;
il fut convenu que l’enfant mâle seroit à la charge du père,
et que la fille seroit remise à sa mère. Depuis, l’enfant
mâle est décédé.
,
'
L e 19 brumaire an 4 , sous l’empire de la loi du 17
nivôse an 2 , il y a eu un second contrat de mariage entre
le général d’A y a t, divorcé d'avec la dame G uyot-M ongrau, et avec laquelle il a liquide les droits ¿1 elle ap
partenait s , et Charlotte-Josépliine Kempfer, veuve de
Georges H uet, « ayant trois enfans de son mariage
.« avec le défunt, pour lesquels, comme leur tutrice lio« notaire et spécialement autorisée, elle a renoncé, cou-
x
�( 5 )
« jointement avec les tuteurs onéraires, à la succession
« de leur père, quant aux biens situés sur le territoire
« de la France, pour quoi elle n’est tenue à aucun compte
«^de tutelle. »
Les époux excluent le régime de la communauté;
« ils doivent jouir, à part et divisément, de leurs biens
« et revenus, à l’effet de quoi, la future demeure au« torisée à r é g ir , gouverner et administrer ses bieos
« et revenus, jouir, faire et disposer de son mobilier;
« en un mot, elle reçoit le pouvoir le plus étendu pour
« l’administration et la disposition de ses biens, et le
« futur promet avoir le tout pour agréable.
« Le futur a doué et doue la future de 3,000 francs
« de rente nette, et sans retenue, de douaire préfix, dont
« elle aura droit à compter du jour que ce douaire doit
« avoir lieu, sans être tenue d’en former demande en jusc< tice; le fonds duquel douaire sera propre aux enfans
'a à naître du futur mariage. »
Cependant, et nonobstant le douaire ci-dessus constitué,
le général d’Ayat se réserve la faculté de vendre tout
ou partie des immeubles qu’il possède, sans pouvoir être
inquiété ni recherché par les acquéreurs, pour raison de
ce douaire.
« Le survivant des deux époux doit prendre, h titre
« de gain de survie, sur les biens les plus clairs et les
« plus appareils du premier décédé, jusqu’à concurence
« de la somme de 5o,ooo francs, soit en deniers comp
te tans, soit en meubles et effets, suivant la prisée de
« l’inventaire et sans crue, soit sur les autres objets déte penduns de la succession, ainsi que le survivant avisera.
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( 6 )
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« Les meubles et effets mobiliers qui se trouveront
dans les maisons appartenantes à l’un ou à l’autre des
futurs époux , seront et appartiendront à celui des
deux auxquels la maison dans laquelle se trouvent les
objets mobiliers appartiendra. »
II n’y a d’excepté que « les habits, linges, hardes et
autres effets, par leur nature emportant l’usage particulier de celui des époux qui ne sera pas propriétaire de la maison ; le tout sans qu’il soit besoin, par
celui des futurs à qui appartiendra la maison, de
justifier d’aucunes quittances.
« L e loyer des lieux qui seront habités conjointement
par les futurs époux, seront payés chacun par moitié;
les baux en seront passés au nom de l’un et l’autre;
les meubles et effets mobiliers qui les garnissent, seront achetés et payés aussi chacun pour m oitié, sans
qu'il soit besoin, par les futurs, de justifier d’aucunes
quittances respectives ; pour q u o i, en cas de décès de
l’un ou de l’autre, les meubles et effets mobiliers seront partagés entre le survivant et les héritiers du
premier décédé, par m oitié, à l’exception néanmoins
des objets tels que linge de corps, de ménage, vêtemens , hardes , bijoux , argenterie, q u i , par leur nature, indiqueroient l’usage personnel de l’un des futurs,
ou porteroient son chiffre ou marque particulière; tous
lesquels effets derniers énoncés, appartiendront, d’après la marque ou indication, soit à l’époux survivant , soit aux héritiers du prédécédé.
« Dans le cas où l’un des époux auroit acquis seul
aucun effet mobilier- étant dans l’habitation coinl
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mune, et q u i, par sa nature, n’indiqueroit aucun
usage particulier, il lui appartiendra, en justifiant
par lui de quittances, soit par-devant notaires, soit
sous signature p rivée, de la part des ouvriers et fournisseurs qui auront vendu et livré l’effet mobilier par
lui réclamé.
« Le survivant des époux a la faculté de garder tout
ou partie des effets mobiliers garnissant leur habitation commune, suivant la prisée de l’inventaire, et
sans cru e, sauf à imputer le montant des effets mobiliers sur l’effet de la donation qui va être ci-après
faite, et qu’on va littéralement transcrire.
« Les futurs époux, voulant se donner des preuves
de leur amitié réciproque, se f o n t , par ces présentes ,
donation m utuelle, p u re, simple et entre-vifs, l’un
à l’autre et au survivant d’e u x, et acceptée respectivement par le survivant, de tout ce dont la loi leur
permet de disposer en faveur l’un de l’autre, au jour du
décès du premier mourant, ayant enfans d’un prê
mier mariage, ou de tout ce dont la loi leur pér
mettra de disposer aussi en fa v e u r l’un de Vautre,
au jo u r du décès du premier m ouran t, dans le cas
oü la loi donneroit plus de latitude à ces sortes
de dispositions, p ou r, par le survivant des futurs,
en jouir à compter du décès du premier mourant, sui
vant et aux termes de la lo i, sans être néanmoins
tenu de donner a u c u n e ca u tio n , et seulement à la
charge de faire faire fidèle inventaire des biens du
prédécédé.
« Dans le cas o ù , au jour du décès du premier mou-
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( 8 )
rant, les époux ne laisseroient aucun' enfant, soit du
précédent, soit du futur mariage , les futurs époux se
fout donation, toujours acceptée respectivement, de
tous les biens meubles et immeubles qui se trouveront appartenir au premier mourant d’eux , au jour
de son décès, h quelque somme qu’ils se trouvent
monter, et en quelques lieux qu’ils se trouvent dûs
ou situés, pour par le survivant jouir, faire et disposer
du tout en toute propriété, et comme de chose à lui
appartenante, à compter du décès du premier mouran t. »
•
:>
Telles sont les principales conventions de ce mariage.
Comme elles sont en général insolites , il étoit difficile
de les analiser plus brièvement. Les amis .du général,
qui en eurent connoissance, remarquèrent qu’il n’avoit
pu résister à la séduction, et lui reprochoieut d’avoir
oublié les deux enfans qu’il avoit encore à ce moment,
d’avoir même donné plus qu’il n’a v o it, en constituant
un douaire au capital de 60,000 f r . , un gain de survie
de 5o,ooo fr. au profit de sa femme , et en outre une
donation mutuelle, qu’il étendoit à tout ce que les lois
présentes et futures pourroient permettre de plus libéral.
On observoit encore que ces clauses multipliées, re
lativement au mobilier, étoient autant d’avantages in
directs au profit d’une seconde femme. Mais la dame
Terreyre doit garder le silence ; elle ne s’écartera jamais
du respect qu’elle doit a la mémoire de son père. Ce
n’est pas à elle qu’il appartient de blâmer sa conduite.
Elle n’avoit rien fait qui dût. lui faire perdre sa ten
dresse : s’il fut entraîné par les charmes d’uu nouveau
lien ,
�2JÔ
( 9 )
lien, la loi vient au secours de l ’enfant du premier lit,
pour arrêter la main prodigue d’un p è r e , d’un époux
trop généreux, qui s’oublie ou s’égare dans les bras d’une»
seconde femme.
Cependant il paroît que le général d’Ayat n’a pas
exécuté littéralement les conventions du contrat de ma
riage, relativement aux baux à loyer, qui devoient être
passés au profit des deux époux. Il avoit un loyer à
Paris : deux baux sont rapportés; l’un, du premier no
vembre 1806, pour trois, six ou neuf années; un se
cond, du premier nivôse an 13 , pour vingt et un mois :
dans ces deux baux le général d’Ayat y figure exclusi
vement ; la dame Kempfer n’y est pour rien.
La défenderesse s’est mariée avec M . le baron Terreyre,
le I er. octobre 1810. L e général d’A y a t , son p ère,
lui a cédé en toute propriété, et à titre d’avancement
d’h oirie, i ° . une rente de 600 fr. par a n , à prendre
et avoir dans celle de 1,360 fr. de rente perpétuelle,
inscrite à son profit au grand livre de la dette publique,
et 2°. le tiers d’une somme de 100,000 fr. de principal,
exigible au décès de la dame douairière le N orm and,
aïeule paternelle de la dame T e r re y r e , affectée sur la
terre Soisy-sous-Etiolle, près Corbeil. Mais comme la
dame le Normand en a la jouissance viagère, le sieur
de Beaufranchet, pour indemniser sa fille de la nonjouissance du tiers de cette somme, promet et s’engage
d’acquitter à la dame sa fille, annuellement, et à la fin
de chaque année, une rente de i , 5oo f r . , à compter
du jour de la célébration du mariage : la rente doit
se prendre sur la somme de 8,000 fr. d’appointemens
�> ,
i
( 'io )
provenans de la place d’inspecteur général des haras,
pendant aussi long-temps qu’il conservera cette place.
Dans le cas où il viendroit à la perdre, sans en obtenir
d’autre équivalente, la rente de i , 5oo fr. sera réduite
au quart de la pension de retraite qui lui sera allouée
dans la partie des haras.
Cette constitution singulière n’a pas besoin de com
mentaire ; elle prouve la vérité de ce que disoient les
amis du général, qu’il avoit donné à sa seconde femme
plus qu’il n’avoit.
L e général d’Ayat est mort à Vichy-les-Bains, le 2
juillet 1812. Sa veuve requit l’apposition des scellés,
q u i, en effet, furent apposés le 6 du même m ois, au
château d’A y a t , par le juge de paix du canton de SaintGcrvais.
L e 12 juillet 18 12 , il fut procédé à l’inventaire des
effets qui se trouvoient dans l’appartement de V ic h y , où
le-général étoit décédé.
L e i 5 du même mois de juillet, inventaire au châ
teau d’Ayat. Les scellés avoient également été apposés
à Paris, dans l’appartement que le général avoit à titre
de loyer; et le 4 novembre 1812, il a été procédé à
l’inventaire et à la vente des meubles qui s’y trouvoient,
par un commissaire priseur, suivant l’usage.
Ces formalités remplies , la dame Terreyre et son
époux n’avoient qu un seul désir, celui de terminer
amiablement toutes affaires d’intérêt avec la veuve de son
père; mais la dameKempfer s’est pressée d’en venir aux
voies judiciaires.
Quelle étoit cependant sa position? elle devoit plus
�qu’un autre des ménagemens à la fille unique de celui
que la loi lui permet d’appeler son époux ; elle ne pouvoit surtout ignorer que les prodigalités du général se
réduisoient à la quotité permise par l’article 14 de la loi
du 17 nivôse an 2, qui régissoit alors les conventions
matrimoniales; que le général n’avoit pu déroger à son
premier contrat de mariage, au douaire de 4,000 francs
qu’il a voit assuré à la dame Mongran,sa première épouse,
et dont le capital étoit propre aux enfans du premier lit.
Que restoit-il donc à la dame Kempfer? Son douaire,
son gain de survie s’évanouissent; tout se réduit à l’usu
fruit de la moitié des biens laissés par le général, déduc
tion faite des 80,000 francs qui appartiennent à la dame
Terreyre, en vertu du contrat de mariage de sa mère.
Il sembloit donc qu’il n’y avoit pas matière à discus
sion; mais la mère du général est toujours existante; elle
est usufruitière du capital de 100,000 francs, qui com
posent la succession du général d’A y a t, et la dame
Kempfer n’avoit rien à prendre dans ce moment. Elle a
cru sans doute intimider par des prétentions; et le 5
janvier 1813, elle a fait citer au bureau de paix M . et
madame Terreyre; elle expose qu’aux termes de son
contrat de mariage, du 19 brumaire an 4 , les époux se
sont donnés au survivant d’eux , tout ce dont la loi alors
existante leur permettoit de disposer, et même tout ce
dont la loi qui existeroit au décès du p r e m i e r mourant leur
permettroit de disposer en faveur l’un de l’autre ;
Que le sieur Beaufranchet étant décédé sous l’empire
du Gode Napoléon, la disposition devojt être régie par
les règles de ce Code; qu’en conséquence, d’après l’ar-
�( 12 )
ticle 1098 du Code, la dameKempfer a le droit de récla
mer contre l’enfant du premier mariage du sieur d’A yat,
le quart, en toute propriété, de tous les biens de celui-ci ;
Qu’elle auroit en équivalent le droit de demander
ce dont la loi existante au temps du mariage permettait
de disposer, c’est-à-dire, d’un côté, l’usufruit de la moitié
de tous les biens du général d’A y a t, de même que le
dixième en pleine propriété de ses biens, et ce confoi’mément aux articles 14 et 16 de la loi du 17 nivôse
an 2, et à l’article 6 de la loi du 18 pluviôse an 5 ; que
ces droits auraient lieu en sa faveur, indépendamment
de tous autres droits ou reprises qu’elle pourroit avoir
sur la succession de son m ari, résultans , soit de son
contrat de mariage, soit de toutes autres causes qu’elle
se réserve expressément de réclamer lors du partage des
comptes et liquidation à faire entre les copartageans. Mais
elle veut bien se contenter pour le moment du quart en
propriété.
Elle expose encore que les biens immeubles dépen
dons de la succession ne sont pas susceptibles d’être par
tagés commodément, et avec avantage, entre les parties;
elle demande qu’à sa requête, poursuite et diligence,
il soit procédé à la vente sur licitation, et à l’estimation
des immeubles, sur le cahier des charges qui sera a cet
effet déposé au greffe, après que toutes les formalités
prescrites par la loi auront été observées.
L e 11 janvier i 793 > Pr °cès verbal de non-concilia
tion. L e 18 du même mois de janvier, assignation en ce
tribunal, pour être condamné à venir à division et par
tage de tous les biens meubles et immeubles délaissés par
�( 13 )
le général d’A y a t , pour en être attribué un quart en
toute propriété à la demandei’esse ; elle conclut de nou
veau k la licitation-, et en attendant qu’elle soit faite,
elle demande un« provision de 10,000 francs, sous la ré
serve expresse de tous autres droits résultans de son
contrat de mariage.
L e 25 janvier, les sieur et dame Terreyre ont fourni
leurs défenses , et se sont principalement occupés de la
demande en provision ; ils ont rappelé les dispositions
du premier contrat de mariage, contenant une constitu
tion de douaire de 4,000 francs de rente, au principal
de 80,000 francs, propre aux enfans à naître du mariage.
Cet objet appartient à la dame T erreyre, et doit être
prélevé avant tout, indépendamment de toutes disposi
tions libérales du second contrat.
Tous les avantages faits au profit de la seconde femme
doivent se réduire à l’usufruit de la moitié des biens
restés libres entre les mains du général; il ne pouvoit,
aux termes de l’article 14 de la loi du 17 nivôse an 2 ,
donner autre chose que cet usufruit, et tous les avan
tages matrimoniaux se confondent dans cette jouissance
sans pouvoir l’excéder.
L ’article 16 de cette loi ne s’applique pas aux époux
qui ne peuvent rien se donner en propriété, lorsqu’il
y a des enfans du mariage, ou d’une union précédente.
La dame Terreyre donne les mains au partage, sous
cette modification; elle remarque, avec fondement, que
la dame Kempfer, très - opulente, paroît bien pressée
d’obtenir une provision, puisque, lors de sa demande,
il n’y a voit pas six mois que la succession était ouverte,
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\ V i
(H ) '
et que son héritiere n’avoit encore perçu aucunes jouis
sances; elle ne trouve pas qu’il y ait de modestie à de
mander 10,000 francs pour la première fois.
’
La dame Terreyre se plaint que la dame Kempfer ait’
abusé des clauses de son contrat, relativement au mobi
lier, en enlevant celui d’Ayat pour meubler celui de Blot,
dont elle a fait l’acquisition peu de temps avant le décès du
général d’Ayat. Peu importeroit qu’elle l’eût enlevé avant
bu après la mort du général. Dans le premier cas, ce seroit
un avantage frauduleux; dans le second, ce seroit spo
liation, et la dame Kempfer n’en seroit pas moins pourvue
d’un objet dont elle doit rendre compte.
Elle ajoute que les provisions ne sont dues qu’en ligne
directe, entre cohéritiers; que la dame Kempfer n’est
point cohéritière, et qu’enfin toute provision est inutile,
lorsqu’on donne les mains au partage, et que la cause est
en état de recevoir un jugement définitif sur le fond.
Les répliques de la dame Kempfer ne valent pas la
peine d’être analisés; on ne fera mention que de ce qu’il
y a de plus saillant, pour donner une idée de son extrême
sensibilité, et de sa grande modéi'ation.
Elle est lasse cCattendre, et six mois de veuvage lui
paroissent un siècle. Ce que dit la dame Terreyre, res
pectivement au mobilier, est aussi étrange qu'in jurieux,
et rempli de la plus révoltante imposture. Elle fait grâce,
en se bornant au quart des liions; elle pouvoit exiger
l’usufruit de moitié, et un dixième-en propriété. Mais
une donation entre-vifs, portée par contrat de mariage,
n’est qu’un testament, une simple expectative, qui doit
se régir par la loi en vigueur à l’époque de l’ouverture
�( i 5 )
de la succession. La dame Kempfer's'embarrasse fort
peu de ce que contient le contrat de mariage de la dame
de Mongran ; elle ne le connoît ni ne le veut connoître*
La dame Terreyre a accepté la succession de son père;
elle a cessé d'être douairière, conformément aux articles
2Ôo et 2Ôi de la coutume de Paris, qui ne permet pas
de confondre ou de réunir les deux qualités ; ainsi il
faut retrancher le douaire.
Mais reprocher ù la dame Ivempfer d’avoir spolié le
château d’Ayat! n’est-ce pas une véritable calomnie?
L e soi-disant château d 'o y a t étoit une des plus mes
quines gentilhomeries de /’A uvergne, inhabitée depuis
plus de trente ans avant l'époque où les temps forcèrent
la dame d 'A y a t à y venir chercher un asile. L e général
d’A y a t n'a dans aucun temps acquis de meubles ; ce
serait avec les vieilleries vermoulues de ses a ïe u x , que
la dame JLernpfer aurait meublé à la înoderne son
château de B lo t , etc. , etc.
La dame Kempfer adresse ensuite quelques petits
reproches à la dame Terreyre ’ « elle avoit dit à la
« veuve qu’elle avoit donné des ordres d’apposer les
« scellés sur les appartenions qu’occupoit le général
« d’Ayat à P a ris, et elle avoit donné des ordres con« traires! les scellés n’y ont pas été apposés de suite;
« la dame Terreyre et son mari eu avoient toutes les
« clefs , entr’autres celle du petit coflre du secrétaire.
« Llle refusa d’aller au mois de septembre à Paris , et
« trouva mauvais que la dame K em pfer y eût envoyé
a sou gendre. »
Il est assez bizarre que la dame Keinpfer se permette
�c'UV
( i 6 )
ces petits reproches, et se gendarme si fort sur le terme
de spoliation ; qu’elle se réserve même de se pourvoir
en réparation d’injures contre la fille de son mari, sur
tout avec son contrat à la main , et son acquisition de
la terre de Blot. Mais ce qui paroîtra plus extraordi
naire, c’est de voir toutes,fes clefs entre les mains du
portier, les scellés apposés le 21 septembre, à la requête
du fondé de pouvoir de la dame K em p fer, l’inven
taire fait bientôt après, ainsi que la vente des meubles,
sur les poursuites et en présence de la veuve, qui n’a
pas eu la témérité de réclamer, ni de se plaindre; et
qu’ensuite, six mois après, elle vienne, en récriminant,
rappeler la clef d’un petit coffre que la dame Terreyre
n’a jamais eue en son pouvoir, puisqu’elle n’est allée
à Paris que lors de la vente des meubles.
Ce n’est là qu’un misérable commérage, qui ne sauroit
atteindre la dame Terreyre ; et personne ne croira que
le général son é p o u x , qui a toujours marché dans la
voie de l’honneur, se soit abaissé jusqu’à ces vils détails.
C’est même beaucoup trop s’en occuper ; et puisque
les sieur et dame Terreyre sont obligés d’entrer en lice
avec une veuve si pressée, mettant de côté la demande
en provision, qui n’est que ridicule, on croit devoir
discuter le fond de la cause, et examiner le mérite des
prétentions de la dame Kempfer.
La défense se divise en deux parties. Dans la première,
on prouvera que la dame Kempfer ne peut obtenir que
l’usufruit de la moitié des biens du général d’A y a t, que
tout se réduit h cette quotité de jouissance, et que son
contrat doit se régler d’après la loi du 17 nivôse an 2.
Dans
�( 17 )
Dans la seconde, on établira que la dame Terreyre a
le droit de réunir et de cumuler les deux qualités de
douairière et d’héritière, dès qu’elle est fille unique ;
que la disposition de la coutume de Paris ne reçoit au
cune application à l’espèce .particulière, et que le rapport
du douaire n’est dû qu’entre cohéritiers.
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,
' uc.'
1
,(
L a dame Kempjer doit être réduite à Vusufruit
de la moitié des biens délaissés par le général
d'Ayat
.
C’est un principe constant qu’une donation entre-vifs
doit se régler par la loi existante à l’époque où elle a
été faite. Il y a cette différence entre une donation et
un testament; c’est que la première a un effet présent,
qu’elle lie les parlies au moment même où elle est faite,
par cela seul qu’elle est irrévocable, tandis que le tes
tament étant ambulatoire et révocable à volonté jus
qu’au décès du disposant, n’a d’effet qu’au moment de
la m o rt, et par conséquent doit se régler par la loi
existante à l’ouverture de la succession. Cette distinction
a été parfaitement établie par le savant Ricard, dans son
Traité des dispositions conditionnelles, et personne n’oseroit entreprendre de contester une vérité aussi généra
lement reconnue.
La dame Kempfer en conviendroit elle-même; mais
elle veut établir une différence entre une donation mu-
3
�. TT1
' '
tuellej’ dont l’effet est renvoyé au décès du premier des
époux , ePune donation entre-vifs qui reçoit son exécu
tion au moment même. Elle pense que ce n’est qu’une
donation à cause de m ort, unJvéritable testament, qui
doit par conséquent se régler par le 1 Code Napoléon’*,
dès que la succession du général d’Aÿat est ouverte sous
l’empire du Code.
Dumoulin, sur l’article 291 d elà coutume de Bour
bonnais, a embrassé une opinion toute contraire; il dis
tingue la disposition de l’exécution : l u donatione sunt
duo dispositio et executio : dispositio vero statun ligat
nec suspenditur , et ab eâ j i t denominatio j ergo non
annuïlatur licet executio habeat tracturn.
L e don mutuel entre époux , dont l’exécution est ren
voyée au, moment du décès, doit-il être considéré comme
une véritable donation entre-vifs ? Voilà ce qu’enseigne
Duplessis, dans sa quarante-septième consultation : « La
« donation mutuelle est une véritable donation entre« v ifs , qui lie les parties au moment même où elle est
« faite; elle en a le principal caractère, qui est l’irrévo« cabilité........... Son exécution, à la vérité, » t remise
« au temps de la mort ; elle ne doit avoir d’effet que
« par le décès d’un des contractans; e t ‘par rapport à
« chacun d’e u x , elle est suspendue par l’incertitude de
« l’événement : mais dans la donation, il y a deux choses
« à considérer, la disposition et l’exécution de l’acte.
« Lorsque la disposition a lié sur-le-champ la liberté
« des parties contractantes, c’est une véritable donation
« entre-vifs, quoique son exécution ait trait à la mort. »
M . Grenier, dans son Traité des donations, tome/2 ,
�iv&
C 19 )
deuxième édition , pages 148 et 149, aux notes, professe
la môme doctrine.
Trois arrêts du parlement de Paris, en date des 14
février 1633, *7 février 1642, et 30jaoût 1675 ( tome 1,
Journal des audiences , et tome 2 du Journal du palais),
ont décidé que la donation mutuelle , loin d’être con
sidérée comme une donation à cause de m ort, devoit
être réputée donation entre-vifs, et comme telle jugée
non réductible ni sujette au retranchement que souffrent
les donations testamentaires. Le motif de ces arrêts est
que le droit étoit acquis dès l’instant de la donation, qui
demeuroit parfaite, absolue et irrévocable au même
moment quelle étoit passée.
Pareille question a été jugée deux fois, et de la même
manière, par la Cour de cassation.
Le premier de ces arrêts est du 18 mai 1812; il est
l’apporté dans Sirey, premier cahier de 1813, page 12
et suiv.; en voici l’espèce. Le 6 ventôse an 6 , mariage
du général W irion avec Marguerite Raclot; les deux
époux se donnent mutuellement tous leurs biens à venir
par une clause ainsi conçue : « Les futurs époux se font
« don mutuel, indéfini et irrévocable, le premier mou« rant nu survivant, de tous les biens généralement
« quelconques que délaissera le premier m ourant, pour
a le second être saisi cCiceux sans qu’il y ait inven
ta taire. »
M ort du général W irio n sans enfans, en 1809: son
père lui survit, et demande le quart de sa succession , en
vertu de la disposition du Code Napoléon; la veuve
conteste, et oppose sa donation.
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3*
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( 20 )
L e père embrasse le même système que la dame
Kempfer. Ce don mutuel nefrappoit que sur des biens à
venir; l’effet en étoit renvoyé à la mort; ce n’étoit qu’un
testament qui devoit se l’égler par la loi de l’ouverture
de la succession. Un jugement du tribunal de la Seine
adjuge la demande du père ; appel en la Cour impériale
de Paris ; arrêt du 6 août 1810, qui infirme et ordonne
l ’exécution pure et simple du don mutuel. L ’arrêt donne
pour motifs que les lois n’ont pas d’effet rétroactif;
que le caractère d’irrévocabilité attaché aux donations
de survie, singulières ou réciproques, stipulées par con
trat de mariage dont elles sont une condition, les cons
titue de véritables donations entre-vifs, qui ne peuvent
être soumises, dans leur exécution, qiCà la loi du contrat.
Il considère enfin que la donation portée au contrat de
mariage du 16 ventôse an 6 , a été faite sous l’empire
de la loi du 17 nivôse de l’an 2 , qui n’attribuoit au
cune réserve héréditaire aux ascendans.
Pourvoi en cassation, où le père renouvelle les mêmes'
moyens de défenses; la veuve lui oppose une foule d’au
torités , et notamment celles qu’on vient de rappeler, et
dont on a vérifié l’exactitude.
« La Cour, attendu que le don mutuel entre époux,
« fait par contrat de mariage, met le donateur dans
« l’incapacité de disposer ultérieurement de ses biens;
« d’où il suit qu’il est irrévocable, et, par une eonsé« quence nécessaire, qu’il doit se régir par la loi du
« temps où il a été f a i t ; que si, par la nature des choses,
« son exécution est purement éventuelle, cette éventua« lité se rattache à l’époque de la disposition, puisque
�«
«
«
«
c’est elle qui constitue le droit du donataire; — que
ce droit étant acquis d’une manière irrévocable, ne
peut être altéré en tout ou en partie, par une législation qui lui est postérieure;
« Que la prohibition de l’effet rétroactif des lois
« est en effet l’une des bases fondamentales de notre lé« gislation , et que ce seroit violer le principe établi par
« l’art. 2 du Code Napoléon, que de faire prévaloir les
« dispositions de ce Code aux lois existantes à l’époque
« de la convention ;
« Attendu que l’art. 9 1 5 du même Code, sur lequel le
« demandeur fonde son ouverture de cassation, n’a disposé
« que pour l’avenir; que cela résulte non-seulement de
« sa combinaison avec l’art. 2 , mais même de ses propres
c< termes, pris dans leur sens littéral; qu’ainsi le don mu
te tuel que se firent les époux W ir io n , par leur contrat
te de mariage du 6 ventôse an 6 , n’a pu recevoir aucune
te atteinte des dispositions de l’article 9 1 5 , qui n’a acquis
te le caractère de loi qu’en l’an 12 ; et que loin de
te violer ledit article, l’arrêt attaqué a fait une juste ap
te plication de l’article 2. Rejette. »
L e second arrêt rapporté dans le même recueil, pre
mier cahier de 18 13, est du 9 juillet 1812.
Le 18 mai 1785, contrat de mariage de Marc-Urbain
Leclerc et de Victoire-Antoinette Maussaire; les époux
se firent un don mutuel de tous biens, aux termes de
la coutume de Paris, sous l’empire de l a q u e l l e ils dé
clarèrent se marier.
Leclerc, à l’époque de son mariage, avoit une fille
�îib
u
( 22 )
naturelle, reconnue par son acte de naissance; elle s’étoit
mariée avec un sieur Abadie , le 23 fructidor an 11.
>
Leclerc meurt le 26 juillet 1809, sous l’empire du Code
Napoléon. La veuve réclame tous les biens du mari, en
vertu de son don mutuel. La fille demande la réserve sur
les biens donnés, aux termes des articles 754 et 757 du
Code Napoléon. Jugement du tribunal de la Seine, qui
affranchit le don mutuel de tout retranchement, sur le
fondement que le don mutuel par contrat de mariage est
une véritabledonation entre-vifs, qui n’est soumise,quant
à son étendue et à ses effets, qu'aux lois existantes à
Vépoque du contrat ; qu’à l’époque du contrat la loi
n’accordoit aucun retranchement en faveur des enfans
naturels.
L e 22 février 1 8 1 1 , arrêt confirmatif de la Cour im
périale de Paris. Pourvoi en cassation, et toujours avec
le même système que le don mutuel, par contrat de
mariage, n’est point une donation entre-vifs, mais une
donation à cause de m ort, soumise au retranchement
et aux réserves, d’après les lois existantes à l’époque du
décès du donateur.
A rrê t, sur les conclusions de M. le procureur général
M erlin, qui rejette, par les mêmes motifs que le précédeat.
Il est donc bien constant quVw don mutuel est une vé
ritable donation entre-vifs, qui lie les parties dans le mo
ment même, à raison de son irrévocabilité, et q u i, par
conséquent, ne peut se régir que par la loi du contrat.
Comment dès-lors la dame Kempfer peut-elle invoquer
�(. 23 )
l’article 1098 du Code Napoléon, lorsque son contrat
a été passé sous la loi du 17 nivôse an 2? ne seroit-ce
pas évidemment donner un effet rétroactif au Code Na
poléon, au préjudice de l’article 2 du même Code? Peu
importe que l’exécution d’une donation entre-vifs soit sus
pendue, qu’elle ne puisse avoir effet qu’à la mort du do
nateur; elle n’en a pas moins un effet présent, en ce qu’elle
met le donateur dans l’impuissance de disposer de ses
Liens à titre gratuit. Ainsi il faut dire, avec Dumoulin
et Ricard, que la donation étant irrévocable, caractère
qui détermine la substance et la qualité de da donation,
doit se régler par la loi existante au moment de la do
nation , et que le moment de l’exécution est absolument
indifférent pour en déterminer la nature et les effets.
L e don mutuel porté par le contrat de mariage n’a
donc d’autre régulateur que la loi du 17 nivôse an 2.
Les lois futures ne pouvoient avoir aucune influence sur
un don mutuel, qui a un effet présent; et rien de plus
inutilè que la clause qui se réfère aux lois à venir.
Il reste à démontrer à la dame Keinpfer qu’elle s’abuse
encore dans sa prétention, en supposant que si la dona
tion doit se régler par la loi du 17 nivôse an 2, elle doit
avoir l’usufruit de m oitié, et le dixième en propriété.
Pour prouver son erreur, il faut rappeler notamment
les articles 13 et 14 de cette même loi. La première partie
de l’article 13 donne aux époux la plus grande latitude
dans leurs bienfaits, lorsqu’ils n’ont pas d’enfans, et la
loi interprétative du 22 ventôse ajoute que c’est une
latitude politique, qui fait assez apercevoir que le sys-
�\W \
( M )
tème restrictif n’est pas pour les libéralités entre ép o u x,
lorsqu’il n’y a pas de descendans.
Mais en même temps , si la loi a voulu laisser aux
époux tous les moyens de se faire des avantages singuliers
ou réciproques, elle a aussi veillé sur le sort des enfans;
et la seconde partie de cet article 13 porte textuellement :
« Néanmoins, s’il y a des enfans de leur union, ou d’un
cc précédent mariage, ces avantages, au cas qu’ils concc sistent en simple jouissance, ne pourront s’élever au
« delà de la moitié du revenu délaissé par l’époux dé« cédé ; et s’ils consistent en des dispositions de propriété,
« soit mobilière , soit immobilière, ils seront restreints
« à Vusufruit des choses qui en seront Vobjet, sans
« q u ils puissent excéder la moitié du revenu de la
« totalité desdits biens. »
Il convient de s’arrêter un instant sur ces dernières
expressions de l’article. A moins de se refuser à l’évi
dence , toutes les libéralités, en cas d’enfans, ne peu
vent jamais excéder la jouissance de la moitié des biens;
et l’époux s u r v iv a n t ou donataire, ne peut, en cas d’enfans,
rien recevoir en propriété ; la loi le borne à un simple
usufruit. Si la donation est faite en propriété, elle est
réduite à la jouissance, et si cette jouissance encore excède
la moitié des revenus ,*elle est réduite à cette moitié.
L ’article 14, qui suit, se référé en entier à l’article 13 ,
en permettant encore aux époux, pour l’aven ir, de se
faire des avantages par quelque acte que ce soit ; il ajoute :
a Sauf néanmoins leur conversion ou réduction en usu« fr u it de m o itié, dans le cas où il y auroit des enfans,
« conformément à Varticle 13 ci-dessus. »
Ce6
�*ÎC K
( 25 )
—
Ces deux articles s’appliquent uniquement et exclusi
vement aux donations faites entre époux. La loi s’oc
cupe ensuite de toutes autres dispositions qu’elle veut
permettre au profit des tiers; elle y met la plus grande
parcimonie, et exclut absolument les successibles, parmi
lesquels elle établit la plus stricte égalité.
Cependant, par l’article 16, elle autorise pour l’avenir
la disposition du dixième de son bien, si on a des hé
ritiers en ligne directe , ou du sixième , si l’on n’a
que des héritiers collatéraux, « au profit d’autres que
« des personnes appelées par la loi au partage des succes« sions. >3
Il est vraiment curieux d’entendre la dame Kempfer
s’appliquer le bénéfice de cet article , et réclamer le
dixième en propriété des biens du général d’A y a t , lors
qu’ il est décidé , par les articles précédens , qu’en cas
d’enfans, tous les gains, tous les avantages se confondent
dans la jouissance de moitié, et ne peuvent l’excéder;
lorsqn’enfin la loi décide que les dons en propriété sont
restreints à l’usufruit des choses qui en sont l'objet.
Comment ne pas voir que l’article 16 ne se rapporte
qu’à des tiers, et non aux époux; à des étrangers, à des
amis , pour laisser des moyens de récompenser le zèle
ou l’affection d’un am i, d’un parent non successible ;
mais que les époux ne sont pour rien dans cette dispo
sition ? Si en effet le général d’Ayat s’étoit contenté de
donner a sa seconde femme le dixième en propriété , le
don seroit réduit à l’usufruit de ce dixième; il a donné
à sa libéralité toute la latitude permise; elle doit donc
4
�( * 6 ) ..............................
aller jusqu’à l’usufruit de m oitié, mais rien au delà.
La dame 'Kempfer invoque , à l’appui de son système,
l’article 6 de la loi du 18 pluviôse an 5 ; et cette dé
couverte n’est pas heureuse. En effet, pour bien entendre
cet article, il faut connoître le précédent, qui s’occupe
des actes de dernière volonté, maintenus par l’article 4.
La loi veut qu e, lorsque ces actes contiennent tout à
la fois des dispositions ù titre universel, et des legs par
ticuliers , les dispositions universelles et les legs parti
culiers soient réduits proportionnellement, et au marc
la livre des valeurs que chacune des dispositions devoient
produire net par les anciennes lois, à celui qui en étoit
l’objet.
Mais par l’article 6 , les avantages entre époux, main
tenus par les articles 13 et 14 de la loi du 17 nivôse
an 2 , sur ¡’universalité des biens de l’auleur de la dis
position , ne s’imputent point sur le sixièm e ou le
dixième déclaré disponible entre toutes les personnes,
par l’article 16 de la même lo i, et n’entrent point en
concurrence avec les autres légataires, dans la distribu
tion au marc la liv re , ordonnée par l’article précédent.
Cela ne veut dire autre chose, sinon que les libéra
lités entre époux ne reçoivent aucun retranchement par
le legs du sixième ou du dixième; qu’il n’y a pas de
concurrence entre les époux donataires et les légataires.
Mais la loi suppose évidemment que les légataires de
cette quotité sont autres que les époux, et ne peuvent
pas être les époux.
Ainsi donc , et en terminant sur celte première partie
�m
( 27 )
de la cause, le don mutuel, porté par le contrat de
mariage du 19 brumaire an 4 , le douaire et le gain de
survie, constitués par le même contrat, se confondent
dans les avantages autorisés par l’article 14 de la loi du 17
nivôse an 2 , et se réduisent à l’usufruit de la moitié des
biens libres qu’a laissés le général d’Ayat lors de son décès.
On dit les biens libres; car il ne faut pas oublier que
le général d’A y a t , par son premier contrat de mariage
avec la dame Mongran, du 2 août 1783, avoit constitué
à sa femme un douaire de 4,000 francs de rente, dont
le principal étoit stipulé propre aux enfans à naître du
mariage. L e général d’Ayat n’a pu déroger à celte dona
tion par des dispositions ultérieures, et son second contrat
ne doit y porter aucune atteinte.
Madame Terreyre, fille unique provenue de ce pre
mier mariage, doit don c, avant tout, prélever cette
somme de 80,000 francs, qui fait le capital du douaire,
et qui lui est propre : elle a justifié de ce contrat, qui
a été communiqué à la demanderesse.
« Mais cette disposition lui est absolument indifférente,
« dit madame Kempfer; elle ne peut en rien changer ses
« droits, ni la position des défendeurs à son égard. La
« dame Terreyre a accepté purement et simplement la
« succession du général son père : dès l’instant qu’elle a
« été héritière, elle a cessé d’être douairière, suivant les
« articles 260 et 2Ôi de la coutume de Paris ; elle ne peut
« pas confondre les deux qualités. C’est donc sans but
« comme sans utilité qu’elle excipe du contrat de sa
« m è r e , qu’elle rappelle une disposition relative à un
4*
tu
�vn.
i
( i8 )
« douaire p ré fix , qu’elle auroit elle-même effacée par
« son propre fait. »
11 faut prouver h la dame Kempfer que madame T erreyre, iille unique, a pu être tout à la fois douairière
et héritière, et que la demanderesse s’iibuse encore dans
sa prétention. C’est la seconde partie de la cause, qui,
comme on vo it, n’est pas la moins importante.
§. I I .
Madame Terreyre, fille unique, a le droit de réunir
les deux qualités de douairière et dhéritière de
son père > et peut prélever le fonds de douaire
avant Vexercice des droits de la seconde femme
.
L ’unique moyen opposé par la dame Kempfer, soit
dans ses répliques, soit dans les consultations qu’elle a
obtenues , est tiré de l’article 2Ôi de la coutume de
Paris, qui porte : « Nul ne peut être héritier et douai« rier ensemble, pour le regard du douaire coutumier
« ou préfix. »
Il en résulte, dit-elle, que d’une manière indéfinie,
généi'ale et absolue, un enfant ne peut jamais en aucun
cas réunir les deux qualités d’héritier et de douairier.
Cette proposition , prise dans un sens aussi absolu,
est une erreur combattue par les.auteurs les plus ac
crédités.
Il faut bien se pénétrer d’abord d’un principe qui
aide à expliquer dans quel sens on doit entendre l’ar-
�( *9 )
ticle 2Ôi de la coutume de Paris. Cette coutume étoit
une coutume d’égalité, o ù , du moins en ligne directe,
les enfans étoient obligés au rapport de tout ce qui leur
avoit été donné par leur père ou mère, lorsqu’ils venoient à leur succession; ils ne pouvoient garder les dons,
legs ou douaire qu’en renonçant à la succession ; on ne
pouvoit être héritier et donataire ( art. 303 et 304). C’est
dans le même esprit que la coutume a d it, article 25 i ,
que nul ne peut être héritier et douairier ensemble. Et
pourquoi, nous dit Dumoulin,,sur l’article 178 de la cou
tume de Senlis, qui a la même disposition que celle de
Paris? Quia débet doarium conferre : arrestum fatn os uni vigilia natalis JDomini 1536.
I/enfant ne peut donc cumuler la qualité de douairier
et d’héritier que parce qu’il doit le rapport du douaire.
A qui ce rapport est-il dû? Il ne peut l’être qu’aux co
héritiers ou aux créanciers , parce que le rapport n’est
dû que dans ce cas. Si donc il n’y a qu’un enfant, et
qu’il n’y ait pas de créanciers, le rapport du douaire n’est
pas d û , l’héritier peut cumuler les deux qualités.
Cette conséquence résulte de l’article 262 de la même
coutume, qui porte « que celui qui veut avoir le douaire,
« doit rendre et restituer ce qu’il a eu et reçu en ma« viage, et autres avantages de son père, ou moins
« prendre sur le douaire. »
Ferrières, sur cet article 2Ô2, n°. 4 , tient « que ce
« rapport est introduit tant en faveur des enfans qu’en
« faveur des créanciers; en faveur des enfans , parce que
« les uns seroientplus avantagés que les autres; ilsseroient
�C 3° )
plus avantagés que ceux qui seroient héritiers, étant
déchargés de toutes dettes et hypothèques.
a La faveur des créanciers oblige aussi à ce rapport;
car un père ayant épuisé ses biens par des donations
faites à ses enfans en avancement d’hoirie, ou pour
les marier, et ayant pour cet effet créé des dettes, les
enfans prenant encore pour leur douaire une grande
partie de ses biens, les créanciers qui certant de damno
vitando, seroient en danger de perdre tout ce qui leur
seroit dû. »
Enfin, n°. 6 , Ferrières donne en maxime que ce rap
port n’a lieu qu’en faveur des enfans, pour conserver
entr’eux l’égalité , et à l’égard des créanciers.
' L ’annotateur de Ferrières ajoute que cet article est
clair, qu’il ne mérite pas d’explication ; ce n’est propre
ment que la suite du précédent. Car, comme le fils ne
peut pas être héritier et douairier, il faut qu’il rapporte
tout ce qu’il a reçu de son p è re , ou qu’il souffre qu’on
en fasse la diminution sur le douaire, parce que tout
ce que le père donne est présumé donné en avance
ment d’hoirie.
. Qu’est-ce en effet que le douaire préfix stipulé propre
aux enfans à naître du mariage? Ce sera, si l’on veut,
une créance établie sur les biens du p è re , mais ce ne
sera pas moins un bienfait exercé par le père, une do
nation en faveur des enfans. O r , le rapport d’un bien
fait, d’une donation, n’a jamais lieu qu’entre héritiers ,
afin d’établir entr’eux l’égalité; car voilà l’unique motif
du rapport. O r , il ne peut utre question d’égalité qu’entre
«
a
'
«
«
«
«
cc
a
«
�2U
( 31 )
héritiers, et jamais entre un enfant, et des étrangers
qui viennent en vertu de dispositions à eux faites. Ces
dispositions sont réputées de droit être bornées à ce
qui reste de lib re, distraction faite des objets donnés,
q u i, par cela m êm e, ne sont plus dans la succession.
La dame Kempfer invoque l’autorité de Pothier ,
Traité du douaire, pour établir qu’en aucun cas, et en
aucune sorte de manière, l’enfant ne peut être tout à
la fois héritier et douairier ; mais elle n’est pas allée
assez lo in , et n’a pas voulu lire ce qu’ajoute P o th ier,
page 439. Elle y auroit vu que si un enfant ne peut
cumuler les deux qualités, c’est parce que le douaire,
comme tous les autres avantages, soit que l’enfant les
tienne du père par des donations, soit qu’il les tienne
du bénéfice de la loi ( le douaire coutumier ) , doivent
être rapportés et conférés.
Il est vrai que Pothier en vient à ne plus supposer
un concours d’enfans, dont l’un seroit douairier, et les
autres non : il dit alors que le douaire étant une dette
de la succession , cet enfant, héritier de son p ère, ne
peut pas être débiteur de lui-même.
M ais, dans ce cas, Pothier suppose le concours de
l’enfant unique douairier , avec les créanciers de la suc
cession , et c’est une suite de ce qu’il avoit dit précé
demment ; car autrement, s’il n’y avoit aucune espèce
de concours de l’enfant douairier , soit avec d’autres en
fans, soit avec des créanciers delà succession, tout ce qu’il
,diroit seroit sans objet, et même absurde : aussi il ex
plique bien vite sa pensée, car il examine de suite si
�l’enfant peut être tout à la fois douairier, et héritier
sous bénéfice d’inventaire. Il distingue alors deux cas ;
celui où l’enfant douairier concourt avec d’autres enfans,
et celui où le concours auroit lieu avec des créanciers
de la succession.
Pour le premier cas, il prononce que l’enfant est tenu
au rapport, parce que l’enfant douairier, quoiqu’ héri
tier sous bénéfice d’inventaire, n’en est pas moins hé
ritier ; en sorte qu’il cumuleroit toujours ces deux qua
lités, ce qui ne se peut pas à l’égard des eufans.
Dans le second cas, l’auteur décide que l’héritier bé
néficiaire peut, vis-à-vis des créanciers, être héritier et
douairier. La raison en est, dit-il, que l’effet du bénéfice
d’inventaire est de conserver à l’héritier qui y a recours
tous les droits et recours qu’il a contre la succession; et
le douaire n’est autre chose qu’une créance.
Ce que Pothier ajoute est important. « A l’égard de
« l’objection qu’on fait, que la coutume dit absolument
« et indistinctement qu’on ne peut être héritier et douai<c n e r 7 je réponds qu’il est dit pareillement qu’aucun ne
« peut être héritier et donataire ,* néanmoins tout le
(t monde convient que cette maxime n’a d’application
« que vis-à-vis les cohéritiers de l’enfant donataire, aux« quels, lorsqu’il est héritier , il doit conférer et rnp« porter tout ce qui lui a été donné__ Pourquoi ne
« dirait-on pas pareillement que la règle n ul ne peut
« être héritier et douairier, n’a d’application que vis« à-vis les cohéritiers du douairier , auxquels l’enfant
« qui se porte héritier doit rapporter et conférer son
douaire,
�( 33 )
« douaire, d’autant que c’est le sens dans lequel l?a en
te tendu Dumoulin en sa note ?
r
En un m ot, quel est le principe) abstraction faite de
l’opinion des auteurs ? C ’est que tout rapport ne peut
avoir lieu qu’entre cohéritiers. Le Code Napoléon nous
a d on n é, sur ce poin t, des règles qui ne font pas droit
nouveau, et confirment les anciens principes. L ’art. 843
dit que tout héritier, môme bénéficiaire, doit l’apporter
à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt; ce qui
s’accorde parfaitement avec la doctrine de Potliier.
L ’article 85 y dit que le rapport n’est dû que par
le cohéritier à son cohéritier,* « il n’est pas dû aux
« légataires ni aux créanciers de la succession. » S i, dans
l’espèce particulière, les créanciers pouvoient prétendre
au rapport du douaire, ce n’est que par le motif qu’en
donne Ferrières, que le p ère, en créant des dettes, les
créanciers seroient en danger de perdre ce qui leur est dû.
Mais la dame Kempfer ne pouvant figurer, ni comme
enfant, ni comme créancière de la succession de son
m ari, ne peut demander un rapport à l’enfant unique
de son mari ; elle doit se borner à exercer ses droits
sur l’usufruit de la moitié des biens laissés par son mari ;
c’est-à-dire, ceux qui restent libres, distraction faite des
objets donnés, qui ne peuvent être dans la succession.
En un mot, il n’y a aucune différence entre la maxime
nul ne peut être donataire et héritier, et celle qu’elle
invoque , nul ne peut être héritier et douairier ,• et
comme la demanderesse n’auroit aucun titre pour de
mander à la dame Terreyre le rapport d’une donation,
�Jft»
s........
.
( 34 )
elle n’a pas plus de droit de lui demander le rapport du
douaire.
Voilà à quoi il faut se réduire; et puisque la dame
Kempfer est lasse d’attendre, il ne s’agit que de pro
noncer sur le fond : la matière est suffisamment disposée
pour recevoir un jugement définitif.
M e. P A G E S , ancien avocat.
M e. S I M O N N E T ,
avoué licencié;
A R IO M de l’im p. de T H IB A U D , im prim . de la C our im périale, et libraire,
ru e des T a u le s, m aison L andriot . — A vril 1813.
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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A name given to the resource
[Factum. Terreyre, Denis. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Simonnet
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour M. Denis Terreyre, Général de brigade, Baron de l'Empire, l'un des Commandans de la Légion d'honneur, et dame Anne-Pauline-Victoire Lors de Beaufranchet-d'Ayat, son épouse, autorisée en justice, défendeurs, contre dame Joséphine Kempfer de Plobsheim, veuve, en premières noces, de Georges Huet de Seign-Wittgenstein-Berlembourg, et, en secondes noces, de Louis-Charles-Antoine Lors de Beaufranchet-d'Ayat, Général de brigade, Inspecteur général des haras de l'Empire, demanderesse. Questions. 1°. Les dispositions entre époux, stipulées en contrat de mariage, doivent-elles se régler par la loi en vigueur à l'époque du contrat, ou par la loi existante à l'ouverture de la succession de l'époux prédécédé ? 2°. Une fille, unique héritière de son père, peut-elle prendre tout à la fois les biens de l'hérédité et le douaire préfix qui lui est propre ; ou, en d'autres termes, peut-elle être douairière et héritière ?
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2208
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
BCU_Factums_G2212
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53437/BCU_Factums_G2208.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
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RÉPONSE
POUR
Le
S.r de M ONTLOSIER et les héritiers bénéficiaires
d e la d a m e d e M O N T L O S I E R , i n t i m é s ;
A u dernier Mémoire pour les sieurs et demoiselle de
S E R V I E R E , appelans.
----------llH I—
L
—
1
E S appelans réclament, comme aux droits de Jean de
Servière, leur père, la succession de Françoise-Marie de Servière , sa nièce, f i lle , en premières noces, de la dame de
Monllosier.
Cette Françoise-Marie est décédée le 25 octobre 1781. Il y
a dès-lors près de trente ans que sa succession est ouverte. Il
n’est guère probable qu’une famille demeure trente ans , sans
réclamer la succession d’une parente aussi proche.
D ’un autre côté, par un acte en date du
3o janvier 1783,
Jean de Servière, père des appelans, acheta de la dame de
�ssô-
( i )
Montlosier, sa cohéritière, tous les biens alors libres de celle
succession. Comment les appelans pourront-ils parvenir au
jourd’hui à un partage sur ces biens ?
Les appelans ne paraissent point s’inquiéter de cette cir
constance; ils s’en autorisent même. Les biens ont été vendus,
disent-ils, donc il n’y a pas eu de partage. De plus, les contractans ayant omis d’énoncer dans cet acte , qu’ils traitaient
comme cohéritiers, les appelans s’aulorisen I de cetle omission pour
présenter cet acte comme étranger à leur qualité de cohéritiers.
Mais d’abord, comment se fait-il que le père des appelans ait
jugé à propos d’acheter les biens d’une succession, au lieu de la
part ager;
en d’autres termes, comment se fait-il qu’il se soit
décidé a avoir, à titre o n é r e u x ,
ce q u e , selon les appelans , il
pouvait avoir à titre gratuit?
Si on consulte la vraisemblance en pareil c a s , c’est sans doute
que la prétendue succession ne valait pas la peine d ’un partage
juridique. Point du tout; les appelans répondent que leur père
était dans l ’ignorance de ses droits.
Mais les appelans eux-mêmes, comment se fait-il qu’ils aient
attendu l ’année 1809 pour réclamer leurs droils? A ne consulter
de même que la vraisemblance, on pourrait croire qu’il y a eu
en l'année 1809 nuelqu’événeinent particulier qui a déterminé
leur demande. Point du tout ; les appelans allèguent la même
ignorance que leur pere. A son dérès , il les a laisses lotis
quatre en très-bas â g e , et ce n'est qu'en Vannée 1809 qu’ils
ont c lé instruits de leurs droils.
En suivant celte ligne tracée p a rle s appelans, 011 pourrait
arriver à penser que l ’acle de i y 83 a élé en effet, de la part de
Jean de Servièrc , une méprise; el comme, dans un partage de
succession, la première règle entre les parties est la bonne f o i ,
il ist nécessaire, avant de passer aux queslions de droit, de
bien établir les points de fait.
�•>■ u //A
( 3 )
En premier lieu, s’il se trouve que la succession de FrançoiseM arie, dont il s’agit, était tellement couverte par les reprises
de la dame de Montlosier, et tellement engagée en outre dans le
dédale d’une contestation précédent e, qu’elle était en soi mani
festement n u lle , ou moins que n u lle , on pourra n’être pas
élonné que Jean de Servière ait cherché à se procurer, à titre
d’achat, des biens extrêmement à sa convenance, qu’il convoi
tait , plutôt que de les x’echercher par la voie inutile, et dange
reuse pour l u i , d’un partage juridique.
S ’il se trouve, 2.° que toutes les prétentions , tant anciennes
que modernes , de la famille , se réunissaient comme de concert
sur un certain domaine, appelé C hés-Sabi, situé à la porte de
Jean de Servière , domaine que les parties avaient déjà démem
b ré, et qu’elles continuaient plus bu moins activement à se dis
puter, on concevra que les parties ont pu être amenées à croire
que , par la vente de ce bien , elles termineraient à Ia-fois toutes
les contestations.
S ’il se trouve ,
3 .° que , malgré l’allégation d’ignorance, oppo
sée par les appellans, leur père n’a pu réellement méconnaître,
ni le décès de Françoise-Marie, ni ses droits à sa succession, ni
la nature des biens qu’il achetait; s’il se trouve que l’acte, par
lequel il a acheté, a été tout à son avantage, qu’il est l’époque
précise de la pacification des deux fam illes, et q u e , pendant
les 28 ans qui ont suivi cette époque, toutes les anciennes con
testations ont été terminées, toutes les anciennes instances reti
rées et abandonnées, il faudra un peu revenir de l’idée que les
appelans veulent nous donner de l’acte de 1783, et de 1 inten
tion dans laquelle cet acte a été passé.
Voilà quant à Jean de Servière.
Relativement aux appellans eux-mêmes, qui prétendent avoir
été dans l’ignorance comme leur père, et qui justifient cette
ignorance parce que leur p è r e , à son décès,
les laissa tous
2
�( 4 )
quatre en très-bas âge (motifs d’appel ); s’il se trouve, i.° que
ces enfanS; prétendus au berceau, étaient tous majeurs; s’il se
trouve, 2.0 que l ’année 1809, où ils prétendent avoir été éclairés
inopinément sur leurs droits, est précisément l’année où ils ont
appris, à la suite de plusieurs mémoires imprimés dans une
autre affaire, que le sieur de Montlosier avait été privé, par la
révolution, de tous ses papiers; s’il se trouve, 3 .° que cette cir
constance , concourant avec les effets de la révolution qui a
changé la nature des biens, et avec le laps d u (tems qui a fait
espérer des prescriptions, et a baissé les créances en argent, a
déplacé ainsi sous tous les rapports l’ancienne situation des
parties , on sera autorisé à trouver dans la demande des appelans
des caractères tous ditlerens de c e ux q u ’ ils affectent de présenter.
L es intimés vont d’abord dans une première partie exposer
en détail les circonstances où se trouvaient les parties à l’époque
de l’acte de 1783; dans une seconde partie ils discuteront les
allégations des appelans; dans une troisième partie ils tacheront
d’établir les questions de droit.
PREMIÈRE
PARTIE.
FAITS.
L a dame de Montlosier et les appelans tirent, comme cousins
germains, leur origine de Gilbert de Servière , leur grand -père
commun. O r , ce Gilbert de Servière avait contracté deux ma
riages : le premier, avec Catherine Daurière , de laquelle sont
issus cinq e n t o ns , notamment Jean de Servière, père des a p
pelons , et J e a n -B ap tiste, premier mari de la dame de Mont
losier; le second , avec Gilberte Dupeyrqux , de laquelle est issu
un seul fils, nommé J acqu es, et de cé Jacques, Jea n n e *M adelaine de Servière , épouse , en premières noces , de Jeanïîaptiste , son oncle c o n s a n g u i n ; en secondes noccs, du sieur
de Montlosier.
�'•A
(
5 )
Ledit Gilbert mourut en 1742. Sa succession se composait de
beaucoup d’argent comptant, d’un mobilier considérable, de la
terre duTeilhot, et de deux gros domaines, dont l’u n , entr’autres,
appelé C hés-Sabi, est souvent rappelé au procès.
Parmi ces enfans, deux filles ayant ete mariées forcloses; et
un des enfans mâles, Jean de l’Etang, ayant traité ensuite pour
sa part, avec le père des appelans, il arriva qu’en 1758 , époque
à laquelle la demande en partage fut formée, il n’y eut plus pour
copartageans q u e , i.° Jean de Servière , père des appelans, do
nataire particulier de son père; 2.0 Jean-Baptiste, depuis mari de
la dame de Montlosier,réclamant une légitime et sa part demobilier;
3.° la dame de Montlosier, alors mineure; elle réclamait,
comme Jean-Baptiste, sa légitime et une part du mobilier; elle
demandait, en outre, une partie de la dot de Gilberte Dupeyroux,
sa grand’mère, dont elle était unique héritière. Il faut savoir, à
ce sujet, que Gil bert de Servière avait dissipé une partie des
biens de Gilberle Dupeyroux, sa seconde fem m e, notamment
2,000 francs d’argent de sa d o t, et le domaine et moulin de
Roubrat.
L a cause engagée ainsi à la sénéchaussée de R i o m , le père
des appelans donna les mains au partage ; mais il chercha à
éluder les répétitions parliculières. Il opposa entr’autres, en
compensation du domaine et moulin de R oubrat, vendus par
son pcre, un cheval et un colïre de linge qu’il prétendit avoir
donné au père de la dame de Montlosier.
Une sentence de l’an 1760, qui ordonna le partage, rejeta
quelques-unes des répétitions des réclamons. Mais relativement
d o m ai n e et m o ul in de R o u b r a t ,
réclam és
p ar la d a m e de
Mo n tl o si e r c o m m e bien dotal de Gil berte D u p e y i o u x , elle p r o
n o n ç a qu e les parties contesteraient pins amplement.
L a d a m e de Mo ntl osi er et J e a n - B a p t i s t e , depuis son m a r i ,
s’élevèrent v i v e m e n t contre ces dispositions. Leur protestation
SJcy.
�d’en appeler est consigne'e d’une manière énergique au bas de
la sentence. Cependant l’opération d’experts ordonnée, ajant eu
lieu la même année, il lut délivre aux réclamans , provisoi
rement les deux tiers du domaine appelé C h é s -S a b i; l’autre
tiers demeura à Jean de Servière.En recevant ce démembrement
de domaine, comme délaissement provisoire, la dame de Montlosier et Jean-Baptiste protestèrent contre l’opération des experts ,
comme ils avaient protesté contre la sentence. L ’année d’ensuite,
17 6 1, l ’appel au parlement fut fait et relevc.
Depuis ce tems, réunir aux deux tiers arrachés à son frère
le troisième tiers qui lui a été laissé, devient le grand objet
de Jean-Baptiste. D an s cette v ue , il achète le 3 avril 176ÎÎ ,
de Jea nne- Madel nine, sa nièce, peu après sa f em me , la portion
du domaine de Chés-Sabi, qui lui avait été délivrée pour son
lot ; mais obligée de spécifier que ce lot lui a été fait par
l’opération des experts, de 1760, Jeanne Madelaine a soin de
ne rappeler cette opération que comme un partage verbal.
L ’année d’ensuite elle épouse Jean-Baptiste.» Elle a soin de
mettre les contestations pendantes sous la protection de son
mari; elle se constitue en tous ses droits échus par le décès
de scs père et mère , q u'elle lu i donne pouvoir de poursuivre
et de rechercher. Jean-Baptiste meurt sans les avoir terminées.
Nous arrivons actuellement au second point principal de la
cause , la succession de Françoisc-Maric.
Il faut savoir que du mariage de Jean-Baptiste et de la
dame de Montlosier , il était provenu une fille. Or , JeanBaptiste étant venu à décéder, sa fille F ran çoise-M arie fut
dans le cas de recueillir le tiers de ses biens ; la dame de
Montlosier, donataire de son in ari, les deux tiers. Il est bon
d’évaluer la succession.
. Les biens de Jean-Baptiste sur lesquels la légitime de Françoisc-Marie avait à se former, se composaient ostensiblement
de deux corps de domaines : l’ un , appelé llecolèno , acquis
�( 7 )
par lui avant son mariage; l’autre, appelé les deux tiers de
Chds-Sabi, dont moitié lui avait ete devolue personnellement
par l’opération des experts dont il a ete parlé, et l’aulre moitié,
ainsi qu’il a été d i t , acquise par lui , de sa fe m m e , un an
avant leur mariage.
^
O r , Recolène ayant été acheté 19,000 fran cs, en-1 7 6 6 , 'et
vendu 38,000 francs, en 1791 (42,000 fr. en assignats) , par
le sieur de Montlosier, avec ses améliorations et ses embellissemens, 011 p e u t , en 1780, le porter, si on veut, à 28,000 fr.
D ’un autre côté, C hés-Sabi ayant été ve n d u ,
en 1783, 10,000 f r . , et la dame de Montlosier en
trouvant alors môme 12,000 francs, soit....................
12,000 fr.
T o t a l .....................................
40,000 fr.
II faut prélever actuellement les reprises et créances de la
dame de Montlosier.
En premier lieu, Jean-Baptiste ayant acheté de sa nièce,
un an avant leur mariage, sa portion des deux tiers de ChésS a b i, et ne l’ayant pas payée, ce point forme un premier objet
de reprise.
E n second lie u , Jean-Baptiste ayant v e n d u , pendant le
mariage, la terre d’Arsège appartenant à sa femme, cette terre
forme un second objet de répétition.
Si on ajoute à ces deux objets la valeur du trousseau re
connu et quittancé par le contrat de mariage, ainsi que que^cl ucs
parties d’acquisitions faites immédiatement après le dtcès de
Jean-Baptiste, et confondues dans le domaine de Recolène, on
aura à peu près la masse des reprises et prélèvcmens de la
dame de Montlosier (1).
( 1 ) Il existe encore diverses pariies ilo dettes contractées par J e a n Baptiste de Servière, et acquittées par la dame de Montlosier. N o u s sommes
obligés de les négliger pour le m om en t, n’ayant pu encore les relever.
�( 8 )
Or, il ne s’agit plus que d’évaluer cette masse.
4
Et d’abord il n’y a pas de difficulté' pour le trousseau; il est
quittancé dans le contrat de mariage à la somme de 2,000 fr.
Il ne peut y en avoir davantage pour les acquisitions men
tionnées ; elles se montent à environ
3,000 francs.
Relativement au prix d ’un des deux tiers de Chés-Sabi, vendu
à Jean-Baptiste avant le mariage, cet article est susceptible de
quelques observations.
Il faut savoir d’abord que, par
mariage , la dame de Mont losier
époux de vendre ses b i e n s , mais
rem ploi en acquisition de fon d s.
un article de leur contrat de
avait permis à son premier
à la ch a rg e n é a n m o in s du
Fondés sur cette clause, les
intimés pensent qu’en toute équité, il faudrait rapporter i c i ,
non le faible prix de la vente , mais la valeur réelle des biens.
On leur oppose que la stipulation du contrat de mariage, précise
pour les ventes à venir, n’énonce rien sur les ventes passées.
L es intimés se tournent alors vers une seconde observation.
L a dame de Montlosier n’ayant vendu qu’au prix modique
de 2,248 francs un objet q u i , dans l’état ci-dessus, est porte
à 6,000 f r . , il semblerait, dans ce cas, qu’il y a lésion , nonseulement du tiers au q u a rt, mais encore d’outre moitié. Mais
comme 011 oppose encore sur ce point la différence des tems,
nous consentons à ne porter cet objet qu’à son prix modique
de v e n te , 2,248 fr.
Il reste à apprécier la valeur de la terre d’Arsège. Une conten
tion vive s’élève sur ce point; il s’agit de savoir si cette terre
s’évaluera en nature , ou seulement au prix de vente. JeanBnptiste ayant reçu de sa fe m m e , par contrat de m ariage, la
permission de v e n d re , et ayant vendu au prix de 7,600 f r . , les
appelans soutiennent que ce n’est plus que la somme de 7,600 f.
qui doit être portée pour les reprises.
Il
�( 9 )
Il est difficile de le penser.' L a dame de Monllosier a sans
doute permis à son mari de vendre ses biens; mais elle ne l’a
permis qu’à line seule condition : à la charge néanmoins de
fa ir e em ploi des deniers qui ptovicndront desdites ventes en
acquisition de fon ds.
L a condition du r e mp l oi étant ici i nt ég ra nt e, c ’est dès-lors l a
v al eu r de la terre d ’A r s è g e en nature qu i doit être r a p p o r t é e , et
non pas son f ai bl e pri x de vente. O r , cette t e r r e , c o m p o s é e ,
1.° d’un gros domaine labourant a trois paires de bœufs ;
2.° d’une dîme sur la moitié de la paroisse de Saint-Hilaire ;
3.° de redevances en censives; 4.0 de la justice haute, moyenne
et basse, sur tout son territoire, 11e peut être portée à moins
de
3o,ooo fr. ;
Ce qui, ajouté aux autres objets des reprises sus-mentionnées,
porte toute la masse à 87, 248 fr.
Celte somme retranchée de la masse ci-dessus de 40,000 fr.
laisserait à la mort de Jean-Bapl iste une masse nette de 2 , 75 2 fr.
L a succession de Françoise-Marie, se composant comme légi
time du tiers de cette somme f lesterait des-lors a 9 1 3 fr.
Reprenons.
Le
25 octobre 17 8 1, Françoise-Marie meurt; sa succession est
alors à partager par égale portion entre Jean de Servière, son
oncle , père des appelons , et la dame de Montlosier, sa mère ;
non comme mère , les ascendans n’héritent pas en coutume
d’Auvergne , mais comme cousine germaine de sa propre fille.
L a légitime de celle-ci , m ontant, ainsi que nous avons vu ,
a 9 i 3 i r . , il revient dès-lors à Jean de Servière, cohéritier, la
somme de 456 fr. 10 s.
Quelque modique que soit cette somme, il ne faut pas croire
qu elle aille entrer ainsi dans les mains du siem,* de Servière : il
3
�( 10 )
s’en faut ; car la succession de Françoise-Marie , qui vient de
s’ouvrir au profit de Jean de Servière contre la dame de Mont
losier, rencontrant l’autre succession au profit de la dame de
Montlosier, qui se débat contre Jean de Servière, celui-ci, qui
devenait partie prenante dans la succession nouvelle pour une
somme nulle et insignifiante , se trouvait dans l’autre succession
comptable pour des sommes considérables, agravées de quarante
ans d’intérêts éch u s, et des intérêts de ces intérêts , depuis
l’époque de la demande.
Dans cette situation, l’embarras des deux parties est facile à
concevoir. V eu v e depuis quelques m o is, si c’est la dame de
Montlosier qui la première commence les hostilités, en repre
nant contre son oncle les poursuites que son mari n’a pas ter
minées , son oncle forme aussitôt une demande en partage pour
la succession de Françoise-Marie. L a dame de Montlosier évince
alors, sans nul doute, pour ses reprises, les acquéreurs de la
terre d’Arsège; et elle les dépossède. Mais ceux-ci se pourvoyant
en recours contre les biens du vendeur, l’évincent à leur tour,
et la dépossèdent de Recolène : elle trouve a u -d ev an t d’elle,
sur cette route, beaucoup d’embarras et de perplexités.
S i, au contraire, c’est le sieur de Servière qui commence le
premier les hostilités, en recherchant sa moitié dans la misé
rable succession de sa n iè c e , d’un côté il fait consumer la suc
cession sans fruit ; d’un autre côté la dame de Montlosier re
prend contre lui la poursuite de la succession de son père. Jean
de Servière, qui dans une première opération d’experts, a perdu
les deux tiers de Chés-Sabi, risque, dans une seconde, de se
voir enlever le troisième tiers. On conçoit facilement que Jean
de Servière n’eut garde de réclamer juridiquement un partage
q u i, d’un côté, ne lui faisait espérer aucun profit, tandis que
d’un autre côté il lui faisait craindre sa ruine.
On vient de voir pourquoi la succession de Françoise-Marie
�( 11 )
de Servière ne fut 'point recherchée juridiquement. On va v-ois
actuellement, comment, au milieu de toutes ces difficultés, les
parties furent amenées à la vente du domaine de Chés-Sabi.
Il faut savoir, en premier lieu , que ce Chés-Sabi se trouvait,
d’ une diverse manière, le point de mire des deux successions.
E n vertu de leurs droits respectifs, dans la première, les parties
avaient commencé, depuis long-teins, à le démembrer. Noua
avons vu qu’un partage provisoire, ordonné par une sentence de
la sénéchaussée de R io m , de 1760, avait délivré à Jean-Baptiste
de Servière, un tiers de ce domaine , à la dame de Montlosier et
à Jean-Baptiste, depuis son m a r i, les deux tiers.
Dans cette position, le 21 juillet 1782 , la dame de M ont
losier se remarie. Par ce second de mariage , elle donne au
sieur de Montlosier, au prix de 20,000 francs, le domaine de
Recolène, un des biens de la succession de Jean-Baptiste. Cette
succession , à laquelle on touche, pour la première fois , se
trouve dès-lors liquidée pour les droits de la dame de Mont
losier, de toute la valeur de ce bien. Il ne restait plus de cette
succession que Chés-Sabi. L a dame de Montlosier, prévoyant
qu’elle pourra avoir à compter de la légitime de sa fille, laisse
lib re , pour satisfaire à cette légitime, ce domaine. Elle a soin,
même pour plus de facilité, de se le réserver en paraphernal.
La dame de Montlosier ayant ainsi, par un second mariage,
disposé de Recolène (le principal objet de la succession de JeanBaptiste), le père des appelans vit avec complaisance la légitime
de sa nièce, à laquelle il avait part, se placer sur les deux tiers
de C h é s - S a b i, dont il avait l'autre tiers. Cette circonstance lui
devenait favorable, soit pour défendre, contre les droits de la
première succession, son troisième tiers qu’on convoitait, soit
parce qu’il avait l’espérance qu’on lui céderait, par quelque
�.
jê b .
( T2 )
arrangement nmiable , .les deux
tiers qu’il convoitait à son
tour.
Cependant diverses personnes pressaient la dame de Montlosier de poursuivre rigoureusement ses droits.
Après y
avoir bien réfléchi, elle repoussa ce parti. Elle
venait de se remarier : par ce second mariage , elle avait
frustré sa famille d’une partie de ses biens. Son oncle n’en avait
pas montré trop d’humeur; elle en eut de la reconnaissance;
l’esprit de bonté prévalut chez elle sur celui d’intérêt. II fut
convenu que le sieur de Montlosier irait au T e ilh o t, demeure
de Jean de Servière, avec la commission de voir amiablement
ce qui pourrait être fuit de. m i e u x pour terminer tous les
diflërens.
Deux partis, à cet égard, étaient à prendre : le premier,
acheter le troisième tiers de Chés - S a b i , le réunir aux deux
autres tiers qu’on avait déjà en sa possession , et composer
ainsi un beau corps de domaine; le second, vendre à Jean de
Servière les deux tiers qu’on possédait, et lui laisser en entier
ce bien qui était à sa porte ; se débarrasser ainsi de toute
chance sur la légitime de Françoise - Marie , laquelle , en
supposant qu’elle fût quelque chose, s’y trouvait incluse : tels
les points convenus entre le sieur de Montlosier et sa
femme.
furent
L e sieur du Teilhot repoussa, dès le premier abord, la pro
position de céder, à la dame de Montlosier, son tiers de ChésS abi ; mais il entendit très-bien celle de lui acheter ses deux
tiers. Après quelques pourparlers, l ’argent à donner, ce qui
était un point important, fut convenu; il ne restait plus qu’ù
terminer.
Ici nous n’aurions plus qu’à rendre compte de l ’acte par
lequel on termina , si les appelons n’avaient jugé à propos de
�( i3 )
mettre en cause la procuration même dont on se servit : quel
ques mots sont indispensables à ce sujet.
Ne comptant à une premiere entrevue que sur de simples
pourparlers, ne sachant complètement si ces pourparlers au
raient un bon résultat, ni quel serait ce résultat, le sieur de
Montlosier était arrivé au Teilhot, sans procuration. Une fois
d’accord avec le sieur de Serviere, il était assez simple qu’il sc
retirât auprès de sa fem m e, pour se consulter avec elle et avec
des hommes de loi pour la rédaction de lacté. L a politesse la
plus affectueuse ne lui en laissa pas la liberté. On ne voulut
pas lui laisser la peine d’aller chercher lui-même cette procu
ration. L e père des appelans, qui avait peur que quelque chose
ne dérangeât les dispositions favorables du sieur de Montlosier,
s’obstina à le retenir au Teilhot : on dépêcha un exprès à la
dame de Montlosier.
Un acte de vente e'tait certainement la principale penscfe des
parties. De toute manière, une vente paraissait le meilleur ex
pédient, i.° parce que les parties étaient décidées à ne point
entrer dans une liquidation en règle de leurs divers droits suc
cessifs : liquidation à laquelle ils voyaient beaucoup de danger;
2.° parce que la grande probabilité pour les parties était que la
dame de Montlosier couvrait tout, et qu’en fin de liquidation il
aurait fallu en venir tout de même à une vente, pour faire passer
à Jean de Servière un bien qu’il désirait extrêmement et qui était
tout-à-fait à sa convenance; 3 .° enfin , parce que dnns tous les
cas le bon sens disait assez que, pour la partie minime et toute
chanceuse, appartenant à Françoise - Marie , les parties, qui
étaient en présence l’ une de l’autre, ne pouvaient jamais être
censées , l’une vendre cc qui ne lui appartenait p a s , 1 autre ache
ter ce qui lui appartenait. L a vente, dans ce cas, devenait bien
réellem ent, pour cette partie incertaine et éventuelle , une véri
table licitation, encore qu’elle n’cn portât pas le nom.
Une procuration pour vendre fut ainsi le principal objet en
�( i4 )
vue. Cependant nous ne voulons pas disconvenir que si cette
procuration eût été rédigée en la présence du sieur de Montlosier, elle aurait énoncé quelque chose des anciennes divisions
de la famille.
Cette idée n’échappa pas au sieur de Montlosier. Il écrivit
à sa femme de lui envoyer la procuration la plus am ple, no
tamment pour vendre, traiter et disposer de Chés-Sabi, comme
il entendrait.
L a dame de Montlosier envoya chez un notaire, à une lieue
de là , l’ordre d’expédier à son mari la procuration la plus
am ple, et les pleins - pouvoirs les plus étendus, notamment,
pour vendre et pour fa ir e du bien de C h é s -S a b i ce q u ’i l j u
g e r a it à p ro p o s. L e notaire, qui était étranger à des démêlés
éloignés de l u i , entendant ces paroles à sa manière , dressa
une procuration très-ample sur beaucoup de choses inutiles;
il ne fut bref que sur les points essentiels : il voulut bien
toutefois énoncer, d’une manière précise, le pouvoir de vendre.
11 ajouta m ê m e , mot pour m o t , les paroles de la dame de
Montlosier, et f a i r e d u d it bien to u t c e q u ’i l ju g e r a à p r o p o s ,
p o u r et au n o m de la dam e co n s titu a n te .
Cette procuration ayant été apportée a in s i, il n’était nul
lement commode, à dix lieues de distance, eu hiver, dans un
pays de montagne , d’en envoyer chercher une nouvelle. Les
parties finirent par se persuader q n’ elles pouvaient s’en servir,
telle qu’elle était. Jean de Servière acheta ainsi, le 3o janvier
17 8 3 , au prix radouci de 10,000 fran cs, un bien dont le
sieur
M
a z e r o n
offrait à la dame de Montlosier 12,000 fr. ; de,
p lu sf il obtint avec garantie une clause de référen ce au par
tage , ainsi qu’à la sentence de 1760 , clause qu’il désirait
beaucoup, et au moyen de laquelle ledjt partage et ladite sen
tence furent regardés entre les contractans comme définitifs.
Tel a été , dans toutes ses circonstances, l’acte par lequel
�( i5 )
Jean de Servière acheta les biens passibles de la succession
de Françoise-Marie sa nièce. On peut dire, tant qu’on voudra,
que cet acte fut mal réd igé, en ce qu’on n’y énonça pas ,
d’une manière précise, l’intention des parties, soit sur la suc
cession de Gilbert , soit sur celle de Françoise-Marie. Mais ,
d’un côté , les circonstances antérieures et contemporaines dé
cèlent suffisamment cette intention : d’un autre c ô té , les effets
font foi, à leur tour, de celte intention. Dès ce moment, toutes
les anciennes discussions sont complètement terminées : les deux
familles se visitent et se voient habituellement; plus de mention
du passé. Pendant vingt-huit a n s , il ne s’ élève aucune récla
m ation, ni de la part de la dame de Montlosier, qui retire
et acquitte à ses frais toutes les pièces de l’ancien procès, ni
de la part du père des appelans , qui survit cinq ans à cet
acte, ni de la part des appelans eux-m êm es, pendant les vingtdeux ans qui s’écoulent depuis la mort de leur père. lia famille
Servière ne songe plus à la succession de Françoise-Marie ,
dont la dame de Montlosier se croit entièrement libérée ; et
la dame de Montlosier ne songe pas davantage à la succession
de Gilbert de Servière, sur les poursuites de laquelle la famille
Servière se croit parfaitement acquittée.
Il nous reste à montrer comment l’année 1809 est venue
tout à coup changer ces dispositions.
Trois sortes de motifs avaient déterminé dans l’acte de 1783
la conduite de Jean de Servière : le premier, la nullité de la
succession de Françoise-Marie; 2.0 la crainte des recherches sur
la succession de Gilbert ; 3.° le désir d ’acquérir les deux tiers
de Ghés-Sabi, qui étaient à sa porte, et dont il possédait 1autre
tiers. En l ’année 1809, ces trois bases se trouvèrent tout a coup
déplacées.
■Et d ’a bo rd il faut s avoir q u e le do ma in e d e R ecolène, p r i n
c i pal bi en de la succession de J ea n - B a p t i s t e , ayant été ancien
nement r o t u r i e r , c ’est-à-dire c h a r g é de d î m e , de perrière et de
�\ /r<*.
( i6 )
cens, et la terre d’Arsège, au contraire, principal objet des re
prises de la dame de Montlosier, étant une terre en toute justice
haute , moyenne et basse, avantagée de tous les droits seigneu
riaux, la révolution, q u ia supprimé tous les droits seigneuriaux,
a par-là même élevé Recolène de valeur, et abaissé Arsège.
M . Lecourt ayant précisément vers ce tems acheté Recolène à
un prix très-élevé, pour ne pas dire exagéré, cette différence
dans l’ancienne balance d’actif et de passif de la succession de
Jean-Baptiste, devint manifeste.
Nous supposons ici que la terre d’A rsège, principal objet de
reprise de la dame de Montlosier, sera estimée en nature; s i ,
au contraire, on vient à la porter seulement à son prix de vente
de 1767, comme le veulent les appelans, ce prix ayant été alors
excessivement b as, et par le laps de tems ce bas prix ayant en
core baissé , à cause de la progression des terres et de la station
de l’argent, il se trouvera que ce prix aujourd’hui n’aura pres
que plus de valeur.
Il en sera de même du prix de la moitié de Chés-Sabi, autre
objet des reprises de la dame de Montlosier , ainsi que des
3,000 francs de trousseau et des autres dettes acquittées. Tout
11e formera plus aujourd’ hui que de petites sommes, compara
tivement à leur valeur foncière il y a cinquante ans.
U n autre é v é n e m e n t , p r o pr e à l ’a nné e 1809, vi ent e n c o u
r a ge r les projets des appe la ns. Dans 1111 procès de f a m i l l e , qui eut
m a lh e u r e u s e m e n t de l’c c l a t , et où plusieurs m é m oi re s i m pr i mé s
f urent r é p a nd u s a ve c p r o f u s i o n , il devi nt notoire que le sieur
de Mo ntl osi er avait per du à la r é vo l ut io n tous ses papiers. Cette
ci rconstance n ’ est pas de peu d i mportance au p ro cè s; car le
si eur de Mo n t l o s i e r aura per du de cette mani ère les titres et
lettres de sa f e m m e , re la ti ve ment à la négociation de 1783; il
aura perdu de m ê m e les lettres qui furent écrites à ce ll e* ci p ar
la mère des a p p e l a n s ; il aura perdu encore la reconnaissance
q u e lui d o n n a sa f e m m e , par-devant t é m oi n s , du p ri x de Chés-
Sabi ,
�( *7 )
Sabi, qu’il lui apporta; enfin, il aura perdu tous les anciens
titres de reprise et de créance de la part de la dame de Montlosier, soit contre son premier mari, soit contre le père des appelans; de manière que toutes les anciennes procédures, relativement à la succession de Gilbert de Serviere, pourront être
présentées aujourd’hui comme une niaiserie ou une chimère.
Les sieurs et demoiselle de Servière veulent expliquer par
leur ignorance leur silence de 28 ans. Ils invoquent une pré
tendue révélation subite qui leur a été faite de leurs droits en
1809.On peut sans miracle expliquer la différence de la conduite
de leur père et de. la leur.
i.° En 1791, la succession de Françoise-Marie n’était rien
pour leur père ; aujourd’hui, d’après les changemens survenus,
ils ont calculé qu’elle était quelque chose.
2.0
E n supposant que la succession de Françoise-Marie eût
alors quel que réalité, Jean de Servière était contenu par l’ins
tance pendante , relativement à la succession de Gilbert de Ser
vière, ainsi que par quarante ans d ’intérêts et de jouissances.
Aujourd’h u i, par la perle des papiers du sieur de Montlosier,
cette instance aura disparu; ou bien, par le laps de teins, elle
sera prescrite.
3 .° Jean de Servière regardait comme une grande fortune
pour lui de recouvrer les deux tiers de Chés-Sabi qui lui avaient
été arrachés, et de les rattacher au troisième tiers qui était dans
ses mains. A ujourd’hui Chés-Sabi est entre les mains de ses enfans ; ils n’ont aucune crainte qu’il leur échappe.
C ’est ainsi que les anciennes bases de la c o n d u i t e de Jean
de Servière ayant disparu, et des circonstances nouvelles étant
survenues , les enfans de Jean de Servière se prévalant de la
rédaction peu soignée de l’acle de 17O3, ont elé amènes à
croire à une grande facilité dans leur attaque , et a un grand in
térêt a celte attaque.
Tel est l’historique des faits. Nous allons passer à la discüssion.
�• jr i( 18 )
SECONDE
PARTIE.
Discussion sur les points de fait.
P
r e m i è r e
A
l l é g a t i o n
d e s
A
p p e l a n s
.
L e s anciens dém êlés sont étrangers à la cause.
Les appelans recherchent au Bout de 29 ans line succession
dont ils détiennent les biens; passe. Seulement, comme ils re
cherchent leurs vi eux droits , on doit croire q u ’ ils nous p er
mettront de rechercher aussi les noires. Il semble que ceux qui
forment une demande, tout juste la veille d’une prescription à
échoir, montreront quelque réserve à opposer eux-m êmes la
prescription. A l’époque où la succession qu’ils réclament s’ouvrait, comme ils étaient comptables d’une autre succession , il
est probable qu’ils 11e voudront pas repousser l’une, en recher
chant l’autre. C ’est seulement par erreur, disent-ils, que pen
dant 29 ans, eux et leur père ont négligé ce qui leur était dû ;
ils ne se feront pas un titre de celle erreur pour se libérer de ce
qu’ils doivent. De toutes manières les intimés ont dû compter
que les nppelans proposeraient, en tout et pour t out , de se re
placer à l’époque de la succession qu’ils réclament.
Point du tout. L e palais a été témoin, en ce gen re, du plai
doyer le plus inoui. Les appelons entendent se placer pour leurs
droits à l’époque du décès de Françoise-M arie; ils n’entendent
pas que nous nous y placions pour les nôtres; ils s’excusent débonnairement de leur négligence; en même-tems ils la mettent
à prolit. Si leur prétention est admise, ils se trouveront n’avoir
négligé leurs droits, que juste le lems qui était nécessaire pour
faire prescrire les nôtres. J£n mi m ot, la veille d’une prescription
�( *9 )
à échoir se trouvant pour eux le lendemain d’une prescription
échue, ils s’autorisent de cette double circonstance pour réclamer ce qui leur est dû , et se déclarer acquittés de ce qu’ils
doivent. Examinons d ’abord celte prétention.
Les appelans veulent séparer les anciennes répétitions de la
dame de Montlusier, sur la succession de Gilberte, de leurs droits
sur la succession de Françoise-Marie. Mais comme la succession
de Françoise-Marie, en faveur de Jean de Servière, s’est ou
verte en même-tems que l’ancienne succession de Gilbert au
profit de la dame de Montlosier contre Jean de Servière , se
débattait , lès deux parties réciproquement partie prenante
dans une des successions, et partie comptable dans l’autre, se
sont trouvées dans le cas de la compensation. D ’un autre côté il
faut remarquer que la succession de Françoise-Marie, qui n’est
pas encore liquidée , doit se former sur celle de Jean-Baptiste,
Son père; qu’à l’exception du domaine de I l e c o l è ne , la succes
sion de Jean-Baptiste n’est pas plus liquidée que celle de Fran
çoise-Marie, et qu’elle doit se former sur la succession de Gilbert
de Servière , son père. Dès-lors, les trois successions, celles de
Françoise-M arie, de Jean-Baptiste, de G ilbert, forment dans
la cause un tout homogène.
E n parlant de ce p o in t, on verra au premier abord , que
la recherche des appelans , sur la succession de Françoise*
Marie, n’a pu avoir lieu, sans déterminer de la part des intimés,
sur les successions de Gilbert de Servière et de Gilberte Dupeyroux , une recherche correspondante.
E n effet, si l’acte de 17O3 n’a été, comme les sieurs et de
moiselle de Servière le prétendent, qu’une simple vente ; s’il
n’a eu aucun trait aux diU’érens passés ou présens de la fam ille,
il s’ensuit que l’opération des experts et la sentence de 1760,
qui s’y trouvent mentionnés, ne sont qu’une vaine énonciation.
6
�\ jr 4 .
( 20 )
Les partages de la succession de Gilbert de Servière et Gilberte
Dupeyroux ne sont donc pas encore terminés. Les appelans ont,
à cet égard , à compter avec nous pour des sommes considé
rables, a v e c soixante-dix ans d’intérêt, et les intérêts des intérêts
depuis l’époque de la demande.
Les appelans ne se sont pas donné la peine de répondre à ces
fails dans leurs précédentes écritures. Mais, dans leur nouveau
mémoire imprimé, ils commençent à entrer dans la question :
« L e besoin de l’ une des parties, disent-ils, lui a commandé de
« compliquer un peu plus l’affaire. Une vieille procédure a
« été exhumée; et en liîr o , pour la première fois, on a pensé
« à interjeter appel d ’ une sentence rendue contradictoirement
« en 1760 , et exécutée très - volontairement dans
le courant de
« la même année (pages 2 et 12 ) ».
Lorsqu’argunnt d’une omission de qualité dans l’acte de 1783,
les appelans prétendent que Jean de Servière, qui était réelle
ment cohéritier, n’a pas a ch eté, comme cohéritier de sa co
héritière, ils peuvent dire tout ce qu’ils veulent. Nous ne pouvons
leur répondre à cet égard que par la loi et par des fails; car nous
n’avons plus à notre possession les monumens et correspondances
du tems; mais quand ils parlent de la sentence de 1760, et
qu’ils en repoussent l’a p p el, sous prétexte que cette sentence a
été sig n ifiée, cl très - volontairem ent exécutée dans l ’antiee t
cette sentence se trouve heureusement en notre possession ; et
en ce point, au moins, nous pouvons abattre leurs assertions.
Suit l’ extrait suivant de ladite sentence : a Délivré copie de la
« présente sentence à M .e Claude -A m able V e r n y , procureur
« du sieur du Teilhot , sans icelle approuver aux chefs dont
« ledit sieur de Servière, capitaine, et ledit sieur de Servière de
« l ’Etang, tuteur,
sont
grevés, et par exprès en ce qu’on n’a
»' pas admis la preuve de la consistance du m obilier, suivant
�'
( 21 )
« la commune renommée, et que sur la demande en préléve«
«
«
«
«
«
«
«
ment de 2,000 francs , constituée à Gilberte Dupeyroux , les
parties sont mises hors de Cour, et le tuteur, quant à ce,
débouté de sa demande en entérinement des lettres; protestant, au surplus, de mettre la susdite sentence a exécution
pour les autres chefs, sauf à se faire faire raison du surplus
du mobilier et de la somme de 2,000 f r . , s’il est ainsi dit dans
la suite , sur Vappel que lesdils sieurs de Servière et de
V E tang, tuteur, protestent d’interjeter en la Cour de parle-
« m ent; dont acte; fait le 7 août 1760 ».
Nous venons de voir la sentence: voyons actuellement le par
tage. Ce prétendu partage se trouve n’être ni homologué, ni
expédié, ni.signé, ni signifié; les parties ne veulent pas plus le
sanctionner que la sentence.
« E t , d’autant q u e , suivant la susdite sentence, il est porté
« que nous, experts, ferons délivrance a u x parties de chacune
« sa portion, aurions fait lecture de notre présent rapport, con
te tenant partage auxdits sieurs du T eilhot, de Lim e - D ragon,
« fondé de la procuration du sieur de Servière, capitaine, et
« audit sieur de Servière, tuteur, pour savoir s’ils voulaient ap
te prouver ledit partage , et accepter lesdites délivrances par
« chacun leurs signatures; iceux nous ont dit et déclaré chacun,
« à son égard, qu’ils ne voulaient point signer ni approuver
« ledit partage; et qu’au contraire, ils entendaient se pourvoir,
« tant contre ladite sentence, de laquelle ils ont respectivement
« protesté d’appeler par les significations qui ont été faites
« d’icelles, et par le procès-verbal de notre nomination d experts,
« que contre le partage par nous fait ».
On voit par ces deux pièces , qu’à l’époque de 1acte de 1783,
rien n’était encore fini sur la succession de Gilbert dans la
quelle néanmoins devait se prendre la succession de JeanBapiiste, et dans celle-ci ¿1 son tour, la succession deFrançoiseMarie.
- SïJ.
�( ^2 )
De cet état de choses sortent avec évidence les deux points
suivans : i.° qu’il n’y a point de prescription possible sur les deux
premières successions, tant qu’il n’y en a pas sur la succession
de Françoise-Marie; 2.° que la succession de Françoise-Marie,
dans quelque hypothèse que ce puisse être, est nulle et moins
que nulle. Etablissons ces deux points.
Et d’abord, voilà au moins , dans les deux actes que nous
avons cités, quelques traits de cet appel , dont on nous a
reproché de ne pas même offrir de trace (dernier mémoire).
A yan t perdu tous nos papiers , ce n’est pas notre faute , si
nous ne représentons pas aujourd’hui la procédure; du moins
nous avons retrouvé, ù ce s uj e t , dans un vieux résidu, c h e z
M . Chas sai ng de S a i n t - A m a b î e , des lettres du fotidé de p r o
curation des parties, à Paris. Dans l’une, en date du i 3 janvier
176 1, il est dit : « J yenvoyer ai chez vous et le r e lie f d 'a p p el,
« et Vargent nécessaire pour le fa ir e signifier par le G ran d ,
au Teilhot : i l en sait le chem in ».
Dans une autre lettre du 22 janvier de la même année, il
est dit : « Quant à Vaffaire contre M. du T e ilh o t, mon p ro
cureur doit avoir le v é le r elief intervenu ».
Nous n’avons pas négligé de rechercher ce relief aux ar
chives du Parlement. Une lettre de M. le dépositaire, chef
de' la section judiciaire des archives de l’Empii'c , qui altcslo
avoir f a i t , à cet égard , des recherches infructueuses , porte
qu’il ne peut assurer que les reliefs de l’année 1761 soient dans
son dépôt : « A yan t été chargé de ces minutes en bloc, et sons
« aucun inventaire préalable, et n’ayant d’ailleurs trouvé qu’ une
« très-petite portion des registres d’entablement dressés par les
« anciens procureurs au Parlement, greiliers, gardes de ces
'
« minutes ».
Après avoir établi à la Cour l'existence de cet a p p e l, pai’
toutes les preuves qui sont en notre pouvoir , nous ne pce-
�( 23 )
tendons pas exciper de ces preuves, comme si elles établissaient
un appel réel : nous n’en avons nul besoin. Il nous suffit de
remarquer, i.° que la sentence dont il s’agit n’a pas été signifiée
par le sieur du Teilhot, à Jean-Baptiste et a la dame de Montlosier que les intimés représentent, et que , par conséquent^
n’ayant pas été constitués en demeure par un acte du sieur du
T eilh ot, la prescription de dix ans n’a pas couru contr’eux.
Il est vrai que la sentence a été signifiée par eux : mais ils
n’ont pu, par leur fait propre, se constituer en dem eure, et
ag ir contr’eux-mêmes. Ils ont signifié d’ailleurs avec protestation
d’appeler. D ’un autre côté, la dame de Montlosier n’ayant été
majeure qu’en 176 5 , et ayant épousé son oncle Jean-Baptiste
en 1767 , celui-ci n’est mort qu’en 1780. En 17 8 1, époque du
décès de Françoise-Marie , il n’y avait encore que trois ans
d’écoulés. Depuis celle époque, la dame de Montlosier s’étant
mise de nouveau en puissance de mari en l'année 1 7 8 2 , et
à l’époque de sa mort , les sieurs et demoiselle de Servière
étant devenus n l’instant même ses héritiers de droit , ils ne
peuvent plus nous opposer, pour leur profit, un tems de pres
cription qui a été leur ouvrage.
Ils disent bien, à la vérité, dans leur mémoire, que les héri
tiers bénéficiaires qui ont pris leur p lace, ont du prendre les
choses dans l'éta t où elles é ta ien t; mais en vérité, plaidant
en répétition contre nous, et nous opposant une prescription
que nous n’avons pu empêcher par aucune voie, et qui est tout
entière de leur fait, ce serait un peu trop fort.
M a i s c’ est trop nous appesantir sur ce point. L e partage de la
succession de F r a n ç o i s e - M a r i e n ’étant point f a i t , du moins dans
1 hypothèse des a p p e l a n s , et les biens aHectés a celle succession
se t ro uva nt a pp a rt e ni r en partie à la succession de Gilbert, tant
q u e le pa rt ag e de la succession de Françoi se-Marie , q u i doit se
i o r m e r dans la succession de J e a n- Ba p ti s te , et celle-ci dans la
�( M
)
succession de G ilb e rt, n’est pas fait, l’état de l’une commande
l ’état de l’autre.
T
II nous reste à traiter le second point, c’est-à-dire que la suc
cession de Françoise-Marie est, dans tous les cas et dans toutes
les hypothèses possibles, évidemment nulle.
Nous avons vu , par le compte rendu dans la première partie,
que la succession de Françoise-Marie, laquelle devait se former
pour un tiers dans la succession de Jean-Baptiste , se montait,
déduction faite des reprises de la dame de Montlosier, à une
modique somme de 913 francs, sur quoi Jean de Servière avait
à prendre pour sa moitié 456 francs 10 s. Cette situation, qui
fatigue les appelans, relativement à leurs espérances ultérieures
au procès, les fatigue encore pl us , relativement nu sens de l ’acte
de 1783 , qu’elle explique trop bien ; ils s’efforcent lant qu’ils
peuvent de la changer.
Ils n’ont pas voulu s’expliquer à cet égard dans leur dernier
mémoire; mais dans leurs précédentes écritures, nous voyons
que sans déranger l’évaluation de la succession de Jean-Baptiste,
qu’ils passent comme nous à 40,000 f r . , ils tâchent d’abaisser au
moins, du côté de la dame de Montlosier, la masse des reprises.’
Leur querelle porte principalement sur la terre d’Arsège, que
nous avons estimée en nature à la somme de 3o,ooo fr., non
qu’ils contestent cette valeur en s o i, niais parce qu'ils prétendent
que Jean - Baptiste ayant reçu de sa (emnie la permission de
ve nd re , et ayant vendu au prix de 7,500 fr. , ce n’est plus que
la somme de 7,5oo fr. qui doit ôtre portée pour ses reprises.
Celte difficulté, en point de fait, dépend de la solution d ’un
point de droit. Il s’agit de savoir si la terre d’Arsège , bien dotal
de la dame de Montlosier, vendue par son mari, sera rapportée
çn nature, ou seulement a s011 prix de vente. La dame de Mont
losier a permis sans doute, dans son contrat de m ariage, de
vendre
�•t v - ^
'( 25 )
vendre ses Liens. Elle ajoute : mais à la charge néanmoins de
fa ir e em ploi des deniers qui proviendront desdites v en tes, en
acquisition de fo n d s . L a condition du remploi en acquisition
de fonds est ici intégrante; et elle a de plus poui elle la faveur
que la coutume d’Auvergne donne en général à la dot des femmes.
Les appelans
con vien nen t
que le commencement de cette
clause est contr’eux ; mais ils répliquent qu à la suite de cette
condition expresse de faire remploi en acquisition de fon ds, la
dame de TÆontlosier a demande que ces fonds fussent certains
et suffisons pour en répondre. De cette clause, ajoutée par la
dame de-Montlosîer, en addition de précaution pour elle et
d’agravation pour son m a r i , ils en font une clause de modifi
cation et d’atténuation. Suivant eux, la dame de Montlosîer au
rait commencé sa phrase par commander à son mari le remploi
en fonds ; elle aurait fini cette même phrase par l’en dispenser.
C o m m e n t
ne pas s’apercevoir que la d ame de Mont losîer a voul u
le rempl oi fût fait en acquisition de fonds. Crai gnant
ensuite que ces fonds fussent ou insullisans, ou achetés de mau
vais vendeurs , elle est revenue sur sa clause, et a exigé que les
d ’abord que
fonds qu’on lui rendrait en place de ses biens dotaux fussent
certains
et sufiisans pour répondre de la valeur de ses fonds.
L e non accomplissement d’une condition aussi importante et
aussi impérative ne peut profiter aux héritiers de Jean-Baptiste
contre les héritiers de la dame de Montlosîer. Arsège sera
compté selon sa valeur réelle et non selon son prix de vente. L a
portion afférente des appelans sera ainsi fix é e , ainsi que nous
l’avons calculé, à la somme capitale de
456 fr. 10 s.
Tandis que les sieurs et demoiselle de Servièie plaident avec
fracas , qu’ils mettent six parties différentes en cau.se , pour la
répétition d’une somme de 456 fr. io s. , ü es* Cl,iieux de con
naître les sommes dont ils sont comptables eux-mêiues sur la
succession de Gilbert de Servièrc , grand-père commun.
7
�u
( ^6 )
On volt, soit dans la signification de la sentence de 1760,
soit dans les dires rapportés au procès-verbal des experts, soit
dans d’autres pièces , une grande irritation de la part de la dame
de Montlosier et de Je an- B ap t is t e, son premier mari, contre
cotte sentence. Elle contient en effet trois dispositions également
révoltantes.
Et d’abord, la dame de Montlosier et son mari avaient de
mandé. que la consistance du mobilier Fût établie d’après la com
mune renommée. Qu’ordonne la sentence ?,
Que les experts estimeront le mobilier selon Vêtat que ledit
Jean de Servière en a f o u r n i, en affirmant néanmoins par
ledit de Servière du T e ilh o t , par-d eva n t le com m issa ire-ra p
p orteu r , p a rties p résentes ou dûm ent a p p elé e s, qu e lesd its
états sont sincères et véritables, et q u 'il n'a trouvé lors du
décès de son p è r e , d'autres meubles et b estia u x, que ceu x
compris en iceux.
De cette m anière, la consistance du mobilier, tant en bes
tiaux que meubles, se trouva monter à rien. Cependant, au
moyen de plusieurs renseignemens très-positifs et très-précis,
la dame de Montlosier et Jean-Baptiste s’étaient assurés qu’une
quantité de bestiaux des domaines avaient été déplacés et vendus.
Par rapport à l’argent, le scandale était encore plus grand : il
11’y avait qu’ un seul bruit dans le pays relativement aux sommes
énormes laissées par Gilbert de Servière à son décès. Ces sommes
s’étant découvertes dans la suite, i.° par l’acquisition que Jean de
Servière fit de la terre de Glenat, et qu’il paya comptant; 2.0par
le traité qu’il fi1 avec son frêre et trois de ses sœurs, qu’il paya
également comptant; et enfin, par l’acquisition même de ChésS a b i, qu’il fit en 1783, et qu’il paya également comptant, on
voit que sur ce point Jean-Baptiste et la dame de Montlosier
avaient lieu d’êue assez peu satisfaits de la sentence de 1760,
�(
27 )
qui avait établi en faveur de Jean de Servière la consistance
du mobilier sur un simple état de lui affirmé.
L a sentence de 1760 contient contre la dame de Montlosier
particulièrement une seconde disposition euoore plus agra
vante.
Gilbert de Servière avait reçu de Gilberte Dupeyroux , sa
seconde femme, une somme de 2,000 francs faisant partie de
sa constitution dotale. Que fait Gilbert pour sauver Jean ,
son fils favori , de la restitution de cette dot ? Il imagine
de faire faire à Louise D upejroux , sa b elle-sœ ur, par un
traité du 17 mai 17.30, une reconnaissance de la somme de
5 ,85o francs, montant, est-il d it, de dépens, fournitures ou
fr a is de voyages qu’il a faits dans la poursuite d’une affaire
commune avec Gilberte D u p e jro u x , sa femme, et sur laquelle
il y nvnit eu , entre les p ar t ies , mie ti'ansaction amiable. C ’est
ce traité portant reconnaissance de la somme de 2,000 francs,
par Louise Dupeyroux , acte tout à fait étranger à Gilberte
Dupeyroux , que la sentence de 1760 applique à ce lle -ci
comme devant elle-m êm e supporter en défalcation de sa dot
un retranchement correspondant de 2,000 fr. Il suffit d’énoncer
une telle disposition; elle ne pourrait tenir sur l’appel : elle est
révoltante.
E n fin , une troisième disposition est relative au domaine et
moulin de Roubrat. L a sentence porte :
«
«
*
a
«
a
« Et sur la demande formée par ledit tuteur ( la dame de
Montlosier) , en prélèvement du domaine de R oubrat, ordonnons que les parties contesteront plus amplement, ainsi
que sur la demande formée par ledit du Teilhot contre ledit
tuteur, en rapport de la valeur d’un cheval hainache et de
deux coffres remplis de linge qu’il prétend avoir été délivrés
nudit défunt Jacques de Serviere, son Irere, sans néanmoins
8
�.\V„
( 28 )
que pour raison de ce , ledit partage puisse être sursis, à
« l’exception d’un huitième qui demeure réservé ».
k
On voit d’abord l’excès de faveur de cette sentence. Comment
la dame de Montlosier demande à prélever un domaine dotal
de sa grand’mère; et, sous prétexte que Jean de Servière op
pose en compensation un cheval harnaché et des coffres de
linge, qu’il dit avoir donnés à Jacques, son frère, on sursoit
à la répétition !
Maïs ce que nous avons sur-tout à faire remarquer, c’est
l ’excès d’imprudence des sieurs et demoiselle de Servière : à l’aide
du tems et de l’abolition de tous les souvenirs, q u ’ils aient espéré
échapper à la recherche de l’ancien mobilier de Gilbert de
Servière : passe ; mais sur la somme de 2,000 f r . , effacée de la
constitution dotale de Gilberte D u p eyrou x, sous prétexte d’un
traité de Gilbert de Servière avec sa belle-sœur, traité où celle-ci
veut bien se reconnaître tenue à 2,000 fr. pour les frais d’un
procès , ils ne peuvent sûrement échapper à la révision d’un
arrêt sur ce point.
D ’un autre côté , ils prétendent ne pas savoir ce que c’est que
le domaine et le moulin de Roubrat; mais cette ignorance meme
devrait les effrayer. 11 n’est pas tout à fait improbable qu’au
moment actuel ce domaine et ce moulin , qu’ils ne connaissent
p as, se trouvent valoir 3o,ooo fr. Triplons ensuite ce capit al ,
a cause des intérêts depuis soixante-dix ans ; voila aussitôt 1111
total de 120,000 fr. Ajoutons-y la sorrïîiifédè 2,000 fr. avec l’ad
dition de trois fois le capital depuis soixante-dix ans; voilà
128,000 fr. Comment! il se trouve des jurisconsultes q u i, con
seillant le sieur de Serviere , le jettent dans un procès , où ayant
d’un côté à répéter une somme de
fr* 10 s. (1,000 fr. avec
trente ans d’intérêts), ¡1 a d’un autre coté à compter d’une
somme de 128,000 fr. ! Comment ! il se trouve des jurisconsultes
qui placent ainsi leur client dans le dilemme d’être accablé de
�( 29 )
frais s’il vient à perdre son procès , et d’être ruiné de fond en
comble s’il a le malheur de le gagner ! ! !
Nous devons croire que la Cour, souveraine arbitre de ce
diiïei’end, sera plus sage que le sieur de Servière et ses conseils.
En attendant nous voulons bien le rassurer au moins sur un
point; c’est que le domaine et le moulin de Roubrat, vendus
à Michel Coulongeon, par acte du 7 octobre 1722, n’apparte
nait pas en entier à Gilberte Dupeyroux; elle en jouissait con
jointement avec Marie Bougnol, fille et héritière d’Antoinette
D u p e yro u x , sa tante, et Louise D upeyroux, sa sœur, veuve
de Jean Magne. Mais enfin , en rabattant tant qu’on voudra
de nos droits sur ce domaine et sur ce moulin ; quand on sup
poserait qu’ils ne montaient aujourd’hui qu’à 4,000 Francs ;
avec soixante-dix ans d’intérêts, cela formerait au moins une
somme de 16,000 f r . , q u i, jointe à celle de 8,000 f r . , prove
nant des 2,000 fr. de la constifulion dotnle de Gilberte Dupeyroux , formerait encore un total de 24,000 fr., dont les appelans
se trouveraient comptables.
Après cela , qu’ils restreignent Arsège tant qu’ ils voudront ;
qu’ils le portent même , s’ils veulent, à son prix de vente; au
lieu delà somme de 4^6 fr. 10 s. pour leur portion afférente, ils
ne parviendront ainsi qu’à une somme de 4,000 fr. (1) , laquelle,
doublée par les trente ans d’intérêts, leur laisserait encore à solder
sur les 24,000 fr. ci-dessus une somme de i 5 à 16,000 fr. La
demande des sieurs et demoiselle de Servière n’aura été pour eux
que d’un très-léger inconvénient, s’ils viennent à perdre leur
procès. S ’ils avaient le malheur de le gagner, ce succès devien
drait une grande charge, peut-être une ruine.
(*) E11 effet, co ne serait plus dans ce c a s , au ^elt ^ une so,ntne de
37,200 fr. Je reprises, que nous avons établie, Hue ce^e de *4,000 fr. ,
qui ne laisserait sur celle de 40,000 fr . , valeur ostensible de la succession
do Jean-Bnptiste, rjUe celle de 25,800 fr., dont le tiers 8,400 f r . , partagé
en deux parts, laisserait aux appelons celle de 4,200 fr.
�( 3o )
I I .e
A l l é g a t i o n
d e s
A p p e l a n s .
L a vente de 1783 a été une vente ordinaire ¡u n acte d'étranger
à étranger.
Il se trouve q ue, par l’acte de 1783, la dame de Montlosier
a reçu 10,000 fr. Sur une succession nulle ou moins que n u lle ,
on doit croire que son intention n’était pas de donner gratuite
ment à son oncle le bien de Chés-Sabi. L a somme de 10,000 fr.
devenait ainsi nécessaire pour la solde de ses reprises, qui
n’étaient pas remplies par Recol ène ; elle pouvait être regardée
aussi c o m m e une indemnité des successions anciennes, que l ’acte
de 1783 lui faisait abandonner.
Les parties ne s’étanf pas explique'es sur ces points, les appe
lans profitent de cette circonstance pour faire regarder l’acte
de 1783, comme une vente ordinaire, où tout a été égal de
part et d’autre. «Il est vrai, disent-ils, que nous détenons les
a biens soumis à la succession de notre cousine; mais nous en
« avons payé le prix ; c’est comme si nous n’en avions rien eu ».
Nous ne prétendons point repousser désobligeamment cette
objection ; nous allons, au contraire , indiquer aux appelans
un moyen de lui donner un grand éclat. Qu’ils nous fassent
signifier la déclaration suivante :
« Attendu que l’acte de i 783 a été entre les parties l’effet
« de l’ignorance et de la méprise, nous ne voulons point qu’on
« nous oppose cet acte sur la succession de noire cousine; mais
« nous ne voulons pas non plus en tirer avantage; qu’il soit re« gardé entre nous, comme nul et non avenu, lleplacons-nous,
« en tous les points, au même et semblable état où nous étions
« à l’époque du décès de Françoise-Marie ».
�( 3i )
Si les appelans ne nous font point signifier cette déclaration
sur laquelle nous les provoquons, c’est que , par l ’acte de
17 8 3 , la dame de Montlosier, non - seulement ne leur a pas
fait payer la convenance de Chés-Sabi, mais encore qu’elle leur
a donné, pour 10,000 fr., un bien dont elle trouvait 12,000 fr.
Ils veulent conserver les avantages de l’acte de 1783, sans en
avouer le principe : ils le pèsent dès-lors à deux balances. Comme
premier acte entre cohéritiers, comme pouvant s’entendre de
l ’absorption que leur père aurait voulu faire de ses droits, cet
acte est sans effet : les parties ne savaient ce qu’elles faisa ien t.
Mais comme vente, comme ayant transmis à un prix avan
tageux, un bien situé à leur porte, enclavé dans leurs posses
sions, et composant les deux tiers d’un corps de domaine, dont
ils possédaient l’autre tiers, les parties savaient très-bien ce
qu’elles faisaient ; ou si elles ne le savaient pas, c’est égal. L ’œuvre
de l ’ignorance, en ce p o i nt , doit demeurer stable.
Il en est de même de l’ancienne succession ; ils la repoussent
par la prescription, en nous demandant trente ans d’intérêt
sur la nouvelle. Les mains garnies ainsi de 20 à 3o,ooo fr.
des successions antérieures ; les mains garnies pareillement sur
la succession de Françoise-M arie, les sieurs et demoiselle de
Servière prétendent n'avoir rien eu.
Nous disons que la vente de Chés-Sabi, au prix de 10,000 f . ,
s’est faite à un prix adouci. Il ne s’agit pas de comparer ce
prix à des prix antérieurs. Nous offrons de p r o u v e r q u ’alors
même des étrangers , et entr’autres , le sieur M a z e r o n , en
offraient à la dame de Montlosier 12,000 fr.
Nous faisons plus.
Il est reconnu que depuis iy 83 les biens fonds ont augmenté
de quelque chose; mais d’abord ce n’est certainement pas du
double. H faut remarquer ensuite, que cest sur-tout à cause
de la libération des dîmes et des droits féodaux. Or, Chés-Sabi
�(
( 32 )
n’est pas dans ce cas ; il a toujours été allodial. Eh bien ! que
les appelans consentent à nous livrer aujourd’hui les trois tiers
réunis de Chés-Sabi !, nous les prenons pour 3o,ooo fr. : c’est
justement le double du prix des deux tiers, par l’acte de 1783.
Dans l’acte de 1783, tout a été égal entre les parties. Que
signifie donc, dans cet acte , la clause si soignée et si détaillée
de référence à l’opération des experts de 1760, consacrée
comme partage définitif, lorsque dans la réalité ce partage
n’avait été ni homologué , ni signifié , ni signé , et qu’au
contraire il y avait eu jusqu’alors protestation continuelle contre
ce prétendu partage ?
Il ne faut pns oublier que depuis cet acte seulement , le père
des appelans a commencé à jouir avec sécurité , non-seulement
de tout Chés-Sabi , mais de sa propre terre du T e i l h o t , terre
engagée jusque-là dans les chances dangereuses d’un long et
grand procès.
Sous ce point de vu e, le partage de 1760 qui était informe,
et qui est consacré par la vente de 1783 , a une liaison essen
tielle avec les intentions et le sens de cette vente. En effet, le
domaine de Chés-Sabi ne pouvait être vendu par la dame de
Montlosier, et acheté par le sieur de Servière régulièrement,
que parce qu’il était reconnu comme appartenant à la dame
de Montlosier; et il ne lui appartenait, que parce que toutes
les autres propriétés de la succession de G ilb e rt, et celles du
Teilhot même étaient consacrées par cet acte en faveur de M. dll
Teilhot; celui-ci trouvait d o n c, et dans cette acquisition, et
dans la consécration de ses autres propriétés, le prix de son
consentement a terminer tout.
On veut que ce soit là un pacte d’étranger à étranger. M M . de
Sèze , Calissane et Bélard , dans leur consultation , répondent
que l’acte tout entier repousse celte idée. « Qu’eût fa it, disent-ils,
un étranger? il eût voulu connaître le titre eu vertu duquel
Madelaine
�( 33 )
Madelaîne de Servière était propriétaire du bien qu’elle lui
transmettait. A u contraire, Jean de Servière ne s’embarrasse
pas de prouver que Madelaine était propriétaire , mais que
c ’était Jean-Baptiste, sur la succession duquel Françoise-Marie
avait à prendre sa légitime. Un seul titre de propriété est indiqué
dans l’acte, et ce titre est le partage de 1760 ; et comme il y avait
été partie, on ne peut pas dire qu’il en ignorait les dispositions
ni les réserves ».
« Il est vrai que par ce partage Madelaine de Servière pouvait
être réputée propriétaire de la moitié de l’objet vendu. Mais
Jean de Servière savait très-bien que sa nièce avait vendu,
en 1765, cette portion à Jean-Baptiste. L ’acte de 1783 prouve
donc, par ses dispositions même, que les parties connaissaient
leurs qualités; autrement cet acte constaterait que Jean de Ser
vière voulait acheter à non d om in o, puisqu’il contiendrait la
preuve écrite que la dame de Mont l osi er, qui vendait, n'était
pas propriétaire ».
« E t qu’on ne dise pas que Jean de Servière croyait Madelaine
de Servière propriétaire de l’objet qu’elle v e n d a it, en vertu de
la donation universelle qui lui avait été faite. D ’abord, dans le
système absolu d’ignorance qu’on lui suppose, il devait ignorer
cette donation comme tout le reste; et si l’on ose avouer qu’il la
connaissait, comment ne lui arriva-t-il pas dans la pensée d’exi
ger que la dame de Montlosier prît dans l’acte cette qualité de
donataire, qui validait son acquisition? Les parties ne prirent,
dans l’acte de 1783, aucune qualité, précisément parce qu’elles
connaissaient toutes leurs qualités ».
Les appelans excipent de ce que dans l’acte les contractans
ont omis de déclarer qu’ils étaient c o h é i ' i t i e r s . Mais lorsqu’en
réalité les contractans étaient cohéritiers, et qu ils ont disposé
bien réellement des objets de la succession, une simple omission ,
un simple silence , ne donnent pas aux appelans le droit d’in
venter à leur gré la pensée de leur père.
9
�Et certes, il est assez connu que la qualité d’héritier, à moins
qu’on ne l’abdique, est indélébile. En vevfu de la règle, le mort
saisit le v i f , la qualité de cohéritiers a suivi les contractans dans
l’acte de 1783 , comme elle les a suivis par-tout. Pour agir hors
de la qualité de cohéritiers dans cet acte, où l’on traitait d’un
objet de la succession, il fallait manifestement une réserve et
une stipulation expresse : cette reserve et cette stipulation ne
s’y trouvent pas.
L es appelans ont bien senli qu’ils ne pouvaient pas tenir sur
ce terrein. Ils ne se sont pas contentés d’exciper de l’omission de
la qualité de cohéritier; ils ont allégué que leur père avait été
dans l’erreur.
Sous ce rapport , la cause peut devenir très-sérieuse. Si en
effet les appelans établissent l’erreur de Jean de Servière, et que
cetle erreur porte sur des points de fait; par exem ple, si Jean de
Servière n’a pas connu l’existence de Françoise-Marie et son
décès, ou bien s’il n’a pas connu la nature des fonds qu’il ache
tait, le moyen est proposable; il doit être débattu.
Les appelans ne disent pas cela : ils avouent que Jean de
Servière a connu l’existence et le décès de sa nièce. Il a su qu’à
la mort de celle-ci, il était appelé à lui succéder par le sang ; il
a su que les biens q u ’il achetait étaient par leur nature soumis à
sa légitime. Quelle a donc été l’erreur de Jean de Servière?
' Ses enfans nous l ’apprennent dans leur premier mémoire
imprimé.
« Jean de S er v iè r e fut abusé par la donation universelle que
« son frère J e a n -Baptiste avait faite à sa femme en se ma« riant ( page 7 ) »•
Admettons d’abord cette allégation telle qu’ elle est. Elle
prouve nu moins que la succession de Françoise-Marie fut dans
la pensée de Jean de Servière : il en délibéra avec lui-même.
�'
( 35 )
I l est vrai qu’il se trompa dans cette délibération. On nous
assure positivement q u 'il ne f i t pus attention à l'art. 14 de
la coutume d ' ¿iuvergne. Mais enfin cette pensée fut présente
à son esprit : il se conseilla à cet égard ; il se consulta. L a cause
pourrait être jugée par cet aveu seul.
Reprenons.
On voudrait nous faire croire que Jean de Servière n’a pas
su que sa nièce avait une légitime. Remarquons qu’il ne s’agit
pas ici d’une règle établie par la loi particulière de quelque lieu
obscur et ignoré. L a légitime des enfans est consacrée à la fo is ,
et par les ordonnances, c’est-à-dire par la loi générale de toute
la France, et par la coutume d’ A u vergn e, c’est-à-dire p a r la
loi longuement et anciennement établie du pays où Jean de
Servière vivait. O r , est-il probable qu’ un homme qui a reçu
de l’instruction , et qui par sa fortune et son r ang est hors de
la classe commune , ne connaisse pas , sur un point aussi im
port ant , aussi f ami l i e r , aussi habi tuel , ce qui est réglé p a r l a
loi générale de la France et par la coutume particulière de son
pays ?
On nous dit que Jean de Servière , le
3o janvier 1783, ne
lit pas attention à l’art. 14 de la Coutume d’Auvergn e; mais il
eut ensuite dix années entières pour y faire attention. Dans
l’espèce, Jean de Servière q u i , selon le narré des appelans, n’a
souscrit l’acte de 1783 que par un défaut d’attention, sur vit cinq
ans à cet acte. Dans cet intervalle, la dame de Montl osi er meurt ;
le sieur de Montlosier vend Recolène; d ’autres le v en d en t et le
revendent après lui : il a fallu sûrement un mi racle paiticulier
pour que Jean de Servière ait demeuré dans 1 aveuglement.
Ce n’est pas tout. Les appelans prétendent avoir participé
eux-mêmes à ce miracle et à cet aveuglement; ils allèguent, dans
leurs motifs d’a p p e l, que leur père, à son décès, les laissa tous
quatre en très-bas âge.
10
J- s * ) .
�Celte allégation est fausse. Il se trouve, par l’extrait baptistaire de Gilbert, le plus jeu n e d ’entr’eux, qu’il avait vingt-cinq
ans à l’époque du décès de son père.
Nous venons de prouver, d’après toutes les circonstances de
fait et de position des p arties, qu’elles ont très-bien connu
leurs droits. Nous avons été plus loin dans la cause que nous
n’y sommes tenus. Il est, à cet égard, un principe général qui
n’a jamais été contesté par qui que ce soit : c’est que chacun
est présumé connaître sa chose; de plus, personne n’a jamais
été censé ignorer le droit, nemo ignarus ju r is. Les sieurs et
demoiselle de Servière prétendent n’avoir pas connu leur chose ;
ils prétendent avoir ignoré le droit; la présomption légale est en
notre f aveur ; elle nous dispense, par cela m ê m e , de toute p r e u v e ;
c’est aux sieurs et demoiselle de Servière à prouver leur allé
gation.
Il ne reste actuellement aux appelans que deux objections:
la première, relative à ce que la dame de Montlosier n’a donné
de procuration à son mnri que pour vendre ; la seconde, relative
à ce que la vente n’embrasse pas toute l ’hoirie.
Et d’abord, au sujet de la procuration, nous rappellerons;
non pour nous justifier, mais seulement pour rendre raison
de quelques négligences qu’on peut y remarquer , que le sieur
de Montlosier n’est point arrivé au Teilhot avec cette procura
tion, ainsi que les appelans le font supposer, mais seulement
qu’oïl l’a envoyé chercher du Teilhot mêtne. Elle est arrivée ,
non pour entamer des conventions, mais pour consommer des
conventions déjà faites. Ce fait, qui semble singulier en le com
parant avec la date de la procuration , ne sera cependant pas
contesté. L ’homme d ’affaire, envoyé exprès du Teilhot par Jean
de Servière, vit encore.
Nos adversaires disent ( p .
^5 de leur dernier mémoire) : « Le
« s.r de Montlosier n’a pu avoir d'autres volontés, faire d’autres
�( 3? )
« conventions, que celles autorisées par la procuration ».'Mais
entre mille autres méprises, que nos adversaires font dans cetté
affaire, ils raisonnent toujours du sieur de Montlosier, comme
si c’était un mandataire étranger à sa femme. E n faisant sur
la réticence de la procuration, relativement aux démêlés de fa
m ille, tous leurs beaux raisonnemens, ils oublient une seule
chose , c’est que le sieur de Montlosier était le mari de la dame
de Montlosier. L a procuration, disent-ils, a été donnée pour
vendre et non pour partager ; cela devait être. Pour vendre un
bien paraphernal de sa fem m e, le sieur de Montlosier a eu be
soin d’une procuration, et il l’a demandée. Mais prétendre que
sa femme ait dû lui envoyer une autorisation pour transiger sur
d ’anciens differens, ou pour partager une succession, laquelle,
hors Chés-Sabi, faisait partie de sa constitution dotale ; il n’y a
que les appelans, au monde, à qui il puisse arriver une telle
pensée.
« Mais avec cette procuration, le sieur de Montlosier pouvait
« vendre à tout autre qu’à Jean de Servière ». Sans doute. Mais
d’abord, en vendant à tout autre, il n’eût pas vendu au même
p rix , puisque le sieur Mazeron offrait 12,000 fr. En vendant à
un autre, il n’eût pas consacré, par son approbation et sa signa
ture, comme partage, un acte informe qui n’en méritait pas le
nom.
L e sieur de M ontlosier pouvait vendre à tout autre. Mais
c’est ce qu’il n’a pas fait. D ’un côté, il a dû avoir une pro
curation générale pour vendre , à l'effet de ne pas subir la
loi que n’eût pas manqué de lui imposer le sieur de Servière,
s il avait su qu’il ne pouvait vendre qu’à lui« D ’un autre coté,
appliquant avec sa qualité de donataire et son autorité de mari,
le pouvoir qui lui était donné dans les meilleurs intérêts de
celle qui le lui donnait , il a dû ne vendre qu’au sieur du
T eilh ot, afin d ’anéantir à la fois, par le même acte, les débats
des deux successions. Sa pensée, en cela, a été bonne; son
�autorité et ses droits suffisans. Si en raison des circonstances,
de l’absence de conseil et d’hommes de loi , il y a eu dans
l ’acte quelque négligence de rédaction , cette négligence pa
raîtra excusable : il suffit que tous les élémens essentiels y
soient.
Relativement à leur allégation : que l ’acquisition de ChésSabi n’embrasse pas toute l ’hoirie, il faut que nos adversaires
se croient bien surs de la puissance de cette difficulté ; car
après l’avoir faite en première instance, ils la répètent encore
dans leur dernier mémoire. « L e partage ne s’exerce pas, disent« ils, sur un objet particulier, sur un seul héritage de la suc« cession ; il se fait sur la masse entière ( 29 ) ».
A entendre nos adversaires, on dirait qu’il n’y a qu’une seule
succession en scène; il y en a trois : celle de G ilb e rt, celle de
Jean-Baptiste, et celle de Françoise-Marie. Ces trois successions
ayant à se former l’une dans l’autre , fallait-il que l’acquisition
faite par Jean de Servière embrassât les trois successions ? Ne
suffit-il pas pour la cause qu’elle ait embrassé la succession
entière de Françoise-Marie?
Il ne faut pas oublier que la succession de Jean-Baptiste, à
laquelle lesappelans font particulièrement allusion, n’a à paraître
dans la cause que fictivement, à l’effet de former la masse sur
laquelle se composera celle de F r a n ç o i s e - M a r i e . O r, sur cette
succession de Jean-Baptiste, la dame de Montlosier a disposé,
par un second contrat de mariage, du domaine de Recolène. Il
s’agit de savoir s i , étant tout à la fois donataire de Jean-Baptiste,
créancière de Jean-Baptiste, coheiitieie de sa fille, et laissant,
pour la portion légitimaire de sa fille, des biens reconnus plus
que suffisans pour parfaire cette legilime, la dame de Montlosier,
n’a pas pu disposer légalement dans la succession, d’une portion
d’héritage, moindre que celle qui lui compétaif.
Par l’évaluation portée dans le premier mémoire des appelons,
�(
il
39 )
est établi que C hés-Sabi, réservé libre après la disposition
effectuée de Recolène, était près du double suffisant pour former
la légitime de Françoise-Marie.
L e même aveu est consigné dans le dernier mémoire, p. 23.
Il en résulte que la succession de Françoise-Marie ne peut plus
aujourd’hui se former sur Recolène. L ’aliénation ayant été
faite de première date et sans opposition , elle est légalement
et irrévocablement consommée.
E n tout, l ’objection roule sur une équivoque.
Pour faire le partage de la succession de Françoise-Marie,
il faut sans doute faire le partage des trois successions; mais
lorsqu’il est établi et convenu au procès (les autres biens ayant
été précédemment aliénés ) , que C h é s-S a b i, qui reste libre ,
est suffisant, plus que suffisant, pour former la succession de
Françoise-Marie, on ne peut pas dire que la vente de cet objet
n’ait pas embrassé -toute la succession.
T R O I S I È M E
POINTS DE
PARTIE.
DROIT.
Cette partie nous paraît présenter trois questions : i.° Quel
est le caractère légal de l’acte de 1783? 2.0 Quels doivent être
ses effets , considéré comme premier acte entre cohéritiers ?
3 .o Quels doivent être ses effets, considéré
comme vente?
Sur tous ces points, nous pourrions être trop facilement accusés
de peu de connaissance ou de partialité. Des hommes très-graves
pour le caractère, ainsi que pour la science, M M . Poiiier, de
Sèze, Bélard et Calissane, ayant à diverses reprises examiné et
traité cette affaire, nous sommes assez heureux de n’avoir plus
qu’à rapporter leurs décisions.
�U °
)
'
* *
PREMIERE
;
QUESTION.
Caractère légat de l'acte de 1783.
Il faut d’abord qu’on nous accorde qu’il est permis de consi
dérer dans les actes , non-seul ement ce qui y est é c r i t , mais
ce qui est fait, non modo quod scriptum e s t , sed quod gestum
est in spicitur; il faut qu’on nous accorde que les contrats valent,
non-seul ement
par la lettre des contrats, mais encore par la
qualité des contractans. Un père qui dans un mariage autori
serait son f i l s , sans déclarer qu’il est père ; un mari qui auto
riserait sa f e mme , sans déclarer qu’ il est mari ; u n h o m m e
son
subordonné, sans déclarer son grade, n ’autoriseraient pas, par
constitué en autorité , qui accorderait une permission à
cette omission, le doute qu’on voudrait élever sur l ’intention
et l’objet de l ’acte qu’ils auraient passé.
Il ne faut sûrement pas mettre dans les actes ce qui n’y est
pas; mais il faut pourtant convenir, d’après Domat et les lois
romaines , que c’est sur-tout l’intention présumée des parties
qu’il faut consulter. Ces principes établis , les jurisconsultes
précités ont examiné l’acte de 1783 ; ils y ont trouvé écrites
matériellement les dispositions suivantes:
L e sieur de Montlosier , au nom de sa femme JeanneMadelaine , vend à Jean Servière du T e i l h o t , un doma i ne
appelé C h és-S a bi, à elle réservé par son contrat de m ariage,
comme bien paraphernal. Sur ce premier point , si on veut
savoir quelque chose de plus , il faut l apprendre d ailleurs ;
car dans l’acte on ne dit rien : on n’y dit ni à quel titre la
dame de Montlosier est propriétaire du bien qu’elle vend, ni
en quelle qualité elle vend. L a dame de Montlosier ne s’em
barrasse pas de l’énoncer : Jean de Servière ne s’ embarrasse
pas de le lui demander. O r } certainement, Jean de Servière
n’a
�( 41 )
n’a pas voulu acheter un- bien à non domino. On apprend,
bientôt, mais en dehors de l’acte, que la dame de Montlosier
qui vend, est la propre nièce de Jean de Servière qui achète,
en même-tems qu’elle est sa belle-sœur; car elle est fille d’un
de ses frères, femme d’un autre de ses frères. On voit aussitôt
pourquoi les parties ne'gligent d’enoncer dans l’acte leurs qualite's ; c’est qu’étant de la même famille , du même sang , ayant
eu dans le cours de leur vie beaucoup d’autres intérêts à démêler,
elles savent si bien leurs qualités , que par cela même elles
omettent de les énoncer. Les parties s’en rapportant à ce qui
est, comme le sachant suffisamment, il ne s’agit p lu s, pour
connaître le vrai sens de l’acte, que de rechercher ce qui est.
O r, dans la réalité, la dame de Montlosier avait, sur CliésS a b i , qu’elle vendait, le double droit de donataire de son pre
mier mari, et de cohéritière de sa fille. Les deux parties s’étant
référées à ce q u ’elles savaient de leurs qualités réelles, il en
résulte que la dame de Montlosier a vendu C hés-Sabi à son
oncle , dans ses deux qualités de donataire de son mari et de
cohéritière de sa fille : rien n’est si simple.
Point du tout. Les sieurs et demoiselle de Servière repoussent
cette explication ; ils voient dans l’acte que la dame de Mont
losier a vendu seulement comme donataire de son mari. De ce
que Jean de Servière ne lui fait énoncer aucune qualité, ils n’en
concluent pas que Jean de Servière ne lui a connu aucune qua
lité, et qu’il a voulu acheter d’elle comme à non D om ino ; ce
qui serait au moins conséquent ; entre les deux qualités de la
dame de Montlosier , également omises t o u t e s deux, il en trient
une à leur fantaisie, et ils laissent l’autre. Ils affirment positive
ment que la dame de Montlosier n’a entendu vendre que comme
donataire, et que Jean de Servière n’a entendu acheter d’elle
que comme donataire. Toutefois celte qualité, Jean de Servière
pouvait, absolument parlant, ne pas la connaître, puisque c’était
11
�( 4 0
un acte particulier enlre le mari et la femme; au lieu que sa
qualité de cohéritier^avec e lle , il ne pouvait l’ignorer, puisqu’elle
lui était acquise par le sang.
Poursuivons.
Il est dans l’acte une autre disposition non moins-intéressante,
et dont au premier abord on ne découvre pas toute l ’importance.
L a dame de Montlosier, cohéritière, vend à Jean de Seïvière,
le domaine de Chés-Sabi, et comment le vend-elle?
« Ainsi que le tout se limite et comporte, et que les héritages
« sont amplement et séparément déclarés et confinés au partage
« passé entre messire Jean - Baptiste de Servière, écuyer, capi« taine au régiment de T h i a n g e , messire Jean de Servière ,
« écuyer, sieur du T e i l h o t , et messire autre J e a n de Servière,
« en qualité de tuteur de la fille mineure de défunt Jacques de
« Servière, suivant le rapport d’experts, fait par M M . Yialette
« et
L egay,
le 29 août 1760, duement contrôlé à Riom le i 3 sep-
« tembre suivant, et le procès-verbal d’affirmation dudit rapport,
a fait en l’ hôtel de M. V issac, conseiller à R io m , dudit jour
« i3 septembre ».
E t d’abord il faut apprendre, mais en dehors de l’acte (ca r il
n’y en est rien d i t ) , que Jean-Baptiste de Servière, capitaine, est
le premier mari de la dame de Montlosier; 2.° que la personne
rappelée comme fille mineure de Jacques, est la dame de Mont
losier elle-même, venderesse; 3.° que Jean de Servière du Teilhot,
est son oncle, l’acquéreur.
Il faut apprendre, z.° mais encore en dehors de l’acte (car
on ne s’en douterait p a s ) , ce que c’est que ce prétendu partage
qu’on consent à énoncer ici comme passé.
Q u’ il nous soit permis de rappeler, quoique pour la seconde
fois, la manière dont a été passé ce prétendu partage.
« Iceux (le s parties) nous ont dit et déclaré, chacun à son
�$of>>
( 43 )
«
«
«
«
«
«
égard , qu’ils ne voulaient point signer ni approuver ledit
partage; et qu’au contraire ils entendaient se pourvoir, tant
contre ladite sentence de laquelle ils ont respectivement protesté d’appeler par les significations qui ont été faites d’icelles,
et par le procès -verbal de notre nomination d’experts, que
contre le partage par nous fait ».
On voit, par l à , qu’au moment où le mari de la dame de
Montlosier avait la complaisance de rappeler, comme partage
passé, un acte, qu’elle, ladite dame Montlosier, n’avait jamais
voulu ni approuver ni signer, il n’y avait rien réellement de
paSsé sur la succession de Gilbert ; tout était en l ’air sur celle
succession ; rien n’était positivement à personne.
C’est ainsi que cette clause, qui dans son écorce peut paraître
frivole et insignifiante, prend une importance immense de l’état
où se trouvait la famill e; et ici on ne peut pas dire que cet état
fût inconnu de Jean de Servière; on ne peut exci per, ni de son
ignorance, ni de ce qu’il n’avait pas fait attention à Part. 14 de
la Coutume d'A u vergn e; il y était lui-même partie; à l’exemple
de ses deux autres copartageans il avait refusé sa signature à cet
acte que les contractans convenaient actuellement de consacrer
comme partage.
En cet état, le sieur de Montlosier et les héritiers bénéficiaires
disent : « L a loi défend de scinder dans les actes les dispositions
« diverses des actes. Vous avez acheté Chés-Sabi, concurrem« ment avec la reconnaissance qui vous a été faite comme pnr« tage réel, de l ’opération informe des experts, en 1 an 1760.
« Nous avons le droit de vous dire : Vous a v e z acheté consé« quemment. Un acte rédigé dans un h a m p a u , sans le secours de
« conseil et d’hommes de loi, peut q u e l q u e f o i s 11 être pas bien
« tourné dans ses expressions. Mais les faits y sont pntens; ils
« ont une corrélation évidente. Vingt-huit ans d’exécution dans
« ce sens ne laissent pas de prise au* subterfuges. La prescription
« que vous alléguez ( si réellement elle vous était acquise ) dé-
12
�« poserait contre vous - même ; car ¿faut le fruit de Tacfe de
« 1783, elle vous a\erlirait d ’avoir un peu plus de respect que
a vous ne voulez en avoir pour l ’acte qui vous a apporté ce
« fruit ».
D E U X IÈ M E Q U E ST IO N .
D e Cacte de 1 7 8 3 , considéré comme premier acte entre
cohéritiers.
L e premier principe qui a frappé M M . de Sèze, Calissane
et B e l a r d , dans cette question, c’est cette disposition de la l oi,
à croire le moins possible à une l ongue indivision de choses
commîmes entre des individus. La loi
5 , §. i 5 , fF., s’énonce à
cet çgard d’une manière tranchante : Duortim in solidwn dom in iu m , v el possessio esse non pot est. La loi
3o , §. i 5 , iT. de
acquis, vel amis, posses. s’énonce d’une manière non moins
précise : P lu res eamdem rem in solidum possidere non possunt.
Elle en donne la raison : Contrà naturam quippe est , ut cùm
aliquid teneam , tu quoque id tenere videaris.
Se gouvernant selon ce principe, aussitôt que la loi peut voir
l'indivision cessée, elle la voit cessée; et elle la voit toujours
cessée, lorsque les intéressés proche parens ont par un acte quel
conque mis les mains sur la propriété commune. « Dès que les
« cohéritiers changent par un premier acte la manière dont la
« loi les avait investis des biens d’une succession; dès que leur
« possession cesse d’être commune, la loi voit dans ce premier
« acte le but unique de tout partage, qui est la cessation de Pin« division ; et elle en tire la conséquence que tel a été l’objet
« des contractans. E t , en eirel, il est impossible de leur sup« poser une autre intention , s’ils n’ont pas énoncé, de la ma« nière la plus expresse, une volonté contraire ». ( Consultât,
de M M . de Sèze, Calissane et Bélard.)
�( 45 )
L a loi, selon ces messieurs, se gouverne encore par un autre
grand principe; c’est que, d’après la réglé, le mort saisit le v if,
le partage est par sa nature non attributif, mais seulement dé
claratif de propriété. P a r t a g e r dès-lors, disent ces messieurs , est
un fait plutôt qu’ un acte ; car l’acte n’est précisément nécessaire
que là où il y a translation de propriété. A in si, des qu’une fois
la déclaration de propriété, qui constitue le parlage, est authen
tique, de quelque manière que cette authenticité se compose,
quelque nom ou quelque titre qu’on lui donne, la loi l’accueille
telle qu’elle est, et la consacre.
Cette règle, émanée des principes, était nécessaire sous le
point de vue d’ordre public. On ne peut contester que, soit la
crainte des recherches du fisc, soit le danger de prendre un titre
d ’héritier, et de s’engager ainsi dans les dettes ou dans les af
faires embarrassées d’une succession , soit la nature des affaires
d’une maison , qui repoussera c o m m e ruineuse une liquidation
en règle et les formalités ordinaiies juridiques, soit enfin telle
autre cause r peuvent porter lus familles à traiter entr’elles sous
une forme particulière. L a loi, protectrice de tous ces petits in
térêts domestiques, veut les favoriser; elle consent à confondre,
sous le nom générique de partage , tous ces actes , quels qu’ils
soient : il lui suflit qu’ils soient faits de bonne f o i , et qu’ils fas
sent cesser entre les parties l’état d’indivision.
Cependant il importait, pour l’égalité des partages, que
cette simple déclaration , qui devait pouvoir se faire f aci lement ,
ue put pas se faire non plus trop légèrement. En nnaliere de
succession, chose casuelle ordinairement, et ad ve nt i ve, il était
a craindre que des individus sans expérience sur une chose
qu ils n’ont pas encore possédée, n’eussent aucun moyen de re
parer leurs méprises. L a loi a ouvert à cet elïe t, sur tous ces
actes indistinctement, un pourvoi en rescision du tiers au quart.
Mais après nvoir fixé à cet égard le terme de dix ans , elle a
v o u lu , par la même réciprocité des motifs d'ordre et de préser
�/'
( 46 )
vation des intérêts des fam illes, rendre ces actes irrévocables
après dix ans.
Tels sont les principes. Entrons actuellemect dans l'espèce.
Après le décès de Franeoise-Marie , la dame de Montlosier et
Jean de Servière sont saisis ensemble, conjointement, de sa suc
cession , par la règle le mort saisit Je v if. Un an et demi après
ce décès, les deux cohéritiers traitant ensemble des objets libres,
soumis à cette succession , un d’eux les transmet à l’autre. Dans
cet acte, qui ne porte pas le nom de p a rta g e , mais qui certai
nement a bien fait cesser l’indivision , y a-t-il quelque erreur
pour Jean de Servière , ou pour la dame de Montlosier ? La loi
protectrice est l à ; elle leur donne dix ans pour réparer cette er
reur par un pourvoi. C e p e nd ant le pourvoi offert par la loi n’est
point accepté. Les parties continuent, non-seulement pendant
dix ans, mais pendant vingt-huit ans conse'cutifs, à être satis
faites de leur convention ; et après ce tems , lorsque de grands
événemens ont tout déplacé , les hommes et les choses, les pro
priétaires et les propriétés, un cohéritier qui se dira gratuite
ment avoir été dans l’erreur, pourra venir bouleverser le repos
de dix familles! Essayant sa position sur tous les points, il de
mandera le partage, tantôt sur un bien qui a été irrévocable
ment donné par contrat de mariage (m ém . en 1 . « inst. ) , tantôt
sur une somme qui ne fait point partie des biens héréditaires
( Motifs d’ appel ) , tantôt seulement pour se ménager à la suite
de ce procès un nouveau procès en garantie, au sujet d ’ un trouble
qu’il se fait à lui-même (dern. mém.)! Et on croit que, pour de
telles considérations, la justice s’empressera de renverser l’ordre
accoutumé et la marche ordinaire des lois!
L a sagesse de la Cour et toute la juiisprudence française ne
permettent pas de s’arrêter a cette supposition. G est ici que nous
devons rappeler textuellement celte grande règle relative au
premier acte que l’auteur du mémoire des sieurs et demoiselle
de Servière s’est tant efforcé de défigurer.
�( 47 )
Repoussant d’un côté, comme improbable, ainsi que contre
la nature des choses, la supposition d’une longue indivision
entre particuliers, et la regardant d un autre coté comme impos
sible , lorsque ces particuliers ont m is, en presence l’un de
l’au tre, les mains sur la chose commune; partant de ce principe,
que la propriété commence entre cohéritiers au moment du
décès, que le partage est une simple déclaration, et que des-lors
il est constitué par toute espèce d’a c te , pourvu que dans le fait
il fasse cesser l’indivision; regardant ensuite comme une pré
somption légale, que personne ne jette sa chose : nemo prcesum itur jactare rem suam ,* et que personne n’ignore sa chose :
nemo ignarus ju ris; s’apercevant enfin que ces actes étant, selon
la position diverse des familles et de leurs petits intérêts, sus
ceptibles de prendre divers modes et diverses formes; la juris
prudence a vou lu , tant pour conserver üégalité des partages,
que p our préserver les familles d ’ un cahos de procès et de con
tentions rui neuses , prévenir à la fois tous les i nconvéniens par
un principe général, absolu, dur peut-être quelquefois comme
la prescription, mais aussi, comme la prescription, conservateur
de l’ordre public, et fécond en toute sorte de salutaires effets.
C e principe a été : « que tout premier acte entre cohéritiers,
« faisant cesser l’indivision dans les choses à partager, serait
« regardé comme équipollent à partage, quelque nom qu’il pût
« avoir d’ailleurs ».
Ce principe une fois prononcé, toute la législation s’y est atta
chée. Les jurisconsultes anciens sont unanimes sur ce point.
Les modernes ne le sont pas moins. Ces jurisconsultes ne disent
pas, comme voudraient l’entendre plusieurs personnes, que tout
acte portant le nom de partage sera réputé partage : ce qui
serait une niaiserie. Il ne disent pas non plus, comme le vou
draient les sieurs et demoiselle de Servière dans leurs motifs
d’appel , qu’une vente entre héritiers sera réputée partage ,
lorsqu’on verra dans cette vente des lots, des parts, des prélève
ra ens , ce qui est une absurdité. Ils ne disent pas non plUSj
�Gov*
( 48 )
comme les sieurs et demoiselle de Servière le prétendent dans
leur dernier mémoire, qu’une vente entre cohéritiers ne doit
être réputée partage que lorsqu’on verra, par quelqu’en d roit,
que cette vente n’est pas réellement une vente; ce qui est une
autre absurdité. Ils disent :
« Les premiers actes qui se font entre cohéritiers, après la
« succession ouverte, de quelque manière qu’ils soient conçus,
« sont réputés partages ». ( Argou. institut, au droit français).
Ils disent : « L e partage est un contrat innommé. Ainsi il n’im« porte de quel nom on le ba ptise, soit de transaction ou autre
a acte. Il suffit que ce soit le premier acte fait entre cohéri« tiers, pour être réputé partage ». ( Bret onni er , sur Henrys,
livre 4. )
Ils disent : « E o ju re uiim ur ut qiiocitmque nom ine donetur
« contractus primus inter coheredes reique communis particc cipes, sive transactio vocetur, seu non , tarnen pro divisiotie
« heredilalis rerumque communium accipi debeat ». (Mornac.)
Ils disent : «Il est reçu en jurisprudence de regarder comme
« partage tout premier acte par lequel des communistes auraient
« voulu sortir de communion, quelque nom qu’on lui ait donné,
« comme vente, licitation, ou transaction, parce que iF'nom ne
« change pas la chose». (P rou d h on , tom. 2 , pag. 267.)
/
« Enfin 011 n étendu, dit Vaslin, l’exception des lots et ventes
« ail premier acte qui se passe entre cohéritiers, concernant
« les biens de la succession, quoique par l’arrangement tous les
« immeubles passent à un seul, et quoique cet acte soit conçu
« en forme de v en te, transaction ou autrement. L a raison est
« que le premier acte est considéré comme un acte de partage,
« ou supplétif à partage, et que les arrangcinetis convenables à
n l’intérêt et au repos des familles, mentent une faveur singu« lièrc ». ( V a s lin , coutume de la Rochelle.)
Parlant
�<jo2
(
49 )
Partant de cette jurisprudence comme établie, le Gode Nap.
l ’a proclamée loi de la France. L ’art. 888 porte :
« L ’action est admise contre tout acte qui a pour objet de
« faire cesser l ’indivision entre cohéritiers , encore qu’il fût
« qualifié de v e n te , échange , ti’ansaction , ou de tout autre
« manière ».
Mais c’est en vain que la loi et la jurisprudence auront pris
toutes ces précautions; l’esprit de chicane ne sera pas encore
aux abois; il saura, à force de subtilités , trouver un subterfuge
dans la règle la plus claire, et opposer la loi même à la loi.
Faisons connaître les nouvelles difficultés de nos adversaires.
Elles consistent, i.° dans un commentaire sur ces mots de
l’art. 888, ayant pour objet de fa ire cesser Vindivision ,* et
alors on nous dit : « P r o u v e z que l’acte de 1783 a eu pour
obj et ». E l le s consistent, z.° dans un autre commentaire sur le
texte de quelques jurisconsultes, q u i, en parlant des premiers
actes, ajoutent : au sujet de la succession , rela tif à la succes
sion ; et alors on nous dit : prouvez que l’acte de 1783 a eu lieu
au sujet de la succession , a été rela tif à la succession.
M ais, d’un côté, en disant que tout premier acte entre cohé
ritiers sera réputé partage , des jurisconsultes ont pu ajouter :
relatif à la su ccessio n , au sujet de la succession. Cela était
nécessaire au sens, afin qu’on ne crût pas qu’un premier a cte ,
sur des choses étrangères à la succession, serait aussi compris
dans cette cathégorie.
l ) ’un autre côté, quand la loi a dit : Tout acte ayant pour
objet de faire cesser l'indivision , elle n’a sûrement pas entendu,
dire que quand un acte aurait cet cllcf réel, il pourrait être
censé n’avoir pas eu cet objet; car quand des parties obtiennent
lin résultat important par un contrat , elles sont bien censées,
à. moins de la preuve contraire, avoir eu ce résultat en vue.
i
3
,
�( 5o )
•Point du tout; l ’auteur du mémoire des sieurs et demoiselle
de Servière prétend qu’on doit prouver dans ce cas l’objet de
l ’acte. « Pour décider que l’acte de 1783 a eu pour objet de faire
« un partage, il faudrait d’abord établir que les parties en ont
a eu la pensée ».
Comment établir que des contractans qui étaient cohéritiers,
ont eu la pensée d’être cohéritiers ? Etablir que des contractans,
qui ont traité réellement des objets de la succession , ont eu
la pensée de traiter de ces objets!! Etablir que l’auteur du mé
m oire, qui a fait ce raisonnement, a réellement eu la pensée
de faire ce raisonnement !
Ce sophisme n’ est point une conception nouvelle. I l avait déjà
été présenté au tribunal de première instance, et nous l’avions
repoussé alors par ces paroles même de M . le Procureur-général
à la Cour de cassation :
« Quelquefois, dit ce magistrat, pour prévenir les demandes
a en rescision, ori donne à l’acte de partage la forme d’une vente,
« le plus souvent celle d’ une transaction; mais précaution vaine.
« Pour trancher toute dispute qu’élevaient à ce sujet d’ignorans
« praticiens, la jurisprudence a établi, pour règle constante,
« que tout premier a c t e ............».
Cette citation, prise dans un cas particulier, prouve q u e ,
pour que l’acte soit réputé partage, la loi 11’exige pas que les
parties aient fait apercevoir par quelque endroit l’intention de
partager. Elle veut q u e , quand même elles auraient employé
tous les modes imaginables, pour ôter à leur acte l’apparence
d’un partage , cet acte soit réputé comme tel.
*
N on, sans d o u te , répond l’auteur du m ém oire; la loi
« n’exige pas que les parties aient m ontré 1 intention de partager ;
« car alors l’acte serait partage par l’expression comme par le
« luit. Mais elle exige qu’elles l ’üieiit eue, (¡ue l’acte ait eu pour
�( Si )
« objet de faire cesser l’ indivision, et il faut que cette intention
« el cet objet paraissent par quelque endroit ».
Mais ce subterfuge
n’élude en aucune maniéré la décision de
O
M. le Procureur-général. Ce magistrat ne dit pas : « si vous pre
nez mal vos précautions, et q u e, par 1 effet de votre mal-adresse,
votre intention de partage se décele par quelque endroit, alors
votre acte sera réputé partage ». Il dit en substance : que votre
intention paraisse ou ne paraisse pas ; que vous ayez pris bien
ou mal vos précautions, tout cela n’y fait rien. P récaution s
vaines; il en donne aussitôt le m otif. P o u r trancher toute
dispute que d'ignorans praticiens pourraient élever sur ce
p o in t , la jurisprudence a établi pour règle constante que
tout premier a c te , etc.
E t remarquons, d’après cette décision, que la loi n’a pas seu
lement en ce point un objet de justice générale; mais qu’elle a
encore un objet réglementaire. D ’un côté, elle part du principe
que le partage n’est point attributif, mais seulement déclaratif
de propriété; que personne ne jette ordinairement sa chose, et
que chacun est censé connaître sa chose; d’un autre côté, elle a
une grande précaution en vue
p o u r
t r a n c h e r
t o u t e
d i s p u t e
.
Il est bien d’autres exemples de ces dispositions réglementaires.
U n homme se porte bien aujourd’hui; il fait une donation de
ses biens; il n’y a nulle fraude de sa part. Mais un accident par
ticulier, une maladie, lui survient ; il périt peu de jours après
sa donation. Quoique cette donation ait été sincère, et réelle
ment entre-vifs, la lo i, pour trancher toute dispute sur sa vali
dité, a fixé un certain nombre de jours précis.
“
«
«
«
Elle a dit de même : « Lorsque des héritiers traiteront entre
eux, par premier acte, des objets soumis à la succession communc , la présomption naturelle et légale étant qu’ils ont su
ce qu’ils ont fait, pour trancher toute dispute, leur acte équ;vaudra ù partage ». Sur ce point, la loi n a pas pu craindre
H
�( 52 )
des méprises; car elle a donné dix ans pour se pourvoir contre
ces actes.
Tous les auteurs se réunissent à celte interprétation. En par
lant du premier acte, quelques-uns ajoutent, il est v r a i , rela tif
à la su ccessio n , au sujet de la su ccession , 1 N d i v i d c j n j u i s ;
c’est, comme nous l’avons dit, pour éloigner l’ idée qu’un pre
mier acte entre cohéritiers fût également x-éputé partage, lors
qu’il porterait sur des objets étrangers à la succession. Mais
ceux qui, regardant le scrupule de cette précaution comme inu
tile, parlent franchement sur la question , nous disent tout sim
plement :
« Les premiers actes qui se font entre cohéritiers, après la
« s u cce ssio n o u v e r te , de quel que manière q u ’ils soient conçus,
« sont réputés partage ». ( Argou ).
Ils disent : « L e partage est un contrat innom m é; ainsi il
« n’importe de quel nom on le baptise, il suffît que ce soit le
« premier acte fait entre cohéritiers, pour être réputé pax-tage ».
( Bretonnier-sur-Henrys ).
Ici nous allons avoir en confirmation une autorité beaucoup
plus imposante, celle de feu M. Treiîhard , qui avait rédigé Iuimênie l’art. 888 dont il est question : elle est rapportée par
M . Merlin.
Traitant cette matière dans un plaidoyer, en la Cour de cas
sation , prononcé n Pnttdîence du 29 janvier 1808 , présidée par
Son Excellence Monseigneur le Grand-Juge, toutes tes sections
réunies , ce magistrat rappela d’abord pour maxime : que le pre
m ier acte entre cohéritiers, de quelque nature q u 'il s o i t , équi
vaut à partage y et ne peut etre considéré que comme un par
tage. Il ajouta ensuite:
« Aussi voyons-nous dans le proces-verbal de la discussion du
« Code Napoléon , au conseil d’état, que, pour justifier cet ai’* tic*lc du reproche qu’on lui faisait d’introduire une nouvelle
�■
( 53 )
« jurisprudence, M. Treilhard disait que la section de légis« lation s’était déterminée, par la raison que le premier acte
« que tes héritiers f o n t entr’eu x ,
t e n d
t o u j o u r s
à partager
« la succession ».
Nous supplions la Cour de remarquer que la pense'e du l égis
lateur est ici dévoilée de la manière la plus authentique. L a
raison de la législation , relative au premier a c te , n e se tire pas
de toutes les origines si ingénieusement révélées aux sieurs et
demoiselle de Servière. « L a section de législation s’est détermi« née, par la raison que le premier acte que les héritiers font
« entr’eux tend toujours à partager la succession
C ’est de soi, c’est par sa nature, c’ est toujou rs, qu’un premier
acte entre cohéritiers tend à partager la succession ouverte. Il ne
s’agit donc pas de prouver par témoins la pensée des parties, ou
de faire la preuve que tel a été réellement l ’objet et l ’intention
des parties ; le premier acte que les héritiers f o n t e n lr e u x
tend toujours à partagerda succession. Telle est l’interprétation
solennellement proclamée en la Cour de cassation , eu présence
de Son Excellence Monseigneur le Grand-Juge , toutes les sec
tions réunies , de l’art. 888 dont il est ici question.
Tout ce qu’il y a de respectable parmi les jurisconsultes de la
France s’est empressé de proclamer cette décision. Les auteurs
de la jurisprudence du Code c iv il, tom.
5 , p. 1 1 2 , s’expriment
ainsi :
«
«
K
“
ct
«
«
«
« Tout acte, qu’il soit qualifié de v en te, d’échange ou de transaction entre cohéritiers, et qui fa it cesser l ’indivision , est
un acte de partage. Dans l’ancienne j u r i s p r u d e n c e , comme
dans la nouvelle , par-tout où l ’on trouvait cet effet, quelque
couleur que l’on eût donnée à l’acte, soit qu on 1 eut qualifie
ven te, licitation, transaction ou autre , si par cet acte des cohéritiers sortaient de la communauté de biens, on y appliquait les règles et les principes qui régissaient les partages.
C ’est ici que s’appliquait dans toute sa force cet adage du
CoC
�(aol •
(
54 )
« Droit romain : Non tantum quod scriptum , sed quod g e s
te. tum est inspicitur ».
Nous venons de p rou ver, contre tous les subterfuges des sieurs
et demoiselle de Servière, cjue la disposition de la jurispru
d ence, relativement à tout premier acte entre cohéritiers, est
une disposition réglementaire, fondée , non sur telle 011 sur telle
invention arbitraire de ceux qui s’appuient de la loi pour échap
per à la lo i, mais sur le fondement que, dans la position où se
trouvent respectivement des cohéritiers, lorsqu’ une succession
est ouverte , la présomption de droit est qu’ils ont voulu partager
la succession*. L e premier acte que les cohéritiers j o n t en tr'eux
t e n
d
t o
u j o
u r s
à partager la succession.
par surabondance
que nous avons traité ce point : il ne nous est nullement néces
N ous devons ajouter ac tuel lement que c’est
saire. Les sieurs et demoiselle de Servière se contentent de de
mander que dans l’acte de 17 8 3 , l'in ten tion de partager pa
raisse au m oins par quelqu'endroiC. Nous avons prouvé que
cette intention paraissait avec évidence, par tous les endroits
et par tous les points.
TROISIÈM E
QUESTION.
D e L'acte de 1783, considéré comme une simple vente.
Après avoir examiné la vente de 1783 comme premier acte
entre cohéritiers, les jurisconsultes déjà cités l’ont considérée
connue simple vente. Sous ce îappoit comme sous
1autre, ils
ont jugé que la demande des sieurs et demoiselle de Servière ne
pouvait être admise.
Et d’abord, qu’est-ce qu’une demande en partage? c’est une
répétition de droits. Or, comment peut-il y avoir lieu a partage,
lorsqu’on
a acheté les fonds qui etaieut nilectés a ses droits?
�■•£
( 55 )
2.° Qu’est-ce encore qu’une demande en partage? c’est une
demande en formation de lot. O r, comment peut-il y avoir lieu
à partage, lorsqu’on détient tous les biens et les seuls biens où
pourrait légalement se former ce lot?
3.o
Les sieurs et demoiselle de Servière rêvent que dans ce
cas il y a lieu à garantie contre le vendeur. Une décision précise
de Pothier pourra les faire revenir de leur reve.
Reprenons.
Il n’est pas donné à tout le monde de connaître les profondeurs
de la jurisprudence. Mais en règle de bon sens, comme en prin
cipe d’équité naturelle, lorsqu’ un individu consent à acheter un
fonds sur lequel il a des droits, à moins qu’il n’y ait de la part
du vendeur dol ou surprise, il est naturellement supposé qu’il
a entendu comprendre et absorber ses droits.
Dans l’espèce, si Jean de Servière a été t rompé en quelque
point, si quelque chose lui a été cachée, que justice se fasse :
mais si en connaissant bien ce qu’il faisait , il a acheté benè
sciens et benè volens , les fonds affectés spécialement à ses
droits, comment peut il y avoir lieu aujourd’hui au partage de
ses droits ?
Ici nous nous attendons bien que les appelons feront revivre
contre l’ intégralité de la vente, les mêmes objections qu’ils ont
déjà employées contre la supposition d’un premier acte, c’està-dire que Jean de Servière ne connaissait pas ses droits. Mais
nous leur répéterons encore que si leur père n’a pas connu ses
droits , il a connu au moins tous les élémens de ses droits , il a
connu l’existence de sa nièce ; il a connu son décès, il a su qu il
était son oncle et son héritier par le sang; enfin il a su que les
fonds qu’ il achetait provenaient de la succession du père de
Françoise-Marie : car il était lui-même partie dans le partage
ébauché du 1760, qui les lui avait attribues. S il fallait, après
vingt-huit ans, revenir contre les effets d’un acte important, sous
6o$
�prétexte qu’ un des contractans qui a connu tous les élémens de
ses droits, n’a pas connu ses droits, on n’en finirait plus : et c’est 1
pourquoi la loi s’est décidée, une fois pour toutes, à prononcer
l ’axiôme : Nemo ignarus furis.
Toute la question qui reste dès-lors à examiner, est de savoir
si le domaine de Chés-Sabi, renfermant éventuellement les droits
de la dame de Montlosier et du sieur de S ervière, dans la suc
cession de Françoise-Marie, la dame de Montlosier a pu légiti
mement vendre, le sieur de Servière légitimement acheter. C ’est
ce que décide formellement Pothier, cité par M . Poirier, dans
une consultation sur ce sujet, du 10 juin 1810.
« Il est v r a i , dit Pothier , que l ’on ne peut pas vendre à
il est cléjà propriélaire. Suce rei e m p tio '
« non v a let, sive scie n s, sive ignurans, emerit. Mais 011 peut
a q u e l q u ’un la chose dont
« vendre de bonne foi la chose dont on n’est pas propriétaire;
0 car le vendeur ne s’oblige pas précisément, par le contrat, à
« transférer la propriété : il s’oblige seulement à mettre l’acheteur
« en possession de sa chose, et à le défendre coutre tous ceux
« qui par la suite voudraient la lui faire délaisser et y prendre
« quelque droit. Ila cten ù s tenetur ut rem emptori habere li« c e a t, non etiam ut eju s fa c ia t. L .
3o , §. i . e r , il. de act.
« empt. Mais on peut vendre une chose commune à son coU propriétaire. Si quelqu’un a quelque droit par rapport à une
« chose qui m’appnrtient ; puta , si j ’en suis débiteur envers
« lui, la vente qu’il ine ferait de telle chose serait valable, et
« elle serait censée être la vente du droit qu’il avait par rapport
a à cette chose. Si je n’ai qu’une propriété imparfaite d’une
« chose, je puis acheter ce qui manque a mon droit de pro« priété ».
« D ’après ers principes puisés dans Pothier, dit M . Poirier,
a que pourrait-on alléguer contre la vente de 1783, puisque la
« dame de Montlosier a livré la chose, et que l’acquéreur en
« jouit sans trouble. On ne pourrait jamais prétendre, pour Jean
de
�( 57 )
«
«
«
ii
«
«
«
«
deS ervière, qu’il a acheté ce qui lui appartenait, puisqu’il
ne pouvait jamais prétendre alors sur l’objet qu’ il acq uérait,
qu’une propriété imparfaite, éventuelle, dépendante d’un
partage litigieux, et dont il connaissait parfaitement l’incertitude. Il a donc pu acheter, et la dame de Montlosier a pu
vendre, parce qu’elle avait sur Ches-Sabi des droits au moins
égaux et communs, e t , s’il faut en revenir a la v é rité , des
droits certains et exclusifs.
« L a vente considérée comme telle est donc inattaquable.
« Enfin les demandeurs, en désespoir de cause, prétendraient-
« ils, contre les héritiers de la dame de Montlosier, la restitution
« du prix de la ven te, au bénéfice de la garantie qui a été expres« sèment stipulée ?
«
«
«
«
« L ’objection serait encore repoussée par notre p rin cip e , qui
est une fin de non-recevoir absolue (jurisprudence du premier acte ( i) . Mais regardons encore une fois l’acte comme
une vente, et il ne pourra y avoir lieu davantage à aucune
garantie.
« L e vendeur, dit Pothier, pages 493 et
5o i ,
est
tenu de ga-
« rantir l ’acheteur de tout trouble et éviction, par rapport à
« la chose vendue. Il est obligé de le défendre de toute demande
« formée contre l u i , par un tiers, pour lui faire délaisser la chose
« vendue. Mais le principe souffre exception, lorsque l’éviction
« procède du fait de l’acheteur; alors il est non recevable à se
« plaindre et à agir en garantie contre le vendeur. P o u r qu’il y
«
«
«
“
ait lieu à garantie, dit-il, page 5 19 , il ne suffit pas que la
chose soit sujette à éviction, il faut que l ’acheteur en ait été
réellement évincé; car il n’y a résultat de garantie que vis-avis l’acheteur qui a souffert éviction de la chose qui lui a été
“ vendue.
(0
M. Puirier a v a i t décidé que Pacte de 1783 était un véritable premier
acte de cohéritier.
15
�(î\\
( 58 )
« D o n c , ajoute M . Poirier, point de garantie sans éviction,
« point d’e'viction sans trouble, point de possibilité d’éviction
« ni de trouble de la part de l’acquéreur. On ne peut se troubler
« ni s’évincer soi-même; il serait absurde de le prétendre; la
« nature de la garantie résiste à une pareille idée. L e vendeur a
a garanti de tout trouble de sa p a r t , et de celle de tous les
« tiers. Il ne peut pas avoir promis à l’acquéreur de le garantir
« du trouble qu’il veut se causer à lui-même ».
Considéré comme vente , l’acte de 1783 a donc tout terminé
irrévocablement. L a dame de Montlosier a pu vendre; Jean de
Servière a pu acheter un bien qui était frappé de leurs droits
communs. Toute recherche ultérieure à cet égard ne peut être
admise.
Et remarquons ici la force des principes; c’est q u e , si on
le considère dans son exécution , le partage que les sieurs et
demoiselle de Servière réclament est devenu , parle fait de cette
vente, légalement et matériellement impraticable.
E n effet, une des premières règles des partages, c’est qu’ils
doivent être faits en corps héréditaires. Les appelons n’ignorent
pas cette règle; ils en ont fait la demande expresse dans leur
requête d’introduction. O r , il n’y a dans la succession de JeanBaptiste, sur laquelle celle de Françoise-Marie doit se former,
que deux corps de bien , Ilecolène et Chés-Sabi. De ces deux
corps de Lien, Ilecolène a été en 1782 l’objet d’une donation
spéciale ; en 1783 le père des appelans a acheté Chés-Sabi.
Comment un partage se lera-t-il aujourd’hui en corps hérédi
taire ? L a Cour dira-t-elle que le lot des sieurs et demoiselle
de Servière sera fait par retranchement sur Recolène ? Il serait
sans exemple d’ordonner un retranchement sur une donation
spéciale, lorsqu’à l ’époque de la donation le reste des biens
libres était suffisant pour remplir les droits réclamés. Dira-t-elle
que le retranchement sera fait sur Chés-Sabi ? Les appelans le
détiennent.
�( 59 )
Les sieurs et demoiselle de Servière se tourmentent de toutes
manières pour échapper à cette situation. Après avoir commencé
par demander le partage en corps héréditaire, ils se sont ravisés
dans leurs motifs d’appel ; ils ont demandé a prendre leur lot
seulement sur les 10,000 f. prix de Ghés-Sabi. Une telle disposition
serait contre les règles; elle serait sans exemple. Il est bien vrai
qu’un cohéritier ayant vendu par avance un des biens de la suc~
cession commune , on ordonne que le bien sera rapporté, pour
le partage en être fait seulement sur le prix. Mais alors la chose
demeure à son lot ; et le partage se fa it, quoique par anticipa
tion , en fonds héréditaires.
Il
n’y a que dans les cas des tiers acquéreurs qu’on peut trou
ver des exemples d’une telle substitution. Mais dans ce c a s , si
la loi déroge à sa règle générale , c’est par la faveur qu’elle veut
accorder à des étrangers , q u i , ne sachant rien des affaires d’une
succession , méritent d ’être protégés contre les effets d ’une i gn o
rance tout excusable. Nous doutons que des cohéritiers, mem
bres d’une même fam ille, qui traitent entr’eux sur des intérêts
qui leur sont familiers, soient dans le cas d’ une exception.ré
servée spécialement aux étrangers. S i , pour réparer les effets
d’une imprudence par laquelle un individu a négligé de fa ire
attention à Part. 14 de la Coutume d 'A u v erg n e t la Cour trou
vait convenable de transgresser une des premières règles des par
tages , son arrêt devenant un exemple, on ne sait trop quelle
conséquence il aurait. Les lois et les règles sont une propriété
commune ; il importe qu’elles ne soient pas facilement trans
gressées.
Nous devons ajouter dans ce cas, que la règl« même serait
violée en vain. L e sieur de Montlosier a remis à sa femme le
prix de Chés-Sabi ; il en offre la preuve; et il est d’autant plus
dans le cas de l’exception portée au Code Napoléon, pour les
cas d'in cen die, de fo r c e m ajeure, ou d ’événemens im prévus,
�( 60 )
que ce n’est point ici une excuse de circonstance. L a perte
de ses papiers est un fait constaté dans une affaire précédente.
Les sieurs et demoiselle de Servière disent dans leur dernier
mémoire : « Gela ne peut faire obstacle à l’action en partage ,
« et ne peut concerner que les opérations ultérieures. Les opéra« tions de rapport sont sans influence sur la demande principale
« à laquelle elles sont subordonnées, dont elles ne sont que la
« conséquence, et qu’elles ne peuvent jamais exclure (p . 3o)».
Mais les sieurs et demoiselle de Servière sentent très-bien que,
dans la position qui est leur ouvrage, un partage ne peut avoir
lieu que par des opérations irrégulières et violentes; leur but
serait de commencer à engager la Cour par un arrêt ordonnant
le partage, et de se prévaloir ensuite de cet arrêt , à l’ellet d’ob
tenir tous les bouleversetnens qu’ils voudraient.
L a Cour ne tombera pas dans ce piège.' En remarquant l’état
actuel des objets de la succession , elle s’apercevra que , par
un acte du fait légal de la dame de Montlosier, et par un acte
du fait volontaire de Jean de Servière, il n y a plus aujourd’hui
de lot possible , et par conséquent de partage possible. Elle
trouvera dès-lors contre sa dignité, d’ordonner un partage qui
n’amènerait aucun résultat.
Même en admettant l’allégation d’ignorance si gratuilemenr
avancée par les appelans, il serait impossible de leur accorder
ce qu’ils demandent.
Us voudront bien convenir que l’ ignorance de ses droits,
lorsqu’on a sous les yeux tous les élémens de ses droits, est
une grande faute. Certes, la loi 11 est pas douce en pareil cas.
On a beau se plaindre des dommages qu on éprouve, elle répond :
Quod quis pro sud culpd dammtm s e n tit, damnum sentire
non inCelligitur.
Dans la vérité, ils n’ont éprouvé aucun dommage. Ils ont
�( 61 )
au contraire retiré de cette faute de grands et de nombreux
avantages. A u lieu de retenir ces avantages, et de nous opposer
sur l ’ancienne succession une prescription déloyale, ils avaient
une manière bien simple de donner une apparence de justice à
leur réclamation; c’était de nous dire : « Rendez nous 10,000 f.
donnés par erreur : nous allons vous rendre Chés-Sabi et tous
vos droits à l ’ancienne succession. Oublions de part et d’autre
nos erreurs, et reprenons tous nos droits ». L ’apparence de cette
proposition raisonnable aurait pu séduire les juges, et alors nous
n’aurions pu nous-mêmes en être éloignés, que par la perspective
des frais, et un chaos de procès interminable.
Mais vous avez commis une faute qui vous a été heureuse ,
qui vous a été profitable; et lorsque vous en retenez les fruits,
vous voulez la faire tomber comme un fléau sur le sieur de
Montlosier, comme donataire, sous prétexte que le domaine de
Recolène , de la succession de Jean-Bnpiisle , iui a été donné
par contrat de mariage; oii bien comme mandataire, sous pré
texte que, faisant les atFaires de sa femme , il a reçu pour elle
une somme de 10,000 fr. qu’il a eue à sa disposition pendant
toute la route qui conduit du Teilhot a Recolène !
Comment a-t-on pu croire que la Cour voulût consacrer une
telle prétention? Certes, un partage n’est pas tout à fait comme
une contribution militaire, où, quand celui-ci manque de payer,
un autre paye à sa place. Un partage est assujéti à un ordre et
à des règles établis, que la justice 11e se permet pas de violer.
RÉSUMÉ.
En examinant en soi l’acte de 1783, il c^t évident que c’est
un prem ier a cte entre coh éritiers, ayant /<//£ cesser l in d iv is io n .
En examinant cet acte dans toutes ses circonstances, ainsi que
dans les circonstance* d’intérêt et de positions des parties, il est
16
�évident que cet acte est un arrangement de famille. Vingt-huit
ans de silence deviennent sur cela un témoignage irrécusable.
En considérant l’acte de 1783 comme simple acquisition faite
par Jean de Servière, du seul objet libre de la succession affectée
à ses droits, ces droits étant évidemment modiques, incertains,
éventuels, dépendant des hasards d’un partage, la dame de
Montlosier a pu légitimement vendre, et son oncle acheter un
objet sur lequel ledit Jean de Servière n’avait qu’une propriété
im parfaite. Par cette vente, les droits de Jean de Servière ont
été absorbés. Tout a été consommé.
E nfin, l’effet de cette vente étant aujourd’hui de rendre toute
opération régulière de partage im praticable, les héritiers de
J ea n de Servière n’ ont pas le droit de faire t omber c o m me un
fléau sur des tierces parties étrangères à la succession, les effets
d’une prétendue erreur qui leur a été profitable, et dont ils
s’obstinent à retenir les fruits,
M A N D E T jeune , avoué du sieur de Montlosier.
B E A U D E LO U X avoué des héritiers bénéficiaires.
A R I O M , de l ’imprimerie de la Cour impériale et du Barreau,
chez J .- C . S A L L E S ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montlosier. 1811?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandet
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
ventes
partage
successions
lettres de rescision
forclusion
tutelle
experts
domaines agricoles
indivision
prescription
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse pour le sieur de Montlosier et les héritiers bénéficiaires de la dame de Montlosier, intimés ; au dernier Mémoire pour les sieurs et demoiselle de Servière, appelants.
Table Godemel : Vente : 14. l’acte du 30 janvier 1783 consenti par Raynaud de Montlozier, en vertu de la procuration à lui donnée le 15 dudit mois, par Jeanne-Madeleine de Servière, son épouse, par lequel il vendit, à titre de vente pure et irrévocable, avec promesse de garantie, fournir et faire valoir, au sieur de Servière de Teilhet, les deux tiers du domaine de chez Saby, circonstances et dépendances, pour le prix de 10,000 livres et dix louis d’épingle qui lui furent payés comptant ; cet acte, quoiqu’il ait été le premier passé entre ledit sieur de Servière et la dame de Montlozier depuis le décès de Françoise-marie de Servière à laquelle ils devaient succéder, peut-il être considéré comme un partage de ladite succession, qui a dû faire cesser l’indivision de tous les objets composant cette succession ? ou bien, cet acte ne doit-il pas être regardé comme une vente pure et simple des deux tiers du domaine de chez Saby ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de la Cour impériale et du Barreau, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1811
1783-1811
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
62 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2018
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2017
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Priest-des-Champs (63388)
Pontgibaud (63285)
Clermont-Ferrand (63113)
Paris (75056)
Saint-Hilaire (63360)
Nébouzat (63248)
Roubras (domaine de)
Recolène (domaine de)
Chez Saby (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
domaines agricoles
experts
forclusion
indivision
lettres de rescision
partage
prescription
Successions
tutelle
ventes
-
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a08f8c7f39ab8001ea07e3df6adb42fb
PDF Text
Text
G E N E A L O G I E
D E S
P A R T IE S .
Gilbert de Servière,
à
Première» noce»,
Catherine Daurière.
M arguerite-Anne,
Jean-Baptiste, décédé en 1780,
Benoît Alaiga«,
Jeanne-Magdelejno de Servière,
•a nièce, décédée en 1788.
i
à
Françoite-M arie,
de cujui ,
décédée u n i postérité en 17O1.
N.
Secondes noces,
Gilberte Dupeyroui
Jean , sieur du T e ilh o t,
à
N . . . . Beaufranchet,
G ilbert.
Jeanne.
Am able.
M arie-Gilberte,
à
N. • •. Taravant.
Louise.
Françoise,
Enjelvin.
Jean s®.
Jacques,
n
Claire Desaix.
Jeanne-Magdeleine, décédée en 1788, sans postérité
,
Audebert.
Première» noces ,
Jcan-BaptUte de Servière ,
son oncle.
Seconde» noce» ,
François-Domiuique
Raynaud do Moatlotier.
�'
!
à
Marguerite-Aune,
Jean-Baptiste,
Benoît Maigne.
Jeanne-Magde
•a nièce, dé
Franço?8tente,
. . .
^
décédée sans j
unique
mtloiier.
�-
■
M
COUR
E
M
O
P
O
U
I
R
E
‘“ ™
R
I r ®. CHAMBRE*;
Les sieur et dame D E S E R V I E R E , propriétaires,
habitant au T e ilh o t, commune de SaintPriest-des-C hamps, appelans et intimés ;
C O N T R E
Le sieur E N J E L V I N , maire à Pontgibaud;
L o u is A U D E B E R T , marchand à Clermont et les dames T A R A V A N T , leurs
épouses , intimés et appelans
Le sieur R A Y N A U D D E M O N T L O Z I E R ,
propriétaire, habitant à Paris, intimé •
Les sieurs L E CO UR D E S A I N T -A G N E ,
propriétaire à Clermont P E Y R O N N E T }
médecin à Rochefort
E
et M. le baron M AN
N E Y évêque de Trêves, aussi intimés.
Ce t t e cause, fort simple dans son principe, ne
présentent d’abord que la seule question de savoir si une
vente consentie en 1783, à Jean de Servière, auteur des
A
�( o
appelans, devoit prendre les caractères d’un premier acte
entre coh éritiers, et ¿lever une fin de n o n -re c e v o ir
contre la demande en partage formée par les sieur et
dame de Servière. E lle a été jugée en ces termes au
tribunal de Clermont : et cette question fait l’objet d’un
appel interjeté par les sieur et dame de Servière.
L e besoin de l’une des parties lui a commandé de
compliquer un peu plus l’affaire; une vieille procédure
a été exhum ée; et en 18 10 , pour la première fo is , on
a pensé à interjeter appel d’ une sentence rendue contra
dictoirement en 1760, et exécutée très-volontairement
dans le courant de la même année.
Cet appel, imaginé pour les intérêts du sieur de M ontlozier, a été interjeté par les Taravan t, qui, pour la pre
mière f o i s , en 1809 , ont pris la qualité d’héritiers
bénéficiaires de la dame d e M o n tlo z ie r, décédée en 1788.
C e sont eux qui le soutiennent, sans objet comme sans
intérêt pour e u x -m ê m e s ; ce sont eux qui paroissent
défendre à la demande en partage ; et pendant que tous
les écrits sont faits en leur n om , parce qu’ils n’ont besoin
que d’y consentir, le sieur de M ontlozier, qui ne se com
promet pas en écrivant, agit, sollicite, recherche, re
mue ciel et terre pour gagner une cause que sans doute
il croit juste.
M algré cette addition d’une procédure étrangère à la
demande en partage, et qui l’a surchargée sans utilité,
il est fa cile, avec un certain o rd re, de rendre claire
ment les faits qui ont amené la contestation. Cette nar
ration naturellement arid e, et qui ne peut rien avoir
de piquant, exigera un degré d’attention de plus pour
en bien saisir tout l’ensemble.
�(
3
)
F A I T S .
G ilbert de Servière, aïeul des appelans et de la dame
de M o n tlo zier, fut marié deux fois.
E a premières noces, il épousa Catherine D a u r iè r e ,
dont il eut six enfans ; M a rg u erite-A n n e, qui épousa
Benoît M a ig n e , et dont il n’est pas question dans la
cause; Jean-Baptiste; Jean , sieur du T e ilh o t , père des
appelans; Marie - G ilb e rte , qui épousa le sieur T a ra v a n t , auteur des dames A u debert et Eujelvin ; Jean ,
et une autre fille dont il n’est plus question aujourd’hui.
E n secondes n oces, il épousa Gilberte D upeyroux ;
il en eut un seul enfant m â le , nommé Jacques, pèrô
de la dame de Montlozier.
Gilberte D u p e y r o u x , seconde femme de G ilbert de
S e rv iè re , avoit pour cohéritière Louise D u p e y r o u x ,
sa sœur. Les biens éloient indivis, et Gilbert de Servière
avoit été o b lig é , pour leur conservation, d’intenter ou
de soutenir des procès considérables, notamment contre
un sieur de M assé, et de faire des frais énormes qu’il
avoit tous avancés. Il paroît que ccs contestations furent
terminées par un tra ité, et j l fut stipulé que les frais
avancés par le sieur de Servièie seroîent compensés avec
certaines créances que le sieur de Massé avoit droit
de répéter contre Louise et Gilberte D u p eyro u x ; en
sorte qu’elles deviennent débitrices du ni on tant de ces
frais envers le sieur de Servière : ils se portoient, à ce
qu’il p a r o ît, à une somme de
fraiics‘
Gilbert de Servière avoit reçu , du chef de sa seconde
A 2
�( 4 )
fem m e, une somme de 2,000 francs. A p rès le décès de
Gilberte D u p e y r o u x , Jacques de S e rv iè re , son fils,
forma contre son père une demande en restitution de
ces 2,000 fr. ; mais comme le père étoit créancier de
2,175 fr. pour les frais avancés pendant le mariage pour
faire rentrer les biens de Gilberte D u p e y r o u x , Jacques
de Servière se désista bientôt de cette prétention.
Gilbert de Servière môurut en 174 2 ; tous ses enfans
étoient majeurs; mais Jacques, son fils du second l i t ,
l’a voit prédécédé ; Jeanne-M agdeleine, sa fille , étoit en
core m in eu re, Jean 2e. de Servière lui fut donné pour
tuteur.
L a succession du père donna lieu à. une instance en
la sénécliaussée ; Jea n , sieur du T e ilh o t, étoit donataire
de son père; les six autres étoient réduits à leur légitime
de droit; d’eux d’entr’e u x , notamment Jean 2e., avoient
cédé leurs droits au sieur du Teilhot.
Jeanne-Magdeleine, qui étoit seul enfant du second lit,
avoit des intérêts particuliers ; le tuteur forma en son
nom diverses demandes principales ou incidentes, ce
qu’il est assez difficile d’éclaircir après un laps de temps
aussi considérable, et dans un moment où aucune des
parties n’est nantie de la procédure.
Il prit d’abord des lettres de rescision contre le dé
partement fait par Jacques de Servière, de la demande
qu’il avoit form ée en restitution de la somme de 2,000 fr.
reçue du chef de Gilberte D u p e y ro u x , sa m ère, et il
en demanda l’entérinement.
Il prétendit en outre que sa mineure devoit prélever
9ur la succession un domaine appelé de Roubrat.
�( 5 )
L e sieur du T e ilh o t, à son to u r, demanda contre^ le
tuteur qu’il fût tenu de rapporter deux coffres .ççmplis
de linge, et un clieval harnaché, qu’il; prétendit avoir été
délivrés à Jacques de Servière.
-jü;. m ;; u
,-r
Sur toutes ces contestations, fut rendue, le '22 juillet
1760, une sentence contradictoire qui ordonna le partage,
11 est dit que le partage sera'fait>en quatorze portions ;
Q u ’il en sera délivré sept au sieurndu T e ilh o t, pour
le remplir de sa donation;, une pour [Sa, portion h éré
ditaire, et deux autres pour celles des- deux cohéritiers
dont il a les droits;
;/)J t?
* .jij ¿;;îî j'.ü; 'non ii\
Q ue sur deux autres -portions destinées^ aux dames
M aigne et T a ra v a n t, filles forcloses., il sera;)fait distrac-1
tion des sommes qui leur ont été données pour; légitim e,
et que le surplus,, faisant le droit d’accroi$sement, sera
partagé entre les quatre enfans mâles;
■
,
\-j..
Q ue la treizième sera délivrée à Jean-Baptiste* pour
sa légitime de d ro it;
-, ; , -r :,
.1 ir^ovu'l u-r.
. Et la quatorzième à Jean de, S erv iè re , comme tuteur
de Jeanne-M agdeleine,jsa n i è c e . , „ n 07jj
Il est o rd o n n é , s u r j e t t e dernière portion ; que-le
tuteur iinputeiftjja 'somme ¡de ] i ,75.i£v.r avancée pa;r,l’c’iïeul
pour le compte de Gilbert I}upeyrpu;>f, oatrç les 2,000 fr,
qu’ il a voit - entre,.les mains.,-j oov,} . ;| -ju^rti^'Ti: l* ?
« En conséquence, est-il d it, sur la demande en pré«
«
«
*
lèvement de la somme de 2,oop; francs.,* constituée à
Gilbertc D upeyroux,, ayonsqmis ,l§s parties h o r s d e
Cour-, à l’effet de quoi-av<j>ns.débouté le tuteur.dû
sa demande en entérinement des lettres de rescision
�( 6 >
« obtenues contre le département de Jacques de Sera vière. »1
'
^
Sur la demande éri prélèvement du domaine de R o u brat, ainsi que sur celle du sieur du T eilh o t contre le
tu te u r, il est ordonné que les parties contesteront plus
amplement.
Cette sentence fut signifiée au sieur du T e ilh o t , et
exécutée quant au partage immédiatement après; deux
experts, les sieurs Vialette et L e g a y , furent nommés
par les parties, et le 29 août 1760 ils firent leur rapport
qui contenoit partage entre les parties.
'' Ces faits se rattachent tous à l’appel interjeté par les
T a r a v a n t , de la sentence de 1 7 6 0 , le 12 janvier 1810.
, Il paroît que jusqu’à cette époque les pai’ties avoient
conservé paisiblement la possession des' lots respectifs
qui leur avoient été attribués; aucune n’avoit pensé à
critiquer les dispositions de la sentence, toutes au con
traire l’avoient respectée et exécutée; bien moins eucore
a voient-elles songé à suivre la disposition préparatoire,
relative au prélèvem ent de R o u b ra t, sur lequel le juge
ne s’étoit pas trouvé suffisamment instruit.
L ’ordre de faits dans lequel nous allôij's1e n tr e r, et qui
est h peu près étranger à l’appel dés T a râ v a n t, est néan
moins intimément lié avec ceux dont on vient de rendre
compte.
L a succession de Gilbert de Servière, partagée entre
tous ses enfans, se! composoit du château et réserve du
T e ilh o t, du domaine appelé 'du Teilhot', et de celui
nppelé de Chez-Saby.
�( 7 )
Les experts n’ayant à faire que la portion de JeanBaptiste et celle de Jeanne-Magdeleine * suivant lesrbases
posées par la sentence, avoient attribué des héritages
désignés à chacun de ces légitimaires; et délaissé le sur
plus au sieur du T e i l h o t , donataire.
Il paroît que sur leur rapport, et par leur m édiation,
les parties s’accordèrent entre elles, et exécutèrent ce
partage sur leur bonne foi réciproque. C ’est au moins ce
qui semble résulter des actes dont on va rendre com pte,
dans lesquels on en parle comme d’un partage verbal.
L e 3 avril 1 7 6 5 , M a rie -M a g d e le in e de Servière,
devenue m ajeure, vendit à Jean-Baptiste de S e rv iè re ,
son oncle, i ° . neuf corps d’héritages ou bâtimens, situés
au lieu de C h e z -S a b y , « et généralement, dit la vente,
« tous les autres biens fonds et communaux qui peu« vent lui appartenu*, et tels qu’ils lui sont échus par le
« partage verbal fait enti’e les parties et Jean de Servière,
« sieur du T e ilh o t , par les sieurs Vialette e t L e g a y ,
« experts convenus. »
Cette vente fut faite moyennant la somme de 2,248 fr.;
et en outre sous la condition par Facquéreur de tenir
quitte la
dem oiselle
de Servière de
la
somme {de
28 fr a n cs qiüelle lu i devait pour retour e t soulte dudit
partage.
Cet acte fut suivi d’ un contrat de mariage entre les
memes parties. Jean-Baptiste de Servière épousa JeanneMagdeleine , sa n ièc e, le 10 avril 1767.
L a future se constitua, i°. son trousseau estime 2,000£.;
2°. tous les droits qui lui étoient échus par le décès de
�( 8 )
ses père et m ère, avec pouvoir/au futur de les recher
ch e r , m êm e'de les rvendre et aliéner. • d
fi'^Lès futurs époux se firent donation mutuelle, au sur
vivant d’eu x , de tous leurs Biens présens et à venir.
Ce mariage donna le jour à cune fille, Marie-Françoise
de Servière,» dont la succession fait l’objet principal du
procès.
y.
>
ya Jean - Baptiste -de, Servière mourut à Recolène , une
dé ses propriétés, le 9 ' septembre 1780;
• !E t ’M arie-Françoise, sa fille, mourut à l’âge de douze
ans , le 25 octobre 1 7 8 1 , nè laissant d’autre succession
que la portion qu’elle pouvoit exiger dans les biens de
son père , par retranchement sur la donation portée au
contrat de mariage de 1767.
- A p rè s la1«perte de sa fille un iqu e, Jeanne-Magdeleine
de Servière ne resta pas lon gtem ps veuve ; elle épousa
le sieur Raynaud de M ontlozier, le 23 juillet 1782.
P ar le contrat de m aria g e , *elle- se constitua tous ses
biens, hors son domaine de C h ez-Sab y, qu’elle se réserva
en paraphernal.
Elle fit donation entre-vifs, au sieur de M on tlozier, de
son domaine de R ecolène, et lui donna la jouissance de
ses autres biens en cas de survie.
Ce sont toutes les clauses essentielles à rappeler. O n
se souvient qu’elle réunissoit sur sa tête sa portion et
celle de Jean-Baptiste de Servière, son premier m ari,
dans les biens de G ilbert de S ervière , son aïeul; elle
avoit deux tiers du domaine de Chez-Snby; et celui de
Recolène , acquis par Jean-Baptiste, lui apparienoit en
entier.
�( 9 ) .......................
entier. A la vérité cette p r o p r i é t é é f o i t sujette à retran
chement pour la portion légitimaire de Françoise-Marie
de Servière; mais cette circonstance, ignorée sans doute
des héritiers naturels de Marie-Françoise, n’avoit donné
lieu à aucune re ch erch e, et la dame de M ontlozier ne
la connoissant pas mieux , avoit continué à se regarder
comme propriétaii'e de la totalité.
C ’est dans cet esprit que voulant se défaire de tout
ce qu’elle possédoit dans le domaine de Chez-Saby, elle
donna, le i 5 janvier 1783, au sieur de M on tlozier, son
é p o u x , une procuration qu’il est essentiel de connoître.
Elle lui donne pouvoir « d'a fferm er, régir et spé« cialem ent vendre tous les biens tant meubles qu’im«
«
«
a
«
«
meubles, bestiaux , denrées et effets, et percevoir tout
ce qui peut lui être d û , tant en principal, intérêts que
frais, le tout appartenant à ladite dame de Servière,
comme biens paraphernaux situés dans le lieu de
Chez-Saby................ toucher les deniers provenant des
baux à ferme ou des ventes qu’il pourra faire, donner
« quittance du to u t, et faire desdits biens tout ce qu’il
k
jugera à p ro p o s, pour et au nom de ladite dame cons-
« tituante, promettant, etc. »
Cet acte ne restreignoit à personne en particulier la
faculté d’acquérir; il étoit libre au sieur de Montlozier
de vendre à qui bon lui sembleroit : ce qui démontre
déjà que Jeanne-Magdeleine de Servière, héritière de sa
fille, com m e sa cousine g erm a in e, n ’ a v o i t pas le moins
du monde en v u e , dans cette p r o c u r a t i o n , un pacte
quelconque sur la succession de sa iille, ni aucun traite
avec scs cohéritiers.
B
�J 3AC 10 )
La manière la plus avantageuse de se défaire des deux
tiers du domaine de Chez-Saby, étoit sans doute de les
vendre à celui qui avoit la propriété de l’autre tiers ;
aussi le sieur de M ontlozier pensa-t-il à traiter avec le
sieur du T e ilh o t; il lui en passa la vente le 30 janvier
1 7 8 3 , à quinze jours de date de la procuration. Il faut
connoîtrecet acte exactement, puisqu’il est la pièce prin
cipale du procès : tout y est essentiel, jusqu’aux qualités
que prennent les parties.
L e sieur de M ontlozier y figure comme fondé de
procuration de son épouse, pour vendre les deux tiers
du domaine de Chez-Saby.
- IL déclare ensuite « q u 'il vend à titre de vente pure
a et sim p le , perpétuelle et irrévocable, avec promesse
« de g a r a n tir , fourn ir, faire jouir et faire valoir envers
« et contre tous, à M . Jean de S e r v i è r e . . . . les deux
« tiers du domaine appelé de Chez-Saby, etc.
« Ledit domaine ainsi vendu f r a n c et quitte de cens
« et autres charges et servitudes, et en outre pour le
«
«
«
«
«
p r ix et som m e de d ix mille liv. et dix louis d’épingles,
q u i ont été payés co m p ta n t, réellement et d e f a i t . . . .
à la vue des notaires................ . . . au moyen de quoi
ledit sieur v en d eu r, ès-dites qualités s’est dès à p résent dessaisi et dévêtu de la p ro p riété, etc. »
Cette vente faite par la dame de Montlozier est celle
qu’on veut aujourd’hui faire considérer comme un par
tage de la succession de M arie-Françoise de Servière : il
étoit essentiel de le faire connoître. Les choses restèrent
en cet état jusqu’au 21 mars 178 8, époque du décès
de la dame de Montlozier.
�( 11 )
. Cet événement fixa sur la tête du sieur de M ontlozier
la propriété du domaine de R eco lètie, et .l’usufruit de
tous les autres biens de Jeanne-Magdeleine de Servière.
Il conserva paisiblement l’un et l’autre , quoiqu’une
partie de ces biens appartînt à la succession de Fran
ç o ise -M a rie de Servière*, ses héritiers ne réclamèrent
pas davantage en ce m om ent, qu’ils ne l’a voient fait dans
l’intervalle de son décès jusqu’à l’acquisition de 17 8 3 ,
ignorant sans doute que la légitime étoit conservée par
la lo i, malgré la donation entre-vifs.
Les événemens de la révolution vinrent se joindre à
ces circonstances, et éloigner encore le moment où les
sieurs de Servière devoient connoître la réalité de leurs
droits.
- Les choses ont resté en cet état jusqu’au 21 octobre
1809. Les sieur et dame de Servière ont commencé par
répudier la succession de la dame de Montlozier.
L e 3 novembre ils y ont fait nommer un curateur.
L e 18 du même mois ils ont présenté une requête au
tribunal de C lerm ont, et introduit l’instance.
Ils ont demandé la permission d’assigner, i ° . le cura
teur, pour venir à partage de la succession de FrançoiseM arie de S e r v iè r e , dont la dame de M ontlozier étoit
héritière en p artie, non comme sa m è re , mais comme
sa cousine germaine ;
••’ 2°. L e sieur de M o n tlo zier, donataire de son épouse,
et la représentant, pour vo ir o p é re r, sur l a donation
faite à Jeanne-Magdeleine de Servière par son premier
mari y le retranchement d’un tiers f o r m a n t la légitime
de rigueur de Francoise-M arie, leur fille ;
B 2
�( 12 )
3°. I 'es acquéreurs de Recolène, pour rapporter les
biens acquis.
Ces acquéreurs étoient M . M ann ey, acquéreur de ce '
domaine en .1 7 9 1 , et les sieurs Peyronnet et L ecou rS a in t-A g n e , entre les mains desquels il a passé depuis.
4 0. Enfin les sieur et dame de Servière ont demandé
une provision de 3,000 francs.
' Cette requête ayant été répondue d’une ordonnance
portant permission d’assigner, le tribunal de Clermont a
été saisi de la contestation par exploits des 20 et 28 no
vem bre 1809.
Mais dans l’intervalle de nouvelles parties s’étoient
présentées. Les T a r a v a n t, sans se déranger de leur do
micile , a v o ie n t , le même jour 20 n o vem b re, accepté
sous bénéfice d'inventaire la succession de la dame de
M o n tlo zier, par acte mis au greiTe du tribunal de Clermont..
Cette acceptation , à laquelle vraisemblablement ils ne
mettoient pas grand intérêt, avoit été faite par le sieur
de M ontlozier, comme fondé de p o u vo ir, en vertu d’une
procuration sous seing p r i v é , du 12 du môme mois.
Ces héritiers bénéficiaires s’en tenoient à cet acte : leur
fondé de pouvoir ne s’empressoit pas de le faire connoître. Les sieur et dame de Servière en furent instruits;
ils prirent le parti d’en retirer une expédition ; et le
26 décembre ils les assignèrent, en leur notifiant l’acte
d’acceptation mis au greffe par leur fondé de pouvoir.
•: Pendant que tout cela se faisoit h Clerm ont, un autre
genre de procédure se preparoit en la Cour. La sentence
de 1760 fut exhumée ;. et malgré son isolement, son
�( *3 )
exécution, et lès cinquante années entassées sur elle, un
appel f u t . interjeté le 12 janvier 1810", nf) t
-j ■
--»
Par qui ? Mais pourquoi cette question»? n e1 vient-on
pas de dire que les Taravant s’étoient portés héritiei’s
bénéficiaires de la dame de Montlozier ?
Cet app el, interjeté pour la première fois en 18 1 0 ,
pouvoit paroître d’une inconcevable témérité; aussi cruton nécessaire de lui donner la couleur d’une reprisé!'’
On y parle d’un précédent appel, que les'sieur et damé
de S erv ière , et vraisemblablement les Taravant euxm êmes, peuvent bien soupçonner n’avoir jamais existé;
car ils n’en connoissent pas la plus petite trace!
’’
O n y assigne pour voir reprendre ï’instàncè prétendue
pendante au parlement; mais, par mesure d e 1prudence^
qui assurément ne passera pas pour un excès de pré
caution , on y demande acte de ce qu’on réitère l’ap p e l ,
de ce qu’au besoin on en interjette un nouveau; i ° . en
ce q u e , par la sentence, le tuteur de Jeanne-Magdeleine
de Servière a été débouté de sa demande en prélèvement
des 2,000 francs ; 20. en ce* qu’il a été ordonné qu’on
contesteroit plus amplement sur le prélèvement du do
maine de Roubrat. O n demande l’adjudication des con
clusions prises en première instance. >
i
•*' *
Quand on considérera cle près ces deux chefs de
demandes, on demeurera convaincu qu’ ils n’étoient pa's
sérieusement l’objet de l’appeli
'<•
^
A u s s i, à mesure que les sieur et dame de Servière
sollicitoient le jugement de la cause, les’Taravant redoitbloicnt d’eiïorts pour le retarder; ils vouloicnt le pousser
jusqu’après le jugement de la demande en partage, dont
�C x4 )
cet appel étoit destiné à devenir un incident. U n arrêt
par d éfau t, du 31 juillet 18 10 , les déclara non recevables; ils y "ont formé opposition.
Bientôt après, et le 14 août 1810, le tribunal de Clermont a prononcé sur la demande en partage; les sieur
et dame de Servière en ont été déboutés.
Les motifs de ce jugement sont en substance, que la
succession de Françoise-Marie de Servière étoit ouverte
lors de la vente de 178 3 ;
_ Que cet acte est passé entre majeurs ;
Que les deux tiers du domaine de Chez-Saby faisoient
partie de la succession de Jean-Baptiste de Servière, et
q u e Jean de Servière ne pouvoit ignorer qu’ils fussent
sujets à la légitime de Françoise-M arie;
Que cet acte, quoique qualifié v e n te , doit être con
sidéré com m e ayan t eu pour 'objet de f a i r e cesser
t indivision entre les contractans, et de f ix e r 'le s droits
successifs de chacun dans l’hoirie de Françoise-Marie
de S ervière;
Que le prix de 10,000 francs donné à la vente doit
être considéré comme soulte de partage ;
Enfin que cet acte, considéré comme p artage, n’a pu
être attaqué après le terme de dix années.
Les sieur et dame de Servière, par un appel, ont saisi
la C our de cette demande.
C ’est alors que sous le nom deT aravan t on s’est décidé
à poursuivre; on a demande la jonction de cette instance
avec celle déjà pendante sur l’appel de la sentence de 1760.
La cause portee à l’audience, les sieur et dame de Ser
vière s’opposèrent à cette jonction.
�(iS)
! Ils soutinrent qu’il n’y a voit pas lieu à reprise 3 parc©
qu’ il n’y avoit pas d’appel au parlement; ,*> r
Q ue l’appel interjeté, en tant que de besoin , en 1810,
n’étoit pas recevable; que conséquemment il n’étoit pas
question d’examiner si le fond avoit ou non de la connexité avec la demande en- partage.
A u fond même ils observèrent que l’appel étoit sans
objet pour les 2,000 francs;
r
E t que pour le prélèvement du R oubrat, ce n’étoit pas
le cas d’interjeter appel de ce que les juges ne s’étoient
pas trouvés suffisamment instruits, et de se plaindre d’une
disposition purement suspensive, après avoir reconnu , •
par un silence de cinquante années', qu’on n’étoit pas en
état de leur en apprendre davantage ;
Q u ’ainsi ce ne pou voit être, sous aucun rapport, le
cas de saisir la C our par un appel.
• Néanmoins, contre les conclusions du ministère pu b lic,
•la jonction fut ordonnée. Il faut donc examiner la cause
dans son ensemble.
:
'
D IS C U S S IO N .
. 1
r
•
L ’ordre des faits nous conduit d’abord à examiner la
demande en rep rise, et l’appel de la sentence de 1760.
Quelques réflexions démontreront bientôt qu’il n’est ni
recevable ni fondé. .
E t d’aboi'd il faut écarter la demande en reprise de
l’appel pendant au parlement; on n’en r appor te aucune
trace, les sieur et dame de Servière nelo connoissent pas:
�y ** '
( Ï6 )
comment pourroit-on en ordonner la reprisé, lorsqu’il
est plus incertain qu’il ait jamais existé ?
Que faut-il penser de l’appel en lui-m êm e ? L a sen
tence fut signifiée et exécutée en 1760.
- A là vérité cette exécution n’auroit pas préjudicié à
l ’appel de la disposition relative au domaine de R oubrat,
parce que le partage devoit être fait nonobstant le sursis;
mais elle n’en est pas moins la preuve certaine que la sen
tence fut légalement connue de toutes les p a rties, en
1760, que conséquemmentles délais de l’appel ont couru
depuis cet époque.
ç 1 Ce délai étoit de dix ans pour une sentence contra
dictoire , et il s’en est écoulé cinquante.
O r , non - seulement on ne rapporte aucune preuve
d’interruption, mais encore il est évident que la pres
cription s’est accomplie plusieurs fo is , soit sur la tête de
Jeanne-Magdeleine de Servière, pour le compte de la
quelle l’appel est interjeté , soit sur celle du sieur de
M ontlozier , son d onataire, soit même sur celle des
Taravant.
E t en effet, Jeanne-Magdeleine étoit majeure en 176 5,
lorsqu’elle vendit à son oncle sa portion dans les biens
du père : elle n’est décédée qu’en 1788.
Et depuis cette époque vingt-deux ans se sont encore
écoulés sur la tête du sieur de M o n tlo zier, son dona
taire , et sur celle de son héritier.
) Dira-t-on que la succession étoit vacante? Mais l’héri
tier qui a accepté après vin g t-d e u x ans, a dû prendre
les choses eu l’état où elles étoient. L ’acceptation remonte,
par
�( 17 )
par la fiction de la lo i, au moment du dccès; car celui
qui accepte de fait étoit déjà saisi de droit depuis l ’ou
verture de la succession; .il est censé avoir été héritier
dès le premier instant ; il a toujours été l’homme de la
succession; les actions ont résidé dans sa personne, et la
prescription a co u ru , sauf les interruptions ordinaires.
Mais au fond, qu’est cet appel? Une chimère.
Il est évidemment sans motifs pour le prélèvement de
2.000 francs constitués à Gilberte DUpeyroux. G ilbert
de Servière, qui les avoit reçus, avoit avancé pour elle
2,175 francs, dont elle avoit largement profité par la
rentrée de propriétés considérables : les deux sommes
s’étoient réciproquement compensées en se rencontrant
dans la même main.
Aussi Jacques, père de Jeanne-Magdeleine, qui avoit
form e contre son pere la demande en payement de ces
2.000 francs, s’étoit-il départi de sa demande.
C ’étoit donc très-mal à propos que le tuteur de sa fille
avoit pris des lettres de rescision contre ce département;
la sentence avoit donc bien jugé en le déboutant de sa
demande en entérinement des lettres ; et enfin JeanneM agdeleine, devenue majeure, avoit donc sagement ap
précié cette sentence en l’exécutant.
V o ilà , ce sem b le, de quoi justifier pleinement, et la
sentence, et le silence de cinquante années qui l’a suivi,
par conséquent la témérité de celui qui s’est avisé de le
rompre.
S e r o it- il plus heureux pour l’autre chef? Cela n’est
pas vraisemblable.
Pourquoi fut-il ordonné un plus amplement contesté?
C
�( 18 )
Parce que le tuteur ne justifioit pas sa demande en
prélèvement.
P o u r q u o i, après cette sentence, le tu teu r, ou JeanneM agdelein e, devenue majeure, n’ont-ils pas tenté d’éclairer le ju g e , et d’obtenir une décision ?
. Parce q u e , sans d o u te , ils n’ont pas été à même de
mieux établir leur prétention.
E t de là ressort évidemment le bien jugé de la sen
tence.
Si d o n c , à l’extrémité de cette longue période , ils
ont trouvé des moyens capables d’obtenir le prélève
ment qu’ ils demandoient, c’est au juge lui-même qu’il
falloit les produire ; mais ils ne pouvoient fournir le
plus léger prétexte d’attaquer la sentence.
Juger que la sénéchaussée a fait tort aux parties par
un sursis indéfini, lorsque les parties elles-m êm es en
ont attesté la nécessité par un sursis volontaire d’ un
demi-siècle; retenir la connoissance de cette disposition
par voie d’a p p e l, blâmer le juge et infirmer son juge
ment dans des circonstances semblables, ce seroit ne pas
a voir une assez haute idée de la justice.
, Mais deux mots sur le fond démontreront encore la
témérité des Taravant.
L e sursis prononcé par la sentence pouvoit avoir deux
causes.
O u le tuteur n’établissoit pas que sa mineure fût
propriétaire du domaine dem andé, ou il ne prouvoit
pas qu’il fût entre les mains des cohéritiers de Servière.
O r , ce que le tuteur ne faisoit pas alors, les Tavavaut ne le font pas encore aujourd’hui.
�( 19 ^
s Ils ne se sont pas mis en mesure d’établir le droit de
Jea n n e-M a gd e le in e de S erv iè re , à un domaine de
Roubrat.
E t quand ils l’auroient fa it, leur cause n’en seroit pas
meilleure ; car ce domaine n’est pas entre les mains des
héritiers de Servière. Si en effet on consulte le partage
de 1 7 6 0 , on ne voit dans la masse des biens que la
réserve et le château du T e i lh o t , le domaine du même
n o m , et le domaine de Chez-Saby ; rien qui ressemble
à un domaine appelé de Roubrat.
Comment donc pourroit s’exercer ce prélèvem ent? '
’ Ces réflexions sont surabondantes : on n’a pas cru ce
pendant devoir les omettre; elles démontrent à la C our
que cet appel n’est qu’une réminiscence tardive, destinée
seulement à faire diversion , et sur la q u elle , il faut la
croire, les Taravant conservent pour leur compte une
parfaite insouciance.
Il faut donc entièrement oublier cette partie de la
cause, et ne s’occuper que de l’appel du jugement rendu
par le tribunal de Clermont.
Sur ce p o in t, la défense du sieur de M ontlozier roule
sur un seul argument qu’ il tourne et retourne sans cesse
dans la bouche des Taravant.
Quoique la vente de 1783 soit d’un objet unique
de la succession , quoiqu’ellç soit faite pour un prix
certain, quoique j’aie reçu ce prix qui est la représen
tation de l’im m euble, et que je l’aie tout entier entie
les m ains, je soutiens que cet acte qualiiie vente étant
le premier que j’aie passé avec mon cohéiitiei t il tient
�( 20 )
lieu d’un véritable partage, lors duquel chacun auroit
reçu sa portion.
A la v é r ité , le prix payé et reçu fait obstacle à cette
interprétation -, mais l’obstacle est peu de chose : la somme
payée e st, suivant l u i , une soulte de partage, et non
un prix de vente.
C ’est donc principalement dans cet acte qu’il faut
chercher des principes de décision. P o u r cela, il faut
en considérer la natui’e , la substance et les effets.
Mais avant tou t, il faut bien saisir ce qu’ont entendu
la-loi et la jurisprudence en érigeant en principe que
le premier pacte entre cohéritiers , sur la succession
co m m u n e, est réputé partage.
D e tous les temps on a reconnu en principe qu’il n’étoit
pas plus permis d’user de fraude dans un partage que
• dans tout autre acte. C ’est ce qui' y a fait admettre l’ac
tion en rescision pour lésion.
P o u r échapper à cette action, on eut bientôt imaginé
de donner aux partages une couleur qui ne leur étoit
pas p ro p re, celle d’ une transaction-, celle d’une v e n te r
d’un échange, etc. La loi étoit éludée, si les tribunaux
n’eussent pas pris le parti de réprimer sévèrement cette
fraude.
• P a r une conséquence directe du principe qui veut
q u’on considère plutôt l’intention réelle des parties que
la form e ou la figure des actes, on considéra comme
partage, non pas comme l’ont dit les premiers juges
avec les intirnés, tout prem ier acte entre co h éritiersf
mais tout premier acte r e la tif à la succession } tout acte
�( 21 )
dont l’objet évident étoit de f o i r é cesser Fiiidivision.
Puisque cette règle n’est pas écrite dans la lo i, il faut
s’aider de l’autorité des docteurs qui les premiers l ’ont
introduite ; mais aussi faut-il prendre leur doctrine telle^
qu’elle est, et surtout ne pas lui donner une amplifi
cation ridicule.
.• P o u r n’éprouver aucun reproche, prenons les auteurs
que citoient les Taravant en première instance : d’abord,
Mornac.
Il s’exprime ainsi sur la loi 30, cod. D e p a ctis, in jin . :
Cœterum ut transaclionis verbum transfertur hic
ad bonorum diçisiones ita et servam us ex u s u , atque
e x a rrestis, doctrinam interpretum quâ d ici consuev it, coheredes quantum vis utantur transactionis verbo
I N D I V I D U N D I S QUÆ I N T E R EOS E X H E R E D I T A T E D E F U N C T I C O M MU N IA S ü n t esse
tcimen n on transactio—
nem sed meram
factam
divisionem
scilicet
u t
7iec
ver à injuriosus dam nosusque sociu s in causa s i t , ut
QUISQUE PORTI ONE SUA H E R E D I T A R I A F R U A T U R ,
deteratur hœ reditatis indivisœ unw ersitas.
11 ne faut pas se faire illusion sur le véritable sens de
ce passage. Ce n’est pas tout premier acte entre cohé
ritiers que les auteurs ont considéré comme partage,
mais uniquement celui qui a eu pour objet de diviser
la succession commune : in dividundis quœ com munia
surit.
Bien plus, cette décision porte avec elle - même son
*notif, sou objet; elle n’en a d’autre que de prévenir
les fraudes, en assujettissant à la rescision pour cause
de lésio n , les actes qui ont intrinsèquement le caractère^
�446 '
( 22 )
de partages quoiqu’autrement qualifiés : Ja cta m sciîicet
u t q uisqu e portione sua fru a tu r.
Teuons-nous-en pour ce moment à ces deux remar
ques; nous verrons bientôt si l’acte de 1783 peut satis
faire et l’esprit et l’objet de cette décision toujours ob
servée depuis en jurisprudence.
Les auteurs français tiennent tous le même langage.
Bornons-nous à M . M e r lin ; voici ses propres expres-sions rapportées par les Taravant eux-mêmes, en pre
mière instance :
« La jurisprudence a établi que tout premier acte entre
« cohéritiers, a u s u j e t d e l a s u c c e s s i o n qui leur
« est dévolue
en commun , est réputé partage. »
E t enfin, quoi de plus formel que l’article 888 du
Code Napoléon ?
« L 'a ctio n en rescision est adm ise contre tout acte
« qui a four
objet
de
fair e
cesser
l ’i n d i v i s i o n
« entre cohéritiers , encore qu’ il fût qualifié vente ,
« transaction, éch a n ge, ou d’ une autre manière. »
Cet article n’est qu’ une copie fidèle du passage de
Mornac. La loi n’a d’autre but que d’atteindre les actes
dont Vobjet est de f a i r e cesser t in d iv isio n , et de les
soumettre à Tabtion en rescision.
Mais il faut que Pobjet de l’acte soit du moins apparent;
que quelque circontance le découvre : jusque-là il reste
ce qu’ il est, sans qu’il soit permis ni de le dénaturer, ni
d’y lire autre chose que ce qui y est écrit; car il est un
autre principe non moins sacré, c’est qu’un acte vaut pour
ce qui y est ex p rim é, à moins que sa substance 11e s’y
oppose. '
�( *3 O
Q u ’on n’érige donc pas en principe que deux co h é
ritiers de Liens indivis ne peuvent faire entr’eux de
convention d’aucune espèce, sans s’interdire la faculté
de demander le partage, et que le moindi’e pacte fait
par l’un d’eux sur le plus petit héritage de la succession,
vaut de droit aliénation de sa, p o rtio n , quelque con
sidérable qu’elle puisse être. Celte proposition est tel
lement révoltante, que la raison seule la repousse sans
le secours du droit.
Cependant, a dit en première instance le sieur M outlo zier, « la loi n’exige pas, pour que l’acte soit réputé
« partage, que les parties aient m ontré l’intention de
« partager ; elle veut que quand même elles auraient
« employé tous les modes imaginables pour ôter à leur
« acte l’apparence d’un partage, cet acte soit réputé tel, r»
Cet argument ne pèche que par un seul mot ; mais
si on supprime ce m ot, l’objection disparoît toute entière.
N o n , sans d o u te, la loi n’exige pas que les parties
aient m ontré l’intention de p artager, car alors l’acte
serait partage par l’expression comme par le fait; mais
elle exige qu’elles l’aient eue, que l’acte a it
eu pour objet
de faire cesser l’indivision. Et il faut que cette intention
et cet objet paraissent par quelqu’endroit ; que l’acte
permette de le penser, et en fournisse la p reu v e, ou
par lui-m êm e, ou par les circonstances qui l’enlpurent.
A in si, dans une donation frauduleuse et déguisée sous
la forme d’une ven te, le juge n’exigera pas,, pour l a n n u lle r , que les parties aient montre leur intention de
trom per, mais au moins ne le décidera - t - i l pas sans
que cette intention lui soit dévoilée par un concours
�( M )
de circonstances. Hors ce cas , il maintiendra l’acte
comme donation , et en ordonnera l’exécution dans sa
form e, pour tout ce qui y est exprimé. Il en est de même
dans le cas présent.
Ces principes posés, examinons l ’a cte , et voyons s i,
bien loin de permettre l’explication des intimés, il nel’exclut pas entièrement.
‘ i ° . La perm et-il? non.
Il est passé entre la dame de M o n tlo z ie r, par son
fondé de p o u v o ir, et le sieur du Teilhot.
Ils n’y disent nulle part q u ’ils traitent comme cohé
ritiers.
Ils ne se donnent pas même cette qualité.
Ils n’y parlent d’aucune succession qui soit le sujet
‘de leur pensée.
L ’une des parties vend à l’autre un objet déterminé.
E lle le vend moyennant un prix certain.
L ’acquéreur paye le p r i x , et ne devient propriétaire
q u ’à cette condition.
E t il faudroit considérer cet acte comme fait au sujet
r
d’ une succession !
Considérons bien la position des parties.
Jeanne -M agdeleine de Servière étoit donataire u n i
verselle de son premier mari.
E lle se considéroit comme propriétaire du tou t; elle
l’étoit en e ffe t, sauf le droit réservé à sa fille de de
mander le retranchement.
E lle décède en minorité , ne laissant que des héritiers
collatéraux , qui ignorent le droit que leur donnoit la
loi de faire retrancher la donation.
Ces
�•
(
î
5
)
Ces héritiers, possesseurs d’un tiers de d om ain e, et
bien aises d’y réunir les deux autres, gardent deux ans
le silence, quoiqu’il leur fût facile d’en obtenir la ma-*
jeure partie par cette voie.
A u bout de ce temps, la dame de M ontlozier met en
Vente ces deux tiers de domaine; ils n’aperçoivent pas
d’autre moyen de les acquérir, ils les achètent, ils les
payent.
E t ils ont entendu faire un partage !
E t la justice doit décider qu’ils ont eu pour objet de
f a i r e cesser Vindivision !
Evidemment l’acte ne permet pas une interprétation
aussi contraire à sa substance qu’à sa forme.
2°. Il l’exclut entièrement.
Car pour décider que l’acte a eu pour objet de faire
un partage , il faudroit d’abord établir que les parties
en ont eu la pensée.
O r , le contraire est témoigné par l’acte, et surtout
par la procuration en vertu duquel il est consenti.
E n eifet, le sieur de M on tlozier, vendeur com m e
f o n d é de pouvoir seulement, n’a pu avoir d’autres v o
lontés, y faire d’autres conventions que celles autorisées
par la procuration.
Que porte-t-elle?
Remarquons d’abord que la dame de Montlozier n’y
a absolument en vue que les deux tiers du domaine de
Chez-Saby.
Elle donne pouvoir à son mari de les a fferm er , régir,
et spécialem ent vendre, percevoir tout ce q u i peut lu i
être d û , etc.
�( â'6 )
E lle ne lui permet donc de pacte que sur les deux
tiers de C h e z - S a b y , ce qui est absolument exclusif de
toute idée de partage de la succession de sa fille; car
pour cela il eût fallu y rapporter, au moins fictivement,
le bien de Recolène dont elle avoit déjà disposé ; par
conséquent traiter, faire un pacte quelconque sur cette
propriété; ce dont elle n’avoit pas donné le pouvoir.
E t ce domaine de C h e z-S a b y est tellement peu dans'
sa pensée destiné à faire des lots de partage, qu’elle
autorise son-fondé de pouvoir à le vendre à qui bon lui
semblera, sans limitation de personnes, et surtout sans
aucune indication de ses cohéritiers.
E t parce qu’un accident tout à fait étranger à. la pro
curation de la clame de M ontlozier, et indépendant de
sa v o lo n t é , a voulu que l’acquéreur fût précisément
un cohéritier, il en résultera que le fo n d é de p o u v o ir,
qui a reçu le p r i x , a voulu et pu faire un partage de
succession !
Cette proposition est insoutenable.
Ici on ne peut se dispenser d’ une réflexion.
Ce fondé de pouvoir fut le sieur M on tlozier, aujour
d’hui partie dans l’instance.
au lieu de placer des moyens de d r o i t ’dans la bouche
des T a ra v an t, pour imprimer à la vente de 1783 un
caractère qui n e peut ótre le sien , il avait positivement
avancé qu’en effet il fut question entre le sieur de
Si
Servi cire et lui du ¡partage de- ’la succession ; que l’acte
n’eut réellement 'pus d’autre o b je t, que les ro,ooo IV.
payés ne furent pas le prix réel de la vente, mais scu-
�( 27 )
lement une soulte de partage, on lui demanderoit com
ment il put le faire ainsi en vertu de sa procuration ;
Comment il n'entra pas dans sa pensée, à lui qui y
eût été spécialement intéressé comme donataire de R e c o lè n e , de lier formellement le sieur de Servière par
l’abandon de ses droits successifs ; ce qu’il eût bien fait
assurément si c’eût été là son intention ;
O u comment, s’il voulut partager avec une procuration
qui ne le lui permettoit pas, il n’eut pas l’idée, ou d’en
prendre une autre, ou de se porter fort pour son épouse;
ce qui de voit d’autant moins lui coû ter, qu’il étoit pro
priétaire de tout le surplus de la succession.
Il est difficile de deviner ce qu’il pourroit répondre;
mais au moins il auroit eu le mérite de s’expliquer po
sitivement.
Comment se p e u t- il donc que sur un fait qui lui est
personnel, il se réduise lui-même à des inductions tirées
des principes du droit, qu’il accommode au besoin de sa
cause ?
Mais il est évident que l’acte ne contient pas les con
ditions indispensables pour pouvoir le présumer partage.
Si on considère le but et les effets de la jurisprudence
dont les intimés se prévalent, on en sera bien mieux
convaincu.
O n a vu qu’elle n’a pas d’autre objet que de soumettre
ees sortes d’actes à la rescision pour lésion.
Aussi les intimés se sont-ils empressés de d ir e , et le
tribunal de Clermont de juger , que cette action ne
pouvoit être exercée après dix ans.
D 2
�( 28 }
Ils reconnoissent donc que cet acte eût été susceptible
de lésion du tiers au quart.
Il y a grande apparence qu’ils n’eussent pas tenu le
même langage le lendemain de la vente, si le sieur de
Servière eût exercé cette action ; et certes ils y auroient
été bien mieux fondés; car si on suppose qu’elle eût été
exercée, il est au moins fort difficile de concevoir com
m e n t on s’y seroil pris pour l’étab lir, et par quel moyen
la justice auroit pu l’admettre.
E t si pour distinguer mieux encore le caractère réel
de l'acte, on suppose que la dame de M ontlozier eût ellemême demandé la rescision pour lésion d’outre-moitié,
comment le sieur de Sei'vière e û t-il résisté à cette de
mande ? e û t - il dit que c’étoit un premier acte valant
partage ?
Mais la dame de M ontlozier lui eût victorieusement
répondu : V o u s êtes dans l’erreur. D ’une part, quand
l’acte seroit fait en form e de partage, il ne m’obligeroit
pas, comme tel , car je n’en ai pas donné le pou vo ir;
mais il n’est que l’exécution littérale de ma procuration.
Je n’ai voulu que vous vendre, et non pas faire un pacte
de succession; je vous ai ven d u ; je vous ai garanti la
propriété; j’ai reçu le p r ix ; mon contrat n’a donc rien
d’aléatoire; il n’est donc qu’une véritable vente, sujette
à toutes les règles de la vente ; je suis donc fondée à
prendre la voie de la rescision.
Cet argument eût été sans réponse.
En faut-il davantage pour démontrer que le tribunal
dont est appel s’est m épris?
�( 29 )
M ais, ont dit les Taravant, le domaine deC h ez-S ab y
est le dernier vendu ; donc votre demande en partage
devroit d’abord s’exercer sur cette partie de la succession.
O r , à qui pouvez-vous le demander qu’à vous-même?
E t quelle singularité de distinguer dans la cause Servière h éritier, de Servière acquéreur, et de le voir ré
duit à exercer son action contre lui-même en sa double
qualité?
>
Cette subtilité approche beaucoup du sophisme.
E t en effet, s’ il y a quelque chose de singulier à voir
un individu acheter une propriété qui étoit à l u i , en.
tout ou en partie, ignorant qu’ il y a un droit quelconque,
il n’y en a pas au moins à lui voir ensuite réclamer ses
d ro its, nonobstant l’acte de vente.
r
Dans le cas présent, que peut-il en résulter?
L e partage ne s’exerce pas sur un objet particulier,
sur un seul héritage de la succession ; il se fait sur la
masse entière.
Celui qui demande le partage p e u t, en réclamant le
rapport fictif de toutes les aliénations pour supputer son
lo t, ne demander le rapport réel qu’à certains des ac
quéreurs-, il n’est pas tenu de l’offrir s’il est acquéreur
lui-même.
.
Mais si le cohéritier qui a vendu, on ses acquéreurs
plus anciens l’exigent, il en résulte alors, que le vendeur,
obligé de garantir tous ses faits et l’exécution de sa vente,
est sujet aux dommages-intérèts de son acheteur. ■i
Mais cela ne peut faire obstacle à l’action en partage,
et ne peut concerner que les opérations ultérieures. X,es
questions de rapport sont absolument sans influence sur
�C 30 )
la demande principale', à laquelle elles sont subordonnées,
dont elles ne sont que la conséquence, et qu’elles ne
peuvent jamais exclure.
c Les intimés ont dit encore que la succession ne p résentoit aucun espoir au sieur du T e i l h o t , qui n’avoit
absolument rien à y prendre.
Si cet argument est renouvelé, on y répondra à l’au
dience; mais dès à présent on peut observer que pour
absorber la succession de Jean-Baptiste par les reprises
de son épouse , il a fallu soutenir que le bien d’ Arseige,
vendu 7,5oo francs par le m a ri, en vertu du pouvoir
qu’il tenoit de son contrat de m ariage, devoit produire
une reprise de 30,000 francs , parce qu’ il ne pouvoit
vendre qu’avec condition d’emploi. Gomme si la charge
d’emploi étoit autre chose qu’un moyen de garantie,
poiir assurer la reprise de la femme; comme si elle peut
jamais avoir d’autre efTet que d’autoriser l’acquéreur à
retenir le prix jusqu’à l’em ploi; comme si enfin le mari
peut jamais être débiteur de plus qu’ il n’a reçu !
Enfin les intimés prétendent tirer un grand parti du
silence gardé pendant vingt-huit ans.
O n l’a déjà dit ; il a eu pour cause principale l’igno
rance de son droit, et: pour cause secondaire les événemcns qui ont traversé cet intervalle.
Mais ce silence, d’ailleurs bien justifié, n’est pas une
fin de n o n - recevoir. Personne n’est coupable d’ ignorer
son d ro it; personne n’est p u n i, que celui dont l’ ignoj-ance ayant duré trente ans utiles, laisse présumer qu’il
l’ti abandonné.
Si la demande eût été formée peu de temps après l’acte
�( 31 )
de 1783, elle auroit du paroi tre incontestable : elle est
toujours la même après vingt-huit ans.
Si ce silence n’étoit justifié par r ie n , il pourroit faire
sur l’esprit du juge une légère impression morale sur la
manière dont l’acte a été envisagé par les parties.
Mais cette impression, qu’un peu de réflexion dissi—
p e ro it, ne seroit pas une présomption capable de le dé
terminer; c a r la loi ne l’autoriseroit pas à s’y arrêter, hors
le cas de prescription, et il ne pourroit s’en appuyer
sans créer une fin de n o n - rec ev o ir, contre la prohibi
tion de la loi.
M ais, on vient de le dire, ce silence est parfaitement
justifié : l’ignorance de son d roit, le décès du sieur de
S erv ière, la jeunesse de ses enfans, leur ignorance per
sonnelle du f a it , les événemens de la révolution , l’ins
cription sur la liste des émigrés de l’une et l’autre des
parties, sont des explications plus que recevables.
Il faut donc juger la cause comme on eût fait en 1783,
et alors elle ne semble pas susceptible de difficultés. L e
jugement dont,est appel froisse tout à la fois les principes
les plus positifs et les droits les mieux établis : les sieur
et dame de Servière, en se plaignant de ses dispositions,
en soumettent la censure aux lumières de la C o u r, pleins
d’ une entière confiance dans l’esprit de justice et d’im
partialité qui préside constamment à ses arrêts.
M e. V I S S A C , avocat.
Me . D E V È Z E ,
licen cié
avoué.
A R I O M , de l’ im p. de T H I B A U D , im prim . de la C ou r im périale, et libraire,,
rue des T a u le s , m aison LANDRIOT —
1 8 11.
�ï l jvudla, /Î5// ¡>h (Á.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Servière. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Vissac
Devèze
Subject
The topic of the resource
ventes
partage
successions
lettres de rescision
forclusion
tutelle
experts
domaines agricoles
indivision
prescription
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieur et dame de Servière, propriétaires, habitant au Teilhot, commune de Saint-Priest-des-Champs, appelans et intimés ; contre le sieur Enjelvin, maire à Pontgibaud ; Louis Audebert, marchand à Clermont, et les dames Taravant, leurs épouses, intimés et appelans ; le sieur Raynaud de Montlozier, propriétaire, habitant à Paris, intimé ; les sieur Lecour de Saint-Agne, propriétaire à Clermont ; Peyronnet, médecin à Rochefort ; et M. le baron Manney, évêque de Trèves, aussi intimés.
arbre généalogique
note manuscrite. Arrêt complet du 31 juillet 1811, 1ére chambre. Mal jugé, ordonne que les parties viendront à division ce partage.
Table Godemel : Vente : 14. l’acte du 30 janvier 1783 consenti par Raynaud de Montlozier, en vertu de la procuration à lui donnée le 15 dudit mois, par Jeanne-Madeleine de Servière, son épouse, par lequel il vendit, à titre de vente pure et irrévocable, avec promesse de garantie, fournir et faire valoir, au sieur de Servière de Teilhet, les deux tiers du domaine de chez Saby, circonstances et dépendances, pour le prix de 10,000 livres et dix louis d’épingle qui lui furent payés comptant ; cet acte, quoiqu’il ait été le premier passé entre ledit sieur de Servière et la dame de Montlozier depuis le décès de Françoise-marie de Servière à laquelle ils devaient succéder, peut-il être considéré comme un partage de ladite succession, qui a dû faire cesser l’indivision de tous les objets composant cette succession ? ou bien, cet acte ne doit-il pas être regardé comme une vente pure et simple des deux tiers du domaine de chez Saby ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
1783-1811
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2017
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2018
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53387/BCU_Factums_G2017.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Priest-des-Champs (63388)
Pontgibaud (63285)
Clermont-Ferrand (63113)
Paris (75056)
Saint-Hilaire (63360)
Nébouzat (63248)
Roubras (domaine de)
Recolène (domaine de)
Chez Saby (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
domaines agricoles
experts
forclusion
indivision
lettres de rescision
partage
prescription
Successions
tutelle
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53231/BCU_Factums_G1417.pdf
278270f648bcc51e287e2073f84209b6
PDF Text
Text
4g i
t r ib u n a l
MÉMOIRE
EN
d ’a p p e l
fiéantàRiom.
RÉPONSE,
P O U R
, P i e r r e et G i l b e r t L A N D R IE V E ,
père et fils, cultivateurs habitans du lieu de
Chantagret, commune du P eyrou ze, appelans
d’un jugement rendu au tribunal d’arrondisse
ment de cette ville d e Riom , le 3 floréal an 9 ,
C h a rle s
et demandeurs en opposition ;
C O N T R E
,
B R U N E L D E P R I V E Z A C pro
priétaire, habitant du lieu de Chauzy , commune
de Besset, département de l'Allier, intimé et
défendeur en opposition.
'J a c q u e s
,
J a c q u e s Brunel de Privezac a affermé, le 8 germinal
an 4 , deux domaines aux appelans le prix de ce bail
A
�( a )
est de 3,000 fr. par année. Les appelans étoient précé
demment fermiers des mêmes objets depuis 1784; et le
prix de ce bail ancien n’étoit que de 1,300 fr. argent,
quarante - cinq livres de beurre et douze poulets pour
chaque année.
Les appelans ont demandé la réduction du nouveau
bail au prix de l’ancien, et leur notification a été faite
dans le temps prescrit par la loi.
Par une singulière fatalité, les premiers juges ont
refusé d’admettre la réduction demandée, et ont con
damné les fermiers à payer la somme de 3,000 fr. chaque
année, pendant la durée du bail.
Les fermiers réclament contre ce jugement qui viole
ouvertement la disposition des lois, et blesse tous les
principes de justice et d’équité.
L ’intimé qui affiche un grand désintéressement, a
des raisons personnelles pour ne pas désirer qu’on paye
toujours sans réduction ; il prétend néanmoins que le
jugement dont est appel est sage dans ses motifs, et juste
dans ses dispositions : il a cru devoir rendre sa défense
publique, et s’imagine que des déclamations bannales
contre les fermiers peuvent servir de moyens.
Les appelans se llattent au contraire de démontrer que
sa’ prétention est exagérée, et qu’en payant le prix du
bail ancien ils sont entièrement libérés.
FAITS.
Le 5 août 1784, un sieur T iïly , propriétaire de deux
domaines appelés de Gliantagret et de Cornassat, situés
�( 3 )
commune du Peyrouse, les donna à titre de ferme aux
appelans : ce bail fut consenti pour neuf années consécuti
ves, qui ne devoient prendre cours qu’à compter du 24
juin 1788.
L e prix de la ferme est de 1,300 fr. par année ,
payables en deux termes égaux ; et pour droit de survine , les fermiers doivent payer en outre quarante-cinq
livres de beurre et douze poulets.
L ’intimé devenu acquéreur de ces deux domaines de
puis le 13 juillet 1790, avoit droit d’interrompre le bail
en vertu de la loi JEmptorem j mais il le trouva assez
avantageux pour ne pas user de cette faculté, et il en
perçut le prix pendant toute sa durée.
Quoique ce bail ne dût éclioir que le 6 messidor
an 5 , néanmoins il voulut le renouveler un an avant ;
et le 8 germinal an 4 , il fut passé entre les parties un
nouveau bail pour neuf années, moyennant la somme
de 3,000 fr. par an. Il est dit que ce bail est consenti à
prix d’argent, que la somme est payable en numéraire
ou valeur représentative : mais on verra que cette énon
ciation , dont l’intimé voudrait abuser, ne peut être
d’aucune importance*, elle ne s’appliquoit qu’aux man
dats qui devoient être reçus comme espèce métallique,
d’après la loi du 8 ventôse précédent.
Bientôt les mandats furent retirés de la circulation ;
il falloit dès-loi’s concilier les intérêts divers, et déter
miner la nature des engagemens de ceux qui avoient
contracté pendant les assignats ou les mandats.
L e législateur s’occupa principalement du prix des
fermages, et la loi du 9 fructidor an 5 , art. VI^ régla
A a
�(.4 )
que tous les baux qui avoient été passas entre la publi
cation de la loi du 4 nivôse an 3 , portant suppression
du m axim um , et celle de la loi du 5 thermidor an 4,
seraient sujets à réduction, c’est-à-dire, que le prix en
seroit réduit à celui des baux existans en 1790.
Une loi postérieure du 6 messidor an 6, veut, art. II,
que tous baux stipulés en tout ou partie à prix d’ar
gent, passés entre le Ier- janvier 1792 et la publication
de la loi du 5 thermidor an 4 , soient susceptibles de
la réduction mentionnée en l’article V I de la loi du 9
fructidor précédent, quelques expressions ou dénomi
nations de monnoie qui y aient été employées.
Les appelans avoient fait leurs diligences avant l’émis
sion de cette dernière loi. Dès le 9 vendémiaire an 6,
ils firent signifier au domicile de l’intimé un acte par
lequel ils déclarèrent qu’ils entendoient profiter du bé
néfice de la loi du 9 fructidor an 5 , et réduire le prix
du bail du 8 germinal an 4 , à celui du bail qui existoit en 1790.
Cette notification n’arrêta point le citoyen de Privezac.
Le 16 nivôse an 6, il fit commandement à ses fermiers
de lui payer la somme de i , 5oo fr. en numéraire, pour
le premier terme écliu le 21 brumaire précédent.
Les fermiers, pour éviter des poursuites plus rigou
reuses , se déterminèrent 11 faire un acte d’offre au domicile
du cit. de Privezac, le 21 nivôse an 6 ; i°. de la somme de
65o fr. pour la moitié du prix du bail du domaine existant
en 1790; 20. de la somme de 42 fr. pour la valeur de
la dîme ; 30. 6 fr. 5o cent, pour les frais du commandementi total 698 fr. 5o cent.
�( 5 )
Refus de recevoir : citation au bureau de paix en réa
lisation et validité d’offres ; assignation au ci-devant tri
bunal civil du déj>artement du Puy-de-Dôme, pour voir
dire que conformément aux art. V I et IX de la loi du
6 fructidor an 5, et en conséquence de la demande en
réduction, le prix du bail du 8 germinal an 4 demeu
rerait fixé à la somme de 1,300 fr. d’une part, comme
faisant le prix du bail existant en 1790, h celle de 42 fr.
d’autre, pour la valeur de partie de la dîme, dont les
fermiers devoient compte, et pour voir donner acte de
la réitération des offres; à défaut de les recevoir, per
mission de consigner les sommes offertes.
Un premier jugement par défaut, du 27 messidor
an 7 , adjugea les conclusions des appelans.
La cause n’ayant pu être vidée sur l’opposition du
citoyen de Privezac , il fit citer ses fermiers au tribunal
d’arrondissement de cette commune, pour procéder sur
cette opposition.
La cause portée à l’audience , il y est intervenu, le
3 floréal an neuf, un jugement contradictoire qui, sans
s’arrêter à la demande en réduction du prix du bail
du 8 germinal an 4, dans laquelle les fermiers sont déclarés
non-recevables , ordonne que le bail du 8 germinal an 4
sera exécuté selon sa forme et teneur jusqu’à son expi
ration ; que les poursuites commencées seront continuées:
les fermiers sont condamnés en tous les dépens ; et il est
ordonné que le jugement sera exécuté nopobstant oppo
sition et sans préjudice de l’appel.
Ce jugement est principalement motivé sur ce que les
fermiers n’ont donné aucun effet à la réduction par eux
A 3
�demandée, en ne faisantpointles offres des arrérages échus,
d’après les formes voulues par les lois subséquentes.
On prétend que l’article V III de la loi du 6 messidor
an 6 n’autorise la demande en réduction, qu’autant que
les fermiers payent préalablement tous les termes des baux
échus antérieurement à la demande : on ajoute que, dans
l’espèce, les fermiers n’ont point fait des offres de tous les
termes échus à cette époque; on en conclut qu’ils n’ont
point satisfait à la loi du 9 fructidor an 5 , ni à ce qui
étoit ordonné par celle du 6 messidor an 6.
Les fermiers ont interjeté appel de ce jugement; et
pour ne pas plaider les mains garnies ils ont, le 4 floréal
an neuf, renouvelé au domicile du citoyen de Privezac
. les offres qu’ils lui avoint déjà faites, en y ajoutant tous
les termes échus.
L ’intimé n’a pas cru devoir se rendre à ces nouvelles
offres ; il a fait signifier de nouveau le jugement portant
nonobstance, avec sommation de se trouver au greffe
pour y voir présenter sa caution, et pour éviter des
poursuites plus rigoureuses. Les appelans ont présenté
requête au tribunal pour demander acte des offres réalisées
sur le bureau de l’audience de la somme de 6,362 francs
90 centimes : il a été rendu sur cette requête un jugement
qui donne acte de l’appel et des offres, renvoie les parties
à une audience extraordinaire , toutes choses jusqu’à ce
demeurant en état.
Ce jugement a été notifié au citoyen de Privezac; et,
le 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
donne aux appelans acte de leurs offres, acte au citoyen
de Privezac de ce qu’il offre de recevoir à bon compte
,
�( 7 ).
. .
et sans aucune approbation préjudiciable; le surplus des
moyens respectifs demeurant réservé aux parties : c’est
en cet état que se présente la cause.
Pour prouver que le jugement dont est appel, est con
traire à la disposition des lois , et qu’il y a nécessité de
le réformer , il est essentiel d’analyser les différentes lois
rendues sur les fermages ; e t, quoiqu’en général on puisse
reprochera ces lois une grande obscurité dans la rédaction,
leurs dispositions ne sauroient être plus claires relative
ment à la question particulière qui divise les parties.
L ’article X de la loi du 9 messidor an 4 , porte « que
» les prix des baux non stipulés en denrées et qui ont
» été passés postérieurement à la publication de la
» loi du 4 nivôse an 3 , qui a levé le maximum ,
» seront réduits au prix du bail précédent , en y ajou» tant la valeur des dîmes et autres charges supprimées,
» conformément à la loi du 10 avril 1791 , et autres.
» S’il n’existoit pas de bail antérieur , ajoute le
» môme article , le prix du nouveau bail sera réglé
» par experts , valeur de 1790; dans les deux cas, le
» prix de ce nouveau bail sera payé de la même manière
» que le seroit celui d’un bail passé en 1790. »
L ’article V I de la loi du 9 fructidor an .5 , dit « q u e ,
» si le bail a été passé entre la publication de la loi
>3 du 4 nivôse an 3 , portant suppression du maxim um ,
» et celle de la loi du 5 thermidor an 4 , le prix doit
» en être réduit à celui du bail existant en 1790. »
L ’article V II de la même loi veut « que l’on corn» prenne dans le prix, outre l’évaluation du prix de 1790,
» la valeur des dîmes et autres charges supprimées par
A 4
^
�(S )
la loi du io avril 1790 , et autres, et dont étoient
tenus les fermiers, ainsi que les sommes q u i, promises ,
soit à titre de pot de vin, soit par contre-le tires, soit
de tout autre manière, seront reconnues avoir fait dans
le temps partie dudit prix. »
Enfin , l’article IX de cette même loi porte ce que les
» baux, soit à ferme, soit à portion de fruits dont une
» partie de loyer a été stipulée à prix d’argent , sont
» soumis pour cette partie du prix et suivant le cas, aux
j) dispositions des articles précédens , dans lesquels se
» trouve compris l’article V I précité. »
Il est ajouté « que la somme stipulée en argent dans
» le nouveau bail sera réduite à celle portée dans le bail
» existant en 1790 , augmentée de la valeur des objets
» mentionnés en l’article V I I , si la quantité des fruits
» ou denrées promises, est la même dans l’un et dans
» l’autre. »
L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , « comprend
» dans l’article V I la loi du 9 fructidor an 5 , et regarde
» comme susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article tous baux stipulés en tout ou partie à prix
» d’argent -, passés entre le I e r . janvier 1792 et la publi» cation de la loi du 5 thermidor an 4 , quelques ex» pressions et dénominations de monnoie qui y aient
» été employées. »
L ’article V III veut «que les fermiers qui provoque» roient la réduction du prix de leur b ail, ne le puissent
» à peine d’être déclarés non - recevables, que dans le
» mois qui suivra la publication de la présente, et qu’en
» payant dans le même mois , ou au pi-opriétaire ? ou
»
»
»
»
»
�( 9 )
»
»
»
»
»
»
»
au receveur du domaine, suivant les cas, soit le montant des termes échus.suivant le montant du bail de
1790, soit à défaut de bail ou dans le cas de l’article V , quatre fois la contribution foncière de l’an 5 , des
objets dont il s’agit., sauf à compter et parfaire , ou
même à répéter, s’il y a lieu, lors de la liquidation déiinitive. »
Telle est l’analyse des différentes lois sur les fermages;
on a cm devoir la présenter de suite pour ne pas inter
rompre la discussion , et en faire plus facilement l’appli
cation au cas particulier.
Il s’agit d’examiner si les appelans ont satisfait à la
disposition de ces lo is , et si le défaut d’exécution de
l’article V III de la lôi du 6 messidor, peut être opposé
avec succès aux appelans, et faire obstacle ù leur demande
en réduction?
Point de doute d’abord sur la faculté de réduire.
Le bail est du 8 germinal an 4 , par conséquent il a été
passé antérieurement -à la loi du 5 thermidor an 4 ,
époque déterminée pour la réduction.
La dénomination & argent ou de numéraire ne change
pas la nature des engagemens : déjà l’article IX de la
loi du 9 fructidor an 5 , l’avoit ainsi expliqué et déter
miné , et l’article II de la loi du 6 messidor an 6, ne
laisse plus d’équivoque à cet égard.
Maintenant il faut se lixer sur l’époque de la demande
en réduction qui a été formée par les appelans , et ne
pas perdre de vue que la notification par eux faite est
du 9 vendémiaire an 6 -, c’est-à-dire, antérieure à la loi
du 6 messidor.
A 5
�L ’acte d’offre, la citation au bureau de paix , l’assi
gnation au tribunal c iv il, ont également précédé l’émis
sion de la loi du 6 messidor , puisque tous ces actes sont
du mois de nivôse an 6.
Ils ont tous été faits en exécution de la loi du 9 fruc
tidor an 5 , en exécution des articles V I et IX de cette
loi qui n’astreignoit point les fermiers pour obtenir la
réduction à faire des offres des termes échus.
Cependant même avant la loi du 6 messidor, ils avoient
fait des offres de la moitié du prix du bail précédent :
c’étoit alors tout ce qu’il y avoit d’écliu ; ils avoient donc
satisfait même au delà de ce que la loi du 9 fructidor
sembloit exiger.
Vouloir astreindre les fermiers à l’exécution de l’ar
ticle V III de la loi du 6 messidor, c’est alors donner évi
demment un effet rétroactif à la loi ; c’est lui faire régler
pour le passé ce qu’elle n’a voulu déterminer que pour
l’avenir. En effet, la loi ne parle que des fermiers qui
n’ont point encore fait de diligences ; elle veut que ceux
qui n’ont pas encore provoqué la réduction de leur bail,
ne le puissent faire que dans le mois qui suivra la pu
blication , et qu’en payant dans le même mois au pro
priétaire le montant des termes échus d’après le bail
existant en 1790.
Mais les fermiers qui s’étoient déjà mis en règle, qui
avoient manisfesté leur intention de réduire, conformé
ment à la loi du 9 fructidor an 5 , ne sont point astreints
à la même obligation ni aux mêmes délais. L ’article X
de la loi du 9 fructidor an 5 , n’obligeoit les fermiers
qu’à la formalité de demander cette réduction par écrit,
dans le mois de la publication.
�( 11 )
L ’article X I de la même loi donnoit dans ce cas au
propriétaire la faculté de résilier, si la réduction blessoit
ses intérêts , et en avertissant le fermier dans les deux
mois de la même loi du neuf fructidor.
Cette loi du 9 fructidor n’exige pas le payement des
arrérages : faculté de réduire, faculté de résilier ; voilà
tout ce qu’elle accorde.
La notification des appelans est du 9 vendémiaire
an 6 ; c’est-à-dire , qu’elle est dans le mois de l’émission,
et avant celui de la publication. Ainsi , il ne faut donc
consulter que la loi du 9 fructidor, celle du 6 messidor
est étrangère à l’espèce : ce n’est qu’une loi additionnelle
toujours favorable aux fermiers, qui proroge encore le
délai de la notification , mais qui aggrave la condition
de ceux qui ont été négligens , en les conti’aignant de
payer tout ce qui est échu.
D ’ailleurs les appelans, au moment de leur acte d’offre
du 21 nivôse an 6 , ayant offert la moitié du pi'ix du
bail antérieur, offroient tout ce qui étoit échu. Leur
bail a commencé le 24 juin; il étoit payable en deux
termes égaux, l’un au jour de N o è l, le second au jour
de St. Jean , et il est clair qu’à l’époque du 21 nivôse
an 6 , qui représente le 11 janvier, il n’y avoit que le
premier terme d’échu ; c’est-à-dire , la moitié du prix
du bail ; par conséquent les fermiers ont offert tout ce
qu’ils devoient, même dans le sens de la loi du 6 ther
midor.
Comment donc concevoir d’après des raisonnemens
aussi simples, le jugement dont est appel qui oblige les
fermiers ù payer 3,000 francs par année, pour un bail
�( 12 )
qui, avant le papier monnoie, n’étoit que de 1,300 francs,
et qui a été augmenté de plus de moitié ?
Les fermiers, dit-on, n’ont donné aucun effet à leur
demande en réduction, dès qu’ils n’ont pas offert les ar
rérages échus, d’après les formes voulues par les lois
subséquentes ; et on explique qu’on entend par lois sub
séquentes, l’article V III de la loi du 6 messidor.
M ais, d’une part, on a démontré que cette loi sub
séquente 11’avoit aucun rapport avec les appelans qui
avoient fait leurs diligences antérieurement à sa publi
cation , et en vertu d’une loi différente. D ’un autre côté ,
on a prouvé qu’au m om ent des offres les fei’miers avoient
offert tout ce qui étoit échu.
Mais, dit-on, lors du jugement du tribunal civil, les
fermiers n’ont pas offert ce qui étoit échu à cette époque.
Ce motif est bien extraordinaire : la loi même du 6 mes
sidor n’astreignoit qu’au payement des termes échus à
l’époque de la notification ; elle n’obligeoit point de
faire à chaque échéance de nouvelles offres j si la discus
sion se prolongeoit; et si, lors du jugement du tribunal
civil qui a été rendu en thermidor an y , il etoit échu
d’autres termes , l’intimé pouvoit en faire prononcer la
condarimation, et même obtenir des dépens contre les
fermiers débiteurs. A u lieu de former sa demande, il
s’est laissé condamner par défaut ; les appelans 11e pouvoient donc encourir aucune peine, et rien ne les obligeoit à faire de nouvelles offres.
Il est plus difficile d’expliquer pourquoi on reproche
dans ces motifs aux appelans de n’avoir pas renouvelé
leurs offres à domicile. L ’acte d’offre du a i nivôse an 6,
�( i3 )
étoit fait au domicile du citoyen de Privezac; il y a eu
refus de recevoir; il n’étoit donc pas nécessaire de re
nouveler à domicile, il suffisoit de les réitérer à l’au
dience ; et c’est ainsi que cela a toujours été pratiqué.
Les motifs du jugement une fois écartés, il n’est plus
question que de discuter les moyens proposés par l’intimé ;
et on va voir qu’ils n’ont rien de spécieux.
D ’abord, l’intimé présente de prétendus motifs de
considération ; suivant lui les Landriève ont fait une
grande fortune dans cette ferme : il auroit trouvé le
meilleur moyen d elà diminuer, ou d elà détruire, s’il
pouvoit se faire payer, pendant neuf année^, une somme
de 3,000 francs pour deux domaines qui n’étoient af
fermés auparavant que 1,300 francs par année.
Il prétend aussi que le sieur T illy , peu soigneux dans
ses affaires, répandu à la cour et livré aux plaisirs, faisoit peu d’attention à la valeur de ses biens , s’en rapportoit à des gens d’affaire , ou recevoit à l’avance des
sommes considérables de la part de ses fermiers.
Mais ces allégations ne sont que ridicules ; elles ne sont
appuyées sur aucun adminicule de preuves, et les appelans
ont toujours désavoué d’avoir payé par anticipation aucun
pot de vin ; ils ont soutenu que les domaines étoient
portés A leur juste valeur, et que le prix du premier
bail ne leur promettoit aucun bénéfice.
L ’intimé , au fond , examine deux questions : la pre
mière , celle de savoir si le bail du 8 germinal an 4
est sujet à réduction ; et la seconde, si les Landriève sont
redevables à la proposer. Il observe judicieusement que
la lin de non-recevoir doit être examinée la première,
�parce que la question principale seroit surabondante, si
les Landriève étoient non-recevables.
L ’intimé convient cependant que la demande en ré
duction a été signifiée dans un temps utile; mais, sui
vant lu i, une demande n’est que le commencement d’une
contestation : on ne sait pas trop où il veut en venir
avec cette distinction. Il faut toujours commencer par
demander; mais au moins le jugement doit toujours se
reporter à la demande.
Un des grands griefs contre cette demande, c’est que
l’exploit n’est pas signé des fermiers, ni d’un fondé de
pouvoir ;• l’huissier, dit-il, ne présente aucune assurance
en cas de désaveu, et les Landriève auroient pu s’en
moquer impunément.
C ’est la première fois qu’on a imaginé de prétendre
qu’il falloit signer un exploit pour constituer une de
mande : comme il y a beaucoup de gens qui ne savent
pas signer , il faudroit en tirer la conséquence que toutes
les personnes illitérées n’ont pas capacité de former une
demande, ou de faire donner un exploit.
L ’intimé ajoute, qu’il n’y avoit rien de terminé entre
les parties, lorsqu’à paru la loi du 6 messidor an 6 ; et
quoiqu’ils fussent en litige au tribunal civil du Puy-deDôm e, il n’y avoit encore rien de réglé, ni par les par
ties , ni par les tribunaux.
O r, dit-il, l’article X V de la loi du 6 messidor an 6 ,
porte que toute contestation non définitivement terminée
sera jugée en conformité de la présente loi. Si l’aifaire doit
être jugée en conformité de la loi du 6 messidor, les fer
miers doivent donc offrir tous les arrérages échus ; et c’est
ce qu’ils n’ont pas fait.
�( i5 )
Il sê présente deux réponses péremptoires à cette ob
jection ; et d’abord les appelans eux-mêmes peuvent in
voquer avec succès les dispositions de cet article, relati
vement à la dénomination de numéraire qui a été em
ployée dans le prix du bail. Cette loi dit, article I I , que
le bail sera toujours sujet à réduction, quelques expres
sions et dénominations de monnoîe qui y aient été em
ployées; donc le citoyen Privezac ne peut pas dire que,
parce qu’il s’est servi de l’expression numéraire, le bail
ne peut pas être réduit.
Mais c’est aller trop lo in , que de soutenir que les fer
miers doivent offrir tous les termes éclius ; il suffiroit
qu’ils se fussent conformés à la loi précédente du 9 fruc
tidor an cinq : on a vu que l’article V III de la loi du
6 messidor, en exigeant le payement des termes échus,
n’avoit entendu parler que des fermiers qui jusques-là
n’avoient fait aucune diligence.
D ’un autre côté, les Landriève, lors de leur acte d’offre,
avoient offert tout ce qui étoit échu à cette époque,
quoiqu’ils n’y fussent pas obligés , et le citoyen Privezac
■est forcé d’en convenir. M ais, d it - il, ces offres n’ont
été faites ni à ma personne, ni h mon domicile, quoique
le prix du bail fût payable à mon domicile; elles ont été
faites au domicile par moi élu chez le citoyen Brun, et
des offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu.
Quelque prépondérance qu’ait l’autorité de Denisart
sur laquelle le citoyen de Privezac s’ap pu ie , ce ne seroit
point à lui à proposer une semblable objetion. Le citoyen
de Privezac a changé cinq ou six fois de domicile pendant
�(.*)
la révolution ; et comme il n’a pas toujours été en de
mandant , plusieurs de ses créanciers ont éprouvé souvent
l ’embarras de ses changemens de domicile : mais il n’est
pas exact lorsqu’il annonce que le prix du bail est payable
à'son domicile. L ’article X V du bail du 8 germinal an 4
porte que le beurre, ou les poulets que doivent les fermiers
pour survine, seront conduits à Riom ou à Clerm ont,
ou à une distance égale ; et l’article X V I dit que la
somme de 3,000 francs, formant le prix du bail, sera payée
par eux aux lieux portés ci-dessus : ce n’est donc point
au domicile que Privezac a pris dans le département de
l’Aveyron, que les fermiers doivent porter le prix du
bail.
D ’un autre côté, la notification en réduction du 9 ven
démiaire an 6 a été faite en la commune de Pagas, dé
partement de l’A veyron, en parlant au fils de l’intimé.
Lors de son commandement du 16 nivôse an 6, l’intimé
a élu domicile, pour une décade, chez le citoyen Jean
Brun, cultivateur du lieu de la Maison-Neuve, commune
du Peyrouze près Montaigut ; et c’est à ce domicile
que les fermiers ont fait les ofïi’cs le 21 nivôse an 6, le
cinquième jour du commandement, et avant l’expiration
du délai pendant lequel il y avoit domicile chez le citoyen
Brun.
Enfin , le citoyen Brun a répondu à l’acte d’offre, qu’il
n’avoit aucun pouvoir de Brunei, et que cela ne le concernoit pas; et lorsque les appelans ont fait citer Brunei
au bureau de paix du canton de M ontaigut, pour voir
déclarer les offres valables, et en cas de refus, qu’il fût
permis de consigner, Privezac a comparu par Desmaroux,
�f 17 3
io j
son fondé de pouvoir, et a persisté dans la réponse faite
par le citoyen Jean Brun.
Sur l’opposition foi’mée au jugement du tribunal civil du
27 tliermidor an 7, le citoyen Brunei a assigné les appelans au tribunal d’arrondissement de Riom ; il a donc
reconnu, et le domicile par lui é lu , et la juridiction du
tribunal d’arrondissement: mais ensuite, en renouvelant
son opposition par exploit du 5 frimaire an 9 , il n’est
plus domicilié dans le département de l’A veyro n , il élit
domicile dans la commune de Chauzy, département
d’Allier.
Gomment pourroit-on saisir le citoyen Brunei avec des
changemens de domicile aussi fréquens ? Voudroit-il que
les offres eussent été faites aux lieux où le prix du bail
étoit portable ? c’est à Riom ou à Clcrmont, ou à une
distance égale, et sans aucune désignation que l’indication
qu’il voudroit en faire. V o u d ro it-il que les fermiers
allassent au lieu de Pagas , département de l’Aveyron ?
mais il se dit tantôt domicilié de l’A veyro n , tantôt du
département d’A llie r, suivant l’intérêt qu’il a à em
barrasser ses créanciers ou ses débiteurs, comme il l’a fait
pour les héritiers Tassy qui ne savent où le prendre.
En un mot, le bail est fait en la commune du Peyrouze
près Montaigut ; point d’indication déterminée pour
le lieu du payement; élection de domicile chez le citoyen
Jean Brun; c’est donc là ou ces fermiers ont dû s’adresser;
et il peut d’autant moins s’en plaindre, qu’il a connu l’acte
d’oifre, qu’il a comparu au bureau de paix sur la citation
par tout autre fondé de pouvoir que B ru n , et qu’il a
adhéré à la réponse de Brun.
4M
1
|
,
�( 18 )
En un m ot, la loi qui ordonne que les offres seront
faites au domicile du créancier, doit être entendue civile
ment : elle n’a pas exigé l’impossible , elle a voulu prin
cipalement favoriser la libération ; et il est absurde de
prétendre qu’un débiteur soit obligé d’aller faire des offres
à deux cents lieues, lorsqu’il n’y a point d’indication
précise pour le payement, et lorsqu’il y a un domicile élu
dans le lieu où sont situés ces immeubles affermés.
On ne peut pas reprocher aux appelans le défaut de
consignation de leurs offres ; il y a toujours eu litispen
dance sur la suffisance ou la validité de ces mêmes offres,
rien de déterminé à cet égard jusqu’au jugement définitif:
et comment consigner, lorsqu’il y a toujours des doutes ?
X^es appelans ont réitéré leurs offres après ce jugement ;
l’intimé a reçu à bon compte ; les appelans ne plaidoient
donc pas les mains garnies comme voudroit le prétendre
le citoyen de Privezac.
Telles sont les fins de non-recevoir singulières qu’oppose
le citoyen Privezac à ses fermiers. Bientôt par une con
tradiction choquante, et tout en invoquant la loi du 6
messidor an 6 , il vient dire q u e, dès qu’il a stipulé le
payement en numéraire, il ne peut pas y avoir lieu à la
réduction ; il croit appitoyer sur son sort en disant qu’il
a dû compter sur 27,000 francs, et qu’il ne touchcroit
que n , 5oo francs dans le sens du bail de 1784 : cette
différence, d it-il, scroit énorme, et vaut bien la peine
qu’il résiste aux prétentions déloyales des Landriève.
Mais les Landriève n’ont promis 3,000 francs par année,
que parce qu’ils devoient croire qu’ils payeraient en
mandats; mais ils n’ont promis 3,000 francs, qu’à raison
�( 19 )
de la progression survenue dans les denrées pendant
l’émission du papier-monnoie ; et aujourd’hui que tout
est rentré dans l’ordre, on ne peut exiger d’eux que la
juste valeur des immeubles affermés. La loi a prononcé,
les appelans ont satisfait à la loi ; et le jugement qui les
condamne présente une contravention manifeste à la
disposition des lois de la matière.
Par conseil, P A G E S ( de Riom ) , anc. jurisconsulte.
B A Y L E ,
< *>
a«
(o,
avoué,
f"
A RIOM, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du Tribunal d’appel. — A n 10.
/S4 ^
v
�
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A name given to the resource
[Factum. Landriève, Charles. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bayle
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Charles, Pierre et Gilbert Landriève, père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de Chantagret, commune du Peyrouze, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville de Riom, le 3 floréal an 9, et demandeurs en opposition; contre Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant du lieu de Chauzy, commune de Besset, département de l'Allier, intimé et défendeur en opposition.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Fermier - qui, en vertu de la loi du 9 fructidor an 5, a demandé la réduction du prix de son bail, lorsqu’il n’a pas été statué sur cette demande avant la publication de la loi du 6 messidor an 6, a-t-il dû faire les offres exigées par l’article 8 de cette dernière loi ? peut-on lui appliquer les dispositions de l’article 15 qui veut que toute contestation non définitivement terminée soit jugée en conformité de ce que cette loi prévoit ? ou bien, le droit de réduction était-il acquis au fermier par le simple effet de sa demande ?
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De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1796-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1417
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0234
BCU_Factums_M0233
BCU_Factums_G1416
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
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Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
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9c42ca6c6ef3ead4450f1a686eb34c0b
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Text
4
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J.']
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MEMOIRE
Ire. Section.
P O U R
J a c q u e s B R U N E L D E P R I V E Z A C , proprié
taire, habitant actuellement du lieu de C h a n zy ,
mairie de B esset, département d’A llier, intimé
et défendeur en opposition;
C O N T R E
,
et G a b r i e l L A N D R I È V E t
fermiers habitans du lieu de Chantagret mairie du
Peyrouse, appelans et demandeurs en opposition.
C h a r le s -P ie r r e
►I
i
•'v
P NDANT le cours du papier-m onnoie, le citoyen de
E
Privezac a réaffermé aux appelans deux domaines ou
leur famille a trouvé le germe d’une fortune très-con
séquente pour eux. L e bail a été fait en l’an 4 pour
commencer en l’an 5 ; le p rix en a été exprim é en nuA
�méi-aire. E n abusant des nouvelles lois sur les tran
sactions entre particuliers, les appelans veulent se jouer
de leurs promesses; ils ont conçu le projet inique de
payer plus de moitié moins que ce ù quoi ils sont
obligés. Il en résulte la question de savoir si un fer
m ier qui a requis la réduction d’un bail à ferme ctaZ—
germ inal an 4 , au p rix d’un bail ancien, peut obtenir
cette réd u ctio n , quoiqu’il, n’ait pas payé dans le mois
de la publication de la loi du 6 messidor an 6 , l ’arriéré
des fermages. Les premiers juges ont dit n on ; leur langage
est celui de la loi.
FAITS:
L e sieur de T illy , m aréchal des camps et armées de
France, demeurant à P aris, étoit propriétaire de la terre
de B eauvoir, située arrondissement de R io m , canton de
M ontaigut-les-Com brailles.
D e cette terre dépendoient deux domaines très-considérables, connus sous les noms de Chantagrct et C ornassat. Les L an driève en ont été fermiers pendant plu
sieurs générations. Ils y ont acquis plus de 80,000 francs;
la commune renommée leur donne 60,000 francs d’ar
gent comptant.
Le
août 178 4, le sieur de T illy étant alors en son
autre terre de B ostes, département d’A llie r , distante
de liuit lieues de celle de Beauvoir, le sieur de T illy re
nouvela au profit des Landriève la ferme des domaines
de Cliantagret et Cornassat. L e cours de ce nouveau,
l^ail devoit commencer seulement à la Saint-Jean 1788,
çt, finir à. la Saint-Jean 1797. L e prix, ostensible fui de
5
�la somme de 1,300 francs ai’gen t, quarante - cinq livres
de beurre et douze poulets. L e bail contient plusieurs
clauses inutiles à rappeler ici.
L e sieur de T illy liabitoit la capitale ; sa naissance
et son rang l ’attachoient à la cour. Eloigné de ses biens,
il n’en connoissoit pas le produit réel : les L andriève
les exploitoient depuis longues années; il avoit la bonté
de s’en rapporter trop à eux : aussi s’y sont-ils enrichis.
D ’ailleurs, le sieur de T illy étoit noble, et par cette
raison exem pt de taille; comme noble, il ne devoit que
des vingtièmes : cette imposition étoit assise en propor
tion des p rix de ferme. Par ce m otif, tous les gentils
hommes avoient un grand intérêt à mettre en évidence
des fermages moindres en sommes ; mais ils n’y perdoient
rien. Ils recevoient des pots de vin conséquens. T o u
jours il y avoit Ou des contre - lettres ou des effets an
nuels , qui pour l’ordinaire égaloient le p rix exprim é
au bail.
I l en fut ainsi entre le sieur de T illy et les L an
d riè v e , en 1784. L e sieur de T i l l y , dont les affaires
n’étoient pas en -très-bon état, passant alors une reno
vation de bail qui ne devoit commencer que quatre ans
après, (à la Saint-Jean 17 8 8 ), le sieur de T illy , disonsnous, reçut beaucoup d’argent com ptant, et le prix écrit
dans l’acte pardevant notaire, en fut d’autant moindre.
L e 13 juillet 1790, le citoyen de Priveznc acquit la
terre de Beauvoir et dépendances, par acte passé devant
notaire ¿1 Paris : la vente comprenoit beaucoup de droits
féodaux que la révolution a fait disparoître.
L e citoyen de Privezac arrivé sur les lie u x , trouva
A 2
�toutes choses dans le plus mauvais ordre. Il vit les L an driève en possession des deux domaines de Chantagret
et Cornassat ; il fut frappé de la vilité du p rix du bail :
mais il étoit obligé à l’exécuter ; il le üt.
Lorsqu’il fut question de passer nouveau b ail, les
Landriève se m irent sur les rangs. Plus d’un an avant
l ’expiration de celui de 178 4 , ils prévinrent le citoyen
de Privezac ; ils devinrent très-pressans. Celui-ci étôit
dom icilié dans le département de l’A v e y ro n , où l’on attaclioit peu de p rix au papier-monnoie. Q uoiqu’il eût
à se plaindre de ce que les Landriève l’avoient payé aussi
avec ces non-valeurs, ce 11e fut pourtant pas une raison
d ’exclusion contr’eux; il se contenta de faire avec eux les
conventions qu’on faisoit aloi*s pour n’avoir que des écus,
ou tout au moins la valeur représentative des écus.
A in si il fut passé bail entre les parties, ( et pardevant
n o ta ire ,) le 8 germ inal an 4 ; il fut fait pour neuf ans,
qui devoient commencer le 24 juin 179 7, ( id e s t, le 6
messidor an 5 ) ; il y est dit : à titre de b a il à fo r m e et
.rm x
d ’a r g e n t
.
Ce bail contient à peu près les mêmes clauses que celui
de 178 4 ; il y a pourtant cette différence , que par
l’article X I I , le citoyen de Privezac donna aux Landriève
le droit de prendx-e chaque année dans un bois, appelé
les Saulzeix., la moitié d’une douzième portion de bois,
avantage que ne leur accord oit pas le bail de 1784; il
y a aussi cette autre différence, que par le bail de l’an 4 ,
les Landriève furent chargés des contributions, tandis
qu’ils n’y étoient pas obligés par celui de 1784.
L e p rix annuel du bail de l’an 4 fut convenu à la
�( 5 )
■
somme de 3,000 francs, payable au dom icile du citoyen
de Privezac et en numéraire (1).
Cette somme est le juste prix de la ferm e de ces deux
domaines ; et les fermiers peuvent encore y faire de trèsbonnes affaires.
A la suite viennent les bestiaux de ces deux domaines.
Les Landriève reconnoissent a v o ir, depuis 178 2, six
bœufs arans, neuf vaches mères, un taureau, une v êle,
trois suivans et trente brebis. Les bestiaux à cornes sont
estimés à la somme de 626 francs : les L andriève s’en
gagent à en rendre pour même somme en fin de ferme ;
quant aux brebis, ils doivent seulement les remettre
tête pour tête.
Toutes ces précautions étoient dictées par les circons
tances d’alors. Instruits par le passé, les propriétaires
en usoient ainsi pour éviter l’écueil du papier-monnoie.
L e citoyen de Privezac étoit dans la ferme persuasion
d’en avoir exprim é assez pour s’en mettre à l’abri ; mais
il ne fut pas long-temps dans cette sécurité; les L an d riève,
dans lesquels il lui avoit paru quelque honn êteté, se
.montrèrent tels qu’ils sont. L e 9 vendém iaire an 6 , ils
lui notifièrent, en son domicile dans l ’A v e y ro n , que le
(1) A rt. X V I. E t enfin pour le prix de ladite ferm e, lesdits
preneurs ont promis et se sont obligés de payer audit citoyen
bailleur, chacun a n , aux lieu x portés ci-dessus, l a s o m m e d e
5 , 0 0 0 FRANCS EN NUMERAIRE OU VALEUR REPRESENTATIVE, e n deUX
termes égaux de chacun i,5oo francs; le premier payement échoira
le 11 novembre 1797 >
•second le 2^ ju in 179 8 , et ainsi con
tinuer, etc.
^
�( 6 )
bail du 8 germinal an 4 , se trouvant passé entre le pre
m ier janvier 1792 et la publication de la loi du 5 ther
m idor an 4 , ils en requéroient la réduction au taux
de celui existant en 179 0 , (d e celui du 5 août 1784 )»
Celui de 1784 n’ayant qu’un p rix ostensible, un p rix de
1,300 francs , tandis que lors de ce bail ils avoient versé
beaucoup d’argent dans les mains du sieur de T illy ;
il suivroit de cette perfidie que les Landriève jouiroient
des biens du citoyen de P riveza c, .pour une somme infi
niment inférieure à la valeur réelle de son produit.
L e 16 nivôse an 6 , le citoyen de Privezac fit aux
Landriève commandement de payer la somme de i , 5o o fr,
montant du demi-terme alors échu. P ar cet acte, il fit
élection de domicile en sa maison à Pagas dans l’A veyron ,
( et encore en la m aison et dom icile du citoyen J e a n
B r u n , habitant du lieu de L a -M a is o n -N u e , com m une
du Pey.rouse, pour la décade seulement. Il nous a semblé
nécessaire de rapporter ici le mot pour mot de cette
élection ).
L e 21 du mcrnc m ois, les L an driève firent au citoyen
de P rivezac, (a u domicile du citoyen B r u n ), des offres,
i ° . de la somme de 65o fran cs, formant le demi-terme du
fermage sur le taux du bail de 178 4; 20. de celle de
42 francs pour la dîme supprim ée; 30. de celle de 6 liv.
10 sous pour frais du commandement de p a ye r; et
rien pour le beurre et les poulets ; et rien pour le bois
des Saulzeix. X/C citoyen Brun n’a voit pas pouvoir de
toucher ; ces offres ne furent pas reçues.
A p rès avoir cité au bureau de p a ix , et en vertu de
procès verbal de non conciliation, le 26 du même m o is,
�( 7 )
les Landriève assignèrent le citoyen de P riveza c, au
tribunal civil du département du P u y-d e-D ôm e, i ° . en
réduction du prix du bail de l ’an 4 , au taux de celui
de 1784 ; 2°. en réitération et consignation de leurs offres..
Cette assignation fut donnée au dom icile du citoyen Brun.
A cette époque, le citoyen de Privezac étoit dans sa
terre de Pagas ; les Landriève profitèrent de la cii’constance pour prendre contre lui jugement par défaut ; il’
est du 27 messidor an 7.
P ar ce jugem ent, le p rix du bail de l’an 4 es^ réduit
au p rix de celui de 178 4, en y ajoutant 42 francs pour
la dîme. Les L andriève réalisèrent leurs offres de la
somme de 692 fra n cs, seulement pour le terme écliu le
2.1 brum aire an 5 , ou frais, pas un centime pour ceux
échus depuis. lueurs offres sont déclareés suffisantes; la
consignation leur en est permise aux frais du citoyen de
Privezac ( 1 ) .
(1) Attendu que d’après l’article V I de la loi du 9 fructidor an 5,
tous les baux passés entre le i 'T. janvier 1792 et la publication de
la loi du 5 thermidor an 4 , sont réductibles aux prix des baux des
mêmes objets en 1790, en y ajoutant les droits supprimés, quel
ques expressions et dénominations de monnoie que les baux em
ploient.
Attendu que tous doutes à cet égard sont lèves par l’article II de
la loi du G messidor an 6.
Attendu que le bail consenti par le défendeur, le 18 germinal
an 4 , est placé au nombre de ceux sujets à réduction.
Attendu le fait constant que le bail desdits biens ne s’élevoit,
en 1790, qu’à une somme de i,3oo francs.
Attendu que conformément aux dispositions de ladite loi du.
�•
( -8 )
P o in t de signification de ce jugem ent, point de con
signation des offres; les Landriève demeurent nantis
de
»
tout.
L es prem ier fructidor an 8 et 5 frim aire *an 9 , oppo9 fructidor an 5 , les demandeurs ont ajouté à leurs offres la
somme de 65 o francs pour un dem i-term e du bail à ferm e , la’
somme de 42 francs pour les droits supprimés, plus celle de 6 fr.
5o centimes pour frais ; que dès-lors leurs offres sont régulières.
L e tribunal, par jugement en dernier ressort, donne défaut
contre le défendeur, faute de plaider ni personne pour lui ; et pour
le profit, ordonne que le prix du bail à ferme par lui consenti aux
demandeurs le 8 germinal an 4» demeurera réduit et fixé, pour
toute sa durée, tant pour les termes éclius que pour ceux à échoir,
à la somme de i , 3oo francs d ’une p art, comme faisant le prix
du bail existant en 1790; à la somme de 42 francs d'autre p a rt,
pour la valeur de la partie de la dîme qui doit être ajoutée au prix
de cedit bail ; en conséquence, donne acte aux demandeurs de
leurs offres réalisées sur le bureau de F audience, i®. de la somme
de 65 o francs pour le terme de leur ferm e échu le 21 brumaire
an 6 ; 2°. de celle de 42 francs pour la 'valeur de la dtme sup
primée, qui doit être jointe au prix de l ’ancien bail ; 3°. de celle
de Gfrancs 5 o centimes pour frais ; déclare lesdites offres bonnes
et valables et suffisantes ; ordonne que ledit Brunei sera tenu de
les recevoir et d ’en fournir quittance aux demandeurs; faute de
c e , leur permet de les consigner entre les mains du receveur établi
en la commune de R io m , aux frais dudit Brunei : ordonne , en
conséquence, que la quittance de consignation délivrée par le
receveur, leur tiendra lieu de quittance et valable décharge,
tant du prix du bail échu le 21 brumaire an 6 , que de la totalité
de la valeur de la dlme des fruits récoltés en l ’an 5 , qui doit en
faire partie , ainsi que des frais fa its par le citoyen Brunei; et
condamne ce dernier aux dépens.
sition
�C-9 )
sition du citoyen de Privezac. Il demande la nullité (les
offres et lit continuation des poursuites commencées.
L e 3 floréal an 9 , jugement contradictoire rendu entre
les parties, au tribunal civil de l’arrondissement de R iom ;
l’opposition du citoyen de Privezac au jugement par
défaut du 27 messidor an 7 a été reçue; les L andriève
ont été déclarés non recevables en leur demande en
réduction ; l’exécution pleine et entière du bail de l’an
4 a été ordonnée ; le citoyen de Privezac a été auto
risé k continuer ses poursuites (1),
(1)
Attendu que quoique les parties du citoyen Bayle jeune*
par leur acte du 9 vendémiaire an G , aient requis en temps utile
la réduction du bail dont il s’a g it, autorisée par la loi du g fruc
tidor an 5 , néanmoins elles n'ont donné aucun effet à ladite ré
duction , en faisant les offres des arrérages échus, d ’après les form el
voulues par les lois subséquentes.
Attendu que l’article VIII de la loi du 6,messidor an 6 , pour
autoriser la demande en réduction des b au x, exigeoit de la part
de? fermiers le payement de tous les termes desdits baux échus
antérieurement à ladite demande.
- Attendu que les parties du citoyen Bayle n ’ont pas fait des offres
de tous les termes qui étoient échus à cette époque.
Attendu pareillement qu’à l’audience du ci-devant tribunal du
départem ent, elles n’ont fait les offres intégrales de tous lesdità
termes échus h cette1époque,
'
Attendu que les offres'd'un demi-terme par elles faites, et autres
accessoires, n ’ont pas été renouvelées à domicile, ni e ffe c tu é e s au
bureau de conciliation, en consignant au moins le moulant de cc
qu’elles avoient offert à l’audience.
Attendu que d’après toutes ces c o n s id é r a tio n s , les parties dit
citoyen Baylp n ’ont pas satisfait, ni à ce qui étoit prescrit par lq
13
4
6
?
�( 10 )
L e ‘28 du même m o is, signification de ce jugement au
domicile des L«indriève.
- L e 3 prairial suivant, appel des Landriève.
J.ié 4 du même m ois, offres réelles faites par les L an
driève au citoyen d e P riv e z a c , (en son nouveau domi
cile actuel à Chanzy, département d’A llie r ,) de la somme
de 6,362 francs 90 centimes pour les arrérages de la
ferme sur le taux du bail cle 1784 échus alors, pour
'intérêts et frais; offres non acceptées.
L e 26 messidor an 9 , demande par les L an d riève, en
défenses, contre l’exécution du jugement dont est appel.
Jugem ent qui ordonne que les parties en viendront à
l’audience du 6 th erm idor, toutes choses demeurant en
¿lat.
L e 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
donne, i ° . aux L an d riève, acte de leurs offres de la
somme de 6,352 francs 90 centimes*, 20. au citoyen de
P riv e za c, acte de ce qu’il offre de recevoir à bon compte
et sans aucune approbation préjudiciable.
loi du g fructidor an 5 > ni à cc qui ctoit ordonné par celle du
6 messidor an G.
L e tribunal, par jugement en premier ressort, reçoit la partie
de Lougnon opposante au jugement par d é fa u t, du 27 thermidor
an 7, lequel demeurera sans e ffe t; et sans s’arrêter ¿1 ¿a demande
en réduction du prix du bail du germinal an 4 , dans laquelle
8
les parties du citoyen B a jle sont déclarées non-recevables, fai
sant droit au fond, ordonne que ledit bail du 8 germinal an 4
sera exécuté suivant sa forme et teneur, jusqu’à l’expiration d’icelui j,
prdonne en outre que les poursuites commencées seront continuées,
et condamne les parties du citoyen Bayle aux dépens.
I
�Réception par le citoyen de Privezac de la somme de
5,682 fran cs, et le 20 fructidor su ivan t, réception par
le citoyen G-ourbeyre de la somme de 672 francs ; total
6,354 francs, avec la clause, le surplus et m oyens res
pectifs demeurant réservés a u x parties.
L e prem ier floréal an 10 , défaut contre les L an d riève,
défaut non expédié.
L e i 5 du même m ois, opposition par les Landriève,
M O Y E N S .
Dans cette cause, nous avons des lois très-positives,
rien n’est laissé à l’arbitraire. Les premiers juges ont
appliqué bien exactement ces lois ; leur jugement est le
résultat d’une méditation sage. Dans le nombre de ces
lois ils ne se sont pas mépris ; ils ont approprié à l’espèce
celles qui lui appartiennent.
Il en est une du 9 messidor an 4 , qui soumettoit à la
réduction tous les baux à ferme passés après la publication
de celle du 4 nivôse an 3 , portant levée du m axim um (1).
U ne autre loi du 5 therm idor an 4 , autorisa tous les
citoyens à contracter comme bon leur semblerait. E lle
voulut que les obligations qu’ils auraient souscrites fussent
exécutées dans les termes et valeurs stipulés (2).
(1) A rt. X . Les prix des baux non stipulés en denrées, et qui
ont été passés postérieurement à la publication de la loi du 4 ni
vôse an 3 , qui a levé le maximum, seront réduits au prix du.
bail précédent, etc.
(2) A rt. l'\ A dater de la publication de la présente lo i, chaque
B 2
�( « “)
Celle du 18 fructidor an 4 ,. lit une exception à la ré
duction exprim ée en l’art. X de celle du 9 messidor
précédent. Dans cette exception elle com prit les baux
stipulés en denrées ou en N u m é r a i r e , En sorte que
par-là , le propriétaire qui avoit contracté moyennant
des écus, fut assuré de 11’èti e payé qu’en écus et sans aucune
réduction. Il est à remarquer ici que cette loi se sert seu
lement du substantif num éraire , parce qu’en l’an 4 1
quand ou disoit n u m éra ire, l’on entendoit parler d’es
pèces sonnantes et non de papicr-m onnoia Les mots non
stipulés en denrées ou en n u m éra ire, qui y sont aussi 7
signifient bien clairement que la réduction ne s’étend pas
jusqu’aux baux qui contiennent la stipulation en numé
raire ( 1 ).
V ien t ensuite la loi si connue du 9 therm idor an 5 :
par l’article V I , elle assujettit ù la réduction les baux
passés entre la publication de la loi du 4 nivôse an 3 ,
et celle de la loi du 5 therm idor an 4 ; i ° . au taux du
citoyen sera libre de contracter comme bon lui semblera. l.e s
obligations qu’ il aura souscrites seront eocéculees dans les termes
et valeurs stipules.
(1) A rt. III. L a réduction pfononcée par l ’article X de la loi
du 9 messidor dernier, des prix des baux qui ont été passés pos
térieurement à la levée du hiaximum, aura son effet pour Tan 5
comme pour l’an /(, et en général pour toute la durée desdits baux.
JLa même réduction pourra être demandée sur les baux n o n
STirULÉS
EN D E N R E E S OU
EN N U M E R A IR E , p o s té r ie u r s
OU
i " . J tm -
pier 179 2 , dont les anciens prix sont augmentés de plus d’un
cinquième.
�C 13 )
bail de 1790 , s’il en existe u n ; 20. au taux'fixé par des
experts, s’il n’y a point de bail existant en 1790. Dans
les deux cas elle veut ( article V I I ) que pour le p rix ou
l’évaluation du p rix de 1790, on ajoute les dîmes et autres
charges .supprimées’par la loi du 10 avril 1791 e t autres:
elle veut que l’on comprenne aussi lès so m m es'q u i, pro
m ises, soit et titre de pot de v in , so it p ar cohtre-lettre,
soit de toute auti-e m a n ière, seront reconnues avoir f a i t
dans le temps partie du p rix.
• L ’article X oblige le ferm ier à demander par écrit la
réduction : il doit le faire dans le mois de la publication
de la lo i; après ce d éla i, il y. est nonrecevable (1). i,
( L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , explique,
l’article V I de celle du 9 fructidor an 5 ainsi qu’il suii^
<c Sont compris dans l ’article V I de lu loi du 9 fructidor
» an 5 , et susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article, les baux stipulés, en tout ou en partie, à p rix
» d’argent, passés entre le prem ier janvier 1 7 9 2 , et la
» publication de la loi du 5 therm idor an 4 , relative aux
» transactions entre citoyens, quelques expressions et dé» nominations de rrïonnoie, qui y aient été employées ».
Mais la même loi ( article V III ) ,astreint les ferm iers,
i° . à requérir dtms le mois la réduction ^ 20. ¿1 payer
dans le même délai au propriétaire, soit le montant des
(1)
A rt. X . Ceux des fermiers qui ayant, d ’après les articles
précédons, droit à la réduction du prix de leur b a il, ne l’auroient
pas encore demandée ou obtenue, seront tenus, a te in e d ’en'
£the o éch u s, de la demander par écrit, dans le moïs qui suivra
la publication de la présenté.
�C *4 )
termes échus suivant le bail de 179 0 , soit le montant
de quatre fois la contribution foncière assise en l’an 5 ,
sur les objets affermés, et cela dans le cas où il n ’ y auroit
point de bail existant en 1790. Ces deux conditions sont
de rigueur sans demande et sans payement dans le m ois,
le ferm ier encourt la peine de la fin de non recevo ir,
pax-ce que la loi ne veut pas que le ferm ier abuse des
circonstances, et tienne le propriétaire en état de souf
france ( 1 ).
P ar l ’article X V , la même loi veut que toutes contes
tations à ce sujet soient réglées suivant ses dispositions (2).
L ’article X V I I porte que les dispositions de cette lo i
ne sont pas faites p o u r les b a u x passés par anticipation,
at dont le ¡preneur ne seroit pas encore entré en jouissance. L e bail du 8 germinal an 4 , a commencé en
messidor an 5. Les adversaires sont d ès-lors entrés en
jouissance avant la loi du 6 messidor an 6 j elle est
donc, applicable à la cause.
(1) A rt. y i I L Les fermiers qui provoqueraient la réduction
du prix du b ail, n e l e p o u r r o n t , a p e i n e d ’ ê t r e d é c l a r é s n o n r e ce v a b le s ,
q u e d a n s iæ m o is q u i s u iv r a
l a p u b l i c a t i o n d& l a
p r é s e n t e , e t q u ’ e n p a y a n t d a n s l e m êm e m o i s , o u a u p r o p r ié
ta ir e ,
ou au receveur des domaines, suivant les cas,:
S o it l e -
MONTANT DES TERMES ECHUS, d ’ atRES LE BAIL EXISTANT EN 17 9 O,
soit, à défaut de bail ou dans le cas de l’article V ci-d e ssu s,
QUATRE FOIS LA CONTRIBUTION FONCIERE de Vail 5 , <loS objets
dont il s’agit, sau f à compter, même à re'pe'ter s’il y a lieu, lors
de la liquidation définitive.
(2) A rt. X V . Toutes contestations non définitivement terminées,
seront jugées en conformité de la présente.
\ •
�( i 5 )
L ’analyse de ces lois met bien en évidence le point
de droit. O n peut donc juger bien aisément 'dans quels
cas il y a lieu à réduction, quelle marche et quelles con
ditions sont à suivre pour l’opérer légitim em ent.
A in si donç nous aurions à traiter deux questions;
l’une de savoir si le bail du 8 germinal an 4 est sujet
à réduction ; et l’autre de savoir si les Landx’iève y
sont reccvables : nous nous attacherons ‘principalement
à cette dernière. Nous ne ferons ressortir que comme
moyens de considération les circonstances relatives à la
p rem ière, parce que s’il y a fin de non-recevoir cer
taine , une discussion plus étendue scroit superflue.
§ 1er.
• •
F in de ?ion recevoir.
L e 9 vendémiaire an 6 les Landriève ont'signifié
qu’ils requéraient la réduction du p rix du bail du 8
germinal an 4 , au taux de celui de 178 4, en vertu de
la loi du 9 fructidor an 5.
Celte réquisition paraîtrait être venue dans le m o is,
à compter de la publication de cette loi ; parce que
cette publication n’a été faite au département du P u yde-D ôm e', que le 23 fructidor an 5.
Maïs il ne sufiisoit pas d’une simple réquisition de la
part des fermiers. Elle conslituoit seulement une demande;
et une demande n’est pas toujours un droit invariable
ment acquis. U ne demande n’est que le commencemçnt
d’ une contestation.
i
�^ \\\.
( 16 )
P o u r que tout soit r é g lé , il faut entre les fermiers et
le propriétaire, ou un consentement réciproque, qui
form e un contrat entre eux , sur lequel les deux puissent
rep oser, ou un jugement qui en tienne lieu. P o u r que
tout soit certain de la part des fermiers , il faut qu’ils
signent leur réquisition et en l’original et en la copie ;
il faut,qu’ils le fassent ou par eux ou par un fondé dq
p ou voir spécial ^et meme que l’on donne au propriétaire
copie de ,1a procuration, parce que les fermiers y coiii
tractent un engagem ent, celui de payer sur l’ancien bail,
Sans -signature, la réquisition peut être désavouée : il n’y
a i-jen de constan,t.
Ici point de signature de la part des I;an d riève,n i d’un
fondé de pouvoir spécial. L ’exploit du 9 vendémiaire an 6 ,
a été posé par un nommé A u b in , huissier reçu en un
tribunal de district dans l’A v eyro n , huissier qui ne
présente aucune assurance en cas de désaveu. En sorte,
que les L an driève auroienl pu s’en m oquer im puném ent,
si l ’on ayoit voulu les prendre au mot sur l’effet de leur
réquisition.
A u reste il n’y avoit rien.de terminé entre les parties,
lorsqu’à paru la loi du 6 messidor an 6. V o ici quello
étoit leur position respoctive au moment de là publication
de cette lo i : nous venons,de le dire, les Landriève a voient
requis la réduction le 9 vendémiaire an 6 : le citoyen
de Privezac n’y avoit pas adhéré ; au con traire, il leur
avoit fait le 16 nivôse su iva n t, commandement de payer
la somme de iô o o francs, pour le demi-terme échu de
la ferme sur le pied de 3000 francs par an. L e 26 du
même mois , les Landriève l ’avoient fait assigner au
tribunal
�( 17 )
tribunal civil du département du Puy-de-D ôm e , pour
voir, prononcer sur la réduction requise par l’exploit
du 9 vendémiaire. A u moment de l’apparition de la loi
du 6 messidor an 6, il n’y avoit encore rien de réglé
ni par leâ parties , ni par les tribunaux ; les parties en
étoient seulement en état d’une contestation bien formelle.
Elles se trouvoient donc précisément dans le cas de
l’article X V . L ’affaire devoit donc être conduite et jugée
en conformité de cette loi. Il falloit donc aussi que les
Landriève payassent dans le mois de la publication
(suivant l’art. "VIII) tout l’arriéré des ferm ages, sur le
taux du bail de 1784 , existant encore en 1790 ; sans cela
fin de non recevoir écrite très-expressément dans la loi.
O r , c’est ce que n’ont pas fait les Landriève : en effet,
au moment de l’émission de cette lo i, étoient échus les
termes de novembre 1797 ( ou brumaire an 6) et de juin
1798 ( ou messidor an 6 ) ; ces deux termes form oient,
suivant le bail de 1784 , un total de 1300 francs de p rix
principal. Les Landriève devoient dès-lors payer et cette
somme et les accessoires expliqués en ce bail , et les
objets supprimés par les lois nouvelles.
Il est vrai que les Landriève ont offert au citoyen de
Privezac ( au domicile du citoyen Brun ) , le 21 nivôse
an 6 , la somme de 65 o francs pour le demi-terme échu
le 11 brumaire p récéd en t, plus celle de 42 francs pour
la dîme supprimée , et eniin celle de 6 francs 10 sous
pour frais.
Mais , i°. ces offres n’ont pas été faites ni a la personne,
ni au domicile du citoyen de Privezac. X-e p rix du bail
étoit payable au dom icile de ce dernier \ cela est dit dans
C
�(iS)
le bail du 4 germinal an 8. Celui de 1784 portoit même
engagement de la part des Landriève. D ’ailleurs c e u x -c i
l’ont jugé eu x -m êm es ain si, puisqu’ils sont allés au
domicile du citoyen de Privezac pour faire leurs offres
tardives du 4 prairial an 9. L e domicile élu par le citoyen
de Privezac cliez le citoyen Brun , n’autorisoit pas les
L andriève à y faire leurs offres du 21 nivôse an 6. Des
offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu , qu’autant que le créancier a notifié au
débiteur l’indication de payer là , ou que ce créancier
a donné à celui chez lequel est l’élection de domicile ,
le mandat formel cio toucher ( 1 ). Ici rien de.tout cela.
2 0. C e s o ffres s e ro ie n t e n c o r e in su ffisa n te s, p a rc e q u e le
( 1 ) D en izart, <verbo o f f r e s , n . 20, dit : « Les offres doivent
»
»
»
»
»
>!
»
«
»
être faites en temps et lie u , c’est-à-dire ( pour le lieu ) à la
personne du créancier, ou à son dom icile, ou à celui qui a été
désigné pour la convention. O n ne peut pas valablement les
faire au domicile élu chez un procureur, s’il n’y a sur cela une
convention expresse entre le créancier et le débiteur. L a cour a
jugé de pareilles offres insuffisantes, par arrêt rendu le 17 déccmbrc 1714» entre le sieur le Breton et la dame Jossm'e, quoiqu’elles eussent été réitérées à l’audience sur le bureau ( en cause
principale ). »
Pigeau, en sa procédure civile, liv. II, part. I V , tit. I, chap. I,
note B , dit : « Elles ne peuvent l’être au domicile élu par les acte»
» de procédure, tel que celui de procureur ou autre-, parce que
« cette élection n ’est faite que pour que les actes que l ’on veut
» signifier à une partie parviennent sur le champ à son procureur,
» et qu’il fasse en conséquence ce qu’il estime convenable; mais
» elle ne donne pas au procureur pouvoir de recevoir pour sa
» partie. »
�( *9 )
bail de 1784 , comme celui du 8 germinal an 4 , obligeoit
lesLnndriève i\ payer annuellement quarante-cinq livres
de beurre et douze poulets rendus et conduits au château
de Bostes. L e s Landriève n’ont rien offert pour cela.
3°. Dans le bail du 8 germinal an 4 , le citoyen de
Privezac a accordé aux Landriève une portion à prendre
annuellement dans le bois des Saulzeix ; celui de 1784
ne leur donnoit pas cet avantage. Dans leurs offres, pas
un centime pour raison de cet objet : autre moyen d’in
suffisance.
4 0. Lorsque les Landriève prirent au tribunal civil
du département du P uy-de-D ôm e, le 27 messidor an 7 ,
un jugement par défaut contre le citoyen de P rivezac,
il étoit échu une autre année de ferme en son entier ;
ils dévoient donc alors deux années q u i, suivant le bail
de 178 4, auroient monté à 2,600 francs do prix prin
cipal, à 82 francs pour dîmes supprimées, à quatre-vingldi x livres de beurre , et à vingt-quatre poulets. Néanmoins
ils ne réalisent sur le bureau de l’audience , que les
sommes offertes le 21 nivôse an 6 , c’est-à-dire, 65o fr.
d’une part, pour prix principal d’un demi-terme, 42 fr.
pour dîme supprim ée, et 6 francs 10 sous pour frais. Il
y auroit donc insuffisance énorme,
5 °. D e simples offres ne suffisent pas, et suivant les anciens
principes, et suivant les nouveaux principes sur les tran
sactions entre particuliers. Dans l’ancien droit, l’on tenoit
pour maxime que des afj'res labiales ne libéroient pas,
Les tribunaux les jugeoient toujours comme non-avenues,
quand elles n’étoient pas suivies ou de réception par le
créancier, ou de consignation par le débiteur. Dans le
G z
4 »
�'
.
.
( 20 } .
nouveau d roit, même règle, (i) : il faut que le débiteur
ne plaide pas les mains garnies ; il faut qu’il soit dessaisi
des deniers offerts ; il faut que sa libération soit opérée
par une consignation.
I c i, point de consignation par les L an d riève; ils sont
toujours demeurés rétentionnaires des deniers offerts ;
ils ont plaidé les mains garnies.
L es choses en étoient en cet état de.dénûrnent absolu
de la part des L an d riève, lorsque la cause a été portée,
plaidée et jugée au tribunal de prem ière instance à R io m ,
le 3 floréal an 9 : même en cet instant point d’offres
réalisées sur le bureau de l’audience, pas même des
sommes expliquées au procès verbal du 21 nivôse an 6.
L ’article V III de la loi du 6 messidor an 6 , est de la
plus grande rigueur; il veut très - formellement deux
choses infiniment essentielles : i ° . demande en réduction
dans le m ois; 20. payement de tout l’arriéré, aussi dans
le mois. L ’une de ces conditions m anquant, fin de nonrecevoir très-expresse. N e le p o u rro n t, A p e i n e d ’ ê t r e
DÉ CLA RÉ S n o n - r e c e v a b l e s , que dans le m ois q u i
suivra la publication de la, présente, e t q u ’ e n p a y a n t
d a n s LE MÊME MOIS. Si l’on ne requiert pas dans le
m ois, et si l’on ne paye pas aussi dans le m ois, c’en est
fait ; le ferm ier est obligé d’exécuter le bail sans réduc
tion aucune. T elle est la peine prononcée par la lo i; et
les tribunaux n’ont qu’à en faire l’application.
(1) A rt. X V de la loi du 9 fructidor an 5. I l en est de même
de ceux qui ont fa it des offres et consignations valables et suf
fisantes.
�( 21 )
Que les Landriève ne disent pas que tout a été réparé
par leurs olives du 4 prairial an 9 ; qu’ils ne disent pas
que le citoyen de Privezac les ayant reçues, il en résulte
qu’il est payé , et qu’il ne souiïre plus aucun tort.
i° . Ici tout est de rigueur. L e délai donné par la loi
du 6 messidor an 6 n’est pas comminatoire ; il est fatal.
L e mois écoulé sans payement de la part du ferm ier,
la fin de non-recevoir est acquise au propriétaire, et il
n’est pas au pouvoir des tribunaux de le priver d’un
avantage assuré par la loi.
20. A u temps des offres du 4 prairial an 9 , le mois
donné par la loi étoit plus que passé; la fin de nonrecevoir étoit encourue; la justice avoit prononcé la
pein e; les choses 11’étoient plus entières.
3°. Suivant la loi du 6 messidor, c’étoit ici une affaire
d’argent ; les Landriève dévoient commencer par l ’offrir
et le consigner dans le temps utile ; ne Payant pas fait à
propos, ils sont dans la même position que s’ils avoient
exercé une faculté de rém éré contre le citoyen Privezac.
S’ils en avoient été déchus par une sentence sujette à appel,
pour n’avoir pas offert et consigné, sur l’appel ils seroient
non-rcccvables à purger la demeure : la sentence scroit
confirmée purement et simplement.
Ici il s’agit uniquement de décider si les premiers
juges ont bien fait en prononçant la fin de non-recevoir
écrite dans la l o i , faute du payement dans le mois. Il
est constant qu’alors il n’y avoit point de payem ent, point
d’offres suffisantes, point de consignation tenant lieu de
payement. Par conséquent le tribunal de Riom a trèsbien jugé. C ’est l’état des choses au temps du jugement
�du 3 floréal an 5 , qui est déterminant. A cette époque,
y a v o it - il o,Très et consignation ou payem ent? Non. Ce
qui a été fait après le jugement et môme après l’a p p e l,
ne peut pas faire que ce qui n’existoit pas encore lors du
jugem ent, eût existé avant ce jugement. Comme ici il ne
peut être question que du an benè an m a lè , il faut
nécessairement remonter à l’état des choses au temps de
ce jugement.
4°. L e citoyen de P rivezac, en recevant les sommes
offertes en cause d’a p p el, ne les a touchées qu’à bon
compte ; il s’est réservé tous ses moyens de fait et de
droit. Il lui étoit dû plus de 12,000 francs , il n’a reçu
qu’entour 6,000 francs ; il ne risquoit donc rien en
prenant cet acompte.
5 °. Quand au tort résultant de la conduite des adver
saires envers le citoyen de P rivezac, ce tortprésenteroit
une lésion de plus de moitié , si leur projet réussissoit.
Nous allons le démontrer dans le paragraphe suivant ;
mais en attendant il doit paroître démontré que les
premiers juges ont parfaitement bien jugé en déclarant
les adversaires non recevables eu leurs demandes en ré
duction,
§ 1 1 ,
Ce seroii pour lecitoyen de Privezac un grand m alheur,
si les Landriève pouvoient se soustraire impunément
aux engagemens qu’ils ont contractés envers lui par le bail
du 8 germinal an 4. S’ils avoient obtenu la réduction de
ce bail au p rix de celui de 1784, ils y auraient l’avantage
�23
(
)
criminel de jouir de ses biens moyennant ün p rix moindre
que celui qu’ils ont payé au sieur de T illy .
E n effet, dans l ’exactitude des laits, le vrai p rix de
ferme des domaines de Chantagret et de Cornassat, est
celui stipulé au bail de germinal an 4* L e bail de 1784
et autres antérieurs avoient été préparés et faits par des
agens d’affaire, qui auroient dû marquer plus de fidélité
envers le sieur de T illy . C e lu i-c i liabitoit la capitale;
entraîné par le tourbillon des affaires de l’état, éloigné
de ses propriétés, il étoit obligé de s’en rapporter à autrui,
et ses intérêts n’en éloient que plus mal soignés. P ar cette
raison ses biens n’étoient pas affermés comme ils devoient
l’ê tre .D ’un autre côté, l’on faisoit donner en pot de v in ,
et sans on faire mention dans les b a u x , des sommes con
sidérables. Par ce biais , le sieur de T illy obtenant de l’ar
gent comptant ( dont il avoit très-souvent besoin), il avoit
cet autre profit que ses domaines ne paroissant affermés
que moyennant 1,300 francs, il ne payoit des vingtièmes
que sur ce revenu ostensible. L e bail de 1784 a été passé
pour commencer seulement en 1788. Cette anticipation
nous présente sûrement la pensée bien exacte , qu’alors
il y eut de l’argent donné en secret, parce qu’il n’est pas
ordinaire qu’un propriétaire renouvelle ses baux quatre
ans avant l’expiration de ceux déjà existans.
S i aujourd’hui le citoycnde P rivczac étoit réduit au prix
du bail tic 178 4 , au p rix ostensible de 1,300 francs, il
s’ensuivroit qu’il n’auroit pas le prix réel. Il n’auroit
aucune ressource pour se faire faire raiso n du prix supplé
mentaire et caché, parce que tout se passa en secret entre
le sieur de T illy et les Landriève : en sorte qu’ily a u ro it
�(H )
impossibilité absolue de rem plir le vœu des lois nouvelles
sur les fermages. Ce vœu est que le propriétaire ait au
moins le p rix an cien , et ici le citoyen de Privezac ne
l’auroit pas.
Q u ’à cette considération entraînante on ajoute les ex
pressions et les inductions que présente le bail du 8
germ inal an 4 , il ne restera pas le moindre doute que
les parties ont traité en écus , et que sans la vue cer
taine , autant que possible alors, d’être payé de cette
manière , le citoyen de Privezac n’auroit pas affermé.
E n e ffe t, il est dit dans ce b a il, i°. que le citoyen de
P riveza c a ffe r m e « p rix (Vargent. E n F r a n c e , quand en
l ’an 4 on disoit argent, personne 11e se trom poit sur
l ’acception du mot. T o u t le monde entendoit des espèces
sonnantes, et non du papier-m onnoie ; les plaies pro
fondes qu’avoit faites ce signe monétaire étoient encore
toutes vives , toutes saignantes ; et alors on évitoit avec
soin ces maux pour l’avenir.
2°. Ce bail exprim e encore que la somme de 3,000 fr.
sera payable en num éraire ou valeur représentative.
N um éraire signifioit alors des especes métalliques. L a
loi du 18 fructidor an 4 , n’emploie que le mot num é
raire , pour rendre que les baux stijmlés en écus, ne
scroient pas réductibles. Par valeur représentative, l’on
entendoit aussi des denrées, elc. qui représentoient aussi
des écus.
L ’usage est la m eilleure explication du sens des termes
dont on se sert dans certaines contrées ; cet usage donne
toujours la mesure de l’intention des parties. O r , une
preuve que dans le canton de M ontaigut, par le mot
num éraire
�Ç a 5 .)
num éraire on vouloit dire é c u s , et non assignais ou
mandats , se trouve dans la relation du contrôlé du
bail de germinal an 4 , faite au Bureau de M on taigut,
le 12 germinal. Dans cette relation, on vo it quelle; con
trôleur a perçu i o 5 francs; savoir, 100'francs en "mandats,
et 5 'francs en num éraire ( 1 ) . D elà il suit, que dans ce
canton l’on ne considéroit pas les mandats comme dit1nu
m éraire ; il s’ensuit' cjue l ’on né considéroit c o m m e numé
raire que le num éraire proprem ent dit, et non ces valeurs
fictives qui ont désolé tant’de Français.
'
30. L e bail du 8 ’germinal an 4 , contient rém unéra
tion et l ’appréciation des bestiaux garnissant les domaines
du citoyen de Privezac. Ces bestiaux consistaient en six
bœufs arans, neuf vaclies m ères, un taureau, une jeune
vache et trois suivons; total, vingt bêtes à cornes. E h bien,
ces vin gt bêtes n’ont été estimées qu’à la somme -de
526 francs. Cette circonstance dépose bien clairement que
toutes les stipulations des parties ont été faites en espèces
sonnantes ; car en papier-m onnoie, vingt bêtes à cornes
auraient été portées à plusieurs m ille livres.
Considérons, enfin, que le citoyen de P riv e za c , en
affermant pour neuf années, moyennant 3,000 francs
par a n , a dû compter sur 27,000 francs à toucher pour
toute la durée du b a il , tandis qu’il ne recevroit que
11,700 francs dans le sens du bail de 1784. L a différence
seroit én orm e; elle seroit de 15,300 francs : elle vaut
(x) Enregistré à Montaigut le 12 g e rm in a l an 4 * Reçu xo 5francs
en mandat de loo francs et 5/m/2Ci üE ÀUMÉitAiRE, Signe Piètre.
D
¿ ig s
a ï A
�( 2 0 )
bien la peine qu’il résiste aux prétentions déloyales des
Landriève.
Que les L an driève aient fait une fortune de 80,000 francs,
on ne la leur envie pas : on la croit légitim em ent acquise ;
mais ils devraient être bien contens d’un aussi grand p rofit,
et ne pas viser à avoir injustement le bien du citoyen
de Privezac. Ils se sont engagés à le payer en num éraire.
C ’est chose qui appartient incontestablement à ce dernier ;
et le tribunal d’appel partagera la sorte de satisfaction
qu’a dû éprouver celui de l ’arrondissement de R io m ,
en trouvant dans les circonstances de l ’affaire et dans la
lo i du 6 messidor an 6 , une fin de non-recevoir invincible ,
un m oyen infaillible pour forcer les L an driève à tenir
leurs promesses , à rem plir un engagement sacré sans
lequel ils n’au ro ien t plus eu la ferme des deux domaines
en question.
GOURBEYRE.
A. R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T rib u n a l d ’appel.— A n 10.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel de Privezac, Jacques. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant actuellement du lieu de Chanzy, mairie de Besset, département d'Allier, intimé et défendeur en opposition ; contre Charles-Pierre et Gabriel Landriève, fermiers, habitans du lieu de Chantagret, mairie du Peyrouse, appelans et demandeur en opposition.
Table Godemel : Fermier - qui, en vertu de la loi du 9 fructidor an 5, a demandé la réduction du prix de son bail, lorsqu’il n’a pas été statué sur cette demande avant la publication de la loi du 6 messidor an 6, a-t-il dû faire les offres exigées par l’article 8 de cette dernière loi ? peut-on lui appliquer les dispositions de l’article 15 qui veut que toute contestation non définitivement terminée soit jugée en conformité de ce que cette loi prévoit ? ou bien, le droit de réduction était-il acquis au fermier par le simple effet de sa demande ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1796-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1416
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0233
BCU_Factums_M0234
BCU_Factums_G1417
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53230/BCU_Factums_G1416.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
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PREMIER
MEMOIRE
PO U R
les Sieurs D e s f o n t a i n e s
C o m p te s,
C O N T R E
&
, A u d i t e u r des
L a m y , B ourgeois de P a r is
M.
le D u c
d
' O r l e a n s
Prem ier
P rin ce du Sang.
o
N a p e r fu a d é à
M . le D u c d’O rlé a n s q u ’il étoit
propriétaire de tout le terrein qui , avant fes n o u v e lle s
co n ftructio n s , conduifoit de fon Palais à la rue de R i
chelieu. D e - l à le projet co n çu par ce P rin ce de bâtir f ur
cet em placem ent; D e - là les voies de fait que ce font permifes fes ouvriers. D e - là les prétentions é levées par fes
G e n s d’affaires. D e - là e n fin , pour les fieurs D esfontaines
& L a m i , la trifte alternative ou de perdre le u r b i e n ,
ou de repouff er l’attaque q u ’on leu r livre.
A
�T o u s ceux qui voient aujourd'hui les murs immenfes
dans lesquels
enfermée la Capitale , ne fa vent pas
dans quelles limites
ccroit.cs , c li c fut originairement •
reiïcrrcü.
L u tcce Jîtuée dans une ijlc de■h S ein e ^ dit C é f a r , e jl
la V ille des Parifiens.
J u i q u ’à la fin d c r l a fç ce nde J\^ce , Paris .fut efïecti vement-eirconfcrit ¿ntre-Hôs-deux'-bras delcette R i v i e r e .
A
la fin du douzième ilecle , Philippe A u g u i t c en.
re cula les 'limites. '
'
V f"'
;f
7
M ais ce q u ’il importe de connoîçre , pour l’intelli
ge n ce de la caufe , c ’eil l ’enccinte de cette V i l l e , coinme ncée fous-Charles V en 1 3 6 7 , , &: ache vé e fous, fon
fuccefleur en 1 3 83 .
*
'• *r\ ' '
A cette é po qu e furent placées les portes S a i n t - A n -
çoine , Saint-Martin Sc Saint-Denis 3 fur. l’emplacement
q u ’elies oc cu p en t aujourd’hui.
D e ' l a porte Saint-Denis , les murs des rempârts'conrinuoient par la ’rue de B p u r b o n -, traverfoient l c s P e - :
t j t s - C a r r e a u x , la rue M o n t m a r t r e , la place d e s V i d o i r e s ,
l ’hôt el de T o u l o u f e , le jardin d u ' P a l a i s - R o y a l , la rue
de R i c h e l i e u entre celles des Bo ucheries &: du R e m p a r t ,
& :aljoi.efjt £pir au bout: de la, rue Sa mt- Nicaife.
: i- cs maifçns .qui o n t leur façade fur la rue St. H o i^pré; j, • ctitrp' la. ru,Q de Richelieu^ 5c I c ( P a l a i s - R o y a l ,
s'^tendoient parj derrière jus qu'a ux murs des remparts.
�3
-
L e Cardinal ‘de R i c h e l i e u ., p r o p ^ i ^ j r ^ #e§J£jî$rens
jcîrconvoifînhitjistca, e n • i Ciaj^ lsM£ond4iiV?rtï!dfi;fe[nrP,'i^s
a u jo u rd ’hui l e P a l a i s r oyal . . . ■
Jijiio'j
.‘ ."'cio ¿si
C e t t e immenfe bâtifle changea encore".de *c£ t ô t é les
limites de.Paris.
J- o .
l •'» en.
‘
Li^ p or te Saint-Honoré , alorsrplacéçi fur le (local afi•tuèFdes'Quinze-Vingts, 'fut,reculée
l'endroÎDoti
nous l’avons vue j & depuis cette porte , ju fq ü a cel le de
S a i n t - D é n i s , le circuit que trace maintenant le b o u l e
vard fut oc cu p é par de nou ve a ux remparts.
L e Cardinal ;s’çmpara de
la p a r t i e . des anjcicps qui
étoit à'fa ¡convenance , ou elle luic f u t ' co nc é dé e rpV^la
.Ville q ui en étoit propriétaire , dans l a dirC & è d u R q ï .
L e Palais fut a ch e vé i 6 3 6.
C e t t e même année le
>■
Cardinal çn fie donation à
L o u is X I I I .
C e p e n d a n t il réfolut de Je bâtir un hptel p a r t i c u l i e r ,
à l’endroit de la rue de R i c h e l i e u o ù s’é î e v é aujourd’hui
le th éâ tre des V a r i é t é s , 5c de le fa irc;C o m m u riiq u er a v e c
fon b â tim e n t .p rin c ip a l. '
.v .
I l f a l l o i t , pour cet e f f e t , acquérir tout ou pïiftié des
propriétés qui régnoientvfur la-rué S a in i- H o n or é, depuis
c e J e de R i c h e l i e u j û f q u ’au Palais royal,
r.
'
O r du nombre de ces maifons étôient céllés dont j'quifient a prefent les ficiirs Desfontaines Sc L a m i.
'
^Celle-ci au derriere d’une autre v donnant fur la rue
Saint-Hohoré , qui avoit pour ehfeigne: l ’I m a g ç N o t r e D a m e , ou la Belle-Image , étoit. compofée d ’un - corps,
de bâtiment &; d ’un jeu de paulme terminés ^iar une
place vague.
À
i
�' n i,
-,
C e l l e - l à fucceiïivement connue fous le nom du C o r n e f
& du D a u p h i n * donc elle avoic vraifemblablemenc porté
les enfeignes confiftoit en deux corps d ’hô te l av e c étables
& jardin derriere.
L ’une &
l ’autre aboutifîbit , comme les maifons voi-
fiaes , aux anciens remparts de la V i l l e . D e s contrats &. ;
fentences de 1 4 7 6, 1 ? 7 4 , i i J o p & i i o i , n e leur don
ne nt pas d ’autres tenans de ce côt é , & prouvent en même
temps leur confiftance telle que nous venons de la détailler.
L e Cardinal de R i c h e l i e u ayant cu b ef oi n d’ une partie
du terrein dépendant de ces maifons, pour la conftru&ion
de fon nouvel hôtel , le (leur D e v a u x , auteur du ficur
L a m i , lui céda d’abord la place qui terminoit fa propriété,
& de p u is, cinquante-cinq toifes de fon jeu de paulme.
C es ventes font des deux août 1 6 $ $ & 2 1 décembre
1 (5’4 1 .
D a n s les mêmes années , le ficur HanneiTon , alors
propriétaire de la maifon du fieur De jfo nta in es, fit auifi,
au profit du C a r d i n a l , de ux aliénations fitcceffives de
portions de la C o u r , autrefois jardin , qiû écoic derriere
fes étables.
L e s d e u x contrats de 1 6 4 1 contiennent la claufe que
le C a rd in a l fera conftruirc de n e u f fur fon fonds de terre ,
aux dépens de lui feul , & fans répétition , un mur qui
fera la féparation des terréins cédés d ’ave c le réfidu de
j e u depaulm r & de cour que fe réfervoient les v e n d e u r s ,
fans q u e dans ce mur,qui fera mitoyen dans toute fa largeur
& h a u te u r , il puifle pratiquer aucunes v u e s , égouts , ni
autres fervitudes.
L e mur de démarcation , co nve nu par ces a&cs & par
�% .6\
S
les traités du meme genre , faits av e c les propriétaires
r/i
vo i fi n s , étoit déjà co m me ncé l orf que , le 2 3 maf 1 6 4 2',
le Cardinal fit fotî teilament. I l en ordonna la continua
tion fuivant les delfins & devis q u ’il avoit arretes.
L o u is X I I I habita ce Palais pendant le peu de temps
q u ’il fu rv é cu t à fon premier Miniftre.
L o u is X I V . y fit aufli fon féjour pendant fa minorité ,
&
le
conferva j u f q u ’en 1 6 9 2
q u ’il en fit donation a
M on fi eu r , premier D u c d’ Orléans , fon frere uniq ue.
C e p e n d a n t le mur co nvenu entre le Palais royal & les
propriétés limitrophes , avoit été conftruit comme l ’avoit
preferit le C a r d i n a l , d ’une maniéré uniforme & couronné
d ’une corniche faillante dans toute fa longueur.
O n y avoit adofie la b ib lio th èqu e.
Aufli les maifons des fieurs Destontaines 6c L a m i } aux
quelles les titres de 1 4 7 ^ 1 ^ 7 4 , 1 i o o &. 1 6 o b avoient
j u f q u ’alors donné pour tenans les remparts, ou les murs de
la V i l l e , font-ils depuis énoncés aboutir de ce côté aux
murs mitoyens de la biblio thè que
ou du Palais royal.
D e s actes de vente , des décrets , des procès-verbaux
d ’e x p e r t s , & des déclarations à terriers des années 1 6 $ 4 ,
1657,
/
1 6 5 8 9 1 6 tfa , 1 6 9 2 & 1 7 0 2 , prou
ven t cette vérité.
D ou il réfulte que le terrein d ’entre le Palais royal
ou la bibliothèque & les maifons qui y faifoient f a c e , &
auxquelles !a biblio thè que ou le Palais royal fervoient de
tenant de ce côté , a toujours fait partie de ces maifons p a r .
ticulieres , qui en con fé q u en c e avoient deflus leurs en
trées & leurs vues , & q u ’il doit etre confidéré par rap
port aux iieurs Desfontaines & L a m i , com m e leréjidu de
\
�G
cour ù de je u de paulm e q ue s‘étoicnt réfervés leurs a u
teurs j par les actes de
1Î41.
- ''
J
Ce p e nd a nt c ’eil pour la confervation Je ce réfidu, q u i
fervoit de paflage de la rue de R i c h e l i e u au Palais r o y a l ,
& fans le q u e l les maifonsdes iîeurs Desfontaines &. L a m i ,
ne feroienr que des cachots ; que nous fommes forcés
de piailler aujourd’hui conrre M . le D u c d’Orléans.
A u mois de janvier 1 7 8 7 , les ouvriers de ce Prince
ont mis des cadenas aux portes des fieurs Desfontaines de
L a mi donnant fur le paflage.
D e p u i s , ils ont creufé le fol au pied des murs juf■qu’à la profondeur d’environ deu x roifes.
A inf ile s fie-ur D e s f o n t a i n e ô c L a m i , enfermés c h e z eux
de ce côté , courent en outre le rifque d’être écrafésfous
les ruines de leurs maifons.
A ces voies de fait cependant ont fucc éd é des voies
de droit.
L e 20 février
1 7 8 7 , il a été flic aux fieurs-Dds-
fontaines 8c L a m iu n c fommation de s’écayer du côté du
paflage ,
même de juftifier des titres' en vertu defquels
ils y avoient pris des jours & des iiTucs.
L e 2 4 mars
lurva-nt , on les a fait fommer de ;fe
tr ouver fur les lieux , à l’effet d’ y être fait vifitc des
murs féparatifs des propriétés refpe&ives.
Le
iîeur L a mi s’cil rendu aux défirs de M . le D u c
d ’Orléan s , 6:-après avoir exhibé fes ti t r e s , il a reprefente
à i’ArchiiXcte du Prince que les jours 8c les entrées qu-il
à voie fur le paflage n etoient l’effet d'aucune fervitude ,
mais le libre exercice de fa propriété , q u ’efïe&ivement
le terreiil fur le qu el il en jouifloit 3 vis-à-vis de fa maifon,
w
�•
7
.
lui a p p a r te n o it , 5c q u e le mur de la bib liothèque é tok
aux termes du contrat de 1 ^ 1
, &
de tous les a&es
poftérieurs, la limite'du Palais royal.
E n co n fé q u c n c c le ficur L am i s’oppofa à la continua
tion des ouvrages de M . le D u c d ’Orléans , & ils fu.retin
fufpendus.
Mais bientôt on' réfolut de les reprendre.
L e i 2 mai î 7 8 7 , on fit lignifier, a la requête de IVi.
le D u c d ’O r l é a n s , un arrêt obtenu feus ion nom la furveille , qui lui permçttoit de faire afligner tous les,pro
priétaires des marions aboutifiant au paflage. en queilion y
pour juftifier des
titres
de foufïrance q u ’ils pou voient
avoir fur ce terrein., iînon s’en voir déclarer d é c h u s ,
ce q u i , fur la demande provifoire du Prince , à ce q u ’il
fût autorifé à continuer fes travaux , jndiquoit jo u r
..
. -. i .1 .
au i 0.
L e s parties ayant été appointées à mettre , les iieurs
Desfoniaines &. La m i fembloient n’avoir à craindre a u
cune innovation iu f q u ’au juge ment de cette inftance > c e
pendant il fallut encore un référé pour arrêter les nou
velles cntrpprife des ouvriers.
....
?
C cft dans l’inftance provifoire que , le 2 1 juin 1.7 8 7 ,
-
eftintervenu arrêt qui, avant faire droit, ordonne la. vifite
&: reconnoiiTance des terreins dont il s’a g i t , par experts ,
auxquels les parties remettroient leurs titres refpeftifs de
p ropri été, apiès.^fe les,çtre mutuellement co ççi iuj n iq^ g ■
pendant trois;jours.
*
.....
-
. Ge tt ç opération a eu-lieules 2 4 juillet & jours ; fuivan?,
& , s il le faut /nous montreront dans bi fuite., 3vec plus
de détail , q u ’il en réfultc en faveur des fieurs Dcsfoiv-
�s
’
taines & L a m i , une infinité de preuves de leur propriété >
du terrein c o n te n tieu x .
N o tr e ob jet a & u e l n’eil q u e de donner un apperçu
des moyens qui , tant en la form e q u ’au fo n d , s’é lè v e n t
contre la prétention de M. le D u c d ’O r l é a n s , prétention
dont les auteurs eux-memes ont fi bien fenti l ’illufion que
q u o iq u ’ils la p réfen ten t hardim ent au ju gem en t de la
C o u r , ils n’onc pas même , dit-on ,
ô fé la foum ettre
encore , ou du moins ils ne l ’auroient offerte que depuis
peu de te m p s, à l ’exam en du C o n fe jl faic pour prémunir le
P rin ce contre de pareilles furprifes.
m
o
y
e
P r e m i e r e
n
s
.
P a r t i e .
F in de non-recevoir.
L e s fieurs D esfontaincs & L a m i font loin d ’imputer
à M . le D u c d 'O rléa n s les voies de fait dont ils ont à fe
plaindre. L e P rin ce qui , fécond L é o p o ld , exp ofe fes
jours pour co n ferv er ceu x du dernier de fes g e n s , ne fau roit-ètre fou p çon n é d ’a v o ir trou b lé violem m ent la p r o
priété des d eu x citoyens i mais la garantie civ ile du faic
de fes ouvriers , dont M . le D u c d ’O rlé a n s eft te n u , n’en
fournit pas moins à c e u x qui en ont été les victim e s,
une exception péremptoire contre fa demande.
C e tte fin de n o n -rec ev o ir refu lte de la maniéré illé
g a le d onton a p r o c é d é , foit à la réclufion des fieurs D e s fontaincs & L a m i , du cô té d u terrein contentieux., foie
S
3
�9
à l’excavaiion du fol au pied de leursmaifons, t a n t a v * n t
q u e depuis le litige!
Cadenafîer les portes d ’un propriétaire , avant d ’en
gager aucune conteftation ave c lui , & découvrir ju£>
q u ’aux fondations de Tes b ât im e n s , c ’cft de la part des
f u b a lt c r n e s , coupables d’un pareil at t en t a t, avoir m é
connu les premieres réglés de l’odre public , & violé la
condition fondamentale du pa£Ve focialj fuivant lefquelles
nul ne peut troubler de fa feule autorité une pofleffion
fubfiftante fous la fauve-garde des loix : N ih il efi exitio tiojîus civ ita tib u s, n ihil tant contrarium ju r i & legibus ,
quam compofitâ & conjiitutâ republicâ } quid quant agi per
vim, C ic . de legib. lib. 3 , n° 1 8 .
Mais rcn ouveller ces a&es d’hoftilité lors même q u e
les
parties font devant
les T r i b u n a u x principalement
deftinés à les rép rime r, c ’eft pour ainfi dire , méprifer
la juftice elle-même. Dans le doute a uqu el des contendans la C o u r adjugeroit le bien c o nt e nt ie u x, les ouvriers
du Prince devoient attendre , dans une ina&ion refpectueufe , q u ’elle en difpofât en fave ur de celui dont le
droit plus évident feroit pancher fa balance , & ils onc
fait perdre à leur Maître toute efpérance de vi&oire , en
prenant fur eux de difpofer d’avance de l’objet qui doic
en être le prix.
U n homme demande à être re lev é eontre un engage
ment onéreux , le Lég if la te ur ne ve u t pas q u ’on mette à
exécution le titre contre le q u e l il Te pourvoie. l>cg%unicai
Cod. lib. 2 j tit.
5 o.
U n héritier légitime attaque un teftament 5 il » pour
lui la loi qui l ’appelle A. la fucceflîon , & même un pre
mier ju g e m en t qui fait cefler l ’o b i h c l e q u ’oppofoient à
B
�1o
f a j^uliTance les dernières difpoficions du d éfu nt 5 c e p e n
d an t , s’il y a appel , il ne doit pas , avant l'arrêt .défi
nitif y fe mettre en pofîeffion des b i e n s , L eg. 1
lib :
Qodic.
5 ? tit. 2 1 .
L e principe qui ,di£ta la prohibition d ’innover pen
dant le litige , eft: confacré par la doctrine des Aute urs
ÔC par la ' jurifprudence. ; V o y e z Pothier , du .droit de
propriété, part-, 2., chap. 1 ç r , art. 2 ; les arrêts de Pà pon
liv. 1 4 j titre 1 3 5 & M ar éch al , traité des droits h on o
r i f i q u e s , chap. 2 3 $. $.
Ainfi , mal à propos les ouvriers de M . le D u g d ’O r
léans ont-ils / a u mois de janvier 1 7 8 7 , intercepté , par
des cadenas j le .paU'age. dont avoient joui j u f q u ’alors les
fieurs Desfontainfcs & L a m i , 6i creufé le long de leurs
murs
le terrein contentieux plus
bas même que
les
fondations.
j Mais plus mal à propos encore., ont ils continué ces
ouvrages pôilérieürementiau jï'2 mai 1 7 8 7 , ép o qu e de
la d em an d c'i mr od u cl iv e de la caufe.
^
^
L a co nf éq u en ce qui refult« contre M . le D u c d’O r
léans , de ces quafi-délits de fes fu b o r d o n n é s , q u o iq ue
çoinmis
ians fa participation,
c’êft q u ’il faut dès à pré-
le n t remettre les. chofes dans l’état où elles éroient avant
ces voies de fait. Spoliatus ante otnniâ reflituen diis, c ’eft
le v œ u des loi-x &. la jurifprudence confiante de la C o u r .
'
« C e l u i qui aura été dépoiTédé par v o ie de f a i t , porte
. TO rd on na nc e C iv il e , cit. 18, art. 2, » pourra demander la
» réintégrande. »
■
'
U n Pa vt ic ul ie r. tr ou ve ,une-digue éle vé e fur un che
min p u b l i c , i l i a d é t r ui t j un arrêt du mois de Juill et
1603 , fans avoir égard au motif plaufible d’ une telle
c o n d u i t e , l ’oblige à la r é t a b l i r . &
dépens.
le condamne aux
�z
I i
D e s P a y f a n s com blent des fofies par le fq u e ls oti le u r
avoit récem m ent
interdit
l ’encrée
d ’un
pré
où
ils
étoient dans l ’ufage de faire paître leurs beftiaux i par
arrêt
du 4 Septem bre ! 7 4 P , ils font condam nés provi-
foirem ent à la réparation de’ leurs voies de fait.
' . _
L a même queffcion fe préfente le 12 mars 17 ($’4 , &:
elle effc jugée de même au rapport de M . 1 A b b e T e r r a y .
V o y e z le C on tin u ateu r de D e n iz a r t , verbis V o ie s de fait j
& le T r a it é des Injures de D a re a u , page 8 0 - 8 4 .
C ’eft A cecte falutaire' aliimadveriîon des T r i b u n a u x
contre toute efpéce de voie de fait, que font dus l'ordre
& la tranquillité p ubl iqu e 5 6c la Juftice ne fauroit fe
relâcher de cette fainte f é vé ri ré , fans introduire en même
tems dans la fociécé la violence & les guerres inteftines ,
qui ont fi long-tems défolé notre patrie.
Mais les nouvelles excavations c o m b l é e s , la liberté
du pafl'ige r é t a b l ie , que lle fera en définitif l’iiTue de
la
conteftation ? C ’elt ce q u ’il faut examiner fubfidiairement * ne fut ce que pour éclairer la religion du P ri n ce
fur r injuilicc de la conreflation q u ’on lui fait foutenir.
S
e
c
o
n
d
e
P
a
r
t
i
e
,
D efe n fes au fo n d .
T o u t demandeur doit~:juiUfïer l’a di on q u ’il intente j
& pour fe fouiïraire à fa po ur fui te , il fuffit au d é f e n
deur de montrer q u ’elle eft dép ourvue de fondemenc :
dclore non probante , ra.üs abfolvitur.
Mais fi le demandeur obligé de tout prouver, ne prouve
r i e n , 3c q ue le déf endeur exempt de rien p ro u v e r, p rou ve
B 2
6ï
<w.'
�t o u t , le fuccès de ce dernier peut-il alors être d o u te u x ?
N o n certes j 8c celle eft heureufement pour les (leurs Desfontaines ôc L a m i , la pofition re fp e& iv e des parties.
- ’ ' M . le D u c d ’Orléans aftrcint à démontrer fa propriété
du terrein c o nt e nt ie u x, ne l’établit pas.
'!
E t fes adverfaires qui pourroient fc renfermer dans leur
poflefïion , démontrent par les pieccs mêmes, q u ’on leur
o p p o f e , la juitice & la légitimité de leur défenfe.
s j ' v
' M . le D u c d'O rléa ns ne prouve rien.
\
D e trois experts qui ont procédé à l’opération o r d o n
née par l ’arrêt du 2 i juin 1 7 8 7 , un feul eft favorable à
la prétention du Prince
c ’eft celui q u ’on a nommé de.
fa part. L e s deüx autres font unanimement d ’avis co n
traire.
■
-
M a is ;v oy on s fur quoi fe fonde le premier.
D ’une multitude de plans produits par M . le D u c
d ’Orléans pendant le cours de la vi fi te, il n’en cft q u ’un
a u q u e l il s’attache, 5c voici à qu el le occafion & de q u ’elle
maniéré il a été fait.
E n 1 d’4 0 , il s’étoit é le vé une conteilation entre l’A r c h e v ê q u e de Paris 5c le chapitre de Saint-Honoré., fur les
limites de leur cenfives, dans le quartier du Palais royal,
8c les experts .nommés, pour fixer la.'lignc -.dc démarcation,
a v o i e n t , afin de fournir intégralement au chapitre les 1 ^
arpens q u ’il reclamoit, e m p ié té de quatre perches fur les
anciens remparts de la ville , dans la directe du R o i.
O r , c ’eft pour revenir de la part du D o m a i n e , contre
cette légère anticipationv q u ’en
^ a été dreflo le
�13
pian q u ’adopte cxclufivcmenc l ’expert de M .
le
Duc
d ’O r l é a n s , 8c d’après l e q u e l il décide q u e les fieurs D e s
fontaines 6c L a m i doivent fournir au Pr in ce les q uan ti
tés de toifes f u p e r fi c ie l le s , acquifes de leurs a u t e u r s , par
le C ard in al de R i c h e l i e u , 8c que le paflage en queftion ,
en fait néceflairement partie.
C ’eft peut être de la part de cet e x p e r t , d écé le r aflez
mal adroitement l’efprit dans le q u e l il a rédigé fon avis ,
q u e de prendre ainfi fur lui d ’adjuger à M . le D u c d ’O r
léans la propriété du terrein contentieux , tandis que fa
miiTion fe bornoit Amplement à vifiter 6c à reconnoître le
local.
C e a ’eft pas non plus annoncer moins de p réventio n,
q u e de prendre pour bafe de cette décifion inc omp éte nte ,
une opération faite entre le D o m a i n e ôc le Chapitre SaintH o n o r é , fur tout après avoir rejette c e lle beauc oup plus
r e g u l i e r e , faite antérieurement entre ce même chapitre &
l ’A r c h e v ê c h é de Paris, fous prétexte que la contejtatiofi
qui Vavoit occafionnée n avoit aucun rapport au x demandes
des fieu rs D esfon ta in es G* L a m iy ôc de porter à l ’aide de ce
p l a n , à plus de 20 toifes la largeur des remparts, fixée à
4 0 pieds par un procès verbal de 1 64.0.
A u lurplus le] plan de 1 6 9 5 , e f t , fuivant le procèsverbal qui s’y réfère, un plan figuré Ù fa n s échelle , 8c
l ’expert n’affigne même aucunes dimentions fur Icfq.ueües
on puilTe en dreiTer une.
E n fécond lieu, le cerreinpour la reconnoiflance d u q u e l
il a été f a i t , eft fitüé à l’extrémité de la rue des Bons Enfans', vers la rue Bail ii f, & c o nf éq u em me nt à une diilance
trop confidérable du paflage contentieux., pour q u ’il puifle
s’y appliquer.
Enfin on ne voit ni fur ce pian , ni fur le p r o c è s - v e r
�bal qui l’expl iqu e , les points qui ont déterminé l'ob
liquité des lignes qui s’y trouvent tr acé es, pour repréfenter les anciens fofles ou rempars de la ville 5 car pour
fixer la direction d ’une ligne q u e lc o n q u e , il
faut
au
moins deux points donnés j o r , en fupçofant avec l’auteur
q u ’il aie trouvé un ancien veftige du mur du rempart à
l ’extrémité de la rue des Bons E n f a n s , il auroit fallu pour
prolonger fa l i g n e , comme il l a fait fur Îon plan , qu il
eue encore rencontré pour fecours q u e l q u e ancien témoin
des rempars près de la rue de R i ch e l i eu .
R i e n donc de plus incertain que le tracé des lignes
fur le plan de 1 69 j , &; deslors nulle preuve en faveur
de M . le D u c d’O r l é a n s , de la propriété que fon expert
ne lui attribue que fur la foi de cette feule opération ,
d ’ailleurs non moins étrangère au lo c a l , ainfi q u ’aux par
ties, q ue cel le de 1 6 4 0 , q u ’il écarte fous ce p ré te x te . .
§
I I.
Jjes Jleurs D esfon ta in es & Lam i prouvent tout.
E n a ¿T3 9 &c 1 S 4.1, les auteurs des fieurs Desfontaines
& L a m i , n’ont ve ndu q u ’une p a rt i e , l’un de la c o u r , èç
l ’autre du jeu de paulme qui terminoient leurs propriétés.
I l doit donc encore leur refter , indépendamment de
leurs m a i f o n s , le terrein réfervé lors de ces aliénations,
& qui leur
étoit indifpenfablement nécciïaire pour
la
confervation des jours 8c la commodité de leur paiTage.
Auiîî dans différens actes faits depuis cecte époque, leurs
maifons avec ces réfidus de terrein font deiignes ainfi. qu il
fuit :
E n 1 <j 4 3, celle du fieur L am i , eft dite joignan^ai*
jardin de l'hôtel de R ic he li eu ,
�„
* *
E n i 6 ; 4 , le Palais du Cardi na l eft donné pour tenant
à la propriété du fieur Desfontaines.
E n i 6$ 7 , 6c i 6 £ 8, le terrein d u i ie u r L a m i eft énoncé
aboutir à la bibliothèque.
Dans un décret de i 6 6 2 , on lui donne pour tenant
le mur mitoyen de la bibliothèque.
Da ns un autre
de la même année , il eft dit abou-
tiflant d’un bout au Palais royal.
*
E n 1 6$ 2 } le local du fieur D e s fo n t a i n e s , a pour c o n
fins le Palais royal.
E n 1 7 0 2 , même énonciation par rapport au manoir du
fieur L am i.
Il
eft donc confiant q u e depuis 1 6 4 1 , les propriétés
des fieurs Desfontaine 6c L a m i fc font étendues j u f q u ’au
mur de la bibliothèque ou du jardin du Palais r o y a l , quoi
q u e leurs bâtimens fe terminaiTent à environ 20 pieds en
deçà. C e fait n’eft pas moins pr ouvé par les aftes de 1 6 4 3 ,
1 <5^ 4 , 1 (i j 7 , 1 6
, 1 6 6 2 , 6c 1 7 0 2 , q ue ne l ’étoic
par les ailes de 1 4 7 6 ’ , 1 J 7 4 ,
1 600 * 6c 1 <
5o 1, l ’exten-
Îïon antérieure de ces mêmes t e rr e in s ju fq u ’aux remparts.
L e s énonciations géminées qui s’en trouvent dans des
actes d c toute efpéce , 6c notamment dans plulïeurs dé
crets faits pendant plus d ’un demi ficcle prouvent dès lors
q ue le paflage intermédiaire en faifoit partie. E t co n fé quemment que c'eft ce mur de la bibliothèque , conitani'
m e n td o n n é p o u r tenant auxmaifons des fieursDesfontaines
6c L a m i , ce mur qualifié mitoyen dans le décretde 1 6 6 2
q u e le Cardinal a fait conftruire pour fe borner av e c fes
voifins conformément aux traités de 1 6 4 1 .
C ’eft d ’ailleurs ce q u e prouve la forme même de cette
bâtifle,
/
�E u effet, fi le mur de la bibliothèque n’étoit pas celui
que le Cardinal s’éioit obligé d ’él éve r entre fes propriétés
& celles que s’étoient réfervées les auteurs des fieurs D e s
fontaines, L a m i Sc autres, il fa u d r o it , ainfi que ne craint
pas de le fou tenir l'e xpe rt de M . le D u c d ’Orléans j q ue
les murs qui font en f a c e , Sc qui terminent les bâtimens
particuliers q u i y régnent, euflent été deftinés à cette fin.
O r , indépendamment de ce que dans cette hipothèfe
on n’auroic pas donné la bibliothèque pour confin aux
propriétés des fieurs Desfontaines Sc L a m i , qui n’auroient
abouti q u ’au paflage j abftraclion faite en outre dejee que
dans cette fuppofition il ne reiteroic rien à ces proprié
taires de la cour Sc du jeu de paulme dont leurs auteurs
n ’ont
cependant aliéné q u ’ une partie j fi l’on compare
feulémenr les murs qui terminent leur jouiflance a & u el lc
à ce que difent les a de s de
1 6 4 1 , 6c le teilament de
* 6 4 2 , relativement à celui dont la conilruétion
étoit
dès lors projettée , on fera bientôt convaincu q ue cette
fuppofition eil inadinifible.
A u x termes des a il e s , le mnr que devoit él ever le
C ar din al entre fes propriétés Sc celles que s etoienc ré
fervées le fieur D e v a u x 2c fes confors, étoit un mur d’ une
fe u le c o n i t r u & i o n , 6c dans le q u e l il ne pourroit lui- mem e
p ercer ni vues ni autres ouvertures.
Su ivant le rapport au contraire , les murs des fieurs
Pesfo nta ine s ôc Lam i n’ont ni fymétrie ni uniformité j
ils ferve nt dans un endroit de clôture
Sc dans un au
tre de p i g n o n , enfin ils font percés de toutes parts, de
çroifées 6c de portes de paflage.
C ’eft
�Z7&
11
C ’eft do n c a ve c raifon q u e le m u r de la B i b l i o t h è q u e
ou du P a la is -R oy al a toujours é té confidéré c o m m e la
ligne de dé m a r c a ti o n , c o m m e le mur m itoyen e n t r e les
pro pr iété s d u P r i n c e £c celles de fes voiiins , &i q u ’on T a
p e r p é t u e l l e m e n t d o n n é p o u r t e n a n t aux maifons des fieurs
D e sf o n t ai n e s Sc L a m i .
Mais il exifte en outre dans le mur de clôture de ce
dernier un témoin muet de l ’impoiîibilité phyfique que
ce mur ait été conilruit depuis les aliénations partielles
faites par fes auteurs ; c e f t un arrachement fouterrein ,
reite du mur qui féparoit cette maifon de la maifon voii i n e , 6C qui ne pourroit fubfifter , fi poftérieurement à
la réunion des propriétés dans la maifon du C a r d i n a l , il
eut tranfverfalement
fait conitruire le mur a u q u e l cec
arrachement eft encore adhérent.
N ou s fournirions bien d ’autres preuves de la fauffeté
de ce fyftême
j
fi
le Prin ce propriétaire de de ux maifons
mitoyennes , l’une avec celle du fieur Desfontaines , 5c
1 autre ave c celle du fieur L a m y vouloic rapporter les
ventes fucceiïîvts faites aux époques de i 6 3 9 & 1 6"^ 1
par ceux à qui ces mêmes maifons appartenoient alors.
No us ne diffimulerons cependant pas que dans un con
trat du 28 Juin 1 7 4 6, Sc dans une fentence du 1 $ A v r i l
1 7 7 8 , la maifon du fieur L a m i eft dite tenir par derriere
au paflage qui conduit de la rue de R i c h e li e u au Palais
R o y a l 5 d’où l’on a prétendu inférer que la partie de ce
paflage qui oc cu p e l’intervale de fon mur de clôture à
celui de la Bi bl io th èq u e n’en dépendoic pas.
Mais q u a n d , d ’a i l l e u r s , ces mêmes titres d ’acquifition e x p r i m e n t q u e
c e tt e
maifon
eft
v e n d u e , ainfl
C
�i 8
q u e lle f e pou rfu it j comporte. & étend de toutes parts >
fa n s aucunes exception ni réferves ; c ’eft confcamment
aux ailes antérieurs q u ’il faut fe référer pour en connoître l ’étendue.
O r en i <$"4 1 , le fieur D c v a u x , auteur du ficur L a m i , en cédant une partie du jeu de paulme qui
étoit
derriere fa niaifon , s’étoit réfervé l’autre , 6c ce réfidu
de terrein eft dit , fuivant des aûes 6C des décrets de
1 64 3 , i 6 $ 7 ôc 1 7 0 2 , renir au jardin de R ichelieu _>
au mur de la Bibliothèque^ à l ’ H ô te l du Cardinal, au P ala is
R o y a l , 6c même fuivant un décret de
1 6 6 2 , au mur
mitoyen de la bibliothèque.
N u l l e part on ne lui donne le paiTage pour ccnfîn , S:
pendant un aulli long intervale de t e m s , 2c j u f q u ’aux
voies de fait commifcs par les Ouvriers du P r i n c e , les
fieurs Desfontaines 6c L a m i o n t ,
comme propriétaires,
joui de vues droites 6c d’ifiucs fur le terrein contentieux.
L e s ailes 6c fentcnces de 1 7 4 6 6c 1 7 78 font meme men
tion de ce droit.
Q u e faut-il de plus pour développer rénonciation 7
peut-ê tre d ’ailleurs incom ple tt c, de ces titres? E t com
ment au rc-fte , prétendre q u ’un défaut de défignation
plus précife dans leur co nt e xr c, attribue à un tiers une
extenfion de propriété au préjudice des Parties contrac
tantes.
Auifi mal à propos a-t-on excipé pour le Pr in ce de la
ciirconftance q u ’il avoit un SuiiTe à ia folde 6c à fa livrée
à la porte du paflage du c ô té de la rue de R i c h e l i e u .
M . le D u c d’Orléans., pofîedant plufieurs des maifons qui aboutiiTent au pailage , dont il cil à ce titre co
propriétaire , il étoit de fa dignité que le tout fût gardé
�1
9
par un de fes domeftiques j & l’on auroit eu d'autant
moins de droit de s’y oppofer , q u ’indépendamment de
l ’avantage q u ’on y t r o u v o i t , la maifon particulière où
logeoit le Suiflc , & qi,n terminoit le paflage du côté de
la rue de R i c h e li e u , étoic une de celles qui
apparte-
noient au Prince.
Répétera-t-on encore q u ’il y avoit des boutiques der
rière les maifons des fieurs Desfontaines Si L a m i , &
q u ’ un des Officiers de M . le D u c d ’Oriéans en percevoic
le l o v* e r. ’
Quand
le
fait
feroit
v r a i , q u ’en conc lueroit-on
contre ces propriétaires, s’ils louoient eux-mêmes le der
rière de leurs maifons à M , le D u c d’O d é a n s i C e Prin ce
n’anroit-il pas été maître d’ y adofler des échoppes ou des
b o u t i q u e s , & d’en percevoir la location.
Mais l’aiTcrtion n ’eft pas exacte. Le s b o u t i q u e s q u i
o c c u p o ie n t le d e rr ie re des maifons des (leurs D e s f o n t a i n e
& Lami , appartenoient
a ux
marchands
qui les ou-
v r o i e n t , 6c s’ils pa yo ient un droit q u e l c o n q u e au C o n
cierge du P r i n c e , c ’étoit p o u r la permiijion de les ap
p u y e r c o n tr e des maifons d o n t il énoit locataire.
A ucu ns de ces petits moyens fur lèfquels on a tant
mfifte dans le cours du p ro c è s -v e rb a l, ne peut donc por
t e r atteinte aux preuves qui réfultent furabondamment en
faveur des ficursDesfontaincs &. L am i, des titres dei CT^j ,
■16f 4 3 16 J 7 , 1 6 6 2 , 165? 2 , & i j Q 2 , qui tous ne don
nent d’autre limite par derriere à ieurs propriétés que le
mur mitoyen de la B i b l i o t h è q u e , ou du Palais R o y a l .
C e p e n d a n t , à ces preuves multipliées de la prop iiétc
des lieurs Desfontaines & L a m i , & de la pofielîion mm\é-
�2O
m o riale qui les c o n f a c r e , nous pourrons ajouter d ans, la
fuite l ’analyfe d ’une foule d e plans & de procès-verbaux
produits par M . le D u c d’O r l é a n s , & que fon Exp er t n’a
rejettes que parce q u ’ils s’élé ve nt contre le fyftême q u ’il
v o u loit fcconder.
M a i s une plus ample difc uffion ne
q u ’autant q ue les Gen s d’affaire de
fe roit néceff a i r e ,
le D u c d ’O r -
M.
léans fermeroient les yeux à l ’évidence & fie
au cou-
traire , ( livrons-nous à cette d o u c e efpérance) fi le C011feil éclairé du Prince , fi le Prince lui-même jettent les
yeux fur cette défenfe , bientôt les voies de fait h afar
dées par d’audacieux Ou vriers feront réparées
la de
mande formée fous le nom de M . le D u c d ’Orléans ne
reparoîtra plus &
les fieurs Desfontaines & L a m i auront
la fatisfaction d ’avoir obtenu de la j u ftice du Prince ce
q u ’ils ne follic itoient q u ’à regret de celle des T r i b u
naux. Signé M
artin
M e.
D
esfontaines
. & L
G U I L L A U M E ,
amy.
A v o c a t.
y
P
olle de
V
iermes
, Procureur.
7 .4*
D e l'imprimerie de Q U I L L A U , I mp. de S. A . S. Mgr. l e p r i n c e d e C o m t y
rue du fonarre N° 3, 1788.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Desfontaines. 1788]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Guillaume
Polle de Viermes
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
violences sur autrui
violation de propriété
Palais Royal
Richelieu (Cardinal de)
Bibliothèque nationale
jurisprudence
experts
mitoyenneté
Description
An account of the resource
Titre complet : Premier mémoire pour les sieurs Desfontaines, auditeur des comptes, et Lamy, bourgeois de Paris ; Contre monsieur le Duc d'Orléans, premier Prince de sang.
Table Godemel : Trouble : 1. des entreprises commises sur la propriété de l’adversaire pendant que les parties sont en instance sur le droit de propriété, constituent-elles une fin de non recevoir ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Quillau (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1788
1787-1788
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1213
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53171/BCU_Factums_G1213.jpg
bibliothèque nationale
Conflit de voisinage
experts
jurisprudence
mitoyenneté
Palais Royal
Richelieu (Cardinal de)
violation de propriété
violences sur autrui
-
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4 ^
RÉCLAMATION
D’ É T A T .
U n pere voulant ravir à fa fille unique & légitime
la fucceffion de fa mère lui conteft efa légitimité :
il lui f uppofe une fauffe mère dans une famille
étrangère : il lui refufe les alimens qu elle demande
en attendant la décifion de fon état
,
.
N ecare videtur non tantum is qui partum perfocat ; fed & is qui abjicit
& qui alim onia denegat.......... Leg. I V , Lib. x x v , f f. de agnofeendis , &
alendis liberis.
U ' tj f k.
A
P A R I S
M.
-
D C C.
<&■— — — =—■
'¿oeo'Zy
,
D e l'imprimerie de P. G . S i m o n , & N. H. N
Imprimeurs du Parlement, rue Mignon .
i
J
■—
L X X X I V.
y o n
=^ï-
,
�4
B
DE MANDE
E
'
n
m aintenue p ro vif oire en la poffe ffîon d 'é t a t ,
& provif ion alimentaire.
P O U R C a t h e r i n e - V i c t o i r e G r o m e a u , fille mineure ,
procédant fous l’affiftance &: autorité de M e C arlier, fon
Curateur ad hoc , & pour ledit M e C a r l i e r audit nom ;
C O N T R E N ic o la s - J e a n - B a p t is t e G r o m e a u , intéreffé
dans les affaires du R o i, fon pere.
Q u e l fort que celui d'une fille unique & légitime, qui
après avoir reçu de fon pere l’éducation la plus diftinguée,
& toutes les marques de l’amour paternel, fe voit tout-àcoup l’objet de fa fureur & de fa haine, repouff ee de fon
fein , & releguée dans la claffe de ces enfans défavoués
& malheureux, qui femblent ne refpirer que pour déplorer
le moment fatal de leur naiffance
Le fieur Grom eau, pour éluder le compte qu’à fa ma
jorité prochaine il devra à fa fille , prétend lui enlever
l’honneur de la légitimité dont elle a joui depuis fon ber
ceau , & qui lui eft affuré par les titres les plus authen
tiques & les plus refpectables. Il lui refufe les alimens dans
un Monaftere où elle a été obligée de fe retirer pour fe
A
j
Ch a t e l e t t
ARC CiriL'
rapport de m.
D uval , Coït-
fcillcF
�1
dérober à fa colere, à fes traitemens affreux. Quel eit fon
prétexte, fur le refus des alimens ? c’eil encore la bâtardife , comme fi un pere naturel ne devoit rien à fes enfans l
ainfi il foule à fes pieds la premiere de toutes les lo ix , celle
de la nature.
Que d’avides collatéraux viennent fouiller la mémoire
d’un parent & difputer la légitimité à fes enfans pour enva
hir fa fucceffion , c’eil un trait aiTez ordinaire dans les fartes
de l’humanité. Mais qu’un pere , loin de rougir d’avoir créé
dans le crime , proclame fans néceiïïté fa propre honte, fe
vante même d’un fcandale qu’il n’a pas commis, deshonore
une fille unique qu’il a reconnu légitime fur les fonds de
baptême , & aux pieds des Autels où il a été prêt de la con
duire dans deux mariages projettés ; qu’il refuie à cet enfant
des alimens dans une retraite religieufe, quand il vit dans
l’aifance & félon fes goûts j qu’il la diffame, la calomnie,
vomifle mille outrages j enfin qu’il lui fuppofe une fauffe
m ere, par le plus coupable attentat à l’honneur d’une fa
mille étragere, c’eil un exemple rare de la perverfité du cœur
humain. Il étoit réfervé à notre fiecle , à notre Capitale, où
la licence des mœurs s’affiche impunément fur nos Théâtres,
de voir un citoyen & un pere" porter cette même licence
jufques dans le faniluaire de la Juilice , y braver l’honnêteté
publique, & s’imputer des crimes pour ôter à fa fille unique
l’honneur de fa naiffance légitime , dont il femble ne faire
pour fon compte aucun cas j ce mépris public des mœurs ,
cette fouillure du Temple des Loix annonce le dernier degré
de corruption & de calamité.
Les Minières de la Juftice ne tarderont pas fans doute à
rçpoufler de leur Sanéluaire un fcandale auifi effrayant ; &
en confacrantpar provifion une poiTe/fion d’état appuyée fur
�3
les titres les plus facrés , ils apprendront à ce pere indifcret
à refpe&er les mœurs, la tranquillité des familles, l’honneur
de fa fille ; & à fe refpe&er lui-même.
Viftoire-Catherine Gromeau naquit à Paris rue B etizy, ^
le 3 Août 1 7 6 0 , du légitime mariage de Jean - Baptifte
Gromeau , alors Employé aux affaires du R o i , & de Ca
therine Calon , fon époufe. Elle fut baptifée en l’églife de
S. Germain-l’Auxerrois , fon pere préfent. L ’afte de baptême
eft iigné de lui ( 1 ) . C ’eft lui-même , qui loin de rougir de
la naiiTance d’un enfant qui feroit le fruit de fa débauche, le
reconnoît au contraire à la face de l’E g life , comme le gage
précieux de fon union , & vient dépofer fon état dans les
regiftres publics deftinés à fixer l’état des hommes.
Cet enfant perdit fa mere dans un âge trop tendre pour
avoir pu la connoître. Elle fut élevée depuis le berceau
dans la maifon paternelle. A l’âge de fept ans fon pere la
mit à Ruelle au Couvent des Dames de la Croix. Il la rappella au bout de deux ans.
Elle entroit dans fa onzieme année lorfque fon pere tra
vailla à perfectionner fon éducation chrétienne. Il lui donna
des maîtres dans les talens agréables. Le fieur Lejeune lui
enfeignoit le Deflin & la Peinture.
( 1 ) E x t r a i t d e s r e g iflr e s d e l ’ E g l i f e R o y a l e & P a r o if f i a le d e S a ïn t - G c r m a i n - V A u x e r r o i s i
L e 3 A o û t 1 7 6 0 , fu t b a p t ifé e V ïE lo ir e - C a t h e n n e , f i l l e d e N i c o l a s - J e a n - B a p t i f l e G r o m e a u ,
E m p l o y é a u x a ffa ir e s d u R o i t £ d e C a th e r in e Ç a lo n f o n é p o u f e , ru e B é t i ^ y ; le P a r r e i n ,
L o u i s B o n a r d , B o u r g e o is d e P a r i s ; l a M a r r e i n e , P ie r r e t t e N i c o t , f i m m t d e A r d r i - L a u *
re n t C h a l o i t B o u r g e o is d e P a r t s . L ’ e n fa n t t j l n è a u jo u r d ’h u i , & o n t f i g n e à l a m in u te .
S i S n e s ’ B ° n a rd y N i c o t , G r o m e a u . C o lla t io n n c à l ’ o r i g in a l p a r m o i f o n jp g n ê C u t i d e l a
P a r o i j f e , A P a r i s t « p J a n v i e r 1 7 8 4 » S ig n é , R i s G A R D .
A ij
�Elle viiitoit fouvent une tante, fœur de fon pere j elle
en étoit traitée avec des égards, des foins & une amitié
que des parens collatéraux ne prodiguent guère à un
enfant né de la débauche & du libertinage. Cette tante,
que la demoifelle Gromeau a encore eu le malheui
de perdre , étoit fouvent fa médiatrice auprès de fon
p e re , foit pour calmer fa févérité ,, foit pour obtenir de
fa tendreiîe paternelle ces légeres fatisfa&ions de la parure,
qui plaifent tant à la jeuneflc , & qui étoient le prix mérité
de fon application tk. de fon avancement.
Son goût pour la Peinture étoit déclaré j il devenoit même
une paiTion. Le fieur Gromeau qui s’en apperçut remercia
fon maître , & dit à fa fille que n’ayant pas befoin.de ce
talent pour v iv r e , il ne voùloit pas qu’elle le portât trop
loin.
Elle entroit alors dans cet âge où les femmes font
capables des foins de la maifon , & d’y procurer la féli
cité domeftique. Elle en fit fa principale occupation, &
fon unique gloire ; elle s’acquittoit par mille tendres
foins, envers celui qui avoit foulagé avec bonté les incom
modités de fon enfance importune , qui avoit guidé fa jeunefîe, & qui lui avoit fourni les talens , & les moyens
néceflaires pour fe dérober à l’ennui , & aux vices dont
on voit tant de vi£times dans un fexe foible & inoccu
pé. L a demoifelle Gromeau reconnoiiTante , méprifant les
charmes d’une figure qui pouvoit la rendre vaine , s’honora
d’être la premiere domeitique de fon pere , dans une infirmité
qui le menaçoit de perdre la vue. On la vit fubitement
paiTer de la vivacité de l’enfance & de la jeuneife, à un cara&ere folide , & devenir la compagne de fon pere, & fon
�4 ^
■
S
unique confolation. Elle avoit atteint l’âge de 1 9 ans }
n’ayant jamais cefle de jouir au milieu de la fociété de ion
état légitime.
A cette époque remarquable, le fieur A * * * * , ami de
Ton p ere, la demanda en mariage. Ce jeune homme pourvu
d’un état honnête & lu cratif, fe contentoit d’une modique
dot de 6 0 0 0 liv. On vit un moment où le fieur Gromeau
étoit prêt de confentir -, puis changeant tout-à-coup de fentiment il renvoya avec humeur ce prétendant qui s’étoit
montré avec le plus noble déiintéreiTement, & comporté
avec la plus grande décence.
La jeune perfonne ne murmura point contre cette con
duite de fon pere : cependant il la tint renfermée pen
dant trois m ois, à l’expiration defquels il la fit partir pour
Chartres nuitamment & à l’improvifte , & la mit au
Couvent de l’Union , comme ii elle eût été coupable. Il
foupçonnoit que fon cœur étoit bleiïe, & vouloit, difoit-il,
y ramener lô calme de l’indifférence. Falloit-il pour cela fe
porter à une démarche aufli inconfidérée, qui tenoit plus
de la diffamation & de la tyrannie , que de la follicitude &
tendre prévoyance d’un pere ?
Le 4 Mars 1 7 8 3 , la demoifelle Gromeau fut rappellée
dans la maifon paternelle, où le malheur l’attendoit. Elle n’y
trouva plus un pere ", les fentimens du iieur Gromeau avoient
été aliénés en fon abfence par une affeftion étrangère
dont les fuites ne furent que trop publiques. L ’objet de cette
affeftion ofoit publier qu’il étoit pere naturel & non légi
time de- fa fille. La diffamation étoit d’autant plus langlante
qu elle partoitde la bouche d’une commenfale de la maifon,
qui avoit pris un empire redoutable fur l’efprit du fieur
Gromeau. Les mauvais traitemens étoient toute la fatisfaç*
�1 .* •
6
tion qu’il donnoit à fa fille fur ces difcours infolens , aux
quels il n’ajoutoit, difoit-il, aucune foi ; & la protégée nioit
le cas.
Cette calomnie parut refter affoupie pendant un certain
tems : elle fe réveilla dans une circonftance bien cruelle ,
mais bien intéreflante pour la caufe.
Vers la fin de Juillet 1 7 B 3 , le fieur Gromeau fit appeller le fieur M .. . . , Profefleur d’Anatomie , en qui il
avoit confiance , pour la guérifon de fes yeux. Ce jeune
Praticien devint bientôt l’ami de la maifon : il plut au fieur
Gromeau, au point qu’ayant conçu de l’inclination pour fa
fille , elle lui fut accordée.
L a favorite voulant mettre obftacle à cette union , fit
parvenir au jeune Médecin les propos qu’elle avoit ofé en
fanter. Celui-ci alla trouver le fieur Gromeau chez le fieur
M auduit, un jour qu’il s’y faifoit éle&rifer. Il lui fit part
des difcours qui lui étoient parvenus fur l’état de fa fille.
V oici la lettre que le lendemain il lui écrivit^ à ce fujet.
•C’étoît l’ex;
„ y ous trouverez ci-joint * , Monfieur , la réponfe à la
trait de b a p '
7
7
•
u
%jr
tême
de fa >» converfation que vous m’avez tenue hier matin chez M .
rn
1
e‘
» M auduit} vous pouvez même en faire part aux gens de
» la ville , & même à ceux de la campagne qui ont part
»aux propos infâmes tenus fur ma fille. Je fuis même en
» état dç donner d’autres preuves authentiques de la validité
»de mon mariage, lorfque les circonftances& les honnêtes
» gens l’exigeront. Vous n’avez pas beaucoup différé à
» réalifer. ce que vous m’avez dit il y a quelques jours que
» l’on cherchoit à noircir la réputation de ma fille : mais jç
»vous préviens que j’attends de pied ferme les canailles
»>qui oferont dire quelque chofe , parce que je fuis fon dét»fenfeur. Je fu is, & c .
G ro m eau ,
�4ÿ
i
7
» P . S . Vous voudrez bien me renvoyer cet extrait
» quand vous en aurez pris copie , & même fait la vérifi» cation. ».
Cette lettre du fieur Gromeau , rapportée en original,
parce que le iieur M ** * * a bien voulu la communiquer ,
porte une déclaration que les Loix ne permettent pas à un
pere de retra&er. Jointe à Faéte de baptême , émanée de
fa main à la fuite de la poiTeflion publique d’enfant légitime
pendant plus de vingt ans , c’eft le complément de tout ce
qui peut aiTurer l’état de la demoifelle Gromeau dans la
fociété civile.
Cependant des troubles d’un autre genre vinrent affliger
cette fille infortunée. Le cœur de fon pere fe, changea tout—à
coup ÿ il ne voulut plus confentir à aucun mariage, ni que fa
fille le quittât d’un feul inftant. Etoit-ce excès de tendreffe,
ou une véritable haine ? C ’étoit l’un & l’autre enfemble. Les
foins empreifés de cette fille auprès de fon pere menacé
de perdre la v u e , étoient fouvent reçus par des traitemens
ignobles, mêlés de difcours étranges. Elle fe retiroit dans
fa chambre en verfant des larmes ; elle y étôit pourfuivie
avec fureur.
Vingt fois elle fupplia fon pere de la reléguer dans un
C ouvent, puifque fa piété filiale & fes fervices domeftiques
ne lui étoient point agréables. Elle follicita même une dot
dans un Monaftere , pour y paifer toute fa vie. Il répondit
à cette priere en lui reprochant fon ingratitude. Vous
voule^ donc , difoit - il 9 m'abandonner dans mon infirmité à
des foins étrangers ?' Cette infirmité eft une vue obfcurcie.
Le fieur Gromeau, dans un âge peu avancé , jouit d’ailleurs
dune fante parfaite : les couleurs de la jeuneiTe nuancent
encore fon vifage •, aucunes rides ne couvrent fon front.
�8
'
Un jour qu’elle infifta pour la retraite , forcée par fes
tiraitemens extraordinaires , il entra en fureur , & lui dit
qu’il ne lui devoit rien , qu’il n’gvoit jamais rien reçu de
fa mere. — Eh 1 n’êtes-vous pas mon pere ? — N on j je ne
te connois pas : tu n’es qu’une ingrate , indigne de ma
tendreiTe & de mes bienfaits.
Bientôt les mauvais traitemens devinrent plus violens ;
les injures & les menaces étoient à leur comble : cette
malheureufe fille étoit même le jouet d’une domeftique audacieufe , qui avoit acquis ' cet empire par de viles complaifances.
L a demoifelle Gromeau ne put réfifter à tant d’outrages ;
elle fentit bientôt les atteintes d’une maladie mortelle. Elle
pria le Médecin de fon pere de lui procurer un afyle , en
attendant qu’elle pût fe rendre dans un Couvent. Elle y fut
reçue malade , & fut prefqu’auffitôt attaquée d’une fluxion
de poitrine , qui fit long-tems craindre pour fes jours.
Dans cet état de maladie & d’abandon , enyain fit-elle
folliciter fon pere de la fecourir ; les inftances furent in
utiles. Les fecours les plus preilans furent refufés , fous le
prétexte que la malade n’étoit qu’un.e bâtarde , à laquelle
fon pere naturel avoit donné un talent pour fubfifter ;
qu’après l’avoir nourrie & élevée jufqu’à l’âge de 24 ans, il
ne lui devoit plus rien.
Après fa convalefcence, la demoifelle Gromeau fit en?
core prier le fieur fon pere de lui indiquer un Couvent.
Il promit de faire réponfe , & garda le filence lé plus froid.
On fut obligé d’intérefler la religion & la charité des ames
honnêtes pour procurer à fa fille un Couvent.
Pans cette extrémité , elle fe vit forcée d’implorer le
fecours
�9
fecours des Loix. Elle forma fa demande au Chàtelet ,
en proviiion , d’une fomme de 1 2 0 0 0 liv. , en attendant
qu’il pût être ftatué fur fes droits légitimes & fur fon état c iv il,
& que par proviiion les termes injurieux de bâtardife fuiTent
fupprimés. Au fond, elle demanda que le fieur fon pere fût
condamné à lui communiquer l’inventaire qui a dû être fait
après le décès de Catherine Calon , fa mere , & les pieces
inventoriées , & de rendre le compte de la communauté
qui a dû exifter entre lui & ladite défunte dame fon époufe ;
finon , à lui payer la fomme de 6 0 ,0 0 0 liv.
Le fieur Gromeau crut oppofer une défenfe légitime à
cette demande en difant » que fa fille étoit bâtarde, qu’il ne
»lui devoit rien, & qu’elle devoit fe contenter d’avoir reçu
» chez lui des foins & une éducation que le vice de fa naif» fance ne la mettoit pas en droit d’attendre ni d’exiger. »
N ’efi: - ce pas infulter à un être malheureux que de lui
reprocher même fon éducation ? Nous ferions tentés de
penfer que quand la naiffance eft fouillée par l’incontinence
d’un pere , par fon mépris pour la Religion & pour les
Loix , les foins & l’éducation qu’il doit au fruit de fon
crime femblent mériter de fa part plus d’attentions & de
foins, afin d’expier fa faute ,• & d’effacer , s’il lui eft poffible , une tache dont un enfant innocent n’eit pas coupable ,
en procurant à cet enfant au moins la confidération &
l’eftime que les gens de bien accordent toujours au mérite
perfonnel.
Le fieur Gromeau ajouta » que la demande formée contre
»lui avoit tous les caraéteres de l’a&ion qu’intente une fille
» naturelle contre fon pere ; que fe prétendant légitime ,
»»elle devoit convoquer fa famille en l’hôtel du M agiftrat,
» s y faire nommer un tuteur pour s’aiTurer le fuffrage de
B
�» cette famille dans laquelle elle avoit deiTein de fe faire
» admettre : que pour établir fon état, elle devoit rapporter
» l’a&e de célébration de mariage de fes pere & mere ;
» qu’il n’y a qu’un pareil a£le qui puiiTe aiTurer l’état d’un
» enfant légitime. »
Il prétendit enfin que la mere de fa fille étoit encore exiftante, fe nommoit Marie-Catherine Calon; & quelle époufa à
Saint Euftache, le 19 Novembre 1 7 6 4 , le fieur Lacroix.
Il donne 'en effet la copie de fon extrait de mariage.
Mais ce n’eft-Ià qu’une affertion hardie ; car l’extrait de
baptême de la demoifelle Gromeau porte qu’elle effc fille de
Catherine Calon, époufe de Nicolas-Jean-Baptifte Gromeau.
O r , Catherine Calon & _Marie- Catherine Calon font évi
demment deux individus très - diftinéls par la défignation
des noms de baptême. Et quand Catherine & Marie-Catherine
Calon feroient un feul & même individu, le mariage que
Marie-Catherine auroit contra&é en 1 7 6 4 feroit-il abfolument la preuve qu’elle n’en auroit pas contraélé un premier
avec le fieur Gromeau ? Ce font de ces évencmens trop peu
rares pour en nier la poiïibilité. Mais fans éclaircir ce myftere , il fera aifé de démontrer qu’à la faveur de cet a£le
de mariage controuvé, le fieur Gromeau ne peut enlever à
fa fille l’honneur de la légitimité.
Cette queftion de légitimité ne peut être jugée défini
tivement en ce moment. Il ne s’agit aujourd’hui que de la
maintenue provifoire en la pofleifion d’é ta t, & d’une provifion alimentaire. Comme cette provifion doit être d’autant
plus confidérable fi elle eft adjugée à une fille que la Juftice
préjuge légitime, il eft neccfiaire d’établir la légitimité de la
demoifelle Gromeau. On ne l’établiroit pas , qu’il n’y auroit
encore aucun doute que fon pere fût condamné à lui
�payer également une. provifion alimentaire ; fk. en définitif,
une dot quelconque pour fon établiffement , félon le rang
dans lequel il l’auroit élevée.
Les principes fur cette matiere ne font plus chancelaos.
L ’illuftre d’Agueffeau & le célébré Cochin les ont fixés
dans leurs Plaidoyers immortels, & la Cour les a confacrés
par fes Arrêts. La légitimité des enfans , d’après ces deux
grands Orateurs , peut s’établir par la feule poffeilion d’état,
ne fût-elle accompagnée d’aucuns titres. C ’étoit autrefois la
feule marque, la feule régie qui diftinguoit les hommes & les
citoyens entr’eux. Les enfans étoient élevés dans la maifon
cles peres & m eres, comme les fruits précieux de l’union
conjugale. Les rapports des différens membres d’une famille
fe confirmoient , fe reiTerroient de jour en jour par la
notoriété publique. C ’étoit enfin la poileffion feule qui fixoit
l’état des hommes -, c’étoit l’unique efpece de preuve qui fût
connue j & quiconque auroit voulu troubler cette pofleiïion,
auroit troublé toute l’harmonie du genre humain.
Quoique nos Légiflateurs aient ajouté un nouveau genre
de preuves à la pofleffion d’état, elle n’en eft pas moins encore
feule fuffifante pour fixer parmi nous l’état d’un citoyen.
Nos Ordonnances ont introduit l’ufage des regiftres publics *
ce genre de preuves n’ajoute qu’un degré de force à l’état
qui doit être établi dans la fuite par la poiTeffion. L ’auto
rité que forme le concours de ces peuves eft inébranlable j
quand celle de la pofleifion & celle des regiftres publics
fe prêtent un mutuel fecours, tous les doutes difparoiflent.
Le genre d’éducation, dans nos mœurs, eft encore une
preuve , ou au moins un indice violent de l’état légitimé
d un enfant. L a voix de la nature & celle du feutiment
B ij
�s’expliquent par leS circonftances de l’éducation j c’eft une
fécondé naiffance : la premiere eft la naturelle ; celle-ci eft
pour ainii dire une naiffance civile & fociale.
Que iî la négligence d’un pere refufe à fes enfans cette
preuve de leur légitimité , la loi ne les abandonne pas pour
cela ; la moindre déclaration, émanée de lu i, opere une
parfaite conviftion contre lui jufqu’à ce qu’il montre manifeftement qu’il a été trompé. Développons tous ces prin
cipes.
§. Ier.
Pojfejjlon d’état fondée fu r le titre primordial de la
légitimité.
Il n’y a point de peuple fur la terre chez lequel l’homme
foit affuré de fon origine, & de fa qualité de fils légi
time.-En vain les nations les plus civilifées ont-elles cher
ché une maniéré certaine de juger du véritable état des
citoyens ; c’eft un fujet qui n’admet que des conje£hires >
des préfomptions & des probabilités. Les Légiilateurs R o
mains ont pofé pour réglé que celui qui nait hors du
légitime mariage s’attache à la m ere, félon la loi de la
nature ( i ) ; de-là, ils ont préfumé que celui qui a été élevé
par fon pere eft légitime. C ’eft fur ce fondement conje&ural
que la poffeffion d’état s’eft établie.
Cette pqffeilion ainfi acquife, l’Empereur Titus voulut
quelle eût l’effet de re&ifier même les titres de la naiffance
quand ils étoient défeftueux, afin, que l’état des enfans n’en
—i
(1)
1
"■■■ 1
—
—
Lex naturœ hac ejl, ut qui nafcitur Jint légitima matrimtnio, matrtm fequaturi
Leg. 24, de ihtu hom, ff. Q.
tit. 5.
�13
pût être blefîe, y fuiTent-ils déiîgnés fous le titre d’efclaves ou de bâtards ( i ) .
La difpoiition teftamentaire de Lucitis Tititts , citoyen
Romain , fournit un exemple remarquable de la poiTeffion
d’état chez les anciens. Son teftament étoit conçu en ces ter
mes : « Si Aurelius prouve au Juge qu’il eftmon fils, qu’il foit
» mon héritier » . La queftion débattue par les Jurifconfultes,
le Juge difpenfa de la preuve ; Aurelius fut déclaré fils lé
gitime , & fuccéda au teilateur (2). Tel étoit l’effet de la
iimple poiTeffion d’état chez ces Légiilateurs.
C ’efi: auffi l’efprit de nos Loix & de notre Jurifprudence.
Chez une nation foumife aux loix de l’Evangile la fociété
n’eft pas intéreffée à nourrir des bâtards dans fon fein ,
elle l’eft beaucoup au contraire à n’y rencontrer, & à n’y
reconnoître que des enfans légitimes , pour l’exemple des
mœurs. Un pere q u i, de fon vivant proclame bâtarde fa
fille unique , fe couvre parmi nous de' honte & d’infamie ;
& fa déclaration n’eil d’aucun poids. La poiTeffion d’état
fuffit à fa fille , fans juitifier même de fon extrait de bap
tême , ni de l’a&e de célébration de mariage de fes pere
& mere.
« D e toutes les preuves qui affurent l’état des hommes
»>dit le célébré C ochin, il n’y en a point de plus folides,
»de plus puiffantes que celles de la poiTeffion publique.
» L ’état n’eil autre chofe que le rang & la place que cha» cun tient dans la fociété générale des hommes ; & quelle
» preuve plus décifiye pour fixer cette place que la poffef( 1 ) Imperator Titus Antoninus rtfcripjit non lotiï ftatum liberorum ob tenorem
injlrurncnti'malèconcepti, ff. deftat.hom. tit 5. i. 8. Godeftoy, fur cette lo i, ajoûte;
Ut fi fervi , fpv.nl apptllaù fint.
(2) Loi 83 , ff, dt eçnvic, €•' dtmonft.
�V ^ V14
» iion publique où l’on eft d’en occuper une depuis que l’on
» eit au monde ?
» Celui qui l’a en fa faveur n’eft point obligé de remon
t e r à d’autres preuves: elle tient lieu de tous les titres
» que les Ordonnances deiirent ; elle fupplée aux aftes de
» célébration de mariage , aux extraits baptiftaires, & à
h tous les ailes qui font ordinairement employés pour fixer
» l’état des hommes.
» Mais il ce principe eft ii néceflaire en lui-même, ajoute
» ce célébré Jurifconfulte , il devient encore plus facré quand
» on oppofe aux enfans qu’ils ne rapportent pas l’a&e de
» célébration de mariage de leurs pere & mere. La raifon
» décilîve eft que ce titre n’eft point perfonnel aux enfans.
» Les titres qui leur font propres font leurs extraits bap» tiftaires. Ils font obligés d’en juftifier , ou de fuppléer à
» ces titres eifentiels par d’autres aétes , ou papiers domef» tiques. Et ii tout cela leur manque, la poffeifion publique
» de l’état vient à leur fecours j mais il n’y a jamais eu ni
» Loi ni Ordonnance qui ait exigé qu’ils portent la preuve
»jufqu’à établir que la qualité de mari & femme prife par
» leurs pere & m ere, leur a appartenu légitimement. Elle
» feroit réduire très-fouvent les enfans à l’impoffible. Com» bien y en a-t-il qui élevés tranquillement fous les yeux de
» leurs parens, n’ont jamais penfé à demander où leur pere
» avoit été m arié, & qui interrogés fur ce point après la
» mort de leur pere , feroient abfolument hors d’état d’y ré» pondre ? Combien y en a-t-il qui ne favent pas même où
» leur pere demeuroit dans le tems de fon mariage ?
»Jam ais, s écrie plus loin. l’Orateur, on a porté l’inqui» fition à de tels exces ; on s’eft toujours repofé fur la foi
vpublique, dans toutes les circonftances où la légitimité eil;
�*>néceiTaire : jamais elle ne s’établit que par l’extrait baptif» taire de celui qui fe préfente. S’agit-il de recevoir un Ma» giftrat, d’ordonner un Prêtre ? Son extrait baptiftaire fuffit,
» & jamais on n’a demandé Pà&e de mariage des pere &
»mere. Pourquoi cela ? C ’eit que l’enfant dont l’etat eft
>>aiTuré parles titres qui lui font perfonnels , ne peut
» être obligé de rapporter les titres de fes auteurs ; c’eft que
» l’autorité des titres perfonnels de l’enfant & de leur exé»>cution , prouve par elle-même Pexiftcnce des titres de fes
» auteurs, quoiqu’ils ne foient pas rapportés ; ôc pour tout
» dire , en un m ot, c’eit que la pofleilion publique fuffit par
» elle-même «.
Ces principes ont été adoptés par une foule d’Arrêts. Le
premier eil celui d’André Dohin, que Cochin rapporte. Par
fon contrat de mariage avec Colette Raquelot, il lui avoit
fait une donation univerfelle de tous fes biens. A fon décès ,
fes collatéraux contefterent la donation ,' fur le• fondement
qu’il n’y avoit point eu de mariage. La veuve déclara le
jour où elle avoit été mariée en la paroifle Saint - Jacques
de la Boucherie.On confulta les regiftres qui fe trouvèrent en
bonne forme, & l’afte de célébration de mariage ne s’y trouva
point: cependant par Arrêt du 7 Juin 1 6 7 6 , fur la foi de
la poiTeiîion publique de femme légitime où elle avoit longtems vécu , fon état fut maintenu, & la donation confirmée.
On trouve au Journal des Audiences, tom. 5 , un fécond
Arrêt du 1 7 Janvier 16 9 2 , qui a jugé que l’enfant n’étoit
point obligé de rapporter l’a&e de célébration de mariage
de fes pere & mere, & que la preuve de la p o fle ilio n d’état
lui fuffifoit.
En 1 7 1 1 , le fieur Miotte , accufé de bâtardife , fut
déclaré fils légitim é, quoiqu’on ne pût rapporter l’aile de
célébration de mariage de fes pere & mere j mais il avoit
�t')l
*
Ï<V
vécu dans la poiTeffion de la qualité d’enfant légitime.
En 1 7 2 5 , Marie-Anne Porchet fut déclarée légitime par
Arrêt de la C o u r, nonobftant la Déclaration de 1 6 8 o , qui
déclaroit nuls les mariages des Proteftans avec les Catho
liques. Louis Porchet fon pere étoit dans le cas ; & l’on ne
rapportoit pas l’extrait de fon mariage , qui devoit avoir été
contra&é depuis la prohibition de la Loi. On le préfuma
antérieur, & l’état de l’enfant fut confirmé.
Qui ne connoît PArrêt deBourgelat, plaidant M e Cochin?
Bourgelat étoit fils d’un premier lit. Sa veuve demandoit à
partager la fuccefïion de fon beau-pere, avec les enfans du
Îecond lit. Ceux-ci foutinrent qu’il étoit bâtard ; on ne rapportoit point en effet d’extrait de mariage : cependant l’on
jugea que fans remonter aux titres primordiaux, la poiTeffion
publique de l’état du fils fuffifoit pour le déclarer légitime.
Appliquons ces principes. Un enfant vient de naître au
fieur Gromeau ; il s’empreffe de le faire infcrire fur les monumens facrés qui affurent en même tems fon entrée dans
le fein de l’E g life, & fa-place dans la Société civile. C ’eil
un pere qui s’applaudit, & reçoit cet enfant^ comme un gage
précieux de la fidélité conjugale.
Catherine -Vi&oire n’a d’autre afyle que la maifon où
elle eit née. Le fein maternel eil la fource pure où elle
puife la vie fous les yeux d’un pere qui s attendrit à ce
fpe&acle. L ’époufe s’occupe des foins de fon enfance : elle
d^cede ; fon époux la remplace, & fa fille ne ceffe d’être
l'objet de fes foins & de fes complaifances, comme le feul
gage qui pût adoucir la douleur que lui caufe la perte d’une
époufe chérie.
Le pnoment de l’éducation morale arrive. Le Sr Gromeau
conduit
�JO I
17
conduit fa fille unique dans une Maifon Religieufe, où elle
fe prépare à Te rendre digne de s’unir à ion Créateur par
la nourriture myftérieufe qui purifie l’ame 'des vrais Chré
tiens. Eniuite il s’occupe à embellir Tes qualités naturelles
par des talens agréables. Le deffin & la peinture n’cft,
dit-il, qu’un métier qu’il a voulu lui donner pour gagner
fa vie ; mais le fait dément cette aiTertion. La demoifelle
Gromeau a z 4 ans, & jamais elle n’a fait la moindre dé
marche pour faire connoître au Public fon talent dans ces
arts libéraux. Il y a même plufieurs années que fon pere lui
fit abandonner fes travaux fur cet o b jet, afin de porter
toute fon application aux foins de fa m aifon, dont il lui
donna le gouvernement.
Enfin il a voulu deux fois la m arier, comme fa fille lé
gitime -, & cette inculpation atroce de fille naturelle n’eil
que le fruit de l’imagination d’une intriguante qui eit venue
à bout de pervertir le cœur d’un pere. Faites un pas dans
le crime , vous êtes entraîné dans un autre. Infenfiblement
le fieur Gromeau s’eft laiiTé fubjuguer au point que l’intérêt
le plus vil l’a porté enfin à nier l’état de fa fille pour lui
ravir fes droits & fa légitime. Tel eft lVffet des pafiions
malheureufes qui fouvent dénaturent les cœurs foibles.
Mais avant que le fieur Gromeau eût reçu ces impreflions
funeiles, avec quelle force ne s’élevoit-il pas contre les
ferpens de l’en vie, qui jettoient leur venin fur fa fille unique ?
J ’attends 3 diioit-il, les canailles qui ofent fe pei mettre ces
propos infâmes. J e f uis en ¿tat de donner des preuves authen
tiques de la validité de mon mariage, lorfque les circonflances
£ les honnêtes gens Vexigeront. Donnez-les donc, malheu
reux pere 1 Ces preuves authentiques qui d o iv e n t rétablir
votre honneur & celui de votre enfant ! Les circonflances
C
�/
i8
l’exigent ! la Juftice vous en fait un devoir ! & ii vous êtes
fenfible à l’eftime des honnêtes gens & à votre propre gloire,
vous ne tarderez pas à défavouer votre impofture. Si vous
y perfiftez , vous ne recueillerez de votre crime que la
honte & le défefpoir j car les Loix vous condamnent. Ecou
tez le langage d’un grand Magiftrat.
« Quand un pere feroit coupable, dit M. d’AgueiTeau ,
» quand il auroit l’indifcrétion de s’accufer lui-même, il
» n’eft point l’arbitre de l’état & de la deftinée de fon fils.
» La Loi rejette fon témoignage, & les Arrêts n’ont jamais
» eu d’égard à ces vaines déclarations fuggerées par la co» lere ou l’intérêt, infpirées par la haine, toujours fufpeftes ,
» foit de la part de celui qui les fait, foit de la patt de
» ceux qui les écoutent & qui en rendent témoignage «.
Le témoignage du iieur Gromeau eft fu fp eft, puifqu’il
ne doit le jour qu’au befoin de fe défendre contre l’aftion
en reddition de compte de fa fille : il eft fau x, puifqu’il eft
démenti par fa lettre datée du i Septembre i 7 8 3. Voilà donc
l’époque du premier trouble que fa fille a éprouvé dans la
poiTeifion de fon é tat, fi toutefois l’on peut appeller trouble
des difcours étrangers émanés de gens que fon pere appelle
des canailles. Elle a donc vingt-trois années de poifeiïïon
publique de fille légitime dans la maifon paternelle, confir
mée par ld déclaration du fieur Gromeau lui-même, qui
l’avoit reconnue en 1 7 6 0 fur les fonts de baptême. O r, elle
ne peut être dépouillée de cet état par provifion ; & au
contraire, par provifion , elle y doit être gardée & main
tenue : fpoliatus ante çmnia rejlituendus ejl. Autrement, un
enfant élevé dans la maifon de fes pere & m ere, comme
le fruit légitime de leur mariage, courroit tous les jours
le rifque d’être dégradé.
�19
En matiere provisoire, l’examen des titres qui femblent
combattre la pofleffion publique, fe renvoie lors de la difcuffion du fond de la queflion. Ainii la demoifelle Gromeau
pourroit fe renfermer dans fa feule pofleffion d’état certifiée
par fon pere. Elle lui fuffiroit pour obtenir des Magiftrats
la provifion alimentaire, & la radiation des termes de bâtardife^ comme injurieux & diffamatoires. Mais des intérêts
aufïi précieux exigent que nous traitions la matiere dans
toute fon étendue, comme s’il étoit queftion d’une décifion
définitive fur l’état de la réclamante. Nous ne faurions trop
difîiper les nuages & éclairer la religion des Magiflrats : il
n’eft pas moins important de porter la lumiere dansTefprit..
du fieur Gromeau, afin de le faire-rentrer en lui-même.
Détruifons fa confiance aveugle ; arrachons-lui fans vio
lence , &; par la feule voie de la perfuafion, les armes qu’il
s’eft forgées, & qu’il regarde comme capables d’afTurer le
triomphe du crime contre les efforts de l’innocence.
§.
I I.
Que le titre de la naijfance de la demoifelle Gromeau n e jl
détruit par aucun titre produit, &-ne peut letre par aucun
témoignage.
Si la pofleffion d’état d’un citoyen étoit équivoque, le
titre primordial en répareroit les vices. Il viendroit au
fecours d’une infortunée qui feroit privée des avantages
d’une reconnoiflance folemnelle. Mais la demoifelle Gro
meau a non feulement la pofleffion publique & non équi
voque de fon état ; elle a encore le titre qu’exigent les
5
C ij
/
�Loix civiles ( i ) & nos Ordonnances pour affurer la légi
timité des enfans. Son extrait de baptême, du 3 Août 1 7 6 0 ,
porte que Catherine Calon fa mere , eft l’époufe du iieur
Gromeau : il étoit préfent à la réda&ion de cet a ft e , & il
l’a figné. Voilà donc une preuve folemnelle, authentique
& invincible de fa naiifance légitime.
Cette reconnoiiTance du fieur Gromeau lors du baptême y
fait naître une préfomption de fon m ariage, telle qu’on ne
peut recevoir de preuve du contraire. C ’eft une Jurifprudence établie par les Décrétales : prœfumptum matrimonium
videtur. Contra pmfumptionem hujufmodi non ejl probado'
admittenda (2 ).
. Nous avons vu plus haut que les enfans ne font point
aiTujettis à rapporter l’afte de célébration de mariage de
leurs peres & meres. Il n’y a donc plus rien à deiirer d’après
l’a&e de baptême de la réclamante.
« Il ne peut jam ais, dit C ochin , fe former une queflion
» férieufe fur l’état d’un citoyen , quand le titre & la pof» feffion font d’accord à fon égard.. . . En vain articuleroit» on alors des faits, & demanderoit-on la permiffion d’en
» faire preuve , on feroit néceifairement accablé par le poids ’
» de ces deux preuves réunies.'.. . . L ’autorité que forme le
» concours de ces preuves eft: inébranlable. La p r e u v e tef» timoniale n’efl: pas d’un poids & d’un caraftere qui puiife
» leur être oppofé : autrement, il n’y auroit perfonne qui
» pût être affuré un feul inftant de fon état, n’ayant pour
» garant de fon fort que les regiftres publics & la poifef*
» iîon <♦.
( 1) Voyez la Loi 2 , cod. de tijlibus, & la Loi 2 4 , ff. de probat.
( i ) Cap. j ç , extrà de fponfalibut & matri 71,
�/ ô /
1
Si l’on a quelquefois emprunté le fecours de la preuve ■
teftimoniale dans les queftions d’état, c’eft lorfqu’il y avoit
une contradi£Uon palpable entre la poiTeffion & les regiftres
1
publics ; parce que la vérité n’étant pas marquée à ces caraéleres dont les Loix exigent le concours, il faut fe prêter
à tous les éclairciiTemens qui peuvent la développer. Mais
quand le titre de la naiffance paroît, aucune preuve néga
tive n’eft admiffible. En cas de perte de regiftres publics }
les Ordonnances du Royaume ont voulu qu’on eût recours
aux regiftres & papiers domeftiques des pere & m ere, pour
ne pas faire dépendre l’état de citoyen de preuves équivoques
& dangereufes, telle que la preuve teftimoniale, dont l’in
certitude a toujours effrayé les Légiilateurs.
Les pere & mere eux-mêmes ne peuvent oppofer leurs
propres témoignages contre l’a&e de baptême de leurs
enfans. Envain diroit-on de la part du iieur Gromeau, que
l’on doit regarder la déclaration d’un pere comme un ju
gement domeftique, toujours également décifif, foit qu’il
foit contraire ou favorable aux enfans ; que les noms facrés
& de pere & de m ere, & la tendrefTe que la nature leur
infpire pour leur propre fang , ne femblent pas pouvoir
permettre que l’on doute de la vérité de leur fuffrage*. Que
ce fut par ces raifons que les Romains accordèrent aux
pères la puiffance de vie & de mort fur leurs enfans, Sc
les ont affranchis de la peine des parricides „ ne préfumant
pas que jamais un pere put abufer de fon autorité , &
rien faire contre l’honneur & l’avantage de fes enfans.
Ce fyftême étoit à la vérité celui d’une ancienne nation
de la Grece j la déclaration de la mere faifoit la loi fouveraine de l’état des enfans, & quoique l’autorité du perene fut pa,s fi grande, néanmoins l’on y déféroit.
"À
�Mais il eil faux que ces maximes aient été accueillies
par les Légiflateurs Rom ains, quoiqu’en dife Bodin dans'
fa république. On a vu des peres condamner à mort leurs
enfans pour le foutien de la difcipline militaire : mais aucun
pere n’a été le Juge Souverain de la naiifance & de la
légitimité de fes enfans. Nous voyons dans leurs L o ix, que
quelque déclaration qu’une mere ait faite contre l’état de
fes enfans, la vérité confervoit toujours fes droits ; on la
cherchoit par toutes fortes de v o y e s, même après le ferment
de la mere.
Voici en effet ce que porte la Loi 29 , ff. de probat. &
præfumpt. « Les preuves de l’état des enfans ne coniiilent
» pas dans la feule affirmation des témoins ; & même les
» lettres .qui feroient émanées des meres ne pourroient
» avoir aucune force de preuve contre leur état ( 1 ) » . r
La même Loi propofe cette queilion. « Une mere en» ceinte eil répudiée par fon mari ; accouchant en fon ab» fence , elle déclare fon enfant batard adultérin dans un
»âéle particulier j elle décédé enfuite ab intejlat. L ’on de» mande il fon enfant tombe dans la puiffance du pere, fi,
»de fon ordre, il peut réclamer la fucceffion de fa m ere,
» & ii la déclaration de la défunte, faite dans un mou» vement de fa colere, peut nuire à fon état. Le Jurifconfulte
»>Scœvola répond que non; & que la vérité a confervé tout
» fes droits ( 2 ) » .
[ed
( 1 ) Probatìones qua de filìis dantur, non in fola ajfìrmaiione ttflium confijlunt,
& epiJìoUs qua uxonbus mijfx allegarentut , f i de fide eatum confluii ,
nonnullam v ic m
inftrumtntorum obtinere decretum eft. Leg. 29 ff. de prob. S i
prajfumpt.
( i ) M ulìtr gravida repudiata . filiurn enixa abfente marito , ut fpurium in ailit
pròf i f a
e/l, Quafiium efl : an is in proteflate patris f i t , 0 maire inteflatà mortud.ì
�Jo ï
2y
' Non-feulement les pere & mere ne peuvent ôter l’état cle
leurs enfans ; mais même ceux-ci ne peuvent s’en tenir à
leur déclaration & abandonner leur état légitime dont ils
doivent compte à la fociété. Deux Princes d’Italie furent
blâmés d’ignorance & regardés comme des lâches pour avoir
abdiqué leurs Etats, par une déférence fotement fcrupuleufe,
pour la déclaration de leur m ere, qui en mourant avoit ‘
aiTuré qu’ils n’étoient pas enfans de fon mari. Qu’une mere,
au lit de la mort, expie dans le fein de la Religion , par
de triftes aveux, l’adultere qu’elle a commis; le repentir eil
légitime: mais qu’elle décide que le complice de fon crime
foit le pere de fes enfans plutôt que fon mari ; c’eft vouloir
pénétrer aveuglement le myftere impénétrable de la nature ;
c’eft juger fans néceifité & fans droit contre l’autorité des
Loix ( 1 ) ; c’eft bleifer les droits d’autrui, qu’il n’eft permis à
perfonne de compromettre. Et des hommes qui adoptent un tel
jugement d’une mere expirante font dans l’ordre civil ce que
des fuicides font dans l’ordre naturel. La demoifelle Gromeau
fe doit donc à elle-même, & elle doit à la mémoire de celle
qui l’a portée dans fon fein , & qui l’a nourrie de fon la it,
de foutenir le titre honorable de fa légitimité. Combattre
fon pere en pareil c a s, c’eft le refpe&er, le forcer à fe
refpefter, & non lui faire injure.
La Jurifprudence Romaine fur les déclarations des peres
& meres contre leurs enfans, nous a fervie de modele.
«Q u i ignore, dit l’Orateur françois ( 2 ) , que les parens
jujfu '¡u s f hcreditatem matris adîri pajjlt ; ntc otßt yrofcjjio à maire irrita ß S Jre/pondu : veritati locum' fuperfore.
(1)
Pater 6- quem nujpùm démontrant.
( a ) C ochin. Plaidoyer de B o u rg ela t, canoniit par un A rrêt notable^
�24
» ne peuvent détruire l’état de leurs enfans quand il eft une
» fois établi ? C ’eft un préfent de la nature, ou plutôt de
» la Providence dont ils ne peuvent difpofer; il eft vrai
» qu’ils en font les premiers témoins : mais quand une fois
» ils ont rendu ( comme a fait le iieur Gromeau ) un témoi» gnage éclatant à une vérité ii précieufe, quand ils l’ont
» confirmé par une longue fuite d’aftes, & par le fait public
» de l’éducation, il ne leur eft plus permis de varier : il n’eft
» plus tems, lorfqu’un fils eft parvenu jufqu’à l’âge de trente
» ans avec tous les honneur d’une naiflance pure , de vouloir
» le faire paffer pour le fruit de la débauche & de la cor» ruption. L ’état eft form é, la poÎfeiTion eft acquife, rien
» ne p e u t l’ébranler » .
« C ’eft un principe général, dit M. d’AgueiTeau, auffi
» convenable à l’équité naturelle qu’à l’utilité de la fociété
»civile: qu’un pere & une mere peuvent bien aiïurer par
» leur fufïrage l’état de leurs enfans, mais qu’ils ne peuvent
»jamais le détruire».
Ce principe a été confacré par une foule d’Arrêts ; nous
n’en citerons que deux, rendus fur les conclufions de ce
M agiftrat, les i 5 Juin 1 6 9 3 & 16 Juillet 1 6 9 5 . Dans
l’efpece du premier Arrêt, la mere étoit accufée d’adultere;
elle avoit avoué en Ju ftice, dans fon interrogatoire , que
fon fils ne devoit la vie qu’à fon crime * & néanmoins après
une déclaration fi authentique, on déclara l’enfant légitime;
èc pourquoi ? Parce que le mari n’avoit été abfent que trois
m ois, enforte que l’adultere de la femme n’empêchoit pas
qu’on ne pût penfer qu’il fût pere ; & parce qu’encore ,
comme nous 1 avons obfervé, la nature dans fes produétions
eft impénétrable aux etres meme dont elle employé les or
ganes fecrçts, comme des inftrumens dont elle fe fert pour
opérer
�25
.
^
opérer fes prodiges. Il ne fuffit pas même , dit le favant
Magiftrat , de prouver l’infidélité de la mere pour en
conclure que le fils eft illégitime. La Loi s’oppofe à cette
conféquence injufte ; & elle fe déclare en faveur du fils
par ces paroles fameufes fi fouvent citées dans ces ma
tières : non crimen adulterii quod mulieri objicitur, infanri
prœjudicat ; cum p o jjit & ilia adultéra ejfe, & impubes defunctum patrem habuijfe. ( L o i i i . §. 9. ff. ad leg. Juliam de
adulteriis. )
Dans l’efpece du fécond Arrêt, Firmin-Alexandre Delatre,
méconnu par fon pere, étoit né trois mois après le mariage.
Le pere prétendoit qu’il n’y avoit pas eu de confommation,
& qu’il étoit impuiffant. La mere étoit accouchée fecrétement
à l’infçu de tout le Public, & même de toute fa Maifon. La
Sage-Femme fit baptifer l’enfant, & le confia à une blanchiifeufe qui fut dépofitaire de fa deftinée. Aucun témoin,
ni parent, ni étranger n’avoit aififté au baptême ; il étoit fait
mention dans le regiftre que le pere étoit abfent; l’enfant
n’avoit aucune pofleflion d’état ; fa naiiîance feu le, trois
mois après le mariage du fieur Delatre avec fa mere, étoit
certaine. L ’on préfuma qu’il étoit le fruit de la fréquentation
du fieur Delatre avant fon mariage; on le jugea légitimé
par ce fubféquent mariage , malgré le defaveu du mari &&
fon impuiifance dont il offroit la preuve.
Y a - t - il la moindre préfomption favorable à l’état d’un
enfant? les Loix la faififfent. Eft-il poflible qu’il foit né légi
time ? Elles le déclarent tel j elles veulent que ce qui n’eft:
que poifible foit réel & pafle pour confiant. Chœf-d’oeuvrc
admirable de légiflation, ce principe établi par la fageife Sc
1 expérience humaine, eft le fondement le plus folide de la
tranquillité
du repos des familles. Il faut être bien aveuglé
D
�iio
I \ »,
.
16
par Ta vanité pour ofer prétendre renverfer un principe
auili précieux
la fociété civile.
Majs quand l’homme eft aiTez méchant & corrompu poui
s’élever au-deffus des mœurs , des bienféances & des lo ix ,
dans quels excès ne tombe-t-il pas ? Qu’on en juge par ce
trait de la défenfe de notre Adverfaire.
Il oppofe contre l’aéle de baptême de fa fille , l’afte de
mariage d’une Marie-Catherine Calon, q u i, le i 9 Novembre
1 7 6 4 , époufa le fieur Lacroix en l’Eglife Saint-Euftache.
« Voilà votre m ere, dit-il à fa fille : vous l’avez crue dans
» le tombeau dès votre plus tendre enfance ; elle couloit
» fes jours dans les bras d’un époux légitime dont elle a
» aujourd’hui plufieurs enfans. Si votre naiffance eût été le
» fruit d’une union contrariée aux pieds des autels, & non
» pas celui de ma fédu&ion & de mon libertinage, Marie» Catherine Calon , mon époufe, n’eût pas pu fe marier de
w mon vivant. Elle l’a fait ; donc vous êtes bâtarde ; donc
» votre afte de baptême eft fau x, & j’étois alors moi-même un
» vil fauffaire fur vos fonts de baptême, me jouant de tout
» ce que les loix & la religion ont de plus facré » .
» Qui vous a indiqué , ou communiqué cet extrait de
mariage de ma prétendue mere, répond la demoifelle Groîneau à fon pere ? Eft-ce cette époufe légitime du fieur La
croix que je n’ai jamais vue dans votre maifon, que vous
ne m’avez jamais fait connoître , & dont j’ai ignoré toute
ma vie le nom que vous n’avez jamais prononcé ? Quelle
relation avez-vous pu conferver avec une femme dont vous
dites avoir féduit & trompé la jeuneflc ? Après un laps de
tetns de vingt-quatre années , vous avez donc.été vous préfenter chez cette époufe légitimé d’un citoyen , & vous lui
avez propofé de reconnoitre fa prétendue foiblcfle, de cer-
�î?
tifier l'illégitimité de ma naiffance , & de vous donner une
arme contre moi ? Mais eft - il dans l’ordre des vraifemblances, que il véritablement cette femme étoit ma mere ,
elle eût eu pour ion fédu&eur une ii lâche complailance ;
qu’elle fe fût expofée à découvrir fa honte à fon époux ,
au public , & fur-tout à fes enfans ? L ’avez-vous trompé fur
l’ufage que vous vouliez faire de fon' afte de célébration de
mariage ? Eft-il dans fon intention de produire cet afte pour
prouver qu’elle n’a jamais été votre époufe légitime ? J ’ad
mettrai cette conféquence ; mais prétend-elle que je fuis fa
fille ? Non. Son a £ e de mariage , loin d’établir ce fait , le
dément. Elle y eft nommée Marie-Catherine Calon, ck mon
a&e de baptême porte que je fuis née de Catherine Calon,
rotre époufe. L ’identité des noms vous manque par un effet
de la Providence , qui démafque le crime. Vous rapporte
riez la déclaration de la dame Lacroix qu’elle me reconnoît
pour fa fille naturelle, les M agiftrats, dépoiitaires de mon
honneur & de mon état , ne pourroient l’en croire. Le
doux nom de mere feroit fans doute fait pour m’attendrir ôc
me faire voler dans les bras de celle qui prendroit ce pré
cieux titre : mais pourrois-jereconnoître pour mere une femme
que je n’ai jamais connue, qui n’a pris aucun foin de mon
enfance &■ de mon éducation, & qui ne m’a jamais donné
le moindre figne de maternité ? Pourrois-je traiter en mere
celle qui viendroit prêter fon nom à un pere qui me refufe
des alimens qu’elle ne m’offre pas? Celle qui ne fe feroil;
connoître que pour m’ôter l’honneur , l’exiftence civile &
la vie même? Ainii,malheureux enfant, je ne trouverois donc
dans les deux auteurs de mes jours que des tigres qui fe
preteroient un mutuel fecours pour me déchirer le fein &
me couvrir de honte & d’opprobre ! O douleur ! O défefD ij
�;t{
18
poir ! Ah ! je ne puis retenir mes larmes.."».. O vo u s, mes
défenfeurs & mes Juges ! Ayez pitiez de mon fo r t, fauvezmoi de ma propre foibleiTe.... Armée contre un pere qui
me fuppofe une mere , je tombe évanouie à ce nom refpe&able. Je pouffe des cris & des fanglots , je ne puis plus
me défendre.....»
Soutenez votre courage , fille infortunée 1la fenfibilité de
votre ame pourroit vous tromper & abufer la nature : l’il—
luiîon nous arrache des larmes tout ainii que la vérité. Cette
fauffe mere ne vous reclame pas. Attendez donc qu’elle parle
pour confulter votre cœur. Il n’eft pas tems encore de vous
abandonner aux mouvemens de la tendreffe filiale >de verfer
ces larmes délicieufes capables de vous confoler un moment
d’une naiffance illégitime: non, il n’eft pas tems de décider
cette grande queftion d’état & de maternité.
Si cette mere de famille vient vous réclamer & vous appeller au nombre de fes enfans, vous demanderez à la voir},
vous chercherez à reconnoître dans fes traks fi les vôtres n >
font pas confondus ; & fi la nature parle, vous entendrez,
fon langage , & vous obéirez à fa voix. Par un mouvement
fubit & réciproque , vous ne formerez plus alors qu’un
feul être par vos embraffemens ; car la nature ne fauroit
tromper. Ce témoignage de l’ame , ces mouvemens prcffés,
ne font pas de ces accens que fait entendre l’impoiture, ni
de ces preftiges que l’erreur enfante ; c eft la force de la
nature qui les produit : c’eft fa loi fuprême qui commande
& fe lait obéir. Ainfi vous feule pouvez diiïiper les ténebres
dont on voudroit obfcurcir votre naiffance; & vos Juges *
m uets, ne prononceront que quand la voix de la nature fe
fera fait entendre.
Que fi elle garde un profond filence, la loi civile ne
�f (3
29
pourra vous forcer à rendre hommage à celle que vous
n’aurez pu reconnoître. Les circonilances de votre état font
telles , que l’éclat de la vérité ne peut briller que dans votre
ame , & ne peut fortir que de votre propre conieffion.
Prenez bien garde que les loix rendent le titre de votre
naiiTance inébranlable ^ indeftru&ible, & qu’il doit provi
soirement & définitivement triompher d’un a£te de mariage
q ui , rapproché de votre a£te de baptême , n’annonce pas
que l’époufe du iîeur Lacroix foit l’individu de qui vous
tenez la naiiTance.
L ’Ordonnance de 1 6 6 7 , art. 7 , tit. 2 0 , a é t a b l i que les
baptêmes, mariages &fépultures feroient fixés par des regis
tres en bonne forme qui feront fo i & preuve en Jujlice. Chaque
a&e fait donc foi & preuve de fon contenu. Que prouve l’ex
trait de baptême de la demoifelle Gromeau ? Qu’elle eft née
de Nicolas-Jean-Baptifle Gromeau & de Catherine Calon fon
époufe. Eit-ce Catherine Calon q u i, le i 9 Novembre 1 7 6 4 ,
a époufé le fieur Lacroix ? Si le fait étoit v r a i , il ne détruiroit pas encore la poifibilité d’un premier mariage avec
le Sr Gromeau : & non feulement ce premier mariage feroit
dans l’ordre des poffibles ; mais il feroit réel & conilaté par
l’extrait de baptême de l’enfant ; les loix canoniques & ci
viles le fuppoferoint ; elles n’obligeroient pas l’enfant d’en
rapporter d’autre preuve ; les Arrêts l’ont décidé. Donc fi
. c’étoit Catherine Calon , mere de la demoifelle Grom eau,
.qui eût époufé le fieur Lacroix, ce dernier mariage ferot
.nul; les enfans Lacroix feroient des bâtards adultérins , &
la réclamante feroit le feul 'enfant légitime de Catherine
Calon , époufe du Jieur Gromeau , par la force de fon a&e
de baptême, auquel la foi feroit due, & qui feroit preuve
complette aux termes de la loi.
�Mais il eil démontré fa u x , par l’a&e môme de mariage
que Catherine Calon ait époufé le iîeur Lacroix : c’eil un autre
individu, qui porte à la vérité le même nom de famille Calon,
mais non pas le même nom de baptême. Marie-Catherine
n’eil pas le même nom que Catherine. La différence eil pe
tite à la vérité : mais qui ne fait que ce font ces petites &
imperceptibles différences qui diilinguent les perfonnes dans
la fociété civ ile, les peres d’avec leurs enfans mâles les
freres d’avec les freres, les fœurs d’avec les fœurs, les tantes
d’avec les nieces , & même les êtres étrangers qui portent
fouvent le même nom de famille. On connoit à Paris Jean
Lefebvre ,Je a n -B aptiße Lefebvre , Nicolas-Alex andre Lefebvre ,
8c Nicolas Lefebvre-. ces quatre perfonnages font abfoluinent
étrangers entre eux.
Pourquoi les Ordonnances du Royaume ont-elles prefcrit
l’établiiTement des regiilres dans les ParoifTes, & ont-elles
voulu que les noms des citoyens recevant le baptême & la
fépulture* & contraélant m ariag e ,y fuifent infcrits avec la
plus grande exaétitude ? c’eil pour aifurer fans confufion
l’état des hommes. Le nom de famille eil celui qui appar
tient à toute la ra c e , qui fe continue de pere en fils, &
pafle à toutes les branches. Le nom de baptême eil celui
qui eil infcrit pour différencier ceux qui font de la même
famille, & qui doivent fo r m e r différentes branches de l’arbre
généalogique. Si vous ne diilinguez pas Jean de Jean-Baptiile , Catherine de M arie-C ath erin e , les individus ne pour
ront plus être diilingués que par les figures & la poifeifion
d’état; & les regiilres publics fi néceilaires, fi fagement éta
blis , auxquels les Loix & les Magiilrats veillent avec un fi
grand fcrupule , loin d’être d’aucun fecours, ne feront plus
�31
s u
que des monumeus inutiles, incertains , d’où fortiront les
ténébres les plus épaiffes, qui répandront au loin Terreur ,
le trouble & la confuiion.
Nous pourrions rapporter ici une foule d’autorités &
d’exemples j mais la matiere nous meneroit trop loin dans
une caufe où il ne s’agit que de ftatuer fur la maintenue
provifoire en la polTeiTion d’é ta t, & fur une provifion ali
mentaire. Nous finirons cette partie'de notre difcuifion par.
une réflexion fimple qui va faire fentir que Fa&e de
mariage des fieur & dame Lacroix , produit par le fieur
Gromeau , ne peut être d’aucune influence , • fur-tout au
provifoire.
Il eil de principe que nul ne peut nuire à un tie rs, ni fe
mêler du droit d’un tiers. Or le fieur Gromeau ne peut pas
attribuer à la dame Lacroix un enfant qu’elle ne reclame
ni ne reconnoît. En vain lui attribue-t-il cet enfant ; fa feule
déclaration ne fuffit pas. Il faut favoir fi la dame Lacroix
reconnoîtra cette propriété, & la maternité criminelle dont
on l’honore. Eh 1qui fait fi cette femme calomniée ne rendra
pas plainte contre le fieur Gromeau en diffamation de fa perfonne ; & fi fon mari & fes enfans ne reclameront pas dans les
Tribunaux l’honneur d’une époufe & d’une mere , & la
vengeance qui leur eft dûe contre leur détra&eur. E h ! de
quel droit le fieur Gromeau va-t-il lever dans les dépôts
publics l’extrait de mariage du fieur Lacroix , pour venir
flétrir la réputation de fa femme & l’honneur de fes
enfans ?
Le fieur Gromeau eft non-recevable à argumenter d’un
titre qui ne lui eft point perfonnel, & d’où il ne peut faire
refulter que la honte 6c l’opprobre d’une famille étrangère-
�3*
La dame Lacroix n’ayant fait aucune déclaration , aucun
a v e u , & n’étant pas dans la caufe , on doit ignorer qui elle
eft. En attendant quelle s’explique ou qu’elle paroifTe, la
proviiîon eft due au titre de la demoifelle Gromeau ; elle
doit être maintenue en la poffeffion de fon état, & obtenir
fa proviiîon alimentaire.
Quand il fera queilion du fond de la caufe, on pourra
y appeller la dame Lacroix, pour déclarer fi elle reconnoît
Vi&oire-Catherine pour fa fille naturelle : alors nous établi
rons avec plus de force & d’étendue les grands principes
fur la différence des noms de baptême : alors nous décou
vrirons le complot, & alors s’élevera cette grande queilion
de la fauffe mere que Salomon décida fi ingénieufement.
Mais il y a lieu de penfer dès-à-préfent que le fieur Gro
meau fera défavoué, & ne recueillera de fa témérité que
le blâme des Magistrats, & l’indignation publique.
§.
I I I.
Que la provijion alimentaire ejl due , quel que foit l’état de
la réclamante.
Dans toutes les caufes d’E ta t, jufqu’à ce qu’elles foient
terminées , le pere eft obligé de fournir des aliméns à celle
qui fe dit fa fille , ne le fût-elle pas , pourvu cependant
qu’elle foit en pofleiîion de fa filiation. C ’eft un principe
confacré par une foule d’A rrêts, tous fondés fur cette ma
xime : qu’il vaut mieux que celui qui peut être un enfant
fuppofé , foit alimenté ; que celui qui peut être véritable,
meure de faim. Satins eft eum qui forte filius non eft, ali ,
quam eum qui forte filius eft , famé necari,
Au
�Au mépris de notre Jurifprudence , qui eft confiante fur
ce point, le iieur Gromeau foutient fa fille non-recevable
dans fa demande en provifion alimentaire fur ces trois mo
tifs: i ° . que fa fille eft bâtarde ; z°. qu’ayant été élevée
dans fa maifon jufqu’à l’âge de 2 4 ans , & lui ayant procuré
le talent de la peinture, il ne lui doit plus rien; 3 0. quelle
peut revenir dans fa maifon, prendre foin de fa perfonne
infirme , & qu’elle y trouvera la v i e , l’entretien & l’hon
neur.
Il eft d’abord faux que la reclamante foit bâtarde. Mais
fuppofons qu’en caufe définitive elle puiffe être déclarée
telle , ce que perfonne n’imaginera ; du moins quant à préfent elle a titré & poffeiTion de légitimité , que l’on ne peut
lui ôter par provifion. Or il s’agit uniquement de cette même
provifion : ainfi l’allégation de bâtardife ne peut pas mettre
d’obftacle à la demande des alimens provifoires.
Allons plus loin : la demoifelle Gromeau n’auroit ni titre
ni pofleflion de légitimité, elle feroit bâtarde , Si fon pere
un concubinaire, où feroit encore le doute fur les alimens ?
il eft de jurifprudence confiante au Châtelet , & dans les
autres Tribunaux du Royaume , confacrée par les Arrêts de
toutes les Cours Souveraines, que non-feulement les peres
naturels doivent des alimens à leurs enfans, & une dot pour
leur établiffement félon leur éducation primitive , mais
même^que les héritiers de ceux-là en font tenus, modo
emolumenti.
Dans la foule des Arrêts nous ne citerons que celui de la
Grand’Chambre du Parlement de Paris, du 1 7 Juillet 1 7 5 2 »
qui , en confirmant une Sentence du même Tribunal où la
deBioifelle Groîneau attend fon fo rt, a adjugé une penfion
�34'
alimentaire de $ 0 0 livres à la demoifelle Bonnièr , fille na
turelle du fieur Bonnier de la MoiiTon. Elle avoit été oubliée
dans le teftament de fon pere. Les héritiers ont été condamnés
à lui payer une fomme de 2 0 , 0 0 0 livres, payable lors de
fon établiffement.
2 0. Ce traitement, dit-on, n’efl: point dû à la demoifelle
Gromeau. Son pere lui a donné un talent dont elle peut vivre
honorablement.
Jamais le fieur Gromeau n’a été dans l’intention que fa
fille vécut du Deifin & de Ja Peinture qu’il lui a fait apprendre.
C ’eit au feul'titre d’éducation qu’il lui a donné des Maîtres
dans ces Arts agréables ; il l’a avoué lui-même dans fa propre
défenfe. « Je lui ai donné , dit-il , des foins & une éducation
» que le vice de fa naiffance ne la mettoit pas en droit d’exi» ger de moi » . Ce n’étoit donc pas dans la vue de lui pro
curer les moyens de fubfifter que vous lui donniez cette
éducation , fi peu faite , dites-vous , pour quadrer avec
le vice de fa naiffance. Si au contraire votre intention
étoit que cette éducation la mît en état de gagner fa v i e ,
comme une fille qui n’a ni parens , ni patrimoine , cette
même naiffance1 vicieufe exigeoit donc de vous cette utile
éducation ?
Quel efi le traitement ordinaire des enfans, dont la nai£
fance illégitime fait rougir leurs auteurs ? ce n’eil point dans
la maifon du pere qu’ils font élevés * ils fuivent l’état & la
condition de leur mere j c’eft à celle-ci que leur éducation eft
déférée. Le pere ne doit qu’une penfion alimentaire à l’en
fant , & quelquefois une indemnité confidérable à la mere,
ou des dommages-intérêts, félon les circonihnces. Elle éleve
alors fon enfant félon fa condition ; elle lui fait apprendre
un métier, ou lui donne un talent honnête, félon fes moyens.
�*»*—
t
3t
Que fi la mere meurt, ou l’abandonne , le pere alors en cil
chargé : mais ce n’eft point dans fa maiton qu’ordinairement
il éleve ion enfant naturel : il le met dans une peniion ; bientôt
par l’éducation vulgaire qu’il lui donne, il lui fait ientir le
vice de fa naiiTance, & l’éleve de maniéré à lui apprendre,
que quand il fera parvenu à un certain âge , il doit gagner fa
v i e , puifque nos Loix veulent que les bâtards n’aient ni
parens ni patrimoine.
Un enfant naturel ainfi élevé , pourvu d’un métier ou
d’un talent dont il efl en plein exercice, à l’âge de z 5 ou
3 o ans , pourroit bien n’obtenir qu’une légere faveur en
Juftice fur une demande en alimens, fauf pourtant la dot ,
qu’en cas de mariage & d’établiffement, un pere naturel d’un
état ordinaire doit à fon enfant.
Mais une fille , prétendue naturelle , élevée chez fon
pere: depuis fon berceau , comme une fille unique & légi
time , traitée avec toutes les attentions, les foins & le s égards
dûs à ces deux titres précieux , une fille à laquelle fon pere
a donné des talens agréables , fans jamais lui faire fentir
qu’elle en dût, un jour fubfifter ; qui a partagé les avan
tages de fon rang & de fa fortune ; qui avoit été accordée en
mariage à deux citoyens honnêtes que le feul caprice du S r Gromeau a éloignés ; une fille qui a tous ces cara&eres n'aura
aucun droit 1 c’eft un enfant de cette claife particulière qu’un
pere prétendra obliger de fe faire un état & une profeifion
publique des foibles talens qui ont fait partie de fon éduca
tion ! un art que la réclamante n’a pas pu perfe&ionner, par
foumiiTion à la volonté de fon pere , il faudra aujourd’hui
qu elle en vive 1fi le fieur Gromeau vouloit que fa filie profefsat le Deflin & la Peinture , il ne falloit donc pas, il y a
quatre ans , la priver de fes Maîtres 7 & l’employer au fervice
E ij
�36
continuel de fa maifon ( i ) . S’il prétend aujourd’hui qu’elle
reprenne les crayons , la palette & le pinceau , dont elle
ne rougiroit pas fans doute , qu’il lui donne donc les meubles
& effets qui étoient à fon ufage dans fa maifon, les moyens
de vivre , la provifion qu’elle lui demande , en attendant
que fes talens fe faffent connoître, & puiffent lui procurer
une fubfiilance honorable. Veut-il que fa fille aille implorer
des fecours étrangers , & proftitue fa perfonne dans un fiecle
corrompu ? « On tue fon enfant, dit la L o i , non-feulement
» lorfqu’on l’étouffe, mais encore lorfqu’on l’abandonne ;
» lorfqu’on lui refufe la nourriture, & lorfqu’on l’expofe dans
» un lieu public, afin qu’il trouve dans les autres une com» paffion , dont on n’a point été touché foi-même envers lui » .
Necare videtur non tantum is qui partum perfocat : fed & is
qui abjicit ; & qui alimonia denegat ; & is qui publicis locis
mifericordiæ caufa exponit, quam ipfe non habet. ( Leg. 4.
lib. 2 5. tit. 3 , ff. de agnofcendis & alendis liberis ).
3 °. Que ma fille revienne chez mo i , s’écrie le fieur Gromeau en fureur 5 elle y trouvera la vie, l’entretien, & l’honneur.
L ’honneur ! Eh ! déjà vous le lui avez ravi ! ou du
moins tous vos efforts y tendent. Une fille légitime ne peut être
contrainte à rentrer dans une maifon où l’on répand fur fa
naiffance des doutes honteux , & où l’infolence des valets
fe joint au mépris du maître.
D ’ailleurs , la reclamante ayant des droits à exercer
contre fon pere , ne peut être contrainte à aller vivre dans
( 1 ) Il avoit une cuifm iere, & un la q u a is ; il renvoya fa cuifiniere lorfque fa fille
eut vingt ans. Il ne vouloit voir fur fa table que ce qui ¿toit apprêté par les mains de
fa fille ; il en avoit le d r o it, car les enfans font les premiers ferviteurs du pere de
fam ille. L es domeftiques ne font que des aides qu’il veut bien leur d o n n e r, foit
pour alléger leur p e in e , foit pour les occuper de chofes plus importantes,
�’ 37
fa maifon. Jamais en pareille conjon&ure les Jugemens n’ont
forcé les enfans à aller recevoir les alimens chez leurs
parens. L ’incompatibilité *d’humeurs , par exemple , n’eft
point un motif légitime de' refufer d’aller vivre avec fon
pere ; cela eft jugé par un Arrêt du 2 7 Juillet 1 6 0 9 :
mais le choc des a&ions juridiques fur l’état & les intérêts
civils répugne à l’afyle commun.
Il eft encore d’autres motifs de féparation que nous
enfeigne le Jurifconfulte de la Normandie , cet oracle dont
les fages maximes retendirent tous les jours dans nos Tri
bunaux } & même aux pieds du Trône. »Les enfans , dit
» le célébré Houard , en recevant de leur pere même les
w alimens , ( nom fous lequel il faut toujours comprendre
» toute efpece de befoins, en fanté comme en maladie , )
» peuvent être contraints à réfider chez e u x , fi ce n’eft dans
>»le cas o ù , par exemple , les moeurs d’une fille ne feroient
»pas en fûreté avec une belle-mere débauchée , ou dans
» celui qui expoferoit un fils tendre & honnête à des violences
» de la part d’un pere barbare & injujle. »
Ce ne font pas feulement les injures atroces & la néceiTité d’exercer fes droits qui ont forcé la Réclamante de
quitter la maifon paternelle. Des traitemens ignominieux &
déteftables lui en ont fait un devoir j s’il eft v r a i , comme
on n’en peut douter, que tout être foit obligé de veiller à
fa fûreté & à ia confervation. Ces mauvais traitemens ont
été dépofés dans le fein des Miniftres du Roi & de l’Eglife.
La Juftice ne forcera pas fans doute une fille trop malheureufe à s’en plaindre ; elle les a oubliés. Le refus des ali-*
mens • n’a donc ici d’autre caufe que le plaifir inhumain
d affliger'l’innocence. ’
Réfumons , en peu de mots , les objets fur lefquels les
�3*
Magiftrats doivent prononcer dans cette caufe importante."
L a demoifelie Gromeau s’occupoit de fon émancipation
& de FaiTemblée de fes parens & amis , qu’elle vouloit
provoquer en l’hôtel de M. le Lieutenant C ivil , pour s’y
.faire, ¿nommer un tuteur à fes aâions immobiliaires , lorfque
la maladie qui fuivit les mauvais traitemens de fon pere
l’arrêta dans cette opération.
Si l’humanité foigna fes jours,, la charité chrétienne lui
fit ouvrir les portes d’un Monaftere pour faire ceiTer les
_difcours injurieux de fon pere, qui, loin de la couvrir de
fon manteau , lança contr’elle les premiers traits de la ca
lomnie. Il fe garda bien de fe rendre à nos inftances de
mettre lui-même fa fille au Couvent ; il fe feroit ôté le doux
plaifir de la diffamer & de fe venger. Mais on y a pourvu
fans fon fecours.
Elle s’eft vue dans la néceifité de former une demande en
proviiîon alimentaire. Le fieur Gromeau y a défendu par
l’atroce inculpation de bâtardife \ ce qui a donné lieu à la
demande incidente en la poffeifion d’état , par proviiîon.
Ainfi , maintenue provifoire en la qualité de fille légitime j
provifion alimentaire d’une fotnme de i 2 , 0 0 0 l i v . , ou de
telle autre qu’il plaira à la Juftice de fixer , félon l’état &
la fortune du iieur Gromeau , laquelle fomme doit être
employée non rfeulement aux alimens de la Réclamante ,
mais encore aux frais de pourfuite de fes a&ions juridiques ;
enfin , fuppreifion de termes injurieux , avec dépens. Tels
font les objets fur lefquels la Juftice doit ftatuer.
Il
ne s’agit point de juger définitivement la queftion
d’état. La caufe au fond n’eft point encore portée au
dégré d’évidence dont elle eft fufceptible ; car l’extrait de
fnariage de la dame Lacroix femble y répandre quelques
|£nçbres, qui nç tarderont pas ¿1 fe diiHper entièrement
�X ?3
à la tueur des inftruâions que le terns pourra procurer.
Quelle eft donc en ce moment la lîtuation critique &
touchante de la demoifelle Gromeau ? Que fes Juges dai
gnent la confidérer d’après le tableau qu’elle a trace ellemême à nos yeux attendris, dans fes initruéUons fur les faits.
Contrainte de combattre un pere qu’elle voudroit
défendre , d’expofer au blâme celui qu’elle voudroit ho
norer, fon cœur eft déchiré par les mouvemens- divers de'
la tendrefle filiale, 8c de la jufte colere qui vient troubler un'
ii beau fentiment, fans y porter pourtant aucune altération1
réelle. Le feu de l’indignation1 nuancé fon vifage.... furieufe
un inftant.... mais bientôt vingt années de foins ,-de bontés
& d’affe&ions vraiment paternels viennent tout - à - coup
émouvoir fes entrailles, & exciter f a v i v e reconnoiiTance.
Elle voit comme encore préfentes à fes yeux , ces
mains dHm* pere toujours pleines de ce qui pouvoif
flatter les goûts dé fon'enfance &T de fa jeuneiTe ; elle’
fe rappelle avec attendriffement1• cette générofité fansbornes , ces riens fi précieux qui font le charme
des coeurs vraiment uni s , & fur-tout cette aimable égalité
où un pere femble laifler flotter les rênes de fon autorité ,
& à1travers laquelle une fille fage TaiiTe entrevoir fon refpeft
& fa foumiflion.... Hélas ! qu’êtes- vous devenus, ô doux
inftians-de l’amour paternel ! ô précieufes années- de paix
& de félicité l
Fille fenfiblë'! cœur fublime & reconnoiflant ! vous
vous attendriffez encore : je vois-! vos yeux mouillés de
larmes vous brûlez d’aller vous abandonner à la pitié d’un
pere
de vous jetter dans fon fein!.... Allez ,. fi vous
.croyez trouver un pere 5. volez dans» fes; bras ; la Juftice
va fufpendre fes oracles..,. M ais, hélas î vous vous flattez
�40
envain : il eft un âge &: des fituations où l’homme eft im
placable ; fes fibres endurcies ne portent plus à l’ame ces
fublimes impreffions qui ne font faites que pour la tendre
jeuneffe , ou pour des coeurs privilégiés de la nature. Vous
ferez repouffée , malheureux enfant !
Ah ! dites plutôt avec le Roi Prophète : » Un lion raviff eur
& rugiffant s’eft jetté fur moi : le confeil des méchans m’a
» affiégée ; il ont déjà partagé mes vêtemens. Je vous implore , ,o mes Juges ! vous êtes mes défenfeurs dès le
» ventre de ma mere : ne m’abandonnez pas , car la tribu» lation eft très-prochaine. » E h ! ne fentons nous pas qu’elle
vous accable en ce moment même ? Le devoir , l’am our,
la nature & la loi font violés en votre perfonne ; les moeurs,
l’honnêteté publique , l’honneur perfonnel, ce bien le plus
précieux du citoyen , ce frein des gens de bi en, tout eft
bravé , tout eft facrifié pour vous perdre. L ’audace de vos
ennemis va même jufqu’à. porter la défolation dans une famille
étrangère, au fein de laquelle ils vous fuppofent une fauff e
mere ; s’ils la couvrent d’opprobre , c’eft afin qu’il rejalliff e
fur vous. Mais votre état eft confervé dans les monumens
publics : vous êtes fous la garde des Loix & des Magiftrats ,
& bientôt vos Juges apprendront à ces perturbateurs du repos
des familles, qu’ils ne peuvent fe jouer impunément ni de la
foibleffe des pupilles, ni de la majefté des Tribunaux.
S ig n é , C a t h e r i n e - V ic t q ir e
G ro m eau &
C a r lie r ,
curateur.
Monf i eur D U V A L , Rapporteur.
M e H U B E R T , Avocat,
C A R L I E R , Procureur,
À PARIS, chez P. G, SiMOM, & N. H. Nyon , lmp. duParl., rue Mignon, 1784
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gromeau, Catherine-Victoire. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Duval
Hubert
Carlier
Subject
The topic of the resource
successions
légitime
enfants naturels
refus d'aliment
abus de faiblesse
diffamation
maltraitance
faux
vie monastique
Description
An account of the resource
Titre complet : Demande en maintenue provisoire en la possession d'état, et provision alimentaire. Pour Catherine-Victoire Gromeau, fille mineure, procédent sous l'assistance et autorité de Maître Carlier, son curateur ad hoc, et pour ledit Maître Carlier au dit nom ; Contre Nicolas Jean-Baptiste Gromeau, intéressé dans les affaires du Roi, son père.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez P. G. Simon et N. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1783-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0809
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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abus de faiblesse
diffamation
enfants naturels
Faux
légitime
maltraitance
refus d'aliment
Successions
vie monastique
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ef345cc8e60304bd5cd32612275025c0
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Text
POUR
Me
c o n t r e
M e
R
■
,
M orizot ,
le
i d e o
S.
P
A v o c a t au ( 1 ) Parlement.
r o c u r e u r
-G
é n é r a l
,
A d v o c a tu m q u i P a tr o n o egea t.
H ie ro n y .
E p if t
ad B o n a fu m .
S i jamais Caufe f ut d iffic ile , fi jamais pofition fut crue lIe ,
c ’e ft ma C aufe , c’ eft ma pofition.
S eroit-ce que la queftion foumife au jugem ent de la
t w ------:— :— :----—— :------- —— ---- ;——----- -— ----------------- —
( t ) I l fe t r o u v e b e a u c o u p d e p e r f o n n e s q u i f o n t u n e d iftanctio n e n tr e le s A v o c a t s , &
q u i p r é t e n d e n t q u e c e u x q u i f o n t fu r le T a b l e a u d o i v e n t s’ a p p e l l e r , A v o ca ts au
P a rlem en t, & c e u x q u i n ’ y f o n t p a s , A vocats en Parlement. M a i s c e s
perfon nes
q u i f e p i q u e n t d e c o n n o î t re l’ u fa g e , n e fe d o u t e n t p a s , q u e n p n f e u l e m e n t e l l e s
i g n o r e n t l ’a n t i q u e u f a g e , m a is e n c o r e q u ’e ll e s b l e ffe n t l a l a n g u e .
C ’eft en f a v e u r d es A v o c a t s a u P a rlement deParis d i f t ic tio n
fu t i n v e n t é e
o r ig in a ir e m e n t t. I ls s’ in titu lo îe n t : A vocats en Parlement , t o u t c o u r t ; p e r fu a d é s q u e
l' h o n n e u r d ’ e x e r c e r l e u r s f o n c t i o n s d a n s le p r e m i e r P a r l e m e n t d u R o y a u m e m é r i t o i t
q u i s ' a p p r o p r ia f f e n t c e t t e d é n o m i n a t i o n in d é f in ie à’ A vocats en Parlement qu i les dif
p e n fo it d ' e x p r i m e r q u e l P a r l e m e nt. O n n ’a j a m a i s d i t : A v o ca t en Parlement de Pari s.
�'a'
C our,
des
c it .u n de ces m yileres de d r o it , où les lumières
plus clair-voyants fc trou vent en délauc ? H élas !
dans tous les Pays de la terre , l ’ad o lefcen t le moins
inftruit la décid eroit fur fon fimple expofé.
S e ro it-c e que j ai en tête des A d verfaires
fans, qui s’oppofent à mes fuccès ?
Outre
tout
p u if-
qu e dans le
T r ib u n a l où je p la id e , je ne craindrois pas leurs efforts,
j ’ai eu peine à déterm iner le M in iftère p u b lic
fur la
fa ve u r d u q u e l je c o m p t e , à m ’offrir l ’apparence d’un
~ contradi& eur.
Q u ’cft-ce donc qui rend ma condition fi f â c h e u f e , il
embarraffance ? C e l a même que je ne devrois rencontrer
ni objections
Les
O uvrages
ni A dverfaires. E n effet
des
an cien s
A vocats ,
j
fo u r n iiT e n : c e n t
com m ent établir
preuves
de
ceci.
Les
P l a id o y e r s de M a r io n , A v o c a t au P a r le m e n t de P a r i s , depuis A v o c a t G é n é r a l , fo n t
i m p r i m é s e n 1609 , i o u s c e titre : P la id o y er de M tjfue Simon Marion , Baron de
D r u y , ci-devant A v o c a t
en
Parlem ent.
C e u x de B o rd e n a v e , A v o c a t
au
P a r l e m e n t d e N a v a r r e , & a u i f i d e p u is A v o c a t - G é n é r a l à c e d e r n ie r P a r l e m e n t ,
im p r i m é s en 1 6 4 1 , le f o n t f o u s c e titre : Plaidoyers & aRions de M . Me A rnaud
de Bordenave ,
ci-devant A vo cat a u Parlement. L a M é t h o d e G é n é r a l e p o u r Pin»
t e l l i g e n c c d e s C o u t u m e s , i m p r i m é e e n 1 6 6 6 , p o r t e q u ’e l l e a é té c o m p o f c e p a r M e ,
P a u l C l i a l i i n e , a n c i e n A v o c s t en Parlement. E l l e ert d é d ié e i
M o n f;ig n e u r de
• N o v i o n , Prèfideni en Parlement. O n lit a u F r o n t i l p i c c d e la C o m p i l a t i o n d e B o r j o n
f u r le s D i g n i t é s , i m p r i m é e e n 1 68
&
y.p a r M e .
B o r J o n , A vo ca t en Parlement; C l i a l i i n e
B o i j o n é to ie n t A v o c a t s a u P a r l e m e n t d e P a r i s : m a i s à - p e u - p r e s d a n s le m ê m e
tem s o n im p iim o it la p re m iè re E d itio n du T r a i t é des H y p o t h è q u e s , par M e . H e n r i
B a f n a g e , A voca t au Parlement de Normandie•
J e p o u u o i s m u l t i p l i e r à l ’ i n S n i le s c i t a t i o n s , fi l’ o b j e t a v o i t p lu s d ’i m p o r t a n c e .
V & u g e l a s , d a n s f i s R e m a r q u e s , , o b i è r v a q u ’ o n n e d if o it pas b i e n , A v o ca t en P a r
lement ,
Sc q u ’ i l f a l l o i t d i t e , A vocat au. S a
d é c i f i o n , a d o p t é e p a r l’ A c a d é m î e
F r a n ç o i f e , p ar l e D i & i o n n a i r e d« T r é v o u x , d e r n ie r e é d i t i o n , & c . a a c q u i s f o r c e d e
L o i , & l’ e x p r e f l l o n A vocat en , s’ e lt t r o u v é e e n t iè r e m e n t p r o f e n t e . C e u x q u i v e u l e n t
ra p p eller cette lo c u tio n b a ib a r e q u o iq u ’ h o u n o r a b le & la d é g r a d e r ,
p o u r ain fi d i r e ,
e n l’ a p p l i q u a n t a u x A v o c a t s q u i n e fo n t p a i f u r l e T a b l e a u , h e u r t e n t d o n c to u t-à -g
l a - f o ï s , l ’H i f t o i r c &
la G ra m m a ire.
�la .vérité d’un axiome ?.C om m ent p ro u v e r, par e x e m p le :
q u e la partie eft moins grande que le tout ? E t quand
vous cro y e z q u e c ’eft un Co,rps qui vous impofe
cette
tâche 5 fi ce C orps s’é clip fc , pour ne vous lai fier q u e des
O m b res en p réfen ce : n’y a -t-il pas de quoi fe défefpérer 2
fur-tout ii pendant q u e l ’on vous force , d’un côté , à
p ou rfu ivre des fantômes qui rient de vos vaines atteintes,
vous etes attaqué de l’autre par .des ennemis réels qui
vous blefient im p ito y a b le m e n t, &; vous font des torts
irréparables.
A jou tera i-je que dans ce Procès je dois parler de m o i ,
q u ’ainfi placé fous les y e u x de l ’envie &. de la m ali
gnité je 11e puis-prefquc rien d ire , qui ne foit 011 proferit
par l’une avec hum eur , ou adopté par l’autre a ve c joie?
Q u e lq u e
foient
ces obftaclcs , dont je
connois ,
dont je fens bien toute l ’étendue , toute la réfiflance ;
foutenu par ma C a u fe 6c par
ma co n fia n ce, dans les
Alagiftrats qui d oivent la j u g e r 5 j ’expoferai fans foiblefie,
la ju ilice de ma prétention 6c l ’évid en ce de mon droit.
O n ne penfe pas a fle Z j q u e ces retraites, ces m én agemensfi com m uns,dans des conjon& urespareilles à celle-ci,
font autant d ’infultes faites aux JLoix &..à leurs O r g a n e s ,
q u ’ils perdent to u t, en e n c o u ra g e a n t le progrès de l’ar
bitraire, en b iffant impunie la vexa tion , dont les auteurs
érigent les a&es en règles
5i
les vi&im es pufillanimes en
e x e m p le s , q u ’ils ofent enfuite c i t e r , pour juftifier les
nouveaux
excès auxquels ils ne m an qu en t pas de fe
Jivrer.
J e fuis de B o u rg o g n e : ma fam ille efl: connue depuis
Jong-tems dans la P r o v i n c e } .& mes Peres.» q u ’ont difA' a
�^
r
tingués des vertus utiles., des études particulières ou des
talens a p p la u d is , m’ont im pofé la loi de ne rien faire
de ne rien fouffrir contre 1 honneur.
J e fus reçu A v o c a t au P a rlem en t de Paris en i 7
&. je fuivis le B arreau ju fq u ’en 1 7 7 1 , que je me retirai
à A v a l o n j où I o n m inferivit f u r i e T a b le a u des A vo ca ts
d u B a illia g e . J ’ai même eu depuis occafion de rem placer
le L ie u te n a n t-G é n é ra l dans une circonitance fameufe j
où j ’ai vu mon ju g e m en t confirmé par un A r r ê t foJemnel
d u P a rle m en t de D ijo n .
E n 1 7 7 4 je revins à P a r is , réfoiu
d ’y continuer la
P r o feflion 5 8c c ’cft ce dont fait foi ma m a tricu le, vifée
par
M c de L a m b o n , Bâtonnier d ’alors.
J e fréquentois les A u d ien c es a ve c afllduité
lo rfq u e
la p e r fp e & iv e d’un O ffice de Judicature , dans une C o u r
S o u v e r a in e , s’ouvrit devant moi. T a n d is que je m ’o c c u pois des démarches à f a i r e , pour en être p o u r v u , nne
p erte inopinée vint tout-à-la fois m’ôter
l'efpérance de
pofleder la C h a rg e , Sc le p ouvoir de perfévérer dans le
defTein de
m’ag gréger aux brillantes
plendiffbnt au Barreau.
lumieres qui ref-
Je crus devoir me tourner du
co té de la F in a n ce. M . de Cluçniv., C o n trô leu r-G é n éra l,
’
m ’y promettoie un avancem ent rapide. Sa mort m’a laide
.
dans les B u reau x de Sa M ajefté s où d ’abord il m ’o c
cupa.
C e n’eit pas q u ’abandonnant la carrière du P a la is ,
j’en aie abjuré les occupations'j je me
félicite d’avoir
rendu fervice à nombre de perfonnes j d ’en avoir , par
mes confeils , p réfervé plufieurs d’une ruine certaine , Sc
'd ’en a v o ir, par mes démarches, fauve d'autres d un entier
�'nauffrage. Je rappelle
fans vanité , ce que j ’ai fait fans
intérêt.
J ’eus le m alheur
de
perdre mon P è re 0 1 1 1 7 8 3.
F e r m e , in itru it, plein de délicateiTe, pendant quarante*
cinq ans q u ’il exerça l ’état d’A v o c a t Sc remplit différons
Offices de ju dicature ( 1 ) , il avoit acquis des droits , i
la ^ rcconnoiflancc d ’une fou le de fes C oncitoyens
,f 8c
j
s etoit concilié l ’eftime de tous. I l laiiToit une fucceiTion
bien m odique à partager félon les L o i x , entre fon époufe
Sc trois enfans.
M o n frere p u în é , A v o c a t à D ijo n , vo la vers la maifoft
paternelle. M a frcur y d e m e u r o it, à portée de prendre
5c de donner tous les renfeignem ens défirables. J ’ignore
com m ent les fcellés furent m is5 ce que je fais, c ’ei\. q u ’ils
fu rent levés fans mon intervention , fans inventaire , 5c
q u e la vente des effets fe co m m e n ç o ic , qu'on ne s’étoic
p a s avifé de s’informer (i je vivois encore.
L ’irrégularité de ces démarches ne doit furprendre
q u e ju fq u ’à .u n tertain point. L e C i e l , en accordant djs
longs jours à ma m ere, ne lui a pas fait une faveur entière.
Son efprit s’efl beaucoup plus reflenti, que fon corps de
l ’injure des années. P o u r ma fccur , un fleur G u é n io t en
premier dieu , M a ître de Pofte , AiTefleur dé la M a r é chauffée à T o n n e r r e , puis M é d e c i n , très-heureufemenc
( 1 ) II a v o i t d ' a b o r d p o f t u l é a v e c fticc è s à D i j o n , o ïl
il ¿ p o u i a
D e m o ife llc
L o u i f e - M a r g u e r i t e , fille d i M . D e l u i T e u i , A v o c a t a u P a r l e m e n t d i P a r i s & d e
D i j o n , P r o f e i ï c u r en D r o i t d e l ’ U m v e i f i r é de c e t t e V i l l e , A u t e u r d ’ u n e A n a l y f e d e s
In ftitu ts , q u i eft d e m e u r é un L i v r e C la iT iq u e d e l’U n i v e r f r é . L ’i n t é i ê t d ’ u n e g r a n d e
m a i f o n voifin-.’ -d ’A -v a lo n , cjui.av.oi: b e f o i n de fes c o n i è i l s , l’ attira d a n s c e t t e V iH * >
o u la c o n f i a n c e d e s H ^ b ic a n s Si d es S e i g u e u r s d e s e n v i r o n s le f i x è r e n t .
�Vo*
¿r
■fans m a la d e s , à A u x c r r e , finalement M a r c h a n d de Vins
F o ra in ,' P o ë tc ly riq u e 8c F a ife u r de grands projets ,
p ou r la fp len d eu r de l E t a t a A v a lo n j ce iïeur G u é n io t
la
dirige.
O n vient de voir par 1 énum ération de Tes q u a li t é s ,
q u ’il en réunit trop pour être
un grand J u r ifc o u fu lte j
q u o iq u ’il foit au par-deilus A v o c a t.
O r , ma foeur à
la q u e lle il a , comme enfant d’E fc u la p e , promis un fiecle
de vie , dont il charmera les m o m e n s , comme fuccefîeur
d ’O r p h é e j ma foeur, d is-je, fuivant p o n d u e ile m e n t en
itout j le régim e q u ’il lui p re fe rit, on ne doit pas abfolu m ent s’étonner de ce que fes procédés ont d’illégal.
Q u a n d il fu t enfin bien reconnu que j ’exiitois, &; que
mes proies , à l ’héritage p a te rn el, ne pouvoienc m ’etrp
c o n te fté s , on m’aifigna au B ailliage d’A v a lo n : « à l'effet
» d ’y procéder au
partage en nature du reftant des
3> meubles & immeubles de la fuccciîîon de mon pere ».
H ab itant de Paris, j'attirai la difcuifion au C h â t e l e t , 6c
l à , je me hâtai de donner les mains, à la demande form ée
.contre moi.
L a conteftation d evo it finir faute de conteftansj mais
ma fœ u r , ou p lu tô t le fieur G u é n io t , vou loit plaider. I l
accourt à P a r is , muni des pleins pouvoirs de fa d é v o u é ç ,
il d efeend au G r e f f e , prend acte de v o y a g e , affirme être
ven u tout exprès pour ce P ro c è s , q u o iq u e la follicitatioij
d ’une L e t tr e de cachet contre
fa fille , d ’une penfion
pour lui, à caufe d ’une O d e fur l’abolition de la S erv itu d e
couro n n ée à l ’im m a c u lé e C on cep tion de R o u e n
com m unication
d ’un P la n de F in a n ce
la
m e rv e ille u x ,
enfanté dans les milans cjue lui Uifloiç de l i b r e s , fon
�4of
7
génie poétique ( i ) , fuiTent les objets de fon vo y a g e.
J e ne crois pas q u e fes rares talens l’aient p rotégé auill
avantageu fem ent auprès du M in iftr e , que la parentee
de fa fo e u r* , a v e c le G reffier M e D e f p r é s , l ’a bien fervi * LaDamelc
au C h â tc le t. D è s l ’a b o r d , celui-ci fe montra
,
p rotecteu rd e la C a u fe de mon A d v e r f a i r e ,
dont
il
l ’ a r d e n t P ère, D irectricedela Pofchargea t c à Auxerre.
fon C ou fin j feu M e D e fp ré s le jeu n e.
L e premier effet de cette b ien veilla n ce d éclarée
fu t
de m’em p êch er de trou ver un d éfen feu r dans les A vo ca ts
du C h â telet. I l m ’en fa llu t ch erch er un., parmi c e u x
qui s’attachent de p référence au P a rle m en t 5 les accès
d ’une m alheureufe affeftion n e rv eu fe , dont j ’étois to u r
m enté j m’ôtant la faculté de me fervir m oi-m êm e.
L e s incidens incroyables qui fe f u c c é d è r e n t , font
d ’une
telle nature 3 q u e j ’aime m ieux les palier fous
lilence , q u e d ’excicer ch e z les a u tres, &: de ré v e ille r
c h e z moi j en les racontant, l’indignation q u ’ils y ont faic
naître. Q u ’il fuffife de f a v o ir , que voyant ma fanté en
m eilleur é t a t , je formai la réfolution d’aller m oi-m êm e
lire à l’A u d ie n c e j ce que j’écrivois dans le C abinet.
Je mis donc ma robe , mon b o n n e t, mon rabat & tout
le r«efte d u coftume , & je fus me préfenter au T r ib u n a l. J e me plaçai , fclon l’ufage j dans le banc des A v o c a ts
& je pris un défaut , que M e T h o r e l , plaidant pour ma
fœ u r , fit ra b a ttre , en demandant q u e la C a u fe fût p la cé e.
( i ) U fa u t v o i r la m a n i è i e m o d e f t e d o n t le l ù u i G a é n i o : , d a n s la n o t e d e Ton
O d e fui- l a S e r v i , u d e , i i n p i i m c e
à
P^ri*:, c l i e z B r l i n , a n n o n c e f o n P r o i e t , fur la
p r é s e n t a t io n d u q u e l i l c o m p t o i t o b t e n i r l E u t i e p ô t d u T a b a c , & l a D u c f t i o n
f o fte à A y a lo n ,
de 1»
�*
S u r mes re m o n tra n c e s , on la re n v o y a Am plem ent à troisjours.
J e reparus de n ou veau , dans ce banc d ’où l ’on veu t
m’exclu re ; je n’obtins q u ’une n o u velle remife. Enfin ,
la tro ifiem e fo is , la C a u fe d ’un com m un accord fu t r e
te n u e, qualités p o fees ôc placée au T a b le a u
pour venir
à fon tour.
Q u a tre mois entiers s’é c o u l è r e n t , pendant le f q u e ls
mon P la cer ne fut point appellé. T o u jo u rs jl demeuroic
le dernier 3 & s’il avoit été f e u l j on l ’auroit ou blié. M a
patience étoit à bout : j ’eus befoin d ’avoir recours au
M a g iftra t qui préfidc fi dignem ent le C h a te le t. J e lui
jrepréfentai : q u e s’agiffant d ’un provifoire , ma C a u fè
éto it u r g e n te j q u e p e n d a n t q u e l’on me ten o it en fu fp en s
d ’un cô té , on me ruinoit de l ’autre par les fuites q u ’on
donnoit à certains premiers jugemens , fur lefqu els la
queftion écoit de prononcer. I l eut la bonté de me tranq u illifer , & fes ordres firent à la fin , venir mon P la c e r ,
+
’
le 2 6 J u in
1.
1784.
J ’étois à l ’A u d i e n c e , on appelle ma C a u fe j je me le v e,
prends des conclufions , &. déjà j’entrois dans l’expofition
des fa its, lo rfq u e IVLe P e fp r é s Greffier > fait inviter M 6
T h o r e l , par l ’H uiifier de fervice., à venir lui parler. M®
T h o r e l fe rend à l ’invitation -, Sc après un inftant de
co llo q u e j il retourne à la place q u i l avoit quittée s Si
ftvinterrompt
dç
la
maniéré
la
moins honnête.
Il
/ é c r i e ; oc je ne plaiderai point contre cet h om m e-là :
» un Commis » terme q u ’il prononce d ’un air dédaigneux.,
accom pagné de l ’épithete la plus indécente », I l n’efl:
p pas A v o c a t . . , .
I l n a pas le droit de fc mettre au
» banc 4
�j>
<*
» banc , ni d ’avoir le bonnet quarré fur la tcte , ou à
» la. main j
& c . ».
C ectc fcèn c peu digne de la maiefte du lieu oii elle
fe pafl’o it j me troubla. M . le L ie u te n a n t- C iv il daigna
é leve r la voix en ma faveur. I l v o u lu t bienatteiler : « q u e
» j'étois A v o c a t . . . Q u e le P la ce r avoit été mis fous
»
mon nom j &; les qualités pofées’ ave c moi . . . .
»
la C a u fe étant engagée j, il falloit la plaider ». M o n
A n ta g o n ifte tint boii
Q ue.
pour co u p er court au fcandale
qui com m ençoit à grandir d é m e fu ré m e n t, le M a g iilra t
re n v o y a la C a u fe au 3 0 fuivant (1).
C e jo u r , l ’obilination de M e T lio r e l l ’emporta encore
.
fu r 1 équitable difpofition dçs Juges. C es derniers vou loient m’entendre j j ’avois un puiilant intérêt à m’cxpliq u er 5 mais M e T li o r e l refufant de plaider j le T r ib u n a l
fe vit forcé de mettre l'A ffaire en délibéré.
J ’ai dit que j ’avois le plus grand intérêt d'etre p erfonncîlem ent entendu , en voici la preuve : je demandois une
provifion , fur ma part de l ’argent de la fucceflion , elle
me fut a c c o r d é e , cette provifion ; par une S entence qui
p orte, « q u ’elle me fera payée par le N o ta ire fequ eftre
» &: des d e v e r s qui font entre fes mains» 3 mais il' n ’y a
point de N otaire fe q u cllre , & c ’eft ce q u e j’aurois e x p li
q u é , il l ’ont m’eut laifle plaider. M a fo c u r, c ’e f t - à - d ir e ,
( 1 ) C e r e n v o i fu t o r d o n n e a p r è s q u ’ o n e û t é té 2 k x o p i n i o n s , & p e n d a n t q u e le
M a g i l î r a t Iss p r e n o it à d r o it e ,,M,* D e f p r é s n e c e f l o i t d e c r ie r a u x J u g e s d e U colonne
o p p o f e e : a N e le l a i f i e z p as p la i d e r ; c ’ç f t u n i n f o l e n t , il m ’ a é c r it u n e le t tr e q ue ) a '
p. F em ife à M . le L i e u t e n a n t de P o l i c e >j.
B
V
•
�1O
le fîeur G u é n io t , tient tout ( i ). J ’ai fait fignifier ma
S e n t e n c e , on
n’y a rien répondu. D e forte
que
le
j u g e m e n t , eft d eve n u la matière d’un fécond Procès.
A u milieu de tous ces débats, fi prolongés, fi pénibles,
je m’étois affermi dans le parti de n ’abandonner q u ’à m o i ,
le
foin d ’inftituer
8c d ’éclaircir mes prétentions. L a
confiance en autrui , eft un fentiment dont on n’eft pas
m aître, 8c q u ’on eft conven u dans la vie civile , de tie
point forcer. I l eft aufîi flatteur de, l ?infpirer , q u ’il cil
injufte 8c affreux de l ’exiger.
A l. le L ie u te n a n t
Je donnai ma R e q u ê t e à
C i v i l , pour être maintenu dans la
pofïeilîon de l ’exercice dJun droit qui m’appartient 5 celui
de plaider mes propres C a u f e s a u B a n c , 8c dans le co ftu m e
d ’A v o c a t.
A v a n t d ’appointer ma R e q u ê t e , M . le L ieu ten an tC iv il me propofa de prendre l ’attache de IV1C R o u h e t te ,
alors Bâtonnier des A vo ca ts.
Par déféren ce pour le defîr de cc C h e f refpeclable „
je vis 2 j ou 3 o fois M . le Bâtonnier. Q u e l fut le réfultac
de nos conférences ? Q u e répondit-il à mes explications ?
O n me pardonnera de ne pas en rendre compte. Soit
défaut de précifion de fa p a r t , foit défaut d ’intelligence
de la mienne, il m’a été impoiïïblc de pénétrer fes fentimens 5 de manière q u e m ’appercevant que je ne faifois
( ) ) Si c ’cft un malheur pour moi , c’eft un bonheur pout lui. Avec c e t a rp e n t
où j’ai nia p a ît , fort inutilement, le fieur G u é n io t s eft tiré de la prîfon de la Ville
de S a u li e u , dans la quelle certain C ré an c ier d ifc o u rto is, l ’avoit fait traîner, le 1 8
A v i i l 1 7 8 4 Pour une d « te
“ M e ¿ e u s , q u ’i l a p a y é e e n p a i t i c à m e s d é p e n s .
�4*4
i r
q u e battre l’eau , lafle de fortir de ch ez l u i , la poitrine
8c la tète fa tig u ée s, je ce{Tai mes vifites, auffi avancé , ;l
notre tems &. à ma patience p rè s, qu’avant de lui on
avoir rendues.
J ’ai pourtant appris i n d i r e c t e m e n t q u ’il avoir un jour
porté ma C a u fe à la D ép u tation
&: q u e la D éputation
m’avoit condamné! C ’e ftto u t ce q u ’on m ’a laide pénétrer
de la fortune que j ’ai co uru e dans cette finguliere J u r i f - .
diction.
*
E n attendant „ j ’étois retourné au C h a te le t pour fuivre
contre ma fccur une demande , en communication des
papiers de la fucceHion.
J ’y obtins une Sen ten ce par
défaut qui l ’ordonna.
L e P ro c u re u r. D efp rés y forma oppofition
et} fo n
propre & privé nom. Je répondis à M e D e fp ré s : « que je
53 n’avois rien à dém êler avec lui j q u e je plaidois contre
y» une D c m o ifelle ,n o n contre un P rocu reu r, Si q u e j ’avois
» aiîez d’A d v e r f a ir e s , fans q u ’il vintgratuitem en t en aug» menter la C om p agnie». L e 2-j. Q èto b rc fu iva n t,j’obtins
par défaut à l’A u d ie n c e ^ le débouté de fon oppofition.
J e croyois en être quitte , mais q u ’on ju g e de ma
ftupéfa£lion j lorfque j’apperçois un particulier en robe
q u ’on m’apprend fe nommer M e C o l l o m b e a u , le q u e l
fe met en pied., pour dire à mes J u g e s ; «c q u e tout me
»
feroit accordé par défaut j parce q u ’aucun A v o c a t ne
» vouloir me reconnoître ppur A v o c a t , attendu que je
« n’étois pas fur le T a b le a u ».
Je parai de mon mieux ce coup inattendu. M es efforts
furpnt vains. M e C o l l o m b e a u eut a&e de fes
sentations j
repré
q u ’il prétexidic faire au nom du Barreau ,
B a
�4 ta>
U*
:I 2
«ofmtie fi le Barreau l ’avoit chargé de cette commiffion.
O n me refufa aéte des miennes., &. ii fu tp ro n o n cé : « q u ’en
»
continuant la C a u f e , au lendemain Saint M artin , ii
» feroic d élibéré
fur ¿es repréfanations de M °
C o l-
» iom beau ».
M e voilà donc avec une n o u ve lle conteftation ! Je
fus o b ligé de préfenter R e q u ê t e pour avoir un Procureu r.
J e pris des conclufions contre M c Thorel-j caufe de toutes
cfts tracaiTeries , qu’ il ne p révoyoit peu t-être pas, j’aime
à le c r o ir e , de joignant
à ma R e q u ê t e „ l ’A r r è t du
P arlem en t de Paris, qui me reçoit au nombre des A vo ca ts
qui ont prêté ferm ent en la C o u r 3 j’en reclamai l'e x é
cution a félon fa forme &c teneur 5 Sc comme d’après trois
rcmi!'<_s contradictoires", on me troubloit dans la jôuif» fance actuelle de mon d ro it, je demandai d’y être
» .m a in t e n u
& gardé,
entendant l ’e x e r c c r j pour me
» défendre perfonneilem ent, Sec. *>.
•
O n enjoignit au P ro cu re u r d’o c c u p e r , fi je le requé-
roisj mais on ne m’a c c o rd a • pas la permiffion de faire
aflïgner M c T h o r e l , £c le 10 D é ce m b re dernier , fans'que
le ;M in iilè r e pu blic i n t e r v in t , fans q u e mes A dvcrfa ires
fuiTenc compromis , il f u t ’rendu d ’Office , la Sentence
fui vante :.N o u s .,/ « r les repréfm ta tio nsde 'M o ri7Ko t, Vavons
renvoyé à f e pourvoir j
& pour être procédé à:l expédition
des Caufes dans lefq u d les il ejl Partie ., difons que par
provi/lon & fa n s préjudicier à fe s'd r o its & prétentions, il
demeure autorifé à f e préfenter 'à la Barre de l 3A udien ce y
affifté de f o n •Procureur , pour y plaider en f o n nom. ,
Tout
me défendoit
d ’acq uiefcer
à
un Ju g em çn t
contradictoire, irré g u lie r, i l l é g a l , .& qui m ’enlève oi’uiie.
manière p re fq u e fiétriflante, des prérogatives qui me font
V
�déclarées acquifes par les O rd o n n a n c e s , l a 'r a i f o n
Si
l ’ufage. J ’étois coniéquemir.cnt~bien décidé à me pour
v o i r , la difficulté n ’étoir plus q u e de chercher coatré
q u i , la Sen ten ce mettant hors
d ’atteinte mes h e u reu x
AntagoniiteSi J ’ai pris des L ettre s en C h an cellerie qui
me permettent d ’intimer M . le P ro c u re u r G é n éra l
fut
la Sentence du C h â t e l c t , dont je demande l ’infirmancn.
$.
P r e m i e r .
V ices du Jugem ent<
Pourrois-jc ne pas l’o b te n ir, cette infirmation? Q u a n d
je ne fer'ois q u ’oppofer le ju gem en t au ju g e m e n t , il feroic
impofiible q u ’il fubfiitat.
O n me renvoie à me pou rvoir; mais par-là j le T r ib u n a l
rcconnoîc donc , q u ’il n’efl- pas com pétent pour ju g e r la
queition qui s’agite devant lui ? C e la é t a n t , conçoit-on
q i n l fi ni fie par la d é c id e r, &: par la décider contre moi ?
I l fa u t que j e me préfente à la Barre de la Cour > affiflê
de mon Procureur
j
comme un Particulier fans qualité
5
comme un A v o c a t dagradé , après q u ’.à fept o u hu it r é prifeSj les M agiftrats ' m ’ont entendu de la p lace q u e
m’aiïîgnc
l ’A r r é t
qui
me reçoit
A v o c a t ? C e r t e s , la
C o u r ne fouffrira pas que la petite cabale d ’un G r e ffie r ,
& les fantaftiques idées de q u e lq u e s individus p eu réflé
chis , peu co n fé q u e n s , m’arrachent ce que je tiens de
ion autorité,
daccord
matière.
me l’arrachent par un ju gem ent auifi peu
a v e c lu i- m ê m e , q u ’a v e c les principes de Ja
�C a r , n’eft-ce pas un axiome en fait de provifoirc ,
q u ’on n’y peut rien ordonner qui ne foit réparable en d é
finitif i Mais q u a n d une fois j ’aurai renoncé à mon d roit,
abd iqu é mon p rivilège ôc confenti * mon déshonneur 3
com m ent me relevera-t-on de ma foiblefie 3 com m ent me
re n d r a - t- o n a ma dignité première 5 com ment reftituera-
t-o n fon intégrité à mon titre ? C e qui fera fait., le fera
pour rétern ité. L e s Juges S u p é r ie u r s ,
même
en me
v e n g e a n t , m’avertiroient de me r e p e n t ir , & leur voix
favorab le en me réhabilitant , confaçreroit moins mon
triomphe , q u e lle ne me condamneroit au remords de
m ’etre lâchem ent trahi pour m ’avilir à leurs y e u x & aux
miens.
E c n’ai-je pas autant à me plaindre de la forme de la
S en ten ce q u e du fond ! O n a vu que dans la remife de
la C.xufe , les premiers J u g e s , on dit : q u i l fer o it délibéré
f u r les repréfentatiansde M Collom beau, &; point du tout,
q uo iq ue comme je l ’ai dit c i-d è v a n t,ils m ’euflent refufé acle
des miennes j ils ont prononcé f u r les reyréfentations de
Mori^Qt j fans ob ferver que par-là, on m ’en lev o itm o n vrai
c o n tr a d ift e u r , & qu'on, me forçoit de fu b ilitu c r ,^ l ’ètre
réel qui n vattaqu oit, qui me nuifoiç de gaieté de c œ u r ,
la perfonne de M . j l e P rocureu r G é n é ra l que j’aurois au
contraire réclam é pour mon protecteur , pour jnon afylç.
J'ai qualifié d’irrégulière la décifion du C h â t e l e t , eftpe allez dire., & ne femblè-t-il pas q u ’à mon é ga rd , Tordre
des chofes fait confondu , interverti ? A v o c a t , je pourrqfë.
prêter mon miniftère à un étranger, plaider en fon n o m ;
g/ on m ’em pêche de plaider au mien ! J ’ai un ju g e m e n t,
& je n’ai point de Parties ! Enfin mon D é fe n fe u r naturel^
�? r
. ©n me co n tra in t‘ de le choifir pour mon A d v e r f a ir e î
A v e c la L o i en ma fa v e u r , je devois peu m’attendre
à ce qui m’eftarriyé. L ’O rd o n n a n ce de Philippe de Valois
touchant le Q h a t e lc t j rendue au mois de F év rie r 1 3 2 7 :
p o r t e , art.. 2 6 : Q ue V A udien ce de celui qui plaidera f a
caufe . . . . ne lui f o u empêchée en aucune maniéré durant
f o n A udience 3 d'autreperfonne. P o u rq u o i donc après un
texte ii précis j les Juges ont-ils laiffé le G reffier D e fp r é s ,
M e T h o r e l , M ° C o llo m b e au fe relayer pour m’interrom
p r e , toi^r-à-tour, pour me vexer Sc m ’cm p ccher l ’A u dience ?E t pourquoi les procédés de tous ces P crfonnagcs
fc trouvent-ils juftifiés par un jugem ent? I l fuffiroit, fans
d o u te , que ce ju gem ent fe co n tre d ît, q u ’il fût irrég u lie r,
^ informe , fans q u ’on pût ajo.uter qu’il n’étoit pas moiys
Contraire aux L o i x qu’à mon droit 8i à mes intérêts.
•
II .
■
j■
■
“ !■
•
D e mes D roits.
C ’eft une b e lle ProfeiTion que celle d’A v o c a t. P r é
férables aux tréfors les plus précieux , dont l ’homme .au
.milieu de fes femblabLes^ne iouiroit pasj lo n g -te m s , les
L o i x qui font les fauve-gardes des p ro p rié té s , la force
d u fo ib le , h richeiîe Hu p a u v r e , raflu rancc des b o n s ,
& le frein des m échans, les L o ix doivent une partie de
leurs miracles aux A vocats. E n fe chargeant de ramener
a fon énergie j ce premier lien de toute fo c ié té , ils offrent
a la V e u v e , à l’O r p h e lin ,à T'Opprimé de toute condition,
un refu ge où les G ran d s, dont le fort fe plaît auifi à faire
�* 'i €
Ton j o u e t , Te font plus d ’une fois retirés avec emprefle-
m ent 6c reco-nnoiflance. M ais de quels m oyens fe ferventils pour ' opérer ces heu reu x effets ? Ils n ’en ont q u ’un
fe u l. Am is de la L o i , ils vive n t pour
elle } a ve c elle.
: In ftru its’ d c fes intentions , familiers a ve c fon langage 3 ils
le font, entendre à l ’ignorance , ils le rappellent «à la d iftra&ion j l’ordre r e n a ît, le bien eft effectué £c l ’E q u ité
fourit au fervice q u ’ils lui ont rendu.
A in fi, la fcie n cc des L o ix effc la qualité fondamentale
d ’un A v o c a t.
Si tout le monde connoiiToit les L o î x } on n’auroit pas
befoin d ’A vocats.
E t c ’e ftc e q u e q u ’attefte l ’étym ologie de leur nom,tiré
d u latin A d v oca ti > » appelles à l ’aide ». 11 ne faut point
4 ’aide à q uicon q u e eft au niveau de fon ouvrage.
N o u s avons cil F ra n ce des E c o le s , les U n iv e r f u é s ,
où ce u x qui fe deftinent à l ’état d ’A v o c a t , font cenfés
s’inilruire fuflifamment de ce q u ’il c il néceiihire de (avoir
pour cela. Q u a n d un A fp iran t y a pris les grades de B a
ch elier Sc de L ic e n c ié j il fe préfente avec fe.s L ettres,,
au P arlem en t féant à la G r a n d ’C h a m b r e , 6c fu r ie s con
clurions de M . l ’A v o c a t - G é n é r a l , il eft admis à prêter
u n ferm ent qui lui imprime le c a r a & è r e , 6c lui confèrç
le titre d ’A v o c a t.
I l n ’eftpas inutile de rapporter ici en quoi confifte cette
cé ré m o n ie .L e P o ftu la n td c b o u te n robe_,en bonnet quarré,
décoré j s’il le v e u t , d'une chauiïe q u ’il porte comme
L ic e n c ié j eft annoncé à la C o u r par l’A v o c a t plaidant.
V o u s JUREZ ET p r o m e t t e z , lui dit folem n ellem en t M
Je j>rçinicr
P r é fid e n t , d e g a r d e r e t d ’ o b se r v er les
O rd on n an cés
«
�O
rdonnances
, A
rrêts et
R
èglemens de
C
la
our
*
S u r fon aveu j q u ’annonce un refp e& ueu x filencc , M . le
prem ier Préfident lui fait prêter ferment j en levant la
main. A la fuite de quoi., il lui adreffe ces paroles notables,
q u i font l’A rrê t de
B
arreau
(
i
la réception : P r e n e z
place
aju
). E t dès lors il eft regardé comme apte à
la défen fe de fes C o n cito ye n s : &
déformais quand il
viendra au P a la is, fa p lace lu i eft fixée au B a r r e a u , au
m ilieu de ceux., qui comm e l u i , fe d é vo u e n t à concourir
a v e c les M agiftrats à l ’e xécu tion des L o i x , dont les
premiers
féconds.
réclam ent l ’autorité ,
que
m aintiennent les
I l y a des exem ples q u ’au mom ent q u ’ils ven o ien t
d ’être r e ç u s , des A v o c a ts préparés d ’a v a n c c , ont p laid e
le u r premiere C a u f e j 2c il eft bien certain q u e de c e t
m ita n t, il leur a toujours été permis de plaider Sc d ’écrire
pour tous ce u x qui ont v o u lu em p loyer lç u r v o ix o u
le u r plume^ à. la difeuifion d ’un procès.
A v a n t les O rdonnances qui ont fixé que l ’on ne r c ce v ro it plus que des L ic e n c ié s au ferm ent d ’A v o c a t ,
même depuis , on ne s’arrêtoit point à l’âge
ôc
pour les
admettre. D ans le fiecle pafle, un A d o le fc e n t de q u a to rze
( i ) S o n n o m e f t in f e t it f a r u n R e g i f t r e , q u e l ’o n a p p e l l e le Regijîre des M a
tricules , d é p o f é a u G r e f f e d u Parlement. O n d é l i v r e à l ’ A v o c a t ,
u n e xtrait
en
p arch em in , de ce R e g i f t r e , leq u el extrait co n tien t le n o m de celui q u i a ¿té reçu t
l e n o m d e l’A v o c a c q u i l ' a p i é f e n t ¿ , l a m e n t i o n d e f o n f e r m e n t , f a d a t e , l e t o u t i î g n é
d u G r e f f i e r e n c h e f , & c o l l a t i o n n é p a r l e C o m m i s q u i t i e n t la . p l u m e à l ’ A u d i e n c e ,
c l e f t f o n ti tr e d ’ A v o c a t , & t o u s o n t l e m ê m e .
G
�'ï 8
ans ( i ), nom mé C o r b i n , plaida
comme A v o c a t à la
G r a n a ’C h a m b re d u P a rlem en t de Paris. M a i s , au r c f t e ,
dans tous les tem s, auifi-tôt q u ’un individu eût prêté fon
fermentque
la C o u r l’eût r e ç u , elle l ’in veilit du
droit inconteftable de faire les fondions d ’A v o c a t. D r o i t ,
dont il ne p eu t être prive q u e par la m ême autorité ,
dont il le t ie n t , le R o i ou fon Parlem ent. U n A u te u r
a p p elié C la u d e J éfu , dans fon
in stitu tio n de l
’A v o c a t ,
v a même ju fq u ’à v o u lo ir, q u ’il, faille pour ilatuer _/}//* f a
dépofitioiij que toutes les Chambres du Parlem ent Joien t
ajfanblées.
P a re il au S acerd oce a u q u e l la J u itic c eit comparée
par les L ég ifla te u rs , le ca ra d è re de l ’A v o c a t eit indélé
bile. P o u r n’être attaché à aucune E g life
a pas moins la fa cu lté
un P rê tre n’en
de cé lé b re r les Saints M y ite re s
dans toutes.
» Jecrois d e m o n f u je t îî, d itH u iT o n » ,d o n t nousavons
un
T r a ité exprès
de
l
’A v o c a t
,
«
d ’examiner
fi
» toutesfois , fans crim e, fans d é l i t , fans faute g r a v e ,
» fans ju g e m e n t,
» rang
que
les A vo ca ts
donne
la
Q u e lq u e s lignes après
(i ) Le
peuvent
M a tric u le
être privés du
à chacun d ’eux ».
il d éclare ainfi fon fentim ent :
C o m m e n t a t e u r d e B o j l e a u , ( B r o iT ette ) d a n s f a n o t e f u t le v e r s d e l a
d eu xièm e E p îtr e ,
Faire enrouer pour toi Corbin, ni le M arier.
p a r l e d e c e tte A n e c d o t e . II r a p p o r t e m ê m e le s d e u x p la t s v e r s qui f u r e n t m is a u bas
d un T a b l e a u v o t i f ^ d é p o f é à N o t r e - D a m e p a r l e p e r e , a f i n (Je r e n d r e le C i e l p r o p i c e
au £ l s , dans cette o c c a fio n ,
Vierge, au vifage bénin ,
Faites grâce au p etit Corbin<
�ip
,
"
4
« Jamais un A v o c a t ne p eu t perdre j fi ce n e f t par fon
» f a i t , le droit q u e lu i allure la M atricu le. S e retire qui
» v o u d r a , non pas feu lem en t pour trois , mais pour, d ix
» ans ou p l u s , fon a b fe n c e , fon ina& ion, ne lui nuifent
?> en rien. Q u a n d il vou d ra reprendre fa robe , il jouira
» tra n q u ille m e n t,
certainem ent de fon grade. I l n a
» befoin pour ce la d ’aucun con^é# N o tr e Profeffion efb
» l ’exercice de la v o l o n t é , de la liberté , du talent 2c
» de 1’hon nctcté. E l l e n ’eit bornée à au cu n nom bre s
» ch argée d ’aucuns d e v o ir s , embarraiTée d ’au cu ne en 3* trave , cernée dans au cu n cfp acc. O n s’y livre pour un
» te m s , pour toujours, fi l ’on v e u t. E l l e n ’eft attachée à
» aucune g l è b e , e lle a fècou é le fardeau de la nécellîcé
» 6c ne fouffre pas de L o i qui la p e r p é t u e » . *
Si donc l’on p rétend m ’ôter le droit qui m’e il acquis
par ma M a tric u le , q u ’on me ch e rch e
un crime 3 une
fa u te grave * &c je fors du B a n c , comm e on v e u t q u e j ’en
forte , ave c ignominie. M ais quand je puis liv r e r , q u an d
je livre ma vie entiere à la difquifition de mes ennemis 6c
q u e je défie leur h a i n e , qui me pouffera hors d’un li e u
honnorablc , q u e la C o u r me f î t o ccu p er j 8c dont je n’ai
point ceffé d’être digne !
E n qualité d e C i t o y e n , ou plutôt en qualité d 'h om m e,
je puis moi-même défendre ma C a u fc . L e J u g e q u i doit
p ro n o n c e r, ne peut prononcer fans m’entendre. L e bon
fens , fait un axiome de cette propofition
& les O r d o n
nances , c e lle du C h â te le t q u e j’ai déjà citée en fon t une
rè g le lég ale. D éfen d u e f l } p orte-t-elle , art. 4 2 , que
nu l ne s'efforce de plaider s il n e f A d v o ca t j f i ce n efl
pour
sa
propre
C
ause.
C 2
�M a is je ne fuis pas-feulem ent un fimple C ito y e n i je
fuis de plus un A v o c a t. J ’ai donc le d ou ble droit de
p la id er pour ma propre C a u fe ,
d ’abord en qualité de
C itoyen , &, enfuite en qualité de C ito y en -A v o ca t. C o m m e
C it o y e n , je propofe mes moyens au T r i b u n a l 5 bc comme
'A vo ca t je les propofe dans le coftum e d ’A v o c a t ,
au
lie u qui m’eit défigné par le P a r le m e n t , qui après avoir
re ç u le ferm ent q u ’il me d em a n d a, me d it: de prendre au
Barreau une pla ce
qui m ’appartiendra déformais quand
j ’y paraîtrai.
E t de b o n n e - f o i , les A v o c a ts n ’ont-ils pas tous intérêt
a me voir ufer des prérogatives qui m’appartiennent de
q u i nous font communes ? C e u x qui ne fon t pas la profeiïïon , y ont un intérêt dire£t, c ’e il le u r C a u fe autant
q u e la mienne q u e je défends. C e u x qui exercent la
profeifion y o n t , i ° . ce même intérêt d ire d . T e l qui a
b eau cou p d ’emploi aujourd’hui , p eu t demain
dans le cas de courir une
autre c a r r i e r c ,
fe voir
ainfi q u ’il
m ’e il arrivé. O r , c e lu i- là ne feroii-il pas bien hum ilié il
un Procès p erfonnel le rappelloit dans le fan&uaire de la
J u f t i c e , d e s’y voir regarder par fes J u g e s , parfes C a m a
rades , p lutôt en proferit q u ’en iim ple étranger ?
Ils y ont ,
2 0. un intérêt de bienféance. I l
fau
d r a it, s’il étoit poffible , accueillir a v e c plus de grâces,
u n C o n frè re q u e
les circonitances ont éloigné
d ’une
Profeifion q u ’il avoit embraiTé par g o û t , lo rfq u e d ’autres
circonilances le ramènent parmi ce u x qui ont p u ne la
pas quitter. C ’e il en pareil cas ce qui fe pratique par
tout , & dans les fociétés les moins diitinsruées.
Ils y o n t , 3 °. un intérêt de réputation. L e bon P a -
�2 1*
4Z i
triote j to u ch e du bien p u b lic f e u le m e n t , applaudit i
ce lu i qui le fait. L ’envie , la jaloufie n’approchent poinc
de fon c œ u r , 8c parce q u e ce n’eft pas.lui qui a g i t , il
n ’em pêchera q u ’un a‘uire n’agiiïe. L e M i n i i l c r e d’A v o c a t
c i l , com me je l’ai d it , de confiance de la part du C lie n t.
I l étoit dans les premiers tems de la R é p u b liq u e R o m ain e
de pure générofité de la part de l’A v o c a t. M ais mainte
nant q u e je paie mon défenfeur., p ou rq u oi il la fuffifance
de mes forces
tu n e de l ’autre
d’un c ô t é , Sc fi l ’infuffifancc de ma for
m'y o b lig e j n ’épargnerois-je pas des
honoraires en me fervant m oi-m êm e ? E i l - ce q u e les
A v o c a ts poilulans v e u le n t mettre un im pôt fu r le P u b lic >
E i l - c e q u ’ils prétendent tenir en F e r m e les Bancs d ’où
ils pérorent ? O ù feroit alors cette noblcfle d e p e n fe r .,
cette é lévation d’ame j d ont ils fc p iq u e n t î
Ils y ont 4 0. un intérêt de d éce n ce q u ’ils auroient dû
fentir. L e b e a u f p e & a c le à d o n n e r a u P u b li c . ,q u e c e lu i d ’un
hom me en robe 8c chaperon,décoré comme eux enfiiijobligé
de fendre la tourbe pour aller fc mettre d erriereu n c e r c le
¿ ’A u diteu rs
en face du G reffier 8c de l’HiiiiTier-Audien-
cier affis dans une e n c e in t e , ¿l'ex térieu r de la q u e lle il fa u
dra q u ’il plaide debou t j coudoyant le P u b lic qui le c o u d o yera ^ an s voir q u ’à moitié fes Juges qui l ’entendront de
même., au rifque d’exciter par la nouveauté Se la b ifa rre rie
d e la fc è iiC j des huées j qui j u f q u à un certain point pour
tant
rejailü roieni fur ceu x
dont il porte le co itum c !
« O h ! » me d it-on»., c ’eft ju ile m e n t-là cc q u ’on vous
» difputc.
C e t te robe j ce b o n n e t , ce chaperon j Sic.
» qui font les marques d’honneur d ’ un A v o c a t ».
E t fu r q u e l fondem ent me les difpute-t-on ? J ’ai & as
Â0.
�4^
J f# '
ti
contredit la facu lté de m'honnorer dans u ne cérém onie
de M a ria g e o u de B aptêm e , dans une ProceiTion , à
l ’üEuvre ave c les M a r g u illie r s , de tous ces ornemens ,
de m ’e n o r g u e illir d ’en ctre revêtu . O r , je demande
q u e l droit les A vo ca ts ont de m ’e n le v e r cette portion
d'honneur , en me déshabillant dans le Palais des L o i x ?
L a prétention en eft i n t o l é r a b l e l ’a& c en feroit r é
voltant.
« A l a bonne-heure, » m e d ifent-ils}» n ou s confentons
»
à vous laiffer la robe, le bonnet Sc tout l ’attirail. Mais
»
com m ent vous p rop ofez-vou s encore de plaider au
» B a n c ; I l n ’y aura donc plus aucune différence entre
» des O rateurs com me nous., &: un Com mis tel q u e vous
» êtes , car vo us n’êtes q u ’un Commis qui v o u le z par
» hafard , exercer une fois la profeilion q u e vous a vez
» abd iqu ée ».
E c o u t e z , s’il vous plaît. J e ne fais fi vous a vez connoifîance d ’un mot de M c D u m o n t , A v o c a t fam eux dans
fon tems. I l étoit chargé pour des Farceurs. L e premier
P r é f id c n t de H a rla y
qui ne l ’aimoit pas , lui dit : « L a
» C o u r eit étonnée q u ’un homme de votre mérite plaide
» pou r de telles gens. Monfieur.,« répondit l ’A vocat» J ’ai
» cru , quand la C o u r leur donne A u d i e n c e , que je
30 pouvois parler pour eux ».
A préfent vo u d rie z-vo u s bien m ’apprendre p o u rq u o i,
lo rfq u e pendant fept o u hu it fois, M . le L ie u te n an tC iv il me trouve à ma p lace
dans ce B a n c
d où je lui
exp ofe mes demandes 5 vous re fu fe z , v o u s d e me ré
pondre , moi reliant à ce même B anc , qui d’ ailleurs 1 1 ejl
p as le votre ? Q u a n d je fuis arrivé au C h â t e le t , a ve c ma
�robe , j’ai été m’afleoir dans ce B a n c , 8c perfonne ne
s’eft avifé de s’y oppofer. J ’y ferois refte m ille a n s , fans
■
»
q u e vous m ’euffiez contefté mes droits à ce fiège. O r ,
q u e l changem ent apporte à mon état , la circon ilan cc
d ’un Procès qui m’arrive ? M e donneriez-vous la raifon
pour la q u e lle vous e n ten d ez q u ’il me foie défendu d’etre
i e v e dans un endroit ou vous n ’o feriez m ’em pcchcr de
m affeoir, 6c de parier d ’où il vou sp aroît jufte q u e j’écoute ?
.S il faut abfolum ent q u ’il y ait une diftin&ion entre n o u s ,
q*u e ne vous m ettez-vous à la B a r r e , où vous me rélésruez
?
o
J e ne m’y oppofe p o i n t , & ' p e u t - ê t r e , pourriez-vous
prendre ce parti plus raifonnablem ent qne moi. Je viens
de vous dire q u ’au C h â te le t , le B a n c des A v o c a ts n é toi c
pas le votre. J e m’ex p liq u e : N o s R o is ont attaché des
A v o c a ts particuliers à cette Jurifdi& ion. L ’article premier
d e 1 O rd o n n a n ce de C h arles V ,
du 1 7 J a n vier 1 3 6 ’7 ,
contenant un R è g le m e n t fu r les fon dion s des A v o c a ts
ôC Procureurs au C h â tc le t de Paris , s’exprim e ainfi :
A chacun an* le lendemain de Quafimodo
jo u r plaidoyable après
V acation &
fi* le premier
Vendanges j
les
A dvocats & Procureurs fero n t & renouvelleront leurs f e r
m ais de bien 6* loyaument patrociner >fé lo n ce q u i l leur
fe r a enjoint & chargé par le Prévoft & J i comme Ven le
* f a i t au Parlem ent, & fe ro n t les noms enregiftrés par quoi
l ’ en fâ c h e „ quels A d vocats
patrociner.
V o u s n’a v e z
&
Procureurs y
doivent
*
pas fait de ferm ent au C h â te le t , V o s
noms ne font point enregiftrés dans un T a b le a u particu
lier qui avertifle quels font ce u x qui doivent patrociner *
dans ce T rib u n a l. I l
eft do,ne évid en t q u e vous n ’y
�e x e r c e z vos fon dion s q u e par tolérance
& q u e vou s
n ’y p o u v e z réclam er q u e les p r iv ilè g e s , q u e me donne
auiîï bien q u ’à vous notre réception au P a rlem en t. Mais
fous cet a f p e f t , vous a v e z moins de droits au B a n c q u e
moi j
je le prou ve. L article 3 j de l ’O rd o n n a n cc de
P h ilip p e I V j t o u c h a n t i.e C h a s t e l e t , dit : Q u e n u l
f i é au rang ne au Siège des A d v oca ts fo r s q u â u x , f i ce
n e f l d u commendement du P rev o ji ou de f o n Lieutenant.
V o u s notes pus A v o c a t au C h a te le t., cela eft conven u (1).
N i le P r é v ô t , ni fon L ie u te n an t 11c vous ont com m ande
de vous ail'éoir au S ie g e dcfliné aux A vocats du C h a te le t.
O n vous y fouiFrc , c ’c ll tout. E h bien ! m o i , j ’ai une
autorifation p a r tic u liè r e , un ju gem en t de M . le L ie u t e
n a n t - C iv il, au nom du T rib u n a ^ e n ma faveur. L u i ayant
dem andé , felon l'uf.igc , «.l etre d ifp cn fc pour plaider
p crfon n ellcm cn t ma C a u fe , i n i h l l é q u e j’étois dans le
lia n e j il m a p u b liq u e m e n t , au th cn tiq u em rn t accord e
111a dem ande (2). O r , fi le ferment prêté au P arlem ent
q u e j ’a l l è g u e , ne fuflît pas félon v o u s , pour s'afleoir fur
le B a n c des A v o c a ts au Ctiucclec >il s'enfuit q u e vous ne
d e v rie z pas vous y mettre , Sc q u e m o i , X qui vous le
( 1 ) Ce fyrtf mt n*j t.tn J« ixwtcau ni Je finguUr. Il vient «Tétre Gwfna mat*
J n»euie p<f li Cammmu’.té «le» PtKv.’ .'uii ta Chitt*«« «fam on .Mr-noire, o<i l'on
«prit
poin: JTAtrxv i La Junf'tili*’«!
Ci
; & j*c4
ctmcluJ s « qo'ro cat d'aliVocf, tfatfi:k>n ou aatf** »vnfi.ii :n*ni d<;
• tr i m
P i K s i t a n <k 1 « r r n p - ' w i , c -ro-n* r r i w i - 1 ' *!'•* S « g t &
non i (tu t
• t|a l f’ie i ¿ u i n T i i ^ w i l la ftofciTw-io iJ’A ' « « ••
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d ifp u c c r,
�4 *#
'2 f
d i f p u t e z , je l'o ccu pe légalem en t & meme a ve c
titre
pour vous en exclu re.
V o u s vous com parez aux anciens Orateurs. Je confens q u ’entre eux ôc vous l’état 5c les talens foient é g a u x ,
vous v o y e z q u e je fuis de bonne compofition. Mais elVce
q u e vous auriez de plus précicu fcs qualités que Scipion;
de pltis liantes prétentions q u e Céfar> 5c encore plus de
gloire q u e C ic e ro n > T o u s ces grands O r a t e u r s , quand
ils venoient plaider , s’afTcyoicnt fur des Bancs qui leur
étoient communs avec leurs C l i e n s , &: plufieurs autres
perfonnes.
E n voici
la démonftration dans le pailaçc
fuivant. Il s’agit de l’O ra ifo n pour K o fc iu s A m érinus.
*> L ’A cc u fa te u r »,dit C ic é r o n , u p éro ra,s’aflît. Je me levai.
» P e u de tems auparavant ayant jette les yeux fur les per« Tonnages afiîs dans les B a n c s , il avoit dem andé , li cç
» feroit tel ou tel qui défendroit l’A c c u f c f N e me fo u p » çonnam pas fe u le m e n t, parce q u e jufques-IA , je n'avais
» plaide aucune C a tifc p u b liq u e ( i ) ».
E t ce que faifoient C ic e ro n , C e fa r . S c i p i o n , vous d é
daigneriez de le pratiquer ! O u
a b lk n e z -v o u s de
les
c i t e r , ou ne re fu fe z pas de les imiter.
P c u t-c tr c en me voyant étendre n u rép liq u e À votro
objeftion , penfez-vous d é ji q u e je veu x éviter de parler
(0
f a i k if i,
éftê-1
> (*•
* i im H f t t
ré*t y M i f n
■/*/*»/«r*. t f t t *
P é t t f id n t t , tttJt
— n t i U , *mt l it
( t m ' é n *«./■<« f i ’t u n ¿« r>
HW. f«*. Romin. r .’V j , »A, » , ctp» l i » Ckttoa Jlt « n e » » , Li»t*
V tm t
n.
W .
Jf»
• I' ? * f W n n
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n » i t*<»» 1« ( ’ « y t « ' •
ï-» fr« w , U
!»» r.-iü^«*n. U t Ci* « m , JU . M * -U 4»*m Lé m
(t
r
w
:
�'V vM
du rep roche d’être C o m m is , &: que je crains d entamer
cette matière. V o u s vous trom pez.
Je fuis
j
en effet j C
ommis ,
E
mployé,
dans les Bureaux
de Sa M a je i lé , ainfi que vous me le dites.
O r , parce que je fuis C
ommis
, vous v o u le z q u e j ’aie
perdu le p riv ilè g e de me défendre en qualité d ’A v o c a t.
E x p liq u e z-v o u s : eft-ce par dérogeance ou par incom
patibilité ?
P ar dérogeance ? L a propofition feroit un peu forte.
J e vous préviens q u ’à préfent même j ’ai pour collègues
des G e n tils-H o m m cs, des alliés à la haute ro b e , des C h e
valiers de Saint L o u is , des C h eva liers de Saint L a z a re
6c pour ne parler q u e de ces dern iers, je ne.crois pas q u e ,
ni v o u s
j
ni m o i
,
v inf li ons à b o u t de periuader au public
q u e ces d eux Ordres aient moins de délicatefle que les
A v o c a ts .
S ervir le R o i dans fes B u reau x , c ’eft; fervir la Patrie >
c ’eft contribuer au bien , que le P ere de la N ation fait a
fa famille. L e M ilitaire défend l’E ta t contre les Ennemis
du d ehors, fous les ordres du P r i n c e , d ont il reçoit des
apppintemens > l ’E m p loy é e ll néceiïaire à la dillribution
intérieure des avantages réfultans pour les C itoyens de l’éco
nomie du P lan d ’Adm iniftration ordonné par le Prince.,
qui récom penfe le C om m is, de la même main q u ’il ilipendie le G u errier. L o in q u ’aux ye u x du
mérite dans une occu p ition
fcm blable
M o n a rq u e , le
, sob fcu rcifle par
q u e lq u e dégradation j il fem ble y prendre plus de confiftance Sc s’y préparer aux d ig n ité s, à l’illu ilra tio n , aux
charges importantes. C e C o lb e rt dont la mémoire vivra
fans cefie parmi nous, avoit, étant C o m m is, appris à faire
�le b on h eu r de Ton Pays étant M iniftre. E t fans remonter
à l ’autre fié c le , fans fortir même du tems p r é f e n t , nous
voyons parmi les M agiilrats de la premiere C o u r du
R o y a u m e , le fils d’un homme qui fut fait C on feiller d’E tat,
au fortir des B u re a u x où il s’étoit diftinsué. E n fuivant la
m êm e rou e , mon C om patriote , M . C r o m o t ,e ft parvenu
au même degré d ’honneur &: à la S u r-In ten d a n ce de la
M a i fou de M o n s i e u r , F r e r e du R o i ( i) .
O r , dans une place où j ’ai pour m o tif d ’é m u la tio n ,
des fujets d ’efpérance pareils, on viendra me dire q u e je
me rends indigne de la profeifion la plus libre 5 que je
perds mes droits à fon exercice* que fi je v e u x me d éfe n
d r e , ce q u ’on ofe pas tout-à-fait me contcftcr , il faut le
faire dans une pofturc h u m ilié e , ave c un décroiflem ent
m arqué de mon ça ra d è re j on me preferit, en un m ot,
de
11c plus me
regarder ,
que comme
un dim inutif
d ’Avo'cat. Q u o i ! m o i , qui p o u rro is , il je m’en rcndojs
c a p a b le , m’afleoir un jour parmi les C on feillers d ’E ta t >
je ne pourrai me tenir de bout dans un B a n c , à cô té des
A vo ca ts employés au C h â te le t ! A v a n c e r une pareille prpp o fu i o n , c ’eft aflurément au moins faire p reu ve de fingularité.
U tile s , nécefiaires, q u e lq u e forme de g ou vern em en t
q u ’on adopte , parce que l ’Adm iniftration
a
toujours
befoin d’A g c n ts qui la fecondent j l ’état de Com mis n ’a
jamais été mis au rang de ceu x qui dérogent. U n Commis
( 1 ) J e p o u r r o is c i te r b i e n d ’ a u tre s e x e m p l e s , d e c e s c h o i x iî h o n n o r a b l e s p ° uf
c e u x q u i s e n f o n t m o n t r é s d i g n e s , fa i.s d a n s d e s B u r e a u x . J e m e c o n t e n t e i a i J e raP”
p o rte r e n co re ie lu i de M , F u m c r o n , p réfen tem çn s M e des R e q u ê te s.
D
�'a ?
ne ceilc pas d’etre N o b le 5 pourquoi ceiTeroit-il d être
A v o c a t , tandis q u ’un A v o c a t p e u t ,
fans perdre fes pri
vilè g e s , cefler de les mériter ? E t je m’en rapporte à la
Lc?i qui in’oifre la b a l a n c e , dans la q u e lle j ’invite mes1
A d v erfa ires a fe pefer.
« O n laïiTe plaider tant q u ’ils v e u le n t ce u x qui ont
» ju g é
à propos de choilir cet E m p lo i, honoré dans
» R o m e , bien entendu qu'ils ne faifiront l'occafion d e
» plaider q u e pour ajouter à leu r gloire , & non à leur
» paie j car s’ils font conduits par le lucre , par l'a r g e n t,
» 011 peut les ranger comme des perfonnages abjeils 6c
»
dégénérés dans la claife la plus vile [ 1 ) ».
L a nature même de la commiilïon fait entrer le Com m is,
clans une forte de participation d e l ’eftime q u em érite tluPu-*
b lic , le C h e f qui l'emploie* eftime relative à l'im portance
de la partie q u 'il dirige. J'ai montré,en indiquant la q u alité
de mes Cam arades de B u reau & le fort de q u e lq u e s-u n s ,
q u 'ils devoient fe regarder comme jouiflans d 'u ne conildération v ra ie , attachée à leur condition même. I l n 'e n
c il pas alnfi de l'A v o c a t : tout d é p e n d , félon la L o i , d e
la manière dont il s'acquitte de fes devoirs. C ’eft lu i, qui
dans les mêmes fondions , s’avilit ou s'illuftre. A.-t-il du
courage , du défintéreiTemcnt, de l’amour pour la b e lle
gloire? L e L é g ifla te u r l'é le v e aux regards de fes C o n c i-
( 1 ) A pu i autem urhem Romanam ctiatn honotatis, qui hoc officium putaverint
tilgen dum , eoufque liceat orare, q u oifq u t nt.iluerint, videlicet ut non ad turpe com~
penJium flipemqi deformem, hac arriptatur ocafio , (ed L u d ís per ta n augmenta quterantur. Nam f i lucro pteuniáque capuntur : vtluti abjeilt
v iliß m o s nnrntrabuniur. C o d . d e P o f t i i l . 1. 6 , p a r a g . 5 .
atyut degenere!,
ima
�•a>
toyens, & le déclare digne d'honneur. Manque-t-il dé ces
vertus 1 II le jette dans la fange 5c le livre au mépris.
A p r é f c n t , irai-je m 'en qu érir de la co n d u ite , fcruter
les fentimens de ce u x qui me l'ont oppofés? L eu rs dirai-je ?
«c l'honorifique q u e vous me d if p u t e z , p ro u ve z q u ’il
» vous appartienne. O ù font les pauvres que vous avez
» fccourus ? I n d iq u e z-m o i les innocens dont vous avez
» brifé les fers par des démarches vives £c g ra tu ite s , par
» des écrits véh é m en s, à la compoiition d efq u els vou s
33 a v e z donné les jours 6c les nuits , fans avtre récom penfe
»
que la fatisfa&ion intérieure d'aid er v o tr e fem blable ?
53 Faites-moi lire les expreiïïons de reconnoiiïance q u e
» vous ont adrefîees les femmes j les enfans d 'u n pere ,
33 q u 'a llo it écrafer le crédit, organe pervers ou miniftre
» ave u g le de l'injuftice j Sc q u e vous a ve z
fa u v e de
» l ’opprcifion , en vous y cxpofanc vous-m em e » ? M e s
•perqüifitions produiroient-ellcs b eaucoup de fruit ? J e
fuppofe quelles ne feroientpas vaines, que je tro u vero isce
qu e je cherche dans le plus grand nombre ? Il faudroic
d o n c , à mon tour , atteiler q u e lq u e s individus à qui mon
z è le ne fut pas inutile , rappeller le témoignage rendu à
mes oeuvres par M . le L ie u te n a n t-C iv il aux quatre B â
tonniers *3 étaler quelqu es bonnes aétions& en perdre le
* ç*eQ C9
mérite en les divulzan*? N o n , non. J'aim e mieux admettre 3"e>e tienstî<1
.
nvr
-
,
M M .R o u h e tte
comme une vérité certaine que 1 U niverlalite des A vo ca te &
Camus
poflede toute la délicateiTe , tout le d é t a c h e m e n t , toute dHouloiITÎV
Texqu ife probité q u 'e x ig e la L o i pour que les diftin&ions
individuelles fe changent en générales > &. dire à tous :
*
E c o u te z votre fens in tim e, il vous crie } q u 'a u f o n d
a
vous ne fauriez me ch erch er q u e relle pou r un
�(***■■
»
?o
maigre fujct. L'a bonne nature d i d e aux hommes j
>.> q u e tout ce q u ’ils p eu v en t abandonner fans fe faire
» to rt, ils le d oiven t même à un in co n n u » . T r æ c ip it¿
ut quicquid fin e detrimento commodari poJ/it} id tribuatur,
offi. Vel ignoto. ' *
üb. premier.
^ Q u e l tort ré fu ltc ro it-il de ce que vous me tailleriez
* C icer. Je
plaider ave c v o u s, côte à cote ? A u c u n , certes. Q u a n d
»
donc je ferois un premier vena , il feroit à défirer q u e
?) vous ne me refufailîçz pas cette faveur. Mais fouvenez?) vous q u ’il s’en fliut de beaucoup que l ’on puifle me
a? placer dans cette catégorie. J ’ai fait mon D rp it com m e
v
v o u s j . j ’ai prêté ferment au P arlem en t comme vous j
9î j’ai été reçu A v o c a t comino vous j mon nom efb inferit
dans la M a tricu le
des A v o c a ts avec Ici vôtres j j’ai
>j plaidé comme vous j j ’ai ju g é , ce q u e peu d’entre vous
» ont fait. T o u s tant q u e vous êtes, vous vous t r o u v e z
» intérefles
à me laiiTer jouir de nos droits cpmmuns.
» J ’en ai moi , de particuliers ., q u e [’O rd o n n a n ce m ’a cc o r d e , q u ’ un ju g em en t m’a flu r e , &: fur lefqu els l ’ufage
» q u e j ’en ai fait de concert a ve c vous., ne vous perm et
» plus de revenir. V o u s m’o b je d e z une occupation noii?> v e l l e , mais loin de m ’ôter l ’avantage de vivre en bonne
?» C o m p a g n ie , cette occupation m’a donné pour C o l l e ?> gues des C itoyen s d ’une
»
naiiîance r e le v e e , decoré^
des infignes d ’O rdres re fp e d é s > elle m encourage an
î? travail , à la cu ltu re des talens., en m offrant la perf?
•?î p e d i v e des flacteufes récom penfes du M o n a rq u e ,
?» C e t te occupation pou rro it-elle rendre indigne d ç
p
fç m êler parmi vous ? un C o n fre re qui çonfenc à n ç
�3*
»
iî<5
pas examiner fi d’après le texte du la L o i , vous êtes
» fondés vous-mêmes par vos a d i o n s , comme A v o c a ts ,
» à prétendre aux honneurs qui leur font deftinés," &c
» qui p ar-là, v o u c en co n v ie n d re z , s'il ne pourroit ternir
» votre gloire , ménage au moins votre m odellie ? D é jà
» un ancien des nôtres, H uifon , avoit décid é la queition
» en ma faveu r. Si un A v o c a t , d i t - i l , prend q u e lq u e
» E m p lo i, il faut d iftin g u e r : l ’E m p loi e ft-il honnorable?
» alors
l ’A v o c a t co n ferv e fon r a n g , à la v é r it é ,
fans
» q u'un E m p loi plus honnorable- ajoute à fa dignité. E t
*‘
» il cite un A r r ê t , du L u n d i i 3 M ars 1 6 2 9 , par lequel.
» i l a é t é ju g é q u ’un A v o c a t C o n trô le u r ( 1 ) du D o m a in e
» n ’auroit rang au B arreau que du jour de fa M a tric u le ,
» q u o iq u ’ès A flem blées pu bliqu es ôc p a rtic u liè re s , il
» précéd ât les A vocats ( 2 ) .
•M ais quand la P la c e que j’o c cu p e dérogeroit par quelq u ’endroit à la qualité d ’A v o c a t -, je foutiens q u e plaidant
pour m o i-m ê m e, les Suivans du B arreau , ne p ourroient
a v e c juftice , me rabaifler dans des f o n d i o n s a u x q u e l l e s
j ai un titre , à deflein d’exalter dans leurs p e r fo n n e s ,
l ’e xercice de ces mêmes fon dion s 5 & j’ai pour garant de
cette opinion un homme qui valoir bien HuiTon. C ’eft le
P rin c e des O r a t e u r s , qui dans fes Offices, s’exprime ainfi ;
« e n lev e r q u e lq u e ch o fe à un autre homme , & , v o u lo ir
) > ) M a i s u n C o n t r ô l e u r d u D o m a i n e n ’ e f t q u ’ u n C o m m i s , te v o i l à q u ’ o n le
conferve a u B a r r e a u , & q u ’ o n l u i a c c o r d e l e p a s f u r l e s A v o c a t s .
( 1 ) S i vero murtus aliquod fufcip'iat, diftinguendum : aut tnim honoratum e fl, tune
aute.n gradum qu'idem retinct Toçatus ; Jed ex accejja dignitate non promovet. D s
A
dvocato,
L i b . i l , C a p . 48,
(
�v augm enter fes avantages au détrim ent d'un h o m m e ,
s> c'elt une a f t io r r plus contre nature q u e la m o r t ,
» que
la p a u v r e t é , que- la d ou leu r &
que
tout cç
» q u ’il peut arriver d a c c id e n s , fojt au corps, foit aux
» biens ( i ) ».
Q u e ces M eilleurs viennent
donc
maintenant me
d ép ré c ie r, pour fe faire v a l o i r , j ’efpère q u ’ils ne com p
teront ni fur le fuffrage des Juges fuprêmes (2), ni fiiy
pelui de leur co n fcien ce,
A p te s avoir bien am plem ent difeuté la d érogeance q u ’on
y o u d ro it m’objecler 3 je ferai b r e f fur l ’incom patibilité.
O n dit : q u e d eu x états font incom patibles, quand
pn ne p eu t s 'occu p er de l’ un , fans q u e l ’autre en fouiFre,
d ’ une manière eflentielle.
Ji s’agiroit donc de iavoir , fi je ne pourrai plus faire
mon devoir dans un B u re a u , parce que hors dp ce B u re au ,
je cultiverai lesconnoiiTances que j ’aiaçcjuifcs des L o i x &
4 es formes judiciaires de mon Pays.
S ’il fa lla it foutenir thèfe ,
il mç feroit facile
de
( i ) Dctrahere }gl(ur aliquid a lu n , & hpmlncm', hominïs incommodo fuum augere
çammotium j magis eji contra naturiim, quant mors, quant paupertas, quant cetera
qup pofjunt , aut corpori accidere, aift rebus çxtcrràs. I - i b , 3:
(z ) L e P a r le m e n t v ie n t de ju g e r tou t r é c e m m e n t , q u un S a v e tie r de N o g c n t - J e H o t r o u , q u i a p r è s , a v p j r f 4 K Toi) M é t j e r p e n d a n t q u a r a n t e a n s , s e t o ir g r a d u é , 8ç
^ v q jt p rê té f e r m e n t d ’A v o c a t j f e r o it in fc r it fu r l e T a b l e a u des A v o c a t s d u S i è g e
f i } i l g r é l ’ o p p o f i t i o n d e f e s C o n f r è r e s . O r , c o m m e n t f u p p o f e r q u e Igs M a g i f t r a t s ,
g u i n’o n t p as tr q u v é do d é g ra d a tio n dans l'h a b itu d e de q u a ra n te ans dp r a c c o m p9dage
4e Ÿ Î c u ï
fo u liers , en v o ie n t un e dans
1e x e r c i ç p
a £ \ t jc l d e C o m p r i s d a p s
Jes i j u r c a u j c d e S j I ty a je fté ! C e q u ’ o n d e m a n d e à u n A v o c a t , c ’ efi; ç)u t a l e n t , d u
( V o i r Sç 4 e ?
jj ’ a j l j e u r s ,
011
d ify > e n fe d ç t o i i t e i l l j j f t p j i o n q u i
tire iq n
o rig in ç
�33
4
dém ontrer en rig u e u r q u e la profeiTion d ’A v o c a t , n’eit
im com patible a ve c aucune. I l y a p l u s , j’irois ju fq u Jà
p ro u v e r q u e les é lém en s,en fon t nécefiairesà tous les Sujets
d Jun E m pire. J'ai dit les é lé m e n s , p a r la raifon q u e ch ez
n o u s , il eit impoflible d’en avoir la parfaite péritie.
M a is lo r f q u ’il n ’eit q u e itio n , comme dans cette circo n itan ce, q u e d ’exercer le M in iftère d ’A v o c a t initantan em en t en fon propre &. privé nom s il n ’y a plus d ’in
com patibilité à mettre
en avant. Q u e ls q u e foient les
devoirs qui font impofés par une P l a c e , ou une C h a r g e ,
ce q u ’on ne fait q u e p ou r f o i , on p e u t toujours le fa ir e ,
parce q u e c ’e il la profeiTion p u b liq u e d ’un A r t qui caractérife TA rtiite. L ’O fficier., par e x e m p le ,
qui s’amufe à
peindre en mignature., n’eit point un P e in tre de portraits,
q u o iq u ’il faiTe ce lu i de fon ami. C ’eit le fens du vieu x
P ro v e rb e : n e jîp a s vaUt^qui fe fe r t . L e s L o ix prohibitives
n ’o n t
m ême alors aucune application.
A i n f i , q u o iq u ’il n ’y ait point d ’incompatibilité plus
p r é c ife , q u e
c e lle des fon dion s habituelles de J u g e 6c
d A vocat , ( V o yez
1 article
i i j
de
T O rd o n n a n ce
de B lo is) néanm oins, nous avons v u u n M a g iilr a t cé lè b re
par fon amour pour le bien p u b lic , Si par des talens ora
toires
dont
il avoit déjà donné des preuves fignalées
comm e A v o c a t
du R o i
au
C h a te le t ,
aller
q u o iq u e _
C o n fe ille r au P a r le m e n t , foutenir dans deux Parlem ens
nnc C a u fe qui lui étoit p erfonnelle.
U n e pareille autorité é q u ivau t à tout. U n M a giftrat
fur fon fiège , c ’eit la L oi. vivante. D è s-lo rs fa conduite
dans le fan& uaire de la J u i t i c e , e il u n m od èle qui ne
E
�M ^fauroit égarer. T h é m is ne p eu t m anquer d ’infpirer fes*
O r a c le s , quand ils habitent ion T e m p le .
R e je tto n s donc a ve c indignation , le m o tif infultant
de la dérogeance 5 & a v e c dédain , le m o tif frivo le de
Vin cornpatibilité.
N o u s voici à des difficultés que l ’on regarde comme
plus férieufes.
O n me d i t : i ° . V o u s n’ètes pas fur le
T a b le a u . 1 ° . L ’O rd re des A v o c a ts a la p olice , la d is
cipline , la cen fu re de fes PÆembrcs,
la D é p u ta tio n de
cet O r d r e a décidé q u e vous ne plaideriez pas au Banc.
3 0. Q u ’efp érez-vou s obtenir de la C o u r ? U n A rrê t qui
vous adm ettroit à plaider au B a n c , dans le coihim e qui
v o u s .e il propre 3 forcera-t-il un A v o c a t q u e lc o n q u e à
p laid er contradictoirement ave c vous ?
A v a n t d ’e n tre r en m a tière fu r ccs d iv ers a rticle s ,
il
m ’eft v e n u la r é fle x io n d e S é n è q u c é c riv a n t à L u c ili u s .
« V o u s me fe re z une affaire, fans vous en d ou ter, en me
» propofant vos petites queftions à éclaircir. Je prévois
» q u e je ne différerai pas d ’opinion d ’avec nos G e n s , fur
» tous ces points , fans perdre leu r fa ve u r j 6c je ne faurois
» fans ré vo lter ma co n fcien ce , être de leu r avis ( 1 ) » .
Q u o i q u ’il en
foit., j ’imiterai
le P h ilo fo p h e , & je
préférerai de fatisfaire ma co n fcien ce en difant la v é r ité ,
à l'avantage de plaire à certaines perfonnes en careffant
des erreurs q u e le u r vanité choie tendrement.
( 1 ) Dum n cfcis, in magnam me litem ac molefliam impinges , qui mihi tales quajliun-
culas ponis ; in quibus ego ,
nec dijfentire a nojlris falya gratia ,
tonfcieniid pojfum, E p i f t . 1 1 7 , i n p r i n c i p .
nec (onfentire fa lv d
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Tableau des A v o ca ts. ' - - - '■
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D e p u is quand fait-on un T a b l e a u , des A v o c a ts > 6c
quels P rivilèges font réfervés à ce u x q u i le com pofent >
C ’eft une ch ofe ailez finguliere ‘ q u e la réputation
d ’antiquité a ttrib u ée , on ne faic c o m m e n t , à tel o b je t ,
dont la naiflance a p rcfq u e frappé nos regards.
I l n’eft rien de plus
m oderne
q u e l ’inilicution du
T a b le a u des A v o c a t s , 5c ‘com m uném ent on imagine q u ’e lle
date de fort loin.
A la vérité , le premier article d ’un ancien R è g le m e n t
intitulé :
O rdonnances
TOUCHANT
C onseillers a u P a r l e m e n t ( i )
LES
AVOCATS
ET
, eft ainfi c o n çu : « Q u e
v l ’on c o m m ence par mettre, en é c r i t , les noms des A vo ca ts
» 6c q u ’e n f u i t e , on
rejette ce u x q u ’on d éfaprou vera
pour choiixr les aptes Ce fuflîfans à cet O ffice (2)». M ais
on o b fe rvera q u ’il s’agit ic i, des A v o c a ts -C o n fe ille r s ,
co n fu lté sp ar les Juges avant de pronon cer leurs A rrêts ,
S: q u il paroîc que c ’étoit ceu x-là., dont on faifoitainfi un
choix néceiTaire.
Il
fe ' p eu t
exigé par
une
encore
que
O rd o n n a n ce
ceci regardât
de
1274. ,
le ferm ent
qui
veut :
a q u e les A v o c a t s qui r e fu fe ro n t de ju rer en la form e
(1 ) U n v ieu x r e g i i h e d ate c e R è g le m e n t de 1 3 1 g , de m a n ié ré q u ’il c o n c o u rr o it
p r e f q u c a v e c 1e t a b l i i T c m e n t d u P a r l e m e n t f c d c n t a i r e à P a r i s , é t a b l i i T e m e n t f j i t
par P h if'p p e - le - B e l, en
1301.
(•) Primo pjnantur iu fcripns , nomin.t Advocatorum , deindi rcjeSl'is inprov:Ü‘ s
clîg.intur ml hune Otjicïum idonei &• fiijficlenlcs.
E *
�» prefcrite , foienc interdits tant q u ’ils n’auront pas fait
» le ferm ent ( i ) ». A lo rs ce u x q u ’on rejettoit de la L if te
com m e d éfap rou vés, c ’étoient les réfracbaires qui n 'avo ien t
pas v o u lu ju r e r : « de ne défendre q u e des C a u fes q u ’ils
» c r o i r o i c n t juftes »5 car tel étoit le v œ u de l ’O rd on n a n ce.
L o i f e l a cru que l ’on iaifoit au com m encem ent de
c h a q u e S éa n ce un R o l e
des A vo ca ts qui devo ien t être
em ployés pendant cette Séan ce } Si cela à l’inftar des
Oiîïciers du Parlem ent.
Q u o i q u ’il en f o i t , dès
q u June fois les A v o c a ts ne
fu ren t plus que les organes des Parties , &c q u ’on s’en
rapporta de leur f c i e n c e , aux tém oignagcsdesU niverfités j
en les re cev a n t au f e r m e n t , on les inferivit fur la M a
tricu le ou R ôle fans examen , fans exception. E t voici
une p reu v e p o ü tiv e , q u ’anciens &c n o u v e a u x , fré q u e n tans ou non le P a la is , ils étoient tous fur cette L ifte >
c ’eft un paílage de la première R e m o n tra n ce faite au
Parlem ent, par le S e ig n e u r de P ib ra c, A v o c a t du R o i (2) :
« L e R o o l l e qui
a été lu des S céanccs des A d v o c a ts ,
» montre q u ’il y en a de trois fortes , les uns font ce u x
» qui viennent céans 8c afliftent aux P la id o ir ie s , pour
» efeo uter & a p p re n d rc jle s autres font occupés 5: employés
» à plaiderj les troiilémes font les A d v o ca ts C onfultans ».
N i L o if e l dans fon D i a l o g u e , ni HuiTon dans fon
T r a it é de
T A v o c a t , n’ont parlé du T a b le a u .
L ’O rd o n n a n ce du mois d ’O & o b r e 1 $ 3 y , art. I V , C h .
I er, défend à tous Graduer^ &' A v o ca ts d 'eu x ingérer de
( r ) A v o ca d autem qui ju xtâ eam formarti jurare noluerint, hujufmodi volúntate
durante, Advocationis Officium in dittis Curiis/ibi novenni interdiflum. Voy. l e R e c u e i l
des O r d o n n a n c e s du L o u v r e , p r e m ie r v o l. p . 30 0 .
(i) Imprimée en : J73 chez Robert Etienne, fol.
ïi
, yerfo.
�p oflu ler ne patrociner en icelle notred. Cour de Parlem ent ¿
q u ils ne fo y e n t reçus en icelle & qu ils n a y e n t prêté le
ferm en t en tel cas p ertin en t,
M atricule
et
soyent
Éc r i t s
dans
la
, de non f u r le Tableau.
IL eft confiant q u e ce moc Te trou ve em ployé pour la
prem ière fois dans l ' O rd o n n a n ce de i 6 6 j , ail tit. i>rf.
d épen s
,
art.
1 0 : T o u te s écritures
contredit?> porte
cet a rtic le , fero n t rejettées des taxes de dépens, f i elles
il ont été fa ite s
& fig n ées par un A v o c a t plaidant. , du
nombre de ceu x qui fe r o n t inferits dans le Tableau qui fera
dreffé tous les ans , & qui fe r o n t appelles au ferm en t qui
f e f a i t au x ouvertures ; & fe r o n t tenus de mettre le reçu
au bas des écritures.
C es expreflions, qui fe r o n t inferits dans un Tableau qui
fera drejje > ne font pas ob fcu res , elles font bien v o i r ,
q u ’il n ’y avoit point alors de T a b le a u . M ais fi cela ne
contentoit pas les efprits mal aifés à c o n v a in c r e , ils n Jont
q u ’à co nfultcr le P ro c ès-v erb a l de l ’O rd o n n a n ce , ils y
trou veront q u e l’article fut p ro p o fé par M . P u iT o rt, de
de la manière fuivante : Toutes écritures & contredits 3
fe r o n t rejettés des taxes de dépens >f i elles tio n t été fa ite s
& fign ées p a ru n
A
v o c a t
c o n n u
.
Q u e lecture faite de
1 article j M . le premier Préfid ent d i t , q u e cela s Jobfer-
v o it. . . .
& q u e M . T a lo n rem ontra : « q u e les mots
» d’ A v o c a t connu q u Jon avoit mis dans l ’art, pour diitin» g u e r c e u x qui travailloient au Paiais, d ’a v c c ce u x qui
» n’en portoient q u e le n o m , ne fignifioient pas aiTez -,
M qu il feroit bon de mettre : les A v o ca ts Plaidàns qui
» fcro ien t inferits dans un Tableau, & qui fcro ien t appellés
n au ferm ent qui f e f a i t à la Saint M artin
Su r la propofition de M . T a lo n , l ’article fut corrigé
�4&
v
3S
comm e on l’a vu. O r , le m o tif fur le q u e l il appuya fon
fentim ent Sc l ’adoption de ce f e n t i m e n t d o i v e n t difliper
tout nuage fur l ’ép o q u e où l ’on com m ença à fonger au
'
T a b le a u .
Je dis
où l ’on com m ença à fonger au T a b le a u , car
q u e lq u e im pérativc que foit rén on ciation de
ci - dcilus cité ,
on
fe tr o m p e r o it,
l ’article
fi l’on imaginoit
qu'il fut fait un T a b le a u dans ce tems-Ià.
L a p reu ve q u ’on ne s’en o ccu p a p o i n t , ré fu lte d e s ter
mes de l ’O rd o R n a n c c de i 6 6 9 s au titre des Committimus.
E l l e accorde ce d r o it, art. X I I I , aux q u in ze anciens
A v o c a ts du C o n fe iis , fu iv a n t l'ordre du T a b l e a u il en
■exiiloit un pour eux 5 mais art. X V I , en attribuant le
me me droit aux dou^c anciens A v o ca ts du Parlement de
P a ris j au lieu de parler du T a b le a u , elle d i t , le R ô l e :
dont
le R ô le fera attefté par les premiers P r ifid e n s ,
A v o c a ts £■ Procureurs
G énéraux.
S ’il y avoir eu en
1 6 6 9 un T a b le a u des A vo ca ts au P a rlem en t de P a r i s ,
il auroit cté inutile de s'cmbarraiîer de la confe£lion d’un
(
I l ô i e déjà fait,&: l ’O rd o n n a n c c fe feroit exprim ée pour les
A v o c a ts au P a r le m e n t, comme pour les A v o c a ts au C o n feil.
Il
n ’y avoit point encore de T a b le a u en 1
c ’cft ce qui réfu lte d ’u n e délibération de la C om m u n auté
des A v o c a ts Sc Procureurs h o m o lo g u ée le 1 6 J u ille t de
1
cette année
1 53 7 par A r r ê t de la C o u r. O n y lit entre
autres chofes : « Q u e les Procu reu rs de C o m m u n a u té
» porteront leurs plaintes à M . le B â to n n ie r , de certains
>3
C le r c s de P rocu reu rs qui ayant la qualité d ’A v o c a t ,
» faifoient des pa&ions pour les écritu res, a v e c les P r o - ‘
33 cureurs aux gages d cfq u efs ils écoicnc; & afin d ’y pour-
/
62
�3*
V
‘*
?» voir , lie prieront de dem ander à la C o u r , q u e lefdits
» Avocats-CJercs fo is n t rayés de la M aîriculc. ». D o n c
il nJexiiloit pojnt de T a b le a u (i).
T ro is ans a p r è s , point dé T a b le a it non plus j une
n o u v e lle D é lib é ra tio n fur le mctue o b je t , hom o logu ée
le 1 4 Janvier i i f ) o , en fournit une preuve tranchante.
A p rès le re n o u v ellem e n t des plaintes q u e l ’on vient de
tr a n fe rire , on y en gage le B â to n n ie r, M . Uîalis j « afin de
33 retrancher du Barreau ceux, qui alnifent du nom Sc de
» la profeifion d ’A v o c a t , de vou lo ir prendre la p ein e de
» donner à la Com m unauté, le Tableau corrigé des A vocats
» qui po.urroienc*être employés tantà la p la id o ir ie , q u ’aux
» écritures , pour s’y conform er ».
L e s inftances faites auprès de M .. Ifiaîis fu ren t fans
[
\
f-'
fuccès , il ne donna pas à la C o m m u n a u té le T a b l e a u
q u ’ elle lui demandoit. L e s plaintes co n tin u a n t, la C o u r
s’o ccu p a des moyens de les faire c e fle r, £c ce fut ce q u i
produifit l’A r r c t de R è g l e m e n t , du
17
J u ille t i'd 'jp j.
O n défigna dans cet A r r ê t , les écritures q u e les A v o c a ts
auroient le droit e x c lu fif de com pofer. O n d éfend it aux
Procu reu rs d’en faire a u cu n e s , 6c on ord on n a : que les
écritures du m iniflcre des A v o c a ts , n entreraient p o in t en
taxe j Ji elles n étoietit fa ite s & fignées-par un A v o c a t de
ceu x qui fe r o n t in ferits (q u i s e r o n t Sc non pas qui s o n t )
dans le Tableau qui f e r a j ( toujours qui s e r a Sc non qui
( ’ ) E : q u ’ o n n e d ife p a s , q u e ce s A v o c a t s n ’ é t a n t p o i m fu r l e T a b l e a u , c ’ é t o i t U
r a i f o n p o u r l a q u e l l e , c n . d p a u n d o i r , q u ’ils fuiTent rayés Je la M a t r i c u l e ; on n e fs io k p a s
■mention q u e s’ il y a v o i t eu u n T a b l e a u , le s P r o c u r e u r s « ’» c r o i e n t e u g a i d e d e fe f e r v i r
A v o c a t s q u i n ’ a u r o i e n t p a s é té d e f T u s , p u i f q u ’ a u x t e r m e s d e ¡’ O r d o n n a n c e , leurs
écritures auroient été rejettées des Taxes de dépens.
4 ^9
�V' • - •
'4 0 ' e s t ) préfenté à la Cour par
le B âtonnier des A v o ca ts
q u i l n y aura que ceu x qui f o n t actuellement la profefjion
d*A vocat qui pourront être in fcrits dans 'le Tableau
&
q u ils ne pourront fa ir e d'écritures q n i ls n aient au moins
d eu x années de fo n d io n s ( i) .
L e s difpofitions de T A r r è t font telles , q u e Ton femb le p o u vo ir donner fon émanation pour date au T a b le a u .
J Jai pourtant lieu de p réfu m er q u e de tout Tautre fie c le ,
il îTen exiita point j & q u e le premier T a b le a u lé g a l c il
de celui-ci.
O n trouve dans T hiitoirc très-peu fure, très-peu co rreclc,
très-peu com plette de T ord re des A v o c a ts v'a ) * , que le
plus ancien T a b l e a u , qui foit c o n n u , e il celu i de Tannée
i 3 6 3 , dont L o i f e l parle dans fon D ia lo g u e . M ais loin
q u e L o i f e l fafle mention d 'u n T a b l e a u , le terme Tableau.
n e fe trouve pas même une fe u le fois dans tout fon livre.
C e lu i de R o o lc dont il fe f e r t , à T en droit q u e déiîgnc
pro b a b le m en t l ’A u t e u r de ThiiToire, nJa trait qiTà Tart.
du R è g le m e n t dont j Jai donné T exp lication plus h a u t , &
q u e L o i f e l p la c e , je crois m al-à-propos, fous Tan n ée
i 3 5 3 , au lieu de T année
1 3 1 8 (3). A u r e it e , ce q u ’il
« h u h i i i i n in n ■■■»■
■. —
a
(1 ) L e M e r c u r e H i f t o r i q u e & P o l i t i q u e d u m o i s d e S e p t e m b r e , e n a n n o n ç a n t c e t
A r r ê t , dit : a q u e le s P r o c u r e u r s n ’ e n f o n t p as c o n t e n s , p a r c e q u e t o u t l ’ a v a n t a g e d u
» R è g l e m e n t r e v i e n t a u x A v o c a t s ; & q u e c e l a fa i t f o u p ç o n n e r q u ’ o n a q u e l q u e d e ilè i n
» d ’ é r i g e r le s f o n & i o n j d ’ A v o c a t e n titre d o f f i c e p a r t o u t le R o y a u m e » .
( x ) E l l e eft i m p r i m é e à la tê t e de l a n o u r e l l e é d it i o n d u n O u v ra g e i n t i t u l é : Règles
pour former un A v o ca t. L e q u e l O u v r a g e n ’efl: q u ’ un R ecueil d e t r iv ia lit é s é c r i t e s
d a n s u n f t y l e p a r f a i t e m e n t a i ï o r t i a u x c h o f e s q u i l c o n t i e n t , & q u i n e fo n t dépitées n i
p a r le f o n d ni p a r la f o r m e d e c e t t e L i f t o i r e p r é lim in a i r e .
( 3 ) « C e f u t l o r s / a v o i r e n l ' a n 1 3 * 3 , q u ’ il f û t o r d o n n é , q u ’ en p r ô t a n t l e f e r m e n t a u x
» o u v e r t u r e s d e s P a r l e m e n s , o n f e r o it un Roolc des p r in c ip a u x A v o c a t s , q u i e n f e r o i e n t
» l a c h a r g e , p e n d a n t la S c a n c e » . O p u f c u l c s d e L o i f e l , p . 4 8 4 .
�- ¿Í4 1
dit reflcm b lc fi p eu à l Jidée q u Jon fe forme d’ un Tableau
connu , q u ’il ne nomme pas même un feul de ceu x qui
d evo ie n t y être infcrics. C e q u e L o i f e l a donné effecti
v e m e n t, c ’eft d eu x liftes d ’A v o c a ts des années 1 5 2 4 , Sc
1 S 9 9 5 & ces L ifte s ou M a tricu les, com m e les a p p elle
l ’E d ite u r C la u d e J o l y , font fi p eu fidèles,- q u e l’on y
obtnet des A / o c a ts qui l’étoient bien certainem ent alors t
candis q u ’on y en rencontre qui ne l ’étoient pas encore.
L ’Almanach. R o y a l qui p eu t fe r v ir , finon'd ’a u t o r i t é ,
au moins de g u id e dans ces matières , n ’a com m encé à
in férer les noms des A v o c a ts au P a rle m en t q u ’en 1 7 1 6 " .
C ’cft donc bien évidem m ent à un peu plvs d’un demi iiècle
q u e l ’on p eu t reporter la vérita b le apparition , de ce
q u ’on
a p p elle le Tableau.
O n voit par le R è g le m e n t ce q u e
ce fu t q u e ce
T a b l e a u , Sc de q u e lle manière il d evo it être com pofé.
C ’étoit une lifte extraite d ’un R e g if tr e ju rid iq u e , ( la
M a tr ic u le ) dans la q u e lle lifte , on ne p ou voir mettre ,
que ce u x qui f o n t actuellement la profejjïon d‘ A v o c a t :
mais tous c e u x - là y d evo ie n t être. P a r cette l i f t e , on
établit une diftin&ton en fa v e u r de ce u x qui auront d eu x
ans de fo n d io n s .
L e droit de faire des écritures utiles
le u r eft attribué : c’eft l ’u n iq u e q u ’on le u r ré fe rv e , &
c ’cft la fe u le ch ofe qui les différencie , de ce u x de leurs
C o n fre re s , q u i font de d e u x ans plus jeunes dans la
Profeflîon, C e s
C adets p e u v e n t plaider ,
co n fu lte r ,
écrire m êm e , p o u rv u q u ’ils renoncent à l ’é m o lu m e n t ,
a fa ir e entrer leurs écritures en taxe. P a r le fait n’avoir
pas d eu x ans de T a b l e a u , ou ne point figurer d e ffu s ,
ç etoit etre ré d u it à la nob leffc , a u défintéreflem ent anF.
�tiques, qui plus q u e le s T a le n s ont iliuftré cet état ; c^étoit
être forcé à la bienfaifance , circonfcrit dans la voie des
bonnes œ uvres 5 c ’étoit enfin être condam né au R ô l e de
D é f e n f e u r g én ére u x des C aufes d é la ifle e s , D é fe n fe u r
a u q u e l o iv ch a rg e o it la vertu de payer fes honoraires.
L e s A vo ca ts du T a b le a u fe font appliqués à garan
tir de toute atteinte , les prérogatives q u Jil leur afl'uroit.
U n P la id e u r ayant ch argé par lettre fon P r o c u r e u r , de
s\adreiier pour les écritures à un A v o c a t q u Jil défigna 8c
qui n Jétoit point fur le T a b le a u > comm e il fut queftion
de r E x é c u t o i r e , dans le q u e l étoient portés les droits de
r é v ifio n , copie &. lignificationd efditesécritures, M e L o u is
E u iF ro y, A v o c a t en la C o u r 8c B â to n n ie r, sJen m ê l a / fie
bravem enc un rapport au P a r q u e t ,
il fu t rendu A r r ê t
le, 7 S ep tem b re 1 705? , le q u e l ordonna: « la diitraction
» du montant des articles qui concernoient ces écritures
» difcréditécs ». O n notera q u Jil n 'y eut aucunes défenfes à r A v o c a t
d Jen faire ,
ni au P ro c u re u r
d Jen
lignifier de fem blables à l ’avenir j qttJon 11e fupprima
point celles-ci, comme. faufTes, (1) 5c q u Jon sJen tint à les
déclarer
abfohuncnt- gratuites &
improduifautes. C ’en
étoit a i e z pour leu r ôter toute e fp cce de cours -, maisle
prononcé du P a rle m en t confirme d ’une manière in-
conteftable ce q u e j ’ai dit : que l'e x e r c ic e des fonctions
d ’A v o c a t , n’étoit nu llem ent reftreint par le R è g le m e n t
de 1 69 3 aux A v o c a ts fur le T a b le a u
que ceux qui n Jy
( t ) L n r f p ’ en \ 6 o i l e P a T c m e n c v o u l u t o b l i g e r le s A v o c a t s d e f e c o n f o r m e r à
l ’a ; t .'6 1 d e l’ o rd r n n a n c e d e B i a i s , i l o r d o n n a q u e ' l e s r é f r a f t a i r e s /croient rayés ¿e.
U M itr a ille ( n o n d u T a b ' e a u q u i ü ’e i i l l o i t p as ) 6- à eux fa it dèfenjh de cm jutttr v
icrire,ni plaider > A P£Il<E DH f a u x .
.
�étoicnt pas, deir.curoient dans la plenitude de leurs droits,
au bénéfice près de la taxe des écritures, a u q u e l on ne
les admettoit pas.
A c e t é ga rd , le n o u v e l A r r ê t de R è g le m e n t in terven u
en 1 7 5 :1 , en aggravant les o b lig a tio n s , en éprouvant
par une plus longue expectative , la vocation des Afpirans
au T a b le a u , n 'a point augm enté les P rivilèg es de ce u x
q u i l ’illu fire n to u q u Jil illuilre
n ’a rien ôté aux A v o c a ts
qui n’ont pas le fuprem e avantage d'y paroître à leur rang.
L e s Candidats font par cet A r r ê t , « fournis à quatre ans
» de fréquentation du B arreau , 'dont ils d oiven t rap» porter un C ertificat figné de fix A v o c a ts j indiqués par
» le Bâtonnier. O n leur dem ande un dom icile certain
» Sc connu à P a r is , 5c l’cx e rcice a d u e l de la profeflion j »
enfuite de quoi ils d oiven t être admis fur la L if te , Sc
p eu v en t faire des écritures qui paiTent en taxe.
M ais en a t t e n d a n t , ils plaident au B a n c des A v o c a t s ,
iis font des M é m o ir e s , ils fignent des C onfultations , ils
com poferoient m ême des écritures., il e u x 8c les P r o c u
reurs conven oient du cgratis.
>
P la id e r effc de toutes les fon dion s de l’A v o c a t , c e lle
qui fu t toujours la plus li b r e , & qiiJon s avifa d autant
moins de gên er par aucune entrave , qu e lle cft permife
aux
Particuliers
&
q u e lq u e fo is
fans
d iilin d io n
des
A vocats.
M o n ayeul p a t e r n e l , appellé à Paris par le grand
C h a n ce lie r d’A g u e ff e a u , pour plaider la C a u fe de M . de
G a n n a y , n’étoit pas fur le T a b le a u . I l plaida pourtant
a v e c applaudifiem ent, a v e c fuccès,dans ce B a n c , q u ’une
F 2
�qi-'alité inhérente à fa perfonne , après fa récep tio n au!
fe rm en t d ’A v o c a t , lu i ordonnoit d ’occu p er.
N o u s avons v u M e G e o ffro y de L i m o n , n 'é ta n t pas
fu r le T a b l e a u , ayant abandonné la carrière du Palais ,
p la id e r à la T o u r n e l l e , non pour l u i ,
mais pour
une
E t r a n g è r e , dans le B an c & a ve c le coilu m e des A v o c a ts .
Q u o i q u i l ne fû t pas fur le T a b l e a u , q u o iq u e d ’après
je ne fai q u e lle d élibération les A v o c a ts aient arrêté de,
n e plus y inferire d ’E ccléfiaftiques., M . l ’A b b é B e a u d e a u
« ’a -t-il pas p la id é , fans réclamation j au C h â te le t 6c au
P a r l e m e n t , a v e c tous les infignes & les honneurs de
l a P rofeilion ?
E t M . D e la B é d o y e r e re fu fé à ce m êm e T a b l e a u , n e
d éfend it-il pas fa C a u f e , d écoré
p la cé comme fon
A d v e r f a i r e , dont le nom ornoit le fam eux C a ta lo g u e , ic
- m êm e en régen toit un p e u , d it-o n , les individus?
N o u s avons v u davantage. M . le M a rq u is de Sainte
M a u r e , M . M in g a u t M a rq u is de L â g e > qui n ’étoienc
point A v o c a t s , ont plaidé l ’un &
l ’autre en le u r n o m ,
dans ce B a n c , q u e l’on vou d roit m ’interdire.
E t pour clorre cette férié de traits décififs, par un traie
qui me foit analogue, M c P h ilip o t, deftitué de l ’O ffice de
P ro c u re u r à PoiflV, prétendant que fa deftitution étoit injurieu fe ,e ft ve n u plaider fa C a u fe J n t r o d u it dans le B a n c par
fa qualité d ’A v o c a t , à la q u e lle il avoit pourtant renoncé en
poftulant comm e P ro c u re u r 5 & il n’a rencontré a u cu n e
oppofition de la part de ceu x qui m en m ontrent une ft
vive.
O r , ne puis-je pas q u a lifier, au m oins, de tém éraire,
la tracafïcrie infolite que j ’éprouve ? J 'a i pour m o i , le
�^
--------------------------------------H
bons f e n s , la L o i , la J a rifp ru d e n c e & l ’u fa g e c o n fia n t ,
T
q u e fa u d ro it-il de plus ?
F o r c é de co n ven ir d e l'é v id e n c e de mes raifons > on
m e répond : « q u ’en effet les choies le font toujours pafîees
»
a in f i , q u e les exem ples q u e . j’en rapporte font tran-
» chans j mais on ajoute : q u e l ’O r d r e des A v o c a ts a de
a» to u t tems été dépofitaire de l a P o l i c e , de la D ifc ip lin e ,
|
»
d e la C e n fu r e de fes M e m b r e s , & q u e la D é p u ta tio n
»
d e cet O r d r e , ayant d écid é q u e je ne plaidcrois pas
»
au B a n c , il ne me re fle d ’autres parti à prendre q u e
» d ’en pafler par fa déciiîon ».
f.
IV,
I
D u Bâtonnier. D é la D éputation & des D r o its de P o lic e
de D ifc ip lin e „ de Cenfure fuprêm e que VOrdre des
|
A v o c a ts prétend avoir f u r f e s M embres.
I
D a n s la pofition où je f u i s , p ou rq u oi vient-on m’o b li
ger à difTerter fur l'autorité q u e les A v o c a ts du T a b le a u
s’arrogent les uns fu r les autres ? E h ! q u e m’im porte à
!
moi , qui ne fuis pas de leur C o llè g e p a rticu lie r, le r é
gim e q u ’il leu r plaît d’y o b fe rv er ? AiTurérncnt
devroic
m ’être fort indifférent;
ce la
mais ils entendent m e
foum ettre à le u r Jurifdiétion , il fau t bien dès-lors q u e je
la difeute. J e vais donc
faire toucher au d oigt ,
que
c eft un grand m alheur pour la Profeifion , q u ’ils aient
imagine d ’e x erce r une P o l i c e , une C e n fu r e q u e lc o n q u e
fur leurs égau x y q u e cette C e n f u r e , cette P o lic e ils ne
les ont jamais eues -, q u ’ils ne les ont point j q u ’elles ap-
�<6
^artienwent au P a r l e m e n t fciu j q u ’eux-memes ne p eu v en t
le s ’ avoir j &, q u e la D ép u ta tio n me ddic (avoir g r é ' d u '
filence q u e je garderai fur ceîte décilîon prétendue , bien
n u lle à mon égard , mais qui pourroic c t r e ; d ’u n e' trop
grande c o n fé q u e n c e au fien.'
.
c
: ; C e lu i qui p rétend à la Suprém atie parmi .les Avocdts',
s’appelle Bâtonnier. A u trefois il étoit deitiné à porter le .
baron a u q u e l étoit attachée l ’Im age d e Saint N ic o la s , aux
Procédions de la C onfrairie de ce Saînr; C onfrairie corap o fé e d ’A v o c a ts êede Procureurs. A i m i , c e Bâton qui fervoit jadis aux C on frères de point de ralliem ent dans leurs
m arche , ferviroit au jou rd ’hui de directoire aux A v o c a ts
dans leur conduite.
.
I l n^y a pas forc-long-tem s, q u e la préém inence atta
ch ée à cette fu b lim c fon& ion e il'r e c o n n u e . O n ne d evinoir p a s 'm ê m e dans
le dernier S iè c le , en quoi elle
p ou voir confiilèr.' C ’eft ce q u ’indique la queiticm q u e fît
au rapport d ’H u fïb n , le C o n fe ille r au P a rle m en t à qui
l ’ un d ’e u x s’éto itfait annoncer. I l le p ria gaiem ent de lui
■QunJnaman'i- d ire : « Q u e l A n im a l c ’étoit q u ’un Bâtonnier ? » *
w i ï lr o Z T
A u f a i t , avant q u ’il fût queftion du T a b l e a u , il .
¿.•■■uLivit.Lib. d é ç o it pas queftion du Bâtonnier. L e D o y e n des A vo ca ts,
i v . t aj>. 40.”
r . 1:
^
■
y r
s’il iurvenoic q u e lq u e s occanons rares de le montrer , en
prenoit le foin.
; D è s que le P a rlem en t e u t défigné le Bâtonnier pour
préfenter le
Tableau , il fe crut en droit de faire a
T a b le a u ; 6c bientôt de le faire à fa g ù ifc ( i) . C o m m e
( i j II r ft i n c o n r c f t a b l e q u e la c o n d i t i o n du T a b l e a u n ’ a p p a r t ie n t ni a u B â t o n n i e r ,
p i a n ? A v o c a t s . L e B à w o n n ic j-c i\ n o m m é d a n s i ’ A u c c J e R è g l e m e n t d e i f i p j ,p é u r
�'47
les O ffic ie rs , nommés C en fcu rs ch e z les R o m a in s j
qui
d'abord inilitués pour d énom brer & éva lu e r les facultés
des C ito ye n s j finirent par être chargés d’infp e& er leurs
m œurs 5 le Bâtonnier en form ant le T a b le a u ^ s’imagina
avoir la puifîance de trier ce u x qui d evo ien t le f o r m e r ,
<d’écou ter les d é la tio n s , de les p ro v o q u e r 8c de ju ger de
le u r mérite) à la différence., q u e les C e n fe u rs approuvés à
R o m e par le Souverain*, fe co n d u ifiren t félon des réglés
certaines) au lieu q u e les Bâtonniers n’ont eu q u 'e u x mêmes pour garans de le u r a u to rité , 8c q u e leurs propres
idées pour g u id e , dans l ’u fagc q u ’ils en ont fait.
P e n d a n t cinq ou fix fiècles, les A v o c a ts avoien: v é c u
en tr’eux dans la p a ix , la co n cord e 5c les douceurs de la
fraternité. I l n y a pas de traces d ’aucune q u e re lle é le v é e
dans le u r fe iiij durant tout ce long intervalle. L e T a
bleau ne fut pas p lu tô t inventé, que la D ifc o r d e repoufl'ée
im perturbablem ent de ce paifible ce rcle , fe v e n g ea du
mépris q u ’il avoit fait de fon pouvoir.
D è s 1 7 0 7 j L o u is N i v e ll e , A v o c a t diftingué , p ré fente fon T a b le a u , qui fo u lè v e tout l’O rd re contre lui 5
on le d éfa vo u e , &. la b efo g n e
eft fupprim ée *V
C e premier exem p le de réclam ation n’em pêch a pas roTei/cü-f’ ^
ce u x d’un abus tyrannique de fe m ultiplier.
Avocats, chai*.
préfenter U Tabhau à la Cour, n o n , pour le fa ire ; Si o n a fi b ie n r e c o n n u q u e I *
c o m m i f l i o n de préferur le T a b lea u , n ’ em porte,■
it f as l a ' f a t u it é ' d e l e r é d i g e r , i p l o n g - t e n i s le s a n c i e n s B â t o n n i e r s , Sc e n f i M e les D é p u t é s (e f o n t a d jo in t s a u
R a o n n i e r e n p la c e p o u r c e t t e o p é r a t i o n .
M iis lo in d e l e u r
co n fier
c c (o in ,
ni
O r d o n n a n c e s , ni A r r ê t s , n e n o m m e n t f e u l e m e n t les A n c i e n s o u les D é p u t e s . S i q u c l q u un cft p a r t r c u l iè r e n n nt d é i î g n é p ' a i le S o u v e r a i n p o u r d r e f ie r le Tableau des A vocats,
c e f o n t , ItsJ h tn ie rs P réfid en t, si-voçafs & Procureurs G énéraux des C^urs. V o y .
1Ordi>i)[i.\iiL'C
6
c!e 1 (. ) . A r t .
XvJI,
cité ci-deiT us , p. 3 8 .
�^8
O n s’cn plaignit fou ven t. U n e guerre inteitine produifit les haines. L e s ja io u fie s é c l a t è r e n t , & la perfécueion
in c o n n u e j en
horreur
à des hommes qui font fes ennemis
n a tu re ls, fu t a ccu eillie par eux 6c s’établit dans le u r fociété,
comme
dans fon centre. Sous v in g t p ré te x te s, ou
v e n g e a fesoffenfes particulières. L a Partie , qui en v o u lu t
à un A v o c a t , tr o u v a , com me dit un M ém o ire imprimé
dans ce tems : ce de l ’accès auprès d ’ün Bâtonnier ^ parvint
» à lui perfuader des faits calom nieux contre cet A v o c a t ,
» ce qui n’e il pas difficile ait T u b u n a l de l'in q u ifitio n :
» ce font fes t e r m e s , & f u t fu r e de lu i nuire ».
N o u s en avon s> continue l ’A u t e u r , un exem ple tout
récent dans la conduite q u u n B âtonnier a tenue j à l ’ égard
d'un de f e s Confrères qu'il a p erfécuté & calom nié , de la
maniéré la p lu s cruelle & la p lu s indigne ^ à l'occafion
d'une action louable
généreufe & charitable de. la p ro -
fe ffio n .
L e m ême raconte j « q u ’un A v o c a t , pour s’être ch argé
» de
la d é fe n fe de q u e lq u e s m a lh eu reu x P a y f a n s ,
à
» q u i le frère d ’un B âtonnier avoit e n le v é quatre D o » m a in e s, & l ’avoir forcé à re ftitu tio n , par une S e n te n c e
» du
»
2 1 J a n vie r 1 7 2 2 , fû t pourchafie pendant fept
ans par ce B â t o n n ie r , qui le diffamant de tous côtés ,
» parvint à confom m er l ’œ u v re de fa radiation, dont il
» l ’avoit m enacé ». S ’étendant fu r tous les inconvéniens
du defpotifm e B â to n n ifte, il d ép lore ainiî le fort d e c e u x
qui fré q u e n te n t
le B a rrea u
: E f l - U donc
mainte
nant un é ta t, dont la b a ffeffe, l'efcla vage 6* la dépen
dance p u iffen t être comparées à celui des A v o ca ts , qui
^voient été j u f q u t i i p refq u id olâ tres de leur liberté ?
C cttç
�4?
‘
C e tte faillie ne paroît pas d é p la c é e , quand on e il.a u
fa it de fon motif. L e B âton n ier.d e 1 7 2 3 ? , de concert
ave c fept autres B âto n n ie rs,
abbatis d’A v o c a ts ,
l’avoit compris dans ula
q u ’il venoit
de faire.
Cetce petite
C a b a le fe donna le divertifiem ent d ’en rayer plus de 1 30
du T a b le a u , & on ne s'¿to 'u pas a tta ch é, dit-il
à ceu x
qui avoientle moins de capacité > de mérite & de réputation ,
CC n ’ É T O I T
P O IN T
A
C E U X -L A
Q U ’O N
EN
V O U L O IT .
U n volum e fort ample ne fufnroit pas pour rendre
compte , de toutes les d ifp u tes, de
tous
les orages qui fe
font élevés dans la clafle des A vo ca ts. L a puilfance in
définie des B â to n s , s’eft un peu m odérée. I l y a environ
3 o ans q u ’il fe fît une infu rre& ion contre les G lig a rch e s j
mais à l’O lig a r c h ie a fu cc éd é une A riftocratie plus dang é r e u fe , C h a q u e B a n c ( î ) a nommé d eu x D é p u té s. C es
D é p u té s ont form é un T r ib u n a l. C e T r ib u n a l qui s’a ffem b le
toutes
Cam arades
les fe m a in e ? , a befoin de C aufes. L à , des
exam inent les a & i o n s , péfent les paroles,
fe rm e n t les penfées de leurs Cam arades
5 ilb
s’informent
com m ent ils fe font c o n d u i t s , v e u len t prévoir co m m en t
ils fe conduiront. C e s incroyables Juges prononcent fans
avoir de C o d e , fans écrire leurs d écifions, fans en tendre
foit les prétendans au T a b le a u , foit ce u x qui n’en ayant
pas la prétention
n’y font pas enregiflrés 5 & ils pronon
cent fa n s appel. Ils font un peu plus de grâce aux inferits,
ils les e n t e n d e n t , le u r perm ettent de recou rir à l ’O r d r e
( ' ) O n a p p e llo i t B a n c , l a ï A m i o n d e p l u f i e u r s A v o c a t s , à un ¿ e s p 'i lie t s -le la
g r a n d e S a l l e d u P a l a i s . D e p u i s q u a t r e o u c i n q a n s , le s A r o c a i s fe f o n t d i r i f é s par
C o l o n n e s , c o n t e n a n t u n c e r t a i n n o m b r e d ’ e n t r ’ e u x , & c h a q u e C o l o n n e oti d i v i f o n
c o m m e an n u ellem en t deux D e r m e s .
G
*1
�\
'
y o
entier 5 qui ne m anque güères d ’infirmer la S en ten ce des
A riitocrates. I l eft vrai, q u e c e u x - c i , à le u r to u r , n’o u
b lien t pas de crier au renverfem ent de la d ifciplinc , au
b o u leve rfe m en t des principes, & fans d o u t e j ils fauront
bien créer un m oyen
pour détruire cet a f y l e ,
pour
brifer ce frein. O n allure q u ’ils fe propofent actuellem ent
de ne plus admettre aux aflemblées générales les jeunes
gens. I l faudra , d it-on , dix ans de T a b le a u pour pou
voir y voter. E ffectivem en t on ne p eu t difeonvenir que
les intérêts majeurs
qui fe balancent dans ces
graves
C o n c ilia b u le s , m éritent bien l ’attention des têtes les plus
mûres. « I l s’y agit de favoir : f i un Stagier (1 ) a afiez
»
de livres , fi fon A nti-cham b re ejl paffable (2) * s’il ne
» fait pas d c p ie c c s
d ’écritures
, s’il eft
d ’u n
âge au-deflus
■
» ou au-deiïbus de quarante ans 5 & c . & c . ».
E t q u ’on n e f c perfuade point q u e je dénature ou que
je charge. T o u s ces détails j font de la plus ftriéte exacti
tu d e. O n rit ou on lè v e les é p a u le s, en les lifa n tj mais
q u an d on fon ge q u ’a v e c de pareilles n iaiferies, on perd
un C it o y e n ,
q u ’on
lui e n lèv e un E ta t dans le q u e l il
auroit peut-être acquis de la c é lé b r ité , de la fo r tu n e ,
co n folé fon père , fait vivre fa m c r e , foutenu le reile de
fa famille 5 q u ’on lui e n lè v e
— ni»11
1 '
( 1 ) C e m o t n ’é t o k a u t r e f o i s
ainfi ,
ians retour , fes
-e n u f a g e q u e d a n s 1E g l i i ê . Il i i g n j f i e le n o u v e a u
C h a n o i n e q u i , p a r u n c t r t a i n t e m s d ’ affid u ite a u x O f f i c e s , fe m e t e n é t a t d e p e r c e v o i r
t o u t e s le s r é t r ib u t io n s d e f a P r é b e n d e . II e ft a d o p t e m a i n t e n a n t a u P a l a i s , o ù l ’ o n s ’ en
fe rt p o u r d é f i g n e r les j e u n e s A v o c a t s q u i v i i ê n t a u x h o n n e u r s a u T a b l e a u . O n i e m b l e
v o u l o i r le u r f a i r e c r o i r e q u ’ u n e p l a c e f u r le T a b l e a u , e ft u n C a n o n i c a t .
( i ) U n A v o c a t d u n v r a i m é r i t e , d e m a n d o i t un j o u r p o u r s’ i u f t r u i r e , a u D é p u t é q u i
f a i f o i t u n r a p p o r t o ù i l d i f o i t : « q u e M . un t e l a v o i t u n e Anti-Chambre p a y a b le , fi
» c e l a y o u l o i t d ir e , q u ’ o n p o u v o i r y p a fle r » .
�4
îi
M
*
v<^|
efpérances & le fruit de fes études 5 q u ’on le deshonore
en fin , il faut g é m ir , ou frémir.
O n ne connoiiîoit pas le T a b le a u , 011 n’avoit jamais
entendu parler de la difeipline de l ’O r d r e dans ces b ea u x
jours j où cet Ordr.e é t a it , fu ivan t P a fq u ic r :
« la pépi-
» nière des Officiers de J u i li c e j des L ieu ten an s-G én é»
» rau x,
C rim inels
Sc Particuliers ,
des A v o c a ts
» P rocureu rs du R o i , C on feillers des C o u rs
» raines
M a ître
des R e q u ê t e s ,
8c
Souve-
P r é fid e n s , v o i r e ,
» C hanceliers m ê m e » *.
* Recherches
O n ne connoiiToit ni T a b le a u , ni D é p u ta tio n , lo rfq u e ¿«la France,
les A v o c a t s , pleins d ’eftime les uns pour les autres, fe
fo u te n o ie n t, s’é c la ir o ie n t , s’encou rageoien t
m u tu e lle
m ent j lo rfq u e C h a rle s D u m o u li n , traité trop durem ent
à l’A u d ie n c e par l ’im mortel C h rifto p h e de T l i o u , vit
une grande partie de fes C on frères , le D o y e n à le u r
tête , fe rciTcntir de fon injure &. aller s’en plaindre à
l ’oiTcnfeur lui-même , qui fe
fit un honneur de la ré
parer.
C e ne fut-ni au T a b le a u j ni à la D é p u t a t i o n , q u e le
P u b lic dur ce v e rtu e u x M o n th o lo n , dont L o i f e l écriv o it :
I l avoir acquis une telle réputation de probité q u ’on
» le c r o y o it, fur ce q u ’il d i f o i t , non com m e A v o c a t ,
» mais comm e s’il e u t été R a p p o rte u r d ’un P ro cès fan«
» lui faire lire aucune pièce.
A u iîi ■é toit-il un
trèv-
» homme de bien , vivan t honorablem ent fans a v a r ic e ,
» ni ambition, vén érab le 6c craignant D i e u , ce q u i le
» f î t a p p ellcr par le R o i H e n ri I I I , pour lui donner
» la garde des S c e a u x de F ra n c e ».
C e t O m c r T a lo n , qui après avoir fait la profeifion.
G a
�¿ ’A v o c a t
pendant dix-huit
a n s , balança long-tems
à
prendre la charge d’A v o c a t G é n é r a l , q u ’il dévoie rem
plir a ve c tant de gloire , dans les circonftances les plus
difficiles, n ’a v o it fait preuve ni au T a b le a u de fes talens,
ni à la D ép u ta tio n de fa b elle ame.
Q u a n d dans le fiècle dernier le cé lè b re N u b l é j un
des premiers A v o c a ts confultans, ayant acheté de Scarron,
un bien pour 1 8 0 0 0 livresjforça fon ve n d e u r à recevoir
2 0 0 0 écus de p l u s , parce q u ’une eftimation à v o itp o r té
ce bien à 2 4 0 0 0 livres j q u an d à ce f u je t , M é n a g e
difoit : « que les A v o ca ts étoient une efpèce de G ens qui
fa ifo ie n t une profejjion particulière d’ honnêteté ; & q u e
Segrais ajoutoit : qu étant les difpenfateurs de Véquité à
l ’ égard des autres, il n étoit pas étrange qu ils fu ffe n t
équitables envers ceu x auxquels 3 ils Je croyaient obligés
S sgraifian a.
de l ’être * j alors on ne connoiiToit ni le T a b l e a u , ni la
D é p u ta tio n .
L e s anciens A v o c a ts penfoient de grandes chofes ,
en faifoient de bonnes , en
difoient de fenfées ,
en
écrivoien t de favantes , fans être fur le T a b le a u , fans
être furveillés par la D é p u ta tio n .
Q u e dis-je ? L a fou le d ’Ecrivains renommés , q u e
l ’O rd re des A v o c a ts foùrniifoit fur les matières les plus
intéreflantes à difparu , à l ’inftant ou le 1 ableau s’eil
montré. Si même nous nous en rapportons au M é m o ire
de M e F c r ic o q de la D o û rie , ci-dciTus c i t é , ce fu t un
m o tif pour fe faire rayer de ce C a ta lo g u e , q u e d ’être
A u t e u r ( 1 ).
A u fli
depuis
environ
foixante a n s , les
( 1 ) a A u a a u t r e o n a dit q u ' i l é to it A u t e u r , & q u ’il a v o i t m is a u j o u r u n O u v r a g e .
�A v o c a ts fur le Tableau.» n ’ont q u e bien rarem ent été
tentés de faire part au p u b lic , des fruits de leurs re ch e r
ches o u de leurs méditations. P re fq u e to u s , ont fui ce
d an gereu x honneur.
A l ’époqu e où
pou r fe voir em p loyé au P a la is , il
falloir être c o n n u , le je u n e A t h le t e cu ltiv o it fon talent
en filence. A v a n t q u e l ’occafion d ’efîayer fes forces vint
s’offrir , il nourriifoit fon efprit par des études co n tin u el
les. I l s’habituoit par la f r u g a l i t é , au déiîntérciTement 3
alloit s’initruire dans le cabinet des A n c ie n s } conférer
a v e c les modernes j fc faifoit par fa franchife , par fa
l o y a u t é , des amis de fes c o llè g u e s , qui rendoient de lu i,
p endant fa vie & après fa m o rt, un tém oignage flateur.
ÎVenoit-il à fe diftinguer ? à être chargé d’un grand eir.ploi ?
I l fe gardoit b ie n d’aller perdre fon t e m s , le tems fi
p ré cie u x pour u n A v o c a t , dans des AiTemblées futiles ,
à s’o c c u p e r d ’un vain réglernentage
d ’une od ieu fe invef-
tigation fur le com pte de C onfrères q u ’il aimoit , ou q u 'il
eftim oitj il ne paroiiToit au P a la is,
q u ’afin d’y rem plir
fo n miniftère auprès des J u g e s , en éclairant leur religion}
ou d u P u b lic , en augm entant par fa v o i x , la confidération des O ra cles qui fe rendoient au fam eux B a n c des
C o n fu lta tio n s , maintenant m uet 6c défert. L e s hommes
fimples qui s’y ra ife m b lo ie n t, n’étoient pas effrayés par
» r e v ê t u d ’a p p r o b a t i o n & p r i . î l c g e » ( C ’écoit le T r a i t e ’ de< M a n d e m s i i s & P r o c u
r a t i o n s ) » q n ’ o n n ’a p u c r i t i q u e r . L ’ I n q u i i î t c u r d e l ’ O r d r e s ’é ta n t c o n t e n . é d e f a i i c u n e
» in f u lt e p u b l i q u e i c e t A u t e u r d a n s l e P a l a i s , e n p v é lè n c e d e t o u s le s A v o c a t s fes
» C o n f r è r e s ; s’ i m a g i n a n t q u ’ un f a n g l a n t a f f i o n t , d e s m e n a c e s , d e s v i o l e n c e s & d : s
n i n ju r e s g r o i f i è r e s v o m i e s a v e c a u t a n t d ’ e x t r a v a g a n c e q u e ^e t é m é r i t é
» m e n t p o u r r o i e n t t e n i r l i e u d e c i t i q u e , Sic, » .
MÉMOIRE pour
d ’e m p o r r e -
plufieurs Avocats,
au Parlement de P a r is , oppofans à l ’homologation du Tableau , DemanJ‘ “ ’ s
Complainte* p a g , zx •
�■A
S4
l ’afilucnce. des C andidats q u i vou lo ie n t fe faire initier
aux myftéres des L o i x j ils ne craignoient pas q u ’on portât
trop de faucilles dans le champ où ils moiiTonnoient.
« Q u e lq u e s
nom breufes ,
que
foient les réceptions
» d ’A v o c a t , » difoit HuiTon,» leur trop g rande m u ltitude
*Fonglona^ ne n u jt p 0inc à la g loire du B arreau * ». I l n ’en c i l
non cffxtt nu-
1
0
merojîorAdyc»-pas de mcm e de leurs SucceiTeurs.
L a quantité
les a
, / A r , , .fa it trembler. Ils ne l ’ont pas diiïimulé. L e ftage fu cc eifif
j e ¿ eux ans 3 j e q Uatre ans, le T a b l e a u , la D é p u ta tio n
icpr¿am o n t été leu r reiïource
,
* * . Im prudens , ils n 'o n t pas
, ^
buic de l’Anétappercu q u ’ils alloient d ire& em ent contre le u r but. U n
de R è g l e m e n t ,
»
s
.
v
.
d j Ma i7 fi.n o m coûte a mei-iter, a tirer
> ,-1
du néant. C e n eifc point
aflez d ’avoir des difpofitions ; il faut y joindre des c o n noifíances qui ne s’acq uièren t q u ’à force de travail &. de
foins. I l faut de plus faire p reu ve de ce q u ’on vaut. N o n fe u lem e n t l ’infcription au
T a b le a u q u i tient
lieu de
r é p u t a tio n , q u ’on croit qui la donne j car enfin avoir
fon nom imprimé dans un In d e x de cette im portance ,
doit iïgnifier q u e lq u e
ch ofe j n o n - fe u le m e n t, dis-je ,
l ’infcription au T a b le a u difpenfe de toutes q u a lité s , de
to u t labeu r > mais de plus coulante à l’égard des unes ,
e lle d éfe n d l ’a u t r e , . Sc vous mène au terme le plus
com m odém ent du m onde. A v o i r le v ifa d u Bâtonnier
fur l ’extrait de fa M a tric u le ; pendant quatre ans faire
une ou d eux promenades par mois dans la G ra n d e S a lle
du
Palais 5
n’y
parler
que
de
chofes indifférentes>
paroître fort d étach é de procédures & de Procès 5 ne
fe m ontrer par aucun endroit fa illa n t, & pour le plus
fu r , ne rien produire du tout j payer à p r é f e n t , u ne
çorifation q u ’on s’eft im pofée , 2c fa part d ’un re p a s , à
�5?
M . le B âtonnier 3 tels font les moyens certains d ’être
a g g reg é
aux
C oriphées
moins difficile : auilî
de l ’E lo q u e n c e .
e iï- c e
R ien
de cette manière ,
1 7 4 .J , nous avions fept cent c i n q ,
n’eft
q u ’en
£c que nous avons
a & u e lic m e n t cin q cent, q u a t r e - v i n g t - fept
rivaux de
D é m o fth è n es 6c de C ic c ro n .
L e s individus multipliés à. cet excès par le T a b l e a u ,
les liens d ’amitiés q u i unifloient les A v o c a t s , fe font
relâchés , fe font rompus, ce Ils ont appris à d étefter * rim'inftUcem
»
c e u x d ’entre eux qui réuifiiTent, 6c à m éprifer les contmnunt.
,,
» m alheureu x ».
expofés à tout
^
Ce
y,
■
n etoit
pas
a fiez
coup aux mauvais Offices
,
r
q u i ls lu f i e n t
Sen ec. de Iiâ .
L ib . n , C ap.
des Parties 8‘
A d v e r f e s , à la m éconnoiflance des leurs , à l’animadyerfion des T r i b u n a u x , il leur m anquoit de fe regarder.,
« com m e une C h a m b rée de G lad iateu rs ^ ennemis vivans
» e n f e m b lc , 6c n’y v iv a n t q u e pour s’acharner les uns
» contre les autres ( 1 } ». C e q u e ne fe
p e r m e t t e n t pas
les
Ju g es, ils le font. Ils fu fp e n d e n t, in terdifen t, dégradent à
le u r fantaific. L e s M agiftrats ve u len t-ils avertir? Ils puniffenc. Ils t u e n t , ce lu i q u ’un A r r ê t ne faifoit q u e blefler.
M a is ont-ils , ont-ils eu ce D r o it cru e l de d ife ip lin e ,
q u i l s exerce n t il f o u v e n t > ave c une fé c u r i t é , une in c lé
m en ce non pareilles ? Ils ne l ’ont point 5 ils ne l ’eurent
en au cu n tems.
IniHtués par les R o is , les A v o c a ts font u n iq u em en t
fournis à leurs
O rd o n n a n ce s,
aux R è g le m e n s 6c à la
J u r ifd id io n des C ou rs. Philippe I I I , après avoir arrêté
(1)
Non alia quam in ludo gladiatorio vita ejlcum iifdem viventium , pugnantiurn
SUf.S™, Deità. Lib. x i , C a P . 8 .
�y*
ce qui concerne leurs fe r m e n s , leurs fon dions & leurs
f a la i r c s , ajoute : « Si q u e lq u ’un d ’eux viole fon ferm ent
» ou tranfgreflc les préfens Statues & O rd o n n a n ce s, du
»
m om ent q u ’il en confiera à nofdites C o u r s , q u e fans
»
attendre une autre Sentence , il foie exclus à toujours
» de l’O ffice d ’A v o c a t , avec note d’infamie 6c de par» jure , fa u f néanmoins à le punir autrement s’il nous
»
paroît à propos, ou à nos autres Juges, dans le T r ib u n a l
»
d efqu els il aura d élin q u é ( i )
C ’c il le P a rle m en t qui fe charge du foin d ’élire ce u x
q u 'il croira propre à cet O f f i c e , dans l ’article rapporté
plus h a u t , pag.
3 $.
L ’O rd o n n a n ce de F é v r ie r 1 3 2 7 , pour le C h â t e l e t ,
art. 3 3 , d éfen d « à tout A v o c a t de fe mettre en in terlo-
& Jî il aparoit à notre dit
P r év o jl que calomtiieufemetit f e accoutum ât à ce fa ir e _,
». cutoire m al-à-propos , »
le dit P rév o fl ïe n punira & donnera telle p e in e , comme,
i l apartiendra Q l) L e R o i Jean , par un R è g le m e n t fur les P r o c è s , daté
de
1 3 £3 , après avoir en différens articles fixé le g en re
&
le mode des écritures du miniitère des A v o c a t s , finit
le douzièm e ce en leur in tim an t, q u e s’ils font le contraire
( 1 ) S i qui s veto ordinationes & Jlatuia hujus modi , ntc non & jurarntr.ti.rn p r tfthum violare prajum pferit, poflquam conjlitcr'u iià ejfe m pradiflu C u riis, is n o ti
perjurii & infamiet, nuilâ alla c x p tiijtâ fententia, ab Advocation 'n cfficio perp tua
f i t exclu f u s , alias nihilominùs prout nobis /eu aliis nojlris judicibus in quorum
Curiis dtliquerit vidchitur puniendus. R e c u e i l d e s O r d o n n a n c e s d u L o u v r e , t o . n . i .
p. } O I .
( i ) D ' a p r è s c e ; a r t i c l e ¡1 e f t b i e n ¿ v i d e n t q u e M e* T h o r e l & C o l o m b e a u , q u i f o n t
v e n u s fi m a l - a - p r o p o s , i n t e r c a l e r i in c id e n t d o n t i l s a g i t , a u m i l i e u d e 1a e d u f e p r i n c i
p a l e , ip é r i t o i e n c une peine telle qu’i l appartenait,
» de
�»de
s7
leur c il p r e i c r i t , ils feront g rièvem en t
ce qui
» punis ( î j . 5»
Je citerai plus
bas ,
du i 6 D é c e m b re i 3 6 4 ,
l'O rd o n n an ce de C h a rle s V ,
fur l ’e fp èc e de la p eire .
O n p eu t co n fu h er ce lle de C harles V I j du
M ai
1 4 1 3 , p ou r la P o lice gén érale du R o y a u m e , art. 2 0 0 .
O n y verra q u ’il ie plaint de ce que les A v o c a ts grèvent/e
povre P eu ple
j
par ialaires exceilîfs
écritures prolixes
,
comme autrement en plufieurs & diverfes manières qui
fera ien t trop mal gratieufes à réciter -, 8c q u ’il mande au x
C en s du Parlem ent 3 au P révoft de P aris > ù
S
Sénéchaux & B a illifs
à tous
& autres Jufticiers que ils corrigent
les deffusdits rigoureufement & fa n s d é p o r t ,
dans
ca s ........ tellem ent que ce f o i t exem ple à tous autres.
j
^
Son
SucceiTeur
art. 2 0 ,
le
*
de Ton O r d o n n a n c e de
1 4 7 3 5 L o u is X I , art. 3 6 , de - e ll e du mois de F é v r ie r
1 4 8 0 , pour le P arlem ent de D ijo n j C h arles V I I I , art.
2(5, de ce lle du 6 J u ille t 1 4 P 3 5 L o u is X I I , art. 8 4 ,
■
de ce lle de M ars 1 4 ^ 8 5 François premier , art.
37 ,
de ce lle de 1 j 3 6 , portant R è g le m e n t pour la J u iü c c
en Brefagne ; 8c encore le même R o i dans celle de 1 5 3 9 ,
indiquent différons cas, pour le fq u e ls , ils enjoignent aux
C ou rs & aux autres Juges de févir contre les A v o ca ts *
foit par amendes , foit par fu fp en fion , foie par privation
nbfolne de p o ilu la c b n .
J e 'd é f ie les plus érudits de mes A d v e r s a ir e s , iTôles
ou réunis , de me m o n tre r un feu!
p iifa ve d ’un
écrit
remontant à quarante a n n é e s , où il loi: q ueiiion d ’une
-i.
#
(i/JniimanJo eifdcmntt>.dfi feceritu 'to .traiuin,'0:u\t.u
il
J\
V
^
�*8
D ifc ip lin e attribuée à l’O r d r e des A v o c a ts i q u e dis-je ,
où l ’on life , foit ce mot même de d lfc ip lin e , foie q u o i
q u'autre é q u ivalen t. L e
P arlem en t feu l eft chargé de
cette difcipline. C ’eH: ce q u ’HuiTon , au C h a p . 35» de foa.
I I I e li v ., imprimé en i 6 6 ^ „ dit en termes très-énergi
ques,
très-précis j aux
A v o c a t s : a A l l e z m a in te n a n t,
»
p la id e z avec force , p laid ez avec confiance j vous ne
»
p o u v e z avoir pour vous e n c o u r a g e r , pour vous diriger,
» pour vous récompcnfe'r , aucun S u périeu r d ’un rang
53 au-defTous de ce S énat aufli illu ilre par fon titre , q u e
» puiilant par fon autorité ( i ) . „ .
E t dans ce S iè cle -ci., l ’A u te u r d’une Diiîertation fur
la C o m m u n a u té des A v o c a ts
Procu reu rs au P arlem en t
de Paris ( 2 } j a tranferit, d ’après B o y e r , u n A r r ê t du
1 8 M ars 1 j o 8 , rendu fur les remontrances du P r o c u
reur G é n é r a l ,
le q u e l enjoint
aux Procureurs
de
la
C om m u n a u té de faire « aflem blée entre les A v o c a ts &:
33 P r o c u r e u r s , pour entendre les p la in te s , chicanneries
3) de ce u x qui ne fu iven t lesxformes anciennes, co n tre»
vien n en t-au ftvlc & O rd o n n a n ce s de la C o u r , faire
4
y.> regiitrer
1
com m uniquer au fieur P ro c u re u r G é n é r a l
» p o u r en fa ir e rapport en la Cour , & procéder contre
» les coupables par fufpenfion , privation ou autres voies
» de droit ».
L a 23 2 e des queftions de Jean de le C o q , ( Joannes
( 1 ) Â g e pefl hxc , âge fortiter , âge conftunter , non inferior , ùbi hort.uor, tibi
m edcrjtor, tibi coronalor acceJet, qudin jtnatortus caïus 6* illu jlris titulo & potens
impe o.
(■) E l i . - c i l
‘
in fé r é e dan s le tr o iiié m e v o l .
H ist o r iq u e s. A
P a ris,
chez N y o n ,
175^.
d’ un R e c u e i l in t it u le
: V a r i é t é .’ ®
�G a lli ) qui font à la fa ite du vieu x ftylè du P a rle m en t , ^ __$)
contient H iilloire de M ? J ea n .d e N u l i y , A v o c a t : « q u i
» lut bien ch audem ent &. de près pris pour une amende ,
» afin q u ’il fcrvit d ’exem p le au re ilc de fes C o n fr è r e s ,
» parce q u ’il étoit d’un caraclère bouillant ( i ) ».
L e fam eux C h a rle s D u m o u li n , ayant pubiié , fur le
C o n c ile da T r e n t e , une C o n fisca tio n dont on ju g e a les
principes erronés, fût mandé par la C o u r , & conftitué prifonnicr. E la rg i depuis , fur les concluiïons de M M . les
G e n s du R o i , qui allèrent: a à lui faire de rigoureufes
». remontrances
à le priver d u Barreau., » & abflineat
fo r o * on
re n vo ya
ne le
pas à
fes
C on frères
pour "Voyez ù Vis
décider de fon fort ; & s’il fe p la ig n it, ce ne fut pas q u ’ on
e û t, à fon é ç a r d , m anqué à l ’ufage ou dérobé à fes pri-Thou,f.us
’
t>
’
1
&
■ t>
i
l'ancéis if 64.
vileges.
x
L o i f e l , pag. 5 3 £ de fon D i a lo g u e , parle de l’A v o c a t
F o u l lé , « qui fut,» dit-il », aifez peu h e u reu x dans l ’office
» d’A v o c a t , en ce q u e s’étant o u b lié dans une C a u f e
» q u ’il conduifoit pour l’E v ê q u e de Saint F l o u r , P rie u r
»
de G o u r n a y , il lui f u t défendu p a r l a C o u r , de s Jen
» p lu s entre-m ettre».
D u l u c , dans fon R e c u e i l d’Arrecs , liv. V , tic. 2 , a
inféré , fous le nom bre 1 2 , l'avanturc d ’un P r o c u r e u r
qui ayant pour C lie n t un A v o c a t , fe fervit à fa follicitation d’une chicane q u e l ’Arrefcographe a p p elle inouie ,
fans la détailler autrement. C e P ro c u re u r eut la p ré ca u
tion de prendre de fa P a r t i e , une garantie de to u t ce
('-) F uit ditlus A dvocatus fuper err.indâ beni calid'c, & dtpropi capws. S e d f u it ,
( 111 ¿udivi ) canfa ut caicrif cedtrtt in cxemplum fi* quia fa tit animofut fu it .
Ha
�6 o'
q u i pourroit arriver. L e s Juges s’étant apperçus de la
manoeuvre , firent venir le P ro c u re u r qui montra bonne
m ent l’écrit de l’A v o c a t : là-deifus A r r ê t qui ordonna :
« q u ’en préfen ce du P rocu reu r 6c du C lie n t j le B ille t
» de garantie feroit déchiré 5 le P r o c u r e u r , interdit pou r
» un a n , 6c V A v o ca t pour deux ».
C h a ro n d a S j liv. 2 , tit. 3 3 , n. 4 de fes Com m entaires
fur le C o d e H e n r y j note un A r r ê t de la C o u r , du 10
J u ille t 1 y 63 , qui interdit 'à tems ^ avec défen f e s de réci
diver
fo u s peine de punition & d ’ amende arbitraire un
A v o ca t,
convaincu d ’avoir extorq u é de fon C lie n t des
fommes exhorbitantes
& de s’être fait faire en o u tr e .>
une obligation qui fut annullée
par
le même
ju g e -
ment.
B ien perfuadés q u ’ils n’avoienc rien à craindre , ni à
efpérer de l ’O rd re , les A v o c a ts ne le réclamoienc en
aucune occafion. Q u a n d datis la C a u fe pour le D u c h é
de B retagn e j C la u d e M a n g o t , interrompu par P ierre
V e r f o r i s , lui dit : « M e Verforis vous a v e z tort de m ’in»
terrompre , vous en a ve z aiTez d i t , pour g agn er votre
» avoine
» j
V erfo ris
infulté ,
ne
s’adreiTa
ni au
B âtonnier , ni a l’aflemblée de fes C o m p a g n o n s pour
obtenir rép aration , il la dem anda au P a r le m e n t , qui la
lui accorda
én faifant dire enfuite de l ’A r r ê t par le P.
P réfid en t : que ce qui f e
donne a u x A v o ca ts pour leur
labeur n efl p o in t par form e d’ avoine , mais que c efl un
honoraire. V o y e z B o u c h e l, au mot A
vocat,
& l’H iftoire
de l ’O rd re des A vo ca ts > C h a p . X V I I I .
L o r f q u e l ’innovation com m ençant à pointer., le R é
gime etonne leva fa tete a demi formee parmi ceu x qu'il
�, é i
Revoit fu b ju g n er 5 loin d ’obéir à fa v o ix , on ne fît pas
m ême fem blant de l ’entendre. L e s faifeurs de T a b le a u ,
en p erpétuant par l’impreiîîon d ’un
A r r ê t , fans celle
rc n o u v e llé [ i ) , d’ une manière allez peu d écente, la honte
d ’un de leurs C on frères j
m ’ont adminiftré la p reu v e de
ce fait. U n M e M ic h ela rm e qui n’avoit fans doute point
d ’écritures à faire
ou q u i p eu t-ê tre v o u lo it rendre fer-
vice à q u e lq u ’ami qui ne pouvoir, pas figner celles q u ’il
f a i f o i t , co nientit de les adopter
d ’y appofer fon nom.
O n dénonça le cas énorme au Bâtonnier qui xava de
dciTus le T a b le a u de 1 7 2 ^
M e M ic h ela rm e . C e lu i - c i
n ’en tint com pte : il continua de mettre des iîgnatures
de com plaifance au bas de com portions qui n’étoient'pas
les Tiennes, & M e G r o f t ê t c , Bâtonnier en 1 7 2 7 , d eu x
ans a p r è s , fu t o b lig é de le d éférer à la C o u r .,
&
de
cfemander q u e f a radiation demeureroit; grand a v e u de
l ’infuffifance de la radiation familière pour priver un
A v o c a t de l ’exercice de fes fo n d io n s 5 mais fur tout d é monftration du p eu de cas q u e faifoit le p ro fe rit, de la
profeription & de fes auteurs.
E t m ême a u jou rd ’hui., q u e le R é g im e forti de ra d o le fcen ce , fe
M a u ltro t ,
montre dans la vigu eu r de l’âge viril , M e
fom mé par la D ép u tation
de com paroîtrc
devant elle j lui a répondu : « que les v e n ia tj n’étoicnc
» point faits
pour lui ». C e J u rifc o n fu lte eitim able ,
( i ) C e t A r r ê t r e p a r o î t t o u s le s a n s à l a fuite d u T a b l e a u . O n r e m a r q u e r a q u ’ il
i n c u l p e u n A v o c a t & u n P r o c u r e u r , l e P r o c u r e u r aiïirz l é g è r e m e n t p a r u n e i m e r J i û i o u
d e fix m o i s , & [’ A v o c a t p a r l a r a d ia t io n . L e n o m d u P i o c u t e u t c f t e n b l a » c £: c e lu i de
1 A v o c a t e n t o u t e s le t t r e s . C e l a n e l a i d e p as d ’ in d i q u e r c o m b i c n l e R é g i m e eft l» « “
i n t e n t i o n n é p o u r fe s f a j e c s .
�*Uw
^
62.
-
c u iu ié , agrégé au C orps des A v o c a ts de Paris depuis
plus de 50 ans,, a déduit fes raifons dans u o is
lettres
v ig o u reu ies^ 1 ) , u u l a D octrine de l ’O rd re en g é n é i a l u n i t
pas plus m énagée q u e Ja conduite de certains individus.
C es trois lettres ont été im p rim é es, d iv u lg é e s , &' le
R é g im e p r o v o q u é , s’eft abilenu a ve c r é v é r e n c e d e tou
ch er à ce vén érab le V ie illa rd , dont la co urageufe réiift a n c e & l a noble ferm eté,ont ajouté aux titresj q u ’un long
' cours de v e r t u s , lui ailiiroit à r d i i m e 3c à l ’admiration
*•
générales.
M a i s , dira-t-on, « E f t - c e q u e vous refu fez aux A vo ca ts
„
le droit de retrancher du T a b l e a u , ceu x qui leur d é-
,, plaifent ? Nierez-vous., au moins, q u ’ils ne l ’e xercen t >
Si je le leu r refu fe ! O u i certes. E t à q u e l propos,
le Bâtonnier , la
D é p u ta tio n , l ’O r d r e entier , rayç-
roiçnt-ils un A v o c a t du
T a b le a u ? Y ont-ils la plus
lé g è r e influence ? N e le reconnoiifent-ils pas ? C e T a
bleau , c ’eft un A r r ê t du P a rlem en t qui l ’a fait exifter.
A - t - o n vo u lu y
apporter q u elq u es
changem ens j
n ’y
introduire q u e ce u x qui y auroient p oftu lé une P la c e
. pendant quatre ans ? I l a fa llu un autre A r r ê t de la C o u r
q u e les A v o c a t s ont follicité. D ’où fuppoferoit-on q u e
viendroient leurs droits à en retrancher leurs C onfrères >
( 1 ) O n y lit l a p h t a f y f u i v a n t e : J t tiendrai à honneur de n i plus appartenir à un
Ordre qui a tant dégénéré de Jon antique vertu , £• qui
f i PT°digieu-ement & f i
juftement déchu de I'ejlime publique.
E h ! niais , o d p r e n n e n t d o n c tant de f i t p c t b e , e e u x q u i fe Iaiflên t a i n ii tr a it e r , fa n s
d ire u n m o t . f a n s fa i r e u n p a s , c c q u i f c m b j e a v o u e r la d e t t e f L e u r i ie d - il b ie n île r e f u l c r
u n e p l a c e a u p r è s d ’e u x , i u n h o m m e q u i p o u r r ie n f u r l a t e r r e , n e v o u d r o i t f o u ff r ir
u n e p a i t i l l e a p o f t t o p h e , n i f u r - t o u t la iiïe r c r o i r e q u i i l a m é r it e ? D a n s l ’ é ta t d e s
c h o i e s , à q u i d e n o u s a p p a r t i e n t - i l d e f e p la in d r e d ’ un r o i i î n a g e p e a h o n o r a b l e î
�Ils le f o n t , je le fai 3 mais ils le font par un abus contre
l e q u e l , les M agiftrats n’attendent peut être , q u e d ’être
i n v o q u é s , pour l ’arrêter ( 1 ) . E n tout d is , leur radiation
n ’a jamais été q u e précaire. P o u r la rendre cfFetilive, il a
été nécefîaire q u e l ’autorité de la C o u r y foit intervenue ;
& c ’effc la déciiion de la C o u r f e u l e m e n t , qui a donné
q u e lq u e force à leurs délibérations. S u iva n t fa fagefle ,
la C o u r les a confolidées o u anéanties. Si e lle confirma
la radiation de M e M ic h e la rm e , par e xem p le , e l l *
ordonna le rétabliflement de M c F lo r e n t Parm entier ,
q u ’on s’étoit a viié de fupprim er du T a b le a u ou fans
m otifs, ou par des motifs qui lui parurent infuffifans.
Q u e ce lu i qui auroit la faufle p révention q u e
A v o c a ts ont entre e u x ,
les
une difeipline l é g a l e , un p o u
voir fur l ’état les uns des a u t r e s ,
fe
d éfa b u fe donc.
L ’univerfalité des décrets de nos M o n a rq u e s , le fenti*
ment des A u t e u r s , la féric des A rrêts , l ’ufage toujours
corroboré par lui-même, s’accordent à renferm er dans le
fein d u P a r l e m e n t ,
comme' dans un d ép ô t inviolable ,
tout ce qui concerne l ’E ta t &
l ’honneur des A v o c a ts .
P o u r diitraire une p arcelle de cette précieu fe confignatio n , 2c la confier à d ’autres eard
iens, il faudroit ch an O
ger
O
leur conjlitution 5 2c je vais établir q u e ce tte D é p u ta tio n
q u ’à fait naître l e . T a b l e a u , ce fim u la c re de T r ib u n a l,
d eftru & eu r de l ’éclat £c de la liberté de la Profeilion ;
nuiiîble aux avantages q u e le P u b lic à droit d ’en atten-
( 1 ) C e f t c e q u ’ a t r è s - j u d i c i e u f e m e n t fait le P a r l e m e n t d e B î C i n ç o n , q u i v ie n t d e
t e n d r e u n A r r ê t , c o n f i r m é a u C o n i e i l , p ar l e q u e l , t o u t e s ce s p r o i c r i p t i o n s d e C o n f r è r e s
d a n s le fq u e lle s u a h o m m e h o n n ê t e n e fau roit tr e m p e r fan s r é p u g n a n c e o u fans rem ordJ,
f o u ; f a g e m e n : p r o h i b é e s p o u r l ’a v e n i r , Si j u f t e m e n t a n n u l l é e s « o ” ' !»* - - 0"'
�s
o *
<5-4
dre j u fu rpateur d ’une autorité q u ’il n’eut ja m a is, & q u i
fu t de tout tems r é f e r v é aux Coursj je vais, dis-je,établir
q u e cette
repréfentation
contradi& oire
de
T r ib u n a l
eft
de
plus
ave c le cara& ère eflentiel des A v o c a ts >
directem ent o p p o fé aux L o i x , aux formes du G o u v e r nem ent ; 6c fans doute digne d’attirer des peines graves
fur la tête de ceu x qui le com pofent
fi pour en devenir
•¿çs M e m b r e s , ils étoient plus conduits par une volon té
é c l a i r é e , q u e par une facilité 6i par une habitude égale
m ent aveugles.
Partons de principes inconteftables : tout A v o c a t cil
l ’éga l d’un autre A v o c a t.
I l doit néceifaivement l ’être.
C ’efl déjà trop q u ’on ne puiiTe o b vier à la différence des
talens. Si l ’un p ou voit en impofer à l ’autre , fi la J u fticc
écoit o b lig ée d ’écou ter c e l u i - c i , a ve c plus de foin s
a v e c plus d ’égards que c e lu i- la j elle briferoit fa balance ,
011 la jetteroit loin d ’elle. M ais un E g a l n\a point do
p ou voir fur fon E g a l. P a r in parent non habet imperium.
O r , ce q u ’ils n’ont
p a s, ce q u ’ils ne fauroienc a v o ’r
chacun en particulier , peuvent-ils l ’avoir réunis ? N o n ,
m ille z é r o s , ne font pas plus q u ’un zéro. Peuvent-ils fe
le conférer les uns aux autres ? C e feroit une abfurdité
de le fu p pofer. N em o d at, quod non habet. I l faut donc
co n clu re que parmi des éga u x., d ’une égalité e fle n r ie lle ,
il c il contre la nature des chofes , d ’admettre une Jurifdiction de t o u s , fur tous, ou de q u e lq u e s-u n s , fur le refte.
A U ns plus loin : un axiome p hyfiqu e } c ’eft q u e » pour
» a g ir , pour donner p'rife fur foi,il faut être Corps. Facers
& j u!lo '1 f i ne corP orc -» nu^ a P otcf i rcs.
L e s A v o c a t s fe
font
�61
font toujours' défendus d ’en former iiinX.it}. .Amalgamés-
autrefois a ve c les Procureurs „fous le titre di,Com m unauté
.■des A v o ca ts & Procureurs , ils avoient fous .cette dén o
mination une om bre de u>miilance. C e t alliage qui duroic
.depuis pluiieurs S iècies h u r a déplu
ils viennent d e
l ’abjurer j & de cette m a n ière, il ne leu r reftè pas m êm e
cette om bre de confiitance q u ’ ils ont eue. A préfent de
q u e lle énergie font-ils fu fcep tibles ? Q u e l l e aclion leur
co nviend roit com m e A ffe m b lée ? T a n t q u ’ils d em eure
ront dans cette n u llité de C orp oration , on leu r accor
de roit des prérogatives q u ’elles ne pourroi.ent s’imprimer
fu r eux 5à moins q u ’on n’admît l ’exiftence d ’une form e fans
matière. Sem blables à ce tte image d ’A n c h ife ,q u i s’évanouit
dans les bras d ’E n é e 5 leurs efforts, leurs prétentions, leurs
démarches j n’ont donc pour termes de comparaifon , q u e
les
chimères d ’un rê v e
o u les apparences légères des
nuages.
E t fi on vo u lo it y prefridre g a r d e 5 on re rro it com bien
font juftes de pareilles conféquences. C a r q u ’eft-ce q u e les
A vocats? P o u rq u o i les ap p elle-t-on un O rd re ? L e s A v o
cats font des L ic e n c ié s en D r o i t , q u e les P a r le m c n s , au
n o m d u R o î ,o n t déclarés inftruitsdes L o ix Si d ig n e s d t les
xappeller aux Juges & aux Parties. P o u r c e la , ils n’ont
b e fo in , ni de fe voir, ni de fe connoître. A u lii ne tiennentils en fem b lc par aucuns S ta t u t s , com me les C orps de
M étie rs. Ils ne ferrent de nœ uds q u e ce u x qui leur con
v ie n n e n t, & qui p rennent leur force dans des rapports
( i ) a L e s A vocats coniîdérés tous enfem blet ne forment point un C jip s
abrégée de l’O r d r e , ch. i , .
I
iiiÆ»
�oS
de cœ u r fie d’e fp r it , tout-à-fait étrangers à la Profeflion.
C ’eit cette indépendance m utuelle dans la q u e lle ils fu b i î i l e n t , qui a fait donner à leur C o lo n ie > le titre d’ Ordre.
A p p e lla tio n v a g u e qui ne fignifiant, ni un Ordre R e lig ie u x
n i un Ordre M ilitaire , ni aucune afibeiation pareille *
co n ferv e
l’indétermination q u e lle a dans la langue. O n
dit Yordre des A v o ca ts ;
comme on dit , un ordre de
C itoyens. L e premier , ou le dernier ordre des C itoyens ,
v a d éfign er, foit la N o b le fle , foit le P e u p le d’ une V i l l e >
& le mot Ordre s’applique indifféremment aux Grands &
à la C an aille.
O n a peine A co n cevoir q u e des I n d i v i d u s , rangés
à cô té les uns des autres , dans l ’état du plus jufte niveau
& du plus parfait i foie m e n t , ayent imaginé de placer fur
leurs tètes une C om p agnie d ’Infpecleurs
3 &,
q u ’ils aient
cru de bonne foi que leurs fu fixages vains attribueroient
q u e lq u e p o u vo ir,q u elq u es droits à des D é lé g u é sp h a n ta ftiques. I l ne peut émaner de D é lé g u a n s fans puiiïance ,
q u ’une délégation fans vertu. A infi les m ouvem ens de la
D é p u ta tio n ne font , pour rendre par une phrafe qui
m anque de fens , des actions qui m anquent d’effets, q u e
l ’asitation
du néant dans le vu ide.
t>
M ais fi l’étonnem ent p eu t ce f i e r , lo rfq u ’on voit que
rétabliiletr.ent exiite
ce n’e i h q u c pour fa ir e place à nn
Sentiment b ie r plus a c t i f , quand on apprend que
ces
D é lé g u é s , ii com p lettcm ent inertes, ofent portant attaquer
la réputation ,f ôter le pain:, ôter l état
arracher l ’hon
neu r à des C it o y e n s , leurs .Cor.frcies, en les d é g r a d a n t ,
en les rayant arbitrairement du T a b l e a u > ce qui dans
l'opin ion publique 3 dit l’A u te u r de l'H iitoire A b r é g é e de
�*
l ’O rd rc j .C h . X ' , emporte une note d’ ignojninie*-.* T t
¿7
Com m ençons par admettre qu'ils ayent le droit affreux d e
traiter ainfi leurs C o llè g u e s . E h ! Com m ent fe refolven tils à en faire ufage ! U n M a g iu r a t fe p l a i n t , quand l im
périeux com m andement de la L o i le conduit fur un fiège,.
où il faudra q u ’il févifTe contre un m alheureux qui n’a
d ’autre titre à fa co m m iiera tio n , q u e le nom d ’homme j
ce
M a giftrat vou d roit
alors pouvoir tranfmettre fon
autorité à d ’autres perfonnes ; & ce n ’eft q u ’à contre-cœ u r
q u ’il fc prête à la rigueur de fon miniltère. Q u o i ! les
A v o c a t s , réduits à la dure extrém ité de m u l& e r un d’e u x,
ne devroient-ils pas ch erch er une e xeu fe pour fe défendre
de le condam ner eux-mêmes ? N e devroient-ils pas fç
réunir ,
conduire
l’infortuné aux
pieds
des
Juges »
rem ettre à c c u x -c i le gla iv e qui leur auroit été confié ,
& fc retirer en le u r recom m endant encore fes intérêts !
C e tte conduite lou ab le ne laifTeroit'foupçonner ni l’intri
g u e , ni la jalouiie. E i t - c e c e lle q u ’ils tiennent ? B ien
loin d e-là . P o u r exciter leu r c o u r r o u x , il fuffit de leur
difputer le p rivilège de fe nuire , ou de s’oppofer aux
épreuves q u ’ils en font. M a is il eft d’évid ence que rien
n ’autorife , ni ne p eu t autorifer leurs procédés 5 dès-lors ,
q u e lle qualification ne m ériteraient pas leurs déportemens ?
F a ifo n s-e n juges , les A v o c a ts e u x mêmes. Si j’allois
les trouver tous., les uns après les autres 5 h je leur difois :
« Plufieurs Particuliers fe font lig u é s , &. fans titre , à
» l ’in fp e â io n de m a perfonne ou de mes m x u r s j ils ont
» e xercé à mon égard une fcandaleufe inqu ilkion. Ils
» ont fini par me r u in e r , par me Hccrir dans l ’opinioo
1 2
�vO *v
T.
» p u b liq u e ». Q u e m é répondroîent-ils ? A coup f û r r
vo ici ce q u ’ils me répondroient : « R e n d e z
P la in te
5> contre des êtres auill dangereux pour la fociété , & q u i
»
trôublent fi gravem ent Ton harm onie. P r o u v e z le u r
sJ d é lit, attirez au milieu de ces hommes f u n e f t e s , la
»
foudre de la Jufticej q u ’elle les anéantifle ou au moins
*
q u ’elle diilipe leu r cabale.
Soyez
certain q u e vo u s
si ob tiend rez uiie réparation co n ven ab le aux torts q u ’ils1
» vous ont occafionnés, foit dans vos b ie n s, foit dans
»
votre ren om m ée» . Si j ’ai pofé exactem ent la q u e it io n r
la D é p u ta tio n n’a t-e lle pas perdu fon procès?
J ’entends d3ici une voix f u p e r b e , qui empruntant tin
palîage
de
M o n tc fq u ie u , pour
A v o c a ts font
Cenfurer,
par
me p ro u v e r
q u e les-
le u r e x c e l le n c e , en pofieifion de fe
c ’e ft- A- di r e , dé retrancher de leurs M em b res
ce u x q u ’ilsju g en t à p ro p o s, me d e m a n d e : » fa v e z - v o u s c e
’» q u e c ’eft q u e la C e n fu re ( i) ? »
O u i , repliquerai-je à la v o i x , je le fais & je ferois
bien hon teux de ne pas le favoir m ieux q u e vous. L a
C e n fu r e étoit à R ^ m e , un ju gem en t porté par des M a*
filtrats légitim em ent é l u s , qui avoit pour b u t u n iq u e de
*Cenfoii jr£- f airi rougir le Citoyen qui en étoit l'o b jet * . L e C e n f e u r
<;«« mhïifirh o b lig é de d éclarer fes m o tifs , pouvoir être traduit devant
damnito ajfert
ü
.
.
.
i
i n •
• •
rr
mfîruborem.
le P e u p le . I l ne jugeoit ni clandeitrnement ni îrrerragaj y ’ Libf Te blem cnt. I l fe réform oit q u e lq u e fo is lui-même. O n apm,
,
i
_______________
( i ) T e l c f t l e d é b u : d ’un petit P a ir ip h li t a n o n y m e '‘¡.ui p aru t i l y a p o u i a a n s f o u s c c
■titre, l à C e n s u r e . C ’ eft u n R c c i u i l ra re d’ i g n o r a t i c c s . I g n o r a n c e d c l a n g u e , i £ n o r a n c c
d é f a i t s , ig n o r a n c e d e p r in -ip e s , ig n o r a n c e de ia ;( o n n c n ) e n t, & c . il en co n tien t d ï
t o u t e s le s e f p t c e s , & fi je ne c o n n o i f f o i s u n A v o c a t , d o n t !e p r o j e t c f l d e d o n n e r
h e u r e s d e fe s v ^ e ït n e e s z la x c f u t â . i o u d e c c t t c f o l l i c u l e , j ç n i 'c i i i c r o h ï o c c u p é .
�p e llo it d e fe s ju g e m c n s , 8c o n le s faifoitinfirm er , q u o iq u ’ilsne fiflent au cu n tort ré e l à celu i q u ’ils frappoient.
On
a une fou le d’exem ples de R o m ain s notés par le C e n f e u r
Sc depuis élevés par le P e u p le aux premières dignités ,
2c même à la C e n fu r e (i ). D a n s le v r a i, la C e n fu re étoic
bien plu tô t une admonition q u ’une Sentence.
M ais q u ’ont de com m un cette admonition ou cette
S e n t e n c e , a v e c les a&es de J u rifd i& ion q u e fe perm ettent
les A v o c a ts ? E n quoi des C e n fe u rs lég ale m en t prépofés
a l’indagation des m œ u rs, dont ils d é v o ile n t au P u b l ic le
r e lâ c h e m e n t , afin d ’en p révenir les d éfo rd res, 6c d ’exhalter dans des R é p u b lica in s , le fentimenc de l ’hon nête 5 en
quoi ,c e s Officiers 3 chargés de c o r r i g e r , 2c non de punir.,
reiTemblent-ils à des D é p u té s fans miifion p o ilîb le 5 ju geant
fans raifons apparentes 5 & p roferivant fans retour , fans
appel ? A u ta n t l ’établiiTement des premiers infpire le
re fp e£ t, autant l ’éruption des féconds imprime l ’averiîon
pour ne rien dire de plus.
C a r examinons c e u x - c i , de fang froid. i ° . N ’efl-il pas
vrai q u e l ’inilitution de furveillans pour certains a b u s ,
fu p p ofe les abus ? D è s q u e vous cré ez pour les A v o c a ts ,
des Gardiens d ’h o n n e u r j vous adm ettez q u e les A v o c a ts
m a n q u e n t, ou m anqueront à l’honneur. C 'e ft ainfi q u e
les M e r c i e r s , les T a ille u r s 6c autres C om m u nautés d e
M archan d s ou d ’O u v r ie r s , ont des M aîtres G a rd es p ou r
faire des v ifite s , d éco u vrir les contraventions 6c d én o n c er
les contrevenans. L e s D é p u té s feront d on c les M aîtres■»ra m*xn
( 1 ) D e p u i s q u e le s A v o c a t i r a y e n t d u T a b l e a u c e u x d e s le u r s q u i o n t 1« m a l h e u r ‘ fe
l e u r d é p l a i r e , il e f t i a o u i , q u ’ ils e n a y e n t r é t a b l i u n f c u l . L a r a d i a t i o n . e f t w 1 A t y i c
J
n mo ie
tr .
îlei» ru
�ty û
7°
G ard es de (’O rd re . 2°. A u moins les M aîtres-G ardes des .
Com m u nautés ont des R é g le m e n s auxquels ceu x qui font
füjets à leurs perquilitions doivent fe conform er, T o u s fave n t fur quoi portent les prohibitions, quand & ce q u ’ils
o n t à rifquer. O ù io n t les Scatutsdes Avocats? R ie n d ’écrit,
rien de perm anent parmi eux. U n e tradition orale, plus
v e fü itile encore q u ’imparfaite , fert de bafe à leurs réfolu tio n s , q u ’on ne rédige p oin t, aiïn q u ’elles s’o u b lie n t
m ieu x , &
q u e le même cas d écidé pour tel qui n ’a nul
a p p u i, aucun p rô n e u r, puifie être d écidé d ’une manière
çntièremdnt op p ofée , pour tel qui eit en c r é d i t , & q u e
la brigue p rotège. L a lo i d’ honneur eji Leur Code j dit la
C e n fu r e . M ais cette loi même p u lvé rife & la d ifciplinc
p rétendue de l ’O r d r e , &. la D ép u ta tio n , & fes œ u vres.
P o u r être fournis à l’e xam en , il faut q u ’un C o n frè re foie
d éfé ré par q u e lq u ’un. U n d éfé ré p eu t-être innocent. O r ,
çrès-certainemept aux y e u x 4e l ’h o n n e u r, le délateur eft
u n crim inel auilî vil q u e lâche. A in fi l ’on d e v r o it , le lo n
je C o d e in v o q u é , d éb u ter par rayer le délateur 5 &
ce
feroit c p f u i t e j fur la parole d ’un coup able q u ’on rayeroiç
le p révenu . Q u e l l e constitution q u e c e lle où pour avoir
un a c c u f é , il eft de toute néçeiîité d ç faire un prévarica^
peur ! 3 0. O n n’a donc pas daigné confidérer un inltanç
de quoi il s’agifloit i c i , &. les gens qui citent M on tefq u itu .
affectent donc d’en ou b lier une des principales maximes ?
Q u e l l e e ft, félon ce p rofond G é n i e , la bafe du G o u v e r
nem ent M o n a rc h iq u e ? Q u e l eft fon reflbrt particulier >
L ’honneur. C ’eftdans ce G o u v e r n e m e n t , c ’eft c h e z nous,
q u e c h a q u e individu apprend à dire , dès fa plus tendre
jeuneiTe : « q u e l ’honneur lui eft plus çh er que la vie »,
�71
,
: ^
r l l n’efl rien q u e l ’opinion p u b li q u e , n’e x e u fe , quand il
a pour m o tif, la confervation de l honneur.
A u d i touc
m anque à qui l ’a perdu. Plus de r a n g , plus de p la c e ,
plus de P a tr ie , pour l’homm e deshonoré. Son parent le
plus proche , fon ami le plus c h é r i , n’oient
l ’avouer.
C ’eft: l ’ancienne interdiction du feu & de l’eau 5 c’eit une
véritable excom m unication civile* &L dans fa trille pofition,
. iîj.e déplorable A n a th êm e n’a pas allez de vertu pour
: mourir de h o n t e , il ne refte plus q u ’à lui fouhaiter aiTez
de courage , pour ne pas mourir de défefpoir. E t c ’e il cet
hon neu r fi précieux que refpecte
le P rin ce lui-meme ,
•au q uel les A v o c a ts toucheroient fans m énagem ent ! Ec
c'eil cette horrible iituarion dans la q u e lle ils s’applaudiroient de jetter leurs A ffo ciés, q u o iq u e le droit d ’y ré
duire , com porte plus q u e le droit de vie &. de m ort!
E n vérité , en vérité , l'indifférence pour les vrais prin- c i p e s , la hardiefle d ’en avancer d ’e rro n é s , après avoir
induit à tout d i r e , m ènent à tout faire. M ais 4 0. depuis
quand en France., y a-t-il une c o n féd é ra tio n , un aréopage
exiftant fans L e t t r e s - P a t e n t e s , fans a u to rifm o n fpéciale
du Souverain , ou de ce u x q u ’il commet à la P o lice de
fon R o y a u m e i A partir des C om pagnies de la fu p ièm e
M a g iilratu re , ju f q u ’aux Jurandes des A r t ifa n s ., nulle
efp èce de C o r p s , ne fe forme que de l’ordre exprès de
Sa
M ajesté.
T o u t e co-alition qui n ’e il pas fceilée du
fceau de la volonté Sou veraine eil traitée par les O r d o n
n a n c e s , d'Ajj'emblée illicite , &. comm e telle prom ptem ent
diilbute , par la vigilance des M agiilrats. A p rès la fam eufe
D écla ra tio n q u ’ils ont donnée en 1 7 3 0 , à la fuite de
1 A rrê t du C o n fc il qui les c o n d a m n o it, « à défavouw ou
37
^
�<<
72
» a rêtraâer, une C on fu lta tion Hgnée de 4 0 d’entre eux,
» à p ein e d’ être interdits » ; après cette D é cla ra tio n ,
dis-je , les A v o c a ts ignorent-ils q u e l ’autorité c il
une
parmi n o u s j . q u e tout e xercice p u blic de l ’autorité doit
ém aner de cette fource unique : L e R o i f e u l Souverain
Légijîateur dans f e s E tats ( 1 ) ? N e fu iro ie n t-ils plus q u e
des droits R é g a lie n s le premier 8c le plus f i c r é , c ’eft celu i
de rendre la juftice? L ’invalion de ce droit cft une révolte,
un crime de L è z e - M a j e t l é , parce q u e le P rin ce étant
garant des b ie n s , de la vie 8c de l ’honneur de tous fes
Sujets 3 attaquer fous fes yeu x,leu rs biens, leur vie ou leur
h o n n e u r , c ’cft m éprifer fa p u iflan ce, c ’eft l ’infulter dans
ce q u e fon ca ra d ère à de plus augulbe , c ’eft le blefler
dans ce q u ’il a de plus fenfible. Q u e s’il punit a v e c fé ■'vérité , le v o le u r qui s’adrefle au x biens , l ’aflaflin qui
-attente à la vie > de q u e lle rig u e u r ne s’armera-t-il point
à l ’égard de q u ico n q u e entreprend fur l ’honneur préfé
r a b l e à la plus brillante fo r tu n e , à la vie même ! E t cette
-rigueur de com bien ne s'augm entera-t-elle pas , fi pour
com p loter le f o r f a i t , l ’on cu m u le le
crime contre le
vfujet a v e c l ’offenfe envers le M o n a rq u e 3 fi , afin de
confom m er le tort q u ’on fait au prem ier , on empiète fur
les plus faintes fon d ion s du f é c o n d , fur celles qui
le
conftituent fpécialem ent le P e r e - P r o te d e u r de la N ation >
enfin fi l’on v o u e à l ’in fa m ie , fi on le prive des fervices
d’un individu qui p e u t être , lui en auroit rendu de
'g r a n d s , en brifant la barrière p ro te d ric e des formes ju
diciaires , dont il entoura fon Peuple j ou pou r m ieux
( 1 ) T e r m e s d e la D é c l a r a t i o n des q u a ra n te A v o c a t s , à la q u e lle le re tic d e l'o rü re
’ %■a d h é r é p a r . l ' i n t e r v e n t i o n d u B â t o n n i e r .
dire ,
�73
cîirc , en corrompant ces formes elles-mêmes , a v e c la
iîmilitude d efqu elles l ’on p erfécute de la m êm e manière
q u ’il protège , 6c l ’on perd com me il fa u v e !
Je m’arrête. D e s abus fi propres à réveiller la follicitude du M in iitère p u b lic , des excès fi dignes de réprefilon , des actes ii téméraires , fi a u d a c ie u x ........... m’em
p êch e n t de me livrer à la difeuflion du foi-difant D é c r e t ,
par le q u e l la D é p u ta tio n m’ordonne de plaider hors du
Banc
des A vo ca ts. C e beau D é c r e t q u e l ’on m’a fait
fo u p ç o n n e r , p lu tô t que con n oître, rendu fans m’entendre
par un T r ib u n a l imaginaire* injurieux à ce u x mêmes qui
l ’ont vo u lu c r é e r , n’admettant
de rè gle q u ’un éternel
ve rtigejfap p an t lesfondem ens de la M o n a r c h ie F r a n ç o ife ,
&: dont ch aq u e décifion eft un attentât aux droits du
T r ô n e Si un délit f o c i a l , ce D é c r e t pourroit foum ettre
fes A u te u rs à une punition exem plaire. O r , à D i e u ne
plaife q u e je rende à mes E nnem is , tout le mal q u ’ils
ont vo u lu me faire ! Q u e la C o u r a ccu eille ma ju fte
prétention , &
j ’irai ju fq u ’à ou b lier tout ce lu i qti’ils
m ’ont fait.
§.
V.
•
-
R ép o n fe à une O b jeâ io n .
•
« O u i,» me d it'o n ,» r ie n n ’eft plus é qu itable q u e votre
» demande 5 mais l ’A r r ê t qui vous l’a ccordera, fortira-t» il fon plein & entier effet j & les A v o c a ts ne tr o u v e » ront-ils pas
le m oyen d’échapper à l ’obligation de
» plaider avec vous ? »
. D ’abord , q u ’cft-ce que cela me fait ? M a C a u fe n’ira
pas moins à fon terme. J e prendrai un ju g em en t par
K
�d é fa u t, & fi je n’ai point de contradiéteur, je ferai forclore
mes Parties adverfes. E n fu ite leur P ro c u re u r peut fu b ftituer l ’A v o c a t j cela fe fait tous les-jours. D ’ailleurs
pou rquoi fuppofer «l’O rd re des A v o c a ts aflez- extraordi
n a ire , pour re fu fer de fe rendre à une fo u le de raifons
dont la moindre eft péremptoire ?
A u furplus j la C o u r n’eft-elle pas la maîtreiîe de les
forcer à rem plir leur d evoir fi elle le trouve à propos ?
L e s O rdonnances &. fes R é g le m e n s , ne laifient pas m ême
de doute fur ce point. C harles V
* Elles fon: d - art.
té e s c i - d e f f u s ,
page 57.
furnom m é le S age ,
de fes L e ttrc s-P a te n te s * , pour l ’expédition des
.
1 5
affaires pendantes au P a r l e m e n t , s exprime ainfi : Se
défaut y a par V A v o ca t qui en fera charrié ( I l s’agit* des
art. de la caufe qui d oivent être produits dans un tems
préfîx) que tantôt & fa n s délais & fa n s aucun déport d ix
livres parifis fo ie n t levées fu r f e s biens.
E t comme par la fuite on v o u lu t faire paifer les difpofuions de cet article pour fimplement com inatoires, 8c
q u ’on eiTaya de les é lu d er en diverfes occafions, C h arles
V I I crut d evoir les ren ou veller par l’art. 4 8
de fon
O rd o n n a n ce de l’an 1 4 5" 3 ■Item & pour ce que fo u v en tes
f o i s notred'ite Cour à condemné les A v o ca ts ù Procureurs
pour les Caufes fu fd ite s & pour autres fu ite s
& fa u tes , en amandes j lefquelles amandes
délais, abus
aucunes f o i s
n o n t p o in t été levées / mais tenues en fu rféa n cep a r requête
q u ils baillent après ou autrem ent, nous , voulant pourvoir
auxdits abus y voulons & ordonnons que dorefnavant in
continent que notre dite Cour aura condemné l e f dits A v o ca ts
& Procureurs pour les caufes fu fd ite s
3 le Greffier fera
tenu
icelle condemnatioti enregiftrer, & le Receveur des amendes
�/ (tJ
7?
exiger ù le v e r , fa n s que de ce leur, f o i t f a i t aucune
rémijfion , grâce ou pardon j
en croiffant les peines par
notre dite C our, fé lo n ce q u e lle verra les fa u te s
d e fiits
■Procureurs & A v o ca ts en fu ite s déraifonnables.
L o in q u ’aucunes des O rdonnances postérieures, ayent
en rien d érogé aux réfolutions de c e llc s - c i , elles les co n
firment. O n peut co n fu lter la fou le de celles que j’ai
indiquées c i-d e v a n t pages j 6 ôc 5 7 .
L a C o u r , dans fes R é g le m e n s , ne s’eft jamais écartée
des voies tracées par les Ordonnances. O n lit dans un
'des premiers q u e lle ait fa it, in titu lé :
du
P
P arlement
arties
qui y
touchant
ont a
tous
plaidoier
les
O
rdennances
espécialem ent
les
Se q u e L o i f e l j nous
a cofiiervé dans fes O p u fe u le s -• « q u e la Partie qui ne
»
feroit oie & d élivrée par la d éfaute de l ’A d v o c a t qui
» devroit plaidicr fa C a u fe , &. feroit certaine q u e ce
feroit par la défaute de l ’A d v o c a t j feroit oie après >
» mais l ’A d v o c a t en payeroit 1 0 liv. d’am ende,tous fes
»
( tout fec fans délais ) & eft à entendre des A v o c a ts
» réfidens en P a rle m en t ».
L es A rticles des injonctions
défenfes & D éclarations
fa ite s &• publiées en la Cour de Parlement p o u r l’ abréviation
de l a J u f l i c e & c .
le 4 e Janvier i
5g 5
p referiven t aux
A v o c a ts : « de fe tenir prêts pour leu r C a u f e , de bien
» connoître leurs pièces & les endroits q u ’il faudra li r e ,
» ainfi q u i l leur fera dit & ordonné par la C o u r, & ce ,
» fur peine de 4 0 fols parifis pour la première fois i êc .
3> s ils font trouvés coutu m iers,
d’autres telles peines
» arbitraires q u e ladite C o u r verra être à faire ».
D e u x ans après , n o u ve l A r r ê t de la C o u r de P a rle K 2
�7 6
m e n t, prononcé en pleine A u d ie n c e , pour le Règlem ent
des A v o ca ts & Procureurs„ & V abréviation des Caufes y
affluantes j, par le q u e l : « ladite C o u r enjoint à tous les
» A v o c a ts chargés des C a u f e s , de fe trouver au commencernent de la plaidoirie. E t où ils ne fe trouveroient à
53 l ’heure , q u e les C aufes dont ils font chargés , feront
33 apelléeSj d é c la ire ic e lle C o u r , q u ’ils feront enregiftrés
30 par le C l e r c , qui rédigera la plaidbirie pour l’amende
33 de a o f. parifis, &. fera ré ferv é à la Partie concre
33 la q u e lle aura été donné exploit fon recours pour fes
3» dommages Sc intérêts, contre
l ’A v o c a t par la faute
39 d u q u e l l ’exploit aura été donné 3».
O n trouve dans le D ia lo g u e des A v o c a ts , des p re u
ves q u e le P a rlem en t tenoit la main à l ’exécution des
O rdonnances & de fes A rrêts. L ’A u te u r qui n’eft pas
f u f p e d , p u ifq u ’il éroit A v o c a t èi q u ’il écrivoit alors en
le u r fa v e u r, ne le diiTimule point. D e plufieurs paiTages
qui y font f o r m e ls , je me contenterai de c e l u i - c i , copie
dans les pages j 28 & j a p « A ce D a v i d » ( nom d’un
A v o c a t plaidant) « reflembloit aucunem ent M e B e r th e ,
3» au moins en ce
q u ’il étoit fou vent
condamné en
3> l ’am en d e, à raifon de q u o i , on l ’apelloit par raillerie ,
33 le p etit A m endiery car il étoit de petite ftature ».
T e l le s font les O rdonnances , tels font ies R eg lem e n s
& les A rrêts de la C o u r. M a is en entrant au Barreau ,
tous les A v o c a ts n ’ont-ils pas promis Si jure de fe confor
mer aux O rdonnances , A rrêts
R eg lem e n s de la C o u r >
C e t engagem ent fi folem nellem ent pris , qui a pu le
rompre ?
Les principes de la Députation j feroien t-ilsqu’on ne
�77
¿ tr
doit pas garder les fermens prêtés devant la C o u r ? O ù les
A v o c a ts en fortant d u B arreau , fe font-ils faits entre eux
lé fécon d ferm ent de ne pas tenir le premier ?
O n ne dira point cjue ces O rdon n an ces, ces A rrêts j ces
Réglem ens , font tombés en d éfu étu d e. L a formule du
ferm ent conitam m ent exig é j s’oppofe à cette idée. L e
T r ib u a a l n ’obligeroit pas tous les jours à jurer , que l ’ on
obfervera des L o i x q u i n’exiitent plus depuis pluileurs
fiècles.
L a C o u r n’a donc q u ’à vou lo ir ,
elle
contraindra
l ’A v o c a t chargé de la C a u f c pour mes A dverfaires à la
plaider , en le condamnant à l ’ amende s’il fait refus j
&
en croiffant les pein es-, fuivant l’O r d o n n a n c e f i au mépris
de l ’amende il s’obftine dans des fu ite s déraifonnables,
fa u f/es dommages-intérêts q u e fe s C lie n s pourront répéter
contre lui.
« L e s A vo ca ts font libres » s’écrie-t-on ? Q u o i libres !
L ib res de m anquer à leurs fe r m e n s , d’enfreindre les
L o i x ! O u i comme tout homme eft libre de commettre
une mauvaife a ctio n , 6c comme le Parlem ent eit libre
*
\
de le punir.
O n cite un D ifco u rs de M . d ’A g u eifea u fur l ’ in d é
pendance des A v o ca ts > où il les vante
de leur liberté.
M ais en premier li e u , on o b fe rv e ra , q u e c ’e il en i «S’p 3
ou M . d’A g u e fle a u prononça cette harangue. N i la C e n
fure , ni les C en feu rs n’étoient imaginés en ce tems-là.
L e s A v o c a ts n’avoient pas encore fubi le joug. V in g t ans
plus tard , ce grand
homme , au lieu de paranimpher
/ indépendance des A v o c a t s , auvoit été ob lig é de recom
mander la deféren ce à l’O rd re ; 6c l’E lo g e de la liberté, fe
�78
feroit converti dans fa b ou che , en celui de la foumiffion
aux jugem ens des D épu tés
E n fécond l ' e u , pour fe
m éprendre au fens de l ’O rateu r
ne pas v o ir , q u ’i lr i ’a
vou lu parler q u e d ’une indépendance relative , réfultante
pour les A v o c a ts de cette exiftence folitaire & in dividu elle
qui les admet à faire nom b re, fans ceiTer d’être des hom
mes p rivés, & qui leur donne un état non tranfmis , non
tranfmiiîîble ; pour ne pas fentir, que la liberté q u ’il p réconife , n’eft q u ’une liberté légale , qui confiile dans l’affranchiffement de tout Statut particulier gou vernant les
fociétaires & dirigeant la fociété , le q u e l affranchiiTement
laiffe les A v o c a ts u niquem ent ailujettis aux L o ix èc aux
T r ib u n a u x , ce qui e ftê tr e auiîi libre q u ’on puiffe l ’ê tr e ,
pour fe trom p er, dis-je
fur l ’acception dans la q u e lle il
a pris ces d eux mots , indépendance & lib erté, il faut
n ’avoir pas lu ce D ifco u rs entier. L a maniéré dont i l le
termine , lè v e toute incertitude fur fon intention. « L e s
» Procureurs.,» d it-il,» n’ont pas davantage d’exercer une
» Profeiïïon ii é cla ta n te 5 mais q u e lq u e différence q u ’il
»
y ait entre leurs fonctions’., ils p eu v en t s’appliquer les
» mêmes maximes ». A in li les A v o c a ts & les Procureurs
font aulîî libres auiïi indépendans les uns que les autres.
j
Q u a n t à l ’indépendance civile que fem blent réclam er les
p re m ie rs } ce cé lèb re C h e f de la Juftice etoit fi peu d ’avis
q u e lle fût ou q u e lle pût être leur appanage q u ’il écrivoit
à leur fujet en i 74.9 : K q u e
P^L1S g r;w d de tous les
» inconvéniens cft ce lu i de laiffer méprifer l’a u torité, de
01 de fouffrir q u ’il y ait un Corps dans l’E tat qui fe préw tende indépendant de toute puiflance ».
£ t «1 q u e l titre les A v o c a ts afpireroient-ils à cectc
�79
m onftrueufe indépendance : M ettons pour un m om ent
de c ô té
la quantité des L o i x Pvomaines qui les aflrei-
gn en t à prêter leur m iniilère j fous telle ou telle peine j
ne regardons pas non plus , à nos O rdonnances 5 traitons
la matière fur les feules règles
du bon fens.
O
Ils co n vien n en t q u ’un A vo ca t,, « c il un homme de
» b ie n , qui fait parler » , vir bonus diccndiperitus. Mais
un homme de bien q u ’eft-ce ? P o u r q u ’on ne me chicane
pas fur fa définition j je la tirerai d’un P oëte P h ilo fo p h e
qui s’étant fait la même queftion , ne nous avoir certes
pas en vu e en écrivant la réponfe. « L ’homme de bien
»
q u e l efl-il ? C e lu i
qui fe foum et 'aux A rrêts , qui
» obéit aux L o i x & fuit les C o u tu m e s » .
P ir bonus ejî quis ?
Q u i conjulta P a ir u m , qui leges ju r a que fervat.
Horat. lib. n , Epift. i S .
O r , s’ils refu foient de fe foum ettre à l ’A r r ê t qui
m’affermira dans la jouiflance de mon d r o it ,
en s’obfti-
nant a-ne pas plaider contre m o i, comm e ave c un C o n
frère , ils facrifieroient donc la qualité d’ homme de bien
à celle d 'A v o ca t 3 q u o iq u e celle-la tienne ie premier rang
dans la compofition de celle-ci.
Je les prie de me dire e n c o r e , s’ils cro ycn t leur O ffice
eiTentiel dans la conflitution a & u elle de la chofe p u b li
qu e ? In fa illib lem en t leur avis fera q u e cet O ffice
c il
efîcntiel. Je leur demande alors fi depuis q u ’ils font
A v o c a t s , ils ne fe regardent plus comme C itoyen s ? Ils
fe recrieront fans doute & protefleront q u ’ils s’honorent
\ 1y*
>*1
i l .
1
ae i e t r e , & q u i ls font gloire de marcher au rang des
meilleurs. M ais un C ito y e n , après avoir obtenu de fa
�Patrie , un tém oignage de confiance par la collation d ’un
O ffice cfientiel , q u ’il en a f o l lic it é , peut-il par q u e lq u e
m o tif que ce foie , abandonner cet Office au détrim ent
de fa Patrie ? Q u a n d même il imagineroit voir des raifons
qui i ’.iutorifent à fe défendre de remplir fa p la ce j peut-il
fe conitituer J u g e de la valeur de ces raifons? U n e maxime
p areille accréditée ouvriroit la porte à tous les b o u leve rfçm ens. Q u a n d la L o i ,
quand les T r ib u n a u x com m an
dent , le C ito y e n exécu te leurs ordres. C e lu i qui réfiile,
n ’ext q u ’un r e b e lle , q u e les L o i x , q u e les T r ib u n a u x
d oiven t ramener à l ’obéiflance.
E t f i les A v o c a ts ont eu auttefois une forte de prétexte
au file n c c , ou à l’a&ion volontaire dans l ’efpèce d’ inco
gnito a v e c le q u e l ils exerçoient leur Profeffion ; ils l ’ont
abandonné par la publication du T a b le a u . C e u x qui fe
font inferire dans cette L i f t e , c o n t r a i e n t avec l ’E ta t qui
aflure à chacun d ’eux des
a v a n ta g e s , en confidération
defqu els tous s’engagent à fervir le P u b lic . V o u d ro ie n tils donc que le contrat ne fû t obligatoire q u e d u 'c ô té de
l ’E t a t j
p ré te n d ro ien t-ils, pendant
tranqu illem ent les privilèges qui leur
q u ’ils exploitent
font a c c o r d é s ,
q u ’ils ch erch en t m ê m e , j’en fuis la preu ve , a ie s étendre
au -d elà de toutes bornes, prétendroient-ils, d is-je, reiter
libres de fe fouftraire aux devoirs q u e ces P rivilèges leu r
impofent? A fliirém cn t ils ne canoniferont point en ce qui
les touche ,u n e D o û r i n e , q u ’ils fe h âteroien td ’anathéniapifer, fi elle fe préfentoit par-tout ailleurs.
L a religion du fe rm e n t, le rcfpe£t pour les L o i x , les
faints devoirs de P a tr io te , de Sujets fidèles, la néceffité
¿ ’acq uitter les claufes d’un contrat fy n a lla m a tiq u e , les
�8t
plus fortes chaînes enfin , tant au for intérieur q u ’à i ’exterieur , lient les A v o c a ts
à l ’obfervation du ju gem en t
qui interviendra.
E h ! com m ent le u r a-t-il fa llu un ju gem en t pour laifler
un de leurs C onfrères en pofleilion de la plus légère pré
rogative j de ce lle q u ’on ne refu fe pas même à un fimplc
C ito y e n qui n’y afpire q u ’à l’abri d ’une éducation un p eu
foignée , & à qui ce titre fuffit pour l ’obtenir ! C om m e n t
ont-ils p e r m is , ont ils fouffert q u ’au m ilieu du T r ib u n a l,
en préfen ce de tout ce q u ’on re fp e& e , on me fît tout
entier un affront fanglant dont on m énageroit la honte
au plus m ép rifab le des hommes dans la
‘fociétés civiles ! C om m e n t la
derniere des
D é p u ta tio n , ce co n v e n -
‘ tîc u lc de fantômes qui prononce au hafard des A rrêts
n on rédigés ,
non fignifiés &. pourtant e x é c u t é s , qui
dans fa fouveraine inexiftence , fait un tort du m a lh e u r,
un reproche du t a l e n t , un crime du travail j com m ent
dis-je la D é p u ta tio n s’e il- e lle enhardie, ju fq u ’à m’en leve r
fans explication de ma p a r t , ni de la Tienne & fous les
regards du P a rle m en t , les droits q u e m’a conférés le
P a rle m en t j & fur le fq u e ls les premiers J u g e s , s’étoient
abftenus de rien d écid er
! M ais com ment fur - t o u t ,
après q u e les A v o c a ts m’ont exclu s du B a rrea u , un A v o c a t,
M e G i q u e l j a t-il pu s’y montrer , &. mon pofte vacant,
obtenir contre moi par d é f a u t , des jugem ens auxquels
on ven oit de m’interdire la faculté de m’oppofer ! » N o u s
» fom m esdans l’arène,vous me faites arracher mon arm e,
» ôc v o u s , dem eurant armé , vous me p o u rfu iv ez , vous
» me frappez. . . A r r ê t e z , & en attaquant mon h o n n e u r ,
» fo n g e z donc au vôtre ».
�•
82
J ’apporte aux pieds de la C o u r, mes griefs &: mes
doléances. Les uns ne motivent que trop les autres. Je
dois aux vaines difficultés que quelques Avocats m’ont
fufcitées , une foule de procédures fruftratoires qui dévorent mon patrimoine. L a Chicane s’inftitue héritière
de mon père ; & ce n’eft pas affez de me dépouiller de
ma fortune , je dois à leur injure , la perte de ma fanté
& celle de mon repos. L e tems coule trop rapidement
pourfatisfairé aux courfes, aux écritures diverfes qu’exige
de moi la foule des incidens que le premier à fait naître.
Les auteurs de ma peine voient mon trouble, mon cruel
embarras, mes écrits &: mes démarches également préci
pités , ils les voient, ils en rien t, ils en profitent. Mais
les Juges fupérieurs, dont j’efpère tant, ne leur font-ils
rien craindre ?
\
S ig n é , M o r i z o t , A v o c a t & Partie.
M onfieur
SE G U IE R ,
A v o c a t Général.
B R A Z O N , Procureur.
»
.s. , j »11 * ,n i *"■ v *.. rr,. «.
De l'imprimerie de Q u i l l a u , Imprimeur de S. A . S. Monfeigneur le Prince
DE C O N T I, rue d u Fouare, N ° . 3,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Morizot. 1785?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Morizot
Séguier
Brazon
Subject
The topic of the resource
avocats
plaidoiries
commis
successions
usages locaux
tableau des avocats
Parlement de Paris
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Maître Morizot, avocat au Parlement. Contre monsieur le procureur-général.
Page 25, note de bas de page mal numérisée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Quillau (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1785
1784-1785
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
82 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0808
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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avocats
commis
Parlement de Paris
plaidoiries
Successions
tableau des avocats
usages locaux
-
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7bab98375141e5b3d333b6a63ba26d8a
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Text
REPLIQUE
POUR
Demoifelle
A n t o in e t t e -L o u ise A
n-
procé
dant fous l'autorité d’Antoine M augis, fon T u
teur ad hoc.
g e l iq u e
-C h a r l o t t e
C O N T R E
B
C
o m b e ll e s
d e
C
h a r le s
ess ie u r s
De
B om belles ,
r é d é r ic
M
a r ïe
Vicomte
-F
d e
r a n ç o is e
.
En préfence de Demoifelle
teffe d e B o m b e l l e s ,
M
- F
Demoifelle
&
a r v o is in
de
Cam p3
M a r th e
Vicom
,
tous les incidens bifarres que cette C aufe préfente, le
plus fingulier p eu t-être, le plus é to n n a n t, c ’eft que dans l e ,
;
A.
�prodigieux efpace de tems que nos Adverfaires y ont d o n n é ,
elle foit devenue beaucoup plus obfcure qu’auparavant ;
8c
qu’après fix A udiences em p loyées, s’il faut les en croire , à
nous répondre, la partie la plus eiïentielle de nos moyens foit
reilée fans rép on fe, que le véritable nœud de l’affaire, l’article
qui d ev o it, ce fem ble, mériter fu r-tou t leur a tten tio n , foit en
core à traiter de leur part.
V ou s vous le rappeliez, M e s s i e u r s , je l’avois réduite à.
deux points principaux. P e u t-o n , d oit-on préfum er qu’il y a
eu un premier m ariage? L e fécond m ariageeft-il valide? V o ilà
les deux queftions que je me fuis attaché à réfoudre dans la
«feule & unique A udience où j’ai eu l’honneur de vous entre
tenir. A llia n c e lég itim e, contra&ée par celle que je défends :
alliance a b u fiv c , contrariée par la D em oifelle de Carvoifin.
T e lle a été la divifion toute naturelle de m on prem ier P la i
doyer. J’ai prouvé que la nature & la raifon fe réuniifoient
pour confirm er les droits de l’u n e , com m e la Xuftice & les
L o ix pour proferire l’ufurpation de l’autre.
N o s Adverfaires ont affe£é d ’abord de publier q u ’ils fe c o n form eroient au m êm e plan , & il jette en effet plus de clarcc
dans la difcuffion. Mais ils l ’ont bientôt perdu de v u e , ou du
m o in s, ils ont jugé à propos de n’en rem plir qu'une partie. I l*
ont oublié qu’il s’agiffoit moins pour eux d ’attaquer, que de fe
défendre ; &
cette méprife inconcevable nous donne dès à
préfent un avantage qui ne vous eit certainem ent pas échappé.
T ou s leurs efforts fe fon t dirigés contre le premier m ariage.
I l n’y a pas un d’eux qui ait ofé prendre fur lui de juftifier le
fécond
& en le lailîant ainfi H l’éca rt, ce n’efl pas qu’ils aient
réellem ent dédaigné nos moyens d’abu s, ce n’eil pas qu’ils les
aient jugés infuffifans, ils en ont eux-m êm es fenti & reconnu
�*33
3
la force ; mais dans l’impuiiTance où ils fe trouvoient de les
détruire , ils ont mis en ufage un ilratagcmc un peu étrange ,
pour fe difpenfer même de les attaquen
* Vous avez entendu le Sieur de Bombelles & la Dame
Herinet, renvoyer a leur affociée la corvée pénible de les com
battre. On vous a hautement & pluiieurs fois annoncé que le
Défenfeur de la Demoifelle Carvoiiin briferoit, en fe jouant,
dans nos mains ces armes importunes dont on feignoit de méprifer l’éclat. Q u’en eft-il arrivé? La Demoifelle Carvoifin a
paru à. fon tour dans la lice , & ce qu’elle devoit faire, elle
a fuppofé qu'on l’avoit fait d’avance. Elle s’eft exeufée de ré
pondre aux moyens d’abus, fous le prétexte que fes prédéceffeurs ne lui avoient rien laifle à dire à ce fujet.
Cette fubtilité commode peut épargner des embarras, mais
elle n’eft pas propre à convaincre des Auditeurs éclairés. Tout
ce qu’il en réfulte, c’eil que la nullité du iecond mariage eit
démontrée & avouée même par nos Adverfaires.
Et en effet, toutes les irrégularités qui peuvent anéantir §
fuivant les L o ix , un a&e de cette nature, fe trouvent raflemblées dans celui-ci : abfence du propre Pafteur, faux domicile
prêté à l’une des Parties, mépris des formes juridiques, au
dace à enfreindre de foi-même un engagement antérieur donc
les Tribunaux feuls pouvoient prononcer la réfiliation. Il femble que le iieur de Bombelles, en cherchant h rompre les liens
qu’il avoit contra&és h. Montauban, ait fait en même tems tout
ce qui dépendoit de lui pour les affermir par la foibleife qu’il a
donnée h ceux qu’il eifayoit d’y fubilituer. Lui & fes adhérens,
par leur filence fur cet article, rendent donc un hommage forcé
aux vérités que nous vous avons préfentées.
En diminuant leur tâche, ils ont allégé la nôtre. Puifqu’ifc
A ij
�4
fe font bornés h nous oppofer des fins dé non-recevoir, nous
nous bornerons de notre côté à en établir l’illufion. Nousprouverons que la Dame & la Demoifelle de Bombelles font recevablcs à excipcr de la nullité d’un mariage qui fait tort à leurs
droits à toutes deux. Nous démontrerons qu’il y a eu un enga
gement férieux & effectif, confommé entre le Sieur de Bom
belles & la Demoifelle Camp. Nous ferons voir que la validité
& la réalité de cet engagement font juftifiées de toutes les ma
niérés qui peuvent aiTurer l’état des hommes, par lapoiTeiIion&
par les titres.
On a nié l’une, M e s s i e u r s , & l’on a feint de vouloir at
taquer les autres ; & c’eft encore ici la rufe que l’on a fubftituée
aux raifons, c’efl: l’adreiTe que l’on a mife en œuvre, au lieu de la
folidité des preuves.
D ’une part, pour rendre la pofleffion douteufe , pour don
ner lieu de croire que le mariage de la Demoifelle Camp n’avoit jamais été approuvé de la famille, ni reconnu publique
m ent, on a fait intervenir dans la Caufe une tante qui avoit
déjà joué un rôle peu honorable dans les préliminaires qui
l’ont néceiîitée. D e l’autre, pour affoiblir les titres que nous
étions en état de produire, mais dont, par des ménagemcns
particuliers, par des raifons faciles h pénétrer, nous nous étions
abftenus jufqu’ici de faire aucun ufage , on a traduit fur la fcene
un Curé de Bordeaux, de la main duquel cil émané un de ces
titres.
Ce Curé eft un corps de réferve, qui doit agir dansfon terns.
On r 'annonce avec appareil. Il doit , dit-on r s’infcrire en
faux. Il doit invoquer la rigueur des Loix contre l’abus qu’on
s’eft permis de faire de fon nom , contre le délit qui ofe imiter
fa fignature au poin t, comme il l’avoue dans fes lettres, de lui
faire illufion à lui-méme.
�I£ j
• Il y a loin , M
e ssie u r s
5
, des bords de là Garonne h ceux
de la Seine. Ce Curé pétulant pourroit bien ne pas fe croire^
obligé de tenir fervilemént la parole qu’il a donnée au fieur de
Bombelles.La chaleur qu’on luiprête ici pourroit fediffiper dans
le voyage ; & fi réellement il le f a it , s’il a la hardieiTe de paroître devant vous , il ne parlera peut-être pas plus du prétendu
faux, que laDemoifelle de Carvoiiin des moyens d’abus. Quand
il nous aura entendu, quand il aura vu briller enfin au grand
jour ces armes redoutables que nous voulions bien laiiTer dans
robfcurité , & que nos Adverfaires eux-mêmes ont eu l’impru
dence d’en faire fortir ; il n’y ajoutera pas celle d’en rendre la
vérification néceiTaire. L e cri de fa confcience l’emportera fur
la crainte qui l’anime aujourd’hui. Il tremblera de devenir , par
une dénégation trop facile à confondre, plus criminel aux yeux
de la L o i, qu’il ne peut jamais l’être par l’aveu pur & iimple de
la vérité.
Quoi qu’il en foie, à ces moyens puériles ,1e iieur de Bom belles en a joint d’autres qui n’ont pas plus de force. Il a eifayé
d’appuyer l’intervention de la Dame H ennet, & la menace de
l’infcription de faux, par des reproches fcandaleux , qui ren
d aien t l’une & l’autre moins révoltantes s’ils étoient fondés.
Vous vous rappeliez, M e s s i e u r s , de quelle maniéré il a ré
pondu aux égards , aux ménagemens que nous avons affe£tés
pour lui. En refufant un état à fa fille , il n’a ouvert la bouche
que pour en déshonorer la mere. Il ne lui efi: pas échappé un
toot qui ne foit une infultc , pas une phrafe qui ne contienne
une calomnie.
Il s'eft efforcé de dévouer à l’opprobre cette femme refpectable, dont il a fouillé lrinnocence, &c qui jouiroit e n c o r e d’une
gloire fans mélange ft elle n’avoit eu le malheur de le cro ire
*
�6
vertueux. Sédu&ions , intrigues, manœuvres de toutes les efpeces , complots coupables dans tous les genres ; il n’y a point
de délit dont il ne l’ait accufée ; point de maniéré de refroi
dir l’intérêt que fon infortune excite, qu’il n’ait mife en ufage.
Ces reproches au fond,M e s s ie u r s , ne doivent point influer
fur la Caufe, mais il eft cependant nécefiaire de les réfumer &
de les détruire. Tout ici tient à la délicatefle, à l’honneur. C ’eft
au nom de la vertu trompée, que la Demoifelle de Bombelles
demande la réhabilitation de fa mere & la iienne. Il eft donc
important pour elles, avant tout, de prouver combien cette
vertu leur a été chere. Il leur eft eifentiel de faire voir à qui
appartiennent ici les qualifications odicufes,iicruellem ent, ii
légèrement prodiguées du côté du iïeur de Bombelles.
Nous allons donc, avant to u t, difeuter les inculpations par
lefquelles il s’eft flatté de rendre fa premiere femme fufpe&c,
& de rejetter fur elle ce mépris public , cette indignation gé
nérale dont il avoue lui - même qu’il fe fent pourfuivi. Nous
écarterons enfuite l’intervention frivole de la Dame Hennet, &
nous finirons par un examen rapide des deux reifources qui
juilifient nos droits & notre efpérance, de cette polfeilion qu’on
nous difpute, de ces titres qu’on feint de vouloir nous enlever.
§1Rèponfe aux reproches faits a la Demoifelle Camp par le Sieur
de Bombelles, & c .
L e premier reproche que le fieur de Bombelles fait à la
Demoifelle Camp , c’eft d'avoir joué la comédie. Il n’ofe pas,
à la vérité , tout à fait la placer au rang de ces A&rices ambu
lantes , animées par le double attrait du gain & de l’indépen
dance f qui promenant de V ille en Ville leur art & leurs talens /
�7
en flétriflent trop fouvent l’éclat par le défordrc qui en accom
pagne le développement. Mais tout ce qu’il étoit poiîible d in -
finuer de méchant & d’infidieux , en parlant de cet amufemcnt
prétendu de la Demoifelle C am p, a été prodigué k l’Audience.
La réflexion a fait retrancher en partie cette calomnie cruelle
de l'imprimé. On y lit cependant encore, pag. 37 , en parlant
de deux perfonnes que le iieur de Bombelles n’aime pas, que
l’un cil Bernard Lacojle , fur le théâtre duquel mcntoit la D e
moifelle Camp. Qui ne p^endroit à ce mot le iieur Lacofte
pour un Dire&eur de t r o u p e & la Demoifelle Camp pour une
de fes gagiftes ?
Vous vous rappeliez , M e s s ie u r s , les détails avec lefquels
cette idée a été préfentée dans les plaidoiries. On vous a dit que
la Demoifelle Camp, chargée de jouer un rôle, avoit cru trouver
dans le iieur de Bombelles un inftituteur propre h lui donner
le goût de la déclamation ; qu’elle l’avoit prié de vouloir bien
être fon guide dans ce jeu délicat, où il eft ii facile de laiiïer
pénétrer dans le cœur les fentimens que la bouche exprime^
On vous a affirmé que cette propofition étoit le fruit d’un ar
tifice profond , & que le deifein de l’écoliere, en montrant
tant de docilité , étoit de parvenir, comme elle y a réuili,
a-t-on d it, à captiver fon maître. On a été juiqu’à vous nom
mer le drame qui avoit donné occafion à un manege fi adroit,
fi bien concerté. Qui oferoit, après des détails fi précis, fe dé
fier de la vérité du fait qu’ils confirment?
Cependant, M e s s i e u r s , il n’y a pas un mot de vrai dans
tout ce récit. N on feulement la Demoifelle Camp n’a jamais
pris de rôle dans aucune de ces fociétés, devenues fi fréquentes
aujourd’hui,peut-être au détriment des mœurs ; non-feulement
elle n 'a jamais paru dans aucune de ces repréfentations bour-
�m
\
8
gcoifcs qui font les délices de tant de jeunes gens , même dans
lçs grandes V illes, où la perfection des théâtres devroit, ce fein»ble,dégoûter de ce plaifir difpendieux «Sc pénible : mais iî n’y a
jamais eu de fociété de ce genre formée h Montauban pen
dant le féjour qu’y a fait le ficur de Bombelles. Je vais yous en.
donner la preuve.
Certificat de M . le Premier Préfident de la Cour des Aydes &
Finances de Montauban.
Amable-.Gabriel-Louis-François de Malartie , C hevalier , Com te de
M ontricoux , certifions à qui il appartiendra , que Dam e Marthç
Ç a m p , VicomteiTe de Bom belles, a toujours joui avant & depuis l’an*
née 1 7 66 , époque de Ton m ariage, d’une réputation inta& e; q u il eji
fa u x qu'elle ait jamais jo u é la comédie. En foi de q u o i, & c . Fait à Mon
tauban le 6 Juin 1 7 7 1 . S ig n é, M a l a r t i e d e M o n t r i c o u x ,
Lettre de M . de la Mothe 3 Chevalier de l'Ordre Royal &
Militaire de Saint Louis , à M . Linguet.
Montauban ce 7 Juin 1 7 7 1 .
Il s’eft répandu i c i , M onfieur, des bruits fi injurieux fur le compte
de Madame de Bombelles & fur les maifons qui l’ont reçue , que je ne
dois pas v o u s laifler ignorer la faufieté de tout ce qui s’en eft dit. Ces
mauvais propos ne peuvent venir que de M. de Bombelles.
Mademoifelle Camp a toujours paiTé pour une perfonne de bonnes
piœurs ÔC de très-bonne conduite ; elle n'a jamais donné dans aucun
fpcclacle yni penfc à jouer la cojnedit; elle a toujours fréquenté de fort
honnêtes gens. M. de Bombelles la v it pour la premiere fois chez Ma
dame de L efcu re, femme du Procureur du R o i au Bureau des Finances
de cette V ille , Chevalier de Saint Louis ; il la v it enfuite dans de fort
bonnes maifons de gros Com m erçans, au Fauxbourgde Villebourbon,'
qui a toujours été fon lieu d’habitation: enfin, M. de Bombelles époufe
cçîte jeune perfonne} 8i la prefenta dans toutes les maifons comme
Madame
�9
Madame de Bombelles fa femme ; & le jour qu’il l’apréfenta à Madame
de la M o th e , j’avois grande aflemblée chez moi ; il lui dit : Voilà Ma
dame deBom belles ma f e m m e ..............................
J’ai l’honneur, & c . Signé, L a M o t h e , C h evalier de l’Ordre M ili
taire de Saint Louis.
Lettre de M . de la Cofle , à M . Linguet.
Plufieurs perfonnes m’ont a ffu ré , M onfieur, que l’A v o c a t de M. de
Bombelles avo it avancé en pîeine Audience les plus grandes infamies
contre moi &c ma famille. Je n’ en ferois pas du tout affe&é ii cela s’éto it p a fle ic i; la V ille entiere auroit pris mon parti. £ïous nous connoiffons tous dans les petits endroits, & cent cinquante ans & plus
d’ une roture honorable dans le commerce en g r o s , fans interruption &c
•fans la moindre ta c h e , feroient y o ir combien cette roture eft préférable
& infiniment au-deffus d’une nobleffe qui eft affez lâche pour s’avilir
par des calomnies atroces & des m enfonges, les uns 8c les autres ii
aifés à détruire. C ’ eil être bien m a l-ad ro it, pour défendre une Caufe
tléfefpérée au Tribunal de l’honneur, que d’em ployer de fi indignes
m oyens , & qui ne peuvent pas foutenir la plus petite information.
Perm ettez cette courte réflexio n , qu’il feroit inutile d’étendre avec
v o u s , M o n f i e u r ........................• .
Je me bornerai à vou s dire que '
j’ai v u quelquefois chez moi M. de Bom belles, mais pas fréquemment ;
c’étoit chez ma mere , v e u v e très-refpe&able, âgée alors de près de
quatre-vingt ans, demeurant dans la maifon paternelle affez éloignée
de la mienne , viva n t avec fes trois filles, mes fœ u rs, qui n’étoient
plus jeunes, que fe rendoit prefque tous les jours M. de Bom belles,
& ou il v o y o it Mademoifelle Camp : la Com pagnie étoit ordinaire
ment nom breufe, &c toujours dans la Chambre de ma m ere, d’où
elle ne fortoit jamais. O n cite ma m ere, croyez-en mon affertion que
tous les habitans de cette V ille attefteroient avec plaifir ; on cite ma
mere , dis-je , comme un exemple de toutes les vertus fo c ia lc s ,& furtout de celles qui. ont trait à 1’,honneur, à la mofleftie & à la plus féyerc décence; mes fœurs en ont h é r ité ,& foutiennent ces qualités par
13
�••*•»
10
la meilleure éducation. Q u elle apparence , d’après ces vérités dont il
m’eft bien permis de m’honorer & qu’il feroit très-facile de p ro u v e r ,
j
que Mademoifelle de Camp ait pu être fubornée dans une maifon fi ref-
j
pedable ! C ’eft de ces horreurs que les honnêtes gens n’imaginent pas.
j
Je permis à mon fils & à ma fille de repréfenter chc{ moi, avec leurs amis
j
& amies, quelques pieces de théâtre des plus décentes & des plus châtiées ;
|
la premiere repréfentation ,par Andromaque ,fu t le 21 Avril 1768. Rap-
I
prochez cette date de celle du dernier départ de M . de Bombelles ,
r
v o u s verrez s’il s’eft trou vé à nos comédies de fociété. Il ne s’en cil
. !
pas joué ici ailleurs que chez m o i, depuis qu’on donna quelques repré-
|
ientàtions chez M. de la C o r é e , Intendant de cette V ille ; Madame de
Bombelles ne repréfenta pas plus che{ M. de la Corée que che{ moi. E lle
[
• n'a jamais mis les pieds fu r les planches pour y jouer aucun rôle. Elle ne
!
v in t chez m o i, comme fpeûatrice , qu’aux premieres repréfentations»
A yan t appris dans ce tems que M. de Bombelles a vo it jété mis au Fortl’E v ê q u e , elle renonça
à toutes fortes de fociétés , & o n ne la vit plus abfo'
lument autre part que che[ elle. Le jour qu’on donna Zaïre chez m o i, le
3 Décem bre 1768 , M. de G o u rg u e , Intendant de cette G énéralité, y
aifiita; c’étoit Mademoifelle R a u ly qui rempliffoit le rôle de Zaïre.
Eft-il poffible qu’aux plus infignes menfonges on ajoute encore le
Iranfport des tems & des perfonnes ? ..........
J’ai l’honneur , ôcc. Signé , B. l a C o s t e .
A
Montauban le 6 Juin \yyx.
Je ne fais point de réflexions, M
, fur ces notices
i
accablantes pour le fieur de Bombelles ; mais s’il ne peut
les démentir, je lui demande à lui-m êm e quelle idée on
doit fe former de fa ftncérité , & quelle confiance on doit à
' j
e s sie u r s
1 audace avec laquelle il rejette comme des impoilures toutes
les pieces dont il redoute l’effet.
Û n autre reproche ou il n a pas ete plus vérid iq u e, ni moins
im prud ent, c’eit celui qu’il a mis dans la b ou ch e de la D am e
|
j
�n
m
i
Hennet, & qui a dû certainement faire fur vous une certaine
impreiiion , parce que d’une part il eft grave ; que de l’autre il
tombe fur une des principales pieces que nous avons em
ployées dans notre défenfe ; & , qu’en troifieme lieu , vous ne
pouviez pas être en garde contre la hardieife avec laquelle on
a ofé le dénaturer.
*
J’avois parlé du teftament du (leur de Bombelles, dans lequel
il déiigne à chaque phrafe la Demoifelle C am p, par le nom de
fa chcre époufc. Je l’ai cité^ non pas comme une piece dont on
pût jamais faire ufage pour s’approprier la fucceflion du teftateur, mais comme une preuve de la vérité qu’il nie aujour
d’hui, comme une reconnoiffance authentique de la réalité de
ce mariage qu’il s’efforce de dégrader. J’en ai produit une ex
pédition (ignée du (leur de Bombelles. Je l’ai mife fous vos yeux
a la premiere Audience : je vous ai fait obferver quelle portoit
non-feulement fon n om , mais fon cachet & le fceau de fes
armés , imprimées avec le plus grand appareil. Il étoit préfent ;
il n’a pu méconnoître ce monument de la tendrefle qui l’animoit dans des tems plus heureux, & d’une paillon qui ne lui
infpiroit alors que des deiirs honnêtes. Il n’a pu fe tromper
fur la voie par laquelle elle nous étoit parvenue, ni oublier à
qui nous en étions redevables.
Quelle a été ma furprife, M e s s i e u r s , quand j’ai entendu
inculper avec véhémence la Demoifelle Camp à cette occafio n , & fon mari lui faire un crime de ce qu’elle avoit fon
teftament en fa poffefllon ! Q uel a été mon étonnement, quand
on l’a accufée devant vous d’avoir violé , pour fe le procurer,
le dépôt d’un Officier public, de l’en avoir fouftraitclandeftineH^nt, ou arraché avec un éclat coupable ; d’avoir ou trompé
ou corrompu l’homme intégré à qui il avoit été confié 1 &
’
B ij
�c’eft le iîeur de Bombelles qui fe permet ces indignes décîa**
mations !
Pour le confondre, il ne faut que repréfenter la piece. Nonfeulement, M e s s i e u r s , ce n’efl: point l’original, ni une ex
pédition furprife en fraude, à la vigilance d’un Officier qui fe
,foit laiffé ou tromper ou écarter des devoirs de fon miniiîere ;
non-feulement ceii’eil qu’ une copie j non-feulement cette copie
cft expédiée, délivrée delà main du iieur de Bombelles lui-même;
m ais,comme ii la Providence, prévoyant dès-lors l’excès d'au
dace auquel il fe livreroit un jour à cette occaiion, avoit voulu
ménager à fa déplorable époufe un moyen fûr pour le couvrir
de honte, elle a difpofé les choies de maniéré qu’il y a configné
lui-même la preuve qu’elle pouvoit fe trouver innocemment
hors l’Etude du Notaire. Voici ce qu’on lit au dos, écrit de fa
main : ( Copie du tejlament que j'a i dêpofé che?L M . Plancadc,
Notaire Royal à Montauban 3 le 5 A v ril iy 66 . Signé y
B
o m belles.
)
C ’efl cette copie, M e s s i e u r s , que lui-même a remife dans
le tems à la Demoifelle C am p , pour aiTurer fon état, fur la
quelle i l vient aujourd’hui feindre fi groffiérement de fe mé
prendre , fans fonger qu’une impofture confondue eft plus
nuifible encore à fon inventeur qu’à fa viftime.
Voici quelque chofe de plus férieux. Dans le Mémoire à
confulter, du 12 Novembre 1771, dans ces repréfailles que la
néceifité a arrachées à la vertu gémiffante, à l’honneur défefpéré, on rend compte avec franchife de ce qui a précédé &
même motivé, le mariage dont nous foutenons ici la validité.
O11 avance que la famille de la Demoifelle Camp a cru le fxeur
de Bombelles Proteftant ; &c que, par une confiance bien mal
placée, on a penfé devoir faire ufage pour l’enchaîner, des
�* '■'t4&
13
noeuds confacrés par cette Religion, dont il affe&oit de devenir
l’enfant adoptif.
C ’e ft, fi on l’en croit, une calomnie affreufe.Il paroît péné
tré d’horreur & d’inquiétude fur le feul foupçon de cette apoftaiie. O n le croiroit animé du zele le plus pur pour la vraie
Religion; & dans l’efpérance apparemment de prouver mieux
fpn éloignement pour un culte proferit, il s’ell permis d’en
traiter les Miniftres & les Seftateurs avec un emportement,.
une fureur capables d’indigner la vraie charité , & de fcandalifer la dévotion même la plus outrée. 11 dénonce en confé- ‘
quence la Demoifelle Camp comme une calomniatrice achar
née qui le compromet de gaieté de cœ ur, comme une femme
irritée qui fe livre aux machinations les plus odieufes pour
fatisfaire fa vengeance.
Q ue ces cris, que ces déclamations lui conviennent peu !
Q u ’il auroit été plus prudent à lui d’obferver le filence fur cet
endroit délicat du Mémoire à confulter 1 Qui fait mieux que
lui combien les faits en font exacts, & avec quel fcrupule la
vérité en a été pefée ?
O u i, M e s s i e u r s , j’ai ici la preuve dans ma main de tout
ce qui y eft avancé, & fur-tout de cette affe&ation d’apoftafie,
par laquelle le iieur de Bombelles eft parvenu à éblouir des
parens trop crédules, à féduire une fille trop confiante, à abufèr une Ville entiere, où une trifte néceflité a familiarifé les efprits avec des contrafles que nos yeux fupporteroient diffici
lement dans cette capitale, avec de certains déguifemens que
la Religion tolere, que l’honneur ne condamne p a s ,& que le
befoin exciife. Je la tire d’une information juridique où cin
quante témoins ont été entendus d'ans'toutes les réglés de lx
procédure, par le C h ef de la SénéchaufTée de Montaubaru.
�* *
i4
, que je ne m etois pas encore per
O b fervez, M e s s i e u r s
mis d’en faire ufage. Je m’étois impofé des ménagemens fans
nombre pour ce malheureux jeune homme, & fur-tout une
réticence abfolue fur cette piece redoutable. Je la lui avois
laifle entrevoir dans mon premier Plaidoyer; mais, en même
tems, je l’avois engagé , conjuré en quelque forte de ne pas
me forcer à m’en fervir. Il l’a voulu. C ’eft lui le premier qui a
ofé vous l’indiquer, & qui m’a fait par-là un funefte devoir
de la mettre fous vos yeux. Q u ’il ne s’enprenne donc qu’à
lui-même de l’effet cruel qu’elle va peut-être produire. Q u ’il
n’accufe que lui-même des plaies que vont lui faire des armes
qu’il nous a mifes à la main, quand nous la reculions, de peur
d’être forcés de les faiiîr, & d’en faire ufage.
Dcmoifellc Marthe Carrejóles :
D é p o s e , qu’il y a environ cinq ans &
demi , avant qu’il fut
queiîion du mariage du fieur de Bombelles avec la D em oifelle C am p ,
&c ledit fieur de Bombelles étant en v o y a g e avec le fieur Samuel D u
mas , la Dépofante & la Dam e fa mere , ledit Jîeur de Bombelles leur dit
vivre intérieurement dans la religion protejfante , mais qu’à caufe de f a croix,
qu'il indiqaoit avet la main , il allait à la rnejje.
Dame Sufanne Dunions , époufe du jîeur Jean Lefcure :
D é p o s e . . . . que le fieur de Bombelles a dit plufieurs fois
à elle D é-
pofa!>te, chez le fieur fon pere, qu/V vivoit intérieurement dans la religion
protejlante, que çétoit celle de fe s peres ; &c qu’il dit même un jour à la
D épofante, q u 'il yenoit D ’EXHORTER SA B o R D l E R E ( i ) , q u i yenoit de
dueder dans ladite religion,
Demoifelle Marie Dumons, fille au fieur Gérard Dumons ;
DÉPOSE , que le fieur de Bombelles lui a plufieurs fois déclaré q u ’//
vivpic dans la religion protejlante ; 6c dans une occafion , qu7/ yenoit
(0 Mitaÿçre, Fermière,
i
�M
D'EXHORTER SA BORDIERE , qui venolt de décédsr dans la religion protejlante.
D lle. Emilie Plantier, fille au fieur François Plantier, Officier Suijfe:
D é p o s e , qu’étant à la campagne de la Dam e D elon, le fieur de Bom-
belles, qui avoit dîné dans le même lieu, vint vo ir la Dame D elon, & que
ledit fieur de Bombelles dans la converfation particulière avec la D ép ofante, lui dit qu’/7 vivoit intérieurement dans la religion prétendue réformée,
qui étôit la religion de fon pere ; mais qu'à caufe de fon emploi & de la croix
dont il étoit décoré, il alloit à la rnejfe une fois l'an.
Le Jteur Daniel Dumas 3 Négociant :
D é p o s e , qu’étant avec les Dames C o rre jo lè s, mere & fille , & le
fieur de Bombelles en converfation, ledit fieur de Bombelles leur dit
qu’/Vproftffoit intérieurement la religion protejlante ; mais qu'étant Chevalier
de L'Ordre de S. Lazare, en portant la main à fa croix , il alloit quelquefois
fepréfenter aux églifes des catholiques. Q u ’un autre jour étant allé avec
ledit fieur de Bombelles v o ir le moulin du fieur Mariette qui n’étoit pas
fin i, après a vo ir examiné enfemble certaines pieces dudit m o u lin , ledit
fieur Bombelles lui répéta qu ’/7 ¿toit vraiment protejlant, quoiqu'ilf it audehors les acles de catholique romain, & c .
MeJJire François de Beaudeau , Lieutenant-Colonel d'infanterie, &c.
D é p o s e ..................de plus que le fieur de Bom belles, pour obtenir
la D em oifelle Camp en m ariage, a déclaré être protejlant ; le D épofant
l ’ayant raillé & badiné fur fon peu de religion , ledit fieur de Bombelles
a toujours paru très-embarrafle.
Françoife Gailhard, époufe de Guillaume M oulis:
D é p o s e ................. que ledit fieur de Bombelles ajjîjloit régulièrement
aux lectures qui fe faifoient de la bible 6* autres livres de piété che£ ledit fleur
Camp ; qu’il a dit à la dépofante, dans certaines occafions: où eft-ce
qu’elle alloit ? que lui répliquant qu’elle alloit à la m e fle , ledit fieur
de Bombelles lui difoit: qu’eft-ce qu’elle y alloit faire? qu’elle,lui ayant
répondu qu’elle alloit y faire ce que lui fieur de Bombelles y faifoit
lui-m em e, celui-ci lui a dit dans lefdites occafions, qu’i7«|y
PLUS.
a l l o it
Demoijllle Marthe Dumons:
D é p o s e , , , , qu’il y a enYJron fix ans, & avant k mariage dudit
�16
fieur de B om bellesavec laD em o ifelle C a m p , dans le tems de la m o i£
fon , ledit fieur d eB om bellesd it à la D épofante , & à ceux de fa maifo n , qu ’/7 étoit p r o ttfa n t, mais qu'il ne pouvoit pas le faire paroîtrt, craintc
de perdre la penjion def a croix ; qu'il pria la fam ille de la Dépofante de lui
prêter des livres protejlans ; qu'il dit même cheç la Dépofante qu’il venait
d
' EXHORTER LA FEMME du nommé Duron, Jon Bordier, qui venoit d'ex
pirer dans la religion protejlante, qu’il a vo it môme été détourné par un
catholique romain qui étoit furvenu.
M effîn de Viço^e de la Cour :
D é p o s e ................. qu’il fe rappelle encore que ledit fieur de Bom-
belleslu i confia un jour, qu'ayant mûrement étudié les deux religions catho
lique & proteflante, il étoit réellement convaincu que çette derniere étoit la
meilleure ; qu'il étoit D E C I D E A LA PROFESSER TOUTE SA V I E .
Telles font, M e s s ie u r s , les voix qui s’élevent contre le
fieur de Bombelles. Telles font les effrayantes vérités dont
nous aurions voulu lui faire grâce. Comment eft-il poffible
qu’il fe foit aveuglé au point de méconnoître nos égards, &
de nous réduire à rompre un filence fi précieux pour lui ?
Il eft vrai qu’il s’efl: flatté, en s’expofant au rifque de voir cette
enquête devenir publique, d’en affoiblir, non pas l’impreflion,
mais l’effet judiciaire, en la fuppofant contraire aux formes.
Il a prétendu qu’elle étoit défendue par la Loi. Il a cité l’arti
cle de l’Ordonnance de 16 6 7 , qui abroge les examens à fu
tu r, & s’eit efforcé de le diriger contre l’information qu’il feignoit de braver.
J’examinerai ailleurs, M
e s sie u r s
, ce fubterfuge. Je vous
ferai voir que cet. article de la Loi n’a aucune forte d’applica
tion ici. Mais quand il feroit vrai qu’en effet ces témoins en
tendus par le Juge en vertu d’une Ordonnance en réglé , ne
pourroient arracher de vous une condamnation rigoureufe »
ni
�17
‘
ni faire punir comme apoftat l’homme vil que leurs déposi
tions çlémafquent, ces déportions infufîifantes aux yeux de
la L o i, ne le feroient pas à ceux de l’honneur. Les faits qu’elles
confiaient n’en feroient pas moins des faits démontrés pour
tous les cœurs fufceptibles de quelque délicatefTc. Il n’en feroit pas moins prouvé que la foi de la Demoifelle Camp a été
furprife par une affeftation hypocrite, & que fes parens ont
ete abufés par un attachement impofteur pour un culte qu’ils
ont le malheur de regarde? comme le feul vrai. C ’en eft aifez
fans doute , foit pour exeufer leurs démarches lors du fatal
mariage, foit pour juftifier les aveux du Mémoire à confulter;
Il n’étoit queftion alors, ni même ic i, du châtiment que
peut meriter un homme capable de faire fervir une piété frauduleufe a raccompliflement de fes defirs effrénés. Il ne s’agiffo it, il ne s’agit encore, que d’examiner Ci la famille de la D e
moifelle Camp a pu croire, en la livrant à ce terrible Catho
lique , 1 unir à un homme fincere que l ’a m o u r ramenoit à une
croyance familiere dans fa maifon ; car il n’eft plus tems de le
difTimuler, M e s s i e u r s , le fieur de Bombelles pere avoit été
marié deux fois. Sa premiere femme étoit une Proteftante ,
nee & morte à Montauban. Il ne devoit donc pas fembler fi
extraordinaire que le fils imitât le procédé de fon pere; & l’ap
parence de fon abjuration, toute facrilége qu’elle auroit pu paroître à des yeux éclairés de la vraie fo i, pouvoit éblouir des
efprits malades, à qui les circonftances ne laifToient le tems ni
de 1 examen ni d elà réflexion.
Ce n’eft donc point par malignité que la Demoifelle
Camp a fait faire cette enquête. Ce n’eft point par le d e iïr de
fe conformer fervilement à fa pafTion qu’un des faits qui y font
configneS a ¿té produit dans le Mémoire à confulter : ce n’eft
C
^
�' Ai
18
point encore par ce motif odieux quelle reparoît ic i, c’eft
u n iq u e m e n t par le befoin de rendre hommage à une vérité
dont l’i m p r u d e n c e du fieur de Bombelles a rendu la m a n ife ftation indifpenfable.
Après avoir ainfi difcuté & détruit les trois principaux griefs,
que dirai-je, M e s s i e u r s , des autres qu’il a hafardés avec au
tant de hardiefle, & encore plus de légéreté ! Q ue répondrai-je,
par exemple , à ce reproche, de l’avoir calomnié fur l’article
de fes dettes, fur fa facilité à les contra&er, 8c fa négligence à
les éteindre ; d’avoir eu l’indignité de lui fuppofer de fauffes
lettres de change, & un dérangement total dans fes
d’avoir effayé par-là de lui enlever fes protégions 2c
dit ? M a réponfe fera encore bien fimple. C e fera
duire les lettres que l’on écrivoit ù la Demoifelle
affaires ;
fon cré
de pro
Cam p,
comme à l'époufe de ce Débiteur fu gitif, & les aveux
naïfs que faifoient fes parens & fes amis, du défordre où ils ie
voyoient plongé.
M
a d a m e
,
La cruelle fituation où vo u s met la conduite de M. de Bombelles ,
nie touche jufqu’au fond du cœur. Je ne faurois deviner le m o tif d’un
fi étrange filen ce, fur-tout après la promeffe qu’il m’a v o it faite , 6c
l’air pénétré dont je crus m’appercevoir en lui lifant v o tre lettre. Sans
chercher
le juftifier d’un procédé fi condam nable, je ferois tenté d’en
attribuer ,1a caufe à quelques petits dirangemens dans fes affaires , qu'il
n d peut-etre oje vous confier, dans la crainte d’augmenter v o s cha
grins , plutôt qu’à une indifférence qui ne peut fuccéder fi vîte au ten•
dre amour que vo u s lui aviez in fp iré , & à l’eftime qu’il ne fauroit
v o u s reftifer. •
•
•
•
.
Mais quand il auroit des torts aufïi réels
que vous le craign ez, vo u s devez etre affurcc de le ramener
à fespre^
�*9
miers devoirs par cette aimable douceur qxii l’avoit it bien captivé,'
£c plus encore par vo tre ve rtu qui a toujours des droits fur les coeurs
les moins acceifibles........................
J’ai l’honneur d’être , Sec. Signé, CoNSTANS,
L ille , ce 31 Mars tj6 8 .
Lille y.le 18 A vril ty S 8%
M A
d a me
;
\
V o u s ferez fans doute fort furprife de recevoir une lettre d’ un in
connu. J’ofe vous certifier que ce n’eft qu’avec le plus grand regret du
inonde que je me détermine à vous é c rire , pour vous demanderf l x louis
d ’or que j'a i prêtés il y a quatre à cinq mois à M . votre époux, lorsqu'il
tomba affeç dangereufement malade; i l Tri avait promis de me les remettre
fous quinze jours, mais vraifemblabument il m'a oublié, puifqu’il eil parti
fur un congé de fix femaines, fans me les a vo ir donnés ôc fans me rien
dire. L’incertitude oii je fuis de favoir où prendre M. vo tre m ari, 8c
le befoin urgent que j’ai de cette fom m e, m’o b lig e , malgré m o i, à
avoir recours à vous, pour vou s prier d’a vo ir la bonté de me rendre le
fervice de me la faire paffer le plutôt que vou s le p o u rre z, ôcc.
Signé, J a u v e ll e , Capitaine au Régiment de Piémont,
M
a d a m e
,
J’ai l’honneur de vous informer qu'il m'ejl dû par M. le 'Baron de
Bombelles, Officier au Régiment de Piémont , la fomme de 420 livres. M . de
Bombelles m'a donné une lettre de change de 800 livres , qu il a tirée fur
M . Gurijfon , Négociant à Bordeaux , de pareille fomme , le 12 du mois de
'Mars, payable au S d'Avril ; elle a été envoyée 6*proteflée, avec réponfe que
l'on n'avait pas de fon ds, & que l'on ne connoijfoit pas le tireur de la lettre
de change qui m'a. été renvoyée
dont ¿ai été obligé de rembourfer les
irais fur le champ. Il y a grande apparence que M . de Bombelles s'ejl
fervi de cettefubtilité pour trouver le moyen de partir troisjours après qu'il eut
c 1;
. _
�iy>
xo
fa it cette lettre de change , quoiqu’il ni avoit promis, parole d’honneur, qu'il
ne partiroit pas avant que cette lettre ne foitpayée3 d'autant que je devois lui
remettre le furplus de l'argent qu'il avoit befoin pour fon voyage. V oilà
com m e il m ’a a m u fé , & c . Signé, D e f o n t a i n e .
16 Mai 1768.
L ille , 13 Janvier 17 Î9 .
M a d a m e ,
Je prends la liberté de vous é crire , pour vo u s prier de vouloir bien me
faire tenir l'argent de la. dépenfe que M. le Baron a fait che£ moi. Je vous fais
part que pendant fon abfence j’ai pris fes intérêts , je lui ai fait gagner
500 liv re s , que Meilleurs de la V ille de Lille ont jugé en nia faveur
pour fon profit. La lettre de change de 1200 liv . n’a été rem bourfce
que ce qu’il avoit reçu , vous obligerez infiniment. Il m’a fallu mettre
en gage tout ce que jep ofled e , me réduire à la derniere mifere. Infor
m ez-vous de fon dom eilique comme j’ai agi pour Monfieur ; j’ai délivré
fon billet au Commandant de la citadelle. J’ai l’honneur, &cc. Signé,
G e r m a i n , Cuifiner à la citadelle de Lille.
M a chere Sœur,
............................................... V ous me marquez que vous ne recevez
aucune lettre de mon frere pour moi ; je n'entends plus parler de lui
comme s’il n’étoit pas au monde. Je voudrois bien favoir s’il efl toujours
enfermé ; je fu is perfuadée qu'il nefa it plus ou donner de la tête. Je le regrette
de tout mon cœ u r, je voudrois p ouvoir lui rendre fervice..................
Je fuis tcu te à v o u s , v o tre affeftionnée fœ ur S a i n t e - D o r o t h é e
B om belles.
Vous v o y e z , M e s s i e u r s , que la Demoifelle Camp n’a
rien avancé de trop, qu’elle n’a dit c[ue ce qui étoit nécciTaire
à fa Caufe, & ce qu’elle étoit malheureufement en état de juf"
tifier.
*
M a is, s’écrie encore le mari perfide qui l’outrage , & qui ,
�iSt
21
'
dans fa fureur, confond tous les objets, elle a cherché à foulever l’Europe entiere contre moi dans l’unique defïeiii de me
déshonorer fans qu’il y eût de Caufe engagée, fans que rien pût
fervir de prétexte à cette incurfion; elle a publié, pour me per
dre , un libelle affreux, fous le nom de Mémoire à confulter.
Profitant de la fermentation univerfelle qu’a produite cet écrit
empoifonné, elle s’eft liguée avec les Chefs d’une Maifon cé
lébré , où a été élevée mc^n enfance. Ceux-ci oubliant leur de
voir , la décence , les égards qu’ils devoient au Public, à mon
nom , à eux-mêmes , à la vérité, font devenus mes ennemis
irréconciliables par une funeite complaifance pour cette femme
intriguante. Une lettre a paru, qui me retranche du Corps
auquel ma conduite ne pouvoit faire qu’honneur, & qui a
porté un coup mortel à ma réputation. Elle me livre à une
forte d’excommunication publique, elle m’a rendu la fable &
l’opprobre de la Société. L ’effet de cette rufe infernale eft telle
q u e, même en gagnant ma C a u fe, je n’en ferois pas moins
perdu, & que fi je ne la gagne pas, la mifere , la honte, le
défefpoir, font mon unique partage.
Je ne chercherai point, M
e ssie u r s
, à affoiblir cette pein
ture , qui n’eft réellement que trop fidelle ; mais je demande
rai à notre Adverfaire de quel droit il fe plaint de nous ? Le
Mémoire à confulter, dit-il, a été publié fans caufe. Eh quoi !
le fien, cet Imprimé du 25 Juin 1 7 7 !, qui peut être mis au rang
des monumens d’audace les plus finguliers & les plus incroya
bles, cet ouvrage où il ne parle delà D llc Camp que comme
d’un fantôme chimérique , évoqué du néant par fes ennemis,
° ù il ne préfente fon mariage avec elle, que comme une inven
tion miférable,defl:inée uniquement à troubler fon repos & fon
bonheur; cette produ£Hon de l’impoiture, où il affe£te le lan
�gage de -la vérité fçnfible & de l’innocence outragée , ne meritoit pas une réponfe ! La Demoifelle Camp eft criminelle d’a<>
voir ouvert la bouche pour fe défendre, dans un tems où
fon exiftence même étoit rejettée comme une infâme ca.lomnie 1 Elle a dû fe taire, dans le tems où on la défioit de
parler, & où l’on annonçoit qu’on regarderoit fon iilence f
comme la conviftion du crime de fes amis }
C ’eft à ce défi formel que la Demoifelle Camp a cru devoir
répondre, en attendant que les Tribunaux pulïent s’occuper
de fa réclamation ; elle a pris ? pour fe défendre, la même
voie que l’on avoit employée pour l’attaquer. Et c’eft l’obli
gation indifpenfable de repouffer cette injure , dont le (leur de
Bombelles ofe aujourd’hui lui faire un crime ! C ’eft parce
qu’elle ne s’eft pas biffée calomnier, qu’il s’efforce de la trayeftir en une infâme calomniatrice !
Mais que devoit-elle donc faire ? Q uoi ! relier dans l’inac
tion ? Attendre, pour préfenter fes larmes à la Juftice, que la
douleur en eût tari la fource ? Patienter dans Faviliflement &
l’indifférence ? Ne devoir qu’au mépris de la pitié, des fecours
eue fon innocence avoit droit d’exiger ? N ’ofer lever vers les
Tribunaux, qu’un front chargé d’ignominie? Abandonner k
fon Adverfaire tout le triomphe de la vertu ? Prendre fur elle
toute l’humiliation du crime ? Enfin, l.aifïer dépendre du tems
& des formes de la Juftice, une réparation tardive, dont fii
contenance, peut-être, l’auroit fait juger indigne?
N o n , M e s s i e u r s , elle n’a pas eu ce courage indiferet,
elle ne devoit pas l’avoir. Quand elle en aurait été capable
pour elle-meme, l’intérêt de fa fille lui défendoit de s’y livrer»
Il étoit trop important pour cette enfant, dont les pleurs & l ç
�13
défefpoir ont afîiégé le berceau, que la vérité fût connue fans
délai. Elle a donc brillé ; & fes rayons, on l’avoue, ont percé
le fieurj de Bombelles à jour. Le fends de fa conduite, une
fois con n u, la réclamation a été univerfelle.
Il a mis fa reffource dans des Loix rigoureufes, qui ne lui
offrent, comme vous le verrez bientôt, qu’un fupport incer
tain ; mais la Demoifelle Camp a mis la fienne dans une prote&ion plus honorable & plus fûre, dans l’honnêteté, clans
leftime publique. Elle ne ^ouvoit agir autrement, fans fe man
quer à elle-même, fans trahir fa fille. Elle n’a d’ailleurs em
ployé d’autres intrigues pour fe faire des Protefteurs, que
l’excès de fon infortune. C ’efl au fleur de Bombelles lai-même
qu’elle doit fes partifans.
. x
Si la lettre écrite par le Confeil de l’École M ilitaire, doit
faire placer dans ce nombre les Chefs de cette maifon refpectable ; fi l’Arrêt de ce Tribunal, plus redoutable peut-être pour
.un homme fenfible, que ceux où la Juftice apprécie les for
mes , & non pas les procédés, fait un violent préjugé en fa
faveur : ce n’eft pas à la furprife, aux intrigues qu’elle en eft
redevable. Je le déclare ici, M
e s sie u r s
,
& j’y fuis autorifé
par le Confeil même de l’Ecole. La Demoifelle Camp ne connoiffoit encore aucun des M em bres, elle n’en avoit vu au
cun : elle n’avoit ni parlé, ni fait parler à aucun quand cette
lettre a été écrite & envoyée. Elle a été le fruit libre, volon
taire , fpontané de l’indignation commune qui a faifi toutes
ces ames généreufes, en voyant un de leurs Eleves fe dégrader
ainfi lui-même, & s’avilir par un procédé dont perfonne ne
pouvoit mieux qu’elles, apprécier la noirceur.
V o u s fa v e z , M e s s i e u r s , fur quels principes on s’attache
«
�24
former cette pépiniere cîe Héros deiVnfs à devenir lin jour la
reflource de l’Etat & le rempart de la Patrie. L ’honneur , la
délicatefle la plus pure font fur-tput les objets qu’on leur ap
prend à refpecter. T out dans leur éducation eft fubordonné à
ces grands mobiles du vrai courage Sc du feul héroïfme au
quel des hommes doivent prétendre. O n leur apprend tout à
la fois les exercices du Guerrier Si les vertus du Citoyen : mais
çelles-ci ont toujours la préférence. Des mains, des cœurs ,
fignalés par l’habitude des uns & des autres , leur en rendent
la pratique facile. Cette jeunefle, élevée à l’ombre des lauriers
dont leurs Iniïituteurs font couverts , puifent dans leurs
exemples le defird’en cueillir bientôt de pareils. Ils apprennent
d’eux à chérir la gloire, & plus encore cette paix avec foimême, ce repos de l’ame, cette tranquillité intérieure produite
par la vertu , fans laquelle ce que nous appelions un grand
homme n’eft le plus fouvent qu’un homme dangereux.
Le premier foin du iîeur de Bombelles, en arrivant à Paris,
en 1767 , avoit été de rendre Tes hommages à fes anciens
Maîtres : ion cœur , encore innocent alors, 11e rougiffoit point
des modeles refpe&ables dont cette maifon eit remplie ; il n’avoit pas à craindre d’en être repouffé par l’air de pureté qu’on
y refpire. En les informant de fa fituation a£tuelle , il s’étoit
ouvert fur fon mariage avec la Demoifelle Camp. Il l’avoit
publié hautement avec une fatisfaftion qui annonçoit encore
l’ivreffe du bonheur & la franchife de la vérité. Je fuis de même
autorife, M
e ssie u r s
, à vous le plaider; j’en fuis avoué par
le Confeil de l’Ecole. Il n’y avoit donc perfonne qui n’y fût
informe de l union contra&ée par le fieur de Bombelles ¿1
Montauban , &r perfonne qui ne l’eût félicité, en apprenant de
lui
�u s
lui les qualités de fon époufe, les agrémens de fa figure, la
douceur de fon cara&ere, les charmes de fon efprit.
Jugez, M e s s i e u r s , quelle a dû être la furpfife de ces Juges
intégrés, quand, dans un premier Imprimé, ils ont vil le fieur
de Bombelles traiter lui-même de calomnie & d’impofture ces
aveux libres que fa bouche leur avoit fi fouvent faits ; Si quand
enfuite ils ont été convaincus, par la réclamation de l ’infortunée
ainfi trahie, que le fieur de Bombelles manquoit aux fermens
les plus facrés, que ce ma)i parjure, ce pere dénaturé fe jouoit
des nœuds que tous les autres hommes refpeûenr. -Honteux
d’une telle corruption dans un cœur forti de leurs mains, ils
ont fongé du moins à empêcher quelle ne devînt contagieufe,
8c à tirer de l’efpece de honte qu’elle pouvoit faire à l’Ecole ,
un préfervatif pour les autres Eleves qui auroient pu être un
jour tentés de l’imiter.
V oilà, M e s s i e u r s , ce qui a difté cette lettre que le fieur
de Bombelles ofe vous préfenter comme le fruit d’un complot
odieux tramé pour le perdre, ce monument à jamais mémo
rable de l’impartialité du Confeil de l’Ecole Militaire, &: delà
vigilance avec laquelle les Chefs qui le dirigent s’acquittent .des
fondions que le Roi a daigné leur confier. La Demoifelle
Camp y trouvoit fon avantage, parce que fa Caufe étoit inti
mement liée à celle de l’honneur & de la vertu. Le devoir Sc
l’inclination l’ont portée à les en remercier : l’accueil.qu’ils ont
cru devoir à fa beauté , à fes malheurs , lui a fait réitérer deux
ou trois fois cette marque de fa reconnoiffance. Voilà à quoi
fe réduifent ces liaifons, cette intimité que' le fieur de Bom
belles n’a pas balancé à fuppofer, pour rendre fon époufe dé
favorable , fans faire attention qu’il compromettoit une maifon
dont le nom feul exclut tout foupçon de manège, & à laquelle
D
�»
i6
il ne devroit jamais penfer qu’avec ce mouvement de refpe&
qu’éprouvent toutes les ames honnêtes qui en font forties.
J’ai répondu , je crois, M e s s i e u r s , à tous les griefs; j’ai
écarté tous ces reproches étrangers à la Caufe dont il ne l’a
chargée que dans l’efpérance de vous faire illufion , & de dé
rober à vos regards, au milieu de tant d’objets inutiles, celui qui
feul mérite votre attention, la réalité du premier mariage. Avant
que de l’examiner à fond, j’ai encore un mot à dire fur l’inter
vention -de la Dame Hennet. J’ai à faire évanouir ce fantôme
fans confiftance, que l’artifice a produit & que la malignité a
paru animer au moins pour un inftant.
Que veut-elle ? Que demande-t-elle ? Q u ’efpere-t-elle ?
Vengeance pour moi & juftice pour mon neveu. Vous l’avez
féduit, vous m’avez outragée ; vous avez fait de moi dans
votre libelle un portrait odieux : vous m’avez rendue ridicule
& haïffable: la Juftice doit réprimer des écarts de cette nature;
une pareille licence eft plus dangereufe que les travers même
que vous me reprochez.
J’avoue, M e s s i e u r s , que le portrait de la Dame Hennet,
qui fe trouve dans le Mémoire à confulter, du 1 2 Novembre
177 î ,n’eft pas à fon avantage ; mais avant que d’accufer la main
qui l’a tracé, qu’elle fe rappelle donc le perfonnage qu’elle
joue dans l’imprimé de fon neveu, & les déclarations faits ici
même, à cette Audience.
Q u ’y a-t-clle dit r>Q ue c’eft elle, & elle feule, qui a empêch’é
le mariage de la Demoifelle Camp d!’être ratifié ; qu’elle prcnoit fur elle les fuites de l’affaire & la honte qui en couvre
l’auteur ; que le fieur de Bombelles n’avoit rien fait que par (es
coiifeils ; quelle l’avouoit de tout : & en effet c’eft de fa main
�///
17
qu’il a reçu les lettres dont il excipe. C ’eft elle qui lui a procuré
des atteftations , des certificats qui femblent un peu le raffurer.
C ’eft elle qui éloigne de la Demoifelle Camp une de Tes bellesfœ urs, & qui n’ayant pas eu le même empire fur l’autre que
le Cloître dérobe à Tes follicitations, lui a voué une haine irré
conciliable. Et c’eft d’après un femblable procédé , qu’elle fe
plaint que la Demoifelle Camp l’injurie, en fe défendant des
infultes dont elle-même l’accable !
Q uoi ! par écrit & déV vive voix à cette A udience} vous
vous déclarez ma plus cruelle perfécutrice, 8c vous prétendez
que je vous honore ? Un caprice inconféquent vous infpire
contre moi une rage opiniâtre : vous bravez, pour me nuire,
le cri public : vous étouffez celui de votre confcience : vous
facrifiez l’honneur de votre neveu : vous confentez à partager
volontairement fon opprobre : & vous exigez que je vous
refpe&e ! Vous corrompez fon cœur pour le rendre parjure:
vous me cherchez des ennemis d a n s-fa famille : vous n’aviez
voulu entendre parler de lui ni de fes fœ urs, depuis la mort
de leur pere : vous nourriifiez pour eu x, & par une raifon
dont je vais rendre compte tout à l’heure, une averfion invin
cible en apparence ; cependant vous la faites céder au plaiiir
de le voir devenu méchant, dès que fa perverilté peut affurer
mon infortune. Vous lui tendez les bras, dès qu’il eft devenu
parjure, infidele , méconnoiiTant. Mes malheurs vous recon
cilient : & vous voulez que je vante votre bienfaifance, que
j’orne le tombeau, où vous allez defcendre, des éloges dus à
la générofité ! Mais pour perfuader que je vous ai calom
niée , ceffez donc de prouver par votre conduite, que ces
calomnies font des vérités néceffaires. Ah 1 il vous étiez
bonne, indulgente , véridique , amie de la vertu , ferois - je
infortunée ?
D ij
ùi
�Si votre demande, tendante à la réparation,eil illufoire, dé
mentie par les procédés même au moyen dtfquels vous
croyez la juftifier, que faut-il penfer de cette prétendue juftice
que vous follicitez en faveur d’un neveu q u i, comme vous le
déclarez vous-même , vous doit fes funeftes égaremens 1 D e
quel droit, à quel titre intervenez-vous ici pour lui? Etesvous fa tutrice, fa curatrice ? Avez-vous , pouvez-vous avoir
quelque qualité dans la Caufe ?
Vous vous accufez de l’avoir perverti : c’eil: un aveu qui
vous expofe à partager avec lui les rigueurs de la Juftice ; mais
ce n’eft pas un titre qui vous nutorife à le défendre, ni qui
puiffe donner du poids à fes foibles allégations. La Loi vous
exclud formellement de l’a&ion que vous intentez: elle vous
repouffe à l’inftant même où vous feignez d’implorer fon
pouvoir.
Mais mon alliance, fi l’on vous en croit, avec le fieur de
Bom belles, eft difproportionnée ; elle feroit la honte de fa
famille j & c’eft un des cas où les collatéraux font admis à faire
caffer un mariage, qu’ils feroient dans toute autre circonftance forcés de refpeûer.
D e la difproportion I Et où la trouvez-vous ? M . de Bom
belles a de la nobleffe, mais j’ai de la vertu. Il flétrit fa famille j
m o i, j’honore la mienne. Cette difproportion eft-elle fi défa
vorable ? S’il y a de la honte à la franchir, ce n’eft fans doute
que pour moi : mais d’ailleurs , de combien eft-il plus noble
que fon pere ? Celui-ci n’a pas cru déroger, en époufant en
premières noces une femme du même culte que m oi, & d’une
condition inférieure. Son union en a-t-elle été moins refpectée ? A-t-il trouvé dans fa famille une Madame Hennet, prête
à la combattre & à tout facrifier pour la faire anéantir ?
�2Q
r ' 'Vous vous êtes permis d’avilir l’homme refpe&able dont je
tiens la naiffance. Vous l’avez travefti en un Compagnon T ein
turier. Si votre ame étoit fufceptible de quelques remords,
vous lui en feriez aujourd’hui une réparation plus éclatante
que ne le pourroit être celle que vous prétendez. Auriez-vous
,ofé hafarder une pareille impofture devant nos Compatriotes,
juges naturels d’une imputation de cette efpece? Perfonne ne
fait mieux que vous, que il le goût de la médiocrité lui a fait
quitter de bonne heure urç commerce honnête , où fes parens
s?étoient diilingués comme lu i, il s’en eft retiré avec la confidération publique dont il jouit encore ; fucceffion précieufe ,
aiïurée à fes héritiers, & que vous ne tranfmettrez probable
ment jamais aux vôtres.
Des iiecles d’une roture utile & fignalée par des vertus, va
lent bien fans doute, comme vous le difoit tout-à-l’heure un
de ces Négocians que vous haiflez parce qu’ils nous connoiir
fent tous deux & nous rendent juftice, valent bien quelques
années d’une noble-île dégradée par des lâchetés & des par
jures.
. Comme collatérale, vous n’avez pas à vous plaindre d’une
alliance où ma famille court plus de rifque que la vôtre. Com
me (impie tante, vous n’avez rien à dire dans les affaires où
les qualités doivent être pefées autant que les raifons. Cette
tendreffe, dont vous vous enorgueilliffez , cette affeftation
d attachement pour votre neveu peut-elle fuppléer à des titres
que vous n’avez pas, & que vous n’avez jamais pu avoir?
Vous lui tenez lieu de pere, dites-vous. A h ! combien frémiroit l’auteur de fes jours , à ce langage cruel pour lui! Com
bien il rougiroit de fe voir ainfi remplacé 1 Avez-vous donc
oublié, avez-vous perdu de vue ce monument de fes der-
�3°
nîeres volontés, cet écrit où fa main mourante a coniîgné le
dernier fentiment qui ait rempli Ton cœur ? Ne vous fouvenezvous plus que dans Ton teflament il a paru ne rien tant redou
ter pour fes enfans, que de voir vous mêler en quelque chofe
de leurs affaires ? Voici ce qu’on y lit:
Le fieur de Bombelles pere, après avoir fait Tes difpofition s, ajoute :
« Sur-tout j e recommande que mon frère & ma fœur ne Je
» mêlent en rien de tout ce qui me regarde & mes enfans »>.
Il n’en faut pas davantage , M e s s i e u r s , pour écarter la
puérile intervention de la Dame H ennet, & pour juilifier ce
qui a été dit d’elle dans le Mémoire à confulter. Cet oracle domeilique eil un arrêt foudroyant, qui la condamne au iilence.
La nature & la Loi défèrent à un pere qui fe voit arraché par
la mort des bras de fes enfans le droit de choiiir les mains à
qui il veut confier leur foibleffe ; mais s’il a la nomination, il a
fans doute auffi l’exclufion. D ’après le teflament du fieur de
Bombelles pere, la Dame Hennet n’auroit pu avoir le nom de
tutrice auprès des enfans qu’il laiffoit ; elle ne peut donc pas
aujourd’hui en exercer les fonûions. Ses vains efforts ne doi
v e n t a rrê te r ni vos regards ni les nôtres. Portons-les donc fur
de plus grands objets. Examinons en détail ce mariage intéreffant, à la deilinée duquel une partie de la Nation croit voir
la fienne attachée,
§. 11.
Preuve de la, pojfejjlon d'état de la Demoifelle Camp,
Il cil bien étrange, fans doute, que ce foit au mari de la
Demoifelle Camp qu il faille prouver qu’elle eil mariée j il eil
étonnant que ce foit lui qui fe preiente pour dénier des fermens
�que fa bouche a proférés, & des faits dont il a lui-même été
le premier mobile. Encore s’il avoit fuivi par artifice le même
plan que les égards, les ménagemens nous ont fait adopter;
fi, au lieu de fe produire lui-même fur la lice, il n’y avoit laiffé
paroître que fa prétendue fécondé époufe, comme la Demoiielle Camp n’y a expofé que fa fille, alors la querelle étant
entre deux perfonnes étrangères l’une à l’autre , chacune des
combattantes auroit p u , ^ans rougir, nier des particularités
qu’elle auroit été cenfée ne pas connoître. Toutes deux auroient pu fans honte affe£ter une ignorance entiere du paiTé,
& exiger des démonftrations rigoureufes de tous les événement
auxquels elle auroit paru n’avoir pas eu de part direfté.
Mais que ce foit le fieur de Bombeiles qui vienne en perfonne montrer cet air novice & défintérefle ; qu’il feigne ic i, â
cette Audience, d’écouter ce que nous difons, avec un air de
curiofité & de furprife, comme fi c’étoient des chofes abfolument nouvelles pour lui ; qu’il affe£te d’en prendre des notes ,
comme s’il avoit befoin du fecours de l’écriture pourfe les rappeller, & q u e ce petit artifice dût l’aider à préparer fes réponfes, c’eft encore, M e s s i e u r s , un de ces incidens bifarres
qui, comme j’ai eu déjà l’honneur de vous le dire, diftinguent
cette Caufe de toutes celles qui l’ont précédée.
Q uoi qu’il en fo it, donnons-lui la fatisfaftion qu’il foühaite*
Procurons-lui le'plaifir d’entendre prouver géométriquement*
des faits qu’il connoît au moins auffi bien que nous. Dém on
trons que fa premiere femme a en fa faveur la pofTeiilon & les
titres.
Q u eft-ce que la poiTeiTion d’état ? D e l’aveu de nos A dverfaires , page 50 de leur Imprimé , elle conjijle dans l'opinion
publique j mais principalement dans l'opinion de ceux qui f ont
�< X L \
3l
obligés d'en prendra connoijjancc, & qui ont intérêt de ne pat
s'y méprendre. Si cette définition eft jufte, qui a jamais eu une
poiTeifion d’état plus confiante, moins problématique, que la
Demoifelle Camp ?
Q ui font les perfonnes obligées de prendre çonnoiflance de
l’état des Citoyens ? Ce f.n t fans doute les Chefs de l’Adminiftration, tant eccléfiaftique que civile. O r la Demoifelle Camp
vous préfente, M e s s i e u r s , fes atteftations en form e, éma
nées de ce que chaque forte de Magistrature a de plus refpectable. M. l’Evêque de Montauban, dans un Certificat du 7
Oitobre 1 7 7 1 , déclare que,
D ’après les inftru&ions que nous avons prifes fur la conduite de la
D em oifelle C a m p , elle a toujours j o u i , en qualité de fille , d’une
bonne rép u tatio n ; que depuis environ 1766 elle a été reconnue pour
Vépoufe de M. de Bombelles, & qu’elle a mérité l’eitime du P u b lic, & c .
D onné à M ontauban, le 7 O & obre 1 7 7 1 . Signé,d e B r e t e u i l , E vêq u e
de Montauban.
M . le Premier Préildent de la Cour des Aides & Finances
de Montauban certifie que
Dam e Marthe Camp , VicomteiTe de Bombelles, a toujours j o u i ,
avant & depuis l’année 17 66 , époque de f i n mariage, d’une réputation
intatte ; que la fagefle, de fa conduite & l’auftérité de Tes moeurs lui
ont mérité l’eitime publique, & c . Fait
Signé t M a l a r t i e
de
Montauban le 6 Juin 1 7 7 1 .
M o n t r ic o u x .
M . le Commiflaire départi dans la Province, attefte que
D em oifelle Marthe C a m p , habitante de M ontauban, & connue fous
le nom de Dam e de Bombelles depuis l’annee 1766 , a toujours e u ,
avant & depuis fo n mariage, u n e conduite irréprochable, qui a mérité
l’eftime du P u b lic, & c . Fait à Montauban le 9 O & obre 1 7 7 1 . Sig n é,
de G o u r g u e .
Vous
�33
Vous le v o y e z, M
e s sie u r s
: à la certitude de l’état de la
Demoifelle C am p , ces trois pieces joignent une vérification
particulière de Tes procédés, & une atteftation précife de la
régularité de fa conduite. L ’Infpe£teur-né des mœurs, le Ven
geur de l’honnêteté publique, le Pafteur univerfel, l’Evêque,
qui a dû plus que perfonne être en garde contre un mariage
célébré par des Proteftans; le Commiflaire départi, à qui eft
confiée l’exécution des R^glemens rigoureux prononcés contre
tout exercice d’un culte profcrit ; le premier Préfident d’une
Cour fouveraine , à qui l’obfervation des Loix ne peut jamais
être indifférente, fe réunifient tous pour attefter que la Dem oi
felle Camp a été reconnue époufe du fieur de Bombelles, &
que l’année 1766 ejl L'époque de fon mariage. Si jamais il y a
eu quelque choie d’authentique, c’eft fans doute une vérité
confirmée par la réunion de trois témoignages, doxit un feul
fuffiroit pour rendre un fait inconteftable.
Si les perfonnes obligées de prendre connoiflance de l’état
des Citoyens , rendent hommage à celui de la Demoifelle
C am p, que font celles qui ont intérêt de ne pas s’y méprendre ?
Ce font fans doute les parens qui forment cette fécondé clafle:
o r , dira-t-on qu’ils aient méconnu le mariage dont nous foutenons la validité? Mais vous avez entendu le fieur de Bombelles fe récrier fur une prétendue ligue formée, pour le perdre,
entre eux & fa premiere époufe : vous l’avez entendu fe plain
dre à grands cris de ce que la Demoifelle Camp a fafeiné les
yeux de fa famille, de ce qu’elle eft Finftrument dont fe fer
a ie n t des perfécuteurs dénaturés, pour compromettre fa
gloire troubler fon repos. N ’eft-ce pas là un aveu b i e n précis
E
�V A
34
de la juftice que rendent Tes parens à fa véritable époufe ?
C e qu’il appelle former une ligue contre lu i, c’eft être fufceptible de quelques fentimens d’équité : ce qui lui paroît une
perfçcution cruelle, c’eft l’attachement aux principes d’hon
neur & de délicateffe qui animent toutes les perfonnes de fa
race, excepté peut-être, puifqu’il faut le dire, la Dame Hennet,
qui s’expofe fi courageufement à partager fon opprobre. Hors
çlle, quel parent, quel allié voyez-vous paroître ici pour com
battre nos réclamations? O u plutôt, de quel parent, de quel
allié ne font-elles pas avouées ?
O n vous a cité à l’Audience les Demoifelles de Bombelles,
fœurs de notre Adverfaire, comme complices de l’interven
tion illufoire de la Dame Hennet. O n n’a cependant pu pro
duire que je ne fais quel défaveu fait au nom de l’aînée, d’un
pouvoir donné par elle, pour tenir en fon nom la jeune Char-,
lotte de Bombelles fur les fonts de Baptême. M ais, en fup-'
pofant que cette aînée q u i, d’ailleurs, refte dans le filence >
fe foit lailTée furprendre par les infinuations intéreiTées de la
Dame Hennet, ce fuffrage du moins ne feroit-il pas plus que
fuffifamment compenfé par un autre fuffrage d’un tout autre
poids, & qui nous eft affuré ? c’eft celui de la cadette, Ile—
ligieufe à Montauban.
Avant & depuis fa Profeifion, elle n’a cefle cle rcconnoître
la Demoifelle Camp pour fa belle-fœur, & la petite fille pour
fa niece, & de leur prodiguer les noms ainii que les careffes les.
plus tendres. 11 n’y a point d’année où elle n’ait donné par écrit
des preuves de fon attachement &: de la ferme perfuafion où
elle éto it, que l’engagement de fon frere avec la Demoifelle
Camp eft folide & irrévocable. Il n’y a pas une de ces lettres
O^i elle ne parle du mariage, de l’accouchement, de la petite
�* 6
' 35
nicce* Depuis même que le Procès eft commencé, le 14 Fé
vrier 1771 , voici ce qu’elle mandoità la Demoifelle Camp:
V ous avez eu t o r t , ma chere fœ u r, de me vo u lo ir du m al; vous
connoiflez l’amitié que j’ai pour vous ; je voudrois p o u v o ir vous dé
livrer de toutes vos peines, mais cela n’eft pas poilible. Q ue vo u lezvous que fafle une pauvre religieufe ? Je ne puis que vo u s exhorter
d’etre foum ife à la volonté de D ieu , de faire bon ufage de toutes les
croix que le bon D ieu vou^ envoie : fi cela dépendoi de m o i, de ce
moment ici vo u s feriez au comble de vo s .deiirs. Je conviens que vous
aveç un trijîe f o r t , fachant qu 'il ne dépendoit que de vous , A V A N T VOT RE
mariage
, de prendre un bon parti. Il faut efpérer que tout s’accom
modera d’une façon que v o u s v iv r e z heureufe......................
Ce témoignage n’eft pas moins précieux, il eft peut-être en
core plus décifif que ceux que j’ai déjà eu l’honneur de vous
citer. La fœur Dorothée avoit plus de préjugés à vaincre,.que
perfonne: Catholique,Religieufe, enchaînée ainfi doublement
en quelque forte, à l’obfervation de ces Loix que l’on oppofe
à la Demoifelle C a m p , quelle incertitude, quelle évidence
ne falloit-il pas aux droits de celle-ci, pour fubjuguer les ferupules de fa belle-fœur, & l’engager à reconnoître en elle une
alliance q ui, au premier coup-d’œ il, pouvoit paroître fufpefte
à l’Eglife ?
Si le mariage n’avoit pas été public 8c confiant, en quelle
qualité la Demoifelle Camp auroit-elle paru aux yeux de cette
pieufe reclufe ? A quel titre auroit-elle ofé lui préfenter le fruit
de fon union ? Si le mariage n’avoit pas été connu & avoué;
fi ce n’avoit été, comme l’affure fi agréablement la D am e
Hennet dans fes lettres, quun goût v i f , mais faffager ; 8c
comme le dit, avec une componûion très - édifiante le i«eur
�■
3
*
de Bombelles lui-même, quune foibleffe expiée par fa conduite
pojlérieure ; fi enfin ce n’avoit été, comme on vous l’a plaidé fi
hardiment, qu’une continuation de défordre & un concubi
nage fcandaleux, la Religieufe fe feroit-elle prêtée à y donner
la moindre approbation ? Eft-ce avec elle que l’objet de ce
commerce impur auroit cherché à vivre dans l’intimité ? Son
amitié feroit-elle devenue le prix d’une liaifon malhonnête ? Et
le premier devoir que lui auroit prefcrit la délicateffe de fa
confcience, n’auroit-il pas été de bannir à jamais d’auprès
d’elle cette ufurpatrice d’un rang & d’un nom qu’elle déshonoroit ?
'
.
.
Mais elle s’eft biffée tromper, dira-t-on ; la clôture rend les
filles ainfi ifolées, plus crédules, moins défiantes. Rien de plus
facile que de leur en impofer fur ce qui fe paffe au-delà des
murs impénétrables qui leur ôtent la vue du fxecle & de fes
vanités.
Ah, M
e s sie u r s
, fur .cet article j’en appelle à l’expérience.
Les Cloîtres font inacceffibles aux perfonnes étrangères qui
n’y doivent point entrer. Mais le font-ils de même aux nou
velles ? On s’y pique d’un mépris rigide pour le monde & fon
vain éclat ; mais a-t-on une pareille indifférence pour les incidens qui l’agitent ? N ’y cherche-t-on pas plutôt à s’affermir
dans un fage éloignement pour ce théâtre de corruption , par
la liberté avec laquelle on apprécie les fcenes qui s y jouent,
& par le defir impétueux que l’on a d’en être initruites dans le
plus grand détail? Eit-il bien vrai qu’il foit aifé, à cet égard ,
d’abufer les habitantes de ces retraites facrécs ? Quand toutes
les vertus trouvent auprès d’elles un afyle, la vérité feule en eftelle bannie ? Et n’eft-ce pas fur-tout quand les événemens ont
quelque rapport aux perfonnes de la m aifon, ou à leurs far
�37
milles, que la cùrioiifé commune devient plus a&ivé, plus
infinuante, & mieux informée ?
■
Je veux croire qu’il auroit été poffible d’en impofer à la Sœur
Dorothée fur le mariage de la Demoifelle C am p, & de métamorphofer à fes yeux un défordre criminel en une conjonftion
légitime ; mais fes compagnes auroient-elles été auffi faciles,auiïi
peu clairvoyantes? Cette prétendue belle-fœur entroit dans le
Couvent; fa figure, fa taille étoient faites pour fixer des yeux
oififs que la nouveauté futaout a droit de frapper. Si le nom de
Bombelles qu’on lui donnoit, n’avoit été qu’une impofture
les Religieufes, les Supérieures, & par conféquent la Demoi
felle de Bombelles elle-même, auroient- elles tardé à en être
averties ? Celle-ci fe feroit-elle opiniâtrée, au milieu de tant de
leçons d’innocence & de modeles de pureté, à paraître la proteftrice du fcandale & garnie du libertinage, fur-tout en faveur
d’une Proteftante, à qui rien ne l’attachoit d’ailleurs, & pour
qui la feule différence des cultes devoit lui infpirer au premier
coup-d’œ il, plus d’éloignement que d’inclination ?
Je ne crains pas de le dire, M
e s sie u r s
, jamais il n’y a eu
de preuve de poffeifion d’état, c’eit-à-dire, de la publicité de
cet état, plus forte que la reconnoiffance de la Sœur Dorothée.
C ’eff iine voix* accablante qui crie contre le fieur de Bom
belles , & qui devroit porter dans fon cœ u r, finon les re
mords, au moins la honte & l’effroi.
Q u’on y joigne maintenant cette quantité innombrable de
lettres de toute efpece, & de tous les amis du fieur de Bom
belles j informés par lui-même de fon mariage. Q u ’on y joigne
ces fuferiptions adreffies cle Lille à la Demoifelle Camp, par le
Cuifinier qui a nourri fon époux, & qui demande fon paiement;
par cette Dame indignement trompée, à qui l’on remet une
�T8
fauffe lettre de change pour l’endorm ir, & Te ménager le
moyen de s’évader fans en être obfervé;, par ce Camarade qui
réclame une dette d’honneur ; & qui tous n’ont pu être ins
truits , dans le fond de la Flandre, d’un mariage contrarié à
M ontauban, au fond du Q u ercy, que par une publicité bien
notoire. Q u ’on y joigne les aveux, les déclarations faites par
le iieur de Bombelles lui-même, ioit dans Ton teftament qui a
donné lieu de fa part à une calomnie fi audacieufe & fi im
prudente, foit dans fes propres lettres qui portent toutes, pen
dant plus de quatre ans, une fufeription feule fuffifante pour
le condamner, puifqu’elles font adreffées à Madame la Baronne
ou la Vicomteffe de Bombelles, fuivant qu’il plaifoit à fon
mari de s’intituler Vicomte ou Baron ; foit à l’Ecole Militaire,
où il s’eft fait publiquement gloire de fon alliance avec la
Demoifelle Cam p, comme j’ai eu l’honneur de vous l’obferver.
Q u ’on réuniife, M
e s sie u r s,
toutes ces efpeces de preuves,
& qu’on voie s’il y a jamais eu une pofleiTion d état mieux
déterminée, plus authentique que celle que nous annonçons
aujourd’hui. Dans quel efprit le concours de tant de témoi
gnages , fans interruption, peut-il laifler fubfifter la moindre
idée d’incertitude ?
%
Faut-il répondre aux miférables chicanes, aux impoftures
criminelles par le moyen defquelles notre Adverfaire s’eil flatté
d’affoiblir cette chaîne terrible de preuves qui l’eiFraie & l’acca
ble ? Il avoit commencé par accufer la Demoifelle Camp d’a
voir em ployé, pour furprendre à fa tendrciTe des dénomina
tions honorables, un ftraragême inSigne d’un cœur honnête.
Il a articulé en propres ternies , quelle avoit d’abord fuppofé
une groflefle, à la faveur de laquelle on l’avoit engagé, pour
�39
lui fauver l’honneur, à lui donner le nom d’époùfe. Cette im
putation développée , étendue à l’Audience , s’eft évanouie à
l’impreflion, comme celle qui regardoit le théâtre du fieur
la Coite. O n n’en retrouve plus qu’un mot échappé par mégarde à la page 50.
C ’eft la défavouer (ans doute, que de l'avoir ainfi fupprimée.
Mais quel fruit s’eft promis le fieur de Bom belles, de la hardiefîe avec laquelle il a oie la haiarder d’abord à l’Audience ?
Quel avantage efpéroit-il d(une inculpation inconféquente dont
il ne lui refte que la honte ; puifque, malgré le trifte courage
dont il n’a donné que trop de marques dans la C au fe, il fe voit
aujourd’hui forcé de l’abandonner ?
Quelle raifon a pu l’engager de même à avancer, à la page
45 de fon Imprimé, une abfurdité ridicule qui n’avoit.point
paru à l’Audience ? Ses propres lettres, pendant quatre ans,
portent conftamment une fufcription non fufpeôe & tran
chante. Elles font toutes adreflees à Madame de Bombelles.
EmbarraiTé fur ce fait, qu’il ne peut nier, puifqu’on en produit
la preuve écrite, il dit qu’il n’a employé cette dénomination y
que par convention, & parce que cefl l ’ufage à Montauban
et aller retirerfoi-même fes lettres au Bureau de la Poße.
Mais fi cette alïbrtion eft fauffe ; fi cet ufage prétendu n’eft
pas plus en ufage en Montauban qu’ailleurs ; fi dans cette Ville
commerçante il y a , comme dans toutes les autres , un Fac
teur établi exprès pour la diftribution des lettres , que réfultet-il de lexcufc frivole & menfongere que préfente le fieur de
Bombelles ? Ne donne-t-il pas par là un nouveau poids à ces
mêmes lettres , dont il eflaie d’alléger le fardeau ? N ’en conftate-t-il pas l’authenticité , par les efforts qu’il multiplie pour
1 éluder? Si elles n’ont pas été myftérieufes, fi elles ont dû par
�40
venir à Ton époufe par la voie ordinaire , il elles ont dû lui
être portées indiftin&ement comme les autres par TOfficier
chargé de ce miniftere , n’eft-il pas évident que les droits,
dont la fufcriptîon contenoit l’aveu, n’avoient rien de clandeftin & de problématique ? N ’eft-il pas clair que ion intention
étoit qu’on fût à la Pofte & par-tout où les marques de fa
tendreile pour la Demoiielle Camp pourraient être connues,
qu’il l’avouoit pour fa femme , que des nœuds indiflolubles
l’engageoient à elle, & qu’à chaque fois qu’il prenoit la plume
pour lui écrire , il çonfirmoit des fermens par lefquels il lui
avoit en i j 66 engagé fa foi-fans réferve ?
Mais ce menfonge officieux, dit-il à la même page 4 5 ,3 pris
fin au mois d’Août 17 7 0 , où recommence l’adreffe de Mademoifelle Camp ; ces deux derniers mots font imprimés en
lettres italiques : &r pour vous en prouver la juftelTe , M
sie u r s
es-
, nous produifons une lettre du 9 Septembre 17 7 0 ,
adreftee à Madame Cam p, pour remettre à Madame fa fille.
Mais a-t-elle fait dans le ménage quelqu’a&e capable d’in
diquer fa qualité ? A-t-elle payé des dettes , compté avec des
fermiers , xeçu de quelques débiteurs ? Non , M e s s i e u r s ,
elle n’a pas reçu des débiteurs, parce que le iieur de Bombelles
11’avoit que .des créanciers. Elle n’a pas payé de dettes, parce
que fa fortune n’y auroit pas fuffi , & que , il elle avoit voulu
faire face aux demandes qu’occafionnoit le dérangement de
fon mari, elle auroit ruiné fa famille fans le libérer. Enfin elle
n’a point compté avec des fermiers, parce que le fieur de Bom
belles n’avoit point de fermes.
Ilne poffedoit pour tout fonds qu une maifon de campagne,
cftimee dans fon partage 27000 livres. Il lui avoit promis
Uy’
�¡r t
41
lui en afîurer l’ufufruit ; par ion tjeftament 11 lui en donnoit
même la propriété. Cependant il l’a vendue dans fes befoins.
Elle ne s’en plaint pas ; mais on voit combien il eft difficile
qu’il fubfifte des traces d’une adminiftration ainfi raccourcie.
Mais dans l’extrait de baptême de fa fille , on ne fait pas
même mention de fon pretendu mariage. Charlotte de Bom
belles n’y eft dite ni légitime, ni iffue de pere & mere mariés.
Cela eft v ra i, M e s s i e u r s ; mais pour en tirer une induction
férieufe, il faudroit que toutes les preuves de l’état que nous
réclamons fuiTent réduites à ce titre feul. Il faudroit qu’il fût
bien conftaté que le Vicaire qui a baptifé l’enfant n’ait pas eu
désraifonsperfonnelles de haine q uil’aient dirigé dans la rédac
tion de l’a&e de baptême ; il faudroit qu’on ne pût pas le foupçonlier d’un zele amer & vindicatif, q u i, par un déplorable abus,
a influé jufques fur les fondions de fon miniftere. Il faudroit
enfin que la fimple omiifion d’un mot fût une nullité irrémé
diable , à laquelle rien nepûtfuppléer ; il faudroit qu’on n’eût
pas d’exemples, fur-tout dans les baptêmes des Proteftans, des
correftions ordonnées par les Tribunaux en pareil c a s , & que
la Demoifelle de Bombelles ne pût pas un jour demander, s’il
en étoit befoin , que le regiftre refté imparfait à fon égard par
négligence ou par malignité, fut réform é, comme tant d’autres
font parvenus à en faire rayer des qualifications injurieufes que
la malignité ou la négligence y avoient fait inférer.
Mais au m oins, dit le iieur de Bombelles , fi j’avois en
tendu contra&er un engagement férieux ,fi j’avois voulu tranfferer à la Demoifelle Camp mon nom & les droits d’épo-ufe ,
Jer* aurois auili voulu toucher le prix i je n’aurois pas
©mis den exiger la d o t; on juge bien que je ne fuis pas
�4*
hom m e à m’endorm ir fur un pareil article. C ependant vou s
a vo u ez que les 8000 livres portées par le contrat n e'm ’ont pas
é té délivrées. C e l a eft encore v r a i , M
e s sie u r s
; & com m e
cet article a quelque chofe de fp é cieu x , il mérite explication.
Au moment du mariage, les deniers étoient prêts & les efpeces comptées ; elles ont été offertes au fleur de Bombelles ;
mais foit qu’il voulût donner une plus grande idée de fa mo
dération , foit qu’il crût cet argent plus en fûreté dans les mains
de fon beau-pere que dans les fiennes, foit que la poiTefïion de
fon époufe lui fuffît alors, & qu’elle remplît exclufivement
tous fes defirs, il refufa pour le moment. Quand le féjour
de la garnifon de Lille eut changé fes mœurs , & que le défordre lui eut fait connoître le befoin ; quand après d’inutiles
efforts pour dérober fon inconduite aux yeux de fes compa
triotes , elle eut percé jufqu’à M ontauban, & qu’on l’eut vu
forcé de vendre cette maifon qui devoit fervir d’afyle & de
douaire à fon époufe; quand après avoir épuifé ces reffources,
il n’en vit plus d’autres pour lui que la d o t, & qu’il la demanda
par forme d’emprunt, le pere de la Demoifelle Camp crut de
voir fagement fe refufer à la demande d’un diffipateur que ce
foulagement paffager n’auroit pas tiré de l’abîme où il s’étoit
précipitéIl
n’avoit plus rien qui pût répondre des fonds qu'on lui
auroit confiés. C etoit l ’unique patrimoine de cette enfant, que
fon cruel pere méditoit peut-être dès-lors d’abandonner. Il
n ’étoit permis de le lui remettre que fous la condition expreffe
d’en faire un emploi ; & cet em ploi, dans fon cœ ur, étant ou
l’acquit de quelques dettes peu honnêtes, ou peut-être même
le moyen d’en contra&cr de nouvelles , il n’auroit été ni pru
dent , ni licite au fe u r de Camp pere de s’en defTaifir. Il devoit
�réferver à fa malheureufe petite-fille ée débris d’une fortune
que lui-même ne pouvoit pas augmenter, puifqu’il avoit d au
tres enfaus à qui il fe devoit également.
Vous voyez donc , M e s s i e u r s , que ce refus n avoit rien
que de fage & de légitime ; mais nous ne devons pas diffimuler non plus que c’eft là probablement l’origine de la conteftation que nous éprouvons aujourd’hui. Le fieur de Bombelles,
dans fa détreiTe, trouvant une perfonne preffée de fe marier,
qui fe préfentoit à lui ¿Vec un revenu à peu près sûr , ne
voyant plus rien à efpérer d’une famille trop prévoyante , qui
ofoit fe piquer d’économ ie, & lui préférer l’enfant à laquelle il
avoit donné le jo u r, a regardé un fécond engagement comme
une efpece de bonne fortune dont il failoit profiter.il a envifagé la crédulité & la précipitation de cette fille aveugle,
comme une reffource inattendue qu’il ne failoit pas laiifer
échapper. Quoique fa main n e lui appartînt plus , puifqu’il en
avoit déjà difpofé, comme c’étoit la feule chofe au monde
qu’il pût donner à la Demoifelle de Carvoifin en échange
des avantages quelle lui faifoit, il a étouffé le lcrupule qui
s’élevoit dans fon cœur , à la feule idée de ce ftellionat d’un
genre nouveau.
C ’eft alors qu’il a cherché les moyens de n’être plus marié ;
c’eft alors , pour la premiere fois , qu’il a trouvé douces les
Loix rigoureufes
fous lefquelles les Proteftans gémiffent.
L ’amour en avoit fait un Réformé : l’intérêt en a refait un
Catholique. Serm ens, devoir, honneur , il a tout facrifié à la
médiocre opulence de la Demoifelle de Carvoifin , prêt peutêtre à la trahir bientôt elle-même pour une rivale plus riche ;
prêt , fi [c fécond mariage eft annuité , comme fans doute il
le feia , & fi fes efforts prévaloient contre le premier, à cmF ij
�44
braffer une nouvelle religion 8c une troifieme époufe, dans le
cas oii il trouveroit un autre culte propre à favorlfer l’incons
tance , 8c une femme affez hardie pour recevoir fa foi I
M a is , a-t-il dit encore , il mon mariage avec la Demoifelle
Camp a été fi public & fi connu, pourquoi la Demoifelle
Camp a-t-elle paru elle-même s’en défier ? Pourquoi a-t-elle
affe&é de cacher fa groffeffe 8c fa délivrance? Pourquoi eft-ce
dans un village, à quatre lieues de Montauban , dans une
Paroiffe étrangère , qu’elle a été accoucher ?
Pourquoi ? Et c’efl vous qui le demandez ! vous qui infiftez
fur l’époque de ce défaflre malheureufement fi fameux, fur
ces ravages caufés par l’inondation du Tarn en 1766 \ vous
avouez que la maifon du fieur Camp pere a été du nombre
de celles que la riviere en fureur a renverfées ; vous avouez
que c’eft là où a recommencé une familiarité intime entre vous
8c l’infortunée dont vous ne détaillez ici les faveurs que pour
les faire paroître déshonorantes , après les avoir furprifes à
l’aide du voile le plus honorable 8c le plus fait pour les juftifier.
C e fyftême de réconciliation n’eft qu’une chimere. Il n’y
avoit point eu jufques-là de brouillerie entre vous 8c la vic
time de vos différentes paflions. Mais ce qui eft vrai 8c cer
tain , c’eft le renverfement de la maifon paternelle , où avoit
habité jufques-là là Demoifelle Camp. En attendant qu’elle fût
reconftruite, la famille défolée avoit été forcée de chercher
une retraite qui devoit être plus difficile à trouver en raifon de
ce qu elle etoit plus néceffaire, parce que le grand nombre des
perfonnes qui avoient befoin du même fecours, le rendoit
rare. Le fieur Camp avoit été forcé de fe loger à l’étroit 8c dans
une maifon remplie, contre la coutume de la province, d’une
�/>/. /
45
m ultitude de difFérens m énages. 11 n’eft pas étonnant q u u n e
jeune femme , dans une premiere groiTeiîe., fe foit trou vée
im portunée de ce m élange. Il n’eft pas étonnant qu’elle ait
cherché à fe procurer un C jo u r m oins d éfagréable, & qu’elle
fe foit tranfportée à la cam pagne, p our y attendre la fin d’une
incom m odité paflagere , dont le bon air & le grand exercice
fon t peut-être les plus sûrs rem ed es, ou du m oins les plus
grands adouciiTemens.
Et dans quelle campagne s’eft-elle retirée ? A Bioulle , dans
un bien qui appartient à fou pere. C ’eft là ce qu’il plait au fieur
de Bombelles d’appeller une ParoiiTe étrangère : comme s’il
étoit défendu à une femme d’aller accoucher dans un village
où fon pere a une maifon, quand celle qu’il occupoit à la ville
eft détruite par un accident; comme fi cette précaution, fage à
tous égards , étoit une preuve de honte ou un indice de la dé
fiance qu’elle-mêmc avoit fur fes droits.
Jufqu’ic i, vous le voyez , M E S S IE U R S , la poiTeifion de la
Demoifelle C a m p , fa qualité d’époufe légitim e, eft établie
par toutes les preuves qu’il eft poifible d’en donner , d’après
les deux premieres conditions qu’exigent nos Adverfaires euxmêmes ; les Magiftrats de tous les ordres la certifient ; toutes
les perfonnes qui ont intérêt de ne pas s’y méprendre la pu
blient. Les parens la reconnoiffent ; le fieur de Bombelles luimême y rend un témoignage éclatant. V ous pouvez juger
dès à préfent fi le titre qu’elle réclame e f t , comme il le dit
avec tant d’agrément & de délicateffe dans fon Imprimé,
page 4 4 , un nom de guerre qu’une fille prend dans f* groffeffe , & fi les monumens qu’elle cite fo n t, comme il 1 ajoute au même endroit, des témoignages d'affection qu elle
fc foit fa it écrire par fon galant. Non , M e s s ie u r s > ils ne
�46
méritent pas cette qualification auffi honteufe que groiîîere.
C ’ert en tout le langage du cœur & de la vérité.
M a i s , pour y mettre le dernier fceau , il y manque encore
l’opinion publique ; il y manque cette voix univerfelle qui a ,
quand il s’agit de 1 état des hommes , plus de force que les
écrits ; cette voix qui fupplée aux regiftres, qui difpenfe de les
chercher quand ils font perdus, qui autorife à les réformer
quand ils font défeftueux ; enfin cette voix qui fubjugue la
Juftice elle-même & difte aux Tribunaux des Arrêts que la Loi
les force d’adopter. Avons-nous en notre faveur cette relTource ?
O u i, M
e ssie u r s
, & en voici la preuve.
Cette enquête , dont j’ai déjà eu l’honneur de vous parler,
contient la dépoiition de cinquante témoins ; il feroit facile
d’en faire entendre mille, fi l’on en avoit befoin.Tous atteftent
qu’il n’y a point eu dans Montauban d’incertitude ni d’embar
ras fur la qualité de la Demoifelle Camp ; tous déclarent qu’ils
l’ont vue préfentée dans les meilleures Maifons de la Ville par
fon mari, & ouvertement avouée comme époufe légitime; tous
publient que fa groileffe a été connue & à l’abri de toute efpece
de fufpicion.
D e ces témoins, les uns font des femmes de condition qui
l’ont reçue avec honneur, qui l’ont traitée avec les égards que
méritoient fa vertu & fon état, & qui la chériflent, la coniiderent encore dans l’humiliation où la perfidie d’un époux vo
lage 1 a réduite; les autres font ou des Magiftrats, ou d’anciens
Militaires retirés du fervice, ou des Officiers qui y font encore
engages ; Catholiques pour la plupart, & par conféquent moins
fufpe&s, (i le foupçon pou voit avoir lieu dans une occaiion
où ils ne parlent qu au nom de 1 honneur & fous la foi du fer
ment : d’autres font des perfonnes d’un état moins relevé, mais
�m
4*7
non moins croyables ; des Négocians diftingues par leur
probité, des Ouvriers aifés qui rendent gloire à la Juftice, 8c
confignent entre les mains du Magiftrat le récit naif de ce qui
s’eft paffé fous leurs yeux.
Il
n’y a point d’affertion du iieur de Bombelles, qu’ils n’aient
démentie d’avance. Il n’y a aucune de fes calomnies qu’ils
n’aient détruite. Il feroit trop long de vous rendre compte
de tous1ces détails, par lefquels ils appuient la vérité à laquelle
ils font hommage ; màis il ne m’elt pas permis non plus de
les fupprimer tous. Cette partie de laCaufe n’eft pas la moins
eiïentielle , puifqu’elle porte fur des faits, 8c que les faits font
ic i, M
e ssie u r s
, un des principaux mobiles qui doivent fer-
virà vous diriger.
Par exemple, le fieur de Bombelles , en fe débattant contre
l’évidence , en cherchant à fe fortifier lui - même contre
le jour qui lui blefloit les yeux , s’eft hafardé à foutenir qu'il
n’y avoit jamais eu aucune liaifon p a r tic u liè r e entre lui 8c la
famille de la Demoifelle Camp ; que jamais il n’en avoit fré
quenté les parens ; qu’il n’avoit point habité chez eux aVec
elle , 8c qu’au moment de la catailrophe occasionnée par le
débordement, elle n’étoit pas venue loger avec lui. Il a rendu
compte des repas qu’il a pris chez le fieur Camp pere, qui fe
réduifent, dit-il, à un feul depuis cette calamité : repas qu’il
n’a même accepté que par délicateiïe, 8c dans la feule vue de
leur prouver qu’il ne les méprifoit pas.
Qui ne croiroit voir , à ce tableau , un Gentilhomme foigneux de fe refpe&er, toujours fur (es gardes pour ne pas
commettre fa noblefle avec la roture , 8c qui veut bien condefeendre aux defirs de ces Bourgeois, de façon à honorer
leur table fans s’expofer au rifque de fe trop familiariftr • Q u*
�48
ne croiroit, à tout le refte des peintures indécentes q u ll s’ eil
permifes avec tant de profuiion & de confiance , que c’eit la
Dernoifelle Cam p qui le recherchoit avec ardeur ; qu’il ne fai•foit que fe prêter à Tes empreflemens , & que les faveurs prodiguées dans ce tendre com m erce, c’étoit lui qui vouloit bien
les accorder ?
L ’enquête, M
essieu rs
,
préfente des idées bien différentes.
O n y voit u n fieu rd e Bombelles peu reffemblant, à ld vérité,
,à celui que nous com battons, mais tel qu’il étoit alors , fou
rnis , tend re, aimant fon époufe , plein d’égards pour fa fa
m ille , révérant fon beau-pere, portant le deuil de l’aïeule ,
affiftant les enfans dans les devoirs pénibles que la coutume
impofe dans ces triftes circonftances. O n le voit agiiTant libre
ment dans la maifon , ufant des droits d époux , fe montrant
au lit fans contrainte avec la femme que fon cœ ur & les L oix
lui ont donnée : 011 le v o i t , ce qui eil effentiel après l’aiTurance avec laquelle il affirme qu’il n’a jamais habité avec elle
fous le même toît
on le voit prendre une maifon commune ,
y V ivre, y demeurer enfemble.
11 faut , M
essieu rs
,
vous en
convaincre par les propres expreffions des témoins.
Françoife Gaillard, époufe de Guillaume Moulis ;
DÉPOSE , ' q u e ......................................................................
;
vers le commencement du mois d’A v ril ou Mai 1766 , ledit fieur de
Bombelles lui dit qu’il étoit marié avec la Dernoifelle Camp, & qu’elle dev o it l’appeller Madame de Bom belles; que ladite Dernoifelle Cam p &C
fa famille ayant délogé du fauxbourg de V illebourbon à caufe de l’inon*
dation, étant venu habiter en v ille, ledit (leur de Bombelles co-habitant dans
la même maifon avec ladite Dam e ; qu’ils y vécurent comme mariés jufqu’au départ du fieur de Bom belles; que pendant cette époque la Dam e
M erignac grand’mere de la Dam e de Bombelles étant décédée, ledit Jieur
dt Bombelles prit & porta le deuil.....................
JElifabeth
�49
Elifabeth D elm as, époufe du fieur Beffon cadet :
D é p o s e , que lors de l’inondation du Tarn de 1766 , ayant été
obligée de quitter fa maifon du fauxbourgd e V illebourbonpour venir
loger en v i ll e , elle prit un appartement dans ctllc qu'habitoient le Jîcur
de Bombelles & lefieur Campfo n beau-pere ; qu’elle qui dépofe v it le iieur
de Bombelles vivre avec la Demoifelle Camp comme mari & femme , la traiter
en cette qualité , & particulièrement les avoir vus occuper une partie de l'apparlement, y coucher enfemble , & vivre en commun avec les Sieur & Dame
Campfes beau-pere & belle-mere. D ép ofe de p lu s, qu’elle a v u porter le
deuil audit fieur de Bombelles , de la mere de ladite Dame Camp fa
belle-mere.
M. Pierre S adou s , Lieutenant Général & Criminel au Sénéchal & Préfidial de Montauban :
D é p o s e ....................... :
:
:
.
. .
. .
. .
:
;
:
qu’ il a v u la Dem oifelle Cam p être annoncée dans les maifons fous le
nom de Madame de Bombelles , qu'il a vu habiter l'un & l'autre enfemble
dans une maifon qu'ils avoient louée dans la ville.
D am e Marie Vigie , époufe du fieur Baudon :
D épose , que lors de l’inondation arrivée en 1766 , le fieur Camp
& fa famille vinrent loger dans la maifon qu’habite la D é p o fa n te .. . .
qu’elle a vu quelquefois le fieur de Bombelles pafler dans la chambre
de la D em oifelle Camp avec de la lumiere ; que plufieurs fois la D é p o
fante demanda audit fieur Cam p comment fe portoit Madame fa fille:
ledit fieur Camp lui répondoit qu'elle fe portoit bien, mais n ’étoitpoint
encore levée de fon U t, q u elley étoit avec ledit fieur de Bombelles fon mari.....
& a ajouté qu’elle a v u porter le deuil audit fieur de Bom belles, à la
mort de la grand’mere de fadite époufe.
Demoifelle Madeleine A lbert, fille du fleur Alexis Albert :
D é p o s e .............. qu’elle a auiïi très-fouvent entendu que ce dernier
VM. de Bombelles) appelloit M. Camp,papa, & l’époufe de ce dernier, ma
bonne maman ; & à chaque inftant elle entendoit crier dans le degré &
d une chambre à l’autre, Madame de Bombelles, ma chere femme ; qu’un
jour la Depofantc étant à fa fen être, elle entendit que le fieur de Bom-
G
<
�5°
belles dit à fadite ép o u fe, en la tenant dans fes bras : ma chere époufe,
l’enfant que tu p o rtes, à mon retour faura bien me crier papa. D épofe
de p lu s, que lors de la mort de la Dam e M erign ac, grandVnere de la
Dam e de B om belles, la Dépofante fut y faire fa v ifite , ôc tro u va ledit
Sr dô Bombelles en d e u il, & rece vo it les vifites. D épofe de plus, qu’elle
a v u plufieurs fois le domeftique du fieur de Bombelles dans la maifon
du ficur C a m p , & que ce dernier faifoit tout ce que ladite Dam e de
Bombelles lui com m andoit, & que ledit domeftique l’appelloit iouvent
Madame de Bom belles; qu’elle qui d ép o fe, ayant quelquefois ren
contré la fervante de ladite Dame , & lui ayant demandé l’état de la
fanté de ladite Dame , ladite fervante lui répondoit qu’elle ne pouvoit
point lui rien dire à caufe quelle ¿toit dans J'on Ut avec ledit Jîeur de B om
belles J'on mari.
Les autres dépofitions, M e s s i e u r s , ne font ni moins for
tes ni moins précifes fur le fait du mariage public, fur celui de
la groiTeiTe& delà cohabitation connue, confommée fous les
yeux du p ere, de la mere & de toute la Ville. O r , je le de
mande , cil-il poifible de foupçonner, dans une liaifon de
cette efpece , la moindre apparence de clandeftinité ? Peut-il
tomber dans l’efprit qu’elle n’ait pas été précédée d’un mariage,
d’un engagement affez fort, affez facré, pour motiver la con
fiance de la famille & l’abandon de la jeune perfonne ?
L e fieur de Bombelles dit qu’il ne l’avoit pas époufée. Il
foutient que rien ne l’attachoit à elle. Mais qu’alloit-il donc
faire ii librement dans la maifon? C ’étoit de l’aveu de fes pa
reils qu’il vivoit chez eux dans, une fi exceifive familiarité. O n
ne cachoit ni la grofleiTe, ni l’auteur de cet état j-uftement
regarde comme la bénédiction la plus confolante pour une
femme légitime, & comme le dernier degré d’ignom inie, le
com ble de la dégradation pour une fille fans liens. T o u te la
Ville le connoifloit cet é ta t, & y applaudiflbit.
�/ai
51
S’il n’y avoit pas de m ariage, le pere Si. la mere proftituoient
donc eux-mêmes leur fille ? Eux & toute leur famille étoient
donc flattés de la honte qui la couvroit ? Ils fe déclaroient
donc les entremetteurs d’un commerce impur, qui les déshonoroit plus encore que l’infortunée qu’une indigne complaifance facrifioit à l’ignominie ? L a V ille entiere, témoin paifible
de leur filence & de leur crédulité , étoit donc duppe ou com
plice de cette impofture & de ce libertinage ?
Mais cette idée réHolte &: fait frémir. L e dernier excès de
la dépravation des mœurs , c’eft lorfque des parens fans pu
deur , étouffant la voix du remords & celle de la n atu re,
prennent fur eux de tracer à leurs enfans le chemin du crim e,
& que par une tolérance intéreflee , ils les encouragent à un
défordre dont ils reçoivent le prix ; mais cet horrible attentat,
ce n’eft pas au grand jour qu’ils le confom m ent; c’eft dans les
ténebres qu’ils concluent leur coupable marché ; c’eft fous la
voile d’une feinte ignorance qu’ils cachent le confentement
honteux qu’ils y donnent ; & le premier indice de l’opprobre
auquel ils fe d évo u en t, efl l’obfcurité, où ils enfeveliffent leur _
infâme trafic.
Et malgré leurs efforts, jamais la malignité publique ne laiffe
leur lâcheté impunie. Leur procès eft inftruit dans tous les
cœurs , & leur arrêt prononcé par toutes les bouches à cha
que inftant du jo u r , fur-tout dans les petites Villes , où les
ames , fans être plus pures fi l’on v e u t, font au moins plus
aifément affe&ées, où le fcandale trouve moins d’excufe &
de proteôeurs , où l’oifiveté & la jaloufie entretiennent une
cenfure plus a&ive peut-être , plus vigilante que ne le feroit
celle de la vertu. L a voix commune y fait bientôt juftice de
G ij
�l'apparence ttiême du défordre , avant que les Vengeurs des
L oix & de l’honnêteté en aient pu être inftruits*
Mais il eft fans exemple que des parens, dans ces fortes de
lieux , aient ofé fe glorifier eux-mêmes de leur lâch eté, qu’ils
aient produit leur opprobre au grand jo u r, & appellé publi
quement le corrupteur de leur fille pour l’encourager à coniommer leur déshonneur. Il eft fans exemple que des voiiins
fe foient' laides abufer fur une négociation de cette nature ,
qu’ils aient regardé un étranger comme un ép o u x, & un fédu&eur comme un mari.
Il eft encore plus fans exemple que des femmes fe foient
réunies pour admettre dans leur fociété une fille qui auroit
porté les marques viiibles de fa foibleffe , & qui n’auroit pu y
paroître fans rappeller à chaque inftant à fes compagnes qu’elle
avoit manqué au premier des devoirs de fon fexe. Q ui ignore
de quelle févérité fe pique ce tribunal privé fur des fautes de
ce genre ? Q u i ne fait combien ces cœurs , û tendres d’ail
leurs , font inflexibles 3 impitoyables pour celles qui ofent
ufurper leurs privilèges fans en avoir le d r o it, & avec quelle
rigidité les femmes mariées foutiennent entre elles les préro
gatives d’une vertu à laquelle on ne peut plus leur reprocher
de manquer?
E n fin , il eft encore fans exemple que les Chefs des deux
hiérarchies fe foient réunis pour légitim er, chacun en particu
lier , un défordre qu’il auroit été de leur miniftere d ’arrê te r &
de punir; qu’un E vêq u e, un Premier Préfident de C ou r fouverain e, un Intendant atteftent de leur fignature la réalité
d’un mariage qui n’auroit été qu’une licence fcandaleufe ; &
q u e , pour protéger une fille fans honneur , ils aient prodigué
des témoignages qui ne pouvoient être accordés par eux qu’à
�53
la vérité la plus notoire, à la délicateffe la plus preffante.
P e fe z ,
M
essieu rs
, toutes ces preu ves, raffemblez toutes
ces induftions , & jugez s’il ne nous eft pas permis de nous
appliquer ce quedifoit en fon tems
M e
Cochindans la fameuie
affaire de Bourgelat. « Toutes les voix fe réuniffent pour affu» rer la légitimité de l’enfant, & par conféquent le mariage
»'*de fes pere & mere. C e ne font point ici de ces dépoiitions
» préparées avec a rt, fou tenues ou par dévouem ent à la Par*> tie , ou' par corruption, ou par foibleffe : c’eft un langage
» uniforme d’un nombre infini de Parties différentes ; c’eft un
» concert de toutes fortes de perfonnes q u i, entraînées par
» la notoriété , fe réuniffent dans un point de vérité qui n’a
» jamais trouvé de contradi&ion ; & c’eft l à , ajoutoit cet O ra» te u r, ce qui forme la poffeffion d’état ».
Q uelle eft la demiere reffource du fieur de Bom belles, pour
éluder l’effet de cette enquête foudroyante ? C ’eft , com m e
j’ai eu l’honneur de vous le dire , d’en attaquer non pas l’au
thenticité, mais la validité. Elle n’eft pas ‘juridique, fi on l’en
croît ; c’eft le fruit d’une efpece d’émeute populaire , d’un at
troupement indécent & criminel que le Juge n’auroit pas dû
to lérer, & dont il ne nous eft pas permis d’exciper contre
lui. Eft-ce férieufement qu’il parle ainfi ?
D ’abord , la qualité du plus grand nombre des témoins en
tendus annonce affez que ce n’eft pas le peuple feul ici qui x
parle j & que leurs dépoiitions n’ont pas été produites par
une forte d’emportement aveugle , à laquelle en effet cette
cluffe de la fociété n’eft quelquefois que trop fujette. Mais
quand réellement l’obfervation du fieur de Bombelles feroit
vraie , qw en refulteroit-il contre l’enquête ? Rien dont il put
s applaudir, rien qu’il lui fut poifible de tourner en fa faveur*
�1
I
V
.
54
C e ferait la preuve d’un déchaînement univcrfel contre Ton
procédé ; & d’oii viendrait ce déchaînem ent, fi ce n’eft d’une
conviction intime de ce que ce procédé a de criminel ? Le iieur
de Bom belles, comme la Dem oifelle C am p , eft hé à M ontauban ; il y a des parens , il y a eu des amis tant qu’il a été
vertu eu x;fa famille doit naturellement y avoir plus d’influence
que celle de la Demoifelle C am p , fur-tout dans l’ordre de la
NobleiTe. Pourquoi donc tout cet O rdre s’eft-il, avec les au
tres , déclaré contre lui? Pourquoi, de tous'fesCom patriotes,
n’y en a-t-il pas un qui n e l’accufe & ne le condamne? Si l’en
quête eft en effet le fruit d’une impulfion com m u n e, c’eft
donc de celle que peut donner à des ames honnêtes un prin
cipe d’h onneur, de délicateffe &c decom paifion dirigée par la
juftice.
Eft-il vrai enfuite qu’elle ne foit pas juridique ? Mais j’ai eu
l’honneur de vous l’obferver,
M
essieu rs
,
c’eft fur une O r
donnance du Juge qu’on y a procédé. Cette Ordonnance
fubfifte , elle n’a point été attaquée par la voie de l’appel ; jufques-là, dans l’ordre même de la p rocédure, les effets en
font facrés ; il n’y auroit qu’un Jugement fupérieur qui pût les
anéantir.
M a is , dit le fieur de Bom belles, ils font profcrits de plein
droit par la Loi même ; l’article I du titre 1 3 de l’O rdonnatice de i 6 6 j abroge à perpétuité ces fortes de procé
dures , & défend aux Tribunaux de les reconnoître ou de s’y
prêter. Ic i,
M
essieu rs
,
le fieur de Bombelles fe trompe ;
après avoir hafardé, dans le refte de la C a u fe , tant de faits
fau x, il fe permet une fauffe application de la Loi. V oici ce
qu’elle porte :
« Abrogeons toutes enquêtes d’examen>ià fu tu r, &
celles
�55
» par turbes, touchant L'interprétation d'une coutume ou ufage}
» & défendons à tous Juges de les ordonner ni d’y avoir
» égard , à peine de nullité ».
M a is,
M
essieu rs
, eft-ce donc ici de l’interprétation d’une
Coutum e qu’il s’agit ? Eft-ce de la valeur d’un {impie ufage
qu ’il eft queftion ? N ’eft-ce pas d’un fa it, d’un fait important
à éclaircir, d’un fait précieux à tous égards, puifque de là dé
pend l’état de deux Citoyens ; d’un fait effentiel à la C a u fe, &
fans la connoiffance c^uquel vous ne pouvez la juger?
A vant l’Ordonnance de 1667 , avant que cette L oi eut fixé
une forme invariable pour les procédures, cette partie de la
légiflation étant dans le plus affreux défordre, n’y ayant point
de Loix générales, chacun cherchoit à expliquer en fa faveur
les petites Lôix particulières qui dirigeoient chaque canton ;
cette multiplicité infinie de Coutum es qui défigurent & défolent encore la F ra n ce, donnoit lieu à une infinité d’ufagés
ou plutôt d’abus contradictoires entre eux com m e leurs fources : les Juges inférieurs étoient cependant forcés de fe déci
der d’après ces notions faciles àfaifir ; & les Parties qui avoient
gagné, avant que de paroître devant les Juges d’appel, avoient
foin de faire conftater, par une enquête , la réalité de l’uiage
qui avoiwdéterminé le premier Tribunal en leur faveur; c’étoit
une efpece d’efcorte qu’elles avoient foin de donner aux pieces
de leur procès , Si c’eft ce qu’on appelloit examen à fu tu r ,
c ’eft-à-dire , examen fait d’avan ce, atteftations prém aturées,
deftinées cependant à juftifier la Sentence, dont le fait certifié
etoit l’origine.
L a procédure une fois devenue uniform e, il étoit fage de
Supprimer ces traces d’une barbarie honteufe qu’il eût été bien
a iouhaiter qu’on eût pu faire difparoître dans toutes fes par-
�i
56
'
ties. V oilà l’objet & le fens de l’article de l’Ordormance de
1 6 6 7; mais jamais le Légiflateùr n’a entendu fupprimer ou
annuller des recherches faites de l’autorité du Juge fur 1111
point fufceptible de la preuve teftimoniale , & dans des circonftances où les délais auroient pu nuire à cette preuve.
Q u o i qu’il en foit au refïe du vrai fens de la Loi , voulezvous qu’elle tombe en effet fur notre enquête ? voulez-vous
qu ’elle nous défende de produire ain fi, avec les formes juri
diques , une démonftration écrite de votre parjure & de la
vérité de nos droits ? Eh bien ! nous y confentons ; qu’en réfultera-t-il ? Q u e ces dépofirions ne feront plus des témoi
gnages judiciaires : nous le voulons bien : ce fera une procé
dure inutile ; mais les pieces qui lacom pofent ne feront pas pour
cela anéanties.
C e n’eft plus une information que nous préfentons à la Juftice , c’eft un afte de notoriété légalifé par un Juge, & {igné
de cinquante de nos Com patriotes, qui fe font unis pour
certifier ce qu’ils ont v u , les faits dont ils ont une parfaite
connoiffance ; ce font des atteflations perfonnelles que chacun
d’eux a données en fou particulier devant un homme public ;
ce fera un commencement de preuves par écrit, à la faveur
duquel nous demanderons d’être admis à faire la preuve complette en vertu de la même Ordonnance. Ces pieces que vous
réprouvez, mifes fous les yeux des Magiftrats , ferviront à
convaincre l’homme en eux , en attendant que les mêmes faits,
les mêmes détails, produits avec l’appareil des form alités,
puiffent fubjuguer le Juge.
Mais avons-nous en effet befoin de ce délai ? Aurons-nous
recours à ce fupplément apparent d’une preuve déjà faite ?
N on j
M
essieu rs
; ce ft tout ce que nous pourrions faire fi
nous
�m
M
nous n’avions d’autre; appui que la poiTeiîion antérieure de
l’état que nous réclamons pour l’avenir. Mais à cette pofleifion
déjà invinciblement démontrée aux yeux de l’honneur & de
la con fcien ce, nous allons joindre des titres qui ne permet
tront plus à la Juftice de balancer; nous allons faire voir que
ces titres facrés n’ont été ni fouillés par la fraude, ni enfantés
par le menfonge. Si la bouche qui les attaque étoit auiTi pure
que la main qui les préfente , il ne manqueroit rien au bon
heur des Parties.
\ /
§.
III-
Preuves de l'état de la Demoiselle Camp par titres.
R é f l e x i o n s
p r é l i m i n a i r e s .
N ous vous arrêtons i c i , vont fans doute s’écrier nos A dverfaires : vous voulez parler probablement de ces aftes de
célébration , ou furpris , ou fabriqués dans les ténebres ; vous
allez multiplier les efforts & les fophifmes pour les pallier ;
épargnez-vous cette profuiion inutile de paroles & de raifonnemens : deux obfervations feules fuffifent pour vous réduire
au illence.
D ’ab o rd , vous êtes Proteftante, vous le publiez haute
m ent; dès-là il eftim poifible que vous foyez mariée valable
ment , il eil donc impoifible aufll que vous foyez même
admife à produire les monumens d’un mariage chimérique.
. E nfuite, ces a&es dont vous croyez faire ufage , en les produifant les premiers nous les avons réduits en poudre avant
m ê m e qu’ils aient pu repaffer de nos mains dans les v ô tre s ;
nous fommes prêts à nous inferire en faux , ii vous ofez feu
lement feindre de ramaffer les débris de ces menfonges : abanH
�ïf
dbnnezrles donc volontairement!, avant; que d’y être réduits par
là force. .
"Vtoilà-, M e s s i e u r s , ^ peuprès,ce. qu’ont dit , ou du moins
ce q u ’o n t voulu dire:nos.Adiyerfaires ; ils ne m’accuferont pas
d’affoiblir leurs o b jeô io n s, mais bientôt ils me reprocheront*
encore moins d’y répondre..
V ou s prétendez donc qu’un mariage contra&é par des Proteftans ne peut être valide ÿ q u e, fans examiner là nature des
titres , ou l’authenticité des monumens qui le con fiaien t, il
faut l’annuller ; & fur quoi fondez-vous cette étrange déciiion ? L e mariage en lui-même n’eft que l’exercice du plus na
turel de tous les droits : tout être qui a reçu la vie a , par cela'
m êm e, contrafté L’o bligation de la donner;. & l’un des plusgrands adouciffemens peut-être à la néceflité de conferver ce
p réfen t, fouvent fi douloureux , ii funefte, c’eft le pouvoir de
le communiquer.
A la v é rité , des confédérations d’un autre ordre ont fait?
quelquefois déroger à cette Loi univerfelle ; une vertu plus
fublime a fan&ifié des privations qu’une vertu plus commune
redoute : le célib at, qui femble contrarier la n ature, a été
confacré par une autorité qui a droit de la maîtrifer.
M ais, outre que cet effort de l’héroïfme religieux n’eft re
commandé qu’à ceux qui s’en font crus capables, outre qu’il
n’eft méritoire Sc exigible que quand il a été volontaire *au
moins dans l’origine, les Proteftans n’en font pas fufceptibles;
leur croyance n’y attache aucun prix ; l’impuliîon de la nature
fe fait donc fentir en eux avec toute fa force ; il eil néceffaire1
qu’il produife des effets; il efi donc néceffaire auift, ou qu’il»
aient recours au mariage qui légitimera ces effets-& les rendra
utiles à la fo cié té, o u q u ’ils fe plongent dan» 1« libertinage qui'
les enrendra les fléaux,
�O r cft-il v r a i,
*9
M
essieurs
, qu’il y ait
des
Loix qui
les
réduifent à la fécondé partie de cette alternative ? Eft-il vrai
.qu’une Com m union entiere de Chrétiens éclairés par les lu-mieres de l’Evangile , foient punis d’une erreur qui leur
en
cache quelques vérités, par une dénégation abfolue de tous
les droits attachés à la qualité d’homme & de citoyen ? Eft-*il
vrai que vous foyez aftreints, par des réglem ens, à flétrir
leur race, & que le malheur feul de ne pas fuivre une croyance
affez épurée, les fouïnette , eux & toute leur poftérité, à ne
-pouvoir contracter que des liens h o n teu x , à ne connoître de
l’amour que ce que l’animal le plus méprifable peut en difputer
à l’hom m e, à ne chercher dans L’union des fexes que la fatisfa&ion d’un befoin m om entané, à devenir, dans les plus doux
momens de leur exiftence, tout à la fois vils & cruels : v ils ,
par la baffeffe qui leur ferait rechercher un .plaiiir paflager,
malgré la honte qui y feroit attachée pour eux; c ru e ls, par
ljindifférence avec laquelle ils en envifageroient les effets, par
l’infenfibilité qui ne les empêcheroit pas de donner le jo u r
à des êtres dévoués comme eux au plus ignominieux ef.clavage ?
N on,
M essieurs
, il n’exifte point de L oi pareille. Si en
effet il en exiftoit une , elle feroit l’opprobre de la légiflation.
M a is, je le répété, il n’en exifte pas. Je porte ici le défi à nos
Adverfaires d’en citer une , une feule qui préfente feulement
la moindre idéfc de cet oubli de la part du L égiflateu r, & de
cette humiliation prononcée contré les Sujets.
Ils nous renverront, je le fais, à l’Edit d’O ftobre i
<585 ,
à
la Déclaration du 14 Mai r7»4 ; ils citeront tout au long les
articles 1 de l’un & 15 de l’autre. Le premier interdit aux Ré*fofiïrés tout exercice de îeur R eligion, il prcyfcrit les
H ij
�éo
■blées qui ont le culte pour objet. Je l’avoue : mais qu’en rél’u lte-t-il ?
Si le mariage n’eft p o in t, dans cette C o m m u n io n , un aile
religieux , peut-on croire que la rigueur avec laquelle la R eli
gion a été fou droyée, a pu s’étendre jufqu’au mariage ? Si
une des méprifes des Proteilans , fi un des points de la croyance
funefte qui les entretient dans le fchifm e, c’eft le refus de
croire que D ieu ait élevé l’union des fexes au degre de facre
ment , &: qu’il ait attaché la profufion de fes grâces fpirituelles
à la promelfe par laquelle deux individus s’engagent l’un à
l’autre fur la terre, eft-il poflible d’imaginer que le Légiilate u r , en profcrivant cette cro yan ce, ait auffi.voulu profcrire
cet engagem ent ?
O r,
M
essieu rs
, vous le favez , aux yeux des Réformés
le mariage 11 eft que ce qu’il a été fi long-tems avant que le
jour qui nous”éclaire fût levé pour le genre hum ain, ce qu’il
eft encore chez tous les peuples à qui cette lumiere eft incon
nue f un pur contrat civil ; c’eft devant le Magiftrat qu’ils le
contra&ent : c’eft l’autorité laïque qui forme les noeuds dont
ils fe chargent ; s’ils affe£lent de les confacrer par la média7
tion du Minillre des autels , c’eft un hommage poftérieur &
abfolument volontaire qu’ils rendent à leur Eglife : [’interven
tion du Pafteur n’eft point néceffaire ; & fi, foit par le caprice
des contra£lans , foit par un accident imprévu , foit par quelqu’autre raifon , la célébration eccléfiaftique n’a pas lieu , l’u
nion n’cn a pas. moins la plénitude de fes effets civils, pourvu
que la puiffance politique l’ait ratifiée.
Je fais,
M
essieurs
, qu’ils font à plaindre par cette liberté
même ; je fais q u e , fous prétexte d’épurer leur culte en cette
partie, ils en ont en quelque forte dégradé les M iniftres, &
�61
qu’en croyant délivrer leurs liens d’une fujction im portune,
ils fe font privés des fecours qui peuvent le plus contribuer a
les rendre précieux pour des ames éclairées par la veritable
foi. Mais il ne s’agit point ici d’apprécier leurs principes en
th éo logien , il n’eft queftion que d’en conftater la nature en
politique ; & la voilà : c’eft: de réduire le mariage à n’être
qu’une promeffe , un contrat fournis comme les autres à l’in
fluence du M agiftrat, dépendant excluiivement pour fa vali
dité, de la puiffance ^emporelle , qui parmi nous ne s’en eft
réfervé que la police. O n ne peut donc pas dire qu’il faiTe
partie des exercices profcrits p arl’Edit de 1685. Cette L oi ter
rible qui a renverfé les Tem ples & anathématifé les C oniiftoires ; cette L oi qui a coûté à la France tant de Citoyens utiles,
& enrichi il rapidement les Nations étrangères de nos dé
pouilles , ne ftatue donc rien de contraire au mariage des P ro
ie ftan s\A l’égard de la Déclaration de 1 7 2 4 , que porte l’article 1 5 ?
Que les Particuliers nouvellement réunis à la Foi catholique
feron t, comme tous les autres Sujets, obligés à exécuter , félon
leur forme & teneur, les loix du Royaume fu r le fa it du ma
riage. V ou s vo yez l à , M e s s i e u r s , deux claffes de Citoyens
exa&ement marquées ; y eft il qu eftion , peut-on fuppofer qu’il
y foit queftion des R éform és? Sont-ils compris dans cette expreflion générique, comme tous nos autres Sujets ?
. Mais fi cela éto it, rien de plus inutile que la diftin&ionmarquée par la Loi ; fi ces enfans rebelles à l’Eglife étoient
déjà fournis aux Ordonnances politiques, même avant que
d’être rentrés dans le giron de leur M ere , quel befoin étoit-il
de faire mention de l’obéiffance à laquelle ils feroient aftreints
après leur retour ? Sans doute, en abj,urant leurs erreurs, il*
�6t
•h’auroîent pas acquis le droit de braver les L oix de leur patrie:}
to u t le changement qui fe vferôitjOpéré en e u x , c’eftque l’homïnage forcé qu’ils auroient rendu auparavant à des conilitu*tions qvùls ne reconnoiffoieilt point., feroit devenu'raifonnable , volon taire, confécju.ent, lorfqu’ils auroient adopté la
façon de penfer qui les môtive.
S i,, en qualité de Prqtéftans, ils éto’iënt déjà afïujettis aux
‘formules des C ath oliqu es, à quoi ferviroit d’annoncer qu’ils
n’en feroient pas exempts cjuand ils de.viendroient .Catholi
ques eux-mêmes? D e cela fèul que la Déclaration de 1724 les
y aflreint dans le cas de lëu'r abjuration comme les autres Su
jets , il s’enfuit que
Ces
autres Sujets ne font pas ceux de leurs
freres qui perïiiloi<?nt daiis le fcliifme
que cette nouvelle
efpece de dépendance ne leur devenoit commune ¡qu’avec le?
•Catholiques , dont ils pàrtageoiéht déformais le bonheur & les
,dogmes.
Mais , dira:t-oti, ils perdoient à cette'régénération ;;Ies fectateurs obilinés de l’erreur reiloient lib res, tandis c^ueles enfans adoptifs de la vérité devenoient efclâves ; le fort de ceuxci étoit plus rude precifétoent en raifon du droit qu’ils acqué^oient à des adouciffemens,.
N on,
M
essieu rs
, on ne nous fêra point ce raifoilrte*
ment 'blafphématoire; outre les biens que ce changement leur
afïuroit du coté du falu t, cette fervitude apparente leur valoit
autant d’avantages , que la liberté chimérique qu’ils abjuroient
produifoit d’inconvéniens ; ils rentroiént en polleffion de tous
Jes privilcges dont leurs anciens freres étoient privés.; la bar
rière élevée par une L oi inflexible entre eux & tous les états
de la v i e , s’évanouiïïoit ; ils redevenoient capables de tout#
Içs 'diftin&ions focialcs dont l’apiniàtreté des' aïitrèS le s ‘éScluOiif
�/¿)3
il falloit bien qu’en rentrant dans,le Corps de, la Nation } eii
quelque fo rte , ils en fupportaffentles ch arges; & une de
ces charges étoit l’obfervance ilrifte des L oix fur le fait des
unions conjugales.
Q uant au refte de ces efpritsy d’ailleurs fi paifibles, qu’une
déplorable prévention fixoit dans-la révolte contre les dogmes
de FEglife feulement , ils reftoient dans l’excommunication
politique &
religieufe prononcée contre eux.; tous les arts ,
toutes les profeffions^ tous les méders leur étoient interdits ;
le com m erce, feul état peut-être fur. lequel la>force n’ait point
dep rife, ni l’autorité d’empire, le-commerce étoit leur uniquereffource, comme il a été dans tous les tems & dans tous lespays celui de toutes les fettes écrafées. par une Religion dom i
nante & exclufive.
Maisda politique ,• en les mutilant' ainil de toutes parts en-'
quelque f o r ^ , en coupant tous les liens faâices qui: auroient
pu les-attacher à'la fociété., ne pouffoit pas: cependant la ri—
gueur au point de leur interdireTufage des facultés naturelles:'
dont cette même fociété, devenue fi impitoyable pour eu x , ne
' pouvoir manquer cependant de tirer avantage;.elle les p totégeoit dans leurs unions entre eux ; aucune Loi., je le répétéencore, M e s s i e u r s , & il cil important de le répéter fouv e n t, aucune Lot ne les dévouoit au plus affreux de tous les
anathêm es, à- celui de ne pouvoir perpétuer leur race- fans
honte, ou fans crainte.Il y a bien plus : le Souverain les encourageoit à remplir
ouvertement cette fon& ion’précieufe, cette deftination eflentiellede tout être vivant. D ’a b o rd ,. ce même Edit accablant1de
»-6S5 les invite à r e s t e r d a n s LE R o y a u m e , en attendant
quil-plaif-e à-D ieu de-Us iclairer, W leur promet q u ils y pour*
�64
font continuer leur commerce & jouir de leurs biens, fans être
troublés ni inquiétés fous prétexte de ladite Religion , à condi
tion s comme dit e fl, de ne point faire d’exercice} ni de s’a f
fembler fous prétexte de prieres 3 ou de cidte de ladite Religion,
C e ft là déjà un engagement tacite, à la vérité, mais bien pré
cis , de refpecler leurs mariages & leur poftérité. Sans c e la ,
les promeffes de l’Edit ne feraient qu’une vaine ironie & une
cruelle dérifxon. Les exclure de l’a&e le plus important de la
\'ie, auroit-ce été tenir la parole de les biffer jouir de leurs
biens fans' les troubler ni empêcher ? Pourrait - on regarder
comme un état paiiible la contrainte violente où paiTeroient
leurs jours, des êtres condamnés à combattre éternellement
les plus doux penchans de la nature ?
Ainfi donc le Souverain, même en refufant fa fan&iorl à
un culte que la rivalité du fien ne pouvoit plus tolérer, en
banniffant de ces exercices mécbaniques ou ingénjeux qui font
tantôt la fo rce, tantôt la gloire d’une nation, des efprits opi
niâtres qui vouloient avoir d’autres dogmes , d’autres autels
que les tiens, s’eft engagé cependant à les tolérer dans le
refte. Il a donné fa parole de leur conferver la jouiffancp de,
burs biens fans trouble; c’eft-à-dire, le droit d’en acquérir & .
de les tranfmettre, & par conféqupnt de fe faire à eux-mêmes
des héritiers capables de les recueillir. Et ce n’eft pas encore
tout : en portant le coup mortel à l’exiftence politique de l’er
reur, il a pris des mefures pour fixer la maniéré dont pour
raient fe perpétuer légitimement à l’aveiiir les infortunés dont
la Providence n’auroit pas encore diifipé l’aveuglerrjent.
C ’eft, M e s s i e u r s , une particularité prefque ignorée. C ’cft
un fait fur lequel il eft bien étonnant qu’on fe foit mépris , &
qu’on ie méprenne encore tous les jours. Non-feulement les.
mariages
�*5
mariages des Proteftans,.entre eux ne font.pas proscrits, mais
ils font autorifés. Non-feulement le Lég'.ÎÎateür n’a. pas eu dèffein de leur en interdire à jamais la faculté , mais il a eu l’in
tention de la co n ferver, de la protéger ; & cette intention
bienfaifante, il l’a exécutée au milieu des a&es rigo u reu x qu’une
perfuafion qu’il^ne nous convient point d’apprécier ic i, lui
faifoit multiplier d’ailleurs.
Précifém ent, quinze jours avant la révocation de l’Edit
de N a n tes, le 1 5 Septembre 1685 , dans le tems par conféquent où tout le plan de la nouvelle légiilation étoit fix é , où
la ruine de la liberté de confcience étoit décidée, où les m oyens
en étoient prêts , où l’Ordonnance qui devoit la confomm er
étoit dreiTée, dans ce tems , ce jour là m êm e, il paroît un
Arrêt du Confeil qui réglé la maniéré dont les Proteilans
pourront s’époufer à l’avenir. O n leur permet de célébrer
leurs mariages par l’interpoiition du Miniftre , pourvu toute
fois , dit l’A r r ê t, que ce fo it en préfencc du principal Officier de
Jujlice 3 & fous la condition exprefle quV/ n'y aura ni prêche,
ni exhortation, ni exercice religieux d'aucune efpece. Q u e
faut-il de plus,
M essieu rs
? Eft-il poilible de m éconnoître,
à un indice auifi frappant, le vœ u du Légiilateur & fa v o
lonté }
Et qu’on ne dife pas qu’il a lui-même annullé immédiate
ment après cet oracle émané de fa bouche ; que par l’Arrêt
du 15 Septembre il reftreint le droit de marier en préfencc du
Juge, à un certain nombre de Miniftres choifis & nommés par
les Intendans ; & qu’au contraire par l’E d it, il enjoint à ces
mêmes Miniilres d’abjurer ou de fortir du Royaum e. C e fer°it certainement manquer à la Majefté R oyale , que. de fupppfer 1 Adminiftration aiTez variable, aiTez inconféquente pour
I
�fe livrer , dans un fi court intervalle & fur le même o b je t, à
une contradl&ion auffi vifible. D e cela feul que l’Arrêt &
l’Edit font de la même époque & de la même main , il s’en
fuit qu’ils font concertés : & il n’efl: pas difficile en effet de les
concilier.
Dans le premier inftant d’une révolution fx facheufe pour
tous les individus qu’elle concernoit, il étoit important de pa
cifier les efprits, & deloigner des Provinces préparées peutêtre à la fermentation, des hommes que la nature de leur miniftere, l’habitude de la parole, la confiance , le refpeft
qu’infpiroient leurs malheurs, & le mérite de la perfécution fi
impofant aux yeux de la multitude, pouvoient faire paraître
propres à allumer l’incendie que l’on redoutoit. Il falloit donc
d’une part éloigner les Minières, dont l’ame trop fiere ou trop
fenfible n’auroit pu fe prêter à un changement fi rude, & de
l’autre conferver ceux qu’un cara&ere plus doux ou mûri par
l’expérience, difpofoit davantage à la foumiffion ; c’eft ce
qu’opéroient très-bien ces deux Réglemens.
Par l’E d it, tous étoient indiftinftement compris dans l’alter
native de l’exil, ou de la converfion, dont la menace devoit les
intimider. Par l’Arrêt, plufieurs étoient exceptés. O n laifToic
aux dépofitaires immédiats de l’autorité royale , le choix de
ces Pafteurs deftinés déformais à confoler en fecret leurs ouail
les , dans l’humiliation à laquelle la politique croyoit devoir les
réduire. Ils étoient chargés de veiller à écarter les Pafteurs
mutins en vertu de la Loi rigoureufe, & à conferver les do
ciles en vertu de la Loi indulgente.
C ’eft encore à peu près aujourd’hui l’état où cft cette
partie de l’Adminiftration. La Loi publique repouffe les M i
nières Proteftans : la tolérance fecrete les rappelle 'ik les
�ftiaintient ; ils font connus des Commiiïaires départis dans les
Généralités. T an t qu’ils n’abufent point de la confiance dont
on les h o n o re, ils font protégés ; ils ne font punis que quand
par un éclat dangereux >mais heureufement encore plus rare,
ils bravent des Loix qu’il faut toujours refpe&er, parce qu’en
fin ce font des L o ix , & que tant quelles exiftent, il fa u t, pour
le bien comm un , qu’elles foient au moins ménagées en ap
parence , loj^ même que la fageffe du Gouvernem ent veu t
b ie n , par des raifons perfonnelles, en fufpendre l’exécution.
E n fin , M e s s i e u r s , non-feulement le Gouvernem ent ne
profcrit point ces mariages , ou plutôt il les autorife ; mais
de fpn côté l’Eglife les approuve : la Puiflance laïque les to
lère , & la Puiflance eccléfiaftique les confacre. Rappeliezvous le B ref célébré du Pape Benoît X I V , que j’ai eu l’hon
neur de mettre fous vos yeux à la premiere Audience. C e
P o n tife , dont la mémoire fera à jamais chérie de l’univers
chrétien „ confulté fur l’opinion q u e l’on devoir avoir des
mariages contra&és par des Proteftans entre eux , ou avec des
Catholiques, décide que , dans un cas comme dans l’autre ,
l’union eft valide & indiffoluble! Dans le premier , fi les Par
ties reconnoiflent
leurs
erreurs &
qu’elles les abjurent ,
le changement que la grâce opere dans leurs cœurs n’en
apporte aucun à leur état : ils n’ont pas befoin , pour
afllfrer leurs liens, de les renouveller par l'intervention d'un
Prêtre , quoiqu’aucun Prêtre n’ait concouru à les former (1).
( i ) Quod altinet ad matrimonia ab Hareticis inter fe celebrata , non fer
rata forma per TriJentimini preferiptd , quccqiu in pofierùm contrahentur,
dumniodò aliud non obßiterit canonicum impedimentum , Sanclitas Sua ß a tuit pro valìdis habenda ejfe : adeòque f i contingat utrumque conjugem ad
liì
�68
Dans le fécond c a s , l’obftination dp la Partie infidelle ne. nuit
point à la validité des engagemens de l’autre. Qiûelle fe fouvienne quelle ejl liée éternellement ( i) ^dit le Saint Perë, Il
lui eft permis, recommandé m êm e, de faire tous les efforts
pour difliper l'aveuglement de cette malheureufe moitié 'id’elleniêm e,m ais non pai dëVen féparer. ,
Voilà d o n c / ' M e s s i e u r s
une Loi nouvelle, une Loi
précife' dans cette matière, qui achève de lever toute difficulté,;
Je ne réponds pas à la maniere plus qu’indécente dont on s’y*
eft pris pour l’éluder ¿page i j de l’imprimé du iieur de Bbmbelles. O n y cite une phrafe du Pape Evàrifte, qu’on dit con
temporain du diyin Fondateur d e ’ notre Religion, quoiqu'il
foit mort l’a n 10 8 de l’ere chrétienne. Cet anachronisme eft'
plus excufable que le badinage qui raccompagne : JÌ la D emoifelle Camp croît le Pape infaillible s dit le fieur dé Bombelles", Evarijle l ’etoit avant Benoît X I K . O r , la décifion du
premier eft contraire à celle du fécond , & par conféquent
elle doit prévaloir fur l’indifcrétion dùin moderne, qui n'apu 'l
de fa feule autorité , ni difpenfer les Fideles de la B énédicliort^
nuptiale qui ejl de droit divin , ni conférer pour Vimpartition ^
\
Catholicœ Ecckjitz Jlrium fe recipere, tockm quo antea conjugall vinculo ipfoç
omnino teneri , ctiarnfi mutuus confenfus coràm Parocko Catholico non rtnovetiir.
(2.) Quod vero fpecht ad ta conjugia qua abfqiit forma à Tridentina
fiatutd contrahentur à Catholicis cum Hxrcticis , ftve Catholicus vir Ilareticamfaminam in matrimonium ducatftve Catholicafxmina Ilœretico viro nubat. . .. Si hujufmodi matrimoniumfit contracium , aut in poflerùrn contraili
continuât , Tridentini forma noti fervatd , déclarai Sanclitas Sua , alio non
concurrente impedimento, validum habendum ejfe. . . . Sciens conjux Catho
licus fc ijlius matrimonio vincalo perpetuò ligatum iri.
�69
fes pouvoirs aux Miniftres Protejlans qui n'ont pas reçu Üordi
nation canonique , ni ratifier des impartitions illicites dans leur
principe.
Je ne prétends point , M e s s i e u r s , développer ici jufqu’où s’étend l’autorité d’un Souverain Pontife. Je me borne à
examiner ce que celui-ci a fait; & je vois que , quoiqu’il con
nût la décifion de fon prédéceiïeur, quoiqu’affurément celles
des Concita^ ne lui fuflent pas cachées , quoique fes lumiè
res fuffent égales à fes connoiffances & à fa droiture, ou plu
tôt parce qu’en lui les unes égaloient les autres , il a cru devoir
prononcer l’oracle que j’ai mis fous vos yeux : oracle infini«
ment précieux dans la Caufe: oracle dont nos Adverfaires 11e
réuifiront jamais à obfcurcir le fens ou à diminuer la fo rce ,
parce cju’il eft conforme aux vues d’une faine politique, parce
qu’il s’accorde avec la charité de la Religion bien entendue,
parce qu’enfin il émane d’une autorité infiniment refpe&able ,
d’un homme que la fupériorité feule de fon génie permettroit
de regarder comme un guide irréfragable, quand à íes autres
qualités il n’auroit pas joint celle de C h e f de l’Eglife.
Ici nos Adverfaires m’arrêteront encore. Q u ’im porte, di
ront-ils , une décifion qui 11e concerne que des Etats étran
gers ? Benoît X I V n’a eu en vue que les Proteftans de H o l
lande ou des Pays-Bas : &: dans ces contrées en effet ils ont
une exiftence légale ; mais il n’en eft pas de même en France.
Il .n’y a point de Proteftans dans notre patrie. Les Tribunaux
n’en connoiffent point. T o u s les François fontcenfés C ath o
liques fans exception : vous cherchez ici des Loix pour des
êtres chim ériques, dont il c il même défendu aux Juges de
regarder la réalité comme poifible.
L a première partie de cette objection,
M
essieu rs
, fe dé
�70
truit par la feule lefture du Bref. Quoique Sa Sainteté femble
en reftreindre l’application, parce qu’EUe ne répond qu a ceux
qui l’avoient confultée, cependant les termes qu’Elle emploie
font généraux. C e n’eft pas un ufage national, ni un point de
difeipline particulier qu’Elle fe propofe d’expliquer, c’eft la
dodrine de FEgliie entiere qu’Elle développe, fur un article
çffentiel pour tous fes enfans.
Quant à l’cxiftence des Proteftans, je ne m’arrêterai pas à
combattre longuement cette obje&ion indigne elle-même d’une
réfutation férieufe, quoiqu’elle foit tous les jours très-férieufement hafardée ; ce n’eft pas volontairement que. je m’arrête
fur ces matieres délicates , où l’intention la plus pure ne fauve
pas toujours des interprétations malignes, & où il eft quel
quefois plus dangereux d’indiquer la vérité, que d’appuyer
l’erreur en mille autres occafions. Je me contenterai de vous
ob'ferver que les Proteftans, par le fait & par le droit, ont
réellement dans le Royaume cette exiftence que je leur fuppofe ici.
•A l’égard du fa it, il ne peut pas être révoqué en doute ;•
nous fommes entourés de ces Citoyens utiles qui s’épuifent
pour expier, à force de fervices, les maux qu’a caufés le fanatifme de leurs peres , ou plutôt peut-être celui de leur iîecle.
Des Provinces entieres en font compofées ; mais auffi pacifi
ques déformais que leurs ancêtres ont été furieux, ils ne fe
diftinguent que par leur foumiifion.
O n peut fe méprendre quelquefois fur l’exiftence d’un par
ticulier. Il eft des cas où les Tribunaux peuvent, fans incon
vénient , la méconnoître ; mais il n’en eft pas de même de celle
d’un peuple nombreux, d’une nation entiere.
Quand il y auroit en effet une Loi qui fupprimeroit les R é
�'Ào i
7*
formés dans toute la F ra n ce, & qui défendrait aux Cours de les.,
fuppofer exiftans, s’il eft de notoriété publique- qu’ils exiftent»
qu’ils viven t, qu’ils contra&ent fous l’autorité duPrince, il s’enfuivroit évidemment que la L o ia f u b i une révocation tacite;
que le Souverain l’abroge dans le fait, & qu’il confentàfon inexé
cution dans ce cas-ci,com m e dans tant d’autres. M ais,
sieurs
M
es
, il n’y a point non plus de Règlem ent de cette nature.
Je réitéré ici à j^os Adverfaires le défi que je leur ai déjà porté fur
l’article du mariage. N on-feulem ent il n’y a pas d’Ordonnance
qui interdife aux Proteftans la faculté que la nature leur donne
de refpirer l’air de la France , d’y élever leurs enfans , d’y foutenir leurs droits civils ; m ais, vous l’avez v u , il y en a de pré*
cifes qui leur conferent ces prérogatives, & leut en affurent la
jouiflance.
V ou s vous rappeliez ce même Edit d’O & o b re 168 5, que
j’ai eu l’h o n n e u r d e vous c it e r ; cette Loi fanglante qui a terraffé
le fch ifm e & fait couler tant de p le u rs , d o n t la v ra ie Religioit
feule n’auroit peut - être pas exigé le facrifice. ^Eh bien , cet
Edit les autorife en termes précis à demeurer dans le Royaum e,
leur garantit l’exercice de leur commerce &: la jouiflance
de leurs biens. Jamais-cette parole authentiqe n’a été révo
qué!! En accablant le c u lte , on a donc toujours refpe&é les
perfonnes; ils ont donc une exiftence de fait & de droit dans
'le Royaum e. V ous pouvez d o n c,
M essieu rs
, vous d e v e z3
dans ce qui n’eft que purement civil, dans ce qui ne concerne
point la croyance ou les exercices religieux, & fur-tout dans
toutes les difeuflions qui portent fur leur état politique, leur
donner la même attention , la même b o n té , les mêmes fecours
qu aux autres Citoyens.
Il n y a point de L oi civile qui proferive leurs mariages;
�il ne peut pas y en avoir : il y en a u n e, au contraire , qui les
autorife : il y en a une qui en réglé la forme & qui en fixe l’ap
pareil; & l’E glife, loin de réprouver cet arrangement, le con
firme. Elle donne prefque la force & la validité du Sacrement v
à ces nœuds temporels que l’intervention feule du Magiftrac
laïc a formées. Les Proteftans font donc en droit d’en pro
duire les monumens. Ces traces écrites qui confiaient un con”
trat refpeftable, lors même qu’il eft dépouillé de la dignité fpirituelle qui le décore pour nous, font admiffibles dans les T ri
bunaux.
C ’cft ce qu’il falloit démontrer d’abord, afin d’éca rter,
d’une part, quelques fcrupules que laiffoient appercevoir des
perfonncs même bien intentionnées, fur le fond de cette
C au fe; afin tde juftifier en quelque forte le G ouvernem ent,
qui n’a pas penfé que la croyance
4 e la
Demoifelle Cam p fût
une raifonpour luirefufer l’accès des Tribunaux; & , d ’autre
part, afin de ne point laifler à nos Adverfaires ce prétexte, dont
ils auraient triomphé avec afFeâation,
J’ofe vous fupplier,
M essieu rs
, de vouloir bien ne point
perdre de vue les réponfes que je viens de faire d’avance à leurs
obje&ions. Il n’arrive que trop fouvent que dans des querelles
de la nature de c e lle -c i, dans des plaidoieries que la divifion
des audiences éloigne néceffairement les unes des autres, on
o u b lie , ou l’on s’efforce de faire oublier aux Juges ce qu’ils
avoient d’abord entendu. O n renouvelle, on rajufte les diffi
cultés: on feint d’ignorer quelles ont été détruites ; & la rapi
dité de la parole fécondant cet artifice, l’avantage du fond
femble en quelque forte refter à la Partie qui parle la derniere,
tandis qu’elle n’a vraiment que celui de la place : elle femble
avoir tout dit viâorieufem ent, précifément parce qu’elle a'
rien dit qui pût lui affurer la vittoire,
V ou s
�75
V ou s ne fouffrirez pas,
M
essieurs
, que cette rufe foit ici
mifeen ufage, ou du moins elle le fera fans fruit, fi 011 o fe l’em
ployer. V ous voudrez bien vous fouvenir que j’ai démontré la
réalité des droits civils des Proteflans ; que j’ai juftifié le privi
lege de leurs unions ; & qu’en perdant les prérogatives qui dé
pendent , dans un Etat p olicé, de la volonté mobile du Sou
verain , ils ont confervé du moins celles que donnent les loix
confiantes, immuables de la nature.
E x a m e n d e s t it r e s q u i p r o u v e n t le m a r ia g e .
Examinons maintenant ces titres, annoncés depuis fi longtem s, & com battus, au moins par des m enaces, avant même
que nous fuffions décidés fur l’emploi que nous en devions
faire. Il y en a deux,
M essieu rs
, comme on vous l’a dit, &:
tous deux font des aftes de célébration du même mariage; l’un
émané d’un Miniftre Proteftant, l’autre d’un Curé Catholique.
T o u s deux ont été dépofés chez des Notaires, afin de ménager
le m oyen d’en tirer .des expéditions exactes ; tous deux ont été
légalifés folemnellement par les Juges des lieux avant le dépôt :
il n’y a donc rien qui n’en garantiffe l’authenticité.
Cependant le fieur de Bombelles affirme qu’ils font faux.
Les v o ilà , s’écrie - 1 - i l , c’eft: moi qui les révélé ; & il vous
entendez vous en fervir, je fuis prêt aies attaquer par les voies
de droit. J’ai de plus un Affocié qui m’aidera dans ce com bat
difficile : c’efl le C uré dont vous avez ufurpé le nom ; il défavoue hautement fa fignature, comme je défavoue mon ma
nage. Unis par cette conformité d’intérêt, de fentim ens, for
tifiés par cette complicité m utuelle, nous vous offrirons des
athletes redoutables, dont vous ferez prudemment d’éviter
le choc.
�74
A h ! gardez pour vous ces infirmations de ménagement &
& de prudence ! C ’étoit dans votre Caufe qu’il en falloit faire
ufagé. Q uoi ! vous vous flattez par de vains propos d’éblouir
la Juftice fur des aftes écrits que vous-même lui préfentez? Ils
fubfiftent tant qu’ils ne font pas attaqués ; vous ne les attaquez
point, en difant que vous les attaquerez : jufqu a ce que vous
ayez formé votre infcription de faux, 8c qu’elle ait été admife,
jufqu a ce que vos moyens aient été jugés pertinens & valides,
ces a&es font la réglé dont les Tribunaux ne peuvent s’écarter.
C ’eft votre L o i, comme la nôtre & la leur: vos efforts, pour
les éluder, font puériles, & vos tentatives illufoires.
Mais feriez-vous recevable à la former, cette infcription de
faux? Quel en feroit l’objet? D e faire déclarer nulles ces pieces
qui vous importunent ; de les rejetter du procès, où vous les
redoutez ? Mais elles n’en faifoient point partie : c’eft vousmême qui les y avez incorporées. Si réellement vous les croyez
fauifes, pourquoi les tirer de l’obfcurité où nous les laiffions ?
Nous ne les avons jamais produites. Si dans le Mémoire à
confulter le certificat du Miniftre Proteftant a été d’abord an
noncé, d’autres vues, le refpeft pour des préjugés mal fondés, le
peu d’envie de s’embarraffer dans les difcuffions où vous nous,
avez forcés d’entrer, nous avoient décidés à les laifler à l'écart*
Si celui du Curé Catholique a été vu , comme vous le dites*
des Magiflrats & des principaux parens de la Demoifelle Carvoifin, c’étoit par l’ordre d’une autorité fupérieure ; mais dans
le procès, & même dans le Mémoire à confulter, il n’en a pas
été queftion. C ’efl: donc vo u s, & vous feul, qui en avez opéré
la repréfentation : or on n’efi: pas recevable à attaquer foi-même
des titres qu’on pouvoit fe difpenfer de produire. D ès que,
par le filence, on étoit en droit d’attendre le même avantage
que peut procurer l’attaque, celle-ci neit point tolérée par la
�75
Juilice, qui réprouve toutes les procédures inutiles. Votrô pré
tendue infcription de faux ne feroit donc pas admillible dans la
forme, quand même vous auriez la hardieffe de l’entreprendre.
Mais l’auriez-vous, cette hardieffe ? Au fond du cœur les
croyez-vous faux, ces ailes que vous inculpez avec tant de
légéreté ? Soutiendriez-vous jufquau bout une procédure férieufe, dont la fin ne pourroit être que de vous convaincre
vous-même ^’une impoilure iniigne , & d’ajouter encore, s’il
fe pou voit, à l’opprobre dont cette Caufe ne vous a déjà que
trop couvert ?
J’en appelle ici à vous-même : c’eil votre cœur que j’inter
roge : ofez nous en développer les replis : faites-nous voir qu’il
eft vuide de crainte, exempt de remords ; que le tems en a
effacé jufqu’au moindre fouvenir de cet engagement qui fait
aujourd’hui votre effroi, parce que vous avez perdu l’innocence
avec laquelle il a fait vos délices. Ah ! je ne veux ici d’autre
Juge que votre confcience. Trouvez moyen de mettre au jour,
d’une iganiere certaine, les fentimens qui l’agitent & peut-être
le déchirent en ce moment, & nos conteilations feront bientôt
décidées.
Ces a£les font faux ! Et comment le prouveriez-vous ? Eftce celui de Bordeaux que vous attaquerez d’abord? Le Curé
le dénie hautement ; il foutient qu’il ne l’a ni (igné ni délivré ;
mais ce Curé prudent qui prévoit les événemens, qui voudroit
tout à la fois vous fecourir & ne pas s’expofer, avoue pourtant
que la iignature reffemble ti fort à la tienne, qu’elle lui fait illu
sion à lui-même (i). Il n’y a donc pas là de moyen de faux. Les
Experts pourront-ils fe défendre d’une illufion qui trompe la
6 ) V o y e z la Lettre de ce C u r é , au fieur de Bombelles.
K .j
�76
Partie la plus intéreflee à s’en garantir ? D es étrangers démê
leront-ils l’impofture d’un écrit qui en impofe à celui même
dont on a co n trefait la main ?
V ou s offrez de prouver que vous n’étiez point à B ordeaux,
mais à T o u lo u fe , à lep oque indiquée par l’a&e. A h ! ne pouf
fez pas l ’imprudence jufques-là ; outre que la preuve contraire
feroit trop facile, nous en avons une déjà faite , qui vous difpenfera de cetté ignominieufe & pénible corvée. Dans l’année
même de votre m ariage, dans la premiere ivreffe de votre féli
cité , dans ces momens où vous ne refpiriez encore que pour
le bonheur & la vertu , vous avez avoué à vos amis le fecret
de votre mariage à Bordeaux : la Juftice leur a arraché cette
confidence, dont vous avez perdu la mémoire. V o s anciens
camarades ont dépofé de ces aveux échappés à votre franchife,
dans un teins ou elle ne pouvoit pas être fufpefte.
Le Jieur Paul-Elit Vialette c£Algnan , ancien Officier du Régiment de
Piémont :
D épose , qu’il a v é cu d’une étroite liaifon avec le fieur île Bom~
b e l l e s .......................................................... qu’étant revenus enfemble
l’h iver fuivant en cette v ille , ledit fieur de Bombelles dit au D é p o fant pendant leur route & en la ville de P a ris, qu'il ¿toit marié & avoir
époufé la Demoifelle Camp, à Bordeaux ou aux environs.
Mefjîre François de Btaudau , Lieutenant-Colonel d'Infanterie,
D épose , que M. de Bombelles , long-tems avant de partir de cette
ville (d e M ontauban) lui a déclaré & avo u é fon mariage avec la
D em oifelle C a m p , lui ajfurant avoir époufé à Bordeaux.
Et vous parlez de vous infcrire en faux contre l’afte de Bor
deaux !
Serez - t o u s plus heureux contre celui de Montauban ? Il
porte, dites-vous , une fignature idéale, parce qu’il fe trouve
�2
o
7
77
foufcrit Sol-Elios. Ce mot, par un rapport qui n’eft aiTurément
point fans exemple, iignifie le Soleil en Latin & en Grec ; en
conféquence vous vous écriez agréablement que cejl un nom
en l'air; qu’on ne trouvera point fur la terre l’individu auquel
il s’applique. Vous niez de l’avoir jamais connu : oferiez-vous
l’atteiier fur la foi du ferment? . . . .
Mais non , je vais vous
épargner la tentation d’un nouveau parjure. Ecoutez & rou-giiTez.
^
V o ici, M e s s i e u r s , une preuve non douteufe de Texiitence
de cet homme chimérique. Voici une lettre de ce fantôme que
le iieurde Bombelles méconnoît, & qu’il met au rang des vifions fantaffiques dont la Demoifelle Camp remplit l’Europe
pour troubler la paix de fon ménage. Le fieur Sol-Elios, après
avoir été douze ans Miniilre à Montauban , s’eft retiré à S&verdun, dans le Comté de Foix. Voici ce qu’il écrit le 6 de ce:
mois à un de fes Confreres :
O u i , cher a m i, c’eft mol qui prêtai mon miniftere à M. de Bom
belles, pour fe lier par les noeuds les plus facrés avec Madame de Bom
belles t ci-devant Mademoifelle Cam p. C ’eft donc mal-à-propos que c e
Gentilhom me fournit aujourd’hui des doutes à fon A v o cat fur mon»
exiftence , puifqu’il m’a vu y qu’il me co n n o ît, & qu’il devroit fe rap p eller du peu que je lui dis lorfque je lui départis la bénédiâion nup
tiale................................................................................................. ........
M . de Bombelles prétend que je fuis un fo u rb e, un im p o iïeu r, dont on
a emprunté le nom r ou qui l’a lui-m ême prêté pour donner quelquecouleur à l’impofture. Q u e ce Monfieur me connoît mal
M. de Bombelles prétend qu’il n’y a jamais eu à M ontauban, ou aux en
virons , de Pafteur défigné fous le nom de Sol dit E lios.............. Il n’eil
du tout point fondé fur cet a rticle , puifque j’ai d e fle rv i, en qu alité
de P a fteu r, ce pays là l’efpace de dix à douze ans ; que je fuis également
connu fous ce nom dans le Périgord tout comme ici. C et cchapatoir'fc'
�78
de fa part eft d’autant plus groiîiérement tr o u v é , qu’il eft aifé de.fe
convaincre de la vérité du fait par les Regiftres des baptêmes & des
mariages de l’un &C de l’autre endroit, tout comme par l’a tteftation( i) que
je vo u s e n v o ie , fignée d’un certain nombre de Bourgeois &. Habitans de
cette Ville , tout autant de perfonnes compétantes pour attefter que je
v i s , que j’exiftois il y a une quarantaine d’années , puifqu’elles m’ont
v u naître & que je laboure ma quarante-huitieme. Je fais qu’il n’eil
pont de plus méchans fourds que ceux qui ne veulent point entendre,
& que M . de Bombelles perfévérant toujours dans fon im pénitence,
Soutiendra que toutes ces fignatures , comme n’étant point munies du
fceau de la V ille , font des pures fictions : mais que ce M onfieur, ou
tout autre en qui je puiffe me co n fier, me fourniffe un fauf-conduit
de la C o u r , & je le co n vain crai, s’il le fa u t, de mon exiftence. Signé,
S o l dit E lxo s.
C e Pafteur eft donc un homme bien réel : le mariage qu’il
a béni a été folemnel.
»
M a is, ajoute-t-il, l’a&e n’eft pas figné des Tém oins; il ne
l’eft pas des Parties. Quand cela feroit , qu’en réfulte-t-il ?
N ’eft-ce pas l’ufage des lieux & la Loi des contra&ans qu’il
faut fuivre ? Vous-mêmes, M e s s i e u r s , pendant l’inftruftion
de cette Caufe , vous venez d’établir, par un Arrêt folemnel,
qu’il n’eft pas toujours néceflaire pour la validité d’un atte de
célébration, que les Témoins & les Parties l’aient figné; &
l’efpece étoit bien plus forte, il étoit queftion d’un mariage cé
lébré fuivant le rite Romain.
Le fieur Gobaut réclamoit la Loi qui lie les Catholiques
fur cet article : la Dame de Lepine produifoit la Coutume qui
les en difpenfe en Flandres & ailleurs. Dans cette matiere pro( i ) C ette atteftation fignée de dix-fept des principaux H abitans, a
été remife fous les y e u x de M , l’A v o cat Général.
�blématique, malgré les inconvéniens qui pouvoient réfulter de
cette opinion, vous avez prononcé en faveur de la Dame de
Lepine. Les Proteflans , attachés à l’ancienne difcipline, confervés par la révocation même de l’Edit de Nantes dans la
jouiflance des droits civils que cet Edit leur affuroit, ont confervé, comme les Catholiques des Pays-Bas& de l'Allemagne,
l’ufage immémorial parmi eux de ne pas exiger la fïgnature des
Témoins ni celle des Parties. En voici la preuve.
N o u s , fouifign és, Chapelains & Anciens de la chapelle de leurs
Hautes-Ptiiflances NoiTeigneurs les Etats-G énéraux des P rovinces
unies des P a ys-B as, auprès de fon Excellence M. Leitevenon de BerK e n ro o d e , leur AmbafTadeur à la C o u r de France , déclarons & cer
tifions q u e , fuivant l’ufage de nos églifes , nos regiftres des mariages
font uniquement lignés de nous C h ap elain , & de celui de nous qui fe
tro u v e en fo n & io n , & que ledit ufage ne demande ni même ne com
porte que les parties & les témoins lignent dans nofdits regiftresr Eu
foi de quoi nous appofons i c i , à côté de nos fignatures, le cachet de
notre Com pagnie. A Paris en C on iiiloire ce
Juin 177 2 . Signé, D u vO iS iN , C hapelain; F .G . d e l a B r o u e , Chapelain; L. S e r r u r i e r ,
Ancien ; F r é d é r ic D u v a l , Ancien (1 ).
D e ce c ô té , l’a&e de Montauban efl donc en réglé.
Mais il y a bien plus : ces témoins , dont la fïgnature n’a
pas été reqûife , parce quelle n’étoit pas nécefTaire, ont
rendu un nouvel hommage à l’authenticité de la cérémonie ,
que leur nom & leu r préfence ont légitimée. Ils ont été entendus
tous trois dans l’enquête dont je vous ai déjà tant de fois parlé;
& voici comme ils s’expriment.
Le Jitur Louis Ltcun, Négociant, âgé de 4 7 ans.
D épose , qu’étant dans une maifon, dans cette ville, vers le mois dier
Mars 1766 x il vit la cérémonie du mariage du Jicur de Bombelles avec la
0)
ligalifation de M. l’Arabaffadeur de Hollande eft jointe à ce certificat.
�I ..
8o
Demo'ifelle Camp ; fe rapellant ce fait très-particuliérem ent, que le Pafteur demanda, audit fleur de Bombelles, s’il vouloit pourf a légitime époufe,
la Demo'ifelle Camp , & quayant répondu avec beaucoup defécurité q u 'o u i,
ledit Pafleur, qui avoit déjà pris le conftntement de la Demo'ifelle Camp ,
bénit leur mariage, à la très-grande fatisfaâion de l’une & de l’autre des
Parties.
Les fleurs Jacques Brun & Jean-Pierre Moles dépofent la
même chofe.
Eft-ce un a£e de cette nature, eft-ce une piece ainiî juffifiée
que vous réufllrez à convaincre de faux ? L ’auteur fe préfente
& l’avoue; les témoins l’atteftent ; ce n’efl: plus un afte fuppofé,
ni un être imaginaire, comme vous l’avez avancé. Comment
éluderez-vous cette intervention, bien autrement férieufe, bien
autrement frappante que celle du Curé votre protefteur, quoi
qu’elle n’ait pas l’apparence judiciaire ?
Direz-vous que c’eflt une nouvelle impofture , qu’après
avoir appofé ce nom au bas d’ùn a£te , on n’a pas eu plus de
peine à le foufcrire à la fin d’une lettre ; que le Sol-Elios de
Saverdun n’efl: pas plus croyable que le Sol-Elios de Montauban ? N o n , vous ne le direz pas. La lettre porte un de ces
caraftçres de franchife & de probité, auxquels çn ne peut fe
méprendre. L ’atteftation des Habitans, qui y eft jointe, n’eft
pas fufpe&e. La Cour peut d’ailleurs ordonner à ce fujet des
informations qui l’éclai.rçiffent, M, l’Avacot Général peut en
prendre : nous fommes prêts à fubir tous les examens. Il n y
a pas de recherches qui nous inquietent. Avez-vous le même
çourage ? Montrez-vous la même fermeté }
Le Curé de Bordeaux nie qu’il ait rien infcrit fur fes regiflres
de l’afte dont il paroît avoir délivré l’extrait. Il en offre la vé
rification i
�8i
rification ; mais , qu’en réfulte-t-il ? O u qu’il les auroit fouftraits depuis que l’affaire a éclaté , ou qu’auparavant même ,
toujours précautionné , toujours attentif à fe prémunir contre
les événemens, il fe feroit difpenfé d’infcrire fur ces regiftres la
célébration dont il donnoit un certificat en bonne forme ;
qu’il auroit joint à la prévarication envers les Loix de fon Eglife,
une autre prévarication envers les Parties, en leur délivrant
une copie d’un a&e dont il n’exifteroit point d’original , &
qu’il en comniettroit aujourd’hui une troifieme , en niant la
vérité de cette copie même , écrite & (ignée de fa main.
Mais cette triple infidélité pourroit-elle nuire à la Patrie qui
eft innocente, & qui a rempli , autant qu’elle le pouvoit, les
devoirs que la Loi lui impofoit ?
C ’eft une fuppofition ! Mais fi l’on avoit pu recourir à cet
indigne artifice , (i l’on avoit eu befoin de cette fupercherie,
& que la famille de la Demoifelle Camp fe fût dégradée au
point de la mettre en ufage, pourquoi auroit-on choifi, par pré
férence , le nom d’un Curé d’une grande V ille , o ù , fi l’on vous
en cro it, la Demoifelle Camp n’a jamais été ? Pourquoi l’aller
chercher dans la Capitale de la Province , dans la Métropole ,
où réfidoit le Tribunal qui dans ce tems-là devoit connoître
du fa it, s’il avoit jamais excité quelque plainte ?
Q uoi ! en fuppofant que ce certificat de mariage dût exciter
des conteftations, c’étoit alors au Parlement de Bordeaux
qu’elles auroient été portées. Et c’eft un Pafteur de Bordeaux
dont on auroit pris le nom pour appuyer une femblable impofture ! Y avoit-il rien de plus redoutable , pour les fabricateurs de cette ufurpation clandeftine, qu’un pareil théâtre ?
Pouvoient-ils préfumer que le Curé de Saint Siméon ne feroit
L
�pas inftruit d’une querelle où fon nom auroit paru avec tant
d éclat ?
S’ils avoient eu en effet à contrefaire un titre, une fignature , à fe l’approprier fans la participation de la perfonne inté—
reffée, n ’auroient-ils pas choiii celle de quelques Pafteurs de
ces Paroiffes éloignées , de ces Villages perdus en quelque'
forte dans les landes impraticables dont le Q uercy & le'
Périgord font remplis ? Là ils auroient pu croire leur crime
enfevelir Us auroient pu fe flatter d’être à couvert de la récla
mation d’un homme qui n’auroit peut-être jamais entendu
parler d’eux , quelque bruit qu’eût pu occafionner leur affaire.Mais eft-il naturel qu’ils euffent choiii un Pafteur connu
dans une des Villes les plus commerçantes de la France î
Eft-il naturel que, pour dépofer la produftionde la fourberie *
ils euffent encore préféré le lieu où il a fon domicile , & où
par conféquent il étoit plus facile de la découvrir ?
Enfin cette piece eft légalifée du Lieutenant Général deGuyenne , Membre du Parlem ent, qui auroit été Juge de
l’Inftance dans la q u e lle elle auroit été produite , comme je'
viens de le dire,, avant la Loi qui attire devant vous, M e s
, tous les appels comme d’abus. N ’auroit-on pas re
douté les regards de ce témoin incorruptible , & fa jufte in
sie u r s
dignation , s’il avoit pu s’appercevoir qu’il eut été trompé £
Laiffonsdonc ces vains reproches, ces menaces encore plusvaines d’une infcription de faux : elle n’eft pas admifïible :
quand elle le feroit en apparence, elle ne pourroit réuûir dans>
le fond. Ces fortes de reffourccs femblent avoir été celles de
tous les. époux réfra£hires , q u i, fans être dans une pofition
auffi odieufe que celle du fieur de Bombelles, avoient le même
intérêt à fecouer des liens dont ils fe trouvoient furchargés».
�213 '
83
Il y a peü de Caufes de cette nature, où les a&es de célébra
tion n’aient été ou attaqués ou menacés, fans que la Juilice ait
même daigné s’arrêter à ces démonftrations illufoires.
Dans celle du Com te de la R iv i e r e c o n t r e la Demoifelle
de C o lig n y , au dernier fiecle > on s’élevoit contre l’aûe. L e
Com te de la Riviere avoit déclaré ne vouloir pas s’en iervir ;
la Dem oifelle qu’il réclamoit pour é p o u fé, & qui nioit lui
avoir jamais appartenu à aucun titre , é^cipoit hautement de
cette déclaration. Elle étoit appuyée des plus vives , des plus
preiTaiites foilicitations qui aient jamais été faites. Sa famille
intervenoit en fa fav eu r, & cette famille étoit com pofée de
ce qu’il y avoit de plus grand dans le R oyaum e , à com
mencer par la Maifon de Loraine : mais elle avoit écrit des
lettres où elle fe difoit mariée ; elle avôit eu un enfant qu’elle
avoit reconnu, & donné au Com te d elà Riviere. Ces circonftances prévalurent fur l’irré g u la rité de l’a fte, quel qu’il fût. L e
mariage fut confirmé.
Je ne finirais pas , fi je voulois citer toils les Arrêts rendus
dans les mêmes cfpeces. Je me bornerai à un fe u l, parce qu’il
eft célébré encore dans le Languedoc, où il a produit la même
fenfation que l'affaire de la Demoifelle Cam p produit i c i , &;
quêtant tout récent, il a l’avantage d’indiquer une Jurifprudence moderne. C ’eft celui qui a été rendu le 19 Avril 17 6 9 ,
au profit de la Dem oifelle Chabaud. Elle étoit Proteftante &:
ne s’en cachoit pas. Elle produifoit un aûe de célébration d’un
C uré Catholique argué de faux. Par une fingularité remar
quable, ce Curé, fugitif au moment où il étoit cenfé avoir (igné
l’a fte, avoit depuis été condamné aux Guleres. O n ne trouvo it ni chez l u i , ni au Greffe , de regiilre qui juilifiàt l’extrait.
Il y a plus : l’infcription de faux avoit été form ée; elle avoit
L ij
�§4
même été ' admife ; & il y a bien plus en co re, le faux étoit
prouvé. Entre autres indices, l’a&e portoit que la Bénédiôion
nuptiale avoit été impartie un Dim anche 11 Juin, O r , le i x
Juin de cette année n’étoit pas un Dim anche , mais un Jeudi.
L ’afte étoit donc faux & nul en lui-même.
M ille autres circonftances fortifioient encore cette preuve
indubitable. C ependant, après les plus mûres délibérations ,
après un renvoi de la Grand’Chambre à l’une des Enquêtes, ce
qui éèartoit d’autant toute idée de furprife & de précipita
tion , le mariage a été confirm é; & l’enfant qui en étoit pro
v e n u , déclaré légitime : tant eft grande aux yeux des T rib u
naux la faveur d’une union contra&ée fincérement, & fur-tout
d’une union féconde.
V o u s vo y ez d o n c ,
M
essieurs
, que dans aucun fens , la
menace du fieur de Bombelles & de fon Curé n’eft à crain
dre. Dans aucun cas leur infcription de faux n’eft admiiîible.
N os a& es, ou plutôt les leurs, font à couvert de cette efpece
d’attaque & par la forme & par le fond.
M a is , continuent-ils, pourquoi deux a&es ? Si le premier
eft bon , pourquoi avoir provoqué le fécond ; & s’il eft infuffifan t, qui aiTurera que celui-ci vaudra mieux? L ’un a-t-il pn
fuppléer à l’autre ? LJti Miniftre Proteftant a t-il quelque chofé
de commun avec un C ure C atholique? D ailleu rs, ajoute
ront-ils probablem ent, vous venez de citer un Arrêt du C o n fe il, qui enjoint aux Réformés de fe marier devant un Juge
L a ïc ; mais il n’y en a aucun qui les autorife à contrafter, foie
devant un de leurs Pafteurs , foit devant un des Miniftres de
nos autels. La Demoifelle C a m p , par cette duplicité d’a ô e s ,
ind iqu e, dune p art, la con viâion où clic eft elle-même de
lh ir infujBifance j & de l’au tre, par leur nature même , il eft
�2 \S
85
clair qu’elle a dérogé au règlement que vous produifez en fa
faveur.
Il
eft ju fte ,
M
essieu rs
, de répondre à ces deux objections.
L a premiere, fur-tout, eft celle que nos Adverfaires ont déve
loppée avec plus de complaiiance : c’eft celle fur laquelle ils ont
fondé les efpérances de leur triom phe, s’il eft vrai qu’en effet
ils fe foient flattés de triompher.
\
. Certainement l’Arrêt du Confeil du 15 Septembre 1685
étoit ce qui pouvoit arriver de plus heureux aux Proteftans
François. Dans l’horreur des défaftres qui les accabloient de
toutes parts, ils fe trouvoient à peu près par-là réduits à la con
dition des Catholiques en A n gleterre, en H o llan d e, par-tout
où domine la croyance des enfans dénaturés de l’Eglife R o
maine.
O n vous a plaidé qu’ils y gémifloient dans la plus cruelle
oppreiTion ; que c’étoit par repréfaillcs, que la main de nos
Souverains s’étoit appefantie fur ceux de nos compatriotes
qu’une Foi commune lie avec ces Nations commerçantes &
guerrieres. Rien n’eft plus faux affurément. Les Catholiques à
L o n d res, à Am fterdam , dans toute l’étendue des ProvincesU nies & de la Grande-Bretagne, ont des prérogatives plus ou
moins reftreintes ; mais nulle part leurs unions 11e font gênées,
L a feule marque de dépendance à laquelle ils font obligés en
vers le G ouvernem ent, c’eft de fe marier devant le M agiftrat,
comm e les Se&ateurs du culte autorifé. En afBmilant l’état des
^Proteftans François en France à celui des Catholiques étran
gers chez nos vo iiin s, on ne faifoit donc aux premiers aucun
tort réel.
Si la fin du dernier fiecle & le commencement de celui-ci
avoient etc plus paiiibles, fans doute ce règlement utile n’au^
�86
i'oît jamais reçu d’attéinte, je ne dis pas de l’autorité publi*
que, puifqu’elle l’a toujours refpe&é , mais du caprice des Par*
ticuliers qui devoient l’obferver. Mais ces deux époques ont
été troublées par dés guerres il cruelles ou par des révolutions
de finance fi fingulieres , qu’il a été difficile au Gouvernement
de porter/fans ceife un œil, attentif fur tous les objets qui mé*
ritoient fes regards.
Tandis qu’on enfanglantoit les deux mondes , pour donner
uil Maître à la Nation qui a découvert le nouveau, & que les
convulllons du fyilême agitoient Ci cruellement cet Etat au
quel on l’avoit préfenté comme un remede , TAdrainiflration
perdit de vue les Proteftans, que leur imperceptibilité même
rendoit cependant plus dignes que jamais d’eftime & de pro*
teftion,
D ’autres querelles non moins funefles
concouroient à
augmenter fes embarras. Des diviflons intérieures que ia fa*
geife des Magiftrats & la douceur du Prince ont à peine cal*
mées , abforboient encore l’attention que l’on auroit pu don*
ner à ce qui fe paifoit dans une Communion autrefois rebelle
& redoutée , & maintenant oubliée, méprifée , depuis quelle
nvoit ceiTé d’être puiffante ou fanguinaire.
O n abandonna donc à euxvmêmes les Proteftans, & le foin
de leur difcipline civile. L ’Adminiilration , contente de veiller
fur la profcription du culte, négligea de s’occuper de l’état
des perfonnos, qui pouvoit lui paroxtre aiTuré par l’Arrêt du
Confeil. Sans défendre leurs mariages, on ne fe mit pas en
peine de les approuver. Les Juges , qui dévoient en être les
témoins, les miniftres juridiques, refuferent de remplir fans
ordres ces fondions délicates. Peu inftruits des intentions dç
la C o u r , timides, aveuglés peut-être par des préjugés, ils crai
gnirent de touchera. 1 cncenfoir, en fe mêlant d’une cérémonie
�217
%1
<jui, parmi n o u s, tient au culte & au dogme. Enfin , les Proteilans, av ec le règlement à la main, ne trouvoient perfonne
qui voulût les marier. Us ne pouvoient fe préfenter devant des
Magiftrats de leur F o i, puifqu’ils n’en avoient pas ; ni devant
des Magiilrats Catholiques , puifqu’on les refuloit. Que faire
dans cet abandon, dans ce dénuement abfolu de reffources ?
Us imaginèrent, d’une part, de former leurs vœ ux, de pro
noncer leurs f^rmens en préfence de ceux de leurs Miniftres
que la tolérance de l’Adminiftration leur laifioit; & de l’autre ,
l ’efprit toujours rempli de l’Arrêt de 1685 , toujours attentifs
à rendre hommage à la Loi du pays , à la volonté du Prince,
voyant que parmi nous les Curés font de vrais Magiftratsdans ce qui regarde le mariage, fongeant que dans l’adminiftration de ce facrement,rAutorité laïque eft m êlée, incorpo^
•rée à la Puiflance fpirituelle; que ces deux pouvoirs font con
fondus & réunis à l’inflaiit de la célébration , dans l’individu
facré q ui, en ratifiant le confentemem prononcé parles Par
ties , y attache tout à la fois les grâces du Ciel & les effets civils
aux yeux de la L o i , ils s’aviferent de fe préfenter devant nos
Pafteurs, non pas pour y recevoir un facrement dont leur
incrédulité les rend malheureufement indignes, mais pour y
conilater juridiquement leur union, & en tirer un monument
capable de la faire valider. Le Miniftre continua d’être l’hom
me de leur confcience, & le Curé devint à leurs yeux celui
de la Loi.
Cette coutume, introduit? pa;r>la néceiïité, a donné lieu à
une Jurifprudence adoptée par •l*‘ fagefl'e des Cours , & tacite*
ment confacrée par le iilence du Gouvernement. Il n’y a peutttre pas d’années, comme j’ai eu l’honneur de vous le dire à 1»
première Audience, où quelque Parlement du Royaume n’ait
à juger quelque Caufe de cette efpece : & jamais, M e s s ie u r s 7
�88
le certificat du Curé, ainfiproduit,n’afouffert de difficulté. Les
exemples en feraient innombrables ; mais vous les connoiifez
auffi bien que m o i, & la voix de la notoriété publique ne per
met pas même de révoquer en doute la vérité de ce fait.
M aintenant, que deviennent les obje&ions auxquelles j’ai à
répondre ? Non-feulement la Demoifelle Camp n’eft pas repréhenfible d’avoir en fa faveur deux certificats, mais c’eft
précifément çette innocente duplicité qui fait la fûreté de fa
Caufe. Si elle n’en avait qu’u n , fon droit pourrait paraître
douteux. C ’eft la réunion des deux qui le rend inconteftable.
Les Ordonnance«, qui enchaînent les Catholiques parmi nous
à l'obligation de ne fe marier que devant leur propre Curé ,
font précifes, O r , le Pafteur, qui marie les Proteftans, n’eft
pas leur propre Curé : il faut donc prouver que ce font des
Proteftans qui fe font préfentés devant lui ; & c’eft ce que fait
l’aûe de célébration du Miniftre. L ’un attefte aux Tribunaux,
que les Parties font étrangères à la Loi ; l’autre leur fournit le
voile favorable dont ils ont hefoin pour déguifer la difpenfe
néceflaire qu’ils accordent de çette Loi rigoureufe. D e tous les
mariages proteftans qui fe célebrcnt dans le Royaum e, il n’y
en a pas un qui ne foit fortifié de cette double formalité ; il n’y
en a pas un qu’on ne puiiTe juftifier par ce double titre qui cou?
cilié tous les intérêts, & aflure aux enfans le ta t, l’honneur, la
fucceffion de leurs peres.
A la vérité on ne le$ produit pas toujours tous deux. Il y
a des cas où l’on fe contente du premier : le fécond eft une
pièce fecrete, que l’on confie à la difcrétion du Miniftere pu
blic & à la fageiTe des Juges. Il eft rare que ces fortes de ma
riages éprouvent une attaque auffi violente, auffi finguliere
�89
ên tout f*ens que celle dont nous nous plaignons, & que les
deux titres foient expofés à une difcuffion pareille à celle à
laquelle nous avons été contraints de nous livrer. Cela n’eft
cependant pas,
M
essieu rs
,
fans exemple.
A in fi, dans cette mémorable affaire dont j’ai déjà eu Thon«
neur de vous parler, dans celle delà Dem oifelle C h a b a u d ,o n
produifoit également deux titres, deux certificats. Celui du
Miniftre étoit^figné d’un fleur Paul R a b o t, Pafteur à Nifmes ;
celui du Curé portoit le nom d’un fîeur C a n o n g e, Deffervant
de IaParoifTe de Maffanne dans le voifinage d * cette Ville. C e
lui-ci, comme je vous l’ai obfervé, étoit violemment inculpé de
faux ; la main qui l’avoit fouferit, & la piece m êm e, étoient
■également fufpeftes : l’autre emporta la balance. Les Juges,
■en voyant la preuve d’un confentem entréel, n’héfiterent point
-à confirmer le mariage.
• M a is , dira-t-on, c’eft donc un facrilege. Si cette licence eft
to lé ré e , l’adminiftration d’un de nos facremens ne fera plus
qu’un jeu ; & ce jeu affligeant pour l’E glife, cette profanation
criminelle n’aura bientôt plus de bornes.
-
Je crois d’abord,
M
essieu rs
,
que cette décifion eft un peu
rigoureufe. O bfervez , je vous fupplie, ce que j’ai déjà eu
l’honneur de vous dire. D es deux minifteres que le Curé rem
plit à l’égard des Catholiques , il n’en exerce qu’un envers les
Proteftans. C e n’eft pas un facrcment qu’il leur proftitue; c’eft
lin certificat pur & fimple qu’il leur délivre. Il n’eft pas pour
eux le miniftre des Autels & le canal de la grâce. Il 11e fait que
les fonftions d’un Magiftrat ; il eft témoin de leur union ; il
rend compte de la déclaration qu’ils lui en ont faite. Iln e paroît
pas que la piété la plus févere puifl’e s’alarmer au moins des
M
�90.
fuites de cette complaifance qui retient des Citoyens dans
l’E ta t, 6c légitime des engagemens que le refus rendroit en
core plus fcandaleux que ne peut l’être la conceifion.
E nfuite, je n’entends pas juftifier les Minières Catholiques-,
qui fe prêtent à des importunités innocentes au moins de la
part de cetix qui les follicitent, quelque jugement que l’on en
porte à l’égard de ceux qui les écoutent. L ’idée qu’on en doit
avoir, dépend peut-être de leurs motifs. Si la feule ardeur de
contribuer au bien de la Patrie les enflam m e, s’ils ne font di
rigés que par
151fenfibilité pour
des êtres malheureux que leur
fécours arrache à l’opprobre, & dont leur indulgence fixe l’état
& le f o r t , il cû plus difficile de les condamner.
S i , au contraire , c’eft un vil intérêt qui les anime ; s’ils met
tent à prix d’argent leur facilité ; fi, à la premiere faute de
paroître ouvrir les portes de leur Eglife à des enfans déshéri
tés, qui en font exclus, ils joignent celle d’en vendre l’ou
verture , ils/ont criminels & puniflables fans doute; mais alors
c’eil leur nfiotif, & non pas leur a&ion, quieft malhonnête. La
mefure du délit eft celle de l’avarice qui L’a infpiré.
Peut-être même la connoiffancc de ce délit eft-ellc matière.à N
la cenfurc des Supérieurs Eccléfiaftiques, plutôt qu’aux recher
ches des Tribunaux féculiers. D u moins , quand ces Mimllrcs
prévaricateurs, comme il eit arrivé quelquefois, ont étépourfuivis par les Officiers R o yau x, ce n a ete ni pour avoir attefté
une célébration laïque s s’il eft permis de parler ainfi, ni même
pour avoir mis un prix à cette extenfion de leurs fon&ions-;
mais, ou ils avoient eu l’infidélité de ne pas inferire fur les regifHes l’original de l’a&e dont ils délivroient des copies , ou ils
avoient fouilrait ces archives précieufes pour ôter aux Parties
intéreifées la faculté d’y recourir. C ’eft cette duplicité vile (k
baife, que les Tribunaux ont cru devoir punir de la peine des
�\
. ................■;$'
.
galeres dans le Curé de M afiane, que j’ai deja eu
1honneur
de vous citer.
A cet égard, c’eft à celui de Bordeaux à fonder fa confcience
.& fa mémoire : c’eft à lui, qui offre fi fièrement la vérification
de fes regiftres, à examiner fi en effet il a fupprimé la feuille
qui contenoit l’afte dont il s’efforce de décréditer l’extrait, ou
fi, par une malverfation encore plus criminelle en quelque
forte , il n’affij^ne que le mariage du fieur de Bombelles ne s’y
trouve pas configné , que parce qu’en effet il ne l’y a jamais infcrit. C ’eft à M. l’A vocat Général à fe procurer, à cet égard,
les éciairciiTemens, & à prendre les conclufions que fa fageiTe
lui di&era.
Mais quelle que foit la perverfité du P afteur, il eft impoflible que les Parties , qui fe font livrées à fa f o i , en fouffrent.
L ’aûe eft valide, quoiqu’émané d’une main coupable. T o u t ce
que la Juftice exige , c’eft qu’on lui préfente une preuve de ce
confentem ent, qui conftitue l’effence du mariage. C ’eft qu’elle
ne puiffe douter de l’intention qu’ont eue les Parties, de s’u
nir , & de la démarche qu’elles ont faite pour effe&uer cette
union.
O r ici cette preuve eft complètte : le contrat civil a été
formé de la maniéré la plus authentique. V ous y trouverez ,
comme dans l’affaire du Com te de la Riviere , des reconnoiffances fans nombre de la part d’un des conjoints, & un enfant.
V ous y trouverez , comme dans celle de la Demoifelle Chab a u d , deux certificats qui fervent d’appui , de juftification
l’un à l’autre. S’il y a également un Curé pervers , dont les re
giftres foient reftés imparfaits dès le tems par une prévoyance
infidieufe, ou aient été mutilés depuis par une infidélité en
core plus repréhenfible, cette parité n’eft à craindre que pour
M ij
�9*
le Minière prévaricateur. L ’extrait qu’il a*délivré eil bon , a u
tant qu’il peut l’être : il attefte, il certifie le fait qu’il étoit im
portant ici d’établir, celui d’une union conjugale entre les per..fonnes qui y font nommees.
1
U
4,
Et c’eil cependant,
M essieu rs
%
, cette liaifon confirméer
jnfiifiée d’ailleurs par tant d’autres preuves, légitimée par la
poffeifion la plus folemnelle, que l'on s’efforce de dégrader ici;,
c’eft ce mariage contrafté fur la foi de l’honneur , ratifié par
toutes les efpeces de titres qu’il étoit poifible d’y donner
pour fupport., qu’on fe propofe de réduire à un honteux con
cubinage.
C é d e z, s?écrie le fieur de Bombelles à fa véritable époufe,
cédez fuivant mon caprice votre rang 8c vos titres : vous étiez,
vertueufe , & je vous ai réduite ; vous jouiifiez d e‘toute la :
gloire atachée à la pureté de votre fexe , & je vous l’ai ravie.
J’ai eu jecours, pour vaincre votre réfiftance, aux artifices le$
plus recherchés, aux combinaifo-ns les plus hardies. Sermens,
devoirs , honneur , religion, j’ai tout employé pour parvenir
à vous pofféder : mais vos droits s’évanouiffent au moment
où j’ai lahardieffe de m’accufer moùmême de libertinage. Vous
n’êtes plus mon époufe ; vous ferez la complice & la viftime
de ma foiblefie. J’ai facrifié votre jeuneffe & vos charmes à mes
defirs. Je veux vous facrifier une fécondé fois à mon inconftance 8c au reffentiment de la Dame Hennet. Cette ennemie
implacable veut fe vanger de vous , 8c je ferai de moitié dans
fes projets, j arce que mes affaires font ruinées &: mon cœur
volage , parce que j’ai des dettes & q u e je n’ai plus d’am our,
parce que vous ne m’offrez que de la beauté & des vertus, 8c
que je n’ai plus de tendreffe ni de reffources.
Et toi j être malheureux, qui m’appellois ton pere tpi dont
�'ÀZ2?
la naiflance me càufa un plaifir ii v if, quand mon ame encore
honnête ne connoiffoit ni les befoins , ni'les remords ; toi qui
•m’as {urpris ici même des carefles dont je croyois la Source
tarie dans mon cœ u r, toi qui m’as fait Sentir encore une Sois
combien il Seroit doux d’être vertueux, renonces à TeSpérance
de me jamais fléchir. Je t’ai donné le jour , mais c’eft pour te le
•rendre odieux. T u as reçu la vie Sur la foi de l’engagement le'
‘plus facré, m^is ce n’eft que pour te dévouer à la honte &
confommer ton opprobre. Fuis : Sois anéantie comme je vou
drais l’être.-Les noms de pere, d’époux,m e font en horreur.Cruels objets dont le-Seul afpe£Vme tue , c ’eft vous qui m’avez
perdu , je vous perdrai à mon tour. Abandonné de mes amis,
méprifé de mes parens, proScrit par la Société entiere, je n’ai
plus que l’affreufe couSolation de vous faire partager mes in-fortunes.
T e l eft , M e s s i e u r s - , le terrible tableau que le fleur de?
Bombelles a préfenté lui-même à cette Audience. T el eft l e
fens des déclamations dont il a rempli ce Tribunal. Vous prête
rez-vous à ce trânfport inSenSé? La Juftice s’avilira-t-elie au
point de devenir l’inftrument de fa fureur , & condamnerezvous à- une flétriiTure éternelle deux êtres innocens , dont'
tout le crime eft d’avoir des droits trop certains à Son amour ?
Et par qui leur Sont-ils diSputés , ces droits-? Quelle eft leur
rivale en.ee moment remarquable? Quelle eft la perTécutrice
•ardente qui les pourSuit à grands cris ,<cn faifant retentir lesnoms odieux de bâtardiSe & de concubinage ? Faut-il le dire !
c’eft:une'fille imprudente, qui cédant au defir effréné d’avoir
•un mari , a foulé’ aux pieds , pour fe l’aiTurer, l'honnêteté
¡publique, les mœurs , le s L o ix , Sa- propre conSdence ; une
.¿Ule fans dolieatefie , qui s’eft ailez peu refpe&ée elle-même
$pOUr»accepter-une main qu-elle - Savoip être-déjà donnée ; une
�-94
fille fans fcrupule , qui a confenti a devenir heureufe par uti
crime ; une fille fans pudeur , q ui , dans le moment. même où.
ion prétendu mariage eft attaqué , que dis-je , attaqué , dérmontré n u l , ne rougit point d i l’avouer, d’en faire ufage ,
de vivre publiquement avec l’époux que la Juilice s’apprête à
arracher d’entre fes bras ; une fille,indifcr.ete enfin , qui ayant
été jufqu’ici traitée par nous avec des ménagemens fans exem
ple , ne les a ¿reconnus, que par des calomnies-atroces , &
un emportement fans bornes ! Et voilà celle qui invoque ici
la fainteté des Loix qu’elle a violées, contre uns femme refpeftable qui les a toutes obfervées ; contre une enfant qui n’a
pu les enfreindre , puifqu’elle ne les connoît pas!^
, ' Et quels font fes titres ? Eft-ce Timpofture de cet a£te dç
célébration furpris fur un faux expofé , où elle prête à ce mari, *
qu’elle trembloit de laiiTer échapper , un domicile qu’il n’g.
jamais eu ni pu avoir? Eft-ce l’audace qui lui a tout fait méprifer , pour fatisfaire une paifion que la raifon feule auroit dû
.combattre, & que les çirconftances rendoient coupable? Eft,ce la précipitation avec laquelle, fans atten’djre la proclama
tion des bans , fans daigner approfondir des avis trop multi
pliés & trop certains , elle s’eft hâtée de former un lien dont
elle ne pouvoit tirer que le frivole avantage d’impofer filencç
pour un inftant à fes remords, & de confommer, fous un voile
honnête, le facrifice honteux quelle méditoif de fa pudeur ? .Et c’eft vous qui prétendez rejetter fur nous l’ignominie dup
à un commerce impur ! Je fuppofe pour un inftant qu’il fui
poifible à ces Juges qui nous écoutent, d’héiîter entre vous &
nous ; .je fuppofe qu’ontrouvât de part.& d’autre la même préci
pitation , la même légèreté à s’engager, le même abus dans les
préliminaires ainfi que dans les fuites de l’engagement, l’égalité
Blême de ce prétendu defojrdrç produiroit-elle.entre nous'im e
�%2i
égalité de ' droits ? Cette enfant qui réclame un état que la
Juftice lui d o it, ne fera-t-elle comptée pour rien dans fa ba
lance ?
V ou s
la
voyez,
M
essieurs
, cette enfant déplorable, dont
la bouche ne peut encore exprimer de vœ u x , & dont la fituation n’en eft que plus touchante. Les larmes de fa mere ont
_été fon premier aliment : la honte de fon pere a flétri fes pre-,
miers regards ; faudra-t-il qu’à Imitant où elle commencera à
fe con n oître, dans ces momens où le cœ ur eSî plus fcnfible
en raifon de fon inexpérience, elle ne trouve autour d’elle
que des traces du défefpoir de l’une , & du crime de l’autre ?
La considération des enfans eft toujours ce qui vous a déter
minés dans des C au fes de la nature de celle-ci
on vous a vus'
pluiïeurs fois donner les effets civils à des mariages dont vous
biffiez la validité douteufe. Ainii le 12 Mai 1633 , par A rrêt
rapporté au Journal des A u d ien ces, fur les conclusions de
M . l’A vocat Général Bignon , fans vous e x p liq u e r fur la na
ture d’un mariage évidemment n u l v o u s avez cru devoir
déclarer les enfans légitimes* AinSi le 25 Mars 1709 , fur les.
conclusions de M . l’A vocat Général le Nain , vous avez pro
noncé de même dans un cas encore plus défavorable : il s’agiffoit d’une alliance contra£ïée par un homme condamné à
mort ; il n’avoit point purgé fa contumace ; il s’étoit marié
dans les cinq ans ; fa femme ignoroit fa condamnation ; fes
enfans fe diieient légitimes : vous les avez jugés tels, & le P u
blic éclairé a applaudi à votre décision.
Pouvez-vous craindre qu’il en foit autrement ici , Si vous
montrez en notre faveur une indulgence q u i , d’après to u t ce
qui précédé, ne fera réellement qu’une juftice? A h ! croyez-en
ce co n co u rs, ces acclamations qui ne partent ni d’une vaine
curioiite , ni d’un tranfport frivole dont nous rougirions d’être
�96
les objets. N o n ,
M essieu rs
, cet intérêt général dont le
Public honore la Caufe de la Dem oifeile Cam p & de fa fille,
a pour principe l’amour de l’honneur & de l’équité ; & cet
accord unanime, j’ofe le dire , eft une époque glorieufe pour
la Nation.
Dans la dépravation commune des m œ urs, l’innocence &
la vertu ont donc encore des .partifans; cette ardeur généreufe
qui a toujours fignalé les François, s’eft réveillée au bruit
d’un crime nouveau qui fembloit fouiller leur gloire. Si cette
ardeur eft devenue plus vive à l’afpect des perfonnes intéreffée s , fi les charmes attendriffans de la mere, fi les grâces
n aiffantes de l’enfant ont donné lieu à leurs protecteurs, c’eftà-dire à toute la France , de fe réjouir de -voir leur affection
,fi bien placée, fera-ce à vos yeux une raifon pour être en
garde contre un penchant que tant de vertu juftifie ? C e
triomphe journalier fera-t-il flétri par votre Arrêt ? Et vou
driez-vous qu’on dît un jou r, la Nation entiere follicitoit pour
elles , & le premier Tribunal de la Nation les a condamnées ?
Non , M e s s i e u r s , vous ne réfifterez point à ce concert
univerfel qui vous preffe au nom de l’honneur & de l’intérêt
commun de la Patrie. Il y a eu un premier mariage , ce fait
n’eft point douteux ; le fécond mariage eft nul, ce point eft
encore démontré, & vous voyez qu’on n’a pas même effayé
de combattre les preuves que j’en ai données. C ’eft donc au
premier mariage qu’il faut revenir , c’eft le feul qu’il vous foit
permis de confacrer.
Monfieur D E V A U C R E S S O N , Avocat Général.
Me L IN G U E T ,
...................*""
Avocat.
............................
D e L'Impr. de L. C E L L O T , rue Dauphine. 1772..
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Bombelles, Antoinette-Louise-Angélique-Charlotte. 1772]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vaucresson
Linguet
Subject
The topic of the resource
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
validité de mariage contestée pour minorité
Protestants
vices de forme
suspicion de bigamie
diffusion du factum
opinion publique
rapt de séduction
défaut d'actes de mariage
faux
témoins
Description
An account of the resource
Titre complet : Réplique pour demoiselle Antoinette-Louise-Angélique-Charlotte de Bombelles, procédant sous l'autorité d'Antoine Maugis, son tuteur ad hoc. Contre Charles-Frédéric Vicomte de Bombelles, et demoiselle Marie-Françoise de Carvoisin. En présence de demoiselle Marthe Camp, Vicomtesse de Bombelles.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de L. Cellot (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1772
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
96 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0804
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0801
BCU_Factums_G0802
BCU_Factums_G0803
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53053/BCU_Factums_G0804.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montauban (82121)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
défaut d'actes de mariage
diffusion du factum
Faux
opinion publique
Protestants
Rapt de séduction
suspicion de bigamie
témoins
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
validité de mariage contestée pour minorité
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53052/BCU_Factums_G0803.pdf
7d06dfa04ef72c72b7f8eeba89d40036
PDF Text
Text
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} Sous-A id e M ajor d’ in fa n terie,
Chevalier-N ovice de l 'O rdre R o y a l & Militaire de Saint
L azare, In tim é, D éfendeur & Demandeur.
C O N T R E
«
Demoifelle Marthe C a m p , Fille majeure,
-v - ^
/ ^ /• '
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»*»**
^
Appelante comme d’ abus , 6' JDéfendereffe
E t contre Antoine M A U G IS , Tuteur ad hoc d ’ AntoinetteLouife-Angélique-Charlotte
D E
B
o m b e l l e s
, auffi
Appelant & Demandeur.
d e
C
a r v o i s i n
A
Epoufe dudit Vicomte de Bombelles.
b e lle s ,
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E t de Dame Magdelainc-Claudine-Charlottc-Renée d e B o m
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En préference de Dame. M arie-Françoife
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Veuve de M efffire Antoine H e n n e t , Lieutenant-
Colonel d ’Infanterie , Intervenante.
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L o r fque la fcène s’ eft ouverte dernièrement pour attaquer
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fous vos yeux le V ico m te de B om belles, je n’ai pû voir fans,
étonnement que la principale A & rice qui l’avoit dénoncé
comme Bigame à toute la T e r r e , & qui avoit eu le courage
de l’accufcr de'libertinage o u tré, de féduiflion, d’apoitafie,
de trahifon, de lâcheté & de tous les forfaits im aginables,,
refuiat de com m encer 1’attaque.après l’ y avoir appelle; qu’elle
fe fut môme condamnée au filen ce, dans le feul lieu où il lui
convcnoit de parler, & qu’ elle n’y parut que pour y faire un
coup de th eltre, & immoler encore une fois le V icom te de
Bombelles à la haine publique , par l’exhibition maligne d’ un,
enfant qu’il ne ceiTe de lui redemander.
M ’ c Îl-cg pas encore un phénomene tout a fait nouveau ,
que cet enfont qui ne foupçonne pas même les diftindion^
introduites par les L oix dans l'état des perfonnes, qui ne fçait:
rien de ce qui a précédé fa naiflance , & qui n’ a connu fon
pere pour la premiere fois que par le baifer & les larmes qu’il
en a reçu s, en fe rencontrant avec lui dans ce champ de
bataille, vienne foutenir l’ état de fa m ere, elle préfente ,
tandis qu’ elle n’ ofe plus rien demander pour elle-meme.
Cependant, il faut l’avou er, après ce que la DemoifeJle
Cam p s’eft permis contre le V ico m te de Bombelles , il eût
été bien plus étrange de la v o ir , ou revenir fur £bs pas pour
revendiquer comm e m ari, un jeune homme qu’elle a couvert
d ’opprobre : ou periiiter dans l’horrible defiein de le livrer
com m e Bigame au iupplice honteux de ce ilellionnat,
& de
faire déclarer, par le même A rrê t, fon enfant fille légitime
d ’ un pere infâme !
Si l’impoilibilité d’opter entre ces deux partis Ta réduite
h la néceilïté de fe remplacer par fa fille & de lui remettre
fes intérêts , fa paiîion n’ a rien perdu h ce changement. E lle
�y trouve au-qontraîre deux avantages : le prem ier, d j fauver
par les reticences du refpect filial toutes les injures & les
..calomnies entaifées dans fon L ib e lle , & de biffer douter fi ce
*1 eft pas par pure bienféance qu’elle les a fait fupprimer dans
la Plaidoirie : le fécond, de fe rendre favorable par l’ interpo
sition d’ un être innocent, qui pour être le fruit d’ un amour
illic ite . n’en eft pas moins digne de votre pitié. Je ne trou
verai point à redire à fa dexterité.
Mais ce qui a frappé une partie de fes Auditeurs , & ce qui
m ente en effet laplusiérieufe attention, c’eilq u e perfeverantà
fedire mariée au V icom te de Bombelles, & ayant fait proviiion
d aétes de m ariage, les ayant même fucceflivem ent employés
pour l’enlever à fa véritable époufe & le faire difparoître par
des coups d’autorité, elle failè dire aujourd’hui qu’ elle n’ en a.
p o in t, qu'elle, ne .peut pas en produire , qu’ elle ne le doit pas ;
& qu au lieu d’ailes elle ait recours à de nouveaux expédiens
q u i, en donnant la facilité d’époufer les gens à leur infçu &
malgré e u x , aboutiroient non-feulement a l’ aviliilèment, mais
à l’abolition totale du mariage.
Si elle n’a point d’a&es , elle a donc étrangement trompe
le Public, & l'Europe entiere , a qui elle promettoit ci-devant
d en produire, (a) & qui ne s’ eft prévenue en fa faveur que
fur ce fondement.
^ Elle en a ,
M e s s ie u r s ,
& j’en ai les,expéditions procurées
d après les fienncs. Mais ce font des acles faux. C ’eft ainix
qu elle s’eft acquis l’état de femme , & qu’ elle a jetté le trou
ble & 1 amertume dans le mariage d’ une fille de qualité, inno
cente & vertueufe, qui n’étoit point faite pour entrer en conurrence avec elle.
.
c — __________
^oyez. ce t t e pro m e tte dans la n o t e au bas de la page 6 de I o n M é m o i r e à t o n * '
l u l t e r , c d m o n 111 4“,
A i;
�4
I l eft vrai que le V ico m te de Bombelles qui aimoit éperduement la D em oifelle C a m p , & qui conferveroit encore
pour e lle T e ftim e , il elle ¿voit confervé du refpeét pour la
v é rité , a fait les plus grands efforts pour la faire admettre
dans fa famille ; ôc la naiilànce de leur enfant eft diftinguée
des autres par ce rayon d’honnêteté. Mais il ne lui a jamais
été poiîible de l’époufer.
L e rôle d’époufe trahie & dégradée, qu’on lui fait jouer
depuis fix m ois, eft une intrigue concertée dans le tourbillon
d’ une cabale infenfée, donc je ferai connoître les Chefs. V o u s
v e rre z , M e s s i e u r s , que cette époufe trahie & dégradée n’eft
qu’une fille à qui le befoin d’une ombre de mariage pour cou
vrir les foiblefles de l’amour, a fait imaginer mille ftratagêmes
pour paroître m ariée, .& à qui le dépit de ne l’être pas a fait adopter le projet d’une vengeance inouic. E lle n’a tourné
contre le V ico m te deBombelles la prétention d’ être fa fem me,
que pour le punir de ce qu’il a , par fon mariage a ctu el, irré
vocablement ceiTé d’ être fon Amant!
D ans une affaire qui n’ eft de fa part qu’un jeu cruel de
l’ amour , je n’ai garde de vous porter contr’elle aucune plainte
des calom nies, des faux & des attentats, dont il a prefque été
la vi&ime. Quand elle en feroit l’auteur, on contrarie même
par les unions furtives une efpece d’iden tité, & l’on ne peut,
fans retenir une partie de l’ opp rob re, deshonorer ceux avec
qui l’ on a une fois mêlé fon iang.
Je ne veux que défendre de fon inimitié un jeune homme
qui n’a pû fe défendre de fa bienveillance & de fes charmes.
En repouiTant fes attaques , je me fouviendrai qu’elle lui a été
chcre ; & quoique le combat.i'oit a tro ce , je tâcherai qu’elle
cil forte fans bleifure. Je ménagerai mes forces de façon à
�1
lui faire tomber ion mafque , fans la frapper trop rudement.
-
Quand jeur ancienne liaifon ne m’impoferoit pas cette mo
dération , je m’en ferois un devoir pour l’enfant qui leur doit
fon exiftence. I l ne faut pas que cet enfant ait à rougir un
jo u r , ni de fon p e r e , ni de fa mere.
C ’eft aux auteurs de l’intrigue que doit en refter toute la
honte. Ci-devant ils fe propofoient de fupprimer la perfonne
du V ico m te de Bombeî^es.
L ’appel comme d’abus qu’ils ont fubftitué à leurs' vaines
tentatives auprès du M iniftere, & qu’ ils ont repris après avoir
pareillement échoué par deux fois au Tribunal de la NobleiTe,
a pour objet de lui enlever la D em oifelle de Carvoifin fon
epoufe, qu i, méritant le plus v if attachement par fes qualités
perfonnclles , devient encore plus intereifante pour lui par le
courage même qu’elle a eu de lui refter fidelle dans fa difgrace.
Mais d’un c ô té , le nom d’épouie que poiTede la D em oi
felle de C a rv o ifin , fe rencontre avec un titre autentique. D e
l’autre, la D em oifelle Camp n’ofe plus y prétendre, & ne '
rapporte aucun a&e de mariage ; il n’en faudroit donc pas
davantage pour réprimer fes incurfions.
I l étoit refervé à elle feule , ne pouvant établir fur fon
mariage la légitimité de fon en fan t, de prendre les chofes à
rebours, & de com m encer par foutenir que fon enfant eft
légitime , pour en conclure qu’elle eft mariée.
N ous n’avons garde de diriger nos efforts contre cet en
fant qui n’a point de v o lo n té, & dont elle règle la langue &
les mouvemens. S’il ne veut qu’ un éta t, un nom & un pere
certain, nous avons prévenu fes d é firs, il a tout ce qu’ il
demande. L e V ico m te de Bombelles a coniigné de lui-même
( il y a long-tems. ) dans les regiftres de la C o u r fa. reconnoii-
�6
fance oc ics offres de légitimation (a). P ar-là il lui donne ce
qu ’il a de plus eftim able, fes parens, avec un nom connu en
France depuis cinq cens ans. I l prie même la C ou r de lui ac
corder tout ce qu’elle pourra.
L e furplus des demandes hafardées fous Ton nom ne mé
rite aucune attention. L a légitimité originelle des enfans ne
dépend pas de la volonté des peres. I l n’ eft pas plus poffible'
au V icom te de Bombelles de faire que la fille de la D em oi-.
felle Cam p ait été légitime en fiaiiTant, que de lui donner une
autre rrjere.
I l eft d’autant plus abfurde de commettre cet enfant avec
la D am e de B om belles, que non-feulement on ne prouve
point le mariage de la D em oifelle Cam p fa m e re , mais qu’on
n’ofe produire pour elle-même fon propre extrait de Bap
tême.
Je pourrois m ’en tenir-la & conclure dès-k-préfent h ce
que la mere & l’enfant foient déclarés non-recevables dans
leurs prétentions. Mais comme ils font au pouvoir d’autres
M o teu rs, qui fçavent où l’on fabrique des a & e s, & qui en
feront paroître quand il leur p laira, il faut répondre à ces
Adverfaires fecrets.
L e V icom te de Bombelles ne fera point à la D am e fon
époufe, dont le mariage eft autorifé par les deux fam illes,
l’injure de foumettre ce mariage a l’infpe&ion d’ étrangers qui
n ’ont rien h y v o ir , & qui auroient mauvaife grâce à invo
quer des L o ix dont ils foulent aux pieds l’autorité. (b) C ’eft
à la D em oifelle Cam p d’établir fon mariage avant que d’ atta
quer celui des autres.
( d ) Arrct du 5 Mars 1 7 7 1 .
(ß) Non cß audiendus legem invocans qui contra legem facit.
�O r d’ aprcs cc qu'elle a écrit & fait plaider , s’ il y avoit de
fon côté quelque mariage, il feroit nul, & il faudroit en punir
les auteurs.
Mais il n’ y en a p o in t, ôc il faudra peut-être punir les impofrcurs qui ont abufé de fa complaifance.
Elle n’a pas même le miferable avantage d’ avoir le m oindre
reproche à faire au V ico m te de B om belles, & c eft à lui feul
qu’il iied de fe plaindre.^
P R E M I E R E
P A R T I E .
Confcqucnces du prétendu Mariage , s’ il ctoit réel.
Si dans l’état de la nature il y a peu de différence entre le
mariage & le concubinage , il y en a une très-grande dans l’ état
civil.
Tous deux commencent par la tradition m utuelle de foimême. Mais l’un fe form e par le feul concours des volontés ,
qui ne confultent que l’inftinct de lapaffion , & dont les vues
indifférentes fur la propagation de l’efpece fe terminent a la
poiTeffion refpeélive des deux individus.
L ’autre fe form e par l’intervention de l’autorité légitime ,r
qui ajoute a l’union volontaire des deux Contra&ans un lien
extrinfeque plus fort & plus durable. C ’ eft une pollicitation
publique faite entre les mains de ceux qui font prépofés pour
la recevoir , par laquelle chacun des Contra&ans fe charge
envers l’Ê trc Suprême & envers toute la fociété humaine
dès cet inftant & pour toujours,de la perfonne qu’ il s’ attache,..
& du fardeau des enfans que cette union pourra produire.
Tous les peuples du Monde y ont impoié les
c o n d itio n s
�8
les formes qu’ils ont jugé les plus convenables à la concorde
'
des époux , au bien-être de leur poftérité , au repos de leurs
familles , & à l’harmonie de toute la fociété dont les familles
font comme les premiers élémens ; & fuivant le plus ou le
moins d’importance , ils y ont appofé des peines plus ou
moins féveres.
N o s L o ix font te lle s, que la D em oifelle Camp ne gagneroit rien à être mariée comme elle le dit , & que fa famille
pourroit y perdre beaucoup. Sa religion prétendue réfor
mée , dont elle fe fait un m o y e n , ne lui donncroit aucun
privilège , & ’ne l’expoferoit qu’ à de plus grandes rigueurs.
§ . I.
N
u
l
l
i
t
é
.
I l eût p e u t-ê tre mieux valu pour le V ico m te de B om bélles qu’il y eût un mariage , & fçavoir où le prendre : il
y a long-tems qu’ il n’en feroit plus queftion. U n e fille-fans
naiiTance , fans fortune & d’une R eligion décriée n’auroit pu
refter fa femme. Sa famille quoiqu’ en ligne collatérale , in
vitée par nos L oix à venger l’ affront d’ une ii honteufe méfalliance , n’auroit pas héiité h la faire déclarer nulle.
La
D am e Hennct fa tante ne paroît ici que pour l’atteftcr.'
Lui-m êm e y feroit encore recevable. L ’impoifibilité d’en
acquérir plutôt la preuve auroit prorogé fon aftion , & il
ri’auroit pas grande peine à faire prononcer la nullité ; ou
p lu tô t, com m e la nullité eft de plein droit dans les circonftances où fe trouvent les Parties , il n’ auroit eu befoin que
d’ une fimple proteilation pour fe mettre en état de paiTcr k
il’autres nôçes.
i° .
�■M
9
i° . Incapacité de leurs perfonnes.
Ils n’ étoient ni capables d’être unis enlemble par le lien,
conjugal, ni en âge de difpofer d’eux-mêmes.
i° . C e lien , qui dépend des L o ix de l’Etat & de la R e li
gion , ne fçauroit s’adapter aux perfonnes qu’elles réprou
vent.
L ’ un des obftacles le^ plus diriments , c’ eft la difparité de
culte. D ieu lui-même defendoit k fon peuple de donner des
femmes aux In fid eles, & d’en prendre chez eux *. Dans c *m^e.1usfoçialis
le Chriftianifme , le mariage avec un Payen , ou même avec Deut. ch. 7^/3!
un Juif , feroit un crime , & non un contrat.
\
Il ne faut pas faire aux Proteftans l’ injure de les abaifler'
au même rang : ce font nos freres dans le Chriftianifme , &
nos concitoyens dans l’ Etat. S’ils font encore dans la folle
prévention , que l'Efprit-Sainc a retiré de l’ Eglife le dépôt de
la révélation pour le placer dans leurs mains , au moins ne
font-ce pas ces Fanatiques des fiécles précédens , dont toute
la religion confiftoit dans l’horreur de la n o tre , qui , peu
contens de fe confédérer , prenoient les armes pour le fuccès
de leurs opinions , & qui traitant notre Eglife de proftituée ,
nos Souverains Pontifes d’ A n te th rifts, nos Prêtres de P i
rates , & nous-mêmes d’ id o lâ tre s, profanoient ôcravageoient
par le fer , par le feu , par la luxure , temples , autels, &
tout ce que nous avons de plus facré. Mais quoiqu’ il n’ y ait
de proferit que leur do&rine , leur culte , leurs aiTemblées ,
leurs çonfiftoires , leurs temples 6c leurs Miniftres , & que
chacun d’eux,pcrfonnellement conferve fon exiftance légale
& fon aptitude a la plupart des effets civils ; l’averiion fecrette
que la plupart ont pour nous , les remords dont ils femblent
R
•
�M
i
jfo
>
rongés quand ils fe foumettent un inflant à l’ autorité légi
time , l’empreiTement avec lequel ils fe rallient au premier
fignal & pour le plus léger in té rê t, cette tendance perpétuelle
à form er un état dans l’Etat les a fait décheoir de tout emploi,
& même de l’ honneur d’ être admis à nos alliances.
Ils nous en ont donné l’exemple dans les pays où ils domi
nent , & nous n’avons fait qu’ ufer de reprefailles.
- Ils nous ont fourni une raifon déplus dans l’ opinion même
qu’ ils ont du mariage. A u lieu qu’il eft de fon eiïèn ce, dans
notre Eglife , que les deux Contra&ans commencent par fc
remettre dans les mains de l’Ètre Suprême pour s’ accepter
mutuellem ent de fa main , comme un préfent céle ile , & que
* Quodcwjùnxit le nœud de leur union foit l’ ouvrage de D ieu même * le
^
Vlat!** N ovateur audacieux qui les a égarés à fa fuite, l’ a dégradé, en
lui ôtant tout ce qui peut lui concilier la faveur du C iel & le
refpeét de ïa T e r r e , & l’a converti en un marché profane &
fordide , qui s’accomplit com m e les autres par le fimple con
cours des volontés.
A u ili ne s’ eft-on pas contenté pour eux des L o ix de FEglife , qui défendent le mariage avec les H érétiques, fans
l’ annuller : nos L o ix , plus féveres , le déclarent nul avec
e u x , fans qu’il foit befoin de recourir aux Tribunaux pour
en faire prononcer la nullité.
» V oulons ( dit l’ Edit de
» D écem bre 1 6 80 ) qu’à l’avenir nos Sujets de la R eligion
» C atholique, A poftolique & Rom aine ne puiiTent, fous
» quelque prétexte que ce foit , contraéïer mariage, avec
yj ceux de la R eligion prétendue réformée , déclarant tels
» mariages non valablement contractés , & les enfans qui en
» proviendront, illégitimes « .
L*i Déclaration du 18 Juin 1 6 8 ^ vouloit même que les
v
�2?>
II
mariages en contravention à. cette L o i fullènt expiés par la
démolition des Tem ples où ils auroient été célébrés.
L a profcription générale de leur fede,prononcée par l’ Edit
du mois d’ Oét. i G B 5 ,a corroboré la prohibition de s’allier avec
eux. Cette profcription fubiiite toujours ; elle eft: confirmée
par la volonté du Monarque rég n a n t, coniignée dans la D é
claration du 1 4 Mai 1 7 x 4.
» D e tous les grands deiïèins
» ( y eft-il dit ) formésy par notre augufte Bifaïeul dans le
jj cours de fon R e g n e , il n’y en a point que nous ayons plus
» il cœur de fuivre , que celui d’éteindre entièrement l’hé» réiie dans ce R oyaum e. . . .
I l répugné donc que notre
» fang puiife fervir à la perpétuer a .
Q uel que foit le mépris voué par nos L o ix aux P ro teftan s,
nos mœurs en ont pourtant préfervé ceux d’entr’ eux qui ont
le courage d ’être honnêtes , & qui , après avoir apporté dans
la négociation du mariage la bonne foi requife , ne font point
difficulté pour fon accompliiTement de fubir le joug de nos
ufages. O n ferme les yeux fur leur diveriité de croyance en
confidération de leur docilité , & l’ on renverfe pour eux la
barriere qui les féparoit d’avec nous.
Mais elle eit inébranlable pour tout autre , & fur-tout
pour ceux qui n’étant arrivés au mariage que par débauche ,
par intrigue & par fraude , n’auroient pour toute excufe que
le fcrupule injurieux de fe conform er au furplus de la Nation.
L a conjugalité de pareilles gens n’ eft tolérable qu’ entr’e u x ,
& jamais ils ne pourront atteindre jufqu’h nous , tant q u ’ils
perfevéreront dans leur contumace.
L a profeilion même de leur prétendue réform e étant un
obftacle invincible au mariage de la D em oifellc Cam p avec
B ij
'
A
�Ii
le dernier d’entre les Catholiques , fon mariage feroit. nul de
plein droit par l’incapacité de fa perfonne.
Vainem ent auroit-ellc eiTayé de fe rendre capable en lui
faifant changer de religion. N o s L oix obvient à de fi miférables expédients. L ’Edit du mois de Juin 1 6 8 0 , en proro
geant encore pour quelque te m s, & a r e g r e t, la tolérance
de la R eligion prétendue réform ée , défend k tous Sujets
de quelque qualité , condition } âge & fe x e que ce fo it , faifant
profejjion de la Religion Catholique, Apoflolique & Romaine ,
de jamais pajjer de l’ une à l’ autre pour quelque caufe 3 raifon ,
prétexte , ou confidération que ce puiffe être ; & aux Miniftres
cfc les recevoir ; enjoint môme aux Procureurs Généraux d ’y
tenir la main.
L es Edits de Mars 1 6 8 3 , & Février 1 G 8 >5 , renouvel
lent la même défenfe. L e délire d’ une abjuration prohibée ,
fur-tout d’ une abjuration fecrette & démentie au dehors par
toutes les marques de Catholicité , ne feroit donc pas ceilèr
la prohibition d’ époufer ? L ’incapacité primitive de la Dem oifelle Camp n’ en fubftitueroit pas moins ; & par conféquent
fon mariage n’eut été qu’ une vaine cérémonie qui 11’ auroit pû
lier le Vicom te de Bombelles , ni l ’empêcher de difpofer
ailleurs de lui-même au premier changement de volonté ; à
peu près comme une donation faite à une perfonne incapable ,
n’ empêche pas qu’on ne puiife enfuite difpofer au profit d’ une
perfonne capable.
2°. Sa minorité
fe r o it
encore un autre moyen de nullité.
I l n’en eft pas du mariage comme des auçrcs contrats , ou
comme des autres établiUèmens. On 11e inet dans tout autre
qu’ une portion plus ou moins foibîe d’intérêt ; on m et dans
celui-ci fa perfonne toute entière. C ’eft une chaîne indiiTo-
�x3
lubie qu’ on s’impofe pour paiîèr le refte de fes jours avec
une autre perfonne dont il faudra fupporter k l’ avenir tous
les défauts , tous les caprices , toutes les infirmités , toutes
les infortunes.
I l étoit de l’équité , fur-tout dans une affaire de cette im
portance où deux perfonnes vont confondre leurs deftinées ,
de ne pas abandonner la jeuneffe , ni à fa propre imprudence ,
ni aux fuggeftions étrangères : c’eft l’âge des grandes paillons
& des plus déplorables naufrages.
I l étoit bien plus jufte encore de ne pas expofer le repos
& l’honneur des familles a fa témérité.
L e mariage eft la
conilitution d’ une nouvelle famille aux dépens de deux au
tres , dont l’honneur & les intérêts deviennent déformais
communs par cette alliance. I l leur importe d’ être bien afforties , & de reftcr Juges des alliances qui leur convien
nent.
Calvin lui-même , qui femble avoir pris h tâche d’abolir
toute autre autorité, refpe&e du moins celle-ci ; & quoiqu’ il
Semble dans, tout le refte avoir travaillé bien plus au détri
ment , qu’ à la réform e des m œ urs, au moins ne veut-il pas
Nque fa fecïe foit l’écucil de la minorité , ni qu’on y donne
fiabilité aux mariages contractés entre jeunes gens fans la par
ticipation de leurs pareils.
I l impute à l’Eglife Catholique un
ufage & des L o ix contraires , qu’ il traite de Loix très-impics
envers D ieu , & très-injufies envers les hommes ( <2). L ’ impu
tation eft calomnieufe : mais du moins il en rélulte qu’à fon
avis c’eft une injuftice, & même une impiété de maintenir de
pareils mariages.
•
fJ o n f i i ; c ; i l.r g e s fa n x e r u n t partim in D eu m îM inifeftè im picis , partim in hrm ints
2ri,-jui[]imas , qu ales f u n c , ut co m u v ia int r a d o lefien tu lo s parentum in iu fu c o n t r a d i j
Jirma raïajue montant. Inftit. lib. 4 , cap. 19 , n. } 7.
�*4
N o s L o ix y ont p ourvu, & ont voulu que les enfans de
fam ille & les mineurs ne puilcnt contrarier ni mariage , ni
engagement h. ce fujet , fans le confentement des perfonnes
dont ils dépendent. » Si ceux qui voudront fe marier ( dit
îj l’art. 40 du fameux Edit de Blois ) font enfans de fa» mille , ou en la puiilance d’ au tru i, défendons très-étroitement de paifer outre à la célébration defdits mariages ,
s? s’il n’apparoîtdu confentement des peres , m eres, Tuteurs
jj
» ou Curateurs » .
Quand donc l’ un des deux prétendus mariages d’ entre la
D em oifelle Cam p & le V ico m te de B om belles, ou que tous
les deux enfemble feroient véritables , ils ne pourroient être
valables , s’ ils n’ ont été autorifés , ni de Tuteurs , ni de la
fam ille du V icom te.
O r , quoiqu’ aux deux différentes époques de ces prétendus
mariages il fût encore loin de fa m ajorité, qu’ il n’ eût que
vingt ans à la premiere & vingt-un a la fécondé, on ne voit, de
fon cô té , ni dans l'un ni dans l’autre mariage, aucune ombre
ni de T u te u r , ni de famille. L a nullité en feroit donc inévi
table fous cet afpeét.
C e jeune homme n’ eft point de pire condition que tant
d’ autres dont le mariage a été caifé , même après la naiifance
de pluiieurs enfans, & il ne perdroit pas fon honneur pour
avoir ufé d’une reiTource que les L o ix de l’honneur même
accordent h fon âge.
Son mariage feroit encore nul fous tout autre afpeél:.
2°. Défaut de formes.
I l y a deux fortes de folemnités établies pour le mariage ;
les cérémonies religieufes, & les formalités civiles.
�11
Les unes ont pour objet d’ élevcr le mariage au plus haut
degré d’ honneur par tout ce que la R eligion a de plus augufte ; les autres , de mettre tous ceux qui peuvent y avoir
intérêt en état de s’ oppofer à ce qu’il ne fe faiîè rien k leur
préjudice.
Dans tous les fiécles & dans toutes les parties du Monde
civilifé, la R eligion de l’Etat a toujours préiidé aux mariages
des particuliers. L a nô^re , qui ne s’interpofe dans aucun
autre c o n tra t, s’eft réfervé celui-ci : E lle a voulu que la
tradition des deux époux , & le ferment de ne fe plus quitter,
fe fiilent dans fes Tem ples aux pieds de fes A utels , & que
leur union y fût fcelléepar la bénédiction facerdotale ( a ) C e font là les mœurs antiques de la Monarchie Françoife ,
conftatées pour la premiere race par les Capitulaires de la
fécondé ( b ) , & confacrées à. perpétuité dans la troiiiém e par
nos L o ix récentes , notamment par la Déclaration du i <5
Juin 1 6 9 7 , qui veut qu’on ne puiiTe fuppUer par aucun acle
à la bénédiction des Prêtres que /’ Eglife a ( dit-elle )Jî rcligieufement ohfcrvée depuis les premiers (iécles de Jon établijfement.
N os Prêtres font donc les Miniftres eifentiels de nos ma
riages.
( a ■î Aliter lagitimum non ejl csniugium , nifi [acerdotaliter, ut mot «■_/?, bÒiecintar.
vand. cp. 1 . ad Ep. Afr. a ° . p 6 . » . . Matrimonium Ecclefia conciliât, confirmât
-, (’¡¡flirtai bineàiSHô. T e m ili. ai uxor. lib. i . . . & 4. C.onc. Carth. c. 1 3.
. '■. )
7 , c. tOi,. On appelloit Capitulaires les Réplemens qui étoient
oix d Etat &. de l’Eçlife. Celui-ci eft conçu dons les munes termes que la reponfe du
“ape F.vari fie, .
f 1]"a.P cc'a,at' on
Benoît X I V . du 4 Novembre 1741 , qu’on cite pour la Dem oiC.
p
^
contraire. Mais fi elle croit le Pape infaillible, Evarifte l’ctoit
••vjnt Benoit X ( V . au moins connoiiToit-il mieux l'efprit du Fond teur de laKelirion,
ont il a ere contemporain , & fa reponfe étant confirmée par les Conciles & par les
tori'A111165 r ,X ' e^e
Prevaloîr à celle d’un M oderne, qui n’a pû de fa ièule aucotiférèr*1
^¡î^"er
Eideles de la benédiâion nuptia'e qui eft de Droit divin, ni
l’O
r ^0 ' r lrnP:,ft'‘tion iês pouvoirs aux Miniftres protfftsns qui n’ont pa» reçu
runauon canonique , ni ratifier des inipartitions illicites dans leur principe.
�iG
L a préfence
du propre C u ré c il fpécialement recom
mandée par les Conciles & par l’ Edit de Mars 1 6 9 7 , comme
une des J oit limites ejjhitielles ( y e ft-ild it) , & des plus propres
à empêcher les conjonclions malhcureufes qui troublent le repos,
& jlétnjj'ent F honneur des familles , & qui fouvent fo n t encore: plus honteufes par la corruption des mœurs , que par Vinégalité
de la naijfance. « Défendons ( ajoute-t-il ) à. tous Cürés &
» Prêtres de conjoindre en mariage autres perfonnes que
93 leurs vrais & ordinaires Paroiffiens . . . . fi ce n’eft qu’ ils
» en ayent une permiilion fpéciale & par écrit du C u ré des
33 Parties qui con tra& en t, ou de l’Evêque D iocéfain 93 .
L a nécefiité des publications préparatoires eft également
établie & par le vœu général du monde Chrétien que nous
ontf-tranfmis les Conciles , & par les Ordonnances de nos
R o is , notamment par FEdit de Blois , qui fert de fondement
à la Jurifprudence de tout le R oyaum e : L o i d’ autant plus
chereà la N a tio n , qu’elle n’eftpas une de celles qui lui ayent
été impofées par la feule volonté des R ois , mais une L o i
qu’elle a requife elle-même dans la plus nombreufe A ilem blée
de fes Etats généraux , pour fe mettre h. FuniiTon de toute la
T erre qui venoit de s’expliquer par l’organe des Peres du C o n
cile de Trente.
jj P our obvier ( di t Fart. 40 ) aux. abus & inconvéniens
33 qui aviennent des mariages clandeitins , avons ordonné
» que nos Sujets de quelque é t a t , qualité & condition qu’ils
j> loient , ne pourront valablement contracter mariages fans
33 proclamations précédentes de bans , faites par trois jours
9j de fêtes , avec intervale com pétant, dont on ne pourra
93 obtenir difpcnfc , fin on après la première proclamation
yy faite ; après lefqucls bans, feront époufés publiquement « .
La
�17
L a Déclaration du 1 6 N ovem bre 1 6 3 9 , do::née princi
palement en interprétation de cet article , veut » que la proy> clamation des bans foit faite par le C uré de chacune des
)> Parties « .
I l faut avouer néanmoins que le défaut de publications ne
fuffit pas entre majeurs pour opérer la nullité du mariage.
Mais il fuffit entre mineurs ; & toutes fois ( dit Lacom be )
que ces Caufes f<^font préfentées , les Gens du R o i , chargés
de l’ordre public oc de l’efcécution des Ordonnances , fe font
élevés avec force , & ont fait valoir ce m oyen comme vi& o rieux ( a ).
C es L o ix font générales , & n’exceptent perfonne.
A la vérité il ne faut pas aiTujettir , com m e on faifoitautrefois en certains pays ( b ) , ni même admettre aux publications
fie à la bénédiftion nuptiale ufitées entre nous les profanes
qui ne font pas initiés h nos m yfteres , tels que les Juifs &
les Payens. L eu r race avilie ne mérite pas qu’on s’embarraiîe
des folemnités avec lefquelles ils la perpétuent. Mais par-tout
où l’on veut bien admettre les Proteftans à nos cérémonies ,
foit qu’ils contra&ent avec nous , foit qü’ils contra&ent entr’eux , il f a u t , s’ils veulent participera nos avantages , qu’ils
rempliiTent les mêmes conditions : ils n’ont par-devers eux
aucune autorité qui puiile les en difpenfer.
O r il ne paroît pas que ce foit l’ intention , ni de l’ Eglife ,
ni de nos L o ix , qu’on les réduife par des refus de mariage à
un célibat licen tieu x, ou à des conjon&ions illicites. Q uel
qu’ ait été le zele du Légiflateur en aboliifant leur fe£te , il
(a) D iftio n n . de Jurifp. C a n o n , au mot Bans, ic ft. i .
#
Kb ) V . Lfg. Vifigoth. lib. x i , c. 6. En 6^0 les Juifs étoient obligés à faire bénir
leurs mariages dans nos E g life s, à peine du mort.
�18
n’a pu croire que fa parole eût l’effet de changer les cœurs.
Mais convertis ou n o n , en leur ôtant leurs Chefs & leurs A ffemblées , il les a remis dans leur état p rim itif, réunis au
furplus de la Nation , fournis aux mêmes Pafteurs ; & a
voulu , entr’autres chofes , les accoutumer infeniiblement à.
la réunion par l’ uniformité des mariages , qui eft de tous les
liens politiques le plus doux & le plus fort. » Enjoignons
v ( eft - il dit par la Déclaration du i 3 D écem bre 1 G 9 8 )
« aux Sujets réunis d’ obferver dans leurs mariages les folem » ni tés prefcrites par les Canons & par les Ordonnances a .
O n les admet en conféquence dans la plupart des D iocèfes,
& notamment dans celui de Montauban , à la bénédiction
nuptiale , lorfqu’ils s’y préfentent avec le refpeâ: convenable.
I l y en a plus de 40 0 exemples dans la feule V ille de M ontau
ban , patrie-du V ico m te de Bom belles, & de la D em oifelle
Camp.
D ’ailleurs le contrat de mariage de la D em oifelle Cam p
contient à ce fujet une claufe formelle. Elle en a impofé au
Public, quand elle a ci-devant oie dire que, malgré des exem
ples nombreux & l’ufage reçu parmi eux d’ emprunter nos
formes , la droiture de fon pere l’ avoit empêché de fe ré* V o y . M ém o’ re
à confulter, page
y-
foudre à cette fauife apparence de Catholicité *.
Elle en impofe encore à p réfen t, quand elle fc vante d’ a
voir mieux aimé paroître aveuglée par une erreur héréditaire,
* V o y . Plaid,
pag. 14.
que de fq biffer un inftant foupçonner d’ impofturc *.
V o ic i ce que porte le contrat non-feulement figné d’elle ,,
de fon pere & de fes proch es, mais difté par eux au N otaire
étranger qu’ils avoient fait venir fccretem cnt : Les Pairies ( y
eft-il dit ) fou s réciproque Jlipulatlon & ' acceptation font con
venues qu’ entre ledit Mejfire de Bombelles & ladite D anoifdU.
�Camp , il fera fa it & accompli mariage , qui fera edebre fuivant
les Loix & formalités du Royaume.
N ’ eût-il été parlé que de célébration , l’on ne pourroit
1 entendre des Proteftans , qui n’en ont point. I l n’y a rien
de ii contraire à la célébration qu’une bénédiétion au défert.
L e defert eft un lieu à l’écart , non fréquenté du P ublic , &
même dérobé à fes regards. L a célébration fuppofe au con
traire un lieu ouvert K topt le monde & fréquenté par la m ul
titude ; elle annonce de plus un a£te public ôc des Témoins
légitimes.
Mais la claufe ne s’arrête pas la ; elle ne laiile aucune am
biguité. Q jii fera célébré (dit-elie ) fuivant les Loix & forma
lités du Royaume ; c’eft-a-dire , fuivant le rit catholique ,
après publications , & clans l’ Eglife paroiiliale de l’un ou de
1 autre des Contraéhms.
O r il eft prouvé parles certificats des Pafteurs compétansr,
& avoué par la Dem oifelie Cam p , qu’il n’y a eu ni publica
tion de bans , foità Saint-Orem s de V ille-B ourbon , Paroiile
fur laquelle demeuroit fa famille , foit h. Saint-Jacques de
Montauban , ParoiiTe du V ico m te de Bombelles , ni célé
bration de mariage dans aucune des deux ParoiiTes , ni permiflion de leurs Curés ou de leur Evêque d’aller fe marier
ailleurs. Quand donc elle perfiileroit 'a fe décorer, comme
ci-devant , du mariage qu’elle plaçoit dans la ParoiiTe de S.
Simeon de Bordeaux, ce mariage étranger ne-pourroit lui
Servir de rien.
Quand elle y fubftitueroit un mariage au défert , ce ne
icroit qu’ une nullité de plus. Il n’ y a .d e Miniftres capables
c^c rccevoir le co:ifentement des Parties & de leur impartir
la bénédiction nuptiale , que ceux qui tiennent leurs pouvoirs
C ij
�20
de la PuiiTance fpirituelle & de la Puiiîance temporelle. L es
Miniftres Proteftans n’ont ni m iilion, ni cara&ere ; leur miniftere eft même réprouvé , & fujet à la peine de m ort par
les L o ix de l’Etat. I l y auroit donc de l’ abfurdité a vouloir
faire protéger leurs impartitions facrileges par un Tribunal où
l’on ne monte qu’ après avoir juré de les punir.
On fçait quelle eft la Jurifprudence des Parlemens qui
ont des Proteftans dans leur reiTort, & notamment celle du
Parlem ent de Touloufe , dans le reilort duquel eft la V ille
de Montauban , & auquel il auroit appartenu de prononcer
fur le mariage de la D em oifelle Cam p , s’il avoit exifté. Il
n’a jamais accordé le nom , le rang , les honneurs & les pré
rogatives du mariage h ces aiTortimens bizarres bénis au défert
par des P iofcrits que nos L o ix ne nous préfentent qu’ avec
l ’image funefte d’ une corde au col ; & fon A rrêt du 2 4 Mai
1 7 6 4 , contre lequel toute la Se&e s’ étoit pourvue au Conf e il, eft demeuré dans, fa force , malgré le crédit dont elle
jouiiToit alors ( a ) .
Si la difparité de culte , fi la minorité , fi le défaut de
publications . il l’aficétaition d’éviter Tuteurs , Parens & Pafteurs légitim es, font tels , que chacun de ces vices fuffit pour
opérer la nullité d’un mariage : de quoi pourroit fervir à la
D em oifelle Cam p un mariage qui les raÎTembleroit tous ?
Non-feulement fa réalité lui feroit inutile , mais il lui
importe , <Sc.à toute fa-famille
dule pour y ajouter foi.
qu’on ne foit pas aflez cré
L e Miniftere public & la C o u r ne
pourroient pas en fouffrir le fcandalc ,. ni fe difpenfer de
févir contre les auteurs.
( 1 ) Le l'aileuie.it d<; ,>ronob'c ne pfrin< t pas meme la Lo-hauitstion ,
traite
com m ? Concnl)MVi;rcs ¡Ci otftin is qui fc marient de la forte. Y o y . Arréti des i A vril
1746 , & 7 Juin 174 ?. Cod. matrim.-
�y
§.
IL
y
D
é
l
i t
.
L es L o ix ont pris foin ( dit la D éclaration du 22 N o
vem bre 1 7 3 0 ) de caraéèérifer le genre de crime qu’elles
ont appelle rapt de féduclion. C ’eft ( ajoute-t-elle ) par la cor
ruption des mœurs f l’inégalité des conditions & le défaut
d’ autorifation qu’il fe caraétérife. Mais la marque la plus demonftrative , c’eft lorfqu’entre deux familles il y a ignorance
d’un côté , & obfeifion de l’ autre,
O n connoît la févérité de nos L o ix contre ceux qui font
contra&er des mariages aux mineurs , h. l’ infçu de leurs fa
milles. 35 V ou lons (d it l’Ordonnance de Blois', art. 4.2) que
ceux qui fe trouveront avoir fuborné fils ou filles mineurs
» de 2 ^ ans , fous prétexte de mariage , fans le gré , fçu ,
» vouloir &. confentement exprès des peres & meres , ou
jj
» desTuteurs , foier.t punis de m ort, fans efpérance de grâce
» & de pardon. ; . ; & pareillement feront punis extraordi>5 nairement tous ceux qui auront participé au rapt en aucune
53 maniéré que ce foit « .
L a Déclaration du 26 N ovem bre 1 6 3 9 s’éleve fpécialement contre l’efpece de féduétion , qui trouble le repos , &
flétrit l’honneur des familles par des alliances inégales. i> Elle
îî
enjoint très expreiTément aux Procureurs Généraux 6c h.
35 leurs Subftitùts de faire toutes les pourfuites néceflaires
» contre les ravifleurs & leurs complices , nonobftant qu’il
)j 11 y eût plainte de Partie civile ; & aux Juges, de punir les
x> coupables de peine de mort , fans que cette peine puiiTe
, 53 être modérée. E t afin que chacun rt^connoiin^ajoute-t’ellc)
�22
» combien nous déteftons toutes fortes de Rapts , défendons
» très-exprefTément aux Princes de nous faire inftance pour
v accorder des Lettres , & aux Juges , d’ y avoir égard. «
» E t comme lafubornation (e ft-il dit encore dans la D é » claration de 1 7 3 o ) peut venir également de l’ un ou de
» l’autre côté , & que celle qui vient de la part du fexe le
» plus foible eft fouvent la plus dangereufb , les L o ix n’ont
» mis aucune diflindion à cet égard ent;re les fils & les filles,
jj & elles les ont également aiTujettis à la peine de m o r t ,
i) félon que les uns ou les autres feroient convaincus d’être
» les auteurs de la fubornation c< .
L e contrat de mariage qu’on a fait foufcrire au V ico m te
de Bom bdles le 2 9 Janvier 1 7 6 6 , n’ annonce que trop la
fédu&ion la plus criminelle , & le côté d’où elle procède.
L ’âge & la qualité des Parties , le lieu , le tems où il s’ eft
paiïe , la qualité du N otaire qui l’a reçu , & celles des perfonnes qui s’y font trouvées , tout eft démonftratif.
Quoique la Déclaration de 1 6 3 9 exige que les articles
de mariage entre mineurs foient arrêtés en'préfence de quatre
proches de l’une <Sc de l’autre Partie , on voit ici d’un côté ,
jufques dans le fein de fa famille & de fa patrie , un mineur
qui n’avoit pas encore alors 21 ans , tiré de defTous l’aîle de
fon T u teu r, fouftrait à une tante qui lui tenoit lieu de mere ,
h fes fœurs , à tous fes autres parer s , à tous fes amis , em
barqué toutfcul au milieu d’ une troupe de gens que fes parens
n’ ont jamais vu ; & de l’autre , une fille de 24 ans , affiftée
de fon pere , de fon oncle *, & de pluficurs amis de fa famille.
On y voit tous les Notaires de la V ille mis h l’é c a r t, & h
leur place un N otaire de campagne , venu exprès d’ une Jurifdi&ion étrangère ponr tromper mieux la vigilance du T u
teur & de la D am e Hennet.
�23
C 'e ft dans unFauxbourg , & chez l’ oncle de la Dem oifello
Camp que fe tient l’ ailemblée , & c’eft dans la débauche noc ■
turne d’un fouper que le N otaire de M ontclar en Q uercy ,
déguifé en {impie convive , fait figner aveuglément a ce jeune
homme , deilitué de con feil, la promeffe de faire entrer dans
fa famille une perfonne dont la naiifance & la fortune ne
pouvoient lui convenir , & qui , par le foin même de fe ca
cher , avoue tacitement q u elle auroit été rcfufée.
Fut-il jam.iis rien de fi. contraire aux bonnes mœurs ? efl>
ce ainii que l’ on négocie les mariages ? Q ue tout le monde
s’ interroge. E ft-il un fcul homme , foit parmi les gens de
qualité j foit dans la plus mince Bourgeoifie , qui trouvât bon
que l’on prît fes enfans dans de femblables pièges ? E ft il une
duppe qui n’eût bonne grâce h. s’en plaindre & h s’en retirer ?•
Si donc il étoit vrai que ce contrat de mariage eût été fuivî
de bénédiction nuptiale , fi l’on pouvoit ajouter foi aux
propos inconfidérés de la Dem oifello C a m p , qui vient s’ aceufer elle & ies parens d’avoir enlevé de nos ParoiiTes dans
leur defert un mineur né de parens Catholiques , pour le lie r,
à l’infçu d e T u .e u r , de parens & d’ amis , pnjr un mariage
facnlege &c clandeilin , ils n’en feroient pas quittes pour la
nullité de cette abfurde cérémonie ; il faudroit leur faire
expier l’attentat commis fur les droits de l’E g life , fur la li
berté de ce jeune homme & fur l’honneur d’une fam ille d is
tinguée , qui n’ avoit pas mérité que perfonne lui fît la m or
tification de vouloir s’y gliflèr furtivement.
Elle ne feroit point reçue à dire contre un jeune homme
aveuglé par l’am our,qu’ils ont compté fur fon honnêteté,dans
une affaire où ils bleifoient eux-mêmes de fang-froid les pre
miers principes de 1 honnêteté..
�24
I l ne ferviroit de rien d’excufer l’obmiiïïon des bienféances
& des formalités par l’apoftaile & 1’aviliifement qu’elle a
ci-devant fuppofé dans la perfonne du V ico m te de Bombelles.
C ette circonftance ne feroit qu’aggraver la féduction fouifertc
par ce jeune homme. C e feroit un rapt fait tout à la fois à fa
famille & à fa religion , & cette double féductionne rendroit
que plus irrémiifible la peine encourue par feS Sédudeurs.
Les Edits qui défendent de recevoir aucun Catholique à
la profeilion de la prétendue réforme , font tous antérieurs
à la profcription générale de la Sede. L e Calvinifm e avoic
encore alors la coniiftence que lui avoit donnée l’Edft de
Nantes. Cependant la réception d’ un Transfuge étoit dès-lors
un crime (i grave , qu’il emportoit interdidion pour jamais
de l’ exercice de cette religion & démolition de fes prêches
dans le lieu du délit, &
contre fes Miniftre amende hono
rable , banniiTement perpétuel hors du R oyau m e , & confïfcation de tous leurs biens ; ce qui a été depuis converti en
peine de m ort par la D éclaration du i 4 Mai 1 7 2 4 .
Ordonnons ( dit l ’art. 2 ) que tous les Prédicans qui
» auront fait fo n d io n s , foient punis de mort. Défendons à
» tous nos Sujets d’avoir diredem ent ou indiredem ent aucun com m erce avec eux
à peine contre les hommes de
v galcres à perpétuité ; & contre les femmes , d’ être rafées,
v & enfermées pour le refte de leurs jo u rs, & de confifcan tion des biens de? uns & des autres « . Si la plus fimple
fondion , fi le plus fimple commerce entr’ eux font punis de
la forte , comment p un iroiton des fondions & des intrigues
tendantes à féduire un Catholique ?
Loin que le mariage foit ouvert à la propagation du C a l
vinifme , la rigueur de cette L o i ne feroit au contraire que
pl u
�2<
plu3 inflexible contre quiconque , pour fignaler fes con
quêtes , choiiirôit le plus important de tous les contrats.
Cum uler encore Hi-deiTus le rapt d’ un m ineur, abufer
d’ un moment d’ yvreiTe & d’enchantement pour le précipiter,
à Finfçu d’une famille refpeétable , dans l’ignominie d’ un ma
riage impie & mal aiTorti, ne feroit-ce pas la plus abomina
ble de toutes les fédu&ions ?
*
Non-feulem ent il n’y ^uroit pour lui aucune obligation de
réhabiliter , mais toute ratification poftérieure de fon pré
tendu mariage pur lui-même , ou par les parens, feroit inutile :
la fédu£tion ne fe couvre pas. L a peine de m ort efl: prononcée par PEdit de Blôis , nonobjlant tout confcntenient que
les mineurs pourraient alléguer par après avoir donné au rapt}
lors d ’icelui, ou auparavant. L a Déclaration de 1 6 3 9 veut
que cette peine demeure encourue , nonobjlant le confenternent qui pourroit intervenir puis après de la part des peres ,
meres , Tuteurs & Curateurs *.
* Voy. dans'
L a D em oifelle Cam p ne gagneroit donc rien au mariage
&
dont elle fait tant de bruit : ce feroit au contraire s’expofer dîins ^emfart au
'
m
mot tia.pt , celui
elle-même & toute fa famille à la rigueur de nos L o ix , que du m Juili.1717.
d’infifter plus long-tems dans cette allégation.
•
O n prendroit même pour infulte à. Juftice l’ acharnement
avec lequel cette famille fe préfenteroit pour demander la
récompenfe de fon crime & la reilitution de fa proye.
Mais ils ne font point fi coupables que la D em oifelle Cam p
ou fes Confeils voudroient le faire croire. O n va démontrer
que la fédu&ion n’a point été confom m ée, & que fon mariage
n’eil qu’ une miférable impofture. Si l’ on a le défagrément
qu il faille confondre fes menfonges , au moins aura-t-on la
farisfaition de iàuver fa perfonne,
D
�160
ié
S E C O N D E
P A R T I E .
Faujfcté du mariage & gravité de Vimpojiurc.
. On nes’ efl: tant étendu fur la nullité & fu ries autres vices
du prétendu m ariage, que pour faire fentir qu’ en le fuppofant réel , il n’y auroit du côté du V icom te de Bombelles
aucun intérêt de le nier , & que de l’autre la D em oifelle
Cam p & fes Complices ne feroient pas il hardis que de le
foutenir. Ils ne
le
foutiennent, que parce qu’ une fille irritée
contre fon A m ant rifque moins à le calomnier publiquem ent
en majorité , qu’ à l’époufer clandestinement en minorité.
D ans le doute , entre la défertion d’ un mariage réel & la:
fimulation d’ un mariage qui n’exiite pas , il feroit encore
plus tolérable d’en laiiTer rompre la chaîne à ceux qui ne
la peuvent porter , que de la faire porter h. ceux qui ne fe
la font point impofée. Mais il ne peut plus y avoir de doute en
cette matiere.
,
^
L es L o ix euiTent été fort imparfaites , fi elles n’a v o ie n t.
réglé que les conditions & les formes du mariage. Il fa llo ir,
auffi en déterminer les preuves. L e bon fens ne permet pas
d’abandonner h la licence des conjeétures , ni à la foi d’ au
trui , même de Citoyens connus & d’ une réputation entiere ,
beaucoup moins h la foi de gens inconnus ou proferits , lef o r t , l’état & l’honneur de qui que ce T o it, ni par con féquent le mariage d’ou dépend 1 état & 1 honneur de plufieurs
perfonnes.
* Chapitre
4*
Juftinien nous apprend par fa novelle 7 4 , * que faute
de cette attention l’Empire fe trouva de ion^tems plein de
troubles occafionncs par des fuppofitions de mariages. I l n’ y
�17
a ( dit-il ) point de nom flateur que la folie de l’ amour ne
faiîb prodiguer à. l’ objet aimé. A v e c des Tém oins on en iaifoit
' une affaire férieufe.
Sa novelle a pour objet de remedier à cet abus. Elle in
troduit en conféquence pour les perfonnes de qualité , &
pour les Citoyens du fécond ordre , deux genres de preuves
littérales, & déclare qu’on ne regardera plus à l’avenir comme
mariage toute union qui ne fera munie de l’ une ou de l’ autre
de ces preuves.
N ous avons imité Juilinien. N ous avons même encore
plus rétréci la fphere de la preuve teftimoniale. N o s O rdon
nances la rejettent en toutes conventions de quelque im
portance , & veulent au-delà de 10 0 livres des a£tes fous
leing p riv é , ou des atteilations d’ Officiers publics qu’ elles
aient prépofés à. cet effet.
Elles portent bien plus loin la précaution pour les a&es
d ’ une auffi grande importance que le font les mariages.
» Pour pouvoir ( dit l’Edit de Blois,article 40 ) témoigner la
îj
form e qui aura été obfervée ès mariages , y ailiiieront
» quatre perfonnes dignes de foi pour le moins , d o n t1fera
» fait regiflre.
L ’ Ordonnance de 1 6 6 7 , titre z o , s’ explique avec encore
plus de précifion : » Les preuves du mariage ( dit l’ art. 7 }
» feront reçues par des regiitres en bonne forme.
» Les ades de mariage ( ajoute l’ article 1 0 ) feront écrits
» & fignés par les perfonnes m ariées, & par quatre de ceux
"»> qui y auront affilié . . • C ’ eft ainfi que fe prouve l’ étac
des perfonnes.
U faut néanmoins diilingucr entre l’ état des peres &
h
D ij
�28
meres vivans , & l’état de leurs enfans, après leur décès..
Chacun n’ eft tenu de fçavoir que ce qui eft de fon fait. U n
enfant peut ignorer en quel lieu fon pere & fa mere ont été
mariés. A lors c’eft la poifeifion d’ état qui décide ; furtout
s’ils ont été mariés dans un Pays où il n ’y ait point de re
giftres. L ’article 1 4 permet en ce cas-là de prouver d’ abord
le défaut de regiftres : » Si les regiftres font perdus ou
» qu’il n’y en ait jamais e û , la preuve en fera reçue , tant par
» titre que par Témoins.
C ette preuve faite : » Les mariages & Baptêmes pourront
» ( ajoute-t-il ) être juftifiés tant par les regiftres ou papiers
* V o r le roccs
verbal de l ’ O rd.
1667*
domeftiques des pcres & meres décédés , que par Témoins
» fau f h. la Partie de vérifier le contraire. *
W
L ’ A rrê t du Parlem ent de T o u lo u fed u 9 Juillet 1 7 7 0 ,
ne regarde non plus que les enfans de pcres & meres décé
dés , qui ont vécu comme légitimes époux , & qui ont été
reconnus pour tels , Joit dans leurs fam illes. , f o it dans le
public.
■ Mais quand il s’ agit,com m e ici,de perfonnes vivantes dont
l’une prétend avoir époufé l’ autre , nos L o ix n e connoiilent &
n’admetent que des a&es de mariage fignés des deux Parties
& datés du lieu , & du jour où s’ eft faite la célébration : tout
autre a&e eft inutile.
O n n’eft pas marié pour avoir figné un contrat de ma-
fJ ïu ïfÎ z tr b Z riaSc - * }C elui qu’on a faic f°ufcrire au V icom te de Bom niumx ft’,d ed o n a t. b elles, n’eft point une de ces déclarations par lcfquelles les
' iU
deux Contra&ans fe prennent dès-à-préfent pour mari &
femme ; ce n’eft qu’une promeife de mariage qui fera fa it
& accompli à la premiers requifition de Vune des Parties. P û telle ferieufe , elle ne prouve rien. Tous fcs jours il arrive
�t& h
qu’on change de volonté , & qu’ on fe quitte au m om ent de
conclure.
U n teftam ent, des-lettres ou d’ autres a£tes prouvent en
core. moins. O n ne s’époufe point par teftament. C elui du
V ico m te de Bombelles ne contient qu’ une qualification de
chere époufe. O r , il ne s’ agit pas de fçavoir s’il l’a traitée d’é—
poufe , mais ii elle l’a'été.
Ses lettres dont on ^ recueilli ii précieufem ent toutes
les expreflions , ne laiflent appercevoir qu’un déiir ardent
de l’époufer , & une anticipation des qualités d’ é p o u x , en
attendant l’opportunité de le devenir. Mais on n’y trouve
pas* un feul mot qui annonce raccom pliflem ent du mariage
projetté.
L a plus apparente de toutes , celle du 2 1 Mai 1 7 6 7 , où
ü fait mention de Mademoifelle de L . dont il invoquoit la
médiation , eft relative au contrat de mariage. C e contrat
paffé avec.tant d’indécence , a l ’infçu de toute la fam ille, &
emporté par un N otaire étranger , étoit un m yftere pénible
hi reveler. Je la prie bien inflament ( dit-il ) d'adoucir Madame
Hennet, & de lui dire la chofe tout au long,. E t .comme la
m odicité de la dot pouvoit nuire h. la négociation , je fuis
bienaife de te prévenir ( ajoute-t-il ) de ne pas dire que ton pere
ne t’ a donné que 8000 livres .
. . . il faudra grojfir de
beaucoup l ’ objet, & faire parade.de groffes efperances de tes
parens.
Celles des 3 0 - Avri l & 2 7 Septembre de la même an née , annoncent combien elle fe déiioit de la legereté de fon.
Am ant dont elle avoit déjà fait l’ expérience. T u as tort ( lui
écrit-il ) de me recommander que l’ abfence ne produife pas le
même ejjet que l ’ année demiere . .. : connais mieux mes f e 1*
�L\
3°
timens pour to i, & rends juftice à leurfiabilité. Ils fo n t à F abri
des révolutions du tcms. Crois que difficilement on fe détacheroit d ’ un objet comme toi.
N o n feulement on ne trouve dans tout ce qu’ elle a publié
aucun veftige de bénédi&ion nuptiale ; mais, en y voit clai
rement qu’il rapporte l’ origine & la coniiitance de fes liens
uniquement à leur contrat de mariage j & à l’ enfant qu’ ils
ont eû après leur réconciliation : f i vous rdavic^ ( dit-il par fa
lettre du 3 Mars 1 7 6 9 ) que ma Jimple parole pour Vinviola
bilité de mon ferm en t, ce contrat feroit auffi facré que celui qui
cfl une preuve incontefiable des droits que vous aure^furm oi,
& c. . . . Ces liens ( ajoute-t-il par celle du 2 ^ Mars 1 7 7 0 )
n’ ont befoin d ’ autre, garant que le fr u it précieux que tu as porté
dans ton fein.
L ’objet même de ces lettres , qui eft de la tranquilifer ,
annonce qu’ils étoient encore en
1769
&
7 0 dans les
ternies d’une ilmple expe& ative, dont elle craignoit l’ évanouiffement par 1*événement de la condition qu’ il y a perpétuelle
ment appofée de ne paiTer outre à la célébration qu’après avoir
obtenu l’ agrément de fa famille,
C ’eft apparemment pour donner plus d’importance à de
pareils a&es , qu’elle l’ accufoit ci-d evan t, d ’avoir défavoui
pour la deshonorer , des acles fg n és de fa main. C e font d’ un
feul coup deux calomnies. I l n’ a ni cherché à la déshonorer,
ni défavoué aucun des aéles ci-deiïjs. Loin de les defavouer ,
il en fera tout à l'heure ufage pour là convaincre d’impofture.
T o u t ce qu’il prétend quant h p réfen t, c’efl: qu’ ils peuvent
bien prouver une fimulation de m ariage, mais ne prouveront
jamais un mariage réel.
JEn un m o t , dans tout Payjs où l’on tient reg'ftre ces ma-.
�31
riages, & où les regiftres n’ont péri par aucun accid en t,
quiconque fe dit marié ne peut le prouver que par un extrait
de ces regiftres.
L a D em oifelle Cam p l’ a bien compris. A u d i a - 1 - elle
cherché à fe procurer cette efpece de titre. E lle a même
dans fon porte-feuille deux extraits de mariages au lieu d’ un.
L e premier dont elle a fait dépofer l’ original par le
•nommé C infraix chez R^uzan , N otaire à Bordeaux , le i 3
Mars 1 7 7 1 , eft intitulé , extrait des regijîres de l ’Eglifc Paroijjialc de Saint Simeon de Bordeaux. I l porte qu’ après trois
publications & fiançailles, entr’ elle & le V ico m te de Bom bclles , la bénédi&ion nuptiale leur a été impartie le 8 Fé
vrier i j 6 6 , en cette Eglife par le fieur Linars , C u ré de la
Paroiilè , en préfence de quatre Tém oins , appellés de Le^ement, A dingaJD orid el & Gabrouil, qui font dits avoir figné
avec les deux époux & le Curé.
I
e fécond dont elle a fait dépofer l’ original par un foi-
difant M iniftreProteftant, chez D up ré, N otaire àMontauban,.
le 1 G A o û t 1 7 7 1 , eft intitulé , extrait des regiftres des ma
riages S’ baptêmes des Eglifes Protejlantes dcMontauban de Vannte 1 7 S6. Il porte que leur mariage a été béni le x 1 M ars
de la même a nnée , par Jacques S o l - E l i o s , M iniftre du
Saint Evangile * ; il eft die figné par trois perfonnes :
» n eft ,<cn-r
fçavoir Louis Lecun, Jacques Brun & Jean-Pierre M o lle s , *Îa,"s 1aôe
,
3
1
'
3 E lu o s , mais on.
qualines de T ém o in s , fans fignature , ni de M in iftr e , ni de a fait demander
p q rr- _
0
1 arC 1CS-
comment il fep ro nonçoit ;
C eft le premier de ces deux ailes qu’elle a fait parvenir Sol'^ilos'
1 année derniere au parent de la D am e de Bombelles , C o n dufteur de l’ intrigue ; & c’eft avec cet a<5le qu’ a été livré
le premier aiTaut h l’é t a t , h l’honneur fie à la .liberté du*
c ’eft
�32
V ico m te, fous Je nom des perfonnes les plus refpe&ables qu’ on
avoit eû la hardieiïe de réduire & d’ interpofer.
C ’eft avec le fécond qu’ elle a paru depuis, elle-m êm e, fur
la fcên e, annonçant à toute l’E u ro p e, que puifquele V icom te
de Bombelles avoit l’impudence de nier qu’ il l’eût époufée à
S . Sirncon de Bordeaux, elle alloit le confondre en lui prou
vant qu’il Fa époufée au déjert.
Je pourrois dès-à-préfent prendre avantage de cette du
plicité même de mariages , pour écarter le dernier malgré
la préférence qu’elle paroît lui donner. C ar enfin fi elle étoit
mariée en l’Eglife Catholique , pourquoi fe marier encore
dans le rit Proteftant ? Si elle ne l’étoit pas , pourquoi jetter
ou entretenir le Public dans cette erreur pendant quatre an
nées entieres , fans excepter les perfonnes les plus auguftes ?
E t fi elle a pû fuppofer le premier de ces deux m ariages, pour
quoi n’ auroit-elle pas auiïi fuppofé le fécond ?
Mais i °. ces deux a&es font faux & fabriqués , avec cette
différence que la fauflèté du fécond eft bien plus marquée :
2°. l’inéxiftence d’ un mariage quelconque eft démontrée
par les précautions mêmes qu’elle a prifes pour paroître ma
riée , & par la poiTeiïion refpeétive dans laquelle font reftées
les Parties.
§. I.
F a u s s ÉTÉ DES B E U X a c t e s & abfur dite du fécond.
Quand on époufe ce que l’ on aim e, on ne refufe pas de
iigner fon engagement. L e V icom te de Bombelles
avoit
bien figné le contrat de mariage avec la D em oifelle Camp*
II auroit bien auifi figné le mariage m êm e, s’il eût franchi
Je pas.
Cependant
�Cependant il n’ exifle nulle part aucun reg iilrccc m a lic e ,
où il Te ioic inferit & ligné avec elle j & il attelle le Ciel q u 1
ne l’a jamais conduite, jamais accom pagnée, ni a B ordeaux,
ni au d éfert, ni en aucun autre endroit pour l’ épouler , &
qu’il ne connoit aucun des Perfonnages dénommes dans les
deux aéles dont elle s’eit munie.
Leurs noms mêmes font il bifarres qu’on feroit tente do
croire que ce font des ncrçns phantailiques. Quels qu’ ils foient,
la fauiTeté de ce qu’ ils attellent n’e il plus douteuie.
i °. Acte de Bordeaux.
L ’ illulion de ce mariage étoit déjà diilipée avant que le
V ico m te de Bombelles s’en mêlât. D ès l’ année derniere fur
fa* dénégation , & fur le rapport qu’ en avoit fait la perfonne
interpofée contre lui auprès de la D am e fon époufe , on avoit
provoqué à ion infçu la vérification des regiilres Se S. Simeon ,
& elle avoit été faite par le C u ré , fous les yeux & à la rcquifition du Sf . Intendant de G u yen n e, qui avoit commiflion
fpéciale à cet effet. Les regiilres ont été parcourus d’ un bout
à l’autre. L ’a&e ne s’ y trouve p a s, & le C u ré certifie n’ avoir
jamais vû ni connu le Vicomte de Bombelles ni la JDemoiJelle Camp.
Quant à l’extrait délivré fous fon nom , il convient que
fon écriture & fa iignature font imitées a s’y méprendre.
Mais il dénie en être l’ A uteur & offre de s*itifcrire en fa u x.
Il a Procureur en Caufe h cet effet. L a faufleté de cet a£te eft
même fi bien avérée, que la D em oifelle Cam p n’ ofe plus s’en
fervir, ni même en faire mention. Il ne relie plus qu’à confondre
celui de Mautauban.
E
�4)
34
x ° . -Acte de Montaubar 7
C ’eft ici la pièce avec laquelle on a donné une fi cruelîe
atteinte à l’honneur du V icom te de Bombelles.
On a fenti que la religion de ion pere qui n’a jamais été
fuipecte ; celle de fa mere qui a été l’ exemple de fa Patrie ;
celle de fes fœurs dont l’ une eit R eligicufe , & l’autre de
meure en Couvent ; celle de toute ià famille dans laquelle
il n’y a jamais eû de Proteftant ; la C ro ix de Saint Lazare
dont il eit lui-m êm e décoré , & qui ne fe donne qu’aux C a
tholiques, jetteroient de l’invraifemblance fur un mariage au
défert , fi Ton ne commençoit par ajufter fa perfonne à
cette fable.
'
On a donc com m encé, pour préparer les efprits à l’illufion,,
par lancer fur lui avec la plus grande hardiefîe un trait d’ au
tant plus empoifonné , qu’ il eft trempé dans le fanatifme. L a
D em oifelle Cam p l’a repréfenté ou fouffert qu’ on le repréfen ta t, non pas feulement comme ayant déguifé fa f o i , mais
comme ayant feint d ’ abjurer (a religion pour féduirc une jeune
perfonne, & Ta traduit tout-h-la-fois aux yeux des Catholi
ques
com m e indifférent fur la form e du mariage , & aux:
yeux des Proteftans comme ayant voulu abufer de la leur
pour fe jouer plus facilem ent de fa future. » Il ne la réduira
p as, ( dit-elle encore h préfen t, ) à la trifte néceilîté de prou
ver qu’il n’a réuifi auprès d’ elle que par le facriiice de fa ca
tholicité.
Mais fans parler du mélange abfurde & impur q u ’elle fait
ici des m yftercs de fa religion avec ceux de l’am our, fans par
ler de l’ ignorance de fon Profelyte qui n’ a jamais fçu la diffé
rence de leurs d o gm es, & auquel il n’eit pas arrivé une feule
�Fois d’ affilier à leurs aflcm blées, qu’avoit-il befoinde déguifer
fa f o i , pour époufer une fille qui ne tenoit alors h. aucune re
ligion , & qui par une claufe expreife de fon contrat de ma
riage , avoit flipulé avec toure fa famille que le mariage feroit
célébré , fiiivant les Lo'tx & formalités du Royaume.
Cette claufe a paru fi énergique k la D em oifelle Cam p & h
fes complices , qu’ils ont cru devoir la fupprimer dans l’édi
tion donnée de fon contint à la fuite de fon Libelle , & d’y
fubflituer des points. Im pofleurs mal-adroits , en la laiflant
fubfiflrer , ils en auroient été quittes pour dire qu’ on s’en étoit
écarté par de fécondés réflexions ; au lieu que par leur fuppreilion frauduleufe , ils déclarent que cette calomnie ne leur
étoit pas encore venue à l’e fp r it, & qu’ils ne connoiifoient
d’ autre ouverture à l’imputation d’ ap oilafie, ni d’ autre m oyen
d’amener un mariage proteflant, que de faire une lacune dans
le co n trat, en dérobant au Public la claufe qui leur faifoit
obftacle. Mais elle n’en exifte pas m oins, & ils ont été forcés
par nos clameurs de la rétablir. Il en réfulte que loin par le
V icom te de Bombelles , d’avoir exigé ni flipulé une bénédic
tion au défert , c’efl au contraire la D em oifelle Cam p & fon
pere qui , malgré la répugnance dont elle fait aujourd’ hui pa
rade , fe font- fournis de leur plein gré à une célébration en
Eglifc catholique.
C ’ eil même évidemment l’ infpiration & la force de cette
claufe qui a produit le faux aéle de célébration en l’ Eglife de
Saint Simeon de Bordeaux. C e t a fte , tout faux qu’ il e i l , a
du moins une date certaine. Il s’ annonce , comme délivré par
le Curé , le 28 Mai 1 jG G ; & il c il bien légalifédu lende
main 2 9 par M. de la R o fe , Confeiller au P arlem en t, &
Lieutenant Général de Bordeaux. Sa légalifation reconnue
E ij
�HP
36
par celle qu’ il a mife tout récemment au bas de la copie colladonnée , eft conftam m entdu 29 Mai 1 7 6 6 . L a D em oifelle
Cam p tenoit donc encore alors le V ico m te de Bombelles pour
Catholique , n’imaginoit pas d’ autre mariage poilible avec lui
qu’ en face de TEglife
ne croyoit pas encore l’avoir époufé
au défert le 2 1 Mars précédent.
Si rimputatïon d’apoftafie eft abfurde , l’ a&e de mariage
^ fabriqué fur ce fondement I’eft encore,davantage. C et a¿te
e prem^r^me qm > fa? la feule garantie d’un Ecrivain téméraire * , a jette
cett<TaffaheT'-t- tant
monc^e dans l’erreur , n’a vu le jour pour la premiere
tention quelle fois que le i G A o û t i 7 7 1 . C e jour-là , un homme qui s’eft
dit Jean Murât de Graillé , & qui s’eft. qualifié PaJIeur de V E glïfe réformée y & Détenteur des. rcgijlres des baptêmes S’ mariages
des Eglifes protejlantes de Montauban , eft entré ch e z D u p ré ,
N otaire R o ya l en la même V i l l e , accompagné de deux Habit ns qui ont dit le connoître, apportant l’a&e en queftion qu’il
a certifié & figné en leur préfence , & dépofé pour fervir de
minute.
Il eût été difficile de prendre confiance en un pareil acle_
L ’époque même de fon apparition le rendoit luipe& : C ’eft
après le diferedit total de celui de Bordeaux , qui avoit fervi
à faire illufion au Public pendant 4 ans.
Son origine ténebreufe augmentoit la défiance. En général
un extrait n’ eft qu’une copie tirée d’un regiftre qu’on a fous les
yeux . <Sc délivrée par un Officier public, dont la fignature fait
foi en Juftice. Ici au contraire , c’ étoit une prétendue copie
d’un regiftre que perfonne n’a v u , délivrée à un Officier pu
blic par un inconnu , fur l’unique autorité duquel portoient
f exiilence du regiftre & la foi de l’extrait , & qui amencit
pour garants , non de fa probité ni de ion regiftre , mais fim r
�fil
37
plement de fon individu & de fa dénomination de Murât ,
deux Compagnons y eux-mêmes fu fp e& s, dont l’ un eit Ber
nard C o d e , fur le théâtre duquel montoit la Dem oifelle
Camp > & l’autre un neveu du Juge-M age, dévoué au fleur
M erignac, oncle de cette fille , pour fervices pécuniaires.
C e qui mettoit le comble à. la perpléxité , c’ eft d’une parc
l ’affectationde cet incopnu , de n’ avoir déclaré ni d ép ô t, ni
domicile où l’on pût aller com pulfer& confulter fes prétendus
registres ; & de^ l’autre , îe refus opiniâtre par la D em oifelle
Cam p de déclarer , fuivant les fommations qu’ on lui en a
faites, le domicile du prétendu Jacques Sol-Ehos , qui eft dit
avoir béni fon mariage, & de ce foi-diiint Jean Murât qui eft
dit en avoir délivré <Sc dépofé l’extrait. Par-la toutes les voyes
étant fermées à la recherche de la vérité , il étoit impoflible
de fçavoir s’il y a un regiftre , fi le prétendu mariage y eft
inferir, & depuis quand exifte le regiftre ou l’infcription.
T out ce que l’on voyoit par l’extrait, c ’eft que le prétendu
afte de mariage n’eft figné ,. ni du V ico m te de Bombelles , ni
de la D em oifelle Cam p y ni de fes parens qui n’y font pas
même préfens, ni de Jacques Sol-Ehus»
Il ne porte aucune date de lieu ,. pas plus que s’il n’avoic
été fait nulle part ; il .n’indique ni V ille r ni Fauxbourg, ni
Porêt 5 ni Campagne , où l’on pût .aller à la recherche du
mariage de la D em oifelle Cam p ; il le laifie dans un défert
aufi] vague que les efpaccs imaginaires.
Il ne dit pas non plus quelle partie du Monde habitent les
trois Tém oins y dénommés. Quand donc il n’eût porté fur lefront aucun autre indice de faufTeté* encore étoit-il impoflible,
parmi taht d’incertitudes, d’y ajouter la moindre foi„
Mais la D em oifelle Cam p a elle - même diilîpé tous les:
�/
doutes. Elle avoit déjà fait im prudem m ent, à la fin de fori
M ém oire à confulter du mois de N ovem bre dernier, l’aveu
difert du fdencc des regijlres , dont elle annonçoit l’ extrait au
commencement. Elle déclare aujourd’ hui qu’il n’y a pas
même de regiftre ; l’extrait qu’ elle en a fait dépofer par
Mu r â t , & qu’ elle promettoit de montrer au P u b lic , n’eft
donc pas un ex trait, mais une pièce originale de nouvelle fa
brique.
I l n’y a pas même de Sol-Elios ifur te rre , & il n’ en paroîtra
» N om
du S o -
r e c ! " latin & Cn
pas , ce n’eft qu’ un nom en l’ air. *
com ble de l’impofture , c’eft qu’on a mal choiil le lieu
& le jour du mariage. L e 2 1 Mars 1 7 6 6 , le V icom te de
Bombelles n’étoit pas à Montauban ; il étoit a Touloufe de
-^ e
puis cinq jours , & y eft refté jufqu’ au 2 7 du même mois.
T els font les a&es qui, jufqu’ à préfent, ont fervi de baie à la
plus horrible diffamation dont il y ait mémoire. L a différence
des d e u x , c’ eft que l’extrait de Bordeaux , cite au moins un
regiftre & un C u ré qui exiften t, au lieu qu’il n’y a ni regiftre
ni Miniftre pour l’extrait de Montauban.
Mais ce qui rend cette derniere impofture encore plus reprehenfible , c’ eft le parjure qu’on y ajoutoit ci-devant pour
mieux tromper le Public. » N ous eûmes ( faiioit-on dire à la
» D em oifelle Cam p ) pour Témoins de nos fermons , ce M ir> niftre , nos amis , nos parens & D ieu . . . Jamais s’efton joué fi licencieufement de la crédulité humaine ?
Si la probité eft de toutes les religions , fes parens & fes
amis ont du frémir de fe rencontrer avec la famille du V i
com te de Bombelles , mais plus encore avec Sol-Elios , Sc
D ieu dans cette citation impie. D ieu qui voit to u t, n’ a jamais
vii ion.m ariage, & ne voit aujourd’hui que l’impudence de
�ti'b
39
ceux qui la font parler. I l n’ a reçu d’ elle aucuns fermens
il
n’ en reçoit que l’ outrage d’ être appelle en faux témoignage :
& S oI-EK qs ne peut' fervir qu’à porter fon parjure au plus>
haut'degré d’évidence.
*
'
'*
F ou r n’être plus le jouet de fa duplicité , 6c de peur qu’ il
ne lui prît fantaiiie d’imaginer un troifiéme a&e de mariage ,
le V icom te de Bombellcs lui a fait faire deux fommations *, . * }^cs 14 & 7*
■j.
,
•.
j
_
Januer 1 7 7 1.
de declafer comment il lufcplaifoit d’ être mariée , dans quel
fieu elle aîrnoit mieux placer la fcêné , à B ordeaux, ou au dé-'
fert , & auquel des deux extraits elle vouloit s’ en tenir. Elle
n’ a oie s’ expliquer. Elle eft forcée de .les abandonner tous
deüx , 5c ne pouvant dire ni dans quelle partie du M onde , ni
par qui elle a été mariée , elle a recours à fon enfant pour la,
iolution de ce problème.
^
1
C ’eft fous le nom de .cet enfant qu’elle offre aujourd’hui la
preuve p arT ém oin s, non pas d’ une bénédiction nuptiale, feul
a& epar où puiile commencer un mariage , mais d’ une pré
tendue poiTeifion d’état , com m e fi l’ on pouvoit acquérir des
maris par prefeription , ou par conje&urcs.
Suppofons pour un moment que ce foit le V ico m te de
Bom belles qui pourfuit la D em oifelle Cam p , lui qui n’ a pris
aucune précaution pour s’aiïurer d’elle , qui ne s’ eil fait re
connoitre mari , ni par teila m en t, ni par aucun autre aétey
qui loin d’avoir des ailes de mariage n’avoit pas même ci-de
vant l’expédition de leur contrat, ni ne fçavoit où répofoit la
minute emportée par leN otaire inconnu : L ’ ayant laifïee dans
tous les tems maîtreiTe de fa perfonne & de fes b ien s, de quel
œil le regarderoit-on s’il prétendoit la tirer des bras drunm ari?
avec des lettres ou d’autres témoignages de leur ancienne fa
m iliarité, & en faifant parler contr’ ellc l’ enfant qu’il en a eu. I
�40
N e fcroit-il pas infâme par l’affront même qu’il auroit voulu
lui faire ?
Q ue chacun reprenne maintenant fon rôle. E lle aura pû
d ifp o fer, & même ( pour parler comme elle ) trafiquer de fa
perfonne, fans qu’il pût l’en empêcher : & l’on fera d’autres
loix pour lui ! Il fera marié fans qu’ elle le foit ! I l deviendra
fon efclave avec des Tém oins !
,
Te ne m’arrêterai point à combatre un expédient, fi pro
pre à bouleverfer toutes les familles , & fi difertement ré
prouvé par nos Ordonnances , ni à démontrer l’impoifibilité
fpéciale , de remettre le fort de qui que ce foit à la difcretion
d’ une fille qui n’a celle , jufqu’à p réfen t, d’être livrée à des
gens affez peu délicats, pour lui fabriquer de faux aétes , ou
pour lui en altérer de véritables.
Je vais lui épargner de nouvelles intrigues , en faifant voir
que non-feulement elle n’ a ni titre , ni pofleiïion d’ un mariage
quelconque , mais que tout l’efpace d’entre fon contrat de
mariage & la rupture définitive, eil rempli par une inten
tion & par une poiTeffion , qui réfiftent invinciblement à fes
fables.
§. I L
I
n e x i s t a n c e
d
’
u n
M
a r i a g e
q u e l c o n q u e .
L a réalité ne fçauroit fe ren con trer, ni fubfifter avec la
fi&ion.
O r , tout ce que la D em oilelle Camp a fait ou fait faire
d’a&es avant & depuis le 8 Février , & le 2 1
Mars 1 jG G ,
époques prifes par fes faux extraits de mariage , ne font que
de vains fantômes deftinés uniquement à faire illufion aux
gens
�41
gens de fa force , & ils font tous démentis par la poilèflïon
refpe&ive des Parties.
i° .
t
Preuves de jîtnulation.
%
O n ne s’ avifa jamais de faire des a6tes évidemment nuls
pour des fins férieufes, ôc encore moins de faire des aétes
faux quand on en a de véritables.
Tels font néanmoins^ tous ceux qu’ elle rap porte.-C eux
qu’elle a fait confentir par le V ico m te de Bombelles , font
nuls ; ceux qu’elle a fait faire à fon infçu , font faux , ôc d’ une
fauiTeté ii averée , qu’ elle n’ ofeplus s’ enfervir.
i
°.
Son contrat de mariage attentatoire aux L o ix du
R oyaum e , qui défendent le mariage avec des Proteftans ,
6c a l’honneur d’ une famille diftinguée qui n’ en a rien fçu ,
n’eft pas feulement nul , il conduiioit à des peines capitales ,
il l’on eût paiiéà l’exécution en minorité. L e foin même que
fes parens ont pris d’ appeller unN otaire étranger, qui n’ avoit
aucun pouvoir d’inftrumentcr b. Montauban , le réduit écarté
où ils fe font cachés en faifant le co n trat, & le m yftere dans
lequel ils l’ont retenu , même après la premierc rupture du
V ico m te de Bombelles avec leur fille, annoncent clairement
que leur intention n’ étoit pas d’en faire ufage contre lui. C e
u étoit done qu’un a&e iimulé , un a£te détourné de fa fin
naturelle à quelque autre ufage , & dans lequel on n’avoit
recherché qu’une vaine apparence , fans afpirer à la réalité.
En le réunifiant aux autres aéies de même époque , furtout avec le teilainent holographe qu’on a fait dater du <5
A vril fu ivan t, il eil évident qu’il n’ a point été fait pour fe
m arier, mais pour couvrir de l’ombre d’ un mariage l’ enfant
ou les enfans dont la naiifance eil difertement annoncée par le
teiiament.
F
�6
4*
1 ° . C ’eft dans la même vue qu’a été fait ce te ila m e n t,
qui ne feroit ni o u v e rt, ni entre les mains de la D em oifelle
C a m p , s’il étoitférieux.
I l eft aifé d’y recoftnoître par le ftyie même , le Praticien
de Campagne , qui avoit rédigé le contrat de mariage. Il y
fait dire au V icom te de Bombeiles , qu’ il s’ en rapporte pour
•
Même expref- fes honneurs funebres a fon héritier bas nommé : *
fo."ratUeje aima-e
Q u’il donne a M arthe.Cam p , f a chcre époufe, l’ ufufruit de
na»efes biens , à la charge de nourrir , a fon pot-au-feu, jufqu’à.
2 5 ans , les enfans provenus de fon mariage :
Q u ’il nomme pour fes héritiers généraux le pojlhume, ou les
pojîhurnes dont elle pourroit être ou devenir enceinte , venant en
lumière de leur mariage ;
E t qu’ à défaut de poithumes , il Î’inftituc elle-même fon
héritiere générale , pour jouir & difpofer de fes biens à f e s
plaifirs & volontés.
O n eil fcandaîifé au premier afpcét de voir une prétendue
femme préfager la m ort d’ un jeune homme plein de vie & de
trois ans moins âgé qu’elle , & s’ occuper de fcs funérailles &
de fa fucceilïon. Mais il lui faut rendre jufticc : elle avoit en
core alors ailèz d’honnêteté pour ne pas expofer férieufement
des idées fi trilles , ni des défirs fi rampans.
Q uelle étoit donc fa penfée ? En Pays de D ro it écrit, tout
le monde fçait que les teilamens holografes n’ y font reçus
que du pere aux enfans , & qu’ ils font nuls à l’ égard de toute
■Voy. Maynari, autre perforne. * En même-tems qu’on fuggeroit celui-ci
r o i ’ de i/Z/t au V icom te de B om beiles , on ne lui en iaiflh point ignorer
concernant les
tfjia m e /is , art, ¡ 6 .
Ja nullité. C e ne pouvoit donc pas être pour tefler c u ’il
.
.
n
1
i
écrivoit ce teltamcnt. On ne peut pas le lui avoir diété pour
s’enrichir de fes dépouilles. L a D em oifelle Cam p ne fe i’ eit
�n r
43
évidemment procuré qu’ à dellbin de pouvoir mettre devant
elle un monument où elle fût traitée de chere epoufè, & peutêtre d’ avoir auiïï un vernis d’honnêteté tout prêt k jetter fur
les pojlhumex qui viendraient en lumière de leur trop grande fa
miliarité. C e n’eft donc qu’ une fimple précaution pour fuppléer au défaut de mariage.
3°. C ’ eft par la même précaution , & k défaut d’ autres
titres , qu’elle eft refté^ nantie de fes lettres. Jamais femme
s’avifa-t-elle de garder les lettres de fon mari en preuve de
mariage ?
4 ° . U ne autre efpece de précaution encore plus démonftrative , ce font les faux a£tes de bénédiction nuptiale qu’elle
s’eft procurés jftratagême auquel on n’a recours que quand on
n’ eft pas marié.
L ’aéte de Bordeaux qui eft daté du 8 Février 1 7 6 6 , n’a
été , comme on l’a vû , légalifé que le 29 Mai fuivant. Elle
étoit donc encore alors occupée k iim uler un mariage.
T o u t l’efpace. poftérieur eft rempli par la même iim ulation. Elle faifoit encore ufage de fon extrait de Bordeaux
en Février 1 7 7 * , lorfqu’elle l ’a fait palier à l’ Ennemi ca
pital du V ico m te de Bombelles , pour tromper les perfonnes
illuftres qui commençoient a le p roteger, & au mois de Mars
fuivant, lorfqu’ elle l’a fait dépofer par un Particulier de Montauban chez Rauzan , N otaire a Bordeaux , pour y fervir de
minute , & s’en procurer l’ expédition qu’elle a dans fon
porte-feuille.
C e n’ eft qu’au mois d’ A o û t 1 7 7 1 , qu’elle s’ eft avifée
de fe faire marier au défert le 2 1 Mars 1 7 6 6 .
Jüfques-lh,
c e f t fur l’acte de Bordeaux du 8 Février 1 7 6 6 , q u elle a
F ij
�44
afondé toutes íes prétentions. I l n’ y a donc dans l’ intervale
du 8 Février 1 7 6 6
au mois d’A o û t 1 7 7 1 ; aucune place
où l’on puiiTe faire entrer un mariage férieux.
A in ii toutes fes précautions fe tournent con ti’ elle , & les
ailes dont elle abufoit fi étrangement pour prouver un ma
riage , prouvent précifément tout le contraire par la perfeverance même de l’ ufage qu’ elle en a fait jufqu’au moment ou
elle a vu qu’ils alloient être convaincus de faux.1
Si quelque chofe en cette matiere pouvoit fuppléer au dé
faut de titre , ce feroit la poilèilion. L ’ eiïènce de la pofleffion
d’état confifte dans l’opinion publique, mais principalement
dans l’opinion de ceux qui font obligés d’ en prendre connoiffance , & qui ont intérêt de ne pas s’y méprendre.
i ° . I l y a des indices dont la préfence eft équivoque ,
mais dont l’ abfence eft démonftrative. Par exemple , l’ unité
' de nom & l’unité de domicile , ne prouveroit rien pour la D emoifelle Cam p. C e t indice eft commun aux époux & aux
concubins , & par conféquent ne fçauroit fervir à. diftinguer
les uns avec les autres.
Quelques précautions que prennent deux A m a n s , pour
couvrir d’ une apparence refpe&able le vice de leur familiarité,
le Public , pour l’ordinaire , n’ eft point duppe d’un nom de
guerre que prend une fille dans fa groiTeiTe , ni des témoigna
ges d’affedion, ou d’une adreife de lettres qu’elle fe fait écrire
par fon G alant, ni même d’une réfïdencc en domicile com
mun ; il ne la rcconnoît point tant qu’il ne la voit point recon
nue par la famille , ou par l’ autorité publique.
Mais quoique l’ unité de nom & de domicile 11c prouve
�45
rien , la diverfité prouveroit beaucoup. U n e fille honnete
une fois m ariée, n’a rien de plus preiïé que d’ oublier fon riom
pour prendre celui de fon mari , avec qui elle ne doit plus •
faite qu’une même perfonne. L a D em oifelle Cam p étoit trop
jaloufe de ion honneur pour manquer à cet ufage. Cependant
elle convient * avoir continué de porter fon nom de Camp “ Pair. 7 ¿e f>n
j
• n
n i»
Mémoire a t o n pendant toute 1 année i 7 6 6 , & jufqu au moment de 1 an- iuiter.
née i 6 6 7 , où fa groifeife s’ eft déclarée. Toutes les lettres
qu’elle a reçues du V ico m te de Bombelles dans cetintervale,
quoiqu’il la traite d’époufe , font à l’adreiïe de Mademoiselle
Camp. C ’eft donc la.groiTeiîe , & non pas le mariage , qui a
été eaufe du changement de nom fur-venu depuis.
Si depuis le mois d*Avril 1 7 6 7 , il lui a écrit quelques
lettres fous le nom dont elle s’étoit décorée, c’eft par conven
tion , & parce que l’ ufage eft à Montauban d’ aller retirer foimême fes lettres au Bureau. A u reile ce menfonge officieux , .
après de longues interruptions , a pris fin au mois d’A o û t
1 7 7 0 , où recommence l’adrefle de Madcmoifclle Camp. '.
Une' des plus flétriiTantes calomnies dont elle l’ait n o irc i,
c’ eft l’imputation de l’ avoir tirée des aras de fon pere, & d’ être
enfuite venu loger che^ elle. Elle n’ o fe y infifter. I l eft en effet
de toute fauiîcté quM Tait jamais emmenée chez lui. .Elle
u auroit même pas pû décemment y conientir. I l a toujours
.lo g é en chambre garnie *. Elle n’y a fait que quelques appa-
• Cen-
ntions furtives , n’ v a accepté que quelques foupers , ôc dans fuite chez Caiil,
fpVo
„.
t
/tv que quelques
1
• n.
9 pas une Alaitre
«-s
autres
vilites
n»y a palié
înltans
, oc
qujer. perru_
feule nuit.
^Si jamais la maifon du mari doit être le domicile de la femme,
c eft fur-tout quand elle n’a plus d’ autre logem en t, & que fa
calamité la force de chercher un afyle. L a D em oifelle Camp
�4-6
s’eft trouvée dans cette crifc au mois de N ovem bre 1 y G G. La
maifon de Ton pere venoit de périr avec la majeure partie du
Fauxbourg. C ’étoit le moment de prendre gîte eliez le V icom te
de Bombeiles , s’il eût été Ton mari. Son defaftre qui l’ a
ramené auprès d’elle , n’a point empêché leurs rechûtes: c’eft
l ’époque où elle eft devenue féconde ; mais il ne l’a pour
tant point réduite à cette extrémité de loger avec l u i , elle a
été loger ailleurs.
Il
eft faux qu’ il l’ait fuivie chez fon pere pendant ia grof-
fe fle , ni qu’il y ait transféré fon domicile. Il-n’ y a p a s logé
une feule fois ; il a même eû la délicateilè de n’ y accepter en
tout qu’un feul repas , & dans la feule vue de leur prouver
qu’il ne les méprifoit pas. A in fi ils font reftés diftinéb par le
nom & par le domicile.
A - t ’il du moins fait ufage des droits que lui donnoit leur
contrat de mariage , & entr’autres chofes eft-il muni de la dot ?
L eu r contrat de mariage porte qu’il lui fera payé par le
fieür Cam p pere, lors de la célébration, laJbmnic de 6000 llv.
dont il donnera fa reconnoiiTance. A -t-il reçu cette fomme ?
E lle n’eft pas fâchée qu’ on le croie ; mais pourtant elle eft
forcée de convenir qu’il n’ en eft rien. O r tom be-t-il fous le
fens que ce jeune homme , qu’ elle fuppofe avide d’ a rg e n t,
eût négligé fa dot s’il s’étoit chargé de fa perfonne ?
E lle l’accufoit ci-devant, de lui avoir demandé au mois de
Juin ï j GG , à elle 1 5 00 ^vres » ** ion pere 3 0 0 0 liv. E lle
n’a pu juftifier ce fait , & n’ a voulu communiquer les pré
tendues lettres qu’elle citoit : mais elle lui a fait donner copie
de fa lettre écrite du Fort-l’Evêque le 3 Mars 1 7 6 9 . C e jl un
lieu très-onéreux ( lui m arque-t-il) je m’y trouve à /’ étroit }
vous nie rendrie£ Jervice d'emprunter à votre pere ou à vos
�m
47
parens cent ¿eus dont j ’ ai ajj'e^befoin. Je ferai très-fenjible à
cette marque d ’ amitic de votre part. Dans cette détreife auroitil demandé à emprunter cent écus , pouvant exiger fix mille
livrer ?
z ° . V o y o n s maintenant quelle a été l’opinion de ceux qui
étoient obligés de les connoître , & qui avoient L»céiêt de ne
pas s’y méprendre. Com m ent ont-ils été regardés l’ un par les
plus proches parens de l’autre ?
L e fleur Camp pere s’eft-il mépris jufqu’au point de re
garder le V ico m te de Bombelles comme fon gendre & de
lui payer la d o t , ou de lui prêter quoique ce Toit ? I l s’ en eft
bien gardé.
Com m ent la D em o ifelle Cam p a-t-elle été regardée a Ton
tour par tout ce qui tient au V ico m te de Bombelles dans Montauban , par la D am e H ennet, par les D em oifelles de Bom
belles ? O n peut le conjecturer par la maniéré outrageante
dont elle a traité la D am e Hennet.
A-t-elle du moins réglé quelques affaires de ménage , payé
quelques dettes , compté avec les Fermiers , reçu de quel
ques Débiteurs ? R ien de tout cela : perfonne ne l’ a reconnue
pour femme.
Il
n’ exifte pas un fcul aéte public où cette qualité lui foit
donnée ; pas même l’extrait de Baptême de Ton enfant.
C ’eft ici une obfcrvation a faire qui fera fentir un jour h.
cet enfant le prix de fa légitimation. L ’ ufage du D iocèfe ,
même pour les Froteftans , lorfqu’ un enfant doit fa nailfance
^ des perionnes m ariées, eft de le qualifier de légitime, ou de
faire mention du mariage de les pere & mere. L a D em oifelle
Camp , qUi a
b ap tise en l’ Eglifc paroilïiale de V ille —
bourbon , n’oferoit nier cet ufage. Son propre extrait de
�48
Baptême en fait foi.
Ses pere & mere y font dits mariés.
E lle a efîayé d’obtenir par furprife du Prêtre qui a baptifé
fon e n fa n t, les mêmes qualifications, & de lui faire croire
qu’elle étoit reconnue pour femme. Dans ce deiTein elle avoit
apofté , pour tenir l’enfant fur les fonts de Baptême fous
le nom de la D em oifelle de B om belles, qui depuis en a donné
fon défaveu , une certaine Antoinette Biargues , qui fe difoit
commife à cet effet par cette D em oifelle. L e Prêtre n’ a point
donné dans ce piège , il s’ eft contenté d’exprimer le nom du
pere & de la mere bien conflatés par les lettres qu’ elle rapportoit. Mais il s’eii abftenu d’exprimer q u ’ils fuiTent mariés,
ôc n’a point voulu rifquer fur l’ enfant la qualité de légi
time.
3 0. Enfin elle n’a tenu compte de l’erreur des dupes qui
croyoient à fon mariage. E lle a au contraire refpeété l’ opiniorT
la plus générale qui ne lui paroiiToit pas favorable, & elle y a
conform é fa conduite.
Q uoiqu’elle prît la qualité de femme , la vérité a prévalu
dans fin/tant périlleux de fes couches. Celles d’ une femme
légitime fe font fans m iile re , & s’annoncent avec éclat. E lle
a été cacher les fiennes en Paroifîe étrangère à quatre lieues
de Montauban.
On ne lui fera certainement point un crime d’ avoir laifTé
le V icom te de Bombelles vingt-un mois au F ort-l’ Evêque ,
fans le venir trouver & fans lui prêter aucun fecours. Mais fi
elle avoit été fa fem m e, quelle exeufe pourroit-elle alléguer
de fon indifférence ? L e mariage n’exifte-t-il donc que dans
la prdfperité? N ’embraiTe-t-il pas l’ enfemble de toute la vie?
Q u ’ y a-t-il de plus humain que de partager l’ adverfité de ceux
mêmes
�125
49
m êm es, dont on ne partage plus les plaifirs ? Juiqu’aux fem-mes les moins fid elles, ne fe font-elles pas un honneur de
voler au fecours de leurs maris , quand il leur arrive quelque
accident? (a)
Il
n’ y avoir rien dans la conduite , ni dans la détention du
V ico m te de Bombelles dont elle pût rougir ; & c ’eft faire un
cruel ufage de fa calam ité, que d’ y chercher des fujets d’ ou
trage & de le traduire en cette prifon , comme un homme
perdu de dettes, traînant dans la débauche une vie pénible 6’
fcandaleufe. Les lettres qu’ il rapporte de fes Supérieurs prou
vent la confideration qu’ils avoient pour lui. L e certificat du
Greffier & du Concierge du Fort-l’Evêque attellen t, qu’il n’ y
a été conftitué Prifonnier que par ordre du R o i } & qu’ il n’ a
point été écroué pour dettes. Elle-m êm e rapporte dans fa lettre
du 3 Mars i 7 6 9 la preuve qu’elle ne l’ignoroit pas : Pour
ne vous laijfcr ( y eil-il dit ) aucun louche fu r les raifons qui
ont déterminé Sa M ajejîé, je vous envoyé la lettre que NL. Gayot
C h ef du Bureau de la Guerre , m a écrite dans les premiers inftans de ma détention; & elle fçait k n’en pouvoir douter, qu’ il
n’ étoit que pour avoir déplu à des perfonnes en place : caufe
qui n’ ayant pas empêché des Officiers Généraux de l’ honorer
de leurs v ifite s, une fille de qualité de l’ admettre h fon al
liance , une PrinceiTe du Sang de figner leur contrat, n’ auroit
pas pû difpenfer la fille d’ un Com pagnon Teinturier de venir
folliciter fa délivrance & abroger fa captivité, s’ il eût été fon
mari. U faut donc pour fon honneur , qu’ elle avoue n’ avoir
m écon n u , dans cette longue épreuve, les fentimens & les
devoirs d’ une fem m e, que parce qu’elle n’ en avoit acquis ni
Içs droits , ni le cara&ere.
' r>a X ^ onf { ‘r ùum om n is v itee , fF. d e r i t u n u p t , I „ 1 .
ri
1 rr^ i t’uinanum quàm fo r t u it is cafibu s m u lieris m a ritu m , v tl uxorem y i n p .v
c>peut ejfc ? ü. toi, Wauim . &ç, L . 1 1 , 7.
°
�5°
O n voit, i ° . Q u'elle n’ a point d’a â e de mariage ; 2 °. Q ue
tous fes a&es font de vains iïmulacres ; 3 0. Q u ’elle n’a point
de poiTeflion ; & 40. Q u ’ il y a poiTeflîon contraire. Elle n’a
donc jamais été fem m e, & par conféquent, ni elle , ni fa fille
à qui elle ne peut avoir communiqué plus de droit qu’ elle
n’en a elle-m êm e, ne font recevables k venir troubler le ma
riage du V icom te de Bombelles & de la D am e ion époufe.
E lle n’a même que des torts & pas un.feul fujet de plainteT R O I S I E M E
P A R T I E .
Torts de la Demoifelle Camp, & demandes contr’ elle.
L a D em oifelle Camp étant convaincue de faux fur le ma
riage & la bigamie qu’ elle imputoit au V icom te deBombelles,
que refte-t-il qu’ elle puiiTe lui reprocher ? Sont-ce les fautes
antérieures au contrat de mariage & revelées par le teilament*
Eft-ce la rupture occafionnée par la fupercherie de ces a£tes ?
E ft -ce la groiTelfe poilérieure à leur réconciliation ? E il-ce la
iimulation de mariage qu’ elle a exig ée, & h. laquelle il s’eft
prêté pour fouftraire cette avanture h la malignité publique ?
C e ne font-la que des foibleiTes de fon â g e , & des excès de
com plaifance, repréhenfibles à. la vérité dans la perfonne des
Séduéleurs , mais pardonnables h un jeune homme leduit.
Q u ’elle ait commencé par feindre une groiîcilfc , pour furprendre un contrat de mariage, qu’ elle ait enfuite abufé d’une
groiTefTe ré e lle , pour fe foire donner le titre de fe m m e , il
ne s’en plaindra pas , puifqu’il y a confenti. Mais devoit elle,
pour fe confcrver une fi&ion de mariage , chercher h. fe dé
faire de ion prétendu mari ; em ployer , pour lui ôter l’hon
neur, les mêmes a&es qu’ il n’avoit foufcrits que pour lui fauver le fiçn ; avoir recours aux ilratagêmcs les plus défefperés*.
�11
pour mettre en péril la liberté & p e u t-ê tre la vie d’un
jeune homme qui n’ a point d’autre tort que d’avoir accepté
.fa
< bienveillance ?
Elle n’ e ftp a s (il e ftv ra i) l’ auteur du complot. L eV icom te
deBombelles & laD em oifelle de Carvoiiin fon époufe feroient
encore heureux & florifl'ants, fi leur mariage n’ avoit porté
ombrage, d’ un c ô té , à l’implacable avidité d'un parent comp
table , & de l’autre à la^niferable jaloufie d’un parent ambi
tieux. C e font-lù les deux paiîions qui ont recherché cette
fille ; & qui ont fait paile avec fa vengeance. Mais c’ eit
£lle qui leur a fourni d’abord le faux extrait de Bordeaux ,
pour arrêter tout à. coup le V ico m te de Bombelles dans la plus
brillante carriere, & le faire enferm er comme Bigame ; projet
qui feroit exécuté
fans la fageife & la probité du Magiftrat
chargé de la P o lic e , qui avant de fouffrir qu’ on attentât à la
liberté d’un C ito y e n , a été d’avis que l’on commençât par vé
rifier l’ aéle fur lequel on avoit obtenu l’ ordre du R o i.
Elle s’efî: prêtée depuis à toutes les autres manœuvres.
Fabrication d’ un nouvel a&e , qu’ elle a elle-m êm e, finon
com m andé, du moins apporté deM ontauban, Ôcfubftitué im
perceptiblement au premier , pour renouveller la fable de fon
m ariage, & y ajouter l’épifode d’ unefédu&ion préparée par
une feinte apoftafie.
Enquête clandeftine à cent lieues du V ico m te de B om
belles, pour le traveftiren P roteilant malgré lui ôc fans qu’il
put s’en défendre.
Inquifition fur toute fa vie pour lui trouver des crimes ;
attention de fouiller jufques dans les regiilres du Bureau do
la Guerre , pour voir s’il y eft bien ou mal noté.
AfTociation avec to u t ce qu’ elle lui con noît d ’ e n n e m i s ,
G ij
�?*
pour recueillir tous les propos ignominieux qu’ on a pû tenir
fur fon compte.
Libelle deftiné à prévenir les efprits par un tas d’horreursj
chargé d’un faux titre qui pût lui frayer une route k la publi
cation , tourné en form e de M émoire a con fu lter, <Sc fuivi
d’une Confultation encore plus iniidieufe, tendante a foulever les Proteftans , les uns par une fauiTe démonftration d’ a t
tachement k leur fc6le , les autres par la fauife annonce qu’il
s’agit Je leur état y & à faire croire à tout le monde que le ma
riage en queftion étoit hors de d o u te , en ne répondant que
fu r la validité ; toutes fuppofitions mifes par déception , fous
le cautionnement & la foi d’un minïftere propre k fubjugüer
la confiance du Public r qui fait k l’O rdre des A vocats cet
honneur bien mérité de croire qu’il n’en efl aucun qui voulût,,
au mépris de fa confcience & de fon ferm ent, écrire le con
traire de ce qu’il verroit dans les a ile s , bâtir des fyitêm es de
diffamation fur des pièces dont il connoîtroit la fauiTeté , ni
y abufer du nom deD ieu pour attefter des bénédiélions nuptiales>
impoilibles par l’inéxiilence du M in iftre, & par l’abfence des
Parties («).
Précautions de toutes efpéces pour empêcher que la vérité
ne fe fit jour par aucun endroit ; édition de fon contrat de
mariage avec fuppreilion de la claufe eifentielle ; dexterité de
ne pas laifler voir fon a&e de bénédi&ion au d é fe rt, dont
l’abfurdité frappante auroit pû revolter le P u b lic , & néan
moins de le lui annoncer d’ un ton d’ aiTurance, avec promefîe
de le produire , & réfolution de n’ en rien faire.
Machinations pour furprendre & faire inférer dans les ga
zettes étrangères des lettres & des notes outrageantes, qui
( a ) Terfonnc de ceux qui connoiflént lc E é fe rfc u r de ia D em oifellc Camp , ne
croira qu’ il ait tu connoiliance de toutes ces faulletés, à moins qu'il ne l ’allure
lui-mcrac.
�12 ï
13
annoncent au V ico m te de B om belles, qu’ i/ pourra triompher
dans les Tribunaux , mais qu’ il cjl condamne au Tribunal de
l ’ honneur, comme ii l’honneur pou voit avoir d’autres Tribu
naux que ceux où l’ on prononce avec connoiilance de cauie,
ou d’ autres organes que ceux qui ont fait vœu de la plus icriipuleuie impartialité.
Affectation de traîner partout avec elle cet enfant qu’elle
refufe à ion prétendu m ^ri, & d’abufer du fruit de leur
am o u r, pour allumer contre lui la haine dans tous les cœurs.
Déchainement général excité par Tim pollure de fes titres
& de fes déclamations,- qui ont réduit ce jeune homme h la
néceffité , ou de perdre ion honneur en ne fe montrant p a s,
ou d’expofer fa vie en fe m ontrant, com m e il a fa it, fans y
manquer un feul jour.
L e V icom te de Bombelles pourroit entreprendre les F auf, faircs, & s’il ne craignoit de rencontrer parmi eux la perfonne
qu’il veut épargner , il dénonceroit à l’inilant au M iniilere
public les deux ades faux.
Il
nom m eroit, pour parvenir à la découverte des Auteurs
du p rem ier, le M agiftrat qui en a été porteur auprès de la
D am e de Bombelles ,. le iieur Intendant de Guyenne . qui a
été chargé de la vérification r «5c le nommé C in fra ix , qui en a
fait le dépôt chez Rauzan , N otaire à Bordeaux. L eur cons
cience eft engagée à. déclarer qui leur avoit remis cette
p iè ce , & C infraix doit en répondre fur fa tête..
Il
nommeroit fur le fécon d , Bernard C o ite & M e. Jean-
Marie de Foreftier , neveu du Juge-Mage de Montauban ,
qui fe font préfentés le 1 6 A o û t i 7 7 1 avec J e a n Murât pour
en faire le dépôt ch czD u p ré N o ta ire , & ils ne pourroient fe
difpenfer de livrer l’A u te u r , s’ils ne veulent paifer pour A u
teurs eux-mêmes ou pour Complices*.
J
�/X*
u
Mais !e reiTentiment ne l’emportera point à fufciter une
attaque il propre à le venger ; il ne veut qu’ achever fa défenfe ; & laiiTant la perfonne des coupables pour fe borner à
leur ouvrage , il fe contentera quant à préfent de requerir
pour toute fatisfa&ion :
i
’
Q ue les deux expéditions foient lacérées, & que men
tion en foit faite fur les deux originaux.
2 °. Q ue l’Enquête clandestine faite au mois d’ O & obre der
nier par le Juge-M age de Montauban foit déclaré nulle.
3 0. Q ue le M ém oire à confulter & la Confultation du i 2
N ovem bre fuivant foient déclarés calomnieux.
L ’ Enquête a pour objet de prouver qu’ il a fait femblant
d’ époufer la feéle de la D em oifelle Cam p pour parvenir à.
époufer fa perfonne , c’eft-k-dire de prouver le contraire de
ce qui eft démontré par la claufe du contrat de mariage qui
avo itété frauduleufement retranchée. E lle devient par conféquent inutile à la D em oifelle Cam p depuis le rétabliifement
de cette claufe , & fa Ie&ure ne feroit que le com ble de l’infulte qu’elle a faite à fes Juges de les interpofer , moins pour
ju^er de fon mariage que pour être témoins & fpe&ateurs de
fes outrages.
Elle lui eft encore inutile par fa nullité manifefte , nonfeulement comme ayant été faite fans demande préalable 6c
Cms être ordonnée , mais comme étant prohibée form elle
ment par le titre 1 3 de l’ Ordonnance de 1 G G 7 , ayant même
été faite avec la plus infigne mauvaife f o i , fans y obferver
aucune des formalités requifes avant l’abrogation des Enquêtes
* V. le procès- d ’ examen a fu tu r , * c’eft-h-dire fans aflignation de Tém oins
pour prêter ferment , ni de Partie pour aflifter à la preftadon ; compofée d’ailleurs de Tém oins dévoués , 6c qui ont
été dépofçr d’ eux-mêmes,
�C ’ eft même une de ces inquiiitions odieufes fur la vie d'au
trui donc l’ufage n’a jamais été permis en France , 6c qu’ on a
toujours réprimé ( dit M. l’ A vocat Général Bignon ) par des
dommages-intérêts. Cette Jurifprudence eft confacrée par fon
Réquisitoire & par l’A rrê t de la C o u r intervenu en confor
mité le 1 4 D écem bre 1 6 ^ z *.
*
Quant au L ibelle qu’on a répandu avec tant de profuiiorr Aud
dans le public au mois dt^ N ovem bre dernier , fous le titre
impofant de Mémoire à confultcr, tout ce qui cara£lérife un
Libelle diffamatoire sTy rencontre. i° . D éfaut de caufe : la
D em oifelle Cam p n’avoit point k fe défendre , perfonne ne
1 attaquoit. 2°. D éfaut de droiture : il ne tend point k inftruire les Juges qui n’étoient encore faifis d’ aucune a&ion ,
niais fimplement k s'emparer de la prévention publique.
3 °. FauiTeté 6c délire: il eft rempli de faits calomnieux étran
gers k fon prétendu mariage , tels que les dettes , la fabrica
tion de faufîes lettres de change , la débauche, 6cc. 6c ceux:
même qui peuvent s’ y rapporter font tournés a d’autres ufages^
T out y refpire la vengeance & l’ exécration. I l ne feroit donc
pas jufte de laifler exifter ce monument ignominieux.
O n ne s’en prendra point k la D em oifelle Cam p. Eût-elld
etc l’ame du co m p lo t, on n’ignore pas ce que peut contre'
fon Am ant une femme en fureur, quand elle croit fon amour
nieprifé y & qu’elle fe voit obligée de rentrer dans la fphere
d ou elle étoit fortie. C ’eft un torrent qu’il eft impofTible d’arrescr , 6c auquel il faut laifTer un libre cours. A ufli jufques.
dans les outrages dont elle accable le V ico m te de Bom bclIesr
il ne fcnt que la douleur qu’elle exhale. I l ne cherchera point'
d autre vengeance que de brifer les armes dont, elle s’eft fer—
vie pour le perdre.
�S’il requiert que défenfes lui foient faites de fe dire F icomteffe de Bombelles , & qu’ on lui arrache ce nom qu’ elle a
cru pouvoir,fe féliciter de perdre, ce n’eft point pour la punir
de la témérité qu’elle a eue de l’u fu rp er, ni des efforts qu’ elle
a faits pour l’a v ilir, c’eft pour rendre hommage à la vérité, &
le fixer fur une époufe refpecta b le , qui feule a droit de le
porter.
S’il requiert que l’enfant dont elle fe fert pour l’ attaquer
foit remis en d’autres mains , avec offres d’em ployer à fa fub
f iftance le peu de fortune qui lui refte , c’eft tout-a:la-fois
pour donner à fa religion un témoignage authentique de fon
attachement inviolable , & marquer fon obéiffance aux L oix
de l’E ta t, qui veulent que les enfans dont les peres fo n t Catho
liques , & les meres de la Religion prétendue réformée , même les
enfans nés hors mariage & tous autres, foient baptifés & élevés
en l ’Eglife Catholique , & enjoignent aux Juges d ’y tenir la
» D é c l.d u iF e v .
1 6 6 9 , a rt. 39 i
du 51 J a n v . i é S i ,
Edit d’ O ftobre
i 6 8 y , a rt. 8 ,
main.
Il
ne fe propofe qu’une meilleure éducation fous les auf-
pices d’ une R eligion plus pure. D u refte il n’entend point
féparer la mere d’avec l’ enfant : elle pourra le voir tant qu’elle
voudra. I l defire même que cet enfant conferve pour elle tout
le refpect qui peut lui être dû; & qu’ il ignore (s’ il eft poffible)
ou du moins qu’ il joigne fes efforts à ceux de fon pere pour
faire oublier la faute qui lui a donné le jo u r, ainfi que l’éclat
dont elle a été fuivie.
• Monfieur D E
V A U C R E S S O N , A vocat Général.
M c. L E B L A N , A vocat.
D e l’im p r . d e C H . E s t C h e n a u l t ,
ru e de l a V i e i lle d r a p e r ie
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Bombelles, Jean-Louis-Frédéric-Charles. 1772?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vaucresson
Leblan
Subject
The topic of the resource
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
validité de mariage contestée pour minorité
protestants
vices de forme
suspicion de bigamie
diffusion du factum
opinion publique
rapt de séduction
actes de mariage
faux
Description
An account of the resource
Titre complet : Plaidoyer pour Messire Jean-Louis-Frédéric-Charles Vicomte de Bombelles, sous-aide major d'infanterie, chevalier-novice de l'ordre royal et militaire de Saint Lazare, intimé, défendeur et demandeur. Contre demoiselle Marthe Camp, fille majeure, appelante comme d'abus, et défenderesse. Et contre Antoine Maugis, tuteur ad hoc d'Antoinette-Louise-Angélique-Charlotte de Bombelles, aussi appelant et demandeur. En présence de dame Marie-Françoise de Carvolsin, épouse dudit Vicomte de Bombelles. Et de dame Magdeleine-Claudine-Charlotte-Renée de Bombelles, veuve de messire Antoine Hennet, lieutenant-colonel d'infanterie, intervenante.
Annotations manuscrites: condamnation du mari.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Ch. Est. Chenault (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1772
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
56 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0803
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0801
BCU_Factums_G0802
BCU_Factums_G0804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53052/BCU_Factums_G0803.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montauban (82121)
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de mariage
diffusion du factum
Faux
opinion publique
Protestants
Rapt de séduction
suspicion de bigamie
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
validité de mariage contestée pour minorité
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53051/BCU_Factums_G0802.pdf
2f76af161aa5e952db7b61cfad8f8451
PDF Text
Text
P L A ID O Y E R
P O U R Demoifelle A n t o i n e t t e - L o
l iq u e
-C
h a r l o t t e
fous l'autorité d'A
ad hoc.
B
d e
n t o in e
u is e
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a u g is
,
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n g e
procédant
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o m b e l l e s
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CONTRE
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C h a r l e s
F r é d é r ic
Vicomte
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B O M B E L L E S ;
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a r v o is i n
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u u X ù ^ c t:
6 JfXc, ^ ^ * * ^ 1
DE BOMBELLES,
y
E S S I E U R S ,
J e
cro iro is m a n q u e r à m a C a u fe , & p lu s e n c o r e p e u t - e tre
^à vous même f i p o u r l ' é t a b l i r , j ’c m p l o y o is ici à m o in d re
a r t e l l e e f t bien f o n d é e , & v o u s ê t e s f e n f i b l e s : n o u s avo n s
A
it»,.)
Îm
* ^ j C 3c r
Vicom-
M
f o t , **»
*■
*
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%
pour nous la Nature & les Loix. Q u ’ai-je donc k faire, fïnorc
de juitifier les prérogatives de l’une par les difpofitions des
autres , & de prouver que , quand la premierc nous appelle r
les fecondesvous invitent à nous accueillir?
Vous voyez devant vous une enfant dévouée,dès l’âge le
plus tendre, aux plus cruelles traverfes;
une enfant aban
donnée d’un père qui femble ne la reconncître que pour la
couvrir d’ignominie; une enfant qui n’a eu jufqu’k ce moment
pour reiTource que les pleurs d’une mere condamnée à parta
ger fon opprobre par l’époux qui l’a féduite.D 'une part, elle réclamé un état, fous la promeiTc duquel
elle a reçu la nailTance. D e l’autre, elle attaque un engage
ment poiléricur qui le détruit. Elle demande l’honneur pour
fa m ere, l’exiftence pour elle-m êm e, 6c le moyen du repentir
pour un pere imprudent, qui gémit fans doute de s’être ôté
le pouvoirdelafeconder,qui rougit de l’humiliation h laquelle
fon fan geil réduit, q u i, s’il conferve encore quelques fentimens de délicatcfle & d’hum anité, s’il n’eft ennemi de fa gloire
autan: que de fon bonheur, fait au fond de fon amc des vœux
peur notre fucccs.
Q ue cette façon de penfer doit être douce & facile pour
lui ! Nous avons du moins écarté, de notre part, tout ce qui
pouvoir y faire obilaclc. Vous entendre/ k quoi fe bornera f i
véritable époufe, & dans quelles fortes de conclurions elle fe
renfermera. Cruellement outragée, cxcuiable iï elle cherchoit
la vengeance plus qu’une réparation ; autorifée à pourfuivre le
châtiment d’un délit, dont elle a été l’o b jet, 6c jufqu’ici la
vi& im e, elle fe tait: c’efl dans les foiblcs mains de fa fille
qu’elle remet fa défend*. Elle oubliera tout ce qu’a fo u flcrclcp o u fe, il la mere cil une fois fatisfaitc.
�cU '
3
Le V icom te de Bom bcllcs pourroit-il Te diflimuler com
bien cft avantageux pour lui l’aipeét fous leqiiel cette Caufc
fe préfente? Les' deux Adverfaires qu’il force aujourd’hui u
l’attaquer, doivent fans doute lui être également chercs ; mais
il fentira fans doute auili quelles ne font pas également redou
tables. Il n’y a point de reproches que la femme ne fût en
droit de lui faire, & il y en a peu que fa fille ne foit obligée de
iupprimer. L ’une auroit le privilège de lui demander compte
prefque de toutes fcs penfées ; l’autre ne fe permettra d’exami
ner qu’une feule de fes a&ions : la première pourrait, fans en
courir de blâm e, devenir une ennemie inflexiblement acharnée
à fa perte, & regarder comme un triomphe, ou du moins
comme une indemnité pour elle , & l’inftruition qui porteroit
Je flambeau fur toute la vie de fon fédu&eur, & le Jugement
qui le condamnerait à une peine infamante ; la fécondé , intéreflee a la gloire de fon propre nom , cil bien loin de chercher
ù le flétrir ; elle n’attaque une fois celui à qui elle le doit, que
pour le refpeiler toujours. Elle détefteroit fa vi£toire, s'il falloit qu’elle coûtât l’honneur à l’auteur de fa vie.
V oyez donc, M e s s i e u r s , de combien de refTourccr» nous
prive ce nouveau plan de défenfe, <k quels avantages il laiiïe
au V icom te de Bombcllcs. Il ne nous obligera pas fans doute à
le changer : vos cœ urs, & le fien peut-être, nous dédomma
geront de ce facrificc. En fongeant à ce que nous n’aurons
pas dit, vous penferez à ce que nous aurions pu dire ; <5: luimême , en combinant les armes dont nous aurions eu droit
de nous fervir, avec celles dont nous allons faire ufage, fc dé
fendra difficilement de quelques retours amers fur fcs egarcmens pafles : il reconnoîtra une fille à la crainte rcfpe£tucufe
qu’elle aura de rendre fon perc méconnoiflâble.
A ij
�4
L a validité du fécond mariage contra&é par ce pere aveugle,
eil l’objet de cette Audience. Nous demandons qu’il foit dé
claré abufif. A vons - nous qualité pour hafarder cette entreprife ? Avons-nous un intérêt prenant à en pourfuivre la réuflïte ? C ’eft ce que je vais, M e s s i e u r s , examiner d’abord. C e
fera le fujet de la premiere partie de notre défenfc.
Après avoir prouvé qu’Antoinette de Bombelles réunit en'
fa faveur ces deux fortes de droits, je difeuterai ce fécond ma
riage, contre lequel nous follicitons votre rigueur"; je cher
cherai s’il peut fe foutenir devant la Loi ; ôc ii ce lien que la?
Nature a réprouvé en refufant d’y attacher la' plus, douce récompenfc , le fruit le plus précieux du mariage, la fécondité r
doit être plus ménagé par les Tribunaux..
Dans le cours de cette difcuilion , comme nous- avons ici
deux femmes qui revendiquent chacune de leur coté un titre,
ex clu fif, comme c’eit de votre A rrêt feul qu’elles peuvent au
jourd’hui tenir une dénomination qui n’admet point de par
tage , je ne donnerai ni à l’une ni à l’autre ce titre qui fait
l ’objet de leurs vœux. A fin de prévenir toute équivoque , je les
défignerai Amplement par les noms qu’elles portoient avant
cette union funefte qui les a rendues toutes deux malheureufes..
La fille au contraire n’a- point de rivale; c’e ftla feule à qui
j appliquerai, dès à préfent, le nom de fon pere.
Je dis , M
essieurs
, qu’A ntoinette de Bombelles , née le
A oû t 17 6 7 , & baptifée le 30 du même mois dans KEglifc Paroliliale de Saint Sauveur & Saint Roch de Bioulle prbs
Mon
tauban , a quilité pour interjetter appel comme d’abus du fé
cond mari-ge du Vicom te de Bombelles. Pour cela , il fuffit
�&
1
qu’elle Toit conflâmment née de l u i, & d’un mariage préexis
tant, aux d roits, à la légitim ité duquel préjudicieroit celui
qu’elle attaque. Sur le premier p o in t, il n’y a , il ne fauroit y
avoir aucune difficulté.
'
Antoinette de Bombelles eft incontefinblement fille du "Vi
comte: il l’a avoué lui-même , & depuis le commencement duProcès. Dans des conclufions fignifiées le 5 Mars de cette an
née, il déclare qu’il a toujours reconnu pour fa fille AntoinetteLou'ife - Ange leque - Charlotte , nie de la Demoifelle Marthe
Camp. Il va jufqu’à. énoncer qu’i/ entendfupplier le R o i de la
légitimer parfes Lettres. Il demande même que cette enfant
fo it enlevée à fa mere, dont elle eft Punique confolation. I l
veut qu?à l’âge de quatre ans elle foit rémife dans un Couvent Y
aux offres qu’il fait d'en payer la penfion.
Ces offres illufoires, ces concluions déplacées dans leur:
énicmble & cruelles dans leurs détails , exiftent. I l en refaite,,
fans aucune efpece d’ambiguïté , que l’enfant eft bien née de
lui & de laDem oifelIe Marthe Camp: Mais à quel titre ?
Il aiîcclc , en- la rcconnoifTant ,• de joindre au nom-honora
ble de fille , une épithete faite pour ne pas déshonorer, &
laquelle l’ufage attache cependant un fans ignom inieux, celle
de fille naturelle. Q ir entend-il par li*?-Veut-il dire que cettcs
enfant foit une de ces produirions du libertinage & de la fo ibleiFe,- auxquelles la L oi refuie un rang cîanvla fociété, &c qu’elle
punit des égaremens de leurs auteurs ? Il veut la faire légiti
mer ! La rcgardc-t-il donc comme le fruit drune cùnjonéliôn
illégitime,' &: clVcrchc-r-il, par fadoucifllm cnt qu’il pvopofé'
en faveur de la' fri le, k-diminuer l’infulte qu!il ne craint pas de
faire a la mere ?
N on , M e s s i e u r s , ce ne peut p:.s être la fun dcflliii : ce
�G
n’e il pas là le fcns dans lequel il entend le m ot de fille natu
relle : ou il a donc bien changé de langage & de fentimens. I l
a donc oublié ce contrat figné de l u i , drefîe par un Officier
public , muni des noms des témoins appellés pour certifier &c
confolider des droits qui faifoient alors Ton bonheur! I l a donc
oublié ce teftam ent écrit tout entier de fa main , dans lequel il
confirm e l’engagem ent ftipulé par le contrat, &aiTure non-feu
lem ent à cette époufe qu’il dédaigne aujourd’hui , mais aux
enfans qui naîtront d’e lle , tous les droits héréditaires qu’il pou»
vo it tranfm ettre par fa volon té! I l a donc oublié cette fou le
de lettres qui d é p o fe n t& d e la réalité des liens dont il s’étoit
chargé , & de la fatisfa&ion avec laquelle il les p o r to it, & de
la félicité qu’il attachoit à la naiiTance de cette même enfant
à qui il re fu fe , non plus des droits pécuniaires dont elle eil peu
jalo u fe, mais un nom , un titre, un é ta t, dont rien ne pourroit la dédom m ager s’il fa llo it qu’elle le perdît !
C es pieces font précieufes, M sssie t jr s ; il faut les rem ettre
fous vos yeu x: elles font un des principaux foutiens de la C aufe,
& ne feront pas le m oindre fujet d’étonnem ent des perfonnes
qui voudront comparer ces expreffions anciennes du cœur du
V ic o m te de Bom bellcs , avec les démarches a&uelles qu’un
autre intérêt lui fait hafarder en ce m om ent ( i) .
Contrat de mariage.
» L ’an mil fept cent foixante-fix >& le vingt-ncuviem c jour
)) du mois de Janvier , après m id i, dans la maifon du fieur
( i ) C es Pieces ont déjà etc imprimées à la fuite d’un M ém oire à confulter, pu
blié vers la fin de l’année derniere par la mere de l’enfant qui réclame ici fon ¿fat j
les originaux font fous les y e u x de M , l’A v o cat G énéral.
�s-) Merignac , N égocian t, au fauxbourg de Villebourbon-lfc33 Montauban , régnant Louis X V , pardevant nous A vocat au
33 Parlement, Notaire royal de Monclar en Q u e rc y , fouffigné,
33 & en préfence des témoins bafnom inés, ont été conilitués en
v pcrfonnesMeilire Tean-Louis-Frederic-Charles de Bombelles,
35 Ecuyer, Chevalier de l’Ordre R oyal & Militaire de Saint
5) L azare, d’une part ; & Dem oifelle Marthe C a m p , fille de
5J M. Pierre Camp , Bourgeois, 6c de Dem oifelle Marthe Meri-
J jg n a c, mariés, habitans dudit fauxbourg de Villcbourbon35 lès-Montauban , ParoiiTe Saint A ra n s, procédant du confen33 tement de M. fon pere , ici prefen t, d’autre part ; lefquelles
33 Parties, de leur bon gré, fous réciproque Annulation & accep-
tatio n , ont convenu qu’entre ledit Melfire de Bombelles &
33 lad. D em oifelle C a m p , il fera fait & accompli m ariage, qui
33 fera célébré fuivant les Loix & formalités du Royaum e à la
3>premiere réquifîtion des Parties , en faveur duquel ledit M.
)3 Camp a donné «Scconflitué à la D em oifelle Camp fa fille , fu33 ture époufe, & celle-ci audit Meflïre de Bom belles,fon futur
33 époux, la fomme deSooo livres, tant de fon ch ef propre que
33 de celui de ladite Dem oifelle de Merignac fon époufe. . . .
33 Fait en préfence de M. Sidrac N oailh ac, B ou rgeois, & de
J3 M. Bernard Caufte , N é g o c ia n t, habitans de cette ville ,
>3 fignés avec les Parties & nous, Bombelles , Marthe Camp ,
33 Pierre C a m p , Noailhac aîn é, B. C a u fte, Cam bon , Notaire
33 royal. Signés à l’original , lequel cil contrôlé <Sc infinué à
>3 Monclar le y Février i y 66 , par la Coftc , Com mis , qui a
»3 reçu en tout 170 liv. 10 fols. Expédié par nous Jean-Jofepli
>3 la Coite , N otaire royal de M onclar , fouffigné, fucceiTeur
& détenteur des minutes & Office dudit feu M e Cajmbon«
y>
foi de q u o i & c >3.
�jB
Teftament de M . de Bombelles.
« A u nom de D ie u , & c . Nous fouffignés, M eiïïre JeaaLouis-Frédéric-Charles de Bom belles, Chevalier de l’Ordre
>5 Royal , & c. fils de feu Meiîire François-Gabriel de Bom belp le s , Chevalier de Saint Louis, & de Dan;e Jeanne-Catherine
» de Zolles, mariés , habitan? de Monta^ban , étant en bonne
v fantéôc en tous mpsbon§ fens; confidérantl? fragilité de cette
n viej & l’incertitude de l’heure de la m ort, çi difpofé de mes
» biens par mon préfent teftam ent, que j'a i écrit moi - mirve
» en la forme fuivante. En premier lieu , je prie D ieu de me
v pardonner mes pochés , & de recevpir mon ame en Paradis ;
» voulant qu’après mon décès, mon corps foit enfçvel; avec
s) tels honneurs funebres qu’il plaira à mon héritier bas nommé ;
V & quant à mes biens, je donne à Marihe Camp, ma cherc
v époufe y la jouiiTance , pendant fa viç , de mes entiers
» biens & hérédité , à la charge par elle d’erç acquitter les
p charges annuelles , y faire faire les réparations nécefTair
3j res , & de nourrir & entretenir dans fa maifon, à fon pot au
5? fe u , fes enfans qui feront provenus de notre mariage, jufv qu’à ce q.uils aient accompli leur vingt-cinquieme année, ou
» qu’ils viennent à fe marier ; au moyen de quoi je veux que
v madite époufe ne puiiîe être obligée de rendre ^ucun compte
p de fes jouiillmçes ^& en cas que le compte lui en jferoit dcT
>7 mandé, j.e lui donne & l,egue le reliquat, & conilitue en ce
p mon héritière particulière, & e n tous & chacun mes biens
p meubles & immeubles ? noms , yoies, droits , raifons & ac^
é tio n s , préiens & à venir. Je nomme & inilituc pour mes
» héritiers univerfels & généraux, les poithumc & pofthup/jes
p dont
�41
9
*» dont ladite Dame mon époufe pourroic être ou devenir en» ceinte, venant en lumière de notre mariage , pour par eux en
y jouir après mon décès, & après le décès de mon épouje , & en
» faire & difpofer à leur plaiiîr & v o lo n té, en payant mes dettes: 6c en cas où je décéderois fans enfans ou pofthumes ,
v audit cas je nomme & inftitue mon héritiere univerfellc &
» générale, ladite Dam e Marthe Camp, ma chere époufe, pour
» par elle en jouir, faire
difpofer de mes biens & hérédité ,
*> après mon décès , à fes plaiiirs & volon tés, en payant mes .
» dettes. E t , en cette forme , j’ai fait mon préfent teftam ent,
9) voulant qu’ il vaille comme teftament ou comme codicile ,
■
»donation, & difpofition à caufe de m ort, & en la meilleure
» forme que de droit pourra valoir; révoquant tous les autres
» teftametis & difpoiltions de derniere volonté que je puis avoir
faits : voulant que le préfent foit le feul valable. Et après l’a» voir lu ôc relu, & trouvé conforme à ma volonté, je l’ai
9> iigné a la fin d’icclui , & au bas des autres pages. A Mon*
•>* tauban , ce -5 A vril 1766. Signé3 B o m b e l l e s ».
Extrait des Lettres de M . de Bombelles à fa femme.
« A d ie u , chere époufe , je t’ embraffe un million de fois. D e
» Lim oges, du 14 A vril 176 7.
» Je ne cefie de pleurer comme un en fa n t, depuis que je me
” vois éloigné de ma chere époufe , qvie j’adore. D ’Orléans,
« le 10 A vril.
» Sois convaincue du plus tendre amour qu’a pour toi ton
v cher & tendre époux. 14, A vril 1767.
» Ménage ta fanté, je t’en fupplie , ma chere & tendre amie.
» N e néglige pas de me circonftancier l’état 011 tu te trouves,
B
�4*
ID
» Ta groj/ejeeü-eïïe heureufe ? Tes maux d’eftomac ont-ils un
» peu diminué ? . . . .
Crois-moi pour la v ie , avec les fend
ît mens que tu mérites , ton tendre époux. D e Vien^on, du 19
n A vril 176 7.
» Adieu , ma chere amie. Je t’embraiTe un million de fo is ,
» & fuis avec la plus tendre am itié, le plus fidelle des époux,
» petite coquine, que tu es. D e L ille , du 30 A vril 176 7.
» N e penfc pas qu’un garçon doive me fatisfaire plus qu’une
i) fille .N e vient-il pas de toi? V oilà la feule raifon qui me le
» rend cher..............
« C ............N ........... & la C .. . . te font les aifurances les
» plus vives de leurs refpeéts. Peut-être , fi j e nétois ton m ari,
» ils me chargeroient de toute autre chofe. D e L ille , du x i
» Mai 176 7.
» Q ue je fuis heureux , ma chere amie , d’apprendre que tu
» viens de donner le jour à une petite fille qui fera le bonheur
» de ma vie! E lle te reiTemble aÎfurém ent, c’eil tout ce que
v je defirois. Ma coufine B .........ne favoit trop comment me
» l’annoncer ; elle fembloit craindre qu’une fille n’eût quelque
» chofe d’alarmant........Ma fanté délabrée depuis long-tems ,
» éprouve aujourd’hui que le meilleur remede eit la douce fa» tisfaélion d’apprendre que ma tendre époufe fe porte bien ,
» & qu’elle me donne une fcconde elle-même. Je fuis d’une
» gaieté inconcevable, ton état & tes couches heureufes y ont
v la plus grande part. Tous les Officiers du Régim ent te fon t
v mille com plim ens, fur-tout C ........., N .......... & la C . . . . qui
v t’aiment autant que moi. A d ieu , ma chere amie ; recommande
» à la petite d’être bien fa g e , & d’avoir le cara&cre auifi doux
n que celui de fa chere & tendre mere. Embraife-la unm illion
33 de fois de la part de celui que tu crois être fon pere. En-
�4
?>
IT
»gage-la k le bien aimer ; il ne lui fera pas difficile de fuivre
» ton exemple........ ' . J’ai eu la vifite de plufieurs de mes ca)> marades ; dans le nombre il y en a trois qui font mariés,
» & qui ont reçu aujourd’hui la nouvelle des couches de leurs
» femmes; il femble que nous nous fayons donné le m o t , car
» elles ont toutes fait des filles........... Je leur difpute à tous le
« plaiiir qu’ils reffentent, parce que je crois qu’aucun d’eux ne
» doit aimer autant leur f^mme que m o i, parce que la mienne
» eft la plus aimable de toutes. J ’oubliois de te faire part que
)> notre ami C ..........veut être ton gendre, ainii garde lui bien
» fa petite femme. D e L ille s du 7 Septembre 17 6 7 .
» T u me fais toujours des reproches , ma chere a m ie ..........
v Connois mieux mes fentimens pour t o i , & rends juftice à.
» leur fiabilité ; crois que difficilement l’on fe détachcroitd’un
» objet comme toi. Je n’avois pas befoin de la douce fatisfac» tion d’être pere , & de ce refpeftable titre , pour t’aimer avec
)? plus d’ardeur. Mes fentimens pour toi font à l’abri des rév volutions du tem s, ils ne fauroient s’altérer.. . . .'Je vois avec
» chagrin que tu foufFres beaucoup en nourriilant........ C011fidere que tu n’es pas ta maîtreffe en pareille circonilance ,
» & que tes jours font également précieux à. ta chere fille
»? comme à. ton tzndre époux..........J’ai defiré toujours que les
*> couches fuiïont heureufes pour ma tendre épouje...... Ma chere
» a m ie, ne doute plus de ma tendreiTe pour toi ; elle eft trop.
« légitime , pour que je ne deiire iîncéremcnt de t’en convain
c r e ........ Ma fagefTe 6c ma fidélité me placeront comme l’e» xemple des maris. Quand on a une femme telle que t o i , l’on
>5 n’a pas grand mérite à referver tout pour elle. C ........ , qui
3>n eft point preiTé de rompre le célib a t, attendra que la vir» ginité de la petite foie ¿t maturité ; ainfi il t’en rend rc/ponH ij
�4 1\
1Z
v fable. Fais enforte de la lui conferver. I l fe réjouit d’avance
» du plaiiir qu’il aura de cueillir le jour, des noces ce fruit il
» rare dans le fiecle ou nous fommes , & qui rarement fe cro» que dans le lit nuptial ; mais il efperc que la petite fuivra
» l’exemple de fa mere. JDe L ille , du 0.7 Septembre 1767.
v L e Monfieur que vous citez comme ayant porté obftacle
» aux nouveaux liens que je devois form er, n’exifle que dans
» l’imagination des auteurs de cette impoilure. Mes démarches
» auprès de mes parens., pour donner quelqu’authenticité à
jy ceux que fa ijo r m is avec vous , détruifent ce prétendu fait....
» Je ne dois qu’à vous , M adam e, pour votre tranquillité ( s’il
» eil vrai que vous puiiïiez l’être ) la certitude que,^/? vous■
v n’avie^ que ma fm v le parole pour tinviolabilité de mon fer-» m ent, ce contrat fer oit aujfifacrc que celui qui ejl une preuve» inconteflable des droits que vous aure?L fur moi A tant qu'il cir>
» culera une goutte de fa n g dans mes veines. D u 23 Mars 1769..
» L e voile du myiïcre m ’a offert à tes yeux comme un cri—
v mfnel , qui tramoit fourdement des moyens de rompre des>
v liens qui ri ont befoin d ’autre garant qui le fru it précieux.
jj que tu as porté dans ton fein . Rends-m oi plus de juftice ; &c
» n’imagine point qu’une paiïion brutale ait pu allumer 1c»flathbeaudu tendre am our,quiem braferatoujours mon amei.
y> D u 25 Mars 1770
Tels étoient alors les ientimens du V icom te de Bonibelles : telles étoient les expreflions de fon coeur enflammé'
drune paiïion honnête, & qu’il juroit de refpe&er toujours !i
Peut-il , après les avoir ainii confignées par é c rit, nier
l ’exiftence, la réalité d’un mariage entre lui & celle à qui il lcsadreiTe? Vous v^nez d’entendre le contrat qui l’annonce, le
ccftamcntqui le fuppofe, les lettres qui le ratifient. Dans quel
>
�.4/
. . .
13
cfprit peut-il, aprbs l’exhibition de tant de monumens décififs,
relier le moindre doute à cet égard?
M ais, dira-t-on, fuivant les L oix du R oyau m e, un mariage
n’eil valide qu’autant qu'il a été célébré régulièrement. Il doit
exiiler des traces de cette célébration. Rapportez-vous l’acte
qui la conilate?
V oilà fans d o u te, M e s s i e u r s y ce qu’on nous objeélera ; &
moi je ferai à notre Adveffaire a mon tour une autre queftion y
qui fervira de réponfe à la\ienne. L ’acle de célébration, l’ex
trait des regiilresqui le renferm ent, efl-il la feu le, l ’uniquepreuve de laquelle les L oix faflent dépendre l’état des perfonnes mariées & le fort de leurs enfans ? N ’ y a-t-il pas des cas où
l ’on peut être difpenfé de le repréfenter? O ui , . M e s s i e u r s , il y
en a, & plusieurs qiie les Ordonnances elles-mêmes ont prévus.Celle de* 1639 n’admettoit point d’exception L c e t égard ; i l
falloit ou être infcric fur un reg iilrc,. ou fubir la marque honteuie d’une flétriiTure ineffaçable.- La négligence d’un pafteur
ou celle du gardien de ces dépôts précieux fuffifoit pour plon-ger des familles dans le défefpoir , & pour anéantir l’état le
plus confiant, le mieux reconnu d’ailleurs.
O n ne tarda pas h fentir ce qu’avoit de dangereux l’ exceflive
févéritéde cette Loi. L ’ Ordonnance de 1667 tempéra la rigidité
de la Loi précédente. E lle admit par l’article 14 du titre x o
a faire preuve d’un mariage , tant par titres que témoins yf i lesl'egijlres font perdus, au s 'il ri y en a jamais eu.
Sommes-nous dans le cas-de cette exception favorable ? E h !’
M e s s i e u r s , qui pourroit en douter ?
Je ne craindrai point de le dire dans ce fan&uaire où l’huma-’
toté n’a pas moins de dro.ts que la L oi elle-m êm e, dans ce
templc augufte où la Juilice s’occupe à pefer les a£lions des
�*4
hommes & non pas feur culte. L a D lle Marthe Camp n’à ja
mais caché le fien. Elle a mieux aimé paroître aveuglée par une
erreiir héréditaire, que de fe biffer un inflant foupçonner d’impoflure : fidelle h la croyance de fes p eres, malheureufemenc
attachée hune difcipline qui n’eft pas la nôtre, elle n’a pas voulu
h cette infortune, dont on ne peut que la plaindre, joindre une
fauifcté qui l’auroit fait rougir : elle ne le diifimule pas ,
M es
elle eft née Proteftante ; & cette faute de la deftinée »
cette faute involontaire de fa part, en a néceffité d’autres dont
sieurs j
elle n’a pas été maîtrefTe de s’exempter.
Je ne toucherai point ici a cette queftion fi délicate, fi intéreflante, & tout îi la fois fi redoutable , h ce que l’on a cru du
moins,de l’état des Proteftans en France. La politique s’étonne de
la trouver encore indécife. La Religion éclairée ne s’oppoferoit
peut-être point h ce qu’on la décidât : la raifon , la juftice, l’hu
manité l’exig en t, & il femble qu’il ne feroit pas impoifible de
trouver des temperammens qui conciliaiTent dans cette grande
affaire la dignité du culte dom inant, le refpcct dû aux L oix qui
le rendent cxclufif, & l ’intérêt particulier, avec la paix & la
fureté co m munc.
Mais en attendant ce grand événement dont fauteur feroit
béni de toutes les générations, la néceffité a fait établir dans les
Tribunaux une Jurifprudence qui tient lieu d’une Loi précife ,
& en produit imparfaitement les avantages : elle a fait confacrer le principe de n’apprécier les mariages des Protcftans que
par la polfdfion. Quiconque a pu conftatcr que fes parens
ctoient malheureufement engagés dans la Réform e , a été dès
ce moment mis fous la fauve-garde de cette maxime auili fage
que refpe&able : il eft maintenu dans ion état, fans autre pré
caution que d’examiner s’il en a joui ; on fuppofe pour lui qu’il
�A*
n’exiftoit pas de regiftres ; '& les collatéraux qui font ordinaire
ment les affaillans dans ces fortes de combats, font déclarés nonrecevables à en exiger la repréfentation.
Cette Jurifprudencc éclairée autant qu’humaine , & faite
pour honorer le cœur des Juges, non moins que leurs lumiè
res , a produit dans tous les pays où ces efpeces font plus fré
quentes, des Arrêts qui la conftatent : le plus remarquable & le
plus moderne eft celui du ^Juillet 1 7 7 0 ,rendu a T ou lou fefu r
les concluiions de M. l’A vocat Général Cambon : il s’agiiToit
précifément de la queftion que nousexaminons. «N ous favons,
>3 difoit aux Juges cet illuftre M agiftrat, qu’il n’eft pas en votre
33 pouvoir d’établir une forme de mariage pour les Proteftans ;
» ce n’eft pas auifi ce que nous vous propofons ; nous voulons
33 feulement que lorfqu’ils o n t vécu comme de légitimes époux,
33 qu’ils ont été reconnus pour tels,foit dans leur famille, foit dans
33 le public, on ne puifTe pas troubler leurs enfans dans la pof33 feiïion de leur état en les obligeant à rapporter l’a£te de celc—
33
bration du mariage; nous voulons qu’à cet égard ils foient
33 traités comme les C ath o liqu es.il ne faut pas fe demander à
33 foi-même ii l’on eft perfuadé de l’cxiflence du mariage dont
33 on contefte la vérité ; mais il faut fc demander fi l’intérêt pu33 blic n’exige pas qu’on le préfume, & c : une expérience malhcu-
3) reufe a fait connoitre l’inutilité des moyens dont on s’eft fervi
» jufqu’à ce jour pour déraciner l’erreur ; & nous ne doutons
33 pas qu’à l’avenir on n’en emploie qui feront plus conformes
33 aux réglés de la faine politique & aux L oix de l’humanité.....
33 Vous n’avez point à juger fi un mariage qui n’a pas été con33 tr#&é en face d’Eglife eft valable ; mais fi un enfant né de
,} deux perfonnes , dont l’union a toujours été réputée lé)y gitim c, peut être obligé à faire preuve de fa légitimité par la
�4 *
16
» rcmife de l’ailé de la célébration du mariage. Cette queilion
» doit être décidée en faveur d’Etienne Salles, à caufe des cir->
» confiances ».
Le Parlement fuivit de point en point les concluiions de M ,
.l’A vocat Général. L ’enfant fut difpenfé de repréfenter l’aclç
de célébration du mariage de fes auteurs, & déclaré légitime.
E t il ne faut pas croire que cette indulgence foit une faveur
pour ceux qui ont le trifle privilège delà revendiquer, ni qu’elle
puiiïe donner lieu h des abus : ce n’eft jamais une faveur que
d’être réduit à la moitié
des droits
dont on p o u r r it efpé-
rer la totalité. O r , fuivant cette Jurifprudence, les Proteflau?
n’ont qu’une maniéré de conftater l’état de leurs enfans. Les
C atholiques, j’ai prefque dit les nationaux, parmi nous en ont
deux : même en politiquç , les premiers expient donc bien leur
erreur par ce retranchement de leurs facultés,
Enfuite, quel abus peut-on craindre d’un privilège reilreint,
d’un privilège que tant de circonllances peuvent rendre inutile,
& contre lequel le moindre foupçon peut prévaloir?Ce n’eil pas
ici le lieu de m’étendre fur cette queilion ; il me fuffit d’avoir
établi qu’il cil des cas ôù la rppréfentation des regiftres n’eit pas
néceilhire pour opérer la certitude d’un m ariage, & que les
unions dps Proteitans foijt fj.ir-t.out celles auquclics on doit ap
pliquer cette maxime.
Maintenant qu’exige-t-on de nous ? Je fomme notre adverfaire de s’expliquer fur cet article ? Contcftez-vous le mariage
de ma m ere, ou ne le cootefkz-vous pas ? Si vous ne le contcitez pas, vous le rcconnoiilez donc ; & de votre aveu, j’ai la
qualité nécciTajrc fuivre eu Juflice la demande que j’ai for
mée.
Si
�*9
17
Si vous le conteilez, il faut donc m’ admettre îi le prouver par
témoins. J’ai pour moi les préliminaires que l’Ordonnance exige.
Cette même L oi de 1667 qui , à l’article 14,
du titre t o ,
permet la preuve teilimoniale pour découvrir la réalité d un
mariage , au défaut des regiftres, exige cependant, en général,
à. l’article 3 du même titre, un commencement de preuves par
écrit. O r , de ce côté-là , qui a jamais été en é ta t, plus que m oi,
d ’accomplir laregIe?D es commencemensde preuves par écritl
Eh ! j’ena i de toutes les\fpeces : contrat qui a dû précéder la
célébration ; teftament q u i, d’après les termes dans lefquels il
ê(l co n çu , l’a néceiTairement fuivie ; lettres qui,par la force des
expreiTïons qu’elles contiennent, feroient prefque capables d’y
fuppléer. C ’eft déjà une preuve complette que je vous offre, «5c
les dépolirions des témoins ne feront que la développer. Elles
n’y ajouteront rien dont la Juitice ne doive dès à préfent être
convaincue.
Expliquez-vous donc fur cet article. Si vous vous taifez ,
votre iilence me tient lieu de preuves ; & ii vous ouvrez la
bouche pour dénier ce que j’avan ce, je demande à la faire.
Mais vous en connoiiTez trop la facilité 8c la certitude ; vous,
ne vous y expoferez pas. V ou s chercherez à l’éluder ; ce n’eft pas
l’exiftence du mariage que vous attaquerez, mais fa validité.
Vous prétendrez d’abord, je le prévois, que ma mere feule étoit
Proteftante ; vous foutiendrez que vous étiez Catholique , &
que par conféquent l’exçeption fur laquelle je m’appuie ne
peut pas avoir lieu.
Mais, que'dis-je? N o n : vous ne hafarderez point cette aiTer~
tion imprudente. V ous êtes précautionné par vous - même :
vous êtes dirigé par des Confçils éclairés : votre propre coniC
�i8
cience vous fervira de guide plus fur en core, plus inilruic que
ceux même dont vous avez fait choix. Je fuis votre fille ; je
veux l’ê tre , &c je me garderai bien de m’emporter à des mena
ces contre l’auteur de mes jours ; mais lui-même m’épargnera
le chagrin affreux de le voir confondu fur cet article : il
ne forcera point ma merc à rompre le filence qu’elle s’imp o fe ,à rappellerà fon volage époux un tems où leurs cœurs
fembloient moins unis encore par un penchant m utuel, que
leurs efprits ne l’étoient par la conformité de la croyance. I l ne
la réduira point à la trille néceifité de prouver que pour la féduire , il a feint des engàgemens bien plus férieux que ceux
de l’amour.
I l y a plus : quand le danger attaché à cette excuiè ne le
détourneroit pas de s’en fervir, le peu d’utilité qu’il en pourroit tirer la lui feroit fans doute abandonner. C e n’eil pas fur
les L o ix du Royaum e qu’il prétendroit fonder cette diftin&ion
artificieufc, & celles de l’Eglife la profcrivent avec indigna
tion. U n des Pontifes qui en a le plus honoré le trô n e, Benoît
X I V confulté fur la validité des mariages entre Réform és dans
les Pays-Bas, commence par décider qu’ils font valides d’un
Proteilant à l’autre , au point que fi tous deux faifoient abju
ration , ils n’auroient pas befoin de réhabiliter leur union de
vant un Miniftre catholique.
Qiiod attinet ad matrimonia ab hereticis inter Je celebrata
non fervatâ formaperTridenttnumprefcriptâ, quccque inpojlerum contrahentur, dummodo alïttd non objliterit Canoniciim
impedimentum ,SancIitas fua Jlatuit pro validis habenda ejfe:
adeàquc f i continuât utrumque conjugem ad Catholicœ Ecclefïce
Jlnum fe recipere
eodem „ quo antea conjugali vinculo ipfosi
�19
emnino teneri} eùâmfi mutuus confenfus coram Parodia Catholïco non renovetur (1).
Il prévoit enfuite le cas où le V icom te de Bombelles pré
tend fe trouver : & f i l'un des conjoints feulement ejl Catholi
que 3 continue le Pontife , fa Sainteté déclare que le mariage
ejl valide. L e fidele doit faire tous fes efforts pour amener l’au
tre à la connoiifance de la vérité ; mais en attendant, i l faut
toujours q u ii f e fouvienne qu'il efl lié d'un nœud indiffoluble.
'V
Çhiod vero fpeclat ad ea conjugia quœ 3 abfque forma à Tri
dentino Jîatutâ contrahentur à Catholicis cum Hœreticis } fiv è
Catholicus virHœreticam feminam in matrimonium ducat}fivè
Catholica f emina Heretico viro nubat. . . . S i hujufmodi ma
trimonium fit contracium aut in poflerùm contralti contingat>
Tridentini forma non fervatâ y declarat SanBitas fu a
alio non
concurrente impedimento 3 validum habendum effe.......... feiens
conjux Catholicus f e ifiius matrimonii rinculo perpetuò ligatum iri (z). O n n’a jamais rien dit de plus précis, de plus re
la tif à. laCaufe.
.
.
M ais, j’étois mineur, direz-vous , mes fermens n’ ont pu
me lier dans un tems où la Loi m’ôtoit le pouvoir de difpofer de
moi-même. Je rétra&e dans un âge plus mûr ces paroles que
la foibleiTe, la fédu&ion m’ont arrachées. L a D em oifelleCam p
étoit plus âgée que moi. Elle a-com m is un rapt en ma perfonne ; & loin d’avoir à craindre de jouer ici le perfonnage
d’accufe , ce feroit h moi à prendre celui d’accuiateur.
j
’
(1 ) V o y e z la Déclaration du Pape B enoît X I V , du 4 N ovem bre 1 7 4 1 , publiée
ce titre.
(0
Ibid.
c iî
�2.0
Oferez - vous
produire
i
ce moyen de juftification plus
que le précédent ? Oferez-vous affirmer devant les - Tribunau-x
ce que vous avez é c r it , par inadvertance fans doute , à des M agiilrats qui demandoient un compte fuivi de vos procédés, que
ma m ere,en vous époufant , avoit fept ans plus que vous?
Elle eft née le 'Lrj Mars 17 4 1 ; vous le 8 Février 1745. Il n’y
a donc que trois ans de différence. En 176 6 , teins du contrat,
vous étiez mineurs* tous deux : 6c l’on fait trop qu’entre des
perfonnes de cet âge , il n’y a d’autre féducteur que l’amour. •
D ’ailleurs, il j avois eu le malheur de vous perdre , au lieu (
d’éprouver celui de vous combattre ; fi j’avois ici pour ennemi
un tuteur qui réclamât vos droits , ou des collatéraux qui mer
difputaifent, non pas votre nom , feul bien dont je fais cas ôc
qui ne feroit d’aucun prix pour eux, mais une fortune que je
n’attends pas de vous, & que vous ne me laifferez jamais ; je
fens que ces Adverfaires indire&sfcroient fondés h exciper de vo
tre m inorité, à attaquer des fermens dont ils n’auroient pas été
les tém oins, à révoquer en doute des paroles dont il leur feroit
permis de fe jouer , ou à foutenir au moins que la L oi les annulle malgré la bonne foi qui les a di£tées.
Mais vous qui les avez prononcés , ces fermens ; vous qui
les avez données, ces paroles facrées ; c’eit vous qui ofez ici
les rétra&er ! E t dans quelle occafion? Quand ce retour va
coûter l’état à votre fille ; quand il jette dans le défefpoir une
époufe vertueufe qui vous a livré , fur la foi de ccs garans per
fides, ce qu’elle avoit de plus cher ; quand il plonge dans Je
défefpoir une famille qui s’eit fait un honneur de vous accueil
lir , & qui ne fera couverte d’infamie que parce qu’elle vous, a
cru un cœur honnête.
Y avez-vous bien réfléchi? Et f i , ce que je ne crois pas.
�t e
I
ai
votre cœur eft fermé à ces confidérations puiiTantes, celui eje
mes Juges le fera-t-il à l’idée du danger attaché à cette récla
mation , au moins indiferete, contre des nœuds deftinés à. être
éternels ? Que difoit le célébré d’AgueiTeau dans une Caufe
pareille, dans une Caufe où un fieur Bellet donnoit à la France
,-furprife l’exemple que je voudrois , au prix de tout mon fang,
ne vous avoir pas vu fuivre ?
L e fieur B e lle t, marié comme vous pendant fa minorité ,
excipoit, comme vous, du bénéfice de la L o i , pour fe difpenfer des devoirs contraélés au préjudice de fa jcmieiTe. Que lui
répondoit-on ? ce Q u ’il feroit d’une conféquence pernicieufe
» d’admettre une pareille demande; que tous les jours on en
» formeroit de femblables, & que le contrat le plus inviolable,
« le plus authentique, feroit expofé, comme la plus légere pon« v en tio n , à l’inconftance &c au caprice d’un m ineur, qui ne
» manqueroit jamais de prétexte pour rétra&er fon engage» ment ; que d’ailleurs il ne peut intenter cette aftion fans s’acjj eufer lui-même de d o l, de furprife, d’infidélité, fans violer
j? la foi qu’il a donnée à la face des Autels ; & que s’il a négligé
» l’obfervation de quelques form alités, il ne peut que fe l’im « puter, & chercher à réparer par une réhabilitation folem nelle
» les défauts d’une premiere célébration «.
Q u’ajoutoit ce grand homme h l’expofé de ces raifons fi
fortes, à côté defquelles il faifoit marcher celles.qui pouvoient
les combattre ? Que chacun de ces deux fentimens a l'avantage
davoir des Arrêtspour garans ; mais que les circonflances doivent
influer fur l’adoption ,que les Juges en peuvent faire plus que les
maximes de D r o it , & quen général la prétention de ceux qui
veulent rompre leur engagement fu r ce prétexte y femble peu fa
vorable. Y a-t-il jamais eu de Caufe de ce genre, où les cir-
�A
’ ai
confiances aient été plus p r e n a n t e s p l u s réunies que dans
c elle-ci, p o u r faire déclarer le mineur inconftant, indigne de la
fa v e u r des Tribunaux ?
V ou s étiez libre, vous ne dépendiez point de vos parens dont
Je fort vous avoit p rivé, & qui s’armeroient aüjourd’hui pour
m o i1, s’ils èxiftoient encore. V ous étiez gentilhomme. V ous
preniez à témoin de vos ferm ens, non pas l’Am our, cet être
fantaftique & volage qui fe r i t , dit-on, des perfidies, & qui
applaudit aux menfonges ; mais ce D ieu terrible, vengeur du
parjure, ce D ieu envers qui votre piété fembloit devenir plus
fervente en raifon du fecret avec lequel vous affe&iez de lui
rendre vos hommages ;'c e D ieu dont la vérité eil l’efience,
qui pardonne plutôt une méprife dans le culte qu’on lui
re n d , qu’une impofture capable de porter le trouble dans là
Société.
• !fi ' jJ
■'
■'
Mes parens ont été excuiables de vous croire. Ils l’ont dû.
Laifiez à des étrangers une réclamation'dont ils frémiroient
peut-être, s’ils en connoiiToient tous les détails. Mais vous,
m a ri, pere ; vous q u i, fur la foi d’un engagement facré, avez
joui d’ùn droit dont l’ufagc feul impofe des obligations indeftru&ibles ] quand il n’a point le libertinage pour ob jet, & une
indépendance fcandaleufe pour origine ; rougifîez d’employer
dés'm oyens que les Tribunaux ne fauroient admettre dans
votre'bouche ;'ren on cez à vous débattre contre des nœuds
dont la R eligion vous a chargé, & que laJufiice ne peut que
ferrer au moment où vous ofez l’appel 1er pour les rompre.
Antoinette dè'Bom bclles , M
essieurs
, a donc une qua
lité confiante dans la Caùfe. E lle eil fille du V icom te : elle cil
née d’un mariage exiftant entre fa merc & lui. C e mariage eil
avérépar toutes les fortes de certitudes quipeuvent l’dtablirj hors
�ntie dont on ne peut exiger la repréfentation : fi l ’on éleve en
core le m oindre doute h ce fu je t, nous offrons la preuve par
témoins; nous ibm m es dans le cas de l’ O rdonnance qui autorife
à y recourir.
C e n’eft donc pas htortque j’ai eu l’honneur devous dire, en
commençant, que nous avions pour nous la N ature & lesL oix.
R ien ne s’oppofe à notre réclam ation,
fi nous parvenons à
démontrer que la nouvelle alliance qui la motive nous préjudicie, fi nous rendons fenfiMe l’intérêt que nous avons à ne la
pas laifler fubfifter. O r, à cet égard encore peut-il y avoir
le moindre doute?
Ma mere eit vivante ; elle eft mariée à mon pere , & mon
pere a volé dans les bras d’une autre époufe. Il a élevé entre
lui & la prem iere, un mur de féparation qui rendroit fon retour
auiïi criminel en apparence, que l’a réellement été fa fuite. C ’eft
ce mur dont je demande la deftru&ion : & j’ai, fans doute,
l’intérêt le plus v if à le folliciter.
Je fuppofe , M
essieurs
mariage du V icom te
, que cc que je viens dire du
de Bombelles & de la D em oifelle
C a m p , laiiTe encore quelqu’ obfcurité dans les efprits. Je fup
pofe qu’on puiiTe y defirer quelques formalités de plus , & que
ce foit k cet excédent que l’on attache le*fort de fa fille : qui
ne voit que le fécond mariage lui en enleve l’ efpérance, &
meme la poffibilité ?
Com ment leVicom te de Bombelles, uni avec la D em oifelle de
Carvoifin, pourra-t-il réhabiliter fon alliance avec fa premiere ,
fa feule & véritable époufe ? L e contrat de m ariage, dont j’ai
cu 1 honneur de vous faire le â u re , porte l’engagement littéral
de le célébrer fuivant les loix & formalités du Royaume 3 à lapremière rèquijition de l'une des Parties. Je veux croire que jui^
�2-4
qu’à préfent on a retardé l’accompliftement de cette ftipulation;
mais le terme de l’échéance n’en eft pas fixé. I l eft toujours
tems d’y procéder.
C e contrat exifte. I l n’eft pas attaqué. N e l’examinons
que d’après fa nature, fon eiTence, comme un engagement
purement civil. Si les lo ix & formalités qu’il défigne font les
cérémonies fpirituelles auxquelles D ieu attache fes grâces, ma
mere n’a pas perdu le droit d’en requérir l’accompliirement ; & _
ii elle le requiert aujourd’h u i, la préfence de la Dem oifelle
Carvoifin n’y eft-elle pas un obftacle invincible ? Si cependant
notre état dépend de cet accomplilTement, fi nous n’en pou
vons jouir qu’après avoir exclu cette étrangère qui eft venue
clandeftinement ufurper notre place, ne fommes-nous pas fon
dées a la repouifçr ànotre to u r, ôc à fupplier la Juftice de nous
maintenir dans un droit que rien ne l’autorife à nous difputer?
L ’intérêt de la jeune de Bombelles n’eft donc pas moins
évident que fa qualité. V ous ne pouvez donc, M e s s i e u r s ,
refufer de l’admettre à la difcuilion de ce fécond mariage qui
compromet ii cruellement fon état : ¿ k c ’e ftd e q u o i nous al
lons nous occuper.
L e %() N ovem bre 1 7 7 0 , le V icom te dé Bombelles s’eft ma
rié à la D em oifelle de Carvoifin. V o ic i, M e s s i e u r s , l’extrait
qui en a été délivré.
Extrait des Regißres des mariages de tE g life Paroijjiale de
Saint - Sulpicc à Paris.
a L e Z9 Novem bre 177 0 , a été célébré le mariage de Haut
» ôc PuiiTant Seigneur Jean-Louis-Frédéric-Charlcs V icom te
» de Bom belles, Chevalier de l’Ordre Militaire deSaint-Lazare,
A yd c-
�J ï
M
.»A ide-M ajor d’infanterie, âgé de vingt-cinq ans & dem i, fils
» des défunts , & c. decettcparoijje depuis un mois >rue du F ou r,
c¿-devant de celle de Saint-Gervais pendant trois ans, rue de
la Mortellcrie , avec haute ôc puiffante D em oifelle Marie»Françoife de C arvoiiin, fille majeure, & c. de cette ParoiiTe,
» rue du B a c q , au Couvent des R écollettes depuis trois ans ,
» un ban publié en cette Églife & en celle de Saint» Gervais , fans oppofitic^i , difpenfe de deux, avec la per» million. de fe fiancer & marier le même jo u r , accordée
» p ar Monfeigneiir l’Archevêque le 20 de ce m ois, infinuée &
» controllce le même jo u r, fiançailles faites. Préiens & té» moins, du côté de l’époux, & c. & de l’époufe, & c. qui tous
» ont certifié le domicile comme deiTus & la liberté des Par» tics pour le préfent mariage : & ont figné.
Jï Collationné h. l’Original par moi foufligné, Prêtre , V i» cairc de ladite ParoiiTe. A Paris, ce 2.9 du mois de Novem bre
53 de Tannée 1 7 7 1 . Signé , Simon", Vicaire.
T el eft l’Extrait fidelle des Regiftres de Mariage de la ParoiiTe de Saint-Sulpice. O r il nous offre un vice radical, un
défaut eiTentiel qui fuffiroit feul pour opérer la nullité du ma
riage. Il n’a point été célébré par le propre Curé des Parties.
Il fuppofe ay V icom te de Bombelles un domicile évidemment
faux.
Vous vo yez, M
e s s i e u r s
,
qu’on fpécifie qu’il de
meure depuis un mois rue du F o u r , fur la PafpilTe dans la
quelle on le m arie, & ci-devant, depuis trois ans , rue de la
Mortellerie fur la ParoiiTe de Saint - Gervais : en initruifant le Prêtre qui l’a réd igé, on l’a trompé ; on lui a fait tranfciire dans fes regjftres un énoncé infidellc. Dans le fa it, il
cil faux que le V icom te dé Bombelles demeurât depuis trois ans
D
�26
dans la rue de la Mortellerie , ni fur la ParoiiTc de S ain t-G er-e
vais. Dans le d ro it, il eft plus faux encore qu’il eût, ni ce domi
cile , ni aucun autre, acquis dans Paris. Nous voudrions pou
voir nous impofer iilence fur la nature de la preuve que nous en .
allons produire , comme fur tout Je refte de ce que l’hiftoire
de la jeuneiTe du V icom te de Bombelles offre de peu avantageux
pour lui ; mais c’eft ici le nœud de la C au fe, & fe taire y ce feroit
fe trahir fui-même.
Difons donc, & fans aucun commentaire, qu’il a été conduit
au F ort-l’Evêque le zy^Novembre 1768 ; il n’ en eft forti que
le 10 A oû t 1770. N ous rapportons l’écrou qui conftate l’épo
que de fa détention & celle de fa liberté. O r , le Fort-l’Evêque
n’eft pas fur la Paroiffe de Saint-Gervais ; en fuppofant que fa
retraite forcée dans cetteprifoneût pu lui procurer un domicile)
il eft évident que ce ne feroit pas celui qui lui eft fuppofé dans
l ’acte.
OnafTure qu’en fortant du F o r t-l’Evêque il a été en effet
demeurer deux mois dans la rue de la Mortellerie ; mais outre
qu’il étoit probablement en chambre garnie , ce court féjour
n’eit ni celui de trois ans que l’a&e de célébration articule, ni
celui d’un an que l’Ordonnance exige pour tout homme qui
change de Diocèfe, ni même celui de fix mois que les L oix pres
crivent h tout particulier qui refte fur fa ParoiiTe.
Voilh donc dans le fait une fuppofition révoltante dans l’a&e
de célébration ; vous en avez fouvent annullé, M e s s i e u r s , de
moins coupables, de moins fujets h la cenfure. Dans le d ro it, il
eft bien moins foutenable encore.
Où éto it, où pouvoir être en Novem bre 1770 le vrai domi
cile du Vicom te de Bom belles, relativement à fon mariage?
I l eft né le 8 Février 1745 , il n’a donc été majeur que le 8
�Février 1770. Mais alors il étoit en prifon. Quand il en eft
fo rti, il avoit donc pncore le môme domicile légal avec leque^
il y étoit entré. O r ce domicile légal étoit celui de Ton Cura
teur; & Ton Curateur demeure àM ontauban. C ’eft donc dans
cette Capitale du Quercy qu’il falloit publier les bans : c’eft lk
qu’il falloit aller chercher le propre Curé du V icom te ; c’étoit
de ce Curé qu’il falloit obtenir la permiflion pour célébrer à
Paris fur la ParoiiTe de Saint-Sulpice.
A u terme de la-Loi, il faut un an révolu, pour que le domi
cile foit réputé changé d’un D iocèie à l’autre. Quand le V icom te
n’auroitpas été en prifon à fa majorité , il n’auroit pu fe marier
légitimement à Paris , fans la permiflion de fonPafteur deM ontauban, qu’après le 8 Février 1 7 7 1 . A in ii dans tous les cas poffibles, le domicile qu’il s’eft prêté dans i’a&e eft fa u x , & la bé
nédiction nuptiale furprife fur ce fondement ruineux croule, s’a
néantit avec lui.
Q ue ce défaut, M e s s i e u r s , foitpéremptoire, qu’il emporte
la nullité de l’aftedont il eft la bafe; c’e ft, je crois , ce qu’on
ne nous difputera pas. C e principe eft trop bien é ta b li, pour
qu’on puiiTe avoir feulement la moindre idée de le contefter.
Et qu’on ne nous dife pas que nous hafardons ici un reproche
que nous avons à redouter nous-mêmes. Q u ’on ne fe récrie pas
que nous n’avons pas plus que la D em oifelle de Carvoifin l’autorifation du Pafteur , fans laquelle une conjon& ion, quelque
légale qu’elle foit d’ailleurs, eft néceflairement proferite ! Quelle
différence entre fa fïtuation & la nôtre ! N os obligations nos de
voirs , nos charges, nos rifques, font-ils donc les mêmes ?
Vous avez un aile de célébration , vous le produifez. U ne
imprudence frauduleufe l’a corrompu ; mais fans ce la , il fuffiroit feul povu: affûter h jamais votre repos & celui de votre poiléD ij
�rite, il D ieu n’avoit pas refufé cette bénédi£tion à une union qu’il
réprouvoit. Nous n’ en produifons pas ; nous n’en pouvons pas
produire ; nous n’en devons pas produire. Aftreints aux Loix de
votre E g life , forcés de vous y conformer, fous des peines qui ne
peuvent vous être inconnues, par combien dedédommagemens
êtes-vous indemnifés decctte gêne falutaire?Vous parvenez à des
charges, fans les payer par des facrileges : vous pouvez préten
dre aux honneurs, fans les acheter par une trahifon : vous ne por
tez pas fur le front un fceau de réprobation , que vous ne puiflîez faire difpaïoître, qu’en vous couvrant d’ un m afque, impie *
quoiqu’il ait une forme religieufe. Les remords ne vous trou
blent point au milieu de vos fuccès.
Mais nous , réduits h ne nous livrer qu’en tremblant aux
plus douces impreiiions de la nature , perpétuellement flottans
eatre notre confcience & nos defirs, craignant de donner à nos
unions une publicité capable d’alarmer un faux zele , & de les
laiifer auifi dans une clandeftinité qui les rendroit fufpectes ,
exclus de tout par une fermeté vertueufe , rongés de remords
fi nous écoutons une ambition complaifante , fufpendus fans
ceile entre l’exiftence & le néant ; combien la politique nous
vend cher cette tolérance apparente quron peut toujours nous
contefter fans rifque, <5t nous enlever fans paroître commettre
d’injuftice! Quand on nous opprime , ce n'eft que l’humanité'
que l’on outrage , & l’on croit fouvent accomplir la Loi.
V oyez donc s’il eft poilible d’établir aucune cfpece de comparaifon entre nous : le mariage de ma mere eft revêtu de tou
tes les formalités q u i, fuivant la nature des chofes, peuvent le
rendre authentique. Ce qui y rrjanque peut facilement être fuppléé. Je fuppofe que l’on n’y ait pas obfcrvé toutes les réglés y
au moins n’y en a-t-on enfreint aucunc.On n’établit pas encore.
�qu’il ait ¿té célébré par le propre Paiteur ; je vous l’accorde ;
mais vous ne prouvez pas auffi qu’il ait été célébré par un autre:
o r, c’eft précifément ce que je vous reproche ; c’eft ce que j’arti
cule contre votre union. M a mere n’a pas acccompli la L oi ; mais
vous l’avez violée. Elle peut réparer fon omiilion , il elle eft
réelle, & votre délit cil auifi conilant qu’irréparable.
N e m’oppofez donc point une. fimilitude imaginaire. N e
me forcez point à m’appefantir fur les détails d’un acte dont
toutes les circonftances né peuvent manquer de tourner contre
Vous , & qui n’a point été altéré par la feule imprudence.
Vous y avez fuppofé à mon pere un faux domicile. E it-c e
au hafard que cette falfification a été commife ? N o n , fans*
doute. Vous faviez qu’il avoit des engagemens aM ontauban ,
il en convient lui-même dans fon Mémoire à confulter ; dansce Mémoire cruel, où ma naiiTance eil mife au rang des crimes,
& où l’on traite comme une calomnie l’équité de ceux qui
Veulent bien rappeller mon exiilence à celui qui me l’a don
née,
Je veux croire que vous ignoriez la nature & la force de ces
Engagemens : mais vous ne pouviez pas vous diflimuler de quel
genre étoient ceux que vous alliez former vous-même. Vous
deviez favoir f & vous faviez que pour les rendre facrés il falloit qu’ils fuiFent contra£lés avec un homme libre. Pour vous
mfpirer de la défiance & du doute , c’étoit aiTez- même d’un
foupçon. O r les déclarations formelles qui vous avoient été
faites d un mariage antérieur & fubfiilant,fuffifoient fans doute
pour vous obliger a des recherches , à des informations.
Si vous craigniez d’alarmer votre nouvel époux , s’il répugnoit a la délicatciTe de votre cœur de 1 i montrer ces alarmes y
t'es inquiétudes peu confolantcs en e fe t ; la publication des
�3°
bans ¿toit un moyen fur de les difliper , fans qu’il fût poffible à celui qui en étoit l’o b je t, de s’en plaindre. O r vous
n’avez pas eu recours à cette voie falutaire. V oici un certificat
qui le prouve.
'
« A déclaré n’avoirproclamé les bans d’un prétendu mariage
j? à Paris, de Meflïre de Bom belles, Officier au Régim ent de
35 Piém ont , dans fon Eglifc paroifliale de Saint Jacques de
5) Montauban , ni dans aucune de fes deux annexes , ni n’a
» donné aucun ordre de les proclamer : &c a figné. A Montau» ban , ce io Septembre 1 7 7 1 . Signé } H u c a f o l , Chanoine
» Sacrifie , Curé de Montauban 35.
C ’eil donc volontairement que vous vous êtes prêtée aux
efforts frauduleux par lcfquels on cil parvenu à éluder la L oi :
vous êtes donc au moins complice de cette trame obfcure qui
vous a donné un mari : vous n’avez pas drç>it de vous plaindre
de la Juftice qui va vous l’ôter.
C e n’eilpas fans y avoir bien réfléchi, ' M e s s i e u r s , q u el’on
a fuppofé au Vicom te un domicile de trois ans , dans un autre
quartier que celui de S. Sulpicc.Si l’on avoit informé le Curé de
cette Paroifle des circonflances, de la détention du jeune
hom m e, il auroit de lui-même fait des informations. Il auroit
fallu lui éclaircir le fait du Fortr-l’E vêque, la minorité, le domi
cile de droit à Montauban ; il auroit refufé fon miniilere,.ou exi
gé une publicité connue du mariage dans la V ille où demeuroit le Curateur du m ineur, parvenu depuis peu à fa majorité.
Alors la Dem oifelle de Carvoifin auroit perdu l’objet auquel
elle vouloit s’attacher h. quelque prix que ce fût : alors elle fenioit bien qu’unç rivale autoriféc fefcroit élevée contre fes pré
tentions. Il auroit fallu y renoncer, & elle a préféré la fatisfa&ion prompte d’un goût paffager , à une patience qui l’au-
�31
roit mife en état de contra&er une alliance plus folide & plus
durable. Q ui peut-elle accufer du trille fort auquel elle va fe
trouver réduite? Elle eft digne de pitié , fans doute, mais mé
rite-t-elle la moindre indulgence ?
Je l’ai prouvé ,
M
essieurs
, fon mariage avec le V icom te
de Bombelles eft: nul. I l porte un cara&ere évident de fuppofition & de clandeilinité. L e feul défaut de la préfencç du ,
propre Curé , l’énonciation'd’un domicile qui n’eft point le
véritable, l’affe&ation avec laquelle on a trompé & le Pafteur
& peut-être des témoins trop confians , tout vous oblige à
profcrire un a£te dont l’impoilure eft; le principe , & que la
Jurisprudence la plus confacrée réprouve. Mais eil-ce le feul
vice qui en juftifie la condamnation ? N o n ,
M
essieurs
, vous-
y en trouverez encore un autre qui n’eil pas m oindre, & qui
prenant une nouvelle force des griefs dont je viens de vous
parler, doit achever de faire perdre à la D em oifelle de Carvoifin tout ce qu’elle a. pu confcrver jufqu’ici d’efpérance.
Je fuppofe encore, comme je viens de le faire tout à l’heure,,
que le mariage de la D em oifelle Camp fût in com plet, qu’ il y
m anquât, du côté des formalités , une forte de perfe&ion dont
il étoit fufceptible ; cependant, le V icom te de Bombelles luimême ne peut pas le n ier, il exiftoit un engagement ; le con
trat pardevant Notaires feul étoit un lien.. Pour que le V i
comte fût en droit de fe croire d é g a g é, il falloit opérer fa
délivrance. E t de qui pouvoit-il l’attendre ? Etoit-ce de fa vo
lonté uniquement ? Pour fe retrouver indépendant, fuffifoit-il
qu il s allât jetter aux genoux d’une maitreiTe nouvelle ? Etoitd libre , par cela feul qu’i l . étoit ïnconftant ? E t la L oi qui
avoitratifiéfes premiersfermens,chan'geoit-elle avec fon cœ ur?
N o n y M e s s i e u r s > il ne p o u v o i t recevoir f o n affranchiiTe--
�3%
ment que des mains de celle qu’un nœud commun & réci
proque attachoic à lu i, ou de la Juftice , q u i, fans approuver
fa légéreté , avoit le droit de la rendre légitime après en avoir
pcfé les motifs : 01* il n’a employé aucune de ces deux voies.
Il n’a eu aucune efpece de confentemcnt de la Dem oifelle
Camp. Le contrat qui l’enchaînoit à elle n’a été réiilié par au-r
çun Jugement ; & cependant, au préjudice de ce titre exiftant,
il n’a pas craint de contracter un engagement nouveau. Il a
promis à une autre époufe une foi dont il ne pouvoit pas dif-r
pofer. Il
3.
confommé une efpece de fteliionat de fa perfonne,
Je dis , M e s s i e u r s , qu’il n’en faudroit pas davantage encore
pour vous décider a annuller fon fécond mariage , & ce n’eft
pas k moi que vous vous en rapporterez fur cette décifion intéreilànte. C ’eit h
M.
Je Chancelier d’A gueifeau, de l’autorité
duquel j’oferai m’apjpuyer, & qui ne laiiTera , je crois, fublifter
aucune efpcce de difficulté dans vos efprits.
I l portoit la parole en 1691 dani> une Caufe qui a trop de
rapport à notre efpece , pour ne pas en faire le rapprochement.
I l s’agiiïoit d’un iieur Pierre L efcu ier, qui avoit pouffé plus
loin
que le V icom te de Bombelles l’oubli de fes fermens i5c
de fes devoirs. Jouet d’un tempérament fougueux & d’une
imagination foible , il fe marioit prefque dans toutes les V illes
où il alloit. En 1691, il fe trouvqit trois femmes vivantes ,
toutes trois époufées en face d’Eglife ; & toutes trois récfajnoient des droitsqui ne pouvoient être adjugés qu’à une feule.
Entre le premier de ces mariages & )c n ô tre, il y avoit des
différences de toute efpece ; c’étoiçnt des Catholiques ; le mari
étoit en puiilance de parens ; la femme étoit une fervante. La
célébration avoit été faite iur de faux noms , fur de faux cer-?
tificats de publication de bans.
Rien
�33
r R ie n de tout cela n’appartient au mariage de la Dem oifellc
Camp. Mais ce qui fait un trait de reiTemblance effentiel,
c’eft que le jeune homme avoit contracté , étant mineur ,
qu’il avoit, comme le V icom te de Bom belles, paiTé dans les
bras de fes nouvelles maitreiTcs, fans avoir fait prononcer la
nullité de fon premier engagement. Il s’agiffoit de . faire un
choix entre ces trois mariages. M. d’Agueiïeau fe décida en
faveur du premier. Après a ^ ir expofé les raifons qui le déterminoient,
« N ou s n’ajouterons p lu s, continua-t-il, à toutes ces re» flexions, qu’un dernier moyen qui ne nous paroît pas moins
» décifif que ceux que nous avons eu l’honneur de vous pro» pofer.
» Quand on voudroit foutenir , qu’aprbs tout ce qui a fuivi
» ce premier mariage....., il n’étoit pas encore entièrement Iégiwtim e peut-on douter au moins que ce m ariage, tout im jî parfait qu’il e i l , ne fût .un véritable engagem ent, une obli» g a tio n queLefcuier feul ne pouvoit violer?
,
:
v Si nous rccoimoiiïbn<; que les voies de nullité n’ont point
» d e lieu en France ; qu’il' faut que l’ Autorité R oyale inter» vienne pour refqudre une fimple promeiTe ; qu’il n’y apref» que point d’obligation qu£ l’on- puiiTc annuller fans les L ct» très du Prince ; exceptera-t-on de cette réglé générale la
» plus indiiToluble de toures les obligations, & le con tratlç plus
» important de la fociétç civile? Perm ettra-t-on à un homme
V
qui'fe,croit e n g a g é , qui a perfévéré dans cet en gagem en t,
» de fc rendre Juge de la validité de fon engagement ,
» de rompre Jes JUtuds par fon autorité particulière , & de con» tracier un fécond mariage’fans avoir fait déclarer la nulhtc
Ttdu premier}
�34
» Nous n’ignorons pas cependant, continue fur le champ
v l’habile Magiftrat , que l’on a confirmé plufieurs mariages
» contractés au préjudice cTun premier engagement. M ais dans
quelle efpece a-t-on pu rendre de pareils Juge mens» ? C ’e il,
d’une p art, quand les féconds mariages n’avoient en euxmêmes aucune forte de nullité qui les rendît indignes des
regards de la Juflice , & de l’autre, quand les premiers au
contraire étoient infeétés de tels vices , de tels défauts qu’ils
fuiTent abfolument intolérables ; &
alors même il falloir
qu’on eût réclamé auffi-tôt après leur prétendue célébration
l'autorité des L o ix & la protection de la Juflice. O n avoit
du moins rendu cet hommage aux L oix d’implorer leur fecours pour parvenir à. fe dégager.
C ’cft ce que M. d’AgueiTeau remarque expreiTément: « &
» quoiqu'il f û t plus régulier, ajoute-t-il, etattendre que le pre» mier mariage fû t déclaré nul , on exeufe cependant la préciyj pitation d'un homme qui s'engage avant la fin d'un procès ,
m dont l'événement ne peut être douteux ». Il y avoit donc des
procès commencés dans ces efpeces ; il y avoit une réclama
tion confiante & immédiate. L e bigame en ce cas prévenoit
la décifion des Juges, mais il ne fe croyoit pas en droit de
s’en paifer. Il avoit d’abord m anifeftéfa foumiilion avant que
de fe livrer h fon impatience.
Eft-ce là , M e s s i e u r s , ce qu’a fait le V icom te de Bom belles? Quelles démarches a-t-il faites pour parvenir à fe débarraiTer de fes anciens nœuds? Quelles réclamations s’eft—il
permifes ? Quels efforts a-t-il hafardés pour s’y fouftraire? A u
cuns. Il les a laiile fubfifter dans toute leur force. C ’eft par une
marche oblique qu’il eft parvenu à les cacher. C ’eft en évitant
d’en donner connoiffance au Paftcur qu’il féduifoit de concert
�31
avec fa nouvelle époufe, qu’il a réufli à les dérober aux regards.
% Mais par-lk même il en conilatoit l’exiftence. C et aveu tacite
équivaut à une reconnoiflance authentique ; & n’eft-ce pas là.
le cas de s’écrier comme le faifoit encore M .d ’AgueiTeau dans
la même Caufe :
« N e doit-on pas rentrer dans le droit commun , & décider
v que ce premier mariage, défe£tueux à la vérité dans fon com « m encem ent, cil néanmoins un empêchement capable de di» rimer ceux qui l’ont fui^i ? Et ne peut-on pas dire que la fe>9 conde & la troiiieme femme font ici fans intérêt , puifqu’in» dépendamment de la validité du premier mariage il faudroit
J3 toujours prononcer la nullité des engagemens qu’elles fou» tiennent, & que dans le concours d'un mariage douteux avec
» un mariage n u l, le premier mériteroit toujours la préfe» rence » ?
C et oracle , M e s s i e u r s , eft d écifif, & acheve de trancher
toute efpece de difficulté. V ou s v o y e z quel parfait accord
regne ici entre le vœu de la Nature & la difpofition des Loix.
Q ue pourrois-je ajouter de plus en faveur de la Caufe que je
défends? Sous quelqu’afpeft qu’on l’envifage, elle eft renfermée
toute entiere dans ces mots précieux : dans le concours ctwi ma
riage douteux avec un mariage n u l, le premier mérite toujours
la préférence.
Je vous préfenterai cependant encore , M e s s i e u r s , une
autre coniidération; c’eit que ce mariage nul dans le droit cil
reile ilériledans le fait : au contraire cette union douteufe jufqu ici, je le fuppofe, mais préférable par tout le reile, a été
fuivie d une heureufe fécondité. En rendant l’un à fon néant ,
c n 1 abandonnant à fa propre invalidité, vous ne frappez que
E ij
�36
fur la coupable , qui a cherché de fang froid h vous tromper.
Elle n’a perfonnè qui réponde à Tes plaintes. Elle gémira feule
d’une imprudence qu’elle a volontairement commifc. Elle ne
pourra accufer de dureté des L oix qu’elle a bravées avec ré
flexion.
En anéantilfant l’autre que tant de motifs rendent ficrée ,
vous puniriez l’innocence : vous flétririez pour jamais cette
. enfant d’autant plus digne de p itié , q u elle ne connoît pas
encore fes malheurs, & que ia ienfibilité ne commencera que
dans le tems où celle qu’ils auront fait naître fera epuifée.
C e n’uft pas to u t, M e s s ie u r s , la dégradation d’A n toi
nette de Eombelles aurait encore des fuites bien plus fùneftes.
U n peuple entier attend votre déciiiou en tremblant. Si elle
nous étoit contraire, il la regarderait comme l’A r rôt de fa
propre condamnation. Le fort de cinq cens mille familles dans
le Royaum e , l’état d’un million de C itoyen s, il n’eit plus tems
de fe 1^ dilfimuler, dépend de notre fuccbs : jamais Caufe, avec
une apparence plus bornée , n’a eu des rapports plus étendus.
Quand la D em oifelle de Carvoifin feroit bien fondée, quand
fon mariage feroit auifi régulier qu’il eit illégitime , quand en
le contractant elle auroit obfervé toutes les Loix qu’elle a vio
lées, la Juitice auroit peine peut-être à la défendre'contre Je
grand , contre le prodigieux intérêt politique qui la combat :
niais elle n’a pas même cet avantage. Quand elle n’auroit que
nous pour Adverfaires, fa perte feroit encore inévitable. Que
fera-ce donc aujourd’hui que le bien public la nécciïite ? Cette
rivale indiferete n’a que des torts de fa part à nous oppofer.
Pourrez - vous balancer entre elle &c une ii nombreufe partie
de la nation ?
�37 .
t t i m i • \ ~ iz m u zssB jB ta y m m r r i td T n hiiv * B z w e E a x m -w , r r r . m jg ’iir a m r —
O B S E R
Du
D é f e n s e u r
V A
t a ra u ux u m
» » r ÿ t r i& a a l
T I O N S
des D a m e &
Demoifelle D E
B O M B E L L E S,
J ’ a u r o ï s voulu pouvoir me borner à ma C au fe, & n’être
pas forcé de convaincre le V icom te de Bombelles d’un mau
vais procédé de plus. Mais il a néceflité un cclairciffem ent,
pour lequel je ne produirai que des faits & des pieces.
L e V icom te de Bombelles a fait imprimer dans tous les pa
piers étrangers , avec des réflexions injurieufes, & fait courir
dans Paris , avec des apoflilles contraires à la vérité , la lettre
fuivante :
« J’ai reçu avec la plus grande reconnoiffdnce s & lu avec le
>?plus v if intérêt, le Mémoire que M . le Vicomte de B om )) belles a eu la bonté de m envoyer. C ’eil quelque chofe de
v bien iingulier en effet que la hardieiTe avec laquelle on ofe le
» compromettre par des imputations de la nature de celle dont
» il fe plaint. Peut-être eft-ce fon mariage même qui en effc
» l’origine. I l eit poflible que quelques collatéraux, du côté da
» Madame fon ép ou fe, aient conçu de l’inquiétude de cet
33 événem ent, & qu’ils aient imaginé ce lâche & mal-adroit
» moyen pour fe tranquillifer. A u r e fie , l’éclat même qu’ils
»auroient néceffité , ne peut fervir qu’il rendre leur honte pu” blique , & à. faire briller l’innocence du C lien t, ainji que les
33 talens du Defenfeur. J’ai l’ honneur d’ail’urer M . le V icom te
33 de Bombelles du refpeil avec lequel je fuis fon très-humble
33 & trbs-obéiflant ferviteur. Signé , L in g u iît.
Lucienne, ce 4 Juin i y j t „
�ïù
f
.
Dans les copies^iftribuées >
à Paris , de la main du V ico m te,
fc trouvoit Tapoftille ci-jointe de la même main :
« L ’ original de la lettre ci-deiTus a été communiqué ? en
» plein P arqu et, à M e Linguet qui nioit Ton exiftence , par le
» V icom te de Bombelles qui l’a dans Ton porte-feuille. A.
» Paris le 10 Mars 1772.. S ig n é, V icom te
de
B
ombrlles
».
L ’apoilille du 10 Mars & la date du 4 Juin, font remar
quables.
Toutes ces manœuvres avoient pour objet de me compro
mettre , en iniinuant qu’après avoir été le Confeil de M. de
B om belles, j’avois préféré de devenir celui de ia fem m e, &
que j’étois reité confondu , fans défenfe, devant mes Confrè
res, fur l’articje de la lettre. C e plan annonce , de la part de
M. de Bom belles, beaucoup d’art & de fang-froid, mais peu
de ménagemens pour la vérité.
Il eitfau x ( je fuis fâché d’être obligé de le dire à un Gen
tilhomme ) que l’original de cette lettre m’ait été communi
qué eh plein Parquet. Il cil faux que j’en aie nié l’exifl;encc.
I l eft faux que le V icom te de Bombelles m’ait jamais parlé
dans fa v ie , ni au Parquet, ni ailleurs ; au contraire, c’eit
moi-même qui ai interpellé en plein Parquet à l’occafion des
bruits femés fourdement «5c des alTertions configoé^s dans les
papiers étrangers , M e le Blanc , A vo ca t du Vicom te. Je l’ai
fommé de repréfenter cet o rigin al, dont il annonçoit qu’il
comptoit tirçr grand parti dans la Caufe. M e le Blanc ne l’a
pas voulu faire -, mais après une difcuiïion même allez v iv e , il
s’eft: retiré en difant: E h b ien , j e déclare que vous nave^ j a
mais été le Confeil de M . de Bombelles ; êtes-vous fatisj'ait ■
Cette déclaration a été faite devant M. l’A vocat Général de
Verges & cinquante Avocats que j’avois engagés à être pr^"
�//
39
fens à la conteilation , & Juges de mon procédé. O r , ce pro
cédé , le voici :
L e x Juillet 1 7 7 1 , tems où j’étois accablé de toutes parts de
lettres , de complimens, de félicitations que je ne méritois point,
fur des objets auxquels je n’ai jamais eu aucune p a rt, fur des
ouvrages que je n’ai connus qu’avec le P u b lic , le V icom te de
Bombelles m’adreiîa, par la petite p o ite, un de fes Mémoires
imprimés, avec la lettre que^voici :
« Paris , le x Juillet 1 7 7 1.
« M
o n s i e u r
,
» Défendre le Citoyen chargé des intérêts du M onarque, &
« obligé de maintenir fon autorité, a été l’emploi glorieux ,
» dont vous vous êtes ii bien acquitté dans la calomnieufe im» putation faite à M .... Il n’eil point étonnant q u ’ un h o m m e
)) en place foit en butte à de grandes révolutions & à des épreu« ves fâcheufes. Mais pourquoi un Citoyen ignoré par état &
» par caraôere , eit-il l’objet d’un acharnement odieux ? C ela
« eft, on ne peut pas p lu s, difficile à concevoir. Je me fers
» avec plaiiir de cette circonitance , pour rendre hommage à
>■
>vos talens & à votre mérite. J’ai l’honneur d’être, Monlieur,
« vo tre très-humble & très-obéilfant ferviteur.
Signé j
t
B om belles.
J’étois alors dans l’idée fauiTe qu’une politelTc devoit tou
jours être payée par une autre politeiTe, & qu’on ne fe com promettoit point par un procédé honnête. J’avois pour princ’pc de
rcP°ndre à toutes les lettres que je rccevois. L ’expérience m ’en
�4°
a corrigé, & je fuifis cettJ occafion de prévenir toutes les perronnes qui continuent à m’honorer de leurs lettres , de n’êtré
pas furprifes de mon filence. M. de Bombelles m ’a donné à ce
fujet une leçon que je n’oubjierai jamais. Je lui répondis : je le
connoiiTois ii peu, j’avois ii peu de relations avec l u i , que pour
lui faire parvenir mon rem erciem ent, que jere.gardois comme
un d evo ir, je fus forcé d’adreiTer ma lettre à M e Perrin, A v o
cat aux C o n fe ils, qui avoit figné fa Confultation. M e Perrin
certifiera ce fait.
Je n’ai é c r it, comme on peut le v o ir , à M. de Bom belles,
que de ces chofes vagues qu’indique l’envie de donner dans le
fens d’un homme de qui l’on a reçu une marque de confidération. Si je parlois des collatéraux , c’çil que ce font ordinaire
ment ces fortes de parens qui ont intérêt h attaquer des ma
riages. Je fuppofois que les prétendus ennemis de M. de B om
belles ne pouvoient être que de cette clafTe. Jevoulois lui prou
ver que j ’avois eu l’honnêteté de lire fon Imprimé ; & e n voyant
la hardiefle avec laquelle il défioit fa première époufe de fe
montrer, qui auroit jamais pu foupçonner qu’elle exiftât ?
Cependant au mois d’O ftobrc fuivant, cette époufe fe préfenta chez m o i, & implora mon iècours ; je ne balançai point
à le lui promettre. Je lui ai tenu parole , & je la feconderai
jufqu’à ce qu’un Jugement folemnel ait éclairci & fixé fes
droits.
Je n’ai certainement ni dû ni pu me croire lié envers M. de
Bom belles, par un envoi fans conféquence, par le préfent d’un
Imprimé fur lequel on ne m’a même jamais demandé d’avis. Si 1a
maxime contraire s’établiiToit, les Portiers des A vocats devicndroient donc les arbitres de leur délicateiTe. Un Plaideur qui
feroit la dépenfe d’adrciTcr à tous les Jurifconfultcs, attachés à
un
�41
lin T ribun al, un exemplaire d’un de fes Mémoires , feroit sûr
de n’y point rencontrer d^Adverfaires.'1 -0'jii-•: v u :
J
L ’induclion tirée de ma lettre eil rabfurde ; mais la date
tju’on y fuppofe éil une particularité cffreufe. Je-neToupçonne
pas M .-d e Bombelles ders’étre imaginé''que j’aurcis perdu la
fiennc du 1 Juillet. Je ne l’âccufe pas d’avoir gratté la fin de ce
îfiot fut 'la mienne , & 'd ’en avoir fait f u i n , àfin^qu’elle pût
£>aroître avoir précédé-fa Confultation , qui eft du Z) Ju in , &
«qu’il eût le droit d^nfinuer que j’avois pu voir fon Mémoire
en manuferit. Ces idées font trop violentes , pour que je m’y
arrête. Il eft poifible, après to u t, que le 4 Juillet j’aie daté
du 4 Juin. Cette méprife n’a rien,d’improbable*
Mais comment M. de Bombelles, qui doit avoir les faits préfens, & q u i n’a pas pu fe méprendre fur les époques, a-t-il ofé
non-feulement laiifer fubiifter , mais même appuyer l ’efpece de
doute qu’il'faifoit naître fur celle-là. ? I l (ait que c’eft un Impri
mé qu’il m’a fait parvenir. Sa lettre prouve aiTez qu’il ne m’avoit
jamais écrit avant le z Juillet. E lle prouve qu’il me faifoit un
envoi, & non pas qu’il attendît de moi un avis : la mienne, qui
eft une réponfe, ne dit rien autre chofe. Si j’avois été fon C on f e il, lui aurois-je parlé de ma reconnoijfance , en accufant la
réception de fo n Mémoire ? Lui aurois-je rappellé les talens de
fo n Défenfeur, ii j’avois été ce D éfcnfeur ? Jamais il n’eft
entré chez moi •, jamais il n’a eu avec moi de corrcfpondance
d aucune efpece. Com m ent ofe-t-il donc eifayer de me com
promettre ainfi & dans la Capitale & dans les pays étrangers, fur
un prétexte dans lequel il me feroit fi facile de trouver une im pofture criminelle ?
Je laiiTe au Public & à lui-mcme le foin de l’apprécier j mais
je n c vpuis m’empêcher de déplorer'le fort de q u ic o n q u e a
F
�42
le malheur de fixer un inftant les regards dans une carriere
pénible, & d’y rencontrer des Adverfaires peu délicats. I l
éprouve à chaque inftant la vérité de cet adage fi connu, fi
affreux , fi cru el, & cependant fi fen fé, en fuppofant qu’on
puiffe proftituer ce nom aux armes du crime : Calomnions
toujours nos ennemis. Qu'importe q u 'ils f e ju ftifient /
Ils
guériront la plaie , mais ils ne feront pas difparoître la cica
trice. Cette réflexion n’eft pas étrangère à. la C au fe, fi l’on en
croit d’autres bruits femés par le V icom te de Bombelles contre
fa fem m e, avec auffi peu de fondem ent, & u n e m alignité auffi
courageufe.
Monf i eur D E
V A U C R E S S O N , Avocat Général,
M e L I N G U E T , Avocat.
M e M O Y N A T , A vocat du Parlement.
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D e l’imprimerie de L . C E L L O T rue D auphine, 1 7 7 2.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum.De Bombelles, Antoinette-Louise-Angélique-Charlotte. 1772]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vaucresson
Linguet
Moynat
Subject
The topic of the resource
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
protestants
vices de forme
suspicion de bigamie
diffusion du factum
opinion publique
actes de mariage
Description
An account of the resource
Titre complet : Plaidoyer pour demoiselle Antoinette-Louise-Angélique-Charlotte de Bombelles, procédant sous l'autorité d'Antoine Maugis, son tuteur ad hoc. Contre Charles-Frédéric Vicomte de Bombelles ; Et demoiselle Marie-Françoise de Carvoisin. En présence de demoiselle Marthe Camp, Vicomtesse de Bombelles.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de L. Cellot (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1772
1770-1772
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0802
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0801
BCU_Factums_G0803
BCU_Factums_G0804
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montauban (82121)
Paris (75056)
Rights
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Domaine public
actes de mariage
diffusion du factum
opinion publique
Protestants
suspicion de bigamie
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
vices de forme
-
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Text
PLAIDOYER
PRONONCÉ à
la Toure l le-Criminelle le Jeudi 19 M ars 178 9,
p ar lefieu r B E R G A S S E , dans la Caufe du fieur KORNMANN
M
ESSIEURS,
I L faut donc que je me défende encore!
V O U S favez dans quelles conjonctures j’ai entrepris la Caufe
du fieur Kornmann; comment à l’époque de fon affaffinat, le
voyant fans appui, fans fecours, dénué de toute efpèce de
A
�;
h*
2
confolation, le plus malheureux comme le plus perfécuté de
tous les hommes; je me fuis décidé à partager fa folitude 8c fes
dangers.
Vous favez comment, expofé depuis à ce que l’intrigue a de
plus noir, la calomnie de plus audacieux, la méchanceté de
plus redoutable, de quelques menaces, de quelque fédufîiùn,
de quelques manœuvres qu’on ait fait ulage, ii a été impoffible
de me détourner un feul inftant du projet que j’avois formé de
le faire triompher de fes nombreux ennemis.
Vous favez encore à travers quelles fingulières révolutions,
ne faifant pas une démarche que je ne rencontraffe un obftacle;
les évènemens fur lefquels j’avois le plus com pté, manquant
à chaque inftant à ma prudence; ayant quelquefois à braver
toutes les autorités réunies pour me perdre; toujours tranquile.
cependant, efpérant toujours alors même qu’il falloit efpérer
le moins, j’ai amené jufqu’aux pieds de votre Tribunal, l’Infortuné, qui, depuis fi long-tems, réclame avec tant de confiance
& d’éclat, votre juftice.
Enfin , M e s s i e u r s , vous n’avez point oublié, je l’efpère au
m oins, quelle a été ma conduite dans ces circonftances mémo
rables où vous avez donné à la Nation de fi grands exemples
de fermeté, de prudence 8c de patriotifme; vous n’avez point
oublié comment, vous prenant en tout pour modèles; imitant
autant qu’il m’étoit donné de le faire , votre dévouement & vos
facrifices; n’écoutant comme vous que la voix impérieufe du
devoir, je profitai, de concert avec le fieur Kornmann, des
rapports qui exilloient entre notre fituation particulière, & les
deftinées publiques, pour parler, à votre exemple, au milieu de
la diffolution de tous les principes, le langage des Lois 8c de la
liberté, proclamant, ainfi que vous l’aviez fait, parmi les
0
�4^
3
habitudes du defpotifme, & au fein de fes plus formidables
*• vengeances, ces grandes vérités, defquelles réfultent comme
des conséquences infaillibles, le fyftême conftitutif des fociéte s , & les droits du genre humain qui ne peuvent pas
mourir.
TOUS ces faits font connus, &: il faut que je me défende
encore !
Et il s’ell: trouvé dans un Ordre juftement eftimé par fes
lumières, & à caufe des exemples de courage & de patriotifme
qu’il a donnés auffi en plus d’une occafion mémorable, il s’eil:
trouvé quatre hommes, dirai-je affez hardis, ou aiTez imprudens ( i ) , pour ofer m’accufer en votre préfence, &. m’obliger
h juftifier aux pieds de votre Tribunal, une conduite conftamment noble & généreufe, avec les mêmes foins qu’on employeroit à juitifier une conduite criminelle!
Et pendant fept audiances j’ai demeuré devant eux, écou
tant avec une patience bien étrange tout ce que la méchanceté
humaine peut inventer de menfonges, de fophifmes, de ca
lomnies, pour dénaturer les aétions les plus fimples, pour créer
des motifs malhonnêtes aux aftions les plus pures, pour faire
regarder, dans leur inconcevable délire, comme un axiome
inconteftable, cette idée auffi affligeante que faufle: qu Un y a
( i ) . M e. D o n n e r , Avocat de l a d am e K o r n m a n n .
M e- L a M a l l e , Avocat du ficur Daudet.
M e. I l i m b e r t , Avocat du iîeur de Beaumarchais»
M e. M a r t i n e a u , A v o c a t du P rince de Nailau.
Il cft iinportiblc de fc form er une idée des injures groilîcrcs que ces quatre A vo cau
p i’ont prodiguées,
A 3
'Ui
�4
pas de Vertu qu’un intérêt prefque toujours odieux ne puijje pro
duire, pas de mouvement, même héroïque, dont on ne pulffe trouver
la caufe dans une affection perverje, ou unevolomé corrompue.
Et d’après cet odieux fyftém e, je les ai vus combiner entre
eux tous les moyens de me faire perdre l’ellime publique, que
j’ai malheureufement obtenue; car, je vois bien que c’eft un
malheur que d’obtenir Feftime publique à un certain degré:
8c fans pudeur, comme fans mefure, dans ce ianflua’re où
fiégent les Magiilrats que je me fuis efforcé de prendre pour
modèles, fous les yeux de ce peuple pour lequel vous m’avez
appris à me dévouer, folliciter à grands cris ma condamnation
& ma honte.
bien! queft-ce qu’ils me reprochent? Puifqu’après tant
de travaux entrepris pour faire triompher la Caufe des mœurs
Eh
& de l’humanité, c’ eil à des reproches qu’il me faut répondre ! .
n’exigeront pas, fansdoute, que je m’occupe férieufement
de l’imputation qu’ils m’ont faite, 8c qu’ils ont répété jufqu’à
la fatiété, que c’eft le defir d’une vaine célébrité, qui, me
faifant tout-à-coup fortir de mon repos 8c de ma folitude, m’a
déterminé à entreprendre la Caufe du fieur Kornmann,
S’ils n’ont vu dans mes Mémoires que les produâions d'un
efprit ambitieux , s’ils ont véritablement penfé qu’avec les
feules reiTources d’une imagination vive 8c forte , fans que la
vérité fut mon guide , il m’étoit poffible de les écrire ; que
I ls
leur dirais je ? Et pourquoi entreprendrais-je de détruire en
eux une opinion qui feroit moins alors de leur part l’effet de
la réflexion , que le réfultat nécelTaire d’une organifation
mallieureufe.
�5
S i, au contraire , à l’exemple de tous ceux qui ont lu ces
Mémoires, devenus trop fameux, ils tint compris que je n’avois
pu les compofer , fans m’abandonner à tous les mouvemens
d’une ame profondément émue , s’ils ne peuvent fe diffimuler
qu'une ame profondément émue eil toujours franche, toujours
fincère, s’ils favent comme moi qii’il y a un langage que l’efprit réduit à fes feuls m oyens, que l’imagination même la
plus brillante avec toutes fes refiources n’imitera jamais ; que
’ leur dirais-je encore ? & pourquoi voudroit-on [que , fur un
objet d’une ii foible importance, je m’arrêtafle péniblement à
leur prouver qu’ils ont constamment parlé contre leur penfée,
& que li le befoin de leur caufe ne les y avoit pas contraint, ils
euifent porté, fur ce que j’ai fait, un jugement moins févère.
J e laiiTe donc-là, une fois pour toutes , cette imputation
vague 8c fans m o tif, 8c j’arrive aux feuls reproches que j’aye
quelque intérêt à détruire.
C es reproches fe réduifent à deux.
S’il faut les croire , en défendant le fieur Kornmann , je
favois que je ne défendois qu’un coupable; enaccufant la dame
Kornmann, je favais que j’accufois une femme innocente ; 8c
pour prouver cette étrange propofition, ils ont produit des
billets écrits par moi à M,: Fournel, billets defquels il réfulte,
a ce qu ils prétendent, que je ne croyois en aucune manière
aux délits que j’imputois à la dame Kornmann, puifquc j’y
offre non-feulement de la réconcilier avec fon mari , fi elle
veut fe féparer publiquement des hommes que nous accufons
de l’avoir corrompue, mais que je m’y engage même en quelque
forte, cette féparation obtenue, à lui faciliter les moyens de
-fe jufliiier. Voilà leur premier reproche.
�6
S’il faut fcscroire encore, je n’ai pu , fans une pcrveriîté
dont il y a peu d’exemples ( ce font leurs termes ) parler du
Prince & de la Princefle de NaiTau comme je l’ai f a it , mani
feste r fur leur conduite des foupçons qui les outragent, leur
faire jouer un rôle indécent dans une affaire à laquelle, ainfi
que le fieur de Beaumarchais, ils n’ont pris part que pour obéir
aux mouvemens de la fenfibilité la plus refpe&able & la plus
pure; 8c, en conféquence, vous les avez vu commenter à leur
manière, c’eil-à-dire, en inve&ivant fans ceife, 8c en ne raifonnant jamais, le peu de mots qui me font échappés dans deux
de mes Mémoires fur le Prince 8c la Princefle de NaiTau, 8e
conclure de leur commentaire , à la confirmation du décret
d’ajournement perfonnel que le Prince de Naflau a obtenir
contre moi. Voilà leur fécond reproche,
J E reviens, fur le premier reproche,
V o u s favez m aintenant, MESSrEURS', ce que vous devez
penfer du fieur Kornmann 8c de fon époufe : fi mes Mémoires
n’ont pas fuffi pour démontrer l’innocence de l’un , 8c la con
duite conilamment criminelle de l’autre ; s’il reftoit encore
quelques nuages à diffiper dans cette' caufe , 8c quelques fan
tômes à combattre,grâce aux rares talensde notre défenfeur,(x)
à l’ordre dans lequel il vous a préfenté le vafte fyftéme de faits
& d e moyens dont il avoit à vous rendre compte , à l’éloquence
impofante 8c fière avec laquelle il a repoufîe lesobje&ions tou
jours faibles &. toujours faiblement expofées de nos Adverfaires, il me femble qu’aujourd’hui vous n’avez plus de doutes
à former.
Pour vous, comme pour m o i, comme pour ce Public qui
) l ) M«. Duverycr,
�•
(
7
m’ écoute, le plus infortuné de tous les homm es, & celui qui
a le moins mérité fes malheurs, eft inconteftablement le fieur
Kornmann ; ôc s’il faut appcller aufii infortunée la dame Korntnann , ce n’eil certes pas parce qu’elle eil innocente , mais
feulement parce q ue, malgré fes erreurs , on ne peut fe dé
fendre de quelque pitié , en fongeant à la deftinée , qui fera
déformais fon partage.
Il n’a donc pas dû exifter, dans le cours dë cette affaire, un
feul inftant où j’aye pu penfer-que la dame Kornmann netoit
pas criminelle.
< Mais alors que fignifient les billets que j’ai écrits à Mc Fournel?
Pourquoi y promets-je d’aller au iecours de la dame Korn
mann ? Pourquoi y vais-je même jufqu’à dire que fi elle fait ce
q u ej’éxigé d’elle, je m’occuperai de fa junification?
' M a l h e u r e u s e m e n t je ne puis m’expliquer ici fans rendre
compte de quelques circonftances encore inconnues, que j’aurois bien voulu pouvoir diiTimuler toujours, mais fur lefqueUes
mon honneur trop publiquement offenfé , ne me permet plus
de garder le filence.
Je vous prie , MESSIEURS, de m’écouter avec quelque at
tention.
M*Fournel, dans le cabinet duquel fe font fi à propos re
trouvé les billets dont on a cherché à fe prévaloir contre moi
dans cette audience , a été non-feulement le confeil, mais
l’ami du fieur Kornmann.
■ .'
C ’eft d’après fon avis, 8c en conféquence même de fes preffantes follicitations , que le fieur Kommann a rendu plainte
contre fon époufe ; c’eit même lui qui a rédigé cette plaints
�a* •
-\.8
( j’en puis fournir une preuve écrite de fa main (j ), ),6c..quita
‘ confeillé l’information qui l’a. fuivie.
O r , voici m aintenant, MESSIEURS, ce qu’il vous im porte
• d ’apprendre.
A l’époque' de raiïaiïinatdu fiéur Kornmann, bien que j’euffe
formé la réfolution de ne le plus quitter jufqu’à ce que jç
l’euiie arraché à l’affreux fyilême de perfécution dont il avoit
failli devenir la viitime.,.il ne me vint pas d’abord dans lapenfée
d’écrire pour le défendre.
Cette tâcfce me parut ne devoir regarder que Me Fournel,
& ce ne fut que par ce qu’il trouva bon que je m’en chargealTe,
que je me déterminai à la remplir,
Nous convînmes enfemble que je ferois un Mémoire pour
le fieur Kornmann , où je ne diiïimulerois aucun des faits
graves que celui-ci avoit à raconter, & que lui MeFournel ac
compagnerait ce Mémoire d’une Confultation lumineufe ,
comme il difoit alors, où, faifant fentir toute l’importance
de l’affaire qui y étoit traitée , il porterait jufqu’à l’évidence
la démonftration des délits que le iieur Kornmann imputoit à
fes Advèrfaires, 8c la légitimité des accufations qu’il leur avoit
intentées.
J’écrivis, en conféquence, mon premier Mémoire.
Quand il fut achevé , je le fournis aux lumières de M* Four
nel. Il approuva la manière dont il étoit écrit; mais il blâmai
fortement la modération avec laquelle j’y parlois de la dame
Kornmann. Si je l’avois cru , j’aurois dû la traiter fans
( i ) J ’ai la m in u te de cette plainte ¿crite de la m ain de M e F o u rn e l, com m e aulfi d ’au trei
C onfultations pour le ficur K ornm atm , ou ¿c ru es ou figuées p ar lui.
ménagement
�9
ménagement, caraôérifer fes fautes avec févérité, 8c au lieu dç
la prefenter au Public comme un objet fait pour l’intéreller
encore, malgré Tes nombreufeserreurs, la dévouer avec éclat
au mépris des gens de bien qu’elle n’avoit que trop mérité *
& à la vengeance toujours trop tardive des Lois, à laquelle ,
féduit par une faufle pitié, je cherchois mal-à-propos à la fouftraire(i).
• Il me fut impoflible d’adopter l’opinion de Me Fournel. Je
lavois mieux que perfonne combien la dame K-ornmann étoit
coupable; mais il me parut dur de brifer, fans retour, les liens
qui l’attachoient à fes enfans. J’aimois mieux lui fuppofer des
fentimens q u e, depuis long-tems, elle n’avoit pas, 8c je trouvai
préférable de lui ménager de loin, par la manière dont je ren
dais compte de fes fautes, les reffources d’un aveu noble Sc
tî’un falutaire repentir.
M e Fournel tint à fon avis : je ne pus abandonner le mien.
Les chofes allèrent ii loin, que je déclarai que s’il ne vouloit
pas adopter mon Mémoire tel que je l’avois compofé, je fou-
;
{ i ) Je me rappelle, qu’à cette époque , Me Fournel ne cefloit de me dire que m a modé
ration ne pourroit que faire le pîus grand tort à l’affaire du fîeur Kornmann , 3 c que li je i»e
m ’élevois avec toute l’énergie dont j’étois capable contre la dame Kornm ann, je m oterois le
droit de pourfuivre arec vigueur fes complices- O n a vu.ee même fyfb m c , tout ridicule
qu'il c i l , développé à l’audience par le D éfcnfcur de la dame K o rn m a n n , qui a pris beau
co u p de ren iêign em cn s de M e F o u rn e l, & j’ avoue que ce n’a pas etc fin» une grande lurp r ife , que j’a i entendu cet hom m e foutenir qu’ il falloit donc que la dame Kornm ann ne
fu t pas coupable > puifque je n’avois jam ais parlé d’elle qu’avec m énagem en t,
comme
£ on o c pouvoit parler avec m énagem ent d’ un coupable, puis conclure de cette proportion
citra va g a n te que , puifqu’clle n’étoit pas coupable , elle n’avoic donc pas de complicc, &
enfin entreprendre de m e prouver que fi j ’avois attaqué M - le N oir & les iieurs D audet
fit Beaum archais, ce n a v o it été uniquement que parce qu’ un jo u r , fans d o u te , où je
«a’eoaujrois de m oa o ilîveté, je m 'é to is mis dans la tête de faire beaucoup de bruit a leurs
4épexu< O a * férieufem ent dit toutes ces chofes.
�*
/
IO
haitois n’être cite en aucune manière dans l'affaire. J'ajoutai de
plus que n’attachant aucune importance k cet ouvrage , je le
priois d’en ufer ainfi que de fon bien propre , & d’en tirer ,
comme d’un canevas informe, des matériaux pour récompofer
un écrit plus conforme à fes vues.Mon Mémoire, en effet, fut p o rté, dans ce deflein , chez
M e Fournel.
Je ne dois pas omettre ici que durant le cours de ces difcufiions, Mc Fournel ne pouvant fupporter les délais que M. le
Procureur du Roi apportoit à donner des conclufions fur l’in
formation à laquelle il avoit été procédé contre la dame Kornmann, voulut abfolument qu’on lui fit des fommations judi
ciaires pour l’y contraindre , & qu’il rédigea lui-même ces foinmations.
Je ne dois pas omettre encore que ce fut auffi par le confei-Î
de Me Fournel, que le iieur Kornmann, diftinguant le iieur de
Beaumarchais de tous les complices du fieur Daudet, rendit une
plainte fpéciale contre lu i(i).
Ainfi , comme on le v o it, aucune démarche eiTentielle ne
s’eft faite en cette affaire , qu’elle n’ait été , en quelque forte r
commandée par Me Fournel.
le bruit fe répandit que j’avois compofé u n
Mémoire dans la caufe du fieur Kornmann, où M. le Noir n é CEPENDANT
toit pas bien traité.
Alors s’ouvrirent, chez M. le Procureur du R oi, ces confé
rences fameufes, dont on a tant parlé, conférences qui n’avoient
( i ) Je dirai plus b a s , dans «nc nocc t £c qui s’cft paiTc entre Me Fournel & le fieur Koc»
jnautt ,
au fujet de
la plainte contre le fieur de Bcaum arçhaij.
�4£ ï
it • ■
fo u r objet que,de fouftrâire M. le Noir au danger qui le menaçoit; M e Fournel fut invité à s’y trouver, 8c il nous prévint,
qu’il ne pouvoit fe difpenfer de s’y rendre.
Il faut bien le dire ; dès ce moment M>’ Fournel ne nous parut
plus le même. Il trouvoit toujours l'affaire dufieur Kornmantt
excellente au fond ; niais le fuccès, d ifo it-il, commençoit à
lui en paroître problématique;la dame Kornmann étoit encore
jeune 8c jolie ; 8c que ne pouvoit pas, dans une Ville de cor
ruption 8c d’intrigue , pour fe fouftràîre à l ’empire des L o is,
une femme accoutumée à féduire, 8c, dans cet âge encore où,
■en faveur des agrémens, on pardonne fi facilement les erreurs ;
M . le Noir fur-tout étoit puiflant. On connoifloit fesliaifons,
jfon crédit, le grand nombre de perfonnes de la Cour qu’il avoit
obligées, fes reflburces pour nuire, fes moyens pour fe garantir
des coups qu’on pouvoit lui porter ; nous étions fçuls , nous
étions foibles, 8c qu’étoit>ce que la folitude -8c la fbiblelle contre
toutes les efpèces d’autorité réunies pour protéger un cou^
pable?
Malheureufement, il eit impofiible d’obtenir quelque .choie çle moi par la crainte. Ces diverfes raifons ne firent aucune impreffion fur mon efprit. Pour toute réponfe, je demandai mou
Mémoire, 8c à quelques tems de*là je le fis imprimer.
Je fupprime à dçilein des détails curieux fur la manière dont
■cc Mémoire a été imprimé, 8c fur les précautions q u il nous a
fallu prendre pour qu’on ne devinât pas le lieu de l’impreffion,
iur une trahifon qui nous fut faite au moment même ou
l’impreflion du Mémoire étoit aehevée , trahifon qui faillit
rendre toute notre prudence inutile, f u r l’ordre qui fut donné
¿pu çonféquence, par M. le Garde des Sceaux , pour arrêter 8c
«üj
�12
110s perfonnes & notre écrit, rurTadreiTe avec laquelle nous nous
garantîmes de l’effet de cet ordre , toujours pourfuivis , jamais
atteints, & nous jouant avec une facilité &. un courage peutêtre fans exem ple, des obftacles de tout genre qu’on multiplioit à chaque inftant fur nos pas.
'[
Me Fournel eil loin de fe douter que j’ai des preuves écrites1
du rôle, pour le moins bien étrange, qu’il a joué dans des circonftances fi périlleufes pour nous, & qu’il ne me feroit pas d if-.
ftcile de démontrer qu’il en avoit un plus honorable à'rem -'
p lir(i).
•
1
( i ) Il faut dire un m ot de ce rôle & rendre com pte de la trahifon dont je viens de p arlerv
tout-à-l’heure. J’ avais cru devoir , par m énagem ent pour M e F ourn el , diffimuler ic i'
toutes ces chofcs. J’avois même porré la modération jufqu’à ne pas vouloir faire im prim er'
mon plaidoyer, principalem ent parce que j ’ ai fenti que je ne pouvois le publier, fans faire»
à M e Fournel un tort irrréparable ; mais les propos indécens qu’ il tie n t, & ceux qu’ il a
fait tenir à Js dernière audience par le D éfenfeur de la dame Kornm ann , m ’apprennent
qu’ il y auroit de l ’ im prudence à le diftinguer plus lo n g -tem s de la troupe d’homme»
m éprifables auxquelles il s’eft trop inconfidérem ment a flo cié , & qu’il a fi inal-à-propos,
entrepris de fe r v ir , en fe rendant coupable, à notre é gard , de l’abus de confiance le plus
criminel*
O r , voici ce dont il s’ a git. L e fieur K o rn m a n n , prêt à fe rendre dans la V ille où l ’ou
im p rim oit mon M é m o ire , eut l ’imprudence de confier fon fccrct à M e Fournel. C e lu i-ci
n’en fu t pas plutôt pollefleur , qu’ il chercha les m oyens d’en inftiuirc M . le Noir. E t pour
cela , ne voulant pas fe co m p ro m ettre, en lui écrivant de fa propre m a in , il fe rendit au
Palais , & y dicta , à un des E crivain s qui s’y railem blcnt, un billet à l’o n adreiTei oà
il l’inftruifoit de tout ce qui fe pafloit.
•>
M u n i de ce b il l e t , M . le Noir a lla trouver M . le Garde des S ce a u x , q u i , d e p u is, à
rapporté à D a v ille , au iîcur K ornm ann lu i même , qu’il n'avoit pu fe difpcnlèr , ' d’apres
l ’indication t.cs-précife que lui avoit donnée M . le N o ir, du lieu où nous faisons im
primer , de donner des ordres & d’envoyer des gens de la Police pour l'c faifir de notre
é c r it, & même de nos perfonnes.
Quoi qu’il en fo it, quelque tems après la publication de mon premier M é m o ire , l’Er
« rivainqui avoit r é d ig é , fo u s la d ifté e de M e F o u rn el, le b illet i-M . le N o ir ,
voyant
le
fieur K orn m ann fe promener fréquem ment dans la Salle du Palais avec M« F o u rn ct, &
�- ï.
-,'3 .
'
?
Quoi qu’il en fo it, le Mémoire parut.
Avant Ton apparition, la dame Kornmann avoit rendu quel
ques yiiites à M c Fournel ; dans ces vifites, il avoit été beaucoup
entendant dire que ce même M e Fournel éto it l’Avocat du fieU r K o rn m a n n , ne pût s’em
pêcher d’en manifefter fa furprife , & de raconter à plulîeurs perfonnes le fais du b ille t
qu’on lui avoit fait écrire.
•
C e fait parvint ainfi jufqu’à nous; d e p u is, & quand nous avons voulu en acquérir la
certitude * nous avons fait venir l’E crivain, q u i , en préfence de témoins , nous a déclaré
que non-feulem ent il ¿toit prêt à Pattefter & à m un ir fon atteftatioa de fa ilgn atu re; mai*
qu’il fe rappdloit très-bien qu’ il avoit à côté de lui,torique M e Fournel lu i d id o it le b ille t
dont il s’a g i t , un autre E crivain dont il connoifïoit toute l’honnêteté, & qui attefteroit
le fait de la même manière que lu i. Nous avons en conféquence envoyé chercher l’ autre
E c r iv a in , qui ,|cn e ffe t, a confirmé le récit du p rem ier, & tous les deux nous ont fourni
la déclaration fuivante.
T
’ • '
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, • .
>
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et Je fouffigné d éclare, pour rendre hom m age à la vérité , que dans le courant du moi*
» d’A v ril de l ’ année dernière 1 7 8 7 , M e F o u rn e l, A v o ca t, vin t m e trouver Grande Sallç
>5 du Palais de Juftice, au banc où j ’écris ordinairem ent, pour m e faire écrire une L ettre
» dont il tira la m inute de fa poche , qu’ il me d id ta, conçue en cet scrm cs à peu-près.
(
» la déclaration fuirante :
.
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1
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*
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M.
__ _
...
Quelqu'un qui prend p art à ce qui vous intereffi , vous avertis que M . Kornmann fa i t
dans ce moment , imprimer à C h a r t r e s le Mémoire contre vous.
» Q u ’il déchira fa m inute , plia la L e ttre que j ’avois tra n fe rite, ne la figna p a s, &
. . . .
x nie fit m ettre l ’adrefle.
.À A i. te N o i r , B ibliothécaire du R oi , &C.
1
j
.<• T
' 53 Q u e je lui fis l'obfervation que c ’étoit un anonym e qu’il m’avoit fa it copier, il ré -1
» pondit que ce n’étoit rien de conféquent.
,
|
» C e fait fe pafla en prélcuce du iîeur K ic a rd , écrivant journellem ent à côte de m oi,
m
ce que j ’offre & fuis prêt d’affirmer en tel cas requis»
1
» A P a r is , ce 0,6 A vril 1788. Signé G autier.
’
r N ota- » M e Fournel me paya 6 fols pour cette copie.
’
En m arge de c e t t e déclaration eft é c r it,
>
» J e fuis prêt & offre d’affirmer les faits énoncés en la déclaration ci-contre du fieur
j j G a u t i e r . A P a r is , c e 19 A vril 1788. Signé R icard.
.
.1 , ;
>
Je ci ois ijuc je n’ ai pas befoin de faire remarquer combien , dans cette circonlbnce j
îà condwitc de Me Fournel eft odieufe , & il m e femble qu’il a ’cA perionne qui
�14
queilion de recommencer de nouveau & toujours de la part
de la dame Kornmann, dans le defiein de tromper des négo
ciations avec le iîeur Kommann,
O r, mon Mémoire épargnant, autant qu’il étoit poffible, la
dame Kornmann , & l’opinion qu’il avoit produite dans l’efprit
du Public , n’étant défavorable qu’aux hommes qui l’avoient
égarée, on crut qu’on pourroit s’en fervip comme d’un moyen
pour m’engagér à propofer un accommodement, dont on le
propofoit bien de nous rendre les dupes.
;
En. conféquence, Mc Fournel vintnous voir, & nous proteA
tant que la dame Kornmann étoit abfolument changée, qu’elle
n’avoit pu lire, fans vepfer des larmes, l’écrit que nous venions
de publier , que c e t écrit lui avoit fait faire des réflexions férieùfes fur fa pofition, qu’elle n’afpirpit plus qu’à réparer fes
torts & à fe réunir à fes enfang, il nous conjura de l’aider dans
un projet fj louable, & finit par m’inviter à venir dans fon ca
binet en conférer avec elle (i).
tente Je regarder ; com m e une fau te légère , le crim e d’avoir livré le fecrct de fes clients,
à l'homme qui a vo it le plus d’intérêt à leur n u ire , & q u i , du propre aveu de Me F o’u r n e l,
pouvoir djfpofer dç plus de moyens pou r y parvenir.
( i ) Je puis citer pour témoins de ce que j ’avance jc i,.le .fie u r.C la v ie rc ., B a n ju içr
à
P a r is , & le liti^r B rillot de W a rv J lc , homme de Lettres d’ un m érite reconnu, q u i t u s
les deux dinoient ch rz le iieur K orn m ann , au m om ent où IVÎe. Fournei vint iiqus fiire. I4
proportion de confcntir à une entrevue avec la dame Kornm ann. Ils diront) comment le
lipur K orm an n rejctt.i d?aboul cette prbpoiîtion, avec quelle peine on parvint eofuice 4
l ’e n gager à fo jlfr ir qu’au m oins, m o i, je ville la d u n e l'Çorninannclicz M c . F o u r n il,
com m ent ce confcntcm ent obtenu > j embrallois M e. F o u rn e l, l^i d é cla ra n t, que 1) en
e ffe t, comme il me le d if o it . la (.l'âme Korrimnnn étojt repentante , je ferois pout ce qui
dépendroit de moi pour lui erre u tile, & ajoutant que le plus.beau jour de ma vie feroic
çelui où je pourryis lui faire retro u ver,' àii m ilieu de fa tymille & parm i ceux qu’cllç
devoit chérir , toutes les habitudes qdi l’avoient rendu li heureufe a u tre fo is , . . T ^ t e s
pes circonihnoes ne peuvent encore être oubliées de M e. F o u rn e l. . . ,
trpmjier 1
E t il
*QJ|u fl)Ç
�I5<
— Le fieur Kornmann fi fouvent joué par fon'épouie, eût bien
de la peine à croire à un changement fi fubit. Je fus plus
facile.
L’idée de ramener une mere à fes enfans, d’opérer entre
elle & fon mari , une paix durable après tant d’orages, de dé
tourner d'elle à jamais cette honte cruelle qui fuit nécellairement la manifeftation des crim es, mais, qu’un repentir fincère
devroit toujours effacer, cette idée fi confolante &fidoucene
pouvoit que me féduire, & je promis, du confentement toutes
fois du fieur Kornmann, de me rendre à la conférence qui
m’étoit indiquée.
■ Plufieurs jours s?écoulèrent avant le moment fixé pour cette
conférence. Pendant cet intervalle nous eûmes loccafion de
nous entretenir plus d’une fois avec M 1. Fournel, des objets
qui
devôiént y être traités.
Il me parut que dans toiit état de caufe, & fur-tout après
l'éclat que le Mémoire avoit fait, il étoit impoffible de fonger à rapprocher la dame Kornmann d’abord de fès enfans, enfuite de fon mari; fi elle ne fe fép’arôit de la maniéré la plus
décidée & la plus folem nelle, des hommes qui. avoient trop
efficacement contribué à la favorifer dans.fes défôrdres, c’elîà-dire alors, de M. le -Noir & du. fieur de Beaumarchais, car le
fieur Daudet étoit abfent. Je demandai donc avant tout, comme
on vous l’a dit, que la dame Kornmann m’écrivit une lettre que
j’auroisle droit de publier, o ù , fans s’expliquer d’une manière
détaillée fur fes fautes., relie contiendrait .en général qu’elle
avoit été féduite par de mauvais confeils , 6c ou nommant
les homm es'qui l’avoient féduite , elle déclareroit qu’elle
s’en rapportoit abfolument à moi fur ce qu’il lui conve**
�■
i6
no'it de faire dans la circonilance malheureufe où elle ¿toit
placée ( i ). .
Il me parut jencore que cette Lettre publiée, la dame
Kornmann devoit faire un Mémoire où rendant juilice à la
conduite conftamment généreufe de ion m ari, évitant des
aveux trop difficiles, mais annonçant un repentir véritable;
parlant fans aigreur de cette troupe d*hommes fans foi, aux
quels elle s’étoit livrée, mais ne diffimulant pas leurs crimes;
invoquant fur fa jeunefle & fon inexpérience la pitié de tous
les gens honnêtes, elle offriroit le fpeftacle fi touchant & ii
noble d’une femme féduite, & non pas encpre pervertie , qui
abjurant de bonne foi fe's erreurs, répare, par l’éclat de fon
retour à la vertu, le fcandale trop public que fa conduite a
.caufé.
. .
Toutes ces idées furent trouvées fages par M e^ Fournel ;
feulement il obferva que la dame Kornmann étant décrétée
'd’aifigné pouf être o u ï, né pouvoit fe difpenfer de prêter fe*
Téponfes, 8c que pour achever mon ouvrage,, il falloit que je
miffe par écrit à-peu-près ce qu’elle pourroit dire , lorfqu’elle
feroit interrogée par -M. le Lieutenant-Criminel, afin qu’elle
(ne nuifit pas, par fa propre imprudence , au rôle fi intéreflant
■que je lui deftinois.
Je n’apperçois quàpréfent le piège qu*on m etendoit alors.
Il ne me feroit, certes, jamais venu dans la penfée qu’on dut
un jour fe prévaloir contre moi des écrits qu’on follicitoit de
ina pitié en faveur de cette femme trop coupable, 8c qu’un
moment viendrait où l’on fe feroit un moyen pour me dcs( i ) J’exigeai de p lu s, conim c ot^lc verra plus b a s , qu’elle écrivit deux lettres» l ’ une
à M . le N o ir , l’autre au fieur de Oeaum arclnis > où elle leur annonceroit qu’elle renonçoit
absolum ent à leur fo ciité .
honorer
�^33
.
7
. !> .
honorer au Tribunal de l'opinion, de ce qu’on m’invitoit â faire
pour elle.
M=. Fournel, je l’ai déjà d it, étoit notre ami autant que
tiotre Confeil ; nous lux avions donné, en plus d’une occafion,
des preuves d'un attachement trop véritable pour penfer un
inftant qu’il voulut nous tromper. Il étoit donc tout fimple
que je TécoutaiTe fans défiance, & que je n’héfitafle pas à faire
tout ce qu’il trouvero.it convenable de me prefcrire, dans une
circonftance où il m e'ïembloit que, comme m oi, il n’avoit
qu’une bonne aftion pour objet,
D e -là , Meffieurs, les différents billets que j’ai écrit à
M 2. Fournel, billets écrits fans précaution, parce que je croyois
écrire à mon ami; billets néanmoins o ù , quoiqu’on ait pu
d ire , je défie , comme je le prouverai dans peu, qu’on apperçoive autre chofe que les intentions que j’expofe ici.
Je reviens à mon récit.
Quoiqu’il en fo it, le jour fixé pour la conférence arriva. La
dame Kornmann fe rendit avant moi chez Me. Fournel. J ’i
gnore quel fut le fujet de leur entretien jufqu au moment où
je parus ; ce que je fais , c’eit que ce n eil pas avec des re
proches ( i ), comme on a ofé l’avancer^ mais avec des com*
plimens vraiement exagérés, que la dame Kornmann m’ac
cueillit; ce que je fais encore, & ce que je défie de n ier, c’eft
qu’avant même que je me fuife expliqué, on me déclara qu’on
adoptoit mon plan à-peu-près dans toute Ion étendue..
’ Une feule chofe pafut devoir y ‘être modifiée. On defira
que je n’exigeaiTe pas que le fieur de Beaumarchais & M. le
Noir fuiTentexprefiement nommés dans la Lettre qu’on devoit
.(i) Das reproches á moi tic la part Jo la Jam i K o n m u n u .
c
�i8
m’écrire, parce qu’il y avoit une.forte de difconvenance , difoit-on, à ce qu’une femme, placée dans une poiition auffi dé
licate que celle où fe trouvoit la Dame Kornmann , fe déter-r
minât elle-même à flétrir les complices de fes fautes.
Je ne fus pas d’abord de cetavis. Cependant après quelques
difcuifions, je confentis à la modification qu’on me dcmandoit,
parce qu’on me promit d’ailleurs de défigner ii bien les perfonnages, que qui que ce foit ne pourroit s’y méprendre.
,
C eci convenu, on propofa de rédiger fur le champ la Lettre.
M e. Fournel & la Dame Kornmann me prefsèrent beaucoup de
me charger de ce travail. Je ne le trouvai pas convenable, parce
que cette Lettre devant être de quelqu’étendue , il étoit pofiîble qu’on y reconnût ma manière d’écrire , & qu ainii j otaffe
à la Dame Kornmann le mérite d’être revenue d’elle-même, &;
fans autre impulfion que celle de fa confcience, à fes devoirs de
mère & d’époufe.
On feignit d’approuver mes raifons. Mc. Fournel alors fe
réduiiit à me prier de mettre par écrit feulement les idées
principales qui devoient fe trouver dans cette Lettre. Je ne
crus pas la chofe bien néceffaire , je connoiiïois l’intelligence
de Mc. Fournel, ôc il me fembloit qu’il n’avoit aucun befoin de
mon fecours pour rédiger une Lettre q ui, au fond , ne me paroiflbit pas bien difficile à faire. Je cédai néanmoins , & me
plaçant à fon Bureau, j’écrivis le peu de lignes informes qu’on
vous a produit ( i ), n’employant pas une exprefïion que Mc.
( I ) V o ici CCS lign rs informes :
C onvenu entre Madame K . & moi , au nom de M . K . , qu’elle m ’écrira une L ettre
qui fera rendue publique , dons laquelle cil; dira qu’elle n’a pas attendu la publication de
mon M ém oire, pour rendre juflice à fon rnari, qu’elle a etc entraînée loin de lui par de»
circonilanccs malheurcufes , qu’au fciu de ces circonftantcs elle n’a ccflc de regretter
�Fournel napprouvât , ou q u il ne me fuggérât me me fpécialement ( 2 ),
Le projet de Lettre arrangé , la Dame Kornmann me parla
deies enfans, 8cfe cornpofantla phyiîonomie d’une mère affli
gée , elle fe plaignit de ce que je ne les avois pas amenés avec,
m oi; puis elle me prefla vivement de la conduire fans délai
chez le fieur Kornmann, afin de lui procurer la fatisfadion de
les embraifer.
Tout cela fut dit avec un intérêt fi peu véritable , qu’heureufement pour moi je ne fus pas ému. Je répondis, 8c Me.
Fournel ici feignit encore de m’approuver, qu’il m’étoitimpoffible de la rapprocher de fes enfans, tant que je n’aurois pas la
certitude, par la Lettre que je demandois qu’elle avoit entiè
rement rompu avec fes corrupteurs; qu’au refie il ne falloir pas
beaucoup de tems pour écrire cette Lettre , & que fi je l’avois
■------ -- -
-
----------
^ *■ ^
r
-----
«nfans, Je pleurer leur abfcn ce, & de fe rciTouvenir avec amertume des fix années de paft
& de tranquillité, & c. & c.
Q .t’ ellc croit devoir s’ éloigner des perfonnes q u i, foit involontairem ent, foit im pru
dem m ent, ont néceilîté k s réclamations de fcm mari ; qu’il lui paroît convenable de recou
rir
à l’homme fcn'îble & généreux qui a défendu arec tant d’intérêt la caufe de fon m a ri,
pour établir, &c. &c.
A u moyen de laquelle Lettre M . K . amènera fes enf&nS a M adam e K . , fera offrir ju
diciairement à M . de Beaumarchais ce qu’elle lui doit, & donnera a fa femme des marquât
¿ ’ une iincèrere conciliation.
Signé B E R G A S S E .
( a ) Par exemple , je me rappelle t r k - b i en que les mots f hom m e finfiblc & généreux
qu’on lit dans le projet de Lettre d dciïlis , & q u i' fcmble contenir une efpécc d clo ge de
m o i, m ’ont été diftés par M c. Fournel,‘ que j ’avois mis à la place c e u x - c i, VA m ï
vertueux , & que M e. Fournel me les fit effacer pour y fubftitucr les précédons. L u im êm e, il y a peu de jours , cft convenu ¡Je ce fait ; cette rem arque, quoique m in ucieufc,
éto it nccclfairc.
'
\"
�dans fa matinée 'du lendemain, elle verroit fes enfans le jour
même.
O n vint alors à m’expofer l’embarras où l'on Te trouvoit visà-vis du fieur de Beaumarchais. On m’avoua qu’on lui devok
dix-fept mille liv ., parce que la penfion de deux mille écus que
payoit le fieur- Kornmann , n’avoit pas toujours été fuffifante
pour les dépenfes qu’on avoit faites. •
Je n’héiïtai pas à levér , au nom du fieur Kormanrï, cette
difficulté, &, trouvant fage d’affranchir promptement de toute
efpèce de reconnoiflance envers un homme auifi. vil que le fieux
'de'Beaumarchais, une femme que j'aimais encore à. croire plus
égarée que coupable, je m’engageai , fitô-t que nous ferions
poffefTeurs de la Lettre , & même avant qu’elle fut publiée , à
'faire porter chez le fieur de Beaumarchais les 17, 000 liv. qu’il
avoit prêtées.
L
"
‘
L a conférence avoit duré deux heures. Nous- n’avions plusrien à nous dire y & j’allois quitter la Dame K o rn m an n lo rfqu'ellenouspropofa de faire avec elle un tour de promenade an
jardin du Roi. J’acceptai. Durant cette promenade, il fut encore
queftion de la conduire fur le champ chez le fieur Kornmann p
pour y voir fes enfans. Me. Fournel q u i, comme on vient de
le voir , n’avoit pas d’abord approuvé cette démarche , parut
alors fe rapprocher un peu de la Dame Kornmann. Heureufement je demeurai ferme dam ma réfolution., infiftant toujours
fur la Lettre qu’on m’avoit promife T & décidé à tout refafet
jufqu’à ce qu’on eût rempli ce préliminaire indifpenfab!e*
i
.
N ous nous féparâmes. enfin. En me difant adieu, la Dame
K.ornmann m’afTura que le lendemain j’aurois la Lettre. Je
�43/
2
i
l’attendis vainement, le jour fuivant 6c pluiieurs autres s’ecôii«
lèrent fans que j’en entendifle parler.
s
.
1
.
.
A cette époque , parut ma réponfe âü premier Mémoire dut
iïeur de Beaumarchais. Dans cette répOnfe , ainfi que dans mon
grand Memoire, la Dame Kornmann eft iingulièrement mé
nagée. Comme j’y parlois de l’avenir affreux qu’elle fe préparoit
ii elle continuoitàvivre danslafociété deshommeâqui l’avoicnt
perdue, je penfai que la peinture effrayante que j’y faifoisde cet
avenir, hâteroit encore le deifein, ou j’avois cru la laiifer, de
s’éloigner d’eux fans retour; je le lui envoyai donc, & j’imaginai
en même tems de faire figner l’envoi que je lui en fis par fes
enfans ( i ).
Il me fembla que le nom de/e s enfans tracé de leur main}& mis
fous fes y e u x , feroit quelquimpreiTion fur ion e fp rit, quelle
fe reffouviendroit enfin quelle étoit m ère, & que fa tendreiîe
pour eux la porteroit à ne plus différer ce qu’elle m’avoic
promis.
( i ) V O I C I C E T ENVOIA M aJanie K O R M A N N ;
D e la part de f e s E nfans.
Signé
A délaïde
COCO ; c'eft le nom de ion Fiis,
Kornmanrt.
que m :ÿ
me les oppofer à l ’ A u d icn ce , & cil conclure toujours avec la merric logrcjir; ,
que la Dame Kornnun croit donc bien innocente à mes yeux , puifque j a vois pu la i ertvoyer une lig n e , lignée Coco & Adélaïde Kornnunn , & que dôs-lors il fillort, de toj.e
néceflité , que je fullc un homme déteifable , puifque j’ai éié capable de 1 accuicr in-Ugre
Croiroit-orï qü’on a gardé pendant pendant deux Années ce peu de iigncs » ainfi
billets i pour
l ’opinion que j’avois de fon innocence. C ’ cA cependant à do »elles pauvret.*? qu it fane
répondre»
�V
22
Je me trompai,' mon envoi refta fans réponfe. Mais, jç
jfcmpçonnois fi peu qu’on m’eût abufé, que je n’attribuai les
délais que j’éprouvais, qu’au defir que Me. Fouinel pouvoit
avoir de rédiger avec plus de foin, qu’un Ouvrage ordinaire, la
Lettre que j’avois demandée.
f
C e p e n d a n t les délais parurent fi longs, que je commençai
h vouloir en connoître la caufe.
On ne s’attend pas à ce qui me reile à raconter.
L e crime n’efl pas toujours prudent. Je ne tardai pas à être
inflruit de la part d’une perfonne qui le tenoit du fieur de
Beaumarchais même, que cette fameufe conférence où je procédois de fi bonne-foi, n’étoit qu’un piège que m’avoit tendu
le fieur de Beaumarchais, qu’on ne s’étoit propofé d’abord que
de m’engager à écrire quelques lignes, dont on pût inférer quç
je çroyois la dame Kornmann innocente, enfuite de me dé
terminer, en intéréflant ma fenfibilité, à conduire la dame
Kornmann chez fon mari, moins pour y voir fes enfans, que
fous le prétexte d’y yoir fes enfans : il faut bien diftinguer çes
deux chofes.
Ces articles obtenus, on auroit dit au fieur Kornmann : vous
¿ivez reçu la dame Kornmann chez vous, elle y a v u , elle y a
cmbraiTé fes enfans; c’eil votre ami qui l’y a conduite, vous êtes
donc réconcilié avec elle? O r, toute aâion d’adultère eft
éteinte, fitôt qu’il eft prouvé qu’il exifte une réconciliation
entre l’époux qui accufe, &. l’époufe qui elt accufée ; il ne vous
jreile donc plus d’autre parti à prendre que de garder le filence,
�4& )
& de vous ioumettre à la loi qu’il nous plaira de vous faire
jfubir.
Ces articles obtenus , on m’auroit dit : de votre aveu, 5c’
d’après l'écrit que vous avez rédigé : la dame Kornmann eil
innocente, vous avez donc menti à votre confcience en défen
dant fon mari, en transformant en de vils corrupteurs, des
hommes recommandables qui ont pris foin d’elle dans fa mifère;
vous n’êtes donc plus qu’un audacieux Libellifle ; ceux que vous
avez outragé vont rendre plainte contre vous, & demander la
jondion du Miniflère public, pour vous faire punir comme vous
l’avez mérité. En conféquence, le Miniftère public devoit être
engagé à réquerir contre moi les peines les plus infamantes ;
& on eft allé jufqu’à me nommer celui de MM. les AvocatsGénéraux, qui, difoit-on , pour venger M. le Noir, & fur-tout
le fieur de Beaumarchais, dont on ofoit le fuppofer l’am i,
avoit promis de fe charger de cet étonnant réquiiitoire (i).
Une pareille trame eil horrible : elle m’étonna peu, comme
on le penfe bien, de la part du fieur de Beaumarchais; ce n’étoit
pour lui qu’un crime de plus. Il n’y avoit, dans tout cela, que
•le rôle de Me. Fournel qui devoit me furprendre; mais j’étois
fi aveuglé fur fon compte; d’ailleurs il auroit fallu, en le foupçonnant, lui fuppofer un cara&ère fi étrange, pour ne rien
dire de plus, que j’aimai mieux le croire abufé comme
moi (2).
( i ) 'C cft a cette m m ic époque que le fîcur de Beaumarchais annonjoit par tout qu il
alloir me faire condamner aux G A L E R E S .
(cl) J’ai ici une obfervation importante à faire. On a lu à l ’audience les originaux de
mes billets t & on a eu foin de dire , q u ’on en lifo it les originaux. Depuis j ai demande
qu’on m e proJuiiît ces o rig in a u x , comme j ’en ai in con t:ftabl:m :n t le d r o it, & je u ai pu
�Ce n’a étç qu’environ un ou deux mois après, qu’inilruit qu’il
cntretenoit des liaifons fecrettes avec M. le Noir & le fieur dç
Beaumarchais, dans le tems même où je l’avois cru le plus en
tièrement dévoué aux intérêts du fieur Kornmann, je cpmmençai à penfer qu’il pouvoit bien n’être pas entièrement
étranger au complot formé pour me perdre , 8c que je finis par
engager le fleur Kornmann à lui retirçr fa confiance. .
l’obtenir. M e. to n net s’efl: contenté d’en envoyer îles copies à M e. D u veyrier, écrites de
la main de la dame Korninann , Sc encore n’a -t il pas envoyé d’abord des Copies de tous
Us billets. C e n’a été que fur la remarque de M e. D u veyrier, qui s’vft apperçu , que parmi
ces co p iis , il lui en tjiancjuoit un : bien cilen cicllc} que nous fem m es parveuus a nous (es
procurer toutes,
'
Q r , çn premier li-u , pourquoi ne me pro lu it on pas mes originaux, & qui mV.ilure
que les copies qu’on en a faites ne font pas iufiileües ?
En fécond lieu , pourquoi les copies qu’on m ’a produites, font elles écrites de la niait»
(Je U dame Korninann ? Seroit-ce parce qu’on a u rtit voulu m énager à M ?. Fournd l’excufç
de dire cij’ a l’époque où nous nqus fommes occupés cnlsjnble de rapprocher la dame Korn_
mann de fun m a r i , il n’a cru fuivre que mes intentions en les communiquant a La
4 ame
K orninann.
M ais il y a loin cîç communiquer mes billets, à permettre qu’on les copie ; c a r , a quoi
lx>n les copier ?
M a s de p ljs , parmi ces büjet.s, il çn cft un qui ne devoit jamais (ç retrouver dans les
mains de la dam e K orn m ann , & qui cependant s’y retrouve; & on a li bien fenti qu’ il ij;
devoit pas s’y retrouver, que c ’eft précifém cnt la copie de celui-là qui ipanquoit à U
^ollcilion de M ç. D uveyrier.
J),ins cç dernier biJlct, caufant fam ilvrem en t av cc Me. Fouruèl ftim m c dans tous les
a u tre s, je dis ces mots remarquables : J e lui amènera! (es e n fin s , & nous feron s m e (cent
de larmes qui finira tout. Certainem ent un billet de cette efpèto ne devoit pas fe retioavet
dijis les mains de la dame Kortunann.
Non. Q uoiqu’on f tilc , on n’evitera pas le b liin c qu’on a encouru en livrant mes billets,
& de telles rulcs n’empêcheront pas qu’ une upiaion défavorable ne fe forlne fur [e compe
de l'hom m e peu délicat qui le$ a livrés.
Il
�44 \
*5
- i ï étoit important que je rendiiTe compte de ces circonftances.
‘ Or , ces circonilances expofées, j’ai deux chofes à demander.
A-t-on pu faire ufage de mes billets dans cette caufe ? Mes
billets iignifient-ils ce qu’on a eu la méchanceté de leur faire
iîgnifier ?
D ’abord, a-t-on pu faire ufage de mes billets dans cetti
ca.ufe ?
A qui ai-je écrit ces billets ? A M c. Fournel ; c’eil-à-dire au
Confeil du iieur Kormann, à mon C on feil, à notre ami com
mun. Qui les a produit dans cette audience ? Les adverfaires
du fieur Kornmann, les miens. Qui les a livrés à nos adver
faires? Ce même M e. Fournel ( 1 ) , qui nous dirigeoit dans
( 1 ) J’ai dit plus h iu t que c’étoit Me. Fournel qui a v jit engagé le fieur Iv a r n a u iu 1
rendre plainte fpécialement contre le fieur de Beaum archais.
O r . voici encore un fait qu’il faut raconter.
A l’époque des conférences tenues chez M . Ic Procureur du R o i, M e. F ourn il perfiita
• toujours k vouloir que le fieur Kornmann rendit fa plainte ; il la rédigea m im e & me
l ’envoya pour m'en demander mon avis , je l ’approuvai, Si il fu t décidé que le lendcm ai«
ou le furlendemain elle feroit remife à M . le Procureur du Koi.
En eonféquence le fieur Kornm ann fe
ren d it
chez M *. Fournel pour la ligner. A peine
ctoit- il arrivé que le copiflede Me. Fournel parut avec la plainte m ifeau net. Me. Fournel
f r i t la plainte des mains du copifte, & l’ ayant parcourue des yeux , il dit au fieur K orn*
irwnn , c’eft b o n , elle elt exa& cnicn t copiée , vous pouvez la ligner.
L e lietir Kornm annTieurcufem ent aufîi voulut la parcourir. Quand il arriva aux con*
d u rio n s, fa furprife fut extrême de voir que M e. Fournel y avoit ajouté une phrafe, par
laquelle l u i , fieur Kornmanrt, fe défirtoie de toute a&ion contre fon époufeÉtonné d’ une addition fi é tra n g e ,
M e. Fournel. . . .
le
fieur K ornm ann en demanda
la raifon à
J’ai v o u lu , répond celui-ci , vous mettre dans le casd'obten;r une
iuflicc plus prompte de vos cansm is. O n oc vous refufera rien , & j en ai parole, fitét
D
�chacune de nos démarches, fans l’avis duquel nous ne nous per
mettions de rien entreprendre. Mais j’interroge ici tous les
<Jurifconfultes qui m’entendent, quels fo n t, relativement à
leurs cliens , les devoirs rigoureux de l’honorable profeflion
qu’ils exercent ? Peuvent-ils en aucune occafion, révéler les
fecrets qu’on leur confie ? Exiile-t-il aucune circonftance où ils
aient le droit de faire paiTer des mains d’un clien t, dans les
mains de fon ennemi, 8c même dans des mains feulement étran
gères , des a&es, des titres quels qu’ils foien t, qui peuvent
que vous vous ferez défiftè de votre aftion contre votre époufe. M a is , rep’ ujue le lïeur
K o rn m a n n , comment voulez-vous que je puiile pourfuivre mes ennemis que vous m ’avc&
en g ag é vous même à attaquer comme complices de mou époufe, il j’ abandonns mon
a&ion contre elle; avez-vous oublié que vous avez blîm é la m anière modérée Jonc j’ai
parlé de M ad. Kornmann dans mon M ém o ire, & cela uniquement p.irce que vous avex
craint que je nenuifiiTc ainfi à l ’a£Uon que j’ intentois a fes corrupteurs? ne détruirai-jepas
infailliblem ent cette dem iere aélion , Jn moment que mon aâio n contre Made. Korm ann
n’exiftera plus ? comment .peut-on être fondé à pourfuivre des complices quand on renonce
à pourfuivre un accufé principal; y a - t il même des complices où il ne fe trouve point
d’accufé principal ?
L ’obfervat’on étoit péremptoire. M e. Fourncl en fu t un moment déconcirté. Puis fe
décidant à propos , il arracha la requête des mains du fieur Kornmann & la jetta au feu j
proteftant qu’ il n’avoit vou'u faire autre choie que nous fauver , que nous n i connoiflïons
pas le nombre & la puilÎance de nos e n n e m is, q u ’in failliblem en t nous fuccombcrions à
notre a tta q u e , Sic.
C es menaces effrayèrent peu le iîeur K o rm m n n . C r ? y e z , M oniteur, rép ondit-il, que
fi j’ avois été capable de lign er de pareilles conclufions, je m ’en l'rrois puni fur le champ »
en brûlant la main qui les auroic lignées.
Le
lendemain ou le furknd em ain de cette fcènc , Me- Fournel refit la requête d’ une
manière conforme aux intentions du ficnr K o rn m a n n , à quelques mots perfides, pris
ce p e n ia n t, que le Procureur dii iîeur K orn m ann de concert t.vcc celui - c i , crut devoir
retran ch er, avant que de la revêtir de fa fignature.
C e r é c it , n a , je crois , pas bclbin de Com m entaire, J’obfcrvcrai feulem ent que nom
étions encore , a 1 epoque ou tout ceci fe pniTi , tellement confiant dans l ’honncteté de M*
Fourncl , que nous nous contentâmes de croire qu’on l’avoit in tim id é , & qu’ il ne nous
tin t pas dans l’efjprit de foupçonner qu’il eût voulu nous tromper.
�44$
27
intereiîer I honneur de ce client ou fa fortune ? Je vais plus
loin ; quand celui qui vient implorer le fecours de leurs lu
mières feroit abfolument indigne de leur affiftance, de cela feul
qu ils l’ont écouté, ne fe forme-t-il pas entre eux 8c lu i, comme
une convention tacite, qui ne let^r permet plus de prêter leur
miniilère aux perfonnes qui fe font déclaré fes parties ?
Et fi les a&es, que livre à mon ennemi le Jurifconfulte
auquel je m’adrefle, font des titres qu’il a lui-même follicité
de ma crédulité; ii lui-même m’a tendu des pièges pour me
livrer fans défenfe aux hommes que je pourfuis; fi fon cabinet,
qui devoit être à mes yeux l’afyle de la diferétion & de la
confiance, n’a été pour moi qu’un ahtre ténébreux où fiégeoient
à Tes côtés le menfonge 8c la perfidie.
Et fi le Jurifconfulte auquel je m’adreffe , étoit non-feule
ment mon confeil ordinaire, mais mon ami, fi jufqu’au moment
où il m’a trompé , il étoit impoflible que je trouvaife dans mon
cœur auGun foupçon qui m’avertit de me défier de fa bonne foi,
fi j’ai dû m’abandonner fans craipte à fes fatales infpirations,
fi depuis je l’ai trouvé partout agiiTant fourdement pour mon '
deshonneur 8c ma ruine.
Je vous le demande à tous, exiile-t-il un délit plus grave que
celui qu’on m’oblige de révéler en ce moment? Et quand, en
effet, entraîné hors des bornes ordinaires de la prudence, j’aurois
p u -me permettre quelques démarches, tracer quelques lignes
qui m’euffent compromis, auroit-on le droit de s’en prévaloir
„ contre moi? Ne voyez-vous donc pas ici que fi les Magiilrats
pouvoient prononcer , d’après des titres obtenus par un abus de
confiance pareil à celui dont je me plains, ne v o y e z - vous pas»
fans que j’aie befoin de vous le faire remarquer, qu’il n y auroit
plus rien de facré parmi les hommes ; que le recours aux
D 2-
�k
wV
Triburiaux^déjà fi difficile, deviendroit-’ néceflairement tou
2
8
jours dangereux ; que fi l’on ofoit admettre une fois contre un
accùfé quelconque , des titres fournis par celui auquel il auroit
confié le foin de fa défenfe, il n’y auroit pas d’innocent, pas
d'homme injuflement perfécuté, qui ne dût frémir en appro
chant du'cabinet d’un Jurifconfulte; que fi ces cabinets ne font
pas des âfyles facrés h. la porte defquels veillent fans ceffe l’hon
neur &. le fiience, il n’y a plus de repos, plus de fécurité po£
•fibles pour les malheureux qui viennent implorer le fecours des
lois ; enfin que fi l’on ne pofe pas en maxime que tout titre
livré par le confeil d’une partie eft un titre obtenu contre la foi
publique, & dont l’ufage doit être févérement interdit, l’ordre
focial tout entier eft infailliblement ébranlé, p uifque l’ordre
• focial n’exifte que par la loi , &. que la loi n’eft plus qu’une
inftitution illufoire, partout où l’homme qui l’invoque peut,
’avoir quelque chofe à redouter de ceux - là m êm e, quelle a
chargé du foiii de le défendre.
Jurifconfultes honnêtes , qui m’écoutez , ces maximes
font les vôtres , & l’outrage dont je me plains , eft un ou
trage fait aufli à la noble profeffion que vous exercez. Pourquoi
m Vt-on forcé de parler, quand, depuis deux ans, bien con- vaincu de l’abus de confiance-, dont je viens de rendre com pte,
r je m’étois impofé l’obligation de me taire? Ah! croyez que de
r tout ce qu’ils ont imaginé dans cette audience, pour aigrir ou
• affliger ma fenfibilité, rien n’a été plus douloureux pour m oi,
r que la néceffitéoù ils m’ont mis de révéler une faute que j’avois
pardonnée, que la cruelle alternative dans laquelle ils m’ont
placé, ou de manquer à ce que je me devois à moi-même, ou de
faire connoître publiquement, comme un perfide, un homme
; honoré d’un Miniftère que vous rendez fi refpeitable par vos
lumières & par vos vertus.
�-9:
r - C e n’eft pas tout : non-fisuiement, orj n’a.pu.£e prévaloir de
mes billets dans cette Caufe mais 'ils offrent précifément un
fens oppofé à cçlui qu’on a eu la mauvaife-foi de leur donner ;
mais le fens qu’ils.-offrent ne fait qu’ajouter à l’opinion .qu’on
, a déjà fi généralement conçue de la pureté des motifs qui m’ont
çonftamment déterminé dans tout ce que j’ai entrepris pour la
defenfe duiîeur Kornrnan.tf.. - r
1 e n ; ,j- Car enfin, M e ssie u rs, que trouve-t-on'‘dans ces billets,
jmême en les confidérant, indépendamment des circonllanœs
dont je viens de parler ? Y trouve-t-pn, commç on a ofé vous
le dire, que j« crois la dame Ivoinmanri innocente? Que fâché
'd’avoir écrit eu fay.eur du feur Kornn^un-, je voudrais bien
trouver le moyen de la réconcilier avec lui; enfin^ qu.e^moimême j’ai follicité cette réconciliation? N on , certes: & il
falloit être doué d’ un efprit auffi faux que méchant, pour
mettre à côté de ces billets iï fimples, des opinions de ma
. part, après ce que j’avoit fait, après ce que je n’ai celle de faire,
fi peu vraifemblables 8c fi ridicules.
Q u’y trouve-t-on donc, quand ce n’eft pas avec le deffein de
de calomnier qu’on les lit? Ceci feulement, que je promets de
venir au fecours de la dame Kornmann, fi elle confent à fe
féparer avec éclat de fes corrupteurs ; fi elle m’écrit une lettre
que j’aurai le droit de rendre publique, où elle confeifera que
les confeils perfides d’une troupe d’hommes fans foi l’ont éga
rée ; fi, dans cette même lettre, elle rend hautement juiîice
aux aflions conflamment nobles, conftamment généreufes de
fon mari (i).
( i ) V o ic i co m m e D t je m ’exp lique: « V o u s rjpyc*.qu’il.cft de la plus.liuut« itnpprtance
•)} que notre plan s’exécute , il faut abfolum ent q u e vous aracniez Madame K o m it ia p a à
�I*
3°
Qu’y trouve - t - o n encore? que ces préliminaires remplis,
je m’engage à faciliter à la dame Kornmann les moyens
de fe juftifier : ce qui ne veut pas dire, ainfi qu’on a eu l’impu_
dence de le prétendre, que j’offre de lui fournir les moyens do
combattre avec avantage le fieur Kornmann, puifqu’çn même-*
tems, je le repète, je veux qu’elle lui rende hautement juilice,
puifqu’en même-tems je le repète, je veux qu’elle avoue que de
perfides confeils l’ont égarée; mais ce qui veut dire Amplement
que je fuis prêt ¿'ménager fa défenfe, de manière à ce que,
fans diffimuler fes fautes, elle en rejette tout l’odieux fur chacun
de ceux qui l’ont favorifé dans fes défordres, comme je l’avois
fait' moi-même jufqu’alors ; comme je n?ai ceiTé de le faire,
depuis ( i ) .p
*
» écrire à M . le Noir & à M . de B e a u m a rch a is, uns lettre courte, iîmple & noble, dans
» laquelle elle dira : que revenue de fe s erreurs, voyant dans toute la profondeur l'abyme où
on l ’a entraînée\ elle f e propofe de rendre compte au public de f a conduite , qu elle
t> s'éloigne d'eux f i n s retour » . E t on a. ,pr<Jduic ce billet ? l’audien cc, pour prouver que
jecro is la
dam e
Kornmanp, innoccpte ! A u .r ç ftç , remarquez dans ce billet ces mots«,
et Vous voyez qu’ il cil de la plus haute importance q\ie nQtre p|an s’exécurï » . Le plan
dont il s’ a git ici , é to itd o n c autant le plan de M®. F o u rn cl, que le ir.i:n , & comment
aprèj cela Mé. F o u rn d a-t-il eu le courage de livrer mes billets À la dame K ornm ann & à
fon défenfe ur ? C o m m e n t n’ a -t- il
pas fenti qu’ en donnant à mes billets une interpréta
tion auflî fiu llc que calqm nieufe, l ’opinion qu’ il cflayoit de former fo n tre tu p i, il la
formoit encore plus contre lui.
( i ) V o ic i encore ce que je dis dans un Sucre de mes billets : c< Sauyons M adam e K orn » mann fur toute cl.ofc ,
& préparez le canevas des lettres dont je vous ai parlé ( les
?> lettres à M . le Noir & au lieur de Beaum archais ). Vous fave? quelles font mes in ten.
» tions , & li la Nature m’ a doué d’ une âme méchante. Je contribuerai de bon cœ ur à lu j
» f.rrc jouer dans le public , le rôle le plus iiitér^flant & le plus noble, pourvu qu’elle
» veuille s’y prêter », M ais en quoi pouvoir confiftcr ce rôle intércifant& noble? n’étoit cc
pas à s’ élever, en quelque fo r te , au delTus de fes fau tes, en ne ro u giflan t p u d’en faire
l ’aveu? E t p:ut-on en douter, quand qp renia rque que je dem ande, avant t o u t , qu’oit
é t f i r c M . à le Noir & au fieor de Beaum archais ? O r , oa a vu plus haur dans quels terme*
�44.1
‘ Enfin, qu’y trouvê-t-'on, fi dn les confidère relativement
aux circonflances dans lefquelles ils ont été écrits, relative
ment aux moyens qu’on a mis en œuvre pour me les faire
écrire ?
Que j’ai été dupe, en les écrivant de'm a- confiance en un
homme dont je n’ofois më permettre de ibupçonner la bonnefoi; que j’ai peut-être trop facilemént cédé à la pitié qu’il tâchoit de m’infpirer pour une femme coupable ; qu’au moindre
figne de repentir que cette femme m’a donné, ou plutôt qu’elle
a feint de me donner de concert avec l’homme qui me trompoit, je fuis allé au-devant d’cllé pour l’arracher à la deilinée
qu’elle fe préparoit; enfin, que j’ai vivement fouhaité qu’il
put exifter un moyen de la rapprocher de fes enfans, en la féparant de fes corrupteurs ; 8c qu’en conféquence, je me fuis
prete fans effort, fans précaution, a faire toutes les démarches
qu’on a exigé de moi pour opérer ce rapprochement falutaire.
. " '
'
< .
ç;
.
!.
r
Voilà tout ce qu’on remarque dans mes billets; voilà tout
ce qui réfulte des circonflances dans lefquelles on me les a
fait écrire.
r E t ce font là des crimes! Et des intentions fi douces 8c fi
pures, ont été travefties en intentions malfaifantes! Ah! je ne
m’en défends pas. Oui, j’ai voulu fauver la dame Kornmann;
oui, j’ai faifi avec toutTempreflement d’une âme honnete 8c
fenfible, l’occafion qui m’a été offerte de diffiper l’illufion
je veux qu’on leur é c riv e , & conjtncnt j ’cxige.«ju’on Jcur déclare, qu on rcnoncc pour
toujours à leur io d écé.
4
�32
fatale dont elle aimoit à s’énvironner; o u i, j’ai defîré la fépa
rer de fes corrupteurs; oui, je nai pu fans frém ir,voir fe brifer,,
fous mesyeux , les liens qui l'attachaient à fes enfans.. . . . . . #
Une mère & des enfans, & un éternel iilence entre une mère 8c
des enfans. .*>................. .^Cette idée étoit horrible pour m oi,
8c c’étoit parce qu’elle étoit horrible , que dans tous le i
Écrits que j’ai publiés dans cette Caufe , je me fuis iingulièrement occupé depréfenter, fous un point de vue intéreflant,
celle que d’affreufes circonftances m’obligeoient d’accufer ;
c étoit , parce qu’elle étoit horrible , que plus cette
femme eft devenue criminelle , 8c plus ma pitié pour elle
efi: devenue profonde ; c’étoit parce qu’elle étoit horrible,
que plus les auteurs de fes honteux égaremens m’ont
perfécuté , 8t plus j’ai éprouvé d’émotion en fongeant au fort
cruel qui devoit être un jour fon partage, & moins j’ai pu me
réfoudre à manifefter l’opinion, hélas! trop véritable que je
m’étois faite de fa dépravation profonde ;'efpérant toujours
qu’un moment viendrait, où tant de modération de ma part,
opéreroit dans fon dîne une révolution falutaire, 8c n’ofant pas
hum ilier par des vérités trop févères, celle qui pouvoit encore
fe montrer fi digne d’être honorée, par un retour fincère à
la vertu.
Infortunée! vas, je te pardonne tout le mal qu’ils ont voulu
me faire en ton nom. Quelque part qu’ils t’ayent donnée dans
leurs lâches com plots, ne crois pas que je t’impute aucun de
ceux qu’ils ont formé pour me perdre. Non , jamais, quoique
'tu faffes, tu ne trouveras dans mon cœur que de^laco.mpalfion
& de l’indulgence.
Infortunée ! dans quel abîme de corruption ils t’ont fait des
cendre ! Comment celle qui rempliffoit fes devoirs avec une
fidélité
�fidélité fi touchante èc il refpeftable, comment celle qui pré-:
feroit aux vains plaifirs du monde , la paix de fa maiibn, le
bonheur tranquille dont elle joüiiToit auprès de fes enfans ,
comment eft-elie devenue la plus perfide des époufes , la plus
infenfible des mères ? Oh ! pourquoi n’es-tu pas ici ? Pourquoi
fous les yeux de tes J u ge s, enpréfence de ces femmes qui m’écoûtent 8c qui font mères comme toi, pourquoi ne pùis-je in
terroger ton cœur? Non , je ne le crois pas; non, quelqu’ayent
çté tes fureurs, tes égaremens, tes attentats, ils ont égaré ton
cœur, ils ne l’ont pas entièrement corrompu / La nature garde
le cœur d’une mère ; il eiï des méchans qu’elle laiife fans re
mords; mais pour la confolation 8c le bonheur de l’efpèce hu
maine , alerté d’une mère coupable, elle place toujours le re
pentir!
. Hélas ! peut-être en ce moment, tu pleures foiitaire 8c délailfée ! Peut-être tu gémis fur les funeftes confeils qu’ils n’ontceffé de te donner jufqu’à ce jour; peut-être confidérant déplus
près l’avenir dont je t’avais menacée, tu regrettes d’avoir cher
ché à me trahir, quand-je m’occupais avec tant d’intérêt de te
tendre une main fecourable ! Combien elles doivent être
amères tes larmes ! Comme je les vois totflber lentement fur
ton cœur ! Que de fautes elles expient à mes yeux'.Infortu
née , . . . tu ne verras plus tes enfans, 8c tu pleures !....
Voiis, qui devez la juger; vous, les témoins de mon trouble
8c de la douleur que j’éprouve, en fongeant au fort qui lui eft.
maintenant réfervé ; non, vous ne ferez point inexorables, vous
aurez pitié d’une mère , puifque nous nous fommes vus forcés
d’acçufer une mere devant vous ; je le fais, il en efl peu d’auiîi
coupables : mais auffi, exiih. - t - i l jamais une fociété plus ,
E
�*
H
pCrverfe, plus corrompue que celle dans laquelle une première
f a u t e l’a malheiïreufemeht entraînée? _
Lorfqu il s’àgit de punir une femme infidelle , qüélqües
foicnt Tes erreurs, quelques foient même Tes crimes, n’oublions»
jamais que la première caufe de fes erreurs & de fes crimes
• ne fut pas en elle-même ; que c’eft toujours une féduâion étrari*
gère qui les a préparées ; que la nature, qui fit les femmes polir
aim er, leur donna aufli plus d'abandon dans lé développeinéfrt
de leurs partions ou de leurs féntimens ; que prefque toujours
toute la raiion d’une femme efl dans fon cœur; qu’il eft comme
impoiTible qu’elle ait d’autre morale que celle de l'homme
qu’elle aime , & que fi cet homme eft artificieux 8c méchan*,
il faut bien enfin, à moins que quelqu’évé n e m e n t imprévu ne
diffipe le charme qui la fé d u it, qu’elle devienne , comme in
volontairement la complice de fes artifices & de fa méchan
ceté ( i).
• N on, encore:une fo is, vous ne ferez point inexorables,vous
nè verrez pas d’un même œil & les bourreaux & la viftim e, &
cette troupe d’hommes fans fo i, dont vous connoiffez mainte-
' f i j J î rem arque une choie bien étrange dans flos m œ urs. U n hom m e cité pour fa vie
Jnccntieufi , un- homme qui- aura porté le trouble dm» vin g t ménages ,. n ’en:ourrc aucunr
blâm e ; on le v ç it fin s ferupule , on l'a ccu eille avsc in té rê t, on plaidante même avec lui
de cc qui fait la d é fla tio n des fam illes qu ’ il a désho.-.orées, & une femme que tan r de
circonftances c.Tcufcnt q u e lq u e fo is , fi m aîheureufem ent fon infidélité eft devenue tro p
pttbHqne, fc trairre rout-ir-coup vouée'a l ’abâm !on & a la honte i certainem ent je ne veux
j u s q u e - la fem m e qui s'cft b iffée fé d u ire ,
4c q u i,
f u r t a u t , a donné trop d’éclat à fes
fa u te s , conferve encore une conlidération qu'elle a m érité de perdre ; m ais l'hom m e
qui l’a fédulte , n’eft il donc pas plus coupable, & p o u rqu o i.le traite-t-o n avec une R
Ihm daleufc in dulgen ce, ' UDdis qu’ on la punit, e lle , avec taat de rigu eu r & de f é » ir iic l
.
—
�4S\
35
riant tous les crim es, & l’infortunée qu’ils ont perdue. Le Ma*
giilrat, chargé des importantes fondions du Miniftère public j
faura déterminer la julle diftance qu’il faut mettre entr’eux.
Vous l’entendrez, avec cette éloquence énergique & douce,
avec cet efprit de lumière qui le cara&érife, établir des difc
tin&ions néceflaires entre la femme adultère , & celui qui la'
détournée de la route de fes devoirs ; il vous préfentera dans
tout fon jour cette vérité fi fimple & fi importante en mêmetems que la nature elle-même punit la femme adultère d’une
manière déjà bien rigoureufe, en la privant de toutes fes affedions domefliques , ( i ) en brifant les liens qui l’attachoient à fes enfans , en mettant une éternelle folitude danç
fon cœ ur, & tandis qu’il appellera toutes les vengeances de$
Lois fur la tête des coupables, que nous vous avons dénoncés,
vous le verrez accueillir, avec i n t é r ê t , la prière de celui que
nous avons défendu., la prière d’un époux couvert d’outrages,
q u i, pour fe garantir des attentats de ceux qui lui ont ravi fon
¿poufe, forcé de l’accufer elle-même, ne vous demande pas
fa honte, vous conjure , au contraire, d’éloigner d^elle toute
(0
Prçciftm cnt parce que les f : mn'.es font faites pour aim er, elles ne font Hcurcufe*
«jue par des rapports dom efiiqujcï, & ces rapports leur font-encore plut cflcntieJs qu’i
nous. L a vo cat.o n d’ une fem m e, fi je peux me fervir «le-ce m o t, cil d e tre époufe &
m ère ; & fa vie , m algré le tumulte du monde , n’eft prefque toujours qu’ L’n î vie foücaire,
in quietts & p kijje d’canifis ; quand Ies'aiRcHoiU de mère & d’époufe lui m a n q u en t..O r,
l ’ jd u ltcrc une fois cp np u, fiiparont nécciTaircmeni une fem m e de fa fam ille , I’ifol.mt
in fa illib lem en t de tout ce qu’cJJe devoit a im e r , porte avec lui fa peine, & une peine q u i,
m alheurçufcm ont.nc peut finir qu’ avec l'infortunée qui en eft l ’omet. Mais, d’apics cette
id é e , nos loi* qui p'Jni/Tent avec autant d« févérité la fcnjine infùjellc que fprç corrup
teur , ne font-elles pas fufceptibles de quelque reforme ,
& a l ’égard d f la femme in fi
dèle , fi la rature venge les m eturs a rc c tant d’énergie , fiut-il encore ajouter beau?
ceup de chofe à la vengeance f
B 'j
Hé
�condamnation trop févère , 8c ne defire autre chofe de votre
juilice , finon que vous déterminiez fon fort, de manière à ce
qu’elle ne puiiïe s’égarer davantage.
. Hélas ! j’ai vu les plus hautes protégions employées a fouftraire à un châtiment trop mérité , les fcélérats qui ont con
sommé fon opprobre. J’ai vu le Magiftrat prévaricateur, qui,
au mépris des Lois les plus faintes, s’ell occupéde la favorifer
dans fes défordres ; j’ai vu l’homme vil auquel elle s’eft aban
donnée; j’ai vu l’homme audacieux qui s’eil fait un mérite de
ta fouftraire à l’autorité de fon époux ; je les ai vus tou s, en
vironnés de ce que le crédit a de plus im pofant, l’intrigue de
plus dangereux, l’autorité quelquefois de plus formidable, 8c je
n’ai vu perfonne s’intéreiTer véritablement au fort de cette infor
tunée, & depuis qu’elle a quitté la maifon de fon époux,tous ont
cherche à mettre k profit fes erreurs, tous l’ont encouragée dans
la carrière licentieufe qu’ils ont ouverte devant elle , nul n’a
youlu lui donner un confeil falutaire. Et moi feu l, peut-être ;
j’ai cherché à la fauver, 8c vous voyez comme ma pitié pour elle
a failli me devenir funefte, 8c vous voyez comme ces hommes
affreux ont tenté de tourner à ma honte tout ce que j’ai entre
pris pour la rappeller à fes devoirs ; comme ils ont eflayé de
transformer, en démarche crim inelle, la démarche la plus in
nocente, la plus fnnple, la moins fufceptible d’une interpré
tation défavorable.
Après cela, dois-je me repentir d’avoir été trop crédule dans
une circonftance où ma crédulité, quoiqu’excitée parles motifs
les plus nobles, a pu avoir pour moi des conféquences fi cruelles?
Non : j’aime encore mieux être imprudent qu’impitoyable. S’il
efl des larmes perfides, on pourra, je le fens, me tromper en
core , 8c quelque dure que foit l’expérience que j’acquiers
�w
37'
aujourd'hui, ce fera'toujours avec le même abandon, la même
difpofition à me laiiTer féduire par de trompeufes apparencesj
que j’irai au-devant des malheureux qui imploreront mon
appui.
v
jr
Je paffe au fécond reproche qui m’eft-fait. Vous n’avez point
oublié qu’il a pour objet ce que j’ai dit du Prince & de la Prineeile de NaiTau dans mes Mémoires; qu’en conféquence de.
ce que j’y ai dit de l’un 8c de l’autre, le Prince de Nafiau a rendu
plainte contre le iîeur-K..ornmann 8c contre moi; 8c que, fur
cette plainte, grâce à la complaifance des premiers Juges,nous
nous trouvons tous les deux décrétés d’ajournement perfonnel.Je remarque, entre le Piince de NaiTau 8c m oi, deux efpèces
de difficultés : des difficultés de f o r m e , 8c des difficultés de
fond.
Difficultés de forme. Il prétend que la plainte qu’il a rendue,
contre nous eil régulière’; 8ç m o i, je foutiens qu’elle eil récri- ‘
minatoire.
Difficultés de fond. Il prétend qu’il a eu raifon de rendre :
plainte contre nous, parce que nous l’avons calomnié: 8c m oi,
je foutiens q u e , loin de l’avoir calomnié, nous n’avons pas
dit de ltli tout ce que nous pouvions, tout ce que nous devions
dire.
Je m’arrêterai peu fur-les difficultés de forme.
Le Prince de Naiïau afïure que j’ai tort de regarder comme
récriminatoire la plainte qu’il a rendue contre nous, attendu,
d it-il, qu’une plainte récriminatoire eil la plainte que rend,
un accufé contre fon accufateur, 8c que nous ne l’avions pas
accufé lorfqu’il a rendu plainte conrre nous.
�3$Et comment le ’ Prince de Naiïauveut il prouver qu’à cette
époque, il n’étoit pas accufé ? De deux manières;
5
Il n’étoit pas accufé, parce q u e , quand il a rendu plainte
contre nous, il n’étoit pas décrété, & q u e, parmi nous, il n’jr
a que le décret qui accufé,
Il n’étoit pas accufé, parce q u e , quand il a rendu plainte
contre nous , non-feulement, il n’exilloit point de décret, mais
même il n’exifloit pas de plainte fpéciale contre lui de la part
du fieur Kornmann.
A ces deux moyens, j’oppofe deux réponfes bien fimples.
Premièrement, il eil faux que, fuivant notre jurifprudence #
il faille être décrété pour êtrea'ccufé. Deux“particuliers rendent
plainte le même jo u r, l’un contre l’autre fur le même fait, en
s’accufant mutuellement. Dans cette pofition , quel eil le
devoir du Juge. Peut-il accueillir les deux plaintes à la fois?
N’eil-il pas tenu au. contraire de rejetter l’une pour adopter
l’autre? De déclarer ainfi qu’entre ces deux particuliers, l’un eil
accufateur & l’autre accufé? E t cependant il n’a point encore
prononcé de décret. Ce n’eil donc pas, comme vous le voyez ,
le décret qui accufé, mais la plainte; puifque dans cette h ypoth èfe, c’eil entre des plaintes qu’on choifit pour déterminer
quel eil l’aceufé & quel ell l’accufateur.
n
En fécond lie u , il eil faux que lé fieur Kornmann n’ait pas
rendu plainte contre le Prince de Naflau , bien antérieurement
h la plainte du Prince de Naflau, contre lu i; car, dix-huit
mois avant la plainte du Prince de Nauflau, le fieur Kornmann
avoit rendu une plainte générale contre le fieur Daudet, fes
complices, fauteurs & adhérens. O t , le fieur Kornmann a
dém ontré, & je le démontrerai dans peu davantage, que le
Prince de NaiTau eil un des complices du fieur Daudet. Il eû
�40
39
do rtc ¿vident qt/en rendant plainte contré îe iieùr Daudet,
il a rendu plainte aufii contre ïe Prince de Naffau.
Mais , dites-vous, ces mots com plices, fauteurs & adhérans
-qui fe trouvent dans la plainte contre le fieur D aud et, font
des mots que vous pouvez appliquer à tout le monde, 8c qui,
conféquemment, ne s’appliquent à perfonne.
O u i, je peux appliquer ces mots à tout le monde; maisl’effentiel eft de favoir ii je les applique bien ou mal.
S i, par exemple, je ne vous démontre pas que le Prince de
Naflau eft fauteur, complice ou adhérent du fieur D a u d et, il
fe trouvera que j’ai mal appliqué ces expreiîions au Prince de
Naffau, qu’il n*eft pas accufé, & que fa plainte n’eft pas récria
•minatoire.
Mais fi je vous démontre invinciblement que perfonne nV
plus favoriie le d élit & la continuation du délit du fieur Daudet
.que le Prince de Naffau, il fe trouvera que j’ai bien appliqué
au Prince de Naffau la qualité de com plice, fauteur ou adhé
rent du fieur Daudet; q u e, dès-lors, il eft néceffairement com
pris dans la plainte que le fieur Kornmann a rendue contre le
fieur Daudet; que, dès-lors, il eft accufé; que, dès-lors aulïi,
la plainte du Prince de Naffau eft récriminatoire.
Ces idées font trop faciles à faifir pour que je m’y arrête dar
.vantage : j’arrive aux difficultés du fond ; c’eft-à-dire, à la ca
lomnie que m’impute le Prince de Naffau.
. *.
, S’ i L faut croire le Prince de Naffau, je l’ai calomnié, nonfeulement dans fa perfonne; mais ce qui eft bien pis, dans la
perfonne de. la Princeffe de Naffau, fpn époufc.
. Et fur quoife fonde^t-il pour dire que je f a i calomnié? fur
�ti
• -\
r '4 °
(deiix phrafes qui fe trouvent dans deux de mes Mémoires. Et
quelles font ces deux phrafes (i)?
- ¿.
: - L e f i e u r d e Beaumarchais publie un Écrit, où:il annonce
qu’il ne s’eft chargé de faire des démarches en faveur dé la
dame Kornmann, qu’en conféquence de la miffion expreife
qu’il en a reçue.chez le Prince de Naffau.
'Et' moi je réponds au iieur de Beaumarchais, que la miifion
qui lui a ét.é donnée chez le Prince de Naifau, par quelques
hommes corrompus & quelques femmes fans pudeur, ne fuffit
pas p .mr le juiKfier du rôle odieux que je lui reproche.
M.. le Noir publie un Écrit où il dit. que la PrinceÎTe de
JNaiTau, a vivement follicité auprès de lui, la liberté de la
dame Kornmann, 8c ce qui eft bien plus fort, où il nous apr
prend q u e l l e a e n v o y é aux M in ières des Mémoires, dans lef-r
quels, à coup fur, afin de difculper la dame Kornmann, elle
ne traitoit pas le fieur Kornmann avec beaucoup de .ména
gement.
;
. Et moi je réponds à M. le Noir que les.follications de la
Princeffe de Naiïau, ne l’excufent en auçune façon à mes*
( i ) O n trouvera ic i trois ou quatre pages de réflexions déjà développées dans mon
grand M ém o ire contr« le P rin ce de N aflau ; il faut b ien , m a lgré m o i, répùter ces
réflexions, & trè j-fo u ye n t dans les mêmes termes >quand ;e ne puis reneontrer m ieux ;l
l’Avoc.it du Prince de Naifau n’a fait autre cliofc Ü l’audience que p a te n te r k s o b je d io n s
cf.ic je me fuis faites dans cc même M é m o ire , & tout fon art â conlîfté à ne pas dire un
m ot de mes réponfes. Cependant cet A v o c a t, comme les trois autres , prétend que mes
M ém oires font fa m e u x , que tout le monde les.a lus
mais alors n’ i - t - i l p as.un peu
m an qu é, non-feulem ent de b o n n e-foi, mais de .pudeur, en extrayant de ces M ém oires fi
connus , tout ce'que j ’y avois m is n u i-m cin e à. m a tlia rg e , afin d’en com poler fon P la i
doyer , & en laiil'ant"dû côté toÜJ l e ; raifonnemens) un peudécififs, il élt v r a i, dont je
ïn ï fuis fervi pour liét^uut fans jretour les im putations que je prévoybfadevoir un jour
m'erre faites.
yeux,
�4j y
,
.
.
.
4 *
. ..
*
.
*
yeu x, attendu qu’il favoit très-bien qu’il exiftoit desrelation£
intimes, entre elle & le fîeur Daudet, & que lui-même, en
parlant de ces relations au fieur Kornmann, ne s’en étoit pas
expliqué d’une manière bien avantageufe.
Voilà ce que j’ai écrit. O r, pour favoir fi j’ai calomnié en
écrivant ainii, il faut rechercher fi ce que j’ai écrit eft vrai
pu faux.
E t d’abord, en ce qui concerne la PrinceiTe de NaiTau, elle
ne niera pas, & tout le public fait comme moi, qu’il exiftoit
entre elle 8c le iieur Daudet, des relations intimes. M. le Noir,
defon cô té, n’oferoit pas nier, s’il fe trouvoit ici en préfence
du fieur Kornmann, qu’il n’a pas parlé de ces relations, en des
termes très-honorables.
M . le N oiravoit ent re fe s mains les regiftres de Ja Police,
remplis de notes infamantes contre le fieur Daudet , regiftres
dont, dans les cours momens de fa profpérité, le fieur Daudet
avoit vainement follicité la fuppreffion, regiftres qui dépofent
encore en plus d’un lieu cjue le fieur Daudet eft un efcroc, un
intriguant, un homme fans principes 8c fans f o i, & , d’après
cela, dequel œil M . le Noir pouvoit-il voir les relations de la
Princefle de Naffau avec un. tel perfonnage ? Et comment entreprendroit-on de nous prouver aujourd’hui que nous en avons
im pofé, lorfque nous avons affirmé que M. le Noir en s’expli
quant fur de telles relations avec le fieur Kornmann, n’en a paî
parlé d’une manière favorable(i) ?
( i)
les
b ien
L ’A rocat du fieur D audet a ofé me faire uu crime de ce que je cite ici
régim es de 'la Police , 8t il a déclaré avec une
* fuuluitcr
q u ’i l
renonçât ,
qu’ il
me
emphafe à laquelle
rcndoit
iclponfable
il ferpit
«.eCoutcs
F
les
�M a i s , me répliquez-vous , qu’importe tout ce que vous
dites ici.? En avançant qu’il ejuiloit des relations intimes entre
la PrinceiTe de Nafiau 8c le fieur Daudet, vous avez fait naître
des foupçons fur les mœurs de laPrincefle de Naffuu, 8c fous ce
point de vue vous êtes toujours bien coupable.
N on , je ne fuis pas coupable. S i , dans cette occafion ,
comme vous le prétendez , les moeurs de la Princefle de
Nafiau ont été ofïenfées, à qui doit-elle imputer cetteoffenfe?
Ju fais, pour un m om ent, une fuppofition impofliblc. Je fuppofequa le fieur Daudet, que vousconnoiiïez maintenant pour
le plus vi l , le plus odieux de tous les hommes , fi le fieur de
Beaumarchais n’exifioit pas , foit au contraire.un homme d’une
çoiu|uite pure St irréprochable. Eh bien , dans cctte hypotlicfe,
quand j’ai dit qu'il ex ifloit des relations intimes entre la Princefie de Nafiau & le fieur D audet, je n’aurai rien dit qui puilïe
faire foupçonner les mœurs de la PrincelTe de NalTau. Et pour
quoi? parce que des relations intimes entre la PrinceiTe de Naffau & un homme de bien, ne peuvent qu’être honorables.Ce
imputations que
je m’etoi* permife», d’aprèi c ; que p o iro it tontenir et» n u !h «u -
reu i re£iftrc> i l'A voeat du fieur Daudet n '.tro 'i p u befoin rie faire tin t »le fctui«; •«
xpf fiiu toii.o’J f* ren.lu lefponfable Je tout ce que /a i dit ou ¿ t n t , depuis que je me m 'Ie
Je dire o j d e a ire - Je déclare lion: ici que (i l«t Kegülrc« «le h Police n- .îipofent p u que
le fie ir D j j J c i c.1 un in tti^ u an t, un cfctoc , un homme fin? principes & O n, fu i, je cooftm a pa(Ter pour en n o i r impofé au P.ib!ic & au* M agiftrJts. Ap*es cette I r .l a t a t io a ,
le lieur Daudet n'a pîui qu'une choie à faite- C/ctl <k io llm te r un A trct de la C o u r . qui
orJonoc l’apport iîc» Ktgiftre» de la P o lic e , 01 birn je le foilictterai , r a o i , 8t pi i»
■ o j»
Il
*e »on» te qui féfu lt:ra de ta fonfron: >:i.»o de t r t Hep.-ftrei >»ee le(‘« m D aiik't.
faut dire cneoeeque t ’eft .le M le Noir . j-: r>o n te ’•vu j ie le tioa» d'i fitur Dai: let
qui fc tr o jr e e n piut d'uo lieu lu» I«* K cgi r u .U la P o ù s ', o ’jr cil n j|I-: p-ui aeion^rig
J u ta epiii
h-wotaWe, A p tit tela, c « f i;:n c r : M le No»» a*t il pu U m i ladauvc
r u an au Ikur Daudet. Je lui Utile cette q j « t W i t tii’%
»-» re .
�43
n’oft donc uniquement que parce que.le fieur Daudet eft en
vironné de la réputation la plus infâme , que je n’ai pu-, félon
vous, fans que les mœurs de la PrincelTe de Naflau aient été
oiîenfées, parler de fes relations avec elle ; mais alors , à qui
doit s’en prendre la PrincelTe de Naflau? Eft-ce à moi qui inc
fuis vu contraint, parla nécel'fité de la défenfe du fieur Kornmann , de faire remarquer de telles relations ? Ou à c l b , qui
ne s’eft fait aucun ferupule de les entretenir ? Ou h elle , q u i ,
en recevant habituellement dans fa maifon, comme fon homme
de confiance, comme fon ami , un perfonnage de tout point mal
famé; en le fervantoutre-mefure dans une circonftatice où il
ne méditoit qu’un crim e, a donné à connaître combien fa ré
putation lui étoit peu chère, 8c n’a pas craint de préparer ainfi
fur elle -même l’opinion défavorable dont vous m’accufez fi inconfidcrétncnt d’être l’ Autcur aujourd'hui ?
lu puis, pourquoi me parlez-vous ici des mœurs do la Prin
celTe de Naflau ? Kt comment pouvez-vous dire que j’aye fongé
il les oftenfer, quand les Mémoires mêmes dont vous vous plai
gnez, prouvent évidemment qu’il eft impoiTible qu’un tel dclTcin
me Toit jamais venu dans Tefprit?
N'avez-vous pas remarqué que dans ces Mémoires, en mèmetems que je parle des relations de la PrincelTe de Naflau avec
le fieur Daudet, je rends compte dans le plus grand détail de la
pafiion du fieur Daudet pour la dame Kornmann? N avez-vous
pas remarqué que dans ces mêmes Mémoires, j’expole qtte c eft
pour fervir cette pallion malhonnête, que la PrincelTe de Nallau a fait un fi grand nombre de démarches, toit auprès de M.
le N oir, foit auprès des Minirtre*.
O r , fi ?’v rends com pte dans le plus grand détail , de la p\ffiondu fieur Daudet pour la dame Kormn »tui, <>l >’ peins cnmêtrtc
K «j
�44
tems la Princeffe de Naffau, tout occupée de fervircette paflion
malhonnête , comment pouvez-vous fuppofer que mon deffein
ait été de donner à entendre un feul inftant que cette même
PrinceiTe de Naffau n’agiffoit ainfi,que parce qu’elle étoit éprife
du iieur Daudet. Ne fentez-vous donc pas que dans une pareille
hypothèfe, l’intérêt de la Princeffe de Naffau eût été précisé
ment d’éloigner la dame Kornmann du fieur Daudet , & que
dès que je vous la préfente , au contraire , employant tout ce
qu’elle a de crédit, & de moyens pour rapprocher le fieur,Daudet
de la dame Kornmann, néceffairement je fuis allé au-devant de
l’opinion qu’il ait pu exifter entr’elle 8c le fieur Daudet des ha
bitudes offenfantes pour les mœurs, des habitudes femblàbles
à celles qui exiftoient entre le fieur Daudet par exemple, & la
dame Kornmann. Tout cela eft fi clair , que je n’ai pas befoin,
de m’y arrêter davantage.
A i n s i , je n’ai pas calomnié la Princeffe de Naffau. Voyons
m aintenant fi le Prince de Naffau p e u t, avec plus de raifon ,
prétendre que je l’ai calomnié.
J’o u v R E le Mémoire du fieur de Beaumarchais ; & qu'y
vois-je ? Le Prince de Naffau agiffant ,' écrivant, multipliant
les démarches pour procurer à la dame Kornman fa liberte.
J’ouvre le Mémoire du fieur de Beaumarchais, 8cquTy vois-je?
Le Prince dé Naffau invitant le fieur de Beaumarchais à fe pré
valoir des Lettres du fieur Kornmann au fieur D au d et, pour
lépandre en fecret chez les Miniftres l’opinion que le fieur K.ornmann avoit vendu fon épotife au fieur Daudet , tandis qu’ea
Public , n’ofant pas fe prévaloir de ccs mêmes Lettres, qui atteftent précisément, 8c d’une manière invincible, l’opinion con*
�¿féî
45
traire, ils s’efforçoient l’un 8c l’autre de faire regarder le iieur
Kornmann comme le mari le plus jaloux & le plus intraitable^
Enfin j’ouvre le Mémoire du fieur de Beaumarchais , & qu’y
vois-je encore ? que c’eil aux fol licitations très-preffantes du
Prince de Naflau , a fes voyages à Verfailles, à fon crédit im.
pofant, que la dame Kornmann a dû la fatale révocation de
l’ordre qui a permis qu’elle fût transférée de la maifon des
Dames D ou ay, dans celle du Médecin Page (i).
( i ) L e terrs ne me perm ettant pas de fa ;re im prim er à préfent les lettres du Sr. K . dan
toute leur in té g rité , je les publierai après l ’A rrêt qui va in terven ir , aVec'un é c rit, où je
rapprocherai de ces lettres enfin connues, l’horrible com m entaire qu’en a fait le fieur de B .
dans fon premier M ém oire. O n fe rappelle , qü’ à cetté époque,
11concluait
de ces Ifttres,
• qu’il cito it par la m b e a u x , & qu’il ticnquoit à fa fantaifie ; que le fieur K o rcm an n é to itle
plus vil de tous les h o rrm es, q u ’ i l avoit l i v r é Jui-m tm c fon époufe au fieur Daudet. O n
fera bien fu rp ris, quand on les lira telles c u ’clles fe n t, de n’y voir autre chofe que h
m orale d’ un homme de bien , que tous les fentimens u’un époux honnête pour nne fem m e
qu’ il voudrait rappeller à fes devoirs, que la peinture du chagrin qu’il éprouve, en fongeant qu’il n’a fait auprès d’elle que des efforts inutiles.
s
T o u t cela eft fi fra p p a n t, que quelques perfom es qui les ont déjà lu e s, fc demandent ii
ce font bien là les mêmes L e t t r e s , dont le fieur de Beaum archais s’ eft l'ervi pour diftamer
le fieur Kornm ann.
Alors on fe demandera , com m ent il a pu exiiler un Avocat afïc-i peu jaloux de ion hon
n e u r , T A v o cat dtl fieur Daudet, qui les a lues, comme tout le monde les lira dans peu, pour
continuer les diffamations fi abominables t alors on concevra pourquoi M . le LieutenantC rim in el & M . le Procureur du K o i, évidem m ent de conccit avec le i:eur de
pas Toulu nous perm ettre même
1 iulpcéüon
de ces Lettres ; alors 011 faitira ,
13. , n ont
je 1efpere
plus encore qu’ on ne IV* f a i t , la néccifiiti de dépouiller les premiers Juges d’une grande
■portion du pouvoir que la L o i leur accorde, puilqu’ils peuvent en faire un li détcftable
ulage. E t cette caule qui a d i,.i tant avancé les idées publiques, nous amènera peut-être
à remarquer ce qui fe paiÎe chez nos \oilins , & à faire enforce qu’ une fois notre régim e
politique é t a b li, le Jugement par Jurés, c’eil-à-dire , la feule maniéré de juger les
hommes qui fo it raisonn ab le, s’établi/fe parmi nous, & remplace la Jurilpri^ucncc
ju flj arbitraire que barbare, ¿laquelle nous avons jufqu’à préfent obéi.
�Ce rt’eil: pas tout. Jejettc les yeux fur l'information, 8c qu’eilce que j’y trouve ? Que le fieur Daudet, corrupteur très-connu,
très-public de la dame Kornmann, que le fieur Daudet , objet
principal denosaccufations, par une condefcendance bienfcan-daleufe, a eu la faculté de fe rendre tous les jours dans la maifon du Médecin Page ; c’eft-à-dire, dans la maifon de ce même
'-Médecin, chez lequel le Prince de Naifau 8c le fieur de Beau
marchais avoient fait transférer la dame Kornmann , 8c, qu’à
cet égard , aucune gêne ne lui étoit impofée.
Voilà ce que je trouve dans le Mémoire du fieur de Beau: marchais, 8c dans les dépôfitions des témoins.
O
le
r
,
vous voudrez bien
rem arq u er,M
Prince de Naflau n’a défavoué les faits
que jamais
contenus dans le Mé
essieu r s
,
moire du fieur de Beaumarchais, que même encore dans cette
audience , il en a , comme malgré lui , reconnu la vérité , en
s’efforçant de faire regarder comme une imprudence , ce que
je lui im pute, m o i, comme un crime.
Vous voudrez bien remarquer que le Prince de Naflau ne
peut pas plus n ier, que la Princefle de Naflau , 8c qu’il ne nie
pas en effet qu’il n’exiftât des relations très-habituelles , trèsintimes entre le fieur Daudet 8c lui.
Vous voudrez bien remarquer que le Prince de Naflau ne
peut pas nier davantage que lorfqu’il s eft occupe de rendre la
liberté à la dame Kornmann , il favoit parfaitement , comme
tout le m onde, que le fieur Daudet étoit l’unique caufe de la
détention, comme le principal auteur de fes défordres.
Enfin, M e s s i e u r s , vous Voudrez bien remarquer qu’à cette
même époque , le Prince de Nafleau recevoittous les jours le
fieur D audet, q ui , de fon côté, employoit avec une incroyable
�'4 7
activité, toutes les reifources de l’intrigue, pour fe rapprocher
de la Dame Kornmann.
Et de ces circonftances bien connues, 8c quand je vois enfuitç
le iîeur Daudet fe réunir à la dame Kornmann, à peine échappée'
de chez les dames D ouay, vous me permettrez fans doute ce
conclure q u e, dans tout ce qu’a fait le Prince de Naiïau en fa
veur de la dame Kornmann, il n’a eu certainement pour objet,’
ainii que la Princeffe de Naifau , que de fouftraire la dame
Kornmann à l’autorité de fon époux, pour la replacer fous la
main de fon féduftëur.
Mais alors , qu’eft-ce à mes yeux que le Prince de Naiîau ?
évidemment un des principaux auteurs dé l’infortune du fieur
Kornmann ; 8c lî je confidère ici les fuites funeftes qu’a eu pour
iieur Kornmann , pour la Dame Kornmann elle-même , le
fuccès des démarches du Princs de NafTau auprès des dépoiîtaires de l’autorité ; s’il n’eft que trop démontré, par l’enfemble
des faits de cette caufe , q u e, fans fon intervention funeflé, la
Dame Kornmann, égarééun inftant,' mais vôifine du repentir(i),
feroit revenue d’elle-même à fes devoirs, 8c jouiroit peut-être
encore aujourd’hui de la çoniidération publique, 8c sûrement
du moins n’auroit pas à fe reprocher l ’opprobre 8c la défolatioit
de fa malheurëufe famille ; l î , fans le Prince dé Naifau, tant de
malheurs nq fe.roient’pas arrivés, taut de forfaits n’auroient pas
été commis, exiila-t-il jamais un délit plus grave que celui
dont il me force , en cet inflant ,de l’accufer.
Et ii c’eil-la un délit grave, '
Qui ofera me nièr que , dès le principe de cette affaire, je
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( 1 ) V ojrci m e » p rem ier M ém oire, .
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n’euife bien inconteflablement le droit de le pourfuivre dans les
tribunaux d’une manière fpéciale ? Qui ofera me nier que r
dès le principe de cette affaire , je ne fuife bien fondé à lui
faire fubir tous les rifques d’une procédure criminelle , ainii
qu’auiieur Daudet, ainii qu’au fieurde Beaumarchais, qu’il fecondoit ij bien dans leurs lâches complots ? Qui ofera me nier
q u e, dès le principe de cette affaire, m’armant contre lui dq
toute la févèrité des loix , il ne me devint facile de le faire
compter au nombre des principaux coupables dont j’avois manifefté les trames criminelles ? 8c publié íes yexations pu le$
attentats?r
Au-lieu de tout cela , qu’ai-je fait? Je publie un premier
M ém oire, 8c dans ce premier M é m o i r e , je garde un rigoureux
filence fur les démarches du Prince de NaiTau , quoiqu’elles me
fuifent bien connues : 8c quand m’arrive-t-il de parler de l ui ?
Quand je ne peux plus me difpenfer H’en parler; quand las dq
le voir citer à tout propos par mes Adverfaires ; quand fatiguq
d’entendre louer fans m efure, comme fans pudeur, fa bonté, fa
vertu chevalerefque, daps une circonftance où il n’a voit employé
fa bonté, la vertu çhevalerefque , que pour enlever une femme
k fon m ari, une mère à fes enfans, je fens que je ne peux plus
ipe taire fans compromettre la caufe de l’infortuné dont j’ai
entrepris la défenfe.
Et encore, MESSIEURS , comment m'arrive-t-il d’en parler?
Vous venez de voir tout ce que je pouvois d ire, vous venez
d’apprendre tout ce que je pouvois faire, 8c modéré néanmoins
3yec tant de raifousde ne 1 etre pas, je ne laiffe échapper contre
lui qu’une inculpation indirede. Le fieur de Beaumarchais me
provoque , en me parlant avec emphafe de la milfion qui
lui aveit été donnée chez le Prince.de Naffeau relatiyemertf À
�4 0
49
ia Damme Kornmann ; 8c m oi, je vous le répète, qui rugnorois
a cette époque aucune circonftance du rôle indécent que le
Prince de Naflau avoit joué dans l'affaire du fieur Kornmann.
je n attaque pas le Prince de Naflau, je me contente Amplement
de dire au fieur de Beaumarchais que je ne penfois pas que la
miffion qui lui avoit été donnée chez le Prince de Naflau par
quelques hommes corrompus 8c quelques femmes fans pudeur,
fut'fuffilante-pour excufer la conduite criminelle que je lui
reprochois.
C ’eft à cette feule phrafe que fe borne tout ce que j’ai dit
fur le Prince de Naflau.
Et c’eft fur cette phrafe fi fim ple, fur cette phrafe fi loin des
cruelles vérités que je pouvois révéler, que le Prince de Naflau
fe permet de crier à la calomnie !
E t vous , qui l’avez défendu , vous avez ofé dire que je Fai
calomnié ; mais , qui donc , je vous prie, fi ce ne font des
hommes corrompus 8c des femmes fans pudeur, qui donc a p u ,
chez le Prince de Naflau, donne* au fieur de Beaumarchais'la
miffion fcandaleufe dont il fe vante? Avez-vous oublié que
cette miflion avoit pour objet le fuccès d’un complot infâme ,
d’un complot qui offenfoit également la pudeur 8c la probité ?
E t fi ce complot ¿toit infâme, s’il offenfoit également la pu
deur 8c la probité, fi, pour le faire réuflir, il falloit employer ,
comme on n’en doute plus maintenant, toutes les reflources de
l’intrigue, tous les moyens de la calomnie , faités-nous donc
connoître ici les femmes honnêtes qui n’ont pas- craint de l’ap_
prouver, nommez-nous donc les hommes- délicats qui fe font
emprefles de l’accueillir.
•
Et vôus, qui l’avez défendu, vous avez ofé dire que je l’ai
calomnié. M ais, qu’elï-ce que calomnier, à votre avis? N’eft-ce.'
G
�V '.
pas imputer un délit à un homme qui n’en eft pas caupabfeî
Et pouviez-vous douter, d’après l’enfemble des faits que vous*
aviez fous les yeu x, 8c qui aurait dû vous amener aux mêmes
conféquence que m oi, pouviez-vous douter que le Prince de
Naiîau ne fût ici d’autant plus coupable, que, fans lui peut-être,,
nous n’aurions point eu de crimes à dénoncer, point d’accufés à
pourfuivre, point de malheurs fur-tout à réparer.
Et vous, qui l’avez; défendu, après avoir fait de vains efforts
pour me prouver que je l’ai calom nié, vous n’avez pas craint
d’ajouter quej’étois d’autant plus digne de toute îa févérité des;
Lois, que j’ai manqué à toutes les bienféances, en attaquant ,;
dans le Prince de Naffau , un homme recommandable par fai
naiffance, fon rang, fes dignités.
Sa naiffanee, fon rang, fes dignités TQuoi ! il offenfe dans lai
perfonne du iïeur Kornmann , le 3 premières lois de la morale 8c
de la nature! Q uoi! fans autre m otif que de favorifer le liber~
tinage effréné d’un homme fcaricaleux , il fépare l’époux de
l’époufe, la mère desenfans, il prépare à tous, autant qu’il eifc
en l u i , une affreufe deflinée, 8c on voudra que je refpe&e fa.
naiffance, Ion rang,'fes dignités, 8cces vaines prérogatives de
viendront un obllacle , qu’en des circonilances fi funeiîes, il ne
me fera pas permis de franchir? Et toutes les fois qu’à côté d’undélit je trouverai un nom illullre, ou un grand pouvoir, il fàudra>
que je m’enveloppe dans une circonfpeftion timide, 8c qu’ôtant
à la vérité fon énergie naturelle , je lui donne ce cara&ère
d’embarras 8c de foupleffe, qui, félon moi, ne devroit jamais
être que l’apanage du menfonge.
Sa naiffance, fon rang, fes dignités! Mais, vous qui me par
lez ainfi, ne viens-je pas de vous démontrer'que j’àvoisle droit
de m’exprimer fur le Prince de ^»affau x avec bien plus de £é-
�4^7
51
yérité que je ne l’ai fait ? Et alors, fi j’ai ici quelque reproche à
m efaire, il je Tuis coupable , n’eil-ce pas uniquement d’avoirété
tropmodéré dans une cccafionoùj’auroisdûm’abandonneràtous
les fentimens énergiques que m’infpiroit le fpeélacle d’un
homme puiiTant, combinant froidement , avec une troupe
d’hommes ians morale, la ruine d’un infortuné qu’il connoifloit
à peine, d’un infortuné qu’il auroit du connoître au moins avant
que de fe mettre à la tête du complot dont il eil encore aujour
d’hui la vi&ime.
Sa nailTance, fon ran g, fes dignités ! Mais , vous qui me
parles ainiî, vous m’auriez donc épargné tons les outrages dont
vous m’avez couvert, file prince deNaiTau n’avoit été qu’un
iimple particulier, qu’un homme fans nom, qu’un individu né
dans les dernières claiTes de la fociété ? Apprenez de moi qu’il
n’y a point de naiflance, point de rang, point de dignité devant
la L oi; que dans les pays libres la Loi affure l’égalité des hommes,
que dans les pays qui malheuteufement ne font pas libres, la
fondion de la Loi eil cependant encore de faire retrouver à
to u s, du mcins en fa préfence , cette égalité précieufe qu’ils
tiennent de la nature ; que dans les tribunaux où la Loi règne
fans partage, on n’efl ni grand, ni petit, ni puiflant, ni foible,
qu’on efl Amplement homme, que là il ne peut être queilion que
de vices ou de vertus, de bonnes aftions ou de crimes, 8c que le
vil langage des efclaves n’y eil pas plus tolere que;le langage
orgueilleux des tyrans.
Sa naiflance, fon rang , fes diguités ! Et vous avez o fe , en
nous parlaut de toutes ces chofes, comparer le P r i n c e de Naflau
au Grand-Homme qui nous écoute ( r) ; & me fupp°fant ei*
( j ) L e Prince H eari <lf PruiTç.
^
�52*
délire, vous n’avez pas craint d’avancer;que û c e t ïioihme ,objetr.
de notre admiration & de nos refpefts, s’étoit trouvé dans une
pofition femblableà celle du Prince de Naffau, je n’euffe pas
fans doute parlé de lui avec plus de circonfpettion & de me
sure. Que venez-vous nous dire ici ^& comment n’avez-vous pa&
fenti que vous me placiez dans une hypothèfe imaginaire 7 Coin*
ment n’avez-vous pas compris, qu’ayec un grand cara&ère , on
ne fait que de grandes-adions? qu’avec une ame généreufe, il
ell impoffible qu’on defcende à des démarches fans nobleiTe 8c
fans générofité? Un tel homme, d’ailleurs, foyez-en sûr, s’il
étoit né parmi nous, 8c ii quelqu’événement étrange l’obligeoit
de paroitre dans nos Tribunaux,ne fe prévaudrait pas, comme
le Prince de Naffau,. de fon rang, de fanaiffance, de fes dignités*
Il ne fe prévaudroit pas même de cette fuite d’aôions magna-*
nimesqui font de fa vie une des vies les plus illuilres 8c les plus
mémorables. Vous le verriez, M E S S I E U R S , pour rendre
hommage à la L o i, inclinant devant vous fes palmes iminor-<
telles, fe placer à côté du pauvre qui invoquerait la Loi comme
lu i, 8c, dans cet abaiffement augufte, vous offrir à-Ia-fois, ainft
que dans tant d’autres circonftances, le Héros de la guerre 8c de
l’humanité.
Je n’ai donc pas plus calomnié le Prince de Naffau que îa
Princeffe de Naffau ; je n’ai donc pas même dit tout ce que
je pçuvois dire; je ne me fuis donc pas même expliqué fur
leur compte avec cette liberté févère que la nature de leurs
démarches 81 les défordres qui en font rcfultés, me mettoit dansle cas d’employer.
>'
i
M a i S, après ce la , M e s s i e u r s , que faut-il penfer du
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5 3 .
.
décret d’ajonrnement perlonnel, dans les ‘liens duquel je fuia
retenu depuis deux ans? Que faut-il en penfer, fur-tout ii l’on
fonge aux motifs qui m’ont fait entreprendre cette affaire, à la
conduite que j’ai tenue depuis que je l’ai entreprife, au zèle il
défintéreifé, lî patient, fi pur, que je n’ai ceifé de manifefter
pour la conduire à fon dénouement mémorable*
Q uoi! je fuis décrété! quoi! depuis deux ans, je vis dans
une efpèce d’interdi&ion civile , & je n’ai fait autre chofe que
remplir envers l’amitié malheureufe les premiers devoirs de
l’honneur & de l’humanité ! & ceux qui m’ont fait décréter,
coupables du délit le plus grave, infra&eurs audacieux des plus
importantes règles de l’ordre focial, jouiifent encore de la plé
nitude de leur état û de leur liberté! & , comptant fur une im
punité funefte, ils ofenr, entre l’opinion qui les a déjà com-*
damnés, &. la Loi qui les attend pour les punir, demander
quune telle vexatiou continue, que ce décret, qui fait la honte
des Juges qui l’ont décerné, fubiîiîe dans toute fa rigueur, ce
n’eft pas to u t, qu’un Arrêt infamant contre m oi, imprimé'au
nombre de trois mille exemplaires, les venge de la perfévérance avec laquelle j’ai défendu' l’infortuné dont ils avoient
conjuré la ruine*
Un Arrêt infamant contre moi !
Et où feroient-ils afficher cet Arrêt? Si vouâ n’étiez pas mes
Juges, s’il leu ïéto it poffible de l’obtenir, dans quel lieupourroient-ils faire lire fans indignation la condamnation d’un Ci
toyen irréprochable , qui s’efl dévoué avec tant d’abandon pouf
le fuccès d’une Caufe , laquelle, par les circonflanceS fameufes
qui l’ont accompagné, n’eft pas moins aujourd’hui la Caufe
de la Patrie , que la Caufe des mœurs & de l’humanité#
Un Arrêt infamant contre moi !
�■■14
Et comment n’ont-ils pas-frémi, comment n’ont-ils pas fentî
toute leur confcience fe foulever, quand ils ont ofé former une
demande ii audacieufe? Quelle efl celle de mes allions, à côté
de laquelle ils auroient la témérité de placer la honte? & com
ment pourroient-ils fe flatter d’environner de quelqu ignominie
celui qui n’eft remarquable aujourd’hui que pour avoir rem pli,
à travers les plus grands dangers , les devoirs les plus nobles que
la Providence puiile impofer à un mortel.
Un Arrêt infamant contre moi!
Et ce feroit-là ma récompense * après trois ans de perfécutions
8c d’outrages! après avoir mené, pendant ces trois années qui
ne s’effaceront jamais de mon Souvenir, la vie la plus agitée 8c
la plus malheureufe! Et la patience dans les .calom nies, la fer
meté dans les revers , la réfignation dans l’infortune, le courage
.contre les tyrans, le dévouement pour mon pays; toutes ces
.cftofesme feroient comptées pour des crimes, dont il vous fej-oit ordonné de pourfuivrç la vengeance !
Je n’ofe me livrer, MESSIEURS, à tous les fentim.ens d’amer
tume que tant d’impudence , après tant d’attentats , excite
malgré moi dans mon cœur. Ces fentimens, je l’efpère, ou
plutôt, je n’en doute pa s , font en cet inftant partagés par
tous ceux qui m’écoutent, 8c du moins cette confolation me
tefte; du moins, j’ai cette confiance dans la pureté desprincipes
qi^i m’ont dirigé , & dans l ’intérêt fi fatisfaifant qu’on met à
m’entendre, que s’il fi trouvoit encore des hommes aiTez hardis
pour me contraindre à une apologie, il n’eft perfonne içi q u i ,
comme par un mouvement involontaire, ne-fe levât pour fe
déclarer mon vengeur, 8c ne s’honorât de prendre pn ijiain ma
défenfe.
• •
E n voilà bien aiTez, en voilà trop, peut-être, fujr les re
proches frivoles qui m’ont été faits.
�4ï !
5î
M a i n t e n a n t ', M e s s i e u r s
qne s'eft-on prbpafé, ea
me rendant l’objet d’une perfécution ii longue 8c fr cruelle?
Qu’a-t-o-n voulu, en- déclamant contre ma conduite jufqu’au
pied de votre Tribunal avec tant d'acharnement 8c de fureur?
Pourquoi toutes ces injures qui m’ont été dites? Pourquoi
toutes ces- infultes qui m’ont été faites? Pourquoi toutes ces
calomnies qu’on m’a prodigué avec Ci peu de pudeur 8c de
mefure ?
On s’étoit flatté, Je le fais, qua force d’outrages, on me
détacheroit du malheureux que j’ai défendu; on avoit efpéré
qu’à force de vexat i onson parviendrait à me faire renoncer à
la tâche fi noble que j’ai .entreprife; on avoit compté, fur-tout
dans ces derniers momens, qu’en me couvrant pour ainfi dire,
d’inve&ives groffières & d’impudens menfonges, on parvien
droit à m ’ éloigner de ce fanéluaire redoutable, où ma préfence¿toit importune, où n’ofoient fe montrer à côté de m oi, tous;
ces hommes pervers que j’ai accufés devant vous^
• Comme ils font loin de me connoître ! Comme ils fe doutent
peu de l’élévation, 8c en même-tems de la févérité des prin
cipes auxquels j’obéis.
Qu’ils apprennent que fi, par Un événement déformais im poffible,- ce Tribunal fe peuplant tout-à-coup de Magiflrats:
pour quilacaufe des mœurs feroit indifférente, 1 infortuné que
j’ai défendu, voyoit fcs demandes rejettees, fes accusations;
abolies, qu’ils apprennent que je m’unirois a .lui, d autant plus
qu’il lui reileroit moins de confolation fur la terre. L’amitie ne
fait point de facrifïces. Dans quelque lieu qu’il portât fes pas,,
je le fuivrois.La contrée qu’il auroit choifiepour y finir fes dé-*plorables jours, deviendroit ma patrie, 8c que quelque trifleque
put paroître mon fort à ceux qui ne favent pas de quelle pais;
�l\\%
43
fecrette les bonnes aôions font toujours accompagnées, je
m’efiimerois heureux, moi, d’acquitter auprès de lui, jufqua
fon dernier m oment, la dette de la Juilice 8c de l ’humanité.
Q u’ils apprennent que quelques puiiïent être encore leurs
complots, leurs intrigues, leurs perfidies; à quelques vexations
que je me trouve encore réfetvé, je ne ceflerai jamais de les
pourfuivre; que tant qu’ils feront impunis, je ne me tairai pas,
qu’il faut qu’on m’immole à leurs pieds, ou qu’ils tombent aux
miens.................... L’autel de la Jufiice efl dans ce moment pour
moi l’autel de la Vengeance; car, après tant de forfaits, la
juilice 8c la vengeance ne font qu’une même choie à mes yeux ;
6c fur cet autel, déformais funeile.................je jure que jamais
il n’y aura de paix entre nous ; que je ferai fans cefle au milieu
d’eu x , co m m e une Providence qui éclate parmi des pervers ;
que je ne les quitterai plus, que je ne me repoferai plus, que
je m’attacherai à eux, comme le remord à la confcience cou
pable; que jamais, non jamais, je n’abandonnerai ma tâche
commencée, jufqu’à l’inilant folemnel. où en prononçant fur
cette maffe d’attentats, les Magiflrats qui m’écoutent, auront
obtenu de nouveaux droits à la reconnoiflanct de la Nation
entière, attentive à la deilinée de cette Caufe mémorable.
Et vous, qui préfidez ce Tribunal augufte, vous l’ami des
mœurs 8c des Loix; vous, dans lequel nous admirons tous, à
côté des talens qui font le grand Magillrat, les vertus fimples
8c douces qui cara&érifent l’homme de bien & l’homme fenfible. , .
. recevez mes fermens (j).
r
Au refie, tous leurs efforts feront vains. Quoiqu’ils faffent,
M , le I’clJ.'tiçr âç Saint J jr g ç a u .
le
�57
Je triomphe des mœurs ne fauroit être encore long-tems différé.
O if commence à connoître, enfin, les rapports des mœurs avec
la liberte ; on commence à fentir pourquoi la corruption 8c la
tyrannie marchent toujours enfemble; pourquoi toujours il
faut dépraver les hommes quand on veut les accoutumer à la
fervitude ; pourquoi dans une fociété dont les mœurs fon diffoutes, il ne refte plus de place pour les fentimens généreux que
l ’amour de la liberté fait éclore ; dans peu la morale domeftique
il intimement unie avec la morale des peuples, ne fera plus
l ’objet d’une dériiîon fcandaleufe; dans peu, des habitudes plus
ierieufes, mais plus douces, fuccéderont à toutes ces habitudes
frivoles, qui ont été jufqu’à préfent notre partage; dans peu, 8c
quand nous ferons vraiment citoyens, nous comprendrons que
celui-là ne fauroit être long-tems bon citoyen, qui n’eft ni
Jbon père, ni bon fils, ni bon époux, qui porte avec lui
tlans les familles, le défordre 8c le trouble qui font dans fon
cœur. Dans peu nous ne douterons plus que ce ne foit du milieu
d e s vertus privées, 8c pour ainfi dire de leur fein , que s’élèvent
les vertus publiques, fi néceflaires au progrès de l’ordre focial
fi effentielles au maintien de la profpérité commune.
Ils vont donc difparoître fans retour, tous ces préjugés, que la
malheureufe dépravation de nos mœurs avoitfait éclore, toutes
ces-vaines opinions d’un monde corrompu, dans lefquelles nos
adverfaires avoient mis, je le fais, leur plus grande confiance',
les temsde notre diiTolution 8c de notre frivolité font paiTés, la
Vérité s’avance comme un Empira qui fe m eut, 8c quoiqu’on
faflepour s’oppoferàfapuiffanc'e, il n ’ y a plus d’erreur, quelque
impofante, quelque accréditée, quelque univerfclle même
qu’elle foit, qui ne doive tomber 8c s’anéantir devant elle.
Ainfi nous verrons le morale renaître à côté de la liberté.
H
�474
58
J e n’ai donc pas à craindre, qu’au commencement d'une
époque, qui fera fi fameufe un jour dans l’Hiftoire des Na
tions, les Magiftrats qui ont défendu avec tant de courage & de
zèle nos droits politiques, ne fe hâtent de concourir, autant
qu’il eft en leur puiffance, aù rétabliffement des mœurs, par un
exemple mémorable de juftice 8c de févérité.
Notre liberté étoit méconnue, 8c ils nous ont appris à la cont
noître; nos mœurs étoient détruites, 8c ils nous apprendront
combien il importe quelles renaiffent, 8c s’il n’y a pas de bon
heur durable fans les mœurs & la liberté, tout le bonheur dont
nous allons jouir au fein de l’heureufe conftitution, que nous
appelle à former avec lu i, un Monarque auquel l’Eu ro pe dé
cerne déjà, comme le plus beau titre de gloire, le nom de Roi
Légiflateur, tout ce bonheur, il l’auront donc préparé ; nous
pourons donc en grande partie le regarder encore comme leur
bienfait & leur ouvrage.
S ign é , B E R G A S S E .
B r u n e t i e r e ,
f t Ct/ïAAJT
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De l’imprimerie de C a i l l e a u , rue Galande , N ° 64.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bergasse. 1789?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergasse
Subject
The topic of the resource
plaidoyer dans l'affaire Kornmann-Beaumarchais
Description
An account of the resource
Titre complet : Plaidoyer prononcé à la Tournelle-Criminelle, le jeudi 19 mars 1789, par le sieur Bergasse, dans la cause du sieur Kornmann.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Cailleau (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1789
Circa 1789
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
58 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0713
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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plaidoyer dans l'affaire Kornmann-Beaumarchais
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7b5fa666389005e368a2341c6bfa8db0
PDF Text
Text
P R E C I S
PO UR les Citoyens V E R SE PUY et LABOU LLÉE ,
Intim és;
C O N T R E le C ito y e n G I R O U S T et sa f e m m e , appelan s
de l 'a d ju d ica tio n du 1 3 P lu v iô s e an 10.
Le
C ito y e n M A U G I S e t sa f e m m e , p ou r s u i v a n s
E n présence du Citoyen BOURSAULT et autres
Créanciers , demandeurs en validité de l’expropriation
I l s’ a g ite, au tribunal d’A p p e l, un procès dont on peut bien
tôt connaître l’intérêt.
Il est question d’ une expropriation forcée, poursuivie contre
le Citoyen G irou st, notaire destitué.
Nommer le citoyen G irou st, c’est annoncer un homme perdu
de dettes, occupé, depuis plus de dix ans, à tromper.ses créan
ciers.
M
Sa maison , sise rue de la L o i , a été adjugée au feu des
enchères.
i
' '
Elle a été adjugée moyennant 205,400 livres. En y comprenant
les charges, le prix se m o n te à 230,000 livres.
A
�4o C
*
(
2
)
T
Rien de plus lo yal que cette adjudication.
Versepuy et Laboullée sont adjudicataires.
Aujourd’hui on attaque le jugement d’adjudication sur l’appel,
par plusieurs des moyens qui ont été proscrits en première ins
tance. On en a ajouté quelques autres qui n’ont pas une plus
grande valeur.
T e l est l’état de la cause.
M
O Y E N S .
Nous avons une législation sur les hypothèques, dont le double
but a été de faciliter les expropriations et de rendre plus prompt
le payem ent des créanciers.
C ependant, c’est depuis cette législation}moderne que les dis
cussions se sont davantage multipliées contre les adjudications.
I l est contraire à l’esprit général de la loi du n brumaire an 7 ,
que de pareilles tentatives soient favorablement accueillies.
L ’objet de son article X X III a été particulièrement d’en res-<
treindre l’effet.
r
C et article X X III est conçu en ces term es :
a L e saisi, ni Tes créanciers ne peuvent qu’exciper contre l’ ad
ju d icataire, d’aucun moyen de n u llité , ou omission de forma
lités dans les actes de la poursuite, qn'autant qu’ ils les auroient
proposés à Vaudiencc ou l’adjudication aura eu lieu. »
On apperçoit, au premier coup-d’œ il> les motifs et la sagesse
de cette disposition particulière.
Par les affiches, la justice appelle les citoyens pour venir con
tracter avec élit?Ji
Tous ces concurrens, qui se présentent de toutes p arts, sont
�4o?
( 3 )
étrangers à la situation des parties, aux procédures qui ont Uh
tenues.
Il y aurait donc une souveraine injustice à les rendre pas
sibles, de conventions qu’ils auraient ignorées, de moyens que
leurs conseils ou eux-inêmes n’auroient pu apprécier, et dont ils
n’auraient pas voulu courir les risques s’ils en eussent été instruits.
Telles sont les premières réflexions qui se présentent quand
il faut apprécier un appel d’adjudication.
Examinons maintenant les moyens du citoyen Giroust, d’après
l ’analyse qu’il en a lui-même signifiée et dans l’ordre qu’il les a
présentés.
PREMIER
M O Y E N D'APPEL.
« L ’affiche sur laquelle a été poursuivie l’expropriation forcée,
ne c o n t i e n t pas l 'indication et l ’ étendue s u p e r f i c i e l l e de la
inaison. »
.
RÉPO NSE.
'
O n l i t , dans l ’affiche, un article spécial pour désigner l’objet
à vendre; il est ainsi conçu :
« N a tu re, étendue superficielle et^situation.
« Cette maison est située à Paris, rue de la L o i, n». 3 1 7 ,
vis-à-vis la rue F ey d e a u , division Lepelletier.
Suit le détail, très-m inutieux, des bâtimens et des dépendances.,
qu’on peut lire dans l’affiche elle-même,
L ’article se termine ainsi :
« La totalité de ladite maison et des dépendances, tient, d’un côté
au C. G risenoy, et de l’autre au C. Geoffron; d’un bout à la rue de
la L o i, et de l’ autre à la caisse du Commerce. »
A Z
�'
<
4 ')
' I l étendue superficielle d’ une propriété est suffisamment dési
gnée, quand tous les points certains qui l’environnent sous tous les
aspects sont indiqués.
L es lois de tous les temps n’ont point exigé d’autre modededési-gnation pour l'étendue des maisons.
» .
.
f
L ’article IV de la loi du n brumaire an 7 n’exige point qu’ou
détaille cette étendue par le nombre des toises ou des mètres.
E lle n1ordonne aucune opération pour ces détails.
A Paris , les matrices des rôles n ’en font point mention.
Il serait même impossible d’obtenir en droit cette désignation
exacte avec le secours d’ une expertise que la loi n’indique pas.
1
L ’ usage général est conforme.à la désignation de l’affiche de la
maison adjugée.
Personne n’a pu être trompé sur cette maison.
Ce premier grief doit être écarté.
DEUXIÈME
MOYEN
D'APPEL.'
•^1
« L a subrogation demandée verbalem ent, sur le barreau, par le
citoyen Boursault, n’a pu Être admise sans une citation préa
lable. »
R É P O N S E .
L a subrogation n’ est point une demande principale ; par sa na
ture elle est incidente. Elle se forme par intervention ; le deman
deur ne peut donc être assujétià la conciliation préalable.
E t quand le saisi est présent, quand il est assigné, quand il peut
répondre aux conclusions, il est inutile de le c ite ra son domicile.
�} * '
*y
' A u su rp lus, que veut la loi du i r brumaire an 7 ? . *. qnc les
poursuites d’expropriation aient lieu , sans l’essai d’ une conciliaciliation préalable.
Suivant l’article V I , la partie saisie et les créanciers inscrits ,
doivent être assignés au jour de l’expropriation; toutes les poursuites
doivent leur être notifiées. Ces assignations, ces notifications leur
sont données sans comparution préalable au bureau de paix.
Elles deviendraient sans objet, si, pour les réclamations qu’ils
ont à faire, le saisi ou les créanciers étaient obligés de recourir, soit
aux assignations à dom icile, soit aux comparutions au bureau de
paix. «
Cette objection du citoyen Giroust est donc suffisamment réfutée.
Lors de l’adjudication du 13 pluviôse an d ix , le citoyen Giroust
allait plus loin.
Il soutenait que le droit de subrogation n’existait pas.
Aujourd’h u i, il ne fait plus paraître ce reproche ; il serait dé
truit par la simple lecture des motifs du jugement.
L e droit de subrogation à une poursuite n’a point été aboli par
la loi du 11 brumaire an s e p t, et l’ article X X X V I conserve toutes
les lois qui n’ont point été abrogées.
L e poursuivant l’expropriation , qui est obligé d’avertir tous les
créanciers , devient le mandataire de tous, puisque la dépossession
s’opère nécessairement au profit commun.
Les créanciers ont intérêt de surveiller les effets de la poursuite,
et d’cmpêclier ceuxdc la connivence possible entre le poursuivantet
le saisi.
A in s i, et en point de droit, nul doute sur l’existence de la sub
rogation,
�Dans l’espèce, le citoyen B o u rsa u lt, demandeur en subroga
tion , avait été appelé en qualité de créancier inscrit.
Il a cru apercevoir des traces de collusion entre le poursuivant et
les saisis ; il s’est présenté avec dés titres exécutoires, qui n’ont
point été contestés^
D éjà il avait fait un commandement d’expropriation.
Il a donc pu demander la subrogation ?
T oute difficulté, à cet égard , ne peut être fondée.
T R O I S I È M E M O Y E N D ’A P P E L ,
« L a subrogation accordée à B o u rsa u lt, n’a pu ensuite être ré
tractée et rendue à M augis, poursuivant. »
« L a poursuite ne pouvait être rendue à M augis, au préjudice
des désistemens qu’il venoit d’en donner par écrit. »
r
é
p
o
n
s
e
.
E n rétablissant les faits, on y reconnaîtra ces trois vérités :I a première, que les'juges n’ont point rétracté leur propre jugement.
L a seconde, que jamais Giroust n’a fait valoir un acte de désiste
ment en première instance.
L a troisième enfin, qu’il ne s’est pas même plaint de ce qu’après
la subrogation demandée , on poursuivait à la requête de Maugis,
Prenons le jugement et lisons :
L es choses se sont passées bien naturellement.
A u moment où l’on se disposait à lire l’affiche pour recevoir
les enchères, Giroust a demandé« qu’ attendu qu’il s’était a b r a n g ü
�(
7 } /
avecM augis et sa fe m m e , il ne fût pas procédé à l’adjudication. »
Mais dans l’instant même , Maugis a déclaré, qu’ z7 n'était point
désintéressé des causes de la p o u rsu ite, qu’il n’avait point été
d o n n é d e d é s i s t e m e n t ; qu’il avait été seulement convenu de
surseoir ; et notons bïen qu e cette dénégation de l’existence du dé
sistement ne se trouve pas contestée par Giroust.
L es créanciers n’ont vu dans ce réquisitoire que le résultat d’ une
intelligence pratiquée entre le poursuivant et le sa isi, ils ont de
mandé la subrogation , et au lieu d’ordonner purement et simple
ment ¿ il a été seulement décidé que, faute par Maugis de mettre à
J in la poursuite d’ expropriation et de requérir Vadjudication in
diquée y Boursault demeurerait subrogé à ladite poursuite.
C ’est après ces dispositions conditionnelles que Maugis requiert
acte de ce qu’z7 entendait suivre Veffet de sa poursuite et requé
rait la lecture de Vaffiche et l ’ adjudication à sa requête.
Remarquons encore ici que Giroust n’a point excipé de son désis
tement , qu’il n’a point contesté le nouveau réquisitoire fait par
M au gis, et qu’ainsi le tribunal l’a admis sans difficulté.
M aintenant, quelles sont les conséquences de ces faits ?
D ’abord , on voit que le tribunal n’avait pas irrévocablement
donné la subrogation au citoyen Boursault.
L e jugement porte seulement : « f a u t e
à fin les poursuites. )>
PAR m a u g is
de mettre
Ainsi les premiers juges n’ont point rétracté leur propre juge
ment en adjugeant à la requête de Maugis.
2°. On voit que lors du réquisitoire fait par Maugis , après la sub
rogation demandée par Boursault, pour faire adjuger à sa requête 7
Giroust n’ a point encore présenté de désistement, et n’a point de
mandé que ce second réquisitoire ne fût pas accueilli.
�' (
8
)
O r, suivant la loi, Giroust ne pouvant faire valoir sur l’appel,
d’autres moyens que ceux qui ont été présentés en première ins
tance ,
Par cela seu l, qu’après la subrogation demandée , Giroust n’a
point contesté le réquisitoire d’adjudication â la requête de Maugis,
il ne peut aujourd’hui se faire un moyen de cette circonstance.
En vain objecterait-il que, dans le fa it, il existait un désistement
de la part de Maugis.
Nous répondons que ces conventions privées ne peuvent affaiblir
et détruire les droits de l’adjudicataire.
L ’adjudicataire qui vient contracter avec la justice, sons la foi
pu bliqu e, ne peut être atteint par des actes ou des moyens qu*il
n’aurait pas été à portée d’apprécier en première instance.
E t il suffit dans l’espèce, que ce prétendu désistement n’ait point
été présenté de la part de Giroust ; q u e , loin d’être présenté, son
existence ait été formellement déniée par le poursuivant dont on
le disait ém ané, pour qu’il ne puisse jamais former un moyen de
nullité contre l’adjudication.
M ais, nous dit-on encore, ce désistement est enregistré du même
jour que l ’adjudication.
Nous répondons, i°. que l’exhibition actuelle de cet enregistre
ment ne détruit point le fait ; qu’il n’a point été exhibé en première
instance , et que c’est à Giroust seul ù s’imputer ce défaut d’exhi
bition , dans le cas où il aurait réellement existé.
20. Quand il a u r a i t été représenté, il ne serait arrivé aulrs
chose, sinon qu’ au lieu de vendre à la requête de M augis, l’adjudi
cation aurait eu lieu à l a requête de Boursault.
Qui ne voit d’ailleurs que cet acte est le fruit de la collusion
entre le poursuivant et le saisi ? . . . S’il eût réellement existé, ja -
�( 9 ')
mais Maugis ti’aurait osé le dénier d’une manière aussi publique
qu’il l’a fait lors de l’adjudication du 13 pluviôse an 10 , et enfin
Girousfc n’aurait pas laissé sans réponse cette dénégation de
Maugis.
A u surplus, quand le saisissant aurait traité avec le saisi,
ce traité particulier n’aurait pas pu empêcher la poursuite au
préjudice des. créanciers inscrits.
-
Dans tous les tem ps, les créanciers opposans dans une expro
priation , ont été considérés comme saisissans ; le poursuivant
n’était que le mandataire de tous; il n’était pas le maître seul
d’enchaîner ses poursuites et de les anéantir ; il ne pouvait rien
faire à ce sujet que. du consentement de tous les Créanciers,
parce que c’était entre ses mains qu’ on avait confié l ’intérêt
commun.
E t nulle part la loi du n
ractère de cette poursuite.
brumaire an 7 n’a changé le ca
A in s i, en appréciant ce troisième grief sous tous ses rapports,
on y apperçoit : i°. qu’il est faux , en point de 'f a i t , que le
tribunal de première instance se soit déjugé relativement à la
subrogation;
J2.°. Que ce désistement n’a point paru en première instance;
3*.. Que le citoyen Giroust n’a fait aucune réquisition pour
empêcher l’expropriation à la requête de M augis, après la sub
rogation demandée par Boursault ;
;
4’ . Que ce désistement n’a pu être que le fruit d ’un concert
fraud u leu x en tie la partie saisie et le poursuivant ;
5°. Que q u an d mêm e ce désistement auroit été represente, il
n’ a u ra it pu enchaîner les poursuites d’expropriation.
6°. Enfin, qu’il ne serait, dans tous les cas, qu’ une conven-
�( ï° )
fion privée entièrement étrangère à l’adjudicataire, qui pourra
peut-être donner lieu à une action entre le saisi et le poursui
v a n t, sans avoir la puissance de détruire le contrat fait de bonne
foi avec la justice.
Ce troisième moyen d’appel ne m érite donc aucune considé
ration.
QUATRIÈME
MOYENS
et
CINQUIÈME
D A P P E L.
« L ’adjudication a été faite à six heures du soir, heure insolite,
aussi la maison a-t-elle été adjugée au v il prix de 2o5,ooo fr.
tandis qu’elle est louée 32,000 fr.
RÉPO NSE.
On lit dans l’adjudication qu’elle a été faite à l’audience des
criées ; rien ne constate l’heure dont parle le citoyen Giroust.
L a loi n’a point voulu attacher de nullité à cette circonstance.
C ’est là tout ce que mérite un pareil prétexte d’appel.
Quant à la prétendue vilitÇdu p r ix , elle n’existe que dans l’ima
gination du citoyen G iro u st, et ne peut form er un moyen de
nullité.
Suivant le rôle des im positions, la maison est évaluée en pro
duit à 8?oo fr.
D ’après l’articleX IV de la lo i, il suffirait que les enchères aient
¿té portées à quinze fois cette valeu r, 123,000 f r ., pour que le
tribunal ait pn prononcer l’adjudication.
Pans le fa it ,
l’adjudication se monte à ao 5,o o o fr., et avec
�(1 1
)
les antres dépenses, le prix s’élève réellement à 230,000 fr.
Il est vrai qu’on parle ici de 32000 fr. de revenu : mais cette
allégation, déjà contradictoire avec l’estimation du rôle qui n’est
portée qu’au quart de cette somme , se trouve encore démentie par
les baux réels qui ne s’élèvent pas à plus de 12,000 fr.
Il faut donc regarder que la maison a été payée sa véritable va
leur.
E t c’est ainsi que se dissipent les moyens d’appel du citoyen
Giroust.
Les citoyens Versepuy et Laboullée sont deux locataires de la
maison, ils y ont établi, avec des dépenses considérables , leurs
magasins. Ils ont eu soin de passer des actes avec le citoyen
G iroust,m ais il n’est aucune sorte de chicane qu’ils n’aient essuyée
de sa part.
L e but de l’appel du citoyen Giroust n'est pas de faire bénéficier
ses créanciers ; tout le monde sait qu’il ne paye personne ; il veut
a v o i r l’occasion nouvelle de s’alimenter de procès.
L es citoyens Versepuy et Laboullée doivent donc attendre avec
confiance, que l’adjudication solen nelle qui leur a été faite par la
ju stice, sera définitivement maintenue.
L e citoyen T R Y , Commissaire du Gouvernem ent,
B E C Q U E Y
BEAUPRÉ,
D éfenseur
L E S G O T , A voué.
D e l’imprimerie de G . M UNIER, rue Poupée, N°.6 ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Versepuy. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Try
Becquey
Beaupré
Lescot
Subject
The topic of the resource
expropriations
superficie
subrogation
estimation
loi du 11 brumaire An 7
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour les Citoyens Versepuy et Laboullé, intimés ; Contre le citoyen Giroust et sa femme, appelans de l'adjudication du 13 pluviose an 10. Le citoyen Maugis et sa femme, poursuivans. En présence du citoyen Boursault et autres créanciers, demandeur en validité de l'expropriation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de G. Munier (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa An 10-Circa 1802
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0712
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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estimation
expropriations
loi du 11 brumaire an 7
subrogation
superficie
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Text
A
R
R
D E LA
Ê
T
COUR
DE P A R L E M E N T ,
Q U I condamne, trois Imprimés : le premier en un petit volume in-18 ,
en 2 8o pages , fans noms d'Auteur ni d’Imprimeur , ayant pour titre:
V o yag e de Figaro en E fp agn e, avec cette épigraphe : C urrente rotâ ;
à Saint-Malo , 1 7 84.
L e fécond f dans le format d'un in-8° , de 88 pages , ayant pour titre :
V o yag e de Figaro en Efpagne ; fans noms d’Auteur ni d Imprimeur ¡
A Séville ,1 7 8 5
L e troifîeme, en deux tomes in-1 2 , dont le premier de 2 23 pages, le
fécond de 209 pages , l’un & l’autre ayant pour titre : V o yage en E f
pagne , par M . le Marquis de Langle , imprimé à Neufcha te l, de
l’imprimerie de F a u c h e , fils a în é , & C om pagnie, 1 7 8 5 , à être
lacérés & brûlés p a r L’Exécuteur de la Haute-Juftice.
EXTRAIT
DES
REGISTRES
DU
PARLEMENT.
D u fept Février mil fept cent quatre-vingt-fix .
'
E jo u r, la C our, les Grand-Chambre & Tournelle affemblées à
l’iffue de la premiere Audience , les Gens du R oi font entrés ; & ,
M e Antoine-Louis. S eg u ier, Avocat dudit Seigneur R o i , portant la
p a ro le , ont dit :
C
M E S S I E U R S ,
L ’ a t t e n t i o n continuelle des Dépofitaires de l’autorité ne fuffit
pas toujours pour arrêter aux barrieres du Royaum e ces Ecrits dangeA
�ti.ux , dont la licence eft véritablement un fcandale pour la Religion ,
& dont la témérité ne peut qu’exciter la jufte réclamation des Puiffances alliées de la France. Mais la vigilance de notre miniftere dé
couvre bientôt les productions furtives que la fraude a fù fouftraire à
la furveillance de la Police -, il ne tarde pas à réparer , s’il eft poiîible,
le mal d’une diftribution clandeftine , en provoquant une condamnation
éclatante : & iî la fageiïe des Magiftrats pàroît alors tirer des ténèbres
ces oeuvres d’iniquité, c’eft pour les flétrir avec une plus grande
publicité, & les replonger auiîitôt dans le iilence de l’oubli le plus
profond.
T e l fera le fort des différens Imprimés que nous venons dénoncer
à la Jultice : & nous ne pouvons mieux les cara&érifer qu’en les an
nonçant comme les productions obfcènes du délire & de l’extrava
gance , ou comme les fruits infâmes de l’impiété & de l’irréligion.
L e premier de ces Imprimés eft un petit volume iti-1 8 , fans noms
d’Auteur ni d’im prim eur, portant pour titre : Voyage de Figaro en
Efpagne. A Saint-Malo , IJ8 4 .
Cette énonciation {impie & modefte femble indiquer un récit amufant plutôt qu’un recueil d’impiétés -, mais à peine en a-t-on parcouru
au hafard quelques articles, qu’on apperçoit le but de l’Auteur. Son
projet n’eft encore qu’ébauché dans cette brochure bizarre ; on diroit
u’inquiet de la deitinée de fon ouvrage, il a voulu s’aiïurer de l’efpece
e fenfation qu’il produiroit fur les elprits ; & pour preiïentir l’opinion
publique, il a jetté au hafard une premiere édition informe , avec
cette épigraphe latine , •currente rota, comme voulant donner à en
tendre que cette production anonyme fe reiTentoit de la fatigue de
l’efprit d’un Ecrivain qui a travaillé en courant, Sz dont les idées n’ont
d’autre fuite que le rapprochement des objets qui fe font préfentés à
fes regards, d’autres combinaifons que celles de la Nature qui femble
avoir difpofé ces mêmes objets pour former un contrafte capable d’a
nimer & de foutenir la curiofité du leiïeur.
Le nom du Voyageur pouvoic fans doute contribuer au fuccès de
l’ouvrage: & ce n’eft pas fans une intention maligne & cachée que
l’Auteur a pris pour fon Héros un être imaginaire , qu’il a cru rendre
plus^ piquant en le reprefentant comme étranger lui-même dans fa
patrie. Cet intriguant comique , fubilitué de nos jours aux intriguans
fameux depuis ii long-temps en poileilion de la feene , comme eux
fans pudeur. & {ans.principes, plus inilruit & pkis intelligent, mais
trop aiTorti peut-etre à nos mœurs & au cara&ere du iiecle ^ ce nou
veau perfonnage étoit feul digne du rôle qu’on lui fait jouer , feul il
3
�pouvoit remplacer un Auteur qui condamnoit par fon filence l’écrit
qu’il n’ofoit avouer.
Cette premiere édition a bientôt été fuivie d’une fécondé dans le
format d’un in-8 ° ., mais elle n’eft qu’une copie littérale de la preipiere,
fans changemens & fans augmentations ; c’eft précifément le meme
texte que Pédition de Saint-M alo, à la feule différence qu’elle eft datée
de 1 7 8 5 , & que , fans noms d’Auteur ni d’imprimeur , & même fans
épigraphe , Sèville eft le lieu où elle paroît avoir été imprimée.
Dans cette fécondé édition , l’Auteur n’a pas imaginé pouvoir en
core fe nommer. C e n’eft qu’à la troifieme qu’il a ofé fe montrer à
découvert j il a cru fans doute , ou qu’il donneroit plus d’importance
à fon ouvrage en mettant fon nom au frontifpice de l’imprime , ou
qu’il fe donneroit à lui-même plus de célébrité en faifant connoitre le
génie créateur d’une produ&ion auiTi extraordinaire.
Cette troifieme édition n’a pas tardé à fe répandre. C e n eft plus
F ig a ro , qui entreprend de parcourir fon pays natal & d e rendre compte
de fes obfervations ; le titre porte iimplement : Voyage en Efpagne >
p ar M . le Marquis de Langle ; Imprimé à Neufchatel, de l’Imprimerie
de Fauche s fils aîné, & Compagnie , i j 85 .
L e nom de l’Auteur cefle ici d’être un myftere : le V oyageur chi
mérique eft devenu le Marquis de Langle ; mais auffi l’ouvrage a pris
une forme toute nouvelle. C e font deux volumes in- 12. , dans lefquels
le véritable Auteur s’élevant au-deffus de tous les préjugés , s’eft prin
cipalement attaché à ajouter des infamies aux horreurs qu’il avoit
déjà publiées. Il a mutilé lui - même fes premiers é c rits, pour être
plus concis & plus énergique dans le dernier j & quoiqu’il paroifle
avoir fait des changemens confidérables aux deux premiers exemplaires,
il n’en a pas moins laiifé fubfifter , il a même inféré dans la nouvelle
relation de fes découvertes, un grand nombre d’articles plus licentieux
encore que ceux qu’il a fupprimés : & par cette augmentation il a
donné un nouveau degré d’atrocité aux blafphêmes & aux obfcénités
déjà répandus dans les éditions de Séville & de Saint-Malo.
Pour fe former une idée jufte de ce prétendu voyage , dans un pays
dont il paroît que l’Auteur ne connoît pas même le lo c a l, on doit l’envifager comme une colle&ion infâme de blafphêmes contre la D ivin ité,
d’impiétés contre la R e lig io n , de farcafmes contre les m œ urs, d’in
jures contre la Nation Efpagnole, & d’inve£Kves contre fon gouver
nement.
Nous allons parcourir tout l’ouvrage fous chacun des points de vue
que nous venons d’annoncer.
A %
�4
*■
Le premier blafphême de l’Auteur eft déguifé fous le voile de l’ironie
Imre^DiP^us indécente. Il exifte, dans le magnifique Monaftere deftiné à la
inité.
iepulture des Rois d’Efpagne , un crucifix placé dans le réfe&oire des
42 3° édit Hiéronymites : Un Chriflm’a fra p p é , dit le M. de Langle , ce Chrifl ejl
vol.'
en fa n g y Marie pleure à fes pieds ; & de quoi ? puifqu’elle fa it que fon
fils , mon feulement pour la forme , refj'ufcitera quand il voudra«
i
Une interrogation auiîi facrilége fait aifément préfager tout ce qu’on
!
doit attendre de la plume d’un écrivain qui ne lait rien refpefter. Par
cette efpece de. profanation, il a voulu , pour ainii d ire, faire l’eiTai
de fes forces. Le premier trait ùne fois lancé , il ne garde plus aucune
mefure. Mais comment entrer dans le détail des abominations que
vomit la bouche impure de cet infenfé ? L ’extravagance eft pouffée à
un tel point, que l’Auteur n’en paroît que plus digne de pitié. Il propofe
1
-de compter déformais lsamour & fes jouiffances au tiombre des Sacremens.
3* ¿dit. i vol. Il in vite.................
à fe rendre dans les Temples. Les Marches du
pag. io 2 .
San&uaire y font le théâtre de la débauche. Les jeunes gens des deux
fexes • « .............y viennent invoquer , im ploreradorer D ieu ; & croyent
lutter avec lu i, f i on ofe le dire, de bonheur, de grandeur & de p u if
fance.
Après avoir eu la hardieiTe de crayonner ce tableau infâme , dont
nous n’offrons cependant ici qu’une foible efquiife ; dans un accès de
i r* ¿dit. pag. f o l ie e n c o r e * p lu s o u t r é e , l ’A u t e u r s’é c r i e : J e ne f u i s p a s un impie :
ïii u i2i. toujours j ’ai cru, j e crois encore que les myjleres de l’amour ne peuvent
profaner un Temple.........................Il ne nous eft pas permis d’achever:
vous frémiriez d’un blafphême abominable : l’honnêteté publique
nous ordonne en ce moment d’élever une barriere de décence & de
pudeur entre le dénonciateur & la dénonciation.
Il eft cependant dans le refte de l’Ouvrage un blafphême plus hor
rible encore. Notre miniftere fe refufe encore à le biffer foupçonner.
La feule idée en fait rougir le cenfeur, & la cenfure feroit elle-même
un fcandale.
L ’excès de licence à laquelle l’Auteur s’abandonne avec tant de fécurité, ne doit pas étonner. Il avoit fon projet & fon plan. Il a bien fenti
qu’il blafphémoit. Il s’eft hâté de prévenir l’accufation, & de fe fouftraire au châtiment. Son affurance , vraiment téméraire , eft fondée fur
i,eédlt
i im Pr*nc*Pe dont ^
foi* une Égide , qu’il croit impénétrable. Ce qui
vid. la noie 3lï n’° f 'enf e P as ^ Société, n’eflpas du rejfort de lajuflice. Cette vérité, dit-il,
devroit être la bafe de tous les Codes criminels. Quelle eft la conféquence
de cet axiome? L impunité. Pour peu qu’un tigre eût eu le jens commun,
eut eu de la religion, jam ais, dit le Marquis de Langle, il n’eût condamné
�■les blafphématenrs à avoir la langue coupée. Un blafphémateur n*offenfe
perfonne. Il a néanmoins le courage d’avouer, qu'il blejje , q u il outrage
la Divinité. Mais c’eil en quelque façon pour la provoquer. D ieu ,
ajoute-t-il, ejl ajjeç grand, ajfe^ puijjantpour punir. L a mort efl à les
ordres. Son arfenal ejl plein d’armes. Sa foudre à côté de lui n a pas befoin
de nos bras , de nos bourreaux pour le venger.
Un blafpkémateur ti'offcnfeperfonne. Maxime intolérable, avancée par
la Philofophie moderne, & déiavouée par la fagefle ! Eh- quoi donc ?
Le blafphême n’eft - il pas un fcandale public ; le fcandale n’eft - il
pas une contagion ; la Société n’eft-elle pas intéreiTée à arrêter les
progrès de cette épidémie morale? Chez tous les Peuples policés, il efl
défendu, fous les peines les plus graves, de manquer au refpe£l dû aux
PuiiTances de la terre; à combien plus forte raifon ne doit-on pas violer
impunément la majefté du Roi des R o is, devant laquelle toute la gran
deur humaine s’éclipfe & difparoît.
Etrange aveuglement d’un E crivain , aiTez éclairé pour ne pas ignorer
que les blafphémateurs ont de tout temps été punis par la Juilice
humaine, aiTez audacieux pour ne pas trembler en blafphémant contre
le Ciel , aiTez extravagant pour défier la patience de FEtre fuprême , dans l’inftant même où il reconnoît l’étendue de fa toutepuiffance !
S i l’Auteur a porté la démence jufqu’à faire du Dieu des Chrétiens
une de ces divinités phantaftiques du Paganifm e, qui donnoient aux mortels l’exemple des vices les plus honteux, on ne doit pas s’attendre à
trouver en lui le panégyrifte ou le difciple d’une R eligion , dont il veut
avilir le divin Fondateur. Etablie par les prodiges les plus éclatans,
-appuyée fur les preuves toujours Habilitantes de la révélation , atteitée
par une tradition confiante & loutenue , fondée , enfin , fur la morale
la plus fublime, notre Religion fainte eil vraiment l’ouvrage d’un Dieu
fait homme pour le falut de tous les hommes. Elle eft defcendue du
C ie l, & l’univers converti s’eil rangé fous l’étendard de la Croix. Le
M . de Langle , au contraire , attribue la rapidité de fon établiflement & fes progrès, à des motifs purement humains ; & encore entre
tous les motifs capables d’entraîner l’humanité, il ne rougit pas d’adopter
celui qui eil le plus oppofé à la fainteté des Dogmes facrés que nous
avons le bonheur de profefler.
Que le Conquérant de l’Arabie falTe efpérer à fes profélytes un
torrent de délices .& des plaifirs fans ceiTe renaiiTans : cette béatitude
charneV.e annoncée dans l’Alcoran , n’eil promife aux croyans qu’après
k u r trépas, & pour récompenfe de l’obfervation fcrupuleufc de la loi ;
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c’eft le fer à la m ain , c’eft avec cette efpérance, que Mahomet a fubju g u é, & que fes iucceiTeurs captivent encore des peuples innom
brables. L ’Auteur du V o yage d’Efpagne s’eft égaré fa:ns doute dans un
pays autrefois fournis aux Mahométans. L a tête encore pleine des rê
veries du Prophète de la M ecque , il place au berceau de l’Eglife
naiflante le fyftême de volupté que les Mufulmans n’attendent que
dans l’autre vie ; & s’il faut l’en croire, c’eft par la force de la féduftion
du fexe que la Religion Chrétienne a fait tant de conquêtes. Cet infenfé
déclare expreiTément que les Apôtres de Jéfus-Chrift étoient intapables
de remplir l’objet de leur apoftolat : que les prodiges qu’ils ont opérés
par la vertu du Très-H aut, n’ont point contribué à la converiion des
Pjge j , 4> Juifs & des Gentils. Sans les femmes , dit-il, tout fçavans, tout illuminés,
¿dit., i". tout éloquens quétoient les Apôtres , jam ais le Paganifme n’eût été aboli,
ol.
jam ais le fa n g des Martyrs neût coulé. C’ejl pour plaire à des femmes ;
c e fl à leurs genoux, c’ejl dans leurs bras que les premiers Chrétiens, ivres
de f o i , d’amour, de religion & de volupté, jurerent de croire à Jéfus-Chrifl3
de L’implorer , de l’adorer, & de mourir pour lui.
Abandonné au délire de fon imagination, l’Auteur n’héfite pas à s’é
riger en réformateur. Ce n e jl point aux hommes à prêcher $ c’ejl aux
Ibid.
femmes à qui D ieu conféra le don d’attendrir, le don de perfuader. Mais
ce n’eft point affez de la prédication. Il veut attribuer aux femmes
toutes les fondions du Sacerdoce ; le pouvoir excluiif de confacrer, de
préfenter à Dieu les offrandes, d’adminiftrer les Sacremens. S i cétoit à
leurs pieds qu’on dût aller avouer ou pleurer fes fautes ; f i cétoit de leurs
’age 9 4 , i,«r«
Ins qu’on dût recevoir l’h oflie,........ les temples & les fancluaires feroient s
dit.
mains
remplisi plus d ’Incrédules, plus de D éifies, plus d’Athées.
Cet erithouiiafme n’eft cependant pas de longue durée. Rendu à luimême , l’Auteur veut abolir tout le culte extérieur de la Religion. Nos
Bafiliques facrées lui paroiffent fuperflues. I l n’ejl pas v ra i, dit-il, que
Page 29; , £ ) leu ait dit à Salomon de lui bâtir un Temple , pour avoir un Temple. C’ejl
parce que les coffres de Salomon regorgeoient d’o r; parce que la Judée étoit
pieine d’ouvriers fans occupation. Ce fu t pour les nourrir, pour les occuper,
pour faire- circuler l’argent. . . L a preuve qu’il ne s’en Joucioit guères , c’ejl
qu’il permit que Titus profanât & convertit en étables, en écuries, le bel
ouvrage de Salomon.
L ’exemple de Titus paroît à l’Auteur digne d’être imité. Il propofe de
dépouiller toutes les Sacriflies, toutes les Madones du monde C/uétien; &
ce pillage une fois exécuté, il confeille d’oublier tout-à-fait la Divinité.
Exploitons ces mines, dit-il en parlant des ornemens & des vaïes
facrés -, ceffons d’enfermer D ieu entre quatre murailles. Tout d’or, tout vafie
�que fo it un Temple', c efi un cachot, c’efi une crèche.pour lui. Démolijfohs
toutes nos E glijes , & affemblons-nous dans une plaine. . . l à , une fo is feu
lement par m ois, prions . . . le refie du temps travaillons. . .ne payons pas ^a(fe
plus à D ieu que s’ il n’exifioit pas , & croyons qu’il fera enchanté de nous volume.
voir travailler.
Il n’eft pas facile de comprendre ou d’expliquer les alternatives aux
quelles l’Auteur fe livre tour à tour. E il- il rien de plus injurieux que
cette invitation faite au genre humain : N e penfons pas plus à D ieu que
s’il n’exifioit pas ? Comment reconnoître un Dieu créateur , & juiKfier
cette indifférence à fon égard ?
Le M . de Langle penfe que tous les hommes, vertueux ou non,
religieux ou coupables, Chrétiens ou Idolâtres , ont un droit égal à
1héritage célefte ? Les defeins de D ieu fo n t, dit-il, impénétrables. Son
Cielefi à lui ; il peut y loger qui lui plaît. M ais le Mufulman qui s’en- page 100
rhume en criant A lla A lla , & le Talapoin qui s'enfonce des épingles dans le 3e
kcon
corps, & le Marabou qui marche à cloche-pied , è* le Santon qui regarde f i 0 u ‘ *
le bout de fon ne{ efi rouge, verd ou noir...........................................................
tne paroiffent aujji dignes de pajfer Uéternité dans le palais de D ieu , que le
D évot • • • • qui fe querelle & qui fe bat en attendant l’abfolution.
Malgré le rapprochement bizarre des Religions les plus inconci
liables , on croiroit que l’Auteur eft bien convaincu de l’exiftence d’un
D ieu, du bonheur des Elus, & du refpeft dû aux Bienheureux. Ce
feroit s’abufer groiïiérement, que de lui prêter une façon de penfer
fi raifonnable. L e Ciel efi défert, dit-il, depuis que les bourreaux payens
ne peuplent plus le Paradis. L ’imbécillité, la iàinéantife & la malpro
preté j telles font les vertus que le Ciel récompenfe ; tels font les Saints q u il
^ ’
faut invoquer. Car depuis l’invention du Ciel, je défie quon me site pour
Saint un homme utile, un homme aimable, un homme, enfin, dontj’euffe „e
92 ’Cf
voulu faire mon ami.
^
volume.'
11
elt étonnant fans doute que dans le nombre infini des Êtres pri
vilégiés que l’£glife propofe à la vénération des Fid eles, il ne s’en
trouve aucun digne de l’amitié du M. de Langle. A bien plus jufte
titre ils fe feroient refufés à toute communication avec lu i, à moins que
le zele & la charité ne les euifent déterminés à faire les plus grands efforts
pour vaincre fon incrédulité & le ramener à la raifon ! Qu’auroient-ils
Pu gagner fur un efpnt aliéné , qui prétend qu’en parcourant le nom
It‘J des perfonnages compris dans le Calendrier, on efi tenté d’en déchirer les
-^
H n’eft qu’un feul homme qui a pu.trouver grâce devant lui.
faut effacer le nom de tous les Saints, & y fubilituer le nom de
°uiieau. I l faut mettre en pieces tous les ouvrages de philofophie } de
�8
f j p. 94
, piété* de morale , & conferver uniquement les livres de Roujfeau. O mon
i j'éd. i*r vol. D ieu , s’écrie FAuteur, ta morale, le texte , le commentaire , le premier
mot, le dernier mot de ton Evangile , ton Evangile tout entier , & tel qu’il
j‘
efl fo rd de ta bouche, fe trouve à chaque page dans les (Æuvres de Rouffeau.
ji .
Ne faut-il pas être doué d’une impudence plus que cynique , pour
|I
appeller en témoignage Dieu lui-m êm e, & lui faire atteilcr que notre
!■
laint Evangile eft tout entier dans la Nouvelle Héloïfe , dans E m ile, &
!. i ;
dans les Confeifions du Citoyen de Geneve.
E n fin , M e s s i e u r s , une derniere impiété que nous ne pouvons
paiïer fous filence, c’eft celle qui concerne les vœux faits en Religion.
n y a que le D ieu des ajj'ajjins , le D ieu qui préjîde au meurtre & au
*, ’ ’
néant, qui puijje recevoir les vœux facrileges , les voeux germicides d'une
'■° ‘
jeune Religieufe. Quel eft donc ce Dieu des aiîailins, ce Dieu qui préiide au meurtre & au néant?........Quelle horrible aiîertion ! L ’énergie
p
de notre filence peut feule vous indiquer le Dieu à qui s’adreffe cet
effroyable blafphême.
Nous n’ajouterons rien à ces réflexions, en terminant ici le tableau
des horreurs que FAuteur a proférées contre la Religion Chrétienne.
Nous nous contenterons d’obferver qu’il eft des impiétés de tous les
genres. Vous avez dû voir en effet, qu’il n’eft aucun des objets qui
intéreflent le dogm e, la croyance & le culte ,• que FAuteur n’ait cherché
1
à tourner en ridicule, ou qu’il n’ait eilayé de deshonorer par l’obfcénité
,
des couleurs fous lesquelles il a affefté de les préfentcr.
di
jjj
Le troifieme objet que nous fommes chargés d’examiner dans cet
Sarcafmes Ouvrage im pie, c’eft la maniéré dont FAuteur s’eft expliqué fur les
co^tr® les mœurs publiques.
1
’
La Religion épure les m œ urs, & les mœurs confervent & entre
tiennent Fefprit de la Religion dans tous les cœurs. Le premier devoir
¡e|
d’un Ecrivain eft donc de refpe&er les mœurs. L ’Auteur s’eft fait un
!
jeu d’outrager par-tout la décence. Sa plume impure paroît familiarifée
avec les défordres les plus greffiers -, & par les peintures licentieufes
dont nous avons foulevé le voile pour les faire entrevoir, vous êtes déjà
convaincus que l’imagination du Peintre ne refpire que la lubricité la
plus effrénée.
Mais indépendamment de ces images honteufes , que l’homme le
plus corrompu n’oferoit expoler aux regards de la fociété , il eft une
maniéré plus adroite de dégrader les mœurs publiques, de les altérer
jufques dans leur fource , & de hâter leur corruption} en détruifant
les établiffemons faits pour les conferver.
L ’Auteur ne veut ni éducation publique dans les C o llèges, ni éduca
tion
�don particulière dans la maifon paternelle. Que devien ra c onc une
jeuneiTe vive & inconiidérée, qui ne coniulte que les goûts pa agers
& la phantaiiie du moment ? Ardente & impetueufe dans es e 1rs ,
elle ne connoît d’obftacles que ceux quelle ne peut furmonter; indo
cile par caraftere & obftinée par foibleiTe , toujours prete à lecouer
le joug de la dépendance , elle fe croit libre ; & lufage de a 1 erte
en eft l’abus continuel. Inçapable de réfléchir , codant à la premiere
impuliion, entraînée par l’exemple , l’a&ivité dune imagination exaltee
lui fait la loi. E n iin , guidée plutôt par des fenfations repetees que
par les lumieres d’une raifon qui n’eft point encore developpee, quelle
fera la deftinée de l’enfance, ii elle n’eft confiee de bonne heure à la
furveillance d’une fage inftitution, qui lui apprenne à distinguer le bien
d’avec le m a l, à difcerner le jufte de l’injufte , à feparer lhonnete de
l’utile , le vice d elà v ertu ; en un m o t, qui lui enfeigne les ventes
fondamentales de la Religion , & la force de fe livrer à 1étude pour
y puifer les premiers élémens des connoifîances humaines ; qui lui
montre l’étendue de fes obligations , les lui fafle chérir , & lui perfuade que fon bonheur eft attaché à l’obfervation de fes devoirs. Dans
quelle école l’enfant, parvenu à l’adolefcence , ira-t-il fe penétrer de
Page 1 3'
ces grands principes ? L ’Auteur répond , qu il fau t abandonner les enjans ^c édit. z' V'
à eux-mêmes ; que les P ré ce p te u rs 11 apprennent, rien , ne forment , ne
changent rien ; que l’éducation morale efl une chofe impojfible, une idée
bigarre , & que fans fecours étrangers , lam e fe développe & croit a' mefure
que le corps grojjit & grandit.
Cette proposition tend à établir le pur matérialifme ; & pour qu on
IbU.
n’en puiiTe pas douter , l’Auteur ajoute : Nous naijfons bons ou méchans,
& jamais aucune éducation quelconque n a e u d’influence fu ries difpofîtions
de notre cœur.
Eh quoi ! les végétau x, ces êtres infenfibles , fe corrigent, fe rcdreflent, s’adouciffent par les foins d?un cultivateur habile -, l’homme
feu l, cet être qui penfe, qui raifonne , qui délibéré , l’homme fera
incapable de profiter des leçons de la fageiïe, & des confeils de l’expé
rience ! Et fon efprit , s’il eft naturellement porté à quelques v ic e s ,
toujours rebelle à l’inftru&ion , nes’élevera jamais jufqu’à la fphere de
l’honneur & de la vertu ! Contradiction révoltante dans l’ordre même de
la nature , inconciliable avec l’ufage de la raifon , Ôz qu’on ne peut
hippofer dans l’intelligence parfaite qui a créé tout ce qui exifte.
Si l’homme eft naturellement tout bon ou tout méchant, placé au milieu'
de la fo ciété, livré à l’efprit d’indépendance qui le gouverne, fans
autres principes que ceux qu’il fe fera faits h lui-même , fans autre
�!
guide que fa propre volon té, quelle fera un jour fa conduite dans
b;i
cette union intime formée pour le bonheur commun des deux fex es,
fi.J ;
& deflinée à perpétuer les générations ? Le mariage , dont la fiabilité
!
importe fi fort à la confervation des m œ urs, le mariage eil une fource
féconde d’abfurdités dans le point de vue fous lequel l’Auteur l’envifage.
'
L ’indiiTolubilité d’un nœud aufli intérefTant à l’ordre public , n’eil plus
'i
qu’une chimere. Les noms de pere , de mere, d’époux , d’enfans , pafferont
3* édition ,
mode ; on ne faura bientôt plus ce qu ils voudront dire , & le Gouver, Mge i >¡6,2e nement fera le pere commun. L a poilérité peut-elle être flattée de fe trouver
l,ol‘
réduite au fort des Enfans-trouvés, ou ae devoir fon exiilence civile à la
bienfaifance de l’Etat ?
L ’Auteur articule que cette époque n’eil pas bien éloignée. Mais en
0
attendant ces triiles événemens, il fe charge d’introduire des mœurs
nouvelles dans la fociété. Son premier mouvement eil de s’indigner
!
contre le célibat involontaire des Prêtres & des Soldats. C e il fur-tout
?
le fort de ces derniers qui l’intéreffe ; il veut les marier à quelque prix
que ce fo it , mais fans leur impofer le joug du mariage ; & à cet effet
il imagine l’extravagance la plus complette que l’efprit humain ait
P^e 149 , jamais enfantée. C ’eil de changer la deflination des cafemes, & de faire
xl edmon. marler chaque Soldat avec la fem m e, la fille ou la fervante de la maifon
, ,
où fon billet l'envoye loger.
M a is c e n’ e ft p o in t a ffe z d ’affra n ch ir les célibataires de la contrainte
où ils font réduits. L ’Auteur croit devoir également venir au fecours
’a
des perfonnes mariées, en les débaraiTant des liens indiffolubles du
d
Sacrement. Pour réparer les malheurs des unions mal aiTorties , pour
prévenir l’uniformité , l’ennui & les dégoûts de la vie conjugale, dans
*
les cœurs qui ne font point animés d’une véritable tendrefle, l’Auteur,
-'éJit âge fertile en reiTources, propofe qu’en Efpagne & par-tout, le mariage dea* vol. vienne un contrat civil quon puiffe renouveller ou rompre tous les ans.
M
Légiilation funeile ! q u i, loin d’arrêter le défordre , ne feroit qu’en
augmenter le fcandale , qui acheveroit de corrompre les mœurs fous
prétexte de les rétablir dans leur ancienne pureté, qui nous rameneroit
1
enfin à ces tems de divorce & de diifolution où les nœuds du mariage
étoient aufli-tôt rompus que formés ; enforte, dit le fatyrique Rom ain,
qu’il exiiloit à Rome des femmes qui comptoient les années de leur
mariage par le nombre de leurs époux. Détournons les yeux de ces
fiecles d’opprobre & de corruption. Quelle tendreffe les époux ainii
divorcés pourroient-ils avoir pour les fruits d’une union momentanée,
union honteufe , formée plutôt par le defir que pour le bonheur. Et
ne feroi;-il pas à craindre ae voir s’éteindre infenfiblement cette nom-
�breufe poiiérité qui fait le bonheur des familles & la richeffe de 1Etat ?
C ’eft ians doute une des vues fecrettes du M. de Langle ; car il
s’éleve contre la population. L ’Efpagne ejl déferte, dit-il j tant mieux.
L e monde ejl plus que complet ; il y a beaucoup d’hommes de trop , 6*je 119, 1 "
le crois depuis long-tems. A vec de pareilles idees , il n eft pas étonnant
qu’il fafle en quelque façon l’apologie du fuicide. C’ejl, ait-il, une fpe- 3«édit.
culation. I l ejl aujji Jimple d’aller chercher le bonheur dans l autre monde ^ &■ 8
que d’aller tenterfortune dans le nouveau. L e plus grand nombre des Théolo
giens & des Moralijles Efpagnols permettent à tàut malheureux de fe
tuer quand la vie lui fa it m al, ou quand la fociété lui refufe la portion de
fortune quelle lui doit.
Nous ne ferons point l’injure aux fameufes Univerfites de Salamanque & de Valladolid , aggrégées à l’Unrverfité de Paris , aux
Univerfités d’Alcala & de Tolede , de Grenade, de Seville & de V a
lence , ni à tant d’autres Facultés qui n’ont peut-être pas le même dégré
de célébrité , mais qui font toutes animées du même efprit, nous ne
leur ferons pas l’injuftice de croire , fur l’affertion du M . de Lan gle,
que leurs Théologiens enfeignent ou tolerent une doftrine contraire
à la Religion , aux Loix , à l’humanité. C e qui cara&érife de plus en
plus l’aveuglement & le délire de 1*A u teu r, c’eft que cette meme
do&rine eft combattue & proferite par le feul prétendu Sage dont il
veuille adopter la morale. Si le M. de Langle avoit autant de
confiance qu’il montre d’admiration pour les écrits de ce raifonneur
profond , il fe feroit convaincu, en lifant la Nouvelle Héloïfe , que
le fuicide cil une révolte de la Créature contre fon Créateur, un attentat
contre la Providence & un oubli de tous les devoirs de l’homme & du
citoyen. S’il eût médité fur les vérités que J. J. Roufleau préfente avec
tant d’énergie lorfqu’il a le bonheur de les faifir , & qu’il entreprend
de les défendre, il eût trouvé dans ce Moralifte qui ne parle félon
lui que le langage de l’Evangile , il eût trouvé que l’homme doit l ’ufage
de fa vie entiere à fa Patrie , à la fociété , a fes femblables. Il eût appris
à fon ecole , que celui qui ofe attenter à fes jo u rs, par cette mort nonteufe & furtive > trompe fa dejlination. Il eût applaudi à la bienfaifance
. du Philofophe de Geneve , qui apprend au défefpoir à aimer encore
la vie. Qu’il eft fublime , le langage du Milord à un jeune infenfé
qui le confulte ! Chaque fo is que tu es tenté de fortir de la vie , dis
en toi-même : que je fajje encore une bonne aclion avant de m ourir............
S i cette confidération te retient aujourd'hui , elle te retiendra encore demain,
après demain & toute la vie. Douce & confolante maxime ! feule ca
pable de ranimer le courage le plus abattu. Mais fi la main de l’erreur
B 2
�11
s’empreiTe de répandre ce baume falutaire fur les plaies du furieux qui
cherche à fe détruire ; comment fuppofer qu’un corps de Théologiens
éclairés des lumieres de la révélation & de la foi , puifle jamais fe relâ
cher de l’étendue d’un précepte émané de la bouche de Dieu m êm e,
lors de la promulgation de lv Loi des Juifs. Non occides , dit la voix
du Seigneur fur le mont Sina” ; & Moïfe rapporta cette prohibition
gravée de la main du Très-Haut fur les tables de la Loi. Non occides.
Défenfe publique & générale qui n’admet aucune reftriftion ! C ’eft
comme ii le C iel avoit prononcé , N on occides, neque fratrem tuum ,
neque te ipfum : ni ton frere , ni toi-même. Neque fratrem tuum, parce
que tou6 les hommes font freres , & qu’ils doivent s’aimer & fe pro
téger -, neque te ipfum , parce que tu m’appartiens avant d’être à t o i ,
& que tu ne peux difpofer de ma créature fans mon confentement.
La généralité du commandement en fait un précepte dans tous les cas
poflibles. Non occides.
La tolérance inhumaine imputée aux Théologiens Efpagnols , eft
donc une impofture aufli grofliere quelle eftabfurde: mais Tidéc affreufe
du fuicide, idée révoltante pour un être doué d’une intelligence railonnable, à qui la nature a donné une horreur prefqu’invincible pour fa
deflxuéUon, & qui au moment où il s’eft décidé à attenter à fa vie ,
fe trouve pour quelques inftans encore placé entré le néant & l’infini,
ce tte idée capable a e faire frémir quand on y réfléchit de fang-froid ,
même s’il pouvoit y avoir la plus légère incertitude fur l’avenir, cette
image de la mort n’eft point effrayante pour le M . de Langle. Il
s’y arrête avec complaifance : il en fait un fujet de badinage & de plaifanterie. Il fixe lui-même la deftinée qui l’attend : & ces lieux confacrés
à recevoir les triites reftes de l’humanité, n’offrent rien de terrible à
fon imagination. Il fait la defeription la plus agréable des cimetieres
fitués aux environs de Madrid. Il les peint comme des jardins de délices ,
émaillés de fleurs, plantés d’arbres fruitiers , entrecoupés de ruifleaux ,
& déclare qu’il veut y avoir fa fépulture. Et pourquoi cette prédilcftion ?
C ’efl: pour fe dire en mourant, quand mes enjans iront fu r ma tombe pleurer
inédit ,88’ ma Perte>
tr0llvcr0nt de l'ombre, ils pourront cueillir des rofes, s’affeoir
au bord de l'eau, & me manger dans une pomme. Quelle douce confolation pour un pere ! Quelle horrible jouiiTance pour des enfans! La nature
fe fouleve à l’afpeft d’un fruit aufli amer que dégoûtant -, & la piété
filiale recule en frémiiTant d’un tel excès d’aveuglement.
Jufqu’à préfent, M eifieurs, nous avons analyle l’Ouvrage relative
ment à la D ivin ité, à la Religion & aux M œ urs, foit en ce qui con
cerne la décence & l’honnêteté , foit en ce qui peut les altérer &:
�achever de les corrompre. Nous avons encore à le confiderer fous
deux afpefts ¿salement intéreffants à l’ordre public -, relativement a la
Nation Efpagnole , & relativement à fon Gouvernement. Commençons
par ce qui concerne le corps de la Nation.
„
Notre miniftere ne peut encore vous présenter le Voyage en hjpagne
.J
que fous la qualification d’un véritable libelle. Nous avons eja eu ^ Nation ^
l’honneur de vous faire obferver que ce titre n’eftq u u n pretexte que l)agnole,
le prétendu Voyageur faiiit pour marquer les différentes (rations q u i
prétend avoir mites dans fa courfe. C ’eft un cadre qui lui a paru propre
à renfermer les objets dont il avoit fait ch o ix , à leur donner le mou
vement & la vie , & à les offrir à fes leftcurs tels que fon ima
gination les lui préfentoit à lui-m êm e. Mais la nature des o jets
dont l’Auteur a fait c h o ix , l’ordre dans lequel ils font dilpoles , ix
l’affeftation de rapprocher ce qu’il y a de plus profane de ce qu îh y
a de plus facré , ou de faire fuccéder une niatiere licencieuie aux
chofes les plus refpe& ables, tout annonce que le but de 1Auteur a ete
de publier une Satyre auffi indécente que criminelle , des m œurs, des
ufages & du caraftere de la Nation Efpagnole. Il entre à cet égard
dans les plus petits détails, ils parcourt tous les états, toutes les con
ditions. Les menfonges les plus groifiers , les exagérations les plus
extravagantes ne coûtent rien à fa plume, pourvu cju elle puiffe creei
un ridicule, ou préfenter un appât à la crédulité des oiiifs qui ne
liiént que pour tromper leur ennui.
C e carattere de libelle fuffiroit pour armer notre févérité. Le genre
de diffamation que l’Ouvrage renferme eft une infulte g ra v e , dont la
Nation Efpagnole juftement offenfée a droit de demander réparation.
Et le relpeft dû aux Nations fait partie du Droit des Gens , ainii que
de la Police publique dont la manutention eit fpécialement confiée à
notre vigilance.
(;
Nous ne nous arrêterons point à relever les reproches b a s, puériles
& déplacés que l’Auteur a accumulés contre le commun des Habitans
de l’Efpagne fans aucune fpécification individuelle. Qu’importe la cou
leur , la Itature , la conformation générale de tout un peuple ? Chaque
Nation a des traits plus ou moins prononcés , une configuration diftin ftiv e, un enfemble prefqu'uniforme qui la fait reconnoitre. Quel
quefois , il eft v r a i, des Particuliers vont emprunter l’attitude & la
c émarche , l’air & le coftume de leurs voifins} ¿c ious ce deguifement,
iis croient fe donner une nouvelle maniéré d’exifter. Mais la copie eft
toujours h éloignée de l'original, qu’il n’eft pas poilible de s’y mé
prendre. Ces imitateurs font des êtres mixtes qui ne font plus ce qu’ils
�, 14' .
étoientpar la naiffance & par l’éducation, & qui ne font pas devenus
ce qu’ils vouloient être par adoption & par goût. Repouifés par leurs
compatriotes, défavoués par leurs modeles , ils n’ont bientôt d’autre
reifource que de reprendre le ton de la nature : mais l’exemple de ces
transfuges n’influe en rien fur le corps de la Nation. Elle eft toujours la
même. L e peuple a fon mafque qu’il ne peut dépouiller : fes yeux
y font accoutumés : il y trouve même une forte de beauté, parce que
la beauté eft idéale : & l’Indien rembruni fur les bords du Gange ne
porte point envie à la blancheur des Européens.
La conftitution phyiïque de l’homme eft égale, à peu de chofe près,
dans tous les climats : mais de même que chaque Nation a un genre
de phyfionomie qui la cara& érife, de même aufli elle a un cara&ere
d’efprit qui lui eft perfonnel. C ’eft ce caraftere inhérent au Peuple
Espagnol que l’Auteur a voulu principalement ridiculifer -, voilà ce que
nous appelions une infulte faite au corps de la Nation : & dans le peu
d’exemples que nous nous permettrons de vous citer, nous vous prions
de remarquer que chaque inventive particulière eft accompagnée &
foutenue a une impiété plus monftraeufe encore que l’injure.
L ’Auteur accufe également le Peuple & les Grands de fanatifme &
de fuperftition. Il donne à entendre que leur dévotion ne coniifte que
dans un extérieur com pofé, dans des grimaces & des contorfions, dans
l’habitude de porter le fcapulaire & de réciter le chapelet : enforte que
la Religion n’eft en Efpagne qu’une Religion d’apparat, de cérémonie
& de pure oftentation.
;i
On y porte le Viatique , dit l’Auteur, avec pompe, L a première perfonnç
Vq\] qui fis trouve en voiture} efi obligée d ’en deficendre & de prêter fo?i carrojje
à Dieu, Et il ajoute tout ae fuite : Ces vaines cérémonies fiont les dernieras
planches fur lejquelles fie fiauve, f i on ofe le dire, la Religion, aux abois.
Perfonne n’ignore quelle eft la haute confiance que les Peuples
d’Efpagne ont toujours eue pour la mere de notre divin Sauveur. L ’ef*
pece de culte qu’ils lui rendent paroît tenir de l’adoration. Ces hom
mages éclatans, ces pieufes falutations, ce refpeft profond, eft trans
formé pur l’Auteur en momerie & en dérifion ; il va mçme jufqu’à le
qualifier d’idolâtrie.
Les tréfors des Eglifes confacrés à Dieu fous l’invocation de la Sainte
V ie r g e , les E x voto placés fur les murailles des Chapelles qui lui font
dédiées, ces témoignages de la reçonnoiflimee, ne font que des dons
f aits en payement de fies miracles,
^
Chaque E f 'pagnol regarde la Vierge comme une parente , comme une
’ amie , comme une maitrcjfiç toute pmffiante, . . . . C’efi en fion nom quune
�femme trompe fon mari t quune fille aime fort amante reçoit une lettre 3fa it
la réponfes donne de fes cheveux t envoie fon portraits Ù accorde des render-vous.
Quel aflemblage inoui de piété & de corruption ! Quel mélange
incompréheniible de confiance & de défordre ! Peut-on fuppofer un
abus aufli monftrueux de l’interceflion de la Proteélrice de tous les vrais
Fideles ? Cette fuppofition eil-elle même vraifemblable ? Nous ne dis
conviendrons cependant pas que le Peuple, dans l’ardeur de Ton z e le ,
par une pieufe ignorance, peut rendre quelquefois à la Mere un culte
qui n’eft dû qu’à fon Fils : mais s’il donne un peu trop aux apparences
extérieures de la dévotion, ce ne font point les premiers Pafteurs qu’il
accufer. C ’eft que le peuple eft extrême en tout: c’eft que
^intérêt entretient fon enthoufiafme : c’eft qu’il ne connoît que les pra
tiques du C lo ître, & qu’on ne lui explique pas allez en quoi confifte
la véritable piété. Un peuple religieux n’a befoin que d’inftru&ion :
•& s il va plus loin que la Religion ne l’ordonne , il faut en chercher la
caufe dans l’excès de fa ferveur, & dans le deiir ardent de remplir les
devoirs que l’Eglife impofe à tous les Fideles. Auffi n’eft-ce pas dans
la claffe des hommes inftruits que l’Auteur place la grande dévotion.
C efl parmi le peuple , c efl parmi les pauvres gens que l'on compte le plus pag. î0 , 3
de dévots. Tant il efl vrai que lorfqu’on n a rien, lorfqu'on fo u jjre 3 cefl un ¿dit. a* vol.
, plaifir de prier D ieu.
Seroit - ce une vérité échappée à la plume du M . de Langle ?
Non fan^ doute j ce genre de plaifir lui eft inconnu. Il en fait un objet
de raillerie., parce qu’il n’a jamais été dans le befoin ou dans la fouffrance. Mais un jour viendra, où cet incrédule deiîrera connoître par
lui-meme la fituation heureufe d’une ame pleine de confiance, q u i,
accablee de peines & de chagrins , de douleurs & d’infirmités , va fe
jctter aux pieds de la D ivin ité, trouve une véritable confolation dans
la priere, oublie tous fes malheurs en la préfence de fon D ieu, & puife
de nouvelles forces dans la foumiffion même avec laquelle elle accepte
es epreuves qu’il plaît à la Providence de lui faire fupporter.
r ,
Giflons pas féduire par une efpérance vaine. Peut-elle jamais
e realiler . Que peut-on attendre d’un homme qui ne veut pas qu’on
implore 1aiïiftance du Tout-PuiiTant ; qui dit qu’il faut laiffer faire D ie u ,
f fi11^ regarde la ferveur de la priere comme une dépendance de la
uperftition & du fanatifme dont la Nation Efpagnole eft tranfportée ?
*e peuple en Efpagne efl généralement fanatique & 'f uperflitieux,
comme le dit le M . de Langle , cet excès lui conftitue au moins
l,n genre de cara&ere quelconque. Cependant il ne veut pas que l’Ef-
�16
pagnol ait un cara&ere de quelque nature que ce puiiTe être. E t , toujours en contradiélion avec lui-même, il lui ôte le ligne caraélérif¡ie ¿¿Ut. pag. tique qu’il lui avoit aiîigné. Les Efpagnols manquent de caractere, dit-il,
!f* " vo1, dès-lors il ejl impoffible de les aimer beaucoup, de trouver plaifir à 'vivre
avec eux. Un homme fans caraclere n e fl rien , n e fl bon à rien.
La nouveauté de cette inculpation peut furprendre. Mais auffi Ton
abfurdité démontre le peu de jugement de l’Auteur. On peut en con
clure que s’il a jamais parcouru l’E fp agn e, il n’a pas été aiTez heureux
pour y former la plus foible de ces liaifons que le hazard fait naître
quelquefois , que le rapprochement des efprits entretient, & que lefentiment perpétue. Il avoue cependant qu’il a trouvé un Peuple grave &
iïlencieux, renfermé en lui-même, & ne cherchant point à fe familiarifer avec les Etrangers. Cet aveu juiKfie ce que nous ne faifions que
préfumer. Le Peuple Efpagnol aura craint de fe communiquer à un
eiprit auiîi fuperficiel, aufli inconiidéré que celui de notre Voyageur.
L e M . de Langle cherchoit peut-être un autre lui-même, & au ro it
voulu fe rencontrer par-tout. Mais incapable , par fa légereté , de
defeendre dans la profondeur d’une ame naturellement circonfpe&e &
• réfervée, pouvoit-il faiiir le cara£lere d’une Nation dont chaque indi
vidu l’étonnoit par fa feule prélence , & accabloit fon imagination du
poids de fa gravité ?
:
I’
tl°s
' o u , liv. 1 9
^i.ip. 10.
■:
I!
j!
i:
Un Philolophc du fie c le , appréciateur éclairé de tous les P euples,
a rendu plus de julHce aux Efpagnols. Il obferve , que leur bonne fo i a
été fameufe dans tous les temps : que toutes les Nations qui commercent à
J.
J r
1
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t‘r
1
c
•
■
,1
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Cadix , confient Leur fortune aux LJpagnols ; <y que jam ais elles ne s en Jont
repenties. Cette probité nationale ne fuffit-elle pas pour former un grand,
un noble caraftere ?
A ce défaut de cara£tere , le M . de Langle affe&e de joindre le
défaut de connoiffances & d’inftruélion. Les Efpagnols , dit-il , ont
cultivé l’Hiftoire avec une forte de fuccès : mais ils ont négligé d’ailleurs
tous les genres de Littérature. Et peut s’en faut qu’il 11e les accufe d’être
abfolument étrangers aux A rts, aux Sciences & aux Belles-Lettres. .
C e Paradoxe eft-il l’effet de l’aveuglément ou de la mauvaife foi ?
Comment refufer aux Efpagnols les plus grands talens ? Ils ont de l’é
lévation dans le gén ie, & de la nôblefle dans les idées. Leur ame eit
pleine de fentiment, & leur efprit capable de pénétrer dans les Sciences
l e s plus abftraites. La plus haute antiquité dépofe en faveur de l’Efpagnc.j
& l’on citera , jufques dans la poltérité la plus reculée, les grands
Hommes qu’elle a produits. Elle a fans doute à fe glorifier d'avoir •
donné le jour à l’Empcrcur T ra ja n , qui fut les délices du genre-humain ;
¿1 TEmpereur
�à l’ Empereut A drien, qui le premier établit dans Rome
^m
pour y enfeigner les Sciences & les Lettres, 1Eloquence & es L o ^
C ’eft de fonbfein que font fortis les deux Seneques le: Phdo o ^ e &
le Rhéteur, les deux Poètes Lucain & M artial, le célébré Q uinül«n
le Géographe Pomponius M ê la , & le fameux Co urne e q t C
premier Traité fur l’Agriculture. Nous ne parlons point des; Ec: <
illuftres qui depuis ont été la gloire S i la lumiere de eurs c
P‘
»
foit dans la Médecine , foit dans la Jurifprudence , foit ans c
logie. Mais cette eiquiffe fait voir combien 1 Auteur e mju e
ignorant fur des faits qui fe trouvent coniignes dans es anna es
toutes les Puiffances de l’Europe.
...
,
Un dernier reproche, mais d’une nature ii extraor maire qu
lifant on doute encore s’il eft écrit, c eft celui dans eque
ue
l’impudence, permettez-nous cette expreilion, oui lim pu ence e r
voquer en doute la bravoure des Troupes Efpagnoles. e
.. I
Langle s’eft exprimé en ces termes : L ’ Efpagnol pajje p o u r Joutenir pat
i re éditio>
faitement le premier choc, mais aujji-tot qu il voit Jon J an§ cou f 7 3 J ° J page 143* |
camarade tomber mort, on l’accufe alors de perdre courage , e quitter Jes
rangs , & de recommander fon ame à D ieu. Voila c e qu i fit a a atai
de R am illies, &c.
T
i i- ,
La citation eft précife : à la bataille de Ram illies. Le temps & le lieu
ne préfentent aucune équivoque. Ne faut-il pas avoir un iront pLus que
d’airain pour faire une pareille affertion ? Lim pofture eft d autant p us
grofliere, que les malheurs de la F ra n c e , à 1époque de 170 6 , ont
univerfellement connus. Philippe Y étoit alors occupé à reconquérir on
Royaum e fur l’Archiduc Charles qui s’en étoit empare. La * raijce eUc"
même avoit à fe défendre de prelque toutes les Puiiïances cle Europe
conjurées contre elle. Les Alliés étoient commandés par le
uc e
Marlborough. Les François avoient à leur tete le Marecha e 1
leroy. La pofition des deux armées décida du gain de la bataille, otre
aile droite fut écrafée, parce quelle eût à foutenir le choc de toute
l’armée ennemie. Notre aile gauche, poftée de façon qu elle ne pouvoi
attaquer ni être attaquée , le retira en bon ordre en prc ence es
Impériaux. Mais il n’y avoit aucunes troupes Efpagnoles ans
camp. Les accufer d’avoir quitté leurs rangs, d avoir pet du coût âge, c e
en impofer contre l’apparence même de la vente.
.
f
Indépendamment de la fauffeté de cette accufation dans a circon
tance particulière de la bataille de Ram illies, lEurope entière atte
tera le courage de la Nation & fur-tout de l’infanterie EfpJgno e.
plaines de Rocroi ont été témoin de fon intrépidité, &: les ^ a n e s u
�I
18
Grand Condé dépoferoient de la fermeté de ces vieilles Bandes qu’il
enfonça trois fois à la tête de la Noblefle Françoife, & dont lui & les
fiens furent trois fois repouiTés : corps inébranlable qu’il ne pût rompre
qu’avec du canon. C e Prince , digne fang de nos R o is , & qui
femble avoir laiile fa valeur en héritage à fa poftérité, ce héros viendroit attefter que chaque Soldat conferva fon poite jufqu’à la m ort:
qu’il voyoit fon fa n g couler, & fes camarades tomber fans quitter fon
rang. Il vous diroit que le Comte de Fuentes, jaloux de fa g lo ire, mais
digne C h e f de cette brave Infanterie , quoiqu’oftogénaire goûteux &
impotent, fe fit porter fur un brancard au milieu de la m êlée, qu’il
fou tint par fa préfence la valeur inouie de cette antique milice ; que
la conilance de ces généreux Efpagnols fut portée à un tel degré, qu’ils
aimerent mieux fe voir détruire que de fe rendre prifonniers & de
quitter le champ de bataille. Et ii la deftru&ion prefqu’entiere d’une
Troupe jufqu’alors invincible ajoute au triomphe du vainqueur, la
réiîitance héroïque des vaincus devient pour eux un titre de gloire &
d’immortalité.
Les Armées navales du Roi d’Efpagne ne font pas traitées avec plus
de circonfpe£tion que les Troupes de terre» La Marine Efpagnole y dit
»95 > l’Auteur, a très-peu de confidêration. L ’efprit mercantile, l'ardeur des prifes%
édlt‘
Uamour du gain qui domine les Officiers, l ’âge décrépit des Vice-Amiraux'
& des Chefs d'Efcadre y & la fuperflition de tout l’ Equipage y ne permettent
pas de compter fur les forces maritimes de ce Royaum e. L ’Auteur
convient cependant qu’on a une grande idée des talens militaires de
plufieurs Généraux dont il rapporte les noms» Mais après avoir fait
2HJ.
d’eux un éloge m érité, il fe hâte de le détruire en ajoutant: D es V ieil
lards décompofés , qui-ne voyent plus , qui n entendent plus , qui ne refpirent qu'à demi, & qui vivent à peine, ne font pas plus en état de fe
battre y de commander une flotte, de fe faire obéir, que de fauter fu r la
torde y de s*y tenir en équilibre , ou de danfer à l ’ Opéra.
Peut-on fe permettre une comparaifon plus outrageante y & l’An
gleterre elle-même reconnoîtra-t-ellc à ce portrait les Généraux Efpa
gnols qui fe font fi .fort diftingués dans la guerre que la France vient
tle terminer à la fatisfaflion de l’Europe & du Nouveau Monde ?
Si le M . de Langle fe déchaîne avec tant de fureur contre le
corps de la Nation Efpagnole, dans tous les afpefîs où il a voulu la
faire envifager ? on ne doit pas s’attendre qu’il témoigne plus de refpeét
>our la Majefté du Souverain & pour le gouvernement paiticulier de
’Efpagne.
U a des premiers objets dont l’Auteur a paru s’occuper, ce font les
Î
�Edits du Confeil, & les Ordonnances de la Police de Madrid. Il annonce
cet article avec une forte d’emphafe. On croiroit qu’il va développer
le plan de la Légiilation Efpagnole , & entrer dans le détail des Loix
nationales. Il n’en a pas même la plus légere connoiiTance. Une feule
lemble avoir fixé fon attention. C ’eft la Loi qui condamne à être
enfermées, les femmes &filles qui fe font avorter. C efl Charles-Qidnt, dit-il, Pa^68 & Æ'
quiafigné , qui a diclé cette Loi. C’ejl Charles-Qidnt, qui lui-même étouffa, 1 ^ lU0]
enterra , dit-on , l’enfant qu’il eut d’une Bouquetiere d’ Oudenarde.
Il
eft vrai que dans une note il femble fe rétra&er. On y lit :
eaucoup d Hifloriens difent que non ; je crois quils ont raifon. L e
fameux D on Juan d'Autriche , l*un des nombreux bâtards de Charles{¿u m t, prouve au refie que ce Prince n étouffoit pas tous fes enfans.
' Voilà fans doute un genre de rétractation tout-à-fait nouveau. C ’eft:
reparer un outrage par une injure aufli grave ; fur-tout quand on trouve
a la fuite de ce paflage , que ce même Empereur vouloit qu’on punît
de mort les femmes adultérés. Le rapprochement de ces deux L o ix ,
miles en oppofition avec la conduite de l’Empereur Charles V , plutôt
?°\/r ln^ ter à fa mémoire que pour inftruire , renferme tout ce que
e M. de Langle connoît du Code Éfpagnol. Il ne s’eft jattaché au furplus
qu à la maniéré dont il prétend que les Loix font publiées.
E n Efpagne, dit-il, c e fl au bruit du tambour, c e fl le Bourreau qui pa„e
publie les Ordonnances & les Edits. Il fe demande enniite la caufe d’un ¿dit. 2* vol
uiage aufli extraordinaire. Il n’a pu la pénétrer ; & il ajoute : Quelle
Janclion , quel poids, en effet, peut conferver un E d it quelconque, après
avoir paffépar la bouche d'un Bourreau , d'un homme infâme ? .............
1
es partifans de la reforme en matiere de légiilation lui répondront fans
oute que la Loi ne perd rien de fon autorité, du refpeft qui lui eit
u , quelle que foit la perfonne qui en faiTe la publication ; que les
I z01.^ P^na^es acquéreroient peut-être un degré de force , fi la puiflance
eguLitive les faifoit publier par celui qui fera chargé d’en punir la
vio ation. L Exécuteur de la loi en proclameroit les difpofitions ; &
îorreur naturelle que fa préfence infpire pourroit commander l’atten
tion ite préparer à l’obéinance. Mais fans iniifter fur ces réflexions} cet
u iag e , vraiment fingulier, n’a jamais exilté. Les Edits du Confeil &
es Ordonnances de Police fe publient à M adrid, comme par-tout ailleurs,
par le miniftere d’un Crieur public. Nous avons en France des Officiers
charges de cette publication. Qu’elle fe fafle au fon de la trompette
? U a t^
tam^our y l’effet eft toujours le même ; les fondions du
uré-Trom pette, ou de l’homme qui bat de la caille , ne font que des
appels bruyans pour avertir le peuple de la proclamation. La lecture
C z
�20
g.
26, id.
g- -7
;gc 8 0 , i rc
ion.
•âge 2^4
e édition.
de l’Ordonnance fe fait à haute & intelligible voix ; elle eft cenfée con
nue du moment qu’elle a été publiée. Après avoir attefté un ufage
qui n’exifta jam ais, l’Auteur s’attendrit fur le fort'des hommes dont
l’unique emploi eft de faire les exécutions publiques. L e M. de
Langle veut bien qu’il y ait une note d’infamie attachée aux fondions
d’Exécuteur des Hautes-œuvres ; mais comme l’infamie ejl une peine réelle,
comme il efl injufle de punir un homme qui fouvent penfe mieux, vaut mieux ,
a plus d’amc que la plupart des gens qui le fuient ,• il voudroit que cette
fonction fût attribuée à un fcélérat à qui on laifleroit la vie , & q u i,
condamné à une prifon perpétuelle , en fortiroit feulement pour les
exécutions. Et comme le métier ne(l pas a ifé , quun habile Bourreau efl un
homme rare , l’Auteur , par un effort de génie incroyable , veut qu’on
maffole pour tous les crimes ; & alors, il ne faudra ni apprentiffage , ni coup
d ’è jp ii, ni chef-d’œuvre, & le premier venu fera fuffifant. Cette maniéré
de punir les criminels a des attraits pour le M . de Langle. Car dans
un autre endroit de fon ouvrage , il avoit déjà avancé : P a r p itié} par
humanité, vuidons tous les cachots, toutes les prifons , tous les bagnes ;
infligeons la mort pour tous les crimes ; faifons mourir fans faire de mal;
maffolons tous les brigands , & tout de fuite ; plutôt aujourd’hui que demain.
Cette doftrine meurtriere fuppofe qu’il n’y a point de gradation dans
les crimes : & tandis que les Moraliftes les plus fages cherchent à dé
montrer que la peine doit être proportionnée au délit , le M . de
Langle décide que tous les crimes méritent égalem ent la mort; mais une
mort douce & qui n’ait rien d’effrayant pour le coupable , ni pour ceux
qui pourroient le devenir. C e nouveau Légiflateur fe feroit-il flatté de
s’attirer les hommages & de mériter la reconnoilfance de l’humanité ?
Il en eft perfuadé ; 6c fa compaffion pour les malheureux eft fi excefîive
qu’elle va ju fqu à la cruauté. S i j étois R o i , dit-il, & que dans une de
mes Villes il mourût quelquun de mifereyje fcrois affembler tous les riches
& les ferois décimer.
Quelle idée fanguinaire ! Faut-il donc être atroce pour être bienfaifant ? L ’humanité fouffrante a fans doute des droits fur une aine bien
née. Le fpeélacle de la mifere attendrit l’être le moins fenfible ; &
l’aumône qu’une main charitable dépofe dans le fein de l’indigence eft
le produit d’un fentiment naturel, plus que l’accomplilTement du pré
cepte , qui en diminueroit le mérite & le prix. La charité eft une vertu
qui ne fe laiiTe pas commander ; elle ne demande qu’à être avertie ,
inftruite & dirigée ; elle eft fa récompenfe ; elle jouit de fes bienfaits >
elle ne confulte qu’elle-même pour les répandre , & n’écoute que le
cri de la pitié quli retentit au fond d’une ame compatiiïante. Mais eo
�faire une L oi de rigueur ou d’obligation , rendre la dixieme partie des
citoyens opulens d’une même ville refponfable de la vie dun mendiant,
peut-être inconnu, qui a péri faute de fecours, ce n’eft plus humanité ,
c’eft barbarie ; & de même qu’il n’y a pas de généroiite a fecourir
un malheureux, de même le défaut de bienfaiiance ne peut être regardé
comme un crime digne du dernier fupplice.
C ’eft nous arrêter trop long-tems à réfuter les idées abfurdes & bi
zarres répandues dans un écrit qui ne doit infpirer que la plus vive
indignation. Reprenons-en l’an a ly ie, & hâtons-nous de remplir la tâche
que nous nous fommes impofée. Parcourons rapidement les injures
atroces prodiguées contre le fyftême politique & le gouvernement in
térieur de l’Eipagne.
Si le M. de Langle parle de l’adminiftration des finances & de la
v;
perception des impôts , ce n’eft pas feulement pour en fixer la nature Inve&vc*^ j
& en critiquer l’étendue : il femble qu’il a formé le projet de foulever co"e"nement j '
les peuples contre l’autorité. Rien , dit-il , de plus multiplié , de plus d’Efpagne. :
exorbitanty de plus mal ajfis, que les impôts quon paie en Efpagne. Rien pa^ ^ ^
de plus onéreux pour le R o i, de plus coûteux pour les peuples , que la ma- édit. ier vol. [■
niere dont on les perçoit.......... L e peuple ejl malheureux , & le R o i fe plaint
'
toujours de n’avoir, pas affè^ d'argent. Cette inventive , dirigée contre le
Gouvernement 8c contre le Roi lui-même , eft terminée par une comparaifon injurieufe, qui frappe également fur toutes les Têtes couron
nées. Mais cette offenfe n’eft pas encore fuffifante à ce Critique effréné.
Il ofe avancer que le peuple de M adrid ejl celui de toits les peuples qui a le pag
moins de nerf. On peut impunément doubler , tripler les impôts : il ne dit édit. z* vol, *
rien; les Minijlres font ce quils veulent, Une fe plaint jam ais.
Ce reproche fait à tout un peuple, de manquer de nerf, de ne jamais
fe plaindre, & fur-tout cette expreiîion, impunément, nous paroiflent
i
placés à deffein, pour exciter de la fermentation dans les efprits, pour
les encourager à la défobéiiîance \ & cette femence de fédition n’eft
plus équivoque, quand on fait attention au peu de ménagement avec
lequel l’Auteur s’eic expliqué fur le compte des Miniftres.
D es projets commencés, des moyens lents , des demi-volontés , voilà le iTf ¿flition,
rond que l’orgiteil national trace depuis plus de deux Jieclcs autour du M i- pa&e
nijlre • • • - Voilà le fléau , la hache 3 la coignée , qui cléracine, qui arrachey
qui étouffe en Efpagne tous les germes, tous les plans , tous les hommes.
Depuis long-temps l’Efpagne n’a eu que des Minijlres nuls , abfolument p3ge
,
nuls.
v ii.la note.
Les M inijlres, les Généraux, les Ojficiçrs s’accufent tour a tour d’irré- page
folution, (Cinfouciance j d’impéntiek
�22
Page 193 ;
Enfin, il y a des hommes de refie ¡ mais cefont des hommes fans courage,
id. la note. ^ Jl0,m m£s Çans ¿ ra s.
Sera-t-il donc permis à un particulier d’infulter ainfi à une Nation en
corps ; d’avilir les Miniftres dépofitaires de l’autorité ; de dégrader aux
yeux des fujets les Agens de la Souveraineté? E ft-il un Etat policé où
l’on puiiTe tolérer une pareille licence ?
C e n’eft pas feulement fur le genre d’adminiftration , & fur les Mi
nières d’Etat que l’Auteur fe plaît à répandre le poifon de la calomnie.
Il
ne craint pas d’attaquer les repréfentans de la Majefté royale auprès
des PuifTances de l’Europe. Mais par un rafinement de m échanceté,
c’eit en faifant leur éloge q u ’il prend p laiiir à les outrager. L ’Ambafladeur extraordinaire de S. M. C. auprès de la Cour de France n’eit point
à l’abri des traits de fa plume empoifonnée. C’ejl le feu l homme , dit
3e édition, l’Auteur, de qui la Monarchie Efpagnole puijfe s’enorgueillir à préfent.
oag. 1 2 7 ,1 " Cet éloge eft pompeux : mais pour en connoître la force & l’étendue,
' ol*
il faut pénétrer le fens de l’Auteur. Quel eft donc le fondement de cet
orgueil? Le croiroit-on? C ’eft que le M. de Langle lui prête fon lan
gage , fes opinions, fon aveuglement & fon abfurdité. L ’Ambafladetir du
Roi d’Efpagne eft trop modefte & trop éclairé, pour avoir Famour-propre
Idem.
de fe croire le feu l que la poflérité puijfe inferiré fu r fes tablettes. Ne peuton être gran d, fans être l’homme unique à qui ce titre foit réfervé ?
Toute l’Europe rend juftice à fa fageiîe, à fa prudence, à fes talens.
Mais les idées extrav ag an te s qu ’ on fubftime à fes v u e s
à fes principes ;
íes projets infames qu’on fuppofe qu’il devoit mettre à exécution j l’aiTociation de la vérité & de Fimpofture qu’on lui attribue ; ces fyftêmes
de tolérance & d’irréligion, font fi éloignés de fon caraétere , de fon
efprit & de fon cœ ur, que les motifs mêmes de fon éloge ne peuvent
qu’exciter fa jufte indignation. Le M. de Langle s’eil en quelque
lorte perfonifié dans l’Homme d’Etat qu’il a voulu calomnier. Vous
avez déjà vu qu’il affeftoit dans le corps de fon Ouvrage de rapprocher
&■ de confondre les rêveries de l’Alcorán & les Myfteres de notre fainte
Religion : qu’il confeilloit la deftruélion des Temples & le dépouille
ment des Eglifes. Il a cru fans doute ajouter à ia glo ire, en donnant
cette façon de penfer impie & facrilege, à un Miniitre également confommé dans Fart militaire & dans la Tcience du Gouvernement, à un
Politique profond, trop inftruit pour ne pas deviner les autres, mais
trop habile pour fe laifler pénétrer lui-même ; enfin, à un génie fage &
religieux, vigilant & a£lif, qui ne s’eft pas moins acquis de réputation
dans les Cours étrangères, qu’à la tête des Confeils de fon Souverain.
Voilà Fhomme que le M . de Langle ne craint pas d’aiTocier, pour
�ain fid ire,à ion extravagance, ¿k qu’il dégrade au point de le louer,
comme ayant adopté ion fyftême & fes impiétés.
Nous ne releverons point les irrévérences dont l’Auteur s eft rendu
coupable envers la perfonne même du Roi d’Efpagne. S’il convient que
ce Monarque ejl adoré, fa plume audacieufe fe permet des remarques Page
& des expreflions aufli indécentes qu’injurieufes à la Majefté Royale. édlt* 1
Auroit-il donc oublié que le Prince qui gouverne aujourd’hui l’Efpagne
avec tant de fagefle , formera , par les ieuls événemens de l'on regne ,
une époque mémorable dans les Faites de cette Monarchie ? Auroit-il
oublié cjue ce Prince eft un B o u rb o n -, que cet augufte nom eft devenu
aufli precieux à l’Efpagne , qu’il a toujours été cher à la France ? Le
D uc d’A n jo u , en montant fur le T rô n e, femble avoir tranfporté dans
ces climats cet amour v if & généreux que les François ont de tout
temps fait éclater pour les Defcendans de Clovis & de Saint Louis ? Les
Elpagnols ne fe font-ils pas fait une gloire de nous imiter ? N ’ont-ils pas
prodigué leur fortune & facrifié leur vie pour le petit-fils de Louis X IV ?
Tant il eft vrai que la deftinée des Bourbons eft d’être aimés de tous les
Peuples qui ont le bonheur de vivre fous leur empire.
L ’union entre la France
l’Efpagne doit être auiïi incliffoluble que
les liens du fang : elle eft aufli conforme aux intérêts réciproques des
deux Nations, qu’aux vœux conftans & finceres de leurs auguftes Sou
verains. Comment cette union fi naturelle & fi deiirable pourroit-elle
fubiîfter entre deux Peuples nombreux, dont l’un fe verrcit en butte
aux infultes de l’autre ? Le mépris provoquerait néceflairement la haine;
& l’Hiftoire ne fournit que trop d’exemples des terribles effets produits
par les antipathies & les rivalités nationales. Les guerres fanglantes qui
ont défoie l’Europe, ont dû leur commencement & leur prolongation
à ces funeftes fentimens. I l n’y a plus de Pyrénées, difoit Louis X IV .
Faut-il qu’un Ecrivain furieux vienne élever une barrière plus difficile à
franchir que les monts les plus efearpés ? Un Auteur qui tend à renouveller d anciens motifs de diviiion, ou à en faire naître de nouveaux, doit
etre puni comme un incendiaire. Les Nations, plus éclairées fur leurs
véritables intérêts S; fur les droits de l’humanité, femblent aujourd’hui fe
rapprocher naturellement, & vouloir faire entr’elles un pafte de frater
nité. Ne doit-on pas regarder comme une pefte publique, l’Ecrivain qui
maltraite aufli gratuitement quinjuftement, une grande Nation, voifine
de la France, ion alliée, & qui mérite à tant de titres fon eftime & fon
amitié ?
Si chaque Nation a fon cara& ere, fes mœurs & fes ufages , chaque
Nation a aufli fon honneur dont elle eft jaloufe, & fa Majefté qui doit
�14
être refpeftée. Eft-il rien de plus capable d’animer le zele de notre
M iniitere, que le traitement odieux que la Nation Efpagnole éprouve
dans l’écrit que nous venons de vous dénoncer ?
Elle n’a pas befoin d’être juilifiée des imputations ou des reproches
d’un Auteur dont la démence peut à peine fe concevoir : des écrivains
plus accrédités, plus fages, plus véridiques, lui ont d’avance rendu
juitice j & notre apologie iéroit fuperflue. Mais notre miniftere indigné
de voir un François s’abandonner à un tel excès de frénélie , croit
qu’il eit de ion devoir de défavouer, au nom de toute la France , les
outrages que le M. de Langle a eu Finfolence de fe permettre ; 8c
nous ne craindrons point de tracer ici le portrait tout - à - fait oppofé
d’un Peuple ii cruellement défiguré.
Les Eipagnols ont le maintien férieux ; la nature leur a donné un
air grave, qui, au premier abord, impofe à ceux qui ne le connoiffent pas : ils font froids, réfervés & peu communicatifs ; mais fufceptibles d’attachement, de liaifon & d’amitié ; 6c lorfqu’ils fe font une
fois familiarifés dans le commerce de la vie , ils quittent cette gravité
extérieure , 6c fe montrent animés, doux, fociables 6c pleins d’aménité.
Iis ont l’efprit noble & fublime , pénétrant 6c propre à toutes les
fciences : ils n’ont befoin que d’être encouragés au travail ; l’excès de
la fatigue 6c le manque de fuccès ne font pas capables de les rebuter.
Ardens dans leurs entreprifes , conilans à les pourfuivre , lents à fe
déterminer, mais fermes dans leurs délibérations , fages 6c patiens dans
l’adveriîté , le péril n’a rien qui les étonne ; & le fang-froid du vrai
courage accompagne toujours, leur intrépidité.
Généreux 6c magnifiques, délicats fur le point d’honneur , exafts à
tenir leur parole , même contre leurs propres intérêts, ils donnent à
toutes les Nations l’exemple de la probité la plus fcrupuleufe. En gé
néral les Efpagnols ont de grandes vertus & quelques défauts, commetous les autres Peuples. Quelle Nation ofera fe vanter de n’avodr au
cune des foibleiTes attachées à l’humanité ?
Nous devions ce genre de réparation à un Peuple notre ami 6c notre
allié. Mais après avoir fatisfait à cette obligation , nous devons nous
occuper de la condamnation d’un ouvrage aufli fcandaleux. En moins
d’une année , le V oyage en Efpagne a été imprimé trois fois fous deux
titres différens ; & la troifieme édition eft déjà prefque épuifée. Les
impoftures les plus groiïïeres , à force d’être répétées 6c répandues ,
acquièrent enfin une forte de confiftance : elles produifent infenfiblement une impreffion confufe 6c générale -, 6c la plaie n’eft jamais par
faitement cicatrifée.
La
�La flétriffure la plus éclatante ne fuifit pas pour reparer un fcandale
déjà trop multiplié. Le M. de Langle a pris à tâche de calomnier les
Nations , d’attaquer les Gouvem em ens, cl’infulter la Religion , de dé
grader la Providence , d’anéantir la Divinité , s’il étoit poffible , en la
peignant comme complice de tous les défordres des paillons humaines.
Son ouvrage doit fans doute être jetté dans les flammes avec tout
l’appareil de l’infamie qu’il mérite ; c’eft peut-être lui faire trop d’hon
neur que de le regarder comme dangereux. Mais l’Auteur avoit prévu
le fort qui le m enaçoit, & l’annonçoit avec fatisfaélion. Mon ouvrage
fâremetit fera réduit en cendres, dit-il, tant m ieux, tant mieux , mille
fo is tant mieux , cela porte bonheur ; falut aux ouvrages qiion brûle , le
Public aime les livres brûlés.
Cette joie faélice & immodérée n’eft qu’un épanchement de l’amourpropre ; ces exclamations redoublées font le cri de l’orgueil & de la
préfomption ; les fentimens qu’il décele annoncent une ame vouée à
l’ignominie. Eft-il un des Cyniques de l’antiquité qui fe foit fait un
plaifir de provoquer ainfi la condamnation ? Et le M. de Langle
ofe'appeller fur fa tête la cenfure publique , il ne craint pas de s’en
faire un triomphe ! Mais il fera de courte durée. Nous la requerrerons
cette condamnation : 8c pour la rendre plus folemnelle, nous y ajou
terons les qualifications qui conviennent à l’Auteur & à fon ôuvrage.
Nous ferons plus encore, nous' requerrerons que le procès foit fait à
celui qui n’a pas craint de mettre fon nom au frontifpice de la troifieme édition ; & alors la vanité qu’il efpere tirer du goût du Public
pour les ouvrages brûlés, fera tempérée par la honte de refter dans
les liens d’un décret toujours fubfiftant.
On nous dira peut-être qu’il y a du danger à décréter un A uteur,
parce que fon nom fe trouve à la tête d’un imprimé ; un étranger ne
peut-il pas avoir emprunté ce nom pour donner le change aux Magiftrats? C ’eft un malheur fans doute , mais un malheur facile à réparer,
oi le M. de Langle n’eft pas l’Auteur du Voyage en E fp ag n e, qu’il
fe préfente à la Juftice , qu’il fe hâte de défavouer un ouvrage , qui
ne fait honneur ni à fa plume , ni à fon efprit, ni à fes m œurs, ni
à fa qualité.
Nous finirons comme l’Auteur lui-même a fini fon premier volume.
11 s’écrie -.Heureux qui n a jamais lu ; la lecture efl un poifon lent qui
tUe le génie, monte à la tête , & laiffe dans le cerveau une efpece de fédiment qul empêche de fentir & de penfer.
Le M. de Langle a voulu cara&érifer fon propre ouvrage. Quand
on en a pris lefture , on eft forcé de dire avec lui : Heureux qui n a
.
Page 13,!
¿¿it.ac vol,|
Pag. a n ;
édlUL- v,1‘
�i6
jamais lu une produ&ion impie , blarphêmatoire & facrilége. Elle ne
pourroit infpirer qu’un fentiment d’horreur .& de mépris, iî l’impreiîion
que produit l’audace & la licence effrénée de l’Auteur n’étoit modérée
par un mouvement de pitié pour l’aliénation totale de Ton efprit.
Nous laiffons à la Cour les trois éditions de l’imprimé dont nous
venons de rendre compte , avec les concluions par écrit que nous
avons prifes à ce fujet.
Et fe font les Gens du Roi retirés , après avoir laiffé fur le Bureau
lefdits trois Exemplaires & les concluions par eux prifes par écrit
fur iceux.
Eux retirés;
V u trois Imprimés : le premier en un petit volume /7 2 -18 , en 2 8 0
p ag es, fans noms d’Auteur ni d’imprimeur, ayant pour titre : Voyage
de Figaro en Efpagne , avec cette épigraphe : currente rota. A SaintM a lo , 1J8 4 . Le iecond dans le format d’un in-8°. de 88 pages, ayant
•pour titre : Voyage de Figaro en Efpagiie , fans noms d’Auteur ni d’Im.prim eur; à S ¿ville, i y S5 . Le troiiieme en deux tomes in - 1 2 , dont le
premier de 223 pages, le fécond de 209 pages , l’un & l’autre ayant
pour titre : Voyage en Efpagne , par M . le Marquis de Langle, imprimé
à Neujchatel, de TImprimerie de Fauche , fils aîné, & Compagnie, i y 85.
Concluions du Procureur Général du Roi. Oui le rapport de M c Ga
briel Tandeau , Confeiller. L a matiere' mife en délibération.
L A C O U R ordonne que lefdits trojs Imprimés feront lacérés &
brûlés en la Cour du Palais, au pied du grand efcalier d’ic e lu i, par
l’Exécuteur de la Hautc-Juftice , comme impies , facrileges , blasphé
matoires , deftrufteurs des Moeurs & de la Religion , injurieux & ca
lomnieux envers la Nation Efpagnole & fon Gouvernement, féditieux
& propres à foulever les efprits contre l’autorité légitime & les Dépofitaires de ladite autorité, enfin tendans à porter atteinte à l’union
indiffoluble qui doit régner entre la France &: l’Efpagne : enjoint h
tous ceux qui en ont des Exemplaires, de les apporter au Greffe de la
Cour , pour y être fupprimés : fait très-expreffes inhibitions & défenfes
à tous Libraires, Imprimeurs , d’imprimer, vendre & débiter lefdits
Livres , & à tous Colporteurs, Diftributeurs & autres > de les colporter
ou diilribuer, à peine d’être pourfuivis extraordinairement, Si punis
�27
fuivant la rigueur des Ordonnances : ordonne qu’à la requête du Pro
cureur Général du R o i , il fera informé , pardevant le Confeiller-Rapporteur , que l a Cour com m et, pour les témoins qui fe trouveront à
P aris, & pardevant les Lieutenans Criminels des Bailliages & Sénéchauff ees du reffort, pour les témoins qui font hors de ladite Ville ,
contre les Auteurs, Imprimeurs ou Diftributeurs. defdits L ivres, pour
les informations faites , rapportées & communiquées au Procureur
Général du R o i , être par lui requis & par la Cour ordonné ce qu’il
appartiendra ; ordonne à cet effet qu’un Exemplaire defdits Imprimés
fera dépofé au Greffe de la C o u r, pour fervir à l’inftructio n du procès.
Ordonne en outre que le préfent Arrêt fera imprimé, publié & affiché
par-tout où befoin fera, & copies collationnées envoyées aux Bailliages
& Sénéchauffées du reffort, pour y être lu , publié & regiftré enjoint
aux Subftituts du Procureur Général du Roi efdits Sièges d’y tenir la
mai n, & d’en certifier la Cour dans le mois. Fait en Parlem ent, les
Grand Chambre & Tournelle affemblées, le fept Février mil fept cent
quatre-vingt-fix. Collationné L u t t o n .
'Signé L E B R E T .
E t le mercredi quinze Février mil fept cent quatre-vingt-f îx , lefdits trois
Imprimés ci-deffus énoncés , ayant pour titre' les deux premiers , V oyage
de Figaro en Efpagne; & le troif ieme , V oyage e n Efpagne, par M. le
Marquis de L an gle, ont été lacérés & brûlés par l’Exécuteur de la HauteJuftice , au pied du grand efcalier du Palais , en préfencè de moi EtienneTimoleon Yfabeau , E cu yer, l’un des Greffiers de la Grand"Chambre 3
affifé de deux Huiffiers de la Cour.
Signé Y S A B E A U .
■
■'
-
-
...... 1
---------- --
■
------
A P a r is . Chez P. G . S im o n & N . H. N y o n , Imprimeurs du Parlement,
rue Mignon, 1786
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Arrêt de la Cour de Parlement. 1786]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lebret
Ysabeau
Subject
The topic of the resource
censure
recueil d'impiétés
blasphème
atteintes aux bonnes mœurs
livres interdits
Description
An account of the resource
Titre complet : Arrêt de la Cour de Parlement, qui condamne trois Imprimés : le premier en un petit volume in-18, en 280 pages, fans noms d'auteur ni d'imprimeur, ayant pour titre : Voyage de Figaro en Espagne, avec cette épigraphe : currente rotâ ; à Saint-Malo, 1784. Le second, dans le format d'un in-8°, de 88 pages, ayant pour titre : Voyage de Figaro en Espagne ; fans noms d'auteur ni d'imprimeur ; à Séville, 1785. Le troisieme, en deux tomes in-12, dont le premier de 223 pages, le second de 209 pages, l'un et l'autre ayant pour titre : Voyage en Espagne, par monsieur le Marquis de Langle, imprimé à Neufchatel, de l'imprimerie de Fauche, fils aîné, et compagnie, 1785, à être lacérés et brûlés par l'exécuteur de la Haute-Justice.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez P. G. Simon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1786
1784-1786
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0701
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
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Domaine public
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atteintes aux bonnes mœurs
blasphème
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livres interdits
recueil d'impiétés
-
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Text
ME M O I R E
S IG N I F I É
PO UR
le Sieur M O R I N , D o cteur de Sorbonne ,
Chanoine Régulier Prémontré , & Cure de Saint
'
André.
CO NTRE
le Sieur L A F O R I E , Religieux
dans ladite Abbaye.
C'est avec bien de l’étonnement que l e fieur
M o rin a vu le fieur Laforie, fon Confrere,
vouloir fe lervir de la R é fignation de f a
cure qu'il avoit faite en maladie il y
' a près de deux a n s , pour l'inquiéter dans
les fonctions, & qu’il s’obftine de vouloir l’y troubler
& le priver même , s’il eft poffible , de fon état. C ar
c’eft ainfi que le fieur Laforie tourne contre fon bien
faiteur même les traits les plus marqués de fa bien
veillance. O r pour lui montrer combien il s’abufe , il
fuffira de lui faire fentir tout l’odieux d’ un tel procé
dé , &. combien il couvre d’opprobres celui qui a la
'A
�V
l i c i t é de s’y laiiïèr aller , car la honte d ’une telle
démarche iufîîc toute feule pour en prouver Finjuftice.
Ce n’eft cependant pas le feul moyen qui nous reíle,
& quelquç fu ffifan t, quelqu’efïïcace que foit le lan
gage de l’honneur 6c du fentiment dans les ames bien
n é es, on ne doit pas négliger la voix de la loi qui
doit forcer ceux mêmes qui auroient dépofé le voile
de la pudeur.
¡mîere Pâme.
L e fieur M o rin penie que le iieur Laforie eit rem
pli de ces fentiments de droiture , de co u rage, 6c
fur-tout de reconnoiilànce, qui caraâérifent l’homme
d ’honneur, & qu’il s’eit efforcé lui-méme de iem e r,
de cultiver 6c de faire croître dans Famé du fieur L a fo
rie tout le temps qu’il a été ion éleve. O u i ces leçons
font trop récentes , 6c le foin que le iieur M o rin a
pris pour les graver profondément dans le cœur du
jieur L a fo r ie , lui répondent que de tels procédés ne
font point de lui ; ou du moins que ion cœur défavoue fa main qui s’y prête &: qui les ligne. C ’eft à
une forte de nouveau guide , qui Fa fé d u it , qu’il en
faut rapporter la noirceur, 6c fur lequel doit en tom
ber toute la honte. N o u s trouvons une forte de con*
iolation à détourner fur un étranger une bailèilè 6c
line infamie dont notre difciple n’eit pas coupable.
N ’attribuons donc pas à notre éleve d’avoir man
qué librement & de propos délibéré à la droiture 6c
h. la fidélité de fa parole 6c de i*cs promeifes. L e lieur
M o r.n , quoiqu’ environné de l’image de la m o r t , quoi
que frappé par le danger de ia maladie , en réiignant
fa Cure au fieur L a fo r ie , a l’attention de lui faire re
marquer que c’eft l’idée d’une mort prochaine qui cil
�3
,
■ •# > *
le mobile tout feul .de fa réfignation , & qu’ elle ne
doit avoir aucun effet i l , contre l'on attente, il revient
en convalelcence. L e iieur L a fo r ie , parfaitement initruit des dilpohtions du iieur M o rin , lui ailùre qu’il
ne lui donnera aucune inquiétude iur cette réfignation.
O r d’agir enfuite contre cette parole, de violer dans
une choie auiïi lerieuie la fidélité de fa promeiïè , fuppoleroit qu’on a voulu employer la fraude & le menfonge pour tromper un mourant ÔC le faire tomber
dans un piège. Quelle perfidie plus révoltante ! je le
répere, le iieur Laforie en eft incapable , & il s’élève
du fond de Ion cœur un fentiment qui réclame con
tre cette imputation.
O n dira peut-être que dans le temps où la chofe
fe p a ifo it, & que le iieur Laforie recevoit de la partde ion bienfaiteur le témoignage le plus inconteflable
de fa bienveillance , il avoit effectivement dans l'on
cœur les fentiments dont il rendoit témoignage par fa
b ou ch e; mais que dans la fu ite, preile par la cupidi
t é , il aura manqué de courage & ie lera laiiTé aller à
la tentation de dépouiller fon bienfaiteur pour fe re
vêtir lui-même. M ais fi la chofe étoit a in fi,il faudroit
donc convenir que l’image du bienfait qui fe préfentoit naturellement, joint à l’idée de manquer à fa pa
role , n’auroient point été des moyens aifez puiiîàrits
pour fe foutenir contre une tentation vile & méprifable. O r quelle lâcheté! cette foib leiîè, cette défe&ion
de cœur doit être imputée à l’étranger qui l’a furpris;
car fera-t-on coupable d’une faute à laquelle on a été
entraîné & que Io n a defavoué aufli-tôt ? L e lieur
Laforie a defavoué verbalement à ceux qui lui en ont
fait le reproche , ce qu’on lui a fait faire juridiqueA 2.
�^ v ''
4*
m ent, &: a dévoilé le coupable, qui a eu ailez de front
pour en convenir lui-même.
L ’ingratitude encore, ce caraftere des ames v ile s ,
pourron-elle habiter dans une ame bien née ? & quelle
ingratitüde plus inioutenabie que celle de vouloir dé
pouiller ion Conirere ,. fon ami , ion bienfaiteur, de
io n é t a t , de íes fo n d io n s, de fa place, 6c de changer
iès bienfaits en Pinftrument de ia perte ; la nature ré
voltée s ’oppofe à cette démarche; elle iufïit toute feu
le aux animaux les plus féroces , pour leur apprendre
.qu’il faut répondre par la reconnoiiiance aux bienfaits
.que, l’on reçoit. Quel cil donc celui qui a d i t , allez,
je vous l’ordonne, n’ écoutez point cette voix intérieur
re de la reconnoiiîance <5c de la gratitude ; quelqu’im:re pofl-e'-.périeufe qu’elle f o i t , il faut paiîèr o u tre ; venez, je
à^i’Autei Je vous revêtirai moi-môme , je vous prendrai par la
main , je vous conduirai à l’A u t e l, 6c en face du
T r è s - H a u t , je vous aiderai à fouler au pied l’humanité, l’honneur &c les fentiments qui vous gênent. L a
Province a confervé encore ailez l'ordre .& les régies
.de la nature, pour ne pas produire de tels hommes.
L a Capitale n’a pas été il heureuie ; trop lu jette à
fournir des exemples des deux extremes , de la plus
rare vertu ¿k des plus étonnants vices, de la grandeur
la plus Tublime & de la baífeííc la plus profonde. O n
.a vu autrefois dans ion fein s’élever une pareille quellio n au grand fcandale de tous les gens de bien : rap
portons-en le fait avec toutes les iuites , puiiqu’il n’a
été que l’image d,e celui .que nous traitons , &c qu’ il
doit montrer quelle en doit être la réuifite. O n lent
■bien que c’ efb l'affaire d’ un nommé Semelle que je
rappelle; il étoit Vicaire du lieux B e n o ît, Curé des
M*
�5
Saints Innocents à Paris , & le fieur Benoît lui avoit
réfigné fa Cure en maladie, avec une explication ver
bale que la réiignation ne devoit fortir aucun e ffe t,
il le lieur Benoît revenoit en convalefcence ; néan
moins ledit Sem elle, après la convalefcence du fieur
B e n o î t , voulût uier de la réiignation pour dépouiller
ion bienfaiteur: ( & il faut remarquer que la voie du
regrès n’avoit pas encore acquis cette certitude fixe &
conlhnte quelle obtint alors par une régie qui fut
établie à cette occafion comme une loi pour tout le
R o y a u m e .) Mais le procédé dudit Semelle révolta tous
les honnêtes gens, & l’affaire fut portée au Tribunal
de Sa M ajefié Henri I I , il y eut A rrê t du Confeil
de Sa Majefté du 29 A v r il 1 5 5 8 , par lequel , fans
avoir égard aux offres de S em elle, qui àccordoit ait
iieur Benoît la jouiflance des fruits des deux Cures
des Innocents de Paris & de P o u illy , Diocèfe de Sens*
qu’il lui avoit réfignées; ledit Semelle fut condamné à
être contraint par emprifonnement de fa perfonne à fe
départir & annuller tout ce qu’ il avoit fait en conle*
quence de la réiignation ; & fut ajouté que cet A rrê t
i e r v i r o i t .d e loi inviolable en cas femblables p a rto u t,
le Royaum e. Cefl: ainii que le rapporte le fieu rF evret
dans ion Traité de F A b u s , & 1*Auteur des Définitions
du D roit C a n o n , ainfi que les autres Juriiconfultes,
qui ne rappellent ce fait qu’avec une forte d’indigna
tion contre ledit Sem elle, & avec des témoignages de
reconnoiilance envers Henri I I , qui fixainviolablement
la régie.
Ce «raml R o i , clic l’A utcu r déjà cité des D éfin i
tions du D roit C a n o n , ce grand R o i ma avoit uni en
fa veu r de Jè s Peuples la piété avec la MajeJtc R oyale,
�eut horreur de cette lâche action ; de maniéré q u il vou
lut que VArrêt célèbre qui fu t rendu Ju r cette affaire fû t
inféré dans les Regijlres de toutes les Cours Jouveraines
de fo n Royaume , afin de fervir de l o i , de régie & de
mefure à tous fes Sujets dans des rencontres de cette
qualité : de mamere que Vingratitude de ce lâche D o mejlique efl marquée dans la pojlérité avec des carac
tères honteux , fi ce grand Prince crut que cette action
étoit trop extraordinaire pour ne pas employer fe s fo in s
à couper chemin aux fuites qui pouvoient ¿enfuivre.
D e tout ceci concluons que la perfidie , la lâche
té
l’ingratitude de Semelle ayant fuffi pour faire
rendre l’A rrê t qui le condamna a la prifon , & por
ter la loi contre les Réiignataires ingrats qui v o u droient fe fervir d’une réiignation faite en m aladie,
doit fufïire à plus forte raifon au fieur Laforie pour
lui faire connoître l’injufîice de fon procédé.
M ais avançons , &c pour oppofcr des moyens in*
vincibles aux iuggeftions étrangères d’un Confeillcr qui
le iéduit , montrons les régies, ou plutôt faifons-en
l’application. *
s«conde Parti«:
Ici nous ne parlerons point nous-m êm es, nous nous
fommes adrcifés à celui que les Ouvrages & la re
nommée nous ont déiigné comme le Jurifconfulte le
plus diftingué dans les matières bénéficiais ; c’cil
fa réponfe que nous allons produire au iieur Laforie.
* C e m auvais C o n fe illc r s’étant recon n u dans ce M é m o ir e , a crié
qu’ on le difFamoit , en d éto urnan t fur lui là honte qui to m b ero it
fur le fieur L a fo r ie , mais on lui dit de ne pas fe d é m a f q u e r , & que
le P u b lic ign o rant qui il c il , il ne fera pas diffamé.
�7
Sf/
C O N S U L T E
D E
M.
P I A L E S ,
A v o c a t au Parlement.
Ob
ser vatio n s sur une d em a n d e
en
regrés
formée par un Religieux contre fo u Réfignataire.
■\
O n demande , i°. fi les Curés Réguliers qui ont . Première q«e<
réfigné en m alad ie, font en d r o it , ainfi que les u°n*
Séculiers, d’exercer le regrès, lorfqu’ils iont revenus
.en cÎTnvaleicence.
Cette queftion n’efi: pas fufceptible de la plus lé
gère difficulté , la premiere loi qui a établi le regrès
metu m o in s , eit générale ôt fans aucune exception.
E lle autoriie tous ceux qui ont réfigné, étant attaqués
de quelque maladie ou infirmité lérieuiè , à rentrer
dans leurs Bénéfices lorfqu’ils iont revenus en convalefcence, & qu’ils en ont été dépoiledés par leurs
lléfignataires. E lle les autoriie à plus forte raifon à
fc maintenir dans leur poiïèifion lorfqu’ ils n’ont point
été dépoiTédés par leurs Réfignataires ; c’eft-à-dire ,
qu’ils iont bien fondés à empêcher que ces Réfigna
taires ne fe mettent en poifeifion des Bénéfices qui
leur ont été réfignés. O r il efi: de principe confiant
qu’il ne faut point diftinguet* là où la loi ne diftingue point. L e Légiilateur n’a point dit que les Bénéficiers Séculiers qui auroient réiigné en maladie
-pourroient demander à être réintégrés dans leurs B é
néfices lorfqu’ils feroient revenus en convalefcence. Il
a dit en général que les Bénéficiera qui auroient ré
fignés in infirmante conflituù , auroient la faculté
d’exercer le regrès. L a diipofition efi: générale, elle em-
�,8
braiTe les Bénéficiera Réguliers auÎïi bien que les Sé
culiers. Fo u r prétendre que les Réguliers en iont ex
ceptés , il faudrait rapporter quelque d ifpo fu ion , ioit
de la loi prim itive, ioit de q uelqu’ autre poftérieure,
qui eut fait cette diftin&ion. O r il n’y en a point,
il ne peut pas même y en avoir.
E n effet, quel eft le m otif de la loi , ou qui a
fait introduire le regrès au profit des Réiignants ,
metu mords ? I l eft indubitable que les Réiignants en
maladie n’ ont été admis à exercer le regrès
par la confidération qu’il n’eft point d’a&e plus im>ortant, & qui confequemment exige une plus grande
iberté , qu’ une réiignation , puifqu’elle tend à dé
pouiller le Rélignant de ion état, de fa fortune
de fes fondions. O r rien n’ éft moins libre qu’un
a&e qui n’ eft fait que par une impreifion de la crainte
la plus vive 6c la plus capable de contraindre la
volo n té, ou d’ôter la liberté, telle qu’eft celle d’une
mort préfente ou très-prochaine : le Légiilatcur a
voulu en conféquence que toute réfignation qui auroit été faite par un M a la d e , fût réputée condition
nelle, ou qu’elle ne put recevoir Ion exécution qu’au
tant que le Réiignant , revenu en èonvaleicence , y
perfifteroit ou la confirm croit, foit expreflement, ioit
tacitement ; de forte cju’il en eft du Rélignant en
maladie comme d’ un l e f t a t e u r , qui a la faculté d’a
néantir Ion Tcftamcnt.
O r ce motif: principal & fondamental de la loi ne
s’ applique pas moins aux Curés & autres Bénéficiera
Réguliers qu’aux Curés &: autres Bénéficiera Sécu
liers j & il eft de régie que ubi eadem ratio , idem
{
ju s.
A u fli
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SS3
A u ifi aucun Canonifle, ni autre A u t e u r , ne s’eflril jamais avifé de prétendre que les Béncficiers R é g u
liers étoient exceptés* de la loi du regres ; 6c dans l\ifage les uns 6c les autres y ont été également adm is,
fans aucune diftin&ion, en forte que les Séculiers n’onc
point à cet égard plus davantage que les Réguliers ;
il n eft donc pas douteux que M . M o rin , Chanoine
R égu lier de l’ Ordre de Prémontré , qui conftamment
a réiigné fa Cure , in infimùtate cohfiitutus , eft bien
fondé à demander d’être maintenu en pofïèfÎion 6c
jouiiïànce de là Cure , puifque l’on ne peut conteiler,
& que dans le fait l’on ne contefte p o in t, qu’il ne
:foit convaleicent , 6c même parfaitement guéri de
i a maladie dont il étoit attaqué lorfqu’il a confenti
la procuration ad rcjignandum en faveur d’un de les
Confreres.
O n demande en fécond lieu fi une révocation de
la réfignation , par le minillere d’un H uifher , ne tIÜ
lie pas les mains du P a p e , lorfqu’elle eft faite avant
que la réfignation foit admiiè à Rom e.
Dans la grande rigueur des régies , lorfqu’un Bé
néficier , foit S é c u lie r, foit Régulier , a confenti en
état de fanté une procuration ad rejignandum , 6c
qu’enfuite il veut empêcher que cette procuration n’aye
fon e ffet, il doit en faire la révocation par le miniitere d’un Notaire royal apoilolique , 6c faire notifier
cet a&e de révocation à Ion Rélignataire avant que
le C o u r ie r, porteur de ladite procuration , n’arrive
Rom e. Il doit de plus faire inlinuer au Greffe des
Infmuatipns cccléiiaftiques l’a&e de révocation , enfembtè' la notification ou lignification qui en a été
faite au Rélignataire. M ais l’obiervation rigoureufè
�JSâ
y
* ’
ïo
de toutes ces formes n’ efi: néceilaire que pour fe mettre
.entièrement à couvert de toute critique ; il n’y a
que deux chofes qui foient requifes ; l’une , que le
Réfignant ait révoqué ; l’autre , que la révocation
ait été fignifiée au Réfignataire ; encore faut-il obferver que tous les Auteurs ne lont pas d’accord fur la
fécondé. Des Auteurs tres-accrédités enfeignent qu’il
fuffit que la révocation foit faite avant l’ admiffion de
la réfignation, & qu’ il n’y a point de néceifité qu’elle
foit lignifiée au Réfignataire,
A v a n t l’Edit du mois de Décembre 1 6 9 1 , por
tant création des Offices de Notaires royaux apoftoliques , tous Huilfiers avoient qualité pour recevoir 6c
notifier , chacun dans leur diftriâ: , les a&es de ré
vocation des procurations ad rejignandu.ru. L a récep
tion & fignification de ces a£tcs ne leur a été ôtée
que pour attribuer des fondions aux nouveaux O ffi
ciers , ou pour faire vendre les Offices : or perfonne
n’ ignore que cet Edit eft burfal , & qu’il n’a reçu
d’exécution littérale dans prefque aucun Diocéfe , la
. plupart ayant acquis ces Offices : en contequence les
Cours n’ ont pas cru être aifujetties à fe conformer dans
leurs jugements à la difpoiition littérale de l’E d it ;
on a penlé qu’ en foi il é t o it , par exem ple, fort in. différent pour la validité d’ un acte de révocation d’ u
ne procuration ad vefignandum , que cette révoca
tion fut reçue par un Notaire .royal apoitolique, ou
par un limple Notaire r o y a l , ou par un Huillier ;
011 a penié encore que li un acte de révocation étoit
nul , pour avoir ère. reçu par 1111 limple N otaire ro' yal , ou par un H u ifiie r , cette nullité n’qxîh* que, re
lative q u à l’ intérêt pécuniaire. des Notaires royaux
�II
J.
apofloliques , & qu’ eux fèuls avoicnt qualité pour
s’en plaindre ; de forte que ladite nullité relative
n’empeche pas que Pa 61e ne ioit foncièrement valable
à l’effet d’annuller la procuration ad rejignandum ,
6c de lier les mains du Pape.
A u furplus , quand dans Pefpece l’a&e de révoca
tion de la procuration ad rejignandum ièroit abfolument n u l , pour avoir été reçu & notifié par un H u iffie r, le Réfignataire ne pourroit tirer aucun avan
tage de cette nullité, parce q u e, pour empêcher l’effet
d ’ une rélignation faite en maladie , il n’eil pas nécefiaire que le Réiignant révoque la procuration ad
rejignandum avant l’arrivée à R o m e du Courier por^
teur d’icelle ; il iiifRt que le Réiignant , revenu en
convalcfcence , déclare qu’ il entend conferver fon
Bénéfice , ou que la réfignation qu’il a faite en ma
ladie foit coniidérée comme non avenue , & ne
prodniie aucun effet. L e fieur M orin ayant réiîgné ,
in injinnitate conjlitutus , &: ayant de plus révoqué
la procuration ad rejignandum , avant ion admiflion
à R o m e , a donc deux moyens invincibles pour.écar
ter fon Réfignataire , & rendre inutiles toutes les
tentatives.
On demande , en troifieme lieu, fi le défaut d’Iniinuation dans le mois annulle la révocation de ma
niéré qu’ on ne puiilè pas dire qu’elle aie lié les mains
du lJ apc.
Cette queftion n’en cil point une, car tout le monde
fait que la n u l l i t é prononcée par l’ Edit des Infirma
tio n s, du mois de Décembre 1 6 9 1 , contre tous les
actes qui n’auroient point été inlinués dans le m o is,
n’clï auc purement comminatoire quant au délai d’ un
�JSéi
*
11
mois ; de forte qu’ il a été jugé cent fois , c’eft-à-dire ,
autant de fois que la queiHon s’eft préfcntée, qu’il
fuffit que la formalité de l’Infinuation Ibit remplie
avant la décifion de la çontcftation en dernier reiîôrt
jufques là le défaut d’Inimuation cft toujours répa|
rable.
jnatrîcmequef-. £ a quatrième queftion efl de favoir fi une Cure
|
régulière, dans les Fauxbourgs d’une V ille murée ôc
!
.
capitale de la P ro v in c e , ne doit pas exiger des G ra!
des , ainfi que les autres Cures des Fauxbourgs de
la même V i l l e , qui en ont toujours exigé.
Cette queftion n’eil pas plus iufceptible de diffi
culté que la précédente ; il eit vrai que l’on a douté
anciennement fi les Cures fituées dans les Fauxbourgs
des Villes murées étoient afiè£lées à des G r a d u é s ;
mais il y a long-temps que le doute eft le v é , ¿k qu’il
a été jugé par grand nombre d’A rrêts que les C u
rés des Fauxbourgs ne font pas moins aifujettis que
ceux de l’intérieur des V illes à la l o i , qui veut que
les Cures des Villes murées ne.loient poflédées que
par des Gradués , au moins Maîtres - e s-A rts. Il n’y
r
a plus depuis long-temps de partage de fèntiments
iur ce point : tous les Canoniftes 6c Jurifconfultes
attellent unanimement que pour être capable de poiieder une Cure de Fauxbourgs , il faut être gradué.
O n convient que iuivant la Jurifprudence moderne
i! „ ’cil jlas nécefîaire d’avoir le G rade temporc provifiom s , ck qu’il fufïït de l’avoir obtenu avant la prife
de poiTeifion. D ’où il rélulte qu’une proviiion fur rélignation peut être valab le, quoique le Réiignataire ne
ioit point G ra d u é , 6c qu’il lui iufht d’obtenir le
Grade , avant de iè mettre en poilêilion de la Cure,
�M ais comme le Réfignataire du fieur M o rin n’avoic
^ VM
aucun degré lorfqu’il a entrepris de fe mettre en
poiîeifion de la Cure dont il s’a g it , ion Réfignanc
a été bien fondé à s’oppoicr à cette entrepriié par
cette raifon , indépendamment des autres précédentes.
L a cinquième queilion iè réduit à demander fi le, c; nquieme qujj
défaut de Grad.es dans le Réfignataire n’eiï pas un tlon‘
défaut eiïèntiel qui lui ôte tout droit au Bénéfice Cure
d ’une V ille murée , de maniéré qu’il n’eil plus à temps
après fa prife de poiïeiïion de prendre des Grades ?
L a réponfe à cette difficulté eit renfermée dans la
précédente. Il fuffira d’ajouter pour plus grand cçlairciilement qu’ un pourvu de Cure de V ille murée, qui
n’a aucui) G rade, peut indubitablement être évincé
par un dévolutaire ; cependant ii le poiTeiieur de Cure
non Gradué obtenoit un degré valable avant que d’être
attaqué par un dévolutaire, celui-ci feroit déclaré non
r e c e V a b l e . Mais il l’e roit inutile d’infiftcr fur cette q u e f
tion ainii que fur la précédente , parce que le fieur
M o rin n’a pas befoin , pour écarter l'on Réfignataire,
du moyen réiultant du début de degrés.
O n demande de-plus f i la fituation de PEglife pa- Sixiemequeflio
roiiiiale dans une Jurifdi&ion particulière à l’A b b aye
& hors de la Banlieue de la V ille , empêche que la
Cure ne foit également ailujcttie aux Grades , quoique
les Paroiiuens foient dans les Lauxbourgs de la V ille
murée ?
Pour la réfolution de cette q u eilion, il fufïït. d’obferver que ce n’eit pas à eau fe de la fituation d ’une
-Eglife paroiifiale, mais de la qualité de H abitants,
q u ’une Cure cil a i l l é e à des Gradués. Pour cette
affectation il liiffit que les Paroiiûens ioicnt habitants
�"
14
de Villes ou des Fauxbourgs en dépendants. Ces H a
bitants font préiumés de droit être plus civilités, plus .
inftruits , plus intelligents , & par cette railon il leur'
faut un Pafteur plus éclairé , plus capable , & c . d’où
il luit que la Cure dont il s’agit doit être affetlée à
un Gradué. M ais on le répété, cette queftion eft en
core fuperflue dans la conteftation qui s’eft élevée entre
le lieur M o rin 6c fon Rélignataire.
Il en eft de même de la queftion fuivante propofée en ces termes : fi la maxime de R e b u f, dans
la Pratique B é n é fk ia le , que le regrès doit être favo
rable lorfqu’il s’agit d’un Rélignataire moins capa
ble , doit être luivie dans l’eipece préfente où le l î é fignant eft Docteur de S o rb o n n e , & le Rélignataire
n’a aucun Grade (k n ’a fait preique aucune étude ?
L e regrès eft toujours traité favorablement, lorfque
la réfignation a été faite mctn niortis, 6c que le R c iignant eft revenu en conva'eicence. Mais dans l ’efpéce prélente , où le Réfignant eft Doêleur 6c le R é
lignataire fans degrés 6c fans preique aucune étude,
il mérite encore plus de faveur. Cependant ce n’eft la
qu’une fimple circonftance, 011 une conlidération de
faveur plutôt qu’un moyen rigoureux de droit.
A ces obfcrvations il faut ajouter que quand le
ficur M o rin rélignant, le feroit réiervé une penfion
iur fa Cure , il n’en fèroit pas moins en droit d’exer
cer le regrès metu niortis, c’eft ce qui a été jugé par
plufieurs A r r ê t s , rapportés dans le Journal des A u
diences 6c dans les autres Recueuils. On n’examine
point ii le Rélignant a de quoi vivre par d’autres B é
néfices , par des penlions ou un revenu patrimonial,
mais uniquement s’il étoit malade , lorfqu’il a réligné
�I1
& s’ il eft actuellement convalefcent. D e - là il réfulte
que quoiqu’un Religieux Curé aye toujours de quoi
vivre , quoiqu’il aye réfigné fans réferve de penfion ,
cela n’empêche pas qu’il n’aye la faculté d’exercer le
regrès.
L e Confeil fouffign é, qui a pris lecture des obf e r
vations ci-deffus , eftime que les réponfes aux ques
tions propofées font puifées dans les vrais principes
du Droit & de la Jurifprudence.
Délibéré à Paris le 1 1 Décembre 1 7 7 1 .
Signé
-
Piales.
L a conclufion que l'on doit tirer de tout ceci, c e' ft
que le fieur Laforie a entrepris une affaire de la même
efpece que celle du fameux Sem elle, dont la mémoire
ne le tranfmet à la poftérité depuis plufieurs fiécles
qu’avec des caracteres honteux. Affaire qui par de nou
velles circonftances a ici quelque chofe encore de plus
odieux & de plus contraire aux régies ; digne conféquemment d’un fort encore plus funefte.
L
A
De
l ’im p rim erie
e s c u r e
, Procureur.
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
«le P i e r r e V I A L L A N E S , Im p rim eu r des
R o i , p rès l' ancien M arche au u le d . 1 7 7 2
D om aines
du
^
�
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Morin. 1772]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pialès
Lescure
Subject
The topic of the resource
résignations
droit canonique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire signifié pour le Sieur Morin, Docteur de Sorbonne, Chanoine Régulier Prémontré, et Curé de Saint André. Contre le Sieur Laforie, Religieux dans ladite Abbaye.
Table Godemel : Résignation : 1. les curés réguliers, qui ont résigné en maladie, ont un droit, ainsi que les séculiers, d’exercer le regret, lorsqu’ils sont revenus en convalescence.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1772
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0329
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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droit canonique
résignations