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D ’A U V E R G N E ,
M O N S I E U R
L E L IE U T E N A N T G É N É R A L CRIM INEL.
S u p p l i e humblement Jean-Baptifte G iraud, notaire royal,'
habitant de la ville de M ontaigut, accufé ;
M . le procureur du roi de la fénéchauffée d 'A u - >
ve rg n e, accufateur;
D ifant que la juftice, après avoir découvert un faux qui
peut étonner par fa nouveauté, s’occupe actuellement à en
c onnoître les auteurs.
A peine a-t-elle commencé fes pourfuites, que fes regards
fe font portés fur le fieur D efm aroux : des preuves écrites, &
de fon propre fait; des preuves teftimoniales, la voix publique,
fe font élevées tout-à-la-fois contre lui : auffi , quoiqu’il fût domi
cilié connu, père de huit enfans & officicier public (circo n s
C ontre
tances bien propres, en gén éral, à modérer les premiers coupsk
A
�'de là juftice)', il a été décrété de prife de corps ôc privé dé*
fa liberté.
Aujourd’hui le fieur Defm aroux, pour fe difculper, enfante ,
un fyftême abominable ; il ne craint pas de commettre un
fécond crime qui feul renferme tous les crimes enfemble. Dans
un mémoire qui vient de paroître, il s’efforce de prouver que la •
juftice s’eil méprife ; que le feul auteur du faux qu’on lui impute, ^
eft le fieur Giraud.
Ainfi le fieur G iraud, après avoir exercé avec honneur ,
pendant près de quarante ans, les fondions de notaire, fe
vo it obligé de defcendre'à une jüfti'fication : au lieu de; joilir
du repos auquel il avoit droit de prétendre, il voit déchirer
fa réputation, fa famille en alarmes, fon état fufpendu par un
décret d’ajournement perfonnel. Ce vieillard infortuné qui n’a
à,fe reprocher que d’avoir eu trop de confiance pour le'fièiir
Defm aroux, fuccomberoit, fans doute, au milieu de tant de
malheurs, sJil n’étoit raifuré par fog innocence.
Il faut qu’elle foit bien certaine, puifqu’il fe flatte de la
dém ontrer, quoiqu’il foit dans la pofition la plus rigoureufe,
oîi puiiTe fe trouver trn ¿cctifé’.-5Il a à combattre dans le fieur
JDefmaroux un adverfaire redoutable par des talens qui l'ont
déjà fait triompher de quelques accusations judiciaires ; qui
s'eft fait un crédit fur les'lieux, foit par une fortune rapide-'
nient acquife, foit parce qu’il a eu l’adreiTe de fe rendre dépoiîcaire des. titres & des fecrets des familles ( i ).
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J.
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^ ( i ) Defmaroux a eu l’adrefle de ne faire paroître qu’à la veille du
jugement un long mémoire ,' dans lequel lé fieur Giraud eft horrible
m ent''com prom is. Il a eu plus données pour concertei & écrire des
hnpoftures, co n tre'lc fieur ü ira u d , <jue celui-ci n’a eu de jours pout
�Âu-mois de feptembre 177 6 , le fieur Defmâroux engagea,
le fieur de Segonzat à lui vendre tout fon bien. L e 24 de ce
m ois, à dix heures du foir, le fieur Defmâroux propofa au
fieur Giraud de recevoir cette vente, en fa qualité de notaire^
le fieur Defmâroux l’avoit lui-m êm e rédigée, fous la forme
d’une donation, & la minute étoit écrite fur _deux feuilles ^
de la main du fieur Lougnon, fon clerc & fon beau-frère, ‘
L e fieur Giraud renvoya la perfe&ion de cet.a&e^u lendey
main; il en reçut la minute qui fut contre-fignée par le fieur
Charbonnier. Cet a£te étoit une donation , à la charge de
payer au fieur Rance & à ’ d’autres créanciers du fieur dè
Segonzat, la fomme de 10200 liv. 6c une penfion au fieur de
Segonzat de 800 liv.
On conçoit aifément que le fieur Giraud n'avoit qu’une
connoiflance imparfaite des difpofitions de cet a£te;.il lui fuffifoit de s’afTurer qu’elles avoient été arrêtées entre les parties ;
il n’avoit pas befoin de les approfondir.
Le fieur Giraud laifla cette minute au. pouyoir du fieur
Defmâroux qui le défira, pour la faire contrôler & infinuer^
conformément à l’ordonnance de 1731. C ’eft cette confiance
qui eft la fource de tous les maux du fieur Giraud ; elle n’a rien
les réfuter. Defmâroux a fait tous fes efforts pour ôter au fieur Giraud
& à fon défenfeur la connoiflance du mémoire. L a veille du jour où il
a été dîftribué, Lougnon monta la garde dans le cabinet du défenfeur
de D efm âroux, pour empêcher qü’il ne fût délivré un exemplaire cju
* mémoire au défenfeur du fieur Giraud. Ces petites reiTources, font bien
dignes d’unë caufe déplorable.
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de blâmable; elle h’eft'pâs exceiïive, fi-l’on fait attentïort
qu’elle eft ordinaire entre confrères. Il n’eft même pas rare de
voir des notaires confier des minutes a des juges, à des avocats,
& encore à d’autres perfonnes dont la probité eft connue, ou
dans lefquelles on fuppofe de la délicateffe, à raifon des fonc-^
tions qu’elles exercent.
Après que l’a£te fut contrôlé & infinué, Defmaroux en garda
pendant long-tem ps la minute. Dans cet intervalle, il pria le
fieur Giraud de lui figner une ou plufieurs expéditions : le fieur
Giraud avoit un caractère trop facile pour s’y refufer ; d’ail
leurs, il ne foupçonnoit point dans Defmaroux des vues cri
minelles.
Une grande partie des biens donnés, o u , pour mieux dire,
vendus, étoit dans la direde de M . le duc d’Orléans : le fieur
Salleneuve, fon fermier, demanda au fieur Defmaroux les
droits de lods. Defmâroux foutint qu’ils n’étoient pas dus,
attendu que l’a£te étoit conçu en forme de donation; il donna
en communication au fieur Salleneuve une expédition de l’a£te
conforme à la minute. L e fieur Salleneuve foutint que les lods
‘étoient dus ; & il faut obferver qu’il eut la précaution de
retenir une copie de l’expédition qui lui avoit été commu
niquée.
: D efm aroux, pour éluder la demande en paiement des lods
"dont il fe voyoit menacé, conçut un projet qui ne fe concilioit point avec fa probité, mais dont l’exécution ne l’effrayoit
point, parce qu’il le croyoit convenable à fes intérêts; il ima•gina de multiplier, à fon g ré , la forme de fon atte; de le faire
Jparoître nul aux yeux du fermier, lorfqu'il voudroit réclamer
‘ les lo d s, & de le montrer valable au fieur de Segonzat, s*ü
javifo it d^ réclamer fa fortune. •
•
�Ci)
r Pour parvenir à fon but, Defmâroux eut; 1’infîdéiité de ■
fouftraire une des feuilles de la minute; on veut,dire celle^du,
milieu. C ’étoit fur cette feuille qu’étôit écrite xette claufede
' l ’a&e qui contenoit la donation. L ’efprit & les termes de cette
daufe préfentoient une donation de biens préfens. Defmâroux
fit tranfcrire cette feuille par le fieur 'Lougnon , fon beaur-frère, avec une addition qui étoit aflez facile. Dans la feuille
tranfcrite, la donation étoit de tous biens préfens Ôc à venir.
Perfonrie n’ignore qu’une donation'de cette nature, faite autre
ment que par contrat de mariage, eft nulle. Cette fécondé
feuille fut intercalée & fubilituée à la première ; & il eft eflentiel de remarquer que Defmâroux eut foin de conferver la.
première qui contenoit la donation des biens préfens ; il devoit
faire ufage de cette feuille, en cas de befoin, contre le fieur,
de Segonzat.
; Peu de temps après, Defmâroux remit au fieur Giraud la
minute ainfi défigurée, & il fe donna bien de garde de l’inftruire
de fon infidélité. En cet état, Içs fieurs Salleneuve & Rance
ayant demandé chacun une expédition detl’a£te, le fieur Giraud
la leur délivra. Ces expéditions fe trouvèrent auifi altérées
que la minute que Defmâroux avoit remife au pouvoir du fieur
Giraud. C e lu i-ci tranfcrivoit & collationnoit les expéditions
fur la minute qu’il avoit, & qu’il crôyoit véritable; il ne foupçonnoit pas le changement qui y avoit été fait; enforte q u e,
fuivant les expéditions, la donation comprenoit les biens à
.venir.
.
Dans cet intervalle, Defmâroux fongea à tirer parti de la
fouftra&ion de la véritable feuille. Mais, quelque fécurité que
‘le menfonge puiffe afficher, il n’a jamais la même confiance
que la vérité, Definaroux craignoic d’entrer en difcuifion avec
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ie fieur Saïfenèûve £enrconféquence,’ il «fîhyâ dè feprocurer'iifl
titre^qui parut exclure toute a&ion de là part du fieur Salie?!
neuve , &-&’après leq u el, ce dernier n’eût pas. bfé même fe, :
montrer.
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- Defmâroux concerta une procédure clandeftine & fraudu-'
le u fe , entre lui 6c le fieur de Segonzat ; il fe fit aiïigner par \
lé fiie’ur de Segonzat, au bailliage de M ontâigut, par exploit!
dü 17 février 1777 , pour voir-prononcer là nullité de la?
donation. Defmâroux n’étoit pas de ces adverfaires qui cher
chent à prolonger les délais ; il ne lui fallo it, ni tem ps, ni
foins, pour repoufler une demande qui n’étoit qu’un jeu :
auifi , il s’empreiTa d'en reconnoître , en;apparence, la légiti-*
mité. Il laifla obtenir, le 4 mars 1777', avant l’expiration des:
délais de l’ordonnance, une fentence qui déclare la donation
nulle ( 1 ).
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L e fieur Salleneuve, qui ignoroit peut-être les manœuvres
de Defm âroux, mais qui au moins ne les auroit pas redoutées ^
quand il les auroit connues, le fit aflïgner, fous le nom de
M . le duc d’ O rléans, en paiement des lods, le 1 ? mars 1777.
Il eft eflentiel de remarquer les moyens de défenfes, qui furentoppofés par Defmâroux : on les expofe , d’après ce qu’il a dit
lui-même dansfon mémoire, ( page 10 ). II oppofa que la dona*
tion faite en fa faveur par le fieur de Segonzat, n’avoitpu , par
fa nature, donner ouverture aux droits de lods; qu’au furplus*
il ne pouvoit plus être queftion de ces droits, puifque'la dona*
tion avoit été déclarée nulle , par unefentence du bailliage de
J
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( 1 ) Suivant l’ordonnance de i 66 j ,. le fieur. de Segonzat n’auroit pji
obtenir une fentence que 27 jours après.Ton alïjgnation.
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'Montaigut,-fur Ie'fondemènt qu’ellè°comprenbit tous lés tien«
échus & à é ch o ir, préfens& à venir * du iieur de Segonzat.
L e fieur Defmaroux pourfuivit j au bailliage dé Montaigut ^
fur la demandé du fieur Salleneuve
3 le i2 àô û t 1 7 7 7 , i\
fit rendre, par défaut, une fenténce , par laquelle M / le dùci
d’Orléans fut débouté de fa demandé en paiement dés'droits?
d elo d s3 à la charge, par D efm aroux, d’affirmer & de fairè
affirmer par le fieur de S egon zat, que la donation du 24 fep~
iembre ty'jGëtoit fincère & quelle riàvoit pas été imaginée
pour frujlrer M. le duc d’ Orléans, dés droitsfeigneuriûux.
\
On voit que le fieur Defmaroux méditoit deux moyenÿ
contre le prince. Il difoit d’abord, que 1 a & e , comme dona
tion , n’avoit pas donné ouverture aux lods ; mais il entendoit
toujours foutenir, comme il avoit déja fait, quë cet a£te étoif
jriul ; d’où il réfultoit une conféquence plus certaine, que le^
lods n’étoientpas dus : dans fce moment > Defmaroux , n’étanü
pas pourfuivipar le fieur Salleneuve., ne veut pas compromettre'
ce dernier moyen concernant la nullité ; il s’en tient au premieri
Que d’abfurdités dans cette fenténce ! d’abord , il falloié
apprécier- l’ade enJlui-m êm e, & ce n’étoit pas Taffirm^tidrt
des parties qui pouvoit en déterminer la nâturë : en fécond
lièii'j il falloit approfondir le moyen de nullité ? foutenu par
le fieur de S egon zat, adopté par Defmaroux : car , fi l’a£të
étoit nul , l’affirmation'ordonnée devenoit au moins inutile^
O n voit donc que la fentence a été rendue dans les vues dé
Defmaroux ; elle le mettoit à portée d’efquiver la principale
Hifficulté; c’eft-à-dire, la nullité, dont Defmaroux entendoit
T a ir e un moyen de réferve, un moyen auxiliaire, au cas qué
Je prem itfiie réufsîtpas. N e feroit-ompàs tenté de croire qué
Defmaroux avoit fingulièrement influé fur les difpofitions Bè
là ftntence ?
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r M ais; ce qui confirme cette idée, c’elHa manière dont cette
fentence a été exécutée. En effet, Defmaroux fit venir à l ’au
dience le fieur ;de Segonzat, cette machine, qui n’a jamais eu
^autres mouvemens, que ceux que lui a donné Defmaroux;
il avoit prévenu le fieur de Segonzat, qu’il feroit queition d’af*
jfirmer; auifi, le juge de Montaigut, attendu la préfence di^
fieur de Segonzat, reçut fon affirmation , ainfi que celle de
Defmaroux : c’eft ce qu’on voit dans la fentence.
.
.L e fieur Salleneuve’interjetta appel de cette fentence au
parlement : en réfléchiffant fur les moyens dont il devoit faire
wfage, il s’apperçut q u el’a& e, qui lui avoit d’abord été com
muniqué par Defmaroux , & dont il avoit retenu une cop ie,
ne parloit que des biens préfens , & que l’expédition de ce
même a£le, que le fieur Giraud lui avoit délivrée, comprenoit
les biens à venir. L e fieur Salleneuve, frappé de cette contra-»
di&ion, pourl’éclaircir, eut recours au regiilre des infinuations;
il fe convainquit que la donation ne frappoit que fur les biens
préfens; il retira une copiecollationnéefur le regiilre: alors,
le fieur Salleneuve ne put plus douter de l’indigne fupercherie
que Defmaroux n’avoit pas craint de mettre en ufage, pour
frauder les droits feigneuriaux.
L e fieur Salleneuve en inftruifit le fieur Giraud : ce lu i-ci
témoigna d’abord de l’étonnement, mêlé d’indignation & de
crainte. Il vit que Defmaroux avoit commis quelque falfificatio n , dans la vue de faire paroître l’aéte dont il s’a g it, tantôt
valable, tantôt nul, au gré defes intérêts. Il s’apperçut enfuite,
qu’il étoit devenu lui-même * fans le favo ir, l’inftrument du
trim e de Defmaroux, 6c q u e , malgré fon innocence, il pourroit être regardé , au premier coup d’œ il, comme coupable
pu complice.
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Danf
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* Dans le filenCe de la n u it, dans ce temps ou l’on réfî^okic
malgré r o i, pour.peu que.l-on. ait l’eiprit.jtraublé,, le fieuc0
Qiraud porte Tes regards fur les fuites funeftes de fa trop aveugle^
confiance, pour un confrère qui n’étoit pas digne de.l’être., ^
,1 1 eft agité, tantôt par la crainte deyoirfonlionneurçompram is, & d’être confondu avec le coupable,.tantpt par.,lafpeib
d’une famille défolée : à l’abattementfuccèdent la fermeté &^le
courage qu’infpirenc ordinairement.le témoignage de la con-p,
fcience & l’indignation dont on eft animé contre le coupable,
auteur des maux que l’on fouffre injuftement..:Le fjeur- Giraut^'
trouve en lui des forces jvfque-l^incpnnues j . & ^fortantde^i
bornes de fou caractère , il prend une.réfol^ti^tt, , qui. par oî^
d’abord peu fage;,'& qui,tne {peut être juftifipç que par Févéne-^
ment: il oublie, & fon â g e , & fes infirmités; il fe munit d’un,
piftolet chargé, & il accourt , à la pointe du jour , che&
D efm aroux, qu’il trouve "au lit.
. . pi
' ■
;i 11 expofa à Defm aroux, avec.ce ton/énergique, qui ne con-?,
vient qu’à l’innocent, & qui.eft fait pour déconcerter le cou-«,
pable, 1’embarras cjans lequel l’avoit mis Defrparoux, en falf}fiantl’a£le qu’il lui avoit confié : Defmaroyx tergiverfa; mais
enfin, il fut obligé d’avouer, ôc fon d é lit, & le m otif qui lelu i. avoip fait commettre. Il chercha la- véritable feuille qu’il
âvoit fouftraite, qui étoit écrite de la main de-Lougnon ,
ainfi que la feuille fervant d’enveloppe^ qui étoit déjà au pou
voir du fieur Giraud : celui-ci ne fut pas plutôt muni de cette
feuille, dont l’exiftence conftatoit tout-à-la-fois,'&fon inno
cence, & le délit de Defmaroux, qu’il fortit de 1% maifon de^
Defmaroux ; & , ayant apperçu dans la rue, le iieurjSalleneuve,'
y lui* d it, en lui- montrant la feuille ; voilà là véritable feuille j
j e la porte.
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Il efi: eiïentiel de remarquer, qu’à-peu-prè$à èette époque9
ou aü moins depuis que le fieuf'Salleneuve eut appris aufieuf
Giraud que les expéditions qu’il avoit délivrées au fieur Rance
au fieur Salleneuve étoient inexa£tes, le fieur Giraud s’emprelTa de fupprimer celle de Salleneuve, de Ton confentement,
& de corriger celle de Rance.
Il faut a&uéllement reprendre le fil des pourfuites du fieiir
Salleneuve contre Defmaroux. La caufe ayant été plaidéeau
parlement, fur l ’appel de la fentence de M ontaigut, qui
déboutoit M. le duc d’Orléans de la demande en paiement des
Ibds , il intervint arrêt le 11 août 1775? , par leq u el, faifanc
droit fur les conclufions de M. le procureur général , il fut'
ordonné que là feuille ajoutée à la minute de l’afte de dona
tion , enfemblé la minute de cet a£te , feroient apportées au
greffe civil du parlem ent, pour être pris, par M . le procureur
général, telles conclufions qu’il aviferoit, & ordonné ce que
de raifon. C e même arrêt condamna Defmaroux au paiement
des droits de Iods , & aux dépens.
L e 1 ; mars 1785, cet arrêt a été fignifîéau fieur G irau d,
iï la requête dè M . le procureur gén éral, par Pontus, huiilier.
t e fieur Giraud a remis à Pontus'la minute, & la feuille qui'
avoit été fubftituée par Defmaroux; l’a â e de l’huiiïier en con
tient déciharge!.
- M .Ie procureur général a demandé la punition du fauxdont’
îl s’agit. Vous avez été com m is, Monfieur, pour inftruire 8c
jliger le procès : fur les informations, Defmaroux a été décrété
p'rife de éorps, & conduit dans les prifons de ce fiége , Ôc
le'prôcès a été réglé« à!1’e'xtràordinaire.
t L efieur Giràüdadépofécom m e témoin ; il a configné, dan#
fa dépofition f le fait de l ’intercalation ôc fubftitutior* de 1#,
ri
�(
ii )
feuille r de la part de Defmaroux. M ais, à ce premier, fait
le fieur Giraud en a ajouté un autre, qui n'a jamais exifté j
u n fait qu’il ne peut avoir imaginé pour nuire à autrui, puifque^
p’il étoit v ra i, il le compromettroit principalement , & l,ut
attireroit la répréhenfion de la juftice. O n conçoit bien quç
le fieur Giraud n’a pu voir, fans chagrin, lanaiffance, le progrès
& les fuites de cette malheureufe affaire. Quelque raifon qui}
jeûc de fe raiTurer fur fon innocence, il ne pouvoit pas être
fans crainte , parce qu’il s’appercevoit que, Defniaroux, dèÿ
im itant qu’il eut commis le faux, avoit pris des précautions ,
non feulement pour fe mettre à l’abri desjpourfuites judiciaires,
mais encore pour en rejetter tout le poids fur le fieur Giraud,
Depuis fept à kuit ans ce malheureux vieillard a vécu dan*
l ’inquiétude & dans les angoifles. Cette cruelle fituation a.
.altéré fes facultés intelleâ;uelles ; fa mémoire s’eft prodigieufe^
ment affoiblie, & fon imagination creufe ôc délirante, lui a
quelquefois repréfenté de vains fantômes, qu’il a innocemment
placés à côté de la vérité.
• Lorfque le fieur Giraud éprouvoit cette altération. fenftble
«dans fes organes, à l'époque où le fieur Salleneuve lui fit
appercevoir l’aby me dans lequel Defmaroux vouloit le plonger,
<en lui remontrant qu’il avoit délivré & figné une expédition
différente de la minute , le fieur Giraud fit un mémoire qui
devoit être adreffé au confeil de M . le duc d’Orléans, dans
^’intention de fe juftifier. On a déjà dit que Deimaroux,,
lorfqu’il.étoit enpoiTeifion delà minute, avoit faitfigner,paè
ie fieur G iraud, quelques expéditions. Ces expéditions paroiffent au fieur Giraud autant de minutes ; en. conféquencè
,il n’héfite pas, en s’inculpant, de dire dans le mémoire, que jUçfn^arguf lV o ic engagé à figner plufieurs m inutes. fous la
P a ; ‘
"
�même date ; qu*il les fupprimoit fucceflîvêment, & que 1er
contrôleur fe prêtoit à ces fuppreifions, en remettant fur
chaque minute qu’on lui préfentoit, la relation du contrôle.
L e fieur G irau d , dont l’état étoit à*peu-près le même, lorà
üe fa dépôfition ,' voulant d’ailleurs foülager fa mémoire *
répéta fervilement la déclaration qu’il avoit faite au confeil
du Prince.
C ’eft cet âveu qui â provoqué, contre le fieur G iraud, un
décret d’ajournement perfonnel, dans les liens duquel il gémit
depuis 'Itirig- temps. Il ofe fe flatter que les dépofitions ne
contiennent aucunes preuves qui y aient donné lieü : heureufement cèt aveu, o u , pour mieux dire, cette rêverie,que
le fieur G iraud, revenu à lui , a abandonnée lors de la con
frontation, n’eft d’aucune conféquence, comme on le démon
trera daiis la, fuite ; elle ns peut qu’infpirer un fentiment da
pitié pour le fieur G iraud, & une nouvelle indignation contre
Defmaroux.
ici un moment, & fixons les idées qui
ïortent naturellement des faits dont on vient" de rendre compte^
ils préfencent incontefiablement deux vérités.
A rrêtons r nous
• L a p rem ière, qu’il a été com m is un faux d’un gen re inoui
jufqu’à préfent; qu’on a fouftrait la feuille du milieu de l’a£le
du 24. feptembre 177^; qu’on y a fubftitué une autre feuille,
Hans laquelle on a inféré les termes à venir, qui n’étoient pas
dans la feuille fouftrâite. Cette vérité eft ayouée par Def•*
.
.
1
niaroux.
L a fécondé, que Defmaroux eft lui-même l’auteur de la
fpuftra&ion de la véritable feuille, & de la fub.ftitution de la
‘feuffe. Defmaroux ne fe rend pas de même fur cette fécondé,
�c * i3 o r
vérité; maïs, à l’aide de quelques réflexions, il eft irtipoifiblek
à tout homme impartial d’en douter.
t i° . L a feuille fauffe , la feuille fubftituée a été écrite
rd e la main de Lougnon -, clerc & beâu-frère de Defmaroux, .
qui avoit écrit la minute fous fa di&ée ; ;enforte que les trois
feuilles font écrites de la main de Lougnon. *
Cette circonftance feule ne permettra jamais de douter que
Defmaroux ne foit l’auteur de la fubftitution, ôc que Lougnon.
ne foit fon complice.
- \ *• ;
t 2°. Defmaroux a néceiTairement commis cette frauduleufe
fubftitution, puifqu’il demeura nanti de la véritable feuille du
milieu qu’il avoit d’abord fouftraite, pour y fubftituer celle
qu’il avoit fait tranfcrire par Lougnon, puifqu au moment où
le fieur Giraud s’apperçut de la fupercherie. de Defmaroux ,
il alla chez lui; il le.força à lui donner la véritable feuille
qu’il avoit gardée, & fe hâta de la montrer au fieur Salleneuve
qu’il rencontra dans la rue. La preuve de ces derniers faits
doit être confignée dans les informations; elle doit fur-tout
réfulter de la dépofition du fieur Salleneuve. Que Defmaroux
nous explique, comment il auroit gardé, la première feuille
du m ilieu, s’il ne l’avoit pas fouftraite, pour y fubftituer la
fauiTe. Voilà un fait, & un fait prouvé, contre lequel vien-'
dront toujours fe brifer les allégations menfongères de D efrnaroux.
•
....
.
!;t.- .
3°. O n ne commet jamais gratuitement un crim e, un faux
qui peut avoir pour fon auteur les fuites les plus funeftes ; il
n’y a qu’un intérêt puiiTant qui puiife contrebalancer la crainte
de l’événement.
“ Il faudroit bien méconnoître le cœur humain, pour ne pas
fe rendre à cette propofition, ' L ’immortel orateur de Rome
�obtint l’abfolution d'un de fcs concitoyèns qui étoit'âccufé ’det
parricide, en prouvant qu’il n’avoit eu aucun intérêt à com-i.
mettre un crime auflî énorme ( i). Sic vita hominum eft, difoît-il,
ut ad. maltficium nemo coneturfinefpe atque emolumento acce->
dere. Il citoit un célèbre magiftrat Romain qui dans les cauièa>
Criminelles avolt- coutume de demander de quel avantage le<
crime pouvoit être à l’accufé. L. CaJJius ille quart populus
Romanus feverijjinium & fapientiffimum judicem putabat identi-k.
dent in caufis quœrere folebat t c u i b o n o f j j i s s e t .
:i
: O r , il feroit difficile' de concevoir quel intérêt le -fieur
Giraud pouvoit avoir à la fàlfification de l’a£teen queftionÿ
ion feul intérêt étoit de ne pas s’écarter de Ton d evoir, de1
veiller à la confervation du dépôt qui lui étoit confié. Il fàü^
droit le fuppofer le plus infenfé des hommes, pour croire qu’it
ait confenti à l’altération d'une minute, fans autre perfpe&iv©
que la honte & l’infamie; auifi n’a - t - i l pas plutôt connu 1*
fraude de Defm aroux, qu'il s'eft empreiTé de la réformer. ^
Mais fi le fieur Giraud n’avoit aucun intérêt à commettre!
cette altération, il n’en étoit pas de même de Defmaroux :
en donnant plufieurs^formes à la donation, il pouvoit parvenir
a fe fouftraire à des droits de lods confidérables. T e l étoié
aufliTon but. Salleneuve demandoit-il les lods, il n’y avoic
pas d’a& e, ou ce qui eft de même, il étoit n u l, au moyert
, de l’addition des biens à venir. L e fieur de Segonzat eût - il
¿oulu férieufement réclamer fes biens, l'afte fe feroit tout-à.coup transformé en donation de biens préfensj il auroit parii
régulier.
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V f r ) CL, pro Sexta
Amerino^
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E t q u'onfafle attention que Defmaroux dam’fon idée rifquoi^
«de tout gagner, fifnepouvoit rien perdre; il efpéroit de leurrer
fendant long-temps le fieur Salleneuve, de le réduire à aban
donner fa prétention, en préfentant l’a&e comme une donation
des biens à venir, en feignant de le regarder comme nul j
mais ce facrifice n’étoit qu’apparent. L e rufé Defmaroux favoiç
<jue la validité de la donation feroit toujours aflurée v is-à-vis
le fieur de Segonzat, foit par la véritable feuille qu’il avoit
retenue, & qu’il fe propofoit peut-être de fubftituer dans la
minute qu’il avoit remife au fieur G iraud, en abufant une
fécondé fois de fa confiance, foit par une des expéditions qu’il
s’étoit fait délivrer par le fieur G iraud, & qui contenoit 1*
mention des biens préfens feulement, foit enfin par la juftification du regiftre des infinuations, où l’a&e avoit été tranfcrit
fous ù. vraie form e, fans l’addition des biens à venir.
L a nullité apparente de la donation profitoit à Defmarouxt
ne profitoit qu-a lui feul : comment donc attribuer ce projet
à run autre ? Is fe c it fce lus cui prodejî. .
t
a&uellement les m Q yens que Defmaroux
invoque pour faire regarder le fieur Giraud comme l’auteur du
fa u x , pour renvoyer-fur la tête du fieur Giraud le glaive de la
^uftice qu’il voit fufpendu fur la fienne.
Ii dit que le fieur Giraud fut le réda£teur de Î’a£le ; que
Lougnon l’écrivoit fous fa d iilé e, en préfence de Defmaroux
&; du fieur de Segonzat ; que l*a£le ayant été achevé, & Lougnon.en faifant la le£lure, Defmaroux s’apperçut que le fieur
‘G iraud , par ignorance, ou plutôt dans le dejjein de trahir fe s
intérêts') aVoit inféré ’dans là claufe que le fieut' de Segonzat
Idonnoit de plus à Defmaroux tous fes biens échus ■&à échoir ,
s E
x a m i n o n s
�'(
préfens & à venir ; <}ue Defmaroux fut frappé de Côttê claufe j
qui rendoit la donation radicalement nulle ; qu'en ayant fait
l ’obfervation, le fieur Giraud remontra qu’il fuffifoit de changer
la feuille du m ilieu, fur laquelle étoit écrite la claufe vicieufe^
& de fubftituer une autre feuille, dans laquelle on ne com
prendrait point les bletti à échoir ou à venir y que'Defmaroux
& le fieur de Segonzat fe rendirent à fon avis ; que dans le
même moment, la feuille ayant été trânfcrite par Lougnon, la
claufe ayant été fupprimée & l’a&e figné, Defmaroux fe retira
avec le fieur de Segonzat, -laifTant fur la table du fieur G iraud,
& la minute de la donation, & la feuille fupprimée qu’on auroit
dû déchirer dans l’inftant ( pages f & 6 ).
' '-a
Defmaroux ajoute que dès ce moment Girâud conçut lé
deflein d’abufer de cette feuille, pour opérer la nullité de la
donation ; il lui fuppofe, à cet égard, un intérêt dont perfonné
ne s’étoit encore douté ; il dit que le fieur Giraud forma le
projet de faire revenir le fieur de Segonzat contre la donation;
dé l’engager à donner fon bien au fieur B outin, beau-frère du
fieur Parin, gendre du fieur Giraud; que c’eft pour parvenir à
ce but que le fieur Girâud conferva la feuille qui contenoit la
claufe vicieufe.
Pour donner plus de poids à ces aiTertions, le fieur Defmâ^
roux rapporte une lettre qu’il prétend lui avoir été adrefîéë
par le fieur de Segonzat, & qu’il date du 10 août 1777 : c ’eft
principalement]avec le fecours de cette lettre que Defmaroux
entend prouver la perfidie qu’il impute au fieur Giraud.
'
Il n’y a pas une ligne de ce long paifage du mémpire dç
Defm aroux, qu’on vient dextraire, qui ne renferme, ou des
impoilures} ou des invraifemblances ) q u i des contçadi&ion^
choquantes ÿ
�C 17 >
&
choquantes ; ce il cequ?on va démontrer jufqu’au dernier dégrc ?
d’évidence.
,
En premier lieu , comment Defmaroux perfuadera-t-il qu’il:
n’a point préfidé à la rédaition d’un a£te a'uiïi complique Ôc:
aufli intéreflant pour lui ?'Comment fuppofera-t-on que le fieur •
Giraud ait di£lé une claufe aufli vicieufeque celle de la doua-"
iion de biens'échus & à échoir, préfens &' à venir? Comment:
croira-t-on que cette faute groilière n’eut point été remar
q u ée, foit par Defmaroux q u i, comme il dit, é to it;préfent à la réda£tion de l’atle, foit par Lougnon -qui^l’écri-'
voit , par ce praticien également attaché à Defmaroux , ôc par
les principes, & par les liens du fang ? Le fieur Defmarouxr
peut-il férieufement entreprendre de juftifier toutes ces invraifemblances ? L e fieur Giraud qui a plutôt cherché à fe faire;
éftimer par des fentimëns honnêtes, qu’à fe :faire admirer ou
craindre par des talens, conviendra fans peine que Defmaroux pouvoit mieux que lui rédiger un a£te aufli important,
6c qu’i l ne fe feroit peut-être pas chargé de fa rédaction : on
ne peut même point douter que ce ne foient cecara& ère
facile, cette crédulité aveugle , en un m ot, cette bonhomie
qui aient déterminé le choix que fit Defmaroux du fieur Giraud ;
il préfumoitj fans doute, qu’il lui confîeroit la minute encore
plus facilement que tout autre notaire.
, ; En -fécond lieu , s’il étoit vrai que lors de la ’ réda£lion
cle l’a£te, ôc dans l’étude du fieur G iraud, Loùgnon eut
écrit la feuille qui contenoit la claufe vicieùie des biens à
venir, comme le prétend Defmaroux , cette feuille paroîtroit
avoir été écrite d’un même contexte, avec la feuille fervant
d’enveloppe, elle feroit écrite de la même encre : cela eft
*
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8
)
ïnèonteftable; cependant Morgeat & Barbon , experts, qui'
ont vérifié les trois feuilles , ont été d’avis que celle qui contènoit la claüfe vicieufe, paroiffoit n’avoir pas été écrite de la
même encre que la feuille d’enveloppe, ni d’un même con*texte , & ils ont porté un jugement tout différent delà feuille
qui contient la claufe valable; que ce témoignage eft précieux
pour le fieur Giraud! il l’auroit cependant ignoré fi le fieur
Defmaroux ne l’en avoit inftruit dans fon mémoire ( page jo .)
O n en fent aifément la conféquence. Si la feuille où il eft fait
mention des biens prefens feulem ent, eft de la même encre ôc
du même contexte que la feuille fervant d’enveloppe, c’eft
parce que ces deux feuilles ont formé , dans le principe, la
minute telle qu’elle a été rédigée & préfentée au fieur Giraud.
S i , au contraire, la feuille qui contient la claufe vicieufe des
biens à venir n’eft pas écrite de la même encre & du même
-contexte que l’enveloppe , fi certaines lignes font rejferrées ,
& d'autres efpacées & d’an plus gros caractère, c’eft néceiïairement parce que cette feuille irrégulière, a été tranfcrite
après coup. Donc il n’eft pas vrai que cette feuille ait été écrite
dans lé même moment que la feuille fervant d’enveloppe, fous
les yeux du fieur Giraud , fous fa di£tée, ôc dans fon étude :
a u iïi, Barbon n’a pas balancé à dire que la feuille féparée a
été écrite dans un temps différent de la donation.
En troiiième lieu , comment préfumera-t-on qu’il fût venu
en idée au fieur Giraud de profiter de la circonftance qu’il avoit
en fon pouvoir la feuille qui renfermoit la claufe vicieufe
-pour opérer la nullité de la donation , pour être à portée
d’engager le fieur de Segonzat à difpofer defes biens en faveur
<Tu fieur Bouttin , beau-frère du fieur Parin , gendre du fieur
Giraud ? 'ces rèlatioris auroient-elles été aiTez puiiTantes pour
déterminer le fieur Giraud à commettre un faux i
�■xp )
(
Maïs il eft même imperdible que le fieur Gîrâud ait conçu ce
deffeirt. En e ffet, s’il eût été affe&é de cette id ée, il auroit
fur le champ fubftitué la mauvaife feuille à la bonne , fie il
auroit préfenté la minute en cet état au contrôle ; elle auroit
été copiée fur leregiftredesinfinuations, aveclaclaufevicieufe:
au lieu deprendre ce parti, le lieur G iraud, fui vant Defmaroux,
â fait enregiftrer l’a£te dans fa forme régulière ; il faifoit tout
ce qui était en lui pour en aiîurer la validité & l’exécution.
Comment donc Defmaroux a - t - i l pu avancer que dès le
moment même de la perfe&ion de l’a£le, le fieur Giraud avoit
formé le projet de l’anéantir ?
En quatrième lieu , Defmaroux dit d’abord que le fieur
Giraud avoit conçu le defiein d’annuller l’a£te , dès l’inftant
même qu’il fut rédigé, dans la vue de faire pafler les biens du
fieur de Segonzat au fieur Bouttin ; mais il ne tarde pas à fe
contredire, & à donner un m otif tout différent au prétendu
projet du fieur ¡Giraud : il dit ( page 8 ), que depuis la dona
tion, ayant été chargé, en fa qualité de procureur, de ladéfenfe
de Jean Roufille, auquel le fieur Giraud avoit fufeité le procès
le plus injujle ( i ), pour la vente de la coupe d'un bois taillis ;
il devint un objet odieux pour le fieur Giraud: il faut me venger¿
dit Giraud y il faut me venger , quandj e devrois moi-même être,
enveloppé dans ma propre vengeance.
Defmaroux fuppofe encore, que long-temps après la donation,
il s’eft formé contre lui une cabale, à la tête de laquelle il
place le fieur Salleneuve; ôc il donne à entendre que le fieur
Giraud a été gagné par fes ennemis, & s’eft prêté à leurs vues
malicieufes.
--------------------------•
_
| ^
• - ( ‘i •) C e proccs eft arrive plus de deux ans aprçs la donation,
G *
i
�M ais, fi le fieur Giraud n’a imaginé d’âhnuller la doriâtiôn
que pour fe venger de ce que Defmaroux a occupé contre lui,
pour Roufille plus de deux ans après, s’il a été gagné par une-,
cabale, long-tem ps après la donation, il n’eft donc pas vrai
que dans le moment même de la réda£tion de cet a£te, le fieur>
Giraud ait formé le projet de l’annuller; il n’eft donc pas vraiqu’il ait eu pour but de faire paiTer les biens du fieur de Segonzat-,
au fieur Bouttin : fi toutes ces aflertions s’entre-détruifent, il*
eft impoflible d’ajouter foi à aucune.
j
Defmaroux fe réfute lui-même avec une facilité admirable;
& il ne pouvoit mieux nous prouver que fa défenfe n’a pas
la vérité pour bafe
En cinquième lieu, fi l’on fait quelqu’attention à la con-:
duite qu’a tenu Defmaroux, dès l’inftant de la perfe£lion del ?a£te, il eft impoflible qu’on fe perfuade que le fieur Giraud^
ait abufé de la feuille qui renfermoit la claufe vicieufe, dans,
l ’intention de nuire à Defmaroux. Quoi ! li Defmaroux eût
été aufli indignement trompé par Giraud, fon premier mou
vement n’eût-il pas été de crier contre ce notaire, à la per
fidie, à la trahifon ? N ’auroit-il pas même été tout de fuite
défabufé, en confaltant le regiftre des infmuations ? n’auroit-il
pas fait valoir une expédition que.vraifemblablementil avoit fait
ligner par le fieur G iraud, avec la claufe des biens préfens feule-;
ment? Mais Defmaroux tient une conduite bien différente. Sur
liai demande eh nullité prétendue formée par le fieur de Segon2at , il s’emprefîe d’y acquiefcer, & laifle obtenir avant l’expira
tion des délais de l’ordonnance, une fentence qui prononça cette
nullité. Lorfqu’il eft enfuite adionné par le fieur Çalleneuve ,
en paiement des lods, il dit froidement que l’a£te ne peut
donner ouverture u ces droits, parce qu’il a été déclaré nul;
V
�ne faüdroit-il pas fermer les yeux à la lum ière,-pour. ne., pas;i
recônnoître Defmaroux pour l’aüteuri de cette procédure? •
AuiTi la voix publique s’eft d’abord élevée contre Defmaroux.
R ien ne doit faire plus d’impreilion à cet égard, que la dépo- ^
fition du fieur Salleneuve. Peu de temps-après l’a tie , il eut
des difcuifions avec Defmaroux, dont il.a-étudié depuis, les .
manoeuvres. Si Defmaroux eût été trahi par le fieur Giraud,
ne l’auroit-il pas dit au fieur Salleneuve; cependant, ce fer
mier n’a ceffé de dire dans le mémoire qu’il a envoyé au confeil du prince, & dont le.fieur. Giraud a une copie, que Def
maroux, en abufant de la confiance ( 1 ) du fieur Giraud, avoit
fouftrait une feuille ôc en avoit fubftitué une autre, pour faire^
paroître l’a£te nul ; que fon but étoit de frauder les droits
feigrieuriaux, parce qu’il préfumoit que le fieur Salleneuve
négligeroit de confulter le regiftre des iniinuations, où la tte
étoit tranfcrit avec des claufes qui le rendo,ient .valable ; que
la d e m a n d e , en nullité du fieur de Segonzat, fur laquelle Def- .
maroux fe fo ndoit à l’égard du fieur Salleneuve, n’étoit qu’uu
jeu. Le fieur Salleneuve difoit qu’il n’y avoit rien de fi mépri-.
fable que la fentence du juge de M ontaigut, du 12 .août 17 7 7 ,
qui déboutoit de la demande en paiement; des lods, â la charge j
dé l’affirmation. "
1
• -Il ne négligeoit pas la remarque qu’on a déjà faite, que le.(
fieur de Segonzat étoit v.enu à l’audience pour affirmer., avant
q u e . fon
affirmation fut ordonnée. Il en^çqncluoit que la ;
ftntence étoit préparée depuis.Jong- temps. E n fin , le fieur ■
( 1 ) Ile fieur Salleneuve fe fervoit d’un terme bien ¡moins honnête;
il difoit de l'ineptie du notaire Giraud. Cette petite citconftanceprouve«
qu ’il n’ y . avoit pas de collufion entre le fieur Salleneuve Si Je fieur,
Giraud.
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i uc: . :
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Sàlleneuve n’impute rien au fieur Girâud ; au contraire i
il rend compte de fa furprife & de Ton indignation /lofqu’il
:apperçut l’abus que Defmaroux avoit fait de la confiance de
la" minute.
En fixième lieu, ce qui ne permet pas de douter que D ef
maroux ne foit l’auteur de la falfification, c’eft: la circonftance
que le fieur Giraud alla retirer chez Defmaroux la feuilles
fôuftraite : il réfulte de ce fa it, que Defmaroux en impofe,
lôrfqu’il dit que le fieur Giraud demeura de'pofitaire des trois
feuilles, lors de la réda&ion de l’a&e.
'D efm aroux frémira, fans doute, à la le&ure de toutes c e s obfervations; elles renferment la preuve la plus convaincante
de fon crime.
A l’égard de la lettre du 10 août 1 7 7 7 , attribuée au iîeur
de Segonzat, elle ne peut tenir contre les preuves qu’on vient
de développer. O n pourroit peut-être fe difpenfer de la réfuter
férieufement ; cependant, pour ne rien négliger, dans une
affaire de cette importance, on va démontrer qu'il en réfulte
feulement, que Defmaroux eft adroit & rufé.
>II eft déjà dans tous les cœurs , que d’après le cara&ère du
freur de Segonzat, il a été aiiifi raifé à Defmaroux de lui faire
écrire ôtfigner cette lettre , qu’il lui a été facile de faire tranfcriréj par Lougnon, la feuille qui devoit être intercalée. Pour
ne plus révoquer cette idée en doute, il nous fuffira de tranfcriré un paflage du mémoire de Defmaroux. C e u x , d it-il
( page 8 ), qui ont connu le fieur de Segonzat y ne- feront point •
étonnés que Giraud ait pu lefaire varier. Q ui ne voit donc que
Defmaroux:, qui dès l’inftant de fon crim e, a pris des précau
tions , non pour le pallier, cela étoit im poflible, parce qu’il.étott prouvé, mai» pour le rejeter fur le fleur G ira u d , a fait
écrire ou figner cette lettre par le fieur de Segonzat l .
�Y o f
î î y
O n ne peut en'driuter / d’après la manière dônt cette lettrç
eft conçue. M. Bidon , mon procureur, m'a dit que vous ave%
formé oppofition à la fentence du 4 mars lyyy (qui déclare
la donation nulle) ; je vous prie de ne point la pourfuivre. M .
Giraud, quoique votre ami, m\ivoit confeillé cette demande ,
pour m engager àfaire une nouvelle donation à M. Bouttin. Il
m avoit dit quil s'étoit réfervé > lors de la donation , de quoi à
me faire réujjir ; je fuis trop content de vous,, pour me laijjer
gouverner à l'avenir par de mauvais confeils. Faites faire la
foupe j je vais la manger cherLvous. 1\ falloit être fingulièreTiient intéreiTé à faire trouver le fieur Giraud coupable., pour
écrire une femblable lettre. Elle eft trop étudiée, pour fuppofer
que le fieur de Segonzat l’ait écrite; lui qui , a beaucoup près,
n’a jamais eu l’ufage des lettres, &qui n’étoit pas d’un caractère
à s’enflammer pour obliger. Il eft impoifible que tout autre que
Defmaroux ait renfermé, en fi peu de lignes, tant de traitç
propres à perfuader que la demande en nullité de la donatiorç
étoit férieufe, à fe difculper de la falfification, & à noircir lç
fieur Giraud. Comment Defmaroux a -t-il pu fe flatter qu’orç
xnéconnoîtroit fon ouvrage ? Cette pièce manque d’art parce •
•qu’il y en a trop.
i
Mais on n’eft pas réduit ici à de fimple9 conjectures; il
s’élève contre cette lettre un écrit du fait même du fieur dç
Segonzat, qui la dément entièrement: cet écrit eft le projet
<l’un mémoire quifutadreffé, en 1782, par le fieur de Segonzat*
à M. le procureur général ; il eft de la main du curé d’Y ouy
¡qui lui a quelquefois fervi de fecrétaire;
*.
t
' L e fieur de Segonzat y expofoit que-Defmaroux' l avoit
engagé, en 1776 , à lui donner tout fon bien, à la charge dç
payer quelques- dettes, moyennant une penfion de .8ûq llv* ôc
�.
Ç ?4 >
èn outre’ foiis là' réferve de 'la'jouiffancerde'quelques objet?'du
.produit dej 150 liv.' qu’en 1780' Defmaroux ,Jp6ur fe difpenfe*
de payer la penfion, & pour jouir des objets réfervés , porta
le fieur de. Segonzat à venir demeurer chez lui ; il lui offrit fa
table &: l’entretien; que-cés offres furent acceptées parle fiéur
■de Se^ônzat, & -arrêtées par umacte fous feing-privé/du 2^
Vnafs i78o ;'maiÿ'q'ü’il ne tarda pas a s’en repentir.' La table.de
'Defmaroux ne ■
répondoit pas à la .penfiun que le fieur de
•'Segonzat abandonnoit, '& l ’entretien qu’il fourniiïoit étoit
tro p ^ o d iq iie; que pendant un an & quinze jours qu’il avoit
tlerrieuré chdz Defrûâroux, on lui avoitfa it faire feulement une
paire'de fou liers } déux paires de bas de laine, & on lui avoit
fa it retourner deux habits q u il avoit en y entrant. L e fieur de
'Segonzat difoit que depuis fa fortie de la maifon de Defmar
ro u x, arrivée le 27 novembre 1781 , il ne lui avoit pas été
pojfible^d'en toucher un fou ,* que les huiffiers &' les procureurs
iie voyant' pas d’argent, navoient pas voulu travailler contre ,
lin confrère f que la place de lieutenant général à Montaigut,
était vacante depuis long-temps ; que le fieur Bichard. qui en
faifoitles fonctions3fetrouyoit compliqué avec Defmaroux, dans
une affaire criminelle qui fe pourfuivoit à Riom ; qu ils avoienc
'intérêt de fe foutènir: CVft pour fôrtir de cet état que le fieur
de Segonzat implorbit la prôte&ion de M. le procureur général.
Il eft effentiel de remarquer que dans ce même mémoire il
eft parlé de la fouftraâion de la première feuille & de-la fubf‘tifcution deüa féconde ; que le fiëur'de’Sègonzat attribué .cette
manoeuvre à Defmaroux, puifqu’outre qu’il ne parle point du
iieur Girauth; il dit que l’on fe jouçit ainfi de la foi d’un a û e ,
pour sJre 'xenipier par'là des droits de lods.1 ;; ,
’
}
Ce mémoire ne fut pas fans f r u i t . - , l e procureur général
le
�O r»
le? renvoya à ion fubftitut en ce fiége ; & , fur l'avis qui en fut
donné,àDefmàroux, par M, le procureur du ro i, Défmaroux
confentit à de nouveaux engagemens avec le fieur de Segpnzat, ,
par un,a£tedu t4 ju in i782 , qui fut paffé par la* médiation de
deux avocats de.cette ville.
* O n fent aifément qu’il réfulte de ce mémoire, des confê- quences accablantes pour Défmaroux; il prouve, i°. que le.
fieur de Segonzat n’étoit pas auiïi content de Défmaroux que
la lettre qu’on date du 10 août 1 7 7 7 , femble. l’annoncer.
a0. Q ue le fieur de Segonzat 11e regardoit pas le fieur t
Giraud comme l’auteur de la falfification, puifqu’il ne parle
pas du fieur G iraud, & qu’il dit que cette manœuvre avoit;
féulement pour but de sJexempter des droits de lods y ce qui ne 1
pouvoit profiter qu’à Défmaroux.
" 30. Que le fieur de Segonzat n’avoit jamais entendu deman
der la nullité de la donation, puifque bien loin d’invoquer
cette n ullité, il apprend lui-même qu’il n’avoit ceiTé de l’exé
cu ter, & qu’il a donné une nouvelle approbation à cet a&e,
par le traité du 14 juin 1782; d’où il réfulte manifeilement
que la procédure, en nullité de la donation, a été l’ouvrage
de Défmaroux.
Enfin, que l’on faffe attention à cet état de la dépendance*
la plus fervile, de la foumiilion la plus rampante, dans lequel
fe trouvoit le fieur de Segonzat, à l’égard de Défm aroux, ôc
dès-lors on ne fera point étonné que ce dernier ait obtenu oi^
extorqué la lettre dont il fait parade.
}
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#
i rDESMAROUX o p p o fe q u e le fieu r G ira u d a lu i-m ê m e rernis
la :m in u te au fieur T a ilh a r d a t.d e l a F a y e tte ., p o u r la faire infH
p,
�< * y
nuer ; que le contrôleur l’a enfuite rendue au fieur Giraud \
il prétend établir ces faits par un certificat du fieur de la
Fayette.
D ’abord ce billet paroîtra toujours fufpe£l. Defmaroux eiî
l ’am i, le notaire, l’homme de confiance du fieur de la Fayette;
il-le remplaçoit dans fon bureau, lorfqu’il étoit abfent. Le fieur
Giraud eft en état ôc offre de le prouver ; il eft donc bien
extraordinaire que le fieur de la Fayette ait écrit férieufement
un billet au fieur Defm aroux, qu’il voyoit plufieurs fois par.
jour.
M ais, en fuppofant que ce billet foit fincère, qu’en réfulteroit-il ? que le fieur Giraud auroit été faifi de la minute
immédiatement après le contrôle ; mais il n’en feroit pas moins
vrai ; que le fieur Giraud auroit bien pu la remettre dans la
fuite à Defmaroux-, & que celui-ci auroit pu la garder pendant"
long-temps.
Il faut ne point perdre de vue que le fieur Giraud aura tout
prouve en fa faveur, s’il établit que Defmaroux a eu la minute
en fon pouvoir dans un temps ou dans un autre, & que D ef
maroux ne prouve rien , en prouvant que le fieiir Giraüd.a
été faifi de cette même minute. Cette vérité eft fi évidente j
qu’il n’eft befoin que de la préfenter.
' O r , le fieur Giraud a prouvé que Defmaroux avoit eu en
fon pouvoir la minute : cela réfulte , i°. de ce que les experts
ont dit que-la- feuille fubftituée avoit été écrite: par Loiignony
dans un autre temps que celui de la donktion ; c’eft-à-dire,, hors
de la maifon du fieur G iraud, & dans celle de Defmaroux ;
2°. de ce*que le fieur Giraud alla retirer chez Defmaroux la
feuille fouftraite, & en fortant la montra au fieur Salleneuve ;
�( 27 )
ïa /
,on fent bien que s'il‘eil prouvé que Defmaroux a fouiîraît une
feuille de la minute 6c y en a fubflitué une au tre, il l ’eft
•également que Defmaroux a eu en fon pouvoir la minute : la
preuve de la fécondé propoiition èft cohérente à la preuve de
.la première.
On voit donc que Defmaroux s'attache à prouver des inuti
lités y & cherche à faire perdre de vue les preuves qui l’accablent.
, dit encore D efm arouxà-peu-près dans le temps où
la donation fut paffée, j’en communiquai une expédition au
fieur Salleneuve ( une de celles que le iieur Giraud a avoué avoir
fignée pour lui à différentes époques, lorfque Defmaroux étoit
faifide la minute ). Cette expédition étoit régulière ; elle frappoit fur les biens préfens ; donc il n’eft pas vrai, conclut Def-maroux, que j’aie eu le deffein d’annuller cet a£te, pour éviter
les droits de lod s, auxquels il pouvoit donner lieu.
; Voilà encore une autre fubtilité qu'on réfutera aifément.
* Il ne faut pas perdre de vue ce quon a dit dans le récit des
-faits. Defmaroux n’avoit pas d’abord en vue la fouftraftion
d’une feuille & la fubftitution d’une autre ; il croyoit pouvoir '
..échapper aux droits de lods, fur le fondement feul que l’aûe
étoit une donation, de fa nature ; ainfi, étant affe&é de cette
id ée, Defmaroux ne devoit pas balancer à montrer une expé
dition fincère avec la clauiede biens préfens feulement. Le fieur
Salleneuve doit i'avoir fait remarquer.
Ce ne fut que lorfque Defmaroux s’apperçut de la foibleffe
de fon objection, qu’il fe ravifa, qu’il fongea, par le moyen de
la fouftra&ion, à faire paroître l’adle nul refpe&ivement à
Salleneuve, & qu’il demanda la nullité, fous le nom du fieur,
de Segonzat.
. . .
M ais
D a
�w
C e qui prouve que telles ont é t é les idées de Dèfmârbüyy
c’eft qu’en fe défendant contre Salleneuve, fur la demande
en paiement des lods, il a fait marcher de front le premier
moyen réfultant de la nature de l’afte, & qu’il n’a employé
le moyen relatif à la n ullité, que comme auxiliaire, & en
paroiffant toujours craindre de le compromettre.
O r , Defmaroux a pu tenir cette conduite , quoiqu’il eût
d’abord donné en communication à Salleneuve , une expédi
tion fincère. Defmaroux penfoit que cette communication
n’avoit eu aucune conféquence ; que le fieur Salleneuve n’auroit pas fait beaucoup d’attention aux claufes de l’a&e : il ne
Îoupçonpoit pas que Salleneuve en eût retenu une copie. Enfin ,
dans tous les cas, il croyoit qu’en faifant paroître, ou la minute
qu’il avoit altérée, ou une expédition avec la claufe des biens à
vtnir, qu’il avoit furprifedu fieur Giraud, en excipant d’une fentence qui auroit prononcé la nullité, il croyoit, dit-on, queSalleneuve ne poufTeroit pas plus loin fes pourfuites. Il y a même
'plus, au moyen de l’altération de la minute: Defmaroux pouvoit
rendre impuiilante, entre les mains de Salleneuve, une expédi
tion fincère, quand il feroit vrai qu’il lui en eût donné une.
On ne peut donc rien conclure en faveur de Defmaroux, de
ce qu’il a d’abord“communiqué à Salleneuve une expédition
exa£te.
D e s m a r o u x relève, avec un air de triomphe, la mention
‘que le fieùr Giraud a faite dans fa dépofition, des minutes fuc:ceffivement fupprimées. Il crie, contre le fieur Giraud, aux
inconféquences, aux contradi&ions ; il lui prodigue les épithètés
les plus outrageantes.
Mais 3 on a déjà expliqué, dans le récit des faits , ce qui
�;'C«j>5
~<3 onn£ lieu à'cêtte fable: c’eft le fruit do délire de.rimâgination
du fieur Giraud , qui a été fur le point de fuccomber fous le
poids des maux que lui fait fouffrir Defmaroux. Comment
celui-ci ofe-t-il donc fe faire un trophée de fon ignominie, s’ar
mer du ridicule contre un vieillard qui n’eft malheureux ,
que parce que Defmaroux lui-m êm e eft criminel?
D ’ailleurs, rien de plus vain que cette déclamation : on ne
peut douter de la fauifeté de cette fuppreilion de minute, dont
l ’aveu a été retra&é utilement par le fieur Giraud , & qui lui
auroit principalement nuit, fi elle eût été vraie. L e fieur D ef
maroux crie à toutes forces, que cette fuppreifion eft une chi
mère ; Charbonnier, notaire contre - fignant, l’a foutenu; le
fieur Tailhardat, contrôleur', l’a auifi attefté. Que réfulte-t-il
donc des reproches aigres & amers de Defmaroux ? que le
fieur Giraud a dit une erreur , une rêverie : eh ! il en con
vient. '
Si cette fuppreifion eft fauiTe, l’aveu qu’en a fait le fieùr
Giraud ne peut lui nuire en aucune manière; il ne le lie point.
Un homme qui avoue un fait qui ne nuit qu’à lui-même, un
fait qui eft démontré faux, peut être à plaindre; mais il n’éft
pas pour cela puniiTable : d’ailleurs, fuivant nos lo ix , un
~accufé n’eft jamais condamné fur fes propres allégations3 ex
confejfis,
î
Defmarovx ne fera peut-être pas fatisfait de ces raifonnemens; il paroît ne reconnoître que les preuves de l’école; fon
mémoire eft hérilTé & allongé d’une foulç de citations inutiles.
Il n’a fu marcher qu'avec un cortège de gloflateurs & d’inter
prètes du droit. Pour achever de le convaincre, on va donc
prouver par des autorités, que la confeifion d’un fait démontré
faux ne peut .être d’aucune conféquence. C ’eft ce qui réfultc
�<îe U loi t 4 , / . de interrog. ht totum confejjlônes ita rata
fu n t, f i id quod in confejjione venit, & ju s , & natura recipert
potejl. '
Balde développe la propofition qu’on a déjà avancée fur la
loi confejjionibus du même titre. Confejjîo, inquit, debet ejjs
vera aâualiter 3 vel potentialiter ; aliàs non ejl obligatoria, jivs,
f it impoffibilis naturâ yfive ipfo jure.
Mornac fur la loi 14. confirme cette doftrine, & il la ren
force encore du fentiment du do&e Cujas, fur la loi impojfi~
.bilium de regul.jur. aitque Cujacius, dit M ornac, neminem ex
falfa confejjione teneri, nifi naturœ conveniat confeffio.
Mais de ce que la fuppreiïion fucceflive des minutes eft une
fab le, il n’en eft pas moins vrai que Defmaroux a fouftrait la
première feuille & fubflitué la fécondé. Il eft également cer
tain que par l’effet d’une furprife, à l’abri de laquelle n’auroic
pas été l ’homme le.plus prudent, il a fait figner par le fieur
Giraud une expédition, dans laquelle il avoit furtivement
gliifé, comme dans la minute altérée, ces mots à venir ( 1 ),
après avoir fait figner, félon les apparences, une expédition
conforme à la vraie minute ; qu’enfuite il a remis au fieur
( 1 ) L e fieur Giraud ne fe fouvient pas du nombre d’expéditions
. que Defmaroux lui a fait figner, avant de lui rendre la minute. Quand
le fieur Giraud auroit lui-mêmecollationné les expéditions fur la minute,
il auroit été également furpris. Defmaroux pouvoit lui préfenter tour-àtour la vraie minute & la minute altérée; & le fieur Giraud qui n’a jamais
bien retenu les difpofitionsde l’a fte , auroit pu penfer que chaque minute
. dtoit la véritable, fur-tout étant toutes écrites de la même main. C ’eft
ce qui lui eft arrivé, lorfqu’étant faifi de la minute altérée, ¡1 en a délivre
innocemment des expéditions à Rance & à Salleneuve.
. •
�Girâud la minute falfllîée, avec les mêmes termes « venir qui
relativement au fieur G iraud, opéroient un changement imper
ceptible, pour que le fieur Salleneuve confultant cette minute,
s’imaginât que la donation étoit nulle, & qu’il n’étoit pas fondé
dans fa demande des droits de lods.
. Mais le fieur Giraud n’a point commis d’erreur fur le fait
de l ’intercalation dont Defmaroux eft auteur. L ’aiTertion du
fieur Giraud fur ce fait eft appuyée par les preuves qui réfultent des dépofitions des experts & de celle du fieur Salleneuve
qui a vu rapporter parle fieur Giraud, la feuille fouftraite, en
fortant de la maifon de Defmaroux. Voilà autant de vérités
que Defmaroux. ne parviendra jamais à obfcurcir.. Heureux
encore dans fa trifte fituation, s’il ne s’étoit pas rendu cou
pable d’une calomnie affreufe, par le plan de défenfes qu’il a
adopté.
.
< . ' ' _ r-. ! Ji O ’ h l
Enfin , Defmaroux dit que Lougnon a quelquefois écrit
pour le fieur Gir'aiid, & dans fon étude ; mais ce fait eft faux.
L e fieur Giraud l'a défavoué dans les interrogatoires, ôc De£
maroux n’ert offre même p a ila pieuve*.-* x *
;
1 'Ó .N á W o ít peut - Etre f)rëfentë* fa juftiïicatlon iu fieur
Giraud dans--un- plus grand jo u r v fi l ’ftn àvoit eu Jfoûsles
^yeux les pièces du procès. O n ^auroit combattu avec fuccès
les dépofitions qui peuvent être contraires au'fieur G iriu d ,
èn iuppofant qu’il y érç ait; nftns il
ck>*et avantage
'-•par une loi qui a toujours^parii dure aujc yeux ‘çl^îâ raifôn ,
«fuî'femble préfuhier' le ciime^Ôc "Crâindre' de' tfóüver ‘ lTrino-'
c'ence ; il eft cependant' raffuré par ;les;lumières & 1 attention’
ordinairede fes juges. - >
I
�C e con sid é r é , M on sieu r, il vous plaife, en procédant
au jugement du procès, ayant égard au contenu en la pré- :
fente requête que le fuppliant emploie pour moyens d atté
nuation , le décharger de l’accufation dont il s’agit lui
permettre de faire imprimer & afficher votre fentence dans
les villes de Riom & de Montaigut, jufqu'a concurrence de
cent exemplaires fans préjudice de fes dommages-intérêts
contre le fi eur Defmaroux, & vous ferez bien.
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Rapporteur
M e G R E N I E R , avocat.
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aîné propureur,
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A R IO M , chez Ma r t i n D É G O :U T T E , Imprimeur
Libraire, près la Fontaine des Ligne 1 7 8 4
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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Description
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Giraud, Jean-Baptiste. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Giraud
Chabrol
Grenier
Miche
Subject
The topic of the resource
faux
notaires
opinion publique
Duc d'Orléans
donations
droits de lods
droits féodaux
abus de confiance
Description
An account of the resource
Titre complet : A Monsieur le Sénéchal d'Auvergne, ou monsieur le Lieutenant général criminel.
Annotations manuscrites: « Par la sentence rendue à Riom, Desmaroux a été condamné au blame, Giraud interdit pour 6 mois et défense faite à Lougnon de récidiver sous peine de punition corporelle et condamné à 50 livres d'aumone ».
Table Godemel : Faux : dans un acte, reçu le 24 septembre 1776, la feuille du milieu avait été soustraite et remplacée par une autre contenant des altérations essentielles. quel est l’auteur de la substitution ? est-ce celui au profit duquel l’acte avait été consenti, ou le notaire recevant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1776-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0933
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0934
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53094/BCU_Factums_G0933.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigut (63233)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
donations
droits de lods
droits féodaux
Duc d'Orléans
Faux
notaires
opinion publique