1
100
9
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53924/BCU_Factums_M0729.pdf
48c083cd0127faf3e4727e2ff261e442
PDF Text
Text
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
y
Pour
C
a t h e r in e
M O L I N , et les S.r et dame V E N D R I E Z
et B O R N E , intimés ;
CON TRE
Jean et autre Jean CHO U V E N C 3 appelans.
Q U E S T I O N S .
1 ° L a procédure des a ppelans a -t-elle é té périm ée de p le in
droit dans le ressort du parlem ent de T o u lo u se ?
; 2 ° S i e lle n 'est p a s p é r im é e , p e u v e n t-ils, com m e tiers a cqué
reurs, repousser l'a ctio n des in tim és p ar la p rescrip tio n de
d ix a n s , dans le m êm e parlem ent ?
3 .° S 'il n 'y a p as p rescription , les a ppelans so n t-ils recevables en la dite q u a lité d'acquéreurs d'un c o h éritier, à fo rm er
tierce op p osition à des ju g em en s en dernier r e sso r t, rendus
sur a p p o in tem en t, entre leu r vendeur et ses autres coh éritiers
pour le règlem ent de leurs droits resp ectifs à la su ccessio n
com m un e ?
4.0
Thérèse M o lin a -t-e lle eu 10 ou
3 o ans p ou r se p o u rv o ir
c o n tre une renonciation surprise en m in o rité p a r des p rotuteurs,
dans l ’ignorance de ses droits et sans être in fo rm ée que les testamens de ses père et mère étaient n u ls ?
C ette question d o it-elle être décidée par une ju r isp ru d e n ce
autre que ce lle du parlem ent de T o u lo u se ?
5 .° C atherine M o lin a -t-elle p e r d u , p a r la p rescrip tio n de 3o
A
�(*)
a n s, le droit de dem ander le p a rta g e, pendant sa coh a b ita tio n
dans la m aison p a tern elle ?
6.° L e testam ent de Catherine F e r r a p ie , sa ns s ig n a tu r e ,
ou déclaration nég a tiv e de la te sta tr ice, et sans lecture à la dite
testa trice , e s t-il v a la b le? Q u e ré su lte -t-il p o u r ou contre sa
v a lid ité de c e q u 'il est antérieur à la p u b lica tio n de Cordon
na nce de 1735 ?
7 .0
L a prem ière su b stitu tion q u 'il c o n t ie n t , e st-e lle J id é icom m issaire o u jid u c ia ir e ? L a seconde est-elle une su b stitu tion
p u p illa ire ? E st e lle v a la b le? A - t- e lle transm is la succession à
M arie M olin , dernière appelée ?
8.“ L e testam ent de P ie rre M o lin , q u i a sim plem ent lé g u é
un e légitim e à ses enfa n s p u in es , e st-il n u l p o u r v ice de prétériu o n ?
T .L L .S
sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé la C o u r pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catherine
F e rra p ie , rapportée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. L a Cour s’est
vu e forcée d ’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
a c t e ; aujourd’hui la nouvelle expédition est 1apportée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans , et s u b i , pour faire juger un simple
p a rta g e, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Pierre M olin a v a it , dit-on, pour frères M a rc e lin , Biaise , et
Ignace Molin. Tous , excepté le dernier , sont inutiles à la
cause; et pour ne pas l’em bro uiller, les intimés se contentent
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié ù Catherine Ferrapie. Ils ont eu six enfans.
�(
3 )
P ierre M olin , mort en 1743.
Catherine F e r ra p ie , morie en i y 35.
!
M arie M olin.
M arguerite ,
Pierre ,
i.e r m a r i,
N .. Cliam barliac.
m orte s. p.
né le 2 m ai
en 1741.
1731 ;
,
2.e m a r i
N ... D e jo u ï.
3 .e m a r i,
C la u d e-L a m b ert
L acro isiire.
■ 1
Catherine , Jea n n e ,
intim ée.
m. s. p.
eu 1770.
m ort s. p.
le 3 noyemb.
1748.
Jeanne B o rn e ,
L ou is V e n d r ie z ,
intimé«.
L e 2u m ars i y 35 , Catherine F errapie fit son testament. E lle
légua à ses six enfans leur légitim e de droit, à titre d’institution.
.V oici les dispositions et la form e de ce testam ent:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ig n a c e
M olin* curé de C h a m b o n , son beau-frère, et Pierre B o ye r, son
o n cle , « à la charged e rem ettre, quand bon leur sem blera, ladite
« hérédité à P ie r r e , fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
a M olin vint à mourir sans p o u v o ir disposer, ou sans avoir
« recu eilli ladite hérédité, elle lui substitue M arie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans d ista ctio n de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des fr u it s de
a ladite héréd ité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .... Fait et récité audit T e n c e , dans la maison d’autré
« sieur Pierre M o lin , en présence d e ..............témoins soussignés.
« L adite testatrice ille de ce enquise et requise............. »
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, fit son testament : « ¡1
« institue pour son héritier Pierre M olin son fils. . . . Il donne
« et lèg u e à ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
« et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ig n a c e M olin
« curé de Chambon , son frère , et M a r ie , sa fille , de ré ‘n r et
« administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A 2
�;
( 4 )
« de le faire..........Fait et récité à T en ce , maison du testateur »;
Pierre M olin mourut le 21 du même mois de mai 1743. A lo rs
Marie Molin , m a je u re , et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de Gham bon , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux successions, s’engagea aussitôt qu’il en eut l ’âge. Il
mourut à L ille le
3 novembre 174O, et 011 fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.'
Quelques années apiès, 011 trouva l'occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse M o lin , avec le sieur Borne , d ’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l ’œil aux affaires
de la maison , et par le contrat de mariage du 5 juin 1755 , le
sieur Gliambarliac lui constitua 1,900 IV. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du p è re , de la m ère, de
la sœur d é cé d é e, et même on ajouta celle du lrère , quoiqu’on
n ’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse M olin, m in eu re, re
nonça à toutes successions, et s’obligea de la confirm er et rati
f i e r à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander celte
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’ap ithie du sieur
Borne son m a ri, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur C h a m b a r lia c , 11’eût toujours persuadé que M ir ie Molin
était l’héritière de ses père et n ère. Quand le sieur C h am barliac décéda, elle passa en de secondes noces avec le sieur Déjouv,
puis en de troisièmes, avec le sieur L a m b e r t- L a c r o i s i è r e , qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose p rè s,
de dissiper la succession.
Thérèse M o li n , veuve, revint habiter près de sa fam ille, et
11e connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. L e 22 janvier 1783, elle a s s i g n a Marie Molin
et Lacroisière, son troisième m a r i, en partage des successions
de ses p ère, m ère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa p o r
tion rffïorante.
Après cette dem ande, elle fit donation de ses biens à la dame
�( 5 )
...
V e n d rie z , sa iilîe , qui intervint. L e procès fut appointé a T e m ’e ,
et le 2 novembre 1 7 8 4 , il intervint sentence qui ordonna le par
tage du c h e f de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le sur
p lu s, ordonna une estimation préalable des biens des père et
mère communs.
L e s druir parties interjetèrent appel'dé cette sentence ; les pro
cédures se continuèrent en-procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Puy fut choisi pour connaître de cet
appel.
C e tribunal rendit son jugement le 26 janvier 1 7 cj3 , sur pro
ductions respectives, cl jugea dans ses motifs :
i.° Que le testament du père était nul par prétérition; 2.0 cjue
la substitution, portée d;:ns celui de la mère, avait s'isi Pierre
Mniin de la success on , et que ledit M olin étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes ; 3,° que
la rcnouuicition de Thérèse Molin était nulle , comme n’étant
dhigee nu profit de personne , comme faite par une mineure ,
avec i-o'ivent on dr ratification non effectuée, et comme dirio-ée
au pr<ur d’ une pioîutru-c , et que l’action avait duré trente ans.
E n conséquence , ce tribunal ordonna le partagé desdites suc
cessions, |iour etre délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
I)c son côté, (.atlu-rine M o lin , sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœ u r, en 1 o8ii , avait assigné L am bert-L acroisière, son héritier, le ¿17 novembre de la même année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du ch e f de son p è re , et
seulement un douzièm e, du chel de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la cro yan ce, que. Marie M olin était héritière
par dés testamens qu’elle n’avait jamais^vus ; elle demanda éga
lement les successions collaterciles.
: U ne sentence du 17 août 1790 ordonna c o p a rta g e , pour être
expédié un douzième des biens de la m è r e , un dixième des biens
du p è ra , et dans lus mêmes proporlions pour les successions col
latérales.
�,
( 6 )
*_es ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine M olin
alors ayant eu connaissance du testament de sa m ère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du c h e f maternel.
L e P u y ¿tait aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 179^*
O n présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
M a r ie - T h é r è s e M o l i n , en dernier ressort , n’avait garde de
plaider plus long-tems contre C a th erin e , devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent, le
19 février 1 7 9 3 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugem ent , en
dernier re sso rt, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à T hérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’ elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
Il est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
q u ’il occupe , un domaine et’un jard in, et déduiront les créances
q u ’ila'acquittées envers Jean-Antoine M o lin , à la déchai’gedetous.
E t comme évidemment ces biens ne suffisaient p a s, il apprend
qu’il a vendu aux nommés C houvenc , I r a is s e , C u o q , lio y e r ,
D e lé a g e , et laisse à Catherine et Thérèse M o lin , à se pourvoir
contre e u x , ainsi qu ’elles aviseront.
E n f i n , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d ’appel.
L e 26 février 1 7 9 3 , les i n t i m é s signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 ja n v ie r,
pour qu’ils l ’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v r il, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun ; la plupart acquiescent à la deinaude. Le moyen des
Chouvenc n’était pns alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�C7 )
L e 19 prairial on 3 , un jugem ent ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, i .° les biens lib res, z.° ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiescés avant d ’en
venir a u x Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulem ent depuis la demande comme acquéreurs de
bonne foi.
Depuis cette époque le tem<? de la péremption s’accomplit : ce
n ’ est que le 9 vendémiaire an
3 , que les C h ou v en c signifient l’ex
ploit de l’an 4 a Catherine Molin s e u le , pour assister en la cause.
1 L e 16 germinal an 9 , les intimés on» assigné les C h ouvenc en
lu cour, pour se voir démettre de leur nppèl.
('/est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Chouvenc ont inviginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leur nrétenduo bonne foi : t-ppendant ils ont acquis d’une cohén iic te qui avait une pcput dans la m aison, ils ont fait p lu s, ils lui
ont paye le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
S i, quand les intimés ont plaidé avec le sieur L a c ro isière , ils
avaient eu le moindre soupçon de la vente fa îte a u x C h o u v e n c ,
le même procès aurait tout term iné: et certes, en voyant toute
la résistance du sieur Taci-oisière e t combien le tribunal du P u y
a approfondi les questions de ce procès , il est aisé de v o ir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien changé i sa déc ision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’A r d ê ih e , l’idée ne leur est pas même venue d ’attaquer le j u
gement du 26 janvier 1793 , et de faire rejuger un procès qui
leur était étranger ,
et
dont l’issue eut indubitablement été la
même- mais à R i o m , une d iv ersité , ou plutôt une innovation
d e j u r i s p r u d e n c e a changé leur plan. L e s Chouvenc veulent a u
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le fonds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’ il
s’agit d’examiner.
�C3 )
P R E M I È R E
' QUE S T I ON.
L a procédure des* appelons est-elle périm ée?
‘
L a loi Properandwn et
i
...
1’ordonnance de Boussülon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entretenus par
des procédures, sinon l’instance est d-îclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement de 1692 , qui, voulait que la. péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrit n’a eu d’eiiet que dans son
ressort. A u parlement d e .T o u lo u s e , au contraire, l’ordonnance
de Roussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des senteuces; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppleiiit
si on ne la demandait pas.
?
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l’ancien ressort de Toiilolise, la Cour a ju g é , notam
m ent les 18 pluviôse an.r 1 et 12.nivôse an 12 , que la péremption
avait eu lieu de plein droit, même pendant la révolution , et la
suppression des avoués.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
Mais i.° cet exploit assigne lés Chouvenc pour se voir démettre
de leur a p p e l, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire ¿1 cette
démission d’appel; il serait dpnc bizarre de dire que celui-là ap
prouve u n 'a p p e l, qui assigne l’appelant aux lins de s’en voir
déihetlre. Il faut bien que la péremption même soit prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit oblige de s’en tenir à ce rn jyen seul; car en Cour
d’appel il n’y a pas d'exceptions sur lesquelles,il faut statuer préa
lablement) connue l’exige, en première instance, l’ordonnance ’
de
�(9)
de 1667.. On sait assez qu’il faut, en
Cour
souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2 .0
Cette question a été discutée par M . r le procureur géné
ral M e r li n , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le systeme
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit puhlijj tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. L es ordonnances , dit-il, le veulent a in s i,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790»
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m o is , C in sta n ce sera p érim ée de droit et V action
étein te ; donc, a jo u t e - t - i l, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M , r Merlin , en sa discussion , ne s’occupe p a s , comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre m o is, qu’il ne cite
que pour comparaison. L ’ordonnance de Pvoussillon lui sem ble
aussi c la ir e , toutes in sta n ces disco n tin u ées pendant trois ans
sont éteintes et péries. A va n t son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
«
«
«
«
périe, ensorte que nonobstant qu'on ait repris cette in sta n ce
on peut faire juger la péremption................ L ’ordonnance de
Roussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
C ’est un droit p u b lic auquel 011 ne peut déroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
t r è s
- respectables ; mais à la longue ce respect s’afiaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du 16.e siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 149.3, ce que nous ne voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre tiès-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
U
�( 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de T oulouse; la péremption y était jugée de p lein d r o it, et c’est
dire assez qu’elle y était un moyeu de droit public.
L es Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n ’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualilé dans
le jugem ent de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
ve n ir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la pérem ption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
DEUXIÈME
QUESTION.
I
L e s appelons , tiers acquéreurs , p eu v en t-ils in v o q u er, à T o u
lo u s e , la prescription de d ix a n s ?
L e s Chouvenc font des efforts incroyables pour
1établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qu i, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (p ag. 9 de leur
m é m o ire ), que M arie M olin ne p o u v a it p as vendre la p o rtio n
de ses coh éritiers, q u ’ i l est CERTAIN que ces cohéritiers avaient
TRENTE ANS u t i l e s p our réclam er contre / o m / c v e n t e f a i t e par
l'u n d'eux.
M a is, continuent-ils, la question con cern e T acquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les v e n te s, et de ne pas les avoir
con tre l'acquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut m ieux
dire que les Chouvenc ont été forcés-de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en e lle - m ê m e , ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit ro m a in , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour 11e pas faire de confusion à l ’a v e n ir, et respecter le
�£•
( ii )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
com m encées seront réglées conformément aux lois anciennes.
11 faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
a la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obscurite dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que l’ usage est VinterprèLc
le p lu s sur des lo is , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement o b s c u r e , el si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur , on voit aussitôt après l’authentique m alæ
f u le i qui l ’ explique et la com m ente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
J îd e i possessore a lié n a n te , cessât lon g i tem poris prescrip tio\
s i verus dom in us ig n oret j u s suum et a lienationem fa cta m .
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présum ant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite der l'authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce n ’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ig n orâ t verus a lien a ta rum rerurn dom in us, non a liter hune e x c lu d i n isi p er tricn n a lem prescriptioneni : non valente dicere eo qu i res h oc m odo
p ossid et quia ipse bond fid e p o ssid et, quandb ip se à m ald Jid e
p ossidente hoc a ccep it. Novell. 1 1 9 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous 11e savions que la C o u
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant
au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort attestent, sans exception , que la prescription de dix ans n’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
B 2
�C 12 )
Boutaric , page 182 , a , sur ce s u j e t , une discussion très-ap
profondie. Serres, page 137 annonce la seide prescription de
trente ans comme un principe non contesté. Graverol et Larocheflavin , p.
5 io ; Catelan , p. 507, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usucapion de dix a n s , que
« Justinicn même avait transformée en prescription de trente
« ans; q u ’ainsi le tiers acquéreur purge l’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
Furgole , en son traité des testam ens, tom.
3 , pag. 4 1 7 , s’ex
plique ainsi : « A u parlement de Toulouse , ou ne connaît d’autre
« prescription pour l’acquisition ou la perte des droits person« nels 011 réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente an s, même ¿1 celui qui possède avec
« un titre, lequel 11’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« com m e ayant été consenti à non dom ino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
lo use, A i x , Bordeaux et Grenoble. O n peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lnpeÿrère , lettre P , n.°
83 ;
M ontvalon , page i o 5 ; D econnis , tom. 2 , col. 589 ; Bretonier ,
v.° prescription ; M . r M e r lin , v .° hypothèque , § . i 3 , et la
m axim e est tellement devenue triviale d;ms les parlemens du
droit écrit, que suivant D upérier , » la prescription de dix a n s,
« en ce c a s, n ’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui 11e s’y con
formait p a s; le docte D om at y avait réfléchi lui-m êm e, et ne
s’en étonnait pas : « L es lois, disait-il, qui marquent le tems des
« prescriptions ne sont (pie des lois arbitraires, car la nature 11e
« fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle difïe« reniaient en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. Il y en a ou elles ont été
« réduites
à
une seule prescription de treille ans. »
N ous verrons sur la 4.« q u estio n , que la C our de cassation a
�( iS )
consacré, p a r trois arrêts, la necessitò de sui vr e la j u ri sp rud enc e
d u p ar le me nt de T o u l o u s e , et expresse'ment sur la matière des
prescriptions.
C o n c l u o n s "donc q u e les C h o u v e n c ne p eu ve nt i n vo q ue r la pres
cri pt ion de d i x ans , dans u n ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou j u g e m e n t q u i , en s e mb la bl e cas , l ’ ait jamai s admi se.
D a n s leur propre système , il faudrait les suppose r de b o nn e l o i ,
et il est i mpossible q u ’ ils le fussent.
L a l o i , au r este, n ’est n u l le me n t en l eur f a v e u r , et ce n ’est
q u e sur ab o nd a mm en t q u ’ il y a lieu d ’i n v o q u e r l ’i nva ri ab il it é
de la jurisprudence.
T ROI S I ÈME
QUESTION.
L a tierce op p o silion des appelans, e s l-e lle re ce v a h le ?
« P o u r être reçu tiers o p p o s a n t , disent les a u t e u r s , il ne suffit
« pas d ’ avoir intérêt de l’a t t a q u e r , il faut a voir élé partie n éces« sairc dans le procès j u »
L e s i . l i o u v r n c étaient - ils donc pnrlies nécessaires da ns le
procès d ’entre les intimés et le sieur Lucroi si ère , de q u o i s’ugissait-il ? d’ un p a r t a g e .
M a i s un partage :1c succession ne p ouvai t être fait q n V n f r e
cohéritiers. A c lio fam ihœ ercisciuniœ solis hœredibus cotn-
pelit.
L e s questions d ’un p ar tag e sont tellement étrangères à tous
a ut re s , q u e q u a n d un li.u-s achète la porti on d ’un cohéri ti er ,
les autres p eu v en t l ’ex pul se r en le r embo ur sa nt , p o u r l ’e m p ê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Au ssi en d r o i t , l ' a c
tion en 'partage e s t - e l l e , p a r sa seule d é fi n i t i o n , e x c lu s i v e de
toute admission étrangère : A c lio familiev crciscimdœ est aclio
ci vi lis qnâ cohœredcs i n t e R î>e agunl de com muni hœreditaie
dividundâ.
J u s q u e - l à u n a c qu é re ur n ’est pas partie nécessaire d a ns n n
p a r t ag e ; il a suivi la foi de son v e n d e u r , et q u a n d la n o v e l l e
1 1 9 le réputé a cq u é r e ur de m au v a i s e f o i , p a r cela se ul cple ac
�(H)
_
cep it à m a lâ J îd e p ossid en te, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont
nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d ’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
L es Chouvenc n ’ont pas dû être assignés nécessairem ent’'
L ’ordonnance de 1667 d'ailleurs 11e donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
ou leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A in s i,
dit R o d ie r, un c réa n cier, un acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u if. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles luiacecordenl le droit d’interjeter a p p el, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S ie m p to r de proprietate v iclu s e s t , eo c e ss a n te , auctor eju s
appeliare poterit y item s i auctor egerit et v iclu s s i t , non est
deneganda em ptori appellandi fa cilita s. . . . l d que ità co n slitutuin est in persond creditoris. L . 4. ( f ■de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur; et quand celui-ci a lui-même interjeté a p p e l , la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès , si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Q uiu cliant si auctor appcLlaverit , deindù in causai
d ejen sion e suspectas v is u s e s t, pertndù dc/ensio caitsœ einj.tori
com m iltcnda e s t , atijue si ipse appeliasset. L . ead.
L e ( ’ode civil s’est conformé à ces principes,
sur-tout
en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
sommé , il n’admet les créanciers qu’à intervenirà leurs fr a is ,
�C 15 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice cl’une opposition par eux formée (art. 882).
Il y a plus ; car si , par l’eflet du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l'immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tons acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’é v in c e r, l’art.
883 lui répondrait « que chaque
« cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous
« les effets compris en son l o t , ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine M olin o n t , dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
C h o u ve n c, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au p a rta g e , mais qui pouvaient seulement y intervenir , trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju g é e , et ne peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
S i, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en fa veu r
des intim ées, et on n ’en citerait pas un seul qui fût favo rab le
aux Chouvenc.
Parm i le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
liv re s , nous 11e puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l ’espèce de lad écicision n ’a pas bien été saisie.
1.0 M . r C o ch in , en ses notes alphabétiques, tom.
dit ; « jugé par arrêt du
5 , pag, 5 2 7 ,
3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Am elot et le comte de T avan es,
que le tiers détenteur , assigné en déclaration d ’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre sou
« v e n d e u r , ne peut y former tierce opposition, q u oiqu e son
« acquisition y soit antérieure. »
2.0 M . r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , c jtc
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Conllans était en procès
�(i6)
« avec un seigneur voisin pour m ouvance de fief. . . elle vendit
« sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
« son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
« des droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet a rrê t. . .
« l’acquéreur y forma tierce opposition , 011 lui répondit qu’il
« devait s’imputer de n ’être pas intervenu : par arrêt du 3 i
« mai 1742, il fut déclaré non recevable dans sa tierce opposition. »
P a r le 2.° arrêt, « le marquis de L usignau vendit , en 1720 ,
« des (erres au sieur Dauriac. . . . L es héritiers de.la dame de
« Monriquet liront, en 17 2 7 , confirmer , sur a p p e l, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de L usignan seul. M . r .Dauriac
« soutint q u ’on aurait dû l’appeler, et forma tierce o p p o sitio n ....
« O n lui répondit q u ’ il devait intervenir. . . . q u ’il était censé
« avoir été partie dans l’arrêt j)ur son v e n d e u r, q u ’en celte
« partie il était Vayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre i~5o , il lut déclare non recevable. »
3 .° L e B u lletin o[ficiel de cassation rapporte un arrêt du 12
fructidor an 9 , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s.r Forestier se lit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort cl par
défaut du
3 janvier 1792. . . G o d et, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le finit d ’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art. 5 et 11 du titre 27 de l ’ordonv nancc de 1667, et l’art. i . cr du litre
35 . . . • Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes , ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parlies appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessart , était à cet égard
« son ayant cause. . . . que Lessart a éléappelé. . • . que Godet,
« en qualité de son ayant cause , n ’aurait pû être recevable a
« a lla q u e rc e jugem ent, q u ’aulant q u ’il eût élé juslifié que Lcs« sai t atiK’ il été lui-même admissible à se pourvoir.
que les
« juges do Can , en admettant la tierce opposition du cit. G o d e t,
« oui violé l ’arl.
5 de l'ordonnance concernant l'a u to rité de la
« Chose ju g é e , et oui contrevenu ibmicllement a l’art. i . cr du
litre
�« titre
( *7 )
35 , qui ne perm et de rétracter, autrem ent que par requête
« c iv il e , les jugem ens rendus en dernier ressort , avec ceu x
« qui y ont été p a rties, ou leurs ayant cause...................Casse
« et annulle etc. »
V o ilà donc la pleine confirm ation de la loi 4 iï. de a p p ella tion ib u s et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent m êm e attaquer la chose
ju g é e , par la voie de l’a p p e l, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugem ent est en prem ier ressort; par la requête civile , s’il
est en dernier ressort.
T o u t cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. A u cu n s de ces arrêts ne sont dans
' l ’espèce d’ uu procès de succession. S o lis hœredibus cornpetït.
D e u x autres m oyens résistent à l ’admission de la tierce oppo
sition des appelan». i°. L es tierces personnes ne sont admises in
définim ent à s’opposer, d’après l’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugem ent. M ais il a
été signifié aux C h ouvenc en 1798; et ils n’ont form é tierce op
position qu’après dix ans. z ° . D ans les circonstances d e là cause,
c’était de leur part une action p rincip ale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
L es Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. C epen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite com m une. Quand ils voyaient C ath erin e M o lin
dans la maison p atern elle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu so rtir; quand
Thérèse est revenue de l’A rd èch e dans son pays n atal, 11’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un pro cès, ont-ils pu
se défendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et q u riu r-to u t en a payé le prix capital à une
, fem m e séparée de biens.
,
A u re ste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
condam né sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
G
�c
1 8
)
e n co re , d’ exîgèr en règle générale, que tout cohéritier dûf sa
voir s’il y a des acquéreurs , avant d e re ch e ich e r ses droits, cVstà-dirè fût tenu de connaître lès forces de la succession , lors
q u ’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action da
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues ?
Q U A T R I È M E
Q U E S T I ON.
T hérèse M o lin avait-elle d ix ans ou trente ans p o u r se pour*
voir contre sa renoncia tion ?
C ette question doit-elle être décidée p ar u n e ju risp ru d en ce
autre que c e lle du parlem ent de T o u lo u se ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne m arque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouveric
à pénétrer, par une voie d’intrusion, dansune famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on a annullé'deux testamens: J e m 'y
o p p o se ; je veux faire rejuger tout c e la ; je veux scruter vos
testamens, vos contrats de m ariage, tout ce qui s’est passé dans
votre maison depuis i y 35 jusqu’en 1793. V o s cohéritiers n’y
seront pas même a p p e lé s, car il y a chose jugée avec eux , et
c’ est inoi seul qui veux faire r é g l e r , avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime..
Si ce système des Ch ouvenc, qui cependant est toute la base
du procès a c t u e l , ne révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, v oy ons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ée et remise en litige doit être
rejugée .
T hérèse M o lin s’était pourvue en 178 3 , contre une renoncïa-
�C 19 >
tíon de 1755. E lle y a été re ce va b le , parce que dans tout le par
lement de T o u lo u s e , et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de
3 o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actio n s y étaient réglées à cette d urée, à la seule exception de
l ’action hypothécaire.
L e s Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r , ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n ’a m ême pris quelque
consistance que depuis le Code civil et pa r induction de l’un de
ses articles; jusques là , la Cour d ’appel ne s’était pas prononcée
et on trouverait m ême dans l ’un de ses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrem ent, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’a p p e l, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose jugée ,
m êm e des questions nées en 1783 , dans un parlement étran ger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
com m e lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui eu serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju g é e , mais
encore quand elle serait pleinement en litige ? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était in con n ue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une m arche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de l u i , par le pouvoir que ïeg e regid
i l en a donné au prince. E n les exécutant, il les e xp liq u e, et la
manière
d’après
d’expliquer
un
les
lois
par
l ’usage ,
dit
V in n iu s ,
auteur la tin , vaut m ieux que ce qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valere leges c/uce m oribus com probatee surit
quant ques scripto c o n sta n t, vérité bien plus marquée encore
j>ar la maxime si co n n u e , que la jurisdrudeace est le m eilleur
�( 20 )
interprète des lois. C onsuetudo est legurn optim a interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est pas seulement un mode de
ju g e r , mais d ’après la définition de Vinnius , J u s litiœ ha b ita s
p ra cticu s , n’a pas cessé d’êlre une espèce de législation impérative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand R om e n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudenlum fixaient la m a
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrifcde soumettre les lois
à la jurisprudence et de respecter les usages. Prœ ses p ro v in ciœ ,
probatis h is quœ in o p p id o , frcquenter in eodem controversiœ
g e n e r e , scrvata s u n t , cauàd cog n ild statu it. L . 1. cod. quœ s.
long. con s.
L a Cour d ’appel donne tous les jours cet exem p le, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait c ro ire , par le but de
son inslitulion , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
m elle sur la question qui nous occupe.
« Considérant ( porte un i . er arrêt du 2 messidor an n ) , que
« les dispositions du droit romain 11e fon,t loi dans les pays même
« q u ’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la ju risp ru d en ce ; qu’il est constant q u e , par
« une longue suite d’arrêls sem b lab les, le parlem ent de T o u « lo ù se a j u g é , ètc. » (S irey , page 3 0 9 ).
2.0
Dans une autre cause, du
5 floréal an 1 2 , la Cour de cas
sation a dit: « Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre pré« sens, et 20 ans entre absens ; c e p e n d a n t, dCaprès la ¡u risp ru « dence du parlem ent de T ou lo u se constatée par divers arrêts,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s acquérir que par la
« possession im m ém o riale, et que c est a in si qu i l a entendu l(X
« lo i , etc. casse et aunuile, clc. » (B u lle tin , n.° 9 2 ),
�( 21 )
3 .° U n arrêt du 2Z du m êm e mois a jugé de m êm e, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir lé g isla tif, pouvait être considérée com m e
«c fixant le sens des dispositions législatives. » ( S ir e y , p. 2 6 7 ).
Si donc la C our adm et les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au P u y avec L a cro isière , elle ne les jugera
évidem m ent que par la jurisprudence du parlem ent de T oulouse.
Thérèse M olin a renoncé en 1 7 5 5 , cela est v ra i; m ais, i.° elle
était m ineure , et la convention porte q u ’elle sera tenue de co n
firm er et ratifier à sa majorité. E lle n’en à rien fait. Il n’y a donc
pas de partage final là où il y a lieu de le confix-mer en m ajorité;
ce n’est jam ais qu’ une m esure provisionnelle.
2.0
O n fit renoncer Thérèse M olin à tous droits et sup p lém ent.
I l est évident qu’on lui fit entendre en m inorité qu’ elle n’avait
qu’ une légitim e de rigueur. D o n c on la trom pait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .° Si on suppose qu’elle a approuvé les testam ens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. C elui-là
seul prescrit le droit de réclam er contre une destination de légi
tim e , qu i agnovit ju d ic iu m defu n cti. T e ls sont les principes
invariables com m e la C our l’a souvent ju g é , et notam m ent les
31 therm idor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4.0
L e testament de 1735 a été expédié par le n otaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’était donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse M olin pouvait croire M arie
M olin substituée, puisque la condition du décès de P ie r r e , sans
avoir rem is, était rem plie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r e c u e illi, ne l’était pas. O r , non videnlur qu i errant c o n sentire , et la prescription ne court que du jo u r de la découverte
de la vérité.
5 .° Thérèse M o lin , née en 17 3 3 , avait deux ans au décès de sa
m è r e , et dix ans au décès de son père en 1743. M arie M o iin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au m ois de février
�C 22 )
1718. L e père l ’avait chargée de régir et adm inistrer conjoinletement avec Ignace M o lin , curé de C ham bon; et les Chouvenc
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais c o n n u s , nous apprennent que ledit Ignace Molin parle,
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et m è r e , don t jo u is s a it M arie M o lin .
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins c o m p ta
ble depuis 1 7 4 3 , envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n ’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien in ég a le, lorsqu’il fut traité en 1755 , entre M arie
M o lin q u i, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testamens, et Thérèse M olin qui
ignorait tout.
O r , le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d’admettre eu
pareil cas le renonçant non v isis ta b u h s , a se pourvoir pen
dant trente ans. Q u ’on consulte M a y n a r d , liv. 2 , chap.' 99 et
100 ; D o liv e , liv. 4 , chap. 16; C atelan , liv . 8 ; Bretonuier, v .°
restitu tio n ; ou plutôt qu ’on parcoure tous les auteurs de cè
p a r le m e n t, ou ceux qui mentionnent sa jurisprudence , on ne
trouvera nulle part que l'art. i 34 de l ’ordonnance dé i 53g ait
été jamais appliqué à celte espèce.
L e parlement de P a r is , après l ’ordonnance de i539 , jugea
lo n g -te m s, comme le parlement de T oulouse a toujours ju g é
L e s auteurs du tems même de cette ordonnance , notamment
M . r D u v a l , de rebus dubiis , enseignaient q u ’il n ’y a contre les
actions en nullité que l ’action Irentenaire. Quarante ans après f
le parlement de Paris ohangca sa jurisprudence!, mais enfin il la
changea de nouveau après l'ordonnance dé 1667 ; et il a inva?
riablement jugé depuis que l’art. 134 de l’ordonnance de i o 3g
ne s ’appliquait q u ’aux actions rescisoires.
C e lle jurisprudence constante s’est mainlenue jusqu’au Code
civil. O n a vu encore, dans les disoussions sur ce Code, les .efforts
des sections réunies de la Cour d’appel de Paris, ¡pour faire main-
�......................... '( 2 3 )
.
tenir l ’action de trente a n s , et on n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d ’Orléans et de L iège.
L e tribunal civil du P u y-d e-D ô m e commença par suivre les
anciens principes. I l jugea le
28 pluviôse an 4 , entre lés
Cham pom ier et S e z e l, que l ’action en nullité avait duré trente
a n s, en floréal an
5 , à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lu i donnait pas cet exemple;
elle avait ju g é en thèse le
3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de m a ria g e, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
« Attendu que l ’art. i 3 i de l’ordonnance de 1 5 3 9 , déclare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra« teurs. etc. directement ou ind irectem ent, avant le compte
« r e n d u , et q u ’une vente , faitë par une mineure en faveur d ’une
« personne qui administrait ses b ie n s , présente un avantage
« indirect ;
« Attendu q u ’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art.
tit. 29 de l’ordonnance de 16 6 7 ,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
-« com pte, c’est le compte seul qui peut éclairer le m ineur sur
« ses intérêts ;
« Attendu que l ’art. 184 de l ’ordonnance de i 53g qui restreint
« le délai à dix ans , n ’est relatif qu ’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de com m un avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres ,
« casse et annulle , etc. »
Il est même remarquable que le Bulletin officiel ju s q u 'à e t
jo u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de R io m ne s’est prononcée, pour les d ix
ans , pour la première f o is , que le 18 prairial an 11 , c’est-àd ire, depuis le Code c iv il , et par induction de l’article 475. O u
verrait m ê m e , dans un arrêt du
25 nivôse an 10 , que la pre
m ière section avait admis une fem m e pendant trente a n s, et jug<r
�( H )
encore que l ’action n’avait couru q u ’après le décès du p è re , q u i
avait constitué la dot m aternelle par le contrat attaqué. M ais si
cet arrêt ne ju g e pas la question isolém ent et en thèse, il paraît
au moins certain que la C our n’a jam ais ju g é en faveur de d ix
a n s, avant le Gode civ il.
Com m ent donc concevoir que la Cour pût infirm er le ju g e
m ent du P u y qui a adm is Thérèse M o lin , après d ix ans , lors
que ce tribunal a ju g é com m e son parlem ent , com m e le par
lem ent de Paris , com m e la C our de casation elle-m êm e.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L 'a c tio n de Catherine M o lin est-elle ‘p rescrite p ar trente ans ,
q u o iq u 'elle ait co h a b ité la m aison p a tern elle ?
L e s Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n ’ont pas la moindre analogie.
i.o
D argentré q u ’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s'occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire q u ’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. E n f i n , L a peyrère , bien loin de vouloir la p rescription, ♦lit expressément
ce ciui suit : « T a n t que les enfans sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitim e ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « id e m , en matière départagé »;
et il se fonde sur Coquille , en la question z 5().
M a is , outre L a p e y r è r e , on ne voit pas d ’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrem ent, et si on en cite
plusieurs a u tre s , c’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n ’ont pas vo u lu chercher la question où ils 1 auraient
trouvée.
D o liv c en fait une question expresse au chap.
3 i du liv. 5 ,
et décide que « si les enfans vi v e n t en com m un sur les biens de
« l’Jiériidité , celte prescription ne court pas contre eux , en cette
« rencontre,
�( »5 )
f< rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment q u ’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d é fu n t , ils sont censés être en possession. »
D o liv e cite deux arrêts des xo janvier i 63o et 26 août i 636 .
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l , liv. 2 , chap.
36 ;
S erres, pag. 294 ; D unod , p. }io i ; Despeisses , tom. 2 , p. 0 1 3 ;
et L e b r u n , liv.
3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion , si les auteurs ne l’enseignaient pas.
L a Cour d’appel vient très-récemment de p i'ononcer, dans
un arrêt du i 3 ventôse an i 3 , le m o tif suivant :
« A l tendu que l’habitation d’Antoine et Pierre V e sch am b e ,
« dans la maison paternelle , a constamment réclam é la con
te servation de leurs droits. »
A in si Catherine M olin qui a habité la maison paternelle jus
q u ’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la d e m a n d e ,
n'u pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, com m e les
Chouvenc le font aujourd’hui , que la cohabitation n ’avait pas
empêché de prescrire.
r
L es Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard ? quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J e a n n e , et celles de Marguerite et de Pierre M o lin ; car l’a c
tion d ’ un cohéritier se compose de tous les droits partiels , q U 'h
ad hœreditatem veniunt ; et comme les portions advenues à
Catherine Molin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne , aussitôt leurs décès, en vertu de la rè"le 1p ». ,
7
#
#
o >
m ort
fü is it le v if , Catherine M o lin a é t é , dès cette é p o q u e , p ro
�C 26 )
priétaire d’une quotité plus considérable , et n’en a pas plu»
perdu une fraction que la totalité.
S i x i è m e
Q u e s t i o n .
L e testam eut de Catherine Férrap te e s t-il v a la b le?
« U n testament, dit R ic a r d , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n e f f e t , dans cet acte si im p o r ta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1785 est vicié par deux nullités textuelles : i .°
il est dit f a i t e l ré cité en la m aison de P ierre M o lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a d ic té , pour qu'il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
Il n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n ’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L a d ite testa trice i l l e de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 1735 dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lec« ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’il ne sait ou ne
«. peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
M iis , disent les Chouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l’ordonnance de 17.35 : cela est vrai.
Mais cette ordonnance ne fait que répéter eu cette partie les
dispositions des ordonnances d ’Orléans et de Blois.
« Et en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« signer , les notaires fe r o n t m ention de la réquisition par eux
�( 27 ) _
« faite aux parties ou témoins de s i g n e r , et de leu r réponse
« q u ’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i 65 .
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de xy 35 .
E t les auteurs qui ont écrit avant l ’ordonnance de i y 35 r
enseignent que cette réponse né peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e M aitre , sur Paris , article 14»
chapitre i . e r ; R a v i o t , question 164; M aillart , sur A r t o is ,
art. 74 )•
O n cite souvent R icard, comme ayant rapporté un arrêt de i 65 z
validant un testament où il était dit : « L e q u e l n ’a p u signer ,
« interpellé de le faire. » M ais on pourrait voir que R ica rd le
d ésappro uve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence^que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
A u ssi R ic a r d , n.° 15 2 6 , citant un arrêt
ment où le testateur a déclaré ne savoir
notaire eût dit l’avoir interpellé , ajoute :
« fois autrement , si le notaire déclarait
qui validait un testa
signer , sans que 1^
« Il en serait toutede son nom que le
« testateur n ’a pu signer , parce q u ’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse d u
« testateur.... Car le n o ta ire , dit R icard , au n.° i 568 , ne doit
« contribuer d ’autre chose que de son oreille et dé sa m ain ,
« dans la rédaction du testament. »
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart un arrêt du
3 septembre 1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n 'a va it pu sig n er à cause de sa fa ib le sse , de ce en qu is.
Le
tribunal civil du Puy-d e-D ôm e a ju g é deux fois de la
m êm e m a n i è r e , le 17 ventôse an 6 , sur appel du C antal , et
le
23 pluviôse an 7 , entre les héritiers V a c h i e r , cl’A ria n e .
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la C o u r î
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur déD 2
�.
, ( ? 8 )
clarc ne savolr'slgner, il soit fait m ention expresse de sa d écla
ration ; ainsi la loi n ’a pas change , et lu cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
L e s Chouvonc se sont imaginé qfie les ordonnances d ’Orléans
et de Blois n ’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait ([ne tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
s m s dire mille part que leur parlement ne les adopte pas.
i
A la vérité l) jlive dit que de son tems on n’était pas rigo u
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan i n it pas si le testateur avait signé ; mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. F u rg ole dit au contraire
que les fo rm a lités que les lo is prescrivent, p ou r la v a lid ité des
testam ens , so n t de droit p u b lic , et q u ’un testament doit porter
la preuve avec lui-m êm e; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement
observées.
O
D ans le testament de Catherine F e r r a p le , il n’y a pas même
la preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Chouvenc
se sont efforcés de persuader q u 'ille veut dire HUtéré , puis
(\u H 'itéré veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sa it écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
M ais d ’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une antre irrégularité ,
en ce q u ’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
U n arrêt de règlement de i 685 défend aux notaires d’ user
d ’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pas il l’essence de l’a c te , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
V in n iu s et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
tout , qui sont testa tio m e n tis , il iaut écrire en toutes lettres
et d ’une manière intelligible sans user de siniples notes ou abré-
�( 29)
vial ions. Cœterum litteris iisq u e u sita tis et legibilibus scri
be n du m esse p la c u it , non s ig n is , obscurisve n o t is , /.
6 , § . u/t.
de bon. p oss.
L e mot illit é r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’A cad ém ie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferr iè r e , ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de T rév o u x le mot illé tr é , signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n’y a pas dans le testament il lit é r é , il y a i l l e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver
dans ce mot bizarre, une déclaration de la testatrice, qu’elle n ’a
pu ou su signer. Allon s plus loin même , le m ot illité r é ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I O N .
Q u e lle est la nature de la su b stitu tion du testam ent de 1-735?
a -t-elle transm is la su ccession à M arie M o lin ?
Q u a nd ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’eiFet de réduire Thérèse et Catherine M o lin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet é g a r d , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ ils accréditaient encore plus
par une expression infidelle de l’expédition, q u ’ils avaient d’abord
produite, de ce testament.
L es héritiers institués, disaient ils , étaient Ignace M o lin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de rendre la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre M olin est mort en 1 7 4 8 ,
et Marie M olin était appelée à la substitution , dans le cas ou
ledit Pierre M olin décéderait sans avoir rem is la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la m axim e
substitutus substituto est substitutus in stitu to , M arie M o lin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l'extrait vidim é du testament de
�( 3° )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la Cour , qu'au lieu du
mot remis il y a recu eilli. Cela pose', voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d ’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution Rdéiconnnissaire et la substitution
fiduciaire.
L a pi’emière fait passer réellement la succession sur la tête d a
grévé : l’autre ne lui transmet qu ’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus , qui a fait un traité sur les fidéicomrnis, le définit
ainsi. F id u cia riu s est hœres q u i, non s u î con tcm p la tio n e scd
alterius gratiâ in stitu tu s , eidem restituerc hcreditalem ,p o s t
diem certam v el incertain , rogatus propom tur.
« Ces, substitutions, disent Henrys et Bretonier, sont com « munes dans les pays de droit é c r i t , sur-tout en faveur du sur
it vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l’obéissance h o c co n silio ut p arenti obsequerentur..........
k Q uoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pa3
« marqué dans le testam ent, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
« lib e rté , et n ’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
. « O n doit penser, dit ailleurs le même au te u r, q u ’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; q u ’il vise plutôt à leur
« u tilité , et ne l’avantage q u ’à leur considération ; qu ’ainsi il ne
« l’a instituée que par la nécessité de leur bas â g e , non ut f ili is
m inoribus o b e s s e t, sed. p o tiu s ut eis consuleret. » ( hem\ t.
i , c r , p. 736 , L 3 , p. 69 ).
T ous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du fiduce, q u ’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�(
3i )
i.° Calherine Ferrapie avait un fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2-o Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédité à son
fils, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d'aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grevé de fidéicoinmis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( 1. i . « § . 5 } ad treb. ) ;
3 °. E n remettant l ’hérédité à Pierre , ils élaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre c h o s e , sans
aucune stipulation ;
4.0
Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , u t p arentibus
obsequerentur. A cela p r è s , elle exigeait les mêmes soins pour
eu x, que si elle eût été vivante , sed p o tiu s ut eis consuleret.
A in si disparaissent Pierre B o j e r et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre M olin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre M olin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-mèine de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u 'il v în t à m ourir sans
p o u v o ir disposer y ou sans a v o ir r e c u e illi la d ite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non e x tite r it h œ resJ iliu s ,
aut s i irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pas mort sans p o u v o ir disposer ,* car
en p a j s de droit écrit le mineur avait testam enti ja ctio n em .
aussitôt q u ’ il avait atteint sa puberté. O r , Pierre M olin , né
en 1781 , était p u ! ère en 174s , et il n ’est décédé q u ’en 1748.
S i ce m o je n n ’était pas pérem ptoire , on opposerait aux
�,
c 3 2 }
Chouvenc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
com m e l ’enseignent les institutes , is subslituere p o te st liberis
im puberibus
quos in p o t e s t a t e
iiâbet,
cùm eju s œ tatis sin t
in quâ ip si tcstam entum fa cere non p ossu n t.
Il
ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
encore par le principe enseigné par Cujas sur celte matière ;
c’est que la règle substiluLus su b slilu to n’a pas lieu en la subs- ,
titution p u p illaire , et le substitué au pupille n ’est pas censé
l ’héritier du testateur. ( C u j a s , ad I. 41. de vul. et pup. su b .)
A insi le testament de i y 35 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière ù Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son ch e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e testam ent de 1743 e s t- il n u l ?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité ne change rien à
l ’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce qu ’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre M olin père a institué son fils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses enfans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hæredem in s titu â t, aut exhœ redem norninatim f a c i a t , a lioquin in u tiliter testabitur.
Cette disposition a élé répétée dans l’art. 5o de l’ordonnance
de 1 7 3 5 , qui dit q u e , dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M ais l’héritier, institue par le testament de 174^ j étant décédé
ab in te s ta t, il importe peu que scs sœurs viennent de son ch e f
�.
(
3
3
)
ou ju r e suo , h la succession de leur p è r e , il n’est pas moins vrai
de dire q u ’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
L es Chouvenc terminent leur mémoire par d em an der, x.°
q u ’on estime les biens de la succession M olin ; 2.0 q u ’on accorde
à Marie M olin leur venderesse , les prélèvemens q u ’elle aurait a.
faire, notamment trois q u ’ils indiquent; 3.° q u ’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances * s’il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugem ent dont est
ap p el, y a fait droit , en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intim és, avant d’en venir aux
Chouvenc.
A in si les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient fa ire , pour conserver l’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugem ent dont est appel.
Alors , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils a u
ront droit et intérêt d ’en re q u é rir, s’il y a lieu , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n ’est q u ’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité Je
fraude q u ’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans m otif; car
la fraude ne se présume pas.
T o ut prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès , après en avoir perdu deux , et les
exclamations des C h o u ven c, pour crier a la collusion , ne sont
q u ’ une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
foule de papiers de la famille M olin , q u ’ils ne pouvaient tenir
que de lui. T o ut ce q u ’ils ont expliqué sur celte famille avec
tant de détails, ne peut être de leur science personnelle, et il
st remarquable q u ’ils n’on t jamais demande en com m unicat ion
E
�(34)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés q u ’ils elevent.
M ais tel est le résultat Fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont q u ’un piège tendu a u x
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
•variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour veu t statuer
sur les questions d ’un partage, avec l’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien ju g é du jugem ent en dernier res
sort de 1 7 9 3 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce ju g e
ment étaient sages et lé g a le s , et n ’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e D A U D E , avoué.
A
R I O M ,
De l’imprimerie du Palais, chez J.-C. SA LLES. (An XIII).
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1735-An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0729
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53924/BCU_Factums_M0729.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53884/BCU_Factums_M0624.pdf
16657c05abada09a1fbe2a19ba3c350e
PDF Text
Text
new
x m a m i Ai9aLEMx?sjii£±t m m
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
POUR
C
a t h e r in e
M O L I N , et les S.r et dame V E N D R I E Z
et B O R N E , intimés ;
CONTRE
J e a n et autre J e a n
CH O U V E N C
, appellans.
Q U E S T I O N S .
1 .° L a procédure des app elans a -t-elle é té périm ée de p le in
droit dans le ressort du parlem ent de T o u lo u se ?
2 .° S i elle n'est p a s p érim ée, p e u v e n t-ils , com m e tiers acqué
reurs, repousser L'action des in tim és p ar la p rescrip tion de
d ix a n s , dans le m êm e parlem ent ?
3 .°
S 'il n y a p as p rescription , les app elan s so n t-ils rece
vantes en la d ite q u a lité d'acquéreurs d'un co h éritier, à form er
tierce op p osition à des ju g em en s en dernier r e s s o r t, rendus
su r a p p o in tem en t, entre leu r vendeur et ses autres co h é ritie rs,
p ou r le règlem ent de leurs droits resp ectifs à la su ccession
com m u n e ?
3
4 -° T hérèse M o lin a -t-e lle eu 10 ou o ans p o u r se pourvoir
con tre un e renoncia tion surprise en m in o r ité p a r des p rotuteurs,
dans l ' ignorance de ses droits et sans être inform ée que les testam ens de ses p ere et m ère étaien t n u ls ?
C ette question d o it-elle être décidée par une ju risp ru d e n ce
a u tre q u e ce lle du parlem ent de T o u lo u se ?
5 .°
3
C atherine M o lin a -t-elle p e r d u , p a r la p rescrip tion de o
A
�c o
a n s, le droit de dem ander le p a rta g e , pendant sa coh a b ita tio n
dans la m aison p a tern elle ?
6.° L e testam ent de Catherine F erra p ie , sans signature ,
ou déclaration nég a tiv e de la te sta tr ic e, et sans lecture à ladite
testa trice , e s t-il valable ? Q u e ré su lte -t-il p ou r ou contre sa .
v a lid ité de c e q u 'il est antérieur à la p u blica tio n de C ordon
n a n ce de 1735 ?
rj.° L a prem ière su b stitu tion q u 'il c o n t ie n t, est-elle J id é icom m issaire ou fid u c ia ir e ? L a seconde est-elle une su b stitu tion
p u p illa ire ? E st elle v a la b le? A - t- e lle transm is la succession à
M arie B iolin , dernière appelée ?
8 .° L e testam ent de P ierre M olin , q u i a sim plem ent lé g u é
u n e légitim e à ses en/ans p u in és , esi-il n u l p o u r vice de prétérition ?
F W W i 'V V % % V V W V X W W \ W % V % .‘W
I
V.
t.
W
%
r. t . fi sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé La Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle 'du testament de Catheriue
F e rra p ie , rapportée-par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. L a Cour s’est
vue forcée d ’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
a c te ; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapportée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 a n s, et s u b i , pour faire juger un simple
p a r ta g e , quatre degrés de juridiction. .
■ F: A I T S.
• r. ,
■ ...
Pierre M olin a v a it , dit-on , pour frères M a rc e lin , Biaise , et
Ig n a ce K o lin . Tous , excepté le dernier , s.*mt inutiles’ à la
cause; et pour 11e pas l’embrouiller , les intimés se contentent
d’en rappeler lts noms , pour passer'à lu descendance de Pierre,
m arié à Catherine Ferrapie. ils ont eu six enfuns.
.
■> ' 1
�C3 )
P ie r r e M o l i n , m ort en 1743.
C a t h e r in e F e r r a p i e , m orte en 1735.
2.
3.
I
4.
S.
a.e m a ri }
N ... D ejoux.
3.e m a r i ,
C laude- L a m b e rt
Lacroisière.
Jeanne Bor ne,
Louis V e n d r i e z ,
intimés.
L e 20 mars 1735 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ig n a c e
M o lin , curé de Chain bon, son beau-frère, et Pierre B o ye r, son
o n cle , « à la charged e rem ettre, quand bon leur sem blera, ladite
« hérédité à P ie r r e , fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« M olin vint à mourir sans p o u v o ir disposer, ou sans avoir
« recu eilli ladite hérédité, elle lui subslitue M arie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans d ista clio n de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com p te des fr u its de
« ladite hérédité , et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .. . . Fait et récité audit T e n c e , dans la
m a iso n
d’autre
« sieur Pierre M o lin , en présence d e ..............témoins soussignés.
« L adite testatrice ille de ce enquise et requise............. ”
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
« institue pour son héritier Pierre M o lin son fils. . . . Il donne
« et leg u e à ses cinq autres enfans leur légitime de droit} . . . .
« et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ig n a c e M o lin ,
« curé de Cham bon , son frère, et M a r ie , sa lille , de régir et
a. administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A z
�,U )
'
« de le faire..........Fait et récité à T en ce , maison du testateur ».
Pierre M olin mourut le 21 du même mois de mai 1748. A lo rs
Marie Molin , m a je u re , et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de C liam bon , Pierre B oyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
" aux deux successions, s’ engagea aussitôt qu’il en eut l’âge. Il
3
mourut à L ille le novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, 011 trouva l'occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse M olin, avec le sieur Borne , d ’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux allaites
5
de la maison , et par le contrat de mariage du
juin
, le
sieur Cham barliac lui constitua 1,900 fr. de dot, en bien expri
mant que c ’ était pour les successions du père , de la mère , de
la sœur d é cé d é e, et même 011 ajouta celle du frère , quoiqu’on
n ’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse M olin, m in eu re, re
nonça à toutes successions , et s’obligea de la confirm er et ratiJ îc r à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son m ari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur C h a m b a rlia c , n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n è r e . Quand le sieur C h a m b a rlia cd é céd a , elle passa en de secondes noces avec le sieur D ejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur L am b ?rt-L a cro isière, qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose près ,
de dissiper la succession.
Thérèse Molin , veuve, revint habiter près de sa f.¡mille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. L e 22j<mvjer 17813, elle assigna Marie M olin
et L acro isière, son troisième m a ri, en partage des successions
de ses père, m è re, irère et sœurs, pour lui être délaisse sa p o r
tion adorante.
A p rè s cette dem ande, elle fil donation de ses biens à la dame
�.( 5 ) . .
V e n d rie z , sa fille, qui intervint' L e procès fut appointé à T e n c e ,
et le 2 novembre 1 7 8 4 , il intervint sentence qui ordonna le par
tage du c h e f de Jeanne seulement : et avant faire droit sur le surplus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
mère commun?.
L e s deux parties interjetèrent appel de cette sentence ; les pro
cédures se continuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Piry fut choisi pour connaître de cet
appel.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 17 9 3 , sur pro
ductions respectives, el jugea dans ses motifs:
i.° Que le te>fanu'nt du père était nul par prétention; 2.0 que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
M o in de la -iuccess’on , et que ledit M olin élant mort après
quMorze an s, les substitutions s’étaient alors éteintes ; .° que
la renoue iulion de Thérèse Molin était n u lle , comme n’étant
dirigée au profit de personne , comme faite par une mineure ,
3
a vec convention de ratification non effectuée, et com m e dirigée
au profit d’ une protutiice , et que l’action avait duré trente ans.
E n conséquence , ce tribunal q^donna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame V e n d riez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
D e son co té, Catherine M o lin , sortie de la maison paternelle
à la mort de sa s a \ ir , en 1788 , avait assigné Lambert-X-acroisière, son héritier, le 27 novembre d e là m ême année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du c h e f de son p ère, et
seulement un douzièm e, du chef de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la croyance , que M arie M olin était héritière
par des testamens q u ’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions colhjtérciles.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m è re, un dixième des biens
du p è r e , et dans les mêmes proportions pour les successions col
latérales.
�/
(6)
^ c s ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine M olin
alors ayant eu connaissance du testament de sa m ère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du c h e f maternel.
L e F u y était aussi saisi de cet appel qui
s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci-dessus,
du 26 janvier 1793.
O n présume sans peine que Lncroisière, succombant vis-à-vis
M a r ie - T h é r è s e M o l i n , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parlies traitèrent , le
19 février 1 7 9 3 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère nu jugem ent , en
dernier resso rt, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à T hérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’ elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
Il est convenu que les experts expédieront d ’abord la miiison
q u ’ il occupe , un domaine et un ja rd in , et déduiront les créances
q u ’il a acquittées en vers Jean-Antoine M o lin , à la décharge de tous.
E t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés C h ouven c , l'r a is s e , C u o q , B o y e r ,
JDcléage , et laisse à Catherine et Thérèse M o lin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu ’elles aviseront.
Enfin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 17 9 3 , les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 ja n v ie r,
pour qu’ils l ’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v r il, ils les assignent tous en désistement et jugement
c o m m u n ; l a p l u p a r t acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvenc n’était pas alors d’attaquer le jugçinent du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�_C 7)
L e 19 prairial an 2 , un jugem ent ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, i.° les biens libres, 2 ° ceux
abandonnes par les acquéreurs , qui ont acquiescés avant d 'en
venir a u x Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulem ent depuis la demande comme acquéreurs de
^ b o n n e foi.
~
D e puis celte époque le tems d e l à péremption s’accomplit: ce
n ’ est que le 9 vendémiaire an 8 , que les C h o u v e n c signifient l’ex
ploit de l’an 4 a Cat herine Molin s e u le , pour assister en la cause.
1 L e 16 ger ninul an 9 , les intimés ont assigné les Chouvenc en
la coui-, pour se voir démettre de leur appel.
C ’ est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Cliouvencont imaginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leu.i! prétendue bonne.foi : cependant ils ont acquis d ’une cohé
ritière qui avait l'ne sœur dans la maison; ils ont f¿iit plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
' S i, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lacroisière, ils
avaient eu le moindre soupçon de la vente faite aux C h o u v e n c ,
le même procès aurait tout term iné: e f c e r t e s ,e n voyant tonte
la résistance du sieu^Lacroisièrè^'et combién le tribunal clu P u y
a approfondi les questions de ce procès , ile s t aisé de v o ir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien i hang’é à sa décision. Quand
ils 1ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’A rd é ch e , l’idée 11e leur est pais même venue d ’attaquer le j u
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger u n procès qui
lèur était étranger , et d o n t,l’issue eût indubitablement été la
rtiêtiie; mais a Riom^ une d iv e rs ité , ou plutôt une innovation
Jurisprudence a changé leur plan. L es Chouvenc veulent a u
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d ’aborder
lc>fouds , ils Sont arrêtés par des questions préalables
s’acit
:l ■
O d'examiner.”
qu’il
�C a )
P R E M I È R E
Q U E S T I O N .
L a p rocédure des a p p elo n s-est-elle p é r im é e ?
L a loi Properandum et l’ordonnance de R.oussillon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entrètenus par
des procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt dé
règlement de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrêt n’a eu d’eiïet que dans son
ressort. A u parlement de T o u lo u s e , au contraire, l’ordonnance
de Roussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de p lein droit, et le juge la suppléait
si 011 ne la demandait pas.
!
1 ' "■
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue etl
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l’ancien ressort de T o ulo use, la Cour a ju g é , notam
ment l e s 'i 8 pluviôse an 11 et 12 nivôse an 1 2 , que la pérçrnption
avait eu lieu de plein droit, m ême pendant la révolution , et la
suppression d p avoués.
......
.
On objecte que lps intimés on.t couvert la péremption eu anti
cipant le 16 germinal an 9. ,
vt, ,
, [ ¡; - . ;i| ifj . ¡,
Mais 1.0 cet exploit assigne Içs Chouvenc p0u r,?,e;voir déme^lre
de leur a p p e l, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à celte
démission d’appel ; il serait donc bizarre dç dire jqqe c e lu i- ^ a p prouve un a p p e l, qui assigne l’appelant aux.
s*en, v^irj
démettre., Il.f/JUt bien que la péremption mê ms f i i t , pr o noncçe.
en justice,
et
personne n’osera cxigçr qu e: ce ln i/p û -la prétend,
acquise, soit obligé de s ’en tenir à ce .moyen sç.gl, ;:.par en Cour
d’appel il p ’^.a,p,as d^exçeptjpns.s.ur lesquelles il.fjHM statuer.pr,\hi-\
la b iem en t, comine l’exige, en première instance, ro^dÿnnoncb:
de
�(9 )
de 1C67., On sait assez qu’il faut, en Cour so u v era in e , proposer
tons ses moyens à la fois.
2 .0
Celte question a été discutée par M . v le procureur géné
ral M e rlin , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui 11e se couvre pas. L es ordonnances, dit-il, le veulent a in s i,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m o is , l'in sta n ce sera périm ée de droit et Ûaction
étein te ; d o n c, a jo u t e - t - i l, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée 11’y conclurait pas.
M . r Merlin , en sa discussion , ne s’occupe p a s , comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre m ois, qu’il ne cite
que pour comptiraison. L ’ordonnance de lioussillon lui semble
aussi c la ire , toutes in sta n ces d isco n tin u ées pendant trois ans
so n t éteintes et péries. A va n t son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, 11e se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
v périe, ensorte que nonobstant q u o n ait repris cette insta nce],
« on peut faire juger la péremption................ L ’ordonnance de
« Iloussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C ’est un droit p u b lic auquel on ne peut déroger».
P a r une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-lout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’allaiblit singu
lièrement. D e la vient que les auteurs du 16.c siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 14 9 3 , ce que nous 11e voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
B
�( 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de T oulouse; la péremption y ¿tait jugée de p lein d r o it, et c ’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
L es C houvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est 1111 rêve de dire que Jeanne
Borne n ’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualité dans
le jugem ent de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
ven ir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption , elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
Q U E S T I O N .
L e s appelans , tiers acquéreurs , p eu v en t-ils in v oq u er, à T o u
lo u se , la prescription de d ix ans ?
L e s Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse q u i , sans exce p tio n , sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir ( pag. 9 de leur
m é m o ir e ), que M arie M olin ne p ou v a it p as vendre la p o rtio n
de ses coh éritiers, q i i i l est
t r e n t e
a n s
UTILES
c e r t a in
que ces cohéritiers avaient
p ou r réclam er contre to u le V ü N T E fa ite par
Vun d'eux.
M ais , continuent-ils, la question concerne Vacquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les v e n te s, et de ne pas les avoir
c o n t r e V acquéreur ; comme ce serait inexplicable, il vaut mieux
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-même , ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’a ve n ir, et respecter le
�C i1 )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
com m encées seront réglées conformément aux lois anciennes.
11 faut donc chercher
ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
1
drait dire avec la Cour de cassation que ''usage est V interprète
le p lu s sûr des lo is , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement o bscure,
et si 011 trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malœ
J id ei qui l’ explique et la com m ente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
J id e i possessore a lién a n te , cessât lon g i tem poris prescriptio ,
s i verus dom inus ig n oret j u s suum et alienationem fa c la m .
Si ce commentaire de la loi elle-rnême ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présum ant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce n’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i auteni ig n orâ t verus a lien a ta rum rerum dom inus, non a liter hune e x c lu d i n is i p er triennalem prescription cm : n on valente dicere eo q u i res h o c modo
p o ssid et quia ipse bond fid e p o ss id e t, quando ip se à m al à Jide
posfiidenle h o c a cccp it. Novell. 1 1 9 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de T o ulo use, tous les auteurs de sou res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
B a
�(
1 2
)
_ \
Bouiàric , page 182 , a , sur ce s u j e t , une discussion très-ap
profondie. Serres, page i 5 y annonce la seule prescription de
trente ans com m e un principe non contesté. Graverol et Laroc h e ila v in , p.
5 io;
Çatelan , p. Boy, disent « que le parlement
« de T oulouse n ’a pas reçu cette usucapion de d ix ans , que
« Justinicn m ême avait transformée en prescription de trente
« an s; q u ’ainsi le tiers acquéreur purge l ’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
F urgole , en son traité des test,-miens, loin.
3 , pag. 4 1 7 ,
s’ex
plique ainsi : « A n parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l'acquisition ou la perle des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente an s, même à celui qui possède avec
« un titre, lequel n ’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« c.mune ayant été consenti à non dom ino.
Ces principes sont élémentaires dans les pnrlemens de T o u
lo use, A ix , Bordeaux et Grenoble. O n peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.°
5
83 ;
jflontvalon , page i o ; Decormis , loin. 2., col. ÎS89 ; Brelonier ,
v.° prescription ; M . r M e r lin , v.° hypothèque , § . i
3,
et la
m axim e est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit é c rit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix a n s ,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui 11e s’y con
formait p a s; le docte Domal y avait rélléchi lu i-m ê m e, et ne
s’en étonnait pas : « L es lois, disait-il, qui marquent le teins des
« jjrescriptions ne sont que des lois arbitraires, car la nature ne
« iixe pas quel teins il faut pour prescrire----- Il se règle difle« remment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. 11 y en a où elles ont été
« réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrous sur la 4;e question, que la Cour de cassation a
�>3
(
)
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de Toulouse , et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons donc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix ans , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i , en semblable cas , l ’ait jamais admise.
D ans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne f o i,
et il est impossible q u ’ ils le fussent.
L a lo i, au reste, n ’est nullement en leur fa v e u r, et ce n’est
que surabondamment q u ’il y a lieu d ’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N .
L a tierce op p osition des appelons est-elle recevable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il ne suffit
« pas d’avoir inte'rét de l’attaquer, il faut avoir été partie n éccs« saire dans le procès jugé. »
L e s Chouvenc étaient - ils donc parties nécessaires dans le
procès d ’entre les intimés et le sieur L acro isière5 de quoi s’a
gissait-il? d’ un partage.
M ais un partage de succession ne pouvait être fait q u ’entre
cohéritiers. A .ctio fa m ilicc erciscundœ so lis hœredibus com p e lit.
'
L es questions d ’un partage sont tellement étrangères ;\ tous
autres, que quand un tiers achète la portion d ’un cohéritier ,
les autres peuvent l ’expulser en le remboursant , pour l ’einpôcher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l ’ac
tion en [partage est-elle , par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c t i o fa m iliœ e r c is c u n d œ est a ctio
c w ilis qud cohecredes
dividundâ.
1 JSTT £ R
se agunt de com m uai hœ reditate
Jusque-la un acquéreur n ’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son v e n d e u r, et quand la novelle
119 le réputé acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�*4
(
)
c e p il à tnahî J id e p o ssid en te, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullem ent et inutilement
procédé pour avoir omis d ’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
L es C houvenc n’ont pas dû être assignés nécessairem ent•
L 'ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêm es,
ou leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A i n s i ,
dit R o d i e r , un créancier , 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nous allons voir encore que le Droit romain les place sur la
m êm e ligne.
A u if. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent le droit d’interjeter a p p el, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S i em ptor de proprietate vie tus e s t , eo c e s s a n te , auctor eju s
appellare p o lerit / il cm s i auctor egerit et victu s s i t , non est
deneganda em ptori appellandi fa c u lta s . . . . I d que ità co n stitutum est in persond créd ito n s. L . 4. if- de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand celui-ci a lui-même interjeté a p p e l , la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’ intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Q uin ctiam si a u ctor a p p e lla v e r it, deindè in causa;
d ejen sio n e suspectus v is u s e s t, perindè defensio causœ em ptori
com m ittenda e s t , atque si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
s o m m é , il 11’admet les créanciers qu’à in terv en ir à leurs fr a is ,
�C 15 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice d’ une opposition par eux formée (art. 882).
Il y a plus ; car si , par l'effet du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art.
883
lui répondrait « que chaque
« cohéritier est censé avoir succédé sez// et im m édiatem ent à tous
« les effets compris en son l o f , 011 à lui échus par licitation. »
A in si Thérèse et Catherine M olin o n t , dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise e x causa an tiq u a , et qui est réputée
leur appartenir depuis l'o u vertu re des successions. Ainsi les
C h o u ve n c, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au pa rta g e, mais qui pouvaient seulement y in terven ir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju g é e , et ne peuvent
plus faire juger avec eux seu ls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
S i, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intim ées, et on n ’en citerait pas un seul qui lut favorable
aux Chouvenc.
Parm i le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous 11e puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n ’a pas bien été saisie.
i.° M . r C o c h in , en ses notes alphabétiques, tom.
dit; « jugé par arrêt du
5 , pag, 527,
3 i mai 17^6, en faveur des sieur et dame
« Miissol contre M . r le président A m elot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d ’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , 11e peut y former tiei’ce opposition, quoique so n
« a cquisition y so it antérieure. »
2.0
M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. P a r le premier, « la dame de Conllans était en procès
�(
1
6
}
« avec un seigneur voisin pour m ouvance de fief, .
'
elle vendit
« sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
« son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
«..de? droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet a rrê t. . .
« l ’acquéreur y forma tierce opposition , on lui répondit q u ’il
« devait s’imputer de n’êlre p is intervenu : par arrêt du
31
« mai 1742, il fui déclaré non i-eeovabledanssa tierce opposition.»
P a r le 2 .c arrêt, « le marquis de L usignan ve n d it, en 172 0 ,
« des terres au sieur D auriac. . . . L es héritiers de la dame de
M onriquel firent; en 17 2 7 , confirmer , sur a p p e l, une sentence
« de 1718 , contre le .marquis de L usign an seul. M . r D auriac
« soutint qu|on aurait dû l ’a p p e le r, et forma tierce o p p o sitio n ....
« O n lui répondit q u ’il devait intervenir. . . . q u ’il était censé
« avoir été partie dans l ’arrêt par son vendeur , q u ’en cette
•« partie il était l 'ayant eduse du marquis de L usignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1760 ,.il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e
B u lle tin o fficiel de cassation rapporte 1111 arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s.r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du
3 janvier 1792.
. . G o d et, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d ’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art.
5 et
11 du Litre 27 de l ’ordon-
« nance de 1667, et l’art. x.cr du titre
35 . . . . Attendu
que la
« reserve du droit des tierces p erso n n es, 11e concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessurt , était a cet égard
« son ayant cause. . . . que Lessart a élé appelé. . . . que G odet,
« en qualité de son ayant cause , 11’aurait pû être recevable à
attaquer
c e
ju g e m e n t, q u ’autant q u ’il eût été justiiié que L es
te sari aurait élé lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en adm ettant la tierce opposition du cit. G o d e t ,
« onl violé l ’art. 5 de l’ordonnance concernant P a utorité de la
« C hose j u g é e , et ont contrevenu formellement à l ’art. i . cr du
titre
�J7
C
)
* « titre 3 S , qui ne permet de rétracter, autrement que par requête
« civile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause................... Casse
« et annulle etc. »
V o ilà donc la pleine confirmation de la loi 4 CF. de a p p ella tion ib u s et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
ju g é e , par la voie de l’a p p e l, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête c i v i l e , s’il
est en dernier ressort.
T o u t cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n ’y avait eu fraude évidente. A u cu n s de ces arrêts ne sont dans
l’espèce d ’ un procès de succession. S o lis hæredibus com p elit.
D e u x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo«sition des appelans. i°. Les tierces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793 ; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. D ans les circonstances de la cause,
c ’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
L es Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine M olin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter 1111 procès, ont-ils pu
se defendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital a une
femme séparée de biens.
A u reste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
condamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
�( i8 )
encore, d’exiger en règle générs’ é , que '^ut cohéritier dût sa
voir s’il y a des a c q u ére u rs, avant d erecherch r ses iiro t ; , cYstà-dire lût tenu de connaître les forces de la succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues
% ?
;
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N .
T hérèse M o lin avait-elle d ix ans ou trente ans p ou r se p ou r
voir contre sa renonciation ?
C ette qu estion doit-elle être d écidée p ar u n e ju risp ru d en ce
autre que c e lle du p arlem en t de T o u lo u se ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne m arque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion , dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
régleiiK nt de vos droits, on a annullé deux testamens : J e m ’y
o p p o s e ; je veux faire rejuger tout c e la ; je veux scruter vos
testamens, vos contrats de m ariage, tout ce qui s’est passé dans
votre maison depuis i y
35
jusqu’en 1798. V o s cohéritiers n’y
seront pas môme a p p e lé s, car il y a chose jugée avec eux , et
c ’ est moi seul qui veux faire ré g le r, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seu le partie légitime.
Si ce système des Ch ouvenc, qui cependant est toute la base
(7u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier ap erçu ; s’il faut
trouver en eux le seul lég itim e contradicteur, voyons donc par
quelle juiisprudence la chose ju g é e et remise en litige doit être
reju g ee.
Thérèse M o lin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C
)
tion de 1 7 . E lle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de T o u lo u se, et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
55
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de
3o ans. Nous avons vu
sur la z .e question que toutes les
a ctio n s y étaient réglées à cette d urée, à la seule exception de
l ’ac
tion hypothécaire.
L es Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r , ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là , la Cour d ’appel ne s’était pas prononcée
et 011 trouverait même dans l’ un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrem ent, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’ap p el, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose jugée ,
m ême des questions nées en 1783 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement ju g é
com m e lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju g é e , mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était in con n ue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n ’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de l u i , par le pouvoir que leg e regid
il en a donné au prince. E n les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l ’usage , dit V m in u s ,
d après un auteur lalm , vaut mieux que ce qu’011 lit dans la loi
elle-même. P lu s valere leges quœ m oribus com probalce s a u t,
quant quœ scripto c o n s ta n t, vérité bien plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
G a
�( 20 )
interprète des lois. Consuetudo est legum optim a interpres.
L a jurisprudence en ellet qui n’est pas seulement un mode de
ju g e r , mais d ’après la définition de Vinnius , J u stitiœ habit us
p ra cticu s , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impérative, depuis que les anc iens ressorts des Cours sont confondus.
Quand R om e n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la m a
nière de les interpréter, et cette jurisprudence, devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lais
à la jurisprudence et de respecter les usages. Prœ ses p ro v in ciœ ,
probatis h is q u æ in o p p id o , frequenter in eodem controversice
g e n e r e , servata surit, causa cognitd statu it. L . 1. cod. quœ s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exem ple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution, plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
m elle sur la question qui nous occupe.
« Considérant (porte un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain 11e font loi dans les pays même
« q u ’elles régissent , que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la ju risp ru d en ce ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts sem blables, te parlem ent de T ou« lo u se a ju g é , etc. » ( S i r e y , page 3 0 9 ).
2.0
Dans une autre cause, du
5 'floréal
an 1 2 , la Cour de cas
sation a dit: « Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre prê
te sens, et 20 ans entre absens ; cependant, d’après la jurispru<1 dence du parlem ent de T ou lo u se constatée par divers arrêts ,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
« possession im m ém oriale, et que c ’est ainsi q u ’i l a entendu la
« l o i , etc. casse et annulle, etc. » ( L u l l t l i n , n.° 92).
�3 .°
( 21 )
Un arrêt du 2 Í du même mois a jugé de m ê m e , « que la
* jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( S i r e y , p. 2 6 7).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec L acroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 17 5 5 , cela est vrai; mais, i.° elle
était mineure , et la convention porte q u ’elle sera tenue dè con
firm er et ratifier àsa majorité. E lle n’en à rien fait.
11 n’y
a donc
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’ une mesure provisionnelle.
2.° On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplém ent.
I l est évident qu’on lui Ht entendre en minorité q u ’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. JJonc 011 la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .°
Si on suppose qu’elle a approuv é les testamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre une destination de légi
t i m e , qu i agnovit ju d ic iu m d efuncti. T els sont les principes
invariables comme la Cour l’a souvent ju g é , et notamment les
21 thermidor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4«° L e testament de 17^5 a été expedié par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’elait donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de P ierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r e c u e illi, ne l’était pas. O r , non vidèntur qui errant c o n
sentit e , et la prescription.ne court que du jo u r d e là découverte
de la vérité.
5 .°
Thérèse M o lin , née en 1733, avait deux ans au décès de sa
.
mère , et dix ans au décès de sou père en 1743 Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de février
�C 22 ) f
1718. L e père l ’avait chargée de régir et adm inistrer conjoinletement avec Ignace M o lin , curé de C ham bon; et les Ghouvenc
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus , nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de scs droits légitimâmes sur les biens de ses
père et mère , dont jo u iss a it M arie M o lin .
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins c o m p ta
ble depuis 1 7 4 3 , -enversune sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n ’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17IS0 , entre Marie
M o lin qu i, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testameiis, et Thérèse M olin qui
ignorait tout.
• O r , le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d ’admettre en
pàreil cas le réuonçant non v isis ta b u h s , a se pourvoir pen
dant trente ans. Q u ’on consulte M a y nard , liv. 2 , cliap. 99 et
100 ; D o liv e , liv. 4 , chap. ï 6; Catelan, liv. 8 ; Iiretonnier, v.°
restitution ; -ou plutôt qu ’on' parcoure tous les auteurs de ce
parlement , ou cens (pii mentionnent sa jurisprudence , 011 ne
trouvera nulle 'part que l’art. i3 4 de l ’ordonnance de i r> ait
53
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de P a r is , après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-teins , comme le parlement de T oulouse a toujours jugé
L e s ailleurs d u i e m s même de cette ordonnance , notamment;
M r D u v a l , de rebus dubiis , enseignaient q u ’il n’y a contre les
actions en nullité que l ’action trentenaire. Quaranlo ans après
le parlement de Paris changea sa jurisprudence', niais enfin il la
changea de nouveau après l’ordonnance de 1667 ; et il a inva
riablement ju g é depuis que l’art. 134 de l’ordonnance de i539
né s’appliquait q u ’aux actions rescisoires.
Cette jurisprudence constante s’est maintenue ju sq u ’au Code
civil. On a vu encore, dans les discussions sur ce Code, les clibrts
des sections réunies de la Cour d’appel de Paris, pour faire main
�C 23 )
tenir l ’action cle-trente a n s , et 011 n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d ’Orléans et de L iège.
L e tribunal civil du Puy-d é-D ôm e commença par suivre les
anciens principes.
11 jugea le
28 pluviôse an 4 , entre les
Cham pom ier et S e z e l, que l ’action en nullité avait duré trente
.ans, en floréal an
.
5,
à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait ju g é 011 thèse le
3 messidor an 4 , que
Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de m ariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
3
« Attendu que l’art. i i de l’ordonnance de i
53(),
déclare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra« teurs. etc. directement ou indirectem ent, avant le compte
« rendu , et q u ’une vente , f lile par une mineure en faveur d ’une
« personne qui administrait ses b ie n s , présente un avantage
« indirect ;
« Attendu q u ’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente an s,
« parce que suivant l’art. i . e r, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable 11e cessant de l ’être que par la reddition de son
« com pte, c ’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l ’art. 134 de l ’ordonnance de i53 9 qui restreint
« le délai a dix ans , n ’est relatif q u ’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de com m un avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n ’était pas besoin de lettres ,
« casse et annulle , etc. »
,11 est
même remarquable que le Bulletin officiel ju s q u 'à ce
j o u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de Ilio m ne s’est prononcée, pour les d ix
ans , pour la première f o is , que le 18 prairial an 11 , c ’est-àdire, depuis le Gode c i v i l , et par induction de l ’article 475. On.
verrait même , dans un arrêt du
25
nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�24
(
)
encore que l ’action n’avait couru q u ’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix
a n s , avant le Gode civil.
Com m ent donc concevoir que la Cour put infirm er le ju g e
ment du P u y qui a admis Thérèse M o lin , après d ix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-iuême.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L 'a c tio n de Catherine M o lin est-elle prescrite par trente ans ,
q u o iq u ’e lle ait co h a b ité la m aison p atern elle ?
L e s Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir celte
prescription par des citations qui n ’ont pas la moindre analogie.
i .° D argentré q u ’ils invoquent sur l ’art. 276 de Bretague , ne
s’occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire q u ’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a pëyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce ciui suit : « T a n t que les enfans sont nourris sur les biens de
«’ l ’hérédité, la prescription de la légitime ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « id e m , en matière départagé » ;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M a is , outre L a p e y rè re , on ne voit pas d ’auteurs qui aient
traité la questio n , s’être expliqués autrem ent, et si on en cite
plusieurs autres, c ’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n ’ont pas voulu chercher la question où ils l ’auraient
trouvée.
D o liv e en fait une question expresse au chap.
3i
du liv.
5,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l ’hérédité , celte prescription ne court pas contre e u x , en cette
« rencontre,
�c 25>
a rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment q u ’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d é fu n t, ils sont censés être en possession. »
63o et 26 août i 636 .
Cette opinion est encore enseignée par Y e d e l , liv. 2 , chap. 36 ;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101 ; D espeisses, t o m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b r u n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
D o liv e cite deux arrêts des 10 janvier i
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion , si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d ’appel vient très-récemment de p ro n o n c e r, dans
un arrêt du i
3 ventôse an i 3 ,
le m o tif suivant :
« A ttendu que l’habitation d ’Antoine et Pierre Vescham be ,
a dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con
te servation de leurs droits. »
A insi Catherine M olin qui a habité la maison paternelle jus
q u ’en 1788 ; qui n ’en est sortie que pour former la demande ,
n ’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
C houvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n ’avait pas
empêché de prescrire.
L es Chouvenc veulent que cette"prescription ait couru à
leur égard , quand elle n ’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est diiïicile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir h la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J e a n n e , et celles de Marguerite et de Pierre M olin ; car l’ac
tion d un cohéritier se compose de tous les droits partiels , qu i
ad hœreditatem v e n iu n t,* et comme les portions advenues à
Catherine M olin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
ja is it le v i j , Catherine M olin a é lé , dès cette é p o q u e , proV
�Ci6)
priétaire d ’une quotité plus con sid érable, et n’en a pas plu*
perdu une fraction que la totalité.
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
l e testam ent de Catherine F erra p ie e s t-il v a la b le?
« U n testam ent, dît R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa so lennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n etYet, dans cet acte si im p o rta n t, îl faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d’après les ordonnances.
L e testament de 1,735 est vîcié par deux nullîtés textuelles : i.o
il est dit f a i t et ré cité en la m aison de P ierre M o lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a d ic té , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
Il n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n’avoir su ou pu signer , car on
y■
lit seulement : « L a d ite testa trice i l l e de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de i y
35 dit
que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lecn ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’iTne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . z 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
Mais , disent les Chouvenc , le testament de Catherine
3
Ferrapie est antérieur à l ’ordonnance de i y a : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d Orléans et de Blois.
« E t en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« sig n e r, les notaires f e r o n t m entioji de la réquisition par eux»
�27
(
)
a faite aux parties ou témoins de s i g n e r , et de leu r réponse
« qu ’ils ne savent signer. » Ordonnance d ’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i
65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de 178s.
E t les auteurs qui ont écrit avant l ’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e M aitre , sur Paris , article 1 4
,
chapitre i . e r ; R a v i o t , question 164; M aillart , sur A r to is ,
art. 74 ).
On cite souvent R icard, comme ayant rapporté un arrêt de i6 6 z
validant un testament où il était dit : « L e q u e l n’a pu signer ,
« interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que R icard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et q u ’il y a
grande apparence’ que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
A ussi R i c a r d , n.° i 5 z 6 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l ’avoir in te rp e llé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n ’a pu signer , parce q u ’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... C ar le notaire, dit Ricard , au n;° i
568 , ne doit
« contribuer d ’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans D enizart un arrêt du
5 septembre
1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n 'a v a it pu sig n er à cause de sa fa ib le sse , de ce en qui s.
XiC iribunal civil du Puy-de-D ôm e a ju g é deux fois de la
meuie maniéré , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal , et
le
23 pluviôse an 7 ,
erçtre les héritiers V a c h i e r , d ’A ria n e.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur dé
fi a
�.
( 2 8 )
cla ren e savoir signer, il soit fait m ention expresse de sa d écla
ration ; ainsi la loi n ’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
L e s Chouvenc se sont imagine' cpie les ordonm nees d ’Orléans
et de Blois n ’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D o live dit que de son tems on n’était pas rigo u
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan inait pas si le testateur avait sigué ; ' mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. F urgole dit au contraire
que les fo rm a lités que les lo is prescrivent, p ou r la v a lid ité des
testam ens , sont de droit p u blic , et q u ’ un testament doit porter
la preuve avec lui-m êm e; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
D ans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas môme
11 preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. L es Chouvenc
se sont, efforcés de persuader q u 'ille veut dire illité r é , puis
cju'illité r é veut dire ne sa it écrire, puis enfin que les mots ne
sa it écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
M ais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce q u ’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
U n arrêt de règlement de i
685
défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne d ins toute espèce d ’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’a c t e , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
V in n iu s et la loi nous apprennènt que dans les testamens sur
to u t , qui sont testa tio m e n tis , il fiu t écrire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29 )
via t ion s. Ccvterum îilteris iisq u e u sita tis et leg lb ilibus scribendum esse p la ç a i t , non s ig n is , obscurisve jio tis , L G , § . u lt.
de bon. p oss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’A cad ém ie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferr iè r e , ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de T rév o u x le mot M é tr é , signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n ’y a pas dans le testament i l l i l é r é , il y a i l l e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de tro u v e r,
dans ce mot biza rre, une déclaration de la testatrice, q u ’elle n ’a
pu ou su signer. Allons plus loin même , le m ot illité r é ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I O N .
Q u elle est la nature de la substitution du testam ent de i y
a -t-elle transm is la su ccession à M arie M o lin ?
35 ?
Quand ce testament serait valable en la fo rm e , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine M olin à
une légitime de rigueur.
C ar le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ ils accréditaient encore plus
par une expression infidelle de l’expédition, q u ’ils avaient d’abord
produite, de ce testament.
Les héritiers institués, disaient i l s , étaient Ignace M olin et
pierre Boyer. Ils étaient çhargés de rendre la succession à Pierre
M olin quand bon leur semblerait. Pierre M olin est mort en 174^,’
et M arie M olin était appelée à la substitution , dans le cas où
ledit Pierre M olin décéderait sans avoir rem is la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , d o n c , en vertu de la m axim e
su b slitu tu s substituto est su b stilu lu s in stitu to , Marie M olin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
- D ’abord il est prouvé par l ’extrait vidim é du testament de
�c 30 )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , q u ’au lieu dit
m ot remis il y a recu eilli. Gela p o s é , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d'une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu ’un dépôt à titre de confiance,
et le grève d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus , qui a fait un traité sur les fidéicommis , le définit
ainsi. F id u cia riu s est hœres q u i, non su î con lem p la tio n e sed
alterins g r a liâ 'in s tilu tu s , eidem restituere hereditatem ,p o s t
diem certain v el in ce rta in , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent Henrys et Bretonier, sont com
te munes dans les pays de droit é c r i t , sur-tout en faveur du sur« vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l’obéissance h o c co n silio ut parenti obsequerentur..........
« Q uoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pas
« m arqué dans le testam ent, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
0 lib e rté , et n’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« O n doit penser, dit ailleurs le même a u te u r, q u ’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; q u ’il vise plulôt à leur
« utilité., et ne l’avantage q u ’ù leur considération ; qu'ainsi il ne
« l ’a instituée que par la nécessité de leur bas âge , non ut j i l i i s
m inoribus o b e s s e t, sed p o tiu s ut eis con su leret• » ( henr. t.
3
1 ,e r , p. 7 3 6 , t. , p» 69 )•
T o u s les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du iid u ce , q u ’011 retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C
30
' i.° Catherine Ferrapie avait un fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2-° Ferx-apie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédité à son
fil s, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d’aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grévé de fidéicommis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( l. i . er § . 5 , ad treb. ) ;
3 °. E n
remettant l’ hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les Fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chosè , sans
aucune stipulation ;
4.0
Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , u t p a ren tibu s
obsequerefitur. A cela prè-8, elle exigeait les mêmes soins pour
eu x, que si elle eut été v iv in te , sed p o tiu s ut eis con suleret.
A in s i disparaissent Pierre B oyer et Ignace M olin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre M olin , impubère , vé ri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre M olin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était a la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u i l vint à m ourir sans
p o u v o ir d isp o se r, ou sans a v o ir r e c u e illi la d ite hérédité.
O n voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non e x tite r it hceresJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre M olin n’est pas mort sans p o u v o ir disposer ,* car
en pays de dro.t érr.t le m ineur avait testam enti fa c tio n e m
aussitôt q u ’ il avait atteint sa puberté. O r , Pierre M olin , né
en 1781 , était puioère en 1746 , et il n ’est décédé q u ’en 1748.
Si ce in o je n n ’était pas péreinptoire , on opposerait aux
�I
(3 0
Chouvenc que la mère ne pouvait pas Faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o te st h beris
im puberibus
q u o s
in
p o t e s t a t e
h a b e t
,
cùm e ju s œ tatis sin t
in quâ ip si testam.en.luni fa c e r e non p o ssu n l.
Il
ne reste donc que l’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloigne'e
encore par le principe-enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règle su b stitu lu s substituto n’a pas lieu en la subs
titution p u p illa ir e , et le substitué au pupille n ’est pas censé
1
l ’héritier du testateur. ( C u j a s , ad . 4 1. de vul. et pup. s u b .)
A in si le testament de 1735 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab in testa t : donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e testam ent de 1743 e s t- il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité ne change rien à
l ’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugem ent de 1793.
Pierre M o lin père a institué son iils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses eufans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hœredem in s titu â t, aut exhceredem nom inatini fa c ia t , a lioquin inuti/itcr testabitur.
Celte disposition a été répétée dans l’art.
5o de
l ’ordonnance
de 1 7 3 5 , qui dit q u e , dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
v droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M ais l'héritier, institué par le testament de 1748, étant décédé.
ab in te s ta t, il importe peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
�33
(
)
ou ju r e suo , à la succession de leur p è r e , il n’est pas moins vrai
de dire q u ’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
L es Chouvenc terminent leur mémoire par d em an der, i.®
q u ’on estime les biens de la succession M o lin ; 2.0 q u ’on accorde
à Marie M olin leur venderesse , les prélèvemens qu ’elle aurait à
faire, notamment trois q u ’ils indiquent; 3.° q u ’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances , s’il en existe.
A l’égard des .deux premiers articles, le jugem ent dont est
a p p e l, y a fait d r o i t , en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intim és, avant d’en venir aux
Chouvenc.
'
A insi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intéi’êts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et p o u v a i e n t f a i r e , pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugem ent dont est appel.
A l o r s , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d ’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sex-a pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n ’est q u ’ une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu ’ils n ’ont pas le droit de soupçonner sans m otif; car
la fraude ne se présume pas.
T o ut prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souffle
encore un tioisicme procès , après en avoir perdu deux , et les
exclamations des C h o u ven c, pour crier à la collusion , ne, sont
qu'une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audiencc avec une
loule de papiers de la famille M olin , q u ’ ils n e'po uvaien t tenir
que de lui. T out ce cpi’ils <>nt; expliquai siit cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de ieur science personnelle, et il
st rem arquable q u ’ils n ’o n t ■jan^Ai d e n iitn d éW com m u n ich t'io n
E
\
�( 34)
les pièces du procès par écrit ju g é en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés q u ’ils elevent.
M ais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont q u ’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour v e u t statuer
sur les questions d ’ un partage, avec l ’acquéreur d’ un cohéritier ;
si elle veut examiner le bien jugé du jugem ent en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce ju g e
ment étaient sages et lé g a le s , et n ’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M . e D A U D E } avoué.
A
R I O M ,
D e l ’im prim erie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I ) .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0624
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_M0729
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53884/BCU_Factums_M0624.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53774/BCU_Factums_M0326.pdf
b87c237863031fd8c9f10d2276f606cc
PDF Text
Text
M E M O I R E EN RÉPO N SE ,
POUR
i
C a t h e r i n e M O L I N , et les S .r et d a m e V E N D R I E Z
et B O R N E , i n t i m é s
1
CONTRE
J e a n et. autre J e a n
CIIOUVENC ,
appelans.
Q U E S T I O N S .
i.° L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2.0
S i elle n'est pas périm ée, peu ven t-ils, comme tiers acqué
reurs., repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix ans , dans le même parlement ?
3.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils recevables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier ressort, rendus
sur appointem ent, entre leur vendeur et ses autres cohéritiers,
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4.° Thérèse M ol in a-t-elle eu 10 ou 3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l ’ignorance de ses droits et sans être informée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
5 .° Catherine Mol in a-t-elle p erd u , p a r la prescription de 30
A
�c o
ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine Ferrapie , sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de l'ordon
nance de 1735 ?
7.0
L a première substitution q u il c o n tie n t, est-elle Jidéicommissaire ou jid u cia ire ? L a seconde e st-e lle u n e substitution
pupillaire ? Est elle valable? A -t-elle transmis la succession à
Marie Mo lin , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo/in , qui a simplement légu é
une légitime à ses enfatis puinés , est-il nul pour vice de prétérition ?
T P e l l e S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé la Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catherine
Ferrapie, rapporfée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapporiée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, et subi, pour faire juger un simple
partage, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Tierre TWoîin avait, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise , et
Ignace Molin. Toi,is , excepté le dernier , s**>nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l’embrouiller, les intimés se c o n t e n t e n t
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié a Catherine Ferrapie. Ils ont eu six enfans.
�C3 )
Pierre Molin , mort en 174)5.
Catherine Ferrapie, morle en 1735.
2.
3.
I
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Chambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
i ? 3r ;
2.c marij
4.
<
^
;
*>
JL
Catherine , J ea n n e ,
intimée.
m. s. p.
Thérèse.
Louis Borne.
I
en I770.
N ... C cjoux.
mort s. p.
Jeanne B o rn e ,
3 .e mari ,
le 3 novemb.
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L ouis Vendviez >
1748.
intim és.
L e 20 mars 17 3 5 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine FeiTapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la chargede remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
«
«
«
«
«
«
«
«
a
«
«
recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testatrice fait ladite institution sans distaclion de quarte et sans
qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des fr u its de
ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
enfans__ Fait et récité audit T e n ce , dans la maison d’autre
sieur Pierre Molin, en présence d e .............témoins soussignés.
Ladite testatrice ille de ce enquise et requise............ »
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
institue pour son héritier Pierre Molin son fils. . . . Il donne
et lègue à ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ign ace M olin,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa fille , de régir et
« administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A 2
�U )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur»;
Pierre Molin mourut le 21 du même mois de mai 1748. Alors
Ma rie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de Cham
bón , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux successions, s’engagea aussitôt qu’il en eut l ’âge. Il
mourut à Lille le 3 novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, on trouva l’occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux aiïaires
de la maison , et par le contrat de maringe du 5 juin 1755 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 IV. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du père, de la mère, de
la sœur décédée, et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions, et s’obligra de la confirmer et raliJier à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n ère. Çi-nnd le sieur Chambar
liac décéda, elle passa ende secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui a ch e va , a peu de chose p rès,
de dissiper la succession.
Thérèse M olin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. Le 22 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son iroisième m a r i , en partage des successions
de sus père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion aderante.
Après cette demande, elle fit donation de scs biens à la dame
�( 5 )
Vendriez, sa fille , qui intervint. L e procès fut appointé à T en te ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du chef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le sur
plus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
inère communs.
L es deux parlies interjetèrent appel de celte sentence ; les pro
cédures se conîinuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Pay fut choisi pour connaître de cet
appe!.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 1793, sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
i.° Que le testament du père était nul par prétention; z.° que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
Moün de la succe-s'on , et que ledit Molin étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes.; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était n u lle, comme n’étant
dirigée ru profit de personne , comme faite par une mineure ,
ave-, ronvtut on de ratification non effectuée, et comme dirigée
au pi 'fil d’une piolut'ice , et que l’action avait duré trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
]>(■son còlè, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lambert-Lacroisière, son héritier, le 27 novembre delà même année pour venir
à partage, • t lui expédier un cinquième clu chef de son père, et
seulement un douzième, du chef’ de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans !,i croyance , que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père, et dans les mêmes propulsions pour les successions col
latérales.
�,
( 6 )
ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molía
alcirs ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du ch ef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
On présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 fév rier 1793 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 ja n v ie r, et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine M o lin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
qu’il occupe , un domaine et un jardin, et déduiront les créances
qu’ila’acquittées envers Jean-Antoine M olin, à la décharge de tous.
É t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouuenc , Graisse, C u o q , B o y e r ,
B eléa g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
E n fin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 179^, les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seuleinent ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 avril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvcncn’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�^( 7 )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, 1 les biens libres, 2.°ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demandé comme acquéreurs do
bonne foi.
Depuis cette époque le tems de la pérémption s’accomplit : ce
n’est que le 9 vendémiaire an 8, que les Chouvenc
l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine IVlolin seule, pour assister en la cause.
L;; 16 g e n r r n a l an 9 , les i nt i mé s ont a ss i g n é les C h o u v e n c en
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e d e l e u r a p p e l .
1 ..
C ’est en la cour , seuhment pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer lejugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Lt ui^ résistance soutenue est fondée sur
l e u r prétendue bonne foi : cependant il s ont acquis d’une’. cohé
ritière qui a v a i t une sœur dans la m a i s o n ; ils ont fait plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lar'roisière, ils
avaient'éu le moindre'soupçon de la Vente laileaux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certts, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce proc<'-, ¡1 est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa décision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Hante-Loire et de
L ’Ardêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le ju
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger un procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eût indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le fonds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
»’agit d’examiner.
�T
P R E M I È R E
Q UE S T I O N.
P--
i'VV. '■ L a procédure des appelons est-elle périm ée?
-?ï. ;
v.
.
„
Jp.i 'P.i;opcrandurn et l'ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès'soient promptement jugés ou entretenus par
des:procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
u
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement! de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après; une ¡demande ; mais cet arrêt n’a eu d’efïet que daîîs son
ressort. Au parlement de Toulouse, au contraire, i’ordonnance
de.Iloussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontimmtion , était môme
devenue, un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien resâôrt de Toulouse, la Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an.t i,et 12 nivps.e an 12, que-la péremption
avait eu lieu de plein droit, même pendant la révolution , et la
suppression des avoues.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
. Mais i.° cet exploit assigne les.Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette e x p r e s s i o n générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à cette
démission d’appel ; il serait donc bizarre de dire que celuMà ap
prouve un a p p el, qui assigne l’appelant aux fins de s’en voir
démettre. Il faut bijen que la péremption même soit'prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit obligé de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablement , comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
�(9)
de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral Merlin, en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc, a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r M erlin, en sa discussion, ne s’occupe pas, comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre mois, qu’il ne cite'
que pour compai'aison. L ’ordonnance de Houssillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
« péiie, ensorte que nonobstant qiton ait repris celte instance].,
« on peut faire juger la péremption...............L ’ordonnance de
« Houssillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C est un droit public auquel on ne peut deroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’aflaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du i6 .e siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 149^, ce que nous ne voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la môme chose.
�C 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein droit t et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qüalilé dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
QUES TI ON.
L e s appelons , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix a n s?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers , qu’ il est c e r t a i n que ces cohéritiers avaient
TRENTE ANS UTlEES pour réclamer contre toute v e n t e f a it e par
l'u n d'eux.
M a is , continuent-ils, la question concerne l acquéreur ; on
leur demandera d’abord c o m m e n t il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ventes, et de 11e pas les avoir
contre Vacquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux:
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, car dans une grande
paille de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain, et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�C I* )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que Yusage est l ’interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malce
fid e i qui l’ explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu, que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
ji d e i possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem factam .
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienatarum rerum dom inus , non aliter hune excludi nisi per triennalem prescriptionem : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fid e p ossid et , quandb ipse à mald jid e
possidente hoc accepit. Novell. 119, ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugciit pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
�( 12\
Eoutaric , page 182 , a , sur ce su jet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page
annonce la seule prescription de
trenfe ans comme un principe n'on contesté. Graverol et Larocheflavin, p. 5 io; Catelan , p. 5oy, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usucapion de dix ans , que
« Juslinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
Furgole , en son traité des testamens , tom. 3 , pag- 4*7? s’explique ainsi : « Au parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« uii titre, lequel 11’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.° 83 ;
Montvalon , page i o 5 ; Decormis , tom. 2 , col. 589 ; Bretonier ,
v.° prescription ; M .p M erlin, v.° hypothèque, §. i 3 , et la
ïnaximfe est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix ans,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles ».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Domat y avait réfléchi lui-même , et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le terus des
« prescriptions ne sont (pie des lois arbitraires, car la nature ne
«
«
«
«
k
fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle dilféremment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
t e m s de prescription du droit romain. Il y en a ou elles ont été
réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.« question , que la Cour de cassation a
�( i 3 )
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T ou lou se, et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons dnnc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i, en semblable Ctis , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a loi, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
QUESTION.
L a tierce opposition des appelans est-elle receuable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il nesuiTit
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie
«
saire dans le
néces-
j rocès jugé. »
Les Chouvenc étaient-ils donc parties nécessaires dans le
procès d’en Ire les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’agissnit-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers, A c tio ■familiœ erciscundæ salis hœredibus com -
p etit.
Les questions d’un partage sont tellement élrangères à tous
autres, que quand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en partage 681-0116”, par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c tio fa m iliœ erciscundæ est actio
civilis quâ cohœredes
dividundâ.
in te r s£
ag a n t de commun i hœreditate
Jusque-là un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�C «4 )
cepit à viald Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
ou leurs ayant-cause.
Or comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. Ainsi,
dit R o dier, un créancier, 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u 1F. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent ledroitd’interjeteri/^tf/, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
Si emptor de proprietate victus e s t , eo cessan te, auctor ejus
appellare polerit ,• item si auctor egeiit et victus s i t , non est
deneganda emptori appellandi facultas. . . . I d q u e ità constitulinn est in persond creditoris. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand c e l u i - c i a lui-meme interjeté a p p el, la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Quin e lia m si auctor ap pellaverit, deindè in causcv
dejensione suspectus visu sest, penndè de/ensio causæ ctnylori
comniittcnda est, atijue si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
sommé , il n’admet les créanciers qu’à intervenirà leurs frais ,
�( i5 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudic e d’une opposition par eux formée (art. 08a).
31 y 3 plus ; car si , par l’eil'et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art 883 lui répondrait « que chaque
u cohéritier est censé avoir succédés«// et immédiatement à tous
« les effets compris en son lo t , ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin o n t, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et ne peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et on n’en citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous ne puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien été saisie.
i.° M .r Cochi» , en ses notes alphabétiques, tom. 5, pag,
dit ; « jugé par anêt du 3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
z.° M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Couilans était en procès
�( 16 )!
avec un seigneur voisin pour mouvance de fief. . elle vendit
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y foîrna tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pris intervenu : par arrêt du 3 i
mai 1742, il fut déclaré non recevable dans sa tierceopposition.»
Par le 2.° arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720 ,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur a p p el, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l’arrêt par son vendeur , qu’en cette
«
«
«
«
«
«
«
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1750 , il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s .r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du 3 janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art. 5 et 11 du titre 27 de l’ordon« nance de 1667, et l’art. i . er du titre 35. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessart , était à cet égard.
« son ayant cause. . . . que Lessart a été a p p elé ., . . que Godet,
« en qualité de son ayant cause , n’aurait pu être r e c e v a b l e à
« attaquer ce jugement, qu’autant qu’il eût été justifié que Les
te §art a u r a i t été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en admettant la tierce opposition du cit. G odet,
« ont violé l ’art. 5 de l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chosç ju g é e , et ont contrevenu formellement à l’art. i . er du
titre
�(
«7
)
<< titre 35 , qui ne permet de rétracter, autrement quepar requête
« c iv ile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
Voilà donc la pleine confirmation de la loi 4 fï. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête civile , s’il
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts 11e sont dans
l’espèce d’ un procès de succession. S olis hæredibus competit.
D eu x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tiei'ces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste, s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
cqjndamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
\
�( 18}
encore, d’exiger en règle génén e , que 'ont cohéritier dût sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derechercli r ses dro‘ts, c’està-dire lut tenu de connaître les forces ue iu succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
*ous lés actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
Jes notions reçues ?
»
!
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M ulin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion, dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on. a ajinullé deux testamens: J e m ’y
o p p ose; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos
testamens, vos.contrats de mariage, tout ce qui s est passe dans
votre maison depuis i y 35 jusqu’en 179^' ^ os cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugee avec eux , et
c’ est rr.oi seul qui veux faire régler, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce s y s t è m e des Chouvenc, qui cependant est toute la base
c’u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ee et remise en litige doit être
rejugee .
Thérèse Molin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C T9 )
tion de 1755. Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles , on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de 3o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à celte durée, à la seule exception de
l’açtion hypothécaire.
Les Chouvenc ayant leur pi’ocès en cette C o u r, ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là, la Cour d’appel ne s’était pas prononcée^
et on trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrement,. 11’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence, même la.chose ju g é e,
même des questions nées en iy 83 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui. *
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de lu i, par le pouvoir que lege regid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d’après un auteur latin, vaut mieux que ce qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valcre leges quœ moribus comprobalce su tit,
qïiam quœ scripto con stan t, vérité biçn plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�I
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est pas seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , JustitL v habitus
praclicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impcrative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciœ ,
probalis bis (/i/æ in oppido, frequenter in eodem controversice
gen ere, servata s u n t, causé cognild statuit. L . 1. cod. quce s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for*
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant ( por-îe un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
«< été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts semblables, le parlement de Tou« louse a jugé., etc.» ( S ir e y , page 809).
' 2.0 Dans une autre cause, du 5 floréal an 12 , la Cour de cas«
saiion a dit: « Considérant que quoique en générai on puisse par
v
«
*
«
•
«
le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre présens, et 20 ans enlre absens ; cependant, d'après la jurisprudence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêls,
les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
possession immémoriale , et que c'est ainsi q u 'il a entendu la
lo i t etc. casse et aimulle, etc. *~^Lullctin, u.° 52).
�(
21
)
3.° Un arrêt du 2.1 du même mois a jugé de même, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( Sirey, p. 267).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.« elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait. Il n’y a doue
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
Il est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .° Si on suppose qu’elle a approuvé lestestamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre u n e destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m defuncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a
souvent
jugé, et notamment les
21 thermidor an 8, et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1705 a été e x p é d i é par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’était donc induire en
erreur les parties intéressées. T h é r è s e Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis q u e celle de son décès, sans
avoir re cu e illiy ne l’était pas. O r, non videnlur qui errant consentire , et la prescription ne court que du jour de la découverte
de la vérité.
5 .° Thérèse Molin i née en 1733, avait deux ans au décès de sa
mère , et dix ans au décès de son père en 1748. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de lévrier
�c 22} .
1718. L e père l ’avait chargée de régir et administrer conjoinletement avec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc
qui connaissent plus d'actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et m ère, dont jo u issa it Marie M olin,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta
ble depuis 1743, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n’avait
que douze ans, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
lç succession et le vice des testarnens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.
. O r, le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d’admettre en
pareil cas le renonçant non visis tahu lis, à se pourvoir pen
dant trente ansl Q u ’on consulte May'nard , liv. 2 , chap. 99 et
100 ; D olive, liv. 4, chàp. 16; Càtelan, liv. 8 ; Brefonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les. auteurs de ce
parlement, ou ceux qui mentionnent su jurisprudence , on ne
trouvera nulle part que l’art. 134 de l’ordonnance de 1639 ait
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Paris, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-tcms , comme le p a r l e m e n t de .Toulouse a toujours ]uge
Les auteurs du tems môme de cette ordonnance , notamment
M .f D u v a l, de rebus dubiis , enseignaient qu’il n’y a contre les
actions on nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
lo parlement de Paris changea sa jurisprudence', mais enfin il la
c h a n g e a do nouveau après l ’ordonnance dé 1667; et il a inva
riablement jugé depuis que l’art. 184 de l’ordonnance de i5o9
ne s ’ a p p l i q u a i t qu’aux actions rescisoircs.
Cette j u r i s p r u d e n c e c o n s t a n t e s ’est m a i n t e n u e j u s q u au Code
civil. O n a v u e n c o r e , dans les di s cus s ion s s u r c e C o d e , les efforts
des sections r é un i ç s de la Cour d ’a p p e l de P a r i s , p o u r faire m a i n -
�C *3 )
tenir l ’action de trente ans, et on n’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entre les
Cliatnpomier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en. floréal an 5 , à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
«
«
«
«c
« Attendu que l ’art. i 3 i de l’ordonnance de i 53c), déclare
nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administrateurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
rendu , et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
personne qui administrait ses b iens, présente un avantage
« indirect ;
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l’art. i 34 de l’ordonnance de 1539 fIu^restreint
« le délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres f
« casse et annulle , etc. »
II est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d’appel de Hiom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c’est-àdire, depuis le Code civil, et p ir induction de l’article 475. On
verrait m êm e , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�C*4 )
encore que l'action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix;
a n s, avant le Gode civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-même.
!
)
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N , .
Inaction de Catherine M olin est-elle prescrite par trente ans t
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
Les Cliouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D om at, au tir. 7 du liv. 3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a peyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfans sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitimé ne court point contre
« eux». Son annotateur ajoute « idem , en matière départagé»;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs autres, c’est seulement pour convaincre les Cliouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l’auraient
trouvée.
Dolive en fait une question expresse au chap. 3 i du liv. 5 ,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l’hérédité , cette prescription ne court pas contre eux , en cette
« rencontre,
�C r f)
«
«
«
«
rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seulement qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
défunt, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i 63o et 26 août i 636.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap. 36;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, to m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b ru n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion, si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d’appel vient très-réceminent de prononcer, dans
un arrêt du i 3 ventôse an i 3 , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Vescham be,
« dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière,'
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce 11e
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels, q u i
ad hœreditalem ven iun t; et comme les portions advenues à
Catherine Molin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
9aisit le v i j , Catherine Molin a été, dès ceLle époque, proD
�C
26
)
priétaire d’une quotité plus co n sid éra b le, et n’en a pas plus
perdu une fraction que la totalitéT
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
I .e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testam ent, dit R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n effet , dans cet acte si im p o rta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.0
il est dit f a i t et récité en la maison de Pierre Mo lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable qu'un
testament soit lu à celui qui l’a d i c t é , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
11 n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de 11’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice ILLE de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 178b dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en leront ensuite lec« ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... A près
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 )• »
M u s , disent les Chouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l'ordonnance de 1735 : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« Et on cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t m ention de la réquisition par eux
�( 27 )
« faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i 65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de xy 35.
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14,.
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur Artois t
art. 74 ).
On cite souvent Ricard, comme ayant rapporté un arrêt de i 65z
validant un testament où il était dit : « Lequel n’a pu signer t
a interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence'que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
Aussi Ricard , n.° i 526 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaire, dit Ricard , au n.° i 568 , ne doit
<c contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
t- L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n’avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce enquis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal et
le 23 pluviôse an 7 , entre les héritiers V a ch ier, d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art.. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur ddD 2
�. ( 2 8 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce j:oint la jurisprudence.
Les Cliouvenc se sont imaginé cpie les ordonnances d'Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T ou
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D >!ive dit que de son teins on n’était p is rigou
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan iuait pas si le testateur avait signé; mais Serres, Boutaric
et F u r g o l e ne disent rien de p a r e i l . Furgole dit au contraire'
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit public , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
1 1 j reuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Cliouvenc
se sont efforcés de persuader qu’///<? veut dire il/itéré , puis
i[u illile r é veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i 685 défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’acte, elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
T
Vinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, cpii sont testatio mentis , il faut éc.rire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29^
viations. Ccvterum Htteris iisque usitatis et legibilîbus scribenduin esse p la c u it , non sig n is, obscurisve n o u s , l. G , § . ult.
de bon. p o ss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le dictiounaire de l’Acadéinie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; 011 n ou veau diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , if n’y a pas dans le testament illité r é , il y a ille , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot biznrre , une déclaration de la testatrice, qu elle n a
pu ou su signer. Allons plus loin nieine , le mot illitcre ne lu
remplacei’ait pas.
SEPTIÈME
QUESTION.
Q u elle est la nature de la substitution du testament de 1735 ?
a-t elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par iine expression infidelle de l’expédition, qu’ils avaient d’abord
produite, de ce testâmes.
Les héritiers inslitués, disaient ils , etaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de r e n d r e la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution, dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
substitutus substituto est substituías instituto , Marie Molin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l’extrait vidimé du testament de
�( 3° )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p o sé , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inoflicieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Péi’égrinus, qui a fait un traité sur les fidéicommis, le définit
ainsi. F iduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
alterius gratiâ institutus , eidem reslituere hereditatem ,p o st
diem certam vel incertam , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent ïïenrys et Bretonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é crit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
«c et l’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerenlur.........
« Quoique le tems de la restitution, contiuuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ierait bon usage de cette
« liberté , et n’attendrait pas jusqu’a sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« On doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et n e l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
« l’a instituée que parla nécessité de leur bas â g e , non ut /¿lus
minoribus obesset , sed potius ut eis consu/eret. » ( henr. t.
i . c r , p. 736, t. 3 , p. 69 ).
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du fiduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C 3f )
i .° Catherine Ferrapie avait un ills et des filles ; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2*0 Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l'hérédité à son
fils, sans distraction de cpiarte. Ces prétendus héritiersn’avaient
donc l’espoir d'aucun droit , de leur c h e f, à la succession ; car
tout héritier grevé de fidéicornmis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( 1. i . cr §. 5 , ad treb. ) ;
3 °. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut parentibus
obsequerentur. A cela près, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eût été vivante , sed potius ut eis consuleret.
Ainsi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin } mais seulement au cas q u 'il vint à mourir sans
pouvoir d isposer, ou sans avoir recueilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , si non extiterit hœ resJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pas mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de droit écrit le mineur avait testamenti fa ctio n em
aussitôt qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , né
en 1731 , était pubère en 1746 , et il n ’est décédé qu’en 1748.
Si ce moyen 11’était pas péremptoire , on opposerait aux
�C 30
Chouvenc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o iesi liberis
inipuberibus q u o s IN p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus œtatis sint
in quâ ip si lestamentum fa cere non possunt.
, Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
«ncore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règlesu b stitu tu s subslilulo n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad j. 41. de vul. et pnp. su b.)
A insi le testament de
, valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q UE S TI ON.
L e testament de 1743 e st-il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité 11e change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin,père a institue son (ils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses enfans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hæredem in s titu a i, aut exhœTedem nomi/iatim f a c ia t , ahocjum inutilitcr testabitur.
Cette disposition a etc répétée dans l’art. 5o de l'ordonnance
de 1735, qui dit que, dons les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M us l'héritier, institué par le testament de 174^ >étant décédé
ab in testa t, il importe.peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
/
�( 33 )
ou ju r e suo , à la succession de leur p ère, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité'.
Les Chouvenc terminent leur mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession Molin ; 2.° qu’on accorde
«à Marie Molin leur venderesse , les prélèvemens qu’elle aurait à
l'aire, notamment trois qu’ils indiquent ; 3.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s’il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait d r o it, en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l’exécution du jugement dont est appel.
A lors, seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible..
Quant au eornpulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
foule de papiers de la famille Molin , qu’ils ne pouvaient tenir
que de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
s-t remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en communication
E
�(
3 4
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d ’un partage, avec l ’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M.* D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E , avoué.
A
R I O M ,
D e l ’imprimerie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I )•
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
prétérition
prescription
testaments
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0326
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53774/BCU_Factums_M0326.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53506/BCU_Factums_G2520.pdf
f2bdb61e87702c60506dae495bb99ac7
PDF Text
Text
ff
■ÿr m
memoire
EN REPONSE,
P O U R M. J e a n - A n t o i n e M O L L I N , ancien Magistrat,
au nom et comme tuteur de ses enfans mineurs l
habitant de la ville d ’Yssingeaux; intim é.
�MEMOIRE
COUR ROYALE
DE RIOM.
EN R E P O N S E ,
Ir
P O U R M . J e a n - A n t o i n e M O L L I N , ancien Magistrat, .
au nom et comme tuteu r de ses enfans mineurs ,
habitant de la ville d ’Y ssingeaux, in tim é
*r
{ 9 X%
CONTRE
L e S ieu r J e a n - M a r t i n
R O C H E R , N é g o c ia n t , ^ ~
habitant de la ville de T e n c e , en q u a lité de subrogétuteur de J e a n - P i e r r e - À u g u s t i n P e y r a c ho n , appelant;
EN PRÉSENCE
«
D u S ie u r J e a n - P i e r r e P e y r a c h o n Propriétaire t
habitant la v ille de T e n c e , aussi intimé.
S
i la loi a mis des bo rne s à
la
faculté
q u ’elle
a c c o r d e a u x pères de disposer de le ur s b i e n s , à titre
g r a t u i t , c ’ est p r i n c i p a l e m e n t d a n s l ’ i n t é r ê t des enfans.
/
�, r
( 2 )
C ’est, cl’un autre c ô t é , pour maintenir l ’égalité
V
entre les héritiers, et sur-tout entre les enfans, appelés
à la même succession, que la loi a ordonné le rapport
des dons q u i leur ont été faits , s’ ils n ’ont pas été
expressément dispensés de ce rapport.
Ma is , d ’après les principes même qui l ’ont fait in
troduire, le rapport ne peut être exigé par le donataire
ou légataire, étranger à la succession.
C e point n ’est pas contesté.
O n ne veut pas moins en éluder l ’application 5 et ,
pour y parven ir, on veut faire distinguer l ’action en
r a p p o r t , de l ’aclion en im p u t a t io n .
C e n ’est pas, d il -o n , le r a p p o r t de la dot par elle
reçue, et du domaine qui lui a été abandonné en
jjiienient d ’ une partie de cette d o t , q u ’on a demandé
ïîtcjp- madame Mo llin.
L a loi faisait en sa faveur une
l*. * réserve dont elle ne pouvait être privée par les dispo^
* ^
"
*\
sitions gratuites du sieur Peyrachon , son père. L e
legs fait en faveur de Jean-Pierre-Augustin Peyrachon
doit recevoir son exécution ju s q u ’à concurrence de
cette réserve et de celle du sieur Jean-Pierre P e y r a c h o n ,
autre enfant; mais, pour compjti/fcr la ré se rv e de ma
dame M o l l in , il faut d ’abortl im p u t e r le montant de
sa dot et l ’excédant de valeur du domaine qui a été
délaissé à son mari.
On arriverait ainsi, pour Jean-Pierre-Augustin P e y
rachon , légataire, au même résultat que s’il pouvait
obtenir le rapport do la dot constituée à jMm'! Mollin.
L e legs iait eu faveur de Jean-Pierre Peyrachon 11c
�(3 )
peut comprendre, aux termes mêmes du testament du
sieur Peyrachon p è r e , que le tiers des biens existans
dans les mains de celui-ci à l ’ époque de son décès.
Il
ne peut être question , dans aucun cas ,
de
Y im putation de cette dot; et madame Mollin ou ses
enfans doivent obtenir leur droit de réserve sur les
biens dont le sieur Peyrachon est mort saisi, tout en
conservant la dot que le sieur Peyrachon lui avait
constituée.
A u moins ,
madame Mollin et
ses enfans
de
vraient toujours retenir l ’excédant de la valeur du
domaine de la Nau te , si cet excédant ex i s te , et est
réputé lib é r a l i té , à valoir sur la quotité disponible des
biens du sieur P e y ra ch o n , le d é l a i s s e m e n t d e ce d o
m a i n e , en p a i e m e n t de la d o t , devant etre considéré,
q u a n t à l ’excédant, comme un don .en pr éc ip ut ; cequi restreindrait d ’autant le legs fait à Jean-PierreAugustin Peyrachon.
C ’est ce que nous espérons étab l ir , avec le secours
d ’ une législation qui a eu principalement en vue les
héritiers à réserve, saisis de plein droit de la succession,
quelles que soient les dispositions fai tes pour les en
écarter; avec le concours d ’ une jurisprudence qui tend,
avec raison , lorsque la loi n ’a pas de prohibition for
m e l l e , à préférer, à des l é g a t a i r e s étrangers, ceux pour
lesquels les l i e n s du sang et les droits de la nature
semblaient être une recommandation suffisante, dans
l ’exercice de la faculté donnée h l ’ homme de substituer
aux héritiers que la loi appelait, des héritiers de son
choix.
�(4)
\ »
B u reste,
l ’avantage q u ’on veut obtenir pour le
mineur Peyraehon tient à la décision d ’un point de
' . ,.
droit 5 et l ’on doit s’en rapporter aux lumières des
magistrats q ui doivent prononcer.
Mais le mineur Peyraehon a cherche en ou tre , ou
l ’on a cherché dans son in térêt, à détourner toute la
fortune mobilière du sieur Peyraehon.
C ’est l ’objet d ’un autre procès pendant én la C o u r ,
et dans lequel figure un sieur abbé Merle, qui aurait
participé aux soustractions et enlèvemens dont les
h é r i t i e r s légitimes se sont plaints.
N ’é t a i t - c e p o i n t a s s e z , p o u r le m i n e u r Peyraehon ,
de recueillir, au préjudice de son père et de sa tante,
»
le tiers des biens de la succession de son aye ul?
FAITS.
L e sieur Jean-Pi erre P e y r a e h o n , ancien juge de
paix du canton de T e n c e , a e u , de son mariage avec
Marguerite Rocher ,
trois
enfans , savoir : Marie-
Geneviève , Jean-Pierre et Augustin.
M a r g u e r i t e H o c h e r est d é c é d é e ' l a p r e m i è r e .
A u g u s t i n P e y r a e h o n est m o r t q u e l q u e t e m s a p r è s .
M a r ie -
Geneviève Peyraehon a contracté
mariage
avec M. Jean-Antoine M o l l i n , juge au tribunal civil
d ’Yssingeaux.
L ’acte réglant les conditions civiles de ce mariage
est en date du 12 iloréal an i 3 .
L e régime dotal est d ’abord stipulé.
�(5 )
L e sieur Jean-Pierre Peyra ch on, pére de la futu re,
lui donne et'constitue en dot la somme de 5 o,ooo f r . ,
dont 2000 fr. du chef de Marguerite R oc h er, alors
décédée, et le surplus du chef paternel.
L a somme de 25 ,ooo fr. doit être payée en dettes
ou obligations à réquisition, et d après 1 clat à faire
entre les parties. « Les autres 2^,000 f r . , est-il d i t ,
« seront payables en fonds ou a r g e n t , par qui de
« dro it, après le décès du donateur, et sans inté rêt,
« et même par anticipation, en tout ou en partie »
L a future se constitue de son ch ef, et du consente
ment de son père, la somme de 1000 francs pour son
trousseau.
Il est stipulé un gain de survie en faveur de la
future.
Suit immédiatement la clôture de l ’acte, avec la
mention des signatures des parties et des témoins.
« Déclarant ladite f u tu r e , est-il ajouté après cette
« clôtu re , que dans ladite constitution maternelle,
« qui est mobilière, sont fixés et compris les droits
« qui peuvent lui revenir du chef d ’Au gu stin Pe yra « chonson
frère, dont le tiers se porte à 5oo f r . ,
« et q u ’elle renonce à tous ses droits légitimantes
« paternels et maternels. »
C e c o n t r a t est passé sous le C o d e c i v i l .
L a déclarai ion qui le termine est insignifiante; elle
devrait d ’ailleurs, en la forme, être considérée comme
non écrite.
E n paiement du premier terme de la dot de son
�(0)
épouse, M. Mollin a reçu du sieur Peyraclion , son
b eau-p ère , le ro mai i 8 o 5 , des effets* et créances,
ainsi que quelques héritages, céd és et rem is pour la
somme de 5 ooo f r . , ju s t e v a le u r desdits fo n d s .
L e second terme a été anticipé. L e 20 juin
i
8i 3
,
le sieur Peyraclion a remis à M. Mollin des titres de
créances, pour la somme de i3 ,o o o fr. ; « et pour les
« 12,000 f r . , restant de ladite d o t , lit-on dans l ’acte,
« je,
Peyrachon , ai remis et cédé,
en propriété,
« l ’entier domaine de la N a u te audit sieur M ollin,
i< a cc epta nt, pour le m onta nt desdits 12,000 francs,
« d u q u e l domaine il n ’entrera en j o u i s s a n c e cju après
« le décès d u sieur P e y r a c l i o n , qui s’en réserve les
« fruits pendant sa v i e ; et, au moyen de tout ce que
« dessus, et sau f le paiement desdites créances, ledit
« Peyrachon sera libéré de rentière dot de sa fille. »
L e sieur Peyrachon avait un attachement particulier
pour madame Mollin , q u ’il honorait d ’une entière
confiance.
Il
est inutile , pour la
cause a c t u e l l e ,
d ’entrer dans des explications à cet égard. Il suffira de
dire q u e , par un premier testament olograph e, en
date du i3 juin i8i3 , le sieur Peyrachon av;rit légué,
sur la portion disponible de ses liions, à Jean-PierreCiiarles M o llin , son petit-fils et filleul, son domaine
du P e ic h e r , et avait donné le surplus de cette portion
disponible à Jean-Pierre-Martin-Alphonse P e y ra c h o n ,
un des enfans de Jean-Pierre Peyrachon , son fils.
Ce
n ’ont
pas
été les
dernières dispositions du
sieur Peyrachon : inutile encore de dire comment et
�( 7 )
par les suggestions de q u i elles ont ¿té changées. L e
sieur abbé Merle joue ici un
rôle peu h o n o rab le ,
comme dans toutes les circonstances q ui ont précédé,
accompagné et suivi la mort du sieur Peyraehon.
'
Qu oi q u ’il en soit, le sieur Peyraehon a fait u n
second testament olographe, sous la date du 3 o mars
1819.
i° L e testateur révoque et anmille toutes les dispo
sitions q u ’il pourrait avoir faites antérieurement ;
20 II fait quelques legs p i e u x , à. acquitter p a r c e lu i
q u i aura la partie disponible de ses bien s3 q u i d e
meure aussi chargé de ses honneurs fu n èb res ;
3°
Il donne à Jean-Pierre P ey ra eh o n , son fîls aîné,
le domaine de F o u r n e t, un pré et un bois, et c e y
p o u r lu i tenir lieu du tiers de ses biens que la lo i lu i
accor de y
4 ° « Je déclare reconnaître, porte le testament,
« pour mes p e ti t s-en fan s, M a r i e - G e r m a i n e , Jean« P ierre-A u g u stin et J e a n - P i e r r e - M a r t i n - A l p h o n s e
« Peyraehon ,
ces trois e n f a u s issus du mariage do
« mondit fils avec feue Maric-Germaine Deiguas ; e t ,
« au surplus de tous mes autres biens meubles et
« immeubles, noms, droits, voies, raisons et actions,
« je les d o n n e e n p r é c i p u l e t a v a n t a g e ,
hors p a r t e t
« p o r t i o n , e t sans r a p p o r t , à Jean-Pierre-Augustin
« P e y r a e h o n , m o n p e t i t - f i l s , l ’a î n é de mond it lils et
« de la défunte d e m o i s e l l e Deiguas, pour lui tenir
« lieu de la portion disponible de mes bie ns, que je
�(8 )
« lui don ne, à la charge par lui d ’exécuter le contenu
« au présent testament, et de payer mes dettes. »
L e testament se termine par la déclaration, de la
part du testateur, que ses meubles et effets ne sont
de v a le u r que de cent cinquante fr a n c s .
C ett e déclaration était-elle un moyen q u ’on cher
chait à se ménager, pour écarter tous reproches d ’enlèvemens et spoliations?
L e sieur Jean-Pierre Peyrachon est décédé le 9 mai
1819.
U n a c t i f considérable en deniers et en c r é a n c e s avait
été dét ou rn é, d a n s l ’ i n t é r ê t , san s d o u t e , de JeanPierre-Augustin Peyrachon : on veut bien croire que
le sieur abbé Merle n ’y avait aucun intérêt personnel.
L e 18 mai 1819, M. e t M meMoIlin présentent requête
au tribunal d ’Yssingeaux, et ils obtiennent une ordon
nance portant permission de faire des saisies-arrêts,
jusques à concurrence de la somme de 3 o,ooo f r . , entre
les mains de diiférens débiteurs désignés, et de tous
autres qui
pourraient
être
découverts.
La
même
o r d o n n a n c e , a t t e n d u ‘que les intérêts de .Tcan-Pierre-
A u g u slin
Peyrachon ,
encore
m ineur ,
peuvent se
trouver en opposition avec ceux d u sieur Jean-Pierro
P e y r a c h o n , son père,
autorise M. et M me Mollin à
provoquer la nomination d ’un subrogé-tuteur.
Suivant procès-verbal du 4 j n ‘ n !8i9> le sieur JeanMartin llocher a été nommé subrogé-tuteur du mineur
P e y r a c h o n , par le conseil de fumillo.
�Des saisies-arrêts ont eu l i e u , et elles ont été suivies
de demande en validité.
Peu de jours après., et le 11 juin
1 8 1 9 , M. et
M me Mollin ont saisi le tribunal d ’Yssingeaux d ’ une
demande en p a r t a g e de la succession du sieur JeaiiPierre Peyraclion.
C ett e demande est formée contre le sieur JeanPierre Peyraclion fils, et contre le sieur R o c h e r , en
sa qualité de subrogé-tuteur de Jean-Pierre-Àugustin.
Peyraclion.
Il est annoncé que les biens de la succession, indé
pendamment des immeubles légués au sieur Peyraclion
pour son tiers, consistent dans plusieurs m aiso ns,
domaines, rentes, e l dans le s titr e s e t p a p ie r s que
Jea n -P ieire- A u g u s t i n Peyraclion remit en dépôt à
M e Cham pagnac j notaire à T e n c e , avec le testament
de son a y e u l, et dans les promesses et sommes ré
clam ées contre les siciu's a b b é M erle et R o c h e r , en
sa dite q u a lité > et que le m ineur P e y r a c lio n , d ’in
telligence avec le sieur M erle , pretre, ont transfoi'mées en b illets p a y a b les au p o rteu r, dont ils sont
restés saisis.
L e subrogé-tuteur et le sieur abbé Merle sont égale
ment assignés pour rapporter à la masse tout ce q u i
a clé détourné avant la mort du sieur Peyraclion et
pendant sa maladie, même de son consentement} pour
rendre toutes les sommes remises en leurs mains, ainsi
que tous les billets et promesses souscrits, par suite
des changemciis opérés, au 110111 du sieur Merle ou de
�Jean-Pierre-Augustin P eyra ch on, ou stipulés 'payables
au porteur , desquels billets et promesses ils ont été
n a n tis , et qui étaient primitivement au nom du sieur
Peyrachon père.
M. et madame Mollin concluent enfin à ce que le
sieur Peyrachon , en qualité de tu teur légal de JeanPi erre-A ugustin, et le sieur Ro ch er, en qualité
de
subrogé-tuteur, ne puissent être envoyés en possession
des biens com pris en
l ’ institution f a it e p a r Jean-
P ierre P eyrachon j prem ier du n o m , en fa v e u r de
J e a n -P ierre-A u g u stin j son p etit f i l s , que de con for
m ité à la loi.
L ’affaire étant engagée devant le tribunal d ’Yssingeaux, des faits de soustractions et spoliations ont été
précisés d ’une manière plus particulière, par M. et
madame M ollin, et ils en ont offert la preuve. Préala
b l e m e n t , l ’abbé Merle et le subrogé-tuteur ont subi
interrogatoire sur faits et articles, en vertu de jugeincns des 12 juillet et 9 novembre 1819.
M. et madame Mollin ont soutenu que le legs fait
en f a v e u r d e J e a n - P i e r r e - A u g u s t i n
testament du
3o mars 1 8 1 9 , 11c
P e y r a c h o n , p a r le
p o u v a i t lui donner
droit q u ’au tiers des biens dont le sieur Peyrachon
père était mort en possession \ et que pour déterminer
la quotité disponible à l ’égard de ce légataire , qui
était étranger à la
succession, 011 ne devait point
comprendre dans la masse la somme de 48,000 francs,
montant de la constitution de dot laite à la dame
�( 11 )
'/
M o l l i n , dont le rapport ne pouvait être du q u ’au sieur
Jean-Pierre P e y r a c h o n , cohéritier.
L e subrogé-tuteur du mineur Peyrachon a demandé,
par application des articles 920 et 922 du Code civil,
que la f i x a t i o n de la quotité dont le sieur Peyrachon
père avait pu disposer, fut faite sur une masse c o m
posée to u t à-la-fois des biens existans à son décès, et
des immeubles et sommes d ’argent dont il avait dis
posé de son vi va n t; et , par suite , que Ton comprit
dans la masse, soit la somme de 48,000 f r . , montant
de la constitution de dot faite à la dame M o llin , soit,
q uan t à l’excédant de v a le u r , le domaine de la N au te ,
donné en paiement, sur le montant de la d o t , pour
la somme de 12,000 f r a n c s , et a y a n t u n e v a l e u r beau
coup plus considérable, d ’après le subrogé-tuteur et
le sieur Jean-Pierre Pey ra chon , q u i , de son c o t é ,
demandait le rapport du domaine même de la Naute.
L e sieur Jean-Pierre Peyrachon a adhéré, d ’ailleurs,
aux conclusions de M. et madame Mollin , et à celles
du subrogé-tuteur, en tant q u ’elles avaient pour objet
d ’augmenter la masse de la succession, h laquelle il
était appelé pour un tiers. L e subrogé-tuteur lui op
posait q u ’ il était censé avoir renoncé à cette succession,
en acceptant le legs à lui fait par le testament, eu
jouissant et prenant la possession des objets q u i lui
avaient été légués.
L e sieur abbé Merle s’est réuni au subrogé-tuteur
pour coutester les enlèvemens et spoliations articulés
�par M. et madame Mollin; il a particulièrement conclu
à la suppression des écrits signifiés par M. et madame
M o llin , comme lui étant injurieux.
E n cet état , le tribunal civil d ’Yssingeaux a rendu,
le 7 juin 1820, un jugement contradictoire dont voici
le dispositif (1) :
« L e tr ib unal, après avoir entendu M. le substitut
du
procureur du Roi,
et
en avoir délibéré en la
chambre du conseil ,
« Ordonne que par les sieursPannelier, Mathieu aîné,
et B renas, experts-géomètres, que le tribunal a nommés
d ’o f f i c e . . . . , il sera p r o c é d é à la v i s i t e e t e s t i m a t i o n des
immeubles délaissés par défunt Jean-Pierre Peyrachon,
en ce non compris le domaine de la N a u t e , cédé par
ce dernier à M. M o l l in , en paiement de la somme de
,12,000 francs, pour savoir si lesdits immeubles dont
ils seront tenus de rapporter l ’état , consistance et
v a l e u r , peuvent se partager commodément en portions
égales, sinon avec soultc; et, dans le cas où la division
puisse avoir lieu , ils en formeront trois lots égaux ,
pour en être att ri b ué, par la voie du sort, et
par-
devant le juge-commissaire, un à chacun des eo-partageailS, Marie-Gencvièvo, J e a n - P i e r r e et Jean-PierreAu gust in P e y r a c h o n , légataires; lesquels experts se
ront tenus de présenter les bases de re s t i m a l io n , et
( 1) I-cs motifs de ce jugeaient sont transcrits dans le M ém oire p u b lié
au nom du sieur Jean-M artiu R o c h e r , su brogé-tuteur , pages 8 c l
suivantes »
�( -3 )
d ’estimer encore les restitutions de fruits desdits biens,
depuis le décès du père Peyrachon ;
« Déclare n ’y avoir lieu d ’accorder au légataire le
rapport à la niasse de la somme de 48,000 f r . , payée
par ledit défunt Peyrachon à la dame M o l l i n , sa fille;
ordonne que cette somme sera rapportée à l ’égard de
Jean-Pierre Peyrachon , cohéritier ;
« Déclare ce dernier non-recevable dans sa demande
en rapport, à la masse, du domaine de la N a u t e , cédé
par le défnnt à M. Mollin , pour completter la dot
q u ’il avait constituée à sa fille; ordonne aussi que ,
par les mêmes experts, il sera procédé à l ’estimation
de la valeur de ce d o m a i n e , à dater du jour de la re
mise q ui eu a été faite à M. M o l l i n , p o u r , s u r leur
r a p p o r t , ê t r e statué ce q u ’il appartiendra ;
« E t , avant dire droit sur la demande en partage
des meubles dépendans de la même succession, le tri
b u n a l reçoit M. Mollin à prouver, tant par titres que
par témoins, dans le délai de h u i t a i n e , par-devant
M. Massard, jugeîi cet effet commis, les faits suivans :
« Qu e le défunt Peyrachon était reconnu dans le
public pour un grand capitaliste, ayant à sa disposi
ti on, et placée chez différons particuliers, une somme
de 5o,ooo francs, q u ’ il prêtait journellement avec on
sans b i l l e t s ;
« Q u ’il avait un livre-journal oii il énumérait scs
dettes actives, et indiquait sa position avec ses fermiers;
« Q u e , par aveux, et pendant sa maladie, et no
tamment depuis le carnaval dernier ( i B kj ) , le défunt
�avait reçu de ses fermiers, des cohéritiers Boy er, ou
du nommé P e y r o t , plus de 6000 francs en argent ;
« Q u ’ un grand nombre de promesses ou billets ,
souscrits en faveur du d é f u n t , et sous son nom, ont
été convertis en billets au porteur*, que les nouveaux
billets ont été écrits par Jean-Pierre-Augustin Peyrachon,
légataire, en présence de l ’abbé Merle; que
tantôt il était convenu q u ’ils seraient payés à JeanP i e r r e - A u g u s t i n , et tantôt à l'abbé Merle; que JeanPierre-Augustin s’est rendu plusieurs fois chez les dé
b i t e u r s pour leur recommander le secret, et les engager
à déclarer q u ’ ils n e d o i v e n t r i e n ,
et q u e ,
pour y
parvenir, il leur observait que l ’abbé Merle pensait
q u ’ils pouvaient dire avoir payé le d éfun t;
« Qu e depuis le dimanche gras, et pendant tout le.
tems qui a précédé de quinzaine la mort du père
P ey ra ch on , l ’abbé Merle était souvent pendant tout le
jo u r , et ju s q u ’à m i n u i t , dans le domicile du dé f u n t ;
« E t enfin q u e , pendant la maladie et après le décès
de Jean-Pierre P eyra ch on, Jean-Pierre-Augustin } son
petit-fils, a emporté de la maison du premier plusieurs
objets, tels que linge, bouteilles, argent, papiers et
autres effets;
« S a u f audit Jean-Pierre-Augustin Peyrachon et à
l ’abbé Merle leurs preuves contraires, dans le même
d él ai, et par-devant le même commissaire;
« Sursoit à prononcer sur la demande en suppression
de mémoire, déclaration d ’écrits calomnieu x, et eu
�( i5 )
dommages-intérêts, formée par l ’abbé Merle, jusqu a
ce q u ’il aura été procédé en exécution de l ’interlo
cutoire ci-dessus ordonné;
« C ondamne Jean-Pierre-Augustin P ey rach o n , dans
la personne de son subrogé-tuteur, en la moitié des
dépens faits j u s q u ’à ce j o u r , le surplus demeurant
réservé en définitif- »
L e 2 5 octobre 1820, le sieur Rocher, en sa qualité
de subrogé-tuteur, a interjeté appel de ce j u g e m e n t ,
tant contre le sieur Jean-Pierre Peyrachon , que contre
M. et M me Mollin ; mais avec déclaration que V appel
ne portait point sur la
disposition du ju g em en t j
relative à la preuve ordonnée p o u r de prétendues
sp oliation s.
Les parties ont dès-lors procédé en exécution de
cette disposition. Des enquêtes ont eu lieu; e t , par
de nouvelles conclusions, M. et M me Mollin ont de
mandé que le subrogé-tuteur et l ’ abbé Merle fussent
condamnés solidairement à payer et rapporter à la
succession de Je an -Pierre Peyrachon la somme de
5o,ooo fran cs ,. p o u r le numéraire q u ’avait le d é f u n t ,
et pour les sommes retirées par Jean-Pierre-Auguslin
P eyra ch on, ou mises en dépôt chez l ’abbé Merle, ou
enfin détournées par substi tut ion de promesses au
porte ur, h. laquelle somme le légataire serait privé de
prendre part , et ce , indépendamment des objets
énoncés aux t i t r e s confiés à M* C h am p a g n a c , à l ’égard
desquels il serait également déchu de tout droit.
L e subrogé-tuteur et l ’abbé Merle 11’ayant pas cru
�Î^î
( «6 )
.
devoir se présenter devant le tribunal d ’Y ss in geaux,
sur ces conclusions, un jugement par défaut, faute
de plaider, est intervenu le 25 mai 1 8 2 1 , par lequel
la condamnation au rapport de la somme de 5o,ooo fr.
a
été
prononcée solidairement
contre Jean-Pierre-
Àugustin Peyrachon et l ’abbé Merle. Il a été ordonné
que cette somme serait divisée par égale portion, entre
M. et M me Mollin et le sieur Jean-Pierre P e y r a c h o n ,
sans que le mineur Peyrachon pu t y prendre aucune
part. Il a été néanmoins déclaré par le jugement, que
cette privation ne s’étendrait point aux sommes prove
nant des l i t r e s déposés c h e z le n o t a i r e C h a m p a g n a c y
lesquelles seraient p a r t a g é e s e n trois portions, dont
l ’une serait attribuée au mineur.
L e subrogé-tuteur et le sieur abbé Merle se sont
pareillement pourvus en la C o u r contre ce jug ement ;
et il s’agira de savoir,
lorsqu’on s’occupera de cet
app el , s’il est recevable, et très-subsidiairement s’il
est fondé.
Q u a n t à pr és en t, nous n ’avons à. examiner que les
dispositions du jugement du 7 j u i n . 1820, dans les
chefs attaqués; et c ’est à justifier ces dispositions, que
nous allons nous attacher.
�MOYENS.
L
a
principale q ues ti on, la question même unique
qui se présente en ce moment à la décision de la
Cour,
consiste à déterminer sur quels biens Jean-
Pierre-Augustin Peyrachon peut prendre le legs q ui
lui a élé fait par Jean-Pierre P e y ra c h o n , dans le testa
ment du 3 o mars 1819.
C e legs doit-il être borné au tiers des biens existant
lors du décès de Jean-Pierre P e y r a c h o n , c ’est-à-dire,
des biens dont il est mort en possession ?
O u bien ce legs peut-il comprendre le tiers des mêmes
biens, en y réunissant fictivement le m onta nt de la
constitution de dot faite à la dame Mollin par son
contrat de mariage du 12 floréal an 1 3 , et le prétendu
excédant de valeur du domaine de la Naute ; de telle
sorte que Jean-Pierre-Angustin ait le tiers en valeur
des biens existans lors du décès, du montant de la
C o n s ti tu t io n de d o t ,
et de l ’excédant de valeur d u
domaine ?
I l f a u t d ’a b o r d se f i x e r s u r les t e r m e s m ê m e de l a
d i s p o s i t i o n f a i t e p a r J e a n - P i e r r e P e y r a c h o n pè r e .
Après d!flférCng legs, et notamment le legs d ’ un
domaine fait au sieur Jean-Pierre Peyrachon fils, pour'
lui tenir lieu du tiers des biens que la loi lui accorde,
le testateur ajoute : « E t au surplus de mes biens
3
�« meubles et immeubles , je les donne en préciput
« et avantage à Jean-Pierre-Augustin Peyraclio n, mon
« p e t i t - f i l s , p o u r lu i tenir lieu de la portion dispo« niblc de mes biens que j e lu i donne. »
Q u ’entend donner,
sieur Peyraclion
et que donne
réellement le
par cette disposition ? L a
quotité
disponible; et il ne pouvait pas donner davantage :
quotité disponible, déterminée par l ’article
q i
3 du
C od e c i v i l , d ’après lequel les libéralités, par acte
entre-vifs ou par testament, ne peuvent excéder le
t i e r s des biens du disposant, s’il laisse h son décès deux
enfans légitimes*, cas d a n s l e q u e l sc t r o u v a i t le sieur
Jean-Pierre Peyraclion.
L e sieur P e y ra c l io n , testateur, gratifiait donc JeanPierre-Àugustin Peyraclion du tiers do ses biens.
Mais était-ce seulement du tiers des biens dont il
mourrait saisi et v êtu ?
L ’affirmative est sans difficulté.
Il est certain que des objets donnés entre-vifs, des
objets constitués en d o t , sortis de la main du dona
teur ou constituant, ne lui appartiennent plus. Si
postérieurement il dispose de tout ou de partie de ses
b ie ns, sur-tout par un testament qui ne reçoit d ’eiïet
que par sa m o r t , celte disposition ne peut atteindre
les biens dont il s’est déjà dépouillé par des donations
entre-vifs ou des constitutions de d o t , qui ne sont
autre chose que des donations.
A la vérité, les dons entre-vifs peuvent ne pas être
irrévocables, en ce sens q u ’il est des cas oit ils rentrent
�( *9 )
<
dans la succession du don at eu r, pour être soumis au
partage, ainsi que les biens dont le donateur est resté
nanti ju s q u ’à sa mort.
Mais c’est là ce qui constitue le rapport à succession.
A i n s i, c’est par l ’effet du rapport à la succession du
do nateur, que les objets donnés ou constitués en dot
viennent faire partie de la succession, viennent grossir
la masse des biens laissés par le donateur ou consti
t u a n t , afin que ceux q ui ont droit à la succession
puissent avoir leur p a r t , non-seulement dans les biens
existans lors du décès, mais encore dans les biens dont
le défunt avait cessé d ’être propriétaire à titre gratuit.
O r , quel est l ’objet du rapport?
C ’est d ’établir l ' é g a l i t é e n t r e c e u x q u i s o û l appelés
h la s u c c e s s i o n ; et cet engagement des en fans et autres
desceiulans, dit D o m a t , L o is c iv ile s , liv. 2 , l i t . 4 ,
sect.
i rc,
n°
I er,
à remettre dans la masse de l ’ hérédité
de leur père, ou autre ascendant à qui ils veulent
succéder, les choses-à eux données par cet ascendant,
pour être partagées entr’eux et leurs cohéritiers, de
même que les autres biens de l ’ hérédité,
est d ’une
équité toute évidente, qui a son fondement sur l'éga
lité naturelle entre les enfans dans la succession de
ascendans , et sur ce q u ’on présume d ’un lel
don,
n ’a v a i t été fa it <jue p o u r avancer au do
leurs
nataire u n e partie d e ce q u ’il pouvait espérer de l'hé
rédité.//«- titu lu s manifestant habet œ quilalem : loi 1,
il’, de collatione honorum. C e sont les mêmes p r i n c i p e s
qui out die te 1 article 8^3 du, Code c iv il, qui soumet
�Ctf
( 20 )
tout héritier venant à une succession, à rapporter tout
ce q u ’il a reçu du d é f u n t , directement ou indirecte
ment , à moins que les dons et legs ne lui aient été
faits expressément par préciput et hors pa rt, ou avec
dispense du rapport.
Dès que le rapport n ’a d ’autre b u t que l ’égalité
entre cohéritiers, il s’ensuit q u ’il ne devait être or
donné q u ’en leur fave ur, et q u ’il ne pou vait l ’être au
profit de ceux qui n ’étaient point appelés à la succes
sion,
et particulièrement
au profit des légataires,
envers lesquels le cohéritier donataire ne peut être
aucunement obligé.
».Telle a toujours été la règle, que l ’article 8D7 d u
Code civil n ’a fait que consacrer : « L e rapport n ’est
« du. que par le cohéritier à son cohéritier j il n ’est
« pas clù a u x légataires ,
ni aux
créanciers de la
« succession. »
U n e des conséquences
forcées de cette
règle est
q u ’ un légataire, quel q u ’il soit, e t su r- to u t le légataire
de la quotité disponible, ne peut demander le rapport
à l ’enfant ou autre cohéritier donataire, pour prendre
son legs tant sur les objets donnés que sur les biens
de la succession.
C ’est ce q u ’expliquent très-bien , pour l ’ancienne
législation, P o t h ie r , T r a ité des S u ccessio n s, chap. /j,
article a , § (>*, et pour la n o u v e ll e , M. C h a b o t
de
l ’A l l ie r , dans son ouvrage sur les Successions.
« L e rapport étant introduit pour établir l ’égalité
entre les enfuns qui Viennent à la succession de leur
�père 011 mère, ou autres ascendans, dit P o t h ie r ,
il
suit que l ’enfant ne doit le rapport q u ’aux autres
en fans ses cohéritiers : c’est pourquoi nous avons vu
q u ’il ne pouvait être prétendu par les créanciers de la
succession acceptée sous bénéfice d ’inventaire.
« Par la même raison , continue le même a u t e u r , si
un père qui a deux en fans, à l ’un desquels il a fait
une donation entre-vifs, fait un tiers-étranger léga
taire du tiers de ses biens, ce légataire ne pourra pré
tendre aucune part dans le rapport des biens donnés
entre-vifs à l ’un des enfans,-et n’ aura que le iiej's des
biens q u i se sont trouvés lors du d écès. C e u x donnés
entre-vifs à l ’un des enfans, se partageront entre les
deux enfans; car le rapport n ’est ilù q u ’aux enfans
cohéritiers. »
« M. C h ab ot de l ’Allier s’exprime en ces termes, sur
l ’article 857 du C o d e , n° 3 :
« Il est évident que la l o i , en cherchant à établir
l ’égalité, par le moyen du rapport, n ’a eu en vue que
les héritiers du sang, à qui la nature donne en effet
des droits égaux. Il ne peut y avoir aucun m o t if pour
établir l ’égalité à l ’égard des héritiers institués, dés
légataires, des donataires, qui ne tiennent leurs droits
ni de la n a t u r e , ni de la l o i , mais un iquem ent de la
volonté de l'homme. »
. ,.
H . C h ab o t pose ensuile cet exemple :
«Uri père, ayant cinq enfans, a fait à l ’ un d ’eux uil
don en avancement d ’ hoirie, et postviiun cinen t i l ' a
institué un étranger son héritier, ou légataire du quart
�de ses biens. Si l ’enfant donataire vient à la succession,
il fera le rapport de ce q u ’il a reçu ; mais ce rapport
ne profitera q u ’à ses frères et sœurs. L ’ héritier institué,
ou le légataire, n’aura rien à prétendre dans la chose
rapportée, et ne prendra son quart que dans le reste
de la su ccessio n / en sorte que si la succession vaut
4ooo francs,; et que le don fait à l ’un des cnfans soit
de 600 francs, l ’ héritier in sti tué, ou le lé g a ta ire ,
n ’aura le quart que de 34oo francs : les trois autres
quarts et les 600 fr. rapportés par le donataire seront
partagés également entre les cinq cnfans.
C e s p r i n c i p e s s’ a p p l i c f u e n t d i r e c t e m e n t a n o t r e espeCG.
L e sieur Peyrachon
père a légué à Jean-Pierre-
A u g u slin P ey ra chon , son petit-fils, la portion dispo
nible de ses biens, c’est-à-dire le tiers, dès q u ’il avait
deux enfans. L a dame Mollin avait reçu 48,000 francs
en d o t; elle en doit le'rapport, sans difficulté, à JeanPierre P e y r a c h o n , son cohéritier; mais elle ne le doit
point, à Jean-Pierre-Augustin , légataire étranger. C e
légataire ne doit donc avoir que le tiers des biens q u i
se sont trouvés lors du d é c è s , suivant les expressions
de Pot hier.
On cherche, pour le mineur P e y r a c h o n , à écarter
la conséquence qui vient d ’être tirée de la règle que lo
rap/torl n ’est pas dit a u x légataires ,
tinciion.
c'ntro les principes
sur
par une dis-
le rapport et les
principes sur Y im p uta tion .
Sous les anciennes lois, diL-011, l ’imputation pouvait
�( =3 )
être exigée par nn donataire on légataire étranger,
toutes les fois q u ’un légitimaire, qui avait déjà reçu
du défunt une libéralité, d e m a n d a it , pour obtenir sa
légitim e, le retranchement du don fait à l'étranger.
Il y a identité de cause et de nature entre la légitim e
d ’autrefois et la réserve actuelle. Sous les lois n o u
velles, il n’est pas permis de disposer, au préjudice
des enfans , d ’une quotité
d é t e r m in é e ,
qui est la
réserve faite en leur faveur-, et si une libéralité excé
dant cette quotité est faite au profit d ’un étranger,
les enfans ont le droit de la faire réduire; mais cette
réduction doit avoir lieu d ’ après la base déterminée par
l ’art. 922 du C o d e , et les enfans sont tenus d ’imputer
sur la portion ré se rv é e les sommes .et objets q u ’ils ont
précédemment reçus.
On cite , entre autres a u t e u r s ,
D o n a tio n s, partie 3 , cliap.
Ricard (T ra it é des
8., sect.
11,
n° 1 1 5 ) ,
L eb ru n (Traité des Successions, liv. 2, cliap. 3 , sect. 9,
nos 4 et 5 ) , M. Merlin (Répertoire de Jurisprudence,
au mot lég itim e, sect. 8 , § 3 , articles 2 , n° 4 ) , et
M.
Grenier
(T ra it é des D on a tion s
et
T esta m en s,
4e p a r t ., cliap. 2 , sect. 4 , § 2 , n° 5 9 7 . ) — Suivant ces
aut eurs, tout ce qui avait été donné par le défunt à
celui qui réclamait une légitime par voie de réduction,
devait ê t r e impute sur c e t t e légitim e, même quand la
demande e n réduction ou retranchement pour la légi
time aurait, été dirigée contre un étranger, légataire
universel.
Voila sans co nliedil des a u tonlc s bieu imposantes ■
�Wt
( H )
Voyons ju sq u’à quel point elles peuvent
servir au
système dtï‘ subrogé-tuteur du m ineu r Peyrachon.
'■ i° Il ne s'agit pas précisément, dans l ’espèce, d'une
action en réduction ou retranchement.
donation
ou un legs universl avait été
é t r a n g e r , celui
q u i réclamait
une
L o r s q u ’une
fait à un
légitime devait
imputer ce q u ’il avait reçu du défunt : c ’est ce qui
parait résulter assez
positivement
de l ’opinion des
auteurs.
Mais Jean-Pierre-Àugustin Peyrachon n ’a pas reçu
de Jea n -P ier re Pe yra ch on , son grand’père, un legs
Universel d o n t la r é d u c t i o n soit n é c e s s a i r e pour former
ôti completter la réserve de la dame Mollin dans les
biens du testateur. L e mineur Peyrachon n ’a reçu
d ’autre legs que celui de la quotité disponible ; c’est
•
un legs à titre universel. O r , quelle était la quotité
disponible? le tiers des biens existans au décès; car ,
à l ’égard du légataire, le montant de la constitution
dotale de la dame Mollin était irrévocablement sorti des
înains du testateur. C ’est à ce tiers des biens existans
lors du décès, que le mineur Peyrachon a seulement
d r o i t , d ’ a p r è s la d i s p o s i t i o n elle-même, sans q u e la dame
Mollin ait besoin d ’agir e n r é d u c t i o n o u retranchement.
Nous sommes absolument dans l'hyp othèse d ’une suc
cession où il y a tout à-la-fois des héritiers donataires
et un légataire d ’une quotité fixe. On a v u , suivant
Pothier- et M. C h a b o t , q u ’ il y a , dans ce cas, deux
masses distinctes; l ’ une à partager entre le légataire
et les héritiers, et qui ne comprend que les biens esis-
�(» 5 )
M
tans à l ’époque du décès de l ’auteur com m un ; l ’autre
à laquelle ne prennent part que les héritiers, et com
posée des biens existans au décès, distraction faite du
legs ; plus , des objets rapportés
par
les héritiers
donataires.
20 L e legs en faveur de Jean-Pierre-Auguslin Peyrachon fùt-il r é p u t é legs u n iv e r s e l fait sous l ’empire du
Code civil, il ne po urra it, ce semble, jouir des mêmes
S^jntages q u ’il aurait pu avoir sous l ’ancienne^ légisr
lation.
Sans entrer dans un examen approfondi du carac
tère de la légitime ancienne; sans chercher a marquer
tous les points de différence qui existent entre cette
légitime et la ré se rv e l é g a l e a c t u e l l e , d is o n s que la
q u e r e l l e d ’i n o f f i c i o s i t é , inventée pour les cas où ayant,
m éprisé .leu rs e n fa n s, les pères s ’étaient épuisés en
fa v e u r des étrangers} était considérée, en général ,
comme une grâce extraordinaire (ce sont les termes
dont se sert Ricard, à l ’endroit ci té ), que la loi n ’avait
introduite que sous des conditions qui étaient, entre
autres, d ’imputer et de tenir compte, par les enfans,
des libéralités q u ’ils avaient reçues de leur père. L e
brun disait aussi que la querelle d ’ inofficiosité «t la
demande de la légitime étaient un droit extra ord i
naire q u i n c d e v a i t a v o i r li eu q u e l o r s q u e le père, ou.
n ’avait p o i n t du to ut, ou n ’avait pas assez considéré
son sang, et q u a n d il fallait que la loi vint au secours
de la nature, et suppléât au défaut de l ’affection pa
ternelle : Q uia ju d ic iu m p a tris l e x supplet.
4
�'( 26 )
L a réserve, cette portion sacrée, que le Code a établie
en faveur des enfans et ascendans, se rattache à des
idées différentes : les enfans et ascendans ne peuvent
en être privés par quelque disposition que ce soit. C e
sont eux q ui ont la saisine des biens, que le légitimaire n ’avait jamais autrefois. A u x termes de l ’ar
ticle i o i r du Code civil, les héritiers auxquels une
quotité de biens est réservée par la l o i , sont saisis de
lein (]roit de tous les biens de la succession ; et leJ|i|r
universel est tenu de leur demander la déli
vrance des biens compris dans le testament.
C ett e sa is in e est -e lle s o u m i s e à q u e l q u e condition?
L e Code civil, unique lo i qui doive régler la réserve,
oblige-t-il l ’héritier réclamant sa réserve
contre
un
étranger, à imputer ce q u ’ il a reçu de son auteu r?
Les auteurs conviennent, au contraire, que la querelle
d ’ inofficiosité n ’avait été introduite que sous la co n d i
tion de l'imp utation. U n e pareille condition peut-elle
être suppléée, lorsque toute la faveur est du coté de
l ’ héritier h réserve?
E t n ’est-ce pas un principe constant, écrit (Jans la
loi 20, au code, de co lla tio n ib u s, q u ’on ne doit im
puter dans la légitime que ce qui est expressément
soumis par la loi à cette im putation? C e l t e loi établit
d ’abord que tout ce qui est sujet à l ’imputation dans
la légitime, l ’est aussi au rapport dans la succession ;
m ais, suivant l ’explication ajout ée, il ne faut pas en
conclure que réciproquement tout ce qui se rapporte »H
la succession doive s’impu ier sur la légitime. l)ü toutes
�( 27 )
/<
les choses soumises au rap port, on ne doit assujettir à
l ’imputation que celles qui sont exprimées par les lois.
H œ c autem rég u la , ut omma quœ p o itio n i quartes,
com putantur, etiam cib inteslalo conferantur : m inim e
è contrario tenebit3 ut possit quis diccre etiam ilia
quœ con feru n tu r, omnimodb in quartam partem his
c o m p u t a r i q u i ad inojficiosi querelam v oca n tu r. E a
enini tantummodb ecù his quœ co n feru n tu r3 m ém ora tœ portioni com putabuntur, pro quibus specia liter
leg ib u s} ut hoc f ie r e t , expressum est.
3 ° M. Merlin, dans l ’endroit in d iqu é, ne s’occupe
que de la question de savoir si les donations ordinaires
s’imputent sur la légitime, q u ’elles aient été faites ou
non sous c e l t e c o n d i t i o n 5 et ce p o i n t est d i s c u t é en
thèse g é n é r a l e . M . M e r l i n rapporte l'opinion de difi’érens auteurs, et l ’espèce de plusieurs arrêts. C e n ’est
que dans l ’article 3 du même § , q u ’il examine si un.
étranger, institué héritier ou légataire universel, peut
obliger le légilimaire à l ’ imputation de ce q u ’ il a reçu.
L a raison de douter, dit -i l,
est très-plausible. Les
choses exemptes du rapport à la succession le sont
aussi, en général, de l'imputat ion dans la légitime.
Après cette réllexion, INI. Merlin se borne à transe, ire
le sentiment de L e b r u n . O n voit dès-lors q u ’il ne
s ' e x p l i q u e p o i n t sur la réserve actuelle.
#
4" Q u a n t à l'auteur du dernier Traité des D o n a
tions, c’est à l ’occasion d ’un arrêt rendu par la Cour
d ’appel d ’ Agen, le 28 décembre 1808, q u ’ il (ait u n e
dissertation savante sur cette matière. Il indique aussi
�un grand nombre d ’autorités, et s’appuie principale
ment de la distinction faite par D u m o u l i n , sur l ’ar
ticle
ii
du chapitre 27 d e l à C o u tu m e de Nivernais,
entre le rapport simple à une succession à laquelle on
vient comme héritier, çt le cas d ’ une attaque dirigée
contre un don ou un legs, à l ’effet de faire ordonner
une déduction pour la légitime.
Dans l ’espèce de l ’arrêt de la C o u r d ’A ge n, rapporté
dans le Journal de D en ev ers3 i er v o lu m e de 1809,
page 49 du sup p l. , le sieur de Montalambert a v a it ,
par te sta m en t, légué à sa mère la moitié de ses m e u b l e s ,
son a r g e n t e r i e , e t u n e p e n s i o n de 800 f r a n c s ; 1il avait
institué po u r son héritier universel Louis de Montal e m b e r t , son cousin.
L a mère du testateur a tout à-la-fois réclamé le
quart qui lui était réservé par l ’arlicle 91 5 du C o d e ,
et le legs à elle fait.
L ’ héritier institué a soutenu que la mère ne pouvait
cumuler la réserve et le legs, qui ne lui avait pas été
fait à titre de préciput et hors part.
‘
O u voit la similitude q u ’offre cette espèce avec celle
de la cause : la m è r e v o u l a i t ne point r a p p o r t e r a u
mineur le legs à el le f a i t ; la fille v e u t o b t e n i r l a réserve,
indépendamment de la somme à elle constituée en dot.
Eli tyen! la C o u r d ’appel d ’Agen a accueilli la ré
clamation de la mère : «Considérant que les art. 843
et 85 7 du Code n ’assujettissent les héritiers venant à.
succession, à rapporter les donations entre-vifs q u ’ils
ont reçues du d é f u n t , 1 et ne leur interdisent de ré
�.( 29 )
'
clamer les dons h cause de m o r t , ou les legs q u ’il leur
a faits, q u ’a l ’égard de leurs cohéritiers; d ’où il suit
que l'incompatibilité des qualités d ’héritier et de lé
gataire en la même personne n ’est point absolue, mais
seulement
relative à l ’intérêt des cohéritiers;
que
l ’expression cohéritiers, employée dans les articles pré
cités, ne signifie que les héritiers légitimes, et non
les héritiers institués........... ; que l ’objet des rapports
étant de maintenir l ’égalité entre cohéritiers, l ’héritier
in s ti tué, non successible, est non recevable, envers
l ’héritier de la loi , à demander soit le rapport des
donations, soit la compensation des dons et legs avec
la réserve, parce que son titre établit l ’inégaliié, et
q u ’il i m p l i q u e r a i t q u ’il p û t l ’a i d e r , pour m a i n t e n i r ou
pour a u g m e n t e r cette inégalité, des mesures que le
législateur n ’a admises que pour la faire cesser........ ;
que l ’héritier in s ti tué, non successible, tenant tout
son droit du testament, doit prendre ce titre tel q u ’il
est dans son entier; q u ’il peut d ’autant moins inquié
ter l ’ héritier au sujet des legs q u i lui ont été faits ,
q u ’ils dérivent du même titre que l ’in s tit u t io n , dont
ils sont, en quelque sorte, une condition (les dons
entre-vifs sont encore plus favorables), et que le tes
tateur eût pu transmettre à cet héritier sa succession
tout entière, sans blesser en aucune manière les droits
de celui qui se trouve institué; par oii il est évident
que l ’appelant n ’est pas fondé en droit à forcer l ’hé
ritier à opter entre la réserve et le legs. »
M. Grenier, après avoir dit que cette décision n ’est
�( 3o )
.pas, àj beaucoup près, sans difficultés,, discute les
motifs d e - l ’arrêt de la C o u r d ’'Agen, q u ’il trouve en
opposition avec les anciennes règles sur l ’im pu tation ,
anciennes règles non contrariées, d i t - i l , par les dispo
sitions du Code c i v il , et à l ’appui desquelles viennent
les articles 920 et 922.
« A u surplus, ajoute cet a u t e u r, jusqu'à, ce q u ’il
y ait à ce sujet une jurisprudence formée, q u ’il est
impossible de faire résulter du seul arrêt de la C o u r
d ’appel (l’A g e n , la discussion aura l ’avantage de faire
sentir combien il est p r uden t, lorsqu’ on,veut instituer
un l é g a t a i r e u n i v e r s e l , e t q u ’ il y a u n a s c e n d a n t ou
un autre héritier à réserve, auquel on fait un d o n ,
de, s’expliquer de manière q u ’ il résulte de la volonti*
même du disposant, si le don est fait à l ’ héritier qui a
droit de réserve, indépendamment de cette même ré
serve, o u , au contraire, à imputer sur cette réserve,
en tout ou en partie. »
M . Grenier est donc bien loin d ’émettre l'opinion,
q u e , d ’après les dispositions du Code civ il, le donataire
ou légataire, en même tems héritier, doive absolument
imputer le don o u le legs sur la portion que la loi d é
clare indisponible en sa l a v e u r . Il indique seulement
des précautions ju s q u ’à ce r ju il y a it, à ce su je t }
une ju risp ru d en ce fo r m é e .
C et te
jurisprudence existe aujourd’ hui ; et nous
mettrons en première ligne un arrêt de la C o u r de
cassation , considéré comme étant de la p lu s hauts
im portance par les arrêtistes qui l ’ont rapporté.
�(
3i
)
C e t arrê t, qui est en date du 3 o décembre 1 8 1 6 ,
et q u ’on trouve dans le Journal de D e n e v e r s v o l . de
1 8 1 7 , page a 5 , et dans celui de S irey } tome 1 7 ,
page 1 53 de la i re partie ,
a été rendu contre un
héritier à qui la portion disponible avait été léguée
par préciput sur la totalité des biens, et q ui voulait
prendre c e . préciput sur l ’universalité de la succession,
y compris les objets soumis au rapport.
Il s’agissait
du
partage de la succession de Jean
Decour, q u i , en mariant ses trois filles, dans le cours
des années 1791 , 1792 et 1 7 9 4 , leur avait constitué
des dots, sous l ’obligation de rapporter à la succession
du constituant le capital et même les intérêts des
sommes dotales à elles constituées, dans le cas où elles
voudraient venir à partage.
L e 9 juin
1807 , testament de Jean D ec ou r, par
lequel il lègue à ses enfans mâles, avec dispense de
r a p p o r t, le qua rt de tous les biens qui composeraient
sa succession, sans en rien excepter.
S ’étant agi du partage
de la succession du père
commun , les filles y ont prétendu une part égale >.
nonobstant la clause portée en leur contrat de mariage.
Les frères ont demandé q u ’on fit entrer dans là masse
les dots reçues, pour, sur le to u t, être prélevé le
quart à 1<mu- profi t, et les irois quarts resians être
partagés entre tous. Les filles ont répondu (pie le pré
ciput ne pouvait se prendre que sur les seuls biens
qui étaient dans les mains du père au jo ur de son
�(32 )
décès, et non sur les sommes données en d o t , et qui
ne faisaient plus partie des bieris du testateur.
Les frères Decour disaient à leurs sœurs q u ’elles ne
pouvaient toucher au legs fait en leur fa veur , q u ’au
tant q u ’elles ne trouveraient point dans les dots reçues
et dans les biens libres de la succession, leur réserve
légale; et ils leur opposaient, comme le fait le subrogétu teur du mineur Peyrachon , l ’article 922 du Gode
civil , d ’après lequel la réduction des dons et legs se
détermine en formant une masse de tous les biens
existans au décès du donateur ou testateur ,
en
y
réunissant fictivement ceux dont il a été dispose par
donations entre-vifs, et, e n c a l c u l a n t sur tous ces biens,
après en avoir réduit les dettes, quelle est, eu égard
à la qualité des héritiers lé giti m es, la quotité dont le
donateur ou testateur a pu disposer.
L e tribunal d ’A r g e n l an , et la C o u r royale de C a e n ,
par arrêt du 20 avril 1814? ont proscrit la prétention
des sieurs Decour frères; et la C o u r de cassation ,
section civile , a rejeté le pourvoi formé contre cet
arrêt.
Les motifs de l ’arrêt de la C o u r de cassation
\
sont « q u ’en décidant q u ’ un héritier qui est en même
tems légataire, par p r é c ip u t , d u q u a rt
des b i e n s d u
d é f u n t , peut réclamer sa portion v i r i l e , comme héri
tier, sur les sommes qui sont rapportées à la masse de
la succession par les cohéritiers donataires en avance
ment d ’ h o ir i e ; mais q u ’il 11c peut être adm is , cil
qualité de légataire, à prendre une part quelconque
$ur les sommes rapportées, et q u ’en conséquence il
�n ’a droit, en ladite qualité de légataire, q u ’au quart,
par préciput, des biens qui appartenaient au testateur
lors de son décès, l ’arrêt dénonce a fait une juste ap
plication de l ’art. 857 du Code c i v il , et que d ’ailleurs
il n ’a contrevenu à aucun des articles invoqués par les
demandeurs, et qui étaient tous sans application à
l ’espèce. »
U n arrêt de la C o u r de cassation, du 27 mars 1822,
rapporté
dans le n° 3 du B u lle tin des A rrêts de la
C ou r de cassation } p o u r 1 8 2 2 , a été rendu absolu
ment dans les mêmes pr incipe s, en cassant un arrêt
de la C o u r royale de Montpellier, du 8 avril 1818.
E n 1792 , 1.793, et en l ’an 7 , le sieur Balsan avait fait
des dons, en a v a n c e m e n t d ’hoirie, à ses deux filles et
à l ’ un de ses fils. L e i 3 mai 1802, il fit un testament,
par lequel il donna, par préciput et hors p a r t , à JeanBaptiste B alsan , son fils a i n é , le quart de tous les
biens q u i l laisserait à son d é c è s , de q u elq u e nature
q u ’ils fu sse n t.
ainé
L e quart légué par préciput au fils
d e v a i t - i l être
prélevé
sur tous les biens dé
laissés par le père c o m m u n , y
compris les rapports
des dons en avancement d ’ hoirie, ou seulement sur
les biens dont
le père
était saisi au
moment
de
mort ? L e tribunal de Lodè vc et la C o u r de
M o n t p e l l i e r avaient décid£ que le préciput du q u a rt
devait ê tre p ris sur tous les biens, en y comprenant
sa
les dons en avancemens d ’hoirie. L a C o u r
sation
nant
a ,
au
contraire ,
les demandeurs
à
jugé
« q u ’en
rapporter
de cas
condam
à la succession
�(34)
de leur p è r e , et au profit d ’un légataire du quart en
p r écip u t , les biens q u i leur avaient
été donnés en
avancement d ’ hoirie, la C o u r royale de Montpellier
avait violé l ’article 857 du Code c i v il ,
et fait une
fausse application de l ’article 922 du même Code. »
C o m m e n t un légataire, non successible, pourrait-il
avoir plus de droit q u ’un légataire par préciput, ve
nant au partage comme héritier?
L a C o u r de cassation, par son arrêt d u 3 odécembre
1816,
a , au surplus, regardé comme non avenue et
sans effet la renonciation qui aurait été faite par les
sœurs D e c o n r , clans leurs contrais de mariage; ce qui
nous conduit à faire remarquer que la renonciation
de la dame Mollin à tous ses droits légitimaires pa
ternels, moyennant la somme à elle constituée en d o t,
ne peut influer en rien sur le droit de réserve qui lui
était assuré par la l o i , sur-tout à l ’égard d ’ un légataire
4
q ui n ’avait en l u i - m ê m e aucune vocation pour être
admis au partage des biens.
C e t t e renonciation
ne
parait point avoir été exigée par le père : pourrait-elle
être opposée sous une législation qui prohibe d ’une
m a n i è r e si e x pr e ss e les s t i p u l a t i o n s sur les s u c c e s s io n s
non o u v e rte s ? ( Code c i v i l , a r t i c l e s 7 9 1 , i i 3 o , i38f),
1G00, 18 3 7.).
A u besoin, M. Mollin rappellera les dispositions des
articles il\> i 5 , 16 et G8 de la loi du
ventôse
an 1 1 , sur le notariat, qui veulent que la mention de
la signature des parties, des témoins et des notaires
soit laite il la fui de l ’aôte; que les renvois et apostilles
�C 35 )
soient écrits en marge ou à la fin (le l ’acte , avec signa
t u r e , paraphe, et même
approbation des parties ,
lorsque la longueur du renvoi a exige q u ’il fût mis à
la fin de l ’acte; et q u ’ il n ’y ait dans le corps de l ’acte
ni surcharge, ni interligne, ni addition.
Sans nous occuper davantage de cette clause de re
nonciation, disons donc , ainsi que l ’ont décidé les
arrêts de la C o u r de la cassation, des 3 o décembre
18 1 6 et 27 mars 1 8 2 2 , que les légataires, lors même
q u ’ils ont une portion virile a réclamer comme héri
tiers , ne peuvent faire porter la disposition testamen
taire sur les dons en avancement d ’ hoirie ou autres,
que leurs cohéritiers ont r e ç u s .
E n vain on d i t , j)our le mineur P e y r a c h o n , que
l ’arrêt du 3 o décembre 1 8 1 6 , le seul que l ’on con
naissait, est étranger à la cause, et ne peut s’appliquer
q u ’au légataire d' une
quote déterminée , q u i
veut
augmenter le legs du q u a r t , de tous les dons précé
demment faits.
Nous avons déjà observé que Jean-Pierre-Augustin
Peyrachon était simplement légataire de la
d is p o n ib le ,
q u o tité
q u i se trouvait déterm inée au tiers, à
raison du nombre des enfans du testateur.
I j ’arrêt de la C o u r royale d ’A ge n, clti 28 décembre
1808, n ’a-t-il pas, d ’ailleurs, été rendu contre un
légataire universel qui refusait à la mère d u testateur
le legs particulier à elle fait et la réserve légale cu
mulés, c’est-à-dire, q u i voulait que le legs fut imputé
sur la réserve légale.
�( 36 )
L a C o u r royale de Limoges a décidé la munie chose
par un arrêt du i 4 juillet 1818 (D enevers, volume de
1 8 1 9 , page 7 d u suppl. ; S i r e y , tome 1 9 , page 1 44
de la 2e partie.). D ’après cet arr ê t, l ’ héritier à réserve
à qui il a été fait un legs, peut cumuler le legs et la
réserve, lorsqu’il vient en concours avec un étranger,
ou même un successible, agissant en qualité de léga
taire universel. L a C o u r de Limoges se fonde sur les
dispositions conférées des articles 843 et 8 5 7 du C o d e ,
et
répond aux objections tirées des articles 920
et
suivans.
« A t t e n d u , est-il d i t d a n s les m o t i f s de l ’arrêt, q u e
du système des rapports, voulùt-on passer à l ’examen
de la section du C ode q u i traite de la réduction des
donations et legs , la décision attaquée n ’en serait pas
plus légale; q u ’en effet, q u o iq u ’au premier aperçu l ’on
puisse peut-être s’arrêter à l ’idée de quelques auteurs
modernes, q u i ont dit q u i l ne s ’agit point proprem ent
d e rapport, tant que les legs n ’ont point été reçus, et
que la question doit être ju g é e p a r la règle des ré
d u ctio n s ; néanmoins 011 v o i t , i° q u e , dans la 2e partie,
l ’a r t i c l e 8 /j3 p r é v o i t le cas de legs à r e t e n i r o u à rap
p o r te r , et les embrasse dans sa g é n é r a l i t é ; 2° que le
système des réductions s’appliquant uni quement à la
quotité indisponible, il en résulte que les héritiers à
réserve ont seuls droit à former cette action en réduc
tion, pour faire rendre intacte à la masse c e t t e quotité
indisponible, si elle a été ébréchée; et q u e , dans l ’es
pèce, Lo uis C h e y l a r d , frère du déf un t, ne sc trouvant
�,
( 37 )
point dans la catégorie des héritiers à réserve, serait
encore non recevable dans sa demande, soit q u ’on la
jugeât par les règles des rapport s, soit par celles de la
réduction. »
A i n s i, il résulte bien positivement de cet arrê t,
comme de celui de la C o u r royale d ’A g e n , que le
légataire, même universel, doit souffrir tout à-la-fois
l ’exercice du droit de réserve accordé aux en fans et
ascendans, et le prélèvement des legs faits à ces der
niers, quoique non dispensés du rapport. A plus forte
r a i s o n , l ’héritier à réserve doit-il conserver les dons
irrévocables par lu i reçus, et obtenir sa réserve sur les
biens existans lors du décès.
✓
On ne se borne pas, pour le mineur P e y ra c h o n , à
demander la réunion de la dot de la dame Mollin à
la masse du patrimoine, pour déterminer la quotité
disponible; on veut aussi que la dame Mollin impute
sur ses droits légitim aires la plus-value du domaine
de la N a u te , délaissé à M. Mollin pour une somme
de 12,000 fr.
Nous avons à présenter des observations particulières
relativement
à cette plus-value
du domaine de la
N a u t e , si tant est q u ’elle existe.
C e ne serait pas, sans d o u t e , un excédant de valeur
peu considérable (j Uî pourrait faire regarder coin 111d
un avantage fait à la dame M ollin, le délaissement du
domaine de la Naute. Il a toujours été reconnu, en
matière de rapport ou à a' ré d u ctio n s q u e , pour l ’en-
�( 38 )
>tière exécution tle la vente faite à un successible, il ne
/fallait pas q u e l l e eut é té f a it e exa ctem en t au p r ix
'V énal, lors de cette v e n te } d ’après une estimation
d ’e x p e r ts , q u i p eu t elle-m êm e n ’être p a s sans in cer
titude ( L e b r u n , des S u ccessio n s} livre 3 , cliap. 6 ,
section 3 , n° 7 J 'M . G r e n ie r , T ra ité ¡des D on a tion s et
T estam ens} 4 e partie, chapitre i EV s e c t . 2 , n° 5 i 8 .).
M . Grenier pense que. si la valeur réelle n ’excédait
pas d ’un qua rt le prix de la v e n t e , la différencetqui
existerait serait sans conséquence.
Mais supposons que le domaine de la INaute-, donné
en paiement po u r 12,000 f r . , valait réellement plus
de iG,ooo I r . , 24,000
5 si 1 on veut.
Lorsque le sieur Peyrachon père a ainsi abandonné
h JVI. Mollin le domaine de la N a u t e , il n ’avait point
iencore disposé de la quotité de ses biens dont ses
•enfans pouvaient être privés.
Dès-lors, si on voit une libéralité dans la plus-value
•du domaine délaissé, le sieur Peyrachon aurait entamé
l a quotité disponible, par cette libéralité, qui serait
p r é s u m é e avoir été faite à
personne de son m a r i , à
la dame M ollin , dans la
titre de p r é c i p u t et hors
part.
E11 effet, non seulement, d ’après une jurisprudence
aujo u rd ’ hui iixéc, toute donation déguisée est valable,
.'lorsque le donateur est capable de donner et le dona
taire de recevoir; mais encore une semblable donation
f a it e à un successible est dispensée du ra ppo rt , et le
donataire peut la roieuir ju s q u ’à concurrence de la
�( 39 )
portion disponible, et prendre également sa portion
virile dans le surplus. Par cela que le donateur a em
prunté la forme d ’une vente ou de tout autre contrat
o n éreu x, il est censé avoir donné à titre de préciput
et hors part ( V o y e z , entre autres arrêts, celui de
la C o u r d ’appel de C o l m a r , du 10 décembre i 8 i 3 ,
rapporté dans le Journal de D ene vers , v o l. de i 8 i 5 ,
page i 4 du suppl. ■) et celui de la C o u r de cassation,
du i3 août 1 8 1 7 , rapporté dans le même jo u r n a l,
v olu m e de 1 81 8, page 98.).
Ainsi , M. Mollin ou ses enfans ne peuvent devoir,
dans aucun cas, le rapport ou l ’imputation de la plusvalue du domaine de la N a u t e , pas même envers le
sieur J e a n -P ie rre P e y r a c l i o n , q ui était le cohéritier
de la dame M o l l in , parce que l ’héritier venant à u n e
su c c e ss io n n ’est soumis au rapport de ce q u i lui a été
donné ou légué, que lorsque les dons-et legs ne,lui ont?
pas été faits par préciput.
A u contraire,
le legs fait ail mineur Peyraclion
doit être diminué de l ’excédant de valeur du domaine
de la N a u te ; de telle sorte que la portion disponible
des biens q u i devront former la succession du sieur
Peyraclion, soit d ’abord attribuée aux enfans Mollin,
jusques à concurrence du montant de l'estimation do
ce domaine, eu sus de la somme de 12,000 francs, et
que le mineur Peyraclion 11c puisse prendre que le
surplus.
C ’est de cette manière que doivent être entendues les
dispositions du jugement rendu .par le tribunal d ’Yssiu-
�( 4o )
geaux; et l ’on se demande comment se trouveraient
blessées les intentions d u sieui' P e y r a c h o n , et les
règles du ju s te ?
Les intentions d u sieur Peyrachon ! ...........
. Pe u t- on supposer que le sieur P e y ra c h o n , qui avait
constitué une dot à la dame M ollin , et q ui ensuite a
délaissé à M. M o l l i n , en paiement d ’une partie de
cette d o t , un domaine q u i aurait été d ’ une valeur
plus considérable, ait voulu restreindre et diminuer
les droits de la dame Mollin sur les biens dont il avait
resté saisi, pou r augmenter d ’autant le legs q u ’il fai
sait à Jean-Pierre-Àugustin Pey ra ch on ?
Mais le sieur Peyrachon avait donné des preuves à la
dame Mollin de l'affection q u ’il lui p o r t a i t , par les
dispositions contenues dans son premier testam ent,
d u i 3 ju in i 8 i 3 .
L e testament du 3 o mars 18 1 9 contenait-il la véri
table expression de scs dernières volontés? O11 pourrait
en d o u t e r , d ’après toutes les ’c irconstances qui ont
précédé sa mort.
Q u o i q u ’ il e n s o i t , ce testament doit recevoir son
exécution, mais de m a n i è r e à n e pas porter atteinte
aux droits que la dame Mollin tenait de la loi , ou
que lui assuraient des dispositions irrévocables en cllesmêinos, sur-tout respectivement ?i un légataire qui
n ’avait rien à prétendre, et qui ne recevra une portion
des biens de son a y e u l , que pour en p r i v e r sa tante et
son père, auxquels la loi les destinait entièrement,
�( 4 0
Les règles du juste ! ...............Mais
_ J
les raisons les plus puissantes, l ’équité la
mieux entendue ne se réunissent-elles pas en faveur
des enfans, dans la transmission des biens du père de
famille ?
Il a fallu laisser aux pères les moyens d ’exercer des
libéralités
qui , dans certains cas ,
pouvaient
être
d ictées p a r l ' affection ou com m andées p a r la recon
naissance.
Les enfans n ’en ont pas moins du exciter toute la
sollicitude de la loi ; et alors la nature et la loi se
trouvent d ’accord.
S ’écarterait-on des Règles du juste , par une obser
vation rigoureuse de ce qui est commandé par la nature
et par la loi ?
B E R N E T - R O L L A N D E , A v o ca t.
A L L E Z A R D , A voué.
RIOM
I M P R IM E R IE DE S A L L E S , PRÈS LE P A L A I S DE JU STIC E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mollin, Jean-Antoine. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bernet-Rollande
Allezard
Subject
The topic of the resource
legs
partage
successions
légitime
quotité disponible
réduction
experts
réserve héréditaire
gain de survie
jurisprudence
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour M. Jean-Antoine Mollin, ancien magistrat, au nom et comme tuteur de ses enfans mineurs, habitant de la ville dYyssingeaux, intimé ; contre le sieur Jean-Martin Rocher, négociant, habitant de la ville de Tence, en qualité de subrogétuteur de Jean-Pierre-Augustin Peyrachon, appelant ; en présence du sieur Jean-Pierre Peyrachon, propriétaire, habitant la ville de Tence, aussi intimé.
note manuscrite : « 3 juillet 1822, arrêt confirmatif, Journal des audiences, p. 116. »
Table Godemel : Legs : 5. le légataire de la portion disponible peut-il, n’étant pas héritier à réserve, exiger que les héritiers qui ont reçu des dots en avancement d’hoirie, en fassent le rapport par voie d’imputation ? est-il réduit à prendre la portion disponible calculée sur ce qui reste dans les mains du donateur au moment de son décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
An 13-1822
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2520
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2519
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53506/BCU_Factums_G2520.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tence (43244)
Yssingeaux (43268)
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
La Naute (domaine)
Pêché (domaine du)
Fournet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
experts
gain de survie
jurisprudence
légitime
legs
partage
quotité disponible
réduction
réserve héréditaire
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53505/BCU_Factums_G2519.pdf
d745023ace7cb673eff5d2456984529d
PDF Text
Text
MEMOIRE
COUR R OY AL E
DE RIOM.
POUR
Ire CHAMBRE.
L e Sieur Jean-M artin R O C H E R , Négociant, habitant
de la V ille de Tence, arrondissement d ’Issingeaux,
en qualité de subrogé-tuteur de J e a n - P i e r r e
P eyrachon, fils mineur, habitant de la même Ville,
A ppelant
CONTRE
D am e M a r i e - G e n e v i è v e P E Y R A C I I O N
et M onsieur J e a n - A n t o i n e
O L L I N , Juge
M
au Tribunal civil d 'Issingeaux , son m ari, de lu i
autorisée, habitansde la F ille d T s s in g e a u x , intimés;
E t C O N T R E Sieur J e a n - P i err e P E Y R A C H O N
Rentier, habitant en l a ville de T ence, aussi intimé.
,
D a n s tous les tems et chez presque tous les peuples
policés, les lois ont accordé aux pères la faculté de
disposer d’ une partie de leurs biens.
�Cette faculté,
trop étendue peut-être parmi les
Romains, et que des idées bizarres avaient réduite à
rien parmi nous, à une époque où les exagérations
dictaient les lo is , cette faculté précieuse a été sage
ment réglée par notre législation nouvelle.
Le Code civil présente, il semble, la combinaison
la plus juste du droit de disposer, qui est une éma
nation du droit de propriété, avec les devoirs que la
nature impose aux pères envers leurs enfans.
E n fixant
tiers, ou au
enfans, nos
passions, ou
la quotité disponible à la m o itié , au
quart des biens, selon le nombre des
législateurs ont prévenu les écarts des
les erreurs de la faiblesse, en même tems
q u ’ils ont laissé une carrière assez grande à la recon
naissance, aux affections et aux sentimens généreux.
Les tribunaux ne sauraient trop respecter ces règles
bienfaisantes q u ’ont préparées de profondes médita
tions; et s’ils doivent être attentifs à empêcher que
les réserves destinées aux enfans ne reçoivent quelque
atteinte, ils ne doivent pas être moins empressés à
consacrer les dispositions des pères qui ont employé
d abord une partie de l e u r p a t r i m o i n e à payer la dette
de la nature.
Ainsi l ’enfant qui a reçu de son père un don con
sidérable pour sa portion héréditaire, 11e saurait être
admis à critiquer des libéralités postérieures, ou doit
au moins imputer, sur la réserve q u ’il r é c l a m e , l'avan
cement d ’hoirie qui lui a été fait.
Cette vérité, élémentaire en droit, a cependant été
�. ( 3 )
méconnue par le tribunal d ’Issingeaux. Confondant
les principes des rapports avec ceux de l ’im putation,
et sous le prétexte que le rapport n Jétait pas dû au
légataire, ce tribunal a pensé que l ’héritier, donataire
d ’un avancement d’hoirie, avait le double droit et de
conserver le don, et de réclamer en outre la réserve
par la voie du retranchement , contre un légataire
universel.
Une telle erreur, qui tendrait à détruire la faculté
de disposer, est trop contraire à la doctrine ancienne,
à la doctrine nouvelle, à l’esprit, et même à la lettre
de la loi considérée dans son ensemble, pour soutenir
long-tems les regards éclairés des magistrats d ’une Cour
supérieure.
F A IT S.
L a contestation est née sur une demande en partage
de la succession du sieur Jean-Pierre Peyrachon.
L e sieur Peyrachon a laissé, à son décès, deux enfans, Marie-Geneviève Peyrachon, épouse d eM .M ollin ,
et Jean-Pierre Peyrachon, deuxième du nom.
L e contrat de mariage de Marie-Geneviève Peyrachon
et de M. Mollin est en date du 12 floréal an i 3 .
Pa i' ce contrat, passé sous l ’empire du Code civil,
le père de la future lui constitua une dot considérable,
q u i, d’après l ’intention des parties, devait lui tenir
lieu de scs droits dans la succession de sa mère, dans
celle d ’un frère nommé Augustin, et dans les biens
paternels.
�( 4 )
Voici les termes de la constitution :
« Ledit sieur Jean-Pierre Peyrachon donne et cons
titue à la demoiselle Marie-Geneviève Peyrachon ,
sa fille, en dot, la somme de cinquante mille francs,
dont deux mille francs du chef de ladite Rocher (la
mère, alors décédée); le surplus, du chef paternel,
dont v in g t-cin q
mille francs seront payables en
dettes ou obligations, à réquisition, et d ’après l ’état
à faire entre les parties; et les autres vingt-cinq
mille francs seront payables en fo n d s ou argent ,
p ar q u i cle d roit, après le décès dudit donateur ,
et sans intérêt, et même p a r a n t i c i p a t i o n , en tout
ou en partie. »
Plus bas est ajoutée la clause suivante :
« Déclarant ladite future q u e , dans ladite consti« tution maternelle, qui est mobilière, sont fixés et
« compris les droits qui peuvent lui revenir du chef
« d ’Augustin Peyrachon, son frère, qui se portent à
« 5oo fr. pour le tiers
et ( j uel le renonce à ses droits
« légitimaires paternels et maternels. »
Ces dernières expressions sont claires; Marie-Geneviève Peyrachon renonçait, moyennant la dot promise,
à scs droits le'gitimaires paternels. O r , depuis la
publication
du Code civil ,
les droits légitirnaires
n ’étaient autre chose que les droits à la réserve légale
établie par l’article c) 1 3 , réserve qui remplaçait la
légitime ancienne.
A insi, que la renonciation fût ou non valable, il est
évident q u e , renoncer à de tels d ro its, c’était rocou-
�(
5
)
naître que la dot avait été donnée et reçue à compte
seulement de la réserve, et à imputer sur la portion
qui reviendrait à l ’épouse dans cette réserve, si elle la
réclamait un jour.
Cependant Marie-Genevière Peyraehon a soutenu
dans la suite q u ’elle pouvait, et retenir sa d o t, et
réclamer, en outre, le tiers des biens que son père
avait laissés au moment de son décès ; et cette pré
tention j repoussée par la volonté du père comme par
les dispositions de la lo i, a cependant été accueillie
par le tribunal d’ïssingeaux.
Il parait que la dot entière avait été payée par le
père; que même il avait délaissé, pour 12,000 francs
seulement, un domaine appelé de Naute , dont la
valeur réelle est de 24?000 francs.
Convaincu d’avoir donné à sa fille plus même que
la loi ne lui attribuait dans son patrimoine, le sieur
Peyraehon père crut pouvoir exercer des libéralités
envers celui de ses petits-fils qui s’était montré le plus
digne de son aflection.
Il consigna ses volontés dans un testament olographe
du 3 o mars 1819.
x
Le testateur fait d ’abord quelques legs pieux;
Il lègue* ensuite à Jean-Pierre Peyraehon , son fils
aine, un domaine, un pré et un bois, p ou r lu i tenir
lieu , d it-il, du tiers de mes biens r/iic la lo i lu i accorde ;
Enfin il lait nu legs universel en faveur de JeanPierre-Auguslin Peyraehon, son petit-fils. Voici les
termes de la disposition :
�(
6
)
« E t au surplus de tous mes autres biens meubles
« et immeubles, noms, droits, voies, raisons et actions,
« je les donne en préciput et avantage, et hors part
« et portion, et sans rapport, à Jean-Pierre-Augustin
« Peyrachon, mon petit-fils, l’ainé de mondit fils et
« de la défunte demoiselle D e ig n a t, pour lui tenir
« lieu de la portion disponible de mes biens que je lui
« donne, à la charge par lui d ’exécuter le contenu au
« présent testament, et de payer mes dettes. »
L e sieur Peyrachon déclare, dans son testam ent,
que son intention a été de prévenir les procès entre
ses enfans.
On verra combien peu ont été respectées les der
nières volontés d ’un père.
L e sieur Peyrachon décède. Bientôt après, M. Mollin
et son épouse forment contre leur frère une demande
en partage ; e t , comme le légataire était un mineur
non émancipé, et q u ’il avait des intérêts contraires à
ceux de son tuteur légal, ils l ’assignent dans la personne
de son subrogé-tuteur, en réduction du legs universel
qui lui avait été fuit.
Ils appellent aussi dans la cause le vicaire de Tence,
q u ’ils accusent de spoliation, et multiplient les procé
dures par de nombreuses saisies-arrêts, destinées, si
on les en croit, à faire connaître les vraies forces de la
succession du père.
Sans entier dans le détail de ces diverses procédures,
il suffira de dire que la cause fut jugée contradictoire
ment ti l ’audience du 7 juin 189.0.
�(
7
)
L à , M. Mollin et son épouse conclurent au partage
des biens dont le sieur Peyrachon père était en posses
sion au moment de son décès ; ils demandèrent que le
tiers de ces biens leur fût a ttrib u é , et q u ’en consé
quence le legs universel fut réduit. Ils soutinrent q u e ,
dans le tiers auquel ils avaient droit, ne devaient être
compris ni les 48,000 fr. de dot que le père leur avait
donnés, ni le domaine de N au te, qui leur avait été
délaissé h vil prix.
Le sieur Jean-Pierre Peyrachon fils conclut aussi au
partage 5 mais il réclama seulement le tiers du patri
moine de son p ère, patrimoine sur lequel il n’avait
rien reçu.
Le subrogé-tuteur du légataire soutint que la réduc
tion du legs universel ne pouvait être demandée par la
dame et le sieur M o llin , qu'autant que ce qui leur
avait été donné serait insuffisant pour leurs droits
dans la réserve légale, et q u e , pour vérifier ce fa it,
il fallait réunir fictivement aux biens existans au décès
du testateu r, ceux que ses héritiers avaient reçus
pendant sa vie.
Il fut pris de part et d ’autre divers autres chefs de
conclusions qui sont étrangers à la discussion actuelle.
L e tribunal adopta le système que lui présentait la
daine M o l l i n ? refusa, pour déterminer la réduction
du legs universel, de réunir fictivement les biens
donnés à la masse des biens existans au décès du tes
tateur, et ordonna que ce legs serait réduit au tiers
seulement des biens existans.
�f k
l
( g }
Cependant la dame Mollin fut soumise, envers son
frère, au rapport des 48>ooo francs qui lui avaient
été constitués ; mais on ne l ’obligea pas à rapporter
le domaine de Naute. L ’estimation de ce domaine fut
néanmoins ordonnée, mais dans le but unique de
diminuer encore le legs fait au petit-iils Peyrachon^
de toute la plus-value q u ’aurait le domaine au-dessus
de 12,000 francs ( i) .
( i ) Voici lo texte du jugement sur la question :
E n c e q u i t o u c h e la d e m a n d e e n p a r t a g e f o r m é e p a r les é p o u x M o l l i n ,
A ttend u que nul ne peut ôtre contraint de demeurer dans l ’indivi
sion ; que dès-lors un cohéritier a droit de forcer son cohéritier, ou
tout autre détenteur des biens de la succession , à quelque titre que ce
çoit, de venir à partage de ces mêmes Liens;
Attendu que Jean-Pierre Pcyrachon père n’a fait aucun acte duquel
011 puisse tirer la conséquence, qu ’ il a abandonne la succession pater
n e lle , pour s’en tenir an legs qui lui avait été fait par son père; qu ’ une
semblable option ne peut résulter que d’ un acte fôrmel fait au greffe
ilu tribunal ; qu ’on n’en produit aucun de cette’ espèce ;
A ttendu que les cohéritiers du sieur Jcan-Picrre P cyra ch on , voulant
procéder à la division des biens délaissés par c e lu i - c i , ont dû y appeler
Jean-Picrrc-Augustin Pcyrachon , son légataire; qu'il est impossible de
procéder au partage d ’ u n e B u c c e s s io n hors la p r é s e n c e d ’ une personno
intéressée à cc partage.
E n cc qui touche le rapport, à la masse de la somme des q u arantehuit mille francs donnés à la daine M o llin , réclame par le mineur
Pcyrachon ,
Attendu que des dispositipns du Code c i v i l , il îésnlle que le rapport
¡est nue obligation imposée par la loi à l’héritier, du remettre dans Ifi
succession les choses q u ’ il a reçues entre-vifs directement ou indirocjuent, de la part du défun t, pour ¿tic partagées entre tons les héritiers;
A t t e n d u q ue cette o b l i g a t i o n
,
fondée sur
1«
présomption q u e le don
�(
9
)
L e principal motif de la décision est puisé dans une
fausse application des règles sur les rapports, notam
ment de celle qui déclare que le rapport n’est dû q u ’au
n ’avait été fait à l ’héritier, qu’à titre d ’avance sur ce qu’ il devait re
cueillir dans la succession, a pour principal objet de rétablir entre tous
les héritiers l ’égalité qui est dans le vœu de la loi ;
Attendu que cette vérité résulte de l ’article
843 , qui déclare que
tout héritier, même bénéficiaire, venant à une succession, doit rap
porter à ses cohéritiers tout ce qu’ il a reçu du défunt par donation
en tre-v ifs, directement ou indirectem ent, à moins qu ’ il lia it été e x
pressément dispensé du rapport;
Attendu que de ce principe constant et bien reco nnu , il suit qu ’ il
n’y a que le cohéritier qui puisse demander à son cohéritier le rapport
du don entre-vifs qu ’ il avait reçu du d é fu n t, puisque lui s e u l a droit à
la faveur de la loi et au maintien de l ’égalité; que cette conclusion est
encore corroborée par les dispositions claires, précises et formelles de
l ’article
85^ du Code c iv il, ainsi conçu ; « L e rapport n’est dii que
ic par le cohéritier ci son cohéritier ; il n'est pas du ni a u x légataires
« ni a u x créanciers de la succession ». E t la Cour suprême a consacré
ce principe par son arrêt du
3o décembre 1 8 1 6 , dans la cause entre les
frères Davier et les sieurs Villeniorc et L e c l c r c , rapporté par S ire y ,
tome 17 , pages i 53 et suivantes.
Attendu , en f a i t , que le mineur Peyrachon n’est pas le cohéritier de
la dame Mollin ; qu ’il est étranger à la succession , dans laquelle il ne
recueille que ce qui lui a été transmis par la libéralité de son grandpère ; q u ’ il ne peut dès-lors invoquer le bienfait d ’ une loi qui n’a
d ’a u tre
objet que de rétablir l’égalité parmi les cohéritiers du sang.|
Q u a n t à la d e m a n d e e u r ap p o r t d e c e t t e s o m m e ,
f or mée p a r le sieur
P e y r a c h o n pè r o ,
A ttendu qu ’ il est le cohéritier de la dame M o llin , et qu ’en celle
qualité il peut exiger le rapport du don entre-vifs qui lui a été tait
par l’uutcur commun ; que tel est le vœu des articles 843 et
Code civil.
857 du
�(
10
)
*
cohéritier, et qu ’il n ’est pas (lu aux légataires ni aux
créanciers de la succession.
Le tribunal n’a pjis réfléchi q u ’il ne s’agissait pas
En ce qui touche la réclamation de Jean-Pierre P eyra ch o n , tendant
au rapport à la masse du domaine de la Naute,
Attendu q u e , lors du contrat de mariage de la dame Mollin , le père
de celle-ci ne lui constitua qu ’ une dot de la somme de cinquante mille
francs; qu ’à la vérité, il se réserva, ou à scs héritiers, la faculté de
payer la moitié de celte dot en fonds ou en argent ;
Attendu que de la réserve de cette faculté, 011 ne peut induire
que les biens qui seraient donnés en paiement seraient dotaux, parce
qu il résulterait de cette induction , que la nature de la dot de la daine
M ollin n’aurait pas été certaine, et qu'elle aurait pu varier au gré de
son père ou des héritiers de c e lu i- c i, ce qui répugne au caractère de la
dot , qui d )it être déterminée par le contrat de maiiage ;
Attendu que toute interprétation doit disparaître devant les termes
môme de l ’acle dans lequel on lit que ledit Jean-Pierre Peyrachon
donne et constitue en dot à sa fille la.som me de cinquante mille fra n cs ;
q u e , par ces expressions, la nature et le caractère île la dot sont fixés
d ’ une manière absolue; q u ’on ne peut y apercevoir qu’ une dot mobi
lière; que si h: constituant s’est réservé le droit (le payer une partie de
cette dot eu immeubles, c ’est une condition qu ’ il a imposée à son
g e n l t e , et a laquelle celui-ci a acquiescé; q u ’ il serait difficile de con
cevoir l’exécution de cette clause entre le sieur Peyrachon père et sa
fille, puisque, dès 1 instant où le inanpge était accom p li, elle nVtait
plus habile à recevoir do ses mains les fonds qu’il aurait voulu lui
donner en paiement ;
A t t e n d u q u ’on 11e p e u t v o i r d a n s c c l t o c la u s e q u e la f n cul l é d e p a y e r
a ve c des i m m e u b l e s u n e d ot m o b i l i è r e ; q u e si tel est le v é r i t a b l e p o i n t
d e v u e sous l eq u e l on d o i t la c o n s i d é r e r ,
il s ' ens u i t q u« l ’ i m m e u b l e q u i
a ét é d o n n é en p a i e m e n t d e la s o m m e d e d o u z e m i l l e francs n ’est pas
d o t a l , d ’après
1rs
di s posi t i ons d u p a r a g r a p h e 2 d e l ’a r t i c l e
1 553 d u
C o d e c i vi l ;
A tleu du que la vérité de cette proposition acquiert un nouveau degré
�de juger une question de rapport, mais une question
de réduction; que le légataire n ’était pas demandeur
en rapport, mais défendeur en réduction; et q u ’il
d'évidence, par le mode d ’exécution de cette clause, entre les paities
qui l ’avaient consentie. Il n’est pas contesté que le sieur Peyraclion
père ait remis et cédé à son gendre la propriété du domaine de la
N a ute, en paiement de la somme de 12,000 francs qu’ il lui devait pour
payer la totalité de la dot qu’ il avait constituée à sa fille ; le père
Peyraclion avait donc entendu que la dot de sa fille était constituée en
a rg en t, mais qu ’il avait la faculté d’en payer une partie en immeubles ;
le mari l ’avait entendu de m êm e; ils ont exécuté l’ un et l ’autre cette
c onvention, dans le sens qu’elle présente naturellem ent, et de la ma
nière qu ’ils l ’avaient composée l'un et l’autre; et peut-il y avoir une
règle plus contractante dans le inoilo de sou exécution?
A ttendu néanmoins qu ’il est soutenu que la valeur du domaine de la
Piaule s’élève à la somme de 24,000 fr. , tandis que cet immeuble a été
cédé à M. Molli» , pour acquitter une somme de 12,000 fr. ;
Attendu q u e , s’il était vrai que cet immeuble fût réellement de la
valeur de s j ' 000 fr. , ou de toute autre supérieure valeur de celle de
12,000 f r . , il s’en suivrait que le père Peyraclion aurait exercé envers
M . Mollin une libéralité qui excéderait le montant du paiement qu ’ il
a voulu faire, libéralité qui aurait réduit d’ autant la faculté que lui
accordait la loi de disposer d’ une partie de ses biens;
Attendu que , pour déterminer si le sieur Peyraclion , de la succession
duquel il s’agit, n ’a pas dépassé les limites que la loi lui avait assignées,
il est important de connaître la valeur du domaine de la Mutile........
I->e t r i b u n a l .............................. o r d o n n e q u e , jinrJVIiW. P a n e l i e r , d u l i e u
d e P a n e l i e r , c o m m u n e d e S a i n t - V o y ; M a t h i e u a î n é , d e la v i l l e d e l i a s ,
e t Jîreiias, île lu v i l l e d ' I> s i ng e a u x , e x p e r t s - gé o n i èl r e s ......... , il sera p r o
c é d é à la visite e t e s t i ma t i on des i m m e u b l e s délaissés p a r d é f u n t J e a n P i e r r e P e y r a c l i o n , en c e non c o m p r i s le d o m a i n e d e l a f t a u t e , céilé
p a r ce d e r n i e r à M. Mollin , en p a i e m e n t d e l a somme d e 12,000 f r an c s ,
pour savoir si lesdits immeubles , dont ils ser ont t e nu s d e r a p po r t e r
�( 13 ;
n ’exigeait pas un rapport réel pour prendre une partie
de la chose donnée, mais seulement une réunion fictiv e
pour juger si l’héritier à réserve avait déjà reçu tout
ce que la loi lui assurait.
L e subrogé-tuteur du légataire a interjeté appel
d ’un jugement par lequel les droits de son pupille
étaient sacrifiés.
L ’appel a été dirigé contre les deux héritiers à réserve.
L a Cour aura à examiner si ces héritiers, auxquels
il n’a pas été fait de don en précip ut, ont le droit
de faire réduire un legs, pour obtenir plus des deux
tiers du patrimoine de leur père, quoique cette quotité
seule leur soit attribuée par la loi.
l ’é t a t , consistance et v a l e u r , peuvent sc partager commodément en
portions égales, sinon avec soulte ; e t, dans le cas où la division puisse
avoir lieu , ils en formeront trois lots égaux , pour en être a ttr ib u é , par
la voie du sort, et par-devant le juge-commissaire, un à chacun des
copartageans , M arie -G cn evièv e , Jean-Pierre et Jean-Pierre-Augustin
Peyrnclion , légataire. Lcsdits experts seront tenus de présenter les l>nses
de 1 estimation, et d ’estimer encore les restitutions de fruits desdits
biens , depuis le décès du père Peyraolion ;
Déclaré n y avoir lieu d’accorder a n l é g a t a i r e le rapport à la masse de
la somme de .(8,000 fr. , payée par ledit défunt Peyrachon à la dame
Mollin , sa fille ; ordonne que cette somme sera rapportée à l’égard de
Jean-Pierre Peyraclion, cohéritier;
Déclare ce dernier non recevablc dans sa demande en rapport à la
masse du domaine de la K a u l c , cédé par le défunt à M. Mollin , pour
compléter la dot qu’ il avait constituée h sa fille ; ordonne nussi q u e , par
les mêmes experts, ¡1 sera procédé à l'estimation de lu valeur de ce do
maine, a dater du jour de la remise qui en a été faite à M. M ollin, p ou r,
sur leur rap p ort, élrc statué co qu ’ il appartiendra........
�( ,3 )
A consulter seulement les principes, la négative de
cette proposition ne paraîtra pas douteuse.
Si l ’on considère aussi les termes de la constitution
dotale faite à la dame M o llin , on sera de plus en plus
étonné de son succès en première instance.
Les principes anciens et nouveaux sont en harmonie
parfaite sur la question.
On sait que la réserve légale est aujourd’hui ce
q u ’était la légitime autrefois. L ’une et l ’autre ont les
mêmes caractères, sont fondées sur les mêmes m otifs,
ont reçu de la loi la même destination.
L a réserve légale, comme la légitime, est une portion
du patrimoine du père, que la loi attribue aux enfans,
et dont il ne lui est pas permis de les dépouiller.
La réserve légale, comme la légitime, est une dette
du père, destinée à fournir des alimens aux enfans.
L a réserve légale, comme la légitime, n’admot ni
mode, ni terme, ni conditions.
Elles ne diffèrent entr’elles que par le nom et par
la quotité.
Aussi vo it-o n , dans les discours des législateurs,
que la réserve légale a été établie à l ’image des légi
times fixées soit par le droit romain, soit par la
coutume de Paris; que les discussions ont roulé seule
ment sur sa q u o tité ; et que le Code civil a adopté,
sauf quelques modifications, la quote légilimaire réglée
par la coutume de Paris, qui avait mis une balance
�( 4 )
plus égale entre le droit de propriété et les devoirs de
famille (i).
Aussi remarque-t-on , dans les procès-verbaux du
conseil d ’E t a t , relatifs à la rédaction du Code civil.,
que la réserve légale est appelée légitime (2).
S ’il y a identité de cause et de nature entre la
légitime d ’autrefois et la réserve légale actuelle, ce qui
a été reconnu vrai dans la législation ancienne, relati
vement à la légitime, doit être appliqué, sous la
législation nouvelle,
C Jest en effet un
les cas semblables, il
In casibus omissis 3
à la réserve légale.
aphorisme de d ro it, q u e , dans
doit y avoir semblable décision.
deducenda est norma legis à
sim ilibus. (B a co n , aph. 115 D u p in , Principia ju r is
civilis prolegomena.')
O r , si nous examinrvis les principes anciens, on
reconnaîtra que l ’eufant légitimaire, quoique dispensé
du rapport envers 1111 étranger, était cependant tenu,
même à l’égard de celui-ci, d ’imputer sur sa légitime
ce q u ’il avait reçu précédemment de la libéralité de
son père.
La décision devait être différente dans les deux cas,
parce que les règles sur les rapports, et celles sur
( 1 ) V o y e z l’arliclo
do c c l l o coultunc.
(a) N ota. O u lit notam m ent, dans le procès-verbal do la séance du
rj pluviôse an 1 1 , ces oxpressions :
« JjO conseil d l'-tal adopte en p r in c ip e , cpie l(i Icgitimc ne pourra
(t être iïappéo ilo substitution. *
�l ’im putation, appartenaient à deux ordres distincts
d ’idées et de principes.
Les règles sur les rapports avaient leur fondement
sur l ’égalité naturelle des enfans dans la succession de
leurs ascendans (i).
Ut liberis tum m asculini quam fe m in i seæûs...........
cequd la n ce, p a n que modo prospici possit : hoc
etiam œquitatis studio, pressenti legi credidim us inserendum , ut in dividendis rebus ab
functoriun parentum ,
intestato de-
tcim dos r/ucim antè nuptias
donatio confcraiur. L . 1 7 , C . de C ollât.
Si le m otif d’équité qui avait dicté la règle ne se
rencontrait pas, le rapport n ’avait pas lieu.
Ainsi le rapport n’était dû q u ’entre enfans cohéri
tiers, et h ceux-là seulement qui avaient ces deux
qualités (?.).
Tous les auteurs anciens s’accordent à professer cette
doctrine, et à reconnaître que le rapport n’est dû ni
aux légataires ni aux créanciers de la succession.
Les règles sur l ’imputation n ’étaient pas les mêmes.
L ’imputation pouvait être exigée par un donataire
ou légataire étranger, toutes les fois q u ’un légitimaire,
qui avait déjà reçu du défunt une libéralité, deman
dait, pour obtenir sa légitime, le retranchement du
don ou du legs fait à l’étranger.
(1) Voyez D om at, Lois civiles , titre (lit rapport, scct. 1 " , art. i tr!.
(a) Voyez D o m a t , Lois civiles, i l i d } scct. 1 , ait, 1 , 3. -
�Cette règle était la conséquence d ’un autre principe
qui n’autorisait l ’enfant à quereller les dispositions
faites par son père, q u ’autant que la dette de la nature
ne lui avait pas été p a yé e, et q u ’il était privé de tout
ou de partie de sa légitime.
In quartam parlent a d excludendam inojficiosi
(juœrelanij tant dotem quàm antè nuptias donationem
prœfato modo volum us im putari, siexsub sta n tid ejus
p rofecta sit de cu ju s hœreditate agitur ( L . 29, C . de
inojf. testant.
Tous les auteurs s’accordent aussi à décider que
l ’enfant doit imputer sur sa légitime ce q u ’il a reçu
du père, à moins q u ’il n’en ait été expressément dis
pensé par celui-ci.
U n grand nombre, et des plus recommandables ,
examinent la question même qui a été jugée dans la
cause; et leur décision est absolument contraire à celle
du tribunal d ’Issingeaux.
Dumoulin la résout dans une courte note sur les
articles 10 et 11 du chapitre 27 de la Coutum e du
Nivernais.
L article 10 pose le principe du rapport des dons à
la succession.
L ’article 11 établit deux exceptions : l ’une quand
l’enfant donataire renonce à la succession ; l ’autre
quand le don lui est fait en préciput.
Sur cette dernière exception , Dumoulin fait observer
que, dans le cas prévu, l’enfant même, en se portant
héritier, n’est pas tenu de rapporter : i)uia tune
�(
'7 )
succedenclo non lenetur conferre. Mais il ajoute
aussitôt que l ’exception disparaît, c’est-k-dire, que le
rapport est d û , si la légitime des autres enfans est
atteinte, et si l ’enfant donataire réclame lui-méme sa
légitim e, par la voie du retranchement sur une dona
tion ou sur un legs. F a lh t , quatenhs ahorum liberorum légitima lœderctur. Item f a l h t , u t se m p e u
TENE 4TUR IMPÜTARE IN LEG1 TIMAM3 SI OPÜS SIT (i).
« Il est impossible, dit un auteur- m odern e, de
« mieux marquer la différence q u ’il'!*y a' entre le
« ' rapport simple à une succession à laquelle on vient
« comme héritier, et le cas d ’une attaque dirigée
« contre un don ou un legs, pour faire ordonner une
«’ déduction pour la légitime (2). »
Ricard, dans son Traité des D onations, après avoir
démontré que l ’incompatibilité des qualités de dona
taire et d ’ héritier, et l ’obligation du rapport ont lieu
seulement entre les enfans, et non pas à l ’égard des
étrangers (3) , examine si le légataire étranger peut
exiger que le don fait à l’enfant s’impute sur la légitime
q u ’il réclame (4).
i
Il indique les raisons contre cette imputation ,
raisons q u ’il puise dans les règles du rapport.
(1) Voir lcsn o tcstlc Dumotilin *ur Icsarticlescit<5s, dans le C oatum ier
tonic 3 , p o ^ o 1 x S s .
*
g e n t 1r a l ,
(•*) Truitc des Donations, par M. G re n ie r , edition iu- 4 ° , tome a ,
page 337.
,
;
,
( 3) l’ artle x1* , chap.
{\) Garlic
3
3 , sect. i 5.
3 ‘ chap. 8 , scct."i 1 , n « 1 1 54 et suivang.
!
�( 18 )
Mais il se décide eu faveur du légataire. Y o ic i eu
quels termes
« Mais encore que cette doctrine (de la dispense du
rapport à l ’égard d ’un étranger) pût être véritable
dans un raisonnement exact, et q u ’il semble q u ’il
. y ait d’autant plus de lieu de la réduire à cet effet,
que nous sommes dans une matière extrêmement
favorable, néanmoins il faut considérer d ’un autre
côté q u ’il s’agit d ’une grâce extraordinaire , que
la loi n ’a introduite que sous des conditions qui
sont entr’autres d ’imputer et de tenir compte par les
enfans des libéralités q u ’ils ont reçues de leur père;
et , en effet , si nous considérons quels ont été
l ’origine et le m otif de la querelle d ’inofficiosité,
nous trouverons q u ’elle n’a été inventée que pour
réprimer les libéralités immenses des pères, dans
les
rencontres
auxquelles ,
ayant
méprisé
leurs
iferifans,' ils s’étaient épuisés en laveur des étrangers;
si bien-que, lorsque cet oubli ne se rencontre pas,
et que le père a employé une partie de ses libéralités
envers scs enfans, il est bien raisonnable que l ’action
que la loi leur a mise en main diminue à proportion
q u ’ils ont été reconnus par leur père. E t si notre
première proposition avait lieu, il s’ensuivrait q u ’un
fils, comblé de bienfaits par son père, ne laisserait
pas de pouvoir contester les moindres et les plus
légères donations q u ’il aurait faites, et d ’en de
mander le retranchement; si bien que cette obliga
tion d ’imputer les avantages reçuç à la légitim e,
�(
r9
7^
)
« étant si fort de la substance à l ’égard de qui que
« 'ce so it, il n’y a pas d ’apparence de prétendre que
«r nous en ayons tiré l'usage du droit romain, sans
« cette circonstance qui lui est si essentielle : aussi la
« pratiquons-nous de la sorte sans contredit. » •
M. Lebrun traite aussi la question5 e t, après avoir
développé, comme Ricard, les motifs que les principes
sur les rapports peuvent fournir contre l ’imputation ,
il ajoute (1) :
« Il faut dire néanmoins que des héritiers étrangers
a ont droit, comme des enfans qui sont institués
a héritiers, de faire faire l ’imputation sur la légitim e,
«
«
«
«
parce que la querelle d’inofficiosité, et la demande
delà légitime sont un droit extraordinaire, qui 11e doit
avoir lieu que lorsque le père, ou n ’a point du tout,
ou n ’a pas assez considéré son san g, et quand il faut
« que la loi vienne au secours de la n a tu r e , et q u ’elle
« supplée au défaut de l ’affection paternelle : Q uia
« ju d ic iu m patris le x su pp let, dit Godefroy
« loi S i totas C) j
C . D e in of.
donat .
sur la
Ainsi cette
« action n ’a point lie u , quand le père a rempli les
« devoirs naturels; et il serait fort injuste q u ’un fils,
«
«
«
«
comblé des bienfaits de son père, vint accuser son
t e s ta ie n t , et donner atteinte à do légères libéralités,
dont le père aurait voulu reconnaître l ’amilié de
quelqu’un. »
(1) Voir L ebrun , îles Successions, tome i " , li Y. a , cliap.
n°‘ 4 et
5.
3 , sect. 9 ,
�(. 2 0 )
Espiai’d-D usaux, dans ses Observations sur L e b ru n ,
enseigne la même doctrine.
Argou, dans ses Institutions au droit français, après
avoir dit que le père peut disposer des deux tiers ou
de la moitié de ses bien s, selon le nombre de ses enfans,
soit en faveur de l ’un d ’eu x, soit en fa v e u r d ’ un
étranger, fa it, en parlant de la légitim e, la remarque
suivante :
i
j
.
« Sur quoi les enfans doivent, parmi nous, imputer
« tout ce q u ’ils ont reçu de la libéralité du père ou
« de la mère ( i) . »
Fçrrières, sur la coutume de Paris; Furgole, dans
son Traité des testamens; Pothier, dans son Traité
dfcs Donations entre-vifs, expriment la même opinion;
L apeyrère, pour le parlement de Bordeaux; Duperrier, pour celui de Provence; d ’O live, pour celui de
Toulouse, attestent l ’ usage admis dans ces parlemens, de
faire imputer sur la légitime ce que les enfans ont reçu
de leur père par donation entre-vifs, « soit q u ’il l ’ait
« ainsi expressément ordonné, ou q u ’il n ’en ait point
« parlé du t o u t , remarque d ’O live; car bien que la
« donation ne soit point conçue en termes qui puissent
« induire l’im putation, la Cour, toutefois, à l ’exemple
« de ce grand Papinien , estime que la pensée du
«< donateur est étendue plus avant que l’écriture :
« P lu s diettim minus scriptum . »
INI. M erlin ,
q u i,
dans son Répertoire, rappelle
(i)Iustitutions au droit français, liv. a , chap.
de la dixième ¿dition.
> tome i ' r , page
3/P
�plusieurs de ces opinions, et qui atteste la jurispru
dence uniforme des tribunaux français, sur ce poin t,
s’exprime ainsi :
« 11 faut considérer la chose donnée au légitimaire^
« comme existant dans la succession , et supposer
« ensuite q u ’il l ’en tire en vertu de la volonté du
« défunt; ce qui amène nécessairement cette consé« quence, que Vimputation ne peut en être éludée
« p ar quelque prétexte que ce soit ( i). »
Telle était, à l ’instant où le Code civil a p a r u , la
doctrine généralement adoptée par les auteurs et par
les trib un au x, doctrine qui distinguait le rapport de
l ’im putation; doctrine qui ne permettait pas au léga
taire de demander à l ’enfant donataire le rapport de
la chose donnée, pour en prendre une partie, mais
qui l ’autorisait à soutenir que la valeur du don fait
à l’enfant devait s’imputer sur sa légitim e, et q u ’il
fallait q u ’il y eût insuffisance pour que le legs fût
réduit.
Cette doctrine, aussi équitable que constante , at-elle été renversée par le Code civil?
Pour le supposer, il faudrait rencontrer dans la loi
nouvelle les dispositions les plus claires et les plus
fo rnielles.
O r, q u ’y trouve-t-on, et quels articles ont invoqués
les premiers juges?
On y trouve des règles sur les rapports; et les ar( i ) Voir au mot L ég itim e} section 8 , paragraphe 3 ,-art. a , u°
4*
�(
22
)
ticle s' 843 , 8^7 sont les seuls q ü ’on ait invoques k
l ’appui d ’un nouveau système,
;
!» n ¡ ' il
■'J'xr
Mais ces articles ne disent rien de plus que ce^tjue
disaient les lois anciennes. r
'
•
L ’un déclare que tout héritier, venant h. partage,
doit rapporter k la succession le don q u ’il a reçu, s’il
ne lui a été fait e n p ré cip u t.
L ’autre ajoute q u e le rapport n ’est pas dû au créan
cier ni au légataire.'
'•
’
aw.»
Tout cela était vrai autrefois comme aujourd’hui :
la loi nouvelle n ’est q u ’une copie fidèle du droit
antérieur.
Ces articles ne disent pas que l ’ héritier naturel peut
faire réduire le legs fait h ¿un étranger, sans imputer
sur la portion héréditaire q u ’il réclame, les donations
q u ’il a reçues.
La question même ne peut être résolue dans des
articles qui ne traitent que des rapports, parce q u ’elle
a moins trait à un rapport q u ’à une réduction.
- C ’est dans les articles qui fixent la quotité dispo
n ib le, qui établissent une légitime ou une réserve
légale, qui autorisent les cnfatis q u ’un père injuste a
dépouillés de cette réserve ii la réclamer; c’est dans
les articles qui accordent aux enfans l ’action en re
tranchement, et qui en règlent le mode et les condi
tions, que doit être cherchée la solution de la difficulté.
O r , si nous considérons cette partie de la loi, nous
verrons q u ’elle autorise la disposition de la moitié, du
tiers, ou du quart des biens du disposant, selon q u ’il
�laisse à son tîécès un seul enfant légitim e, cru deux,
ou un-plus grand nombre ( Y . Code civil, art. 9 13 .)
L a réserve est donc restreinte, suivant les cas, k la
moitié, aux deux tiers ou aux trois quarts des biens.
C ’est de cette réserve seulement q u ’il n ’est pas
permis de disposer au préjudice des enfans.
C ’est cette réserve q u ’ils ont le droit de réclamer
par la voie du retranchement, s’ils en sont privés par
des libéralités excessives.
Mais si les libéralités n’excèdent pas la quotité dis
ponible , si les portions que conservent ou que re
cueillent les enians suffisent à la réserve légale, l ’action
en retranchement ne saurait être admise.
E t quelle opération ordonne la' loi pour vérifier si
le père, par une aveugle générosité, a excédé les bornes
q u ’elle lui prescrivait? L ’article 922 nous l ’apprend.
« La réduction se détermine en formant une masse
« de tous les biens existant au décès du donateur ou
« testateur. On y réunit fictivement ceux dont il a
« été disposé par donations entre-vifs,
d ’après leur
« état à l’époque des donations, et leur valeur au
« tems du décès du donateur. On calcule sur tous
« ces biens, après en avoir déduit les dettes, quelle
« est, eu égard à la qualité des héritiers q u ’il laisse,
« la quotité dont il a pu disposer. >»
La règle est positive; elle veut que tous les biens
du d éfu n t, ceux même dont il a disposé à titre gratuit
pendant le cours de sa v ie , soient, sinon rapportés,
au moins réunis fictivement à ceux q u ’il laisse à son
�l
(= 4 )
décès', pour ne former q u ’une seule masse de patrie
moine, sur laquelle on calcule la quotité dont il a pu
disposer.
Alors s i , dans les libéralités entre-vifs ou testamen
taires, il y a eu excès de la quotité disponible, la
réduction est faite ; s’il n’y a pas eu excès, les libé
ralités sont maintenues.
Telle était l ’opération que devait ordonner le tri
bunal d ’Issingeaux; telle est celle q u ’on lui deman
dait; telle est celle q u ’il a refusée, quoique la loi la
prescrivit impérieusement. Il l ’a refusée sous le plus
vain prétexte. Les règles sur les rapports ne s’appli
quaient pas à la question. Il ne s’agissait pas d ’un
rapport réel, mais d ’une réunion fictive; et qu o iqu ’il
paraisse y avoir quelque analogie dans les deux cas,
on y reconnaît une différence sensible, pour peu q u ’on
réfléchisse. Lorsqu’il y a rapport réel, celui qui l ’a
exigé et qui l ’a o b te n u , prend part dans la chose
rapportée -, il en prive le donataire. Mais par une
réunion fictive, le donataire n’est-privé de rien; il
conserve la chose donnée; elle n’est réunie que par un
simple calcul, pour faire connaître le patrimoine entier
du donateur, en déterminer la valeu r, et vérifier ainsi
ce dont il a pu disposer au préjudice de ses en fans.
E t remarquons que celte réunion purement fictive
est ordonnée par la lo i, dans tous les cas possibles.
Quels que soient les donataires, étrangers ou successibles ? les libéralités q u ’ils ont reçues doivent servir à
�(
»5
)
former la masse destinée à calculer la quotité dis
ponible.
A in si, pour savoir si le sieur Peyrachon père avait
excédé cette quotité, l ’on devait former une masse
générale, soit des objets légués au sieur Peyrachon fils,
soit de ceux compris dans le legs universel, soit enfin
des biens donnés précédemment, et par conséquent de
la dot constituée à la dame Mollin.
La valeur de cette masse étant déterminée, on en
aurait distrait,
i° les sommes ou les valeurs données
à la dame Mollin ; 20 celles léguées au fils P eyrach o n ,
pour le tiers que la loi lui réservait.
On aurait examiné ensuite si le surplus du patri
moine excédait le tiers dont la loi permettait la dis
position .
E n cas d ’excès, le legs eût été réduit.
S ’il n ’y avait pas excès, le legs eût du être exécuté
sans modification.
Cette opération simple , la seule juste , la seule
légale, ne pouvait convenir à la dame M ollin, parce
q u ’il en serait résulté la preuve q u ’elle était en
possession du tiers du patrimoine du père, de ce tiers
que personne ne lui d isp u ta it, de ce tiers, seule
quotité que lui réservait la lo i, puisque le défunt n’a
laisse ([iic deux enlans.
L lle a voulu conserver la dot q u ’elle avait reçue,
et obtenir encore le tiers du surplus; elle a soutenu
et a eu le bonheur de faire penser aux premiers juges
que sa dot ne devait pas-s’imputer sur le tiers qui
4
�( 26 )
lui était réservé par le C od e; c’est-à-dire q u ’après
avoir reçu de son père sa portion de la réserve > elle
a prétendu q u ’elle lui était due une seconde fois en
vertu de la loi.
Cette prétention est contraire à notre législation, à
la doctrine de tous les auteurs nouveaux, aux clauses
même du contrat de mariage de la dame Peyrachon.
A ce que nous avons déjà dit sur les termes et le
sens de la loi, il suffira d ’ajouter quelques réilexions.
Si les législateurs ont établi une réserve légale, c’est,
comme nous l ’avons déjà remarqué, dans le but de
prévenir l ’erreur ou la passion d ’un père q u i , mécon
naissant ses devoirs envers ses enfans, les priverait de
son patrimoine entier, pour verser scs bienfaits sur un
héritier de son choix. Guidée par le vœu de la nature,
la loi a créé la légitime ou la réserve, comme une
créance des enfans sur les biens de leurs auteurs. Elle
a d ’ailleurs autorisé ceux-ci à disposer à leur gré du
surplus de leur fortune. O r , un père qui constitue
une dot à sa fille, doit être , ainsi que tout autre
débiteur, présumé avoir voulu acquitter la dette dont
il ne lui était pas permis de s'affranchir, plutôt que
faire une libéralité purement gratuite : Nem o liberalis
nisi liberatus. Cette présomption ne cesse que lors
q u ’une volonté contraire a été exprimée, c’est-à-dire,
lorsque le don a été fait en préciput.
Comment d ’ailleurs supposer q u ’un père, qui a
versé ses bienfaits sur l ’un de ses enfans, ait voulu
le dispenser de lui en* tenir com pte, lui permettre de
�(
27 )
l'accuser de ne pas avoir rempli ses devoirs, et lui
laisser le droit de faire réduire ses autres dispositions,
et de demander une légitime entière comme s’il n ’avait
rien reçu?
9
L ’action en réduction n ’est accordée à l ’enfant, que
comme un secours contre l ’injustice ou l ’aveuglement
du père, et comme un moyen de réparer les torts
de celui-ci. Si le père a été juste et éclairé, si l ’on ne
peut lui reprocher aucun tort, il n’y a pas de répara
tion à ordonner, et l ’action en réduction disparait.
Enfin le droit des enfans à la réserve est un droit
sacré, sans doute; mais celui des pères sur le surplus
de leurs biens est également respectable; et ne seraitce jias l ’anéantir, que d ’autoriser l ’enfant, déjà comblé
des bienfaits de son père^ à disputer encore à un tiers
une faible partie de la quotité disponible?
C ar quel serait l ’efFet d’un tel système?
L e père de deux enfans, après avoir leur donné
entre-vifs les neuf dixièmes d ’une grande fortune ,
ne pourrait cependant disposer à son gré du dixième
qui lui resterait. Il serait tenu d’en réserver les deux
tiers aux deux enfans déjà si riches de ses libéralités.
Une telle conséquence, résultat nécessaire de l ’opi
nion de M. Mollin , en rend l ’erreur palpable.
Aussi les auteurs nouveaux ont-ils reconnu le prin
cipe de l ’im putation, en l ’appliquant à la réserve
comme les auteurs anciens l’appliquaient à la légitime.
M. Malleville , dans sou Analise du Code civil >
�( ^8 )
enseigne celle doctrine, précisément sur cet art. 857,
q ui a fourni à M. Mollin son principal argument.
Voici comment s’exprime ce magistrat, q u i, comme
011 le sait, a concouru à la rédaction du Code :
« Si un enfant prétendait faire retrancher une do« nation ou un legs , comme ne trouvant pas sa légitime
« ou sa réserve dans les biens libres, sans doute les
« légataires ou donataires seraient en droit d ’obliger
« cet enfant à tenir compte de ce q u ’il a reçu; mais
« ce n’est pas Iti ce q u ’on entend par rapport. »
Les auteurs des Pandectes françaises énoncent la
même opinion sur le même article 8^7 :
« Il y a cependant un cas où il se fait une sorte de
« rapport par l’hérilier donataire à d ’autres qu a des
« cohéritiers : c’est celui où il demande le retranche« ment des legs ou des donations, pour compléter sa
« légitime. Comme il doit alors imputer sur sa légi« lime les choses q u ’il a reçues lui-même, et que les
« legs ou donations ne souillent de retranchement
« que pour ce qui manque sur sa légitime après cette
« imputation , l’enfant donataire fait une espèce de
« rapport de ce qui lui a été donné, aux légataires
« et donataires étrangers, quoiqu’ils ne soient passes
« cohéritiers. »
lie savant auteur du dernier Traité des Donations
et Testainens, distingue aussi les principes qui con
cernent l’action en réduction d ’un legs universel, pour
le parfournissement de la légitim e, de ceux qui ont
�( . » ,
r t f :
traitl simplement au rapport. On remarque clans sa
dissertation les expressions qui suivent :
« Dans le cas de la demande tendant à faire distraire
« d ’un legs universel la portion nécessaire pour com« poser la légitime, il n ’est pas un au teu r, au moins
« de ma co n n a issa n ceq u i n’ait enseigné, en s’expli« quant d ’après les principes mêmes dans lesquels le
« Code civil est con çu, que tout ce qui était donné
« par le défunt à celui qui réclame une légitime par
« voie de réduction , devait être imputé sur cette
« légitime, même quand la demande en réduction ou
«
«
«
«
«
retranchement pour la légitime (ce qui doit avoir
lieu aujourd’ hui pour la réserve) serait dirigée
contre un étranger qui serait légataire universel. Ce
q u i, dans ce cas particulier, exclut l'application .des
principes concernant les rapports, c’est la nécessité
« de concilier le droit de disposer, accordé par la lo i,
« avec le devoir q u ’elle impose de laisser une partie
« de ses biens à quelques-uns des héritiers. Si ce
« devoir est rempli en entier, la disposition ne doit ’
« être réduite que proportionnellement à ce qui peut
« manquer pour compléter la réserve (i). »
Cette uniformité d ’opinions démontre la vérité de
la règle de l’imputation; elle est en harmonie d ’ailleurs
avec les lois,’ les autorités et la jurisprudence, qui ,
( i ) Voir le Traite des Donations, par M . G re n ie r , édition i u - 4 ° >
tome 2 , page
334 -
�1 ^
( 3o )
dans l ’ancien droit, obligeaient le légitimaire a déduh'e
sur sa légitime les dons q u ’il avait reçus. O r, l ’on sait
que les lois anciennes et nouvelles se prêtent un mu.tuel secours pour la décision des cas non expressément
prévus par l ’une des législations. Leges priores ad
posteriores trahuntur et è contra. On se rappelle aussi
la maxime que nous avons déjà citée : In casibus
omissis deducenda est norma legis à sim ilibus.
Mais dans la cause, on pourrait se dispenser d ’avoir
recours aux règles générales, qui ne sont nécessaires
que dans le silence des actes de libéralité.
E n effet, la question est décidée par le contrat
même qui contient la constitution de dot.
On se rappelle les termes de cette constitution.
D ’un côté, le sieur Peyrachon père avait stipulé
q u ’une partie de la dot ne serait payable q u ’après
son décès, ce qui indiquait assez q u ’il ne la donnait
que pour tenir lieu à sa fille des droits q u ’elle aurait
un jour dans sa succession,
D ’un autre côté, il exigea d ’elle une renonciation «
tous scs droits le'gitiniaires paternels et maternels.
N ’était-ce pas interdire formellement à la daine Mollin
le droit de réclamer une portion de la réserve légale?
N ’était-ce pas lui annoncer clairement que son père
entendait disposer du surplus de ses biens, sans q u ’il
lui fut permis d ’attaquer les dispositions?
La dot fut le prix de la renonciation. Comment la
dame Mollin pourrait-elle conserver la dot, et rétracter
la renonciation? Si elle refuse d’exécuter la convention,
�n ’est-il pas juste q u ’elle en restitue le prix ; q u ’elle le
rende au patrimoine du père, dont il avait été tiré,
ou q u ’elle l ’impute au moins sur les droits légitimaires
q u ’elle avait promis de ne jamais réclamer?
Ainsi la loi du conti’at de mariage suffirait pour
décider la cause, et pour faire rejeter les prétentions
exagérées de la dame Mollin.
Combien ne doit-on pas être surpris de la double
erreur des premiers juges? Ils ont méconnu tout à-lafoiset les règles ordinaires de l’imputation, qui devaient
dicter leur jugem ent, et la convention écrite, qui ne
permettait pas a la dame Mollin de retenir sa dot en
réclamant ses droits légitimaires! Cette erreur est trop
grave pour ne pas être réparée par la Cour.
Les motifs que nous avons développés peuvent s’ap
pliquer à l ’imputation de la valeur réelle du domaine
de Naute, comme a celle de la partie de la dot qui a
été payée en argent.
S ’il est v r a i, comme on l ’assure, et comme cela
paraît avoir été reconnu par toutes les parties, que ce
domaine fut d ’un prix beaucoup au-dessus des 12,000 fr.
pour lesquels il a été délaissé, la plus-value doit aussi
être imputée sur les droits légitimaires de la dame
Mollin.
E n valu dirait-on que le domaine a été délaissé h
M. Mollin, non à son épouse, et q u ’il n ’appartient
pas à celle-ci.
Plusieurs réponses écarteraient l ’objection.
i° Elle n’est pas justifiée; car l ’acte de délaissement
�n ’est pas rapporté. Il ne paraît pas même q u ’il ait été
produit en première instance; et cependant il serait
important à connaître ;
20 L e délaissement f u t - il fait au m ari, s’il y a
vilité dans le p r ix , et si l ’on doit considérer la plusvalue comme une vraie libéralité, au moins doit-on
reconnaître aussi que c’est envers sa fille, et non en
vers M. M ollin, que le sieur Peyrachon aurait entendu
se montrer généreux; q u ’ainsi la libéralité devait être
attribuée à celle-ci, et par conséquent être imputée
sur les droits q u ’elle réclame ;
3 ° C e t t e i m p u t a t i o n s e r a i t d ’ a u t a n t p l u s équitable,
que si le père, par un délaissement d ’immeubles , a
réellement augmenté la dot promise, il n ’a fait à sa
fille et à son gendre cette seconde libéralité, que parce
q u ’il a pensé qu e, fidèles à remplir la condition à
laquelle ils s’étaient soumis, ils ne réclameraient pas
leurs droits légitimaires.
A ujourd’hui q u ’ils se jouent de cette condition ,
pourquoi conserveraient-ils l’avanlage de la plus-value
du domaine que leur a cédé le sieur Peyrachon père?
Ce domaine, comme la dot payée en a r g e n t , doit être
réuni à la masse du patrimoine pour déterminer la
quotité disponible, sauf, après la fixation de celte
q u o tité, à ]\I. Mollin et à son gendre, à retenir l’ar
gent cl le domaine, en les imputant sur le tiers qui leur
revient dans le patrimoine entier.
Mais n’ordonner l ’estimation du domaine de N aule,
comme le porte le jugement dont est appel, (pie pour
�diminuer le don fait au légataire, c ’est blesser à-lafois et les règles du juste, et l ’intention* évidente du
sieur Peyrachon père.
Quoique principalement dirigée contre la dame
M ollin, la discussion à laquelle nous nous sommes
livrés s’applique aussi au sieur Peyrachon son frère.
Si la dame Mollin doit imputer sa dot sur sa portion
dans la réserve légale, c’est-à-dire sur le tiers du pa
trimoine du père, son frère ne doit pas lui-m êm e
obtenir la moitié de cette dot et le tiers du surplus
des biens; car il aurait plus que la loi ne lui attribue,
et le légataire serait privé d ’une partie de la quotité
disjionible.
L e jugement doit donc aussi être réformé à l ’égard
du sieur Peyrachon fils.
Au reste, celui-ci avait approuvé le testament, et
l ’avait même exécuté , en 1 se mettant en possession
du legs qui lui avait été fait pour sa portion dans la
réserve légale. Cette circonstance présente un moyen
de plus contre la décision du tribunal d ’Issingeaux.
Il serait superflu de réfuter l ’application d ’un
arrêt de cassation, du 3 o décembre i8 i( î, cité dans
les motifs du jugement. L ’arrêt est étranger à la
cause. Il d é c i d e que le légataire d ’une quote déter
minée , c’est-à-dire du quart des biens de la suc- *
cession j
ne peut exiger le rapport des dots ou des
avancemens d’hoirie, pour prendre le quart, même
des objets rapportés.
5
�( 34 )
La difficulté n ’était pas celle qui nous occupe. Il
s’agissait d ’un rapport r é e l, qui tendait à priver les
donataires antérieurs d ’une partie de la chose donnée,
et non d ’une réunion fictive, destinée seulement à
faire connaître la quotité disponible. L e légataire
n ’était pas attaqué en réduction;
au contraire, il
voulait augmenter le legs, du quart de tous les dons
précédemment faits. Ce n’est donc que par confusion
de principes, que l'on a pu assimiler les deux questions.
Egarés par les règles sur les rapports , les premiers
juges n ’ont pas remarqué q u ’ils se jetaient dans une
fausse route, et q u ’ils avaient à juger seulement une
question de réduction.
Ils ont oublié q u ’un legs,
quelque considérable q u ’il f û t , ne devait pas être
r é d u it, s’il n’exçédait point la quotité disponible. Ils
se sont mis en opposition directe avec le texte même
du droit français, qui ordonne la réunion des biens
donnés aux biens existans lors du décès du testateur,
pour calculer la valeur de la quotité dont il lui était
permis de disposer. Ils ont ignoré aussi ce grand
principe d ’équité et de justice, qui ne permet pas aux
enfans d ’attaquer les dernières volontés d ’un père,
lorsque celui-ci n ’a pas négligé lui-même scs devoirs,
et lorsqu’il leur a payé la dette de la nature et de la
loi. E n fin , méconnaissant le vœu de la législation
n ou velle, qui
protège également , et le droit des
enfans à la réserve q u ’elle a é ta b lie , et la faculté
de disposer accordée aux pères, mais restreinte dans
de justes bornes, ils ont créé un système qui rendrait
�(3 5 )
■ ■w
cette faculté illusoire, et qui autoriserait les enfans,
quoique enrichis, par les bienfaits du père, de la plus
grande partie de son patrimoine, à faire réduire à
son décès les libéralités même les plus modiques,
dictées par l'affection ou commandées par la recon
naissance.
Me ALLEMAND, Avocat.
M* GAYTE-LARIGAUDIE, Licencié-Avoué.
R I O M , I M P R I M E R I E D E S A L L E S , P R È S L E P A L A I S DE J U S T I C E .
-
,
■r
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rocher, Jean-Martin. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Gayte-Larigaudie
Subject
The topic of the resource
legs
partage
légitime
quotité disponible
réduction
experts
réserve héréditaire
gain de survie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean-Martin Rocher, négociant, habitant de la ville de Tence, arrondissement d'Yssingeaux, en qualité de subrogé-tuteur de Jean-Pierre Peyrachon, fils mineur, habitant de la même ville, appelant ; contre dame marie-Geneviève Peyrachon et monsieur Jean-Antoine Mollin, juge au tribunal civil d'Issingeaux, son mari, de lui autorisée, habitans de la Ville d'Issingeaux, intimés ; et contre sieur Jean-Pierre Peyrachon, rentier, habitant en la ville de Tence, aussi intimé.
Table Godemel : Legs : 5. le légataire de la portion disponible peut-il, n’étant pas héritier à réserve, exiger que les héritiers qui ont reçu des dots en avancement d’hoirie, en fassent le rapport par voie d’imputation ? est-il réduit à prendre la portion disponible calculée sur ce qui reste dans les mains du donateur au moment de son décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
An 13-1822
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2519
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53505/BCU_Factums_G2519.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tence (43244)
Yssingeaux (43268)
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
La Naute (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
gain de survie
légitime
legs
partage
quotité disponible
réduction
réserve héréditaire
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53286/BCU_Factums_G1612.pdf
0e4ad46cb2e11637c4ee170badb30836
PDF Text
Text
GENEALOGIE,
M arie MOLIN.
P
i e r r e
J
M O L IN .
E lle a testé le 2 juillet 1759 ; a institué
Ignace Molin , son neveu , et fait un legs
à Geneviève P é rie r, sa nièce , et à Mar
celin M olin , son neveu.
M O LIN ,
Femme P É R I E R .
e a n n e
G
I
e n e v iè v e
,
Légataire de M arie M o lin , sa tante.
»■ — " i
I
B
laise
I
.
gnace
P ierre M O L I N ,
A testé, et est décédé Je 20 mai 1743.
Catherine F e R R A P I E ,
A testé le 24 mars 17 3 6 ; morte le 28 dudit
mois.
,
Curé du Chambon , héritier testamentaire
de Marie Molin , » tante , fidéicommissaire ou fiduciaire de Catherine Ferrapie,
sa b e lle -s œ u r, a assisté au contrat de
mariage de M arie lïo liQ» sa nièce, du i
février 1763. Par son testam ent, du 7 no
vembre 17 6 3 , il a iustitue Jean M olin,
sou frère , et fait un ®SS * Marie M o lin ,
sa uièce.
3
M arcelin M O L IN ,
Créancier dénommé dans le contrat de ma
riage do Marie M o lin , sa nièce , et léga
taire de Marie M o lin , sa tante.
J e an M O L I N ,
Héritier testameitaire d’Ignace, son frè re ,
représenté par . Jean-Antoine Molin, juge
au tribunal d’Vssengeaux, partie secrète
en la cause, d’après l’acte du 14 février
1
, et les pièces de la procédure.
11
793
1
r
2
Ma
r i e
,
3
N ée le 2 février 1 71 8, mariée le i février
17 Î3 , avec Claude de Chainbarlhac, puis
à D ejou x, puis à Lambert Lacroisière;
appelée par le testament de la mère à lui
succéder ; légataire d’ Ignace Molin , son
oncle; a vendu à C houvenc, appelant, et
demandeur en tierce opposition , le do
maine du V illars, le 14 ao it 1778; décé
dée en 178O, après avoir fait Lacroisière
ton héritier testamentaire.
C
a t h e r in e
,
N ée le 24 janvier 1720; demanderesse en
1793 ; intimée
défenderesse en tierceopposition.
M
3
a r g u e r it e ,
Morte a i intestat , le 1 7 septembre 1740.
J
4
e a n n e
6
5
,
N és le 7 février 17 2 5 , décédée le 10 juin
I77g.
3
P
i e r r e
,
3
N é le
mai 1731 , décédé le
novembre
! 7/(8 ; appelé par le testament de la mère
à lui succéder.
T H É RÈ S E ,
Nén le b avril 1 733 ; mariée à Antoine
Borne le 6 mai 17 6 5 ; devenue sa veuve
le i mai 1768.
3
I
J E ANNE B O R N E ,
Femme du sieur V endriez , in tim és, défendeurs.
3
Pages 2 et
du Mémoire des intimés, — E clairer la justice , n ’est pas embrouiller la cause. Pierre Molin , père des six enfans , avoit quatre
frè re s , au lieu de trois : tous étoient légitimaires ou copartageans de Pierre M o l in , premier du nom. Ignace et M arce lin représentoient leur
tante, Marie M olin. I l est à présumer qu’ils ont été désintéressés par M arie M o l in , leur nièce , ou par ses trois maris. I l y a lieu de croire
que M . M o l i n , d ’après l ’acte du i/t février 1 7 9 3 , passé avec L a c ro is iè re , et comme ayant succédé, à Ignace M o l i n , a tous les papiers do la
famille en son pouvoir. Comment supposer qu’un acquéreur puisse les avoir autrement que par les dépôts p u b lic s ? Cette circonstance ne suffitelle pas pour accueillir la prescription de dix ans entre présens ?
�3 o )7
CONCLUSIONS MOTIVE E S
D 'A P P E L
£ T
N O T E S EN R E P L I Q U E ,
SÉANT
A R IO M.
P O U R
J e a n et autre J e a n
CHOUVENC, appelans ;
CONTRE
,
M O L I N et les sieur et dame
V E N D R IE Z et B O R N E intimés
C a t h e r in e
A
c e
q u 'i l p l a i s e
à
la
.
c o u r
En la fo r m e ,
E n ce qui touche la péremption de l ’appel, demandée par les
intimés ;
A ttend u qu’iln 'y a pas eu instance sur l’appel régulièrement for
mée et entretenue entre toutes les parties dénommées dans le juge
ment dont est a p p e l, avant le 16 germinal an 9 , que la cour a été
saisie de cet appel ( 1 ) ;
(1)
c o u r
7
4 dans
Page
du M é m oire des intim és; l'exploit du 7 pluviôse an
leur dossier. I l n'a é té donné q u ’à la requête du sieur Ven d riez, seule
A
�.
(
2
)
Attendu qu’il y auroil eu interruption de cette péremption,
par le changement d’ état de l ’affaire (2);
Attendu que le jugement dont est appel a été rendu par for
clusion , et que l'appel d ’un pareil jugement n ’est sujet à péremp
tion qu’ autant qu’il y a eu contestation en cause ;
Attendu que quand la péremption auroit été acquise, elle a
été couverte ( ).
3
m e n t , et encore seulement à Cliouvenc fils , qui n’est pas partie
le jugement
dont est appel.
Lors du
an a , le sieur Vendriez , s e u l ,
procès verbal
dans
du 9 thermidor
fut représenté par le sieur Lagrevol ,
sans pouvoir dans la forme exigée par la loi de 1790.
Ce ne fut point
Jean Chouvenc du Villars , mais Pierre Cliouvenc de T en ce , qui co m
3
parut ; et l ’exploit de signification, du i thermidor an a , avec assigna
tion pour l ’exclusion des tribunaux , n ’a été donné qu’à t a requête du
sieur V e n d rie z , et à C h o u venc de la R o c h e , fils , en laissant à l'écart
Chou venc père , du Villars. Pareilles insuffisances dans le procès verbal
et dans l’assignation d e s 8 et 28 fru ctid or an 2. I l n ’a été suppléé à ces
omissions que par les exploits des 9 vendémiaire an 8 et 1 6 germinal an 9.
(2) Pag. 3 et 4 de V A ju g e r ; pag. 10 de la Réponse. Jeanne B orne étoit
en qualité dans le jugement de 179^ ; mais elle ne l ’a été ni dans l ’ex
ploit de signification , ni dans les actes de 1 an z , ni dans celui du 7 plu
viôse an 4. Chouvenc fils , donataire e n t r e - v if s , avoit un droit acquis au
moment de son intervention , et son père n auroit pu nuire à ce droit
particulier , indépendant du titre successif.
3
( ) Pag. 4 ,
5
et 6 de V A ju g e r-, pag. 8 , 9 et 10 de la Réponse. Ces
deux questions sont oiseuses, parce qu ’il vient detre prouvé qu ’il n ’y a
pas de péremption ; que l ’on n ’adopte pas sur la première l’opinion de
Bonnam ent : il est certain que la seconde
n ’est pas seulement prouvée
par tous les actes rappelés p.'ige 6 , que les intimés , page 8 , réduisent au seul
exploit du 16 germinal an 9 , tnnis encore par la ju risprudence de T o u
louse. Cette preuve acquiert une nouvelle force , i ° . par extension que
Ifs intimés p r ê t e n t aux mots .te v o i r d é m e ttre d e le u r a p p e l , qu'ils re
gardent généraux et indéterminé* , tandis qu ’il est notoire que ces expres
sions , dans les tribunaux de l’ancien ressort de Toulouse , ont la même si
1
gnification que c e lle -c i, d éb o u ter, et que l ’ une et l'autre s’adaptent au fond :
lorsqu’on entend employer ou ajouter les moyens de forme , on se sert
de ces m o t s , se v o i r d é c la r e r non rece va b lo , ou de ce u x-ci, se v o ir
�f 3 )
E n ce qui touche la nullité de la procédure sur l ’ap p e l, deman
dée par les appelons, de ce que la dame Vendriez ri’ avoit pas
été autorisée ;
Attendu que le sieur Vendriez est intervenu pour l’autoriser ,
et qu’en recevant l’intervention, il a été donné acte de ladite
autorisation :
A l ’égard du fond ,
A tte n d u , en d ro it, le principe consacré par l’ancienne comme
par la nouvelle lo i, que celui qui acquiert de bonne fo i, et par
juste titre, un im m eu ble, en prescrit la propriété par dix a n s ,
et q u ’il suffit que la bonne foi ait existé au moment de l'acquisition;
A t t e n d u q u e s’ il s’est élevé quelques doutes, quelques incertitudes
parmi certains jurisconsultes, d ’après la Novelle 1 1 9 , ces doutes
et ces incertitudes doivent cesser par le Code civil, surtout lorsqu'il
y a réunion de ces deux circonstances; l’u ne, que non-seulement
l ’acquéreur, mais encore le vendeur, sont de bonne foi; l’autre,
que les prétendus copropriétaires n ’ont point ignoré la vente, et
ont laissé jouir paisiblement l’acquéreur pendant plus de quatorze
a n s , au lieu de dix qui suffisent pour prescrire (4 ) ;
d é m e ttre p a r fin s d e n o n -re c e v o ir e t d e n o n -v tilo tr ; a . par la juris*
prudence constante de T o u lo u se , qu'il étoit libre aux parties de renoncer
à la péremption , en rétorquant aux intimés leur assertion sur la néces
sité J e suivre cette jurisp udfnce. Pag. 1 2 , i et 20 de leur Réponse.
(4
3
3
Pag. 7 , suivan tes, et 18 de \ 'A j u g e r \ pag. l0 , 1 1 , 12 et i d e l à
Réponse. C h a cu n e dr-s assertions est appuyée sur ces autorités , la Novelle
l i ( ) , c l i a p . 7 , et la jurisprudence de Toulouse. La question n’est-elle que
pou r les écoles , lorsque , d ’après les expressions de M aynard , de Du peiier et du cardinal Luca , elle n ’est pas fort b r o u illé e , qu ’on s’arrête
q u e lq u e fo is k cette p re scrip tion , quand il n ’ y a pas d e r e m è d e s p o u r
s 'e n g a r a n t ir ? Deux points n décider. Existe t-il un usage à Toulouse de
rejet de lrt prescription de dix ans entre présens , tel que cet usage puisse
résisterait Code c i v i l , plus déclaratif que constitutif en cette partie?
Y a-t il eu mauvaise fui dans Marie Molin , dans sa v e n te ; et , en la lui
supposant , Catherine et _ Thérèse M o lin ont-elles ignoré cette vent e?
1 . Les citations invoquées par its oppeluns ne sont ]'< int nffoibIi«s par
A a
�Encore relativement à Catherine Molin ;
A tte n d u , en d r o it , que toute action prescrit par le laps de trente
celles des intimés , et il ne résulteroit de la différe n ce , qu ’ une contrariété
qui rendroit indispensable d ’admettre comme loi déclarative la disposi
tion du Code c i v i l , qui se contente de la bonne foi de l ’a cq u ére u r, qui
Veut que cette bonne foi soit toujours 'présumée , que c ’est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prou ver , et qu’il suffit que la bonne foi ait
existé au moment de l’acquisition. Si les intim és
la demande en désistement, qui est
n’eussent pas confondu
la seule qui existe, avec celle en
partage , qui ne peut a vo ir lieu , d ’après leur traité avec L a c ro is iè re , ils
n ’auroient pas rétorqué l’aveu du principe fait par les appelans , que le
cohéritier peut réclam er contre son cohéritier pendant trente a n s , sur
les aliénations qu’il a faites , mais nullement contre le tiers , ainsi que
l'observe Furgole d ’aprés M ornac , dans le passage même dont les intimés
ont transcrit une partie. Sur l ’usage de Toulouse , classons Furgole avec
Boutaric et Serres. I l se trouve également réfuté pag. 1 2 , i , 14 * * ,
1 6 et 17 de Y A ju g e r . Les appelans ne sont pas démentis sur le fait , qu’il
n ’est point d ’arrêt de Toulouse qui ait jugé la question ; mais ils le sont
sur ce qu’ils ont assuré que l’arrestographe Laroche - F la v in n’en faisoit
aucune mention. E n e f f e t , pag. i o , il ne parle que de la prescription
3
5
5
pour les biens substitues. Graverol , son annotateur , ne fait mention que
de la prescription par dix ans de l ’hypothèque ; et lorsqu'il ajoute que
le tiers possesseur prescrit dans trente ans un droit de propriété , il a
raison en thèse générale ; mais il n’a pas étendu cette opinion au tiers posses
seur avec juste titre et bonne foi. Catelan n’a pour objet que l ’hypothèque
pour cette prescription de dix a n s ; et si ce qu’il rapporte de l’ usage de ne
pas recevoir cette u s u c a p io n , est fondé sur ce qu’il ajoute q u ’elle a été
transform ée, même par Justinien , en prescription de trente a n s , il est
évidem m ent dans l’erreur sur la N o v e lle 1 1 9 , qui établit la distinction
de la prescription de trente ans avec celle de dix a n s, avec justo titre et
bonne foi. I l est inutile de vérifier Lapeyrère , par le peu de confiance
q u ’ il a au palais , d ’après Bretonnier , qui , dans la préface de ses Ques
tions alphabétiques , dit que cet ouvrage est mal digère , q u ’on l’a aug
menté d ’environ la moitié , en sorte que l'o n a fait un volume in -folioyôr#
m in c e d e tou tes le s m a n ières.
M on tvallon n ’est pas plus recusable que Bonr.ament et de Bezieux. C et
auteur se fonde sur Uuperifer comme Bonnament ; mais bien loin de con
trarier l'urrèt r.ipporté par de B e z ie u x , in terven u s u r d e s c irc o n s ta n c e s
�zfoi
( 5 )
ans, et que la cohabitation, d ’un c ô t é , ne peut l’interrompre
5
533
d iffé re n te s , il se réunit à D u p e r ie r , d’après un a*rèt du i février i
,
pour supposer la nécessité de la part du légitimaire de discu ter, p o u r , en
cas d ’insuffisance, être colloqué pour le surplus sur les biens médiocre*
de la même hoirie , aliénés;. par l ’héritier. Mais le même Montvallon ter
m ine , d ’après de Bezieux , et , d it-il , tous les a u t r e s , par donner pour
certain que nonobstant que l’action pour demander la légitime dure trente
ans , celui qui a confessé par acte l’avoir reçue , n’a que dix ans pour
dem ander la rescision de cet acte.
A l'égard de Bretonnier , il suffit d ’y renvoyer , tom‘. a , pag. 74. L e
docte Domat , en attestant la diversité des provinces , n ’ajoute pas que
celle de Languedoc soit une de celles où l'on n'observe pas les divers
temps de prescription du droit romain. Les intim és croiroient-ils avoir
tout dit en alléguant que le Code civ il a adopté tantôt le p u r droit romain ,
tantôt la Coutume de Paris , et que ce parlement la prenoit pour règle
dans les moindres doutes ? Mais ce parlem ent de Paris , par son arrêt
du
6 mai
1G07 , recueilli par H enrys , n ’a-t-il pas jugé pour le pays de
droit é c r it ? N ’est-ce pas d ’après le démenti donné à Chorier par la dernier observateur , sur les œuvres de ce magistrat de M ontbrison , pays de
d ro it écrit ; n’est-ce pas surtout d ’après son attestation que cette maxim e ,
qui établit cette prescription , est devenue le droit commun de toute
l ’Europe ; que la jurisprudence de la cour d'appel de lliom , qui va p r o
non cer , est invariablement fixée sur ce point , par un premier arrêt en la
première s e c tio n , du 16 ventôse an 1 2 , au rapport de M . T h u r r a u l t , sur
les conclusions dé M . Touttée , substitut de M , le procureur général ,
entre Pierre Beschatnbes et Marguerite Cros , a p p e la n s , et Marianne Cas ,
intimée ; par un second rendu en pluviôse dernier , en la seconde section ?
31 est
à remarquer q u e , dans l ’espèce du p r e m ie r , il étoit mis en avant
que le vendeur n ’étoit pas propriétaire ; mais il a suffi q u ’il eût vendu
en son nQin propre et privé , et q u ’il ne fût pas établi par aucun fait , par
aucune c irc o n s ta n c e , que V i d a l , a c q u é re u r, eût connu le vice de la vente.
Cet acquéreur a été regardé comme présumé en droit acquéreur de bonne
foi. L e second de ces arrêts a été rendu pour l’ancien ressort de Toulouse ,
entre le sieur Porrat du Clufcel et la veuve Beyzaguet. D o n c ne seroit-il pas
rid icu le d ’applifj uer cette jurisprudence de la cour de cassation contre la
disposition du Code civ il d ’accord avec la loi ro m a in e , non pas à une juris
prudence constante de Toulouse , mais à une controverse sur laquelle il n’est
rapporte aucun ¿rret qui ait rejeté celte p re scrip tion , lorsqu'il y a eu réunion
de titre et de bonne foi.
�/
*
\
(«)
qu’autant "qu’on peut la considérer comme possession indivise,
a 0. L a preuve de la bonne foi il« la venderesse Marie M olin , et de la
connoissance qu’ont eue ses sœurs Catherine et M argu erite, de cette vente
de 1 7 7 8 , suffisamment établie pag^s 10 et 1 1 de V A j u g e r , et nullement
contredite par les intimés , est renforcée d ’abord par le contrat de mariaga
de Marie M o lin , de 17 5 3 , par lequel elle donne à C h a m b a rlh a c, son m a ri,
le
s es
pouvoir de vendre pour acquitter les légitimes et les droits successifs da
sœurs et d ’un o n c le ; p u is , par l’acte de propriété que fit Cham barlhac
en tnai 1 7 5 5 , en quittant Claude Chouvenc , père et aieul des appelans ,
qualifié d ’ancien fermier d e s o n domaine du V i l l a r s , d e tout le temps da
sa jouissance; d ’où il résulte que Catherine et Thérèse M o l i n , cohabitant
la
maison maternelle , n'ont pu ignorer le changement du fermier en pro
priétaire. Ensuite , une circonstance particulière a chacune des soeurs M o lin ,
si elle ne démontre pas complètement cette connoissance , contribue à !es
repousser ; c ’est q u ’il y a tout lieu de croire que Catherine Molin avoit
tr,iité de ses droits envers sa sœur ainée , M arie M olin , ou envers ses
trois maris , moyennant une somme fixe. On remarque dans le vu des
pièces de la sentence qu'elle a obtenue en 1790 , une saisie-arrét faite à
sa requête entre les mains de l'acquéreur F r a i s e , du 14 janvier 1 7 8 9 : par
acte du 14 février 179^ , passé avec Lacroisière , elle s’est obligée d ’allouer
900 fr. ; et par sa quittance notariée, du
25 mars
1784 , on voit que l'im
putation doit être faite sur le capital. Ces inductions ne doivent - elles
pas nécessiter l'admission de cette prescription ?
A l'égard de Thérèse , elle a cédé , à la vérité en m in o rité , ses droits
à sa sœur , femme C hambarlhac , en
1755-
L ’action rescisoire lui ètoit
p.iraphernale , elle a pu et dû l’exerrer dans les dix ans de sa majorité ,
arrivée le
5
avril 1758. Non-seulement elle n’a pas réclamé avant le décèi
de son mari , arrivé le 2Z mai 1768 , mais encore ayant habité le lieu de sa
naissance depuis cette époque , elle a vu successivement jo u i r , d'abord sa
s œu r , puis «on a c q u ére u r, depuis 1 7 7 8 , sans réclamation ni contre cet
acqu éreu r, ni contre Marie Molin à qui elle a vo il cédé ses d r o its , plus d®
dix ans avant. Kiifin les intimés se sont eux-mêmes exclus de leur recherche
Contra c< t a c q u é r e u r , en optant le moyen de discussion qui a été opposé par
l e s C h o u v e n c a u bureau de conciliation , le j thermidor an 2 , comme grief
contre le jugement dont est appel. Celte option résulte, et de l’acte passé avec
3
L.tcr .isière , du I j. février 179^ , et de tous les arrangemrns qu’ils ont pris
avec les autres acquéreurs postérieurs à Cliouvenc , antérieurement et ulté
rieurement au jugement dont est a p p e l, et à l’appel. Si la réunion de tous
�4< *2
5
(7)
réelle ét corporelle ( ) ; et q u e, d e l’ a u tre , elle ne peut être op
posée utilement à un tiers détenteur ;
ces moyens n ’achève pas de confondre les intimés , même subsidiairement ,
dans l’esprit de la dernière partie de la Novelle , pour ¡faire adopter cette
prescription , et même encore dans le système de Boutaric , Serres et F urgole , la cour se déteriuineroit encore par la disposition de la loi n , ff. D e
j u d i c i i s et ubiquisqu e agere , et par la 7 5 e. du dernier titre du digeste
Q uolies œ quitatem d e s id e r ii n a tu ra lis ratio , aut d u b ita tio ju r is mor a t u r , ju s t is d e cretis res tem peranda est. Règles du droit civ il par D an toine , pages 246 et 247. Comment , en effet , se refuser à maintenir en paix
l ’acquéreur du 1 7 7 8 , lorsqu'il n'a p is été inquiété pendant dix ans par ceuxlà mèine qui ont connu son titre , et qui sont parvenus , par toutes sortes de
voies insidieuses , contre l ’héritier de la venderesse et d ’autres acquéreurs ,
jusqu'à les dépouiller et priver ce premier acquéreur , non-seulement de tout
recours en déchargeant indéfiniment Lacroisière , mais encore des moyens
de se défendre , en s’emparant de tous les papiers de la famille.
5
( ) Pages 1 9 , 20 , 21 de l 'A ju g e r ; 24 ,
25 ,
a(j de la R é pon se. S i les
intim és eussent approfondi la question, ils n ’eussent pas aventuré que les
appelans n'ont p a s vou lu la ch erch er où ils
1‘ au roien t trouvée , et ils se
seroient convaincus de l ’im portance des citations de d ’Argentré , de D o m a t,
et de l'arrêt de Bordeaux , en opposition à ceux dont parle Dolive. L ’in
terruption de la prescription est naturelle ou civile. Il ne peut être ques
tion ici que de la première. E ll e est fondée sur la loi cum nottssirni , §. ,
dont voici le texte : Im o et illn d p ro cu l d u b io est q u o d s i q u is eonim
q u ibu s a liq it id debetu r , b es s ib i s u t f o s i t a s sine v io le n tia ten uerit ;
î’ k r HA.NC j i e t ; n t i » m e » in te m ip tio fit prceteriti tem poris , s i m inus
e fflu x it trig in ta v e l q u a d ra g in ta annis. Le commentateur de la loi prend
5
le mot su ppositas pour o b lig a ta s . , Les arrêts cités par D o l i v e , et celui
rapporté par Lapeyrère , ont jugé d ’une manière contraire , les premiers ,
en adoptant l ’interruption par la cohabitation et la nourriture du
légi-
timaire , l ’autre , en la rejetant. Cependant ces deux parlemens se sont
décidés par ces expressions de la loi , p e r hanc deten tionem ; en sorte
que ce n ’est que par induction et non virtuellement que Toulouse a puisé
son opinion
dans ces mots. E n cherchant la méprise de l'une de ces
deux cours , il a convenu d’aller ju sq u ’à la définition qui peut ca racté
riser interruption civile. Or , la détention dérivant de la loi unde v i f
doit etri. réelle , corporelle , d ’intention ; et c ’est afin de 11e laisser aucun
doute sur ce prem ier point , que les appelans ont invoqué le* auteurs
1
�.V
(
8
)
A tte n d u , dans le fa ît , que Catherine Molin , née le 24 janvier
1 7 2 0 , pubère à l’époque du décès de sa m è r e , du 28 mars i y
,
n ’a réclamé contre Chouvenc qu’en 1 7g3 , et contre Lacroisière
q u ’en 17.88, et qu’il s’est écoulé beaucoup plus de temps qu’il ne
faut pour prescrire par trente ans utiles (6).
55
dénommés , page 20 , d ’où ils ont conclu que le parlement de Bordeaux
avoit mieux saisi l'esprit de la loi que celui de Toulouse , et que l’ar
ticle 2 2 | 3 du Code étoit à cet égard déclaratif du §. im o e t illn d . Ce
n ’est donc q u ’en torturant le sens de ces mois v e r h a n c d e te n tio n e m ,
que l’on peut comparer une cohabitation avec nourriture à une possession
r é e l le , capable seule d'opérer l ’interruption naturelle. Ma i s , d un c ô t é ,
les Chouvenc désavouent la nourriture de Catherine Molin sur les biens
de l'hérédité , d ’un autre , cette nourriture lui auroit été fournie, non
par sa sœur , mais bien par ses maris , maîtres de tous les biens dotaux
de M arie M olin ; et on vient de démontrer au moins la forte présomption
par le long silence de Catherine M olin , par ses q u itta n ces, p a r sa saisiearrèt , et par l'interception de tous les papiers de M arie M olin , qua
cette fil le avoit terminé , en acceptant une somme une fois payee ou en
rente viagère. En un mot , cette nourriture , fîit-elle établie , ne pourroit
équivaloir à une jouissance par indivis avec les maris de Marie M o l i n ,
jouissance qui d è s - lo r s feroit croire à un traité définitif avec l’ un dej
beaux-frères. Les appelans pourroient encore s’aider d’Aiiroux-des-Poinmierg ,
*ur l ’art. z 6 , tit.
3 de
la Coutume de Bourbonnois ; de C h a b r o l , sur l’art, 7,
tit. 27 de la Coutume d'Auvergne. Ils distinguent la simple dem eure, de
la jouissance. Ce dernier donne pour certain que des cohéritiers et autres
communs qui ont joui séparément d'objets distincts de la succession, et
depuis plus de trente ans utiles , ont prescrit l’action en partage; qu^ la
pnssesjion trentenaire en tient lieu , comme elle tient lieu de vente ou de
tout titre translatif de propriété. Il n’y a pas eu de possession indivise ,
1755
puisque Cliambarlliac appeloit , en
, sien, le domaine vendu p«r sa
Veuve en 1 7 7 8 ; et à cette époque Catherine Molin nvoit prescrit depuis sa
•puberté du 51 j j.mvier 17^2. Combien plus de force a cet argument pour
l ’arrjuAreur ! l.’.irrèt d " la c o u r , du i 3 ventôse an 1 est étranger n l ’espèce :
les Vesdiiimhes nvoient sans doute une jouissance réelle.
(fi Tout concourt à prouver qu'elle connois^oit le testament de sa trière,
puisqu'elle ne pouvoit ignorer la sentence de T e n re , en 1 7 ^ , qui a main
tenu ce testament respectivement à Tliérèso , sa sœ ur, puisque nicore elle
«'est restreinte .par quatre requêtes à un douzièm e, sn légitime d f rigueur.
âubsidiüircmc'iit,
�£o$
Su] s'dia’rem en t, en ce qui touche la tierce-opposition.
E n la fo r m e , attendu que cette tierce-opposition a dû être
nécessairement portée en la c o u r , parce que c’est une interven
tion autorisée par l’art. 28 , tit. 1 1 de l ’ordonnance de 1667 ,
parce que la cour a remplacé le tribunal du P u y , qui a juge
en dernier ressort, et qu’elle est saisie de la contestation prin
cipale (7) ;
Attendu que cette tierce-opposilion a pu être formée dans les
trente ans , s’agissant de jugement rendu contre des tiers qui
n ’ont point été appelés, ni qui ne sont pas partie dans le juge
ment (8) ;
Attendu que cette tierce-opposition n ’est qu’ accessoire à l ’ins
tance , et que par là même elle n ’étoit pas susceptible de la voie
préalable de conciliation (g) ;
A u f o n d , attendu que les appelans n ’étant parties ni dans le
jugement obtenu par la dame Vendriez , du 26 janvier 179 3 ,
ni dans l’acte passé entre les intimés et Lacroisière , du 14 février
suivant ; que n ’ayant pas été appelés, ils ne peuvent être consi
dérés comme les ayans-cause de Lacroisière ; que conséquemmcnt
ils sont recevables dans cette tierce-opposition ( 1 0 ) , et peuvent
(7I P.ige 22 de V A ju g e r .
(8) Page 2 a île V A ju g e r .
(i))
de I ’ Y
Les intimés ont insisté sur
ce moyen clans leur
réponse A griefs, à toutes les nmlienres , même d.ins le pro» is verbal de
l'extr.iit viiliu .é , du o thermidor ail 1 2 , page 47 de leur Réponse.
23
5
5
(101 Piges 2{ ,
. zG , 27 de V A ju g e r - l î , 1 4 , i . i f i , 17 , 18 d e l à
Réponse. Les intimés ronloiident le p*
ave0 |e
désistement,
l ’rtrlion en subrogation de la part du coliéiiticr qui ¡1 nHuté la portion
liérédiu ire de l'un
(1 eux ,
<ivt!C
L vente particulière de quelques immeubles,
CVst clan« re dernier cas que sont les appel,ms. L»*s ¡111 ¡niés confondent
<ii' nie , <|.i*ii« |,i riüition des iirri’ ts , « eux concert) ml îles né;m< i> rs , avec
ceux <]ni inu'-revspht d is tiers détenteurs à titie particulier. Pour f.iire mit ux
ressortir 1.1 <lif(Hrvnre f| 11 il v a entre les arttts ré ¡|iroqui'mMit invoqué*,
Supposons (pie Mmie Moljn exi'.t.'it 1 nror» , et q u ’elle e{u f.,ii uni* ilnii.iiinn
eiitie Wfï u in vtiic llü u son inaii L a c r o U iir t ', puuuuil-«.n dite qu'tlU: eût
li
�( 1° )
faire valoir tous les moyens qu’auroit pu opposer leur venderesse,
Marie Molin.
D ’un côté, attendu que par l ’effet de l'acte du
février 1 7 9 3 ,
les intimés, en acceptant de Lacroisière , à compte de leurs pré
tendus d ro its, sans liquidation préalablé , non - seulement les
immeubles qui lui restoient d ’après ceux qu’il avoit expédiés au
sieur Jean-Antoine Molin , mais encore tous autres objets , s’il
y en a ( 1 1 ) , sont devenus garans de leur demande envers les
acquéreurs de Marie Molin (12 ).
D ’un autre côté, attendu que Thérèse Molin , mère de la dame
V endriez, étoit non recevable pour n ’ avoir pas réclamé dans les
dix ans du jour de sa m ajorité, arrivée le
5 avril i y 58 ,
contre
la vente qu’elle avoit faite de tous ses droits successifs par son
contrat de mariage de l'jS S ( i ).
5
compris dans la donation ce qu’elle avoit Vendu dix ans avant ; qu’elle se
fut par là dégagée de la garantie qu ’elle avoit contractée envers l’acquéreur
C lio u v e n c ; qu a force de sophismes , la collusion de Lacroisière «ût enve»
lpppé à la fois la garante et les garantis ? E h ! admettons un instant qu’il
ne s'agit que de pa rtag e; tout ne seroit-il pas consommé avec une fraude
évidente ? Lei intimés ne sont-ils pas parvenus à s’emparer contre L a cro ii i é r e , et tous les antres a cq u ére u rs, de tout ce qui composoit les entières
hérédités en mobilier et im m o b ilie r? Ne l’ont-ils pas fait sans appeler les
Cliouvenc ? ¡S’ont-ils pas em ployé l'astuce et la perfidie, d ’après leurs actes
de pluviôse et ventôse an g ? ;
(11') L\croîsière devoit tout le mobilier , e t, selon les intimés , des dégra*
dations et des jouissances. Il étoit encore nanti de tous les papiers, des quittunces'sur les légitimes des belles-sœurs , et de celles des ODcles et grandtante.
(la'i PagfS 27 et i de V A ju g e r. Ce moyen est demeuré sans réponse.
(10) Pages 2 8 , 29 et o de XA j u g e r ; 18 , ig , 20 , 21 , 22 ,
, 2 \ de la
Réponse. C ’e»t par erreur que , p><g« 29 , l’époquo du décès de Pierre M olin
père a été portée au 20 mars 174^ , tandis qu’il est , d ’après l ’extrait ra p
porté par les intimés , du ao mai 17 4 ^ : mais c ’est Ignace Molin qui a géré
3
3
pendant la puberté de Pierre et de Thérèse M olin. Ln preuve en est dans
le dossier des appelans , par l’acte du 2 décembre 17G3 ; et c ’est M . Molin ,
partie secrète du p ro c cj , q u i , comme héritier d 'I g n a c e , son o n c l e , seroit
�/
( n
>
)
'
4 oJ
.
Encore subsidiairement,
'
E n ce qui touche le testament de Catherine Ferrapic;
Attendu qu’il résulte de l’extrait vidirné en vertu de l’arrêt
de la c o u r , que l’abréviation i ,ié, précédée des mots (a testa
tr ic e , et suivie de ceux-ci, enquise et req u ise, ne peut signifier
autre chose qu’illitérée ou ne sachant écrire ; et que les mots en
quise et requise supposent nécessairement qu’elle a lait la réponse
de ne savoir signer; qu’ainsi le testament est régulier dans la
forme ( 1 4 ) ;
1
garant <le celle administration. On applaudit à la profondeur et à rrudii on
de la discussion , sur la prescription qui résulte de l'ordonnance de i y :
V a i n s e f f o r t s ! L e défaut de réclamation des cours d'appel du L a n g u e d o c ,
53
ressort de T o u lo u se , dans leurs observations sur le projet du C o d e , n'atteste
j>as que l'usage étoit d ’admettre l’art. i i , tt prouve en tout cas que ces
3
cours ont reçu , comme l'a fait la cour de cassation , cette partie de l’art- io4
du projet du Code , érigé en loi par l’art. 47 > du Code. La cour de R io m
l'a adoptée , et il y a lieu de croire qu ’ elle ne changera avec la loi qu ■ lors
que , dans une révision , on aura pesé l'avantage d ’un mineur , et l'embarras
et le trouble, pendant un si long intervalle, de temps , des familles des
tuteurs ou autres administrateurs.
(l/j) Pages
,
,
de I A. j u g e r ; 26 . 27 , 28 et- 29 de la Réponse. Les
intimés proposent une autre nullité q u ’ils (ont résulter du défaut de lecture
du testament , quoiqu’ils se c o n t r e d i s e n t e n faisant mention du mot r é c it é ,
qui n’est autre chose qu'une lecture , dans le sens constant et général de tous
53 3 35
les notaires du Languedoc. Raviot qu ils invoquent, question 1 6 \ , n". 8 ,
dit. précisément que l'interpellation suppose la réponse , comme quand le
notaire , en exprimant la cause de la non signature, d i t , ne sait ligner e n q u is .
L e testament d o n t il s'agit renferme les deux mots e n q u is e Pt r e q u is e ; ce
qui prouve que le mot i l l i t è 'è n’est pas le discours du notaire lui seul : cVst
ainsi que l’a jugé l’arrêt rapporté par Ricard. L ’argument liré de l’arréîiste
Dpnisart , est rétorqué sans réplique. Apiès avoir rapporté , n°. 87 , un arrêt
du ift décembre 1 7 5 7 , validant le testament de U -dam e d'F.guilles, qui
n avoit pu signer , quoique enquise , il s’explique ainsi , ri®, rjo , sur celui du
û
»
»
»
septembre 17(18 : « O n sontenoit , même, d e l.i part de l’appelant , que ces
trois mots cl,, Cl! e n q n is avoient été ajoutés après c o up, tant dans la mi*
n t ' <l' e d.ins la grosse , raison pourquoi il y avr il <u inseripui'u de
taux. » Ce moyeu éioii Ucs-considcTuble. Ce n ’est p«s du mot M e tte dont
13 3
�Attendu que le testament du 24 mars 1 7 3 5 est antérieur à
l ’ordonnance du mois d ’août suivant ; que les ordonnances d’Or
léans et de Blois n’ étoient pas observées à Toulouse ni à A ix ( i ) ;
qu’au su rplus, d’un côté , l’ action pour en demander la nullité
seroit prescrite ( 1 6) ; que, de l ’autre, ce moyén seroit anéanti par
la loi du
septembre 17 9 1 (17)*
E n ce qui touche la substitution établie par ce testament;
Attendu q u e, tant par les expressions que par l’intention de la
5
8
testatrice, M arie Molin en a recueilli l’e ffe t , soit parce que Pierre
Molin , son f r è r e , n ’a pas recueilli , soit parce qu’il n ’auroit pu
disposer par acte entre-vifs, étant décédé en minorité (18).
il s’a g i t , mais bien de celui à 'illit é r é ce n’est pas le Dictionnaire de T r é
voux qu ’il faut con su lter, mais bien Cambolas , magistrat de T o u lo u s e ,
36
565
35 36
pages
a et
.
( i ) Pdges
,
de V A j u g e r ; 28 de la Réponse. Cambolas, Dolive, S a l l e ,
M a y nard , Soëfve , art. , ch. i . Denisart , mot te sta m e n t , à la suite de
l ’arrêt n°. 87 , fait mention des actes de notoriété , qui altestoient qu’en
P roven ce les notaires n ’ étoient pas dans l'usage de faire mention , ni d’inter
pellation , ni de déclaration des testateurs relativement à la signature.
5
3
( 1 61 F u r g o le , des testamens, tom. 2 , pag. j 65 . Marie a fait acte solennel
de propriété de l ’h é ré d ité , par son contrat de mariage de 1 753. Le testament
a été rendu p u b lic par le contrôle en 17 3 8 . Voyez ci-devant notes
5 et 12.
(1 71 L a loi de 17 9 1 n ’est qu’ une déclaration de l ’usage du parlement de
Toulouse. Quoique le V ela y n'y soit pas ajouté au V iv a ra is , l’ un et l’autre
pays , également dans le ressort de T oulouse, é to ie n t, avant i
558 , d e
la d é
pendance de la sénéchaussée de Beaucaire et Nimes , en V ivarais , dont
celle du Puy fut démembrée ¡1 la sollicitation de l ’évêque Martin de Piéthune,
cli.inrelier de la reine Catherine de M édicis. Sans doute on ne doit pas
donner de l’extension aux lois ; mais lorsqu’ il est évident , en droit public ,
q'i'ellr n’est que déclarative d ’un usage qui est c o m m u n à d ’autres , pou r
quoi n’en étendroit-on pas le bénéfice aux pay* qui pouvoiciit faire la même
de ma n de ?
36
33 3
3 3 3
(i S) Pages
, 37 ,
, g , /,o de V A j u g e r -, 29 , o, i , a de la Réponse.
L 'e rreu r du notaire , d ’avoir écrit sur une expédition re m is au lieu de r e
c u e i ll i y no produit aucun ch a n g em en t, puisque Pierre Mo l i n , p rn n ier
substitué , n’a pu recu eillir que quand il plairoit aux héritiers non pas grevés ,
car n em o on era tu s n is i h o n o r a tu s , mais chargés de rendre. Une mère ne
�•
(13 )
^Ô
C)
T oujours subsidiairement,
A t t e n d u , d ’un côté, qu’il y a eu collusion entre les intimés,
L a c ro isiè re , M . Molin et autres tiers détenteurs des biens pro
venus des successions dont il s’a g it , et avec lesquels ils ont traité,
soit avant, soit depuis le jugement dont est appel, sans le concours
des appelans ; et que , de l’autre , les intimes sont au delà désin
téressés de tout ce qu’ils auroient pu prétendre dans les hérédités
des père et mère.
doit à ses enfans qu'une lé g itim e , et elle peut instituer des, étrangers, en
instituant particulièrement chaque enfant pour sa légitime ; et c est ce qu a
fait Catherine Ferrapiu. Les définitions de Peregrinus , d Henrys et de B re tonnier sont indifférentes , puisque les vocations de Pierre et de M arie
M o lin ont été conditionnelles , et qu’elle ne leur a donné qu ’ un espoir.
A u c u n d ’eux n’a été saisi de droit ; et Pierre , premier appelé , n’auroit pu
recueillir que par l’expression de la volonté du curé du Chambon. N ’ayant
pas r e c u e i l l i , il n ’a pu disposer d 'u n simple espoir par le testament q u ’il
avoit la capacité de faire en p u b e r t é , et il le pouvoit encore moins par acte
entre-vifs. Ainsi , jamais Ignace M o lin n ’a disparu tant qu ’il n’a pas remis
à Pierre M olin , dont l’état d ’impuberté ou de puberté est absolument in
différent , puisqu'il n ’en est fait aucune mention dans le testament. I l est
d'autant plus ridicule de nommer cette substitution pupillaire , que , d ’un
côté , elle n’est point d ire c te , mais seulement oblique ; et , de 1 autre , les
intimés sont forcés de convenir du p r i n c i p e , que la inere ne peut faire une
pareille substitution. O r , d ’après Cujas , si la substitution n ’est pas p u p il
laire , rien ne s’oppose à l'application de la règle S u b s t itu a is su b stitu to e s t
su b s iitu tu s in s titu to . T ra ité des substitutions , par M . Th evcnot d ’Essaule
33 36
3
de S a v i g n y , pages
,
, 3 7 , i o , 104 : « Le caractère le plus notable du
» fidéicommis conditionnel , est de ne s’ouvrir qu ’au moment où la condi» tion sans laquelle il a été f a i t , vient à échoir , tellement q u ’il nVst point
» transmissible aux héritiers du substitué , si
»
l
'
é c h é a n c e
d e
c e t t e
c e l u i
-
c i
u é c k d b
a v a n t
5 , 1 0 6 , i 56 , 1 5 7 , 1 7 0 , 1 7 1 ,
» 58a , 383 , 4°9 1 4 1 0 i 4 1 *- Quoique ce
c o n d i t i o n
.
» io
n°. 5 2 6 , 17 S , i g i , 24.3 , 244 t
sou assez in d ifférent, i l est certain qu’il s'agit de fidéicommis , et nullement
de fiduce , i°. parce que Pierre , ainsi que M arie , ont été institués particu
lièrement J ans ieur lé g iti„le . 2°. parce que l’époque de la remise n ’a pas
été bornée à un jour certain. L ’exclusion de la quarte ne fait q u ’ajouter au
caractère du fidéicommis , qui l ’eût assuré aux héritiers chargés de rendre ,
£ il n y avoit pas eu clause prohibitive.
�( H )
Par tous ces m o t i fs ,
■
r
Sans avoir égard à la péremption d ’appel , demandée par les
intim és, et mettant hors de cour sur la demande en nullité formée
par les appelans , à raison de ce que la dame Vendriez n ’a pas été
autorisée dans l’exploit d ’assignation sur l ’appel, dire qu’ il a été
mal jugé par le jugement rendu par forclusion au tribunal d ’arron
dissement d ’Y ssen geau x, dudit jour ig prairial an 2 , bien appelé,
émendant, débouter purement et simplement les intimés de leur
demande , subsidiairement, recevant les appelans tiers-opposans
envers le jugement rendu en dernier ressort par le ci-devant tri
bunal du district du Pu y , du 26 janvier >79^, sans avoir égard
audit jugement non plus qu’ audit acte du i/| février 179 $ , qui
seront déclarés nuls et de nul e ffe t , respectivement aux appelans ;
déclarer les intimés et intervenant non recevables et mal fondés
dans leur demande , les en débouter , les condamner en tous les
dépens de cause principale et d ’appel , et ordonner que l ’amende
sera rendue; enjtore très-subsidiairement, o r d o n n e r que M . M olin,
lesdits Lambert Lacroisièrc , lîoyer , Deléage , Cuoq , Fraise et
tous autres détenteurs des biens provenus desdits Pierre Molin et
Catherine F errap ie , seront assignés en assistance de cause, rap
porteront les actes passés entre eux et les intimés, et pour répondre
et procéder comme de raison ; ordonner que par experts convenus
ou pris d ’office , il sera procédé aux description , estimation de
tous les immeubles provenus desdites successions , et feront men
tion des époques des mutations ; autoriser les appelans à com
pulser tous registres et actes publics , afin d ’en obtenir expédi
tion ou extrait, de tous dépositaires, afin d ’établir tout ce que
M arie Molin et ses trois maris ont acquitté à la décharge dos
successions desdits Molin et Ferrapie, et de leurs ailleurs; ordonner
que lors des opérations des e x p e r t s , les p a r t i e s pourront faire tels
d ires, observations et réquisitions qu ’elles aviseront, par elles ou
par leur conseil , pour, ce fait ou ;’t défaut de c e , être pris par
les appelons telles conclusions qu ’ils aviseront, audit cas, réserver
les dépens; ordonner néanmoins que le coût de l’a r r ê t , ensemble
�¿fil
5
( i
)
les frais d’expertise, de rapport et d ’affirmation, seront avancés
par les intimés (19).
43
33 54
(19) Pages 40 , /f t , 42 ,
de V A j v g e r ;
et
de la Réponse. L e juge
ment dont est appel n’ordonne pas un partage , mais seulement un désis
tement qui ne pouvoit avoir lieu qu'après avoir épuisé tous les moyens , pour
être convaincu s’ il devoit être accueilli ou non. A vec qui le partage auroit il
pu se faire? avec Lacroisière. E li bien ! les intimés a voient tout termine
avec lui par l’acte du 14 février 1 7 9 3 , qui a rendu inutile le recours que le
jugement accorde contre lui. D u reste , l ’état «les parties et de affaire a
changé , puisque les intimés ont tout consommé envers les autres cocondamnés par lé même jugement. N ’est-il pas évidemment injuste d ’avoir accordé
aux intimés le tiers afférant à Marie Molin , par droit d'hypothèque , nonobs
tant les lettres de ratification des appelans, et l’acte passé avec Lacroisière ?
1
Les réponses des appelés en cause apprendront comment Lacroisière a ter
mina avec M . M olin , en lui relâchant des immeubles des successions, pou r
quoi Lacroisière a déclaré avoir reçu 1200 fr. pour consentir l ’acte du 14 fé
vrier 17 9 3 , de quelle manière les tiers acquéreurs avoient payé le prix de
leur acquisition , notamment Fraise , en suite de la saisie-arrêt de Catherine
M olin , et quelles ont été les conventions entre les .intimés et ces tiers. A
l ’égard des prélèvemens , surtout de ceux qui ne sont pas connus , et p ro
venant des payeuiens faits aux oncles et grand’tantes , il ne seroit utile de
s’en occuper qu ’autant que Marie M olin ie trouveroit moins avoir que ce
qu ’elle a vendu aux appelans. Mais le compulsoire ne pourroit etre refusé
dès ce moment ; et bien loin d ’étre l’effet d ’une in q u ié tu d e tr a c a s s iè r e ,
ce n ’est qu’ un moyen pour mettre entièrement à découvert la fraude qu i
résulte déjà de la conduite des intimés. 11 est sans doute révoltant de pré
tendre que Lacroisière, dont les intimés ont fait un m a n n eq u in , souffle
ce procès , dont la cupidité et l ’injustice des intimés sont la seule cause.
Il n’y a pas eu d ’autres papiers portés à l ’audience que ceux joints au dossier
des appelans : les testainens de Pierre Molin et de Catherine Ferrapie , le
contrat de mariage de Thérèse M o lin , leur ont été expédiés, ainsi que les
actes des 20 août 17 6 1 , 2 décembre 1 7 6 3 , et
25 mars
1784. Ils n’ont eu de
Marie Mo l i n , que son premier contrat de mariage , et le testament d'autre
M arie Molin , sa grand’tante , du 2 juillet 1 7 6 9 , qui a été expédié à M ar
celin Molin 11 n’est pas exact de dire que les appelans n’ont jamais demandé
en Communication les pièces du procès par écrit , jugé en 17 9 5 . Il y a eu
trois communications , la première par la voie des ayoués ; l'avocat des appe-
t
�'h '\
( 16 )
lans en a fait l’extrait avant la première plaidoirie. Dan« l'intervalle de la
troisième à la quatrième , il prit com munication seulement de la sentence
de 1790 , des mains de l’avocat des intimés ; et la troisième par le même
c a n a l , en recevant l ’exemplaire de la réponse. Lors de cette troisième , il a
remarqué une erreur, page 9 de l'A ju g e r , sur la consistance des biens de C a
therine F e rra p ie , que les appelans n’ont fait consister que dans le domaine
du Villars, des bàtimens et jardin à T e n ce , et divers héritages détachés, tandis
que Catherine M olin , par la requête du 1 juillet 1790 , 8e. p a g e , ajoute
une prairie et bois au terroir de S alettes , et une autre maison à T en ce , et
3
elle n ’articule pour biens provenans du père que le domaine de la Bruirette.
M ais tel est le résultat des menées des intimés , d ’avoir tout dénaturé ,
d'avoir présenté comme partage une demande en désistement, soutenue
avec autant d ’astuce que de mauvaise foi , pour évincer le premier acqué
reur de l'héritière de Catherine F erra p ie , au préjudice d ’un juste titre
et d ’ une bonne foi évidente , soit de la part de l’acquéreur , soit de la part
de la venderesse ; et malgré que tout concoure à écarter une prétention a
laquelle ces deux soeurs avoient renoncé , par un silence soutenu d'une connoissance , d'une approbation du testament de la mère.
jf
avocat,
avoué.
COUHERT-DUVERNET,
/
c ft k
Me. C O S T E S ,
C K lL x » .
(* ’ t~ y
a -**-»
IÎa
tw*-
0- *
A R IO M
U y fa
'
.
de l’imprimerie de L
a n d riot
, seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Ventôse an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chouvenc, Jean. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : Concusions motivées, et notes en réplique, pour Jean Chouvenc, appelans ; contre Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1778-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1612
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1611
BCU_Factums_G1610
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53286/BCU_Factums_G1612.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53285/BCU_Factums_G1611.pdf
1bd132b9f0abfe7d69085439c1166eb3
PDF Text
Text
( s v i i l iw
w k t i .»J8J J m 1.» M a a « « .i K m i E m m m a j ç j g u M f c M m i w a
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
POUR
C
a th er in e
MOLIN, et les S.r et dame VENDRIEZ
et BORNE, intimés;
c o n t r e
J e a n et autre J e a n
CHOUVENC,
appelans.
Q U E S T I O N S .
1 L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein,
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2. 0 S i elle n'est pas périm ée, p euve n t-ils, comme tiers acqué
reurs, repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix a n s , dans le même parlement ?
.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils rece-
3
vables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier resso rt, rendus
sur appointements entre leur vendeur et ses autres cohéritiers
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4. 0 Thérèse M olin a-t-elle eu 10 ou
3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l'ignorance de ses droits et sans être inform ée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
C elte question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
.° Catherine M olin a-t-elle perdu , p a r la prescription de
A
5
30
�ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine F er r a p ie, sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de Vordon
nance de 1735 ?
7.° L a première substitution qu'il co n tie n t, est-elle Jidéicom missaire ou fid u cia ire? L a seconde est-elle une substitution
pupillaire ? Est elle valable? ¿4 -t-elle transmis la succession à
M arie Mo Un , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo lin , qui a simplement légué
une légitim e à ses enfa n s puînés , est-il n u l pour vice de prér
térition ?
EL L E S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les pallies el qui ont occupé \a Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catheriue
Ferrapie, rapportée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée d elà minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est lapporlée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, el subi, pour faire juger un simple
p a ita g e, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Pierre Molin fivnit, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise et
Ignace Molin. Tous , excepté le dernier , s«nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l'embrouiller, les intimés se contentent
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié à Catherine Ferrapie. Ils ont eu six eufans.
�*3(è?
3
(
)
Pierre Molin , mort eri 1743.
Catherine Ferrapie, morie en 1735.
2.
JL
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Clxambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
1731 ;
,
2.e m a r i
N .. . Dejoux.
3 .e mari ,
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L e 20 mars i y
.
6
5.
3.
Catherine , J e a n n e ,
intimée.
m. s. p.
en 1770-
Thérèse.
Louis Borne.
I
.
,------- '------- «.
m ort s. p.
Jeanne Bo rn e,
le 3 novemb.
Louis Vendriez ,
174S.
35 , Catherine F en ap ie
intimés.
fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la charge de remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
« recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans distaction de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des f ruits de
« ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .... Fait et récité audit T e n c e , dans la maison d’autre
« sieur Pierre Molin, en présence d e ............. témoins soussignés.
« Ladite testatrice ille de ce enquise et requise.............»
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
«
«
«
«
«.
institue pour son héritier Pierre Molin son lils. . . . Il donne
et lègue ¿1 ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas ¿ïge de son héritier, il j^rie Ign ace M olin ,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa iille , de régir et
administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A a
�,
*
«•*
'
,( 4 )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur».
Pierre Molin. mourut le 21 du même mois de mai 1743. Alors
Marie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de ChamL o n , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux suc cessions > s’engagea aussitôt qu’il eu eut l’âge. Il
mourut à Lille le novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
3
Quelques années après, on trouva l'occasion de marier la plus •
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux a Ha ires
5
de la maison, et par le contrat de mariage du
juin 1705 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 fr. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du p è r e , de la m ère, de
la sœur décédée , et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n eut pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions , et s’obligea de la confirmer et ratiJ îer à sa majorité. On ne s’ est jaimis avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et ri ère. Quand le sieur Chambar
liac décéda, elle passa en de secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose près,
de dissiper la succession.
Thérèse M o lin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sac rifice qu’on .avait extorqué
de son inexpérience. L e 2.2 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son troisième mari, en partage des successions
de ses père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion all’éranle.
Après cette demande, elle Ht donation de ses biens à la dame
�Vendriez, sa fille, qui intervint. L e procès fut appointé à T e n c e ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du ch ef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le surplus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
■mère communs.
L es deux parties interjetèrent appel de celle sentence ; les pro
cédures se continuèrent en procès par écrit jusqu’a la révolution.
L e tribunal du district du J?uy fut choisi pour connaître de cet
nppe1.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 179^ 5 sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
1.° Que le te.-ta ment du père était nul par prétention; 2.0 que
la substitution, portée dans celui de la u ère, avait saisi Pierre
Molin de la success’on , et que ledit M o l¡11 'étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes ; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était nulle , comme n’étant
dirigée au profit de personne , comme faite par une mineure ,
avec convention de ratification non effectuée, et comme dirigée
âu profil d’une protutiice , et que l’action avait dure trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calc ulcc audit jugement.
De son côté, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lam bert'Lacroisière, son héritier, le 27 novembre de la même année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du chef de son père, et
seulement un douzième, du chef de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la croyance, que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle 11’avail jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour êlre
expedie un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père , et dans les mêmes proportions pour les successions col
latérales.
�'
‘
( 6 )
^ e s ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molfu
alors ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du chef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque lut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
Ou présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus, long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 février 17 9 3, et comme on le voit , en grande connaissance
de cause,
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
q u ’ il occupe , un domaine et un jard in, et déduiront les créances
q u ’il a acquittées en vers Jean-Antoine Molin, à la décharge de tous.
Et comme évidemment ces biens 11e suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouvenc , V raisse, C u o q , I io y c r ,
D e lc a g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin, à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
Enfin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 1793 , les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v ril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demande. L e moyen des
Chouvenc n’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , amis de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�7
C )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, x.° les biens libres, 2 ° ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demande comme acquéreurs de
bonne foi.
Depuis celte époque le tems d elà péremption s’accomplit: ce
n’ esf que le 9 vendémiaire an 8, que \e* Chouvenc signifient l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine Molin se u le , pour assister en la cause.
L e 16 g e r m i n a l a u 9 , les i nti mé* ont a ss i gné les C l i o u v e n c e n
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e de l e u r a p p e l .
C ’est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 179,3,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leur prétendue bonne foi : cependant ils ont acquis d’ une cohé
ritière qui avait une sœur dans la maison; ils ont fait plus, ils lui
ont paye le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lacroisière, ils
avaient eu le m o i n d r e soupçon de la vente faite aux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certes, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce procès , il est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa déc ision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’Arilêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le; ju
gement du 26 janvier 17 9 3 , et de faite rejuger 1111 procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eut indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui ftiire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le ionds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
s’agit d’examiner.
�C 80
PR E
il 1 È R E
Q U E S T I O N .
L a procédure des appelons est-elle périmée ?
L a loi Properatiduni et l’ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entretenus par
des procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrjt n’a eu d’eiï'et que dans son
ressort. A u parlement de Toulouse, au contraire, l’ordonnance
de Roussillon'était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien ressort de Toulouse, lu Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an 11 et 12 nivose an 12 , que la péremption
avait eu lieu de plein droit, même ^pendant la révolution , et la
suppression des avoués.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
Mais i.° cet exploit assigne les Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à celto
démission d’appel; il serait donc bizarre de dire q u e celui-là ap
prouve un appel , qui assigne l’appelant aux. fuis de s’en voir
démettre. Il faut bien q u e lu péremption même soit prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit oblige' de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablem ent, comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
de
�de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral M erlin , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur prdinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790»
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc , a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r Merlin , en sa discussion, ne s’occupe p a s , comme on
pourrait le croire , des péremptions de quatre m ois, qu’il ne cite
que pour comparaison. L ’ordonnance de Roussillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
«
«
a
«
périe, ensorte que nonobstant qiüon ail repris cette instance\
on peut faire juger la péremption............... L ’ordonnance de
Roussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
C ’est un droit public auquel on ne peut déroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s'affaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du 16.c siècle voyaient, dans
1 ordonnance de 1493 , ce que nous 11e voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
B
�£70
u
,
C i° )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein d roit, et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualité dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils, il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
DEUXIÈME
QUESTION.
L e s appel an s , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix ans ?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour lorcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers, qu’ il est CERTAIN que ces cohéritiers avaient
t r e n t e ans UTILES pour réclamer contre ¿o h /é v e n te J a itc par
l'u n d'eux.
Mais y continuent-ils, la question concerne t acquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ven tes, et de ne pas les avoir
contre l'acquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux
dire que les Chouvenc ont élé forcés de r e c o n n a î t r e l ’évidence
du princ ipe.
A u reste, en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�passé, l ’art. 2281 termine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription d e d ix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que '‘ usage est l'interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en laveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après 1 authentique malœ
Jidei qui l’explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malœ
Jid ei possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
1
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem faectam.
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienalarum rerum dom inus, non aliter hune exclu d i n isi per triennalem prescriptionern : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fide possidet, quandb ipse à ma/dJide
possidente hoc accepit. Novell. 119 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l ’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort a tt e s te nt, sans exception , que la prescription de dix ans n’y
est admise que p o u r l’hypothèque, et que le tiers p o s s es s eu r 11e
prescrit que par trente ans.
B a
�Boutaric, page 182, a , sur ce sujet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page 167 annonce la seule prescription de
trente ans comme un principe non contesté. Graverai et Larocheilavin, p. io; Catelan, p. ÎS07, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usueapion de dix ans, que
« Justinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l ’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
5
Furgole , en son traité des testamens, tom.
3 , pag. 4 17, s’ex
plique ainsi : « A u parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l ’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« vin titre, lequel n ’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan, livre 7 , chap. a i ; Lapeyrère , lettre P , n.°
;
5
83
58g ; Bretonier ,
hypothèque, §. i 3 , et la
Montvalon , page i o ; Decormis , tom. 2 , col.
v.° prescription ; M .r M erlin, v.°
maxime est tellement devenue triviale dans les parlemens du*
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix a n s ,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans 1111 parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Doinat y avait réfléchi lui-m êm e, et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le tems des
« prescriptions ne sont que des lois arbitraires, car la nature ne
« fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle difïé« remment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« sc régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. Il y en a où elles ont été
« réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.e question, que la Cour de cassation a
�3*2
'3
(
)
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T o u lo u se , et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons donc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i , en semblable cas , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a lo i, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N .
f
L a tierce opposition des appelons est-elle recevable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il ne suffît
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie néces« saire dans le procès jugé. »
y
Les Chouvenc étaient - ils donc parties nécessaires dans le
procès d ’entre les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’a
gissait-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers. A c t io fam iliœ erciscundœ solis liœredibus com
patit.
Les questions d’un partage sont tellement étrangères à tous
autres, que qnand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en ’partage est-elle , par sa seule définition , exclusive de
toule admission étrangère : A c t io fam iliœ erciscundœ est actio
a v ilis qiuî cohccredes i il T E R s e agunt de com m uai hœreditate
dii>idundd.
Jusque-la un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise
�( h )
cepit à ma/cz Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
011 leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A insi,
dit Rodier, un créancier, un acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u ff. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent le droit d’interjeter appel, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S i emptor de proprietale victus e s t , eo cessa n te, auctor ejus
appellare poterit y item si auctor egerit et rictus s i t , non est
deneganda emptori appellandi fa cilita s. . . . I d que ità con stitulum est in personâ créditons. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur; et quand celui-ci a lui- même interjeté a p p e l, la loi,
toujouis juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès , si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Qui/i etiam si auctor appellauerit , deindà in causai
dejénsionc suspectas visus e st, pennde defensio causa; emptori
committenda est, atquc si ipse appellassel. I j . ead.
L e Code civil s’est conformé ¿1 ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère, après le partage con
sommé', il n’admet les créanc iers qu’à inlcrvcnirà leurs fr a is ,
�y > j(
)
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice d’une opposition par eux formée (art. 882).
II y a plus ; car si , par l’efl’et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envahi tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer, l ’art.
lui répondrait « que chaque
'5
883
« cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement a tous
ce les effets compris en son lut, ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin ont, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties ne'cessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et 11e peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en p artage, de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et 011 n’eu citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tons les
livres, nous 11e puiserons que dans des sources indubitables,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien é*é s:iisie.
i.° M .r Cochin , en ses notes alphabétiques, tom.
dit ; « jugé par arrêt du
5, pag, 627,
3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur, assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
2.0
M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Gonflans était en procès
�\\*
«
«
«
«
«
«
«
avec un seigneur voisin pour mouvance de
. . tuie venait
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l ’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y forma tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pas intervenu : par arrêt du 3 i
mai j 742, il fut déclaré non recevable dans sa tierce opposition. »
Par le z .e arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur appel, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l ’arrêt par son vendeur , qu’en cette
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1760 , il fut déclaré non recevable. »
.° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un a rr êt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f . , le s.r Forestier se fit envoyer en
3
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
3
défaut du janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition, et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art.
5 et
11 du titre 27 de l ’ordon-
35
« nance de 1667, ct
1>er
•*tre
. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur G o d e t, comme créancier de L essa rt, était à cet égird
« son ayant cause. . . . que Lessart a été appelé. . . . q u e Godet,
« en qualité de son ayant cause , n ' a ur a it p û être recevable à
« attaquer ce j u g e m e n t , q u ’a ut a n t qu’il eût élé juslilié que Les
te sart aurait été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C an, ei \ admettant la tierce opposiliondu cit. Godet,
« ont violé l ’art.
5 de
l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chose ju g é e , et ont contrevenu formellement à l ’art. i . cr du
titre
�2>7Y
C *7 )
a titre 35, quï ne permet de rétracter, autrement que par requête
« civile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
a qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
V oilà donc la pleine confirmation de la loi 4 ff. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel,.aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier l'essortj par la requete civile , s îl
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts ne sont dans
l’espèce d’un procès de succession. Solis hœredibus cornpelit.
D eux autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tierces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793 ; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation ? quand ils l’en ont vu sortir ; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, 11’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d etre
condamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
�A "
!
C 18)
encore, d’exiger en règle générale, que tout'cohéritier d6Î sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derecheicher ses droits , cVstà-dirè fût leiiü de connaître les forces de la succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions èt
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues?
•■
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M olin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour?
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudençe
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouveric
à pénétrer, par une voie d’intrusion , dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on a annuité deux testamens : J e rn'y
op p o se; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos»
testainens, vos conttats de mariage, tout ce qui s’est pa^sé dans
votre maison depuis 1735 jusqu’en 1793. Vos cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugée avec eux , et
c’est moi seul qui veux faire r é g le r, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent} dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce système des Chouvcnc, qui cependant est toute la base
du procès a c tu e l, 11e révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ée et remise en litige doit êtro
rejugée.
Théièse Molin s’e'tait pourvue en 1783, contre une renoncià-
�75
C *9 )
tîon de i o i Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à cette durée, à la seule exception de.
3
L’action hypothécaire.
- L e s Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r, ont été séduits,
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l un de
$es articles; jusques là , la Cour d’appel ne s’était pas prononcéef
eton trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oublies.
Mais quand cela serait autrement, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose ju g é e ,
même des questions nées en 1783 , dans un parlement étranger f
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait I4
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mai^
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brusr
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans de§
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marchq
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de/lui, par le pouvoir que lege rcgid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d'après un auteur latin , vaut mieux que cc qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valere loges quee moribus comprobalœ surit,
(¡nam quœ scripto co n sta n t, v ér i té bien plus m a r q u é e encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�\
,
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est p is seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , Justitice habitus
practicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impérative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables. les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
-à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciæ ,
probatis his quæ in oppido, frequenter in eodem controversice
g eh ere, servata surit, causa cognilâ statuit. L . 1. cod. quæ s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant (porte un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ), que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts sem blables, le parlement de Tou« louse a ju g é y etc.» (Sirey , page 809).
2.0
Dans une autre cause, du floréal nn 12, la Cour de cas
sation n dit:« Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre prê
te sens, et 20 ans entre absens ; cependant, d'après la furispru-
5
« dence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêts ,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
« possession immémoriale, et que c'est ainsi q u 'il a entendu la,
« lo i , etc. casse et aimulie, etc. * (Bulletin, n.° 52).
�M
( \
( 21 ) ' 7
3.° Un arrêt du
du même mois a jugé de m êm e, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( S ir e y , p. 267).
■Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.0 elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait.
n’y a donc
11
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité j
ce n’est jamais qu’ une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
I l est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3
- .° Si on suppose qu’elle a approuvé les testamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre une destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m de/uncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a souvent ju gé, et notamment les
a i thermidor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1735 a été expédié par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C était donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r ecu eilli, 11e l’était pas. O r, non videntur qui errant consentire , et la prescription 11e court que du jour de la découverte
de la vérité.
5
.° Thérèse M olin, née en 1733, avait d e u x a n s nu décès de sa
mere , et dix ans au décès de son père en 1743. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans j car elle était née au mois de février
�*
-
(«)f
1.718. L e père levait chargée de r^zV <r/ administrer conjointetementavec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc.
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont,
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle,
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et inère, dont jo u issa it Marie M olin,
,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta->
ble depuis 174.3, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison, Le frère n’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fat traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testamens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.;
•
,
Q r, le parlement de-Toulouse n’a jamais hésité d’admettrea i
pareil cas le. renonçant non visis tiibnlis, à se pourvoir pen-j
dant trente ans. Q u ’on consulte May nard , liv. 2 j chap, 99 et
100^ DoJive , liv. 4 , chap. 16; Catelan, liv...<8 ; Bretonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les auteurs de c i
parlement , ou ceux qui mentionnent sa jurisprudence , on ne
trouvera nulle part q u e .l’art. i
de l ’ordonnance de i539 ait
34
qté jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Pari^, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-teins, comme le parlement de Toulouse a toujours jugé
Les auteurs du tems même de cette ordonnance , notamment
M .r D u v a l, de reùus dubiis , enseignaient qu’il ju’y a contre les
qctions^en nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
le parlement de Paris changea sa jurisprudence?, mais enfin ilia
changea de nouveau après l’ordonuance de 1667 ; et il a inva«
riablement jugé depuis que l’art. 1ÎJ4 de l’qvdonnanee de 1089
ne s ’ap p l i quai t q u’aux actions rescisoires.
Cette jurisprudence constante s’est maintenue jusqu’au Code
civil. On a vu encore, dans les discussions sur ce Code, les ellbrts
des sections réunies de la Coi^r d ’appel de Paris, pom luire muin-
�-b it
■'
• .... . • : .
tenir l ’action de trente a n s , et on n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entré les
Champoinier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en floréal an 5 , à la vérité il changea de .jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait'élé recevable pendant trente ans a se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
« Attendu que l ’art. i i de l ’ordonnance de i g , de'clare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra
it teurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
3
53
•« rendu, et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
.« personne qui administrait ses biens, présente un avantage
« indirect :7
«
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
•« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
« ses intérêts ;
34
« Attendu que l ’art. i
de l ’ordonnance de 1ÎS39 qui restreint
« le.délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres t
« casse et annulle , etc. »
Il est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r 11e mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de Riom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c ’est-àdire, depuis le Code c iv il, et par induction de l ’article 47λ. On
verrait même , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jug^
�( H >
encore que l ’action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse , il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix
a n s , avant le Code civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de P a r is , comme la Cour de casation elle-même.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L ’action de Catherine M olin est-elle ’p rescrite par trente ans ,
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
"
Les Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c iv il, art. 2243 se contente de
3
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. E n fin , L apeyrère , bien loin de vouloir la presci’iption, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfa'ns sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitime ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « idem , en matière départage»;
25
tet il se fonde sur Coquille , en la question
9.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs antres, c’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l ’auraient
trouvée.
•
r
Dolive en fait une question expresse au chap. i du liv.
3
5,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
a l’hérédité, cette prescription ne court pas contre e u x , en cette
« rencontre,
�3
5
% $
( ï )
« rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d éfu n t, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i o et 26 août i
.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap.
;Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, tom. 2, p. i ;
et L ebru n, liv. , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice presci’iraient 1 observa
63
3
636
36
33
tion, si les auteurs ne l’enseignaient pas.
,
L a Cour d’appel vient très-récemment de prononcer, dans
3
un arrêt du i3 ventôse an i , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Veschambe ,
a dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels , qui
ad hœreditatem veniunt ; et comme les portions advenues à
Calherlne Molin par le décès de scs sœurs , se sont accrues à
la-sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le. mort
jd is it le v if y Catherine Molin a été, dès cette époque, proD
�T
.
-
C 26)
.
priétaire d’une quotité plus con sid érable, et n’en a pas plu*
perdu une fraction que la totalité.
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
l e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testament, dit R ic a r d , est un acte dont tonte la valeur
k
est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« fermes. »
E n e l l e t , dans cet acte si im p o r ta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.®
il est dit fa it et récité en la maison de Pierre M alin ; maià rien
ne constate que la lecture ait élé faite à la testatrice.Cependant
la loi l’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a dicté , pour q u ’il soit certaia
que ce sont là ses véritables intentions;
2.° Il n ’e6t fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice
ille
de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 173 5 dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lec« t u r e , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’ il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
M i i s , disent les C h ouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l’ordoninnee de 1735 : cela est vrai.
Mais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« E t en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t mention de la réquisition par eux
�b i> 1 '
7
( 2 ) _
a faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
65
ordonnance de Blois , art. i .
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de i y .
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14 ,
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur A rto is ,
35
art. 74 ).
On cile souvent R i c a r d , comme ayant rapporté un arrêt de i a
validant un testament où i l était dit : « Lequel n’a pu signer ,
65
« interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence^que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
5
Aussi Ricard , n.° i 26 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé, ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaii’e , dit Ricard , au n.° i
, ne doit
« contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
568
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart. un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé uu
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n'avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce eticjuis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal , et
le a pluviôse an 7 , entre les héritiers V a c h i e r , d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur déD 2
3
�î
( 28 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas change', et la cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
Les Chouvenc se sont imaginé que les ordonnances d’Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité Dolive dit que de son tems on n’était pas rigou
reux sur les signatures de testamens , et que môme on n’exan iuait pas si le testateur avait signé ; mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. Furgole dit au contraire
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit p u b lic , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
la preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Chouvenc
se sont efforcés de persuader qu'ille veut dire illitéré , puis
illitéré veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours ime autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i
défend aux notaires d user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pus à l’essence de l’acte , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
685
Yinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, qui sont testatio m en tis, il faut écrire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�9
.
( a )
viations. Cœlerum litteris iisque usilatis et legîbilibus scribendum esse p la c u it, non sig n is, obscurisve n o tis, I. 6 , g. ult.
de bon. poss.
L e mot illité r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’Académie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n’y a pas dans le testament illité r é , il y a M e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot bizarre, une déclaration de la testatrice, qu’elle n’a
pu ou su signer. Allons plus loin même , le mot illitéré ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I ON .
Q u elle est la nature de la substitution,du testament de iy35 ?
a-t-elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’eíFet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par une expression inlidelle de l ’expédition, qu’ils a vaient d’abord
produite, de ce testament.
Les héritiers institués, disaient ils, étaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de rendre la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution , dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
sub stitu tu s su b stituto est substitutus in stitu to , Marie M o l i n a
recueilli l’hérédité directement des doux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l ’extrait vidimé du testament de
�3
( o )
Ï735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p osé, voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
. L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus, qui a fait un traité sur les fîdéicornmis, le définit
ainsi. Fiduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
aherius gratid institutus , eidem restituere hereditatem ,p o st
diem certain vel incertain , rogatus proponitur.
c< Ces substitutions, disent Henrys et Brelonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é c rit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l ’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerentur.........
« Quoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
« liberté, et n’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res« titulion. . . .
« O11 doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et ne l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
a l’a instituée que par In nécessité de leur bas Age, non ut filiis
jninoribus obesset , sed poilus ut eis consuleret. » ( henr. t.
X.er } p.
, t. , p. 69 ).
736 3
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du liduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�& (h \
( 8 0
1.° Catherine Ferrapie avait tin fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2.° Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédilé ù son
fils, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d’aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grévé de fidéicommis a le droit de retenir la quarte
§.5
trébellianique ( 1. i . er
, ad treb. ) ;
°. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
3
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut pa\entibus
obsequerentur. A cela p rès, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eut été vivante , sed potius ut eis consuleret.
A insi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-mèine de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u 'il vînt à mourir sans
pouvoir disposer, ou sans avoir recu eilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non exliterit hceres J iliu s ,
aut si impubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pis mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de dro't écrit le mineur avait testamenti fa ctio n cm
aussilot qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , ne
cil 1731 , eta;t pu ère en *74^ > et il n ’est décédé qu’en * ®Si ce moyeu n’était pas péremptoire , on opposerait aux
74
/
�52
C
)
Chonvcnc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l’enseignent les institutes , is subslituere potest liberis
impuberibus q u o s i n p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus cetatis sint
in quâ ip si testam entum facere non possunt.
Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
encore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règle substilulus substituto n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad 1. 41. de vul. et pup. sub.)
Ainsi le testament de 1735 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses soeurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son chef recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e teslament de 1743 e st-il n u l ?
s
Il
est évidemment-nul, mais cette nullité ne change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; el on ne s’en occupe
que parce qu’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin père a institué son fils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses eufans héritiers, ou les
exhe'réder nominativement, aut hceredem in stitu â t, aut exhœ. redem nominatim fa c ia t , alioquin inutiliter testabitur.
Cette disposition a été répétée dans l’art. o de l’ordonnance
de 1735 , qui dit que, dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers, au moins eu ce que
le leslateur leur donnera.
5
Mais l’héritier, institué par le testament de 1743 , étant décédé
ab in testa t, il importe peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
�33
C
)
^
ou ju r e s u o , à la succession de leur père, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
Les Chouvenc terminent l e u r mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession M olin; 2.0 qu’on accorde
à Marie Molin leur venderesse , les pi*élèvemens qurelle aurait a
faire, notamment trois qu’ils indiquent ; B.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait droit , en ordonnant que tous les bienS seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugement dont est appel.
A lo r s , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore a cette époque qu’ils au„ ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lie u , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans celte cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
Joule de papiers de la famille Molin , qu’ ils ne^pouvaient tenir
que*de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur celle famille avec
ta ni de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
st remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en cornmunicat ion
E
�34
(
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siége principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation- des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d’un partage, avec l’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et reformation.
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E ? avoué .
)WA^V'^VW 1 V W V \,W W \W \A ^ ,V W V \'W W ^
A RIOM,
De l ’imprimerie du Palais, chez J . C . S A L L E S . ( A n X I I I ) .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1778-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1611
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1610
BCU_Factums_G1612
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53285/BCU_Factums_G1611.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53284/BCU_Factums_G1610.pdf
0cf8548632bcdfb2c879c9e747290589
PDF Text
Text
/Vî? / ft/- /fsi^/v/^cy
- -»
A JUGER,
D ’A P R È S
CINQ
A U D IE N C E S ,
COUR
d ’a p p e l
SÉANT
A RIOM.
POUR
l ere. SECTION.
J e a n , et autre J e a n C H O U V E N C , père et fils,
appelans, demandeurs en tierce-opposition ;
CONTRE
C a t h e r i n e M O L I N , et les mariés VEND R I È S et B O R N E intimés, défendeurs.
S i les appelans peuvent être évincés de tout ou de
partie de la métairie du Villars , acquise par Chouvenc,
père, de Marie M o lin , le 14 août 1778?
Cette question principale amène celles-ci :
E n l a f o r m e , l’appel est-il périmé ? Dans ce cas,
la péremption n’a-t-elle pas été couverte ?
A u f o n d , l ’ac ti on des i nt im és n e d o i t - e l l e pas être
A
�écartée par la prescription de dix ans entre présens?
Ne peut-on pas opposer utilement la prescription de
trente ans à Catherine Molin ?
Respectivement à la femme Vendriès, la tierce-oppo
sition a - 1 - elle été portéç, régulièrement en la cour ?
a-t-elle été formée dans un délai utile ? a-t-elle dû être
précédée de la voie de conciliation? Les Chouvenc peu
vent-ils être considérés comme ayans cause de la Croizière ; e t , dans ce cas, sont-ils non-recevables dans cette
tierce - opposition ? S’ils sont recevables , cette tierceopposition est-elle fondée ? Mais la femme Vendriès
n’est-elle pas irrécevable à réclamer contre la cession
qu’elle a faite de tous ses droits ?
Subsidiairement, sous le rappo.it de l’une et de l’autre
des intimées , d’un côté , ne sont-elles pas garantes de
leur demande? d’un autre, le testament de Catherine
Ferrapie est-il n u l? Cette nullité, fût-elle réelle, peu (elle etre valablement opposée ? Que ce testament ren
ferme une substitution fiduciaire ou iidéicommissaire,
Marie M o lin , venderesse, n’en a - t - e l l e pas recueilli
l’effet ?
Encore subsidiairement, bien qu’on restreignit Marie
Molin , ou Chouvenc , son acquéreur , au tiers des biens ,
n’est-il pas évident que Chouvenc ne seroit pas rempli
de ce tiers ? Dans ce doute, ne seroit-il pas indispen
sable d’ordonner une estimation préalable de tous les
biens, et d’accorder compulsoire , afin d’obtenir tous
extraits d’actes propres à établir les prélèvemens dûs à
Marie Molin ?
Toutes ces questions vont composer cinq parties.
�(3)
-"
P
r
e
m
i
è
r
e
p
a
Péremption.
r
t
;t ■■j
i
e
.
L e jugement dont est appel, rendu par forclusion le
19 prairial an 2 , ne comprend que Chouvenc pèi’e avec
quelques autres cocondamnés qui ont transigé sur l’appel.
L ’acte de signification de c e jugement à domicile , du
27 messidor a n 2, a etc fait seulement à la requête de
Vendriès comme mari, quoique Jeanne Borne, sa femme,
et Catherine M olin, fussent en qualité dans ce jugement.
Jusqu’au 9 vendémiaire an 8 , on ne voit pas qu’il y ait
eu aucun tribunal saisi de l’appel, avec toutes les parties
qui figuroient dans le jugement: Jeanne Borne et Cathe
rine Molin n’ont jamais été en qualité dans les différens
actes sur l’appel. Chouvenc fils, étranger au jugement,
n’a été en qualité que pour la première fois dans l’assi
gnation du 9 vendémiaire an 8. L es.céd ulc, procès
verbal de non conciliation et assignation , des 6 pluviôse,
21 ventôse et 13 germinal an 9 , qui ont eu lieu à la
requête de Catherine Molin et de Jeanne Borne , sans
accession de Vendriès, d’avec qui sa femme se dit séparée
quant aux biens, prouvent qu’il n’y a pas eu, jusqu’à cette
époque, de péremption, et que même plusieurs des par
ties qui avoient fait appel s’étoient désunies et avoient
fait des traités. Il 11’y a pas eu péremption, parce que la
péremption n’atteint que les parties qui sont en instance,
et lorsqu’il 11’y a ni mutation dans les personnes, ni chan
gement dans l’état de l’aflaire. O r , i°. Catherine Molin
A 2
�(4)
et Jeanne Borne n’ont jamais été en qualité sur l’appel
avant le 9 Vendémiaire an $ ; n°. d’un c ô té , le iils Cliouvenc , donataire de son père, est devenu un nouveau per
sonnage dans l’instance; d’un autre, u supposer que l’ins
tance fût liée avec toutes les parties , comme elle l’étoit
par l’intérêt réciproque émanant du jugement dont est
appel, puisque l’éviction n’étoit que conditionnelle, si
les objets des dernières ventes ne suflisoient pas pour
remplir les intimées, cette liaison,et de personnes,et d’in
térêts, a cessé par des arrangemens partiels avec plusieurs
des condamnés, ainsi qu’il est constaté par les cédule,
procès verbal et assignation, des 6 pluviôse, 21 ventôsô
et 13 germinal an 9. Outre que ce changement appor-4
toit une novation dans l’état de la procédure, il s’agissoit
de prendre de nouvelles conclusions à raison de la dis-*
jonction de diverses parties colitigantes: il n’y avoitdonc
pas, de l’aveu même des intimées, péremption en l’an 9.
A u reste , cette péremption n’eût pas été encouruede
plein droit. Il est vrai que le parlement de Toulouse différoit,danssa jurisprudence, decelui deParis. Danscelui-ci,
il falloit demander cette péremption , au lieu q u e , dans
celui-là , le seul laps de temps couru suilisoit pour asseoir
cette espèce de prescription : cependant, c’étoit contrairé
à l’esprit de la loi Properandurn, et à la doctrine des
plus célèbres jurisconsultes. La péremption , sans doute,
est une peine résultant d’une négligence. Pour avoir en
couru cette peine, il faut bien que la négligence soitconstmte , et elle ne peut l’être que par une déclaration judi
ciaire. C’est ce qui résulte des expressions de la loi P o st
liteni contastatarh j d’où conclut M . Bonnament, nou
�(5)
vel auteur provençal, maxim. 27, que la péremption
n’a pas lieu pour les sentences par défaut ou forcluclusion : c’est de cette nature qu’est le jugement dont est
appel. Ce môme jurisconsulte, tom. 1 , max. 24 , n°. 8,
enseigne que la prescription ne peut être suppléée par le
ju g e , qu’elle doit être proposée par la partie qui veut
fe’en aider, vu que la prescription n’étant pas meri j u n s ,
sed con trà , partim juris , partim f a c t i f \e juge, en la
suppléant, suppléeroit au fait qui doit toujours être avoué
par les parties.
D ic i potest, enseigne Faber, nullam reo imputandam
négligentiam, quamdiii nullam acior diligentiam adhib u it.........actorum enirn est lites perseqni , reoruni
fu g e r e . . . . potuerint milita accidere quœ ju e r in t ne
hodiè Us tractari passif.
Ici, nulle poursuite avant l’an 9 , sur l’appel de Cliouv e n c , de la part des intimées ; et il est a rr iv é , entre
toutes les parties comprises dans le jugement, des con
ventions qui ont changé l’état du litige.
M . D u v a l, 1). reb. dub. , tract. 1 5 , veut que le juge
prononce sur le.fait; et Mornac , qui pense comme le
précédent, dont il fait l’éloge, rapporte un arrêt du 3 mai
1618 , lors duquel M. le président dit qu’il n’y avoit pas
de péremption si personcirum mutatro intercesserit.
Dans l’espèce, il y a eu nécessairement changement de
personnes par les traités faits entre plusieurs des con
damnés et les intimées sur les objets corrélatifs avec les
Chnn venc.
Il laut conclure que le parlement de Paris avoit mieux
„.saisi le véritable sens de la loi Properandum , en subor
�C6 )
donnant la peine de la prescription à la vérification et à la
prononciation du fait de négligence, s u p e r l i t e m c o n T E S T A T A M ; et on doit regarder comme déclaration d’un
droit ancien dans la diversité de jurisprudence des deux
parlemens de Pax*is et de Toulouse, la disposition du
Code c iv i l , qui porte, art. 2223, « que les juges ne peu« vent pas suppléer d’office le moyen résultant de la
« prescription. »
Il n’y a donc jamais e u , ni de fait, ni de droit, aucune
péremption; mais existât-elle, elle a été couverte par
la cédule du 6 pluviôse an 9 , par le procès verbal de non
conciliation, du 21 ventôse, et par l’assignation du 13 ger
minal de la même année ; par l’acte de bail de copie du
jugement dont est appel, contenant sommation , de la
part des intimées , de signifier causes et griefs ; par leur
réponse à ces griefs ; par les conclusions au fon d , prises
par Vendriès dans sa requête d’intervention, et par-le
jugement qui a reçu cette intervention. L ’exception de
péremption n’a jamais été considérée comme étant de
droit public; il est libre aux parties d’y renoncer. C’est ce
qu’enseignent M . de la Moignon , pag. 58 , raax. 224;
Despeysses, tom. 2, pag. 538; Graverol sur LarocheF la v in , pag. 234 ; L a n g e , tom. 1, pag. 626, 627 ; le jour
naliste du palais de Toulouse, qui rapporte un arrêt de
cette cour, du 20 févi’ier 1727 ; Rodier, pag. 259; enfin
Vodel sur Catclan, tom. 2, 'pag; 197 , d’après un arrêt
du 13 septembre 1691.
:
...
-
�*bzs>
(7 )
D e u x i è m e
p a r t i e
.
Prescription de d ix ans entre présens.
~ '« Celai qui acquiert de bonne fo i, et par juste titre,
« un immeuble, en prescrit la propriété par clix ans. »
( Art. 2265 du Code civil. )
« La bonne foi est toujours présumée ; et c’est à celui
« qui allègue la mauvaise loi à la prouver. » ( Art. 2268. )
« Il suffit que la bonne foi ait existé au moment de
« l’acquisition. » ( Art. 2269. )
« Les prescriptions commencée^ à l’époque de la pu« blication du présent titre, seront, réglées conformément
« aux lois anciennes. » (A rt. 2281.)
^Ce dernier article n’est cité que pour rappeler que la
loi nouvelle se réfère aux anciennes sur les difficultés
résultantes de la prescription.
Les trois autres articles ne peuvent pas présenter de
question de rétroactivité, parce qu’ils ne sont qu’une
déclaration du droit ancien, établi et expliqué par les
lois romaines ; mais ils prémunissent contre tout ce qui
pouvoit contrarier le caractère de bonne foi.
Ces articles ne sont que la répétition des articles 46 ,
49 et 5o du projet du Code. 11 n’est point de tribunal,
ni d’autorité, qui ait proposé la moindre observation ;
et après que M . le conseiller d’état Bigot-Préameneu
et M . l’orateur tribun Goupil-Préfeln, se sont réunis,
comme l’avoient fait les empereurs romains, pour dis
tinguer les possesseurs avec litre et bonnç foi, de ceux
�(8 )
qui manquoîent des d eu x, ou de l’un ou de l’autre, se
sont accordés, autant pour la paix des familles que pour
l’intérêt de l’agriculture , à poser pour principe que
l’acquéreur de bonne fojL et par juste titre ne doit pas
être exposé à l’ester dans une longue incertitude, pour
se livrer avec confiance aux constructions, et aux amélio
rations, par défrichement ou dessèchement.
« Le titre est juste, dit l’orateur tribun, à l’égard de
« l’acquéreur, quoiqu’il puisse ne l’être pas de la part
« du vendeur; et la bonne ou mauvaise foi de celui-ci
cc ne peut être d’aucune considération relativement à
« l’acquéreur de bonne foi ; et c’est à celui qui revendique
« à prouver la mauvaise foi. »
Chouvenc a eu juste titre et bonne foi, le 14 août 1778,
par l’acquisition qu’il a faite de Marie M olin , qui étoijt
notoirement reconnue comme possédant l’universalité des
biens délaissés par Pierre Molin et Catherine Ferrapie,
ses père et mère.
Mais, d it - o n , i°. Marie Molin ne pouvoit vendre
que sa portion, et nullement celle de ses cohéritiers ;
20. d’après la Novelle 119 , chap. 7 , ses cohéritiers ayant
ignoré Ja vente, ont eu trente ans pour revendiquer ;
30. le droit romain n’est qu’une raison écrite; 40. la
jurisprudence constante du parlement de Toulouse, at
testée par Boutaric et par Serres, n’admettent pas cette
prescription de dix ans ; 5°. aujourd’hui cette jurispru
dence doit tenir lieu de loi.
RÉrONSE.
�(9 )
RÉPONSE.
Premièrement, Marie Molin ne pouvoit pas sans
doute vendre la portion de ses cohéritiers ; et il est éga
lement certain que ces cohéritiers avoient trente ans utiles,
du jour de l’ouverture de la succession, pour l’éclaincr
contre toute vente faite par l’un d’eux : mais la question
concerne l’acquéreur. O r , que Marie Molin fut consi
dérée comme possesseur ou vendeur de mauvaise foi, res
pectivement à la vente des portions d’autrui, Chouvenc,
second possesseur, seroit dans le cas de la Novelle :
habens titulum et bonam fidem à malœ fîdei possessore
prœscribit inter pressentes spatio decem annorum.
Si Chouvenc étoit lui-même en mauvaise foi, ce seroit
aux intimées à le prouver; mais il étoit dans un bonne
foi évidente ; il avoit vu constamment Marie M o lin ,
'Chambarlhac et Dejoux, ses deux premiers maris, jouix-,
au su et en présence des sœurs et frère, de l’universa
lité des biens laissés par les père et mère communs, de
puis 1745, c’est-à-dire, depuis trente-trois ans : le 14 août
1778 , il avoit lieu de croire que Marie Molin étoit
libérée par quittance ou par prescription de la part de
ses cohéritiers. Cette croyance, qui constitue la bonne foi
de cet acquéreur, n’est-elle pas pleinement justifiée par
le seul fait de la possession paisible de Marie Molin ,
pendant plus de trente ans avant le contrat de vente
du 14 août 1778 ?
Catherine Ferrapie, mère des enfans Molin , décédée
le 28 mars 1735, avoit laissé le domaine du Villars, des
B
�t’
>4
( 10 )
biitimens et jardin à Tence, et divers héritages détachés.
Pierre M olin, leur père, décédé le 20 mars 1745, a voit
en copropriété, alors indivise avec ses frères et ses oncle
et tante , le domaine de la Bruirette, et une maison et
jardin à Tence.
D u mariage desdits Molin etFerrapie, étoient nés six
enfans : i° . Marie M olin , venderesse, née le 2 février
1718, pubère en 1730, majeure à l’époque du décès de
son p è re , jouissant h cette époque de cette métairie par
elle vendue en 17 78 , et mariée pour la première fois,
en février 175 3, à Chambarlliac ; 20. Catherine, Tune
des intimées, née le 24 janvier 1720, pubère en 1732, et
majeure avant la mort de son père, décédé le 20 mars
1746 : elle avoit laissé jouir paisiblement sa sœur aînée et
ses deux maris pendant trente-trois ans; 30. M a r g u e r i t e ,
décédée le 17 décembre 1740, conséquemment avant le
père , et dont personne n’avoit réclamé la portion ;
40. Jeanne, née le 7 février 1725, décédée le 10 juin
1778, et qui n’avoit aucunement réclamé; 5°. Pierre, né
le 2 mai 17 3 1, mort le 3 novembre 1748 ; 6°. Thérèse,
née le 5 avril 1733, mariée le 5 avril iy 55 avec Borne,
mère de la femme Vendriès, autre intimée : Thérèse
Molin étoit veuve depuis le 13 mai 1768, et domiciliée,
depuis cette époque, à Tence, lieu de sa naissance.
Si Chouvenc avoit pu concevoir quelque inquiétude
respectivement à ces trois derniers enfans , n’é toi t-il pas
parfaitement rassuré relativement aux trois autres, d’au
tant que l’objet de son acquisition ne formoit pas le tiers
des biens des père et mère ?
En falloit-il donc autant pour établir la sécurité , la
bonne foi de cet acquéreur ?
�2> Z 1
( 11 )
Secondement, peut-on raisonnablement supposer dans
Catherine et Thérèse Molin l’ignorance de la vente faite
par leur sœur ainée , en 1778 , à Chouvenc ? S i vcrus
dominus hune possiderc sciait et ipsum non inquietavit.
Sin autern ignoravit, tum non prœscribit n isi spaiio
trigenta annorinn.
Admettons, contre la vérité , que Chouvenc eût cru
acheter seulement une partie du domaine du Villars, d’un
possesseur de mauvaise f o i , Catherine Molin et ses sœurs,
majeures depuis long-temps, et cohabitant , selon ellesmêmes , avec leur sœur aînée et leur beau-frère , q u i ,
l’une majeure et l’autre pubère , au décès de leur p è r e ,
a voient vu Chambarlhac et Dejoux , maris de Marie
Molin , jouir de ce domaine , pourroient-elles être pré
sumées , vivant dans la môme commune , bien p lu s ,
sous le même toit , n’avoir pas su que la jouissance de
ce domaine avoit passé de la veuve Dejoux à Chouvenc
en 1778 ? L e contrat de vente authentique n’a-t-il pas
reçu sa publicité par le contrôle et l’insinuation ? Peuton croire qu’elles ne s’étoient pas aperçues qu’il ne venoit
plus dans la maison, de métayer du Villars, qu’il n’y avoit
plus de ce domaine, ni quart, ni pittance, ni volailles,
ni corvées? Si elles se fussent crues copropriétaires ,
n'auroient-elles pas inquiété cet acquéreur. Ce silence
ne p r o u v e - t-il pas qu’elles ont sanctionné la venle ;
qu’en tout événement elles ont adopté ce que la règle , en
matière de partage , fait pratiquer , de faire entrer dans
le lot du cohéritier vendeur ce qu’il a aliéné.
En troisième lieu , de quelle utilité peut être dans la
cause ce qu’ont opoose les intimés sur l’eiïet du droit
D 2
�I
(12)
romain en France? Tout ce qu’on pourroit répondre
équivaudroit-il aux dispositions de lu cour de cassation ,
qui a souvent jms pour base d’annullation de jugemens,
diverses contraventions aux lois romaines ?
4°. C’est bien juger légèrement de la jurisprudence
d’une c o u r, de ne pas saisir l’ensemble des opinions de
ses jurisconsultes. A la vérité , Serres, d’après Boutaric ,
qui n’a fait à ce dernier que quelqu’augmenlation , atteste
que dans les pays de droit écrit on ne peut acquérir les
immeubles , non plus que les meubles , que par une
prescription de trente ans , qui est appelée , en d r o it,
longissimî te/nporis. Boutaric se demande par quelle
bizarrerie la prescription de dix ans se trouve adoptée
dans les pays coutuiniers , et l’ejetée dans les pays de
droit écrit : mais , continue-t-il, « c’est chose dont il est
a assez difficile de rendre raison, si on rie veut dire qu’en
« cela les pays coutumiers et les pays du droit écrit ont
« cherché à se conformer aux principes du droit romain ,
« quoiqu’ils s’en soient également éloignés les uns et les
« autres. » 11 accuse les auteurs de la coutume de Paris
de n’avoir pas réiléchi que la Novelle 119 exige que
celui qui allègue la prescription, ait acquis d’un autre qui
fût aussi dans la bonne f o i , du moins dans le cas où le
véritable propriétaire a ignoré l’aliénation et le droit
qu’il avoit en la chose aliénée ; et il accuse encore les
jurisconsultes des pays de droit écrit cc de n’avoir pas
« réiléchi que la Novelle ne fait d elà connoissance du
« propriétaire une condition pour la prescription de dix
« ou de vingt ans, que lorsque celui qui veut prescrire
c ou qui allégué la prescription a acquis d’un possesseur
�)
( *3 )
de mauvaise foi-, que l’esprit de la Novelle est celui-là,
que l’ignorance où est le propriétaire et de l’aliénation
et de son droit, est un obstacle à la prescription de dix
ou de vingt ans, lors seulement que celui qui allègue
ou qui oppose la prescription n’a pas acquis d’un possesseur de bonne foi , et que la mauvaise foi de celui
qui a aliéné n’est aussi un obstacle à la même prescription, que lorsque le propriétaire n’a pas eu connoissance de l’aliénation et de son droit sur la chose
aliénée. »
...
Maintenant, dans tous les systèmes, quelle application
eût faite Boutaric dans cette espèce , où Catherine et
Thérèse M olin, copropriétaires du domaine du Villars,
majeures depuis long-temps, habitant dans ila même com
mune, bien plus, réputées, selon elles-mêmes, jouissant
par indivis, par une cohabitation avec f Marie M o lin ,
n’ont pu ignorer la vente? Bouta i’ic n’eût-il pas pensé
que dans celte position où étoient l’acquéreur et la venderesse, ni l’un ni l’autre n’ont pu avoir de mauvaise foi ?
A in s i, d’après ces deux jurisconsultes, Boutaric et
Serres, il seroit contraire à leur doctrine, et ce seroit
faire injure à la loi romaine et à la raison qui en est la
base, de confondre les deux prescriptions langi et longissim i iem poris, le possesseur avec titre et bonne foi,
d’avec celui qui n’a ni l’un ni l’autre.
A u surplus, ces deux professeurs ne rapportent aucun
arrêt de Toulouse, parce que sans doute il ne s’est point
présenté d’espèce semblable à celle-ci, ou, s’il y en a eu,
le premier propriétaire ou l'acquéreur éloit de m a u v a i s e
foi, ou le propriétaire évincé n’avoit pas, ou pouvoit
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
�C
!4 )
être présumé n’avoir pas connoissance de l’aliénation.
Enfin, ces deux professeurs, dont l’avis ne pourroit
équivaloir à une jurisprudence constante, sont contrariés
par la majorité des auteurs qui ont traité cette question
pour le droit écrit.
L ’auteur des Remarques du droit français, un des plus
anciens du parlement de Toulouse, qui vivoit en i5oo,
et dont l’ouvrage a été imprimé en 1 5 14, établit, pag. 457,
pour dix-liuitième maxime, qu’en la prescription de dix
ans inter prœsentes.... Ju re ciçili suffîcere bonam jîdem
Jouisse in initio contractas ; ou bien : Tempore traditio n is, s i post contractum res empta aut permulata
tradita fiie r it.
Guypape, du parlement du Dauphiné, cité par Serres,
Guypape, auteur plus ancien que le précédent, d it,
qu. 416, que « la prescription de dix ans entre présens....
« pour les immeubles possédés avec titre et avec bonne
« foi, est en partie favorable et en partie odieuse : par
« cette considération, on prend un milieu pour elle. La
« contestation en cause l’interrompt, et non le simple
« exploit libellé. »
D u perrier, du parlement de P roven ce, admet celte
espèce de prescription; mais deux choses l’ont, d i t - i l ,
rendu presqu’inutile, i°. dans le cas de la nullité de la
vente; 20. lorsque la mauvaise foi du vendeur passe à la
p er s o nne de l’uclieteur, si ce n'est que le propriétaire
sache la vente et ne s'en plaigne pas. Il ajoute que p r e s
q u e J A M A I S la prescription de dix ou de vingt ans 11e
suffit au possesseur contre la revendication.
Son annotateur en induit que cette prescription est de-
�I
( '5 )
venue pi’esqu’inutile, et que, d’après le cardinal Luca ,
elle n’est plus que pour les écoles, parce qu’il y a dans
le palais bien des remèdes pour s’en garantir.
Ces autorités militent pour Cliouvenc. L u i, ainsi que
Marie M olin, ont été chacun de bonne foi, et Catherine
et Thérèse Molin ont connu la vente, et ont laisse jouir
l’acquéreur, paisiblement plus de dix ans. Si presque
jam ais la prescription de dix ans ne suffit, si elle est
devenue presqitinutile parce qu’il y a dans le palais
bien des remèdes pour s'en garantir, il s’ensuit néces
sairement qu’elle suffit quelquefois et qu’elle est utile,
lorsque, comme dans l’espèce, il n’y a pas de remèdes
pour s’en garantir.
Bonnainent, du même pnys, maxime 42, qui cite mal
a propos sur cette question l’article 134 de l’ordonnance
de 1539, rapporte l’opinion de Duperrier; il atteste que
Buisson, autre auteur provençal, certifie que l’on donne
pour Tordinaire trente ans, et que cependant de Bczieux
rapporte un arrêt contraire intervenu sur des circons
tances différentes.
Papon , dans ses Arrêts, liv. 12, n°. 7 , des prescrip
tions , certifie qu’en pays de droit écrit les prescriptions
décennales et vicennales sont pratiquées.
Mais revenons aux arrêtistes du parlement de T o u
louse.
Voici ce qu’a éçrit M . Mainnrd , conseiller en cette
cour , tom. 2 , pag. 107 : ce II s’est élevé des disputes et
« questions dans des cas occ.urrens, au sujet de telles et
« semblables prescriptions , sur ce qui peut être estimé
« juste et valable titre avec bonne fo i.... Ces questions
�( iG )
« f o r t brouillées ont fait qu’on ne s’arrête pas fo r t ordi« nairement et précisément à la prescription de dix et de
« vingt ans ; la prescription de trente ans , dite d’un
« long temps par les empereurs , étant celle qu’on tient
« et garde exactement. »
Cet ajouté est contraire aux expressions précédentes :
On ne s'arrête pas f o r t ordinairement.
Despeysses a éludé cette question, en distinguant néan
moins , tom. i , part. 4 , titre 4 , par deux articles différen s, la prescription de dix ans pour les immeubles,
d’après Guypape et la loi romaine, au Cod. D e prœscript, long, te/np, , d’avec celle pour l’hypothèque.
Aussi , d’un côté , ne v o it-o n rien dans Albert ,
Cambolas , Dolive , Laroche et le Journal du palais ;
d’un autre , les jurisconsultes des autres parlemens de
droit écrit attestent le contraire de Serres et de Boutaric.
D u n o d , que Serres n’invoque que sur la prescription
de trente ans, page 19 4 , au lieu de s’être porté sur ce
qu’il dit de la prescription de dix ans, page 17 5 , Dunod,
disons-nous , atteste que cette prescription de dix ans
s’observe dans les pays de di’oit écrit.
Bretonnier, dans ses Questions alphab,, tom. 2 , p. 74,
rapporte que tous les parlemens de droit écrit admettent
cette prescription de dix ans , et il n’excepte que celui
de Grenoble , non pas selon G uypap e, mais d’après
Çliorier,
Ilenrys , auquel Boutaric renvoie , tom. 2 , liv. 4 ,
çhap. 6 , quest. 19 , pag. 240 et 241 , explique disertement la Novelle , et rapporte un arrêt du parlement
de P a p s , du 6 mai 1637 , approbatif d’une sentence de
la
�( 17 )
la sénéchaussée de Lyon , qui avoit confirmé la décision
du bailliage de Forez , pays de droit écrit, dans la cause
des nommés Maison-Neuve et F a u re , bien moins favo
rable que dans l’espèce présente , puisque Faure , tiersacquéreur , avoit su le droit du demandeur. Il persiste ,
sur la question 42 , n°. 7. Ses observateurs tiennent la
même opinion ; et le dernier, page go 5 , donnant, a
l’aide de Salvain, usage des iiefs , chap. i er. , un démenti
à Ghorier , assure « qu’il n’y a point de maxime plus
« certaine dans tout le droit que celle qui établit la près« cription de dix ans entre présens, et vingt ans entre
« absens ; et cette maxime a paru si juste et si utile ,
« qu’elle a été embrassée par toutes les nations : elle est
« devenue le droit commun de toute l’Europe. »
Cependant il convient d’usages différens , et il désire la
cessation de ce schisme dans la jurisprudence.
Enfin nos auteurs élémentaires en ont fait des prin
cipes de notre ancien droit ; Pocquct de Livonnière ,
chap. 9 , max. 34 , pag. 530 ; A rgou , pag. 235 : et le
Code civil est p lu tô t, dans cette partie , déclaratif de ce
droit ancien que constitutif d’un droit nouveau , en éta
blissant l’uniformité qui doit dorénavant avoir lieu dans
toute l’étendue de l’empire, sur cette incertitude ou sur
cette vacillation de jurisprudence ; mais , selon tout ce
qui vient d’être rapporté du parlement de Toulouse ,
d’après même Boutaric et Serres, et les autorités qu’ils
rappellent, rien n’est plus incertain que la jurisprudence
de cette cour sur l’inadmission de la loi romaine , dans
tous les cas du concours de la bonne foi et du juste titre,
C
�( i8 )
avec la connoissance de la vente de la part du coproprié
taire présumé , sans nulle inquiétation.
Cinquièmement , des novateurs ont porté atteinte à
cette ancienne maxime JNo7i exemplis sed legibus judicandum. Il paroît même que dans quelques circonstances
la cour de cassation a préféré la jurisprudence d’une cour
à la disposition textuelle de la loi romaine. Nulle loi
humaine n’a pu tout prévoir. Certainement l’autorité
établie pour la sauve-garde des lois ne reproduira pas
les enquêtes par turbes , et ne mettra pas les répertoires
de jurisprudence en opposition avec le Code c iv i l , dont
le principal bienfait tend à ramener tous les tribunaux
à l’unité de pratique , comme il a établi l’unité de prin
cipe ; mais , dans cette conjoncture , nulle jurisprudence
déterminée qui ait atténué le résultat des longues mé
ditations des législateurs romains, par la Novelle 119 ,
qui est devenue le type des trois articles de notre Code.
Il n’y a pas eu seulement présomption d’entière pro
priété sur la tête de Marie M olin , venderesse, comme
dans l’espèce de l’arrêt rapporté par Henrys ; il y a eu
à la fois certitude de cette propriété , et connoissance de
la vente, de la part de Catherine et de Thérèse Molin.
A u surplus, autant les certitude et connoissance, que
la nécessité d’adopter cette espèce de prescription, acquer
ront plus de force par le surplus de cette discussion.
�3î j
( I9 )
T r o i s i è m e
p a r t i e
.
Prescription de trente ans.
Cette prescription est relative à Catherine Molin. Née
le 24 janvier 1720, elle étoit pubère le 28 mars 173^,
jour du décès de sa mère ; elle étoit majeure lors de celui
de son père, du 20 mars 1745. Elle a successivement hé
rité , i°. de Marguerite , sa sœur, morte le 17 septembre
1740; 20. de Jeanne, autre sœur, q u i, née le 7 février
1725, est décédée le 10 juin 1778 ; 30. de Pierre M olin,
son frère , q u i, né le 2 mai 17 3 1, est mort le 3 novem
bre 1748.
Pendant tout le temps qu’a vécu Marie M olin, décé
dée en 1788, Catherine , sa sœ ur, l’une des intimées , n’a
rien réclamé. Il y avoit donc prescription trentenaire
depuis 176 5, respectivement à la succession de la mère,
dont la métairie dont il s’agit, faisoit partie; depuis 1775,
pour celle du p ère, et depuis 1770, pour celle de M ar
guerite M o lin , sa sœur. A l’égard de Jeanne Molin , autre
sœur , décédée en 1778 , elle n’avoit rien réclamé depuis
les décès de ses père et mère, de Marguerite, sa sœur, et
de Pierre, son frère; en sorte que Marie Molin , venderesse , avoit prescrit contre toute prétention de Catherine
M olin , sa sœur, l’une des intimées, soit de son chef, soit
comme représentant Marguerite, Jeanne et Pierre Molin,
ses sœurs et frère, décédés en 1740, 1746 et 1778.
Mais, dit-on , pour Catherine Molin , sa cohabitation
et celle de Jeanne avec Marie Molin ont i n t e r r o m p u
cette prescription.
C 2
�( 20 )
D ’abord, si ces cohabitations sont réelles, l’acquéreur
de Marie Molin en induit, ainsi qu’on l’a remarqué ,
la preuve que les deux sœurs ont eu connoissance de
la vente faite par leur sœur aînée, du domaine du Villars,
à Chouvenc, le père, en 1778, et dès-lors, nulle diffi
culté d’adopter la prescription de dix ans entre présens.
Secondement, cette prétendue cohabitation n’est point
établie contradictoirement avec Chouvenc qui la désavoue.
En troisième lie u , fût-elle certaine , elle ne seroit interruptible de prescription qu’au regard des cohéritiers ,
et nullement envers Chouvenc, tiers acquéreur.
Quatrièmement, ce moyen ne poürroit être opposé,
et mériter quelque considération , que respectivement
aux portions de Catherine et de Jeanne, nullement sous
le rapport de Marguei'ite et de Pierre, décédés en 1740
et 1745.
Enfin, cette cohabitation avec des beaux-frères, maris
et usufruitiers des biens de Marie M olin , n’équivaudroit
pas à une possession indivise, capable d’opérer celte in
terruption naturelle, exigée par les lois, et qui n’a lieu que
per corporalem et realem detmtionem rei. C’est ce qu’en
seignent d’Argentré, sur l’article 276 de la coutume de
Bretagne, cap. 4 , n°. i er.; Domat, liv. 3, tit- 7; Pothier,
sur les pandectes, liv. 4 1 , tit. 3 ; D u val, tract. i 5. C’est
d’après cette doctrinç que le parlement de Bordeaux,
par arrêt du 21 mars 1673, i*apporté par Lapeyrere, a
jugé que le légitimaire étoit non-recevable, pour n’avoir
pas formé sa demande dans les trente ans, quoiqu’il eût
été nourri dans la maison de son frère. Cet arrêt, contraire
à ceux cités par D o liv e , et à son opinion, a relevé la
�( 21 )
fausse interprétation que cet auteur et divei*s juriscon
sultes ont donnée à la loi 7 , au cod. Carn n otissin ù ,
§. 5 , imo et illu d , parce que par les expressions per
hanc detentionem, on ne peut entendre qu’une posses
sion réelle, corporelle, ou d’intention ; et c'est ainsi que
l’a expliqué le Code civil, art. 2243, qui doit à cet égard
être déclaratif du §. imo et illud.
Les intimés se sont abusés en invoquant, à cet égard,
les lois F a m iliœ erciscundœ , commuai dwidundo.
Ces lois n’ont aucune application.
Sous le rapport de Marie M o lin , venderesse, elle- a
dû réclamer contre la ven te, et contre la promesse de
ratifier dans le délai de dix ans depuis sa majorité ; et
c’est ce qu’elle n’a pas fait.
Sous le rapport de l’acquéreur, il n’est pas cohéritier;
c’est un tiers détenteur : on n’ordonne, et on ne fait de
partage avec l u i , que lorsqu’il s’agit de le réaliser avec
des cohéritiers dont l’acquéreur a acheté. I c i, il n’y a
dans les intimés que des cohéritiers qui représentent le
vendeur.
,
Les appelans pourroient borner là la discussion ; les in
timées doivent être repoussées, l’une et l’autre, par la
prescription de dix ans entre présens; subsidiairement,
Catherine M o lin , par celle de trente ans. Mais pour
suivons sur les autres subsidiaires.
�( «
Q u a t r i è m e
)
p a r t i e .
Tierce-opposition.
%
Ce subsidiaire n’a lieu que parce que la femme V en d riès, fille de Thérèse Molin , a opposé un jugement
en dernier ressort, qu’elle a fait rendre le 26 janvier
1 793 5 avec
Croisière, troisième mai*i et héritier tes, ^y^i^taire de Marie Molin.
D ’abord la cour- est-elle compétente pour connoître
de cette tierce-opposition? Les intimés ont soutenu la
négative dans leur réponse à griefs , et aux premières
audiences; mais ils n’ont pu répliquer ni au moyen résultant du fait que la cour a remplacé le tribunal du
P u y , qui a jugé comme cour dappel,, ni au moyen du
droit ; de ce q u e , d’un côté, d’après la loi du 11 février
1791 , en assimilant la tierce - opposition à la requête
civile, par induction de l’art. 2 tit. 35 de l’ordonnance
de 1667, elle devoit être portée à un tribunal d’appel;
de l’autre, s’agissant de tierce-opposition à un jugement
en dernier ressort, il eût fallu nécessairement se pour
voir devant le même tribunal qui l’avoit rendu, ou devant
celui qui lui est substitué, parce que la tierce-opposition
n’est qu’une intervention qui ne peut etre portée à
d’autre tribunal q u ’à celui qui a l’endu le jugement contre
lequel réclame cet intervenant qui n’y a pas été partie.
Enfin, les intimés se sont départis de ce moyen ù la der
nière audience.
�( 23 )
Les Chouvenc ont-ils renoncé à cette tierce-opposi
tion , et ont-ils été astreints à la former dans les dix ans?
i°. Il faut une déclaration expresse pour renoncer à
un droit acquis. L e silence, surtout dans une cause que
les appelans ont dû laisser juger par défaut, ne peut pas
tenir lieu de cette déclaration. »
2°. S’il y a diversité d’opinion sur le délai de dix ou
de trente ans pour former opposition , il n'en a jamais
existé sur la tierce-opposition. Rodiei’ , sur l’article 10 ,
titre 27, et sur l’article 2 , titre 35 de l’ordonnance de
1667 , distingue non-seulement l’opposition de la tierceopposition, mais encore la tierce-opposition de la part
d’un tiers qui n’a pas été du tout appelé , d’avec la tierceopposition de celui qui a été indûment appelé. Tout
tiers-opposant a trente ans pour réclamer , pai’ce que
l’ordonnance ne fixe pas de délai, qui dès-lors est celui
de trente ans, que le droit commun a fixé pour acquérir
la prescription.
A u reste, disent les intimés, cette tierce-opposition
est nulle, parce qu’elle n’a pas été précédée de tentative
de conciliation.
Cette tierce-opposition n’a eu lieu, que parce que les
intimés ont voulu exécuter, contre les appelans, le juge
ment en dernier ressort, qui ne les concerne pas. Ce
n’est pas par action principale, mais seulement par excep
tion nécessairement incidente au procès , qu’ils l’ont
formée. La loi n’assujettit à cette voie préalable, que les
demandes principales ; et c’est ce qui a été jugé p a r la cour
de cassation, p a r divers arrêts des 29 p r a i r i a l an 9 ,
5 pluviôse, 24 prairial an 1 1 , 2 6 vendémiaire an 12.
�( H )
A u surplus, insistent les adversaires, cette tierceopposition n’est ni recevable, parce que Cliouvenc est
l’ayant cause de la Croisière, ayant été entendu dans sa
personne , lors du jugement du 26 janvier 1793 ; ni fon
dée , parce qu’il a été bien jugé en prononçant la nul
lité du testament de Catherine Ferrapie; qu’en tout cas
Marie IVlolin n’avoit pu recueillir la succession de sa
m ère, Catherine Ferrapie.
Premièrement, Jousse n’entend par ayans cause, que
les créanciers qui exercent les droits de leur débiteur,
èt non ceux qui succèdent à titre particulier de dona
tion ou de vente.
Comment Chouvenc, acquéreur de Marie Molin pen
dant qu’elle étoit veuve D e jo u x , en 1778 , pourroit-il
être l’ayant cause de la Croisière , qui n’est devenu mari
de cette venderesse, et son héritier testamentaire , que
long-temps après ce contrat de vente ? Si cet héritier n’a
pu disposer par contrat en faveur d’un autre , de ce
que Marie Molin avoit vendu à Chouvenc , a-t-il pu
nuire judiciairement à cet acquéreur ? N ’est-il pas éga
lement certain , par la loi 2, au code, liv. 7 , tit. 3 6 , par
celle du digeste 1 , liv. 41 , tit. 2 , et 74, liv. 5o, tit. 17,
que pas plus la chose jugée qu’un contrat ne peuvent nuire
à un tiers.^
L ’ancienne, comme la nouvelle jurisprudence, se sont
conformées à cette règle , souvent même lorsqu’il a été
ques ti on de créanciers , en expliquant les cas susceptibles
de l’application de l’article je*-, ou de l’article 2 du titre 35
de l'ordonnance de 1667.
Avant cette ordonnance, un arrêt du parlement de
Paris,
�c 2 5 }
Paris , du 20 mai 1599, rapporté par Papou , avoit reçu
la tierce-opposition de Claude de Tourn on , tiers-posses
seur des biens d’un débiteur insolvable, et contre lequel
il y avoit présomption de collusion.
Celui du 28 mars 1702, au Journal des audiences, est
étranger à l’espèce, ainsi que celui du conseil, en 1704,
l’apporté par Brillon.
Quant aux deux rapportés par Cocliin , du 31 mai
1726, tome 6 , page 527, et du 8 mai 1744 , tome 5 ,
page 349; le premier n’a pas de rapport à notre espèce,
parce qu’il paroît que les immeubles jouis par le tierspossesseur étoient aiï'eclés antérieurement à la vente; et
l’autre seroit d’autant plus concluant pour cette cause ,
que la tierce-opposition du marquis de R ey n e l, contre le
duc d’Orléans, n’avoit pour objet que des créances.
Pa rmi les arrêts recueillis par Denisart et par G u y o t,
ceux de 1743 , 1760, 1761, 17 6 1, février et juillet 1777,
,ainsi que ceux de la cour d’appel de Paris, des 29 prai
rial an 9 et 18 ventôse an 11 , et celui de la cour de
cassation, du 22 fructidor an 9 , sont étrangers à l’es
pèce. Mais ceux des 17 janvier et 30 mai 1767 , et fé
vrier 1778 , 21 brumaire an 5 , de la cour de cassation,
de celle de Bordeaux, du 9 thermidor an 9 , et de celle
de Rouen , ont admis des tierces - oppositions dans des
espèces ou semblables ou moins favorables. Il seroit aussi
inutile que fastidieux d’analiser ces décisions; il suffit de
l’appeler l’observation des rédacteurs du Répertoire, au
mot opposition, page 4 1 9 , « qu’on a vu les tribunaux
« préférer , ù la rigueur , la voix de l’équité qui leur
« parloil en faveur des parties condamnées injustement. »
!D
�o 6)
Mais ne perdons pas de v u e , dans cette affaire , que
Chouvenc n’est nullement créancier ni tiers-détenteur de
Lacroisière; il étoit acquéreur de sa femme long-temps
avant que Lacroisière l’épousât, et qu’il en devînt l’hé
ritier..
Ce scroit une erreur de soutenir que ce jugement a
eonfirmé la sentence de Tence. Par celte sentence, lafemme Borne a été déboutée de sa demande en nullité
du testament, et en ouverture de substitution en faveur
de Pierre Molin. Ce n’a été que sous la réserve' de tous,
les moyens de Marie M o lin , contre les lettres de resci
sion, que l’estimation par experts a été ordonnée.
■Sur l’appel respectif porté au tribunal du P u y , la
femme Borne se plaignoit du débouté , et Lacroisière,,
de ce que les lettres de rescision n’avoient pas été rejetées..
D ’un autre côté, Catherine Molin avoit demandé par
quatre différentes requêtes contre Lacroisière, héritier
de sa femme, en la justice de T e n c e , un douzième du
chef de la Ferrapie, sa mère , et un dixième du chef de
son père, et avoit obtenu sentence conforme à ses con
clusions, le 17 août 1790 : mais il existoit un appel de
la part de Lacroisière.
C’est en cet état, que fut rendu le jugement du 26 jan
vier 1793 , qui,infirmant la sentence du 2 novembre 17O4,
nnnulle le testament de la Ferrapie-: non-seulement Laeroisière' négligea d e s m o y e n s péremptoircs, mais encore
il consentit que le mot remis fût changé en celui de re
cueilli • que l’on donnât la femme Vendriès quinze ans,
lors de son contrat de mariage ; tandis qu’elle en avoit
•vingt-deux..
�•7I 27 )■
>
^
Ge fut dix-huit jours après, le 14 février 1793., que
la femme Borne et Catherine Molin se réunirent avec
Lacroisière, chez un notaire. Lacroisière ne se contenta
pas de stipuler au gré de l’une et .de l’autre, il aban
donna tout ce qu’il possédoit, même tout ce qu’il pouvoit posséder ; il ne se borna pas à déclarer une pré
tendue insuffisance, il alla jusqu’à indiquer des tiers-acqué
reurs , malgré qu’il en fût le garant , et à stipuler les
intérêts d’un sieur Molin , véritable partie secrete , et de
cet acte, et du procès, quoiqu’il ..ne fût pas en qualité
dans cet acte.
L e payement de tant de complaisances fut 1200 francs,
et quelques meubles délivrés à Lacroisière, ou qu’il s’est
retenus. Les appelans en ont offert la preuve ; mais cette
preuve de collusion, à la différence de celle d’une con
vention , ne résulte-t-elle pas de la réunion des diverses
circonstances, de la différence des prétentions de Cathe
rine et de Thérèse Molin , de leur réunion au même
résultat, de s’être fait substituer par Lacroisière à tout
ce qu’il pouvoit posséder provenant de Marie Molin ?
M ais, quelques foibles qu’elles fussent, ces circonstances,
ne seroit-il pas révoltant, ce système, de .prétendre que
Lacroisière eût p u , en 17 9 3 , détruire l’acte de vente
que Marie Molin a voit consenti irrévocablement en 1778 ?
S’il 11e l’a pas p u , il seroit sans doute par trop ridicule
de considérer cet acquéreur, de 1778 , comme l’ayant
cause de Lacroisière , qui étoit bien éloigné d’avoir
aucun droit, aucune prétention en i778:idonc cet acqué
reur a dû être appelé ; d on c, ne l’ayant pas été , il a la
faculté d'user du droit de la tierce-opposition que lui
D 2
�( 28 )
donne l’article 2 du titre 35 de l’ordonnance de 1667.
Secondement, jamais tierce-opposition ne fut mieux
fondée , et ne mérita autant de faveur.
D ’abord,Thérèse M o lin , mère de la femme Vendriès,
n’étoit pas recevable. Par son contrat de mariage du 5
mai 1755 , elle céda à Marie Molin, sa sœur, en la per
sonne de Chnmbarlhac, son m ari, tous les droits qu’elle
a voit dans les sucessions de ses père et mère, et dans celles
de Marguerite et Pierre Molin , ses frère et sœur, moyen
nant 1900 IV. A g é e alors de vingt-deux ans , devenue
majeure en 1758, elle a reçu le prix de cette cession par
quittance du 21 mars 1761. Elle s’étoit constituée pour
dot le prix de cette renonciation ; elle avoit promis de
ratifiera sa majorité; et quoique l’action rescisoire fût
paraphernale, quoique Marie Molin fût en outre par
faitement devenue maîtresse de tous ses droits par le décès,
de son mari , Antoine Borne , du 13 mai 1768 , elle a
laissé écouler les dix ans fixés par l’article 134 de l’ordon
nance de 1539, sans réclamer, puisqu’elle ne s’est pourvue
que le 22 janvier 1783.
M ais, dit la femme Vendriès , i°. cette cession de
droits ne peut être considérée que comme un partage
provisionnel, puisque la ratification à la majorité a été
convenue ; 20. Marie Molin avoit été établie protutrice
ou administratrice des biens de Pierre et de Thérèse
M olin; elle devoit un compte; ne l ’a y a n t point rendu,
toute convention faite non l'isis inhuüs , ?>cc (üspoitctis
rationibits, est radicalement mille par l’article 131 de
la môme ordonnance de i5;39 , constamment suivie au
parlement de Toulouse; et l’action pour faire prononcer
cette nullité dure trente ans.
�( 29 )
D ’abord, c’cst une absurdité de présenter comme par
tage , sans que rien puisse le caractériser, une véritable
cession de droits successifs, Reproduiroit-on encore ici
les lois Familiœ erciscundœ, comtnuni Aividwido ? on
renverrait à la réponse qui y a été faite. Mais il est in
différent, dans l’espèce, si la convention portée par le
contrat de mariage est une vente ou ün partage, puisque,
dans l’un comme dans l’autre cas, l’action de rescision
n’a duré que dix ans. Thérèse Molin n’a jamais pu ignorer
l’obligation qu’elle a contractée personnellement ; e t , dans
le fait, elle a ratifié, en ne réclamant pas contre cette
obligation, non-seulement depuis 1768 qu’elle a été ma
jeure et maîtresse de ses biens parapliernaux, mais encore
depuis sa viduité. T e l a été l’avis du célèbre Cocliin
73e. consultation, tome 3 , page 775.
En second lieu, dans le fait, la prière de Pierre M o lin ,
dans son testament de 1743 , à Marie M o lin , de gérer
l’hérédité, dans laquelle il avoit institué autre Pierre
M olin, son fils, ne peut pas être considérée comme opé
rant une protutelle. -Au surplus , cette prière d’abord
adressée à Ignace Molin , irère du testateur, et seule
ment subsidiairement à Marie Molin , est devenue cadu
que , pavee que ce testateur n’étant décédé que le 20 mars
17^5, Thérèse Molin éloit pubère à cette époque. Pierre
n’a resté que six semaines à le devenir; et il est prouvé,
pu- une procuration donnée par lu i, devant Roubin ,
nntaiiv , du 20 janvier 1748 , visée dans la sentence de
Tence, du 17 août 1790, qu’il administrait, à cette époque,
ses biens.
Mais , d’ un cûté , les intimées soutiennent, et la femme
�( 30 )
"Vendriès l’a fait juger , que ce testament est nul, parce
que les légitimaires n’ont pas été honorés du titre d’ins
titution ; et ce qui est nul ne peut produire aucun effet.
D ’un autre côté , s’il y a eu une administration tutélaire,
c’est Ignace Molin qui en a -été chargé, ainsi que l’a
reconnu Catherine Molin par divers actes émanés de
son fait, après le décès d’Ignace M olin, notamment par
celui notarié qu’elle fit conjointement avec Marie Molin,
le 2 décembre 1763.
Dans le droit , quand on envisagerait Marie Molin
comme administratrice comptable, elle n’avoit que dix
ans, et non trente ans, pour réclamer utilement. La
controverse qui existoit à ce sujet dans les tribunaux ,
comme parmi les jurisconsultes, a dû être terminée par
l ’article 476 du Code c iv il, qui doit être regardé comme
déclaratif ou explicatif du droit ancien. L e projet de ce
Code portoit la même disposition , articles 103 et 104.
La cour de cassation , dans ses observations , a adopté
cette partie de l’article 104. Des vingt-six cours d’appel
qui ont donné leur avis sur le projet j trois seulement,
celles de Liège et d’Orléans pour les dix ans, et celle
de Paris pour les trente ans ; les vingt-trois autres cours
ont , par leur silence , adhéré au projet. Les tribuns
M M . Iluguet de la Seine, et L e r o i, l’ont admis, ainsi
que M. le conseiller d’état Berlier. Procès verbal de-dis
cussion du projet de code c iv il, tome 2 , page 620. Ce
commissaire rappelle les diverses mesures de prescription ,
selon les pays, pendant la monarchie. Cette discordance
n’eût-elle pas sufii pour provoquer une déclaration du
r o i , explicative. C’est ainsi qu’il faut considérer le Code
�Ml
C 3i )
civil, q u i, pariàm êm e, ne présente aucun effet rétroactif.
Une autre fin de non recevoir enveloppe à la fois les.
deux intimées ; elles sont garantes de. leur, propre de
mande. Par l’acte du 14 février 17930. elles, sont devernues successeurs universels de-Marie. Molin , et par là
obligées de maintenir la vente qu'elle a consentie le 14
août 1778, d’après la maxime,, Qutm de evictionc te n d
actiu eumdem ogentem repellit excepiio.
En acceptant de Lacroislère-, héritier testamentaire
de Marie M olin , non - seulement les maison et jardin
qu’il occupoit, et le domaine de la Bruirette , mais encore
tous autres objets , s’il y en a , les intimées, ont pris la
place de Lacroisière; c’e s t - à - d ir e ,, de son chef, elles
doivent maintenir la vente qu’à faite Marie M olin;. et
elles ont si bien manifesté leur conviction qu’elles sont
tenues des faits de. Marie M o lin , que, de leur propre
a ve u , elles ont traité avec les autres qu’elles avoient
aussi fait assigner en désistement, et contre la plupart,
desquels elles ont obtenu la même condamnation que
contre, les. appelons. Qui dit to u t, n’excepte rien. Par
l’expression générale, tous autres objets , s'il y en a ,,
on doit nécessairement entendre le mobilier et les papiers..
En prenant tout à forfait, elles.se sont chargées des obli
gations de garantir de la part de Lacroisière , dont
elles ont constitué l’insolvabilité, en acceptant de lui,,
sans compte, ni mesure, ni inventaire, tout ce qui provenoit de la succession de Marie Molin.
Parmi ces papiers étoient les quittances de ce qui*
a<voit été payé par.Marie M olin, et par ses trois-maris „.
�( 32 )
A la décharge des successions des auteurs communs.
Les intimés soutinrent , ù la dernière audience, qu’il
ne falloit pas faire remonter la généalogie plus haut qu’aux
père et mère communs, et que c’étoit Cliouvenc qui
retenoit les papiers pi’ovenus de Marie M o lin , puisqu’il
en existoit dans leur dossier.
t'
R É P O N S E .
En premier lie u , par le premier contrat de mariage
de Marie Molin avec Chambarlhac , en 1763, son mari
eut pouvoir de vendre pour désintéresser deux oncles,
Mai’celin, et Ignace Molin , présens au contrat. Mais
ces oncles n’étoient pas les seuls ; il existoit encore Biaise
et Jean : ce Biaise étoit légataire de Marie Molin , grandtante de Marie Molin. Cette Marie M o lin , première,
par son testament, du 22 juillet 1769, avoit encore légué
à Geneviève Périer, sa nièce, fille d’une Jeanne, femme
Périer , et elle avoit fait héritier Ignace Molin , curé du
Chambon , son neveu, qui par son testament du 7 no
vembre 1763 , après avoir dit que Marie Molin , sa nièce,
jouissoit des biens affectés à ses droits, lui légua 800 fr.,
et les intérêts de tout ce qu’il avoit à prétendre ; en sorte
que cette recherche nécessi toit divers partages, que Marie
Molin , deuxième , ou ses trois m a r i s , ont écarté , en
désintéressant les héritiers et légataires de la grand’tante
Marie Molin, première. Lorsque Marie Molin, deuxième
du nom , eut consenti la vente de 1778, au père Chouvenc,
celui-ci acquitta diverses créances à la décharge de sa
venderesse , envers l’une de ses sœurs , envers les sieurs
de
�( 33 )
de Reynaud, et Olivier de T e n c e , et envers le curé de ce
lieu. Chouvenc n’exigea pas de subrogation , ni men tip n
que le prix de son acquisition eût été payé de ses deniers
à ces créanciers, tant il croyoit à la sûreté de la vente ,
et à l’obtention, sans opposition, des lettres de ratifica
tion-qui furent expédiées sur cette acquisition.
En second lieu, de tous les titres qui sont dans le dossier .
des appelans, le premier contrat de mariage de Marie
Molin est le seul qu’il tienne d’elle. £1 paroît quelle en
a voit fait usage le 3 février 1773, cinq ans avant la vente
de 1778, dans un procès qu’elle avoit contre Catherine
de Chambai'lhac, veuve Boulhot.
Cette fin de non-recevoir, évidemment démontrée, et
qui ajoute à la nécessité d’adopter la prescription de
dix ans, devroit dispenser de s’occuper des droits suc
cessifs de Marie M olin , venderesse ; mais ne laissons
rien à désirer contre le jugement du 26 janvier 1793.
L e testament de Catherine Ferrapie, du 24 mars 1735,
régulier dans la formé , a transmis, par l’effet de la subs
titution qu’il contient, la succession à Marie Molin.
L ’extrait vidimé de ce testament, en vertu de l’arrêt
de la cour , et le procès verbal qui a eu lieu à ce sujet, ne
laissent aucun doute que le mot abrégé ilî° , précédé des
mots la testatrice, et suivi de ceux-ci, enquise et re
quise , ne peut signifier autre chose qvCi/litérée, enquise
et requise ; c’est-à-dire , qu’elle nç-sait pas écrire , et que
la demande et la réquisition lui ont été faite de cette
déclaration. L e mot illitéré, d’après Cambolas, p. 362
et 363, et l’usage constant du pays de Languedoc, qui
résulte de tous les registres des notaires de cette contrée,
E
�C 34 )
est synonyme avec ceux-ci, ne sait écrire. Suétone en
donne la même explication, d’après les expressions de
Néx*on , à qui on deinandoit une signature : Utinam
litteras nescirem.
Ce procès verbal a été contradictoire seulement entre
des femmes; d’un côté, celle Chouvenc, assistée de son
parent, le notaire Gire , d’Yssingeaux ; de l’autre , les
femmes adverses, assistées du même sieur Molin , pour
qui l’acte du 14 février 1793 contient des réserves, quoi
qu’il n’y soit pas en qualité. Pourquoi dans ce procès
verbal fait-on dire que la femme Vendriès n’a point eu
de constitution de dot? Pourquoi avoir empêché que le
notaire commis par la cour ne constatât l’uniformité de
la même abréviation usitée par ce môme notaire, dans
d’autres teslamens contenus dans le même registre, depuis
1732 jusqu’en 1738, si ce n’est dans quelques actes écrits
d’une autre main que la sienne?
« Parmi nous, dit Ferrières dans son Dictionnaire de
« d ro it, les abréviations sont reçues ou réprouvées,
« par rapport à la facilité ou à la difficulté de les en« tendre. A in si, on admet celles qui ont une signiiica« tion certaine dans l’usage , et pour les autres on n’y
« auroit pas d’égards. » L e même , dans son ouvrage
intitulé Science parfaite des notaires, leur recommande
de ne point se servir d’abréviations , à moins qu’elles
n’aient une signification certaine dans l’usage.
Si la cour estimoit , dans sa sagesse , qu’il finit éclaircir
davantage ce fait , il s’agiroit d’ordonner l’apport du
regis Ire.
jVluis, en d r o it , il n’en est aucunement besoin.
�S/l
.
( 35)
L ’ordonnance du mois d’août 1735 n’est que postérieure
au testament du 24 mars précédent. Celles d’Orléans et
de Blois n’ont pas été enregistrées au parlement de T o u
louse, et n’y étoient point observées. Cambolas rapporte
un arrêt de cette c o u r , du 21 juin 1624 > en la deuxième
des enquêtes , qui déclara valable le testament de Giraud
Martin , que ses frères arguoient de nullité, parce qu’il
n’y avoit pas de.signature. M . D olive, pages 408 et 4 ° 9 î
a recueilli deux arrêts, des i 5 mars 1631 et 22Tiiai 1632,
et a attesté que l’ordonnance, sur ce point, n’est point
en usage dans cette cour , « q u i, ajoute-t-il, par le mou« vement de l’utilité publique qui s’intéresse dans la sub« sistance des dernières volontés des mourans, se porte
« plus volontiers à suivre la disposition d’une des nou« velles constitutions de l’empereur Léon , qui veut que
« le nombre suffisant des témoins fasse valoir un tes
te tament, quoique destitué des seings , des sceaux et des
« suscriptions du testateur et des témoins. »
C’est ce qu’atteste encore M . Sallé,dans son ouvrage
sur l’Esprit des ordonnances, art. 5 de celle de 1735,
tome 1 , pag. 25 î. IL ajoute à la citation de Dolive et
de Cambolas, celle d’un arrêt du parlement d’A ix , re
cueilli par Boniface , qui prouve que ce parlement n’a
pas été plus exact observateur de cette ordonnance à cet
égard. Les lois romaines avoient toujours prévalu. Les
dernières volontés d’un père ou d’une mère envers leurs
enfans lenoient lieu de toutes les formes , et ces lois vouloient que ces volontés fussent gardées par tous les moyens.
Maynard, tome 1 , page 698.
E a
�K C 36 )
A u reste, s’il y avoit nullité dans ce testament, la fa
culté de la demander, cette nullité, seroit prescrite au
moins depuis 1738» ci116 ce testament a été contesté; elle
seroit encore écartée par la loi du 28 septembre 17 9 1,
qui maintient les testamens auxquels on opposerait ces
nullités. Cette l o i , quoique désignant quelques provin
ces, notamment le Vivarais , d o it, pour l’honneur même
de la législation, s’étendre dans les pays soumis à la même
juridiction des parlemens de Paris et de Toulouse, suitout dans l’étendue de ce dernier parlement, où les or
donnances d’Orléans et de Blois n’étoient pas observées.
Cette nullité étant aussi puissamment écartée, tant par
le fait que par le d ro it, il est aussi facile d’établir que
Marie Molin a recueilli l’effet de la substitution établie
par le testament.
- En voici les clauses.
« La testatrice a institué , et de sa propre bouche
« nommé pour ses héritiers universels, Ignace Molin ,
« curé du Chambon, et sieur Pierre Boyer, son oncle,
« à la charge de remettre, lorsque bon leur semblera,
a ladite hérédité audit P ierre, iils de ladite testatrice;
« et au cas ledit Pierre Molin , son fils, vînt à mourir
« sans pouvoir disposer, ou sans avoir remis ou recueilli
« ladite hérédité, elle lui substitue ladite Marie. Ladite
« testatrice a fait cependant ladite institution d'héritier
« sans distraction de quarte, et sans qu’ils soient obligés
« de rendre aucun compte des fruits ou revenus de ladite
« hérédité; et au cas où ils fussent recherchés, elle leur
« en fait un prélegs, et à la charge d’entretenir les
« enfans. »
�3Sî>
( 37 )
Pierre B o y e r, l’un des héritiers , est décédé le 2 5 juin
1740. A cette époque, Pierre M olin, né le 2 mai 1731,
étoit pupille , et il est décédé le 3 novembre 1748.
Ignace Molin , l’un des deux héritiers institués, est de
venu le seul, par l’accroissement résultant du décès de
Pierre Boyer. D ornat, liv. 3 , tit. 1 , sect. 9 ; Brillon ,
V . accroissement, nos. 26, 2 7 , 28, 29, 30; Maynard,
liv. 5 , chap. 1 0 ; Code civ il, art. 1044, 1045.
Cette substitution est-elle fiduciaire, ou fideicommissaire? Cette question est absolument indifférente. Dans
l’un comme dans l’autre cas , la volonté de la testatrice
n’est pas conjecturale , elle est clairement exprimée. Il est
constant que Catherine Ferra pie a voulu que son entière
succession advînt à son fils, o u , à son défaut, à sa fille
aînée ; mais elle a voulu que le fiduciaire ou le fideicommissaire ne fît la transmission que quand bon lui
sembleroit, et qu’au cas le fils vînt à mourir sans pou
voir disposer , ou sans que l’héritier eût remis, et, si l’on
veut encore, sans qu’il eût recueilli. Il est évident, dans
tous les cas, que lors du décès de Pierre M o lin , il ne
pouvoit point disposer; qu’il ne lui avoit été rien remis;
qu’il n’avoit rien recueilli. Lors de son décès, Pierre
Molin étoit pubère et pouvoit tester; mais il étoit mi
neur, et il lui étoit interdit de disposer par acte entre v ifs ,
soit à titre onéreux, soit à titre gratuit. Si Pierre Molin
eût atteint sa majorité, il s’agiroit de discutersi la parti
cule ou devroit s’entendre disjonctivement ou copulativement. Mais Pierre Molin est décédé en minorité , dans
les liens de la prohibition de disposer entre vifs, et il de-
�(38)
vient indifférent de savoir s’ilavoit recueilli un objet dont
l’époque de la remise avoit été laissée à la volonté d’Ignace
Molin , et dont il est certain que la remise n’avoit pas
été effectuée. La testatrice n’a point entendu limiter la
faculté de disposer ; les expressions, sa?is pouvoir dis
poser , comprennent toute la latitude dont ce pouvoir
est susceptible. Il suffit donc que Pierre Molin ne pût
disposer entre vifs , pour que cette vocation soit devenue
caduque , et dès-lors nécessairement la seconde appelle
Marie Molin à recueillir. Telle a été l’intention de la
testatrice. Catherine Ferrapie a vo u lu , sans doute, pré
férer son fils ; mais, dans la prévoyance ou d’indignité
ou d’incapacité, elle a laissé â l’arbitrage du curé du
Chambon le temps de la remise , et, dans le cas de la réa
lisation de cette remise, elle a entendu que le fils pût
disposer ; en sorte que par l’effet de cette clause, si la re
mise eût été faite à Pierre Molin , et que lors de son
décès, eu majorité, il eût été interdit, d’après cette clause
impérative , la substitution eût été ouverte en faveur de
Marie Molin. Si donc Pierre M o lin , lors de son décès,
n’a pu disposer, soit parce qu’il étoit dans les liens delà
m inorité, soit parce qu’il ne lui avoit été fait aucune
remise, ou encore parce qu’il n’avoit recueilli ni par
le fa it, ni par le droit ; c’est incontestablement Marie
M o lin , seconde appelée , qui a recueilli la substitution
de Catherine Ferrapie. C’est donc en pure perte que les
intimées ont compulsé la loi Generaliter, puisque les
deux conditions sont arrivées, incapacité de disposer,
et n’avoir pas recueilli. Si les expressions du testameut
�M
i
( 39 )
étoient douteuses, il suiliroit que la volonté de la testa
trice fût évidente. In conditionibus testamentorum ,
voluntatem pottùs quant verba considerari opporteat.
Et cette volonté a expliqué et dirigé clairement les con
ditions. In conditionibus , pritnum locuni voluntas
d.ifuncti obtinet eaque régit conditiones. Lois 19 et
101, if. de cond. Ricard, chap. 1 , n°. 16.
Enfin, cette substitution n’a jamais été ouverte, de droit,
en faveur de Pierre Molin ; il ne l’a jamais recueillie de
fait ; i ° . il ne seroit point censé remplir un degré.
M . Daguesseau, 1 1 e. question.
Tout se réduisoit dans lui à une espérance. A b ire à
nobis dominium speratur, si conditio legati extitcrit,
L . 66. if. de reivindic. Le substitué conditionnel est sem
blable au créancier conditionnel, qui n’a aucun droit,
tant que la condition n’est pas arrivée. Gonditionales
dicuntur h i quibus nondùrn conipetit actio. L . 54, if.
de verb. signif.
2°. Il n’y a jamais eu plus de doute dans la famille, que
dans la notoriété publique, que Marie Molin a recuilli.
S’il y a eu acte de remise de la part d’Ignace M o lin , il
est entre les mains des intimées , ainsi que tous les papiers
de la famille, comme il a déjà été prouvé ; mais il en
existe au procès d’autres preuves écrites et équipollentes.
i°. Dans le contrat de mariage de Marie Molin avec
Chambarlhac, son premier mari , du 13 février 1763,
la future, en présence d’Ignace Molin , se constitua dans
ses biens , dont elle autorisa son futur à faire vente, pour
le payement des L É G I T I M E S et droits SUCCESSIFS com-
�C 40 )
pétens aux sœurs de ladite Juture épouse j qu’il sera
libre audit futur époux de liquider en argent, ainsi que
ledit'sieurfutur époux avisera , de même que les droits
appartenans à sieur M arcelin M olin , son oncle.
2°. Dans le testament d’Ignace M o lin , du 7 novembre
1763 , il lègue à Marie Molin , sa nièce, la somme de
800 francs ; laquelle, est-il d it, se retiendra sur les biens
de feu ses père et mère que jo u it ladite M o lin , à laquelle
il veut et entend que tous les intérêts à lui dûs jusqu’à
ce jour de ses droits légitimantes, lui appartiennent.
30. Dans les requêtes de Catherine M o lin , au nombre
de quatre, visées dans la sentence de 1790 , elle y a in
connu qu’elle n’avoit à prétendre qu’un douzième dans
la succession maternelle, et un dixième dans la succession
paternelle, Cette sentence jugea conformément à ses de
mandes.
O r , si Marie Molin a été reconnue, parla famille,
héritière, possédant l’universalité des biens paternels et
maternels, Chouvenc a-t-il pu douter du contraire, lors
qu’il a acquis d’elle en 1778? et par cette conséquence
forcée, n’étoit-il pas certain de la bonne foi de la venderesse ? de là même n’avoit-il pas prescrit par dix ans?
C
i n q u i è m e
p a r t i e
.
Estim ation et compulsoire.
En écartant hypothétiquement les prescriptions, les
fins de non^recevoir, et le testament de Catherine Fer^
rapie,
�âS7
t 40 _
ra p ie , et en supposant que Marie Molin , venderesse,
n’eût qu’un tiers à prétendre dans les successions des père
et mère, il faudroit bien lui accorder les prélèvcmens
qu'elle auroit à faire. Il en est qui sont établis par les
pièces du procès; i ° . 1900 fr. payés à Thérèse Moliu
pour le prix de la vente par elle consentie par son contrat
de mariage, suivant la quittance notariée du 21 mars
1761 ; 2°. celle de 900 fr. payée à Catherine Molin , sui
vant l’acte du 14 février 1793 ’■
> 3°* ^es ^°° francs légués
à Marie Molin par Ignace M o lin , son on cle, ensemble
les intérêts de tout ce qu’il avoit à prétendre, tant de
son chef sur les successions de ses père et mère , que1
comme représentant Marie M o lin , sa tante, sur les suc
cessions de ses aïeul et aïeule. Ce dernier objet nécessiteroit des partages préalables ; mais il est à présumer,
d’après le contrat de mariage de Marie Molin , venderesse, avec Chambarlliac, de 17^3, qu’elle ou ses maris
ont acquitté des légitimes envers Biaise, Jean et M ar
celin , dont elle préleveroit ou le montant ou les portions
en nature. Si les quittances ont été données par actes
publics , un compulsoire seroit indispensable pour en
recouvrer des extraits , en laissant à la religion de la cour
d’apprécier dans sa sagesse tout ce qui a été dit sur les
titres de famille, parmi lesquels étoient sans doute beau
coup de quittances sous seing privé. A toutes ces don
nées , soit certaines, soit conjecturales, ajoutant l’estima
tion de tous les biens des père et mère, à l’époque du
14 août 1778 , 011 croit pouvoir assurer que l’objet de
l’acquisition faite par Chouvcnc étoit bien loin de rcinF
�( 42 )
plir tous ?les droits de sa venderesse , M arie M olin.
A ce sujet, les intimés opposent que le jugement dont
est appel ne grève pas les appelans, parce que le désis
tement n’est ordonné qu’autant qu’il y auroit insuffisance
pour remplir les lots des intimés.
Combien est misérable cette objection , d’après tous
les moyens qui viennent d’être développés ! Mais ce qui
est le plus péremptoire sans doute, c’est que les intimés,
en se subrogeant aux droits de Lacroisière, héritier de
M arie M o lin , l’ont déchargé de toute restitution, sous
quelque dénomination que ce puisse ê tre , et ont encore
ajouté au titre et à la bonne foi de l’acquéreur de cette
M arie M olin.
C ’est à ce point principal que doit se réduire cette
immense affaire. Plus il y auroit du doute sur les ques
tions secondaires, plus il seroit équitable de se décider
par la prescription de dix ans entre présens. Il suffit
de comparer les sentences et jugemens de 178 4 , 1790 ,
1793 , avec l’acte du 14 février 1793 ? les cédule et procès
verbal de pluviôse et ventôse an 9 , et les moyens qui
viennent d’être détaillés , pour demeurer convaincu,
d’après la disposition du Code c iv il, d’accord avec la loi
romaine, d’après même Boutaric , Serres et de Bezieux,
que jamais il n’y a eu cause où cette prescription fût aussi
favorable que décisive. A u surplus, les subsidiaires ne
laissent rien A désirer , pour repousser une ténacité d’au
tant plus injuste, d’autant plus tém éraire, que les intimés
ne sont réellement rien dans cette affaire. C’est un sieur
M o lin , leur paren t, auteur et partie secrète, tant de
�( 43}
la procédure dont il a écrit et dirigé presque toutes les
pièces , que de l’acte du 14 février 1793, où il n’est pas
en qualité, quoiqu’il soit la principale partie qui a été
ensuite souvent rappelée, pour son profit, dans les actes
de procédure.
Me. C O U H E R T - D U V E R N E T , avocat.
Me. C O S T E S , avoué .
A R I O M , de l ’imprimerie de L a n drio t , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chouvenc, Jean. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Costes
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : A juger, d'après cinq audiences, pour Jean, et autre Jean Chouvenc, père et fils, appelans, demandeurs en tierce-opposition ; contre Catherine Molin, et les mariés Vendriès et Borne, intimés, défendeurs.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1778-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1610
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_G1611
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1612
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53284/BCU_Factums_G1610.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53242/BCU_Factums_G1502.pdf
909b27e6f454feb8207dae025e0f2c10
PDF Text
Text
ai
COUR
D ’A P P E L
SÉANT
%»' » iu<«k iir
A RI OM.
J a c q u e s C H A V E , appelant ;
C O N T R E
Jeanne
L
A
VALLA, et E l i s a b e t h FERRIER,
sa fille , majeure intimées.
,
recherche de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœurs un scandale de moins. D ans ce secret de
la nature , le législateur ne p o u v o it que s’en rapporter à
la crédulité de l’ h o m m e , ou se jeter dans le vagu e des
conjectures : le prem ier parti seul étoit juste; la loi l’adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nom m er son p è re
que celui qui a vo ulu se déclarer tel.
N ul acte ne doit donc être plus lé g a l, plus lib r e , que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incomA
�1
( o
patible avec elle ; car si elle n’est pas clairement l ’eiTet
^
spontané de la réflexion , le bu t m oral de la loi n’existe
plus.
* - *'* -uXLî^ g\
L ’appelant réclam e contre l ’oubli de ces p rin c ip e s, et se
place sous la protection de la c o u r , p o u r faire annuller un
***'
acte in fo r m e , auquel on l’a fait participer par la violence ;
4
il demande à n’être par foi’pè île rçcpnnqître un enfant. ' ',
•
y* " '
■
U fX«rilÉi)
qui ne fut jamais le sien.
-y*
^
^
L es premiers juges n ’ont pas vo u lu admettre là jîreuve*«'^ >*u
q u ’il étoit à m êm e d ’o ff r ir ; et si cette o p in io p ,'p o y v o it ^ .*
p ré v a lo ir , il en résulteroit que , contx;e ,le-*vœu'de i« l a i f
un h o m m e donneroit son nom m algré lui à u n 'e n fa n t
**••?
n a tu r e l, seroit contraint de prendre soin d’un étrtfng^r,-' *- >
et de lui laisser sa succession.
. ;
*" '
F A I T S .
Jeanne Valla^ et Elisabeth F e rrie r, sa fille, habitent le
lieu de M a z e t , m airie de Cham bon. L eu rs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques C h a v e ,
qui demeure à la distance d ’environ une lieue de leur
domicile.
Son â g e , plus avancé m ôm e que celui de la m ère, ne lui
eût donné aucun prétexte de se rapprocher de la fille. U n
séducteur à ch e v e u x blancs est ra re ; au village il ne connoît pas l’oisiveté qui nourrit les illusions, et la m onotonie
de ses travaux rustiques avance l’amortissement de ses
sensations, en occupant toute son existence.
Ces femmes étoient donc absolument étrangères à Clia ver
lorsque tout d’ uu coup il s’est trouvé m êlé à leur destinée
**
�(3)
SU
p ar une de ces sourdes m anœuvres que l ’enfer seul peut
faire concevoir.
U n matin à huit heures ( le 21 germ inal an 9 ) , Jacques
C have , m a la d e , est brusquem ent arraché de son lit par
deux frères de la fille F errier , suivis de trois autres jeunes
gens armés de bâtons ou de fourches. Il se disent envoyés
par le sieur de B an n es, m aire de C h a m b o n , et comman
dent i'i C have de les suivre dans la maison de ce sieur de
Bannes. Il s’habille et les suit.
L à il trouve Jeanne V a lla qui paroit en grande ç o l e r e ,
l ’accueille par des injures grossières , lui dit que sa fille est
a c c o u c h é e , depuis quinze j o u r s , d’un garçon dont il est
le p è r e , suivant le récit de sa fille et de M . le m aire de
C ham bon , et q u ’il faut signer sur le cham p l’acte de
naissance.
C h a ve , étourdi d ’une vespérie aussi in a tten d u e, pressé
entre les cris de la m ère , les coups de poings des f r è r e s ,
et les menaces de leurs trois hom m es d’esco rte, veut éle ver
la v o i x , et in v o q u er la notoriété p u b liq u e; des bâtons sont
levés contre lui p o u r toute réponse : il sollicite la justice
du m aire , mais le m aire le pren d à part p o u r lui dire
q u ’ il falloit céder à la circonstance, et que sa v i e .n etoit
pas en sûreté. L ’avenir a appris à C h a v e quel interet pres
sant le m aire lu i- m ê in e avoit a ce que la calom nie eut
une direction certaine.
O n com prend alors que cette derniere insinuation a
ébranlé le courage de Chave. L e sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efFace quelques mots, en subs
titue d’a u tre s , et remet une plum e à C h ave : une seconde
résistance am ène de nouvelles violences. I l fait enfin ce
q u ’ on exige ; il signe.
�(4)
E n sortant de chez le m a ire , les satellites le mènent au
cabaret, se font donner ù b o ire , le forcent à p a y e r, mettent
l ’enfant dans ses bras , lui font les pins horribles menaces
s’il dit un m ot ; et se retirent.
Sans doute il m an gu e à ces faits beaucoup de circons
tances
importantes ; mais C h a v e , glacé d’épouvante ,
étoit-il libre de r é flé c h ir ? L a plupart de ces détails ont
échappé à sa m é m o ire , ou plutôt à son attention».
Enfin C h a y e , revenu de son étourdissem ent, p ut réflé
ch ir sur les conséquences de l ’acte qu ’on venoit de lui
e x t o r q u e r , et sur le parti q u ’il avoit à prendre.
L a dém arche la plus pressée et la plus indispensable,
étoit de se débarrasser de l ’innocente créature q u ’une
m ère dénaturée avoit rejetée de ses bras p o u r l'aban
don ner aux. soins d ’un étranger. C h a v e hésita s’il la
r d p p o r te r o it, dans la n u i t , à la porte des F e rrie r : cepen
dant la l’e l i g i o n , l’hum anité , peut-être la terreur pourlu i-m è m e , l’em p ortèren t sur son d é g o û t , et il fit porter
l’enfant à une nourrice.
M a is aussitôt, et en signe de sa protestation, il rendit
plainte au juge de p a ix de T e n c e ; le juge de p a ix le
ren voya au magistrat de sûreté : mais com m e la plainteéloit dirigée aussi contre le m a ir e , les autorités délibé r è r e n t , et ne résolurent rien.
C h a v e in q u ie t , et ne voulant pas que son silence p ût
d éroger a son d r o i t , se décida à citer, le floréal an 9 ,
5
tant Jeanne V a lla et sa fille , que le m aire lui - même-,
p o u r v o ir dire q u ’il seroit restitué contre la reeonnoissince de paternité qui lui avoit élé extorquée p:ir la
v io lé iit e , et que le m aire seroit tenu de rayer du registre
�3ï
XO>
( 5 >
ce qui concernôit ladite reconnoissance •, et la m ere et
la iille p our être condamnées à reprendre l’e n f a n t , payer
ses alimens chez la n ourrice , avec dommages-intérets.
O n pense bien qu’au bureau de p aix la fille F e rrie r
ne manqua pas de faire la réponse d’ u sag e, qu ’elle avoit
été séduite et abusée sous promesse de m ariage , et q u ’elle
seroit en état de p ro u v e r les familiarités de C h ave avec
elle ; celui-ci l ’en d é fia , et ajouta m êm e q u ’il offroit de
p ro u v e r c e u x avec qu i elle avoit eu fréquentation.
T o u t cela étoit de trop de part et d ’a u t r e , puisqu’il
n’èst permis de rien p ro u v e r
et la fille F e rrie r ne
risquoit rien à faire b onn e contenance. Q u o i qu'il
en
s o it, un p rem ier ju g e m e n t, du 28 p luviôse an 1 0 , m it
le m aire hors de p ro cès, com m e ne p o u v a n t être juge
sans au torisation , et a p p o in ta les autres parties en droit.
Cet appointement ne fournit pas plus d’éclaircisse
ment. C h a ve persista toujours à offrir la p reu ve de la
violence exercée contre lui -, et les femmes F e r r i e r , q u i ,
au bureau de p a i x , n’a voien t paru a vo ir aucune crainte,
firent leurs efforts p o u r soutenir cette p reu v e inadmis
sible. L e u r système p r é v a lu t ; et le 14 fructidor an 1 0 ,
le tribunal d ’-Yssengeaux rendit le jugem ent qui suit.
.1
« Considérant que l'article 2 du titre 20 de l'ordonnance de 1GG7
défend de recevoir la preuve par témoins contre et outre le contenu
aux actes publics; qu'à la vérité la force, la violence, sont un
moyen pour les faire rescinder, mais qu’en ce cas il faut articuler
de menaces graves, qui feroient craindre pour la vie nietus rnortis,
ou que la partie obligée auroit souffert ‘cliarte privée, ainsi que*
Renseignent Domat en ses Lois civiles, et Potlûtr en son T ra ité
des obligations;
�7
( 6 )
» Considérant que Jacques Chave n ’a articulé qu’il lui ait été
fait aucune menace, ni qu’il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son domicile, ni dans celui du maire où il s’étoit
rendu pour reconnoilre pour lui appartenir reniant d o n t s’éloit
accouchée Jsabeau Ferrier; et qu’étant dans ce dernier domicile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
éprouvés, contre ceux qui s’cn seroient rendus coupables envers
sa personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
Cependant C h ave avoit offert expressément de faire
p reu v e de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il étoit p riv é alors d ’un m oyen important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite aloi*s au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de B a n n es, m a ire , qui avoit trop d ’intérêt
à en cacher l’irrégularité p o u r la faire soupçonner. A u
reste, C have s’est p o u rv u en la cour contre le jugem ent,
et il sera question d’exam iner de quelle influence la form e
de cet acte doit être p o u r la décision du procès.
M O Y E N S .
L ’ancienne législation française étoit extrêm em ent dure
contre les enfans naturels; et cependant, par une étrange
inconséquence., elle admettoit les preuves de paternité
sans distinction. A u jo u r d ’hui la loi a fait p o u r eu x
davantage : mais sans v o u lo ir percer le mystère qu i
cou vre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences; .elle ne vo it dans
l ’enfant né hors le mariage q u ’ une innocente créature
�^ / 7
/
digne de la pitié de tout le m o n d e , mais ne tenant à la
société que par celle qu i lui a donné le jour. Si cepen
dant un hom m e , gu id é par des apparences q u ’il a ie droit
djapprécier lui - m êm e , et cédant à l’impulsion de sa
conscience,
veut se don ner le titre de p è r e , la loi le
lui p erm et, s’ il n’est engagé dans les liens du mai’iage :
mais com ptant p o u r rien aujourd’hui toutes les démons
trations exté rie u re s, elle exige une déclaration authenti
que et non éq u iv o q u e ; elle prescrit à l’acte une solen
nité plus grande que p o u r la naissance m êm e de l ’enfant
légitim e.
L ’intention du législateur étoit si claire, q u ’elle a ôté
tout prétexte à l ’astuce, et n’a laissé de voies q u ’au faux
ou à la violence. M ais à q u i peut être réservée l ’une ou
l ’autre de ces vo ie s criminelles ? Ce n’est pas à la fille tim ide
q u i , rougissant encore d ’ une prem ière foiblesse, et par
tagée entre l’am ou r de son enfant et la honte de sa nais
sance, n’en ose no m m er le père que dans le secret de son
c œ u r, et se fait l ’illusion de penser que le mystère dont
elle s’en velop p e la p rotégera contre l ’o pin ion qui fait
son supplice.
M ais que feront ces femmes d é b o u t é e s , qui ne voient
dans la prostitution qu ’ une h a b itu d e , dans leur avilisse
ment q u ’ un éta t, et dans leur fécondité qu’ un acciden t?
Incertaines elles-mêmes d’ une paternité q u ’elles déféroient
naguères suivant leurs convenances, elles n’en arrachoient
pas moins des sacriiices pécuniaires aux homm es qui leur
étoient souvent les plus étrangers , mais q u ’ép ouvanloit
la perspective d’ une honteuse et p ublique discussion. Si
on leur laisse en trevo ir aujourd’hu i une tolérance queU
�(; » )
c o n q u e, que leu r coûtera-t-il de tenter d’autres voies p ou r
en ven ir aux mêmes lins? E t s’ il est près de leur demeure
un citoyen paisible, q u i, p ar ses mœurs douces et réglées,
puisse passer p o u r pusillanim e, quelle difficulté y aura-fc-il
de répandre adroitement que c’est là le c o u p a b le , d’ip téresser contre lui qu elqu e personne c r é d u le , de l’effrayer
lu i-m êm e sur les dangers de sa résistance, d’ameuter s’il
le faut ceu x qui ont un intérêt réel <iu succès de la n é g o
ciation ! Jadis il falloit des témoins,«aujourd'hui il ne faut
q u ’une simple signature; tout cela p eu t s’exécuter avec
rapidité : ce n’est q u ’un changem ent de com plot.
Heureusem ent cette rapidité m êm e ne laisse pas au
crim inel le calm e de la réflexion : souvent scs fautes le
trahissent, e t , quelques légères qu ’ elles soient, il faut les
com pter avec scrupule; car on est bien assuré qu’ ellesne
sont pas un simple résultat de sa n égligen ce, mais q u ’elles
ont é c h a p p é à l’excès de sa précipitation.
C e u x qu i ont gu id é la fille F e rrié r dans ses démarches
n ’ont pas visé à l’exactitude ; la co u r en sera convaincue
bientôt par la form e de l’acte de naissance qui fait son titre.
U n e seconde décou verte la convaincra encore q u ’il ne
s’agit point ici de ré p a r e r , envers une fille s é d u ite , des
torts que la m alignité suppose toujours. L a fille F errier
a , le 20 prairial an n , donné une n ouvelle p reu v e de
sa con tinence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m è r e , que l’acte apprend m êm e avoir
été sage-femme en cette circonstance.
Il ne paroît pas que p our cette fois la m ère et la fille
Fen-ier aient jugé à propos de réunir un conseil p o u r
disposer du nouveau n é , et lui élire un père ù la p lu
ralité
�(?)
ralité des suffrages; il est vraisem blable que la précédente
tentative les avoit intimidées.
• Q u o i q u ’il en soit, et soumettant cette découverte p ré
cieuse aux réflexions de la cou r , l’appelant ne s’en occu
pera pas plus lo n g -te m p s , et se contentera d’observer
q u ’ il n’y a rien de légal dans la prétendue déclaration de
paternité q u ’on lui a fait sig n er, et au surplus que les faits
-de violences articulés suffiront p ou r la détruire. C ’est à
l ’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i ° . L a d éclaration de "paternité n e s t pa s légale.
Ija lo i du 12 bru m aire an 2. s’occupoit de trois espèces
d ’enfans naturels, après a vo ir décrété en principe qu ’ils
^toient successibles.
i° . C e u x dont le p è r e é t o it d é céd é , et il leu r suffisoit
de p ro u v e r une possession d’ é t a t , par des soins donnés
à titre de p a te rn ité , et sans in terru p tion ; 2°. xles enfans
d ont le père et la m ère seroient encore vivans lors du
C o d e c i v i l , et leur état civ il y étoit re n v o y é ; 3 0. de ceu x
dont la m ère seule seroit décédée lors de la publication
d u C o d e , et alors la reconnoissance du p è r e , faite devant
l ’oilicier p u b l i c , rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’ un enfant de la seconde espèce ; et le p ré
tendu p ère , quel qu ’il s o i t , de m êm e que la m è r e , sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle
urgence y a v o i t - i l de
p réve n ir la publication du Code civ il , en faisant faire
une déclaration que la loi ne demandoit p a s , et q u ’ello
B
�ajournent au contraire ? N ’a percevroit - on pas déjà le
do l dans cette extraordinaire p révoyance ?
D ira -t-o n que le Gode civ il prescrit aussi une décla
ration au th en tiqu e, et q u ’ on n’a pas v io lé la loi en la
devançant ? M ais qui blâm era les législateurs de l’an 2 ^
d ’a vo ir vo u lu p r é v o ir q u e leur système ne seroit peutêtre pns celui du C o d e civ il ? qu i leur reprochera d’a v o ir
supposé que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de maturité , et de s’être défiés de le u r
p rem ie r système sur une innovation aussi im p o rtan te?
Ils vo u lu ren t rég le r le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la lo i transitoire du 14 floréal an 11 ,
nous apprennent assez q u ’il n’y a eu , dans l ’intervalle d e
l ’an 2 à l ’an 1 1 , aucune législation touchant les enfans
naturels. L es bulletins de la c o u r de cassation sont aussi
rem plis d’arrêts qu i ont cassé tous les jugeinens dans lestjuels les tribunaux avoient vo u lu r é g l e r , m êm e p r o v i
soirem ent , le sort de quelques enfans n a tu re ls, pendant
cette lacune d e n e u f ans.
Il ne p o u v o it donc être question d e fixer l ’état d e
l’enfant d ’Elisabeth F e rrie r q u ’après le Code c i v i l , dont
l ’art. 334 p orte que la recounoissauce sera faite par un acte
a uthentiqu e, si elle ne l’a pas été par l ’acte de naissance.
M ais fût-il indifférent q u e la rcconnoissance contestée’ „
•ait été faite avant ou après le Code c iv il, m algré la sus
pension totale e x ig é e par la cou r d e cassation , et rappelée
par la loi transitoire; cette reconnoissance n ’en est pas
moins ir r é g u liè r e , car elle n ’est faite ni par l’acte d e
naissance lu i-m êm e, ni par un acte séparé authentique*
V oici com m ent cet acte est littéralement écrit au registre*
�c » î
A c T I
D I
N à Î S S A S C I i
rt D u huitième jour du mois de germinal, l’an 9 de la répu« blique française. A cte de naissance de Jacques^ f i l l e ( Ce mot
» est effacé, et on y a substitué au-dessus, dans Vinterligne,
» F e r r i e u , que l’ on a encore effacé, et l ’on a écrit à côté G11 a v e . ),
» né hors de mariage, né le septième jour du mois de germinal,
» à sept heures du soir, fils d ’isabeiu Ferrier, non mariée, domi» ciliée du lieu de la Marette, susdite commune, et Isabeau Ferrier,
» non mariée; le sexe de l’enfant a été reconnu u n e ( On a couvert
» d’encre la lettre e . ) f i l s , né hors de mariage : premier témoin,
» Jean-Pierre Ferrier, demeurant à C iiam bon , département de
» la H a u te - L o ir e , profession de cultivateur, âgé de irente-neuf
» ans; second témoin, Pierre Rue], demeurant à C h a m b o n , dé-*
u partement de la H a u t e - L o ir e , profession de tailleur d ’habits,
» âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite par
» Marie R u e l, sage-fem m e de ladite accouchée, avons inscrit le
» sus-nommé Jacques Feuuieu ( C e mot est raturé, et l’ on a mis
y> au-dessus, dans l’ interligne, C iia v e. ), portant l e n o m d e sa
» m è r e ( Ces mots ont été rayés, et l ’on y a substitué ces mots :
» l e n o m d u p è r e . ); et ont la déclarante ne savoir signer, et les
» témoins signé. Ferrier, R u e l, signé à l'original. »
« Ledit Jacques Chave père reconnolt ledit Jacques son fils, de
» ladite déclaration de la présente, acte; le reconnoit pour son
»> véritable fils, avoir droit à tous ses biens, en présence de Jean» Louis Riou. ( -f* Ici est un renvoi. ) Constaté suivant la loi, par
» moi Annet de Bannes, maire de la commune de Cham bon, fai» sant les fonctions d ’officier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e Bannes, maire, signé.
“
Et de Pierre C allon , et de Jean-Pierre Fresclict, et de Jeanw Pierre Ferrier ; et dit Jacques Ghavd a signé avec les tcmoin$.
13 2
�_»
t
(
)
» Ont signé, ledit Pierre Callon a déclaré ne savoir signer , C liave,
» R io u , Freschet, Fcrrier. D e Bannes, m aire, signé. »
( Nota. L ed it renvoi est en marge, en travers. )
■
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecture
de la Haute-Loire ,
BARRÉS.
Il est aussi ¿vident q u ’il puisse l ’ê t r e , que cet acte se
compose de deux parties Lien distinctes , qui në sont pas
d ’un m êm e c o n t e x t e , ne sont pas l’ouvrage du m ê m e
m o m e n t , et cependant ne sont pas deux actes absolu
m ent séparés.
i° . A c t e de naissance bien parfait et très en r è g le , d’un
enfant né dyls a b e a u F e r r ie r , s a n s m en tion d u p ère.
O n lu i donne le nom de sa mère. Il y a deu x témoins
de cct a c te , Josep h F e rrie r et M a rie R u el. L ’acte est
donc com plet : le v œ u de la lo i d u 20 septembre 1792
est rem pli.
,
2°. V ie n t ensuite une déclaration de C h a v e , qui est à
la suite du p rem ie r a c t e , et qui a exigé des surcharges.
M a is p e u t - o n , de bonne f o i , y v o ir un acte authen
t i q u e , une reeonnoissance de paternité telle q u e la loi
la com m ande et que la raison la c o n ç o it ?
Cet acte n’a aucune date , parce q u ’en effet il a eu
lie u
le 21 g e r m i n a l, et a été ajouté a un acte terminé depuis
le 8. Com m ent supposer en effet q u e celte déclaration
finale fait partie de l’acte du 8 ? Les témoins dénommés au
.prem ier u c signent pas la déclaration.
�/
37
( 13 )
O n a raturé et interligné le prem ier acte de naissance,
sans faire i*ien ap p ro u ver aux prem iers témoins. L e maire
se u l ap p ro u ve t o u t , m êm e ce q u ’il lui plaira de raturer
e n c o re ; les autres t é m o in s , C h a v e l u i - m ê m e , ne font
aucune approbation. O r , il est de p rin cipe que les ratures
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n ’y a appro
bation des parties et témoins.
Il est un autre p rin cipe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’ importance q u ’ils aient; c’est que les tém oins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le f r è r e , qui ont déclaré la naissance le 8 , n ’ont pas signé
à la fin. Si c’est un seul et m êm e acte, les uns l’ont signé
au m ilie u , et d’autres à la fin : chose bizarre et rid ic u le ,
qui ne peut s’a llie r avec la g r a v ite de l ’acte qu’on prétend
maintenir.
Q u e p e u t - i l résulter d’un acte de cette e s p è c e , si ce
n ’est de la pitié p o u r ses ré d a c te u r s , et une conviction
intime que ce n’est pas C h a v e qu i est allé déclarer la n a is
san ce d’un enfant com m e s’en disant le père ?
L e but de la lo i n’est donc pas rem pli ; car dans qu elqu e
form e que dût être une reconnoissance de p a te r n ité , il la
falloit dans l’acte m êm e portant la déclaration de naissance,
ou bien il falloit un acte p a rtic u lie r, daté lu i- m ê m e , et
qui 11e fût pas réd igé dans une form e ayant p o u r but de le
rattacher à un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous q u e l ’article 334 du Code civ il dilt
que la reconnoissance sera faite p a r l’acte de naissance,
«u p a r un acte ath en tiqu e; à qu oi l’article 62 ajoute que
la c té de reconnoissance sera inscrit sur les registres n sa
date y et q u ’il en sera lait m ention en m arge de l’acle de
naissance.
f-V
�7
C «*
B.appelons-nous encore que le but bien positif de la loi
est de ne com pter p o u r rien les reconnoissauces antérieures
au c o d e , quand l ’auteur est vivant. Il en est de cela com m e
des testamens antérieurs à l’an 2, q u ’ il falloit refaire p o u r
les circonscrire dans les termes du droit nouveau. L a loi
a eu ici un but plus m oral : les changernens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons pas sur l ’im portance des formes
dans une matière aussi délicate : on est si scrupuleux
p o u r tant d’autres actes! U n seul m o t é q u iv o q u e en un
testam ent, détruit toute la volon té d’ un père de fam ille;
u n e donation exige encore des formes plus m ultipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importans qu e celui où il s’agit
de transmettre sou nom et sa fortune ; où il s’agit de plus
e n c o r e , de vaincre l ’opinion et de surm onter sa p ro p re
répugnance ? D ’ailleurs , p o u rq u o i 11e p ourrion s - nous
pas dire p o u r un tel acte ce que R ica rd dit des tcstam ens,
« q u e toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leu r solennité consiste dans les formes ? »
A u jo u r d ’hui il faut y ajouter une v é rité bien c e r t a in e ,
c'est que la seule supposition q u ’un h o m m e est tenu et
obligé de se charger d ’ un enfant naturel sans sa libre
v o l o n t é , est incom patible avec le système indubitablem ent
reçu sur la législation des enfans naturels.
20. Cette d écla ra tion de p a tern ité est n ulle , s 'il y
a
violen ce. L e s f a i t s a rticu lés suffisent. L a preuve en
est a d m issible.
On est extrêmement sévère dans le monde pour ju ger
�5
( i
)
des eiTets de la p eu r d’autrui ; e t , quand on en com
mente les p articu larités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu ’ on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à rég ler p o u r soi-m êm e;
c a r , en d e u x cas semblables , le m êm e in d ividu se c o n dui roit rarem ent deux fois de la m êm e manière. M ais
celui q u i raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il ra is o n n e , tandis que le p rem ier elfet de la terreur
est d ’absorber toutes les réflexions / p o u r ne laisser place
q u ’à une seule id éed om in an te, la conservation de soi-même.
Q uelques auteurs , partageant sur ce point les idées du
v u lg a ir e , sem bleraient aussi se m on trer difficiles à ad
m ettre la p lup art des excuses fondées sur la crainte. 11
faut d is t in g u e r , d is e n t - ils , la cra in te gra ve et la crainte
l é g è r e , et on ne peut tro u v e r de m oyen rescisoire q u e
dans celle qui su ffiro itp o ur ébranler la ferm eté de l’h o m m e
le plus in tré p id e , m etus n o n v a n i h o m in is , sed q u i in
1
h om in etn co n sta n iissim u m c a d a i, . 6 , fF. Q u o d m etus
causa.
Ces a u te u rs, s’en tenant à une lo i isolée démentie p a r
beaucoup d’autres, n’ ont pas v o u lu ap ercev o ir, dans cette
rigueur étrange, un m on u m ent de la iierté romaine plutôt
qu’une règ le générale. Ce p e u p le , qu i avoit détruit le
tem ple é le v é p ar T u llu s à la C ra in te , n’ éto it, en la pros
crivant p ar ses lois, que conséquent avec lu i-m êm e . Sous;
un système de conquêtes sans b o rn e s, et avec une consti
tution toute m ilitaire, quel rom ain p ou vo it allégu er u n e
crainte lé g è re ! E le v é dans les carpps, son excuse m êm e
eut consacré sa houle , et la loi étoit rigoureusement juste
en exigeant de lui l’intrépidité d ’uu soldat.
�L a France militaire ne réprouvera pas cette législation
sévère ; elle l ?c*ût créée e lle -m ê m e , s’il falloit un code au
courage. M ais les actes civils des simples particuliers ne
se règlent pas par des m axim es nationales; la théorie
principale des lois consiste à les a p pro p rier au x mœurs
de ceux q u ’elles doivent régir.
G ardons-nous donc de l’exaltation , quand elle est hors
de m esure; ne nous obstinons pas à tro uver un Scévola
dans un laboureur tim id e , qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
L es auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D o rn a t surtout, à qui les premiers juges ont fait
Finjure de prêter une opinion si contraire à son discer
n e m e n t, D om at , dont l’ouvrage im m ortel n ’est que le
précis des lois rom aines, bien loin de se fonder sur la
loi 6 , ne la signale que p o u r en blâm er la rudesse.
« N ous avons v o u l u , d it-il, rétablir les principes na« tu rels, et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit rom ain parmi celles de cette sec« t i o n ......... T o u tes les voies de fait, toutes les violen ces,
■
v toutes les m enaces, sont illicites; et les lois condam« lient non-seulement celles qu i mettent en p éril de la
k vie ou de quelque tourm ent , mais toutes sortes de
« voies défait et mauvais traitemens. E t il faut rem arquer
« que com m e toutes les personnes n ’ont pas la m êm e
« fermeté p o u r résister à des violences et â des menaces,
ce et que plusieurs sont si foibles et si tim ides, q u ’ils 11e
« peuvent se soutenir contre les moindres impressions,
« un n e d oit pas b o rn er la p rotection des lo is con tre les
« m en a ces
�/-«
4 ^
( ij )
« m enaces et les v io le n c e s , à ne réprim er que celles
« q u i so n t capables d ’abattre les personnes les plus
« intrépides ; mais il est juste de p rotéger aussi les plus
« tim id es............
« 11 est t r è s - j u s t e , et c ’est -nôtre u sa g e , que toute
« violence étant illic ite , on réprim e celles m êm e qui
« ne v o n t pas à de tels ex c è s, et qu’ on répare tout le
« préjudice que peu ven t causer des violences qui enga« gent les plus foibles à qu elqu e chose d’injuste et de con« traire à leur intérêt : ce qu i se tro u ve m êm e fondé sur
« quelques règles du droit r o m a i n ............et ces règles
« sont tellement du d ro it n a t u r e l, q u ’zV ne p o u rro it y
« a v o ir d ’ordre dans la so ciété des h o m m e s , s i les
« m oin dres violen ces
étaien t réprim ées. » ( Sect. 2 ,
des vices des c o n v e n t i o n s , p ré a m b u le .)
•’
Il est peut-être inu tile, après a vo ir cité D o m a t , de faire
d’autres recherches ; mais les prem iers juges ont encore
fait l’ injure à P o th ie r de lui prêter des principes qui ne '
sont pas lës siens.
•
Cet auteur cite les lois ro m a in e s , et par conséquent
les rappelle
lelles q u ’elles sont. M ais il termine son
article de la crainte par dire que « le p rincipe qui ne
« connoît d’autre crainte sufTisante p o u r faire pécher un
« contrat par défaut de lib erté, que celle qui est capable
« de faire impression sur l’hom m e le plus c o u r a g e u x , est
« trop r ig id e , et ne doit pas être suivi parmi nous à la
« lettre ; on d o it, en cette m a tiè r e , a v o ir égard à l'â g e,
« an se x e et à la con d itio n des personnes ( i) ; et telle
( «) Expressions copiées mot pour mot en l'art. 111 a du Code civil.
c
�C 18 )
« crainte q u i ne seroit pas jugée suffisante p o u r a vo ir
« intim idé l ’esprit d’un hom m e d ’un âge m û r ou d’un
« m ilita ire , et p o u r faire rescinder le contrat qu ’ il aura
« f a i t , peut être jugée suffisante à l’égard d ’ une fem m e .
« ou d ’ un v ie illa r d , etc. » ( T ra ité des
page i re. , cliap. I er. , n°. 2 5 , in fin .)
obligations,
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
fortifiée par d ’autres citations, on les puiseroit dans les lois
romaines elles-m êm es, q u ’il ne faut pas juger par un
fragm ent u n iq u e , et q u i, au c o n traire, nous enseignent
ce que D om a t et P o th ie r vien nen t de nous apprendre.
T o u t consentement doit être l i b r e , disent plusieurs
lo is; e t, p o u r être restitué, il n’est p is besoin d’une v i o
lence c o r p o re lle , mais seulement d’ une crainte inspirée
à celui qui contracte; q u p a d ju sta m restitu tio n is ca u
sa/n n ih il refert u tràm y i an inetu q u is c o g a tu r . . , .
et q u o a d effecturn ju r is u tro b i deest c o n s e n s u s , a c
libéra volu n tas p a tie n tis , ut velle Ji,on videatur. L . 1 , 3 ,
7 e t ü , ff. q u o d m et. C. L . 1 1 6 , de r e g .ju r. ( in C o rv in o .)
Ces lois étoient bien- inoin§ dures, que nç l ’pnt sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la c ra in te , quand m êm e C h a ve auroit été
hors d’état de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
inspirée;, n on tatne/i ne cesse est des ig n a r e, perso n am
q u œ m etum in t a lit, sed s u jjic it p r o u a r e in c tiu n , q u ia
7/ietus habet in se ignorantiar//. f , . 14. ff. eod.
En lin , ce qui achève de convaincre que ces lois savole,nt
aussi se mettre à la portée de la foi blesse des h o m m es,
cYst q u ’elles expliquent q u ’ il 11’étoit pas nécessaire de
p ro u v e r l'existence d’un danger- r é e l , mais seulement
�4 $
*
(* 9 )
'.
.
,
.
.
la crainte de ce d a n g e r , qui en elTet devoit detruire le
i)
consentement. S i ca u sa f u is s e t , c ü r p ericu lu m tim eret\
q u am vis p ericu lu m uerb n on f u i s s e t . . . . non con sid é-.
ra tu r e v e n tu s, sed ju s ta opin io.
e0l^‘
1
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc un guide bien sûr:1
A u lieu d’adopter l’antique rig u e u r d ’une lo i oubliée par*
les Rom ains e u x -m ê m e s , il a 4jugé que la crainte inspirée
à C h a ve n’avoit pas été un m o tif suffisant p o u r le con
traindre ; e t cependant il ig n o ro it jusqu’à q u e l'p o in tC h ave avoit été contraint ou menacé ; il l’ ignoroit ët ai
v o u lu l ’ignorer to u jo u r s , en refusant de s’ éclairer par uné'
p reu ve : cependant les faits articulés étoient graves. C h a v e
ofl’r oit et o iïïe encore de p ro u v e r ces f a i t s articulés", etnotam m ent,, i° . que le 21 g e rm in a l îcs frères F e r r ie r ’et*
d ’autres h o m m e s arm és de bâtons SOLlt'Venus c h e z 'l u i
2°. q u ’ils l ’ont forcé de se lev er et de les s u iv r e ,'e n le
m en açan t;
3 0.
que chez de Bannes ils se sont opposés
toute e x p lica tio n , l ’ont in ju rié, menacé et frappé*,
4°.
à*
que1
de Bannes l’a pris à part pour: l ’exhorter à céder à la fo r c e 1
et éviter un plus grand m a l; °. qu’on l’a fd rc é'd e Vëriir'
5
dans un cabaret, où on lui a remis un e n fa n t, avec de
nouvelles menaces.
M a is , a dit le tribunal d’Yssengeaux/, C lia v e 5, soiti dé'
sa m aison.et conduit chez le m aire, p o ù vü it récltfifrér.
■
C e seroit une réflexion b ieiyn atu rèlle, si les faits même'de la caiise n’ étoient déjà venus la détruire ; car ce m aire
lu i-m êm e étoit si peu disposé à user de son a u t o r ité ,'
qu’ il est difficile de ne pas le juger au contraire intéressé1
à l’événem ent.
’
I
1'
il
Muis à quelle protection , il faut' le d ire , auroit pu
�( ' 2 °- )
s’attendre un m alheureux à la m erci de c in q :individus ,
dans le domicile isolé d ’un m aire de v illa g e ? Battu à ses
y e u x , Chave p o u vo it-il se croire dans un asile in viola
b l e ? L e maire lu i-m êm e, l ’e x h o rta n t'à céder à la fo r c e ,
m.ettoit le com ble à sa terreu r, et déclaroit, ou sa p ro p re
c o m p lic ité , ou au moins son impuissance.
L ’acte le m oins im portant d e là v ie seroit vicié par une
semblable v i o l e n c e , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incom patible avec la m oindre contrainte. U n
p ère de famille a contracté un engagement sacré envers
m*s enfans par son m a ria g e; mais c e l u i- l à m êm e qu i
auroit p rocréé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien c iv il :.so n h o n neur et les sentimens de la
nature deviennent leu r unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. L es enfans naturels n ’ont point de
fam ille; tel est le langage d e là lo i : elle ne veut pas qu ’ils
en aient une. Q u an d leur père se nom m eroit hautem ent
dans le m o n d e , il ne seroit tenu à rien; la loi lui perm et
seulement de se. déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volon té seroit donc se croire plus sage
qu ’elle.
M ais si la loi n’exige rien d’ un père , si elle consi
dère com m e un vice m oral de lui don ner un iils que
sa prop re vo lo n té cependant n’a pas désavoué , peut-on
soutenir l’ idée révoltante q u ’ un h o m m e sera contraint
m algré lui^d’adopter un enfant dont il n’est pas le p è r e ?
Q u i lui donnera la force de supporter , dans sa de
m e u r e , la vue habituelle d ’une créaLure si étra n g è re,
placée là p ou r sa honte im m u a b le, sans aucune com pensatioU'SatisiaisantQ ? et qui oseroit répondre que dans
�4 > '
( 21 )
^
cette situation de d é sesp o ir, aigri p a r u n sentiment d’in
justice , il p û t assez maîtriser une fu re u r c o n v u ls iv e ,
q u i seroit tout à la fois le tourm ent de l’innocence
et
son p ro p re Supplice ?
E loign on s plutôt de vagues suppositions fondées sur une
p u re chim ère. L a p révo ya n ce des magistrats distinguera
la v é rité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. O n ne donne p o in t à u n h o m m e l ’enfant
q u ’il repousse avec m épris , qu and la lo i n’en fait pas
un devoir. L a c o u r doit p ron o n cer ici sur les consé
quences d ’un acte l i b r e , et tout p r o u v e q u ’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qu i donne lieu au procès. C h a v e ,
con d uit p a r la f o r c e , m enacé dans sa r o u t e , a signé
sous le bâton ; et, p o u r se s e r v ir des expressions de D o m a t,
si un consentement de cette espèce étoit jugé validç , ce
■seroit un a tten ta t a u d ro it n a tu re l ; i l n y a u r o it p lu s
d ’ ordre dans la so cié té des hom m es.
L a conduite d’Isabeau F e rrie r , l ’ép oque de ses co u -ches, c’est-à-dire, de celles qu i donnent lieu au procès,,
le c h o ix de ses croupiers , le lieu de la scèn e , la cir
constance q u ’ un acte de naissance a été c h a n g é , e t c . , tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , m a is.q u i sei’oient oiseuses, tant que la p reu ve
de la violen ce ne sera pas ordonnée.
Cette p r e u v e , sans con tred it, est adm issible; aucune
ordonnance ne la p r o h i b e ; et ce qui é to n n e , c’est que
les prem iers juges n ’aient pas v o u lu p ronon cer en connoissance de cause.
Il est possible que la m alignité toujours nvide de calom
nie , et toujours difficile ù d é t r o m p e r , prétende que C h a v e
�%
,
. .
( 22 )
n ’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth F errier
de ce dont on l ’accuse : mais il en prend le ciel à tém o in ,
cette fem m e lui fut toujours étrangère.
C h a v e , maître de ses actions , célibataire , feroit sa
jouissance principale de se v o ir re v iv r e dans un fils qu ’il
croiroit le sien ; à son âge, et avec ses principes re lig ie u x ,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans m obiles ne
peuven t donc être vaincus 'q u e par quelque chose de
plus puissant e n c o r e , une conviction in tim e , une insur
m ontable répugnance.
Il ne demande pas à être cru sur p arole ; et si son
p rem ie r m oyen ne suffit p a s , il offre la p reu ve des v i o
lences qu i l ’ont forcé à donn er sa signature : et certes,
quand la cou r se sera assurée que C h a ve a été forcé de
sortir de son d o m ic ile , mené chez le m aire par cinq
h o m m e s , menacé et battu , elle a p p réc ie ra alors toute
la valeu r d’ une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lorsque la vertueuse Elisabeth F e rrie r sera
convaincue q u ’il ne lui est plus libre de faire de sa p ro
géniture une charge p u b liq u e , peut-être s’e fforcera-t-elle
d e mettre un terme a sa féco ndité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat,
M e . M A R I E , lic e n c ié avoué.
~
A R IO M , de l'imprimerie de L andriot , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Therm idor an 15.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
enfants naturels
faux
menaces de mort
reconnaissance de paternité
code civil
actes de naissance
violences sur autrui
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Table Godemel : Paternité : 1. la déclaration de paternité d’un enfant naturel est nulle, si elle a été arrachée par la violence. quels caractères doivent avoir les faits de violence ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1801-An 13
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1502
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0705
BCU_Factums_M0307
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53242/BCU_Factums_G1502.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de naissance
Code civil
enfants naturels
Faux
menaces de mort
reconnaissance de paternité
violences sur autrui