1
100
1
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53296/BCU_Factums_G1622.pdf
996b0d8d9122dea1ff386404671faa37
PDF Text
Text
MÉ MO IRE
D E C H A R D O N ; M a r g u er ite D E
C H A R D O N , et Jacques M O N T A N IE R , son mari;
P e r r e t t e D E C H A R D O N , veuve d e R o c h e v e r t ; et
A n n e D E C H A R D O N , fille majeure -,
M a r i e - A n n e - H é l è n e D U B O I S D E L A M O T H E , veuve
de Fre t a t ; Marguerite D U B O I S D E L A M O T H E ,
veuve Forget;
E l i z a b e t i i D E R E C L E S N E , veuve de G a s p a r d d e L i g o n d è s ;
M a r i e - T h é r è s e D E R E C L E S N E , ex-religieuse;
A n n e- M a r ie - J oseph - G arr iel- J e a n - J a c q u e s V I D A U D D E
L A T O U R et ses frères et sœurs;
F r a n ç o i s D U R A N D , de Pérignat ; G a b r i e l l e D U R A N D ,
de Pérignat; M a r i e D U R A N D , de St. Cirgues; M a r i e A n n e - F é l i c i t é F R E D E F O N D , et J e a n - J a c q u e s R O C H E T T E son mari; M a r i e - T h é r è s e B E L L A I G U E , et
autres héritiers testamentaires ou ab intestat, médiats
ou immédiats, d ’A NNE D E L A I R E , épouse de J e a n C h a r l e s C l a r y , p r é s i d e n t en la cour des Aides de Clermont-Ferrand, défendeurs;
E t e n c o r e p o u r J e a n - P i e r r e D E C L A R Y , de M u rat;
M a r i e D A U P H I N , épouse de J e a n R o d d e , de Chalagnat; E t i e n n e C H A B R E , et A n t o i n e C H A B R E , héri
tiers dudit J e a n - C h a r l e s d e C l a r y , aussi défendeurs ;
P our C la u d e - A nto in e
F É L I X , et Louis M A R L E T , son mari,
coutelier à Clermont, demandeur.
C ontre A nne
C
ette
affaire est née on 1794, a u m ilieu des orages révolutionnaires.
L a femme M arlet se prétendit alors fille naturelle adultérine
de la dame de C l a r y , et réclama à ce titre le tiers de sa succession.
�( a )
-
Elle demnnrlc aujourd'hui, après dix ans de silence, à être re
connue pour fille légitimé de M . et M mp- de C l a r y , el à recueillir
à ce titre l’universalité des deux successions.
Elle a sans doute en sa faveur les titres, la possession?
N i l’un , ni l’autre.
L a possession est contraire.
T o u s 1rs titres la condamnent.
Elle n ’a pas même pour elle la plus légère présomption , la
moindre probabilité morale ; rien enfin , qui puisse laisser un
instant en suspens l’opinion du magistrat et celle du public.
Son entreprise n ’est donc pas seulement téméraire,- elle est
l ’excès de l’audace.
Elle est l’excès de l’ingratitude; c ’est le serpent gelé, réchauffe
par le villageois.
Elle est l’excès de la mauvaise foi.
L a femme M arlet, en usurpant un nom distingué, en aspirant
à dépouiller d ’uno grande fortune des héritiers légitim es, n ’a pas
m em e pour excuse 1 ignorance <ie son sort
Pincert.itude de son
origine; il est prouve q u e lle doit le
jo u r
à une servante de la
Chapelle-Agnon.
F A I T S .
L a d a m e d e C la r y avoit de grandes propriétés dans les environs
d ’Arnbert ; elle avoit une maison dans cette ville , où elle passa les
années 1761 el 17G2.
D égoûtée du séjour d ’ A m b o r t , elle se retira à L y o n .
Naturellement sensible* et bienfaisante, elle cberclioit tous les
moyens de soulager l’infortune; et elle crut
ne
pouvoir laire un meil
leur usage de son aisance, que de l'employer à élever de jeunes filles
orphelines ou abandonnées.
Son premier mouvem ent fut d ’en prendre à l’hôpilal de L y o n ;
mais ne les ayant pas trouvées assez saines, elle préféra d ’en faire
venir d ’A m b c r t , lui paroissanl d ’ailleurs juste de répandre ses bien
�( 3 )
faits dans un pays qui étoit le berceau de scs pères et le principal
siège de sa fortune.
Elle s’adressa pour cela au sieur M adur, procureur fiscal à A m b e r t,
qui lui envoya successivement et en différens temps plusieurs jeu
nes filles, les unes tirées de l ’hôpital, les autres de chez les nourrices
dont les mois éloient payés par l'hôpital.
L a femme M arlet eut le bonheur d ’être du nombre de ces jeunes
filles envoyées par le sieur M adur à la dame de C la r y .
Elle étoit alors âgée de cinq à six ans; elle avoit été nourrie aux
frais de l’hôpital par la nommée Louvau fruitière vis-à-vis l’église
paroissiale d ’A m b e r t , où elle avoit été trouvée exposée à l’ûge d ’en
viron six m ois, pliée dans un mauvais sac et couverte des haillons
de la misère.
Arrivée à L y o n , l a d a m e de C la r y la fit baptiser, parce qu’on ignoroit si elle l ’avoit été, n ’ayant été exposée que lo n g -te m p s après sa
naissance; elle voulut être sa marraine.
Elle ajouta à son nom de baptême celui de F é lix , et elle a toujours
été connue depuis sous ce nom dans la maison de la dam e de C la ry .
Elle a été élevée, nourrie et entretenue par la dame de C l a r y ,
com m e les autres élèves ses compagnes.
P arvenue à l’àge de n e u f a n s ,
dame de C la r y crut devoir lui
faire apprendre un m étier; elle la plaça , ainsi q u ’A n n e P errier,
qui étoit aussi du nombre de ses élèves, chez le no m m é H ibaud
boutonnier; m ais, après six semaines d ’essai, elle la r e lira , parce
que sa trop grande jeunesse ne la rendoit pas propre à cet état.
• Elle la plaça ensuite, à l’âge de treize à quatorze a n s, avec une
autre de ses élèves nom m ée Catherine P errier, chez la dame Pinel
lingère dans l’allée des Images, où elle demeura deux ans.
L a dame de C la ry ayant pris le parti de fixer sa demeure à sa
terre de G o n d o lle , elle revint de L y o n avec A n n e F élix , et la
nom m ée J a n y , autre élève qu ’elle a mariée depuis avec le sieur
C o t i n , de M o n l-F erran d .
Elle envoya peu de temps après A n n e F é lix
A m b ert.
au
couvent
A 2
à
�(4 )
Pondant qu'elle éloit dans ce c o u v e n t , elle fut recherchée en
mariage par un nom m é A c lia rd , garçon menuisier et vitrier : la
dame de C la r y vouloit lui donner 600 francs de dot et un trousseau:
mais A n ne F élix ayant témoigné quelque répugnance pour ce
m a ria g e , il n'en lut plus question.
D e retour à G o n d o lle , elle eut occasion de faire connoissancc
avec Louis M a rle t, coutelier.
L a dam e de C ln ry éloit très-attacliée à la famille M arlet.
M a rlet p ire avoit servi le sieur Delaire son frère avec beaucoup
de zèle et de fidélité; elle lui d«voit même personnellement de la
reconnoissance pour les soins q u ’il avoit pris de veiller à ses intérêts
dans les derniers moraens du sieur Delaire.
D éjà elle avoit donne 600 francs à l’une des filles M a r le t , lors
de son mariage avrc Pons.
Elle avoit aussi donné une pareille som m e de six cents francs
à une autre des filles M a ile t établie à Paris.
L a recherche de Louis M arlet pour A n n e F élix ne pouvoit donc
que lui cire agrôalile.
INon seulement elle y donna les m a i n s , mais elle voulut faire
plus pour cet établissement, qui éloit dans son g o iu , rpiV-lle 11’avoit
fait pour ses aulres elèves; elle porta la dot d ’A n n e Félix à 3 ooo fr.
au lieu de 600 fr. q u ’elle étoit en usage de leur donner.
O n lit d,afl,s son contrat de mariage passé devant C h asso g ay ,
notaire à M o n t-F e rra n d , le 5 o janvier 1 7 7 9 , q u ’elle y est dénom
mée M a rte-A n n e F é l i x , originaire de la ville d ’ A m b e r l;
Q u ’elle procède de l’agrément et sous l ’autorité d ’A n n e D elaire,
épouse de M . Charles de C l a r y , sa marraine;
Q u e la dame de C la r y fait donation à la future sa filleu le de la
som m e de 5 ooo fr a n c s , qu’ elle promet payer dans des termes.
On lit les mêm es noms de M a rie-A n n e F é l i x , dans l’acte de
célébration , sans indication de père et in è r e , comme dans le
contrat de mariage.
L a dame de C l a r y , après avoir établi ses élèves, ne les perdoit
pas de vue.
�(5 )
A y a n t quitté G on d o lle , pour se Fixer à M o ttt-F e rra n d , elle visitoit souvent soit la J a n y , qu ’elle avoit mariée au sieur C o t in , et
à laquelle elle avoit constitué une dot de 1400 fra n cs, soit la femme
M a r le t , qui étoit mariée à Clerm ont : si elles étoient malades,
elle les faisoit soigner à ses frais par son m édecin, et par fois elle
ne dédaignoit pas de les soigner elle-même.
Scs premiers bienfaits étoient des titres auprès d ’elle pour en
obtenir de nouveaux.
L e 12 mars 1783 , elle fit donation d ’une rente viagère de 200 fr.
payable sur la tète de Louis M a rle t, de M cirie-Aim e F é li x , sa
f e m m e , et de Rose M a r le t , leur fille m in e u re , jusqu’au dernier
vivant d ’eux.
Cependant cette rente ne fut pas entièrement gratuite; on y lit
qu ’elle est faite « à la charge néanm oins, et non autrem ent, que
» ladite dame donanle demeurera quitte envers lesdils sieur et
» dame M a r le t , i°. de la somme de 5 oo fran cs, à eux restée due
» -de celle de 3 ooo fr a n c s , donnée par le contrat de mariage du
» 3 o janvier 1 7 7 9 ; 20. de celle de 5 oo francs, aussi due par ladite
» dame audit M a rle t, pour cause de prêt. »
L a dame de C la r y a payé exactem ent cette rente tant q u ’ elle a
v é c u ; mais elle n ’a rien f.n’i de plus pour la fem m e M a rle t.
Elle a fait son testament olographe le 20 juin 178g.
Elle f a it , p a r c e testament, pour environ 25 o,ooo francs de legs
aux hôpitaux, aux établissemens de charité, à des communautés
religieuses e t à des particuliers q u ’elle connoissoit à peine.
E t elle ne donne pas la plus légère marque de souvenir à la
fem m e Marlet.
Cepend an t, toujours conséquente dans ses principes, elle met
■une si grande importance à ce genre de charité q u ’elle avoit exercée
pendant une grande partie de sa vie, q u ’elle fait un legs de 3 6 ,000
francs à l'hôpital d ’ A m b e r t , « pour l’établissement de trois filles
» de charité de l’institut de St. V in cen t de Paule, pour l’éducation
» e.t entretien de 12 orphelines, légitimes ou n o n , qui s e r o n t reçues
» dans ledit h ô p ita l, pour y être nourries, logées, soignées et iu-
�( G)
» struîtes : elles y seront gardées jusqu’à l ’âge de 18 a n s ; elles y
» seront reçues dans le premier âge ou plus t a r d , suivant que la
» charité le requerrera ; et elles seront remplacées successivement
» à mesure que les places viendront à vaquer. »
Elle a vécu plus de deux ans après ce testa m e n t, sans q u ’il lui
soit venu en idée d ’y faire aucun changement.
E tan t au lit de la m o r t, le 27 octobre 1 7 9 1 , elle a fait un codi
cille par lequel elle a fait différons legs, tous à des personnes quilui étoient étrangères; et elle ne s’est pas plus occupée de la femme
M arlet et de sa fille dans ce codicille, que dans son testament..
L a dame de C la r y est décédée le lendemain 28 octobre..
C e d écès a été suivi d ’apposition de scellés, d ’inventaire; et la
fem m e M arlet ne s’y est pas présentée.
Plusieurs années se sont écoulées dans un'silence absolu de sa
part.
.v
L a loi d u 12 brumaire an 2 , rendue en faveur des enfans natu
re ls, a sans doute exalté scs idées; elle a cru que n ’ayant point de
p aren s, elle pouvoit
donner au gré de son ambition.
L e s circonstances étoient heureuses pour la fem m e Marlet : l ’illé
gitimité de la naissance étoit en honneur; l ’immoraiitô ¿toit érigée
en principe ; la désorganisation sociale étoit à son comble..
L a succession de la dame de C la r y étoit d ’ailleurs entre les m ains
d’une religieuse sexagénaire hors d ’état de se défendre d ’une pareille
attaque, qui n ’étoit elle-même appelée à recueillir cette opulente
succession que par une loi révolutionnaire, et qui dans tous les cas
ne pouvoit inspirer aucun intérêt.
Pou r faciliter de plus en plus aux enfans naturels l ’usurpation
de la place et de lii fortune des héritiers légitimes, on avoit interdit
la connoissance de ces sortes de contestations aux magistrats établis
par la loi, pour la d é fé re r ,, en.dernier ressort, à fies arbitres qui
dévoient être munis de certificats »le civisme ; formalité qui n e
laissoit ni latitude dans le ch o ix , ni sécurité dans la confiance.
C ’est dans cet état de choses que la femmo M arlet a paru pour
la première fois sur la scène, le i 5 ventóse>an 2.
�C7 )
( O n vo it, dans le premier acte juridique qu'elle a signifié à la dame
D e laire , sœur et héritière de la dame de C la r y , qu’elle prend le
nom d ’ Anne-M arie jDe/a/Ve, dite F é lix;
« Q u ’elle entend form er demande en délivrance du tiers à elle
j) attribué par l ’art. i3 de la loi du 12 brumaire an 2 , dans les
» biens et successions d ’A n n e - M a r ie D elaire, décédée femme du
» citoyen Charles C la r y , de laquelle la requérante est née, dans
» le temps que ladite citoyenne A n n e-M a rie Delaire étoit engagée
» dans les liens du mariage. »
L ’objet de ce premier acte est de nommer deux arbitres, et de
som m er la dame Delaire d ’en nommer de sa part.
L e tribunal arbitral fo r m é , la fem m e M arlet assigne la dame
D e la ir e , le i 5 prairial an 2 , « pour 'voir reconnoitre la requérante
« f i lle naturelle de défunte A n n e -M a r ie D e la ire , à son décès
» fem m e de Charles Clary ; en conséquence lu i voir adjuger le
» tiers de sa su ccession , qui lu i est attribué par Varticle 1 3 de
»> la lo i du 12 brumaire dernier; voir dire que pour parvenir au
» partage les parties conviendront d ’experts, etc. »
L e s arbitres assemblés, et le tribunal f o r m é , le 4 messidor, la
fem m e M a r le t, se disant toujours M a r i e - A n n e D ela ire, a exposé
« qu’étant fille d ’A n n e Marie D elaire, à son décès femme de Charles
» C l a r y , et née hors du mariage, elle réclame l'exécution de la
» loi du 12 brumaire an 2; et par les différens actes qu ’elle a signi» fiés à la dame Delaire les 16 floréal, i 5 prairial dernier, et autres
» portant nomination d ’arbitres pour e lle , elle a dem andé, en
» exécution de Varticle i 5 de ladite lo i, que délivrance lu i soit
» fa ite seulement du tiers de la succession de la défunte A n n e » M arie D elaire.
»>E l d ans le cas où sa possession d ’état seroit contestée, elle offre
» de la prouver, tant par représentation d’écrits publics et privés
» de sa m è re ,
que
par suite des soins qu’elle lui a donnés à titre de
» m atern ité, et sans interruption, tant à son entretien qu'à son
)> éducation, et demande à faire ladite preuve
.» loi. »
co n fo rm ém en t
à la
�‘( 8 )
L a dame Delaire a répondu que la prétention de la fem m e M arleï
est loul à la fois une calomnie atroce contre la mémoire de la dame
de C la r y , et un trait monstrueux d ’ingratitude;
Q u ’elle sait m ieux que personne, que « la dame de C la r y a é t é ,
M pendant tout le temps de sa v i e , dans l’usage de prendre des
» enfans de l’hôpital par m o tif d ’hum an ité, de les. élever, de les
» é ta b lir, et de leur donner une petite dot pour faciliter leur m a» riage et leur état ; »
Q u e c ’est par un heureux hasard q u ’elle s’est trouvée de ce
nom bre;
Q u ’elle a retiré com m e elle de l’hôpital la nommée Perrier, qui
est au service de la veuve T e y r a s ;
L a nommée C atherine, qui est établie dans la ville d ’A m b e r t ,
à qui elle a fait une dot ;,
L a nom m ée J a n y , qu’elle a établie avec le nom m é C o t i n , à qui
elle a fait aussi une dot ;
Que la dame de C la r y a encore élevé plusieurs autres enfans
de 1 hôpital d A m b e r t , tpj’eiie tenoit dans une des salles dudithô-pital, à qui elle fournissoit la nourriture et l’entretien,, et payoit
les personnes chargées d’en avoir soin ;
Q ue s’il étoit aussi vrai qu’ il est faux que la dame C la r y fû t la
mère de ladite fem m e M a r le t, elle ne l ’auroit pas réduite à une
dot modique de 3 ooo liv. , pour laisser Ja totalité de sa fortune à
des héritiers collatéraux.
E lle a ajouté que la preuve de sa possession d ’é ta t, qu ’offroit la
fe m m e M a r le t , indépendamment qu ’elle étoit vague , indétermi
n ée, et incapable dans tous les cas de satisfaire au vœu de la loi,
n ’étoit pas admissible, dès qu’elle se présentoit comme bâtarde
adultérine, parce que celte preuve étoit scandaleuse, qu’elle o ffensoit l’honnêleté publique, et ne tendoit à rien moins q u ’à trou
bler toutes les fa m ille s } et à renverser les premières bases de l’ordre
social.
M ais h quoi pouvoit servir alors ce genre de défense ? tout étoit
entraîné par le torrent révolutionnaire; et les arbitres, cn>admettant
�( 9 )
lant par leur jugement la preuve testimoniale offerte par la
fem m e M a r l e t , ne firent sans doute que céder à regret à l’impul
sion irrésistible du moment.
C'est encore à l’empire des circonstances qu ’il faut attribuer le
soin qu'ils prirent dans ce jugement de stipuler les intérêts de la
fem m e M a r le t, et de lui indiquer les changemens qu ’elle devoit
faire dans son plan d ’attaque.
Elle n ’avoit osé jusque-là usurper que le nom de M a r ie - A n n e
D ela ire ; elle ne s’étoit présentée que com m e fille naturelle née
d’ une autre union (¡ne celle d’ sin n e-M a rie IDelairc avec Charles
Clary , c’est-à-dire, comme fille naturelle adultérine :
O n lui insinue que se prétendant née pendant le mariage de
M arie-A nne Delaire avec Charles C l a r y , elle a droit d ’aspirer à
la qualité de leur fille légitime.
E lle avoit jusque-là borné son ambition au tiers de la succes
sion de M a rie -A n n e D elaire, qu ’elle réclamoit en vertu de l ’articlei 3 de la loi du 12 brumaire an 2 :
O n lui apprend q u ’elle a droit de prétendre à la totalité de cette
succession é c h u e , et à la totalité de celle de M . de C la r y , à échoir.
E n co n séqu en ce, et d ’après des considérans qui développent
toute la théorie de ce nouveau plan, « le tribunal d arbitres ordonne,
» avan t faire d r o i t , que la demanderesse, conform ém ent à L’ar» ticle 8 de la loi du 12 brumaire , prouvera sa possession de l ’état
» par elle réclamé d ’enfant d ’A n n e-M arie D e la ire , p a r la repré» sentation d ’écrits publics et privés de ladite Anne-Marie Delaire ,
» ou par la suite des6oinsà elle donnés à titre de maternité et sans
» interruption, tant à son entretien qu ’à son éducation : autorise
» à cet effet la demanderesse à faire entendre témoins en pré» sence du tribunal, sa u f la preuve contraire de la même manière.
» O rdonne en outre que la demanderesse sera tenue, lant par ti» très que par tém oins, d'éclaircir le fait de la présence de Charles
» C la r y auprès de son épouse, ou de son absence, lors et à l’é» poque de la naissance d ’elle demanderesse; et en cas d absence,
D dan6 quel éloignement de son épouse se trouvoit Charles C la r y à
B
�( IO )
)> ladite époque; tous moyens de fa ite t de d r o it, ainsi que les dépena,,
» réservés aux parties: L'étal et les droits de la demanderesse lu i
)) demeurant aussi réservés , tant envers Charles C la ry , que sur
» la totalité de la succession d’ A n n e-M a rie D e l aire. »
C e jugement étoit rendu en l’absence de Charles C la r y ; on
disposoit à son insu de tout ce que l ’homm e a de plus sacré sur
la terre , d ’une prétendue paternité q u ’il devoit repousser avec
h o r r e u r , de son n o m , de sa fortune.
L a fem m e M arlet cependant n ’eut pas le courage de su iv re , dans
les premiers instans, la marche que sembloient lui tracer ses arbi
tr e s ; elle avoit sans doute de la peine à se familiariser avec l ’idée
d ’une entreprise aussi hardie : elle se contenta d o n c , sans appeler
M . de C la r y dans la, cause, de suivre l’exécution de son jugement
controla religieuse sexagénaire, q u ’ellecroyoit trouver sans défense.
Elle fit entendre tre n te -d e u x tém oin s, dont presque toutes les
dépositions, quoique préparées et combinées avec art par les m o
teurs et les agens de cette intrigue révolutionnaire, ne sont qu ’un
tissu de contradictions, e.t 8o réduisent d ’ailleurs à des o u ï-d ir e
insignifians, dont il est facile de trouver la source dans l ’intérêt
q u ’avoit la fem m e M arlet de les répandre et faire répandre par ses
nom breux émissaires, pour form er l ’opinion publique qui dirigeoit
tout alors;
A des so in s, à des caresses que la dame de C la r y prodiguoit
indifférem m ent à toutes ses élèves, et surtout aux plus jeunes, et
qui n ’étoient de sa part que l'e ffe t de la compassion, de la cha
r ité , de la bienveillance q u ’inspirent aux âmes tendres et sensibles
l ’enfance et le m alh eur, et dont l ’habitude de la bienfaisance fait
un besoin.
*
Enfin ces dépositions se réduisent à une prétendue ressemblance,
qui scroit indifférente quand elle seroit véritable, mais qui est
d ’une iausscté telle cpi'il seroit peut-être impossible de trouver
entre deux fem m es une dissemblance plus co m p lète, soit dans les
traits de la figure, soit dans la taille et la constitution; la dam e de
C la r y étant d ’une taille avantageuse, c l réunissant tous les traits
�( Il
)
^
et toutes les formes de la beauté, tandis que la fem m e M arlet joint
à une maigreur qui lient de la momie une constitution si frêle et si
mesquine , q u ’on y retrouve encore les tristes effets du brsoin et de
la misère qui ont assiégé les premières années de son enfance.
L a dame D elaire, de son cô té , a fait entendre dix-huit tém oins,
qui ont attesté unanimement l'habitude où étoit la dame de C la r y
de prendre chez elle, dès leur enfance, de jeunes filles orphelines
ou abandonnées, de les élever, de les nourrir, de les entretenir, de
leur procurer des états, de les doter et de les établir; et cela sans
autre m o tif que la charité, l'h um an ité, et par suite d ’une bienfai
sance naturelle qui dirigeoit toutes ses actions.
Il résulte encore des dépositions d'un grand nombre de ces té
m o in s, i eaf-, que la femme M arlet a été nourrie dans son enfance
■chez la fem m e L o u v a u , à A m b e r t ;
2eot-, que la fille nourrie chez la fem m e L ouvau a été exposée
à la porte de l'église paroissiale d 'A m b e r t , à l’àge d ’environ six:
mois, pliée dans un mauvais sac ;
5 Pnt-,
que cette
fille exposée à la porte de l ’église paroissiale
d ’A m b e rt , est une fille n a tu re lle , née au village de la B âtisse,
de la n o m m é e Jeanne M io la n e , servante de L o u is E c r l a n , bo u
langer à la C h a pelle-A gno n .
O n sent q u e , dès que cette enquête a été connue de la femme
M a r l e t , son ardeur à poursuivre sa prétendue possession d ’état
a dû s’attiédir.
C e qui a dû l ’attiédir encore , c ’est la loi du
nivôse an 3 .
D e s p lain tess’étoient élevées de toutes les parties de la F r a n c e ,
contre l’abus introduit p a r la loi du 12 brumaire an 2 , de confier
a de prétendus arbitres,
p ris
indistinctement dans toutes lesclasses
«le la société, le droit de décider en dernier ressort, et sans le
concours du ministère p u b lic , sur les réclamations des en fans na
turels, et généralement sur toutes les questions d ’elat que
ces
récla
m ations pouvaient faire naître.
Cette loi a lait cesser cet a b us; elle a abrogé la disposition de
l ’ article 18 de la loi du 22 b ru m a ire , et a statué q u ’à l'avenir
15 2
�toutes les contestations de ce genre seroienl jugées par les triLo.naux de district.
Depuis cette loi, il n ’a été fait aucun acte de procédure de la
part de la fem m e M a rle t, jusqu’au 17 floréal an 3 .
A cette é p o q u e , elle a fait citer au bureau de conciliation la
dame Delaire et M . de C la r y :
C e l u i - c i , « à ce qu'il eût à assister dans la cause, pour voir dé» clarer le jugement à intervenir com m un contre l u i , pour être exé» cuté à son cgard suivant sa form e et teneur ; en conséquence ,
» voir dire que la requérante sera reconnue sa fille , née de son
» mariage avec défunte An ne-M arie D elaire ; que son acte de bap» tême sera r é fo r m é , ainsi que tous les actes civils où elle auroit
» pu être ci-devant qualifiée sous le nom de F é l i x , et q u ’il y sera
» ajouté le nom de C l a r y , fille de Jean-Charles de C la r y et d ’Ànne» M arie Delaire; q u ’elle sera envoyée en possession de tous les
» droits, biens et actions à elle appartenans à ce titre : et ladite
» dame D clairo, u ce q U’en rectifiant et augmentant les conclusions
» prises d abord par la rufjUttrante^ ene soi(; condamnée à lui re» mettre et abandonner la totalité de lu succession de ladite défunts
» Delaire de C la r y . »
C e tt e citation en conciliation n ’a pas eu de suite;, et non seu
lement la fe m m e M arlet s’est depuis cet instant condamnée au
silence, mais elle a mêm e formellement abandonné sa prétention.
C e t abandon résulte d ’une procédure faite en son n o m , en l’an 6 ,
pour raison de la rente viagère de 200 francs , créée le 12 mars
1783 par la dame de C l a r y , sur sa tête , sur celle de M arlet et
sur celle de leur fille.
A celte époque de l’an 6 , e l l e 17 vend ém iaire, M a r le t , agissant
tant en som qu ’en qualité de mari d ’sin u e F élioc, et encore en
qualité de père et légitime administrateur de R o s e Marlet sa fille ,
tous donataires de défunte sln n e D ela ire fem m e C la ry , fil citer
au tribunal civil du département du P u y -d e -D ô m e , séant à R io m ,
Je sieur C h a r d o n , pour voir déclarer « exécutoire contre lu i, en
» qualité d’ héritier d 'A n n e D ela ire fem m e Clary, l ’acte du
�( >3 )
» mars 1783 , portant création d ’une rente viagère de 200 francs
» en sa faveur et en celle de sa fe m m e et de sa fille. »
Il dem ande, en conséquence, le payement des arrérages de cette
rente en deniers ou quittances valables, et provisoirement un
payement de 600 francs à compte.
C e provisoire a été accordé par jugement du 4 brumaire an 6.
L e s 6 0 0 francs ont été p ayés, et la pension viagère a été servie
exactement depuis, sur les quittances tantôt du m a r i, tantôt de
la fe m m e , indifféremment.
On a dit que la fem m e M arlet avoit, par cette procédure , aban
donne form ellem ent son action en possession d ’é ta t; i ent-, parce
q u e , dans cette procédure, la fem m e M arlet a cessé de prendre
le nom de D e la ir e , qu’elle avoit usurpé, et qu’elle avoit pris dans
tous les actes de la procédure, pour reprendre modestem ent celui
d ’A n n e F é lix ;
2eu t, parce qu ’elle a dirigé son action contre le sieur C h a r d o n ,
en qualité d’ héritier d ’A n n e D ela ire femme de Charles Clary ,
et qu’en le reconnoissant ainsi pour héritier, elle renoncoit ellem êm e formellement à toute espèce de prétentions sur cette héré
d ité , surtout donnant celte q ualité d ’héritier à M . de C h a r d o n ,
apiès s^être prétendue fille légitime de IYlme- de C l a r y , et avoir
réclam é l’universalité de sa succession, com m e elle l ’avoit fait par
sa citation du 17 floréal an 3 .
C ’est après cet abandon a b so lu , perpétué et renouvelé pendant
dix années, et sept à huit ans après le décès de M . de C l a r y , que
la femme M a r le t , mue par, on ne sait quel esprit de vertige, a cru
pouvoir faire revivre sa scandaleuse recherche,
qui étoit déjà
oubliée dans le p ublic, et que les deux familles Delaire et de C la r y
avoient bien voulu elles-mêmes oublier ou dédaigner.
L e 1". prairial an 1 2 , elle a fait citer en conciliation M . de C la r y
de M u r â t , frère et héritier de M . Charles de C la ry .
J u s q u e - l à , elle n ’avoit usurpé que le nom de la dame D elaire ;
elle n avoit pas même osé prendre celui de C l a r y , dans la citation
q u ’elle avoit donnée à M . de C la r y , le 17 floréal an 5 .
�\ *
(
14
)
M a is, dans celte nouvelle citalion, elle ne croitplus devoir garder
de m esure; elle se nom m e sJ nne-M arie F é li x de C la ry , dite
F é lix .
Elle expose q u ’elle étoit en instance avec Jeanne-Marie D elaire,
sœur d 'A n n e D elaire, relativement à son état civil, et à sa reven
dication de tous les d roits, biens et actions de ladite A n n e D e la ir e ,
decedt-e épouse de Jean-Cliarles C la r y , sa m ère;
Que d'abord cette instance étoit pendante devant un tribunal
de famille ( i ) , et a ensuite été portée au ci-devant tribunal de dis
trict de cette ville (2) ;
Q u e depu is, soit à cause des cliangemens dans l’ordre judiciaire,
soit à cause des cliangemens des qualités des parties, et autres
rnolifs puissans, celte instance est restée impoursuivie et indécise;
Q u ’a y a n l intérêt d e là voir finir, elle se propose de la poursuivre
au tribunal de première intance de celle ville.
D ’après ce préambule, elle cite M . de C la r y de M u r â t , com m e
s étant cinparii <1<_* la succession de M . Charles de C l a r y , son frère,
poui etre conciliée av<-c
sul, ja (]em am ]e qu ’elle se propose de
fo r m e r , tendante « à ce q u ’il soit t c „ „ . v>?ssister dans la causc dont
» il s ’a g it, ii l’effet de voir déclarer le jugement rju’c-iio va pour» suivrecontre les prétendans droits et détenteurs d e là succession
« de la dame Delaire femme C l a r y , com m un avec l u i, pour être
« exécuté selon sa forme et teneur; pour voir dire que l’exposante,
v fille légitime desdils leu Jean-Cliarles de C l a r y , et A n n e D e la ir e ,
» comme étant née de leur m ariage, sera reconnue en ladite qua» lilé , q u ’en conséquence son acte de baptême sera ré fo rm é , ainsi
» que tous les actes civils où elle auroil pu élre ci-d e va n t qualifiée
» seulement sous le nom de Félix , et q u ’il y sera ajouté le nom de
» C l a r y , fille de Jean-Cliarles C la ry et d ’ A n n e D elaire; que com m e
(1) C’est 11110 erreur; il n'y a jamais eu do tribunal do famille, niais lin trilnniul arbitral, composé do quairo citoyens absolument étrangers aux deux
familles Delaire et de Gary.
( ? ) A u tre e r r e u r ; il n ’y a jam ais eu d'assign atio n a u trib u n a l tic d is tric t.
�■( i5 )
»
véritable, seule
et
unique héritière de sesdits père et m è r e , elle
») sera envoyée en possession de tous les droits, biens meubles
et
» immeubles et actions généralement quelconques, dudit feu de
» C la ry , son père, et ledit de C la r y de M urât tenu de se désis)> ter de tout ce qu’ il retient de ladite succession, avec restitution
» des jouissances, d é g r a d a t i o n s , détériorations et intérêts du tout. »
M . de C la r y de M u r â t a paru par son fondé de p o u v o ir, sur
cette citation , et a demandé à son tour à être concilié sur la de
m ande qu’il se proposoit de former contre la fem m e M arlet et son
mari , en 20,000 francs de dommages-intérêts , pour les punir de
l ’infàme calom nie, à laquelle ils n ’avoient pas craint de se livrer
contre la mémoire de M . et de M nîp. de C la ry.
L e procès verbal de non-conciliation a été suivi d ’une assigna
tion à l’audience du 16 messidor.
Pareille assignation a été donnée à M M . de C h a rd o n , V id a u d '
de L a t o u r , et autres héritiers testamentaires ou ab intestat , m é
diats ou immédiats de la dame de C la r y : elle a également conclu
contre e u x , à être reconnue pour fille légitime d ’A n n e D elaire,
com m e née de son mariage avec Charles C l a r y , et à être envoyée
à ce titre en possession de l'universalité de ses biens.
T e l est l’ordre des faits et l'état de la procédure.
MOYENS.
L a fem m e M arlet a paru successivement dans cette cause sous
deux titres opposés et qui s’entre-détruisent :
C o m m e fille naturelle adultérine d ’A n n e Delaire , épouse de
Charlés de C la r y ;
E t com m e fille légitime de l ’un et de l ’autre.
Sous le premier titre, elle a conclu à être maintenue dans sa
possession d ’état : elle a demandé à être envoyée en possession du
tiers des biens d ’A n n e D e la ir e , conform ém ent à l’article i 3 de
la loi du 12 brumaire an 2.
Sous le second, elle revendique un état q u ’elle convient n ’avo:r
�( 16 )
jamais possédé , et clic demande à êlre envoyée en possession de
l'universalité des deux successions de M . et M m=. de C la ry.
D e l à , la division naturelle de la discussion en deux paragraphes.
§• I er,
E xa m en de la demande de la femme Marlet, comme
se disant jille naturelle adultérine d'Anne D e la ire ,
épouse de Clary,
L a première loi de la révolution, rendue en faveur des enfans
n a tu rels, est le décret de la C on ventio n, du 4 juin 179s.
C e decret est conçu en ces termes :
« L a Convention nationale, après avoir entendu le rapport de
» son com ité de législation, décrète que les enfans nés hors le
» m a ria g e , succéderont à leurs père et m è r e , dans la form e qui
« sera déterminée j>ur \„ i0;
C o lle form e a été déterminée par , a loi d(J I2 b r u m a ;re an a ,
qui est ainsi conçue, article I ." :
« Les enfans actuellement existans, nés hors du m ariage, seront
» admis aux successions de leurs père et m è re , ouvertes depuis le
» 7 4 j u ille t 1789. »
L a dame de C la r y est décédée le 28 octobre 1 7 9 1 ; dès-lors la
fe m m e M arlet se Irouvoit appelée, par celle loi, à recueillir le
tiers de sa succession, si, en e ffe t, elle é to it, com m e elle le préten d o it, sa fille naturelle adultérine.
L e 5 vendémiaire an 4 » il est survenu une aulre loi ainsi conçue,
art. X I I I :
« L a loi du 12 brumaire an 2 , concernant le droit de succéder
» des enfans nés hors m ariage, n’aura d’ effet qu’ à compter du
» jour de sa publication. »
D ès-lors, plus de moyens de succéder à la dame de C l a r y , dé
cédée en 179* >quanti la femme Marlet auroit été reconnue pour sa
fille
�C 17)
fille naturelle adultérine, et qu ’elle auroit eu en sa faveur toutes les
espèces de preuves écrites ou testim oniales, qui peuvent mettre ce
genre de filiation à l ’abri de contradiction.
II ne lui resteroit pas mêm e la ressource de réclamer des alimens
contre ceLte succession , à ce titre de fille naturelle adultérine, parce
q u ’elle a reçu 3 ,000 francs de d o t; q u ’elle touche annuellement
200 francs de rente viagère; qu’elle a été d ’ailleurs mise en état de
gagner sa vie; et qu’aux termes de l ’article 764 du nouveau C o d e ,
« lorsque le père ou la mère de l'enfant adultérin ou incestueux
» lui auront fait apprendre un art mécanique, ou lorsque l’un d ’eux
m lui aura assuré des alimens de son v iv a n t , l’ enfcint ne pourra
» élever aucune réclamation contre leur succession, »
A i n s i , tout seroit terminé sous ce premier point de v u e ; et la
réclamation de la fem m e M arlet seroit repoussée par une fin de
non-recevoir insurm ontable, sans avoir besoin d ’entrer dans l’exa
men de la réalité ou de la fausseté du titre de fille naturelle adul
térine qu'elle a voulu se donner.
II ne reste donc qu’à savoir si elle peut être plus heureuse, en se
présentant aujourd’hui com m e fille légitime de M . et de M “»- de
C la r y .
S.
II-
Exam en de Vaction de la femme Marlet, comme se disant
Jille légitime de M. et de M me- de Clary.
I l s’élève d ’abord contre cette action deux fins de non-recevoir
également décisives.
L a première résulte de ce que la fem m e M arlet a com m encé
par se dire fille naturelle adultérine de la dame D e la ir e , et née
d’ une autre union qu’avec Charles Clary ; qu ’elle a demandé à
¿Ire maintenue dans sa possession d ’état à ce titre, et que , dans le
cas où sa possession d ’état seroit contestée, elle a
o f f e r t
d e
la prouver
tant par représentation d'écrits publics et privés de sa m è r e , que
G
�< ’T
( 18)
par la suite des soins q u ’elle lui a donnés à titre de m atern ité, et
sans interruption, tant à son entretien qu ’à son éducation.
O n a v u , dans les tribunaux, des individus commencer par récla
m er le titre d ’enfant légitime, et, après avoir échoué dans cette pre
mière tentative, se réduire à la condition d ’enfant naturel adul
térin , pour obtenir du moins des alimens sur les successions de
leurs père et mère.
T e l étoit le prétendu Jean D u r o u r e , qui a d o n n é lieu au 17*.
plaidoyer du célèbre M . d ’Aguesseau.
T e l est encore le prétendu Jean Neuville , qui a donné lieu à
Parrêt de la cour d ’appel, du i 5 prairial dernier, dont il sera parlé
ci-après.
M ais il est sans exem ple, qu ’après s’être avoué bâtard a d u ltérin ,
on ait osé prétendre au titre d ’enfant lé g itim e , et en réclamer le
ra n g , les honneurs et les droits.
Cette fin de non-recevoir , au surplus , est textuellement écrite
dans le nouveau C od e civ il, art. 3 a 5 .
L e s articles precea<;ns « r,IiqUent les différens genres de preuves
qui peuvent être admises en faveur t u l’enfant qui se prétend né en
légitime m a riag e, pour établir sa possession d ’état, ou pour récla
m e r un état dont il auroit été dépouillé.
L ’article 325 détermine ensuite quelles sont les preuves con
traires, qu ’on peut opposer à la preuve directe q u ’offre le prétendu
enfant légitime.
C e t article est conçu en ces termes :
« L a preuve contraire pourra se faire par tous les m oyens
» propres à établir que le réclamant n ’est pas l’enfant de la mère
» qu ’il prétend avoir, ou m êm e , la maternité prouvée, qu’ il n’est
» p as l’ enfant du mari de la mère. »
O r , celte dernière preuve est déjà acquise par le fait de la fem m e
M a r le t elle-même.
Elle a formé sa première demande com m e fille adultérine d 'A n n e
D e l a i r e , épouse de Charles C la r y ; elle a consigné dans tous les
actes de la procédure, «t dans le jugement arbitral d u 4 messidor,
�C J9 )
(
q u e lle étoit née d’ une autre union que celle d’A n n e D elaire
avec son mari.
Elle ne peut donc être admise à se dire aujourd’hui fille légitime
de M . et M mc. de C l a r y , puisque lors même qu'elle parviendroit
à acquérir la preuve de la m a te rn ité , cette preuve seroit écartée
par la preuve contraire émanée d ’e ll e - m ê m e , qu’ elle n’ est pas
l’enfant du mari de la mère.
Cette première fin de non-recevoir ne permet pas de réplique.
L a seconde fin de non-recevoir , qui s'élève contre cette, nouvelle
prétention de la fem m e M a r le t, résulte de ce qu’après avoir annoncé
par sa cédule du 17 floréal an 3 , qu ’elle étoit dans l’intention d ’ac
tionner M . de C la r y , pour voir déclarer com m un aveclui le jugement
qu’elle se proposoit d ’obtenir contre la dame D e laire , ex-religieuse,
et pour voir dire qu’elle seroit reconnue fille légitime de M . et M me- de
C la ry, comme née pendant leur mariage, elle n ’a donné dans le temps
aucune suite à cette cédule, et de ce q u ’elle s’est m êm e départie
depuis, non-seulement de toute prétention à ce titre de fille légi
time de M . et M m*. de C la r y , mais encore de toute prétention au
titre de fille naturelle adultérine de M»e- de C la r y .
On vo it, en e ffe t, dans la procédure tenue au tribunal de d e parlem ent, à R iom , dans le cours de l ’an 6 , pour raison de la
rente viagère de 200 f r a n c s , que la fem m e M a r le t , qui avoit con
stam m en t usurpé le nom de M a rie-A n n e D ela ire , depuis les pre
miers actes juridiques faits dans la cause, ne se nom m e plus
qu ’A n n e F é lix ;
Q u ’au lieu de se dire héritière de la dame de C l a r y , cette pro
cédure est dirigée contre M . de C h a rd o n , à titre d ’héritier;
Q u ’au lieu de prétendre droit à cette succession,
titre d ’héri
tière, elle ne réclame des droits, et le jugement ne lui en accorde,
contre cette succession, qu’à titre de créancière;
Q u ’en fin , elle n ’a cessé, pendant dix ans consécutifs, de ne se
considérer que sous ce point de vue de créancière de celte suc
cession, puisqu’elle a touché constam m ent, depuis, celte rente via
gère des mains des héritiers de M m0, de C lary.
C a
�( 20 )
M a 's quelque décisives que soient ces fins de n o n -re ce vo ir, les
représentans de M . et de
de C la r y n ’en ont fait usage que
pour l’honneur des règles, et parce que , d ’ailleurs, elles n ’auroient
pas échappé à la sévérité du ministère public; ils veulent bien les
oublier un instant pour se livrer à l’examen de cette nouvelle pré
tention de la femme M a r l e t , qui a pour objet de se faire reconnoître
pour fille légitime de M . et de M me' de C la r y ,
et de se faire
en vo ye r, à ce tilre , en possession de l ’universalité de leurs deux
SUCCi SSioHS.
L e premier pas à f a ir e , dans cette discussion, est de mettre
à
l ’écart la procédure faite en l ’an 2 et en l’an 3 , devant les arbitres.
Cette procédure doit être rejetée de la cause, i ent-, à raison de
son o b je t;
a eDt*, à raison du temps où elle a été faite ;
3 ent-, à raison de son irrégularité.
E lle doit être rejetée de la cause, à raison de son o b je t, parce
qu il s’ a g<ssolt alors d ’une demande en possession d ’é ta t, formée
par la f e m m e M a r i c t , « m m e fille naturelle adultérine de la dame
de C l a r y , et que 1 institution des a u t r e s n ’avoit pour objet que
les contestations qui pourroient s’élever sur i v ^ clll;on ¿ e ]a i0i
du 12 brumaire an 2;
Q u ’il ne s’agit plus aujourd’hui de l ’exécution de cette lo i, ni
de statuer sur une question d ’é ta t, élevée par un enfant né hors
m a riag e , mais par une fille soi-disant légitime; question qui n ’a
jam ais pu être de la compétence des tribunaux d'arbitres institués
par celte loi.
2enti, elle doit être rejetée de la cause, à raison du temps ou
elle a été fa ite , parce qu ’elle a eu sa source dans l'effet rétroactif
de la loi du 12 brumaire an 2 , qui faisoit remonter les droits de«
enfans naturels aux successions de leurs père et m e r e , ouvertes
depuis le i/( ju ille t 1789 ;
Q u e cet effet rétroactif a été aboli par l’ art. XIII de la loi du
3 vendémiaire an/j., qui a ordonné que la loi du 12 brumaire an a
ji'auroit d’effet qu'à compter du jour de sa publications
�( 31 )
Q uecette
même loi a aboli et annullé tous les actes et toutes les pro
cédures qui avoient eu leur Fondement dans cet e ffe t rétroactif, et
par conséquent cette procédure faite pour une succession ouverte
en 1791*
C 'est ce qui résulte formellement du II*. paragraphe de cet ar
ticle X III, qui est ainsi conçu :
« Les règles d ’exécution du présent a r tic le , seront les mêmes
» que celles établies ci-dessus, relativement à Tabolition de l’effet
» rétroactif des lois du 5 brumaire et du 17 nivôse. »
O r , on lit dans l’article X I , qui précède, que « tous procès
» e x is to n s , même ceux pendans au tribunal de cassation, tous
» arrêts de deniers, toutes saisies ou oppositions, tous fugemens
» intervenus, partages ou autres actes et clauses qui ont leur l’on» dement dans les dispositions rétroactives desdites lois des 5 bruw maire et 17 nivôse an 2 , ( p a r conséquent de celle du 12 b r u -
» m a i r e ) , ou dans les dispositions des lois subséquentes rendues en
j) interprétation, sont abolis et annuités. »
5cnt. t celte procédure doit encore être rejetée de la cause, à
raison de son irrégularité.
Q u 'o n suppose, si l’on v e u t , que la fem m e M arlet ait pu in
tenter contre l’héritière de la da m e de C l a r y une action tendante
à se faire déclarer sa fille naturelle adultérine, sans appeler dans la
cause M . de C la ry, qui étoit si essentiellement intéressé, sous tous
les ra p p orts, à repousser les traits de la calomnie qui cherchoit à
remuer les cendres de son épouse et à flétrir sa mémoire : on ne
pourra du moins disconvenir que le tribunal arbitral ne p ouvoit,
sans le concours de M . de C l a r y , « ordonner que la demanderesse
» seroit tenue, tant par litres que pur témoins, d ’éçjaircir le tait
» de la présence de Charles C la r y auprès de son épouse, lors et à
» l’époque de la naissance d ’elle demanderesse; et, en cas d ’absence,
» dans quel éloignement de son épouse se trouvoit Charles C la r y
» à ladite é p o q u e ; ...................................... l’état et les droits de là
» demanderesse lui demeurant réservés > tant envers Charles Clary
�« que sur la totalité de la succession d ’A n n e - M a r i e Delaire. »
C e jugem ent seroit donc évidemm ent n u l , sous ce point de v u e ,
com m e rendu sans y avoir appelé la principale partie intéressée.
A u surplus, ce jugement a été attaqué par la voie de la tierce
opposition, soit par M . de C la r y de M urât et les autres héritiers
représentans de M . Charles de C la r y , soit par les héritiers testa
mentaires ou ah intestat de la dam e de C l a r y , qui n ’avoient pas
été appelés dans la cause : ainsi il ne peut plus y avoir de prétexte
ci’en faire usage à l ’avenir; et dès-lors les enquêtes qui en ont été
le produit ne doivent pas être lues.
C ’est ainsi que l’a décidé la cour d ’ appel de R io m , par son arrêt
du i 5 prairial dernier, rendu dans la cause de Jean Neuville dit
V ille fo rt, contre M a r ie -A n n e R o u stan g, veu v e d e Gilbert N euville.
Jean N euville, se prétendant filsnaturelde Gilbert N euville, dé
cédé le i " . nivôse an 9 , avoit fo rm é , au mois de ventôse su iva n t,
contre M arie-A n n e R o u s t a n g , sa veuve et son héritière, une de
m ande temíante à ce qu’elle fu t tenue de lui abandonner la tota
lité de sa succession.
U s’est ensuite restreint au rang dW î m t naturel adultérin, et
xl a demandé à ce titre le tiers de celte succession.
Il o ffr o it , dans le cas où son état seroit contesté , de prouver les
soins q u ’il avoit reçus de Gilbert N euville, pendant 18 ans, à titre de
paternité.
L e tribunal de première instance de L y o n , par jugement du i*\
germinal an g , sans s’arrêter à la preuve des faits articulés par Jean
N e u v ille , dans laqùélle il aVoit été déclaré non-recevable, avoit
renvoyé la veuve de G ilbert N euville de l’instance.
C e jugement avoit été infirmé sur l’appel par arrêt du i/¡ floréal
an i o , et la preuve offerte avoit été ordonnée.
L a veuve de G ilbert Neuville s’étoit pourvue en cassation ; m'dis,
pendant l'instance en cassation, Jean Neuville avoit fait procéder
il l ’enquête.
.............................
V !L e jugement de la cour d ’appel de L y o n ayant été cassé, et los
�í
( =5 )
parties renvoyées à la cour d ’appel d e R i o m , il s’est élevé un inci
d e n t, sur la question de savoir si les enquêtes seroient Iues.
M . le procureur général a été d ’avis qu’elles ne pouvoient être lues.
L a cour a ordonné q u e , sans lire les enquêtes, il seroit passé
outre au jugement de la cause; et le jugement du tribunal de pre
mière instance de L y o n , a été confirmé avec amende et dépens.
A combien plus forte raison la lecture des enquêtes doit-elle être
interdite dans la cause actuelle, où non-seulement ces enquêtes ont
etc faites en vertu du jugement le plus nul et le plus irrégulier qui
fu t jam ais, mais lorsqu’elles ont été abolies, ainsi que toute la pro
cédure qui les a précédées, par le texte formel de la loi du 3 ven
démiaire an 4 , qui a rapporté l’effet rétroactif de la loi du 12
brumaire an 2 ; et q u ’enfin, ces enquêtes sont non-seulement étran
gères à la ca u se , mais inconciliables avec l’état actuel de la cause,
puisqu’elles avoient pour objet d ’établir une filiation adultérine,
et q u ’il s’agit aujourd’hui d ’établir une filiation légitime !
Si les représentans de M . et de M me* de C la r y insistent sur ce
p o i n t , ce n ’est encore que pour l’honneur des règles : ils sont loin
d ’avoir à redouter la lecture de ces enquêtes; c a r , quoique faites dans
les temps les plus orageux de la révolution, et dans les circonstances
les plus favorables à la fe m m e M a r l e t, elles ne prouvent rien pour
elle, qui avoit tout à prouver, et prouvent to u t, au contraire, pour
les représentans de M . et de M me- de C la r y , qui n ’avoient rien à
prouver.
Quoi qu’il en soit: s i, après avoir oublié les fins de non-recevoir,
après avoir mis à l’écart la procédure arbitrale et les enquêtes, on en
vient à l’objet de la cause, on ne trouve plus qu ’une question d'état,
dégagée de tout ce qui a précédé, qui se réduit aux idées les
plus simples, et à l’application des principes fondam entaux du droit
et de la morale de toutes les nations.
L ’état des hommes porte sur deux genres de p reu ves, les titres
et la possession.
r
« Q u a n d on a en sa faveur l’ autorité des titres publics et de
�( 24 )
'
» la possession, dit M . C o c h in , dans l ’affaire de M me> de F r u i x ,
» tom. II, pag. 3 /,6 , on jouit d ’un état inébranlable; et par la même
» ra iso n , quand on n ’a en sa faveur ni l’une ni l’autre de ces preuves,
» les tentatives que J on fait pour s'arroger un état dont on n ’a
» jamais jo u i, ne peuvent tourner qU’à la confusion de ceux qui
» s’engagent dans des démarches aussi téméraires. »
L a femme M arlet demande à être reconnue pour fdle légitime
de M . et de Mme. <je C la r y ; à jouir, à ce titre, du n o m , des dro its,
du ra n g , des prérogatives qui y sont attachées, et à être envoyée
en possession de l’universalité de leurs deux successions.
E lle convient n ’avoir pas la possession de cet état de fille légi
time de M . et de M me- de C l a r y , et n ’en avoir jamais joui.
E h ! com m ent pourroit-elle en effet avoir cette possession d ’état
de fille lé g itim e , après s’être prétendue elle-m êm e, quoiqu’avec
aussi peu de fondem ent, fille naturelle adultérine de M me- de C la r y ,
et née d'une autre union qu ’avec son m a r i , et avoir demandé à ce
titre le uors de sa succession, en vertu de l’art. i5 de la loi du 12
brumaire an 2 , r c n , i Ul, OT1 f a v e u r (]es enfans naturels?
M ais si la fem m e M arlet n ’a
^ sa faveur la posse6siori de
l ’état de fille légitime q u ’elle réclame dans
..,om e n t, a-t-elle
du moins quelques titres qui lui donnent le droit d ’y prétendre?
C e n ’est pas son extrait baptistère, qui est ordinairement le monu
m ent le plus précieux dans ces matières ; il n ’est pas dans ses pièces:
d ’où l’on peut conclure avec confiance q u ’ il ne peut être représenté
sans nuire !x sa prétention.
C e n ’est pas son co ntrat de mariage avec Louis M a rle t; elle y
est dénommée A n n e F é l i x , originaire de la ville d ’A m b e r t , sans
indication de père ni de mère.
L a dam e de C la r y y intervient com m e sa marraine ; elle lui con
stitue une dot com m e elle étoit dans l'usage de faire à toutes ses
élèves, avec quelque augmentation, p a r c e q u ’elle étoit sa f ille u le
,
et q u ’elle avoit dailleurs un attachement particulier pour la famille
M arlet,
Cq
�(¡.5)
C e n ’est pas l ’acte de célébration de son mariage; e]ie n >y csj.
encore désignée que sous le nom d ’A n n e F é lix .
C e ne sont pas les actes baptistères de scs enfans; elle n ’y
encore désignée que sous le nom de M a rie-A im e h é lix .
C e n’est pas l’acte constitutif de la pension viagère de 200 francs,
où la fem m e M arlet n ’est encore dénommée q u A n n e h é lix .
C ’est encore moins sans doute dans le testament et dans le codi
cille de la dame de C la ry qu’elle espère trouver ces titres solennels,
qui doivent Pélever au nom , au ra n g , à la fortune auxquels elle
aspire.
L a dame de C la r y fait son testament olographe en pleine santé
en 178g : elle semble dans ce testament être embarrassée de sa for
tune; elle comble de biens tous les hôpitaux de Clerm ont et d ’A m b c r t , différons établissemens de charité des campagnes; elle fait
des legs à des maisons religieuses, à des cu rés, à des particuliers;
ces legs sont au nombre de 19, et montent à environ 25 o,ooo francs;
et il n ’y a pas une ligne, pas un m o t, pour la fem m e M a r le t, ni
pour personne de sa famille.
U n e pareille conduite n ’ est pas dans la nature ; on ne croira
jamais q u ’une mère ait étouffé tous 1ps sentimens cJe la tendresse
m a ternelle, nu point <lc prodiguer sa fortune et de la verser a plei
nes mains dans les établissemens publics, ou pour enrichir des per
sonnes qui lui sont étrangères, pendant qu’elle laisse son enfant
en proie au besoin et luttant contre la misère. Num quid oblivisci
potest niulier infanlem suum , ut non misereatur f i l i i uteri su i?
Mais si la dame de C la ry a oublié la femme M arlet dans son
testament olographe, quoique fait dans le silence de la réflexion,
on croira peut-être q u ’elle aura réparé cet oubli dans son codicille
fait au lit de la m o rt, dans un temps où elle n ’avoit plus rien à
craindre ni à espérer des hom m es, et où les seuls remords de la
conscience a uroientdû l’obliger à rendre témoignage à la vérité.
M êm e silence dans ce codicille que dans le testament, sur le
compte de lu fem m e M arlet : la daine de C la r y prodigue cncorç
D
<
�V JÎK -
( 26 )
âcs dons à un grand nombre d ’individus qui lui sont absolument
étrangers ; et ce codicille ne contient pas pour elle le legs d ’une
obole.
A in s i, de tous les titres écrits qui sont destinés par leur nature à
constater l’état des h o m m e s, extrait baptistère, contrat de ma
riag e, testam ent, codicille; pas un ne laisse apercevoir la plus lé
gère présomption en faveur de la fem m e M a rle t, et tous au con
traire s’élèvent contre elle et form en t, réunis, un témoignage irré
cusable contre sa prétention.
M ais sera-t-il du moins permis à la fem m e M a rle t de suppléer
par la preuve testimoniale, soit à la possession qui lui m a n q u e ,
soit au silence des a ctes, et au- défaut de preuves é c rite s , dont elle
est absolument dépourvue ?
Ecoutons sur cette question M . C ocliin , dans l ’affaire de la *
dam e de Bruix , tome 4 , p age ^4^*
« \Jn citoyen veut se donner entrée dans une fam ille: il n ’a pour
» y p arve n ir, m \0 »<«ours jg g rnonumens publics, ni l ’avantage
» de la possession: arrêté par ccaoW acle8 invincibles, qu'il articule
h des faits , qu’il demande permission d'et, îy.;..«, preuve ; cette voie
» inconnue à la l o i , funeste à la société, sera nécessairement rC» jetée dans tous les tribunaux. »
» Quand les titres et la possession , dit-il plus b a s , page 5 5 i ,
» sont d ’accord sur l’état d 'u n citoyen , la preuve testimoniale qui
» a pour objet de les co m b a ttre , ne peut jamais être a d m ise ;
« i° . parce q u ’elle est nécessairement impuissante; 2°. parce qu ’elle
» est infiniment dangereuse. «
Elle est nécessairement impuissante, parce que, quelles que soient
les déclarations des tém oins, elles ne peuvent jamais être mises en
balance avec le poids des preuves q u ’administrent les titres et la
possession.
Elle est infiniment dangereuse, parce q u e, dit encore M . C ocliin ,
« l’état des h om m es, ce bien précieux qui fait, pour ainsi dire, une
*> portion de nous-m êm es, et auquel nous sommes attachés par des
\
�4
( 27 )
» liens si sacrés , n ’aura plus rien de certain; on le verra tous les
» jours exposé aux plus étranges révolutions.
» L ’homme qui jouit d ’un nom illustre et d ’un rang distingué
» sera renversé et précipité, pour ainsi d ire, dans le n éa n t, parce
» qu ’on entreprendra de lui prouver, par tém oins, qu’ il n ’est point
» né des père et mère qui lui ont été donnés dans son acte de bap» têm e, et qui l ’ont élevé publiquement comme leur enfant: on
» supposera des faits auxquels on donnera un extérieur de vraisem» b la n ce ................................D ’un autre côté, un enfant de ténè» bres, qui ne trouve dans son sort que dégoût et que misère , en» treprendra tout pour en sortir: plus sa destinée sera obscure et
» inconnue au public, et plus il lui sera facile de se donner un nom
» et un rang distingués, s’il lui est permis d’y aspirer avec le se» cours de quelques témoins disposés à soutenir son imposture, n
L es lois romaines ont un grand nombre de textes qui consacrent
ce principe.
S i tib i controversia ingenuitatis fia t, clefende causam tuam
instrumenlis et argumentis quibus p otes; s o li enfm testes ad in
genuitatis probationem non suffichint. L o i 2 , au C o d e , de Testib.
Probationes qitœ de JUifs dantur, non in sold affirmatione
testium consistunt. L oi 24» au D i g . , de Prob.
L a législation française a toujours été animée du même esprit :
elle a voulu que la preuve de la naissance fut faite par les registres
publics: en cas de perle de ces registres publics, elle a voulu q u ’on
eût recours aux registres et papiers domestiques des père et mère
décédés , pour ne pas faire dépendre l 'é t a t , la filiation , l ’ordre et
l ’harmonie des familles , de preuves équivoques et dangereuses,
telles que la preuve testimoniale dont l ’incertitude a toujours
effrayé les législateurs.
C ’est par suite de ces principes q u e, dans la cause jugée par l’ar
rêt du 7 mars 1641
,
M arie D a m itié , ayant demandé
p e rm issio n
de faire preuve par témoins, q u ’elle éloit s œ u r d ’Élizabeth et Anne
R o u ssel, elle fut déboutée de sa demande, sur les conclusions de
M . l’avocat général T a l o n , qui « soutint comme une maxime m D a
�N (vV t j
( 28 )
)) dubifable q u ’il ¿toit Hc périlleuse conséquence d ’admettre cette
)) p reu ve, parce q u ’il seroit facile à toute sorte de personnes de
» se dire de quelle famille il lui pluiroit; d ’où pourroienl naître
* de grands inconvéniens. »
INI. T a lo n , en portant la parole en i 65y , dans l ’affaire de
Georges de Lacroix , se disant fils de M . de L a p o r t e , soutint en
core en principe q u e , « comme l’état et la naissance ne se pouvoient
» vérifier par tém oins, mais seulement par titres, pour lo rs, à
» l ’égard de celui qui se prétend d ’une condition dont il ne rap>) porte point de titres, ne pouvant prouver son état par tém oin s,
» sa prétention passe pour une imposture et pour une usurpation ,
» qui font un crime pour lequel il a pu être poursuivi : » et sur
ses conclusions, Georges de L acroix fut condamné en des peines
très-graves, pour avoir usurpé le nom de M . de L a p o r t e , et s’être
dit son fils.
M - T a l o n disoit encore dans l ’affaire de M a r s a n t , jugée par
afret du 13 janvier tc.gf; ^ (( qUe ja seu|e preuve par témoins n ’étoit
„ pas suffisante dans les quesu«,,. r,,é t a t . que les disposilions tie
» droit en avoient été rapportées, qui étou-.,i r >^;scs et formelles:
)> que si cette voie étoit admise , elle seroit d ’une conséquence- ¡n-
« finie dans le public, et il n ’y auroit plus de sûreté dans les
w f a m ille s } que les plus sages peuples de la terre ont voulu q u ’il
» y eût des témoignages publics de la naissance des en fans. »
L ’arrêt de S a c illy , rendu sur les conclusions de M . l’avocat gé-»
ïîéral C bguvelin , a encore maintenu ce principe avec sévérité.
Les premiers juges avoient ordonné la preuve , et elle étoit même
faite et concluante; mais la cour, inflexible sur des règles qui peu
vent seules maintenir l’ordre et la tranquillité p u b liq u e , ne crut
pas mêm e devoir entrer dans le mérite de la preuve ; et, en infir
m ant ln sentence qui l’ avoit admise, débouta le prétendu Sacilly
Je sa demande,
E n fin , ce principe vient encore d être solennellement consacré
par l’arrêt de la cour d appel de f lio t n , rendu contre le prétendu
Jean N e u v ille , le i 5 prairial dernier,
�( 29 )
Les enquêtes étoient faites; mais com m e le prétendu Jean N eu„
•ville n ’avoit en sa faveur ni titre ni possession, la cour a déridé
q u ’elles ne scroient pas lues, et a confirmé purement et simplement
le jugement du tribunal de p r e m i è r e instance de L y o n , q u i, sans
s’arrêter à la preuve des faits articulés par Jean N e u ville, dans la
quelle il avoit été déclaré non-recevable, avoit renvoyé la veuve
Neuville de l’instance.
M a is, au surplus, c ’est ici lutter contre une chim ère, que de
s’occuper de l ’admissibilité ou de l’inadmissibilité de la preuve
testimoniale.
L a fem m e M arlet a f o r m é , depuis plus d ’un an, sa d e m a n d e ,
tendante à être reconnue pour fille légitime de M . et M me- de C la r y ,
sans avoir, en sa faveur, ni titres, ni possession ; et elle n ’a pas
encore articulé un seul f a it , qui tende, sinon à justifier, au moins
à colorer sa prétention:
C a r on ne peut pas regarder com m e des faits articulés pour la
cause actuelle, ceux qui l’ont été en l’an 2.
- D ’une p a rt, on a démontré que tout ce qui a été fait alors ne
subsiste plus, soit comme ayant son fondement dans Felfet ré
tro actif de la loi du 12 bru m a ire , qui a été abolie, soit com m e
ayant été fait sans le concours de M . de C l a r y , qui étoit la partie
la plus intéressée, et celle qu ’on devoit le moins oublier dans une
pareille cause.
D ’autre p art, la fem m e M arlet ne prétendoit alors qu’au rang
de fille nalureîie adultérine; et quoique la preuve des faits qu’elle
articuloit ne dût pas être admise, parce que la loi du 12 brumaire
ne l’aulorisoit que pour les enfans nés de personnes libres, et qu'elle
exceptoit formellement les enfans naturels adultérins, ces f a it s ,
quand ils seroient articulés de nouveau aujourd’h ui, seroient ab
solument indifférais.
Ils consistent uniquem ent, en effet, dans l’ articulation
vague
des
joins que M me- d e C la r y avoit pris (l’elle dans son e n f a n c e .
O r , ces soins 11’ont pas besoin d ’être prouvés; ils sont avoués
dans la cause : ils lui ont été donnés par M me- de C la r y , comme à
�(5p)
Leaucoup d'autres jeunes filles, orphelines ou abandonnées, qui
cloient l’objet continuel de sa charité et de sa bienfaisance.
(f C ’ est abuser des choses les plus in n o ce n tes, disoit encore
» M . C o c h i n , de vouloir que les soins et la tendresse deviennent
» des preuves de m atern ité: c ’est bannir de la société toutes ces
» communications qui peuvent la rendre si douce et si agréable, si
» l ’on est en droit d ’en tirer de si funestes conséquences : c'est se
» servir des propres bienfaits d’ une personne tendre et charitable,
» pour la déshonorer ; en un m o t, c’ est corrompre, c’ est em » poisonner ce q u 'il y a de plus pur et de p lu s sacre’. »
O n ne parlera pas ici de sa prétendue ressemblance avec la
dame de C la ry : indépendamment q u ’il n’y a pas de signe de filia
tion plus équivoque, elle n ’a pas osé l’articuler en l’an a : ce fait
n ’étoit pas du nombre de ceux dont le jugement du 4 messidor ordonnoit la preuve; si plusieurs de ses témoins en ont pari«!, c ’est
d ’office, et dans la vue de donner de la faveur à sa
cause, t.t «Mo »
;<;)S pa r tic u |cr aujourd’h ui, pour ne pas cho
quer trop ouvertement 1.«
paraison qui la couvriroit de ridicule.
¿ viicr cl’aillcurs une co m
M ais il y a m ie u x : supposons q u ’on articule ici 1rs laiis n-» ,,i„»
précis, les plus propres à porter la conviction dans tous les esprits ;
supposons q u ’en renversant tous les principes, on admette la
preuve de ces fa its, et que cette preuve soit si forte, si co n cluan te,
que personne ne puisse se refuser à l ’évidence q u ’elle présentera;
on n ’aura beso in, pour renverser tout CCI édifice, que de rappeler la
disposition de Part. 5 a 5 du C o d e civil, que nous avons déjà cité,
qui porte q u e, <« la preuve contraire pourra se faire par tous les
» m dycns propres à établir que le réclamant n ’est pas lYnfant de la
>» mère qu'il prétend avoir, et tnerne , la maternité prouvée , qu*il
» n’rst ¡Hts /*enfant du mari de la rnrrr. »
Ici, celle p rrm o co n tra ire, *i elle ctoit jamais nécessaire, *e trouveroit f.iite d ’avance, et par l'aveu mêm e de |j fem m e M a r le t ,
q u e lle n ’est pas l'enfant du nuiri île la mèrr, puisqu'elle a f.iir tous
«es e ffo rts, en l’an a , pour prouver q u ’clJc ctoit fille adultérine de
�( 3i )
la dame de C la r y , et née d'une autre union qu'avec Charles Clary,
son mari.
Jusqu’ici les représentons de M . et de M me- de C la r y ont parlé
le langage des lois ; ils n ’ont vu que leurs juges ; ils ne sc sont occupés
q u ’à les convaincre : ils ont actuellement une autre lâche à remplir;
, c ’est celle d ’éclairer le public, qui n’est jamais indifférent sur les
questions d ’état, et qui croit aussi pouvoir s’ériger en juge.
L a prétention de la femme Murlet ne seroit-elle, aux y eu x do la
ju stice , que l’effet du délire d ’une imagination déréglée; elle peut
laisser dans l’opinion des impressions désavantageuses, q u ’il est in
téressait t de dissiper.
L a femme Marlet s’est d ’abord annoncée, dans la cause, com m e
fille naturelle adultérine de la d a m cD e la ire , épouse de M . de C l a r y ;
clic sc dit aujourd'hui fille légitime de l’un et de l’autre.
La première réflexion qui so présente, c ’cst q u ’ il ne tombe pas
cous les sens que la fem m e M arlet ait pu hasarder un« prétention
aussi extraordinaire, si elle n'a pas du moins r u s a faveur des pré
som ptions, dos probabilités mor*»!«’« , qui i i f i u r n t «on erreur; et
dès-lors, on sent cnmMen ¡1 «»» difficile de vaincre les préjugés que
cette première n llexion, si simple, si naturelle, peut faire naître
dans tous les esprits.
Il n ’y avoit peut-être pour c e la , q u ’un seul moyen , c ’étoit de ro*
monter à l’origine de la femme M a r le t, et d ’etablir sa naissance ; et
la famille Dcl.iire y est parvenue.
O n diroil en vain q u ’il y a »le l'inconséquence
faire usage des
enquêtes, après avoir démontré qu elle s dévoient être rejetées de
la cause.
D 'une p a r t , on ne doit pas oublier que nous parlons ici au pu
blic, qui r.*t étranger aux form es ju rid iqu es, et qui ne doit 'o i r ,
d ans ce* >n q u c tr s , que les preuics qui m résultent ;
D autrr purt , quoique ce* enquêtes ne doivent | H cire lues
�r
*'■ r
Y 5a )
com m e pièces juridiques de la cause, et q u ’elles ne puissent être
d'aucune utilité à la fem m e M a r l e t , on n ’â pas moins le droit d ’en
user contre e ll e , parce que c ’est elle qui y a donné lieu, et q u ’on
doit les considérer com m e son ouvrage.
O r , il résulte de ces enquêtes plusieurs faits essentiels et qui
répandent le plus grand jour sur celte affaire.
L e prem ier, qu ’une servante de la Cliapelle-Agnon , nommée
Jeanne M iolan e, s ’est accouchée d'une fille vers l’année J 7 6 2 .
L e second, que Jeanne M io lan e, étant morte après l’avoir allaitée
pendant cinq à six m o is , elle a été portée à A m b e r t , où elle a
été exposée à la porte de l ’église paroissiale.
L e troisième, que celle fille exposée a été nourrie jusqu’à l ’âge
de 4 à 5 ans, chez la nom m ée L o u v a u , qui habitoit à A m b e r t , visà vis la porte de l’église.
L e q u atriè m e , que c ’est cette même fille nourrie chez la L ouvau ,
qui a été envoyée à L y o n , chez la dame de C la r y , et qui csl au
jo urd’hui ltt fem m e M a r le |i
I
our établir ces fau& , 0lt ^ s’arrêtera q u ’à des dépositions posi
tives et à l ’abri de toute contradicU oi..
C ô m e B e rtu i, tisserand, de la C hap elle-A gnon , i \ , „ <1^ ^
moins entendus à la requête de Jeanne-Marie D e l a i r e , sœur de
la dame de C la ry,
« Dépose qu ’il est parent du nom m é Berlan , boulanger de la
» Chapelle-A gnon : il y a environ 3 o ans, que revenant du P u y
» en V e l a y , à la C h ap e lle -A g n on , il entendit dire que la nommée
» M iolan e,servan te chez Berlan, a v o lt f a i t u n e nfant; q u ’A n lo ine
» B e rla n , fils de L o u is , en étoit le père; que la mère, qui nourris» soit cet enfant au village de la Bâtisse, étant décédée, l’enfant
» fut porté chez B e rla n ; q u ’alors le déposant fut invité par l’un
» dos Berlan , d ’aller chercher q uelqu’ un qui se chargeât d ’aller
» porter l ’en fant ;’» A m b e rt : le déposant fit en effet son marché
» avec le nom m é M o u r le v a u , qui sera un des témoins à entendre,
» et qui portu en effet à A m b e r t 1 enfant dont il s’agit, qui étoit
une
�( 33 )
» une fille : le père du déposant fut chercher chez Berlan le chej) val qui porta à la fois le commissionnaire et l'enfant.
Jeanne C h ain b ad e, fem m e d ’A n n e t M io ia n e , tisserand cle I3
C h ap e lle -A g n o n ,
« Dépose q u ’il y a environ 32 ans , la nommée M io ia n e , sœur de
» son m a r i, demeurant à la Chapelle-Agnon, chez Ber 1an , y
h devint grosse; ses maîtres la firent sortir; ladite M ioiane vint
« alors dans la maison oùdem euroit la déposante , qui n ’étoit pas
» encore sa belle-sœ ur, et elle y fit ses couches; qu’après la mort
» de la M ioiane, rncre de l’e n f a n t , la nommée Chegne porta l ’en»^fant chez Berlan , boulanger. »
A n n e t M ioiane , frère de Jeanne ,
'( Dépose, q u ’il y a environ 5 o ou 3 i ans, que Jeanne M ioiane,
» sa sœur, s’accoucha chez lui d ’ un enfant femelle , q u ’elle avoit
» eu des faits d ’Antoine Berlan , fils à Louis , boulangera la C h a -
» pelle-Agnon, chez lequel elle derneuroit com m e domestique; que
» sadite sœur étant m orte, ses parens ne pouvant se charger de
» la nourriture de cet en fa n t, il fut porté dans la maison de Louis
» Berlan, grand-père, et qu ’il ne sait pas ce q u ’il est devenu, et
» où Berlan m il ensuite cet en fa n t.»
Jean M io ia n e , neveu du précédent,
« Dépose q u ’il est fils naturel de Jeanne M io ia n e , qui reslo it,
« il y a environ trente-trois ans, en service chez L ouis B e rla n ,
» boulanger à la C h a p e lle -A g n o n ; que lui restoit au village de la
» Bâtisse, dans la maison deses auteurs maternels; qu’à cetteépoque,
» sa mère sortit de service de chez Berlan , et vint s'accouchcr
» dans la maison où lui déposant derneuroit, d ’une fille qu ’elle
« avoit eu avec J3e r la n , fils audit L o u is ; que sa mère nourrit cet
» enfant jusqu’à sa m ort, et q u ’ensuite, ni le déposant, ni sespa» rens ne pouvant lui continuer les mêmes soins, il fut porté chez
» Louis Berlan ; que cet enfant y demeura quelques jours ; et qu’il
» a ouï dire, dans le temps, que Berlan avoit fait porter cet enfant à
»
A in b e rt ; le déposant n ’a pas SU depuis ce qu'il étoit devenu. »
A n toin e M ourlevau, Tisserand au village du M a s , commune
de la Chapelle-Agnon ,
�( 54 )
« Dépose qu’il y a environ 5 i ans q u ’il lui fut proposé par L ouis
» Berlan , de mener un on f¡in t <I’en\¡ron 12 ou i 3 mois ( * ), d e là
» Cliapelle-Agnon à Arnbert. Le déposant y consentit; cl en effet
» C ó m e Boriili , père de l’un des témoins qui a déposé, alla
j) chercher le cheval de Louis B e rla n , et accompagna le déposant
j) et l’en faut jusqu’à environ une lieue : ¡] (‘toit alors n u it , et
» c ’étoit à l'époque des environs de la Saint-Martin d ’é t é , qui se
» trouve dans le mois de juillet. C ò m e Berlui , après une lieue
» de c h e m in , laissa le déposant à pied , chargé dudit e n f a n t, et
» emm ena le cheval. L e déposant arriva à A m b e r t à la pointe
)> du jo ur, et au m om ent où l’on sonnoit la cloche: il laissa l’en» fa n l à la porte de l ’église, sur Pescalier, à un endroit que l’on
» appeloit alors vis-à-vis la rue de chez Mandarol. L e déposant se
» retira , et depuis n’a plus ouï parler de cel enfant. Ajou te le dé» posant q u ’il est de sa connoissance que l’enfant dont il vient de
» pnrler, est l’enfant d ’une nom m ée
M i o l a n e , habitante de la
» Cl.apoUcî-Agnôn , et qu ’il est sorti de chez Berlan; mais il ignore
;> qui en étoit le
^ j oulc encore qUe l’enfant avoit une coeffe
» de cotonnade b leue, et
, olic jjjeue unie,e£e£o/£ enveloppé
» dans un sac qui lu i tenoit jusqu’ au
„
V o ilà donc la fille de Jeanne M io la n e , exposée a
p erle de
l ’église d ’A m b e r t : il ne reste q u ’à savoir ce q u ’elle est deven u e,
et si celte fille est la mêm e que la fem m e M arlet. O r , c ’est co
qui est encore établi jusqu’à la démonstration.
L a fem m e M arlet a fait entendre dans son enquête M arcellin
L o u v a u , qui dépose « q u ’il ne sait autre chose relativement à la
» naissance de la dem anderesse, si ce n ’esL que le père de lui dé-
» posant, l ’ayant trouvée exposée au-devant de l’église d ’A m b e r t ,
» la conduisit dans sa m aison, où elle a resté l'espace de plusieurs
» années.
II
y3
ici e rre u r s u r les
m ois
<lo l ’eiifuiit > mQis il ne üiut piis p erd re do
Vue qu’on a remis au témoin cet enfant la n u it , plié dans un sac j que l’Ago do
l’enfant ¿toit étranger à sa mission., et qu’il dépose de faits qui remontent à
plus do
5 o uns.
�(35)
» L e déposant, dans ce temps-lù , avoit ouï dire que c ’étoit une
» bâtarde de la Chapelle-Agnon. »
A n n e L o u v a u , sœur du précédent tém oin, entendue dans l ’enquête contraire,
« Dépose qu’à une époque qui remonte à plus de trente ans,
» le père d ’elle déposante, revenant le malin de l’église d ’A m b o r t ,
» d i t , en rentrant chez l u i , I l y ci ci la porte de l’ église un paquet;
» mais sans dire ce que conlenoit ce paquet; qu’elle déposante,
)) mue par un sentiment de curiosité, se rendit au-devant de l ’église,
» trouva, en e ffe t, un s'ac dans lequel ètoit un enfant de cinq
)> mois ou environ, ledit sac ayant une petite ouverture qui cor» respondoit au visage de l’ enfant ; que la déposante fut aussitôt
» avertir un nom m é Perrier, avec lequel elle se rendit chez un
» boulanger voisin, pour faire chauffer cet enfant; q u e lle quitta
)) ledit Perrier pour aller chez le cit. M a d u r, alors procureur d ’office
» du bailliage d ’A m b e r t , le prévenir de l ’exposition de cet en» f a u t ; .................. qu’il envoya la déposante chez le cit. M a lh ia s,
» qui étoit, à ce qu’elle croit, greffier; que M athias et M a d u r furent
» ensemble constater l ’exposition de cet enfant; q u ’après cette opé» ration, ils dirent à l’exposante de porter cet enfant à 1 hôpital
» d ’A m b e r t; q u ’ o n e f f e t , c l i c s ’y r e n d it; que le sieur V i m a l , ad» ministraleur dudit h ô p ita l, lui dit de l ’emporter chez elle pour
» quelques jo u r s , et q u ’on lui trouveroit une nourrice ; qu ’en.
» effet la déposante porta cet enfant dans la maison de son père ;
» que son père étant revenu le soir, se fâcha contre elle déposante,
)i mais que sa mère l’engagea à garder cette p e tite , en disant q u ’on
» avoit promis de payer les mois (Je nourrice ; que le père de la dé» posante embrassa cette peLile et consentit de la garder ; q u ’il est •
» de sa connoissance que le sieur V im a l a depuis payé au père de
» la déposante cinq ou six mois de pension, à raison , h ce q u ’elle
» c r o i t , de 5 à /t liv. par m o is , et qu’elle ignore si son père a
» été payé du surplus du temps où cet enfant y a dem euré, et par
» qui il a été payé. »
Plusieurs autres témoins déposent encore de l ’identité de cette
E 2
�( 36 )
fille, exposée à la porte de l ’église d ’A m b e r t , avec la fille née de
Jeanne Miolane.
Jeanne C h ain b ad e, belle-sœur de Jeanne iVTiolane, dépose avoir
vu cet enfant chez des filles revendeuses de fruits, qui deineuroient
vis-à-vis la porte de l’église d ^ A m b ert, lesquelles filles revendeuses
de fruits étoient les deux filles Louvau.
A n to in e tte L av a n d ier, veuve de Pierre P a cr o s, « dépose qu ’elle
» se rappelle l ’époque où un enfant fut expose au-devant de la
» porte de l’église d ’A r n b c rt, et amené ensuite chez la L o u v a u ;
)> q u ’alors elle demeuroit chez la darne de C la r y . »
E lle ajoute qu’elle alla voir l’enfant qui avoit été e x p o s ', et
qui attiroit la curiosité debeaucoup de personnes; elle remarqua,
qu’il étoit enveloppé dans un mauvais sac.
A n n e P e r rie r , l ’une des élèves de la darne de C la r y , u dépose,
» q u ’elle se rappelle parfaitement l ’époque où la demanderesse fut
» exposée au-devant de l’église d ’A m b e r t , qu’elle y f u i trouvée p liée
» dans un sac ; elle ajoute, q u ’elle fu t portée chez un nom m é L o u » v a u , où elle a
.... . ;nsqu,. r «ge (Je 4 ans< „ O n voit dans la déposition de j Ca ,.„ 0 M a re in at, fem m e d 'A n n e t
B â tisse , qu ’elle a ouï dire par son m a ri, « f|tlt u boulanger de la
» C hapelle-A gnon avoit fait un enfant avec sa servante, et que
» l’enfant qui étoit chez la L o u v a u , éloit ledit e n fa n t.»
11
ne reste donc plus q u ’à savoir s’il est prouvé que cet enfant de
Jeanne M i o l a n e , exposée devant la porte de l'église d ’A m b e r t ,
p lié dans un mauvais sac , et nourri depuis par la fem m e L o u
v a u , est identiquement le même individu qire la fem m e M arlet.
O r , c ’est un fait avéré dans la cause , qui est d ’ailleurs établi par
une multitude de dépositions.
Marcellin L o u v a u , témoin entendu à la requête de la fem m e
M a r le t , dépose en parlant de la demanderesse , q u ’il qualifie a in si,
« que la dame de C la ry la fit retirer , et conduire chez elle à L y o n ,
)) et observe que si son père avoit vécu, la darne de C la r y auroit
» éprouvé des obstacles. »
M arie J a n y , fe m m e C o t i n , l ’une des élèves de la dame de
�( 57 )
C
C l a r y , pareillement entendue à la requête de la fem m e M a r le t,
« dépose , qu ’il est à sa connoissance que la citoyenne M arlet a
» été recueillie par la citoyenne C l a r y , sur l’invitation qui lui en
» avoit été fuite par une citoyenne Perrier, qui a\oit été élevée
» elle-même par ladite dame de C la ry. »
Elle ajoute encore q u e , « dans un temps où la dame C la r y se
» plaignoit de la haine qui exisloit entre la demanderesse et la
» nommée P e r rie r , la darne C la ry dit à elle déposante, que la de» mandoresse avoit tort , parce que sans ladite Perrier elle ne
» seroit pas venue cliez la dame C la ry. >>
A n t o i n e Buisson , autre témoin de la fe m m e M a r le t , d é p o se ,
que la demanderesse a demeuré chez la nom m ée A n n e L o u v a u ,
jusqu’à la fin de 17G4 ou au com m encem ent de iyG S, q u e l a ie m m e
L o u v a u la conduisit à L yo n , chez la dame C la ry.
A n n e Louvau dépose, que la demanderesse a resté chez son pere
jusqu'à sa mort , arrivée quatre ou cinq ans après son exposition ;
que ce fut à celte époque que la dame de C la r y , qui étoit à L y o n ,
manda à défunt sieur M aclur, de faire venir cet
enfant
auprès
d'elle, et que ce fut elle-même qui la conduisit avec sa sœur.
Antoinette Lavandier, fem m e de Pierre* Pacros, dépose de m êm e,
quela dame de C la r y a retiré I entant qui élojt chez la Louvau.
A n n e Perrier, dont on a rappelé ci-devant la déposition , après
avoir dit que la demanderesse, qui avoit été exposée à la porte
de l ’église, fut portée chez un nom m é L o u v a u , ajoute que c ’est
sur son indication, q u ’il y avoit une petite fille élevée chez les
L o u v au , c tq u e c e s g e n s -là étoient très-pauvres,que la dam ede C la r y
écrivit au sieur D ulac - M a d u r , d ’A n ib e rt, pour faire venir cette
petite, qui en effet fut amenée à L y o n par la nommée L ouvau.
L a déposante, qui étoit a lo rs, com m e e l l e , chez la d a m e d e
C l a r y , la suit dans tous les instans :
Ch ez le marchand bonlonnier , où elles ont resté ensemble;
Chez la lin^ère de l ’allée des Im ages, où elle fut placée avec
Catherine Perrier, autre élève de la dam e de C la ry ;
A u couvent d ’A m b e r t , où elle a été recherchée en mariage
par le nomme A c h a r d , garçon menuisier et vitrier ;
�( 38 )
Et enfin , jusqu’à son mariage avec M a r le t , qui fut p ré fé r é ,
dit-elle, par la daine de C la r y , p;trce q u ’elle éloil atluchée à sa
fa m ille , ce qui la détermina à augmenter sa dot.
Catherine Perrier , autre élève de la dame de C la r y , dépose
« qu'elle a plusieurs fois oui d ir e , soit par la dame C l a r y , soit
» par la Perrier , que si la demanderesse éloil auprès d ’elle, c ’éloit
» à la Perrier q u ’elle en éloit redevable. »
Elle répète plus bas que ce fut sur l’ invitalion que lui avoit
faite la Perrier île prendre un enfant fort pauvre, qui étoit à A m hert chez des gens peu fortunés, qu'elle consentit à prendre cet
enfant dont il s'agissoit, qui est la demanderesse.
E lle ajoute encore , « avoir ouï dire par la dame de C la r y à la
» demanderesse, q u ’elle ne pouvoit pas souffrir la Perrier, et q u ’elle
» avoit bien t o r t , puisque c'étoil à elle q u ’elle étoit redevable de
» l ’avantage d ’avoir été reçue dans sa maison. L a dame de C la r y
» ajouioît q u ’elle ne comprenoit pas l’orgueil de la demanderesse,
« puisqu’elle ctou ,liV à la ci,a p e llc-A g n on , et q u ’elle étoit fille
„ d ’un boulanger nom m e ^ 1;<n qu Mlolane> „
Elle rend compte ensuite, com m e
p errjer t de la recher
che du n o m m é A chard , menuisier el vitrier, pcm iam ,pio \a j emanderesse étoit au couvent à A m b e r t ; des offres de la dame de
C la r y , de lui donner fioo francs de dot pour ce mariage ; de la
préférence qu ’elle a donnée depuis à Mari e t , el de l’augmentation
de dot q u ’elle a donnée à la demanderesse , à raison de son atta
chem ent pour la famille M arlet , dont le père avoit servi son
frère avec un zèle et une fidélité dont elle avoit toujours conservé
le souvenir.
C ’est donc un fait c o n s t a n t , et qui d ’ailleurs ne sera pas désa
voué par la fem m e M a r l e t , qu ’elle est identiquement la même
que celte petite fille nourrie et élevée chez la L ouvau jusqu’à l’Agc
de /f à 5 ans , et conduite à L y o n chez la dame de Clary.
O r , il a été établi précédemment que celte petite fille nourrie
et élevée chez la L o u v au est identiquement la mêm e que celle
qui a été exposée à la porte de l’église d ’A m b e r t , pliée dans un
mauvais sac.
�(Sq )
E n fin , ¡1 ost établi que ccl enfant , expose à ln porte d e T M i s c ,
plié (Iîiiis un mauvais sa c , est né de Jeanne IYlioLn0
servante
du boulanger de la Chapelle Agnon.
D ’où il résulte que la prétention d e l à femme M.'irlet, do se
faire reconnoître pour fille de la dame de C l a r y , soit q u ’ello se
présente com m e sa fille naturelle adultérine, et com m e née d'une
autre union q u ’avec M . de C lary , soit q u ’elle se présente com m e
fille légitime de l’un et de l’a u tre , est une ingratitude d ’autant
plus monstrueuse, et une calomnie d ’autant plus criminelle contre
la mémoire de sa bienfaitrice, q u ’elle n ’a même pas l’excuse de
l ’ignorance et de l ’obscurité sur son sort, que ses parens sont con
n u s, et son origine mise au grand jour.
A u surplus, pour effacer jusqu’aux dernières traces des cica
trices que la calomnie de la femme Mariet a pu laisser après elle,
il suffit de rappeler que dans l’une et l’autre des enquêtes, ou
trouve un grand nom bre de témoins qui déposent de la bienfai
s a n c e , de la charité de la dame de C la r y , de l ’usage habituel où
elle étoit de retirer de jeunes filles de r h û p ila l, de les n o u rrir, de
lis entretenir, de les élever, de leur donner des états ou des dois
pour les établir.
Q ue non contente d ’avoir toujours auprès d ’elle un certain n o m
bre de ces filles orphelines ou abandonnées, elle répandoil encore
«es bienfaits sur celles qui lui étoient inconnues; qu’elle avoit re
com m andé à François B o uch on -M alm en ayde, son chargé d ’affaires
à A m b e r t , de procurer des nourrices aux filles qui se trouveroient
exposées , d ’en payer provisoirement les mois , q u ’elle lui en tiendroit compte sur ses revenus, et q u ’elie avoit fait un établisse
ment. à l’hôpital d ’A i n b e r t , pour fournir à l’entietien d ’un certain
n om bre de filles de celte classe.
E t ce qui prouve jusqu'à quel point ce genre de charité étoit
dans ses habitudes et dans ses goûts , c ’est la disposition q u ’elle
fait par son testament d ’une somme de 56 ,ooo francs en faveur
de l’hôpital d ’A m b e r t , pour rétablissement de trois filles de cha
rité
,
pour l’éducation et entretien de
douze
orphelines
,
légitimes
ou n o n , qu elle veut être reçues dans cet hôpital pour y etre lo
�C4o)
g é e s , nourries ,e t instruites , et y être gardées jusqu’à l’âge de
18 ans.
Vouloir , d ’après cela, présenter com m e des preuves de m ater
n ité, les soins q u ’a pris la dame de C la r y des filles orphelines ou
abandonnées q u ’elle a retirées du séjour de l ’infortune et de la
m isère, et q u ’elle a élevées auprès d ’elle; c ’est, com m e nous l’avons
déjà d it, d ’après M . Cochin , se servir des propres bienfaits d’ une
personne tendre et charitable , pour la déshonorer; en un m o t ,
c ’ est corrompre, c ’est empoisonner ce qu’ il y a de plus pur et
de p lus sacre.
U n pareil attentat ne doit pas demeurer impuni.
L a fem m e M arlet s’est livrée à une supposition calomnieuse
contre la mémoire de la dame de C l a r y , sa bienfaitrice ; elle a
cherché à porter le trouble et le déshonneur dans un grand nom
bre de familles qui ont un rang distingué dans la société : elle a
usé de ruse et d ’artifice pour conquérir une grande fortune , et
en dépouiller les vrais propriétaires.
L e s bornes d u civil n e permettent pas aux représentans de M .
et M m de C l a r y , de co n clu re co n tre la fe m m e M arlet à d ’autres
peines qu'à des Dommages-intérêts applicables aux pauvres
Ils laissent au zèle du Magistrat chargé du maintien de
l’ordre
s o c ia l, de venger la morale publique outragée, et d ’appeler sur
sa tête toute la sévérité des lois.
BO I R O T ,
ancien jurisconsulte.
C H ASSAING,
LEBLANC,
> avoués.
G R IM A R D ,
A
de l'imprimerie de L a n d r io t , imprimeur de la Préfecture,
place du Vieux-Marché, maison Viallanes anciennement.
CLERM O N T ,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. De Chardon, Claude-Antoine. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Chassaing
Leblanc
Grimard
Subject
The topic of the resource
enfants naturels
abandon d'enfant
legs charitables
hôpitaux
arbitrages
successions
témoins
jurisprudence
preuves
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Claude-Antoine de Chardon ; Marguerite De Chardon, et Jacques Montanier son mari ; Perrette De Chardon, veuve de Rochevert ; Et Anne De Chardon, fille majeure ; Marie-Anne-Hélène Dubois de Lamothe, veuve Forget ; Elizabeth Dereclesne, veuve de Gaspard de Ligondès ; Marie-Thérèse Dereclesne, ex-religieuse ; Anne-Marie-Joseph-Gabriel-Jean-Jacques Vidaud de Latour et ses frères et sœurs ; François Durand, de Pérignat ; Gabriel Durand, de Pérignat ; Marie Durand de Saint-Cirgues ; Marie-Anne-Félicité Fredefond, et Jean-Jacques Rochette son mari ; Marie-Thérèse Bellaigue, et autres héritiers testamentaires ou ab intestat, médiats ou immédiats, d'Anne Delaire, épouse de Jean-Charles Clary, président en la Cour des Aides de Clermont-Ferrand, défendeurs ; Et encore pour Jean-Pierre De Clary, de Murat ; Marie Dauphin, épouse de JeanRodde, de Chalagnat ; Etienne Chabre, et Antoine Chabre, héritiers dudit Jean-Charles De Clary, aussi défendeurs ; Contre Anne Félix, et Louis Marlet, son mari, coutelier à Clermont, demandeur.
Table Godemel : Enfant naturel : 2. la femme Marlet, après avoir formé une demande tendant à être reconnue fille naturelle adultérine de défunte Anne Delaire, épouse de Charles de Clary, et à être envoyée en possession du tiers de ses biens, conformément à l’article 13 de la loi du 12 brumaire an 2, a-t-elle pu, dans la même cause, prétendre au titre d’enfant légitime de la dite dame et du sieur Clary, et demandeur à être admise à prouver sa filiation par témoin ? n’y a-t-il pas là recherche de paternité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Clermont)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 12
1794-An 12
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1622
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
La Chapelle-Agnon (63086)
Le Cendre (63069)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53296/BCU_Factums_G1622.jpg
abandon d'enfant
arbitrages
enfants naturels
hôpitaux
jurisprudence
legs charitables
preuves
Successions
témoins