1
100
12
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54010/BCU_Factums_DVV14.pdf
a63ee339c0e4ead0c52fffb0e5b30531
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A MONSIEUR LE PRÉSIDENT ,
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ET
MM. LES CONSEILLERS
DE LA COUR ROYALE
:
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DE RIOM.
'liovjj J> ijf'.rincr'-fooci
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acte que mon Avocat a signé pour moi , de mon
consentement, comme fondé de pouvoir j peut-il délier
un frère, de rapporter les jouissances comme les autres
gardiens cohéritiers ?
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Pourquoi cette exception?
M c Dorlac m’aurait bien fait réserve dans l’inventaire
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des meubles et immeubles à mon usage ; mais la promesse
•„
*
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de partager au premier jour tous les biens de la succession,
fut cause que je suis resté huit ans comme étranger au mi
lieu de mon bien j tandis que M. de Péguerol, alors SousPréfet , était en hôtel garni dans notre maison d’Jssoire.
Trois hommes d’affaires et mon frère Julien, aussi gardien,
avaient leur habitation aux Barthes.
�Maurice jeune, au Cours Sablon , faisait aussi profit
de son gardiénage , comme de sa propre chose j il en avait
fait une maison de santé , où plusieurs cures ont pourri
une partie des matelas qu’il m ’a remis. Jusque-là, tous
les frais ont été payés, soit en instance, soit en appel,
chacun selon son amendement j actuellement, nous sup
porterions seuls, avec Julien, tous les frais de l’appel,
pour récompense d’avoir respecté les donations, volontés
de mon Père.
J ’ai fait les plus grands sacrifices. Pour en finir plus
vite , j ’acceptai un lot d’attribution , composé d’une mai
son et d ’un tas de charboïi avarié, que je n’ai pu vendre ,
et duquel je rapporte l’intérêt comme les autres cohéritiers.
Et Maurice seul serait excepté !
♦
c 11
*:
Je n’ai jamais participé à tous les incidens qu’élevèrent
mes frères en instance et en appel j et pour avoir obtenu
justiqe du Tribunal d’Issoire , nous supporterions des frais
considérables , à cause de la petite avidité du minimus de
mes frères.
Si les faits ci-dessus, ne sont pas suffîsans, je vous prie
Messieurs, de faire expliquer à M* D orlac, mon Avocat et
mon fondé de pouvoir, ce qu’il a cru devoir signer à ce su
jet ; si sa lettre écrite à M* Tailhand, ne vous paraît pas suf
fisante.
�3
—
—
Le Tribunal d’Issoire ayant parfaitement connaissance
des faits ci-dessus, a très-bien jugé contre un frère q u i, je
vous prie Messieurs de bien le remarquer, s’est fait com
prendre dans l’acte de donation entre-vif , fait en fa
veur de trois de mes frères, par Guillaume Bellon mon
neveu, incapable, alors comme aujourd’hui, de compren
dre ce qu’on lui fit signer. Il ne lui reste plus rien , et.
cet oncle était son Médecin !
Dans notre grande affaire, nous avions le même avoué,
à Issoire, M* Triozon-Avinain. Eh bien, Messieurs, je
dois vous faire connaître que j ’ai été forcé de payer pour ce
frère sa portion de frais j l’exécutoire à ce sujet est joint à
mes pièces.
Louis SADOUR N Y ,
Ancien Officier de L'ex-garde Impériale.
R io m T H IB A U D
, IM P R IM E U R DE L A C O Ü R R O T A L R ,
�
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Title
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. A monsieur le président et MM les conseillers de la cour royale de Riom. 1839?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Louis Sadourny,
Subject
The topic of the resource
successions
maisons de Santé
Description
An account of the resource
A monsieur la président et MM les conseillers de la cour royale de Riom.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Emile Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1839
1839
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
3 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV14
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Clermont-Ferrand (63113)
Vernet-la-Varenne (63448)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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maisons de Santé
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53535/BCU_Factums_G2620.pdf
27b8a24024656c15cae725e128e0b392
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7®îü'j
MÉMOIRE
POUR
L e sieur B O U R N E T , p ro p ri ét a ire , h a b i t a n t de la
• DE RIOM.
v il le d' Iss oir e, A p p e l a n t ;
2e CHAMBRE.
CONTRE
Jean
B O N N A F O U X , p ro p rié ta ire, habitant au
lieu de L u za règ u es 3 com m une de M o lè d e , dépar
tement du C antal ; J e a n V I A L F O N T , secrétaire
i
de la s o u s - p réfectu re de S a in t- F l o u r , et dam e
F rançoise
D E L A R O C H E , son ép o u se;
V IA L F O N T , Jeanne V IA L F O N T ,
H e n r i
sa soeur,
propriétaires , habitans d u lieu de M o lèd e ; J e a n n e
V IA L F O N T
et A n t o i n e
F O U I L L O U X , son
m ari, q u i l ' autorise, propriétaires,
habitans d u
lieu de B o u f e le u f, com m une d ’A u r ia t 3 même d é
partem ent du C a n ta l, intim és ;
EN PRÉSEN CE
D e d ame
.
Amable-H e n r i e t t e D E C H A U V I G N Y D E
B L O T , veuve de M. C l a u d e - E t i e n n e - A n n e t D E S R O I S propriétaire, habitante de la ville de M ou
lins, et de M. A n n e t comte D E S R O I S , propriétaire,
habitant de la ville de P a ri s , rue Bl an c, n° 1 7 5 ,
défendeurs en assistance de cause.
L
orsqu’ en
COTJR ROYALE
1814 un gouvernement nouveau s’établit
en Fra nc e, le prince qui en était le c h e f , après avoir
publié uue charte q u ’ il destinait à rallier toutes les
�v° ήf
'
( - )
opinions, exprima bientôt le vœu d ’effacer ju sq u’aux
dernières traces des haines et des proscriptions qui
avaient affligé tant de Français.
C ’est dans cette sage pensée q u ’il abolit d ’abord
toutes les inscriptions encore existantes sur les listes
des émigrés, et q u ’il proposa ensuite aux chambres
un projet de loi sur la remise des biens non vendus.
Les chambres s’empressèrent de concourir à cet acte
de justice, et la loi du 5 décembre 1814 fut émise.
L e b ut de cette loi était clairement manifesté par ses
expressions ; elle voulait que les biens fussent rendus
en nature à ceux q ui en étaient propriétaires, ou à
leurs héritiers ou ayan t cause.
Ces termes : a u x propriétaires ou à leurs héritiers,
n ’étaieut pas é q u ivo q u es; ceux-là seuls, qui étaient
héritiers naturels des émigrés, avaient droit aux biens
rendus -, des étrangers légataires ou cédataires ne de
vaient pas etre admis à les réclamer, parce q u ’ils
n ’étaient rendus qu'à la famille de l ’émigré, h ses pa-
i
♦
rens les plus proches.
Aussi les tribunaux s’empressèrent-ils, dès l ’origine,
de repousser les demandes de ces étrangers ambitie ux ,
q u i , à l ’aide de titres vagues et généraux, cherchaient
à s’emparer de propriétés
auxquelles ne pouvaient
s’appliquer des actes très-antérieurs à la restitution.
IVlais dans les divers conflits auxquels cette loi bien
faisante autant que juste a donné l i e u ,
toujours il
avait été reconnu q u ’aux héritiers seuls de l ’émigré,
o u , si ses héritiers n ’existaient plus, à ses parens les
plus proches devaient appartenir les biens rendus.
i
�Ü iT v
*
( 3 )
é ilm
4
Jamais on n ’avait hasardé de prétendre que les pa
reils les plus éloignés de l ’émigré, et des païens qui
u ’étaient pas, qui n ’avaient jamais été ses héritiers,
dussent cependant profiter des bienfaits de la loi.
Il était réservé au sieur Desrois, q u i , encore aujour
d'hu i comme,dans une première cause, est l ’adversaire
réel du sieur B o u r n e t , il était réservé au sieur Desrois
de créer un sy stè me, dont le résultat serait de fausser
la loi sous prétexte de l ’interpréter, et d ’enrichir ceux
qui n ’ont rien perdu en privant ceux q u i ont été dé
pouillés.
Déjà ce système, présenté avec tout l ’art possible
par le sieur Desrois l u i - m ê m e devant la C o u r , a ce
pendant
etc proscrit.
Sera-t-il plus heureux aujourd’ h u i , en le reprodui
sant sous le nom des Bonnafoux?
11 nous est permis d ’en douter.
FAITS.
L a contestation a pour objet la succession de ClaudeG ilb ert de l ’Espinasse, émigré depuis 1792 , décédé
eu pays étranger le 6 frimaire an 8.
E n se fixant sur la généalogie, on voit que les aïeux
de C la u de-G il b ert de l ’Espinasse étaient C la u d e-G il bert de Sévérac et Marie-llose Bonnafoux.
Ceux-ci,
•
de leur un io n, avaient eu cinq enfans ,
savoir :
Claude de Sévérac, qui épousa Anne de Fondras, et
en eut un fils nommé Jean-Marie-Claire de Sévérac ,
décédé sans postérité le 2 germinal an 2 -,
.
�ut
( 4 )
François-Alclebert de Sévérac , qui avait épousé
Amable-Henriette C h au v ig n y de B l o t , et qui est aussi
mort sans enfans, le 4 germinal an 4 '•>
Marie et Marguerite de Sévérac, qui étaient entrées
en religion, et dont la survivante est décédée, à ce q u ’il
pa rait, le i i septembre
i
8 i 5;
E n f i n , Catherine-Marie-Louise de Sévérac, qui avait
épousé Guil lau m e de l ’Espinasse : c’est de ce mariage
q u ’était né le sieur C la u d e-G il b ert de l ’Espinasse de
l'hérédité duquel il s’agit.
A la mort de Jean-Marie-Claire de Sévérac, sa suc
cession, régie par la loi du 17 nivôse an 2 , fut divisible
par moitié entre les Fondras, pareils de la ligne mater
nelle, et les Sévérac, païens de la ligne paternelle ; et
comme le sieur de l ’Espinasse fils représentait sa mère
qui n ’existait plus, il devait concourir, avec FrançoisAldebert de
Sévérac,
son o nc le , et avec Marie et M a r
guerite de Sévérac, ses deux
t a n t e s , au
partage
de la
moitié affectée à leur l ig n e 5 en sorte q u ’il lui revenait
un huitième du patrimoine d u .d é iu n t .
C e patrimoine se composait, i° de la terre de Y e r tessère, située dans le département du C a n t a l ; 20 des
trois quarts de celle de Sévérac, située dans le même
dé p a r t e m e n t } 3 ° des trois quarts de celle de $l-Martin,
située dans le département du Pu y-de-D om e.
L e sieur de l ’Espinasse fils,
héritier pour un hui
tième, devait donc obtenir un huitième de la terre de
Vertessère, et trois trente-deuxièmes des deux autres
terres.
Lesmemesquotités appartenaient a Franeois-Aldebert
�de Sévérac, aussi héritier pour un huitième du défunt.
Au décès de François-Aldebert de Sévérac, qui eut
lieu le 9 germinal an 4 > ses seuls héritiers étaient
Marie et Marguerite de Sévérac, ses deux sœurs, et
Claude - G ilb ert de l ’Espinasse, son neveu. C h a c u n
d ’eux était appelé à recueillir le tiers de sa succession ;
et comme cette succession se composait de la terre
d ’A n z a t , d ’ un huitième de la terre de Vertessère, et
de trois trente-deuxièmes des terres de St-Martin et de
Sévérac, il en résultait que les droits du sieur de l ’Espinasse fils, dans les successions de ses deux oncles,
s’ é l e v a i e n t
à un tiers de la terre d ’A u z a t , à quatre
trente-deuxièmes ou à un huitième des terres de SaintMartin et de Sévérac, et à un huitième plus un tiers
de huitiè me, c’est-à-dire à quatre vingt-quatrièmes ou
un sixième de la terre de Vertessère.
Mais, émigré depuis 1 7 9 2 , frappé de mort civile
par la loi du 28 mars 1 7 9 3 , il n ’avait pu alors re
cueillir lui-mème ces deux successions. C ’était à l ’K ta t
d ’exercer scs droits en vertu de 1 article 3 de la loi du
28 mars, qui porte que les successions échues et à
éch o ir a u x ém igrés pendant 5 o a n s , seront recu eillis
p a r la république.
E n l ’an 2 , à la mort de Je an -M ari e - Claire de
Sévérac, ses biens furent mis sous le séquestre, à la
diligence des agens du gouvernement. Il parait q u e ,
postérieurement, un partage fixa les lots de chaque
héritier.
E n l ’an 4 > <1 l ’ouverture de la succession de François
Aldebert de Sévérac, des mesures conservatoires furent
�aussi prises clans l ’intérêt de l ’É t a t ; et le séquestre
fut mis notamment sur le mobilier qui se trouvait
dans les bàtiinens d ’ Au zat.
Mais la veuve de Sévérac (la dame de C h a u v ig n y de
B l o t ) ¿tait usufruitière des biens de son mari pour le
tems de sa viduité,.
Donataire de l ’ u s u f ru i t, elle réclama la main levée
du séquestre, et elle o b t i n t , le i 3 germinal an 4 > un
arrêté de l ’administration départementale du Pu y-d eD ô m e , q u i , en ordonnant cette main levée, l ’autorisa
à se mettre en possession de la terre d ’A u z a t , et la
soumit seulement à faire procéder à un inventaire du
m obilie r, et dresser un état des immeubles.
L ’inventaire des meubles et l ’état des immeubles
furent f a i t s , le 24 germinal an 4 ? et
dame de
C h a u v ig n y a constamment joui, dès cette époque, de
la terre d ’Auza t.
L ’annee s u i v a n t e , le 3 o floréal an 5 , elle a c q u i t ,
au plus vil prix , les droits héréditaires des deux
religieuses, Marie et Marguerite de Sévérac, droits qui
comprenaient les deux tiers de la terre d ’Au zat.
L e 17 septembre 1 7 9 7 , la dame de C h a u v i g n y
épousa le sieur Desrois. Dès cet instant son usufruit
devait cesser, aux termes de son contrat de mariage;
elle conserva cependant une jouissance à laquelle elle
n’ avait plus droit.
Cependant
le sieur de l ’Espinasse fils mourut à
liurghen en B avi ère , le 16 frimaire au 85 le sieur
G u il la u m e de l’Espinasse son père, qui lui survécut,
était
son plus proche parent et son seul
héritier,
�( 7 )
d ’après la loi du 17 nivôse an 2. Les lois sur l ’éniigration
le p r i v èr e n t de cette succession.
Mais, en l ’an 10, parurent le sénatuscousulte du
16 floréal et l ’avis interprétatif du
9 thermidor.
On sait que le premier de ces deux actes législatifs
amnistia
les émigrés ,
en leur
imposant
quelques
c o n d i ti o n s, notamment celle d ’obtenir un certificat
d ’amnistie ; l ’avis du 9 thermidor étendit cette faveur
aux émigrés décédés, en autorisant leurs héritiers à les
faire amnistier.
L e sieur de l ’Espinasse père o b t i n t , le i 5 ventôse
an 1 1 , un certificat d ’amnistie pour son fils dont il
était l ’ unique héritier. Il est à remarquer q u ’à cette
d er n i è r e
époque, le chapitre du code civil sur les suc
cessions n ’avait pas encore paru. L a
an
2
était encore en vigueur.
J|l>i
du 17 nivôse
*
L ’amnistie prononcée, le sieur de l ’Espinasse père
obti nt divers arrêtés des préfets de la I l a u t e - L o i r e , du
Cail ta l et du Puy-de-Dôme , q u i l ’e n v o y è r e n t ,
en
qualité d ’ héritier de son fils, en possession des biens
de celui-ci.
Mais ces arrêtés diffèrent dans leurs dispositions ,
e t , par suite , dans leurs effets. 4
Les seuls biens à recouvrer dans le département de
la Ila ute-Loire étaient possédés par le fils, au moment
de son émigration. Ils furent restitués au père par un
ar r ê té que prit le préfet de ce département , le 11
germinal au 11.
M a i s , dans les déparlemens du Cantal et du Puyde Dôme se trouvaient les terres de Verlessère , de
�-\n
( « >
Sévérac et d ’A u z a t , dont une partie était échue au
fils l’E^pinasse, en l ’an 2 et en l ’an 4 ? pendant son
émigration.
L e préfet du C antal, par son arrêté du 25 thermidor
an 1 1 , délaissa au sieur de l ’Espinasse ce que l 'É ta t
avait recueilli pour son fils dans les terres de Vertessère
et de Sévérac.
Mais le préfet du département du P u y - d e - D ô m e ,
par arrêté du 7 frimaire an 12,
fit une distinction
entre les biens personnels du fils et ceux qui lui étaient
advenus pendant l ’émigration ; il ordonna , qua nt aux
premiers, la main-levée du séquestre, et le maintint
qua nt aux autres.
C e l t e dernière décision était autorisée par la loi du
8 messidor a n ^ , et par des actes du gouvernement,
des 5 brumaire et 24 frimaire an 9 et 3 floréal an 11.
L e si eur de l ’Espinasse fut donc obligé de s’y résigner;
et il ne put exercer, pour le m o m e n t au moins, les
droits q u ’avait son fils, soit au huitième de la lerre de
St- M ar ti n , soit au tiers de celle d'A nzat. Il parait que
le huitième de St-Martin ayant été déjà réuni à la sénatorerie attachées la cour royale de llioin, cela contribua
à la rigueur de l’ari f l é du préfet du Puy-de-Dôme.
Mais le sieur de l’Espinasse profita dès-lors des biens
qui lui étaient délaissés par l’arrêté du préfet du C a n t a l ,
dont la décision fut aussi définitive, les préfets de
chaque département étant chargés par la loi de pro
noncer sur ces sortes de difficultés.
Ces circonstances furent favorables ïi la dame de
C h a u v i g n y , (jui^ par S011 second mariage avec le sieur
�* \
de cu ju s.
�GÉNÉALOGIE.
»H*0 *3“
J ean
BOINNAFOUX DE BEYSSAT,
M a rg u e rite
) .
DE VERDONNAT.
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JEAM'E,
à
Jeas \ ialfost.
AG>ES,
MARIK-KOSE,
C l a o d e - G i l b e r t DE S É V ¿ R A C ,
JEAN-BAPTISTE,
à
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M
J t A K - J o s iP I l U O ISA FO D X .
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CLAUDE,
Roux.
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*í f r a m c o i s -a l d e b e r t , .
I
à ¡» .« ta » W |
HENRIETTE
DE CIIAUWGNY DE C L O T / *
rvuiariée i M. Dtsuois.
CATHERINE,
JE A N ,
Intimé.
1
JX A X -Jo jcru
de
L
a x o c b i.
JEAN-MARIE-CLAIRE, ,
•J- le 3 germin»! an a.
ANTOINETTE,
i
J
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»
V
ia lfo r t.
MARGUERITE.
MARIE.
CATHERINE-M ARIE-LOUISE
à
G
u il l a u m e de l ’E î p i s a s s e
H « li gi cU S «S <
CLAUDE-GII.BERT.
de ç u ju t.
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a R I E - F hA S C O H E ,
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II
•
K
I
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cchue
au
�Desrois,
a v ai t
m i e r mari.
perdu l ’ usufruit des biens de son pre
Elle se maintint dans la possession du
tiers
de la terre d ’A u z a t , qui était échu à l ’émigré l ’Espiuasse, et que l’E t a t négligea de réclamer contr’elle,
dans l’ignorance, sans d o u t e , de son convoi ou des
clauses de son premier contrat de mariage.
Cependant* le sieur l ’Espinasse père avait cédé au
sieur Gren ier, à la charge de le garantir des dettes, et ,
pour la somme de 3 ooo fr. , tous les droits qui lui
avaient été délaissés par l ’Etat.
U n e contestation s’étant élevée entre le cédataire et
la dame Desrois, pour le partage des biens de la suc
cession de François-Aldebert de Sévérac , son premier
mari, il fut question de la terre d ’A u z a t , de la posses
sion illégale de cette dame et de la négligence des em
p lo yés de la régie. Mais cela n ’eut pas de suites; le sieur
Grenier étant sans qualité pour réclamer, la dame
Desrois se maintint dans sa jouissance.
Les événemens mémorables de i 8 i 5 produisirent la
restauration. Alors les familles des emigres purent
espérer de recouvrer ceux de leurs biens dont l ’É t a t
était encore en possession.
Un premieractede justice fut fait par une ordonnance
royale du \ juin 18 14 s (1M>> cn réunissant au domaine
de la couronne les biens qui formaient la dotation des
sénatoreries, ordonna q u ’on eu distrairait les propriétés
particulières acquises
par voie de confiscation , et
q u ’elles seraient rendues aux anciens propriétaires.
Par l ’eifet de cette ordonnance, le sieur de l ’Espinasse
père devait recouvrer le huitième de la terre de Saint2
�Martin , qui faisait partie de la dotation de la sénatorerie de Riom.
Bientôt est publiée une loi plus générale, celle du
5 décembre 18 14 s Par laquelle le pouvoir législatif
ordonne que « tous les biens immeubles séquestrés ou
« confisqués pour cause d ’émigration, ainsi que ceux
« advenus à 1 É t a t par suite de partage de successions
« ou presuccessions, qui n ’ont pas été vendus et font
« actuellement
partie
du
domaine p u b l i c , seront
« rendus en nature à ceux q ui en étaient proprié« taires, ou à leurs héritiers ou aya^it cause. »
E n vertu de l ’ordonnance du 4 juin et de la loi du
5 décembre, le sieur de l’Espinasse père avait à récla
mer, soit le huitième de la terre de St-M a rtin , soit le
tiers de celle d ’Auza t.
Dans l ’ignorance de ses droits h ce dernier ob jet, il
n agit (1 abord, que pour le huitième de la terre de
St-Martin.
L e sieur Grenier prétendit alors que les droits du
sieur de l ’Espinasse à celte terre étaient compris dans
la cession q u ’ il lui avait faite, le 18 vendémiaire an
i /j .
C ette erreur fut repoussée d ’abord par le tribunal
d ’Is^oire, ensuite par la cour de lliom.
L e jugement du tribunal d ’issoire considère dans ses
motifs, « que les biens dont il s’agit étaient irrévoca» blement réunis à la dotation du sé nat, deux ans avant
» la cession faite par M. de l ’Espiuasse à M. Grenier;
» ‘ lue, dans la supposition où les biens eussent été
» nominativement compris daus ladite succession , la
�V* •
*
c „
)
m
>
» clause eut ¿té, par les lois existantes, déclarée comme
» non avenue. »
E t , dans son dispositif, le tribunal déclare que la
qualité de représentant d u .sieur C la u d e-G ilb ert de
l ’Espinasse } p o u r l ’objet en question, repose dans la
seule personne du sieur de l ’Espinasse père, et q u e ,
p a r conséquent, il est seu l habile à se pourvoir devant
la commission du gouvernem ent, p o u r être envoyé en
possession des biens restitués p a r ordonnance royale.
Tel est le jugement que la cour de R f o m , chambres
réunies, confirma, purement et simplement en ce point,
par-arrêt du 3 mars 1817.
Depuis, par acte authentique du 29 octobre 1817 ,
le
sieur
de l ’Espinasse, qui avait une affection particu
lière pour le sieur Bournet son parent et son successible, lui a fait donation entre vi fs , de tous les droits
qui résultaient, en sa fave ur , de l ’ordonnance royale
du 4 juin 1 8 1 4 5 île la loi du 5 décembre su ivant, et
de l ’arrêt de la C o u r , du 3 mars 1817.
Cependant cet arrêt avait ordonné que M. de l ’Espinassc con trib u e rait , dans la pioporlion de la valeur
du huitième de la terre de St-M arlin, aux dettes de la
succession du sieur de l ’Espinasse fils.
E n exécution de cetarrêl, il fut procédé à un compte,
lors duquel des débats s’élevèrent. On parla de la terre
d ’ A u z a t ; et le sieur Bournet découvrit alors les droits
de son donateur au tiers de cette terre, et la posses
sion illégitime dans laquelle s’élait maintenue la dame
Desrois.
Il forma aussitôt, devant le tribunal civil d ’ Issoire,
�la demande
en
paYtage des biens de la succession d’Al-
debert de Sévérac, qui étaient situés dans le départe
ment du Puy-de-Dôme, et il en réclama un tiers, comme
représentant le sieur de l ’Espinasse iils, héritier pour
un tiers de cette succession , les deux autres tiers ap
partenant à la dame Desrois, du chef de Marie et de
Marguerite
de Sévérac, dont elle avait acquis les droits.
C ett e action avait pour b u t , principalement, d ’ob
tenir le tiers de la terre d ’Au zat.
E lle fut accueillie par jugement du 19 décembre 1822,
qui condamna la dame Desrois et son mari à rapporter
ou à faire rapporter au partage, i° tous les immeubles
de la succession ; 20 la valeur des dégradations q u ’ils
avaient commises \ 3 ° les jouissances q u ’ils avaient per
çues depuis le 5 décembre 1 8 1 1\.
L a dame et le sieur Desrois interjetèrent appel de ce
jugement.
L e sieur B o u r n e t se p l a i g n i t aussi, par un appel
inc iden t, de ce que la dame et le si eur Desrois n ’ a v a i e n t
pas été condamnés au rapport des jouissances depuis la
date du second mariage.
Devant la C o u r, la daine Desrois n ’épargna rien pour
faire triompher des prétentions illégitimes.
E lle soutint q u ’elle était seule propriétaire du tiers
de la terre d ’A u z a t , réclamé par le sieur Bournet ,
comme du surplus de cette terre.
Il lui appartenait, disait-elle, «Vplusieurs titres :
Co mm e subrogée aux droits du sieur Grenier, à qui
la cession en avait été faite, et avec qui elle avait clleincine truité ;
�Comm e l ’ayant acquis des demoiselles de Sévérac, a
qui ce tiers appartenait ;
Comme exerçant, dans tous les cas, les actions des
demoiselles de Sévérac, qui lui avaient vendu toute la
succession d ’Àldebert de Sévérac, et q u ’elle prétendait
être héritières, pour m oit ié, de l ’émigré l ’Espinasse.
Sous ce dernier rapport, la dame Desrois demandait
à être admise, du chef des dames Marie et Marguerite
de Sévérac, à réclamer les biens rendus par l ’ordonnance
du 4 juin 18 14 ? et Par k' loi du 5 décembre i 8 i 4 ; elle
concluait aussi à ce que le sieur Bournet fut tenu de
rapporter le huitièmede la terre d e S t - M a r l i n , q u ’avait
obtenu le sieur de l’Espinasse père ; elle réclamait la
moitié, soit de ce huitième, soit du tiers de la terre
d ’A u z a t , échus à ' l ’émigré l ’Espinasse.
' Toutes ces questions furent débattues pendant p l u
sieurs audiences, devant la C o u r ; tou tes, elles furent
jugées en thèse, par arrêt du deux janvier 1827 , qui
confirma le ju gem ent , quant à l ’appel principal, et
qui, l ’infirmant sur l ’a p p e l incident, condamna lad amç
Desrois à restituer les jouissances q u ’elle avait perçues,
du jour de son convoi avec le sieur Desrois.
Les motifs de l ’arrêt déclarent que ce serait sans
qualité comme sans dr oit, que la dame Desrois vou
drait retenir le tiers de la terre d ’Auzat, et q u ’elle n’en
avait été ni pu être saisie par la cession que lui avaient
faites les deux dames de Sévérac, le 3 o floréal an 5 .
Cependant
comme l'on contestait au sieur de l ’Es-
pinasse père et au sieur Bournet son donataire la qualité
d ’ héritier unique de l ’émigré, et que l ’on soutenait que
�( r4 )
les clames de SévérajC étaient aussi les héritières de celuici pour la moitié des biens q u ’avait rendus la loi du
5 décembre 18 i 4 ? la C o u r eut à se prononcer sur cette
question, et elle la décida par des motifs aussi puissans
que précis.
E n voici le texte*:
« Considérant q u ’aux termes de celte loi (la loi du
« 5 décembre 18 i 4 ) > les biens dont elle a ordonné la
« remise ont du. être rendus en nature à ceux qui en
« étaient propriétairés, ou à leurs héritiers ou ayant
« cause.
_
J
« Que le sieur G uillaum e de l ’Espinasse, aux droits
« duquel est la partie d ’Allem and , ayant élé reconnu
« et déclaré être le seul représentant
de
Cla u de de
« l ’Espinasse son fils , par le jugement du tribunal
« d ’Issoire et par l ’arrêt de la C o u r , des iG juin 18 iG
« et 3 mars 1 8 1 7 , et ces jugement et arrêt n ’ayant
« pas été a t t a q u é s pa r les pa rt ie s de Bayle , il doit
« demeurer pour constant que le
si eu r G u i l l a u m e de
« l ’Espinasse a été seul appelé à recueillir, du chef de
« Claude-G ilb ert son fils, le bénéfice de la loi du
« 5 décembre 1 8 1 4 ? pour raison de tous les biens
« séquestrés ou confisqués sur ce dernier ;
« C o n s id é r a n t, d ’ailleurs., que le sieur Claude« G il b ert de l ’Espinasse, étant décédé le 1G frimaire
« an 8 , sous l ’empire do la loi du 17 nivôse de l ’an 2,
« et ayant élé amnistié le i 5 ventôse de l ’an 11 ,
« toujours sous l ’empire de la même loi, le sieur de
« l’Espinasse son père a été seul saisi de sa succession >
il suivant lo droit commun ; qu'à la vérité
l ’ e xerci ce
�( '5 )
« de ce droi t, acquis audit sieur de l ’Espinasse père,
»
avait
été suspendu par l'effet des lois sur l’émigia'-
(( t i o n , qui l ’avaient transmis au fisc, mais que les
« droits civils ayant été, depuis, restitués aux émigrés,
« et le sieur l ’Espinasse fils ayant été amnistie , la
« remise, ordonnée par la loi du 5 décembre i B 1 4? de
« ses biens dont l ’E t a t avait été saisi momentanément,
« n ’a pu et du etre faite qu au sieur G uillaum e de
« l ’Espinasse son père, comme seul héiùtier naturel
« au moment de son décès ;
« Considérant, au surplus, et en ce qui touche la
demande
subsidiaire que les parties de Bayle ont formée
seules sur 1 appel ,
« Que le tiers de la terre d ’ Auzat formait, ainsi que
« le huitième de la terre de Saint -Martin , la quotité
« de ces biens que le sieur de l ’Espinasse fils aurait
« recueillis dans les successions de Jean-Marie-Claire
« et de 1^rançois-Aldebert de Sévérac, s’il
« émigré, et que la nation avait
« Q u e , dès
q u ’ il
n ’e û t
r ec ue i ll i e p o u r
pas
lui;
a été reconnu et décidé par les
« jugement et arrêt des seize juin mil huit cent seize
« et trois mars mil huit cent dix -se pt, que le sieur de
« l ’Espinasse père avait e u , seul, le droit de réclamer
« la remise du huitième de la terre de Saint-Marlin ,
« en vertu de la loi du cinq décembre 18 1 4 ? les mêmes
« motifs qui ont fait admettre la réclamation du sieur
« de l ’ Espinassc père par rapport au huitième de la
« terre de Saint-Martin , comme étant l ’ unique héritier
« de son fils, doivent aussi faire accueillir celle que le
« sieur Bournet son donataire a formée,
quant au
�(
)
« tiers de la terre d ’A u z a t , sans être assujetti à aucun
« rapport, respectivement à la terre de S ain t -M arti n ,
« et sans q u ’il y ait d ’autre opération à faire que de
« procéder au partage de la terre d ’A u z a t , et du mobi« lier qui en dépendait, pour en être attribué un tiers
« au sieur Bournet, avec les jouissances, suivant q u ’elles
« seront ci après réglées. »
L a dame Desrois se pourvut en cassation contre
l'arrêt. L e pourvoi fut rejeté par la section des requêtes.
L e sieur Bournet devait donc croire q u ’il était désor
mais à l ’abri de toutes tracasseries.
M ais , sur la revendication de la moitié du bien de
l ’émigré l ’Espinasse, la C our de cassation, examinant
seulement la qualité de la dame Desrois, se borna à
déclarer « q u ’il était reconnu en fait que la cession
« consentie, en floréal an 5 , n ’avait point porté ni pu
« p o rt er sur la succession du fils l’Espinasse, décédé
« seulement en f r i m a i r e a n 8 ; q u ’ e ^ e portait seule« ment sur la succession de François-Ald eb er t de
« Sévérac, et q u e , même sur cette succession , elle ne
« conférait nullement à la cessionnaire le tiers en
« question (le tiers de la terre d ’A u z a t ) ;
« Q u ’ainsi , ne pouvant non plus représenter les
« deux religieuses, Marie et Marguerite de Sévérac,
« la veuve de Sévérac, épouse Desrois, était également
« sans qualité pour eu exercer les droits. »
L e silence de la C o u r de cassation sur le fond du
droit, dont elle n’avait pas à s’occuper, à fait concevoir
a la dame et au sieur Desrois le projet de
renouveler
le
j) roc es sous le nom des héritiers maternels des religieuses,
�( *7 )
Ils ont
t ra i té
avec eux par un acte sous seing privé
q u ’ils ne présentent pa s, de crainte que l ’on n ’en
remarque
le faible prix; e t , agissant sous le nom de
cfcs prétendus héritiers, ils ont formé, soit contr’euxmêmes comme détenteurs de
la
terre d ’A u z a t , soit
contre le sieur Bournet , la demande en partage de la
succession de Claude-Gilbert de l ’Espinasse lils.
C ’est par exploit du 16 août 1828 , que l ’action à
été intentée.
n
Les prétentions que l ’on y élève ne sont pas modiques :
non seulement les demandeurs concluent au partage
de la succession de François-Aldebert de Sévérac; non
seulement ils réclament même le rapport de la portion
de la terre de Saint-Martin , restituée au sieur l ’Espin a s s e
par l ’ordonnance du 4 juin 1 8 1 4 , mais ils veulent
encore
faire confondre dans cette succession tous les
biens provenus au fils l ’Espinasse , de la famille de
Sévérac, qui était celle, disent-ils, de Catherine de
Sévérac sa mère.
T o u t e s ces p r é t e n t i o n s o n t été ac cu ei l li es p a r le t riI,
I llW ' l'Ttr ------ 1 I -
* • -»•
4
hunal d ’ Issoire, qui s’est mis en contradiction directe
avec les décisions q u ’il avait rendues l u i - m ê m e , soit
dans une cause semblable entre le sieur de l ’Espinasse
et le sieur Gren ier, soit, dans la même cause, en ire
le sieur Bournet et la daine Desrois, qui a aussi consi
déré comme inutile même, la lierce-opposilion que les
B o n n a f o u x devaient, il semble, former aux arrêts par
lesquels le sieur de TEspinasse père avait élé déclaré
,seul représentant et unique héritier de son iils.
J^es motifs du jugement examinent lu qualité des
«
�(.8 )
■
demandeurs, l ’exception résultant de la nécessité où
ils étaient de former tierce-opposition aux précédens
arrêts, les effets de la loi du 5 décembre 18 1 4 Ils décident que la qualité est suffisamment justifiée
par les actes produits.
Sur la fin de non recevoir, ils déclarent,
« Que les demandeurs n ’ayant pas'figuré dans les
jugemens et arrêts invoqués contr’eux, ont pu remettre
en question ce qui avait été jugé en leur absence; que
l ’article 474
Code de procédure, qui autorisait les
tierces-opposilions'aux jugemens auxquels on n ’avait
pas été pa rtie, accordait une f a cu lt é , mais n ’imposait
pas une obligation. »
Sur le fonds de la cause, ils jugent,
,
« Q u ’en l ’an 4 > au décès de François Aldeberl de
Sévérac, le tiers de sa succession, dévolu à C laude Gilbert L ’Espinasse, alors émigré, fut recueilli par
l ’E t a t qui le représentait ;
« Q u e , lors de l ’amnistie, le
g o u v e r n e m e n t ne réin-
. tégra le sieur L ’Espinasse père q u e dans les biens qui
avaient appartenu au fils décédé en état d ’émigration,
sans y comprendre le tiers allèrent à ce dernier dans
la succession de son oncle François-Aldebert de Sévérac;
« Q u e , dès-lors, ju sq u’au moment de la p r o m u l
gation de la loi du 5 décembre 18 1 4 > l ’ Etat s’est trouvé
propriétaire légal de ce bien; que cette loi n ’a fait
cesser, que pour l ’aven ir, l ’eiFel des lois sur l'éinigration , ce qui s’induit nécessairement de la substitution
faite dans la rédaction du mol rendu au mot restitué
qui se trouvait dans le projet;
�( i9 )
«
Q u ’en
se pénétrant bien de l ’esprit dans lequel
cette loi a été rendue et de la discussion qui a précédé
son
adoption , on voit que le législateur a voulu
accorder une laveur à l ’émigré, k sa famille ou à ceux
à qui il aurait cédé ses droits après la publication de
la loi, et q u ’en désignant les héritiers, il n ’a eu en vue
que ceux qui auraient recueilli la succession s’ il était
décédé postérieurement au 5 décembre i 8 i 4 ;
« Qu e c’est sans fondement q u ’on a prétendu q u ’en
décidant que les biens rendus doivent être attribués
aux héritiers que l ’émigré, décédé sous l ’empire de la
loi du 17 nivôse an 2 , aurait eus s’il eut survécu à la
publication de la loi de 18 r 4 ? ce serait admettre q u ’ un
individu pût laisser deux successions qui
devraient
être régies par des principes différens; q u ’il est évident,
en eff e t, q u ’on ne peut considérer comme ayant fait
partie de la succession de C l aude-Gilbert de L ’Es pi
nasse, décédé sous l ’empire de la loi du 17 nivôse an a ,
des biens q u i , à l'époque où cette succession s’est
ouverte , appartenaient à l ’E t a t ,
et qui n ’ont été
rendus à la famille de l ’émigré que par une loi de grâce
et de laveur, qui n ’a été promulguée que long-tems
après son décès, et qui, d ’après son texte et son esprit,
ne peut avoir aucun effet rétroactif:
« Q u e , d ’ après les lois alors en vigueur, les parens
du sieur de I/Espinasse fils, au degré successible le
plus rapproché, étaient, au 5 décembre 1 8 1 4 , pour
la ligne paternelle,
le sieur de L ’Espinasse père,
représenté par le sieur lîournet;
et , pour la ligne
maternelle, la dame Marguerite de Sévérac, décédée
�\
( 20 )
1e i i
septembre
i8 i
5,
*
Laissant pour héritiers les
demandeurs en partage.
Par ces m o t if s , le tribunal déclare mal fondées les
exceptions proposées par ledit sieur Bournet, les rejette,
et,
statuant au f ond, donne acte à la dame veuve
Desrois et au sieur JDesrois de la déclaration q u ’ils ont
faite par leurs conclusions signifiées 3 q u ’ ils sont prêts
à faire compte, à qui par justice sera ord onné, des,
jouissances dont ils peuvent être tenus ;
« Ordonne que les parties viendront à partage des
Liens meubles et immeubles dépendant de la succession
de François-Aldebert de Séverac; que la dame veuve
Desrois et le sieur Desrois, en leurs q ualité s, rappor
teront audit partage i° tous les immeubles de ladite
succession dont ils peuvent
être détenteurs;
i° la
valeur des dégradations qui auraient pu y être com
mises, avec les intérêts à partir du jour où elles a u
raient eu lieu ^ 3 les meubles , effets mobiliers et
créances actives qui font partie de la succession, avec
les intérêts à dater du jour du convoi de ladite dame
de C h a u v ig n y de Blot avec le sieur Desrois; 4 °
valeur
des jouissances des immeubles, à partir de la même
époqu e, avec les intérêts à dater de la première de
mande en partage, introduite par le sieur Bournet
contre les sieur et dame Desrois ;
« Ord on ne, en o u t r e , q u e , du tout ¡1 sera fait
masse pour en être attribués deux tiers à la dame
Desrois, en sa qualité de cessionnaire des dames
Marie
et Marguerite de Sévé rac, et l ’autre tiers a u sieur
B o u i n e t , aymvt cause du sieur Lespinasse père., d ’ une
�p a r t , et à Jean Bonnafcmx et consorts, d ’autre p a r t ,
comme représentant ensemble les parens successibles
dans les lignes paternelle et maternelle du sieur C la u de
Gilbert de l’Espinasse ; p o u r , ledit tiers être subdivisé
entr’eux tous, chacun suivant son amendement dans
la portion de ce dernier ; '
« Ordonne , encore , que les parties viendront à
division et partage des b iens possédés par ledit Bournet,
provenant de la succession de Jean-Marie-Cia ire de
Sévcrac n e v e u , situés dans la commune de S t - M a r i i n
desTTains^t
de
autres, ainsi que de ceux de la succession
Claude-G ilbert
de l ’Espinasse, décédé émigré, q ui
1uTprovénaient de l a famille de S év éra c, pour en être
attrïbueea
cha~cïïn sa portion afférente; auquel partage
chaque co-partageant rapportera les biens meubles et
immeubles
dépendant desdites successions, dont il se
trouve en possession , avec restitution de jouissances et
intérêts, depuis son entrée en jouissance, soit par luimême, soit par ceux dont il serait l ’ hé r i t i e r ou l ’ayant
• ■
cause. »
Tels sont littéralement les termes des motifs et du
dispositif du jugement dont on a retranché seulement
quelques membres de phrase, étrangers aux difficultés
à résoudre.
Il résulte de ce jugement que le tribunal a été
beaucoup plus lo in , peut-être, q u ’ il ne s’en doutait.
E n effet, non seulement il a attribué aux deman
deurs un droit sur le tiers de la terre d ’ Au za t et sur
le huitième de la terre de Saint-Martin , comme ayant
été restitués aux héritiers de l ’émigré l ’Espinasse par
�la loi du 5 décembre 18 1 4 1 mais encore il a condamné
le sieur Bournet à rapporter au partage tous les autres
biens meubles et immeubles provenant de la f a m ille de
Se’véra c; et par conséquent, soit les terres ou les por
tions des terres de Vertessère et de Sévérac, qui avaient
été restituées au sieur l ’Espinasse p è re , dès le 25 ther
midor an i i , par un arrêté du préfet du C a n t a l ; soit
encore les biens mêmes que pouvait avoir recueillis le
sieur de l ’Espinasse fils dans la succession de la dame
de Séverac sa m è r e , avant son émigration ; ces biens
qui furent également restitués au sieur de l ’EspinaSse
père, par les arrêtés des préfets du Puy-de-Dôme et de
la Ilaute-Loire", des 11 germinal an 11 et 7 frimaire
an 12.
.
C ette étrange largesse n ’est, sans doute, que l ’efTet
d ’une erreur q u ’ont pr od uite , on doit le croire, les
conclusions des demandeurs.
Mais elle prouve, a u m o i n s , q u e le tribunal a été
fort peu a tten ti f aux faits de la cause, comme nous
démontrerons q u ’il a commis les plus graves erreurs en
principes.
L e sieur Bournet a interjeté appel de ce jugement
contre les B o n n a f o u x , demandeurs apparenô.
Il a aussi appelé devant la C o u r la dame veuve
Desrois et le sieur Desrois son fils, demandeurs réels;
et toutes les questions soulevées devant les premiers
juges se reproduisent aujourd’hui.
C e t appel donne donc lieu à examiner les qualités
des demandeurs, la procédure q u ’ils ont tenue, le foiidement enfin des prétentions q u ’ils élèvent.
�C 23 )
Mais, sur le premier o b je t , on se bornera a faire
que les qualités ne paraissent pas suffisamment
justifiées, en ce sens, au moins, que les Bonnafoux ne
ob s erve r
représentent pas toutes les branches des parens m a
ternels de l ’émigré. On se réserve, d ’ailleurs, devérifier
les actes de famille q ui pourraient être rapportés.
Le second objet exigera quelque discussion.
L e troisième, comme le plus im po rta nt, recevra tout
le développement qui est, il semble, nécessaire pour
faire apprécier sainement les droits des parties.
S Ier. 1
*
i
P rocédure tenue p a r les dem andeurs.
~La procédure des demandeurs a été peu régulière.
Ils se présentaient comme héritiers, pour m oiti é, de
C l a u d e - G il b er t
de l ’Espinasse , d o n t , d ’après eux-
mêmes, ils n ’étaient parens q u ’à un degré très-éloigné.
Ils n ignoraient pas q u e , par plusieurs jugemens et
par plusieurs arrê ts, le sieur de l ’Espinasse père avait
été déclaré seul héritier, seul représentant du sieur
Cla ude -G ilb ert de l ’Espinasse, son fils.
C ’é t a i t , en effet, ce q u ’avait décidé un premier
jugement rendu par le tribunal d ’Issoire, le i3 juin
18 i <3 , entre le sieur de l ’Espinasse père et le sieur
Gren ier, relativement à la terre de St-Martin , objet
du procès alors comme aujourd ’ hui. Dans le dispositif
du ju g em e nt , le tribunal déclare que la q u a lité de
représentant du sieur C la u d e de /’E sp in a sse, p o u r
l ’objet dont est q u estio n ,
sonne du sie u r de l
repose
’ E s p i n a s s e pfcniî,
dans
la. s e u l e
per
et, par conséquent,
�* 1
( 24 )
q u ’ il est s e ul h a b i l e à se p o u r v o i r d e v a n t la commission
d u G ouvernem entj p o u r être envoyé en possession des
biens restitue's p a r ordonnance royale.
'»
O r , ce jugement fut confirmé par un arrêt solennel
des chambres réunies de la C o u r de Iliom , prononcé
le 3 mars 1817.
C ’est encore ce q u ’avaient jugé et le même tribunal
d ’ Issoire et la même C o u r de R i o m , entre le sieur
Bournet et les sieur et dame Desrois, qui élevaient
les mêmes questions, renouvelées aujourd'hui par euxmêmes sous le nom des Bonnafoux dont ils sont les
cédataires déguisés. Alors aussi la dame Desrois préten
dait que le sieur Bournet n’avait droit , du chef du
sieur de l ’Espinasse père , q u ’à la moitié des biens
restitués par les ordonnances royales et par la loi du
5 décembre 1814 j elle soutenait que la moitié de ces
biens a p p a r t e n a i t aux religieuses de Sévérac dont il
se disait le cédataire ou le c ré an ci er , e t dont il déclarait
exercer les droits; alors, en un m ot, elle agitait toutes
les difficultés qui se présentent aujourd’ hui; et, toutes,
elles furent repoussées par le tribunal et par la Cour,
dans un jugement du
19 décembre 1 8 2 2 , dans un
arrêt du 2 janvier 1 8 27 ; par la C o u r , notam ment,
qui , après les plaidoiries
les plus soignées, après
l ’examen le plus scrup uleux, déclare dans ses motifs ,
« que le sieur G uil la um e de l ’Espinasse a été seu l
« a p p elé à r e c u e illir , du chef de C la u d e - G il b e r t son
« fils, le bénéfice de la loi du 5 décembre 18 1 /|., p o u r
« raison de tous les biens séquestrés ou
« sur ce dernier. »
c o n fis q u é s
�( 25 )
Comment
/
concevoir q u e , sans q u ’il fut pris aucune
voie pour faire disparaître'ces respectables décisions,
un tribunal inférieur ait pu anéantir des droits aussi
solennellement consacrés ?
Mais, a-t-on d i t , ces décisions sont étrangères aux
Bonnafoux et consorts. Elles sont pour eux res inter
alios cictci.
Elles sont étrangères
aux
Bonnafoux ; mais les
Bonnafoux sont-ils les vraies parties de la cause? qui
oserait l ’affirmer? il est co n nu , il est notoire q•*u ’ils «ne
jo u e n t , dans cette nouvelle contestation, que le rôle
salarié de complaisans prête-noms, et que la dame et
le sieur Desrois ont acquis, au plus vil prix , leurs pré
tendus droits, afin de retarder l ’exécution des arrêts
de la justice, et la restitution d ’immeubles dont ils
s’étaient illégalement emparés. C e n’est q u ’en cachant
dans l ’ombre une cession prohibée par la l o i, q u ’ils
traînent encore le sieur Bournet devant les tribunaux.
A u reste, q uoiq u’étrangères aux demandeurs en ce
sens (jue ceujc-ci n ’y avaient pa s ete p a r tie s, les dé
cisions que nous venons de rappeler devaient être atta
quées, de leur part, par la voie de la tierce-opposition.
C ette voie extraordinaire, autorisée par l ’article 474
du Code de procédure comme elle l’était par les anciens
principes, a été introduite précisément pour les cas
où des tiers n’auraient pas été appelés à des jugemens,
à des arrêts qui pourraient leur nuire en att ribua n t à
un autre une qualité, un droit, un immeuble qui leur
appartiendrait.
Ces tiers sont autorisés à former tierce-opposition
4
�( 26 )
à ces décisions rendues hors leur présence, et à débattre
leurs propres moyens, à faire valoir leurs titres devant
le même tribunal qui a déjà eu à prononcer sur les
mêmes questions.
L a loi le vent ainsi dans le b ut de concilier ce qui est
du à la dignité de la justice et ce que réclame l ’intérêt
des parties;
, Ce qui est dû à la d ig n ité de la j u s t i c e , qui serait
compromise si non seulement les mêmes moyens, mais
encore les mêmes droits, la même cause étaient ac
cueillis par tel tribunal et repoussés par tel autre, sans
que celui qui d ’abord s’est prononcé ait été appelé, ou
à reconnaître sou erreur si une discussion plus appro
fondie la lui signalait, ou à consacrer son opinion par
un second jugement si un second examen lui en démon
trait la justice.
Ce que
réclame l ’intérêt des parties ; car il
convenable que ceux auxquels
sont
est
opposés (f^s juge-
mens, des arrêts oii ils n ’ont pas été appelés soient
admis à se défendre eux-mêmes, à présenter sous un
jour plus simp le, peut-être, la cause que ce jugement
a condamnée, à l ’appuyer d ’ une discussion plus forte,
plus entraînante, s’ils en ont le pouvoir; en un m o t ,
à soumettre les observations q u ’ ils croient propies à
ramener le magistrat à une opinion qui leur soit
favorable.
C ’est ce double b ut que la tierce-opposition est
destinée à remplir.
Soutenir q u ’elle n’est pas nécessaire parce que l ’ar
ticle 1 35 i du code civil n ’accorde la force do la chose
�(.,>
jugée
q u ’a u x
'
*Y-
jugemens rendus entre les mêmes parties
et pour le même o b j e t , c’est évidemment méconnaître
l'esprit de cette règle législative; c ’est aussi blesser la
lettre comme le sens de l’ article 474 du code de pro
cédure.
Sans doute l ’autorité de la chose jugée'n’a pas lieu
dans les cas prévus par l ’article
i
3 5 i
du code civ il;
car
si elle existait, il ne serait pas permis, même au tiers,
de la détruire. Mais c’est précisément d ’après le prin
cipe de l ’article 1 3 5 1 , que l ’article 474 du code de
procédure autorise la tierce-opposition. A l ’aide de
cette voie extraordinaire, les intérêts des tiers et le
respect
dù à la justice sont également ménagés, puisque
les tiers obtiennent le droit de sou tenir personnellement
leurs propres intérêts, et que la justice est elle-même
appelée à reviser, avec son impartialité ordinaire, ses“
propres décisions.
Pré tendre , d ’ailleurs, que la tierce-opposition est
in u til e , c est évidemment iaire une injure à la sagesse
du législateur que l ’on accuserait d avoir é t a b l i , dans
l ’article 474 d u c°de du procédure, une formalité abso
lument frustraloire ; c’est même vouloir rayer cet ar
ticle de la loi; car , s’il en était ainsi, quel serait le
plaideur qui ne se dispenserait pas de la règle, ne fùtce même que pour éviter l ’amende à laquelle doit être
condamné le tiers-opposant qui succombe?
La tierce-opposition est sur-tout indispensable lors
que celui qui réclame ne se borne pas à résister à une
action exercée contre lui en vertu d ’ un jugement qui
lui est étranger, mais q u ’ il prend lui-même l ’initiative;
�q u ’il veut obtenir de la justice ce que déjà elle a at
tribué à un autre; que ses efforts tendent à paralyser
les effets de jugemens ou arrêts antérieurs.
O r , C’est précisément ce q u i arrive dans l ’espèce.
L e sieur Bournet a déjà dans ses m ain s, et en vertu
de décisions judiciaires, aujourd’hui définitives, le hui
tième de la terre de Saint-Martin. Il a, de plus, obtenu,
contre le sieur et contre la dame Desrois, des décisions
semblables qui condamnent ce ux -c i à lui délaisser le
tiers de la terre d ’ A u z a t , et à lui restituer de nom
breuses jouissances. C e sont les effets de ces décisions
que tend à anéantir la demande des Bonnafoux. C o m
ment pourrait-elle être accueillie sans une tierce-oppositionPEt comment se f a i t - i l q u ’étant avertis du moyen,
puisque le sieur Desrois l ’in vo q u ait,
les Bonnafoux
n ’aient pas pris la sage précaution de former cette
tierce-opposition devant le tribunal , d ’ Issoire , qui
devait en c o n n a î t r e ? car les arrêts de la C o u r étaient
confirmatifs de jugemens rendus pa r ce t r i b u n a l .
C ette négligence aveugle ou plutôt cette étrange
obstination à ne tenir aucun compte des décisions de
la justice recevra sans doute son prix par l'annulation
de toute la procédure des Bonnafoux et consorts.
Mais, s’il fallait examiner le fonds de leurs pré
tentions, il serait facile d ’en démontrer l ’erreur.
S II.
E xa m en du f o n d des prétentions des intim és.
Les Bonnafoux et consorts, se prétendant héritiers
de l ’émigré C la u de de l ’Espinasse, ont réclamé, °n.
�vertu de la loi du 5 décembre i 8 i 4 j non-seulement
les immeubles rendus par cette lo i, mais encore ceux
qui avaient été restitués antérieurement.
Tou t ce q u ’ils demandaient leur a été accordé, par
une erreur de droit sur le sens de la loi quant aux
objets de la première classe, par une erreur de f a it ,
même dans leur propre sy s tè m e , relativement aux
biens précédemment recouvrés.
Examinons successivement les deux points :
L ’erreur de droit sera facile à démontrer en se fixant
sur les termes comme sur l’esprit de la loi, sur l ’opinion
des auteurs, sur la jurisprudence même des arrêts;
car tous les élémeus de doctrine se réunissent pour
repousser
les prétentions des Bonnafoux.
L a loi du 5 décembre 18 1 4 peut être considérée sous
deux rapports : ou comme un acte de justice, ou comme
un acte de libéralité. Or, sous l’un comme sous l ’autre
de ces rapports, elle ne peut être que favorable au
sieur Bournet.
Considérée comme acte de justice, cette loi a dù
nécessairement diriger ses dispositions en faveur de
ceux auxquels avait nui la confiscation, dont elle avait
pour b ut de réparer les effets, au moins en partie; e t ,
par conséquent, ses avantages ont dù être recueillis par
l ’émigré lui-mêm e, s'il était encore vivant; par l ’ héritier de cet émigré, si celui-ci n’existait plus au mo
ment de la loi. La justice v o u l a i t , en effet, que l ’ hé
ritier profitât de ce q u ’aurait dù recevoir l’émigré luimême, parce q ue, si la remise avait eu lieu avant le
décès de l ’émigré, l’ héritier aurait trouvé dans la suc-
�‘
( 3o )
*
cession, ou les objets remis, ou leur valeur; parce que,
en ce sens, c ’était réellement l ’ héritier qui avait perdu.
O r , c’est précisément ce que la justice prescrivait,
q u ’a entendu faire le législateur.
11 nous l ’apprend lui-même dans deux de ses actes :
dans l ’ordonnance du 21 août 1 8 1 4 , qui a précédé la
loi du 5 décembre, et dans les considérans où sont
indiqués les motifs qui ont dicté cette loi.
Dans l’ordonnance du 2 r a o û t , l ’auteur de la Charte
constitutionnelle, en la rap pelant, fait connaître sa
pensée toute entière, par ces expressions remarquables:
« L e vœu le plus cher à notre cœur est que tous les
» Français vivent en frères, et que jamais aucun sou» venir am er ne trouble la sécu rité qui doit suivre un
» acte aussi solennel. »
C ’est en exprimant ce v œ u , q u ’il annonce une loi
prochaine sur la restitution des biens non vendus des
émigres; et c est en exécution de ce vœu q u ’est pré
sentée et q u ’est adoptée la loi du 5 décembre.
O r , quel était le b ut de celte loi?
L e législateur nous l’apprend l u i- m ê m e dans son
préambule.
Il y déclare q u ’en rendant une prem ière ju s tic e par
l ’ordonnance du
21
a o û t , qui abolissait toutes les
inscriptions encore existantes sur les listes des émigrés,
il a annoncé l ’intention de présenter aux chambres
une loi sur la remise des biens non vendus.
Il
ajoute q u e , dans les dispositions de cette loi, il a
dù concilier un acte de ju s tic e avec le respret dû à des
droits acquis p a r des tiers en vertu des
lo is
existantes.
�r
( 3- )
>3
T e l s sont les m o t i f s s ur l esq ue ls est f on d é e u n e loi
o ù l ’on r e m a r q u e trois p r i n c i p a l e s d is p os i t io n s :
L ’une consignée dans l ’article i er, par laquelle «sont
» maintenus, soit envers l ’É t a t , soit envers les tiers,
» tous jugemens et décisions rendus, tous droits ac» quis avant la publication de la C h ar te constitution» nelle, et qui seraient fondés sur des lois ou actes
» du Gouvernement , relatifs à l ’émigration. » .
L ’autre, contenue dans l ’article 2 , et
qui
est ainsi
conçue :
« Tous les biens immeubles séquestrés ou confisqués
» pour cause d ’ém igrat ion, ainsi que ceux advenus à
» l ’État par suite de partage de successions ou de pré» successions, qui n'ont pas été vendus et font actuel»
lement
partie du domaine de l ’É t a t , seront rendus
» en nature à c e u x qui en étaient propriétaires, ou ci
» leurs héritiers ou ayant cause. »
L a t r o i s i è m e , e x p r i m é e pa r l ’a r t i c l e
\!\,
q u i réserve
a u x c réanci ers des é mi gr é s toutes a ctio ns su r les b i e ns
r e n d u s , en s u s p e n d a n t , s e u l e m e n t j u s q u ’ au i " j a n v i e r
1 8 1 6 , l ’e xerci ce de ces ac ti on s.
Que l ’on combine les motifs qui ont dicté l ’ordon
nance du 21 août avec ceux qui ont préparé la loi du
5 décembre, avec les dispositions littérales de cette loi.
Q u ’y reconnaitra-t-on ?
Que la loi s’est proposé de concilier tous les esprits,
d ’efiacer tous souvenirs a m e r s , de ramener tous les
Français îi une douce concorde, de les engager à vivre
tous en frères.
Que devait-elle faire pour remplir cet heureux b u t ?
y
�,*.V
i r* ‘
vi
l
( 3= )
Elle devai t, sur-tout, être jii9te!
E lle devait donc concilier tous les intérêts, tous les
droits.
,
D o n c , elle devait rendre les biens confisqués à ceux
qui en avaient été privés, c’est-à-dire aux émigrés euxmêmes s’ils étaient encore vivans; à leurs héritiers, si
ces émigrés étaient morts. C ar les héritiers avaient été
réellement privés, comme l ’émigré q u ’ils représentaient,
de tous les biens confisqués sur c e lu i - c i , puisque ces
biens leur seraient parvenus sans la confiscation.
Donc aussi elle devait respecter les droits acquis;
ca r , en les vio la n t, la justice aurait été blessée.
Donc,
enfin,
elle devait protéger les droits des
créanciers des émigrés.
O r c’est précisément tout cela q u ’elle a fait par les
articles cités; puisqu’à défaut de l ’cmigré, la remise a
été faite à son héritier; puisque les droits acquis ont
été maintenus; p u i s q u e les a c ti on s des créanciers ont
été ménagées.
Ainsi
l ’on doit
reconnaître que c ’est à titre de
justice que la remise a été faite.
E t comment pouvoir soutenir q u e , dans l ’intention
du législateur, cette remise a été une pure libéralité,
tandis que dans la loi il parle plusieurs fois d ’actes (le
justice à faire, sans employer une seule fois le nom do
lib é r a lité ?
Co mm en t ne pas réfléchir, aussi, q u e , s’ il s’était
agi d ’ un simple d o n , les actions de tous créanciers,
ou non, n’auraient pas été réservés sur les biens
rendus? c ar ces biens étant devenus, par lu d é c h é a n c e ,
déchus
�( 33 )
libres de dettes dans la main de l ’É t a t , auraient passé
libres aussi'dans celle d ’ un donataire qui n ’aurait pu
être tenu de payer les dettes d ’ un émigré dont il n ’au
rait
pas été le vrai héritier. E t cependant une jurispi u-
dence’ constante a chargé d ’ une contribution propor
tionnelle aux dettes ces héritiers eux-mêmes q u i , avant
la l o i , avaient cédé à un t i e r s , aux risques de celui-ci,
tous leurs droits héréditaires, et q u i , ayant recouvré
par Cette loi les biens non vendus,
refusaient de
contribuer avec leur propre cédataire au paiement des
dettes, sous prétexte que la remise n ’était q u ’une
libéralité. Cela a été ainsi jugé notamment entre le
sieur de l ’Espinasse lui-m«me et le sieur Grenier, par
arrêt de la cour de Riom , du 3 mars 1 8 1 7 ; et cet
arrêt fut confirmé par la cour de cassation, qui depuis
a rendu deux décisions semblables, les 26 juillet 1826
et 24 avril 1827 ( Y . Sirey, 27. 1. 100 et
Mais, d i t - o n , on a substitué dans la loi le mot
rendre au mot restituer, qui était dans le projet.
Q u ’importe? n ’est-ce pas une misérable subtilité que
de trouver dans cette substitution un acte de libéralité
dont la loi ne parle pas, au lieu d ’ un acte de ju s tic e
q u ’elle annonce positivement!
,
Telle ne fut pas, au reste, la pensée qui dicta au
législateur ce léger changement de mots; la cause en
est connue : le législateur craignit que l ’emploi du mot
restituer ne fit supposer q u ’il entendait signaler connue
une spoliation la main-mise nationale sur les biens des
émigrés.
Car 011 restitue ce q u ’on a v o lé ou,pris sans droit.
5
�Ut
k
(
3 4
)
On rend ou l ’on remet ce que l ’on a r e ç u , ce dont
on s’est chargé.
*- E n employant le mot vendre comme étant l ’expres
sion la plus juste et la plus douce, le législateur a voulu
prévenir toute fausse interprétation tendante à ‘flétrir
d ’anciennes lois, qui avaient été sévères sans dou te,
mais que les dangers de l ’E t a t avaient peut-être com
mandées.
C ’est dansce b ut unique, non dans celui d ’indiquer
un don , que l ’on a remplacé le mot restituer, non par
le mot donner, mais par le mot rendre, qui a un tout
autre sens.
L ’on donne à qui l ’on veut, par une pure générosité,
ou par des senlimens particuliers d ’affection.
Mais l ’on ne rend q u ’à celui qui a eu , et q u i , sinon
a la rigueur, au moins en éq uité , a le droit de re
couvrer.
Or, la loi de 1814 n ’ a été le fruit, ni d ’ une affection
spéciale, ni d ’ une générosité c a p r i c i e u s e , qui ait voulu
gratifier, par une étrange préférence, une classe de
citoyens plutôt q u ’une autre ; elle a été dictée par le
sage désir d ’éteindre toutes les haines, en réparant,
autant que possible, d ’anciens maux et de grandes
pertes. L ib éra le, si l ’on v e u t , en ce sens q u ’elle ac
cordait ce q u ’elle pouvait refuser, elle a cherché prin
cipalement à être juste, d ’ une justice politique et civile
tout à la fois; d ’ une ju s tic e ¡)oliti<jue, sa mesure bien
faisante tendant h détruire de funestes germes de dis
corde; d ’ une ju s tic e civile,-en ordonnant que les biens
fussent rendus à ceux-là mêmes qui en avaient été
�( 35 )
les propriétaires, ou à leurs héritiers ou ayant cause.
C ertes, ce ne serait ni faire l ’acte cle ju s tic e annoncé
par la l o i , ni remplir le b ut cle conciliation et (le
c o n c o rd e q u ’elle se proposait, que de rendre les biens
non vendus, non au parent le plus proche de l ’émigré
l ’Espinasse, mais h ses parens les plus éloignés; non
au seul héritier q u ’ il avait laissé, à cet héritier q ui
seul avait pleuré sa mort , q ui seul avait fait réhabi
liter sa mémoire,
qui seul avait accepté les charges
de sa succession, à son malheureux père enfin, encore
existant au jour ou a paru la loi du j decembie i 8 i ^ ;
mais à d ’indifierens collatéraux qui ne s’ étaient jamais
occup és du sort de l ’émigré, q u i ,
peut-être m ê m e ,
avaient toujours ignoré son existence.
On opposera peut-être q u ’au moment de son décès,
en frimaire an 8 ,
le sieur de l ’Espinasse fils était
émigré, q u e , comme tel, il était frappé de mort civile,
et q u ’ainsi il n ’a pu transmettre alors aucun droit à
aucun héritier.
C ette question, s'il était utile de l ’app ro fo ndir ,
présenterait des difficultés d ’autant plus sérieuses ,
q u ’elle a été diversement jugée par la C o u r de cassation
elle-même.
Dans l’ancienne jurisprudence, si l ’on rendait les
'biens confisqués sur un individu mort c i v il e m e n t, la
remise en était toujours faite à l ’ héritier du tems de
la mort naturelle. C ’est ce q u ’avait décidé la C o u r
de cassation par un premier arrêt du 21 fructidor
an 8; et c’est ce q u ’elle a jugé encore par un second
a n ê t , du 21 décembre 1807 , relativement à la suc
�cession d ’un
émigré,
dont la
mort
avait précédé
l ’amnistie. On lit dans l'arrêt ce motif remarquable :
« C ’est Vhéritier légitim e à l ’époque de la mort
« naturelle de l ’émigré, qui a dù recueillir sa succes« sion ( i ) . »
D e p u is, par un arrêt du j
août 1820, la même
C o u r suprême a pensé que la succession de l ’émigré
amnistié après sa mort n ’était censée ouverte q u 'a u
jour de l ’amnistie, et q u ’elle appartenait à l ’ héritier de
cette époque, non à celui qui le serait au moment du
décès de l ’émigré (2).
Mais la question est indifférente pour la cause; car
le sieur de l ’Espinasse serait l ’ héritier légitime et l ’ hé
ritier unique de son fils, le 16 frimaire an 8, date d e l à
mort naturelle; et il le serait aussi exclusivement, le
i 5 ventôse an 11
date de l ’amnistie q ui fit cesser la
mort civile du fils émigré. A cette dernière ép oque,
comme à la p r e m i è r e , la loi du 1 7 nivôse en 2 , seule
en vigueu r, attribuait au père toute la succession d ’ u n
fils qui ne laissait ni enfans, ni frères ou sœurs, ni
d ’autres ascendans.
A i n s i , que la succession du fils émigré amnistié
soit réputée ouverte au moment du décès, ou seule
ment au jo u r de l ’amnistie, dans l ’ un comme dans
l ’autre cas, le père a été le seul héritier de son fils. L u i
( i ) V o i r l e i er a r r û t , d a ns les Q u e s t i o n s d e D r o i t d e M e r l i n , nu m o t
confiscation, § 2. V o i r aussi le r é pe r t o i re d u m ê m e a u t e u r , au m o t
h é r itie r .
(^) Vuir l’ arrût dans le Journal de Sircy, a i . 1. 14.
�( 3 7 )
seul aussi, en cette q u a l ité , avait obtenu en l ’an i l
le certificat d ’amnistie du ills; lui seul, comme unique
représentant de l ’émigré, avait été, lors de l ’amnistie,
envoyé en possession, par les arrêtés des préfets du Cantal,
de la I la u te -L o ir e , du Puy-de-Dô m e, de tous les biens
de l ’émigré qui furent rendus à cette époque; lui seul
a agi, a tr ait é, a acquitté les dettes, comme héritier
de l ’émigré, depuis l ’an 11 ju sq u’au jour de la loi de
i 8 i 4;
lui seul, enfin, au moment où cette loi de
justice a été publiée, était investi et du titre d ’héritier
et des droits attachés à ce titre ;
Comment ne pas reconnaître que c’est aussi lui seul
qui a été appelé par cette loi a recueillir des biens
q u ’elle déclarait ne rendre q u ’à l ’ héritier de l ’émigré?
Que pourrait-on opposer de solide à des observations
fondées sur les faits, sur les termes de la l o i , sur
l ’équité même?
Co mm en t pourrait-on soutenir sérieusement que le
législateur, q ui a déclaré vouloir avant tout être juste,
n ’a cependant pas entendu rendre tous les biens du
fils au père , qui seul en avait été privé par la confisca
tion, et que ce législateur ait eu la bizarre pensée d ’en
rendre moitié à des parens éloignés qui n’avaient rien
perdu et à qui la confiscation u ’avait rien ô t é , puis
q u ’ ils n’auraient rien obtenu ni à la mort du fils, s’il
était décédé integri slatusj ni au momentde l ’amnistie;
la loi des deux époques ne leur accordant aucune part
dans l’ hérédité de l’émigré?
Mais la question peut être examinée avec le même
avantage sous son autre face.
�rY
( 38 )
Que l ’on suppose, si l ’on v e u t , que les biens aient
été rendus par pure lib é ra lité plutôt que par esprit de
justice.
Résulterait-il de là que ce soit à d ’autres q u ’au sieur
de L ’ Espinasse père que la remise en ait été faite?
Non sans doute.
. Les biens seront rendus, dit la l o i , à c e u x q u i en
étaient propriétaires ou à leurs héritiers ou ayant
cause.
A
leurs héritiers! Pour exécuter la loi,
rechercher si, au moment où elle a p a r u ,
il faut
l ’émigré
L ’Espinasse avait ou non un héritier.
S ’il en avait u n , c’est à lui que les biens doivent
être rendus.
S ’il n’en avait pas, c’est à ses parens les plus proches,
à ses successibles, c’est-à-dire à ceux que les lois exis
tantes appelleraient à être ses héritiers, que les biens
devront a p p a r t e n i r .
Mais nous avons vu que dans'
existait,
l ’ espèce u n
héritier
[je sieur de l ’Espinasse père avait ce ti tr e,
ou depuis le iG frimaire an 8 , date du décès du fils,
ou depuis le i 5 ventôse au n , date de son amnistie.
Il en avait été saisi par le bienfait du sénatus-çonsulte
du iG floréal an 10 et du décret du g thermidor suivant ;
il avait été reconnu comme tel par de nombreux actes
administratifs, et notamment par les arrêtés des préfets
de la Ilautc-Loire, du C a ntal, du Puy-de -D ôm e; c’est
eu cette c£11a 1ité q u ’ il avait été envoyé en possession des
biens de son fils, sur la tête duquel ne pesait plus dèslors la dangereuse qualification d ’émigré; il a
exercé
�( 39 ✓
)
seul pendant 10 ans et plus, avant le 5 décembre 18 r 4 ?
les droits d ’ héritier, et en a seul aussi supporté les
charges; il a seul disposé des biens; il a seul acquitté
les dettes de la succession.
Comm ent se ferait-il que ce ne fût pas à lui seul que
s’appliquât le texte comme l ’esprit de la loi du 5 dé
cembre 1814 > et f£ue cette loi, qui dit expressément
que les biens seront rendus a u x héritiers de l ’ancien
propriétaire, eût voulu tout lew.contraire de ce q u ’elle
disait, eût entendu que les biens seraient rendus, non
au sieur de l ’Espinasse père, encore vivant et seul in
vesti, en 1814 s fl u l itre d ’héritier de son fils, mais aux
B o u n a f o u x , qui n ’avaient jamais eu cette qualité, q ui
ne l ’avaient même jamais réclamée, et qui n’en étaient
pas plus saisis alors q u ’antérieurement?
Mais, dira-t-on, ce n ’est pas aux anciens héritiers
que la loi a entendu rendre, c’est 'a de nouveaux hé
ritiers, parens des deux lignes paternelle et maternelle,
qui auraient été successibles d ’après la l o i , si la suc
cession du fils l ’Espinasse s’était ouverte seulement le
5 décembre 18 il\.
Cett e assertion, comment la prouve-t-on?
Que l ’on cite un seul article, un seul mot dans la
loi du 5 décembre qui l’autorise?
Cette loi ne parle pas de su cce ssib le s, elle parle
d ’ héritiers déjà reconnus comme tels.
Elle ne crée pas un nouvel ordre de succession, un
nouveau mode d ’attribution ou de partage des biens ;
elle s’en réfère à l ’ordre déjà existant; elle attribue ce
�qui reste des biens de l ’émigré à l ’ héritier de celui-ci,
à celui qui déjà avait recueilli légalement le surplus de
l ’ hérédité, à celui à qui seul ce reste appartenait, puis
que seul il en avait été privé ju sq u’alors par une re
mise tardive.
Seulement la jurisprudence, plutôt même que la loi
dont le sens a été peut-être un peu forcé, la jurispru
dence a exigé que l ’ héritier légitime fut v i v a n t , pour
lui attribuer la remise, o u , si l ’on v e u t , le bienfait.
Mais aucun arrêt, aucune autorité
n ’est
allée ju sq u’à
décider, ju s q u ’à préjuger, même indirectement, que
l ’ héritier ancien, que l ’ héritier saisi légitimement et
reconnu comme tel en 18 14? s ^ existait encore lorsque
la loi a paru ,
ne fût pas aussi le Seul héritier que
cette loi appelât à profiter des biens dont elle faisait
la remise. Il était réservé aux sieur et dame Desrois
eux-mêmes e t d e faire élever par les Bonnaloux cet é t r a n g e s y s t è m e , que l'aveuglement de
l ’ intérêt ou les erreurs de l ' i m a g i n a t i o n o n t pu seuls
d ’ cl e ve r
enfanter ; qui tendrait à détruire cette maxime si con
nue : sem el hœres sem per lueres; qui établirait deux
successions différentes dans le même in div id u , et q u i ,
en laissant au sieur de l ’Espinasse p è r e , comme seu l
héritier de son fils avant
1 8 t 4 > to u t le patrimoine
recouvré antérieurement, le priverait de la moitié de
son titre pour le
tems
postérieur, et l ’obligerait à
partager les biens obtenus depuis, avec d ’autres héri
tiers, créés tout-à-coup non par la loi qui n ’en parle
pas, mais par les illusions ou les caprices de la
argumentation de quelques jurisconsultes.
vaine
�( 4. )
C ett e création fantastique est en opposition dircctG
avec les termes de la loi de 18 1 4 s qui n’appelle q u ’un
seul ordre d ’héritiers, c’est-à-dire les héritiers déjà dé
clarés
tels et eæislans encore au moment de sa p u b li
cation; qui ne reconnaît, d ’ailleurs, q u ’ une seule suc
cession de l ’émigré, puisqu’en rendant les biens non
vendus aux héritiers, elle a soumis ceux-ci à la charge
proportionnelle des dettes, même de celles dont l’É t a t
était affranchi par la decheance, et dont un simple
donataire de l ’É t a t aurait dû l ’être par le même
motif.
Ces observations, et sur-tout les termes de la l o i,
son b u t , son esprit, repoussent avec force les préten
tions tardives des B on nafoux, dont le silence prolongé
depuis 18 14 n a ^
évidemment rompu en 1829 q u ’à
la demande des sieur et dame Desrois, et moyennant
un modique salaire payé à leur complaisance plutôt
q u ’à la cession secrète de leurs droits illusoires.
L a loi de 1 8 1 4 fournirait au sieur Bournet un ar
gument de p l u s , s'il était nécessaire.
E n effet, dans le préambule, le législateur déclare
formellement q u ’il veut concilier un acte de justice avec
le respect d û 11 d e s d r o i t s a c q u i s p a r d es tiers en
vertu des lois existantes.
Dans l ’article premier, il déclare maintenir, tous
jugem en s et décisions rendus, tous actes passés, t o u s
d ro its
a cq u is
avant la p u b lica tion de la C h â tie
constitutionnelle t et <jui seraient fo n d é s sur des lois
ou des actes du Gouvernem ent rela tifs ii Vém igration.
O r , la qualité de seul héritier (le l ’Espiuasse fils
6
�p X\
'•
( 4 0
était pour le sieur l ’Espinasse père un droit acquis en
vertu des lois existantes.
C et te qualité de seul héritier lui avait été coniérée
ou reconnue par plusieurs actes du Gouvernement, re
latifs à l ’émigration, tels que le certificat d ’amnistie,
délivré à sa demande, et les arrêtés d ’envoi en possession
des biens du fils, rendus en sa faveur; ces arrêtés,
parmi lesquels celui du préfet du C a n t a l , qui reçut
sa pleine exécution, restituait au père, même les terres
de Vertessère et de Sévcrac échues au fils, par suc
cession, pendant son émigration et sa mort civile.
*
Cett e qualité indélébile d'héritier u n i q u e , ce droit
a cquis et consacré par plusieurs actes administratifs non
attaqués et inattaquables, serait un jeu si le système
des Bonnafoux était accueilli; une choquante rétroacti
vité serait admise , et tous les principes nouveaux
comme tous les principes anciens seraient également
méconnus et blessés p o u r favoriser des prétentions que
l ’équité repousse autant que la l e t t r e de la loi.
U n e autre circonstance vient encore à l’appui des
droits du sieur Guil laum e de l ’Espinasse. Il é t ait, en
18 14 > Ie parent le plus proche de l ’émigré son fils; et
sous ce dernier ra p port , n ’eiit-il pas même été alors le
seul héritier reconnu, le seul héritier saisi de ce titre
depuis le a 5 ventôse an i i , date de l ’amnistie de
l ’émigré, il eût d u , d ’après la jurisprudence, recueillir
seul tout le bénéfice de la remise accordée par la loi
du 5 décembre.
Nous verrons en effet, bientôt, que les arrêts
même
invoquas par les Bo nnafoux, ces arrêts rendus dans
�( 43 )
(les cas où l'héritier légitime de l ’émigré n ’existait plus
au moment de la publication de la l o i, ces arrêts ont
attribué tous les biens au parent le plus proche de
l ’émigré, sanstexaminer de quel côté il était parent, à
quelle ligne il appartenait.
Soit, donc, que l ’on considère que l ’émigré l ’Espinasse étant décédé en l ’an 8 ,e t ayant été amnistié en
ventôse an 11 , c’est-à-dire sous la loi du 17 nivôse an
2 , ri; a eu q u ’ un seu l héritier, un seu l représentant,
un seu l ayant-cause 3 savoir : le sieur G uillaum e de
l ’ Espinasse père;
Soit que l ’on fasse attention que le sieur de l ’Espinasse père était encore existant au 5 décembre 1 8 1 4 ,
et q u ’il avait alors un droit acquis à ce titre d ’héritier
u n i q u e , de représentant u n i q u e , d ’ayant-cause de son
fils dont la qualité d ’émigré avait été depuis long-tems
effacée par l ’amnistie;
Soit , enfin , que l ’on réfléchisse que le sieur de
l ’Espinasse père était seul aussi le parent le plus proche
de l ’ancien émigré ,
On sera dans la nécessité de reconnaître que c’est à
lui seul aussi que doivent appartenir les biens rendus
par la loi de iBi/jToutes ces idées sont en harmonie avec les opinions
des auteurs, avec la jurisprudence des arrêts.
M. Merli n, dans ses questions de d ro it, au m o t
con fiscation y § 2 , après avoir rapporté l ’arrèt de cas
sation prononcé le 25 janvier 1 8 1 9 , entre l ’abbé l)uclaux et le marquis D é p i n a y - S a i n t - L u c , fa it , sur cet
arrêt, plusieurs réflexions.
�Il remarque que l ’émigré Dép inay de L i g e r i , mort
long-tems avant la loi, avait laissé pour héritière légi
time sa fille, décédée elle-même cinq ans avant le 5
décembre i 8 i 4 > et dont l ’abbé Duclaux était le léga
taire universel \
Que cette héritière, n’existant pas en 18 t 4 ? n ’avait
pu, ni profiter du bénéfice de la loi, ni par conséquent
le transmettre à son légataire;
E t que les biens rendus avaient été attribué!' au
sieur Dépinay-Saint-Luc., comme étant le p l u s p ro c h e
p a ren t, exista n t en 1 8 1 4 ? de l ’émigré Dépinay de Ligeri.
Mais M. Merlin ajoute d ’ importantes observations :
C e n ’est,
dit-il,
que par une fin de non recevoir
contre l ’abbé D u c l a u x ,
que la question fut jugée en
faveur du sieur Dépinay-Saint-Luc. L ’abbé D u cl aux,
étranger h la famille D é p in a y , n ’avait ni titre ni qua
lité p o u r réclamer les biens rendus.
D ailleurs, p o u r a d m e t t r e la d e m a n d e du sieur de
S a in t-Lu c, il eut f a l l u supposer, s ’il exit eu en tête un
adversaire com pétent ( c ’est-à-dire un héritier vivant
de l ’é m ig r é ) , que le com te D ép in a y de Ligeri avait
laissé d e u x successions (pii s ’étaient ouvertes <i d e u x
époques différentes ; supposition q u i répugne a u x no
tions les p lu s triviales de la ju risp ru d en ce
L ’auteur fait ensuite observer que l ’arrêt cité regarde
la q u a lité d ’héritier com m e indispensable à
tout
membre de la f a m ille des anciens propriétaires 3 q u i
se présente p o u r profiter de la remise.
M. Merlin continue ainsi :
» Il dit bien ( l ’arrêt Du cl aux) que la loi du 5 dé-
�( 45 )
J f ô
« cembre i 8 i 4 est une ^oz p o litiq u e et spécia le ; mais
« il ne va pas jusqu’à dire q u ’elle donne à l ’expression
« héritier, une acception différente de celle que lui at« tribueut les lois ordinaires.
« Il dit bien que cette loi doit trouver son interpré« tation dans les motifs qui l ’ont fait rendre; mais il
« ne s’en suit nullement de là que l ’expression héritier
« soit, dans son texte, susceptible d ’un autre sens que
« celui q u ’il présente par lui-mème. »
M. Merlin termine par penser, en s’appuyant d ’ un
avis du conseil d É t a t , du q thermidor an io^ « que
«
par les mots,
le u r s
h é r it ie r s
,
l ’on doit entendre
« les personnes auxquelles les lois civiles accordent ce
« titre. »
T o u t , dans cette discussion, est précieux pour lu
cause actuelle.
S ’il est vrai que par les mots, leurs héritiers, e m
ployés dans l ’article i de la loi du 5 décembre 18 1 4 ?
on doit seulement entendre les personnes auxquelles les
lois civiles accordent ce titre, il est évident que c est
an sieur Guillaume de l ’ Espinasse seul que ces mots
s’appliquent; parce que c ’était à lui seul que les lois
civiles avaient attribué le titre d ’héritier, soit en l ’an
8 , époque du décès du fils émigré, soit en l ’an i r ,
époque de son amnistie; parce que c’est aussi le sieur
de l ’Espinasse, qui seul avait la qualité d ’hé»ilier de
vant les lois civiles, au moment où fut présentée et
décrétée la loi sur les biens remis.
S ’il est vrai aussi q u ’on ne puisse supposer que le
même individu ait laissé deux successions qui se soient
<
�U
( 46 )
ouvertes à d e u x époques différen tes, et si cette suppo
sition répugne a u x notions les p lu s triviales du droite
c’est encore le sieur de l ’Espinasse père qui doit seul
profiler des biens rendus, paice que ces biens n’ont
pas dû former une succession particulière du fils; parce
q u ’ ils ont dû se rattacher à la succession déjà ouverte
dont ils sont devenus en quelque sorte l ’accessoire, et
parce que le sieur de l ’Espinasse père, qui avait seul
recueilli et dû recueillir la succession à son ouve rt u re ,
était encore vivant en 18 14 » pour recueillir aussi l'ac
croissement que cette succession reçut alors.
E n décider autrement ce serait évidemment dire
que l ’émigré l ’Espinasse a laissé deux successions qui
se sont ouvertes à deux époques différentes; l ’une en
l ’an 8 ou en l ’an 11 , régie par la loi du 17 nivôse an
2 , et attribuée par cette loi au sieur de l ’Espinasse
père comme seul héritier; l ’autre au 5 décembre 1 8 1 4 ?
régie par le Cocl e c i v i l , e t d i v i s i b l e par moitié entre
les deux lignes paternelle et maternelle de l ’émigré.,
c ’est-à-dire entre le sieur de l ’Espinasse père d ’une
p a r t , et les Bonnafoux et consorts de l ’autre.
Indiquer une telle conséquence, c’est suffisamment
démontrer l’absurdité du système des demandeurs.
M. Dalloz dans sa Jurisprudence générale, au mot
ém ig ré, section 3 , art. 2 , § i , r , examine aussi à qui
profite la remise ordonnée par la loi du 5 décembre
1 8 1 4 ; et après avoir dit que la ju risp ru d en ce constante
de la C ou r de cassation a é té fa v o ra b le a u x parens
les />lus p roches, au jo u r de la lo i, ( ce qui cependant
n a été admis par la C o u r de cassation
elle-m êm e
que
�(47)
iff
lorsque ces parens étaient en concours avec des étrangers
cédataires ou légataires universels de l ’émigré ou de ses
héritiers) , l ’arrêtiste se livre lui-inéme à une disserta
tion sur le caractère de la remise faite par la l o i; il
prouve clairement que cette remise n’a p a s é té une
lib é r a litéj mais que l ’É ta l s ’est im posé ce sacrifice
p o u r fa ir e cesser l ’œuvre de la v io len ce , p o u r opérer
une réparation $ il le prouve avec le préambule de la
loi
où le législateur déclare s’être proposé un acte
de ju s tic e : il le prouve avec les termes de l ’article deux
par lequel les biens sont rendus non à la famille des •
émigrés, en général, mais à leurs héritiers ou ayant
cause • il Ie prouve aussi,
l ’ar ti cl e
I er
avec les expressions de
qui a maintenu les droits a c q u is, et par
conséquent les qualités et les titres existans au moment
de la remise; il argumente de la loi du 27 avril 182$
sur l ’in d e m n it é , qui est en opposition avec le système
de libéralité , puisqu’elle attribue l'indemnité
aux
héritiers du jour du décès de l’ émigré; il fait observer
d ’ailleurs , avec beaucoup de justesse, que si la loi
de 18 f 4 avait voulu faire une libéralité, il eut été
inutile de dir e, comme elle l ’a dit dans l’article 3 ,
q u ’îl n’y aurait lieu à aucune remise des fruits perçus;
enfin il ajoute , ce qui est aussi décisif, que la loi ne
contenant aucune disposition expresse qui intervertisse
l'ordre de su ccessib ilité toujours a d o p té , il ne v o it
pas ce q u i p eu t autoriser le ju risco n su lte ou le m a
gistrat à fa ir e de cette lo i une innovation exorbitante
et sans exem p le.
Ces observations sont péremploires, même celle tirée
�\v
Il *
delà
(
48
)
loi de 1825 sur l ’indemnité; car les deux lois
n ’ont de différence q u ’en ce que , d ’après la dernière,
ce sont les héritiers du jour du décès de l ’émigré,
qui profitent de l ’indem nit é, tandis q u e , d ’après la
j u risprudence actuelle delà C o u r de cassation, appliquée
à la loi de 18 r 4 5 c’est aux héritiers du jour de l ’am
nistie que les biens ont été rendus.
M. Sir ey , dans une dissertation par laquelle il a fait
précéder la relation de l ’arrêt Ma la fosse, du 18 février
i8a4? énonce une semblable opinion;
et
dans le rap-
* procheincnt des diverses parties de la loi du 5 décembre
18 14) dans le préambule notamment, où le législateur
d i t , à deux fois différentes, q u ’il se propose un grand
acte de ju s tic e et où l ’on ne voit pas q u ’il s’agisse de
lib éra lité ; dans cet article où il déclare rendre les biens
aux anciens propriétaires ou à leurs héritiers ou ayant
couse, comme dans celui qui conserve ou rétablit toutes
les actions des créanci ers des émigrés sur les biens remis;
dans la combinaison, enfin, des di ffé re nt es di sp osi t io ns
de la loi , M. Sirey trouve la preuve que le système
de la lo i n ’est pas un systèm e de lib é ra lité mais un
systèm e de ju s tic e p o litiq u e , si ce n ’est pas un système
de ju s tic e civ ile.
Ainsi ce sont des idées de justice qui ont princi
palement dominé dans la pensée du législateur. L ’on
ne peut donc pas dire q u ’il ait ordonné la remise à
titre de lib éra lité se u lem e n t, et par une libéralité
aveugle , par une libéralité indépendante de toute
autre impulsion. U n tel système serait en opposition
directe avec les termes positifs do la loi, qui
parlent
�"
( . » )
;(?
d’ actes de ju s tic e à faire, de biens à remettra a u x
héritiers de l ’ém igré. D ’ailleurs, que cette justice ait
été faite par politique ou par uu autre m o t i f ; qu elle
ait été aussi dictée, si l ’on v e u t , par des sentimens de
libéralité , il n’en est pas moins vrai que la remise n’a
pas été une libéralité pure; il n’en est pas moins vrai
q u ’elle a eu pour base principale des sentimens de jus
tice- il n ’en est pas moins vrai q u ’elle dev ait , par
c o n s é q u e n t , être dirigée en faveur de ceux-l'a mêmes
auxquels avait nui la peine de la confiscation-, e t , par
conséquent, en cas de prédécès des anciens propriétaires',
en faveur de leurs héritiers légitimes s’ils étaient encore
vivans, ou en faveur des parens les plus proches, si les
héritiers légitimes étaient aussi décédés au moment de
la loi. C a r , tout en se montrant libéral, il eut manqué
le but de justice q u ’il se proposait, le législateur q u i ,
méconnaissant les droits d ’ un héritier légitime encore
exista n t, aurait attribué tout ou partie des biens ren
dus, à des parens éloignés auxquels la confiscation n avait
pas fait éprouver la moindre perte ni le moindre tort.
L a C o u r de cassation a été bien éloignée elle-même
de commettre une pareille erreur. E n eff e t, si l ’on
parcourt les arrêts q u ’elle a rendus sur la matière, on
reconaitra q u ’ ils consacrent, au lieu de la d e t i u i i e ,
la doctrine que nous avons professee.
Les arrêts s’appliquent à trois cas différons :
i° Au cas où les parens de l ’émigré étaient en con
testation avec des légataires universels, soit de l ’émi
gré, soit (les héritiers de celui-ci;
2° A celui où l’émigré n’avait jamais été amnistié;
7
�’H
-(5°)
3 ° A celui enfin où l ’émigré, étant décédé en 18 14 ,
avant d ’avoir recueilli une hérédité ouverte pendant
sa m ort civile , avait pu cependant en transmettre les
droits à ses propres héritiers.
Dans le premier cas, c’est contre les légataires u n i
versels, dont le titre était antérieur à la l o i, que la
question a toujours été décidée. Elle devait l ’ètre ainsi,
soit parce que l ’on ne donne que ce dont on est pro
priétaire, soit parce que l ’étendue des legs repose toute
sur l ’intention présumée des testateurs. O r , il était
impossible q u ’ un testateur eût pu et eût entendu
léguer des biens qui non seulement ne lui apparte
naient pas lors du te stam en t, mais q ui même ne lui
avaient jamais appartenu , puisqu’ils n ’avaient été
rendus que long-tems après son décès. Tels sont aussi
les principaux motifs qui ont dicté l ’arrêt d ’E p in aySaint -Luc et Du cl aux , du. a 5 janvier 1 8 1 9 , l ’arrêt
R e culot, du 10 février 1 8 2 3 , l ’arrêt Ma la fosse, du
18 février 1 8 2 4 , l ’arrêt May n a r d e t L a Ferté , du 19
mai de la même année (1).
Il est même à remarquer que ces divers arrêts, en
préférant la famille de l ’émigré à des légataires un i
versels dont les titres étaient antérieurs à la l o i, n ’ont
p a s , d ’ailleurs ,
ordonné le partage
des biens
par
moitié entre les pareils des deux lignes paternelle et
maternelle de cet émigré, mais q u ’ils les ont adjugés
( 1 ) C e s arrêts sont da ns tou s les rec uei l s. O n p e u t les vo i r n o t a m m e n t
3,
a 4®} a 4 -
duns la J u r i s p r u d e n c e g é n é r a l e d e D ; t l l o z , au m o t emigre, secti on
article a , § i , et da ns le J o u r n a l d e S i r e y , 1 9 . 1. 7 6 j
1. aG 3 c l 'io'j.
23.
1.
�Jfl
en totalité aux parens les plus proches au moment de
la remise : circonstance qui rend ces arrêts favorables
au sieur (le l’Espina'sse père , parcé q u ’il était , au
moment de la loi de 18 14 ? Ie parent le plus proche de
son fils.
On doit aussi'faire observer que tous les arrêts ont
été rendus dans des espèces où les héritiers légitimes
de l'émigré étaient décédés eu x-m êm es , et n’ avaient
pu, par conséquent, recueillir, à ce titre d ’ héritiers, les
biens qui furent postérieurement remis , ni les trans
mettre à des tiers qui n ’étaient pas même parens de
t • r
1 *émigré.
Aj out ons
q u ’ une
jurisprudence semblable
établie pour l'application de la loi du
s’est
avril i B ?.5
sur l ’indemnité. Par arrêt du 8 février i 8 3 o , la C o u r
de cassation a décidé que la cession, même la plus
générale des droits héréditaires, ne comprenait pas
l ’indemnité accordée par cette loi à l ’ émigré ou à ses
héritiers.
L e second cas à examiner est celui ou 1 emigie
n’avait pas été amnistié et n’a été réintégré dans ses
droits civils q u ’en 18 14- C e cas est celui de l ’arrêt
Dcvenois.
C et a r r ê t , qui a été invoqué par les B o n n a f o u x , ne
décide absolument rien en leur faveur. Pour s’en con
vaincre il suffit de rappeler les faits, et de les comparer
aux motifs de la décision, mais en remarquant que
deux arrêts ont été rendus dans cette cause, le i er, par
déf aut , du 9 mai 1821 ( c ’est celui-là seul que rappor
tent la plupart des recueils)*, le second', contradictoire,
�sur opposition, du 28 janvier i 83 o. O11 le trouve à sa
d a te , au bulletin civil de cassation. Les motifs de ce
dernier arrêt sont sur-tout importans à combiner avec
les faits.
Pierre-René Devenois, décédé le iG octobre 1794?
avait laissé pour héritier Jacques son frère5 mais, celuici étant é m i g r é , l ’É t a t s’empara de la succession.
Jacques Devenois mourut en i 8 o 5 sans avoir été amnist ié ; il ne l ’a été q u ’en i8i/j-. Son héritière naturelle
était la demoiselle Laguerney, morte en 1808, et dont
l ’héritier était un sieur Porcher de Longchamp.
C e l u i-c i, en 1 8 1 4 ? se st présenté comme héritier de
la demoiselle Laguerne y, e t , comme se c r o y a n t , du
chef de celle-ci, héritier de Jacques Devenois auquel il
ne parait pas d ’ailleurs q u ’ il fut même parent; il s’est
présenté et a réclamé les biens rendus par la loi du 5
décembre. Mais un sieur B a zire, q ui é t a i t , en 1 8 1 4 >
le parent le p l u s proche de l ’émigré, a demandé luimême à profiter de la remise.
De là est née la question de savoir si les biens rendus
étaient censés appartenir à l ’ héritier du tems du décès,
ou à celui du tems de l ’amnistie.
C ett e question ,‘ sur laquelle la nouvelle jurispru
dence de la C o u r de cassation s’était fixée par 1111 arrêt
du 7 août 1820 , ne pouvait plus être sérieusement
élevée. Il était naturel que la C o u r , persistant dans sa
doctrine, décidât que l ’ém ig r é, mort civilement au
moment de sa mort natur elle, 11’avait pu rien transïneitre alors, ni par conséquent avoir un héritier;
*l«’ ainsi la succession devait appartenir seulement au
\
�( 53 )
;•
j6[
parent le plus proche au moment de l ’ainnistie, parce
que c’était à cette époque seulement que l ’émigré, re
c o u v r a n t son état ci vil , devait être réputé avoir laissé
une hérédité. Il était conséquent aussi avec ces idées
que la demoiselle Laguerne y, morte en 1808, ne fut
pas considérée comme ayant recueilli une succession
qui était censée ne s’ètre ouverte q u ’en 1 8 1 4 - C ’est
d ’après ces puissans motifs et notamment par le défaut
d ’amnistie avant 1 8 1 4 ? que la C o u r se détermina h
refuser l ’hérédité au représentant de la demoiselle L a
guerney, et à l ’accorder au sieur Bazire, parent le plus
proche de l ’émigré, et par conséquent son héritier en
1814, au momen t où avait cessé la mort civile de l ’émigré.
Que Ton vérifie scrupuleusement ce dernier ar rê t,
et l ’on reconnaîtra q u ’il n ’a aucune analogie avec la
cause actuelle, puisque l ’émigré l ’Espinasse fils avait
été amnistié le
ventôse an 1 1 ,
et que le sieur
l ’Espinasse père, son seul héritier alors, était encore
vivant en 1814 , n ’avait pas perdu sa qualité d ’ héritier
u n i q u e , et était par c o n s é q u e n t apt e, d ’après la loi
civile o r d i n a i r e , et appelé par la loi spéciale du 5 dé
cembre, à recueillir les biens alors rendus.
Le
seul arrêt dont l ’espèce présente une grande
analogie avec la cause actuelle est celui re ndu , le 21
janvier 1 8 2 1 , dans Tafiane de Béthune et Carnin.
Béthune-Sully fils, décéda en 1794 sous la loi du
17 nivôse an 2 , laissant pour unique héritier le comte
de Béthune son père, alors émigré. L ’É t a t qui repré
sentait le père s’empare de la succession. E11 l ’an 1 0 ,
le comte de Bélhune est amnistié; il se remarie , meurt
�%
( 54 )
avant iBi/fj mais laisse (les enfans qui lui survivent, ( i )
Plusieurs des immeubles dont s’était emparé le fisc
au décès de Béthune-Sully fils sont rendus par la loi
de 18 1 4 • Les comtes de C arn in les réclament comme
é t a n t , au décès du fils S u l l y , scs plus proches parens,
après son père, que sa mort civile comme émigré avait
rendu incapable de succéder.
Ces prétentions sont écartées par des motifs remar
quables :
Les biens étaient dévolus au père par la loi du 17
nivôse an 2 ;
L e père en était saisi par le droit com m un ;
C e droit avait é té seulem ent suspendu par l ’effet
des lois sur l ’ém ig rat io n, q ui l ’avaient transmis au
fisc ;
Mais les droits civils ayant été depuis restitués aux
émigrés, la remise, opérée par la loi du 5 décembre
18 14 > n a Pu ¿ire iaite q u ’à la famille du com te
B éthun e com m e ancien p ro p riéta ire , en t/utilité d ’hé
ritier de son f i l s .
C et arrêt présente un cas oii le succès devait paraître
plus douteux même que dans celui qui nous occupe.
E t cependant il déclare que le père émigré était saisi,
suivant le droit com m un , des biens de son fils, quoi
q u ’ il ne les eut pas recueillis, à cause de sa mort civile;
il dit que son droit n a é té que suspendu par la main-
(0
V o i r l 'arvét dans lo j ou r na l d e S i r c y ,
22,
1. 21 , et d a ns la j u
r i s pr ud e nc e g é n é r a l e d e D a l l o z , au mo t émigré, s c c t i o u
p. 8aO.
3;
art. 2. § 1»
�mise du fisc; il décide que cet émigré, en qualité d ’ hé
ritier de son fils , devait être réputé Vancien p r o
priétaire de ces biens qui cependant n’avaient été remis
q u ’après sa mort; il ajoute q u ’il a transmis son droit à
ses propres héritiers.
Tous ces principes s’appliquent littéralement à la
cause du sieur l'Espinasse père, représenté par le sieur
Bournet.
L ’Espinasse fils, émigré, avait été saisi aussi, suivant
le droit c o m m u n , en l ’an 2 et .en l ’an 4 > des biens
de Jean-Marie et de François-Aldebert de Sévérac.
Son droit avait été aussi seulement suspendu par
l ’effet des lois sur Immigration, qui l ’avaient transmis
au fisc.
Mais ses droits civils lui ayant depuis été restitués,
il a transmis, au moment de son amnistie, à son père,
à son seul héritier, tous ses droits aux biens dont son
émigration l ’avait p r i v é \ e t , par conséquent, c’est eu
faveur du père seul, q u ’a pu être faite la remise opérée
eu 1814*
On le voit; soumises au creuset d ’un examen sérieux,
les prétentions des Bonnafoux se dissipent, tandis que
les droits du sieur l ’Espinasse père en sortent intacts,
consacrés, comme nous l’avons d i t , par la loi, par la
doctrine des aut eu rs, par la jurisprudence des arrêts.
L a loi a votilu voulu faire un acte de j u s t i c e , e t ,
par conséquent, rendre à celui qui avait perdu. O r ,
le sieur de l ’Espinasse père avait seul perdu les biens
qui ont été remis; car seul il les aurait recueillis en
l ’an S , en l’an 11 , si la confiscation n’avait pas eu
�lie u , ou si les maux q u ’elle avait causés eussent été
plus tôt réparés.
Se fut-elle même proposé de faire un acte de pure
libéralité, la loi, au moins, a déclaré rendre à llié r itier, de l ’ancien propriétaire; elle n ’a d i t , ‘d ’aill eu rs,
ni explicitement ni implicitement , q u ’elle créait une
nouvelle classe d ’ héritiers; elle n ’a pas dit aussi q u ’elle
rendait les biens à l ’héri ti e r'futur ; e t , s’en référant
par son silence même au droit co m m u n , elle n ’a en
tendu , par le mot h éritier, elle n ’a pu e n t e n d r e que
celui qui déjà était saisi du titre et des droits d ’héritier ,
s’il était vivant lorsqu’elle a paru. O r , le sieur l ’Espinasse père existait alo rs , et seul il était investi de la
qualité d ’héritier de son fils; seul il avait été reconnu
comme te l, soit antérieurement, soit à cette époque,
par les autorités administratives ou judiciaires, par les
créanciers de la succession comme par toutes parties
intéressées. C ’ est d o n c lui seul aussi que désignait la
loi en appelant l ’héritier à profiler des biens r e n d u s .
L a loi de plu£ a déclaré q u ’elle entendait respecter
les droits acquis. O r , au moment où la loi a p a r u , le
sieur de l ’Espinasse père avait un droit a cquis au droit
indélébile au titre d ’ héritier unique de son fils, e t ,
par conséquent, aux avantages attachés à ce titre. Ce
droit acq ui s, la loi l ’a expressément consacré; donc
c’est à lui q u ’elle a remis les biens non vendus.
Enfin , lorsque les héritiers légitimes n’existaient
plus en 18 14 , la jurisprudence interprétant la l o i, a
attribué les biens rendus aux pareus les plus proches
de l ’cmigié.
�( 57 )
Or, le sieur de I’Espinasse père était, à cette époque,
tout à-la-fois et le seul héritier légitime exi stant, et
le parent le plus proche de son fils; c’est donc évi
demment lui seul qui doit recueillir les avantages de
la remise des biens non vendus.
Co mm en t exp liquer, d ’après ces observations, l ’as
sertion de l’avocat de la dame et du sieur Desrois,
qui , après avoir succombé sans adversaire sur un
simple pourvoi, s’est hasardé à dire dans un écrit,
que si le fond de l ’affaire avait été exam iné, l ’arrêt
aurait été cassé.
Assertion imprudente!
œuvre éphémère des désirs
pris pour la réalité ou des illusions de l ’amour-propre,
que l’on a considérées comme le succès.
Assertion irréfléchie! comme si de graves magistrats
livraient au public les secrets de leurs délibérations;
comme s i , lors même que le pourvoi aurait été admis,
une dissertation approfondie et le frottement de la
contradiction n’eùt pas fait jaillir une lumière propre
à éclairer et à guider les esprits même incertains.
C ’est cependant peut-être cette étrange assertion
q u i , imposant au tribunal de première instance, l ’a
déterminé à repousser la doctrine que lui offraient les
deux arrêts rendus par notre C o u r dans cette même
cause; c ’est par elle q u ’il a sans doute été entraîné
dans un tel oubli des principes, que non seulement il
a attribué aux Bonnafoux une partie de la terre d ’ Au zat
rendue par la loi du 5 décembre 18 1 4 , mais q u ’il a
aussi ordonné en leur faveur le rapport au partage,
soit du 8mc de la terre de S a iu t - M a r t in , restitué au
8
�( 58 )
sieur l ’Espinasse père avant cette l o i , soit même de
tous les autres biens meubles et immeubles provenus
de la famille Sévérac, et qui lui avaient été délaissés
irrévocablement depuis plus de dix années par plusieurs
actes administratifs.
L e 8me de la terre de Saint-Martin faisait partie de
la sénatorerie attachée à la C o u r de Riom. Il en fut
détaché, par une ordonnance royale du 4 juin i 8 i 4 >
comme les autres propriétés particulières acquises par
voie de confiscation , que cette ordonnance déclara
restituer aux anciens propriétaires dans l ’état où elles
se trouvaient.
Ainsi, le 4 juin , le sieur de l ’Espinasse père, comme
seul héritier et seul représentant de l ’ancien pro
priétaire, son fils, eut à cet objet un droit acquis,
indépendant de la remise faite par la loi du 5 décembre
suivant. C o m m e n t s’est-il donc fait que le tribunal
ait cru pou voir, en vertu de c e t te loi, faire participer
les Bonnafoux aux avantages d ’une restitution q ui
l ’avait précédée?
L ’erreur du tribunal est encore plus saillante rela
tivement aux autres biens meubles et immeubles pro
venant de la famille Sévérac.
L e sieur de l ’Espinasse père avait été envoyé en pos
session de ces biens, dès l’an i i et dès l ’an 1 2 , en
vertu du certificat d ’amnistie q u ’il avait obtenu , le 5
ventôse an 11 (24 février i 8 o 3 ) , pour son fils alors
décédé.
Des anétés pris, les 11 germinal an 1 1 , 25 thci-
�( 59 )
7^
midor an n , 7 frimaire an 1 2 , par les préfets de la
I l a u t e - L o i r e , du C a n t a l , du Puy-de -D ôm e, lui dé
l a i s s è r e n t , comme au seul héritier de son iils émigré
amnistié, tous les biens que celui-ci avait possédés dans
ces trois départemens. L ’arrêté du préfet du C antal
lui abandonna aussi, par une disposition expresse, les
portions des terres de Vertessère et de Sévérac, qui
étaient advenues au fils, par succession, pendant son
émigration.
Ces actes administratifs ont toujours été respectés-,
ils ont
r eç u
leur pleine exécution. L e sieur de l ’Espi-
nasse, usant des droits qui lui avaient été conférés, a
cédé, le 8 vendémiaire an i!\ (29 septembre i 8 o 5 ) ,
tout
ce qui lui avait été délaissé , au sieur Grenier qui
lui -même en a disposé à son gré depuis cette époque
reculée.
Par quel aveuglement le tribunal a-t-il cru pouvoir
condamner le sieur de l ’Espinasse à rapporter tous ces
objets au
partage q u ’il
a ordonné?
et co mment,
même dans son s y s t è m e sur le sens de la loi du
5 d é c e m b r e 181/^ ne s’est-il pas aperçu que cette loi
commandait impérieusement, par son article i cr, de ne
porter aucune atteinte a u x droits acquis avant la p u
blication de la Charte constitutionnelle} et qui sei'aicnt
fonde's sur des lois ou des actes du gouvernem ent} rela tifs à Vémigration.
Ne nous étonnons cependant pas trop de cette aber
ration. On sait q ue,
lorsqu’au point de dép art, 011
ne prend pas le droit ch em in, plus on avance, plus 011
s’écarte de la vraie route.
�JS Pt
( « . )
Riais c’est trop nous occuper de ces erreurs secon
daires, q u ’il suffit de signaler pour les faire reconnaître,
ei qui doivent, d ’ailleurs, subissant le sort de l’erreur
principale, être réformées comme elle.
C e l t e réformation est commandée par la l o i , par
l ’équité comme par la justice, par la jurisprudence de
la C our de cassation, comme par celle de la cour de
Rio m.
P a r la l o i , qui considère les biens rendus comme
une partie intégrante, comme
u n accessoire nécessaire
de la succession de l ’émigré, puisqu’elle les soumet à
contribuer aux dettes héréditaires; qui n ’a d ’ailleurs
ni déclaré ni entendu établir deux ordres de succession
dans la même personne, et q u i , rendant les biens à
l ’ héritier de l’ancien propriétaire, les a nécessairement
rendus à celui-là seul sur la tê teduqu el, au moment de
sa publication , reposait ce titre d'hé ritier, à celui-là
seul à qui les c h a r ge s c o m m e les bénéfices de l ’hérédité
avaient été depuis long-tems t r a n s m i s , l o r s q u e , s u r
t o u t , existant au moment de la l o i , il réclamait luii
%
^
4
mêmd'l’es avantages de la remise.
P a r V éq u ité com m e p a r la ju s tic e ; car c ’est l ’équité
du législateur qui a dicté l ’acle de justice q u ’il proclame
dans le préambule même de la loi. Or, l'équité voulait
que l’on effaçât les dernières traces d ’ une confiscation
odieuse, d ’ une confiscation rayée depuis long-tems de
notre législation criminelle, d ’une confiscation vio
l en te , reste affligeant d ’ un tems de discorde et d ’égaremens. L ’équité voulait aussi que l ’acte de justice lut
dirigé en faveur de celui-là seul à qui les biens confis-
�qués avaient été enlevés. Or, quel autre que le sieur
del'Espinasse père, seul héritier de son iils au moment
de son décès, au moment de son amnistie, aurait re
cueilli ces biens si les rigueurs de la confication ne l ’en
avaient
privé ? quel autre
donc doit recueillir les
faibles restes de cette succession?
E n fin p a r la ju risp ru d en ce de la C our de cassa
tion j com m e p a r ce lle de la C ou r de R iom .
Par la jurisprudence de la C our de R io m , qui s’est
manifestée deux fois sur les mêmes questions, dans
cette même cause, en faveur du sieur de l ’Espinasse
père,
q u ’elle
a déclaré seul héritier, seul représentant
de l ’émigré amnistié son fils. L ’un des arrêts fut même
l ’ouvrage solennel des chambres réunies.
Par celle de la Cour de cassation, qui n ’a eu que
dans \i ne «Soule %oacasionv* dans.ia cay&e.jle Béthuue*r\
AM.
S ullyfc.&e.5i P 1P#KWie cIuesUon a l)eu Pl'es id e n t iq u e ,
et qui l ’a résbliïô dans un seti£;*itttrorAble au sieur de
l ’Espinasse. D ’autres arrêts, quoique moins applicables,
csK c,es.
'plus au moment de la l o f * n'ont 'cepeyfnftt
appelé h recdj^lH W è^^iens,1^ (4 4 i9t»^u’un seul parent,
n ’ ex i s ta i t
c’est-à-dire le parent le plus proche de l ’émigré; e t ,
dans la cause, le parent le plus proche est encore le
sieur de l ’Espinasse père.
L e sieur de l’Espinasse, ou le sieur Bournet son
représentant,
peut aussi invoquer
la doctrine
des
auteurs modernes.
Ainsi il réunit en sa faveur les termes et l ’esprit de
la loi, le poids des opinions les plus puissantes, l ’au-
�torité des arrêts les plus respectables, tous les principes
comme toutes les considérations. Pourrait-il craindre,
avec de tels m oyens, de succomber dans sa nouvelle
lutte contre des cédataires de droits litigieux, q u i ,
se déguisant sous le masque de parens éloignés de l ’é
migré amnistié; qui, empruntant le nom de collatéraux
dont un modique salaire a acheté la complaisance,
viennent contester encore des droits évidens et consa
crés déjà deux fois par la justice éclairée de la C o u r ?
BOURNET.
M e A L L E M A N D , A v o ca t.
Me S A V A R I N , A v o u é-L icen cié.
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A RIOM, CHEZ SALLES f i l s , Seul imprimeur de la C our royale et de la Mairie.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bournet. 1831?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Savarin
Subject
The topic of the resource
émigrés
successions collatérales
mort civile
séquestre
amnistie
sénatorerie de Riom
rétroactivité de la loi
doctrine
arbre généalogique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Le sieur Bournet, propriétaire, habitant de la ville d'Issoire, Appelant ; contre Jean Bonnafoux, propriétaire, habitant au lieu de Luzarègues, commune de Molède, département de Cantal ; Jean Vialfont, secrétaire de la sous-préfecture de Saint-Flour, et dame Françoise De Laroche, son épouse ; Henri Vialfont, Jeanne Vialfont, sa sœur, propriétaires, habitans du lieu de Molède ; Jeanne Vialfont et AntoineFouilloux, son mari, qui l'autorise, propriétaires, habitans du lieu de Boufeleuf, commune d'Auriat, même département du Cantal, intimé ; En présence De dame Amable-Henriette De Chauvigny De Blot, veuve de M. Claude-Etienne-Annet Desrois, propriétaire, habitante de la ville de Moulins, et de M. Annet comte Desrois, propriétaire, habitant de la ville de Paris, rue Blanc, n° 175, défendeurs en assistance de cause.
Annotations manuscrites. « 10 juin 1831, arrêt infirmatif, 2éme chambre. Pourvoi. 22 juillet 1833, Cour de cassation, section civile, rejet. Voir Sirey, 1833-1-676. »
Table Godemel : émigré : 5. ceux qui, héritiers d’un émigré à l’époque de son décès, n’ont recueilli qu’une partie des biens restitués à sa succession en vertu du sénatus consulte 6 du floréal an X, l’autre partie ayant été affectée à un service public, doivent recueillir cette dernière partie des biens, remise en vertu de la loi du 5 xbre 1814 et ce, à l’exclusion de ceux qui, devenus héritiers plus tard, se sont trouvés habiles à succéder avec eux lors de la promulgation de cette loi. – ici ne s’applique pas la règle consacrée par la jurisprudence, que les héritiers de l’époque de la remise doivent être préférés aux héritiers de l’époque du décès.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1792-1833
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
62 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2620
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2621
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53535/BCU_Factums_G2620.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Molède (15126)
Saint-Flour (15187)
Auriac-l'Eglise (150013)
La Chapelle-Laurent (15042)
Moulins (03190)
Paris (75056)
Auzat-la-Combelle (63022)
Saint-Martin-des-Plains (63375)
Mozac (63245)
Vertessère (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
amnistie
arbre généalogique
doctrine
émigrés
mort civile
rétroactivité de la loi
sénatorerie de Riom
séquestre
successions collatérales
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53765/BCU_Factums_M0317.pdf
80631803e280bd76f5f7adf63f93eade
PDF Text
Text
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COUR
*
i
M
E
M
O
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D ’A P P E L
SÉANT
P O U R
A R IO M .
Les
h é ritie rs
F L O U V A T
;
C O N T R E
Jeanne
I
l
A S T A N IE R E ,
veuve
M A RCON.
est peu d ’héritiers aussi maltraités par les procès de successions,
que l’ont été les sieur et dames Flouvat. L a veuve Marcon est
depuis vingt-un ans en possession de son lot et de la presque tota
lité des autres biens; cependant, après des variations sans nombre,
elle se dit aujourd’hui leur créancière.
Quoique toutes les difficultés soient réglées entre les parties par
deux arrêts; à en juger par le mémoire que signifie la veuve Marcon
il resteroit encore à statuer sur un compte inextricable.
A Dieu ne plaise que les sieur et dames Flouvat aient le projet
d ’y fournir des débats détaillés ! Après trente-cinq ans déjà passés
en procès, le reste de leur vie n ’y suffiroit pas.
A
�(2 )
II semble que la veuve Marcon ait oublié ce règlement des arrêts,
car la base de ses calculs repose sur des systèmes nouveaux. 11 faut
encore chercher ces systèmes dans l’entassement de chiffres sous
lequel elle a affecté de les cacher, pour que la lassitude de la suivre
fit adopter en masse un compte qu’on ne comprendroit pas.
C a r, il faut l’avouer franchement, les héritiers Flouvat, épou
vantés d ’avoir à combattre un ennemi fort de soixante-dix pages
in-40. de chiffres, et d ’un errata de deux pages, ont senti toute
la difficulté de lutter contre de telles armes; et, semblables aux
E gyp tien s,
qui
se v o y o ien t
forces de résoudre, sous peine de la
vie, une énigme du Sphinx, ils ont hésité d’abord si, dans l’im
puissance de répondre à celle de la^veuve Marcon, ils ne lui lais—
seroient pas plutôt dévorer ce qui reste de leur fortune.
Cependant il étoit dur de penser que la veuve Marcon, ayant
cédé scs droits pour 4 ° ° ° livres, dans une succession estimée
27000 liv ., jouissant de son lo t, et débitrice en sus de i 3goo liv.
depuis plus de vingt ans, pût cependant se trouver libérée et même
créancière.
Cette impossibilité étoit tellement palpable qu’elle devoit résister
à tous les chiffres du monde; et quand les héritiers Flouvat se sont
un peu enhardis à considérer les détails du compte de la veuve
M arcon, ils ont vu bientôt le bout d ’oreille percer en plusieurs
endroits, et ont trouvé très-simple que la veuve Marcon parvint
à se dire créancière, lorsqu’elle fait porter intérêt a ce qui lui est
d û , et n ’en fait porter aucun ?» ce qu’elle doit; lorsque pendant
quarante ans elle s’obstine à trouver qu’un sixième revenant à sa
mère est absorbé par les charges , tandis que la moitié qu’elle y
amincie elle-m êm e se porte chaque année ù une somme consi
dérable ; lorsqu'cnfm, de son autorité privée, elle ajoute ù son
�C3 )
actif clos valeurs arbitraires, des sommes inconnues, et éteint dès
l ’origine, par une compensation à sa guise, les capitaux qu’elle
doit, pour qu’ils ne portent plus intérêt.
Voilà cependant sur quelle base est fondé un colosse de. compte
qui pourroit séduire d ’abord par l’immensité du travail et par
les précautions minutieuses qu’on a affecté de prendre dans des
tableaux explicatifs. Les héritiers Flouvat ne l’attaqueront pas
dans sa masse, ils n ’y sont pas tenus, et n ’oseroient d’ailleurs
l ’entreprendre; mais ils se contenteront de revenir à leur propre
compte, sur l’une des premières années, de le comparer à celui
que présente la veuve Marcon à la même époque, et d ’en exa
miner les points de discordance. Cela suffira pour toutes les autres
années et pour l'éclaircissement du procès.
Pour se rendre intelligibles, les héritiers
donneront
Flouvat
quelques explications sur les faits principaux qui ont précédé le
compte ; et il est surtout nécessaire que la cour ait sous les yeux
l’état de la famille des parties et les deux arrêts principaux qui
ont statue sur leurs contestations.
F A I T S .
E t i e n n e A s t a n i è r e , m ort on 1722.
M a r i e A u t EROCIIE , m orte le n m ars 1743.
I
I
I
M a r ie .
F r a n ç o is e ,
J ean a s t a n iè r e .
A n t o in e ,
J e a n -J o s e p ii,
m orte a i in te s u t.
C laU D A A u T E R O C IIE .
m ort le 27 sep-
rnoiuQ.
tem b re 1738,
r~
I
i
A s t a n iè r e ,
C la u d e M a rc o n .
I
I
M 1- C é s a r ,
M a r c - A lf .x .
M a r ie .
m ort le i 5 si-Ptem -
m ort le 22 ju in
A n to in e F lo u v a t .
bre 1739.
174 o .
|
1
�(4 )
Jean Àstaniere, par son testament de 1738, avoit institué ses
quatre enfans héritiers par égalité, sauf un préciput à César, de
5ooo livres.
César et Marc étant décédés peu de temps après, en droit écrit,
leur mère avoit recueilli une portion virile : mais elle passa en
secondes n o ces, et perdit par conséquent la propriété de cette
virile, sauf l’usufruit; elle ne conserva la propriété que de la por
tion recueillie en collatérale du chef de M a rc, dans la succession
de César, comme n ’étant pas provenue e x substantiâ patris, sui
vant la
distinction d u droit.
L a dame M arcon, héritière pour moitié dans le surplus, con
tracta mariage le 3 septembre 1743, et céda au sieur Flouvat ses
droits successifs moyennant 4000 liv ., et à la charge detre libérée
de la moitié d’une pension de 3oo liv. due à sa mère par la succes
sion paternelle.
Sa mère, présente, lui constitua de son ch e f 3ooo livres, et la
moitié de scs meubles m eublans, à la charge de ne demander
aucun compte. Cette constitution étoit conforme au contrat de
mariage de la dame Flouvat, qui avoit été instituée héritière de la
mère en 1742.
En 17 7 1, la dame Marcon se pourvut contre sa cession, 60us
prétexte de minorité.
Un arrêt du parlement de Paris, du 3 i juillet 1779, annulla
cette cession, condamna le sieur Flouvat à rendre compte des jouis
sances des successions cédées, depuis le 3 septembre 1743, avec
intérêts depuis la demande, à la charge par la dame Marcon de
. lui faire compte de la moitié de la pension de i 5o livres, et de la
somme cle 4000 livres, avec intérêts depuis les payemens.
\
En exécution de cet arrêt, les biens furent estimés par experts
�(5)
le 24 février 1780. L e sieur Flouvat présenta l’état des charges dont
les biens étoient grevés, justifia du payement des 4000 li v ., et de
quelques dettes de la succession.
L e procès sembloit toucher à sa fin : mais la dame Marcon ne
trouva pas avoir assez gagné, et elle éleva la prétention singulière
que les 4000 livres ayant été reçues par son mari ( insolvable), on
n ’avoit de recours que contre lui ; elle fit naître une foule de dif
ficultés sur les dettes payées, sur les charges, sur l’usufruit dû à
la mère, représentée en cela par le sieur Flouvat; car la dame
Marcon avoit trouvé plus lucratif de scinder sa cession, et de s’en
tenir à la dot particulière que sa mère lui avoit constituée.
Ces nouvelles difficultés donnèrent lieu à second arrêt du a 5
juillet 1781. Cet arrêt condamne la dame Marcon à payer person
nellement, i°. la somme de 4000 liv., arec les intérêts à compter
du jour de chaque payement ( Us sont de 174^, 1745 et 1746. ) ;
2". la somme de 726 livres pour quatre ans et dix mois de la pen
sion de i 5o liv.; 5°. la somme de 1000 liv. ( pour une provision
payée ); 4°*
somme de 5oo liv. ( pour autre provision p ayée) :
elle est encore condamnée à faire compte de 279 livres 5 sous de
dettes payées.
Il
est dit qu’il ne sera pas fait compte des intérêts de ces articles,
mais que les sommes seront compensées sur les jouissances jusqu'à
due concurrence.
Et à l’égard des déductions à faire sur les jouissances, des cens,
rentes, et usufruit dont les biens étoient grevés, l’arrêt porte les
dispositions suivantes :
O rd o n n e que sur le montant desdites jouissances revenante» à la fem m e
M a r c o n , seront déduites les sommes c i - a p r è s ,
�(6)
S a v o i r , i°. celle de i 56 l i v r e s , portée en l ’a rtic le i d u troisième c h e f
des conclusions de ladite d em a n d e ;
a 0. C e lle de 37 livres 2 sous , portée en l ’article 2 ;
3°.
La m oitié des arrérages de la rente de i 37 l i v r e s , pa y ée aux sieu's
Costet de C r e s p a t , à c o m m e n c e r du
3
septembre 1 7 4 s , jusques et com pris
l'é c h é a n c e de la T o u ssain t de 1769 seulem ent; le tout sauf la d é d u c tio n
des impositions royales ;
E t en outre la som m e de t i g l i v 10 sou s, faisant m oitié des 2^9 l i v . ,
payée à c o m p te par F lo u v a t fils a u d it de C r e s p a t, le 20 juillet 1774« en
sem ble la m oitié de tous autres payem ens faits par lesdits Flouvat audit
de C r e s p a t , depuis 1 7 6 9 , sous les mêmes d é d u c tio n s ;
4°. L a som m e de 997 liv . 10 s o u s , portée en l'article 4 ( dî'oït de sur
f i e de la m ère ) , sur laq u elle néanm oin s seront retenues les impositions
royales ;
5 °.
C e l l e de
55
livres 10 s o u s , portée en l ’a rticle
6°. L a m oitié des intérêts de la som me de i
25o
5
;
l i v r e s , form ant le q uart
revenant à C la u d a A u ter o ch e dans le prélegs de M ich el-C ésa r A s t a n i é r e ,
depuis le 3 septembre 1 7 4 $ , jusqu ’au 8 jan vie r 1 7 7 2 ; ensemble la moitié
de la som m e à laquelle se trouvera m o n te r , depuis led it temps , le seizième
des jouissances des biens de Jean A stan iére, qu i a appartenu à ladite C lau d a
A u t e r o c h e , du c h e f d u d it M ic h e l- C é sa r Astan iére, à titre d ’usufruit seule
m e n t , d éd u c tio n faite des intérêts, tant des charges foncières que des rentes
annuelles et autres c h a r g e s, lequel seizième sera liq u id é d ’après l’estimation
générale qui sera faite ( si fait n ’a été ) des jouissances des biens d u d i t
Jean A s t a n ié r e ;
7 0.
L a m oitié de la s o m m e à laq u elle se trouvera m onter, p o u r le temps
et d ’ après les estimations et d éd u ction s ci-dessus énoncés , le d ouzièm e
des jouissances des biens de Jean Astaniére , q u i a appartenu à ladite C lauda
A uteroch e,
à titre d 'u su fru it se u le m e n t ,
d u c h e f personnel de M a r c -
A le x a n d r e Astaniére :
P l u s , pe n d a n t led it tem ps, la m oitié des intérêts de la som m e de 4 16 liv.
i 3 sons 4 d e n ie r s, faisant le tiers revenant«! ladite C la u d a A u te r o ch e dans
le quart r ecu eilli par ledit M a rc-A le xa n d re Astaniére, du prélegs de
5ooo
liv .
de M i c h e l - C é s a r , son f r è r e ; p l u s , la moitié de la somme à laq uelle se
trouvera m o n t e r , po u r le tem ps et d ’après le» estimations et déd u ction s
c i dessus é n o n c é s , le quarante - huitièm e des jouissances des biens d u d it
Jean A siatuire , q ui a appartenu à ladite C l a u d a Au teroch e , à titre d ’usu
fruit s e u le m e n t, du c h e f d udit M a r c-A le x a n d r e , coium a a y a n t eu droit
�C7 )
de jouir d ’un tiers dans le seizième échu audit M a rc-A lexa nd re par le décès
d u d it M ic h e l- C é s a r , son frère ( * ) .
D éb ou te les héritiers F lou va t de leur demande en p a y e m e n t du surplus
de la som m e portée en l ’a rticle
3,
et en condam nation d'intérêts des sommes
portées aux sept articles ci-dessus, sauf l ’im pu tation et la com pe n sa tion
sur les jouissances , ainsi q u ’il a été ci dessus o rd onn é.
C o n d a m n e lesdits F lo u v a t à a cq u itte r et faire tenir q uitte ladite M a r c o n
de toutes dem andes et répétitions qui pourroient être formées c o n tre elle
pour raison d ’a u cun e des dettes , rentes et charges ci-dessus allouées auxdits F lou vat.
E t dans le cas où , par l ’évén em en t des imputations et com pensations
ci-dessus ordonnées , soit avec les jouissances a n n u e l l e s , soit a vec les autres
sommes particulières qui po urroien t se trouver dues à lad ite M a r c o n , elle se
trou v ero it reliquataire envers lesdits F l o u v a t , c o n d a m n e ladite M a r c o n à
p ayer auxdits F lo u va t le m on ta n t d u d it r e l i q u a t , avec les intérêts à c o m p te r
du ôo mai dernier , jour de la d em a nd e , dépens c o m p e n s é s , fors le c o û t
de l ’arrêt , q ui sera supporté par c e lle des parties qui , d ’après les im p u
tations et compensations ci-dessus ordonnées , se trouvera d éb itric e.
Après une aussi ample explication, il ne sembloit plus rester de
difficultés; mais la dame Marcon ne jugea pa6 le procès assez com
pliqué ; elle prétendit qu’on n ’obéissoit pas à l’arrêt de 1779, en
se désistant sur le champ; et cependant elle n ’adoptoil pas le rapport
d ’experts de 1780, et concluoil à un amendement : à cela elle ajoutoit plusieurs conclusions nouvelles.
i°. Elle plaidoit, en première instance, sur le partage de la suc
cession de Marie Auteroclie, son aïeule, ouverte en 1745; elle le
fit évoquer au parlement.
(■*) C e ca lcu l do fraction * se réd u it A un s ix iè m e ; en e ffe t , r ï ’ î’ T ï + 7 1
C ’e»t donc un six iè m e que la m ère a en usufruit.
P l u s , il lu i est accordé un quart et uuo m o itié dans le p réleg s de fcooo l i v r e s , aussi en
u su fru it.
l'n fin , scs d roits en propriété sont fix és i un n e u v iè m e , plu s u n tr e n t e -s ix iè m e , par
l ’arre t ci-ap rès.
�(8)
2°. Elle plaidoit sur le partage de la succession de son père et
de ses frères, quoiqu’il fût virtuellement ordonne par les deux
premiers arrêts, dès qu’on devoit lui rendre compte de moitié des
jouissances; elle le fit encore évoquer.
5°. Elle plaidoit sur le partage de la succession de Clauda Autcroche, sa mère, ou du moins de la virile à elle due, de l’argenterie,
des gains de survie et du compte de tutelle, quoique son contrat
de mariage et les précédens arrêts eussent réglé tout cela : autre
évocation, et jonction du tout.
4 °. Enfin, elle demanda les jouissances de 178 1, qui étoient de
droit, en vertu du premier arrêt.
Ces nouvelles réclamations, et les débats qu’elles occasionnèrent,
embrouillant de plus en plus le procès, il fut rendu un troisième
arrêt le 1". août 1781.
« L es F lo u va t sont co n d a m n é s à se désister d e la p o rtio n de biens cédés
» en 1 7 4 3 , a v e c r estitu tion de jouissances et intérêts depuis 1 7 7 1 .
« I l est o r d o n n é une nouvelle estim ation aux frais a va ncés de la dame
« M arcon. »
F a isa n t d ro it sur la d em ande en partage de la su ccession d e M a rie
A sta n iè r e , évoquée en la c o u r , c o n d a m n e les héritiers F lo u v a t à p ayer
à ladite dam e M a r c o n la som m e <le
livres , faisant m oitié de celle
de i 5o liv r e s , à laquelle les m eubles délaissés par M a r ie A u te r o c h e ont
été estimés par le p r o c éj
verb al de d e sc r ip tio n
fait après son décès ,
le i 5 octob re 1 7 4 S ; ensemble la som m e de 18 livres i 5 sous po ur le quart
en sus de ladite e s t im a tio n , a vec les intérêts du tout à c o m p te r d u d i t
j o u r ; ensemble la moitié de la valeur de tous autres meubles qui seront
justifiés a v o ir apparten u à ladite M a rie A u teroch e , au jo u r de sa i n o r t ,
m êm e des l i t s , ta b le s , a r m o i r e s , coffres et chaises de M a r ie A s t a n ic r e ,
que led it feu An toin e F lo u v a t a reconnu avoir eus en sa possession , sui
vant l'estimation qu i en sera faite à l'amiable entre les parties , sinon
par experts conven u s d ev an t le juge royal d 'I ssoire, que la c o u r c o m m e t ,
ou par lui pris et nomm és d'office. Q u a n t aux autres d roits de la suc
cession
de ladite M a rie A u t e r o c h e , r é s u l t a n t , soit de son
contrat de
mariage
�(9 )
m ariage avec Etien ne Astanière , d u
25
jan vier 1681 , soit (le la recon-
noissance passée pa r -d e v a n t n o ta ires , d u 16 juin 1 7 1 7 , sans s’a rrêter à
tous traités q u i auroient pu être faits au p r éju d ice de l'institution conten ue
dans le contrat de mariage de Jean Astanière , d u 16 fév rie r 1722 ;
O rd o n n e que ladite M a r c o n , p o u r sa moitié dans lesdits droits , sera
p a y é e sur les biens de la succession d u d it Jean A s t a n i è r e , de la som m e
de
3/(.o8
livres ; s a v o ir , celle de i 85o liv . à la date du z 3 jan vie r 1681 , et
celle de i 558 livres à la date du 16 juin 1 7 1 7 , ensemble des intérêts
d u tout à c o m p te r d u
A u t e r o c h e (*).
12 mars
1 7 4 3 , date du décès de lad ite M a r ie
E n c e q u i tou ch e les d em andes en partage d e la su ccessï> n d e Jean
A s ta n iè r e , père c o m m u n , évoquées en la cour , sans s’arrêter à la d em a n d e
en n u llité de la d isposition de J ea n Astanière , r elative à son m o b i l i e r ,
fo r m ée par ladite M a r c o n , la d éclare n o n -rec ev ab le dans sa d em a n d e
afin de partage des m eubles ineublans d u d i t Jean Astanière.
A l ’égard des im m eu b les autres que la maison située sur la place d 'I sso ir e ,
ord on n e que dans la q u in za in e de la signification d u p rése n t arrêt à
personne ou d o m i c i l e , il sera à l ’a m iab le , si faire se peut , sin on par
deux experts autres que c e u x qu i o n t dressé le procès verb al du 24 fé v rie r
1780 , procéd é A la v i s i t e , arpentage et e stim atio n des terres , prés
vignes et bois , proven an s de la succession
d u d i t Jean A stan ière , au
n o m b re desquels ils c o m p r e n d r o n t le bosquet ou petit bois Saussay, a ctuel
lem en t join t au p r é M o u to n par la partie seulem ent que lesdits experts
r e c o n n o itr o n t être devenué une d ép en da n ce d u d it pré M o u to n , laquelle
partie sera , par lesdits experts , mesurée et estimée avec ledit pré M o u to n .
O r d o n n e que lesdits experts procéd eron t ensuite au partage et division
de tous lesdits biens en deux lots é g a u x , autant
que faire se p o u r r a ,
lesquels l o t s , chargés de leurs soultes ou retour en d en iers, si aucunes il
y a , seront tirés au sort.
Q u a n t à la maison située sur la p la ce d 'Isso ir e, ayant égard aux demandes ,
offres et consentemens respectifs des parties , ord onn e que par les mêmes
experts il sera p ro c éd é à la v i s i t e , toisé et estimation de ladite m a i s o n ,
en distin gu a nt dans ic elle les trois parties d o n t elle se trouve actuelle*
m e n t com posée ; sa vo ir :
La prem ière p a r i e acquise par feu A n to in e Flou vat , de Jean-Baptiste
T i x i e r et sa fem m e , tenant du m id i
à la
maison de C h a b r a t , et
bise , à la seconde partie ci-après.
( * ) C o tte «omme a é té p a y é e. V o ir l ’acte de 1 7 8 3 , ci-ap rè s.
B
de
�( 10 )
L a d ite seconde partie énoncée et décrite en un procès V e r b a l et rapport
d ’experts , du p rem ier octobre 1667.
L a troisièm e p a r t i e , q u i , à c o m m e n c e r des confins de la précédente ,
suivant ledit procès v e r b a l , form e le reste de ladite maison actuelle ju s
q u ’au c o in de la maison du nom m e le l î l a n c , de bise.
Lesquels experts examineront s i , dans l ’état a ctuel de la m aison, les trois
parties qui la c om po sen t p e u ve n t se partager en telle sorte que les héri
tiers
F lo u v a t aient Ja prem ière portion
ci-dessus
d é s i g n é e , la
fem m e
M a r c o n et la ve u ve F l o u v a t , aient chacun e m oitié dans le surplus ; auquel
cas ils in d iq u e r o n t et fixeront la m anière d ’o p é r e r , au profit desdits h é r i
tiers , le partage et séparation de la prem ière po rtio n d ’a vec le su r p lu s ,
ainsi que le partage et séparation d udit surplus.
E t dans le cas où lesdits experts seroient d ’avis que ladite maison ne
p e u t se partager , et q u ’il seroit de l ’intérêt de toutes les parties ou de
q u e l q u ’une d elles de l i c i t e r , soit les trois portions de maison e n s e m b le ,
soit seulem ent les deux dernières portions , o r d o n n e qu'ils estimeront la
valeu r de ch acu n e desdites portions qui seront à lic ite r.
O r d o n n e au s u r p l u s , par rapport à la n ou velle estim ation des fruits
et jouissances c i - d e v a n t p rescrite , que par les mêmes experts il sera dç
s u i t e , et par un procès verbal sép a ré, p r o c é d é aux frais de ladite M a r c o n ,
et sauf à r é p é t e r , c o m m e d it e s t , à la nou velle estim ation du produit de
ch acu n e pièce de t e r r e ,
pré ou
v i g n e , depuis le
3
septembre
1743,
jusques et c o m p r is 1779» année c o m m u n e , eu égard aux bonnes et m au
vaises a n n é e s , d é d u c t i o n faite <les tailles , vin gtièm es et autres im p o s i
tions
royales , m êm e
de 8 livres l 3 sous
4
des cens et rentes
foncières
( autres
deniers due aux B én é d ictin s , de
3
que c e lle
livres due aux
prêtres de S a i n t e - A n n e , de trois c o u p e s fro m en t due aux mêmes , sur ]a
v ig n e a u x . C h ap elles ; desquels
cens
et
rentes les parties ont c om pté
e n t i ’elles jusqu’ en 1778 et 1 7 7 9 1 su iv an t l ’arrêt du 2,5 ju illet dernier ) ,
ensemble des frais de culture et semailles , suivant I usage des lieux , sans
a v o i r , par lesdits experts , aucuns égards à la prétention des héritiers FIouvat , dans le cas où ils prétendroient a ppliq u er à feu A n to in e Flouvat la
jouissance
à titre de percière , des objets dont
les baux à pe rcière ont
cessé pe n d a n t sa possession ; desquels obj»ts I s fruits et jouissances , à
com pter de la cessation desdits baux à percière , seront estimés pu rem ent
et s i m p l e m e n t , et suivant la d é d u c tio n ci-dessus.
C om m e aussi ord onn e que lesdits experts estimeront la valeur du prod u it
d'> c hacu n de«lits objets d ’année en a n n é e , et c e , suivant les m e r c u r ia le s ,
minages ou pancartes de c h a c u n e a n n ée, s'il
s'en trouve
po u r chaque
espèce du f r u its, e t , ù défaut d i c t l l e * , suivant la c om m u ne r eno m m ée et
�( 11 )
leurs connoissances p e r s o n n e lle s , dans laquelle
estimation
toutefois de
fruits et jo u is s a n c e s , ne sera , du consonteinen' r esp e ctif des p a r t i e s ,
com pris le prod u it du bosquet ou petit bois Saussay , joign an t le pré M o u to n .
O rdo nn e pareillem en t que lesdits experts e s t im e r o n t, c o m m e dit est , le
p r o d u it ou la valeur de tous les objets ( autres que ceux expressément e x
ceptés par le présent arrêt ) qui leur seront indiqués par l ’ une ou l ’a ulre
des p a r tie s , com m e d ép en da n s des successions d o n t il s’a g i t , et c e , sans
p r é ju d ic e du d ro it de la partie q u i se c ro iro it fo n d ée à em p êch er ladite
e stim a tio n , défenses réservées au con tra ire ;
C o m m e aussi q u ’ils estim eront les loyers q u ’o n t dû prod uire les deux
dernières parties de la m a is o n , eu égard à l ’ état dans lequel elles étoient
a va n t les réparations et reconstru ction s faites p a r feu A n t o i n e F l o u v a t ,
d éd u c tio n faite sur le m ontant desdits loyers , x°. de ceux des cham bres et
logeinens stipulés au profit de M a r ie A stan ière et de C la u d a A u t e r o c h e ,
aux termes des contrats de m ariage des i 6 février 1722 et i 5 octobre 1 7 4 a ,
po u r le temps qu’elles en ont joui ou dû j o u i r ; 20. de ceux de la m oitié de
la secon d e partie d é c rit e au procès verbal du prem ier o c to b r e 1667.
R e la tiv em en t aux dem andes des héritiers F l o u v a t , afin d 'in d em n ité des
r ép a ra tion s, n ouvelles a c q u i s i t i o n s , im penses et r econ stru ction s par eux
prétendues faites dans lesditcs deux dernières parties de maison , c o n d a m n e
ladite M a r c o n , suivant ses o ffr e s , i°. à pa yer auxdits héritiers F lo u va t la
som m e de 460 l i v . , de laq u elle ils ont d éclaré se c onten ter p o u r une in d e m
nité de la moitié des droits cédés a!feu A n to in e F l o u v a t , dans la seconde
partie de lad ite m a is o n , par Jean-Baptiste T i x i e r et Jeanne M o u r n a t , son
épouse ; a0, à leur p ayer le m on ta n t des réparations utiles et nécessaires
faites par led it A n to in e F l o u v a t ; à l ’effet de quoi ord onn e que par les
e x p e r t s , et dans le m êm e procès verbal d ’estimation des f r u i t s , revenus
et jo u issa n c es, estimation sera faite desdites rép a ra tion s, r e c o n s t r u c tio n s ,
impenses et am éliorations utiles et nécessaires.
S u r les demandes de la dame M a r c o n , afin d in d em nité des aliénations
faites p a r An toin e F lo u v a t , d ’aucuns des biens de la succession de Jean
A s t a n i è r e , d éc la r e ladite M a r c o n non recevable dans sa d em a n d e en in
d em n ité de la valeur et des jouissances des im m eubles donnés par led it
F lo u va t à M a r ie A sta n iè r e , par la transaction du
23 septembre
1744> pour
l ’a cq u it de sa légitime.
Q u a n t aux in d e m n ité s prétendues pour l ’aliénation de la p e tite inuison
de S a u v a g n a c , v e n d u e à rente au n o m m é Canassy , et de la vig n e aussi
donnée à rente à un p n rtic u lirr de S au v a gn ac , or d o n n e que par les mêmes
expert» il sera p ro c éd é à la visite, to is é, mesure et e stim a tio n , tant de
l a d ite maison que de ladite v i g n e , eu égard à le u r va leu r a c t u e l le , dé-
B a
�( 12 )
duction faite toutefois des im p e n se s, augmentations et am élioration1: qui
seroient du fait des preneurs à r e n t e , ensemble à l ’estimation des lovais et
jouissances depuis le
3
septembre 1743 jusques et c o m p ris 1779 ; et, dans le
cas où le m on tant de l'estim ation excéderoit le p r in c ip a l des rentes m o y e n
n ant lesquelles lesdites maison et vig n e o n t été a liénées, c o n d a m n e dés à
présent les héritiers F lo u v a t à pa yer l ’excédent à ladite M a rco n .
A l’égard des im m eubles qui ont pu être c o n c é d é s à aucuns p a r tic u lie r s ,
soit par ledit An toin e F l o u v a t , soit par sa ve u ve ou ses h éritiers, à titre
de pe rciére , d on ne acte auxd its ve u v e et héritiers F lo u v a t , de leurs
offres de ren d r e sans e f f e t , dans le déla i d ’un an à c o m p te r de la date du
présent a r r ê t , tous les baux à perciére qui ont pu être consentis par led it
feu A n to in e F lo u va t ou par eu x , sans au cun e garantie toutefois du fuit
des tenanciers q ui se préten d roien t en droit d ’en jouir audit titre de perc i è r e , i n d é p e n d a m m e n t desdits nouveaux baux à p e r c i é r e , et en vertu de
titres en possession antérieure à iceux.
S u r les autres dem andes respectives des parties , afin d ’estimation des
dég ra d atio ns ou améliorations prétendues fuites aux terres, vignes et p r é s,
les met hors de cour.
D e toutes lesquelles estimations de jou issa nces, répa ra tion s, r ec o n stru c
t i o n s , impenses et am éliorations et i n d e m n i t é s , sera, par lesdits e x p e r t s ,
dressé procès verbal sé p a r é , c o m m e d it e s t , lors d u q u e l les parties p o u r
r o n t faire tels dires , réquisitions et observations que bon leur semblera.
P o u rr o n t lesdits experts, à l’effet de toutes les opérations des deux procès
verbaux ci-dessus o r d o n n é s, faire telles autres o p é r a t i o n s prevues ou non
prév u es q u ’ils jugeron t nécessaires ou c o n v e n a b le s, m ê m e , en cas de par
tage e n tr ’e u x ,
c o n v e n ir d ’un tiers expert devant
le juge royal d ’Issoire ,
q u e la c o u r c o m m e t à cet e f f e t , ou en req u é rir la nom ination d ’office;
p o u rro n t aussi consulter , si bon leur semble , les voisins , ouvriers , et
autres a yan t connoissance de l ’ancien état et valeur tant de la maison d ’Is
soire que de la maison et vig n e baillees à r e n t e , meine , com m e renseignemens , les titres et papiers q u i leu r seront remis par les p a r tie s , n o ta m
m en t le procès verbal du p rem ier oc to b re 1667 , celui dressé a la requête
enfin celui du z/t février 1780.
K n ce q u i touche la d em ande en partage d rs su ccessio n s de M ic h e l-
d u d i t A n to in e F l o u v a t , le 22 avril
César et d e M arc * A le x a n d r e A s L an ière. , frères c o m m u n s , form ée par
la d am e M.ircon ,
Donne acte à ladite M a r c o n de ses offres de faire état ou payem ent en
deniers , à la ve u ve F lo u va t , de la valeur à laquelle se trouvera monter la
portion virile de C la u d a A u t e r o c h e , mère c o m m u n e , dans la succession
d u d it M a rc - Alexandre Astnnlèro ; lui donne pareillem en t acte de ce q u e ,
�( i5 )
par leur requête du 4 juin d e r n i e r , lesdits Flou vn l a cc e p te n t Iesdites offres;
en co n s é q u e n c e , c o n d a m n e ladite M a r co n à faire état ou p a y e m e n t en d e
niers , à ladite ve u ve F l o u v a t , de la m o itié de la som m e de
2 deniers , faisant le neuvièm e des
5ooo
555
livres 11 sous
livres de prélegs fait à M icliel-C é sar
Astanière , par J<;an, son p è r e , ensemble de la m oitié du trente-sixième de la
valeur à laquelle les biens d e Jean Astanière se tr ouveront monter , d ’après
l'estimation ci-dessus ordonnée , d é d u c tio n faite des capitaux tant des charges
fon cières que des dettes , ensem ble d u d it prélrgs et autres legs , si a ucun s y
a e n ; auxquels neuvièm e et trente-sixième
A u te ro c h e
le
droit de portion virile de C lau d a
, q u an t à la p r o p r ié t é , dem eure fixé p a r lu présent a r r ê t , sans
pr éju d ice de l ’usufruit de la totalité des portions viriles de ladite C la u d a
A u tero ch e , dans les successions desdits M ic h e l -C ésa r et M a r c - A l e x a n d r e ,
ses enfans , suivant q u 'il est fixé par l ’arrêt du a5 juillet dernier.
C e fa isan t, sur la dem ande en partage desd iteï su c ce ssio n s, met les partiel
hors de cour.
E n ce q u i touche les demandes relatives à la su ccessio n d e C lau d a
stu tero ch e , déboute ladite M a r c o n de sa d em a nd e en n u llité de l ’o r d o n
nance <1(1 juge d 'îs s o ir e , du 29 mai 1 7 7 3 , qui n permis à la veuve F lo u v a t de
prendre la qualité d ’héritière par bénéfice d 'in ventaire de lad ite C l a u d a
Auteroche.
Sans s’arrêter aux autres demandes de ladite M a rcon , afin de p a r ta g e ,
tant des portions viriles recueillies par C la u d a A u t e r o c h e , que de ses gains
de survie , ni à sa dem ande afin de remise de sa p a rt de l ’argenterie p r é
tendue trouvée dans la succession de C la u d a A u t e r o c h e , desquelles d em a n
des elle est déb ou tée, d on ne acte aux Flouvat de la déclaration faite par
ladite M a r c o n , q u 'elle n ’entend point d em ander le c o m p te de tutelle à
elle dû par C la u d a A u te r o c h e ; en conséquence , cond am ne lad ite ve u ve
F l o u v a t , en ladite qualité d ’héritiere b én é ficia ire ,
i ° . A payer à ladite M a r c o n la somme de
3ooo
livres à elle assurée par
ladite Clauda A u t e r o c h e , tant p a r l e contrat de mariage d ’A n t o i n e F l o u v a t ,
que pnr celui de ladite M a r c o n , sous la cond itio n de ne p.is d em a n d e r
ledit co m p te de t u t e l le , avec les intérêts à c om pter du 8 jan vie r 1 7 7 2 ,
date du décès de ladite C la u d a A u t e r o c h e ;
2 e. A d élivrer à ladite M a r c o n la moitié de tous les meubles en nature '
( autres que c e u x d e cure ) , à elle pareillement assurée par lesdits contrats
de m a r ia g e , et c e , suivant les procès verbaux d'apposition de s c e l l é s ,
reconnoissance d ’iceux et inventaire , des 8 jan vier 1772 , fi et iq j u i l
let 177S ;
5°.
A payer en mêm e temps à ladite M a r c o n ln som m e de
35o
livre*,
à laquelle la c o u r arbitre les dommages - intérêts r é s u lta n s , soit du dé-
�C *4 )
faut de jouissance desdits m e u b le s , soit d u
ép ro u v e r .
dépérissem ent q u ’ils ont pu
Sera ladite veuve F lo u v a t tenue de satisfaire aux condam nations ci-dessus,
dans deux m ois p o u r tout d é l a i , à co m p te r de la signification du présent
arrêt à personne ou d o m i c i l e , si m ieux elle n ’aime rend ra son com pte de
bénéfice d'inventaire , ce qu'elle sera tenue de faire dans le m êm e délai de
deux mois , sinon , et à faute de c e faire dans l e d i t d é l a i , et icelui passé ,
en vertu" du présent a r r ê t, et sans q u 'il en soit besoin d'autre , la déclare
d é c h u e d u d i t bénéfice d ’i n v e n t a i r e , et la répute d é b itric e pure et sim ple
d e ladite M a r co n .
L e tout sans p r é ju d ic e et sous la réserve des droits et prétentions des
héritiers F l o u v a t , c o n tre la succession de ladite C lau d a A u t e r o c h e , d é
fenses réservées au contraire.
E n ce q u i lou che l.i deirtande île ladite ATarcon , afin de jo u issa n ce pa r
m o itié , en la présente année , tle tous le s fr u its e t revenus des biens
d o n t il s ' a g i t , ensemble afin d ’ind em nité de la p riva tion q u ’elle a essuyée
d ’a ucuns
d iceu x
en 1 7 8 0 ,
nonobstan t
l ’arrêt
prov isoire
du
8 juillet
de la m êm e an n ée, ordonne que le d it arrêt sera exécuté pour la présente
ann ée
com m e
i l d ev oit l ’être po u r
1780; en c o n s é q u e n c e , que
ladite
M a r co n jouira de tous les biens des successions d on t i l s’a g it, par égale
po rtio n avec la veu ve F lo u v a t , à la charge par elle , su ivant ses offres ,
i ° . de faire état ou payem en t à la ve u ve F lo u v a t pour les années 1780
et
1 7 8 1 , d es
intérêts de
la som m e
à laquelle
se
trouvera
m on ter,
q u an t à la p r o p r i é t é , d'après les estimations ci-dessus ordonnées , la por
tio n v ir ile de Clpu d a A u t e r o c h e , dans la succession de M a r c - A le x a n d r e ,
son fils, appartenante à ladite ve u ve F l o u v a t , en sadite qualité d'h éritière
b én é firi lire ;
20, D e c on trib u er pour m o itié au payem en t des c e n s , ta ille s , v i n g
t i è m e s , frais d ’exp loitation, rentes et autres charges desdites su c c e ssio n s,
m êm e de p a v e r , à la Sain t-M artin p r o c h a i n e , aux héritiers F l o u v a t , la
som m e de 218 livres po ur intérêts des 4000 livres, d ’ une pr.rt, et 725 liv.
d 'a u t r e , allouée par l ’arrct du
25
juillet dernier, plus celle de 18 livres
répétée par les F lo u v a t p a r leur requête du
juillet d e r n ie r ; lesquelles
som m es néanmoins ladite M a r c o n demeure autorisée à retenir entre ses
m a in s , sur et en déd uction du montant des sommes par elle répétées à
titre de non jouissance pe n d a n t l'année d er n iè re, de tout ou partie d ’au
cuns des objets detdites successions ; à l'effet de quoi ord on n e que par
les mûmes experts qui procéd eron t aux opérations c i-d e v a n t ordonnées ,
la moiti» revenante à ladite M a r co n
dans les loyers de la deuxième et
Uoisiéine portion de la maison sur la place d ’Issoire , pour les années 1780
�( J5 )
et 17S1 , sera estim ée , eu égard à l ’état dans lequel étoien t lesdites p a r
ties de maison avant les réparations et r econ stru ction s faites par A n t o i n e
F lo u v a t , et d é d u c tio n faite seulement des loyers de la m oitié de lad ite
d eu x ièm e partie ; desquels loyers , ensemble du m o n ta n t d u prod u it de*
autres objets dont ladite M a r c o n n 'a pas eu la jouissance , elle pourra
im p u te r et d éd u ire la som m e sur le total de celles allouées p a r ledit arrêt
du ï.5 juillet dernier.
S u r le surplus des demandes , fins et conclusions d tsd ite s parties , les
met hors de cour.
>
C o n d a m n e les F l o u v a t , pour tous dom m ages et in t é r ê ts , aux trois quarts
des é p ic e s , v a c a t io n s , et co û t de l ’arrêt du 6 septembre 1 7 7 9 , q u i a dû être
a v a n c é par A n to in e F lou vat et sa fem m e ; c ond a m ne la dam e M a r c o n à
l ’autre quart des dépens réservés par les p r é c é d e n s arrêts; p l u s , à supporter
ou rem bourser le quart des épices , vacations , et c oû t d u d it arrêt du 6 sep
tem bre 1779 , tous les dépens relatifs
à la
nouvelle estimation réservés : c o n
d am n e la ve u v e F lo u v a t en une m oitié des autres dépens faits depuis l ’arrêt
du 6 septembre 1 7 7 g , autres q u e ceux de la cause jugée par l’arrêt d u
25 juillet d er n ie r , de laquelle m oitié ladite ve u v e F lo u va t pourra e m p lo y e r
un sixième en frais de bénéfice d ’inventaire : c o nd a m ne les héritiers F lo u v a t
en un sixième' desdits dépens, les deux autres sixièmes compensés, que la dam e
ve u ve F lo u v a t et la fem m e M a r c o n em p loiron t r esp e ctiv em e n t en frais de
partage.
E t sera le r.oùt du présent arrêt supporté po u r deux cinq uièm es par la
dame veuve F l o u v a t , qui pourra en e m p lo ye r un sixième en frais de b én é
fice d ’i n v e n ta ir e ; po ur un a u tre cin q u ièm e par les héritiers F lo u v a t ; un
c in q u ièm e dem eurant com pensé entre l a d ite veuve F lou vat et ladite M a r c o n ;
et l'autre c in q u iè m e réservé pour être répété en définitif,
11 esl aisé de voir, par plusieurs dfis dispositions de cet arrêt,
que le parlement étoit lassé de statuer sans cesse sur les mêmes
difficultés ; il donnoit tout pouvoir aux experts ; il régloit des in
demnités d ’office: et il y avoil lieu de croire qu'enfia il n’y auroit
plus de procès.
Mais les sieurs Flouvat éioicnt assez malheureux pour qu’il n ’en
fût pas ainsi. Les experts nommés pour l’amendement requis
par la dame M arcon, employèrent un rapport de neuf cent vingt
�( i6 )
pages à être divisés d’opinion ; un tiers expert estima la succession
à 27905 liv. 5 sous, et fixa les jouissances.
«
Les héritiers Flouvat purent enfin s’exécuter ; et ils prouvent,
par ce qui se passa alors, combien ils éloient jaloux de terminer
avec la veuve Marcon par tous les sacrifices possibles.
i°. L ’arrêt lui adjugeoit, dans la succession de l’aïeule, une
somme de 3408 livres; ils lui délaissèrent des fonds pour cette
somme.
20. L ’arrêt lui adjugeoit 85 liv. i 5 s. pour le mobilier de ladite
succession, estimé; plus, la moitié de celui qu'Antoine Flouvat
reconnut avoir en sa possession ( d ’après une transaction de 1756).
Les héritiers Flouvat le fixèrent eux-mêmes à i 5 o livres, lors du
premier rapport d’experts : ce qui eut lieu sans réclamation.
5°. Par traité du 12 novembre 1783 , ils délaissèrent des im
meubles à la veuve Marcon pour la payer de tout ce qui lui étoit
dû dans la succession maternelle, c’est-à-dire , de 3ooo liv. pour
sa d o t, de 1714
Pour intérêts, de 35o liv. pour dommages-
intérêls arbitrés d ’office, et pour la somme de 55o liv. pour un
quart des frais du premier rapport.
Et comme les immeubles cedes excedoient lesdites sommes de
celle de 1400 livres, il fut dit que cette somme de i/,oo livres
resteroit entre les mains de la veuve Marcon ; pour être ensuite
imputée : elle en est débitrice.
4°. Par autre traité du i y décembre 1784, la maison d ’Issoire
fut licitée entre les parties à iôfioo livres; la femme Marcon la
retint pour cette somme, et il fut réglé qu’il ne lui en revenoit
que pour 25oo liv. ( à cause des réparations et augmentations
faites par le sieur Flouvat. )
Sur le surplus, elle paya 600 liv. aux sieurs Flouvat; elle retint
eu
�( *7 )
en scs mains la somme de i 25oo liv. pour en faire le rapport. Sur
quoi elle s’obligea d’acquitter ce qui restoit dû au sieur T ix i e r ,
vendeur ( environ 800 li v .) ; et il fut ajouté qu’elle feroit compte
de Vintérêt du surplus au taux de la lo i , sans retenue.
A i n s i , la voilà débitrice de 1400 liv. depuis 1783 , et d’environ
11700 liv. depuis 178 4, avec l’intérêt au denier vingt.
D e leur p a rt, les sieurs Flouval dévoient la restitution des jouis
sances de la moitié des biens de Jean Astanière depuis 174^; mais
tout prouvoit que les charges les reduisoient à r ie n , puisque leur
père avoit donné tous les biens à jouir à sa belle-mère pour ses
reprises: fait dont la dame Marcon se fait elle-même un moyen.
T elle étoit la position des parties, lorsque le 18 mai 1785 la
dame Marcon assigna les sieurs Flouvat pour exécuter les arrêts,
et voir homologuer les rapports.
Alors les sieurs Flouvat présentèrent leur compte le 1". février
1786.
Ils divisèrent chaque année en deux chapitres ; le premier se
composoit, i°. des sommes payées à la dame Marcon , avec l’in
térêt , 20. des reprises de la mère ( représentée par eux suivant les
arrêts ) , 3e. des charges annuelles et rentes ; et le deuxième cha
pitre se composoit de la moitié des jouissances ducs à la dame
Marcon , suivant le l'apport.
Par ce com pte, les héritiers Flouvat s’établirent créanciers de
3 i 52 liv. en 1780, époque où la dame Marcon s’étoil mise en pos
session; à cela, ajoutant les provisions payées, et autres sommes
ne portant pas intérêt, plus, les ia5o liv. prix du retour de lot
de la maison, et enfin les intérêts du tout jusqu’à la fin de 1785;
il en résulta que la dame Marcon étoit débitrice de 17985 liv.
liientôt les sieurs Flouvat s’aperçurent qu'ils avoient omis dans
G
�( i8 )
ce compte quelques articles, et notamment la somme de 1400 liv.
portée en l’acte de 1783, comme restée dans les mains de la dame
Marcon : ils rectifièrent cette erreur par des conclusions.
L a dame Marcon signifia, le 17 décembre 1786, des débats à
ce compte, ou plutôt elle en présenta un nouveau, où elle se
reconnut débitrice, en compte final, de462g liv., déduction faite
des 4000 livres et des i 5ooo livres; laquelle somme de 462g livres
elle prétendit devoir rester en ses mains pour sûreté des frais par
elle faits , offrant de payer Vintérét de ladite somme de 4G29 liv.
suivant l’acte de 1784.
Comm e par ce débat la damer IVIarcon avoit fait apercevoir
quelques défauts de calcul au compte des sieurs Flouvat, ceux-ci
les rectifierent par une écriture du 6 avril 178g. Ce n ’est qu’après
celte dernière rectification que le compte fut affirmé par-devant
M . Ferrand , conseiller, le 2 juillet 178 g: après ce la , la dame
Marcon fit encore signifier de très-longs débats le 17 décembre 1790.
T e l fut le dernier état au parlement, supprimé peu de jours après.
On fait grâce à la cour du détail fastidieux d ’une foule de pro
cédures frustratoires et occultes , qui furent laites sous le nom de
la dame Marcon , au sujet du même compte. O11 avoit fait inter
venir sa fille, comme curatrice du sieur Marcon; c’est à e lle q u ’on
rendoit un compte : on y faisoit paroitre plusieurs prétendus créan
ciers, et le procureur lui-même y intervenoit sous son nom. On
faisoit trouver les sieurs Flouvat débiteurs de 57000 liv.; et on surprenoit des arrêts par défaut , auxquels , faute d ’en recevoir copie,
il n'y avoit pas eu d ’opposition. Enfin le scandale de cette procé
dure appela l’attention: un arrêt du 5o août 1786, la déclara toute
entière nulle et frustratoire, et condamna le procureur (le sieur
Golct de lilacy) aux dépens en son nom personnel.
�( *9 )
L e procès fut repris à R io m , comme tribunal choisi par les
exclusions respectives, en 1792. 11 n ’y fut rien statué; mais ce qui
s’y passa est important pour la cause.
L e 1 3 prairial an 4 , les fils Marcon, agissant pour leur mère, signi
fièrent aux héritiers F lo u vat, que le jugement du procès en reddition
de compte étoil peut-être fort éloigné, parce que le tribunal civil étoit
encombré d’affaires ( et sans doute que les assignats approchoient
de leur fin); qu’ils avoient intérêt de se libérer de trois objets indépendans du compte; en conséquence, ils firent des offres, à porte
feuille ouvert et papiers déployés ( ce sont leurs expressions), de
*999® ^v* > pour le prix resté en leurs mains des deux actes de
1783 et 1784, et pour la virile due à Clauda Auteroche, dans les
successions de scs enfans ; ils augmentèrent ces offres par autre
exploit du i 5 , et les portèrent à 21000 liv.
Ces offres ont été déclarées nulles, par jugement du a5 prairial
an 7 , attendu qu’elles dépendoient d ’un compte non réglé. Il n’y
a pas eu d’appel de ce jugement.
Enfin, le procès a été repris en la c o u r , où la dame Marcon a
fait signifier le mémoire auquel on répond.
•
m o y e n
s.
L a dame Marcon s’obstine à 11c vouloir pas suivre les formes
reçues. L ’ordonnance de 1667 dit que l’oyant compte donnera ses
blâmes et débats dans la huitaine; et c’est un compte nouveau
qu’elle a voulu présenter. Mais où en seroit-on , et comment pourroit-on s’entendre, si le comptable étoit obligé de débattre 1111
second compte? et quelle raison y auroit-il pour qu’il n’en donnât
pas aussi un troisième, sous prétexte de corriger le second? II fauC a
�( 20 )
droit bien aussi le présenter avec ses apostilles et ses preuves j et
malheur à la patience même la plus exercée, si les héritiers Flouvat
eussent voulu rectifier le second ou plutôt le troisième compte de
la dame Marcon par un quatrième compte!
L a course passera certainement de cette surcharge de chiffres;
il est même difficile de ne pas lasser son attention , par ce qui
reste à lui dire. Mais au m oins, puisqu’un soutènement décompté
est chose nécessaire, les sieurs Flouvat en abuseront le moins pos
sible, et se contenteront de prendre pour exemple la première
année 1743 , c’esl-à-dire, les quatre mois comptés de l’année 17^3 ;
de là ils parcourront
quelques
articles
d ’années
subséquentes.
Il faudroit peut-être répondre auparavant à un calcul prélimi
naire que fait la veuve M arco n, aux pages 4 et 5 de son mémoire.
Mais la plupart de ces articles sont des objets étrangers aux arrêts,
et déjà proscrits par les hors de cour : tout cela d ’ailleurs exigeroit
des développemens nouveaux; e t , dans une cause aussi compli
quée, ce seroit brouiller les idées de la cour, et s’embarrasser soim êm e, que de s’éloigner de l’objet positif du procès.
II s’agit d ’un compte de jouissances , dû à la veuve Marcon, qui
doit, de son côté, des créances réglées, et des charges. Ce compte
a été présenté, il ne s’agit donc que d ’examiner en quoi on le
dit défectueux.
§. 1". D e 1745. ( Page 8 du mémoire. )
L ’article premier est un capital de 5oo liv. pour un terme de
la dot reçue par la dame Marcon ; elle l’alloue. L ’article 2 étoit
de 7 liv. 10 sous pour les intérêts de cette dot en 174^. L a dame
M arcon, par sa requête de 178 6, allouoit 7 liv. 7 sous 9 den. ;
�( 31 )
par sa requête de 1790, elle allouoit seulement 29 sous ; et enfin,
par son mémoire , elle n’alloue rien du tout.
Cette négation parolt d’abord peu conséquente ; mais elle s’é
tend ensuite à toutes les années du compte ; et par ce
m oyen ,
la dame Marcon se dispense de payer pendant quarante ans l’in
térêt des 4000 livres qu’elle a reçues, malgré l ’arrêt de 1779.
Son moyen (qui se trouve page 10) est de dire que le capital
est éteint par la compensation de sommes antérieures au 3 septem
bre 1743, et ne peut porter intérêt.
Quelles sont ces sommes? Elle n’en dit rien. Quelles peuvent*
elles être? Aucunes, sans contredit; car les héritiers Flouvat ne
doivent rien d’antérieur.
Ils ne doivent que du mobilier de la succession de l ’aïeule : le
total étoit de 86 liv. par l’arrêt, à quoi ajoutant j 5 l i v ., suivant
le rapport des sieurs Petit et R o b e rt, on sera toujours bien loin
de compenser 5 oo liv., et à plus forte raison, dans les années
suivantes, sera-t-on éloigné de 4000 hv.
D ’ailleurs , de quel droit la dame Marcon raye-t-elle un article
autorisé? L ’arrêt du 21 juillet 1779 la condamne à faire compte
de la somme de 4000 liv. ; savoir, 5oo liv ., etc. avec intérêt à
compter de chaque payement.
Les articles 3 , 4 , 5 , 6 ont pou de différence entre le compte
Flouvat et la correction. Cette différence sera aisément rectifiée
lors de l’apurement; et
quoique
les héritiers Flouvat croient avoir
raison , il est inutile d ’en occuper la cour.
L ’article 7 , relatif au sixième revenant en usufruit a la m è re ,
est rayé par la dame M arcon; et son m otif ( page 10 ) est de
renvoyer 5 un tableau par elle rédigé, pour montrer qu’il n ’y a
rien de reste dans la succession après les charges payées, et qu’ainsi
le sixième se réduit à rien.
�( 23 )
Il y a p lu s, car nous verrons ci-après , dans le
I I , que la
darne Marcon fait supporter à sa mère le prétendu déficit qu’elle
dit avoir observé.
Cet article est encore très-important ; car il se répète à toutes
les années suivantes; et il en résulte que pendant vingt-neuf ans
( jusqu’en 1772 ) les Flouvat n ’auroient rien à prendre pour le
sixièm e des jouissances dû à leur mère : cela n’est exact que pour
très-peu d’années , et les héritiers Flouvat n ’ont pas attendu le
tableau auquel la dame Marcon les renvoie, pour diminuer, ou
rayer même les années absorbées par les charges.
Far leur
requête de
178g,
ils o n t réduit l ’article
7,
de
1743 , à
3g so u s, et ont indiqué les autres années pendant lesquelles il y
avoit des déductions à faire.
Mais la loi doit être égale, et les héritiers Flouvat prennent acte
du tableau lui-m êm e, pour en induire que la moitié de ces mêmes
jouissances due à la dame Marcon doit aussi être réduite à rien.
C e n ’est cependant pas là le calcul de la dame Marcon ; elle
raye les articles du sixièm e, et conserve ceux de moitié.
Ne nous étonnons donc plus qu’avec de tels élémens, en ôtant
tous les ans d ’une part, et augmentant de l’autre , il y ait au bout
de quarante ans une si grande différence entre les deux comptes.
Il faut rétablir l’article 7 comme les sieurs Flouvat l’avoient
réduit eux-mêmes en 178«), et il est juste de partir de celte base
pour les années suivantes, jusqu’il 1772. Les héritiers Flouvat con
viennent encore que le*kixième des jouissances revenant à la mère,
et devant être prélevé avant partage, doit n ’être compté qu’en
dernier article, c’est-à-dire, après le dégrèvement des charges.
Les articles 8 et 9 ne sont diminués que de peu de chose : c’est
encore un objet de calcul lors de l ’apurement.
�( ^
)
L ’article 10 consiste en 277 liv. i 5 s. pour le neuvième en pro
priété du prélegs de 5ooo liv. adjugé par l’arrêt du 1". août 1781.
L a dame Marcon ne rejette pas indéfiniment cette somm e; mais
il lui plaît de la transporter à l'année 1772 , comme elle le dit à
la page 10.
Ses motifs seroient assez curieux , s’ils n ’éloient contradictoires
avec ceux qu’elle emploie dans son tableau relatif à la radiation
de l’article 7. Si cela étoit p ayé, dit-elle, en 1743, la mère n ’auroit plus dû réclamer les intérêts; et il vaut mieux lui payer la
somme au moment de sa m o r t , parce qu’elle a besoin jusque-là
de son revenu.
D ’après cela, on -va croire que la dame Marcon portera tous
les ans l’intérêt de cette somme à sa mère pour la dédommager :
point du tout.
On croira au moins que, dans le tableau en question, elle lui
en fait compte, avant de la grever d ’un sixième du prétendu
déficit. Au contraire; car elle porte la moitié du prélegs en dé
duction , quoique la mère ne le prenne p a s, et il résulte du tableau
que la mère n ’a rien dans les jouissances à cause du prélegs qui
aide à les éteindre. Il résulte aussi des pages 8 et 10, qu elle n ’a
rien dans le capital de ce prélegs, à cause qu’il faut lui conserver
ses revenus.
Il
11e reste plus qu’à savoir à quelle page on lui accorde ces
revenus; mais la dame Marcon 11’en a accordé nulle part. Cepen
d a n t, dans son acte d’offres de l’an 4 , elle comptoit Gooo livres
d ’intérêts, et par conséquent elle y comprenoit ceux du prélegs
de sa mère, puisqu’il faisoit partie des trois capitaux offerts.
A u reste, comme la veuve Marcon n’est pas libre de transposer
des sommes qu'un arrêt ne transpose pas , les héritiers Flouvat
�(=4)
demandent qu’elles soient laissées à l’année où ils les ont placées,
parce que jamais on n’a vu attendre le décès d’un créancier pour le
payer.
Ils remercient la dame Marcon d ’avoir bien voulu veiller à leurs
intérêts, en disant qu’elle opéroit ainsi pour ne pas priver la mère
de ses revenus. M a is, s’ils se sont fait tort, ils s’en consoleront;
et ce n ’étoit pas la peine de refondre tout un compte pour faire
semblant de ne pas les priver d ’un intérêt qu’ils ne veulent pas.
L ’art, i i est encore renvoyé à 1779» par un semblable effet de
la complaisance de la dame Marcon. Les sieurs Flouvat n’en persis
tent pas moins à demander que la somme reste à l ’année 1742 , au
risque d’être privés des intérêts à courir.
L ’art. 12 est rejeté tout à fait par la dame M arcon; et ses
moyens ( page 10 ) sont, sur ce point, beaucoup plus étendus.
C ’est qu’aussi sa tâche étoit pénible , car il ne s’agissoit de rien
moins que de lutter contre l’arrêt du i*\ août 1781.
En e f f e t , cet arrêt dit textuellement que la dame Marcon fera
compte au sieur Flouvat de 450 livres pour indemnité à lui due
sur partie de la maison.
L a dame Mqrcon ne se le dissimule pas ; mais elle prétend
prouver que c ’est une injustice, parce que l’arret supposoit un par
tage et non une licitation.
Précisément l’arrêt prévoyoit aussi une licitation. Il fixa une
gomme d ’office pour empêcher de nouvelles contestations ; et on
croit possible de faire tomber cette fixation.
Par q u o i, au reste, est-il prouvé que la moitié de la maison, qui
revenoit dans l’origine à la dame Marcon , ait eu pour moins de
45o livres de réparations? L a dame Marcon veut-elle encore une
expertise ? Mais elle tranche la difficulté en n’allouant aucune
somme
�( ^5 )
somme. Elle veut en revenir à une transaction de 1667 , et à une
explication qui tendroit ù rejuger partie du procès. Elle convient
cependant que la difficulté étoit née lors de l’expertise et du traité
de 1784 ; m a is , dit-elle, on ne pensa pas alors à ces 45 o livres.
On pensa à tout, mais personne ne s’avisa de meltre en question si
l ’arrêt de 1781 seroit réformé lorsqu’il adjngeoit ces 45 o livres , en
mitme temps qu’il ordonnoit partage ou licitation. Les héritiers
Flouvat persistent donc à demander ces 45o livres, et les intérêts
dont ils ont iormé demande additionnelle par leur requête de 178g.
L ’art. i 3 consiste en une somme de 27g livres 5 so u s, pour les
dettes payées par Antoine Flouvat. L a dame Marcon, dans sa requête
de 1786, allouoitcet article, à la charge de produire les quittances;
aujourd’hui elle le réduit à 11 livres 18 sous , et se permet de ren
voyer le surplus à d ’autres années.
C ’est ainsi q u e , sans raison et avec le plus léger prétexte, elle
dénature un compte tout entier, et nécessite, à pure perte, des
frais plus considérables cent fois que la différence qui peut exister
entre l’intérêt d’une foible somme divisée en trois années , et l’in
térêt de la même somme porté tout à la fois.
A u reste, et ce n ’est pas seulement une inutile tracasserie qu’il
y a à reprocher là-dessus à la veuve Marcon , l’ arrêt du 25 juillet
1781 est impératif; il a ordonné qu’elle tiendrait compte de 27g 1.
5 sous sans intérêts, et par simple compensation avec les jouissances.
L a loi ne doit donc pas être dure pour le débiteur seul, qui s’est
libéré en payant la detlc du créancier. L ’arrêt n ’a rien distingué sur
cette somme; et cependant, quant aux4«oo livres, il a distingué les
époques de payeinens : il a donc fallu distinguer quand l’arrêt le
vo u lo it, et ne pas distinguer quand il ne le disait pas. Les héritiers
Flouvat ont en effet divisé la somme de 4000 livres à ses diverses
D
�(
)
époques; et quant aux 279 liv. 5 sous, ils les ont portés à la pre
mière année , ce qui est absolument sans conséquence, puisqu’ils
ne les portent que pour déduire et non pour produire intérêt. Cet
article doit donc être maintenu.
Quant à l’article i 4 > relatif aux impositions à déduire, les sieurs
Flouvat les portoient au hasard à 120 livres par an ( ce qui étoit
très-peu pour une succession de 27900 livres d ’immeubles ) , parce
qu’il leur avoit été impossible de trouver les rôles.
L a dame M a r c o n prétendit avoir élé plus heureuse , et dit qu’elle
avoit un étal général. Il
se p o r l o i t , d i s o i t - e l l e ,
à 101
livres
4 sous
pour 1743 ; e t , par une différence assez inconcevable, l’imposition
n ’éloit que de 27 livres en 1749 , quoique les biens fussent les
mêmes.
Aujourd’hui la dame Marcon fixe les quatre mois de 174$ à
10 livres, et l’année 1749 a 5 francs 77 centimes( pages 8 et 17 ) ;
et pour prouver combien tout cela est intelligible, elle dit ( page 11 )
qu’on trouvera dans trois tableaux tous les renseignemens néces
saires.
L a première chose, également intelligible dans le premier tableau,
est que la cote des biens Astaniere etoit con fondue avec celle du sieur
l ’a y o t , deuxième mari de Clauda Auteroche, de sorte que la divi
sion h en f.iire a été à la pure volonté de la dame Marcon.
Mais c’est assez s ’occuper d ’un article qui doit encore rester tout
entier soumis au calcul définitil- Si la dame Marcon a des extraits
en règle (les rôles, comprenant toute la cote <1<‘ S biens Astanière,
et qu’il soit possible de la distinguer, pas de difficulté alors h suivre
cette déduction ; sinon il faudra bien s’en tenir à celle fuite par
les sieurs Flouvat, ou la cour la fixera d’office.
�C 27 )
§ . 2. D e 1743. (
9. )
Les héritiers Flouvat n ’avoient d ’abord, dans leur compte, porté
en déduction que la moitié des jouissances au profit de la dame
M arcon; mais, par leur requête de 1786, ils ont reconnu qu’i^
falloit y ajouter le deuxième article relatif aux meubles dont ils
avoient fait omission.
Aujourd’hui la dame Marcon se fait créancière de neuf articles
au lieu de deux.
L e premier article n’est pas contesté; mais il plaît
Marcon de le porter
à i 5i
liv.
18
à
sous au lieu de 137 liv.
C ’est, dit - elle ( page 11 ) , une erreur qui s’est étendue
la dame
10
à
sous:
toutes
les autres années : aussi augmente-t-elle sa créance tous les ans ; et
sa preuve est encore renvoyée
à
un tableau.
Mais un meilleur tableau se trouve dans le rapport lui-même
du tiers expert. En 1743, il a porté les produits à 375
livres
: donc
la moitié étoit iZq liv. 10 sous; ainsi de suite dans les années
précédentes.
O r , la dame Marcon a assigné en homologation de ce rapport en
1785, aussitôt qu’elle fut nantie de 16900 liv. et de deux provisions.
T o u t est donc terminé, et il est inutile de refondre un compte
pour chercher au delà de ce qui est définitif.
L es jouissances doivent donc subsister telles qu’elles sont en
17 4 3 , et à toutes les autres années , saui au commissaire de la cour
à examiner si les sommes portées en compte par les Flouvat sont,
chaque année, la moitié exacte de la somme réglée par l ’expert.
L ’article 2 est relatif au mobilier de l’aïeule j il est fixé par le
troisième arrêt : donc pas de difficulté. Les héritiers Flouvat ont
«voué l’omission.
D 2
�( ’ a» )
De même, pour l’article 5 , ils conviennent qu’il faut déduire
cette autre partie de mobilier ; mais on ne peut diviser leur décla
ration : ils ont offert, nu rapport Petit,
1. pour moitié de i 5o 1.,
et non çp liv. i 5 sous.
Les articles 4 et 5 sont une nouvelle découverte de la dame
M arcon, fondée sur deux transactions de i y 5S et 1744*
Si elle avoit voulu lire celle de i j 5 6 , elle y auroit vu que le
sieur Flouvat s'est chargé seulement de mobilier pour
i 5q
livres,
et que le surplus avoit été vendu au sieur Payot.
Elle y auroit vu que Marie Astanière avoit la majeure partie
du mobilier par elle laissé à titre d’usufruit, et
que
cela concorde
avec l’acte de 17^8, où il n’est parlé d’autre mobilier que de celui
q u ’on lui délaisse dans une chambre garnie.
L a transaction de 175G est la dernière : donc les autres s’y rap
portent. Dira-t-on que si Clawla Auteroche a vendu à son mari
du mobilier de sa belle-mère , la dame Marcon doit le retrouver
dans sa succession à titre de prélèvement , puisque les sieurs
Flouvat en sont héritiers?
Mais précisément l’arrêt de 1781 règle tout ce qui doit appar
tenir à la dame Marcon dans la succession de sa mère : elle y demandoit plusieurs espèces de mobilier ; elle en est déboutée, ainsi
que de tonte réclamation en compte. 11 y a plus, elle est, sur tout
le reste de ladite succession , mise hors de cour.
Si dJnc il y a lieu de débattre le compte de la dame Marcon ,
et de devenir o y a n t, on soutient que les articles 4 et 5 du §. 2
doivent être rayés.
11
en est de même de l'article G , il n ’est fondé sur rien ; et ce
n ’est pas après tant de débats et de difficultés qu’il faut élever
des prétentions nouvelles. Comment la veuve Marcon , payée do
�( 29 )
la succpssion tic son aïeule, a-t-elle pu laisser en arrière le revenu
de la seule année 174^ ?
L ’art. 7 n ’est qu’une transposition de l’art. 3 du §. x". L a dame
Marcon veut déduire les vingtièmes de la pension viagère de sa mère.
Elle y est fondée , dit-elle, par son contrat de mariage : on y
lit que sa mère a une pension payable de trois en trois mois par
avance, mais il n ’est pas dit qu’elle sera sujette à retenue.
A la vérité, le contraire n’est pas exprimé ; mais une pension
est par sa nature une chose alimentaire, et ce n ’est pas une rente .
Dans ses écritures , la dame Marcon se fondoit sur Pédit de
1 749, qui parle des rentes viagères. 11 est curieux de voir appli
quer à des arrérages de 17/^3 , un édit de 1749L'art. 8 se rapporte à l’art. 7 du § . 1 " . , qui étoit relatif au sixième
îles jouissances appartenant à la mère.
Ici la dame Marcon , non contente d ’avoir réduit ces jouissances
à rien , veut que la mère lui paye à elle le déficit de ces jouissances.
Demandons lui à quel titre ; pour toute réponse elle renvoie à
l’ un de ses tableaux.
C e qu’on y voit n ’est autre chose qu’un calcul des charges qui
absorbent les revenus, en y
comprenant
merae la moitié du prélegs
que la mère n’a pas, mais qu’on n en met pas moins sur son compte.
T o u t cela n ’explique pas par quel étrange système la mère, qui
avoit droit au sixième des biens , cl qu on réduit a 11e rien prendre
pendant trente-six ans sur quarante,
est
obligée de fournir au déficit.
Q u’un hérilier paye ultra 'vires , cela se conçoit ; mais qu’une
mère, usufruitière d’un sixième, paye à l’héritière de moitié le déficit
du sixièm e, parce que la succession est épuisée par les charges ,
cela est impossible à comprendre ; et tous les tableaux du inonde
ne peuvent pas en donner la solution.
�( 3o )
E n fin , l’article 9 est aussi une nouvelle découverte de la dame
Marcon. C ’est encore la mère q u i , n ’ayant pas assez de fournir
un sixième à la succession de son m a r i , doit fournir un autre
sixième à la succession d e l’aïeule. La dame Marcon a calculé qu’il y
avoit cinq mois et demi de différence entre l’époque fixée par
l ’arrêt pour le calcul des intérêts ; et le temps où ils doivent com
mencer à cet égard.
Mais , i°. il est trop tard , encore une fois , pour élever de nou
velles prétentions ; 20. ce n’est pas à la mère à rien fournir au profit
de la succession de l’aïeule; 59. les arrêts de 1781 fixent le point
de départ général au 3 septembre 174^ : c’est donc les attaquer
que d'exiger des intérêts au delà.
D e 1744 à 1785.
L a dame Marcon n ’ayant plus jugé à propos de donner de
motifs de sa manière de calculer, et de son habitude de réduire et
rayer presque tous les articles de l’actif des héritiers F lo u v a t, il ne
sera nécessaire que de parcourir quelques-unes des années ci-dessus,
pour y faire quelques observations sur quelques articles, autant
néanmoins qu’on aura pu les comprendre.
i°. À pirtir de 174^, la dame Marcon annonce qu’elle ne
comptera plus d ’intérêt6 des capitaux de sa dot ; e t , en effet, la
cour se convaincra que tous les ans chaque article premier est
par elle rayé du compte Flouvat.
C ’est , dit-elle ( pages 12 et 14 ) , parce que les capitaux sont
absorbés par la compensation qui s’est opérée en 1743.
E t , en signe d ’exactitude, 011 voit en 1 749
C
Pa8c *7 )» fî u,°lle
ne compte pas l'intérêt de 3ooo livres , mais qu’elle le compte des
I
�( 5i )
1000 livras restantes; on voit encore (page 9 ) , qu’elle 11e se dit
créancière qu’en 1771* O r , comment a-t-elle pu compenser, trente
ans auparavant, et tant qu’elle a été débitrice, ces 4000 li\res?
Cependant elle se pcrmetde détruire la disposition de l’arrêt de 1779,
qui la condamne à faire compte des intérêts.
Voilà donc près de quarante ans d ’intérêts de 4 °oo livres à
rétablir.
2". Quelle raison donne la' dame Marcon d’une triple division
qu’elle fait à chaque année ( à son profit ) des excédans, avec ou
sans intérêt ?
Dès 17+6, elle se trouve en discordance de 2000 livres, c’està-dire , elle s’adjuge 2000 livres de plus ; car il faut s’entendre : et
on conçoit sans peine qu’avec un aussi bon commencement, et de
bonnes dispositions à ne pas le laisser péricliter , on doit aller loin.
A i n s i , il ne faut pas s’étonner de la finale de son compte.
Cependant, dans sa note sur 1745 ( page x5 ), elle laisse pei’ccr
quelque chose de son plan sur le calcul des intérêts. Elle a fait
scs imputations, dit-elle, d ’après les principes de l’arrêt du a5
juillet 1781 ; e t , par exemple, elle a éteint des capitaux par com
pensation , notamment l’article 2 , comme la dette la plus dure :
on voit la même explication à la fin de la page 2.
O r , quelle est celte detle la plus dure? C ’est justement un capital
de iooo li v ., auquel on veut bien donner un intérêt pour 1745 ,
quoiqu’il ne soit payé qu’en septembre, mais qui n ’en produit
plus pendant toutes les années subséquentes.
Voilà donc comment on s’est affranchi de cet embarras de payer
les inlérêts du prix d ’une cession, tandis qu’on la fait annuller,
et qu’on se fait rendre compte du revenu des jouissances. T o u t
cela n ’est ni juste, ni légal; mais la dame Marcon n ’en donne
�C 53 )
de raisons que par deux lignes d ’une note, ou par des tableaux de
chiffres, si on les trouve plus aisés à concevoir.
5°. Que signifie, en 17G7 (page 55 ), celte séparation d’un capital
qui ne produira d ’intérêt qu’en 1771 ? Pourquoi seulement en 1771?
Effectivem ent, en 1771 se trouve un grimoire d’excédans de six
espèces , sans la moindre réflexion ; et tout cela se perpétue jusqu’à
la fin , sans le secours encore d ’aucun tableau.
P e u t- ê tr e bien la veuve Marcon aura-t-elle pitié de ce qu’on
renonce à la comprendre; mais il vaut mieux se confesser incapa
b l e , que de raisonner sur ce qu’on n ’entend pas.
4°. L a dame Marcon ( page 49 ) déclare qu’elle a séparé du
compte sa delte de i 5Goo l i v . , quoiqu’elle y ait porté celle de
1400 liv. de l’année précédente.
Elle ne dissimule pas que c ’est une finesse de sa part pour ne pas
payer les dépens qui sont réservés pour être payés par le débiteur.
Elle a même quelque soupçon encore d ’être débitrice, car, à la
page suivante, elle appelle à son secours 629 liv. qu’elle a portées
en compte sur les 1400 livres. L e compte plus régulier des Flouvat
prouve qu’ils éloient créanciers en 1785 : et si la veuve Marcon ne
le croyoit pas elle-même, pourquoi oifroit-elle 21000 liv. en l’an 4?
Les héritiers Flouvat n ’élendront pas plus loin l’examen du mé
moire île la dame Marcon , quoiqu’à plusieurs des dernières années
il y ait bien des choses inintelligibles. Mais des doutes ne sont pas
des moyens; cl les héritiers Flouvat croient en avoir assez dit pour
démontrer que tout le travad de la dame Marcon doit être mis de
côté, et qu’il faut s’en tenir au compte qu’ils ont présenté, sauf
les corrections que la cour jugera convenables.
OBSERVATIO NS
�C 33- )
>
’
, • i»
O B S E R V A T I O N S
-r
G E N E R A L E si
Quoique la dame Marcon cherche à hérisser de difficultés un
procès déjà jugé trois fois, il est un fait certain qui parle plus haut
v >' ■
C ’est qu’elle a dans les mains la presque totalité de la succes
sion paternelle, qui est aujourd’hui la seule chose litigieuse.
que tous ses chiffres. .
.
Cette succession est estimée toute entière 27905 liv. 5 sous^non
compris une partie d e là maison à laquelle elle n ’avoit rien à pré
tendre , puisque c’étoit un acquêt du sieur Flouvat.
(J.
O r , elle a reçu en sus de la succession maternelle , et à imputer
sur la succession paternelle, 1400 liy. d ’une p a rt, et, 16600 livres
d ’autre, à la charge de payer une seule créance, qu’elle fixe ellemême à 8 i 3 livres ; elle a reçu deux provisions de i 5oo livres;
et enfin elle a encore reçu 4000 liv. pour sa d o t, dont elle n ’a
fait compte qu’en chiffres.
E lle a donc environ 22000 liv, en ses m ains, depuis a i ans.
Elle doit au moins l’intérêt de ce qui ne lui appartient pas, puis
qu’elle réclame l’intérêt antérieur de ce qui lui appartient.
C e qu’elle doit, dira-t-elle, doit être compensé. O u i, mais jus
qu’à due concurrence; telle est la convention de 1784*
O r , c ’est elle-même qui a calculé qu’à chaque année , depuis
1785 jusqu’à 177 2 , les jouissances étoient absorbées par les charges
et les reprises de la mère ( dont elle n’est pas héritière). Elle
n ’a donc rien à prendre pour ces jouissances; car si son cohéri
tier les perd , pourquoi ne les perdroit-elle pas ?
A u contraire, tout ce qu’elle a reçu en 17S3 et 1784 lui a été
donné franc et quitte; elle jouit depuis cette époque, de plus du
double de ce qui lui revient.
E
�(34)
Un second fait duquel il est fort aisé aussi de tirer des consé
quence , est l’acte d'offres, qui fut fait en l’an 4» de 21000 livres.
A qui persuadera-t-on que celui qui est créancier, se dise lui-même
débiteur, et offre de son bon gré une somme aussi considérable.
Les assignats sont en cendres; mais l’acte d’offres existe avec tous
*
ses résultats.
:
Voilà ce que Monsieur le rapporteur est supplié de prendre en
principale considération, parce que si on peut fasciner les yeux
avec des pages d ’arithemétique, au'm oins elles in’éteignent pas
l’évidence, et l’évidence préserve de l’étourdissement.
i1,
L ’étourdissement naitroit sans doute de la grande étendue que
la veuve Marcon donne à son com pte, et encore plus du compte
préliminaire qui se Jit aux pages 4 et 5. j
'
!
Car on ne peut douter a la page 4 > que la veuve Marcon veuille
entasser de nouveaux faits par sa différence des valeurs de 1784
et de 1782, par une transaction inconnue d e ri 6 g i , par des viriles
plus inconnues encore, des ventes de mobilier dont on ne parloit
pas avant les arrêts, et tant d’autres innovations.
Mais ‘il ne s’agit pas d ’un nouveau procès.
" Les héritiers Flouvat ont été assignés pour rendre un compte de
jouissances , dont les élémens sont fixés avec détail. Ils l’ont rendu;
V c s t donc lui seul qu’il faut suivre , et rejeter d’autres comptes,
'puisqu’ils ne serviroient qu’à rendre l’opération interminable.
C e ne peut pas être un travail extrêmement pénible, puisque
toutes les sommes sont connues. Les héritiers Flouvat doivent des
jouissances ; ils les doivent après les prélèvemens des reprises de la
mère, après la déduction des charges; ils doivent encore deux
’ articles du mobilier de l’aïeule.
I
’
De sa part, la dame Marcon doit l’intérêt de ce qu'elle a reçu :
�(3 5)
les deux sommes se compenseront en se rencontrant, et ensuite
il courra des intérêts pour celui qui ne devra plus de capitaux.
Déjà on aperçoit un résultat quelconque, même avant d ’arriver
au temps où la dame Marcon a reçu des immeubles ; car les
sieurs Flouvat ne lui devoient pour capitaux que la moitié d ’un
mobilier de 5oo livres , plus le quart de 7 5 livres : de sa p a rt,
la dame Marcon devoit depuis 1743 un capital de 4000 livres;
à l’égard des revenus , l’un des cinq tableaux de la dame Marcon
prouve que le sieur Flouvat n'en avoit perçu aucuns.
A u reste , les arrêts sont là pour tout ramener à la chose jugée,
et dissiper toutes les incertitudes. Les héritiers Flouvat ne pré
tendent pas qu’eux seuls ont raison. En se dépouillant de t o u t ,
sans attendre les ordres de la justice, ils ont prouvé qu’ils savoient
sacrifier à leur repos leurs droits et leur fortune. C e qu’ils désirent
principalement, est de voir la fin d ’un procès qui a été la ruine
de leur maison, et que la dame Marcon a seule aujourd’hui intérêt
d ’éterniser. •
M . C A T H O L , rapporteur.
M*. D E L A P C H I E R , avocat,
Me. F A Y E , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L an d rio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Flouvat. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
généalogie
experts
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour les héritiers Flouvat contre Jeanne Astanière, veuve Marcon.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1738-Circa An 8
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0317
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0719
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i
MEMOIRE
JUSTIFICATIF
P O U R
le C h eva lier de la B oulaye M o u fquetaire de la
G arde du R o i.
E C h eva lier de la B oulaye a été obligé de m ettre l ’épée à
' la main con tre le fieur Salafon C ontrolleur des A ctes à
Y ffo i r e : c e C o n trô le u r a reçu trois coups d 'é p é e mais nulle
ment dangereux 3 & qui ne priveront pas le public de fe s fervices:
il s’eft d ’ailleurs attiré ce traitement p ar fon im prudence : j u fques
là rien ne paroît devoir moins intereffer le public & moins in
quiéter le Chevalier de la Boulaye.
M ais le fieur Salafon a voulu perfuader que l’attaquer c'étoit
m anquer de refpect au R o i , & o ffenfer le public. Il a entrepris
d ’in te re ffe r l'autorité R o ya le dans la querelle p a rticu lière , & il
a cru que le p u b lic devo it prendre part-à fon infortune.
Le C hevalier de la Boulaye ne met point aujourd’hui la plume
a la main pour fe ju ftifier vis-à-vis le fieur Salafon cette dém ar
che feroit bien fuperflue : fon objet eft de faire voir que ce qui
s'eft paffé entre eux n’intéreffe ni le fervice du R o i 3 ni le public :
en voici un détail exac t
Le 1 Fevrier 17 4 0 le Sr. L afon t Subdelegue de M . R o ffignol In
tendant de la Généralité de R io m fit tirer les G arçons d ’Y ffoire
pour le fort de la M ilice : le C hevalier de la B oulaye croyoit les
Valets e x e n u s , &: ils l’avoient été dans la précédente M ilice , le
fieur L afo n t n’en jugea p as de même ; il comprit dans fa lifte ces
Valets qui é t o ie n t a b fe n ts , & qui n a
' voient pas été avertis : le Sr.
Salafon que fon o ifiveté avoit c o n dui ch ez le S u b d eleg u é, le
A
L
�* *
\
%
pretil un peu trop officieufement à tirer pour eux , & Ca main o b li
geante am ena pour l’un le billet noir.
L e C hevalier de la Boulaye rencontra le 6 du même mois le Sr
Salafon au milieu de la Place tl’Y ifoire ; il venoit d ’apprendre
dans le m om ent du Subdelegué lui-m êm e ce qui s’ étoit paffé fix
jours auparavant ; il crû pouvoir dire à Salafon qu'il auroit dû fe
difpenfer de tirer pour íes Valets ; q u ’il n ’avoit aucun caractère
qui exigea de lui la dém arché qu’il avo»t f a i t e , & que s'il ne s’en
étoit pas mêlé , le iorc auroit pû tomber iur un autre
Salafon plus ch o q u é de cette repreientation q u ’occupé de Tim*
prudence qu’il avoit eûë, y en ajouta une autre : il avoit une épée,
il la mit à la m ain contre le C h eva lier de la Boulaye. U n C o n tro lleur d ’ Aôtes en lice avec un M ouiquetaire : le com bat n e paroiffoit
pas égal ; le C h e v a lie r de la Boulaye fc crû o b lig é d ’en faire la repréientation ; mais Salafon infifta , & le C hevalier de la B oulaye
Fut forcé de mettre 1 epée à la m ain , ou de reculer s on entend
bien q u ’il ne prit pas le fécond parti.
C e n ’eft pas l.épée â la m ain que les Financiers o n t le fang de la
NobleiTe : Salafon fut blefle , & fut fèul bleiTé. Le C hevalier de
la Boulaye lui porta trois coups ; l’un à la poitrine , l’autre dans
le b r a s , &z le troifiém e au mêm e bras dans le tems que Salafon
ju gean t enfin fes forces inégales fe retournoit pour éviter le cou p ,
ou pour s’enfuir. Le C hevalier de la Boulaye étoit maître de la vie
de Salafon i il l’a ép argn ée s Salafon fe porte fort b i e n , & il a
controllé depuis deux O rd o n n a n ce s de p rovifion que les Juges
d ’YiToire lui o n t accordées.
O n ne croit pas que jamais rixe ait moins concern é la Police ex
térieure de l'E t a t , elle eft toute perfonnelle au fieur S a la fo n , &
de quoi s’agit-il à io n égard ? d ’une im prudence qu ’il a eue de ti
rer pour des M iliciens abfents ; en tirant le fort pour l ’un d ’eux ,
en fe rendant ainfi Je M in iftre de la m auvaife fortune
de ce m alheureux , il a dû fe faire à lui-m êm e des reproches \clt-il
étonnant qu ’il en ait reçû de ceux qui prenoient parc à cet événe
ment \ A une im prudence il en a ajouté u n e a u t r e en mettant le
premier l’épée a la m ain contre le C h e v a lie r de la Boulaye .-car
il e íl 1 agreG eur, il l’a prouvé lui-même dans des informations
q u ’il a fait (aire , ôc le C h e v a lie r de la B oulaye n ’auroit jamais
p enie à l’attaquer.
�T ro ífícm e im prudence enfin : pourquoi Salafon fe trouvoit-il
une épée ? il y a de figes règlemens dans le R o y a u m e , la vie des
C itoyens y eft très en fureté , elle l’cft furtouc à Yi!bire:ious quel
pretexte le iieur Salafon s’eft-il d o n c mis dans la poilèilion de
porter l’épéc .<?lui étoit-elle neceflaire pour tenir io n Bureau ? Si
torique le fort de la M ilice fut tiré , il eût été o ù il devoir être ,
ii fur la Place d ’Y ifo ire il eût été com m e il devoir ê t r e , il n e lui
leroit rien arrivé : c e il- d o n c envain qu’il ve u t le rendre f a v o
rable le p u b l i c , & íes Juges : le public ne peut pas prendre part à
des evenem ens que l’on s’attire par ion im prudence 3 ôc par ià
faute : &: les Juges ne permettent au iîeur Salafon d ’attendre pour
tout fuccès de fà p la in te , q u ’une defenfe de porter l’epée.
Juiqu’ ici o n ne vo it d ’autres perfonnes intereifées dans la que
relle du fieur Salafon 3 que lu i-m ê m e , d ’autre coupable que lui
leul, d ’autre cauie de ce qui eft arrivé que ion im prudence : tout
le co n d a m n e : n ’at-il-donc pas eû raifon de vouloir exciter contre
le C hevalier de la B oulaye des advcrfaircs plus reipedlables, en
iailant repandre que le C hevalier d e là Boulaye a m anqué au R o i,
&: au public 3 au p u b l i c , parce que le C h e v a lie r de la Boulaye lui
à porté , dit-on , un coup d ’epée au derriere du bras; à l’autorité
R o y a le , parce que Salafon ayant contribué à executer les Ordres
du R o i , on n'a pu fin s rebellion à ces mêmes O r d r e s , lui d o n
ner trois coups d ’epée.
L ’injure que Salafon fait au C h e va lie r de la Boulaye en luy
l'éprochant q u ’il ne s’ eft point battu com m e il c o n v c n o i t , co m penfe bien les trois coups qu ’il a reçu j mais s’eft-il flatté iérieuicm ent d ’en im poier iur un fait p areil? le Chevalier de la
Boulaye n’ign o re pas que le public fii/it quelques fois ces fortes
d ’accuiàtions avec a v i d it é , que la m alignité eft une v o y e de
s’iniinuer auprès de luy & q u ’il fe determine même fouvent iùr les
apparences : mais au fon d il décide avec jufteile , & fin s p ailion
lorsqu’il a entendu les deux parties.
C e u x qui co n n o iilcn t le C hevalier de la B ou laye n e le ioupçoneront certainement point d ’avoir attaqué perfonne par der
rière , il déclare d o n c q u ’il n ’a l’hon neur de parler ic y qu a ceux
à qui il eft totalem ent inconnu.^
Salafon co n v ie n t q u ’il a reçu d ’abord deux c o u p s , l’un dans
ta p o i t r in e , l’autre au d e v a n t du b r a s , c ’eft d’un troifiéme coup
A ii
�q u ’il fè p la in t , mais quelle apparence y a-t’il que le C h eva lier
-de la B ou la yc qui avoit porté deux coups par devanr, aie cherché
à en don ner un troiiîéme par derrière , o n croira ians peine
que s’il y a de la lâ c h e té , elle eit de la parc de celuy qui clans le
com bat préientoit les épaulés,& l’on n’avoit point encore o u y d iic
que la manière de le rendre le public favorable fut de luy m o n
trer les coups q u ’on a reçu par derrière.
Mais par quel événem ent Salafon à-t’il d o n c reçu un dernier
coup au derrière du bras? c’ elt pareequ’il choiiic fort mal le temps
de s’enfuire : lorfqu’il ie rétourna le coup étoit porté , le c h a n g e
m ent de poiition de Salafon dirigea le coup à une partie toute
différente de celle pour laquelle il étoit deltiné : ce n ’elt p oin t
la faute du C h evalier de la Boulaye : il a vo it très-bien pris (es
d im e n fio n s, mais Salafon pris mal les iiennes ; que ne s’en fuyoitil un peu plu-toc, ou. un peu plus tard. C o m m e n t p o u n o it o n
rendre le C h evalier de la Boulayc re fp o n ü b le de ce que io n
Adverfaire ne s’eft pas enfui à p r o p o s , d ’ailleurs quand le coup
n ’auroit pas encore été porté lorlque Salafon fit fa rerraite, la
vivacité , & la chaleur de l’a & io n auroient-ils permis au C h e v a
lier de la Boulaye de s’arrêter aufh-tôt?
Le C hevalier de la Boulaye a eu l’honneur de (ervir le R o y
en qualité de M oulquetuire pendant v in g t cin q a n s , on ju
gera aifément q u ’il n ’auroit p.*s demeuré li long-temps dans ce
C o r p s , s’il eût été hom m e à porter des coups par derrière , il elt
décoré du grade de C h evalier de Saint Loiiis : enfin il elt né
G en tilh o m m e, il fçait tout ce q u ’il doit à cc titre'.
A qui veut-on (Tailleur q u ’il ait porté un coup par derrière,
ce n’elt point a un M ilitaire,ce n’elt pas à un G e n tilh o m m e , c’eit
à un Contrôlleur d ’a&es , mais quoy ? ioupçonnera-ton d o n c le
C hevalier de la Boulaye de l’avoir R e d o u té : on l’a déjat dit ; &
cela elt p rouvé par les (oins mêmes du iicur S a la f o n , il doit la
vie au C hevalier de la B oulaye & quel contraire que celuy d'un
G entilhom m e qui blefle par derrière un adverfaire auquel il 1011ferve néanmoins la vie dans ce même moment?
Le Chevalier de la Boulaye ie croit d o n c ju ltific entièrement
& fin s peine envers le Public , néanm oins il avoue q u ’il
jTa ricn h i t encore tant qu'il reliera fur ion com pte le m oindre
f o u p ç o n , d'avoir m anqué d ’une pleine
entière iou m iflion à
l’ uirorité
�l’autorité R o y a le 3 & à 1 exécution des ordres de S i M ajeftéj mais
il cherche en vain l’om bre m êm e , & l’apparence de cette extra
vagan te R eb ellio n , j ’ ay tiré , dit^ Salafon ^ le iort de la M ilice
pour vos v a le t s , vous l’avez trouvé m a u v a is , vous m ’a v e z d o n n é
trois coups d epée , ainli il ell clair que vous vous oppofés à l’O rd o n n a n c e du R o y concernant la levée de la M ilice.
V o ila iàns doute un argum ent bien peu c o h ié q u e n t, Salafon
n’a point été chargé d’éxécuter [O rd o n n a n c e du R o y : il n’a pas
reçu de C o m m illio n du C o n ie il pour tirer pour les abfens 5 le
C h evalier de la Boulaye a reipe& é les ordres du R o y par tout
o ù il a pu en aperçevoir l’im prcllion , il n’a pas eu iàns doute la
ridicule idée de s'élever contre l’autorité R o y a l e , il ne s’eft point
o po fé à ce qu’on tira le fort de la M ilice j il n ’a pas troublé le
Subdélégué dans ies f o n d i o n s ^ il n’a pas dit qu ’il em pêcheroit
ion valet d e le rendre a vec les autres M ilic ie n s , mais il a cru que
fi ce valet eu th é lu y -m ê m e , o u que tout autre eut tiré pour
luy , il auroit été plus heureux * il faut c on ven ir au moins que
c e t o it le pis qui pu luy arriver a il a dit à Salafon qu ’il s’étoit
chargé gratuitement d ’une com m iiïion q u ’il n’étoit pas o b lig e
de remplir , & q u ’on ne d o n n e ordinairem ent qu ’ aux perfonnes
les plus viles : mais q u ’ont de com m un les ordres du R o y a v e c la
dém arche d ’un particulier qui a voulu iàns aucun caractère c o n
tribuer imprudem m ent à leur éxecution dans une aulîi petite par
tie? le C h eva lier de la B oulaye fournis à ion Prince , plein de
r e ip e d pour ceux q u ’il h onore de Îa confiance n ’a pas crii
que ces fentimens d u ik n t s’étendre j u fqu’à ne pouvoir Faire
un léger reproche à un hom m e qui s’djt d o n n é d luy-m êm e u n e
m illion qu ’il n’a pu tenir que de io n oiiivcté voila tout le crirriw
du C hevalier de la Boulaye.
Il c il vray q u e Salafon qui s’enfuit chez le fieur L a fo n t Su b
délégué, le porta , dit-on , à drefler un procès-verbal ou à Ecri
re une lettre contre le C h eva lier de la B o u l a y e , procès-verbal
ou lettre , ce fut fans doute leur o u vrage com m u n : ennemis
l’un , &: l’autre du Chevalier de la Boulaye , ils o n t iàiii une
o ccaiio n com m une de ie ven ger : le C h eva lier de la Boulaye
ignore ce qui rélultc de ce procès verbal s’ il y en a un , mais
il^ içait que cet a & e feroit peu iincère . s’il s’y trouvoic acculé
d 'a v o ir laillc* cchaper le moindre figne d ’im probation des 01B
�<r>
drcs du R o y , & de refus d 'y o b é i r , la m oindre m e n a c e , le
plus leger mépris contre les M iniltres iubalternes chargés de les
exécuter. Le Chevalier de la B oulaye avoir été le même jo u r
6. Fevrier chez le heur L a fo n t Subdélégué pour içavoir de luy
s’il étoit vray que l’o n eu ciré pour ion valet le fort de la M i
lice,le iieur L a fo n t luy répondit qu ’oiiy & q u e c ’eilo it le fieur Salafon q u iavo iteu i’artention de tirer pour ce v a le t , le C h eva lier de
la Boulaye dit au Subdélégué qu'il étoit iurpris de n ’avoir pas
été averti pour faire repréienter les va lets, qu ’il étoit à cet égard
dans une (ecurité d ’autant plus grande que la dernière fois ces
mêmes valets avo ient été déclarés éxemts de tir e r , & il ajouta
peut-être que le iïeur Salafon étoit un étourdi de s'être mêle
d ’une affaire qui ne le régardoit p o i n t , cette reflexion faite
en face de Salafon lui-même n ’auroit rien eut de ch oquan t pour
lui dans les c irc o n lh n c e s de ce qui s’elt pafle ; il peut encore
moins s’en ofFenicr quand elle a été faite en ion a b i è n e e , en
tout cas il n’y a rien encore icy que de perionnel à S a la fo n , 5c
I on peut-être un fujet très fournis, un C ito y e n très l a g e , ôc
trouver la démarche de Salafon peu prudente : mais le fieur L a
font feroit dans ion tort, s’il avoit appliqué à lui-m êm e,ce qui étoit
dit devant luy fur le com pte du iieur Salafon : l’o n ne penfe
do n c point qu’il ait chargé io n procès-verbal ou fes mémoires
d'aucune parole outrageante pour lui ; le C h eva lier de la B ou
laye ne s’eft point écarté à io n égard de ce qu’il doit à l’autori
té du R o y , & quelque petite que iôit la portion de cette auto
rité qui réiide en la perionne du Sr. L afo n t elle n'a. pas moin été
-refpectée par le C hevalier de la Boulaye.
Si le fieur L afo n t ou par inimitié cqntre le C h evalier de la
Boulaye , ou par amitié pour Salafon avoit a va n cé quelque ch o .iè de plus dans des mémoires ce ièroit iàns^ le m oiudre fon de
ment s en tout cas il ne fauroit en être crû : la D a m e L afon t
ia femme étoit prciente à ce qui s’elt p a if é , Salafonc l a faite
entendre en dcpoiîtion ,■& l’o n cil: periuadé q u elle n ’a accufé
le Chevalier de la Boulaye d ’avoir rien dit de d e io b lig e a n t, n ’y
l>our elle , n’y pour ion mari : quels que ioient les faits que le
fieur L afont ait pû avan cer , ils ne le trouvent atteltes que par le
tém o ign age d ’ une feule pcrlcMine, elle n ’eft pas entendue ju diciai
r e m e n t ^ un tém oignage unique ne fait point d'ailleurs une preii-
�vc. Le Sr. L afon n^étoit point en f o n d io n s lors de br converiàtioi*
que le heur Chevalier de la Boulaye eut avec luy , ainfi o n a lieu
de revoquer en doute le droit qu’il a pûs’arroger de drefler un p ro
cès-verbal : mais q u o y q u ’il en loit un procès-verbal de ià part ne
mérité de creancc qu’autant q u ’il e fta tte fté par des témoins non.
Î4ifp e£ ts, & q u e ces témoins o n t été répétés s c’eft-ce-que fupoic
l’article
du titre t o . d e l’O rd o n n a n ce de 1670 . lorfqu’il porte
que les procès-verbaux des Juges ne pourront être décrétés de priie
de c o r p s , il ce n ’eft après que leurs ailiftants auront été répétés :
il faut d o n c qu’il y en ait de qu ’ils ioient répétés s c ’eft-à-dire
que le procès-verbal ne fait pas f o y iàns leur a ilifta n c e , & q u ’il
n e ‘ fait pas fo y même de leur a iliit a n c e , & d e leur depofition
s’il ne {ont entendus de nouveau : un fimple mém oire a encore
bien moins de force.
Si telle eft la depofition de l’O rd o n n a n ce in d iftin& em en t pour
tous les c a s , elle ne doit jam ais être plus rigoureuiement obiervée que dans celuy o ù le ju g e Ce croit infulté , parce q u ’alors
il depoiè dans ia propre cauie , 6c qu ’il s’im agine iou ven t va n ger^ le public , ôc la réglé , quand il ne va n g e que {3.
querelle perionelle , il peut ie croire infulté quand il ne l’elt p as,
lerat-il ju g e de fon opinion ? il faut d o n c que ion tém oignage
ioit fortihé par celuy de pluiîeurs particuliers qui ayant v u de
ian g froid ce qui s’c il p a if é , l'oient plus en état d ’en ren drc
un com pte e x a é l, & qui l’a ttellent par la religion du ferment.
Le C h evalier de la Boulaye içait qu’on a tâcné d’infinuer con
tre lui des impreflions defavantageules au Magiftrat reipe&able
en qui le Souverain a placé ià confiance pour maintenir & faire
refpeéleriès Ordres dans cette Province ; mais il n’échapcra à ia
faqaeité, à fes lumieres 6c à fon équité aucune des obiêrvations qui
aifurent l’innocence de l’accuié , &c prouvent la calomnie de
fes ennem is, fa fermeté dans l’execution des Ordres du R o i &
dans la manutention des règles n’inipire aucune crainte au C h e valier de la Boulaye, parce qu’il ne s’eft jamais écarté du refped
qui leur eft dû.
Le Chevalier de la Boulaye a fervi le R o i p en dant v in g t cin q
ans s o n ne prefumera pas aifement qu'ayant expofé pluiieurs fois
ia vie pour l’execution des Ordres de ià M ajcfté,il y ait contreve1111 lui-m êm e, & qu’il ait fait fucccdcr tout à cou p la révolté,& la
�defobeiff ance au devoir & à la foum iffion
ple pendant tant d ’années. ^
d o n t il a d o n n é l'exem
Il
n ' a d o n c m anqué , ni a ce qu il d o it au R o i , ni a c e qu il
d oit à lui-même . ce font les feuls reproches qui lui tiennent a
cœ u r : du refte , il a b a n d o n n e la querelle particulière de balafon
a tel ju gem en t qu ’o n voudra en porter : à la vérité celui-ci s’e ft
attiré les trois coups d 'epées par deux o u trois im prudences fucceffives ; mais que par indulgence pour l u i , o n ne lui en fuppofe
q u ’une feule, fi l’on v e u t , q u ’on pouffe encore plus loin la c o m p la ifa n c e , peu im porte au C h e va lie r de la Boulaye qu i ne d e
m ande d ’autre g r â c e , fi ce n’eft qu on veuille bien ne pas co n
fondre ce qu’il doit à fon S o u v e ra in , à fon h o n n e u r , & a fa.naiffance avec quelques coups d ’epée que le fieur Salafon a voulu p ar
honneur reçevoir de la m ain d ’un M o u fquetaire.
S ig n é
Le Chevalier D e l a B o u l a y e .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chevalier de la Boulaye. 1746]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Chevalier de la Boulaye
Subject
The topic of the resource
duels
milice
tirage au sort
mousquetaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire justificatif pour le Chevalier de la Boulaye Mousquetaire de la Garde du Roi.
Table Godemel : Duel : Accepté par un mousquetaire de la garde du roi, contre un contrôleur des actes, ayant reçu trois coups d’épée, dont aucun n’était dangereux.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1746
1746
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0418
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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duels
Milice
mousquetaires
tirage au sort
-
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84875f720efadb7daf87e08a6c3b8c51
PDF Text
Text
AVIS A U L E C T E U R .
L a date de l ’avis interprétatif du sénatus-consulte
du 16 floréal, est du 9 thermidor, et non du 19 ther
midor , comme cela a été im prim é, par erreur, à
quelques endroits, notamment à la page 7 de ce
mémoire.
�PRECIS
EN RÉPONSE,
PO U R
B O N N A F O U X , J e a n , V IA L F O N T e t
autres, habitant le département du Cantal,
intimés;
Jean
C O N TRE
Le sieur BO U RNET, propriétaire habitant
la ville d’Issoire, appelant
EN PRÉSENCE
De dame H e n r i e t t e DE CHAUVIGNY DE
B L O T veuve D E SR O Y S et de sieur A n n e t DESROYS.
E n publiant ses moyens contre le jugement du tribunal
d 'Issoire, qui admet les Bonnafoux au partage des biens
rendus par la loi du 5 décembre 1 8 1 4 au x héritiers ou
ayans cause des anciens propriétaires, le sieur Bournet s’est
mis fort à son aise. Il a représenté les intimés comme ayant
élevé une prétention absurde, que la décision des pre
miers juges n’aurait fait que consacrer avec la plus in
concevable légèreté. Suivant lui, c’est un système qui
aurait pour résultat immédiat d’appeler comme ayans
cause d’un émigré, ses parens les plus éloignés, au lieu de
ses héritiers ou de ses parens les plus proches, c’est-à-dire,
COUU ROYAL!-:
DE 111051.
a*
C H A M BRI'.
�K 'A l
( * )
''de fausser la loi sous prétexte de l’ interpréter; et cette
violation de la loi serait encore proposée à la cour contre
l’aütorité de ses arrêts déjà rendus dans la même cause.
Il nous sera facile de démontrer que ce prétendu sys
tème desBonnafoux, repose sur la disposition même de la
loi, sur la jurisprudence constante des Cours royales et de
la Cour de cassation; que leur demande est fondée sur la
doctrine copsacrée par les précédens arrêts de la Cour
qu’a obtenus le sieur Bournet. Nous aurons donc moins
à critiquer ces arrêts, qu’à en invoquer Jes principes;
car, écrits nettement dans ces arrêts, ils y demeurent
inébranlables. Nous démontrerons d’ailleurs que l’appli
cation que le sieur Bournet veut en faire ci lui seu ly
parce qu’il y était seul partie, en l’absence de ses cointéressés, est en contradiction avec le principe qui les
dicte; que c’est lui, et non les Bonnafoux, qui .repous
serait la chose jugée, si son système pouvait être admis;
c’est lui qui détruirait les principes proclamés par la loi
de iBi/f, et les règles ordinaires de l’hérédité. Les Bon
nafoux,au contraire, les invoquent^car eux ou ceux qu’ils
représentent étaient les plus proches parens et héritiers
du défunt au moment où le droit s’est ouvert; et c’est dans
les arrêts de la Cour elle-même qu’ils puisent leurs
moyens de défense. D ’ailleurs, ils sont dans la lettre et
l’esprit de la loi.
La question du procès est de savoir si un émigré étant
mort avant son amnistie, le bénéfice de la loi du 5 dé
cembre 18 14 ( {l uc tout le monde reconnaît n’avoir d’ef
fet que pour l’avenir) appartient à ceux qui auraient dû
succéder à l’émigré le jour de sa mort naturelle, q u o iq u ’à-
�■C3 )
lors il fût en état de mort civile, ou à ceux que la loi ap
pelait à lui succéder au jour de la restitution; c’est-à-dire,
a u x héritiers naturels qui auraient recueilli ses biens, lors
q u e la loi du 5 décembre a été publiée. L e sieur Bournet
soutient le premier système, et le jugement a admis le se
cond sur la demande des Bonnafoux. Tout consiste donc à
rechercher ce qu'a entendu la loi par ces mots '.leurs héri
tiers ou ayons cause. Cette question s’élève entre le dona
taire du sieur de Lespinasse, père de l’émigré, que la loi
du temps de son décès eût appelé à lui succéder pour le
tout, s’il n’eût pas été émigré, et les héritiers collatéraux
de l’émigré, qui étaient appelés à lui succéder pour moi
tié , au moment où les biens qui font le sujet de la contes
tation ont été rendus. C ’est donc sur cette question qu’il
faut fixer spécialement l’attention de la Cour.
Nous pouvons être assez sobres de détails dans le récit
des faits; quant à la discussion, elle sera toute entière pui
sée dans la jurisprudence, où l’on trouve la saine et véri
table entente de la loi. Nous plaçons à côté des faits un
tableau généalogique tel que l’a présenté le sieur Bournet,
enyajoutantquelques indications qui nousparaissent utiles.
F A IT S .
Il s’agit, dans la cause, du sort d’une partie de la suc
cession de François-Aldebert de Sévérac. On voit sur la gé
néalogie qu’il décéda en l’an 4» après avoir recueilli sa
part dans la succession de Jean-Marie-Clair de Sévérac,
son neveu, mort le i germinal an 2. Marguerite et M a
rie Sévérac, sœurs de François-Aldebert, de va ie nt re
cueillir sa succession conjointement avec Claude-Gilbert
1.
�de Cespinasse, qui représentait Catherine-Marie-Louise
deSévérac,sa mère, alors décédée; mais Glaude-Gilbert
était émigré, et en vertu des lois du moment,il était repré
senté par la nation t qui s’était réservé le droit de succéder
à la place des émigrés pendant une période de cinquante
années. Aussi ses biens furent-ils frappés du séquestre.
Toutefois, le séquestre annoncé sur les biens provenus de
François-AIdebert, fut suspendu par une circonstance
particulière. Il avait légué la jouissance de ses biens à la
dame Chauvigny, son épouse, aujourd’hui remariée au
sieur Desroys. O r , ce droit d’usufruit s’opposait à la
jouissance actuelle du gouvernement, qui leva le séques
tre et laissa la veuve en possession.
I l j i ’estpas inutile, pour la suite des faits, de connaître
la composition des deux successions successivement ou
vertes, de Jean-Marie-Clair, et François-AIdebert de Sévérac. Elle est fort bien indiquée au mémoire de J’appelant, page 4 et 5 ; il nous suiiit d’en tracer les résultats.
L e patrimoine de Jenu-Marie-Glair se composait de la
terre de Vertessère et d'une portion de celle de Sévérac,
situées dans le département du Gantai, et d’une portion
de celle de St-Martin, située dans le département du Puyde-Dôme. Il faut faire une différence entre les deux pre
miers objets qui ont été restitués par le préfet du Gantai,
en vertu du sénatus-consulte du 6 iloréal an io , et la terre
de St-Martin qui n’a été rendue que par la loi du 5 dé
cembre i 8 i/}.On voit que Glaude-Gilbert Lespinasse était
appelé h recueillir une partie des biens de Jean-MarieClair, d’abord de sou chef, et ensuite du chef de FrançoisAIdebert.
�ÏÏ'
(. S )
Quant à ce dernier, il laissait dans sa succession la terre
d’Auzat, outre sa part dans les biens de Jean-Marie-Clair;
et Claude Lespinasse était appelé à y prendre une portion
•égale avec Marguerite et Marie Sévérac, ses deux tantes.
C ’est principalement à raison de la terre d’Auzat que s’é
lève la difficulté. Cette terre est demeurée au pouvoir de
la veuve, même après son convoi, quoique, par ce seul
-fait, la jouissance dût cesser de droit, et elle a donné lieu
•à des difficultés judiciaires qu’il faudra connaître. Nous
n’avons pas besoin de nous fixer davantag^sur la quotité
des portions que pouvait amender Claude-Gilbert Les
pinasse, ou, pour lui, le gouvernement, dans ces diffé
rentes natures de biens.
Nous devons noter ici un fait important qui est devenu
le principe de toutes les difficultés auxquelles s’exposa la
dame de Chauvigny, veuve Sévérac. C ’est un point reconnu
en jurisprudence comme en législation, que là nation
,
n’était pas saisie de droit, des successions ouvertes à l’é
migré, pendant sa mort civile; qu’elle ne le devenait que par
l’appréhension réelle, la mainmise surles biens; que,faute
de cette précaution, les successions échues aux émigrés
étaient dévolues aux héritiers républicoles (pour employer
les termes de la législation d’alors). O r, il ne paraissait pas
qu’il y eût eu séquestre effectué sur les biens de FrançoisAldebert, à cause de l’usufruit de son épouse, et on se
persuada qu’aucun acte de l’administration publique ne
les avait mis sous sa main; que conséquemment Margue
rite et Marie de Sévérac, ses deux sœurs, seules héritières
républicoles, avaient été saisies de la totalité, et c’est dans
cet esprit qu’elles traitèrent avec la dame de Chauvigny,
*eur belle-sœur, par acte du 3o floréal an 5.
*Tf
�( 6 5
Par cet acte, elles prirent la qualité de seules et uniques
héritières de François-Aldebert de Sévérac, et, à ce titre,
cédèrent à la dame de Chauvigny tous leurs droits dans
cette succession, sur les biens situés dans la commune
d’Auzat et autres environnantes. Elles en exceptèrent les
droits que François-Aldebert tenait de la succession de
Jean-Marie-Clair de Sévérac; cette réserve frappait ce qui
était advenu à François-Aldebert, dans les terres de Vertessère, de Sévérac et de St-Martin. Marguerite et Marie
Sévérac se lefréservèrent pour les réunir à pareilles por
tions qu’avait chacune d’elles, de son chef, dans les mêmes
biens, et elles exigèrent que la dame de Chauvigny se dé
partît de son usufruit survies portions qui leur provenaient
du chef d’ Aldebert, leur frère, en sorte que la cession
faite, d’ailleurs, moyennant une rente viagère, fut un vé
ritable contrat aléatoire. A u reste, il paraît assez clair que
la dame’de Chauvigny ne visait qu’à réunir dans ses mains
la propriété de la terre d’Auzat, dont elle était déjà usu
fruitière. Munie de cette cession, elle se considéra comnie
‘'seule propriétaire de cette terre, resta long-temps en
possession sans être troublée par personne, et la vendit
par parcelles à un grand nombre d’individus.
Plus tard, comme nous le verrons, Marguerite et Marie
Sévérac vendirent au sieur Grenier les biens et droits
dont elles s’étaient fait la réserve par la cession du 3o flo
réal an 5 .
Claude-Gilbert Lespinasse décéda le 16 frimaire an 8 ,
tq^ijours ou état d’émigration. Il ne laissait ni frères ni
tœurs; mais son père lui survivait. O r, on était régi par la
loi du 17 nivôse an a ; le père eût donc été seul héritier
�( 7 )
s e ^t Pu laisser une succession susceptible d’èlre *
t r a n s m i s e j mais, d’après la disposition des lois sur les effets
de la mort civile, sa succession avait été ouverte au profit
des héritiers qu'il avait au jour de son émigration, et
q u a n t aux biens qu’il avait acquis depuis, à titre successif,
ils auraient également appartenu à ses héritiers, s’ils n’a
vait pas été réservés à la république. O r , Claude-Gilbert
Lespinasse n’avait d’autres biens que ceux qui lui étaient
advenus par les décès successifs de Jean-Marie-Clair et
.François-AldebertdeSévérac,si ce n’est quelques-uns situés
dans le département de la Haute-Loire ; mais ils étaient
tous sous la main de la nation qui les avait séquestrés h son
profit. Le sieur Lespinasse père n’avait donc, alors, de
droits d’aucune espèce, pas même la qualité d’héritier de
son fils, censé mort bien avant la loi du 17 nivôse an 2.
C ’est en cet état que fut rendu le sénatus-consulte du
G floréal an 10, qui, en autorisant l’amnistie des émigrés,
leur rendit tous leurs biens non vendus, réservés ou af
fectés à un service public.
La terre de St-Martin avait été attribuée à la sénatorerie de Riom ; elle était donc exceptée de la restitution.
I,a terre d’Auzat était dans la main delà damede Chauvigny, déjà remariée au sieur Desroys.
On sait que l’avis du 9 thermidor an 10, permit d’ap
pliquer l’amnistie aux émigrés décédés en état d’émigra
tion. L e i 5 ventôse an 11, le sieur Lespinasse père obtint
un certificat d’amnistie pour son fils; après cela, il sollicita
et obtint divers arrêtés d’envoi en possession des biens.
L e 11 germinal an n , les biens du département de la
Ilaute-Loire furent restitués au sieur Lespinasse père,
du
�* par un arrêté du préfet de ce département. Il faut recon
naître, en effet, que le sénatus-consulte, en ordonnant *
la restitution des biens, l’appliquait à ceux qui étaient hé
ritiers présomptifs du défunt au moment de sa publication.
D ’ailleurs ces biens étaient possédés par le fils au mo
ment de son émigration, et il y avait une différence essen
tielle à faire entre ceux-là et ceux échus à l’émigré pen
dant sa mort civile.
Toutefois, un arrêté du préfet du Gantai, du 25 ther
midor an i l , délaissa au sieur Lespinasse père les por
tions échues à son fils dans les terres de Vertessère et de
Sévérac, du chef d’Aldebert et Jean-Marie-Glair de Sévérac.
Quant aux biens situés dans le Puy-de-Dôme, le préfet
n’ordonna la remise que de ceux possédés par le fils, au
moment de son émigration; il réserva tous ceux échus
depuis, comme n’étant pas rendus par le sénatus-consulte:
cela résultait de diverses lois et règlemens, comme en
convient le sieur Bournet, pag. 8 , et c’est un point fort
essentiel à saisir.
Ainsi la question ne resta plus désormais que pour la
terre de Saint-Martin et celle d’Auzat ; tous les autres
biens avaient été restitués à Lespinasse père. Ces deux
propriétés ont donné lieuàdeux procès successifs; d’abord
entre le sieur Lespinasse et le sieur Grenier, son acqué
reur, pour la terre de Saint-Martin; et ensuite entre le
sieur Bournet, donataire de Lespinasse, et la dame Desroys, pour la terre d’Auzat.
L e 18 vendémiaire an 14 , le sieur Lespinasse céda au
sieur Grenier tous scs droits dans la succession de sou fils.
�(9 )
L e s i e u r Grenier, considérant la terre d’Auza t comme ayant
fait partie de la succession du fils, forma, en 1810, une de
mande en partage de cette terre, contre la dame Desroys,
et en réclama le tiers. Avant toute décision, et par acte
sous seing’ privé, du 16 novembre 1811, 1g sieur Grenier
se départit, au profit de la dame Desroys, soit de cette
demande, soit de tous droits sur les successions de JeanMarie-Clair et François-Aldebert de Sévérac. Ainsi, soit ^
du chef de Marguerite et Marie de Sévérac, soit du chef du
sieur Lespinasse, la dame Desroys crut être propriétaire
delà totalité de la terre d’A uzat. C ’est dans cette confiance,
qu’elle l’a vendue; mais elle était dans l’erreur, comme
le démontreront les faits qui vont suivre. Quelque pénible
qu’il puisse être pour elle de rester sujette à des garanties
contre les acquéreurs, c’est une conséquence qu'elle ne
peut éviter; mais il faudra aussi que le sieur Bournet se
résigne à subir celles qui sont attachées à sa propre posi
tion, quelque singulières qu’elles puissent lui paraître. Il
est d’ailleurs fort aisé de reconnaître qu’il ne s’agit pas,
pour lui, d’une perte quelconque, mais d’un bénéfice
plus ou moins grand.
C ’est en cet état que fut rendue la loi du 5 décembre
1814 t
ordonne que tous les biens séquestrés ou
confisqués pour cause d ’émigration, tous ceux advenus à
VÉtat par suite de partage de succession ou présucces
sion ......... seront rendus à ceu x qui en étaient proprié
, à leurs héritiers ou ayans cause. Une commission
taires■
fut nommée pour l’exécution de cette loi.
Bientôt après, le sieur Lespinasse père, comme héritier
de son fils, se pourvut pour obtenir le délaissement de la
terre de Saint-Martin.
2
9
�D e son côté, le sieur Grenier en demanda la délivrance r
prétendant qu’elle était comprise dans la cession de tous
les droits du père à la succession du fils. L e sieur Lespinasse père, disait le sieur Grenier, ne se présente que
comme héritier de son fils. Or, cette qualité-seule repousse
sa demande, car il m’a cédé tous ses droits d’hérédité.
Cette prétention eût été incontestable si Lespinasse
père n’eût pu demander la restitution de la terre, qu’au
titre rigoureux à!héritier de son fils, car il l ’avait cédé au
sieur Grenier. Il fallut donc examiner si cette qualité lui
était nécessaire, et si la remise était faite à celui qui était
l’héritier naturel ou testamentaire de l’émigré au moment
de son décès, ou bien à ceux qui le représentaient,, comme
ses parens les plus proches, et comme étant appelés à lui
succéder au moment de la restitution.
On sent que dans le premier cas, le droit, provenant
d’un fait antérieur à la cessioü, appartenait au sieur
Grenier, céda ta i r e , à ses risques, du titre et des droits de
l’héritier, et que, dans le cas c o n tr a ir e , il ne lui restait ni
titre ni droit. Un arrêté de la commission r e n v o y a les
parties devant les tribunaux, et la cause fut portée devant
le tribunal d’ Issoire.
L é sieur Grenier y soutenait que Lespinasse père avait
été saisi de droit, par le décès de son fils, non-seulcment
des biens qu’il possédait alors, mais de tous les droits et
notions qu’il pouvait exercer, ineme de ceux qui étaient
suspendus parla mort civiteetla confiscation *, que la main
l e v é e du séquestre, la restitution des biens, ordonnées à
posteriori, n’avaient fait que lever l’obstacle qui existait à
la libre exécution des lois générales en matière d’hérédité,.
�yH 'i
«tque les choses reprenaient leur cours, comme si le s é
questre et la confiscation n’eussent jamais existé. O r , didisait-il, Lespinasse père, seul héritier de son fils, avait
réuni dans sa main tous les droits de l’hérédité ; il me les a
cédés; ils m’appartiennent donc, et avec eux la terre de
Saint-Martin, pour la part qui en revenait à mon cédant.
L esie u r Lespinasse, en combattant ce système, pré
sentait une thèse tout opposée; il soutenait d’abord que,
p a r l’effet delà mort civile, Claude-Gilbert Lespinasse,
son fils, n’avait succédé ni à J ean-M arie-Clair, ni à FrançoisAldebert de Sévérac, desquels provenait le huitième de la
terre de Saint-Martin ; que conséquemment il ne les avait
pas recueillis dans la succession de son fils ; d’ailleurs, disaitil, passe pour les biens restitués par le sénatus-consulte
de l’an 10; seul héritier de mon fils, à cette époque, j’en
étais propriétaire, puisqu’ils m'avaient été rendus avant
la cession que je vous ai faite quatre ans plus tard, et ils
peuvent y avoir été compris; mais ceux-ci étaient réservés;
ils ne m’appartenaient pas ; je ne pouvais rien y préten
dre, ni même conserver à leur égard de l’espérance, par
cela seul que la loi les avait exceptés et affectés à un ser
vice public, nous n’avons donc pu avoir ni l’un ni l’autre
la pensée de les comprendre dans notre conyention ; et
quelle que soit la généralité des termes que-nous avons
employés , ils ne peuvent s’appliquer qu’aux droits que
j’avais, et non à ceux qui, ne m’ayant été restitués que
depuis, et encore à titre de faveur et non d’hérédité, sont
tout à fait étrangers à la cession et à la qualité en vertu
de laquelle je vous l’ai consentie.En un mot, disait-il, ce
n’est pas à la succession de mon fils que les biens ont été
�rendus*, c'est à moi, directement, comme à celui-là, qui
seul le représentait au moment de la cession.
Remarquons bien ici que Lespinasse se présentait
comme seul ayant cause de son fils *, que Grenier ne le
contestait pas; qu’au contraire il avait intérêt qu’il le fût,
puisqu’il se présentait comme cédataire ; que ni l’un ni
l ’autre n’avertissait la justice que si la restitution était
directe à l’héritier, il existait d’autres ayans droit de
Claude-Gilbert Lespinasse, au moment de la publication
de la loi du 5 décembre 18 14 j qu’ainsi toute la question
se trouyait dans le plus ou moins d’étendue de la cession,
et non dans le nombre ou la qualité des représentans ou
ayans droit de Claude-Gilbert Lespinasse. En un mot, il
s’agissait de savoir si Guillaume Lespinasse, censé par
toutes les parties le représentant <le la succession de son
fils et son unique ayant droit, avait ou non compris les
biens rendus, dans la cession faite à Grenier, ou si on de
vait les considérer comme rendus directement à celui qui
était ou qu’on considérait c o m m e seul a y a n t droit de l’é
migré, au moment de la restitution.
Ces moyens prévalurent, et un jugement du tribunal
d’Issoire, du iCjuin 1816, adjugea lesbiensà Lespinasse;
il déclara que, nonobstant la cession faite à Grenier, il
était demeuré l’ayant droit de son fils pour tout ce qui
n’avait pas été rendu auparavant, c’est-à-dire, qu’il l’était
resté, nonobstant la cession faite à.Grenier, mais seule
ment comme il l’était auparavant. Si le tribunal d’Issoire
ajouta qu’il était seul représentant de son fils, cette ex
pression posée par opposition à la demande du sieur Grcnicr, ne signifiait autre chose, si ce n’est qu’entre eux
�(13>
deux, seules parties litigantes, seuls dont les droits ou les
intérêts fussent mis en question , Lespinasse était le seul
représentant de son fils, lors de la loi du 5 décembre j 814.
L e jugement ne décidait pas, au surplus, que s’il y avait
d’autres représentans de Claude-Gilbert Lespinasse, ils '
n’auraient pas le droit de demander contre Guillaume ,
d’être admis à participer, pour leur .portion, à une décision
qui leur appartenait évidemment comme à lui; car la seule
chose jugée était que la restitution n’ayant été faite qu’en
1814, et ne se reportant à aucun principe d’hérédité an
térieur, on ne devait pas considérer Guillaume Lespinasse
comme saisi par sa qualité d’héritier de son fils, mais seu
lement comme appelé en qualité d’ayant droit, au moment
de la publication de la loi du 5 décembre 181 4- En un
mot, on adjugeait le profit de la restitution au x héritiers
ou ayans cause de Lespinasse fils, en 181 4 5 contre l’ayant
droit de celui ou ceux qui étaient ses héritiers au G lloréal
an 10. Voilà toute la question qui fut alors jugée.
L e sieur Grenier appela de ce jugement ; il demandait la
réformation de la décision p rin c ip a le q u a n t à l ’a ttrib u
tion de la p r o p r i é t é ; subsidiairemetit, il demandait, comme
en première instance, que le feieur Lespinasse fût assujetti
à contribuer aux dettes de la succession.
Par un arrêt du 3 mars 1817, la Cour confirma le juge
ment, quant à la disposition principale, mais le réforma,
quant au payement des dettes: la Cour ordonna un compte
entre les parties.
L ’une et l’autre se pourvurent en cassation; mais le
pourvoi fut rejeté par-un arrêt du 25 janvier 1819. Ne
nous occupons que de la décision principale, et n’oublions
pas d’observer que si la Cour de cassation se fonda seule-
�ment sur ce qu’il était reconnu par la Cour royale que
les biens en litige n’étaient pas compris dans la cession
faite au sieur Grenier, la Cour royale avait décidé que la
loi du 5 décembre 18 1 4 était une loi de grâce et de fa
veur; que les biens restitués avaient cessé d’appartenir à
l’ancien propriétaire-, qu’ils avaient été irrévocablement
réunis à la sénatorerie, plus de deux ans avant la cession;
que si Lespinasse père les y eût nominativement compris,
la clause eût été réputée non écrite, parce que la loi inter
disait à Lespinasse tout pacte, toute transaction sur des
biens qui appartenaient à autrui. Il est bon, en parcourant
les diverses phrases des instances qui ont été portées de
vant les tribunaux, de ne pas perdre de vue la direction
qui leur était donnée, et les principes qui ont été chaque
fois posés parles arrêts, pour arriver à la décision. Nous
aurons à remarquer plus tard, que celui qui décida la
Cour de cassation, comme les motifs écrits dans les arrêts
postérieurs, militent tous en faveur des Bonnafoux.
' Dans l’intervalle, e t le 27 o c to b r e 1817, le sieur Lesüinasse
avait fait donation au sieur B o u r n e t de tous les
A.
droits dans lesquels il avait été réintégré par la loi du 5
décembre 181 4 >et l’arrêt du 3 mars 1817; et désormais,
ce fut le sieur Bournet qui figura dans les nouvelles pro
cédures.
Les parties passèrent bientôt à l’exécution de l’arrêt;
elles vinrent à compte, et les difficultés qui s'élevèrent fi
rent apercevoir au sieur de Lespinasse que son fils avait
droit à uneportion de la terre d’Auzat, à laquelle il n’a
vait pas pensé jusque-là. Un incident s’éleva, et le notaire
renvoya les parties devant la Cour, où s’établit un nouveau
Jitige. I,e sieur Grenier reconnut., dans çles mémoires Un-
�w
( 15 )
primés, que Ie sieur Lespinasse père , au moment de
la c e s s i o n de l’an 14 ? était exclu de la succession de
Irançois-Aldebert de Sévérac^ comme de celle de JeanMarie-Clair; qu’en conséquence, il ne pouvait rien pré^tendreàla terre d’Auzat, comme cédataire de Lespinasse,
puisqu’elle provenait de François- Aldebert; et par arrêt
du 26 avril 1820, la Cour donna acte au sieur Bournet de
cette déclaration, à l’effet, par Bournet, d’exercer ses
d r o i t s sur cette propriété, à ses risques et périls. Il faut
convenir que le sieur Grenier n’avait pas grand mérite à
faire cette déclaration; d’une part, elle n’était que la consé
quence de l’arrêt déjà rendu contre lui, qui ne pouvait
toutefois préjudicier-aux droits des tiers 5mais quand il eût
e u d e s droits sur A u z a t, dans le principe, il ne lui eussent
plus appartenu, puisqu’il les avait cédés à la dame Desroys, par l’acte de 1810, dont nous avons parlé plus
haut.
C ’est à cette époque que le sieur Bournet fit assigner
les sieur et dame Desroys, et divers acquéreurs de par
tie delà terre d’Auzat; il d em a n d a co n tre les uns le par
tage de la t e r r e , et contre les autres le rapport des por
tions par eux acquises.
- Il n’y eutpointdedifficultéàl’égarddestiers-acquéreurs;
les sieur et dame^Desroys prirent leur fait et cause;
mais à l’égard de ceux-ci, il s’éleva des questions sérieuses.
Les sieur et dame Desroys succombèrent, non parce que
le sieur Lespinasse était le seul ayant droit, mais parcequ’ils étaient sans droit ni qualité pour garder la portion
de la terre d’Auzat échue à Claude-Gilbert, et appréhen
dée par la nation, comme succédant à sa place. Nous en.
serons convaincus par la seule inspection de l’arrêt de k
�( 16 )
Cour, et de celui de la Cour de cassation qui l’a suivi
Cela demande quelques explications.
'
i
Nous avons vu plus haut^ que la dame Desroys était cédataire de tousles droits de Marguerite et MariedeSévérac
sur la terre d’Auzat; qu’elle était encore céda taire de tous
les droits du sieur Grenier. Elle et son époux croyaient, à
ces deux titres, que la propriété du.tiers de celte terre,
provenue de François-Aldebert, ne pouvailleur échaper.
Ils présentaient leurs moyens sous unedouble face.
E t d’abord, disaient-ils, au moment de l’ouverture de
la succession de François-Aldebert de Sévérac, ClaudeGilbert Lespinasse, son héritier pour un tiers, était frappé
de mort civile; il ne pouvait donc- pas succéder à son
oncle. Sa part de cette succession eût pu, il est vrai, être
recueillie par la nation, qui se l’était réservée par les lois
sur l’émigration ; mais il fallait pour cela une appréhension
de fait, une mise en séquestre. Jusque-là, le droit de l’hé
ritier n a tu re l n’était pas paralysé; d’autant qu’en matière
de successions collatérales é c h u e s pendant l’émigration, la’
loi du 8 messidor an 7 et les règlemens p o sté rie u rs a v a ie n t
appelé les héritiers républicoles à succéder à la place de
l’émigré. O r, il n’y a eu ni séquestre ni mainmise de la
nation. Marguerite et Marie de Sévérac, sœurs de Fran
çois-Aldebert, et qui auraient concouru avec ClaudeGilbert Lespinasse, ont donc seules succédé pour le tout:
aussi, en nous cédant leurs droits, elles se sont dites seules
héritières, et nous ont vendu la totalité. La terre d’Auzat
n’a donc pas été rendue par la loi du 5 décembre i 8 i 4 j
elle nous appartient donc indépendamment de toutes dis
positions législatives qui n e sauraient s’appliquer à cette*
propriété; et aussi voit-on que toutes les d e m a n d e s en
�( *71)
partage, tousjles procès n’ont porté ique sur les autres
b i e n s , notamment sur la terre de St-Martin, et que ja
mais depuis i 8 i 4 j et malgré qu’on..ait .constamment
plaidé, on n’a réclamé la terre d’Auzat, parce qu’elle était
soumise à des règles particulières; -t .r . , •
'Mais si on n’adopte pas ce premier moyen, disaient-ils
encore, nous sommes cédataires du sieur Grenier, de tous
ses droits a la- succession d’Aldebert,
relativement à *la
A
terre d’Auzat. O r, si cette terre n’a pas appartenu, en en*
tier, à Marguerite et à Marie de Sévéracy si le , sieur
de Lespinasse a été appelé, comme héritier de son fils,
à en recueillir un tiers, ce tiers se trouve compris dans la
cession que Lespinasse a faite à Grenier, et par consé^
quent dans celle qu’il nous a consentie lui-même.
. En deux mots, disaient ils , le sieur Lespinasse ne peut
avoir droit que comme héritier de son fils, au tiers de la
terre d’Auzat; s’il a un droit, il l’a cédé, et il est,dans nos
mains; s’il n’en n’a pas,,Marguerite et Marie de Sévérac
ont pu nous céder la totalité de la succession d’ Aldebert,,
et elles l’ont fait. Dans l’un et l’autre cas, la te rre d’Auzat
nous appartient en totalité ; nousjen avons disposé de,
bonne foi, et nous ne saurions craindre les suites désas
treuses qui résulteraient contre nousd’un désistement pro
noncé contre nos acquéreurs.
Il est évident que le dernier moyen des sieuv et dame
Desroys, n’était que l’application à la terre d’Auzat,.de
celui déjà invoqué par le sieur Grenier pour la terre de
St-Martin, et qui avait été rejeté par l’arrêt de la ,Gour ;
il nejpouvait donc pas faire fortune. Quant au premier,
il disparaissait devant le fait constant que le séquestre avait
3
�:
( Ù 8 - ) ) .....................................
été' apposé''sui'là^terre d’Àuzat j 'et qu’il n’avait été.levé
que p'àr^l’exfceptibn résultante des droits'd’usufruit de la
veu ve'dé S évérac'A in si la iiiainmisedé la nation avait
restreint'Marguerite et^ftlarie de Sévérac, dans le cercle
de leurs droits personnels; et elles n’avaient recueilli et pu
cédél;';qüe les deux tiers. Restait la question de savoir
à qui la loi de 1814 avait fait’la restitution ; elle se ren
fermait dans ces termes précis : La restitution a-t-elle été
faite:â ceux qui auraient été les héritiers dé l’émigré, le’
6 flotéal an 8') jour dé soù décès, s’il n’eût pas été frappé
dèTimërt civile, é trqui le sont devenusau jour de l’amnistie,
ou à ceux’ qui'étaient'appelés à le représenté!* au moment
où la^'lôi a'ordonné qué lés biens seraient rendus ? C ’était
en effet là-véritable question qui pouvait'se présentery
cdmmëî c’est encore la difficulté à résoudre aujourd’hui;
niais1la Ôoür-n^ëut point à ‘ la décider ; car, réduite à ces
termes 1,'^e!llè ^n’appartenait point à la dame Destoys, q u i,;
éfràngère' à la‘famille dè Sévérac, ne pouvait se présenter
■.
_
:«;i .1 •' _•_. •
que COriime cessionnairc,'sans p o u v o i r user d’aucun droit
pér&mh’eT,1ni pouvoir diré que ni en l’an 10; n i en a8 14 5
elle 'feiït(été a^péléé/de son chef,1à rëprésenter Claude-GilberrLespinabe.1
• ‘-n
■
>
'’Aussi l’arrêt dé là Cour prit-il une toute autre direction
que celle qu’il faut recevoir aujourd’hui dé positions diffé
rentes. Nous allons nôus convaincre qu’en rejetant 1les
moyéns' de fya‘ dame De&oys, il ne préjugea rien contre
les droits des"Bohhafoux, ét'qü’àu contraire il'admit des*
p rin cip e qüi tiiüdctal: à lés apj^üyôr dé toute leur'autorité. '
' N e u f qifèstioris1sont posées dahs cfet arrêt sur l'intérêt'
pi-rnbipa!.J,,i' - ’
!:
s* '' ' - «
■
Z
�-c]cux premières ont'pour unique; objet de rechercher
-si-M arguerite et M arie dé Sévérac ont pu^-se^dire seules
héritières dfA ldebert, com m e profitant de.la,.mort civile
de Claude-G ilbert Lespinasse >’ et si elles ont pu céder en
totalité .»la terre d'Auzat.f;- ! jriui '
mi . :v/hnii-i.r.q
'i L es cinq questions suivantes tendent à savoir si la nation
•aoèté saisie de. plein droit, si ¡çlle a ¡conservé par ¿Je sé
q u e s tr e ;'s i le gouvern em ent est resté saisi jusqu’à la loi
de 18 14*
-"ii
L a huitième's’applique à l’étendue de la cession faite
au sieur Grenier. : ' v
;
La neuvièm e^ enfin, a pour .objet de savoir si Te sieur
B o u r n e t, comme représentant le sieur Lespinasse p è r e ,
«on d o n a te u r, peut profiter seul du bénéfice de cette loi.
O n voit que les huit premières questions n o n t aucun .
trait à la difficulté actuelle, et que la neuvième ne va être
e x a m in é e qu’en considérant Bournet comme représentant
Lespinasse, et en opposant sa qualité, d’ailleurs certaine,
aux prétentions des sieur et dameDesroys.
... . -,
Si nous parcourons les motifs de l ’a rrêt s u r les huit pre
mières q u e s tio n s , nous y voyons la Cour reconnaître
-qu’à la mort de François-Aldebert de Sévérac,- la nation
fut appelée à lui succéder pour .un tiers, par suite de la
- m o r t civile dé Claude-Gilbert Lespinasse j qu’elle opéra
sa mainmise sur les biens-,: que cette mainmise se conserva
sur la nue propriété, nonobstant la mainlevée du séquestrc q u 'e x ig e a l’usufruit de la veuve ; (jue VEtat{est demeuré
hanti jusqu'à la loi du 5 décembre i8 i4 ; que conséquem-inent la cession faite paç,Marguerite et Marie
Sévérac à
-la dame: de Cliauvigny, le 3o florçéajian^, n'q,pu lui çon-
1- . u / 7: -lin ob g'i- :! ,1 -i-j;.- t‘ i ’Ja
�,
,
.
.
.
( ao )
"férer queles deux tiers; que cette dame ne peut davantage
invoquer la' cession du sieur Grenier, qui a reconnu luimême n’avoir aucun droit à la terre d’Auzat’/'
'
Jusque-là’ tout est exclusivement applicable aux faits
particuliers qui intéressaient la dameDësroys, et demeure
tout à fait étranger à la qùestion qui nous occupe; mais il
fallait s’en rapprocher en abordantila dernière question.
Il faut donc appeler un peu plus ¡’’attention sur ces der
niers motifs du jugement.
Ils partent de ce point, que les droits dù gouverne
ment n’ont cessé d’exister que par la promulgation de la
loi du 5 décembre 18 f 4 ? et que
remise a ¿té ordonnée
au profit' des propriétàiresjdeurs héritiers ou ayans cause.
• O n n è voit là encorérien qui nedérivedelaloi elle-même.
TLà Cour dit que Lespinasse , aux droits duquel est le sieur
Bournet, a été reconnu el\déclarë être.le seul représentant
de Claude, son fils; par l’arretdu 3 mars 18 17 , et que
le ju g e m e n t et V arrêt n'ayant pas 1été attaqués p a r le s
sieur et dame Desroys, il >doit demeurer pour constant
que Guillaume Lespinasse a été seul appelé à recueillir le
bénéfice de la loi ;
■y
.. . •
j
Que d?ailleürs Claude1étant décédé le 16 frimaire an 8,
et ayant été amnistiénle i 5 ventôse an 11, sous l’empire
de la loi dû 17 nivôse , le père a été seul saisi de sa suc
cession ; qu’à la vérité son droit avait été suspendu; mais
que lorsque les biëns^dnt élé>rendus, ils n ’o n t pu l’être
qu’à Lespiüasse père',rommefson seul héritier au moment
de son dëiïes. ’ * ^
1 :,u‘
^
Q u’ènfîÜ ^ïts môVne^ hiotifs qüi Qnt fait adjuger à Lespirias^ j4ë£e le hüitiètfiié de îd terre de St-Mdrtin, mili
tent pour lui attribuer le tiers de celle d’Auzat.
�Nous sommes parfaitement d’accord sur ce dernier
motif. Il est incontestable, en effet, que la terre de SaintMartin et celle d’Auzat sont soumises à la môme règle,
comme rendues seulement, l’une et l’dutre, par la loi de
i 8 i 4 >et aussi, les Bonnafoux ont-ils cru devoir les com
prendre l’une et l'autre dans leurs demandes.
Quant aux autres motifs, ils s’appuient principalement
sur la chose jugée : s’ils semblent ensuite aborder la ques
tion , nous ne devons pas p e r d r e de vue que cette question
ne s’agitait qu’entre un héritier ou représentant de ClaudeGilbert Lespinasse, et une autre partie qui ne l’était ni,
ne pouvait l’être ; qu’ainsi la Cour n’avait qu'une chose à
e x a m in e r , celle de savoir si le tiers de la. terre d’Auzat,
échu à Claude-Gilbert Lespinasse, n’ayant été ni pu être
cédé à la dame de Cliauvigny, soit par Marguerite et
Marie de Sévérac, soit par le sieur Grenier, comme cédataire de Lespinasse père, celui-ci, par un droit nou
veau, résultant d’une loi postérieure à la cession, n’était
pas, des deux parties plaidantes, le seul appelé à recueillir
les biens rendus par cette loi. La justice n’examinait pas
si d ’autres héritiers ou ayans cause du propriétaire, pou
vaient y avoir des droits, alors qu’ils n’étaient pas présens
ni appelés pour les faire valoir. Nous nous bornons,
quant à présent, à cette remarqüe qui est nécessaire pour
bien saisir ce qui résulte des faits ultérieurs.
Les sieur et dame Desroys se pourvurent en cassalion ;
ils firent valoir d’abord les moyens qui leur étaient per
sonnels. Sur les premières questions, ils soutinrent que le
tiers de la terre d’Auzat avait été rendu, non par la loi du
.5 décembre 1814 > mais par le sénaîus-consulte du 6 flo-
�*(t
réalan 10; subsidiairement, ils prétendirent que la loi du
5 décembre 18 14 n’était applicable qu’à ceux qui duraient
été héritiers ou ayans cause du propriétaire, au moment
de sa promulgation ; que conéquemment Lespinasse pèrë^
ou Bournet, son donataire, n’était appelé'qu’à la moitié
des biens, comme héritier ou ayâtït cause "seulement du
chef paternel,' et que l’autre moitié était dévolue à M ar
guerite et à Marie de Sévérac; tantes maternelles 'de
Claude-Gilbert, et ses représentàns'fde ce chef. Oi', di
saient les sieur et dame Desroys, nous sommes cédataires
•de-Ma-pguwite et Marie de Sévérac; donc l’arrêt viole ou
applique faussement la loi de ;8i4jenattriljLuantàBQjLumet
la totalité de la portion de Claude-Gilbert Lespinasse,
dans la succession de François-Aldebert de Sévérac? tandis
qu’il nous en reviendrait la moitié.
Ce dernier moyen aurait pu être fort bon , si la cession
de Marguerite et Marie de Sévérac eût été postérieure à
la loi de 18 14 » mais, étant de beaucoup antérieure, elle
ne pouvait attribuer a la d am e D e s r o y s aucun titre, au
cune qualité pour réclamer des biens ou des droits qui
n’étaient advenus à ses cédantes que dix-sept ans après la
cession; elle n’était ni de son chef, ni du chef d’autrui,
ayant cause de Lespinasse fils, a u 5 décembre 18 14 - Cette
circonstance détermina l’arrêt de la Cour de cassation,
sur lequel il est absolument nécessaire de fixer un mo
ment son attention.
Nous ne devons pas douter que cette Cour régulatrice
n’eût abordé le moyen du fond, si elle eût pensé que
Ma rguente et Marie de Sévérac elles-mêmes n’étaient
pas appelées par la loi de 18 14 : c’eût été le seul moyen de
�( - }
.
proclamer la véritable pensée du législateur, et de ramener
à l’exécution de la loi. O r, c’est là’ le but de son institution.
S’arrêter en pareil cas à une simple exception,' c’eût été
employer un moyen évasif, d’autant moins digne d’elle,
que l'arrêt contre-lequel était dirigé le pourvoi semblait
aborder la question, quoique dans un sens tout différent,
comme nous l’avons fait entrevoir. Cependant o d lit dans
l’arrêt de la Cour de cassation, ce motif unique et fort re
marquable sur le second moyen :
•
« Attendu que pour revendiquer subsidiairemen t, non
» pas le tiers, mais bien la moitié du tiers contentieux
» sur la succession de Claude-Gilbert de Lespinasse, la
» veuve de Sévérac, épouse Desroys, étrangère à cette
» succession, se présentait comme subrogée aux droits
» des deux religieuses, Marie et Marguerite de Sévérac,
» ses belles-sœurs, en se fondant à cet effet sur une cession
» rque celles-ci lui avaient faite le 3o floréal an 5 •, mais at» tendu qu’ il est reconnu, en fait, que cette cession
» consentie en floréal an 5 , n’a point porté ni pu porter
» sur la succession de Claude-Gilbert, décédé en frimaire
» an 8 5 q u ’elle portait! seulement sur la succession de
» François-Aldebert de Sévérac, frère des cédantes, dé>> cédé en germinal an 4, et que, même sur cette succession,
» la cession dont il s’agit ne conférait nullement à la ces» sionnairele tiers en question; qu'ainsi, ne pouvant plus
» représenter les deux religieuses , Marie et Marguerite
» de Sévérac, la veuve de Sévérac, épouse Desroys, était
» "sans qualité pour en exercer les droits. » ,
Toutes ces décisions judiciaires consacraient en défini
tif, ce principe non contesté, que la loi de i8 i4 avait fuit
�(=>4 )
une grâce, une faveur, soit aux anciens propriétaires des
biens réservés par lesénatus-consulté, s’ils étaient encore
vivans, soit à leurs héritiers et ayans cause, au momentde,
la loi. Elle les appelait donc directement, non par une res
titution qui eût son principe dans*un droit antérieur, mais
par une sortede libéralité qui ne remontait pas plus loin
que la loi elle-même. C ’est pour cela que les tribunaux
avaient refusé à toutes dispositions antérieures du proprié
taire, à toutes cessions ou transactions, la force de frapper
ces biens qui avaient cessé d’appartenir à l’ancien proprié
taire, parce qu’il en avait été dépouillé irrévocablement.
Or, l’attribution a u x représentans, les saisissait tous, quand
bien même un seul d’entr’eux se fût présenté; car il est de
principe (tout le monde le sait), qu’un seuf des héritiers
qui exerce une action du défunt, conserve les droits de
tous. Ainsi, tout en agissant en son nom personnel, par
suite de la donation de Lespinasse père, et en se faisant
adjuger comme h é r it ie r o u ayant cause du fils, les biens
que venait de rendre la loi, Bournct n’empêchait pas
que les autres ayans droit ne vinssent ensuite réclamer
contre lui la participation à une chose qui leur était com
mune; car il ne pouvait avoir fait prononcer la remise à.
son profit, comme héritier ou ayant droit, sans que la
décision profitât à tous ses cointéressés.
Marguériteet Marie deSévérac étaient décédéespendant
ces discussions': les Bonnafoux qui les représentent, cru
rent que leur droit était suffisamment reconnu par ces ar
rêts, et qu’il leur suffisait, sans avoir besoin d’en demander
la réformation, en tant qu’ils avaient considéré Lespinasse
père comme' sèul héritier, de demander contre son dona-
�,* >
7«’
taire, leur portion d e l à chose commune. TJs assignèrent
soit le sieur Bournet, soit lès sieur et dame Desroys,,pour
v e n ir à partage des Liens délaissés par Jean-Marie-Clair
et F r a n ç o is -A ld e b e r t de Sévérac, et quifseraient advenus
à C la u d e - G ilb e r t Lespinasse, s’il n’eût pas été émigré.
- C ’est sur cette demande qu’est intervenu le jugement
du tribunal civil d’Jssoîre, du 25 août 1829. 11 est presque
littéralement transcrit au mémoire du sieur Baurnet*
page 18 et suivantes. Nous ne le reproduirons pas.
Trois sortes de moyens sont proposés contre ce ju
gement.
i°. Sur les qualités des demandeurs. On se borne à dire*
sur ce point, qu’elles ne paraissent pas suffisamment
justifiées, et qu’on se réserve d’examiner les actes de fa
mille. Nous n’avons donc pas autre chose à répondre à
cette assertion vague, si ce n’est que les qualités sont jus
tifiées par le rapport des actes de famille et des actes de
l’état civil, et qu’ils doivent produire leur effet tant qu’ils
n’auront pas été critiqués valablement.
20. Sur la procédure tenue par les Bonnafoux. On se
plaint de ce q u ’ ils ont été admis à participer à la resti
tution s a n s avoir même formé tierce opposition aux
arrêts de la Cour, qui avaient considéré Lespinasse père
comme seul ayant cause de son fils. Nous avons déjà fait
pressentir le motif pour lequel la tierce opposition nous
avait paru inutile. Nous appuierons davantage sur ce
p o i n t ’, mais il nous semble plus convenable de discuter
d’abord la question du fond, qui est la principale, parce
q u ’ il nous sera beaucoup plus facile ensuite de reconnaître
si lesarrets jugent quelque chose sur la question qui nous
�( 26 )
occupe; s’ils peuvent faire p ré ju d ice su x droits des Bonnafoux, et si au lieu d’avoir à y form er tierce opposition, il
ne leur suffit pas, au contraire, d’en invoquer le bénéfice.
3°. Sur le fond des prétentions des intimés. C ’est là le
seul point qui mérite une discussion sérieuse.
Commençons par bien définir avec la jurisprudence, le
véritable sens de la loi du 5 décembre 181 4 7 voyons
quelles conséquences elle doit naturellement produire, et
nous examinerons ensuite les principales objections qui
nous sont proposées.
Pour bien saisir les résultats delà jurisprudence, il faut
d’abord établir la position extraordinaire créée par la loi
de
Si elle avait voulu, comme la loi de l’indemnité, du 27
avril 1825, faire une restitution à l’émigré en la rattachant
aux droits antérieurs tels qu’ils existaient au 1“ janvier
1792; si elle avait fait cette restitution « à l'ancien pro•» priétaire ou aux Français qui étaient appelés par la
» loi, ou par sa -volonté , à le représen ter à Vépoque de son
» décès, sans quon puisse leur opposer a u cu n e in c a p a c ité
» résultante des lois révolutionnaires, » il n’y aurait eu
rien que de naturel dans son exécution; il aurait fallu re
chercher ceu*x qui étaient désignés par la l o i , ou par
l'émigré lui même, pour lui succéder, pour le représen
ter, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux, soit à titre
universel, soit à titre particulier, au jour de sa mort,
parce que les biens restitués, n’auraient pas cessé de repo
ser sur la têle de l’ancien propriétaire; que dès lors ils
auraient pu être compris, et que, de droit, ils auraient été
censés compris dans toutes les attributions ou dispositions
�( 27 )
universelles des biens de l’émigré, dans tous les traités,
c e s s i o n s , transactions relatives à ses droits et conçues en
termes généraux, parce que ses droits n'auraient-été que
suspendus.
1‘ : r 1
O r, da^s ce cas supposé, la cession faite à Grenier, par
Lespinasse père, aurait frappé tous lés biens qui auraient
appartenu ou dû appartenir à son fils, au moins tous les
droits qu’il y amendait*, le sieur Grenier aurait :iobtemi
le huitième de la terre de Saint-Martin, et le tiers de la terre
d’ Auzat, puisque sa cession était générale; et ce tiers d’Au- ,
zat cédé par lui-même à la darne Desroys, qui l’avait no
minativement acquis, n’aurait pas pu lui être ravi par le
sieur Lespinasse p ère, qui n’aurait été ni pu être admis à
reprendre ce qu’il avait vendu.
Mais, par une exception tirée de quelques termes de
cette loi, on a jugé qu’elle avait créé une position toute
spéciale, qu’elle n’avait pas restitué, mais seulement rendu;
que les^biens n’avaient pas oontinué, après le séquestre ,
de reposer sur la tête de l’émigré; mais qu’il en avait été
irrévocablement dépouillé, et que l’État lui faisait une
sorte de grace, une concession bénévole , qui n’aVait
d’autre principe que le mouvement de sa volonté, et qui
n’ayant aucune relation avec un droit antérieurement
existant, ne prenait naissance que du jour même'de sa
promulgation, n'effaçait pas l'incapacité intermédiaire,
et ne pouvait être soumise à toutes les dispositions de
l'homme, ni aux attributions légales, antérieures au 5 dé
cembre 1814. Si donc, parce qu’on a créé une exception,
le sieur Bournet est parvenu à faire mettre en dehors des
actes consentis par Lespinasbe père, au sujet de la succès-
�(ÎSf
'
* *
( 28 )
sion desonfils, toutcequilui étaitrendu parla loi de 1814,
comme étant étranger à cette succession, il faut qu’il ad
mette toutes les conséquences de ce principe, et qu’il ne
rapporte point à la succession du fils, prétendu ouverte
en l’an 8, la remise prononcée par la loi de 1814- 11
n’y aurait pas de doute si Claude-Gilbert Lespinasse eût
vécu à celte époque; il eût recueilli directement, puisque
c’était à lui qu’on donnait: mais il était mort; la loi
l’a p ré v u , et elle devait le prévoir; elle a appelé les
héritiers ou ayans cause. Dès qu’elle ne voulait pas
reconnaître comme ayans cause les cédalaires univer
sels de droits par actes antérieurs, comment aurait-elle
appliqué la qualité ^ ’héritiers à ceux qui la cherchaient
dans une succession que la loi ne voulait pas reconnaître,
et avec laquelle, vraie ou supposée, elle ne voulait pas
entrer en relation?
Et encore, si on pouvait le supposer, à quel jour eûtelle reporté la fixation du 4foit ? Étail-ce au jour de la
mort naturelle de celui qui déjà était mort civilement ?
Comment, en Défaisant partir l’attribution de propriété,
que du 5 décembre 1814> en 11’efTaçant pas Yincapacité
antérieure) aurait-elle pu reconnaître pour héritiers ceux
qui l’auraient été au jour de la mort naturelle, plutôt
que celui qui était appelé par d’autres lois, nu jour de
la mort civile? Eu ce cas, l’attribution à tel ou à tel,
suivant qu’il plairait d’appliquer telle ou telle l o i , aurait
donc été l’effet d’un caprice* plutôt que la dépendance
nécessaire d’un principe ! On tombe en effet dans le
caprice, dans l’abstraction, dans des conséquences indéfi
nissables, quand, à propos d’une exception, on veut re
�pousser le principe môme sur lequel elle a été fondée, et
q u ’on veut revenir au principe général, pour l’appliquer
à celte exception créée précisément pour échapper au
principe.
A u reste,Voyons comment l’a entendu la jurisprudence
des arrêts.
L e premier arrêt es£ celui de Lépinay do St Luc et de
l’abbé Duclaux : il est rapporté dans Dalloz , ann. 1819 ,
pag. 11 3.
Comme dans l’espèce, le sieur de Saint-Luc, émigré,
était m ort avant toute amnistie (en 1799V
Il laissait une fille unique, madame de Sully.
Celle-ci obtint l’amnistie de son père, et se fit envoyer
en possession des biens rendus par le sénatus - consulte :
toutes circonstances absolument semblables î^i celles du
procès actuel. Elle mourut le 3o janvier 1809, après avoir
institué l’abbé Duclaux son héritier universel.
Convenons ici que le sieur abbé Duclaux, légataire
universel, la représentait pleinement, et que si les droits
que lui attribua plus tard la loi du 5 décembre 1814, s’é
taient référés h. la quqjité d’hcritier ou ayant cause, fondée
sur des faits ou sur un droit antérieur à la loi; qu’en un
mot elle se fût appliquée à celui qui était l’héritier au mo
ment du décès, l’abbé Duclaux, seul, en aurait été in
vesti, caria dame de Sully était la seule héritière de son
père, et il était le seul héritier de la dame de Sully. Il en
éleva la prétention. Pour échapper à cette conséquence,
il fallait donc décider qu’on ne devait considérer comme
héritiers on ayans ca u se, que ceux qui se trouvaient
l’être au 5 décembre 1,814, et non ceux qui pouvaient
�\o'à
’
(3o)
rattacher leur droit à une époque antérieure, comme
celle du décès ; il fallait reconnaître comme tels ceux
qu’appelaient les lois en vigueur au 5 décembre 18 14 ? et
non ceux que désignaient autrefois des lois maintenant
abrogées. L e sieur de Saint-Luc, héritier au moment
de la loi, comme plus proche parent existant du sieur de
Saint-Luc, émigré, réclama la préférence; il soutint que
madame de Sully n’avait pas trouvé, en 1799, dans la suc
cession de son p ère, les biens que venait de lui rendre la
loi de 1814 5 qu’elle n’avait pu les transmettre h l’abbé
Duclaux ; qu’il fallaitexaminer quel était, au jour de la
loi de i 8 i 4 j l’héritier appelé comme plus proche parent
existant.
Celle prétention avait été proscrite par un jugement du
tribunal de la Seine et un arrêt confirmatif de la Cour
royale de Paris. 11 avait été jugé que la remise des biens
était une véritable restitution en entier, qui effaçait toute
trace d ’émigration, de séquestre ou de confiscation ; que
les biens étaient dès lo rs censés n'être pas sortis des
mains des anciens propriétaires qui les avaient tran sm is
à leurs héritiers ou ayans cause. C ’était la doctrine de la
simple suspension que le sieur Bournet veut encore faire
prévaloir aujourd’hui. On appliquait ensuite cette doc
trine aux faits particuliers, et on disait que lu dame de
Sully ayant été Vunique héritière du marquis de SaintL u c , et l’abbé Duclaux étant son légataire universel,
il était le représentant universel et l’ayant cause, non-seu
lement de madame de Sully, mais encore du marquis de
Sjiint-Luc.
fin, l’arretajoutait l’argument d’aujourd’hui,
que sans cela il faudrait supposer qu’A deux époques éloi-
�Vi
( 31 )
g n(ie5 l'une de l'autre, il se serait ouvert, au profit de deux
personnes différentes, deux successions du même individu.
Cet arrêt fut cassé, malgré sa logique forte et persuasive.
La Cour de cassation déclara que la loi n'avait fait cesser
les effets de la confiscation que pour l’avenir, mais ne les
avait pas-abolis pour le passé; q u il ne peut être question
de restitution par suite de cette loi, qui n’a réellement
rendu les biens qu’à titre de libéralité; que dès lors ils
n’avaient fait partie ni de la succession du marquis
Lépinay, ni de celle de la dame de Sully ; qu’ainsi, il n’y
avait pas deux successions du même individu; qu’enfin,
ils n ’avaien t pu appartenir ni à madame de Sully nia l'abbé
D u c l a u x , puisque, jusqu’au 5 décembre i 8 i 4 ,ils étaient
irrévocablement réunis au domaine de VElat; l’arrêt ajoute
enfin que la remise était faite non par la voie civile des
successions, mais par la voie naturellé de justice et d'é~
quite.
Il semble que tous ces motifs sont faits pour la cause
actuelle; e t, en effet, les circonstances étaient à peu près
identiques.
Si on avait dû, dans notre espèce, considérer la voie
natu relle des successions, regarder les biens comme ayant
sans cesse appartenu à l’ém igré, et étant restitués aux
véritables héritiers qu’il avait laissés par son décès, les
biens auraient incontestablement appartenu au sieur Lespinasse père; mais alors, comme nous l’avons déjà observé,
ils auraient été compris dans la cession par lui faite au
sieur Grenier; et il aurait fallu les lui adjuger comme
l’arrêt*de Paris l’avait fait au profit du*sicur abbé Duclaux;
mais comme c’était seulement une attribution faite à titre
�( 3» )
de libéralité, le 5 décembre 18 14 >à Claude-Gilbert Lespinasse ou à ses ayans cause, que cette attribution n’était
pas faite par la voie ordinaire des successions, et que le
décès de l’émigré mettait ses ayans cause en ligne, il ne
faut plus aller chercher la voie ordinaire d’une succession
ouverte en l’an 8, alors que, par sa mort civile, l’émigré
n’avait pas de succession, ni invoquer une loi transitoire
qui attribuait au père le droit exorbitant d’une succession
exclusive; il fallait et il faut rechercher quels étaient au
5 décembre i 8 i 4 » d’après les lois existantes, les héritiers
ou ayans cause de Claude-Gilbert Lespinasse; reconnaître
les parens les plus proches en degré qui étaient appelés
par la loi à le représenter. Or, dans la ligne paternelle,
c’était son père; dans la ligne maternelle, ses deux tantes;
voilà les conséquences les plus naturelles, les plus directes,
les plus sûres, et elles ne produisaient pas d’injustice, elles
n’appelaient pas des étrangers pour exclure les parens
les plus proches; car il ne pouvait plus être question de la
succession exclusive du p è re , sous la loi du 17 nivôse an a:
c’était un fait, un droit auquel le p r in c ip e de rem ise des
biens demeurait tout à fait étranger par la disposition de
la loi.
Voyons l’arrêt Devenois, du 9 mai 1821 (Dalloz, 1821,
p. 397) ; il est encore dans les mêmes termes.
Une succession s’était ouverte au profit de Devenois,
émigré. 11 mourut, en i 8 o 5 , sans avoir été amnistié; sn
plus proche parente, habile à lui succéder, était la demoi*
selle Leguerney; elle mourut eu 1808.
Les biens furent,rendus par la loi de 181 4- CJombat
entre l’héritier naturel de~la demoiselle Leguerney, et
�(r 3 3 )
qui, en omettant tous lès faits antérieurs, se serait
trouvé héritier, représentant, oü ayant'cause, si l’on veut,
de Devenois, émigré, en supposant sa succession ouverte
seulement le 5 décembre 1814.
"T ...
<
■. r
'A rrêt de Caen, qui, suivant l’ordre ordinaire des suc
cessions , regarde comme héritier ou ayant cause du sieur
Devenois, la demoiselle Leguerney, qui, en effet, lui au
rait succédé à' l’époque de son décès; mais cet »arrêta est
encore cassé par des motifs qui ne sont *qu’un résumé'de
ceux de l’arrêt de Saint-Luc. La Gourde cassation déclare
enfcore qu’il ne s’agit point de restitution, mais d’une libé
ralité exercée le .5 décembre 181 4 5 qü’elle n’a pu être at-,
tribuée à la demoiselle Leguerney, quoiqu'ellefût au décès
de Jacques Depenois sa plus proche parente. .
. :/
Ainsi, ce n’est pas le plus proche parent, celui qui est
habile à succéder au moment du décès de rémigré, mais
celui ou ceux qui lui succéderaient comme plus proches,
au 5 décembre 1814, qui sont appelés comme ayans cause
de l’émigré, à recevoir une libéralité qu’il ne peut recueil
lir lui-même par suite de son déçès.
>
Si nous jetons un coup d’œil suril’arrêt de Béthune, du
3 janvier 1821, au même volume de 1821, p. 493, nous y
voyons quelques circonstances différentes, mais une dé
cision semblable Les biens sont attribués aux frères consanguinsdu défunt,au préjudice d’héritiers collatéraux éloi
gnés qui prétendaient les exclure, et n’avaient aucun titre
pour cela.Toutefois cet arrêt, de simple rejet parla section
des requêtes, semble fondé sur une interprétation diffé
rente de la loi ; il dit que le droit du père, héritier de son
fils, n’a été que suspendu par les lois sur l’émigrationj
ce lu i
5
�C34)
mais, d’une part, la succession ouverte était celle du fils,
non émigré ; c’était le père qui l’était, et sous ce rap
port j on pouvait dire que le droit de l’émigré n’était que
suspendu jusqu’à son amnistie. O r , il avait été amnistié
vivant, et avait par conséquent repris ses droits successifs.
Ici les circonstances sont diamétralement opposées; la
succession ouverte était celle de l’émigré; il n’a point été
amnistié vivant, il est mort émigré. On doit donc dire
qu’à son égard le droit des héritiers républicoles n’a pas
été seulement suspendu, mais qu’il n’a pas existé, ou qu’iï
n ’a existé que partiellement, pour profiter des remises suc
cessives de certains biens non réservés par le sénatus-consulte de l’an 10.
>■
'
A u reste,- les arrêts postérieurs ont de nouveau con
sacré le principe admis par les deux premiers que nous
avons cités, que le droit de l’émigré avait été irrévocable
ment détruit et non pas suspendu.
Témoin l’arrêt Barbançon, du 16 février 1824. L ’arrêt
de Paris, contre lequel on s'était pourvu, avait déclaré
que « les biens invendus de l’émigré appartiennent à ceux
» qui se sont trouvés les plus proches parens, lors de la
» publication de la loi du 5 décembre 1814, et non aux» héritiers qu'il a laissés en mourant. » Rejet du pourvoi
par la section civile. lia section des requêtes avait admis,
sans doute, par suite du système de simple suspension,
iju’elle semblait avoir embrassé par l’arrêt de Béthuue.
On sent bien que par ces mots : Les plus proches pa
rens, la loi entend toujours cette proximité qui appelle à
succéder, surtout alors qu’il s’agit de leur rendre des
biens; car ce sont ceux-là, chacun suivant leur droit, à
�£®7
■ .
( 35 )
qui doit profiter la remise, puisqu’elle est faite par la 'voie
naturelle de justice et d’équité.
1
Témoin encore l’arret Dupille, du 4 juillet 1825. (Dalloz,
i825, p. 283.) L ’émigré était rentré, avait été rayé, et
était mort en '1812, après avoir disposé, au profit de ses
neveux Dupille, d’une foret confisquée, mais qui ne lui
avait pas été l’endue. Elle le fut par la loi du 5 décembre
18145 e*- ^es Dupille furent mis en possession par la dame
Biencourt, leur tante, qui aurait été héritière par moitié
avec eux. Rien de plus juste si le droit de l’émigré n’avait
été que suspendu ; car, en l’y rétablissant, en effaçant
Vincapacité antérieure, la loi faisait disparaître tout obs
tacle au droit de propriété toujours subsistant de l’émigré,
et sa disposition demeurait valable; mais la dame Biencourt
se ravisa. Trois ans après, elle réclama la moitié; elle lui
fut adjugée, par le motif qu’au moment de la promulga
tion de la loi, elle était pour moitié l’ayant cause de l’é
migré. On voit que les circonstances, ici, sont tout à fait
les mêmes, et qu’en outre il y avait, dans l’affaire Dupille,
des fins de non-recevoir tirées du fait même de la dame
Biencourt, de son consentement à la mise en possession
des Dupille, de sa reconnaissanc^expresse ou tacite de
leur droit exclusif, qui eût existé, en effet, si les mots
ayant cause, dans la loi de 1814, se fussent appliqués à
ceux qui l’étaient au jour du décès de l’émigré ; car ils n’eus
sent pu l'être que parcequel'émigré n’aurait pas cessé d’être
saisi, et qu’alors il aurait pu céder. La Cour rejeta les fins de non-recevoir, et jugea nettement le principe.
Sur le pourvoi, on s’appuyait de la loi de l’indemnité,
L e pourvoi avait été admis; mais la section civile le re5.
�n
( 36)
jeta eücore, ,en maintenant sa jurisprudence sur le véri
table sens de la loi de 18 14 j elle ajouta que la loi de 1825,
en admettant un principe diamétralement opposé relati
vement aux biens vendus,, n’avait rien innové aux dispo
sitions de.celle de *18iA 5 relative aux biens rendus.
Quoi de plus positif?
< Nous pourrions pousser plus loin les exemples de ju
risprudence. Qujil nous suffise de dire qu’elle est uniforme
sür cette question. L ’application à la cause s’en fait d’ellemême. N ’employons donc pas de temps à le démontrer;
bornons-nous à parcourir les principales objections du
sieur Bournet,,et la conviction s’opérera d’elle-même, si
déjà elle n’est complète.,ij(
On dit que la jloi de 181 4 faisait une justice et non une
libéralité. '
A cela, deuxjréponses :
i°. Les arrêts ont répondu par une décision contraire;
■2°. La justice serait due aux ¡véritables héritiers, à ceux
que la loiappelle aumomentoù on veut l’exercer,lorsque
le propriétaire ne vit plus pour en profiter lu i-m ê m e .
On ajoute que,.le père était seul héritier, soit au m o
ment de la mort de.son fils, soit au moment de son am;
nistie... : ;
‘
•
'
* Nous répondons encore:;,
s
. i°. La. succession ,s’éfait ouverte par la mort- civile, et
alors, le pèvef.n’était point, héritier ; pourquoi irait-on
clioisif répqque(lde la mort naturelle, puisqu7alors il 11’y
avait pointj de f>ucqes,sion? N ’publions pas que lu loi de
i 8 z 5 } seule,y a fait cesser l’incapacité, résultante des lois
antérieure^;,que,le ^natuç-çonsuite de l’an 10 ne Tarait
�( 3y )
pas détruite pour les biens qu’elle exceptait de la restitua
tion, et qu’à l'égard de ceux-là, l’incapacité n’a cessé que
par la loi de 18 142°. Qu’importe donc l’amnistie? Elle aproduit ses effets
par la restitution des biens non réservés en l’an io : pour
c e u x -là , pas de difficulté. Le père était seul héritier, seul
ayant cause de son fils, lors de cette remise,par conséquent
il devait seul en profiter; mais dès que la voie civile des suc
cessions n’est pas le point de départ de la loi de 18 14 >
qu'elle n a point (Teffet rétroactif comme le disent encore
les arrêts, qu’elle ne se reporte à aucun principe, à
aucun droit, à aucun fait antérieur à sa promulgation;
d é f a u t de propriétaire, elle appelle ses ayans cause,
au moment où elle parle ; il est évident qu’il faut recher
cher quels sont ces héritiers ou ayans cause au jour de la
promulgation de la loi.
L e père, dit-on, était encore vivant à cette époque; il.
était le plus proche parent, le seul héritier, le seul ayant
cause de son fils.
O ui, sans doute, il serait seul héritier, si la loi se repor
tait à l ’é p o q u e du décès du fils; encore faudrait-il user
pour c e l a d’une loi exorbitante et seulement transitoire;
mais c ’est du droit commun qu’il s’agit, et le père n’est là
que comme plus proche parent de la ligne paternelle, hé
ritier pour moitié, par conséquent; mais les deux tantes
étaient vivantes aussi, et elles étaient héritières’pour l’au
tre moitié, comme plus proches parentes de la ligne ma
ternelle. Pas de doute ce semble sur ce point.
Si le père eût été décédé en
que serait-il arrivé?
On n’aurait pas dit qu’il était plus proçhç parent; car, en
q u
’à
> >2
�ce cas, il eût fallu appeler son propre héritier, puisque
son droit personnel fût remonté au 6 floréal an 8 , jour
qu’on qualifie comme celui de l’ouverture de la succes
sion naturelle; ou au moins au jour de l’amnistie , qu’on
considère comme celui où la succession a été ouverte
légalement. Si cela était impossible, comme l’ont décidé
tous les arrêts, s’il eût fallu, dans ce cas, appeler les plus
proches parens des deux lignes comme les ayans cause
reconnus par la loi, il est évident que la survie du père,
en 1814, ne lui donne d’autres droits que ceux que sa
proximité lui attribuait au moment de la promulgation
de la loi, c’est-à dire, la succession exclusive dans la ligne
paternelle seulement.
L e sieur Bournet croit faire une objection fort sérieuse,
en disant que pour exécuter la loi de 1814, il faut re
chercher si, au moment où la loi a paru, l’émigré avait
ou non un héritier.
S’il en avait u n , c’est à lui que les biens doivent être
•endus.
S’il n’en avait pas, c’est à ses parens les p lu s p r o c h e s ,
ï ses successibles, à ceux que les lois existantes appelle*
aient à être ses héritiers.
Nous aurions besoin de quelque explication sur cet argunent pour le bien saisir. L e sieur Bournet voudrait-il dire
jue pour que les parens les plus proches, au 5 décembre
1814» profitent de la loi, il faut que l’émigré n’ait pas
laissé de parens au douzième degré au jour de son décès?
Mais alors, comment aurait-il, au 5 décembre i8i/|, des
yarens proches que le sicUr Bournet lui-même appelle
les successibles? Il est difficile de concevoir de quelle
ouche ils seraient sortis.
�tu
( 39 )
D ’ailleurs, dans quels termes de la loi, dans quel exem
ple de jurisprudence, aurait-on trouvé le principe de cet te
distinction fort peu intelligible pour nous? L e sieur Lépinay deSamt L u c, lesieurDevenois et autres, n’avaientils pas laissé des héritiers naturels à leur décès ? N ’a-t-on
pas, précisément à cause de cela, agité la question entre
les ayans cause de l’une et l’autre époque? N ’est-ce pas
pour cela qu’il a fallu examiner si'l’émigré était demeuré
saisi ou dépouillé, capable ou frappé d’incapacité dans les
temps intermédiaires? si lui ou son héritier avait p u trans
mettre, céder, donner, avant la-loi de 1814, lesbiens ren
dus par elle seule ? N ’a-t-on pas enfin nettement décidé
qu’ils étaient rendus à ceux qui se sont trouvés les plus
proches parens de l’émigré, lors de la publication de la loi
du 5 décembre 1814, et non aux héritiers qu’ il a laissés
en mourant? (Arrêt Barbançon.)
A u reste, le sieur Bournet est si embarrassé lui-même
pour fixer le principe de cette hérédité de Lespinasse
père, qu’il hésite entre le 16frimaire an 8, date du décès
du f d s , et le 18 ventôse an 1 1 , date de son amnistie. Si
on s’appuie sur le droit commun, ce serait peut-être bien
plutôt l’époque de la mort civile qu’il faudrait consulter;
et si, comme il le faut sans doute, on s’appuie sur le droit
exceptionnel, on reconnaîtra, avec l’arrêt Saint-Luc, que
la remise n’est pas faite par la voie ordinaire des succes
sions , qu’elle est le résultat d’une volonté actuelle de la
loi, et qu’il faut la prendre telle qu’elle est; que la restitu
tion faite par le sénatus-consulte de l’an 10 doit profiter i\
ceux qu’il appelait; la remise de la loi de 1814 à ceux
qu’elle indique ; que les biens qu'elle rend n’ ont pas fa it
�'G 4° )
! partie de la succession de Lespinasse fils, puisqu’alors
ils étaient irrévocablement réunis au domaine de VÉtat ;
. q u’ainsi il n y a pas deux successions du même individu,
et qu’ils ne peuvent appartenir qu’à jceu x; qui se sont
trouvés ses ayans.cause, non-com m e ayant appréhendé
sa succession en l’an 8 ou en l’an 1 1 , mais com m e rétant
les plus proches pour recevoir des biens qui ne lui appar
ten aien t, ni à l’ une ni à l’autre ép o q u e, et qu'on rem et
aujourd'hui à ses .héritiei'SiOU ayans cause, à ceux qui je
représentent.
•
'
On invoque l’art. I er de la loi qui maintient les droits
acquis à des tiers, et on dit que la qualité d’héritier du
sieur Lespinasse était un droit acquis.
Mais, d’une p a rt, puisque la transmission de la loi ne
s’opérait pas p a rla voie ordinaire dûs 'successions, on ne
concevrait pas trop cet argument appliqué à une qualité
d’héritier.
D e l’autre, on voit, à ne pas en doiiter, que cet article
appartenait plus à u n but p o l i t i q u e , qu'aux droits de successibilité attribués par les lois civiles : c’est ce que prouve
le préambule de la loi et la loi elle-même. L e Monarque
a fait cesser la proscription d’une classe recommandable
de citoyens; il veut leur rendre les biens non vendus;
mais il veut concilier cet acte de justice avec les droits
acquis par des tiers en vertu des lois existantes, >avec
l'engagement contracté de maintenir les ventes de biens
nationaux, avec la situation des finances , etc......... E vi
demment cela n’a rien de commun avec la qualité de ceux
à qui la loi va faire la remisé , et que d’ailleurs elle désigne
clairement.
* ! -..p
�(4 0
Comment, au surplus, le sieur Bournet n’a-t-il pas
aperçu qu’il ne pouvait pas être à la fois Yhéritier ou
Yayant cause, et le tiers qui aurait des droits acquis?
C ’est aux héritiers ou ayans cause qu’oryen d ; mais la re
mise n’aura pas lieu à leur profit, quand il se rencontrera
des tiers qui seront préférables à l’héritier, et ils feront obs
tacle à la remise, toutes les fois qu’ils aui’ont des droits
acquis par les lois existantes. Les tiers sont donc ici une
exception posée contre l’héritier , et leurs droits acquis
une exception à la remise des biens.Qui ne voit cela? et
comment peut-on confondre le tiers et 1h é u t ic i, ,pour
n’en faire qu’une seule et même personne?
Nous ne suivrons pas le sieur Bournet dans ses discus
sions ; cela serait fort inutile. Après avoir posé le principe,
et fait connaître parfaitement le sens clair et formel que
présente la loi de 18 14» et qu’a consacré une jurispru
dence positive etnon interrompue , il nous suffit de dire
que si le sieur Lespinasse avait tiré de sa qualité d’héritier'
de son'fils, en l’an 8 ou en l’an 1 1, un droit à des biens
qui n’ont été rendus qu’en 1814 > ce droit successif aurait
passé dans les mains du sieur Grenier, puis de la dame
D e s r o y s , qui étaient des tiers, et qui avaient acquis de
bonne foi; que si, comme on l’a jugé, la cession ne com
prenait pas les terres de Saint-Martin et d’Auzat, parce
que Lespinasse fils en avait été irrévocablement dépouillé,
et qu’elles n’ont été i’endues qu'en 18 14 »ehes ne peuvent
a p p a r t e n i r qu’à ceux qui étaient ses héritiers ou ayanscause au 5 décembre 18 14* H faut nécessairement que ce
point de départ admis par toutes les parties, excepté la
dame Desroys qui l’a contesté, produise toutes ses conséG
�(
4
2
-
quences, au profit du Marguerite et Marie de Sévérac,
que représentent les Bonnafoux. .
Aussi, pour soutenir le système contraire, le sieur
Bournet se refggie-t-il dans ce mot de l’arrêt de Béthune,
que le droit de l’émigré n’avait été que suspendu. Nous
avons fait voir ci-dessus l’espèce de cet arrêt qui n’est
point applicable, et nous avons montré en même temps
que ce système de suspension, indiqué par la section des
requêtes, par arrêt de simple rejet, avait été constam
ment repoussé par la section civile, avant et après l’arrêt
de 1821.
C ’est cependant sur ce point que roule toute la défense
du sieur Bournet; c’est avec ce moyen qu’il croit pouvoir
affirmer que les droits de Lespinasse père sont consacrés
par la jurisprudence des arrêts. Nous ne croyons pas
avoir besoin de rien ajouter pour prouver le contraire.
Les intimés auraient-ils à redouter l’arrêt de la Cour
rendu sur la demande du sieu r Bournet contre la dame*
Desroys? serait-il nécessaire d’y former tierce opposition,
à peine de voir repousser leur demande en partage? enfin
le défenseur des Bounafoux sera-t-il convaincu qu’il ne
doit pas hasarder une plaidoirie qui ne serait quun bou
leversement des principes, comme n’a pas craint de le dire
dans un écrit particulier le sieur Bournet, ou celui qui est
avec lui ou sans lui la véritable partie de la cause? Le défen
seur avoue qu’il n’est pas encore arrivé à cette perfection.
Il ne dira pris que c’est de la part du sieur Bournet une
assertion imprudente, une œuvre éphémère des désirs.... ou
des illusions de Vamour-propre) mais il se croirait fort imprii'
�tf/f
( 43 )
.
>
dentlui-même, s’il se permettait de flétrir a vecce tou de mé
pris., la conviction de ses cliens, et la décision des premiers
juges, surtout dans les termes où se présente la question.
Il croit pouvoir et devoir la soutenir avec bonne fo i, et en
tout esprit de justice et d’équité.
Quant à la prétendue nécessité de la tierce opposition ,
nousavouonsquenousnesoinmespasnon plus convaincus.
L ’arrêt de la Cour décide, non pas que les droits de Lespinasse fils avaient été suspendus, mais que les biens étaient
rendus à ses ayans cause par la loi de j8 i4 , et ne pou
vaient pas être compris dans des cessions de droits antérieuresà 1814, quelquegénéralesqu’ellespussent être, parce
que ces biens n’appartenaient alors ni de droit ni de fait,
à Lespinasse père, comme héritier de sou fils. Il n’avait
pas à décider cette question entre divers héritiers ou ayans
cause de Lespinasse fils, et à faire choix entr’eux, mais
entre Lespinasse père, qui se présentait comme seul
héritier ou ayant cause, et ses propres cédataires qui n’a
vaient d’autre titre que leur cession, d’autre droit que ce
lui qu’elle pouvait produire. Ainsi, en attribuant les biens
aux ayaris cause, comme rendus et censés leur appartenir
seulement au 5 décembre 18x4 , elle a consacré le droit do
tous les ayans cause, qui peuvent successivement se pré
senter pour y prendre part, s’ils établissent leurs droits. II
en est de ce cas comme de celui où un héritier se présentant
comme unique, obtient contre un débiteur de la succes
sion, un jugement qui le condamne à payer une somme
ou à délivrer un immeuble au demandeur comme seul et
uMqiïe'ïïcnlier du déjunt. Est-ce que plus tard d’autres
héritiers ne peuvent pas se présenter? est-ce qu’ilsauraient
besoin, pour être admis, de former tierceopposition au ju-
�, .
( 44 )
gement? Il est bien évident que non. Où donc est la dif
férence ? A u reste, rien ne sera plus facile que de former,
en tant que de besoin, une tierce opposition qui lèvera
cette prétendue difficulté de procédure.
Mais, dit-on, en termes tranchans, nous n’avons encore
aujourd’hui d’autre adversaire que les sieur et dame Desroys; car ils ont traité avec les Bonnafoux dont un modique
salaire a acheté la complaisance.
Nous n’avons rien à répondre à cette assertion, que
nous ne qualifierons pas non plus im p ru d en te. Les B on
nafoux sont seuls en qualité; nous ne connaissons aucun
acte qui les dépouille de leur droit; et quand on suppose
rait qu’ils l’ont cédé, la question serait toujours de savoir
s’il existait réellement au jour de la cession. C ’est donc
toujours leur droit et leur qualité qu’il faut examiner; car
c'est ce droit et cette qualité dont les résultats sont soumis
à la justice. Nous ne nous ferons point ici les apologistes
des sieur et dame Desroys, de la situation fâcheuse où les
a mis une fausse confiance, tout est terminé la dessus. Ils
ont été condamnés, ils ont dû l’être; mais c’est de ce la
même que découle la nécessité de reconnaître que Lespinasse père n’y avait pas droit comme unique héritier
de son fils, et nous ne craindrons pas de dire qu’il faut
examiner telle qu’elle est la question élevée par les
Bonnafoux, et que rien ne peut ni la dénaturer, ni empê
cher l’action de la justice en ce qui les concerne.
M e D E V I S S A C , avocat.
M e Clle C H I R O L , avoué
Clermont imprimerie de THIBAULT LANDRIOT
�L e s A N C IE N S A V O C A T S S O U S S IG N É S , vu le Mémoire
produit, dans l’intérêt du sieur B o u rn e t, devant la Cour royale
de Riom ; le précis en réponse pour les sieurs Bonafoux ; Je
jugement rendu par le tribunal d ’Issoire , le 25 août 1829;
ensemble la consultation , par eux déjà délibérée , le 10 mars
précédent;
Ne peuvent que persister dans l’opinion q u ’ils ont émise
dans cette précédente consultation, et sont d’avis qu’aucun
des motifs allégués par le sieur Bxjurnet, à l’appui de son a p p e l,
ne saurait prévaloir sur ceux qui ont déterminé le jugement
attaqué.
,, /
La question se réduit à un point bien simple ; il s’agit de sa
voir à qui a profité la restitution opérée par la loi du 5 décembre 1814. Or, il est évident que cette restitution a été faite
à ceux qui étaient héritiers au moment où cette loi a été pro
mulguée. La jurisprudence de la Cour de cassation est formelle
à cet égard : nous ne rappellerons pas les nombreux arrêts que
nous avions cités dans notre première consultation , et dont le
Mémoire dcM *. De Vissac a présenté une analyse aussi exacte
que décisive.
Si la loi du 5 décembre a restitué à ceux qui étaient héritiers
au moment de la promulgation, il est évident qu'il importe peu
q u e , d ’après la loi du 17 nivôse, M. de Lespinassc fut le seul
héritier de son fils, soit au moment où ce dernier est mort,
soit lorsqu’il a été amnistié. Les biens restitués par la loi du
du 5 décembre n’étaient, en cflet, ni à l’une, ni à l’autre de
ces deux époques dans la succession de Claude Gilbert : ils n ’y
sont entrés que par la loi du 5 décembre , et alors existait un
ordre nouveau de succession , d’après lequel moitié seule
ment appartient à M. de Lespinassc, comme représentant de
la ligne paternelle , et l’autre moitié aux daines Marie et
�M a rg u erite, com m e représentant la ligne maternelle. Évidem
m en t, c’est donc dans cette proportion, de moitié seulement,
que la restitution a du profiter à M. de L ’espinasse, ou à son
cessionnaire. C ’est là une conséquence de l’interprétation que
la jurisprudence a donné à la loi du 5 décem bre; o r , recon
naître à M. B o u r n e t, cessionnaire à M. de Lespinasse, avant
1814, le droit à la totalité des biens que cette loi a restitués,
ce serait supposer que ces biens existaient dans la succession,
de Claude G ilb e r t, avant la l o i du 5 décembre ; ce serait opposer
un principe diamétralement contraire à cette lo i, qui, comme
tout le monde le s a it, n’a été q u ’une loi de grâce.
Nous ne croyons pas devoir insister plus long-temps sur une
démonstration que le M émoire de M. De Vissac a rendu évi
dente, et nous ajoutons que rien de contraire à ces principes,
ne résultant des prétendus arrêts rendus , soit avec M. G re
nier , soit avec M. D esrois, ce n’était pas le cas, pour les consultans, de se rendre tiers-opposans à ces arrêts.
Délibéré à Paris , ce 23 avril 1831.
D E L A C R O IX -FR A IN V IL L E .
SC R IB E ,
,
Avocat à la Cour de cassation.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bonnafoux, Jean. 1831]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Chirol
Delacroix-Frainville
Subject
The topic of the resource
émigrés
successions collatérales
mort civile
séquestre
amnistie
sénatorerie de Riom
rétroactivité de la loi
doctrine
préfet
arbre généalogique
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse , pour Jean Bonnafoux, Jean Vialfont et autres, habitant le département du Cantal, intimés ; contre Le sieur Bournet, propriétaire, habitant la ville d'Issoire, appelant ; En présence De dame Henriette de Chauvigny De Blot, veuve Desroys, et de sieur Annet Desroys.
Table Godemel : émigré : 5. ceux qui, héritiers d’un émigré à l’époque de son décès, n’ont recueilli qu’une partie des biens restitués à sa succession en vertu du sénatus consulte 6 du floréal an X, l’autre partie ayant été affectée à un service public, doivent recueillir cette dernière partie des biens, remise en vertu de la loi du 5 xbre 1814 et ce, à l’exclusion de ceux qui, devenus héritiers plus tard, se sont trouvés habiles à succéder avec eux lors de la promulgation de cette loi. – ici ne s’applique pas la règle consacrée par la jurisprudence, que les héritiers de l’époque de la remise doivent être préférés aux héritiers de l’époque du décès.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Thibaud-Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1792-1833
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2621
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2620
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53536/BCU_Factums_G2621.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Molède (15126)
Saint-Flour (15187)
Auriac-l'Eglise (150013)
La Chapelle-Laurent (15042)
Moulins (03190)
Paris (75056)
Auzat-la-Combelle (63022)
Saint-Martin-des-Plains (63375)
Mozac (63245)
Vertessère (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
amnistie
arbre généalogique
doctrine
émigrés
mort civile
préfet
rétroactivité de la loi
sénatorerie de Riom
séquestre
successions collatérales
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53797/BCU_Factums_M0413.pdf
28dce18cff8747d778589fa16f98bb5a
PDF Text
Text
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et a p p e l a n t ;
CONTRE
Dame F r a n ç o i s e - A g l a é - G a b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G'OU R D O N i, son mari ; dame
A n g é l iq u e - A r m a n d e - C a m il l e D E L A
L U Z E R N E , et sieur A n a t h o c l e - M a x i ^ M IL IE N H U R A U L T D E nVI B R A Y E , son
mb éa nr i é, ,fhabitans
de la'ville de -Paris y héritiers
fic ia ir e s d e m a d a m e
M o n t m o r in la q u e lle
é toit héritiaire bénéficiaire du sieur EmmanuelFrédér ic -De Tane,s on f r èr e appel ans • ‘
C
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SieurHenriDuvergierhabitantàParis SimonTerouldeabitantàDauville
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P a r is -h a b it a n t à S en s
'An t o î n e - L o u i s
A
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D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; et J e AN
C H A R D O N y chapelier y habitant à P a risr
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,
aussi appelanSy
CONTRE
Sieur
D E TANE - SAN TEN AS y
habitant à P a ris , intimé ;
A m édée
\
1
E T
C
O
N
T
R
E
Sieur L o u is N A T T H E Y , habitant de, Nyort en
Suisse y austsi intimé ,
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la plus gran d e simplicité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’uné terré, chargé d’en payer
lie prix à un notaire choisi par une direction de créan
ciers, lui en paye près de moitié;, ensuite il revend la
terre, et laisse-dans les‘¡mains du second acquéreur une
somme égale à ce qu'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second aciqUéreur/poursuivi par les opposans, produit.des quittances de consignation, assigne
les créanciers en mainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces, créanciers attaquent le premier acqué
reur, qui met en causç son. ga$an& : celui -ci. emploie
UANS
�C3 )
pôur libération le jugement qui a validé sa consignation.
Alors l’acquéreur observe aux créanciers qui le pour
suivent, qjieileurs oppositions à des lettres de ratification
ont lié leurs intérêts à ceux dit second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés, ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
Voilà à quoi âe'réduit la question principale, et il
est évident que jusqu’ici elle në présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse s 'mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du v e n d e u r
originaire , qui comprennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers-elle seroit pour euxmêmes, font cause commune avec eux, pour que tout
retombe sur le premier acquéreur.
Alors tout s’exagère et se complique. L ’émigration de
l’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout;: d’autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à mille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas , et le
.tribunal même où il a trouvé justice. Enfin, après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la multitude, mais plus
étrangers encore, on~vient crier à l’injustice et à l’indé
licatesse, en disant froidement : « Que'm’importe si vous
« devez recouvrer ou non 5ooooo francs: que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas-la vôtre ! Que
A 2
�(4.)
«. m’importe en.côjrè ,si vo u â tes ruiné par ce payement
« et si votre famille est respectable*..Je veux.de>Pargent,
«• et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose;
« moins en mesMve.;de me-résister’ ; d?aille.iirs voüreiémi« gration.se ¡prête à tous mes sophismes :*'jl y^ajjt.ant de;
« lois sur cette matière, qu’il est impossible dfej ne-'pasr
« y voir que tout doit retomber sur vous..pinailleurs.,;
« quand je me suis donné la licence d’imprimer qu’une
« décision contraire à}mon intérêt étoit unjjjugcmfint de
« fa v e u r , j’ai-calculé; Peffet 'dé ,cettje»in jurp sue, liesprit,
« des magistrats auxquels j’eri idemaïnde ' la réforme.::Si
« je ne puis le s ’forcer, à- croire gqu’il feu ti sacrifier uni
« émigré par préférence, mon .adroite censure sera*tou« jours d’un poids quelcqnque' dans, la i balance;;Vielle
a achèvera probablement de me conquérir le suffrage de^
« ceux, dont l’opinion auroit; été incertaine. ! »[ , *< < .
Ainsi eût parlé Machiavel?;, ainsi panlerit vies '.syndicsdes créanciers de T an e, qui veulent, pe?;\fas et nefas ,
intéresser en se présentant comme des victimes..
Qu’ils .tâchent de-prouver à la Gour que malgré leurs
oppositions à/des lettresy; malgré un jugement qui pro
nonce contre eux la validité du payement que le-sieur.
Natthey a été chargé'de-leur faire, il leur reste encore une,
action : voilà leur cause.
t ;
Mais que dans,leur colère et dans leurs calculs- ils fassent
semblant de supposer, de l’adresse, des insinuations et-de
la faveur; quo tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent ¿\ insinuer que cette émigration deviendra aux
sieur et dame de la'Roche-Lambert, un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s'être,fait de ses propresJautes un moyen
d’acquérir voilà ce qui n’est ni la cause ni la vérité 3
mais une insigne et brutale calomnie.
•Car personne ne sait mieux que les adversaires qu'il
n’y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la Roche-Lambert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en
écus sur une terre qu’ils n’ont pas : et on ose encore leur
demander plus de 5ooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
*
... ■i
■:
:
F
A
I
T
S
.
*
- Apres la mort dû'sieur Emmanuël-Frédéric de Tane*
sa succession1 fut acceptée sou& bénéfice d’inventaire par
Françoise- Gabriëlle) de Tane, épouse de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères.
Madame-de Montmorin ne-pou voit vendre en cette
qualité les .biens, de la succession sans y appeler les
créanciers ; elle fit apposer’des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyre, Chadieu, la GhauxMongros et le* mobilier de la succession. Il y a eu pour
7 7 7 4 0 o francs de ventes avant 1790:
La terre de Chadieu fut vendue' par madame de
Montmorin aux sieur et dame de la Roche-Lambert, par
acte du 17 juin 1788, moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a is évalués à 5 deniers par livre, produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000' fr. seroient:
payés solidairement par les sieur et dame de la RocheLambert entre ¡es mains de Trutaty notaire-séquestre ?
•
�( 6 )
ou aux créanciers qui auront été délégués• savoir, un
quart au i 5 septembre , et le surplus dans le courant
des deux années , en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et que, s’il se trouve des oppositions du chef
de madame de Montmorin, elle les fera lever dans les
six semaines; mais hors, ce cas , elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de Tane de Santenas, Teroulde, commissaire à terrier;
Chardon, chapelier; Louis Laisné, sellier, et Toutain,
tailleur d’habits, tous syndics des créan ciers de Tane,
lesquels , après avoir pris lecture de la vente , la con
firment et ratifient aux conditions y exprimées. Ils font
élection de domicile chez M. Pernot-Duplessis/procu
reur au parlement.
Le jour même de la vente, M. de la Roche-Lambert
paya la somme particulière de 7812 lîv. 10 s., à Tvutaty
notaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
• En 1791 , les sieur et dame de'la Roclie-Lambert,
voyageant en Allemagne, envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur beau-frère, deux procurations; celle du
sieur de la Roche-Lambert porte pouvoir $ emprunter
les sommes nécessaires à ses affaires , gérer , liquider ,
vendre : elle est passée devant Heidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 179 1.
La procuration de la dame de la Roche-Lambert porte
pouvoir d'emprunter 60000 fr , pour placer sur Chadieu ,
�(7)
régler compte avec M\ T ru tat , notaire ; recevoir ,
donner quittance , faire tous emprunts qu'il jugera bon
être 9pour Parrangement des affaires de son mari. Cette
seconde procuration est passée devant Lutner, notaire à
Worms , le 25 octobre 1791 (1).
En vertu de ces actes,.le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
Le 27 novembre 1791 , par acte reçu Cabal, notaire
à Paris, le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la Roche - Lam bert, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n’avoit pas de pouvoir de la dame delà Roche-Lambert ),
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
Pa ris , moyennant ôooooo fr ., dont il reçut 126000 fr.
en assignats, et quant aux 376000 fr. , le sieur Sauzay
promit les payer dans un an aux sieur' et dame de la
Roche-Lambert you , si bon lui semblait, aux créanciers
desdits sieur et dame de la R och e-Lam bert , et spé
cialement aux créanciers privilégiés sur ladite terre.
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la Roche-Lambert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux imputations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dame de la Roche-Lambert quittaient la Fiance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur première pensée a été de s’occuper
de leurs créanciers, et que tel a été' l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�( 8 .)
s’oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
Enfin, pour l’exécution de ladite clause, le sieur de SaintPoney fait une élection de domicile à Paris.
'
Le 4 janvier 179 2, il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellement; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics. .
/ •' ' '
1
L e 22 avril 1792., le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’une, du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
Tane.
Jn . -j
jrj *i> r .*ii oooooct ü; .«irr. /< m r ^-n,ci
Dans la même année 1793 > ^ sieur clejla Roclie-Lam
ber t fut porté sur la 'liste des émigrés, v/rv f\ ? A
La dame de la Roche-Lambfert n’a jamais été -portée
sur aucune liste. \ , ’ 1,
Sous prétexte d’une loijdu 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens desrabsens du territoire:,jsans ]e$
désigner encore comme émigrés,--le sieuib Séjuzayi^fit
déclarer par le curé d’Autezat, à la municipalité*jdu lieu,,1
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la Roche-Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il avoit pris des lettres dti^at ificéition^èt que
les créanciers opposâns* aux: rèttres1
prix'
et au delà : d’où il conclut qû’ii a iii(-eret^e 'conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre pst hypothéquée. « E n sorte que , dit.,1e sieur
« Sauzuy, s'il fa it fa ir e ladite déclaration , c'est moins.
« à
_
�a cause des sommes dont il peut paroître débiteur ,.et
dont la république nèipourra jamais p ro f ter ^ puisqii elles doivent être absorbées par lesdits créanciers
hypothécaires opposans aux lettres de ratification ,
que pour donner des preuves de son civisme y et empêcher qu!on ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence» »jJ . j *
i ->
Par acte du 25 juillet 1793 , le sîeur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux Martres, les mou
lins et fours banaux des. Martres, dépendans de la terre
de Ghadieu yumoyennanti la somme de 6 1100 francs ,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
" Le 7' nivôse an 2, par acte reçu Cabal, notaire à Paris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Cliadieu
^au ¡sieur .W allier, Suisse, pour lui ou la ‘personne que
W allier se réserva de déclarer dans les six mois, moyen
nant 5.30009 frrj dont^Wallie^paya comptant 40000 f r .,
s’obligea de payer 136000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des 355ooo fr. restans, W allier
-fut délégué à les_payer,-: soit aux 'créanciers de T ajie ,
précédent propriétaire \ qui se sont trouvés OPPOSANS
«
«
«
'«
«
«
«
A U X L E T T R E S DE R A T I F I C A T I O N PRISES PAR S A U Z A Y ,
soit afin d’en fa ir e le dépôt et la consignation partout
où besoin sera , aussitôt après, le sceau sans opposition
sur le sieur Sauzay des lettres de ratification à prendre
sur la présente .vente. ■ • !
,
‘LesieurNattheyditavoir été subrogé par le sieur W allier
à ladite vente, par acte sous seing privé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-Dôine
fit décerner , le- 24 ventôse an 2 , une contrainte contre
B
�( 10. )
le sieur Sauzay , pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche-Lambert-en vertu du contrat de
vente de 17 9 1, sous prétexte que le vendeur étoit émigré.
Ensuite, et à la. date du 26 floréal an 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
'
■
cc Je soussigné, receveur de l'enregistrement e t des domaines
ce au bureau de Saint-Am ant-Tallende, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G. Etienne-Jean-Louis Natthey, de N yon,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
ce suivant la déclaration de command en sa faveur-par le
« C. W allie r, du 7 nivôse d e rn ie r), la somme de trois cent
cc cinquante-cinq mille livres , pour servir tant au nom des
cc cit. Natthey et Sauzay , qu’en celui du C. Jean-Baptiste
cc W a llie r, à la libération dp Chadieu.
c< D e quoi m’a été demandée la présente déclaration
cc
cc
, à l ’effet
d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale' sur ledit
1
Chadieu.
U Saint-Amant, le 26 ilotéal àn 2. Signé Mavgue. h >
.
* -
1
w.
^
.
..
’ . :,
. •
.11 pavoît qu’ un arrêté du département , en l’an 3 ,
ànnulla la vente faite au sieur Sauzay , et mit ta terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et ‘Wallier, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay, et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que lo-sieur W allier avoit voulu se
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�Ci1 )
il fit des! offres à Wallier:, et même u n e - consignation, en
mandats. Mais les* loisjsurlla réduction ,.du papier-môunoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de'la„Seine sus
pendit le procès, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de Tane produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frimaire an
4 ? reçu du C . Jean-M arie W allier ^
cc des deniers empruntés de Ja q u e ro t, par acte d u ............ la
«c somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix du domaine
cc acquis par Sa u z a y, des sieur et dame de la Roche-Lam bert,
« ém igrés, suivant le contrat du 27 novembre 17 9 1 ; ladite
«c somme de 355 ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
« nationale sur le receveur du district de Clermont, n°. 42,4, eu
ce date du i 5 brumaire dernier; dont quittance. Signé Maugue. »
L e s créan ciers o n t retiré du m êm e registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an 4 , reçu de
cc de 3 2 8 5 1 francs
Jean-Louis Natthey la somme
25 centimes pour les intérêts restans du prix
ce‘principal dii domaine vde Chadieu, acquis de la Roche-Lam-
i< b ért, ’sa femme’ et Saint-P;oncÿ, émigrés; par le sieur Antoine
« Sa’uzay,"lequel en a fait vente au C. W allie r, par acte reçu
« C ab al, notaire à Paris, le 7 nivôse an 2 , lequel W allier a
ce passé déclaration au profit dudij: Natthey, par acte sous seing
cc privé , du 7 nivôse an 2 , enregistré il Paris le 17 messidor
cc an 3 , par Pinault ; ledit payement 'fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lias, directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrement à Paris , le
cc 12 frimaire présent mois; et ledit payement effectué en une
cc rescription de -la trésorerie nationale sur les domaines d’émi-
« 'g r é s , n ° / 4 g 3 , çt souô la date dudit jour 12 du présent mois.
« Certifié conform e, le 8 vendémiaire an 1 1 . Signé Maugue. »
’ '
B 2
�( 12 )
L e i ev. nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de Tane, aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite, qualité de
créanciers opposans aux lettres de ratification prisesr
par Sauzny; de se trouver le i 5 pluviôse suivant chez
le receveur de Saint-Amant, pour y: recevoir leprioo, de>
Ch adieu. Il est constaté par cet exploit (resté au. pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que l^atthey y procède
comme obligé d’acquitter 37 5ooo frauc^e^ cjap.ital^et^
32852 fr . en intérêts , tant pour se libérer lui^niéme y
que pour libérer'le sieur Sàuzay , ainsi que les,sieur'et
daine de la Roche-Lam bert , premiers acquéreurs et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers 11e se présentèrent pas ; et le sieur
Natthey fit dresser, le i 5 pluviôse an 4 , par le receveur
de Saint-Amant, la pièce suivante produite par lui.
« Je soussigné, receveur de l’enregistrement et des domaines
« au bureau de Saint Amant-Tallende, déclare, d’après le débat
<c des co m p tes qui a eu. lieu ce jo u rd ’hui entre m oi et le .ç it»
ce Parades , des Martres , fondé de pouvoir du C. Etienne-Jean cc Louis Natthey , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Cha?
six cent dix-neu f mille six cent quatre
cc livres quinze sous en l’acquit dudit domaine., dont quittance
cc dieu, la somme de
cc et décharge, sauf audit Parades, qui en Tait expresse réserve
cc pour ledit C. Natthey , de plus ample examen et apuration
r< desdits com ptes , et de se pourvoir d ev an t qui il appartiendra ,
« pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
« sus des sommes dues,par ledit, C. Natthey pour la libération
« dudit domaine de Chadieu.
« Saint-Amant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
�En marge est écrit :
( i3 )
« Sur l’invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. niyôse der« nier, n’a comparu cejourd’hui en mon bureau.
« Le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers- de Tane n’ont formé aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la- Roche-Lambert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulter, du .3 floréal an 10 , et
^c’est le moment d’être attentif sur leur première dé
marche y pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 17 9 1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
Sauzay , sur sa vente du 27 novembre 1791Par exploit du 1 1 brumaire an 1 1 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauzay au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la* vente de 1788; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à(payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente à lui consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit payement. (Cette pièce est produite par le
sieur Natthey.)
Le 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
à Natthey..
Alors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal'de Clermontj.pour voir dire qu’il est valablement libéré au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés h lui
donner mainlevée de leurs oppositions.
�( ¿
4 )
Le 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clermont rend
le jugement suivant :
« Le tribunal déclare le demandeur (Natthey) bien et
« valablement libéré du prix de la terre de Chadieu ,*
« en conséquence, fait mainlevée de l’opposition faite
« par les défendeurs (les syndics) au bureau des hypo« thèques de Clermont, le 2 décembre ; ordonne qu’elle
« sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
« présent jugement; condamne les créanciers aux dom« mages-intérêts de Natthey, à donner par déclaration. »
En vertu de ce jugement, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu . Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
Tout d’un coup, en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire, Ambert et Cler
mont, sur tous les biens appartenans ou ayant appar
tenu aux sieur et dame de la Roche-Lambert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur Natthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de propos, jusqu’à présent, de dire
que pour verser 170644 francs en 17 9 1 ? ^ 3voit été
emprunté pour les sieur et dame de la Roche-Lambert,
savoir, 44000 francs à la dame de Bourneville, mère de
madame de la Roche-Lambert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de Tane-Santenas, représenté par Amédée.
�(
)
On a vu que le sieur de St.-Poncy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T an e, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
Et comme les syndics n ’ a voient inscrit que pour leur
intérêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre »les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la Roche-Lambert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
. .,
Le sieur Natthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
.assigner les sieur et dame de la Roche-Lambert en main
levée'd e ladite inscription.
Le lendemain, Amédée de Tane (très-d’accord, comme
. on le voit déjà, avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la Roche-Lambert de payer les arré
rages de l’emprunt ci-dessus de 30000 francs.
Le 23 du même mois, il a été présenté requête au
tribunal de Clermont, sous le nom des sieur et dame de
la Roche-Lambert; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de Tane, et à ce que le sieur Natthey, se disant
libéré,' fût tenu de faire valoir envers eux ladite libé#
ration, sinon de garantir les sieur et dame de la RocheLambert. Ils'ont conclu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 91 et suivantes, et au désistement de
Chadieu. Euiin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à:1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
Amédée de Tane à la mainlevée du. coin mandement, de
�( i6 )
payer par lui fait, attendu que Natthey, chargé de payer
tout le monde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a eu lieu, les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce jugement, le tribunal de Clermont distingue
les intérêts des créanciers de Tane, d’avec ceux d’Amédée
de Tane. A l’égard des premiers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
Roche-Lambert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur Amédée de T-ane, il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire Trutat,
comme obligation directe et indépendante de l'acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de' la Roche-Lambert de leur opposition au commande
ment de payer (1).
11 y a appel de ce jugement, tant par les héritiers et ,
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheLambert, que par les sieur et dame de la Rodhe-Lambert
contre Natthey et contre le sieur Amédée de Tane. On a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
"des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la Roche-Lam bert;
(1) Ce jugement est transcrit en son entier, avec les motifs,
à la fin du mémoire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( i7 )
d’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , qui, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lambert.
M O Y E N S .
Pour suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour etre
clair, autant que possible, dans une discussion denaturee
et obscurcie par de fausses applications de principes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
Tane d’avec ceux des héritiers de Montmorin, quoiqu’ils
^ient réuni leurs intérêts, sérieusement ou noni On exa
minera, en premier lieu, s’il est vrai que les créanciers de
Tane aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la Roche-Lambert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la Roche-Lambert.
2°. Sur l’appel des héritiers de Montmorin il s’agira
de savoir s i, au cas où le versement du prix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation nationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de Tane, la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
Montmorin, comme condamnée à m o rt, ou pour le
sieur de la Roche-Lambert, comme émigré.
30. Quant à l’appel du sieur de la Roche-Lam bert
contre le sieur Amédée de Tane ', il y aura lieu d’examiner
si le sieur Natthey, chargé de faire face à tout, a également
libéré le sieur de la Roche-Lambert de cette dette.
C
�( ï8)
Enfin, l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir si, dans le cas où le sieur de la RocheLambert seroit condamné à payer des sommes quelconquesaux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A ppel
d es
c r é a n c i e r s
de
T a ne*
La prétendue émigration du sieur de la Roche-Lambert
est le premier texte de la proposition des créanciers de
Tane ; ils l’appuyent sur un arrêté^ du conseil d’état, du
3 floréal an i l , portant que tout créancier à'émigré
non liquidé, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre rémigré : ils en concluent que
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
Rien de plus incontestable que ce point de droit; mais
aussi rien de moins applicable à la couse.
L ’arrêté de l’an 1 1 seroit applicable, si Chadieu ayant
été vendu nationalement, le sieur de la Roche-Lambert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au grand
livre, pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement.
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence;
i°. La terre de Chadieu, qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lambert a
été débiteur, comme détenteur y n’a point été vendue m
0
�C 19 )
la nation né s’en est point emparée : un séquestre aussitôtmis que le vé , n’a pas empêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée, sortie des mains du
sieur de la Roche-Lambert, au 27 novembre 1 7 9 1 , et
le sieur de la Roche-Lambert n’a été mis sur la liste
des émigrés qu’en 1792. La vente ayant une date au
thentique açant le 9 février 17 9 2 , devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Ghadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des événemens , lorsqu’avant leur départ ils ont mis hors leurs mains l’im
meuble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxième vente ; lorsque,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 17 9 1 , et n’avoient rien
de commun avec l’émigration ?'
3°. 11 ne s’agit pas de créanciers à'émigré, qui, après
avoir eu la nation pour seul obligé, ’parce qu’elle s'étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposans qui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur intermédiaire.
♦
t e s créanciers de Tane ont 'bien senti qu’il falloit
C 2
�(
20
)
p ro u v e r, avant tou t, comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la Roche-Lambert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement -personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lambert.
- Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, r°. les héritiers
de Montmorin ou de Tane,. comme« obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification,
ou Ghadieu, à cause' de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la Roche-Lambert, comme délégué envers eux par Pacte
de 1788^
Pour amener à eux le sieur de Ta Roche-Lambert,
il y a une-seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite'sans novation,
c’est-à-dire,.sans l’extinction de la dette du<premier obligé;
et de même il- n’y xa pas de novation sans, l’intention
formelle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r, qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788*
on n’y verra pas même l’apparence d’une novation ; au*
contraire-,, madame de- Montmorin reste- débitrice des
créanciers, de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 3760,00 fr. que payeront les acquéreurs deChadieu ; ils conservent sans le moindre-doute le droit
de s’adresser à madame de Montmorin et cela est si
bien prouvé, que nous.voyons dans l’inscription du 1-1
janvier 1,808, et en la Cour* les dames de la Luzerne,
héritières de Montmorin , se réunii’ aux créanciers de
Tnne pour attaquer le sieur la Roche-Lambert, à cause
de l’intérêt qu’il a à, ne pas payer lui-même..
�( 21 )
Si les daines de la Luzerne n’étoient pas restées débitrices envers les créanciers de Tane , elles ne seroient
pas là pour fa ire valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs*, car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette somme, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la Roche-Lambert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers#
'
M ais, dit-on, les créanciers sont parties en Facte de
1788. Donc il y a délégation et obligation directe et
personnelle des sieur et dame de la Roche-Lambert ; ils
l?ont même exécutée en partie par leurs payemens de
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de l’acte de 1788 , pour ratifier et
confirmer la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
de cette intervention, commandée, par d’autres circons
tances.
Madame de Montmorin étoit héritière bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
1
La coutume de Paris ne permet à1 l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles*, mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus nouvellement réformée, en est le supplément; et
suivant la jurisprudence constante à Paris, aucun héritier
bénéficiaire ne-peut vendre les immeubles sans appeler,
les créanciers.
�t A in si, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
reur , pour éviter des enchères et d’autres contestations,
q u i, bonnes ou mauvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il éloit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation, lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in form â communi d’un
acte qui ne contenoit 'qu’une indication de payement,
ne disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l’engagement des sieur et dame la Roche-Lambert i et
qu’ils éteignoient celui de madame de Montmorin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la vente, que les créanciers intervenoient;
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu'on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Quce dubitationis tollendœ causa
in contractibus inseruntur, jus cdmmune non lœdunt.
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la Roche-Lambert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
c< Pour qu’il y ait délégation (dit M. Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du créancier de décharger le
« premier débiteur, et de se contenter de Vobligation
de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�( *3 )
« place du premier, soit bien marquée. C’est pourquoi
« si Pierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers moi, a, par un partage, chargé Jacques,
« son cohéritier, de me la payer à sa décharge, il rfy aura
<< pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m oi, si je n'ai par quelqii’acte déclaré formellement
« que je déchargeois Pierre : sans cela, quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rten pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ierre9
« et que j raie déchargé pierre.. L . 40, §. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
de la Roche-Lambert ont contracté une obligation per
sonnelle envers les créanciers de Ta ne-, sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas 3 et substituons-y qu’ils
ont contracté , comme acquéreurs E T D É T E N T E U R S ,
l’obligation de payer 376000 fr. pour le prix de la terre
de Chadieu.
Que va-t-il en résulter? Rien que de fort ordinaire;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les>
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellement.*
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure ; car les conventions particulières de la vente
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi dicte, et dont elle ordonne l’exécution. '
Le résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la Roche-Lambert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ordre entre lés soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de Tane; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
■personnels du sieur de la Roche-Lambert.
^ 'S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
Roche-Lambert,'.c’est qu’en effèt ils ne le pouvoient pas^
car, 10. les syndics n’ont pas formé opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la RocheLambert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au sieur Sauzay le 27 novembre 17 9 1. ' ’
Ainsi ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur Sauzay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaqùer les sieur
et dame de la Roclie-Lambert.
Ils se sont jugés eux-mêmes sur ce point , par leur
exploit donné à Sauzay en l ’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
• 2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur l’émigration , prouvent qu’il n’y avoit plus lieu à un ordre,
si un émigré étoit.débiteur, parce que le gouvernement,
dans ce cas, forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
30. Les créanciers pouvoient encore moins ouvrir un
ordre contre le sieur do la Roche-Lam bert, après le
jugement
�( *5 )
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. Natthey, son garant,
a répondu à leur demande en faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tane se croient dispensés de tout,
quand ils disent que cette chose jugée est un piège , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils ' en’ sont les maîtres :
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
- * ■
'r
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à démêler au sieür de laf Roche-Lambert J
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réformer,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler lès créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est ¡pour un émigré,
* et nullement pour libération envers eux. 1 "
r
,\
\
Si les sieur et dame de la Roche-Lamliert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveroient aisément, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose. .
11 s’agit eu ce point d’une vérité de révolution, où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. Pour être mieux écouté, en cherchant le sèns
de quelques lois de circonstance que le* législateur ne
nous a pas données comme ratio scripta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d\me autorité
prépondérante.
D
�( »6 )
Les créanciers de Tane, en citant beaucoup d’arrêts,
ont prévu qu’on pourvoit leur opposer celui rendu en
la Cour de cassation entre les héritiers Lecomte et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvement réfuté, en disant que
l’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison; car quoique dans
cet arrêt il fut question d’une somme versée à la régie
par l’acquéreur d’un bien de condamné, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour mot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens ; c’est dans le plaidoyer de
M. M erlin, qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des émigrés à verser les sommes par eux;
dues, ¿1 la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion, ce magistrat n’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Feffet de ce versement, et pour qui il est présumé
être fait. Yoici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M. d’Ormesson, vendeur d’une ferme moyennant
425ooo f r . , avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m ort, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
prix de la vente.
Après la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame Bélanger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers Lecomte, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix. La dame Bélanger se prér
�( 27 )
{dudit libérée malgré l’opposition, ' et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente; comme y étantobligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit polir le
compte des ayant droit , et par conséquent des créant
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
'
v
C’est pour examiner cette prétention que M. Merlin
discute’; et nous ,allons, voir qu’il l’adopté entièrement.
- « Si au lieu de payer aux héritiersLecomte (créanciers)
« le montant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir pour eux ( i ), leur
« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eux-mêmes..
cc Que reste-t-il à examiner? Un seul point, celui de
« savoir si en effet les héritiers Lecomte on t, par les
c< mains d'un tiers , touché après la mort du citoyen
« d’Ormesson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
• « (Article 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débi
te tcurs des émigrés, à quelque titre que ce soit, ne
c< pourront se libérer valablement qu’en payant h la
cc caisse du séquestre.)
c< C’est donc par forme de séquestre , que la nation
ce va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nution
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
« personjiel ’ elle les recevra pour le compte de ceux qui
(1) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. Merlin ; ils sont conformes à l’art. 12 39 du Code civil,
D 2
�c
2
8
}
pourront y aÿoir droit ; elles les recevra par consé~
quent pour les remettre aux créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en France, sauf à en retenir le
restant à son profit, s’il y a lieu..........
>
« (Article 17. Les sommes déclarées en vertu des
« articles précédens.. . . seront versées.. . . dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrement, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« émigré, et sans y préjudicier. )
• « Voilà qui confirme, qui développe bien clairement
« les conséquences que nous tirions tout à l’heure de l’ar« ticle 14 de la loi du 8 avril 1792. Les oppositions des
« créanciers d'un émigré ne peuvent ni empêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il doit;
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la somme que le receveur de Ven« registrement aura touchée. Preuve évidente et sans
•c réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; preuve évi« dente et sans réplique que les créanciers opposans
« sont censés recevoir par les mains du receveur de
« Tenregistrement ,* preuve évidente et sans réplique,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé payer , non
« pas seulement à la république, mais encore aux créan~
« ciers même opposans. » Questions de droit, tome 5 ,
v°. Lettres de ratification .
Il faut remarquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’Or«
«
«
«
�( 29 )
messon n’avoient été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d'insuffisance des deniers versés , et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d?Ormesson qu’au même cas
d’insuffisance. Le pourvoi des créanciers fut rejeté.
>
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lambert; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits, et en jouant sur les mots.
Quand ils ont poursuivi Sauzay pour les payer comme
leur débiteur, Natthey, son garant, a fait juger contre
eux qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru, équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un payement , mais plutôt d’un versement
pour un émigré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’émigré qui n’ont pas provoqué leur liquidation, et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payement.
Disons donc avec M. Merlin que si Natthey a payé
le prix de Chadieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n’est
pas pour le sieur de la Roche-Lambert qui n’avoit aucun
droit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
Ainsi, quand les créanciers de Tane pourroient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien, puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eux : par conséquent
ils sont payés; et, ne craignons pas de répéter, l’arrêté
�( 3° )
du 3 floréal an n , la seule loi de leur système, ne se
rapporte nullement à eux.
De là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,
et bien se garder de commencer une attaque directe,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras.
Mais qui a autorisé, on le répète, les créanciers de
Tane à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
individu, pour prendre inscription sur ses biens. Et certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 179 1 contre le
sieur de la Hoche - Lam bert, en avoient encore moins
en 1808.
A ppel des h é r it ier s
de
M ontmorin.
A leur égard, il n’est pas douteux qu’une obligation
personnelle de la part des sieur et dame de la RocheLambert a existé.
Mais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
Les héritiers de Montinorin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent concourir.
Le premier , en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
Le second, en prouvant que les acquéreurs postérieurs ,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur de la Roche-Lambeït,
n’ont pas payé.
Le troisième, en prouvant encore que la perte des
versemens faits pour la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la Roche-Lambert, à cause de son
émigration , que pour les héritiers de madame de Montmorin'; à cause, de sa. condamnation révolutionnaire.
Voilà ce que dévoient justifier les héritiers de Montr
morin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres,
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Trutat que les deniers devoient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir. .
Cependant les héritiers de Montmorin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la RocheLambert. En avoient-ils le droit?
D ’abord ils ne rapportent ni mainlevée , ni conseil*
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
,de première nécessité, quand il n’y auroit pas d’autre
obstacle.
Eu second lieu , comment prouvent-ils que les acqué
reurs postérieurs n’ont pas payé ?
Tout ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le prix ; soit h Trutat,
�( 32 )
soit aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à Sauzay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement aux créanciers pri
vilégiés sur la terre.
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la Roclie-Lambert n’a rien touché de ces 375000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des hypothèques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créanciers , de payer les 375000 francs.
Ce contrat judiciaire résultant des lettres, efface l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. aux créanciers
privilégiés seulement.
A son tour, le sieur Sauzay vend au sieur W allier ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers de Tane, l’ont obligé
de ue payer qu’à eux, qu’il délègue W'allier ou Natthey
à payer %55ooo fr. aux créanciers de Tane , opposans
aux lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposajis aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qu'au nom des premiers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’il verse le prix de sa vente.
Ensuite il les assigne, et lait juger contre eux, en qua
lité de créanciers de Tane} qu’il est libéré.
Et
�( 33 )
Et on appelle ce jugement res inter alios acta . On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’intérêt d’un émigré, parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Natthey. Mais, i°. il est
aussi question des héritiers de Montmorin et de la con
fiscation de leurs biens; car Natthey, qui cherchoit à
consolider sa libération, ne manquoit pas de justifier de
son mieux son versement, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’émigré plutôt que contre un autre, c’est que cet émigré
n’est ni partie, ni appelé à ce jugement dont on veut
..lui appliquer tout l’effet.
O r, vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose jugée , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un côté, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de commun, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au premier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eux la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payement.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur qui,
après u n e Nlibération jugée valable, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire, pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
h jugement
E
�(34 r
N’est-ce pas un abus du raisonnement" que de soutenir
de tels paradoxes? Si mon acquéreur chnrgé de vous
payer a fait juger contre von* qu’il avoit valablement
pavé, qui pourra dire, sans choquer le bon sens, que
je n’ai pas payé moi-même, et que je reste débiteur?
Il devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse où il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re* judicata pro veritate habetur ,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression , serait certainement réputé être en trèsbonne monnoie, si un jugement l’avoit dit :■ nul n’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libération , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué..
' J
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a prétendu si constante sur la défense des lois de
consigner sans offres préalables , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des citations nom
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions forcées, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles, puisque les créanciers et les héritiers de Tanene veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validitéde son payement.
E t , chose étonnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de l’an 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de la RocheLambert, après avoir laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion entre les héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de Montmorin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l’exception cedendarum actionurn , et ne leur diroieut
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perdu, et s’ils ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
Natthey, qu’ils expliquent donc pourquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi ils paroissent regarder
ses versemens de l’an 2 et de l’an 4 comme un chiffon
informe, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers de Tane, le sieur de la Roche-Lambert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugement, ils ont perdu tout recours contre
lui *, car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E 2
�( 36 )
lui dire : « Vous avez acheté Chadieu , et vous l’avez
« revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
« être payé par vous , qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le soutenir, on le trouve au contraire fort équitable ;
on se passionne même au point de dire que M. de la
Roche-Lambert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnement; c’est seulement dans
les lois sur les émigrés, quron a prétendu trouver la preuve
q u e res périt domino signifié, en langage de révolution,
que le~prix d’un immeuble dû à des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute é m ig ra tio n a péri
pour t émigré.
Pourquoi ajouter à la dureté des lois révolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cette subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des émigrés , et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent aux débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais qu’y a-t-il de commun entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte notarié, en 179 1? et un bien d'émigré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré,
�C 37 )
qui par des lettres de ratification a formé un contrat ju
diciaire avec des opposans non émigrés , et des débiteurs
d’émigrés?
Mais admettons en toute humilité qu’un républicole n’a
dû souffrir de rien, et que tout le sacrifice doit tomber
sur le proscrit, n’ÿ a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de Montmorin' soient ici à l’unisson avec les
créanciers de. Tane 5 pour dire que Vémigre seul doit
perdre le versement ?
Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
Natthey,, quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche —Lambcrt , seconds débiteurs, il
faudra bien, pour être conséquentarriver jusqu’aux
héritiers de Montmorin, premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M. de la Roche-Lambert a été sur la liste des
émigrés, madame de Montmorin a été condamnée révolutionnairemept : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article i eiv de la loi du 26 frimaire an 2 , dit que lès
biens des condamnés devoient être régis et liquidés, et
vendus comme'les biens des émigrésLa seule réponse qu’on ait pu* faire à cette observa
tion, a été de dire que madame de Montmorin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu;
�( 38 )
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
Auvergne consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état où il la trouve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le Natthey, de Nyon,
qui a consigné à Saint-Amant?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
Natthey, sur la vraisemblance de ses versemens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lambert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur quelqu’un la perte de ses versemens, il
est évident que ce ne peut être sur celui à qui il auroit
profité ^ c’e s t-à -d ir e , aux héritiers de Tané, comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du prix, puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de préférer pour la
perte les sieur et dame de la Roche - Lambert , et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W allier; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur ou l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
dowino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à eu x, la somme consignée
�( 39 )
n’étoit pas pour eux. Qu’elle ait été versée pour les hé
ritiers de'Montmorin ou pour les créanciers de Tane,
c’est toujours aux hér'tiers de Montmorin que la somme
"devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
• :
Gomment'donc a-t-on pu. espérer de prouver, qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la Roche1Lam bert, qui n’étoient propriétaires de cette somme
à aucun titre et en aucune qualité , pas plus qu’ils ne
l’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si ta libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national,‘ c’est le vendeur séquestré1qui se retrouve
-passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur - et qui a donné pouvoir.à un tiers
de verser pour lui.
*
Y- .
Cum jussu meo id quod mihi debes sohns creditori
meo , et tu à me et ego à creditore meo liberor. L , 64,,
ff. De sohitionibus..
• .. r . ?
Souvenons-nous encore que M. Merlin a prouvé qu’un
versement fait à la caisse du séquestre, étoit censé être
fait aux créanciers , et que c’est absolument comme si
ces créanciers avoient eux-mêmes reçu et donné quittance.
Tout ce qu’il a dit se* rapporte parfaitement aux hé
ritiers de-Montmorin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils-assurent
que la somme étoit versee..
Un autre moyen s’applique' encore aux héritiers de'
�( 4° )
/
Montmorin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un émigré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
Or, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il-y a extinction de la dette par con
fusion. (Code civil, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 10 , art 17. )
Ainsi, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
Montmorin sont payés par Natthey , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Iis ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 1 1 , pour revenir de la nation à
l’émigré, puisque la nation les a traités de même, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V oilà, n’en dou
tons pas , ce qui est démontré jusqu’à l’évidence.
A
p p e l
c o n t r e
l e
sie u r
.
A iyiéd ée d e T a n e .
Le jugement de Clermont n?est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W allier; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roche-Lambert à payer la créance du sieur
Amédée de Tane, qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa vente, il est constant que le sieur Santenas
•w’a plus d’action ; car le sieur de la Roche-Lajmbert a
laissé
�( 4T )
laissé entre les mains dç Sauzay une somme suffisante
■pour payer tout le prix par eux d û , c’e s t - à - d ir e ,
3y5ooo fr. , quoiqu’ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
Au reste, il suffit dé renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà dit , et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clermont n’a pas voulu pro
noncer , par une autre inconséquence.
A ppel contre le s ie u r N a t t h e y ,
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la Roche-Lambert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la Roclie-Lambert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooq francs aux créanciers de
Tane , opposans aux lettres de ratification prises par
Sauzay , ou à consigner après le sceau de ses lettres.
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable avec les créanciers ; qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu’il dise, j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�(4 0
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le prix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances 3 il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lui , de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement délégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-monnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de.payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réduction, et ont rigoureusement
exigé qu’ils rapportassent les quittances des créanciers
délégués p a rla vente , même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel noyant rien payé lui-même, seroit privé
de tons moyens de défense.
E st-il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
Roche-Lambert à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payement, et qui, malgré un jugement,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o ch e-L am bert sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de Tane sur
leurs doutes, et de leur apprendre si le premier verse
ment de 355ooo fr., que Natthey dit avoir fait à Saint-
�C 43 )•
Amant le 26 floréal an. 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i 5 pluviôse an 4?
en appelant les créanciers opposans ?
Aucun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du i5 pluviôse an 4 est un versement ou
un compte, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit mois , lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits ; et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour sav.oir ce que Natthey a payé réellement.
Le sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la régie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à rendre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui compter 366000 francs, il faut au
moins convenir qu’ une contrainte n’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin sera ,
après le sceau des lettres de ratification ; mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme mandataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son payement; et il
ne s’cn dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son mandant, car il est obligé sans
exception, ou de faire valoir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclamation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lambert de l’effet de leurs
recherches.
Que si le sieur Natthey prétendoit, ainsi qu’il en a
menacé, s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i°. Parce que lui-môme a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen péremptoire sur la cause
actuelle.
20. Parce que lia demande en garantie a été jointe,
et que-loin d’attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. P a rc e que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel ; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont t o u j o u r s statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (r); l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la Boche-Lam bert dans ses
2 1 ju in 1 8 0 8 .
(r) « J ’ai reçu votre lettre, Monsieur, et je ne veux pas un
« seul instant vous faire attendre ma réponse.
cc J ’ai d abords été fort surpris des inscriptions que les créan
ce ciers de Tane ont prises sur vos biens ; j’ai dû ensuite me
« souvenir qu’ils avoient précédemment regretté de n’avoir pas
cc pris cette voie d’ abord, et de s’être engagés dans une autre
cc voie qui ne leur a pas plus réussi que celle-ci ne peut leur
« promettre du succès. Vous croyez d’avance, je l’espère, que
cc toutes choses sont parfaitement en règle vis-à-vis d’e u x ..........
cc Vous avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai pro« priétaire de Chadieu. D ’un mot je vous tirerai dô toute inquié<c tude. I l n e t i e n d r a , q u ’ a vous q u e N a t t h e y o u m o i , a v o t h e
<C CH OIX , OU TOUS DEUX R É U N IS , N E VOUS OFFRIONS DE NOUS SUI3S-
cc
cc
t i t u e r a vous d a n s c e t t e a f f a i r e : je vous en passerai acte
public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is, toutes choses sont parfaitement en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc Voilà un premier problème résolu, à votre satisfaction sanste doute. Vous v o y e z q u e N a t t h e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
cc QUE M EM E NOUS VOUS O FFR O N S, SOUS N OTRE GARA N TIE ET CELLE
CC DE CH AD IEU , DE NOUS SUBSTITUER A VOUS..................................
? ce
Vous êtes encore dans l’erreu r, quand vous supposez que
« les créanciers de Tane avoient fait opposition aux lettres de
te ratification obtenues par M. votre père sur MM. de Tane.
cc
ce
Fayon s’inscrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ciers non unis , et ne fit point inscrire l’union............. \\ n’y
« eut aucun acte conservatoire de la part de l’ union.
�(
4
6
}
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M. de
Batz, représentant Natthey , et M. de la Roche-Lambert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre
<c votre p è r e , l’ union fit opposition , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4, il y eut des lettres de ratification
cc prises sur Sauzay, et l’union eut le tort extrême de ne pas
cc prendre d’inscription, ni faire d opposition.
<c Us n’ont donc que celle du 2 2 décembre 17 9 1 ; mais il y a
cc
condamnation contr’eux sur ce point,
cc
tance très-âpre et trés-vive qu’ils avoient commencée
cc
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils attaquoient, dans Sauzay, W allier et N atth ey, et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de 11’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre famille, au lieu de se
cc
faire condamner sur leur inscription de
ce
v r a i, je n’aurois pas imaginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient imaginé de finir par où ils
cc
cc
cc
à
l’occasion de l’ins-
17 9 1.
M ais,
Paris
à
à
dire
auroient voulu commencer. Mais les actes subséquens, leur
<c liquidation, leur payem ent, sont tels qu’ils ne peuvent chercc cher qu’à e f f r a y e r e t à a r r a c h e r q u e l q u ’ a r g e n t , du moins de
cc Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos biens, ils en
cc ont également pris sur Chadieu...................Instruisez-moi de
cc
tout ce qui s’est passé d’eux à vous dans cette insurgence, et
cc
vous aurez de ma part, ou par moi, instructions parfaites. Je
cc
vous répète que m’identifiant à N atth ey, je me mettrai avec
cc
ce
plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment a me
faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s il y a
ce
quelque demande formée. Voilà de ma part, j espère, fran-
« chise, loyauté autant que vous pouvez désirer, et plus que
** vous ne pourriez exiger.
“ Keccvez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�( 47 )
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
forme; car, d’après les principes, 011 contracte valable
ment par epLstolam a ut per nuntium.
«attach em en t, et veuillez le faire agréer àJM . votre père.
« <Signc De Batz.
« Dès que j’aurai votre réponse, je partirai ou vous écrirai
« sur-le-champ. Je ne suis nullement in qu iet, parce que je
« connois les faits, et qu’ils sont réguliers. :»
Paris, 9 juillet 1808.
« Je n’ai pas perdu de tem ps, Monsieur, à prendre tous les
cc rëriseîgnernens et toutes les instructions utiles contre les créan-
« f.ciers de'Tane. J ’aurai une consultation des plus habiles gens.
« L/affàireparolt inattaquable par les créanciers de Tane. II est
et heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
« u tile , surabondance de précaution, pour acquitter à la fois
cc vous et moi, et pour mettre dans tous les sens les créanciers
cc en demeure. Vous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces. . . . . . . . .
ec
c<
cc
cc
«
M. votre père n’ auroit pas dû prendre ins
cription sur Chadieu, surtout sans m’en prévenir : il n’auroit
pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
créanciers. Son intérêt est de faire cause commune avec
Chadieu : quiconque lui dira le contraire se trompera , l’induira en erreur. Au reste, je lui demande, et j’espère qu’il
« ne me le refusera p as, de vouloir bien faire rayer 9on ins
ec cription au bureau de Clermont. J ’ai besoin, pour ma seule
« délicatesse vis-à-vis de deux personnes à qui j’ai fait deux
emprunts, d’avoir leur certificat d’inseription avant le vôtre,
parce qu’agissant de bonne foi et d^entu-rre confiance en m oi,
ce ils ont reçu dans leur acte ma parole d’honneur qu’il n’existoit
�-
,
(
4
8
}
M. de Batz, représentant Naüliey, a toujours continué
<T;igir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de Laroche-Lambert la consultation
très-détaillée de MM. Poirier et Bellard (annoncée dans
la dernière lettre), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
Il y a donc im p o s s ib ilit é de délier le sieur INÎatthey de
son nouvel engagement, qui lève tous les scrupules des
lois de rémigration, lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
cc j)as d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
cc donner en toute vérité , et il se trouve que la vôtre existoit
« le jour même où j’affinnois qu’il n’en existoit pas , ou du
cc moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de fa it , et
cc celle de deux pauvres petits créanciers que j ’ai fait condamner
ce à Riom , et que j ’esp ère faire ra y e r à tous momens. M. votre
cc p ère , après avo ir fait ra y e r ce lle q u ’il a déjà faite , pourra
cc au m ê m e in s ta n t , s’il le juge à p ro p o s, la faire rétablir. Je
ce n’y suis que pour ma délicatesse seulement, et j ’espère qu’il
ce 11e me refusera pas cette satisfaction légère, qui, dans aucun
cc cas , ne peut lui être dommageable, et qui a été pour moi
w le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc parlant.
ce Au surplus, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M . Vautrin, et je m’en rapporte à. c e qu’il vous conseillera
cc à cet égard.
cc Je vous renouvelle , Monsieur,
1 assurance de mon dévoue-
cc ment à vos intérêts, et de mon bien sincère attachement.
u S i g n e D e B a tz . »
II
�( 49 )
Il'n e reste plus qu’un mot à dire sur l’effet de "cette
garantie, s’il falloit en venir à elle ; il est réglé ,par le
Code civil, qui s’exprime ainsfÎ
: Article 114 2 . c< Toute obligation de faire se résout en
« dommages-intérêts, en cas'de non-exécution delà part
« du débiteur. »
Article 1184. « La condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été exécuté, a le choix, ou de forcer l’autre à l’exé« eution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en
« demander la résolution avec dommages et intérêts.
« La résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
Le sieur de la Roche-Lambert a conclu à la résolution
de la vente de 179 1 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi' ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui demande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
que le sieur de la Roche-Lambert dut être obligé de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a point élevé une
prétention aussi immorale; il est vraisemblable qu’il s’en
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitime : ainsi , à son
égard, il suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payemens, puisqu’il s’y est engagé, ou qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendeur soit
à l’abri de toutes recherches.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R I O M , de l’ imp. de T H I B A U D , imprim. de la C o u r impériale, et libraire,
rue dej T a u le s , maison
L a n d r i o t. —
Juillet 1 8 1 0 ,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
receveurs de l'enregistrement
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0413
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53797/BCU_Factums_M0413.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
receveurs de l'enregistrement
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MEMOIRE
EN
IMPÉRIALE
RÉPONSE?
POUR
Sieur J oseph DE L A ROCH E-LAM BERT,
habitant à Issoire, intimé et appelant ;
C O N T R E
Dame F r a n c o i s e - A g l a é - G A b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G O U R D O N , son m ari; dame
A n g é liq u e - A r m a n d e - C a m ille D E LA
L U Z E R N E et sieur A n a t h o c l e - M a x i m ilien H U RAU LT D E
V I B R A Y E , son
mari, habitans de la ville de P a r is , héritiers
bénéficiaires de madame d e M o w t m o r i n , laquelle
étoit héritière bénéficiaire du sieur EmmanuëlFrédéric de T a n e , son frère, appelans ;
CONT RE
Sieur HENRI D U V E R G I E R , habitant a P a ris;
S i m o n T E R O U L D E yhabitant à Daudeville;
P i e r r e - L o u is L A I S N E , ancien sellier à
Paris habitant à Sens; A n t o i n e - L o u is
A
DE RIOM.
CH A M BR Ï.
�( a )
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; etJEÀN
C H A R D O N y chapelier y habitant a P a ris,
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,,
aussi appelans,
C ON TR E
Sieur
A
D E TANE - SA N T E N A S,
habitant à Paris y intimé ;
m é d é e
ET
C O N T R E
Sieur L o u i s N A T T H E Y , habitant de Nyon en
Suisse y aussi intimé.
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la p lu s grande s im p lic ité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’une te r r e , chargé d’en payer
S a n s
le p rix à un notaire choisi par une direction de créan
c ie r s , lui en paye près de m oitié; ensuite il revend la
te rre, et laisse dans les mains du second acquéreur une
somme égale à ce q u 'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second acquéreur , p o u r s u iv i par les opposans, produit des quittances de consignation, assigne
les créanciers en m ainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces c r é a n c ie i’s attaquent le prem ier acqué
r e u r, qui met en cause son garant : c e lu i-c i emploie
�C3 )
pour libération le jugement qui a validé sa consignation.
A lo rs l’acquéreur observe aux créanciers qui le pou r
suivent , que leurs oppositions à des lettres de ratification
^ ont lie leurs interets à ceux du second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés , ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
V o ilà à quoi se réduit la question p rin cip ale, et il
est évident que jusqu’ici elle ne présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse : mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du vendeur
origin aire, qui com prennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers elle seroit pour euxmêmes , font cause commune avec e u x , pour que tout
retom be sur le prem ier acquéreur.
A lo rs tout s’exagère et se com plique. L ’émigration de
l ’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout : d'autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à m ille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas, et le
tribunal même où il a trouvé justice. E n fin , après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la m ultitude, mais plus
étrangers en core, on vient crier à l ’injustice et à l’indé
licatesse , en disant froidement : « Q ue m’im porte si vous
« devez recouvrer ou non
5ooooo francs que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas la vôtre ! Que
A 2
�(4 )
«
«
«
«
m’im porte encore si vous êtes ruiné par ce payem ent,,
et si votre famille est respectable. Je veux de l’argent,
et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose
moins en mesure de me résister; d’ailleurs votre émi-
« gration se prête à tous mes sophismes : il y a tant de
« lois, sur cette m atière,, qu’ il est im possible.de ne pas
« y voir que tout doit retomber sur vous. D ’ailleurs ,
« quand je me suis donné la licence d’im prim er qu’une
«• décision contraire à mon intérêt étoit un, jugement de
« f a v e u r , j’ai calculé l’effet de cette injure sur l’esprit
« des magistrats auxquels j’en demande la réform e. Si
« je ne puis les forcer à croire qu’il faut sacrifier un
ém igré par préférence, m on adroite censure sera tou«■jours d’un poids quelconque dans la balance ; elle
« achèvera probablem ent de-me conquérir le suffrage de
« ceux, dont l’opinion auroit été incertaine. »
A in si eût parlé M achiavel ; ainsi parlent les syndicsdes créanciers, de T an e , qui v e u le n t, p e r jh s et n e fa s ,
intéresser en se présentant comme des victimes.
Q u ’ils tâchent de prouver à la Cour, que m algré leursoppositions à des lettres, m algré un jugement qui pro
nonce contre eu x la validité du payement que le sieur
Natthey a été chargé-de leur faire, il leur reste encore une
action : voilà leur cause..
Mais que dans leur colère et dans leurs' calculs ils fassent
semblant de supposer de l’adresse, des insinuations et de
la faveur; que tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent à insinuer que cette ém igration deviendra aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des»créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s*être f a i t de ses propres J'a i! tes un m oyen
d?acquérir : voilà ce qui n’est ni la cause ni la. vérité r
mais une insigne et brutale calomnie;
Car personne ne sait m ieux que les adversaires qu’il
n?y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la R o ch e-L am b ert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en>
écus sur une terre qu7ils n’ont pas : et on ose encore leu r
demander plus de ôooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce:
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
f a i t s
;
A p rès la m ort du sieur Em m anuël-Frédéric de Tane>,
sa succession fut acceptée sous bénéfice d’inventaire par
Françoise-G -abrièlle de T a n e , épouse de M . de M o n tm orin , ministre des affaires étrangères.
Madame de M ontm orin ne pou voit vendre en cette
qualité les biens de la succession sans y appeler- les
créanciers ; elle fit apposer des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyi’e , Chadieu, la ChauxM ongros et le m obilier de la succession. Il y a eu pour
777400 francs de ventes avant 1790.
L a terre de Ghadieu fut vendue par madame de
M ontm orin aux sieur et dame de la R oche-Lam bert, par
acte du 17 juin 178 8 , moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a i s évalués à 5 deniers par liv re , produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000 fr. seroient
payés solidairement par les sieur et dame de la R ocheLam bert eiitre les m ains de Trutat¿ notaire-séquestre,
�(6)
ou a u x créanciers q u i auront été délégués; savoir, un
quart au i 5 septem bre, et le surplus dans le courant
des deux années, en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et q u e , s’il se trouve des oppositions du ch ef
de madame de M on tm orin , elle les fera lever dans les
six semaines ; mais hors ce c a s, elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de T an e de Santenas, T ero u ld e, commissaire à terrier;
C hardon, chapelier; L ouis L a isn é , sellier, et T o u ta in ,
tailleur d’h ab its, tous syndics des créanciers de T a n e ,
lesq u els, après avoir pris lecture de la ven te, la con
firm ent et ratifient a u x conditions y exprim ées. Ils font
élection de dom icile chez M- P ern ot-D u plessis, procu^
reur au parlement.
L e jour même de la’ v en te, M . de la R oche-Lam bert
paya la somme particulière de 7812 liv. 10 s ., à T ru ta t,
n otaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
E n 1 7 9 1 , les sieur et dame de la R o ch e -L a m b e rt,
voyageant en A lle m a g n e , envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur b e a u -frè r e , deux procurations; celle du
sieur de la R oche-L am bert porte pou voir d'em prunter
les sommes nécessaires à ses a ffa ires, g érer, liq u id er,
vendre : elle est passée devant H eidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 1791.
• L a procuration de la dame de la R oche-Lam bert porte
pou voir & em prunter 60000f t \ pour placer sur C ha d ieu ,
�(7 )
régler compte açec M . T r u t a t , notaire j recevoir ,
donner q u itta n ce, fa ire tous emprunts qiùil jugera bon
être, pour Varrangement des affaires de son m a ri. Cette
seconde procuration est passée devant L u tn e r, notaire à
W o r m s , le 20 octobre 1 7 9 1 ( 1 ) .
E n vertu de ces actes, le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
L e 27 novem bre 1791 , par acte reçu C a b a l, notaire
à-Paris , le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la R o c h e -L a m b e rt, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n ’avoit pas de pou voir de la dame de la R oche-Lam bert ) ,
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
P a ris, moyennant ôooooo f r . , dont il reçut i2Ôooo fiv
en assignats, et quant aux 376000 fr. r le sieur Sauzay
prom it les payer dans un an a u x sieur et dame de la
R oche-Lam be? t , o u y si bon lu i sem blait, a u x créanciers
desdits sieur et dame de la R o c h e - L a m b e r t , et spé
cialem ent a u x créanciers privilégiés sur ladite terre..
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la R o ch e-L am b ert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux im putations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dam e de la Roche-Lam bert quittoient la F rance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur prem ière pensée a été de s’o ccu p er
de leurs c ré a n c ie rs, et que tel a été l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�s’ oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
E n fin , pour l ’exécution de ladite clause, le sieur de SaintP on ey fait une élection de dom icile à Paris.
L e 4 janvier 17 9 2 , il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellem ent ; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics.
L e 22 avril 179 2 , le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’u n e , du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
•Tane.
Dans la même année 17 9 2 , le sieur de la R oche-L am bert fut porté sur la liste des émigrés.
L a dame de la R oche-Lam bert n’a jamais été portée
sur aucune liste.
Sous prétexte d’une loi du 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens des absens du te rrito ire, sans les
désigner encore comme émigrés , le sieur Sauzay fit
déclarer par le curé d’A u tezat, à la m unicipalité du lieu ,
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la R oche - Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il a voit pris des lettres de ratification, et que
les créanciers opposans aux lettres absorberont le p r ix
et au delà : d’où il conclut qu’il a intérêt de conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre -est h y po t h é q u é e . « E n sorte q u e , dit le sieur
a Sauzay, s 'il[fa itfa ir e ladite déclaration, c’est m oins
« à
�(9 )
«
«
«
«
«
«
«
à cause des sommes dont il peut paroître débiteur, et
dont la république ne pourra ja m a is profiter, puisq u elles doivent être absorbées pa r les dits créanciers
hypothécaires opposans a u x lettres de ra tifica tio n ,
que pour donner des preuves de son civ ism e, et empêcher qiüon ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence. »
Par acte du 25 juillet 17 9 3 , le sieur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux M artres, les m ou
lins et fours banaux des M artres, dépendans de la terre
de Chadieu , moyennant la somme de 61100 francs,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
L e 7 nivôse an 2, par acte reçu Gabal, notaire à P aris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Chadieu
au sieur W a llie r , Suisse, pour lui ou la personne que
W a llie r se réserva de déclarer dans les six m ois, m oyen
nant 530000 fr. dont W a llie r paya comptant 40000 f r . ,
s’obligea de payer 135000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des
355ooo fr. restans, W a llie r
fut délégué à les payer, so it a u x créanciers de T a n e ,
précédent propriétaire, q u i se sont trouvés o p p o s a n s
A U X L E T T R E S D E R A T I F I C A T I O N PR ISES P A R S A U Z A Y ,
soit afin d'en f a i r e le dépôt et la consignation partout
où besoin se ra , aussitôt après le sceau sans opposition
su r le sieur S a u za y des lettres de ratification à prendre
sur la présente vente.
L e sieur Na tthey dit avoir été subrogé par le sieur W a llie r
à ladite vente, par acte sous seing p rivé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-D ôm e
fit décerner, le 24 ventôse au 2 , une contrainte contre
B
�( ï° )
le sieur S a u za y > pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche - Lambert eu vertu du contrat de
vente de 179 1, sous prétexta que le vendeur étoit ém igré.
E nsuite, et à la date du 26 floréal un 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
3
cc Je soussigné, receveu r de l’enregistrem ent et des domaines
« au bureau 'de S ain t-A m a n t-T a llen d e, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G . E tienne-Jean-Louis N a t t h e y , de N y o n ,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
,
te suivant la déclaration de com m and en sa faveur par le
■« C. W a llie r , du 7 nivôse d e r n ie r ) , la somme de trois cen t
ce cinquante - cinq m ille livres,, pour servir itant au .nom des
a cit. N atth ey et S a u z a y , qu’en ce lu i du C. Jean-JBaptiste
cc W a llie r , à la libération de Chadieu.
cc D e quoi m ’a été dem andée la présente déclaration , à l’e ffet
cc d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale sur ledit
cc Chadieu.
ce Saint-A m ant, le 26 floréal an 2. Sig n é M a u g u è . »
Il
p a v o ît q u ’ un a r r ê té du d é p a r t e m e n t , e n l’an 3 ,
annülla la ^vente fa ite au sieur Sauzay, et mit la terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et W a llie r, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay , et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que le sieur W a llie r avoit voulu 3e
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�( 11 )
il fit des offres à W a llie r , et même une consignation en
mandats. Mais les lois sur la réduction du papier-monnoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de la Seine sus
pendit le p ro cè s, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de T an e produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frim aire an
4j
reçu du C . J e a n -M a r ie T 'V a llier,
cc des deniers empruntés de J a q u e ro t, par acte d u ............. la
« somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix .du domaine
« acquis par S a u za y , des sieur et dame de la R oche-Lam bert,
ce ém igrés , suivant le contrat du 27 novem bre 1791 ; ladite
« somme de 355ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
cc nationale sur le receveur du district de C lerm o n t, n°. 424, en
ce date du i 5 brum aire dernier ; dont quittance. S ig n é M a u g u e . «
/
Les créanciers ont retiré du même registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an
a de 32851 francs
25
4 »reçu
de Jean-Louis N atbhey la somme
centim es pour les intérêts restans du prix
cc
principal du domaine de C h ad ieu , acquis de la R o ch e L a m -
cc
b e rt, sa fem m e et Saint-Poney, ém igrés, par le sieur Antoine
S au zay, lequel en a fait vente au C. W a llie r , par acte reçu
C a b a l, notaire à P a ris, le 7 nivôse an 2 , lequel W a llie r a
passé déclaration au profit dudit N a tth e y , par acte sous seing
p r iv é , du 7 nivôse an 2 , enregistré à Paris le 17 messidor
cc
cc
cc
ce
an 3 , par P in au lt; ledit payem ent fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lia s , directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrem ent à Paris , le
cc 12 frim aire présent m ois; et ledit payem ent effectu é en une
cc rescription de la trésorerie nationale sur les domaines d’ém i« g rés, n°. 493 ? e t sous la date dudit jour 12 du présent mois.
cc
« Certifié c o n fo rm e , le 8 vendém iaire an 11. Sig n é
M
B 2
augue
.
»
�( 12 )
L e iei\ nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de T a n e , aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite qualité de
créanciers opposans a u x lettres de ratification prises
par Sauzay, de se trouver le i 5 pluviôse suivant .chez
le receveur de Saint-Am ant, pour y recevoir le p rix de
C hadieu. Il est constaté par cet exploit (resté au pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que Natthey y procède
c o m m e obligé d?a c q u it t e r 376000 fra n cs en ca p ita ly et
3 2 8 5 2 / h en intérêts , tant pour se libérer lui-m êm e 9
que pour libérer le sieur S a u z a y , a in si que les sieur et
dame de la R o ch e -L a m b e rt? premiers acquéreurs j et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers ne se présentèrent p a s; et le sieur
Natthey fit dresser, le i5 pluviôse an 4 , par le receveur
de S ain t-A m an t, la pièce suivante produite par lui.
«
cc
«
cc
« Je soussigné, receveur de l’enregistrem ent et des domaines
au bureau de Saint-Am ant-Tallende, d éclare, d’après le débat
des com ptes qui a eu lieu cejourd’hui entre moi et le cit.
Parades, des Martres , fondé de p o u v o ir d u C. E tie n n e -J e a n L o u is N a tth e y , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc
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cc
cc
cc
te
«
cc
cc
nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Chad ieu , la somme de s ix cent d ix - n e u f m ille s ix cent quatre c
là >res quinze sous en l ’acquit d u d it d o m a in e, 'dont quittance
et d éch arge, sauf audit Parades, qui en fait expresse réserve
pour ledit C. N atth ey , de plus ample e x a m e n et apuratiou
desdits com ptes , et de se pourvoir d e v a n t q u i il appartiendra ,
pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
sus des sommes dues p ar led it C. N a tth ey pour la libération
dudit dom aine de Chadieu.
cc Saiut-Am ant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4«Signé M a u g u e . »
�'
( I3 )
En marge est écrit :
« Sur 1 invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. nivôse der« n ier, n a com paru cejourd ’hui en m on bureau.
« L e i 5 pluviôse an 4 * Sign é M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers de Tane n’ont form é aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la Roche-Lam bert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulte, du 3 floréal an 10 , et
c’est le moment d’être attentif sur leur prem ière d é
m arche, pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 179.1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
S a u z a y , sur sa vente du 27 novem bre 179 1.
P ar exploit du 11 brumaire an 11 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauza y au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la vente de 1788 ; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente ci lu i consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit p a ye m e n t. (C ette pièce est produite par le
sieur Natthey. )
L e 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
h Natthey.
A lors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal d e Clerm ont, pour voir dire qn’ il est valablement libère au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés ù lui
donner m ainlevée de leurs oppositions.
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le
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«
«
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«
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L e 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clerm ont rend
jugement suivant :
« L e tribunal déclare le demandeur (N atthey) bien et
valablement libéré du p rix de la terre de Chadieu l
en conséquence , fait m ainlevée de l’opposition faite
par les défendeurs (les syndics) au bureau des h yp othèques de C lerm ont, le 2 décem bre; ordonne qu’elle
sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
présent jugem ent; condamné les créanciers aux dom mages-intérêts de N atthey, à donner par déclaration. »
E li vertu de ce jugem ent, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu. Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
T o u t d’un co u p , en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire , A m bert et C ler
m ont, sur tous les biens appartenans ou ayan t appar
tenu a u x sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la R och e-L am b ert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur N atthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de p ro p o s, jusqu’à p résen t, de dire
que pour verser 170644 francs en 1791 , il avoit été
emprunté pour les sieur et dame de la R oche-Lam bert,
savoir, 44000 francs à la dame de B ourneville, m ère de
madame de la R o ch e-L am b ert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de T a n e - S a n t e n a s , représenté par Am édée.
�( x5 )
On a vu que le sieur de S t.-P on cy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T.ane, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
E t comme les syndics n’a voient inscrit que pour leur
in térêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la R och e-L am bert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
L e sieur N atthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
assigner les sieur et dame de la R oche-Lam bert en main
levée de ladite inscription.
L e lendem ain, Am édée de Tane (très-d’accord, comme
on le voit déjà., avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert de payer les arré
rages de l’em prunt ci-dessus de 30000 francs.
L e 23 du même m ois, il a été présenté requête au
tribunal de C lerm ont, sous le nom des sieur et dame de
la R o c h e - L a m b e r t ; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de T a n e , et à ce que le sieur Natthey, se disant
lib é r é , fût tenu de fa ir e valoir envers eux ladite libé
ration , sinon .de garantir les sieur et dame de la RocheLam bert. Ils ont co n clu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 9* ^ suivantes, et au désistement de
Chadieu. Enfin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à :1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
A m édée de Tane à la mainlevée du commandement de
�(
i6
)
payer par lu i fait, attendu que N atthey, chargé de payer
tout le m onde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a .eu lieu , les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce ju g em en t, le tribunal de Clerm ont distingue
les intérêts des créanciers de T a n e , d’avec ceux d’A m édée
de Tane. A l’égard des prem iers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
R och e-L am bert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur A m édée de T a n e , il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire T ru ta t,
comme obligation directe et indépendante de l’acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de la Roche-Lam bert de leur opposition au commande
ment de p a y e r (1).
I l y a appel de ce ju g e m e n t , tant p a r les héritiers et
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheL am bert, que par les sieur et dame de la Roche-Lam bert
contre Natthey et contre le sieur A m édée de Tane. O n a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert;
(1) C e jugem ent est transcrit en son en tie r, avec les m otifs,
à la fm du m ém oire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( *7 )
<l’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , q u i, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lam bert.
M O Y E N S .
P o u r suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour être
clair, autant que possible, dans une discussion dénaturée
et obscurcie par de fausses applications de prin cipes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
T a n e d’avec ceux des héritiers de M on tm orin , quoiqu’ils
aient réuni leurs intérêts, sérieusement ou non. O n exa
m inera, en prem ier lieu , s’il est vrai que les créanciers de
T a n e aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la R o ch e-L am b ert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la R o ch e-L am b ert.
20. Sur l’appel des héritiers de M ontm orin il s’agira
de savoir s i , au cas où le versement du p rix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation n ationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de T a n e , la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
M on tm orin , comme condamnée à m o r t, ou pour le
sieur de la R oche-Lam bert, comme ém igré.
30. Quant à l’appel du sieur de la R o c h e -L a m b e rt
contre le sieur Am édée de T a n e , il y aura lieu d’exam iner
si le sieur Natthey, charge de faire face à. tout, a également
lib éré le sieur de la R oche-Lam bert de cette dette.
C
�( .18)
E n fin , l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir s i, dans le cas où le sieur de la Roche*
Lam bert seroit condamné à payer des sommes quelconques
aux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A
p p e l
d e s
c r é a n c i e r s
de
T
a n e
.
La prétendue ém igration du sieur de la Roche-Lam bert
est le prem ier texte de la proposition des créanciers d e
T a n e ; ils l’appuyent sur un arrêté du conseil d’état, du
3 floréal an 1 1 , portant que tout créancier d'émigré
non liq u id é, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre l’ém igré : ils en concluent qu^
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
R ien de plus incontestable que ce point de d roit; mais
aussi rien de moins applicable à la cause.
L ’arrêté de l’an n seroit applicable, si Ghadieu.ayant
été vendu nationalement,, le sieur de la R oche-Lam bert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au gran d
liv r e , pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement..
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence.
i° . La terre de C h ad ieu , qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lam bert a
été débiteur, com me détenteur y n’a point été vendue;
�( r9 )
la nation ne s’en est point emparée : un séquestre aussitôt.,
m is que l e v é , n’a pas em pêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée , sortie des mains du
sieur de la R o ch e-L a m b ert, au 27 novem bre 1 7 9 1 , et
le sieur de la R o ch e-L a m b ert n’a été mis sur la liste
des ém igrés qu’en 1792. L a vente ayant une date au
thentique avant le 9 février 179 2, devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Chadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des évén em en s, lors
q u ’à vant leur départ ils ont mis hors leurs mains l ’im
m euble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le 'gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxièm e vente ; lo rsq u e ,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 1791 , et n’a voient rien
de commun avec l’ém igration?
30. 11 ne s’agit pas de créanciers d’ém ig ré, q u i, après
avoir eu la nation pour seul o b lig é, parce qu’elle s’étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposansqui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur interm édiaire.
Les créanciers de Tan e ont bien senti qu’il falloit
C 2
�C 20 )
prouver , avant t o u t , comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lam bert.
Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, i° . les héritiers
de M ontm orin ou d e T a n e , comme obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification
ou C h a d ie u , à cause de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la R oche-Lam bert, comme délégué envers eux par l’acte
de 1788..
P o u r amener à eux le sieur de la R o ch e-L am b ert,
#
il y a une seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite sans novation,
c’est-à-dire, sans l’extinction de la dette du prem ier obligé;
et de même il n’y a pas de novation sans l’intention
form elle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r , qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788,
on n’y verra pas même Papparence d’une novation ; au
\
contraire,, madame de M ontm orin reste débitrice des
créanciers de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 376000 fr. que payeront les acquéreurs de
C h ad ieu; ils conservent sans le moindre- doute-le droit
de s’adresser à. madame de M ontm orin ; et cela est si
bien p ro u v é , que nous voyons dans l’inscription du 11
janvier i8 o8 ‘, et en la C o u r, les dames de la L u zern e ,
héritières de M ontm orin , se r é u n ir aux créanciers de
Tane pour attaquer le sieur la R oche-Lam bert, à cause
de Tintérêt qu’i l a ù ne pas payer lui-mêm e.
�( 21 )
Si les dames de la- Luzerne n’étoient pas restées débi
trices envers les créanciers de T an e , elles ne seraient
pas là pour fa ir e valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs ; car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette som m e, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la R oche-Lam bert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers*
M a is, d it-o n , les créanciers sont parties en Facte
1788. D on c il y a délégation et obligation directe
personnelle des sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
l ’ont même exécutée en partie par leurs payemeus
de
et
ils
do
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de Facte de 178 8 , pour ratifier et
c o n fir m e r la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
d e cette in terven tion , commandée par d’autres circons
tances.
Madame de M oütm orin étoit héritière1 bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
L a c o u tu m e de P a r is ne permet à l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles; mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus n o u v e lle m e n t réfo rm ée, en est le supplém ent; et
s u iv a n t la ju ris p ru d e n c e constante à P a iis5 aucun héritier
bénéficiaire ne peut vendre les immeubles sans appeler
les créanciers.
�22)
A in s i, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
re u r, pour éviter des enchères et d’autres contestations',
q u i , bonnes ou m auvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il étoit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation , lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in fo r m a com m uni d’un
acte qui ne contenoit qu’une indication de payem ent,
11e disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l ’engagement des sieur et dame la R oche-Lam bert , et
qu’ils éteignoient celui de madame de M ontm orin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la ven te, que les créanciers intervenoient";
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu’on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Q uœ dubitationis tollendœ causâ
in contractibus inseruntur, ju s com m une non lœdunt.
(
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la R oche-Lam bert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
« P ou r qu’il y ait délégation (dit M . Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du c r é a n c ie r de décharger le
« premier d éb iteur, et de se contenter de Vobligation
« de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�< *3 )
« place du p rem ier, soit bien m arquée. C ’est pourquoi
« si P ierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers m o i, a , par un partage, chargé Jacques,
c< son cohéritier, de me la payer à sa décharge , il. riy aura
« pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m o i, si je ri*a i par q uel qu'acte déclaré fo rm ellem en t
« que je déchargeois P ierre : sans c e la , quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rien pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ie r r e 9
« et que j'a ie déchargé P ie r r e . L . 40, g. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
4 e la R oche-Lam bert ont contracté une obligation pertonnelle envers les créanciers de Tan e , sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas, et substituons-y qu’ils
ont contracté , com m e acquéreurs E T d é t e n t e u r s ,
l ’obligation de payer 375000 fr. pour le p rix de la terre
de Chadieu.
Q ue va -t-il en résulter ? R ien que de fort ordinaire ;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellem ent.
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel*
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure \ c^r les conventions particulières de la vente-
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi d ic te , et dont elle ordonne l’exécution.
L e résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la R o ch e-L a m b ert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ ordre entre les soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de T a n e ; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
personnels du sieur de la Roche-Lam bert.
S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
R oche-Lam bert, e ’est qu’en effet ils ne le pouvoient pas;
car, i° . les syndics n’ont pas form é opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la R och eLam bert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au-sieur Sauzay le 27 novem bre 1791.
A in si ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur S au zay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaquer les sieur
et dame de la R oche-Lam bert.
Ils së sont jugés eux-m êm es sur ce p o in t, par leur
exploit donné à Sauzay en l’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur Immi
gration , prouvent qu’il 11’y avoit plus lieu à un ord re,
si un ém igré étoit débiteur, parce que le gouvernem ent,
dans ce c a s , forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
3°. Les créanciers pouvoient encore moins ou vrir un
ordre contre le sieur do la R o c h e -L a m b e rt, après le
jugement
�(
25
)
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. N atthey, son garant,
a répondu à leur demande ^n faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tarie se croient dispensés de tou t,
quand ils disent que cette chose jugée est un p iè g e , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils en sont les maîtres:
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
'
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à dém êler au sieur de la R och e-L am b ert,
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réform er,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler les créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est pour un ém igré,
et nullement pour libération envers eux.
Si les sieur et dame de la R oche-Lam bert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement.que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveraient aisém ent, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose.
Il s’agit en ce point d’ une vérité de ré v o lu tio n , où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. P ou r être m ieux é co u té, en cherchant le sens
de quelques lois de circonstance que le législateur ne
nous a pas données comme ratio scr ip ta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d une autorité
prépondérante.
D
�c 76 )
L es créanciers de T a n e , en citant beaucoup d’arrêts/
ont prévu qu’on pourroit leur opposer celui rendu en
la C o u r de cassation entre les héritiers Lecom te et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvem ent réfu té} en disant que
l ’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison ; car quoique dans
cet arrêt il fût question d’une somme versée à la régie
par l ’acquéreur d’un bien de condam né, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé ; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour m ot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens j c’est dans le plaidoyer de
M . M e rlin , qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des ém igrés à verser les sommes par eux
dues, à la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion , ce. magistrat n ’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Veffet de ce versem ent, et pour q u i il est présumé
être fait. V o ici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M . d’O rm esson , vendeur d’une ferme moyennant
425ooo fr. ? avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m o rt, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
p rix de la vente.
A p rès la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame B élan ger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers L ecom te, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix, L a dame Bélanger se pré-
�( >7 )
iendit libérée m algré l’opp osition , et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente, comme y étant
obligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit pour le
compte des a yan t d r o it, et par conséquent des créan
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
C ’est pour examiner cette prétention que M . M erlin
discute; et nous allons voir qu’il l’adopte entièrement.
« Si au lieu de payer aux héritiers Lecom te (créanciers)
« le moatant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir p ou r eu x ( i ), leur
•« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eu x-m êm es... . . .
c< Q u e re ste -t-il à exam iner? Un seul point, celui de
-« s a v o ir si en effet les héritiers Lecom te o n t , par les
« m ains $ un tie r s , touché après la m ort du citoyen
cc d’Orm esson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
cc (A rtic le 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débicc teurs des ém igrés, à quelque titre que ce soit, ne
cc pourront se libérer valablement qu’en payant h 1$
,c< caisse du séquestre. )
« C ’est donc par forme de séquestre, que la nation
cc va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nation
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
,« personnel,* elle les recevra pour le compte de ceux q u it
(i) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. M e rlin ; ils sont conform es à la r t. 1 ^ 9 du Code c iv il/
D 2
�'
( 28)
«
«
«
«
pourront y avoir droit ; elles les recevra par conséquent pour les remettre a u x créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en F ran ce, sauf à en retenir le
restant à son p ro fit, s’il y a lieu..,. . . .
« (A rtic le 17. Les sommes déclarées en vertu des
c< articles précéd en s.. . . seront versées.. . , dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrem ent, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« é m ig ré , et sans y préjudiciel'. )
« V o ilà qui confirme , qui développe bien clairement
' « les conséquences que nous tirions tout à l ’heure de l ’ar« ticle 14 de la loi du 8 ‘.avril 1792. L e s oppositions des
« créanciers d’un émigré ne peuvent ni em pêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il d o it,
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la som m e que le receveur de Ven« registrement aura touchée. P reuve évidente et sans
„« réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; p r e u v e évi
te dente et sans réplique que les créanciers opposajis
« sont censés recevoir par les m ains du receveur de
« Tenregistrement j preuve évidente et sans rép liq u e,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé p a y e r , non
« pas seulement à la république, m ais encore a u x créan« ciers même opposans. » Questions de d ro it, tome 5 ,
y 0. Lettres de ratification.
Il faut rem arquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’O r-
�^
( 29 )
messon n’avoiënt été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d?insuffisance des deniers versés, et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d!Ormesson qu’au même cas
d’insufiisance. L e pourvoi des créanciers fut rejeté.
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lam bert ; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits,' et en jouant sur les mots.
' Quand ils ont poursuivi Sauzaÿ pour les payer comme
leur d ébiteur, N atthey, son garan t, a fait juger contre
e u x qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un p ayem ent, mais plutôt d’un versement
pour un ém igré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l ’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’ém igré qui n’ont pas provoqué leur liquidation , et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payem ent. ?
Disons donc avec M . M erlin que si Natthey a payé
•le prix de C h ad ieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n ’est
pas pour le sieur de la Roche-Lam bert qui n’avoit aucun
drçit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
- A in si, quand les créanciers de Tane pourraient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien', puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eu x : par conséquent
ils sont payés; e t, ne craignons pas de ré p é te r, 1’arrçté
�( 3° )
du 3 floréal an n , . l a seule loi de leur système, ne-se
rapporte nullement à eux.
D e là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,,
et bien se garder de'com m encer rune attaque d irecte,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras. ,
’
*
Mais qui a autorisé', on le ré p è te , les créanciers de
T an e à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
in dividu, pour ¡^rendre inscription sur ses biens. E t certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 1791 contre le
sieur de la R o c h e -L a m b e rt, en avoient encore moins
en 1808.
: t
A
ppel
des
h é r i t i e r s
de
M
o n t m o r i n
.
leur égard , il n’est pas.douteux qu’une obligation
personnelle de la part: des sieur et dame de lu R ocheLam bert a existé.
'
-
i
A
M ais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C ’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
-'iL e s héritiers de M ontm orin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent c o n c o u r ir .
L e p rem ier, en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
L e sbçond,' en prouvant que les acquéreurs postérieurs,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur delà Roche-Lam bert,
n ’ont pas payé.
L e troisièm e, en prouvant encore que la perte des
versemeus faits p our la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la R oche-L am bert, à cause de son
ém igration, que pour les héritiers de madame de M ontr
m o rin , à cause de sa condamnation révolutionnaire.
V o ilà ce que devoient justifier, les héritiers de Mônt>
m orin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres ^
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Xrutat que les deniers de
voient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir.
4
;
/
C e p e n d a n t les héritiers de M ontm orin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la R ocheLam bert. En avoient-ils le d ro it?
•
v
• D ’abord ils’ ne rapportent ni m ain levée, : ni consen
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
de prem ière n é c e s s ité , quand il n ÿ auroit pas .d’autre
o b sta cle .
::
:
:
En second lieu , comment prouvent-ils que les acqué*
reurs postérieurs n’ont pas p a y é ? ,
,
T o u t ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la R oche-Lam bert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le p r ix , soit à T ru ta t,
�(
3*
)
soîï aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à S au zay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement a u x créanciers p ri
vilégiés sur la terre.
•
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la R oclie-L am bert n’a rien touché de ces 376000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout ; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des h ypoth èques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créa n ciers, de payer les 376000 francs.
• Ce contrat judiciaire résultant des le tt r e s e ffa c e l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. a u x créanciers
privilégiés seulem ent.
A son to u r, le sieur Sauzay vend au sieur W a llie r ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers d e T a n e , l’ont obligé
de ne payer qu’à eux , qu’il délègue W a llie r ou Natthey
à paj^er 355ooo fr. a u x créanciers de T a n e , opposans
a u x lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer.en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposans aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qiCau nom des prem iers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’ il verse le prix de sa vente.
; Ensuite il les assigne, et fait juger contre e u x y en qua
lité de créanciers de Tane> c£tv il est libéré.
Et
�( 33 )
E t on appelle ce jugement res inter alios acta. On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’ intérêt d’un é m ig ré , parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Nattliey. M ais, i° . il est
aussi question des héritiers de M ontm orin et de la 'con
fiscation de leurs biens ; car Nattliey’, qui clierchoit à
consolider sa lib ératio n , ne manquoit pas de justifier dé
son m ieux son versem en t, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’ém igré plutôt que contre un autre, c’est que cet ém igré
n’est ni p a rtie , ni appelé à ce jugement dont on veut
lui appliquer tout l’effet.
O r , vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose ju g é e , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un cô té, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de com m un, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au prem ier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eu x la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payem ent.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur q u i,
après une libération jugée v a la b le, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire , pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
la jugement.
E
�( 34, )
N ’est-ce pas un abus du raisonnement que de soutenir *
de tels paradoxes? Si mon acquéreur-chargé de vous
p n y e r a fait juger contre vous qu’ i l avoit valablement
p a yé y qui pourra d ire , sans choquer le bon sens, que
•je n’aiipas payé m oi-m êm e, et que je reste débiteur?
A II devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse ou il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re - judicata pro veritate habetur,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression, seroit certainement réputé être en trèsbonne m onnoie, si un jugement l’avoit'dit : n u l n ’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libéi’ation , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué.
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a p r é te n d u si constante sur la défense des lois de
c o n s ig n e r sans o ffres p ré a la b le s , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des c ita tio n s n o m
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions fo rcé es, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles , puisque les créanciers et les héritiers de Tane
ne veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à, leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validité
de son payement.
E t ; chose étoïlnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de Pan 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de' la Roche-,
L am b ert, après avoir, laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion eçtre les, héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de M ontm orin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l ’exception cedendarum actionum , et ne leur diroient
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perd u , et s’ils’ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
N atthey, qu’ils expliquent donc pou rquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par'ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi iis paroissent regarder
ses versemens de Tan 2 et de l’an 4 comme un chiffon
inform e, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers d e T a n e , le sieur de la R oche-Lam bert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugem ent, ils ont perdu tout- recours contre
lu i; car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E a
�C 36 ) •
lu i'd ire : « V ou s avez acheté Chadieu , et vous l ’avez
»■
‘ revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu ,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
* être-payé par v o u s, qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le sou ten ir, 011 le trouve au contraire fort équitable;
on se passionne même au point de dire que M i de la
Roche-Lam bert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce -n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnem ent; c’est seulement dans
les lois sur les ém igrés, qu’on a prétendu trouver la preuve
que res périt domino signifie, en langage de révo lu tio n ,
que le prix d’un immeuble dû à'des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute émigration , a péri
p ou r Témigré,
.
Pourquoi ajouter,à la dureté des lois jrévolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cettei subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des ém igrés, et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent a u x débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais - qu’y a-t-il de c o m m u n entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte n otarié, en 1 7 9 1 , et un bien d'ém igré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré^
'
�( 37 )
qui par des lettres de ratification a form é un contrat ju
diciaire avec des opposans non ém ig rés, et des débiteurs
d’émigrés ?
Mais admettons en toute hum ilité qu’ un républicole n’a
dû souffrir de rien,* et que tout le sacrifice doit tom ber
sur le proscrit, n’y a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de M ontm orin soient ici à l’unisson avec les
créanciers de Tan e , pour dire que rémigré seul doit
perdre le versement ?
■Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
N atthey,. quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche - Lam bert , seconds débiteurs, il
faudra b ien , pour être conséquent, arriver jusqu’aux
héritiers de M on tm orin , premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M . de la Roche-Lam bert a été sur la liste des
émigrés , madame de M ontm orin a été condamnée révolutionnairement : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article I er. de la loi du 26 frim aire an 2 , dit que les
biens des condamnés devoient être régis et liq u id és, et
vendus comme les biens des émigrés.
L a seule réponse qu’on ait pu faire à cette observa
tio n , a été de dire que madame de M ontm orin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu
�( 3 8 }
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
A u verg n e consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état 011 il la tro u ve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le N atth ey, de N y o n ;
qui a consigné à Sain t-A m an t?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
N atth ey, sur la vraisemblance de ses versem ens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lam bert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur q u e lq u ’ u n la perte de ses versem ens, il
est évident que ce ne peut êtrer sur celui à q u i il aurait
p ro fité, c’e s t - à - d i r e , aux héritiers de Tane , comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du p r ix , puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de p r é f é r e r pour la
perte, les sieur et dame de la R o c h e -L a m b e r t, et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W a llie r ; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur oli l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur'personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
domino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à e u x , la somme consignée
�( 39 )
n’etoit pas pour eux. Q u’elle ait été versée pour-les'hé
ritiers de M ontm orin ou pour les créanciers de Tane,.
c est toujours aux héritiers de M^ontmonn que lu somme
devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
Comment donc a-t-on pu espérer de prouver qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la R ocheL a m b e r t, qui n’étoient propriétaires ' de cette somme
à aucun titre et en aucune q u alité, pas plus qu’ils ne
l ’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si la libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national, c’est le vendeur séquestré qui se retrouve
passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur, et qui a donné pouvoir à un tiers
de verser pour lui.
Cum jussu meo id quod m ih i debes sohns creditori
m e o , et tu à me et ego à creditore meo liberoi\ L . 6 4 ,
ff. D e solutionibus.
S o u v e n o n s -n o u s e n c o r e q u e M . M e r lin a p r o u v é q u ’ u n
v e r s e m e n t fa it à la caisse d u s é q u e s tr e , é to it ce n sé ê tre
fa it a u x créa n ciers , et q u e c ’est a b s o lu m e n t c o m m e si
ces c ré a n c ie rs a v o ie n t e u x -m ê m e s re ç u et d o n n é q u itta n c e .
T o u t ce qu’il a dit se rapporte parfaitement aux hé
ritiers de M ontm orin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils assurent
que la somme étoit versée.
U n autre moyen s’applique1 encore aux héritiers de-
�C 4®)
M ontm orin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un ém igré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
O r, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il y a extinction de la dette par con
fusion. (C o d e c iv il, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 1 0 , art 17. )
A in s i, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
M ontm orin sont payés par N a tth e y , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Ils ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 11 , pour revenir de la nation à
l’ém ig ré, puisque la nation les a traités de m êm e, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V o ilà , n’en dou
tons pas , ce qui est dém ontré jusqu’à l’évidence.
A
ppel
contre
le
sieur
A
m édée
de
T
an e
.
L e jugement de Clerm ont n’est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W a llie r ; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roclie-Lam bert à payer la créance du sieur
A m édée de T a n e , qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa v e n te , il est constant que le sieur Santenas
n’a plus d’action ; car le sieur de la R oche-Lam bert a
laissé
�(4 0
laissé entre les mains de Sauzay une somme suffisante
pour payer tout le p rix par eux d û , c’e s t - à - d i r e ,
375000 fr. , quoiqu ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
A u reste, il suffit de renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà d it, et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clerm ont n’a pas voulu pro
n o n cer, par une,autre inconséquence.
A
ppel
contre
le
sie u r
N
a t t h e y
.
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la R oche-Lam bert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la R oche-Lam bert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooo francs a u x créanciers de
Tane , opposans a u x lettres de ratification prises par
S a u za y , ou à consigner après le sceau de ses lettres,
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable açec les créanciers,* qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu il d ise , j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�( 4» )
.
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le p rix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances* il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en -présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lu i, de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement d élégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-m onnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réd u ction , et ont rigoureusement
exigé qiüils rapportassent les quittances des créanciers
délégués par la v en te, même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel n’ayant rien payé lui-m êm e, seroit privé
de tous moyens de défense.
E s t - il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
R o ch e-L a m b e rt à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payem ent, et q u i, m algré un jugem ent,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o c h e -L a m b e rt sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de T an e sur
leurs doutes, et de leu r apprendre si le prem ier verse
m ent de 3 55 ooo fr . 7 que N atthey dit avo ir fait à Saint-
�( 43 )
A m ant le 26 floréal an 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i5 pluviôse an 4 ,
en appelant les créanciers opposans ?
A u cun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du 1 5 pluviôse an 4 est un versement ou
un co m p te, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit m o is, lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits *, et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour savoir ce que Natthey a payé réellement.
L e sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la r é g ie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à ren dre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui com pter 355ooo francs , il faut au
moins convenir qu’une contrainte 11’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin s e r a ,
après le sceau des lettres de ratification ,* mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme m andataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son »payement; et il
ne s’en dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son m andant, car il est obligé sans
exception , ou de faire va lo ir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclam ation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lam bert de l’effet de leurs
recherches.
' Que si le sieur Natthey p réten d o it, ainsi qu’il en a
menacé , s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i° . Parce que lu i-m êm e a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen pérem ptoire sur la cause
actuelle.
2°. Parce que la demande en garantie a été jo in te ,
et que loin d^attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. Parce que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche*-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’ il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont toujours statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (i) ; l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la R oche--Lam bert dans ses
21 juin 1808.
(1) « J’ai reçu votre le ttre , M onsieur, et je ne veux pas un
cc seul instant vous faire attendre ma réponse.
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc
cc
« J’ai d’abord été fort surpris des inscriptions que les créan
ciers de T a n e ont prises sur vos biens ; j ’ai dû ensuite me
souvenir qu’ils avoient précédem m ent regretté de n’avoir pas
pris cette voie d’abord , et de s’ètre engagés dans une autre
voie qui ne leur a pas plus réussi que c e lle -c i ne peut leur
prom ettre du succès. V ous croyez d’a v a n c e , je l’espère, que
toutes choses sont parfaitem ent en règle vis-à-vis d ’eux...........
ce V o u s avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai propriétaire de Ghadieu. D ’un mot je vous tirerai de toute inquiétude. I l n e t i e n d r a q u ’ a vous q u e N a t t i i e y o u m o i , a v o t r e
te C H O I X ,
OU T O U S D E U X R E U N I S , N E V O U S O F F R I O N S D E NO US SU RS-
cc
a
titu e r
vous
dans
cette
a ffa ir e
: je vous en passerai acte
cc public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is , toutes Choses sont parfaitem ent en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc
cc V oilà u n prem ier problèm e réso lu , à votre satisfaction sans
doute. V ous v o y e z q u e N a t t i i e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
te Q U E M E M E NO US VOUS' O F F R O N S , SOUS N O T R E G A R A N T I E E T C E L L E
CC D E
C H A D I E U , D E N O U S SU B S TI T U E R
A VOUS. . .......................
cc V ous êtes encore dans l’e r r e u r , quand vous supposez que
cc les créanciers de T an e avoient fait opposition aux lettres de
cc ratification obtenues par M. votre, père sur MM. de T ane.
cc Fayon s’in scrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ce ciers non u n is, et ne fit point inscrire l’union...............I I n ’y
<c eut aucun acte conservatoire de la part de l’union;
�( 4 <S )
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M . de
Batz, représentant JNultliey , et M . de la R o ch e-L am b ert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre'
« votre p è r e , l’union fit o p position , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4 > il y eut des lettres de ratification
cc prises sur S a u za y, et l’union eut le tort extrêm e de ne pas
cc prendre d’in scrip tio n , ni faire d’opposition.
cc Ils n’ont donc que celle du 2 2 décem bre 1 7 9 1 ; mais il y a
cc. condam nation contr’eux sur c e p o in t, à l’occasion de l’inscc
tance très-âpre et très-vive qu’ils avoient com m encée à Paris
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils atta-
ct
quoient, dans S a u za y, W a llie r et N a tth e y , et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de n’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre fam ille, au lieu de se
faire condam ner sur leu r inscription de 1 7 9 1 . M a is , à dire
v r a i , je n’aurois pas im aginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient im aginé de finir par où. ils
auroient voulu com m encer. Mais les actes su bséqu en s , leur
liquidation, l e u r payem en t, sont tels qu’ils ne peuvent cherc h e r qu’à effrayer et à a r r a c h e r q u e l q u ’a r g e n t , du moins de
Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
cc
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos b ie n s , ils en
ce
ont égalem ent pris sur Chadieu.................... Instruisez-m oi de
ce tout ce qui s’est passé d eux à vous dans cette insurgence, et
ce vous aurez de ma part, ou par m oi, instructions parfaites. Je
ce vous répète que m ’identifiant à N a tth e y , je me mettrai avec
cc plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment à m e
ce faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s’il y a
ce quelque demande form ée. V oilà de ma part, j ’esp ère, fran« ch ise, loyauté autant que vous pouvez d ésirer, et plus que
« vous ne pourriez exiger.
cc Recevez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�.
(
47)
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
form e; ca r, d’après les principes, on contracte valable
ment per epistolam a ut per n un tium .
ce attach em en t, et veuillez le faire agréer à M. votre père,
te S ig n é D e B atz.
« D ès que j ’aurai votre ré p o n se , je partirai ou vous écrirai
cc sur-le-cham p. Je ne suis nullem ent in q u ie t, parce que je
ce connois les faits, et qu’ils sont réguliers. »
Paris, g juillet 1S08.
,
v*
te
te
«
ce
« Je n'ai pas perdu de tem ps, M onsieur, à prendre tous les
re.nseignemens et toutes les instructions utiles contre les créan
ciers de Tane. J’aurai une consultation dés plus habiles gens,
L ’a f f a i r e paroit inattaquable par les créanciers de T an e. Il est
heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
u t ile , surabondance de p récau tio n , pour acquitter à la fois
ce
vous et m o i, et pour m ettre dans tous les sens les créanciers
c< en dem eure. V ous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces.....................M. votre père n’auroit pas dû prendre inscc cription sur C h a d ie u , surtout sans m ’en prévenir : il n’auroit
et pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
cc créanciers. Son intérêt est de faire cause com m une a v e c
cc Chadieu : quiconque lu i dira le contraire se tro m p era , rin
ce duira en erreur. A u reste , je lui dem ande, et j ’espère qu’il
ce ne m e le refusera pas , de vouloir bien faire rayer son inscc cription au bureau de Clerm ont. J’ai b e so in , pour ma seule
« délicatesse v is-à -v is de deux personnes à qui j’ai fait deux
« em prunts, d’avoir leur certificat d’inscription avant le vôtre,
« parce qu’agissant de bonne foi et d entière confiance en m o ir
et ils ont reçu dans leu r acte ma parole d’honneur qu’il n ’existoit
�( 4 8 }
M . de Batz, représentant N atthey, a toujours continué
d’agir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de L aroch e-L am b ert la consultation
très-détaillée de M M . P oirier et Bellard (annoncée dans
Ici dernière le ttre ), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
11 y a donc impossibilité de délier le sieur Natthey de
son nouvel engagem ent, qui lève tous les scrupules des
lois de rém ig ratio n , lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
te
a
pas d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
donner en toute vé rité, et il se trouve que la vôtre existoit
le jour m êm e où j’affirmois q u il n’en existoit p a s, ou du
moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de f a it , et
celle de deux pauvres petits créanciers que j’ai fait condam ner
à Riom , et que j’espère faire rayer à tous momens. M. votre
p è r e , a p r è s a v o ir fait r a y e r celle q u ’il a déjà faite , pourra
au m êm e instant , s’il le j u g e à p r o p o s , la fa ir e r é ta b lir . Je
n’y suis que pour ma délicatesse seu lem en t, et j ’espère qu’il
cc
ne me refusera pas cette satisfaction lé g ère, q u i, dans aucun
cc
cc
«
«
cc
«
c<
cc cas , ne peut lui être dom m ageable , et qui a été pour moi
ce le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc
parlant.
A u su rp lu s, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M. V a u trin , et je m’en rapporte à ce qu’il vous conseillera
cc
cc à ce t égard.
Je vous re n o u ve lle , M onsieur, l’assurance de mon dévoue« m ent à vos in térêts, et de mon bien sincère attachem ent.
cc
«
S ig n é D e B a tz . »
II
�( 49 )
_
?f II,n e reste plus gu-un mütr àcdire sur l’elTet 'de cette
garantie, s’il tfaflloit eii’ Veriir à elle'; il est réglé par le
Code civil ^ iquiis’exprim e ainsi : ;
,* A rticle i ? 42 ^ c< T ou te ¡obligation de falrejse résout en
« dommages-intérêts, en cag de ;non-exécution.de:larpàr£
« du débiteur. »
A rticle 1184.
L a condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à »
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été e x é c u te ra le c h o ix , ou de forcer l ’autre à l’exé« cution de la convention lorsqu’elle est possible, o ird ’cn
« demander la résolution avec, dommage^ et intérêts.
« L a résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
L e sieur de la Roche-Lam bert a conclu à la résolution
de la vente de 1791 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui dem ande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
qlie lç sieur de la R.oche ~Lam bei t dut etie oblige de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a. point /«levé une
prétention aussi im m orale; il est vraisemblable qu’il s’en
G
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitim e : ainsi , à son
égard , il ^suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payem ens, puisqu’il s’y est én gagé, ou -qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendéur soit
à. l ’abri de toutes recherches;1
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
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A-RIOM, de l’imp. de T H I B A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1810,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53807/BCU_Factums_M0423.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54001/BCU_Factums_DVV02.pdf
536c1eb76f7cd39e1fc0fd9edc66e1b1
PDF Text
Text
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POUR
M' CONSTANT, AVOCAT.
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P R E C I S
DE RIOM.
( U iM m t w < v w w w » v \ '( W A W \ V
POUR
i re CHAMBRE.
Me J a c q u e s - F l o r e n t - G a b r i e l CONSTANT, A v o ca t,
habitant de la -ville d ’Issoire, appelant d ’un juge
ment rendu au tr ibun al civil de T hiers, le 19 janvier 1 8 3 1 , et intimé sur l ’appel d ’ un jugement
rendu au même tr ib u n a l, le 8 décembre 1 83o j
CONTRE
L e s héritiers D U P I C et la dame
C I I A L U S , cette
d e rnière , tant en q u a lité d ’héritière D U P I C , que
conune tutrice de ses enfans mineurs, tous habitant
au lieu du F
oulhouxy
com mune d ' E c o u toux , in
timés sur l ' appel du ju g em en t d u 1 9 ja n v ier 1 8 3 1 ,
et ladite
ment du
dame C I I A L U S
appelante
du j u g e
8 décembre i 8 3 o /
E T
CONTRE
L e s héritiers A N D R I E U X , tous habitans de la v ille
de T h i ers , intimés.
R I EN n’est plus simple que le fond de ce procès. Les héritiers
Dupic , comme représentant un sieur G randsaigne, jouissent à titre
pignoratif du domaine du Foulhoux. Cette jouissance, qui remonte
au mois d’octobre 17 56 5 a pour principe deux sentences, l’une du
�( * )
7 juillet 1753, et l’autre du 5 septembre i j 56 . Ces sentences con
damnent Clément Martin à payer à un sieur Philibert Grandsaigne
une somme de 4000 f r . , en conséquence permettent à ce dernier
de se mettre en possession , et de jouir des biens de son débiteur.
M e Constant représente Clément Martin. Ayant appris que le
domaine du Foulhoux était l’objet d’une poursuite en saisie immo
bilière , il a formé une demande en distraction , conformément à
l'article 727 du Code de procédure civile. M e Constant a conclu à
être reconnu propriétaire de l’immeuble saisi, et à sa mise en pos
session du domaine du Foulhoux.
11 se
fondait, d’une part, sur ce
que la créance Grandsaigne était éteinte, offrant d’ailleurs de donner
caution pour la somme de 4°oo fr., montant de cette créance, cl il
soutenait en second lieu qu’il y avait nécessité d’établir un séquestre
et d’enlever la jouissance du domaine du Foulhoux aux représentans Grandsaigne qui en abusaient, en y coupant les bois , et en
commettant des dégradations de tout genre.
L ’admission de cetle demande en distraction ne pouvait être
douteuse , puisqu’elle était fondée sur les titres mêmes rapportés
par les représentans Grandsaigne, les sentences de 17 5?> et 1756
qui apprennent que le vrai et seul propriétaire du Foulhoux était
îe sieur Clément Martin, et que Grandsaigne n’en jouissait qu’à litre
de nantissement jusqu’au moment où il aurait été payé du montant
de sa créance.
Aussi la difficulté ne s’est-elle point élevée sur le 'ond. Mais les
sentences de 1753 et 1756 avaient été précédées et suivies de pro
cédures volumineuses, et tissues avec art. Grandsaigne avait fait
intervenir dans ce procès des parties qui n’y avaient que faire ; il
avait élevé une foule d’incidens dans le but de l’obscurcir et de le
d Daturer ; c’est ce système que les héritiers Dupic ont agrandi et
suivi devant le tribunal de Thiers dans le but de retarder une dépossession, qui d’ailleurs est inévitable.
Les premiers juges se sont laissé abuser : un sursis a été prononcé
sous le prétexte que les sentences de 1755 et 1756 ne statuant pas
sur les intérêts de toutes les personnes qui y étaient parties, et que
ces sentences étant d’ailleurs attaquées par la voie de l’appel, il
�était nécessaire de vider ces différentes difficultés avant de faire
droit sur la demaude en revendication de Me Constant. Le tribunal
n’a pas vu que ces deux sentences avaient des dispositions intéres
sant exclusivem ent Clément Martin et le sieur Grandsaigne ; que
les droits de Grandsaigne , vis-à-vis Clément Martin , ayant une
origine et une cause déterminée entièrement distincte et séparée
de toutes les autres prétentions qui pouvaient s’élever dans le litige,
leur règlement ne pouvait dépendre de ce qui serait ultérieurement
décidé à l’égard des autres parties.
11 était évident
que Me Constant,
représentant Clément Martin , seul appelant, acquiesçant aux sen
tences de 1753 et 170 6 , les exécutant provisoirem ent, et se pla
çant ainsi dans la position la plus défavorable pour lui, avait le droit
de dire à ses adversaires : « les sentences de 1 r 55 et 1756 11e font
« outre chose , en votre faveur , que de vous reconnaître créan«■ciers de Clément M artin, que je représente, et de vous donner
« le droit de jouir de ses biens jusqu’au moment où vous serez
« désintéressés. Si la créance de 4000 lr. vous eût élé payée en 1755,
« vous n’auriez pas obtenu la jouissance du Foulhpux , il importe
« donc peu qu’un appel ait été interjeté de ces deux sentences
« par Clément Martin , puisque je les exécute aujourd’hui et vous
« accorde tout ce que vous pouviez exiger et
attendre
d’un
« arrêt. O r , je soutiens que vous êtes payés des 4000 fr. ; si
« vous 11c l’étes pas j'offre de vous désintéresser complètement :
« j’exécute donc ces sentences, qui 11c peuvent, quoi qu’il arrive,
« produire en votre faveur d’autre elî’ct que celui de vous re« connaître mon créan cier, e t , en cette qualité , de vous donner
« le droit de jouir de mes propriétés. Mais comme ces mêmes
« sentences ne vous accordent celle jouissance qu’à litre pigno« ratif ou de nantissement , et que le nantissement 11e peut
« continuer lorsque la créance est p a yé e , exécutez vous-mèmeces
« sentences , dont vous n’êtes point appelant, et qui sont votre seul
« titre, en me restituant ma propriété.»
C ’est pour ramener la cause à ces idées si simples , que l’on va
exposer les faits, et examiner les différons moyens qui peuvent s’e»
déduire.
�FAITS:
Un premier ordre de faits doit avoir pour objet de rechercher
les causes et la nature du litre qui ont fixé la propriété du domaine
du Foulhoux dans la famille M artin, aujourd’hui représentée par
M ' Constant.
Annet Treilhe et Jeanne-Marie Jolivet avaient eu 4 enfans : Jeanne
qui a épousé Pierre Martin (c ’est de ce mariage que sont issus C lé
ment et deux autres enfans, représentés aujourd’hui par M° Constant :)
G enest, dont la descendance est connue au pro cès, sous le nom de
Daiguebonne ; Jeanne-M arie, qui avait épousé un sieur D e L afoulhouse; enfin M arguerite, qui est décédée depuis long-tcms ,
sans laisser de postérité.
Un partage de la famille J olivet, sous la date du
5 mars
1G70 ,
avait constitué Annet T re ilh e , comme m a ri, créancier des Jolivet
d’une somme de
5 ,000
fr. Annet Treilhe et Jeanne-Marie Jolivet
étant décédés , leurs quatre enfans agirent contre Clément Jolivet
débiteur, et obtinrent le 18 août 1723 un arrêt qui déclara exé
cutoire le partage du
5 mars
1670, et condamna Clément Jolivet
à payer aux quatre enfans Treilhe la somme de 5 ,000 fr. avec
intérêts depuis le a 5 janvier 1698. L e compte de cette créance fut
réglé le
23
janvier 1724? des compensations qui avaient été
ordonnées par l’arrêt furent effectuées , et les Treilhe furent re
connus créanciers d’une somme de 9175 fr. 10 s.
En cet
état,
Louis D e Lafoulhouse, époux de Jeanne-Marie
Treilhe, alors déce lée, agissant, tant en son nom, que comme père
et légitime administrateur de ses enfans, céda à Pierre Martin ,
de Jeanne Jolivet, le quart de la créance due par Clément
Jolivet. Ce cédant donna à Pierre Martin pouvoir de se servir
mari
de son nom et d’agir conjointement avec les autres intéressés pour
faire procéder à la saisie immobilière des biens du débiteur. Celte
cession est sous la date du 11 avril 1701.
La saisie réelle fut effectivement pratiquée , le 26 mai suivant,
à la requête de Louis De Lafoulhouse 5 et ayant été confirmée par
un arrêt du ü 5 février 1734, il y eut bail judiciaire à Pierre Martin,
�sous la date du 21 mai 1740 > moyennant i 5o fr. par an, à dater
de la Saint-Martin 1759.
Pierre Martin est décédé le i 5 août j 7 4 1 • Genest Treilhe et
Louis De Lafoidhouse n’existaient p lu s, de manière que la saisie
immobilière dut cire poursuivie à la requête des héritiers de ces
différentes personnes.
Il est inutile de s’occuper des procédures qui ont eu lieu , tout
ayant été définitivemeu réglé par un arrêt du parlement de Paris
qu’il faut analyser avec soin.
Cet arrêt est sous la date du 27 juin 1 7 4 2•
On y voit figurer sur la même lig n e J e a n n e Treilhe , veuve de
Pierre Martin , agissant en son nom , exerçant ses droits e t en tant
que de besoin comme mère et tutrice de ses enfans mineurs ; M ar
guerite T reilh e, plus tard femme Daiguebonne , fille de Genest
T reilh e; J ea n C h è ze , époux de Marie De Lafoulhouse, fille de
Louis. Ces trois parties demandaient à être reconnues propriétaires
biens saisis, moyennant le prix qui serait fixé par experts.
En seconde ligne, se présente A n n eJ o liv et, lîlle et unique
héritière de Clément partie saisie.
des
Vient ensuite Marguerite T re ilh e , quatrième enfant d’Annet et
de Jeanne-Marie Jolivet , qui avait un intérêt commun avec ses
cohéritiers , mais qui préférait le paiement de sa portion de créance
en a rg en t, à la co-propriélé des immeubles appartenant à son
débiteur.
Enfin 011 trouve en qualité différons créanciers de la partie saisie,
parmi lesquels il convient de remarquer Gilberte Biozat , femme
Desholière ; plus tard on verra celle femme figurer sous le nom
de Grandsaigne , qui est devenu donataire de sa créance.
Il faut actuellement se fixer sur les dispositions de cel arrêt :
11 déclare
exécutoire contre Anne Jolivet les arrêts des
18 août 1725 et 20 février 1754 > et condamne en conséquence
A nneJolivet, en sa qualité d’héritière, à payer aux représentais
d’Annet Treilhe la somme de
5ooo
fr. avec intérêts et aux dépens;
20 L ’arrêt ordonne que quatre maisons situées à Thiers et le
domaine du F ou lh ou x, qui étaient tous les immeubles compris dans
�(G
)
la saisie « demeureront e n t o u t e p r o p r i é t é et possession aux
« représentans d’Annet T re ilh e , pour le p r ix porte en l’estimation
« qu i en sera fa ite p ar ex p erts ».
5° L ’arrêt
fixe dans quelles proportions les representans d’Annet
Treilhe doivent profiter du délaissement en propriété qui vient de
leur être fait. Il attribue les trois quarts de ces biens à ceux qui
avaient expressément conclu à être envoyés en propriété , c’est-àdire à la veuve de Pierre Martin ; à Chèze et à sa femme ( branche
Lafoulhouse ) ; et à la fille de Genest Treilhe (branche D aiguebonne ).
4° Quant à l’autre quart, l'arrêt l’accorde à Marguerite Treilhe ;
mais comme elle avait conclu au paiement de sa créance en argent,
l’arrêt fait dépendre son droit à la propriété, de l’option qu’elle sera
tenue de faire dans quinzaine , déclarant positivement qu’à défaut
par elle d’opter, cette faculté est référée aux cohéritiers de M argue
rite T reilh e; l’arrêt toutefois dit que celte dernière pourra prendre
le prix du quart de l’estimation en contribuant au quart des frais.
Tout cela réglé : l’arrêt, par une quatrième disposition, fait
main-levée de la saisie réelle et oppositions y survenues et en
ordonne la radiation.
5° L ’arrêt porte que si le prix de l’estimation excède les créances
des representans d’Annet Treilhe , ceux-ci paieront cet excédant
aux créanciers opposans, qui eux-mêmes pourront faire vendre
les immeubles en se chargeant de faire porter la vente à si haut prix
que les héritiers Treilhe soient payés du montant de leurs
créances,
condition pour l’exécution de laquelle les créanciers seraient
tenus
de donner caution , comme aussi d’user de cette faculté dans le
m ois, ou au moins de faire option dans ce délai, à peine de
déchéance.
G0 L ’arrêt est déclaré commun
à
tous les créanciers.
Cet arrêt a été signifié à procureur , le 17 juillet 1742. Dès cet
instant, le<lélai accordé pour opter a couru aux termes mêmes de
l’arrêt. Il
est
inutile peut-être de faire remarquer que les créanciers
n’ont point usé de la faculté qui leur était donnée ; mais Marguerite
Treilhe n’ayant pas fait son option dans le délai qui lui était imparti,
�a cto par cela même privée de toule espèce de droit à la propriété,
qui
a été irrévocablement acquise aux autres enfans d’Annet
T reilh e, et notamment à Jeanne, femme Marlin , qui fit cett^
option, option que scs enfans ont d’ailleurs plus tard renouvelée par
requête du 24 juillet 1 754*
11 paraît impossible de trouver un titre qui présente des caractères
plus certains de propriété. Aussi les Martin furent-ils obligés de
payer une somme de 2000 francs, pour droit de lods et ventes;
on rapporte les quittances qui sont sous les dates des 11 mai 1748
et 4 juillet 1752.
On doit, ici fixer un instant son attention sur les droits de chacun
des représentans d’Annet Treilhe , aux biens provenus d’Anne
Jolivct, et sur les causes qui ont fait que ces biens sont restés au
pouvoir des enfans de Jeanne Treilhe et de Pierre Martin.
D ’abord, on se rappelle que M arguerite, à défaut par elle d’avoir
fait l’option qui lui était déférée par l’arrêt de 1 742 > n’avait aucun
droit à la propriété de ces immeubles, cl que tout se réduisait,
pour elle , à recevoir le quart du prix de l’estimation.
E11 second lie u , Louis de la Foulhouse avait cédé scs droits
dans la créance Jolivct à Pierre Martin , par acte du 11 avril 1751.
Il résulte de ce fait, que le quart appartenant à de la Foulhouse,
était la propriété, ou de Jeanne Treilhe , pour qui Pierre Martin
son mari devait avoir acquis, 011 de Pierre Martin lui-m êm e, ce
qui est la même chose dans les intérêts actuels de M e Constant,
puisque les enfans Marlin n’en réunissaient pas moins, sur leur
tête, la moitié des biens délaissés en propriété par l’arrêt de 174 2E nfin, un quart devait appartenir à Genest T r e ilh e ( branche
d’Aiguebonne ) ; mais ce Genest était extrêmement obéré : il devait
à Pierre Martin des sommes bien plus considérables que la valeur
du quart de ccs immeubles ; aussi se garde-t-il bien de rien
réclam er.
On comprend donc actuellement les raisons qui ont fait que
tous les biens provenus d’Anne Johvet sont demeurés
dans la
famille de Pierre Martin, depuis le 28 mai 1740, époque du bail
judiciaire.
Ici se présente une nouvelle série de faits.
�Les deseendans de Pierre Marlin étaient en possession paisible du
domaine du Foulhoux, lorsqu’un sieur Philippe-Philibert De Grand«saigne tenta de les en dépouiller.
L e sieur De Grandsaigne avait fait souscrire, le 7 juillet 172 0 ,
à Pierre Marlin et à Genest Treilhe, une obligation de la somme de
4000 francs, payable dans un an , et causée pour prêt de 4 billets
de la banque ro ya le , de 1000 francs chacun. Cette obligation
n’avait point de cause réelle, les billets de la banque de L aw étant
absolument discrédités et n’ayant plus de cours au moment où
l ’obligation fut souscrite. O11 voit môme q u e, peu de jours après
cette obligation, un arrêt du parlement, du i5 août 172 0 , avait
annulé ces billets, en déclarant qu’ils n'auraient plus cours forcé
dans le commerce ni dans les recettes. Il était dès-lors évident que
le sieur Grandsaigne, avocat et homme très-délié on affaires, avait
abusé de l’influence qu’il pouvait avoir sur Pierre Marlin et Genest
Treilhe , pour leur faire supporter la perte de ces billets de banque
dont le prêteur n’avait peut-être point fait les fonds, ou qu’au moins
il avait bien certainement achetés à vil prix.
L e sieur Grandsaigne connaissait mieux que personne le vice
son tilre; il devait d’ailleurs craindre des explications peu hono
rables pour lui; aussi g a rd a -t-il prudemment le silence jusqu’au
de
décès de Pierre Martin et de Genest T reilhe, ses deux débiteurs.
Pierre Martin avait laissé quatre enfans : Clément, m ajeur,
Annet, Philippe-G enest, et Jeanne-Marie, mineurs, et qui étaient
sous la tutelle de Jeanne Treilhe leur mère.
C ’est contre ces personnes que le sieur Grandsaigne dirigea ses
poursuites, et obtint, le 17 août 174$ , u n e sentence par défaut
qui les condamna au paiement de sa créance. Le 25 du même mois
il y eut appel de cette sentence, et cet appel fut converti en opposi
tion, par acte du 19 novembre suivant.
Jeanne Treilhe est décédée en 1746.
L e sieur Grandsaigne devait éprouver quelques embarras pour
le recouvrement de sa créance. O11 a vu que Genest Treilhe était
extrêmement obéré ; qu’il deyait notamment à Pierre M artin, son
�beau-frère, des sommes bien plus considérables que la portion qu’il
avait à prétendre dans la créance Jolivet, circonstance qui l’avait
empêche de demander le partage des biens délaissés en propriété
par l’arrêt de 1 742 , et l’avait porté à les laisser au pouvoir de la
famille Martin.
Q u ’imagine le sieur Grandsaigne?
L e 8 octobre 17 4 6 , il fait souscrire à Jean Daiguebonne et à
Marguerite Treilhe sa femme
un acte par lequel ceux-ci lui
donnent en m andem ent leur portion dans la créance J o liv e t, sur
les immeubles délaissés par l’arrêt de la co u r, de 174 2 , pour le
paiement de l’obligation du 7 juillet 1720 : « Autorisant le sieur
« Grandsaigne a poursuivre le recouvrement de ladite part et
« portion par toutes les voies de justice-, contre les héritiers dudit
« Pierre M artin, détenteur desdlts biens. » Au reste Daiguebonne
se réserve d’intervenir.
Cet acte est aussi clair que positif. Il contient une délégation de
la part de Daiguebonne, en faveur de Grandsaigne; et cette délé
gation a pour objet de céder à ce dernier la créance Jolivet, pour
lui assurer le paiement de l’obligation du 7 juillet 1720; aussj
Grandsaigne 11c reçoit-L-il y par cet acte , d’autre pouvoir que
celui de poursuivre le recouvrement de la portion appartenant à
Daiguebonne, dans la créance Jolivet. Si Daiguebonne avait des
droits réels sur les ¡immeubles délaissés, il les conserve, et déclare
vouloir les exercer lui-même , en se réservant la faculté d’inter
venir.
L e procès mu entre le sieur Grandsaigne et les héritiers de
Pierre Martin prend ici 1111 caractère plus sérieux, et se complique
d’une foule de difficultés qui ont donné lieu à des procédures volu
mineuses. Les biens provenant des Jolivet appartenaient aux enfans
M artin, du chef de leur mère : ils avaient donc intérêt à ne point
t
représenter
leur
père;
v
•
aussi Clément Martin n’a c ce p ta -t-il la
succession de P ie rre , que sous bénéfice d’inventaire, et les deux
autres enfans répudièrent purement et simplement. Le sieur G rand
saigne, de son coté , pensant qu’il pourrait parvenir à faire décider
que les biens J o l i v e t appartenaient exclusivement à Clément Martin,
2
�(
'O )
comme héritier institué de sa m ère, et ne pouvant avoir l’espérance
de s’en emparer qu’autant que Clément serait considéré comme
héritier pur et simple de son p è re , critiqua la qualité d’héritier
bénéficiaire, que ce dernier avait prise. Sur cela, longs débats
dont aujourd’hui il est inutile de s’occuper, puisque la qualité
d’héritier pur et simple de Pierre Martin paraît reposer sur la tête
de Clément, et que d’ailleurs cette dificulté ne peut exercer aucune
influence sur la décision du procès actuel.
Mais cette procédure doit être examinée dans un autre intérêt.T
1
faut en extraire tout ce qui a le plus directement rapport à la mise
en possession que le sieur Grandsaigue a obtenue des biens appar
tenant à Clément Martin.
A cet égard ,
Un exploit du 19 décembre 1746 apprend que le sieur Grand
saigne fit dénoncer à Clément Marlin le mandement ou la déléga
tion du 8 décembre 174 6 , el qu’il conclut contre lui à ce qu’il fr t
condamné à lui p a y e r, comme possesseur du Foulhoux, la somme
entière de 4000 francs, y compris la portion pour laquelle D aiguebonne était tenu de cette d e tie , « si mieux n’aime Clément Marlin
ff délaisser à Grandsaigne la portion aflórente qui reviendra à la
« Daiguebonne dans le domaine du F oulhoux, suivant le partage
« qui en sera fait. »
Cette demande fut développée parle sieur Grandsaigne dans diffé
rentes
requêtes des 26 juillet 1748, 12 août et
23 décembre
i^So.
Les Daiguebonne , sur les sollicitations de Grandsaigne , inter
vinrent et cherchèrent à lui prêter leur appui.
Enfin Clément Martin combattit cas différentes prétentions par
des requêtes des 2 juillet 1748 et 26 juin 1751.
11 faut donner une esquisse rapide des systèmes qui étaient res
pectivement présentés.
D ’abord G rundsaigne, soutenant la validité du mandement de
174G, demandait que Clément Martin lût condamné par provision
à lui payer la somme de 4000 francs, se soumettant toutefois à
donner caution. Grandsaigne concluait aussi à ce que son adver-
�( 11
)
saire «• lui délaissât en hypothèque les immeubles provenant des
« Jolivet, pour, par lui Grandsaigne, en jouir ou les faire vendre
a sur simple placard. »
S’emparant plus tard de l’intervention des Daiguebonne qui
avaient donne leur consentement à ce que Grandsaigne les repré
sentât quant au partage des biens provenus des J o liv e t, et avaient
soutenu que leur amendement dans ces mômes biens était d’un
q u a rt, de leur chef, et de la moitié d’ un autre quart de la portion
acquise par Pierre Martin de Louis D e Lafoulhouse , dernière
portion pour laquelle les Daiguebonne déclaraient exercer la subro
gation légale , le sieur Grandsaigne concluait à cet égard à être
admis à représenter les Daiguebonne dans le partage à faire et à y
recevoir la portion qui revenait à ces derniers.
Clément Martin, de son côté, après avoir fait remarquer l’origine
odieuse de la créance du sieur Grandsaigne cl le silence qu’il avait
gardé pendant près de
5o
ans , soutenait que le mandement du
8 décembre
174G ne pouvait produire aucun effet; que lui-même ,
Clément Martin , était créancier des Daiguebonne de sommes
considérables dont il faisait connaître le chiffre et les titres. En
conséquence , tout en Concluant à ce que le sieur Grandsaigne fût
débouté de sa demande, Clément Martin soutenait que les immeubles
appartenant aux Daiguebonne devaient être affectés et hypothéqués
au paiement des créances personnelles qu’il avait contre e u x , et
demandait
même expressément qu’il lui fût permis de jouir pignora-
tivement de ces immeubles, si mieux il n’aimait les faire vendre sur
simplejplacard.
Quant à la prétention des Daiguebonne , ayant pour objet d’ob
tenir , par voie de subrogation légale , la moitié du quart vendu à
Pierre Martin par Louis De Lafoulhouse, la réponse de Clément
Martin était simple et péremptoire : Pierre Martin 11’avait pu
acquérir c t n’avait réellement acquis que uxorio nomine ; or
l’action en subrogation ne pouvait être légitimement exercée contre
Jeanne Treilhe-, co-pçppriétaire des biens provenus des Jolivet.
C ’est en cet état qu’est intervenue la sentence du 7 juillet 175 3 ,
dans laquelle figurent comme parties ,
%
�( 12 )
i 0Le sieur Grandsaigne; 20 les Daiguebonne;
5° Clément Martin;
4° Philippe-Genest
et Jeanne-Marie Martin.
Cette sentence a diiTérentes dispositions qu’il faut analiser.
i° E lle reconnaît que la renonciation faite par Philippe-Genest
et Jcanne-Marie Martin à la succession de Pierre leur père est
valable ; en conséquence, elle les met hors de cause;
2° Sans avoir égard aux lettres de bénéfice d’inventaire obtenues
par Clément M artin, elle le condam ne, comme seul et unique
héritier de Pierre , à payer à Grandsaigne la somme de 4000 fr.
3° Pour
parvenir au paiement de cette som m e, la sentence ayant
égard à une saisie-arrêt, qui avait été pratiquée p arle sieur Grand
saigne en i j 32 entre les mains des Jolivet, et à la délégation faite
par les Daiguebonne, le 8 décembre 1 7 4 6 , « permet au sieur
« Gandsaigne de se mettre en possession et de jouir des immeubles
îc compris en l’arrêt de délaissement du 27 juin 174 2 , provenant
«■des Jolivet, si mieux n’aime les faire vendre........ et même des
« biens propres dudit Martin. »
4°
Pour fixer la portion des Daiguebonne et celle de Clément
Martin sur lesdits biens, la sentence ordonne le partage entre C lé
ment Martin et les Daiguebonne.
5° Enfin celte semence ordonne que les Daiguebonne et Clément
Martin feront, lors du partage , leur prélèvement respectif, notam
ment , dit la sentence , « lors duquel partage Daiguebonne et sa
« femme feront raison à M artin, sur leurs portions, des sommes
« qu’il justifiera avoir payées en l’acquit de Genest T re ilh e , leur
« père et beau-père , et par exprès de celle de 2000 lit ainsi
v qu’ils sont ci-dessus adjugés. »
L e sens de cette sentence est facile à saisir :
Clément Martin est condamné à payer au sieur Grandsaigne la
totalité de l’obligation du 7 juillet 1720, souscrite par Pierre M ar
tin et Genest Treilhe.
L e sieur Grandsaigne n’esl point admis à représenter les D aigue
bonne au partage des biens provenant des J o liv e t, parce que le
jugement reconnaît que Clément M artin, 011 Pierre son p è re , ont
p ayé, à la décharge de Genest T reilh e, représenté par les D aigue-
�bonne, des sommes que ces derniers doivent tenir à compte sur
leur portion. C ’est, par cette raison qu’en constituant Clément Martin
débiteur de Grandsaigne de la somme de 2000 fr. due par les Daiguebonne , la sentence donne titre à Clément M artin, pour les pré
lever sur la portion de ces derniers, de la même manière que les
autres sommes qui auraient etc payées pour le compte de Genest
Treilhe.
Cette combinaison donnant à la délégation du 8 décembre 1746
tout l’eiTet qu’elle pouvait avoir; libérant en conséquence envers
Grandsaigne les D aiguebonne, qui devenaient par cela même dé
biteurs de Clément M artin, il convenait de donner à Grandsaigne,
qui n’avait plus qu’un seul débiteur (Clém ent M artin) , un titre qui
assurât le paiement de sa créance : c’est ce que la sentence fait en
envoyant Grandsaigne en possession non seulement des immeubles
compris en l’arrêt de délaissement du 27 juin if1’7 4 2 , mais encore
des biens propres à Clément Martin.
Ici donc tout est positif :
D aiguebonne, représentant Genest T reilh e, est libéré vis-à-vis
le sieur Grandsaigne, mais en même temps il devient débiteur de
Clément Martin.
Clément Martin est lui-même seul débiteur de Grandsaigne.
G randsaigne, à cause de sa créance , est dès-lors envoyé en
possession des biens qui sont au pouvoir de Clément Martin.
Si Clément paye Grandsaigne , ou si la créance de ce dernier est
éteinte par la perception des jouissances qu’il a faites, il y a nécessité
remette les immeubles qu’il a reçus en nantissement de Clément,
sans q u e, sous aucun prétexte, il lui soitpermis de retarder sa déq u ’ il
possession, même en excipant des droits des D aiguebonne, droits
qui, d’ailleurs , n’appartiennent pas à Grandsaigne, et auxquels la
sentence l’a reconnu entièrement étranger.
Mais c’est ainsi que le sieur Grandsaigne lui-même entendait la
sentence de 1753.
E ffectivem ent, le 0.8 août , Grandsaigne fit à Clément Martin
commandement de payer les 4000 f r . , lui déclarant que , faute de
ce faire, il se mettra en possession dns biens conformément aux
dispositions de la sentence du 7 juillet.
�(
Lo
5i
«4
)
du racine m o is, Grandsaigne se présenta au domaine du
Foulhoux avec un notaire ; on lit dans le procès-verbal que Grandsaigne avait cité envoyé en possession pignorative de ce domaine ,
et que voulant user de son droit pignoratif, il demandait à être mis
en possession réelle.
Cette tentative du sieur Grandsaigne ne réussit pas : il trouva au
domaine du Foulhoux Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin qui
s’opposèrent à sa mise eu possession, et soutinrent que les immeubles
provenus des J o liv e t, compris en l’arrêt du 27 juin 1742, ainsi
que les biens de Jeanne Trcilhe leur m ère, avaient cté partagés ;
que Clément Martin avait eu à son lot les maisons et les moulins
situés à Tliiers , et qu’eux-mêmes avaient obtenu le domaine du
Foulhoux. Pour preuve de leur assertion, Philippe- Genest et
Jeanne-Marie Martin rapportaient un bail à ferme consenti par eux
à un nommé S o v e r, sous la date du 29 août , mais qui avait com
mencé et pris cours depuis la Saint-Martin précédente.
Cette opposition fut l’origine de nouveaux débats, pendant le
cours desquels le sieur Grandsaigne fît intervenir plusieurs per
sonnes, et s’épuisa en efforts pour enlever à la famille Martin la
propriété du Foulhoux.
L e I er septembre 1 7 5 3 , G ra n d sa ign e fit. donner assignation à
Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin ; il exposa que la sen
tence du
7
juillet
1753
lui permettait de jouir du domaine du
Foulhoux par droit pignoratif ; il demanda en conséquence main
levée de l’opposition qui avait été formée
à
sa prise de possession ,
et conclut expressément contre Philippe-Genest et Jeanne-Marie
Martin , à ce que, à tilre de dommages-intérêts, ils lussent tenus de
lui payer la créance à laquelle Clément Martin avait etc condamne
par la sentence de
1755.
De leur c o té , et par exploit du même jo u r, les Daiguebonne
dirigèrent une demande ayant pour objet de faire déclarer com
mune
à Philippe G enestet à Jeanne-Marie Martin la disposition delà
sentence du
7
juillet
1753,
qui ordonne le partage des biens prove
nus des Jolivet avec Clement Martin; et, par suite, les Daiguebonne
demandaient que les Martin rapportassent les jouissances du domaine
du Foulhoux depuis l’époque de leur mise en possession.
�Ces instances se compliquèrent par l'appel en cause ou par l’in
tervention de plusieurs parties.
Clément Martin figurait au procès.
Grandsaigne comparaissait, soit en qualité (le donataire de
D esholière, créancier des Jolivet, et qui était partie en l'arrêt de
174 2 ; soit comme subrogé aux droits de Marie De Lafoulhouse ,
femme Chèze ( sans toutefois produire aucun acte de cession ) ;
soit enfin comme cessionnaire des Daiguebonne.
Enfin Grandsaigne avait fait intervenir Anne Jolivet elle-m êm e,
qui avait été irrévocablement dépouillée de sa propriété par
l’arrêt de i'/42Quelles étaient les prétentions de ces différentes parties?
Grandsaigne, par sa requête du 19 août 175 4 , demandait à être
subrogé à l’exécution de l’arrêt de 174 2 , on conséquence, du con
sentement des M artin, à être autorisé à faire faire l’estimation o r
donnée par ledit arrêt ; et si le prix des immeubles délaissés en
propriété excédait le montant de la créance Martin , Grandsaigne
voulait que cette différence lui fût payée , comme représeniant
Desholière. Cette prétention de Grandsaigne était admissible; mais
il ajoutait que conformément à l’arrêt, il voulait que les immeubles,
objets de la contestation, lui appartinssent en tonie propriété pour
le prix de l’estimation , et qu’à cet effet l’arrêt fût déclaré exécutoire
contre les M artin, en leur qualité d’héritiers de Pierre leur père.
Cette demande de Grandsaigne était insoutenable: il essayait d’inter
vertir son titre ; mais cette tentative était repoussée par l ’arrêt de
1742, et plus fortement encore par la sentence du 7 juillet 1755 ,
qui reconnaît que Philippe-Genest et Jeanne-Marie M a r t i n ont
valablement renoncé à la succession de leur père , et qui n’accorde
à Grandsaigne qu’une simple jouissance à titre pignoratif sur les
biens compris en l’arrêt de 1742.
L a requête d’intervention d’Anne Jolivet est du 21 juillet 17 55 Cette intervention avait été requise par le sieur Grandsaigne.
Quoi qu’il en soit, Anne Jolivet conclut à l’exécution des arrêts
des 18 août 172^ et 27 juin 1742. E lle demande que le compte de
la créance ïr e ilh e soit réglé , que l ’on
en
déduise
les
jouissances
�( IG )
<lcs immeubles délaissés, et ce depuis 1731 : la Jolivet offre de
délaisser des immeubles jusqu’à concurrence de la somme qu’elle
restera devoir. E lle demande une provision alimentaire de i 5oo fr.,
et subsidiairement elle conclut à cire délaissée à se pourvoir en
interprétation dcl’arrêt de 1742.
Les demandes d’Anne Jolivet ne présentaient rien de sérieux.
L ’arrét de 1742 avait irrévocablement transmis la propriété de ses
biens aux Treilhe. Amie Jolivet n’avait donc plus qu’une chose à
surveiller, c ’était l’estimation des immeubles à l'effet de savoir si ,
les dettes payées, il n’y aurait pas un excédant de prix qui dut lui
revenir et lui cire payé par les héritiers Treilhe. L e droit de la
J o liv e t, resserré dans ces termes, ne pouvait lui être contesté.
Philippe-Genest et Jeanne Martin développèrent leurs moyens
dans des requêtes qui sont sous les dates des 10 mai, 24 juillet 1 7 54
et 12 août 1755.
j Ils soutenaient que le domaine du Foulhoux leur avait ete délaissé
pour leur portion héréditaire dans la succession de Jeanne Treilhe
leur mère , et demandaient que Clément Martin fût tenu de recon
naître que le domaine du Foulhoux leur avait été délaissé à titre de
partage.
S ’occupant ensuite
de la branche de Louis De
Lafoulhouse ,
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin demandaient à être sub
rogés à la cession que ce Louis De Lafoulhouse avait faite , le
1 1 avril 1731 , à Pierre Martin leur aïeul, du quart de la créance
Jolivet.
Les Martin , examinant leur position relativement à M arguerite
Treilhe qui avait un quart d e là créance J o liv e t, renouvelaient,
à cet égard , l’option qui avait été faite par Jeanne Ireiliie leur
mère de p a y e r, en arg en t, le quart du prix de l’estimation qui
serait faite des immeubles délaissés par l’arrêt de 17^2.
Philippe-Genest
et
Jeanne-Marie Martin devaient peu s’occuper
des Daiguebonne et de l’intervention d’Anne Jolivet, tout étant,
sous ces deux rapports, réglé par l’arrêt de 1742 et la sentence
de 1753.
Sur ces différentes discussions, est intervenue la scntcnco du
�3 septembre 17 5 6 , qui 'ordonne que l’arrêt du 27 juin 1742 sera
exécuté selon sa forme et teneur ; qu’en conséquence, Grandsaigne,
les Daiguebonne, Clément, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin
feront procéder à l’estimation , tant du domaine du Foulhoux , que
des maisons de T h iers, dont le délaissement a été ordonné par
l’arrêt de 1742; que cette estimation comprendra les jouissances ,
dégradations et améliorations qui ont eu lieu depuis l’expiration du
bail judiciaire.
L a sentence porte que les trois enfans Martin nommeront un
e x p e rt, que Grandsaigne et Daiguebonne en choisiront un autre ,
et qu’Anne Jolivet assistera à l’estimation des experts pour y faire
scs observations.
La dernière disposition de cette sentence est ainsi conçue : «■et
« jusqu’après ladite estimation, avons sursis à faire droit sur les
« contestations des parties; et cependant, parprovision, permettons
«
«
«
«
«
à Grandsaigne de se mettre en possession du domaine du F oulhoux...... pour en jouir conformément audit arrêt et à la sentence
du 7 juillet 1755 , à la charge par lui de donner caution jusqu’à
concurrence des jouissances qu’il percevra à l’avenir, en payant
par lu i, toutefois, pour chaque année de sa jouissance, à chacun
« de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie Martin, 100 francs jusqu’à
« fin de cause, à com m encera la Saint-Martin 1757.
Cette sentence fait naître plusieurs réflexions, sur lesquelles il*
convient de se fixer.
D ’a b o r d ,
on s’assure que les prétentions d’Anne Jolivet sont défi
nitivement repoussées par la sentence de 176 6, qui ordonne l’exécu
tion pure et simple de l’arrêt du 27 juin 1742 , ce qui est assez dire
que les immeubles provenant des Jolivet sont, depuis cette époque,
la propriété delà famille Martin; aussi Anne Jolivet n’est-elle point
admise à concourir à la nomination des experts qui doivent pro
céder a l’estimation : elle reçoit seulement la faculté d’assister à l’opé
ration , pour y faire des observations; et pourquoi? si ce n’est
parce que 1 arrêt de 1742 lui réservait implicitement le droit de
percevoir ce qui resterait du prix dos immeubles, la créance Treilhe
cl les autres dettes payées.
�Celte semence fait ensuite concourir à l’estimation des immeubles
provenant de la J o liv e i, d’un côté, les trois enfans de Pierre
Martin qui doivent choisir un expert; de l’autre, Grandsaigne et
Daiguebonne qui ont le droit de nommer le deuxième expert.
A cet égard , les intérêts de Grandsaigne et Daiguebonne étaient
de même nature : ils se rapprochaient sur plusieurs points; on peut
même dire que la délégation du
8
décembre 1746 était un lien
commun entre ces deux parties.
Effectivement, Grandsaigne, comme donataire de la dameBiozat,
femme D esholière, qui figurait dans la sentence de 17 4 2 ; comme
créancière des Jolivct, avait intérêt et droit de concourir à l'esti
mation des immeubles provenant de son débiteur puisqu’il était
possible que le résultat de cette opération lui fît obtenir le paiement
de sa créance. D’un autre côté , Grandsaigne se disait subrogé aux
droits de la branche de la Foulhouse, par l’effet de la cession que
lui avait consentie Jean Chèze , il est vrai que cet acte n’a jamais été
p ro d u it, que la date n’en n’est pas connue, qu’011 ne la rapporte
pas même aujourd’hui, mais si celte cession existe, bien certaine
ment elle ne peut comprendre les droits personnels de JeanneMarie T reilh e, femme de la Foulhouse, dans la créance due par
les J o li v e t, puisque Louis de la Foulhouse avait lui-môme vendu à
Pierre Martin son quart dans cette créance, par acte du 11 avril
• 17 5 1. La cession faite pas Chèze à Grandsaigne, jusqu’ici inconnue,
mais nécessairement d’une date postérieure à celle
de
la Foulhouse,
ne pouvait donc porter que sur le tiers du quart revenant aux de
la Foulhouse , du chef de Marguerite T reilh e, décédée ab intestat
et sans postérité. Sons ce rapport 011 comprend parfaitement que
Grandsaigne avait le droit de faire ce que Marguerite Treilhe aurait
fait elle-m êm e, c ’est-à-dire de concourir à l’estimation des biens
J olivct, à l’effet de connaître la somme qui lui revenait pour son
quart de créance, quart qu’elle ne pouvait au reste recevo ir, aux
termes de l’arrêt de 17 / p , qu’en contribuant suivant son
ment aux frais de l’estimation.
am ende
Quanta D aiguebonne, il a déjà été remarqué que la se ltence
de 17 5 3 , en ordonnant le partage avec Clément M artin, voulait
�que cc dernier préleyàtla somme de 2000 fr. due par Daiguebonne
à Grandsaigne pour moitié de l’obligation du 7 juillet 172 0 , plus
toutes les sommes qui auraient été payées en l’acquit de Genest
Treilhe , beau-père de Daiguebonne. On sent que le partage o r
donné par la sentence de 1753 se réduisait dès-lors, pour D aigue
bonne , à une estimation qui seule pouvait lui apprendre si son
quart dans les biens Jolivet était absorbé par les prélèvemens de
Clément Martin , ou si au contraire il pouvait encore y prétendre
quelque chose.
11 était
donc naturel que Daiguebonne se réunît ù
Grandsaigne pour cette estimation; d’ailleurs la délégation du 8
décembre 1746 semblait établir entre eux une espèce de commu
nauté d’intérêts.
Les trois enfans Martin avaient le droit de choisir un expert; aussi
étaient-ils liés par un intérêt commun et contraire à celui de toutes
les autres parties. Les Martin devaient effectivement désirer que la
valeur des biens provenus de la Jolivet n excédât pas le montant de
la créance qu’ils avaient contre cette famille, créance qui avait servi
de base à l'arrêt de 1742.
Mais la sentence de 17 56 a-t-elle apporté quelque changement
au mode de jouissance de Grandsaigne?
D ’abord, on voit qu’en 17 5G comme en 1753 la cause de celte
jouissance est la m êm e, et qu’elle a toujours pour objet le paiement
de l’obligation de 4°oo fr. Ensuite la sentence de i y 56 est loin
d ’intervertir le mode de jouissance accordé
à
Grandsaigne par celle
de 1753; au contraire, c ’est toujours à titre pignoratif que G rand
saigne est envoyé en possession; la sentence de 1756 impose même
à cette possession des conditions plus dures que celle de 17 5 5 ,
puisqu’elle exige que Grandsaigne fournisse caution pour le fait de
sa jouissance future, et paye annuellement
1O0
francs
à
chacun
de Philippe Genest et Jeanne-Marie Martin.
Pourquoi la sentence de 1756 imposait-elle ces charges à Grand
saigne?
Le motil eu est facile à découvrir. Grandsaigne
O avait été envoyé
J
en possession de propriétés appartenant à Jeanne T reilh e; les enfans
Martin avaient recueilli ces biens dans la succession de leur mère ;
�( 20 )
Grandsaigne n’était créancier que de Pierre Mariiu et de Genest
Treilhe; il ne pouvait donc être envoyé en possession des biens
provenant des Jolivet, que par deux motifs ; le premier résulte de
ce que Clémeni M artin, ayant fait acte d’héritier de P ie rre , était
tenu sur ses propres biens des dettes de son père; le second se
déduit de Ja délégation Daiguebonne, qui donnait à Grandsaigne le
droit de se faire payer de la moitié de son obligation sur le quart des
biens Jolivet appartenant à Daiguebonne. Ainsi Clément Martin et
les Daiguebonne étant les seuls débiteurs de Grandsaigne, et la
sentence de 1755 ayant même libéré les Daiguebonne envers
G randsaigne, en chargeant Clément Martin de payer la totalité de
cette créan ce, il est sans diiliculté que Grandsaigne, du chef de
Clément, pouvait être envoyé en possession des biens provenant
de Jeanne Treilhe.
Mais il n’en était pas de même relativement à Philippe-G enestet
Jeanne-Marie Martin: ceux-ci ne devaient rien à Grandsaigne, et
s’ils parvenaient à prouver qu’ils étaient propriétaires du domaine
du Foulhoux, il devenait certain que ce bien leur provenant du
chef de leur m è re , qui elle-même n’était pas débitr ce de Grand
saigne, ce dernier ne pouvait en être mis en possession sans fournir
Caution, et sans donner une portion des revenus aux co-propriétaires
présumés du domaine du Foulhoux.
O11 voit donc ici quel était l’objet du sursis prononcé par la sen
tence de 175G. La difficulté était de reconnaître le propriétaire
dudit domaine du Foulhoux. Etait-ce Clément Martin, ou au con
traire Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ? ces différentes
personnes avaient-elles des droits ? quelle était la proportion de
leur amendement ? tonies ces questions s’élevaient alors et pourraient
encore s’élever si les enfans Martin étaient eu présence, avec des
intérêts contraires. Mais aujourd’hui ces questions sont oiseuses et
inutiles, puisque M* Constant représente les trois enfans Martin, et
qu’il vient dire à Grandsaigne : « j’exécute provisoirement les
« sentences de 1753 cl 175G, en vous payant la somme de -jooo
»r francs, qui vous est due du chef de Clément Martin; vous êtes
« yous même dans la nécessité de les exécuter en me rendant les
�* propriétés que vous avez en nantissement du chef de Clément;
« il ne peut plus y avoir aujourd’hui de difficultés à reconnaître le
« véritable et l’unique propriétaire du Foullioux , puisque seul je
«■représente tous ceux qui y prétendaient droit. »
Grandsaigne fit signifier cette sentence par acte du 1 5 octobre
suivant, mais les Martin ayant interjeté appel, tant de la sentence
du 3 septembre 1756 que de celle du 7 juillet 1 7 5 5 , il intervint
deux arrêts des 2 et 22 du même mois d’octobre, qui reçoivent les
appels et accordent des défenses indéfinies.
C ’est dans cette position que Grandsaigne prit possession du d o
maine du Foulhoux : le procès-verbal, qui est sous la date du 25
octobre, constate que Clément M artin, qui était dans ce domaine,
s’opposait à la mise en possession , mais que le fondé de pouvoir de
Grandsaigne objecta à Clément Martin qu’il n’avait aucun droit à la
propriété de ce domaine , qu’il l’avait reconnu lui-même en ne con
testant pas que par l’événement d’un partage il était échu au lot de
son frère et de sa sœur. Ainsi Grandsaigne était réellement en pos
session, lorsque, le 19 janvier 1758, intervint un arrêt q u i, levant
les défenses indéfinies accordées contre les sentences du 7 juillet
1753 et 3 septembre 1756 et ordonne que ces deux sentences
seront exécutées, mais seulement dans deux de leurs dispositions,
la première celle qui permet à Grandsaigne de se mettre en posses
sion , la seconde celle qui ordonne qu’il sera procédé à l’estimation
des immeubles provenus d’Anne Jolivet.
V oici le tableau de cette opération qui a été faite, le
4
octobre
1758.
i° L e domaine du Foulhoux, déduction faite de
1679 francs 19 cent, de réparations, a été estimé
Ï1221 fr. ; c i.........................................................................
20 La maison Gourbine a été évaluée 2400 fr. ; mais
comme la sentence de 1755 ordonnait que pour cet
objet il ne serait, fait rapport que de 1800 fr. , on ne re
tiendra que cette dernière somme; c i...............................
11221 f.
1800
5° Les
deux maisons situées, rue de la M alprie, sont
estimées à 1200 fr. j c i..........................................................
j
200
14221 f.
�R eport. . . .
4°
1 4 2 2 1 f.
La maison située, rue du Piaure, est estimée à
1000 fr. : ci
5°
ÏOOO
A ccs différentes sommes il convient d’ajouter le
montant des dégradations estimées par les experts à
222 fr. c i.................................................................................
T o t a l ........................
222
1
544^
^
Dans celte estimation gén érale, on remarque celle du domaine
du Foulhoux, qui y figure pour la somme de 11,221 fr. Les
experts n’avaient à s’occuper que des biens provenus de la famille
Jolivel; aussi ont ils restreint leur estimation aux héritages qui
composaient ce domaine à l’époque de l’arrêt de 1 7 4 2 ; mais
Clément Martin , qui par lui ou par sa mère avait fait des acquisi
tions considérables fit remarquer ce fait aux experts qui en re
connurent la vérité, et déclarèrent que leur estimation du domaine
du Foulhoux était faite sans y comprendre aucune des acquisitions
qui auraient eu lieu depuis
17 4 2 .
Pour ne rien négliger, on doit dire qu’en 1770 les deux maisons
situées, rue de la M alorie, se sont écroulées, que les matériaux et
remplacement ont été vendus, qu’enfin le prix de celte vente a été
reçu, moitié par les héritiers G raudsaigne, et moitié par les Martin,
ainsi qu’il résulte d’une quittance du 8 juin i r}rj 5 .
L e résultat de cette estimation suilit pour faire apprécier l’intérêt
des Daiguebonne , et faire connaître les causes
qui
ont fait que celte
branche de la famille Treilhe n’a jamais fait effectuer le partage
qui était ordonné par la sentence du 7 juillet 1 7 5 f>.
On a vu que cette sentence admettait Clément Martin à prélever
sur la portion Daiguebonne, non seulement les sommes qu’il justi
fierait avoir payées en l’acquit de Gènest Treilhe , mais encore
de 2000 fr. faisant moitié des 400° ^r- > au paiement
celle
desquels
Clément Martin était condamné envers Grandsaigne.
11 faut
avec ces élémens établir la situation des Daiguebonne.
Les enfàns Martin avaient à reprendre contre eux
�i* L a moitié d’une créance due au sieur Barthélémy
Baudiment, et réglée par acte notarié , jlu G octobre
1742, à i 65 o 1.; moitié 825; c i...................................... .
20 La moitié de la créance G randsaigne, liquidée par
la sentence de 1753, à 4012 fr.; moitié 2006 fr. ; ci. . .
5° Pour le tiers , du par les D aiguebonne, des frais
825 f.
2006
ordinaires et extraordinaires de criées, et autres, 982 f.;
c i..................................................................................................
4 ° L e tiers de la somme de 5oo f r . , payé par Pierre
O82
Martin à Grandsaigne pour le compte de Marguerite
Treilhe , le 21 novembre 1740 , 100 fr. ; c i....................
Total èn capital,
3g i 3'fr .
; c i..........................................
100
5g i 3 f.
5° 11 faut ajouter les intérêts de cette somme depuis le
11 novembre 174 2 jusque à pareil jour de l’année 1768,
ce qui donne
3 1 5o
fr. ; c i . ..................................................
3 1 5o
6° Les Daiguebonne étaient aussi débiteurs d’une
obligation consentie par Marie-Anne C lu ze l, leur mère ,
à Clément M artin, le 26 janvier 17/17, se montant à
25oo fr. ; c i.............................................................................
,
25oo
70 Les intérêts de celte somme , depuis la dem ande,
qui est du mois de mai 1747) jusqu’au 11 novembre
17 5 8 , donnent un total de 1437 fr.; c i...........................
1437
8° Il faut ajouter le tiers des droits de lods et ventes
payés en 1748, pour les biens adjugés en 1 742, 700 lr.;
c i.................................................................................. ...
(j° Enfin les intérêts de ces droits de lods, depuis le 11
novembre 1748 jusqu’à pareil jour de 1758 , 55o fr. ; ci.
700
55o
---------- — »—
Total des sommes dues par les Daiguebonne, et dont
Clément Martin devait faire reprise lors du partage o r
donné par la sentence do 17 5 3 , c i...................................
I 2o 3o f.
11 convient d’opposer à ce tableau l’ensemble de tous les droits
et reprises que les Daiguebonne pouvaient avoir contre Clément
Martin.
i° Les Daiguebonne avaient droit au tiers des immeubles dé
laissés par l’arrêt de 1742 > c’est-à-dire au tiers de la somme
�R eport.
544
5 48
de i
^ ii'-j prix de l’cstimation, i
; ci. .
20 Ils avaient également droit au tiers des
jouissances du domaine du Foulhoux, éva
luées par les experts
743
à
. . .
5 14^ f-
la somme de 2120 fr.
pour les années i
, 1744 » 1 74^i *74^ »
1747 et 1748 , à raison de 424 fr. par an; ce
tiers montant à 707 fr ; c i...................................
°Pourle tiers d e s jouissances dudit domaine
5
estimées 420 f. pour 1749 , 14°
? ci. • . •
° Au tiers des jouissances du même do
4
maine , évaluées à 44° fr* pour chacune des
années 1750, l ' j S i , 17 a , 17 5 3 , 1754 et
1755, et formant un total de 2200 fr., somme
3
i a o o f.
/
707
*4°
5
dont le tiers est de 753 fr.; c i...........................
° L e tiers des mêmes jouissances, estimé
5
f annuellement à 420 fr. pour les années
733
1^ 5 6 ,
1767 et 1758 , formant un total de 12G0 f r .,
dont le tiers est de 420 fr.; ci...........................
6° L e tiers des intérêts de la maison vendue
au sieur G ourbine, moyennant 1800 fr. , ce
4 20
qui, à 90 fr. par an, donne pour 16 ans un total
de 144° f r , , dont le tiers est de 480 fr. ; ci. .
480
70 L e tiers des jouissances des deux maisons
situées rue de la Malorie , évalué par les ex
perts, à
45 fr.
par an : cequi forme pour
16
ans,
un total de 720 fr., dont le tiers est 240 fr. ; ci.
Enfin le tiers de i0 ans de loyer de la
maison située rue du Piaure, qui, à raison de
240
40 fr. par an, donne un total de 640 fr., dont
le tiers est de 2 1 3 fr. ; c i...................................
T o ta l
2 13
des droits et reprises des D aigue
bonne au 11 novembre 1758 .; 8081 fr. ci.
Calcul qui constitue les Daiguebonne débi
teurs dos Martin tic la souunc tic 3949 fr. ; ci.
8081 f.
8081
3949
�(
*5
)
Ce tableau explique parfaitement la cause du silence des D aiguebonne et le peu d’intérêt qu’ils avaient à donner suite à une action
en partage qui ne pouvait que leur devenir nuisible; aussi depuis
la sentence de 1 7 56 ne les voit-on plus figurer dans le procès ni
donner suite au partage ordonné en iqS'S.
L e sieur Grandsaigne représentait la dame Biozat , femme
Desholière, en vertu d’une donation du 28 novembre 1753. Il faut
se rappeler que cette créancière était partie en l’arrêt de 174.2,
et devait être payée si le prix de l'estimation des biens Jolivei.
excédait la créance de la famille Treilhe. C ’était tout l'intérêt que
Grandsaigne pouvait avoir du chef de la Desholière 3 lors de la
sentence de 1756.
O11 éclaircit ce point de difficulté en se mettant sous les yeux le
tableau du compte de la créance des enfans Treilhe contre les
Jolivet.
Cette créance se compose :
i° Du capital qui est de la somme de
5ooo f. ; c i..............................................................
20 Des intérêts de cette somme depuis le
5ooo f.
a 3 janvier 1698 jusqu’au 11 novembre 1742 >
jour de l’expiration du bail judiciaire, le tout
conformément à l’arrêt du 8 août 17 2 5 , et
déduction faite des compensations ordonnées
par ledit a r r ê t, 9073 fr.; c i...............................
9°7^
3° Les frais et dépens adjugés par l’arrêt
de 174 2 , et liquidés le 22 décembre 1761 ,
à la somme de 2946 fr. ; c i...............................
T
Si
otal
d elacréan ce Treilhe, 17109 fr.; ci.
2946
17 ,0 19 fr.
on rapproche le total de cette créance de celui obtenu par les
experts, lors de l'estimation des biens provenus des Jolivet, dernier
total qui se porte à 1 544 ^ fr*» on voit que les Treilhe étaient encore
créanciers des Jolivei de lu somme de 1576 0’-; q u ’ainsi, aux termes
de l’arrêt de 17/(2, la dame Biozat, femme Desholière, n’avait ri™
a prétendre sur le prix des immeubles délaissés en propriété à la
�( 26 )
famille T reilh e, puisque cette famille devait être payée avant tous
les autres créanciers.
Pour ne rien laisser à désirer , il faut dire un mot de la position
du sieur G randsaigne, dans le cas oii il établirait qu’il représente
Jeanne-Marie Lafoulhouse , femme C h èze, pour les droits que
celle-ci amendait dans la succession de Marguerite Treillie sa tante.
Cette Marguerite Treilhe a v a it, suivant l’option qui avait été
faite contre elle , conformément à l’arrêt de 1742^ droit au quart
du prix de l’estimation des immeubles provenant de Jolivet, quart
5 ü6 i
qui se monte à 386 1 fr. ; c i....................
Mais sur celte somme , il faut déduire ,
i
°L e quart des frais de criées ,
dont Marguerite Treilhe était
tenue aux termes de l’arrêt de
1 7 4 2 , 756 fr. 10 s .; ci. . . .
736 1. 10
20 Une somme de 5oo liv. que
Pierre Martin avait payée pour
1256 fr.
e lle , le 21 novembre 174°» au
sieur Grandsaigne ; c i...................
5° Les frais personnels
10 s.
3oo
adjugés
contre elle par l'arrêt de 174 2 >
liquidés à 200 liv. ; c i...................
200
Ainsi le quart de M arguerite Treilhe dans
le prix de l'estimation se trouve réduit à
2624 10 s.
Actuellem ent, Jeanne-Marie De L a fo u lh o u se , femme C lu z e ,
avait recueilli le tiers de la succession de Marguerite
Treilhe '-, si le
O
sieur Grandsaigne représente la femme C h i'ze, son droit se réduit
à 875 liv. , somme qui, comme le montant de sa créance contre
Pierre Martin et Genest T re ilh e , est plus qu’absorbée par les
jouissances que Grandsaigne a perçues du domaine du Foulhoux ,
depuis le
25 octobre
1756, époque de sa mise en possession, jusqu’à
ce jour.
Grandsaigne ne pouvait posséder le domaine du
F o u lh o u x
qu’en
exécutant la sentence de 1756 qui avait mis à sa jouissance la
�condition qu’il paierait 100 liv. par année à chacun de PhilippeGenest et Jeanne-Maric Martin. L e sieur Grandsaigne ne satisfai
sant point à cette obligation, il intervint sur les poursuites dos
M artin, le
5 1 juillet
1 760, arrêt qui le condamne à payer les arré
rages de cette provision annuelle.
En 1768 , Grandsaigne est décédé en possession du domaine du
Foulhoux : il 11’avait point d’enfans, et sa succession devait être
partagée entre deux branches de collatéraux , l’une, représentant
Philippe son frère , et l’autre, Marguerite sa sœur qui avait épousé
un sieur Delolz.
L e partage des biens Grandsaigne eut lieu le 20 décembre 1770.
L e domaine du Foulhoux échut au prem ier l o t , c’est-à-dire à la
Branche Philippe , et on lit dans le partage une convention ainsi
conçue : « que, dans le cas où ledit domaine éprouverait éviction de
« la propriété, le second lot lui rembourserait en deniers ou biens
« de la succession la somme de 8000 fr. , et alors les droits et
« créances que les co-partageans ont sur ledit domaine, leur appar« tiendraient en commun. » Les héritiers Grandsaigne connaissaient
donc parfaitement la nature de leur possession , ils savaient qu’à
chaque instant ils pouvaient être évincés du domaine du F oulhoux,
et fixaient à l’avan ce, si ce cas a rriv a it, quelle serait l’indemnité qui
serait duc à celui qui recevait ce domaine dans son lot.
Philippe Grandsaigne , auquel le domaine du Foulhoux était
échu , avait deux enfans , Jean-Baptiste Rémi et M aric-Anne qui
épousa un sieur Jean-Baptiste Delavigne.
Un partage qui eut lieu le 21 décembre 1770 fit échoir le
domaine du Foulhoux a Marie-Anne.
Celle M aric-Anne avait elle-même eu deux enfans , dont l’un ,
Antoinette, a épousé le sieur Dupic. Cette Antoinette était en pos
session d e là moitié du domaine du Foulhoux , et l’autre moitié
était jouie par Jean-Baptiste Rémi représentant de la branche des
Philippe.
L e sieur Dupic , déjà en possession, comme mari d Antoinette
D elavigne, de la moitié du F oulhoux, devint fermier de l’auire
moitié et jouit ainsi de la totalité.
�(
)
En cet état, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ou leurs
représentans furent encore obligés de recourir à la justice pour
conlraindre les Grandsaigne à leur payer la provision annuelle
accordée par la sentence de 17 5 6 ; ils obtinrent un arrêt, sous la
date du 20 niai 17 7 6 , qui condamne les Grandsaigne à payer les
arrérages de cette rente, et à la servir à l’avenir.
Plus tard, le sieur Dupic essaya de réunir sur sa tète la totalité
du domaine du Foulhoux et d’intervertir son titre.
Comment s’y prit-il ?
Anne J o liv e t, expropriée par l’arrêt de 1 74 2 s était encore
vivante ; cette femme fort âgée , habitait la ville de Clerm ont, et il
ne devait pas être difficile d’obtenir d’elle une cession de droits
tout-à-fait illusoires , et auxquels Anne Jolivet avait depuis longtems renoncé.
M e Dupic , avocat, assez connu en la Cour par ses singulières
combinaisons en affaires , fit former contre lui par Anne Jolivet
une demande ayant pour objet le désistement du domaine du Foul
houx. Celte demande qui fut introduite par requête du 29 novembre
et exploit du 10 décembre 1787, ne fut point contestée par Dupic,
q u i, immédiatement, et le 12 décembre (d eux jours après la
demande ) , se fit faire une donation par Anne Jolivet.
Q ue porte cette donation dont on a extrait les faits qui précèdent?
Anne Jolivet, prenant la qualité de maîtresse de scs biens paraphernaux, en considération de la parenté qui existe entre elle et
D u p ic , et pour lui donner une preuve de son affection, lui donne
le domaine du Foulhoux pour en jouir ainsi qu’elle avait le droit de
le fa ir e .
D upic , de son c ô té , déclare connaître l’objet donne pour eu
avoir jo u i comme m ari d ’A n toin ette Lavigne , héritière de
G randsaigne, qu i avait été
envoyé
COMME CRÉANCIER DE LA F AMI LLE M
en
possession
a RTI N.
LeS
de ce d o m a i n e
,
a u t l ’eS C o n d i t i o n s
et réserves contenues dans cette donation, sont au reste inutiles à
connaître.
Q u ’avait voulu faire Ma D upic? L ’arrêt de 1742 et la sen
tence de 175G ne laissaient aucun doute sur ce point de fait, que
�Anne
ainsi
Jolivet
n’avait plus aucun droit sur le Domaine du Foulhoux,
cette femme ne pouvait rien donner et ne donnait réellement
à D upic; d’un autre côté, le donataire ne recevait rien d’Anne
J o livet, puisque dans l’acte de donation même il reconnaissait qu’il
rien
du Foulhoux à la suite de Grandsaigne, qui en avait été
envoyé en jouissance pignorative au préjudice des Martin, ce qui
jouissait
était assez dire que le domaine du Foulhoux était la propriété de
ces derniers.
A ussi, en examinant de plus près les faits, voit-on que Dupic
n’avait pris cette donation que pour l’opposer aux représentans de
Jean-Baptiste-Réini Grandsaigne, du chef desquels il tenait à ferme
la moitié du domaine du Foulhoux.
Il paraît en effet que, le 4 février 179 0 , il fut fait un traité entre
Dupic et les Grandsaigne, par lequel Dupic s’engagea à faire juger
les contestations qui existaient entre les Grandsaigne et les Martin ;
Dupic supposant que le résultat de ce procès serait de constituer
les Martin débiteurs d’une somme de 16,000 f r . , s’obligea avec la
plus grande légèreté à p a y e r , en attendant etavantla fin du procès,
aux héritiers de Je an - 13a p iistc-R ém i Grandsaigne , ou pour leur
com pte, une somme de 7000 fr. ; au moyen de c e , Dupic atteignit
son but et demeura en possession de la totalité du domaine du
Foulhoux sans payer le prix du bail à ferme.
Plus tard Dupic reconnut fort bien l’erreur dans laquelle il était
tom bé, et le préjudice qu’il s’était causé à lui-même. Il voulut
résister à l’exécution du traité, du 4 février 1790; mais un jugement
du io janvier 1825, appréciant la conduite de Dupic dans cette
affaire , et donnant pour motif que le traité avait été désiré par lui
pour conserver la jouissance du F o u lh o u x, en se chargeant de la
poursuite du procès; que ce traité avait eu spécialement pour objet
de ne point déranger la situation de la famille Grandsaigne jusqu’à
décision définitive de ces contestations, ordonne l’exécution du
traité et condamne Dupic à payer la somme de 7000 fr.
Toutefois les M artin, entièrement étrangers à tous ces actes, fai
saient exécuter rigoureusement, les dispositions de la sentence de
l l $ 0 , et réclamaient le paiement d elà provision qu’elle leur avait
�(
3o
)
accordée; le 19 janvier i 8o 3 , ils obtinrent un jugement qui con^
damne les deux branches Grandsaigne, héritiers de Philippe Phi
libert et le sieur Dupic lui-même personnellement, au paiement de
cetle provision pour l’arriéré et pour l’avenir jusqu’au jugement
définitif.
L ’instance sur l’appel des sentences de 1753 et 1756 était pen
dante en la co u r: par exploit du
5
février 18 10 , les enfans de
Jeanne Trcilhe et Pierre Martin assignèrent en reprise d’instance
les héritiers Grandsaigne, qui à leur tour, par exploits des 17 avril
et 10 mai 18 13 , reprirent la même instance contre les M artin, et
conclurent au bien jugé des sentences.
T el est le dernier errement de cette procédure.
Un nouvel ordre de faits se présente : et c ’est celui qui est
spécialement relatif à la contestation pendante en la cour.
On a vu que Jeanne Trcilhe et Pierre Martin avaient eu quatre
enfans, trois seulement ont figuré dans les contestations qui se sont
élevées. Ces trois enfans sont Clém ent, Philippe-Genest, dont les
descendances sont inutiles à connaître, puisque M e Constant a
acquis leurs droits et les représente au procès , enfin JeanneMarie qui avait épousé Jacques-Antoine Constant , aïeul de
M e Constant, appelant.
Le sieur D upic ainsi que la dame son épouse étaient décédés ,
laissant trois enfans, parmi lesquels figurent Marguerite-MarieM ich elle, qui a épousé le sieur François Chalus : 011 dit même que
le sieur Dupic avait vendu au sieur Chalus, son gendre, le domaine
du Foulhoux.
L e 25 décembre 1828 , les héritiers A n d rieux, comme créanciers
D u p ic, et m êm e du sieur Chalus, poursuivirent la saisie
immobilière du domaine du Foulhoux , soit sur la tête de la veuve
des enfans
Chalus, soit sur celle des autres enfans Dupic. Les énonciations du
placard peuvent servir à faire connaître la valeur de la propriété
saisie, qui paye 242 fr. d’impositions foncières. L e 3 juin 18 2 9 ,
adjudication préparatoire en faveur des héritiers Andrieux saisissans,
qui dans celle procédure étaient tout à-la-fois parties saisissantes,
premiers créanciers inscrits cl adjudicataires provisoires.
�M* Constant, instruit de ces faits et de l’état de la procédure,
voulut user du droit qui lui était accordé par l’article 727 du
code de procédure, de former la demande en distraction; à cet
effet, le i
3
août, il déposa ses titres de propriété au greffe du
tribunal de I h ie r s , et le 17 il forma par requête sa demande en
distraction.
L e 8 décembre i 83 o intervint un prem ier jugem ent, lors duquel
les sieurs Andrieux déclarèrent qu’ils étaient désintéressés , et qu’ils
ne voulaient plus donner suite à la saisie. De leur côté la dame
Chalus et les Dupic soutenaient que la saisie immobilière n’existant
plus, la demande en distraction devenait sans objet, et qu’il ne
pouvait y élre statué. M e Constant demandait de sa part qu’il fût
plaidé au fond.
L e tribunal de Thiers rendit alors hommage aux principes , en
reconnaissant que la dénonciation de la saisie ayant été faite aux
débiteurs saisis et à tous les créanciers ne pouvait être rayée que du
consentement de ces derniers ou de l’autorité de la justice ; que dèslors il y avait nécessité d’examiner le mérite de la revendication
exercée par M* Constant avec les héritiers Andrieux, représentant
légalement tousles autres créanciers, à l’effet d’ordonner s’il y avait
lieu à la radiation de la saisie.
E n conséquence le tribunal, tout en donnant acte aux héritiers
Andrieux de leur déclaration, ordonne qu’ils demeureront dans
l’instance, et qu’il sera plaidé au fond.
L a dame Chalus a interjeté appel de ce jugem ent, par exploit
du iG décembre , c’est-à-dire , avant que la huitaine fût expirée.
C ’est dans cet état qu’a été ren d u , le 19 janvier j 85 i , nu tribunal
de Tliiers , le jugement contradictoire dont est appel.
^
11 faut se faire une idée nette des prétentions de chacune des
parties.
M" Constant soutenait que les D upic, représentant les Grandsaigne,
avaient été plus que payés de leur créance d e 4,000 1iv ., parla jouis
sance qu’ils avaient faite du domaine du Foulhoux : il disait également
que les sentences de 1755 et 1756 établissaient qu’il était le vrai
propriétaire du Foulhoux et quelesD upic n’en jouissaient qu’à titre
�(
3*
)
pignoratif : en conséquence M e Constant concluait principalement à
être reconnu propriétaire du domaine, et, comme conséquence, à la
main levée et radiation de la saisie im m obilière, se faisant au reste
toute réserve à l'effet de faire fixer ultérieurement avec les héritiers
Grandsaigne le montant des créances qu’il pouvait avoir à répéter
contre eux.
M e Constant prenait ensuite des conclusions subsidiaires, par
lesquelles il consentait à exécuter provisoirement les sentences de
1753 et 1766, en donnant caution pour la créance de 4000 liv. que
les Martin devaient aux Grandsaigne , et demandait en consé
quence à être envoyé en possession du domaine du Foulhoux.
Enfin, comme les Dupic abusaient de leur possession, coupaient
des bois et laissaient tomber la maison et les bâtimens dans un état
de dégradation absolu , et que ce dernier fait était prouvé par le
placard lui-même , le sieur Constant, par un second subsidiaire ,
demandait à être autorisé à jouir du domaine comme séquestre ju
diciaire, et concluait dans tous les cas à l’exécution provisoire du
jugement à intervenir.
Les héritiers Andrieux renouvelaient les conclusions qu’ils avaient
prises lors du jugement de i 83 o.
Quant à la dame Chalus., e l l e concluait
principalem ent
à la
nul
lité de la demande en distraction, ou à ce que M e Constant y fut
déclaré non recevable , ou qu’il en fut débouté; subsidiairement la
dame Chalus soutenait que le procès actuel se rattachant à une ins
tance pendante au parlement de Paris entre diverses parties, et
sur des contestations relatives
au
domaine du
Foulhoux
, il y avait
lieu à surseoir à faire droit sur la demande en distraction jusqu’au
m om en t où il aurait été statué sur ces difficultés.
Dans un autre subsidiaire , la dame Chalus, se disant héritière
bénéficiaire de son p è re , soutenait qu’elle le représentait comme
donataire d’Anne Jolivet; que sous ce rapport elle avait des intérêts
opposés à ceux de ses mineurs ; qu’ainsi il y avait nécessité
d’appeler le subrogé-tuteur dans l’instance.
Enfin la dame Chalus demandait que les héritiers Grandsaigne ,
qu’elle prétendait ne pas représenter, et les héritiers Duiguebounc
fussent mis en cause.
�Sur cela est intervenu , au tribunal civil de Thiers , un jugement
trcs-longuemcnt. motivé, et dont il est difficile de bien saisir le véri
table sens. Toutefois on croit y découvrir que les Daiguebonne,
comme représentant Genest T re ilh e , ont paru aux premiers juges
être propriétaires d’un tiers du domaine du F oulhoux, savoir, d’un
quart de leur chef, et d’un douzième comme héritiers de M argue
rite Treilhe , décédée sans postérité. Q u ’ils ont fait résulter la
preuve de ce fait, d'abord de la sentence de 17 5 5 , q u i, suivant
eux , ordonne le délaissement du tiers du domaine du Foulhoux
aux Daiguebonne, et ensuite de la sentence de 17 5 6 , q u i, outre
l'estimation des immeubles, ordonne également celle des jouissances
perçues, ensemble des dégradations et améliorations. Celte pre
mière idée longuement développée 3 les motifs du jugement
ajoutent que Me Constant ne représente pas les Daiguebonne; qu’il
y aurait danger à juger hors la présence de ces derniers; qu’il est
im portant, avant de statuer sur la demande en distraction, qu’il
soit, définitivement prononcé sur les contestations qui existaient en
176 6, contestations sur lesquelles il avait été sursis parla sentence
du 5 septembre, même année.
C ’est par ces motifs que le jugem ent, tout en rejetant les moyens
de nullité j proposés par la dame Chalus contre la demande en
revendication, et donnant acte aux héritiers Andneux de leur
déclaration, met ces derniers hors d’instance, et surseoit à faire
droit sur la demande en distraction jusqu’à ce qu’il aura été statué
avec toutes les parties intéressées sur les contestations existantes en
J7 5G, difficultés sur lesquelles la sentence du
sursis à faire droit jusqu’après l’estimation.
5
septembre avait
C ’est de ce jugement dont M B Constant a interjeté appel par
exploit du
5 février i 85 i.
�(
34
)
DISCUSSION.
Rien ne paraît plus facile que (le démontrer les vices nombreux
et le mal jvgé de celte sentence, qui tout à-la-fois a méconnu les
principes les plus élémentaires en matière de distraction sur saisie
immobilière, et complètement erré dans l’appréciation des faits. Et.
d’abord une poursuite en expropriation avait été dirigée contre le
domaine du Foulhoux possédé par les héritiers Dupic ; si celle
expropriation se fut consommée sans réclamation de la part de
M e Constant, 10 ans pouvaient suffire pour qu’il y eut interversion
de titre et anéantir le droit des héritiers Martin à la propriété de ce
domaine.
L a demande en distraction était donc une nécessité pour
M e Constant qui a dû user de celle action conformément à l’article
727 du Code de procédure, en la dirigeant contre toutes les parties
que la question de propriété pouvait intéresser, c’est-à-dire, contre
les héritiers Dupic et les héritiers Chalus , parties saisies, et contre
les sieurs Àndrieux qui figuraient dans la saisie immobilière, en
qualité de saisissans, de créanciers premiers inscrits et d’adjudi
cataires provisoires.
L ’eflèt. de la demande en distraction devait être de faire r e c o n
naître le véritable propriétaire de l’immeuble saisi et revendique ,
et de mettre la justice à même de restituer
la
propriété à celui
auquel elle appartenait et d’ordonner la radiation de la saisie.
Mais comment], et en présence de quelles parties, la propriété
pouvait-elle être reconnue , et la radiation de la saisie pouvait-elle
être opérée ? À cet é g a rd , l’article 696 du Code île procédure
dispose que la saisie ne pourra être ra y é e que du consentement des
créanciers , ou en vertu de jugement rendu contre e u x , lorsque la
notification prescrite par l’article Gq5 aura été enregistrée en marge
de la saisie au bureau de la conservation.
O r, ici la saisie immobilière était
à
un degré bien plus avancé
que
celui prévu par l’article Gq5 , puisqu’il y avait eu adjudication pré
paratoire; dès-lors comment opérer celte radiation sans le consentemenl des créanciers ou un jugement rendu contre eux?
�En fait, il est certain que les créanciers n’ont point donné de
: les sieurs Andrieux, tout à-la-fois saisissans, adjudi
cataires provisoires, premiers créanciers inscrits, no pouvaient lier
consentement
par leur consentement les autres créanciers qui conservaient le droit
de se subroger à la saisie; d’ailleurs les héritiers Andrieux n’ont pas
même donné ce consentement; dès-lors, en fait comme en droit,
il y avait nécessité que la radiation de la saisie fut ordonnée par un
jugement rendu contre les créanciers.
Mais comment rendre un jugement hors la présence des per
sonnes qui doivent y être parties? c’est bien vainement qugin se
demande ici ce que le tribunal pourrait décider, le cas arrivant,
relativement à la radiation de cette saisie, lorsque dans la personne
des héritiers Andrieux il a rnis hors d’instance le premier créancier
inscrit, repr.V. -.r- il lé al de tous les autres créanciers.
Le jugement du 8 décembre i 83 o était à cet égard tout-à-fait
rationnel et entièrement conforme aux principes. Il avait retenu
les héritiers Andrieux dans la cause par de très-bons motifs. La
dame Ghalus a interjeté appol de ce jugement; mais outre que cet
appel est non recevable comme prém aturé, et portant sur un juge
ment préparatoire exécuté, jl est encore victorieusement combattu
par les moyens que l’on vient de déduire; dès-lors impossible de
comprendre les motifs de l’infirmation que les premiers juges ont
eux-mêmes prononcée p a rleu r jugement du 19 janvier i 85 i.
Rien en effet ne pouvait autoriser le tribunal de Thiers à meure
les héritiers Andrieux hors d’instance. Ces créanciers premiers
inscrits déclaraient bien, il est vrai, qu’ils avaient été payés du
montant de leur créance, mais ils ne donnaient pas leur consente
ment à la radiation de la saisie: dès-lors il n’était point satisfait a la
première condition exigée par l’article 696, pour que la saisie fût
valablement rayée. En second lieu, le tribunal lui-même n’ordonnait
point cette radiation contre les créanciers, puisque le jugement
ne lait que surseoir à la décision de demande en distraction . Oèslors comment se fuit-il que les premiers juges n’aient pas vu qu il y
avait nécessité de conserver en cause les sieurs Andrieux , premiers
créanciers inscrit, jusqu’au jugement définitif, et qu’ils 11c se soient
�(
3G
)
pas aperçus qu’en mettant ces créanciers hors d’instance , ils
enlevaient à Me Constant la faculté de faire rayer cette saisie si en
définitive il réussissait dans sa demande en distraction?
On n’insistera pas davantage sur une erreur aussi manifeste qui
aurait pour résultat nécessaire d’anéantir l’action du sieur Constant;
car ce serait bien vainement, que les premiers juges n’auraient cru
prononcer qu’un sursis, si par le fait, en luisant disparaître du
p ro es la partie que la loi y juge indispensable, ils se sont mis
dans l’impossibilité de statuer plus tard sur la demande en distrac
tion 9 et d’ordonner la radiation de la saisie qui en est une consé
quence nécessaire.
Le tribunal dont est appel a donc déjà commis ou s’est mis dans
la nécessité de commettre un déni de justice.
A u fond, quel est l’objet tic la diiïïcùlté?
Il s’agit de statuer sur une demande en distraction, e’esi-à-dirc ,
de re che rch er q u i, do la partie saisie ou du demandeur en distrac
tion , est le vérilable propriétaire de l’immeuble revendiqué.
Si les titres de la partie saisie prouvent qu’elle n’est pas propriétaire
et qu’au contraire le droit de propriété repose sur la tète du de
mandeur en distraction, il n’y a plus rien à rech erch er, et la dé
cision ne peut être douteuse.
Dans l’espèce, les sentences de 1753 et 1766 établissent deux
faits positifs, le prem ier, que le sieur Grandsaigne était créancier
de la famille Martin de la somme de 4000 fr. ; le second, qu'en cette
qualité i l avait été envoyé en possession dudomaine du Foulhouxproyenant de son débiteur, pour en jouir jusqu’au paiement intégral de
ses créances. Ainsi Grandsaigne ou ses représentais ont donc un
titre pignoratif, q u i les rend dépositaires du domaine du Foulhôux
jusqu’à l'acquittement de leur créance. Ils jouissent donc pour la
famille Martin, ils ne peuvent prescrire contre elle : toutes ces vérités
n’ont besoin ni de démonstration ni de développement.
Dans cette position, que devait faire MBConstant, seul
représen
tant de la famille M artin, pour reprendre le domaine du Foulhoux?
Devait-il établir sa propriété? c est ce qu’d a fait, en prouvant
d’une part, qu’il représente Jeanne-Maric M artin, son aïeule, et,
\
�de
l’autre, qu’il est aux droits dcsdesccndans de Clément etPhilippeMartin. Devait-il prouver que les Grandsaigne soin payés de
G enest
de leur créance? C ’est ce que M e Constant a encore fait :
effectivement il a présenté en i re instance un compte qui n’a jamais
été critiqué , et qui établit deux faits, le prem ier, qu’au 25 octobre
1766 la créance du sieur Grandsaigne était entièrement éteinte en
capital et intérêts; le second que ses héritiers ou rep résen ta i seraient
aujourd’hui débiteurs envers la famille Martin de toutes les jouis
l’intégralité
sances duFoulhoux depuis et compris 1767.
Toutefois les conclusions de M e Constant ne se restreignaient pas à
obtenir l’adjudicadon de sa demande principale; voulant satisfaire à
toutes les exigences, M° Constant offrait encore d’exécuter provi
soirement les sentences de 1765 et 1766; il s’astreignait même à
donner caution pour le paiement de la créance Grandsaigne ; et
voulant mettre un terme aux dégradations et aux dilapidations tic
tout genre que les enfuus Dupic commettent journellement dans le
domaine du Foulhoux, M® Constant offrait de jouir de cette pro
priété comme séquestre judiciaire , jusqu’au moment où les comptes
auraient été définitivement réglés.
Cet étal de choses 11e pouvait laisser à la justice qu’un devoir à
remplir; examiner la demande en distraction, apprécier les moyens
qui lui étaient propres, la rejeter ou l'admettre : voilà ce semble
tout ce qu’il pouvait être permis de faire.
O r, qu’apprend le jugement? le tribunal néglige la cause qui lui
était présentée, il ne l’examine même pas, il l’efface entièrement,
et s’en crée une tout-à-fait étrangère à la famille Dupic et à M e Cons
tant; il lui devient dès-lors facile de 11e pas statuer sur la difficulté
réelle qu’il avait à résoudre , et de prolonger par un sursis la pos
session injuste des héritiers Grandsaigne.
Il faut reproduire le système adopté par les premiers juges :
La branche Daiguebonne, qui de son chef était propriétaire du
quart des immeubles provenus dos Jolivet, et du chef de M a r g u e
rite Ireilhe d un douzième du prix de l’estimation , figurait comme
partie dans les sentences de 1753 et 17 5G. Ces sentences avaient
ordonné le partage entre cette branche et les Martin, représentant
\
�(
38
)
les Treilhe créanciers des Jolivet. Les premiers juges s’emparent
de cette circonstance et posent en fait que M e Constant ne repré
sente pas les Daiguebonne; ils supposent ensuite qu’il y aurait dan
ger à juger la cause hors la présence des D aiguebonne, et tirent
de tout cela la conséquence immédiate qu’il doit être sursis à la
décision de la contestation pendante entre M* Constant et les re
présentais Grandsaigne, jusqu’au moment ou il aura été définitive
ment statué sur les difficultés nées en 1^56 entre la branche D a i
guebonne et la famille M artin, difficultés sur lesquelles la sentence
du
5 septembre
n’avait pas prononcé.
C ’est bien vainement que l’on recherche l’influence que pourrait
avoir la présence ou les droits des Daiguebonne sur le jugement de
la demande en distraction formée par M u Constant.
En effet, sous q u e lq u e rapport que l’on examine ce qui intéresse
les Daiguebonne , le résultat est le même.
E t d’abord une première idée saisit et fixe l’attention. Si M e Cons
tant représente les D aiguebonne, ou , ce qui est la même chose , si
ces derniers n’ont aucun intérêt à contester la demande en distrac
tion , cette demande doit être adjugée. O r , qu’est-il arrivé? depuis
1766 les Daiguebonne 11’ont fait aucune poursuite, ils ont laissé
prescrire leurs droits : on a m ê m e vu dans l’exposé du fait que les
D a ig u e b o n n e avaient intérêt à ne point agir, puisque, d’une part,
aux termes de la sentence de 17 5 ? , ils n'étaient admis au partage
qu’en laissant prélever les soijmies que Clément Martin aurait pavées
en l’acquit de Gcnest Treilhe , en exprès celle de 2,000 f r ., faisant
moitié du montant de l’obligation du 7 juillet 1720;
est prouvé qu’en 1758 , la portion des
et que
D a ig u e b o n n e
de l’autre il
dans les biens
Jolivet absorbée , ils étaient encore , à cette dernière époque,
débiteurs de la famille Martin d’une somme de 4 »°°° h'.
D ’ailleurs qui pourrait avoir qualité pour représenter les D aigue
bonne? serait-ce le sieur Grandsaigne? mais il n’a d’autre titre que
l’acte du 8 décembre 1746. O r cet a cte, par scs termes , et suivant
ce qui a élé décide par la sentence de 175 5 , 11’est qu’une simple
délégation, un moyen donne a Grandsaigne pour être payé du
montant de sa créance sur le domaine du Foulhoux ; mais sous
�(
3g
)
aucun rapport, il ne peut être considéré comme un dire propre à
donner à Grandsaigne le droit de repiesenter les Daiguebonne dans
la propriété du domaine du Foulhoux.
D ’ailleurs, quel effet a produit cette délégation? la sentence de
1755 l’apprend :
créancier
la qualité
tence
:
il
partage a été ordonné , non avec Grandsaigne,
délégu é , mais avec Daiguebonne, cohéritier des Martin;
de Grandsaigne n’est donc point changée par cette sen
un
reste toujours créancier et pas autre chose. Mais ce qui
est plus fort, c ’est que par l’cfTet de la sentence de 1753 , Grand
saigne devient en vertu de sa délégation créancier de Clément
M artin, et que les Daiguebonne sont libérés vis-à-vis Grandsaigne ,
d’une manière tellement absolue que Clément Martin doit reprendre
sur les propriétés provenues des Jolivet., et sur la part des Daigue
bonne, la somme de
derniers.
2000 fr.
qu’il doit payer à la décharge de ces
Cette dernière idée conduit immédiatement à reconnaître le vrai
représentant de la branche Daiguebonne. Ce représentant 11e peut
être autre que Clément M artin, qui a payé la dette Daiguebonne ,
et qui est devenu créancier de ce dernier, de la somme dont il l’a
libéré vis-à-vis Grandsaigne. Comment Grandsaigne pourrait-il
refuser à Clément Martin la qualité de représentant des D aigue
bonne, lorsque la sentence de 175 3 , contradictoire avec Grand
saigne, l’envoie en possession des biens Jolivet; que cet envoi en
possession est prononcé contre Clément M artin, comme débiteur
de la totalité de la créance Grandsaigne ; que Grandsaigne accepte
celte délégation, et plus tard l’exécute en se mettant en possession
du domaine du Foulhoux.
Sous un autre rapport il est également certain que Clément,
Martin représentait la branche D aiguebonne, pour tous les droits
qu’elle pouvait avoir dans les propriétés Jolivet. Effectivement la
portion des Daiguebonne , dans ces biens , devait être soumise aux
reprises de Clément Martin qui avait le droit de prélever toutes les
créances qui auraient élé payées pour Gencst Treilhe; or ces
reprises faisant plus qu’absorber la portion des Daiguebonne ,
dans les biens à partager, il est plus qu’évident que Clément Martin,
�(
4°
)
comme créancier des Daiguebonne, et en vertu même des disposi
tions des sentences, les représente complètement pour le fait du
partage ordonné par la sentence de 1755.
Mais cet examen peut paraître inutile pour la décision du procès,
puisque la contestation doit se resserrer entre le sieur Grandsaigne
et les enfans Martin.
Si on consulte les sentences de 1753 et 175 6 , qu’apprendra-t-on?
pas anire chose si ce n'est que les Grandsaigne ont obtenu la mise
en possession du Foulhoux, d’abord contre Clém ent, et plus tard
contre Philippe Genest et Jeanne-Marie Martin. Les Grandsaigne
avant reçu le nantissement des Martin doivent le leur rendre, si leur
créance est payée; et comment les Daiguebonne pourraient-ils
s’opposer à cette remise? ce n’est pas d’eux que Grandsaigne
t i ent
l e d o m a i n e d u F o u l h o u x 5 il n e les a p o i n t a p p e l é s p o u r f a i r e p r o n o n
cer contre eux l’envoi en possession? il ne l' a pas pris de leurs
m a i n s , a u contraire il a reconnu que Clément Martin était devenu
son débiteur de la totalité de l’obligation de 1720 , et c’est unique
ment comme créancier de ce Clém ent, qu’il s’est mis en possession
du domaine du Foulhoux.
Ici la véritable question du procès se représente dans toute sa
simplicité : c’est un débat de propriété entre les G randsaign e et la
famille Martin ; là est toute la cause ; les Daiguebonne sont étrangers
à
ces débats ; les Grandsaigne qui ne
peuvent dans aucun
lo r s ,
cas
les
représentent
pas,
ne
se prévaloir de leurs droits. Pourquoi dès-
dans l’intérêt de Grandsaigne, fixer
sonnes qui ne réclament rien ,
qui ont
son
attention
sur des p e r
intérêt à 11e rien demander?
pourquoi sur-tout en agir ainsi lorsque on s’assure que les Daigue
bonne 11e peuvent être représentés que par C lém en t M artin , qui a
payé leur dette et est encore leur créancier de sommes considéra
bles, sommes qui doivent être prélevées sur la portion des Daigue
bonne dans le
cas
où
les
biens des Jolivet pourraient être soumis à
un partage ?
il est donc évident que les premiers juges ont complètement erré;
qu’ils se sont même mépris sur le véritable sens de l’objection qu’ils
prit imaginée , puisque les droits des Daiguebonne , s’ils existaient
�( 4» )
encore, appartiendraient à la famille M artin, qui seule aurait le droit
de s'en prévaloir.
L ’erreur dans laquelle sont tombés les premiers juges fait sentir
la nécessité de jeter un coup-d oc il sur les mterêts de toutes les p er
sonnes qui figuraient dans 1’arrêt de 1742 et dans la sentence de
1 756, soit personnellement, soit sous le nom du sieur Grandsaigne.
L ’objet de cet examen est d’éviter que la dame Chalus crée une
nouvelle confusion à l’effet de retarder sa dépossession.
La dame Chalus exciperait-elle des droits de Jeanne-Marie De
Lafoulhouse, femme Chèze? D ’abord M 8 Constant, en vertu d’une
cession du 11 avril 1731 , représente celte branche pour le quart
qu elle avait à amender dans les biens Jolivet. L e sieur Grandsaigne
s est prétendu cessionnaire des droits de la dame C h èze, mais on a
vu dans les faits que le sieur Grandsaigne n’avait justifié d’aucun actoj
et cette cession existât-elle , comme elle ne comprendrait que
la portion que la femme Chèze pouvait avoir du chef de M argue
rite T re ilh e , c ’est-à-dire un douzième du prix de l’estimation, et
que ce droit purement mobilier n’affecterait en rien la propriété, il
est évident que Grandsaigne ne pourrait se servir de ce m oyen pour
changer la nature de son titre ^ qu’il n’en serait pas moins un créan
cier jouissant à titre pignoratif de la propriété d’un débiteur, débiteur
qui étant libéré doit cire réintégré dans le fonds qui lui appartient,
et qu’il avait donné en nantissement.
Grandsaigne figurait dans la sentence de 1756 comme donataire
de la dame Biozat, femme Desholière. Quelle était cette dame ?
l’arrêt de 174 2 apprend qu’elle figurait parmi les créanciers opposans de la famille Jolivet ; cette créancière devait être payée sile prix
de l’estimation excédait le montant de la créance T re ilh e , mais cette
estimation a été faite à la requête du sieur Grandsaigne lui-même j
le prix en est con n u, et comme il est prouvé que ce prix est plus
qu’absorbé par la créance Treilhe r la dame Desholiere pas plus
que le sieur G ra n d sa ign e son donataire 11e peuvent avoir rien a
réclam er.
On rencontre ici Anne Jolivet expropriée par l’arrêt de 1743» ct
G
�X
^
)
que Grandsaigne avait fait intervenir, suivant requête du 21 juillet
1755.
Quelle est la position de celte Anne Jolivet?
L ’arrêt de 1742 prononce contre elle une expropriation complctte et irrévocable. Effectivement les Treilhe sont envoyés en
toute propriété et possession des biens saisis; l’arrêt indique même
dans quelle proportion la propriété des biens délaissés doit être
partagée entre les différentes branches d elà famille Treilhe; et pour
qu’il ne manque rien à des caractères aussi positifs de transmission
de propriété, l’arrêt fait même main-levée de la saisie réelle et en
ordonne la radiation.
Il
est vrai que les Treilhe nouveaux propriétaires l’étaient à con
dition de faire estimer les bien s, et que si le prix de l’estimation
excédait les c réances, ce surplus devait appartenir à la femme J o
livet expropriée ; mais cette circonstance démontre déplus fort que
les biens avaient cessé d’appartenir à Anne Jolivet. Le droit de celte
dernière se réduisait dès*lors à requérir l’estimation des biens, et à
assister à cette opération, et c ’est précisément ce qui lui a été ac
cordé parla sentence du 5 septembre 1 75G.Il est vrai qu’Anne Jolivet
demandait davantage, mais la sentence, en repoussant ses préten
tions, a donné une nouvelle force à l’arrêt do 1 7 4 2 ; et c o m m e Anne
J o liv e t n’a point interjeté appel de cette sentence de 17 56 , qui
confirme son expropriation en faveur des Martin , on ne conçoit pas
quel moyen elle pourrait em ployer pour se prétendre propriétaire
du domaine du Foulhoux.
Que devient, des-lors, la donation que Dupic a obtenue de celte
fem m e, le 1 2 décembre 1787 ? La Jolivet ne pouvait conférer aucun
droit à la propriété du Foulhoux; aussi n’a-l-clle donné le domaine
qu’à la chargé d’en jouir ainsi (ju'elle avilit le droit de lè fa ir e ;
et D u p i c , de son cô té, reconnaissant dans le même acte qu’il ne
jouit du Foulhoux qu’à titre p ig n ora tif cl comme créancier des
M artin, il est également évident que la Jolivet n’a point entendu
donner un droit de propriété et que Dupic n’a point entendu
l’accepter.
Q u ’aurait-donc donné Anne Jolivet au sieur Dupic? tout au plus
�son droit au surplus de l'estimation des biens, les dettes payées ;
mais Anne Jolivet a été appelée à cette opération, qui a été laite à
la
requête et diligence du sieur Grandsaigne ; o r , le rapport prouve
que le prix de restimation est inférieur au montant de la créance
Treilhe. De plus , Grandsaigne, qui était chargé de faire faire res
timation , a continué depuis cette époque de jouir du Foulhoux ; et
comme la dame Clxalus et les Dupic sont aujourd’hui héritiers du
sieur G randsaigne, ils seraient inadmissibles à se plaindre de cette
opération, et à opposer quelle n’a point été homologuée.
La dame Chalus dirait-elle que ne représentant pas le sieur
Grandsaigne, mais bien la Jolivet, elle n’est point partie capable
pour recevoir les offres faites par M e Constant?
Celte objection serait détruite
i° Par le fait qu’Anne Jolivet n’étant pas propriétaire du
F o u lh o u x, ne pouvait, par sa donation, intervertir le titre de
D u p ic , qui ne jouissait que pignorativement;
20 Par la circonstance que Dupic n’a point fait notifier sa donation
aux Martin; qu’il a continué de jouir comme représentant le sieur
Grandsaigne, et qu’enfin il a été condamné par jugement de l’an
i i à payer, comme possesseur à titre pignoi’atif, la provision
accordée aux Martin par la sentence de i ,/56 .
Si la dame Chalus et les héritiers Dupic objectaient qu’ils ne sont
pas les seuls héritiers Grandsaigne, on leur répondrait que le
partage du 20 décembre 1770 fait dans leur famille prévoit le cas
d’éviction du domaine du Foulhoux, et que dans ce cas le second
lot doit rembourser au prem ier une somme de 8000 fr. en biens de
la succession. Ainsi le possesseur du Foulhoux représente vis-à-vis
les tiers, tous les héritiers Grandsaigne. L e possesseur a qualité
pour défendre à une demande en éviction; et s’il succom be, il a
une demande en garantie à exercer contre ses co-partageans, ga
rantie dont les effets sont à l’avance réglés par le pariage de 177o.
Enfin 011 peut prévoir que la dame Chalus ira jusqu’à soutenir
q u e , ne représentant que le sieur Dupic qui a vendu à son mari le
domaine du
l
oulhoux, elle n’a pas qualité pour répondre à la
demande en dis trac lion.
�(
44
)
Que signifierait cette objection ? II s'agit d'une demande en dis
traction sur saisie immobilière; on ne peut donc la diriger que
contre la personne sur laquelle la saisie est pratiquée, et que l’on
suppose propriétaire de l’immeuble. En pareille matière la pro
priété est tout, et celui qui possède l’immeuble revendiqué a
toujours qualité pour répondre à la demande en distraction. D ’ail
leurs la vente de M. Dupic au sieur Chalus n’a point été produite ;
tous les héritiers Dupic ont été poursuivis en expropriation à la
requête des sieurs Andrieux ; M° Constant devait donc former sa
demande en distraction contre toutes les parties saisies. Il est
possible que cette demande donnât lieu à une demande en garantie
de la part de la dame Chalus contre les D upic; mais sous aucun
point de v u e , la vente du sieur Dupic au sieur Chalus, étant étran
gère à M® Constant et lui étant absolument in c o n n u e, ne pourrait
paralyser son action contre le possesseur saisi du Foulhoux.
On suppose d’ailleurs que cette vente ne sera pas produite; si
elle l’éta it, qu’apprendrait-elle ? que D upic a abusé du nantisse
ment jusqu’au point d’en disposer et de le vendre , circonstance
q u i, suivant les principes, serait
à
elle seule suffisante pour lui faire
enlever la possession du Foulhoux et faire un devoir à la justice de
la remettre à M® Constant, seul propriétaire de c e domaine.
L ’exam en de cette cause est terminée. Quels sont les résultats
qui se présentent ?
L e domaine du Foulhoux est la propriété des héritiers Martin :
c’est un fait incontestable établi par les sentences de 1753 et
1756.
Un autre fait non moins certain et ressortant des mêmes sentences,
c ’est que les Grandsaigne ne sont en possession du
Foulhoux
qu’à
titre pignoratif et comme créancier de Clément Martin.
Aujourd’hui M BConstant, seul représentant des M artin, prouve
que la créance Grandsaigne est payée. Q u e l obstacle peut-il dont»
y avoir à lui remettre la possession du domaine dont il n’a jamais
cessé d’être propriétaire ?
Serait-ce parce que les Martin ont interjeté appel des sentences
4e
1753 et de 1756? mais aujourd’hui M* Constant exécute ces
sentences, et se met, relativement au domaine du F oulhoux, dans
�(
45
)
la même position que s’il n’y avait point eu d’appel; il accorde tout
ce que les héritiers Grandsaigne avaient demandé par leur assi
gnation en reprise, du 10 mars i 8 i 3 ; il ne se refuse à aucune des
conséquences d’un arrêt confirmatif, puisqu’il offre de payer l’entière
somme de 4000 fr. due aux Grandsaigne.
Sous tous ces ra p p o rts, où seraient do nc les difficultés?
Mais si l’on ajoute que les Dupic ont abusé de leur jouissance ;
que déjà l’immeuble donné en nantissement a été vendu par leur
père; que tous les arbres-chênes ont été coupés, et que les héritiers
Dupic en ont vendu pour 9000 fr. ; que les bâtimens tombent en
ruine; que la culture est négligée; que ce domaine a été saisi
réellement, ne serait-ce pas douter de la justice de la Cour que
de supposer qu’elle autorisera la continuation d’une possession aussi
préjudiciable à M* Constant, et qu’elle hésitera un instant ù
réformer le jugement dont est appel !
J acques- F lo r en t- G a b r iel
CONSTA NT, Avocat.
M° J . - C h . B A Y L E a în é , ancien A v ocat.
Me MARIE , Avoué-Licencié.
R10M,
I MP R I ME R I E DE SALLES F I L S ,
P RES LE PALAIS CE J U S T I C E .
�
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Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
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Description
An account of the resource
<a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les Factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Constant, Jacques-Florent-Gabriel. 1832?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jacques-Florent-Gabriel Constant
J.-C.H. Bayle aîné
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
saisie immobilière
successions
généalogie
bois
saisie réelle
domaines agricoles
experts
bois
métayage
témoins
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Précis Pour Me Jacques-Florent-Gabriel Constant, Avocat, habitant de la ville d'Issoire, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil de Thiers, le 19 janvier 1831, et intimé sur l'appel d'un jugement rendu au même tribunal, le 8 décembre 1830 ; Contre Les héritiers Dupic et la dame Chalus, cette dernière, tant en qualité d'héritière Dupic, que comme tutrice de ses enfans mineurs, tous habitans au lieu de Foulhoux, commune d'Ecoutoux, intimés sur l'appel du jugement du 19 janvier 1831, et ladite dame Chalus, appelante du jugement du 8 décembre 1830 ; Et Contre les héritiers Andrieux, tous habitans de la ville de Thiers, intimés
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1832 ?
1742-1832
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV02
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Escoutoux (63151)
Foulhoux (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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experts
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saisie immobilière
saisie réelle
Successions
témoins
-
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34027e52a76aef95ed27e36fe34c86ec
PDF Text
Text
P
R
E
P O U R le fieur J
C
I
S
CH O M ETTE LA
ean
F O R I E , Négociant à I ffoite , Intimé.
CONTRE le fieur P ie r r e F E U lL H A N D
l'Aine , Négociant habitant, a .Braffaget
,
,
AppelantC
E T T É ' afFaire eft une des plus fimples
qui ait jamais occupé les moments de
la Cour ; fi elle femble préfenter au
premier abord quelqu'obfcurité par une
difcuffion chargée, par une multitude de pieces
tantôt produites & tantôt fouftraites , enfin par
les tournures adroites que la- mauvaife foi réflé
chie s’efforce de donner à tous les faits, elle
s’ éclaircit, elle fe fimplifie, l’évidence fe manifefte
dès l’inftant que l’on oublie tout ce qui s’eft paffe
en la Cour , pour ne confidérer la conteftation
que dans l’état ou elle étoit lorfqu’elle eft fortie
de ce Tribunal de paix ou des Négociants .jugent
A
�0°
a,
leurs égaux, ou les Parties font entendues par leur
propre bouche , & ou la vérité n’a rien à craindre
des pieges que lui tendent continuellement dans
les Tribunaux ordinaires de trop habiles Défenièurs^
•
Remontons donc à cet iriftant &: examinons la
conteftation.
i
Le.,fieur Chomette avoit été en fociété avec le
fieur Feuilhand pour des achats de vin par com, iniïÎion.pour la provifion de Paris.
Forcé d’en venir avec lui aux voies judiciaires,’
parce qu’il lui étoit impoiïible de l’amener à l’a
miable à un compte final, ü le fit afligner en la
Jurifdi&ion. Conlulaire de cette V ille le 13 Juil
le t dernier, pour fe voir condamner à venir en
compte de l’objet de la commiiïion à laquelle il
l ’avoit verbalement aiîocié, pour après le compte
lui payer les fommes dont il feroit conftaté dé
biteur , avec intérêts du jour de la demande.
; Les Juges-Confuls ont renvoyé les Parties à
compter devant le fieur V a y ro n , Négociant à
Brioude, £c le fieur R o b ert, Notaire à Landes.
Ces Arbitres ont été agréés par les Parties; le
19 A oût il a été procédé au compte pardevanc
eux. *
Il en réfulte en premier lieu que le fieur Feuil
hand s’eii reconnu débiteur du fieur Chomette
de la fomme de 14.3 8 livres 10 fols pour reftant
du prix du vin du cru du fieur Chomette, qui a
•conienti à: ne ¿réclamer cette fomme qu’après que
�............................................................................................................ .
3
le fieur Feuilhand en auroit reçu les fonds de~s>
fieurs Chanat ÔC Rondet , leurs Commettants.;
(« )
'
'
Il en réfulte en fécond lieu que le fieur Feuilhand doit au fieur Chomette 1 1 5 liv. 2, lois 6 den*.
pour fa portion du bénéfice net iur la voiture des
vins rendus à Paris.
' { ‘/ ; r
- Ces deux articles ne font plus partie de la conteftation , ainfi l’on ne s’en occupera pas da
vantage1.
>
•
.
• On lit enfuite dans ce compte qu’indépendam
ment de ces fommes » le fieur Chomette prétend*
» lui être dû une fomme de 8 4 1 liv. 6 folsipour» raifon d’avances qu’il a foutenu avoir faites des
» vins achetés au lieu de Perier : & au contraire
» le fieur Feuilhand foutient. que par les arrange?
» ments faits entr’eux pour leur lbciété/ilétpiç
» chargé de payer tous les vins, &c que fur cette
» condition il a fait le rembourfement de ladite
■» fomme de 841 d iv .6 fo ls audit fieur Cliomqtte
» le 3 ou le 4 Mars dernier, Vargent compté deT
» vant le cuvage de M . Amblard-, fu r un poin» ç o n, au lieu -de Chadeleuf.. Ce que ledit fieur
« Chomette a dénié formellement. »
Rien n’étoit plus clair&c plus pofitif que lofait
fur lequel les Parties étoient diviiees ; le fieur
(a) Le fieur
Feuilhand avoit alors reçu la totalité dç ce fonds,
mais il fallut l’en croire fur fa p a r o le , vide la faéture produite
par Feuilhand , où les traites ’ reçues, avant Août iTiontoient ^
2.4061 liv. 1 f o l & le chargement à la même fomnjè,’ ;
A z.
�,
i
« if
iU
4
Cliomette foutenoit qu’il lui étoit dû une iommede- 84.1 liv; 6 fols pour le prix du vin de Perier.,
Feuilhand foutenoit avoir payé cette fomme le.
3*ou le'4. M ars, devant le cuvage de Me. A m biard^ fur un p o i n ç o n a u lieu de Chadeleuf.
Que-' ;po'uvoient faire en pareil cas les JugesConfuls, devant lefquels étoit portée la conteilation^?r la" réponfe fe préfente d’ellé-même, ils devôienr régler les Parties à faire preuve de ce fait;
ils l’ont ordonnée par leur Sentence en ces ternies:
Ordonnons que le fieur Feuilhand fera preuti ve pardevant nous dans huitaine comme il a
» fait un payement de la fomme de 84.1 liv. 6
» fols au lieu de Chadeleuf, fur un poinçon, de*
» vant le cuvage de Me. Amblard , fauf audit
» fieur"Chomette la preuve contraire dans le mk>> m e-délai, qu’il n’a reçu que la fomme de 4 <53
r> 1. 10 f pour payer les Habitants de Sauvagnat,
» laquelle lomme fut jointe à une plus grande qu’il
» avoit reçue, & . dont il donna| quittance fur le» dit poinçon. »
f
Si la Cour n’avoit pas fous fes yeux l’appel
du fieur Feuilhand |)ourroit-elle croire qu’il oie
le plaindre de cette Sentence ?
Quoi ! le fieur Ghomette vous demande une
fomme de 8 4 1 livres 6 fols, vous articulez l’a
voir payée, vous en défignez le lieu & les circonftances , on vous admet à la preuve de ce
.Fait & vous êtes Appellant ?
Telle eft cependant toute la caufc fur ce pre-
�mîer objet, telle elle étoit du moins dans cet inftant
ou nous la confldérons, au moment où l’appel
a empêché les Juges - Çonfuls de continuer l’infc
tru&ion de cette affaire & d’achever leur ouvra
ge ; le fieur Chomette n’avoit-il pas raifon d’aprbs
cela de dire, comme il l’a fait en commençant,
que cette conteftation fous ce point de vue étoit
d’ nne fimplicité rare & d’une évidence à laquelle
il n’étoit pas poiïible de fe refufer.
Si elle n’eft pas auiïl fimple aujourd’h u i, elle
n’en eft pas moins évidente , ôc tout ce que le
fieur Feuilhand a imaginé depuis pour fe fo u f
traire à cette preuve ne fert qu’à en démon
trer de plus en plus la néceifité &; à démalquer
fa mauvaife foi.
On lit dans le Mémoire du fieur Feuilhand,
page i l & fuivantes, que les Juges-Confuls n’ont
pu l’aftreindre à prouver qu’ il avoit payé cette
fomme de 8 4 1 livres 6 fols , parce que le paie~
ment de cette fomme pour les vins de Perier
étoit impoifible, & il fonde cette.impoifibilité
fous deux raifons.
L a premiere eft de dire qu’il y avoit une fom
me de 16 livres 8 fols qui étoit dans les mains
du fieur Chomette pour l’excédant des 1800 li
vres que le fieur Feuilhand lui avoit compté pour
le prix du vin de M e. Amblard, qui ne montoit
qu’à 17 8 3 livres i x fois, de forte qu’il n’étoit
pas poiïible qu’on put l’aftreindre à prouver qu’il
avoit payé 8 4 1 livres 6 fols , qui formoit le to-
�6 ...
tal des vins de P erler, puifqu’il falloit diminuer
1 6 livres 8 fols fur ce total.
En fécond lieu il prétend qu’il avoit déjà fait
compte au fieur Chomette des arrhes de ce vin
de Perier , que ces arrhes diminuoient encore
cette fomme de 84.1 livres 6 fo ls, & que par
conféquenr on ne pouvoit l’aftreindre à prouver
qu’il avoit fait ce paiement de 84.1 livres 6 iols.
Réponfe. Mais premièrement, s’il eft impoiïible que vous, ayez payé le 4. Mars , devant le
cuvage de M fi. Amblard , fui* un poinçon, àChadeleuf, cette fomme de 8 4 1 livres 6 fols, pourquoi avez-vous'donc articulé ce paiement devant
les fieurs Vayron & Robert , A rb itres, devant
lefqnels vous avez: compté le 19 A oût dernier y
i pourquoi l’àvez-vous articulé dans la Jurif*
di&ion Confulaire , où vous étiez en perfonne
lors de la Sentence dont eft appel ? vous avez
menti alors ou vous mentez dans cet inftant •
il n’y a pas de milieu, ii ce neft que vous avez
menti dans les deux ca^s, 6c nous allons le prouver...
Le fieur Feuilhand a menti en annonçant qu’il
avoit fait un paiement de 84.1 livres 6 fols fur un
poinçon, à- Chadeleuf, devant le cuvage de M e.
Amblard. La meilleure preuve que l’on puiiic en
donner , c’eft qu’après avoir articulé ce fa it, le
fieur. Feuilhand fe plaint de la Sentence qui lui
permet d’en faire la preuve.
Une fécondé preuve de la faullcté de ce fait,
c’eft que le même jour 4. M a rs, le'fieur Feuil—
6
�rj
4f J
Jbancl ayant compté au iieur Chomette fur ce
poinçon 453 livres, pour joindre à plus grande
fomme qui complétoit le paiement des vins de
.Sauvagnat, le fieur Chomette en donna un re
çu ious cette date du 4 M ars, qui efb rapporté
par le fieur Feuilhand, & qui, quoique bâtonné,
17’en contient pas moins la preuve démonftrative
de ce fait : ce reçu efb de la fomme de 23 1 2
livres 10 fols 6 deniers , & il y eft expreiîement
ipécifié que c e ft pour payer les vins des P aiticuliers de Sauvagnat.
Si ce même jour 4 Mars &c fur ce même poin.çon le fieur Feuilhand eut payé cette fomme de
.541 livres
lois , on n’auroit pas manqué de
l ’inférer dans ce reçu , & d’y joindre cette famme.
Mais ce n’eft pas tout : peu de temps apr'es
le fieur Feuilhand exige que le fieur Chomette
inferive tous ces reçus au bas de l’état général (/>)
des vins qui font partie de la commiilion, & on
voit à l’époque du 12 Mars que le fieur Cho
mette fait des reçus généraux de tous les reçus
in térieu rs, qu’il a donnés au fieur Feuilhand.
Ces reçus fe réduifent à celui de 2586 livres
pour les vins des petits Particuliers de Sauvag
nat ; à 17 8 3 livres 1 2 fols pour les vins de Me.
A m b lard , c à 600 livres pour ceux de l’Auvergnac.
S’il eut été vrai que le 4 Mars le fieur Feuil
hand eut payé ces vins de Perier au fieur Cho(¿) Cette pièce eft produite par lç fiçur ï ’euilhancL
6
6
�8
•
•mette, àïiroit-il donc oublié huit; jouis après d’en
*faïre mention , loriqu’il annulloit tous les reçus
particuliers , z qu’il forçoit le fieur Chomette
de les mettre au bas de l’état général des vins
qui compofoient la commiilion ?
N ’eiHl pas clair d’après ces faits que lorfque
le iieur Feuilhand ofoit dire qu’il avoit payé ces
vins de Perier au fieur Chomette , qu’il lui avoit
compté pour ces vins la fomme de 84I1 livres 6
fols fur un poinçon à Chadeleuf, devant le cuva
ge de Me. A m b lard , il mentoit a fon A ilb cié,
à fes'Arbitres & à íes Juges? & on ne craint
pas de dire que lorfqu’on l’a admis à la preuve
dont il le plaint, on lui a fait trop de grâce, ôt
il eut été plus juile & plus conforme aux preuves
que rapportoit le fieur Chomette de le condam
ner dès ce moment à payer ces 8 4 1 livres 6 fois..
Lorfque le fieur Feuilhand, en variant fon plan
de défenfes, a dit depuis, pour éviter la preuve ,
que ce n’étoit pas1 cette fomme de 84 1 livres
6 fols qu’il avoit payé, mais qu’il avoit avancé
à VIntimé la fomme qui lui était nécejj'aire pour
ces vins de Perier ; il n’a fttit qu’ajouter un fé
cond trait de mauvàife foi au premier.
• Car à toutes les preuves cjue nous venons d’adminiftrer qu’il n’a pas payé une obole de ces vins
de P erier, le fieur Chomette réunit ici rimpoiïibilité 011 fe trouve le fieur Feuilhand de déiigner
une iommc fixe pour ce prétendu paiement ; il
a, donné l'argent nécejj'aire , mais qu étoit ce que
6
�-cet argent néceilàire’, & pourquoi êtes vous donc
embarraifé fur cette fixation ? _
. ;f . .
A u iurplus, quand le fieur Feuilhand annonce
que l’on a déduit fur le prix de ces vins,, & la
fomme de 1 6 livres 8 iols qui reftoit des 18 0 0
livres deftinés pour payer M e. A m blard, &; les,
arrhes de ces vins de Perier > il avance deux
fauiîetés également palpables.
Quant aux 16 livres 8 fols le fieur Chomette'
en fit dédu&ion fur le montant des vins de Sau-,
vagnat, dont il fit .compte ce jour 4 M ars,.
dont il reçut le reftant du prix, ainii quelesPar-;
ties en conviennent ; &c on trouve la. preuve de ce,
fait dans un état qui eft produit, qui -contient, les':,
différentes?'iommes 'reçues par le fieur Chomette.
& ; l’ emploi qu’il en a fà it, état qui;ieft ahtcrieSr3
à la conteftation, & qui a été fait dans un ■tcmpj»
où il n’étoit pas po’fiible de prévoir que cette r
ibmme •de 16 livres 8 fols fcroj^ jamais matiere^
de la plus legere difcuifion. - 1
,n . t
A l’égard des arrhes des vins -de* Perier., J e .
fieur,Feuilhandfemble triompher: j’ai, dit-il., dans
mes mains un reçu de vous, où il eft dit que je .
vous ai remis les arrhes, „¡de-.tous lès rParticuliers r
dénommés [ci-dejjus,: & de Vautre ,p a r t G r dans
le nombre..dé cès Particuliers, je lis ccuxr^de P c- t
rier , donc vous avez reçu ces arrhes , donc je ne
)ouvois pas vous payer,8 4 1 livres 6 fols, donc
e3 Juges-Confuls n’ont pas dû ordonner la preu-*: 1
ve de ce fait. ..
Î
�?:,Ô cft‘ ainfi qilë*' raifonne le fieur' Feuilhand ÿ4
mais c’eft-là le trait de mauvaife foi le plus odieux
& le mieux établi qui foit dans cette affaire.
Ohc a;*dit plus haut que le fieur Feuilhand
éxigca q u e-Îe:1fiêur Chomettc annullât tous les
reçus particilliërs, •& qu’il en fie le rapport au'
Bas de l’état général des vins qui faifoient partie
de la commiüion. •
L e fieur Ghomette, qui1avoit
un premier
fecir de' 18 6 ‘livrés 10 lois au bas de l’état detous? les Particuliers auxquels il avoit payé des'
arrhes , excepte ceux de Perier , tranfporta ce re
çu , conlme tous les autres qu’il avoit donné au
iieur Feuilhand5, au bas de cet état général, cornrh(r fbxÎgea le fieur Feuilhand, fans avoir la pré
d atio n d’annoncer que dans ces 1 86 livres iô
iôls les 'arrhes de Perier n’y*'~étoient pas conw
priles.
(
'
0 ‘M $ s :heureüfemeri£ le fieur Feuilhand lüi-mcme nous a.fourni la prduve queues arrhes de Pe
rier 'ri^n faitoMe-pàs 'fàrtie.i"^ «.
.
? L é -IDéfenieur clu fieur Chbmctte prit en cômjriunjcàtibn les picces du fieUr-Feuilhand au coriinfënïcrii.ctit ide Jaiivibr , avant! la plaidoierie de la
càufe’,
trbu^a parmi ces pièces un" état, écrit
de'là .rtiairi du fieur Chômêttc^ qui contient tous
les nVfirchps des vins qu’il aVôit fait, autres que ceitx '
d t Périer,' avec les arrhes qu'il avoit payées à
chaeiin des vendeur^ ; ces arrhes étoient tirées hors^ '
ligne & additionnées au total à i8 6 liv-. iô C'f
mis
�ir
L e Procureur du fieur Chomette ne perclit pas'
lin inftant pour tirer parti de cette piece, il com
mença par en prendre une copie , qui eft jointe à
la production du fieur Chomette, * 6c pour que
cette-piece ¿ne put déformais ni-être fouftraite,
ni être défigurée, il déclara expreiTément par une
requête qu’il lignifia le 1 2 Janvier , qu’il avoit
tranfcrit cette copie, 6c qu’il entendoit tirer de
cet état toutes les indu&ions qu’il préfentoir. Cependant par une manoeuvre dont on voie
peu d’exemples , 6c fur laquelle on s’interdit toute
réflexion, le fieur Feuilhand à eu l’adreife de fouftraire cette piece pendant que fes défenleurs avoient
Pinftance en communication.
* Copie de l'état des arrhes JbuJlrait par le fieur Feuilhand.
Blaife P a rr o t, . 6 1.
Gabriel PiiTis , .
6
Me.
Amblard,,
.
6
Jean Durier Pau
vre J e a n , . . 6
M. de.S. Âig.nes,
iz
Claude D e la n e f, 34Lavidalonne ,
. iz
Jacques Bagyer, . 6
Bonnet Celerier, 6
Jean Helÿas , dit
Pichot, . . . 22.L a veuve d’Etienne Parrot G allot, zz
Jçan Helyas Grand
Jean , . . . .
6
Jean Helyas Ppucarret , . . .
6
Jacques Beydier,
Milicien , . . 6
Jacques
Helyas
• Labranchc ,
, '$
Demoifellç D e
lorme,” / .
Total. .
;
.
x86 1.
io
f.
Arrhes de Perier non comprimes
dans l'étatfoufirait.
10 f.
Paul R o ifig n o l, . 6
Jean Clicvant , . 6
, ^Bertrand Mauga , 6
Pierre Gittard , . 6
Annette Bouche
ron, . . . .. £
Jean Jaffàrd Minquet, . ...
. S
T o t a l.
i.
�ii
. M ais fon cxiftencé n’en efl: pas moins aiîù«1
tée , parce quelle a été vue àTA udience , , des
Défenieurs des Parties & de tout le Barreau 7& la
Cour voudra bien fe rappeller que le. Détenteur
du'fieur Chomette en fit inertie le plusgrand uiagc
contre le-fieur Feuilhand.
•
. Cette exiftence efl: encore aiTurée par la copie
qui en a été tirée par le Procureur du fieur Cho-,
mette , & qu’il certifie par fa iignature, cortforme à l’original, dont elle a été extraite, qui eil
entre les mains du fieur Feuilhand.
Enfin elle efl: aiTurée par la déclaration faite
par le fieur Chomette, par fa requête du iz Jan
vier , qui avoit vu & lu cette piece, qu’il en avoit
pris copie, & qu’il entendoit en tirer avantage.
Mais ce n’étoit pas aiïèz pour le fieur Feuilhand de fouftraire cette piece qui conftatoit que
les arrhes qu’il avoit rembourfées au fieur Cho
mette montoient à 18 6 livres 10 fols, fans y
comprendre celles de Perier ; il falloit encore
pour prouver fa thefe faire un état qui comprit
toutes les arrhes , même celles de Perier, qui
faifoient un objet de 36 livres, & que cet état
format un total de 18 6 livres 10 fols Ôc con^
forme à la Quittance.
V oici comment le fieur Feuilhand s’y cil pris
pour exécuter cette féconde manœuvre, plusodieufe, plus criminelle encore que ld premierc.
A la marge.de l’état général , écrit de la main
du fieur Chomette 3 ôc au bas duquel .font tous
�*3
st6i
les reçus qu’il a donné au fieur Feuilhand, il a
fait mettre par une main étrangère ÔC tout nou
vellement, comme la Cour-peut s’en convaincre
par elle-même, fi elle daigne y jetter les y eu x ,
des chiffres à chaque article, par lefquels il en
tend déiigner les arrhes qui ont été payées à
chaque particulier &c dont il forme enfuite un
total additionné à 1 86 liv.
‘ Mais comme toutes ces arrhes montoient réu
nies à 2 2 2 livres 10 fols , il a fallu , pour faire
quadrer ce total avec la quittance, tantôt fouftraire &c tantôt augmenter, & encore la ma
nœuvre a-t-elle été ii groifierement pratiquée,
qu’on n’a pas même eu la précaution de ména
ger une identité parfaite entre ces deux fomm es, puifque l’une eft de 1 86 livres & l’autre
de 1 8 6 livres io fols.
A l’article Claude Lanef, qui étoit de 34. liv.
on l’a feulement porté à 12 livres, & on a fait une
diilra&ion de 22 livres, c i, . . . 22 1.
A l’article de Jean Helias une diftraSion de 16 livre s, c i, . . . 1 6
E t enfin il a fouftrait en entier
l’article de la veuve Etienne G allo t,
qui cil i l livres 10 fols,-ci, . . * 29, 1. 10 f.
Enforte que les diminutions fe font___ ______ _
montées au total à 60 liv. 10 fols, ci, 60
10
E t comme il falloit une augmentation femblable pour aller à cette fomme de 186 livres 10
•fols, le fieùr Feuilhand a ajouté deux articles,
�.
- *4 . •
'
' Celui de Perier de 3 6 liv. . . \ . 3 61 ..
E t 14. livres pour l’article du nommé
M aucour, c i , . . ................................... 2 4
T o t a l ........................60
Que l’on ne croie pas au lurplus que tout
ce que l’on dit ici iur cette inique manœu
vre l'oit hazardé; elle eft établie , elle eft démon
trée par les propres pieces rapportées & produi
tes par le fieur Feuilhand.
Indépendemment de cet état général, qui eft
fur une feuille, & au bas duquel font les reçus
du fieur Chomette, le fieur Feuilhand rapporte
les brouillons <5t premiers états tenus par le
fieur Chomette , qui ne devoient pas être dans
les mains du iieur Feuilhand, & qui cepen
dant s’y trouvent aujourd’hui; ces états réunis
forment un volume de 16 pages.
On trouve à la premiere page , à l’article
Claude Lanef & Antoine Feuilharade ce qui
fuit:
Ont reçu pour arrhes ,
! I . 12, 1,.
Maucour a donné audit de Lanef, . . 6
'Et j’ai payé pour ledit de Lanef aux Con.fuis , . .. . . , . .
... . . . 16
. , 1 34
A l’article de Jean Hclias il eft dit également :
A reçu pour arrhes, . . . . . . 61 .
J ’ai payé pour lui aux Coniuls, . ... . 1 6
�*■>
E t enfin'à l’article de la veuve d’Etienne Gallot il eft'dit : payé %% liv. 10 fo ls, ci, a i 1. 10 £
E t que la Cour daigne ne pas perdre de vue
que ces trois articles fe trouvent ainfi tranferits
dans les états écrits de la main du iieur Chomette , qui font entre les mains du feu r Feuilhand , qui y étoient avant la conteftation , 6c
que par conféquent que c’eft par lui-même 6c
¿ ’après fes propres pieces qu’il eft démontré
coupable des manœuvres que le fieur Chomettc
lui impute. •
L a manœuvre eft la même fur les augmen
tations, & elle n’eft pas moins évidente que fur
l’objet qui précédé.
Il porte en augmentation une fomme de 24. liv.
pour l’article de M aucour, & il eft encore prouvé
par fes propres pieces que cet article n’a jamais
pu faire partie de 186 liv. 10 f. d’arrhes comprifes dans la quittance.
Cet article Maucour fe trouve à deux endroits
du brouillon, à la page 5 , 011 il eft bâtonné , 6c
où il eft dit que cet article eft porté à la page 1 .
O r , à la page 2 , 011 voit qu’à la marge où les
arrhes font inicrites à tous les autres articles, il y a
à celui-ci un zéro. E t dans l’intérieur de l’article
il eft d it , a reçu de mon üeau-frere 2,4. liv.
Ce Beau-frere , eft le fieur Feuilhand, fils, qui
iivoit acheté ces vins pour fon compte, mais
Maucour ayant préféré de les livrer aux iicurs
Feuilhand , .pere, 6c :Choniettc, ils comprirent ces
�24 liv. dans le compte total du prix de ces vin s,
6c non. dans le compte des arrhes , puifque dans
le fait, ni le fieur Feuilhand, ni le fieur Chomette n’avoient payé cette fomme de 24. liv. pour
les arrhes.
E t ce fait efl fi confiant, que dans un autre
état, produit par le fieur Feuilhand, 6c écrit de la
main du fieur Chomette , fur une feuille volante,
on lit à l’article dernier, qui efl celui de M aucour,.
ce qui fuit:
I l faut déduire Z4 liv. en le payant , qui appar
tiennent à Mr. Feuilhand.
Donc ces 2-4 livres n’appartenoient pas au fieur
Chomette , donc le fieur Feuilhand ne les lui a
pas compté , donc ils ne faifoient pas partie des
i 86 livres 10 fols, donc enfin l’infidélité cil la :
même fur cet objet que fur les précédents : par
tout la manœuvre efl évidente 6c la fabrication,
démontrée.
Mais c’en efl aflèz fur ces révoltantes falfifications, qu’on ne diicute qu’avec dégoût, 6c qu’on
ofe à peine articuler la preuve à la main ; aban
donnons-les pour revenir à cette piece fouilraite,
qui feule nous fuiEt, parce que fon cxiftence efl
connue, & que le fieur Feuilhand , en la cachant,
11’a pu l’anéantir.
Il efl clair d’après cette piecc,' que les arrhes
payées par le fieur Chomette, 6c qui lui ont été
rendues par le fieur Feuilhand, conformément à la
quittance rapportée , montent à 18 6 iiv^ 10 f. fans
y
�T7 .
y comprendre celle par lui avancée aux Habitants
de Perier , qui font un objet de 36 liv. à raifon de
6 liv. pour chaque Particulier,
qui lui font en
core dues comme le prix principal de ces vins,
dont le to ta l, en y comprenant les arrhes, cil
de 8 4 1 liv. 6 f.
E t il eil d’autant plus évidént que le fieur Feuil- ° ti:.;
hand n’a pas payé cette fomme de 36 liv. pour les
arrhes de P erier, & que les 16 1.8 f de l’excédant
de Me. Amblard n’ont pas été employées à l’acquit
de ces vins de P erier, que le fieur Feuilhand avoît
toujours foutenu jufqu’àfon appel, & devant les
Arbitres , &c en la Jurifdi&ion Gonfulaire, qu’il
avoit payé cette fomme totale d e .8 4 1 liv .-6 fols
fur un poinçon à Chadeleuf,'devant le Cuvagè
de Me. Amblard, lans qu’il lui foie venu alors en
'idée , pendant plùfieurs mois qu’a duré cettë
conteflation,de prétendre, comme il le fait aujoiïr•d’h u i, qu’il avoit fait fur ces 8 4 1 liv. 6 f. deux dédu&ions , l’une de ï6 liv. 8. T. ¿k l’autre de £6 liv.
' Ainfi donc de quelque côté quc'Tôh enviiàge les
faits, articulés par le lieur Feuilhand, anciens ÔC
nouveaux, ils font tous également faux, égale
ment marqués au coin de la mauvaife foi la plus
infigne; il eil évident, il efl dérnontré que le fieur
Chomette n’a pas reçu une obole fur ces vins de
P erier, que cette fomme de 8 4 1 liv. 6 f lui eil
duç en entier;
bien loin que le fieur Feuilhant
foit fondé à s’ éléver contre la Sentence qui
l’admet *•à- la
preuve
d’un fait qu’il a lui-même
arti-«
*
r
y» - » - -.
^
�vV\
18
culé, on voit que le fieur Chomette pourroît fèul
s’en plaindre, parce que les premiers Juges auroient
du de plein vol , & fans exiger de nouvelles
• preuves,, lui adjuger les 84.1 liv. 6 £ qu’il
réclame.
k c o n S S de ^ nc ie ^ e ^ ^^CLlter que l’objet de la Com m it
fion , qui forme le fécond chef fur lequel les Par
ties font divifées,
- : Les Parties ne purent pas fe concilier fur ce point
-devant les Arbitres ; il eft dit dans leur rapport
-que le fieur Feuilhand prétendit n’avoir aiîocié
’le fieur Chomette que pour la petite commiflion
de cinq fols par poinçon, & pour le bénéfice
qu’il pourroit y avoir fur la voiture, &c que le
fieur Chomette prétendit au contraire être aiïocie
.pour la commiffion, qui eft de vingt fols par pie
ce, &: qui forme un pbjetde 300 liv.
L a caufe portée à l’Àudience fur cet objet,’
les Jug_es-Çonfuls, après avoir entendu les Parties
par leur bouche, ont jugé qu’ils étoient en fociété pour le tou t, -tant pour les voitures que pour
la commillion.
L e fieur Feuilhand fe plaint encore amèrement
de cette çliipofition, &c il prétend que cette aiïociation eft dénuée de preuve , quelle eft invraifemblable, enfin, qu’ elle eft démontrée fauilè.
E t cette démonstration eft appuyée iur ce que
le fieur Chomette a avoué dans lès écrits que
l’afloeiation avoit été faite indéfiniment ; mais ce
terme d’indéfiniment démontre précifémcnt le fait
�19
contraire; rien n’eft plus oppofé à l’indéfini que
lg limitation à tel ou tel objet que veut faire le:,
fieur Feuilhand de l’ailociation contra&ée entre les
Parties.
D ’ailleurs les Juges-Confuls, en décidant cette
affociation générale & indéfinie, fe font détermi
nés par le d ro it, par l’ufage dans ces matières,
& par les circonftances du fait.
Dans le d ro it, s’il y avoit quelque doute fur ce
fait de. l’ailodation générale ou limitée , le. fieur
Feuilhand auroit feul à fe réprochcr de n’avoir pas
fait les conventions, comme il prétend avoir.ei^
intention de les faire : Potuit re integra apertuis
dicere , dit la Loi ; & cette Loi iùffifoit feule pour
di&er aux Confuls le jugement qu’ils dévoient
rendre dans cette affaire.
Mais à la loi ôc à laraifon , le fieur FeuilhancJ
joignoitl’ufage qui s’obferve dans cette Province
pour ces fortes de commiflions : les Marchands de
Paris s’adreilènt à un particulier de la Province
pour faire leur approvifionnement, ils convien
nent de prix avec lui, & ce particulier fe choifit
enfuite un ou plufieurs aifociés, qui fe diilribuenc
dans différents cantons, où chacun travaille de
fon mieux pour le bien commun, & partage en
définitif tous les bénéfices d e là commiiïion ÔC
de la voiture.
C ’efl: en vain & contre la vérité du fait que le
fieur Feuilhand avance que lors de la premiere
commiifion ? où le fieur Chomette a été fon aflbC i
�cié , il. n’avoit point de part dans la commiiïion
mais feulement dans le bénéfice des voitures : la
commiiTion & le5 voitures n’étoient pas diftin^
guées dans cette premiere commiiïion , les aiîociés
avoienr fait un prix unique avec les Commettants
à 14.ÜV. le poinçon, &t ils partagèrent en défini
t if tout le profit qui fe trouva fu rie chargement,
iàns aucune diftinâion.
■ Bien loin donc que cette premiere commiiTion
foit contraire à la prétention a&uelle du iieur
Chomette, & .à la Sentence des Confuls qui l’a
dopte , elle prouve au contraire que l’ufage partilier des Parties eft conforme à l’ufage général de
ces fortes de fociétés, où tout le bénéfice de la
commiiïion fe partage fans réferve.
O r cet ufage eft: encore ici du plus grand poids,
il eft la bafe la plus ordinaire &c la plus fure de
toutes les décifions en matiere de commerce, &
les Loix exigent même qu’il foit religieufement
reipe&é dans tous les Tribunaux.
In Jlipulationibus J i non apparent quid aelinn
e jî , erit confequens ut id fequamur , quôd in ro
gione in qu i aeluni ejl frequentatur. Reg. 34.. de
R e g . jur.
Enfin les circonftances du fait concouroient
dans l ’cfpece avec les loix & l’ufage pour aiîiirer au iieur Chomette le partage général & in
défini de la commiiïion.
Dans tout ce qui a été fait entre les Parties,
comme dans tout ce qui a été fait cil leurriom ,
�Ht
II
ils fe font regardés entr’eux comme aiïociés fans
aucune diftin£tion, & le public les a regardé de
même. Le fieur Prunicre, leur propre Commis ,
qui devoit mieux connoître que perlonne & leurs
intérêts ô t leurs* relations, les regarde lui-même
comme aifociés d’une aifociation générale &
fans reitri&ion ; lorfqu’il figne fes Etats 6c fës
Quittances, il figne pour M . Cliomette & pour
M . Feuilhand. Il comprend les deux Aiïociés
dans la raiion fociale pour laquelle il figne, fans
admettre entr’eux ni îupériorité, ni préférence,
ni diftin&ion.
Lorfque le fieur Chomette fait fes E ta ts, il
met en têtc^état des vins que f a i acheté avec
M . Feuilhand , Vainé, ou bien , état des vins ache
tés par le fieur Chomette de Laforie , afjocié avec
M . Feuilhand , Vainé.
E t dans ceux faits par le fieur Feuilhand &
écrits par lui-m êm e, on lit : Etat de ce que f a i
fourni dans l'équipe de vin en fociété avec M .
Chomette au mois de Mars i j y z .
Le fieur Feuilhand veut à la vérité équivoquer fur ce terme d’équipe , mais il eft clair
pour tout homme qui a les premières notions
de la langue, que ce terme d équipe iignifie un
chargement de plufieurs bateaux qui partent enfemble pour une deflination commune , & non
par le prix de la voiture que peut coûter chacun
des poinçons qui compofent cet équipe.
Il eft au furplus d’autant plus ridicule de vouloir
�réduire le iieur Chomette à la petite commiiîion ^
comme le prétend lefieur Feuilhand, que cette pe
tite commiiTion de cinq fols par poinçon n’eft
qu’ une fous-commiJJloTi proprement dite, qui fe
confie ordinairement à des Journaliers du cane
ton , qui font métier de goûter & d’arrher les
vins pour les Commiiïionnaires ; le fieur Cho'mette n’auroit-il donc été que le fous-commifÎionnaire du fieur Feuilhand 6c non fon AiTocié,
n’auroit il donc été que fon Commis 6c non fon
égal?
Quant à l’ailociation des bénéfices fur les V o i
tures , comme ce bénéfice eft tr'es-incertain, que
fouvent il ie trouve n u l, qu’il cil ordinairement
trcs4 eger, comme dans l’eipece où il n’eft: que de
i l 1} livre s, 6c qu’il peut même dans de certains
cas y avoir des pertes pour cet objet ; le fieur
Chomette qui a acheté la prefqu’univerfalité des
vins , qui a prefque .tout fait pour l’exécution de
la commiiîion , n’auroit donc pu efpérer qu’un
bénéfice incertain 6c prefque n u l , tandis que ion
Aftocié jouiroit tranquillement du fruit de fes tra
vaux , 6c percevroit fans partage le feul bénéfice
aiTuré de la commiiîion ; la fommc de 300 livres
qui appartient au Commiffionnaire pour le icul fait
de l’achat, 6c qui eft indépendante de tous les
événements.
Il ctoit réfervé au fieur Feuilhand de donner
l’exemple d’une pareille prétention , mais déiàvouée par l’équité a contraire à l’ufage du Com-
�a3
merce & aux faits de la caufe , & déjà profcrite
par les Juges de la matiere , elle ne peut pas
éprouver un. plus heureux fort que l’appel indifcret du fieur Feuilhand au chef, qui ordonne la
preuve d’un fait qu’ il a lui-même articulé devant
les Arbitres & à l’Audience de la Jurifdiction .
Confulaire , &: à laquelle il cherche aujourd’hui
à fe fouftraire , parce que cette preuve eft impoffib le , & que le paiement qui en eft l’objet'n’a
jamais été effectué.
^
Monf i eur M O L L E S , Rapporteur.
T r io z o
n
,
Procureur.
A c l e r m o n t - f e r r a n d ,
D e l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du R o i, Rue S. G enès, près l’ancien Marché au Bled. 1 7 7 3
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chomette la Forie, Jean. 1773]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Molles
Triozon
Subject
The topic of the resource
négociants
vin
commission
arbitrages
créances
profit de voiture
commerce
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour le sieur Jean Chomette la Forie, Négociant à Issoire, Intimé. Contre le sieur Pierre Feuilhand, l'Ainé, Négociant, habitant à Brassaget, Appellant.
Table Godemel : Société : 3. l’association des deux parties a-t-elle eu pour objet, seulement le produit de la petite commission et le profit de la voiture (sur expéditions de vin) ou, au contraire, le droit de la grande commission ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1773
Circa 1772-1773
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0322
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0323
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52930/BCU_Factums_G0322.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Brassac-les-Mines (63050)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
commerce
commission
Créances
négociants
profit de voiture
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52931/BCU_Factums_G0323.pdf
842c468d6985a2eb8cb87004d113614b
PDF Text
Text
4 X *.
w*ïÇfs>
PRECI S
P O U R fie u r P
F E U I L H A N D, l’a în é ,
Appellant.
i e r r e
C O N T R E fieur j e a n C H O M E T T E L A
F O R I E , Intimé.
’JAi déjà fermé la bouche à l’intimé f u r les futilités
qu 'il avo it fait valo ir a ve c étalage , com m e fins
de non recevoir contre mon a p p e l , c ’eft établi par
le filence qu’il a gardé à cet égard dans fon M é - m o i re imprimé ; il n’avoit pas moins lieu de fe
taire fur les m o y en s d’appel qu’il n’a crû p o u v o i r
combattre que par des allégations contraires à la notoriété , &
par des fuppofitions que fes propres écrits démentent.
L e fieur Chomette a prétendu & fait j u g e r , que je l'avois afPremierc!
focié , non feulement pour le produit de la petite c o m m iff i o n & ^Sentence
le profit de la v o i ture , mais encore pour le droit de la grande
appe *
commiffion ; j’ai dit que c’eft un fait dénué de preuves , invrai
semblable & démontré fa u x L e fa it ejl dénué de preuves. L ’Intimé en c o n v i e n t , ' il fe re
tranche dans la fuppofition d’un droit inconnu & contraire aux
p r in c ip e s ; il reprend ici fa fauffe a l lé g a ti o n , que l’affociation
av o it été faite indéfiniment & fans explication , & il en conclut
que l’affociation doit être étendue à tout fur le fondement que
potüit re integra apertuis dicere.
Ma is fans m’arrèter à la réfutation de ce b r o c a r t , formé d’un
A
�tronçon de loi.maLentendue ^.&_quLdaus..leie.as.qu’on lui. do n
ne , -contrarieroit la 1 9 5 e . réglé-de dr o i t, qui porte que non..ex~
prefla ,. non nocetit; il faudroit s’arrêter au f a i t , fav.oir, s’il fut
fait une e^pjliçation , ou s’ il n’en fut pas. fait ; je foutiens m’être
expliqué,
j'ai.pour :m oi la préfomption du f a i t ; & le .défaut
de preuve; du contraire , à quoi j’ajoute l’affirmation qui doit
m ’être d é f é r é e - c o m m e défendeur.
<L ’Intimé . nia été o cc upé
ne s’eft. d o n n é . .des-^mouvements
que pou r la petite commiffion ,& pour la voiture , il l’a vo u e ;
il reconnoit que j’ai demeuré chargé de toutes les, avances , ce
qui eft le fajt du grand Commiffionnaire , ainii la c on ven tio n
eut-elle étéfaite fans explication ^elle ne pou rr oit ie référer qu’aux
ohjets-pour 1-efiquels l’Intimé:a été.employé ^ elle ne pourroit donc
s’étendre à la : grande commiffion.
L e fa it ejl invraifemblable. J ’avois obtenu la commiffion
p o u r moi f e u l , le droit de mandat m’appartenoit dès-lors , fans
que je fus tenu de me donner d’autres mouvements que de c o m
mettre des fous-Commiffionnairespour l’achat du vin & des E n
trepreneurs d’équipe pour le tranfport à Paris , fa uf à moi de
fournir les fpnds. P o u r augmenter mes profits , fuivant que
j ’en avois l’occ afion & le droit , je me fuis mêlé de ces deux
dernieres opérations pour lefquelles je me fuis adjoint l’intimé ;
celui-ci reconnoît que je me fuis chargé de fournir tous les
fonds , & que je l ’ai.uniquement o c c u p é , c o n u c u re m m e n t a v e c
jnoi j aux travaux de la fous-conimiffion , & de la cargaifon de
l ’équipe ; J e bon fens veut que l’on penfe que je n ’ai promis
du profit à l’intimé que fur les deux objets pou rlefquels j e l ’occ u p o i s , & il eft invraifemblable que je lui aye promis part dans
le profit de la grancje commiffion , qui eft le produit de mon état
de Commiffionnaire & ? l e fruit des avances dont j’étois feul
chargé.
L ’Intimé réclame l’ufage. comm e con forme à fes prétentions;
ehbien , veut-il faire dépendre la conteftation de ce point de fait ?
j’y donne vo looti er lps mains , & je.le défie de rapporter un feul
exe mpl e,, que le grand Commiffionnire ai fait part.du droit de
grande commiffion aux particuliers qu’il s’eft joint pour l ’exer
cice cle la fou s- co m pi lü o n & la préparation <Sc conduite de
l’équipe.
L e fa it efl démontré fa u x . Il faut ob.ferver ici qu’au moment
c|e m o n M é m oi re imprimé , l’Iutimé fout.enoir, comme on p eu t
�ii »/ 4
X/
l e ,v o i r da’ns-.plufièurs-endroits tle fa requête du 1 3 J a n v i e r der
n i e r , qu’il a v o i t ét éexpreflement aiîocié pour le produit de la'
grande commiflion comme pour le profita faire fur la voit ure ;
il étoit même allé juf qu ’à foutenir que les c o n v è n t i o n s ’ avoient
été fur le p o i n t d ’être conftatées par é c r i t , il n’argumentôit pas
alors par: induction de prétendu défaut d’e xp li c a ti o i r, il avan-'
çoit tout, le contraire ; or p o u r démontrer la faufleté de cette'
i'uppofition:', je nVût befoin que de rappeller l’intimé à lui-mê
m e , de lui remettre fous les y e u x fa requête précédente , dont je
ne me rappele pas la date , & de le f o r c e r a y lire la fuppoiîtion
q u ’il y a v o i r faite , que je l’avois afioc'iè fans autre explication .
C ’eft en vain que l’intimé cherche à infinuer que j’ai r e c o n
nu dans mon M é m oi re cette prétendue c on ven tio n indéfinie 8 r
n on exp liq uée , ce qui répugne ; j’ai toujours foutenü * c o n f o r
mément: à la v é r i t é q u e j e m ’expliquai clairement ave c le fieur 1
Chomette , &■ q u e j e l’affociai uniquement pour le profit de l a !>
v o i t u r e , outre le produit de fa petite commiffion. J e n’ai'parlé î
dé défaut-d’explication que dans le reproche que je fais à l’Inti- '
mé de l’à v o i r ' a v a n c é dans un e n d ro it , & d’a voi r foutenu le ■
contraire dans l ’autre , & pour.fonder Pobjeftion que je déduifois de cette fuppofition de fa part ; dailleurs , difois-je , fi l'a f '
fociation avoit été accordée & demandée fans autre explication ,
elle Je feroit référée de droit à celle qui avoit eu lieu en Novem
bre & Décembre , qui de l'aveu de l'intim é ne lui avoit donné
que le (impie droit de participation à la voiture , ces termes d’h y potefc y fi l'affociation , ces termes fuppofitif fe feroit référée ,
conftatent allez que je n’av o u o is p a s l'allégation de l ’Intimé.
D a n s ces ci r c o n ft an c es , il faut que l’intimé prenne l’un de
ces deux partis; où il fout ie nd ra, conformément à fa première
requ êt e, que l’aflociation a été faite fans autre explication , alors
elle ne pourroit fe référer q u ’aux objets pour lefquels l'intimé ’
a été occu pé ; où il foutiendra conformément à fa derniere *
requête , que la convention a été expliquée , qu’il a été expreflementaiTocié pour le produit de la grande Commiffion , que même
il ne reftoit qu’à conftater la con vention par é c r it , & pou r lors
la fauffeté de fon allégation fera démontrée par fa propre pré
tention dans fa première requête , où il foutient q u ’il ne fut
fait aucune explication & prétend av o ir été tacitement aiTocié ■
p ou r le tout. Cette démonstration du faux , eft ienfible.
L a Sentence dont eft a p p e l , a do nc pris p ou r confiant un fait
A j
�4
dénué de preuves invraifemblable & démontre f a u x , l’appel de
ce premier c h e f eil donc évidemment bien fondé
'
eond chef de
J ’a J ¿té ailreint à p ro u ve r que j ’ avois fait un paiement de 8 4 1
’ ppel"ce d°nt l iv . 6 f . le 4 Ma rs au lieu de C h a d e l e u f , & j’ai lieu de m en
i
plaindre, parce que cette preuve établiroit plus qu’il n’étoit en
1
thefe ; & parce que ce n’étoit pas fur ce fait reconnu par
Chom et te , mais feulement fur le fait articulé par ce d e r n i e r ,
ave c foumijjion de le prouver que l’interlocutoire devo it
frapper.
L a preuve ordonnée établiroit plus q u il nètoit en thefe.
'
■:
' ;
Il étoit p ro u vé par écrit que j’avois fourni à l’intimé dans d’au
tres temps que le jour fixé par l’inter locu toire, différentes fommes
à compte des vins de P e ri er , ainii ces vins de P e r i e r , ne m o n
tant en total qu’à la fomme de 8 4 1 l iv . 6 f . & devant être fait
dédu& ion des paiements juilifiés , cette fomme de 841 li v . 6 f.
fe tr ouvoit néceilairement di m in u ée, & il ne devoit pas entrer
dans l’idée des Ju g es que je duife p ro uv e r a v o ir p ay é à C h a
d e le u f le 4 M ars la fomme entiere , cette preuve établiroit
que j’aurois pay é plus de 8 4 1 liv. en tot al , & conféquemment
elle prouveroit plus qu’il n’étoit en thefe.
P o u r affoiblir cette démonilration de mal j u g é , l’intimé me
fait trois o b j e f t i o n s , également faciles à refuter.
10. O n obje &e que j ’ai articulé ce fait devant les Arbitres ,
6 que j’en ai offert la p re uv e à l’Audience.
J ’ai déjà répondu à cette objeftion dans mon M é m o i r e , page
7 & 8 , mes réponfes qui détruifoient les fuppofitions de
C h o m e t t e , font demeurés fans répl iqu e, je me borne h y perfifter j efpérant que mes J u g e s vo ud ron t bien y jetter les y e u x .
a°. O n prétend'que la fomme dont les 1 8 0 0 liv. que je payai
à M e . A m b la r d , excédoient le prix de fes v i n s , a été imputée
fur le svi ns de S a uv a gn a t & non fur ceux de Perier ; on t r o u v e ,
dit-011, la preuve de ce fait dans un état qui eil p r o d u i t , qui
contient les, fommes que Chomette a r e ç u , & l’emploi qu’il en
a fait ; je réponds à cela , que je defie l’intimé d’ indiquer aucu
nes des pieces que j’ai produites, comm e établiifant cette imputa
tion particulière; s’ il en a produit de fon c ô t é , je les réeufe
c o m m e n’ayant jamais été communiquées ni a n n o n c é e s , & c o m
me étant fans doute de fon ieul fait.
30. E n f i n , l ’intimé me contefte le paiement que je lui ai fait
�ÿ//
p ou r les; arrhes de même vins de P e r i e r ' , & . i l croit pouvoir, dé
truire par des iimpoilures les. preuves écrites que je produit fur>
ce : point.
:( r ;
! ■'
-V ' ■
J e rapporte un état de toutes les arrhes p a y é e s par le f i e u r ’
C h om et te , cette état entièrement écrit de la main de ce d e rn ie r,
monte exa&eme.nt à la fomme.de j 86 liy. a in f iq u ’on peut l e v o i r t
par l’extrait qui en a été fait & rapporté p o u r justification à;
côté de chaque particulier, à la marge de l’état général des vins ;
je produit en outre une quittance de la fomme de 1 8 6 1 iv.
qu’il ma fournie avec imputation expreffe fur ces arrhes ; eft.-il
poiîible d’après cela de douter de ce que j’a v a n c e , fa vo ir que j ’ai
fourni le montant des a r r h e s p a y é e s pour ces vins de P e r i e r ?
Ma is on prétend q u ’il exiftoit autre, fois dans mes pieces un :
état de ces mêmes arrhes, qui les faifoit monter à 1 8 6 liv.
non compris celles payées pour les vins de Perier. Et qu’elle preu
ve donne-t-on de ce fait détruit parun état exiftant & non c o n tefté ? L ’atteftation de M e . T r i o z o n , Cou fin & Pr ocu re ur de ma
P a r t i e , qui certifie l’avoir v û . Q u ’elles miféres ! . qu’elles imp ofr
ture>! i l a exifté de tout temps dans mon doflier un état des ;
a rr h e s, compofé de huit feuillets, tous écrits de la main de
C h o m e t t e ; cet état île produit , il n’a pas pu en exiiler. 1111 autre
différent de ce lu i- là , il feroit p ro u vé faux par cet état de huit
feuillets que Chomette ne peut c o n t e f t e r , puifqu’il eft écrit de.
fa m a i n , & p a r l a quittance fignée de l u i , & c o n fo i m e au réfultat de ce même état.
E n effet, l’intimé fuppofe que fon état prétendu conftatoit
qu’il avoit été p a y é 34 liv . à C la ud e D e l a n e f de G h a d e l e u f ,
pou r arrhes , & cependant l’état que je rapporte de la main
de Chomette , conftate ( p a g e p re mi ere ) q u ’ il n’ a été payé que
l z liv. d’arrhes à ce Particulier. Il eft vrai qu’au deffous de cette
mention il a été ajouté après c o u p , ( l’intimé & M e . T r i o z o n qui
ont originairement pris communication de mes piecès., pour-'
roient mieux inftruire q u e . p e r fo n n e , fi c’eft avant ou après les
conteftat.ions) au deffous de cette mention a reçu pour arrhes i z
li v . il a été a j o û t é , dis-je , d ’un ancre & d’une plume fenfiblement différente , & n’importe dans quel temps, les deux notes qui
fui v e n t , Maucour a donné audit Delanef 6 / . . . •j'a i payé pour lcd.
D elan ef aux Confuls \6 liv. Mais pour pro uve r que ces deux fommes de 6 & de 16 1. ajoutées après c o u p , n’ont pas été payées pour
arrhes, il fuffit d’obferver^ i 0. que ces deux dernieres mentions n’ont
*»
�6
pas été* faites dans ’le mêmèr.temps que-la mention des' arrhes'^]
cleft.;une^preijv.e des y e u x * .2?; -Que-iChomettqfen calculant ces;:*
a r r h e s , a écrit de fa propre main le chiffre 24 au bas d a l a ' m â r i o
ge p o u r représenter le montant de toutes ces arrhes notées à cet
te p a g e , lefquelles montent ef ïeâ iv em en t à 24 livrés j non com*pris les deux fommes d e . 6 i & 16 livres mentionnées p o f t é r i e u r e - 1
nient.
;
*
I I 'e ft vrai que ce chiffre 2 4 livres m i s 1 aui-bas^de i a marge
c om m e total des arrhes , a été bâtonné'auifi' d’une encre diffé
rente que celle dont il avoit été é c r i t , mais d’üne part on n’a pas
ofé le remplacer par un autre chiffre qui auroit du être plus
considérable ; d’autre part; c’eft le-même chiffre de 24 livres qui •
eft rapporté au verfo du feuillet pour aider au c a l c u l , & que
par inattention fans d o u t e , on n’a pas b â t o n n é . . . . . & c .
L e rapport de ces circonftances n’eft pas gracieux -»p o u r l’inti
mé , par la raifon que le tout' eft de fa main. Mais pourquoi
me force-t-il à les relever ? pourquoi me met-il dans l ’indifp e nf ib le néceffité: de p ro u ve r que ce n’eft pas; à moi qu ’on peut
imputer des changements dans les piece’s, & que les impoftures
groiTieres ne font pas d é m o n fait. D ’ailleurs il doit c o n v e n ir que
je garde le filence fut beaucoup d ’autres traits, tels que celui de
J e a n H e l i a s , celui de la v e u v e G a l o t de même efpece que celui-ci
& fur plufieurs autres dont j ’ai donné l ’échantillon à la page
derniere de mon M ém oi re.
Les o b je ft io n s , où plutôt les impoftures ainfi réfu tées, je puis
rappeller en conclufion ce que j’avois d ’abord démontré , (avoir
que la preuve ordonnée prouveroit plus qu’il n’étoit en thefe.
Ce rictoit pas fur ce-fait reconnu par le Jieur Chomette , mais
fur le (.lit par lui articulé , avec foumijjion de le prouver , que
f interlocutoire devait frapper.
C e fait croit reconnu par le fieur C h o m e t t e , ce dernier a vo uo it
lors d e l à Sentence comme a u j o u r d ’h u i , q u ’il lui avoit été fait
un paiement à C h a d e l e u f le 4 Ma rs ; mais il articuloit & fe
foumettoit à prouver que ce paiement avoit été fait pour les vins
de Sauvagnat ; je déniois ce f a i t , & j ’y étois d’autant mieux
fondé , qu’il étoit facile de p ro u ve r que j’avois pay é tous les
vins de S i u v a g n a t avant d ’aller à C h a d e l e u f , ce qui écarte les
faulles induirions que l’intimé déduit du projet de quittance
du 4 M a r s , qui porte en termes formels fon imputation pou r
Sa uv agn at ; car s’il eft confiant que les vins de Sauva gna t étoient
�p a y é s avant que les Parties allaffent à C h a d e l e u f , ce projet de
quittance portant imputation fur les vins de S a u v a g na t , n’a
pas pu être donnée à Ch adeleuf.
L es J u g e s dont eft appel n’avo ient donc pas befoin de s’affurer qu’il avoit été fait un paiement à C h a d e l e u f le 4 M a r s ,
toutes les Parties en c o n v e n o i e n t , mais feulement de la deftination de ce paiement ; c ’eft le fieur Chom et te qui articuloit cette
defti nation avec foumiffion de prouver , dit-il, dans fes requê
tes que cette fomme payée à C h a d e l e u f , étoit deftiné e pour les
vins de S a u v a g nat ; je déniois cette deftination ; c eft f u r ce feul
fait que les Parties p ou voi en t être juftement interloquées, &
l’interlocutoire devoit charger le fieur Ch omette de p ro u ve r le
fait qu’il articuloit, & qu’il fe foumettoit de prouver , f a u f à moi
la preuve contraire , & qu’en exprès tous les vins de S a u v a gnat avoient été pay és avant notre départ de ce V il la g e p ou r
aller à C h a d e l e u f , où fut f a i t , fuivant l’aveu d u fie ur C h o m e t t e ,
le paiement dont la deftination eft conteftée.
Les J u g e s dont eft a p p e l , au lieu d ’interloquer fur ce fait
articulé par C h o m e t t e , avec foumiffion de le prouver , le feul qui
fut à verifier , ont ordonné la preuve d’un autre fait qui établiroit plus qu’il n’eft en thefe ; ils ont donc auff i mal jugé par ce
fécond ch ef que par le premier , je ne peux donc pas douter
que leur Sentence ne foit infirmée en fon entier.
S ig n é , F E U I L H A N D .
Monfieur M O L L E S , Rapporteur.
J
A
u l h i a r d
,
Procu reu r.
CLERMONT. F E R R A N D t
D e l’imprimerie de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines d u
R oi , près l’ancien Marché au Bled. 17 7 2 .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Feuilhand, Pierre. 1772]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Molles
Julhiard
Subject
The topic of the resource
négociants
vin
commissions
arbitrages
créances
profit de voiture
commerce
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour sieur Pierre Feuilhand, l'aîné, Appellant. Contre sieur Jean Chomette La Forie, Intimé.
Table Godemel : Société : 3. l’association des deux parties a-t-elle eu pour objet, seulement le produit de la petite commission et le profit de la voiture (sur expéditions de vin) ou, au contraire, le droit de la grande commission ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1772
1772
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0323
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0322
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52931/BCU_Factums_G0323.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Brassac-les-Mines (63050)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
commerce
commissions
Créances
négociants
profit de voiture
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54014/BCU_Factums_DVV20.pdf
106d5d817990196714de06ebb333c78a
PDF Text
Text
/ / Á t£ /á ¿ /S t* , í. *¿tu**
\JçJu*.<
.*-
. -- -
¿Lí¿rC¿//
MEMOIRE A CONSULTER
ET
C O N S U L T A T I O N
PO U R
M' TRIOZON-SAULNIER,
Avocat près le Tribunal civil d’Issoire.
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iîfîT'in.*ïi>r> , ¿•»i^ifnô:) >. ¡a ;»!>
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M c T rio zo n-Saulnier, avocat près le Tribunal civil d’Issoire ,
consulté par les héritiers Cothon et autres, leur donna l’avis ver
bal d’intenter une action en dommages-intérêts contre un avoue
qui avait eu leur confiance.
Depuis cet avis, M ETriozon ayant eu connaissance de faits et
circonstances qu’il avait jusqu’alors ignorés, ne crut pas devoir
continuer à rester chargé de cette cause.
Les héritiers Cothon s’adressèrent à M .le président du tribunal;
le président du tribunal les renvoya au bâtonnier, qui, se confor-
�mant à leurs désirs , commit M c Triozon-Saulnier pour défendre
leurs intérêts
7«-
. —-
M e Triozon répondit qu’il ne pouvait accepter la mission qui
lui était confiée , par des raisons qu’il était seul en droit d’appré
cier (2).
Le tribunal, formé en conseil de discipline, prit, le i g mars
dernier , une délibération dont le résultat fut que M c TriozonSaulnier comparaîtrait à jour fixe , devant lui, pour expliquer les
motifs JË son refus.
Cette délibération ayanl été transmise à M c T riozon-Saulnier,
il s’empressa de consulter les plus anciens avocats du barreau de
Clerm o n t? pour se conduire d’ après leur avis et ne rien faire qui
put porter atteinte à l’indépendance de sa profession.
Une consultation, signée de M. B o iro t, bâtonnier de l’ordre,
et d’un grand nombre de scs confrères , confirma M c T riozonSaulnier dans l’opinion qu’il s’était d’ abord formée ( 3). Il se pré
senta devant le tribunal, le jour qui avait été fixé, et répondit,
en se conformant à l’avis qui lui avait été donné, que pour la
dignité etjl’honneur de l’ordrCj des .avocats, il ne pouvait ni 11c
croyait devoir fournir des implications pour motiver sa résolu
tion de ne pas plaider, et qu’il persistait dans sa première déter
mination.
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Le tribunal, réuni en conseil de discipline (le 22 mai dernier),
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P iic e s ju stifica tive s, N» ,.
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�fui d’avis que M c Triozon Saulnier s’était renfermé dans l’exer
cice des droits attachés à sa profession (i).
Me Triozdn espérait que cette décision serait souveraine : il se
trompait. Le ministère public , au nom de M . le procureur - gé
néral absent, lui fit notifier un appel et une citation devant la
Cour royale de Riom , pour répondre aux interpellations qui lui
seraient faites sur sa conduite, et se voir appliquer des peines de
discipline, pour s’ètre écarte des scnlirncns d'honneur , de fra n
chise et de loyauté (2).
;
b
8 î $ i ¡cm
;»l t ■ nülqbib »b_ iioêfioa 11y i m i t a t o i i o s
Les termes de celte citation ont justement affligé M c TriozonSaulnier ; il laissera à la sagesse de la C o u r le soin d’apprécier si
M. le procureur-général a pu interjeter appel de la décision du
22 mai : il se bornera à soumettre au conseil l’ unique question de
savoir :
Si un avocat, désigné en matière civile par le bâtonnier de son
ordre, pour défendre une cause qu’il a conseillée, peut être forcé
de faire connaître les motifs de son refus , et si M. le procureurgénéral est fondé à demander contre lui l’application des
peines de discipline, pour avoir répondu que pour la dignité et
l’honneur de l’ordre des avocats, il ne pouvait ni ne croyait de
voir fournir d’explications pour motiver sa résolution dans cette
circonstance.
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(1) Vuy. Pièces justificatives, n° 5 .
(2) Voy. Pièces jusiificativcs, n° 6.
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ibl iuj> anüfJdloqvjJui xjjiî o ib q o q jr ijuog
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Qui a lu i° la décision du tribunal de première instance d’Issoire, réuni en conseil de dicipline, le 22 mai 1828, d’après
laquelle il a été d’avis que M ‘: T rio z o n -S a u ln icr, avocat près le
tribunal, avait eu le droit de refuser de plaider une cause civile,
sur la désignation du bâtonnier de son o r d r e , ( quoiqu’il eût luimeme conseillé le p r o c è s ) , et de faire connaître les motifs de
son refus.
20 L a citation donnée par M . le p ro c u re u r-g é n é ra l, audit
M c Triozon-Saulnicr à comparaître devant la Cour royale de
R io m , à l ’effet de répondre aux interpellations qui lui seraient
faites sur sa conduite, et se voir appliquer l’une des peines de
discipline énoncées en l’article 18 de l'ordonnance royale du 20
novembre 1822 , pour s'être écarté des serdimens d honneur, de
franchise et de loyauté, l'une des bases de la profession d avocat.
Consulté par ledit M c T rio z o n -S a u ln icr, sur la question de
savoir si en maiière civile, un avocat désigné par le bâtonnier
de son o rd re , pour défendre une cause qu’il a conseillée, peut
être forcé de faire connaître les motifs de son refus;
.0 ( ii <cÆYiJüinliJcw)
EST
D ’ A V IS
DES
R É S O L U T IO N S
v (0
S U IV A N T E S :
De l’indépendance , caractère essentiel de la profession d’avo
�cat, naît pour celui qui l’cxerce la faculté d’accorder ou de re
fuser son ministère à ceux qui le réclament. S ’il se consacre au
public, il n’en est pas l’esclave (t) , et il le deviendrait s’il était
l’interprète obligé de scs passions ou de ses caprices. Le serment
qu’il prête en revêtant la to ge, lui impose le devoir de ne point
employer scs connaissances , ses talens au triomphe d’une cause
qu’il ne croirait pas juste en son âme et conscience. Sa conscience
seule est juge des motifs qui le portcnL à accepter ou à rejeter la
cause qui lui est présentée ; « sans ce droit précieux, lit-on dans
» le préambule de l’ordonnance de 1822, les avocats cesseraient
» bientôt d’inspirer la confiance et peut être même de la mé~
» rilcr (2). -•>
Une seule exception, non au devoir de l’avocat, qui est inalté-
(1) D ’Aguesseau ( Discours sur Vindépendance de l ’avocat,')
(2)
D an s l’affaire du chevalier D esgraviers , jVI. D upin a în é , répliquant de
vant la C o u r royale à M. Q u é q u e t, avocat g é n é ra l, disait ;
« C ’est avec plaisir que j ’ai entendu le défenseur de Sa M ajesté rappeler c,elte
belle et rassurante parole , d’un de ses plus illustres d evan ciers, Je savant et
modeste d’A guesseau, le q u e l, en parlant des gens du parquet, disait que : «dans
» les causes du r o i , leur.m inistère ne les rend parties qu’avec les dispositions
» des ju g e s, et le m êm e esprit de justice. »
» M ais en cela, q u il me soit permis de le dire , M . l’avocat du l\o i ne s’est
rien attribué que je 11e puisse égalem ent revendiquer pour le barreau.
» E t nous aussi , Messieurs , le devoir de notre profession nous ob ligea nous
constituer les prem iers juges du droit de nos cltfins ; nous ne sommes les déjeti-
seurs obligés d’aucune cause ; aucune loi ne dit que nous serons tenus de plaider
telle ou telle affaire ; et notre serin en t, le même que nos jeunes contrères vien
nent en ce m om ent de prêter devant v o u s , nous oblige à rejeter loin de nous
le fardeau de toutes les causes que nous ne croirions pas justes en notre ;1me et
conscience. »
�rable J'irltiis iisdn* c;ntièike ülvcrte , existe dans les affaires crimii*fq .
r' . |
,
nelle^. ‘L ’dèsislàntC' fFtin conseil est ■
alôrs exigee , autant dans
l’ intérêt de lû1 jiMick ijuê danb'l’intérê't'de l'accusé ; si hori habebunt advochiuhi v;'ëgà dubo , disait le prêteur (i). L ’avocat
noinrhé d’office ne peut réfuéér d’êfiæ l’appui, le guide d’ un irttr
forfané ; :pour lui la c a u se du malheur est sacrée; res est sacra
miser..... Il ne Tabandônnerait pas lors même que l’obligation
rïe serait pas écrite dans la loi ; mais son devoir dans ces affaires,
reste toujôurs tracé par sii conscience et son serment; il lui est
rappelé avàrit l'ouverture'des débats par le magistrat qui préside
f cttdè d’ inst. CrimiH^lfe. art. 3 i i ); C ’est ce devoir qui lui im
pose quelquefois un douloureux silence qu’il ne saurait rompre
sans blesser sa concience. TSec factum défende rneum , mata
causa silenda est (2).
En matière civile , l’avocat conserve son indépendance toute
entière; aucune injonction , aucune désignation 11e saurait le for
cer à se charger d’une cause qui lui répugnerait; il n’a aucun
compte à rendre de sà détermination; il ne doit consulter que sa
conscience , elle seule est son guide et son juge.
, air>nnr,7'*b «nJz »t'!t zituf üaa'fjf»
;>> a!-i/;iü8?iin '
Ce droiti, inhérent àda profession d’avocat, a été respecté par
i!» JuflvBB »1
le décret de i 8 r o , dont plusieurs dispositions portaient cepen
dant atteinte à son indépendance ; dàns, son système même ce
décret faisait une distinction entre les affaires civiles cl lesaifai-iiv
. . .
,
.
. ;..
res crimiuelles ; au criminel , tout accuse doit avoir un défenseur
de son clioijv , et ç’est pour ce ca§ seul que le déçret de 1810 ,
art.
» assujéLit l’avocat qui refuse, à déduire scs motifs pour
les ¡faire agréer ; rnaisi en* matière civile , il n’est pascssentiel que
■LJÜii i)l> U-U'.l
I .' ", I111(. ^
(r) Jj. 1 f § 4 ff- Wb postutnndo.
(a) (hid. 3 , de Pont.
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�les parties aient un avocat, ; plusieurs s’en dispensent, çt^proeje-,
dure n’en est pas moins régulière; aussi l’art. 4 1 du décret,rçfauf
torise-t-il à nommer d’office un avocat pour ces sortes:d’affaire8,
qu’on ajoutant s ’il y a lieu; ce qui rend la désignation et l’accep
tation facultatives. Le décret n ’oblige pas l’avocat, comme dans
, • cr ■
^ niioijpoeuopeol f JnSmÔiinBpiJa iievudq no li 2L
les atraires criminelles, a taira,connaître et.agréer scs motus;
s o n re f u s est p é r e m p t o i r e , e t c o m m e te d is a it M° D u p i n a î n é ,
inobnoaniîiio mo eojrtfijaiiooaioiiob .ni;! ¿iu<i unnoo 3xc*nic Jkqovî»
dans une consultation du 5 iev n er dernier , sur une question
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semblable, il peut se contenter d e repondre : « II ne me convient
» pas de p l a i d e r telle cause. T o u l c a u t r e d é d u c t i o n de m o t i f s ,
, n
., a a ub.ay.oou3 « p e o i i f i î J n i p aavnsifj 89b i d i w o
» telle que 1 allégation que 1 on est mal p o r ta n t, mie la cause est
--n« /'oir:.ilu<5iio )
ob oûp qtio Uj; o^uipoÆ a o n n o i i f i n a a p i q ^ n j j u p
» mauvaise, que 1 on est trop charge / est de pure courtoisie. »
n b ¡ajlao , oaüiiD r.i o b o J il in o u r (d oup ; « iu q o o a u m p o n o :iJ:i J ifii
Cette faculté de désigner un a v o c a t ’ dtins'-les affaires civiles,
n’est pas reproduite dans l’ordonnance du r o i , de .1822* I^’ai
Licle
4i se contente d’imposer à un avocat I'oblig^jop d’aççorder son
ministère en nialièi c 'C rim inelle ? à moins q u ’i l .n tlit présenté
fait agréer ses motifs d ’excuse.
•®•u
eailqai
Il faut en conclure que U'dispôsîtioh de l’art. 4‘r du décret de
1810 , qui n’imposait du ¡reste aucune: obligation de; p la id er, a
été àbrogée par. l ’ordonnance.
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ob .i’t.s'b
Objecterait-on que dans le cas particulier, l’obligation de
plaider nais&iit à l ’égard de M° TFrio/on , de ce q u ’il a^ait
étinfceillé d-lntentér le pro^è-s- ?Jfioovcfl oup iol iA ob u- . >iî*i-'*> ■
; ôliiipèM fi oin’ioino ) uoq .fiV.ovno’it rd Iifwp omont «nol , vlluéiaoj
On réppndrait qu’en donnant une Qpn^ltaliqn un; ayqcaL n’a
liène passa liberté ; qu’ il ncj.se forme ¡aucqn conjtgftt .-obligatoire
pour lui, vis-à-vits du client. So n devoir, dans spp¡cabineL, est
de peser en son àmç cl.pçi/scicpjcp ses ayis et ses conseils , d’après,
l’exposé qui lui est fait. Lorsqu’ils sonl donnés, ¡l;çst délié;ylp toute
�obligation vis-à-vis du d icn t ; ce dernier est libre de les suivre ou
de les négliger, de continuer ou de retirer sa confiance, de
s’adresser à d ’autres jurisconsultes; la liberté dont jouit le client
existe également pour l’avocat.
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Lhrilipiil jioiJJsJ
S ’il en pouvait etre autrem ent, les conséquences les plus déplo
rables se présenteraient en foule à l’esprit. Ce serait en vain qu’un
avocat aurait connu plus tard des circonstances qui changeraient
'* O fiU *SUPj
jO îüL'IO II 'lO I 'iV .'ji r i l b t V ) l ’ il
•
la face de l’affaire et l’opinion qu’il avait d’abord embrassée,
qu’une enquête dont il était impossible de prévoir le résultat,
aurait fourni des preuves contraires au succès du procès conseillé;
qu’une prescription non acquise à l’époque de la consultation au
rait été encourue depuis; que la moralité de la cause, celle du
client, jusqu’alors ignorées de l’avocat, lui auraient été révélées.
Par cela même qu’il èst possible q u e , postérieurement à la
Consultatidn donnée , des faits nouveaux; changent l’état de la
question e t , par’conséqticnt, le devoir de l’avocat, il f a u t , pour
qu’il l’accomplisse consciencieusement, qu’il demeure, à toute
e'poqup , seul arbitre du parti qu’il doit prendre.
E t quand'il serait vrai que les faits n’eussent pas changé, il ne
faut pas croire que tout conseil 1-engage irrévocablement à se
charger de plaider.
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U n conseil , une consultation peuvent n’êlre autre chose que
l’explication de la loi que l’avocat doit donner, au client qui le
consulte , lors même qu’il la trouverait peu conforme à l’équité;
mais l’avocat reste maître de prendre , non-seulement dans la loi,
mais aussi dans la riolion du ju;itc et de l’injuste qui lui est fournie
par sa conscience , la règle de son devoir. Par exem ple, il ne
peut s’empêcher de déclarer 5 son client q u ’a ux termes de la loi,
la prescription lui est acquise , et cependant sa conscience., appré-
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ciant les faits de la cause dans laquelle cette prescription est invo
quée , peut lui défendre de s’en rendre l ’organe.
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Si l’ayocat est libre de refuser son ministère;,,est-il tenu, com
me on le prétend , de faire connaître les motifs de son refus?
Non , sans doute : car si personne ne peut le forcer à se charger
d’une affaire , personne ne peut lui demander compte des motifs
qui le déterminent. Autrement, ce ne serait plus d’après sa cons
cience qu’ il plaiderait , mais d’après la conscience d’autrui. Ce
ne serait plus parce qu’une affaire lui paraîtrait bien fondée en
droit et et en équité, ce serait parce qu’elle aurait paru telle à
d’autres q u i, jugeant ses motifs, ayant la faculté de les admettre
ou de les rejeter, pourraient le forcer à soutenir ime opinion qui
n’est pas la sienne et à combattre son propre sentiment. Que de
viendrait l’indépendance de l’avocat? Où serait cette liberté es
sentielle à l'exercice de sa profession i'
• < *v
Vy v,
Mais indépendamment de celte liberté qui constitue son droit,
il existe un devoir s a c ré , celui de ne pas trahir la confiance du
client qui lui a demandé conseil ; son cabinet est un asyle invio
lable dan^ lequel aucune inquisition ne peut pénétrer. S ’il est
libre de ne pas défendre les intérêts d ’un c lie n t, il n’est pas libre
de les compromettre. Telle pourrait être cependant la conséquence
de la révélation des motifs qui le portent à refuser.
■
I c e >• êorfofiJiB i n o a î u p ¿ f t o i b
S ’il les communique au conseil de discipline composé de ses
confrères , ne les détournera-t-il pas de se charger de l’affaire ?
ne leur fera-t-il pas partager ses raisons , s a détermination? ne
mettra-t-il pas ainsi, par une indiscrétion îiépréhensiblevie client
qui a placé sa Confiance en' l u i , dans l’impossibilité de trouver
un défenseur?
V i;
— ' ij;
,
�IO
Combien scs intérêts seraient plus gravement compromis en
core si le conseil de discipline était com posé, comme il l’est à
Issoire, des membres même du tribu n al, c’est-à-dire des magis
trats qui doivent juger le procès ; ce serait à ces juges que l’on
voudrait contraindre l’ avocat de dévoiler tout ce que lui a dit son
client, les confidences qu’il peut en avoir reçues! Il devrait leur
exposer scs objections, les développer si elles étaient combat. îü
dJorrfoD *j'jJ-îî!/»iiio i) m l Jixo' i o u *•fi K»c/:o '
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tues , et élever ainsi dans leur esprit, non-seulement des préven
tions fâcheuses , niais peut-être y former une conviction contre
laquelle tous les efforts de son client pourraient être inutiles.
L ’avocat qui en agirait a in si, non-seulement montrerait une
faiblesse , une condescendance condamnables, mais encore mé
connaîtrait sa dignité’, son serment, ses devoirs; alors on pour
rait lui adresser le reproche renfermé dans la citation donnée au
nom de M. le Procureur général à M e Trio/on-Saulnier, de s être
écarté des sentimens d honneur, de franchise et de loyauté.
De ce qui précède , il faut conclure , avec le tribunal d’ Issoirc ,
que la profession d’avocat étant lib re , il est permis à celui qui
l’exerce de refuser ou d’accepter, en matière civile, les causes qui
lui sont présentées; que l’on ne peut exiger de lui qu’il fournisse
des explications sur les motifs de ce refus, parce que ce serait gê
ner la liberté et l’ indépendance inhérentes à la profession d’avo
cat; que M e Triozon-Saulnier s’est renfermé dans l’exercice des
droits qui sont attachés à sa profession.
il est cependant cité devant la Cour royale de llio m : il devra
s’y présenter avec confiance, dans l’espoir de voir consacrer de
nouveau des droits légitime** et précieux qui ont été m é c o n n u s c l
contestés. Les magistrats qui la composent seront frappés de ce
que M. le Procureur général invoque contre M* Triozon-Saulnier
�Inapplication des peines de discipline portées dans l’ordonnance de
1822 , pour avoir refusé de dire les motifs qui l’ ont déterminé à
11e pas plaider une affaire c iv ile , lorsque cette ordonnance , dans
son article 4 1 » ne prononce ces peines, en cas de résistance , que
lorsqu’il s’agit de la défense d ’un accusé ; ils n’apprendront pas
enfin sans étonnement et sans douleur, que la conduite d’un avoqui n’a fait qu’u s e r , suivant sa conscience , de la liberté inhé
rente à sa profession , ait pu provoquer une censure tellement
amère que l’oubli de tous les devoirs pourrait seule la justifier.
Délibéré à P a ris, le 16 juin 1828.
TA R D IF.
D E L A C R O IX - F R A IN V IL LE ;
ancien bâtonnier'.
B E R R Y E I l père.
D E L Y IN C O U R T .
G A Y R A L , ancien bâtonnier .
H E N N E Q U IN .
•F’adhère d’aulani plus volonliers à la consultation ci dessus , que nia con
viction à cel égard est form ée depuis lon g-tem p s; c l que j ’ai déjà émis la même
opinion dans une occasion sem blable. \ oyez la G azette des tribunaux , du 6
février 1828.
D U P IN
aîné.
l- ’ancicn avocat soussigné déclare avec em pressement son adhésion h une
doctrine qui est la seule véritable en m atière de devoirs et de droits de la
profession d’avocat. L es développcm ens que renferm e la co n su ltatio n de scs
confrères lui paraissent aussi concluans que com plets. A son avis , si une dis
cussion aussi lumineuse et aussi forte ne produit pas pour effet d’éclairer le
ministère p ublic exerçant près la C o u r royale de R io m , sur l’erreur de sa pour
�su ite , on ne saurait douter du résultat. D e s M agistats sup érieu rs, renom m és
pour la sagesse habituelle de leurs arrêts , et dont plusieurs se sont élevés des
rangs du barreau aux ém inentes fonctions qu’ ils rem plissent , ne pourront hé
siter à consacrer une défense fondée sur les maximes les plus évidem m ent con
form es à la raison , à la liberté de l ’avocat et à la dignité de sa profession.
D élib éré à P aris , ce 17 juin 1828.
B I L L E C O C Q , ancien bâtonnier.
J ’adhère com plètem ent aux principes développés ci-dessus.
P a ris, le 18 juin 1828.
M A U G U IN .
L e conseil soussigné estime que lors m êm e que la prétention de M
le P r o
cureur-général prés la C o u r royale de R io m serait fo n d ée, la qualification de
la faute qu’il impute ;V M . T iio z o n Saulnier , serait d’une amertume hors de
proportion avec celle faute qui dans la réalité 11e serait qu’une erreur. A in si
même dans ce cas I’accusalion ne saurait être accueillie ; mais appréciée à sa
juste v a le u r , on vo it que c’est elle qui est erronée , et il est évident que
M. T rio zo n Saulnier n ’a fait qu’user d’un droit attaché à sa profession. C ’est
ce qui a été parfaitem ent dém ontré dans la consultation ci-dessus à laquelle le
soussigné adhère com plètem ent.
P a r is , le 18 juin 1828.
D U P I N jeune.
J ’adhère com plètem ent à la consultation ci-dessus. E n m atière crim inelle
l’avocat est obligé d’ obéir il la nom ination d’ office dans l’ intérêt naturel de la
défense qui ne penn et pas qu’ on abandonne un accusé ; mais en matière civile,
il eu est autrem ent; la liberté et l’ indépendance de l’avocat peuvent et doi
vent être en tières, sans nuire à la partie qui trouvera un autre a v o c a t, ou
qui dans tous les cas , ayant un avoué qui ne peut pas refuser la nom ination
d’ office , 11e sera pas abandonnée à elle-m êm e.
�J e crois devoir d’ autant mieux adhérer aux principes développés plus liant par
ines honorables c o n frè re s, qu’ il ne m ’est pas possible de m ’expliquer à m o imêine les raisons sur lesquelles pourrait se form er l’ opinion opposée.
P aris , ce 22 juin 1828.
-,
J. B . N . P A B O U IN .
T
■
»
L e soussigné adhère pleinem ent à la résolution donnée dans la consultation
ci-dessus , ainsi qu’aux m otifs sur lesquels elle est fondée. 11 a toujours pensé
que , hors le cas où l ’avocat est chargé d’ of: ce , en m atière crim inelle en g é
n éral , il ne peut être contraint de rem plir la m ission qui lui serait donnée de
défendre une cause q u elco n q ue, parce qu’ il est juge Souverain des raisons
qui peuvent l’en détourner , raisons que les devoirs de sa noble profession
l ’em pêcheraient souvent de faire connaître à qui que»ce fût.
P aris , le 22 juin 1828.
DURANTON.
J e ne saurais rien ajouter à tout ce qui a été dit dans la consultation et les
adhésions qui p récèd e n t, en faveur de llavocat inculpé.
S a justification me sem ble com plète et irrésistible sous tous les rapports.
P a ris , le 23 juin 1828.
T H E V E N IN
p è re , bâtonnier.
U n avocat qui est nom m é d’ office pour plaider en matière crim inelle et qui s’y
refuse est obligé de déduire et de faire agréer les m otifs de son refus ; la loi est
form elle à cet égard. M ais il n’ en est pas de même en m atière civile ; l ’avocat
peut , en cette matière , se charger ou refuser de plaider selon qu’il le juge h
propos ; ensorte que personne n’a le droit de l’ in te rro g e r, ni de lui demander
compte de sa déterm ination ; il est entièrem ent libre et exempt «le toute espèce
de c o n trô le ; c ’ e s t ce qu’établit parfaitem ent la consultation à laquelle j ’adhère
com plètem ent.
Paris , le 24 juin 1828.
A R C H A M B A U L T , ancien bâtonnier.
�L a liberie dont l'avocat doit jou ir dans l’excrcice do ses fonctions civiles, et
le secret qui doit ûlre observé sur ce qui s’est dit et passé entre lui et son c lie n t,
s’ opposent égalem ent à ce qu’il lui soit demandé com pte des m otifs qui le dé
term inent à refuser la défense d’une cause civile. C ’est un principe universel
lem ent adm is, et qui ne peut ôtre révoqué en doute par ceux qui ont appartenu
à cet ordre.
A Paris , le 24 juin , 1828.
jîu a q gjtfopjoi £ i l .oàbnol îw silo ¿brjp ^ l m
#
T R IP IE R .
0 0 ^
¡ani* «aowafe-w
Le soussigné adhère com plètem ent à la consultation ci-dessus.
P a r is , le a 5 juin 1828.
H . Q U F /N A U L T .
i t o i ^ l o i q sîcfon' £2 :'f> vu& rm i ‘A sup enoeir.': , •iornuolbij no': Jn-ivüyq iup
�PIECES JUSTIFICATIVES
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r i :} î ••
• t.
DES
F A ITS ÉNONCÉS DANS LE M ÉM OIRE A CONSULTER
ET
DANS
X.A C O N S U L T A T I O N .
IV
i.
Lettre cle M . D o r l i i a c , bâtonnier de l ’ordre des avocats près le
tribunal civil d ’issoire , à M ° T r i o z o n - S a u l n i e r , avocat.
L<- 19 Fevrier i8a8.
Monsieur ,
M . le président vient de m’inviter à désigner un avocat pour plaider la cause des Cothon, Pètres et autres, contre Mc Lemoine, avoué ; les parties m’ont en même temps
témoigné le désir de voir confier leurs intérêts à vos soins et à vos lumières; j ’ai donc
cru devoir vous commettre pour les débattre et les soutenir.
Agréez, Monsieur, l’assurance de la plus parfaite considération avec laquelle
j ’ai l’ honneur d’être, votre serviteur,
Signé DORLHAC,
Bâtonnier de l'ordre.
N°
Réponse de M e
T
r io zo n
-S
2.
au ln ie ii
à M'
D
o r liia c
.
Le icr Mars 1828.
Monsieur,
J ’avais prévenu les Cothou qu'il m’etaii impossible tic icpondre à la confiance dont
�iis voulaient m ’ honorer, je dois leur savoir grc' de leurs nouvelles instances par votre
intermédiaire; mais je crois d evo ir, par des motifs que je suis libre d’ apprécier, per
sister dans ma résolution. Il ne leur sera pas difficile de trouver plus de lumières et au
tant de zèle que j ’eu-a lirais mis à l<?s défendre. Je dois faire observer <jue par mon refus
je n’entends rien préjuger sur le mérite cle leur cause.
A gréez, Monsieur, l’assurance de la considération la plus distinguée de votre
très-liumble serviteur,
Signé T R IO Z O N -S A U L N IE R .
ct ,î T TIT?y:n i / rM
r ffIAT/TÎi !.f
..........
„
Lettre de
"
M .
M
N°
a g a u i)
f
3.
d ’A u b u s s o n
tribunal civil d Issoire , à
,
Procureur du R o i près le
M ‘‘ T r i o z o n - S a u l n i e r .
Le 22 Mars 1828.
Wonsieur,
Monsieur le Président ayant fait connaître au tribunal, réuni en conseil de discipline
de votre-Qrdre, qu'ayant été invité par l’organe de M . le bâtonnier,, à prêter votre m i
nistère aux Pêtres, Cothon et autres, en procès avec M . Lem oine, avoué, vous lui
aviez répondu que vous ne pouviez vous charger de cette affaire par des motifs que
vous étiez seul en droit d’apprécier : il a pensé q u e s i dans l’ctat actuel de la législa
tion, qui a déterminé lès devoirs et les prérogatives du b arreau , il ne pouvait être en
joint à nn a v o c a t, en matière c iv ile , de plaider d ’office, il existait pour lui une obliga
tion m orale, dérivant du droit naturel de la défense, et des sentimens courageux et dé
sintéressés dont il a toujours fait p reuve, de prêter son ministère aux parties qui le ré
clament , à moins qu’il n’ait des motifs fondés pour s’y refuser. Que le seul moyen de
concilier ce qui est dû à ce droit sacré de la défense, et à l’indépendance reconnue de
l’a v o ca t, était de l ’iuviter à faire connaître les motifs de son refus au conseil de disci
pline de son o rd r e , il a en conséquence été pris le 19 de ce mois p ar le conseil de disci
plin e, une délibération par laquelle vous êtes appelé à comparaître le 17 avril prochain
à 4 heures, devant lui à iin de déduire les motifs de votre refus.
Bien persuadé, Monsieur , que vous ne verrez là , de sa part qu’ une mesure comman
dée par le besoin d ’assurer un défenseur aux parties qui réclam ent, et qui paraissent
devoir en être privées, tant qu’elles conserveront l’espoir que vous pourrez leur en ser
v ir , je n’hc’site pas à penser que vous voudrez bien vous trouver suffisamment prévenu
par ma lettre, de l ’invitation qui vous est faite. Le désir que j ’ai de conserver avec les
�membres du barreau de ce siège, les relations agréables que permet l’accomplissement
de devoirs quelquefois pénibles, m’ engagera toujours à n’em ployer à leur égard de
mesures plus officielles, qu’ autant qu’elles deviendraient indispensables. Tels sont
mes seuls sentimens avo ues, qui seront toujours ma règle de conduite.
A gréez, M onsieur, l’ assurance de ma considération ti'cs-distinguée,
. . .
,
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. •, . *
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.
L e Procureur du R o i,
Signe M A G A U D n ’A U B U S S O N .
N«
4.
C O N S U L T A T I O N des Avocats près le tribunal civil de
Clerm oni-Ferra nd .
•
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*î ' -.l,!.;i /”! ■
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1er A v r il 1828.
- n o s u n ï ’ i ' 1 o j j ï i u e ^ p a o ja i : c a iu / ijflp p J a sh sq *« i : k !o vçJu ioq :»
Les soussignés, avo ca ts, exerçant près le tribuual d ’arrondissement de ClennontFerran d , auquel il a été exposé par Mu Triozon-Soulnier, a vo ca t, exerçant près Je tri
bunal d ’Issoire , que sur l ’invitation adressée par M . le président au bâtonnier des a vo
cats , de commettre un avocat pour se charger de la défense des héritiers Cotlion , qui
ont un procès pendant devant ce tribunal, contre Mc Lcm oine, a v o u é ,
yb Ki,-j v 1 jaowiM’. onoiq lup , w à u a 'ii..'tiiw o , i ï l *WV'\ teüaKjaînn«» i» Vj
V»
11 s’est refusé à accepter celte mission.
Que cette réponse ayant été rendue à M . le président, il a cru devoir réunir les mem
bres du tribunal, q u i, aux termes de l ’ordonnance du 30 novembre 1 8 2 2 , étaient en
droit de se former en conseil de discipline.
)
Q u’il a été arrêté, que lu i, Triozon-Saulnier serait appelé à com paraître le 1 7 avril
prochain , à
4
heures, à ce conseil de discipline., qfin de déduire les m otifs dç son
refus.
u;
r c: ■ ,
Que M. le procureur du Roi 1a instruit de cet a rrê té , avec invitation de s ’y rendre.
-inl'i • m, jlo 'b buinioii liiauvu’i *41I0(£ -jIJi»io«oil o i t i o Ô cl ¿ 9B:ior »b alUOi
Consultes sur la question de savoir s’ il peut être obligé de déduire les motifs de son
têtus
,
ÜJi 1) HO UjU-»*'-» i-ci JU Jb.J
<
-1' - '
l
1
'i r ,
Estiment que celte prétention est contraire a la dignité et \ l'indépendance de sa p ro
fession , et qu’ il est en droit de se refuser à déduire les motifs de son refus.
Il est d ’abord essentiel d ’ observer qu’ il n’ est d ’tisape de' donner d ’olliee des jfvoe^ts
�aux parties qui le demandent, que dans les causes des pupilles, veuves, insensés, et
personnes misérables ,/eminis vel pupillis, v el alias debilibus, vel qui sanœ mentis
non sont: On peut voir à cet égard , L aroche-F lavin , dans sou T raité des parlem ensde
F rance, liv.
3 , titre
des a vo ca ts, pag.
238.
I c i , il ne s’agit ni de p up illes, ni de veu ves, ni d ’inseiisés, ni de personnes miséra
bles y il s’agit au contraire de personnes aisées qui ont les moyens de pourvoir à leur
défense, et d ’avoir recours soit à des avocats de la Cour ro y a le, soit à des avocats de
tous les tribunaux de son ressort.
Mais lors même qu’il en fut autrem ent, peut-on forcer M® Triozon-Saulnier à d é
duire les motifs de son refus , de se charger de la cause des héritiers Cothon, contre
Me Lqmoine ?
Quoique l’ ordonnance du dernier m inistère, du lo novem bre 18 2 2 , ne soit rien
moins que favorable à l ’ ordre des avocats, et qu’ on doive espérer qu’elle sera réform ée
en beaucoup de points, elle est cependant contraire à l’injonction faite à M c T riozon Saulnier, de se présenter.à Rassemblée du tribunal d ’ Issoire, réuni en conseil de disci
p lin e, pour y déduire les motifs de son refus.
■
*, V>! • :' L ' ' :;
11. ,
■
’
'
On lit dans l ’art. Li de cette ordonnance, que l’ayocat nommé d ’ olüce pour la dé!!,
.
. .
fense d un accuse, 11e pourra refuser son ministère , sans fa ir e approuver ses motifs
d ’excuse et d'empêchement par les cours d ’assises , qui prononceront en cas de résis
tance, l ’une des peines déterminées par l ’art. 18 qui précède.
A insi, d ’une p a rt, il ne s’agit dans celle ordonnance que de la défense d'un accusé,
d ’autre p a rt, cette nomination d ’ollice paraît réservée à la Cour d ’assises.
/HiiiqnKib ;»h li»«noa no umnot 0?. :>b îio-il
D ’autre p a r t , enfin , c’est à la Cour d ’assises seule qu’ il appartient d ’exiger que
l ’avocat refusant déduise les motifs de son refu s, et c’est à la Cour d ’assises seule,
qu’il appartient de les approuver ou de l'es désapprouver.
Il ne faut pas s’étonner que cela soit ainsi en matière ciiuiinelle.
Toute défense à la Cour d ’assises, est honorable pour l’ avocat nommé d ’oflice : l ’ huinanité lui fait un devoir de prêter son ministère à l’accusé pour le ju stifier, s’il est in
nocent ; et s ’ il a des empêchemens pour s’y refuser, comme l’état de sa santé ou d ’aurcs c m p i'c h c in e n s de ce genro, il doit les faire connaître à la Cour d ’assises à laquelle
il appartient de les approuver ou de les désapprouver.
Mais cette ordonnance n’a rien de commun avec le cas qui se présente, où il s’agit
l
�uniquement d ’une cause civile, où l’ avocat nomme d ’ o fiice, peut avoir pour refuser son
ministère une multitude de motifs qui ticuuent à la délicatesse, qu’ il peut seul ap p ré
cier , et qui peuvent être de nature à en rendre la publicité dangereuse soit pour l ’ a v o
cat lui-même, soit pour les parties.
-SiuyJl v 'i 11
Le chapitre des motifs que peut avoir un avocat pour se refuser à plaider une cause
pour tel on tel individu . ou contre tel ou tel individu est inépuisable.
n i; *. i! tlifoiil
Ils peuvent être personnels à l ’avocat.
v • liul ■
. - .I f lO f ü > o ! 3* t i n b ;j b i i 'j ’i ; J a r i b i c l q « b a K î o i uc>i ¿ n i i b
il
Ils peuvent l ’êlre aux parties qui veulent le charger de plaider leur cause.
Ils peuvent l’être à leurs adversaires.
Dans l’un comme dans l ’autre cas, de quel danger ne serait il pas d ’exiger de lui des
aveux propres à compromettre sa délicatesse?
Ce serait bien pis si non content de se nuire à lui meme on veut le forcer de de'voiler
les secrets des autres, de rendre compte
au
public des aveux qu’ ont pu lui faire ses
clients, aveux qui peuvent être de nature à nuire à leur réputation et à leurs intérêts, et
peut-être même à les déshonorer-
,
E t si l’adversaire de scs clients est son am i intime, ou son ennemi im placable , si Ce
même adversaire lui a fait des confidences dangereuses, ou s’il tient ces confidences de
personnes tierces, sous le sceau du secret, sera-t-il obligé de les divulguer et de com
promettre ainsi, légèrement peut-être, l ’ honneur, la réputation et la fortune de cet ad
versaire?
-/
;
'i ü v jo I
. u ic y jI
, i: -1/fT
, wohowôD .t !
Il y a mille autres cas im prévus où l ’avocat peut sc trouver dans une position telle
qu’il ne puisse ni plaider telle cause, ni en rendre publics les m otifs; il n’ a d ’autre juge
que sa conscience dans ces matières.
Il
n 'y a aucune loi qui l’oblige à déduire scs m otifs, et l’ordonnance rendue au crimi
n el, est une exception qui confirme la règle pour le civil.
L ’insistance du tribunal d ’Issoire , pour exiger que M® Triozon-Sauluier déduise les
motifs de son refu s, est donc un acte arbitraire, une violation de la l o i , ou si l’on veut
pour adoucir les term es, une fausse interprétation de l’ordonnance.
■ou1 b î ii'jiniiitî toluoD ¿■ixilWiipaiti ->F) îi*>p,iioa n»
Au surplus, la question n’est pas nouvelle.
Elle s’est présentée tout récemment au tribunal de Brioüde.
•'
�l\Ic R o ch ette , a v o ca t p rès ce tr ib u n a l, a v a it été désigné d ’ oflice p ou r plaider pour
M adam e P o n s-L ig o n e t, contre le sieur C lio m ette, a v o u é , son m a r i, a vec lequel elle
était séparée de corps.
Il s ’y refusa.
L e trib u n a l, faisant les fonctions de conseil de d is cip lin e , v o u lu t le con train dre à
déduire les m otifs de son refus.
Il persista dans son re fu s d e p la id er et d ’en déduire les m otifs.
M° L)upin a în é , c o n su lté , a d é cid é q u ’ une p a re ille exigence était in co n ciliable avec
l ’indépendance de la profession d ’a v o c a t.
L a G azette des trib u n a u x du 8 fév rier d e rn ie r, n° 780 , rend com pte de cette affaire
et ra p p elle les passages les plus saillans de la con sultation de M c D u p in a în é , qui a p r o
du it son e ffe t, et fait cesser les prétentions du tribunal de B riou d e.
Il y a tout lieu de croire que le tribu n al d ’ Isso ire im itera son e x e m p le , et tout bien
c o n sid é ré , les tribu n aux quels qu’ils so ie n t, s’ hon oreron t toujours eux-m êm es en re s
pectan t l’ indépendance des a v o c a ts , qui est l ’a ttrib u t le p lu s p récieu x de leur p ro fe s
sion , le seul p ro p re à leur in sp irer des sentim ens é le v é s , et à les rendre dignes de la
con sid ération et de la confiance de leuxs con citoyens.
- lííJ )
1
;
D élib éré
í .T / ¡ j j
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ThTüO
i î - r . » r>? . J’. V i '- i t ; h n u '/o f î :>! ï t ' a t
à C lerm ont - F e r r a n d , le
M au gu e-M
a s s s is ,
1 e1 a v r il
18 2 8 . Sign é
J e u d y - D u m o n t e ix , G a u l t ie r - B
II. C o n c iio n , M a l l e t , T i x i e r , F o u r n e t , E
tour,
ïm a r d
¿ O íU IO ¿’W ‘l
B o i r o t , bâtonnier,
ia u z a t ,
B o ir o t neveu ,
, Jouvet , V
e r d ie r - L a -
B ksse -B e a u r e g a r d , H. D. D e p a ig n e .
»
?
IV
5.
j ,
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., » «, •
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, » t r*
Décision du 'l ribunal réuni en consed de discipline.
2 a Mai 1828.
A u jo u rd ’ h u i , vin gt-d eu x n ia i, mil hu it cent v in g t-h u it, le tribunal de prem ière in s
tance d ’ Isso irc , réuni en conseil de d iscip lin e , conform ém ent à l’a rt. 10 de l’ordonnance
du 20 n ovem bre mil huit cent v in g t-d eu x , et com posé de M M . M olin p résid en t, M ont e i l, G rc llic h e ju g e s , P ic h o l, B ou tarel ju g e s-a u d ite u rs, M agaud d ’ A u b u sso n , p ro cu
�reur du Roi et Fayolle greffier, pour entendre M c Triozon-Saulnier, a v o c a t, appelé en
vertu des délibérations prises les 19 mars et 17 avril derniers.
Vu la lettre écrite par M. le bâtonnier des avocats à M. le président du tribun al, en
date du 10 m ars 1828.
Vu l’avis écrit de M. le bâton nier, donné par sa lettre du 1 5 , dudit mois d ’avril.
Attendu qu’ il résulte en faits, des lettres précitées de M. le bâtonnier, des dires et
déclarations des héritiers Cothon , Pêtres et autres, faits à M . le présid en t, ainsi que des
explications données en personne par M° Triozon-Saulnier devant le conseil de disci
pline, que les héritiers C othon, Pêtres et autres se présentèrent dans le courant de l ’année
1 8 2 7 , dans le cabinet de Mc Triozon-Saulnier pour le consulter sur une demande en
dommages-intérets qu’ils étaient dans l’ inlention de former contre M e Leinoyne , avoué
près le tribunal d’ Issoire, pour a v o ir, selon e u x , négligé ou compromis leurs intérêts
dans un ordre dans lequel il occupait pour eu x; que ¡VIe Triozon-Saulnier, après les
avoir entendus, leur conseilla de former la demande et les engagea même à se rendre
chez un avoué pour faire dresser l’exploit introduclif d ’instance, sans que M e TriozonSaulnier, suivant son allégation, se fût expliqué sur le point d esavoir s’il se chargerait
ou ne se chargerait pas de l’ affaire, q u e, d ’après ce conseil, les héritiers Cothon, Pêtres
et autres n’ hésitèrent pas à suivre la marche tracée par l’a v o c a t, et furent trouver aus
sitôt Mc B o ry , pour le charger d ’intenter l’ action en dommages-intérèts contre M r Lemoyne , ce qui fut fait par cet avoué.
Que quelque temps a p rès, lorsque les héritiers Cothon voulaient hâter la décision
de leur affaire, ils se rendirent de nouveau chez M° Triozon-Saulnier qui avait leur
coufiance; qu’ alors cet avocat leur déclara qu’ il 11c voulait plus se charger de l'a ffa ire ,
sans toutefois leur expliquer les motifs de son refus ; que dans les premiers jours du
mois dernier, les Cothon et autres s’étant présentés chez M . le président du tribunal pour
a v o i r 1111 avocat qui pût plaider leur cause , inscrite alors depuis plusieurs mois sur le
rô le, ce m agistral pensa qu’ il ne lui appartenait pas de commettre un avocat en ma
tière civ ile, et adressa ces parties à M. le bâtonnier des a vo ca ts, en lui écrivant d'inviler un de scs confrère» à se charger de la défense des héritiers Cothon ; que INT. le bâ
tonnier, d ’après le désir que lui exprimèrent ces derniers, d ’avoir pour soutenir leur
cause, celui qui les avait engagés à l ’entreprendre, crut devoir commettre par une
lettre, M® Triozon-Saulnier pour se charger de cette cause; mais que cet avocat lui
ayant répondu qu’il 11e pouvait se charger de l'a ffa ire , par des raisons q u ’ il était seul
en droit d’a p p récier, sans donner d’autres
e x p lic a t io n s
,
il pensait qu il 11 était pas
�oblige de désigner un autre de ses confrères avant que le tribunal se fût prononcé
à
cct
égard.
L e refus pur cl simple de IVIC Triozon-Saulnier de continuer à prêter ses conseils et
son assistance aux héritiers C o th o n , parut de nature à compromettre la dignité et
l’ honneur des a v o ca ts , et le tribunal, formé en conseil de discipline, p rit une délibéra
tion le 19 mars dernier, pour que M c Triozon-Saulnier comparût à jour fixe devant lui ,
pour expliquer les motifs de son refus.
L a question sur laquelle le conseil de discipline est appelé à d élib érer, est donc de
savoir s i , dans la position où Me Triozon-Saulnicr se trouve p la cé , il doit faire con
naître les motifs de son refus , ou expliquer les raisons qui l’empêcheraient de faire con
naître ces motifs.
M c Triozon-Saulnicr interrogé sur les motifs qui l ’avaient porté à refuser de conti
nuer à prêter son assistance aux héritiers Cothon, a répondu que pour la dignité et
l ’honneur des avo cats, il ne pouvait ni ne croyait devoir fournir d ’explications pour
m otiver sa résolution dans cette circonstance, et qu'il persistait purement et simple
ment dans sa première détermination.
Sur quoi le conseil de discipline, après avoir ouï M PTriozon-Saulnicr en ses observa
tions , et M. le procureur du Roi dans ses conclusions, M. le procureur du Roi et le gref
fier s’étant re tiré s,et après en avoir délibéré,
Attendu qu’ en principe général, la profession d ’avocat est lib r e , et qu’ il est permis
à celui qui l’exerce de refuser ou d ’accepter en matière civile les causes qui lui sont
présentées ;
Attendu que dans l’espcce, M° Triozon-Saulnier a pu se refuser de se charger de la
cause des héritiers Cothon, l’êtres et autres, même après a v o ir c o n s e illé l ’alïairc qui fait
aujourd’ hui l’objet du procès contre Mc L cm o yn c, et après avoir été commis p a r le
bâtonnier de sou ordre , qu’ on ne peut lui demander compte des motifs de son refus , ni
même exiger de lui qu’il fournisse des explications sur les motifs de ce refus, parce que
ce serait gêner la liberté et l’indépendance inhérentes à la profession d ’avocat ,
Est d ’avis que M c Triozon-Saulnier s'est renfermé dans ces circonstances dans l’exer
cice des dioits qui sont attaches a sa profession et qu il n’y a lieu à lui appliquer aucune
des peines portées par 1 ordonnance du 20 novembre 1822.
Signé , Moi.u* , M o n te il , P ic ii o t , G r e l u c h e , Jules B o u t a r e l ,et
K a y o l i .e
greffier.
�-*)b
Jnr.hr.. j en , U iu!
9( t 9i< .*
laiijJosô-ntosohT »M iibaî sup niUlM
N °
6.
.nu jo uii>i fcliLasI
!■
» oui
Citation de M . le Procureur - général près la Cour royale de
liio m , à M . T r i o z o n - S a u l n i e r , pour comparaître devant
ladite cour.
6 J u in 1838.
iw to .'i'W m w p , w o u V \ î \ W n W \ iu W \ \
«A na ïi|& w » K t a b S w A i i h d
L ’an mil huit ccnl ving-huit et le six juin , à la requête de I\I. le procureur-général
près la Cour royale de R iom , lequel élit domicile en son parquet, j e , Christophe Serv o lle s, hu issier, reçu au tribunal de première instance de l’arrondissement d ’ Issp ire,
patenté sous le n° G , résidant audit Issoire, soussigné ,
Ai notifié à M c T riozon -Sauln ier, avocat audit tribunal de première instance d ’Issoiî.c, habitant à Issoire , en son domicile , où je me suis transporte, parlant à sa per-,
sonne,
L ’appel que le requérant interjette par le présent, conformément à l’art.
25 de
l'o r
donnance du Roi du 20 novembre 1822 , de la décision dudit tribunal d ’ Issoire, rem
plissant les fonctions de conseil de discipline de l'ordre des avo ca ts, laquelle porte que
ledit M° Triozon n’a encouru aucune peine de discipline.
E l à même requête et élection de dom icile, en parlant comme il est d it, en vertu de
l ’ordonnance décernée par M. le premier président de ladite Cour ro y a le, le
4
du pré
sent m o is, ai ciîé ledit M° Triozon à comparaître devant ladite Cour royale de Riom ,
toutes lescliambres assembléesau palais deju sticeà Riom, le vendredi 1 t juillet prochain,
cinq heures de relevée, à l’ effet de répondre aux ¡interpellations qui lui seront faites Sur
sa couduite, et se vo ir appliquer l’une des peines de discipline énoncées en l ’art. 18
de l ’ordonuance royale susdatée, rou u
f r a n c h is e
et
de
lo y a u té
s ’ê t r e
éc a r té
des
s e n t im e n s
d
’u o n n e u r , d e
, qui sont l’ une des bases de la profession d ’a vo cat, soit en
refusant de défendre la cause des sieurs Pêtrcs, Cothon et autres, contre Me Lem oine,
avoué, cause qu’il avait d ’abord conseillée, soit en ne v o u la n t pas déduire au conseil
de son ordre les motifs de son refus, après la désignation faite de sa personne par le
bâtonnier; ce qui a m isses clients dans l’impossibilité A’¿Ire d éfendus, et leur a
causé le plus notable préjudice (1).
(1) Voir le certificat ci-après des avocats d’ Issoive qui prouve l’inexactitude «1e cette
assertion.
�Et afin que ledit ¡VIe Triozon-Saulnier n’ en ign ore, je lui a i , en parlant comme des
sus, laissé copie du présent, dont le coût est d ’un fran c, non compris les frais de tim
bre et d ’enregistrement, lesdits jour et an.
Signe S E R V O L L E S .
\\o'i
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î
ï
N °
7
i
k
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. i,ï
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L
.
Certificat des Avocats près le tribunal civil d Issoire , qui attestent
que les sieurs C o t h o n et P ê t r e s n ’ont jam ais réclamé leur mi
nistère pour L'affaire qui les concerne et qui est encore indécise.
16 Juin 1838.
N ous, soussignés inscrits au tableau de l’ordre des avocats près le tribunal civil de
l’arrondissement d ’Issoire, et avocats stagiaires près ledit sièg e, certifions que les nom
més Cothon et Pêtres en instance à Issoire , contre M e Lem oine, avoué , n’ ont jam ais
réclamé notre assistance pour soutenir la demande en dommages et intérêts qu’ils ont
formée contre cet avoué , et que nous sommes disposés à l’accepter dans le cas où ils
la réclameraient.
Issoire, le seize juin mil huit cent vingt-huit.
COTHON , ¡VIo n e s t i e r , A
ltaroche,
M
albet,
observant néanmoins qu’ayant un intérêt
dans l’ordre qui donne lieu à la contestation , je n’aurais pu me charger de la d é
fense.
V
erny
, L
e v e -Bo n f il s ,
T
r io z o n -Co u r b a y r e
, D
albtne,
observant néanmoins
qu’ayant renoncé depuis long temps à la p laidoirie, je n’aurais pu me charger de
leur défense.
G
r e n ie r,
C oustand , F
abre
, B
ar tin
.
1
P A R IS ,
É VEH A T,
IM PRIM EUR
OU MONT
D E P I E T E RUE DU C A D R A N ,
N°
16,
�
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Factums fonds privés
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Title
A name given to the resource
[Factum. Triozon-Saulnier. 1828]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tardif
Delacroix-Frainville
Berryer père
Delvincourt
Gayral
Hennequin
Dupin ainé
Tripier
H. Quenault
Subject
The topic of the resource
avocats
refus de plaider
déontologie
doctrine
conseil de discipline
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultation pour Me Triozon-Saulnier, avocat près le tribunal civil d'Issoire. [suivi de] Pièces Justificatives des faits énoncés dans le mémoire à consulter et dans la consultation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Everat (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1828
1828
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV20
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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avocats
conseil de discipline
déontologie
doctrine
refus de plaider
-
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73d67b61c8e9c743d970f1a442b493fa
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Text
M EMOIRE
P o ur les C R E A N C I E R S de D
ümergue
, originaire de la
commune du Valbeleix;
C ontre
Ledit D U M E R G U E , accusé de banqueroute fra u d u leu se,
R E Y N A U D - R I C H O N et R E Y N A U D je u n e , ses complices.
R E Y N A U D jeune et R eynaud-R ich on sont frères: ils sont origi
naires d’Espinchal, village dans lequel on vient au monde marchandcolporteur , et où la mauvaise foi dans les opérations commerciales
(sauf quelques exceptions infiniment rares) s’est transmise, depuis
un tems immémorial, de génération en génération. C ’est-là qu’abondent ces flibustiers du commerce , connus dans nos m ontagnes
sous le nom de L e vaires(1 ) } qui promènent, tantôt dans un dépar
tem ent, tantôt dans un autre, leur industrie dangereuse, qui trom
pent les négocians en gros et les fabricans par une exactitude dans
les paiemens qui n ’est pas de longue durée, et marquent chaque
tournée par une banqueroute plus ou moins considérable.
Elevé à une pareille école, R ey n au d -R ich o n ne pouvait faire
que des progrès rapides. Il avait reçu de la nature un grand fonds
d’impudence, un front d’airain, de la pénétration, et des dehors
qui masquaient les inclinations les plus vicieuses ; il a mis à profit
pendant vingt ans ces funestes avantages.
Il n’avait pas six francs à sa disposition, lorsqu’il partit pour la
première fois d’Espinchal, avec un de ses frères qui est décédé
depuis à Besse; et au bout de deux ou trois ans, ils revinrent au
pays, bien montés, bien équipés, et chargés d’or: c ’était le résultat
( 1) T r o m p e u r s , filous, escrocs.
I
�( a )
d’nne campagne dans l’Orléanais et dans la Tourraine. L e bruit se
répandit alors qu’ils avaient fait une banqueroute de 80,000 fï.
Dans les premières années de la révolution, il fit des incursions
dans la Normandie , et il en enleva des marchandises pour des
sommes considérables. Il conduisait son butin dans les provinces
méridionales; déjà il était arrivé chez le sieur Versepui à SuintGerm ain-Lem bron, lorsqu’il fut atteint parles négocians qu’il avait
volés, et qui étaient à sa poursuite. Dès qu’il les vit entrer dans
l ’auberge, sauter sur ses pistolets, assurer sa retraite, offrira l ’au
bergiste qu’il trouva sur son ch em in , cinquante lou is, pour l ’aider
à sauver ses marchandises de l’embargo qui les menaçait, ce fut
pour lui l’affaire d'un instant. Mais Versepui rejette avec indi
gnation la proposition qui lui est faite; le juge de paix et la muni
cipalité se rendent sur les lieux; ils reçoivent la dénonciation des
parties intéressées; et R e y n a u d -R iclio n n’évita une instruction
criminelle qu'en traitant avec elles, par Centremise d'un tiers, et
en leur abandonnant les marchandises.
Il épousa, quelque tems après, la demoiselle Richon. Si cette
alliance ne le rendit pas meilleur, on est obligé d’avouer qu’il
devint plus prudent. Il fixa au P u y le siège de son commerce et
de sa fortune. Il gagna la confiance de plusieurs maisons de com
m erce, en satisfaisant à ses engagemens avec exactitude; mais il
se servit de ce crédit pour introduire dans ces magasins des hommes
insolvables et sans a v e u ; il fit, sous leur nom, des achats consi
dérables, qui ne furent pas payés; et il crut avoir trouvé le moyen
de continuer sans risque les opérations hasardeuses auxquelles il
s’était livré avant son mariage.
Des négocians aussi indignement volés, ne gardèrent pas tou
jours le silence sur ses escroqueries. Rc37naud-Richon fut arrêté
en l’an 10, sur la plainte des sieurs Roibon , Marret et B a u ve t,
B o u le t, Guay-Jendron ; et un jugement correctionnel, rendu par
le tribunal de pi ornière instance de L yo n , le condamna à une
année d’emprisonnement, à 3 oo fr. d’amende, et à restituer au
�(3)
sieur Roibon 22,868 iï\ , au sieur Marret 7,662 fr. 10 sous, et aux
sieurs B a u vet, B oulet, Guay-Jendron, 18,000 fr ., pour le m on
tant des marchandises à eux escroquées par les individus désignés
dans la p la in te , et qu’ils avaient livrées sous la recommandation
de l ’accusé.
Reynaud interjeta appel de ce jugement. La famille entière de
son épouse vint à son secours; les juges furent circonvenus d ’inIrigues, et quoiqu’il fût constant au procès, que Reynaud-Richon.
avait profité des marchandises vendues sur sa recommandation (1),
le tribunal criminel infirma le jugem ent, et ces malheureux n égocians furent condamnés en 6,000 fr. de dommages-intérêls.
L e résultat inattendu de ce procès criminel ne pouvait qu ’en
courager un homme comme Reynaud-Richon: aussi un délit sem
blable a-t il donné lieu à la procédure criminelle qu’on instruit
contre lui, contre Reynaud je u n e , son frère, contre Joseph Dum ergue, dit Coslabros, dit R ousseau, dit Rouget et dit Guerrier,
comme auteurs ou complices de banqueroute frauduleuse.
11 est démontré qu’il a existé entre ces individus et un nommé
Angiem i une association criminelle pour faire vendre à D um ergue, et à Reynaud cadet, sous le faux nom de Reynaud de la
Pruneire, et sous la recommandation de R e y n a u d -R ic h o n , des
marchandises qu’on n’élait pas dans l’intention de p a yer, pour
se partager ensuite ces marchandises, et faire disparaître ceux de
la bande qui auraient joué le r ô l e d’acheteurs. R eynaud-R ichon,
Beynaud jeune, et depuis peu Dumergue sont sous la main de
la justice. Un juri de jugement va prononcer sur leur sort, et on
ignore sous quel ciel respire Angremi.
Les Reynaud ont fait paraître à Issoire, au moment de la
convocation du juri d’accusation, un mémoire imprimé qui devait
produire un excellent effet; il était sur-tout appuyé de sollicila(1)
L e marchnnd-commissionnaire fut sollicité par Reyn au d de certifier que les mar
chandises n’avaient pas été portées dans son magasin a u E u y j mais il donna au plaignant
une attestation contraire*
�( 4 )
lion«;, d'intrigues, et de cette foule de petits moyens préparés à
l ’avance, employés à propos, et qui n’obliennent que trop sou
vent du succès. Ce mémoire contient autant de mensonges que de
lignes; les faits y sont dénaturés; les accusés s’y portent hardiment
pour accusateurs ; les imputations les plus calomnieuses y sont
prodiguées à des négocians honnêtes qui n’ont d’autre reproche
h se faire que d’avoir accordé de la confiance à des misérables
qui n’en méritaient pas.
Ces négocians devaient à l’honneur du com m erce, ils se devaient
à eux-m êm es d ’imprimer une réponse, et ils l’ont faite dans le
même tems.
L e moment de la convocation du jury de jugement approche.
L e s R e y n a u d , réunisaujourd hui à D um ergue, reproduiront sans
doute, et leur m ém oire, et les mêmes moyens. Il est bon de les
prévenir en faisant réimprimer et publier de nouveau la réponse.
R ey n au d -R iih o n , que le crédit de la famille de son épouse a
sauvé une première fois dans une circonstance absolument sem
blable, a senti le besoin de parler de son alliance avec la famille
Bichon (alliance qui n’est pas la moindre de ses escroqueries);
mais il s est tu, et sur ses démêlés à St.-Germain-Lembron avec
ces négocians de la Normandie qu’il avait volés, et qui le suivaient
a la p isle, sur le jugement d absolution, rendu sur appel en sa
faveur, par le tribunal criminel du département du R h ôn e, le 3o
floréal an 10, et sur celui du Iribunal criminel spécial du même
département, du 6 floréal an 12, qui a condamné Guillaume R e y naudson frère, à six années de fers et à l’exposition, comme fabiicaleur et négociateur de fausses lettres de change.
A quoi bon, en effet, donner connaissance au public de cette
série de procédures criminelles, instruites contre lesR eyn au d , de
ces luttes dangereuses desquelles ils étaient sortis, tantôt vaincus/
tantôt vainqueurs? Le rédacteur de leur mémoire savait bien qu’un
jugement d’absolution pour fait d ’escroquerie n’est pas un tilre
excellent en faveur de celui qui est poursuivi pour un délit de la
mêm e nature. Malheur à l’homme qui est accusé si souvent!
�(5)
Il valait bien mieux parler de la famille Riclion, dire qu’on avait
des beaux-frères législateurs, avocats, juge de p a ix , receveur des
contributions, notaire et receveur de l’enregistrement.
Accoler le nom des Reynaud à celui d’une famille honnête et
respectable, c’était sans contredit les présenter de la manière la
moins défavorable; mais cela ne suffisait pas pour convaincre de
leur innocence : il fallait prouver que Reynaud-Richon n’avait pas
introduit le banqueroutier frauduleux Dumerguedans difïérens m a
gasins de L y o n ; qu’il ne lui avait pas été vendu de la marchan
dise pour des sommes considérables sur cette recommandation;
que cette marchandise n’avait pas été partagée entre les accusés,
et que Reynaud-Richon n’en avait pas été trouvé saisi ; il fallait dé
montrer que Reyna ud jeune n’avait pas joué ensuite, mais avec moins
de succès, le rôle de D um ergue, et qu'il n’avait pas eu ReynaudRichon, son frère, pour complice. D e tout cela, rien n’a été fait.
L es preuves de complicité, résultant de la procédure et des cir
constances de l’affaire^ bien loin d’être atténuées par le mémoire
des accusés, sont portées au contraire à un plus grand degré d ’évi
dence par les faux raisonnemens et par les aveux involontaires qui
leur sont échappés.
Magistrats, jurés, citoyens, vous tous amis de la justice et de
la vérité, nous allons vous en convaincre.
F A I T S .
Dans les derniers mois de 1807, D um ergue, originaire de Costabros, commune du Valbeleix, fut introduit par Reynaud-Riclion
dans les magasins des sieurs Despeisse et Charmet, Ilardouin-Espesse et compagnie, négocians à L yon : Reynaud-Richon faisait
depuis long-tems des affaires avec ces maisons; et sur sa recom
mandation, sur l’assurance réitérée qu’il donna, et de la probité
et de l’état des affaires de Dum ergue, non-seulement on lui vendit
de la marchandise, mais même le sieur Despeisse se donna la peine
de le recommander à d’autres maisons de commerce.
�(6
)
En février 1808, Dumergue revint à L y o n , et il fil des emplettes
dans quatorze ou quinze magasins. 11 en remplit plusieurs malles,
dont trois, comme on le verra, restèrent en dépôt chez Escalier,
de L y o n , beau-père de cet A n grem i, que Dumergue appelle son
commis, mais qu’une foule de circonstances désignent com me son
associé. Les autres malles et ballots vinrent en A u vergn e; quel
ques-unes contenaient les marchandises dont Reynaud-Richon a
été trouvé saisi lors de son arrestation. On doit observer comme
fait essentiel, que Dumergue avait commandé et acheté ces malles
chez le nommé B ru n e t, marchand c'oiïre lier à Lyon , et que celles
saisies avec Reynaud-Richon ont été reconnues par le sieur Brunet,
qui a été appelé en témoignage.
Dum ergue avait iait quelques effets qui furent prolestés à leur
échéance. Il devait faire un voyage à L yo n dans le courant de
m ars, pour payer tout ou partie des marchandises qu’il avait
achetées, et il n’y parut pas. A u contraire, il renouvella ses de
mandes par des lettres écrites de la main de R eynau d -R ichon, en
date des 2b et 26 février 1808. Ainsi, Dumergue et Reynaud-Richon
noncontens de s’être partagé les malles et les ballots provenant des
derniers achats, visaient à de nouvelles escroqueries. Dumergue
donnait, dans ses leitres aux marchands de L yon , des raisons plau
sibles du retard qu il leur faisait eprouver. Il annonçait son arrivée
comme très-prochaine : le corps de l'écriture était de la main de
Reynaud-Richon , et les lettres étaient signées Dumergue.
Reynaud-Richon avait introduit ce dernier dans quelques m a
gasins, et il fut convenu qu’à son tour il y introduirait Reynaud
jeune, sous le nom de Re}rnaud de la Pruneire. Reynaud-Richon
servait encore de secrétaire à D um ergue, et ces deux li ipons écri
virent et signèrent des lettres adressées à M M . Giroux, Rits et
companie, V e l a t , V erzier, etc.
Muni de ces lettres de recommandation, Reynaud jeune partit
pour L y o n , et se rendit dans les magasins qu’on lui avait indiqués.
Mais il n’obtint pas tous les succès que les associés semblaient
�(7)
attendre. Dum ergue ne venait pas, n’envoyait aucun à-com pte,
et devenu suspect lui-même, son intervention, en faveur de R e y naud je u n e , se disant alors Reynaud de la P ru n e ire , ne pouvait
pas être bien puissante. L a maison Rits et compagnie lui vendit
quelque chose; mais ailleurs il éprouva des refus, et notamment
de la part de la maison Verzier.
Cependant les inquiétudes des créanciers de Dum ergue allaient
en croissant J
; ils ignoraient
le lieu de sa résidence: ils avaient écrit
O
à A rdes, sans recevoir de ses nouvelles : ils s’adressèrent donc à
Reynaud-Riclion. L e 6 avril 1808 , M M . Despeisse et Chai met
lui mandaient : «• Depuis long-tems M. Dumergue n’a pas donné
« signe de vie à ceux avec qui il fait des affaires dans notre ville,
« et nous principalement , en attendons avec d’autant plus de
« de raison, que nous avons fait pour lui un remboursement d’un
« effet qu’il nous avait cédé sur M e n d e , qui a été protesté. T o ut
« cela, joint à ce qu’il nous doit, nous a gêné beaucoup; cepen«■d a n t , d'après ses promesses et sa parole d’honneur, avant son
« dernier départ de L y o n , il devait être de retour pour le mois
« expiré, et nous porter de l’argent. Ce silence nous inquiéterait
«• encore beaucoup , si nous doutions un seul instant de sa bïa« vo'ure et de sa loyauté envers nous, qui lui avons accordé les prê
te nuers notre confiance sous vos auspices, et qui l’avons lié et même
« répondu pour lui auprès des maisons qui ne le connaissaient
te nullem ent, et qui lui ont délivré ce qu’il a voulu. Les obser« valions que nous vous faisons ne proviennent pas d’une crainte
« de notre part , parce que nous sommes surs qu e, s'il était dou« teux , vous êtes trop brave pour ne pas nous en instruire et nous
re induire en erreur, puisque c’est à votre considération que nous
« lu i avons vendu. M ais obligez-nous de nous dire, courrier par
« courrier, où iL e s t , et où nous pouvons lui écrire, etc. ».
Cette lettre, trouvée sur R eynau d -R ichon au moment de son
arrestation , resta sans réponse.
L e 1 1 avril 1808, la maison Ilardouiu lui écrivit pour le prier de
�(8)
luire tenir une lellre à Dum ergue dont 011 ignorait le dom icile,
et pour lui demander des renseignernens sur l ’état de ses affaires.
Il répondit le 18 en ces termes : « En répondant à l'honneur
« de la vôtre d u . . . . avril courant, j ’aurais désiré vous donner
« des renseignernens positifs sur M. D um ergue; mais ne l’ayant
« point vu depuis la foire de Clermont ( 1 ) , et même ayant
«■appris par mon frère, qu’il se passait certains bruits sur son
« com pte, et cela, je viens d ’en être instruit depuis trois à quatre
«• jours (4), j ’ignore les affaires que vous avez pu faire ensemble;
« elles sont toujours trop conséquentes, si vous êtes dans le cas
« d’éprouver quelques désagrétnens ».
Ne recevant aucunes nouvelles,ni de Dumergue , nid eR eyn aud l lic lio n , le s.r Despeisse part pour le Puy. Pendant le court
séjour qu’il fit dans celte v ille , il vit plusieurs fois R e y n a u d ,
et il lui fit de violens reproches, auxquels il ne répondit jamais
qu’en protestant qu’il avait été trompé sur l’état des affaires de
Dumergue et sur son honnêteté, et qu’il éprouvait de vifs regrets
d’avoir lié d’affaires le s.r Despeisse avec lui. Pressé davantage ,
il finit par promettre au s.r Despeisse de le lui faire découvrir;
il lui indiqua ù cet effet la roule qu’il devait suivre, et lui donna
Reynaud jeune , son frère, pour l’accompagner.
Celte maniéré de se conduire parut au sr. Despeisse si franche et
siloyéile, que Reynaud-Richon fut un instant justifié dans son esprit.
11 était encore dans ces dispositions en arrivant à Pauliaguet. Ils des
cendent chez la femme Chauvit; Reynaud jeune demande des nou
velles de Dumergue; et l’aubergiste, avant de lui répondre, lui fait
la question suivante: E st-ce de D um ergue, L’associé de ReynaudR ichon , que vous entende%parler ? Reynaud jeune répondit affir
mativement , en ajoutant d’un air embarrassé qu’il serait fâché que
cet homme se fit passer pour l’associé de son frère.
(1)
11 passa
dix ou douze jours avec lui à Courpière dans le courant de mars.
(2) Il ne parle pas de la prétendue vente que lui avait faite Dumergue de la totalité
de ses marchandises.
Ce
�C9l
Ce petit colloque donna de nouvelles inquiétudes au s.r Despeisse ; il pensa que Reynaud - Riclion , D um ergue et Reynaud
jeune pouvaient avoir agi d’intelligence , et s’être parlagé les
marchandises volées; il parla en particulier à la fem m e Chauvit,
et il sut d’elle que R e y n a u d -R iclio n et D um ergue avaient logé
plusieurs fois ensemble dans cette auberge; que leurs marchan
dises étaient sur la même voitu re, et que Dum ergue passait tantôt
pour le com m is, tantôt pour l’associé de Reynaud.
L e s.r Despeisse, instruit de ce qu’il voulait savoir, observa à
Reynaud jeune qu’il était inutile qu’il l’accompagnât plus loin,
et ils se séparèrent (i).
Reynaud jeune se rendit le 9 mai à C lerm on t, et il déjeûna
ce jour-là chez Boyer jeu n e, avec les sieurs Mollard, Verzier et
Despeisse, créanciers de D um ergu e, et avec les sieurs Anglade et
Balbon d’A r d e s , de qui ils prenaient des renseignemens sur le
compte de leur débileur.
Pendant le déjeûner, le sieur Verzier le reconnaît pour être
le Reynaud de la Pruneire qui lui avait porté à L y o n la lettre
de recommandation de Dum ergue , sous la date du 26 février
précédent ; il lui en fait l’observation, et R eynaud jeune désavoue
et prétend ne pas avoir été à L y o n depuis plus de cinq ans. L e
sieur Verzier insiste ; il sort de sa poche la lettre qui lui avait
été remise par Reynaud je u n e , la lui représente, et il désavoue
encore : alors il prend tous les assistans à témoins de ce qui vient
de se passer. On fait appeler un commissaire de police et Reynaud
jeune est arrêté.
L e commissaire de police s’empara du porte-feuille de Reynaud,
et Ton y trouva un passe-port qui lui avait été délivré au P u y le 3 o
mai 1807, et une lettre de recommandation, qu’il prétendit avoir
trouvée, écrite de la main de Reynaud-Richon son frère, et signée
(1) Avan t de partir de Pauliaguel, Reynaud jeuhe fit des reproches à la femme C h a u v i t , et
lui déclara que , dénoncer ceux qui logeaient chez e l l e , était un m o j e u sûr de les faire
loger ailleurs.
3
�( 10 )
de D um ergiiëjpou r la maison V e la t, rue Bas d’argent, sous la date
du 28 féviier 1808. On conduisit R eynaud jeune en prison,et dans
le trajet il dit à Balb’o'n; gen d a rm e, qu’il craignait d’avoir gâté son
affaire en déclarant qu’il n’était pas allé h L y o n depuis cinq ans.
L e sr. Despeisse avait refconnu l’écriture de Reynaud-R ichon, et il
devenait évident pour les y e u x les moins clairvoyans, que la mar
chandise volée h Lytin avait été partagée entré tous ces fripons;
mais il n’était pas aisé d’en acquérir la preuve légale. L e hasard
servit le sieur Despeisse au-delà de ses espérances. Il apprend le 14
juin 1808, que R e y n a u d -R ic h o n est dans les environs de V ic - s u r A llie r, et il se rend dans celte com m une; Reynaud en était parti,
et on lui dit qu'il est aux Martres. L e juge de paix de V e y re lance
un mandat d’arrêt contre R e y n a u d -R ic h o n et Germain R eyn au d ,
son commis ou son domestique; el en vertu de ce mandat, Germain
R eynaud est arrêté chez la veuve Vazeilhès le 1 5 ju in , el conduit à
Clermont devant le magistrat de sûreté. D eux malles et un sac de
nuit, que Germain - Reynaud déclara appartenir à son m aître,
furent saisis par les gendarmes, et laissés en garde à l’aubergiste.
L e lendemain 16 juin, Reynaud-Richon fut arrêté à la sortie
de M ontférrand, par le commissaire de policé Bastide qui saisit
également une voiture atelée d’un cheval, et une malle appartenant
audit Reynaud. Conduit devant le magistrat de Sûreté, on lui
demanda, en présence du sieur Despeisse, s’il avait d’autres mar
chandises que celles saisies aux Martres et sur sa voiture , et no
tamment chez le sieur Baraduc, aubergiste à Monlferrand ; sa ré
ponse fut n égative; et le même jour 16 ju in , le commissaire de
police saisit chez Baraduc cinq ballots de marchandises qui lui
appartenaient. On avait demandé à Germain R e y n a u d , lors de
son arrestation, où était R e y n a u d - R ic h o n , et il avait îépondu
qu’il était parti avec une malle q 11 était vid e, pour aller chercher
de la marchandise. On interrogea Reynaud-Richon sur le sujet de
son voyage, et il dit qu’il était venu des Martres à Clermont pour
voir son frère. Que de mensonges pour cacher à la justice lé dépôt
�( n
)
de marchandises qu’il, avait chez Baraduc! et pourquoi les Tenir
cachées si elles lui appartenaient légitimement ?
Dans l’intervalle qui s’était écoulé entre l ’arrestation des deux
frè re s, les créanciers de Dumergue , instruits qu’il était lié d ’af
faires avec A n grem i, qu’ils voyageaient ensem ble, qu’ils se sous
crivaient réciproquement des effets q.u’ils mettaient en circulation,
obtinrent du commissaire général de police à L y o n l’autorisation
de faire des recherches , soit chez cet A p g r e m i, originaire de la
commune de /Marcenat, voisine de celle d ’Espinchal, soit cliez
Escalier de L y o n , son beau-père.
Ces recherches eurent lieu chez ce dernier le 22 m a i, en présence
des sieurs Despeisse, Verzier et A llégret, et elles furent constatées
par un procès-verbal, dressé par le commissaire de police de l’ar-:
*on discernent du nord.
On trouva dans la banque de la boutique d’Escalier, i.° un billet
à ordre de la somme de 5 oo fr. à son profit, par D um ergue, sous
la date du i 5 février 1808, et payable au 10 avril suivant; 2.0 un
autre billet de la somme de 174,4 fr. >aussi souscrit par Dum ergue
et Esçaliçr, (Sous la date du 29 décembre 180 7, et payable en fin
de mars 1808 ; cet effet avait été négocié le lepdemain 3o d é
cembre à Esprit Baile par Escalier; 3 .° une promesse, signée A n
gremi , de la somme de 209 fr ., au prpilt d’un nommé A rch et,
au bas de laquelle est l’acquit de ce dernier; 4.0 une lettre de D u
mergue à Escalier, écrite de Paris, sous la date du 2 3 /mars 1808.
D um ergu e, par cette lettre, se plaint de n'avoir pas reçu deux
malles qu’Escalier lui a expédiées, et dans le cas où cet envoi
n’aurait pas eu lieu, il lui donne une nouvelle adresse,et lui indique
une autre manière de les lui faire parvenir, ainsi que-l’autre malle
qu’il a chez lui : en un m o t, il demande qu’Escalier lui fasse savoir
~siles malles lui ont été expédiées à Cadresse de D u m ergu e, ou à
.celle de Rousseau. Cette pièce est essentielle dans l’affaire; elle
prouve les relations de Dumergue et d’Escalier, et la nature de
^Gfâs relations; elle prouve qu’Escalier a été le receleur des mar--
�( 12 )
chandises volées par D um ergue, puisque cet escroc lui avait donné
pour adresse un autre nom que le sien.
, Cette lettre apprit au commissaire de p o lic e , qu’Escalier était
dépositaire d'une autre malle appartenant à Dumergue. Il devint
donc encore plus scrupuleux dans ses recherches, et il trouva sous
une sous-pente et sous un lit une malle qu’Escalier déclara cette
fois appartenir à Dumergue. On procéda à son ouverture, et les
étoffes qu’elle contenait furent reconnues par les sieurs V erzier et
V e la t, marchands de soierie, com me faisant partie de la vente
faite à Dum ergue dans. le courant de février. Dans cette malle
on trouva un porte - feuille , et dans ce porte - feuille un modèle
d ’effet écrit de la main de R eynaud - R ichon , qui pour la d a te ,
l ’époque de l’échéance, la som m e, les lieux où il était fait, et où
il devait être p a y é , et l’arrangemeiit des mots , se trouve exacte
ment conforme au billet à ordre de six cents francs souscrit par
Angrem i à D u m e rg u e , daté de St.-Flour, payable à M en d e, maison
P e r c ig o t ,le 3 o février, et qui fut négocié par D um ergue à la
maison Despeisse et Charmet le n décembre 1807.
C e n’est pas tout: le commissaire de police, en continuant
ses recherches, trouva dans l ’arrière-boutique six mouchoirs neufs
d’indienne fond b la n c , des coupons de tête de pièces de même
étoffe, et le sieur R ils, négociant, appelé par le commissaire de
p o lice , reconnut ces mouchoirs pour faire partie de ceux qu'il
avait vendus à D um ergue dans le courant de février.
Aussi Escalier f u t - i l arrêté et conduit devant le magistrat de
sure.té.
L es deux
R e y n a u d ,
arrêtés à Clerm ont, furent renvoyés à L y o n ,
parce que, dans le principe, Dumergue et ses complices n’étaient
poursuivis que comme escrocs, et ce fut en présence des négocians intéressés qu’il fut procédé le 2. juillet 1808 et jours suivans, h la vérification et reconnaissance des marchandises saisies.
Cette opération fut faite avec la décence convenable et une
scrupuleuse exactitude; les créanciers de D um ergue y assistèrent,
�(-i3 )
parce qu’ils y avaient été appelés par le directeur du juri, et ils
y avaient été appelés, parce qu'eux seuls pouvaient reconnaître
les marchandises qu’ils avaient vendues. Mais R e y n a u d -R iclio n
en a imposé effrontém ent, lorsqu’il dit dans son mémoire im p rim é ,
<r qu’il se trouva au milieu d’une foule tumultueuse qui l ’assaillit
« d’invectives, se jeta sur ses marchandises, sous prétexte d’en
«r faire la reconnaissance, et pour y p ro c é d e r, les déployait, les
« emportait dans les appartemens voisins , et arrachait les éti« guettes pour prendre la note des aunages et des numéros de
« toutes les pièces et coupons ».
Ces faits sont faux r:M . le directeur du juri se serait opposé à
cette violation de toutes les règles, de toutes les bienséances; le
procès-verbal qu’il a dressé, ne contient rien de semblable; les
prétendues réclamations de R eynaud n’y ont pas été mention
nées, parce qu’il n’en a pas f a i t , et qu’il n ’a pas eu sujet d’en
faire. Ces faits sont invraisemblables par eux-mêm es, et le silence
seul du magistrat est une preuve irrécusable de leur fausseté.
Pourquoi les négocians appelés à cet inventaire se seraient-i^s
conduits ainsi? pourquoi auraient-ils arraché ces étiquettes? pour
prendre la note des numéros des pièces et coupons, dit R e y n a u d ,
et fabriquer des factures après coup pour prouver que ces marchan
dises venaient de leurs m agasins, et qu’elles étaient les mêmes que
celles vendues a Dumergue. M. le négociant d’Espinchal se connaît
en factures fabriquées après coup, et il juge d’après lui des négo
cians probes et délicats, auxquels sa manière de travailler est abso
lument étrangère. La raison dit qu’avant d’appeler les négocians
au procès-verbal de vérification et de reconnaissance des marchan
dises , il était nécessaire de leur faire déposer leurs factures au
greffe, parce que sans cette précaution ils devenaient maîtres de
leur cause. Aussi dès le 28 mai leurs factures avaient été para
phées par le magistrat de sûreté. 11 est v r a i, et lés créanciers de
D um ergue le virent avec peine, que nombre de coupons m an
quaient de plombs et d’étiquettes, que les têtes de quelques autres
�■('.i4 )
(contre l'usage du com m erce) avaient été coupées, et que ces
coupons ne purent être reconnus. Mais que faut-il en conclure?
rien, si ce n’est que R eyn aud avait dénaturé partie de ces mar
chandises, et que plus les marchands volés ont été scrupuleux et
difficiles pour faire cette reconnaissance, plus on doit s’eji rappor
ter & leurs déclarations.
On observe q u e , sur les cinq ballots de marchandises saisies'chez
Baraduc, et vérifiées le 2 juillet, le premier ouvert se trouva comr
posé d'uiie pièce de drap noir ¡et .de cinq pièces de velours, quj
furent reconnues par ]VÏ. Hardouûi. pour .être en entier La dernïpr#
vente qa U avait fa ite 'a Dunnergue Le 12 février précédent.
L e second contenait quatre pièces de drap, et M. Allégret le£
reconnut cQmtne composant sa dernière vente à Dum ergue en
février.,11.e^iijlait ¡la plus, parfaite idenlité entre les numéro? des
pièces et .ceux des deux ¡fycjurjes. Il résulte donc cje c,e fait, que,ces
ballots avaient passé entiers des mains de Dum ergue dans celLes de
Reynaud-Richon. C elte observation trouvera bientôt sa place;
Une autre également essentielle, .c’est que la facture V e rzie r,
paraphée p a r M. lç magistrat .de s^rèjté lç 2,8 ¿npi, comprend unç
vente faite à Dumergue le 4 mars 1.8,08, de dej.ix pièces de taffeta's, l’une vert uni, et l’autre rubis ou cramoisi, et que lors dç
l ’inventaire, le s.r Verzier reconnut parmi les marchandises saisies
un coupon de la pièce cramoisie (1).
.
Tant qu’il n avait été question.que d ’un délit d’escroquerie, ,les
tri^upaux de L y o n étaient compét.ens, parce qu’ils étaient les
juges du lieu du délit; mais le 28 juillet 1808, les créanciers de
Duipergue rendirent plainte en banqueroute frauduleuse contre
l u i , ^ a u t e u r s , complices et adhérens, et la plainte une,fois reçue,
l'instruction devait ^voir lie u , aux termes du code de.commerce ,
{levant les juges du dpmicile de D um ergu e, principal failli. C'est
pn pet état que la procédure, les accusés et les pièces de convic(1) L a presque totalité de ces marchandises fut également reconnue par les parties
intéressées.
�( i'5 )
lion ont été renvoyés devant M. le directeur du juri de l ’arron
dissement d ’Issoire (i).
i
Il était indispensable de faire connaître les principales circons
tances du délit et la marche de la procédure; a u trem en t, il eût
été bien difficile de porter dans la discussion à laquelle On va se
livrer, la clarté dont elle est susceptible. Il s’agit actuellement de
Convaincre les esprits les plus prévénuâdë l’existence du délit prin
cipal (la banqueroute frauduleuse de D um ergue) et de la com
plicité de R e y n a u d -R ich o n et de R eynaud jeune. Cette tâche
sera rem plie; la culpabilité des accusés sera portée à un tel degré
d ’é vid e n ce , que la réplique deviendra impossible ; on n’exige pour
Cela que d’être lu avec un peu d’altentiùil.
D u m e r g u e , débiteur à L yo n de sommes considérables pour
des emplettes faites en décembre 1807, fit un dernier voyage en
cette commune en février 1808; il y fit de nouveaux achats, qui
lui furent facilités par l ’attention qu’il avait eue de Venir à L yo n
avant l’échéance des effets souscrits en d écem bre; quelques-uns
de ces effels étaient payables à la fin de février, et ils ont été
protestés. Dum ergue achetait donc à crédit quinze jours a va lit
la cessation de ses paiemens; il achetait, sachant qu’il ne pouvait
payer. Il sollicitait de nouveaux envois de marchandises par lettres
écrites par R eynaud-R ichon, et signées de lu i, sous la date des 26
et 28 février 1808; il a disparu depuis cette époque, sans dontier
connaissance à ses créanciers de l’état de ses affaires, sans justifier
de ses livres, en supposant qu’il en ait jamais tenu; il a soustrait
ses marchandises, dont partie lui a été expédiée sous un nom
supposé, après la cessation de ses paiemens ; il les a partagées
avec ses complices : il est donc en état de banqueroute fraudu
leuse. Soutenir le contraire, ce serait aller directemeut contre la
lettre et l’esprit du Code de Commerce.
•
‘
------
(1) Depuis Escalier a élé élargi. ¡VI. le Dirëcteur du juri a sans doute ponsó q u e , s’ il
avait recelé la marchandise de D u m ergu e, il n’avait pas eu connaissance des moyens
em ployés par les autres accusés pour se la procurer.
�( 16 )
Les frères Reynaud soutiennent qu'ils ne sont pas ses complices;
ils ont môme essayé de l’établir; mais leur cause était si déplo
rable , que leurs efforts, en décelant leurs embarras, devaient
tourner contre eux-mêmes.
Ils ont commencé par se livrer à une critique amère de la pro
cédure qu ’on instruit contr’eux. A les en croire, leur détention
est une atteinte portée aux lois qui consacrent la liberté indivi
duelle, et on ne devait instruire contr’eux que lorsqu’un arrêt de
la Cour criminelle aurait condamné Dum ergue com me banque
routier frauduleux. A in si, bouleversant toutes les idées, ils vou
draient appliquer à la complicité en matière criminelle les prin
cipes sur la caution en matière civile; ils osent ayancei^que la jus
tice ne peut mettre la main sur le complice qu’après avoir discuté
l ’accusé principal. Enoncer de semblables m oyens, c'est y répon
dre.. On instruit à la fois contre le failli principal, ses fauteurs,
complices et adhérens, et cette m a rch e , quoi qu’en disent les
frères R e y n a u d , était la seule à suivre.
Ils ont eu l’air ensuite de douter de l’existence de D um ergu e,
et on ne voit pas quel intérêt ils peuvent avoir à mettre celte exis
tence en problème, à moins qu’il entre dans leurs intentions de
faire remonter l’époque de son décès à celle de sa disparution, et
d’en induire qu’étant décédé avant la cessation de ses paiemens,
il n’y a pas eu de banqueroute frauduleuse, et que dès-lors ils ne
sauraient être poursuivis comme complices d’un délit qui n’a jamais
existé. Dans tous les cas, ce système de défense ne peut faire for
tune. L a lettre adressée h Escalier par D um ergue, dans le courant
de m ars, et trouvée par le commissaire de L y o n , prouve suffi
samment son existence après la cessation de ses paiemens, et les
achats de marchandises faits récemment en Picardie, ne laissent
aucun doute à cet égard.
Examinons maintenant quels indices, quelles preuves, quelles cir
constances désignent les Reynaud com me complices de Dumergue,
Il ne faut pas perdre de vue que si ce dernier ayait son domi
cile
�C 17 )
cile de droit à Ardes, et s’il y avait affermé une boutique, il n’y
résidait cependant pas; qu’il y allait très-rarement; qu’on l’y con
naissait à peine, et qu’il faut attribuer à cette circonstance l’es
pèce de contradiction qui existe, dit-on, entre les deux certificats
délivrés par le maire d’Ardes.
L a patente prise à Ardes par D um ergue, son bail à ferm e, sa
déclaration de domicile , tous ces actes demeurés sans exécution
étaient autant de précautions prises par R e y n au d -R ich o n pour
écarter de lui les soupçons et les regards de la justice, dans le cas
prévu d’une instruction criminelle. Dum ergue, comme célibataire,
sans domicile et sans fortune, était l’enfant perdu de la bande, et
Reynaud-Richon n’avait rien négligé pour se mettre a couvert.
Dum ergue était constamment au P u y , chez R eynaud -R ichon,
ou en route avec lui; ils conduisaient la même voiture; D um er
gue passait tantôt pour son associé, lantôt pour son commis. R e y
naud., le vrai Reynaud de la P ru n eire, commune d’Espinchal,
l’aubergiste de Pauliaguet et autres, ont dû déposer de ces faits.
Lorsque le sieur Despeisse se rendit avec Reynaud jeune à Pau
liaguet, chez cette aubergiste, pour chercher D u m ergue, elle s’in
forma desuitesi c ’était de D um ergue, l’associé deReynaud-Ric hon,
cju’on lui demandait des nouvelles. Escalier, au moment de son
arrestation, dit eu présence du commissaire de police (e t ce fait
est consigné dans son procès-verbal), qu’il ne connaissait Dumergue
que parce que R eynaud-R ichon l ’avait conduit chez lui; que ces
deux individus avaient souvent fait des affaires ensemble, et qu’il
les croyait associés. D u m e r g u e , en écrivant à Escalier la lettre
trouvée p a r le commissaire de police, lui mandait : <rJe vous dirai
« que nous avons cessé notre association avec mon am i, et nous
« nous sommes quittés très-bien*. Cet am i, cet associé, c ’était
Reynaud-Richon ; Escalier 11e le laissa ignorer ni au commissaire
de police, ni aux créanciers de Dumergue. Lorsque ReynaudR ichon, en mars 1808, se rendit chez la veuve Charlat, à Courpière, il d it , en entrant : «-Je viens ici pour attendre Dum ergue j
5
�( 18 )
rr mon associé, qui doit arriver sous peu, et travaillera notre iné v e n t a ir e ».
Q u’on ne s’étonne pas si Reynaud-Richon a été trouve saisi de
partie d e là marchandise volée par D u m ergu e; comme associé, il
y avait des droits incontestables.
R eynaud en a donc imposé lorsqu’il a dit q u ’il avait vu pour
]a première fois Dumergue dans le magasin Despeisse, et que c’est
là qu’il fit sa connaissance. Cette fable est écartée par les preuves
qui existent au procès de leurs relations d’affaires, de leur asso
ciation, de leur intimité. 11 n'est pas plus véridique lorsqu’il dé
savoue d’avoir introduit Dum ergue dans les magasins Despeisse,
Charmet et H ardouin, et de l ’avoir recommandé à ces négocians
com me un hom m e honnete, et qui était, très-bien dans ses affaires.
Il ne peut exister de doute fondé sur cette recommandation, dont
plusieurs témoins ont dû déposer, et notamment les commis qui
travaillaient alors dans ces magasins. «Vendez à ce brave h om m e,
« disait R eyn aud -R icho n , c’est un homme sûr; je réponds de lui
« com me de moi-même ».
L e sieur Despeisse est créancier de Dumergue de près de 9,000 fr.
C ’est de tous les négocians intéressés dans cet le malheureuse affaire
celui qui perd le plus, et c’est lui pourtant que Reynaud-Richon
ose accuser d’avoir introduit Dumergue dans les autres maisons
de commerce où il a pris des marchandises, et de lui avoir faci
lité des emplettes sur lesquelles il avait un bénéfice de cinq pour
cent. Cette récrimination est odieuse, mais elle est encore plus
absurde.
L e sieur Despeisse est originaire du P u y ; il faisait des affaires
avec Reynaud-Richon depuis quelque tems, et il n’avait jamais
connu Dumergue. Ce fut Reynaud qui le lui m en a, qui répondit
de lui, qui parla avantageusement de l’état de ses affaires, qui le
pria de le mettre en relation avec d ’autres négocians de sa con
naissance. L e sieur Despeisse fut dupe: il contribua à ce que
d’autres le fussent ; mais on ne croira jamais qu’il eût délivré pour
�(
)
*9
9,000 fr. de marchandises à un homm e qui aurait suffisamment
manifesté le mauvais élat de ses affaires, en souffrant, dès le m o
ment de l’achat, une perle de cinq pour cent sur ses m archan
dises. On dit une perte, parce que ce qui eût été bénéfice pour
le sieur Despeisse, devenait une perle pour Dumergue. Aussi les
créanciers de ce dernier ont-ils rendu au sieur Despeisse une jus
tice pleine et entière; il est leur fondé de pouvoir dès l’origine de
cette affaire, et il a justifié par son activité la confiance qu’on lui
avait témoignée.
Après avoir fait tous les efforts imaginables pour écarter ce c h e f
d’accusation, Reynaud-Richon le considère comme établi, com me
prouvé, et il soutient qu’il ne serait d’aucune importance, et qu’il
ii’en résulterait aucune p reu v e , et même aucun indice de culpa
bilité. Une recommandation par é c rit, dit-il, à plus forte raison une
recommandation verbale, ne constituent pas un cautionnement
en matière civile, et ne sauraient établir la complicité en matière
criminelle. Ce raisonnement est d’une absurdilé palpable. O u i,
sans doute, au civil, une recommandation n’équivaut pas au cau
tionnement, et la recommandation faite par un tiers à des négocians, d’un marchand constitué depuis en banqueroute fraudu
leuse , ne rend pas ce tiers complice. S’il en était autrement, le
sieur Despeisse, qui a agi de bonne fo i, qui est victime lui-même
du délit qu’on poursuit, devrait quitter le rôle de plaignant, pour
prendre celui d’accusé. Mais si celte recommandation a été faite
de mauvaise f o i , pour donner du crédit à un homme qui n’en avait
pas, pour lui faciliter des achats de marchandises qu’on devait
ensuite se partager; si ce partage a eu lieu ; si on a été trouvé saisi
de la marchandise; si les relations, l’association du tiers avec le
banqueroutier, ne peuvent pas être mises en dou te, alors cette
recommandation change de caractère; elle ne constitue pas la com
plicité , mais elle se range parmi les circonstances qui réunies
servent à l’établir.
Et comme 011 ne peut mettre en doute que le partage de la
�( 20 )
marchandise volée a eu lieu, que les Reynaud ont eu leur por
tion , et que tout ou partie de celle de Dumergue lui a été expé
diée à Paris sous le faux nom de Rousseau, la complicité devient
évidente. A la vérité, Reynaud-Richon produit une facture; mais
depuis quand? et quelle facture? Il a été arrêté le i 5 juin 1808;
dès le premier moment de son arrestation , on lui a demandé
l’exhibition de cette facture, et il n’a pu en justifier qu’à Issoire,
où il a été conduit dans le courant d’octobre. Où donc était cette
fameuse facture? Dans le porte-feuille de R eynaud-R ichon? Non.
Cependant on y trouva une foule de factures anciennes de 1806
et 1807. Reynaud (ce qui était bien surprenant) n’avait avec lui
que celles qui lui étaient inutiles3 1 autre était dans son secrétaire
au P u y , et il fallut plus de six mois pour la faire venir à un homm e
pour qui l ’on a fait des voyages à Ardes, à Issoire, en faveur de
qui l’on a cherché à intéresser nombre de citoyens recomm andables, et fait écrire une foule de lettres de recommandation. Celte
factu re, tout le pro u ve, a été faite après coup. Si elle était sin
c è re , elle se serait trouvée dans le porte-feu ille de R eynaudR ic h o n ; il avait avec lui des factures de 1806 et de 1807; par
quelle fatalité la plus récente avait-elle été reléguée a u P u y , dans son
secrétaire? Pourquoi attendit-il que le procès-verbal de reconnais
sance eût été rédigé pour la faire paraître? Nous trouvons la ré
ponse à ces questions dans le mémoire des accusés. Appelé à cet
inventaire, R eynaud-R ichon, un crayon à la m a in , prit des notes
sur la qualité , la couleur et l’aunage de chaque pièce d’étoffe re
connue, et il lui devint facile de fabriquer la facture qu’il a en
suite représentée. L ’imputation calomnieuse qu’il fait aux créan
ciers de Dum ergue retombe donc sur lui-m êm e; et l’on pourrait
dire que pressentant l’objection fondée que l’on pourrait faire
contre cette prétendue facture, il a voulu la prévenir en en faisant
usage contre celles des parties plaignantes. 11 ignorait sans doute
que ces factures avaient été visées par le magistrat de sûreté de
L yo n , même avant son arrestation, et que ce visa écartait sans
retour la critique et la calomnie.
�( 21 )
Mais , dit-il, quel m otif avais-je pour garder sur moi ces fac
tures? N ’était-il pas dans l’ordre de les jo in d re, lors de mon
arrivée au P u y , à mes autres papiers de com m erce?
On lui répondra, que s’il était dans l’ordre que ces factures
fussent au P u y , réunies à ses autres papiers, il a eu tort de ré
pondre, lorsqu’onlui en a demandé la représentation, qu’elles étaient
dans son porte-feuille, et d’insinuer qu’elles avaient pu être sous
traites par le.sieur Despeisse, qui cependant n’avait pas eu un
seul instant ce porte-feuille à sa disposition. On ajoutera q u e , si
cette facture récente devait être au P u y , il est bien étonnant que
celles de 1806 et 1807 se soient trouvées dans ce porte-feuille,
et q u e , soit que la facture fût dans sa poche ou dans son secré
taire, il ne fallait pas six mois pour en faire la représentation.
Vainement tire-t-il avantage de l’accord qui existe entre la date
qu’il a donnée à sa factu re, et l ’époque à laquelle Baraduc fait
remonter le dépôt des cinq ballots de marchandises. Cette cir
constance , insignifiante en elle - même , devient défavorable à
l ’accusé, si l’on fait attention que ce Baraduc, aubergiste, est en
mêm e tems marchand-colporteur, et l’intime des R e y n a u d , de
Dumergue et d’Angremi. On doit croire que R eynaud et D u mergue choisirent pour dépositaire des marchandises volées un
homme de confiance ; et leur homme de confiance obtiendra dif
ficilement celle de la justice. R e y n a u d -R ich o n devait craindre
des perquisitions dans son domicile; la prudence lui commandait
de disséminer ces marchandises dans des maisons sures, et de ne
recourir à ces dépôts qu’à fur et mesure des ventes qu’il ferait:
voilà pourquoi il alla des Martres à Montferrand avec une voi
ture vide, qui se trouva chargée de marchandises le lendemain
lorsqu’il fut arrêté. Où avait-il pris ces marchandises? chez B a
raduc ? Alors ce dernier a trompé la justice en déclarant qu’il
n’avait jamais été dépositaire que des cinq ballots. Ailleurs ? alors il est
démontré que R eynaud -R ichon avait à Montferrand un autre
dépôt caché de marchandises. En vérité, plus on approfondit cette
�( 22 )
affaire, et plus on est indigné con Ire cel assemblagé de fripons.
On pourrait se dispenser de relever toutes ces circonstances qui
se réunissent contre. celle facture mensongère; un seul fait, on le
répète, en prouve la fausseté. Dumergue demande en fin de février,
à la maison V erzier, de lui expédier deux pièces taffetas, l’une
vert u n i , l’autre rubis ou cramoisi. Ces deux articles lui sont
adressés à Clermont, le 4 mars; le 1 4 , Angremi les relire de chez
M M . Domergtie père et fils, qui ont certifié le fait; et cependant
la coupe de la pièce cramoisie a été trouvée par M. Verzier parmi
les marchandises saisies avec Reynaud-Richon. Ainsi Dum ergue
aurait vendu à Reynaud le 24 février, date de la iausse facture,
une pièce taffetas qui ne lui parvint que dix-huit jours après; ainsi
la revente aurait p r é c é d é la vente de quelques jours. Voilà qui
tient du miracle; et certes, il faudrait être encore plus habile que
R e y n a u d , pour donner sur cela une réponse satisfaisante.
Ce n’est pas tout , d ’ailleurs, que de représenter une facture
qu’il aura, été aisé de faire signer par D u m ergue, en supposant
qu’on n’ait pas contrefait sa signature, ce qui est infiniment plus
probable ; i. faudrait aussi que cette facture eût été couchée sur
le livre journal que le sieur Richon a dû tenir, s’il s’est conformé
à l’article 8 , livre i.er du code de com m erce; et s’il est vrai que
l’on ait fait des perquisitions chez lui* et qu'on n’ait pas trouvé
de livres journaux, que penser d’un marchand qui achète pour
10,000 fr. de marchandises à-la-fois, et qui ne lient pas de livres,
011 qui tes cach e? 11 n’y a pas de milieu: ou R e y n a u d -R ich o n
cache ses livres, et alors il est coupable; ou il n’en a pas tenu, et
dans ce cas, la facture qu’il représente 11e peut inspirer aucune
confiance.
Elle est du 2 4 février ; la vente a eu lieu, dit R ey n au d , en foire
de Clermont; et depuis cette époque il n’a pas vu Dumergue. Il l’a
écrit à la maison Ilardouin; il l’a dit dans ses interrogatoires; ce
pendant il doit avoir été déposé par les veuves Charlat et C liarlatC hom etle, et par Germain Reynaud son domestique, qu’il a passé
�( *3 )
douze jours au moins avec Dum ergue à Courpière clans le courant
de mars. Ce fait que les Reynaud croyaient dérober à la con
naissance, est d’ une si grande importance dans l'affaire, q u ’on
croit devoir entrer à cet égard dans quelques détails.
Sur la lin de février i 8 o 3 , Reynaud-Riclion était dans les en
virons de Clermont. Il éloigna Germain R e y n a u d , son domestique,
en l’envoyant porter au P u y une lettre à son épouse, et lui r e
commanda de venir le joindre à Montferrand où il l’attendait.
Germain R eynaud y arriva dans les premiers jours de mars ;
mais il n ’y trouva pas son maître ; quelques jours s’écoulèrent
sans qu’il parût; et ennuyé de l’attendre, Germain Reynaud fut
le chercher dans les villes qu’il parcourait habituellement. Il apprit
au P o n t - d u -C h ateau qu’il était à Courpière, et il s’y rendit; il
ne trouva pas son maître logé dans son auberge ordinaire; il était
chez les veuves C liarlat, et il se disposait h partir avec sa voiture ,
lorsque son domestique arriva. Ce dernier fut assez mal reçu, et
ils revinrent à Montferrant chez Baraduc, conduisant une voiture
chargée de marchandises. Les créanciers de Dumergue ont su
qu’en se présentant chez les veuves Cliarlat, Reynaud - Riclion
déclara qu’il venait à Courpière attendre son associé Dumergue ,
faire avec lui l ’inventaire de la société, ainsi qu’ils le pratiquaient
entr’eux chaque année. Ils ont appris de plusieurs personnes dignes
de foi qu’eifeclivement D um ergue, Angremi et Reynaud jeune s y
rendirent deux jours après; qu’ils demeurèrent fermés douze jours
consécutifs dans cette auberge, et qu’ils y eurent plusieurs alterca
tions sur des affaires d’intérêt.
D e quoi s’occupèrent-ils? firent-ils le partage des marchandises
volées? firent-ils en outre leur inventaire de société? tout porte à le
croire. Reynaud-Richon parla d’un compte et d’un inventaire en en
trant dans l’auberge. Dumergue écrivit de Paris à Escalier le 23 mars:
nous avons cessé notre association avec mon ami, et nous nous sommes
quittés très-bien. Ilss’oceupèrent décomptés pendant douze jours, et
ils eurent des discussions d’intérêt qu’ils ne purent soustraire à la con
�C 24 )
naissance des personnes cliez qui ils étaient logés. Reynaud-Richon
conduisit ensuite sa voilure à Monlferrand chez Baraduc. Ces cir
constances réunies ne permettent pas de douter du com p te, du par
tage; et il devient évident que les ballots ne furent déposés qu’alors
chez Baraduc , parce qu’alors seulement les marchandises passèrent
entre les mains de R e y n a u d - R ic h o n , et qu’il faut ranger sur la
m êm e ligne, et la facture du 24 février, et la déclaration du com
plaisant Baraduc.
En effet, comment croire à la sincérité de cette facture , de
cette œuvre de ténèbres, lorsque tout se réunit pour déceler son
origine, lorsque toute la conduite de R e y n a u d -R ic h o n , depuis
qu'il a été possesseur de cetle partie de marchandises, a été celle
d’un homme qui a commis un crim e, qui veut en retirer tous les
avantages qu’il s’en était promis, et qui prend toutes sortes de
précaiilions pour en dérober la connaissance à la justice et aux
parties intéressées? Si Reynaud avait achelé réellement de D u mergue les marchandises saisies, il est tout naturel de penser qu’il
les eût conduites au P u y dans son domicile; si sa voiture eût été
trop chargée, les transports de Clermont au P u y ne manquent
pas. Mais il n’agit pas ainsi; il laisse la majeure partie de cette
marchandise dans une auberge, non à Clerm ont, où la préten
due vente avait eu lieu, mais à M ontferrand, chez Baraque; il
cache ce dépôt à tout le m on de, môme à G e r m a i n R e y n a u d ,
son domestique; il part des Martres avec une malle v id e ; il dit
à Germain Reynaud qui l’a déclaré, qu’il reviendra le lendemain
avec de la marchandise; et effectivement il est arrêté le lende
main sortant de Montferrand; on saisit la malle, et elle se trouve
pleine; le magistrat de sûreté de Clermont lui demande si ¿1 son
départ des Martres, elle contenait de la marchandise, et il répond
affirmativement.
On lui demande s’il a des marchandises chez Baraduc, ou ailleurs,
el il répond h deux reprises qu’il n’en a pas d’autres que celles qui
avaient été saisies aux Martres. S’il eût été propriétaire légitime de
ces
�( ^
)
ces marchandises, eût-il agi si mystérieusement? aurait-il mis tant
d’obstination à cacher h la justice ce dépôt qu’elle avait alors en
son pouvoir?
Pour atténuer l’impression défavorable que ces dénégations men
songères devaient produire, Reynaud-Riclion a prétendu qu’il n’a
vait voulu soustraire ces marchandises à la justice que pour s’en faire
nne ressource pendant sa détention: réponse maladroite, qui, si elle
était vraie, décélérait combien peu Reynaud comptait sur son in
nocence et sur un prompt élargissement. Mais aussi faut-il convenir
que le pas était glissant. Avouer le dépôt, l’indiquer à la ju stice,
c ’était pour Reynaud une démarché fort hasardeuse. Ces ballots
étaient intacts, et une fois découverts, comment espérer de faire
croire à la sincérité d’une vente de marchandises sous balles et sous
cordes? A la vérité, ces marchandises étaient alors au pouvoir du
magistrat de sûreté; mais Reynaud-Riclion l ’ignorait ; il comptait
tellement sur Baraduc, qu il ne crut a la saisie du dépôt que lors
qu’on lui représenta les marchandises, et il ne pouvait deviner qu’on
lui opposerait un jour avec avantage, comme preuve de culpabi
lité, cette dénégation que lui commandait alors la position dans
laquelle il se trouvait.
Si l’on pouvait douter encore de la complicité de Reynaud-Riclion,
il suffirait, pour en être convaincu, de se rappeler, i.° qu’on trouva
chez Escalier un projet d’efiet à souscrire par Angremi à Dumergue,
daté de Saint-Flour, et tiré sur la maison Percigot de M e n d e , et
qu’un effet absolument semblable, souscrit par Angremi à D u m e r
gu e , fut négocié par ce dernier à la maison Despeisse;
2.0 Que les lettres par lesquelles Dumergue demandait en février
1808 de nouvelles marchandises, sont toutes écrites de la main de
Reynaud-Riclion ;
3 .° Q u’il en est de même des lettres de recommandation données
à la même époque par Dumergue à Reynaud jeune, sous le faux
nom de Reynaud de la Pruneire.
L e projet d’efTet trouvé chez Escalier prouve que Dum ergue se
7
�( 2 6 )
faisait souscrire des effets par son associé, qu’il les donnait en paie
ment des marchandises escroquées, et que Reynaud R ichon , leur
complice, remplissait les fonctions de secrétaire, et donnait à ces
deux fripons en sous ordre les modèles de ces effets.
Si l’on demande à R eynaud - Richon pourquoi il s’est prêté à
cette manœuvre d’autant moins excusable, qu’il savait fort bien
qu’Angremi était le commis ou l’associé de D u m ergue, et que le
billet qu’on devait faire sur ce projet, serait un piège tendu à la
crédulité de ceux qui le prendraient en paiement; il répond qu’on
ne doit voir dans sa conduite qu’ un acle de complaisance d’un
négociant envers un autre. Si ou lui demande pourquoi il a écrit
pour Dum ergue les lettres relatives a de nouveaux achats de mar
chandises, il répond que c ’est par complaisance, et c’est encore
par complaisance qu’il a écrit pour Dumergue les lettres de recom
mandation qni devaient servir au faux Reynaud de la Pruneire.
C ’est un hom m e bien complaisant pour ses amis que R eyn aud Riclion ; pour les ob lig er, il ne lui en coûte rien de fouler aux
pieds les devoirs sacrés imposés par l’honneur et la délicatesse.
R eyn au d -R ich o n , acquéreur à vil prix de la totalité des mar
chandises de D um ergu e, dans un moment où elles subissaient une
hausse ( i ) , avait la mesure de la solvabilité de son ven deur; et
en se prêtant complaisamment a la demande de nouveaux envois
de marchandises, il facilitait de nouvelles escroqueries : ceci est
dit dans la supposition où la prétendue vente du 24 février 1808
serâit sincère. Mais comme il est démontré que la facture repré
sentée par Reynaud-Richon j est une pièce fabriquée à loisir pour
constater une vente qui n’a jamais existé, des lettres de cette
nature deviennent des preuves de com plicité, et manifestent
l’intention de leurs auteurs de faire de nouveaux vols qui devaient
am ener de nouveaux partages.
Egalem ent, R e y n a u d - R ic h o n nra pu sans crime se servir du
nom de Dumergue pour recommander Reynaud jeu n e, son frère ,
(1} V o y e z sou mémoire»
�(
)
27
sous le nom de Reynaud de la Prun eire; et R eynaud jeune n ’a
pu sans crime se servir de ces lettres pour s’introduire , sous un
nom qui n’était pas le sie n , dans plusieurs magasins de Lyon. Il
est évident qu’il ne se présentait pas sous un faux nom , avec
l ’intention de payer les marchandises qu’il croyait qu’on allait
lui livre r, autrement la précaution qu’il prenait de changer de
nom était parfaitement inutile. Ce nom supposé pouvait le com
promettre , et on ne se compromet pas sans l’espoir d'un gain
quelconque.
" R eynaud-R ichon, qui, pour se justifier d’avoir écrit les premières
lettres ,• prétend quJil ignorait l’état des affaires de D u m e r g u e ,
de ce Dum ergue qui vendait ¿ri globo ses marchandises à vil prix
au moment de la hausse , met en doute que les lettres fussent
effectivement pour Reynaud je u n e , et dans la supposition affir
m ative, il prétend qu elles seraient une preuve que les deux frères
Reynaud ignoraient la mauvaise situation de Dumergue. Quel
avantage, disent-ils, pouvait présenter la recommandation d ’un
homme qui était sur le point de manquer? Cette recommandation
au contraire ne devait-elle pas jetter de la défaveur sur celui qui
en aurait fait la base de son crédit? Èt en supposant que Reynaud
jeune, dom icilié, père de famille, propriétaire d’une fortune immobiliaire, eût pris ces marchandises avec l’intention de disparaître
sans faire face à ses engagemens, le délit qu’il aurait voulu com
mettre à l’aide de celte recommandation, lui serait personnel, ne
concernerait pas R e y n a u d - R ic h o n , son frère, et ne présenterait
aucun indice de complicité dans la banqueroute de D um ergue.
Ces observations ne doivent pas demeurer sans réponse.
Les lettres étaient pour Reynaud jeune, il en fut le porteurelles lui servirent pour s’introduire dans les magasins Verzier, Y e lat,
Rits et autres. Il fut reconnu à Clermonl par le sieur V e rzier; il l’a
été à Issoire par un associé ou un commis de la maison R its, et ,
ce qui lève tous les doutes, on tro u va, lors de son arrestation, une
semblable lettre dansson porte-feuille. Il y a donc mauvaise foi et
�( *8 )
maladresse de présenter comme douteux un fait a v é ré , que l’insliuction a mis dans le plus grand jour.
Dumergue faisait écrire, dans le même tems, aux négocions de
L j ’on , qu’il arriverait en fin de mars, et qu’il solderait ce q u ’il
devait. Ainsi tout à la fois il tranquillisait ses créanciers 3 et donnait
du poids à ses recommandations en faveur du faux Reynaud de
la Pruneire. Il ne pouvait rejaillir sur Reynaud jeune aucune dé
faveur de la banqueroute prochaine de D um ergue; la supposition
de nom ne lui laissait aucune inquiétude à cet égard.
Reynaud jeune n’a point-de propriété foncière; on ne lui con
naît ni femm e , ni enfant ; il ne réside point à Espinchal, il est:
habituellement au P u y , son passe-port nous l’apprend. On peut
d o n c, sans craindre de se -tromper, lui supposer l’intention de se
rendre à L y o n , et d ’y acheter des marchandises et de ne pas les
payer. C ’est un vice dans le sang, une maladie de famille dont il a
éprouvéde fréquentesatleintes, comme tous les R eynau d , ses frères.
Ce n’est pas seulement une tentative d’escroquerie dont il s’est
rendu coupable, parce que la mission qu’il a remplie auprès des
négocians de L y o n , n’est qu’un court épisode de l’histoire de la
banqueroute frauduleuse de D u m ergu e; parce que la signature de
D u m ergu e, si elle est vraie, l’écriture de Reynaud-Richon, et la
présence de Reynaud jeune a l entrevue de Courpièrej rattachent
cet incident au fait principal; parce qu’il est évident que Reynaud
jeune n’a pas été spectateur désintéressé du partage des marchan
dises volées, et qu’on lui destinait sans doute une forte part dans
celles qui allaient l’être à l’aide des lettres de recommandation dont
il était porteur; parce que s’étant trouvé à Courpière avec D u
mergue dans le courant de mars, et sachant que de là il était parti
pour Paris, il induisit le sieur Despeisse en erreur, en le menant
à la poursuite de ce banqueroutier dans la commune de Pauliaguel et autres circonvoisines ; parce que désavouant devant le
magistrat de sûreté que ces lettres fussent pour l u i , il en donna
pour raison qu’il était brouillé avec Reynaud-Richon, son frère,
qui
�( a9 )
qui les avait écrites, et que le contraire résulte de l’instruction ;
parce qu’il n’a d’autre boutique, d’autres marchandises que celles
de Reynaud-Richon ; parce qu’interrogé entre les mains de qui il
avait laissé son cheval et ses marchandises, il répondit : «Entre les
« mains de Guillaume R e y n au d , mon frère », tandis que ce Guil
laume R e y n a u d , condamné aux fers en l’an 1 2 , subit encore la
peine que la justice lui infligea.
Que d’efforts, que de mensonges pour donner le change à la
justice! On impute à Reynaud-Richon d’avoir recommandé D um ergue, et induit en erreur les négocians qui lui ont vendu; et
quand l’instruction présente une foule de preuves de leur associa
tion, et de leur intimité, il soutient l’avoir connu pour la pre
mière fois dans le magasin Despeisse. Il a été trouvé saisi de la mar
chandise vendue d ’après sa recommandation; et il écarte les induclions qu’on peut tirer contre lui de ce fait décisif, par la représen
tation d’une facture fabriquée six moix après son arrestation (i)*
On lui oppose le projet d’effet trouvé chez E scalier, et les lettres
contenant de nouvelles demandes de marchandises ou des recom
mandations pour Reynaud jeune, son frère, sous le faux nom de
Reynaud de la Prun eire, et il rejette tout cela sur son caractère
obligeant qui lui rend tout refus impossible.
D e son cô té, Reynaud jeune , qui a assisté au partage des mar
chandises à C ou rpière, qui a été trouvé nanti d’une des lettres
de recommandation écrites par son frère, et signées par D u m erg u e , qui d’ailleurs a été reconnue par le sieur V erzier, et par un
associé de la maison Rits, dit que ces lettres ne le concernaient
pas, et soutient ne pas avoir joué le rôle du faux Reynaud de la
(1) L orsqu e, dans ses interrogatoires, oa lui demandait le montant de cette prétendue
v e n t e , il répondait qu’ elle s’ élevait à 10 ou à 12,000 f r . , et il portait à 5 ou 6,000 fr. le
montant de la partie de rubans qu’il avait reçue en paiement. I l ne précisait pas les
s o m t a e s , quoiqu’il ne se fût écoulé que quelques mois depuis cette prétendue v e n t e , parce
que la facture n’ était pas encore faite, et qu’il voulait 11e pas Être gêné par des déclara
tions antérieures, lorsqu’il s’ occuperait de ce travail. Cependant comme on ne songe pas
à tout, le prix des malles n’ est pas porté dans la facture, quoiqu’elles aient été reconnues
par le marchand coffrelier qui les avait vendues à Duinergue.
9
�(3 0 )
Pruneire . C e système de défense, qui a pour basé des dénégations
mensongères, des faits controuvés, ne peut réussir. Les citoyens
qui seront appelés à remplir les fonctions importantes de jurés,
donneront une attention scrupuleuse aux débats dont doit jaillir
là lumière. Ils fermeront l’oreille à toutes les séductions de l’in
trig u e , et par une déclaration solennelle, ils restitueront, à des
négocians indignement trompés, des marchandises volées. Ils con
courront efficacement à la répression d’un brigandage affreux,
dont l ’impunité plongerait inffailliblement le commerce dans le
deuil et la désolation. <
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Créanciers de Dumergue. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Triozon-Barbat
Subject
The topic of the resource
banqueroute
fraudes
colporteurs
préjugés
commerce
escroqueries
Description
An account of the resource
Mémoire pour les créanciers de Dumergue, originaire de la commune du Valbeleix ; contre ledit Dumergue, accusé de banqueroute frauduleuse, Reynaud-Richon et Reynaud jeune, ses complices.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
1807-Circa 1880
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0542
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Espinchal (63153)
Issoire (63178)
Le Puy-en-Velay (43157)
Lyon (69123)
Saint-Germain-Lembron (63352)
Valbeleix (63440)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53853/BCU_Factums_M0542.jpg
banqueroute
Colporteurs
commerce
escroqueries
fraudes
préjugés