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y
**-■
MÉMOIRE,
E N R É P O N S E A D E U X M É M O IR E S ,
POUR
C0ÜR R0YALE
C O N S T A N T , Avocat,
. et Juge-Suppléant près le tribunal civil d 'lssoire >
intim é;
. CONTRE
M e
Jacq u es-F loren t-G a b r i e l
L es sieurs J o s e p h - F r a n ç o i s e t T h é l i s R U D E L D U M I R A L , père et f i l s , appelans.
Deux affaires reposant sur des faits communs et identiques avaient
été soumises à l’examen de la Cour une discussion de sept audiences
devait les avoir suffisamment élaborées ; aussiM r Constant, dan s la
confiance ou il était de les avoir réduites, en fait et en d ro it, à
quelques propositions simples et d’une solution facile , attendait-il
avec confiance et sécurité les conclusions de M r l’avocat général et
l’arrêt de la Cour.
Les sieurs R udel-Dumiral ont pensé que la matière n’était pas
epuisée, ou plutôt ne tenant compte d’aucun des résultats acquis
par des plaidoiries longues et animées, et espérant que les traces en.
seraient effacées dans l’esprit des magistrats , ils ont imaginé de pu
blier deux mémoires, où, après un exposé de faits inexact et incom
p let, ils soumettent à la Cour l'examen de neuf propositions, ne
pouvant pour la plupart ressortir des faits de la cause
ou
devant cire
repoussées par le rapprochement des actes, et l'application des
principes de droit les plus simples et les moins contestables.
On comprend très-bien que les sieurs Rudel-Dumiral aient voulu
jeter de la confusion sur ces deux affaires; c’était une nécessité de
leur position, c a r , à moins de s’avouer vaincus , ils ne pouvaient ni
faire connaître les faits ni les interpretrer avec une complette exacti-
DE RIOM,
2Tne
MBRE
�( O
tuclc. L e droit lui-même , considéré dans sa simplicité, lour était
tellement contraire, qu’il fallait bien qu’il fléchît sous une main ha
bile, prît une forme toute nouvelle , et conduisît à des conséquences
inattendues: c ’était-là une œuvre de l’art, on ne pouvait mieux l’accom plirj et sous ce rapport les deux mémoires des sieurs RudelDumiral, impuissans pour le succès de leur prétention, resteront
comme essai bien remarquable de la force qui lutte contre une dif
ficulté insurmontable, et qui contribue, même à son insu, à rendre
plus évidentes les vérités qu’elle s’est efforcée d’obscurcir.
Mais les sieurs Rudel-Dum iral ont bien malheureusement cou
ronné leur œ uvre: ils se demandent s’ils « doivent être les victimes
« des adroites combinaisons d’un habile spéculateur. « Ici on a
voulu viser à l’effet; mais M® Constant n’a-t-il pas le droit de s’ap
pliquer la réponse si simple que reçoit cette question.
Q ui a habilem ent sp éc u lé , en 1720, de la famille Martin ( re
présentée par M® Constant) ou de Philippe-Philibert Grandsaigne
(représenté par les Dum iral), lorsque ce dernier faisait le commerce
des billeis de la banque de L aw , et les transmettait à sa propre fa
mille , par obligation, le jour même de leur suppression ?
Qui a habilement spéculé des Martin ou du sieur Grandsaigne ,
5
lorsque ce dernier, en vertu des sentences de 1^55 et 17 G, s’est
mis en possession pignorative du domaine du Foulhoux, sans autre
titre qu’une obligation consentie par les M artin, sans réception de
valeurs réelles ?
Qui a soutenu cette habile spéculation par cVadroites combi
naisons, si ce n’ est le sieur Graudstiigne, et plus tard ses représen
ta ns, qui, à l’aide d’actes de toute nature et obtenus de diverses per
sonnes, Ont fait tous leurs efforts pour intervertir le titre de leur
jouissance pignorative, le masquer sous les apparences d’un droit de
propriété, et à l’aide d’un procès astucieusement hérissé de diffi
cultés qui paraissaient inextricables , sont parvenus à conserver la
possession du domaine du Foulhoux, depuis 17 G jusqu’en j
,
c ’est-à-dire pendant soixante-seize ans accomplis?
Q u’a au contraire fait M® Constant, si ce n’est de réclamer le pa
5
832
trimoine do sa famille, de le demander comme héritier de sa mère
B
�ou cédataire des droits de personnes qu’il pouvait seul légitimement
représenter ? s’il a repris le domaine du F oulhoux, n’est-ce pas après
avoir offert le paiement de l’odieuse créance , à l’aide (le laquelle
Grandsaigne en avait obtenu la jouissance pignorative ; et s’il ar
riv e , aujourd’h u i, que les héritiers Grandsaigne supportent les
suites inévitables de leurs faiis et de celui de leur auteur, qu’ils soient
teuus de restituer une fortune injustement acquise, peut-on voir
dans ce juste retour autre chose qu’un acte de justice, qui pour être
tardif n’en est pas moins inévitable ?
11
faut donc exposer les faits, et examiner sans préocupation les
difficultés que ces deux causes peuvent présenter,
F A IT S G É N É R A U X .
Avant d’entrer dans cet exposé, il convient de faire connaître
très-sommairement l’objet et le véritable intérêt des deux affaires
qu’il s’agit de décider.
Un arrêt du i août i
, en reconnaissant qu’un sieur Pliilippe-
5
852
Pliilibert de Grandsaigne avait joui par lui-même ou par ses héri
tiers, à titre pignoratif, du domaine duFoulhoux pendant 76 ans,
en a ordonné la restitution en faveur de M. Constant, légitime re
présentant de ceux au préjudice desquels cette longue possession
avait eu lieu : une estimation et un compte ont été ordonnés pour
fixer la valeur de ces jouissances, et régler la position respective
des parties.
L e titre pignoratif du sieur Grandsaigne était une semence de
17 5 6 , qui l'astreignait à payer une provision annuelle de 200 fr.
à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin, et à donner, dans Jes
intérêts de ces derniers, caulion des restitutions de jouissances qu’il
ferait à l’avenir.
Cette sentence nécessitait des mesures conservatoires; trois ins
criptions ont été prises avant ou pendant l’instance en désistement;
leur nullité, radiation 011 réduction sont la matière du premier procès.
La première de ces inscriptions, qui est sous la date du 6 avril
>829, a é té prise par les héritiers de Philippe-Genest M artin, et
�a pour objet le remboursement du capital et des arrérages de la
provision de 200 francs.
La secon d e, devant produire hypothèque sur les immeubles
«fprovenus de la succession de Philippe-Philibert Treilhe de Grand
iesaigne, seu 'em en t, »pour les jouissances du domaine duFoulboux
cl du mobilier mort et v if garnissant ce dom aine, a été requise, le
(i août i o, par M e Constant en qualité d’héritier de Jeanne-Marie
Martin, sa grand-m cre , et comme étant aux droits de PhilippeGenest Martin.
83
Enfin M e Constant comme co-propriétaire, du chef de sa grandm ère, de la provision de 200 f r . , a pris, le 21 janvier 1 • , une
troisième inscription à l’eiFet de conserver ceux des arrérages qui
85
ne l’auraient pas été par l’inscription du 6 avril 182g.
Les sieurs Durniral héritiers Grandsaigne avaient vendu , le
85
12 janvier 1 1 , au sieur Pine-Bouterige le domaine des Robins
moyennant 7 8 ,o o u fr., dont 60,000seulement furent portés en l’acte.
Ce domaine provenant de la succession Grandsaigne était nécessaire
ment frappé par les inscriptions; aussi les sieur Dumiral en deniantlcrent-ils la nullité, radiation ou réduction. C ’est sur l’appel, inter
jeté par ces derniers du jugement du a5 juin 1822 , qui statue sur
ces difficultés, que repose le premier litige.
Une seconde difficulté devait naître :
Un ordre fut ouvert sur la distribution du prix apparent du do
maine des Robins; M° Constant y produisit, et demanda la sépara
tion des patrimoines qui ne fut pas contestée par les contredits des
sieurs Dumiral. Le juge-commissaire fil la collocation provisoire en
vertu de cette règle; mais au lieu de se fixer seulement sur la date
des litres des créanciers dusieurPhilippe-Philibert de Gx,andsaigne>
il eut encore égard à celle de leurs inscriptions. Cette erreur, qui
ctait préjudiciable à M® Constant dans la fixation de son ran g, fut
rectifiée parle jugement du \ juillet 1
, qui maintient le privilège
855
de séparation des patrimoines comme règle de l’ordre , et fait remon
ter la collocation de Mp Constant à la date de son litre, sans avoir
égard à celle de son inscription.
L ’appel de ce jugement d’ordre, interjeté par les sieurs
constitue le second procès.
Dumiral,
�Ces (leux affaires si évidemment provoquées et internées par les
sieurs Durniral, qui ont voulu dénaturer et s’approprier le gage des
créances de M" Constant, sont cependant présentées par eux comme
« des procès aussi considérables qu’inattendus , soulevés par
]\Ie Constant. » Que signifiënt ces reproches : des procès inatten
d u s?.-. lorsque les sieurs Durniral qui connaissaient les inscrip
tions de M e Constant vendentcependantles immeubles qu’ils savaient
assujétis à sa créance, et en reçoivent le prix. D es procès consi
dérab les! mais à qui la faute? ces procès ne sont-ils pas la suite na
turelle des faits des sieurs Durniral? D es procès soulevés par M •
C o n sta n t!... Mais qui les a intentés? qui soutient encore aujourd’hui,
sans autre intérêt que celui des dépens ,1a contestation relative aux
inscriptions , inscriptions qui n’ont cependant exercé aucune in
fluence dans l’ordre. E t pour couronne r l'œ uvre, qxiels moyens fait-on
valoir pour repousser ces inscriptions ? deux propositions de fait
également inexactes et erronées ; l’une , que l’inscription du a G
août i o n’a pas été prise au nom des vrais propriétaires; l’autre,
que les droits de Me Constant sont prescrits; et lorsque M® Constant,
85
cédant au besoin si impérieux pour lui de faire connaître la vérité,
va se livrera l’examen sérieux de ces faits*, et en faire ressortir des
conséquences souvent si peu honorables pour la mémoire de Philippe-Philibert de Grandsaigne , les héritiers de ce dernier n’aurontils pas quelques regrets d’avoir contraint leur adversaire à entrer
dans des explications qu’il aurait voulu leur éviter ?
En jetant un coup-d’œil sur la généalogie, on s’assure qu’au dixseptième siècle les familles Jolivet et Treilhe s’étaient alliées; et un
contrat de m ariage, du 16 octobre i()68, établit que Philibert
T reilh e, indique par erreur dans la généalogie sous le 110m do Phi
lippe, et Annet T reilhe, époux de Jeanne-Marie J o livet, avaient
été institués héritiersde leurs père et mère par égalité, et qu’Anne,
leur sœ u r, avait été réduite a une simple légitime. A cette époque
les fortunes des auteurs des deux familles étaient donc à p*'u près
égales, et cet équilibre ne fut rompu en faveur de Philippe-Philibert
! reilhe d« Grandsaigne, un des enfaus d’autre Philibert, que par
un do ces coups de fortune qui échappent le plus souvent à la pré-
�( G )
voyance humaine, mais dont l’avidité active sait toujours bien pro
filer.
En 1720 la banque de La\v existait; Philippe-Philibert Treilhe
de Grandsaigne, avocat à T h iers, importa dans cette cité indus
trielle les billets de cette banque, e t , à leur aide, parvint à jeter les
fondemens de la grande fortune qui a été plus tard recueillie par scs
héritiers collatéraux.
Philippe-Philibert, dans son ardeur de spéculation, ne se montrait
pas dilîicilcsur le choix de ses victimes. L e 7 juillet 1720, il parvint
à faire souscrire à Genest Treilhe et à Pierre Martin, ses deux cousinsgerm ains, une obligation de 4,000 f r ., n’ayant d’autre cause que la
remise de quatre billets delà banque royale de 1,000 fr. chacun.
Au mois d’août suivant ces billets furent démonétisés. C ’est en vertu
de ce titre si odieux, sans cause au moins utile pour les souscrip
teurs, que Philippe-Philibert Grandsaigne est parvenu à se mettre
en possession pignorative du domaine Foullioux, possession que lui
ou ses représentais ont trouvé le secret de perpétuer jusqu’en i852j
par des tentatives d’interversion de litre, des actes frauduleux, des
subtilités de toute nature qui leur ont servi à ourdir les procédures
les plus ardues et les plus*compliquées,
Le domaine duFoulhoux est advenu à la famille Treilhe par l’ef
fet des poursuites que Jeanne-Marie Jolivet, femme d’Annet Treilhe,
fût obligée d’exercer contre Maihurin J o livet, à l’eflet d’obtenir ce
qui lui revenait dans les successions de Jean Jolivet et de Jeanne
liillon leurs père et mère. Un arrêt , du 18 août 172 a, condamne
Clément, fils de Maihurin* Jolivet, à payer aux quatre enians de
Jeanne-Marie Jolivet, femme T reilhe, la somme de 5,000 fr. avec
des intérêts remontant à une époque assez éloignée pour équiva
loir à une somme plus élevce que le capital.
Maric-Jeanne , un des \ enfans d’Annet T reilh e, avait épouse
Louis de Lafoulhouse, et était Sécédée laissant des enfans de ce ma
riage. Le i 1 août 17^,1 , ce Louis de Lafoulhouse, agissant tant en
son nom que comme père cl légitime administrateur de ses enfans,
a cédé à Pierre ¡Martin, époux de Jeanne T reilh e, son quart dans
la créance résultant de l’arrêt du 1
3 août
172.5 , donnant, au reste
�à Pierre Martin pouvoir de saisir mobilièrement et réellement, même
sous le nom de son cédant, les biens appartenant à Clément Jolivet.
Ou cote cette cession qui a été ratifiée, le 3i mars i-j/fi, par les
enfans deLafoulhouse, parce que l’on verra que plus tard PhilippePhilibert Grandsaigne et ses representans se sont successivement
dit cédataires des droits de Jeanne-Marie de Laf’o ulhouse, femme
Clièze; qu’en cette qualité, ils ont constamment soutenu être p ro
priétaires du quart du domaine du Foulhoux; que dès-lors l’asser
tion, aujourd’hui employée pour la première fois par les sieurs
Dumiral pour le besoin de leur cause, que les Martin ont toujours
pu faire cesser la possession de Grandsaigne en le payant de sa
créance, ou au moins à l’époque ou cette créance aurait été éteinte
par sa compensation avec les perceptions des jouissances, n’a jamais
eu aucune réalité, étant certain, sous ce premier point de v u e , que
le sieur
système
i août
taire de
5
Grandsaigne et ses héritiers ont constamment soutenu leur
de propriété du domaine du Foulhoux, jusqu’à l’arrêt du
1852., qui, reconnaissant M° Constant comme seul proprié
ce domaine, lui en a attribué la possession exclusive.
La saisie réelle des biens de Clément et de Marguerite Jolivet
eut effectivement lie u , le 26 mai 1751 , à la requête de Louis de
Lafoulhouze. Celte saisie fut confirmée par arrêt du
?.5 février 1754;
mais Clément Jolivet étant décédé , Jeanne Grenetias , sa ve u ve ,
essaya bientôt de sauver quelques débris du naufrage. Pour ce la ,
elle fit émanciper Anne Jolivet sa fille qui fut pourvue d’un cura
teur; et du consentement de ce dernier fut rendue, le io a v ril 1759,
une sentence qui, réglant les droits de Jeanne Grenetias pour bagues
et jo y a u x , gains de su rvie, habits de deuil et de noces , rente pour
douaire, et fixant même aune somme de oo fr. les frais de nour
riture et entretien de la mineure depuis le o janvier 1 707 jusqu au
5
5
Si mars 1759, à raison de 20 fr. par mois, commence par compenser
«ivec ces sommes toutes les perceptions de fruits et revenus que la
Grenetias avait pu faire du domaine du Foulhoux et de quatre
maisons situées à Tliicrs , et termine par permettre à la Grenetias
de faire vendre le mobilier ayant appartenu à son mari. Presque
immédiatement, et le 19 octobre suivant, acte par lequel Anne Jo-
�livet, assistée de son curateur, vend à sa mère les bestiaux, meubles
et fruits du domaine du Foullioux moyennant la somme de io5o fr.
que cette dernière se retient en paiement de ses créances , et lui
afferme le Foulhoux pour trois ans moyennant
q5
fr. par an , et
la pension d’Anne Jolivet, qui est elle-même évaluée àGofr. par an,
ayant bien soin de mentionner que les bàtimens du Foulhoux étaient
en mauvais état.
Cependant le 28 mai 1740 Pierre Martin est devenu bailliste
judiciaire du domaine du Foulhoux, etsonbail remontait à la SaintMartin de l’année précédente. Jeanne Grenetias imagina alors de
former demande contre Pierre Martin ; elle est sous la date du pre
mier juillet 1741 et comprend les bestiaux du domaine du Foulhoux,
des semences, du fumier, de l’échalas, une assez grande quantité de
vaisseaux vinaires et quelques gros meubles tels que coffres à blé,
2 grandes tables et autres objets de cette nature. Anne Grenetias
termine par soutenir que tous ces effets ont été retenus par Martin
lors de sa mise en possession ; en conséquence , elle les réclame ou
5
la somme de oo lr. à laquelle elle les évalue.
Bien certainement cette demande n’avait rien de sérieux : aussi
dcmeura-t-elle impoursuivie pendant 17 ans, et on n’en aurait pas
parlé, si, sous la date du 8 mars 1758 , on ne devait trouver le sieur
Phiîippe-Philibert de Grandsaigne avocat jouissant alors à titre
pignoratif du domaine du Foulhoux, se faire céder ces droits liti
gieux, chercher ainsi à détourner à son profit le dépôt que la justice
lui avait confié, et si aujourd’hui encore les sieurs Dumiral ne
cherchaient à se faire un moyen de la turpitude de celui qu’ils re
présentent.
Pierre Martin est décédé , le i
5 août
1741. Sa veuve , Jeanne
Treilhe, avait une position de fortune avantageuse : un partage, du
27 septembre 1 7 1 2 , établit en effet qu’elle était propriétaire de
différentes usines telles que moulins-fariiiiers et à couteaux avec
des annexes et. logemens qui en augmentaient l’utilité et la valeur.
On pourrait établir que ces objets qui ont été recueillis par Clément
Martin ont plus tard produit à ses héritiers qui les ont vendus une
somme excédant celle de
3o,ooo
fr.
L ’arrêt du parlement qui transfère aux Treilhe la propriété des
�quatre maisons tic Thiers et du domaine du Foülhoux saisis réelle
ment sur Clément et Marguerite Jolivet ,'le 26 mai 1701, est du 27
juin 1842. Les termes de cet arrêt ne sont point équivoques : les mai
sons et le domaine « demeureront en toute propriété etpossessionaux
« représentons d’Annet Treillic, pour le prix porté en l’estimation qui
« en sera faite par experts. » L ’arrêt fait main-levée do h) saisie
réelle et opposition y survenue
et en ordonne la radiation.
Fixant ensuite les proportions suivant lesquelles chacun des enfans
de Jeanne-Marie Jolivet et Annet Treillic auront droit à cette pro
priété, cet arrêt en attribue la moitié à Jeanne Treilhe veuve Mar
tin , soit de son ch e f, soit comme représentant la branche Lafoulhouse en vertu de la cession du 11 avril 17 3 1; un quart à la
branche Daigucbonne représentant Genest Treilhe , autre fils de
Jeanne-Marie Jolivet et Annet Treilhe ; et quant au dernier quart
devant appartenir à M arguerite, depuis décédée sans postérité ,
elle a l’option de le prendre en nature ou de se contenter du quart
du prix de l’estimation; niais, Marguerite doit faire cette option
dans la quainzaine, autrement elle est référée à ses cohéritiers.
L ’estimation ordonnée par l’arrêt était dans les intérêts des autres
créanciers de Clément et M arguerite J o liv e t, aussi dispose-t-il que
si le prix de celte estimation excède la créance des Treilhe, ceux-ci
seront tenus de payer les créanciers Jolivet, parmi lesquels figurait
Aune Dezolière que plus tard l’on verra représentée par le sieur
<le Grandsaigne.
Il faut placer ici quelques observations :
On a du remarquer que par suite du délaissement irrévocable-
4
m entprononcépar l’arrêt de 17 2» Jeanne Treilhe, femme Martin ,
était reconnue propriétaire de moitié de ces immeubles; cela devait
être puisque Pierre Martin n’avait acquis la portion de créance de
Louis de Lafoulhouse que dans les intérêts de sa femme ; et à cet
égard, c ’est bien vainement que les sieurs Dumiral ( j ) ont essayé
de détruire cette vérité en faisant remarquer que Jeanne Treilhe ,
figurant dans l’arrêt tant en son nom que comme tutrice , annon
çait assez qu’en cette dernière qualité elle représentait scs enfans
( 1 ) Voyez piigoü \ et a5 du premier mémoire Hudel.
�propriétaires des immeubles pour un quart du chef de Lafoulhouse;
cette assertion est une erreur. En effet, Pierre Martin était bailliste
judiciaire des immeubles dont l’expropriation devait être définiti
1
vement consommée par l’arrèt de 174 2 j ° résultat de cet arrêt
devait cire de mettre fin à ce bail judiciaire ; il était donc naturel
et même nécessaire quelesenfans de Pierre Martin y fussent appelés
et y figurassent. V oilà pourquoi Jeanne T reilh e, veuve Martin, y
est en qualité , non seulement en son nom et comme exerçant ses
d roits, mais encore en teint que de besoin comme mère et tutrice
de ses enfans.
M arguerite Treilhe pouvait, au m oyen d’une option, devenir
propriétaire du quart de ces immeubles , mais elle ne l’a pas faite :
au contraire, plus tard, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ont,
par requête du 24 juillet. 1754 » usé de la faculté d’opter qui était
accordée à leur mère par l’arrêt de 1742» de manière qu’ils sont
devenus propriétaires du quart pouvant appartenir à Marguerite
et que le droit de cette dernière a été réduit à une simple créance ,
qu’elle pouvait se faire payer sur le prix de l’estimation des im
m eubles, mais en contribuant au quart des frais. C ’est ainsi que
l’arrêt de i
a apprécié cette option.
852
Enfin les résultats de l’estimation pouvaient présenter quelque
avantage aux créanciers des expropriés ; il était possible qu’ils
eussent quelques sommes à recevoir. On verra avec quelle habileté
le sieur de Grandsaigne a voulu utiliser cette circonstance pour
faire considérer l’arrêt de 1742 comme ne contenant, en faveur
des Lreilhe, qu’un simple délaissement à titre pignoratif.
Philippe-Philibert Grandsaigne avait déjà exercé quelques pour
suites et même obtenu, le 17 août 174 5 , une sentence par défaut
qui condamnait la femme Daiguebonne héritière de Genest T reilh e,
Clément Martin et Jeanne Treilhe comme tutrice au paiement de
l’obligation du 17 juillet 17 2 0 , lorsque Philippe-Genest Martin
contracta, le a octobre suivant, mariage avec mademoiselle Chambat demeurant au Malzieu dans la Lozère.
Ce contrat de mariage constate que Clément Martin , agissant
comme fondé de pouvoir de sa m ère, a institué Philippe-Genest
�5
C 11
héritier du quart dans les Zl\ de la succession maternelle; le contrai
établit aussi que Philippe-Genest ne reçut rien à l’époque de son ma
riage, pas même une promesse d’avancemenl d’hoirie ; qu’il se relira
immédiatement au M alzieu, domicile de sa femme , où bientôt il rem
plaça un oncle de cette dernière dans les fonctions de notaire; et si
l ’on trouve dans ce contrat que Clément Martin s’est réservé la
faculté de payer Philippe-Genest son frère en argent, les circons
tances du fait apprendront bientôt que la veuve Martin et Clément
son fils ont toujours été dans l’impossibilité d’utiliser cette réserve.
Clément Martin contracta lui-même mariage le 22 août 1746Sa mère l’institua son héritier; la position de Philippe-Genest était
fixée et 11c pouvait être changée ( 1 ). Restait dès-lors Annet et
Jeanne Marie. Il fut constitué à cette dernière un trousseau considé
rable en valeur de plus de 1000 fr. et une dot de 4000 fr., sommes
que Clément Martin fut chargé de lui p ayer, sous la condition ex
presse qu’il pourvoirait aux frais de son entretien et nourriture
jusqu’à son établissement, ou q u ’il lui payerait les intérêts de sa dot.
L e décès de Jeanne T reilhe suivit ce mariage de bien près; il
est du mois de décembre de la même année 1 7 4 6 . A cette époque,
Jeanne-Mariè quitta le domicile de sa m è re , elle se retira au M al
zieu auprès de Philippe-Genest son frère , et ne reçut rien de C lé
m ent, ni sur son trousseau, ni sur les intérêts de sa dot. Ces faits
sont établis par le contrat de mariage de Jeanne-Marie Martin avec
Jacques-Antoine Constant, qui est sous la date du 22 juin 1^55, et
qui constate que la future, habitant depuis plusieurs années au
M a lzieu y s’est constituée en tous ses droits , qu’elle donne pouvoir
au futur d’en faire les recouvrement et de les quittancer, et qu’elle
5
n ’apporte d’autre valeur qu’une somme de oo f r . , dite reçue en
argent ou mobilier.
Ici, il faut fixer la position de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie
M artin; l’un et l’autre avaient renoncé à la succession de Pierre
( 1 ) V o i l à pou rq u oi il n ’ est pas qu es ti on de lui dans c c c o n t r a t ; m ai) on n e p e u t pas d i r e ,
coinm,. le s o u t ie n n e n t les K u d e l , page a i du 1 « m é m o i r e , que c e s i l e n c e d oit faire supposer
que l a rnère lui avait p ayé sa l é g i t i m e ,
lorsq u ’ on v o it qu’ e ll e n ’ avait rien con stitu é en
a v a n c e m e n t «Vlioirie dans le con tra t de mariage du a o c l o b i c 17 4 ^ , et qu’ e lle est m orte un
»pi es ce con tra i.
�Mnrun leur père débiteur du sieur de Grandsaigne; ils avaient des
droits incontestables à la succession de leur mère , et tas dates des
contrats de mariage joints à la circonstance que Clément M artin,
poursuivi avec rigueur par le sieur de Grandsaigne, n’avait cepen, dant pu se libérer envers un créancier aussi âpre qu’exigeant ,
montrent assez que ni l’un ni l’autre n’avaient rien reçu à compte
de leurs droits.
Cependant qu’étaient ces droits?
Ceux de Jeanne-Marie sont faciles à établir; elle avait droit à un
4
m obilier évalué iooo fr., et aune dot fixée à ° o ° fr.; ces capitaux
réunis portaient intérêt à pour o/o depuis le mois de décembre
4
1 746, époque du décès de la m ère, de manière qu’au mois de juin
1 7 5 5 , époque de son m ariage, Jeanne-Marie était réellement
créancière d’une somme de 6400 fr. environ , qui devait lui être
payée en argent ou en effets de la succession.
Quant à Philippe-Genest, il ne saurait y avoir plus de difficultés.
Jeanne Treillic avait laissé quatre enfans ; les légitimes réunies
devaient donc comprendre le tiers de sa succession (1). La fixation
des légitimes de Jeanne-Marie et d’Annct Martin apprenait que la
quotité legitimaire devait être de iG ,ooo fr., somme qui multipliée
par
5
donne cc'le de 48,000 francs comme chiffre représen
tant la fortune entière de Jeanne T re ilh e ; o r, Philippe-Genest,
institue héritier du quart des trois quarts dans ces 48,000 fr., avait
36
évidemment droit au quart de
,000 fr., c’est-à-dire à 9000 fr- et
aux intérêts de cette somme depuis lfc décès de sa mère; ces intérêts
se montant à plus de Gooo francs en 1755 , il est évident qu’à cette
époque les droits successifs de Philippe-Genest excédaientla somme
5
de i ,ooo fr. qui, réunis au 6400 dus à Jeanne-Marie, forment en
semble un total de 21,400 fr. environ.
Ces calculs n’ont rien d’exagéré ; leur exactitude se démontre au
contraire par le rapprochement que l’on peut en faire de la fortune
réelle de Jeanne T r e ilh e , fortune dont la consistance est établie
soit par le partage du 27 septembre 1712 qui constate quelle était
propriétaire immeubles en valeur de plus de o,ooo (r., soit par
<1
3
l’arrêt de 174 2 qui lui attribue quatre maisons situées à T hiers, et
( 1 ) Voyei la noycliu 18.
�le domaine du Foulhoux dont Clément cl Marguerite Jolivct sont
irrévocablement expropriés.
5
Comment donc s’étonner de ce que en 17 G on trouve PhilippeGenest et Jeanne-Marie Martin en possession du domaine du F oul
houx, (le ce que Clément leur a abandonné , à titre de partage et
pour leur tenir lieu de droits montant à plus de 21,000 f r . , un im
meuble estimé en 17.58 à 12,900 fr. , et (le ce qu’il les a en outre
mis en possession du mobilier garnissantee domaine (1)? 11 n’y a que
l ’irréflexion ou l’erreur volontaire de l’intérêt blessé qui puissent dé
naturer de pareils faits , et s’efforcer de donner l’apparence de la
fraude à des actes dont la bonne foi est si évidente et qui n’ont pu
être préjudiciables qu’à ceux auxquels ils ont été plus tard reprochés.
Il faut revenir au sieur Philippe-Philibert deGransaigne : depuis
long-tems il convoitait la propriété du Foulhoux; déjà en 17 4 5 , il
avait obtenu une sentence par défaut condamnant notamment C lé
ment Martin au paiement de l’obligation du 7 juillet 1720. L e8 dé
cembre 174 6 , le sieur de Grandsaigne s’adressa à Jean Dniguebonne et à Marguerite Treilhe sa femme , fille de Genest, ce der
nier coobligé solidaire de Pierre Martin dans l’obligation de 1720,
et en obtint un acte par lequel ils lui donnent en mandent eut et
pour le payer de l’obligation du 7 juillet 1720 leur portion dans la
créance Jolivet assise sur les immeubles délaissés en paiement par
l’arrêt de 174 2 : les Daiguebonne, est-il dit daTis l’acte , « autorisent
« de Grandsaigne à poursuivre le recouvrement (le ladite part et
* portion par toutes voies de justice contre les héritiers dudit
v Pierre Martin détenteurs desdits biens; » les Daiguebonne sc
réservant au reste le droit d’intervenir dans l’instance.
L e sieur Philippe-Philibert de Grandsaigne, armé de cette
pièce, exerça bientôt dos poursuites contre Clément Martin qu’avec
raison il regardait comme seul héritier de son père : il demanda
contre lui le paiement de la somme de 4000 fr. et conclut même à
c e qu’il fut tenu de lui ouvrir partage du domaine du Foulhoux
comme en étant co-propriétaire du chef des Daiguebonne : il fit
nieme intervenir ce dernier pour soutenir sa prétention , et c’est
( 1 ) y oyez page a3 du 1 « m ém oire Ituilel.
�(
4
)
spécialement cnlrc de Grandsaigne , Daiguebonne et Clcment
Martin qu’a été rendue la sentence du 7 juillet 1753.
est vrai que
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin figuraient aussi dans celle
11
sentence, mais sans aucune espèce d’intérêt ; ils avaient en effet
répudié à la succession de Pierre Martin leur père; Grandsaigne
ne leur demandait rien, il ne contestait pas même leur répudia
tion : Philippe-Genest et Jeanne Marie ne jouaient donc dans toute
celte procédure qu’un rôle purement passif ; ils durent dès-lors
se borner à un acte de produit et ne point s’inquiéter de l’issue de
contestations auxquelles ils étaient entièrement étrangers.
Aussi la sentence de 175 3 , après avoir pris en considération la
renonciation de Philippe-Genest et de Jeanne M arie, ci avoir con
damné Clément Martin , comme héritier de son p è r e , à payer à
Grandsaigne les 4000 fr. montant de l’obligation de 1720, permetelle à ce dernier de se mettre en possession et de jouir des im
meubles compris en l’arrêt de délaissem ent de 1742 , provenant
des Jolivet, si mieux n’aime les faire saisir et v e n d re ;—
et même
« des biens propres dudit Martin : plus bas, la même sentence
statuantsur la demande en partage des Daiguebonne, et après avoir
fixé à un quart l’amendement de ces derniers dans les biens délaissés
par l ’arrêt de 1742 , 11e les admet néanmoins au partage qu’autant
qu’ils feront raison à Clément Martin des sommes que ce dernier
justifiera avoir payées pourG cnès Treilhe leur auteur, elpar exprès
celle de 2000 fr. faisant moitié des 4000 fr. « au paiement de la« quelle Clément Martin est ci-dessus condamne envers Grand
ir
saigne, et ce avec intérêts. »
Cette sentence décharge CléinentMartin d’une demande de 21
25 fr.
fournis par Grandsaigne pour le paiement de la dot moniale des
deux religieuses, et cela parce que, le 11 août itÔ o , il y avait eu
traité sur ce chef, Cette circonstance se réunit aux autres pour faire
apprécier l’impossibilité où avait toujours été Clément Martin de
payer les légitimes ou droils héréditaires de scs frère et sœur.
La sentence de 1753 n’envoyait pas le sieur de Grandsaigne
en possession du domaine du Foulhoux nominativement; elle sc
bornait à dire qu’il pourrait jouir des immeubles compris eu l’arrêt
�de délaissement de 1742 , et des biens propres de Clément M artin,
si mieux il n’aimait les faire vendre; o r, parmi ces immeubles exis
taient quatre maisons sises à Thiers; et parmi les biens propres dudit
Martin se trouvaient des moulins et des usines dont la valeur était
bien plus que suffisante pour assurer le paiement de la créance de
Grandsaigne si ce dernier eût eu la loyauté de restreindre ses
poursuites à ce que ses intérêts pouvaient rigoureusement exiger.
Mais il avait d’autres vues; il fallait que la famille Martin fût dé
pouillée du domaine du Foulhoux, et c’est dans ce sens que le sieur
Grandsaigne chercha à utiliser la sentence de 1755.
Comme on l’a déjà fait rem arquer, Philippe-Genest et Jeanne
Marie Martin n’avaient rien reçu de la succession de leur mère;
leurs droits se montaient cependant àplus de 20,000 fr. et Clément,
leur frère, était tellement épuisé par le paiement de la légitime
d’Annet et des dots moniales de Jeanne-Marie et Marguerite
Treilhe, ses tantes religieuses ( 1 ) , qu’il n’avait pu p ayer la créance
Grandsaigne.
fallut donc que Clément oürît, a titre de partage
verbal, le domaine du Foulhoux à son frère et à sa sœ ur, et ceux-
11
ci l’acceptèrent quoiqu’ils eussent bien préféré être payés des
sommes qui leur étaient dues.
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin jouissaient donc comme
propriétaires du domaine du Foulhoux , lorsque le sieur de Grand
saigne, après divers actes de procédures dirigées contre Clément,
s’y présenta lui-meme pour s’en mettre en possession.
3
Cette tentative du sieur Grandsaigne eut lieu le i août 175^;
elle est constatée par un procès-verbal qu’il est important d’analyser.
Philippe-Genest Martin était au Foulhoux ; il déclara « que lui et
« sa sœur étaient en possession depuis long-tems de ce dom aine , et
« que l’un et l’autre en jouissaient à titre de vrais maîtres et proprié
« taires. »
11 ajouta
que le sieur de Grandsaigne, n’ayant aucun titre
Contre eux , pas même la sentence de 1 755 qui leur était étrangère,
ne pouvait les dépouiller d’une possession établie par le fait même
de son habitation actuelle et par un bail consenti par lui cl sa s a u r
( 1 ) \ oy<j2 la t e n t e o c e du 7 j u ill e t 1753.
�au nomme Solicr , bail qui remontait au 1 1 novembre 17 0 3 ’ quoi
qu'il n’eût été enregistré que le 29 août, veille de la tentative de
la prise de possession.
Il esta remarquer que le sieur de Grandsaigne ne contesta posi
tivement aucun de ces faits; qu’il reconnut que Jeanne Treilhe avait
joui du Foulhoux ; que Philippe-Genest et sa soeur avaient bien
pu continuer cette jouissance , mais qu’elle n’avait eu lieu qu’à son
préjudice, puisque Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin avaient
refusé de lui accorder le partage auquel il avait droit tant du chef
de Pierre Martin , comme cédataire de la branche de Lafoulhouse,
que de celui de la branche Daiguebonne qui représentait encore en
partie Marguerite T reilh e, alors décédée sans postérité. Grandsaigne
soutint, d’ailleurs , que la date récente du bail s’opposait à ce qu’il
produisît aucun effet.
Philippe-Genest Martin , après avoir accepté l’aveu fait par le
sieur de Grandsaigne que Jeanne Treilhe avait joui du domaine du
Foulhoux, répliqua que sa jouissance personnelle et celle de JeanneMarie , sa sœ ur, n’étaient que la suite de celle de leur mère dont ils
étaient héritiers, et qui avait laissé, d’ailleurs, d’autres propriétés
que le domaine du ro u lh o u x , biens qui étaient plus que suifisans
pour tenir lieu a Clément de sa portion héréditaire, et de celle d’Annet Martin dont il avait payé la légitime; qu’au reste, leur possession
était ancienne, et que si Clément avait résidé quelquefois au F o u l
houx, il n’y était venu que comme leur régisseur.
Les choses eu restèrent là; le sieu r de Grandsaigne se retira et
Philippe-Genest Martin et sa sœur conservèrent la possession du
domaine du Foulhoux.
I c i, les prétentions du sieur de Grandsaigne se développent net
tement : que voulait-il ? ayant la sentence de 1755 il avait tenté de
sc faire attribuer le domaine du Foulhoux à titre de propriétaire
ou au moins de copropriétaire ; sa demande (ut repoussée et il n ob
tint , comme créancier de C lém en t, qu’un simple envoi en posses
sion pignorative. Grandsaigne s’empressa alors de mettre cette sen
tence à exécution , espérant bien que s’il parvenait à mettre un ¡tied
dans le Foulhoux il en aurait bientôt quatre ; mais de Grand-
�saigne, trouvant dans l’opposition de Philippe-Genest et de JeanneMarie Martin un obstacle inattendu, ne s’occupa plus des droits de
Clément Martin, sou débiteur, à la propriété du Foulhoux : il oublia •
même la teneur expresse de la sentence de 175 3 , en vertu de la
quelle il pouvait agir: il ne critiqua pas la possession de PhilippeGenest et de sa sœur comme étant contraire au droit de propriété
de Clément Martin dont il était créancier; mais il attaqua cette pos
session comme lui étant personnellement préjudiciable, et mettant
obstacle à l’exercice de son droit de propriété. En un m o l, de
Grandsaigne n’agit point, lors de sa tentative de prise de posses
sion , comme un créancier, mais bien comme un maître qui vient
réclamer sa propriété.
Aussi le sieur Grandsaigne créa-t-il immédiatement le procès le
plus compliqué et le plus monstrueux , par lequel il essaya de rem ellre en question tout ce qui avait été jugé jusqu’alors. Dans
celte nouvelle instance , Grandsaigne figura d’abord comme dona
taire de la dame Desholière une des créancières de Clément et Mar
guerite Jolivet expropriées par l’arrêt de 17 4 . 2 , et de ce chef il dedemanda que ce qui resterait du prix de l’estimation de ccs im
meubles, après la créance Treilhe payée, lui fut attribué. D ’un autre
cô té, se prétendant subrogé aux droits de la branche de Lafoulhouse, e t, comme tel, représentant en partie Marguerite Treilhe
décédée sans postérité; et encore en qualité de cessionnaire d e là
branche D aignebonne, le sieur Grandsaigne demandait que , con
formément à l’arrêt de 174 2 , les immeubles délaissés à la famille
Treilhe lui appartinssent en toute propriété pour le prix de l’esti
mation; cl pour que la chose jugée par l’arrêt de 1742 devînt
elle-même la matière d’un nouveau litige, le sieur Grandsaigne lit
intervenir Anne Jolivet fille de Clément exproprié, et lui (il. soute
nir que cet arrêt ne contenait, en faveur de la famille T reilh e,
qu’un simple envoi en possession pignorative. Ainsi on a eu raison de
dire que Grandsaigne remettait tout en question; et la sentence de
1755, etnième l’arrêt de 1742, et tout cela dans le but de s’emparer,
comme propriétaire , du domaine du Foulhoux.
E u examinant la p ro céd u re, 011 s’assure que Clément Martin y
�prit une part assez peu active; il avait délaisse à Philippe-Genest et
à Jeanne-Marie Martin le domaine du Foulhoux à titre de partage ;
, aussi leur laissa-t-il le soin de se défendre. Ceux-ci fournirent diffé
rentes requêtes, et notamment, les 10 mai et 24 juillet 175 4 , dans
lesquelles ils opposèrent au sieur Grandsaigne que le domaine du
Foulhoux leur avait été délaisse pour les remplir de leur portion
héréditaire dans la succession m atern elle, et combattirent, au
reste, les prétentions que ce dernier élevait, soit directement, soit
indirectem ent, sous le nom d’Anne Jolivet, à la propriété du do
maine du Foulhoux.
Clément Martin ne présenta lui-même qu'une seule requête ; et il
y déclara que le domaine du Foulhoux appartenait réellement à
Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin; ce fait est prouvé par
autre requête du 12 août 1755 produite au procès et signifiée à
M° Jurien, procureur de Clément M artin, dans laquelle PhilippeGenest et Jeanne-Marie disent « que s’ils donnent la présente re«■quête contre Clément Martin, c’est uniquement pour demander acte
« de l’acceptation qu’ils font de la reconnaissance par lui faite , en
(f l’instance, que le domaine duFoulhoux leur est échu, et qu’il leur
« a Ol e par lui délaissé pour leur tenir lieu de leur portion hérédi«■taire dans la succession de leur mère. » Les conclusions de cette
requête sont littéralement conformes à l’exposé.
Cette reconnaissance faite par Clément Martin d’un partage v e r
bal existant entre lui et ses frère et sœur fut bien connue du sieur
Grandsaigne qui, après en avoir consigné l’aveu le plus exprès dans
une requête du 26 août 17 5 5 , chercha à on paralyser l’effet en sou
tenant que ce partage n’était pas valab le, parce qu’il contenait de la
part de Clément Martin délaissem ent du bien d ’autrui. Ce n’est
donc point l'existence du partage en lui-même que le sieur de
Grandsaigne conteste; il la reconnaît, au contraire, de la manière la
plus form elle; c’est seulement la validité de ce partage qu’il attaque,
et pourquoi > parce qu’au préjudice de Clément Martin il se prétend
propriétaire du !■oulhoux. Mais s’il est jamais reconnu, et aujourd’hui
la chose est irrévocablement jugée par l’arrêt de 18^2 , que la p ro
priété de ce domaine n’a jamais appartenu à Grandsaigne, qu’elle a
�(
r9 )
au contraire toujours résidé sur la téte de la famille M artin, que
restera-t-il de cette requête, si ce n’est la reconnaissance formelle
faite par Grandsaigne que , par suite du partage fait avec Clément
propriétaire du F oulhoux, ce domaine est devenu la propriété ex
clusive de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie Martin.
On comprend, dès-lors, que Clém ent, après sa déclaration ainsi
formellement acceptée par ses frère et sœur et reconnue par le sieur
Grandsaigne lui-même , devenait étranger au procès ; qu’il dut,
en conséquence, se laisser juger par forclusion , sauf au sieur de
Grandsaigne, son créancier, à utiliser, comme il l'entendrait, le
système qu’il venait de créer.
A la suite de cette procédure est intervenue la sentence du
3 sep
tembre 175 6 , qui ordonne d’abord l’exécution de l’arrêt de 174^9
et, en conséquence, l’estimation tant du domaine du Foulhoux, que
des quatre maisons de Thiers. Cette sentence contient ensuite la
disposition suivante qui, étant capitale dans la cause, doit être tex
tuellement reproduite; et « jusqu’après ladite estimation avons sursis
« à faire droit sur la contestation des parties; et cependant par pro« vision, permettons à Grandsaigne de se mettre en possession du
« domaine du Foulhoux... P o u r en jo u ir conformément audit ar-
a r ê t, et à la sentence du 7 ju illet 1755 •• a
la
charge
par lui de
« donner caution jusqu’à concurrence des jouissances qu’il p ern cevra ¿1 L 'A V E N IR , en payant par l u i , toutefois, chaque année
« de sa jouissance, à chacun de Philippe-Genest et la femme Cons« tant, 100 fr. jusqu’en fin de cause. j>
On ne peut se dispenser de s’arrêter ici pour fixer le véritable
sens de cette sentence et apprécier les effets qu elle devaitproduireLa première observation qui se présente est que la sentence de
1756 n’envoie le sieur Grandsaigne en possession du domaine
du Foulhoux que pour en jouir conformément à la sentence de
1755, c’est-à-dire, à titre pignoratif. Celle sentence, comme tous
les autres actes, établissait donc entre les intéressés des droits el des
devoirs réciproques. Le sieur de Grandsaigne , créancier , avait
bien le droit de posséder, mais il ne pouvait le faire que pour les
propriétaires • Philippe-G enest et Jeanne-M arie Martin devaient
�( 20 )
bien tie leur cote souiTVir la jouissance du créancier Grandsaigne
mais ils conservaient le droit, comme propriétaires , de lui opposer
constamment, en tout tems et quelque longue que fût sa possession,
que, n’ayant possédé que pour eux et à titre précaire, il ne pouvait
prescrire le domaine du Foulhoux contre les propriétaires (C C . art.
2256 . 2237).
On fait ensuite la remarque que la sentence de 1753 a reçu une
modification bien impor ante par les dispositions de la sentence de
17
56 .
Quel est le sens et l’étendue de cette modification? la pre
mière sentence accordait au sieur de Grandsaigne la jouissance déJinitive du domaine du F o u lh o u x, jusqu’au paiement intégral de sa,
créance; celle de 1756 ne lui accorde cette même jouissance que
par provision et transmet conséquemmentdèsrinstantmème et défini
tivement aux personnes qu’elle reconnaît pour propriétaires du
Foulhoux, une portion des fruits représentée parla provision de 200 fr.
en astreignant le sieur de G randsaigne, détenteur à titre précaire
de ce domaine, à fournir caution pour les jouissances qu’il percevra
à l'avenir. Dans les intérêts de qui cette provision et le cautionne
ment sont-ils établis? en faveur de Phiüppe-Genest et de Jeanne.
Marie Martin : donc suivant l’esprit et le texte môme de cette sen
tence ces deux personnes sont les propriétaires du domaine du Foul
houx ; elle les considère au moins comme ayant à cette propriété
les titres les plus apparens elles mieux établis.
5
L a sentence de 17 G , en assujettissant de Grandsaigne à donner
caution pour les jouissances à v e n ir , conduit à un résultat bien im
portant, c’est que l’obligation de restituer ces jouissances , à quel
que époque et quelles que soient d’ailleurs les personnes qui les
aient perçues, remonte à Grandsaigne lui-méme et affectent toute sa
succession.
Effectivement : l’obligation de donner caution suppose nécessai
rement une obligation personnelle et principale à laquelle elle sert
d’appui (C C . Art. 2012); or, sur qui reposait cette obligation prin
cipale cl préexistante au cautionnement? bien évidemment sur le
sieur Grandsaigne dont elle affectait les biens par une hypothèque
judiciaire (C C . 2 1 2 3 ). Mais quelle était la nature de cette obliga
�tio n ? .... conditionnelle , puisque d’une part elle dépendait de la
jouissance qne le sieur de Grandsaigne ferait du Foulhoux , et que
de l’autre elle était suspendue jusqu’au moment où le propriétaire
de ce domaine serait reconnu.
La première de ces conditions a été immédiatement accom plie;
mais la seconde n’a pu l’être qu’en i 832 : dès-lors , jusqu’à cette
dernière époque, la prescription n’a pas couru puisqu’elle ne
s’acquiert point «à l’égard d’une créance qui dépend d’une condition,
jusqu’à ce que la condition arrive » (C C . 2257).
Mais en i
832 , ces
deux conditions ont été pleinement accom
plies; Grandsaigne ou ses héritiers avaient à cette époque effecti
vement joui du domaine du F oulhoux, pendant 76 ans; l’arrêt avait
repoussé toutes leurs prétentions à la propriété de ce dom aine, et
reconnu les droits de Philippc-Genest et de Jeanne-Marie Martin;
l’obligation de Grandsaigne devenait donc dès cet instant complète
et définitive , et devait être exécutée dans toutes ses conséquences.
O r quel est le principal effet de la condition accomplie? « elle a un
effet rétroactif au jour auquel l’engagement a été contracté »
(C . 1 1 7 9 ); donc l’obligation de Grandsaigne remonte à la sentence
de 1766 qui la lui a imposée , et c ’est de celte époque qu’elle doit
produire son effet.
Ces idées simples et d’ailleurs incontestables en principe détrui
sent déjà plusieurs objections présentées cependant avec beaucoup
d’assurance dans les mémoires du sieur Dumiral.
Q u ’importe en effet que dans le deuxième mémoire, pages 14 et
suivantes, on dise «• qu’aucune dette ne pesait sur la succession du
« sieur Grandsaigne, » quand il est démontré qu’une obligation for
melle et conditionnelle atteignait sa personne et ses biens et q u e >
dès l’instant de l’accomplissement de lu condition, elle pesait avec lu
même force sur ses héritiers?
Q ue signifie ce m oyen de prescription si souvent répété et que
1 on retrouve à la p«igc 16 du deuxième m ém oire, si 011 lui oppose
50
les sentences de 1753 et 17
y qui n’accordent à Grandsaigne
l*ne jouissance pignorative, ctl’arrèlde i a, quia définitivement
juge qu il u avait possédé le Foulhoux qu’à titre précaire ; si enfin ,
83
�( 22
)
en se fixant sur la nature de l’obligation imposée au sieur de Grand
saigne, on s’assure qu’elle est restée suspendue jusqu’en 1832, épo
que de l’accomplissement de la condition, et conséquemment seule
date oii la prescription ait pu légalement commencer ?
Enfin quelle puissance pourrait avoir l’assertion consignée aux
pages 20 et suivantes du i #r mémoire des sieurs Dumiral, «que les
(( droits et créances résultant de la sentence de 1756 ne peuvent
« être invoqués par Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin, » si, en
la rapprochant de cette sentence elle-même , on est oblige de re
connaître que, dans les intérêts de Philippe-Genest et Jeanne-Marie
Martin , elle a rendu provisoire la jouissance définitive que la sen
tence de 1753 transmettait au sieur de Grandsaigne du domaine du
F oulhoux; qu’elle lui a d’ailleurs imposé, relativement à la conser
vation et à la restitution des jouissances , des obligations strictes,
et dont les puînés Martin , reconnus ou présumés propriétaires du
Foulhoux , ont aujourd’hui seuls le droit de se prévaloir.
La continuation de l’exposé des faits ajoutera par leur dévelop
pement une nouvelle force à ces résultats.
La sentence de 1756 semblait paralysée par un appel interjeté
par Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin; Clément s’était luimême pourvu contre la sentence de 1 755 , mais le sieur de Grand
saigne dédaignant ces obstacles ne voulut pas moins se mettre en
possession du Foulhoux.
L e 20 octobre 1756 , le sieur de Grandsaigne présenta pour sa
caution M* G o yo n son procureur; Philippe-Genest et JeanneMarie Martin s’opposèrent à sa réception; e t, entr’autres m otifs,
k parce que la sentence de 1756 était une suite de celle de 1755, et
v que Clément Martin avait obtenu contre cette dernière sentence,
u et sous la date du a, un arrêt de défenses qui était rapporté. »—L e procès-verbal constate que le
procureur répondit « que
5
la
« sentence de 1756 n'était pas une suite de celle de 17 ; qu’elles
11 n’avaient rien de commun ; __ que celle de 1 7 G prononce sur
u différentes contestations qui se sont élevées entre le sieur Grand
5
ie saigne, Philippe-Genest Martin et les époux Constant, quelle ne
« prononce rien contre Clément Martin; que l’arrêt de défenses
�0 3
)
cr obtenu par ce dernier contre la sentence de 1703 ne peut point
« arrêter l’exécution de celle de 1766 qui concerne s e u l e m e n t les« dits P hilip p e-G enest et Jeanne-M arie Martin. » L e procureur
du sieur Grandsaigne, pour faire cesser les difficultés qui s’éle
vaient sur la solvabilité de la caution, fait oflre do la part de celui-ci
de faire ses soumissions conjointement et solidairement avec elle,
ce qui est ordonné par le juge. Effectivement, le 22 du même mois,
cette soumission solidaire a eu lieu au greffe de la châtellenie de
Thiers de la part du sieur de Grandsaigne et de sa caution.
Ici se rencontrent deux circonstances qu’il faut retenir : d’abord
le sieur de Grandsaigne reconnaît que la sentence de 1756 était
étrangère à Clément et intéressait exclusivement Philippe-Genest
et Jeanne-Marie Martin ; ensuite la soumission solidaire que le
sieur de Grandsaigne a fait avec sa caution servirait non seule
ment de nouvelle preuve à l’obligation personnelle et hypothécaire
qui pèse sur le sieur de G ran d saign e et sa succession ,mais mémo
serait au besom seule suffisante pour la constituer.
L e sieur de Grandsaigne , après avoir ainsi satisfait à la principale
charge qui lui était imposée parla sentence de 1756, donna sa pro
curation à M. Simon Sauret, praticien à R iom , q u i, assisté d’uu
notaire, et agissant en vertu de la sentence de 17
a
3 octobre,
56 , se présenta , 1«
au domaine du Foulhoux, à l’effet de s’en mettre en
possession au nom du sieur de Grandsaigne, et en jouir conformé
ment à l’arrêt de 1742 et à la sentence de 1756. 11 faut analyser ce
procès-verbal avec exactitude.
L e fondé de pouvoir du sieur de Grandsaigne requiert le notaire
de le mettre en possession du domaine du F oulhoux, et de faire in
ventaire des meubles, fourrages , bestiaux, cuves et vendange qui
se trouveront dans les bâtimens.
Le notaire constate qu’il a trouvé au Foulhoux Clément Martin
qui « a dit y être par ordre de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie
v Martin scs frère et sœ ur, pour y iaire des reparations, et surveil* 1er les fermiers qui ont levé la récolte de l’année présente. »
Clément déclare ensuite qu’il existe un arrêt de défenses contre la
sentence de 17 5 3 , que de Grandsaigne présente comme son titre
�fondamental; crue, dès-lors, ccite sentence ne peut être exécutée
provisoirement, pas plus que celle de 17 , contre ses frère et sœur
56
dont il est le garant; il déclare que les fermiers entendent jouir
jusqu'à la fin de leur bail; et ajoute enfin que ses frère et sœur ont
obtenu un arrêt de défenses contre la sentence de in
56 .
Quant à la maison de maître, ClémentMartin oppose que la grande
quantité de mobilier qui y est contenu la rend impossible à éva
cuer; qu’il n’est point partie capable pour donner de consentement
à cet égard; qu’il faudrait appeler ses frère et sœur auxquels il n’a
point été donné assignation; que dès-lors c ’est au moins le cas
d’accorder un délai suffisant à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie
Martin, pour qu'ils puissent se rendre de leur domicile au Foulhoux,
distans l’un de l’autre de plus de trente lieues.
En conséquence, Clément Martin forme opposition , soit de son
chef, soit de celui de ses frere et sœur, à la mise en possession et à
l’inventaire requis par le fondé de pouvoir du sieur Grand
saigne.
A celte opposition ainsi m otivée, le fondé de pouvoir du sieur de
Grandsaigne répondit, d’abord, qu’il employait pour répliques
celles faites par son mandant à la réponse de Philippe-Genest et
Jeanne-Marie M artin, et consignées dans le procès-verbal de ré
ception de caution, du 20 du même mois, qui a déjà été analysé; il
ajouta que la sentence du
5
septembre 1756 permet au sieur de
Grandsaigne de prendre possession du domaine du F ou lh ou x,
nonobstant toute opposition contraire; «» que d’ailleurs, M. C lé—
« ment Marlin n’a rien à prétendre dans ledit domaine, ainsi qu’il l’a
v déclaré dans l’instance sur laquelle la sentence du 5 septembre est
« intervenue, et qu’il était échu au lot dudit Philippe-Genest et
« Jeanne-Marie Martin. »
Clément se borna dans sa réplique à soutenir que, n'étant point
partie cap able, il refusait d’assister à la description du mobilier;
protestant, au reste, dans l’intérêt de ses frère et sœur qui n’avaient
point été appelés, de nullité contre tout ce qui pourrait être fait.
Le fonde de pouvoir du sieur Grandsaigne se nul immédiatement
et successivement en possession réelle de chacun des bàtiniens ,
�prés, terres, jardins , pàquiers, e lc... composant le domaine du
Foulhoux; et sur sa réquisition, le notaire lui donna acte de cette
mise en possession qui fut accompagnée de l'accomplissement de
toutes les formalités alors exigées ou usitées.
L e notaire procéda ensuite à l’inventaire et à la description de
tout le mobilier qui se trouvait dans le domaine du Foulhoux ; mais
comme il s’agissait de le faire déplacer, Clément Martin se présenta
de nouveau, et, sans rien approuver et seulement pour empêcher le
dépérissement de ce mobilier, il demanda un délai de trois mois pour
que Philippe-Genest et Jeanne-Marie fussent avertis , et pussent
faire procéder à ce déplacement; Clément consentit même à ce
que ce mobilier demeurât à sa charge pendant ce délai, sans que
dans aucun cas il put peser aucune responsabilité contre de Grandsaigne.
Rien n’est aussi significatif que ce proccs-verbal qui est revêtu de
la signature de toutes les parties : d’une part, Clément Martin y
confirme l’aveu qu’il avait déjà fait dans la procédure de l’existence
d ’un partage verbal; aussi reconnaît-il expressément n’ être au do
maine du Foulhoux que comme m andataire de ses fr è r e et sœ ur;
Sju’i l j est par leur ordre et dans leurs intérêts ; que le m obilier
q u i se trouve dans ce domaine leur appartient ; qu’ enfin il est
leu r gérant. Cetltc déclaration signée de Clément Martin fait né
cessairement cesser l’objection présentée par les sieurs D um iral, et
consistant à soutenir que M® Consiant ne rapporte pas la preuve que
Clément Martin ait reconnu l’existence de copartage. ( V . leur i #t
m ém oire, page 22. ) Le fondé de pouvoirs du sieur de Grandsaigne d it , de son c o té , à Clément Martin qu’il n’est pas partie ca
pable pour s’opposer à la prise de possession du Foulhoux, et
pourquoi? parce qu’il a déclaré lui-même que ce domaine apparte
nait à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin auxquels il était
échu , et qui l’avaient reçu par voie de partage; et si Clément ré
plique à ce fondé de pouvoir , c ’est pour se réunir à lu i, et pour
reconnaître sa propre incapacité.
Voilà donc une réunion d’aveux réciproquement faits et acceptés
par Clément M artin, d’une p a rt, et le fondé de pouvoirs du sieur
4
�(
26
)
de Grandsaigne, d’autre; ces aveux et ces acceptations portent sur
le même fait cl l’établissent; ce fait n’est autre que l’existence d’un
partage ayant eu lieu en 1755 , entre Clément Martin et ses frère
et sœ ur, et par suite duquel la propriété du Foulhoux reposerait
irrévocablement sur la tête de ces derniers.
Mais ces aveux acquièrent une puissance tout-à-fait décisive, si
l ’on considère qu’ils n’ont été faits et acceptés parle sieur de Grand
saigne que dans son intérêt; que ce dernier en a immédiatement
profité pour prendre possession du Foulhoux; si surtout l’on fait la
remarque que cette mise en possession a eu lieu en vertu de la sen
tence de 1756, sentence qui, suivant le sieur de Grandsaigne luimême,
CO N C E R N AI T S E ULE ME NT P m L i P P E - G E N E S T ET J E A N N E - M A R I E
. ( V. suprà procès-verbal du 20 octobre 1756. )
D ès-lors, quels sont l es résultats qui se présentent? relativement
au partage qui a transmis la propriété du domaine du Foulhoux à
M
artin
Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin , il y a eu, pendant la
procédure qui a préparé la sentence de 1756 , aveu judiciaire de
la part de Clément; les frère et sœur de ce dernier ont accepté cet
aveu; de son côté, de Grandsaigne a connu*l’aveu et l’acceptation;
il a donc SU qu’il s’etait formé un contrat j u d i c i a i r e entre les frères et
sœur Martin : mais qu’cst-il ensuite arrivé ? lors du procès-verbal
de prise de possession, le sieur de Grandsaigne s’est approprié ce
contrat et y. est devenu partie. On peut donc aujourd’hui lui
opposer ce même contrat, avec toute la puissance que doit avoir
contre lui un acte qu’ il s’est ainsi rendu personnel.
Quelle est l’objection présentée par les sieurs Dumiral ? ils se bor
nent;» soutenir que le fondé de procuration n’avait pas le pouvoir de
faire la déclaration contenue au procès-verbal. ( V . i«r mémoire
peg. 7 ).
Faut-il répondre sérieusement à un moyen aussi léger? et d’abord,
si les faits reconnus, avoués ou acceptés parle mandataire , n’étaient
pas réels, comment les aurait-il devinés? il fallait nocessairenientque
ces faits lui fussent enseignés par quelques dominons ; o r, quels
pouvaient ils être, si ce n’est le dossier contenant les renseignemens
seuls propres ù expliquer et à compléter le mandat. Le fondé do
�(
27
)
pouvoir a-t-il (lit autre chose que ce qui lui était enseigné par les
pièces du dossier? pour toute réponse à celte question, que l’ou
parcoure la requête du 12 août 1^55 signifiée par Philippe-Genest
et Jeanne-Marie Martin j celle du 26 du même m ois, ou le sieur de
Grandsaigne reconnaît que Clément Martin a avoué l’existence du
partage ; ensuite, que l’on se pénètre bien de l’esprit de la sentence
de 1756 , du véritable sens des expressions consignées au procèsverbal de réception de caution, et l’on demeurera convaincu que le
fondé de pouvoir du sieur de Grandsaigne ne pouvait, lors du pro
cès-verbal de prise de possession, agir autrement qu’il ne l’a fait,
et dire, au moins raisonnablement, autre chose que ce qu’il a dit.
D ’ailleurs, le sieur de Grandsaigne n’a jamais protesté contre les
dires de son mandataire ; et comment aurait-il pu le faire lui qui
prenait et conservait la possession du Foulhoux en vertu de co
procès-verbal !
Les désirs du sieur de Grandsaigne devaient être satisfaits ; il élan
en possession du Foulhoux et avait même obtenu, le iq jan
vier 175 8 , un arrêt q u i, quant à la jouissance par provision ,
fait main levée des défenses accordées à Philippe-Genest et à JeanneMarie Martin par autre arrêt du 22 octobre 1756, rendu sur l’appel
interjeté delà sentence du
5 septembre précédent.
Cet arrêt de 1758 ne changeait rien à la position du sieur de
Grandsaigne qui jouissait réellement du Foulhoux depuis 17 5 6 ;
aussi n’eut-il qu’à continuer cette possession sans recourir à un nou
vel acte (1).
O11 a remarqué dans l’acte du
23
octobre 1756 que la mise en
(1) O n sait b ie n q u e, con tre l ' é v id e n c e <lca faits qui font r e m o n t e r la prise de possession du
si eu r de G r a n d s a ig n e au a
3 oct o b re
1756,
le» sieu rs Dura iral on t essayé de ta fixer à une
é p o q u e un peu pos té ri eu re « l ’ arrét de 17 5 8; ils n ’ on t a uc un é l é m e n t pou r ce la ; mais c é
d a n t malgré eux aux traditions qu’ ils on t pu t r o u v e r dan s le u r d o s s ie r, ils on t v ou lu faire
" n essai , et voir s’ d n ’ éch app erait pas au si eu r C o n s ta n t q u elqu e s exp re ss ions qu ’ ils pour
r a ie n t ch a n g e r en a v e u , ou m êm e se faire de son s ile n ce un m o y e n q ui leur pe rm ît d ’ uti
lis er ce tte e rre u r de fait. C ’ est p o u r é vi ter tou te in te rp ré ta ti on q> i po urr ait lui être préju
d ic ia b le , que M e C o n s t a n t d é c la r e fo r m e lle m e n t m a in t e n i r en fait que la mise en possession
Meut de O rnndsaigne a ré e lle m e n t eu l i e u , le a 3 octo b re I " 5 6 , et que depuis cette
] 1 ie la jouissance du d o m aine du i'o u llio u * , de la p a rt de ce d e r n ie r , n ’a pa» c e t t i.
�( 28 )
possession du sieur de Grandsaigne, quant aux immeubles ruraux
de toute nature, était complète; que si celle de la maison de maître
n’avait pas eu lieu immédiatement, c’est parce qu’elle était garnie
d’un riche mobilier appartenant àPhilippe-Gcnest età Jeanne-Marie
Martin , mobilier que ceux-ci devaient retirer dans l’espace de trois
mois. Toutefois Philippe-Genest et Jeanne-Marie n’exécutèrent point
cette espèce de convention qui avait eu lieu entre Clément Martin
leur mandataire et le sieur de Grandsaigne; ils avaient effective
ment à craindre qu’on ne leur opposât un pareil fait
comme un
acquiescement à la sentence de 175 6 , contre laquelle ils s’étaient
pourvus par appel.
Cependant ce mobilier devait exciter l’avidité du sieur de Grand
saigne ; une maison richement meublée devait flatter ses goûts;
mais comment s’em parer, à titre de propriété, d’objets qu’il avait
lui-même reconnus appartenir à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie
Martin; comment même les faire entrer dans sa possession, lorsque
la sentence de 1756 et l’arrêt de 1758 réduisaient sa jouissance pi
gnorative aux immeubles composant le domaine du Foulhoux ?...
Ces obstacles pouvaient arrêter un homme ordinaire ; mais le génie
du sieur de Grandsaigne devait les vaincre.
Q u ’était Clément Martin respectivement à ce mobilier? d’abord
il n'en était pas le propriétaire ; cela est prouvé par le procèsverbal du
25 octobre
5
17 G, et par le fait qu’il ne l’a point retiré
immédiatement, quoique cela lui fût facile puisqu’il avait son do
micile à T h iers, ville toute voisine du domaine du Foulhoux : il en
était donc le gardien, c ’est ce qui est encore établi par le procèsverbal du
octobre 1756 où Clément Martin et le fondé de pou
25
voir du sieur de Grandsaigne se réunissent pour reconnaître ce fait;
et dans les intérêts de qui Clément était-il g a rd ien , si ce n’est pour
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin que Clément et le sieur
de Grandsaigne réunis reconnaissaient comme propriétaires de ce
mobilier ?
Comment le sieur de Grandsaigne intervertira-t-il dans la per
sonne de Clément Martin les qualités qu’il lui avait reconnues lui—
même? H iaut le suivre dans sa marche.
�L ’arrêt obtenu par le sieur de Grandsaigne esi du 19 janvier;
jusque-là, comme on l’a v u , Philippe-Genest et Jeanne-Marie
Martin avaient eu intérêt à ne pas retirer leur mobilier : on sent
qu’à l’epoque ou 1 on est arrivé et au milieu de l’hiver l’enlèvement
de ce mobilier devenait impossible, soit par la distance de trente
lieues qui séparent le domaine du Foulhoux du Malzieux (L o z è re ),
soit par la difficulté des transports sur des ro u les, dans ce tem s,
impraticables.
L e sieur de Grandsaigne a su utiliser toutes ces difficultés et les
faire servir à assurer le succès de ses combinaisons.
Dans le courant du mois de février 1758 , de Grandsaigne de
manda à Clément Martin la remise des clefs de la maison de maître
dont ce dernier était nanti comme dépositaire du m obilier, le me
naçant, en cas de refus, de procéder par voie de fracture des portes
et enlèvement des serrures.
Clément Martin 11e pouvait enlever en mobilier dont il était
cependant seul dépositaire responsable , mais il dut croire à la
réalité des menaces du sieur de Grandsaigne et à leur exécution
immédiate de la part d’un homme aussi peu bienveillant et que le
procès-verbal du
25 octobre 1756 mettait d’ailleurs à l’abri de toutes
recherches. On conçoit donc que Clément Martin, dans son intérêt
et dans celui de ses frère et sœ ur, propriétaires du m obilier, ait
demandé la désignation d’un local de la maison pour l’y déposer,
et un délai suffisant pour le retirer; mais l’on concevrait plus dif
ficilement que le sieur de Grandsaigne se fut prêté à cet acte de
complaisance saus avoir une arrière-pensée.
Les faits attesteraient cependant que de Grandsaigne accéda à la
demande de Clément Martin.
Ce consentement donné par le sieur de Grandsaigne ne pouvait
devenir la matière d’un acte, sur-tout en faveur de ce dernier qui
n’était libéré d’aucune obligation préexistante , et vis-à-vis lequel
Clément Martin n’en contractait aucune nouvelle ; il est évident au
contraire que si ce consentement constituait une obligation, c’était
de 1;1 part du sieur de Grandsaigne envers Clément Martin; c’éia»'
donc celui-ci qui devait en recevoir la preuve écrite et signée par
�(
3o
)
de Grandsaigne ; et en supposant que l'acte contînt une convention
synallagmatique, il devait au moins être fait double et signé par les
deux parties.
Cependant que produisent aujourd’hui les sieurs Dumiral? un
billet du ig février 17
sous seing p rivé, non enregistré, écrit
58
d’une main étrangère et sur lequel se trouverait, dit-on, la signature
de Clément Martin : on peut le voir au mémoire des sieurs
D u m ira l, page 8.
Q u ’apprend-il? qu’une chambre de la maison du Foulhoux est
indiquée pour y mettre ce que Clément Martin appelle m e s m e u b l e s ;
que ces meubles seront retirés au mois de septembre prochain ,
c ’est-à-dire au bout de sept mois ; que Clément Martin gardera les
clefs de celte chambre, et que le sieur de Grandsaigne 11e sera en
aucune façon responsable de ces meubles : de manière que voilà
encore un délai accordé qui nous apprend que le mobilier apparte
nait à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin , puisque eux seuls
pouvaient en avoir besoin pour le retirer. Voilà une nouvelle sti
pulation qui inet le sieur de Grandsaigne à l’abri de toute garantie.
Un second billet du 21 février 1758, écrit de la main du sieur de
Grandsaigne et signé par Clément Martin , autorise le métayer à
remettre au sieur de Grandsaigne les clefs de la maison en réservant
à Clément la chambre désignée dans le billet du 19 ( Y . mémoire
Dum iral, page g ).
Ces deux pièces sont aujourd’hui produites pour la première fois
par les sieurs Dumiral qui ne craignent pas de devenir les conti
nuateurs et les metteurs en œuvre d’un système de spoliation dont
le sieur de Grandsaigne avait préparé les matériaux.
Mais de quelle importance peuvent être ces deux billets pure
ment sous seing p r iv é , qui conséquemment ne pourraient produire
eiîct qu’autant qu’ils seraient légalement reconnus? O r , qui peut
les reconnaître? Les héritiers ou ayant-cause de Clément Martin
seulement ( V . code c i v i l, 1
) ; mais le s i e u r Constant ne figure
dans la lla ire, et sur-tout dans celle des inscriptions où ces billets
sont produits, que comme héritier ou cédataire de Philippe-Genest
535
Çt
de Jeanne-Marie Martin. Ces billets ne peuvent donc lui être
�3
(
. )
opposés , et il pourrait se dispenser de les examiner. Les circons
tances déjà relevées prouvent d’ailleurs que ces deux billets n’ont
pu exister comme émanant de Clément Martin, et que, s’il était vrai
qu’il y eût apposé sa signature , ce ne serait que par une erreur et
par reflet d’un dol et d’une surprise pratiqués par Grandsaigne.
Eirectivemeut Clément Martin ne pouvait ni signer ni approuver le
premier billet dans le sens que l’on veut donner aux mots mes
meubles qui y sont contenus ; qui nous apprend cela ? les sieurs
Dumiral eux-mêmes , dont l’unique moyen repose sur l’idée qu’il
existait un système de fraude entre Clément Martin et ses frère et
sœur; que ces derniers n’étaient, lors de la sentence de 17
56 , autre
chose que les prête-noms de Clément. O r , comment concevra-t-ou
que Clément M artin, après des appels tout réccns de la sentence
de 1756, les eût lui-même anéantis d’un trait de plume , qu’il eut
reconnu , comme lui appartenant, ce qu’il avait si grand intérêt à
faire considérer comme la propriété de Philippe-Genest et JeanneMarie Martin?... c ’est ainsi qu'avec un peu d’attention ce qui d’abord
paraissait odieux devient encore ridicule.
II faut donc le reconnaître : si on peut attribuer les mots mes
m eubles à Clement M artin, on 11e peut au moins leur donner
d’autre sens que celui qui résulte et de la qualité de Clément et de
la loi elle-même.
O r , Clément n’en était pas le propriétaire; il ne les possédait
que comme dépositaire responsable de Philippe-Genest et JeanneMarie Martin : s’il en était possesseur, ce n’était donc qu’à titre
Pr<icaire; mais comme la possession en fait de meubles »vaut litre,
Clém ent, vis-à-vis un tiers, a pu écrire tues m eubles sans vouloir
et pouvoir par ces expressions nuire aux véritables propriétaires
pour lesquels il les possédait.
C ’en serait déjà assez sur ce moyen si les faits subséquens 11c
devaient bientôt le flétrir plus énergiquement.
Ou a vu que le billet de 1758 accordait à Philippe-Genest et à
Je anne-Marie Martin un délai de sept mois, c’est-à-dire jusqu’au
mois de septembre , pour retirer leur mobilier.
Mais cette époque était trop éloignée pour le sieur Grandsaigne
�qui avait conçu son plan de spoliation; il l’avait préparé par le billet
fabriqué ou surpris à Clément Martin : il devait donc lui tarder de
l’exécuter.
Que va-t-il faire? il connaissaiila demande que Jeanne Grenetias,
veuve de Clément Jolivet, avait formée , le Ier juillet 17 4 1 » contre
Pierre Martin alors bailliste judiciaire du domaine du Foulhoux;
cette demande était intervenue à la suite d’une sentence du 1 o avril
1739 que la Grenetias ayaitfait rendre contre Anne Jolivet, sa fille
m ineure, assistée de son curateur, et d’une vente qu’elle avait
obtenue de ces derniers, sous la date du i er octobre suivant, portant
sur quelques bestiaux et mobiliers se trouvant au domaine du Fou
lhoux et la plupart immeubles par destination.
La veuve Jolivet avait fait elle-même justice de sa prétention , et
l’avait laissée impoursuivie pendant dix-sept ans , lorsque, le 8 mars
175 8 , le sieur Grandsaigne avocat et prenant qualité de jouissant
du domaine du Foulhoux , en v ertu de sentences e t arrêts ren
dus contre les trois enfans M a rtin , acquit ce procès , moyennant
590 fr. que la veuve Jolivet reconnaît avoir reçus « à son conten
ir tement et satisfaction avant ces présentes. » Cette vente ne portait,
au reste, sur aucun meuble meublant; elle comprenait des bestiaux,
des vaisseaux vinaires, des instrumens d’agriculture , l’avance de
quelques fournitures pour ensemcncemens de terre faits en 1740,
et une somme de 52 fr. pour paiement de taille.
On ne peut qu’être étonné de trouver un pareil acte dans le dos
sier du sieur do Grandsaigne : il était avocat, et il acquiert des droits
litigieux !...
jouissait du domaine du Foulhoux comme déposi
taire de justice , et il détourne ce dépôt à son profit !... Que l’on ne
11
vienne pas dire que le sieur de Grandsaigne 11e faisait qu’acquérir
une chose qui lui était nécessaire; où était, en effet, cette nécessité
750 , était
pour lui qui, depuis «
en possession du Foulhoux; qui
savait que les objets qui y étaient ameublés étaient pour la plupart
immeubles par destination; que d’ailleurs de simples meubles n’ont
pas de suite pur voie d’hypothèque ? Où était encore celte nécessité,
quant tous les faits témoignent que la femme Grenetias avait aban
donné
sa demande depuis 17 ans, qu’elle ne l’avait jamais renouvelée
�contre ïe sieur de Grandsaigne; que lout apprend qu’elle l’aurait
vainement tenté ; et que l’acte de cession, du 8 mars 17
58 , vient
lui-mème déposer de la manière la plus énergique que de Grandsaigne a acquis les prétendus droits de la G renetias, sans bourse
d é lie r, et que les go f r . , prix de cette cession, n’ont point élé
comptés à cette femme?
5
Quel usage de Grandsaigne va-t-il faire de cette cession ; quelle
interprétation, quelle extension va-t-il lui donner? On a vu que le
billet où sont contenus les mots
mes
meubles
et la cession de la
Grenetias à de Grandsaigne sont à des dates distantes de quinze
jours l’une de l’autre. O11 sait également que, suivant de Grandsaigne,
le billet devait prouver que le mobilier contenu dans la maison de
maître du Foulhoux était la propriété de Clément Martin.
II faut encore se rappeler ici que Clément était l’unique héritier
de Pierre Martin, son père, et que celui-ci était, en 1 7 4 1 ? baillistc
judiciaire du domaine du F o u lh o u x , lorsque la Grenetias forma
contre lui la demande dont elle a ensuite cédé l'effet au sieur de
Grandsaigne. C ’est à l’aide de ces faits que l’on pourra suivre avec
sûreté le sieur de Grandsaigne dans ses manœuvres les plus subtiles.
Le i
5 mars
175 8 , de Grandsaigne présenta une requête ou il
demanda permission d’assigner Clément Martin, comme héritier
de son p è re , à l’effet de reprendre l’instance introduite par exploit
du i er juillet 17/fi; et, en attendant le jugement à intervenir, et
pour assurer le paiement de sa créan ce, de Grandsaigne conclut à
à ce qu’il lui fût permis de saisir, entre les mains du colon du F oul
h o u x, les bestiaux actuellement existans , les meubles meublans
placés dans la maison de maître; il demanda même la faculté de les
vendre et d’en toucher le prix.
L e i5 du même mois , de Grandsaigne fît, entre les mains du co
lon , une saisie de ces bestiaux et de ce m obilier, saisie qu’il dénonça
le même jour à Clément Martin , par un exploit où il conclut à ce
que les b estia u x lu i restassent Ù titre de propriété.
Le lendemain , iG mars, les colons donnèrent par acte notarié ,
‘i leur p ro cu reu r, pouvoir de faire la déclaration que la loi exigeait
d e u x , et en conséquence de déclarer i° le nombre des bestiaux
5
�garnissant le Foulhcmx et provenant p ar propagation de ceux
existant dans ce domaine , lorsque P ierre Martin s’ en mit en pos
se ssio n ; 2° que Clém ent, qui jouissait du domaine du Foulhoux ,
a mis les meubles qu’il y avait dans une chambre dont il a la clef;
° enfin de donner le détail des objets qui se trouvent dans le cuvage.
5
Quelles sont les idées que fait naître ce simple exposé? cette dé
claration est-elle l’œuvre spontanée du fermier qui n’aurait agi que
dans les intérêts de sa position de tiers-saisi ? personne n’oserait le
soutenir. Cette déclaration serait-elle, au contraire, l’ouvrage du
sieur de Grandsaigne créancier q u i, sentant la nécessité de donner
quelque apparence à ses prétentions, l’aurait lui-mème dictée à son
fermier? tout se réunit pour l’établir.
E t comment celte dernière hypothèse ne serait-elle pas la seule
v ra ie , quand on v o it, d’abord , que la déclaration est faite le lende
main même de la saisie; et que si l’on ne peut se rendre compte de
l ’intérêt qu’avait le fermier à agir avec autant d’activité, on saisit
fort bien celui du sieur de Grandsaigne à s’appi’oprier le plus promp
tement possible le mobilier du Foulhoux.
Que signiiie ensuite, dans les intérêts de la partie saisie, cette dé
claration de l’existence de bestiaux provenant par propagation
d’autres bestiaux existant au Foulhoux en 174 0 , c’est-à-dire dixhuit ans avant la déclaration? là, le sieur de Grandsaigne ne se dé
couvre-t-il pas tout entier; et n’est-il pas évident que cette multipli
cation par voie de génération appliquée aux bestiaux du Foulhoux
est un moyen inventé par de Grandsaigne, et qu’il met habilement
dans la bouche de son ferm ier, pour appuyer, par ce m oyen, la
demande qu’il avait lui-même formée de la délivrance de ces bes
tiaux à titre de propriété ?
Quel intérêt, enfin, pouvait avoir le fermier à déclarer que Clé
ment Martin avait été en jouissance du F oulh oux, que le mobilier
de ce domaine lui appartenait ? bien évidemment, tout cela ne pou.
vait que profiter à de Grandsaigne dont les projets sont connus cf.
qui , pour atteindre son but, déploie déjà toutes les ressources de
l’esprit le plus artificieux.
Ainsi, d’une part, précipitation, forme insolite, défaut d’intérêt du
�tiers-saisi dans sa déclaration ; telles sont les circonstances qui con
courent à établir qu’il n’en est point l’auteur. D ’un autre côté , v io
lent désir de Grandsaigne de s’approprier le plus promptement
possible les bestiaux et le mobilier du Foulhoux , nécessité pour cela
de se créer des moyens : telles sont les preuves qui le désignent
comme l’instigateur, et môme le véritable auteur de cette déclara
tion, is fe c it cu i prodest.
Les sieurs Dumiral ne peuvent donc tirer aucun argument de
cette p iè c e , la fraude ne pouvant en aucun cas profiter à celui qui
l’a pratiquée : mais cette déclaration pèse sur la mémoire du sieur de
Grandsaigne de tout le poids d’une manœuvre frauduleuse d’au
tant plus coupable que celui qui l’a pratiquée devait, sur tout étant
avo cat, se respecter assez lui-même pour ne point abuser de l’igno
rance et de la simplicité de ses fermiers; s’abstenir sur-tout d’em
p lo yer sa funeste influence à les rendre complices de combinaisons
odieuses, que bien certainement ils ne pouvaient a p p r é c ie r , mais
que la justice doit aujourd’hui flétrir.
Les sieurs Dumiral seraient-ils plus heureux, lorsqu’ils argumen
tent d’un inventaire de 1 7^9, pour établir que le mobilier contenu
dans la maison de maître du Foulhoux étant la propriété de Clément
M artin, ce domaine doit aussi lui appartenir ?
11 faut vo ir les faits :
L e procès sur la saisie-arrêt du i
5 mars 1758
était encore pen
dant , lorsque, dans le courant du mois d’octobre de la même
année , Clément Martin vint à décéder laissant une fille mineure qui
plus tard a épousé le sieur Dufour.
Il fallait un tuteur; deux des oncles, Philippe-Genest Martin et
Jacques-Antoine Constant ayant des intérêts opposés à ceux de la
mineure ne pouvaient être nommés; le choix se fixa donc sur Annet
Martin q u i, payé de salégitime dès 1752 , et exerçant depuis longues
années la profession de notaire a jNonette, 11 avait jamais eu intérêt
même la possibilité de connaître l’état des affaires de la famille.
Le sieur Grandsaigne ne dut éprouver que bien peu de difficultés
a abuser et à induire en erreur un tuteur qui, n’ayant en vue que
les intérêts de sa pupille , devait accueillir avec empressement tout
�ce qui pouvait lui être avantageux. Grandsaigne sut bien , d’ailleurs,
se créer des moyens de contraindre Annet Martin à avoir des rela
tions avec lui.
Les scellés avaient été apposés à Thiers ; Grandsaigne , en sa
qualité de créancier de Clément Martin , ne manqua pas de former
opposition à leur rémotion; dès-lors sa présence à l’inventaire de
vint indispensable, et, pendant les journées des 17, 18 et 19 janvier
1759 qui furent employées à la confection de cet acte, il eut bien le
temps et la facilité de persuader au tuteur que le mobilier du F oulhoux appartenait à Clément Martin. C ’était déjà beaucoup pour le
sieur Grandsaigne qui s’élait ainsi préparé le moyen le plus puissant
à l'appui de sa saisie, mais il lui restait encore quelque chose à faire;
il contesta à la veuve de Clément quelques minces réclamations
quelle faisait sur ce mobilier qui a ensuite été vendu judiciairement.
Grandsaigne s’est emparé du p r ix , distraction faite toutefois des
frais considérables qu’il avait occasionnés en le faisant vendre.
L ’inventaire fait au Foulhoux est du 22 janvier 1759; le tuteur y
fit comprendre , comme provenant de Clément M artin, le mobilier
renfermé dans la maison de maître. Ainsi les instigations de Grand
saigne avaienl enfin produit leur effet; mais Anuct Martin ne pou
vait pas rester long-tems dans l’erreur : l’examen des affaires de
sa pupille et sur-tout la lecture d’un mémoire signé de Clément
Martin , fourni par ce dernier à son procureur, lui apprit bientôt
qu’il avait été dupe de l’adresse de Grandsaigne. Aussi dans des
instructions de la même année 1759, instructions écrites et signées
de lui et données au procureur de sa pupille, ce tuteur se hàta-l-il
de rétablir les faits dans leur exactitude, et de dévoiler tous les ar
tifices employés par Grandsaigne pour les dénaturer. Cette pièce,
par son ancienneté, la forme de sa rédaction et la note du p ro
cureur qui constate l’époque où elle a commencé à faire partie du
dossier , commande la plus grande confiance. Les explications,
qu’elle contient passeront sous les yeux de la Cour, qui pourra voir
combien 1 extrait que l’on en donne est pâle et incomplet auprès du
tableau si simple et si naif qu’elle contient dos faits qui dépeignent
cependant le sieur Grandsaigne avec autant d’énergie que de vérité.
�Q u’ont donc voulu faire les sieurs D um iral, lorsqu’ils ont p ro
duit cet inventaire à l’appui de leur étrange système? A quoi cet
acte pouvait-il leur servir, dès que la question de propriété relative
à ce mobilier n’est pas encore jugée, et qu'elle est pendante devant
la première chambre de la Cour? ne voyaient-ils pas que lorsqu’il
s’agirait d’examiner cette pièce, on opposerait à la fraude et à l’as
tuce de Grandsaigne un acte sincère qu’il ne saurait désavouer ni mé
connaître , puisqu’il en a profité ; l’on veut dire l’acte de prise de
possession du F oulhoux, ou le fondé de pouvoir de Grandsaigne
reconnaît si nettement que ce mobilier est la propriété de PhilippeGenest et de Jeanne-Marie Martin, et que Clément Martin n'en est
que le dépositaire? ne sentaient-ils pas enfin que le système qu’ils
cherchaient à se créer, en jetant de la confusion dans les iaits les plus
sim ples, ou en leur donnant une fausse interprétation, obligerait
M* Constant à les examiner à son to u r, et à faire retomber sur eux
tout ce que ces faits ont d’accusateur pour la mémoire de celui
qu’ils représentent.
La réponse aux objections que les sieurs Dumiral ont présentées,
et qu’ils ont fait surgir d’un prétendu droit de propriété, que C lé
ment aurait eu au mobilier du Foulhoux, devait nécessairement
arrêter la narration, et interrompre l’appréciation des faits généraux
qui se rattachaient à la sentence de 176 6 , et à la possession pigno
rative que le sieur Grandsaigne a prise de ce domaine, du chef de
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin.
Il faut reprendre ici le récit de ces faits, et fixer son attention sur
les actes qui vont successivement se présenter.
L ’arrêt du 19 janvier l' j SS, qui levait les défenses
accordées
a
Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin contre la sentence
de 175 6 , leur indiquait assez que pour récupérer la possession du
F o u lh o u x, ils devaient se hâter
de
faire statuer sur l’appel qu’ils eu
avaient interjeté • aussi Philippe-Genest et Jeanne—IVlartc INIartm
poursuivaient-ils avec vigueur le jugement de leur affaire, lorsque,
« o mai 175 9 , Grandsaigne imagina d’assigner au parlement de
Paris le tuteur de la mineure de Cl émeht , Philippe-Genest et
Jeanne-Marie Martin , la branche Daigucbonne , Anne Jolivet, et
13
�même un sieurGourbine, acquéreur de l’une des maisons de Thiers
délaissée par l’arrêt de 1742 , et s’avisa, entre autres chefs, de
demander que les biens compris dans cet arrêt de 1742 lui fussent
adjugés à titre de propriétaire, pour le montant de l’estimation in
diquée dans un rapport de 1 7
58^ dont
le sieur Grandsaigne de
mandait l’homologation,
Il
est évident que cette demande remettait tout en question, et
dénaturait tout ce qui avait été jugé depuis et compris l’arrêt
de 174 2 jusqu’à la sentence de 1756 inclusivement : en effet, que
voulait le sieur Grandsaigne? était-ce la jouissance du Foulhoux à
litre pignoratif, et comme créancier de Clément? non... c’était la
propriété de ce domaine qu’il demandait : tous ses efforts , à cette
époque comme avant, tendaient à atteindre ce but; et c’est en présence
de pareils faits que les sieurs Dumiral osent articuler et faire impri
mer qu’ il a toujours dépendu des Martin de faire cesser la jouissance
du sieur Grandsaigne et même la leur, en remboursant la créance
qui leur était due !... En vérité on se lasse à relever de pareilles
erreurs. 11 faut donc, en dédaignant de si futiles allégations, re
connaître , au contraire, que le sieur Grandsaigne se soutenant p ro
priétaire , et SC complaisant dans les conséquences de son système,
avait cru pouvoir se soustraire au paiement de la pension de 200 fr.
créée par la sentence de 176 6, en faveur de Philippe-Genest et
Jeanne-Marie Martin. Ce fait est d’ailleurs établi par un arrêt du
i juillet 1760, qui condamne Grandsaigne à continuer le service
de cette pension de 200 fr. , et qui ordonne, de plus, que dans un
mois la cause principale sera mise en étal d’être jugée.
5
Les choses étaient en cet état, lorsque le sieur Grandsaigne est
décédé en 1768. Sa succession fut dévolue à deux branches colla
térales; celle de Philippe, son frère, dans laquelle figurent aujour
d’hui l(;s D upic; et celle de M arguerite, sa sœ u r, qui épousa un
sieur D cloz, et dans la descendance desquels se trouvent les sieurs
Dumiral.
Ces deux branches se divisèrent la succession de PlulippePhilibert Grandsaigne : ce partage qui est sous seing-privé et
�daté du 20 décembre 1770 , contient deux dispositions qu’il con
vient de faire connaître textuellement.
L e domaine du Foulhoux est échu au lot de la branche Philippe,
« avec convention que dans le cas où ledit domaine éprouverait
« l’éviction de la propriété, 1? second lot lui rembourserait en deniers
« ou biens de la succession la somme de 8000 f r ., et alors tous les
r droits et créances et même le droit de propriété que nous, copar« tageans, avons sur ledit domaine nous appartiendront en commun,
* et le bénéfice qui en résulterait partagé entre nous par moitié ; et
« la pension ou provision adjugée aux sieur et demoiselle Martin du
« Malzieu, qui est de 200 fr. par année, sera payée en commun par
« les copartageans jusqu’à ce qu’ils l’aient fait cesser ou qu’ils aient
« traité avec les sieurs et demoiselle Martin ».
L a seconde convention qu’il convient d’extraire et qui est la
clause finale du contrat est ainsi conçue : «• chacun de nous paiera
<* à proportion de ce qu’il amende dans la dite succession les dettes
« et hypothèques q u i pourront être dues et exercées sur les biens
« de la succession, et contribuera dans la même proportion auæ
« procès actifs et passifs communs ou qui pourraient se mouvoir
v à raison des objets communs de ladite succession, et nous nous
v obligeons respectivement à la garantie de nos lots » .
La simple lecture des deux clauses de ce partage montre déjà
que les sieurs D um irals’en sont occupés avec assez de légèreté; il
méritait cependant l’attention la plus sérieuse.
D'abord quelle était, à cette époque, la position des héritiers de
Grandsaigne et de la famille Martin ?
L e sieur Grandsaigne était créancier d’une somme principale tre
4>°oofr. qui, avec les intérêts, pouvait alors se monter à 8 , 0 0 0 fr. ;
mais ce créancier avait alors perçu quatorze ans de jouissances que
les experts, d’ailleurs si favorables à scs héritiers, ont estimées à
i,o o o fr . année commune; il s’était en outre emparé d’un mobilier
d’une valeur au moins de 4,000 fr., de manière qu’en 1760ht créance
Grandsai gne était plus qu’éteinte, et les héritiers devaient sentir que
la loyauté et même leurs intérêts bien entendus exigeaient également
1*
.
0
0
< <;ux qu üs restituassent le domaine du Foulhoux à son Jégùirtle
propriétaire.
�(
4°
)
Loin (le là : que font les héritiers Grandsaigne parmi lesquels
figurait alors le père des sieurs Dumiral? non seulement ils com
prennent le domaine du Foulhoux dans leur partage , mais en co re,
reconnaissant le vice de leur possession, ils prévoient le cas d’é vic
tion qui, étant éprouvée, doit créer en faveurdela branche évincée
un droit au remboursement d’une somme de 8,000 fr. exigible
contre l’autre branche.
Par l’effet de cette clause, quelle était dès-lors la position du copartageant qui avait reçu dans son lo tie domaine du Foulhoux? il
n’avait point la faculté de le restituer au propriétaire; il fallait qu’ il
é p r o u v â t une éviction, c ’est-à-dire qu’il attendît une action judi
ciaire, qu’il y défendit, qu’il combattît jusqu’àarrétdéfinitif; s’il agissait
autrement, il nepouvait e x ig e rle s8,000 fr. dont, en cas d’éviction,
le remboursement avait été jugé nécessaire pour égaliser son lot. Il
y avait donc nécessite de procès entre l'héritier Grandsaigne y pos
sesseur du F oulhoux, et. ceux> quels qu’ils pussent être, qui vou
draient se prétendre les propriétaires de ce domaine.
Mais si l’éviction arrive , qu’est celte somme de 8,000 fr. respec
tivement à celui qui l’a éprouvée ? elle représente pour lui la moitié
du p r ix principal du domaine du Foulhoux, dont la valeur n’avait ét,é
fixée qu’à 16,000 fr. ,qüèparce qu’on avaii pris en considération le
danger d’éviction dont 011 était menace : mais on sent que celle somme
de-8,ooo.fr. nepouvait comprendre ni s’appliquer aux restitutions de
jouissances qui seraient la suite de cette éviction. Pourquoi cela ?
d ’abord par la raison légale que ces restitutions de jouissances pe
sant sur toute la succession , et non sur un héritier particulièrement,
aucune garantie n’avait besoin d’être prévue à ce sujet ; ensuite,
parce qu’il y a sur ce point convention spéciale entre les héritiers
Grandsaigne , convention qui
ressort claircmenl des clauses du par
tage.
F>i e iîc t, si l’on consulte d’abord la. clause générale , ou s’assure
que les cohéritiers doivent contribuer eu commun aux dettes et
hypothèques de. la succession , ainsi qu’aux Irais nécessaires pour
parvenir à la solution des procès mus et à mouvoir. C ’en serait déjà
assez pour établir que les deux branches des héritiers Grandsaigne
�étaient tenues chacune pour moitié de la restitution de ces jouis*
sances ; mais on lit dans une clause spéciale de ce partage :
« et alors ( après l’éviction ) tous les droits et créances, et même le
« droitdepropriété que nous, copartageans, avons surlcditdomaine,
cc nous appartiendront en commun pour le bénéfice en être partagé
« par moitié. » O r , qu’est cette clause? rétablissement d’une com
munauté d’intérêts et d’une société de bénéfices et de pertes entre tous
les héritiers Grandsaigne. Cette société a pour objet le domaine du
Foulhoux et les procès auxquels sa possession peut donner lieu; sa
durée est fixée jusqu’au moment de l’éviction. Mais
alors
quels sont
les résultats de cette société? les parties doivent se régler sur ses
effets, rechercher, dès-lors, s’il y a des bénéfices ou des pertes à
partager : dans l’un comme dans l'autre cas, ce partage devant
avoir lieu par moitié entre les deux branches, il est évident que la
branche Rudeles^^nue, parla seule force de cc partage, de la moi
tié des restitutions de jouissances dues à M" Constant j et comme
cette obligation est conditionnelle, que son execution est subordonnéeaucas d’éviction du F oulhoux, on ne peut davantage mé
connaître que la prescription n’aurait pu commencer qu’à dater de
cette éviction, c ’est-à-dire de l’arrêt de i
85 a ,
qui a réintégré
M 8 Constant dans la propriété de ce domaine.
Devant des idées aussi simples et aussi décisives, comment les
sieurs Dumiral peuvent-ils invoquer le partage de 1770, pour sou
tenir que la branche à laquelle ils appartiennent est étrangère à la
jouissance du domaine du Foulhoux; que d’ailleurs la créance ré
sultant des restitutions des jouissances ducs à M 8 Constant serait
prescrite vis-à-vis d’eux? Il faut en convenir, raisonner ainsi c’est
prendre les actes au rebours de leur texte, et en renverser le sens.
Deux des quatre maisons de Thiers d é l a i s s é e s , parl’arrêt de 1 2 *
s’étaient écroulées; la dame D ufour, héritière de Clément , en
74
tendit l'emplacement et les matériaux moyennant la somme de 700 fr.
L es héritiers .Grandsaigne formèrent opposition, et le 8 juin 1775
ils reçurent, par suite de leurs hypothèques sur Clément et par
forme de nantissement jusqu’à fin de procès, la moitié de ces 700 fr.
On von que les héritiers Grandsaigne se conformaient bien soi-
6
�gneusement aux traditions de celui dont ils tenaient, les biens; leur
créance contre Clément était éteinte , elle leur servit cependant de
prétexte pour s’emparer d’un capital provenant de leur ancien dé
biteur; e t , pour que Grandsaigne survéqilît complètement en eux,
ils ne manquèrent pas de cesser le paiement de la provision accor
56
dée , par la sentence de 17
, à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie
Martin qui lurent obligés d’obtenir, le 20 mai 1 7 7 6 , un arrêt qui ,
rendant exécutoire celui du
5i
juillet 1760, condamne les repré
s e n ta i Grandsaigne au paiement des arrérages de la provision, et
à en faire le service à l’avenir ju sq u 'à fin de p/ocès.
Plus tard , et le
nivôse an 11 ( 1 9 janvier i o ), les héritiers
25
83
de Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin obtinrent au tribunal civil
de T h ie rs, contre les héritiers G randsaigne, et notamment contre
Claude-Antoine Rudel-Dumiral personnellement, un jugement qui
rend exécutoire l’arrêt du no mai 177G, coqdvmne les héritiers
Grandsaigne au paiement des arrérages de la provision liquidés
à 5,6oo f r . , et à en faire le service ju sq u 'il jugem ent définitif du
procès. Ce jugement frappe donc d’hypothèque le domaine Dumiral provenu d e là famille Rudel.
On voit par quelle série d’arrêts et de jugement les appels in
terjetés contre la sentence de 1756 avaient été conservés; leur
exécution était encore une fause de plus pour en empêcher la pres
cription : cependant les héritiers Grandsaigne ont cru pouvoir op
poser ce moyen ; mais quelle puissance peut-il avoir devant ces
arrêts et jugement qui conservent si soigneusement et si expressé
ment le procès; q u i, en statuant sur la pension, ordonnent qu’elle
sera payée jusqu’à fin de procès , jusqu’à jugem ent définitif du
procès ; et lors même que ces arrêts et jugement n’auraient pro
noncé que sur des incidens, le principe d’indivisibilité de la procé
dure n’aurait-il pas toujours l’eiTet de.m ettre le fond à l’abri de
tonte prescription? qu ‘lie serait d’ailleurs cette prescription si sou
vent interrompue par d.*s poursuites, et par le paiement de la pro
vision? cette provision n’est-clle pas cllc-inêmc un élément du procès,
et un élément tellemdnt vital qu’elle ne peut exister sans que le pro
cès existe avec elle; qu’elle ne peut également s’éteindre sans que
�le procès soit par cola même anéanti. Ainsi, comme on ne conteste
pas que la provision a dù être payée jusqu’à l’exécution de l’arrêc
de i852 , qui restitue à Me Constant la propriété du Foulhoux , on
reconnaît par cela même que le fond du procès, dont la provision
faisait elle-même partie, n’a pu être atteint par la proscription.
Ici les sieurs Dumiral objectent que le jugement de l’an i c n’a
pas été rendu par le tribunal saisi de la connaissance du foiid^ c’està-dire, en d’autres termes, qu’ils soutiennent que ce jugement serait
l’ouvrage d’un tribunal incompétent; mais l’article 2246 du Code
civil n’apprend-il pas que la citation en justice donnée même devant
un juge incompétent interrompt la prescription ; et si cette juridic
tion incompétente, loin d’être déclinée par celui qui avait intérêt
à s’y soustraire, est au contraire acceptée ou prorogée par lu i, les
noctes qui en émanent ne reçoivent-ils pas de la volonté de celui qui
s’y est soumis une puissance égale à celle que la loi attribue aux ju~
gemens rendus par des tribunaux computens ?
Cependant les sieurs Dumiral insistent : sxiivant e u x , le jugement
de l’an 11 ne fait autre chose que rendre exécutoire l’arrêt de
1776; d’ailleurs cet arrêt et ce jugement, ne s’occupant l’un et
l ’autre que de la provision, sont étrangers à la propriété dont conséquemment ils n’ont pu empêcher la prescription.
On pourrait se restreindre à la réponse qui a déjà été faite à cc
m o yen , si les sieurs Dumiral n’avaient pris le soin de l’anéantir plus
complètement encore. En eiFet, des exploits des 3i mars et 10 mai
5
18 1 donnés à la requête des héritiers Grandsaigne parmi lesquels
figurait le sieur Rudel-D ucheyrou un des appelans, aux héritiers
de Philippc-G enest, Jeanne-Marie et Clément Martin , et ayant
pour objet la reprise de l’instance et conséquennnenila confirmation
des sentences attaquées sauf néanmoins la provision dont les héri
tiers Grandsaiene,
se soutenant plutôt créanciers que débiteurs,
o
'
demandaient à être déchargés, contiennent la signification de l’arrêt
de 177G « comme le dernier errement de la procédure sur les ins" tances d’appel des sentences de 1753 et 1756. » Ces expressions
3
des sieurs Dumiral q u i, en 181 , c’est-à-dire à une époque où ils
n avaient pas besoin d’opposer la prescription, conservent à l’arrêt
�(
44
)
de 17765011 véritable caractère et lui font produire l'effet légal
et raisonnable d’entretenir, en son entier, l’instance et la procédure
dont il est le dernier errement; ces expressions ne fournissent-elles
pas, en i
, la meilleure réponse que l’on puisse faire aux argu-
835
mens des sieurs Dumiral q u i, aujourd’hui pressés par la nécessité de
^eur position, s’épuisent en vains efforts pour refuser à l’arrèt le ca
ractère et les effets qu’ils luiontsi expressémentreconnus? de pareils
rapprochemens tranchent et terminent nécessairement une discus
sion , sur-tout si l’on fait la remarque que les exploits des
3 1 mars et
10 mai 1815 contiennent une demande en reprise d’instance qui à
elle seule suffirait pour interrompre la prescription invoquee par
les sieurs Dumiral.
Après l’exposé des faits qui environnent les sentences de 1753
et 17 5 6 , et qui servent à préciser ou à fixer le véritable sens des dis'
positions qui y sont contenues, il convient de jeter un coup-d’œil sur
ceux qui ont amené la demande en revendication du domaine du
Foulhoux formée par M® Constant, ainsi que sur cette instance
elle-même qui a été terminée par un
i3 août 1832.
arrêt de la Cour du
Antoine Dupic avait épousé Jeanne Delavigne , une des descen
dantes de la branche de Philippe Grandsaigne. Vers l'an 1782,
D upic,” en qualité de m ari, prit possession du domaine du Foul
houx : à son tour, il fit ses efforts pour convertir sa jouissance p i
gnorative en titre de propriété. Pour atteindre ce but, le sieur
Dupic se fit faire, le 12 décembre 178 7, une donation par Anne
Jolivet qu’il savait fort bien avoir été définitivement expropriée du
Foulhoux par l’arrêt de 1742; on peut même croire que celte idée
présida à la vente de ce domaine qu’il consentit, en 1818, au sieur
Chai us son gendre.
Q uoi qu’il ensoit, lessieurs Dupic et Chalus décédèrent ayant pour
créanciers les sieurs Andrieuxde Thiers q u i, le 20 décembre 1828,
firent saisir réellement le domaine du Foulhoux sur les héritiers de
leurs débiteurs. L ’adjudication préparatoire avait eu lieu , lorsque le
i août 1829 M* Constant, qui craignait avec juste raison que sou
3
silence plus loug-tems prolongé no nuisit à ses intérêts, déposa au
�greffe ses titres de propriété : sa demande en revendication , qui
est du 17, fut formée par lui en laseule qualité qu’il avait alors, c’està-dire comme héritier de Jeanne-Marie Martin , sa grand-mère.
La demande de M® Constant prévenait bien suffisamment les hériliers Grandsaigne du danger d’éviction dont ils étaient menacés:
ils connaissaient sa qualité et ses droits à la propriété du Foulhoux;
ils pouvaient donc prendre leurs précautions, et cela leur était d’au
tant plus facile q u e , comme on le verra , les héritiers de Philippe—
G enestleur avaient offert un traité qu'ils avaient refusé.
Cependant Me Constant ne se hâtait pas trop, et trois mois s’étaient
déjà écoulés depuis sa demande, lorsque, le 24 octobre 18 2 g, il
accepta les cessions que les héritiers de Philippe-Genest et de Clé
ment Martin lui firent de leurs droits.
Les héritiers de Philippe-Genest étaient bien éclairés sur leurs
droits; l’un d’eux, M® Martin Lasalce avocat, avait fait un examen
sérieux de cette affaire ; c’est lui qui apprit a M® Constant que des
propositions avaient été faites à la dame veuve Chalus de traiter soit
sur la propriété duFoulhoux , soit sur le rachat delà provision; que
les conditions et le prix de ce traité étaient arrêtés, mais que les hé
ritiers de Philippe-Genest n’ayant voulu y donner leur consente
ment définitif, et le signer qu’autant que les sieurs Ducheyroux et
Dumiral y figureraient comme obligés ou comme caution de la dame
C halus, ceux-ci refusèrent et persuadèrent même à la dame Chalus
que les héritiers Grandsaigne, bien loin d’èlre débiteurs des repré
sentons de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie M artin, étaient au
contraire leurs créanciers. C ’est ainsi qu’au refus du sieur D uchey
roux auquel ces propositions avaient été faites, le sieur Constant ac
cepta cette cession qui était pour lui chose nécessaire, cession à la
quelle il avait d’ailleurs seul droit comme co -p ro p rié ta ire indivis du
fo u lh o u x avec les rep résen ta i de Philippe-Genest Martin, cession
dont le prix fut au reste le môme que celui qui avait été arrêté avec
lf‘ dame Chalus.
La cession des héritiers Clém ent, dont les sieurs Dumiral contes
ta m. le sincérité de la date, 011 ne sait trop p o u r q u o i , et q u ’ils p ré
tendent d ailleurs avoir été consentie à vil p r ix , est aussi facile U
expliquer.
�(
46
)
Pour la date on pourrait peut être* se contenter de répondre que
les nombreuses signatures qui sont apposées sur cette cession , et
parmi lesquelles figurent les noms de fonctionnaires honorables
prouvent assez sa sincérité ; heureusement peu de familles se font un
jeu de la fraude et delà simulation ; mais on doit ajouter qu’au besoin
cette date serait fixée par le décès d’une des parties signataires de
l’acte, et par une lettre de M .P opule, sous-préfet, lettre timbrée de
Jloanne et contenant la cession adressée à M® Constant.
Quant au prix de la cession , on sait déjà que cet acte n était pas
nécessaire à M e Constant pour revendiquer le Foulhoux dont la
propriété reposait sur Philippe-Genestet Jcannc-Maric Martin; dèslors , que cédaient les héritiers de Clément? on a vu que cc dernier
avait des créances à répéter sur les Daiguebonne ; M®Constant avait
intérêt à acquérir des droits qui pouvaient lui servir à écarter cette
branche du p artage, dans le cas où ses droits seraient encore
existans.
D ’un autre côté, Clément Martin était débiteur de Grandsaigne ;
c’était même le paiement de cette créance qui avait été le fondement
et l’origine de la possession pignorative de ce dernier : Me Constant
a encore pu penser qu une cession du chef de Clément pouvait lui
être utile pour répondre aux moyens que lesDupicne manqueraient
pas de soulever; mais quel est leprix qu’ila mis à tout cela ? d’abord
5 , 5oo fr.
pour prix de la cession; il a ensuite contracté l’obligation
de payer les frais de procédure de toute espèce; il a encore renoncé
à la garantie que lui devaient les héritiers de Clément Martin pour
la légitime de Jeannc-Marie, et les droits héréditaires de PhilippeGenesl; enfin Me Constant s’est soumis à payer aux héritiers Grandsaigne, les /j.,ooo fr. qui leur étaient dus par Clément M ajtin; et l’on
pcutapprécicrquel aurait été le poids de celle charge si celte créance
n’eût point été étçinte depuis long-t,ems par les jouissances dues à Philippe-Genest et Jeannc-Marie Martin seuls propriétaires du F oul
houx. Ainsi l’on voit que, bien loin qu’il y ait vilitc do prix dans
cette
cession, M® Constant, sans acquérir rien d’utile , a au contraire
payé fort
de faire cesser quelques incidens.
�M e Constant, porteur de ces deux cessions, ne vtmJutctne d u t , à
l’appui de sa demande en revendication, faire usage que de celle
de ces cessions qu’il tenait des héritiers de Philippe-Genest
M a r t i n : ¡I n’agit donc que de ce chef et de celui de sa grand-mcre,
les représentais de ces deux branches étant, à l ’exclusion de toute
autre personne et notamment de Clément Martin, seuls proprié
taires du domaine du Foulhoux. Ce l’ait est attesté par toute la
procédure tenue sur la demande en revendication, et notamment
par le mémoire que Me Constant fit distribuer en première instance.
Les héritiers Üupic opposèrent alors à M° Constant qu’il ne repré
sentait pas Clément Martin; mais celui-ci dédaigna cet argument qui
effectivçment ne pouvait rien changer à la question de propriété; il
communiqua, il est v r a i, la cession qu’il tenait du chef de Clément j
mais sans faire enregistrer cet a cte, sans en tirer argument, persis
tant au contraire toujours dans son système primitif.
L e if) janvier i
i , intervint au tribunal civil de Thiers juge
ment qui surseoit à statuer sur la demande en revendication formée
par M* Constant, jusqu’à la décision des contestations existantes
85
56
en i j
, et sur lesquelles la sentence du
année avait sursis à faire droit.
5 septembre de cette même
11 était difficile de soutenir ce jugement; aussi sur l’appel de
M* Constant fut-il infirmé par arrêt contradictoire du i
5 août 1802,
arrêt dont il est essentiel d’extraire et d’apprécier les dispositions
principales.
D ’abord cet arrêt rejette touteS les prétentions que les héritiers
Grandsaigne avaient élevées à la propriété du domaine du Foul
houx ; il retient comme fait certain que leur jouissance comme celle
de leur auteur n’a eu lieu quepourlc paiement de la dette de 4*000
constatés par l’obligation du 7 juillet 1720, q u ’ain s i ils n’ont joui que
précairem ent et à titre pignoratif.
Devant un pareil fait constaté par arrêt non attaqué, comment les
héritiers Dupic auraient-ils pu opposer la prescription, comment
même les sieurs Dumiral pourraient-ils s’en prévaloir aujourd’hui ■
L arrêt, examinant ensuite les droits qui avaient été attribués pa1'
1742 à Marguerite Treilhe depuis décédée sans postérité,
1 arrêt de
�reconnaît que son droit à la propriété du quart des immeubles dé
laissés à la famille ïr c ilh e dépendait de l’option qu’elle était tenue
de faire; que n’ayant point fait celte option elle était déchuej mais
qu’au contraire Philippe-Genest et Jcarme-Marie Martin ayant euxmêmes fait l’option qui leur était déférée par l’arrêt de 174 2> étaient
de venus propriétaires du quart de ces immeubles au préjudice de
Marguerite T reilh e, qui se trouvait ainsi réduite à une somme
d’argent équivalente à la valeur de l’estimation.
Cette disposition doit encore être soigneusement retenue : elle
constate que Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin sont proprié
taires du quart du domaine du Foulhoux et des quatre maisons de
Thiers compris en l’arrêtde délaissement de 1742; cependant, après
plaidoirie, on imprime encore que Philippe-Genest et Jeanne-Marie
Martin n’avaient aucun droit à la propriété de ces immeubles. Une
simple lecture de l’arrêt aurait averli les sieurs Dumiral de ne pas
insister sur une erreur aussi évidente.
L ’arrêt fixe ensuite les droits de M* Constant à la propriété du
Foulhoux, qui sont des trois quarts de ce domaine, comme repré
sentant ou cessionnaire de trois des enfans de Pierre Martin ; quant
à l’autre quart il est reconnu qu’il peut appartenir aux Daiguebonne
si toutefois ils n’ont pas laissé prescrire leurs droits.
Il faut encore s’arrêter ici. M° Constant est reconnu propriétaire
des trois quarts du domaine du F oulhoux, mais en quelles qualités?
l’arrêt répond d’abord comme représentant; mais de qui? de Jeanne*
Marie Martin s a grand-m ère : dbnc l ’arrêt reconnaît cette JeanneMarie comme propriétaire ou au moins comme co-propriétairc du
domaine du Foulhoux. L ’arrêt ajoute comme cessionnaire , mais
encore de qui? ce ne peut être du chef de Clém ent, puisque la
cession que M" Constant tenait des héritiers de ce dernier n’avait été
enregistrée ni produite en première instance, et qu’il ne pouvait en
faire usage sur appel que comme argument, et pour établir qu il
payait la dette de ce Clément Martin. C ’était donc comme cessionnoire de Philippe-Genest Martin que M* C o n s t a n t avait agi ; c ’est
aussi cette qualité que l’arrêt lui reconnaît; or ce Philippe-Genest
était co-proprietaire indivis avec Jeanne-M arie ,
1un
et l’autre
�avaient un droit égal à la propriété «lu Foulhoux; leur titre était le
même : c’était le partage verbal avoué par Clément Martin, reconnu
et exécuté p a rle sieur Grandsaigne lui-m êm e; donc il y a chose
jugée relativement à la propriété du Foulhoux : ce domaine appar
tient à M 8 Constant comme représentant et cessionnaire de
Philippe-Gcnest et Jeanne-Marie Martin exclusivement.
L e dispositif de l’arrêt envoie M° Constant en possession du do
maine du Foulhoux pour en jouir comme de sa chose propre , à la
charge par lui de faire dresser procès-verbal de l’état actuel des
lieux comparé à leur état ancien, contradictoirement avec les
héki-
t i e u s o u r e p r e s e n t a n s G r a n d s a i g n e ou iceuæ duement appelés.
Q uel sens doit-on attribuer à cette disposition de l’arrêt de 1802 ?
ce dispositif contient deux parties bien distinctes, et qu’il ne faut pas
confondre.
La première est relative à la propriété du domaine du Foulhoux,
dont le désistement est ordonné en faveur de M* Constant : 1 ou
comprend assez que ce désistement, ne pouvant concerner que
ceux qui étaient alors en possession et à qui ce fait était personnel .
ne devait donner lieu à l’appel d’autres personnes que les héritiers
D upic qui avaient seuls intérêt et qualité pour défendre à la de
mande en revendication formée par*Mè Constant.
Mais la seconde partie de ce dispositif qui a pour objet la restitu
tion de la valeur des jouissances et des dégradations, réfléchissant Sur
toute la succession, devait nécessiter la présence de tous les héritiers
Grandsaigne.
En cil’et, le sieur Grandsaigne, ayant joui du domaine du Fouihoux depuis 1756 jusqu’en 17G 8 , devait d’abord les jouissances q u ’il
avait perçues pendant cet espace de temps; une obligation hypothé
caire pour la restitution des jouissances qui seraient perçues a 1 avenir
pesait encore sur lui ; il s’était m êm e, à cet égard, engagé solidaire
ment avec sa caution à cette restitution; enfin le sieur Grandsaigne
pouvait avoir lui-même commis des dégradations : premier motif pour
que tous les représentons fussent appelés , lorsqu'il s’agissait de
régler le montant des restitutions de jouissances et des dégradations.
On a vu que par le partage de * ° les héritiers G randsaigne
7
77
�avaient établi entr’eux une société relativement au domaine duFoulhoux dont ils prévoyaient l ’éviction, et lors de laquelle éviction les
bénéfices et conséquemrnent les pertes de la société devaient être
partagés 5 or, comme les restitutions de jouissances et les dégrada
tions devaient nécessairement entrer dans le chapitre des pertes ,
c’était une nouvelle raison pour que tous les héritiers Grandsaigne
fussent appelés à la liquidation et estimation de ces deux objets.
Enfin le droit du créancier des restitutions de jouissances et dé
gradations existant nécessairement contre la masse des héritiers, la
Cour ne pouvait en restreindre l’exercice sans commettre la double
injustice d’exposer le créancier à perdre ce qui lui était du, et les
héritiers qu’elle aurait désignés, à payer la dette d’autrui.
Ainsi le sens de l’arrêt, quant aux restitutions de jouissances et dé
gradations, ne présente aucune équivoque , il a, au contraire, évi
demment voulu quelles pesassent sur la masse des héritiers , et non
spécialemeut sur ceux de ces héritiers qui avaient été condamnés au
désistement.
M e Constant ne pouvait donc se méprendre sur le mode d’exécu
tion qu’il avait à su ivre, aussi a-t-il appelé tous les héritiers Grand
saigne à la prise de possession du domaine du Foulhoux, cl à l’esti
mation des restitutions de jouissances et dégradations : les sieurs
Dmniral ont fourni des mémoires et des notes aux experts chargés
de l’opération , et ont ainsi reconnu que M° Constant avait agi régu
lièrement j enfin le rapport déposé a été notifié à tous les héritiers
1
Grandsaigne avec demande de Me Constant pour en obtenir homo
logation sur certains points, et la réform ation sur d’autres.
Ici se terminent les faits généraux dont l’exposé a paru nécessaire
pour faciliter l’examen des deux affaires : on ne doit point encore en
tirer toutes les conséquences qui peuvent s’en déduire, mais il
convient cependant de faire observer que déjà ils répondent à plu
sieurs des propositions contenues dans les deux mémoires des sieurs
Dumiral, et que désormais il n’est plus permis de soutenir, comme
ils 1 ont fait dans leur premier mémoire q u e le domaine du l'oui houx
ainsi que les jouissances n'appartenaient
11 l ’hilippc-Genest ni à
Marie Martin, mais bien à Clément, leur frère ; et que, clans tous les
�cas , la prescription aurait éteint les droits qu eM 0 Constant pouvait
avoir à ln restitiition de ces jouissances. C ’est aussi à l’aide de ces
faits, qu'en examinant deux autres propositions exposées dans le
2 e mémoire des sieurs D um iral, on établira sans effort les droits que
Mc Constant a contr’e u x , et que l’on prouvera que la succession de
Grandsaigne est bien débitrice de la restitution des jouissances qui
ont été faites du domaine duFoulhoux de 1756 à i
83 a.
Les autres propositions trouveront leur solution, soit dans l’ap
plication de quelques principes de droit, soit dans l’examen des faits
particuliers à chacune de ces affaires, faits et moyens qu’il convient
d’exposer et de discuter successivement.
FA IT S P A R T I C U L I E R S .
Prem ière affaire concernant la nullité e t la réduction des ins
criptions.
L e 6 avril 182g, le sieur M artin-Lasalce, héritier de PhilippeGenestMarti 11, requit une inscription conircleshéritiers Grandsaigne,
parmi lesquels figurait le sieur D um iral, à l’effet de conserver une
somme de 4,000 fr. représentant le capital de la provision de 200 fr.
et une autre somme de 1,800 fr. pour arrérages. Celte inscription
devait frapper sur les biens provenus de la succession de PhilippcPliilibert Grandsaigne, et même sur les biens personnels des sieurs
Dumiral par la force du jugement du
25 nivôse an
11 qui se trouve
parmi les titres en vertu desquels l’inscription est requise.
Cette inscription contient une réserve qu’il importe de l’ap p orter
textuellement : « le tout sans préjudice du droit que le requérant
« (le sieur Lasalce) a dans la pkopkiété du domaine du Fouih o u x
« que les Dupic ne détiennent qu’à titre d’antichrese, conformément
« aux arrêts précités, et qui avaient été exp éd iés à Philippe-Genest:
* M artin, auteur du requérant, et à ladite M arie M a rtin , veuve
" Constant pour leur légitime. »
Cette r é s e r v e e s t t r è s - s i g n i l i c a t i V e
*829, et a p r è s t r o i s g é n é r a t i o n s , p a r
M a r t i n , l o r s q u e l e p r o c è s 11’ é t a i t
pas
: e ffe c tiv e m e n t e lle
un h é ritier
de
est f a i t e
en
P h ilip p e-G e n e st
l i é , et p a r u n h o m m e
qui u y
�a aujourd’hui aucun intérêt : o r , devant un pareil fait, commeu
soutenir que la propriété réclamée par Philippe-Genest euJoanneMarie Martin n’était qu’une fiction ; qu’ils n’étaient,.relativement au
domaine du Foulhoux, que les prête-noms de Çlcrnent leur frère ?
comment le soutenir? lorsque l ’on s’assure que depuis
jus
qu’en 1829, époque de la demande en revendication formée par
M° Constant, Philippe-Genest, Jeanne-Marie Martin et leurs h éri
tiers n’ont point abandonné un seul instant ni leurs droits ni leur
qualité de propriétaires du domaine du Foulhoux ; que c’est même
comme propriétaires de ce domaine qu’ils ont reçu la provision qui
leur avait été accordée par la sentence de 175 6 , et ont pris mscrip'
tion pour les arrérages qui leur étaient restés dus.
Quoi qu’il en soit, relativement à M e Constant, l’effet de cette pre
mière inscription est déterminé par la cession de 1829011 l’on voit
que les sieurs Lasalce se réservent les arrérages échus de la p rovi
sion , clause qui fait que M e Constant ne peut invoquer cette ins
cription et s’en servir que pour le capital même de cette provision.
85
L e G août i o , une seconde inscription a été prise par M° Cons
tant agissant en qualité d’héritier de Jeanne-Marie Martin, et. comme
étant aux droits de P hilip pe-G enest Martin. Les faits généraux ont
clairement établi que Mc Constant ne pouvait et ne devait agir que
comme représentant ce? deux personnes.
L e but de l’inscription de M° Constant était de conserver i° les
restitutions des jouissances qui avaient été perçues par Grandsaigne
ou scs héritiers ; 30 le mobilier mort et v if qui se trouvait au F o u l
houx lors de la mise en possession du sieur Grandsaigne; 3° les
intérêts, même les intérêts des intérêts de toutes les sommes qui
pourraient être dues au sieur Constant. Q u’étaient tous ces objets l
bien évidemment des droits conditionnels et indéterminés résultant
des décisions judiciaires antérieures au Code civ il, droits q u i, ne
pouvant et ne devant point êire évalués, échappaient co n séq u en t
ment a la formalité de l’évaluation que la loi prescrit., cn certains
cas, pour la validité de l’inscription (Combiner art. 2 1 , 2 1 /j.S CC .).
32
Les litres en vertu desquels M c Constant u pris son inscription ont
été déjà analysés cl appréciés dans l’expose des faits généraux ou
�l’on établit que chacun de ces titres constituait des obligations per
sonnelles et hypothécaires contre Grandsaigne et ses héritiers; il
suffira donc de les rappeler ici très-sommairement. Ces litres sont
la senlcncc du 5 septembre 1706; le procès-verbal de réception
de caution du 20 octobre suivant; la soumission faite par Grandsai«rne
solidairement avec sa caution le 22 du même mois; enfin
o
la prise de possession du domaine du Foulhoux par Grandsaigne ,
du
23
du même mois d’octobre.
Cette inscription est au reste requise sur tous les biens de P h ilip p e-P h ilib ert G rands aigrie.
Les sieurs Du mirai on t, entr’autres m oyens, opposé que celtc
inscription était nulle, 011 au moins ne pouvait produire effet sur le
tiers du domaine des Piobins que Philippe-Philibcrt Rudel, dit la
C h a n tr e , a vendu, le i3 avril 1806, à son neveu François-Joseph
Rudel Ducheyrou. Cette objection q u i, au fond, n’est autre chose
qu’une nouvelle demande formée sur appel devrait peu occu p er ,
cependant que peut-elle signifier lorsqu’on l’oppose à une inscrip
tion qui a été prise seulement sur les biens du sieur Grandsaigne?
11’cst-il pas évident que si le tiers des Robins n’a point fait partie ou
a cessé de faire partie des biens Grandsaigne, il ne peut être grevé
par l’inscription de Me Constant, et que conséqucmment les sieurs
D u m iral, sur les biens personnels desquels aucune inscription n’a
été p rise , n’ont ni droit ni qualité pour se plaindre. 11 est donc vrai
que si cette question peut s’élever, elle ne doit être examinée qu’à
l’ordre qui a eu lieu en vertu du principe de la séparation des patri
moines; et alors, seulement, il s’agira de rechercher si la vente
de 1806 a pu produire l’efFct de soustraire le tiers des Robins a
reflet de cc privilège.
L e ia janvier 1 1 , François-Joseph D u ch eyrou vendit le do
85
maine des Robins au sieur P m c-B ou terige moyennant la som m e
de -8,000 fr. dont G o, 000 seulement furent portés en l’acte. Il n’est
pas contesté que ce domaine ne fasse partie des biens ayant appar
tenu au sieur G randsaigne; il est en effet com pris au partage
de 1 7 7 0, et la vente B o u terige, en établissant la propriété du ven
d eu r, énonce que le sieur D u ch eyro u a recueilli le tiers de ce do
�maine dans la succession de son p ère, en vertu d’un testament dr?
l’an 1 2 ; qu’un autre tiers lui a été vendu par son oncle dit le
C h a n tre , le i avril 180G; qu’enfin le dernier tiers lui est advenu
5
p a r suite d’un échange fait avec son fils, le
5 janvier i 85 i , c ’est-à-
dire quatre jours avant la vente consentie à Bouierigc.
Cette vente n’était pas transcrite lorsque, le 21 janvier 1831,
Me Constant prit une nouvelle inscription à l’effetde conserver dans
son intérêt, et comme héritier de Jeanne-Marie Martin, des arrérages
de la provision de 200 fr. qui sont évalués à la somme de 4,000 fr.
Cette inscription était nécessaire à M e Constant, puisque celle du
G avril 1809 prise p a rle s héritiers de Philippe-Genest, tout en
conservant le capital de la provision, ne portait cependant que sur
la portion des arrérages qui pouvaient leur appartenir personnelle
ment.
La demande des sieurs Dumiràl est du 18 janvier 1852; elle a
pour objet d’obtenir la réduction de l’inscription du 6 avril 1829 ,
prise par les héritiers de Philippe-Genest Martin; et la nullité de
celle du 6 août i
85 o , requise par Mc Constant. Les sieurs Dumiral,
pour justifier ces conclusions , exposent d’abord que ces deux ins
criptions sont un obstacle à la libération du sieur Pine-Bouterige
leur acquéreur; que cependant, ils ne doivent supporter les effets
de la première inscription que jusqu’à concurrence de leur amen
dement dans la succession Grandsaigne, que dès-lors cette inscrip
83
tion doit être réduite à 6GG fr. ; que l’inscription du G août i o de
vait être rayée parla raison que les titres qui lui servent de fonde
ment ne confèrent aucune hypothèque aux héritiers Martin; qu’il
était même impossible qu’ils lui en conférassent aucune, puisque les
sentences et arrêts avaient été rendus dans les intérêts exclusifs de
Grandsaigne, et qu’il est de règle que les jugemens ne constituent
hypothèque qu’au profil de ceux qui les obtiennent. Cette demande
est muette sur la " inscription prise par M° Constant, « 21 jan
vier 18 >1, inscription qui a cependant élé annulée par le jugement
dont est appel. Il y n , à cet égard , appel incident.
C ’est à cette demande inattendue cl soulevée par les sieurs !)u-
3
1
juiral que M.c Constant a été obligé de répondre. L a vente du sieur
�Bouterige lui était enfin connuej ce tiers-acquéreur n’avait encore
85
rempli aucune des formalités prescrites par les art. a.i
etsuivans
du Code civil pour purger les biens acquis ; il avait cependant sou
mis son contrat de vente à la transcription, de manière que M e Cons
tant devait se bâter de soustraire ses hypothèques à l'effet de la pres
cription qui allait commencer.
Pour cela, par exploit du 18 février i
852
et dénonce au sieur
Dumiral par acte d’avoué à avoué, le sieur Constant assigna le sieur
Bouterige et en lui dénonçant la demande que les sieurs Dumiral
avaient formée contre lui, il en dirigea lui-mème une, contre le sieur
Bouterige, en déclaration d’hypothèque et en séparation du patri
moine de Grandsaigne, concluant à ce que ce privilège reçut soa
application sur le domaine des Robins provenant de sa succession.
L e 14 mars rSSa, les sieurs Dumiral firent signifier de premières
conclusions 011 ils soutiennent, i° que l’inscription du 6 août i o
ne repose sur aucun titre transférant hypothèque contre G randsai"ne ou s c s héritiers; 20 que relativement à l’inscription du 21 janï)
.
.
.
vier i
i , dont ils s’occupent pour la première fois, il 11’est pas du
83
85
d ’a rrérages de la provision; que si quelques-uns de leurs cohéritiers
sont en retard, c’est tout au plus d’une somme de3oo fr. ; que d’ail
leurs ces arrérages sont déjà conservés par l’inscription du 6 avril
182g; ?>0 que cette dernière inscription ne pc#t elle-même produire
aucun effet pour le capital de la provision qui n’est pas d û ; que si
elle peut être conservée pour les arrérages, elle doit être réduite à
une somme de 700 fr. Après L’exposé de ces moyens , les sieurs Du
miral soutiennent que la succession Grandsaigne ayant été partagée
entre deux branches, ces branches doivent supporter l’effet des
inscriptions par moitié ; que l’art. 2 1G1 du C o d e civil permettant de
réduire lesinscnp'ionset de les restreindre à des propriétés suffisantes
pour la sûreté de la créance , et étant d’ailleurs certain que l’inscrip« lion d i i G avril 1829« pèse sur le domaine des Robins vendu et
* /uisont pat'tic des lùens de lu succession G randsaigne, et sur
’« d’autres domaines provenant de ladite succession, » il y a lieu de
r °duire cette dernière inscription et à en fixer l’effet sur d e s biens
qu ds désignent et qu’ils soutiennent être en proportion avec la
cieancc que 1 inscription d o n conserver.
�On doit spécialement remarquer que, dans ces conclusions, les
sieurs Dumiral reconnaissent positivement que le domaine des Rohins Tait pcirlic de la succession Grands aigne ; on peut déjà pres
sentir quel pourra être l’effet dè cet aveu sur l’acte de 180G que les
Dumiral ont produit sur appel pour la première fois.
L e 14 mars
i
852
,
M'Constant fitsigniiier ses défenses. Examinant
d’abord l’inscription du G avril 1 8 29 , il fit remarquer qu’elle ne le
concernait que pour le capital de la provision et présentâtes moyens
propres à la justifier sous ce rapport; mais quant à la partie de cette
inscription relative aux arrérages, comme elle intéressait exclusi
vement les sieurs Lasalcc qui se les étaient expressément réservés
p a rla cession du 4 novembre 182g,M* Constant dut se borner à dé
clarer qu’il n’était pas partie capable pour défendre à cette partie de
la demande des sieurs Dumiral et que les sieurs Lasalce devaient être
mis en cause.
Sur l’inscription du 6 août i8ü>o , M e Constant soutient que les
titres qui servent de base à cette inscription transfèrent hypothèque
sur tous les biens de la succession Grandsaigne; que d’ailleurs la
question de savoir si la sentence de 1756 est ou non un titre h ypo
thécaire en faveur du sieur Constant 11e saurait ctre de la com pé
tence du tribunal; qu’aux termes de l’art. 2159 du Code c iv il, cet
examen devait être rfh v o ÿé devant la Cour seule compétente pour
connaître de l’appel interjeté de cette sentence. Effectivement alors
l’arrét de 1802 n’était pas rendu, et la sentence de 1756 était dans
le même état qu’au moment où elle avait été prononcee ; il 11 y avait
donc qu’un arrêt, rendu sur l’appel qui en avait été interjeté, qui put
déterminer ou modifier la valeur et l’effet de celte sentence.
M° Constant insiste enfin sur ses demandes en déclaration d’hy
pothèque et en séparation de patrimoine qu’il soutient bien (ondées.
La cause en cet é ta t, les sieurs Dumiral firent signifier de nou
velles conclusions m otivées, le 1** juin 1852.
Sur l’inscription du G avril 1829, ils disent que ne contestant rien
aux sieurs Lasalcc relativement aux arrérages leur misceu cause est
inutile; quant à la partie do cette inscription portant sur le capital
de la provision cl a la conservation de laquelle M® Constant
�reconnaît être intéressé, les sieurs Dumiral soutiennent qu’uïie pareille
provision ne faisant que tenir lieu d’une portion des fruits annuels
ne saurait être représentée par un capital ; et développant ce m oyen,
les sieurs Dumiral ajoutent que « l’arrêt de 1776 veut que l’on paye
<r la somme de aoo fr. pour partie des jouissances, c ’est-à-dire pour
« la portion ou ù-compte sur la portion revenantà Philippe-Genest
« et Jeanne Marie Martin que M e Constant représente. »
Les expressions des sieurs Dumiral sont bien remarquables. : elles
prouvent que ces derniers ont entendu la sentence de 1766 dans le
sens que M e Constant lui a toujours donné. En effet, que signifient
ces mots parties ou portions de jouissances appliqués à PhilippeGenest et à Jeanne-Marie dans leurs rapports avec le F o u lh o u x,
rapports expliqués par la sentence de
s’ils ne les désignent
pas comme propriétaires ou au moins comme co-propriélaires de
ce domaine? et quand lessieurs Dumiral ajoutent que cette provision
est un à - c o m p t e sur la portion des jouissances revenant ù PhilippeGenest et à Jeanne-Marie Martin , ne reconnaissent-ils pas , par ces
expressions, que ces derniers sont propriétaires du domaine du
Foulhoux pour une portion plus grande que celle qui serait repré
sentée par la quotité des fruits qui leur est attribuée par la sen
tence de 1756?
Les sieurs Dumiral ajoutent ensuite que la provision , n’ étant
qu’ une portion ou délibation annuelle des jouissances , n’a pu
donner à M e Constant le droit de prendre inscription pour le capi
tal qui la représente : pourquoi cela encore , si les sieurs Dumiral
ne reconnaissaient pas que la sentence de 1756 avait consacré le
droit de Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin à la propriété du
Foulhoux, que dès-lors la provision est elle-même un droit réel qui,
existant par sa seule force, n’avait besoin ni d’hypothèque ni d ins
cription pour être affermi et conservé?
Les sieurs Dumiral examinent ensuite l ’inscription du 6 août 1 o ,
et ils emploient contre elle trois moyens. Le premier résulterait de
Ce que la sentence de 1756 ne confère pas d’hypothèque pour la
restitution des jouissances, et encore moins pour le mobilier du
domaine du Foulhoux qui était resté au pouvoir de Clément Martm,
8
83
�Le second moyen consiste à dire que l’.nscription est nulle comme
ne contenani pas l’évaluation de la créance pour lu conservation de
laquelle elle est requise. Enfin pour troisième m oyen, les sieurs
Dumiral soutiennent que les Daiguebonne sont propriétaires d’une
partie du Foulhoux , qu’en celte qualité ils ont droit à une portion
des jouissances pour la conservation de laquelle M e Constant n’avait
ni qualité ni droit de prendre inscription.
Quant à l’inscription du 2 î janvier 1 1, requise par INI®Constant,
inscription dont ni la nullité ni la réduction n’avaient été demandées
85
p a rl’exploit introductif d’instance, les sieurs Dumiral se bornent à dé
clarer que les arrérages conservés par cette inscription ne s’élevant
pointa une somme de plus de 1000 fr. la réduction doit en être or
donnée.
Enfin les sieurs D um iral, répondant à la demande en déclaration
d’hypothcque et de séparation de p a L r i m o i n e q u i avait été formée
par Me Constant, repoussent la demande en déclaration d ’h y p o thèque par le fait que le sieur Bouterige ayant fait signifier, le
10 mars i
85 a, son contrat de vente aux créanciers inscrits, cette de
mande devenait sans objet et était,par le seul effet de cette notifica
tion, convertie en une action sur le prix; quant à la demande en
séparation des patrimoines , les sieurs Dumiral la combattent en sou
tenant qu'elle a été intempestivement formée; qu’elle ne pouvait être
exercée q u ’ à l’ordre et seulement, contre les créanciers.
C ’est en cet état qu’est intervenu, Je 27 juin f
85 a, au tribunal civil
de rl.hiers, le jugement dont il est important dr, présenter l’analyse.
D ’abord le jugement examine l’inscriptidn du G août i o , sous
trois rapports différons, le fond du d ro it, la nullité à défaut d’éva
luation , et la réduction.
83
Quant au fo n d du droit, le tribunal considère qu’il n’est pas sérieu
sement conteste , que le droit du sieur Constant est mémo prouve
par les conclusions subsidiaires des sieurs Dumiral a y a n t pour objet
d obtenir l;i réduction « d’où il suit ( de la part des sieurs D um iral
la reconnaissance d’un droit quelconque en faveur de ¡VF' Constant. »1
La nullité de l’inscription fondée sur le défaut d*evulucition es
eDSuitc r e je té e , p a rc e que cette form alité n’est e x ig é e que p o u r les
�hypothèques conventionnelles; que dans l’espèce, s’agissant d’hypoMièques judiciaires surlesquelles la loi ne s’explique pas, il ne saurait
être permis au juge d’induire de son silence une nullité et de la faire
résulter de l’omission d’une formalité qui n’est prescrite par aucun
des articles du Code civil.
Passant ensuite à la demande en réduction de cette inscription, le
jugement, après avoir reconnu qu’il n’a pas d’élémens sufïisans pour
statuer à cet égard ; que d’ailleurs, à ce sujet, les parties sont déjà
en instance devant la Cour de Riom , reconnaît son incompétence en
déclarant que « les causes ayant la plus grande analogie, ce serai1
« préjuger sur l’arrêt que de statuer sur la demande en réduction. »
L e jugement statue ensuite sur l’inscription du 6 avril 1829 ,
prise à la requête des sieurs L asalce, et reconnaît que cette inscrip
tion doit être maintenue pour le capital et pour Les arrérages de la
provision.
Sur l’inscription de Me Constant, du 21 janvier i
85i , letribunaj
déclare que, quant au capital delà provision, ellea été prise en vertu
d’un titre commun aux sieurs Lasalce et Constant ; mais, croyant que
les arrérages conservés par cette dernière inscription en faveur de
M* Constant faisaient double emploi avec ceux pour lesquels les
sieurs Lasalce avait déjà requis inscription le 6 avril 1829, le juge
ment en a ordonné la radiation; M e Constant a interjeté appel de
cette disposition.
Après avoir ainsi décidé toutes les difficultés que la demande des
sieurs Dumiral présentait à résoudre relativement aux inscriptions,
le jugements’expliquesur les demandes en déclaration d’hypothèque
et sur celle en séparation des patrimoines que M e Constant avait
formées contre le sieur Bouterigç^çt qu’il avait dén oncées aux sieurs
Dumiral. Ce jugement rejette la première de ces demandes comme
inutile, puisqu’il existe de la part de l’acquéreur une notification de
la vente aux créanciers inscrits; quanta la demande en séparation
des patrimoines, elle est également rejetée par ce jugement qui donne
pour motif de sa décision, qu’une pareille demande 11c peut être va
lablement formée que contre les créanciers Iludel seules parties
capables pour y défendre.
�( 6o )
L ’appel que les sieurs Dumiral ont interjeté de ce jugement est
du 28 février 1823 : dans leur acte d’appel ils demandent l’adjudi
cation des conclusions par eux prises dans leur exploit introductif
d’instance du 18 janvier i
, et dans leurs actes signifiés d’avoué
832
à avoué, les 14 mars et Ier juin dç la même année , les sieurs üum iral concluent, en conséquence, à la nullité et radiation des inscrip
tions des 6 avril 1829 et 6 août i
i.
Me Constant a lui-même interjeté appel incident de la disposition
83
du jugement relative à l’inscription du 12 janvier 1
83 1.
Tels sont les faits particuliers qui se rattachent à l'affaire rela
tive aux trois inscriptions; on a été dans la nécessité de les faire
connaître avec quelques détails, et sur-tout d’analyser avec soin les
demandes et les moyens sur lesquels la discussion s’est engagée en
première instance, pour mettre la Cour en état d’apprécier non seu
lement le nouveau systèm e, mais encore les nouvelles demandes
qu’à l’audience seulement les sieurs Dumiral ont imaginé de sou
mettre à l’examen de la Cour.
D IS C U S S IO N .
On sait que tout l’intérêt de cette première affaire se renferm e dans
l ’examen de trois inscriptions, et que deux d’entr’clle s, savoir celle
prise par les sieurs Lasalce le 6 avril 1829, et celle requise par
M" Constant, le 12 janvier 1
85 1 , ont pour objet la conservation du
capital ou des arrérages de la provision de 200 fr.; tandis que celle
du G août i oest prise par M* Constant, pour sûreté de la restitu
83
tion des jouissances perçues et du mobilier existant au domaine du
Foulhoux^, lors de la mise en possession Grandsaigne.
Une première division de cette discussion résulte d’abord natu
rellement de l’objet différent de ces inscriptions; d’un autre côté,
1<-S sieurs Dumiral ayant toujours regardé les inscriptions relatives
à la conservation de la pension comme ne présentant qu 1111 intérêt
bien secondaire à celui qui se rattache à l’inscription du G août 18 5 o ,
il convient de commencer par l’examen de ces premières inscrip
tions , afin de fixer ensuite toute sou attention sur celle qui est l’objet
�avoué du procès, et qui a soulevé tant de débats et de contro
verses.
Inscription du 6 avril 1829.
Cette inscription prise parles sieurs Lasalce, en qualité d’héritiers
de Philippe-Genest M artin, a pour objet de conserver les arrérages
et le capital de la provision de 200 fr.
A qui appartenaient les arrérages ? Aux sieurs Lasalce, qui seles
étaient formellement réservés par la cession de 1829; ainsi c’était
donc contre ces derniers que la demande des sieurs Dumiral devait
être dirigée. M® Constant n’avait pas qualité pour défendre cette
partie de l’inscription; son incapacité , à cet égard, a été reconnue
par les sieurs Dumiral eux-mêmes , q u i, dans leurs conclusions du
1 er juin 1828 , et pour éviter la mise en cause des sieurs Lasalce ,
ont consenti à ce que l ’inscription subsistât dans leurs intérêts,
relativement aux a rré ra g e s.
A in si, les sieurs Dumiral n’ont aucun grief à opposer à cette pre
mière partie du jugement.
L e capital que cette inscription a pour objet de conserver inté
ressait M* Constant; aussi, à cet égard, le débat s’est-il ouvert avec
lui.
Q uel clait le moyen des sieurs Dumiral? que la provision de
200 ir. n’était qu’une portion des fruits , une délibation des jouis
sances que les représentai« de Philippe-Genest et Jeanne-Marie Mar
tin percevaient à titre de co-propriétairesdu domaine du Foulhoux ;
de la, les sieurs Dumiral concluaient que la provision était un droit
réel qui n’était pas susceptible d’hypothèque. Cela était vrai; mais
les sieurs Dumiral négligeaient de remarquer que ces jouissances
11 étaient pas perçues directement par les héritiers de Phdippe-Genest et Jeanne-Marie M artin, qui les recevaient au contraire des
mains du sieur Grandsaigne ou d e ses héritiers; que ces derniers
étaient dès-lors des régisseurs forcés imposés par la justice ¿PhilippeGenest et à Jeanne-Marie Martin; que Grandsaigne avait lui-même
demandé ctoblenu la faculté de percevoir la totalité des jouissances
�(
)
à la charge d’y faire participer les propriétaires pour une quotité
annuelle; que dès-lors il y avait nécessité d’une hypothèque en
faveur de Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin pour leur assu
rer l’exécution de celte charge et le service de la pension annuelle
de 200 fr.
Aussi les sieurs Dumiral se réduisent-ils à objecter que si , à l’é
poque du jugement, il y avait quelque motif pour maintenir cette
inscription , ce motif n’existerait plus aujourd’hui puisque le désis
tement du domaine du Foulhoux a été ordonné et exécuté contre
eux.
Cela est encore vra i, mais quel est l’argument que l’on pourrait
tirer de celle vérité contre le bien jugé du jugement dont est
appel, qui a été rendu lorsque les héritiers Grandsaigne étaient en
core en possession, et avant l’arrêt qui restitue lapropriété du Fouihoux à M° Constant? que peuvent donc à cet égard désirer les
héritiers Grandsaigne? Que M* Constant ne fasse point usage de
cette inscription ! Mais il ne l’a point utilisée dans l’ordre, et il cou
sent même aujourd’hui à ce que l’on donne acte aux sieurs D u
miral de la déclaration qu’il fait qu’il ne veut point s’en servir. Cette
déclaration de M 'Constant exclut tout autre examen de celte partie
du jugement dont la disposition ne peut point cire réformée puis
qu’elle était juste et légale au moment où elle est intervenue. D ’ail
leurs M* Constant d o it, sur ce p o in t, s’en rapporter à la prudence
de la Cour q u i, quelque parti qu’elle prenne , ne peut manquer
de mettre les dépens à la charge des sieurs Dumiral.
I n s c r i/ ftio n d u 2 1 j a n v i e r 1
831.
L e jugement a ordonné la radiation de cette inscription, requise
par M* Constant pour la conservation des arrérages de la pension
qui lui étaient dus du chef de Jeanne-Marie Constant, sa grand-mère.
L e motif unique de ce jugement esi que celte inscription faildoublo
emploi avec celle du G avril 1829, prise par les sieurs Lasalcc.
M* Constant a interjeté appel de celle disposition > qm peut cire
combattue par des moyens aussi simples que percmplotrcs.
Et d’abord, les sieurs Dumiral dans leur exploit de demande
�n’ont pris aucune conclusion relativement à l'inscription du 21 jan
vier i
i. L e sieur Constant n’a pu défendre à une demande qui
n’était pas form ée, et dont le tribunal n’était pas saisij donc, le ju
gement a prononcé sur choses non demandées, ce qui, aux termes
de l’article 480 du Code de procédure civile, est suffisant, non seu
85
lement pour le faire réformer, mais même pour le faire rétracter,
s’il était rendu en dernier ressort.
Un second moyen, contre ce jugement, se puise dans les conclu
sions même du sieur D um iral, sous la date du i*r juin 18^2 , ou ils
se
bornaient à demander la réduction de cette inscription; d’o'u la
conséquence que les sieurs Dumiral reconnaissaient que
C ette
ins
cription devait produire effet au moins pour partie des arrérages,
et qu’elle n e devait pas être rayée commefaisant double emploi avec
celle du 6 avril 1829.
Mais ce double emploi existe-t-il en fait? et en le supposant exis
tant, quel effet pourrait-il produire sur la validité de l’inscription
requise par M® Constant?
II n’y a pas de double emploi par les inscriptions de 1829 et
i
83 i.
En effet, l’inscription de 1829 était requise p a rle s sieurs
Lasalce dans leur intérêt particulier, et pour conserveries arré
rages qui leur appartenaient du chef de Philippe-Genest Martin ,
arrérages dont ils s’étaient d’ailleurs fait réserve expresse par la
cession consentie à M a Constant; l’inscription de 1
83 1 était dès-lors
nécessaire à Constant pour conserver les arrérages auxquels il avait
droit comme héritier de sa grand-mère ; il 11’y a donc point de
double emploi ; les sieurs Dumiral ne peuvent pas même dire que
cette inscription est excessive, l’évaluation des arrérages qu’elle a
pour objet de conserver étant bien inférieure à la somme qui est
réellement due.
i
D ’ailleurs y eut-il double emploi , et ces deux inscriptions
n’eussent-elles eu pour objet que de conserver les mêmes arrérages,
85
cello prise par M® Constant, le 21 janvier 1 1 , n’en serait paS
moins légitime et valable, puisqu’il aurait eu intérêt à la requern*
pour empêcher que lçs sieurs Lasalce ne nuisissent à ses droits on
�t
donnant aux sieurs Dumiral main-levée de leur propre inscription.
1 563
( V . Troplong, t. i , N05
et 5 71).
L ’appel incident de M* Constant est donc ainsi pleinement justifié.
Inscription du 6 août i
83 o.
Cette inscription qui a été requise par M* Constant a pour objet
principal la conservation des jouissances perçues, et du mobilier
retenu par le sieur de Grandsaigne et ses héritiers depuis 1746.
C ’est de cette inscription dont les sieurs Dumiral veulent sur-tout
obtenir la radiation ; c’est aussi contre elle qu’ils ont dirigé leurs
attaques les plus vives et épuisé toutes les ressources de la contro
verse la plus subtile.
Q uel est donc l’intérét que peuvent avoir les sieurs Dumiral à pro
voquer et à soutenir, pour la radiation de cette inscription, des débats
aussi longs et aussi vifs? Il est d’abord évident que les sieurs Dum i
ral ne peuvent attaquer l’inscription qu’autant qu’elle leur nuirait
personnellement, et qu’ils n’ont pas qualité pour se plaindre de ce
quelle frappe sur les autres biens et les autres héritiers Grandsaigne,
héritiers contre lesquels l’inscription d o it, dans tous les ca s, conti
nuer de subsister. Si cette inscription a été attaquée par les sieurs
Dumiral, ce n’est donc que parce qu’elle pèse sur eux comme ayant
succédé au domaine des Robins, provenant de Grandsaigne, do
maine qu’ils ont vendu au sieur Bouterige ; mais on sait que l’ordre
sur le prix de cette vente a été fuit; que M* Constant y a figuré ,
qu’il s’y est fait colloquer, non pas en vertu de son inscription, mais
])ien en utilisant le privilège de la séparation des patrimoines; et
que, parla force de ceprivilége, il a obtenu à cet ordre un rang bien
préférable à celui qui lui aurait été assigné par la date de son ins
cription. Cela posé, quel intérêt ont les sieurs Dumiral à critiquer
une inscription qui, respectivement à eu x, n’a produit aucun effet,
et qui ne peut leur préjudiciel’ dans l’avenir? quel bénéfice attendentils d un arrêt qui annulerait une inscription désormais devenue
sans objet? Plaident-ils pour l’honneur des règles ? on 11e peut le
croire. S e ra it-ce pour une question de dépens , que les sieurs
�( «
)
Dumiral auraient accumule tant d’argumens et créé quatre proposi
tions différentes péniblement discutées? cela n’est pas plus probable.
Les sieurs Dumiral ont donc un autre intérêt; cet intérêt-est en
dehors de la cause que l’on discute et a un double but, d’abord c e
lui de jeter de la confusion sur l’affaire de l’o rd re, et d’obtenir, si
la chose leur est possible, quelques dispositions ou quelques motifs
qu’ils puissent présenter comme préjugé dans l’affaire relative à la
restitution et la liquidation des jouissances, affaire qui est pendante
entre les sieurs Dumiral etM* Constant devant la première chambre
de la Cour.
M* Constant ne doit donc pas oublier que, dans cette discussion,
il a plutôt des pièges à éviter que des intérêts réels à défendre.
C ’est cette considération qui nécessite le changement de l’o rd re ,
d’ailleurs assez peu logique, que les sieurs Dumiral ont adopté dans
l’examen de celte affairé ; M® Constant devra aussi insister sur cer
tains moyens qui sont déterminans mais qu’il aurait pu négliger s’il
ne prévoyait des dangers pour l’avenir.
Celte discussion sera divisée en quatre paragraphes^; sous le pre
mier , on examinera si le tribunal civil de T h ie r s , et la seconde
chambre de la Cour qui est saisie de l’appel du jugement peuvent
apprécier la validité de l'inscription; ou si au contraire la pre
mière chambre , qui est saisie de la liquidation des jouissances cl
de la connaissance de la question de propriété du mobilier existant
en 1756 au domaine du Foulhoux, n’est pas seule compétente pour
connaître de la validité de cette inscription. Sous le second paragra
phe , on démontrera que les sieurs D u m iral, débiteurs, n’ont pas
qualité pour critiquer l’inscription dans sa form e; que d’ailleurs
cette inscription est valable. L e troisième paragraphe devra servir
a prouver que, si en thèse générale, les débiteurs peuvent demander
la radiation des inscriptions ne reposant point sur des titres valables
ou transférant hypothèque, dans l’espèce particulière, lessieurs Du
miral sont loin de rien prouver qni puisse détruire ou affaiblir les
titres qui servent de base à l’inscription du 6 août i o. Enfin, sous
le quatrième paragraphe, on établira que ce n’est point dans celle
cause que l’on doit examiner si le tiers du domaine des Robins est
83
9
�(
06
)
a ff r a n c h i d e l ’h y p o t h è q u e d e M> C o n s t a n t ; q u e c e t e x a m e n d o i t ê f r e
r e n v o y é à l a d i s c u s s i o n d e l ’a f f a i r e d e l ’o r d r e ; q u e d ' a i l l e u r s c e t t e
n o u v e l l e p r é te n tio n d e s s ie u rs D u m i r a l , b a s é e s u r d e s titres n o u v e a u x
et n on p ro d u its en p r e m iè r e in sta n ce , é le v é e
pour
la p r e m i è r e fo is
s u r a p p e l, c o n s titu e u n e d e m a n d e n o u v e l l e d o n t la c o u r n e p e u t p as
conn
î.ie .
§ I er.
Incompétence du tribunal civil de T h iers, e t , par suite, de la
deuxièm e chambre de la C o u r, pour connaître de lu -validité de
Vinscription du 6 août
i
83o .
C e m o y e n d ’i n c o m p é t e n c e a s o n f o n d e m e n t d a n s l ’ a r t . 2 1 5 9 d u
C o d e c iv il, q u i in d iq u e d e v a n t q u e ls trib u n a u x la d e m a n d e en r a d ia
t io n d e s i n s c r ip t io n s d o it ê t r e p o r t é e e t q u i d i s p o s e q u e la d e m a n d e
en
«
«
rad iatio n n o n
co n se n tie d ’une
in sc rip tio n
p rise p o u r
sûreté
d ’u n e c o n d a m n a t i o n
éventuelle ou indéterminée , sur l’e x é c u -
« tion ou liquidation
d e la q u e lle le d é b i t e u r e t le c r é a n c i e r p r é -
« ten d u sont en
bunal,
instance ou doivent être jugés dans un autre tri
d o i t ê t r e p o r t f . e o u r e n v o y é e » d e v a n t la j u r i d i c t i o n c h a r g é e
d e l ’e x é c u t i o n o u l i q u i d a t i o n d e l a c r é a n c e .
C e t e x t e est f o r t c l a i r , il n ’a p a s b e i b i n
de co m m e n ta ire ;
il n e
s ’ a g i t d o n c e n l ’a p p l i q u a n t à c e l t e a f f a i r e , q u e d e b i e n d é t e r m i n e r
l a n a t u r e d e s l i t r e s q u i o n t m o t i v é l ’i n s c r i p t i o n d u
6 a o û t i 83o , e t
la ju r id ic tio n q u i a c o n n u e t d o it c o n t in u e r d e c o n n a ît r e d e s d iffi
c u lt é s q u i s e s o n t é l e v é e s s u r l ’e x é c u t i o n d e c e s t it r e s , o u s u r la l i q u i
d a t i o n d e s c r é a n c e s q u ’ i ls s e r v e n t à c o n s t a t e r . C e t t e j u r i d i c t i o n b i e n
c o n n u e , il s e r a é v i d e n t q u e c ’ e s t d e v a n t e l l e q u e l a d e m a n d e e n r a
d ia tio n d ’in s c rip tio n d o it ê tr e
portée ou renvoyée.
C e l a p o s é , q u ’e st la s e n t e n c e d e
d a m n a tio n
tout à - la - f o is é v e n t u e lle
17
50 ? e l l e
prononce une con
et in d é te rm in é e ;
éventuelle ,
p u is q u ’e lle d é p e n d d e là jo u issa n c e q u e fera G r a n d s a ig n e d u d o m a in e
d u F o u l h o u x , e t d e la d é c i s i o n q u i i n t e r v i e n d r a s u r l a q u e s t i o n d e
p ro p rié té ;
indéterminée , p u i s q u ’ i l f a u t u n e
estim a tio n p o u r en fix e r
la q u o t i t é e t la v a l e u r .
•Actuellement comment cet état éventuel delà condamnation pro-
�lioncco par la sentence de 1766 a-t-il cessé? par l’arrêt rendu par
la première chambre de la C o u r, le i août i
, arrêt q u i, ru
infirmant le jugement de Tliiers du 19 janvier 1 1 , reconnaît que
M e Constant est propriétaire du Foulhoux et l’envoie, en cette qua
lité , en possession de ce domaine en nommant des experts pour es-
5
832
85
timer les jouissances ducs par les héritiers Grandsaigne comme suite
nécessaire du désistement prononcé contr’eux. Cet arrêt nomme en
core un notaire pour recevoir les comptes; il faut ajouter que , par
un arrêt du i
3 février 1 834 >
même chambre se trouve saisie de
la question de propriété du mobilier qui était au domaine du Foul
houx lors de l’entrée en possession du sieur Grandsaigne, mobilier
qui a aussi servi de fondement à l’inscription prise par M® Constant,
le G août i o.
83
Voilà donc la première chambre delà Cour saisie, soitparle droit,
soit par une disposition précise de son arrêt, soit même par le fa it,
de l’instance relative à Xexécution et liquidation de la condamna
tion prononcée par la sentence de 1766 et de tous les actes subséquans qui s’y rapportent : on dit, par le d ro it, parce que l’arrêt du
1 août i
estinfirmatifdu jugement de Thiers, et que l’art. 472
du Code de procédure attribue y en cas d’infîrmation , l’exécution à
5
852
la Cour qui a prononcé; on dit, par une disposition précise de
Yarrêt, parce que celui du i
3 août i 832
ordonne expressément
l’ estimation et la liquidation des jouissances , et que celui du 20 fé
vrier i
834 saisit aussi la première chambre delà connaissance de la
quest.on de propriété du mobilier garnissant le domaiue du Foul
houx ; enfin, 011 ajoute , p ar le f a i t , parce que l’estimation des
jouissances a eu lieu, et que les difficultés que présente le rapport
des experts, soit sur ces jouissances, soit sur la propriété du mobi
lier , sont soumises à l’examen de la première chambre qui est saisie
par une assignation donnée par M® Constant à tous les héritiers
Grandsaigne et notamment aux sieurs Dumiral.
Où serait donc la difficulté de décider que toute demande rela
tive à la validité de l’inscription du 6 août 1 o, ou aux effets qu ’elle
doit prod u ire, doit être portée ou r e n v o y é e devant la première
chambre de la cour, seule chargée de décider sur les difficultés qui
peuvent s’élever au sujet de l'exécution ou liquidation des condam
85
�nations prononcées par la sentence de 1 7
56,
sentence qui est la
base principale de cette inscription?
M e Constant a proposé ce m oyen d’incompétence des l’entrée de
cause et y a persisté le jour même du jugement; ce fait est établi par
les conclusions signifiées, le 11 avril i852, à la requête de M" Cons
tant, et par celles consignées au jugement dont est appel. Comment
donc est-il arrivé que le tribunal de Thiers } qui était incompétent
à raison de la matière, qui conséquemment, aux termes do l’art. 478
du code de procédure, était tenu de renvoyer d’oifice devant qui
de droit lors même que le renvoi ne lui serait pas dem ande, n’ait
pas admis le moyen d’incompétence qui lui était si nettement et si
expressément proposé? on ne peut expliquer cette erreur que par
le soin que prenaient les sieurs Dumiral de laisser supposer au tri
b u n a l qu’il s’agissait moins de la radiation que de la réduction de
l’inscription de i
83 o ,
et par le peu d’attention qu’ont mis les p re
miers juges à combiner les art. 2161 et 2 i5 q du Code c iv il, article
2161 qui rend communes à la demande en réduction des inscrip
5
tions les règles établies par l’art. 2 1 g , en cas de demande en ra
diation.
Toutefois le jugement dont est appel, bien loin de faire préjudice
à M® Constant, repoussait au contraire toutes les demandes des
sieurs Dumiral. M® Constant n’avait donc aucun intérêt à faire re
vivre ce moyen d’incompétence jusqu’au moment ou il s’est assuré
83
que sous lo prétexte de combattre l’inscription du 6 août i o , les
sieurs Dumiral attaquaient le droit que M* ConstanL a aux jouis
sances du domaine du Foulhoux, examinaient si eux-m êm es,
comme héritiers G randsaigne, étaient débiteurs do ces jouissances,
si enfin, respectivement à eux , ces jouissances n’étaient pas pres
crites , questions qui toutes sont soumises à l’examen et au jugement
do la première chambre do la Cour.
Dans celte position , M" Constant a cru devoir signaler à la
sagesse do la Cour le danger prévu par l’art. o du Code de
procédure, etoviter qu’il put intervenir outre les doux chambres de
54
la C o u r, contrariété d’arrêts entre les mêmes parties et sur les
mêmes moyens. Cet inconvénient est trop grave pour que lu Cour
�s’y expose; elle ne pourrait évoquer l’affaire pendante à la première
chambre sans s’exposer à violer le principe sur lequel est fonde
l’art. 2159 du code civil, qui veut que l’accessoire suive le sort du
principal; il semble donc que la deuxième chambre de la Cour
est dans la nécessité de reconnaître son incom pétence, e t , aux
termes de l’art. 171 du code de procédure, de renvoyer devant
la première chambre la demande des sieurs Dumiral relative à
l’inscription du 6 août i
85 o.
§ 2.
L e s sieurs D um iral débiteurs n’ ont pas qualité pour critiquer
85
e t dem ander la nullité de l’inscription du 6 août i o , pour
<Vice d éfo rm é. — C e tte inscription est d ’ailleurs régulière.
L a vérité de la première partie de cette proposition se démontre
par le rapprochement et la combinaison de quelques articles dil
Code civil.
5
Sous le chap. des hypothèques, le législateur, dans les articles
2114 et suivans, a pris soin de définir la nature de ce droit, ses effets,
et quels sont les titres propres à le constituer ; mais dans aucun de
ces articles on ne verra que l’inscription soit exigée comme condi
tion de la constitution d’hypothèque entre le débiteur et le créan
cier : entre ces deux personnes , au contraire, l’hypothèque existe
et produit ses effets par la seule force du titre qui la constitue.
Quant à l’inscription, cette formalité a deux objets; d’abord, dans
l’intérêt des tiers qui voudraient contracter avec le débiteur, de
rendre publiques les hypothèques qui pèsent sur les biens de ce
dernier; ensuite de fixer le rang des créanciers entr’eux. C ’est le
texte dt! l’art. 2 1
du Code civil « entre les créanciers, 1 hypo« theque n’a de rang que du jour de l’inscription prise par le crean* cier sur les registres
du conservateur, dans lu form e et de la
o
manière prescrite par la loi. » 11 est donc vrai que l’inscription fon
dée sur un titre conférant hypothèque n’est exigée qu’entre créan
ciers; que c’est elle qui, par sa date , fixe leur rang, et qu’elle ne
peut produire cet effet qu’autant qu’elle est régulière en la form e ;
34
�(
7°
)
de la résulte bien certainement que le créancier, auquel l’inscription
est opposée , a seul qualité pour en examiner et quereller la forme.
Quel intérêt le débiteur lui-même aurait-il d’ailleurs à cet exa
men? pourrait-il exiger que l’un de ses créanciers fut payé préférajblementà l’autre? mais n’est-il pas également le débiteur de tous, et
s’il s’est engagé vis-à-vis d’eux de la même manière, c’est-à-dire ,
par des titres conférant hypothèque, quel avantage moral ou réel
trouverait-il à ce que quelques-uns de ses créanciers obtinssent un
rang de collocation plus avantageux que les autres ?
Ce qui tranfche la difficulté c’est que le débiteur a le droit de
demander lui-même la radiation de l’inscription qui pèse sur ses
biens; mais dans quels cas? à cet égard, les articles 2 1 g et 2160
5
du Code civil s’expliquent de h manière la plus explicite. L ’article
2159 introduit en faveur du débiteur la faculté de demander la ra
diation de l’inscription, et l’article 21Q0 prévoit les cas dans lesquels
la radiation doit être ordonnée; et il faut remarquer que cet article,
qui s’exprime d’ailleurs dans des termes tout-à-fait restrictifs, in
dique le litre qui a servi de fondement à l’inscription comme la
seule pièce sur laquelle le débiteur puisse porter ses investigations.
Il faut donc reconnaître qu’en matière d’inscription la demande
en nullité , résultant de l’inobservation des formes , appartient ex
clusivement aux créanciers, et que le débiteur peut faire valoir les
moyens résultant du titre sur lequel l’inscription est fondée, titre qui
est d’ailleurs la seule pièce dont il puisse se prévaloir pour deman
der la radiation de l’inscription ( 1 ).
L ’exposé île ces principes pourrait dispenser M8 Constant de
répondre aux moyens de nullité que les sieurs Dumiral lui opposent;
toutefois il convient de les apprécier.
L ’inscription serait nulle, dit-on , comme ne contenant pas d'éva
luation. Le jugement a suffisamment répondu à ce premier moyen:
en cll'et, il s’agit dans l’espèce d’hypothèque judiciaire; l’art. 21/^3,
( 1 ) Sur ce point d 0 doctrine et «tir scs conséquences.— V. T roplon g, com m ent, s u r 1rs
hjrp. T om e 2 , n» 56j. Gron
T . «, p. 17G__ ArnH <lc R ioui, 7 mars i835 , Dalloz,
T . 17. a p. *88.
�4
n® du Code c iv il, n’exige l’évaluation que pour les hypothèques
conventionnelles ; o r, ou est le principe qui autorise les tribunaux à
étendre les nullités d’ un cas à un au tre, ou mieux encore aies créer
quand elles ne sont pas formellement prononcées par la loi? il est
vrai qu’à des idées aussi simples on oppose les opinions de messieurs
Tarrible et G renier; mais on sait que la doctrine de ces deux au
teurs , sur cette question., n’a jamais été admise par les tribunaux ;
le jugement dont est appel cite plusieurs arrêts qui l’ont au contraire
formellement rejetée ; et aujourd’hui l’opinion de M. Troplong dont
on peut lire le développement dans son traité des hypothèques ,
(T om e
5,
n° 684) ne permet plus ni discussion ni controverse sur
cette question.
lie second moyen de nullité proposé contre l ’inscription résulte
rait de ce qu elle n’a pas a été requise au nom du 'véritable créan
cier.
D ’abord, si on examinait ce moyen en droit , il serait facile d’é
tablir que l’irrégularité du bordereau, résultant de la désignation du
nom du créancier n’est pas une Nullité. ( V . Troplong, t. , n» 679.)
D ’ailleurs en fait, comment cette nullité est-elle établie? l’ins
5
cription a été prise au nom de M* Constant, or ilestbien créancier:
sa qualité et ses droits ont été reconnus par l’arrêt delà Cour de i
852 ,
ils 11e lui sont pas contestés par les sieurs D um iral, donc la formalité
de réquisition de l’inscription au nom du véritable créancier a été
rigoureusement observée.
Mais, dit-on, M® Constant figure dans cette inscription, d’unepart,
comme héritier de Jeanne-Marte Martin, et de l’autre, comme ayant
les droits de Philippe-Genest Martin. O r là est le v ic e , là est la nul
lité de I’ inscription : pourquoi? parce qu’en inscrivant sous ces qua
lités M» Constant a suffisamment indiqué qu’il prenait inscription du
chef des deux personnes qu’il prétend représenter j or, comme ces
deux personnes n’ont aucun droit aux restitutions de jouissances,
l’on ne peut pas dire que l’inscription ait été requise au nom du vérnablecréancier; donc le moyen de nullité reste dans toute sa force.
Il est facile de répondre à cette argumemation : d’abord c ’est
M* Constant qui a requis l’inscription, il l’a donc néccssairemeui
�prise à l'effet de conserver tous les droits qu’il pouvait avoir sur les
jouissances du Foulhoux ; o r, on sait qu’à cet égard et au moment
de l’inscription M e Constant représentait non seulement PhilippeGenest et Jeanne-Mârie, mais encore Clément Martin.
Cela pose, qu’importe à la validité de l’inscription que M n Cons
tant l’ait prise comme représentant et cédataire de Philippe-Genest
et Jcanne-Marie Martin? si ces deux personnes sont propriétaires
des jouissances du Foulhoux, M8 Constant a bien fait; son inscrip
tion est régulière : si au contraire Philippe-Genest et Jcanne-Marie
Martin ne sont point propriétaires de ces jouissances, les qualités
prises de leur chef dans l’inscription seront surabondantes si l’on
veut, mais voilà tout; l’inscription n’en sera point viciée pour cela.
M° Constant, qui n’a abdiqué aucun de ses droits ni expressément
ni tacitement, n’en aura pas moins pris valablement inscription du
chef de Clément qu’il représentait alors.
Ic i, à quoi se réduirait la difficulté ? seiàit-cé à rechercher quels
sont les propiétaires de ces jouissances ? les faits ont répondu : c’est
Philippe-Genest et Jeanne-Marie ¡VÎàrtin; donc l’inscription prise de
leur chef est valable. Mais Clément Martin pût-il même être con
sidéré comme propriétaire de ces jouissances , la position de
M c Constant n’en serait pas changée pour cela, puisqu’à l’époque de
son inscription il avait acquis les droits de ce Clément Martin.
Mais les sienrs Dumiral soutiennent qu’a l’époque de l’inscription,
la cession des héritiers de Clément n’existait pas et qu’elle a été an
tidatée.
Les faits ont déjà détruit cette objection qui est d'autant plus futile
que M" Constant n’avait aucun intérêt à cette antidate. Mais qu’en
tendent par là les sieurs Dumiral? veulent-ils accuser Mc Constant
de fraude; oii sont les preuves? ils disent que M® Constant a trop
d’expérience en affaires pour ne pas avoir énoncé dans son inscrip
tion la cession de Clément Martin, s’il l’avait réellement obtenue à
cette époque. Mais les sieurs Dumiral ne voient-ils pas que c’est pré
cisément parée que M®Constant connaît les ailaires, qu a inscrit en
:1
vertu de la sentence de 1766, et non en vertu de celle de 1755; et
pourquoi cela? parce que la sentence de 1756 imposait à Grand-
�saigne l'obligation* clc restituer les jouissances du Foulhoux à Philippe-Genest et à Jeanne-Mârie Martin; que celte obligation avait
pour garantie de son exécution une hypothèque et un cautionne
ment , tandis que la sentence de 1753 n’établissant des droits qu’en
faveur du sieur Grandsaigne , l’obligation et l’hypothcque qu’elle
conférait à Clément Martin pouvaient donner lieu à contestation.
Enfin les sieurs Dumiral prétendent que la cession que Me Cons
tant tient du chef de Clément Martin n’ayant été enregistrée que le
20 février i
832 , cette date est la seule certaine à l’égard des tiers.
Quelle est la force et la portée de cet argument? les sieurs Dumiral sont-ils des tiers vis-à-vis Clément Martin? non; ils sont scs
créanciers, conséquemmentses ayant-cause; o r ,l’art. i5a2 du Code,
civil dispose que l’acte sous seing-privé fait loi contre les héritiers ou
ayant-cause de celui qui l’a souscrit.
I) un autre coté, qu e fait le cédataire q u i , sans faire connaître sa
cession, agir, cependant en son nom pour les droits qui lui ont été
cédés? ce n’est ni la date de la cession ni la cession elle-même qu’il
oppose au débiteur, mais bien le titre constitutif de la créance : et s’il
est vr a i, sous ce rapport, que pour qu’une inscription soit valable,
il faut que le titre en vertu duquel elle est requise soit parfait, il est
aussi certain que M c Constant a satisfait à tout ce que la loi exigeait
de lui à ce sujet, puisque son inscription est basée sur la sentence
de r 7
56.
Mais quant à la cession, il eu est tout autrement : Comment s’opcre-t-elle? à l’insu du débiteur, à qui elle n’a pas même besoin
d’être notifiée pour que le cessionnaire soit saisi à son égard ( Code
civil 1G90); dès-lors qu’importe pour la validité de l’inscription que
la cession iùt ou 1101Ï parfaite au moment ou cette inscription a ctu
requise? tout cela devient encore bien plus évident, si Ion consi
dère que la mention de la cession est inutile pour la validité de
l’inscription; et pourquoi? parce que d’abord la cession 111 l’ins
cription 11e créent aucun droit nouveau; que la cession ne fait que
transmettre , et l’inscription ne fait que conserver des droits déjà
acquis; parce qu’en second lieu, et par argument tiré de l’art. 2148
du Code c iv il, on peut, en matière d’inscription, dire que celte n;c?
10
�(
74
)
sure conservatoire peutêtre requise non seulement parle créancier,
mais encore par un mandataire ou tout autre tiers, pourvu qu’ils
représentent au conservateur des hypothèques l’original en brevet
ou une expédition authentique du titre qui donne naissance au pri
vilège ou à l ’hypothèque ; aussi est-ce dans ce sens que la Cour de
cassation a d é cid é , par deux arrêts qui se trouvent au recueil de
S irey, le i er, tome iG -i-a ; le second, tome 19 -1-4 59 ; i # que
l’inscription prise par un cédataire en son nom n’est pas viciée
33
parce qu’on ortiettrait de mentionner la qualité de cédataire e t
le titre établissant la cession; 20 que le cessionnaire, p ar acte
sous seing-privé, qui renouvelle en son nom l’inscription prise par
son cédant, n’ est pas tenu d ’énoncer, dans son inscription, l’acte
p a r leq u el il est devenu cédataire, n i d ’avoir f u it enregistrer son
acte de cession avant Vinscription.
Il est donc bien nettement établi : i° que les sieurs D u m iral,
débiteurs, n’ont pas qualité pour critiquer la forme de l’inscription
du 6 août i
83o ;
20 que cette inscription, étant prise en vertu de ju
gement, n’avait pas besôin, pour sa validité, de contenir l’évaluation
3
de la créance pour laquelle elle était requise; ° que cette inscrip
tion a été prise au nom du véritable créancier, soit que l’on consi
dère que les jouissances appartiennent a Philippe-Genest et à Jeanne
Marie Martin (cc qui est prouvé en fait) , soit même que l’on sup
pose que ccs jouissances pouvaient appartenir à Clément Martin ,
puisque M* Constant les représente tous, ou à titre d’héritier, ou
à titre de cédataire.
§
3.
U a rt. 2160 du C o d e cunl énumère tous les cas pour lesquels
la radiation de l ’inscription doit être ordonnée p ar les tribunation ; le débiteur ne p eu t donc être admis à dem ander la ra
diation pour autres causes que celles prévues p u r cet article. —
JA's sieurs Dum iral, en se restreignant à la réduction de ¡’ins
cription du G août i
85o ,
ont rendu leur dem ande en radiation
non-recevable.— C e tte inscription a d ’ailleurs pour fondem ent
un titre qui conjère à P h ilip p e-G en e st et à Jeanne-M arie
�Martin nn droit incontestable ci la propriété des jouissances d/c
domaine du F o id h o u x .— C e droit n’est pas prescrit à l ’égard de
la branche de Marguerite R u d el, fem m e D e lo tz, représentée
aujourd’hui par les sieurs Dum iral.
On doit examiner successivement les différentes propositions
énoncées sousce paragraphe; toutefois on essayera de resserreraittant que possible la discussion des différentes questions qui peuvent
se présenter, en renvoyant à l’exposé des faits pour toutes les objeC'
tions des sieurs Dumiral auquelles on à déjà répondu.
L ’art. 2160 du Code civil contient rémunération de toutes les
causes pour lesquelles la radiation de l’inscription doit être ordonnee; elles sont au nombre de trois : 10 si l’inscription a été faite sans
être fondée ni sur la loi, ni sur un titre ; 20 si l’inscription a été prise
en vertu d’un titi'e, soit irrégulier, soit éteint ou solde ; ° si l’ins
cription repose sur des droits de privilège ou d’hypothèques effacés
par les voies légales. Telles sont les règles absolues et restrictives
qui resserrent le pouvoir des tribunaux dans l’examen qu’ils doivent
5
faire des difficultés qui peuvent s’élever entre le débiteur et son
créancier relativement aux inscriptions. C ’est assez dire qu'en cette,
m atière, toute spéciale, on ne peut et on ne doit demander à la
justice que ce que la.loi lui permet d’ordonner, et que toute demande
qui sortirait de ces limites serait par cela même non recevable.
Après avoir ainsi déterminé le champ de la discussion et posé les
bornes qu’elle ne pourrait franchir sans s’égarer, on devrait immé
diatement aborder les moyens opposés par les sieurs Dumiral ,
rechercher s’ds sont compris dans une des trois classifications éta
blies par l’art. 2iGo du code civil, et voir si d’ailleurs ils sont établis
011 en droit 011 en fait : mais avant cet e xa m en , il convient do
s’occuper d'une fin de non rece vo ir qui s’élève contre la demande
en radiation formée par le sieur Dumiral.
Celte demande en radiation a pour fondement deux m oyen s
principaux : le titre qui sert de base à l’inscription n’est pas valable;
d’ailleurs ce litre est éteint par la proscription.
L es sieurs Dum iral sont-ils aujourd’hui admissibles à faire valoir
�(
76
)
ces moyens ? non , ils y ont formellement renoncé en première
instance: ce fait est prouvé par le texte même du jugement qui atteste
que « le fon d du droit n’ a pas été sérieusement contesté par
v les sieurs Dumiral, qui ont conclu, subsidiairement, àce que l’ius« cription fu t réduite à une somme qui serait fixée par le tribunal,
« d ’où il suit la reconnaissance d ’un droit quelconque en faveur
tf du sieur Constant. »
V oici donc une déclaration qui, aux termes de l’art. i
356 du Code
civ il, constitue un aveu judiciaire et qui conscqucminent ne peut
être révoqué. Q u’est cet aveu? la reconnaissance que font les sieurs
Dumiral du droit de Me Constant. Que ce droit soit plus ou moins
étendu, peu importe; il suffit que le droit existe pour que l’inscrip
tion qui n’en est que l’accessoire et le soutien existe avec lui. Dès
qu’il y a un titre qui confère un droit, l’inscription prise en vertu de
ce titre peut être réduite mais ne peut point être radiée.
Les sieurs Dumiral opposeraient-ils que la demande en réduction
de l’inscription n’était qu’un subsidiaire à la demande en radiation?
on leur répondrait, d’abord, que l’on ne peut considérer, comme
étant subsidiaires l’une de l’autre, que les demandes qui, partant d’un
même principe et ayant la même cause, ne différent cm r’clles que
par quelques modifications des effets qu’elles doivent produire ; que
les demandes en radiation et réduction s’cxclucnt,* au contraire,
mutuellement, par cela seul quelles parlent de principes différons;
et que la demande en réduction, qui suppose toujours un titre con
férant un droit au créancier, ne saurait, sous aucun rapport, être le
corollaire ou le subsidiaire de la demande en radiation qui a tou
1absence, 1irrégularité, ou l ’extinction du
droit qui aurait servi de base a 1inscription. D ’ailleurs, dans l’espièce,
jours pour fondement
la demande en réduction n’est point un subsidiaire à la demande en
radiation; les sieurs Dumiral ont, bien volontairement ei bien ex
pressément, substitué l’une à l’autre , et pourquoi ? pour éviter et
repousser le moyen d’incompétence que Mc Constant Opposait à
leur demande en radiation', moyen textuellement écrit dans l’ar
ticle 21^9 du Code civil, et dont l'effet inévitable devait être de
renvoyer devant la première chambre de la Cour la connaissance
et le jugement de celte demande.
�Lorsqu’on s’occupera de l’examen du moyen de prescription pro
posé par les sieurs D um iral, on démontrera que la reconnaissance
qu’ils ont faite devant les premiers juges de l’existence du droit de
M° Constant est la circonstance la plus forte qui puisse être opposée
aux sieurs Dumiral, comme présomption légale qu’il sont renoncé à
cette prescription, et comme preuve qu’ils ne sont plus aujourd’hui
admissibles à opposer ce moyen.
La fin de non recevoir pourrait dispenser d’examiner le système
proposé par le sieur Dumiral ; toutefois , pour ne rien négliger , il
convient ‘d’apprécier ces moyens qui ne tiennent l’apparence de
force qu’ils présentent que de l’art avec lequel le fait et le droit ont
etc mêles et confondus. Analyser sera avoir répondu.
Quel est en effet l’objet de cet examen? l’inscription de i o qui
a pour fondement la sentence de 1 756.
Celte sentence confère des droits : quelle est leur nature? ils sont
conditionnelsj comme tels, s’il n’y a point de temps fixé pour l’avénément de la condition, ces droits subsistent jusqu’au moment où la
85
condition est accomplie. CC. 1 176. Le créancier de ces droits peut
exercer tous les actes conservatoires, il peut donc prendre inscrip
tion. CC. 118 0 , 2i/|8, n°
4-
Quel était le créancier de ces droits? la sentence de 1756 les
créait on faveur de Pliilippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ; ce fait
est établi parla sentence de i y
56 , il est même reconnu par les sieurs
Dumiral ; donc Me Constant cédalaire de Pliilippe-Genest et JeanneMarie Martin est propriétaire de ces droits.
L ’inscription du 6 août i
83 o
est donc valable, puisque, d’une
part, elle a été prise pour conserver l’hypotlièque résultant dune
obligation conditionnelle qui n’était pas alors a c c o m p lie ; que de
1 autre, elle a été requise par le créancier de 1 obligation sur les
biens de son débiteur.
Q u ’opposent les sieurs Dumiral? suivant eu x, inscription du
6 août 173 0 a été prise sans droit ni titre pour la requérir; et
pourquoi? parce que Plûlippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ou
leur cédataire ne prouvent pas qu’ils sont propriétaires du doniame
du l' oulhoux.
1
�J'usques-là l’objection n’a rien (le sérieux : en effet, le titre est la
sentence de 1756. Cette sentence conféré le droit : à qui? à Phi
lippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin : contre qui? contre Grandsaigne. Voilà donc le litre et le droit bien établis; le créancier et
le débiteur bien clairement désignés; comment dès-lors soutenir
que l’inscription a été prise sans droit ni titre !
Mais voudrait-on dire que c ’est à M e Constant à prouver que
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin étaient propriétaires des
droits conservés par l’inscription? si c’est là le sens de l’objection ,
elle n’a aucune portée , et ne fait autre chose qu’attester les efforts
du sieur Dumiral pour dénaturer ou changerl’état des questions que
cette affaire peut présenter.
En eflet, si M= Constant avait voulu poursuivre l’exécution de la
sentence de 175G, et obtenir le paiement des jouissances qu’elle at
tribue conditionnellement à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie
Martin, on comprend bien que, dans ce cas, M e Constant eût été
tenu d’établir que sa créance était devenue exigible par l’accomplis
sement de la condition dont elle dépendait. Mais Mc Constant n’a
rien demandé, il n’a fait que conserver : c ’était son droit. 11 est vrai
qu’au 6 août i o la condition n’était pas accomplie; qu’im porte,
puisque « Je créancier peut, avant que la condition soit accom plie,
83
« e x e r c e r tous les actes conservatoires de son droit » ? O r , si les
sieurs Dumiral voulaient demander la radiation de cette inscription
comme requise sans droit ni titre , c’était bien à eux de prouver
qu’au 6 août i o , ou la condition était accomplie dans un sens dé
85
favorable à Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin , ou qu’elle
était déiàillie, ou qu’il était impossible qu’elle se réalisât en faveur
des créanciers conditionnels. — C C . 1 17G.
.
Mais aujourd’hui cette preuve de l’accomplissement de la condi
tion en faveur de Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin existe ;
leurs droits à la propriété du domaine du Foulhoux <»nt été reconnus
par 1 arrêt de i
85 a:
les prévisions de la sentence de 1756 se trou
vent donc ainsi complètement réalisées.
L à , les sieurs Dumiral insistent plus fortement, et deviennent plus
positifs dans leurs objections : suivant eu x, non seulement Philippe-
�Genest et Jcanne-M arie Martin n’ont aucun droit aux jouissances
du F o u lh o u x m a is encore ces jouissances appartiennent exclu sive
ment à Clém ent Martin.
Ce moyen est tout nouveau: il n’a point été présenté en première
instance, il est même en contradiction avec tout ce qui y a été écrit,
plaidé et jugé'; mais enfin ou prend-il sa source? ce ne peut être
que dans la sentence de 1 756 ; c’est ce titre qui est le fondement de
l’inscription, il doit donc être le centre et le point unique de la dis^
cussion. O r, on sait que cette sentence constitue une obligation con
ditionnelle en faveur de Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin;
les sieurs Dumiral sont en ce point d’accord avec M° Constant:
comme lui ils reconnaissent que cette sentence préjuge la propriété
du l'oulhoux et des jouissances[de ce domaine en faveur deM® Cons
tant ou de ceux qu’il représente : com m ent, dès-lors , les sieurs
Dumiral pourraient-ils soutenir que les jouissances, que la sentence
conserve à Philippe-G enest et à Jeanne Marie Martin, sont cepen
dant la propriété de Clém ent? P ou r appuyer cette prétention, il
faudrait au moins que la sentence de 1756 fût réformée; o r, le sieur
Grandsaigue n’en a point interjeté appel; bien loin delà : lors du
procès-verbal de prise de possession, il en a requis l’exécution; il
faut donc nécessairement que ce titre reste avec le sens qu’il a réel
lement , et que les sieurs Dumiral lui ont eux-mêmes reconnu.
Dans l’exposé des faits généraux, en établissant l’existence du par
tage verbal de i7 5 5 , partage reconnu par Graudsaigne lui-même et
qui a transmis a l ’hilippc-Genesi et a Jcanne-Marie Martin le Foul
houx, 011 a également p ro u ve, 1 que ce partage avait une c a u s e ,
le paiement des droits héréditaires de Philippe-Geuest et de la légi
time de Jeanne-M arie ; 20 que ce partage était nécessa ire, puisque
Clément Martin n’avait pas payé en argent les droits de ses frère et
sœ u r, et que même il avait toujours été dans l’impossibilité d’ellêctuer ce paiement;
3° que ce
partage était avantageux à Clément
Martin et onéreux pour Philippe-Genest et Jcanne-Marie Martin ?
puisque ceu x-ci, pour des droits montant à plus de 20,000 f r ., se
contentaient du délaissement d’ un domaine estimé en 1758 à
i 2,900 fr. et du mobilier qui le garnissait. Voilà des fui 15 sur la
�preuve desquels il n’est plus permis de revenir ( V . faits généraux,
pages 1 1 , 1 et 1 . )
3
3
Quels sont actuellement les objections particulières des sieur»
Dumiral ?
D ’abord ils se prévalent du contrat de mariage de Clémenr.
Martin qui contient, de la part de la mex’e, institution d’héritier en
faveur de ce dernier. O r quelle induction à tirer de ce contrat?
bien certainement cet acte ne détruit pas le délaissement fait à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin ; il montre au contraire, en
faveur de ces derniers, que Clément Martin avait qualité pour le
faire et y consentir.
Les sieurs Dumiral disent ensuite que M® Constant ne rapporte
pas l’acte de p a r ta g e :— on a déjà répondu à celte objection.
( V . fa iis généraux ). Il suffit de rappeler ici que le sieur Grandsaigne a lui-même reconnu l'existence de ce partage , et que s i ,
dans sa requête du
6 août 1 755 ,
il chercha à en paralyser l'e ffe t,
c’est par l’unique m oyen que ce partage contenait délaissem ent du
bien d'autrui. La conséquence de cet aveu est aussi directe que
pressante contre les sieurs Dumiral : « L ’existence du partage est
« certaine; Grandsaigne l’a reconnu , vous ne pouvez rétracter sa
« déclaration : le délaissement du Foullioux à Philippe-Genest et à
• Jeanne-Marie Martin est l’eflet de ce partage; si Clément Martin
« était propriétaire de ce domaine , le délaissement qu’il en a fait
« sera valable ; si au contraire celte propriété résidait sur tout nu« tre et notamment sur Grandsaigne (car alors c ’élait sa prélencr tion ), ce délaissement ne produira aucun e ffet, mais com m e,
« en i
832 , il a été jugé que Grandsaigne n’avait aucun droit à celle
«r propriété, que vous m êm e,aujourd’hui, vous vous bornez à sou
te tenir que le Foulhoux est la propriété de C lém ent, vous recon«f naissez et vous prouvez par cela même que depuis 1753 elle est
« incontestablement devenue celle de Philippe-Genest et de Jeanne« Marie Martin ».
Une autre objection résulterait de ce que , suivant les sieurs
D u m iral, les droits héréditaires de Philippe-Genest et la légitime
de Jeanne-Marie auraient été payés par Clémeni Martin. — Cette
�erreur a etc relevée dans les faits généraux; où l’on a démontré non
seulement que Clément Martin ne s’était pas libéré envers ses frère
et sœur, mais encore qu’il avait toujours été dans l’impossibilité de
le faire : mais^ce qui est plus fort, c’est que Grandsaigne, dans une
requête du 26 août 175 6 , reconnaît si bien que Clément est débi
teur de ses frère et sœ ur, qu’il demande lui-m êm e, lu i G rand
saigne , l’autorisation de p a y er les droits héréditaires de PhilippeGenest et la légitime de Jeaune-Marie Martin, offrant même caution
pour la garantie de ce paiement !.. de pareils faits ne comportent pas
de commentaire, ils excluent môme toutes réflexions, et peuvent
dispenser d’examiner les objections que les sieurs Dumiral élèvent
contre le contrat judiciaire formé entre Clément Martin et ses frère
et sœ u r, même celle qu’ils tirent d’une prétendue reconnaissance
faite par Me Constant que Clément Martin était le propriétaire du
Foulhoux. L e narré des faits a suffisamment fait justice de ces trèspetits moyens de cause.
Q ue signifie dès-lors cette qualification de prête-nom s de C lé
ment Martin , si ingénieusement appliquée à Philippe-Genest et à
Jeaune-Marie Martin ?
P hête - noms !.... Mais Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin
ou leurs héritiers n’ont-ils pas constamment reçu, et souvent après
condamnation prononcée contre Grandsaigne ou ses héritiers, le
paiement de la provision de 200 fr. créée parla sentence de 1756 ?
mais, après trois générations, le sieur Lasalce, héritier de PhilippeGenest, ne s’est-il pas formellement réservé, dans son inscription du
6 avril 1829, ses droits à la propriété du domaine du Foulhoux ?
mais l e s héritiers de Philippe-Genest n’ont-ils pas vendu leurs droits
à M e Constant, n’ont-ils pas même touché le prix de cette cession ;
et comment se seraient-ils permis ce dernier fait s’ils n’eussent été ,
eux-m êm es, que les prête-noms des héritiers de Clément? et quant
aux héritiers de Clément Martin, dont Me Constant a acquis les
droits, pourquoi auraient-ils exigé de leur cédataire qu’il rendît
taisans
les héritiers de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie Martin
s’ils n’avaient reconnu que ces derniers, au cas où ils ne conser
veraient point le Foulhoux, étaient, vis-à-vis d’eux, créanciers l’un
11
�( 8s )
deses droitshéréditaireset|l’autre de salégitime? pourquoi, sur-tout,
ces héritiers Clément auraient-ils interdit à M e Constant le droit
d’agir en leur nom dans les actions qu’il aurait à intenter, s’ils n’eussent reconnu que depuis long-tems ils n’étaient plus propriétaires
du domaine du Foulhoux ?
Une dernière observation se présenle; elle ressort de la sentence
de 1 756 : cette sentence, loin d’accorder à Clément Martin les jouis*
sanees du domaine du Foulhoux les lui refuse au contraire trèsexpressément ; c’est à Grandsaigne qu’elle confère le droit de jouir
de ce domaine, mais à la charge de rendre les jouissances, à qui? à
Pliilippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin. Au 6 août 1 o , époque
83
de l’inscription de M e Constant, y avait-il quelque chose de changé
dans cette situation? bien évidemment non. A cette époque comme
antérieurement, La sentence de 1756 imposait à Grandsaigne l’obli
gation conditionnelle de restituer les jouissances qu’il percevrait
du domaine du Foulhoux ; le droit de réclam er ces jouissances était
introduit en faveur de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie Martin
à l’exclusion de Clément ; c ’est donc au nom des propriétaires de
ces jouissances désignés par la sentence de 17 5 6 , que l’inscription,
du
85
août i o devait être requise.
Il
faut donc retenir comme fait certain que l’inscription de i
G
85 o
étant fondée sur un titre régulier établissant 1111 droit conditionnel
mais incontestable à la propriété des jouissances du Foulhoux , et
que ce droit reposant exclusivement sur Philippe-Genest et JeanneMarie M artin, l’inscription du 6 août i o , p rise, de ces deux
85
chefs, par Mc Constant, est valable à moins que ces droits ne soient
éteints par la prescription.
O r , ces droits sont-ils prescrits ?
S u rce point, 011 a déjà indiqué que les sieurs Dumiral étaient non
reccvables à faire valoir le moyen de prescription , par la raison
qu’en formant la demande en réduction de l’inscription de i o , ils
85
avaient nécessairement reconnu l’existence du droit qui lui sert de
fondement; 011 ne revient sur ce moyen que pour faire remarquer
que la renonciation a la prescription se suppose facilement, que les
circonstances sont toujours suffisantes pour la faire présum er, et
�que les dispositions des art. 2221 et 2224 sont, à cet égard, d’ac
cord avec l’ancienne règle, minima agnitione d eb iti to llitu rp res
cript ¿0.
Mais comment les sieurs Dumiral établissent-ils cette prescription?
ici encore ils n’ont pu se créer un système qu’en déplaçant les ques
tions , en retenant mal les faits dont au reste ils oni tiré des inductions
incomplètes ou erronnées; peu d’eiforts doivent donc suffire pour
briser de si frêles appuis.
D ’abord les sieurs Dumiral invoquent, comme devant régir la
cause, les dispositions de l’art. 2262 du Code c iv il, qui porte que
« toutes les actions tant réelles que personnelles sont prescrites par
«■trente ans. » C ’est bien : m aiss’agissant des suites et des effets de
la sentence de 17 G qui accorde à Grandsaigne la jouissance du
5
domaine du Foulhoux seulement à titre pignoratif, était-ce bien cet
art. 2262 qu’il fallait citer ? évidemment non : c ’est aux art. 2236 et
2257 qu>il faut avoir recours; o r qu’apprennent-ils ? leprem ier, « que
y (;gux qui possedent pour autrui ne piesciivent jamais , pai qucl« que laps de temps que ce soit; que ceux qui détiennent précaire« ment la chose du propriétaire ne peuvent la prescrire; » le second,
que cette prohibition 011 celte impossibilité de prescription suit les
héritiers de ceux qui jouissent à titre précaire. L ’application de ces
principes se fait immédiatement et sans efforts : le sieur Grandsaigne
a pris possession du domaine du Foulhoux en vertu de la sentence
de 1756; cette sentence était pour lui un titre précaire; elle a con
tinué de l’être pour ses héritiers qui, comme lui, n’ontpu jouir de ce
domaine que pour Philippe-Gcnest et Jeanne-Marie M artin, et jus
qu’au moment où la creance que Grandsaigne avait contre Clément
Martin serait payée : il est vrai que Grandsaigne et ses héritiers
ont fait tous leurs efforts pour intervertir leur titre et changer la
nature de leur possession, mais ils n’ont pü y parvenir; et l’arrêt
du i5 août 1852, ayant jugé que la jouissance du Foulhoux n'a
vait* été que
p r é c a ir e
et à
titre
pignoratif
,
a , par cela m êm e,
formellement décidé que les restitutions des jouissances, pas plus
que le droit de propriété de ce domaine , ne pouvaient être expo sés aux effets de la prescription.
�Les sieurs Dumiral objectent ensuite que , depuis le partage du
20 décembre 1770, les intérêts des deux branches co-partageantes
ont été distincts et séparés , que la branche de Marguerite Delotz
est toujours demeurée étrangère à la possession du domaine du Foul
houx , que conséquemment elle a pu prescrire contre la sentence
de 1756; que si quelqu’un a pu être privé du bénéfice de cette
prescription, ce n’est que la branche Philippe et spécialement les
Dupic q u i,
ayant
joui seuls du domaine du Foulhoux, sont aussi seuls
comptables des restitutions de jouissances.
L e m oyen, il faut en convenir, est ingénieux; mais sous quels
rapports? on aime à voir les sieurs Dumiral héritiers Grandsaigne,
«ayant recueilli, à titre de partage, des immeubles en valeur de plus
de
5oo,ooo fr.,
faire tous leurs efforts pour conserver les bénéfices
de cette florissante position er.se soustraire à l’obligation de suppor
ter les charges et de contribuer au paiement des dettes; on ne peut
mieux entendre sa position de plaideur; mais lorsque les sieurs D u
miral ajoutent qu’ils combattent de damno 'vitando, ne doivent-ils
pas craindre que le lecteur, se rappelant Basile arrangeant des pro
verbes à son usage, ne traduise ainsi : C e qui est bon à prendre et
bon à garder.
M ais, considérée logiquem ent, que signifie l'argumentation des
sieurs Dumiral? ~
Ils invoquent le partage de *77°» pour prouver que , dès cetle
époque, ils ont eu, respectivement au Foulhoux, des intérêts distincts
de ceux de la branche Philippe, qui a reçu ce domaine dans son lot;
mais c ’est avec ce même partage que M* Constant prouve lui-même
aux sieurs Dumiral q u e , relativement au domaine du Foulhoux, il
y a toujours eu communauté d’intérêts entre tous les héritiers Grand
saigne; que, pourcet objet, il y acu, entr’eux, une société de béné*
ficeset conséquemment de pertes, qui a duré jusqu’au moinentde l'é
viction ( V (¿lits généraux, p. 3f) cl
5 ).
Ainsi les sieurs Dumiral ne
peuvent donc se prévaloir d’intérêts distincts; leur position est ;fbso-
1ument la même que cî lie des héritiers Dupic.
D ailleurs, dans la position des choses, que signifieraient ces
intérêts distincts ? la sentence de 1756 imposait une obligation au
�sieur Grandsaigne : ce dernier non seulement l’a acceptée , mais
encore il y en a ajouté personnellement une nouvelle en se mettant
en vertu de cette sentence en possession du Foulhoux , après avoir
fourni caution et s’être engagé solidairement avec elle à la resti
tution des jouissances; or, en agissant ainsi, le sieur Grandsaigne ne
s’est-il pas obligé, pour lui et pour scs héritiers, C C . 1 122? uetaiiil pas tenu de remplir scs engagemens sur tous ses biens immobi
liers, CC. 2092? et tous les héritiers Grandsaigne ne sont-ils pas
tenus des dettes et charges de la succession , d’abord , chacun dans
la proportion de ce qu i l y p rend ,'C G . 870, et tous, hypothécai
rem ent, pour la totalité de la dette , C C . 875?
Dès-lors, qu’importe à M e Constant que le domaine du Foulhoux
soit échu à telle ou telle autre branche de la famille Grandsaigne?
que lui importerait même que ces héritiers eussent entr’eux, pris
des arrangemens ou fait des stipulations contraires à scs droits?
Me Constant, étranger à tous ces actes, pourrait-il craindre qu’ils
pussent, j a m a i s , lui être opposés, au moins avec succès?
Mais les sieurs D um iral, dans leur ardeur de controverse de
lucro captando, ne s’aperçoivent pas que leur système blesse toutes
les idées reçues en matière de partage. Ils savent bien que le do
maine du Foulhoux, échu au lot de la branche Philippe, présentait
une
c ra in te
d’éviction pour une cause antérieure au partage de 1770,
que dès-lors la branche Delotz demeurait garante envers ses cohéritiers de cette éviction, si jamais elle avait lieu, C C . 884; ils saventbien que le partage de 1770, loin de contenir une clause particu
lière et expresse qui excepte de la garantie 1 éviction que la branche
Philippe pourraitsouili 11 du domaine du Foulhoux, a, au contraire,
une clause particulière et expresse qui établit entre tous les héritiers
Grandsaigne, et relativement au Foulhoux, une communauté d’inté
rêts et une société qui ne doit être liquidée qu’après l’éviction; ils
savent bien aussi que pendant que les Dupic jouissaient du domaine
du. Foulhoux, les Rudel jouissaient du domaine des Robins, que si
le Foulhoux n’avait point cte retenu dans la succession Grandsaigne
ni compris dans le partage de 1
77° »
Rudel n’auraient eu que la
nioitié du domaine deS Robins, que conséquemmeut c ’cst pour eux,
�Rtidel, que les Dupic ont joui de la moitié du Foulhoux : les sieurs
Dumiral savent tout cela.et ils n’en soutiennent pas moins qu’ils doi
vent garder leur loi exempt et intact de toutes dettes et que les res
titutions des jouissances du Foulhoux doivent ê tre , en totalité ,
supportées par les héritiers Dupic ! il y a là un esprit d’avcuglemem,
qu’on ne saurait qualifier.
Des ce moment on pourrait, sans danger pour Me Constant ,
abandonner ce moyeu de prescription à lui-m êm e; il convient ce
pendant de lui opposer de nouveaux moyens dont-Tun, spécialement,
est de la plus haute importance par l’application décisive qui doit
s’en faire, non seulement à la prescription, mais encore aux princi
pales questions des deux affaires soumises à l’examen de la Cour.
5
La sentence de r7 G form ait, entre Grandsaigne et les M artin,
un contrat pignoratil ou antichrese ; or quelles sont les règles de
l’anlichrèse? celles du ga ge, Code civ il, art. 2090. Ces règles sont
très-nettement exposées dans l’article
2o 85
du Code civil qui, en
cette matière, est conforme aux anciens principes dont il est le résu
mé le plus exact. «Le gage est i n m
visib le
nonobstant la divisibilité.
« de la dette entre les héritiers du débiteur, ou ceux des créan
ciers». Le principe d’indivisibilité du gage est donc absolu, il
ne reçoit aucune exception, pas même celle qui semblerait devoir
résulter de la divisibilité de la dette; et pour qu’on ne se méprenne
pas, la loi, faisant elle-même l’application du principe qu’elle vient
de poser, ajoute : « & héritier du débiteur, qui a payé sa portion
k
«
er
«
de la dette, ne peut demander la restitution de sa portion dans
le g age ) et réciproquement l’héritier du créancier qui a reçu
sa portion de la dette ne peut remettre le gage au préjudice
de ceux qui ne sont pas payés ». Bien certainement ce texte n’a
pas besoin de commentaire; et comme il n’est pas contestable que
les accessoires d’un contrat ou d’une obligation ont les mêmes caractèrcs que cette obligation et doivent suivre son sort, d devient
évident que l’obligation de restituer les jouissances , résultant d’un
contrat à titre pignoratif, est aussi indivisible que l’obligation de
gendre la propriété qui a (ait l’objet et la matière de ce contrat. Ces
deux obligations, naissant l’une de l’autre, sont tcllemenL Connexes»
�qu’elles ne sauraient être régies par des principes differens. Ce prin
cipe d’indivisibilité s’applique activement à M e Constant : comme
créancier des jouissances du Foulhoux , il lui donne le droit de les
réclamer en totalité contre chacun des héritiers Grandsaigne, et
chacun de ces héritiers est, à son tour, tenu envers INI0 Constant de
lui payer la totalité de ces jouissances, sans pouvoir lui opposer le
bénéfice de division.
Ces principes et leurs conséquences ne sauraient être atteints par
aucune objection sérieuse; les sieurs Diyniral ne peuvent même
opposer, comme argument, l’art. 1220 du Code c iv il, relatif aux
effets de l’obligation divisible; car si cet article, tout en reconnaissant
que 1 action susceptible de division doit être exécutée entre le créan
cier et le déb iteu r comme si elle était indivisible, déclare cependant
que la divisibilité reçoit son application à l’égard des héritiers du
créancier et du d é b ite u r, le n u m éro
de l’article 1 2 21 fait cesser
ce bénéfice de divisibilité à l’é g a r d des héritiers du débiteur,
« lo rs q u ’il résulte , soit de la nature de l’engagem ent, soit de la
« chose qui en fait l’objet, soit de la fin qu’on s’est proposée dans le
5
«r con tra t, que l’intention des contractais a été que la dette ne piit
<r s’acquitter partiellement».
Il
faut donc que les sieurs Dumiral héritiers du sieur Grand
saigne débiteur subissent toutes les conséquences de l’obligation
conditionnelle et indivisible qui pesait sur lui; o r , un des effets les
plus directs de cette indivisibilité est que la reconnaissance de la
dette par l’un des débiteurs, ou 1 interpellation judiciaire qui lui se
rait faite p arle créancier, interrompt la prescription contre tous les
autres , même contre leurs héritiers, C C . 2249.
cette interrup
tion, de l’aveu des sieurs Rudel, existe entre les Dupic.
L e moyen de prescription,' considéré sous ces différons rapports,
ne saurait donc êtresérieusenicnt soutenu: mais si, contre l’évidence
du fait et du droit, 011 accordait pour un instant aux sieurs Dumiral
qu’avec les héritiers
D upic, que ces derniers, comme représentant seuls Grandsaigne,
que le contrat de nantissement n’a continué
oiit été aussi seuls substitués à ses obligations, la position des sieurs
Dumiral Cn serait-elle meilleurej pourraient-ils opposer la près-
�cription? on ne le pense pas : effectivem ent, si les D u p ic, comme
débiteurs, étaient seuls tenus des restitutions des jouissances , les
sieurs Dumiral seraient eux-mêmes tenus de cette restitution comme
caution delà jouissance des Dupic : et pourquoi? parce que Grand
saigne, qui ne pouvait prendre possession du domaine du F o u l
houx qu’en fournissant préalablement caution , a fait ses soumissions
conjointement et solidairement avec elle; que par l’effet de cette
soumission Grandsaigne a hypothéqué tous ses biens; et que consoquemment les sieurs Dm niral, reconnaissant que la dette subsiste
contre le principal débiteur, ne pourraient, eux caution, se préva
loir de la prescription , CG.
o.
225
E n voilà assez sur cette prescription ; et si à ces arguinens l’on
ajoute ceux qui ont déjà été exposés dans les faits généraux et qui
r ésu lte n t, soit de la nature de la créance , soit des différons arrêts et
jugement qui sont intervenus, soit même de la demande en reprise
3
formée par le sieur Ducheyroux en 18 1 , on ne pourra qu’être
étonné de ce qu’après des plaidoiries qui auraient dû éclairer les
sieurs Dumiral sur la faiblesse de ce m oyen, ils insistent encore à lo
présenter et à en faire m êm e, dans leur m ém oire, l’objet d’une
proposition toute spéciale.
§
4-
C ’est seulement à l ’ordre que l’ on doit exam iner si le tiers du
domaine des Robins est atteint par l’hypothèque de M* Cons
tant. — L es sieurs Dumiral sont non recevables à soutenir de
vant la Cour que le tiers des Robins est affranchi d’inscription.
__ L 'acte de 1806 n’est qu’une simple licitation entre cohéritiers ,
cet acte ayant tous les caractères d ’un premier acte de partage
ne peut produire que les mêmes effets. — L ’acte de 1 8 0 6
n’ayant point été transcrit a été valablement frappe par l ’ins
cription de Me Constant. — S i le tiers des Robins est devenu un
bien propre <ui sieur R u d e l , il n’en est pas moins atteint par
l ’hypothèque de M ,: Constant.
Il
faut exposer les moyens qui appuycni et établissent ces diffé
rentes propositions.
�3
L ’acte du 1 avril 1806 produit pour la première fois en la Coin
par les sieurs D um iral, et qui sert de fondement à leur demande
nouvel le serait une vente consentie par Philibert-Philippe R udel,
dit le chantre, à François-Joseph Rudel Ducheyroux son neveu; l’un
et l’autre étaient héritiers de Marguerite D elolz, épouse de PierreBlaiseRudel. Cette successionu’avaitpoint étépartagée, de manière
que cette vente de 1706 est le premier acte qui soit intervenu entre
cohéritiers. Cet acte contient vente du tiers du domaine des R o
bins et l’acquéreur en paye une partie du prix en déléguant au ven
deur une créance de 2000 fr. faisant aussi partie de la succession
de Marguerite Delotz, femme Rudel; au reste, cette vente n’a point
été transcrite.
Cela posé, est-ce le moment de rechercher si le tiers du domaine
des Robins , prétendu acquis en 1806, est affranchi de l’inscription
prise par M® Constant, le 6 août i o; et si, quant à ce tiers, l ’ins
cription doit être rayée?
L ’e x a m e n de cette question serait actuellement intempestif, par
la raison que , l’inscription de M e Constant frappant généralement
sur tous les biens provenant du sieur Grandsaigne et ne ponant pas
taxativement sur le domaine des Robins, si le tiers de ce domaine
85
avait cessé de faire partie de cette succession ou était valablement
sorti des mains de ses héritiers, par 1’ciTet de la vente de 1806 ,
celte partie du domaine des Robins ne pouvait être atteinte par
l’inscription de 1
85o.
Et comme il est reconnu que la totalité du
domaine des Robins piovicnt du sieur Grandsaigne, qu’il est éga
lement certain qu il <• etc vendu en entier par les sieurs Dumiral
héritiers du sieur Grandsaigne, que dès-lors, comme il ne s'agit
plus aujourd’hui que de la distribution du prix de cette vente, il est.
évident que toute question, ayant pour objet de rechercher quelle
est la portion du prix de ce domaine qui a été atteinte par l’inscrip
tion de M eConstant, doit être nécessairement renvoyee à l’ordre.
Mais les sieurs Dumiral sont-ils recevables à saisir la Cour de la
connaissance de cette demande? les dispositions de l’urticle 464 du
Code de procédure civile sont expresses : I l ne sera fo rm è, en
k cause d ’a p p e l, aucune nouvelle dem ande, à moins qu’il ne
13
/
�« s’agisse tle co m p en satio n o u que la demande nouvelle ne soit
« la défense à l’action principale. » Voilà la règle et son excep
tion.
Cela posé, qui a introduit l’action principale? les sieurs D um i
ral. Comment se sont-ils expliqués relativement au domaine des Ro
bins? ils ont reconnu en première instance- que ce domaine pro
venait en totalité du sieur Grandsaigne; ils se servaient même de ce
fait pour appuyer leur demande en réduction de l’inscription ; com
ment dès-lors les sieurs Dumiral pourraient-ils, aujourd’hui, à l’aide
de titres produits pour la première fois , former une nouvelle de
mande devant la C o u r, demande que non seulement ils n’ont pas
présentée en première instance, mais à laquelle ils ont encore si
expressément renoncé.
Faudrait-il pousser plus loin cet examen, et rechercher ce qu’est
l ’acte du i3 avril 1806, et quel effet il doit produire? qu’apprendrait-011? cet acte est, sil’on veut, une vente; mais elle estconsentie
par Un héritier à son cohéritier; mais cette vente comprend des
objets provenant d’une succession indivise, le tiers du domaine des
Robins dépendant de la succession Grandsaigne ; mais antérieure
ment à cette vente, il 11’y avait pas e u de partage entre le vendeur
et l'acquéreur de la succession qui leur était commune; mais l’ac
q u é r e u r lui-mônae payait partie du prix de son acquisition au moyen
de la délégation d une créance qui ferait partie de la succession
encore indivise. Q u ’était dès-lors cette vente de 180G? rien autre
chose qu’une licitation entre cohéritiers, un acte ayant tous les c a
ractères et devant produire tous les effets d’un premier acte de par
tagé (argument tiré de l’art. 888 du Code civil. — V . D alloz, V*
Success.,
t.
12 ., ch.
6 .,s e c t. 3 ., art. 5 .); dès-lots en quelle qualité le
sieur D ucheyroux détient-il le tiers du domaine des ltobins? évidem
ment à titre d’héritier : il ne peut donc établir aucune distinction
entre le tiers qu’il a acquis et les autres parties de ce domaine, et
l’inscription de M" Constant l’a valablement frappe de l’hypothèque
qui affectait tous les biens du sieur Grandsaigne.
Actuellement, si l’on voulait considérer le sieur lludel Duclieyïoux
comme tiers-acquéreur de ccttepartic du domaine des Robins.
�t ( ,-0 1 \. )
quel avanlagc pourrait-il tirer do cette concession? la Vcnlc du
i avril 180G n’a pas été transcrite, donc elle a cto valablement f,..p
pée par l’inscription du 6 août i o , c’est là le principe. Il est vrai
que les sieurs Dumiral veulent se placer dans une exception résul
tant de ce qu’avant le code de procédure c iv ile , la vente seule
5
85
suffisait pour purger les hypothèques qui pesaient sur les immeu
bles vendus, quand ces hypothèques n’avaient point été conservées
par une inscription antérieure à la vente.
En point de doctrine, cette distinction est v ra ie , mais elle ne
s’applique pas à l’espèce; et pourquoi? parce que l’inscription n’é
tait exigée que pour conserver les hypothèques créées depuis la loi
du 11 brumaire an 7 ; qu’avant cette lo i, les hypothèques exis
taient et produisaient leur effet sans inscription; d’où la conséquence
que la transcription est toujours nécessaire pour purger les im
meubles vendus des hypothèques antérieures à la loi du i 1 bru
maire an 7. Décider autrement, serait, tout a-la fois, enfreindre
la règle qui refuse aux lois un effet rétroactif, et punir le créancier
d’avoir négligé une formalité à l’accomplissement de laquelle il n’é
tait point astreint par la loi du contrat. Aussi est-ce dans ce sens que
M. Merlin a envisagé et décidé la question. — Répert., t. iG , v e
Inscrip. liypoth. §. 8 b is, n° 2 , p. 4G1. — ■L ’application de ce
principe conduit ici à un résultat aussi simple qu’évident; l’hypo
756 ,
thèque de Me Constant a été créée par la sentence de «
elle
n’avait pas besoin dètre conservée par une inscription : la vente
de 1806 devait être transcrite pour purger le tiers dos Robins do
cotte
hypothèque ancienne, elle ne la point été; donc l’inscription
85
prise par Mc Constant, le G août i o , a été valablement requise et
doit produire son eflet sur la totalité du domaine des Robins.
Enfinsi l’on considérait la vente du i avril 1806 comme ayant
5
transmis la propriété du tiers des Robins ausiour Rudel-Duchcyroux,
ce tiers en serait-il moins assujéti à l’hypothèque de Mc Constant ?
A cet égard quoi est le principe ? « Les titres exécutoires contre
le défunt sont pareil lement exccutoires contre 1 héritier personnol« lement, C C . 877- * O 1’ » quelle peut être la conséquence de cette
règle, si ce n’est que le titre Hypothécaire contre le défunt grève né-
�(
9 5-
)
cessairement les biens propres de son héritier. — V . Delvincourt,
t. 2, p. 2 7 5 , n° i : Dalloz , v° succession, t. 12 , chap. 6 , son 2 ,
n° 6. — Ainsi le sieur Rudel-Ducheyroux étant héritier du sieur
Grandsaigne, ses biens propres ont été nécessairement frappés par
l’inscription de M c Constant, créancier de cette succession : dès-lors
on doit conclure q u e , soit que le tiers du domaine des Robins ait
continué de faire partie de la succession Grandsaigne, soit que la
vente de 1806 ait rendu ce tiers propre au sieur Rudel-Ducheyroux,
héritier du sieur Grandsaigne, ce tiers n’en est pas moins assujéti
à l’hypothèque de M e Constant.
En voilà assez sur la discussion de celte première affaire qui par
elle-même ne présentait aucun intérêt, mais à l’aide de laquelle les
sieurs Dumiral ont habilement essayé de poser clandestinement
quelques pierres d’altente qu’ils pussent utiliser,, lorsqu’il s’agirait de
s’occuper de l’examen des deux procès qui ont une importance
réelle.
SECON D E
A F F A IR E .
D E L 'O R D R E .
P rocéd u re et ju g em en t.
Ap rès l’expiration des délais que la loi accorde pour surenché
rir, et le 20 juillet 1832, lesieur Pine-Bouterige, acquéreur, requit
l’ouverture de l’ordre sur le prix de sa ven te, et lit somrnati >11 de
produire aux créanciers inscrits.
Après cette production , le juge-commissaire dressa, le 20 mars
833
i
, son procès-verbal de collocation provisoire et accorda le
premier rang au poursuivant pour ses frais de poursuites.
L e juge-commissaire reconnaissant ensuite que le domaine des
Robins, dont le p r i x était à distribuer, f a is a i t p a r t i e de la succession
de Philippe-Philibcrl Grandsaigne, et qu’il existe trois créanciers
�de ce lte su cce ssio n q u i d o iv e n t ê tre p a y é s s u r le p r ix d e c e d o m a in e
p a r p r é fé r e n c e a u x c r é a n c ie r s d e l'h é r itie r G r a n d s a i g n e ,
ordonne
la séparation du patrimoine d e P h i l i p p e - P h i l i b e r t G r a n d s a i g n e d é
et que le sieur R udel rapportera a u x créan
c e lu i d e son h é ritie r ,
ciers Grandsaigne le p rix du domaine des Robins.
A près
ce tte
d isp o sitio n
q u i n ’a jam ais
été
attaq u ée
par aucun
c o n t r e d i t , p a s m ê m e p a r le s ie u r D u m i r a l , le j u g e - c o m m is s a ir e r é
g l a n t , s u i v a n t la d a t e d e l e u r s i n s c r i p t i o n s , l e s r a n g s d e s t r o is c r é a n
c i e r s q u i a v a ie n t d r o i t à la d is t r ib u t io n d u p r i x e n v e r t u d u p r i v i l è g e
d e la s é p a r a t i o n d e s p a t r i m o i n e s , a c c o r d e l e s e c o n d à l a v e u v e A u teroch e,
q u i,
3me a u
le
à ce d e rn ier
som m e
de
i
5o , o o o
sie u r L a s a lc e ;
ran g,
est
l e 4 me e t l e
5mc à
M e C o n sian t
c o llo q u é p ro v iso irem e n t
p ou r une
f r . , s o m m e q u ’il n e p o u r r a n é a n m o i n s t o u c h e r
q u ’a p r è s l a l i q u i d a t i o n d é f i n i t i v e d e s a c r é a n c e ; j u s q u e s - l à , l ’a c q u é
r e u r d e v r a re ster d é p o sita ire des fond s.
C ette p re m iè r e
s ’o c c u p e
des
o p é r a t io n étan t t e r m i n é e ,
c r é a n c ie rs p erso n n els
au
le j u g e - c o m m i s s a i r e
sieu r R u d e l;
il f i x e l e u r
r a n g d e c o llo c a tio n et le u r p e r m e t d e se faire p a y e r s u r les fo n d s
accordés
é v e n tu e lle m e n t
e u x de fo u rn ir
à
M e C o n stan t,
m ais
à
la
c a u t i o n p o u r le r a p p o r t d e la s o m m e
charge
par
q u ’ils r e c e
v r a i e n t , d a n s l e c a s o ù la c r é a n c e d e M e C o n s t a n t d e v i e n d r a i t e x i
g ib le .
L e sie u r
B o u te rig c ,
acquéreur;
le sie u r D u m i r a l ,
M e C o n s t a n t e t la v e u v e A u t c r o c h e , c r é a n c i e r s
Grandsaigne,
consignés
Lk
au
s i e UR
ont
fait
des co n tred its
procès-verbal;
B o u te r ig e
à
cette
d é b ite u r;
de Philippe-Philibert.
collocation,
il e s t i n d i s p e n s a b l e d e
les
et les
ont
a n a ly se r.
se plaint delà disposition qui le soumet
à
rester dépositaire des fonds attribués éventuellement à M° Constant
et déclare qu’il veut payer ou consigner.
M" C
onstant
attrib u é.
d e m a n d e un r a n g m e ille u r q u e c e lu i q u i lu i a été
11 sou tient
q u ’ il d o i t o b t e n i r l a p r é f é r e n c e
s u r la v e u v e
A u t c r o c h e , p a r c e q u e s o n titre d e c r é a n c e est a n t é r i e u r à c e l u i d e
c e tt e d a m e , et q u e dans les o r d r e s q u i o n t p o u r p r i n c i p e
et p o u r
r è g l e l e p r i v i l è g e d e la s é p a r a t i o n d e s p a t r i m o i n e s , l a f i x a t i o n d u
r a n g , e n t r e c r é a n c i e r s , d o i t a v o i r l i e u , n o n p o i n t a la d a t e d e
1 in s
�cription, mais bien à celle du titre.— Me Constant demande ensuite
à venir en concurrence et au marc le franc avec les sieurs Lasalce ,
et cela par la raison toute simple que leurs créances ont la même
cause et sont fondées sur le même titre.
L a dame
veuve
AuxEROcnE dem ande q ue l ’o r d r e p r o v is o ir e soit
m aintenu, q ue le ran g q u ’elle y a obtenu lui soit co n s e r v é et insiste
sur-tout sur la séparation des patrim oines.
L e s i e u r D u m i r a l a aussi consigné des contredits dans ce procèsverbal, et comme les contredits doivent, en cette matière , fixer
l ’état de la cause et poser les limites dans lesquelles la discussion
doit se renfermer , il convient de mettre quelque soin à les
analyser.
L e sieur D u m iral, s’occupant d’abord de la collocation faite
au profit de M* Constant au rae ra n g , soutient que pour le
m om ent, cette collocation ne ferait qu'entraver les parties et;
4
causer des frais
inutiles , qu’effectivement il est appelant du
832
jugement rendu au tribunal civil de T h iers, 1027 juin i
, qu’il
conteste à M° Constant tout droit d’hypothèque sur le domaine des
Robins ; hypothèque q u i, suivant lu i, n’est fondée sur aucun
titre; que d’ailleurs la séparation des patrimoines ne pourrait plus
être exercée aujourd’hui p u i s q u ’e l l e a e u lieu e n 1770 et que,
depuis ce tems, il n’est intervenu aucun jugement entre les parties.~
S u b s i d i a i r e m c n t sur ce premier p o in t, le sieur Dumiral conclut à
ce qu’il soit sursis jusqu’à l’arrêt de la Cour.
Examinant ensuite la collocation de M® Constant, collocation q u i
occupe le ,I1L' rang dans l’ordre, le sieur Dumiral la combat prin
5
cipalement par les mêmes moyens; et subsidiairemcnt il demande
encore qu’il soit sursis à l’examen de cette collocation jusqu’à l’arrêt
qui, suivant lu i , doit ordonner la main-levée des inscriptions, qu’il
avait demandée en première instance, et qui leur a été refusée par
le jugement du 27 juin i 852 .
Enfin le sieur Dumiral termine ses contredits par cette formule
<f sous toutes autres causes cl motifs qui seront déduits, le sieur
te Dumiral demande la réformatiou de l’ordre provisoire, et que
<r Me Constant ne soit pas colloqué*.
�833
C'est en cet état qu’a été rendu le jugement du 26 juillet i
Ce jugement, adoptant le contredit de Mc Constant à l’égard de
la veuve A utcroche, et considérant qu’il s’agissait d’une succession
ouverte avant la loi du 11 brumaire an 7 , colloque Me Constant à
la date de son titre, date qui est antérieure à celle du titre de ladame veuve Autcroche.
Le jugement décide ensuite que McConsiant et les sieurs Lasalce
viendront en concurrence , et prendront part à la distribution au
marc le franc de leurs créances.
Il n’y a point d’appel de ces deux dispositions ni de la part de la
veuve Autcroche ni de celle des sieurs L asalce, elles ont donc ac
quis la force de la chose jugée.
II faut mettre plus d’attention à l’examen de la partie de ce ju«
gem ent, qui est relative aux contredits du sieur Dumiral contre
M° Constant, et ce serait le moment d’analyser les conclusions du
sieur Rudel, si, pour leur intelligence complète, il ne devenait né
cessaire d’exposer un incident d’audience dont le sieur Dumiral a
ensuite cru devoir faire le principal moyen de sa cause.
Lors de la plaidoirie de l’affaire, les sieurs Dumiral faisaient sou
tenir que la validité des inscriptions de Me Constant dépendait de
l’arrêt de la Cour devant laquelle l’existence des hypothèques , qui
avaient servi de base à ces inscriptions, était, elle-même, mise eu
question.
M e Constant, plaidant lui-même sa cause et répondant à ce m oyen,
disait que le privilège de séparation des patrimoines ayant été admis
comme principe et îègle de 1 o rd re, lui Constant se trouvait, par
l’effet d’une fiction dérivant de ce p rivilège, en présence du sieur
Grandsaigne son débiteur originaire, débiteur
qui
certainement
n’avait pas le droit de faire une distinction entre ses créanciers ayant
hypothèque et ceux qui n’en avaient pas, puisqu’il était tenu de les
payer
tous sans distinction et jusqu’à épuisement de ses biens tant
m e u b le s q u ’im m e u b le s
: delà M' Constant inférait que la formalité
de l’inscription n’ayant été créée et prescrite que dans l’intérêt des
créanciers entr’eux, il n’avait pas besoin de la sienne pour figurer à
l’ord re, ci que, se trouvant seulement en face de son débiteur, il
�pourrait même sc présenter à cet ordre comme simple créancier
ehirographaire.
Ce moyen n’élait point encore développé, que client, avoué et
avocat étaient debout pour demander acte au tribunal, de quoi? de
ce que M e Constant abandonnait ses inscriptions , et consentait à ne
venir à l’ordre que comme créancier ehirographaire !... C ’était bien
tenter une surprise; mais comme le ridicule de cette scène l’empor
tait sur ce quelle pouvait avoir d’od ieu x, le tribunal et le barreau
commencèrent par en rire; cependant les sieurs Dumiral insistant,
il fallut bien que M* Constant, sur l’interpellation de M. le prési
dent, déclarât ce que tout le monde savait déjà , c ’est-à-dire qu’il
avait voulu faire un raisonnement bon ou mauvais, mais que bien
certainement il n’avait pas entendu renoncer à aucun de ses droits.
L e lendemain et par les soins des sieurs D um iral, cette scène
bouiFone fut traduite en conclusions qui ont été signifiées le 4 juillet
i
855 , et qui sont insérées
dans les qualités du jugement dont est
appel.
Dans ces conclusions, les sieurs Dumiral s’occupent d’abord des
collocations des
3 e et 4 ° rangs intéressant les sieurs Lasalce et Cons
tant et ayant pour objet les arrérages de la provision de 200 fr. ;
ils prétendent, à cet égard, q u ’ i l n’est rien dû sur ces arrérages, et
que notamment leur b r a n c h e en est complettement 1ibcree ; les sieurs
Dumiral demandent en conséquence que ces deux collocations soient
effacées de l’ordre.
I
S ’occupant ensuite de la collocation particulière à M« Constant et
placée au e rang, les sieurs Dumiral demandent acte de la décla
5
ration faite à l’audience par M c Constant qu’il n’entendait venir à
l’ordre que comme créancier ehirographaire; et, prenant cette dé
claration pour leur point de départ, les sieurs Dumiral soutiennent
ensuite que si, par l’effet de la liquidation, M® Constant était recon
nu créancier il ne pourrait, en vertu de sa créance ainsi liquidée,
venir à l’ordre que jusqu’à concurrence delà part pour laquelle Ru
del doit personnellement contribuer aux dettes Grandsaigne a raijjon de son émolument dans celte succession. CC. 87Ü.
En conséquence les sieurs Dumiral demandent principalement
�que cette collocation soit m odifiée, et qu’elle soit entendue dans co
sens, que. Me Constant, considéré comme créancier chirographaire,
ne pourra être colloque contre le sieur Iludel que jusqu’à concur
rence de la part personnelle de ce dernier dans la succession Grandsaigne.
Subsidiairement le sieur Dumiral conclut à un sursis jusqu’à la
liquidation définitive de la créance de Me Constant.
Enfin relativement à la demande du sieur Bouterige ayant pour
objet d’être autorisé à consigner le prix de son acquisition, les sieurs
Dumiral concluent à ce que cette demande soit rejetée.
L e jugement, statuantsur ces conclusions, refuse d’abord de don
ner acte au sieur Dumiral de la prétendue déclaration faite par
M e Constant, déclaration que ce jugement considère comme n'ayant
etc faite que dans un sens hypothétique, et qui a d’ailleurs été ex
pliquée par celle bien plus positive faite immédiatement par Me Cons
tant, qu’il n’entendait abandonneraucun doses droits. Ce jugement
flétrit d’ailleurs cette partie des conclusions des sieurs Dumiral en
disant que la renonciation dont ils demandent acte ne serait que
le fruit de terreur cl de la s u r p r i s e .
Examinant ensuite la partie de ces conclusions contenant con
tredits à la collocation de M> Constant classée au me rang de l’ordre
5
provisoire, le jugement repousse la demande en radiation de cette
collocation par les motifs : i° que manquant de base pour fixer
m ê m e
approximativement le montant de cette collocation, il 11e peut
la réduire; 20 qu’il ne saurait lui être permis d’empiéter sur les
prérogatives de la Cour qui s est retenu la connaissance de toutes
les questions relatives à cette liquidation, d’une part, en nommant
des experts pour estimer ces jouissances, et un notaire pour rece
voir le compte; et, de 1 autie , en se réservant de statuer après ce
compte sur les difficultés qui pourraient se présenter.— Quant au
sursis
fa isa n t
l’objet dusubsidiaire des conclusions du sieur Dumiral,
le jugement 11e s’y arrête pas et îeconnaît, à cet égard, que ses in
térêts sont suffisam m en t garantis pai la condition imposée à M e Cons
tant de 11c toucher le montant de sa collocation qu’après que sa
créance aura été définitivement iixce,
i3
�Le
afin
j u g e m e n t a d m e t la d e m a n d e f o r m é e p a r
d ’o b t e n i r p e r m i s s i o n d e
le
sieu r D o u te rig e ,
c o n s ig n e r le p r ix d e son a c q u isitio n ,
p a r la r a i s o n q u e c e t a c q u é r e u r
en faisan t o u v r i r l’o r d r e
c r é a n c i e r s en d e m e u r e d e t o u c h e r le p r ix ;
créa n cie rs
ne
et q u e le v e n d e u r
ne
que
p e u v e n t a u jo u r d ’h u i le r e c e v o i r v a l a b l e m e n t ,
a m is les
ces
r a p p o r t e p a s la m a i n - l e v é e d e s in s c r ip tio n s q u i g r è v e n t le d o m a in e
d e s R o b in s.
3
Quant aux collocations Lasalce et Constant, classées aux mc et
4mc rangs , comme elles n'avaient été l’objet d’aucun contredit, le
jugement prononce à cet égard par un simple débouté.
Enfin , les dépens doivent être employés en frais d’ordre , niais
en faveur de qui? la taxe l’apprend. D ’abord taxe est accor dée
au débiteur, ensuite au poursuivant qui n’aurait pas même dù figu
rer dans l’ordre; et, chose remarquable! cette taxe est refusée à
M c Constant, créancier, partie nécessaire à l’ordre.
y a là une
11
erreur évidente qui doit ctre réparée sur l'appel incident que
M c Constant interjettera sur ce chef, si mieux n’aime
la Cour or
donner que les frais exposés par ce dernier, en première instance,
seront taxés avec ceux de l’arrêt à intervenir.
Les sieurs Dumiral ont interjeté appel de ce jugement par exploit
du
septembre 1853, qui n’a étésigniilé ni à personne ni au domi
cile réel, mais seulement au domicile élu par 1 inscription de
M® Consiant.
Cet appel repose sur quatre griefs bien distincts :
Les sieurs Dumiral se plaignent ,
i" De ce que la dame veuve A uteroche, au lieu de conserver le
rang qui lui avait été attribué dans le classement provisoire , n’a été
eolloquée qu’après M* Constant : — Ce moyen était rid icu le, il n’a
point été reproduit devant la Cour ;
a® De ce que les collocatious faites aux
3* et 4 ®rangs ont été in
tégralement maintenues p a rle jugement qui n’a pas même ordonne
la déduction des quittances rapportées cl de celles qui pourraient
être produites plus tard. — Celle déduction , étant de droit, ne de
vait pas (aire l’objet d’une disposition expresse et spéciale;
3° Que relativement à la collocation classée
5
au * rang, le tribu-
�val, en donnant acte de la déclaration faite p ar M e Constant qu’il ne
venait à l’ordre que comme créancier chirographaire, n’aurait du
Yy admettre qu’en cette seule qualité, et ne faire conséquemment
supporter aux sieurs Dumiral qu’une portion de la créance Constant
équivalente à leur part virile dans la succession G randsaigne, et
ratione em olum enti;
4° Que le jugement ne devait point accorder au sieur Bouterige
la permission de consigner le prix de son acquisition.
L e dispositif de ces conclusions est en corrélation parfaite avec
l ’exposé des griefs :
Les sieurs Dumiral déclarent qu’ils interjettent appel, mais se u
lem ent quant a u x chefs ci-devant énoncés.
Us assignent Constant pour voir infirmer ce jugem ent, relative
ment aux chefs ci-devant détaillés.
En c o n s é q u e n c e les s ie u r s D u m i r a l , c o n c l u a n t s u r c e s q u a t r e
clieis , d e m a n d e n t ,
^
10 Q “ ’1’1 leurso,'t donné acte delà déclaration de M e Constant •
2° Que la collocation de la veuve Auteroche soit maintenue • ’
° Que les collocations classées a „x * et e rangs soient eflacées
5
3
4
et subsidiairement quelles soient réduites d’après les quittances
r a p p o r té e s , ou qui seront ultérieurement produites par les sieurs
Grandsaigne.
40 (O n copie)* que dans le cas o ù , par le résultat de la liquida
it lion définitive do ses prétentions énoncées en la collocation faite
5
«r au e rang, M« Constant se trouverait créancier de Philippe-Phi« libert Grandsaigne, voir ordonner qu 'il ne sera colloqué que
comme créancier chirographaire de cette succession, et par
« c o n s é q u e n t pour la part personnelle e t virile dont est tenu le
«r
« sieur Rudel avec ses autres cohéritiers des dette? delà succession.»
Rien ne saurait être plus positif que cet appel : il expose netteinent les poi«j> en litige, limite le champ delà discussion, et borne
lui-méinc la haute juridiction de la Cour à l’examen des quatre
griefs qu’il présente. Hors delà plus de discussion possible , car on
ne discute pas l’autorité de la chose ju g é e , et bien nécessaireinentles
�( 100 )
sieurs D um iral, en limitant leur appel, ont par cela même acquiesce
aux dispositions du jugement qu’ils n’ont point attaqué.
C e p e n d a n t c e ne s e ra it p lu s s u r c e s p o in ts u n iq u e s q u e l’a tte n tio n
d e la C o u r d e v r a i t ê t r e fix é e : d e n o u v e lle s d e m a n d e s
o u i sur<n,
o 1
sont-elles recevables? l’examen de cette question devra entrer dans
la discussion.
D IS C U S S IO N .
Si cette affaire était examinée dans son état primitif, et même
5
dans celui où elle avait été placée par l’acte d’appel du 2 sep
tembre i
, elle présenterait bien peu de difficultés réelles; les
855
sieurs Dumiral l’ont bien senti; un grand effort leur était nécessaire,
il leur fallait un essai qui en imposât même par sa hardiesse. Aussi
un système nouveau a-t-il été tout-à-coup im provisé, et les sieurs
D um iral, déposant avec joie leur vieille armure, ont-ils, dit-on,
tressailli de joie à la vue du bon bouclier qu’une main habile leur a
présenté.
11 faut voir si les sieurs Dumiral sont encore vulnérables, et si
cette affaire, présentée dans l’ordre le plus simple peut, dans sa so
lution, faire naître des difficultés plus sérieuses que la première.
L ’ordre adopté pour cette discussion est des plus simples ; en la
forme : on examinera d’abord si 1 appel des sieurs Dumiral est va
lable. Au fond : on devra rechercher si les sieurs Dumiral sont re
cevables à prétendre que la succession Grandsaigne n’est pas débi
trice de IM° Constant; si d’ailleurs en fait ils justifient cette prétention;
si les sieurs Dumiral sont recevables à examiner les effets de la sé
paration des patrimoines prononcée par le procès-verbal de collo
cation provisoire et par le jugement dont est a p p el, et à soutenir
que cette séparation ne s’exercera que sur le domaine des Robins ,
sauf ensuite;» prouver que cette prétention n’est pas fondée : enfin,
si le principe de la divisibilité des dettes entre coheriui*^ peut s’ap
pliquer a l’espèce, et si en droit la divisibilité des dettes peut être
invoquée quand il s’agit de la séparation des patrimoines. Cette dis
cussion se terminera par quelques réflexions sur la permission do
�c o n s ig n e r
accordée au sieur Bouterige par le jugement dont est
appel-
§ Ier
En la fo rm e , l ’appel des sieurs D u m iru lest nul : M* Constant
est recevable à opposer celte nullité et ci s’ en prévaloir.
25
On sait que l’appel interjeté par les sieurs Dumiral, le
sep
tembre 1855 , n’a été signifié ni à personne ni au domicile réel, mais
seulement an dom icile élu par l’inscription de M« Constant.
Q uelle est la règle? « l’appel sera signifié à personne ou domi-
5
r c ile , à peine de nullité » C pr. civ. /, G. — Quelle est l’excep
tion ! s il s agit de saisies-exécutions , le poursuivant doit élire
domicile dans la commune où doit se faire l'exécution, «r et le dca biteur pourra faire à ce domicile élu toutes significations. . . » même
d’appel.— C. pr. civ.
4On comprend l ’utilité et même la nécessité de cette exception ;
une saisie-exécution est un acte de rigueur qui peut causer le plus
grand préjudice à la personne contre laquelle il est exercé. Si le
débiteur peut s’y soustraire, la loi a du lui en faciliter les moyens ;
voilà pourquoi elle a exigé que le créancier fut tenu de rapprocher
fictivement son domicile de celui du débiteur; par là, elle a voulu
53
éviter un mal souvent irréparable en donnant au débiteur les moyens
de se défendre promptement de poursuites injustes. Mais cette ex
ception confirme la règle.
Le c o d e d e p r o c e d u i e c o n t i e n t - i l
en m a t iè r e d ’o r d r e u n e excep-*
l i o n d e c e t t e n a t u r e : 1 o n s e d e m a n d e r a i t d ’a b o r d
à
q u o i e lle s e ra it
b o n n e , q u e l s i n c o n v e n i e n s Je l é g i s l a t e u r a u r a i t p u é v i t e r ? e t il f a u t
c o n v e n i r q u ’ il s e r a i t b i e n d i f l i c i l e d ’e n s i g n a l e r a u c u n .
c h e d o n c une e xce p tio n
à
On
recher
u n e r è g le g é n é r a le , e x ce p tio n q u i serait
san s m o tifs c l q u i p a r ce la m ê m e n e d o it p a s e x is te r d a n s u n e b o n n e
législation.
Aussi l’art. 763 du Code de procédure civile (A u titre de l’ordre),
en réduisant à 10 jours le délai de l’appel, dit-il que l’appel ne sera
reçu s’il n’est interjeté outre un jour pour trois myriameires de
�( 102
)
« d isla n ce d u d o m ic ile r é e l d e c h a q u e p a rtie .
eu
term es
» P e u t-o n ra p p e le r
p lu s f o r m e l s e t p lu s e x p l i c i t e s q u e n e l e fait c e t a r t ic le
7 6 5 , la r c g l e d e la
signification à personne ou donncilel P o u r q u o i
c e t t e a u g m e n t a t i o n d e d é l a i , si l ’ a p p e l , e n m a t i è r e d ’o r d r e , n e d e v a i t
p o i n t , à p e in e d e n u l l i t é , ê tr e sig n ifié a u d o m ic ile
p eut supposer
r é e l ? 011
ne
d a n s la lo i d e s d is p o s itio n s i n u t i l e s , to u te s d o i v e n t
a v o ir u n e a p p lica tio n p ra tiq u e , su rto u t en m a tiè re d e p r o c é d u r e ; et
n ’ e s t- il p a s é v i d e n t q u e c e t t e a u g m e n t a t i o n d e d é l a i s e r a i t d a n s la l o i a u
m o in s u n e su p e rflu ité d é p o u r v u e
d e s e n s s i l ’o n p o u v a i t a d m e t t r e
q u e l ’a p p e l p e u t è l r e v a l a b l e m e n t s i g n i f ié a u d o m i c i l e é lu
c r ip tio n .—
d e u x arrêts,
C ' e s t d a n s c e s e n s q u e la q u e s t i o n a é té
l’un
d e la
C ou r
par
T ins-,
d écid ée p a r
d e Ilio in , d u 20 a o û t 1 8 1 0 .— V . S ir e y ,
t . 1 4 — 2 — 7 0 ; — l ’ a u t r e d e P a r i s — V . D e n e v e r s , t. 1 0 — 2 — n . - r r
Ces
d e u x arrêts ont ju g é
q u ’ e n m a t i è r e d ’o r d r e ,
q u a n d il n ’a é t é s i g n i f ié q u ’ a u d o m i c i l e é lu
l’a p p e l e st n u l
par l’inscription.
L e s y s t è m e q u e l ’o n o p p o s e à c e s p r i n c i p e s s e r a i t f o n d é s u r l e s
d is p o s itio n s d e s art.
111, 21
56 d u C C .
et 5 9 d u c o d e d e p r.
A v a n t d ’o u v r i r l a l o i u n e r é f l e x i o n s e p r é s e n t e à l ’ e s p r i t ; c e s d e u x
c o d e s n e p e u v e n t a v o i r e t n ’o n t r é e l l e m e n t p a s l e m ê m e o b j e t : l e
c o d e c iv il r è g le le fo n d d u d ro it, le c o d e d e p r o c é d u r e en o r g a n is e
l ’e x e r c i c e : p r e m i è r e r a i s o n
p o u r co n su lte r
l ’a u t r e s u i v a n t q u ’i l s ’a g i t d u f o n d
l ’u n
de p ré fé re n ce
o u d e la f o r m e . L e
à
c o d e civ il
a y a n t p r é c é d é l e c o d e d e p r o c é d u r e , il e l a i t n é c e s s a i r e q u ’ e n f i x a n t
l e d r o i t il d o n n â t e n m ê m e t e i n s q u e l q u e s r è g l e s d ’ a c t i o n , m a i s c e s
d e r n i è r e s r è g l e s p o u v a i e n t n ’ê t r e q u e t r a n s it o ir e s : a u c o d e d e p r o
c é d u r e il a p p a r t e n a i t d e l e s a d m e t t r e d é f i n i t i v e m e n t ,
d e le s
chan
g e r , d e les m o d i f i e r , s u r t o u t d ’ e n c r é e r d e n o u v e l l e s p o u r le s c a s
q u i n ’a u r a ie n t p a s é té p r é v u s p a r le c o d e c iv il.
d r o its les r è g le s
c o d e ; il p e u t s e
d ’a c t i o n
faire q u e
A lo r s p o u r ce rtain s
p e u v e n t se t r o u v e r d a n s l’u n et
l ’a u t r o
d e s a cte s d ’u n e m ê m e p r o c é d u r e aien t d e s
f o r m e s p a r t i c u l i è r e s ; m a is q u e ré s u lte r a -t-il d e c e l a , si c e n ’e st q u e
c e lu i q u i a g it d o it stric te m e n t se c o n fo r m e r a u x fo rm a lité s e x ig é e s
p o u r la v a l i d i t é d e s o n a c t e , q u e l q u e s o i t d ’a i l l e u r s l e c o d e q u i e n
a i l t r a c e l e s r é g l é s ? m a i s s ’ il y a v a i t d i f f i c u l t é o u d o u t e s u r l e < h o i x
e t 1 a p p l i c a t i o n d e c e s r è g l e s , il e s t é v i d e n t q u e s ’i l s ’a g i t d e f o r m e ,
�c ’esi le code do procédure qui doit être seul consulté pour servir à
]es r é s o u d r e et à les le v e r , puisqu’il est spécial sur cette matière et
que d’ailleurs, étant postérieur au c o d e civil, il aurait abrogé toutes
dispositions contraires ou qui ne seraient point en harmonie avec
les règles nouvelles que le législateur a cru devoir admettre.
Cela posé, que faut-il rechercher? des règles de procédure ou
de forme relativement aux inscriptions ou à l’ ordre. O r , quels articlescitent lessieursDumiral? d’abord l’art. 111 du CC. quisc trouve
au titre du domicile; ensuitej et sans doute pour servir d’appui à
ce premier article, les sieurs Dumiral invoquent l’art.
59 , §
9 du
Code de procédure, qui est placé au titre des ajournemens.
Quelles sont les dispositions de l’art. 111 duCC .? si un acte contient
do la paît d es p arties ou de l’une d’elles, élection de domicile pour
l execution de ce même acic , les significations , demandes et pour
suites relatives u cet acte pourront être faites au domicile convenu
e t devant le ju g e d e ce dom icile. — Q u e suppose cet article? d ’a
bord un acte contenant convention sur 1111 objet déterminé; et en
suite une seconde convention ayant pour objet de faciliter l’exécu
tion de la première par une élection de domicile et une attribution
de juridiction tout-a-fait spéciale. O r , quel rapport peut avoir
cet article avec la mesure conservatoire do l’inscription requise par
un créancier contre son débiteur? bien évidemment il n’y a point là
d’acte contenant convention relativement l’élection de dom icile, il
faut donc chercher ailleurs si cotte élection de domicile est néces
saire en maliere d inscription, et quel estl’elïet qu’elle doit produire.
L e § 9 de l’art.
59 du C. de pr. se réfère à l’art. 11 1 duC .
civil ; il le
cite même pour établir une exception à la règle que l’assignation
doit être donnée à personne ou domicile; cette exception est « qu’en
eus d’élection de domicile pour l’exécution d’un acte, l’assignation
peut être donnée devantle tribunal du domicile élu; « mais pour cela
il làul qu’il y ail, conformément à l’art, r 11 du C C ., convention entre
les parties sur cette élection de dom icile; ces deux articles doivent
donc être l’un et l ’ a u t r e écartés comme étrangers à la difficulté dont
on cherche la solution.
lledisons-le : que pcul avoir de commun l’eïecti on de domicile ,
�( I04 )
dont parlent les articles 111 du Code civil et £>9 du Code de procé
dure, avec celle que doit contenir une inscription? élection de do
m icile qui est ordonnée pour des cas spéciaux , et dont les effets et
Je résultat sont déterminés par la loi : en effet cette élection de domile est exigée seulement dans l’intérêt du nouveau propriétaire
qui veut remplir les formalités qu’indique l’article 2 1
85
du Code
civ il, et dans l’intérêt de celui qui, voulant poursuivre un ord re,
est tenu de notifier les sommations de produire à ce domicile é lu ,
conformément à l’article 753 du Code de procédure.
Il est vrai que , d’après l’article 2 1
du Code civil, on peut en
core signifier à cc dom icile les exploits au sujet des actions aux-«
quelles donnent lieu les inscriptions. Mais il ne faut pas croire que
56
les dispositions de cet article s’appliquent à l’action que le débiteur
pourrait introduire contre son créancier, et pourquoi ? parce que ,
comme il a déjà été démontré , l’inscription n’intéresse que les
créanciers entre e u x , que le débiteur n’a le droit d’en demander
la radiation ou la réduction qu’autant qu’elle ne repose point Sur un
titre valable ou transférant hypothèque ; que c’est alors le titre qui
devient la matière et le fond du litige; que l’inscription qui 11’en
est que l’accessoire s’anéantit ou se modifie avec l u i , d’où la con
séquence que l’action qui intéresse le débiteur seulement doit être
introduite dans les formes ordinaires et 1 assignation donnée au do
micile ré el, puisque le code de procédure ne fait^ pour ce cas,
aucune exception à lagle générale.
Si l'on décidait que l’art. 2 1
56
du code civil permet au dé
biteur de former sa demande en la signifiant au domicile élu par le
créancier, faudrait-il également admettre que l’appel peut être valablcmenl interjeté au domicile élu? non, la demande et l’appel se
raient alors régis par des règles différentes, règles qui devraient
être également respectées et recevoir leur exécution dans les cas
auxquels elles s’appliquent; o r, étant démontre que 1 art. 765 du
code de procédure maintient, en matière d’ordre, la règle générale
introduite par l’art. /| G qui veut que l’appèl soit signifie à personne
5
ou domicile a peine de n u l l i t é , ce vice de nullité reproché à
j ’actc d’appel des sieurs D um iral, devient de plus en plus évident.
�Enfin, dans les intérêts des sieurs D um iral, on oppose un arrêt
de la Cour de cassation, sous la date du 20 avril 1817. Cet arrêt ne
saurait affaiblir Fautorité de ceux qui ont été cités, il est unique ;
c’est un arrêt de rejet, et sous ces deux rapports il ne saurait fixer la
jurisprudence. 11 faudrait donc en revenir aux principes qui ne
permettent pas aux tribunaux d’étendre les règles ou d’y créer des
exceptions contre le texte précis des lois qui les ont posées. Cepen
dant en examinant cet arrêt de plus près, on s’assure d’une part qu’il
a été rendu dans une espèce oii un créancier inscrit agissait contre
un autre créancier inscrit; que dès-lors y ayant élection de domicile
des deux côtés , la faculté d’agir au domicile élu était respective et
commune aux deux parties; d’un autre côté, il était question d’une
demande qui était la suite et l’e jje t nécessaire de Vinscription
contenant élection de domicile , tandis que dans notre espèce c’est
un débiteur , n’ayant point de domicile élu , qui agit contre son
créancier inscrit, qui l’attaque au sujet d’une collocation qui n’a pas .
même eu lieu en ve n u de l’inscription ; com m ent dcs-lors appliquer
un pai’eil arrêt, lorsque le débiteur aurait deux moyens de signifi
cation d’appel, tandis que le créancier n’en aurait qu’un; lorsqu’on
matière d’inscription le débiteur n’a d’autre action que celle qui ré
sulterait du titre qui lui sert de fondem ent, lorsque sur-tout les
inscriptions n’ont pas été la règle de l’ordre attaqué?
L ’appel des sieurs Dumiral est donc nul en la forme; mais on
oppose a M c Constant une fin de non recevoir résultant des dispo
sitions de l’art. 17;» du code de procédure, qui déclare que toute nul
lité d’exploit est couverte si elle n’est opposée avant toute défense
exception. O r, dit-on, les motifs des conclusions de M e Constant
ne s’occupent que des moyens du fond , il n’y est pas dit un seul mot
de la nullité de l’appel; donc cette nullité a été couverte.
Ici il y a encore erreur et confusion : que l’on fasse bien attention
o u
qu’il ne s’agit point de l’examen d’un jugement dont chaque dispo
sition doit être motivee , soit dans 1 intérêt des parties qui doivent
connaîtrcet
être
mises à même d apprécier les raisons qui ont décidé
le juge, soit même dans 1 intérêt public, puisque la saine doctrine
du droit se
fo rm e
spécialement par la jurisprudence : il est simple-
�{ io6 )
ment question de conclusions de parties qui n’ont besoin de faire
connaître leurs prétentions que par un dispositif, Effectivement le
tarif, qui estsùremenl la meilleure interprétation quepuisse recevoir
le code de procédure, défend expressément (art. 87) d’insérer dans les
qualités les motifs des conclusions; o r, que veulent faire juger les
sieurs Dumiral? serait-ce que les conclusions d’une partie 11e sont
valables qu’autant qu’elles sont motivées? mais sur quel texte appuyé
raient-ils ce singulier moyen? quel développement, au moins rai
sonnable, pourraient-ils lui donner? un client, un homme d’alfaire luimême, ne peuvent-ils pas reculer devant la difliculié de motiver une
demande qui leur semble cependant raisonnable? est-il interdit à
quelqu’un de soumettre sans aucun développement l’examen de ses
prétentions à la justice, et de s’en rapporter, pour trouver les raisons
de décider, à la sagacité et à la prudence des juges?— rien de tout
cela ne saurait faire question; dans des conclusions , les motifs ne
sont rien , le dispositif est tout.
Or, que porte le dispositif des conclusions de Me Constant? « Dé»
« clarer l’appel nul et de nul effet; subsidiairement déclarer le sieur
« Dumiral non rccevable dans ledit appel; subsidiairement encore
ff dire qu’il a été bien jugé ». Rien 11’est plus juridique que ces con
clusions; en première ligne et com m e m oyen principal elles de
mandent la nullité d ’appel; viennent ensuite, comme subsidiaires,
les fins de non recevoir et le bien jugé; comment donc pouvoir
soutenir que la nullité de cet appel est couverte pour n’avoir point
été opposée avanttoute défense ou exception? cette fin de non rece
voir 11’a donc rien de sérieux, et le moyen de nullité proposé par
M° Constant contre l’appel des sieurs Dumiral reste dans toute sa
force.
�( io7 )
§
2
.
L e s sieurs D um iral sont non recevables à soutenir que la
succession Grandsaigne n’est pas débitrice des restitutions de
jouissances du domaine du F ou lh ou x. — Grandsaigne et conséquem m ent scs héritiers sont débiteurs de ces jouissances
comme principaux obligés et comme cautions.
Dans la discussion de la première affaire, le système adopté par
les sieurs Dumiral était de soutenir que le domaine du Foulhoux
et ses jouissances appartenaient à Clément M artin, exclusivement
à Philippc-Gencst et à Jeanne-Marie ses frère et sœur.
11 paraît
qu’ils ont compris que celte distinction entre les créanciers de ces
jouissances, déjà si contraire aux fails de la cause, avait en outre
l’inconvénient d’èire insignifiante et de ne leur présenter aucun
avantage, puisque M° Constant représentait tous ces créanciers, soit
à titre d’héritier, soit comme cédataire de leurs droits. A lors les
sieurs D u m iral, en personnes habiles et fertiles en distinctions , en
abandonnant la prem ière, en ont créé une nouvelle pour le b e
soin de la seconde affaire : ici ce n est donc plus entre les créanciers
qu’il faut distinguer, mais bien entre les débiteurs.
Comment les sieurs Dumiral établissent-ils leur nouveau sys
tème? la succession Grandsaigne, disent-ils, n’est point débitrice
des restitutions de jouissances du domaine du Foulhoux; ce sont
les héritiers qui en sont personnellement débiteurs ; et pour r e
connaître, enlr’e u x , celui qui doit réellement ces jouissances, il
faut rechercher qui a joui du domaine du Foulhoux; celui-là sera
le vrai et l’unique débiteur, les autres ne devront rien : Et pour
quoi ? parce que Grandsaigne n’a pris possession du domaine
du Foulhoux qu’en vertu des sentences de 1753 et 1756; quêtant
décédé en 1 768, sa jouissance n’a pu être assez longue pour qu'il
ait été remboursé de sa créance; que dès-lors, si les Martin sont,
à leur tour, devenus créanciers de quelqu’un à raison de ces jouis
sances, ce 11c peut être que de ceux des héritiers Grandsaigne qui
auraient continué de jouir. O r quels sont ces héritiers? ce sont les
Dupic représentant la branche Philippe; c ’est donc à ces derniers
�( 108 )
que le sieur Constant doit exclusivement s’adresser, la brandie
Delotz étant entièrement étrangère à une dette qui n’est pas celle
de la succession. ( V . 2e. m ém ., § 5 ) .
On a déjà vu que les faits et notamment le partage de 1 770 répon
dent suffisamment à cette argumentation et la détruisent même
compleltement; mais les sieurs Dumiral sont-ils recevables à la
présenter aujourd’hui et à se créer ce nouveau moyen?
La négative de cette question s’établit en deux mots : dans l’ex
posé de la procédure tenue dans celle affaire, on a analysé les co n
clusions du sieur D u m iral, sous la date du
juillet i
et
insérées au jugement, ainsi que l’acte d’appel lui-même : qu’y a-t-on
lu? que les sieurs Rudel offraient de payer la créance Constant pour
4
853
leur p art e t portion virile ( V . appel ) , et de contribuer avec leurs
autres cohéritiers au paiement de la dette, et ce à raison de leur émo
lument dans la succession Grandsaigne. ( V . conclusions et. appel. )
Cela est-il clair ? les sieurs Dumiral ont-ils suffisamment reconnu
par ces offres gém inées, faites en première instance cï réitérées sur
appel, que les restitutions de jouissances du domaine du Foulhoux
sont une dette delà succession Grandsaigne? qui pourrait en douter?
cependant les sieurs Dumiral soutiennent aujourd’hui le contraire ;
mais malheur à celui qui fait reposer sa défense sur une erreur qui
doit s’évanouir à la sim ple lecture des pièces de son dossier!
A u fo n d ,
quelle
fo rc e p o u rr a it a v o ir c e m o y e n s i , en n é g lig e a n t
m ê m e toute au tre c ir c o n s ta n c e ,
o n le r a p p r o c h e , san s p r é o c u p a -
t i o n , d e s d i s p o s i t i o n s d e la s e n t e n c e d e
1 7 5 6 , d u b a il d e c a u tio n et
d e la s o u m i s s i o n s o l i d a i r e q u e G r a n d s a i g n e a faite a v e c c e l t e c a u t i o n ?
La disposition de la semence crée, contre le sieur Grandsaigne,
l’obligation personnelle ei hypothécaire de restituer les jouissances :
le cautionnement constate l'existence de cette obligation (CC. 201 2);
la soumission solidaire du sieur Grandsaigne avec sa caution vient
à son tour fortifier celle première obligation, et m êm e, au besoin ,
en creer une nouvelle liant Grandsaigne envers sa caution, dans le
cas oi 1 celle-ci serait contrainte au paiement de la dette.
O r , que serait-il a rrivé, si la caution, étant poursuivie , eût été
obligée de payer lu detie de Grandsaigne? bien évidemment elle
�(
I0 9
)
aurait eu un recours contre sa succession; mais dans ce cas, ceité
caution aurait-elle été astreinte , pour exercer sa garantie , de dis
tinguer entreles héritiers du sieur Grandsaigne, principal obligé, et
de rechercher quel est celui d’entr’eux qui aurait joui du domaine
du Foulhoux? de pareilles questions n’exigent aucun examen; les
énoncer c’est les résoudre; oui, tous les héritiers Grandsaigne se
raient tenus, comme garans de la caution, de l’exécution de l'obli
gation principale contractée p arce dernier.
Mais ce qui est vrai pour la caution, serait-il faux pour le créan
cier ? comment cela se pourrait-il? dans les deux cas, les raisons de
décider ne sont elles pas les mêmes :
n’est-ce pas toujours l’obligation
principale et personnelle au sieur Grandsaigne qu’il s’agit d’exécuter?
quelques-uns de ses héritiers pourraient-ils légitimement se sous
traire à la demande de M e Constant? et où puiseraient-ils cette fa
culté, lorsqu’on leur démontre que s’il pouvait être douteux qu’ils
fussent tenus de la dette comme cohéritiers G randsaigne , ils en se
raient au moins tenus com m e caution ?
I) ne faut pas insister davantage sur celte discussion , et sur une
difficulté qui est au reste jugée par l’arrêt de i
85 ?., arrêt
qui a re
connu que la restitution des jouissances du domaine du Foulhoux
était bien une dette de la succession Grandsaigne , puisqu’il a o r
donné que leur estimation et le compte en seraient faits contradic
toirement avec tous ses héritiers.
§
3.
L e s sieurs D u m ira l sont non recevables à exam in er les ejjets
que doit produire la séparation des patrimoines et à critiquer
la disposition qu i ordonne le rapport à l ’ordre de Ventier p r ix
du domaine des Robins. — Il y a chose jugée ci cet égard.
La séparation du patrimoine du sieur Grandsaigne de celui de scs
héritiers a été prononcée par M .le juge-com m issaire, quia soumis
à l’ordre
l’e n tie r
prix du domaine des Robins. Cet ordre provisoire
n’a été attaque par personne, pas même par les sieurs Dumiral qui
n’ont critiqué ni le principe de séparation des patrimoines, ni les
�( n o
)
ell’ets qu’il doit produire, pas même le privilège et le rang de
M° Constant. Aujourd’hui môme les sieur Dumiral respectent cet
ordre provisoire, en tant qu’il concerne la veuve Auterocbe; cet ordre
est donc devenu irrévocable à défaut de contredits. A cet
les articles
756 et ^58 du Code
égard,
de procédure civile posent deux
règles; la première est que le créancier produisant, qui ne p r e n d
pas communication des productions ès-mains du juge-commissaire
dans le m ois, est par cela même forclos : la seconde est qu’en cas
de contestation, le commissaire renverra les contestansà l ’a u d i e n c e ,
et néanmoins arrêtera l'ordre pour l e s créances a n t é r i e u r e s à celles
C o n t e s t é e s , et o r d o n n e r a la d é l i v r a n c e d e s bordereaux de CCS créan
ciers : o r , quelle pourrait être la conséquence nécessaire de ces
principes si ce n’esf que tout ce qui n’est pas contredit dans un ordre
provisoire devient par cela même définitif? aussi P igcau ( t . 2 ,
p. 4 27 ) enseigne-t-il qu’à défaut de contredit, toute demande di
rigée contre le procès-verbal de collocation provisoire est non recevable même en première instance; cette doctrine a ensuite été
érigée en principe par un arrêt de la Cour de Nismes, du 24 août
1819. — V . D alloz, t. 10, v° ordre et distribution, chap. i*r.
Celte fin de non re ce v o ir, qui serait déterminante en première
instance, acquiert de nouvelles forces quand elle est présentée sur
appel.
En effet, une prétention qui n’aurait point été présentée dans des
contredits consignés au procès-verbal de collocation provisoire, et
qui n’aurait pas été soumise à l’appréciation des premiers juges, se
rait une demande nouvelle qui ne pourrait être formée devant la
Cour.
V. C. p r ., art. 464.
D ’un autre côté, l’appel des sieurs Dumiral est lui-même exclusif
de la demande qu’ils forment aujourdhui, et pour la première fois
devant la Cour : que l’on lise cet appel, l’on y verra que les sieurs
Dumiral fixent et précisent tous leurs griefs avec une minutieuse at
tention; qu’ensuite s’ils appellent du jugement, c ’est seulement,
quant a u x chefs ci-devant énoncés ; que s’ils veulent obtenir une
infirmation de ce jugement, c’est relativement a u x chefs ci-devant
détaillés : mais parmi tous ces griefs, pas une plainte, pas un mot
/
�contre la séparation des patrimoines et sur les effets quelle doit pro
duire; dcs-lors, par la volonté même des sieurs Dum iral, la juri
diction de la Cour est restreinte à la connaissance des griefs qui sont
proposés, et elle ne pourrait elle-même étendre sa juridiction à
d’autres points sans violer la maxime tantum devolutum quantum
cippellatum.
Enfin, comment les sieurs Dumiral auraient-ils pu attaquer le ju
gement du 26 juillet i
855
relativement à la séparation des patri
moines ; quels moyens auraient-ils employé pour justifier leur
appel, puisque, à cet égard, ils n’ont rien demandé ni par les con
tredits , ni par les conclusions signifiées ou prises à l’audience du
tribunal de première instance? que veulent-ils aujourd’hui? serait-ce
la rétractation de la disposition de l’ordre provisoire qui ordonne le
rapport de l’entier prix du domaine des Robins aux créanciers
Grandsaigne, comme étant la propriété de ce d er n ier ? si telle
é t a i t la prétention des sieurs D um iral, ils d e v a i e n t a t t a q u e r l'ordre
p r o v i s o i r e d e v a n t le t r i b u n a l d e p r e m i è r e instance , saisir ce tribunal
par les voies légales, c ’est-à-dire par une demande formelle consi
gnée dans les contredits ; m ais, non seulement, les sieurs Dumiral
n'ont rien fait de ce que la loi leur prescrivait, ils ont encore négligé
de former aucune demande par exploit ou par conclusions; ainsi le
tribunal n’ayant été saisi, par aucun acte, d’aucune question relati
vement à la séparation des patrimoines, n’a pu et 11’a du rien juger
à ce sujet. Dès-lors, comment les sieurs Dumiral pourraient-ils
présenter devant la Cour et en second ressort des prétentions qui
n’ont été ni jugées ni discutées, ni même présentées devant les pre
miers juges? on ne doit point insister plus long-tems sur une dé
monstration devenue aussi évidente.
Mais encore, sj on examinait cette fin de non r e c e v o i r en point de
droit , on se convaincrait facilement que le s sieurs Dumiral 11’ont ni
intérêt ni qualité pour critiquer la séparation des patrimoines, et
chercher à restreindre les effets qu elle doit produire.
L ’art 209D du CC. trace il une manière nette la position du débi
teur envers sont créancier. « Les bions du débiteur sont le gage
commun de ses crcüiicicrs. »
*
�( ira )
Comment le prix des biens du débiteur est-il distribué cnirc ses
ci’éanciers ? cette distribution se fait ou par contribution, ou suivant
des causes légitimes de préférence que les privilèges et hypothè
ques établissent entre les créanciers.— CC. 2095. 2094.
Cela pose, qu’est le privilège? «■c ’est un droit que la qualité de
v la créance donne à un créancier d’èlre préféré a u x autres
«r créanciers , même hypothécaires, CC. 2095 >»
On ne conteste pas que la séparation des patrimoines soit un p ri
vilè g e, mais par qui et contre qui p e u t-il être demandé? par les
créanciers du défunt , contre tout autre
c r é a n c ie r . C C . 8 78 .
Les p r i n c i p e s a in s i f i x é s , q u e l s e n s o n t les r é s u lta ts ? d’abord il est
évident que les biens du débiteur étant le gage commun de ses
créanciers, ce débiteur n’a aucun intérêt a leur distribution; qu’il doit
rester étranger au mode de distribution avec d’autant plus de raison
que, comme débiteur, il est tenu de remplir ses engagemens
sur
tous ses biens mobiliers et immobiliers. — C C . 2092.
Une autre conséquence de ces principes est que le débiteur ne
peut accorder de préférence à aucun de ses créanciers; que tout ce
qui est relatif à l’ordre doit se passer entre les créanciers , que c ’est
à eux seuls qu’il appartient de demander des préférences ou de les
contester , ce qui fait dire à P i g e a u que le débiteur ne peut pas
contester une c o l l o c a t i o n juste s u r le fondement qu elle est laite par
p r i v i l è g e . — Y . t. 2 . p .
i
85.
O r, que font les sieurs Dumiral et dans l’intérêt de qui peuvent-ils
soulever la question qu’ils agitent aujourd'hui? ils le reconnaissent
eux-mêmes : c’est dans celui de la dame d’Auteroche dont ils v e u
lent améliorer la position (V . 2e mémoire page 11). Mais la dame
d’Auteroche ne se plaint pas, elle n’a point interjeté appel, et où les
sieurs Dumiral ont-ils pris que le débiteur peut exercer les droits
de son créancier ?
Enfin les sieurs Dumiral ont fait juger cette question dans le sens
que M. Constant la présente aujourd’hui. M. Constant avait formé
sa demande en séparation des patrimoines contre les sieurs Dum i
ral et Bouterigc; les sieurs Dumiral, dans des conclusions signifiées
)e premier juin i8 j2 , opposèrent que cette action 11e pouvait cire
�(
” 3
)
valablement dirigée que contre les créanciers , et ce système fur.
adopté par une disposition expresse du jugement rendu, le 26 du
même mois.
Ce jugement est un de ceux qui sont soumis à l’examen de la Cour.
Il ne faut point un grand effort d’attention pour comprendre que si
la demande en séparation des patrimoines ne pouvait être valablement dirigée contre le débiteur, c’est parce qu’il ri avait pas qua
lité pour y défendre; et cependant que demandent aujourd’hui les
sieurs Dumiral? ils veulent défendre à une
dem ande
qui ne pou
vait pas être formée contr’eux; ils veulent exercer des droits qu’ils
ont reconnu appartenir exclusivement à leurs créanciers.
Ce n’est pas tout : les sieurs Dumiral élèvent toutes ces préten
tions en regard du texte précis d’un jugement qu’ils ont eux-mêmes
obtenu, d’un jugement intervenu dans la cause même ou ils ont fait
consacrer une doctrine toute contraire à celle qu’ils soutiennent
aujourd’hui : mais il y a chose jugée contre les sieurs D um iral,
chose jugée conforme à leurs propres conclusions; et si c’est un.
privilège de jurisconsulte d’anéantir aujourd’hui la doctrine qu’il
croyait avoir si clairement établie hier, au moins ce privilège ne
peut-il s’étendre jusqu’au client et lui permettre de déchirer les jugemens qu’il a obtenus, jugemens qui deviennent pour lui, et au moins
pour la cause où ils ont été rendus, une règle dont il 11e lui est pas
permis de s’écarter.
§
4.
L a demande des sieurs Dumiral, tendante à réduire au tiers
du p r ix du domaine des Robins , la distribution faite en 'vertu,
de la séparation des patrimoines , est non rccevable et mal
fondée.
Les sieurs Dumiral sont appelans, et, chose remarquable , ils ne
cherchent à combattre aucune des dispositions du jugement dont
ils ont interjeté appel, ni même a justifier aucun des griefs auxquels
ils se sont restreints. Us ont cru pouvoir s’ouvrir une carrière toute
nouvelle ; et oubliant que le jugement a décidé, sans opposition do
i
5
�leur part, que la totalité du prix du domaine des Robins devait être
rapportée à 1 o rd re , les sieurs Dumiral veulent aujourd’hui que ce
prix soit réduit au tiers , par la raison qu’ils sont propriétaires des
deux tiers du domaine des Robins à titre onéreux, ce qui, suivant
eux, serait prouvé par un acte de vente du i3 avril 1826, et un
acte d’échange, du 8 janvier 1
fois sur appel.
85 1, actes produits pour lu première
Les sieurs Dumiral sont-ils recevables à élever cette prétention?
i° On a fait remarquer qu’aucune demande de cette nature n’a
vait été form ée en prem ière instance, que le jugem ent n’y avait point
statué, que même l’appel des sieurs Dum iral ne contenait aucun
g rie f à cet égard: — de là , première fin de non recevoir résultant
des dispositions expresses de l’article 4^4 du code de procédure
qui défend de former sur appel aucune nouvelle demande;
20 Cette nouvelle demande serait appuyée d’une vente, du i3
83
avril 1826, et d’un acte d’échange, du 8 janvier 1 1 , que lessieurs
Dumiral produisent pour la première fois sur appel; ces deux actes
sont donc dans la cause, titres nouveaux, et sous ce rapport non
seulement ils fortifient la première fin de non recevoir, mais encore
ils en créent une nouvelle; effectivement, en matière d’ordre, le
principe est «qu’on ne peut, devant les juges d ’a p p el, prendre de
« nouvelles conclusions même subsidiaires, ni produire de nou« veaux titres ». —
î. i . - i . - .) ;
A rrêt,
cass. , du
¡4
83
juillet i i . ( V . S irey ,
4 38
5° Le jugement a passé en force dechose jugée avec la dameveuve
Brugière; relativement à elle l’ordre provisoire est devenu définitif.
O r, que décide le procès-verbal d’ordre provisoire et le jugement
qui l’a confirmé? que l’entier pris du domaine des Robins sera rap
porté à l’ordre comme provenant de la succession Grandsaigne ;
que les créanciers de ce dernier seront payés sur ce prix. Voilà
donc des droits irrévocablement acquis à la dame Debrugièrc qui
a acquiescé au jugement et contre laquelle il n’y a point eu d’appel
interjeté. Que veulent les sieurs Dumiral? faire juger contre
]\I* Constant le contraire de ce qui a été jugé avec la darne lirugière. Dans quelle circonstance? lorsqu’en première instance les
�intérêts de la dame Brugière et de Me Constant étaient identique
ment les mêmes; lorsque l’un et l’autre demandaient la séparation
des patrimoines de Grandsaigne leur débiteur, de celui de ses hé
ritiers; lorsque, par suite du fait non contesté que l’entier prix des
Robins dépendait de la succession Grandsaigne, l’un et l’autre ont
été colloqués sur la totalité de ce prix. Que veulent donc les siours
D um iral, en formant leur demande nouvelle hors la présence de
la dame B ru giere, si ce n’est un arrêt qui soit en contradiction for
melle avec les dispositions du jugement qui ne peut plus être atta
qué. Effectivem ent, qu’arriverait-il si les'sieurs Dumiral réussis
saient dans leur prétention? le sieur Constant colloque au Ier rang sui
vant la date de son titre, n’aurait, d’après l’arrêt, droit qtia une somme
de 20,000 fr., comme provenant du domaine des Robins , tandis
que d’après le jugement, la dame Brugière, occupant un rang infé
rieur à celui d eM c Constant, serait colloquée pour 40,000 fr., p ro
venant du même domaine; de manière que Mc Constant, créancier
de la somme de i 5 o , o o o fr., et ayant droit àla totalité des60,000fr.
ne recevrait que sa part contributive sur celle de 20,000 fr., tandis
que la dame de Brugière, qui n’aurait rien eu à prendre si Me Cons
tant eut été payé , aurait un gage de 40,000 fr., gage bien plus que
suffisant pour la désintéresser et dont le reste profiterait ensuite aux
créanciers des héritiers Grandsaigne. Pourrait-on voir une contra
riété d’arrêt et de jugement plus manifeste , une violation plus fla
grante de cette maxime aussi salutaire que sacrée, res judica ta p ro
<veritatc h a b etu r!...
Si la demande des sieurs Dumiral pouvait être reçue , serait-elle
fondée? à cet é g a rd , il n’est pas contesté que le domaine des Robins
vienne du sieur Grandsaigne; d’ailleurs , le partage du 20 décembre
1770 atteste que ses héritiers l’ont recueilli dans sa succession, o r ,
quelle est la disposition de l’art. 880 du C C .? * à l’égard des itn« m eubles, l’action ( en séparation de patrimoines) peut être exer<f cée tant qu'ils ex isten t dans la main de l ’héritier. » Voilà une
règle absolue qui n’admet aucune distinction; il suffit que la créance
existe, et que les biens soient dans la main de l’héritier pour que lu
demande en séparation puisse être form ée; o r , ces deux conditions
\
�1
evistant dans l ’espèce, l’action de > * Constant est valable pour le
to u t, puisque tout le domaine des Robins était dans la main de l’hé
ritier.
Les sieurs Dumiral tirent argument de la loi 2 au if de sepcircitionibus, et d’un passage de Domat. (V . 2" m é m ., p. 21.)
On 11e conteste pas la vérité de ces principes ; il est en effet cer
tain que si l’héritier a aliéné de bonne loi les immeubles provenant
de la succession , l’action en séparation n’est plus admissible, et pour ■
quoi? pour que le tiers de bonne /¿¿‘ qui aurait contracté avec l’hé
ritier ne soit pas trompé en pensant que les biens lui appartenaient
réellement; aussi reconnaît-on que les dispositions de l’art. 880 doi
vent être restreintes à l’héritier, et ne peuvent comprendre les tiers.
Mais cette bonne fo i, si formellement exigée par Domat pour que
la vente puisse exclure l’action en séparation des patrimoines, peutelle exister lorsque la vente est consentie par un héritier à son cohé
ritier? évidemment non : le vendeur et l’acquéreur connaissaient
également les affaires de la succession; ils savaient qu’il y avait des
dettes dont les biens de la succession étaient le gage; il ne peut donc
y avoir, en pareil cas , de tiers-acquéreur de bonne foi; il 11’y a, au
contraire, que deux héritiers de mauvaise foi qui concourent» priver
les créanciers du gage légitime de leur créance.
Dans l ’ e s p è c e , cette mauvaise foi n’est-elle pas au reste démontrée?
le partage de 1770 ne prouve-t-il pas que tous les héritiers Grand saigne savaient que ce dernier ne jouissait du domaine du Foui houx
qu’à titre précaire; et que la sentence de 1756 lui imposait l’obliga
tion de restituer les jouissances à Philippe-Genest et à Jeanne-Marie
Martin? l’inscription prise par M *Constant, le 6 août i
85 o,
ne pré
venait-elle pas tous les héritiers Grandsaigne de la demande en sé
paration de patrimoine qui les menaçait relativement à ces restitutions
de jouissances; e t , dans ces circonstances tout-à-fait spéciales, com
ment pourrait-il arriver que l’échange du 8 janvier i
85 j fût un acte
de bonne foi, lorsque le vendeur et l’acquéreur connaissaient égale
ment la créance qui pesait sur le sieur Grandsaigne, et savaient que
le domaine des Rôbins dépendait de sa succession ?
11 y a donc nécessité d’entendre sainement les dispositions de
/
�l ’art. SSo du Cod. civ.; l’héritier, dans la main duquel les im
meubles existent, est soumis à l’action en séparation des patrimoines,
il ne saurait invoquer aucune exception : relativement à lui, le créan
cier du défunt n’a qu’une chose à faire, démontrer que les biens qu’il
a dans sa main sont ceux du défunt: cette preuve fuite, peu impor
tent les moyens que cet héritier aura employé pour dissimuler ou
dénaturer ce fait qui domine toujours tous les autres; pour le créan
cier du défunt tout se réduit à ces deux mots, I ’ h e r i t i e r , dans la
main duquel les
b ie n s e x is t e n t
,
est toujours Yhéritier vis-à-vis du
quel ce créancier a le droit d’exercer l’action en séparation du pa
trimoine ; cet héritier, au contraire, ne peut jamais être, vis-à-vis du
créancier du défunt, un tiers-acquéreur pouvant s’opposer à l’exer
cice decette séparation. Et comment en pourrait-il être autrement,
lorsque l’héritier a toujours une action en garantie ouverte contre son
cohéritier pour les pertes que l’éviction pourrait lui causer ! —
885
CC.
.
On peut considérer la question sous un autre rapport. L e sieur
Dumiral soutient que l'effet des actes, des i avril 1826 et 8 jan
vier 1
3
85 1, a nécessairement été d’opérer la confusion du patrimoine
du défunt avec celui de son héritier. Cette assertion est une erreur:
en effet, le patrimoine du défunt n’a jamais été confondu; il a été
toujours facile de le reconnaître, entre les mains de l’héritier,
aux signes ineffaçables et indélébiles qu’il tient du partage du 20 dé
cembre 1770 , caractères qui n’ont pu être détruits ni altérés par au
cun acte, tant que le domaine des Robins est resté dans lu main
de l'un des héritiers Grandsaigne.
Que font donc les sieurs Dumiral en réclamant, comme leur ap
partenant , h* propriété des deux tiers du prix du domaine des R o
bins? ils s’efforcent à prouver que leur patrimoine a été confondu
avec celui du défunt; voilà tmit : dès-lors, leur demande n’a pas pour
objet d’établir qne le patrimoine du défunt s’est confondu avec le
leur; mais, à l’inverse de celte proposition , ils veulent au contraire
constater que c ’est leur patrimoine, à eux D um iral, qui s’est con
fondu avec celui du sieur Grandsaigne dont ils sont héritiers.
Cela posé, quelle est la règle? « les créanciers de ¡’héritier ne
�( 1,8 )
« sont point admis à demander la séparation des patrimoines contre
les créanciers de la succession, » — C C . 881; et pourquoi? parce
que le créancier de la succession a un titre préférable à celui du
créancier de l’héritier; que l’adage bona non intelliguntur nisi deducto œre alieno devant recevoir, en matière de séparation de pa
trim oine, une application littérale, ( V . 2e m éin., Dum iral, p. i -)
4
il en résulte que les créanciei'S de l’héritier ne peuvent jamais de
mander à être préférés à ceux du défunt, et que ceu x-ci, au con
traire , ont toujours le droit d’invoquer leur p rivilège, puisque le
débiteur n’a pu rien transmettre à ses héritiers au préjudice de ses
créanciers.
On a déjà établi en principe que le droit de critiquer la sépara
tion des patrimoines ou ses effets n’appartenait qu’aux créanciers;
on se demande ici comment il pourrait se faire que l’héritier débi
teur eût des droits que ses créanciers n'auraient pas et qui leur se
raient au contraire formellement interdits par une disposition ex
presse de la loi? en eiFet, par quelle raison l’héritier du débiteur
pourrait-il demander la séparation de son propre patrimoine de celui
du défunt lorsque « Les titres exécutoires contre le défunt sont
pareillement exécutoires contre Vhéritier! — C C . 877. *
Par la volonté de la loi , l’héritier est donc tenu des dettes de la
succession même sur scs biens propres; c est cette raison qui fait
que les créanciers personnels de l’héritier, n’ayant aucun intérêt à
s’opposer à ce que les créanciers de la succession soient payés sur
les biens de l’héritier, sont inadmissibles à demander la séparation
du patrimoine de l’héritier, de celui du défunt; et cette interdiction,
si énergiquement prononcée contre le créancier de l’héritier du
défunt, ne pèserait par plus fortement encore surl’héritier lui-même
qui, envers les créanciers de la succesion, est obligé comme et de
la même manière que l’était le défunt!... Cette démonstration ne
saurait exiger de plus longs développemens.
reste à examiner soit les litres produits par les sieurs Dumiral
au moment même de la plaidoirie de la cause, soit ceux que, plus
11
tard, ils ont été contraints à donner en communication. En effet
cette communication a éprouve bien des difficultés ; les sieurs
�'» 9
(
)
Dumiral , s’appuyant sans cloute sur l’adage nemo tcnetur edere
contra s e ,7 et craignant
les résultats d’un examen, ont résisté autant
O
qu’ils ont pua communiquer les pièces qui leur étaient demandées:
sommation, échange dénotés, pourparlers, conférences, voilà ce
que les avoués, devenus de véritables agens diplomatiques, ont été
obligés de faire pour régulariser cette production qui enfin a eu
lieu; l’examen des pièces a bientôt appris que les sieurs Dumiral
avaient le plus grand intérêt à les soustraire aux regards de leur ad
versaire.
Il faudra donc analyser ces nouvelles pièces et en constater les
résultats.
On doit d’abord faire quelques observations sur la vente du
i3 avril 1826, et sur l’acte d’échange du 8 janvier i
i.
83
S
u r
l
’é
c h a n g e
:
deux mots doivent suffire;
1®
cet acte ne saurait
être un obstacle à l’exercice des droits de M* Constant, le sieur D u
miral pouvant toujours reprendre ce q u ’il a donne en contre échange
— V . M. G renier , trait, des hyp., t. a, n° 429, p. 286.; 20 l’ins
cription de Me Constant étant antérieure à l’échange , le tiers du do
maine des Robins restait nécessairement assujetti à son hypothèque ;
donc si M9 Constant ne pouvait obtenir le prix représentant ce tiers
en vertu de la séparation des patrimoines, il y aurait toujours droit
et pourrait le prendre comme créancier hypothécaire.
Sur
l a
v e n t e
: il y a peu de choses a dire; on a déjà prouvé que
cette vente n’était qu’un premier acte de partage, une licitation
entre cohéritiers; qu’ainsi le sieur Dumiral avait toujours possédé
à titre d’herilier le tiers du domaine des Ilobins. On a également
établi que cette vente, n ayant pas ete transcrite , était frappée de
l'hypothèque de M®Constant contre les sieurs Grandsaigne par cela
même que cette hypothèque remontait à une époque bien antérieure
à la loi du 1 r brumaire an 7. Ces moyens sont déjà déîerminans ;
mais si l’on ajoute qu’en supposant que M©Constant ne put, comme
créancier hypothécaire-, s’approprier.letiers de ce prix dudomaine
des Robins, il pourrait au moins le retenir comme représentant la
part personnelle du sieur Dumiral dans la dette Grandsaigne, on se
�( 1 20 )
demande quel intérêt doit avoir la production de celte vente et quel
avantage les sieurs Dutniral peuvent en attendre.
Les sieurs Dumiral avaient un essai à tenter, il était périlleux ;
comment en effet opposer à M® Constant la divisibilité de la dette ,
lorsque ce moyen était repoussé et par la nature de la créance et même
parles principes qui régissent la séparation des patrimoines. Cepen
dant ce que le droit repousse est quelquefois admis en équité : c’en
est assez pour les sieurs D um iral, ils créeront un moyen de droit
mauvais, il est v r a i, mais qu’ils appuyeront d’un moyen de faveur.
Q uel sera ce dernier moyen? on soutiendra que les sieurs Rudel ne
seraient personnellement lenus , pour leur portion virile , que d’un
dix-huitième de la dette Grandsaigne et que cependant M° Constant
voudrait la leur faire supporter en totalité.
Cette assertion est-elle vraie; les sieurs Dumiral ont-ils même pu
la faire présenter avec bonne foi ?
Q ue l’on lise les titres dont M* Constant a enfin obtenu commu
nication et que l’on consulte d’abord un testament, du 10 juillet
1821 , par lequel Pierre-Antoine R udel, dit le Prévôt, donne à
R udel-D ucheyroux, son neveu, les capitaux et intérêts provenant
des ventes qui auraient été consenties de sa portion dans les biens
Grandsaigne; à q u e l l e c o n d i t i o n celte donation est-elle faite? a la
charge parle donataire de payer toutes les charges qui pèsent sur
la succession Grandsaigne et pour la part personnelle du testateur.
O r quelle était cette part personnelle? les sieurs Dumiral la portent
eux-mêmes à un sixième.
Voilà donc un sixième de la créance Constant qui doit être mis
à la charge des sieurs Dumiral.
A cet acte s’en rattache un autre qui est d’une date antérieure,
c’est le testament de Philibert-Philippe dit le C h a n tre , testament
qui esrsous. la date du 28 janvier 1809. Ce testament contient deux
dispositions; l’une en usufruit, en faveur de Pierre-Antoine dit le
p révôt , l ’ a u t r e est une institution d’héritier p o u r un quart en faveur
de Rudel-Ducheyroux.
Quels sont les résultats à tirer de ce testament?
�Chantre é t a i t débiteur pour un sixième d e la créance
Grandsaigne ; il donne l’usufruit de ses biens à son frère, dit le Prévot, qui en a joui 12 ans, c’est-à-dire d e 1809 à 1821, et qui conséquemment était en sa qualité d’usufruitier, débiteur, pour ces 12
années, du 6®des intérêts de la créance Grandsaigne. D ucheyroux
D ’a b o r d l e
ayant été chargé
p a rle
testament de 1821, de payer ce que le testa
teur devait dans cette créance> et ces douze ans d’intérêts, faisant
nécessairement partie de sa dette personnelle, devraient donc être
mis à la charge des sieurs Dumiral; cependant on 11e les fera figurer
ici que pour mémoirê, on ne retiendra que le quart du sixième dont
le sieur D ucheyroux, en qualité d’héritier du Chantre , est néces
sairement tenu de ce chef pour sa portion personnelle dans la dette
Grandsaigne.
II
ne reste plus qu’à fixer la portion contributive de D ucheyroux,
du chef de son père dans la dette Grandsaigne. A cet égard, ClaudeAntoine Rudel avait des droits de nature différente j ceux qu il
tenait du chef de la dame sa m ère lui transféraient un sixième de
la succession Grandsaigne , de manière que le sieur Ducheyroux
qui le représente aujourd’hui pour un tiers, doit de ce chef suppor
ter pour un tiers de sixième la dette Grandsaigne. D ’un autre côté,
le jugement de l’an 11 apprend que Claude-Antoine Rudel avait
des droits à la succession Grandsaigne, provenant du chei d’une
dame Raynaud; mais comme ce fait n’est pas suffisamment éclairci,
au moins quant à la quotité de ces d roits, M° Constant n’en parle
encore que pour mémoire, et ne retient contre le sieur Ducheyroux
que le tiers de sixième, qu’il reconnaît lui-même devoir.
I c i , si l’on récapitule, on s’assure qu’en négligeant les intérêts
dus par le Prévôt pendant son usufruit, ainsi que les droits que le
sieur Rudel pouvait avoir du c h e f de la dame Raynaud dans la suc
cession G ra n d sa ig n e , les sieurs Dumiral doivent personnellement
contribuer au paiement de la créance de Me Constant,
i* Du chef de
P i e r r e - Antoine
R udel, dit le P ré v ô t, pour un
sixième ;
2» Du chef de Philibert-Philippe, dit le C h a n tre, p our un quart
de sixièm e ;
�3°
D u chef de Pierre-Biaise R ud el, pour un tiers de sixième.
Tout, cela est incontestable; mais comment les sieurs Dumiral
ont-ils pu , contre leurs propres titres, titres qu’ils avaient si longtems étudiés, soutenir qu’ils ne devaient personnellement contribuer
au paiement de la dette Grandsaigne que pour un dix-huitième in
connue on le v o it, il faut examiner après les sieurs D um iral, et il
est fâcheux que cet çxamen devenu si nécessaire fasse un devoir de
signaler des erreurs aussi peu excusables.
On doit terminer par établir le chiffre pour lequel les sieurs D u
miral doivent contribuer au paiement de la dette Grandsaigne ; o r ,
rien n'est p l u s f a c i l e .
On sait que la créance de M° Constant a été provisoirement fixée
à la somme de i5o ,o o o fr. ; l’opération à faire se réduit donc à
mettre à la charge des sieurs Dumiral une partie de cette somme
équivalente à leurs amendemens dans la succession Grandsaigne j
5
Or dans ces i o ,ooo fr., le sixième du Prévôt est représenté par
la somme de
25,ooo fr.
L e tiers du sixième de Pierre-Biaise Rudel est
représenté par lu somme de
8,333
L e quart du sixième de Philibert-Philippe, dit le
Chantre y est représenté par la somme de
6 ,a 5o
T o ta l
59,585 f r .
Ainsi voilà une somme de 40,000 fr. qui est incontestablement à
la charge des sieurs Dumiral, et jusqu’à concurrence de laquelle ils
doivent contribuer au paiement de la créance Constant; o r, cette
s o m m e absorberait, au besoin, non seulement la valeur du tiers du
3
domaine des Robins compris en l’acte de licitation du 1 avril 182G,
mais encore celle du tiers de ce domaine, qui aurait été l'objet de
83
l ’acte d’échange , du 8 janvier i
r.
Quel intérêt peuvent donc avoir les sieurs Dumiral à soulever
des questions q u i, non seulement sont repoussées par l’exposé des
principes les plus élémentaires du d roit, et qui en lait ne montrent
autre chose si ce n’est que les sieurs Dumiral croient que tous les
moyens sonlbonspour se soustraire au paiement d’une créance dout
�ils ne peuvent contester la légitimité? l’habileté des sYS Dumiral les
a mal servis; il y a toujours faute de la part de celui qui cherche à
captiver la faveur par un mensonge même irréfléchi. L e jour où la
vérité doit être connue arrive tôt ou tard, et alors il est à craindre
qu’une juste indignation ne succède à l ’intérêt que l’on avait voulu
inspirer.
§ .
5
L a divisibilité de la dette entre cohéritiers ne p eu t avoir lie i l ,
lorsque le créancier du défunt requiert la séparation du patri
moine de son débiteur.— La nature de la créance de M" C o n s
tant s ’oppose à ce que les sieurs D um iral puissent dem ander
la divisibilité de la dette. — L e s sieurs Dum iral n’ ont (ta il
leurs ru qualité ni intérêt à opposer ce moyen.
La question de savoir si la divisibilité de la dette entre cohéritiers
peut avoir lieu, lorsque le créancier du défunt requiert la séparation
du patrimoine de son débiteur n’est pas n o u velle, elle a été agitée
une première fois en 1825 devant la Cour de Cacn qui l’a décidée
affirmativement:— V .S ir e y i
833— 1 .'-— G40; et plus tard, en i 8 5 2 ,
devant la Cour de Bourges quia jugé que le privilège delà séparation
des patrimoines confère aux créanciers du défunt le droit de se faire
payer sur tous les biens de la succession, sans égard ¡1 la division
des dettes entre cohéritiers. Y . Sirey 1
833- 2- 638. Ces deux arrêts,»
qui sont tous les deux motivés avec soin, exposent les deux doctrines
opposées; mais le dernier est précédé d’une dissertation si puissante
de logique, que M° Constant p ou rrait, sans danger, s’en remettre
aux principes qui y sont développés avec autant d'énergie que de
vérité.
Toutefois il peut être utile d’exposer de nouveau les bases de ces
deux systèmes, de les mettre en présence l’un de l’autre et de re
chercher quelles sont, en principe général et pour le fait particulier,
les vraies raisons de décider.
IXrs partisans de la divisibilité, ceux qui veulent que le privilège
delà
s é p a ra tio n d e s
patrimoines se divise entreles héritiers, comme
la dette elle-même, se basent sur unescule idée ; c’est que l’art. 878
�(
I24 )
du C C . , qui perm et au créancier de demander la séparation du pa
trimoine du défunt, doit être mis en harmonie avec l’art. 87$ du
même c o d e , qui dispose que les héritiers sont tenus des dettes et
chargesde la succession, personnellement pour leur part et portion
virile. Suivant eux, le résultat nécessaire de la combinaison de ces
deux articles serait que le cohéritier n’est pas tenu des dettes du dé
funt jusqu’à concurrence des biens qu’il a recueillis, mais bien seu
lement jusqu’à concurrence de sa portion contributive aux dettes :
de l à l a conséquence que le seul moyen d’accorder ces deux ar
ticles entr’eux et de leur faire p ro d u ire , à chacun, un eiTeiqui iJimplique pas contradiction, est de reconnaître que l’action en Séparation
de patrimoines se divise comme la dette elle-même ; qu’elle doit
bien empêcher la confusion des biens propres de l’héritier avec ceux
de la succession, mais qu’elle ne p eu t faire que l’héritier, qui a dans
scs mains des biens de la succession, paye sur ces mêmes biens une
portion de dettes plus forte que sa part contributive. Les inventeurs
de ce système soutiennent qu’il acquiert toute la force de la vérité ,
et qu’il doit même être admis comme principe, si l’on considère que
l ’art. 1 220 du Gode civil p ose, comme règle absolue , la divisibilité
de la dette entre cohéritiers, que cette règle n’admet d’autre excep
tion que celles contenues dans l’art. 1221 du même c o d e , et que
parmi ces exceptions ne figure pas celle de la séparation des patri
moines.
Comment raisonnent les jurisconsultes qui admettent , comme
principe, que la séparation des patrimoines confère aux créanciers
du défunt le droit de se faire payer sur tous les biens de la succes
sion, sans égard à la division des dettes entre les cohéritiers ?
Ils prennent, avec raison, p ourpoin t de départ l’art. 878 du
Code civil dont les dispositions sont si positives et si absolues, « la
« séparation du patrimoine du défunt d’avec celui du patrimoine de
« l'héritier peut être demandée par les créanciers du défunt, dans
w tous les c a s, et contre tout créancier. »
Q uel est le premier effet de cette disposition ? c ’est de conserver
intact le gage des créanciers du défunt, de mettre obstacle à ce qu’il
y ait jamais confusion, à leur préjudice, entre les biens de leur dé
biteur et ceux
des héritiers de ce dernier.
�Ensuite, à qui s’adresse le créancier qui dirige son action en sé
paration de patrimoine? est-ce réellement à l’héritier? non, c’est an
débiteur défunt représenté par sa suceession, par ses biens qui som
le gage de ses créanciers, gage dont l’héritier n’est que le déposi
taire, et qu’il est obligé de rendre dès le moment que les créanciers
du défunt l’exigent. L ’héritier n’est donc là qu’une personne fictive,
c ’est le défuitt représenté par ses biens qui est la personne réelle;
son décès ne saurait rien changer ni aux droits ni à la position de
ses créanciers, neminem p e r alterius fa ctu m prœgravari certum
est.
Comment une position si nettement dessinée peut-elle être chan
gée? l’art. 879 du CC. le dit: l’action en séparation des patrimoines
ne peut plus être exercée « lorsqu’il y a novation dans la créance
« contre le défunt, par l’acceptation de l’héritier pour débiteur. »
O r , pour que les droits du créancier contre la succession de son
débiteur soient éteints, il faut donc que ce créancier ait accepté les
héritiers de ce dei'iiier pour débiteurs, autrement ses droits conti
nuent de subsister dans toute leur force , et le créancier peut les
exercer contre les biens du défunt, comme il le ferait contre le dé
biteur lui-même s’il était encore vivant.
Cela posé, le débiteur, dont l’existence continue fictivement dans
l ’intérêt de ses créanciers, pourrait-il opposer la divisibilité de la
délié? les textes répondent : « quiconque s’est obligé personneller ment est tenu de remplir ses engagemens sur tous ses biens
et mobiliers et immobiliers. » — CC.20Q 2.— « Les biens du débi« teur sont le gcige commun de ses créanciers. »— C C . 2093.— * L ’o« bligation qui est susceptible de division doit être exécutée entrele
« créancier et le débiteur comme s i elle était indivisible. »— C C .
1220. — « Le débiteur ne peut point forcer le créancier à rece« voir en partie le paiement d’une dette , même indivisible, j» C C .
1 a/j/ — Ces textes excluent toute espèce de commentaire; leur rap
prochement est sans doute 1 argumentation la plus forte que l’on
puisse faire; 011 ne répond pas aux chiffres, c’est un devoir de céder
à la puissance de la loi.
Mais faudrait-il d’autres raisons dç décider? il s’en présente une
�qui, fut-elle seule, n’en serait pas moins déterminante. En effet, tout
le système de la divisibilité repose sur l’art. 873 du Code civil; il
faut rétablir son texte : « Les héritiers sont tenus des dettes et char
ges de la succession, personnellement pour leur part et portion et
v h y p o t h é c a i r e m e n t POUR l e t o u t . » Donc si la séparation des
patrimoines est revêtue d’une hypothèque légale et tacite, il en
résulte que, lorsqu’elle s’exerce, la divisibilité de la dette n’a pas
lieu même à l’égard des héritiers du débiteur.
Cela posé : qu’est la séparation des patrimoines? un privilège.— •
C C . art. 21 1 1 .— Quels sont les élémens qui composent une créance
déclarée par la loi p rivilégiée sur les immeubles? il en est deux;
d’abord, le privilège personnel attaché à la faveur de la cause de la
créance, ensuite un droit réel résultant d’une hypothèque tacite : il
est vrai que célte hypothèque légale n’est pas comprise dans la sec
tion du chapitre 3, mais elle n’en existe pas moins, et pour s’en assu
rer il suffit de se mettre sous les yeux les dispositions de l’art. 2 1
13
du code civil. « Toutes créances privilégiées » (à l’égard desquelles
les conditions prescrites pour conserver le privilège 11’ont pas été
accom plies) « ne cessent pas néanmoins d ’ être hypothécaires. »
Ainsi que fait cet article? il change en véritables hypothèques lé
gales les privilèges non conservés par l’inscription; ce change
ment porte même sur les créances qui n’étaient dans le principe
que chirographaires, telles que celles des créanciers du défunt aux
quels il n’avait pas consenti d’hypotheque, mais qui ont eu le droit
de demander la séparation des patrimoines; ces créanciers devien
nent hypothécaires, non, il est vrai, à l’égard des créanciers h ypo
thécaires du défunt, mais à l’égard de ceux de l’héritier, et tfonséquemraeiit à l'égard d el’hérilier lui-même.(V. T rop long,t. 1.
Ici, On ne peut s’empêcher de faire remarquer com bien sont fai
bles les argumens de ceux qui soutiennent que l’action résultant du
privilège de la séparation des patrimoines se divise entre les héri
tiers comme la dette -èlle-inôme : en eflet, s’ils invoquent l’art. 873
du code c iv il, cet article leur répond que l’héritier est tenu de la
dette du défunt hypothécairem ent pour le tout'., s’ils veulent que
la divisibilité établie par l'art. 1220 en faveur des héritiers 11c rc-
�(
ï2 7
)
çoivc (Vautre exception que celles comprises en l’art. 1 221, cet art.
dit : « L e principe établi dans l’art, précédent reçoit exception à
« l’égard dc;s héritiers du débiteur, i° dans le cas où la dette est
hypothécaire. » Tout est là; les argumens e m p lo is pour soutenir
la divisibilité deviennent le plus ferme appui du principe de l’indivi
sibilité en matière de séparation de patrimoines; et pourquoi?
parce que, dans ce cas, il y a hypothèque légale ou tacite attaché«?
à la créance et que c’est là tout ce qu’il faut savoir : puisque si la
créance, comme droit contre la personne, pouvait se diviser entre
les cohéritiers, il serait toujours certain que l’hypothèque ne se
diviserait pas (C C .
2 1 1 4 ).
hypolhecci est tota in Loto, e t tota in
qudlibet parle.
Cette preuve est tellement complette quelle dispense de répon
dre aux assimilations que Von a voulu faire, de l’action en sépara
tion des patrimoines introduite par l’art. 878 du code civ il, à celle
qui existe nécessairement, et sans avoir besoin d’être demandée, par
le fait seul de l’acceptation d’une succession sous bénéfice d’inven
taire. Les principes qui régissent ces deux matières sont tellement
différentes qu’il est impossible de les confondre; en bonne logique
comme en bonne justice les règles doivent être restreintes aux cas
qu’elles ont prévus et voulu prévoir. Ici tout est distinct et séparé;
pourquoi donc se complaire dans une confusion qui ne fait qu’attes
ter l’impuissance oii l’on est de trouver, dans les principes spéciaux
à la matière que l’on traite, des moyens qui puissent satisfaire la
raison d un juge éclairé ? Dans ce cas, plus on a d’expérience et de
talens acquis, plus on s’expose au reproche de n’avoir pas une foi
bien sincère à ce que l’on écrit.
Jusqu’ici on a examine la question en pur droit et comme si l’o
bligation était susceptible de division et n’était pas hypothécaire
même dès son origine. Mais ayant été établi d’abord que la sen
tence de 1756 n’était autre chose qu’une antichrèse, que ce contrat
est assimilé au ga ge, que comme lui il est indivisible , il en résulte
qu’aux termes des articles 1221, n°
5 , et
1228 du code c iv il, cha
cun des héritiers serait tenu de la dette pour le tout : étant ensuite
prouvé que la créance était hypothécaire , qu’elle l’était non scu-*
�( 1*8 )
56
lement par la force de la sentence de 17
, mais encore par le
cautionnement fourni par le sieur Grandsaigne solidairement avec
sa caution , que cette hypothèque pesait sur tous les biens G ran d
saigne , il en résulterait encore q u e , lors même qu’en principe
général on pourrait soutenir que le privilège de la séparation des
patrimoines se divise lorsque la dette est elle-même divisible et
n’est pas hypothécaire, celte divisibilité cesse quand la créance est
indivisible et qu’elle est hypothécaire.
Une dernière observation vient clore celle discussion; elle a de
la gravité puisqu’ elle tend à prouver que si la divisibilité du pri
vilège de la séparation des patrimoines était admise , le but que la
loi s’est proposé en créant ce privilège et en assignant les effets
qu’il doit produire, serait par cela mème^manqué.
Effectivement qu’est le privilège de séparation des patrimoines?
tr rien autre chose que l’application littérale de l’adage si connu :
a bona non intelligunlur nisi deducto œre alieno *.— Y • 2* mé
4
moire Dumiral, p. 1 *
Quel est le but de la disposition de l’article 878 du code civil?
« c’est d’éviier que les créanciers de l’héritier 11e soient payes au
préjudice des créanciers du défunt, qui doivent obtenir la préfé« rence sur des biens qui pendant la vie de leur débiteur etaient
« leur gage naturel». V . id .t p. 27. On ne peut définir avec plus
d'exactitude et de précision ; il ne s’agit que d’appliquer.
k
Dans l’espèce particulière, que veulent les sieurs Dumiral? d’abord
leurs créanciers personnels n’ont point requis la divisibilité du pri
vilège de séparation de patrimoines ; il est donc jugé avec eux que
l’entier prix du domaine des Robins appartient exclusivement aux
créanciers G randsaigne, confine provenant de la succession de ce
dernier. Mais les sieurs Dumiral essayent ce que leurs créanciers
n’ont pas cru pouvoir tenter; ils veulent que le privilège de sépa
ration de patrimoines soit divisé , ils demandent donc la faculté
d’enlever à Mu Constant, créancier Grandsaigne, une portion du
prix du domaine des Robins, provenant de la succession de ce der
nier; et pourquoi fuire? pour payer leurs dettes personnelles en
transmettant ce prix à leurs propres créanciers.
�Ainsi, les créanciers de l’héritier seront payés avec les biens de
la succession au détriment des créanciers de celle-ci ; ainsi, contre
la volonté de la loi, la confusion de la succession avec les dettes de
l’héritier, confusion que le privilège de la séparation des patrimoines
a eu pour objet d’éviter, s’opérerait également; ainsi, le privilège
accordé aux créanciers du défunt, d’être payés seuls sur les biens
de la succession, ne serait plus qu’ une promesse vaine , un texte
inerte, une prescription légale qui n’aurait aucune sanction !.... ici
l’on s’arrête : l’erreur d-’un système n’est jamais plus évidente que
lorsque, pressé dans ses conséquences, il conduit à l’absurde; il
faut donc revenir à la loi, elle ne saurait égarer; le privilège qu’elle
établit est juste, il était commandé au législateur par la nature même
des intérêts qu’il avait à régler; mais la loi se fût-elle trompée, elle
n’en devrait pas moins être strictement exécutée. On peut changer
les lois , mais les dédaigner___ _ mais employer l’artifice pour
se soustraire à leur application........ mais les faire fléchir........
jamais ! ( i ).
§6.
Dans Fétat actuel des ch o ses, le sieur B ou terig e, acquéreur ,
ne peut point être admis à consigner.
—
•
C e tte con sig n a tio n
serait préjudiciable a u x créanciers.
L ’examen de cette proposition n’appartenait pas à M* Constant; ce
sont les sieurs Dumiral qui ont interjeté appel contre le sieur liouterige , et ils 11 ont présenté aucun moyen à l’appui de leur appel.
1
Cependant intérêt de la question est évident; une dernière ordon(1 ) O n n e s’ o c c u p e p a s do la c o l l o c a t i o n C o n s t a n t , r e l a t i v e a u x a r r é r a g e s d e la p r o v i s i o n ,
e t p l a c c o ail
4
" * a l ,S>
,Q P a r e e q u o l e s sie ur» D u m i r a l no p r o d u i s e n t a u c u n e
quittance ;
a» p a r c e q u e le j u g e m e n t a y a n t s u s p e n d u l’ e f f e t d e la c o l l o c a t i o n j u s q u ’ u p t è s la l i q u i d a t i o n
d é f i n i t i v e d e la c i é a n c e C o n s t a n t ,
co s q u i t t a n c e s n e p e u v e n t ê t r e p r o d u i t e s e t a p p r é c i é e s
q u e d e v a n t le n o taire ch a rg é de c e tto liq u id a t io n .
A u re n te , d e v a n t l e n o t a i r e , o n d é m o n t r e r a f a c i l e m e n t q u e l e s a r r é r a g é s n ’ o n t p as p u
s e p r e s c r i r e , s o it p a r c e q u e l ’ o n n e p o u r r a i t d é d u i r e s u r l e s j o u i s s a n c e s a n n u e l l e s q u e les
s o m m e s q u i a i l l a i e n t é t é l é e l l c m c n t e t a n n u e l l e m e n t p a y é e s , s o i t p a r c e q u o la p r o v i s i o n , n e
r e p r é s e n t a n t r é e l l e m e n t q u e l e s f r u it s d ’ ui» i m m e u b l e
sujette
A p rescription.
ll
joui
à t i tr e p r é c a i r e , n e p o u v a i t ¿11«
�$
ncnce royale fixe à 2 p. 0/0 les intérêts des sommes consignées; voilà
donc une perte considérable que souffrirait le débiteur ou ses créan
ciers si la consignation était légèrement ordonnée. M e Constant,
comme créancier du sieur Grandsaigne , a intérêt à faire quelques
observations sur cette disposition du jugement; il le doit encore
pour éviter le reproche d’avoir contribué à la perte qui résulterait
de cette différence d’intérêts, perte qui, dans tous les cas, doit
rester à la charge des sieurs Dumiral.
O r , il faut consulter la loi : et d’abord que porte l’art. 2186 du
C . civil? que l’acquéreur « est libéré de toutprivdége et hypothèque
« en payant le prix aux créanciers qui seront en ordre de le receu voir, ou en le consignant. »
Il
faut donc que le créancier soit en ordre de recevoir, c’est-àdire que l’ordre soit clos et irrévocablement terminé pour que la
créancier puisse p a y er; jusques là il doit conserver le prix ; et
comme la consignation ne peut avoir lieu qu’autant qu’il y aurait
obstacle au paiement, ou que ce paiement ne pourrait pas être vala
blement effectué, il est évident qu’il faut, avant la consignation,
qu’ il soit constaté que le paiement était impossible : aussi l’art. 1257
du Code civil exige-t-il que la consignation soit précédée d’un procèsverbal d’offres réelles qui constate le relus du créancier de recevoir;
et l’art. i a
58 ,
n°
5,
dispose q u e, pour que ces offres soient va
lables, il faut « que la condition sous laquelle la dette a été con« tractée soit accomplie »
Cela posé : à qui l’acte d’offres doit-il être fait? aux créanciers !...
mais il faut que ces créanciers soient connus, et ils 11e peuvent l’être
que lorsque l’ordre est devenu définitif, et que les bordereaux ont
été d 'livrés : mais pour que les offres soient valables, il faut encore
que la condition sous laquelle la dette a été contractée soit ac
com plie; o r , à quelle condition Bouterige est-il devenu débiteur ?
à la condition de payer aux créanciers qui lui seraient désignes par
l’ord re; o r, ces créanciers ne sont pas encore connus, au moins
définitivement; le sieur Bouterige ne peut'donc ni p ayer ni o ffrir,
�ct
encore moins
consigner
;
il est obligé d’attendre : la nature
niérne de son obligation lui en impose le devoir.
Le sieur Bouterige, usant de la faculté accordée à l’adjudicataire
par l’art. ^ du Cod. d e p r ., a ouvert l’ordre; par là , il a reconnu
la nature de son obligation, et s’est bien explicitement soumis à con
50
server entre ses mains le prix de sa v e n te , jusqu’au moment où il
pourra s’en libérer en le versant entre les mains des créanciers que
l ’ordre lui désignera. *
Mais encore , dans la jj^sition actuelle des choses, que veut le
sieur Boulcrige? consigner !... mais où sont les obstacles qui s’o p
posent à sa libération? ne peut-il pas payer aux créanciers personnels
du sieur Dumiral s’ils consentent à recevoir sous caution? Mc Cons
tant n'est-il pas créancier de la succession Grandsaigne d’une
somme plus considérable que celle qui est entre les mains du sieur
Bouterige? cette créance n’est-elle point constatée par un rapport
d’experts que les sieurs Grandsaigne n’ont point attaqué ?
Il
est, dès-lors, évident que sous tous les rapports la demande
sieur Bouterige est intempestive ; que la consignation ne peut être
ordonnée, et que , dans l’intérêt bien entendu du sieur Dumiral ,
M e Constant, dont la créance ne peut être m éconnue, doit être au
torisé à recevoir des mains de Bouterige le prix de la vente du do
maine des llobins.
On a enfin atteint le terme de cette discussion; elle a du paraître
longue et souvent fastidieuse : en efifet, ces deux affaires étaient
simples; pour mieux dire, il n’y en avait point; mais les sieurs Dumi
ral ne pouvant, sans danger pour eu x, les montrer à nu, lesontmasquées d’une enveloppe qu’il a bien fallu déchirer. Actuellement les
faits sont expliqués, qu’en est-il resté? d’un côté, un possesseur à titre
pignoratif faisant lois ses efforts pour intervertir son titre , et com
mettre ainsi une spoliation odieuse;., des héritiers, par trop fidèles
à ces fâcheux antécédens, venant aujourd’hui disputer une restitution
de jouissances qui ont accru leur fortune, et dout ils ont injustement
�(
i
3ï )
profite. D'un autre côté, l’héritier,; le seul représentant légitime
d’une famille injustement dépouillée, venant, après avoir reconquis
son héritage, demandera la justice qu’elle complette, autant que pos
sible , la réparation du préjudice qu’il a eu à souffrir; et c ’est en pré
sence de ces faits que les sieurs Dum iral, se posant en victimes, ont
osé adresser des reproches à M e Constant, et placer une question de
moralité à côté des intérêts matériels qui s’agitent dans ces deux
affaires; quel étrange aveuglement M a i s les sieurs Dumiral
croyaient-ils donc que les dossiers avaient été brûlés?.. Avaient-ils
donc oublié leurs propres actes?... ils s’abusaient : tout cela est encore
existant -, la p rocéd u re et les actes apparaissent et surgissent;....
ils vivent dans ce mémoire où ils sont réunis, pour confondre les
sieurs D um iral, et pour éclairer la religion de la Cour.
Me C O N S T A N T , A v o c a t, Juge-Suppléant.
Me Jn-Ch. B A Y L E , ancien A v o ca t.
Me P i e r r e C A Y L E , Avoué.
A
RIOM ,
DE
T.' I M P R I M E R I E
D E. SALLES
FI LS .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
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Description
An account of the resource
<a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les Factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Constant, Jacques. 1834?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Constant
J.- Ch. Bayle
Pierre Bayle
Subject
The topic of the resource
limites de propriétés
experts
généalogie
Grandsaigne (famille de)
système de Law
cautions
domaines agricoles
spéculation
généalogie
moulins
successions
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse à deux mémoire pour Jacques Constant, avocat et juge-suppléant près le Tribunal civil d'Issoire, intimé; contre les sieurs Joseph-François et Thélis Rudel-Dumiral, père et fils, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1834
1720-1834
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
132 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV22
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Courpière (63125)
Foulhoux (domaine du)
Robins (domaine des)
Thiers (63430)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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cautions
domaines agricoles
experts
généalogie
Grandsaigne (famille de)
limites de propriétés
moulins
spéculation
Successions
système de Law
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54001/BCU_Factums_DVV02.pdf
536c1eb76f7cd39e1fc0fd9edc66e1b1
PDF Text
Text
**a u e*r-
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P
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C
I S
POUR
M' CONSTANT, AVOCAT.
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��CO U R
P R E C I S
DE RIOM.
( U iM m t w < v w w w » v \ '( W A W \ V
POUR
i re CHAMBRE.
Me J a c q u e s - F l o r e n t - G a b r i e l CONSTANT, A v o ca t,
habitant de la -ville d ’Issoire, appelant d ’un juge
ment rendu au tr ibun al civil de T hiers, le 19 janvier 1 8 3 1 , et intimé sur l ’appel d ’ un jugement
rendu au même tr ib u n a l, le 8 décembre 1 83o j
CONTRE
L e s héritiers D U P I C et la dame
C I I A L U S , cette
d e rnière , tant en q u a lité d ’héritière D U P I C , que
conune tutrice de ses enfans mineurs, tous habitant
au lieu du F
oulhouxy
com mune d ' E c o u toux , in
timés sur l ' appel du ju g em en t d u 1 9 ja n v ier 1 8 3 1 ,
et ladite
ment du
dame C I I A L U S
appelante
du j u g e
8 décembre i 8 3 o /
E T
CONTRE
L e s héritiers A N D R I E U X , tous habitans de la v ille
de T h i ers , intimés.
R I EN n’est plus simple que le fond de ce procès. Les héritiers
Dupic , comme représentant un sieur G randsaigne, jouissent à titre
pignoratif du domaine du Foulhoux. Cette jouissance, qui remonte
au mois d’octobre 17 56 5 a pour principe deux sentences, l’une du
�( * )
7 juillet 1753, et l’autre du 5 septembre i j 56 . Ces sentences con
damnent Clément Martin à payer à un sieur Philibert Grandsaigne
une somme de 4000 f r . , en conséquence permettent à ce dernier
de se mettre en possession , et de jouir des biens de son débiteur.
M e Constant représente Clément Martin. Ayant appris que le
domaine du Foulhoux était l’objet d’une poursuite en saisie immo
bilière , il a formé une demande en distraction , conformément à
l'article 727 du Code de procédure civile. M e Constant a conclu à
être reconnu propriétaire de l’immeuble saisi, et à sa mise en pos
session du domaine du Foulhoux.
11 se
fondait, d’une part, sur ce
que la créance Grandsaigne était éteinte, offrant d’ailleurs de donner
caution pour la somme de 4°oo fr., montant de cette créance, cl il
soutenait en second lieu qu’il y avait nécessité d’établir un séquestre
et d’enlever la jouissance du domaine du Foulhoux aux représentans Grandsaigne qui en abusaient, en y coupant les bois , et en
commettant des dégradations de tout genre.
L ’admission de cetle demande en distraction ne pouvait être
douteuse , puisqu’elle était fondée sur les titres mêmes rapportés
par les représentans Grandsaigne, les sentences de 17 5?> et 1756
qui apprennent que le vrai et seul propriétaire du Foulhoux était
îe sieur Clément Martin, et que Grandsaigne n’en jouissait qu’à litre
de nantissement jusqu’au moment où il aurait été payé du montant
de sa créance.
Aussi la difficulté ne s’est-elle point élevée sur le 'ond. Mais les
sentences de 1753 et 1756 avaient été précédées et suivies de pro
cédures volumineuses, et tissues avec art. Grandsaigne avait fait
intervenir dans ce procès des parties qui n’y avaient que faire ; il
avait élevé une foule d’incidens dans le but de l’obscurcir et de le
d Daturer ; c’est ce système que les héritiers Dupic ont agrandi et
suivi devant le tribunal de Thiers dans le but de retarder une dépossession, qui d’ailleurs est inévitable.
Les premiers juges se sont laissé abuser : un sursis a été prononcé
sous le prétexte que les sentences de 1755 et 1756 ne statuant pas
sur les intérêts de toutes les personnes qui y étaient parties, et que
ces sentences étant d’ailleurs attaquées par la voie de l’appel, il
�était nécessaire de vider ces différentes difficultés avant de faire
droit sur la demaude en revendication de Me Constant. Le tribunal
n’a pas vu que ces deux sentences avaient des dispositions intéres
sant exclusivem ent Clément Martin et le sieur Grandsaigne ; que
les droits de Grandsaigne , vis-à-vis Clément Martin , ayant une
origine et une cause déterminée entièrement distincte et séparée
de toutes les autres prétentions qui pouvaient s’élever dans le litige,
leur règlement ne pouvait dépendre de ce qui serait ultérieurement
décidé à l’égard des autres parties.
11 était évident
que Me Constant,
représentant Clément Martin , seul appelant, acquiesçant aux sen
tences de 1753 et 170 6 , les exécutant provisoirem ent, et se pla
çant ainsi dans la position la plus défavorable pour lui, avait le droit
de dire à ses adversaires : « les sentences de 1 r 55 et 1756 11e font
« outre chose , en votre faveur , que de vous reconnaître créan«■ciers de Clément M artin, que je représente, et de vous donner
« le droit de jouir de ses biens jusqu’au moment où vous serez
« désintéressés. Si la créance de 4000 lr. vous eût élé payée en 1755,
« vous n’auriez pas obtenu la jouissance du Foulhpux , il importe
« donc peu qu’un appel ait été interjeté de ces deux sentences
« par Clément Martin , puisque je les exécute aujourd’hui et vous
« accorde tout ce que vous pouviez exiger et
attendre
d’un
« arrêt. O r , je soutiens que vous êtes payés des 4000 fr. ; si
« vous 11c l’étes pas j'offre de vous désintéresser complètement :
« j’exécute donc ces sentences, qui 11c peuvent, quoi qu’il arrive,
« produire en votre faveur d’autre elî’ct que celui de vous re« connaître mon créan cier, e t , en cette qualité , de vous donner
« le droit de jouir de mes propriétés. Mais comme ces mêmes
« sentences ne vous accordent celle jouissance qu’à litre pigno« ratif ou de nantissement , et que le nantissement 11e peut
« continuer lorsque la créance est p a yé e , exécutez vous-mèmeces
« sentences , dont vous n’êtes point appelant, et qui sont votre seul
« titre, en me restituant ma propriété.»
C ’est pour ramener la cause à ces idées si simples , que l’on va
exposer les faits, et examiner les différons moyens qui peuvent s’e»
déduire.
�FAITS:
Un premier ordre de faits doit avoir pour objet de rechercher
les causes et la nature du litre qui ont fixé la propriété du domaine
du Foulhoux dans la famille M artin, aujourd’hui représentée par
M ' Constant.
Annet Treilhe et Jeanne-Marie Jolivet avaient eu 4 enfans : Jeanne
qui a épousé Pierre Martin (c ’est de ce mariage que sont issus C lé
ment et deux autres enfans, représentés aujourd’hui par M° Constant :)
G enest, dont la descendance est connue au pro cès, sous le nom de
Daiguebonne ; Jeanne-M arie, qui avait épousé un sieur D e L afoulhouse; enfin M arguerite, qui est décédée depuis long-tcms ,
sans laisser de postérité.
Un partage de la famille J olivet, sous la date du
5 mars
1G70 ,
avait constitué Annet T re ilh e , comme m a ri, créancier des Jolivet
d’une somme de
5 ,000
fr. Annet Treilhe et Jeanne-Marie Jolivet
étant décédés , leurs quatre enfans agirent contre Clément Jolivet
débiteur, et obtinrent le 18 août 1723 un arrêt qui déclara exé
cutoire le partage du
5 mars
1670, et condamna Clément Jolivet
à payer aux quatre enfans Treilhe la somme de 5 ,000 fr. avec
intérêts depuis le a 5 janvier 1698. L e compte de cette créance fut
réglé le
23
janvier 1724? des compensations qui avaient été
ordonnées par l’arrêt furent effectuées , et les Treilhe furent re
connus créanciers d’une somme de 9175 fr. 10 s.
En cet
état,
Louis D e Lafoulhouse, époux de Jeanne-Marie
Treilhe, alors déce lée, agissant, tant en son nom, que comme père
et légitime administrateur de ses enfans, céda à Pierre Martin ,
de Jeanne Jolivet, le quart de la créance due par Clément
Jolivet. Ce cédant donna à Pierre Martin pouvoir de se servir
mari
de son nom et d’agir conjointement avec les autres intéressés pour
faire procéder à la saisie immobilière des biens du débiteur. Celte
cession est sous la date du 11 avril 1701.
La saisie réelle fut effectivement pratiquée , le 26 mai suivant,
à la requête de Louis De Lafoulhouse 5 et ayant été confirmée par
un arrêt du ü 5 février 1734, il y eut bail judiciaire à Pierre Martin,
�sous la date du 21 mai 1740 > moyennant i 5o fr. par an, à dater
de la Saint-Martin 1759.
Pierre Martin est décédé le i 5 août j 7 4 1 • Genest Treilhe et
Louis De Lafoidhouse n’existaient p lu s, de manière que la saisie
immobilière dut cire poursuivie à la requête des héritiers de ces
différentes personnes.
Il est inutile de s’occuper des procédures qui ont eu lieu , tout
ayant été définitivemeu réglé par un arrêt du parlement de Paris
qu’il faut analyser avec soin.
Cet arrêt est sous la date du 27 juin 1 7 4 2•
On y voit figurer sur la même lig n e J e a n n e Treilhe , veuve de
Pierre Martin , agissant en son nom , exerçant ses droits e t en tant
que de besoin comme mère et tutrice de ses enfans mineurs ; M ar
guerite T reilh e, plus tard femme Daiguebonne , fille de Genest
T reilh e; J ea n C h è ze , époux de Marie De Lafoulhouse, fille de
Louis. Ces trois parties demandaient à être reconnues propriétaires
biens saisis, moyennant le prix qui serait fixé par experts.
En seconde ligne, se présente A n n eJ o liv et, lîlle et unique
héritière de Clément partie saisie.
des
Vient ensuite Marguerite T re ilh e , quatrième enfant d’Annet et
de Jeanne-Marie Jolivet , qui avait un intérêt commun avec ses
cohéritiers , mais qui préférait le paiement de sa portion de créance
en a rg en t, à la co-propriélé des immeubles appartenant à son
débiteur.
Enfin 011 trouve en qualité différons créanciers de la partie saisie,
parmi lesquels il convient de remarquer Gilberte Biozat , femme
Desholière ; plus tard on verra celle femme figurer sous le nom
de Grandsaigne , qui est devenu donataire de sa créance.
Il faut actuellement se fixer sur les dispositions de cel arrêt :
11 déclare
exécutoire contre Anne Jolivet les arrêts des
18 août 1725 et 20 février 1754 > et condamne en conséquence
A nneJolivet, en sa qualité d’héritière, à payer aux représentais
d’Annet Treilhe la somme de
5ooo
fr. avec intérêts et aux dépens;
20 L ’arrêt ordonne que quatre maisons situées à Thiers et le
domaine du F ou lh ou x, qui étaient tous les immeubles compris dans
�(G
)
la saisie « demeureront e n t o u t e p r o p r i é t é et possession aux
« représentans d’Annet T re ilh e , pour le p r ix porte en l’estimation
« qu i en sera fa ite p ar ex p erts ».
5° L ’arrêt
fixe dans quelles proportions les representans d’Annet
Treilhe doivent profiter du délaissement en propriété qui vient de
leur être fait. Il attribue les trois quarts de ces biens à ceux qui
avaient expressément conclu à être envoyés en propriété , c’est-àdire à la veuve de Pierre Martin ; à Chèze et à sa femme ( branche
Lafoulhouse ) ; et à la fille de Genest Treilhe (branche D aiguebonne ).
4° Quant à l’autre quart, l'arrêt l’accorde à Marguerite Treilhe ;
mais comme elle avait conclu au paiement de sa créance en argent,
l’arrêt fait dépendre son droit à la propriété, de l’option qu’elle sera
tenue de faire dans quinzaine , déclarant positivement qu’à défaut
par elle d’opter, cette faculté est référée aux cohéritiers de M argue
rite T reilh e; l’arrêt toutefois dit que celte dernière pourra prendre
le prix du quart de l’estimation en contribuant au quart des frais.
Tout cela réglé : l’arrêt, par une quatrième disposition, fait
main-levée de la saisie réelle et oppositions y survenues et en
ordonne la radiation.
5° L ’arrêt porte que si le prix de l’estimation excède les créances
des representans d’Annet Treilhe , ceux-ci paieront cet excédant
aux créanciers opposans, qui eux-mêmes pourront faire vendre
les immeubles en se chargeant de faire porter la vente à si haut prix
que les héritiers Treilhe soient payés du montant de leurs
créances,
condition pour l’exécution de laquelle les créanciers seraient
tenus
de donner caution , comme aussi d’user de cette faculté dans le
m ois, ou au moins de faire option dans ce délai, à peine de
déchéance.
G0 L ’arrêt est déclaré commun
à
tous les créanciers.
Cet arrêt a été signifié à procureur , le 17 juillet 1742. Dès cet
instant, le<lélai accordé pour opter a couru aux termes mêmes de
l’arrêt. Il
est
inutile peut-être de faire remarquer que les créanciers
n’ont point usé de la faculté qui leur était donnée ; mais Marguerite
Treilhe n’ayant pas fait son option dans le délai qui lui était imparti,
�a cto par cela même privée de toule espèce de droit à la propriété,
qui
a été irrévocablement acquise aux autres enfans d’Annet
T reilh e, et notamment à Jeanne, femme Marlin , qui fit cett^
option, option que scs enfans ont d’ailleurs plus tard renouvelée par
requête du 24 juillet 1 754*
11 paraît impossible de trouver un titre qui présente des caractères
plus certains de propriété. Aussi les Martin furent-ils obligés de
payer une somme de 2000 francs, pour droit de lods et ventes;
on rapporte les quittances qui sont sous les dates des 11 mai 1748
et 4 juillet 1752.
On doit, ici fixer un instant son attention sur les droits de chacun
des représentans d’Annet Treilhe , aux biens provenus d’Anne
Jolivct, et sur les causes qui ont fait que ces biens sont restés au
pouvoir des enfans de Jeanne Treilhe et de Pierre Martin.
D ’abord, on se rappelle que M arguerite, à défaut par elle d’avoir
fait l’option qui lui était déférée par l’arrêt de 1 742 > n’avait aucun
droit à la propriété de ces immeubles, cl que tout se réduisait,
pour elle , à recevoir le quart du prix de l’estimation.
E11 second lie u , Louis de la Foulhouse avait cédé scs droits
dans la créance Jolivct à Pierre Martin , par acte du 11 avril 1751.
Il résulte de ce fait, que le quart appartenant à de la Foulhouse,
était la propriété, ou de Jeanne Treilhe , pour qui Pierre Martin
son mari devait avoir acquis, 011 de Pierre Martin lui-m êm e, ce
qui est la même chose dans les intérêts actuels de M e Constant,
puisque les enfans Marlin n’en réunissaient pas moins, sur leur
tête, la moitié des biens délaissés en propriété par l’arrêt de 174 2E nfin, un quart devait appartenir à Genest T r e ilh e ( branche
d’Aiguebonne ) ; mais ce Genest était extrêmement obéré : il devait
à Pierre Martin des sommes bien plus considérables que la valeur
du quart de ccs immeubles ; aussi se garde-t-il bien de rien
réclam er.
On comprend donc actuellement les raisons qui ont fait que
tous les biens provenus d’Anne Johvet sont demeurés
dans la
famille de Pierre Martin, depuis le 28 mai 1740, époque du bail
judiciaire.
Ici se présente une nouvelle série de faits.
�Les deseendans de Pierre Marlin étaient en possession paisible du
domaine du Foulhoux, lorsqu’un sieur Philippe-Philibert De Grand«saigne tenta de les en dépouiller.
L e sieur De Grandsaigne avait fait souscrire, le 7 juillet 172 0 ,
à Pierre Marlin et à Genest Treilhe, une obligation de la somme de
4000 francs, payable dans un an , et causée pour prêt de 4 billets
de la banque ro ya le , de 1000 francs chacun. Cette obligation
n’avait point de cause réelle, les billets de la banque de L aw étant
absolument discrédités et n’ayant plus de cours au moment où
l ’obligation fut souscrite. O11 voit môme q u e, peu de jours après
cette obligation, un arrêt du parlement, du i5 août 172 0 , avait
annulé ces billets, en déclarant qu’ils n'auraient plus cours forcé
dans le commerce ni dans les recettes. Il était dès-lors évident que
le sieur Grandsaigne, avocat et homme très-délié on affaires, avait
abusé de l’influence qu’il pouvait avoir sur Pierre Marlin et Genest
Treilhe , pour leur faire supporter la perte de ces billets de banque
dont le prêteur n’avait peut-être point fait les fonds, ou qu’au moins
il avait bien certainement achetés à vil prix.
L e sieur Grandsaigne connaissait mieux que personne le vice
son tilre; il devait d’ailleurs craindre des explications peu hono
rables pour lui; aussi g a rd a -t-il prudemment le silence jusqu’au
de
décès de Pierre Martin et de Genest T reilhe, ses deux débiteurs.
Pierre Martin avait laissé quatre enfans : Clément, m ajeur,
Annet, Philippe-G enest, et Jeanne-Marie, mineurs, et qui étaient
sous la tutelle de Jeanne Treilhe leur mère.
C ’est contre ces personnes que le sieur Grandsaigne dirigea ses
poursuites, et obtint, le 17 août 174$ , u n e sentence par défaut
qui les condamna au paiement de sa créance. Le 25 du même mois
il y eut appel de cette sentence, et cet appel fut converti en opposi
tion, par acte du 19 novembre suivant.
Jeanne Treilhe est décédée en 1746.
L e sieur Grandsaigne devait éprouver quelques embarras pour
le recouvrement de sa créance. O11 a vu que Genest Treilhe était
extrêmement obéré ; qu’il deyait notamment à Pierre M artin, son
�beau-frère, des sommes bien plus considérables que la portion qu’il
avait à prétendre dans la créance Jolivet, circonstance qui l’avait
empêche de demander le partage des biens délaissés en propriété
par l’arrêt de 1 742 , et l’avait porté à les laisser au pouvoir de la
famille Martin.
Q u ’imagine le sieur Grandsaigne?
L e 8 octobre 17 4 6 , il fait souscrire à Jean Daiguebonne et à
Marguerite Treilhe sa femme
un acte par lequel ceux-ci lui
donnent en m andem ent leur portion dans la créance J o liv e t, sur
les immeubles délaissés par l’arrêt de la co u r, de 174 2 , pour le
paiement de l’obligation du 7 juillet 1720 : « Autorisant le sieur
« Grandsaigne a poursuivre le recouvrement de ladite part et
« portion par toutes les voies de justice-, contre les héritiers dudit
« Pierre M artin, détenteur desdlts biens. » Au reste Daiguebonne
se réserve d’intervenir.
Cet acte est aussi clair que positif. Il contient une délégation de
la part de Daiguebonne, en faveur de Grandsaigne; et cette délé
gation a pour objet de céder à ce dernier la créance Jolivet, pour
lui assurer le paiement de l’obligation du 7 juillet 1720; aussj
Grandsaigne 11c reçoit-L-il y par cet acte , d’autre pouvoir que
celui de poursuivre le recouvrement de la portion appartenant à
Daiguebonne, dans la créance Jolivet. Si Daiguebonne avait des
droits réels sur les ¡immeubles délaissés, il les conserve, et déclare
vouloir les exercer lui-même , en se réservant la faculté d’inter
venir.
L e procès mu entre le sieur Grandsaigne et les héritiers de
Pierre Martin prend ici 1111 caractère plus sérieux, et se complique
d’une foule de difficultés qui ont donné lieu à des procédures volu
mineuses. Les biens provenant des Jolivet appartenaient aux enfans
M artin, du chef de leur mère : ils avaient donc intérêt à ne point
t
représenter
leur
père;
v
•
aussi Clément Martin n’a c ce p ta -t-il la
succession de P ie rre , que sous bénéfice d’inventaire, et les deux
autres enfans répudièrent purement et simplement. Le sieur G rand
saigne, de son coté , pensant qu’il pourrait parvenir à faire décider
que les biens J o l i v e t appartenaient exclusivement à Clément Martin,
2
�(
'O )
comme héritier institué de sa m ère, et ne pouvant avoir l’espérance
de s’en emparer qu’autant que Clément serait considéré comme
héritier pur et simple de son p è re , critiqua la qualité d’héritier
bénéficiaire, que ce dernier avait prise. Sur cela, longs débats
dont aujourd’hui il est inutile de s’occuper, puisque la qualité
d’héritier pur et simple de Pierre Martin paraît reposer sur la tête
de Clément, et que d’ailleurs cette dificulté ne peut exercer aucune
influence sur la décision du procès actuel.
Mais cette procédure doit être examinée dans un autre intérêt.T
1
faut en extraire tout ce qui a le plus directement rapport à la mise
en possession que le sieur Grandsaigue a obtenue des biens appar
tenant à Clément Martin.
A cet égard ,
Un exploit du 19 décembre 1746 apprend que le sieur Grand
saigne fit dénoncer à Clément Marlin le mandement ou la déléga
tion du 8 décembre 174 6 , el qu’il conclut contre lui à ce qu’il fr t
condamné à lui p a y e r, comme possesseur du Foulhoux, la somme
entière de 4000 francs, y compris la portion pour laquelle D aiguebonne était tenu de cette d e tie , « si mieux n’aime Clément Marlin
ff délaisser à Grandsaigne la portion aflórente qui reviendra à la
« Daiguebonne dans le domaine du F oulhoux, suivant le partage
« qui en sera fait. »
Cette demande fut développée parle sieur Grandsaigne dans diffé
rentes
requêtes des 26 juillet 1748, 12 août et
23 décembre
i^So.
Les Daiguebonne , sur les sollicitations de Grandsaigne , inter
vinrent et cherchèrent à lui prêter leur appui.
Enfin Clément Martin combattit cas différentes prétentions par
des requêtes des 2 juillet 1748 et 26 juin 1751.
11 faut donner une esquisse rapide des systèmes qui étaient res
pectivement présentés.
D ’abord G rundsaigne, soutenant la validité du mandement de
174G, demandait que Clément Martin lût condamné par provision
à lui payer la somme de 4000 francs, se soumettant toutefois à
donner caution. Grandsaigne concluait aussi à ce que son adver-
�( 11
)
saire «• lui délaissât en hypothèque les immeubles provenant des
« Jolivet, pour, par lui Grandsaigne, en jouir ou les faire vendre
a sur simple placard. »
S’emparant plus tard de l’intervention des Daiguebonne qui
avaient donne leur consentement à ce que Grandsaigne les repré
sentât quant au partage des biens provenus des J o liv e t, et avaient
soutenu que leur amendement dans ces mômes biens était d’un
q u a rt, de leur chef, et de la moitié d’ un autre quart de la portion
acquise par Pierre Martin de Louis D e Lafoulhouse , dernière
portion pour laquelle les Daiguebonne déclaraient exercer la subro
gation légale , le sieur Grandsaigne concluait à cet égard à être
admis à représenter les Daiguebonne dans le partage à faire et à y
recevoir la portion qui revenait à ces derniers.
Clément Martin, de son côté, après avoir fait remarquer l’origine
odieuse de la créance du sieur Grandsaigne cl le silence qu’il avait
gardé pendant près de
5o
ans , soutenait que le mandement du
8 décembre
174G ne pouvait produire aucun effet; que lui-même ,
Clément Martin , était créancier des Daiguebonne de sommes
considérables dont il faisait connaître le chiffre et les titres. En
conséquence , tout en Concluant à ce que le sieur Grandsaigne fût
débouté de sa demande, Clément Martin soutenait que les immeubles
appartenant aux Daiguebonne devaient être affectés et hypothéqués
au paiement des créances personnelles qu’il avait contre e u x , et
demandait
même expressément qu’il lui fût permis de jouir pignora-
tivement de ces immeubles, si mieux il n’aimait les faire vendre sur
simplejplacard.
Quant à la prétention des Daiguebonne , ayant pour objet d’ob
tenir , par voie de subrogation légale , la moitié du quart vendu à
Pierre Martin par Louis De Lafoulhouse, la réponse de Clément
Martin était simple et péremptoire : Pierre Martin 11’avait pu
acquérir c t n’avait réellement acquis que uxorio nomine ; or
l’action en subrogation ne pouvait être légitimement exercée contre
Jeanne Treilhe-, co-pçppriétaire des biens provenus des Jolivet.
C ’est en cet état qu’est intervenue la sentence du 7 juillet 175 3 ,
dans laquelle figurent comme parties ,
%
�( 12 )
i 0Le sieur Grandsaigne; 20 les Daiguebonne;
5° Clément Martin;
4° Philippe-Genest
et Jeanne-Marie Martin.
Cette sentence a diiTérentes dispositions qu’il faut analiser.
i° E lle reconnaît que la renonciation faite par Philippe-Genest
et Jcanne-Marie Martin à la succession de Pierre leur père est
valable ; en conséquence, elle les met hors de cause;
2° Sans avoir égard aux lettres de bénéfice d’inventaire obtenues
par Clément M artin, elle le condam ne, comme seul et unique
héritier de Pierre , à payer à Grandsaigne la somme de 4000 fr.
3° Pour
parvenir au paiement de cette som m e, la sentence ayant
égard à une saisie-arrêt, qui avait été pratiquée p arle sieur Grand
saigne en i j 32 entre les mains des Jolivet, et à la délégation faite
par les Daiguebonne, le 8 décembre 1 7 4 6 , « permet au sieur
« Gandsaigne de se mettre en possession et de jouir des immeubles
îc compris en l’arrêt de délaissement du 27 juin 174 2 , provenant
«■des Jolivet, si mieux n’aime les faire vendre........ et même des
« biens propres dudit Martin. »
4°
Pour fixer la portion des Daiguebonne et celle de Clément
Martin sur lesdits biens, la sentence ordonne le partage entre C lé
ment Martin et les Daiguebonne.
5° Enfin celte semence ordonne que les Daiguebonne et Clément
Martin feront, lors du partage , leur prélèvement respectif, notam
ment , dit la sentence , « lors duquel partage Daiguebonne et sa
« femme feront raison à M artin, sur leurs portions, des sommes
« qu’il justifiera avoir payées en l’acquit de Genest T re ilh e , leur
« père et beau-père , et par exprès de celle de 2000 lit ainsi
v qu’ils sont ci-dessus adjugés. »
L e sens de cette sentence est facile à saisir :
Clément Martin est condamné à payer au sieur Grandsaigne la
totalité de l’obligation du 7 juillet 1720, souscrite par Pierre M ar
tin et Genest Treilhe.
L e sieur Grandsaigne n’esl point admis à représenter les D aigue
bonne au partage des biens provenant des J o liv e t, parce que le
jugement reconnaît que Clément M artin, 011 Pierre son p è re , ont
p ayé, à la décharge de Genest T reilh e, représenté par les D aigue-
�bonne, des sommes que ces derniers doivent tenir à compte sur
leur portion. C ’est, par cette raison qu’en constituant Clément Martin
débiteur de Grandsaigne de la somme de 2000 fr. due par les Daiguebonne , la sentence donne titre à Clément M artin, pour les pré
lever sur la portion de ces derniers, de la même manière que les
autres sommes qui auraient etc payées pour le compte de Genest
Treilhe.
Cette combinaison donnant à la délégation du 8 décembre 1746
tout l’eiTet qu’elle pouvait avoir; libérant en conséquence envers
Grandsaigne les D aiguebonne, qui devenaient par cela même dé
biteurs de Clément M artin, il convenait de donner à Grandsaigne,
qui n’avait plus qu’un seul débiteur (Clém ent M artin) , un titre qui
assurât le paiement de sa créance : c’est ce que la sentence fait en
envoyant Grandsaigne en possession non seulement des immeubles
compris en l’arrêt de délaissement du 27 juin if1’7 4 2 , mais encore
des biens propres à Clément Martin.
Ici donc tout est positif :
D aiguebonne, représentant Genest T reilh e, est libéré vis-à-vis
le sieur Grandsaigne, mais en même temps il devient débiteur de
Clément Martin.
Clément Martin est lui-même seul débiteur de Grandsaigne.
G randsaigne, à cause de sa créance , est dès-lors envoyé en
possession des biens qui sont au pouvoir de Clément Martin.
Si Clément paye Grandsaigne , ou si la créance de ce dernier est
éteinte par la perception des jouissances qu’il a faites, il y a nécessité
remette les immeubles qu’il a reçus en nantissement de Clément,
sans q u e, sous aucun prétexte, il lui soitpermis de retarder sa déq u ’ il
possession, même en excipant des droits des D aiguebonne, droits
qui, d’ailleurs , n’appartiennent pas à Grandsaigne, et auxquels la
sentence l’a reconnu entièrement étranger.
Mais c’est ainsi que le sieur Grandsaigne lui-même entendait la
sentence de 1753.
E ffectivem ent, le 0.8 août , Grandsaigne fit à Clément Martin
commandement de payer les 4000 f r . , lui déclarant que , faute de
ce faire, il se mettra en possession dns biens conformément aux
dispositions de la sentence du 7 juillet.
�(
Lo
5i
«4
)
du racine m o is, Grandsaigne se présenta au domaine du
Foulhoux avec un notaire ; on lit dans le procès-verbal que Grandsaigne avait cité envoyé en possession pignorative de ce domaine ,
et que voulant user de son droit pignoratif, il demandait à être mis
en possession réelle.
Cette tentative du sieur Grandsaigne ne réussit pas : il trouva au
domaine du Foulhoux Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin qui
s’opposèrent à sa mise eu possession, et soutinrent que les immeubles
provenus des J o liv e t, compris en l’arrêt du 27 juin 1742, ainsi
que les biens de Jeanne Trcilhe leur m ère, avaient cté partagés ;
que Clément Martin avait eu à son lot les maisons et les moulins
situés à Tliiers , et qu’eux-mêmes avaient obtenu le domaine du
Foulhoux. Pour preuve de leur assertion, Philippe- Genest et
Jeanne-Marie Martin rapportaient un bail à ferme consenti par eux
à un nommé S o v e r, sous la date du 29 août , mais qui avait com
mencé et pris cours depuis la Saint-Martin précédente.
Cette opposition fut l’origine de nouveaux débats, pendant le
cours desquels le sieur Grandsaigne fît intervenir plusieurs per
sonnes, et s’épuisa en efforts pour enlever à la famille Martin la
propriété du Foulhoux.
L e I er septembre 1 7 5 3 , G ra n d sa ign e fit. donner assignation à
Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin ; il exposa que la sen
tence du
7
juillet
1753
lui permettait de jouir du domaine du
Foulhoux par droit pignoratif ; il demanda en conséquence main
levée de l’opposition qui avait été formée
à
sa prise de possession ,
et conclut expressément contre Philippe-Genest et Jeanne-Marie
Martin , à ce que, à tilre de dommages-intérêts, ils lussent tenus de
lui payer la créance à laquelle Clément Martin avait etc condamne
par la sentence de
1755.
De leur c o té , et par exploit du même jo u r, les Daiguebonne
dirigèrent une demande ayant pour objet de faire déclarer com
mune
à Philippe G enestet à Jeanne-Marie Martin la disposition delà
sentence du
7
juillet
1753,
qui ordonne le partage des biens prove
nus des Jolivet avec Clement Martin; et, par suite, les Daiguebonne
demandaient que les Martin rapportassent les jouissances du domaine
du Foulhoux depuis l’époque de leur mise en possession.
�Ces instances se compliquèrent par l'appel en cause ou par l’in
tervention de plusieurs parties.
Clément Martin figurait au procès.
Grandsaigne comparaissait, soit en qualité (le donataire de
D esholière, créancier des Jolivet, et qui était partie en l'arrêt de
174 2 ; soit comme subrogé aux droits de Marie De Lafoulhouse ,
femme Chèze ( sans toutefois produire aucun acte de cession ) ;
soit enfin comme cessionnaire des Daiguebonne.
Enfin Grandsaigne avait fait intervenir Anne Jolivet elle-m êm e,
qui avait été irrévocablement dépouillée de sa propriété par
l’arrêt de i'/42Quelles étaient les prétentions de ces différentes parties?
Grandsaigne, par sa requête du 19 août 175 4 , demandait à être
subrogé à l’exécution de l’arrêt de 174 2 , on conséquence, du con
sentement des M artin, à être autorisé à faire faire l’estimation o r
donnée par ledit arrêt ; et si le prix des immeubles délaissés en
propriété excédait le montant de la créance Martin , Grandsaigne
voulait que cette différence lui fût payée , comme représeniant
Desholière. Cette prétention de Grandsaigne était admissible; mais
il ajoutait que conformément à l’arrêt, il voulait que les immeubles,
objets de la contestation, lui appartinssent en tonie propriété pour
le prix de l’estimation , et qu’à cet effet l’arrêt fût déclaré exécutoire
contre les M artin, en leur qualité d’héritiers de Pierre leur père.
Cette demande de Grandsaigne était insoutenable: il essayait d’inter
vertir son titre ; mais cette tentative était repoussée par l ’arrêt de
1742, et plus fortement encore par la sentence du 7 juillet 1755 ,
qui reconnaît que Philippe-Genest et Jeanne-Marie M a r t i n ont
valablement renoncé à la succession de leur père , et qui n’accorde
à Grandsaigne qu’une simple jouissance à titre pignoratif sur les
biens compris en l’arrêt de 1742.
L a requête d’intervention d’Anne Jolivet est du 21 juillet 17 55 Cette intervention avait été requise par le sieur Grandsaigne.
Quoi qu’il en soit, Anne Jolivet conclut à l’exécution des arrêts
des 18 août 172^ et 27 juin 1742. E lle demande que le compte de
la créance ïr e ilh e soit réglé , que l ’on
en
déduise
les
jouissances
�( IG )
<lcs immeubles délaissés, et ce depuis 1731 : la Jolivet offre de
délaisser des immeubles jusqu’à concurrence de la somme qu’elle
restera devoir. E lle demande une provision alimentaire de i 5oo fr.,
et subsidiairement elle conclut à cire délaissée à se pourvoir en
interprétation dcl’arrêt de 1742.
Les demandes d’Anne Jolivet ne présentaient rien de sérieux.
L ’arrét de 1742 avait irrévocablement transmis la propriété de ses
biens aux Treilhe. Amie Jolivet n’avait donc plus qu’une chose à
surveiller, c ’était l’estimation des immeubles à l'effet de savoir si ,
les dettes payées, il n’y aurait pas un excédant de prix qui dut lui
revenir et lui cire payé par les héritiers Treilhe. L e droit de la
J o liv e t, resserré dans ces termes, ne pouvait lui être contesté.
Philippe-Genest et Jeanne Martin développèrent leurs moyens
dans des requêtes qui sont sous les dates des 10 mai, 24 juillet 1 7 54
et 12 août 1755.
j Ils soutenaient que le domaine du Foulhoux leur avait ete délaissé
pour leur portion héréditaire dans la succession de Jeanne Treilhe
leur mère , et demandaient que Clément Martin fût tenu de recon
naître que le domaine du Foulhoux leur avait été délaissé à titre de
partage.
S ’occupant ensuite
de la branche de Louis De
Lafoulhouse ,
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin demandaient à être sub
rogés à la cession que ce Louis De Lafoulhouse avait faite , le
1 1 avril 1731 , à Pierre Martin leur aïeul, du quart de la créance
Jolivet.
Les Martin , examinant leur position relativement à M arguerite
Treilhe qui avait un quart d e là créance J o liv e t, renouvelaient,
à cet égard , l’option qui avait été faite par Jeanne Ireiliie leur
mère de p a y e r, en arg en t, le quart du prix de l’estimation qui
serait faite des immeubles délaissés par l’arrêt de 17^2.
Philippe-Genest
et
Jeanne-Marie Martin devaient peu s’occuper
des Daiguebonne et de l’intervention d’Anne Jolivet, tout étant,
sous ces deux rapports, réglé par l’arrêt de 1742 et la sentence
de 1753.
Sur ces différentes discussions, est intervenue la scntcnco du
�3 septembre 17 5 6 , qui 'ordonne que l’arrêt du 27 juin 1742 sera
exécuté selon sa forme et teneur ; qu’en conséquence, Grandsaigne,
les Daiguebonne, Clément, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin
feront procéder à l’estimation , tant du domaine du Foulhoux , que
des maisons de T h iers, dont le délaissement a été ordonné par
l’arrêt de 1742; que cette estimation comprendra les jouissances ,
dégradations et améliorations qui ont eu lieu depuis l’expiration du
bail judiciaire.
L a sentence porte que les trois enfans Martin nommeront un
e x p e rt, que Grandsaigne et Daiguebonne en choisiront un autre ,
et qu’Anne Jolivet assistera à l’estimation des experts pour y faire
scs observations.
La dernière disposition de cette sentence est ainsi conçue : «■et
« jusqu’après ladite estimation, avons sursis à faire droit sur les
« contestations des parties; et cependant, parprovision, permettons
«
«
«
«
«
à Grandsaigne de se mettre en possession du domaine du F oulhoux...... pour en jouir conformément audit arrêt et à la sentence
du 7 juillet 1755 , à la charge par lui de donner caution jusqu’à
concurrence des jouissances qu’il percevra à l’avenir, en payant
par lu i, toutefois, pour chaque année de sa jouissance, à chacun
« de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie Martin, 100 francs jusqu’à
« fin de cause, à com m encera la Saint-Martin 1757.
Cette sentence fait naître plusieurs réflexions, sur lesquelles il*
convient de se fixer.
D ’a b o r d ,
on s’assure que les prétentions d’Anne Jolivet sont défi
nitivement repoussées par la sentence de 176 6, qui ordonne l’exécu
tion pure et simple de l’arrêt du 27 juin 1742 , ce qui est assez dire
que les immeubles provenant des Jolivet sont, depuis cette époque,
la propriété delà famille Martin; aussi Anne Jolivet n’est-elle point
admise à concourir à la nomination des experts qui doivent pro
céder a l’estimation : elle reçoit seulement la faculté d’assister à l’opé
ration , pour y faire des observations; et pourquoi? si ce n’est
parce que 1 arrêt de 1742 lui réservait implicitement le droit de
percevoir ce qui resterait du prix dos immeubles, la créance Treilhe
cl les autres dettes payées.
�Celte semence fait ensuite concourir à l’estimation des immeubles
provenant de la J o liv e i, d’un côté, les trois enfans de Pierre
Martin qui doivent choisir un expert; de l’autre, Grandsaigne et
Daiguebonne qui ont le droit de nommer le deuxième expert.
A cet égard , les intérêts de Grandsaigne et Daiguebonne étaient
de même nature : ils se rapprochaient sur plusieurs points; on peut
même dire que la délégation du
8
décembre 1746 était un lien
commun entre ces deux parties.
Effectivement, Grandsaigne, comme donataire de la dameBiozat,
femme D esholière, qui figurait dans la sentence de 17 4 2 ; comme
créancière des Jolivct, avait intérêt et droit de concourir à l'esti
mation des immeubles provenant de son débiteur puisqu’il était
possible que le résultat de cette opération lui fît obtenir le paiement
de sa créance. D’un autre côté , Grandsaigne se disait subrogé aux
droits de la branche de la Foulhouse, par l’effet de la cession que
lui avait consentie Jean Chèze , il est vrai que cet acte n’a jamais été
p ro d u it, que la date n’en n’est pas connue, qu’011 ne la rapporte
pas même aujourd’hui, mais si celte cession existe, bien certaine
ment elle ne peut comprendre les droits personnels de JeanneMarie T reilh e, femme de la Foulhouse, dans la créance due par
les J o li v e t, puisque Louis de la Foulhouse avait lui-môme vendu à
Pierre Martin son quart dans cette créance, par acte du 11 avril
• 17 5 1. La cession faite pas Chèze à Grandsaigne, jusqu’ici inconnue,
mais nécessairement d’une date postérieure à celle
de
la Foulhouse,
ne pouvait donc porter que sur le tiers du quart revenant aux de
la Foulhouse , du chef de Marguerite T reilh e, décédée ab intestat
et sans postérité. Sons ce rapport 011 comprend parfaitement que
Grandsaigne avait le droit de faire ce que Marguerite Treilhe aurait
fait elle-m êm e, c ’est-à-dire de concourir à l’estimation des biens
J olivct, à l’effet de connaître la somme qui lui revenait pour son
quart de créance, quart qu’elle ne pouvait au reste recevo ir, aux
termes de l’arrêt de 17 / p , qu’en contribuant suivant son
ment aux frais de l’estimation.
am ende
Quanta D aiguebonne, il a déjà été remarqué que la se ltence
de 17 5 3 , en ordonnant le partage avec Clément M artin, voulait
�que cc dernier préleyàtla somme de 2000 fr. due par Daiguebonne
à Grandsaigne pour moitié de l’obligation du 7 juillet 172 0 , plus
toutes les sommes qui auraient été payées en l’acquit de Genest
Treilhe , beau-père de Daiguebonne. On sent que le partage o r
donné par la sentence de 1753 se réduisait dès-lors, pour D aigue
bonne , à une estimation qui seule pouvait lui apprendre si son
quart dans les biens Jolivet était absorbé par les prélèvemens de
Clément Martin , ou si au contraire il pouvait encore y prétendre
quelque chose.
11 était
donc naturel que Daiguebonne se réunît ù
Grandsaigne pour cette estimation; d’ailleurs la délégation du 8
décembre 1746 semblait établir entre eux une espèce de commu
nauté d’intérêts.
Les trois enfans Martin avaient le droit de choisir un expert; aussi
étaient-ils liés par un intérêt commun et contraire à celui de toutes
les autres parties. Les Martin devaient effectivement désirer que la
valeur des biens provenus de la Jolivet n excédât pas le montant de
la créance qu’ils avaient contre cette famille, créance qui avait servi
de base à l'arrêt de 1742.
Mais la sentence de 17 56 a-t-elle apporté quelque changement
au mode de jouissance de Grandsaigne?
D ’abord, on voit qu’en 17 5G comme en 1753 la cause de celte
jouissance est la m êm e, et qu’elle a toujours pour objet le paiement
de l’obligation de 4°oo fr. Ensuite la sentence de i y 56 est loin
d ’intervertir le mode de jouissance accordé
à
Grandsaigne par celle
de 1753; au contraire, c ’est toujours à titre pignoratif que G rand
saigne est envoyé en possession; la sentence de 1756 impose même
à cette possession des conditions plus dures que celle de 17 5 5 ,
puisqu’elle exige que Grandsaigne fournisse caution pour le fait de
sa jouissance future, et paye annuellement
1O0
francs
à
chacun
de Philippe Genest et Jeanne-Marie Martin.
Pourquoi la sentence de 1756 imposait-elle ces charges à Grand
saigne?
Le motil eu est facile à découvrir. Grandsaigne
O avait été envoyé
J
en possession de propriétés appartenant à Jeanne T reilh e; les enfans
Martin avaient recueilli ces biens dans la succession de leur mère ;
�( 20 )
Grandsaigne n’était créancier que de Pierre Mariiu et de Genest
Treilhe; il ne pouvait donc être envoyé en possession des biens
provenant des Jolivet, que par deux motifs ; le premier résulte de
ce que Clémeni M artin, ayant fait acte d’héritier de P ie rre , était
tenu sur ses propres biens des dettes de son père; le second se
déduit de Ja délégation Daiguebonne, qui donnait à Grandsaigne le
droit de se faire payer de la moitié de son obligation sur le quart des
biens Jolivet appartenant à Daiguebonne. Ainsi Clément Martin et
les Daiguebonne étant les seuls débiteurs de Grandsaigne, et la
sentence de 1755 ayant même libéré les Daiguebonne envers
G randsaigne, en chargeant Clément Martin de payer la totalité de
cette créan ce, il est sans diiliculté que Grandsaigne, du chef de
Clément, pouvait être envoyé en possession des biens provenant
de Jeanne Treilhe.
Mais il n’en était pas de même relativement à Philippe-G enestet
Jeanne-Marie Martin: ceux-ci ne devaient rien à Grandsaigne, et
s’ils parvenaient à prouver qu’ils étaient propriétaires du domaine
du Foulhoux, il devenait certain que ce bien leur provenant du
chef de leur m è re , qui elle-même n’était pas débitr ce de Grand
saigne, ce dernier ne pouvait en être mis en possession sans fournir
Caution, et sans donner une portion des revenus aux co-propriétaires
présumés du domaine du Foulhoux.
O11 voit donc ici quel était l’objet du sursis prononcé par la sen
tence de 175G. La difficulté était de reconnaître le propriétaire
dudit domaine du Foulhoux. Etait-ce Clément Martin, ou au con
traire Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ? ces différentes
personnes avaient-elles des droits ? quelle était la proportion de
leur amendement ? tonies ces questions s’élevaient alors et pourraient
encore s’élever si les enfans Martin étaient eu présence, avec des
intérêts contraires. Mais aujourd’hui ces questions sont oiseuses et
inutiles, puisque M* Constant représente les trois enfans Martin, et
qu’il vient dire à Grandsaigne : « j’exécute provisoirement les
« sentences de 1753 cl 175G, en vous payant la somme de -jooo
»r francs, qui vous est due du chef de Clément Martin; vous êtes
« yous même dans la nécessité de les exécuter en me rendant les
�* propriétés que vous avez en nantissement du chef de Clément;
« il ne peut plus y avoir aujourd’hui de difficultés à reconnaître le
« véritable et l’unique propriétaire du Foullioux , puisque seul je
«■représente tous ceux qui y prétendaient droit. »
Grandsaigne fit signifier cette sentence par acte du 1 5 octobre
suivant, mais les Martin ayant interjeté appel, tant de la sentence
du 3 septembre 1756 que de celle du 7 juillet 1 7 5 5 , il intervint
deux arrêts des 2 et 22 du même mois d’octobre, qui reçoivent les
appels et accordent des défenses indéfinies.
C ’est dans cette position que Grandsaigne prit possession du d o
maine du Foulhoux : le procès-verbal, qui est sous la date du 25
octobre, constate que Clément M artin, qui était dans ce domaine,
s’opposait à la mise en possession , mais que le fondé de pouvoir de
Grandsaigne objecta à Clément Martin qu’il n’avait aucun droit à la
propriété de ce domaine , qu’il l’avait reconnu lui-même en ne con
testant pas que par l’événement d’un partage il était échu au lot de
son frère et de sa sœur. Ainsi Grandsaigne était réellement en pos
session, lorsque, le 19 janvier 1758, intervint un arrêt q u i, levant
les défenses indéfinies accordées contre les sentences du 7 juillet
1753 et 3 septembre 1756 et ordonne que ces deux sentences
seront exécutées, mais seulement dans deux de leurs dispositions,
la première celle qui permet à Grandsaigne de se mettre en posses
sion , la seconde celle qui ordonne qu’il sera procédé à l’estimation
des immeubles provenus d’Anne Jolivet.
V oici le tableau de cette opération qui a été faite, le
4
octobre
1758.
i° L e domaine du Foulhoux, déduction faite de
1679 francs 19 cent, de réparations, a été estimé
Ï1221 fr. ; c i.........................................................................
20 La maison Gourbine a été évaluée 2400 fr. ; mais
comme la sentence de 1755 ordonnait que pour cet
objet il ne serait, fait rapport que de 1800 fr. , on ne re
tiendra que cette dernière somme; c i...............................
11221 f.
1800
5° Les
deux maisons situées, rue de la M alprie, sont
estimées à 1200 fr. j c i..........................................................
j
200
14221 f.
�R eport. . . .
4°
1 4 2 2 1 f.
La maison située, rue du Piaure, est estimée à
1000 fr. : ci
5°
ÏOOO
A ccs différentes sommes il convient d’ajouter le
montant des dégradations estimées par les experts à
222 fr. c i.................................................................................
T o t a l ........................
222
1
544^
^
Dans celte estimation gén érale, on remarque celle du domaine
du Foulhoux, qui y figure pour la somme de 11,221 fr. Les
experts n’avaient à s’occuper que des biens provenus de la famille
Jolivel; aussi ont ils restreint leur estimation aux héritages qui
composaient ce domaine à l’époque de l’arrêt de 1 7 4 2 ; mais
Clément Martin , qui par lui ou par sa mère avait fait des acquisi
tions considérables fit remarquer ce fait aux experts qui en re
connurent la vérité, et déclarèrent que leur estimation du domaine
du Foulhoux était faite sans y comprendre aucune des acquisitions
qui auraient eu lieu depuis
17 4 2 .
Pour ne rien négliger, on doit dire qu’en 1770 les deux maisons
situées, rue de la M alorie, se sont écroulées, que les matériaux et
remplacement ont été vendus, qu’enfin le prix de celte vente a été
reçu, moitié par les héritiers G raudsaigne, et moitié par les Martin,
ainsi qu’il résulte d’une quittance du 8 juin i r}rj 5 .
L e résultat de cette estimation suilit pour faire apprécier l’intérêt
des Daiguebonne , et faire connaître les causes
qui
ont fait que celte
branche de la famille Treilhe n’a jamais fait effectuer le partage
qui était ordonné par la sentence du 7 juillet 1 7 5 f>.
On a vu que cette sentence admettait Clément Martin à prélever
sur la portion Daiguebonne, non seulement les sommes qu’il justi
fierait avoir payées en l’acquit de Gènest Treilhe , mais encore
de 2000 fr. faisant moitié des 400° ^r- > au paiement
celle
desquels
Clément Martin était condamné envers Grandsaigne.
11 faut
avec ces élémens établir la situation des Daiguebonne.
Les enfàns Martin avaient à reprendre contre eux
�i* L a moitié d’une créance due au sieur Barthélémy
Baudiment, et réglée par acte notarié , jlu G octobre
1742, à i 65 o 1.; moitié 825; c i...................................... .
20 La moitié de la créance G randsaigne, liquidée par
la sentence de 1753, à 4012 fr.; moitié 2006 fr. ; ci. . .
5° Pour le tiers , du par les D aiguebonne, des frais
825 f.
2006
ordinaires et extraordinaires de criées, et autres, 982 f.;
c i..................................................................................................
4 ° L e tiers de la somme de 5oo f r . , payé par Pierre
O82
Martin à Grandsaigne pour le compte de Marguerite
Treilhe , le 21 novembre 1740 , 100 fr. ; c i....................
Total èn capital,
3g i 3'fr .
; c i..........................................
100
5g i 3 f.
5° 11 faut ajouter les intérêts de cette somme depuis le
11 novembre 174 2 jusque à pareil jour de l’année 1768,
ce qui donne
3 1 5o
fr. ; c i . ..................................................
3 1 5o
6° Les Daiguebonne étaient aussi débiteurs d’une
obligation consentie par Marie-Anne C lu ze l, leur mère ,
à Clément M artin, le 26 janvier 17/17, se montant à
25oo fr. ; c i.............................................................................
,
25oo
70 Les intérêts de celte somme , depuis la dem ande,
qui est du mois de mai 1747) jusqu’au 11 novembre
17 5 8 , donnent un total de 1437 fr.; c i...........................
1437
8° Il faut ajouter le tiers des droits de lods et ventes
payés en 1748, pour les biens adjugés en 1 742, 700 lr.;
c i.................................................................................. ...
(j° Enfin les intérêts de ces droits de lods, depuis le 11
novembre 1748 jusqu’à pareil jour de 1758 , 55o fr. ; ci.
700
55o
---------- — »—
Total des sommes dues par les Daiguebonne, et dont
Clément Martin devait faire reprise lors du partage o r
donné par la sentence do 17 5 3 , c i...................................
I 2o 3o f.
11 convient d’opposer à ce tableau l’ensemble de tous les droits
et reprises que les Daiguebonne pouvaient avoir contre Clément
Martin.
i° Les Daiguebonne avaient droit au tiers des immeubles dé
laissés par l’arrêt de 1742 > c’est-à-dire au tiers de la somme
�R eport.
544
5 48
de i
^ ii'-j prix de l’cstimation, i
; ci. .
20 Ils avaient également droit au tiers des
jouissances du domaine du Foulhoux, éva
luées par les experts
743
à
. . .
5 14^ f-
la somme de 2120 fr.
pour les années i
, 1744 » 1 74^i *74^ »
1747 et 1748 , à raison de 424 fr. par an; ce
tiers montant à 707 fr ; c i...................................
°Pourle tiers d e s jouissances dudit domaine
5
estimées 420 f. pour 1749 , 14°
? ci. • . •
° Au tiers des jouissances du même do
4
maine , évaluées à 44° fr* pour chacune des
années 1750, l ' j S i , 17 a , 17 5 3 , 1754 et
1755, et formant un total de 2200 fr., somme
3
i a o o f.
/
707
*4°
5
dont le tiers est de 753 fr.; c i...........................
° L e tiers des mêmes jouissances, estimé
5
f annuellement à 420 fr. pour les années
733
1^ 5 6 ,
1767 et 1758 , formant un total de 12G0 f r .,
dont le tiers est de 420 fr.; ci...........................
6° L e tiers des intérêts de la maison vendue
au sieur G ourbine, moyennant 1800 fr. , ce
4 20
qui, à 90 fr. par an, donne pour 16 ans un total
de 144° f r , , dont le tiers est de 480 fr. ; ci. .
480
70 L e tiers des jouissances des deux maisons
situées rue de la Malorie , évalué par les ex
perts, à
45 fr.
par an : cequi forme pour
16
ans,
un total de 720 fr., dont le tiers est 240 fr. ; ci.
Enfin le tiers de i0 ans de loyer de la
maison située rue du Piaure, qui, à raison de
240
40 fr. par an, donne un total de 640 fr., dont
le tiers est de 2 1 3 fr. ; c i...................................
T o ta l
2 13
des droits et reprises des D aigue
bonne au 11 novembre 1758 .; 8081 fr. ci.
Calcul qui constitue les Daiguebonne débi
teurs dos Martin tic la souunc tic 3949 fr. ; ci.
8081 f.
8081
3949
�(
*5
)
Ce tableau explique parfaitement la cause du silence des D aiguebonne et le peu d’intérêt qu’ils avaient à donner suite à une action
en partage qui ne pouvait que leur devenir nuisible; aussi depuis
la sentence de 1 7 56 ne les voit-on plus figurer dans le procès ni
donner suite au partage ordonné en iqS'S.
L e sieur Grandsaigne représentait la dame Biozat , femme
Desholière, en vertu d’une donation du 28 novembre 1753. Il faut
se rappeler que cette créancière était partie en l’arrêt de 174.2,
et devait être payée si le prix de l'estimation des biens Jolivei.
excédait la créance de la famille Treilhe. C ’était tout l'intérêt que
Grandsaigne pouvait avoir du chef de la Desholière 3 lors de la
sentence de 1756.
O11 éclaircit ce point de difficulté en se mettant sous les yeux le
tableau du compte de la créance des enfans Treilhe contre les
Jolivet.
Cette créance se compose :
i° Du capital qui est de la somme de
5ooo f. ; c i..............................................................
20 Des intérêts de cette somme depuis le
5ooo f.
a 3 janvier 1698 jusqu’au 11 novembre 1742 >
jour de l’expiration du bail judiciaire, le tout
conformément à l’arrêt du 8 août 17 2 5 , et
déduction faite des compensations ordonnées
par ledit a r r ê t, 9073 fr.; c i...............................
9°7^
3° Les frais et dépens adjugés par l’arrêt
de 174 2 , et liquidés le 22 décembre 1761 ,
à la somme de 2946 fr. ; c i...............................
T
Si
otal
d elacréan ce Treilhe, 17109 fr.; ci.
2946
17 ,0 19 fr.
on rapproche le total de cette créance de celui obtenu par les
experts, lors de l'estimation des biens provenus des Jolivet, dernier
total qui se porte à 1 544 ^ fr*» on voit que les Treilhe étaient encore
créanciers des Jolivei de lu somme de 1576 0’-; q u ’ainsi, aux termes
de l’arrêt de 17/(2, la dame Biozat, femme Desholière, n’avait ri™
a prétendre sur le prix des immeubles délaissés en propriété à la
�( 26 )
famille T reilh e, puisque cette famille devait être payée avant tous
les autres créanciers.
Pour ne rien laisser à désirer , il faut dire un mot de la position
du sieur G randsaigne, dans le cas oii il établirait qu’il représente
Jeanne-Marie Lafoulhouse , femme C h èze, pour les droits que
celle-ci amendait dans la succession de Marguerite Treillie sa tante.
Cette Marguerite Treilhe a v a it, suivant l’option qui avait été
faite contre elle , conformément à l’arrêt de 1742^ droit au quart
du prix de l’estimation des immeubles provenant de Jolivet, quart
5 ü6 i
qui se monte à 386 1 fr. ; c i....................
Mais sur celte somme , il faut déduire ,
i
°L e quart des frais de criées ,
dont Marguerite Treilhe était
tenue aux termes de l’arrêt de
1 7 4 2 , 756 fr. 10 s .; ci. . . .
736 1. 10
20 Une somme de 5oo liv. que
Pierre Martin avait payée pour
1256 fr.
e lle , le 21 novembre 174°» au
sieur Grandsaigne ; c i...................
5° Les frais personnels
10 s.
3oo
adjugés
contre elle par l'arrêt de 174 2 >
liquidés à 200 liv. ; c i...................
200
Ainsi le quart de M arguerite Treilhe dans
le prix de l'estimation se trouve réduit à
2624 10 s.
Actuellem ent, Jeanne-Marie De L a fo u lh o u se , femme C lu z e ,
avait recueilli le tiers de la succession de Marguerite
Treilhe '-, si le
O
sieur Grandsaigne représente la femme C h i'ze, son droit se réduit
à 875 liv. , somme qui, comme le montant de sa créance contre
Pierre Martin et Genest T re ilh e , est plus qu’absorbée par les
jouissances que Grandsaigne a perçues du domaine du Foulhoux ,
depuis le
25 octobre
1756, époque de sa mise en possession, jusqu’à
ce jour.
Grandsaigne ne pouvait posséder le domaine du
F o u lh o u x
qu’en
exécutant la sentence de 1756 qui avait mis à sa jouissance la
�condition qu’il paierait 100 liv. par année à chacun de PhilippeGenest et Jeanne-Maric Martin. L e sieur Grandsaigne ne satisfai
sant point à cette obligation, il intervint sur les poursuites dos
M artin, le
5 1 juillet
1 760, arrêt qui le condamne à payer les arré
rages de cette provision annuelle.
En 1768 , Grandsaigne est décédé en possession du domaine du
Foulhoux : il 11’avait point d’enfans, et sa succession devait être
partagée entre deux branches de collatéraux , l’une, représentant
Philippe son frère , et l’autre, Marguerite sa sœur qui avait épousé
un sieur Delolz.
L e partage des biens Grandsaigne eut lieu le 20 décembre 1770.
L e domaine du Foulhoux échut au prem ier l o t , c’est-à-dire à la
Branche Philippe , et on lit dans le partage une convention ainsi
conçue : « que, dans le cas où ledit domaine éprouverait éviction de
« la propriété, le second lot lui rembourserait en deniers ou biens
« de la succession la somme de 8000 fr. , et alors les droits et
« créances que les co-partageans ont sur ledit domaine, leur appar« tiendraient en commun. » Les héritiers Grandsaigne connaissaient
donc parfaitement la nature de leur possession , ils savaient qu’à
chaque instant ils pouvaient être évincés du domaine du F oulhoux,
et fixaient à l’avan ce, si ce cas a rriv a it, quelle serait l’indemnité qui
serait duc à celui qui recevait ce domaine dans son lot.
Philippe Grandsaigne , auquel le domaine du Foulhoux était
échu , avait deux enfans , Jean-Baptiste Rémi et M aric-Anne qui
épousa un sieur Jean-Baptiste Delavigne.
Un partage qui eut lieu le 21 décembre 1770 fit échoir le
domaine du Foulhoux a Marie-Anne.
Celle M aric-Anne avait elle-même eu deux enfans , dont l’un ,
Antoinette, a épousé le sieur Dupic. Cette Antoinette était en pos
session d e là moitié du domaine du Foulhoux , et l’autre moitié
était jouie par Jean-Baptiste Rémi représentant de la branche des
Philippe.
L e sieur Dupic , déjà en possession, comme mari d Antoinette
D elavigne, de la moitié du F oulhoux, devint fermier de l’auire
moitié et jouit ainsi de la totalité.
�(
)
En cet état, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ou leurs
représentans furent encore obligés de recourir à la justice pour
conlraindre les Grandsaigne à leur payer la provision annuelle
accordée par la sentence de 17 5 6 ; ils obtinrent un arrêt, sous la
date du 20 niai 17 7 6 , qui condamne les Grandsaigne à payer les
arrérages de cette rente, et à la servir à l’avenir.
Plus tard, le sieur Dupic essaya de réunir sur sa tète la totalité
du domaine du Foulhoux et d’intervertir son titre.
Comment s’y prit-il ?
Anne J o liv e t, expropriée par l’arrêt de 1 74 2 s était encore
vivante ; cette femme fort âgée , habitait la ville de Clerm ont, et il
ne devait pas être difficile d’obtenir d’elle une cession de droits
tout-à-fait illusoires , et auxquels Anne Jolivet avait depuis longtems renoncé.
M e Dupic , avocat, assez connu en la Cour par ses singulières
combinaisons en affaires , fit former contre lui par Anne Jolivet
une demande ayant pour objet le désistement du domaine du Foul
houx. Celte demande qui fut introduite par requête du 29 novembre
et exploit du 10 décembre 1787, ne fut point contestée par Dupic,
q u i, immédiatement, et le 12 décembre (d eux jours après la
demande ) , se fit faire une donation par Anne Jolivet.
Q ue porte cette donation dont on a extrait les faits qui précèdent?
Anne Jolivet, prenant la qualité de maîtresse de scs biens paraphernaux, en considération de la parenté qui existe entre elle et
D u p ic , et pour lui donner une preuve de son affection, lui donne
le domaine du Foulhoux pour en jouir ainsi qu’elle avait le droit de
le fa ir e .
D upic , de son c ô té , déclare connaître l’objet donne pour eu
avoir jo u i comme m ari d ’A n toin ette Lavigne , héritière de
G randsaigne, qu i avait été
envoyé
COMME CRÉANCIER DE LA F AMI LLE M
en
possession
a RTI N.
LeS
de ce d o m a i n e
,
a u t l ’eS C o n d i t i o n s
et réserves contenues dans cette donation, sont au reste inutiles à
connaître.
Q u ’avait voulu faire Ma D upic? L ’arrêt de 1742 et la sen
tence de 175G ne laissaient aucun doute sur ce point de fait, que
�Anne
ainsi
Jolivet
n’avait plus aucun droit sur le Domaine du Foulhoux,
cette femme ne pouvait rien donner et ne donnait réellement
à D upic; d’un autre côté, le donataire ne recevait rien d’Anne
J o livet, puisque dans l’acte de donation même il reconnaissait qu’il
rien
du Foulhoux à la suite de Grandsaigne, qui en avait été
envoyé en jouissance pignorative au préjudice des Martin, ce qui
jouissait
était assez dire que le domaine du Foulhoux était la propriété de
ces derniers.
A ussi, en examinant de plus près les faits, voit-on que Dupic
n’avait pris cette donation que pour l’opposer aux représentans de
Jean-Baptiste-Réini Grandsaigne, du chef desquels il tenait à ferme
la moitié du domaine du Foulhoux.
Il paraît en effet que, le 4 février 179 0 , il fut fait un traité entre
Dupic et les Grandsaigne, par lequel Dupic s’engagea à faire juger
les contestations qui existaient entre les Grandsaigne et les Martin ;
Dupic supposant que le résultat de ce procès serait de constituer
les Martin débiteurs d’une somme de 16,000 f r . , s’obligea avec la
plus grande légèreté à p a y e r , en attendant etavantla fin du procès,
aux héritiers de Je an - 13a p iistc-R ém i Grandsaigne , ou pour leur
com pte, une somme de 7000 fr. ; au moyen de c e , Dupic atteignit
son but et demeura en possession de la totalité du domaine du
Foulhoux sans payer le prix du bail à ferme.
Plus tard Dupic reconnut fort bien l’erreur dans laquelle il était
tom bé, et le préjudice qu’il s’était causé à lui-même. Il voulut
résister à l’exécution du traité, du 4 février 1790; mais un jugement
du io janvier 1825, appréciant la conduite de Dupic dans cette
affaire , et donnant pour motif que le traité avait été désiré par lui
pour conserver la jouissance du F o u lh o u x, en se chargeant de la
poursuite du procès; que ce traité avait eu spécialement pour objet
de ne point déranger la situation de la famille Grandsaigne jusqu’à
décision définitive de ces contestations, ordonne l’exécution du
traité et condamne Dupic à payer la somme de 7000 fr.
Toutefois les M artin, entièrement étrangers à tous ces actes, fai
saient exécuter rigoureusement, les dispositions de la sentence de
l l $ 0 , et réclamaient le paiement d elà provision qu’elle leur avait
�(
3o
)
accordée; le 19 janvier i 8o 3 , ils obtinrent un jugement qui con^
damne les deux branches Grandsaigne, héritiers de Philippe Phi
libert et le sieur Dupic lui-même personnellement, au paiement de
cetle provision pour l’arriéré et pour l’avenir jusqu’au jugement
définitif.
L ’instance sur l’appel des sentences de 1753 et 1756 était pen
dante en la co u r: par exploit du
5
février 18 10 , les enfans de
Jeanne Trcilhe et Pierre Martin assignèrent en reprise d’instance
les héritiers Grandsaigne, qui à leur tour, par exploits des 17 avril
et 10 mai 18 13 , reprirent la même instance contre les M artin, et
conclurent au bien jugé des sentences.
T el est le dernier errement de cette procédure.
Un nouvel ordre de faits se présente : et c ’est celui qui est
spécialement relatif à la contestation pendante en la cour.
On a vu que Jeanne Trcilhe et Pierre Martin avaient eu quatre
enfans, trois seulement ont figuré dans les contestations qui se sont
élevées. Ces trois enfans sont Clém ent, Philippe-Genest, dont les
descendances sont inutiles à connaître, puisque M e Constant a
acquis leurs droits et les représente au procès , enfin JeanneMarie qui avait épousé Jacques-Antoine Constant , aïeul de
M e Constant, appelant.
Le sieur D upic ainsi que la dame son épouse étaient décédés ,
laissant trois enfans, parmi lesquels figurent Marguerite-MarieM ich elle, qui a épousé le sieur François Chalus : 011 dit même que
le sieur Dupic avait vendu au sieur Chalus, son gendre, le domaine
du Foulhoux.
L e 25 décembre 1828 , les héritiers A n d rieux, comme créanciers
D u p ic, et m êm e du sieur Chalus, poursuivirent la saisie
immobilière du domaine du Foulhoux , soit sur la tête de la veuve
des enfans
Chalus, soit sur celle des autres enfans Dupic. Les énonciations du
placard peuvent servir à faire connaître la valeur de la propriété
saisie, qui paye 242 fr. d’impositions foncières. L e 3 juin 18 2 9 ,
adjudication préparatoire en faveur des héritiers Andrieux saisissans,
qui dans celle procédure étaient tout à-la-fois parties saisissantes,
premiers créanciers inscrits cl adjudicataires provisoires.
�M* Constant, instruit de ces faits et de l’état de la procédure,
voulut user du droit qui lui était accordé par l’article 727 du
code de procédure, de former la demande en distraction; à cet
effet, le i
3
août, il déposa ses titres de propriété au greffe du
tribunal de I h ie r s , et le 17 il forma par requête sa demande en
distraction.
L e 8 décembre i 83 o intervint un prem ier jugem ent, lors duquel
les sieurs Andrieux déclarèrent qu’ils étaient désintéressés , et qu’ils
ne voulaient plus donner suite à la saisie. De leur côté la dame
Chalus et les Dupic soutenaient que la saisie immobilière n’existant
plus, la demande en distraction devenait sans objet, et qu’il ne
pouvait y élre statué. M e Constant demandait de sa part qu’il fût
plaidé au fond.
L e tribunal de Thiers rendit alors hommage aux principes , en
reconnaissant que la dénonciation de la saisie ayant été faite aux
débiteurs saisis et à tous les créanciers ne pouvait être rayée que du
consentement de ces derniers ou de l’autorité de la justice ; que dèslors il y avait nécessité d’examiner le mérite de la revendication
exercée par M* Constant avec les héritiers Andrieux, représentant
légalement tousles autres créanciers, à l’effet d’ordonner s’il y avait
lieu à la radiation de la saisie.
E n conséquence le tribunal, tout en donnant acte aux héritiers
Andrieux de leur déclaration, ordonne qu’ils demeureront dans
l’instance, et qu’il sera plaidé au fond.
L a dame Chalus a interjeté appel de ce jugem ent, par exploit
du iG décembre , c’est-à-dire , avant que la huitaine fût expirée.
C ’est dans cet état qu’a été ren d u , le 19 janvier j 85 i , nu tribunal
de Tliiers , le jugement contradictoire dont est appel.
^
11 faut se faire une idée nette des prétentions de chacune des
parties.
M" Constant soutenait que les D upic, représentant les Grandsaigne,
avaient été plus que payés de leur créance d e 4,000 1iv ., parla jouis
sance qu’ils avaient faite du domaine du Foulhoux : il disait également
que les sentences de 1755 et 1756 établissaient qu’il était le vrai
propriétaire du Foulhoux et quelesD upic n’en jouissaient qu’à titre
�(
3*
)
pignoratif : en conséquence M e Constant concluait principalement à
être reconnu propriétaire du domaine, et, comme conséquence, à la
main levée et radiation de la saisie im m obilière, se faisant au reste
toute réserve à l'effet de faire fixer ultérieurement avec les héritiers
Grandsaigne le montant des créances qu’il pouvait avoir à répéter
contre eux.
M e Constant prenait ensuite des conclusions subsidiaires, par
lesquelles il consentait à exécuter provisoirement les sentences de
1753 et 1766, en donnant caution pour la créance de 4000 liv. que
les Martin devaient aux Grandsaigne , et demandait en consé
quence à être envoyé en possession du domaine du Foulhoux.
Enfin, comme les Dupic abusaient de leur possession, coupaient
des bois et laissaient tomber la maison et les bâtimens dans un état
de dégradation absolu , et que ce dernier fait était prouvé par le
placard lui-même , le sieur Constant, par un second subsidiaire ,
demandait à être autorisé à jouir du domaine comme séquestre ju
diciaire, et concluait dans tous les cas à l’exécution provisoire du
jugement à intervenir.
Les héritiers Andrieux renouvelaient les conclusions qu’ils avaient
prises lors du jugement de i 83 o.
Quant à la dame Chalus., e l l e concluait
principalem ent
à la
nul
lité de la demande en distraction, ou à ce que M e Constant y fut
déclaré non recevable , ou qu’il en fut débouté; subsidiairement la
dame Chalus soutenait que le procès actuel se rattachant à une ins
tance pendante au parlement de Paris entre diverses parties, et
sur des contestations relatives
au
domaine du
Foulhoux
, il y avait
lieu à surseoir à faire droit sur la demande en distraction jusqu’au
m om en t où il aurait été statué sur ces difficultés.
Dans un autre subsidiaire , la dame Chalus, se disant héritière
bénéficiaire de son p è re , soutenait qu’elle le représentait comme
donataire d’Anne Jolivet; que sous ce rapport elle avait des intérêts
opposés à ceux de ses mineurs ; qu’ainsi il y avait nécessité
d’appeler le subrogé-tuteur dans l’instance.
Enfin la dame Chalus demandait que les héritiers Grandsaigne ,
qu’elle prétendait ne pas représenter, et les héritiers Duiguebounc
fussent mis en cause.
�Sur cela est intervenu , au tribunal civil de Thiers , un jugement
trcs-longuemcnt. motivé, et dont il est difficile de bien saisir le véri
table sens. Toutefois on croit y découvrir que les Daiguebonne,
comme représentant Genest T re ilh e , ont paru aux premiers juges
être propriétaires d’un tiers du domaine du F oulhoux, savoir, d’un
quart de leur chef, et d’un douzième comme héritiers de M argue
rite Treilhe , décédée sans postérité. Q u ’ils ont fait résulter la
preuve de ce fait, d'abord de la sentence de 17 5 5 , q u i, suivant
eux , ordonne le délaissement du tiers du domaine du Foulhoux
aux Daiguebonne, et ensuite de la sentence de 17 5 6 , q u i, outre
l'estimation des immeubles, ordonne également celle des jouissances
perçues, ensemble des dégradations et améliorations. Celte pre
mière idée longuement développée 3 les motifs du jugement
ajoutent que Me Constant ne représente pas les Daiguebonne; qu’il
y aurait danger à juger hors la présence de ces derniers; qu’il est
im portant, avant de statuer sur la demande en distraction, qu’il
soit, définitivement prononcé sur les contestations qui existaient en
176 6, contestations sur lesquelles il avait été sursis parla sentence
du 5 septembre, même année.
C ’est par ces motifs que le jugem ent, tout en rejetant les moyens
de nullité j proposés par la dame Chalus contre la demande en
revendication, et donnant acte aux héritiers Andneux de leur
déclaration, met ces derniers hors d’instance, et surseoit à faire
droit sur la demande en distraction jusqu’à ce qu’il aura été statué
avec toutes les parties intéressées sur les contestations existantes en
J7 5G, difficultés sur lesquelles la sentence du
sursis à faire droit jusqu’après l’estimation.
5
septembre avait
C ’est de ce jugement dont M B Constant a interjeté appel par
exploit du
5 février i 85 i.
�(
34
)
DISCUSSION.
Rien ne paraît plus facile que (le démontrer les vices nombreux
et le mal jvgé de celte sentence, qui tout à-la-fois a méconnu les
principes les plus élémentaires en matière de distraction sur saisie
immobilière, et complètement erré dans l’appréciation des faits. Et.
d’abord une poursuite en expropriation avait été dirigée contre le
domaine du Foulhoux possédé par les héritiers Dupic ; si celle
expropriation se fut consommée sans réclamation de la part de
M e Constant, 10 ans pouvaient suffire pour qu’il y eut interversion
de titre et anéantir le droit des héritiers Martin à la propriété de ce
domaine.
L a demande en distraction était donc une nécessité pour
M e Constant qui a dû user de celle action conformément à l’article
727 du Code de procédure, en la dirigeant contre toutes les parties
que la question de propriété pouvait intéresser, c’est-à-dire, contre
les héritiers Dupic et les héritiers Chalus , parties saisies, et contre
les sieurs Àndrieux qui figuraient dans la saisie immobilière, en
qualité de saisissans, de créanciers premiers inscrits et d’adjudi
cataires provisoires.
L ’eflèt. de la demande en distraction devait être de faire r e c o n
naître le véritable propriétaire de l’immeuble saisi et revendique ,
et de mettre la justice à même de restituer
la
propriété à celui
auquel elle appartenait et d’ordonner la radiation de la saisie.
Mais comment], et en présence de quelles parties, la propriété
pouvait-elle être reconnue , et la radiation de la saisie pouvait-elle
être opérée ? À cet é g a rd , l’article 696 du Code île procédure
dispose que la saisie ne pourra être ra y é e que du consentement des
créanciers , ou en vertu de jugement rendu contre e u x , lorsque la
notification prescrite par l’article Gq5 aura été enregistrée en marge
de la saisie au bureau de la conservation.
O r, ici la saisie immobilière était
à
un degré bien plus avancé
que
celui prévu par l’article Gq5 , puisqu’il y avait eu adjudication pré
paratoire; dès-lors comment opérer celte radiation sans le consentemenl des créanciers ou un jugement rendu contre eux?
�En fait, il est certain que les créanciers n’ont point donné de
: les sieurs Andrieux, tout à-la-fois saisissans, adjudi
cataires provisoires, premiers créanciers inscrits, no pouvaient lier
consentement
par leur consentement les autres créanciers qui conservaient le droit
de se subroger à la saisie; d’ailleurs les héritiers Andrieux n’ont pas
même donné ce consentement; dès-lors, en fait comme en droit,
il y avait nécessité que la radiation de la saisie fut ordonnée par un
jugement rendu contre les créanciers.
Mais comment rendre un jugement hors la présence des per
sonnes qui doivent y être parties? c’est bien vainement qugin se
demande ici ce que le tribunal pourrait décider, le cas arrivant,
relativement à la radiation de cette saisie, lorsque dans la personne
des héritiers Andrieux il a rnis hors d’instance le premier créancier
inscrit, repr.V. -.r- il lé al de tous les autres créanciers.
Le jugement du 8 décembre i 83 o était à cet égard tout-à-fait
rationnel et entièrement conforme aux principes. Il avait retenu
les héritiers Andrieux dans la cause par de très-bons motifs. La
dame Ghalus a interjeté appol de ce jugement; mais outre que cet
appel est non recevable comme prém aturé, et portant sur un juge
ment préparatoire exécuté, jl est encore victorieusement combattu
par les moyens que l’on vient de déduire; dès-lors impossible de
comprendre les motifs de l’infirmation que les premiers juges ont
eux-mêmes prononcée p a rleu r jugement du 19 janvier i 85 i.
Rien en effet ne pouvait autoriser le tribunal de Thiers à meure
les héritiers Andrieux hors d’instance. Ces créanciers premiers
inscrits déclaraient bien, il est vrai, qu’ils avaient été payés du
montant de leur créance, mais ils ne donnaient pas leur consente
ment à la radiation de la saisie: dès-lors il n’était point satisfait a la
première condition exigée par l’article 696, pour que la saisie fût
valablement rayée. En second lieu, le tribunal lui-même n’ordonnait
point cette radiation contre les créanciers, puisque le jugement
ne lait que surseoir à la décision de demande en distraction . Oèslors comment se fuit-il que les premiers juges n’aient pas vu qu il y
avait nécessité de conserver en cause les sieurs Andrieux , premiers
créanciers inscrit, jusqu’au jugement définitif, et qu’ils 11c se soient
�(
3G
)
pas aperçus qu’en mettant ces créanciers hors d’instance , ils
enlevaient à Me Constant la faculté de faire rayer cette saisie si en
définitive il réussissait dans sa demande en distraction?
On n’insistera pas davantage sur une erreur aussi manifeste qui
aurait pour résultat nécessaire d’anéantir l’action du sieur Constant;
car ce serait bien vainement, que les premiers juges n’auraient cru
prononcer qu’un sursis, si par le fait, en luisant disparaître du
p ro es la partie que la loi y juge indispensable, ils se sont mis
dans l’impossibilité de statuer plus tard sur la demande en distrac
tion 9 et d’ordonner la radiation de la saisie qui en est une consé
quence nécessaire.
Le tribunal dont est appel a donc déjà commis ou s’est mis dans
la nécessité de commettre un déni de justice.
A u fond, quel est l’objet tic la diiïïcùlté?
Il s’agit de statuer sur une demande en distraction, e’esi-à-dirc ,
de re che rch er q u i, do la partie saisie ou du demandeur en distrac
tion , est le vérilable propriétaire de l’immeuble revendiqué.
Si les titres de la partie saisie prouvent qu’elle n’est pas propriétaire
et qu’au contraire le droit de propriété repose sur la tète du de
mandeur en distraction, il n’y a plus rien à rech erch er, et la dé
cision ne peut être douteuse.
Dans l’espèce, les sentences de 1753 et 1766 établissent deux
faits positifs, le prem ier, que le sieur Grandsaigne était créancier
de la famille Martin de la somme de 4000 fr. ; le second, qu'en cette
qualité i l avait été envoyé en possession dudomaine du Foulhouxproyenant de son débiteur, pour en jouir jusqu’au paiement intégral de
ses créances. Ainsi Grandsaigne ou ses représentais ont donc un
titre pignoratif, q u i les rend dépositaires du domaine du Foulhôux
jusqu’à l'acquittement de leur créance. Ils jouissent donc pour la
famille Martin, ils ne peuvent prescrire contre elle : toutes ces vérités
n’ont besoin ni de démonstration ni de développement.
Dans cette position, que devait faire MBConstant, seul
représen
tant de la famille M artin, pour reprendre le domaine du Foulhoux?
Devait-il établir sa propriété? c est ce qu’d a fait, en prouvant
d’une part, qu’il représente Jeanne-Maric M artin, son aïeule, et,
\
�de
l’autre, qu’il est aux droits dcsdesccndans de Clément etPhilippeMartin. Devait-il prouver que les Grandsaigne soin payés de
G enest
de leur créance? C ’est ce que M e Constant a encore fait :
effectivement il a présenté en i re instance un compte qui n’a jamais
été critiqué , et qui établit deux faits, le prem ier, qu’au 25 octobre
1766 la créance du sieur Grandsaigne était entièrement éteinte en
capital et intérêts; le second que ses héritiers ou rep résen ta i seraient
aujourd’hui débiteurs envers la famille Martin de toutes les jouis
l’intégralité
sances duFoulhoux depuis et compris 1767.
Toutefois les conclusions de M e Constant ne se restreignaient pas à
obtenir l’adjudicadon de sa demande principale; voulant satisfaire à
toutes les exigences, M° Constant offrait encore d’exécuter provi
soirement les sentences de 1765 et 1766; il s’astreignait même à
donner caution pour le paiement de la créance Grandsaigne ; et
voulant mettre un terme aux dégradations et aux dilapidations tic
tout genre que les enfuus Dupic commettent journellement dans le
domaine du Foulhoux, M® Constant offrait de jouir de cette pro
priété comme séquestre judiciaire , jusqu’au moment où les comptes
auraient été définitivement réglés.
Cet étal de choses 11e pouvait laisser à la justice qu’un devoir à
remplir; examiner la demande en distraction, apprécier les moyens
qui lui étaient propres, la rejeter ou l'admettre : voilà ce semble
tout ce qu’il pouvait être permis de faire.
O r, qu’apprend le jugement? le tribunal néglige la cause qui lui
était présentée, il ne l’examine même pas, il l’efface entièrement,
et s’en crée une tout-à-fait étrangère à la famille Dupic et à M e Cons
tant; il lui devient dès-lors facile de 11e pas statuer sur la difficulté
réelle qu’il avait à résoudre , et de prolonger par un sursis la pos
session injuste des héritiers Grandsaigne.
Il faut reproduire le système adopté par les premiers juges :
La branche Daiguebonne, qui de son chef était propriétaire du
quart des immeubles provenus dos Jolivet, et du chef de M a r g u e
rite Ireilhe d un douzième du prix de l’estimation , figurait comme
partie dans les sentences de 1753 et 17 5G. Ces sentences avaient
ordonné le partage entre cette branche et les Martin, représentant
\
�(
38
)
les Treilhe créanciers des Jolivet. Les premiers juges s’emparent
de cette circonstance et posent en fait que M e Constant ne repré
sente pas les Daiguebonne; ils supposent ensuite qu’il y aurait dan
ger à juger la cause hors la présence des D aiguebonne, et tirent
de tout cela la conséquence immédiate qu’il doit être sursis à la
décision de la contestation pendante entre M* Constant et les re
présentais Grandsaigne, jusqu’au moment ou il aura été définitive
ment statué sur les difficultés nées en 1^56 entre la branche D a i
guebonne et la famille M artin, difficultés sur lesquelles la sentence
du
5 septembre
n’avait pas prononcé.
C ’est bien vainement que l’on recherche l’influence que pourrait
avoir la présence ou les droits des Daiguebonne sur le jugement de
la demande en distraction formée par M u Constant.
En effet, sous q u e lq u e rapport que l’on examine ce qui intéresse
les Daiguebonne , le résultat est le même.
E t d’abord une première idée saisit et fixe l’attention. Si M e Cons
tant représente les D aiguebonne, ou , ce qui est la même chose , si
ces derniers n’ont aucun intérêt à contester la demande en distrac
tion , cette demande doit être adjugée. O r , qu’est-il arrivé? depuis
1766 les Daiguebonne 11’ont fait aucune poursuite, ils ont laissé
prescrire leurs droits : on a m ê m e vu dans l’exposé du fait que les
D a ig u e b o n n e avaient intérêt à ne point agir, puisque, d’une part,
aux termes de la sentence de 17 5 ? , ils n'étaient admis au partage
qu’en laissant prélever les soijmies que Clément Martin aurait pavées
en l’acquit de Gcnest Treilhe , en exprès celle de 2,000 f r ., faisant
moitié du montant de l’obligation du 7 juillet 1720;
est prouvé qu’en 1758 , la portion des
et que
D a ig u e b o n n e
de l’autre il
dans les biens
Jolivet absorbée , ils étaient encore , à cette dernière époque,
débiteurs de la famille Martin d’une somme de 4 »°°° h'.
D ’ailleurs qui pourrait avoir qualité pour représenter les D aigue
bonne? serait-ce le sieur Grandsaigne? mais il n’a d’autre titre que
l’acte du 8 décembre 1746. O r cet a cte, par scs termes , et suivant
ce qui a élé décide par la sentence de 175 5 , 11’est qu’une simple
délégation, un moyen donne a Grandsaigne pour être payé du
montant de sa créance sur le domaine du Foulhoux ; mais sous
�(
3g
)
aucun rapport, il ne peut être considéré comme un dire propre à
donner à Grandsaigne le droit de repiesenter les Daiguebonne dans
la propriété du domaine du Foulhoux.
D ’ailleurs, quel effet a produit cette délégation? la sentence de
1755 l’apprend :
créancier
la qualité
tence
:
il
partage a été ordonné , non avec Grandsaigne,
délégu é , mais avec Daiguebonne, cohéritier des Martin;
de Grandsaigne n’est donc point changée par cette sen
un
reste toujours créancier et pas autre chose. Mais ce qui
est plus fort, c ’est que par l’cfTet de la sentence de 1753 , Grand
saigne devient en vertu de sa délégation créancier de Clément
M artin, et que les Daiguebonne sont libérés vis-à-vis Grandsaigne ,
d’une manière tellement absolue que Clément Martin doit reprendre
sur les propriétés provenues des Jolivet., et sur la part des Daigue
bonne, la somme de
derniers.
2000 fr.
qu’il doit payer à la décharge de ces
Cette dernière idée conduit immédiatement à reconnaître le vrai
représentant de la branche Daiguebonne. Ce représentant 11e peut
être autre que Clément M artin, qui a payé la dette Daiguebonne ,
et qui est devenu créancier de ce dernier, de la somme dont il l’a
libéré vis-à-vis Grandsaigne. Comment Grandsaigne pourrait-il
refuser à Clément Martin la qualité de représentant des D aigue
bonne, lorsque la sentence de 175 3 , contradictoire avec Grand
saigne, l’envoie en possession des biens Jolivet; que cet envoi en
possession est prononcé contre Clément M artin, comme débiteur
de la totalité de la créance Grandsaigne ; que Grandsaigne accepte
celte délégation, et plus tard l’exécute en se mettant en possession
du domaine du Foulhoux.
Sous un autre rapport il est également certain que Clément,
Martin représentait la branche D aiguebonne, pour tous les droits
qu’elle pouvait avoir dans les propriétés Jolivet. Effectivement la
portion des Daiguebonne , dans ces biens , devait être soumise aux
reprises de Clément Martin qui avait le droit de prélever toutes les
créances qui auraient élé payées pour Gencst Treilhe; or ces
reprises faisant plus qu’absorber la portion des Daiguebonne ,
dans les biens à partager, il est plus qu’évident que Clément Martin,
�(
4°
)
comme créancier des Daiguebonne, et en vertu même des disposi
tions des sentences, les représente complètement pour le fait du
partage ordonné par la sentence de 1755.
Mais cet examen peut paraître inutile pour la décision du procès,
puisque la contestation doit se resserrer entre le sieur Grandsaigne
et les enfans Martin.
Si on consulte les sentences de 1753 et 175 6 , qu’apprendra-t-on?
pas anire chose si ce n'est que les Grandsaigne ont obtenu la mise
en possession du Foulhoux, d’abord contre Clém ent, et plus tard
contre Philippe Genest et Jeanne-Marie Martin. Les Grandsaigne
avant reçu le nantissement des Martin doivent le leur rendre, si leur
créance est payée; et comment les Daiguebonne pourraient-ils
s’opposer à cette remise? ce n’est pas d’eux que Grandsaigne
t i ent
l e d o m a i n e d u F o u l h o u x 5 il n e les a p o i n t a p p e l é s p o u r f a i r e p r o n o n
cer contre eux l’envoi en possession? il ne l' a pas pris de leurs
m a i n s , a u contraire il a reconnu que Clément Martin était devenu
son débiteur de la totalité de l’obligation de 1720 , et c’est unique
ment comme créancier de ce Clém ent, qu’il s’est mis en possession
du domaine du Foulhoux.
Ici la véritable question du procès se représente dans toute sa
simplicité : c’est un débat de propriété entre les G randsaign e et la
famille Martin ; là est toute la cause ; les Daiguebonne sont étrangers
à
ces débats ; les Grandsaigne qui ne
peuvent dans aucun
lo r s ,
cas
les
représentent
pas,
ne
se prévaloir de leurs droits. Pourquoi dès-
dans l’intérêt de Grandsaigne, fixer
sonnes qui ne réclament rien ,
qui ont
son
attention
sur des p e r
intérêt à 11e rien demander?
pourquoi sur-tout en agir ainsi lorsque on s’assure que les Daigue
bonne 11e peuvent être représentés que par C lém en t M artin , qui a
payé leur dette et est encore leur créancier de sommes considéra
bles, sommes qui doivent être prélevées sur la portion des Daigue
bonne dans le
cas
où
les
biens des Jolivet pourraient être soumis à
un partage ?
il est donc évident que les premiers juges ont complètement erré;
qu’ils se sont même mépris sur le véritable sens de l’objection qu’ils
prit imaginée , puisque les droits des Daiguebonne , s’ils existaient
�( 4» )
encore, appartiendraient à la famille M artin, qui seule aurait le droit
de s'en prévaloir.
L ’erreur dans laquelle sont tombés les premiers juges fait sentir
la nécessité de jeter un coup-d oc il sur les mterêts de toutes les p er
sonnes qui figuraient dans 1’arrêt de 1742 et dans la sentence de
1 756, soit personnellement, soit sous le nom du sieur Grandsaigne.
L ’objet de cet examen est d’éviter que la dame Chalus crée une
nouvelle confusion à l’effet de retarder sa dépossession.
La dame Chalus exciperait-elle des droits de Jeanne-Marie De
Lafoulhouse, femme Chèze? D ’abord M 8 Constant, en vertu d’une
cession du 11 avril 1731 , représente celte branche pour le quart
qu elle avait à amender dans les biens Jolivet. L e sieur Grandsaigne
s est prétendu cessionnaire des droits de la dame C h èze, mais on a
vu dans les faits que le sieur Grandsaigne n’avait justifié d’aucun actoj
et cette cession existât-elle , comme elle ne comprendrait que
la portion que la femme Chèze pouvait avoir du chef de M argue
rite T re ilh e , c ’est-à-dire un douzième du prix de l’estimation, et
que ce droit purement mobilier n’affecterait en rien la propriété, il
est évident que Grandsaigne ne pourrait se servir de ce m oyen pour
changer la nature de son titre ^ qu’il n’en serait pas moins un créan
cier jouissant à titre pignoratif de la propriété d’un débiteur, débiteur
qui étant libéré doit cire réintégré dans le fonds qui lui appartient,
et qu’il avait donné en nantissement.
Grandsaigne figurait dans la sentence de 1756 comme donataire
de la dame Biozat, femme Desholière. Quelle était cette dame ?
l’arrêt de 174 2 apprend qu’elle figurait parmi les créanciers opposans de la famille Jolivet ; cette créancière devait être payée sile prix
de l’estimation excédait le montant de la créance T re ilh e , mais cette
estimation a été faite à la requête du sieur Grandsaigne lui-même j
le prix en est con n u, et comme il est prouvé que ce prix est plus
qu’absorbé par la créance Treilhe r la dame Desholiere pas plus
que le sieur G ra n d sa ign e son donataire 11e peuvent avoir rien a
réclam er.
On rencontre ici Anne Jolivet expropriée par l’arrêt de 1743» ct
G
�X
^
)
que Grandsaigne avait fait intervenir, suivant requête du 21 juillet
1755.
Quelle est la position de celte Anne Jolivet?
L ’arrêt de 1742 prononce contre elle une expropriation complctte et irrévocable. Effectivement les Treilhe sont envoyés en
toute propriété et possession des biens saisis; l’arrêt indique même
dans quelle proportion la propriété des biens délaissés doit être
partagée entre les différentes branches d elà famille Treilhe; et pour
qu’il ne manque rien à des caractères aussi positifs de transmission
de propriété, l’arrêt fait même main-levée de la saisie réelle et en
ordonne la radiation.
Il
est vrai que les Treilhe nouveaux propriétaires l’étaient à con
dition de faire estimer les bien s, et que si le prix de l’estimation
excédait les c réances, ce surplus devait appartenir à la femme J o
livet expropriée ; mais cette circonstance démontre déplus fort que
les biens avaient cessé d’appartenir à Anne Jolivet. Le droit de celte
dernière se réduisait dès*lors à requérir l’estimation des biens, et à
assister à cette opération, et c ’est précisément ce qui lui a été ac
cordé parla sentence du 5 septembre 1 75G.Il est vrai qu’Anne Jolivet
demandait davantage, mais la sentence, en repoussant ses préten
tions, a donné une nouvelle force à l’arrêt do 1 7 4 2 ; et c o m m e Anne
J o liv e t n’a point interjeté appel de cette sentence de 17 56 , qui
confirme son expropriation en faveur des Martin , on ne conçoit pas
quel moyen elle pourrait em ployer pour se prétendre propriétaire
du domaine du Foulhoux.
Que devient, des-lors, la donation que Dupic a obtenue de celte
fem m e, le 1 2 décembre 1787 ? La Jolivet ne pouvait conférer aucun
droit à la propriété du Foulhoux; aussi n’a-l-clle donné le domaine
qu’à la chargé d’en jouir ainsi (ju'elle avilit le droit de lè fa ir e ;
et D u p i c , de son cô té, reconnaissant dans le même acte qu’il ne
jouit du Foulhoux qu’à titre p ig n ora tif cl comme créancier des
M artin, il est également évident que la Jolivet n’a point entendu
donner un droit de propriété et que Dupic n’a point entendu
l’accepter.
Q u ’aurait-donc donné Anne Jolivet au sieur Dupic? tout au plus
�son droit au surplus de l'estimation des biens, les dettes payées ;
mais Anne Jolivet a été appelée à cette opération, qui a été laite à
la
requête et diligence du sieur Grandsaigne ; o r , le rapport prouve
que le prix de restimation est inférieur au montant de la créance
Treilhe. De plus , Grandsaigne, qui était chargé de faire faire res
timation , a continué depuis cette époque de jouir du Foulhoux ; et
comme la dame Clxalus et les Dupic sont aujourd’hui héritiers du
sieur G randsaigne, ils seraient inadmissibles à se plaindre de cette
opération, et à opposer quelle n’a point été homologuée.
La dame Chalus dirait-elle que ne représentant pas le sieur
Grandsaigne, mais bien la Jolivet, elle n’est point partie capable
pour recevoir les offres faites par M e Constant?
Celte objection serait détruite
i° Par le fait qu’Anne Jolivet n’étant pas propriétaire du
F o u lh o u x, ne pouvait, par sa donation, intervertir le titre de
D u p ic , qui ne jouissait que pignorativement;
20 Par la circonstance que Dupic n’a point fait notifier sa donation
aux Martin; qu’il a continué de jouir comme représentant le sieur
Grandsaigne, et qu’enfin il a été condamné par jugement de l’an
i i à payer, comme possesseur à titre pignoi’atif, la provision
accordée aux Martin par la sentence de i ,/56 .
Si la dame Chalus et les héritiers Dupic objectaient qu’ils ne sont
pas les seuls héritiers Grandsaigne, on leur répondrait que le
partage du 20 décembre 1770 fait dans leur famille prévoit le cas
d’éviction du domaine du Foulhoux, et que dans ce cas le second
lot doit rembourser au prem ier une somme de 8000 fr. en biens de
la succession. Ainsi le possesseur du Foulhoux représente vis-à-vis
les tiers, tous les héritiers Grandsaigne. L e possesseur a qualité
pour défendre à une demande en éviction; et s’il succom be, il a
une demande en garantie à exercer contre ses co-partageans, ga
rantie dont les effets sont à l’avance réglés par le pariage de 177o.
Enfin 011 peut prévoir que la dame Chalus ira jusqu’à soutenir
q u e , ne représentant que le sieur Dupic qui a vendu à son mari le
domaine du
l
oulhoux, elle n’a pas qualité pour répondre à la
demande en dis trac lion.
�(
44
)
Que signifierait cette objection ? II s'agit d'une demande en dis
traction sur saisie immobilière; on ne peut donc la diriger que
contre la personne sur laquelle la saisie est pratiquée, et que l’on
suppose propriétaire de l’immeuble. En pareille matière la pro
priété est tout, et celui qui possède l’immeuble revendiqué a
toujours qualité pour répondre à la demande en distraction. D ’ail
leurs la vente de M. Dupic au sieur Chalus n’a point été produite ;
tous les héritiers Dupic ont été poursuivis en expropriation à la
requête des sieurs Andrieux ; M° Constant devait donc former sa
demande en distraction contre toutes les parties saisies. Il est
possible que cette demande donnât lieu à une demande en garantie
de la part de la dame Chalus contre les D upic; mais sous aucun
point de v u e , la vente du sieur Dupic au sieur Chalus, étant étran
gère à M® Constant et lui étant absolument in c o n n u e, ne pourrait
paralyser son action contre le possesseur saisi du Foulhoux.
On suppose d’ailleurs que cette vente ne sera pas produite; si
elle l’éta it, qu’apprendrait-elle ? que D upic a abusé du nantisse
ment jusqu’au point d’en disposer et de le vendre , circonstance
q u i, suivant les principes, serait
à
elle seule suffisante pour lui faire
enlever la possession du Foulhoux et faire un devoir à la justice de
la remettre à M® Constant, seul propriétaire de c e domaine.
L ’exam en de cette cause est terminée. Quels sont les résultats
qui se présentent ?
L e domaine du Foulhoux est la propriété des héritiers Martin :
c’est un fait incontestable établi par les sentences de 1753 et
1756.
Un autre fait non moins certain et ressortant des mêmes sentences,
c ’est que les Grandsaigne ne sont en possession du
Foulhoux
qu’à
titre pignoratif et comme créancier de Clément Martin.
Aujourd’hui M BConstant, seul représentant des M artin, prouve
que la créance Grandsaigne est payée. Q u e l obstacle peut-il dont»
y avoir à lui remettre la possession du domaine dont il n’a jamais
cessé d’être propriétaire ?
Serait-ce parce que les Martin ont interjeté appel des sentences
4e
1753 et de 1756? mais aujourd’hui M* Constant exécute ces
sentences, et se met, relativement au domaine du F oulhoux, dans
�(
45
)
la même position que s’il n’y avait point eu d’appel; il accorde tout
ce que les héritiers Grandsaigne avaient demandé par leur assi
gnation en reprise, du 10 mars i 8 i 3 ; il ne se refuse à aucune des
conséquences d’un arrêt confirmatif, puisqu’il offre de payer l’entière
somme de 4000 fr. due aux Grandsaigne.
Sous tous ces ra p p o rts, où seraient do nc les difficultés?
Mais si l’on ajoute que les Dupic ont abusé de leur jouissance ;
que déjà l’immeuble donné en nantissement a été vendu par leur
père; que tous les arbres-chênes ont été coupés, et que les héritiers
Dupic en ont vendu pour 9000 fr. ; que les bâtimens tombent en
ruine; que la culture est négligée; que ce domaine a été saisi
réellement, ne serait-ce pas douter de la justice de la Cour que
de supposer qu’elle autorisera la continuation d’une possession aussi
préjudiciable à M* Constant, et qu’elle hésitera un instant ù
réformer le jugement dont est appel !
J acques- F lo r en t- G a b r iel
CONSTA NT, Avocat.
M° J . - C h . B A Y L E a în é , ancien A v ocat.
Me MARIE , Avoué-Licencié.
R10M,
I MP R I ME R I E DE SALLES F I L S ,
P RES LE PALAIS CE J U S T I C E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums fonds privés
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<a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les Factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Constant, Jacques-Florent-Gabriel. 1832?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jacques-Florent-Gabriel Constant
J.-C.H. Bayle aîné
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
saisie immobilière
successions
généalogie
bois
saisie réelle
domaines agricoles
experts
bois
métayage
témoins
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Précis Pour Me Jacques-Florent-Gabriel Constant, Avocat, habitant de la ville d'Issoire, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil de Thiers, le 19 janvier 1831, et intimé sur l'appel d'un jugement rendu au même tribunal, le 8 décembre 1830 ; Contre Les héritiers Dupic et la dame Chalus, cette dernière, tant en qualité d'héritière Dupic, que comme tutrice de ses enfans mineurs, tous habitans au lieu de Foulhoux, commune d'Ecoutoux, intimés sur l'appel du jugement du 19 janvier 1831, et ladite dame Chalus, appelante du jugement du 8 décembre 1830 ; Et Contre les héritiers Andrieux, tous habitans de la ville de Thiers, intimés
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1832 ?
1742-1832
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV02
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Escoutoux (63151)
Foulhoux (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/28/54001/BCU_Factums_DVV02.jpg
bois
Créances
domaines agricoles
experts
généalogie
métayage
saisie immobilière
saisie réelle
Successions
témoins